Relever Ies defis de Ia gestion
des ressources humaines
Sylvie St-Onge, Michel Audet, Victor Haines, Andre Petit
Relever les defis de la gestion
des ressources humaines
gaetan lllorin 1111 editeur --
CHENELIERE EDUCATION
Relever les defis de la gestion des ressources hurnaines 28 edition Sylvie St-Onge, Michel Audet, Victor Haines, Andre Petit
© gaetan morin editeur Itee, 1998, 2004 Edileur: Sylvain Menard Edileur delegue: Pierre Frigon Editdce adjointe: Melanie Bergeron Coordinalion: Samuel Rosa Revision linguistique: Jean-Pierre Leroux Correction d'epreuves: Danielle Maire Maquette interieure:Catherine Bouchard, Accent tonique Infographie:Annie Lafontaine Catalogage avant publication de la Bibliotheque nationale du Canada Vedette principale au titre: Relever les defis de la gestion des ressources humaines
Comprend des ref. bibliogr. et un index
1. Personnel Direction. 2. Changement organisationnel. 3. Main-d'ceuvre - Planification. 4. Rendement au travail. 5. Conditions de travail. 6. Qualifications professionnelles. I. St-Onge, Sylvie. C2003-942022-1
gaetan morin
editeur
CHENELIERE EDUCATION
7001, boul. Saint-Laurent Montreal (Quebec) Canada H2S 3E3 Telephone: (514) 273-1066 Telecopieur : (514) 276-0324
[email protected] Tous droits reserves. Toute reproduction, en tout ou en partie, sous qu~lque.for~e ~t ~ar quelque procege que ce soit, est interdite sans I autonsatlon eCrite prealable de l'Editeur. ISBN 978-2-89105-866-7 Depot legal: 2e trimestre 2004 Bibliotheque nationale du Quebec Bibliotheque nationale du Canada Imprime au Canada 4 5 6 7
ITG
Ses ceuvres se composent principalement de personnages imaginaires plus ou mains abstraits, faits de formes et de lignes entrelacees en couleurs et textures. L'approche picturale est avant tout intuitive. M. Carignan commence par une esquisse globale, qui vit sous cette forme pendant un temps indetermine, puis ilia reprend pour I'amener au tableau final. Le sens et I'im pact emotionnel peuvent donc varier et evoluer considerablement en cours de route, refletant I'energie et les etats d'Ame du peintre.
a
ISBN 2-89105-866-6
658.3
Richard Carignan est ne a Lachine en 1964; ce peintre est autodidacte et son medium est I'acrylique sur toile.
Les ceuvres de Richard Carignan font partie de nombreuses expositions collectives; elles sont egalement presentees a la Galerie d'art du mont Sainte-Anne Beaupre et la Galerie d'art Basque a Rimouski.
2 e ed.
HF5549.R45 2004
Tableau de la couverture: Guies-tu? CEuvre de Richard Carignan
10 09 08 07
Nous reconnaissons I'aide financiere du gouvernernent du Canada par I'entremise du Programme d'aide au developpement de I'industrie de I'edition (PADIE) pour nos activites d'edition. Gouvernement du Quebec - Programme de credit d'impot pour I'edition de livres Gestion SODEC L'Editeur a fait tout ce qui eta it en son pouvoir pour retrouver les copyrights. On peut lui signaler tout renseignement men ant a la correction d'erreurs ou d'omissions.
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Avant-propos LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES: FAIRE DE LA GESTION DU CAPITAL HUMAIN UN ATOUT CONCURRENTIEL ET UNE SOURCE DE VALEUR AJOUTEE
Al'avenir, il sera difficile pour les dirigeants d'entreprise de batir un avant age concurrentiel a long terme en s'appuyant uniquement sur des facteurs de sucd~s traditionnels comme une technologie d'avant-garde, un creneau de marche, un acces privilegie aux matieres premieres et de meilleures conditions de financement. En effet, la technologie, Ie produit et Ie service d'une entre prise sont rapidement copies par Ia concurrence. Par ailleurs, l'acces privilegie a un marche ou a une matiere premiere est difficile a maintenir dans Ie contexte du libre-echange et de l'amelioration des reseaux de distribution. Finalement, II est difficile de conserver un meilleur acces aux ressources finan cieres alors que les marches s'ouvrent et que Ie capital circule plus librement. Dans ces conditions, force est de conclure qu'a long terme, la plus impor tante source d'avantage concurrentiel ou de valeur ajoutee repose sur l'ele ment qUi a peut-etre He Ie plus neglige jusqu'a maintenant: les res sources humaines. Les entreprises gagnantes, que certains qualifient d'employeurs de choix, seront celles qui parviendront a mieux gerer leurs ressources humaines, c'est-a-dire it mieux relever les detis qui sont examines dans Ie present livre.
les lecteurs vises Comme la GRH touche tout Ie monde et s'avere un domaine de responsa bUites partagees entre divers intervenants, cet ouvrage se veut accessible it une diversite de lecteurs: les dirigeants d'entreprise, les cadres, les syndicalistes, les professionnels des ressources humaines, les employes, les conseillers et les etu diants. En somme, tous les lecteurs, quel que soit leur domaine d'expertise, ont ou auront un role a jouer en matiere de gestion des ressources humaines. Ce livre devrait donc etre pertinent pour les etudiants desireux d'acquerir des connaissances generales ou specialisees en GRH, ou pour les cadres, qu'lls soient specialises ou non dans Ie champ de la GRH. Comme ce livre s'adresse a un vaste auditoire, nous ne traitons pas en detail des outils et des techniques specialises que peuvent mettre au point et gerer les profession nels des ressources humaines. Le professionnel des res sources humaines qui desire acquerir des connaissances plus approfondies aurait interet a consulter des livres specialises, notamment dans les domaines de la selection, de la formation des relations du travail et de la remuneration.
•
Avant-propos
Les objectifs de ce livre Apres avoir lu ce livre, Ie lecteur devrait etre plus qualifie pour prendre des decisions ou porter des jugements en matiere de GRH. En effet, ce livre devrait lui permettre: • de prendre conscience de certains defis de GRH; • de connaitre les nouvelles tendances dans Ie domaine de la GRH; • de comprendre qu'une GRH efficace est contingente a la categorie de personnel et aux contextes d'affaires; • de demystifier les politiques, les pratiques et les activites de GRH (par exemple, les caracteristiques, les avantages, les inconvenients, les limites et les conditions du succes).
Les atouts pedagogiques de ce livre Sur Ie plan du contenu, ce volume se subdivise en 5 parties, chacune exami nant un defi particulier de GRH, et en 16 chapitres. En plus de privilegier la perspective des gestionnaires generalistes, ces chapitres s'appuient sur la structure suivante: une definition de l'activite de GRH visee, l'importance ou Ie pourquoi de cette activite, les etapes a suivre et les exigences legales a respecter, les principales conditions de succes, les particularites de la gestion de cette activite dans divers contextes et pour diverses categories de person nel (par exemple, Ie personnel syndique, Ie personnel expatrie ou Ie secteur public). Plus precisement, voici les cinq types de defis de GRH qui sont decrits dans cet ouvrage ainsi que les chapitres qui y correspondent.
Chapitre 1
Miser sur la gestion des ressources humaines
.Partie I Chapitre 2 ·Chapitte 3 Chapitre 4
Les defis du renouvellement S'adapter aun nouvel environnement ·Donnerune orientation et de ia coherence ala GRH Gerer l'organisatlon et la transformation du travail
·Les defis de la competence Chapitte5 . Se doter d'employes competents et motives Chapitre 6 Developper les competences i,ChaJ)itte 7 Gerer les carrieres Partie II
Partie.1I
Chapitte 8 Chapitre 9
Les defis de la performance Gerer et evaluer Ie rendement au travail Intervenir aupres des employes difficiles
Avant-propos
Sur Ie plan pectagogique, tous les chapitres debutent par une mise en situa tion, Iaquelle est constituee par un article de presse ou l'illustration d'un cas reel d'une entreprise. En plus de proposer des tableaux et des figures visant a synthetiser la matiere etudiee, chaque chapitre presente plusieurs rubriques Info GRH exposant un cas d'entreprise ou des resultats d'enquetes recentes afin de mieux decrire l'etat des pratiques actuelles. La partie theorique de chaque chapitre est suivie par des questions de revision, des questions de discussion, des references recentes ou importantes sur Ie sujet, une liste de lectures supplementaires sur Ie theme explore ainsi que des cas fictUs four nissant des exemples de la matiere expo see. Sur Ie plan de la forme, afin de faciliter l'apprentissage et de s'adapter au vaste public vise, nous avons cherche a privilegier un langage simple et direct pour expliquer et demystifier les fondements theoriques, les pratiques, les techniques et les lois du domaine. Par ailleurs, du materiel pectagogique (un guide d'enseignement et des diapositives PowerPoint) sont egalement disponibles pour les enseignants qui utilisent ce livre.
Remerciements eet ouvrage est Ie fruit d'un effort collectif qUi va bien au-dela du travail fourni par ses quatre auteurs. D'abord, il faut souligner Ie professionnalisme et la patience du personnel de notre maison d'edition. Cette contribution de qualite sur Ie plan de l'edition a du se faire dans des delais tres serres. Felicitations et merci.
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Avant-propos
Nous remercions egalement la direction de nos institutions respectives (HEC Montreal, Universite Laval, Universite de Montreal, Universite de Sherbrooke) qui nous a appuye de diverses fa~ons dans la preparation de cette deuxieme edition. Nous sommes aussi reconnaissants aux organismes de recherche qui ont finance nos recherches respectives ainsi qu'aux associations professionnelles dont nous sommes membres. Le contenu de ce livre decoule aussi de nos recherches et de nos engagements professionnels. Notre reconnaissance va egalement a de nombreux enseignants, notam ment a Denis Morin et a Lucie Morin de l'Universite du Quebec a Montreal, a Aziz Rhnima de l'Universite de Sherbrooke, a Roch Laflamme de l'Universite Laval ainsi qu'a Jacques Besner, president de Plani-Carriere inc. Nous les remercions pour les commentaires et les suggestions qu'ils nous ont apportes pour cette nouvelle edition. Par ailleurs, en nous communiquant regulie rement leurs attentes, leurs appreciations, leurs critiques, les lecteurs nous permettent de bonifier Ie contenu de ce livre avec les annees. Nous tenons egalement a remercier Guy Delisle, directeur de la perfor mance organisationnelle a Alcan, Fran~ois Giroux, sous-secretaire aux poli tiques au Secretariat du Conseil du Tresor du gouvernement du Quebec et Genevieve Fortier, vice-presidente RH chez Reitmans, presidente de l'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agrees du Quebec et presidente du Conseil canadien des associations en ressources humaines (CCARH). Nous les remercions d'avoir participe, a titre d'experts, a une discussion portant sur les deiis du renouvellement de la GRH, sujet traite au chapitre 16. Egalement un gros merd aux etudiants et aux gestionnaires des milieux des affaires que nous avons rencontres au til du temps. Leurs commentaires et leurs reactions au sujet de nos propos nous permettent d'ameliorer la qualite de notre enseignement et de nos ecrits. Nos remerciements s'adressent egale ment a Etienne Savard, etudiant de 2e cycle au departement des relations industrielles pour sa collaboration a la recherche documentaire ayant permis la redaction des chapitres 2, 4, 7 et 16. Un merci particulier s'adresse aussi aux etudiants ayant collabore a la redaction de certains cas presentes a la fin des chapitres et au personnel du Centre de cas des HEC Montreal. Finalement, nous tenons a remercier les res sources humaines les plus im portantes de notre vie, soit notre conjoint ou notre conjointe et nos enfants. Nous leur dedions cet ouvrage, qu'ils sont surement aussi heureux que nous de voir arrive a son terme. En esperant que Ie lecteur appreciera cet ouvrage, nous lui souhaitons une bonne lecture. Sylvie St-Onge Michel Audet Victor Haines Andre Petit
Table des matieres
Miser sur la gestion des ressources humaines ...................... 1
Objectifs d'apprentissage ..................................... 1
Mise en situation ........................................... 2
Introduction ............................................... 4
1.1 La gestion des ressources humaines ........................ 6
1.2 La multiplicite des perspectives dans Ie domaine de la GRH . . . .. 12
1.3 Les acteurs de la GRH dans les organisations . . . . . . . . . . . . . . . .. 18
1.4 Les conditions de reussite du partenariat des acteurs de la GRH . .. 29
1.5 Les defis de la GRH et Ie plan de ce livre .................... 36
Questions de revision ......... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 38
Questions de discussion ...................................... 39
References ................................................. 39
Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 41
Cas. . . . . ... . . . .. .. .. .... . . . . . .. . .. . .... .. . ... .. .. . .. .. .. .. 42
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Les defis du renouvellement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
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S'adapter a un nouvel environnement ... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
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Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 2.1 Pourquoi faut-il adapter la GRH aux nombreux
changements de l'environnement? ........................ 2.2 L'adaptation de la GRH it I'environnement:
un cadre de reference ................................... 2.3 L'environnement en mutation ............................ 2.4 Les implications de la transformation de l'environnement
pour l'emploi et l'organisation ............................ 2.5 Les implications pour la GRH ............................. Conclusion ................................................ Questions de revision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas ... '" . . . .. .. .. .. .. .. . .. .... . . . . . .. .. .. .. .. .... .... .. .. Donner une orientation et de la coherence ala GRH . . . . . . . . . . . . . . . . ..
Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 3.1 Pourquoi planifier les ressources humaines? ................. 3.2 La planification strategique des ressources humaines .......... 3.3 La planification operationnelle des ressources humaines ....... 3.4 Les conditions de sucd~s de la planification des ressources humaines ................................. Conclusion ................................................ Questions de revision ........................................ Questions de discuSSion ......................................
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Table des matieres
References ................................................. 122
Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 123
Cas ....................................................... 124
Gerer l'organisation et la transformation du travail ................. . 127
Objectifs d'apprentissage .................................... . 127
Mise en situation ...........................................
1 28 Introduction ............................................... 1 29 4.1 Definitions de l'organisation du travail .................... . 130
4.2 Pourquoi faut-il reorganiser Ie travail? ..................... . 132
4.3 Vers de nouveaux modeles d'organisation du travail .......... . 136
4.4 Les trois perspectives de l'organisation du travail ............ . 140
4.5 Organiser Ie travail dans Ie temps,
l'espace et la relation d'emploi ............................ . 155
4.6 Les facteurs critiques de la transformation de l'organisation du travail .............................. . 163
Conclusion ............................................... . 169
Questions de revision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 170
Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas ....................................................... Partie II
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Les defis de la competence ..................................... 177
~i.'~pltre 5 ) Se doter d'employes competents et motives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 179
Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 5.1 Les termes-cles ......................................... 5.2 Les acteurs du processus de dotation ....................... 5.3 Reussir la dotation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 5.4 Le processus de dotation ................................. 5.5 Connaitre Ies postes et Ie milieu de travail ................... 5.6 Etablir Ie profil des competences .......................... 5.7 Generer des candidatures par Ie recrutement ................. 5.8 Proceder it une selection efficace ........................... 5.9 Prendre une decision d'embauche et favoriser l'integration des nouveaux employes ....................... Conclusion ................................................ Questions de revision ........................................ Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas .......................................................
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'\i\\W~p'tre 6 ) Developper les competences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 235 Objectifs d'apprentissage ..................................... 235 Mise en situation ........................................... 236 Introduction ............................................... 237 6.1 Le domaine du developpement des competences ............. 238
Table des matieres
6.2 L'importance confirmee du developpement des competences ... 6.3 Les defis du developpement des competences ........ . . . . . . .. 6.4 Les differents acteurs de Ia formation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 6.5 L'analyse des besoins en formation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 6.6 La conception du plan de formation ....................... 6.7 L'evaluation de Ia formation .............................. 6.8 L'apprentissage et Ie transfert des apprentissages ............ " Conclusion ................................................ Questions de revision ........................................ Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees ........................................... Cas .......................................................
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Gerer les carrieres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 7.1 Qu'est-ce que la gestion des carrieres? ...................... 7.2 L'importance de la gestion des carrieres sur
un marche du travail en transformation .................... 7.3 Les caracteristiques influen~ant la carriere
et la gestion des carrieres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 7.4 Les pratiques de gestion des carrieres ....................... Conclusion ................................................ Questions de revision .................. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees ........................................... Cas .......................................................
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les defis de la performance .................................... 315
Gerer et evaluer Ie rendement au travail .......................... Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 8.1 L'utilite de gerer Ie rendement ............................ 8.2 Le processus de gestion du rendement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 8.3 La determination des facteurs de succes et des va leurs ......... 8.4 Planifier Ie travail a faire ................................. 8.5 Exercer un suivi sur Ie rendement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 8.6 L'evaluation du rendement ............................... 8.7 Recompenser Ie rendement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 8.8 Gerer avec soln Ie systeme de gestion du rendement .......... Conclusion ................................................ Questions de revision ............. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees ........................................... Cas .......................................................
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Table des matieres
Intervenir aupres des empJoyes difficiJes .......................... Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 9.1 Les employes difficiles: definition, importance et pieges eviter .. 9.2 L'intervention aupres des employes difficiles ................. 9.3 Le counselling offert par Ies cadres hh;;rarchiques .............. 9.4 Le counselling offert par les professionnels ................... 9.5 L'approche disciplinaire .................................. 9.6 l,a conduite d'un entretien disciplinaire ..................... 9.7 La redaction d'un avis disciplinaire ........................ 9.8 L'intervention aupres des employes coupables
de violence au travail ................................... 9.9 Le partage des rOles en matiere de gestion
des employes difficiles ................................. " Conclusion ................................................ Questions de revision ...................................... " Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas .......................................................
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Partie IV
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Les defis des conditions de travaiJ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 413
Offrir des saJaires equitables ................................... Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 10.1 Le salaire: une composante de la remuneration globale ........ 10.2 L'importance de la gestion des salaires ...................... 10.3 L'influence du contexte d'affaires sur la gestion des salaires ..... 10.4 Les principes d'equite en matiere de gestion de la remuneration .. 1O.S Les structures salariales .................................. 10.6 Les lois sur l'equite salariale .............................. 10.7 Les nouvelles tendances en matiere de gestion des salaires ...... Conclusion ................................................. Questions de revision .... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas ................. " .......................... '.' ........
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Reconnaitre le rendement au travail ............................. Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 11.1 L'importance de recompenser la contribution au travail ........ 11.2 Les regles a respecter face a la reconnaissance du rendement 11.3 La variete des formes de reconnaissance ou de recompenses ....
469
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Table des matieres
11.4 Les atouts des recompenses non pecuniaires et
Ies conditions de leur succ{~s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 485
11.5 La remuneration basee sur Ie rendement individuel ........... 11.6 La remuneration basee sur Ie rendement de l'equipe ........... 11.7 La remuneration basee sur Ie rendement collectif ............. 11.8 Les syndicats et la remuneration variable ....................
Conclusion ................................................ Questions de revision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas ............................... , .......................
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Optimiser 1es avantages sociaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 517
Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................. . ................ 12.1 Definition des avantages sociaux .......................... 12.2 Les avantages sociaux et Ie rendement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 12.3 Les regimes d'avantages sociaux offerts par FEtat ............. 12.4 Les regimes d'avantages sociaux offerts par l'employeur. . ..... 12.5 Les avantages sociaux flexibles de style «cafeteria)} . . . . . . . . . . .. 12.6 La gestion des avantages sociaux .......................... 12.7 Le defi du contrOle des couts des avantages sociaux ........... Conclusion ................................................ Questions de revision ....................................... , Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas ............................ , ..........................
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Promouvoir un mHieu de travai1 sain ........................... "
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Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 13.1 Les raisons d'intervenir .................................. 13.2 Un bref retour en arriere ................................. 13.3 L'ampleur des problemes relatifs a Ia sante
et a la securite du travail .... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 13.4 La gestion des accidents du travail
et des maladies professionnelles .. , . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 13.5 La gestion de la prevention ............................... 13.6 La promotion de la sante au travail ........................ Conclusion ................................................ Questions de revision .................. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees .......................................... , Cas .............................................. , ........
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Table des matieres
Partie V
Les defis de la democratie au travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 585 Gerer les rapports collectifs de travail ............................ . 587
Objectifs d'apprentissage .................................... . 587
Mise en situation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588
Introduction .............................................. . 590 14.1 Le nouveau contexte des rapports collectifs ................. . 591 14.2 Le systeme des relations du travail ........................ . 593
14.3 Les notions relatives aux structures syndicales ............... . 600
14.4 Les centrales syndicales du Quebec ........................ . 602
14.5 L'encadrement juridique des rapports collectifs de travail ...... . 608
Conclusion ............................................... . 617
Questions de revision '" .................................... . 617
Questions de discussion ..................................... . 618
References ................................................ . 619
Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 620
Cas ......... " ............................................ 621
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Negocier et appliquer une convention collective .................... 623
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Objectifs d'apprentissage ..................................... Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 15.1 Les caracteristiques de la negociation collective ............... 15.2 L'aspect legal d'une negociation collective ................... 15.3 Les aspects pratiques d'une negociation collective ............. 15.4 La convention collective ................................. Conclusion ................................................ Questions de revision .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Cas ................................................. " ....
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 659
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Mise en situation ........................................... Introduction ............................................... 16.1 Les parametres du renouvellement de la GRH ................ 16.2 La vision de quelques praticiens: les enjeux pour l'organisation .. 16.3 La vision de quelques praticiens: les enjeux pour
les professionnels des ressources humaines .................. Conclusion ................................................ Questions de revision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. Questions de discussion ...................................... References ................................................. Lectures suggerees ......................................... "
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Index ..................................................... 691
Apres l'etude de ce chapitre, Ie Iecteur devrait etre plus apte a; • Detinir la gestion des ressources humaines (GRH) tant au niveau des organisations, en tant que fonction, qu'au niveau de la societe, en tant que domaine specialise de connaissances. • Comprendre }'importance et Ia pertinence de I'etude de la GRH quel que soit Ie poste occupe au sein d'une organisation. • Nommer et expliquer les principaux detis qui se posent en matiere de gestion des ressources humaines. • Decrire Ies diverses perspectives de la gestion des ressources humaines, de l'epoque de la revolution industrielle jusqu'a l'epoque recente des approches strategiques et de l'entreprise ouverte. • Nommer et expliquer Ies roles et Ies responsabilites de divers acteurs en matiere de GRH: dirigeants, cadres hierarchiques, professionnels des ressources humaines, syndicats et employes. • Comprendre les conditions de
sucd~s
du partenariat en matiere de GRH.
Relever les defis de la gestion des ressources humaines
IE EN SITUATION Patrons, avez-vous pris des resolutions' ?
Les
resolutions de fin d'annee permettent bien souvent de repartir du bon pied - ou du moins de changer quelques-unes de nos vieilles habitudes. Les Affaires ont consulte quelques experts en ressources humaines afin de recueillir des suggestions de resolu tions a l'intention des patrons. Pour les ges tionnaires presses de trouver leur resolution, Alain Gosselin, professeur titulaire aux BEC Montreal, specialise dans Ie domaine, en suggere cinq. 1. Donner de la reconnaissance
«II y a un manque de reconnaissance fla grant dans les entreprises. Rien de plus nor mal qu'un employe fasse bien son travail, pourquoi ne pas Ie remercier? Le feed-back continu constitue une resolution importante parce qu'il motive les gens. » 2. Miser sur I'intelligence « Je constate que les gestionnaires ne misent pas sur l'intelligence, les idees et les opinions de leur personnel. Trop souvent, Ie gestion naire se definit comme la personne qui doit trouver les solutions aux problemes. Par exempIe, si on veut sonder les clients, pour quoi faire appel a une firme exteme quand on a une armee d'employes qui sont en con tact avec les clients tous les jours? On ne les interroge meme pas pour connaftre leur opinion. »
3. Rebatir la confiance
«Est-ce que les gens sont dignes de confiance? Est-ce que le superieur impose a lui-meme ce qu'il impose aux autres? Etre digne de confiance, c'est avoir les competences requises, mais c'est aussi une question
d'attitude. La confiance des employes envers les gestionnaires a ete ebranlee. Les employes ont vraiment l'impression que leurs patrons s'en mettent plein les poches. Par exemple, quand on entend qu 'un cadre qui a travaille pour une entreprise pendant 2 ans part avec 18 mois de salaire, il y a de quoi s'inter roger. Les employes se sentent floues. » 4. Valoriser Ie role des superviseurs de premier niveau
«Ces gens jouent un role extremement im portant dans la mise en ceuvre des strategies d'affaires et dans Ie climat organisationnel. IIs sont souvent mal soutenus. On ne recon naft pas leur importance et on ne developpe pas leurs competences.»
s. Preparer la reieve «Le dossier de la releve a ete delaisse longtemps. Les gestionnaires doivent etre conscientises pour miser sur les bonnes per sonnes et les former. La releve se prepare longtemps d'avance. Les gestionnaires ont tendance a laisser aller les choses et a se dire que les meilleurs se manifesteront par eux-memes. Si rien n'est fait, souvent les meilleurs s'en vont. » Pour Kevin O'Farrell, responsable du groupe capital humain chez Mercer Consul tation en ressources humaines, la releve constitue la grande resolution a prendre. «En raison de la situation demographique dans les entreprises, il y aura au cours des prochaines annees beaucoup de departs ala retraite. C'est Ie grand defi. Les gestion naires doivent mettre I'accent sur le developpement des personnes et sur la mobilisation. »
1. R.-C. Simard, «Patrons, avez-vous pris des resolutions? », Les Affaires, 28 decembre 2002, p. 16.
Chapitre 1
Encourager La coherence entre Ie dis cours et les actes represente un autre pOint sur lequel devraient miser les gestionnaires, scion lui. « C'est important de communi quer des valeurs, mais it (aut aussi les mettre en evidence. Cette resolution agira egalement sur fa mobilisation des employes puisque la coherence donne de la credibilite et du leadership», souligne Ie consultant. Les gestionnaires devraient reconnaitre la valeur des ressources humaines et quan tifier Ie rendement de I'investissement. « II serait egalement souhaitable que les ges tionnaires (a(:onnent des methodes de tra vail, de remuneration ou de recompense plus adaptees aux besoins des individus. 11 (aut reconnaitre les besoins differents des gens selon leur cycle de vie. La conciliation travail-(amille est un exemple. » Quelques entreprises levent Ie voile sur leurs propres resolutions
Plusieurs entreprises ont deja commence a prendre de grandes resolutions pour 2003. L'avenir nous dira st elles ont tenu promesse. En attendant, pour ceux qUi se demandent encore ce qu'ils devraient ameliorer l'an prochain, ces resolutions bien concretes pourront peut-etre servir d'exemples. Chez Sico, la communication est LA grande preoccupation. « Le but est de moti ver les employes. On veut vulgariser l'orien tation strategique de l'entreprise. C'est une responsabilite qui revient aux gesnonnaires. IIs doivent dire aux employes ce qu'ils attendent d'eux. Des employes qui ne com prennent pas ce qu'ils ont a(aire ni OU I'en treprise s'en va deviennent des boulets pour les entreprises. IIs ne sont pas motives, donc non performants. 11 (aut que les grands patrons descendent sur Ie plancher, pour comprendre La realite des employes», precise Marie Letellier, vice-presidente, ressources humaines et communications. Chez PLB International, un (abricant de nourriture seche pour chiens et chats, on
I Miser sur la gestion des ressources humaines
veut developper davantage une attitude orientee vers Ie client, miser sur Ie develop pement des individus et valoriser Ie tra vail d'equipe. Pour Francine Champoux, directrice des ressources humaines, ces reso lutions soutiennent la strategie de l'entre prise, qui est ['orientation vers Ie client. «Chez Uni-Select, on a la chance d'avoir un president qUi croit beaucoup a la gestion des ressources humaines. La conscientisa tion est (aite, reste a passer a l'action. La (ormation constitue notre principale reso lution. La planification de notre main d'ceuvre est egalement importante, surtout avec Ie phenomene de la releve qui repre sente un defi important», souligne lo-Ann Constantin, conseillere principale, ressour ces humaines. Andre Bouchard, president des Betons pre(abriques du Lac, veut semer un vent de positivisme. « Il (aut c!langer la mentalite. Les gens se !event Ie mann et se disent: Encore une journee de travail. On peut accomplir de grandes choses quand on est positif. L'important est de travailler dans un esprit de collaboration et de partager le meme objectif.1l (aut renouer avec Ie plaisir de travailler car la beaute de travailler, c'est l'accomplissement. » II
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o t-on Pourquoi, a votre avis, interroge des experts en gestion des ressources humaines Iorsque vient Ie temps de connaitre Ies orienta tions de I'entreprise susceptibles de faire l'objet de resolutions de fin d'annee?
• A partir
des propos des represen tants de Sico, de PLB International, d'Uni-Select et de Betons prefabri ques du Lac, nommez trois preoccu pations importantes des dirigeants d'entreprise a l'aube de la nouvelle annee.
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
Retirez nos 20 meilleurs employes et, du jour au lendemain, nous devenons une entreprise mediocre2 . Prenez les acafs materiels, laissez-moi Ze personnel et, en cinq ans, nous serons redevenus aussi forts qu'avant3 • Naus passons tout notre temps a gerer des persannes. Le jour Oll nOlls faillirons dans cette facette de la gestion, cette entreprise sera fichlle 4 •
De tout temps, et dans toute organisation, les defis des gestionnaires ont essen tiellement porte sur la transformation d'intrants (ou de res sources) en extrants (ou resultats), par Ie recours a divers processus de transformation. Vne pre miere categorie d'intrants, Ies plus tangibles, consiste dans les ressources mate rielles. Vne deuxieme categorie d'intrants concerne les ressources financieres qu'on doit controler adequatement dans l'espoir de reaUser un profit et d'at teindre un niveau souhaite de rendement des investissements. Vne troisieme categorie d'intrants (ceUe dont traite ce livre) a trait aux ressources humaines qu'i1 faut se procurer en qualite et en quantite suffisantes, a qUi il faut fournir un environnement securitaire, propice au rendement, satisfaisant et per~ comme etant equitable, tout cela pour esperer etre efficace (c'est-a-dire «faire les bonnes choses» et atteindre les resultats vises) et efficient (c'est-a-dire « bien faire les choses» en s'assurant, entre autres, que la valeur des extrants surpasse celle des intrants et des processus de transformation). Dans differents milieux et a differentes epoques, les «ressources humaines» ont porte differents noms. Chez Wal-Mart, par exemple, on les appelle des «associes» i chez IBM, tous les gestionnaires se nomment des «directeurs ». Ailleurs, on utilise d'autres expressions telles que les «employes », les «sala ries », les «membres du personnel », les «partenaires », la « main-d'reuvre» ou Ie «personnel ». Le choix de privilegier Ie terme « ressources humaines)} repose sur la conviction de plus en plus repandue que les ressources humaines et les mecanismes de gestion des ressources humaines (GRH) constituent les res sources les plus importantes d'une organisation, celles qui sont les plus sus ceptibJes de lui procurer un avantage concurrentiel et sur lesquelles il faut Ie plus compter pour obtenir un rendement satisfaisant des investissements. Ce
2. Propos attribues a Bill Gates, P.D.G. de Microsoft (traduction libre). 3. Propos attribues it Alfred Sloan, ancien P.D.G. de General Motors (traduction libre). 4. Propos attribues it Jack Welch, ancien P.D.G. de General Electric (traduction libre).
Chapitre 1
I Miser sur la gestion des ressources humaines
sont les res sources principales sur lesquelles il faut miser, comme 1'ont affirme de nombreux dirigeants d'entreprise qui ont obtenu des succes retentissants, tels que Bill Gates, fondateur et president-directeur general de la fhme Microsoft, Alfred Sloan, ancien president-directeur general de General Motors et Jack Welch, ancien president-directeur general de General Electric. II convient de miser non seulement sur les ressources humaines, mais aussi sur les systemes de GRH pour donner a l'organisation un avantage concur rentiel. En effet, la GRH peut contribuer a l'elaboration et a la mise en reuvre d'un avantage concurrentiel de l'entreprise de deux manieres: d'abord par les systemes de gestion (une selection adequate, une meilleure gestion de la con tribution, des programmes de formation pertinents et efficaces, des systemes de remuneration), ensuite par l'apport des ressources humaines elles-memes qUi s'ajoute aux systemes de GRH. Relever les delis de la gestion des ressources humaines, c'est donc trouver des solutions aux multiples problemes et enjeux qui se posent et qUi derivent de la presence necessaire et inevitable de personnes ou de « ressources hu maines}) dans les organisations. C'est aussi decouvrir les meilleures fas;:ons d'elaborer et d'utiliser les systemes pertinents de GRH. Les delis lies aux ressources humaines sont autant d'appels a l'action qui ont en commun l'obligation de resultat. Ainsi, ce livre vous expose les defis les plus importants et vous presente Ie plus clairement et Ie plus simplement possible quelques unes des solutions qUi emergent de la pratique et de la litterature specialisee dans ce domaine. Dans ce chapitre, la premiere section tente de circonscrire les multiples fas;:ons de definir la gestion des ressources humaines. La deuxieme section expose les principales perspectives qui ont jalonne l'evolution de la GRH. Cela nous permet de demontrer que la GRH est non seulement importante dans Ie contexte contemporain, mais egalement interessante et complexe puisqu'elle peut etre envisagee sous differentes perspectives. La troisieme sec tion presente les acteurs responsables de la qualite de la GRH au sein des orga nisations. En effet, une caracteristique qUi distingue la GRH de la gestion du marketing, de la gestion des finances et de la gestion de la production tient au fait qu'elle repose sur les epaules de divers intervenants dans les organisa tions. Cette notion de responsabilite partagee en matiere de GRH rend d'ailleurs la lecture de ce livre utile a toute personne, queUes que soient ses fonctions ou l'entreprise ou elle travaille. La quatrieme section traite des conditions qui favorisent un partenariat de qualite entre ces acteurs. Enfin, la cinquieme section examine les delis que la GRH doit relever et presente som mairement Ie plan de ce livre.
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
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La gestion des ressources humaines
. .. . . ... . .... . . . .. .. . . ... .. . . ... . . . La gestion des ressources humaines se situe a deux niveaux: celui des organi sations et celui de la societe. Dans les organisations, la GRH constitue une fonction de gestion (analogue aux fonctions «production», «marketing» et «finances»). Dans la societe, la GRH est aussi un domaine de connaissances specialisees donnant lieu a des etudes, a des recherches et a des activites professionnelles. ~
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1.1.1 La GRH en tant que fonction de gestion Comme nous l'avons mentionne au debut du chapitre, toute organisation implique la presence necessaire et inevitable de personnes ou de ressources humaines. Sur ce plan, la fonction «ressources humaines» constitue un ensemble variable de pratiques qui visent a aider l'organisation a resoudre avec efficacite, efficience et equite Ies problemes associes a la presence de per sonnes au sein d'une entreprise. Ces pratiques sont d'abord la responsabilite des membres de la direction generale de toute organisation; elles sont aussi Ie lot de toute personne qui occupe un poste de responsable hierarchique, c'est a-dire qui a des personnes sous sa direction. En ce sens, la fonction «res sources hUmaines» s'interesse a la direction ou a la supervision d'individus dans les organisations. Cette fonction existe independamment de la presence eventuelle d'un service des ressources humaines, et nul n'a besoin d'etre un specialiste de la GRH pour devoir s'y interesser.
A l'interieur des entreprises, les buts de la gestion des ressources humaines sont souvent conflictuels, puisque, d'une part, i1 y ales membres d'une equipe de direction dont Ie mandat consiste a trouver des solutions efficaces et efficientes aux situations de production et, d'autre part, il y a l'ensemble des employes, qui souhaitent que ron prenne leurs besoins en consideration de fa~on a optimiser leur bien-Hre et leur satisfaction au travail. Ces deux points de vue peuvent etre reconcilies, mais on devine facilement Ie conflit potentiel qui existe dans toute organisation. La fonction «ressources hu maines» implique donc un necessaire compromis entre les interets, lequel repose sur l'ethique. En d'autres termes, cela exige des dirigeants qu'ils aillent au-del a d'une reflexion strictement instrumentale (basee sur un choix de moyens en vue d'atteindre des buts) et se situent plutOt sur Ie plan d'une reflexion ethique qui interroge Ies decisions d'une organisation a la lumiere de valeurs non seulement economiques et financieres, mais aussi sociales et humaines. Comme nous Ie verrons d'une fa\,on plus approfondie au chapitre 2, une grande partie des defis contemporains de la GRH decoule directement des changements qui sont intervenus dans I'environnement externe des entre prises. Dans ce contexte de bouleversements et d'ajustements, les pratiques de GRH, autrefois considerees comme mineures, se sont soudainement transfor mees en mecanismes privilegies d'obtention et de maintien de la capacite concurrentielle de toute organisation. Le role des professionnels de la GRH a aussi beaucoup evolue, passant d'une activite de soutien s'appuyant sur des
Chapitre 1
I Miser sur la gestion des ressources humaines
transactions relativement simples et bureaucratiques centrees sur l'embauche et les licenciements a un ensemble d'activites impliquant des decisions com plexes Uees au rendement des employes et a la rentabilite de l'entreprise. Au creur de la fonction « ressources humaines» se situe l'interdependance entre Ies personnes et les emplois, alors que cette relation est eIle-meme influencee par les environnements externe et interne des entreprises, comme l'iHustre ]a figure 1.1. lES COMPOSANTES DE LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES Environnement externe
1.1.2 La GRH en tant que domaine de connaissances specialisees Les etudes specialisees en GRH Les programmes d'etudes specialisees en GRH, du moins en Amerique du Nord, sont apparus dans un domaine connexe qu'est celui des relations indus trielles. Ainsi, l'annee 1920 marquerait la naissance du do maine des relations industrielles avec la creation conjointe d'un departement universitaire consa cre 11 ces enjeux sociaux (a l'Universite du Wisconsin) et d'upe association professionnelle (l'Industrial Relations Association of America). A cette epoque,
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
l'administration du personnel, d'une part, et les relations patronales-syndicales, d'autre part, etaient considerees comme les composantes des relations indus trielles (Kaufman, 1993). Au Canada, la formation de specialistes des relations industrielles s'est in tensifiee avec la fondation, en 1943, d'un departement des relations indus trielles a l'Universite Laval et, en 1945, de l'Ecole des relations industrielles de l'Universite de MontreaL Au Canada anglais, l'Universite McGill, a Montreal, l'Universite Queen's, a Kingston, et l'Universite de Toronto ont aussi innove en creant des unites de recherche et d'enseignement en relations industrielles. Dans les facultes et les ecoles d'administration (ou de sciences administra tives), la formation dans Ie champ de la GRH date du debut des annees 1970 avec I'instauration de concentrations de cours (ou d'options specialisees), par exemple, aux HEC Montreal ou a la Faculte d'administration de l'Universite de Sherbrooke. Aujourd'hui, la GRH constitue un domaine d'etudes specia lisees solidement etabli dans de nombreuses universites a travers Ie monde. Il est de plus en plus possible d'obtenir des diplomes en GRH tant au baccalau reat qu'a la maitrise ou au doctorat. De nombreuses personnes qui abordent Ie domaine d'etudes que represente la gestion des ressources humaines se po sent des questions sur les ressem blances et les differences entre Ie fait d'etudier dans un departement ou une ecole de relations industrielles et Ie fait d'etudier dans un programme dit de GRH, habituellement localise dans une faculte ou une ecole de gestion. Dans un article consacre a cette question, Kaufman (2001) soutient que ces deux domaines ont en commun de nombreuses caracteristiques dont les suivantes: l'accent mis sur les problemes relatifs a l'emploi et au fonctionnement des organisations i un interet pour les politiques des gouvernements, des syndi cats et des employeurs; la reconnaissance du caractere « humain» du travail; la recherche de solutions positives aux problemes du travail; enfin, la multi disciplinarite et l'aspect applique. Les differences entre la gestion des res sources humaines et les relations industrielles s'articulent de la faeon suivante. • La GRH met l'accent sur les solutions patronales aux problemes lies au tra vail, alors que les relations industrielles se centrent sur les solutions syndi cales et gouvernementales. • La GRH utilise surtout une perspective interne, axee sur l'organisation, alors que les relations industrielles utilisent surtout une perspective externe. • Le principal but vise par la GRH est l'efficacite et l'effidence de l'organisa tion, tandis que Ie principal but vise par les relations industrielles consiste a harmoniser l'efficacite et l'efficience de l'organisation avec Ie bien-etre des employes. • La GRH adopte une approche plutOt instrumentale en ce qUi a trait a la promotion des interets des employes, alors que les relations industrielles font des interets des employes un important but largement inctependant.
Chapitre 1
I Miser sur la gestion des ressources humaines
• La GRH vise la creation d'interets partages entre l'employeur et ses em ployes, alors que les relations industrielles se focalisent sur la mediation du conflit entre patrons et employes. • La GRH considere Ie pouvoir patronal comme necessaire a l'efficacite et a l'efficience, alors que Ies relations industrielles mettent l'accent sur la necessite de limiter et de controler Ie pouvoir patronal. • La GRH estime que les conflits peuvent etre minimises par la gestion, alors que les relations industrielles jugent qu'ils sont inevitables et qu'ils exigent habituellement l'intervention d'une tierce partie. • La GRH voit dans Ie management Ie principal responsable des resultats positifs obtenus au niveau de l'organisation et aborde les syndicats et les gouvernements comme des contraintes, alors que, pour les relations indus trielles, Ie management ne peut agir positivement que s'il fait face a des syndicats forts et a des legislations contraignantes. Le parallele entre la GRH et les relations industrielles amene Kaufman a la conclusion suivante: «La realite du monde du travail est telle que la plupart des situations d'emploi representent un melange des points de vue des rela tions industrielles et de la GRH» (2001, p. 370). On peut ajouter que ces deux points de vue semblent coexister assez bien; par exemple, les membres de l'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agrees du Quebec ont Ie choix entre Ie titre de conseiller en ressources humaines agree et celui de conseiller en relations industrielles agree. En ce qui concerne Ie nombre, les deux groupes seraient actuellement a peu pres egaux.
les recherches en GRH La GRH est devenue un theme important de recherches avec la creation aux Etats-Unis et au Canada d'associations de recherches regroupant des specia listes de diverses disciplines (economique, droit, psychologie, sOciologie, his toire, etc.). Aux Etats-Unis, l'Industrial Relations Research Association a ete creee en 1947, tandis qu'au Canada, quelques annees plus tard, a He instituee I' Association canadienne des relations industrielles (ou Canadian Industrial Relations Association). Pour ce qUi est des sciences administratives, la creation de la section «Ressources humaines» au sein de l'Academy of Management date de la fin des annees 1960. Au Canada, l'organisme equivalent qUi ras semble les chercheurs en sciences administratives s'appelle l'Association des sciences administratives du Canada, et ce n'est qu'en 1988 qu'on y a etabli une section specialisee en ressources humaines. Du cote europe en, les cher cheurs fran~ais interesses au domaine de la GRH ont fonde en 1990 l' Association de gestion des ressources humaines.
les activites professionnelles Les ancetres des professionnels actuels de la GRH sont apparus au Canada vers la fin du XIX e siecle. On les qualifiait par des expressions telles que « tra vailleurs sociaux d'entreprise» ou «secretaires au bien-etre des employes». Le premier regroupement canadien de praticiens du domaine de l'administration
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
du personnel s'appelait la Montreal Personnel Association, fondee en 1934. Cette association a servi de tremplin a la creation, vers 1960, de l'Association des professionnels en ressources humaines du Quebec. En parallele, les prati ciens du domaine des relations industrielles creaient, en 1963, la Societe des conseillers en relations industrielles du Quebec, avant d'instaurer, en 1973, la Corporation professionnelle des conseillers en relations industrielles du Quebec (Deslierres, 1990). En 1997, on assistait a la fusion de la Corporation professionnelle des conseillers en relations industrielles du Quebec et de I'Association des professionnels en ressources humaines du Quebec, ce qui a permis l'apparition de l'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agrees du Quebec. II s'agit d'un organisme dynamique et solidement implante dans les milieux de travail puisqu'il regroupe main tenant pres de 7000 membres. La presidente de cet organisme est Genevieve Fortier.
Chapitre 1
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Miser sur la gestion des ressources humaines
11 existe d'autres regroupements de praticiens en GRH. C'est Ie cas, entre autres, d'organismes reunissant des specialistes de 1a remuneration (World at Work), de 1a formation (Society for Training and Development), du developpement organisationnel (DO Canada) ou des systemes d'information en ressources humaines (International Human Resource Information Management Association). Aux Etats-Unis, la Society of Human Resource Management regroupe 1es praticiens de 1a GRH, alors qu'en France, c'est a l'interieur de l' Association nationa1e des directeurs et cadres du personnel qu'ils se retrouvent.
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m .L~ !':1~l~~~~i.c.i~~. ~~~. ~~!~p'~~~i~.~s. ~.~~~ .1~. ~~"'!I.~i.~~ .~~ .1.~ ~~~.
Depuis ses debuts jusqu'aux annees 1960, la GRH, en tant que fonction dans les entreprises et en tant que domaine de connaissances specialisees, a ete caracterisee par trois perspectives principales qui sont plus ou moins contra dictoires les unes par rapport aux autres et qui continuent meme aujourd'hui d'exercer une certaine influence. I}existence de ces diverses perspectives rend la GRH non seulement interessante, mais aussi complexe. Ces perspectives sont les suivantes: • la perspective scientifique ou techniciste (ou taylorisme), dans laquelle la GRH est abordee comme un ensemble de regles ou de methodes a mettre au pOint; • la perspective psychologique, ou Ie mouvement des relations humaines, dans laquelle la GRH est vue surtout sous l'angle du dynamisme humain et ou une importance considerable est accordee aux habiletes des gestion naires dans les relations interpersonnelIes; • la perspective institution nelle, legale et politique, ou des relations du travail, dans laquel1e la GRH est examinee dans Ie cadre des relations structurees (et souvent antagonistes) entre, d'une part, la direction et ses representants et, d'autre part, les employes et leurs representants (les syndicats). Ces trois courants ont ete suivis des deux perspectives suivantes, sur les queUes nous reviendrons plus loin, soit la perspective systemique et la pers pective strategique. Ces differentes perspectives se sont constituees apres la revolution indus trielIe, periode ou la plupart des experts situent l'emergence des problemes humains dans les organisations et ou la perspective adoptee en matiere de GRH est a la fois capitaliste et liberale.
1.2.1 La perspective capitaliste et liberale Au X!X e sii':cle, la revolution industrielle a provoque l'industrialisation massive des nations occidentales (Europe et Amerique du Nord). Dans ces differents pays, les «manufactures », ces grands etablissements ou l'on fabriquait des produits, ont connu une croissance spectaculaire de l'emploi (de 200% a 300%). Alors que les premieres entreprises etaient plut6t petites (artisanales) et dirigees par leur proprietaire, les nouvelles entreprises manufacturieres etaient de plus en plus importantes, ce qui a cree la necessite de faire appel a des gestionnaires pour encadrer une main-d'reuvre de plus en plus «proleta risee» par l'eloignement entre l'employe et Ie proprietaire-patron, par la dequalification du travail (a cause de la mecanisation) et par l'insecurite presque totale en ce qui a trait au maintien de l'emploi et aux niveaux de re muneration. De plus, les pratiques dominantes de GRH consistaient a contier tout Ie pouvoir aux contremaltres, dont la methode privilegiee de supervision etait Ie drive system, qui «impliquait une supervision constante et etroite de la
Chapitre 1
I Miser sur la gestion des ressources humaines
part d'un contremaitre et l'utilisation d'un langage blasphematoire visant par l'abus verbal et l'intimidation a inciter les employes a travailler plus fort» (Kaufman, 1993, p. 7). Meme si ces pratiques assocjt'es au capitalisme « sauvage» et au liberalisme
(qui ne connaissait pas encore de contraintes It'.'gales et sociales) ont permis l'obtention de resultats efficaces et efficients pendant de nombreuses annees, elIes ont aussi ete responsables de la montee incessante de la frustration parmi les travailleurs et de plusieurs affrontements caracterises par la violence sur les Heux du travail. Ces reactions des travailleurs etaient surtout provoquees par les trois facteurs suivants: • de frequentes manifestations de favoritisme dans les decisions des contre maitres en matiere de ressources humaines; • l'absence de toute procedure permettant d'en appeler de ces decisions et d'esperer etre entendus en toute justice; • les attitudes autocratiques et insensibles adoptees par Ia grande majorite des gestionnaires it tous Ies niveaux. Les actes de violence de plus en plus nombreux sur Ies Heux du travail ont amene, des Ie debut du xx e siecIe, un courant de retorme incarne par les trois voies de solutions deja evoquees: Ie genie industriel ou l'organisation scien tifique du travail, a la maniere de Taylor, la psychologie industrielle et Ie mouvement des relations humaines ainsi que l'approche de l'economique institutionnelle du travail, centree sur Ie role des syndicats et des gouver nements dans l'instauration d'un equilibre entre Ie pouvoir patronal et Ie pouvoir des salaries representes par un syndicat.
1.2.2 La perspective scientifique ou techniciste Selon Taylor (1911), les problemes associes au facteur humain etaient simple ment dus it des methodes de production inadequates. Le recours aux principes de l'organisation scientifique du travail devait permettre de trouver la meil leure fa~on (the one best way) de selectionner, de remunerer et de former les employes pour l'obtention du meilleur rendement possible. Un peu comme les promoteurs contemporains de la reingenierie des processus, Taylor propo sait Ie recours a des experts (comme lui) pour qu'ils procedent it des etudes des temps et des mouvements, pour qu'ils con~oivent des systemes ingenieux de remuneration incitative et pour qu'ils mettent au point des programmes de formation et des methodes de selection. Dans cette approche, ni Ie travailleur salarie ni Ie contremaitre n'avaient besoin d'etre mis a contribution, puisque la «science» fournissait les bonnes reponses. En somme, on a pretendu resoudre les problemes associes au facteur humain en oubliant de tenir compte de l'element humain et surtout en negli geant de faire participer les employes a la recherche et a la mise en reuvre des meilleures fa~ons de resoudre les problemes.
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1.2.3 La perspective psychologique et le mouvement des relations humaines Le mouvement des relations humaines a souvent ete mis en relation l de fa~on un peu trop restrictive, avec les travaux du professeur americain Elton Mayo aux usines Hawthorne de Western Electric, de 1927 a 1934. Par ailleurs rex pression" relations humaines» etait, des 1920, utilisee frequemment da~s les ecrits de praticiens de la gestion du personneL Selon Ie point de vue de cette ecole e]argie des relations humaines, s'H existe des problemes entre la direc tion et les salaries, c'est d'abord parce qu'on ne se donne pas la peine de considerer les besoins psychologiques des salaries et ensuite parce qu'on n'accorde pas suffisamment d'importance a des pratiques de gestion carac terisees par Ie leadership, les communications, la reconnaissance et Ie respect des personnes. L'une des consequences positives de l'approche psychologique a ete l'abandon progressif par plusieurs employeurs des methodes de supervision axees sur l'intimidation et la peur de perdre son emploi (Ie drive system), et leur remplacement par des methodes plus positives orientees vers l'instaura tion d'un climat de justice et de respect mutueL
1.2.4 La perspective institutionnelle, legale et politique Selon les tenants de l'approche institutionnelle, legale et politique du travail, les problemes de relations entre les directions d'entreprise et les salaries sont fondamentalement dus d'abord au desequilibre des pouvoirs entre les deux groupes, puis a l'autoritarisme des gestionnaires et, enfin, a la precarite eco nomique que vivent les salaries. Deux types de solutions sont donc privile gies, soit, d'une part, les negociations collectives conduites par des syndicats libres et, d'autre part, l'instauration par l'Etat de regles legales (un droit du tra vail) auxqueUes sont soumis les employeurs. Cet important courant de pen see a fortement contribue a l'etablissement de programmes de formation en relations industrielles et favorise, des Ie debut du xxe siecle, llemergence d'un droit du travail, qUi a lui-me me entraine lleclosion du syndicalisme qu'on connait aujourd'hui. Jusqu'aux annees 1960 environ, on a assiste dans plusieurs ecoles ou de partements de relations industrielles a de spectaculaires batailles theoriques entre les partisans des relations humaines (creuset de ]a gestion du personnel) et ceux de l'economique institutionnelle du travail (creuset des relations du travail). Ces ecoles et departements ont d1ailleurs accorde un poids prepon derant aux relations du travail, surtout a partir de 1958 lorsque Dunlop a fait paraitre un livre intitule Industrial Relations Systems. Son objectif consistait a fournir aux relations industrielles un cadre de reference emprunte a la theorie des systemes et destine a faciliter la representation de l'ensemble des variables intervenant dans un systeme de relations du travail. Progressivement, l'ap proche des relations humaines (et de la gestion du personnel) a presque ete
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I Miser sur la gestion des ressources humaines
evacuee des ecoles et des departements de relations industrielles (du moins pour un certain temps), alors qu'on a observe, paradox,:lemer~t, son em~r gence dans les ecoles de gestion et dans Ies entreprises. A partn des annees 1960, l'approche des relations humaines et la nouvelle appellation «gestion des ressources humaines» ont continue a se developper par Ie recours, entre autres choses, a la perspective systemique.
1.2.5 La perspective systemique
Apeu pres jusqu'aux annees 1960, la gestion des ressources humaines (qui ne s'appelait pas encore de cette fa~on) constituait un eventail d'activites juxta posees, sans reference a une vision d'ensemble. L'emploi de modeles tires de la theorie des systemes allait changer cet etat de choses. Un systeme peut etre detini comme une entite (par exemple, une organi sation) orientee vers la realisation d'objectifs et composee d'un ensemble d'elements interdependants qUi doivent contribuer a optimiser la realisation des objectifs. Un systeme ouvert est influence par l'environnement. II fonc tionne en faisant appel a des res sources, qui sont utilisees dans un cycle d'activites, qui se renouvelle et se regularise par Ie recours a la retroaction (regulation interne) et au mecanisme de distribution des resultats, qui permet Ie renouvellement des ressources. Appliquee a la GRH, l'approche systemique implique d'abord une analyse des composantes de l'environnement qui exercent une influence tant sur les ressources consacrees a la GRH que sur les activites et les objectifs que 1'orga nisation devrait poursuivre. En tant que sous-systeme (ou fonction) d'une organisation, un systeme de GRH doH poursuivre des objectifs compatibles avec ceux du systeme global dans lequel il s'insere. En meme temps, Ie sys teme de I'organisation est inevitablement influence par ce qUi se passe dans n'importe lequel de ses sous-systemes (a cause de I'interdependance), et Ie sys teme de GRH ne fait pas exception a cette regIe. L'approche systemique implique ensuite Ie fait que, pour chacune des acti vites de GRH, on detinisse d'une fa~on rigoureuse les objectifs a atteindre ou l'apport a la realisation des resultats recherches. Cela permet non seulement de contribuer a une plus grande cohesion de l'ensemble des activites de GRH, mais aussi de proceder a une evaluation, dans la me sure ou l'on s'est donne la peine de formuler, pour chaque objectif vise, des normes ou des indicateurs qUi aideront a porter un jugement eclaire sur Ie degre de succE~s ou d'echec des activites. La figure 1.2 illustre l'approche systemique appliquee a la GRH. Ce n'est donc que depuis l'emergence de la perspective systemique et son application a la GRH que toutes les pratiques de GRH peuvent faire l/objet d'une evaluation de leur contribution a la realisation d'objectifs organisation nels. De plus, Ia notion d'interdependance entre Ie systeme et les sous-systemes permet de s'interroger sur la place que Ie valet «ressources humaines» occupe dans les objectifs gIobaux d'une entreprise.
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l'APPROCHE SYSTEMIQUE APPLIQUEE
A LA GRH
Retroaction it l'lnterne Renouvellement des res50urces (par la distribution des resultats)
Dans les annees 1980, une perspective que l'on pourrait qualifier de strate gique est venue s'ajouter ala perspective systemique, ce qui a provoque une transformation encore plus marquee des conceptions et des pratiques de GRH, a tel pOint que certains observateurs (entre autres Kravetz, 1988) ont parle de « revolution des ressources humaines».
1.2.6 La perspective strategique La caracteristique principale des modeles plus recents de GRH reside dans Ie fait qu'ils tentent de reunir diverses activites choisies en fonction de l'obten tion de resultats et qu'ils les integrent en un ensemble oriente de fa~on pros pective vers les besoins de l'organisation. En d'autres termes, ces modeIes font de plus en plus appel a une perspective strategique (Allaire et Firsirotu, 1993; Hafsi, Toulouse et autres, 1996), Dans la Grece antique, un strategos etait un general de l'armee. Par exten sion, la strategie, c'est, du moins selon l'une de ses significations, l'art de conduire des operations miIitaires, ce qui implique de faire des choix en tenant compte de I'ensemble des facteurs susceptibies d'influencer la victoire ou la dHaite. Transposee dans Ie domaine de la gestion des entreprises, la stra tegie designe done Ie processus de formulation et de mise en reuvre des moyens appropries en vue d'atteindre les objectifs d'une entreprise et de
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realiser sa mission, dans un contexte caracterise par I'adversite. La figure 1.3 illustre Ie fait que Ies strategies de GRH se situent dans Ie cadre plus vaste des strategies de I'entreprise et des strategies des unites d'affaires, tout en com portant des volets particuliers associes aux differentes activites ou aux dif ferents programmes de GRH. UN MODELE DE GESTION STRATEGIQUE DES RESSOURCES HUMAINES
Le processus de gestion strategique comprend les quatre Hapes suivantes. • Le diagnostic, qui constitue une Hape prealable alimentant la conception strategique. Cette etape se compose d'une analyse de l'environnement externe ainsi que du systeme interne (les intrants, les activites, les extrants). • La formulation des strategies, qUi comprend l'elaboration des objectifs prioritaires et des plans d'action privilegies. Cette Hape est diffidle car elle implique un acte creatif. • La mise en ceuvre des strategies (organisation et execution), qui constitue une etape souvent plus difficile que la precedente. Elle indut la budgeti sation des ressources requises, un aspect structurel (des politiques, des programmes, l'attribution des responsabilites, des methodes d'evaluation, etc.) et un aspect motivationnel (des outils de stimulation materielle et ideologique: les communications, Ie renforcement positif, etc.). • L'evaluation, qui complete la mise en ceuvre et qui permet de verifier la realisation des resultats. II est a noter que les Hapes de la formulation des strategies et de la mise en ceuvre des strategies representent les aspects fondamentaux de I'idee de stra tegie: d'abord les buts a atteindre, generes surtout par la conception strate gique, puis les voies et les moyens, associes a la mise en ceuvre des strategies.
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Applique it la GRH, Ie concept de gestion strategique consiste it Hablir un lien plus organique entre les strategies de l'entreprise et l'ensemble des prati ques de GRH. Cette approche implique Ie fait que les ressources humaines (et particulierement les gestionnaires specialises en ressources humaines) soient plus etroitement associees au travail d'elaboration des strategies de l'entre prise. L'approche strategique en matiere de GRH exige un effort accru de la part de tous les gestionnaires en cause de maniere it gerer les ressources hu maines en faisant appel explicitement au processus de gestion strategique. Mais pourquoi cela est-il necessaire? Gosselin souligne l'urgence «de consi derer les employes comme une ressource strategique ». II ajoute ceci:
Quand les principaux actifs d'une entreprise sont contenus dans les connais sances et les habiletes des employes plutOt que dans les inventaires, les immeubles et la machinerie, les gestionnaires responsables des orientations strategiques d'une entreprise n'ont pas d'autre choix que de mettre Ie facteur humain au centre de leurs preoccupations (1996, p. 297). Les formulations plus recentes de la gestion strategique appliquee ala GRH reposent de plus en plus sur ce qu'on appelle la conception de la firme basee sur les res sources (resource based view of the firm) (Wright, Dunford et Snell, 2001). Par opposition it l'approche traditionnelle en matiere de strategie, ou les intentions viennent en premier et ou la structure et les ressources viennent ensuite appuyer la strategie, cette approche propose plutot que 1'0n parte de la capacite organisationnelle pour en arriver de fa~on progressive it des strategies qu'on qualifie d'ailleurs d'emergentes. Ainsi, Ie contexte d'un environnement chaotique et imprevisible donne a cette approche sa credibilite. Alors que dans l'environnement traditionnel, l'avantage concurrentiel resultait de la capacite a bien livrer un ensemble existant de produits et de services, Ie contexte nouveau de turbulence implique que l'avantage concur rentiel vient de plus en plus de la flexibilite et de l'agilite organisationnelles que procure la disponibilite de res sources humaines competentes et mobili sees, c'est-a-dire prHes a detecter les changements dans les besoins des clients, it concevoir des produits et des services qui correspondent aces besoins, et a livrer ces produits et ces services plus rapidement que les concurrents. L'une des armes de la nouvelle flexibilite organisationnelle est Ie changement orga nisationnel, qUi n'est possible que grace au changement individuel, puisque, «quand les entreprises n'arrivent pas a changer, l'echec provient rarement du manque de mobilite ou de malleabilite des ressources physiques ou finan cit'~res, mais plutot de l'absence de changement chez les personnes» (Wright, Dyer et Takla, 1999). Consequemment, on voit l'importance de la qualite des ressources humaines et des systemes de GRH pour detecter et realiser les chan gements requis.
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venants, en particulier entre les gestionnaires hierarchiques et Ies autres ges tionnaires specialises en GRH qui CI'uvrent dans Ies services des ressources humaines. Des que la direction d'une entreprise prend Ia decision de creer un service des ressources humaines, c'est-a.-dire une unite administrative specia lisee qUi s'occupera des enjeux lies aux ressources humaines, Ie probleme du partage des responsabilites se pose. Le tableau 1.1 resume d'ailleurs Ies diffe rences entre la fonction « ressources humaines» et Ie service des ressources humaines. On convient de plus en plus, aujourd'hui, que tout gestionnaire, quelles que soient sa specialite fonctionnelle, sa position dans la hierarchie et la taille de l'entreprise pour laquelle il travaille, doit contribuer a s'attaquer de fa\=on efficace et satisfaisante aux enjeux relatifs a la GRH. Les competences requises pour repondre it ces enjeux font de plus en plus partie des compHences essen tielles de tout bon gestionnaire. Vne autre fa\=on de decrire cette situation consiste a. dire que les enjeux se rapportant aux ressources humaines sont dorenavant consideres comme trop importants pour qu'on les laisse unique ment entre les mains des professionnels d'un service des res sources humaines, aussi competents soient-ils. Voyons maintenant les responsabilites des uns et des autres en matiere de GRH. 1.3.1 Les diTigeants d'entTepTise et la GRH Quoique la responsabilite ultime de la qualite de la GRH repose sur les dirigeants d'entreprise, peu d'ecrits ont permis de distinguer clairement leurs responsabilites a cet egard. Plus precisement, nous croyons que Ie discours optimiste des dirigeants d'entreprise a l'endroit de leur personnel a plus de chances de cOincider avec leurs decisions d'affaires dans la mesure ou ils assu ment adequatement trois grandes responsabilites en matiere de GRH, soit
LES DISTINCTIONS ENTRE LA FONCTION «RESSOURCES HUMAINES» ET LE SERVICE DES RESSOURCES HUMAINES
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celles de voir dans les ressources humaines un avantage concurrentiel, de pro mouvoir une GRH adaptee au contexte d'affaires de l'entreprise et d'exercer un leadership fort axe sur la communication.
Voir dans les ressources hurnaines un avantage concurrentiel Dorenavant, il y a peu de possibilites que les dirigeants d'entreprise acquie rent un avantage concurrentiel a long terme en ne s'appuyant que sur des fac teurs traditionnels de sucd~~s comme une technologie de pointe, un creneau de marche, un acces privilegie aux matieres premieres et de bonnes conditions de financement. En effet, les concurrents sont maintenant cap abIes de copier rapidement la technologie, Ie produit ou Ie service qui distinguent une entre prise. Par ailleurs, l'acces privilegie a un marche ou a une matiere premiere est plus difficile agarder dans un contexte de libre-echange et d'amelioration des reseaux de distribution. L'accessibilite aux ressources financieres n'est pas non plus un atout a long terme etant donne que les marches financiers s'ouvrent et que Ie capital circule plus librement. Dans une telle situation, force est de conclure que Ie principal facteur de succes pour les annees a venir correspond a celui qui a peut-etre ete Ie plus neglige jusqu'a maintenant: les ressources humaines. Par consequent, les organisations gagnantes sont celles qui arrivent a mieux gerer leurs res sources humaines, ou encore a mieux relever les dHis de la GRH dont traite ce livre. Comme il est impossible de l'emporter dans les deux volets de la concurrence (l'amelioration de la quantite et de la qualite des produits et des services) sans Ie concours du personnel, c'est sur la capacite des dirigeants a bien gerer cette res source que s'appuie Ie SUCcE!S de leur orga nisation. La qualite de la GRH, c'est-a-dire des pratiques de selection, de formation, de remuneration, etc., peut constituer un avantage concurrentiel, car elle influe sur Ie rendement des employes, sur la realisation de la strategie d'affaires et sur Ie rendement de l'entreprise.
Prornouvoir une GRH adaptee au contexte d'affaires de l'entreprise La perspective dite contingente (ou synergique) a l'egard de Ia GRH peut etre exprimee simplement: il n'existe pas de solution miracle! Les dirigeants d'en treprise doivent donc renoncer a rechercher des « recettes» dans ce domaine. Les ressources humaines constituent un veritable atout dans Ia mesure OU elles sont gerees au moyen de politiques et d'activites qui sont coherentes entre elles, coherentes avec celles des autres fonctions de gestion et alignees sur la realisation de la strategie d'affaires. «La bonne fa~on de faire» en GRH est donc celle qui s'adapte au contexte d'affaires propre achaque organisation, notamment ses valeurs, sa culture, ses objectifs, sa strategie et son environnement, et qui evolue au meme rythme que l'environnement et la strategie d'affaires. Ceia signifie que les dirigeants d'entreprise ne doivent pas s'accrocher aux traditionnelles fa~ons de faire en GRH - qui ont certes pu etre a l'origine du succes passe de leur entreprise -, car Ie nouveau contexte exige certains changements.
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Cela dit, il ne s'agit pas non plus pour eux de modifier continuellement leurs politiques et leurs programmes de GRH sans egard au contexte d'affaires. En effet, de nombreux dirigeants d'entreprise s'aventurent dans des courants a la mode qui ne sont que des solutions toutes faites n'ayant rien a voir avec ce qu'il faudrait accomplir pour resoudre Ie probleme qu'ils connaissent. Certains d'entre eux procedent a des changements majeurs, comme la reduc tion de l'effectif et l'implantation de nouvelles technologies, alors que des modifications plus simples seraient davantage adaptees a leur strategie d'af faires et permettraient d'accroitre Ie rendement de leur entreprise (pour un excellent exemple d'approches responsables en cette matiere, voir Cascio, 2002). D'autres cadres superieurs s'appuient meme sur l'implantation succes sive de programmes dernier cri pour se batir une «bonne» reputation. Ces dirigeants, qUi se preoccupent plus de sOigner leur image aupres des
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actionnaires, du public et de la presse que d'ameliorer les conditions de tra vail reelles des employes, peuvent etre tentes d'opter pour les innovations les moins couteuses qUi permettent certes d'accroitre leur reputation, mais qui ne repondent a aucun besoin des employes. Malheureusement, certains conseils d'administration et dirigeants d'entreprise evaluent la competence de leurs cadres superieurs selon Ie nombre de changements qu'ils proposent et implantent, sans tenir compte de leur pertinence. Lorsque, par un heureux concours de circonstances, de telles innovations improvisees s'averent un succes, les dirigeants d'entreprise s'en approprient vite Ie credit. Toutefois, et ainsi qu'il faut sly attendre, ces innovations (autres que celles qui ont un caractere routinier) donnent rarement les resultats escomptes. Le plus souvent, les dirigeants jettent alors Ie blame sur leurs tradi tionnels boucs emissaires: les professionnels des ressources humaines, les employes ou encore les syndicats. Dans ce contexte, il ne faut pas etre surpris que les employes deviennent de plus en plus sourds, sceptiques, voire cyni ques, a l'egard des dirigeants d'entreprise qui leur demandent de collaborer activement ala realisation d'« un autre» changement organisationnel. Ils dou tent de la sincerite des intentions des dirigeants et de la portee a long terme du changement en question. « Plus r;:a change, plus c'est parei!», diront plusieurs avec raison.
Exercer un leadership fort axe sur la communication Pour se mobiliser et «etre dans Ie coup», les employes et les cadres doivent reconnaitre c1airement Ie leadership de l'equipe de direction. De leur cote, les dirigeants doivent constamment communiquer, verbalement et par ecrit, afin d'indiquer a tous les employes leur vision, leurs valeurs, leurs objectifs, leurs priorites, leurs strategies et leurs resultats. Le principal signe de l'importance que revetent les ressources humaines aux yeux des dirigeants tient au soin et au temps qu'ils prennent, d'une part, pour expliquer leurs actions et leurs decisions aux employes et, d'autre part, pour ecouter les reactions, les attentes et les craintes de ces derniers. Aussi, avant d'adopter des changements majeurs dans Ie domaine de la GRH, les dirigeants devraient s'assurer que les cadres de premier niveau et les employes de la base sont consultes, qu'ils comprennent la raison d'etre de ces changements, les acceptent et les estiment necessaires. Par ailleurs, sachant que les dirigeants sont les premiers responsables de la culture de leur organisation, ils doivent exprimer une ouverture sur les consi derations relatives aux ressources humaines et s'assurer qu'ils la commu niquent de plusieurs far;:ons (tant par ecrit et oralement que par leurs gestes et leurs decisions). Aussi, lorsque la plupart des employes ne savent pas que leur role est important dans la reussite de leur entre prise et que leurs attitudes et leurs comportements a l'endroit des clients font la difference, une partie du blame revient aux dirigeants de l'organisation. Selon Lawler, Ie caractere secret entourant Ie rendement des organisations (notamment a l'egard du rendement des concurrents) serait particulU~rement dommageable elant donne qu'« un certain sentiment d'urgence face aux concurrents est neces saire pour reduire les resistances au changement. Sans cette information, il est
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difficile pour les employes de comprendre le serieux de la concurrence» (1996, p. 221-222).
1.3.2 Les cadres hierarchiques et 1a GRH Le cadre est une personne qui supervise Ie travail d'au moins une autre per sonne. Tous Ies cadres doivent assumer des responsabilites face aux res sources humaines et etre tenus pour responsables, du moins en grande partie, de la qualite de la GRH dans leur secteur. Ces responsabilites de GRH sont inhe rentes it la relation superieur-subordonne. En effet, les cadres hh~rarchiques, queUe que soit leur specialisation (production, marketing, finance, etc.), doivent optimiser non seulement la gestion des ressources materielles et financieres, mais aussi celIe des ressources humaines qUi sont sous leur autorite hierarchique. Par exemple, un directeur du marketing doit, en plus de se preoccuper des ventes, du nombre de clients, de la qualite du produit et de sa distribution, superviser efficacement les personnes qui relevent de son autorite. II a la res ponsabilite de s'entourer de subordonnes competents, de voir it ce qu'ils aient la formation requise, de gerer leur rendement, d'organiser leur travail, et ainsi de suite. En somme, Ie rendement de son equipe repose sur une saine gestion des ressources humaines. Plus precisement, les cadres hierarchiques ont trois grandes responsabilites en matiere de GRH, soit celle d'etablir avec leurs su bordonnees des relations efficaces, respectueuses et equitables, celle d'assumer la supervision de leurs subordonnes et celIe de maintenir des relations appro priees avec les autres services, y compris la direction generale et Ie service des ressources humaines.
Etablir avec les subordonnes des relations efficaces, respectueuses et equitables Comme tous les cadres sont des gestionnaires des ressources humaines, l'ac ceptation d'un poste d'encadrement exige que l'on acquiere des habiletes per mettant d'etablir des relations efficaces, respectueuses et equitables avec des subordonnes, qui sont de plus en plus instruits. Les normes et les prescrip tions sur Ie sujet etant nombreuses (voir la litterature sur Ie coaching), nous resumons dans la liste suivante les comportements que l'on conseille Ie plus souvent aux cadres d'adopter: ecouter les employes, favoriser leur autonomie, exprimer des attentes, encourager la formation, reconnaitre et souligner les reussites des employes, les remercier, stimuler l'esprit d'equipe, responsabiliser les employes, remedier au mauvais rendement, orienter Ie travail, donner un sens au travail, faire les critiques en prive, affronter les problemes, s'entourer de gens competents, agir comme modele, donner aux employes une retroaction continue, se mHier des prejuges ou des biais, reconna1tre Ie droit it l'erreur, se soucier de l'equite, respecter les gens, communiquer.
Assumer la supervision des emp10yes Quoique certains puissent rever it cela, il est impossible d'etre cadre sans super viser Ie personnel! Aussi, dans la mesure ou une personne ne veut pas avoir it
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exercer une autorite hierarchique sur d'autres personnes, il serait preferable pour elle de refuser toute promotion et de se cantonner dans des postes de pre mier niveau, de representant ou de conseiller. Rappelons-le: devoir superviser des gens est inherent a tout poste d'encadrement, de celui de president a celui de superviseur de premier niveau ou de contremaitre. Les cadres sont d'ailleurs tenus pour responsables, et avec raison d'ailleurs, des resultats et de la cohe sion de leur equipe. Assumer la supervision des employes implique done que les cadres s'engagent dans la gestion du rendement des membres de leur equipe. Cela peut signifier, en certaines circonstances, de devoir recourir ades mesures administratives ou disciplinaires (voir Ie chapitre 9 sur la gestion des employes difficiles) et de ne pas essayer d'eviter ces obligations.
Maintenir des re1ations appropriees avec les autres services Les cadres ont egalement comme responsabilite de maintenir des relations appropriees avec les autres services de l'organisation, en particulier la direction generale et Ie service des ressources humaines. En effet, les cadres sont fre quemment invites a participer a plusieurs activites de GRH telles que l'organi sation du travail, la selection des employes, l'evaluation de leur rendement et la determination de leurs besoins de formation ou de leurs augmentations de salaire. Dans tous ces cas, its doivent demontrer qu'its comprennent les poli tiques enterinees par la direction generale; its doivent aussi demontrer qu'Us peuvent collaborer avec les representants du service des ressources humaines, qUi ont comme mandat de faire appliquer et respecter les politiques relatives aux res sources humaines. Certains soutiennent que les cadres de tous les niveaux seront dans l'ave nir davantage appeles a. jouer un rOle preponderant dans des activites tradi tionnellement devolues aux professionnels des res sources humaines, par exemple en matiere de formation, de planification de la main-d'reuvre et de remuneration. Dans ce cas, ils auront encore besoin d'obtenir la collaboration des professionnels des res sources humaines pour pouvoir mieux assumer ces responsabilites accrues.
1.3.3 Les professionnels des ressources humaines et la GRH La qualite de la GRH au sein des entreprises constitue egalement une respon sabilite des professionnels des ressources humaines. En effet, leur role premier consiste a optimiser la productivite des employes en accordant une aide technique, humaine et administrative aux cadres hierarchiques pour qu'ils supervisent adequatement leurs employes. Ces professionnels reuvrent sou vent au sein d'un service des ressources humaines, c'est-a.-dire d'une unite administrative dont la mission est de fournir aux cadres et aux employes d'une entreprise des services qui les aideront a. realiser des activites de GRH (comme Ie recrutement, la selection, la formation, la remuneration et la nego ciation collective). Quels que soient Ie titre du poste occupe par les profes sionnels des ressources humaines et Ie nom de leur unite administrative, leur presence dans l'entreprise n'est pas automatique. Elle est generalement attri buable a deux raisons: Ie manque de temps et Ie manque d'expertise des cadres.
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Le manque de temps des cadres hierarchiques Dans les petites entreprises, les cadres accomplissent seuls les activites de GRH et ont parfois recours a des consultants pour les seconder. Toutefois, Iorsque Ie nombre d'employes augmente, les activites de GRH, et notamment Ia selection et la formation, leur prennent beaucoup de temps, au point qu'il devient diffi cHe pour eux d'assumer a la fois ces activites de GRH et leurs autres fonctions. II est alors temps d'embaucher un professionnel des ressources humaines. Voila pourquoi J'on commence souvent par attribuer aces specialistes des taches qUi requierent enormement de temps, comme la gestion des salaires et des avantages sociaux et Ie recrutement.
Le manque d'expertise des cadres hierarchiques Face a des problemes particuliers lies a la supervision (comme !'insubordina tion ou Ie manque de releve), a l'improductivite ou au climat de travail, plu sieurs cadres ont besoin de conseils precis. Ils peuvent egalement avoir besoin de conseils d'experts pour s'assurer qu'ils ne contreviennent pas aux obliga tions legales sans cesse croissantes rattachees aux chartes des droits et libertes, aux normes du travail, a l'equite salariale au a l'egalite des chances en matiere d'emploi. Dans un contexte ou l'obtention de tels conseils aupres d'entre prises specialisees est trop cofiteuse ou inappropriee, il devient rentable d'em baucher un professionnel des ressources humaines. Cela explique pourquoi les responsabilites des professionnels des ressources humaines sont plus grandes a l'egard des actions ou des activites qui decoulent d'une loi ou d'un n.~glement du travail, comme la negociation d'une convention collective au l'elaboration d'un programme d'equite salariale au d'egalite des chances en matiere d'emploi. Les connaissances techniques du metier s'averent neces saires, et lIon ne peut demander a tous les cadres de les maitriser. En outre, si la presence de profession nels des ressources humaines permet aux cadres de se departir de certaines taches relatives a la GRH, d'autres decisions de GRH, comme celles qui ont trait a la selection finale et a l'evaluation du rendement, restent de leur ressort, meme si les professionnels des ressources humaines peuvent encore intervenir, en cas, par exemple, de non-respect des politiques de l'entreprise.
1.3.4 Les roles des professionnels des ressources humaines Apres avoir fait l'objet de debats pendant plusieurs annees, la question des roles des professionnels des ressources humaines donnerait maintenant lieu a un consensus (Wright, Dyer et Takla, 1999). Ce consensus s'articule sur la base du modele presente en 1997 par Dave Ulrich. Dans ce modele, les roles des professionnels des ressources humaines se repartissent sur deux axes: l'axe vertical indique l'accent place soit sur les operations a court terme, soit sur la strategie a long terme, alors que l'axe horizontal indique }'accent place soit sur les processus, soit sur Ies personnes. Par ailleurs, Ie modele d'Ulrich comprend quatre roles. Les deux roles plus traditionnels des professionnels des res sources humaines sont ceux de representant du personnel et d'expert de pro cessus administratifs, alors que les deux roles plus nouveaux et exigeants sont
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ceux de partenaire strategique (d'affaires) et d'agent de changement (voir la figure 1.4).
Le role d'expert de processus administTatifs Comme nous l'avons indique precedemment, on cree des postes de prafes sionnels des ressources humaines principalement parce que les cadres hierar chiques manquent de temps ou d'expertise pour accomplir convenablement leurs responsabilites de GRH. Une bonne partie du travail, si ce il'est la plus grande (dans un milieu syndique, par exemple), du service des ressources humaines porte sur la gestion des activites quotidiennes liees aux ressources humaines, comme Ie reglement des prablemes quotidiens, l'information a donner aux employes, la gestion des activites de GRH telles que l'embauche et la remuneration, l'information a donner aux cadres et l'execution des taches administratives. Cet aspect «operationnel» du travail des professionnels du service des res sources humaines s'avere tres important. En fait, il faut reconnaitre qu'il a ete, est et sera toujours la principale raison d'etre de la plupart des services des ressources humaines. Certes, l' aspect plus «strategique» de leur travail doit etre mieux assume dans l'avenir, mais cela doit s'ajouter aUK responsabilites quotidiennes et non se faire a leur detriment.
LE MODELE DES ROLES DES PROFESSIONNELS DES RESSOURCES HUMAINES
Strategique a long terme
Operations a court terme ou quotidiennes Source: Adaptee de D. Ulrich, Human Resource Champions: The Next Agenda for Adding Value and Delivering Results, Boston, Harvard Business School Press, 1997, p. 24.
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I Miser sur la gestion des ressources humaines
Le role de representant du personnel Le service des ressources humaines fournit une expertise en matiere de GRH a laquelle plusieurs clients privilegies, et notamment les employes et les cadres, font appel. Comme service-conseil (staf{) , Ie service des ressources humaines a la responsabilite de repondre aux besoins et aux attentes des cadres et des employes. En cela, Ie professionnel des ressources humaines est un represen tant du personnel ou un intermediaire entre les employes et les cadres. Par ailleurs, la seule fa~on efficace pour les professionnels des res sources hu maines de connaitre les besoins de leurs clients et d'y repondre adequatement consiste a travailler en etroite collaboration avec eux. L'etude de Labelle et Dyer (1992) lie d'ailleurs cette responsabiIite des professionnels des ressources humaines aux activitt~s suivantes: soumettre aux cadres les decisions impor tantes de GRH ou les projets de GRH afin d'obtenir leurs avis, faire corres pondre leurs prioritt~s a celles des cadres, tenir compte des suggestions de ces derniers, modifier les activites de GRH de fa~on a mieux repondre a leurs besoins, faciliter la realisation de leurs activites de GRH et faire des enqwHes pour connaitre les besoins des employes ou pour recueillir leurs opinions.
Le role de partenaire strategique (d'affaires) Les professionnels des ressources humaines doivent agir comme des parte naires strategiques ou d'affaires et comme des consultants internes en propo sant des activites qui amelioreront Ie rendement des organisations. L'etude de Labelle et Dyer (1992) associe ce role des professionnels des ressources hu maines aux activites suivantes: influencer les decisions des dirigeants d'entre prise, agir comme conseillers au moment de la prise de decisions strategiques, approuver les decisions importantes concernant Ie personnel et lier la GRH a la strategie d'affaires de l'organisation. Les professionnels du service des ressources humaines doivent aussi s'assu rer que la GRH correspond aux objectifs d'affaires de leur entreprise en prati quant ce qu'ils prechent, c'est-a-dire en mettant l'accent sur la qualite et Ie service. La necessite de mieux repondre aux besoins de leurs clients (les dirigeants, les cadres et les employes) fait que certains professionnels des ressources humaines sont moins nombreux dans les sieges sociaux que dans les divisions administratives, car Us doivent mieux comprendre les activites et demontrer des talents de generalistes.
Le role d'agent de changement Les professionnels des ressources humaines jouent egalement de plus en plus un role d'agent de changement. Ainsi, Us sont souvent charges de s'assurer que de nouvelles approches de gestion pourront etre implantees avec succes dans les entreprises ou ils travaillent. L'etude de Labelle et Dyer (1992) asso cie cette responsabilite aux activites suivantes: verifier si la GRH appuie les activites qUi se trouvent au creur de la mission de l'entreprise (la production et les services), analyser les forces et les faiblesses du service des ressources humaines, determiner les besoins a regard d'innovations en matiere de GRH, evaluer la satisfaction des employes face a la GRH et aux activites du service
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
des res sources humaines, ameliorer la qualite des outils de GRH et recourir des indicateurs objectifs pour evaluer la qualite des activites de GRH. En demontrant leur contribution
a l'amelioration
a
de la productivite de
l' organisation, les professionnels des res sources humaines acquierent de la
credibilite et augmentent leurs chances de devenir des acteurs plus importants au sein de l'equipe de direction. Bien que la reaction initiale de nombreux professionnels des ressources humaines soit souvent de croire qu'il est impos sible d'evaluer avec precision les effets de leurs activites, ils ont tout a gagner lorsqu'ils tentent de Ie faire en avan~ant des chiffres fiables quoique imparfaits.
1.3.5 Les employes et la GRH Si les employes s'attendent a ce que les dirigeants de leur entreprise leur accor dent une remuneration juste et des conditions de travail securitaires et equita bles, les dirigeants d'entreprise s'attendent a ce que leurs employes fassent Ie travail demande, atteignent Ies standards normaux de rendement et respec tent les regiements du travail. Ce sont Ia les responsabilites de base des employes. Toutefois, pour des raisons de competitivite, de plus en plus de dirigeants d'entreprise exigent davantage de leurs employes. Par exemple, ils leur de mandent de prendre plus d'initiatives au travail, d'acquerir de nouvelles habiletes ou de s'identifier encore plus a l'entreprise. Des employes de Ia pro duction sont invites a exercer des responsabilites accrues en matiere de GRH. Par exemple, de plus en plus d'employes sont charges d'evaluer leur propre rendement ou celui de leurs collegues, d'ecrire leur propre description d'em ploi, de participer a l'evaluation de leur emploi en repondant a un question naire, de gerer leur carriere, etc. La reduction recente du nombre de niveaux hierarchiques au sein de nombreuses organisations a d'ailleurs pour effet que plusieurs activites qui etaient autrefois du ressort des contremaitres sont maintenant assumees par les membres d'equipes de travail dites autogerees, semi-autonomes ou autonomes. Ainsi, les membres de ces equipes sont sou vent appeles a executer des taches a tour de role, a evaluer Ie rendement de l'equipe, a fixer leurs objectifs de travail, et meme a participer a la selection et a la formation de nouveaux coequipiers. Finalement, plusieurs employes pro fessionnels qui n'ont aucune responsabilite d'encadrement, c'est-a-dire aucun subordonne a superviser, sont aussi appeles a exercer plus de responsabilites en matiere de GRH. Par exemple, certains ingenieurs interviewent des dip 10 mes de l'universite qui postulent un emploi dans l'entreprise. Remarquons ici que les employes n'aspirent pas tous egalement a se sur passer au travail ou a assumer davantage de responsabilites i ainsi, certains desirent mieux equilibrer leurs responsabilites familiales et professionnelles, avoir plus de temps libre pour mener a bien des projets personnels ou, tout simplement, pour preserver leur sante. On peut alors s'interroger sur la compa tibilite des exigences sans cesse croissantes de certains dirigeants d'entreprise face a l'engagement des employes au travail, alors qu'en meme temps, ils
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I Miser sur la gestion des ressources humaines
procectent a des reductions massives d'effectifs, accordent de plus en plus de contrats ades sous-traitants, offrent une moins grande securite d'emploi, et ainsi de suite. Les employes ne sont pas dupes, ou ne Ie restent pas longtemps: ils se depenseront dans leur travail et assumeront plus de responsabilites dans Ia mesure ou ils en retireront certains avantages, comme une formation continue qui ameliorera leur «valeur» sur Ie marche du travail, une meilleure remune ration ou encore une participation n~~elle a Ia prise de decision et aux benefices de I'entreprise.
1.3.6 Les syndicats et la GRH Historiquement, Ies syndicats ont aussi ete en partie responsables de la qualite de la GRH au sein des entreprises en raison de leur role de representant ou de defenseur des interets de leurs membres dans les negociations des contrats de travail avec les dirigeants. Traditionnellement, l'arrivee d'un syndicat a in fluence la gestion des activites liees a la mobUite du personnel (comme l'em bauche, les mutations, les promotions et les licenciements), a l'organisation du travail, au contrale de l'absenteisme, a la gestion de la remuneration, aux horaires de travail et a la discipline, etc. Au sein d'une entreprise, l'influence du syndicalisme sur la GRH est import ante et elle s'etend souvent aux cate gories d'employes non syndiques. Ainsi, les augmentations de salaire nego ciees pour les employes de la production peuvent creer une pression a la hausse sur les sal aires d'autres groupes d'employes non syndiques, comme les cadres et les employes de bureau, qUi seront insatisfaits de leurs conditions de remuneration si eIles ne s'ameliorent pas dans la meme proportion. Le theme des rapports collectifs dans I'entreprise est d'ailleurs tellement important qu'il fait I'objet d'un chapitre separe (voir Ie chapitre 14).
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Les conditions de reussite du partenariat des acteurs de la GRH La description que nous venons de presenter des responsabilites respectives de divers acteurs a I'egard de Ia GRH permet de faire certaines constatations. Premierement, une mauvaise GRH constitue un probleme complexe a re gIer, car la decouverte des causes et la mise en ceuvre des solutions necessitent la collaboration de plusieurs intervenants. En realite, Ies problemes de GRH sont beaucoup moins souvent dus aux professionnels des ressources hu maines qu'aux dirigeants et aux cadres hierarchiques qui assument mal leurs responsabilites en matiere de GRH. Deuxiemement, la GRH represente l'art de trouver un compromis optimal entre divers groupes d'acteurs dont les inten~ts et les objectifs respectifs peuvent etre conflictuels. Par ex empie, pensons aux employes qui recherchent un emploi stable et suffisamment remunere, alors que les dirigeants veulent maximiser les profits de leur entreprise et contraler Ie coCa des salaires. Ou encore, pensons aux cadres qUi desirent accorder des sal aires permettant d'attirer les meilleurs candidats et d'eviter la syndicalisa tion, alors que les professionnels des ressources humaines veulent offrir des
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salaires concurrentiels et proportionnels aux responsabilites des emplois. Troisiemement, dans ce contexte, it est important de respecter certaines con ditions qui favorisent un partenariat de qua lite entre les divers acteurs de la GRH, soit les dirigeants, les cadres hierarchiques, les professionnels des ressources humaines, les employes et les syndicats. Sur la base de notre revue de la litterature pertinente, nous soutenons que Ie SUccE~S d'un tel partenariat repose essentiellement sur les cinq conditions suivantes: • promouvoir les competences en supervision dans la selection et la pro motion, la formation et l'evaluation du rendement des cadres; • s'entourer de professionnels des ressources humaines competents, detinir leur mandat et leurs objectifs, leur donner les ressources adequates et s'assurer de leur contribution; • faire participer Ie responsable des ressources humaines au processus de planification strategique et Ie faire relever directement du president ou du directeur general de l'entreprise; • clarifier l'autorite respective des dirigeants, des cadres hierarchiques et des professionnels des ressources humaines; • appuyer la GRH sur des politiques claires et adequates. Ces prealables du partenariat se fondent sur la volonte des dirigeants d'en treprise. Cela explique pourquoi on peut considerer ces derniers comme les premiers responsables de la qualite de la GRH dans les entreprises. Les seconds responsables sont les cadres, puisqu'ils ont un contact quotidien avec leurs subordonnes, ce qui leur permet d'influencer leurs attitudes et leurs com portements au travail.
1.4.1 Promouvoir les competences en supervision Bien superviser Ie personnel exige des aptitudes et des habiletes de la part des cadres. Les dirigeants d'entreprise doivent combler les postes d'encadrement en faisant appel a des personnes qui detiennent ces competences. Ils doivent aussi s'assurer que ces personnes ret;oivent au besoin de la formation sur Ie sujet. Cela signifie que les dirigeants d'entreprise doivent considerer les com petences en supervision du personnel des candidats dans la prise de decisions relatives aux promotions. Par ailleurs, si la gestion des ressources humaines constitue un veritable facteur de succ€~s pour l'entreprise, les dirigeants devraient evaluer les cadres (des cadres de premier niveau jusqu'aux cadres superieurs) sur la qualite de leur gestion du rendement de leurs subordonnes. Encore ici, les dirigeants peuvent s'assurer que les cadres supervisent bien leurs subordonnes dans la mesure ou ils sont evalues a l'egard de cette responsabilite. Dans cette per spective, certaines entreprises (teHes qu'IBM) vont jusqu'a adopter un systeme d'evaluation dite ascendante ou les employes evaluent les qualites de leader ship de leur superieur immediat.
Chapitre 1
I Miser sur la gestion des ressources humaines
1.4.2 S'entourer de professionnels des ressources humaines competents Les profession nels des ressources humaines, et surtout Ie responsable du ser vice, devraient etre des personnes competentes. Habituellement, on prefere confier la direction du service des res sources humaines 3 un candidat qUi a un profil de generaliste plutot qu'un profil de specialiste, qUi est en mesure de comprendre les multiples facettes d'une situation. On entend par 13 un candi dat qui connaisse I'ensemble des affaires de l'entreprise, qui possede une cer taine expertise sur Ies differentes activites liees a la GRH (com me la dotation, la remuneration et la formation) et qui comprenne Ies preoccupations de toutes Ies autres fonctions de gestion (comme Ie marketing, les finances, la production ainsi que Ia recherche et Ie developpement). De fait, face au choix de ce profil, il y va de Ia credibllite du responsable du service des ressources humaines aupres des autres cadres de l'entreprise avec Iesquels il devra cons tamment interagir. Par-dela leur competence, les professionnels des ressources humaines doivent disposer des ressources adequates, notamment l'information, l'argent et Ie temps, pour faire holuer la GRH en fonction du contexte d'affaires de l'entreprise. En ce qui concerne Ie nombre de specialistes de la GRH que de vrait compter une organisation, Ie ratio historique moyen aux Etats-Unis du nombre d'employes dans un service des res sources humaines par rapport au nombre d'employes dans toute l'organisation oscille autour de 1/100, voire de 0,9/100 selon certaines tendances recentes observees au cours de trois des annees situees entre 1993 et 2002 (BNA et SHRM, 2002). Finalement, tout comme les autres cadres, Ies professionnels des ressources humaines doivent etre evalues en ce qUi a trait 3 Ia fa.;:on dont ils assument leurs roles en matiere de GRH. Mentionnons qu'il est possible d'evaluer Ie ren dement d'un service des ressources humaines dans la seule mesure ou les dirigeants d'entreprise ont prealablement detini une mission et des objectifs clairs pour ce service. Or, peu de dirigeants d'entreprise detinissent une mis sion et des objectifs clairs pour Ie service des ressources humaines et commu niquent cette information aux autres cadres. Cela eviterait pourtant bien des conflits quant a la repartition des responsabilites.
1.4.3 Faire participer Ie responsable des ressources humaines au processus de planification strategique Si Ies dirigeants veulent faire en sorte que leur service des res sources humaines assume adequatement ses responsabilites, ils doivent faire participer au pro cessus de planification strategique Ie responsable des ressources humaines au meme titre que les responsables des fonctions «finances", «produCtion" et « marketing >}. Par ailleurs, la position hierarchique et Ie titre du poste du responsable des ressources humaines ont une importance strategique et sym bolique. Ils ont une importance strategique, puisque cela determine dans queUe mesure Ie point de vue du responsable des ressources humaines sera pris en consideration dans les decisions d'affaires. De meme, ils ont une
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importance symbolique, puisque cela temoigne de la valeur que la direction de l'entreprise accorde a la GRH. Comme c'est souvent Ie cas pour les respon sables des finances, de la production ou du marketing, Ie responsable des ressources humaines devrait relever directement du president-directeur general. S'il n'occupe pas un poste de niveau hierarchique sembI able au leur, i1 pourra difficilement pretendre influencer autant qu'eux les decisions et les pratiques en matiere de gestion strategique. Par ailleurs, }'absence d'un lien hierarchique direct entre Ie P.D.G. et Ie responsable des res sources humaines perpetue l'idee selon laquelle Ie role de ce dernier est uniquement adminis tratif et denie son role strategique.
1.4.4 Clarifier l'autorite respective des dirigeants, des cadres hierar chiques et des professionnels des ressources humaines En raison du partenariat en matiere de GRH qui doit s'etablir entre les diri geants, les cadres hierarchiques et les professionnels des ressources humaines, il devient important de preciser leur autorite respective afin de minimiser les affrontements. Ces conflits risquent d'etre plus serieux au moment de la prise de decisions touchant a plusieurs intervenants, comme celles qui ont trait a la discipline, a I'organisation du travail, aux congediements, aux mutations, aux promotions et a la planification des ressources humaines. Ainsi, les inter venants doivent distinguer les trois types d'autorite suivants: l'autorite hierar chique, l'autorite de conseil et l'autorite fonctionnelle.
L'autoTite hieTaTchique Ce type d'autorite signifie que les personnes qui la detiennent peuvent don ner des ordres a leurs subordonnes et s'attendre a ce que ces ordres soient suivis. Au meme titre que Ie directeur du marketing, Ie directeur du service des ressources humaines est responsable du travail de plusieurs personnes et pos sede une autorite hierarchique sur ses subordonnes. Ce type d'autorite est aussi regulierement associe aux pouvoirs d'imposer des mesures disciplinaires et, au besoin, de congedier des employes.
L'autoTite de conseil Ce type d'autorite est accorde a des personnes qui ont des connaissances spe cialisees et reconnues ices personnes ont Ie droit de donner des conseils dans Ie champ de leurs competences. Ainsi, les professionneis des ressources hu maines peuvent conseiller les cadres au cours de leur prise de decision en ce qui concerne la supervision. Toutefois, la plupart du temps, ces derniers ne sont pas obliges de suivre leurs recommandations, car les professionnels des res sources humaines n'ont pas d'autorite hierarchique sur les cadres.
L'autoTite fonctionnelle Ce type d'autorite confere a la personne qUi l'exerce Ie pouvoir d'intervenir dans un service autre que Ie sien, d'y analyser des situations et eventuelle ment de formuler des directives et de s'attendre a ce que ces directives soient
Chapitre 1 \ Miser sur la gestion des ressources humaines
suivies comme s'il s'agissait d'un ordre provenant d'un cadre detenant une autorite hierarchique. EVidemment, Ies professionneis des ressources hu maines ne devraient faire appel a ce type d'autorite que dans des cas excep tionnels, decoulant, par exemple, de de£iciences dans l'application de politiques ou de programmes approuves par Ies dirigeants de I'organisation, ou encore du respect de lois ou de programmes gouvernementaux. Cette autorite est indispensable aux professionnels des res sources humaines pour qu'ils puis sent s'assurer que Ies politiques, Ies programmes de GRH ainsi que les regles legales sont respectes et appliques par I'ensemble des cadres de l'entreprise. Comme I'autorite fonctionnelle est souvent a l'origine des conflits entre les cadres et les professionnels des ressources humaines, il importe de bien la distinguer. Voici quelques exemples d'applications auxqueUes eUe donne lieu. Lorsque Ies dirigeants d'une entreprise ont adopte une politique de recrute ment interne, Ie professionnel des ressources humaines at en vertu de son autorite fonctionnelle, Ie droit de refuser qu'un cadre embauche un ami ou un cousin issu de I'exterieur de l'entreprise (aussi competent qu'il puisse etre!) si une personne a l'interieur de I'entreprise s'avere qualifiee et desireuse de combler Ie poste vacant. De meme, Jorsque des dirigeants adoptent un pro gramme d'egalite des chances en matiere d'empJoi seion lequeI, a competence egale, un candidat d'un groupe protege (Ies femmes, Ies personnes handica pees ou les autochtones) est privilegie au moment des decisions d'embauche ou de promotion, Ie professionnel des ressources humaines a Ie droit d'em pecher une unite administrative ou certains cadres de nier l'existence de cette politi que, de la meme manil~re qu'on ne peut accepter que Ie directeur d'une usine choisisse des methodes comptables differentes de celles qu'utilisent Ies autres usines de l'entreprise. Traitant de l'emergence recente d'un modele dit de l'entreprise ouverte, Galambaud souUgne que, dans ce modele qUi s'impose aux entreprises con temporaines, «la fonction gestion des ressources humaines n'est pas au service de Ia hierarchie; eIle est au service de l'entreprise ». L'exigence du rendement de l'organisation et I'obligation de faire face a divers risques exterieurs a I'entreprise qui pesent sur elle contraignent la direction generale a «mettre nombre de decisions hierarchiques sous contr6Ie» (2002).
1.4.5 Appuyer la GRH sur des politiques c1aires et adequates La culture d'une organisation repose en grande partie sur Ies politiques for melles (ecrites) ou informelles (non ecrites) en matiere de GRH. Les politiques de GRH correspondent a des enonces fondamentaux communiquant Ies atti tudes, Ies intentions, Ies objectifs ou Ies preferences des dirigeants d'entreprise en ce qui a trait aux conduites acceptables ou approuvees dans Ie domaine de Ia GRH. Voici des exemples de politiques:
• A competence egale, on privilegie Ies candidats issus de l'entreprise par rapport aux candidats issus de l'exterieur lorsqu'il s'agit de combler des postes.
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
• Le rendement de tous les employes doit etre evalue au moins une fois par annee; celui des nouveaux employes doit etre evalue periodiquement. • La sante et la securite des employes sont primordiales; il faut eliminer tout danger. • Les sal aires et les avantages sociaux accordes aux employes sont compa rabIes a ceux qu'offre Ie marche. • Le salaire des cadres est base sur leur rendement annuel. Le contenu des politiques de GRH doit etre fonction de la philosophie de gestion des dirigeants. Par exemple, les politiques de GRH adoptees par les dirigeants de la firme americaine Lincoln Electric valorisent la securite d'em ploi, Ie service a la clientele, la participation a la propriete ou l'actionnariat et la participation aux benefices au moyen de primes pouvant doubler Ie salaire des employes. Par consequent, contrairement a ce que plusieurs croient, les politiques de GRH ne correspondent pas a des n':glements administratifs (relatifs, par exemple, au temps accorde a la pause-cafe ou aux endroits ou il est permis de fumer) ou a des enonces generaux de conduites (comme «les employes doivent etre loyaux» ou «les employes ne doivent pas voler les biens de l'entreprise »). Par ailleurs, l'adoption de politiques formelles, ou ecrites, de GRH depend de plusieurs facteurs. Premierement, plus une entreprise est grande, plus elle tend a adopter des politiques formel1es. Deuxiemement, les entreprises ou un syndicat est present et dont la main-d'CEuvre est composee principalement d'employes de la production adoptent moins de politiques de GRH, ces der nieres etant examinees dans la convention collective. Troisiemement, les politiques concernant les avantages sociaux, l'evaluation des emplois et la remuneration sont plus formalisees que les politiques ayant trait a la selection, a la formation et a l'evaluation du rendement des employes, peut etre parce que, dans ces derniers cas, on a plus tendance a se fier a des criteres informels.
L'utilite des politiques de GRH Les cadres sont generalement refractaires a tout ce qui reduit leur pouvoir de decision en matiere de supervision (ce qu'entrainent les politiques de GRH) parce que ce sont eux qui, finalement, sont tenus pour responsables du ren dement de leurs subordonnes. C'est d'ailleurs pourquoi Us expriment souvent a l'egard des politiques et des programmes de GRH des plaintes ou des reproches de ce genre: « Les membres du service des res sources humaines me nent l'entreprise» ou encore «On n'a pas it nous dire ce que nous avons it faire.» Toutefois, lorsque aucune politique n'oriente les decisions d'em bauche, de promotion, de remuneration, de discipline, etc., les cadres risquent fort de ne trop savoir quoi faire, d'avoir besoin de beaucoup de temps pour prendre des decisions relatives au personnel ou de prendre ces decisions de fa~on incoherente et inequitable. Ainsi, l'adoption de politiques de GRH s'avere importante pour plusieurs raisons. En premier lieu, de telles politiques correspondent a des guides
Chapitre 1
I Miser sur la gestion des ressources humaines
d'action qUi rectuisent l'incertitude ainsi que Ie temps necessaire pour prendre diverses decisions de GRH. Les politiques agissent comme des fondations sur lesquelles les programmes et les activites de GRH s'appuient. Par exemple, une politique de promotion interne exige qu'on accorde une formation aux employes afin que des candidats de l'entreprise aient Ia qualification neces saire pour occuper les postes a pourvoir. Par ailleurs, une politique de salaire au merite, c'est-a-dire base sur Ie rendement individuel, requiert un systeme d'evaluation du rendement adequat. En deuxieme lieu, Ies politiques de GRH permettent de rectuire Ie favori tisme, la partialite, I'arbitraire ou l'iniquite dans la prise de decision. En somme, elles representent un compromis entre Ie respect de l'autorite hierar chique de chaque cadre et Ie soud de la coherence et de l'equite dans les decisions de GRH prises par les cadres. Ainsi, l'adoption d'une politique dis ciplinaire permet d'eviter que, dans des cas similaires d'insubordination, un premier cadre congectie un employe, un deuxil~me cadre lui donne un aver tissement verbal et un troisieme lui impose une suspension d'une semaine. En dernier lieu, les politiques delimitent les aspects de la GRH sous lesquels les professionnels des ressources humaines ont une autorite fonctionnelle, c'est-a-dire Ie pouvoir d'imposer aux cadres l'application de regIes, de pro grammes ou de processus de gestion, qu'il s'agisse d'une grille d'augmentations de salaire a respecter, d'un formulaire d'evaluation du rendement a remplir, et ainsi de suite.
Les caracteristiques des politiques de GRH efficaces Les politiques de GRH sont efficaces, c'est-a.-dire qu'elles sont utiles, dans Ia mesure ou elles respectent certaines conditions. Premierement, elles doivent correspondre a des enonces generaux qUi limitent Ie pouvoir decisionnel des cadres en matiere de GRH sans Ie leur enlever. Par exemple, une politique de promotion interne force les cadres a privilegier, a competence egale, des candidats issus de l'organisation, mais elle ne les oblige pas a embaucher tel ou tel candid at. Deuxiemement, les politiques de GRH doivent etre coherentes par rapport aux autres politiques, comme les politiques de marketing ou de production. Par exemple, si les politiques de marketing d'une entre prise consistent a offrir des services de qualite superieure a prix eleve a des consommateurs dont Ie revenu est eleve, une politique de GRH coherente consistera a offrir des salaires superieurs a ceux du marche et d'accorder de la formation, de maniere a attirer et a conserver un personnel qualifie. Troisiemement, les politiques de GRH, ainsi que les procectes et les pro grammes qui en decoulent, doivent correspondre a des moyens permettant d'appuyer la strategie d'affaires et de faciliter la realisation des objectifs. Ces politiques ne sont pas une fin en soL Les dirigeants d'entreprise ne remettent pas assez souvent en question la pertinence de leurs politiques alors que les de£is ou la strategie de leur entreprise ont beaucoup change. Dans la mesure ou des politiques de GRH, et consequemment les programmes et les activites
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
de GRH, ne favorisent pas Ia realisation des objectifs de l'entreprise, celle-ci doit les eli miner, sinon elle eprouvera des problemes si elle continue ales appliquer. Outre qu'ils sont charges de veiller a ce que les politiques de GRH soient respectees, Ies responsables des ressources humaines ont Ie devoir de sonder leur utilite et leur pertinence. Quatriemement, les politiques de GRH doivent etre coherentes par rapport au discours des dirigeants, a leur philosophie de gestion et a la culture organi sationnelle pour assurer la reussite des programmes qui en decoulent. En effet, il s'avere tres difficile pour les professionnels des res sources humaines de faire en sorte que les cadres appliquent des politiques de GRH qui ne sont pas con firmees par Ie discours, les decisions et les comportements des dirigeants d'en treprise. Les cadres sont les principaux responsables du respect des politiques et des programmes de GRH, souvent proposes par les professionnels des ressources humaines et approuves par les dirigeants d'entreprise, et ce sont eux qui doivent les appliquer dans Ie quotidien. Plusieurs acteurs a I'interieur des entreprises ont donc des responsabilites en matiere de GRH: les dirigeants, les cadres hj(~rarchiques, les professionnels des res sources humaines, les employes et les syndicats. Tous ces acteurs, et plus particulierement les dirigeants et les cadres hierarchiques, sont en partie responsables de la qualite de Ia GRH. Les dirigeants d'entreprise peuvent etre consideres comme les premiers responsabIes, puisque c'est d'eux que depend Ie respect des principaies conditions de succes du partenariat entre les divers acteurs de la GRH.
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.L~.s. ~~.f~~ .~~ .1~ ~~~. ~~ .1~. p~~~ ~~ ~~. ~i~.T.e. La premiere partie de ce livre concerne les defis du renouvellement. Le cha pitre 2 consiste en une presentation des principaux changements qUi sont intervenus dans l'environnement externe des entreprises et en une analyse des effets que ces changements ont entraines sur la GRH. Ensuite, Ie chapitre 3 explore les mecanismes de planification strategique et operationnelle par lesquels les pratiques peuvent Ie mieux s'accorder avec ces nouvelles circon stances. Le chapitre 4 est centre sur Ie defi provoque par les multiples tenta tives pour organiser Ie travail d'une fa~on a la fois productive et satisfaisante. La deuxieme partie a trait aux defis de la competence. Le chapitre 5 est consacre au recrutement et a la selection des res sources humaines. Quant au chapitre 6, il porte sur la gestion des activites de formation dans l'entreprise. Le chapitre 7 a trait au defi de l'adequation a long terme entre, d'une part, les besoins et les moyens de l'entreprise et, d'autre part, les competences des employes et leurs aspirations individuelles. La troisieme partie examine les defis du rendement. Le chapitre 8 traite de la gestion et de l'evaluation du rendement au travail, puis Ie chapitre 9 se penche sur la question de l'intervention aupres des employes difficiles.
Chapitre 1
I Miser sur la gestion des ressources humaines
La quatrieme partie traite des detis lies a la determination des conditions de travail. Le chapitre 10 est consacre au defi consistant a offrir des salaires et des avantages sociaux equitables. Quant au chapitre II, il est centre sur la question de la reconnaissance du rendement au travail. Le chapitre 12 porte sur I'optimisation des avantages sociaux. Entin, Ie chapitre 13 etudie Ie defi consistant a promouvoir un milieu de travail sain, c'est-a-dire exempt des risques pesant sur la sante et la securite. La cinquieme partie du livre s'interesse aux defis de la democratie au travail. Le chapitre 14 porte sur la gestion des rapports coHectUs de travail, alors que Ie chapitre 15 aborde la negociation et l'application des conventions collectives. Enfin, Ie chapitre 16 invite Ie Iecteur a retlechir sur Ie theme de la contri bution de Ia GRH a la valeur ajoutee.
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Relever les detis de fa gestion des ressources humaines
de revision
o En faisant appel aux notions d'in trants, de processus de transforma tion et d'extrants, nommez et expliquez sommairement Ies trois defis essentiels que doivent relever les gestionnaires.
CD En tant que domaine d'etudes
spe cialisees, dans queis departements, ecoies et facultes la GRH s'est-elle retrouvee?
o Quels
sont Ies principaux orga nismes regroupant des chercheurs ou la GRH, en tant que domaine de recherche, a suscite de l'interet?
f) En quoi la GRH se distingue-t-elle de la gestion des autres fonctions (telles que les finances, Ie marke ting et la production) dans les entreprises? . , Expliquez, a partir de l'approche dite des ressources humaines, de queUe fa~on des investissements dans des pratiques liees aux res sources humaines peuvent donner des resultats compatibles tant avec les objectifs organisationnels qu'avec les besoins individuels.
e GRH Nommez cinq differences entre la en tant que fonction et Ia GRH en tant que service. " En quoi les buts de la GRH sont-Us souvent conflictuels?
G
Nommez deux regroupements pro fessionneis auxquels la GRH est associee .
o Comment aborderiez-vous (ou definiriez-vous) la GRH si vous utili
siez, l'une apres l'autre, l'approche techniciste, l'approche psycholo gique et l'approche institutionnelle?
«V En
quoi consiste la perspective systemique et qu'est-ce que cette approche a apporte a la GRH?
CD En
quoi consiste la perspective strategique et qU'est-ce que cette approche a apporte a la GRH?
Chapitre 1
® QueUes sont les
responsabilites des dirigeants d'entreprise en matiere de GRH?
4i QueUes
sont les responsabilih~s des cadres hierarchiques en matiere de GRH?
(!l Quels sont les roles des profession nels des ressources humaines ?
4) De queUe maniere les employes et
I
Miser sur la gestion des ressources humaines
~ QueUes
sont Ies principales condi tions a remplir pour garantir Ie suc ces du partenariat entre Ies divers acteurs de l'entreprise qUi determi nent Ia qualite de Ia GRH, soit Ies dirigeants, les cadres hU:rarchiques, les professionnels des ressources humaines, Ies employes et les syndi cats? Sur qUi repose principalement Ie respect de ces conditions '?
les syndicats exercent-ils une in fluence sur la qualite de la GRH?
(fJ Nommez cinq detis fondamentaux
ALLAIRE, Y. et M.E. FIRSIROTU (1993). L'entreprise strategique: penser la strategie, Boucherville, Gaetan Morin Editeur.
BOURDEAU, R. (1996). «Utiliser la ges tion des ressources humaines comme avantage concurrentiel: leadership, for mation et communication permettent de se demarquer des concurrents », Les Artaires, 15 juin, p. 24.
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a reIever en matiere de GRH.
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
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Chapltre 1
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I
Miser sur la gestion des ressources humaines
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
La boite de Pandore5
Le
president de Transnational inc., une entreprise de transport qui emploie 5000 personnes, mandate une entre prise de consultants pour I'examen des responsabilites et des activites des six directions de l'entreprise: la direction du service a la clientele, Ia direction du transport, la direction de la mainte nance, la direction du marketing, la direction des finances et la direction des res sources humaines. Au cours des der niers mois, il a eu a resoudre plusieurs conflits au sujet des roles et des respon sabilites entre les cadres des differentes directions. Deux incidents illustrent bien la situation. Le premier incident a trait a la con ception d'un sondage d'opinion qUi devait etre mene aupres des employes. Le vice-president au marketing esti mait qu'il devrait en etre responsable, pUisque les enquetes relevaient de la competence de son groupe. De leur cote, les responsables des directions du service a la clientele, de la maintenance, du transport et des finances preten daient que chacune d'entre elies devrait realiser son propre sondage. Les parti cularites de leur personnel et de leurs activites rendaient inutile un sondage unique pour l'ensemble de l'entreprise. Finalement, Ie vice-president aux res sources humaines croyait qu'iJ etait tout a fait logique que Ie sondage soit cofl(;:u et dirige par les cadres de sa direction. Le second incident concerne l'achat recent d'une serie de logicieis d'inge nierie par la direction de la maintenance.
Ces logiciels utilises pour la planifica tion de l'entretien des equipements ont et{~ achetes directement par Ie service de l'ingenierie. Selon la politique etablie, les services des achats et de l'informa tique, qui sont sous la responsabilite de la vice-presidente aux finances, auraient dl1 etre associes a cette decision. Le mandat confie par Ie president a l'entreprise de consultants comprend deux volets: mettre au jour les princi paux problemes (irritants, obstacles) entre les directions, qui nuisent a la rea lisation des objectifs de chacune des directions, et proposer pour chacune des directions une mission accompa gnee des responsabilites correspon dantes. Pour executer leur mandat, les consultants ont demande aux vice presidents en cause de rediger un rapport sur ces deux volets pour leur direction respective. Deux mois plus tard, Us ont en main les rapports des six directions. En les examinant, ils consta tent que toutes les directions semblent avoir maille apartir avec la direction des ressources humaines. La nature exacte des differends varie d'une direction a l'autre, mais voici quelques extra its representatifs des com mentaires exprimes dans ces rapports: Les specialistes des ressources hu maines s'ingerent dans nos decisions au chapitre de la selection du per sonnel en nous imposant des tests inutiles et couteux.
5. Ce cas a ete redige par Mario Giroux, sous la direction de Sylvie St-Onge. Reproduit avec la permission des HEC Montreal.
Chapitre 1
Les specialistes des ressources hu maines se prennent pour la «police» et interpretent les lois de fm,;on trop prudente. Les specialistes des ressources hu maines sont obsedes par requite. Cela devient paralysant. On ne peut plus se departir des employes difficiles. On ne peut pas donner les augmen tations de salaire aux employes qui Ie meritent, ni decider du montant. On perd beaucoup d'employes supe rieurs a cause des contraintes im posees par Ie responsable de la remuneration. La tache principale de la direction des ressources humaines est de mul tiplier la paperasse. Bile devrait s'as surer qu'elle Ie fait de fa(on efficace plutot que de chercher a nous mon trer comment gerer notre personnel. La gestion du rendement du person nel, c'est leur specialite, pas la notre. On a deja assez de travail, sans avoir a remplir leurs formulaires. Si on est trop transparents avec Ie groupe des ressources humaines, on se fait reprocher nos erreurs.
Les programmes de formation con (US par la direction des ressources humaines ne sont pas adaptes a nos
I
Miser sur la gestion des ressources humaines
besoins. On doit utiliser nos budgets pour trouver des programmes perti nents a l'exteme. Chaque direction devrait avoir son propre groupe de specialistes des res sources humaines. Ainsi, les besoins de chacun seraient mieux cumbIes. Les consultants ont l'impression d'avoir ouvert une veritable boite de Pandore. lIs decident de rencontrer Ie vice-president aux res sources humaines de l'entreprise pour discuter de ces resultats.
o Comment
Ie vice-president aux ressources humaines peut-il re pondre aux differentes remarques exprimees par les cadres des autres directions ?
f) QueUes recommandations les con sultants peuvent-ils faire au presi dent en ce qUi a trait au partage des responsabilites entre la direction des ressources humaines et Ies autres directions?
e entreprise Que pensez-vous de la demarche par Ie president et du pro
cessus utilise par les consultants pour realiser leur mandat?
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Relever les defis de la gestion des ressources humaines
Le rendez-vous manque 6
C' est jour de fete au siege social de Communications inc., une entreprise qui offre des services de teU~communi cations partout au Canada. On procede au lancement du programme de sugges tions «On veut connaitre vos idees». Ce programme est Ie resultat de six mois de travail d'un comite de gestion forme de quatre cadres superieurs de l'entreprise et de deux consultants d'une entreprise americaine specialisee dans la concep tion de programmes de motivation au travaiL En realite, comme des pro grammes simiIaires avaient deja fait leurs preuves dans d'autres entreprises, la principale tache de ce comite a He d'adapter un de ces programmes a la situation particuliere de Communica tions inc. Les dirigeants ont Ie ferme espoir que les suggestions des employes permettront de retrancher plus de quatre millions de dollars des couts d'exploitation et d'administration. «On veut connaitre vos idees» est un programme eclair de suggestions mis en place pour une periode de six mois. La participation est volontaire. Ce pro gramme s'adresse a l'ensemble du per sonnel, a l' exception de certains cadres superieurs et dirigeants de l'entreprise. Son principe est simple. Les employes se regroupent en equipes de sept ou huit personnes et essaient de trouver des moyens de rMuire les couts des diffe rentes activites administratives ou operationnelles de l'entreprise. Les reu nions doivent avoir lieu en dehors des heures de travail. Lorsqu'une equipe a
trouve une suggestion et determine les economies qu'elle entrainerait, elle la soumet a un comite d'evaluation. Si la suggestion est acceptee, chaque membre de l'equipe re~oit un nombre de pOints correspondant a la valeur des economies prevues. II n'y a pas de limite inferieure ou superieure au mon tant des recompenses qui peuvent etre accordees. Les points accumuies sont echanges contre des «prix», qui vont de la tasse de cafe avec Ie logo de l'en treprise jusqu'au voyage a Paris dont la duree est liee au nombre de points qui y sont consacres. Apres Ia ceremonie de lancement du programme, la vice-presidente aux res sources humaines retourne a son bu reau. Vne «petite» surprise l'attend. Les quatre syndicats qUi representent les differentes categories d'employes (800,,1) de l'ensemble du personnel) lui ont fait parvenir un avis !'informant qu'ils ont recommande a leurs membres de boycotter Ie programme «On veut con naitre vos idees ». EIle comprend diffici lement cette reaction. En effet, elle avait rencontre les dirigeants syndicaux deux semaines plus tot pour leur commu niquer la date du lancement du pro gramme. De plus, au cours des trois mois precedents, elle s'(>1ait deplacee partout au Canada, d'une division a l'autre, afin d'expliquer Ie programme aux employes et de les assurer qu'aucun changement dans les conditions de tra vail - notamment la perte d'emplois ne pourrait resulter des suggestions
6. Ce cas a ete redige par Mario Giroux, sous la direction de Sylvie St-Onge. Reproduit avec la permission des HEC Montreal.
Chapitre 1
emises par Ie personnel. LOIS de ces ren contres, on avait meme presente une video ou Ie P.D.G. et Ie president du conseil d'administration reprenaient cet engagement. Le telephone sonne. Le secretaire de la vice-presidente l'informe que Ie presi dent vient de convoquer une reunion d'urgence du comite de gestion au sujet du programme « On veut connaitre vos idees ». Elle sent qu/eUe aura a repondre a plusieurs questions ...
I Miser sur la gestion des ressources humaines
(1)
o prise Comment expliquez-vous Ia decision par les differents syndicats? f) Comment
aurait-on pu eviter qu'une telle situation ne se produise ou, du moins, en limiter les risques?
e pour QueUes mesures devrait-on proposer obtenir Ie plus rapidement possible l'adhesion des differents syndicats?
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les defis du renouvellement
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Apres l'etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Prendre conscience de l'influence des forces de l'environnement externe sur l'evolution des organisations et sur les personnes qUi y reuvrent. • Comprendre les effets de l'environnement sur la transformation de ]a structure des emplois. • Relever et comprendre les implications de la transformation de l'environ nement pour la GRH.
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
Les PME craignent de ne pouvoir trouver de candidats adequats1
Environ 45 % des PME quebi!icoises pre voient aCCToitre leur effectif d'ici 3 ans, mais elles craignent de ne pouvoir trollver ces (uturs employes. .Une etude pancanadienne aupres des p~tites et moyennes entreprises, devoWfe hler par la Federation canadierzne de I'entreprise independante (FCEl), rappelle encore llne fois Ie manque de main-d'reuvre qualifiie. Le sondage, realise aupres de 6740 diri geants de PME au Canada, dont 1179 au Quebec, revele que c'est au Quebec et en Ontario que les PME sont les plus suscepti bles d'accroitre leur effectif d'jci 3 ans. Au Quebec, 45 % des PME prevoient aussi embaucher du personnel d'ici 3 ans, alors que 50 % pensent maintenir leur effectif, et seulement 3 % envisagent de Ie nJduire. Or, 61 % des PME sondees considerent que Ie recrutement d'employes sera difficile. Environ 2% CToient que la situation s'ame liorera, tandis que 32 % estiment que la situation demeurera semblable. Ces PME ont Ie plus souvent besoin de travailleurs reuvrant dans les domaines de formation professionnelle et technique, un secteur ou Ie nombre de diplOmes est insllf fisant, a souligne Ie vice-president pour Ie Quebec de la FCEl, Richard Fahey, au cours d'un entretien tel€phonique. Les secteurs les plus touches sont la con struction et Ie secteur manufacturier, suivis de l'agriculture, a-t-il precise. Les regions du Quebec les plus touchees sont l'Estrie et Quebec. Les PME sont plus durement touchees que La grande entreprise par la penurie de main-d'reuvre qualifiee, notamment parce
que
« la
grande entreprise est
a meme
d'offrir de meilleurs salaires », a-t-il admis.
Stimuler les inscriptions r:.evant ces constatations, M. Fahey repete I Importance de stimuler les inscriptions en formation professionnelle et technique. Cette recommandation s'adresse d'ailleurs non seulement au gouvemement, mais aussi aux etablissements d'enseignement, aux entreprises, aux jeunes et it leurs pa rents. « II faut faire savoir que les besoins de main-d'reuvre sont en formation profession nelle et technique et que ces formations sont un gage de SUCCes)}, a affirme M. Fahey. En plus d'orienter davantage de jeunes vers ces secteurs, la FCEI croit qu'i[ faut etabtir davantage de « passerelles» entre Ie secondaire et Ie cegep, ainsi qu'entre Ie cegep et l'universite, au chapitre de la for mation professionnelle et technique, afin de faciliter la vie it ceux qui veulent y etudier.
o Comment peut-on expliquer ce probleme de 1a penurie d'emp1ois exigeant une formation profession neUe et technique?
@ Comment peut-on expliquer que les jeunes ne choisissent plus la voie de la formation professionnelle et technique?
e Quelles menaces pesent sur les PME quebecoises si 1a situation ne se resorbe pas?
o Que peuvent faire les dirigeants de PME pour affronter ce deli?
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1. L. Levesque, "Les PME craignent de ne pouvoir trouver de candidats adequats ». Le Solei!, 3 avril 2003,
p. C3.
Chapitre 2
I S'adapter a un nouvel environnement
L'organisation et les personnes qUi la composent constituent un systeme com plexe et ouvert. En effet, l'organisation se nourrit de son environnement et eUe l'influence en retour. Ainsi, les gestionnaires prennent des decisions en matiere de planification, de dotation, de formation, de remuneration, de rela tions du travail, de sante et de securite ainsi que d'organisation du travail, afin de s'adapter it un marche du travail en pleine mutation et de faire face it un monde qUi change profondement et it un rythme impressionnant. En resulte alors un marche du travail influence par l'ensemble des decisions des organi sations qui composent un secteur, une region ou une economie. L'enquete de la FCEl dans la mise en situation qui introduit ce chapitre illustre fort bien cette dynamique. La prise en consideration de l'environne ment dans J'etude de la GRH est d'autant plus importante aujourd'hui que Ie contexte dans lequel evolue l'organisation est plus dynamique, plus instable, plus incertain et, par Ie fait meme, moins previsible. Les acteurs de l'orga nisation sont donc appeles it renouveler la gestion strategique classique, it trouver de nouvelles fa~ons d'elaborer des strategies plus adaptatives et it acquerir des capacites organisationnelles. Dans ce chapitre, nous verrons succinctement les raisons pour lesquelles il faut adapter la GRH it l'environnement. Par la suite, nous presenterons les changements de l'environnement selon cinq dimensions, it savoir l'eco nomie, la technologie, la demographie, Ie social et Ie politique. Puis, nous decrirons les principales implications de ces changements pour l'emploi et la gestion des organisations. Enfin, nous insisterons sur les repercussions des changements de l'environnement sur la GRH et la societe dans son ensemble.
_
Pourquoi faut-il adapter la GRH aux nombreux changements de l'environnement? . . .. . . . . . . . . . . . . .. . . .. . . .. . . . .. . . . .
~
Mais pourquoi cette course folIe pour s'adapter it l'environnement et it la nou velle economie? Plus que jamais, les travailleurs doivent trouver une reponse it cette question, car elle represente Ie sens it donner it la transformation actuelle de la societe, des organisations et du marche du travail. Alnsi, les organisations doivent adapter leur gestion des ressources humaines aux changements de l'environnement pour: • survivre; • demeurer ou devenir rentables, productives et perform antes dans un contexte de mondialisation et de competitivite; • batir la perennite et la longevite de l'organisation; • creer et maintenir des emplois de qualite et durables; • respecter les droits des employes et les mobiliser; • evoluer en meme temps que l'environnement, au lieu de subir ce dernier i
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Partie I
I Les defis du renouvellement • composer avec Ie progres et en tirer profit sous forme de prosperite et de qualite de la vie. Bref, qu'importent les raisons invoquees, l'adaptation de la GRH a un envi ronnement en evolution, voire en mutation, est un passage oblige pour toutes les organisations contemporaines, car les couts de la non-adaptation sont sou vent catastrophiques. Des entreprises comme Air Canada (transport aerien) et Quebecor (telecommunications et convergence des medias) font Ia demons tration de l'enormite des couts et des sacrifices assumes parce que les decisions qui ont ete prises, ou qui n'ont pas ete prises, les ont rendues vulnerables. D'autres entreprises comme Enron, Nortel ou Teleglobe ont sombre dans l'ablme parce qu'elles n'ont pas su decoder les signaux et agir dans un envi ronnement changeant. Par contre, Ie changement pour Ie changement ne vaut guere mieux. En effet, certains auteurs (Pauchant, 1996; Pastre et Vigier, 2003) font appel a l'ethique des dirigeants et a leur sens civique afin de resister a la tentation de tout chambarder sans prealablement se preoccuper des con sequences de ces transformations. Cet appel a des strategies visant a ralentir Ie rythme des changements illustre un certain malaise entourant la recherche du sens des transformations organisationnelles et de leurs consequences pour Ie marche du travail et la qualite de la vie en general des employes.
Chapitre 2
., L'adaptation de 1a GRH un cadre de reference
I S'adapter a un nouvel environnement
a1'environnement :
Comme Ie demontre la figure 2.1, la relation entre la GRH et l'environnement est bidirectionnelle, et meme multidirectionnelle, en ce sens que l'environ nement influence la GRH par Ie biais de la transformation de }'emploi et de l'organisation, et en retour Ia GRH influence }'emploi et la gestion de l'orga nisation ainsi que l'environnement en general. II devient alors pertinent d'adopter une approche proactive et volontariste de Ia GRH par opposition a une vision passive et «deterministe». l'ADAPTATION DE LA GRH UN CADRE DE REFERENCE
A UN
NOUVEL ENVIRONNEMENT:
fit L'environnement en mutation II est possible de decrire de multiples fa<;ons l'environnement de l'organisa tion et de Ia GRH en insistant davantage sur certains elements et en reduisant
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
l'import~r:ce d'au~:es elements. Les cinq aspects de l'environnement qUi sont ret~~us leI sont 1 economie, la technologie, la demographie Ie social et Ie pohtlque. ,
2.3.1 Une economie nouvelle, immaterielJe et globaJe Vne economie nouvelle oblige Ies entreprises a affronter la mutation vers Ie savoir et l'immaterieI, la mondialisation et Ia recherche de Ia productivite.
La mutation vers le savoir et l'immateriel Un nouvel equilibre entre Ie travail, Ie capital et les res sources a donne nais sance au concept de nouvelle economie ou d'economie du savoir. L'economie du savoir se caracterise «par la preponderance d'actifs intangibles, la presence d'activites a fort contenu de connaissances et l'utilisation d'une main-d'a=uvre hautement specialisee}> (Ministere de l'Industrie et du Commerce du Quebec, 2001b, p. 2). Selon Ie ministere de l'Industrie et du Commerce du Quebec (2001a), bien que les industries comportant un degre eteve de savoir representent a peine 20% de l'emploi total au Quebec, elles n'en sont pas moins responsables de 46% de la hausse de l'emploi de 1984 a 1999. Par contre, ces industries, qui servent de locomotive a la creation d'emplois, se concentrent surtout a Montreal (plus de 63 % des emplois de ce secteur), d'ou l'urgence de donner a toutes Ies regions du Quebec des strategies et des moyens pour faire en sorte que la nouvelle economie cree de la richesse sur tout Ie territoire. Cette mutation de l'economie n'est pas sans avoir des effets majeurs sur l'emploi et sur la fat,:on de gerer les personnes dans les organisations. L'Organisation de cooperation et de developpement economiques (OCDE) indique qu'il y a de plus en plus de travailleurs du savoir caracterises par des portefeuilles de comphences elevees, complexes et en constant renouvelle ment (OCDE, 2001). Ainsi, la creation de la richesse et la prosperite d'une nation ne passeront plus par l'augmentation de la productivite des travailleurs manuels et des tra vailleurs du secteur manufacturier, du moins dans les pays fortement indus trialises. Elles seront plutOt obtenues par Ie rendement des travailleurs qui, tous les jOurs, recueillent, saisissent, traitent, analysent, echangent et diffu sent des informations de toutes sortes a l'aide de technologies de plus en plus sophistiquees et envahissantes.
La mondialisation Les annees 1990 ont marque un tournant dans l'histoire economique des
nations. La mise en application de nombreux accords, traites, ententes et con ventions entre pays ont eu comme effet de briser les fronti€~res economiques traditionnelles, menac;ant ainsi la legitimite de plusieurs nations qui avaient assimile les frontieres geographiques aux frontieres economiques.
Chapitre 2 \ S'adapter
a un nouvel environnement
Cette liberalisation des echanges, acceleree par la dereglementation des economies et la libre circulation des capitaux, a fait des strategies d'exporta tion des entreprises Ie moteur de la prosperite economique. En effet, de 1990 a 2000, les exportations internationales du Quebec ont augmente de 165~, passant de 34 milliards de dollars a 90 milliards. Cette performance a permls de generer 142000 emplois. Dans une economie nationale ou Ie poids des PME est dominant, les PME dites a forte croissance, soit les PME «gazelles}}, representent a peine 10% des PME manufacturieres, mais elles sont it l'origine de plus de 60% de la croissance de l'emploi Gulien et autres, 2000). Cepen dant, plusieurs entreprises et PME sont menacees par un phenomene lie a la nouvelle economie mondialisee, soit les fusions et les acquisitions. Ainsi, en 2000, la fievre des fusions et des acquisitions a frappe fort pour atteindre un sommet inegale de 1297 fusions correspond ant a une somme de 234 milliards de dollars. Bien que, dans plusieurs cas, les fusions alent ete rentables, voire benefiques, dans de nombreux autres cas, ce produit de la folie des grandeurs a eu des effets devastateurs sur Ia culture organisationnelle, Ie c\imat de tra vail et les conditions de travail et d'emploi. La mondialisation a muItiplie ses cibles et Ies a toutes touchees. Que ce soit Ie commerce de detail (l'arrivee des gran des surfaces comme Wal-Mart ou Home Depot), Ie commerce de gros (la sous-traitance de Ia gestion des stocks et de l'entreposage), l'industrie des services financiers (les nombreuses expe riences de reingenierie suscitees par Ie dec\oisonnement de l'industrie), l'in dustrie des pates et papiers (l'apparition de la technologie et de nouvelles politiques environnementales), l'industrie de l'aluminium (un surplus de l'offre cause par l'arrivee des pays de l'ancien bloc de l'Est) ou encore !'indus trie du transport (terrestre, aerien, maritime), Ie tissu industriel et commercial des pays occidentaux s'est transforme. Meme les gouvernements ont du mener une lutte sans merci contre les deficits accumules. Cela a oblige les decideurs et les acteurs sociaux a s'adapter a ces mutations en deployant l'arsenal strategique de la restructuration, de la reingenierie et de la rearchi tecture. Dans les administrations ,publiques, ces concepts ont ete remplaces par celui de «modernisation de l'Etat».
La competitivite Dans ce contexte de la mondialisation, la competitivite d'une nation et de ses entreprises devient un facteur-cIe pour garantir la prosperite des citoyens ainsi que la qualite de leur vie. La question de la competitivite est consideree comme cruciale au Canada et au Quebec. En effet, de nombreuses etudes (Crane, 1992; Martel et Oral, 1995; World Competitiveness Yearbook, 2003) ten tent depuis quelques annees d'etablir Ie rangement des capacites concurren tielles des divers pays. Au-dela des divergences observees, il est maintenant reconnu que Ie Canada et Ie Quebec possedent tout ce qUi est necessaire pour devenir des leaders dans une economie mondiale competitive. En effet, Ie Canada est un pays riche en ressources naturelles, il se trouve a proximite d'un immense marche (les Etats-Unis), il repose sur des bases soIides en matiere de technologies avancees et il est caracterise par une force de travail
•
•
Partie I
I
Les defis du renouvellement
d'une tres grande qualite, diversifiee et reiativement scoiarisee. Sur Ie plan ecoll?mique, le Canada, et plus encore le Quebec, ont su se demarquer des Etats-Unis et mieux performer qu'eux, a 1a suite des evenements du 11 septembre 2001. Ainsi, les resultats canadiens et quebecois en matU're de PIB et de creation d'emplois font I'envie de bien des nations modernes. Toutefois, en matiere de capacites concurrentielles, rien n'est jamais acquis. Le Canada doit veiller au grain car 1a nouvelle Europe domine de plus en plus Ie marche mondial, soutenue par une activite economique fOisOll nante dans les anciens pays de rEst. Le Mexique gagne egaiement du terrain avec ses 97 millions d'habitants et un excellent potentiel de croissance. Le Conference Board avance meme que, d'ici 2010, Ie Mexique pourrait rempla cer Ie Canada comme principal partenaire commercial des Etats-Unis. Meme les regions sont desormais partie prenante au jeu de Ia competitivite. Recem ment, on a vu piusieurs provinces canadiennes se disputer 1a manne de l'industrie des centres d'appeis. Les technopoles, les nouveaux districts industriels et d'autres regroupements regionaux ou locaux font miroiter de multiples avantages concurrentiels (dont la qualite de 1a main-d'ceuvre) aux entreprises et aux personnes qUi viendraient les habiter. Bref, que Ies entre prises soient petites, moyennes ou gran des, elles sont condamnees a etre per form antes et elles doivent etre appuyees par des regions et des Etats qui sont eux-memes competitifs. Les strategies de GRH deviennent donc un parametre nevralgique dans cette equation de la competitivite.
2.3.2 La technologie La vague deferlante des technologies de l'information et de la communication de meme que la creation de ce qu'on nomme desormais Ie cyberespace sont en train d'atteindre toutes Ies couches de 1a societe et tous les ~ecteurs de n~conomie. La micro-informatique a realise une percee dans Ie traltement de
Chapitre 2
S'adapter
a un nouvel environnement
l'information. Non seulement l'information peut etre traitee en plus grande quantite, plus rapidement et de fa~on plus fine ou detaillee, mais, surtout, elle est aujourd'hui accessible en temps reel et decentralisee, en plus de pouvoir circuler dans Ie format des «reseaux" et dans Ie monde de la virtualite. Autre phenomene fascinant, Ie potentiel de la technologie double tous les 15 ans (Gagne et Lefebvre, 1995). Un tel constat souleve egalement Ie phenomene de l'obesite informationnelle. Certains specialistes utilisent Ie concept d'« attention economy» (Davenport et Beck, 2002) pour illustrer Ie fait qu'il faut maintenant inventer des processus de gestion, d'apprentissage et de decision qUi pennettent de concentrer ses energies sur des informations et des con naissances a valeur ajoutee afin de ne pas se noyer dans un ocean d'informa tions et de connaissances qUi conduit davantage vers Ia paralysie que vers la stimulation des idees et l'innovation.
L'ampleur du phenomene Au Quebec, en 2003, on evalue a pres de 55 % la proportion d'adultes qUi sont des intemautes reguliers (CEFRIO, 2003a). Panni ces derniers, 18% effectuent des transactions bancaires en ligne. Plus du tiers des adultes quebecois utilisent Internet dans leur milieu de travail et 90% de ceux-ci ont fait du courrier electronique un des principaux moyens de communication, sinon Ie moyen Ie plus important, au travail. On observe aussi que 17 % des Quebecois utili sent Internet a la maison a des fins professionnelles. Ainsi, l'importance de la demande actuelle en ce qui a trait aux technologies (Ie potentiel d'utili sation par Ies individus et les entreprises), jumelee avec une offre de services et de produits qUi s'est ajustee consequemment a la deconfiture des entre prises technologiques (point-com) et de certains secteurs comme les tl~lecom munications, nous permet de prevoir une explosion des affaires electroniques et des teIeactivites. La montee du commerce electronique interentreprises (business to business, B2B) demontre egalement que l'integration des fonctions d'une organisation et de ses activites a tendance it se virtualiser de plus en plus et, par Ie fait meme, it ouvrir la porte a l'extemalisation de plusieurs activites organisa tionnelles, ce qUi se traduit notamment par de l'impartition et de la sous traitance. Outre les affaires electroniques, la revolution numerique a donne naissance au concept de teIeactivites, dont Ies applications comprennent Ie teletravail, l'apprentissage it distance (e-Iearning), Ies communautes de pratiques profession nelles, Ie teIemonitorage (dans les soins de sante), Ia telemedecine, etc.
La technologie et la course aux secondes Le nouveau paradigme technologique a eu pour effet de transformer Ia rela tion que l'entreprise a etablie avec Ie temps. Ainsi, la technologie joue un role non seulement de catalyseur des changements et de revelateur des dysfonc tions de l'organisation, mais aussi d'acc€M:rateur et de compresseur du temps. Le cycle de vie des produits a ete divise par un facteur de 3 a 4 au cours des 50 dernieres annees.
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les defis du renouvellement
Au debut des annees 1950, les produits cosmetiques avaient un cycle de vie de 11 ans et Ies jeux et jouets, de 14 ans. Ces produits durent aujourd'hui a peine plus de trois ans. Meme les produits pharmaceutiques reputes pour leur longevite (24 ans) et les produits alimentaires (20 ans) s'eteignent apres 8 ans et 5 ans respectivement. Dans Ie meme ardre d'idees, l'Institut de cteveloppe ment de produits (www.idp-ipd.com) indique que plus de 50 % des ventes realisees actuellement par bon nombre d'entreprises sont attribuables a la mise sur Ie marche de nouveaux produits, et cette tendance connait une hausse constante. Les technologies ont egalement permis a certains secteurs d'activite d'en trer dans la course aux secondes. Chez Cisco, par exemple, les detais de livrai son sont passes de 12 semaines en 1990 a 48 heures en 2002 (CHRIO, 2002).
2.3.3 La demographie Les changements dans la composition de la population ne sont pas sans influer sur Ie marche du travail. Le vieillissement de Ia population et l'arrivee d'une nouvelle generation, la feminisation du marche du travail ainsi que la diver site culturelle sont les variables demographiques qui retiennent l'attention.
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S'adapter 11 un nouvel environnement
Le viei1lissement de la population et l'arrivee d'une nouvelle generation II est superflu de faire la demonstration du vieillissement de la population dans les pays developpes. Le Quebec, qui etait l'une des sodetes les plus jeunes en Occident dans les annees 1960, se retrouvera parmi les 2 ou 3 socie tes les plus agees dans Ie monde d'ici 30 ans. Le faible taux de natalite (avec un indice de fecondite de 1,4 comparativement a 1,5 pour Ie Canada, a 1,8 pour la France et a 2,0 pour les Etats-Unis), s'ajoutant a une augmentation des deces et a un solde migratoire a peu pres nul (une faible performance en matiere d'immigration) temoigne d'un taux d'accroissement naturel et global de la population susceptible de conduire Ie Quebec vers un deficit demo graphique autour de 2020. Ainsi, Ie nombre de Quebecois, qui etait de 7410500 en 2001, se stabiliserait autour de 7800000 dans 20 ans, pour ensuite decroitre (Statistique Canada, 2002). Ce vieillissement de la popula tion, qui caracterise aussi d'autres societes occidentales, pose de nombreux defis d'ordre economique, social, ethique et politique. On devine facilement que la proportion des aines et des jeunes augmentera de fa~on exponentielle par rapport a la population des personnes de 15 a 64 ans 2 , qUi aura a sup porter un poids plus grand quant au financement et a la prestation d'un ensemble de services publics (sante, education, rentes, etc.). Suivant Ie scenario suggere par Statistique Canada (2002), la moitie de la population aura plus de 43,6 ans en 2026, ce qUi represente une forte hausse par rapport aux 36,8 ans observes en 2000. Ce renversement de la pyramide des ages touchera les organisations, en ce sens que la main-d'ceuvre vieillis sante aura plus d'experience ainsi que des attentes par rapport au marche du travail centrees davantage sur Ia fin de la trajectoire professionnelle. D'autre part, Ie marche du travail voit arriver les representants de la generation Y (dont les membres sont nes entre 1977 et 1997), generation qui est carac terisee par des valeurs differentes a l'egard la vie en societe et surtout du marche du travail et des milieux de travail (voir Ie tableau 2.1). La conjonction du vieillissement et du rajeunissement du marche du tra vail constitue une menace pour la stabilite des organisations et pour celle du marche du travail. La retraite progressive au-dela de la peri ode d'admissibilite, Ie transfert des connaissances, la loyaute envers l'organisation, la mobilisa tion, la gestion des carrieres, la planification de la releve et la conciliation travail-famille sont, en matiere de ressources humaines, des enjeux majeurs visant a assurer Ie pont entre les generations. Ainsi, les trois grandes etapes de la vie professionnelle, a savoir la scolarisation, la vie au travail et la retraite, ne sont plus vecues comme des periodes successives, etanches et non inter changeables par une fraction de la main-d'ceuvre. En effet, un grand nombre de personnes poursuivent des etudes tout en faisant partie de Ia population active, d'autres quittent momentanement Ie marche de l'emploi pour parfaire
2. On peut etablir Ie rapport de dependance. un indice demographique traditionnellement reconnu. lequel consiste dans la mesure du poids relatif de la population dUe inactive (de 0 a 14 ans et de 65 ans et plus) au regard de la population dite active (de 15 it 64 ans).
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LES VALEURS DE LA GENERATION Y ET LE MODELE ORGANISATIONNEL RECHERCHE
Sources: Adapte de G. Pare, «La generation Internet: un nouveau profiI d'employes », Gestion, vol. 27, nO 2, 2002, p. 51, et D. Tapscott, Growing lip Digital: The Rise of the Net Generation, New York, McGraw-Hill, 1998.
une formation ou changer d'orientation, et d'autres encore, qui sont offi ciellement retraitees, continuent d'effectuer du travail remunere (Conseil du statut de la femme, 2000).
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S'adapter it un nouvel environnement
La feminisation du marche du travail La proportion des femmes dans la population active est passee de 23,2 % en 1951 a 46,1 % en 2002 (www.statcan.ca). Entre 1975 et 1995, Ie nombre d'hommes en emploi a augmente de 11,7% alors que Ie nombre de femmes en emploi augmentait de 70,1 % (Conseil du statut de la femme, 2000). La tendance indique que les femmes sont en voie de participer autant que les hommes au marche du travail. Bien que les femmes alent une remuneration inferieure a celle des hommes 3, qu'elles soient souvent exclues des postes aux echelons superieurs et que la precarite les guette davantage 4 , il reste que leur presence entraine des changements importants dans la dynamique des rapports humains au travail. Il est reconnu que les femmes gestionnaires ont des qua lites que les hommes n'ont pas. En outre, elles approchent souvent les problematiques de gestion sous des angles differents s1 on les compare a leurs collegues masculins (Dupuis et Kuzminsky, 1998). Par ailleurs, comme nous Ie verrons plus loin, de nombreuses femmes sur Ie marche du travail ont des responsabilites parentales, ce qUi amplifie Ie defi de la conciliation ou de l'equilibre travail-fa mille. De plus, la presence accrue des femmes sur l'en semble du marche du travail souleve des problematiques complexes Bees par exemple au harcelement sexuel, a la discrimination et a la maternite.
La diversite culturelle Un taux de natalite en balsse, un solde migratoire net faible et un deficit demographique prevu a long terme sont des signaux qUi ouvrent la vole a une strategie beaucoup plus vigoureuse en matiere d'immigration dans un proche avenir. Cette strategie semble etre a l'avant-plan des efforts a deployer pour que Ie Quebec continue a se developper sur les plans economique et social. Comme les statistiques l'indiquent, l'equilibre est plus precaire au Quebec qu'en Ontario ou en Colombie-Britannique (Audet, Fradette et Rarnzi, 2002). En progression depuis 1991 (8,2 %), Ie poids demographique des immi grants dans la population quebecoise etait de 9,4°;6 en 1996. Le Quebec a accueilli 32 502 immigrants en 2000. Toutefois, il re~oit seulement 13,1 % des immigrants canadiens, comparativement a 5S % pour l'Ontario, dont Ie poids demographique des immigrants est de 26%. Par ailleurs, la destination d'arri vee privilegiee de la population immigree au Quebec demeure essentiellement la region de Montreal (88 % des immigrants sont installes a Montreal contre 3% a Quebec). Au Quebec, 17,8% de la population montrealaise est immi grante, ce qUi est de loin superieur au taux de 2,6% de la region de Quebec. Bien entendu, la problematique de l'immlgration est etroitement Bee a la
3. Les femmes gagnent en moyenne 10% a 15 % de moins que les hommes, meme apres qu'on a tenu compte des differences entre les deux sexes (scolarite, experience, profeSSion, secteur industriel, heures travaillees) (l/.4ciualite, 2001). 4. En 1996, 67,5 % des emplois a temps partiel etaient occupes par des femmes contre 32,5 % de ce type d'emplois occupes par des hommes. Les emplois atypiques constituent souvent une sorte de piege pour les femmes (Conseil du statut de la femme, 2000, p. 81).
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I Les defis du renouvellement langue. Les intentions gouvernementales en matiere d'immigration stimulent donc l'entree d'immigrants venant des pays de la francophonie, principale ment de la France, des pays de l' Afrique du Nord et de I' Afrique francophone. Le marche du travail se transforme sous l'influence d'un tel mouvement et les entreprises devront etre it I'image d'une societe pluraliste et multicultu relle. II reste cependant beaucoup de travail a faire pour atteindre ce but. En effet, hormis certains secteurs ou il y a penurie et ou un effort intense de recrutement a l'etranger est de mise, on observe que les immigrants se con centrent dans Ie secteur tertiaire et dans certains secteurs d'activite surtout tra ditionnels (hotellerie, restauration, transport, vetement, horticulture, agricul ture, etc.) ou les sal aires et les conditions d'emploi sont moins avantageux. On note aussi que Ie taux de chomage de la population immigrante augmente bon an mal an. Entre 1993 et 1996, il etait de 29,5%, comparativement a 14,7% pour la periode de 1976 a 1980. Une fois de plus, ce sont les minorites visibles qui ecopent, comme en fait foi Ie taux de chomage de 36,9 % chez les immigrants issus de 1'Afrique noire en 1996 (ROY, 1999).
AMontreal, chez les diplOmes d'universite admis au Canada depuis 1991, Ie taux de chomage en 1996 etait six fois plus eIeve que chez les diplomes nes au pays (24%), soit un taux eqUivalent it celui des Canadiens d'origine n'ayant pas termine leurs etudes secondaires (Badets et Howatson-Leo, 1999; Guyon, 1999). Bref, si l'avenir repose en bonne partie sur une integration reussie de la population immigrante, ceia ne sera possible que si Ie marche du travail permet une veritable integration des immigrants, et ce, dans tous les types de qualifications et de responsabilites et dans tous les secteurs d'activite. Les approches preconisees par les organisations face a cet enjeu sont donc au c<:eur d'un tel defi.
2.3.4 Le social Au meme titre que n~conomie, Ia technologie et la demographie, l'environ nement social est une source de transformation. Une nouvelle dynamique entre les acteurs sociaux, l'accroissement de la scolarite, la mutation des mo deIes familiaux et l'apparition de nouvelles va leurs associees au travail sont autant d'illustrations du fait que les organisations doivent s'adapter a une situation inedite.
Une nouvelle dynamique entre les acteurs sociaux Les organisations et la societe sont Ies Heux de la cohabitation de divers groupes qUi dHendent les
intef(:'~ts
de leurs membres. Ce phenomene s'observe
egalement dans Ie monde du travail. Au niveau local, les syndicats et les collectifs de salaries (reconnus ou non) ont agi comme mecanismes de representation pour l'ensemble des salaries. Au niveau societal, les interets des salaries et des employeurs etaient naguere dHendus par les structures tradi tionnelles associees au syndicalisme et au patronat (les centrales syndicales, Ie Conseil du patronat, les chambres de commerce, etc.). Depuis les annees
Chapitre 2
I S'adapter a un nouvel environnement
1980, Ie Quebec s'est montre innovateur en creant de nombreux Heux ou les groupes d'interets peuvent etablir des structures de concertation. Au niveau national, i1 existe plusieurs mecanismes de partenariat visant a elaborer des poIitiques mieux adaptees aux besoins des groupes d'interets. Le Conseil con sultatif du travail et de la main-d'ceuvre, la Commission de la sante et de la securite du travail, la Commission des partenaires du marche du travail et les Sommets socioeconomiques sont des exemples du fait que la concertation nationale et la democratie se portent relativement bien et que les acteurs sociaux ont droit de cite.
L'accroissement de la scolarite La mutation du contenu des emplois de meme que Ies nouveaux emplois crees, vu leur complexite et leur nature, exigent de plus en plus de compe tences. Cela signifie que Ies travailleurs doivent avoir des connaissances de base importantes en ce qui concerne la communication (lecture, ecriture), Ie raisonnement math€:matique, l'utilisation de Ia micro-informatique, etc. Bien que les programmes de formation offerts par les maisons d'enseignement ne correspondent pas toujours aux besoins du march€: du travail, il reste que Ie
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I Les defis du renouvellement Canada et Ie Quebec investissent enormement dans Ie systeme d'education, et les resultats obtenus sont interessants. Pour ce qui est des ressources allouees a I'education (par rapport au PIB), Ie Canada se situe parmi les pays dont ]'effort est Ie plus important, devan~ant les Etats-Unis. Le Quebec est egalement dans Ie peloton de tete des societes modernes en ce qui conceme la frequentation scolaire. De toutes ces considerations, une tendance lourde se degage, a savoir qu'un niveau d'instruction et d'education de plus en plus eleve concourt a developper Ie sens critique des travailleurs. Les nouvelles technologies de l'in formation et de la communication (Internet) rendent I'information plus acceSSible, Ies medias democratisent l'information et la formation donne les des pour comprendre, analyser et agir. L'organisation n'a qu'a bien se tenir, car ses membres seront de plus en plus eXigeants par rapport a toutes les dimensions de sa vie collective. Mentionnons egalement que l'organisation est au premier plan dans cette revolution du savoir et dans l'implantation d'une culture de formation continue. En effet, l'organisation se voit octroyer (par la Loi favorisant Ie developpement de ]a formation de la main-d'reuvre, entre autres) une responsabilite accrue dans Ie developpement de sa propre main-d'reuvre et de celle du secteur et de la region auxquels elle appartient.
La mutation des modeles familiaux En moins de 30 ans, la famille quebecoise a completement change de forme et de modele. Comme on peut Ie constater dans Ie tableau 2.2, la mutation de l'environnement familial n'est pas sans avoir des effets a caractere econo mique, social et ethique. Le rapport que les gens etablissent avec la famille est devenu relativement precaire. Les enjeux de la conciliation travail-famille ont donc pris beaucoup d'importance recemment (Effectif, 2000) et sont susceptibles de prendre une importance encore plus grande dans l'avenir sous la pression d'un redresse ment de la performance du Quebec en matiere de natalite et de fa\=on a repondre a des aspirations familiales plus presentes chez les jeunes (la gene ration Y) qui entrent maintenant sur Ie marche du travail. (' La famille,
lES CARACTERISTIQUES DE LA FAMlllE MODERNE
Chapitre 2
I S'adapter 11 un nouvel environnement
aujourd'hui, c'est un adulte seul avec des enfants, un couple avec ou sans enfants, avec des enfants d'un ou de plusieurs Hts; ce sont parfois deux ou trois generations qui vivent ensemble» (BIT, 1994).
L'apparition de nouvelles valeuTs associees au travail Bien que plusieurs aient jadis reve a Ia societe des Ioisirs, il n'en demeure pas moins que Ie travail a de bonnes chances d'etre encore Iongtemps au centre des priorites dans Ia vie des gens. Que Fon soit pour ou contre, la societe a ren force Ie fait que c'est en grande partie par Ie travail qu'un citoyen developpe sa propre identite et sa reference a Ia reussite. Le travail est Ie lieu ou s'expri ment la personnalite d'un individu, ses ambitions, son autonomie et son epanouissement personnel.
Meme si Ia centralite du travail demeure constante, les valeurs associees au travail ont evolue de fa~on importante, recemment, avec des phenomenes tels que I'arrivee des jeunes, Ie depart des «veterans )}, la recherche de l'equite entre hommes et femmes, la mondialisation et la diversite culturelle. Parmi ces valeurs, l'autonomie constitue l'assise du renouvellement de la gestion modeme. Ce mouvement vers la responsabilisation (empowerment) et l'au toregulation des groupes et des personnes est la preuve tangible du fait que la valeur que constitue l'autonomie alimente main tenant les pratiques de gestion des organisations contemporaines. La popularite du teletravail et de la flexibilite du temps de travail correspond egalement a une nouvelle concep tion du travail qui s'appuie sur Ia responsabilisation. De meme, on remarque la montee de va leurs plus humaines rattachees, entre autres, a l'epanouissement personnel, a la force de l'equipe (l'identite collective) et a l'equilibre entre l'emploi et la famille. Comme on peut Ie constater, les nouvelles valeurs associees au travail ne forment pas un tout homogene a partir duquel on peut batir des strategies de gestion. Elles creent plutot des paradoxes qUi rendent necessaires la negociation, les choix stra tegiques et meme les choix situationnels ou contingents.
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Les defis du renouvellement
2.3.5 Le poHtique Les debats actuels entourant la modernisation et la reingenierie de l'Etat soulevent la question de la participation du politique et des institutions pu bliques dans des champs comme Ie developpement economique, Ie travail ou la protection sociale.
Vers une nouvelle
fa~on
de gouverner
L'Etat doit assumer les responsabilites de protecteur, de redistributeur des revenus, de producteur de biens et de services publics, de regulateur de l'eco nomie et de stimulateur de la croissance et du developpement economique. Depuis les deux dernieres decennies, Ie neoliberalisme et la logique mar chande influencent gran dement les decisions que les gouvernements pren nent, que ce soit sur Ie plan de la legislation ou sur celui de l'intervention au moyen de politiques sociales, economiques ou de main-d'ceuvre. Les forces occultes de I' offre et de la demande dans Ie contexte de la mondialisation de l'economie entrainent des problemes de restructuration des secteurs de l'eco nomie, de distribution des richesses et d'ajustement conjonctureL Quand de tels phenomenes se produisent simultanement, on parle alors de crise. Mais au cours des dernieres annees, les rOles traditionneis de I'Etat eu egard a ses grandes responsabilites, de meme que les strategies nationales par rapport au marche du travail (a la GRH et aux relations du travail) ne semblent plus adequats. La Banque mondiale a etabli des balises visant a provoquer une reflexion sur Ie role de I'Etat. Ces balises sont presentees dans Ie tableau 2.3.
LES PRINCIPES DE LA DEFINITION DU ROLE DE l'ETAT SELON LA BANQUE MONDIALE ET KOCHAN
Source: T. Kochan, «Presidential address: Launching a renaissance in international industrial rela tions research ", Relations industieiles/lndustriai Relations, vol. 51, nO 2, 1996, p. 247-263.
Chapitre 2
I S'adapter a un nouvel environnement
Le role de l'Etat depend du type de modele socioeconomique dont il est garant. Le modele du capitalisme etatique (France et Italie), Ie modele liberal (Etats-Unis et Angleterre) et Ie modele cooperatif (Allemagne et Suede) ont ete largement documentes (Dupuis et Kuzminsky, 1998). La societe quebecoise, a cheval entre Ie capitalisme liberal et Ie capitalisme cooperatif, est sans doute Ia societe qui represente Ie plus l'approche de Ia «social-democratie ». L'Etat providence quebecois, present dans de nombreux domaines (economique, social, culturel, professionnel, environnemental), et souvent depeint comme Ie pretendu modele quebecois, est fortement critique, et plusieurs s'interro gent sur sa pertinence dans Ie contexte des transformations profondes qui modelent l'environnement. II semble que l'Etat providence devra laisser plus de place a un Etat stratege, caracterise par une intervention moins systema tique et par la demonstration d'une plus grande efficacite et d'une meilleure efficience (Boyer, 2001).
La crise du politique et de la democratie Les politiciens, c'est-a-dire les elus qui orientent les societes et qUi decident de l'ensemble des services publics offerts aux contribuables, et Ie systeme po litique, qUi permet les debats avec les citoyens, font I'objet d'attaques provenant de toutes parts. Cette reputation peu enviable que Ie politique a acquise au cours des annees est renforcee par Ies nombreuses r€formes qu'il a faites en ce qui concerne les regimes de relations du travail et de GRH. Dans une allocution prononcee au congres de I' Association internationale des relations professionnelles, Tom Kochan, du Massachusetts Institute of Technology, portait un jugement severe sur les retombees des travaux de la commission Dunlop aux Etats-Unis. Cette commission avait pour mandat de formuler des recommandations visant a reformer et a moderniser Ia legisla tion du travail afin d'appuyer Ia participation des employes, de reduire les conflits lies a la liberte d'association et d'accreditation syndicale, et, enfin, d'encourager Ie regiement des differends sur les Heux de travail. Les interets politiques en jeu et Ie laisser-faire des politiciens ont paralyse l'implantation de ces reformes. Le Canada et Ie Quebec ne laissent pas leur place relativement a la mise sur pied de nombreux groupes ou organismes permanents ou temporaires, nom mes par les politiciens, dont les recommandations ont theoriquement pour but d'ameliorer les relations du travail et la GRH. La commission Beaudry (Code du travail du Quebec), la commission Sims (Code canadien du travail) et Ie Groupe de travail sur la r€forme des milieux de travail au Canada sont des exemples d'exercices politiques dont les retombees ne repondent pas tou jours aux attentes que les groupes d'interets avaient a leur egard.
I!intervention legislative par rapport au travail Guerin et Wils (1992) affirment que les gouvernements constituent un des principaux agents de changement en ce qui a trait aux pratiques des organi sations. Vu son role d'employeur majeur qui influence la supervision de centaines de milliers de travailleurs, et surtout vu son role de legislateur,
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I les detis du renouvellement PEtat peut aussi bien stimuler Ie changement dans les milieux de travail que Ie freiner. Les principales lois qui encadrent la GRH et les relations individu elles et collectives du travail sont presentees dans Ie tableau 2.4. Certaines de ces lois sont traitees de fa~on plus precise dans des chapitres de ce livre.
LES PRINCIPALES LOIS EN MATIERE DE TRAVAIL ET D'EMPLOI POUR LES ENTREPRISES SOUS L'AUTORITE PROVINCIALE
Comme on peut Ie constater, les contraintes et les obligations imposees par les lois du travail ajoutent enormement de complexite et de bureaucratie it la gestion strategique et operationnelle des ressources humaines. Cet en semble de lois qui touchent directement (Ie Code du travail) ou indirectement (les heures d'ouverture) aux relations du travail et d'emploi refiete une conciliation qui doit se faire dans les societes modernes entre les droits indi viduels et la regulation collective. De plus, mentionnons que la conformite aux obligations prevues dans les lois du travail a sans doute ete pour beau coup dans l'implantation et Ie developpement des services des ressources humaines au cours des 30 dernieres annees.
Chapitre 2 , S'adapter 11 un nouvel environnement
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Les implications de la transformation de l'environnement pour l'emploi et l'organisation ................................
L'environnement changeant que l'on vient de decrire exerce une forte pres sion sur Ie marche du travail et la gestion des organisations. Avant de decrire certaines implications de la transformation de cet environnement pour la gestion des ressources humaines, il est pertinent d'examiner Ia transformation de l'emploi et des entreprises. Ces deux realites viennent conditionner les changements en matiere de GRH.
2.4.1 Des emplois qui se transforment En raison de la transformation de I'environnement, on a assiste a un deplace ment de l'emploi dans l'economie ainsi qu'a un changement des formes et du contenu des emplois. La GRH subit et influence a la fois cette mutation de l'emploi.
L'evolution et la repartition de l'emploi Dans son plaidoyer sur la fin du travail, Jeremy Rifkin souligne:
Apres des annees de previsions aveugIement optimistes et de faux departs, les nouvelles technologies de I'information et de la communication sont finale ment en train de peser veritablement sur Ie lieu de travail et i'economie, jetant Ie monde entier dans la melee d'une troisieme grande revolution industrielle. Des millions de travaiLleurs sont d€flnitivement €iimines du processus economique, des categories entieres d'emploi ont fondu, ont ete restructurees ou ont disparu (1996, p. 13).
A l'oppose de cette these de Rifkin, plutot pessimiste au sujet de l'emploi, on trouve d'autres specialistes qui constatent que la revolution technologique cree des centaines de milliers d'emplois. Loin d'etre de petits boulots, ils sont hautement qualifies, consideres et bien payes. Les emplois qualifies represen tent actuellement 40% de l'emploi total aux Etats-Unis, mais ils constituent 70% des emplois crees dans les annees 1990 (Rouge, 1997). Le Quebec a vu son economie se tertiariser au cours des 30 dernieres an nees. Cette tendance se reproduit egalement sur Ie plan de }'emploi. La part de l'emploi dans les services est pas see de 56,9 % en 1966 a pres de 75 % en 2002. C'est dans Ie secteur tertiaire traditionnel (commerce, transport, ser vices personnels et restauration) que l'on compte Ie plus grand nombre d'emplois au Quebec. Cependant, c'est dans Ie secteur tertiaire moteur (tele communications, energie, intermediaires financiers et services aux entre prises) que la progression a He la plus importante. Quant a l'emploi dans Ie secteur tertiaire non commercial (services publics), on observe une stagna tion, sauf dans Ie secteur de la sante et des services sociaux. On peut egalement mentionner Ie fait que la majorite des emplois sont crees dans des entreprises de petite taille, caracterisees par des personnes ani mees de l'esprit d'entreprise. En effet, l'evolution des dernieres annees
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demontre que la PME a cree plus d'emplois que la grande entreprise. Bref, on constate actuellement un deplacement important de l'emploi vers les PME de services. Par contre, il ne faut pas tomber dans Ie piege du small is beautiful, car les grands projets et les grandes entreprises (Hydro-Quebec, Bombardier, Pratt & Whitney, Abitibi-Consol, etc.) jouent encore Ie role de moteur econo mique et de reservoir d'emplois pour une forte majorite de PME. De plus, il faut garder en memoire que c'est dans les PME que les pertes d'emplois sont egalement les plus importantes.
Des ernplois differents Non seulement l'emploi est en mutation sur Ie plan quantitatif, mais il subit aussi des transformations majeures sur Ie plan de la nature du travail a accomplir. Les emplois «autonomises », c'est-a-dire les emplois occupes par les di verses categories de travailleurs autonomes, ont augmente au detriment des emplois permanents et durables. On remarque en effet une «autonomisation» du travail et, dans plusieurs cas, une precarisation du travail dans un contexte ou l'on requiert de plus en plus une force de travail juste-a-temps, soit au moment ou l'on en a besoin et pour Ie temps ou l'on en a besoin. La montee du travail atypique s'observe dans l'ensemble des pays industrialises. Pour l'employeur, Ie travail atypique offre une plus grande flexibilite dans la gestion de la main-d'a'uvre. Pour Ie travailleur, il peut faciliter la conciliation travail-famille ou permettre une plus grande autonomie dans l'execution du travail (Bernier, Jobin et Vallee, 2003). Ces emplois atypiques renvoient au travail a temps partiel, au travail autonome, au travail a duree determinee, au travail interimaire par Ie biais d'agences de placement, au travail a domicile et au travail partage. La part de ces differentes formes d'emploi dans l'emploi total est pas see de 16,7 % en 1976 a 29,3% en 1996 et a 36,4% en 2001. La moitie des jeunes travailleurs de moins de 30 ans fait partie de cette categorie. La main-d'a'uvre touchee par l'emploi atypique est beaucoup plus difficile a fideliser et a mobiliser, ce qui reduit d'autant la loyaute des employes envers leur organisation et envers leur employeur. Les professions hautement qualifiees occupent une place plus importante que jamais sur Ie marche du travail. En 2001, 2,5 millions des IS,S millions d'emplois au Canada exigeaient des etudes universitaires, ce qui represente une hausse de 33 % par rapport a 1991. De plus, bien que de nombreuses theses s'affrontent relativement au mouvement de qualification et de dequali fication de l'emploi (Bernier, 1999; Dube et Mercure, 1999), il semble que la tendance nous conduirait vers une societe ou les emplois sont davantage qualifies, demandant des competences liees a une plus grande variete de taches et a un enrichissement du travail.
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S'adapter a un nouvel environnement
Des emplois qui fluctuent L'instabilite et !'incertitude de I'environnement font pression sur la capac He de l'organisation a s'adapter aUK cycles conjoncturels et structurels. L'ap proche qui consiste a embaucher et a licencier les travailleurs est encore pri vilegiee par plusieurs entreprises. Faute de donnees empiriques serieuses, l'impression que laissent les medias est que Ie nombre de mises a pied et de licenciements s'avere de plus en plus important. Pourtant, les chiffres concer nant la creation d'emplois ctemontrent un effet net positif. Depuis 1994, Ie seul bilan negatif a ete enregistre en 1996 (Ministere de l'Industrie et du Commerce du Quebec, 2002). Pour compenser les repercussions de I'apres-ll septembre 2001, l'economie s'est ajustee. En effet, on evalue a plus de 100000 les emplois perdus aUK Etats-Unis dans Ie transport aerien depuis cet evenement. Des entreprises comme Bombardier, Pratt & Whitney et Boeing ont ete touchees en plein cceur par cette crise. Deja fragilise par Ie degonfiement de la bulle technologique, Ie secteur des telecommunications a vecu une hikatombe au point de vue de l'emploi. Pendant ce temps, on assistait a la creation de nombreUK emplois dans les secteurs des technologies (surtout des PME), des services associes aUK entreprises, de la biotechnologie et de l'industrie pharmaceutique. La rationalisation des effectifs n'est plus Ie lot des entreprises eprouvant des difficultes financieres. Meme les entreprises performantes reduisent leur force de travail afin de mieux gerer leur structure de couts et d'augmenter leur productivite. Meme si cette strategie visant a faire varier l'emploi en fonction des aleas de l'environnement conduit a des effets economiques immediats, elle entraine un ensemble de couts caches qui viennent souvent annuler les gains attendus.
2.4.2 Des organisations qui se transforment Non seulement les mutations de I'emploi forcent les gestionnaires a adapter leurs pratiques de gestion des ressources humaines, mais la gestion des res sources humaines doit egalement appuyer les grandes orientations des organi sations en matiere d'adaptation a l'environnement. Ainsi, la GRH doH soutenir les diverses fonctions de l'entreprise (administration, operations, commercia lisation, etc.) afin qu'elle prenne Ie virage de l'orientation vers Ie client, de l'orientation vers les processus, de l'orientation vers la gestion par les resultats et de I'orientation vers la retroaction et l'apprentissage (Rondeau, 1999).
l'orientation vers le client L'orientation vers Ie client recentre les energies et les ressources de l'organi sation sur ce qui constitue sa raison d'etre ou son but premier, a savoir la satisfaction du client ou du citoyen. Les strategies et les pratiques de gestion aKees sur la demarche de la qualite totale sont un exemple d'actions qui appuient cette orientation. L'orientation vers Ie client redonne sa legitimite a la gestion des personnes. Ainsi, 1a GRH n'aura de sens qu'a 1a condition que les membres de l'organisation servent mieux la clientele.
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Partie I
I Les defis du renouvellement L'orientation vers les processus Vne orientation vers les processus oblige les acteurs d'une organisation a se concentrer sur une activite ou une finalite en s'affranchissant de la dynamique fonctionnelle (administration, production, operations, R&D, marketing, ressources humaines). Remettre un patient sur la voie de la gueri son, favoriser la reussite scolaire d'un groupe d'etudiants et servir un client en integrant l'ensemble de ses besoins ne sont que quelques exemples de pro cessus d'affaires qUi justifient pleinement les activites d'une organisation. Les pratiques de gestion centrees sur la chaine de valeur (la production a valeur ajoutee), la gestion ou la reingenierie des processus, la gestion par projet ainsi que l'approche kaizen illustrent des actions qui s'inscrivent dans cette orien tation. Pour la GRH, rorientation vers les processus injecte une logique matricielle dans la logique fonctionnelle. II s'agit donc de mettre en ~uvre une organisation du travail plus fluide, ponctuelle et a geometrie variable.
L'orientation vers la gestion par les resultats Sous l'impulsion de la mondialisation, la logique marchande force les orga nisations a se doter de tableaux de bord, d'indicateurs de gestion, de proces sus de certification a des normes (par exemple la norme ISO). Cette tendance illustre Ie passage d'une gestion fermee a une gestion ouverte et comparee. Les lois du marche incitent donc les organisations a se mesurer et a se comparer, soit a des normes absolues, soit it des referentiels (Malcolm Baldridge Award, QUALImetre) ou a des modeles. L'approche des meilleures pratiques (best prac tices), Ie balisage concurrentiel (benchmarking), l'implantation de systemes de gestion integres de ressources, les audits de gestion et l'elaboration de bul letins ou de palmares constituent quelques exemples associes a l'orientation vers la gestion par les resultats. Pour la GRH, cette orientation implique la demonstration d'une fonction contribuant au succes de l'organisation ainsi qu'une gestion mobilisatrice et mobilisee vers la realisation de resultats.
L'orientatfon vers la retroaction et l'apprentissage L'orientation vers la retroaction et l'apprentissage consiste a passer d'une culture de gestion complaisante ou suffisante it une culture de gestion mar quee par la remise en question. II s'agit pour l'entreprise d'adopter des mo deles et des pratiques permettant de colliger de l'information sur ses fa\,ons de faire, d'en discuter ouvertement et de les ameliorer de maniere continue par Ie biais de processus d'apprentissage organisationnel influences par les approches de la gestion de connaissances, de l'organisation apprenante (learning organization) et de l'evaluation multisource. Pour la GRH, l'orienta tion vers Ia retroaction et I'apprentissage propose de nouveaux cadres de reference en matiere de gestion du changement organisationnel et d'amelio ration continue. En somme, la GRH sera une fonction credible pour autant qu'elle sou tienne Ie passage des organisations it ces diverses orientations, passage impose par un environnement en mutation.
Chapitre 2
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I
S'adapter
a un nouvel environnement
Les implications pOUT la GRH . . . .. .. . .. . . . . .. . .. . . . .. .
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n serait quelque peu rectucteur de tenter de degager des effets propres a cha
cune des tendances que nous venons de decrire. Les organisations font plutot face a l'interaction et au croisement de ces diverses tendances, ce qui rend complexes Ie monde a l'interieur duquel les gestionnaires et les employes evoluent et les choix strategiques qUi se dessinent. La mutation des para metres de l'environnement remet en question un ensemble de croyances et de comportements dans les milieux de travail Hant donne les orientations (vers Ie client, vers les processus, vers Ia gestion par les resultats et vers la re troaction et l'apprentissage) qui se sont imposees recemment dans la gestion des entreprises ainsi que la mutation de l'emploi et des formes d'emploi (tra vail autonome, teIetravail, travail atypique). Aux fins de ce chapitre, nous mettons l'accent sur un certain nombre d'effets sur la GRH que nous croyons importants. Le chapitre 16 viendra completer ce portrait en presentant egale ment un certain nombre de tendances relatives a la fonction «ressources humaines». Mais avant d'aborder les implications pour la GRH, precisons que chaque milieu de travail, chaque organisation se comportera differemment face aux transformations de l'environnement. La theorie de la contingence nous enseigne que la GRH est non pas un modele prescrit, mais plutot un en semble de choix et de decisions qui correspondent au tissu unique de chaque organisation. Par exemple, un meme environnement en evolution dans Ie commerce de detail en alimentation entrainera des reponses bien differentes dans des organisations comme Provigo, Metro ou IGA. n en va de meme pour Ies firmes CGI, DMR et EDS dans Ie secteur des services-conseils en technolo gie de l'information. La specificite des milieux de travail plaide en faveur du caractere nevraI gique des choix straH!giques, lies bien entendu au processus de gestion strategique et aux qualites de strateges des dirigeants d'entreprise. Comment se fait-il que Ie Cirque du SoieH ait reussi a reinventer l'art et l'industrie du cirque? Comment se fait-il qu'une entreprise de haute technologie, sur un marche en pleine croissance, soit obligee de declarer famite ? Les signaux de l'environnement ne sont-ils pas les memes pour tout Ie monde? Bien que la GRH soit strategique et contingente, certaines grandes ten dances se degagent relativement it l'evolution de ce champ d'etude et de pra tique professionnelle. Ces grandes tendances gravitent autour des effets de l'evolution de l'environnement et de la gestion des organisations en general. Voici quelques-unes des implications de la transformation de l'environ nement pour 1a gestion des ressources humaines.
La res-ponsabilisation des -personnes Une des tendances lourdes que I'on a observees au cours des deux dernieres decennies est la transformation de l'organisation du travail, qui fait une place preponderante a l'autonomie et a la responsabilisation des personnes et des
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
collectifs de travail. Apres la periode des annees 1980 marquee par l'implan tation des demarches de gestion de la qualite totale, qui ont engendre les groupes d'amelioration continue (Ies cercles de qualite, les groupes de progres, etc.), on a ete temoin, ces dernieres annees, du retour en force des equipes de projets et des groupes semi-autonomes, egalement appeles «equipes de travail autogerees }}. Ces collectifs de travail, dont chacun des membres est plus responsable, a plus de pouvoir et est mieux forme et informe, disposent d'une marge de manreuvre importante afin d'atteindre des objectifs preetablis. Cette responsabilisation accrue des membres de I'organisation fait que 1'0n a besoin de moins de gestionnaires, ces derniers jouant un role tres different qUi s'apparente souvent au travail d'un coach ou d'un animateur, par opposition a celui d'un chef traditionnel. Dans les annees 1970, Ia responsabilisation prenait Ia forme de la gestion participative, de l'enrichissement des taches et de la qualite de la vie au travail. Ces pratiques d'organisation etaient associees davantage a des experiences sociales. Dans les annees 1990 et 2000, la reorganisation du travail est marquee par Ie determinisme economique; autrement dit, c'est souvent par obligation plutot que par choix que les decideurs reexaminent leur pouvoir et Facces a !'information dans l'organisation. La nouvelle economie, I'evolution des valeurs et les changements technologiques non seulement rendent possible la respon sabilisation, mais contraignent egalement les organisations a la favoriser. La flexibilite
Un environnement plus ouvert, plus instable et plus imprevisible a pour effet que les organisations ont besoin de s'adapter, de reagir et d'agir avec plus de rapidite et d'efficacite. La mondialisation, Ie sur-mesure de masse, la reduction du cycle de vie des produits et des technologies, la mise a jour des savoirs ainsi que Ie respect de la diversite culturelle sont quelques-uns des parametres de l'emironnement des organisations qui les obligent a reagir promptement et de fa\=on specifique. Les modeles de gestion mis au point au cours des dernieres decennies ayant davantage favorise la rigidite et la bureaucratie, nollS devons aujourd'hui relever Ie deti de la transformation des organisations par la trans formation de la GRH afin de rendre les lieux de travail plus flexibles. Comme Ie souligne Jean-Yves Le Louarn (1990), la flexibilite peut etre numerique ou fonctionnelle. La flexibilite numerique repose sur la variabilite du temps de travail des employes en place ou sur Ie recours a une force de tra vail d'appoint qui varie en fonction des besoins de main-d'reuvre. La gestion des heures supplementaires, Ie partage du temps de travail de meme que Ie recours aux mises a pied, au rappel, aux contrats a duree determinee et aux
employes occasionnels sont des exemples de flexibilite numerique. Quant a Ia
flexibilite fonctionnelle, eIle s'appuie sur la mobilite et la polyvalence des employes de l'organisation afin de faciliter Ie deploiement des ressources au lieu et au moment ou l'organisation en a besoin. Cette strategie de la flexibi lite exige une transformation majeure de l'organisation du travail et, par Ie fait meme, la mise en place de pratiques innovatrices sur Ies plans de la for mation continue, de la mobilite (l'affectation), de la classification, de Ia
Chapitre 2
I S'adapter a un nouvel environnement
remuneration et des communications. La flexibilite fonctionnelle peut egale ment consister deleguer Ie travail au confier une partie de celui-ei a des personnes .it l'exterieur de I'entreprise ou a d'autres entreprises. I1 s'agit iei de la sous-traitance ou, dans Ie cas du secteur public, de Ia privatisation. Le tra vail a forfait, Ie travail independant ou autonome a domicile, l'impartition, l'essaimage (intrapreneurship) et meme l'entreprise-reseau (Ie maillage) a cer tains egards constituent des exemples de flexibilite fonctionnelle externe.
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La flexibilite trouve egalement un echo dans les pratiques liees 3 la re muneration. En effet, Ie rythme accelere de l'implantation des formes non traditionneUes de remuneration est un indice du fait que, pour affronter un nouvel environnement, les organisations ont recours 3 des formes flexibles de remuneration, comme la participation aux benefices, les primes, l'acces a la propriete de l'entreprise ou la remuneration des equipes ou des groupes de tra vail. La gestion strategique de Ia remuneration peut meme etre au centre d'une strategie de GRH a haut rendement (high performance work systems); ceia depend du contexte dans Iequel eUe est implantee et des conditions qUi l'appuient (Kalleberg et autres, 2000).
La formation qualifiante et continue Dans Ie contexte d'une evolution constante que nous venons de decrire, la formation et Ie developpement des competences s'avereront sans aucun doute un levier fondamental, pour ne pas dire une arme strategique de premier ordre, pour prosperer dans la nouvelle economie. Les organisations d'un secteur ou d'une region sont appelees a jouer un role plus actif dans la mise sur pied d'activites de developpement des ressources humaines. l:employe aussi aura de plus en plus la responsabilite d'assurer sans cesse la qualite de son expertise et de suivre l'evolu tion de son «metier». Cette tendance est liee directement a l'explication que nollS venons de donner au sujet de Ia respon sabilisation. Le developpement de l'employabilite et I'autoformation signi fient que Ie developpement est d'abord et avant tout I'affaire de l'employe et que Ie marche du travail qui se profile 3 I'horizon, et qui est influence par l'economie de l'information, sera caracterise par une culture de la formation et de l'apprentissage. Cette culture de Ia formation qualifiante repose sur l'action d'« apprendre a apprendre", c'esHl-dire sur des processus d'appren tissage consistant dans l'habilete a se servir de boucles de retroaction conti nues pour se developper, et non uniquement sur la diffusion traditio nnelIe (3 sens unique) de connaissances. Des politiques de l'Etat exigeant un investisse ment dans la formation correspondant 3 1 % de la masse saiariale par entre prise de meme que Ia popularite de I'approche par Ies competences sont des signaux que l'environnement des organisations exerce une pression tres forte sur Ie developpement d'une culture de la formation dans la societe et les organisations. Les organisations qui en font leur credo se van tent meme d'etre des organisations «apprenantes;). De plus, dans Ie contexte de la gestion de la diversite de la main-d'ceuvre et surtout de la transition de la generation des baby-boomers qui quittent Ie marche du travail a la generation Y qUi entre sur Ie marche du travail, les
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
dirigeants doivent relever Ie defi du transfert des connaissances. En effet les savoirs tacites et Ie capital de competences accumuU~s durant des decen~ies par Ie fruit d~ I'experience doivent etre davantage systematises par des pro cessus de gestlon de connaissances et transferes aux nouvelles recrues sur Ie marche du travail.
La diversite Au sens etroit, Ia diversite est associee aux programmes d'acces a l'egalite ou d'equite qui con cement Ies groupes cibles, a savoir les femmes, Ies autoch tones, Ies minorites visibles et les personnes handicapees. Au sens large, la diversite touche davantage a I'heterogeneite de la main-d'reuvre, ce qUi com prend, en plus des groupes deja cites, la mixite de la main-d'reuvre au point de vue de l'age (les jeunes et Ies personnes plus agees) et de Ia repartition geographique (les regions versus Ie centre). Par extension, on pourrait meme inclure dans fa gestion de Ia diversite Ia gestion a l'echelle intemationale. Comme nous I'avons vu a propos des divers aspects de I'environnement, Ie portrait de la main-d'reuvre et du marche du travail evolue rapidement. On ne peut plus se contenter de faire de la gestion dans Ie contexte de l'homo geneite des ressources, il faut desormais englober Ie contexte de la diversite. Les effets de la diversite sur les organisations peuvent etre a la fOis nega tifs et positifs. D'une part, la diversite peut etre une source d'insatisfaction, de conflits et de demobilisation. D'autre part, elle per met de dynamiser Ie milieu de travail et de Ie rendre plus creatif et plus souple face aux transformations socioeconomiques qui se produisent. n s'agit donc de gerer Ia diver site cul turelle en vue d'en tirer profit et de faire progresser l'organisation. En matiere de diversite, les niveaux d'intervention sont associes aux indi vidus, aux equipes et a l'organisation. Au niveau des individus, les organisa tions doivent combattre les prejuges et les stereotypes, principalement Iors du recrutement et de la selection. Au niveau des equipes, de nombreuses recher ches ont clemontre que les equipes heterogenes ou mixtes (associees a la diver site) sont moins performantes en ce qUi a trait a l'efficacite et a l'efficience (manque de cohesion, tensions, conflits). Par c~ntre, ces equipes sont plus performantes en ce qui concerne la resolution de problemes, l'innovation et la creativite (Ho, 1997; Chicha, 2002). Finalement, au niveau de l'organisa tion, la gestion de la diversite stimule les dirigeants it innover quant aux pra tiques de dotation, de mobilite et de formation. II faut s'assurer d'eliminer les biais discriminatoires (souvent involontaires) dans les processus de prise de clecision et dans Ies outils de gestion (par exemple Ia croyance selon Iaquelle Ies immigrants reussissent moins bien dans Ies tests d'embauche que Ies Quebecois de souche). De plus, Ies dirigeants doivent acquerir une culture axee sur l'integration et la valorisation des differences et du piuraJisme, par opposition a une culture centree sur l'evitement ou l'assimilation pure et simple (Audet, Fradette et Ramzi, 2002).
Chapitre 2
I
5'adapter a un nouvel environnement
Le partenariat lieu de {aire en opposition constitue un mot d'ordre dans une multitude d'entreprises quebecoises. Cette tendance n'est pas l'apanage des milieux de travail decentralises, car on observe les symboles du partena riat a la fois au niveau national (Commission des partenaires du marche du travail, Commission de la sante et de la securite du travail, Conseil consultatif du travail et de la main-d'(X'uvre) et au niveau sectoriel, comme en fait foi la vingtaine de comites sectoriels de main-d'(X'uvre recenses par Emploi-Quebec (Charest, 1998). Plus souvent par obligation que par choix, les parties ont appris as'apprivoiser et a porter un regard different sur les revendications tra ditionnelles, bien au-dela de la conception legale et conflictuelle des rapports de travail. Le modele renouvele des relations du travail (Weiss, 2000) et Ie partenariat constituent les approches privilegiees pour reIever des defis tels que la stabilisation de l'emploi, l'implantation d'innovations organisation nelles, la flexihilite et la reorganisation du travail (Belanger, Lapointe et Levesque, 2002). L'approche de la negociation passe de l'affrontement et du rapport de force traditionnel au diagnostic et a la solution raisonnes des pro blemes de fond, tout en reconnaissant la legitimite des interets de l'autre par tie. La popularite du partenariat patronal-syndical s'est cependant effritee au cours des dernieres annees. Des conflits comme ceux qui ont eu lieu chez Bell Canada (parmi les telephonistes et les techniciens de l'Ontario et du Quebec), Videotron, Bombardier Aeronautique et Alcan, de meme que les annonces de fermeture des usines de General Motors a Boisbriand, de Noranda a MurdochviUe, et d'Inglis a Montmagny, par exemple, ont refroidi quelque peu ]'ardeur des syndicats. S'en est suivi Ie constat que ce modele cooperatif de relations du travail est pertinent, mais seulement dans certains contextes ou un ensemble de conditions de succes doivent etre reunies (Weiss, 2000).
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La conciliation travail-famine La problematique de l'equilibre emploi-famille (ou travail-famille) a suscite l'interet de nombre de chercheurs, de praticiens et meme de politiciens au cours des dernieres annees, car les caracthistiques des emplois de la nouvelle economie ne sont pas necessairement compatibles avec les nouvelles consi derations familiales (couples a deux carrieres, familles reconstituees, fami1les monoparentales, rapports parents-enfants, etc.). Au debut des annees 2000, on a assiste a la mise sur pied d'un ensemble de mesures l€~gislatives, de pro grammes gouvernementaux et de pratiques organisationnelles favorisant une meilleure qualite de la vie pour les travailleurs et leur jeune famille (Conseil consultatif du travail et de la main-d'(X'uvre, 2002; Conseil de la famille et de l'enfance, 2003; Guerin et autres, 1997). Les forces vives de la societe quebecoise ont recemment lance Ie cone ours «ISO familles 5 >', qui vise a reconnaltre, a valoriser et a diffuser les initiatives S. «ISO familles» est une initiative concertee du Conseil du statut de Ja femme, du Conseil de la famille et de l'enfance, du Conseil consuItatif du travail et de la main-d'ceuvre, du ministere du Travail ainsi que du ministere de la Famille et de I'Enfance.
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Partie I
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Les defis du renouvellement
des organisations quebecoises grandes et petites face it ce defi. La Societe cana dienne des postes, l'Universite Concordia, Novotel, Teraxion, Bristol-Myers Squibb et la Regie des rentes du Quebec sont parmi les organisations les plus connues qui ont He primees en 2002 en raison de leur volonte it innover en matiere d'organisation du travail, d'amenagement du temps de travail et de services offerts aux employes.
La sante et les nouve11es pathologies liees au travail La conjonction des facteurs de l'environnement exerce egalement une pres sion import ante sur la sante des travailleurs. Dans de nombreux cas, l'employe investit beaucoup d'energie dans son travail au detriment de sa vie personnelle, tout en en retirant moins de satisfaction. Cet etat se traduit sou vent par de la detresse psychologique, de l'epuisement professionnel et des problemes de sante mentale, lesquels affectent de plus en plus de personnes de venues incapables d'affronter Ie stress occasionne par la surcharge de tra vail, la surresponsabilisation et la pression visant it augmenter Ie rendement. Des recherches effectuees ces dernieres annees indiquent que la cause premiere des absences relatives it l'invalidite amoyen et it long terme est la detresse psy choIogique au travail. Au Canada, on estime que Ie poids financier des pro blemes de sante mentale represente entre 13 et 14 milliards de dollars, dont 8 a 10 milliards engendres par les absences, mais cette charge pourrait atteindre 20 milliards de dollars par annee, dont 4 milliards au Quebec (Vinet, Bourbonnais et Brisson, 2003). En plus des problemes grandissants rattaches it la sante mentale, mentionnons que l'arrivee de nouvelles technologies et la preSSion exercee sur les employes pour qu'ils ameliorent leur rendement ont eu pour effet de multiplier les problemes dits muscuio-squelettiques, c'est a-dire les nombreuses maladies associees entre autres a l'ordinateur (tunnel carpien, tendinite, bursite, arthrose, problemes visuels, etc.).
Conclusion L'environnement des organisations, qUi est en constante mutation, exerce des pressions de toutes sortes sur l'etablissement de la mission de l'entreprise, de ses strategies, de sa structure et des pratiques de GRH. Le marche du travail et la notion meme d'entreprise ont evolue it un point tel que l'on assiste actuellement it une profonde remise en question de l'ensemble de la gestion des fonctions de l'organisation et du role des gestionnaires. Face aux change ments economiques, technologiques, demographiques, sociaux et politiques, les acteurs de l'organisation doivent eIaborer de nouvelles fac;ons de faire et de penser afin d'adapter les parametres de l'organisation a ce nouvel en vironnement. Ils se doivent egalement d'agir sur cet environnement. Bien que les organisations soient soumises it un meme environnement, on observe des comportements et des reactions qui divergent totalement sur les plans strategique et operationnel. Cela s'expJique par un certain nombre de variables contextuelles, comme la culture d'entreprise, la personna lite des dirigeants ou encore la dynamique du pouvoir entre les groupes d'interets, qui rendent les choix strategiques uniques.
Chapitre 2
I S'adapter a un nouvel environnement
On constate un certain nombre d'effets sur I'emploi et sur les pratiques de gestion. Ces effets, a leur tour, ont des repercussions systemiques sur la GRH, a savoir la responsabilisation des employes, la flexibilite, la formation quali fiante et continue, la diversite, Ie partenariat, la conciliation travail-famille ainsi que la sante au travail. II s'agit d'autant de defis que doit relever la GRH, car cette nouvelle situation donne Ie signal du renouvellement de ce champ d'etude et d'intervention.
de revision
o eIles Pourquoi les organisations doivent s'adapter a un environnement en mutation?
8 La
GRH peut-elle influencer l'en vironnement? Si oui, de queUes fa~ons ?
• En quoi l'arrivee de la generation Y sur Ie marche du travail changera t-elle la gestion des ressources humaines?
o QueIs sont les grands defis du vieil lissement de la population et de la diver site culturelle quant a leurs effets sur Ie marche du travail et sur la GRI-I?
e Pourquoi les organisations qui pre sentent des caracteristiques sembla bles quant aux produits, au marche et a la technologie ont-elles des reponses differentes face au meme environnement?
o QueUes
sont les caracteristiques d'une economie nouvelle, imma terielle et globale, et quels sont ses effets sur la GRH?
" Qu'est-ce qui caracterise Ie nouveau paradigme technologique dans les organisations?
o tuent En quoi la revolution que consti les nouvelles technologies de I'information et de la communica tion influence-t-elle la GRH?
o En quoi la transformation du rOle des Etats modernes influencera t-eIle les strategies et les pratiques de GRH?
4IV
De quelle maniere la transformation de l'environnement aura-t-elle un impact majeur sur }'emploi et les pratiques de gestion dans les organisations?
(D Quelles sont Ies implications de la transformation en ce qui a trait aux detis qui se posent a la gestion des ressources humaines?
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Partie I
I
les defis du renouvellement
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Chapitre 2 \ S'adapter 11 un nouvel environnement
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DUPUIS, J.-P. et A. KUZMINSKY (1998).
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Sociologie de l'economie, du travail et de
Exploring Trends in Employment Relations
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Partie I
I Les defis du renouvellement
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Chapitre 2
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I 5'adapter a un nouvel environnement
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Partie I
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Les defis du renouvellement
L'hopital du Beau-Fleuve est malade
L'
h6pital du Beau-Fleuve est situe en banlieue d'un grand centre urbain. II est considere comme un centre hospitalier complet, offrant a peu pres toutes les specialites medicales, et il compte pres de 1000 employes. Certaines specialites attirent meme des patients issus de toutes les regions du Quebec. Le centre hospitalier fonctionne egalement en re seau, que ce soit officiellement ou offi cieusement, avec des cliniques privees operant sur Ie territoire, avec les trois CLSC et avec les cinq centres hospita liers de soins de longue duree de la region. Plusieurs membres du personnel sont appeles a se deplacer souvent sur Ie territoire, ce qui en indispose plus d'un. Les caracteristiques demographiques de la region sont telles que Ies adminis trateurs du centre hospitalier font face a une clientele plus agee qui presente des problematiques de sante de plus en plus complexes. Les urgences debordent regu lierement, les listes d'attente ne cessent de s'allonger et Ie deficit s'accroit mal gre l'interdiction formulee en ce sens par une loi antideficit. Pres de 30% du personnel infirmier sera admissible a la retraite d'ici 3 ans et la majorite de ces employes revent de ce moment, car ils n'en peuvent plus de travailler conti nuellement sous pression dans un contexte marque par Ie manque de ressources. L'ombudsman de l'h6pital vient egalement de deposer un rapport. Le nombre de plaintes des citoyens
(patients et familIes) augmente chaque semaine, ce qui ne fait nullement sour ciller les syndicats ni la direction de l'etablissement. C'est comme si tout Ie monde avait abdique. Devant ces
Signaux alarmants, Ie comite de direc tion a mis sur pied un groupe de travail afin de documenter la situation et de faire Ie tour des problemes. Voici Ie constat que ce groupe veut communi quer aux gestionnaires et aux represen tants des employes. Les professionneis de la sante, Ies medecins et Ie personnel infirmier pre sentent un taux de roulement eleve. L'h6pital a un probleme d'attraction et de conservation du personnel. La poli tique salariale, qui depend fortement des regles provinciales (conventions collectives, politiques en matiere de ressources humaines, etc.), n'a pas ete modifiee depuis de nombreuses annees. La charge de travail est tellement lourde que Ie personnel soignant n'ar rive plus a trouver du temps pour recevoir une formation. Resultat: les methodes de travail ne correspondent plus aux besoins des cas a traiter, les in terventions cliniques prennent encore plus de temps et les erreurs profession nelles s'accumulent. Les recrues qui entrent a l'h6pital sont insatisfaites des conditions de tra vail. Ces employes se plaignent de la lourdeur des formalites administratives, des longues heures de travail, des affec tations difficiles (sur appel, de nuit, etc.), Us considerent egalement qu'ils n'ont pas la possibilite de tirer profit rapidement de leur experience de travail car la gestion des carrieres est plut6t anarchique. Plusieurs parlent d'une ges tion des ressources humaines improvisee.
Chapitre 2
Malgre la difficulte a recruter du per sonnel infirmier et medical, de nom breux candidats tres competents se sont vu fermer Ia porte recemment car ce sont de nouveaux immigrants et ils ne sont pas membres en regIe des differents ordres professionnels qUi encadrent les professions medicales. lIs se resignent donc a travailler a la buanderie et a la cuisine. L'hopital du Beau-FIeuve a acquis toute la technologie necessaire au de ploiement de la teIesante. Ces appareils permettent de faire l'analyse de radio graphies a distance, de questionner des patients et de recueillir des donnees importantes servant a etablir des dia gnostics. Cette infrastructure techno logique est utilisee a peine a 25 % de sa capacite car elle tombe souvent en panne a cause de la negligence du per sonnellors de sa manipulation. De plus, seule une minorite d'employes se sont montres interesses par ce type de travail. Plusieurs soulignent que la technologie deshumanise les soins et leur fait courir des risques sur Ie plan des tautes profes sionnelles. Pendant ce temps, des cen taines de patients doivent parcourir de longues distances pour aIler se taire soigner ailleurs, d'autres figurent depuis longtemps sur des listes d'attente, d'au tres encore passent des heures inter minables aux urgences ou dans les corridors des cliniques externes. Un membre du conseil d'adminis tration de l'hopital du Beau-Fleuve
I S'adapter 11 un nouvel environnement
travaille au cegep de la region. II remar que que Ie nombre d'etudiants qui termi nent leur formation est insuffisant et que Ie type de formation est trop general eu egard aux besoins de l'hopi tal. En outre, les diplomes s'abstiennent de postuler a ce centre hospitalier car sa reputation de mauvais employeur Ie precede. Les couts lies a l'absenteisme de moyenne et de longue duree montent en fleche. Le programme d'aide aux employes est Ie programme Ie plus po pulaire de l'etablissement. Par ailleurs, on observe que 70 % des employes qui ont une episode d'absences rechutent moins de 30 jours suivant leur retour au travail.
o Quels sont les facteurs de l'environ nement qui exercent une pression sur l'hopital du Beau-Fleuve en ma tiere de transformation de la gestion des ressources humaines? Commen tez ces facteurs.
8 Quels detis en matiere de ressources humaines ce centre hospitalier doit il relever?
• Demontrez en quoi certaines prati ques de GRH pourraient aider l'orga nisation a mieux s'adapter a son environnement.
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Apres l'Hude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Preciser en quoi la planification des ressources humaines contribue a l'adaptation des organisations a l'evolution de leur environnement. • Com prendre l'importance de tenir compte de Ia fonction «ressources humaines » aux etapes de la formulation et de l'implantation d'une strategie d'affaires. • Etablir des liens entre les strategies d'affaires et les activites de GRH. • Analyser la situation d'une entreprise a I'aide des modeles de planification strategique et de planification operationnelle des ressources humaines. • Determiner des interventions appropriees dans des situations de penurie ou de surplus de main-d'a'uvre.
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
Les institutions financieres pensent a1a re1eve1 Pendant un bon moment, les institutions finanderes ont puise dans leurs propres effectifs pour combler leurs postes vacants. Le personnel qui occupait des emplois de nature transactionnelle a ete appeIe a remplir un role-conseil. Aujourd'hui, elles doivent preparer la releve. « Les baby-boomers qui vont partir libereront des postes, dont plusieurs sont strategiques. Et en matiere de recrutement, notre planification dolt se faire a long terme », souligne Jean Brunet, vice president aux ressources humaines a la Federation des caisses Desjardins. Louise Desjardins, directrice principale du Service de dotation et recrutement de la Banque Nationale, partage cette evalua tion. « II va y avoir de nombreux departs, il faut mettre en place des strategies pour preparer la releve. » Sang neuf et formation
Les institutions finanderes font davantage sentir leur presence sur les campus univer sitaires et meme collegiaux, en particulier aupres des diplOmes en administration et en finance. « Pour certains postes, notre strategie est de recruter du sang neuf, des personnes qui prendront de l'experience chez nous ou suivront des formations d'appoint pour eventuellement acceder a des postes plus specialises », indique M. Brunet. Desjardins vient aussi d'ameliorer la section offre d'emplois de son site Internet, integree a l'ensemble des besoins du A10uvement Desjardins. Elle permet desor mais a l'internaute d'y soumettre une can didature en Ugne et, si desire, d'etre informe
automatiquement par cmmiel de toute nOl/ velie offre d'emploi. Pour sa part, la Banque de Montreal
mise notamment sur son Academie, un centre de formation pour Ies employes mis sur pied en 1994. Elle souhaite ainsi favoriser Ie recrutement a J'interne. « Nous cholsissons des gens au sein meme de ['organisation et leur donnons la possibilite de parfaire leurs connals sances», note Neil Conway, premier vice president, Gestion des competences, chez BMa Groupe financier. Personnel d'experience
La recherche de main-d'a:uvre qualifiee avec experience rend Ie recrutement plus diffidle. «II y a une rarete de candidats, it faut generalement regarder du cote des concurrents pour trouver les bonnes per sonnes », note ~fne Desjardins. Les planificateurs financiers se retrOl/ vent toujollrs parmi les personnes les plus recherchees. « NOllS en avons besoin a cause dll taux de rolliement, mais il n'y a pas necessairement de creation de nouveaux postes », note M"le Desjardins. Les conseillers sont auss! en demande. «La moWe des gens que nous engageons travaillent aupres de la clientele, comme conseillers en placement ou conseillers hypothecaires », note M. Conway. Ma/gre une plus grande informatisation des tran sactions courantes, que ce soU par guichet automatique, par Internet ou par telephone, Ies institutions finanderes ont toujours besoin de «representants au service a la clientele », c'est-a-dire des caissiers ou des caissieres. « Un grand nombre de ces postes
1. P. Theroux, "Les institutions financieres pensent 11 la releve », Les Affaires, 15 mars 2003, p. A2.
I
Chapitre 3
ont ete transfonnes en emplois a temps partiel, ce qui engendre des difficultes de recrutement », dit M. Brunet. Financement
Dans Ie domaine du financement des entreprises, les problemes de vieillissement et de taux de roulement du personnel sont frequents. Chez Desjardins, dont la reorganisation a amene la creation d'une soixantaine de centres financiers aux entreprises, «nom ne prevoyons pas de penurie de directeurs de compte, mais it y aura des postes apourvoir au niveau senior », souJigne M. Brunet. Meme son de cloche a la Banque Nationale. «II est difficile de trouver des directeurs de compte experimentes. Pour combler nos besoins et assurer une releve, nous avons cree une structure qUi favorise l'embauche de candidats junior », dit M"le Desjardins. La gestion des risques est un autre « domaine de plus en plus complexe qui ne cessite des besoins de main-d'reuvre haute ment specialisee », affinne M. Conway. Les centres d'appels, egalement aux prises avec un taux de roulement eleve, recherchent aussi du personnel.
I
Donner une orientation et de la coherence
a la GRH
Enfin, outre les reseaux de caisses et de succursales, Ies sieges sociaux des institu tions financieres ont aussi des besoins a combler, actuellement et dans l'avenir. «Nous sommes regulierement a la recherche de personnel dans Ie domaine des ressources humaines et du marketing, entre autres », dit M"le Desjardins.
o Les institutions
financi{~res pensent la reI eve parce que les baby boomers sont sur Ie point de prendre leur retraite, ce qui liberera des postes. Quels autres facteurs peuvent inciter les institutions financieres a se preoccuper de la releve?
a
• Croyez-vous que l'amelioration de la section ofire d'emplois de son site Internet aidera Ie Mouvement Desjardins a recruter de nouveaux employes qUi pourront assurer la releve? Pourquoi?
o A votre aVis,
pourquoi Ie taux de roulement est-il si eleve dans les centres d'appels?
La mise en situation du debut de ce chapitre illustre de queUe fa~on un envi ronnement en perpetuelle evolution impose une gestion previsionnelle des ressources humaines. De toute eVidence, plusieurs facteurs influencent la disponibilite des emplois et du personnel dans les institutions financieres. Pensons au depart pour la retraite, au repositionnement des strategies d'affaires, etc. Pour s'adapter a ces changements, les institutions financieres revisent leurs activites de GRH et favorisent Ie recrutement a l'externe, parfois chez leurs concurrents, Ie recrutement a l'interne et Ie developpement de carriere, la preparation de la releve ainsi que la formation d'appoint.
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
Le present chapitre vise a decrire Ie processus de planification des res sources permettant aux dirigeants des organisations de prevoir l'evolution de leur environnement et de mieux s'y adapter. Dans sa forme la plus simple, la planification des ressources humaines represente un processus d'adaptation de l'entreprise a son environnement (voir Ie chapitre 2). Les nouvelles condi tions de l'environnement font nai'tre des defis lies aux ressources humaines autant d'appels a l'action auxquels les gestionnaires apportent des reponses. Notons, par exemple, Ie defi du vieillissement de la population qui se traduit en milieu de travail par des inquietudes quant a la rei eve. Notons que l'on peut gerer les ressources humaines selon une approche plus ou moins previsionnelle ou planifiee. A un extreme, au sein de certaines organisations, on procede a des decisions de GRH de derniere minute (et parfois trop tard!) en reaction a un changement dans l'environnement et pour resoudre une crise. A l'autre extreme, la fonction « ressources humaines}) peut apprecier l'evolution des tendances passees et actuelles, prevoir leurs consequences futures et prendre les mesures qUi s'imposent pour eviter cer tains dangers pour la navigation. Dans ce chapitre, nollS verrons comment la direction d'une entreprise peut adherer a une approche previsionnelle qui donne une orientation et de la coherence a ses actions en matiere de GRH. II sera question de la planification strategique et operationnelle des ressources humaines. De fa~on generale, la planification des res sources humaines s'interesse aux consequences futures des tendances avec comme finalite un plan comprenant les objectifs a atteindre et les moyens lies aux ressources humaines qui per mettront d'atteindre ces objectifs. Plus precisement, la planification des ressources humaines vise a eviter a l'entreprise des situations de surplus ou de penurie de main-d'reuvre tant de nature quantitative que de nature
Chapitre 3
I Donner une orientation et de la coherence a la GRH
qualitative. Autrement dit, l'objectif de la planification des ressources humaines est de s'assurer que l'entreprise dispose d'un nombre suffisant de personnes qualifiees et motivees au bon endroit et au bon moment. Ayant comme point de depart l'analyse des changements (voir Ie chapitre 2), la planification des ressources humaines s'appuie sur des techniques prevision nelles pour estimer l'ampleur des desequilibres en matiere d'effectifs et de competences et, finalement, pour prendre les mesures qui s'imposent. Comme nous Ie venons plus loin, la planification strategique des res sources humaines consiste en une integration de la planification des ressources humaines a la planification strategique de l'entreprise. I}objet de la planification operationnelle des ressources humaines est I'harmonisation de la demande de travail (les emplois) avec l'offre de travail (les employes).
_
.p.~,:,!~~~~ p.l~~i.f~~!.1~.5. ~~~~~~T.C.~5. ~.~~~~~~~.~ La planification des ressources humaines est importante pour plusieurs rai sons. Elle permet aux intervenants dans Ie domaine des ressources humaines de faire des choix eclaires, d'aider l'organisation a s'adapter aux changements environnementaux, de contribuer a l'ameIioration du service a la clientele, d'eviter les surplus et les penuries de main-d'ceuvre et de favoriser Ie deve loppement des ressources humaines.
3.1.1 Faire des choix eclaires en matiere de GRH Le processus de planification des ressources humaines debouche souvent sur des mesures telles que des mises a pied, l'embauche d'employes, la revision des structures salariales, l'octroi de formations, l'adoption de programmes d'equite dans l'emploi, les mises a la retraite et meme l'instauration de ser vices de garde d'enfants en milieu de travail. Ces mesures administratives transforment Ie milieu de travail. On peut penser a l'emergence de la gestion participative et de l'organisation flexible et apprenante ainsi qu'aux nouvelles formes d'amenagement du temps de travail comme l'horaire flexible, Ie tra vail atemps partie I, Ie travail partage et la reduction de la semaine de travail. On observe egalement depuis quelques annees Ia presence accrue d'une main d'ceuvre «peripherique» ou precaire, qui ne beneficie pas des memes avan tages sociaux ou de la meme securite d'emploi que les employes reguliers de l'organisation. Mentionnons aussi les programmes de retraite anticipee qui incitent les personnes ayant une vaste experience professionnelle a quitter l'organisation, ce qUi contribue a modifier Ie milieu de travail. Le choix d'une mesure administrative plutot que d'une autre ne doit pas etre Ie fruit du hasard ou d'une mode, mais bien Ie resultat d'une rHlexion eclairee sur l'avenir de l'entreprise et de ses ressources humaines.
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Partie I
I
Les detis du renouvellement
3.1.2 Aider l'organisation environnementaux
a s'adapter aux changements
Les entrep:ises qui s~rvivent lisent les tendances plus vite et mieux que les autres. Mals la questIOn se pose: comment planifier les ressources humaines dans un environnement qUi exige Ie plus souvent une adaptation rapide a des situations urgentes? Et comment n~~aliser des analyses previsionneUes alors que, comme nous l'avons vu dans Ie chapitre precedent, Ie passe est de moins en moins garant de Favenir? Pour s'adapter aux changements qui se derou lent a Ia vitesse de l'eclair, l'entreprise doit s'appuyer sur un processus de pIa nification des ressources humaines simple, pratique, centre sur l'action, appuye sur la consultation des cadres et portant sur un horizon moins lointain (Ulrich, 1986; Walker, 1990). Ainsi, la planification des ressources humaines doit tendre davantage a une approche de resolution de problc~mes visant a ameliorer la position concurrentielle de l'organisation. La priorite consiste de plus en plus a mobiliser les ressources hUmaines autour d'un nombre restreint d'enjeux prioritaires pour I'organisation.Par exemple, si l'enjeu prioritaire est !'implantation d'un systeme de gestion integre, ou ERP, il faudra preciser les eXigences de ce systeme sur Ie plan des ressources humaines et modifier un bon nombre de systemes de GRH pour assurer Ia reussite de sa mise en ~uvre.
3.1.3 Ameliorer le service
ala clientele
Imaginons Ie cas d'une entreprise qui offre des solutiO~S informati~~es dans un secteur de pointe. Son succes repose en grande partIe sur la 9uahte de son equipe de direction ainsi que sur l'a?equation ~ntre l~~ com~etences de ~es programmeurs et Ies besoins de ses clIents. En SUlvant I evolutIOn des b,esoms de ses clients, la direction de cette entreprise peut s'assurer qu'elle possede les
Chapitre 3
I
Donner une orientation et de la coherence 11 la GRH
competences requises pour y repondre adequatement et rapidement. Si elle cons tate un ecart entre les competences actuelles de ses programmeurs et l'evolution des besoins de ses clients, elle peut mettre en ceuvre des initiatives ayant trait a la formation ou au recrutement qui lui garantiront les compe tences necessaires ala realisation de sa mission. La planification des ressources humaines ameliore ainsi la correspondance entre l'entreprise, ses ressources humaines et les besoins de ses clients.
3.1.4 Eviter les surplus et les penuries de main-d'ceuvre La planification des ressources humaines permet d'eviter les situations de sur plus ou de penurie qualitatifs et quantitatifs de main-d'ceuvre, deux situations qui comportent des consequences financieres pour l'organisation. Dans Ie domaine de l'informatique, par exemple, des retards peuvent s'accumuler dans plusieurs projets de developpement, souvent a cause d'une penurie de specialistes. Le cas d'une multinationale qUi construit une usine dans une region ou les competences requises pour faire fonctionner les equipements ne sont pas disponibies illustre aussi les consequences de l'absence de planifica tion des ressources humaines. Mentionnons egalement Ie cas d'une entreprise dans laquelle les equipements sont utilises en de~a de leur pleine capacite parce que Ies employes n'ont pas re~u une formation appropriee. Pour eviter de telles situations, les organisations ont interet a adopter la demarche previ sionnelle que permet la planification des ressources humaines. Aussi, selon l'Institut canadien d'information sur la sante, entre 2003 et 2006, 28 % des effectifs infirmiers pourraient prendre leur retraite au pays. II faudrait donc, dans Ie cadre d'une gestion previsionnelle, mettre au point immediatement des actions qUi permettront de faire face a un tel exode.
3.1.5 Favoriser le developpement des ressources humaines
A plusieurs egards,
la planification des ressources humaines favorise Ie deve loppement des ressources humaines. Elle permet de reperer des occasions de mouvements internes (comme des mutations, des promotions ou de nou velles affectations) qUi aident a preparer la releve au sein de l'organisation. Grace a la planification des ressources humaines, on peut aussi decouvrir des possibilites de carriere pour les femmes et les groupes minoritaires. De meme, elle permet de deceler des occasions d'actualisation des competences. Enfin, Ie spectre de la perte de certains employes qualifies pourrait inciter la direc tion d'une entreprise a revoir ala hausse ses echelles salariales pour conserver les competences requises dans l'organisation.
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La planification strategique des ressources humaines Afin de bien comprendre Ia planification dite strategique des ressources humaines, il importe de saisir la notion de strategie. Hafsi et Toulouse (1996) relevent trois niveaux de strategie:
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Les defis du renouvellement
• A un premier niveau, la strategic directrice, qui Habore Ie portefeuilIe
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d'activites, informe sur les intentions de la direction de l'entreprise de poursuivre une strategie de croissance, une strategie de maintien ou une strategie de retrait, ou de poursuivre simultanement ces strategies. A un deuxieme niveau, la strategie d'affaires dHinit la maniere dont l'en treprise affrontera la concurrence. Dans sa strategie d'affaires, l'entreprise peut miser sur Ie leadership en matiere de couts, sur la differenciation ou sur la concentration. Aun troisieme niveau, la strategie fonctionnelle est presentee comme un moyen de mettre en a:uvre la strategie directrice et la strategie d'affaires.
La figure 3.1 presente un modele de planification strategique des ressources humaines qui s'inscrit dans la planification strategique generale de l'organi sation. UN MODELE DE PLANIFICATION STRATEGIQUE DES RESSOURCES HUMAINES
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I
3.2.1 La formulation de la strategie La formulation de la strategie consiste essentiellement a eIaborer les objectifs de l'organisation et a preciser les moyens qUi permettront d'atteindre ces objectifs. II s'agit d'un processus non lineaire qUi determine l'affectation des ressources de l'organisation. Ce processus encourage la direction a dHinir l'essence meme de ses activites et a concentrer ses efforts sur des cibles clai rement etablies, donc a s'engager dans une voie determinee. Au moment de la formulation de la strategie, la direction se pose des questions telles que celles-ci: • Devrions-nous accentuer la penetration de marche? • Devrions-nous poursuivre la diversification ou plutOt favoriser la consolidation?
Chapitre 3
I Donner une orientation et de la coherence a la GRH
• Notre croissance devrait-elle passer par la mise au point de nouveaux produits? • L'integration verticale est-eUe la meilleure fa~on d'optimiser notre chaine d'approvisionnement? • Le desinvestissement est-il rendu necessaire dans certaines de nos divisions? • Faudrait-il mettre l'accent sur les couts et les economies d'echelle ou plutot sur la qualite ou l'innovation? Les choix strategiques qui decoulent de cette rHlexion determinent evidemment Ie developpement futur de l'organisation. Vne distinction s'impose cependant entre la strategie souhaitable et la strategie realisable (Allaire et Firsirotu, 1984). La strategie souhaitable (ou deliberee) decoule de l'evaluation des facteurs contextuels, des facteurs structurels ainsi que des facteurs internes de l'entreprise. Cette strategie est toutefois soumise a une realite humaine, technique et financiE:re qUi explique parfois certains decalages entre les resultats atteints et les objectifs vises. La strategie realisable (ou actualisee) est Ie produit des mesures prises et des resul tats obtenus plutot que des mesures a prendre et des objectifs vises. Mais pourquoi existe-t-il des decalages entre les mesures prises et les mesures envisagees de meme qU'entre les resultats obtenus et les intentions contenues dans la strategie initiale? Vne reponse plausible pourrait etre que les dirigeants d'entreprise ne s'interessent pas assez, au cours de la formu lation de la strategie, aux facteurs internes, notamment aux ressources humaines. II faut savoir que si la dimension humaine est exclue de la formu lation de la strategie, il sera difficile pour l'organisation de batir son avenir sur les competences qui peuvent la demarquer de la concurrence. Par consequent, afin d'elaborer une strategie realisable, les dirigeants auraient interet a ren forcer les liens entre la planification strategique et Ia planification des res sources humaines.
L'importance de la GRH lors de la formulation de la strategie L'integration de la dimension humaine au processus decisionnel de la formu lation de Ia strategie peut se realiser a trois niveaux d'engagement. A un faible niveau d'engagement, l'alignement a posteriori sert a renforcer la coherence des systemes de GRH en tonction de Ia strategie d'affaires. Les professionnels des ressources humaines agissent alors seion un mode reactit, c'est-a-dire qu'ils sont a la remorque des decisions prises par les dirigeants. La strategie concernant les ressources humaines ne pourra donc qu/etre reactive (Guerin et Wils, 2002).
A un niveau intermediaire d'engagement, l'evaluation simultanee consiste en une validation fonctionnelle de la strategie selon diverses considerations liees aux ressources humaines. Les professionnels des ressources humaines s'engagent ainsi a analyser la faisabilite et la desirabiIite de divers scenarios pendant qu'll est encore possible de modifier Ia strategie. Selon ce mode
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d'integration, la direction des res sources humaines verifie si la strategie est elaboree en fonction des competences distinctives des ressources humaines de l'organisation. Dans un milieu syndique, il s'agit parfois de s'assurer que la convention collective peut s'harmoniser avec la strategie proposee.
A un niveau avance d'engagement, l'influence a priori designe une inte gration complete des considerations humaines au processus decisionnel de la formulation de la strategie. Les professionnels des ressources humaines sont alors dans une situation avantageuse pour orienter la prise de decision et pro poser de nouvelles voies d'action dans Ie cadre d'un investissement dans les capacites des ressources humaines de l'organisation (Guerin et Wils, 2002). Ils participent pleinement au positionnement de l'organisation face a son envi ronnement concurrentiel ainsi quia la determination et a l'evaluation des lignes d'action. Sous un mode d'influence a priori, la direction des ressources humaines informe les autres partenaires de l'equipe de direction sur les forces a exploiter et sur certaines faiblesses qui pourraient nuire a la realisation de la strategie, ou encore sur certaines competences des employes qui peuvent con stituer un atout strategique (Aubret, Gilbert et Pigeyre, 2002). Les professionnels des ressources humaines jouent alors un role de parte naire d'affaires dans Ie developpement et la revitalisation de l'organisation. Ce role exige une gestion par anticipation et une pleine participation aux etapes de l'analyse et de l'evaluation de l'environnement externe (menaces et opportunites), de l'analyse de la situation interne (forces et faiblesses), de la determination des problemes a resoudre et de la formulation de plans d'action (objectifs et moyens). La reussite dans ce role de partenaire d'affaires repose notamment sur une bonne comprehension des rouages de l'organisation ainsi que sur la capacite d'exercer une influence dans un processus {( politi que » de prise de decision. On fera appel au partenaire d'affaires parce qu'on reconnait sa capacite a distinguer les situations conjoncturelles des changements struc turels et a decoder avec finesse Ie sens d'un evenement. Par ailleurs, Ie parte naire d'affaires pretera attention prioritairement a la realisation de resultats plutot qu'aux activites (Ulrich, 1998). Finalement, l'integration des ressources humaines a l'etape de la formula tion de la strategie non seulement ameliore la demarche strategique, mais en facilite la mise en reuvre. En effet, il est parfois plus difficile d'adapter les res sources humaines a la strategie que d'adapter la strategie aux res sources humaines. Les experiences des organisations en matiere de gestion du change ment temoignent de la difficulte a adapter apres coup les res sources humaines a la strategie. Nous examinerons dans la prochaine section de quelle maniere la fonction «ressources humaines» peut contribuer a appuyer les exigences des decisions strategiques majeures de l'organisation.
3.2.2 La mise en reuvre de la strategie Plusieurs organisations eprouvent des difficultes a l'etape de la mise en reuvre de la strategie (Amboise, 1995). Comme l'indique Rock: {( Les bonnes idees et les bons produits courent les rues. Mais une bonne execution et une bonne
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Donner une orientation et de la coherence it la GRH
gestion, en un mot des hommes competents, voila qUi est plus rare» (1988, p. 30). Les «blocages» auxquels font souvent face les organisations a l'etape de la mise en reuvre de la strategie sont parfois Ie produit d'une formulation realisee sans la consultation des personnes qui auront la responsabilite d'im planter la strategie. Toutefois, meme une strategie bien adaptee a la realite humaine de l'organisation peut echouer a l'etape de la mise en reuvre si les systemes de GRH ne favorisent pas l'adoption de comportements correspon dant aux orientations de l'organisation, c'est-a-dire a ses valeurs, a sa vision, a sa mission et a ses objectifs strategiques. A cet egard, comme Ie prevoit Gosselin, «les entreprises qUi vont survivre et gagner dans Ie nouveau con texte economique sont celles qUi sauront optimiser Ia realisation de leur strategie d'affaires, et Ie facteur humain y jouera un role preponderant» (1996, p. 295).
La strategie fonctionnelle de GRH Au meme titre que les autres unites administratives (Ie service du marketing, Ie service des finances, etc.), les professionnels des ressources humaines peuvent elaborer une strategie fonctionnelle appuyant la strategie de l'orga nisation. Seion Bergeron (2001), une strategie fonctionnelle a pour but de soutenir la strategie et d'indiquer comment I'entreprise peut ameIiorer sa competitivite quant a la commercialisation, a la production, aux finances, aux ressources humaines de meme qu'a la recherche et au developpement. On procecte a Ia formulation de la strategie fonctionnelle de GRH en considerant Ies objectifs strategiques de l'organisation, les autres strategies fonctionnelles ainsi que I'environnement externe et l'etat des ressources de l'organisation. Vne fois cette strategie determinee, eUe represente Ie point d'ancrage des diverses activites de GRH. SeIon Bamberger et Meshoulam (2000), la strategie fonctionnelle de GRH peut etre du type engagement, du type agent libre, du type paternaliste ou du type secondaire. Vne strategie d'engagement met l'accent sur l'initiative, la creativite, l'autonomie et la competence. Typiquement, les organisations qUi privilegient une strategie d'engagement favorisent Ie developpement de carriere, la communication interne et Ie travail d'equipe. La strategie d'agent libre mise beaucoup sur la competence, alors que l'engagement des ressources humaines est oriente davantage vers leur profession que vers l'organisation. Cette strategie d'agent libre est liee a une politique de recrutement a l'externe et a une remuneration variable basee sur la contribution individuelle. La strategie paternaliste, quant a eUe, est axee sur Ie controle et recherche une performance stable de la part des res sources humaines. Les avantages sociaux comptent pour beaucoup dans la strategie paternaliste, ou les postes sont defi nis de far;on relativement etroite. Enfin, la strategie secondaire mise peu sur l'initiative et la creativite et beaucoup sur la supervision etroite. Cette stra tegie est souvent liee a I'embauche d'employes temporaires ou a forfait, a des avantages sociaux peu nombreux, a une faible participation et a une metiance a l'egard des syndicats.
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L'aHgnement des systemes de GRH sur 1a strategie La fonction «ressources humaines» peut aussi contribuer a la mise en (£uvre de la strategie en harmonisant les pratiques de GRH avec la strategie de 1'or ganisation. La demarche consiste a modeler les systemes d'organisation du travail, de dotation, de formation, de remuneration, etc., sur la strategie organisationnelle de meme que sur les valeurs des dirigeants de I'organisation (Dolan et Garcia, 1999). Si, a titre d'exemple, Ie traitement respectueux repre sente une valeur de au sein de l'entreprise, alors les pratiques de GRH devraient refleter cette valeur. Ainsi, chez Cafe Starbucks, cette valeur du respect se reflete dans l'utilisation de I'appellation « partenaires» et dans les occasions de developpement de carriere offertes aux partenaires. II existe d'ailleurs des mocteles d'alignement qUi prescrivent queUes pratiques de GRH sont compatibles avec tel ou tel contexte strategique. Ces modeles d'alignement illustrent comment peut s'etablir une synergie entre la strategie et les systemes de GRH ou comment la strategie, qui a une portee generaIe, se traduit dans des mesures relatives aux ressources humaines ayant une portee plus restreinte. Pour mieux comprendre cette dynamique, nous examinerons 1'alignement des systemes de GRH sur trois strategies d'adapta tion, soit la strategie du prospecteur, la strategie du defenseur et la strategie de l'analyseur (Miles et Snow, 1984). La strategie du prospecteur consiste a developper de nouveaux marches tout en misant sur !'innovation. Cette strategie favorise l'implantation d'une vision d'entrepreneuriat au sein de l'entreprise et comprend des systemes de GRH axes sur les mouvements rapides des ressources humaines dans divers projets. La strategie du prospecteur mise egalement sur Ie recrutement externe, sur Ie developpement rapide des talents qu'on trouve dans l'organi sation, sur Ie travail d'equipe et sur une remuneration variable. La strategie du defenseur consiste, pour l'organisation, a sauvegarder sa part de marche tout en favorisant une croissance stable et moderee a l'inte rieur de marches familiers. La GRH qUi correspond Ie mieux a la strategie du defenseur met l'accent sur Ie developpement des competences qui se trouvent deja dans l'organisation, sur une selection minutieuse, sur l'amelioration de Ia capacite de production et sur la stabilite dans l'emploi. Le systeme de remuneration du de£enseur se fonde davantage sur 1'equite interne que sur 1'equite externe ou Ie rendement. La strategie de l'analyseur consiste a combiner les initiatives pour deve lopper de nouveaux marches avec Ies initiatives requises pour maintenir la stabilite au sein des marches existants. Les systemes des ressources humaines qui correspondent aux projets de I'analyseur sont de deux ordres. Premie rement, pour ce qui est des produits et des procedes matures, la GRH mise sur I'evaluation du rendement, la formation et la dotation interne. Deuxii: mement, en ce qui concerne les initiatives de developpement de nouveaux marches, la GRH repose sur la conception d'equipes de travail performantes et flexibies. Le systeme de remuneration de l'analyseur s'appuie sur l'equite interne et externe, et accorde une importance moderee aux incitations financieres.
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I Donner une orientation et de la coherence a la GRH
Poursuivant Ie meme objectif de l'harmonisation des systemes des res sources humaines avec la strategie d'affaires, Schuler, Galante et Jackson (1987) observent que Ies systemes des ressources humaines divergent seion que l'organisation choisit une strategie de domination par Ies couts, une strategie de differenciation ou une strategie de concentration. Cette idee d'ali gner Ies systemes de GRH sur la strategie d'affaires est aussi decrite par Guerin et Wils (1990). Le tableau 3.1 presente Ie positionnement des systemes des ressources humaines seion que I'organisation adopte une strategie de domi nation par Ies couts, par Ia qualite ou encore par l'innovation. La strategie de domination par Ies couts, qui exige une certaine stan dardisation des comportements, fait appel a une progression selon l'ancien nete, a des normes formelles et explicites d'evaluation du rendement et a une communication limitee. Pour sa part, la strategie de domination par la qualite mise beaucoup sur l'amelioration des competences, Ia gestion participative, Ie travail d'equipe et la diffusion d'une culture favorable a l'ameIioration de la qualite. Par exemple, l'entreprise qui privilegie la quaIite du service a la clientele pour se demarquer aurait interet a revoir ses pratiques de selection de fa~on a embaucher des collaborateurs presentant les traits suivants (Overholt et Granell, 2002): • etre un bon communicateur i • aimer travailler avec les gens; • etre amical; l'ALIGNEMENT DES SYSTEMES DES RESSOURCES HUMAINES SELON TROIS STRATEGIES DE l'ENTREPRISE
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Source: G. Guerin et T. Wils, «I:harmonisation des pratiques de gestion des ressources humaines au contexte strategique: une synthese )1, dans Vingt-cinq ans de pratique en relations industrielles au Quebec, sous 1a direction de R. Blouin, Cowansville, Editions Yvon Blais, 1990, p. 669-715.
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etre rapide et flexible; etre capable de maitriser son stress; avoir des aptitudes interpersonnelles; avoir une capacite d'ecoute empathique; possecter de I' experience dans Ie service a Ia vouloir se realiser et gagner; etre sympathique.
clienh~le;
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La strah::gie de domination par l'innovation, qUi cherche a susciter l'esprit creatif et innovateur des employes, recourt a la gestion participative, ala flexi bilite dans les affectations, au developpement de la polyvalence ainsi qu'a une approche egalitaire dans les relations qu'entretient l'entreprise avec ses employes. Ainsi, les systemes de GRH sont differents selon Ie contexte strategique de l'entreprise. II importe alors non pas d'adopter des recettes toutes faites ou des pratiques a la mode, mais plutot des pratiques qui sont compatibles avec la strategie poursuivie. Vne etude a montre, a cet egard, que Ie succes des equipes de basket-ball repose en partie sur Ie degre de coherence entre la stra tegie de l'equipe, la strategie de l'entraineur et les aptitudes des joueurs (Wright, Smart et McMahan, 1995). Cela signifie que l'alignement des com petences des ressources humaines sur la strategie d'affaires represente un avantage considerable. Mais il y a plus encore: il faut aussi aligner la GRH sur l'environnement.
L'alignement des systemes de GRH sur l'environnement Meme si la strategie represente Ie point d'ancrage des systemes de GRH, ceux ci peuvent egalement s'elaborer sous la pression de l'environnement externe et de la situation interne de l'organisation. Par consequent, les systemes de GRH doivent non seulement soutenir la strategie, mais aussi s'harmoniser avec l'environnement. En effet, dans Ie modele de planification strategique des ressources humaines (figure 3.1), l'analyse de l'environnement externe et de la situation interne est necessaire a l'etape de la formulation de la strategie ainsi qu'a l'etape de la mise en ceuvre de la strategie. Les intervenants en ressources humaines doivent donc s'efforcer de recon naitre, d'interpreter et de prevoir les consequences de I'evolution du marche du travail, des lois du travail, de l'emploi, du revenu national, des relations du travail, des va leurs sociales et des systemes de GRH chez les concurrents. En resume, la determination des lignes d'action en matiere de GRH se base sur un ensemble de facteurs dont certains tiennent a l'entreprise et lui sont propres (la strategie, la structure et les competences) et d'autres qui lui sont extrinseques (la concurrence, la legislation et la technologie).
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La planification operationnelle des ressources humaines La planification operationnelle des ressources humaines assure une continuite dans les mesures adoptees a court terme. Comme mecanisme servant a pre parer }'avenir, elle s'inscrit dans une demarche previsionnelle structuree que nous explorerons dans cette section. Le processus de planification opera tionnelle des ressources humaines est presente a la figure 3.2.
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lE PROCESSUS DE PlANIFICATION OPERATION NEllE DES RES SOURCES HUMAINES
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Integre dans une approche previsionnelle, Ie processus de planification operationnelle des ressources humaines exige que l'on examine les change ments internes et externes. Cette Hape analytique sert principalement a deter miner les grandes questions ou problematiques que la direction des ressources humaines doit considerer. Le processus de planification operationnelle des ressources humaines porte ensuite sur l'appreciation des detis relatifs aux ressources humaines selon leur portee, leurs consequences et les mesures qu'its necessitent. Cette analyse initiale contribue a determiner la demande et l'offre futures de travail. La demande future de travail cone erne les besoins de l'organisation en matiere de ressources humaines alors que l'offre future de travail a trait a la disponibilite de ressources humaines a l'interieur et a l'exterieur de l'or ganisation pour combler ces besoins. Puis vient l'etape de l'evaluation des desequilibres entre la demande et l'offre de travail. Si une situation de desequilibre pointe it l'horizon, la direc tion peut concevoir et implanter des mesures correctives visant a fournir les ressources humaines necessaires au deveioppement de l'organisation. Finale ment, l'evaluation en fonction du degre de realisation des objectifs vises per met d'apporter les corrections requises.
3.3.1 L'analyse des facteuTs de changement Plusieurs changements peuvent modifier les previsions de la demande et de l'offre de travail. La strategie organisationnelle influence les besoins et la disponibilite de ressources humaines. A titre d'exemple, une strategie de crois sance par diversification peut modifier Ie nombre d'employes dont l'organi sation dispose. Par ailleurs, l'acquisition d'une autre firme est susceptible de creer des surplus d'effectifs dans certains postes.
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Donner une orientation et de la coherence
a la GRH
La composition de la main-d'reuvre au sein de l'entreprise represente un autre facteur significatif. Sur ce point, la culture, la courbe d'age, Ie profil des competences, l'experience et Ie potentiel humain sont quelques caracteris tiques a considerer lorsqu'on fait des previsions au sujet de Foffre de travail. Si, par exemple, la courbe d'age temoigne du vieillissement des employes, on doit prevoir les departs pour la retraite et donc Ie besoin de renouveler la force de travail. Dans l'environnement externe de l'entreprise, les facteurs economiques, demographiques, technologiques, politiques et legaux peuvent aussi influer sur les projections relatives aux ressources humaines. Le taux d'activite des femmes en hausse, Ie taux d'activite des hommes en baisse, la montee du taux de scolarisation, l'amelioration de l'esperance de vie, l'urbanisation, la baisse du taux de mortaHte infantile, Ie taux de chomage en baisse, l'indice de fecon dite en baisse et Ie taux de divorce en hausse sont quelques-unes des ten dances qui peuvent avoir des repercussions sur l'entreprise et ses res sources humaines. L'avancement des techniques chirurgicales, par exemple, permet aux etablissements de sante de reduire la duree de l'hospitalisation. Avec Ie retour plus rapide des patients a la maison, les besoins en personnel infirmier sont reduits dans les hopitaux alors que Ies services de soins de sante com munautaires connaissent un essor. La prochaine etape du processus de planification des ressources humaines consiste a evaluer les consequences des facteurs de changement sur la de mande et l' offre de travail.
3.3.2 La nature de 1a demande et de 1'offre de travai1 Pour bien saisir les notions de demande et d'offre de travail, il faut faire la dis tinction entre, d'un cote, Ie marche des biens et des services et, de I'autre, Ie marche du travail. Comme Ie montre la figure 3.3, les expressions «demande}) et « offre» n'ont pas la meme signification seion les cas. La demande de travail represente les besoins en ressources humaines de l'entreprise, tandis que l'offre de travail correspond aux ressources humaines disponibles. II existe des relations entre Ie marche des biens et des services et Ie marche du travail. Si la demande de biens et de services de l'entreprise augmente, l'offre de ces biens et services pourrait aussi augmenter pour repondre a la demande, ce qui aurait comme consequence d'augmenter Ie volume de production et Ia demande de travail. A titre d'illustration, si Ia demande d'au tomobiles s'accroit, les usines de fabrication de pieces d'automobiles augmen teront leur volume de production et pourront avoir besoin d'un plus grand nombre d'employes de production.
A l'interieur de cette dynamique, Ies entreprises interviennent sur Ie marche des biens et des services pour y €:couler leur production et y offrir des services. Sur Ie march€: du travail, Ies entreprises peuvent creer une demande de travail et offrir des salaires et des avantages sociaux. En contrepartie, Ie
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l'OFFRE ET lA DEMANDE SUR lE MARCHE DES BIENS ET DES SERVICES ET SUR lE MARCHE DU TRAVAil
Legende: - - - - ""'" Flux d'argent (salaires ou consommation) -Flux de biens, de services ou de facteurs reels
public achete des biens et des services sur Ie marche des biens et des services, et constitue Ia force de travail sur Ie marche du travail.
3.3.3 L'analyse de la demande de travail L'analyse de Ia demande de travail consiste a prevoir les besoins en ressources humaines au cours d'une peri ode determinee. Elle porte autant sur Ie nombre de postes que sur Ie contenu et les exigences de chacun des postes necessaires pour combler les previsions relatives a l'effort global de production. De mul tiples facteurs peuvent determiner Ie volume de production et la demande de travail au sein d'une entreprise. On peut prendre l'exemple de la Banque de France, qui s'apprete a vivre la restructuration la plus serieuse de son histoire, laquelle fera passer son reseau de succursales de 211 a environ 106. Cette restructuration prevoit l'eIimination de 2600 postes a temps plein. Le motif invoque de ces changements de grande envergure est Ie besoin urgent de reduire les couts dans Ie contexte d'une baisse des taux d'interet (Le Monde, 2003). On constate ici I'ampleur de l'influence de l'environnement sur les effectifs. II importe donc de considerer les facteurs qui vont marquer l'avenir ainsi que leurs repercusSions sur 1a prevision des activites. L'arrivee d'un nouveau concurrent peut reduire la part de marche de l'entreprise de meme que ses besoins en ressources humaines. Par exemple, l'augmentation du prix du car burant et une diminution du volume d'expectitions de grains et de cereales en raison d'une secheresse pourraient inciter une entreprise de chemin de fer a rectuire ses frais d'exploitation au moyen d'une reduction de ses effectifs. Par
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a la GRH
ailleurs, I'introduction d'une nouvelle technologie est susceptible d'ameliorer la productivite et, consequemment, de diminuer les besoi?s. en r:ssources humaines. Ainsi, meme si les ventes dans Ie commerce de de,tall avale~t au~ mente de 5,1 % au Quebec en 2000, les effectifs sont demeures stables a enVl ron 320000 employes. Cette situation s'explique en partie par la hausse de la productivite attribuable a l'informatisation dans ce secteur (Dansereau, 2001). Avec l'introduction de nouvelles technologies, certaines entreprises peuvent produire la meme quantite de biens qu'il y a 10 ans avec des effectifs reduits de moitie. C'est ainsi que l'automatisation de certains procedes dans une brasserie peut faire passer sa productivite de 6 a 10 hectolitres par personne par heure, ce qui reduit les besoins en res sources humaines pour Ie meme vo lume de production. Notons aussi que les besoins en ressources humaines suivent generalement les cycles economiques, c'est-a-dire qu'ils enregistrent une hausse en peri ode de croissance et une diminution en periode de ralentissement economique. Ainsi, en periode de forte croissance economique, les annonces de recrute ment dans la section «Carrieres et professions» des principaux journaux sont nettement plus nombreuses qu'en periode de ralentissement economique.
Les methodes subjectives de prevision de la demande de travail Il existe des methodes permettant de prevoir la demande de travail d'une organisation. Dans la categorie des methodes subjectives de prevision de la demande de travail, on trouve une methode basee sur Ie jugement des ges tionnaires. Cette methode consiste simplement a demander aux gestionnaires responsables d'unites de travail de prevoir leurs besoins en ressources humaines en fonction de I'evolution projetee de l'entreprise. Une institution financH:~re, par exemple, demande aux cadres de determiner les besoins futurs de chaque succursale quant a sa main-d'ceuvre sur un horizon de deux ou trois ans. Les estimations de chaque succursale sont ensuite transmises a la direction de la dotation et de la planification des res sources humaines, qui se situe au siege social. La methode Delphi presente une forme particulierement efficace de previ sion de la demande de travail. Elle convient bien a des situations complexes et incertaines ou lorsque la planification des ressources humaines s'etablit sur un horizon plus lointain. Cette methode pourrait etre utilisee, par exemple, pour prevoir les besoins en personnel infirmier a la suite de la restructuration des services du reseau de la sante dans une region quelconque. Elle pourrait egalement representer une bonne methode pour analyser les aspects quali tatifs de la demande de travail, comme les competences qui seront requises dans Ies postes-db d'une entreprise s'appretant a entrer sur Ie marche international. La methode Delphi est caracterisee par une interaction indirecte des par ticipants et par l'intervention d'un «intermediaire» qui resume l'information et coordonne les activites du groupe. La premiere etape de la methode con siste a diviser Ie probleme en plusieurs questions. Ensuite, l'intermectiaire fait parvenir les questions a un groupe de travail compose d'experts. Une fois qu'il
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a re~u les reponses des experts, il analyse Ie degre de convergence des reponses
~t res~m~ l'info~mati?n. Puis, il renseigne Ie groupe et reprend 1a sequence
1usqu a 1 obtentIOn d un consensus. Basee sur la formulation de , . . . d' .d 11 prevIsIons ~n IVl u,e es co"?c~rnant l'~venir, la methode Delphi permet aux personnes m~erro~ees de reVIser leur Jugement initial avant qu'une decision finale ne SOlt pns~. En somme, s'il est vrai que plusieurs tetes valent mieux qu'une, cette methode favorise une meilleure qualite des decisions prises tout en minimisant, par l'interaction indirecte des participants, l'influence des per sonnalih~s sur les estimations.
Les methodes objectives de prevision de la demande de travail Les methodes objectives de prevision de la demande de travail font intervenir la mesure d'un taux de changement afin d'estimer la demande future de ressources humaines. Ces methodes se fondent donc sur l'utilisation des donnees du passe pour prevoir les besoins futurs de l'entreprise. Par ailleurs, les methodes objectives peuvent faire usage de statistiques pour etabUr la force de la relation entre une ou plusieurs variables et l'evolution de la demande de travail. I:extrapolation represente une methode objective qUi consiste a appliquer taux de changement observe dans Ie passe. Par exemple, une usine d'assemblage qui aurait embauche en moyenne 10 manutentionnaires par mois au cours des 2 annees anterieures pourra prevoir une demande de travail qUi s'etablira a 120 manutentionnaires pour les 12 prochains mois. L'extrapolation peut aussi presenter les variations de la demande de travail en pourcentage avec une ponderation qUi accorde plus de poids aux donnees plus recentes. Entin, cette methode fait parfois appel a l'analyse de series chronologiques ou l'on utilise les niveaux anterieurs de main-d'reuvre en vue de degager les variations cycliques et les ten dances a long terme. Avec l'extra polation, on postule que l'entreprise revivra des situations assez semblables, ce qUi demeure un acte de foi pour plusieurs organisations.
a l'avenir un
La projection des tendances par indexation exige qu'on etablisse une rela tion statistique entre une ou plusieurs variables et Ie nombre d'emplois. Ainsi, s'il existe une correlation entre Ie volume des ventes et la demande de travail, les previsions des besoins en ressources humaines pourraient se fonder sur l'evolution projetee du volume des ventes. A titre d'exemple, une chaine de boutiques de vetements prevoit l'ouverture de 10 nouvelles boutiques au cours de la prochaine annee, ce qui necessitera l'embauche d'un directeur et de 5 vendeurs par boutique. En milieu hospitalier, Ie ratio du nombre de mectecins par rapport a I'ensemble de la population ou Ie ratio du nombre de mectecins par rapport a I'utilisation des services par la population pourraient servir de bases aux projections. Ainsi, une croissance projetee de la population ou de l'utilisation des services medicaux indiquerait une augmentation pro portionnelle du nombre de medecins requis.
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a la GRH
3.3.4 I!analyse de l'offre de travail
a prevoir la main d'ceuvre disponible a partir de sources internes et externes. L'analyse de l'offre interne de travail considere les personnes au sein meme de l'organisa tion tant du point de vue quantitatif (leur nombre) que qualitatif (leurs aspi rations, leurs competences, leur rendement et leur potentiel de meme que leur appartenance a un groupe cible). L'analyse de l'offre externe de travail s'in teresse aux futures ressources humaines competentes, soit a l'echelle locale, nationale ou internationale, ainsi qu'a la capacite de l'organisation a attirer ces ressources humaines.
L'analyse de l'offre de travail consiste, pour l'organisation,
Le principal deti de l'analyse de l'offre de travail se trouve dans la difficulte de prevoir l'etat des ressources humaines dans une organisation et une societe qUi ne cessent de se transformer. Dans l'organisation, Ie taux de roulement, l'evolution du profil demographique de la main-d'ceuvre et l'activite de for mation peuvent influencer l'offre de travail. AI'exterieur de I'organisation, Ie taux de chomage, l'evolution du systeme d'ectucation, Ie taux de natalite et l'immigration constituent des forces de changement egalement susceptibles de modifier la disponibilite de ressources humaines. Un changement legislatif peut aussi modifier l'etat des ressources humaines dans une societe.
Les methodes de prevision de l'offre interne de travail L'analyse de l'offre interne de travail porte sur les personnes actuellement au service de l'organisation. Une methode d'analyse de l'offre interne consiste a
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produire un inventaire de la situation actuelle des effectifs au sein de }'entre ~rise. Le .fait de procecter a l'~n:entaire des ressources humaines dont dispose 1 entrepnse peut mettre e? eVIdence cert,aines categories d'emplois dont les ~emm:s sont exelues ?U deSIgner des unites administratives ou la releve parait I~suffisante. Cette methode vise soit une description quantitative de la situa tIOn (Ie nombre d'employes par categorie d'emploi, par annee d'anciennete, par age et parfois par elasse salariaJe) ou une description qualitative (la sco larite, les experiences de travail, Ies competences, Ie potentiel et Ies aspirations professionnel1es). Bref, l'inventaire des ressources humaines est la methode tout indiquee pour connaitre ses effectifs. Le tableau de remplacement, qu'on utilise pour prevoir l'offre interne de travail, s'inscrit dans une demarche de planification du remplacement a des postes-eles dans la structure de l'emploi de l'entreprise. Cette methode, par laquelle on examine Ie niveau de rendement actuel ainsi que le potentiel de chaque rempla~ant, permet de visualiser les postes pour lesquels l'entreprise a une releve suffisante et ceux pour lesque1s la releve semble insuffisante ou inexistante. Les tableaux de remplacement, qui ressemblent a des organi grammes, aident a. repondre a la question suivante: qui peut remplacer qui au sein de la structure de l'emploi? La planification de la rei eve vise un horizon temporel plus lointain que Ia planification du remplacement. Comme methode de prevision de l'offre interne de travail, elle consiste a preparer une succession ordonnee de per sonnes susceptibles d'occuper Ies postes-des au sein d'une organisation. L'objectif de la planification de la releve est d'assurer une continuite dans l'en treprise. EIle necessite avant tout un bon systeme d'evaluation du potentiel, mais aussi l'analyse des postes, l'analyse de la filiere professionnelle ainsi qu'une retlexion sur les systemes de formation et de remuneration existants dans l'entreprise (Tremblay et Roger, 1992). La formation et Ie developpement de competences generales, Ie coaching, Ies affectations temporaires et Ie men tor at constituent des mesures de planification de la reI eve. Vne autre methode de prevision de l'offre interne de travail consiste a realiser des projections basees sur l'analyse du roulement de fa<;on a prevoir Ies effectifs selon Ie pourcentage d'employes qUi quittent l'entreprise. Si Ie taux de roulement des nouvelles recrues se situe a. 15 % sur une base annuelle, I'entreprise qUi embauche 100 nouvelles recrues peut s'attendre a en avoir 85 encore a son service a. la fin de I'annee. Par exemple, selon Ies projections actuelles, d'ici 2011, les universites canadiennes devront pourvoir 20000 postes de professeur laisses vacants par les departs pour la retraite (Turenne et Chretien, 2003). Mentionnons finalement l'analyse des mouvements internes comme moyen de prevoir l'offre interne de travail. Cette methode consiste a analyser Ies flux de personnel a. l'interieur de l'organisation, c'est-a.-dire Ies mouve ments de promotion a un poste superieur, de mutation a un poste de meme niveau hierarchique et de retrogradation a un niveau inferieur. La situation projetee est donc fonction de la situation initiale et des mouvements internes au cours d'une periode de reference.
Chapitre 3
I Donner une orientation et de la coherence
a la GRH
La prevision de l'offre externe de travail
Si l'organisation ne dispose pas de res sources humaines en qualite ou en nombre suffisants, elle devra se tourner vers l'exterieur. Le re~ponsa~~e de la planification des ressources humaines verifie alors s'il exist: ~ l'extene~r de l'entreprise une main-d'ceuvre abondante, instruite ou maltnsant plusleurs langues. La methode proposee pour prevoir 1'offre externe de travail consiste a sonder l'environnement externe afin de decouvrir sur Ie marche du travail les personnes susceptibles de bien s'integrer dans I'entreprise. La collecte de l'information se realise a l'echelle locale, nationale ou inter nationale, selon l'envergure de l'organisation et ses besoins en res sources humaines. A l'heure actuelle, il importe de considerer au moins quatre facteurs qui influencent 1'offre ext erne de travail, soit Ie taux de chomage, Ie systeme d'education, Ie taux de natalite et l'immigration. Le taux de chomage
Le premier facteur a examiner en liaison avec l' offre externe de travail est Ie taux de chomage, qUi donne une indication du nombre de personnes disponibles pour Ie travail et a la recherche active d'un emploi. Plus Ie taux de chomage est eleve, plus il y a de personnes disponibles pour combler les postes vacants. A l'inverse, plus Ie taux de chomage est faible, moins il y a de personnes disponibles. Il faut savoir que Ie taux de chomage varie en fonc tion des cycles economiques, des pays et des regions. Ainsi, selon des statis tiques recentes, Ie taux de chomage a Montreal se situait a 8,4 %, alors qu'a San Francisco, aux Etats-Unis, il eta it de S,8 % et que dans la region du Languedoc-Roussillon, en France, il s'elevait a 13,7 %. Le systeme d'education
Le deuxieme facteur a considerer est Ie systeme d'education. Lorsque Ie sys teme d'education ne correspond pas aux besoins du marche du travail, on risque de se retrouver dans une situation ou de nombreuses personnes sont a la recherche d'un emploi alors qu'en meme temps plusieurs entreprises n'arrivent pas a trouver les personnes susceptibles de repondre a leurs besoins. Certains estiment a cet egard qu'il faudrait accroitre de beaucoup Ie nombre de diplomes en informatique et en haute technologie pour repondre a la demande d'emploi dans les societes point-com qUi continuent a progresser malgre les difficultes qu'elles ont connues ces derniers temps. Force est de constater, toutefois, que la correspondance entre la formation et des besoins en main-d'ceuvre est difficile a realiser dans les faits. Le taux de natalite
Le troisieme facteur est demographique. Il s'agit du taux de natalite, qui est, avec !'immigration et d'autres facteurs, un determinant de la croissance demographique. Ainsi, un taux de natalite faible represente un frein a la crois sance demographique et, par consequent, un frein a la croissance de la popu lation active disponible sur Ie marche du travail.
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Partie I
I Les defis du renouvellement
L'immigration
Le quatrieme facteur qui a des repercussions sur l'offre externe de travail est I'immigration. Au cours des prochaines annees, les entreprises auront a com poser avec une main-d'reuvre de plus en plus diversifiee. En effet, selon Statistique Canada, il apparalt que: • l'immigration vers Ie Canada vient principalement d'Asie, d'Afrique et d'Amerique centrale et du Sud; • 7S % des nouveaux venus au Canada se dirigent vers les trois plus grands centres urbains que sont Toronto, Vancouver et Montreal; • l'integration economique des immigrants est de plus en plus difficile; • les immigrants qui arrivent au Canada, bien que S4 % d'entre eux soient scolarises, doivent renverser plusieurs barrieres avant de pouvoir se trouver un emploi et participer a la vie economique. Les entreprises devront donc tenir compte de cette realite afin de repondre
a leurs besoins en ressources humaines et respecter Ie principe de l'equite en emploi.
3.3.5 l'estimation des desequilibres entre la demande et l'offre de travail Les analyses de Ia demande et de l'offre de travail peuvent conduire a des constats de desequilibres; les mesures correctives qUi devront etre prises dependront alors de la nature des desequilibres. Premierement, l'entreprise peut prevoir une penurie de ressources hu maines, ce desequilibre etant caracterise par une demande de travail superieure a l'offre. Une situation de penurie quantitative survient lorsque l'entreprise prevoit qu'elle disposera d'un nombre insuffisant de ressources humaines pour repondre a ses besoins futurs. Cette situation se produit plus frequemment lorsque l'entreprise se situe dans une phase de croissance ou que son taux de roulement des ressources humaines est tres eleve.
Chapitre 3
I
Donner une orientation et de la coherence
a la GRH
Une penurie qualitative de ressources humaines apparait lorsque les ana lyses laissent entrevoir une insuffisance des competences en relation avec les ~ouveaux besoins de l'entreprise. Cette situation survient parfois a 1a suite de l'implantation d'une nouvelle technologie ou lorsque l'entreprise souhaite adopter une nouvelle approche de supervision qui fait appel a des compe tences relationnelles differentes. Une penurie qualitative peut egalement survenir lorsque l'entreprise constate une sOllS-representation de certains groupes, comme les femmes, les autochtones, Ies minorites visibles ou Ies minorites ethniques. A titre d'illustration, une entreprise de la region de Montreal pourrait compter seulement 7% de femmes dans l'emploi de techni cien en informatique. S'il y a 19 % de femmes parmi Ies personnes detenant Ies competences pour occuper un tel emploi dans cette region, alors Ie pour centage de sOllS-representation (ecart entre les deux taux) est de 12 %. eet ecart pourrait etre juge problematique dans Ia perspective du droit a l'egalite. La rubrique « Info GRH» qui suit decrit une autre situation de desequilibre qui pose cette fois Ie dHi de I'integration des communautes cu1turelles au sein d'une grande societe.
Deuxiemement, l'organisation peut vivre ou prevoir une situation de sur plus de ressources humaines lorsque Ies previsions indiquent que l'offre de travail excedera la demande. Un surplus quantitatif survient Ie plus souvent au sein des entreprises traversant une phase de decroissance ou la main d'ceuvre est trop abondante pour Ie volume de travail requis.
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Partie I
I Les defis du renouvellement
Un surplus qualitatif se manifeste lorsque les competences des employes sont trop elevees par rapport aux exigences des emplois. A breve echeance, si les possibilites d'avancement sont limitees, un etat de surqualification peut se traduire par une insatisfaction au travail.
3.3.6 Les mesures correctives des desequilibres entre l'offre et la demande de travai1 Selon Ia situation de desequilibre envisagee, l'entreprise dispose d'une grande diversite de moyens pour intervenir de fa(,;on efficace. Le tableau 3.2 pre sente une synthese des mesures appropriees selon diverses situations de desequilibre.
Les solutions Ii une penuTie quantitative de TeSSOUTces humaines Les mesures prises dans une situation de penurie quantitative de ressources humaines visent I'utilisation plus efficace des effectifs presents, Ie recrute ment externe, l'investissement a l'etranger ou la reduction des besoins en ressources humaines. L'utilisation plus efficace des effectifs presents
Seion la premiere option, Ie desequilibre peut Hre evite par la mutation ou 1a promotion des employes dans des emplois qui connaissent une penurie de main-d'CEuvre. Cette mesure qui mise Sur les mouvements internes permet
~liJ~~~3.2
LA CORRECTION DES DESEQUILIBRES
}1i\tYt~~fi~is~l1ilit)re:··
Chapitre 3 I Donner une orientation et de la coherence it la GRH
surtout de combler des penuries de faible envergure. Une autre fa~on d'assurer une utilisation plus effie ace des effectifs consiste a favoriser les heures supplementaires. Ce recours convient a des situations de penurie de courte duree, car a long terme, les heures supplementaires peuvent mener a l'epui sement professionnel de meme qu'a l'augmentation des taux d'accidents du travail. L'utilisation plus efficace des effectifs presents peut aussi prendre la forme de mesures qui favorisent la conservation des ressources humaines. Ainsi, voyant se profiler a l'horizon une grave penurie de main-d'ceuvre, cer taines entreprises incitent leurs employes d'experience a effectuer un retrait progressif plut6t que complet de leur travail. n s'agit alors d'allonger la vie active de travailleurs d'experience. La mise en place de nouvelles technologies ainsi que la reorganisation du travail representent d'autres moyens d'ame liorer la productivite au travail et consequemment d'assurer une utilisation plus efficace des effectifs. Le recrutement externe
La deuxieme option permettant de combler une penurie quantitative consiste a se doter de nouvelles ressources humaines a l'aide de l'embauche d'em ployes a temps partie I ou d'employes a temps plein sur une base temporaire ou permanente. Par exemple, une municipalite qui etait a la recherche de ressources humaines pour son nouveau systeme telephonique d'urgence a mis en place un programme de dotation suivant lequel on recrutait les telepho nistes d'une entreprise avoisinante qui se trouvait dans une phase de decrois sance. Notons a cet egard que les entreprises ont de plus en plus tendance a faire appel a des employes a temps partiel embauches sur une base temporaire, c'est-a-dire pour une duree determinee. Ainsi, pour repondre a la plus forte demande durant Ie temps des fetes, plusieurs detaillants ont recours a une main-d'ceuvre temporaire embauchee pour la duree de la periode de plus grande frequentation. D'autres entreprises engagent une main-d'ceuvre tem poraire pour remplacer les personnes qui se trouvent en conge parental. D'autres, enfin, elargissent leur recrutement afin de combler la penurie de main-d'ceuvre qu'elles connaissent. Ainsi, comme l'explique la rubrique «Info GRH» qUi suit, la plus grande chaine de magasins de bricolage de la Grande-Bretagne a recouru a des employes d'age mur pour combler ses besoins et mieux repondre aux besoins de ses clients. L'investissement
a l'etranger
La troisieme option face a une penurie quantitative de ressources humaines s'inscrit dans Ie paradigme de la mondialisation. Il s'agit, pour l'entreprise, de transferer certaines operations de production dans des pays ou la main d'ceuvre est abondante. Par exemple, on estime que 420000 entreprises etrangeres ont investi en 20 ans quelque 450 milliards de dollars en Chine, la ou la main-d'ceuvre est abondante et bon marche. Cette strategie de produc tion est si populaire que la Chine fabrique aujourd'hui 50 % des appareils photo au monde, 30 % des televiseurs et des climatiseurs, 25 % des machines a laver, 20 % des re£rigerateurs, etc.
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
La reduction des besoins en ressources humaines Entin, lorsque l'organisation est placee dans une situation de penurie quanti tative de ressources humaines, elle peut reduire ses besoins en res sources humaines par Ia sous-traitance de certaines activites. Vne organisation qui confie ainsi l'execution de certains travaux a un entrepreneur reduit ses pro pres besoins en ressources humaines. Vne autre possibilite consiste a renoncer pendant une periode donnee a certains projets de developpement. L'entreprise maintient ainsi sa production a un niveau stable et restreint ses besoins en ressources humaines. Finalement, l'automatisation de certains procedes peut entrainer une reduction des besoins en ressources humaines et permettre a l'entreprise de maintenir un equilibre entre la demande et l'offre de travail.
Les solutions aune penurie qualitative de ressources humaines Les mesures prises dans une situation de penurie qualitative de ressources humaines visent I'investissement dans la formation et le developpement, Ie recrutement exteme ou Ie programme d'acces a l'egalite. l'investissement dans Ia formation et Ie developpement De toute evidence, pour combler un ecart entre les competences exigees et les competences actuelles, l'entreprise peut investir dans la formation et Ie developpement des ressources humaines. L'entreprise qui investit dans des programmes de formation et de developpement de ses ressources humaines corrige une situation de penurie qualitative et accroit en meme temps sa capa cite d'adaptation a plus long terme. En outre, Ia formation des ressources humaines procure une plus grande flexibilite a la gestion des affectations et
Chapitre 3
I Donner une orientation et de la coherence a la GRH
des mouvements internes. Par exemple, si la reIeve a la direction de l'entre prise paralt insuffisante, la formation represente un moyen de developpement des habiletes de direction chez les personnes qUi prendront demain la releve. Le recrutement externe Vne seconde option pertinente dans une situation de penurie qualitative consiste a recruter a l'exterieur les personnes ayant les compHences qui cor respondent au plan de developpement de l'entreprise. Cette option est inte ressante surtout lorsque Ie developpement interne des competences requises s'avere long et couteux. Toutefois, Ie recours au recrutement externe demo bilise parfois les employes actuels qui souhaitaient acceder un jour aux postes en question. Pour remedier a une situation de penurie qualitative, un choix s'impose donc entre Ie developpement interne et l'acquisition externe des competences. Le programme d'acces a 1'egalite Entin, si la situation de penurie qualitative prend la forme d'une sous representation des femmes, des autochtones, des minorites visibles ou des minorites ethniques, alors la mise en place d'un programme d'acces a l'egalite s'avere la mesure la plus appropriee. II s'agit d'un ensemble de moyens vis ant a augmenter la representation des personnes faisant partie de chacun de ces groupes. Un tel programme cherche aussi a corriger les pratiques discrimina toires du systeme d'emploi. Dans les faits, il s'agit d'etablir un ensemble de mesures, dont les suivantes: • des mesures temporaires de redressement pour les membres competents des groupes en question; • des mesures visant a assurer l'egalite des chances a tollS les membres du personnel (par exemple, une politique en matiere de harcelement sexuel) ; • des mesures de soutien s'adressant a tout Ie monde (comme des horaires variables ou un service de garde); • des mesures relatives a la consultation du personnel et de ses representants.
Les solutions a. un surplus quantitatif de ressources humaines Les mesures appropriees a une situation de surplus quantitatif de ressources humaines portent sur la reduction permanente de la force de travail, sur la reduction du temps de travail, sur la reduction de la masse salariale ou encore sur la reduction de la rentabilite. La reduction permanente de 1a force de travail Les licenciements, les fermetures d'usines et les programmes de retraite anticipee et de gel de l'embauche sont des mesures de reduction permanente de la force de travail. Depuis quelques annees, on observe de nombreuses annonces de reduction des effectifs, comme une reduction de 1800 employes
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
chez Nokia, de 4000 chez SAS, de 3000 chez Bombardier, de 7500 chez France Telecom ou de 7500 chez Michelin. Ces licenciements, par lesquels l'em ployeur met fin de fa~on permanente au contrat individuel de travail d'un employe ou d'un groupe d'employes, constituent une mesure de reduction permanente de la force de travail qui s/inscrit souvent dans une perspective de redimensionnement (downsizing). Ces annonces de licenciements represen tent evidemment une dure n~alite pour les personnes touchees. II en va de meme pour les fermetures d'usines, qUi se font generalement en reaction a une baisse importante de la demande de biens ou de services de l'entreprise. Notons toutefois que les entreprises qui procedent a une reduction des effec tifs par ces moyens offrent parfois un service de reaffectation aux employes licencies pour les aider a se trouver un nouvel emploi. Par exemple, Natrel a offert a ses anciens employes une formation comportant des strategies de recherche d'emploi afin qu'ils soient mieux armes pour affronter Ie marche du travail. Dans Ie cas ou la reduction des effectifs s/avere necessaire, elle devrait respecter les conditions enoncees au tableau 3.3. Les programmes de retraite anticipee concernent les travailleurs qUi approchent de l'age ou ils beneiicieraient de la totalite des prestations prevues par leur regime de retraite. Comme moyen de reduire la force de travail, la retraite anticipee est couteuse a court terme, a cause des compensations finan cieres qui s'y rattachent, mais elle peut engendrer, a moyen terme, des econo mies importantes, car les travailleurs d'experience se situent normalement dans Ia partie superieure de l'echelle salariale. Vne autre me sure adminis trative visant une reduction permanente de la force de travail consiste dans Ie gel de l'embauche, lequel peut conduire a un reequilibrage, mais seulement sur une plus longue periode. Ainsi, par un phenomene d'attrition, Ie nombre d'employes decroit graduellement d'une maniere naturelle, soit par des departs volontaires, soit par la mise ala retraite ou par deces. Vne entreprise qui cherche a reduire de fa~on permanente sa force de travail peut ainsi pro ceder a un gel de l'embauche, pour ensuite laisser Ie phenomene de l'attrition faire son (Euvre. La reduction du temps de travail
Les mesures de reduction du temps de travail ont aussi gagne en popularite au cours des dernieres annees. La semaine de travail reduite, en particulier, re~oit actuellement l'appui des centrales syndicales, qUi voient en cet amenagement une maniere interessante de parvenir a la reduction permanente des effectifs. La semaine de travail reduite consiste en une semaine de travail dont la duree est inferieure a la semaine normale de travail. L'entreprise qUi connalt un sur plus quantitatif de main-d'(Euvre peut ainsi, en instaurant la semaine reduite de travail assortie
a une reduction de salalre equivalente, comprimer sa masse
salariale tout en evitant les licenciements collectifs. L'experience europeenne de la compagnie Volkswagen est remarquable a cet egard: «En concluant avec la partie syndicale un accord ramenant la semaine de travail de 36 a 28,8 heures reparties sur quatre jours, en decembre 1993, Volkswagen tra~ait de fa~on eclatante une voie permettant d'empecher une hecatombe de 20000 emp]ois» (Pichette, 1996, p. B1).
Chapitre 3
LES CONDITIONS DES EFFECTIFS
I Donner une orientation et de la coherence ala GRH
A RESPECTER DANS
LE CAS D'UNE REDUCTION
Source: Adapte de J.K Baron et D.M. Kreps, Strategic Human Resources: Frameworks for General Managers, New York, John Wiley, 1999.
Vne autre
fa~on
de reduire Ie temps de travail consiste afavoriser Ie travail
it temps partie I ou Ie partage du travail. Le travail a temps partiel represente
un travail effectue pendant une periode inferieure a la peri ode normale (ordi nairement en de~a de 30 heures par semaine). Cette mesure de reduction des heures de travail peut faire I'objet d'une adhesion volontaire ou non de la part des employes. Le partage du travail permet a deux ou plusieurs employes de partager un poste a temps plein habituellement combIe par un seul titulaire. Notons que ces trois mesures de reduction du temps de travail peuvent servir Ia cause de }'employeur qUi cherche a reduire ses couts, tout comme elles peu vent servir la cause des employes qui veulent avoir plus de temps pour leurs loisirs, pour leur famille ou pour prendre un certain recu1 par rapport a leur vie professionnelle. La reduction de la masse salariale
La reduction de la masse salariale comprend une autre serie de mesures a Ia disposition des entreprises qui prevoient une situation de surplus quantitatif
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
de res sources humaines. La fermeture temporaire de l'usine, les mises a pied temporaires, Ie gel des salaires de meme que Ie conge sabbatique donnent a l'entreprise la possibilite de poursuivre ses activites sans avoir a assumer les couts d'un surplus d'effectifs. Certaines usines ferment ainsi leurs portes pen dant la saison estivale parce que Ie volume de travail diminue alors. Au Quebec, en raison du c1imat, les entreprises du secteur de la construction procedent normalement a des mises a pied pour la duree de la saison hiver nale. Le gel des salaires (ou meme parfois la reduction des salaires) represente une mesure qui s'attaque directement aux couts de la main-d'o:uvre dans un contexte de surplus quantitatif de ressources humaines. Mentionnons egale ment l'engouement actuel pour Ie conge sabbatique, qui permet a l'entreprise une reduction de sa masse salariale et aux personnes qUi en beneficient un temps d'arret propice au ressourcement. Parfois, l'employeur offre la possi bilite a l'employe desirant se prevaloir d'une annee sabbatique de s'inscrire a un programme de traitement differe.
La reduction de la rentabilite Accepter de fat;on temporaire une reduction de la rentabilite de l'entreprise s'avere une autre solution a un surplus quantitatif de main-d'o:uvre. Le cas de I'Atelier d'usinage Aero illustre comment une entreprise a choisi une baisse de 1a rentabilite plutot qU'une reduction de la force de travail comme reponse a une situation conjoncturelle de surplus de main-d'o:uvre.
Chapitre 3
I Donner une orientation et de la coherence ala GRH
Les solutions a un surplus qualitatif de ressources humaines
Une situation ou les
competences ne sont pas pleinement mises a contri bution exige des ajustements en ce qui a trait au contenu des postes ou au cheminement professionnel des membres du personnel. Ainsi, les mesures appropriees a une situation de surplus qualitatif de res sources humaines por tent sur l'enrichissement des taches et Ia gestion des carrieres.
L'enrichissement des taches Le fait d'agir sur Ie contenu des postes pour ajouter des taches d'une com plexite superieure represente un moyen efficace d'ajuster Ie travail aux com petences et aux aspirations des ressources humaines. Concretement, il s'agit de revoir I'organisation du travail (voir Ie chapitre 4) pour octroyer plus de responsabilites a la personne qui occupe Ie poste. Cela rend Ie travail plus attrayant et permet a Ia personne d'utiliser pleinement ses talents.
La gestion des carrieres Pour corriger un surplus qualitatif de ressources humaines, les entreprises peuvent accorder plus d'importance a Ia gestion des carrieres, qUi s'interesse a «la delicate question de la reconciliation des besoins organisationneis et individuels}} (Bernard et autres, 1992, p. 91). Signalons que l'absence d'interventions adequates dans une situation de surplus qualitatif pourrait conduire a Ia desaffection des employes a l'egard de leur milieu de travail et, bien entendu, a un gaspillage du potentiel humain.
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Partie I
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I Les defis du renouvellement Les conditions de succes de la planification des ressources humaines II arrive souvent que les entreprises negligent Ie cote humain de leurs opera tions et demontrent un interet insuffisant pour la planification des ressources humaines. Pourtant, Ies medias abondent en cas d'entreprises qui ont subi les consequences negatives d'une absence de planification des ressources humaines. Par consequent, comme premiere condition de succes de la plan i fication des ressources humaines, il importe de faire comprendre a taus !'im portance de cette activite. II faudrait laisser aux specialistes des ressources humaines l'occasion de jouer leur role de partenaire d'affaires. Dans Ie cadre economique actuel, on constate facilement la preference de plusieurs dirigeants pour une gestion it court terme. Les pressions des action naires qui souhaitent des rendements parfois deraisonnables y sont pour quelque chose. Malheureusement, cette gestion it court terme empeche 1a diffusion d'une gestion previsionnelle des ressources humaines. Pour qu'il y ait une veritable planification des ressources humaines, il faudra que les ges tionnaires portent leur regard sur un horizon temporel plus lointain. Une autre condition du succes de la planification des ressources humaines est que l'entreprise puisse avoir acces it des donnees fiables sur ses ressources humaines. Notons, a cet egard, que de plus en plus d'organisations utilisent un systeme d'information sur les ressources humaines qui contient de l'in formation sur les postes et sur les employes. Les gestionnaires peuvent ainsi consulter les eXigences des postes (demande de travail) et la qualification des personnes au service de leur organisation (offre de travail). Toutefois, la planification des ressources humaines ne devrait pas seule ment viser it repondre aux besoins de l'organisation. Pour avoir une force de travail motivee, l'organisation doit aussi tenir compte des aspirations des employes. Le defi consiste alors a faire Ie pont entre, d'un cOte, les besoins de l'organisation quant aux competences et a certaines caracteristiques et, de l'autre, les besoins des individus en matiere de progression de carriere. Finalement, Ie succes de la planification des ressources humaines repose aussi sur la capacite it composer avec les circonstances qUi se presentent. Ainsi, la situation economique peut changer et les besoins en ressources humaines peuvent augmenter soudainement. Dans ces situations, l' organisation doit etre en mesure de s'adapter rapidement. Bref, la planification des ressources humaines doit demeurer flexible.
Conclusion Dans ce chapitre, il a et{~ question de la planification des ressources humaines tant sur Ie plan strategique que sur Ie plan operationnel. La planification strategique des ressources humaines a comme principal objet !'integration des considerations reliees aux ressources humaines aux etapes de Ia formulation et de la mise en ceuvre de la strategie. Quant a la planification operationnelle, elle vise a s'assurer que l'entreprise possedera les ressources humaines que
Chapltre 3
I Donner une orientation et de la coherence a la GRH
requiert sa strategie. Cette demarche consiste a prevoir 1a demande de t~avail (les besoins de I'entreprise en ressources humaines) et l'offre de trav~ll yes ressources humaines dont elle dispose) afin de prendre Ies mesures qm s Im posent pour eviter les penuries et les surplus de main-d'reuvre. La reussite de la planification des ressources humaines repose sur deux conditions au moins. PremU~rement, la direction du service des ressources humaines doit obtenir l'appui des cadres hierarchiques, car ce sont eux les premiers responsables de la mise en reuvre des plans relatifs aux ressources humaines dans leur milieu de travaiL Deuxi€~mement, eIle doit avoh acces a un systeme d'information qui facilite Ia collecte, Ie traitement et la trans mission de donnees sur les emplois et les employes. Lorsque l'intervenant en res sources humaines dispose de renseignements fiables, il peut reeIlement contribuer a ameliorer la prise de decision dans Ie cadre d'une gestion previsionnelle.
de r evision
o Quelle distinction faut-il faire entre la planification strategique et la planification operationnelle des ressources humaines ?
8 En vous reportant au modele de la planification strategique des res sources humaines, expliquez quels sont les principaux determinants des systemes (ou pratiques) de GRH.
o fonction Expliquez
par queUe approche la « ressources humaines» peut jouer un role important a 1'0c casion de la formulation des objec tifs strategiques de l'organisation.
e Expliquez queUes sont les pratiques de GRH les plus appropriees pour appuyer une strategie de domina tion par la qualite.
"Precisez la strategie fonctionnelle de GRH qui conviendrait Ie mieux a chacune des trois entreprises sui vantes: IBM Canada (www.ibm.com/ ca/fr), les Rotisseries Saint-Hubert (www.st-hubert.com) et SNC-Lavalin (www.snc-lavalin.com).
(it Vne tres grande entreprise du sec
teur de la metallurgie cherche a prevoir les consequences de l'evolu tion du marche et des nouvelles technologies de production quant a ses be so ins en res sources humaines. QueUe methode de prevision de la demande de travail convient Ie mieux a cette situation?
• Expliquez comment l'evolution de mographique des prochaines annees est susceptible d'influencer l'offre de travaiL
o Expliquez comment l'evolution eco
nomique previsible des prochaines annees est susceptible d'influencer la demande de travail dans Ie sec teur de l'aeronautique.
CD Decrivez la nature des desequilibres
entre la deluande et l'ofire de travail
qui pourraient justifier les mesures suivantes: la semaine de travail re duite, les licenciements, la forma tion et les heures supplementaires.
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Partie I
I Les defis du renouvellement
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Partie I
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Les defis du renouvellement
Le Groupe Plastifab
Le
Groupe Plastifab, dont Ie chiffre d'affaires est de 50 millions de dollars, a son siege social a Saint-Jean-sur Richelieu, aproximite de Montreal. Vne caracteristique de cette entreprise est la grande diversite de ses activites. Le Groupe Plastifab produit des com posantes de carton-fibre pour les chaus sures, des moules pour l'injection de plastique, des jets pour baignoire a remous, des dos de meubles, des boites pour Ie transport d'instruments de musique, des planches a neige, des jOints de culasse (gaskets), il colle des pieces de lingerie feminine, et ainsi de suite. La specialite du Groupe Plastifab est toutefois l'injection de plastique, une expertise qui lui procure 25 % de ses ventes. Le marche du plastique est difficile a penetrer parce qu'il s'agit d'un procMe complexe et que les clients hesitent a changer de fournisseur. Sur ce marche, Ie Groupe Plastifab se donne comme objectif d'etre parmi les 5 entreprises les plus importantes dans cette industrie qUi compte environ 300 entreprises au Quebec. II vise des ventes de 100 mil lions de dollars d'ici 5 ans, dont pres de la moitie provenant de l'exportation. Pour y arriver, il veut mettre l'accent sur sa specialite, qui est l'injection de plastique. Sa strategie d'acquisitions vise justement a renforcer l'integration autour de cet axe. D'ailleurs, Marc Germain, Ie vice-president et chef de l'exploitation de I'entreprise, planifie actuellement l'acquisition de 2 presses a injection de 1500 tonnes. Le Groupe Plastifab pre voit aussi rencontrer des clients poten tiels en Nouvelle-Angleterre de fa~on a elargir son champ d'activite.
Au cours de sa longue histoire, cette entreprise a connu une croissance cons tante et relativement stable. Cependant, ses objectifs strategiques actuels la pousseront vers une croissance acceieree au cours des prochaines annees. Ses effectifs passeront en effet de 450 a 700 employes d'ici 5 ans. En ce moment, l'entreprise emploie dans ses differentes usines des assembleurs, des finisseurs et des controleurs de produits en plas tique. II existe toutefois tres peu de rei eve dans ces specialites en raison d'un sys teme de formation professionnelle defi cient. Meme si la commission scolaire locale prevoit l'ouverture prochaine d'un Centre de formation integree en plasturgie et caoutchouc, les premiers diplomes ne seront disponibles que dans trois ans au mieux. Par ailleurs, meme si l'on trouve parfois des candi dats convenables, la periode d'appren tissage apres l'embauche est assez longue avant que les nouvelles recrues ne soient en mesure de realiser un tra vail de qualite. M. Lambert, Ie president de l'entreprise, craint que cette penurie de main-d'reuvre ne freine sa croissance et n'empeche la realisation de ses objec tifs strategiques.
QueUe strategie fonctionnelle en ma tiere de res sources humaines pourrait soutenir la strategie du Groupe Plastifab et ameliorer sa competitivite?
Chapitre 3
I
Donner une orientation et de la coherence
a la GRH
L'lmprimerie Gagnon Depuis l'acquisition de l'Imprimerie Gagnon par Ie Groupe Transfrontal G.T.C., les affaires se portent tres bien. Juliette Gagnon, la fondatrice de l'im primerie, et les autres dirigeants ont accepte de vendre l'entreprise car, dit eUe, « les perspectives de croissance et de rentabilite pour les entreprises de taille moyenne comme la notre nous paraissent plus faibIes)}. La decision de vendre l'entreprise n'a donc pas provo que de dissension parmi les actionnaires et la haute direction de l'Imprimerie Gagnon. La vente a cependant occasionne quelques departs dans Ie domaine administratif, mais il n'y a pas eu de licenciements importants dans les acti vites d'exploitation. Au contraire, ces activites sont en croissance depuis la vente de l'entreprise. Meme si Ies employes de l'imprimerie ont compris Ie bien-fonde de cette deciSion, il n'en demeure pas moins qu'ils ont subi un choc. La direction devra donc gerer avec soin !'integration des deux entites. Pour sa part, Mme Gagnon va rester a la barre des Imprimeries Gagnon pendant encore deux ans, pour assurer la transition; eUe qUittera par la suite l'entreprise afin de se consacrer a d'autres projets. C'est sur cette toile de fond que la direction des Imprimeries Gagnon devra poursuivre Ie developpement de l'entre prise. En 10 ans, Ie nombre d'employes est passe de 2S a 275 et Ies revenus de l'entreprise ont bondi de 2S0 000 $ a 40000000 $. L'entreprise doitune partie de sa croissance recente a l'impression d'un roman qui s'est vendu a 405000 exemplaires. L'impression de ce roman
a necessite 500 tonnes de papier trans portees dans 2S camions-remorques et les presses ont ete actives pendant 250 heures. Juste avant l'acquisition, les Imprimeries Gagnon realisaient 50% de leur chiffre d'affaires au Quebec, 38 % dans Ie reste du Canada et 12 % aux Etats-Unis. Les relations du travail pour raient etre qualifiees de saines dans cette entreprise. Les membres des syndi cats des pres siers et de la photogravure, qui sont affilies au Syndicat canadien des communications, de l'energie et du papier, ont enterine une entente juste avant la vente de l'entreprise. Devenues une division du Groupe Transfrontal G.T.C., les Imprimeries Gagnon devraient poursuivre leur crois sance et meme l'accelerer. Premiere ment, Ie Groupe Transfrontal G.T.C. prevoit investir 10 millions de dollars dans les Imprimeries Gagnon. eet in vestissement servira a acheter un edifice attenant de 5022 metres carres qui portera la superficie de l'usine a 11 625 metres carres. Une seconde ligne de re liure sera installee dans trois mois et une presse rotative dans six mois. Par ailleurs, au cours des prochaines annees, l'entreprise devra remplacer son equi pement vieillissant et adopter une tech nologie d'impression plus performante. Cette expansion creera entre 40 et 45 emplois et la production sera assuree par des equipes de travailleurs auto nomes qui se gerent eux-memes. L'en treprise devra donc combler des postes d'operateurs, de pressiers et des emplois en finition de reliure, entre autres. II faut savoir que, pour certains metiers dans Ie secteur de l'imprimerie, Ies pe riodes d'apprentissage requises sont
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I Les detis du renouvellement
assez longues. Par exemple, il faut gene ralement dnq ans pour qu'un aide pressier accede a un poste de pressier. Avec to us ces changements· qui se dessinent et conformement ala philoso phie de gestion de Transfrontal G.T.c., la direction des Imprimeries Gagnon souhaite instaurer une demarche plus formelle de planification des ressources humaines.
La direction des Imprimeries Gagnon fait appel it vos services de consultant externe afin que vous l'aidiez a mettre en place une gestion previsionnelle des ressources humaines. QueUe demarche lui proposerez-vous?
Apres l'Hude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Definir l'organisation du travail. • Decrire Ies principales caracteristiques des nouveaux modeIes d'organisation du travail. • Connaitre les perspectives organisationnelle (structure), collective (equipes de travail) et individuelle (analyse et conception des postes) de l'organisa tion du travail. • Presenter les principales formes d'amenagement du temps de travail, des lieux de travail et de Ia relation d'emploi. • Decrire les facteurs critiques assurant Ie sucd'.'s et la perennite des experiences de transformation de l'organisation du travail.
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Les defis du renouvellement
Sachez creer un environnernent propice ala creativite 1
II
est tres payant pour les PME de deve lopper un environnement de travail propice a l'eclosion de la creativite chez leurs employes. Un tel environnement se carac terise par un esprit de liberte dans l'en treprise et de valorisation des taches accomplies par chaque employe. Robert Denis peut en temoigner mieux que tout autre. Fils d'entrepreneur, titulaire d'un MBA, riche de sept ans de travail comme consultant en management, il souhaitait mettre ses connaissances en pratique en se portant acquereur, en 1986, d'un marche Provigo, a Laval. «Les debuts furent un enfer, raconte t-il. La pegre avait infiltre mon commerce et Ie personnel me declara d'emblee la guerre. J'ai evite la faillite en me battant chaque jour pour regagner la confiance de mes salaries. » Un succi!s qui repose sur la transparence
Au fil des ans, M. Denis a reussi a faire de son marche un des plus rentables de la ban niere Provigo. Son succes amena meme HEC Montreal a reconnaztre son entreprise de 85 employes comme un exemple de ges tion performante d'une PME. «Chez nous, tout repose sur la trans parence. Notre chiffre de ventes est affiche toutes les semaines. Depuis lOans, Ie tiers des profits nets du marche est distribue a l'ensemble des employes a titre de partici pation au benefice», affirme M. Denis. Selon lui, la recette de cette reussite repose sur Ie fait qu'il a pu placer Ie commis d'epicerie au centre de la strategie de l'entreprise. Par exemple, c'est Ie commis
1. M. De Smet,
« Sachez
qui est Ie premier consulte sur la maniere d'agencer les produits sur les rayons ou encore lorsqu'il s'agit d'entreprendre des travaux de modernisation dans Ie commerce. «Il n'y a pas de miracle, concede M. Denis. Cette transparence requiert du temps et de la patience. Les decisions se prennent en equipe au cours de frequentes reunions. Pour ma part, je passe une journee entiere par semaine a rediger des communiques a l'adresse de tout Ie person nel les informant sur des sujets aussi varies que la vie interne de l'entreprise ou des poli tiques gouvernementales qui touchent Ie commerce de l'alimentation.» Des idees souvent simples
Si M. Denis a pu gagner la confiance de son personnel au fil des ans, certaines entre prises ont pris Ie risque de miser, en situa tion d'urgence, sur la cooperation de leurs travailleurs. C'est Ie cas de CMP Produits Metalliques qui rea lisa it voici 2 ans encore 65 % de son chiffre d'affaires grace a son client principal, Nortel. «Tres rapidement, Ie volume des com mandes s'est reduit comme peau de cha grin. Plut8t que de licencier massivement, nous avons decide de revoir l'ensemble de nos processus d'affaires en y impliquant la totalite de notre personnel », indique Michel Labrecque, directeur corporatif, ressources humaines, de cette PME de 350 employes dont Ie siege social est situe aChtiteauguay. C'est ainsi qu'un travailleur du departe ment des presses-plieuses a propose une reorganisation spatiale de toute la machi nerie; elle fut disposee autour d'un flot
creer un environnement propice it la creativite ", Les Affaires, 26 octobre 2002.
Chapitre 4
central ou sont instantanement access i bles les outils indispensables a tous les employes. «Ce sont de petites choses comme celles-Ia qui ont ete cruciales pour la survie de l'entreprise en engendrant des gains de productivite importants. Toutefois, elles bousculent en profondeur les habitudes du personnel et necessitent, par consequent, un effort d'explication constant aupres du personnel sur les raisons du changement», dit M. Labrecque. Pour les entreprises qui ne sont pas en situation d'urgence comme l'etait CMp, Camille Carrier, professeure titulaire en management a l'Universite du Quebec a Trois-Rivieres, suggere souvent de recourir a l'ecrit pour faire emerger la creativite chez les travailleurs. «En proposant un conte dans lequel les employes peuvent rattacher des situations qui se passent dans leur organisation, on enleve certaines inhibi tions et on permet a des personnes qui ne disposent pas de grandes habiletes de com munication verbaIe de manifester leurs idees », exp/ique ume Carrier. L'idee sur papier est I'approche privile giee par Venmar Ventilation. « On pratique abondamment Ie remue-meninges, ou l'on
I Gerer I'organisation et la transformation du travail demande a chacun de mettre par ecrit ses idees. Ou encore une technique appeIee <{ emergence et convergence de concepts», dans laquelle on elimine, grace a une grille qualitative, idee apres idee pour finalement arriver a formuler Ie bon concept», dit Daniel Forest, vice-president aux techno logies et developpement de produits, de Venmar. «Ce sont des techniques qui nous ont deja bien servis dans Ie passe et grace auxquelles on s'assure d'aIler chercher Ies idees innovatrices de tous Ies participants», estime-t-il.
o ces Quels principes prevalent dans experiences d'organisation du travail ? • En quoi la taille d'une entreprise influence-t-elle I'organisation du travail ?
Au cours de Ia derniere decennie, l'organisation du travail a attire I'attention d'un grand nombre de specialistes et de praticiens de tous horizons profes sionnels. Les juristes, les specialistes de la gestion, les informaticiens, les comptables, les ingenieurs, les sociologues, les specialistes des relations indus trielles, les psychologues, les syndicalistes et les fonctionnaires se sont mis a la tache pour tenter d'ouvrir la boite noire de l'organisation du travail. L'obsolescence des modeles traditionnels d'organisation du travail a donc provoque plusieurs modes dans Ie domaine de l'organisation du travail: ceia est alle de l'approche sociotechnique, popularisee sous Ie vocable de qualite de la vie au travail, a I'approche de la democratie industrielle, en passant par Ia reingenierie des processus et la restructuration. L'organisation du travail
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Les defis du renouvellement
pe~t etre abordee a partir de differents points de vue et perspectives tout aussi mteressants les uns que les autres mais souvent divergents. La GRH situe ~: plus en plus l~organisation du travail au centre de ses preoccupations, car I etude de ce phenomene permet de mieux comprendre comment les deci sions en cette matiere influencent toutes les pratiques de GRH et comment, a leur tour, les pratiques de GRH ont un effet sur l'organisation du travail.
Ce chapitre se divise en six sections. Dans la premiere section, l'organisa tion du travail fera l'objet de definitions. Dans la deuxieme section, les raisons expliquant l'importance de l'etude de l'organisation du travail pour la GRH seront exposees. La troisieme section explore la recherche d'un nouveau modele d'organisation du travaiL La quatrieme section presente les trois pers pectives de l'organisation du travail, a savoir les perspectives organisation nelle, collective et individuelle. Par la suite, la cinquieme section traite de l'organisation du travail dans Ie temps et l'espace de meme que dans la rela tion d'emploi. Enfin, la sixieme section expose les facteurs de succes et de perennite des demarches de transformation de l'organisation du travail.
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.~~!i.~~t.i~.~~ .~~ .1~~~~~~i.s.~~i~~ .~"':'. ~~,!-~~~1. Au cours des deux dernieres decennies, Ie milieu universitaire, Ie monde des affaires et Ie monde syndical ont beaucoup parle de reorganisation du travaiL Pour bien comprendre cette realite, il faut d'abord se referer, comme Ie terme l'indique, au concept d'organisation du travail. On devine facilement que Ie prefixe «re» signifie une reforme ou un renouvellement des theories et des pratiques liees a l'organisation du travail qui tirent leurs origines modernes des travaux de Taylor du debut du xx e siecle. Avant de preciser ces jalons historiques, it est pertinent de suggerer quelques definitions. L'organisation du travail peut se definir camme «Ie double mouvement de division du travail et de sa reunification grace a des mecanismes de coordina tion appropriee» (LapOinte, 1995, p. 4). Henry Mintzberg, auteur et chercheur prolifique qui a consacre la majeure partie de son reuvre aux structures et au fonctionnement des organisations, definit la structure d'une organisation comme «la somme totale des moyens employes pour diviser Ie travail entre des taches distinctes et pour ensuite assurer la coordination necessaire entre ces taches» (1982, p. 18). Cette definition de la structure organisationnelle pourrait fort bien s'appliquer a l'organisation du travail. Ces definitions nous renvoient aux travaux de Taylor sur la division du travail, en ce sens que tout processus operationnel ou flux d'activites (produire un medicament, emettre une police d'assurance, assembler un vehicule, sOigner un malade, trans mettre des connaissances, etc.) est divise en actions et en gestes plUS simples. Ces actions et ces gestes sont par la suite regroupes de fa~on simple ou complexe pour former des postes de travail, qui seront caordonnes par des personnes (supervision) ou par divers mecanismes (des politiques, des proce dures, des regles, un cantrole, la techno}ogie, etc.).
Chapitre 4
I Gerer I'organisation et la transformation du travail
Par ex empie, une institution financiere est caracterisee par certains pro cessus de transactions et de services au comptoir. Ceux-ci vont de l'accueil du client jusqu'a la remise d'argent, a l'achat de services d'assurances ou au depot de montants dans des titres de placement, en passant par la demande d'in formation, Ia validation de I'identite, Ia mise a jour de l'information, l'analyse des besoins, les recommandations, etc. Vne fois ces actions ou ces gestes de termines, l'organisation a Ie choix entre la recomposition simple, ou chaque tache sera effectuee par une personne specialisee qUi traitera un volume important de transactions similaires, ou Ia recomposition complexe, ou un regroupement de taches sera confie a un groupe de personnes polyvalentes pouvant planifier et controler un certain nombre d'eIements du processus operationnel ou du flux d'activites dans un contexte de flexibilite necessitant la polyvalence des personnes et de leurs competences. Dans Ie premier cas, on instaurera une serie de mesures de supervision ou de controle afin de coor donner Ie travail de chaque personne. Dans Ie second cas, Ie groupe Iui-meme verra a s'autoreguler et a s'assurer que Ies objectifs sont atteints et que Ies normes de qualite sont respectees. Les travaux menes par Ie Collectif de recherche sur Ies innovations sociales dans les entreprises et les syndicats (CRISES), qui regroupe de nombreux spe cialistes (Euvrant dans Ie domaine de la sociologie du travail et des organisa tions, font etat du fait que les nombreuses conceptions traditionnelles de l'organisation du travail reposent principalement sur la dimension formelle ou prescrite du travaiL Cette dimension de l'organisation du travail ignore une facette importante de Ia dynamique de l'organisation, soit Ie caractere reel du travail ou encore I'engagement au travail (Lapointe, 1992, 1995). En effet, on a fait Ia demonstration que, queUe que soit la fa<;on dont Ie travail est organise (travail prescrit), il existe dans les organisations une reserve de productivite inexploitee qUi est conditionnee par les rapports informels et les rapports sociaux. Cette reserve represente egalement Ie degre d'autonomie et de liberte des personnes qui accomplis sent Ie travail, car meme dans Ie cas d'un travail encadre et routinier, Ies travailleurs peuvent echapper aux controies les plus rigides (Terssac, 1992). Les travailleurs peuvent executer leur travail, en en {aisant tout juste assez pour que la production {onctionne sans avoir trop de problemes, ou ils peu vent en taire Ie maximum, donner Ie meilleur d'eux-memes pour sortir la pro duction la plus elevee et la qua lite la meilleure. Autrement dft, its peuvent se trainer les pieds, ce que Taylor appelait la fUinerie systematique, ou Us peuvent se de{oncer au travail. Entre l'implication minimale, l'implication maximaIe et ['engagement total, il y a vraiment une question de degres (LapOinte, 1992; 1995, p. 6).
Bref, cette dimension de l'organisation du travail attire notre attention sur Ie conflit ou Ia tension qui existe entre I'efficacite technique ou economique du travail et l'humanisation du travail, ou, si l'on pretere, entre l'organisation du travail comme levier de rendement et l'organisation du travail comme lieu d'appartenance ou se tissent des rapports humains. Cette tension s'est
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Les defis du renouvellement
d'ailleurs exprimee dans un courant de pensee qui a ete dominant it la fin du xx e siecle, soit l'approche sociotechnique. Cette complexite du concept d'organisation du travail couplee it un envi ronnement en constante evolution (VOir Ie chapitre 2) nous obligent donc it repenser les modeles d'organisation du travail, d'ou l'interet grandissant qu'a suscite Ie concept de reorganisation du travail.
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.~~':1!9:U:~~ ~~:u:t.-~l. !~~!~.~':'~~~~ ~~ .t.T.~~~i.l? Les raisons militant en faveur de la reforme de l'organisation du travail et de l'importance de cette pratique de gestion sont nombreuses et bien docu mentees (Grant, Belanger et Levesque, 1997; Giles et autres, 1999). Pour les besoins de ce chapitre, nous retiendrons celles qui nous apparaissent les plus pertinentes (voir Ie tableau 4.1).
4.2.1 La recherche de l'efficacite et de l'efficience Depuis toujours, les efforts deployes dans l'organisation du travail gravitent autour des poles de l' efficacite (<< comment faire les bonnes choses}}) et de l'efficience (<
lES RAISONS MOTIVANT LA REORGANISATION DU TRAVAil .
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Chapitre 4
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Gerer I'organisation et la transformation du travail
approches scientifiques et menant souvent it des certifications par des orga nismes reconnus internationalement (comme l'International Standards Organization pour la certification ISO) ou par de grands donneurs d'ordres. Le lien entre la reorganisation du travail et la performance organisation nelle n'est pas facile it etablir. En effet, la majorite des enquHes, des etudes de .cas et des meta-analyses indiquent que la reorganisation du travail, lorsqu'elle est conduite de fa~on eclairee, entraine des resultats positifs en ce qUi a trait aux gains de productivite, it la qualite, a l'absenteisme, it la satisfaction et it la mobilisation (Higgins, Duxburyet Koziol, 1997). Bien qu'ils soient beaucoup moins documentes, les echecs en matiere de reorganisation du travail traduisent la presence d'un ensemble d'effets plus ou moins desires, qui vi en nent souvent contrecarrer les gains. Parmi ces effets, on observe une augmen tation substantielle des couts de formation, des conflits, de la pression des pairs et une plus grande frustration face au fonctionnement des processus decisionnels. On observe egalement un accroissement de la tension et du stress cause par la del(~gation des responsabilites, par un rythme soutenu et par une charge de travail tres elevee. Bref, la performance organisationnelle associee it la reorganisation du travail depend non seulement des modes d'organisation du travail qui sont choisis, mais aussi de la fa~on de les implanter et de les mettre en U'uvre.
4.2.2 Le passage de la production de masse
a la specialisation souple
La consommation a eu tendance it se demassifier et it se personnaliser. Cela a eu pour effet d'augmenter la variete des gammes de produits et, par Ie fait meme, de multiplier les ajustements sur les lignes de production ou dans la fa~on de fournir des services (Piore et Sabel, 1984). Les nouvelles applications informatiques de «gestion de la relation client" (cllstomer relationship mana gement CRM) ont acceiere Ie mouvement de la personnalisation de Ia con sommation et, par Ie fait meme, stimule la recherche de la flexibilite dans I' organisation du travail.
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les defis du renouvellement
4.2.3 Les nouvelles technologies de l'information et de la communication La vague deferlante des nouvelles technologies de l'information et de la com munication a permis non seulement une automatisation acceleree des sys temes de production, mais egalement une virtualisation des echanges, des communications et de la prise de decision (Lefebvre et Lefebvre, 1999). Les possibilites offertes par les technologies ont permis de mettre au point ce qu'il est convenu d'appeler la «production juste-a-temps» (Womack, Jones et Roos, 1990), phenomene egalement nomme «gestion a flux tendu» ou «produc tion allegee". Vne telle conception de Ia gestion, surtout appliquee aux opera tions, vise a eliminer Ies goulots d'etranglement, a faire la chasse aux temps improductifs et au gaspillage (3 la non-qualite), 3 rectuire les inventaires en amont et en avaI, bref 3 gerer Ies systemes et les humains sous tension, sans filet. Comme Ie chapitre 2 Ie demontre, la technologie bouleverse les pra tiques traditionnelles liees 3 I'organisation du travail, lesquelles doivent s'adapter a un travail de plus en plus relationnel, interdependant et meme delocalise (teletravail et equipes virtueUes). La technologie est egalement Ie catalyseur de Ia reingeriierie des organisations, car elle represente une occa sion de faire les choses de maniere tres differente. Malheureusement, elle ne tient pas toujours compte de I'histoire des organisations ni des personnes qUi les composent (Cornet, 1999).
4.2.4 Les choix strategiques face au redimensionnement Devant I'ampleur des changements que nous venons d'evoquer, beaucoup d'entreprises ont dti prendre des decisions difficiles concernant Ie redimen sionnement (downsizing). Cela s'est traduit et se traduit encore aujourd'hui par des licenciements massifs, des departs volontaires assistes, des preretraites, etc. L'economie canadienne a ete temoin dernierement du redimension nement organisationnel spectaculaire de firmes comme GM, Bombardier, Air Canada et Bell. Bref, il est souvent moins complexe de faire varier les effec tifs que de reformer l'organisation du travail et de remettre en question la pertinence des processus2 . Mais cette strategie comporte des limites, et plus une organisation se voit acculee au mur, plus elle a l'obligation d'interroger son organisation du travail. Beaucoup d'entreprises et de secteurs d'activite se retrouvent egalement face a des defis majeurs touchant a la reorganisation du travail, car la sortie massive d'employes experimentes au cours des dernieres annees a laisse un trou beant dans Ie capital de competences de l'entreprise. La reorganisation du travail devra tenir compte des obligations strategiques de la gestion des connaissances pour systematiser les savoirs individuels et collectifs afin d'assurer la continuite des avantages concurrentiels d'une entreprise.
2. Souvent, ces deux actions sont implantees simuitanement.
Chapitre 4
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Gerer I'organisation et la transformation du travail
4.2.5 Le defi de l'intergenerationnel La difficulte a recruter une main-d'ceuvre qualifU~e, plus jeune et qui a des attentes differentes face au marche du travail (Pare, 2002) nous renvoie ega le ment a la reorganisation du travail. En effet, il est maintenant vital pour les organisations d'encourager les travailleurs experimentes a rester a leur emploi et a partager leurs savoirs avec les plus jeunes. Les dirigeants seront appeles it faire cohabiter des pratiques de conciliation travail-famille, de partage du travail, de retraite progressive, de mentorat, de teIetravail, de gestion des connaissances, et ainsi de suite.
4.2.6 Le besoin d'epanouissement des personnes Meme s'il a respecte ses promesses concernant l'efficacite, Ie taylorisme a pro duit de multiples effets pervers associes ala dequalification du travail, it la dis qualification du travail (au rejet du marche du travail), a la deterioration de la qualite de la vie au travail et a l'inadequation des aspirations de nouvelles generations de travailleurs. Bref, Ie travail a souvent aliene les personnes qui l'accomplissaient. Ce phenomene a ete documente amplement sous l'angle de la crise du travail (Vinet, Bourbonnais et Brisson, 2003) et de Ia periode peu glorieuse des dysfonctions (l'absenteisme, Ie roulement, Ies accidents du travail, les maladies professionnelles, Ie sabotage, la mauvaise fabrication, les conflits larves, les conflits ouverts, les greves, les griefs, etc.). La reorganisation du travail et Ie travail en equipe permettent egalement a l'employe de s'af franchir des regles et de la bureaucratie, de s'epanouir et de controler son environnement. En definitive, Ie travail occupe une place centrale dans Ie sys teme de valeurs des individus, exen;ant ainsi une pression pour humaniser les milieux de travail sous I'impulsion d'un rapport de force susceptible d'etre favorable a la nouvelle generation de travailleurs. En somme, ces quelques explications de l'evolution des raisons militant en faveur de Ia reorganisation du travail montrent que Ie taylorisme n'est plus adapte et qu'il faut maintenant parler d'une nouvelle fa~on de concevoir
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les defis du renouvellement
I'organisation du travail. La recherche d'initiatives en ce sens et Ia quete de nouveaux modeles donnent lieu, par contre, a tout un eventail de pratiques, certaines etant en rupture avec Ie passe, d'autres prolongeant Ie systeme de Taylor. Dans ce dernier cas, on parle de taylorisme assiste par ordinateur (Coriat, 1990) ou encore de taylorisme democratique (Adler, 1997). Les pra ticiens et Ies chercheurs ont done senti Ie besoin de mieux documenter ces pratiques, ce qUi a engendre certaines typologies des nouveaux modeles d'organisation du travail.
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Vers de nouveaux modeles d'organisation du travail
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L'analyse historique de la pensee et du discours en matiere d'organisation du travail comprend trois periodes, lesquelles sont marquees par Ie taylorisme, Ie fordisme et Ie post-fordisme. Le taylorisme a domine Ie monde industriel a travers la standardisation des methodes de travail et la division entre concep tion et execution. Le fordisme a vu Ie jour apres la Seconde Guerre mondiale en reponse au couplage des vertus du taylorisme et de celles de la mecanisa tion. Ce stade de I'organisation du travail s'est appuye sur Ia consommation de masse, sur la production de masse de meme que sur I'evolution propor tionnelle des gains de productivite et du pouvoir d'achat des salaries. Fina lement, Ie post-fordisme correspond a la periode de 1970 a aujourd'hui, alors que Ie modele de l'apres-guerre provoquait la rigidite, l'iniquite et Ia deshu manisation du travail. La separation entre la conception et l'execution a tari la source des gains de productivite et Ie systeme commence a etre contre product if. Les nouveaux modeles post-fordistes associes a la reorganisation du travail ou aux nouvelles formes d'organisation du travail ont des contours floos, une longevite douteuse et des fondements qui sont en construction. II est donc opportun de presenter les caracteristiques des modeles traditionneis et des nouveaux modeles d'organisation du travail (voir Ie tableau 4.2). Dans Ies nouveaux modeles3 , l'organisation du travail dans l'entreprise est caracterisee a la fois par une flexibilite interne et une rigidite externe. Cela s'explique par Ie fait que l'on favorise la securite d'emploi et un investisse ment important sur Ie marche interne du travail en echange d'une plus grande flexibilite fonctionneIle, c'est-a-dire de l'elimination du cloison nement entre les metiers, de la reduction du nombre de classifications, de la polyvalence et de la rotation des postes. En favorisant la flexibilite interne, l'organisation provoque une rigidite externe, en ce sens que Ie recours a la sous-traitance ou aux mises a pied est limite, faisant I'objet de regles d'en cadrement strictes. Par contre, certains auteurs, comme Galambaud (2002), pretendent que les nouveaux modeles se definissent plus par Ie concept d'en treprise ouverte que par celui d'entreprise communautaire, c'est-a-dire par
3. Une analyse relativement exhaustive de 104 cas de reorganisation du travail, menee par des cher cheurs de l'UQAM (Grant, Belanger et Levesque, 1997), a demontre que la recherche de la flexibilite etait la priorite dans 82 % des entreprises etudiees.
Chapitre 4
I Gerer I'organisation et la transformation du travail
lES CARACTERISTIQUES DES MODElES TRADITIONNElS ET DES NOUVEAUX MODElES D'ORGANISATION DU TRAVAil
Souree: Adapte de P.-A. Lapointe, « La reorganisation du travail: continuite, rupture et diversite,), dans l,a reorganisation dll travail: efficacite et implication, sous la direction de R. Blouin et autres, Quebec, Les Presses de J'Universite Laval, 1995, p. 23, et de F. Belussi et F. GaribaJdo, « Variety of pattern of the post-fordist economy: Why are the old times still with us and the new time yet to come? ", dans Work and Society, sous la direction de K. Grint, Cambridge, Mass., Polity Press, 2000, p. 280-302.
une externalisation de l'organisation a travers un reseau d'entreprises auto nomes qUi s'unissent temporairement pour creer un reseau de valeur ajoutee cible sur des segments de clients et des segments de produits et de services (Lefebvre et Lefebvre, 1999). Dans les nouveaux modeles, l'engagement des employes est sus cite par une panoplie de pratiques d'echange de l'informa tion, de redistribution du pouvoir (empowennent) , d'identification (culture d'entreprise), de relations du travail integratives (negociation raisonnee) et de valorisation ou de reconnaissance. Par opposition, Ie paradigme traditionnel (tayloriste et fordiste) reduit au minimum l'engagement des employes en insistant davantage sur Ie respect des attentes quant a l'execution du travail. En definitive, « moins on en sait, moins on en dit et mieux c'est». Les nouveaux modeles d,organisation du travail sont appeles it requalifier Ie travail, a reconstruire l'interface entre Ia conception et l'execution, bref a elargir et a enrichir Ie travail. Ceia permettra aux employes d'acquerir des compHences et des habiletes relativement, entre autres, au diagnostic de si tuations, a la resolution de problemes, au travail en equipe, ala planification,
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Les delis du renouveUement
it l'organisation et au controle. Aujourd'hui, on parle donc d'une organisation du travail qualifiante.
Les modeles renouveles laissent aux acteurs une marge de mana:uvre leur permettant d'analyser et de recomposer Ie travail, contrairement aux modeles traditionnels ou la technologie joue un role « deterministe» et structurant quant it la structure organisationnelle et it l'organisation du travail. En matiere de vitesse, les nouveaux modeles accordent plus d'importance it la rapidite de la creation et du partage des savoirs collectifs (Nonaka et Takeuchi, 1995) et moins d'importance a la rapidite d'execution de taches simples et decomposees. Enfin, dans les nouveaux modeles, Ie rendement est interactif, en ce sens qu'il resulte de la synergie entre les unites de travail et les personnes. Dans les modeles traditionnels, Ie rendement est plutOt additif, c'est-a-dire qu'il est l'objet de la superposition de resultats associes a des unites et a des personnes dans une longue chaine d'activites lineaires et programmees.
4.3.1 Les modeles nationaux d'organisation du travail Les nouveaux modeles d'organisation du travail sont souvent associes it des modeles nationaux. Ainsi parle-t-on des modeles japonais, allemand ou sue dois. Chacun de ces modeles s'inspire des caracteristiques empruntees a son histoire, a sa culture, a ses institutions et it ses organisations dominantes (Sony, Volkswagen, Volvo, etc.). Mais chacun de ces trois modeles est partie integrante d'un plus grand systeme socioeconomique que certains auteurs ont appele «capitalisme cooperatif» ou «capitalisme rhenan». Cette forme de capitalisme, par opposition au capitalisme etatique (France, Italie) ou au capitalisme liberal (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Canada), repose sur l'iden tification a des valeurs collectives fortes, au partenariat des acteurs socio economiques, it des formes de regulation du marche importantes (Ie role des
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I Gerer i'organisation et la transformation du travail
institutions financieres par rapport au marche financier) et a des formes de gouvernance publique plus musclees et transparentes.
le modele japonais La specificite du style de gestion a la japonaise se fonde sur des facteurs insti tutionnels, organisationnels et culturels. Toutefois, ce qui distingue Ie plus Ie modele japonais est sans aucun doute la gestion de la production et la gestion des ressources humaines. La gestion de la production est caracterisee par la philosophie du juste-a-temps ou de la production allegee (l'aplanissement des niveaux hierarchiques, la qualite totale, la flexibilite des operations, la chasse aux temps improductifs). Quant a la gestion des res sources humaines, elle se distingue par la dynamique des communications et de la participation aux decisions, Ie recrutement determine par la culture d'entreprise, la loyaute des employes a travers un syndicalisme d'entreprise, l'emploi a long terme et la promotion selon l'anciennete, la remuneration liee aux resultats et la protec tion paternaliste de l'employeur (Tremblay et Rolland, 1999). La predominance de la gestion de la qualite et de la productivite a donne lieu a des succes inegales dans Ie monde, mais souvent au detriment de la qualite de la vie au travail et de l'autonomie. L'intensification du travail, les longues semaines marquees par beaucoup d'heures supplementaires et l'aug mentation du stress ont provoque un epuisement de la main-d'reuvre (Lapointe, 1995). Le modele japonais a egalement inspire Ie mouvement mondial de la gestion de la qualite, dont un des principes est la standardisa tion des procedes de transformation et des processus de travail. En codifiant les savoirs individuels tires de l'experience, en les standardisant dans des procedes relativement bien definis et en controlant Ie respect de ces procedes, les organisations qUi appliquent Ie modele japonais reduisent significative ment la spontaneite, Ia creativite et l'autonomie des employes. CeUe dimi nution de I'autonomie individuelle se fait au profit d'un renforcement de I'autonomie collective dans la mesure ou Ie groupe participe a la definition et a I'amelioration des methodes de production. Les Nord-Americains ont importe et adapte avec beaucoup d'interet Ie modele japonais, car, contrairement aux modeles allemand et scandinave, il ne remet pas en question la redistribution du pouvoir dans l'organisation. Ainsi peuvent cohabiter une structure participative de cercles de qualite (des groupes de progres ou de resolution de problemes) et un modele hierarchique traditionnel.
le modele allemand L' Allemagne possede une longue tradition de dialogue entre les acteurs socio economiques. Les banques occupent une place predominante dans Ie systeme economique et les syndicats sont des acteurs majeurs dans la conduite des organisations. Les objectifs de rentabilite a court terme sont equilibres par les obligations rattachees a la satisfaction de la clientele et surtout it l'octroi de bonnes conditions de travail. Les engagements nationaux en faveur du deve loppement durable, de la formation professionnelle et du partenariat ant des
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I Les defis du renouvellement incidences importantes sur Ia vie de chaque milieu de travail. Ainsi, les employes voient dans l'entreprise un milieu de travail stable, securitaire et stimulant. lIs sont bien payes et travaillent en moyenne moins d'heures sur une base hebdomadaire.
Le modele suedois Dans Ie modele suedois, la priorite est accordee it la qualite de la vie au travail, it l'autonomie et it la democratie. La standardisation et la parcellisation sont remplacees par l'appropriation, par des collectifs de travail, de parties impor tantes des processus d'operations it l'interieur de cycles plus longs. L'autono mie individuelle et collective est alors plus grande, et la democratie s'exprime avec plus d'objectivite, ainsi que Ie demontrent les mecanismes de selection des chefs d'equipe. Ayant reconnu les competences des travailleurs, l'entre prise suedoise se base sur des equipes de travail qui operent selon Ie principe de l'autocontrole, dans un climat de respect des acteurs (Ie patronat et les syn dicats), de dialogue et de transparence de l'information (Aktouf, 1999). Cependant, Ie modele suedois connait des rates sur Ie plan de l'efficacite et du rendement, «comme en temoigne la fermeture de l'usine Volvo d'Uddevalla (Capelli et Rogovsky, 1994), qui a innove considerablement dans l'organisa tion du travail et de la production afin de procurer une meilleure qualite de la vie au travail» (Lapointe, 1995, p. 25).
4.3.2 A. la recherche d'un modele hybride En resume, Ie renouvellement de l'organisation du travail peut prendre plusieurs formes, illustrees par autant de modeles. Par contre, on peut affirmer que Ie modele traditionnel ne permet plus vraiment aux organisations d'af fronter Ie nouvel environnement des affaires et de la societe. En matiere d'or ganisation du travail, des pratiques innovatrices se situant quelque part entre Ie modele japonais, Ie modele allemand et Ie modele suedois sont susceptibles de creer des milieux de travail performants et humanisants. II n'existe pas de modele pur dominant, mais plutot un processus d'hybridation des modeles (Tremblay et Rolland, 1999) influence par des variables liees au contexte, it la culture et a I'organisation. Chose certaine, les acteurs de l'organisation gagneront it favoriser Ie passage de la productivite des ressources a la produc tivite de l'organisation (Vetz et Zarifian, 1994), it concevoir de ce fait une orga nisation du travail qualifiante, ce qui signifie davantage que des employes productifs.
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Les trois perspectives de l'organisation du travail
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II existe une multitude de cadres de reference permettant de decrire Ies ele ments constitutifs de l' organisation du travail. Mintzberg (1982) parle de parametres de conception, Fabi et Jacob (1994) evoquent des principes direc teurs, Guerin et Wils (1992) distinguent les pratiques de design organisation nel et les pratiques de design de I'emploi.
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I Gerer I'organisation et la transformation du travail
Afin de mieux comprendre la nature de l'organisation du travail, ses eU~ ments constitutifs et les frontieres de ce concept, nous aborderons les trois perspectives traditionnellement reconnues de l'organisation du travail: la per spective organisationnelle (la structure), la perspective collective (les equipes de travail) et Ia perspective individuelle (l'analyse et la conception des postes).
4.4.1 La perspective organisationnelle La structure organisationnelle peut etre definie comme etant l'arrangement des relations formelles et informelles entre les membres d'une organisation. La structure represente la repartition des responsabilites et des roles seion la dimension verticale de I'organisation (la hit§rarchie) et selon sa dimension horizon tale (les etapes des processus ainsi que Ies grandes fonctions comme Ie marketing, la production, les finances et les ressources humaines). Dans la majorite des cas, la perspective organisationnelle entraine un ensemble de decisions visant a affecter les ressources de maniere a atteindre les objectifs poursuivis par l'organisation.
Les types de structures II existe de nombreuses typologies des structures de I' entreprise (Ostroff, 2000; Miles et Snow, 1978; Mintzberg, 1982). De nos jours, on ramene couramment les structures organisationnelles a trois grandes formes, soit la structure mecaniste, la structure organique et Ia structure en reseau.
La structure mtkaniste La structure mecaniste constitue Ie mode traditionnel d'organisation des rela tions dans une entreprise. Cette structure est caracterisee par un processus decisionnel (centralise) qui part de la tete et circule verticalement jusqu'au bas de la pyramide. Souvent appelee l'entreprise verticaIe, cette structure possede de nombreux niveaux hierarchiques, et les emplois y sont specialises et decrits de fa~on stricte; quant aux carrieres, elles se deroulent verticalement et se realisent souvent a l'interieur de la meme fonction. II y a de nombreuses fron tieres entre les fonctions et les unites, et les employes travaillent souvent de maniere isolee et independante. Cette structure a demontre sa pertinence dans des contextes de stabilite, de planification a long terme, de permanence des personnes, de strategies d'affaires plutot defensives et centrees sur l'ex ploitation du potentiel d'affaires et sur la productivite par la standardisation. La bureaucratie mecaniste de Henry Mintzberg (1982) est une autre fa~on de definir cette forme organisationnelle. Les grandes institutions financieres et les diverses organisations qui offrent des services publics constituent des exemples de ce type de structure. Il faut avouer, cependant, que I'environnement actueI, tel que decrit dans Ie chapitre 2, exerce de fortes pressions sur la structure mecaniste pour qu'elle devienne un peu plus aplatie, decentralisee et souple, c'est-a-dire plus organique.
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La structure organique La structure organique se veut plus decentralisee afin de permettre a l'organi sation de reagir rapidement aux occasions d'affaires qui peuvent se presenter, meme lorsqu'un plan strategique a ete etabli. Cette structure est caracterisee par un processus decisionnel decentralise, c'est-
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I Gerer I'organisation et la transformation du travail
Le reseau en developpement pourrait etre defini de la mani(~re suivante: un groupe d'entreprises independantes cooperant durablement ensemble apartir d'objecti{s partages en comnzun de fa~on as'appuyer sur la capacite d'inno vation de chaque firme partenaire et Ie partage systematique de savoirs strategiques entre celles-ci en vue de mieux affronter La nouvelle competitivite internationale. Le programme de recherche vise aoperationnaliser differents principes et technologies en vue de supporter cette mise en relation synergique (Jacob, Julien et Raymond, 1997, p. 307). Cette experience d'entreprises-reseaux unique en son genre au pays peut donner lieu a des applications tres interessantes dans Ie champ de la GRH. Des observations preliminaires font emerger des defis cruciaux pour la GRH dans un contexte de synergie, comme Ia responsabilisation dans un univers ou la gestion se fait en temps reel, la communication ou encore la formation qua lifiante et continue dans une situation d'acceleration et d'obsolescence des connaissances.
L'analyse des processus d'affaires Une organisation est d'abord et avant tout une constellation de processus de toutes sortes. On y trouve des processus-des comme la conception, Ie deve loppement de nouveaux produits, la tenue d'inventaires, la fabrication, Ia dis tribution et Ie service a la clientele. Sur ces processus se greffent des processus de moindre envergure comme la preparation d'une commande, la livraison d'un produit et l'etablissement d'un contact avec Ie client. Finalement, il existe de nombreux processus administratifs visant a supporter Ies processus d'affaires et associes au bout du compte a des activites generant des couts administratifs. L'analyse des processus d'affaires est une demarche rigoureuse qUi examine comment Ie travail cree et ajoute de Ia valeur a I'interieur des divers processus que nous venons de nommer, c'est-a-dire comment Ie travail se deplace a travers l'organisation jusqu'a ce que Ie client prenne possession du produit ou consomme Ie service. Chaque employe res;oit du travail (input), ajoute de la valeur grace a son propre travail et achemine son travail (output) vers un autre employe. L'analyse des processus d'affaires revele alors les diverses Hapes ou actions qui peuvent €>tre combinees, simplifiees ou encore eIiminees. L'analyse des processus d'affaires a He recuperee au cours des annees 1990 par une approche americaine nommee «reingenierie des processus» (voir Ie tableau 4.3). La reingenierie des processus peut etre detinie comme Hant «une remise en cause fondamentale et une redefinition radicale des processus operationnels pour obtenir des gains spectaculaires dans les performances cri tiques que constituent les couts, Ia qualite, Ie service et Ia rapidite en utilisant les technologies de l'information» (CEFRIO, 1996, p. 8). Bien que l'analyse des processus d'affaires existe depuis longtemps (princi paIement depuis I'arrivee de la demarche «qualite») Ia reingenierie des pro cessus a deferle depuis plus d'une decennie parce qu'eHe annonce des gains de productivite nettement superieurs a ceux que genere I'approche fondee sur I
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I Les defis du renouvellement lES CARACTERISTIQUES DE LA REINGENIERIE DES PROCESSUS
Source: C. Bernier et autres, (,La reingenierie: un processus it gerer», Gestion, vol. 20, nO 2,1995, p.45.
I'amelioration continue, elle-meme associee a I'approche fondee sur Ia qua lite. Certains reportages dans les medias ont fait etat d'une amelioration de la productivite et de la satisfaction de la clientele de 20% a50%. Union Carbide, par exemple, a pratique la reingenierie, ce qui lui a permis de reduire ses couts fixes de l'ordre de 400 millions de dollars sur une periode de 3 ans a peine (Fortune, 1993), Bref, la reingenierie promet de reconstruire la structure orga nisationnelle a partir d'une transformation radicale des processus d'affaires et
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des processus administratifs en vue d'une amelioration significative du ren dement. Par contre, cette promesse ne s'est pas concretisee dans toutes les organisations qui ont fait confiance a cette approche. En effet, il semble que, dans une forte proportion des cas - de 30 % a 70 % selon differents specia listes, tels que Hammer (1990), Bergeron et Boudreau (1994) et Bergeron et Falardeau (1994) -, les exercices de reingenierie n'aient pas atteint les objec tifs poursuivis. Pourquoi? De nombreuses raisons sont avancees4 • La princi pale raison, c'est qu'on a neglige de prendre en consideration les dimensions humaine, sociale et politi que de l'organisation du travail en place. En effet, on ne peut pas deplacer indefiniment les employes comme des pieces sur un echiquier, ni meme creer de l'incertitude et proceder a des licenciements, sans que des problemes d'identite personnelle, professionnelle et collective se manifestent. Le bien-fonde du rendement de l'organisation (principalement economique) n'est pas necessairement per~u de la meme maniere par les per sonnes qui vivent les bouleversements. Les autres raisons qui expliquent l'echec de la reingenierie des processus sont associees a l'absence de leadership et de competences strategiques des cadres superieurs, a l'absence d'un senti ment d'urgence et au manque d'appropriation de la demarche par des ressources internes, qui sont souvent remplacees par des consultants.
4.4.2 La perspective des equipes de travai1 Parmi les nombreuses innovations en matiere d'organisation du travail, la par ticipation des employes a des collectifs de travail est sans doute la plus impor tante. Les equipes de travail sont en train de se substituer a l'individu comme unite de base de l'organisation du travail. Le taylorisme a fait en sorte que les decisions se rapportant au travail a effectuer soient acheminees vers un n§seau de gestionnaires et de specialistes. La tendance recente a rendre a des groupes de travailleurs Ie pouvoir de decision sur des activites de travail a eu comme effet de redonner de l'autonomie aux acteurs sur les lieux de travail.
Les types d'equipes de travail Le travail en equipe prend plusieurs formes. Roy (1999) releve certaines formes d'equipes de travail en fonction du degre d'autonomie accorde aux groupes (voir la figure 4.1). C'est sans aucun doute Ie concept d'equipe semi-autonome qui a attire Ie plus l'attention des acteurs et des experts au cours des dernU:~res annees. La majorite des travaux qui ont ete menes recemment sur les equipes de travail se penchent sur une definition des equipes qui s'apparente aux equipes semi autonomes. A titre d'exempIe, la Confederation des syndicats nationaux donne la definition suivante de l'equipe de travail:
4. Seion Bernier et autres (1995), les facteurs de risque sont l'envergure du projet, l'intensite du change ment, Ia complexite des processus, l'environnement organisationnel et la nouveaute technologique.
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I Les defis du renouvellement LES TYPES D'EQUIPES SELON L'AUTONOMIE DEcISIONNELLE
ponctuellement
en permanence
Source: M. Roy, «Les equipes semi-autonomes au Quebec et la transformation des organisations ", Gestion, vol. 24, nO 3, 1999, p. 77.
L'equipe de travail est un groupe restreint de personrles, responsables a des degres divers et de fw;on permanente de l'organisation de leur travail et de la realisation d'un ensemble de taches reliees entre elles, travaillant en vue d'atteindre un certain nombre d'objectifs communs. [...] L'equipe de travail qui nous interesse est celle qui, pour poursuivre notre definition, realise col lectivement des taches de production de biens et services propres a ['organisa tion. II s'agit done d'unites naturelles de travail constituees sur la base du processus de transformation du bien ou du service (CSN, 1995, p. 19). Les groupes d'amelioration Les groupes d'amelioration tirent leur origine des premieres experiences de cer des de qualite popularisees au debut des annees 1980. Ce sont des groupes ponctuels composes de volontaires venant de la meme unite fonctionnelle ou de differentes unites fonctionnelles. Ils ont comme mandat de procecter a une demarche collective de resolution de probU:mes a l'aide de l'analyse de pro cessus, du controle statistique des procedes, du processus de prise de decision, de la creativite ou du travail en equipe. Ces equipes se reunissent la plupart du temps durant les heures de travail, sur une base plus ou moins reguliere. Elles sont animees par un leader (souvent Ie superviseur), appuyees par un facilita teur (souvent un professionnel des ressources humaines), et rendent compte a un comite directeur (steering committee), compose de membres de la haute direction, qui valide et autorise les recommandations des equipes. On observe egalement que, dans un milieu syndique, Ie comite directeur integre souvent des representants de la partie syndicale. Ce type de fonctionnement des equipes de travail a longtemps He Ie plus populaire. Parmi les experiences connues, citons Ie Deti Performance d'Hydro-Quebec, l'approche fondee sur la qualite chez CAMCO (General Electric), les demarches conjointes de certifica tion ISO (industrie des services de l'automobile) et l'implantation des comites d'organisation du travail dans la fonction publique quebecoise (CMOT). Par contre, de nombreuses experiences de ce type ont enregistre des resul tats mediocres, car, avec Ie temps, Ia structure formelle et traditionnelle de l'organisation n'a pas evolue, ce qui a meme mis un frein a l'implantation d'une masse critique d'equipes de travail. En effet, seuls quelques employes
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privilegies avaient acceS aux equipes. En outre, les systemes de reconnais sance, de remuneration, de mobilite, de formation et de classification ne tenaient pas compte des transformations qUi se produisaient dans l'organisa tion du travail. Par ailleurs, les superviseurs reprenaient vUe leurs vieux com portements de patrons, et les dirigeants ne donnaient pas toujours suite aux mesures suggerees par les equipes. De plus, la flamme de l'amelioration con tinue avait tendance a s'eteindre, une fois que des gains de productivite lies a une conjoncture avaient ete realises. Ces gains de productivite ne faisaient d'ailleurs pas toujours l'objet d'un partage equitable entre les employes et la direction. les groupes de projet
Les groupes de projet reuvrent souvent dans une structure matricielle ou en reseau. Ils ont un pouvoir plus formel que les groupes d'amelioration, car ils ont la marge de manreuvre necessaire pour decider a l'interieur de certains parametres (couts, delais, specifications, objectifs, mandat, etc.). Le deploie ment des technologies se fait souvent a l'aide de cette forme d'organisation et les equipes de projet sont susceptibles d'exercer beaucoup de pouvoir sur Ie reste de l'organisation. One equipe de projet regroupe souvent des personnes ayant des expertises variees qui, la plupart du temps, travaillent de fa~6n permanente au projet, que ce soit dans une structure organisationnelle temporaire associee au projet ou encore dans une structure matricielle. Selon Bourgeois et St-Onge:
[Les equipes de projet sont generalement] composees de specialistes (par exem pie, informaticiens, ingenieurs, speciaListes en marketing) qui mettent en commun une expertise variee dans Ie but de mener a terme un projet bien defini. Les membres de ces equipes se consacrent generalement a temps plein au projet pour une longue periode de temps au cours de laquelle Us disposent des ressources, des connaissances et du pouvoir necessaires it la prise de deci sion. Des exemples de projets auxquels ces groupes se consacrent comprennent Ie developpement de nouveaux produits, la conception de systemes d'infor mation et la configuration du plan d'une nouvelle usine (1997, p. 19). Bien que ces auteurs padent d'une longue periode, les equipes de projet peuvent egalement performer sur une courte peri ode ; c'est d'ailleurs Ie principe des equipes de kaizen-corvee qui sont creees sur une courte periode et dont les membres sont liberes a temps plein pour analyser et resoudre des problemes importants dans un systeme de production. Cette approche de ges tion, originaire du Japon, a ete adoptee dans des entreprises quebecoises comme Pratt & Whitney, Domtar et Prevost-Volvo. La fa~on d'implanter les changements technologiques chez Bombardier illustre egalement ce type de fonctionnement en equipe (Grenier et Gowigati, 2002). Les equipes semi-autonomes
Les equipes semi-autonomes (aussi appelees « equipes de travail autogerees}) ou «groupes semi-autonomes", voire process teams) sont Ie type d'equipe qui
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Les defis du renouvellement
occupe la place la plus importante dans l'echelle de l'autonomie decision nelle. Co~trairement aux groupes d'ameiioration et aux groupes de projet (que certams auteurs appellent « equipes paralleles»), elles ne fonctionnent pas en marge de la structure traditionnelle de l'organisation. Elles se substituent plutot a celle-ci et impliquent une transformation profonde de la culture, de la philosophie de gestion, des pratiques de GRH et, surtout, des comportements et attitudes des gestionnaires. Les equipes semi-autonomes tirent leur origine de l'elaboration de l'ap proche sOciotechnique, concept qUi remonte aux travaux du Tavistock Institute de Londres menes dans les annees 1950 (Emery et Trist, 1975). Ces travaux ont donne naissance a des demarches experimentales au Canada et au Quebec dans les annees 1970, dont les plus connues sont l'experience du Centre de distribution des produits congeles de Steinberg (Brossard et Simard, 1990) et l'usine de Shell a Sarnia, en Ontario (Rankin, 1990). Aujourd'hui, l'approche sociotechnique, de meme que sa variante associee de pres ou de loin aux equipes semi-autonomes, est presente dans une multitude de milieux de travail. L'approche sociotechnique interprete l'organisation comme un systeme ouvert compose de divers flux d'activites, fonctionnant dans un contexte de rapports sociaux intenses et encadre par des buts. L'organisation du travail est Ie resultat de choix strategiques et contextuels reposant sur un compromis entre Ies pressions qu'exerce Ie systeme technique de l'organisation et celles
LES CARACTERISTIQUES DE L'APPROCHE SOCIOTECHNIQlIE
Source: A. Petit et autres, Gestion strategique et operationnelle des ressources humaines, Boucherville, Gaetan Morin Editeur, 1993, p. 17L
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I Gerer I'organisation et la transformation du travail
qu'exerce son systeme humain. Le tableau 4.4 presente les principales carac teristiques de l'approche sociotechnique. Les equipes semi-autonomes peuvent a leur tour prendre plusieurs formes en fonction des aires de decisions que les dirigeants leurs confient. En effet, plus de 50% des equipes semi-autonomes recensees dans une recherche menee aupres d'entreprises quebecoises (Roy, 1999) exer~aient une autonomie deci sionnelle sur la gestion des operations courantes (Ie menage, l'entretien des equipements, l'attribution du travail, Ie contrOle de la qualite, les contacts avec les fournisseurs, etc.). De 20% a 45% des equipes semi-autonomes avaient la possibilite de prendre des decisions sur des activites d'organisation et d'encadrement (Ie choix du chef d'equipe, la gestion des absences, des horaires et des conges, l'achat de materiel, les contacts avec les clients, Ie recrutement, la sante et la securite, etc.). Finalement, une minorite d'equipes semi-autonomes (moins de 20%) possedaient une autonomie decisionnelle dans des activites d'alignement strategique, a savoir les budgets, Ie design des produits, revaluation du rendement des membres du groupe, les mesures dis ciplinaires, les decisions salariales et les choix strategiques de l'unite. L'usine Saturn de GM a Spring Hill, au Tennessee, est un des cas les plus cites afin d'illustrer ce type d'organisation du travail.
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Les detis du renouvellement
La penetration du concept d'equipes de travail dans les organisations Le concept d'equipes de travail s'est diffuse d'une maniere extraordinairement rapide au cours de Ia derniere decennie. Des enquetes menees aupres des 1000 organisations americaines les plus importantes ont demontre que Ie pourcentage des employes travaillant dans des entreprises qui appliquent Ie concept d'equipes de travail est passe de 28 % en 1987 a 78 % en 1996 (Lawler, 2000). Toujours seion Ia meme recherche, 8S % des entreprises auraient recours a des equipes dites paralleles (groupes d'amelioration, groupes de pro jet). II semblerait que les formes Ies plus avancees d'equipes, a savoir les equipes semi-autonomes, soient plus presentes dans les gran des entreprises privees et, surtout, dans des entreprises reconnues pour leur capacite d'inno vation. Dans une enquete realisee aupres de 890 responsables des ressources humaines au Quebec au milieu des annees 1990, 28 % des 248 entreprises privees interrogees ont declare avoir des equipes semi-autonomes, contre 00/0 des S7 organisations publiques interrogees (Tremblay, Rondeau et Lemelin, 1997). En 1996, 88 % des 2S entreprises finalistes au concours des meilleures pratiques organisationnelles aux Etats-Unis avaient des equipes semi autonomes (Sheridan, 1996). Cette transformation de l'organisation du travail est amenee principale ment par des forces techniques et economiques, contrairement aux expe riences des approches sociotechniques des annees 1970, dont les motivations etaient davantage sociales ou avaient un caractere plutat symbolique. Dans des secteurs comme ceux de la finance, des assurances, de la production ma nufacturiere et de la petrochimie, l'automatisation a elimine un ensemble d'activites de travail individualisees et manuelles, ce qui a donne aux travail leurs l'occasion de voir au bon fonctionnement et au contrale des systemes automatises, dans une dynamique d'equipe de travail. Dans d'autres secteurs se distinguant par un environnement instable et imprevisible, les activites de travail et les taches se transforment si rapidement qu'il devient beaucoup plus efficace, au point de vue technique, de laisser a un groupe d'employes Ie soin de decider de la fac;:on de s'ajuster aux changements que d'attendre qu'un superviseur ou un specialiste pose un diagnostic et reorganise Ie travail.
4.4.3 La perspective individuelle La troisieme perspective de I' organisation du travail renvoie a. la dimension individuelle, c'est-a.-dire a la fac;:on de structurer chaque poste de travail. En regIe generale, l'effet combine des differents determinants de l'orga nisation du travail (la technologie, la situation economique, la strategie concurrentielle, etc.) a permis de requalifier Ie travail (Adler, 1997). Cette requalification prend naissance dans l'elargissernent des taches (que certains appellent l'enrichissement horizontal) ainsi que dans l'enrichissement ver tical des taches. Comme Ie montre la figure 4.2, l'elargissement des taches per met a. une personne d'executer plusieurs taches dim~rentes ayant une egale complexite et une egale importance. Cet aspect du travail amene les employes a performer dans un contexte de variete des activites de travail, ce qui rompt
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I Gerer I'organisation et la transformation du travail
la monotonie. Les nouvelles competences exigees sont alors associees a I'eIar gissement du champ des connaissances, soit par rapport a des taches simples, routinieres et repetitives, soH par rapport a des taches plus complexes. LA HIERARCHIE DES TACHES CONSTITUTIVES D'UNE ACTIVITE
DE TRAVAil
Planification/
programmation
Controle/coordination (social)
Affectation des travailleurs
Discipline et recrutement
Controle/surveillance (technique)
du procede et de la qualite
Source: Adaptti'e de P'-A. Lapointe, «La reorganisation du travail: continuite, rupture et diversite», dans La reorganisation du travail: efficacite et implicatiolJ, sous la direction de R. Blouin et autres, Quebec, Les Presses de I'Universite Laval, 1995, p. 5.
Quant a l'enrichissement vertical, Ie principe sous-jacent est la recomposi tion d'un poste de travail dans Iequel on integre les taches d'execution et les taches de conception. Pour cela, on part d'activites relativement simples, comme Ie controle technique des procedes et de la qualite, et l'on va jusqu'a des activites complexes de conception, en passant par des activites de gestion des pairs et de planification et programmation. Ce courant de pensee lie a l'elargissement et a l'enrichissement des taches repose sur I'hypothese seion laquelle Ie travail doit valoriser I'employe, lui apporter de Ia reconnaissance et Ie motiver. Cette condition est essentielle si l'on veut obtenir un bon rendement et de Ia qualite. Plusieurs theories ont tente d'expliquer ce phenomene (Hackman et Oldham, 1975), donnant par Ie fait meme des points de reference aux praticiens afin qu'ils puissent prendre des decisions ec1airees en matiere de restructuration et de conception des pastes de travail.
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Partie I
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Les detis du renouvellement
Le processus permettant de systematiser le travail: l'analyse des pastes Une fois les processus d'affaires de l'organisation analyses, la structure etablie, les equipes determinees et les postes con(,;us, les attentes des employes et des dirigeants face au travail doivent etre definies et communiquees. Pour ce faire, les organisations adoptent une pratique connue sous Ie nom d'analyse des postes ou analyse du travail, qui consiste en un processus systematique de col lecte de 1'information concernant un poste pour une periode donnee, ce qUi permet de decrire Ie profil d'un emploi ainsi que ses specifications. La resul tante de 1'analyse des postes ou des emplois devient la description des postes ou des emplois, qui presente l'identification du poste, Ie sommaire des res ponsabilites d'un poste, l'enumeration de ses principales activites ou taches et enfin les specifications du poste, lesquelles incluent Ie portefeuille des compe tences requises pour exercer ce poste. La description des postes est reprise en detail dans Ie chapitre 5 portant sur la dotation. La collecte de ]'information L'analyse des postes doit repondre it un certain nombre de questions, ce qui permettra de documenter la nature d'un poste de travail et son contexte. Que fait Ie titulaire du poste de travail? D'otl provient ce dont il a besoin pour bien faire son travail? Quels sont Ies equipements et Ies outils requis? Quels types d'habiletes et de competences Ie titulaire du poste doit-il possecter? QueUe supervision s'avere necessaire? Quelles sont les attentes des superieurs et des utilisateurs des fruits du travail? Qui SOtH les acteurs importants avec Iesquels Ie titulaire doit traiter? II existe plusieurs outils ou methodes de collecte de l'information. Parmi les plus utilises, on trouve l'observation, Ie questionnaire, I'entrevue et Ie jour nal. L'observation peut etre effectuee soit par un analyste, soit par un moyen electronique. Cette methode consiste it documenter Ie travail reel execute par Ie titulaire ainsi que Ies conditions d'exercice de ce travail, et ce, sans idees precon!,;Ues. L'observation fournit un eclairage sur Ies activites de travail pen dant une peri ode donnee (une journee, une semaine ou un mois).
Le questionnaire est un formulaire assez detaille que remplit Ie titulaire du poste. Cela permet de documenter la nature du travail accompli et les condi tions d'exercice du travaiL Dans la plupart des cas, Ie questionnaire dument rempli est revise par Ie superieur immectiat, qUi valide les divers elements qui y sont contenus. Le questionnaire peut etre ouvert ou ferme, seion Ie type d'information recherche. L'entrevue est souvent dirigee par un consultant interne (membre de Ia direction des ressources humaines) ou externe. L'objet de I'entrevue est Ie meme que celui de I'observation ou du questionnaire. Cette methode peut s'adresser a un individu (Ie titulaire) ou it un groupe (plusieurs titulaires d'un meme emploi), et elle peut egalement etre ouverte ou fermee. Mentionnons que l'entrevue est destinee soit au titulaire du postel soit au superviseur ou it des experts.
Chapitre 4
I
Gerer I'organisation et la transformation du travail
Finalement, Ie journal consiste, pour un titulaire, a prendre des notes sur les principales taches qu'il effectue et sur les incidents critiques lies a l'exer cice de son travail. Chacune des methodes precectentes a des avantages et des inconvenients. Le choix d'une ou de plusieurs methodes d'analyse des postes depend d'un ensemble de facteurs particuliers a chaque organisation. En effet, Ie type de poste analyse, Ia philosophie de gestion plus ou moins participative, les fonc tions visees de meme que Ie temps et les res sources disponibies influenceront Ie choix d'une methode ou d'une combinaison de methodes.
Les fonctions de l'analyse des postes L'analyse des postes est une fonction pivot de Ia GRH. En effet, I'analyse des postes, conjointement avec Ia description des postes, sert a nourrir les pra tiques suivantes de GRH (voir Ia figure 4.3): lES FONCTIONS DE l'ANAlYSE DES POSTES
• La conception du poste de travail. L'analyse du poste donne les renseigne ments necessaires a la conception du poste de travail quant a l'elargisse ment ou a l'enrichissement du travail. Elle permet egalement de prendre des decisions pertinentes en matiere d'ergonomie ainsi qu'en matiere de sante et de securite du travail. • La planification des res sources humaines. L'information resultant de l'ana lyse des postes sert a documenter les besoins en res sources humaines grace a une analyse de Ia demande de travail et du profil des competences . • Le recrutement. L'analyse des postes permet d'etablir Ie profil du travail a effectuer et des competences exigees. Cette information est necessaire si l'on veut avoir recours a diverses sources de recrutement.
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Les defis du renouvellement
• La selection. C'est a partir de l'analyse des postes que les gestionnaires et les specialistes des ressources humaines pourront etablir les criteres de selection et choisir leurs instruments de mesure et d'evaluation. Le choix de criteres valides et fideles est important afin d'eviter les problemes de discrimination dans l'emploi. • La remuneration. L'analyse des postes apporte des renseignements indis pensables a des fins d'evaluation des emplois, de classification et d'equite salariale. Les structures salariales dependent davantage de la valeur relative des postes, valeur qui sera etablie sur la base des renseignements recueillis au cours de l'analyse du travail. • L'evaluation du rendement. L'analyse des postes a egalement comme fonc tion de circonscrire les criteres du rendement attendu dans un poste de tra vail. Elle permet aussi de clarifier les roles relativement au rendement attendu et de prendre des mesures pertinentes par rapport aux problemes de rendement et aux employes difficiles. • La formation. L'analyse des postes documente les competences necessaires pour accomplir un travail; ce faisant, elle sert de fondement a l'analyse des besoins en formation. • La gestion de carriere. L'information resultant de l'analyse des postes sert a eclairer les decisions individuelles et organisationnelles conduisant a la determination des plans de carrieres. 11 faut posseder cette information si l'on souhaite etablir les exigences du passage d'un emploi a un autre et d'une famille d'emplois a une autre. • Les relations du travail. Par son caractere systematique, l'analyse des postes permet de dHinir adequatement les attentes de l'employeur par rapport aux differents postes de travail. Dne formulation rigoureuse de ces attentes peut eviter bien des conflits entre Ie syndicat et l'employeur en ce qui con cerne la sante et la securite du travail, les mouvements de main-d'c£uvre, la determination des salaires, les mesures disciplinaires, etc.
L'avenir de l'analyse des postes Les connaissances resultant de l'analyse des postes reposent sur une vision assez traditionnelle de l'emploi typique. Force est de constater que l'emploi et Ie travail changent de forme et de nature, comme en temoigne la progression de la polyvalence, de la flexibilite dans l'organisation du travail, du travail en equipe et de la mobilite professionnelle. Pour s'adapter, les organisations ont innove en adoptant des pratiques de GRH qui s'appuient davantage sur les competences a acquerir et a mettre en application dans des filieres de postes plutot que dans Ie poste occupe a un moment donne. Cette nouvelle fa~on de concevoir l'analyse des postes donne naissance a des pratiques innovatrices de description des postes, de dotation, de developpement professionnel, de gestion de carriere, de remuneration, d'evaluation du rendement, et ainsi de suite.
Chapitre 4
I Gerer I'organisation et la transformation du travail
Par contre, l'analyse et la description des postes sont la pour rester et constituent une pratique de GRH qUi sera importante dans l'avenir. Des consi derations d'ordre legalliees a l'equite salariale entralnent un interet renouvele pour cette activite.
CD Organiser le travail dans le temps, Pespace et la relation d'emploi
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De fac;on traditionnelle, Ie temps et l'espace de travail correspondent a un horaire fixe de 40 heures, reparties selon Ie fameux 9 a 5, du lundi au ven dredi, dans un meme lieu. Organiser Ie travail signifie egalement organiser Ia dimension espace-temps a l'interieur de laquelle Ie travail prendra forme. Ainsi, sous l'impulsion de processus de production continue (les raffineries, etc.), de services accessibles sur de plus longues peri odes (Ie commerce de detail, les services personnels, les services gouvernementaux en ligne, etc.), des telecommunications (Ie teletravail, Ie bureau mobile, etc.) ou de la recherche d'une meilleure qualite de la vie, de nouvelles manieres d'amenager Ie temps de travail apparaissent, et ce phenomene ira sans doute en s'ampli fiant afin d'inciter une main-d'reuvre vieillissante a quitter progressivement Ie travail plus tard et a repondre aux attentes d'une nouvelle generation d'em ployes qui dictera davantage ses conditions sur Ie marche du travaiL On peut distinguer differentes formes d'amenagement du temps, du lieu de travail et de la relation d'empIoL
4.5.1 La semaine compTimee La semaine comprimee a comme effet de reduire Ie nombre de jours travailles durant la semaine et, par consequent, d'allonger Ia journee de travail. II existe de nombreuses adaptations de ce type d'horaire. D'un cote, on trouve la semaine de 4 jours de 9 ou 10 heures par jour. De I'autre, un mode de 4 jours de travail de 12 heures, suivis de 4 jours de conge. Ce type d'horaire est sou vent applique a des secteurs comme Ia pHrochimie, Ia siderurgie, Ies pates et papiers et Ie transport, c'est-a-dire a un contexte d'activites continues, 24 heures par jour. On constate des modes un peu differents de semaine com primee dans les secteurs de la sante et des services publics (les policiers et Ies pompiers). Les principaux avantages de cet horaire pour l' employeur sont les suivants: • la reduction des temps morts dans les activites ou Ia prestation des services, ce qui entraine une meilleure continuite du processus de production; • Ia reduction des problemes d'equite dans Ies organisations qui fonction nent 24 heures par jour; • une meilleure productivite generee par une adaptation optimale de Ia per sonne a son poste de travail;
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I Les defis du renouvellement • la reduction de l'absenteisme et des retards, surtout dans des organisations situees dans des endroits isoles. Pour les employes, les avantages de la semaine comprimee sont les suivants: • Ia possibilite de disposer de periodes plus longues (loisirs, famille, etc.); • une meilleure adaptation jour et la nuiL
a des fins personnelles
a des changements de quarts de travail entre Ie
Par contre, pour l'employe (et indirectement pour l'employeur), ce type d'horaire entraine des problemes personnels occasionnes par Ie stress et la fatigue. Ces problemes peuvent toucher les sens et Ies reflexes, ce qUi risque de provoquer des problemes de rendement, voire de securite.
4.5.2 L'horaire variab1e ou flexib1e L'horaire variable ou flexible permet a un individu de gerer Ie debut et la fin de sa periode joumaliere de travail. En general, avec ce type de formule, les employes doivent realiser de 3S a 40 heures de travail par semaine, mais its ont assez de latitude pour determiner l'heure d'entree au travail et l'heure de sortie du travail. Dans beau coup de cas, les employes doivent respecter une plage fixe, c'est-a.-dire une periode Ie matin et une l'apres-midi 011 ils doivent etre presents. Ces plages fixes permettent a. l'organisation de tenir des activites collectives (des reunions) necessitant la presence de tous les membres d'une equipe, par exemple. Chaque employe gere une banque d'heures et, par Ie fait meme, peut accumuler du temps, ce qui lui permet de soustraire certaines joumees de travail ou d'ajouter des conges a son dossier. Cependant, on fixe une periode pour Ie report de meme qu'un nombre maximal d'heures reportees.
Chapitre 4
I Gerer I'organisation et la transformation du travail
Les avantages de l'horaire variable ou flexible sont les suivants: • une diminution de l'absenteisme et des retards; • une meilleure productivite des employes grace rythmei
a une
adaptation
a leur
• un climat de liberte et d'autonomie qUi a un effet positif sur la flexibilite au travaili • la possibilite pour les employes de mieux assurer l'equilibre entre Ie travail et la famille, et de tenir compte des contraintes auxquelles ils sont soumis. Par contre, ce type d'horaire com porte les inconvenients suivants: • un nombre insuffisant d'employes pouvant repondre aux exigences de l'organisation et des clients en debut et en fin de journeei • la quasi-impossibilite d'implanter ce type d'horaire dans les activites continues, car celles-ci requierent la presence simultanee de plusieurs per sonnes au meme en droit et la prestation du service a la clientele; • la difficulte a concilier ce type d'horaire avec les imperatifs du travail en equipe, lequel necessite la presence de ses membres sur une base ponctuelle. FedEx, par exemple, a une vision tres etroite de l'horaire variable (McCallum, 1995). En effet, la variabilite de l'horaire est possible seulement 10 minutes au debut et 10 minutes a la fin du quart de travail. Cela s'explique a la fois par la nature de l'activite (Ie transport de marchandises et de colis) et par l'importance accordee au travail en equipe. Comme on peut Ie constater, l'horaire variable ne convient pas a toutes les situations et ne s'applique pas de la meme fa~on au meme genre d'entreprise. Vne multitude de facteurs interviennent dans la decision de choisir Ie meilleur amenagement du temps de travail.
4.5.3 le tI!letravail Le teIetravaiJ permet la flexibilite tant dans l'amenagement du temps de tra vail que dans celui du lieu de travaiL Le teIetravailleur peut ainsi mener des activites professionnelles a distance, a partir d'un poste de travail inde pendant du lieu d'affaires de l'employeur, avec lequel il peut d'ailleurs com muniquer au moyen d'un support informatique ou electronique. Outre l'elimination de Ia contrainte de lieu, c'est toute la notion de temps de travail qui prend un autre sens dans un tel contexte, puisque Ie teletravailleur dispose desormais d'une plus grande Iiberte d'organiser son temps de travail en fonction de ses besoins personnels tout en repondant aux besoins organisationnels. La seule contrainte reside dans la production des resultats attendus independamment du lieu et du moment entourant l'execution du travail.
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Les defis du renouvellement
Nous assistons donc a une veritable revolution dans les approches clas siques de gestion de l'activite de travail, caracterisees traditionnellement par l'unite de lieu, de temps et d'action. Le phenomene du t{~letravail gagne en popularite d'annee en annee. Meme si sa progression est plus lente que ce qUi a ete envisage dans les annees 1990, il n'en demeure pas moins que les estimations les plus positives etablissaient Ie nombre de telE~travailleurs americains a pres de 25 millions en l'an 2000.
Certaines experiences recentes (Banque de Montreal, Bell Canada, Xerox Canada, IBM Canada, CIBC, 3M Canada, HP, fonction publique federale, fonction publique quebecoise) ont ete documentees (Boivin, Rivard et Aubert, 1996; CEFRIO, 2001); les conclusions qu'on en tire en ce qui a trait aux avan tages et aux inconvenients du teIetravail sont presentees dans Ie tableau 4.5. II convient de mentionner que Ie teIetravail, tout comme les autres formes d'amenagement du temps de travail, ne s'applique pas integralement a toutes les organisations. Une combinaison de facteurs, comme Ie type de travail effectue, les qualites des personnes (Ie teletravailleur et Ie teIesuperviseur) ou Ia structure et la culture d'entreprise, doH etre presente pour que cette forme de travail puisse s'implanter. De plus, les experiences reussies de teIetravail sont attribuables a l'eIaboration et a la mise en place de strategies coherentes et integrees de GRH en matiere de formation, de communication, de sociali sation, de selection, de supervision et d'evaluation du rendement.
4.5.4 Le travail atypique L'organisation du travail est Ie resultat des choix faits a l'egard de la nature (des perspectives) non seulement du travail et de l'amenagement du temps et de l'espace de travail, mais egalement de la relation d'emploi. La relation d'emploi peut etre qualifiee de typique ou d'atypique suivant ce que l'on connait d'un emploi traditionnel, c'est-a-dire un emploi perma nent avec un contrat de travail a duree indeterminee, a temps complet avec un horaire regulier, et ou Ie travail s'effectue essentiellement chez l'em ployeur. Mais les tendances de l'environnement dec rites dans Ie chapitre 2 ont conduit Ies organisations a prendre certaines distances face a l'emploi typique en developpant des formes d'empioi qUi varient en fonction de la
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I Gerer I'organisation et la transformation du travail
lES AVANTAGES ET lES INCONVENIENTS DU TElETRAVAll
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Les defis du renouvellement
duree du travail (temps complet ou temps partiel), de l'horaire de travail (regulier ou variable), de la nature du contrat de travail (indeterminee, deter minee ou contrat de service) et du lieu de travail (chez l'employeur ou en d'autres Heux). Bourhis et Wils (2001) ont combine ces quatre dimensions de
LA TYPOLOGIE DES FORMES DE TRAVAIL SELON BOURHIS ET WILS
Source: A. Bourhis et T. Wils, "L'ec1atement de l'emploi traditionnel: les defis poses par la diver site des emplois typiques et atypiques ", Relations industrielles, vol. 56, nO 1, 2001, p. 76.
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Gerer I'organisation et la transformation du travail
l'eclatement du travail typique pour preciser 18 formes de travail comptant autant de relations d'emploi (voir Ie tableau 4.6). Dans un contexte au la flexibilite est un deli majeur pour la GRH (voir Ie chapitre 2), l'organisation configure la nature de la relation d'emploi afi~ de permettre une plus grande adaptation de Ia gestion des ressources humames. Ainsi, Ie recours au travail atypique devient une strategie d'organisation du travaiL Certains auteurs divisent la force de travail en deux groupes, soit Ie noyau et la force de travail peripherique (voir la figure 4.4). l'ENTREPRISE FLEXIBLE D'APRES ATKINSON Pigistes
Travailleurs autonomes
Sous-traitants
Consultants
Source: Adaptee de J. Atkinson, «Manpower strategies for flexible organizations», Personnel
Management, vol. 16, nO 8, aout 1984, p. 29.
Le noyau Le noyau (core) correspond aux employes permanents (emplois typiques) qUi possedent les competences relatives a I'activite majeure de l'organisation et a sa mission. Ces employes appartiennent a un marche du travail interne, caracterise par une flexibilite qualitative ou fonctionnelle, et sont soumis a une gestion selon les principes de l'investissement dans Ie capital humain (la formation, Ie developpement des competences et de la carriere, la mobilite, l'organisation du travail selon la perspective des equipes, etc.). Ils jouent un role crucial dans Ie developpement de l'organisation i pour cette raison, ils font l'objet de pra tiques de mobilisation et de fidelisation.
La force de travail periphEhique L'entreprise embauche la force de travail peripherique afin de s'adapter aux soubresauts de la conjoncture et pour pallier les fluctuations du volume de travail qui ne peuvent etre absorbees par Ie noyau. Ainsi, quand la conjoncture
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I les defis du renouvellement est defavorable, l'entreprise sacrifie d'abord cette force de travail, car elle veut preserver Ia stabilite du noyau et, par Ie fait meme, l'investissement dans son avantage concuIIentieL Cette main-d'ceuvre, qui est d1ailleurs plus fadlement ren:pIas:able que Ie noyau, ne fait pas toujours l'objet d'une attention parti cuherepour ce qui est des strategies de GRH a long terme. La force de travail peripherique est composee de groupes et de populations externes. Un premier groupe peripherique est constitue d'employes ayant un contrat
a duree determinee dont les possibilites de carriere et la securite d'emploi sont inferieures a celles du noyau. Un deuxieme groupe comprend les personnes engagees selon des contrats d'emploi differents de ceux du noyau (emploi interimaire, emploi a temps partie I, poste partage, poste de stagiaire, etc.). Finalement, l'organisation recourt aux services de populations externes, soit des personnes ou des groupes externes composes de sous-traitants, de tra vailleurs autonomes, de pigistes, d'agences d'interim, de consultants, etc. Ce type de main-d'ceuvre effectue un travail qui ne correspond pas a des besoins permanents (dans les champs de l'informatique, de la restructuration, du redressement, dans des projets particuliers, etc.). Les cholx relatifs aux modes de relation d'emploi revetent une grande im portance en ce qui conceme la gestion de la masse salariale et surtout la flexi bilite de l'organisation. La relation d'emploi influence egalement la nature meme du travail et la nature des pratiques de GRH, comme nous l'avons vu au sujet du noyau. Les principaux avantages lies suivants.
a la
force de travail peripherique sont les
• Sa flexibilite externe lui permet de s'adapter a la conjoncture. • Elle permet un meilleur controle des couts. • Elle entraine une diminution des frais relatifs aux avantages sociaux et a Ia masse salariale. • Elle implique une plus grande motivation des employes temporaires qui aspirent a entrer dans Ie noyau. • En restreignant l'acces au noyau et en recourant a de nombreux «satellites», elle cree une organisation virtuelle, qui constitue un modele organisation nel. Un tel modele permet d'affecter des ressources tres rapidement en fonction des besoins et de la conjoncture afin de saisir des occasions d'affaires qu'on ne pourrait saisir autrement. Une compagnie comme Benetton est reconnue mondialement pour avoir reussi a mettre au point ce modele organisationnel. Par contre, les inconvenients de cette force de travail sont nombreux. • Elle provoque des problemes de fidelisation des employes et de loyaute envers }'organisation. • Elle developpe un esprit mercenaire, mercantile et individualiste au detri ment de la solidarite et de l'esprit d'equipe.
Chapitre 4
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Gerer I'organisation et la transformation du travail
• Elle accroit les inegalites en ce qui a trait aux statuts et aux revenus. • Elle cree des marches du travail secondaire et tertiaire qui engendrent un cercle vicieux dans la structure de l'emploi et la recherche d'un emploi. Ainsi, les employes ayant un statut precaire ont moins de possibilites de developpement et, par consequent, moins de chances de decrocher des emplois appartenant au noyau, lesquels favorisent Ie developpement et la carriere. • Elle instaure une culture d'entreprise eclatee et conflictuelle qui trans forme l'organisation en un ensemble de relations structurelles plutot qU'en un lieu ou s'affirme l'identite sociale.
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Les facteurs critiques de la transformation de l'organisation du travail Les ecrits portant sur les facteurs critiques de succes de la transformation de l'organisation du travail sont abondants. Souvent prescriptifs, ces ecrits ne tiennent pas toujours compte de parametres complexes et intangibles comme l'historique des changements anterieurs ou la dynamique des rapports sodaux. Aux fins de ce chapitre, nous retiendrons les facteurs de succes que l'on trouve dans la classification de Jacob, Rondeau et Luc (2002).
4.6.1 Comprendre et promouvoir la legitimite de la transformation de l'organisation du travail Toutes les actions visant a transformer l'organisation du travail necessitent qu'on s'attarde Ii bien comprendre et Ii detinir les raisons qui poussent l'entre prise a changer ainsi que la nature du changement qui est envisage. C'est dans les explications du «pourquoi» (la capadte concurrentielle, la securite d'em ploi, les attentes des clienteles, etc.) et la clarification du «quoi» (la flexibilite, les equipes semi-autonomes, la participation, etc.) que les dirigeants pourront legitimer davantage Ie changement face aux acteurs strategiques en cause (Ie syndic at, Ies gestionnaires, Ies employes, etc.). II semble que les entreprises recherchent naturellement une certaine stabi lite et que Ia transformation de l'organisation du travail se produit surtout quand les acteurs sont dans une position precaire, ont epuise les solutions qUi s'offraient a eux et considerent I'organisation du travail comme l'ultime moyen de consolider des emplois et de remettre l'entreprise dans la voie du rendement. Deux series de facteurs sont associes aux pressions, soit les facteurs lies a l'environnement externe et ceux qui sont lies Ii l'environ nement interne. Les pressions exercees par l'environnement externe, principalement les pressions a caractere economique, sont souvent dtees comme l'element de clencheur d'une demarche de transformation du milieu de travail. Le contexte
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Les defis du renouvellement
du secteur d'activite, la competitivite, la recherche d'une plus grande produc tivite, la lutte pour la survie, les pertes d'emplois, les exigences nouvelles de la clientele, les decisions du siege social, voila autant de facteurs rattaches a l'environnement externe. Ces facteurs constituent a la fois des obligations et des occasions de changer. Cependant, il est interessant de constater que plus l'environnement externe est hostile, plus les emplois sont menaces, plus il y a peril en la demeure, et plus il y a de chances de creer l'unite de pensee et d'action entre les acteurs de l'organisation pour affronter des ennemis qui tentent de les assieger. Les pressions exercees par l'environnement interne, quoiqu'elles soient moins significatives selon les experiences connues, jouent un role crucial dans la transformation du milieu de travail, surtout quand elles renforcent des pres sions externes. Les conflits de travail, les problemes de releve, l'historique des rapports syndicaux-patronaux, les comportements dysfonctionnels de cer tains employes (l'absenteisme, les accidents du travail, Ie sabotage) et l'arrivee d'une nouvelle technologie dominante sont des facteurs qui, pris isolement ou collectivement, creent un sentiment d'urgence face au changement de l'or ganisation du travaiL Bref, l'entreprise change lorsqu'elle est contrainte de Ie faire et lorsqu'un stress majeur s'exerce sur elle. II s'agit, malheureusement, d'un facteur de succes des transformations, sauf quelques rares exceptions. Toutefois, ces pressions peuvent egalement faire echouer certaines experiences d'organisation du tra vail, car, a long terme, les systemes humains ont tendance a resister aux pres sions productivistes des dirigeants, surtout quand l'organisation vit plusieurs cycles de mauvaises conjonctures a repetition (CSN, 1995).
4.6.2 Respecter chaque environnement de travail et miser sur les ressources disponibles Pour com prendre la transformation de l'organisation du travail, il faut egale ment se pencher sur les conditions qui prevalent dans une organisation quant ala disponibilite des ressources et des capacites. L'analyse de l'organisation du travail dans une PME, une grande entreprise ou une organisation de services publics (hopital, universite, ministere) fait emerger l'importance de prendre en conSideration la taille et la nature des activites d'une organisation. II en va de meme pour la complexite du changement. Ainsi, avoir l'ambition de trans former l'organisation du travail au moyen de !'implantation d'un systeme technologique de gestion integre de ressources est autrement plus risque que d'implanter une nouvelle procedure de travail dans un atelier. Parmi les autres conditions determinantes souvent dtees dans la litterature, on observe la marge de mana:'uvre disponible (les budgets, l'expertise interne, une structure et une culture facilitantes, etc.). En effet, il faut plus que la seule volonte des acteurs pour changer. Les forces vives d'une organisation en transformation ont besoin d'investissements lies a la mise en place de pratiques, d'activites de formation, d'outils, etc. Ainsi faut-il avoir acces a des ressources financieres, a des technologies, a des personnes-ressources et avoir du temps.
Chapitre 4 , Gerer I'organisation et la transformation du travail
4.6.3 Respecter la dynamique des rapports sociaux Brossard et Simard (1990) ont demontre que, malgre un rendement impres sionnant, une organisation qui a appuye Ie developpement d'une equipe semi-autonome pendant 10 ans a dfi faire marche arri{~re et revenir a une organisation du travail traditionnelle, creant du meme coup de l'amertume et de la frustration. Cette trajectoire s'explique par un ensemble de phenomenes internes associes a la dynamique des rapports sociaux dans l'organisation, principalement a la dynamique du pouvoir ouvrier. L'ensemble des acteurs sociaux ont un role majeur a jouer pour garantir Ie succes de la reorganisation du travail. De plus, la resultante de la dynamique sociale entre les acteurs s'avere souvent Ie climat de confiance si necessaire pour assurer Ie succes et la durabilite des experiences innovatrices concernant l'organisation du travail.
La haute direction Les ecrits portant sur la transformation de l'entreprise abondent en affir mations seion lesquelles Ie soutien et l'engagement de la haute direction sont un facteur-cle de la reussite d'un changement. L'organisation du travail n'echappe pas a ce constat. Des gestes symboliques executes par Ies cadres superieurs ainsi que la gestion des fenetres d'opportunites (timing) ont tou jours enormement d'effets. La presence d'un leader fort au bon moment est souvent mentionnee comme un gage de sucd's de la transformation d'une organisation.
Les gestionnaires Les gestionnaires, principalement les leaders de I'experience, jouent un role preponderant dans Ie succes d'une demarche visant Ie changement. Comme Ie signale Lapointe:
Tout acaoissement d'autonomie parmi les salaries ainsi que toute delegation de responsabilites et de pouvoirs en leur direction remettent inevitablement en question Ie rOle traditionnel des cadres qui peuvent resister ou au contraire accepter un nouveau role d'animateur et de personne-ressource. Souvent meme leur existence est tout simplement remise en question et leur poste car rement aboli (1995, p. 33-34).
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Les defis du renouvellement
Dans les ecrits portant sur la transformation des organisations Oacob, Rondeau et Luc; 2002), on observe egalement Ie fait que Ie succes depend beaucoup du leader de la demarche, celui que certains appellent Ie champion. La force de conviction d'un leader de terrain, sa volonte et la confiance qu'il inspire font souvent la difference. En outre, sachant que l'experience est fra gile et qu'elle repose sur quelques personnes-cles, il est important d'assurer une certaine continuite dans les postes de gestion et de direction.
les syndicats Dans un contexte ou la syndicalisation est tres presente et etendue, il va de soi que des transformations profondes de la structure du pouvoir dans l'orga nisation du travail ne peuvent se faire a l'insu des syndicats. De nombreux auteurs (Bourque, 1999; Lapointe, 2001) accordent une importance capita Ie a la fa<;on dont les syndicats participent a la reorganisation du travail. Des expe riences menees recemment dans des entreprises des secteurs de la metallurgie et des pates et papiers quant a la partiCipation des syndicats temoignent de cette realite. Pour Lapointe (2001), la transformation de l'organisation du tra vail represente un changement de paradigme par rapport aux formes an ciennes d'organisation du travail reposant sur une double exclusion sur Ie plan de la gestion, soit celle des syndicats et celIe des salaries.
les employes L'identite collective du groupe et la solidarite entre ses membres constituent un facteur important de succes, surtout pour assurer la durabilite de l'expe rience. Brossard et Simard (1990) ont meme attribue l'echec relatif de l'equipe semi-autonome chez Steinberg aux tensions et aux dissensions internes qui se sont revelees apres un certain nombre d'annees d'experimentation d'une nou velle forme d'organisation du travail. Que ce soH dans les experiences de tel{~ travail, de cercles de qua lite (les groupes de progres) ou d'experimentation des equipes de travail autogerees et des equipes semi-autonomes, on remarque que certaines organisations appliquent de fa<;on tres stricte Ie processus de selection de maniere a ne retenir que des gens demontrant des competences exceptionnelIes pour travailler dans de nouveaux contextes d'organisation du travail. On cree ainsi involontairement deux categories de personnel et une organisation qui fonctionne a deux vitesses (les meilleurs et les autres). Les organisations conscientes de ce phenomene ont plus de chances d'eviter Ie « syndrome Steinberg", c'est-a-dire les conflits entre groupes d'employes.
4.6.4 Instaurer un nouveau contrat social et une discipline de gestion La transformation prealable des relations du travail est un facteur crucial pour Ie sucd:s et Ia durabilite des innovations dans Ie milieu de travail. L'instau ration de relations du travail favorisant l'integration et la cooperation grace a une negociation dite raisonnee ou gagnant-gagnant garantit la reussite a un bon nombre d'artisans de la transformation du milieu de travail. La reorgani sation du travail peut difficilement s'enraciner dans l'entreprise si 1'0n n'eta bUt pas un nouveau cantrat social redetinissant les regles du jeu, les pouvoirs,
Chapitre 4
I Gerer I'organisation et la transformation du travail
les droits, les responsabilites et Ie partage des gains realises a la suite de la reor ganisation. De plus, l'institutionnalisation de ce nouveau contrat social (dans les structures et les conventions collectives) semble assocH~e au SUCcE~s des changements. Outre les relations du travail, la transformation de l'organisation du travail gagne a etre appuyee par un ensemble coherent de sous-systemes ou de pra tiques de GRH et de gestion en general. Des pratiques d'information (trans parence economique), de communication, de formation qualifiante, de mobilite, de remuneration, de reconnaissance, d'evaluation et de sante au travail doivent Hre agencees de manH~re it former un tout coherent, nomme « strategie RH». Comme on peut Ie constater, un tel programme ne peut se realiser it court terme; il implique une strategie de GRH et une strategie de transformation de l'organisation qui s'echelonneront sur une longue periode pour permettre a une nouvelle dynamique sociale de s'instaurer. Mais cela ne se produira pas naturellement. Comme l'indique Rondeau (1999), un scenario de change ment dans l'organisation du travail qUi respecte les conditions relativement uniques de chaque organisation doit clarifier quatre facettes distinctes de la conduite du changement: • un plan d'action qui designe les activites de mise en ceuvre du change ment ainsi que la sequence de ceUes-ci; • un encadrement du changement qUi consiste dans Ie partage des rOles et des responsabilites de chaque acteur sur Ies plans strategique, fonctionnel et operatoire; • le rythme a im;taurer et a maintenir afin de profiter au maximum de Ia <
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Partie I
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Les defis du renouvellement
• Ies cibles d'action qUi ont trait a la fois aux objectifs vises et aux resultats escomptes qui serviront de carburant au mentorat et au suivi de la demarche. Bref, la transformation de l'organisation du travail n'est pas une demarche naturelle et vertueuse a laquelle tout Ie monde sans exception se rallie. C'est plutot une trajectoire qui doit dans une certaine mesure etre planifiee et pro grammee, et qui s'adapte a Ia dynamique sociale. II s'agit donc d'un savant mariage de processus inspires de la science de la «gestion de projet» ainsi que de la gestion des rapports sociaux.
4.6.5 PouTsuivTe des gains mutuels Le succes ou l'echec de toute experience de reorganisation du travail depend, en definitive, de ce que les acteurs en retireront comme groupes et de ce que les employes en retireront comme individus. Les gains pour les salaries et les syndicats sont associes a la qualite de la vie au travail, a la consolidation de l'emploi et au renforcement du role du syndicat dans l'organisation. Un des facteurs les plus importants de la reorganisation du travail est lie aux gains obtenus sur les plans de l'ameIioration des conditions de travail et de l'exercice du travail comme tel. Bien qu'il arrive frequemment que les employes travaillent davantage et aient plus de responsabilites qU'avant, on observe que ce qUi compte finalement, c'est la possibilite pour chaque employe de s'accomplir dans son travail, de s'exprimer sur son travail et sur les conditions de sa realisation. La question de l'emploi est egalement au cc£ur d'un debat souvent emotif sur la reorganisation du travail. Comme l'indique Lapointe:
De maniere generate, il est possible d'atfirmer que, sans garantie que la reorganisation n'entrafnera pas de mises apied et sans engagement ferme de La part de La direction a tout mettre en ceuvre pour proteger les empLois, Ie succes et la durabilite des innovations sont fortemetzt compromis. En effet, comment pourrait-on demander a des salaries de s'engager pleinement dans des innovations susceptibles dWiminer leur propre emploi? (1995, p. 38). Pour ce qui est de I'employeur, il va de soi que Ie succes de Ia reorganisa tion du travail est directement proportionnel a I'amelioration de I'efficacite, de l'efficience et de Ia qualite des produits et des services offerts, ce qui consti tue l'enjeu fondamental de Ia demarche visant Ie changement. Dans bon nombre de cas, Ia reorganisation du travail a donne lieu a des gains spectaculaires pour l'employeur, ce qui demontre que Ie jeu en vaut sou vent 1a chandelle. Cependant, ces experiences demeurent fragiles S, car non seulement elles reposent sur quelques personnes-cles, mais de plus, elles sont
5. Wagar (2002) souligne que Ie taux de disparition ou d'abandon des programmes conjoints d'inno vation en milieu de travail etait de 50% sur une periode de 3 a 5 ans.
Chapitre 4
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Gerer I'organisation et la transformation du travail
reevaluees instinctivement par les differents acteurs en fonction du partage des gains realises. En effet, ces acteurs se demanderont s'ils obtiendront leur part des profits ou si, au contraire, quelques privilegies se sauveront avec la caisse. C'est la un debat que les organisations et meme la societe doivent faire apres plusieurs annees de tatonnements en matiere de reorganisation du travail. Bref, les facteurs de sucd:s n'ont pas tous Ie meme poids dans la balance et leur configuration depend beaucoup du contexte de chaque organisation et de chaque milieu de travaiL Par contre, il est sur que plus ces facteurs sont presents, plus il y a de chances pour que la transformation de l'organisation du travail soit un succes en ce qui a trait a ses buts et a sa durabilite.
Conclusion La transformation de l'organisation du travail est un enjeu majeur du renou veHement de la GRH et de son positionnement comme fonction strategique dans les organisations. On ne peut plus consicterer l'etude de la GRH sans proceder a une rHlexion en profondeur sur Ie quoi, Ie pourquoi et Ie comment de Ia transformation de l'organisation du travail, incluant l'influence de l'or ganisation du travail sur les pratiques traditionnelles de GRH (la planification, la dotation, l'evaluation, la formation, la remuneration, la sante et la securite, etc.). Le modele traditionnel et tayloriste d'organisation du travail a ete remis en question par l'ensemble des acteurs sociaux et des specialistes des theories de l'organisation. La recherche imposee d'une plus grande efficacite, Ie passage a une production souple et flexible, les nouvelles technologies de l'information et de la communication, les choix strategiques face au redimensionnement, Ie dHi de l'intergenerationnel ainsi que Ie ctesir
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Les detis du renouvellement
d'epanouissement des personnes sont parmi les principales causes de l'essoufflement du modele tayloriste d'organisation du travail et des tenta tives de renouvellement qui ont suivi. De ces tentatives, on peut retenir qu'entre les modeles japonais, allemand et suedois, il reste de la place pour un ensemble de formules d'organisation du travail qui permettent de poursuivre des objectifs de flexibilite, d'engagement et de qualification. L'organisation du travail peut se faire seion Ies perspectives organisation nelle, des equipes de travail et individuelle, de meme que seion l'amenage ment du temps et de l'espace de travail ainsi que de la relation d'emploi. Enfin, pour assurer Ie succes et la durabilite de la transformation de l'organisation du travail et des innovations dans Ie milieu de travail, certains facteurs doivent etre presents, soit Ia promotion de la legitimite de la transformation, Ie respect des particularites de chaque milieu de travail, Ie respect de la dynamique des rapports sociaux, l'instauration d'un contrat social et, enfin, la possibilite pour les salaries, les syndicats et les dirigeants d'obtenir des gains.
de revision
o Comment definissez-vous Forgani
sation du travail et quelles diffe rences faites-vous entre travail prescrit et travail reel?
8 QueUes
sont les principales raisons qUi motivent la transformation de l'organisation du travail ?
o En quoi Ie defi de l'intergeneration
nel influence-toil la reorganisation du travail?
o nouveaux Quelles sont les caracteristiques des modeles d'organisation du travail par opposition aux modeles traditionnels? " QueUes sont les principales diffe rences entre les modeles japonais, allemand et suedois d'organisation du travail?
Gt Nommez les trois perspectives de I'or ganisation du travail et commentez les.
o QueUes sont les caracteristiques de Ia structure en reseau et en quoi cette structure est-eUe differente
des autres formes de structure organisationnelle?
o Qu'est-ce que l'analyse et la reinge nierie des processus d'affaires?
f) A quel type d'equipe ou groupe de travail fait-on reference dans Ie cas de l'usine Saturn situee a Spring Hill, au Tennessee? Quels sont les princi paux avantages de l'equipe comme mode d'organisation du travail?
«V Decrivez
les principales methodes de collecte de l'information utilisees dans l'analyse des postes.
(D Decrivez Ies fonctions de l'analyse des postes et illustrez-les par un exemple.
(fI Quelles sont les principales formes d'organisation du travail dans Ie temps, l'espace et la relation d'emploi?
(I) Decrivez les principaux facteurs de succes (facteurs critiques) de la transformation de l'organisation du travail.
Chapitre 4
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Gerer I'organisation et la transformation du travail
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Chapitre 4
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Gerer I'organisation et la transformation du travail
ne roule plus chez Target
La
direction de Target, un fabricant de camions specialises pour Ie transport routier, a songe a fermer detinitivement son usine a la suite d'un long conflit de travail de neuf mois. La force de travail est composee de 600 personnes dont Ie nombre d'annees d'experience moyen est de 21 ans. Ces gens, qUi ont ete for mes sur Ie tas, ont acquis une maitrise incroyable de la fabrication artisanale et sur mesure de produits dont ils sont fiers. Le climat a commence a se deteriorer l'an dernier alors que des ingenieurs ont ete embauches pour faire la chasse aux inefficacites dans l'usine. Ces derniers ont specialise davantage les taches de tout Ie monde sur la chaine de montage, ils ont redessine les processus de fabri cation et ils ont impose de nouvelles fac;:ons de faire dans un tres court laps de temps. Pour realiser leur plan, ils ont fait nommer de nouveaux superviseurs qui ont comme mandat de surveiller la fac;:on dont les contremaitres et les chefs d'equipe s'acquittent de leurs taches. Ces superviseurs reIevent de l'adjoint au directeur de 1a production. Quelques mois apres la mise en reuvre de ce chantier de reingenierie, les resultats etaient plut6t negatifs. Les pro blemes lies a la qualite des camions ont augmente, de meme que Ie temps requis pour la production de chaque unite de materiel roulant, sans compter les rebuts et les temps non productifs occasionnes par de nombreuses retouches a faire a la majorite des postes de travail. Decoura ges, les employes se sont mis a s'absen ter (taux d'absenteisme de 15 %), a quitter l'entreprise (taux de roulement de 12 %) et a se mobiliser au sein de leur
organisation syndicale (taux de parti cipation aux assemblees de 95 %). La hausse du nombre d'accidents du travail est la goutte qUi a fait deborder Ie vase. Bref, l'usine est devenue rapidement deficitaire et la productivite est bien en dec;:a de ce qui a ete prevu. La tension qUi se degage sur la chaine de montage a gagne Ies rangs des employes de bureau. Les superviseurs ont commence a appliquer les horaires de travail a la lettre et aucun ecart n'est tolere quant aux absences et aux retards. Resultat: il y a eu une greve sauvage, du sabotage et tout ce qu'entraine un conflit de ce genre. De plus, les ingenieurs ont demissionne en bloc. Dernierement, Ie conflit s'est regIe, mais les b1essures sont profondes. II y a par contre une Iueur d'espoir. Le conseH d'administration vient d'engager un nouveau directeur d'usine, soit un jeune gestionnaire qui a travaille dans des usines d'assemblage performantes dans l'industrie de l'automobile aux :f:tats lInis. Apres avoir rencontre les princi paux leaders de l'usine, il decide de donner une derniere chance aux employes et au syndicat. II vient d'em baucher trois ingenieurs qui partagent sa vision en matiere de gestion des ressources humaines dans un contexte manufacturier moderne. L'equipe de direction vient de communiquer sa nouvelle philosophie de gestion, qui se decline selon les principes suivants: • • •
service a la clientele sans compromis; sante et securite du travail; qualite par l'amelioration continue;
• •
travail en equipe; communication et transparence.
•
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Partie I
I
Les defis du renouvellement
Le directeur d'usine vous a designe pour diriger un groupe de travail qui doit faire la lumiere sur Ies problemes et, surtout, qui doH suggerer un ou deux scenarios qui permettraient de relancer rapidement l'usine et d'en assurer la survie a long terme.
• l'implantation de moyens modernes d'amelioration continue; • Ie recours a l'experience et a l'auto nomie des salaries dans Ie respect de leur integrite physique et morale; • Ie partenariat patronal-syndical.
Le scenario ou Ies scenarios doivent tenir compte des parametres suivants: • une revision de la structure de l'usine; • une revision de l'amenagement des postes de travail;
QueUes sont dans leurs gran des lignes les conclusions auxqueUes votre groupe de travail est parvenu?
·~_;$aefis dell;· . . . ..
lompetence
Apres l'etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Comprendre les conditions de reussite d'un processus de dotation. • Etablir des pratiques de dotation qUi ne pretent pas Ie flanc devant les tribunaux.
a des recours
• Choisir parmi diverses methodes de recrutement interne et de recrutement externe. • Proposer d'autres methodes que !'intuition (ou la boule de cristaI) pour prevoir Ia reussite professionnelle. • Decrire les principales composantes d'un programme d'integration des nouveaux employes.
•
Partie II
I les defis de la competence
Le printemps amime son cortege de campagnes de recrutement1 Plusieurs entreprises lancent en ce mo ment une campagne de recrutement inten sir, notamment les entreprises de services, encouragees par l'approche de la belle saison. Aux prises avec d'urgents besoins de main-d'ceuvre, plusieurs entreprises de Montreal ont profite du Salon Emploi Formation, qui se terminait hier au Palais des Congres, pour combler leurs postes disponibles. Selon les organisateurs, les 250 entreprises presentes offraient au total pres de 10 000 possibilires d'emplois dans des secteurs aussi varies que Ie commerce de detail, la fonction publique, Ie transport, les finances ou la technologie. Les entreprises de services etaient les plus nombreuses sur place a i'evenement pnJsente par Ie gouvernement du Quebec et Monster.ca, un portail Internet de recherche d'emplois. Notamment les entreprises de detail, des services financiers ou du do maine de la publicite et du marketing. Peu presentes, les entreprises manufacturieres aftichaient neanmoins de nombreux em plois, pres de 350, sur Ie babillard tenu par Adecco, une firme specialisee en recru tement pour Ie compte des industries. La reponse des manufacturiers pour annoncer les postes a ete exceptionnelle, soutient la responsable de Ia firme. Les besoins des entreprises sont varies. Par exemple, la compagnie pharmaceutique Wyatt Watson demande des techniciens de laboratoire. Le manufacturier JP Meta America recherche des ebenistes, des dessi nateurs et des charges de projets.
Forte croissance des emplols en service « On remarque une forte augmentation des emplois aftiches par les entreprises de toute categorie depuis trois mois sur notre site Internet, particuiierement de la part des entreprises de services», aftirme Gabriel Bouchard, vice-president et fondateur de Monster.ca. Selon M. Bouchard, les offres d'emplois des entreprises manufacturieres ont cm de 50 % sur Ie site de Monster.ca depuis janvier dernier. Les annonces des entreprises de detail ant augment€? de 100 % et celles des pastes en services financiers, de 57 %. Par exemple, un total de 323 emplois sont actuellement offerts dans ce dernier domaine. Les institutions financieres qui etaient largement representees au Salon disent d'ailleurs engager pnJsentement un grand nombre de commis et de conseillers finan ciers. La Banque Nationale, par exemple, prevoit en engager une dizaine dans les pr~ chaines semaines. La concurrence est tres vive pour attirer Ies employes, car toutes Ies compagnies financieres comme Ies assu reurs ou Ies banques pre{erent Ies personnes bilingues avec un ou deux ans d'experience, commente la responsable au stand de Ia Banque Nationale. Aux stands de Rena-Depot au Home Depot, Ies agents aftirment recruter mas sivement de nouveaux effectifs. Les deux concurrents recherchent des vendeurs, mais ausst d'autres travailleurs specialises comme des jardiniers, par exemple, pour effectuer les taches saisonnieres en
1. M. Guay, "Le printemps amene son cortege de campagnes de recrutement ", La Presse, 28 mars 2002, p. D3.
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horticulture. Les grands magasins prepa rent egaiement fa saison estivale. La Maison Simons cherche aengager 325 employes au total, dont 250 pour Ie nouveau magasin a Laval. La chafne RW&CO travaille a recruter 70 employes pour les postes de gerant ou prepose a la vente. Alimentation Couche-Tard embauche massivement des vendeurs et du personnel specialise comme des informaticiens ou du personnel de bureau.
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Se doter d'employes competents et motives
o Le
Salon Emploi-Formation decrit dans cet article est-il un moyen efficace de recrutement pour les employeurs?
f) Dans queUes circonstances un em ployeur a-t-il interet a participer au Salon Emploi-Formation plut6t que d'utiliser d'autres methodes de recrutement?
. , Pour une personne qUi est a la recherche d'un emploi, quels sont les avantages et les inconvenients rattaches a la participation a des evenements speciaux comme Ie Salon Emploi-Formation?
La mise en situation qUi precede illustre comment Ies entreprises peuvent s'y prendre pour attirer les meilleurs candidats dans Ie contexte d'une concur rence tres vive. S'adjoindre une main-d'ceuvre competente et motivee represente une condition essentielle au succes des equipes de travail et des organisations. Une equipe de travail qui reunit des personnes en mesure de travailler en etroite collaboration Ies unes avec les autres pourra apporter une contribution nettement superieure. Une organisation qui reussit it attirer des candidats qualifies et it prendre de bonnes decisions en matiere de selection ameliore ses chances de reussir ses projets sur un marche hautement com petitif. Notons egalement que Ie fait, pour un gestionnaire, de s'entourer de collaborateurs efficaces constitue un gage de reussite professionnelle. C'est pourquoi il importe de comprendre Ie processus de dotation qui favorise l'em bauche et l'integration en milieu de travail de personnes ayant les compe tences requises et la motivation necessaire. Une autre fa~on d'aborder la dotation consiste it envisager cette derniere comme un levier de developpement du capital intellectuel de l'entreprise. N'est-ce pas Iii une consideration importante dans l'economie du savoir? Des entreprises comme Microsoft et Google se sont d'ailleurs developpees en misant sur l'embauche de personnes brillantes, creatives et debordantes d'energie. Notons, it cet egard, que les entreprises performantes sont aussi celles qui accordent beaucoup d'importance a la selection de leurs ressources
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I Les delis de la competence humaines. Elles sont, dit-on, tres selectives. Ces entreprises cherchent ega le ment a assurer une bonne correspondance entre les caracteristiques des indi vidus et la culture d'entreprise (Baron et Kreps, 1999). Par exemple, dans les cas ou la culture d'entreprise est axee sur Ie travail en equipe, ces entreprises eviteront d'embaucher des individus manifestement individualistes. Bref, les entreprises performantes accordent beaucoup d'importance a l'activite de dotation, car eIles sont persuadees que leur succes depend de la qualite de leurs ressources humaines. Apres une definition des termes-cles, ce chapitre presente les acteurs du processus de dotation et pose les conditions de reussite de la dotation. Ensuite, les differentes etapes du processus de dotation sont examinees sui vant les exigences relatives a l'acquisition des ressources humaines. II est alors question du recrutement des employes, de leur selection et de leur integration dans Ie milieu de travail. Ce chapitre porte une attention particuliere aux principes qui doivent guider Ies actions du processus de dotation. Le Iecteur qUi voudra en savoir davantage sur une technique particuliere pourra consul ter un ouvrage specialise parmi Ia liste des lectures suggerees a Ia fin de ce chapitre.
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les termes-c1es 9'
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lfacquisition des ressources humaines est un processus strategique qui com prend plusieurs composantes qu'il vaut la peine de detinir. La dotation est l'expression souvent utilisee pour designer Ie processus d'acquisition des ressources humaines. EIle comprend l'analyse des postes, Ie recrutement, la selection, la decision d'embauche et l'integration dans Ie milieu de travail. La dotation vise essentiellement a combler les postes vacants avec des personnes issues de I'entreprise ou de l'exterieur de celle-ci qui satisfont aux exigences des postes ou qui depassent celles-ci. Un processus de dotation performant favorise l'embauche de ressources humaines competentes qui sauront con tribuer au developpement de l'organisation. La dotation comprend differentes etapes. Le recrutement, qui est l'une de ces eta pes, comprend l'ensemble des activites d'information concernant les postes vacants au sein de l'entreprise. Son objectif est d'inciter les personnes ayant les competences recherchees a se proposer comme candidates a un poste. Quant a }'etape de la selection, elle consiste a choisir parmi un reservoir de candidats la per sonne qui correspond aux exigences du poste a combler. Le succes de la selection repose en grande partie sur une saine utilisation des instruments permettant d'apprecier chaque candidat a sa juste valeur et de prevoir sa contribUtion future. Si l'organisation dispose d'une main-d'ceuvre en qua lite et en quantite suffisantes, elle peut combler divers postes par des promotiOns et des muta tions. La promotion ctesigne l'attribution d'un paste comportant plus de res ponsabilites et accompagne generalement d'une remuneration plus elevee; ce
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Se doter d'employes competents et motives
poste se trouve donc a un palier superieur de la hierarchie. La mutation signifie une affectation permanente ou temporaire a un poste d'un niveau de complexite similaire. 11 s'agit d'un deplacement horizontal d'un poste a un autre qui comporte des droits et des exigences semblables.
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les adeurs du processus de dotation Plusieurs acteurs jouent un rOle dans Ie processus de dotation. La direction de l'entrepnse communique de fa~on explicite ou implicite Ie profil type de I'em ploye, qui traduit sa vision strategique. Elle participe surtout aux decisions de selection a des postes de niveaux superieurs dans la hH'rarchie. La direction doit s'assurer que les personnes choisies pour occuper ces postes ont des va leurs et des caractenstiques personnelles qUi cadrent avec la strategie de l'entrepnse et sa culture. La direction des ressources humaines tient souvent Ie role principal dans Ie processus de dotation, car elle formule la politique de dotation de l'en treprise et prete son expertise a chaque etape du processus. Par exempIe, en collaboration avec les personnes en cause, un professionnel des ressources humaines peut preparer des questions efficaces a poser aux candidats invites a l'entrevue de selection. On s'attend aussi a ce que Ie professionnel des ressources humaines s'assure que les activites du processus de dotation sont conformes au cadre legal. La direction des ressources humaines peut aussi avoir acces a une base de donnees de candidats qu'elle est susceptible d'uti liser a l'etape du recrutement. Quant aux cadres hiE~rarchiques, ils participent activement aux activites de dotation. Conjointement avec Ia direction des ressources, Us peuvent contri buer a determiner Ie profil de competences recherchees. De meme, les cadres hierarchiques participent souvent a l'entrevue de selection. Parfois, c'est Ie professionnel des ressources humaines qui conduit la premiere entrevue de selection, et Ie cadre hH'rarchique rencontre les finalistes a l'occasion d'une seconde entrevue de selection. Normalement, la decision finale d'embauche leur appartient. II n'est pas rare non plus que les employes, c'est-a-dire les futurs collegues de la personne qui sera embauchee, participent aux activites de dotation. Les employes peuvent participer a l'analyse des postes, au recrutement et a I'ap preciation des candidats pour assurer une meilleure decision d'embauche en fonction des exigences reelles du milieu de travaiL lIs sont souvent les mieux places pour verifier l'expertise d'un candidat. Dans Ie domaine de l'informa tique, par exemple, les employes sont dans certains cas les personnes Ies mieux quaIifiees pour verifier Ia connaissance d'un langage de programma tion particulier. Par ailleurs, les candidats eux-memes ont un role important a jouer dans Ie processus de dotation. lIs doivent fournir toute !'information necessaire a la prise de decision en matiere d'embauche. Ainsi, les candidats soumettent
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I Les defis de la competence leur curriculum vitle lors de l'entrevue de selection, fournissent des references, et ainsi de suite. Leur collaboration est non seulement souhaitee, mais elle s'avere necessaire a la reussite du processus de dotation. De son cote, l'organisation dOit traiter les candidats avec respect et dignite, et prendre tous les moyens permettant d'assurer l'equite de Ia procedure et des decisions.
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Reussir la dotation La reussite du processus de dotation se mesure principalement par Ie rende ment au travail des personnes embauchees. On peut ainsi se demander si les personnes nouvellement embauchees ont les compHences requises par leurs fonctions ainsi que la motivation a deployer des efforts et a demeurer au sein de l'organisation. La reponse a ces questions repose en grande partie sur la qualite des decisions de selection.
5.3.1 Les meilleures decisions de selection Une fa~on concrete d'apprecier Ie succes de la dotation consiste a comparer la proportion des decisions actequates en matiere de selection a la proportion des erreurs de selection. Comme l'illustre Ie tableau 5.1, les decisions en matiere de selection peuvent etre classees en quatre categories: 1)
Un candidat est choisi et s'avere un employe performant. C'est la situation ideale pour batir une equipe gagnante et ameliorer la productivite, la qua lite du travail et Ie service a la clientele. La periode d'adaptation de l'em ploye a son nouveau milieu de travail a de bonnes chances d'etre moins longue.
2)
Un candidat est rejete et, s'il avait ete retenu, il n'aurait pas repondu aux exigences du poste. II s'agit d'une bonne decision pour I'organisation, de meme que pour Ie candidat, qui aurait eu de la difficulte a satisfaire aux exigences du poste et qUi risquait de perdre confiance en ses moyens.
3) Un candidat est choisi, mais it ne fournit pas un rendement satisfaisant.
Cette decision entraine souvent des debours supplementaires en ce qui concerne une surveillance speciale accrue, la formation, la qualite dou teuse du travail, les absences, etc., et meme parfois des mesures disci plinaires ou administratives couteuses. S'H faut reprendre Ie processus a maintes reprises, on peut imaginer l'escalade des couts! 4)
Un candidat est rejete alors que, s'il avait ete retenu, son rendement aurait He superieur aux attentes. L'entreprise ne beneficie pas alors de son talent. Les couts de cette erreur sont mains visibles, mais voila autant de gagne pour la concurrence!
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I Se doter d'employes competents et motives
LES QUATRE TYPES DE DECISIONS EN MATIERE DE SELECTION
Les decisions des categories 1 et 2 correspondent a de bonnes decisions de selection alors que celles des categories 3 et 4 correspondent a des erreurs de selection. On peut resumer en affirmant que la reussite de la dotation s'appuie essentiellement sur l'utilisation de moyens visant a reduire Ie plus possible les erreurs d'acceptation et les erreurs de rejet. S'ajoute a cette exigence celle qui consiste a adopter une demarche respectueuse du cadre legal dans lequell'en treprise se situe.
5.3.2 Le respect du cadre Jegal Le succes de la dotation ne s'appuie pas uniquement sur l'elaboration de methodes et de techniques eprouvees, mais egalement sur Ie respect d'un cadre legal dont la principale composante est la Charte des droits et libertes de la personne. En vertu des articles 10 et 16 de la Charte, Ie processus de dotation est soumis a l'interdiction de toute discrimination fondee sur la race, la couleur, Ie sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'etat civil, l'age - sauf dans la mesure prevue par la loi -, la religion, Ies convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, Ie handicap ou l'utilisation d'un moyen de pallier ce handicap. II faut comprendre que la Charte vise a eliminer la discrimination directe et indirecte (ou systemique) sur la base de ces motifs de discrimination. Les personnes responsables de l'embauche se reservent toujours Ie droit de choisir Ie candidat qui repond Ie mieux aux eXigences professionnelles nor males du poste. Par exemple, un employeur peut refuser d'embaucher une personne handicapee qUi ne possederait pas les aptitudes ou les qualites requises par l'emploi. Lorsque l'employeur invoque ainsi une exigence pro fessionnelle, il doit cependant Ia justifier en fonction de la realite du milieu de travail.
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La Charte des droits et libertes de la personne interdit d'exercer une distinction, une exclusion ou une preference fondee sur les motifs qu'elle enonce explicitement. Par consequent, il serait imprudent de demander it un candidat d'indiquer son age sur un formulaire d'embauche ou d'y joindre une photographie. Aussi, une commission scola ire qUi refuserait d'octroyer un contrat a une enseignante qui ne serait pas disponible une partie de I'annee scola ire it cause de sa grossesse assume Ie risque d'etre accusee de discrimi nation fondee sur Ie sexe et Ia grossesse. Par ailleurs, des questions comme « Combien d'enfants avez-vous a votre charge?» ou «Etes-vous pret it tra vailler pendant Ies fetes religieuses suivantes ... ?» sont it proscrire dans une entrevue de selection. L'entreprise qUi pose de telles questions s'expose it des poursuites en raison d'une discrimination directe. Toujours selon les principes de la Charte, la direction de l'entreprise doit s'assurer que les moyens utilises pour prendre une decision d'embauche n'ont pas un effet discriminatoire. Une norme d'embauche selon laquelle il faut me surer 1,75 metre pour obtenir un poste de pilote d'avion a un effet discrimi natoire, car elle restreint l'embauche de femmes. La politique d'une entreprise visant it n'engager qu'un personnel sans barbe, aux cheveux courts et devant porter un kepi peut avoir comme effet d'exclure les candidats dont Ie port du turban et de la barbe est exige par leur religion. Un test de selection auquelles membres de certains groupes ethniques ont moins de succes pourrait aussi etre juge discriminatoire. II s'agirait, dans ces circonstances, d'une discrimi nation indirecte ou systemique qui n'est pas forcement empreinte de mau vaises intentions, mais qui produit des consequences negatives pour un groupe cible. D'ailleurs, on denonce parfois cette situation dans certains milieux.
La revision des politiques et des pratiques de dotation est necessaire afin d'eliminer les conditions restrictives qUi ne se justifient aucunement par une exigence professionnelle reelle et etablie de bonne foL Les entreprises qui veu lent renforcer l'egalite des chances d'emploi peuvent aussi mettre sur pied un programme d'acces it l'egalite afin de remedier it une discrimination passee
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Se doter d'employes competents et motives
par des mesures de redressement destinees a augmenter la representation de personnes faisant partie des groupes victimes de discrimination dans l'emploi. Un tel programme est repute non discriminatoire s'l1 est etabli conformement a la Charte des ruoits et libertes de la personne. Le tableau 5.2 presente les etapes d'un programme d'acces a l'egalite. La reus site de la dotation repose egalement sur Ie respect des autres exi gences du regime juridique: • La Charte de la langue fran~aise prevoit specifiquement qu'il est interdit a un employeur d'exiger, pour l'obtention d'un emploi ou d'un poste, la connaissance d'une langue autre que la langue officielle, a moins que l'accomplissement de la tache ne necessite la connaissance de cette autre langue. • La Loi sur l'exercice des droits des personnes handicapees, qui vise l'inte gration socia Ie, scolaire et professionnelle des personnes handicapees, sti pule qu'une entreprise peut soumettre un plan d'embauche des personnes
lE DEROUlEMENT D'UN PROGRAMME D'ACds A l'EGAlITE
Source: Adapte de la Commission des droits de la personne du Quebec, L'acces a l'egalite dans l'emploi: guide d'elaboration d'un programme voiontaire, Quebec, Gouvernement du Quebec, 1988, p. 13-17.
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Les detis de la competence
handicapees, sans toutefois preciser de quotas (a l'heure actuelle, on fonc tionne selon une approche d'incitation). • La Loi sur la protection des renseignements personnels dans Ie secteur prive accorde a tout individu la protection des renseignements personnels que l'entreprise recueille, detient, utilise ou communique ason sujet. Nous examinerons plus loin Ies effets de cette 10i sur l'utilisation de references d'employeurs precedents. • Dans un milieu syndique, Ies conventions collectives peuvent contenir des exigences et des restrictions que Ie systeme de dotation doit integrer. Par exempIe, la convention collective d'une usine specifie ceci: « Lorsqu'un poste devient vacant de fa~on permanente ou qu'un nouveau poste est cree, l'EmpIoyeur l'affiche dans les (5) cinq jours ouvrables et pour une duree de (5) cinq jours ouvrables en precisant Ia fonction, l'horaire de tra vail, Ie taux de salaire, les exigences normaies du poste, la nature des tests et la note de passage. » Ii faut donc s'efforcer de prendre de bonnes decisions de selection tout en respectant Ie cadre legal. Mais du pOint de vue des personnes responsables de la gestion des ressources humaines, il importe aussi d'assurer la satisfaction des « clients» des activites de dotation et la coherence entre la dotation et les autres facettes de Ia gestion des ressources humaines.
5.3.3 La satisfaction des clients des activites de dotation Les cadres font generalement appel a cinq criteres pour exprimer leur degre de satisfaction a l'egard des activites de dotation dans leur organisation, a savoir la communication, Ia rapidite, Ia qualite des candidats embauches, Ia qualite des instruments de selection et la qualite du service offert (Heneman et autres, 1995). 11 va sans dire que pour ameliorer la satisfaction de ces clients des ser vices de dotation, les intervenants en cause ont interet abien les informer du processus de dotation, a intervenir rapidement dans les dossiers de dotation, a s'assurer de Ia qualite de l'embauche sur les plans des connaissances, des habiletes et des aptitudes, a s'interroger sur la qualite des instruments de selec tion utilises et finalement a ecouter, a etre accessibies et a faire en sorte qu'ils expriment bien leurs besoins.
5.3.4 La coherence entre la dotation et les autres facettes de la GRH Le SUCcE~s de la GRH depend en partie de !'integration coherente de ses diverses facettes. Les actions administratives de la dotation doivent donc s'harmoniser aux autres pratiques de GRH. En ce qUi concerne la formation, Ies entreprises peuvent so it investir dans Ie developpement des competences des ressources humaines qu'elles posse dent deja ou alors acquerir a l'exterieur une main-d'ceuvre qualifiee. Par ailleurs, si la dotation est moins bien reussie, les charges rattachees a la formation des nouveaux employes seront generale ment plus elevees. La nature, Ie contenu et Ia duree de la formation seront alors determines en partie par l'efficacite du processus de dotation.
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I Se doter d'employes competents et motives
L'evaluation du rendement permet de verifier la reussite ou non des acti vites de la dotation. Dans la mesure ou les personnes nouvellement embauchees manifestent des comportements valorises par l'entreprise et bril lent par leurs realisations professionnelles (et re<;oivent done des evaluations positives de leur rendement), Ie systeme de dotation sera per\=u d'un bon rei!. La remuneration (Ie salaire, les primes, la participation aux benefices, 1'0c troi d'options d'achat d'actions, etc.) et les avantages sociaux influencent la capacite de I'entreprise a attirer des candidats qualifies, et done les probabi lites de succes de Ia dotation. L'equipe de football qui offre Ies meilleurs salaires a plus de chances d'attirer et de conserver les meilleurs joueurs, et eventuellement de remporter Ie championnat. En ce qUi a trait aux avant ages sociaux, de plus en plus d'entreprises implantent des pratiques d'aide a l'equilibre travail-famille (une garderie dans Ie milieu de travail, un horaire fleXible, des conges parentaux, etc.) pour attirer une main-d'reuvre compe tente ayant a composer avec des responsabilites parentales. En outre, les organisations qui offrent de nombreuses possibilites de developpement de carriere peuvent aussi retirer un avantage au point de vue du recrutement. Les clauses d'une convention collective peuvent a l'occasion restreindre Facces a certains postes a des membres du syndicat. Par ailleurs, Ie processus de dotation peut etre en partie determine par les dispositions de la conven tion collective. A titre d'exemple, une convention collective exige que la promotion it l'interieur de l'unite d'accreditation se fasse par affichage aux endroits habituels durant une periode d'au moins 15 jours et que l'employeur transmette une copie de l'affichage au syndicat. Ainsi, les relations collectives du travail determinent en partie les regles a respecter dans Ie processus de dotation.
n peut aussi y avoir des relations etroites entre la strategie d'affaires, la cul ture de gestion et Ie systeme de dotation. Par exemple, une entreprise ou regne un esprit d'innovation axe sur Ie developpement de nouveaux marches pourrait favoriser l'embauche de candidats ayant une experience acquise en recherche et developpement ou en marketing de meme qu'une expertise it jour, une tolerance face a l'ambiguYte et la volonte de prendre des risques. Par ailleurs, selon la situation de 1'entreprise, la direction pourrait favoriser l'embauche d'« artistes)} qui exercent un leadership visionnaire plutot que de «technocrates» qui font prevaloir l'approche technique d'un probleme au detriment des consequences sociales et humaines (Pitcher, 1994) . . , Le processus de dotation Voici les principales etapes d'un processus de dotation: • connaitre Ies postes et Ie milieu de travail; • etablir Ie profil des competences; • generer des candidatures par Ie recrutement;
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• procecter a une selection efficace; • prendre une decision d'embauche ; • favoriser l'integration des nouveaux employes. L'importance accordee a chacune des Hapes du processus de dotation peut varier selon les postes a combler et selon Ie contexte particulier de l'entreprise. L'embauche d'un infirmier, d'un chercheur, d'un informaticien ou d'un manceuvre s'effectue dans chaque cas en fonction de regles et de traditions differentes. Par ailleurs, au sein de Ia petite et moyenne entreprise, Ie recrute ment est peu formel et peu planifie, tandis qu'on realise souvent la selection sans avoir determine clairement Ie profil des competences. Au sein de la tres grande entreprise, comme chez Toyota, Ie processus de dotation peut durer plusieurs mois; il comprend de nombreuses «epreuves» (des simulations, des tests papier-crayon, des entrevues, un examen medical) permettant de verifier Ies competences techniques et interpersonnelles de chaque candidat. La comprehension du processus de dotation peut notamment representer un atout pour Ie candidat a un poste. En fin connaisseur, Ie candidat peut mieux se preparer et ainsi ameliorer ses chances d'etre embauche. II devra s'as surer qu'il connait bien Ie poste qui !'interesse et ses exigences. Le candidat pourra ainsi mieux deviner Ies predicteurs ou criteres de selection et prevoir de queUe maniere l'employeur s'y prendra pour verifier sa qualification.
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Connaitre les postes et le milieu . . . . . .de . . . travail .......
.. ... .......... ... ........ . ~
L'analyse des postes est Ie mecanisme privilegie pour generer de l'information sur les postes et Ie milieu de travail. EUe est une composante essentielle d'un processus rigoureux de dotation qui permet de renforcer la correspondance entre la qualification des candidats et les besoins de l'organisation. Comme Ie montre la figure 5.1, l'analyse des postes et du milieu de travail represente Ie point de depart de l'elaboration du profil des comp€:tences et des €:tapes subsequentes. La mise au point du profil des competences exige qu'on infere des infor mations portant sur Ies postes et sur Ie milieu de travail un profil des con naissances, des habiletes, des aptitudes et des autres caracteristiques requises pour occuper Ie poste pour Iequell'entreprise recrute des candidats. Une fois etabli, Ie profil des competences permet de proceder au recrutement de can didats ayant la qualification qui correspond aux exigences du poste a com bIer. Ensuite, on pourra choisir des instruments de selection qui permettront de verifier si la qualification des candidats correspond a la qualification exigee par Ie poste.
5.5.1 L'analyse des postes et du milieu de travai1 Comme nollS l'avons vu au chapitre 4, l'analyse des postes permet de determi ner par ecrit les activites, les taches, les devoirs et les responsabilites prop res a
Chapltre 5
I Se doter d'employes competents et motives
l'emploi, la nature et la portee des decisions, la procedure, les equipements utilises, Ie traitement de l'information et les conditions de travail existantes, etc. Faisant appel it diverses techniques (l'observation, les questionnaires, les entrevues, les notes prises par les titulaires des postes, etc.), l'analyse des postes consiste en un processus de collecte d'informations qui concernent des comportements observables (Harvey, 1991). LE ROLE DE L'ANALYSE DES POSTES ET DU MILIEU DE TRAVAIL DANS LE PROCESSUS DE DOTATION
L'analyse du milieu de travail porte sur les conditions materielles entourant l'execution du travail, sur la culture d'entreprise, sur Ie systeme de remune ration, sur l'horaire de travail et sur Ie lieu de travail. Cette analyse represente une demarche necessaire pour determiner Ie degre de compatibilite des interets et des preferences des candidats avec les conditions ambiantes des postes. L'exposition a des temperatures extremes, a des vibrations ou a des mati(~res chimiques toxiques est une caracteristique de certains milieux de travail dont il faut tenir compte dans la dotation. Le style de leadership du superieur imme diat et les valeurs de l'equipe de direction sont d'autres composantes impor tantes du milieu de travail.
5.5.2 La description des pastes Plusieurs entreprises adoptent des descriptions de postes qui resultent d'ana lyses des postes. On trouve habituellement dans une description de poste Ie titre du poste, Ie sommaire de ses principales fonctions ainsi que Ia descrip tion des responsabilites et des devoirs lies au poste. Cette description devrait exprimer clairement ce que fait Ie titulaire du poste, comment il Ie fait et pourquoi il Ie fait. La figure 5.2 presente la description d'un poste qUi com prend ces renseignements ainsi que les composantes du profil des compe tences sous Ie rub rique « Exigences du poste ». La description des postes necessite une redaction soignee dont les enonces respectent les parametres d'objectivite, de clarte et de concision. Dans la sec tion touchant au prom des taches, il est preferable d'utiliser des verbes d'ac tion pour decrire les taches qu'accomplit Ie titulaire du poste. Ces verbes
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doivent preciser la nature de l'activite. Par exemple, au lieu d'un verbe tout usage comme «mettre», il conviendrait de recourir a des verbes comme « verser}} I « revetir)} 1 «ajuster}} ou «deposer}} I qui sont susceptibles de rendre compte de l'acte de fa~on plus precise. II importe egalement d'indiquer la finalite de l'activite, les resultats attendus de l'action ainsi que les materiaux, les equipements et les procedures qui sont employes. Pour etre utile ala dotation, la description des postes devrait aussi contenir des specifications sur Ie milieu de travail dans Iequel se realisent les activites professionnelles du titulaire du poste. LA DESCRIPTION DU POSTE DE COORDONNATEUR DE UGUE DE DEVELOPPEMENT
FEDERATION DE NATATION DU QUEBEC
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COORDONNATEUR DE UGUE DE DEVELOPPEMENT
10 POSTES DESCRIPTION D/EMPlOI 1.IDENTlFICATlON 1.1 Organisme:
Federation de natation du Quebec
1.2 Service:
Technique
1.3 Titre de I'emploi:
Coordonnateur de ligue de developpement
1.4 Superieur immediat :
Adjoint au directeur technique
2. RESPONSABILITES
ET TACHES
2.1 Sommaire des responsabilites Le titulaire a la responsabilite de travailler de concert avec I'adjoint au directeur technique afin d'assurer I'organisation et la realisation des acti vites de la ligue de developpement a I'interieur d'une association regio nale de natation. De plus, il veillera a ce que la structure des rencontres de developpement de I'association regionale visent la realisation des objectifs se rapportant au programme de developpement de la natation quebecoise. 2.2 Profil des taches • S'assure que Ie contenu des rencontres des ligues de developpement respecte les principes du modele de developpement de I'athlete et ceux de la Federation de natation du Quebec.
Chapitre 5 \ Se doter d'employes competents et motives
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FEDERATION DE NATATION DU QUEBEC
• Elabore et propose un calendrier de rencontres de developpement de concert avec les entraineurs de I'association regionale. Le calendrier et Ie contenu des rencontres doivent iHre approuves par 10 Federation de natation du Quebec. • Voit a I'organisation des rencontres de developpement avec I'aide du directeur de rencontre pour chacune des rencontres. • S'assure du bon deroulement des rencontres en etant sur place lors de chacune des rencontres. • Se charge de 10 production des resultats de chacune des rencontres et les fait parvenir 10 Federation dans les meilleurs delais.
a
• S'assure que les recompenses sont basees sur duelle des nageurs.
10 progression indivi
• Participe aux reunions de I'association regionale de notation. • Participe aux rencontres d'evaluation des ligues de developpement, organisees par 10 Federation de natation du Quebec.
3. NIVEAU
D'AUTORITE
Le titulaire du poste informe regulierement I'adjoint au directeur technique au sujet de ses activites. " doit Ie consulter en ce qui concerne tout changement pouvant etre apporte 10 structure des rencontres pendant 10 saison. II jouit de I'autonomie necessaire pour mener terme ses taches et ses responsabilites. Le titulaire du poste detient un pouvoir de recommandation aupres de I'asso ciation regionale de notation en ce qui a trait 10 structure des rencontres de developpement. II releve uniquement de I'adjoint au directeur technique de 10 Federation de notation du Quebec.
a
a
a
4. EXIGENCES
DU POSTE
• Avoir termine au moins Ie niveau 2 du PNCE. • Formation en activite physique un atout. 4.1
Experience pertinente • Etre entraineur dans un club affilie Quebec avec trois ans d'experience.
4.2
a 10
Federation de natation du
Connaissances particulieres • Maltriser les principes soutenant Ie modele de developpement de I'athlete.
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I Les defis de la competence
FEDERATION DE NATATION DU QUEBEC 4.3
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Qualites personnelles • Le titulaire du poste doit demontrer un excellent leadership. • II doit avoir un bon sens de I'organisation du travail. • II doit posseder un bon esprit d'analyse et de synthese. • II doil demontrer une grande capacite de creativite professionnelle dans I' elaboration de la structure des rencontres de developpement. • II doit etre tres motive pour I'emploi et faire preuve d'une grande disponibilite. • II doit etre un tres bon communicateur. • II doit faire preuve d'enthousiasme et d'esprit de collaboration avec les differents intervenants de I' association regionale (entraineurs, administrateurs et benevoles) qui seront en mesure de I'aider dans 10 realisation de ses taches. • II doit etre capable d'etablir des relations de confiance, notamment avec les entralneurs de I'association regionale. • II doil etre diplomate. • II doit etre autonome et prendre des initiatives sans pour autant mena cer I'autonomie des gens avec lesquels il pourrait travailler.
RENUMERATION
• 10 postes sont disponibles (1 poste dans l'Association regionale de natation). La renumeration de ces postes se fera sur une base annuelle. DEPENSES
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• Toutes depenses reliees directement la fonction seront remboursees, selon les politiques en vigueur de 10 Federation de natation du Quebec. DATE UMITE
• Les personnes interessees devront faire parvenir leur curriculum vitre ainsi I'attention de qu'une lettre de presentation avant Ie 30 juin 2001 M. Claude Picard I' adresse suivante :
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Federation de natation du Quebec
4545, avenue Pierre de Coubertin
c.P. 1000, succursale M
Montreal (Quebec)
H1V 3R2
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Se doter d'employes competents et motives
etabliT le pTofil des competences ••••••••••••••••••••••••••••
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Un profil des competences facilite la communication a l'occasion du recrute ment. En effet, Ie profil des compHences renseigne les personnes a la re cherche d'un emploi sur les eXigences clairement precisees du poste a pour voir. Le profil des compHences permet egalement de choisir des instruments de selection qui ont un rapport avec les exigences reelles du poste. Dans cette section, nous repondons sommairement aux deux questions sui vantes. Premierement, quel doit etre Ie contenu du profil des competences? Deuxiemement, comment peut-on proceder pour convertir les informations issues de l'analyse des postes en un profil des competences?
5.6.1 le contenu du profil des competences Souvent integre dans la description des postes, Ie profil des compHences spe cifie les connaissances, les habiletes, les aptitudes et les autres caracteristiques que devrait posseder Ie titulaire du poste pour bien accomplir son travaiL Les connaissances sont les renseignements qui portent sur des concepts, des faits au une procedure et qui facilitent la realisation d'une activite. Par exemple, pour un paste d'ingenieur en construction, une bonne connaissance des principes du chauffage, de la c1imatisation, de l'eclairage et de l'acoustique pourrait s'averer necessaire. Dans la mesure ou les connaissances acquises ont de fortes chances d'etre appliquees en situation d'emploi, elles sont d'un grand interet pour la dotation. Pour ce qUi est des habiletes, il s'agit de la capacite a executer des opera tions avec adresse et precision. Une personne habile sait faire une tache comme taper 40 mots a la minute ou trouver les lunettes ou les lentilles cor neennes qUi corrigeront la vue des clients. Les habiletes de gestion compren nent generalement des aspects comme la capacite a etablir des objectifs, a deleguer la responsabilite des taches au niveau souhaitable et a organiser et a presenter des idees d'une maniere convaincante. Les aptitudes font reference a une disposition naturelle a quelque chose. Les aptitudes cognitives, psychomotrices, physiques et sensorielles de meme que perceptuelles sont les principales categories d'aptitudes. La verification des aptitudes cognitives porte generalement sur les capacites verbales, mathe matiques, de raisonnement ainsi que sur la memoire de la personne. Enfin, les autres caracteristiques comprennent des eXigences particulieres concernant un trait physique, la detention d'un titre professionnel, l'interet professionnel, Ie profil de personnalite requis par Ie poste ou d'autres caracte ristiques pertinentes. Par exemple, pour un poste de controleur de la circula tion aerienne, un service de navigation aerie nne civile au Canada a determine les exigences suivantes dans son annonce de recrutement : etre prH a s'instal ler n'importe ou au Canada, avoir au moins 18 ans, Hre citoyen canadien ou immigrant rel;u et posseder une excellente vision et une bonne perception des couleurs. La detention d'un titre professionnel ou d'un permis de conduire
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I Les defis de la competence ainsi que l'interet pour Ie travail dans un contexte particulier sont des ele ments que l'on trouve souvent dans la cab~gorie des autres caracteristiques.
5.6.2 La demarche d'elaboration du profH des competences L'eIaboration du profil des competences pour un poste a combler se realise par inference Sur la base du jugement ou de diverses techniques plus ou moins complexes. La demarche la plus simple consiste a determiner, Sur la base de son jugement et de ses experiences en matiere de dotation, l'ensemble des competences qui semblent associees a la reussite dans un poste particulier. Cette appreciation intuitive permet de reconnaltre, pour chaque element de contenu du poste, les connaissances, les habiletes, les aptitudes et les autres caracteristiques requises. Les techniques plus sophistiquees de determination du profil des competences font appel a l'opinion d'experts et meme parfois a des questionnaires structures (voir Gatewood et Field, 1994, pour un traite ment plus exhaustif de ces techniques).
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Generer des candidatuTes paT le TecTutement Le recrutement designe toutes les activites par lesquelles les employeurs indi quent qu'un poste est vacant dans l'organisation et incitent les personnes sus ceptibles de posseder la qualification requise a presenter leur candidature. Le principal objectif du recrutement est de generer les candidatures les plus qua lifU:es pour un poste ou des postes donnes en nombre suffisant, c'est-a-dire de trouver la main-d'reuvre dont l'organisation a besoin, et ce, souvent dans Ie contexte d'une penurie de main-d'reuvre.
5.7.1 Les penuries de main-d'ceuvre qualifiee Les organisations des pays developpes font face au double defi du vieillisse ment de leur main-d'reuvre et de la reduction du reservoir de releve. A l'heure actuelle, on constate deja, dans divers milieux, des penuries de specialistes en architecture de reseau, de machinistes, d'operateurs a commandes numeri ques, de techniciens en multimedia, de chimistes en cosmetologie, de per sonnel de vente pour Ie commerce de detail et d'ingenieurs en automatismes. Selon un sondage mene par la SocU~te Conseil Mercer, les chefs des entreprises les plus performantes au Canada craignent que la croissance de leurs entre prises ne soit ralentie par Ie manque de main-d'reuvre. Et les dirigeants recon naissent que, pour maintenir leur rentabilite, Us devront faire plus d'efforts pour trouver et retenir les employes-des. La situation est particulierement difficile dans les petites et moyennes en treprises (PME), qUi n'arrivent pas a combler leurs besoins en main-d'reuvre. Les resultats d'un sondage mene par la Federation canadienne de l'entreprise independante aupres des chefs d'entreprise durant Ie premier trimestre de 2002 indiquent que Ie probleme de la penurie de main-d'reuvre persiste dans
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Se doter d'employes competents et motives
les PME. Le nombre total d'emplois vacants correspondait a 4,5 % du total des effectifs de ces entreprises, l'equivalent d'environ un poste vacant sur 22. Heureusement, la pratique du recrutement accorde une grande place a la creativite et a une action hardie et originale pour constituer un reservoir de main-d'a=uvre qualifiee. Ainsi, les entreprises du secteur de la haute technolo gie peuvent attirer des candidats en mettant l'accent sur Ie developpement professionnel et l'acquisition de connaissances a Ia fine pointe de la techno logie (Barrette et autres, 2002). D'autres organisations revoient leurs condi tions de travail de fa\on a rehausser leur at trait comme employeur de choix. C'est ainsi que Hutchison Avenue Software a embauche son propre chef qui, chaque jour, propose un menu different de cuisine maison. Un jour, les em ployes peuvent deguster de la cuisine mexicaine et, Ie lendemain, un saumon cajun. La chaine de restaurants McDonald's, quant a elle, fait valoir des possi bilites d'avancement et de carriere, une remuneration interessante et des avantages sociaux concurrentiels, une formation de qualite, des horaires flexi bIes, l'occasion de travailler avec Ie chef de file de l'industrie de la restauration rap ide ainsi qu'un environnement de travail motivant et dynamique. D'au tres organisations comptent sur leurs pratiques d'equilibre travail-famille ou sur les possibilites d'avancement qu'elles offrent pour faciliter leur recrute ment. En rehaussant ainsi leur image, ces entreprises peuvent bene£icier d'une receptivite plus grande des candidats au regard de leur message de recrute ment (Barber, 1998).
5.7.2 La decision de faire du recrutement interne ou du recrute ment externe La decision de generer des candidatures a l'interieur ou a ]'exterieur de l'en treprise repose sur des considerations d'ordre strategique et operationnel. L'entreprise qui mise sur l'innovation et la creativite aurait interet a favoriser Ie recrutement externe. A I'oppose, l'entreprise qui mise sur une strategie de reduction des couts et qui desire renforcer la culture existante devrait norma lement favoriser Ie recrutement interne. Par contre, pour changer la culture d'entreprise, Ie recrutement externe est susceptible de donner de meilleurs resultats que Ie recrutement interne. L'acquisition a l'exterieur de l'entreprise de certains profils de gestion naires transmet un message clair aux employes en place concernant Ie virage qu'amorce l'entreprise. Par exemple, l'embauche de superviseurs qui adherent a une philosophie de gestion participative et mobilisatrice constitue une indi cation de l'importance accordee a cette vision de la relation d'emploi. Le recrutement externe est egalement considere comme la meilleure approche pour generer de nouvelles idees au seln de l'entreprise. Elle assure une plus grande diversite de la main-d'a=uvre au sein de l'entreprise. Les recrues dont l'experience se demarque de celle du personnel en place apportent souvent une autre vision et des solutions nouvelles. Cela represente un atout pour I'or ganisation, surtout en periode de transition. Ces considerations strategiques et d'autres de nature plus operationnelles sont resumees dans Ie tableau 5.3.
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Les defis de la competence
RECRUTEMENT INTERNE OU RECRUTEMENT EXTERNE ?
Si Ie profil des competences recherche ne se trouve pas parmi les employes actuels, Ie recours au recrutement externe s'avere souvent la seule option pos sible. Cela est susceptible de se produire lorsque l'entreprise se trouve en situa tion de croissance. I:entreprise qUi entreprend un programme d'expansion de ses installations a souvent besoin d'un personnel qui sera en mesure de developper de nouveaux marches. Par aiIIeurs, les politiques de l'entreprise peuvent specifier que Ie recrutement interne sera privilegie, tandis que Ie recru tement externe permettra seulement de combler les postes qui sont au bas de la hierarchie. Notons aussi que Ie recrutement interne represente une compo sante essentielle d'un systeme de gestion des carrieres (voir Ie chapitre 7). Par consequent, l'entreprise qui se preoccupe de la planification des carrieres devrait miser davantage sur la promotion interne des employes en place. Dans un milieu syndique, les dispositions d'une convention collective peuvent ega lement contraindre l'employeur a faire appel a la promotion interne lors qu'un poste se libere. Si l'objectif est d'accroitre la motivation des employes et d'ameliorer Ie cli mat de travail, la politique devrait favoriser les employes actuels dans l'attri bution des postes. Cela a generalement pour effet d'augmenter l'engagement des personnes dans les projets de developpement de l'entreprise. Si, par ailleurs, l'entreprise souhaite compter sur des personnes-ressources qui ont
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une connaissance approfondie des rouages de la gestion, du fonctionnement de l'entreprise, de ses activites, de son personnel et de ses clients, etc., Ie recru tement interne s'averera plus appropri(~ que Ie recrutement externe. Toutefois, lorsque la priorite consiste a eviter des erreurs de selection, on pre£ere souvent Ie recrutement interne. En effet, les dirigeants connaissent deja Ies habitudes de travail des employes en place. La decision de selection sera donc moins risquee. Par contre, un rendement eleve dans un poste n'assure pas un ren dement superieur dans un autre poste comportant des responsabilites differentes. Par exemple, une infirmiere performante ne deviendra pas neces sairement une infirmiere en chef efficace. II importe alors d'apprecier Ie potentiel de rendement de la personne dans un poste de nature differente comprenant de nouvelles exigences. II importe aussi de s'assurer qu'on peut trouver dans l'entreprise les com petences requises par les postes. Le systeme d'information en ressources humaines (SIRH) represente l'outil privilegie d'analyse des competences dis ponibies a I'interne. En interrogeant la base de donnees du systeme, Ie respon sable de la dotation devrait pouvoir reperer rapidement, par exemple, les ingenieurs specialises en genie mecanique qui parlent espagnol.
5.7.3 Les methodes de recrutement interne Un recrutement interne efficace requiert une bonne comprehension du fonc tionnement de l'organisation, de son systeme de gestion des carrieres, de sa preparation de la releve, de sa filiere d'emplois et de ses diverses regles et me thodes. r:entreprise favorise-t-elle une carriere qui mise sur la mobilite du personnel ou une carriere qui est orientee sur l'aide aux employes? Le recrutement interne commande aussi une appreciation du processus de prepa ration de la releve. Par ailleurs, dans un milieu syndique, on trouve frequem ment des indications concernant Ie respect de l'anciennete dans les pratiques de dotation interne. Par exemple, la convention collective de la Federation des infirmieres et infirmiers du Quebec precise que «Ie poste devra etre accorde et sera comble par la salariee qUi a Ie plus d'anciennete parmi celles qui ont pose leur candidature, a la condition qu'elle puisse satisfaire aux exi gences normales de la tache }).
L'affichage des postes L'affichage des postes consiste a renseigner tous les employes sur les possibili tes que leur offre l'entreprise en matiere de postes a combler. Selon une esti mation, cette methode peu couteuse serait adoptee par environ 92,5 % des entreprises quebecoises (Bernard et autres, 1992). L'affichage des postes pen dant une periode determinee permet a chaque employe de s'informer des possibilites d'avancement selon les exigences des postes et de poser officielle ment sa candidature. La figure 5.3 montre un exemple de cet outil qu'est l'avis d'affichage. L'affichage des postes peut se faire sur des tableaux d'affichage prevus a cette fin, dans une annonce qui parait dans Ie journal de l'entreprise, dans
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I Les defis de la competence AVIS D'AFFICHAGE A. SYLVANIA
OSRAM
SYLVANIA
AVIS D'AFFICHAGE DE POSITION Description de la position vacante
Titre _._ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ __ Departement Equipe _ _ _ ~_ _ __ Permanente ___~_. _ _ Temporaire _ _ _ _ _ __ _ __________ Grade ___ _ __ Numero de code __
~.~
Les deIais et les exigences de la position vacante _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ __
La position vacante decrite ci-avant est offerte aux salaries qui respectent l'une des conditions prevues it l'article 15.03 (du departement ou de \'usine) de Ia convention collective. Les salaries doivent poser leur candidature en inscrivant leurs noms avant ___ heures, Ie _ _._ _ _ _ _ 20 __ ~ . Avis d'affichage de position emis par (Superieur immectiat)
(Date JJ MM AA)
Raison de l'affichage:
Inscrire votre nom en lettres mouiees
Date d'anciennete
JJ MM AA
Nom du salarie choisi pour occuper la position vacante
(Nom
du salarie)
(Date d'anciennete)
COPIE ROSE: Service de Ia paie COPIE BLEUE: President du syndicat
(Superieur immectiat)
Service du personnel
COPIEJAUNE: COPIE BLANCHE: Superieur immediat
une note de service ou meme a I'occasion d'une reunion d'equipe. Un incon venient de I'affichage des postes est que cette methode peut engendrer Ie mecontentement chez les employes dont Ia candidature n'a pas ete retenue.
L'inventaire des ressources humaines Le recrutement interne peut egalement se realiser a l'aide d'un inventaire des res sources humaines qui resume l'experience, Ia scolarite, Ies connaissances, les habiletes, les aptitudes et les autres caracteristiques des personnes au service de l'entreprise. En precisant quelques parametres de recherche, Ie
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I Se doter d'employes competents et motives
gestionnaire peut utiliser l'inventaire des ressources humaines pour localiser l'employe possectant la qualification requise pour combler Ie poste vacant. Cette methode d'appariement entre l'individu et l'emploi requiert une infor mation complete et valide sur la qualification de chaque personne. EIle est surtout exigeante sur Ie plan de la coIlecte des donnees et sur celui de la mise a jour des donnees contenues dans la base de donnees du systeme informa tique des ressources humaines.
Les tableaux de remplacement Les tableaux de remplacement procurent a la direction une representation visuelle des candidats susceptibles de combler les postes-des qUi se libereront eventuellement aux echelons superieurs de l'organisation. On peut utiliser les tableaux de remplacement pour Ie recrutement interne en considerant simul tanement Ie rendement actuel des pretendants a un emploi et leur potentiel. Ainsi, dans l'eventualite d'un depart soudain, Ie tableau de remplacement per met d'identifier rapidement une personne qualifiee pour assurer la reIeve. Notons qu'il existe des solutions informatiques qUi facilitent Ie developpe ment et l'utilisation de tableaux de remplacement (www.hrsoft.com; www.succession-pulse.com).
Les nominations Le recrutement interne peut etre realise sur une base plutot informelle par la nomination d'un employe a un poste par un superieur. Cette methode com porte cependant certains inconvenients, car Ie choix des candidats est parfois fonde sur des criteres subjectifs et discriminatoires. Par ailleurs, les personnes qui convoitaient Ie poste et qui n'ont pas ete conviees par la direction risquent d'etre frustrees de n'avoir pu faire valoir leurs merites a I'occasion d'un concours ouvert a tous.
5.7.4 Les methodes de recrutement externe Lorsque Ie marche de l'emploi est caracterise par une abondance de personnes qualifiees a la recherche d'un emploi, Ie recrutement externe s'averera plus facile et probablement moins couteux. Par opposition, lorsque Ie marche de l'emploi est res serre, les efforts de recrutement seront plus grands et la recherche de candidats qualifies pourra porter sur une zone plus etendue (nationale ou internationale). Le systeme d'ectucation, la mobilite de la main d'reuvre, les valeurs liees au travail ainsi que la disponibilite d'une main d'reuvre temporaire ou saisonniere sont d'autres elements auxquels il faut accorder une attention particuliere avant d'entreprendre une campagne de recrutement exteme. Le temps dont on dispose et Ie nombre de postes a pourvoir exercent aussi une influence importante sur Ia determination de la strategie de recrutement exteme. Par exempIe, pressee par Ie temps, une entre prise de recrutement d'employes temporaires a procede au recrutement dans des centres commerciaux afin de combler rapidement les postes crees par l'ou verture d'un nouveau centre de renovation. Finalement, Ie souhait d'aug menter la diversite au sein de l'entreprise peut egalement orienter la fas:on de
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faire du recrutement. Par exemple, l'annonce d'emplois est susceptible d'indi quer que l'entreprise adhere au principe de l'equite en matiere d'emploi; cette annonce pourrait etre traduite en chinois ou en toute autre langue et paraitre dans les journeaux communautaires de certains quartiers ayant une forte con centration de minorites ethniques.
Les annonces dans divers medias De toutes les methodes de recrutement externe, les annonces dans les jour naux et les revues constituent certainement la methode la plus visible. Meme si elle peut s'averer couteuse (il en coute environ 3000 $ pour faire paraitre une annonce dans la livraison du samedi d'un journal a grand tirage), cette me thode permet de rejoindre rapidement un vaste reservoir de candidats. Ainsi, l'annonce presentee a la figure SA permettra a une societe multinationale d'attirer l'attention de professionnels de l'informatique desireux de remplir des mandats d'envergure en Amerique du Sud et en Amerique centrale. II faut prHer attention au contenu de l'annonce, car Ie fait de pubUer celle-ci dans un journal important represente aussi un exercice de relations publiques. La section «Carrieres et professions» est l'une des sections les plus EXEMPlE D'ANNONCE DE RECRUTEMENT DANS UN JOURNAL
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en specifianl Ie titre du poste, a I'odresse suivonte :
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697, rue pe,,~·le·Jeune Boucherville (Quebec) J4B 3J6
Courrier electronique :
[email protected]
Telecopieur: (4501 449-2977
Nous souscrivons ou principe d'equite en matiere d'emploL
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lues du journal. Vne presentation soignee est donc necessaire pour faire bien parai'tre l'entreprise. Sur Ie plan du contenu, il faut surtout s'assurer que la partie concernant les exigences du poste est complete et qu'il y a une cohe rence entre elle et Ie profil des competences du poste. L'annonce doit egale ment inclure une breve description de 1'organisation, une enumeration des principales fonctions, les conditions de travail, les renseignements et les docu ments desires ainsi que la demarche a suivre pour poser sa candidature. Le succes d'une annonce repose aussi sur Ie choix du journal approprie. Certains journaux ciblent un public compose surtout de professionnels ou d'intellectuels, tandis que d'autres visent plutot les classes populaires. Par ailleurs, certains journaux ont une portee nationale, alors que d'autres ont une distribution a l'echelle regionale ou locale. L'annonce d'un poste vacant peut egalement paraitre dans des revues specialisees ou des publications pro fessionnelles. A titre d'exemple, la revue Plan de l'Ordre des ingenieurs du Quebec comprend une section « Emploi » qUi contient les annonces de postes vacants seion diverses specialites. L'annonce peut aussi Hre diffusee a la radio ou a la television. Par ailleurs, les entreprises peuvent annoncer des postes en apposant des affiches dans des lieux publics.
Les evenements speciaux Les operations portes ouvertes, les rencontres d'information et les foires d'em bauche sont autant de methodes de recrutement qui favorisent la transmis sion de renseignements sur I'organisation de meme que sur les possibilites d'emploi au sein de celle-ci. Vne operation portes ouvertes permet au public de visiter l'entreprise, de discuter avec Ie personnel et parfois de regarder une video sur I'entreprise afin d'en savoir davantage sur sa mission, ses produits et ses conditions de travail. Les rencontres d'information reunissent a un moment precis les personnes interessees par un type de travail ou par une organisation donnee. Par exempIe, en utilisant I'affichage dans un lieu public, l' entreprise de peintres etudiants College Pro encourageait les personnes desireuses de <, saisir tous les avantages relies a la gestion de leur propre entre prise» a se presenter a une rencontre d'information (voir la figure 5.5). Les rencontres d'information de ce type sont des occasions pour les res ponsables du recrutement de verifier !'interet des candidats a I'egard des pro duits et des services de l'organisation. Chez Microsoft, par exemple, les agents de recrutement presentent aux visiteurs les nouveaux produits informatiques en developpement et observent leurs reactions afin d'apprecier l'intensite de leur emerveillement. Pour ce qui est des foires d'embauche, elles reunissent les employeurs d'entreprises differentes a un meme endroit et souvent pen dant la tenue d'un congres d'une association professionnelle. Au cours de ces evenements, les employeurs peuvent rencontrer plusieurs candidats en peu de temps, ce qui rMuit les frais de deplacement. Par exemple, AT&T, la Banque Nationale, Bell Canada, Microcell et Videotron ont recemment uni leurs efforts pour organiser une foire d'embauche des centres d'appels. La descrip tion du Salon Emploi-Formation qu'on trouve au debut de ce chapitre illustre comment une telle activite peut se derouler.
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I Les detis de la competence UNE INVITATION
AUNE RENCONTRE D'INFORMATION
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Source: College Pro.
Les etablissements d'enseignement et de formation Le recrutement de personnes qui ont generalement peu d'experience pro fessionnelle pour combler des postes d'entree (ou de premier niveau) dans l'organisation s'effectue chaque annee aupres des universites, des colleges, des ecoles professionnelles et des ecoles secondaires. Les entreprises ont la possibilite d'afficher des postes dans ces etablissements ou meme d'organiser des rencontres avec les etudiants par l'entremise du service de placement de l'etablissement d'enseignement ou de formation. Certains etablissements d'enseignement et de formation offrent a leurs etudiants la possibilite de realiser des stages dans un milieu de travail selon
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Se doter d'employes competents et motives
une formule d'enseignement cooperatif. Cela permet aux stagiaires de deve
Jopper un sentiment d'attachement envers l'entreprise; en outre, l'experience leur fournit une retroaction sur leur rendement avant meme la fin de leurs etudes. Les employeurs beneficient aussi de ce programme, car ils ont I'occa sion de voir Ie stagiaire en situation reelle de travail. Ils sont alors en mesure de prendre une decision de selection en connaissance de cause.
Le Teseau Internet
Le recrutement dans Ie reseau Internet est une methode de recrutement externe qUi connait un essor formidable. Cette methode permet a la fois d'afficher des postes vacants et d'explorer des bases de donnees de candidats potentiels. Surtout utilise initialement en relation avec les professions de l'in formatique, Ie recrutement dans Internet s'est etendu a d'autres categories professionnelles. En affichant les possibilites d'emploi sur son site Internet, la firme Cisco Solutions a reussi it combler les deux tiers de ses postes va cants. Une personne desirant denicher un emploi peut s'enregistrer aupres d'un service de recherche d'emploi, consulter les babillards d'emplois, ou meme visiter la section «Carrieres» du site Web d'une entreprise qui suscite un interet pour elle. Par exemple, une personne qUi voudrait joindre les rangs de la fonction publique du Canada pourrait visiter Ie site suivant: http://emplois.gc.ca. Le tableau 5.4 presente d'autres sites de recrutement a visiter sur l'autoroute de !'information.
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I Les defis de la competence QUELQUES SITES DE RECRUTEMENT DU RESEAU INTERNET
Les candidatures spontanees Les candidatures spontanees, ou non sollicitees, sont une source de recrute ment frequemment utilisee, peu couteuse et appropriee pour ce qui est des postes d'entree au sein de l'entreprise. Selon une publication de Statistique Canada, 46% des 8,4 millions de postes combles au Canada entre 1994 et 1995 resulteraient d'un contact direct avec l'employeur en personne ou par telephone. Cette methode consiste generalement a faire remplir un formulaire de de mande d'emploi par les personnes qUi se presentent chez l'employeur, ordinai rement au service des res sources humaines, pour offrir leurs services. Comme methode de recrutement directe et informelle, eUe se distingue des autres par 1a place importante qu'eHe accorde a l'initiative du chercheur d'emploi.
Les agences de placement Les agences de placement publiques et privees ont pour mission d'optimiser l'appariement entre l'individu (l'offre de travail) et l'emploi (la demande de travail). L'employeur ayant un poste a pourvoir fait appel a une agence de
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I Se doter d'employes competents et motives
placement en precisant les exigences du poste et les conditions de travail. Ilagence de placement a ensuite comme mandat de trouver des candidats ayant Ie profil des competences demande, d'effectuer la preselection et parfois la selection finale. Oeveloppement des res sources humaines Canada maintient un guichet d'emplois qui contient une liste d'offres d'emplois soumises par des employeurs. Les personnes a la recherche d'un emploi peuvent consulter les emplois disponibles aux centres des ressources humaines ou utiliser leur ser vice de placement electronique. Les employeurs peuvent recourir aux services gratuits des centres des ressources humaines pour remplir des postes vacants. Toutefois, contrairement aux agences de placement privees, les centres des ressources humaines n'effectuent pas la preselection des candidats. Les agences de placement privees sont specialisees dans Ie recrutement de candidats pour les entreprises. Par exemple, Adecco Personnel, une agence de placement privee etablie dans S8 pays, a connu un developpement rapide. Chaque jour, elle envoie environ 700000 personnes chez 100000 clients dans tous les secteurs d'activite. Puisque les agences de placement privees font affaire avec un bon nombre d'entreprises, Ie candidat beneticie de leur reseau de relations. Notons egalement que plusieurs agences se specialisent dans des secteurs d'activite precis, notamment les domaines juridique, manufacturier, bancaire et biopharmaceutique. Par exemple, l'agence MPSC Solutions se specialise dans Ie recrutement de personnel pour les centres de contacts clients et dans Ie recrutement de personnel en telecommunications (www.mpscsolutions.com). Les conseillers en recrutement de cadres s'interessent a une autre clientele. On les appelle «chasseurs de tetes» puisque leur recherche sur Ie terrain s'etend aux cadres intermediaires ou superieurs et aux professionnels de haut niveau deja a I'ceuvre au sein d'entreprises concurrentes. n est de regIe dans Ia pro fession que Ia societe de recherche de cadres reclame a son client environ 30 % du salaire annuel du candiat, primes incluses. Certaines entreprises font appel aux conseillers en recrutement de cadres surtout en raison de leur capa cite a trouver la ({ perle rare» qui dispose de connaissances ou d'une expertise particuliere. O'autres entreprises passent par ces specialistes du recrutement dans des circonstances d'urgence ou a cause du caractere confidentiel du pro cessus entourant Ie rem placement d'un de leurs cadres. O'autres encore re tiennent leurs services parce qu'elles n'ont ni Ie temps ni les ressources pour faire ce genre de recrutement.
les autres methodes de recrutement externe II existe bien d'autres methodes de recrutement externe, dont voici quelques exemples. Vne municipalite a eu l'idee d'inviter les telephonistes d'une entreprise voisine en instance de fermeture it postuler un emploi similaire dans son nouveau service telephonique d'urgence. Par ailleurs, une banque americaine a remis a chacun de ses employes des cartes qU'on leur demande de distribuer aux personnes travaillant pour d'autres organisations qUi ont demontre leur capacite a offrir un service exceptionnel. Chaque carte invite
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I les defis de la competence ces personnes a poser leur candidature a un poste a la banque. Dans une agence de mannequins, la personne responsable du recrutement fait reguliere ment des promenades en ville afin de solliciter des personnes ayant une belle apparence. Vne autre methode de recrutement externe particulierement creative fait appel a un concours.
On trouve egalement des traditions propres a certains secteurs d'activite. Ainsi, l'Vnion des producteurs agricoles coordonne chaque ete l'embauche de quelque 4200 travailleurs agricoles, saisonniers ou journaliers. Par ailleurs, Ie recrutement dans l'industrie de la construction et celui du personnel militaire reposent sur des approches partkulieres. Notons egalement que les personnes travaillant deja dans une entreprise peuvent recommander l'embauche d'une personne de leur connaissance ayant la qualification requise par Ie poste a combler. II s'agit en quelque sorte, pour l'entreprise, de faire de tous ses employes des recruteurs. Parfois, la recommandation faite par un employe est suivie d'une prime. Ainsi, un employe d'ESI Technologies rer;oit une prime de 50 $ pour la tenue d'une entrevue avec un candidat qu'il a amene. Si la personne recommandee est embauchee et accomplit trois mois de service,
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Se doter d'employes competents et motives
l'employe en question re~oit une prime de 250 $. Enfin, si la personne embauchee travaille une annee dans l'entreprise, l'employe qUi a contribue a son recrutement re~oit une prime additionnelle de 500 $.
5.7.5 Le choix d'une methode de TecTutement Sachant la diversite des methodes de recrutement, comment savoir laquelle choisir? Malheureusement, les recherches empiriques port ant sur l'efficacite relative des differentes methodes de recrutement n'indiquent pas clairement celles qui offrent les meilleurs resultats (Rynes, 1991). II faut donc s'en re mettre pour les deux tiers a la raison et pour l'autre tiers au hasard. II importe neanmoins de choisir la methode qui convient Ie mieux au type de poste a pourvoir (personnel d'encadrement, de bureau, technique, etc.), a la politi que de recrutement de l'entreprise (interne ou externe), aux conditions du marche de l'emploi ainsi qu'aux contraintes de temps et d'argent (les frais de deplacement et de sejour, Ie salaire du responsable du recrutement, etc.). L'experience de l'entreprise peut aussi guider Ie choix d'une methode de recrutement plutot que d'une autre. La personne responsable du recrutement a interet a verifier si, dans Ie passe, Ia methode de recrutement a: • • • • •
genere des candidats en quantite suffisante; genere des candidats ayant la qualification requise; permis de trouver rapidement Ie candidat ideal; permis d'atteindre I'objectif de recrutement a moindres couts; permis l'embauche de personnes qui ont un tres bon rendement et qui s'absentent peu; • permis l'embauche de personnes qui restent dans l'oganisation (qui ne partent pas apres deux mois).
Vne methode de recrutement qui genere un grand nombre de candidats assure un meilleur ratio de selection, c'est-a-dire Ie ratio entre Ie nombre de candidats embauches et Ie nombre de candidats disponibles au depart. Plus ce ratio est faibIe, meilleures seront, de fa~on generaIe, les candidatures retenues. Ainsi, plus la campagne de recrutement aura attire de candidatures, plus l'employeur peut se permettre d'@tre selectif. On apprecie egalement les resul tats des efforts de recrutement par une verification de la qualite des candidats. Par exemple, un employeur pourrait reconnaltre que les candidatures obte nues avec une methode de recrutement n'ont generalement pas la qualifica tion requise par Ie poste a pourvoir, alors qu'une autre methode donne de bien meilleurs resultats. Vne autre fa~on de porter un jugement sur Ia qualite des candidats generes par differentes methodes de recrutement consiste a faire un suivi sur leur rendement au travail. Ainsi, on pourrait juger qu'une me thode de recrutement attire mieux qu'une autre des personnes qui s'absentent peu et qui offrent un tres bon rendement.
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5.7.6 Une approche reposant sur une description realiste des postes Les employeurs ont souvent tendance a exagerer les avantages d'un poste pour attirer les candidats a l'occasion du recrutement, et ce, surtout lorsque les candidats se font plus rares. Cette approche est toutefois risquee, car en vantant les merites du poste et de l'organisation, l'employeur cree des attentes chez les candidats. Ensuite, si la realite du milieu de travail n'est pas a la hau teur des attentes, cela peut entrainer de la deception et Ie depart hatif de la personne nouvellement embauchee. Par consequent, peu importe la methode de recrutement retenue, une approche reposant sur une description realiste des postes devrait contribuer a ameliorer les taux de succes du recrutement. L'objectif d'une description realiste des postes n'est pas d'attirer un reser voir de main-d'ceuvre, mais plutot de conserver davantage de personnes qui accepteront une offre d'emploi au sein de l'entreprise. Cette approche peu couteuse et efficace surtout pour les postes complexes consiste a decrire Ie travail et les responsabilites d'une fa<,;:on qui soit conforme a la reaUte. Par exemple, pour un poste d'agent de bord dans une compagnie aerienne, une description realiste renseigne sur les aspects negatifs de l'emploi, comme Ie fait de devoir composer avec des clients difficiles, d'accomplir Ie meme trajet a maintes reprises, de ne jamais pouvoir detaire sa valise et de travailler selon un horaire irregulier. L'approche basee sur une description realiste des postes doit ses bons resul tats aux phenomenes suivants (Rynes, 1991). • Elle reduit l'ecart entre les attentes initiales des candidats et la nature du travail a accomplir. • Elle incite les personnes dont les gouts et les aptitudes sont moins adaptes a la realite du poste a retirer leur candidature. • Elle permet aux candidats de se doter par anticipation des mecanismes d'adaptation qui les aideront a composer adequatement avec les con traintes du poste. • Elle intensifie l'engagement des candidats envers l'organisation qui a l'honnetete de leur presenter les inconvenients des postes a combler. En somme, l'utilisation adequate des methodes de recrutement permettant de constituer une reserve de candidats qualifies et la description realiste des postes sont les deux conditions d'une demarche reussie.
5.7.7 le recrutement international Avec la mondialisation, Ie recrutement se fait de plus en plus a l'exterieur des frontieres nationales. Vne entreprise qui decide de recruter pour une filiale a l'{~tranger dispose d'au moins trois optiOns. La premiere option consiste a faire appel aux personnes du pays d'origine, c'est-a-dire aenvoyer des expatries qui sauront rt~aliser des mandats a l'etranger. La deuxieme option consiste a avoir recours aux personnes du pays d'accueiL Par exemple, Coca-Cola pour rait decider de combler ses besoins en ressources humaines au Maroc en
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Se doter d'employes competents et motives
embauchant des gestionnaires marocains. La troisieme option consiste a recruter des personnes de pays tiers. Ainsi, une societe pourrait demander a un cadre suisse de diriger ses operations en Espagne. Le tableau 5.5 resume les avantages et les inconvenients de chaque option .
. . .................................. Proceder a une selection efficace Sans doute que la proportion des lecteurs de ce livre qUi ont deja eu au moins une experience (ou une epreuve !) de selection est tres elevee. La preparation d'un curriculum vitce, la reponse a des questions (parfois bizarres) lors d'une entrevue de selection et la passation d'un examen de comprehension consti tuent surement des activites qUi vous sont familieres. Cependant, pour bien saisir la selection des ressources humaines, adoptons la perspective d'un employeur qUi veut prendre la meilleure decision possible sur la base de ren seignements fragmentaires. La selection consiste a recueillir de l'information sur les personnes ayant pose leur candidature a un poste dans Ie but de les evaluer et de prendre une decision d'embauche (ou de reiet). Pour Ie candidat a un poste, la selection est assimilable a une course dans laquelle il faut reussir plusieurs epreuves avec l'espoir d'atteindre la ligne d'arrivee en premiere position. Pour l'employeur, la selection consiste surtout a mettre en place des mecanismes qui l'aideront a predire la reussite professionnelle avec Ie plus de precision possible. Le defi pour I'employeur consiste a separer Ie bon grain de l'ivraie.
5.8.1 L'analyse des criteres de reus site professionnelle Afin de predire Ie succes dans l'emploi, iI faut detinir adequatement pour chaque poste a pourvoir les eriteres de reussite professionnelle (ou de succes dans Ie poste) qUi distinguent Ie rendement eleve du rendement se situant en de~a des attentes. Dans les organisations, les criteres de reussite profession nelle portent habituellement sur les resultats obtenus dans Ie cadre du travail (Ia quantite de travail, la qualite du travail, Ies couts, Ie volume de ventes, Ie service, Ia rapidite, etc.) et sur Ies comportements qui y sont adoptes (la stabi lite dans l'empIoi, l'absenteisme, les accidents du travail, l'accueil des clients, Ie respect du code de securite routiere, etc.). Pour etablir ces criteres, il faut preter attention au contenu de I'analyse des postes et considerer Ies valeurs et les priorites de l'organisation. Les criteres de reussite professionnelle touchent a toutes les facettes impor tantes du poste de fa~on a eviter un probleme de deticience du eritere. Par exemple, pour un poste de professeur d'universite, nne faudrait pas omettre la production scientifique comme critere de reussite professionnelle. Pour un poste de direction, les faeettes importantes consistent generalement dans la planification, l'organisation, la direction et Ie contrale. On doit egalement s'assurer que les criteres ne concernent que des facteurs lies a l'emploi. La eonduite appropriee d'un vehicule lourd n'aurait certainement aucun rapport
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Les defis de la competence
lES OPTIONS DU RECRUTEMENT INTERNATIONAL
Source: Adapte de ).-1. Cerdin, «Recrutement et selection des expatries », Gestion, juillet-aout 2000, p. 87-101.
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I Se doter d'employes competents et motives
direct avec la reussite dans un poste de commis de bureau. Les criteres doivent aussi permettre de reconnaitre des differences individuelles de maniere a distinguer Ie rendement superieur aux attentes du rendement inferieur a celles-d; il s'agit du caractere discriminant du critere.
5.8.2 La determination des predicteurs de reussite professionnelle La suite logique de l'analyse des criteres de reussite professionnelle est la determination de predicteurs (ou criteres de selection) permettant de prevoir la capacite d'une personne a evoluer avec sucd's dans un poste donne, c'est a-dire a avoir un bon rendement quant aux criteres de reussite professionnelle prealablement etablis. Les predicteurs sont I'ensemble des earacteristiques individuelles assocH~es ala reussite professionnelle et a l'adaptation au travail. Ce sont en quelque sorte les des de la reussite professionnelle. A titre d'illus tration, en prenant comme critere de reus site professionnelle Ie volume de ventes, un employeur pourrait retenir les predicteurs suivants: • la force de caractere; • la capacite d'ecoute; • I'esprit materialiste; • la motivation a vendre; • l'extraversion. Cela revient a dire que l'employeur augmentera la probabilite d'embau cher un representant qui saura atteindre des objectifs de ventes eleves si Ia decision de selection se fonde sur des predicteurs tels que la force de caractere, la eapacite d'ecoute, etc. Dans une autre sphere, alors que Ie travail du techni cien en identite judiciaire consiste a chercher des elements de preuve qui serviront a inculper ou a innocenter un suspect, Ie soud du detail serait un predicteur significatif. Les predicteurs que l'on trouve Ie plus frequemment dans un procfessus de dotation typique sont les connaissanees acquises, les habiletes particulieres ou generales, les aptitudes, les centres d'interet et d'autres caracteristiques per sonnelles. Ces elements sont tous d'une grande importance pour predire Ie comportement futur d'un candidat. L'exercice de selection consiste a deter miner la qualification exigee par Ie poste ainsi que Ie profille plus susceptible de bien s'integrer dans l'environnement de l'entreprise. Par exemple, au-dela des competences techniques, Alcan veut savoir si Ie candidat correspond aux valeurs organisationnelles et aux orientations strategiques de l'entreprise. Par consequent, au-del a de la qualification requise par Ie poste, les predicteurs peuvent porter sur des elements comme la tolerance face au stress, l'adap tabilite au changement, Ie sens des responsabilites, Ie style de leadership, Ie degre d'enthousiasme, la capacite a travailler en equipe, Ia capacite a prendre des decisions justes et edairees, Ie desir d'atteindre les resultats recherches, la personnalite, voire Ie quotient emotionnel. Cest ainsi qu'Unilever considere que l'integrite et la volonte de gagner sont des caracteristiques personnelles qui correspondent a ses valeurs organisationnelles et sur Iesquelles elle fonde ses decisions de selection.
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I Les defis de la competence
5.8.3 Le choix des instruments de selection Une fois qu'on a determine les predicteurs qui aideront a prevoir adequate ment Ie taux de reussite dans un poste donne et dans une organisation don nee, il faut choisir les instruments de selection qui permettront de proceder a la collecte de l'information portant sur ces predicteurs. Le tableau 5.6 illustre comment, a partir des criteres de reussite professionnelle, puis des predicteurs (ou criteres de selection), on arrive a choisir des instruments de selection appropries. Bien entendu, il existe plus d'une fa~on d'obtenir de l'information sur un predicteur. On pourrait ainsi verifier la capacite a etablir des relations inter personnelles au moyen d'un exercice de resolution de problemes en equipe, de l'analyse des reponses obtenues au cours de l'entrevue de selection ou encore de la verification des references.
5.8.4 La validite, la fidelite et l'utilite des instruments de selection Le choix d'un instrument de selection plutot que d'un autre doit aussi reposer sur les resultats de l'analyse de la validite, de la fidelite et de l'utilite de chaque instrument. La validite d'un instrument de selection exprime la force de la relation entre Ie predicteur mesure par l'instrument et Ie critere de reus site professionnelle. La validite de contenu porte sur la pertinence ou la represen tativite d'un instrument de selection en relation avec la nature du travail que doit accomplir Ie titulaire du poste. Par exemple, un test de raisonnement, qui mesure l'aptitude a traduire en symboles mathematiques de petits problemes presentes sous forme verbale, serait approprie aux metiers de l'informatique, mais pas necessairement a la selection d'un representant medical. Autrement dit, l'instrument de selection devrait refleter les exigences du poste. La validite concomitante, qUi est verifiee selon une strategie de validation empirique, renvoie essentiellement a la relation entre l'instrument de selec tion et un critere de reussite professionnelle pendant une meme periode. On pourrait ainsi examiner la relation statistique entre les resultats obtenus lors d'un test de raisonnement et Ie rendement actuel des employes qUi occupent les postes en informatique au cours du meme intervalle. Si les employes qui obtiennent les meiIleurs resultats au test de raisonnement sont egalement ceux qui offrent Ie meilleur rendement au travail, on pourra concIure que la validite concomitante du test est elevee. Pour sa part, la validite conceptuelle constitue une approche de validation plus complexe qUi exige la verification des relations entre l'instrument de mesure d'un concept et d'autres indica tions au sujet de ce concept. La strategie de validation pourrait porter sur la relation entre les resultats obtenus lors d'un test papier-crayon mesurant les aptitudes mecaniques et la rapidite du demontage d'un moteur, soit deux mesures du meme concept. La validite predictive, qui constitue une autre strategie de validation empirique, implique l'utilisation d'un instrument de selection a l'etape de l'evaluation des candidatures et la verification ulterieure d'un critere de reus site professionnelle. Par exemple, si les candidats ayant obtenu les meiIleurs
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I Se doter d'employes competents et motives
LES RELATIONS ENTRE LES CRITERES DE REUSSITE PROFESSIONNELLE, LES PREDICTEURS ET LES INSTRUMENTS DE SELECTION
resultats lors d'un test de raisonnement sont, quelques mois apres leur embauche, parmi les meiUeurs informaticiens, ce serait lil une indication de la validite predictive du test. Choisir des instruments de selection ayant une forte validite predictive constitue un moyen efficace d'assurer de meilleures decisions de selection. Sur la base d'analyses de la validite predictive d'instru ments de selection faites sur une periode de 85 ansi Schmidt et Hunter (1998) ont etabli un classement de 19 instruments de selection qui est presente dans
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I Les detis de la competence Ie tableau 5.7. Ainsi, on constate que Ie test situationnel a une vaIidite pre dictive nettement superieure a celIe de I'analyse graphologique. La fideIite exprime Ie degre de constance au de stabilite des resultats d'une mesure.
Au CaUlS d'une demarche de selection, on ne devrait pas se fier aun
instrument qui ne donne pas Ies memes resultats d'une mesure a l'autre dans des conditions similaires. On peut verifier la fidelite des resultats en faisant passer l'instrument au meme groupe de sujets a deux moments differents de maniere a pouvoir analyser sa stabilite temporelle. Par ailleurs, pour chaque candid at qui se presente a une entrevue de selection, il est possible de verifier Ie degre de convergence des observations de chaque membre du comite de selection (Ie principe de l'equivalence selon la methode de l'accord entre les juges). Le degre d'homogeneite du contenu de l'instrument, souvent exprime par un coefficient de fidelite, donne une indication de la coherence interne
UN CLASSEMENT DES INSTRUMENTS DE SELECTION SELON lELIR VAUDITE PREDICTIVE
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Se doter d'employes competents et motives
de l'instrument de selection. Si les items d'un instrument de selection mesu rent tous Ie meme concept, la coherence interne sera elevee. L'utilite d'un instrument de selection repose en grande partie sur sa vali dit{~. Plus un instrument est valide, plus l'organisation sera en mesure d'eviter les couts engendres par des erreurs de selection, et plus eUe sera en mesure ~e profiter de t'amelioration du rendement au travail qui result~ de ~onnes deCI sions de selection. L'analyse de l'utilite d'un instrument de selectIOn a comme principale caracteristique l'attribution d'une valeur pecuniaire aux variations observees dans les criteres de reussite professionnelle retenus. Ainsi, une equipe de chercheurs a demontre que l'utilisation d'un instrument de mesure des aptitudes cognitives pouvait ameliorer Ies decisions en matiere de selec tion et generer des economies de l'ordre de 272 millions de dollars par annee au sein de la fonction publique federale americaine (Schmidt et autres, 1986).
5.8.5 L'utnisation des instruments de selection Les instruments de selection ont comme fonction de fournir des renseigne ments sur les precticteurs retenus. Nous decrirons les principaux outils de selection en insistant sur les pieges a eviter lors de leur utilisation.
Le formu1aire de demande d'emp1oi Surtout utilise pour les emplois autres que ceux de cadres (voir la figure 5.6), Ie formulaire de demande d'emploi permet d'obtenir des renseignements prin cipalement sur la formation et les experiences de travail de chaque personne qui pose sa candidature. II peut aussi, par extension, permettre d'obtenir des donnees sur les caracteristiques et les antecedents des candidats (predicteurs biographiques) ou sur leurs goiits, leurs habitudes et leurs opinions. Le formulaire de demande d'emploi a l'avantage de presenter les ren seignements sous un format standard, ce qui permet d'etablir rapidement si une personne remplit les eXigences du poste. Pour accelerer l'analyse du con tenu des formulaires de demande d'emploi, Ies organisations peuvent utiliser une grille d'evaluation, avec ou sans ponderation des reponses 2 . Le contenu du formulaire de demande d'emploi doit bien siir respecter les principes de la Charte des droits et libertes de la personne. Le fait de poser des questions sur Ie nombre d'enfants a charge du candidat ou de demander sa date de naissance, son etat civil ou son numero d'assurance sociale (une indi cation de son origine nationale) prete Ie flanc a des possibiIites de discrimi nation. Ces questions en soi ne sont pas ilIegales, mais Ie fait de s'informer sur Ie sexe du candidat, sur son age, sur ses antecedents judiciaires, etc., sans autre precision, peut Iaisser presumer que l'employeur n'a pas l'intention de respecter Ia Charte, et constituer une presomption de fait en cas de plainte a la Commission des droits de la personne pour refus d'embauche. Les formu laires de demande d'emploi doivent done ne comporter que des demandes de 2. Ponderer les reponses consiste a accorder davantage de poids
a certains renseignements.
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les detis de la competence
LE FORMULAIRE DE DEMANDE D'EMPLOI DU GROUPE RENAUD-BRAY
FORMULAlRE DE DEMANDE D'EMPLO\
Temps complet Temps partiel Occasionnel
Brossard
Shemrock
Avenue du Pare Saini-Denis
0 0 0 0
St-BrunoW Quebec
Compiexe Desjardins Ste-Catherine Est
0 0 0
recherche?
POUR QUE VOTRE DEMANDE SOIT TRAITEE. VEUILLEZ JOINORE VOTRE C.V. Signature du candidat
306, rue St-Zotique Est, Montreal (Quebec) H2S 1L6
Source: Renaud-Bray.
Tel: (S14} 272·4049 Fax: (S14} 272·4505
Chapitre 5
I Se doter d'employes competents et motives
renseignements personnels lies directement et obligatoirement l'emploi convoite.
ala nature de
Considerant les risques de falsification (Ie plus souvent une forme d'exage ration) qUi sont considCrabiement eleves (selon certaines estimations, environ un tiers des formulaires de demande d'emploi sont fausses), il importe de s'as surer de l'authenticite des renseignements foumis par les candidats. Notons aussi 1a tendance des gens a temoigner d'une plus grande franchise lorsqu'ils s'attendent a ce que les renseignements foumis soient verifies.
le curriculum vitre Utilise surtout pour la selection de professionnels au de gestionnaires, Ie curri culum vita:: contient des renseignements sur Ie parcours du candidat. En tant qu'instrument de selection, Ie curriculum vita:: sert d'intermediaire entre la personne qui recherche un emploi et l'employeur qui pourrait avoir un poste a pourvoir. Pour etre utile, il doit renseigner Ie recruteur sur la formation, les experiences professionnelles, les activites parascolaires, les centres d'interet, les aspirations et Ies objectifs du candidat. Pour Ie candidat, cette «carte de visite», par sa forme et la formulation du contenu, doit susciter chez l'em ployeur une bonne premiere impression. Voici d'ailleurs une liste non exhaus tive de conseils utHes a la redaction d'un C.V. • La lettre de presentation qui accompagne Ie C.V. doit s'adapter au poste
convoite.
• II ne doit y avoir aucune faute d'orthographe dans Ie c.v.; la redaction doit etre impeccable. • Le curriculum vita:: doit etre concis et precis (deux ou trois pages au Canada ou une page aux Btats-Unis). • II faut toujours utiliser son nom au complet, jamais un sumom. • II faut nommer l'emploi que l'on desire obtenir ou, du moins, Ie genre de travail souhaite. • Lors de l'enumeration des postes qUi ont deja ete occupes, on commence par Ie plus recent et l'on revient en arriere. • II est important de mentionner ses pOints forts. • II est important de se presenter comme une personne d'action; pour cela, on utili sera des verbes d'action tels que « produire », «vendre», «concevoir» ou « intervenir ». • II faut se mettre en valeur en signalant toutes les realisations qui ont ete accomplies au cours d'occupations anterieures, remunerees ou non. • n importe de mentionner les emplois a temps partiel, les emplois d'ete et Ie travail benevole. • II faut faire etat des diplomes obtenus, des aptitudes ainsi que de la for mation qui a ete acquise dans un domaine particulier (par exemple, un cours de reanimation cardiorespiratoire ou la detention d'un permis de conduire).
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les defis de la competence
• II est profitable de demander a un ami ou a un specialiste d'un centre des ressources humaines de relire son C.V. et de proposer des ameliorations.
Les references Une verification minutieuse des references faite aupres de personnes qui ont eu l'occasion d'observer Ie candidat au travail (un superieur, des collegues, des subordonnes, un professionnel des ressources humaines) ou de Ie cotoyer dans d'autres circonstances (d'anciens professeurs, des amis, des membres de sa famille) aide a deceler Ies domaines dans lesqueis Ie candidat pourrait demontrer des forces et des faiblesses dans Ie cadre de ses nouvelles fonctions. La verification des references en personne, par telephone ou par la poste donne egalement l'occasion de s'assurer de l'expertise du candid at, de son experience et de ses realisations. Au moyen de ces differentes approches, l'or ganisation peut solliciter de l'information sur ses emplois anterieurs, son pro fil de personnalite, ses aspirations de carriere, son rendement au travail, son adaptation au travail et les motifs pour lesquels il a qUitte son dernier emploi. On utilise egalement les references (incluant les lettres de recommandation) pour s'assurer de l'exactitude de certains renseignements. Puisque, comme nous l'avons dit precedemment, un candidat sur trois falsifie son c.v., il est important de faire quelques verifications. Les references sont aussi utHes pour obtenir des renseignements additionnels permettant de prMire la reussite professionnelle. Bien entendu, on tient pour acquis que Ie comportement des annees passees represente un bon facteur de prevision des chances de reussite. Comme instrument de selection, les references posent toutefois certains problemes pratiques et legaux. Le principal probU:me pratique concerne Ie fait que les employeurs anterieurs et les gens appeles a donner des references per sonnelles transmettent rarement des renseignements negatifs sur Ie candidat, ce qui rMuit la valeur de l'information obtenue. Pour pallier cette limite, l'analyse des references et des lettres de recommandation devrait porter moins sur l'aspect positif ou negatif du message que sur Ie choix des expressions uti lisees pour decrire Ie candidat. Par exemple, l'analyse des references pourrait mettre en valeur Ie caractere dynamique et proactif d'un candidat ou encore Ie caractere analytique et Ie sens des responsabilites d'un autre candidat. La Loi sur la protection des renseignements personnels dans Ie secteur prive impose cependant des limites au regard de ce qu'un employeur peut divulguer sur un ancien employe. Afin de se premunir contre l'eventualite d'une poursuite judiciaire et de rMuire la crainte de l'employeur d'etre pour suivi pour calomnie ou diffamation, Ie responsable de la dotation devrait obtenir Ie consentement libre et eclaire du candidat avant de s'adresser a une tierce personne. Autrement, si Ie responsable de la selection procede sans Ie consentement du candidat, la demande d'information devrait porter un i quement sur la confirmation de l'exactitude des renseignements transmis par Ie candidat, et non sur I' obtention de renseignements supplementaires.
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Se doter d'empJoyes competents et motives
L'entrevue de selection Pendant de nombreuses annees, l'entrevue a ete consideree par 1es chercheurs comme un outil de selection peu fiable et donc peu utile a 1a selection des ressources humaines. On s'expliquait mal, alors, pourquoi tant d'employeurs persistaient utiliser cette methode dite subjective dans une d~ma:che de se lection autrement serieuse. Heureusement, des recherches menees recemn:ent ant etabli, grace a des analyses statistiques rigoureuses, que l'entrevue de selec: tion represente un outil de selection valide, surtout si l'entrevue se conforme a un certain modele d'application (Cortina et autres, 2000; McDaniel et autres, 1994). Parmi ces modeles d'application, mentionnons la meta-analyse, soit une synthese d'etudes anterieures qui permet la generalisation, selon laquelle l'entrevue de selection dont Ie format est structure a un degre de validite com parable a celui des tests d'aptitudes mentales (Huffcutt et Arthur, 1994).
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Habituellement, au cours d'une entrevue de selection, un comUe pose au candid at des questions factuelles sur sa fonnation scola ire et postscolaire (la nature des cours, les matieres preferees, 1es reussites et les echecs, etc.) et sur ses antecedents professionnels (la nature des postes occupes, les realisations, les relations avec les collegues, etc.). Cela permet de completer et de clarifier les renseignements deja obtenus par d'autres moyens (une demande d'emploi, des references, etc.). De meme, les membres du comite de selection posent frequemment au candidat des questions sur ses connaissances specifiques (<< En quoi la comptabilite par activites se distingue-t-elle des approches comptables traditionnelles? ») ou faisant appel a l'autoevaluation (<< Decrivez vos compe tences de formateur. QueUes sont les choses que vous faites bien et les choses que vous faites moins bien dans vos interventions de formation? »). Afin de tirer profit de l'entrevue de selection, on suggere d'utiliser surtout des questions comportementales et des questions de mise en situation. Les questions comportementales suscitent des reponses sur les comportements passes du candidat; elles permettent ainsi de predire son comportement futur dans des circonstances similaires. Par exemple, les reponses aux questions suivantes pourraient ecIairer Ie comite de selection sur Ie style de supervision du candidat: « Pouvez-vous nous parler d'une interaction particulierement difficile que vous avez eue avec un employe place sous votre supervision?» puis: «Comment avez-vous reussi a ameliorer Ia situation? » Les questions de mise en situation portent sur des incidents critiques que Ie titulaire du poste pourrait eventuellement connaitre au cours de ses acti vites professionnelles. On commence par decrire une situation hypothetique concernant un echantillon de travail; ensuite, on demande au candidat quelle serait sa reaction dans une telle situation. Voici une question de mise en situation utilisee pour la selection a un paste d'infirmit~re: «Un beneti ciaire diabetique et nauseeux a vomi des aliments a trois reprises dans la journee. II n'a pas dine. A 16 heures, sa glycemie capillaire s'elevait it 2,0. Vous etes l'infirmiere responsable de soiree. Comment reagiriez-vous dans cette situation?}) Le comite apprend alors quel cheminement Ie candidat suivrait dans la resolution d'un probleme de la vie reelle, obtenant, par consequent,
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les defis de la competence
une indication de son «intelligence pratique» (Durivage, St-Martin et Barrette, 1995). L'entrevue de selection peut s'averer un instrument de selection efficace dans la mesure ou l'on pose des questions comportementales et situation nelles selon les regles de l'art. Sur la base de nombreuses recherches voici une liste de consignes a respecter pour ameliorer I'utilisation de l'e~trevue de selection:
• constituer un comite de selection, compose de deux a cinq intervieweurs experimentes; • former les membres du comite de selection; • structurer l'entrevue au moyen de questions preetablies et d'une grille d'evaluation; • poser des questions comportementales; • poser des questions de mise en situation; • verifier la pertinence des questions; • prendre des notes pendant I'entrevue; • reserver du temps pour permettre au candidat de poser lui-meme des questions. Si elle ne respecte pas ces consignes, l'entrevue de selection est davantage sujette a plusieurs biais perceptuels. Mais bien conduite, elle permet d'ob server Ie candidat et d'apprecier certains traits comme la spontaneite ou la capacite a s'exprimer verbalement. De plus, l'entrevue de selection permet a un candidat de se faire une pre miere idee de l'environnement de l'entreprise et d'acquerir de nouvelles infor mations susceptibles de guider sa decision d'accepter ou de refuser Ie poste. D'autre part, Ie candidat a evidemment interet a reussir son entrevue de selec tion. Les quelques suggestions qui suivent sont de nature al'aider a decrocher l'emploi qu'il recherche. • Avant l'entrevue, Ie candidat doit preciser ses competences, ses points forts, ses points faibies et ses objectifs personnels. n doit se renseigner sur l'entreprise, sur Ie poste convoite et sur Ies eXigences qui y sont rattachees. 11 doit egalement soigner son apparence et adopter une tenue vestimen taire adaptee au milieu. • Pendant l'entrevue, Ie candidat doit demontrer son interet pour Ie poste et pour l'entreprise. II fera preuve d'honnetete et d'integritc, et il restera lui meme. II veillera a faire constamment Ie lien entre Ie poste et ses objectifs personnels et professionneis. Enfin, il soulignera de fa~on concrete ses realisations et ses apprentissages. • Apres l'entrevue, Ie candidat fera un bilan de ceUe-ci, dans lequel il preci sera ses pOints forts, ses points faibles, ses difficultes de meme que son interet pour l'entreprise. Finalement, il demandera une evaluation de son entrevue.
Chapitre 5
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Se doter d'employes competents et motives
Les tests de select;on Comme les tests de selection sont assez economiques, ne prennent generaIe ment pas beau coup de temps et permettent de comparer les candidats, on comprend pourquoi leur utilisation s'est repandue dans Ie monde du travail. Par exemple, Ie Test personnel Wonderlic, qui mesure les habile,tes d'~ppren tissage, d'adaptation. de resolution de problemes et de ~omprehe~slOn ~es directives, s'avere un instrument de selection valide que 1 on ~eut fane passer en seulement 12 minutes. On trouve d'ailleurs une panophe de tests dans Internet.
La principale difficulte qu'eprouvent les gestionnaires qui n'ont pas I'habi tude d'utiliser les tests de selection consiste a departager les milliers de tests disponibies sur Ie marche. Par ailleurs, Ia plupart des tests utilises sont ameri cains; Us ne sont done pas necessairement adequats a toutes les situations. Ajoutons que Ie recours a certains tests en milieu de travail souleve des ques tions au sujet des droits de la per sonne reconnus dans la Charte des droits et libertes de la personne, D'ailleurs, Normand Pettersen, un specialiste des tests psychomHriques, croit que l'application de tests biaises ou remplis de ques tions subjectives est encore aujourd'hui a la base de decisions injustes ou dis crirninatoires qui peuvent mener a des poursuites (Giguere, 2001). Afin de s'y retrouver, nollS presentons les principales caracteristiques de quatre types de tests de selection, soit Ies tests d'aptitudes, Ies tests de personnalite, Ies tests situationnels et les autres types de tests. Les tests d'aptitudes Les tests d'aptitudes sont generalement consideres comme des outils de selec tion valides. Les tests mesurant les aptitudes intellectuelles, par exemple, ont un coefficient de validite predictive eleve (0,51). Ces tests sont donc,
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I Les defis de la competence contrairement ala croyance populaire, plus efficaces que les tests de person nalite (Rynes, Brown et Colbert, 2002). Ainsi, seion une analyse recente, Ies aptitudes intellectuelles correspondent a environ 25 % du rendement au tra vail (Schmidt et Hunter, 1998). Con~us pour prevoir Ie sucd~s scolaire, les tests d'aptitudes intellectuelles servent aussi a prevoir la reussite professionnelle dans de multiples postes. Ces tests mesurent les habiletes cognitives des candidats, c'est-a-dire leur comprehension verbale, leur fluidite verbale, leur memoire, leur raisonnement par induction, leur aisance numerique, leur rapidite de perception et leur visualisation spatiale. Les tests d'aptitudes mecaniques mesurent les capacites physiques (les aptitudes sensorielles ou musculaires), c'est-a-dire la visualisation spatiale, la dexterite, Ie temps de reaction, l'adresse et la precision. Dans Ie processus de selection, on fait surtout appel aux tests d'aptitudes mecaniques pour les emplois qUi eXigent l'utilisation de machines et d'equipements (comme Ies postes de menuisier, de mecanicien, d'operateur de machinerie, de soudeur, d'eIectricien, de couturier ou de dentlste) et pour d'autres emplois requerant des habiletes de manipulation. Par exemple, Ie test de comprehension meca nique Bennett, qui mesure l'aptitude a percevoir et a comprendre la relation entre les forces physiques et les eU~ments mecaniques dans des situations pra tiques, est particulierement indique pour les candidats dans les mileux indus triels et dans Ie domaine de la mecanique. D'autres tests de selection mesurent Ies aptitudes administratives, et donc la rapidite de perception et la precision dans Ie traitement de donnees verbales et numeriques. Une derniere categorie de tests d'aptitudes porte sur les aptitudes physiques, soit Ia force musculaire, l'endurance cardiovasculaire et l'equilibre. Les tests de personnalite En ce qui concerne les tests de personnalite, ils abordent Ies dimensions de la personnalite telles l'extraversion, l'amabilite, la stabilite emotionnelle, Ia conscience morale et l'ouverture d'esprit. L'inventaire de personnalite de l'Universite de Californie, dont on trouve une version fran~aise, mesure cer taines tendances comportementales, dont la flexibilite, l'efficacite intel lectuelle, la tolerance, Ie sens du bien-Hre, la maitrise de soi, la socialisation, Ie sens des responsabilites, l'empathie, l'independance, l'acceptation de soi, la domination, Ie rendement en relation avec I'independance, Ie rendement en relation avec Ie conformisme, Ie potentiel de reussite et Ia masculinite feminite. Pour sa part, Ie Minnesota Multiphasic Personality Inventory (MMPI), un test tres repute, vise cinq caracteristiques de la personnalite, soit Ies comportements nevrotiques (neuroticism), I'extraversion, I'ouverture, I'amabilite et Ie sens des responsabilites (conscientiousness). Le sens des respon sabilites, en particulier, s'avere une caracteristique de Ia personnalite qUi permet de predire Ie rendement au travail dans plusieurs types d'emplois (validite predictive de 0,31 selon la synthese empirique conduite par Schmidt et Hunter, 1998). Ces traits de personnalite sont importants dans Ie processus de selec tion, car ils determinent la fa~on dont I'individu interagira avec son
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I Se doter d'employes competents et motives
environnement. Ils aident it comprendre pourquoi un individu apprecie un
travail routinier et structure sur une chaine de montage, tandis qu'un autre
individu sera malheureux comme Ies pierres dans un tel travail (mesure du
besoin de structure). La personnalite peut egalement expliquer pourquoi une
personne s'engage dans un comite et y verbalise, tandis qU'une autre per
sonne est plus reticente donner son point de vue (mesure de l'agressivite
sociale). Les tests de personnalite sont des instruments de selection valables
surtout pour des emplois qui exigent des interactions avec d'autres personnes,
qui se reaIisent dans des conditions difficiIes au stressantes au qui ant fait
l'objet d'Hudes sur Ies traits de personnalite. Par contre, ces tests peuvent porter
atteinte a la vie privee en demandant au candidat de se prononcer sur des enon
ces comme «cherche it faire plaisir» au «en forme et de bon appetit ».
a
Les tests situationnels Les tests situationnels (au de rendement) placent les candidats dans des situa
tions caracteristiques du travail a accomplir. Ces tests ant l'avantage de per
mettre une verification directe du rendement a partir d'un echantillon de
travail. lIs sont tres utiles lorsqu'il s'agit de mesurer Ie savoir-faire des candi
dats, c'est-a.-dire leur capacite it faire appel a leurs connaissances et ales appli
quer dans des situations concretes. Pour un paste administratif, les exercices
pourraient porter sur la prise de notes, la dactylographie au la verification
grammaticale. Pour un paste d'ouvrier, on pourrait faire usage de tests situa
tionnels afin de verifier la dexterite a manipuler certains outils, a. reparer un
moteur, a lire des plans, a installer des courroies au a manter un moteur. Pour
un paste d'encadrement, la discussion en groupe sans leader designe permet
d'observer comment Ie candidat travaille avec Ies autres a la resolution d'un
probleme. Quant au jeu de role, il permet d'evaluer Ie comportement du can
didat dans une dynamique d'interactions interpersonnelles.
Avec I'exercice du courrier (in-basket ou corbeille d'entree), Ie candidat traite les cas qui lui sont soumis et s'efforce de prendre Ies meilleures decisions compte tenu des renseignements fournis. Plus precisement, Ie participant doit regler les affaires courantes (rediger des notes de service, planifier des reu nions, etablir des ordres du jour et prendre toutes Ies mesures qu'iJ juge appro pciees) comme s'il Nait vraiment titulaire du paste. Ensuite, l'etude de cas consiste a examiner et a analyser des situations problematiques concretes et realistes, et it trouver les solutions adequates. Ces diverses techniques s'inse rent generalement dans un centre d'evaluation du potentiel, qui est une methode misant sur l'observation des simulations par plusieurs evaluateurs. Les autres types de tests Entin, les autres types de tests comprennent les tests d'honnetete, l'analyse graphologique, Ies tests de centres d'interet, Ies exam ens medicaux avant I'embauche, l'examen genHique, les tests de depistage de drogues et Ie test de depistage du VIH. Les tests d'honnetete sont surtout utilises pour contr61er les problemes de vol, d'absenteisme et de violence en milieu de travail. Alors que l'usage du detecteur de mensonge a ete remis en cause, surtout sur les plans
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I
Les defis de la competence
psychometrique et ethique, les organisations ont de plus en plus recours aux tests d'honnetete ecrits. Notons que les tests d'honnetete sont surtout perti nents dans Ie cas des postes de fiduciaires ou lorsque les employes ont acces a des objets de valeur ou ades produits pharmaceutiques. La graphologie est l'etude du graphisme de l'individu, ('est-a-dire des caracteres particuliers de son ecriture. Grace a l'etude de plusieurs aspects de l'ecriture (ordonnance, dimension, pression, forme, rapidite, direction, incH naison, continuite, etc.), l'analyse graphologique vise a cerner la personnalite et meme les capacites intellectuelles de son auteur. Rappelons cependant la tres faible validite predictive de l'analyse graphologique (0,02). Les tests de centres d'interet permettent d'etablir les aspirations profes sionnelles afin d'estimer les chances de sucd~s des candidats dans l'exercice de leurs fonctions. Par exemple, l'Institut de recherches psychologiques (1995) offre un test qUi sert a mesurer la motivation a la vente. Par ailleurs, l'employeur peut verifier au moyen d'un examen medical avant l'embauche si un candidat est en mesure d'executer son travail. Pour un poste de manutentionnaire, par exemple, l'examen medical pourrait viser it determiner si Ie candidat est apte a lever des boites et d'autres objets lourds. L'examen medical permet aussi de respecter Ia reglementation en matiere de sante, de controler les primes d'assurance vie que paie l'employeur et de prevenir les malaises. Selon la nature du travail a accomplir, l'employeur peut exiger differents types d'examens medicaux, comme un test sanguin, un test objectif pour Ie dos, une radiographie des poumons, un test d'acuite visuelle ou un test por tant sur l'effort. La plupart du temps, Ie candidat doit remplir un question naire qui porte sur sa sante generale. L'examen physique effectue par un medecin peut venir completer Ie questionnaire. L'utilisation de l'examen me dical represente cependant un champ d'activite particulierement sensible en ce qui concerne Ie respect des droits de la personne. A cet egard, les examens medicaux peuvent etre legitimes lorsqu'ils servent it determiner si une per sonne est apte it accomplir les taches essentielles d'un emploi. Notons egale ment que Ie fait de realiser l'examen medical seulement a la suite d'une offre d'embauche minimise les risques d'apparence de discrimination fondee sur Ie handicap. On utilise l'examen genetique pour identifier les individus plus vulne rabIes que d'autres it des elements de l'environnement de travail, par exemple les produits chimiques. Les tests de depistage de drogues sont utilises au cours de la selection en vue d'ameliorer la sante et la securite du travail, de reduire Ie roulement et l'absenteisme, ou encore d'eviter des poursuites pour negligence pour des emplois ou les niveaux de securite sont eleves. Dans l'industrie du transport routier, par exemple, un reglement oblige l'employeur a faire passer a un can didat un test de depistage avant l'embauche. Le recours au test de depistage du VIH (virus de l'immunode£icience humaine) n'est pas une pratique courante au sein des entreprises. L'usage de
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I Se doter d'employes competents et motives
ce test ne se justifie que lorsque l'employeur a des motifs raisonnables et serieux de craindre pour la sante des autres employes et de sa clientele. Or, Ie virus responsable du sida (syndrome d'immunodHicience acquise) ,se t,rans met uniquement par des contacts sexuels, par Ie sang et par une mere a son enfant au cours de la grossesse, de l'accouchement ou de l'allaitement. Par contre, l'employeur peut refuser d'embaucher une personne porteuse du virus ou atteinte du sida dans les cas OU elle n'a plus, a cause de son etat de sante, les aptitudes ou les qua lites requises par l'emploi ou presente une menace directe pour la sante ou la securite d'autrui.
., Prendre une decision d'embauche et favoriser l'integration des nouveaux employes .......................................
11 existe differentes methodes permettant de decider d'engager un candidat plutot qu'un autre sur la base des renseignements provenant de diverses sources (I'approche compensatoire a seuils multiples, l'approche non com pensatoire, Ie modele a etapes multiples, etc.). II faut essentiellement deter miner si un score eleve dans une epreuve peut compenser un faible score dans une autre epreuve. Ensuite, comme I'organisation a investi du temps et de l'argent dans Ia mise au pOint et l'implantation d'un processus de dotation efficace, elle a interet a assurer I'integration harmonieuse des nouveaux employes. En arri vant dans son milieu de travail, la recrue doit apprivoiser les comportements requis pour accomplir de nouvelles taches et pour assumer de nouveaux roles. Pendant cette periode de transition, qUi est, disons-Ie, relativement stress ante, il importe de s'occuper de l'accueil et de I'orientation des recrues. L'accueil vise a faciliter l'adaptation du nouvel employe a l'organisation. II s'agit, Ie jour de l'entree en fonction de I'employe, de lui transmettre Ie manuel de l'employe, la structure et les reseaux de l'entreprise. De meme, il faut presenter la recrue a ses collegues, l'informer des mesures de securite et s'assurer que les attentes de son superieur immediat lui sont communiquees clairement. Soulignons d'ailleurs l'approche multimedia adoptee par la «nou velle societe Domtar» pour favoriser la comprehension de la philosophie de gestion de I'entreprise. Le processus d'accueil constitue en realite un apprentissage de base qui permet de reduire l'incertitude et l'anxU~te de la recrue, et de maintenir son enthousiasme initial. Bref, un programme d'accueil consiste a fournir un encadrement et des ressources qui aideront Ie nouvel employe a bien com mencer. Puisque les cadres jouent un role critique dans l'accueil du nouveau personnel, Ie service des ressources humaines de l'Universite de Montreal a con(,:u un guide d'accueil a I'usage du gestionnaire. Ce guide comprend Ies activites a accomplir avant l'arrivee de l'employe (annoncer aux membres de l'unite administrative la date d'entree en fonction du nouvel employe, etc.), durant la premiere journee (presenter l'employe a ses collegues, lui faire visi ter les lieux, etc.), au cours des premieres semaines (lui communiquer les
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I Les defis de la competence
regles relatives a la securite, etc.) et pendant la periode de probation (evaluer son rendement, etc.). La socialisation est Ie processus par lequell'individu adhere aux normes et aux valeurs de l'organisation. L'orientation represente un mecanisme impor tant du processus de socialisation. Elle prepare la nouvelle recrue a bien reagir aux evenements qUi ne manqueront pas de survenir au cours de ses pre miers mois de travaiL L'orientation contribue a la socialisation en aidant l'in dividu a accepter la realite du milieu de travail, a composer avec la resistance au changement, a realiser son travail dans Ie contexte et les circonstances entourant son emploi, a traiter avec son superieur et a developper son iden tite propre au sein de l'organisation. Les programmes d'orientation comprennent souvent des presentations faites par des professionnels des ressources humaines (avec une periode de questions), la distribution de documents ainsi que des visites guictees. A l'in terieur de ces programmes, on aborde generalement les avantages sociaux qu'offre l'entreprise, les services a la disposition des employes, les produits et les services de l'entreprise, les regles et les methodes a suivre, les programmes de formation et de mobilite et l'historique de l'entreprise. Par exemple, 1a divi sion Sea-Doo/Ski-Doo de la firme Bombardier remet ases nouvelles recrues un dossier comprenant des renseignements sur 1'historique, la mission et les
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I Se doter d'employes competents et motives
objectifs de la societe, de me me que sur la philosophie de gestion, les services aux employes, les dispositions touch ant a la sante et a la securite et, enfin, les conditions de travail. Au debut d'un programme d'orientation, on expose ordinairement les sujets d'interet general propres afaciliter l'integration de l'employe ason nou vel environnement de travail (une presentation de l'entreprise, son histo rique, ses produits et ses services, Ie contenu des programmes d'avantages sociaux, une periode de questions). Ensuite, ce programme porte sur des sujets relatifs au poste de Ia recrue (les attentes du superieur, Ies buts poursuivis par I'unite administrative, les relations avec les autres unites administratives de I'entreprise). Chez Texas Instruments, par exemple, les recrues sont meme informees du profil de leur superviseur, c'est-a-dire de ses passe-temps, de ses centres d'interet et de son style de gestion. Finalement, dans Ie programme d'orientation, on transmet au nouveau personnel d'autres renseignements plus specifiques concernant les taches, les responsabilites, l'evaluation du rendement et les modalites de participation a des programmes de formation continue. Comme condition d'une integration reussie, il ne faut pas oublier Ie role important que remplit la nouvelle recrue. Au cours des premieres semaines d'un emploi, la nouvelle recrue doit se montrer disponible et detenninee a apprendre. Elle a aussi interet atenter de comprendre les relations de pouvoir, a maitriser rapidement ses outils de travail et a s'engager dans son travail.
Conclusion Dans ce chapitre, nous avons suivi, etape par etape, un processus rigoureux de dotation. Les dIfferentes activites de dotation visent a susciter une meilleure comprehension des postes et du milieu de travail. Elles aident a etablir Ie profil des competences et a determiner les criteres, les predicteurs et les ins truments de selection. Le processus de dotation a pour objet de generer des candidatures par Ie recrutement, de proceder a une selection efficace, de prendre une decision d'embauche et de favoriser l'integration des nouveaux employes. Bien que Ie processus presente dans ce chapitre puisse paraitre objectif, voire scientifique, it ne faut pas pour autant mettre de cote Ie jugement et l'in tuition du gestionnaire. La contribution de ces dimensions plus subjectives s'avere surtout importante it deux etapes du processus. Premierement, la par ticipation des cadres ayant une bonne comprehension du poste facilite la determination des criteres de reussite professionnelle. Deuxiemement, au moment de I'etablissement du profil des competences, Ie jugement des cadres permet de preciser la qualification requise pour occuper Ie poste. En somme, l'interieur de cette « science» de la dotation, l'apport de l'experience, du jugement et de l'intuition du personnel d'encadrement represente une force plutot qu'une faiblesse.
a
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I Les detis de la competence
(])
de r evision
o ment En matiere de selection, est-il vrai grave de rejeter un candidat en sachant que, s'H avait ete retenu, il aurait represente un excellent employe? Pourquoi?
" La personne responsable du recrute ment peut-elle demander a l'em ployeur precedent d'un candidat si ce dernier s'absentait souvent de son travail ?
8 Quels
Cit Quelle
e Que reserve l'avenir au recrutement dans Ie reseau Internet? e Dne entreprise utilise actuellement un test de raisonnement logique
o sent Quels tests de selection vous parais les plus appropries en relation
sont les principaux facteurs propres a l'organisation qui exer cent un attrait a l'occasion du recru tement de diplomes de l'universite?
pour l'embauche de ses manuten tionnaires. La nouvelle directrice des ressources humaines se ques tionne cependant sur la validite et l'utilite de cet instrument de selec tion. Comment peut-elle proceder pour confirmer ou infirmer son opinion?
question de mise en situa tion pourrait etre utilisee a 1'0cca sion d'une entrevue de selection pour un poste de gardien de prison?
avec un poste de directeur des ventes?
o Expliquez les roles des profession
nels des ressources humaines, des cadres hierarchiques, de la direction et des employes au moment de l'accueil et de l'orientation de nou veaux employes.
Chapitre 5
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I Se doter d'employes competents et motives
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Les dE% de la competence
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Chapitre 5
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Se doter d'employes competents et motives
(( Recherchons personnel qualitie ))
L
a societe Vert Azur offre des services d'amenagement paysager et de tonte de gazons a des clients residentiels de la banlieue d'Ottawa. Au cours des deux premieres annees d'existence de Vert Azur, la firme ne comprenait que Marc et Tom, les deux proprietaires. En semble, pendant la saison estivale, les deux camarades s'occupaient de l'en tretien des gazons, des plates-bandes, des fleurs et des arb res d'une centaine de clients. Au cours des deux annees suivantes, en raison du phenomene du bouche-a-oreille, la clientele de Vert Azur a connu une croissance importante. Marc et Tom ont alors achete un autre camion et embauche deux personnes chargees uniquement de la tonte des gazons. Apres 6 annees d'une croissance sou tenue, la petite entreprise comptait 10 employes affectes a la tonte des gazons; de leur cote, Marc et Tom s'oc cupaient de moins en moins d'ame nagement paysager et de plus en plus de la gestion d'une entreprise en crois sance. Les deux associes souhaitaient a cette epoque accelerer la croissance de leur entreprise et ameliorer sa rentabi lite. Dans cet esprit, une decision impor tante consistait a offrir a leurs clients un service d'arrosage visant a controler les mauvaises herbes. Selon leur analyse, ce service serait beaucoup plus rentable que la tonte des gazons. Vne autre decision
qui contribuerait au developpement de leur entreprise consistait a lancer une vaste campagne de promotion qui com prendrait l'envoi de brochures et un ser vice de h~lemarketing. Au debut de la saison suivante, Marc et Tom ont cons tate une croissance appreciable de leurs affaires. En particu lier, plusieurs clients demandaient Ie service de controle des mauvaises herbes. Heureusement que Marc et Tom avaient suivi la formation de deux semaines exigee par la loi pour etre en mesure de manipuler des produits chi miques servant au controle des mau vaises herbes. Toutefois, compte tenu de la forte demande, ils devaient recruter au moins quatre autres personnes quali fiees pour Ie traitement des mauvaises herbes. Ils devaient aussi voir a l'em bauche de nouveaux employes affectes a la tonte des gazons. Mais l'annonce qu'ils ont placee au centre d'emploi la semaine precedente n'avait pas suscite beau coup d'interet chez les demandeurs d'emplois. Ayant beaucoup investi dans leur campagne de promotion, Marc et Tom etaient naturellement inquiets devant la tournure des evenements.
Que peuvent faire Marc et Tom?
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Partie II
I les defis de la competence
La nouvelle recrue Pendant ses etudes, Marie-Jeanne occupait un poste a temps partiel dans Ie centre d'appels d'une institution financh~re. Peu de temps apres avoir obtenu son baccalaureat, elle a re~u une promotion comme chef d'equipe dans ce centre d'appels. Travaillant a temps plein, elle avait huit personnes a sa charge et elle passait la plus grande par tie de son temps a gerer les horaires de travail et a assurer la qualite du service a la clientele. Elle s'occupait aussi de la gestion et de l'organisation du traite ment des appels emanant des services internes de la societe. II faut savoir que Ie centre d'appels pouvait traiter en moyenne 40000 demandes d'informa tion par mois et que la qualite du service est controlee sur la base des indi cateurs suivants: • la duree moyenne du traitement de la demandei • Ie temps d'attente par rapport a la du ree de la conversation et au nombre d'appels auxquels aucune reponse n'a ete apportee i • Ie nombre d'appels par pays et par langue; • l'origine des reponses; • la repartition des questions par themes.
AIa suite du depart d'un membre de son equipe, Marie-Jeanne a participe a l'embauche d'une nouvelle recrue qUi
allait se joindre a l'equipe Ie lendemain matin. Apres une longue journee de tra vail, elle s'est mise a rHlechir a l'arrivee du nouvel employe. Elle s'est demande ce qu'elle devrait faire pour qu'il s'in tegre bien dans l'equipe. Elle a alors consulte les documents du service des ressources humaines decrivant les poli tiques et les procedes et methodes du centre d'appels. Elle a souUgne les sec tions importantes et decide de faire au nouvel employe une synthese de ces documents, en insistant surtout sur la procedure de determination des horaires de travail. Etant donne que Ie centre d'appels fonctionne six jours par semai ne pendant toute l'annee, Marie-Jeanne trouvait important d'expliq uer claire ment cette procedure a Ia nouvelle recrue. Elle jugeait egalement important de lui decrire les regimes d'avantages sociaux afin de l'aider a faire des choix eclaires. Aussi, puisque l'assiduite dans son equipe laissait a desirer, elle a resolu de lui dire qu'elle ne pourrait tolerer un trop grand nombre de retards ou d'absences.
o Comment trouvez-vous l'approche de Marie-Jeanne? 8 Quelles lui faire?
suggestions pourriez-vous
Apn':s l'etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Expliquer pourquoi la formation est une activite importante de la gestion des ressources humaines pour les employeurs, les equipes de travail, les cadres hierarchiques et les employes. • Situer les roles de divers acteurs en matiere de formation: l'employe, la direction generale, la direction des ressources humaines, les cadres hierar chiques, les instances gouvernementales, les entreprises de formation, les etablissement d'enseignement et les associations professionnelles. • Comprendre les exigences de la Loi favorisant Ie developpement de la formation de la main-d'ceuvre. • Connaitre la principale demarche qu'on utilise pour analyser les besoins en formation. • Concevoir un plan particulier de formation. • Prevoir des interventions susceptibles de favoriser l'apprentissage et Ie transfert des apprentissages. • Mettre en place une strategie d'evaluation de la formation.
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Partie /I
I Les defis de la competence
L'univeTsite au boulot: la formation en entreprise prend du galon'
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e temps est loin ou l'Universite Hamburger de McDonald's faisait sourire. Aujourd'hui, la formation continue n'est plus un synonyme de vacances ou de mise a l'ecart. De plus en plus d'entreprises ont un interet sincere a ce que leurs employes ame/iorent leur formation, de plus en plus souvent par Ie biais de cours universitaires donmis dans les locaux memes de I'entre prise. La possibilite de suivre des cours payes, parfois meme un MBA, joue un role important dans les decisions des jeunes dip16mes dans les domaines les plus en demande. Voici Ie portrait de la penetration de l'universite dans Ie monde des affaires. En 1997, Provigo a cree I'Academie Provigo pour systematiser La formation de ses employes. n s'agissait d'une excrois sanee du service des ressources humaines qui n'avait pas de domicile fixe. Trois ans plus tard, l'Academie Provigo a cesse d'etre virtuelIe: elle a emmenage dans des locaux situes a l'arriere du maga sin Loblaw du boulevard Sainte-Croix. Depuis, la proportion des activites de for mation qui se deroulent en salle de cours a grimpe a 20 %. Cette evolution de la formation chez Provigo reflete ['importance grandissante de cette activite pour les entreprises quebe coises. La haute direction est de plus en plus engagee dans l'evaluation des «diffe rentiels de competences», comme sont appelees les lacunes de formation dans Ie jargon des specialistes. «Avant, on craignait qU'autoriser un employe 11 acquerir de la formation
suppIementaire lui donne des ailes", estime Cristina Romero, directrice du groupe Ineo, specialise dans la formation. «Maintenant, la plupart des dirigeants ant compris que c'est, au contraire, une maniere de Ie garder. Sans parler de l'impact sur la productivite.» Chez Provigo, un nouvel employe rer;:oit systematiquement un «entrafnement a la tache", explique Diane Trudel, directrice du centre de formation, Ie nouveau nom de I'Academie Provigo. L'entreprise n'a aucune difficulte a atteindre Ie 1 % de la masse salariale prescrit par Ie gouvemement du Quebec; 7 millions ont ete depenses en 2002 par l'intermediaire du centre de for mation, qui assure 95 % de la formation etant donne Ia specialisation des cours. Environ 10000 employes passent par Ie centre de formation chaque annee. Formation unlversitaire
Dans certains domaines, Ia formation en entreprise constitue meme un atout pour attirer ies jeunes dip16mes. «Beaucoup d'etudiants nous posent des questions sur notre programme de formation», explique Louise Gagnon, responsable du programme universitaire ala Banque Nationale. « nest unique au Canada en ce sens que tous nos employes peuvent y avoir acces: il leur suf fit de remplir certaines conditions. Il n'y a pas de quota; it peut y avoir 5 participant5, ou 500. Dans d'autres entreprises, les em ployes qui rer;:oivent de la formation univer sitaire sont plus ou mains choisis par leurs superieurs. »
1. M. Perreault, «L'universite au bou.lot: la formation en entreprise prend du galon », La Presse, cahier special,S fevrier 2003, p. 1.
Chapitre 6
Depuis 1996, entre 3000 et 5000 employes de la BN ont suivi un programme de premier cycle, et 500 une maitrise de type MBA. La BN supporte Ie cout des cours: 3000 $ pour Ie premier cycle, et 9000 $ pour Ie deuxieme, en plus des coilts indi rects (liberations, entre autres) qui gonflent fa facture de 50 %. Comme Ie bac dure de trois a quatre ans et la maftrise, deux ans et demi, les couts atteignent un adeux mil lions par annee. {( Pour des considerations strategiques », M"1e Gagnon n'a pas voulu preciser a quelle proportion de Ia masse salariale cet investissement equivaut. Les cours de la BN ont lieu Ie vendredi et Ie samedi, et une journee est allouee par cours pour les examens. lis sont donnes dans Ies succursaies quand une dizaine d'employes y sont inscrits, ou dans une cons tituante de I'Universite du Quebec; Us peu vent aussi etre suivis adistance, par Ie biais
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Developper les competences
de Ia TeIe-universite TeIuq. Les employes de la BN qui ne travaillent pas au Quebec environ 4000 sur 17000 - sont presque tous inscrits a la formation a distance, en vertu d'ententes avec des universites locales. Le programme universitaire €volue cons tamment. «Par exempie, nous avons recem ment introduit une maitrise en affaires agricoZes», dit M"1e Gagnon. Mais il n'est pas essentiel pour un employe de suivre des cours pour avoir des promotions, selon elle. M"1e Romero, du Groupe [neo, pense au contraire que de plus en plus d'entreprises favorisent les employes qui acceptent des formations suppIementaires. Si on prend un cas de figure OU un employe travaille 60 heures par semaine et un autre en tra vaille 45 et etudie 10 a15 heures, Ie second sera favorise dans les promotions, seion MY'ze Romero.
II est de plus en plus evident que la duree de vie des entreprises repose sur l'en gagernent de leurs dirigeants envers Ie developpernent des cornpetences des employes. La mise en situation qui precede illustre Ie fait que cet engagement peut se manifester par la mise en place de programmes et de politiques visant a systernatiser et a officialiser la gestion de la formation. Heureusement, des entreprises comme Provigo et la Banque Nationale reagissent avec determina tion au deti consistant a developper les competences requises par l'economie du savoir. Par contre, d'autres entreprises accordent peu d'importance au developpement du savoir, du savoir-faire et du savoir-etre de leurs ressources humaines. En outre, parmi les entreprises qui font de la formation, plusieurs s'y prennent maL Vne analyse des besoins en formation escamotee, une peda gogie inadequate et Ie manque d'appui du personnel d'encadrement sont quelques-unes des nombreuses erreurs qui font que la formation n'apporte pas toujours les resultats escomptes. Pour s'ameiiorer, il faut, d'une part, mieux comprendre l'enjeu de la formation et, d'autre part, effectuer une ana lyse rigoureuse des besoins en formation et elaborer un plan de formation qui tiendra la route et favorisera Ie transfert des apprentissages.
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Les defis de la competence
Voila l'objet du present chapitre. Dans un premier temps, nous explorons Ie domaine du developpement des competences. II est ensuite question de l'evolution economique, technologique et legale qui confirme l'importance que l'entreprise doH accorder a la formation professionnelle. La section sui vante presente les differents acteurs de la formation, soit l'employe, la direc tion generale, la direction des ressources humaines, les cadres hierarchiques, les instances gouvernementales, les entreprises de formation, les etablisse ments d'enseignement et Ies associations professionnelles. Les deux sections suivantes abordent les exigences Hees a la mise en ceuvre des activites de ges tion de la formation, soit l'analyse des besoins de formation et la conception du plan de formation. Puis, nous voyons l'evaluation de la formation. Nous terminons ce chapitre par une discussion sur l'apprentissage et Ie transfert des acquis de la formation.
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.L~. ~.~~~i.~~ .~~. ~~.~~1~~"p~.,!".~~~ .~~~ .c~~.~~~~~.c.~~ A l'heure actuelle, dans les medias, les associations professionnelles et les milieux de travail, on entend beaucoup parler de la competence, de la gestion par competences, de la formation, du developpement des ressources humaines, du perfectionnement, du recyclage de la main-d'ceuvre, du developpement organisationnel, de l'organisation apprenante et de regimes d'apprentissage. Cela tient au fait que Ie developpement du capital humain a clairement He designe comme etant la condition necessaire a la competitivite des entreprises et des nations. La presente section vise a baliser, au moins partiellement, ce vaste domaine du developpement des competences. Nous y presenterons les termes-cles, la situation qUi prevaut actuellement ainsi que les liens existant entre la formation et les autres facettes de la gestion des ressources humaines.
6.1 .1 Les termes-c1es D'abord, la competence comprend Ie savoir, Ie savoir-faire et Ie savoir-etre qui sont mis en ceuvre dans l'action et qui font la difference entre un rendement en de\a des attentes et un rendement aU-dela des attentes. On reconnait a la personne competente une certaine expertise! des connaissances, un savoir faire et des comportements appropries a une fonction. La gestion par compe tences consiste a agir sur Ie savoir, Ie savoir-faire et Ie savoir-etre de maniere que les ressources humaines soient en mesure d'ameIiorer leur rendement et de s'adapter a l'evolution du contexte economique, technologique et social de l'entreprise. Comme approche particuliere, la gestion par competences aide a batir un lien soli de entre les plans de developpement des employes et les com petences necessaires a la performance de l'entreprise. La formation, qui est une composante-cll~ d'un systeme de gestion par competences, inclut toutes les activites d!apprentissage ayant pour objet l'amelioration des competences des employes. Elle repond a des criteres precis lies a l'emploi. n existe une formation professionnelle structuree ou
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formelle qui re~oit l'appui logistique et financier de l'entreprise, de meme qu'une formation professionnelle non structuree ou informelle qui n'a pas un objectif manifeste ou un contenu precis. La formation continue traite de la formation des jeunes et des adultes, consideree comme un processus qui dure toute la vie et qui vise it developper l'autonomie et Ie sens des responsabilites. Le developpement des ressources humaines comprend les pratiques de for mation, d'evaluation du rendement, de gestion des carrieres, etc., qui ont pour but d'ameliorer les competences des ressources humaines et leur contri bution it l'entreprise, et ce, selon un horizon plus lointain que celui de la reali sation de la tache actuelle. Alors que la formation vise a corriger des lacunes constatees dans la realisation du travail, Ie developpement des ressources humaines cherche a repondre aux besoins futurs de l'organisation. Le perfectionnement est oriente vers Ie cteveloppement des competences deja acquises partiellement qui s'averent necessaires a une plus grande effi cacite dans l'exercice de fonctions futures. Quant au recyclage de la main d'ceuvre, il permet la mise a jour des competences requises suivant l'evolution du travail a accomplir. II s'agit d'aider les personnes a s'adapter it la vie au tra vail a la suite de changements importants ou de l'abolition de postes. Le developpement organisationnel est un processus de changement plani fie qui a comme finalite l'ameIioration de l'efficacite de l'entreprise ainsi que Ie bien-etre de ses employes. Les interventions en matiere de developpement organisationnel peuvent aussi viser a ameliorer Ie fonctionnement des equipes de travail. La demarche de changement proposee par un projet de
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I Les defis de la competence developpement organisationnel pourrait comprendre l'activite de formation soit comme stimulation, catalyseur au soutien du changement au de la trans formation de l'organisation. II est aussi beaucoup question, dans les milieux d'affaires, de l'organisation apprenante, qui a su developper la capacite de creer, d'acquerir et de transferer des connaissances. L'organisation apprenante, au intelligente, peut etre definie comme une entreprise au les membres peuvent sans cesse developper leurs capadtes et de nouvelles fas;ons de penser et ou les employes apprennent comment apprendre ensemble sur une base continue. L'organisation appre nante met en place un ensemble de conditions favorables au partage du savoir et au developpement des competences. Elle encourage ses membres a ap prendre en permanence par l'autoformation, Ie coaching, Ie mentorat, l'echange de l'information et l'utilisation des technologies de l'information. Aussi, dans l'organisation apprenante, on dispose de mecanismes pour concevoir et ameliorer constamment ses processus (Harvey, 2002). La gestion des connaissances (knowledge management) est une autre expres sion qui a connu un essor au caurs des dernieres annees. Elle consiste a reper torier les cannaissances et les expertises dont dispose l'organisation et qui representent des atouts pour celIe-d. La gestion des connaissances comprend aussi les activites d'analyse des processus de creation de savoirs, de stockage et de transmission des connaissances. EIle requiert egalement la planification et Ie contrale des actions visant a developper les connaissances et Ies proces sus de fas;on a accroitre la valeur de son capital intellectuel en vue d'atteindre les objectifs organisationnels. Mentionnons finalement les regimes d'apprentissage, qUi favorisent I'ac quisition de competences exigees par l'exercice d'un metier. La formule de l'apprentissage consiste a soumettre Ies apprenants a une formation theorique et technique en classe ainsi qu'a une formation pratique chez un employeur. Dans les secteurs de la construction et de l'automobile, on favorise cette approche qui permet d'apprendre un metier en travaillant.
6.1.2 Portrait de la situation actuelle Entre SS et 200 milliards de dollars americains sont investis chaque annee dans la formation en entreprise aux Etats-Unis, selon une etude menee en 2001 par la revue Annual Review of Psychology. On observe toutefois que les investissements en formation des entreprises canadiennes n'ont pas beaucoup augmente ces dernieres annees, selon un sandage effectue par Ie Conference Board. Alors que les entreprises investissaient 849 $ par employe en 1993, ce montant Hait de 8S9 $ en 2000. Un sandage Leger Marketing, paru en novem bre 2001, reveIe par ailleurs que plus de 30 % de la population quebecoise participe a une formation chaque annee. En France, on estime que 9 millions de personnes ant suivi au mains une formation continue entre janvier 1999 et fevrier 2000, soit 28 % des personnes ayant termine leur formation initiale (INSEE, 2000). Notons aussi que plusieurs entreprises ne lesinent pas en ce qUi
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concerne la formation de leurs employes. Ainsi, la societe d'electrolyse et de chimie Alcan offre entre 7S et 90 heures de formation par annee par employe. La raffinerie Shell de Montreal croit, pour sa part, etre en avance sur la for mation donnee en France dans Ie meme secteur d'activite. De son cote, Cascades forme chaque annee environ 10000 de ses 14000 employes. Ainsi, selon certaines indications, i1 se developpe une veritable culture de la formation qui est en mesure de soutenir la concurrence internationale.
Pour comprendre l'etat actuel de la formation en entreprise, i1 faut egale ment se demander qui re<;oit de la formation et de quel type. Selon plusieurs specialistes, l'offre de formation n'est pas distribuee egalement. De nom breuses entreprises reservent leurs activites de formation aux cadres. Ce sont donc les personnes au sommet de la hierarchie de l'organisation qui beneti cient Ie plus de la formation. Les individus plus scolarises profitent aussi dans une plus large part des investissements en formation qu'effectuent les entre prises. On note, par ailleurs, que plus l'employe vieillit, moins l'employeur semble manifester d'interet pour son developpement professionnel. La formation est egalement assez variable selon les secteurs d'activite. Par exemple, les secteurs de la finance, des assurances et des affaires immobilieres sont plus portes a donner de la formation que les secteurs du commerce de gros vehicules automobiles, de pieces et d'accessoires. De meme, tout indique que les secteurs d'activite en mutation investissent davantage en formation (De Smet, 1999). Les petites et moyennes entreprises, quant a elles, investis sent moins que les grandes entreprises dans la formation de leurs employes. Par ailleurs, les entreprises qui ont une tradition de promotion interne (recrutement interne plutot qu'externe) et celles qui ont implante de nou velles technologies ont tendance a investir davant age dans la formation. Du
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point de vue de la main-d'reuvre, il existe donc de grandes differences quant it l'acces it la formation.
6.1.3 La gestion de la formation: ses relations avec les autres activites de GRH Les diverses facettes de la GRH peuvent appuyer l'activite de formation. En retour, la formation peut aussi contribuer au bon fonctionnement des autres facettes de la GRH. C'est pourquoi il importe d'integrer la formation dans la GRH pour renforcer la synergie entre les sous-systemes. D'abord, si la direction a procede it une planification strategique des ressources humaines, il sera plus facile d'harmoniser la formation aux orien tations et aux priorites de l'entreprise. La planification operationnelle permet, par ailleurs, de prevoir une situation de desequilibre, telle une penurie quali tative de main-d'reuvre, it laquelle elle peut remedier en agissant sur les com petences (voir Ie chapitre 3). Vne analyse du poste effectuee adequatement aide it determiner avec precision ce que l'employe doit faire pour avoir un bon rendement dans ses fonctions. Une analyse du poste et une description du poste a jour facilitent l'etablissement des besoins en formation en relation avec les exigences reelles du poste. Les renseignements sur les activites, les taches et les responsabilites que procure l'analyse du poste aident egalement a elaborer un contenu des apprentissages bien adapte it la rea lite du travail it accomplir. Ensuite, il existe une relation directe entre la qualite des personnes embauchees et les besoins en formation. Plus l'entreprise reussit it attirer, a embaucher et it integrer des candidats hautement qualifies, moins les besoins en formation seront importants. En outre, une organisation qUi valorise la competence peut evaluer les candidats en partie selon leurs aptitudes it apprendre. Ainsi, les nouveaux employes seront plus disposes a apprendre des fa<;:ons de faire differentes. Notons egalement que l'investissement en formation peut contribuer it redorer l'image d'une entreprise. Ainsi, certaines organisations choisissent de miser sur la formation pour developper leur image d'employeur de choix de maniere a accroitre leur capacite a attirer un plus grand nombre de candidats. Par exemple, la fonction publique federale a, dans un elan de modernisation, decide d'ameliorer l'offre de formation afin d'attirer et de retenir des per sonnes qualifiees. Les resultats obtenus par les employes aux evaluations du rendement ren seignent la direction sur les besoins en developpement des ressources humaines. Le superieur hierarchique peut proposer a un employe, a l'occasion de l'entretien d'evaluation du rendement, Ie contenu de Ia formation suscep tible de favoriser son cheminement professionnel. Notons qu'avec l'evalua tion multi source (voir Ie chapitre 8), I'employe evalue obtient une retroaction de son superieur, de ses subordonnes, de ses clients et de ses collegues, qUi est de nature a l'aider it mieux cerner ses besoins en formation.
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I Developper les competences
Par ailleurs, de plus en plus d'entreprises adoptent la remuneration des employes selon Ie nombre, Ie type ou la profondeur des competences qu'iIs ont acquises (St-Onge, 1998). Ainsi, des organisations comme Shell, Hydro Quebec, General Electric, Alcan et Bombardier Aeronautique ont mis en place une remuneration basee sur l'acquisition de competences. J:organisation du travail, tout comme la formation, peut etre generatrice d'apprentissages. lei, deux constats s'imposent. Premierement, les experiences de travail qui posent un deti donnent lieu a la plupart des apprentissages qUi se realisent dans Ie milieu de travail. Deuxiemement, les competences s~ deve loppent Ie mieux dans un contexte de responsabilisation ou Ia personne detient une marge de mana'uvre, ou elle peut prendre des initiatives, faire des propositions, decider, etc. (Le Boterf, 2000). C'est donc dire qu'une organisa tion du travail qui favorise la responsabilisation de la personne et son engage ment dans divers projets sera eUe-meme genera trice de competences. Bref, retenons l'idee qu'i! est possible d'organiser Ie travail de fa\on qu'il soit for mateur (Darvogne et Noye, 2000). Selon la Loi sur la sante et la securite du travail, il revient a I'employeur de prendre Ies mesures necessaires pour assurer Ia securite et I'integrite physique des travailleurs. n doit notamment former de maniere adequate les travail leurs afin qu'ils aient les habiletes et Ies connaissances requises pour accom plir leur travail de fa\on securitaire. Mentionnons enfin que la formation s'avere une composante essentielle de tout programme de preparation de la releve dans Ie cadre d'une gestion des carrieres.
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L'importance confirmee du developpement des competences Plusieurs facteurs expliquent pourquoi la societe, Ies dirigeants d'entreprise et les syndicats favorisent aujourd'hul, plus que jamais, la formation profes sionnelle comme principal vehicule d'amelioration de la productivite et de Ia qualite de la vie des gens. Dans ceUe section, nous presenterons l'evolution economique, technologique et legal qui fait du developpement des compe tences un enjeu cruciaL
6.2.1 L'economie et la necessite de la formation continue La mondialisation, l'intensification de la concurrence et la tertiarisation de l'economie expliquent l'importance que revet la formation qualifiante (voir Ie chapitre 2). Une main-d'a'uvre qualifiee, en tend-on de plus en plus, s'avere une variable strategique pour Ie developpement economique (Charest, 1999). Alors que la consommation s'hypersegmente et que Ie consommateur devient de plus en plus exigeant, les entreprises doivent recourir a la creativite, a l'esprit d'innovation, au savoir, au savoir-faire et au savoir-etre de chacun.
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I Les defis de fa competence Notons aussi que l'entreprise qui privilegie l'amelioration continue de la qua lite doit aller au-dela de la formation par rapport a une tache specifique et favoriser une formation qui aide ses employes a avoir une vue d'ensemble des processus de travail. La formation accompagne d'ailleurs dans la plupart des cas I'implantation de programmes de qualite totale. Malheureusement, dans ce contexte concurrentiel, un frein important au developpement des ressources humaines est Ie manque de temps. Les em ployes manquent de temps pour leur propre apprentissage en raison des con traintes que comporte leur travail. Pour leur part, de nombreux employeurs affirment qu'ils ne sont pas en mesure d'accorder aux employes Ie temps necessaire a la formation (FCEI, 2002). Un defi majeur consiste donc a trou ver des moyens de developper les competences dans Ie respect de ces contraintes.
6.2.2 L'evolution de la technologie et la formation II va sans dire que l'essor technologique genere des besoins en formation de la main-d'ceuvre. Pour developper l'industrie pharmaceutique ainsi que les secteurs de l'aerospatiale, de la biotechnologie et de l'informatique, il faut pouvoir compter sur une main-d'ceuvre competente. L'arrivee de nouvelles technologies change plusieurs metiers. L'ouvrier sur la chaine de montage doit savoir travailler avec des outils informatises. La secrHaire doit aujour d'hui avoir des connaissances en bureautique. Pendant que Ie marche de l'informatique continue sa croissance et que la puissance des ordinateurs augmente sans cesse, les compHences doivent suivre. II n'est pas surprenant de constater, dans ces conditions, que, dans plus de la moitU~ des pays de l'Union europeenne, la majeure partie des heures de formation continue est consacree a l'informatique, au traitement des don nees et a la bureautique (Le Mondel 2002). Le savoir represente desormais un outil essentiel pour evoluer dans l'ere de l'information. A l'occasion d'une enquete faite par Statistique Canada, 68 % des participants ont indique que l'avenement des ordinateurs et des technologies de l'information avait modi fie a la hausse les exigences professionnelles liees a leur poste (Lowe, 1997). L'effort mental se substitue a l'effort physique. L'acceleration du rythme des innovations technologiques impose aussi Ie renouvellement des competences a des intervalles plus rapproches. Comme l'exprime avec eloquence Dominique Bouteiller (1997), une partie importante des comp€:tences de l'entreprise sont {( biodegradables ». II faut donc les renouveler pour maintenir Ie capital de comp€:tences de l'entreprise. II va sans dire que la formation de base est indispensable si l'on veut pou voir composer avec la complexite technologique. Malgre ce constat, une etude recente de Statistique Canada met en relief Ie fait que 36 % des travail leurs et pres de 20% des cadres ont de la difficulte a lire ou a rediger un texte tres simple. Une formation de base solide en mathematiques et en langues s'impose donc comme enjeu de developpement economique. Pour combler les lacunes de leurs ressources humaines a cet egard, certains employeurs
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investissent dans la formation initiale. C'est ainsi que, a la suite de l'acquisi tion d'equipements sophistiques pour son usine et jugeant la formation initiale de ses employes insuffisante, la firme Natrel a offert aces derniers un programme de formation de base. Notons egalement Ie cas d'ouvriers de l'en treprise Smurfit-Stone qui se sont inscrits a un cours d'application de la langue fran~aise au travail, auquel on a ajoute des donnees mathematiques de base.
6.2.3 L'encadrement legal de la formation L'enjeu de la qualification de la main-d'o=uvre est a ce point crucial que cer tains gouvernements ont adopte des lois visant a favoriser l'investissement des entreprises dans la formation de la main-d'o=uvre. En France, la loi du 16 juilIet 1971 instaure l'obligation pour les entreprises comptant 10 salaries et plus de participer au financement de la formation professionnelle conti nue. La Ioi du 31.decembre 1991 generalise cette obligation a toutes les entre prises et etablit des taux de contribution minimaux. Cela n'empeche pas les societes d'investir au-deia de l'obligation legale ou conventionnelle en con fiant a leur organisme collecteur la gestion d'une partie ou de la totalite de son budget de formation. Inspiree par la loi fran~aise, la loi 90 a vu Ie jour au Quebec en 1995. L'objectif de cette loi est d'ameliorer Ia qualification de la main-d'o=uvre, de maniere a favoriser l'emploi, l'adaptation et l'insertion en emploi ainsi que la mobilite de la main-d'o=uvre. Tout employeur au Quebec, incluant Ie gouvernement du Quebec, ses mi nisteres et les organismes qUi en sont mandataires, dont Ia masse sal aria Ie est de 250000 $ ou plus, devient assujetti a cette loi. Celle-ci prevoit que I'em ployeur est tenu d'investir l'equivalent d'au moins 1 % de sa masse salariale dans la formation et d'en faire la declaration au ministere du Revenu. Dans Ie cas on l'employeur ne ferait pas cet investissement, Ie montant total ou Ie solde serait preIeve par Ie ministere du Revenu et verse dans Ie Fonds national de formation de la main-d'o=uvre. Si Ies depenses de formation admissibles pour une annee donnee sont superieures au montant de Ia participation mini male exigee par Ia IOi, l'excedent est comptabilise pour les annees subse quentes. Le tableau 6.1 decrit comment les employeurs peuvent s'acquitter de leurs obligations en matiere de formation de leurs ressources humaines. Avec cette lOi, dit-on, Ie «reflexe de former» se developpe dans les entre prises (GuaYI 2002). Ainsi, 9 entreprises quebecoises sur 10 declarent avoir parraine de la formation pour leurs employes. En somme, la reconnaissance, la valorisation et Ie developpement des savoirs s'imposent dans Ie cadre economique, technologique et l{;gal actuel. II s,agit maintenant de prevoir un plan d'action qui servira a relever les dHis du developpement des competences.
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Les defis de la competence
LES MOVENS MIS CONFORMER
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ALA DISPOSITION DES EMPLOVEURS POUR SE
A LEURS OBLIGATIONS EN MATIERE DE FORMATION
Les defis du deve10ppement des competences
... . .. .. . ... .. . .. . . . . . . . .. .. ... .. . .. . .. ....... ~
Le fait, pour une entreprise, de s' engager dans ({ la course au savoir» afin de develop per les competences de ses ressources humaines mieux et plus rapide ment que ses concurrents comporte plusieurs avantages, mais aussi plusieurs defis dont certains sont presentes au tableau 6.2.
6.3.1 Investir suffisamment dans la formation professionnelle Pour de nombreuses entreprises au Quebec, la question n'est plus de deter miner s'il faut investir en formation, mais plut6t a quel rythme et pour quels employes. Alors que certaines entreprises locales et etrangeres investissent jusqu'a 10% de leur masse salariale dans la formation, il appartient a l'em ployeur d'evaluer si Ie minimum requis de 1 % est suffisant pour faire face a la musique. C'est ainsi que Couche-Tard, Ie chef de file des chaines de depan neurs au Canada, a choisi d'investir 3,6 % de sa masse salariale pour former LES DfFIS DE LA FORMATION
Chapitre 6 \ Oevelopper les competences
ses employes au service a la elientele, a la gestion et a la commercialisation. Par ai1leurs, au lancement de la nouvelle usine de production d'automobiles Saturn, chaque employe recevait entre 350 et 700 heures de formation (Rubinstein et Kochan, 2001). Les entreprises comme celIe-la voient dans la formation un investissement plutot qu'une depense. L'idee de la «formation investissement» engendre la croyance que «la formation, ~a rapporte» (Bernier, 1999).
6.3.2 Favoriser une gestion sbab!gique de la formation On doit investir dans Ie developpement des competences de fa~on coherente avec la mission, la vision et la strategie de l'organisation. A l'occasion d'une recherche faite au moyen d'un questionnaire, les directeurs de la formation ont degage comme priorite future de leur organisation l'etablissement de liens appropries entre la strategie d'affaires et la formation (Foucher, 1997). Les par ticipants a cette etude ont egalement accorde la priorite a l'elaboration et a l'application d'une strategie de formation ainsi qu'a l'integration de la forma tion a un plan de developpement organisationnel. Ainsi, la formation peut servir a favoriser Ie travail d'equipe, les comportements ethiques et la diver site de me me qu'a instaurer une culture d'apprentissage organisationnel. Par exemple, la societe-conseil DMR a lance son propre centre d'apprentissage pour retenir ses employes-ell's et soutenir sa croissance. La formation peut aussi permettre de faire face au phenomene du vieillissement de la main d'ceuvre et de relever Ie defi de la preparation de la releve.
6.3.3 Se preoccuper des veritables besoins en formation Le fait de se preoccuper des veri tables besoins en formation exige une analyse complete et approfondie de la situation. II faut bien connaitre Ia situation actuelle dans Ie milieu de travaiL n importe aussi de savoir si l'organisation desire introduire des changements qui entraineront de nouvelles exigences quant aux competences. Une formation justifiee par une telle analyse est de nature a repondre a des besoins reels en formation. Mais qU'entend-on par "besoins en formation» ? Les besoins expriment un ecart entre la situation actuelle et la situation desiree. eet ecart doit cependant etre dO a un manque de competences pour susciter des besoins en formation. Plus loin dans ce chapitre, nous presenterons une approche structuree permettant de realiser I'analyse des besoins en formation des ressources humaines.
6.3.4 Utiliser les bonnes techniques de formation Pour repondre a la question de savoir «comment former»,
il importe de con siderer Ie profil des apprenants. Par exemple, pour un personnel d'experience, on recommande une demarche axee sur Ia resolution de problemes, la partici pation, Ia possibilite de mettre en application les connaissances acquises en cours de formation et un encadrement personnalise (Rivard, 2000). II existe d'ailleurs une panoplie de techniques de formation qui peuvent repondre a
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I les defis de la competence differents besoins en formation et faciliter la realisation d'objectifs d'appren tissage. En matiere de logistique, une recherche revele la tendance au « rapa triement» de la formation a l'interieur de l'organisation ainsi que l'utilisation croissante des res sources internes a des fins de formation, c'est-a-dire la con tribution accrue des superieurs hierarchiques et des collegues a la formation (Foucher, 1997).
6.3.5 Responsabiliser chaque employe face developpement professionnel
a son projet de
Un nombre grandissant d'entreprises cherche a responsabiliser }'employe face a son projet de developpement professionnel. Suivant cette vision de la rela tion d'emploi, l'employe est maitre de son destin et responsable de ses projets de developpement professionnel. Les programmes d'autoformation incitent d'ailleurs les employes a prendre en main l'essentiel de la responsabilite de leur formation (Foucher, 2000). On assiste donc a 1'« autonomisation des sujets sociaux sur Ie champ de la formation» (Carre, 1997). L'employeur qui adhere a cette vision de la formation offre un soutien logistique, comme un centre de ressources comprenant de la documentation, des videos et des cederoms, de fa<;on a encourager et a encadrer les employes au cours du developpement de leurs competences.
6.3.6 S'assurer que les investissements dans la formation donnent des resultats Une etude indique que « la recherche d'une plus grande efficience a ete et continuera d'etre, selon les repondants, une des principales priorites de leur organisation en matiere de formation» (Foucher, 1997, p. 46). Dans un con texte exigeant que l'on fasse toujours plus avec les ressources disponibles, il faut prendre les mesures necessaires pour maximiser Ie transfert des acquis de la formation et ainsi permettre a celle-ci d'etre un levier efficace. Cela implique l'adoption d'interventions avant, pendant et apres la formation afin de faciliter Ie transfert des apprentissages du milieu de formation au milieu de travaiL L'evaluation de l'activite de formation permet, a cet egard, de demon trer dans queUe mesure la formation a pu combler des besoins en formation et contribuer a I'amelioration du rendement.
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Les differents acteurs de la formation •
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L'employe, la direction generale, la direction des ressources humaines, les cadres hierarchiques, les instances gouvernementales, les entreprises de for mation, les etablissements d'enseignement et les associations professionnelles peuvent contribuer a l'activite de formation.
Chapitre 6
I Developper les competences
6.4.1 L'employe Au sein de milieux de travail ou l'on favorise de plus en plus la responsabilite individuelle du travailleur face a son projet de formation, chacun doit faire preuve d'initiative et recourir aux ressources internes et externes existantes (Maurer, Pierce et Shore, 2002). De concert avec son superieur immediat et la direction des ressources humaines, l'employe participe frequemment a I'eta blissement de ses besoins en formation au moyen de l'autoevaluation. II dis cute de sa formation avec son superviseur et suit I'evolution de celle-ci. Un autre role de l'employe consiste a utiliser I'expertise qu'il a acquise au cours de la formation pour devenir a son tour formateur ou mentor dans Ie contexte d'une formation structuree ou non structuree. L'employe pourrait aussi s'en gager dans un comite paritaire de sante et de securite qUi aurait comme man dat de participer a la formation des travailleurs.
6.4.2 La direction generale Le soutien de la direction generale represente une condition essentielle a la reussite de la formation. Si les membres de la direction assistent a certains cours ou montrent par d'autres gestes qu'ils appuient la formation, les apprenants pourront mieux saisir l'importance de leur participation et seront d'autant plus motives a mettre en pratique leurs apprentissages. Par ailleurs, il est du res sort de la direction generale d'investir suffisamment dans la for mation professionnelle. Une etude indique a cet egard que l'accroissement des budgets de formation varie en fonction de l'importance que la haute direction accorde a la formation (Foucher, 1997).
6.4.3 La direction des ressources humaines Jouant un role-de dans la planification des ressources humaines, dans l'orga nisation du travail, dans Ie recrutement et dans la sHection, la direction des ressources humaines s'occupe egalement de la planification, de l'implantation, de la coordination et du suivi des programmes de formation. Selon les resul tats d'une recherche portant sur l'evolution de la GRH entre 1975 et 1995, la formation est apparue comme une responsabilite de plus en plus presente, se situant en 1995 au deuxieme rang parmi 17 activites de GRH (Haines et Arcand, 1997). C'est donc dire que l'expertise en matiere de gestion de la for mation est d'une importance capitale pour Ie professionnel de la GRH. La direction des res sources humaines travaille conjointement avec la direc tion generale, Ie personnel d'encadrement et les employes a l'analyse des besoins en formation. Vne autre responsabilite importante qUi lui incombe est de concevoir Ie plan de formation et de gerer Ie transfert des apprentis sages. Les professionnels des ressources humaines informent les employes au sujet des programmes de formation offerts et ils interviennent parfois aupres des apprenants pour animer des seances de formation. Finalement, une res ponsabilite qui prend de l'ampleur consiste a evaluer l'activite de formation et a prendre les mesures qui s'imposent pour ameliorer son efficacite.
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Partie II
I Les defis de la competence
6.4.4 Les cadres hicharchiques Le personnel d'encadrement est appele a participer a l'analyse des besoins en formation ainsi quia la preparation et a la mise en ceuvre de la formation. L'analyse des besoins se deroulera mieux si les employes se sentent a l'aise pour parler avec leur superviseur dans un climat valorisant l'apprentissage et caracterise par la confiance mutuelle. Pour assurer Ie transfert des apprentis sages du milieu de formation au milieu de travail, le personnel d' encadrement doit etablir un climat de travail ouvert qUi facilite Ie changement de com portement des employes. Le superieur hierarchique qui encourage l'experi mentation de nouvelles methodes et qui tolere les erreurs peut creer un climat favorable a la mise en pratique des acquis de la formation. Et, comme nous Ie verrons plus loin dans ce chapitre, Ie coaching requiert l'engagement des cadres hierarchiques dans les projets de formation (voir aussi Ie chapitre 9).
6.4.5 Les instances gouvernementales Le gouvernement a comme mission de promouvoir et de soutenir Ie deve loppement de la formation de la main-d'ceuvre ainsi que de favoriser l'equi libre entre l'offre et la demande de main-d'ceuvre sur Ie marche du travail. En particulier, les conseiIlers du gouvernement peuvent repondre aux questions des employeurs et les renseigner au sujet des sessions de formation. Bref, les instances gouvernementales offrent des mesures de soutien telles que l'aide a la gestion previsionnelle des ressources humaines, a la determination des be so ins en formation et a l'evaluation du profil de competences.
6.4.6 Les entreprises de formation Certaines entreprises possedent une expertise en GRH, et plus particuliere ment en formation des ressources humaines. II existe, selon Meignant (2001), plus de 4S 000 organismes de formation en France, dont 7600 exercent cette activite a titre principal. Elles offrent des conferences ou des ateliers sur un theme precis, auxquels peuvent s'inscrire les membres d'organisations qUi s'interessent a ce theme. Une societe de formation, par exemple, offre des activites de formation pour developper Ie leadership des gestionnaires et des employes. Certaines societes se specialisent aussi dans la formation continue sur mesure selon les besoins exprimes par l'entreprise cliente qui fait appel a ses services.
Chapitre 6
I
Developper les competences
6.4.7 Les etablissements d'enseignement Au cours des dernieres annees, la collaboration entre les etablissements d'en seignement et les entreprises en matiere de formation s'est amelioree. De plus en plus d'ecoles secondaires et de colleges offrent des cours pour aider les employes de diverses entreprises a acquerir les competences techniques exigees par l'exercice d'un metier. Ainsi, une commission scolaire donne une formation de journalier-manreuvre en bois ouvre d'une duree de 20 semaines, qui per met aux fabric ants de meubles d'une region de regler leur penurie chronique de main-d'reuvre. On assiste au meme phenomene dans Ie secteur des pates et papiers. Par ailleurs, les universites offrent des cours theoriques et pratiques generaux, voire une formation adaptee aux besoins particuliers des entreprises.
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I Les delis de la competence
6.4.8 Les associations professionnelles Les associations professionnelles jouent aussi un role actif dans la formation. Par exemple, I' Association des infirmU~res et infirmiers d'urgence du Quebec offrait recemment aux gestionnaires et aux professionnels du reseau de la sante un semina ire sur la responsabilite medicale et hospitaliere en salle d'urgence. Pour sa part, l'Ordre des comptables agrees du Quebec offre a ses membres pres de 160 cours sur differents sujets qui les interessent.
CD .L'ana1yse en formation.
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Offrir plus de formation ne signifie pas offrir une meilleure formation (Meignant, 2001). Une formation efficace developpe des competences qUi sont coherentes par rapport a la strategie de l'entreprise et qui aident les per sonnes a mieux repondre aux exigences de leur travail. Dans ces conditions, la formation peut contribuer a fournir a l'entreprise un avantage con curren tiel durable. La formation ne doit donc pas etre dissociee de la reaIite de l'entreprise, de sa mission, de sa strategie ou de la situation de travail. Et cette eXigence de la pertinence repose sur un diagnostic fiable. Pourtant, selon I' American Society for Training and Development, moins de la moitie des activites de formation sont precectees d'une analyse des besoins. Or, l'analyse rigoureuse des besoins permet de determiner I'existence de besoins en formation et de decider de la necessite d'eIaborer un programme de formation. Grace au processus de col lecte et de compilation de donnees qui se deroule a l'occasion de l'analyse des besoins, on peut eviter des depenses inutiles liees a la formation. Ce proces sus assure egalement une correspondance entre la situation de l'organisation et les activites de formation. Nous ne saurions trop insister sur l'importance de proceder a une analyse rigoureuse des besoins en formation, cette analyse constituant les fondations sur lesqueUes on pourra asseoir la formation. Plutot que d'investir dans la for mation parce que la competence est un concept a la mode, que cela donne conge aux employes les plus performants ou que cela permet d'atteindre Ie seuil de 1 % de la masse salariale impose par la loi, il vaut mieux developper des competences qui repondent a de vrais besoins. Ainsi, en milieu de travail, la formation ne constitue pas une fin en soi mais bien un moyen d'atteindre certains objectifs.
6.5.1 La nature des besoins en formation La formation vise a prevenir ou a resoudre les problemes qUi peuvent survenir dans un milieu de travail. L'analyse des besoins en formation permet de decouvrir si les problemes deceles dans un milieu de travail ont comme ori gine l'insuffisance des competences des ressources humaines. Pre nons comme exemple les employes d'un service administratif qui eprouvent, depuis l'installation d'un nouveau systeme informatique, de la difficulte a respecter
Chapitre 6
I Developper les competences
les delais de livraison. Le rendement inadequat des employes de ce service pourrait s'expliquer par les limites du nouveau systeme informatique qui n'est pas encore installe completement, ou par Ie manque de connaissances des employes qUi Ies empeche d'en exploiter tout Ie potentiel. Si Ie probleme de rendement est effectivement rattache aux limites du nouveau systeme infor matique, 1a formation n'aura pas pour effet de rectuire les delais de livraison dans ce 5ervice. Afin d'eviter Ie gaspillage de ressources financh~res et hu maines, il importe alors de se demander de fa~on rigoureuse si la .formation peut contribuer a prevenir ou a resoudre entiere:nent 0;t en yartIe les pro blemes qUi se presentent dans un milieu de travail. En resume, seion Bengle et Roussel (2001), il s'agit de repondre aux trois questions suivantes. • Connait-on bien la cause principale de la sous-performance? • Le probleme est-il veritablement lie a un manque de competences ou est-ilIa consequence d'une difficulte sur Ie plan du management? • Peut-on vraiment ameliorer la situation par Ie biais de la formation ou cherche-t-on simplement une solution rapide sans creer d'impact durable? La formation peut egalement avoir pour objet d'appuyer Ie developpement humain de l'employe. Se basant sur la logique sociale de la formation, Ies employeurs peuvent encourager les membres du personnel a suivre des cours sur Ie developpement general de la personne. Cette formation, liee aux objec tifs sociaux de l'entreprise, depasse la formule traditionnelle de ]'adaptation a la tache. Meme si elle ne repond pas a une situation specifique de rendement au travail, eIle sera it susceptible d'avoir des effets benefiques pour l'entreprise a plus long terme en ameliorant Ie bien-etre des ressources humaines.
6.5.2 Le constat d'un ecart de rendernent Un ecart de rendement repn§sente normalement Ie declencheur de 1'analyse des besoins en formation. Par exemple, « l'utilisation non securitaire d'un chariot pour transporter Ie materiel» pourrait s'averer un ecart de rendement. Ensuite, pour determiner s'il existe reellement un besoin en formation, iI faut evaluer dans queUe mesure l'ecart de rendement est engendre par une Iacune relative au savoir, au savoir-faire ou au savoir-etre d'un employe au d'un groupe d'employes. Ainsi, il pourrait etre demontre que Ie conducteur du chariot ne connait pas les regles de securite qUi s'appliquent au transport de materiel par chariot. Un ecart de rendement s'etablit toujours en fonction d'une norme quel con que. Si une couturiere realise une operation en trois minutes alors que la norme de rendement est de deux minutes, on constate un ecart de rendement en relation avec la norme fixee. Au cours de l'analyse des besoins en forma tion, on tente de cerner les ecarts de rendement et de determiner leurs causes. Celles-ci appartiennent generalement a l'une des categories suivantes: • Ie manque de soutien du milieu de travail, qUi ne facilite ni ne preconise Ie respect des normes de rendement; • Ie manque de motivation des employes a atteindre les normes de rendement;
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Les defis de la competence
• des normes de rendement trop elevees; • un changement survenu dans Ie milieu de travail; • I'insuffisance des competences des employes, laquelle empeche d'atteindre Ies normes de rendement. Si Ie manque de soutien, Ie manque de motivation ou la presence de normes de rendement irrealistes sont a\' origine de \' ecart de rendement lo. formation n'arrivera probablement pas a faire evoluer la situation. Les bes;ins en formation apparaissent principalement lorsque l'ecart de rendement est occasionne par l'insuffisance des competences des res sources humaines. Plus precisement, ces besoins se font sentir lorsque l'employe revele des lacunes relatives a son savoir, a son savoir-faire ou a son savoir-etre compte tenu des exigences professionnelles. Les besoins en formation ne decoulent pas forcement de problemes actuels dans Ie milieu de travail. La formation peut aussi accompagner Ie changement et preparer l'avenir. Seion une approche previsionnelle, on se preoccupe des forces de changement presentes dans l'environnement qUi transforment Ie profil des competences requis pour demeurer dans la course. Par exemple, l'ar rivee prochaine d'une nouvelle technologie de production pourrait susciter des besoins en formation sur Iesquels il faudrait agir de fa~on preventive. Une strategie d'affaires peut egalement faire naitre des besoins en formation. Le defi consiste alors a assurer la coherence entre la strategie et les competences des res sources humaines. L'evolution du profil de la main-d'reuvre contribue egalement it faire apparaitre de nouveaux besoins en formation. La diversite de la main-d'reuvre amene ainsi de nombreuses entreprises it eIaborer des pro grammes de formation visant it developper une meilleure comprehension des differences culturelles, des stereotypes, de la politi que de l'entreprise sur la discrimination, etc. Seion un sondage realise aux Etats-Unis, la formation por tant sur la diversite connait une forte croissance au sein des grandes societes americaines (SHRM, 2002). Par ailleurs, Ie vieilHssement de l'equipe de direc tion pourrait inciter cette derniere a investir dans la formation pour preparer la releve. Ces situations illustrent Ie fait que I'analyse des besoins en for mation peut s'inscrire dans une vision proactive du developpement organisationnel.
6.5.3 Les trois domaines de l'analyse des besoins en formation L'approche classique qu'on adopte pour effectuer I'analyse des besoins en for mation prend en consideration la situation de l'organisation, les exigences des taches et les competences des individus face a l'accomplissement des taches (McGehee et Thayer, 1961). La collecte d'information dans ces trois domaines permet d'etablir l'utilite d'elaborer un programme de formation.
L'anaJyse de l'organisation Une des visees de l'analyse de l'organisation consiste a localiser les besoins en formation, autrement dit it determiner les endroits dans l'organisation OU la formation est requise. L'analyse de l'organisation cherche egalement a
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Developper les competences
renforcer la pertinence de la formation eu egard a. la situation de l'entreprise. Comme l'indique l'auteur d'un livre sur la gestion de la formation, il faut une meilleure synchronisation du developpement des competences avec les poli tiques, les plans d'action et les objectifs de l'entreprise (Meignant, 2001). Ainsi, un employeur qui deciderait de mettre en place des equipes semi autonomes de travail dans l'une de ses divisions aurait a. considerer les besoins en formation que suscite une teUe forme d'organisation du travaiL Ses ana lyses pourraient l'informer du fait que les travaiIIeurs dans cette division auront a apprendre a travailler en equipe, c'est-a.-dire a etablir des objectifs clairs, a preciser les roles de chacun, a contribuer a la prise de decision durant les reunions, a formuler des critiques constructives et a resoudre efficacement les problemes. Mentionnons aussi Ie cas de Ia multinationale qui se rend compte de I'importance d'offrir une formation interculturelle pour aider ses cadres expatries a s'adapter a une autre culture nationale. Les reponses aux questions suivantes devraient contribuer a determiner Ies endroits ou 1a formation devrait se faire au sein de l'entreprise, de meme que sa pertinence et sa faisabilite. • Y a-t-il un sentiment d'urgence a. l'egard de la formation dans l'entreprise? • A quels endroits dans l'entreprise (unites administratives, divisions, emplois, etc.) se situent Ie probJeme ou la necessite du changement qui revelent des besoins en formation? • En consideration de la strategie de l'entreprise, quel type de formation faut-il privilegier? • QueUes competences vont distinguer J'entreprise de ses concurrents? • En consideration des valeurs de I'equipe de direction, quel type de formation faut-il favoriser? • Compte tenu des forces a J'ceuvre dans l'environnement economique, techno1ogique et social de l'entreprise, quel type de formation faut-il adopter? • Quels sont les objectifs des unites administratives? • Comment la formation peut-elle aider les unites administratives a atteindre leurs objectifs? • Eu egard aux contraintes liees au temps, au lieu et aux taches, queUes sont Jes probabilites de succes de la formation? • Le climat social est-il favorable a l'apprentissage de meme qu'au transfert des apprentissages de la formation? En apportant des reponses a ces questions, on pourra sans doute mieux dbler la formation et mieux l'integrer dans l'entreprise. L'analyse de l'orga nisation pourrait egalement inciter Ie concepteur a ne pas Haborer tel ou tel programme de formation car Ies circonstances actuelles ne seraient pas pro pices a la mise en ceuvre de nouvelles competences.
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L'ana1yse des taches Tandis que l'analyse de l'organisation procure une vision des cibles a atteindre en matiere de formation continue, l'analyse des taches permet d'etablir les besoins en formation en relation avec les exigences des emplois. Ene aide a mettre au point un contenu de la formation qui respecte les conditions de realisation du travaiL Alors que la formation a normalement comme finalite l'ameIioration du rendement au travail, l'analyse des taches precise les competences qui sont necessaires pour toucher ce but. Les questions suivantes permettront d'orien ter l'analyse des taches de fa\;on a decrire systematiquement l'ensemble des competences requises par un poste de travail actuel et par son evolution previsible. • QueUes sont les activites et les taches effectuees par les membres du personnel? • QueUe est l'importance relative de chaque tache? • A queUe frequence est realisee chaque tache? • Quelles sont les consequences rattachees au fait d'effectuer ou de ne pas effectuer chaque tache? • En consideration de !'evolution economique, technologique et sociale de l'entreprise, queUe sera l'evolution probable du contenu des emplois? • QueUes sont les normes de rendement arespecter? • Quels sont Ie savoir, Ie savoir-faire et Ie savoir-etre necessaires pour executer chaque tache et pour atteindre ou depasser les normes de rendement? Les renseignements obtenus a l'occasion de l'analyse des postes (voir Ie chapitre 4) permettront de repondre a certaines de ces interrogations. Par ailleurs, Ie formulaire d'evaluation du rendement procure de l'information sur les normes de rendement existantes. Finalement, les entretiens avec les titu laires des postes et leurs superieurs hierarchiques renseignent sur les exigences des emplois et sur les competences requises pour respecter les normes de rendement.
L'ana1yse des individus Tandis que l'analyse des taches porte sur Ie contenu et les exigences des postes, I'analyse des individus porte sur les titulaires de ces postes. Les reponses aux questions suivantes permettront de determiner qUi a besoin d'une formation et de quel type. • Le rendement au travail des employes est-il apprecie par les superieurs hierarchiques, les collegues, Ies subordonnes, Ies clients et Ies employes eux-memes? • Les comportements au travail des employes sont-ils adequats? • Les objectifs de rendement sont-ils atteints generalement"
Chapitre 6
I Developper les competences
• Si Ie rendement des membres du personnel ne repond pas aux attentes, est-ce en raison d'une insuffisance des competences? • QueUe activite de formation pourrait contribuer a ameIiorer les compe tences des employes afin de reduire l'ecart de rendement? • Quelle activite de formation permettrait de develop per Ie potentiel et la carriere des employes? • Les individus en cause possedent-ils les aptitudes de base ainsi que la motivation requise pour reussir la formation? A la lecture de ces questions, on constate que l'analyse des individus se de roule en trois etapes. La premiere Hape concerne l'appreciation du rendement au travail des ressources humaines. A la deuxieme etape, on se demande si la formation represente une solution interessante vu la nature des lacunes a combler. C'est l'etape du diagnostic, qui vise a assurer que l'ecart de rende ment observe n'est pas occasionne par une motivation insuffisante ou par un milieu de travail contraignant (des equipements defectueux, une supervision inadequate, un systeme de gestion deficient, etc.), c'est-a-dire par des causes etrangeres a la formation, mais bien par une insuffisance des compHences des titulaires des postes. La troisieme etape de l' analyse des individus porte un regard sur les probabilites de succes de la formation compte tenu des aptitudes et de la motivation a apprendre des individus en cause. La motivation a apprendre, en particulier, est une consideration importante car elle predit l'effort en situation d'apprentissage (Fisher et Ford, 1998) ainsi que la maniere dont les apprenants reagissent a la formation, leur apprentissage, leur trans fert des acquis de la formation et leur rendement au travail qui en resulte (Colquitt, LePine et Noe, 2000). Au risque de s'eloigner des besoins reels du point de vue de l'employeur, on peut aussi demander aux membres du personnel de specifier eux-memes leurs besoins en formation. La figure 6.1 presente un modele de formulaire d'autoevaluation. Les lacunes en ce qui concerne les competences des res sources humaines peuvent egalement apparaitre a l'occasion d'entretiens avec les titulaires des postes, avec leurs superieurs hU~rarchiques ou avec d'autres personnes ressources ou a l'occasion de l'observation du travail quotidien de l'employe ou d'un groupe d'employes. Par ailleurs, l'approche dite du « catalogue» con siste a demander aux employes de selectionner parmi une liste d'activites de formation celles qui conviennent Ie mieux a leurs besoins. Certaines entre prises preferent toutefois faire passer des tests destines a evaluer les connais sances des employes en relation avec leurs activites professionnelles. C'est Ie cas de la firme FedEx, ou les employes ont a repondre tous les six mois a un test de connaissances sur leur travail. Les employes qui ne reussissent pas l'epreuve doivent poursuivre leur formation en vue de faire mieux la pro chaine fois. Signalons en terminant l'existence d'appuis informatiques a l'exercice d'analyse des besoins en formation. Cartons Saint-Laurent, par exemple, a developpe un logiciel multirelationnel qui permet de faire un lien entre les competences exigees par differentes fonctions, les habiletes maitrisees par chaque employe et des programmes de formation permettant de combler les lacunes observees.
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I Les defis de la competence UN MODELE DE FORMUlAIRE D'AUTOEVALUATION DES BESOINS EN FORMATION
Source: Adapte de Societe quebecoise de developpement de la main-d'ceuvre, Guide 1996. Loi favorisant Ie developpement de la formation de La main-d'l1.'uvre, Quebec, Publications du Quebec, 1996, p. 49.
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La conception du plan de formation ... ..... ....... .. .......... .. .
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Pour faire suite a l'analyse des besoins en formation, nous nous pencherons maintenant sur les exigences du developpement d'un plan de formation. Alors que I'analyse des besoins traite du «pourquoi» de la formation, la con ception d'un plan de formation traite du « comment» de la formation.
6.6.1 Le plan de developpement des ressources humaines Le plan de developpement des res sources humaines comprend un grand nombre d'activites qui concernent la formation et, de fac;on generate, la mobilisation du personnel. Dans te milieu hospitalier, par exemple, on detinit ce plan comme un ensemble de processus et d'activites qui vi sent l'adaptation au changement, l'utilisation optimaIe des competences et la croissance des individus et de l'organisation. Concretement, un plan de developpement des ressources humaines contient des mesures relatives a l'accueil des employes, a leur motivation, a leur valorisation, au maintien de leurs competences, a leur evaluation, a leur perfectionnement, a leur mobilite et a l'orientation de leur carriere. Cela signifie en quelque sorte qu'il vise l'amelioration de l'ensemble des pratiques de GRH, y compris la formation. Le plan de formation pourrait donc exister a l'interieur du plan de developpement des ressources humaines.
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Develop per les competences
6.6.2 Le plan global de formation Le plan global de formation rassemble les activites qUi ont pour objet de conso lider ou de developper les competences des employes au moyen d'une forma tion liee aux objectifs strategiques de l'entreprise. La figure 6.2 presente un modele de formula ire visant it elaborer un plan global de formation. TeI qu'iI apparaft, Ie plan global de formation comprend une description des orientations que l'entreprise entend privilegier en matiere de formation. Ce plan integre egalement Ie plan specifique de formation.
6.6.3 Le plan specifique de formation Le plan specifique de formation traduit les choix portant sur les activites qui visent a consolider ou it accroitre les competences d'un employe ou d'un groupe d'employes. La figure 6.3 presente Ie contenu habituel du plan speci fique de formation. Ce modele de contenu d'un plan specifique de formation devrait aider les acteurs en cause a repondre aux questions importantes qUi se posent au cours de la planification et de la conception de la formation. Suivant ce modele, nous presentons les possibilites a considerer pour mieux cerner la nature de la formation et elaborer un plan specifique de formation.
La probh~matique de la formation Pour definir la problematique qUi justifie la formation, il faut d'abord enon cer l'ecart de rendement. Ensuite, compte tenu de la situation de l'organisa tion, des eXigences des emplois ainsi que des competences des ressources humaines, la definition de la problematique devrait presenter une synthese de l'analyse des besoins en formation. Cette partie du plan specifique de forma tion devrait indure les grandes lignes du diagnostic qui a permis de degager les besoins en formation qui sont a l'origine de l'ecart de rendement.
Les objectifs et le contenu de la formation Les objectifs de la formation sont des enonces qui decrivent les cibles it at teindre en relation avec un besoin en formation. Ils orientent les efforts des apprenants et facilitent l'evaluation de la formation. Pour ce qui est de la formulation de ces objectifs, la distinction entre les objectifs organisation nels et les objectifs d'apprentissage semble importante (Camp, Blanchard et Huszczo, 1986). Notons aussi que certains objectifs sont de nature opera tionnelle avec un caractere d'immediatete, tandis que d'autres relevent de la preparation a l'avenir (Meignant, 2001). Les objectifs organisationnels de la formation
Les objectifs organisationnels designent les benefices souhaites au regard des indicateurs generaux de l'efficacite de l'organisation. Si l'activite de formation vise a reduire un ecart de rendement, ses objectifs organisation nels portent
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Les defis de la competence
lE CONTENU DU PLAN GLOBAL DE FORMATION
Source: Adapte de Societe quebecoise de deveJoppement de la main-d'ceuvre, Guide 1996. Loi (uvorisant Ie developpement de la (ormation de la main-d'reuvre, Quebec, Publications du Quebec, 1996, p. SO.
precisement sur la reduction de cet ecart. Prenons comme exemple une situa tion qui concerne les relations du travail au sein d'une usine de fabrication. L'ecart de rendement dans ce cas est Ie nombre trap Heve de griefs relatifs aux horaires de travail et aux periodes de repos. En fonction de cet ecart de ren dement, on a formuU~ un objectif organisaUonnel pour la formation, lequel consiste a reduire de moiti('; Ie nombre de griefs touchant aux horaires et aux
Chapitre 6 1 Developper les competences
lE CONTENU DU PLAN SPECIFIQUE DE FORMATION
Source: Societe qm?becoiSe de developpement de la main-d'~uvre, Guide 1996. Loi favorisallt le developpement de la formation de la main-d'lEuvre, Quebec. Publications du Quebec, 1996, p. 51.
periodes de repos. Si la formation vise a repondre a un besoin de changement, ses objectifs organisationnels ont trait a l'adaptation a ce besoin de changement. les objectifs d'apprentissage de la formation Les objectifs d'apprentissage expriment ce a quoi les apprenants doivent par venir au terme de la formation. lIs specifient les changements souhaites sur les plans du savoir, du savoir-faire et du savoir-etre. Un objectif d'apprentis sage peut porter sur l'approfondissement de la comprehension d'un pheno mene, d'un procede ou d'une nouvelle politique de l'entreprise, C'est-ii-dire des connaissances a acquerir. Toutefois, il peut etre utile de specifier la
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Partie II
I Les defis de la competence conduite observable, soit Ie comportement attendu qui resultera de l'ameIio ration des connaissances ou du savoir-faire. Reprenons l'exemple de l'usine de fabrication. Supposons que Ie besoin en formation concerne la comprehen sion insuffisante de la part des superviseurs des dispositions de la convention collective qui portent sur les horaires de travail et les periodes de repos. A partir de ce besoin, i'oblectif d'apprentissage dit qu'au terme de l'activite de forma~on, les superviseurs devront etre en mesure de se rememorer et d' appli quer, a la lumiere des dispositions pertinentes de la convention collective ies pratiques acceptables et conformes en matiere de gestion des horaires et'des periodes de repos. On exprime ainsi un objectif d'acquisition des connais sances par un comportement precis. Afin de bien formuler Ies objectifs d'apprentissage, Mager (1984) propose trois conditions a respecter. Premierement, l'objectif doit exprimer en fonction d'une conduite obser vable ce que Ie participant devrait etre capable de faire a la fin de l'activite de formation. Les verbes utilises traduisent des gestes, des actions ou un rende ment observables. II s'agit du comportement attendu. Deuxiemement, l'objectif doit decrire Ie contexte particulier a l'interieur duquel Ie rendement sera mesure. C'est la condition de la realisation du rendement. Troisiemement, dans la mesure du possible, l'objectif doit preciser Ie niveau de rendement acceptable qui permet d'evaluer l'activite de formation. Cela constitue Ie critere de rendement. L'exemple suivant, prepare pour un cours d'operation d'un minichargeur
a benne, demontre comment ces trois conditions peuvent etre integrees dans un objectif d'apprentissage.
A la fin de ce module, Ie participant sera capable d'identifier les commandes et instruments de contr81e et en decrire la fonction et Ie fonctionnement [com portement attendu] it l'aide de croquis et de memoire [condition de realisa tion] sans erreur [crithe de rendement] (AGD, 1996, p. 45).
le contenu de la formation Apres la formulation des objectifs d'apprentissage, l'etape suivante consiste it determiner Ie contenu de l'activite de formation. Le contenu se rapporte gene ralement a l'apprentissage des taches etablies au moment de l'analyse des besoins en formation. C'est la maitrise de ces taches qUi permet d'atteindre les objectifs de l'activite de formation. Le contenu de la formation devrait porter sur Ie savoir, Ie savoir-faire et Ie savoir-etre requis pour la realisation de cette tache, souvent sous forme de module. Les instructions de ces modules doivent obeir a une logique qui favo rise l'apprentissage. Considerons, it cet egard, quelques principes de l'agence ment des modules afin d'optimiser l'apprentissage.
Chapitre 6
I Developper les competences
• Passer du general au particulier: L'apprenant beneficie alors d'une vue generale de la situation avant de traiter un element specifique de celle-ci. Par exemple, il convient d'expliquer Ie processus de gestion des stocks avant de decrire comment on remplit un formulaire de requisition. • Aller du simple au complexe: II s'agit de decouper une tache complexe en petits morceaux et de presenter les problemes simples avant Ies pro bU:mes complexes. Par exemple, une future couturiere apprend a coudre les pieces d'un vetement avant d'apprendre a faire des coutures en zigzag pour les poches. • Reproduire Ies sequences n~elles du travail: II s'agit de presenter Ie contenu du module seion I'ordre d'execution du travail. Par exempIe, une estheticienne prend Ies rendez-vous, prepare Ies instruments et les produits necessaires, accueille Ie client et commence les traitements; Ia formation suit alors cette sequence. • Aller des taches Ies plus frequentes aux taches les moins frequentes; Une tache executee frequemment necessite plus d'attention qU'une tache occasionnelle. Notons egalement que la maltrise des taches frequentes augmente Ie sentiment de competence des apprenants. • Suivre l'ordre d'acquisition des apprentissages: Souvent, l'apprentissage d'un element de contenu repose sur la maitrise d'un autre element de contenu. Ainsi, il faut comprendre certaines notions de comptabilite avant d'apprendre comment utiliser un Iogiciel de comptabilite.
La methodo1ogie de 1'apprentissage et de 1'enseignement Dans cette partie du plan specifique de formation, Ie concepteur presente Ia methodologie de l'apprentissage et de l'enseignement qUi permettra d'at teindre les objectifs de l'activite de formation. Voici donc quelques balises. En premier lieu, il faut choisir une methodologie en fonction de la nature de l'apprentissage souhaite. Certaines techniques permettent d'ameliorer Ie savoir (l'expose, Ia conference-discussion, la lecture dirigee), d'autres, de deve lopper Ie savoir-faire (l'etude de cas, Ie jeu d'entreprise), et d'autres encore, de modifier les comportements (Ie jeu de role, l'utilisation de comportements modeles). En deuxieme lieu, il convient de choisir les techniques de for mation les mieux adaptees au profil des apprenants, lequel est compose du nombre de participants a la formation, de leur degre d'autonomie, de leur formation anterieure, de leur capacite de lecture, de leur style d'apprentissage, etc. En troisieme lieu, il faut considerer Ie formateur, sa personnalite, ses qua lites personnelles et son degre d'expertise relativement a diverses techniques de formation. En quatrieme lieu, il faut choisir une methodologie en fonction des conditions materielles dans lesquelles se deroule l'activite de formation. Un choix judicieux repose sur une bonne comprehension des differentes techniques de formation. Nous distinguerons, a cet egard, la formation dans Ie milieu de travail et la formation hors du milieu de travail. La formation dans Ie milieu de travail se realise au cours des activites regulieres a l'aide de diverses techniques comme la demonstration, la rotation
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Partie II
I Les defis de la competence des postes, Ie coaching et Ie mentorat. On reconnait milieu de travailies avantages suivants.
a Ia formation
dans Ie
• L'apprenant «apprend en faisant», ce qUi correspond bien au savoir-faire. • Le transfert des apprentissages du milieu de formation au milieu de tra vail est favorise , car Ie milieu de formation se confond avec Ie milieu de travail.
• La motivation a apprendre est augmentee, car la formation contribue souvent a ameliorer Ie rendement de l'apprenant de et visible.
fa~on
immediate
• La formation dans Ie milieu de travail est generalement moins couteuse parce que Ia production continue pendant la formation. • Elle convient aux besoins et aux ressources des petites et moyennes entreprises. La formation hors du milieu de travail comprend des techniques tradi tionnelles orientees sur l'acquisition du savoir et des techniques qui favo risent l'experimentation et Ie developpement du savoir-faire de meme que la modification du savoir-etre. Elle se deroule generalement dans un climat calme, propice a l'apprentissage, a l'ecart du derangement et des pressions du milieu de travaiL Les erreurs faites pendant une formation qui se deroule a l'exterieur du milieu de travail suscitent moins de mecontentement que les erreurs qui surviennent pendant que se deroule la production. Autre avan tage, loin des press ions reguW~res du travail et d'une supervision directe, l'apprenant pourrait se sentir plus libre de poser des questions et de faire des erreurs qui suscitent des apprentissages. II n'est pas rare aussi que l'entreprise finance une partie des frais d'etudes d'un employe qui voudrait suivre une for mation hors du milieu de travail dans un etablissement d'enseignement reconnu. Ainsi, la compagnie de livraison FedEx rembourse les frais d'etudes jusqu'a concurrence de 1500 $ par annee. Dans ces cas, l'employeur considere generalement la pertinence du cours pour l'entreprise comme condition d'ac o';s au remboursement des droits de scolarite. Mentionnons aussi les entre prises qui mettent sur pied leurs propres centres de formation ou universites d'entreprise.
Chapitre 6
I
Developper les competences
Voici une breve description des differentes techniques de formation qui permettront de faire des choix eclaires quant a la methodologie de l'appren tissage et de l'enseignement a adopter. Commen~ons par les principales techniques de formation dans Ie milieu de travail. La demonstration
La demonstration est une activite d'apprentissage planifiee ou un speciaIiste montre la tache a accomplir, la fait executer par l'employe et lui transmet une retroaction. La demonstration est accompagnee d'explications et Ie formateur encourage l'apprenant a poser des questions. Cette technique de formation directement adaptee a la tache a accomplir et centree sur l'apprenant permet a ce dernier d'apprendre en agissant grace a un enseignement adapte a ses besoins et a son rythme d'apprentissage. La rotation des postes Un programme de rotation des postes permet a l'apprenant d'evoluer dans differents postes et dans differentes unites administratives au cours d'une periode determinee. Etant place devant divers milieux de travail et un large eventail de taches, Ie participant acquiert une meilleure comprehension de son entreprise, ce qUi lui permettra eventuellement d'acceder a une fonction administrative plus eIevee dans la hierarchie. Le coaching Le coaching, un moyen de formation qui gagne en popularite (Foucher, 1997), exprime la relation qui s'etablit entre l'employe et son superieur immediat a l'interieur d'un cycle de gestion du rendement. Avec la technique du coaching, Ie superieur hierarchique (Ie coach) aide l'employe sous sa direction aclarifier son projet et a progresser par l'analyse de ses propres experiences profession nelles. La communication, la collaboration, Ie respect mutuel, l'encourage ment, Ie soutien individuel et la retroaction sont les ingredients essentiels ala reussite du coaching et au developpement du savoir-faire de l'apprenant. Le mentorat Le terme «mentorat» designe la relation entre un mentor, qui est une per sonne experimentee occupant Ie plus souvent un poste de haut niveau, et un protege, qui est une personne generalement en debut de carriere. Houde (1995) presente 12 fonctions du mentor, dont les 5 suivantes font du men torat une veritable technique de formation: • gUider Ie protege dans Ie milieu de travail en lui faisant part des normes, des valeurs et des tabous de la culture d'entreprise; • enseigner au protege; • amener Ie protege a acquerir des habiletes precises liees a l'exercice d'un travail;
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Partie II
I Les defis de la competence • presenter des detis au protege et lui fournir l'occasion de faire ses preuves; • conseiller Ie protege sur differentes questions. Poursuivons avec les principales techniques de formation hors du milieu de travail. L'expose
L'expose constitue une technique de formation qui mise sur Ia presentation verbale de renseignements a un groupe par une personne-ressource. Cette technique permet de transmettre rapidement a plusieurs apprenants une in formation factuelle de fa~on a developper leur savoir. Par contre, a cause du peu d'echanges qu'occasionne cet acte educatif et de son manque de person nalisation, l'expose ne se classe pas parmi les techniques de formation les plus appreciees. La conference-discussion
Avec Ia conference-discussion, les apprenants sont amenes it interagir it pro pos d'une problematique presentee par un conferencier. La lecture dirigee
La lecture dirigee consiste a faire lire un texte en classe ou a l'exterieur. Le pro gramme de lecture peut indure des guides, des documents de reference ou des manuels d'instructions a consulter avant, pendant ou apres l'activite de formation. L'etude de cas
L'etude de cas est une technique de formation qUi consiste a conduire les apprenants «a analyser, a dis cuter et a solutionner une situation problema tique elabon~e a partir d'un fait vecu» (Bedard, Dell' Aniello et Desbiens, 1991). Elle concretise la formation theorique et aide adeveIopper Ie jugement et les habiletes de raisonnement et de communication des participants. Le jeu d'entreprise
Le jeu d'entreprise place les apprenants dans une situation de prise de deci sion en fonction de changements qui surviennent dans l'environnement d'une entreprise fictive. Con~u pour developper des habHetes de gestion, Ie jeu d'entreprise incite les «joueurs» a participer et a travailler en equipe. Le jeu de role
Avec la technique du jeu de role, les participants sont appeles it jouer une courte scene comportant des situations voisines de situations reelles. Par exemple, un participant pourrait jouer Ie role du superviseur qui impose une mesure disciplinaire, et un autre pourrait se mettre dans 1a peau de l'emp1oye qui conteste cette mesure disciplinaire. On fait appe1 a cette technique tres vivante principalement pour modifier les attitudes et developper Ie savoir faire des apprenants dans leurs relations interpersonnelles.
Chapitre 6
I
Developper"les competences
Les comportements modeles Dans un milieu d'apprentissage, l'utilisation de comportements modeles con siste a. susdter l'apprentissage des comportements appropries grace a. l'obser vation de personnes qui maitrisent deja. un savoir-faire. Apres l'observation du «comportement ideal» se deroule une discussion portant sur les elements a. retenir, puis vient une periode d'exerdce ou les participants ont la possibHite d'imiter Ie modele afin d'interioriser ses qualites. La formation assistee par les technologies de l'information et de la communication La formation assistee par les technologies de }'information et de la communi cation (TIC) consiste a. recourir aux technologies de l'information et de l.a communication pour favoriser l'apprentissage. On estime que 13 % des actl vites de formation consistent en une formation assistee par les TIC (Conference Board, 2001), qu'il s'agisse d'une formation par cederom, par DVD , ou encore d'une formation virtuelle (e-formation ou e-learning) utilisant les possibilites d'Internet ou d'un intranet.
Ces approches de la formation comportent plusieurs avantages, mais aussi certains inconvenients. Du cote des avantages, mentionnons que la forma tion assistee par les TIC permet de rejoindre les employes a. des heures varia bles et dans des endroits eloignes en mode juste-a.-temps. Le rythme de la for mation peut etre variable, c'est-a.-dire adapte a. chaque individu. La formation assistee par les TIC permet donc de respecter Ie rythme d'apprentissage de chacun. Du cote des inconvenients, l'investissement initial dans une forma tion assistee par les TIC est, dans plusieurs cas, plus important que celui qui est fait dans une formation traditionnelle. En contrepartie, I'entreprise peut ensuite realiser des economies d'echelle en formant plus de travailleurs. Un second des avantage reside dans Ie fait que cette methode donne lieu a. tres peu de relations interpersonnelles. Etant donne que la connaissance est un phenomene social qui se developpe dans des reseaux de relations, cette sec onde limite s'avere une contrainte importante. Notons aussi les taux d'aban don exorbitants de l'ordre de 80% a. 90% que connait la formation a. distance.
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Partie"
I Les defis de la competence VOTRE ENTREPRISE EST-EllE FAITE POUR l'APPRENTISSAGE VIRTUEl?
Source: TechnoCompetences, e-Learning: guide pratique de l'apprentissage virtuel en entreprise, Montreal, Comite sectoriel de la main-d'ceuvre en technologies de l'information et des commu nications, 2003.
Compte tenu des caracteristiques de 1a formation assistee par les TIC, l'organi sation TechnoCompetences a mis au point une grille de questions servant a determiner si l'entreprise est faite pour l'apprentissage virtue1 (voir la figure 6.4). Les reponses positives aux questions signa lent que l'apprentissage virtuel est une approche interessante.
La description des outi1s pedagogiques et de l'equipement Pour transmettre efficacement un message a l'occasion d'une activite de for mation, il existe de multiples supports pMagogiques que l'on nomme parfois «moyens d'enseignement». Trop souvent, par contre, les supports pMagogiques et l'equipement utilises pour la formation professionnelle sont nettement
Chapitre 6 \ Developper \es competences
insuffisants compte tenu du fait que nos perceptions s'effectuent par la vue dans 85 % des cas, comparativement a seulement 11 % des cas pour l'ouie. Afin d'adapter la formation a cette realite, il faudrait reduire son contenu verbal et recourir davantage a des elements visuels comme Ie tableau, les trans parents, la video et Ie diaporama.
La video est frequemment utili see pour la formation professionnelle. En observant l'execution d'une tache, l'apprenant peut ensuite tenter de repro duire ce comportement dans son milieu de travaiL Le concepteur de l'activite de formation peut preparer une cassette video qui repondra a ses besoins ou en commander une aupres d'un distributeur comme International THe-Film. Certaines experiences menees recemment ont demontre que les odeurs facilitent l'apprentissage de connaissances. La stimulation olfactive pourrait eventuellement prendre de l'ampleur comme outil de formation. Mention nons egalement la popularite de la formation «en plein aif», ou les activites structurees se deroulant a l'exterieur et les expeditions avec couchers et repas representent des moyens d'enseignement pour Ie developpement des compe tences personnelles necessaires en gestion. Meme s'B existe toutes sortes de moyens de stimuler l'apprentissage, les outils pedagogiques employes Ie plus frequemment dans Ie milieu industriel restent la machinerie et Ie manuel d'instructions.
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L'evaluation de la formation Alors que plusieurs entreprises consacrent au moins 1 % de leur masse sala riale ala formation de leurs ressources humaines, revaluation de la formation represente Ie moment uitime ou peuvent etre determinees les retombees de cet investissement. Elle se realise par la collecte systematique de donnees des tinee a la prise de decisions eclairees sur la valeur d'une activite de formation. Selon Ie modele de Kirkpatrick (1998), l'evaluation de la formation peut se realiser sur l'un ou plusieurs des quatre plans suivants: les reactions, l'acqui sition de connaissances, les comportements et les resultats.
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Partie II
I Les defis de la competence Sur Ie plan des reactions, on se demande si les apprenants ont apprecie l'activite de formation et s'ils considerent que celle-ci sera utile dans Ie cadre de leur travaiL Cette approche de I'evaluation qui s'interesse en quelque sorte a la satisfaction des «clients» de la formation est de loin la plus utili see par les entreprises (Young, 2000). Sur Ie plan des connaissances, on se demande si les apprenants ont appris quelque chose de l'activite de formation. A titre d'illustration, un question naire sur la comprehension des methodes de travail et des regles de securite pourrait servir a evaluer une formation en ce qUi concerne I'exploitation effi cace et securitaire d'une nouvelle piece d'equipement. Sur Ie plan des comportements, on se demande si les apprenants utilisent les acquis de leur formation pour executer leur travaiL Cet aspect de l'evalua tion est important, car Ie fait qu'une personne apprenne quelque chose a1'0c casion d'une formation ne signifie pas pour autant qu'elle utilise ses nouvelles connaissances dans son milieu de travail. Sur Ie plan des resultats, on se demande si l'activite de formation a reelle ment contribue au succes de l'organisation. Dans ce cas, l'evaluation permet de juger de la realisation des objectifs organisationnels de la formation. Les ventes ont-elles augmente a la suite de la formation? La formation a-t-elle contribue a ameliorer Ie rendement de l'organisation? Dans Ie cas d'une for mation technique dans l'industrie, on pourrait ainsi s'interesser aux effets de la formation sur la reduction des couts de reparation ou sur la reduction du temps d'arret des appareils en raison de bris. Ii s'agit donc de la rentabilite de l'apport de la formation en fonction du budget qui y est alloue. Malheureu sement, peu d'entreprises evaluent leur formation sur ce plan. Si chaque aspect de l'evaluation nous informe sur l'objet de la mesure (reactions, connaissances, comportements et resultats), il importe aussi de considerer la maniere de faire l'evaluation. Vne demarche frequemment utili see consiste a comparer la situation avant et apres I'activite de formation. La comparaison peut egalement se faire entre les personnes qUi ont beneficie d'une formation et d'autres qUi n'en ont pas re~u (un groupe temoin). La figure 6.5 presente un modele «ideal» d'evaluation de l'activite de formation, qUi resulte de Ia combinaison des deux demarches. UN MODELE «IDEAL» D'EVALUATION DE L'ACTIVITE DE FORMATION
Participants
Avant la formation
ala formation
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Apres la formation
Personnes n'ayant pas re~u de formation
Chapitre 6
I Developper les competences
Comme l'indiquent certains specialistes, Ie recours a ce modele d'evalua tion demeure neanmoins impossible pour la vaste majorite des entreprises (Haccoun, Jeanrie et Saks, 1997). Le modele «ideal» d'evaluation doit donc s'adapter a la situation de I'entreprise et aux besoins du milieu.
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L'apprentissage et le transfert des ap~!~!'.t~~~~~.~~
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Le plan specifique de formation represente une composante importante d'un systeme de gestion de la formation i il ne constitue toutefois pas la finalite de ce systeme. n faut, comme condition minimale de fonctionnement, que l'ac tivite de formation favorise l'apprentissage et Ie transfert des apprentissages du milieu de formation au milieu de travail. Sinon, quel gas pillage de temps et d'energie!
6.8.1 L'optimisation des apprentissages L'acquisition des competences n'est pas Ie fruit du hasard. Plusieurs interven tions peuvent favoriser l'acquisition des competences ou lui nuire. Comme nous l'avons vu precedemment, il est necessaire de faire une analyse des besoins rigoureuse pour formuler des objectifs adequats et un contenu de la formation bien adapte aux exigences du travail a effectuer. Par ailleurs, la pre sentation du contenu de la formation doit suivre une logique qui favorise l'apprentissage. NollS avons insiste egalement sur l'importance de la mHho dologie de l'apprentissage et de l'enseignement et sur celIe des outils pedago giques et de I'equipement. II existe cependant d'autres moyens, soutenus par Ies theories de l'apprentissage, qui ont comme denominateur commun la volonte d'optimiser les apprentissages (voir Ie tableau 6.3). Un instructeur competent recourra a plusieurs des moyens precedents et a d'autres encore pour faciliter l'apprentissage. Ainsi, Ie succes de l'activite de formation repose en grande partie sur la qualite pedagogique. Les chances de reussite sont meilleures avec la selection d'un instructeur qui saura maitriser l'environnement de la formation et demontrer des habiletes de communica tion et de questionnement. L'instructeur devra egalement etre en mesure de donner un renforcement positif et d'utiliser les techniques de formation appropriees.
6.8.2 Le transfert des apprentissages Le rendement de l'investissement dans la formation repose sur Ie transfert des
apprentissages du milieu de formation au milieu de travaiL C'est donc dire que si l'apprenant n'utilise pas les competences qu'il a acquises durant la forma tion pour ameliorer son rendement au travail, la formation n'aura pas atteint son objectif consistant a combler un besoin en formation en vue de reduire un ecart de rendement. Comme l'illustre la figure 6.6, la formation favorise l'ap prentissage de nouvelles notions et fa~ons de faire, ce qui augmente Ie poten tiel de rendement. Cependant, sans Ie transfert des apprentissages, Ie potentiel
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Partie"
I
les defis de Iii competence
OPTIMISER LES APPRENTISSAGES
de rendement demeure inexploite et ne se traduit done pas par une ameliora tion du rendement. LA REPRESENTATION DE LA DYNAMIQUE DU TRANSFERT DES APPRENTISSAGES
Apprentissage
Transfert
Selon une estimation, seulement 10% des apprentissages aequis durant une formation se eoneretisent par de nouveaux eomportements au travail (Georgenson, 1982). De la theorie a la pratique, i1 y a done un pas souvent diffieile a franehir. Pour relever ee defi, les entreprises ont interet a elaborer une strategie de transfert, laquelle pourrait eomprendre les elements indus dans Ie tableau 6.4.
Chapitre 6 \ Oevelopper les competences
DES CONSEllS POUR OPTIMISER lE TRANSFERT DES APPRENTISSAGES
Pour ce qUi est de la formation offerte aux gestionnaires, une courte ren contre de suivi quelques mois apres l'activite, pour voir ace « que chacun des gestionnaires approfondisse et concretise certains contenus de Ia formation re~ue», peut renforcer Ie transfert (Archambault, 1997). Par ailleurs, au moment du retour de l'apprenant dans son milieu de travail, il faut bien sur que son superieur immediat encourage l'experimentation du changement. Le soutien du personnel d'encadrement represente sans doute une condition du reus site de l'activite de formation.
Conclusion Nombreux sont les intervenants qui souhaitent une augmentation des budgets alloues it la formation. Moins nombreux sont ceux qui peuvent gerer l'activite de formation avec soin, assurer Ie transfert des apprentissages et finalement evaluer l'activite de formation et presenter de fayon convaincante les resultats de cette evaluation. Dans ce chapitre, nous avons expose l'enjeu de la for mation ainsi que les considerations-cles entourant une saine gestion de la formation. Dans «la course au savoir", la competence represente avant tout ce qUi peut etre gagne par une entreprise. Le developpement de competences dis tinctives et difficilement imitables qui pousse l'entreprise vers de nouveaux
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Partie II
I Les defis de la competence acelle-ci un avantage concunentiel. A l'oppose, l'entreprise qui ne se preoccupe pas de la formation risque de voir \e IeS~tVoit d~ ~~~ mID
sammet" appmte
petences s'affaiblir, ce qui restreindra son adaptabilite aux changements. Sachant que l'enjeu de la formation est trop important pour etre laisse a la seule volonte des entreprises, certains gouvernements ont decide de renforcer l'effort de formation par l'imposition d'un cadre legal qui penalise les emp]oyeurs qUi n'offrent pas une certaine formation. Les entreprises soumises a une telle obligation doivent toutefois eviter de se con tenter de «gerer un budget captif», et gerer plutot la formation de fas:on a ({ optimiser son effi cience, c'est-a.-dire Ie rapport entre son cout et les avantages qU'elle procure» (Meignant, 2001). Rappelons finalement la convergence des interets en matiere de forma tion. Les personnes qui beneficient d'une formation professionnelle sont generalement plus satisfaites au travail et plus engagees envers leur employeur (Birdi, Allan et Wan, 1997). Par ailleurs, comme en temoignent les palmares, les ({ employeurs de choix» sont souvent ceux qui investissent dans la forma tion et Ie developpement de leurs ressources humaines. Alors, si Ie bien-etre des personnes s'ameliore en fonction de la formation res:ue et que les entre prises tirent profit de cette situation, il n'y a que des avantages a. developper les competences.
. v(J) de revision 4) Quels roles peuvent jouer les diffe rents acteurs de la formation it chaque etape de la conception d'un plan specifique de formation?
f) Decrivez sommairement les conse
"Le mentorat represente-t-il une technique de fmmation? Justifiez votre reponse.
o Quels pourraient etre u.n organisationnel et un ob]ectlf d ap ~bie,ctif
prentiss age d'un cours portant sur les communications interperson nelles destine it des infirmieres en chef d'hopitaux?
quences possibles de l'essor techno logique pour Ie developpement des competences. •
QueUes analyses sont requises pour assurer la pertinence de la I formation?
o Expliquez les divers buts que jlpour sult la formation.
I I
I
i I
I
I I
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QueUes sont les conditions qUi favo risent Ie transfert des apprentissages ?
o Quels liens unissent la notion de transfert des apprentissages a Facti vite d'evaluation de la formation?
Chapitre 6
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I Developper les competences
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I
Developper les competences
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Partie II
I
Les de'fis de la competence
On compte sur vous2 ! Bomodule, une grande entreprise quebecoise du secteur manufacturier, con~oit, produit et vend sur Ie marche international des modules en plastique de diverses formes servant a I'amenage ment des lieux publics. Elle emploie pres de 650 personnes reparties dans quatre grandes fonctions: la produc tion, les ventes, la recherche et deve loppement et I'administration, cette derniere fonction comprenant a son tour les services des finances, de la comptabilite, des ressources humaines et des technologies de l'information et de la communication. Tous les em ployes de la production et une partie des employes de l'administration sont syndiques. Bomodule est situee en region et fait face a une penurie de main-d'reuvre qualifiee. Depuis quelque temps, Ie president de l'entreprise, M. Nadeau, se ques tionne sur Ie capital de competences que possecte l' organisation. Devrait-il rehausser Ie niveau de qualification des postes afin de maintenir a jour les com petences des employes de Bomodule? Preconisant la theorie des petits pas, M. Nadeau suggere de cibler un service en particulier pour commencer. Vne analyse effectuee par Ie service des res sources humaines conjointement avec la direction des quatre grandes fonc tions recommande Ie service de la comptabilite pour les raisons suivantes. • I:implantation prochaine d'un sys teme de gestion integre dans l'en treprise entrainera une reorganisation
importante des taches comptables ainsi qu'un accroissement des res ponsabilites pour certains employes. • Des experiences passees ont demon tre que Ie personnel de ce service est ouvert au changement. • Le syndicat qui represente ces em ployes est plus flexible que celui qui represente les employes de la production. Outre la direction, Ie service de la comptabilite compte six employes, occupant tous un poste de com mis comptable. Parmi ces employes, cinq detiennent un dipl6me d'etudes secon daires (DES) ou I'equivalent, et un detient un dipI6me d'etudes coUegiales (DEC) en comptabilite. La moyenne d'age des employes est de 40 ans et leur anciennete, de 20 ans. Cependant, ces chiffres sont trompeurs si Fon se fie aux details suivants: la doyenne Marie Ange, qui prendra bient6t sa retraite, a 5S ans et 29 ans d'anciennete; Pierre a 47 ans et 27 ans d'anciennete; Jules a 43 ans et 2S ans d'anciennete; Helene a 37 ans et 18 ans d'anciennete; Marie a 3S ans et 16 ans d'anciennete; enfin, Marc-Andre, Ie detenteur du DEC en comptabilite, vient d'avoir 23 ans et travaille chez Bomodule depuis 3 ans. L'analyse suggere de rehausser Ie niveau de qualification requise pour Ie poste de commis-comptable. Ainsi, toute nouvelle embauche ou promo tion pour ce poste exigera un DEC en comptabilite ou I'equivalent. Cette
2. Ce cas a eH~ redige par Lucie Morin, professeure it l'Ecole des sciences de la gestion de ]'Universite du Quebec it Montreal.
Chapitre 6
recommandation fait bondir Ie syndicat representant les employes du service de la comptabilite. A-t-on pense aux em ployes occupant Ie poste de commis comptable et detenant un DES? QueUe sera leur motivation sachant que, s'ils
ne s'occupent pas de rehausser leurs competences, ils n'auront pas acces a des promotions? Ces employes ont tou jours demontre un bon rendement et coHabore activement aux projets d'ame lioration proposes par la direction. Bomodule ne peut pas les laisser tom ber. C'est la responsabilite de l'entre prise de maintenir a jour Ie capital de comp€:tences de ses employes.
I Developper les competences
• Voir a ce que Ie programme de for mation comporte un mecanisme de reconnaissance des acquis afin d'evi ter que les employes ne suivent des cours port ant sur des contenus qu'ils possedent deja. • S'assurer que Ie programme de for mation, en plus de mener a un diplome reconnu, sera ada pte aux besoins specifiques de Bomodule.
Le syndicat fait donc aM. Nadeau les recommandations suivantes.
o auQueisprojetacteurs devraient participer de formation propose par
• Offrir, sur une base volontaire, un programme de formation aux em ployes du service de la comptabilite afin que ceux-ci mettent a niveau leurs comp€:tences en comptabilite tout en restant au service de Bomodule. • S'assurer, par souci d'equite, que ce programme sera flexible afin d'ac commoder les employes ayant une famWe. Pierre agit com me aidant naturel au pres de ses parents et Jules et Helene ont de jeunes enfants.
Ie syndicat? Quels devraient etre leurs roles respectifs? • Comment devrait-on effectuer l'analyse des besoins en formation pour guider Ie mieux possible Ie developpement du programme de formation des employes de la comptabilite?
e Quels peuvent etre les effets positifs et negatifs d'une augmentation du niveau de qualification? Ces effets seraient-ils les memes si les employes vises n'etaient pas syndiques?
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Partie II
I
Les defis de la competence
Vite et bien 3 Vendredi 10 janvier 2003, 11 h 23. « Vile et bien, vite et bien ... 11 va vrai ment falloir etre creatifs et travailler en equipe si on veut y arriver)}, dit Jean a Marie-Josee. Tous deux travaillent pour ABCTech, une entreprise quebecoise du secteur informatique. ABCTech a un chiffre d'affaires de 7S millions de dol lars par annee et emploie 180 per sonnes. Jean occupe la position de directeur des ressources humaines depuis deux ans alors que Marie-Josee a ete embauchee a titre de conseillere en ressources humaines il y a six mois, apres avoir obtenu un baccalaureat dans ce domaine. La journee avait tres bien commen ce. Lors de la reunion de gestion hebdo madaire du vendredi matin, la vice presidente aux ventes a annonce la signature d'un important contrat avec Internet++, une entreprise americaine de l'industrie des tel€~communications en voie de s'implanter au Canada. Comme principal produit, Internet++ offre a sa clientele un service d'acces a Internet. Cette entreprise demande a ABCTech de prendre en charge pour une periode de trois ans les activites de son centre d'appels couvrant Ie centre et rest du Canada. En bref, ABCTech doit, en tant que sous-traitant, fournir des techniciens en informatique dont la prindpale tache est de repondre aux appels des usagers d'Internet, les clients canadiens d'Internet++, ayant divers problemes lies a l'installation et a l'utilisation d'Internet. Le creur etait a la fete! Ce gros contrat apporterait 3. Ce cas a ete redige par Lucie Morin, professeure Quebec a Montreal.
d'importants revenus recurrents a ABCTech et, fait a ne pas negliger, con tribuerait grandement pour plusieurs au boni de rendement de fin d'annee. Cette bonne nouvelle s'est toutefois transformee en cauchemar pour Jean lorsqu'il a pose des questions pour mieux comprendre l'aspect «ressources humaines» de ce contrat. La vice presidente a alors precise que, pour sa tisfaire ce client important, il faudra faire vile et bien en embauchant et en formant 4S techniciens en informatique dans un delai de... 2 mois! Voyant Jean sous Ie choc, elle a ajoute que Ie client est bien organise et qu'il sait ce qu'il veut. La vice-presidente a alors foumi a Jean les details suivants. • Comme Internet++ a deja des centres d'appels aux Etats-Unis, eIle peut fournir une description detaillee et a jour du poste de techniden en infor matique. Au besoin, cette descrip tion en anglais peut etre traduite. • Intemet++ possede un cours de for mation pour ce poste (en anglais ega lement). Pour les employes du client, ce cours est donne ade petits groupes de 10 employes sur une periode de 4 semaines. Cependant, ce cours a ete elabore il y a quelques annees et l'eva luation a revele quelques reactions negatives: Ie cours est trop theorique et son contenu est mal structure. • Internet++ est prete a faire du trans fert de connaissances et a former un employe d' ABCTech pour que celui d devienne a son tour formateur.
a I'Ecole des sciences de la gestion de I'Universite du
Chapitre 6
• En plus des competences techniques, Internet++ demande que les techni dens affectes a son contrat posse dent des competences relationnelles liees au depannage teIephonique. Les technidens devront etre respec tueux, l'ecoute et capables de communiquer clairement afin de resoudre les problemes des clients Ie plus rapidement possible. • Les techniciens doivent €lre bilingues.
a
De retour a son bureau, Jean a demand{: a Marie-Josee de se joindre a lui dans une intense session de remue meninges. Entre 9 h 30 et 11 h, ils ont fait Ie tour des possibilites au sujet de Ia dotation des 45 techniciens et pris les decisions suivantes. • Us exigeront une attestation d'etudes coUegiales en informatique plus un an d'experience dans Ie service a la clientele. • Ils diffuseront leurs offres d'emplois a plusieurs endroits: sur des sites Internet d'emplois, dans la section « Emploi» des journaux locaux, au bureau d'emploi des ecoles specia lisees en informatique et sur Ie site Internet de l'entreprise. • Pour faciliter la manipulation des curriculum vita', on demandera aux personnes interessees d'envoyer leur C. V. par Internet. Jean et Marie-Josee ont egalement discute d'un autre point-cle du contrat. Internet++ demande en effet que les techniciens ceuvrent sur deux quarts de
I
Developper les competences
travail, soit de 7 h 30 a 15 h 30 et de 15 h 30 a 23 h 30, et ce, 7 jours sur 7. Ils en sont vite arrives a la conclusion que cette eXigence requiert un certain ajus tement en ce qUi concerne la gestion du personnel car tous les employes actuels d'ABCTech travaillent uniquement de jour, du lundi au vendredL Cependant, faute de temps, Us ont decide de se concentrer sur Ie plus urgent. Ainsi, a 11 h 23, un peu essouffles, Jean et Marie-Josee en sont a parler de la strategie de formation. Ils ont plusieurs interrogations en tete.
o sage QueUe methodologie d'apprentis devraU-on mettre en place pour s'assurer que la formation portant sur les competences techniques et relationnelles sera efficace et que les techniciens seront pr€ls a temps?
e QueUes mesures devrait-on choisir pour evaluer si les techniciens utili sent bien dans l'execution de leur travail ce qu'i}s ont appris durant leur formation?
e QueUes actions devraient etre adop
tees par ABCTech pour maintenir it jour les compHences des techni ciens en informatique pendant toute la duree du contrat?
o autres En relation avec la dotation, queUes actions devraU-on adopter
pour alleger Ie plus possible les efforts de formation?
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Apres l'etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait Hre plus apte
a:
• Detinir Ie concept de gestion des carrieres. • Donner Ies principales raisons de l'importance de la gestion des carrieres pour l'individu et l'organisation. • Decrire les principaux facteurs qui influencent la carriere et la gestion des carrieres. • Connaitre les cycles professionnel, personnel et familial et leurs principales etapes (ou stades d'evolution), et preciser leurs repercussions sur la gestion des carrieres. • Connaltre les principales pratiques de gestion des carrieres. • Connaltre les strategies organisationnelles de gestion des carrieres.
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Partie"
I Les defis de la competence
Les entreprises se preparent aaffronter la grande vague: la gestion de la releve est au CCl!ur des preoccupations' Hydro-Quebec a deja commence a mobi liser ses experts. Recruteurs, conseillers en ressources humaines, cadres, responsables de dotation, tous se preparent a affronter: la grande vague. Des 2003, la societe d'Etat verra son effectif diminuer de 40 % par annee. Les baby-boomers d'Hydro commen cent aastiquer leurs batons de golf .. «On n'a pas embauche pendant des annees; la, on se prepare a affronter la grande vague de departs a la retraite», dit Henriette Nobert, chef du centre de recrute ment et d'evaluation a la vice-presidence d'Hydro-Quebec. La courbe d'age des employes de la societe d'Etat s'apparente a celie de la population quebecoise. Une ma;orite de tra vailleurs (67%) sont aujourd'hui ages de 40 a 54 ans. Et des qu'ils ont atteint l'age de 55 ansI les employes d'Hydro qui cumu lent 30 ans de service peuvent prendre leur retraite. Les departs vont commencer en 2003, avec une purge importante a partir de 2006, jusqu'en 2012. Ingenieurs, commis, techni ciens, toutes les categories d'emplois seront touchees a tous les niveaux hierarchiques. Certains secteurs sont plus vulnerables que d'autres, comme celui du genie eIectrique. Plus de 500 ingenieurs en electrotechnique quitteront Hydro-Quebec au cours des 12 prochaines annees. «Si on n'a plus d'inge nieurs chez Hydro, c'est simple, on n'est plus en affaires! » dit M'le Nobert.
f. ..J
Les patrons de demain
Plusieurs entreprises, surtout les tres grandes comme Bombardier, auront ce meme defi a relever, constate Fernande Poulin, vice-presidente au Groupe Conseil Aon. Dans cinq ansI un paquet de gestion naires vont partir et les plus ;eunes ne seront pas necessairement prets ales rem placer. Certaines entreprises vont chercher des candidats a l'externe et les developpent en accelere. D'autres pre{erent s'assurer d'avoir a I'interne les ressources dont elles auront besoin. «Alors qu'auparavant les entreprises avaient tendance a developper seulement les candidats a haut potentiel, elles se de mandent maintenant sf elles ne devraient pas aider tout Ie monde a se developper et ainsi avoir acces a un bassin plus large quand viendra Ie temps de trouver des remplarants. L'identification des candidats potentiels exige maintenant plus de doigte qu'aupara vant, constate aussi M'le Poulin. «Avant on identifiait les candidats pour des postes de gestion sans trop leur demander queUes etaient leurs aspirations; main tenant avec les 35 ansI la generation X, il faut discuter ouvertement de ce qu'Us veulent dans la vie. S'Us ne sentent pas qu'Us sont partie pre nante de la decision, vous risquez de les perdre)}, dit Alme Poulin. Pour savoir qui seront les patrons de demain, les entreprises peuvent aussi se
L K. Noel, "Les entreprises se preparent a affronter la grande vague: la gestion de la rei eve est au creur des preoccupations », Les Affaires, 13 octobre 2001, p. 29.
Chapitre 7 1 Gerer les carrieres
servir de tests psychometriques, d'entrevues avec Ies personnes identifiees; elies peuvent aussi mesurer l'impact que ces gens ont deja aupres de leurs coUegues ou de leurs employes par des evaluations dites de 360 degres (interviews avec les clients, les super viseurs, Ies collegues, les foumisseurs). «II faut verifier comment ces gens sont perfus. Est-ce qu'ils sont capables de mobi liser les autres? Sont-ils capables de prendre des decisions a temps? De faire comprendre a l'equipe ou l'entreprise s'en va? On regarde ensuite l'ecart entre Ies besoins de l'entreprise et Ies competences du candidat et comment on doit les developper », pour suit Ia conseillere. L'une des fafons les plus efficaces de Ies developper est sans contredit Ie coaching par les plus experimentes. II peut se faire avant Ie depart, comme chez Hydro Quebec, ou encore apres fa retraite, sous forme de contrats. Et if semble bien que les retraites sont de plus en plus nombreux a jouer ce rOle, selon Michel Lizotte, associe chez Raymond Chabot Grant Thornton. «Ce que les entreprises aiment, c'est quand les conditions exigees sont raison nables et que fa pennet beaucoup de flexi bilite. D'autre part, Ies gens qui avaient decide de prendre leur retraite a 55 ans ne se voient pas jouer au golf pendant les 30 prochaines annees!» Iance-t-il. Le rappel de retraites peut donc aussi constimer une solution a la vague de departs des baby-boomers, qui laissera der riere eUe des jeunes dynamiques, mais qui manquent de vision globale. «Les jeunes
vont avoir la capacite de suivre, mais Us manquent d'experience et de maturite. Ils font face a des problemes qu'ils n'ont jamais vecus », dit M. Lizotte. Un banquier qui rappelle sa marge, un client qui ne veut pas payer: Ie vieux routier se souviendra comment composer avec ces aleas du monde des affaires... Chez Hydro, on ne prevoit pas pour I'instant rappeler d'anciens cadres ou tra vailleurs. On pre(ere se concentrer sur la releve parce que, de toute fafon, il faudra bien s'en occuper un jour, souligne Mine Nobert. « On ne travaillera pas jusqu'a 100 ans.» «Cette grande vague de departs est un grand defi a relever, on pourrait Ie voir comme une menace, rnais fa devient aussi une occasion d'affaires pour alter chercher Ies meilleures ressources. »
o La difficulte liee au phenomene de la releve dans les organisations est elle exageree?
8 Quel
sera Ie prix a payer dans quelques annees si l'entreprise ne s'attaque pas tout de suite a la pla nification de la releve?
8 Quels sont les types d'emplois et les secteurs d'activite qUi sont les plus touches par ce phenomene? . , Comment Ie depart pour la retraite sera-t-il modifie au cours des pro chaines annees ?
La «fin» du travail, la mise au rancart de la securite d'emploi, la precarite du lien d'emploi et l'abandon des rapports de travail fondes sur la loyaute organi sationnelle sont les raisons souvent invoquees pour discrediter Ie principe de la gestion des carrieres dans les organisations. On affirme meme qu'il est
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Partie II
I
Les defis de la competence
devenu presque impossible de faire carriere. Par contre, on observe egalement un interet marque de la part de nombreux dirigeants et de specialistes pour Ie phenomene de la gestion des carrieres. Un tel interet peut sans doute s'expli quer par la mise en place d'une gestion plus strategique des res sources humaines dans un contexte ou de nombreuses organisations font face a des penuries de main-d'ceuvre et eprouvent de plus en plus de difficulte a recruter et a retenir des employes possectant des competences-cl(~s pour l'organisation. Cet engouement pour la carriere et les systemes de gestion des carrieres a aussi son origine dans l'ecole de la gestion des connaissances (Davenport et Prusak, 2003; Wenger, 1998), dans l'ecole de l'apprentissage organisationnel ainsi que dans l'ecole de l'organisation qualifiante (Cad in et Amadieu, 1997; Koenig et autres, 1994; Le Boterf, 1997 i Parlier, 1996). Cette demiere ecole postule que l'acquisition de compHences collectives dans l'organisation, ele ment fondamental pour reussir dans la nouvelle economie, repose sur des formes nouvelles de developpement personnel associees davantage au chemi nement professionnel et a l'organisation du travail qu'a la formation tradi tionnelle et formelle. L'organisation qualifiante (voir Ie tableau 7.1) s'appuie donc en grande partie sur la gestion des carrieres, ce qui relegue au rang de mythe Ie discours seion Iequelle concept de carriere appartient au passe, car la precarite de l'emploi, la flexibilite du travail et Ie travail autonome rendent impossible la planification de carriere au sein d'une organisation. Cependant, il est important de souligner que la gestion des carrieres comme on Fa pra tiquee au cours des 2S demieres annees est obsolete et que la pratique actuelle dans ce domaine se fonde sur une nouvelle logique, celle de la prise en charge par la personne elle-meme du developpement de l'employabilite et des nou velles filieres d'emplois et de mobilite.
lES DIMENSIONS DE l'ORGANISATION QUAUFIANTE
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Source: L. Cadin et J.-F. Amadieu, « Les organisations qualifiantes: ideologies manageriales et pra tiques d'entreprise ", Gestion, vol. 22, nO 3, 1997, p. 38,
Chapitre 7
I Gerer les carrieres
Dans ce chapitre, nous abordons le concept de gestion des carrieres, !es raisons pour 1esqueUes eUe constitue un aspect important de la GRH, les prIn cipaux facteurs influen~ant 1a carriere et la gestion des carrieres, les pratlques de gestion des carrieres de meme que les strategies organisationnelles de gestion des carrieres.
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Ou'est-ce que la gestion des carrieres?
. -:.- ..................................... . La carriere peut etre definie comme ,d'ensemble du cheminement profes sionnel et extra-professionnel de l'individu qui va s'etendre durant la totalite de sa vie dite active» (Amherdt, 1999, p. 77). La notion de carriere dans les organisations peut etre abordee a l'aide de deux demarches, soit la gestion des carrieres et la planification de 1a carriere. La gestion des carrieres (London et Stumpf, 1982; Walker, 1985) consiste en un ensemble d'activites visant a planifier, a organiser, a mettre en ceuvre et a contraler les mouvements de main-d'ceuvre depuis l'entree des personnes dans l'organisation jusqu'a leur depart, ce qui inclut la mobilite interne et divers programmes de soutien sous-jacents a celle-ci. Cette approche de la gestion des carrieres est globaJe en ce sens qu'elle comprend l'aide a la plani fication de la carriere, la planification de la releve, la dotation interne, Ie recrutement et la gestion des departs. En outre, elle etablit des interfaces avec les systemes de planification des ressources humaines, de formation et d'aide aux employes. Quant a la planification de la carriere, plusieurs auteurs l'associent a la di mension individuelle, contrairement a la gestion des carrieres qui est associee a la dimension organisationnelle. Ainsi, la planification de la carriere est un processus delibere permettant a l'individu de devenir conscient des possibili tes, des contraintes, des choix professionneJs et de leurs consequences. Ce processus permet de determiner des objectifs de carriere, des actions de deve loppement professionnel incluant des etapes de realisation et des echeanciers. Il va de soi que des facteurs comme les vagues successives de rationalisation, les nouvelles configurations organisationnelles et la montee du travail aty pique ont amene de nombreux employes a se rendre compte de l'importance de la dimension individuelle liee a la planification de la carriere et au cteve 10ppement de l'employabilite. Comme l'affirme Saba (2000), pretendre gerer des carrieres dans un tel contexte semble tout a fait invraisemblable. En vue d'etabIir Ie lien entre les approches individuelle et organisation neIle du concept de carriere, Amherdt (1999) fait appel a la notion de deve 10ppement de carriere, qu'il detinit comme Ie resultat de l'integration de la pJanification de carriere individuelle au processus de gestion de carriere institutionnelle. Comme )'illustre la figure 7.1, Ie systeme de gestion des carrieres est cru cial dans Ie modele renouvele de GRH, en ce sens qu'il est au centre des activi t€~s de developpement des competences, qu'il est en interface avec les autres
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Partie II
I
Les defis de fa competence
LE SYSTEME DE GESTION DES CARRIERES
systemes de GRH et qu'il est conditionne par les besoins organisationnels rattaches aux plans strategiques globaux de I'organisation. Ainsi, pour pro ceder a la planification et a la gestion des carrieres, les specialistes, les ges tionnaires et les employes auront recours a l'information generee par la planification des ressources humaines (Ie bilan de l'offre et de la demande de travail et l'analyse des desequilibres), l'analyse des postes (les exigences et Ie profil) et l'evaluation des employes (Ie rendement et Ie potentiel). La formu lation des plans de carrieres devrait ensuite favoriser Ie meilleur appariement possible entre les besoins des individus et les besoins de l'organisation (Beer et Spector, 1985). Par la suite, afin d'assurer la mise en a:uvre des plans de carrieres, des mesures de soutien devront etre appliquees, comme des modes d'organisation du travail, de mobilite de la main-d'a:uvre, de remuneration et de formation continue qui s'harmonisent avec Ie developpement des competences.
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L'importance de la gestion des carrieres sur un marche du travail en transformation Malgre Ie discours sur la precarite de l'emploi et sur l'instabilite des organisa tions qui semble remettre en question l'importance de la gestion des carrieres, il reste que la part des emplois de longue duree dans l'ensemble des emplois est relativement stable et que de nombreux employes vivent une dynamique de carriere dans une organisation ou encore dans un reseau d'organisations. Ainsi, les chances de garder un emploi sur une longue peri ode sont supe rieures a ce qu'elles etaient i1 y a environ 20 ans. II faut cependant noter que les emplois de moyenne duree ont ete remplaces par des emplois de courte duree, donc, par definition, plus precaires.
Chapitre 7
I
Gerer les carrieres
La gestion des carrieres demeure une activite pertinente, mais elle change de forme et de nature. Longtemps centree sur la progression verticale, elle est aujourd'hui beaucoup plus eclatee, horizontale et multiforme. On assiste egalement ala montee du phenomene de la carriere nomade, c'est-a-dire a des cheminements de carrieres qui dependent en majeure partie d'une volonte individuelle associee a un contexte de rarete de main-d'ceuvre. On a meme qualifie de mercenaires les employes qui sont caracterises par ces carrieres nomades (Guerrero, 2001). Le tableau 7.2 fait une comparaison entre les carrieres traditionnelles et les carrieres nomades. Dans cette situation, pourquoi la gestion des carrieres est-elle cruciale pour les organisations? D'abord, les employes (les salaries et les gestionnaires) sont de plus en plus scolarises et Us s'attendent a un travail epanouissant et a des possibilites de croissance personnelle. L'interet pour leur carriere et la planifi cation de celle-ci deviennent donc des sources de motivation importantes pour eux. Ensuite, dans un contexte ou les caracteristiques sociodemogra phiques de la main-d'ceuvre se transforment (l'arrivee des jeunes, Ia femini sation et la diversite ethnique), ou la reconnaissance des differences de meme que Ie besoin d'equite et de justice excluent toute forme de discrimination dans les decisions de gestion, Ia gestion des carrieres apporte une certaine transparence aux processus decisionnels et permet aux organisations d'assu mer leur responsabilite sociale. Le temps est un ennemi sournois du « capital de competences» de l'orga nisation (Bouteiller, 1997). En effet, Ies competences ont une duree de vie de
COMPARAISON ENTRE lES CARRIERES TRADITION NEllES ET lES CARRIERES NOMADES
Source; S. Guerrero, «QueUe strategie de carriere, pour quel salaire?", Gestion, vol. 26, nO 3, 2001,
p.13.
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Partie II
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Les defis de la competence
plus en plus rectuite; il en resulte un actif fragile et friable pour l'organisation. Comme l'iIlustre la figure 7.2, certaines compHences sont caracterisees par une erosion rapide et d'autres, par une erosion plus lente. La gestion des car rieres permet donc d'eviter en partie la desuetude des competences et de stimuler la quete du renouvellement de ces dernieres.
a
a
L'equilibre travail-famille est un autre argument l'appui des efforts faire en relation avec la gestion des carrieres. En effet, la realite des couples a deux carrieres, Ie desir de fonder une famille et Ia recherche de l'equilibre dans la vie sont des facteurs qui favorisent une prise en charge volontaire des aspira tions professionnelles et des cheminements de carrieres. Le travail en lui-meme est formation et developpement. De nombreuses recherches ont prouve que Ies affectations comportant des defis, Ie contact avec des individus marquants (comme des mentors) et les difficultes eprou vees au travail (les epreuves personnelles) constituent des activites de deve loppement nettement plus importantes que les cours de formation et la formation traditionnelle (Davies et Easterby-Smith, 1984; Gosselin, 1992; Lindsey, Homes et McCall, 1987). Comme Ie souligne McCall (1988) a propos du peu d'activites de developpement formel suivies par les decideurs des organisations, la qualite de l'experience dans l'emploi et l'apprentissage qu'on en retire deviennent Ie principal aspect du developpement, aspect represente par la gestion de la carriere. Ainsi, la repartition du travail, les affectations per manentes ou temporaires, Ie jumelage avec des personnes competentes et expertes (Ie mentorat) de meme que les communications internes de toutes sortes (les rencontres de temoignages, la consolidation d'equipes, etc.) sont des activites-cles davantage associees a la gestion des carrieres. Il est clair que la gestion des carrieres constitue une activite-cle moins couteuse que d'autres, qui permet de develop per Ie potentiel ou l'actif humain d'une organisation. L'organisation est tributaire de la disponibilite de personnes competentes ala fois a l'interieur et a l'exterieur de son propre marche du travail. Le con texte actuel de penurie de main-d'o=uvre dans beaucoup de secteurs d'activite
LA DUREE DE VIE DES COMPETENCES
Chapitre 7
I
Gerer les carrieres
et de metiers fait emerger des problemes criants d'attraction et de conserva tion des meilleurs elements. La planification de la releve comme pratique-de pour contrer ces problemes est une dedinaison de la gestion de carrieres (Saba, 2003). Elle represente une des nombreuses pratiques permettant de mieux harmoniser les besoins organisationnels avec les besoins individuels. La gestion des carrieres constitue alors l'assise du developpement des compe tences strategiques grace it laquelle les organisations peuvent atteindre leurs objectifs d'innovation, de qualite, de rendement et de rentabilite (Mann et Standemmier, 1991). Finalement, dans Ie contexte de la mondialisation, de plus en plus de car rieres se deroulent et s'epanouissent sur la scene internationale. Ces tra jectoires professionnelles comportent de nouvelles exigences pour les organi sations, comme Ie choix minutieux des personnes en fonction de la compatibilite culturelle, Ia preparation de ces personnes, leur mobilite et la gestion du retour (Berthelot, 2000).
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Les caracteristiques influencant la carriere et la gestion des carrieres ' Afin de mieux comprendre Ia dynamique de la gestion des carrieres, nous exposerons Ies principaies caracteristiques qUi expliquent les cheminements de carrieres et Ia prise de decisions individuelles ou organisationnelles a cet egard. Les travaux menes sur cette pratique organisationnelle permettent de regrouper ces caracteristiques selon trois categories (voir la figure 7.3), a savoir les caracteristiques individuelles, les caracteristiques de l'organisation et Ies caracteristiques de l'environnement (Driver, 1985; Foucher et Hogue, 1992;
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Partie II
I Les defis de la competence LES CARACTERISTIQUES INFLUEN~NT LA CARRIERE ET LA GESTION DES CARRIERES
Gosselin, 1992; Luthans, Hodgetts et Rosenkrantz, 1988; Wils, Laberge et Labelle, 1997).
7.3.1 les caracteristiques de l'environnement Comme nous l'avons vu dans Ie chapitre 2, Ia turbulence de l'environnement peut devenir l'occasion de faire la demonstration de l'importance strategique de la gestion des ressources humaines.
Le contexte Dans un contexte d'incertitude, d'instabilite et de turbulences, la gestion des carrieres, contrairement a ce que Fan pourrait penser, devient une activite de GRH cruciale (Wils, Laberge et Labelle, 1997). Les competences-cles qui per mettent de piloter dans la tempHe sont des atouts pour l'organisation, et la fa~on de gerer les carrieres peut devenir un enjeu de premier plan. Ainsi, les gran des entreprises qui exercent leurs activites dans un contexte de turbu" lences au dans un environnement hostile semblent accorder plus d'impor tance a la gestion des carrieres, du mains pour des groupes d'employes-cles et pour les hauts potentiels.
Chapltre 7
I Gerer les carrieres
Selon que les competences recherchees par les organisations sont rares ou abondantes sur Ie marche du travail, les efforts deployes dans la gestion des carrieres subiront d'enormes variations. Dans Ie contexte d'une penurie d'em ployes competents, les entreprises n'ont d'autre choix que d'investir dans leurs ressources humaines et, par Ie fait meme, dans la conception de plans de carrieres qui permettront aux personnes de combler leurs besoins en deve
loppement professionnel. Comme Ie soulignent Cadin, Guerin et Pigeyre (1997), l'economie du tra vail, au moyen de la theorie du marche interne, nous eclaire sur la place de la carriere dans les systemes de GRH. Doeringer et Piore (1971), les instigateurs de cette theorie, definissent Ie marche interne comme une unite administra tive a l'interieur de laquelle l'organisation du travail, les affectations et la re muneration sont determinees par un ensemble de mecanismes de regulation (regles et procedures). L'emergence d'un tel marche s'explique principalement par l'existence de competences propres a l'entreprise, l'apprentissage sur Ie tas et les rapports sociaux d'equipes de travail. Ainsi, Ie lien specifique entre Ia technologie et l'organisation du travail dans une entreprise produit des com petences requises qu'on ne peut pas toujours trouver sur Ie marche externe du travail. L'entreprise se voit souvent contrainte de developper ces competences par l'apprentissage sur Ie tas qui entraj'ne la transmission des savoirs et des competences parmi les membres d'une equipe de travail. Afin de se premunir contre Ie marche externe (dans Ie but de rentabiliser ses investissements en matiere de formation), l'entreprise elabore un ensemble de regles visant a fide liser ses employes (loyaute) en leur offrant des salaires avantageux, des possi bilites de mobilite interne, des plans de developpement, etc. Cette stabilite des personnes au sein du collectif de travail favorise de nombreux rapports sociaux qui, a leur tour, engendrent des regles, souvent informelles, qui vien nent encadrer la GRH dans un milieu. Ce marche interne peut egalement etre double, en ce sens qu'il y en aura un pour Ie noyau dur des salaries consti tuant les competences collectives-ell's de l'organisation et un autre pour des groupes plus « satellises », pour reprendre Ie terme de Cadin, Guerin et Pigeyre (1997), ces groupes etant utilises selon les besoins ponctuels de l'employeur. Bref, la dynamique meme des marches du travail qUi gravitent a l'interieur et a l'exterieur de l'organisation conditionne la gestion des carrieres.
7.3.2 Les caracteristiques de l'organisation L' organisation, avec son marche interne du travail, est la cible de la gestion
des carrieres. Suivant les definitions qui ont ete donnees precedemment, les caracteristiques de l'organisation conditionnent l'importance que Ie deve loppement de carriere prendra pour des categories de personnel.
La taille et le secteur Les grandes entreprises ont un marche interne beaucoup plus complexe et developpe que les petites et moyennes entreprises. II va sans dire que la gestion des carrieres est plus presente et surtout plus systematique dans les
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Les defis de fa competence
entreprises dont la taille est importante. La gestion des affaires de l'Etat repo sant davantage sur la bureaucratie, il y a plus de possibilites de trouver dans ce secteur des systemes de gestion des carrieres plus formels. Cependant, on observe (Wils, Laberge et Labelle, 1997) que Ie secteur public est caracterise par des modes bureaucratiques et mecaniques de gestion des carrieres, compa rativement au secteur prive qUi a mis au point des modes plus sophistiques et plus organiques eu egard it la recherche d'un avantage concurrentiel au moyen de competences strategiques.
Les pratiques de GRH Certaines pratiques, comme celles qUi sont liees it la planification, it la gestion de projet, it l'organisation du travail, it la dotation, au developpement, it la remuneration et it l'evaluation, conditionnent les decisions concernant la ges tion des carrieres. Une organisation qualifiante, des plans adaptes aux situa tions, la presence de mentors, des activites de formation continue, la rigueur et la periodicite de !'evaluation de me me que l'instauration de pratiques de remuneration basee sur les competences sont quelques exemples demontrant que la GRH est structurante par rapport it la gestion des carrieres et, conse quemment, par rapport it la carriere de chaque employe. Ainsi, non seulement les pratiques de GRH soutiennent les objectifs lies a la gestion des carrieres, mais en plus, elles influencent directement ces objectifs, et donc les resultats.
La philosophie de gestion II ne fait aucun doute que la philosophie de gestion pronee par les dirigeants aura une incidence majeure sur la fa~on de gerer les cheminements de car rieres dans une organisation. Des dirigeants plus sensibles a l'importance et au respect des personnes exercent un leadership determinant quant a la mise en place de processus de developpement de carriere.
7.3.3 Les caracteristiques individuelles La carriere est d'abord et avant tout influencee par un certain nombre de varia bles d'ordre personnel. Le passe d'un individu, ses aspirations et ses qualites personnelles de meme que les relations qu'il entretient ont une incidence si gnificative sur Ie cheminement de sa carriere et sur les decisions qu'il prend a cet effet. Les elements suivants explorent l'aspect individuel des determinants de la carriere.
Les besoins et les aspirations 11 a He demontre que chaque personne est poussee par des motivations ou des forces motrices qUi lui sont propres et qui constituent ce que Schein (1990) appelle des ancres de carriere.
Une ancre de carriere est un choix qui influence de fa(:on decisive nos deci sions relatives aux types d'emplois choisis ou au poids a donner au travail et a la vie personnelle. Ces ancres sont determinees en partie par la perception
Chapitre 7
I
Gerer les carrieres
que nous avons de nos talents et de nos habiletes, de nos motivations et de nos besoins ainsi que de nos attitudes et de nos va leurs (Durivage et Barette, 1992, p. 12).
De toute evidence, l'etre humain recherche un environnement compatible avec ses talents, ses besoins et ses valeurs. Ainsi, un operateur de machine ou un artisan qui s'identifie entierement a son metier desirera evoluer dans un environnement de travail et un cheminement professionnel qui leur permet tront de se realiser, et ils eviteront des responsabiHtes de gestion, par exemple. Les ancres de carriere peuvent egalement changer avec Ie temps. Cepen dant, la rupture avec une ancre de carriere et Ie glissement vers une autre, qui sont peu frequents, demandent beaucoup d'efforts personnels ainsi qu'une remise en question. Dans une typologie popularisee dans les annees 1980 et bonifiee par la suite, Schein (1990) a precise huit ancres de carriere (voir Ie tableau 7.3). lES ANCRES DE CARRIERE
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Les defis de la competence
Source: Adapte d'E. Schein, Career Anchors: Discovering your Real Values, San Francisco, Jossey-Bass, 1990.
Le besoin de documenter les types de comportements des personnes au travail ou de cheminements de carrieres a fait l'objet de nombreuses recher ches. Outre les travaux de Driver (1980) sur les cheminements de carrieres, soulignons les travaux de Holland (1985). CeIui-ci etablit six types de person nalite, a savoir Ie realiste, l'investigateur, l'artiste, Ie sociable, l'entreprenant et Ie conventionnel. Selon Holland, Ie choix d'une profession, d'un metier ou d'un travail refiete la personnalite d'un individu et a done un rapport avec cette typologie. Bien qu'un peu simpliste, cette far,;on de voir les trajectoires profession nelles nous renseigne sur Ie fait que les gens s'inscrivent dans des profils de cheminement de carriere et que, par Ie fait meme, leur carriere repond sou vent a une logique previsible.
Chapitre 7
I
Gerer les carrieres
Les habiletes et les competences Ce qu'on appelle communement Ie talent d'une personne, c'est-a-dire ses habiletes innees ou acquises par une formation de pointe de meme que ses competences, est sans aucun doute une caracteristique d'ordre personnel qui determine dans une large mesure la carriere. Nous avons deja demontre que la personnalite (les ancres) avait une influence marquee sur ce point, mais les reels leviers de rendement reposant sur Ies habiletes et les compHences sont egalement de premiere importance quand vient Ie temps de prendre des deci sions au sujet de la gestion des carrieres. Ainsi, une personne qui possede des competences a erosion lente valorisees par les marches interne et externe du travail a plus de chances de se voir aspirer vers Ie haut (sur Ie plan profession nel et de la gestion) en ce qUi a trait a sa trajectoire de carriere. Par opposition, un individu qUi possecte des competences a erosion rapide et qui ne beneticie pas de moyens de developpement risque de voir stagner son cheminement de carriere.
Le reseau de relations L'appartenance a un reseau de relations «politiques» dans l'organisation s'avere un determinant-ell' dans la gestion des carrieres (Luthans, Hodgetts et Rosenkrantz, 1988). En effet, 1es alliances personnelles ou collectives et 1a con naissance d'acteurs-cles permettent a des individus d'evoluer dans Ie systeme nerveux de l'entreprise. Cette affirmation semble egalement se verifier dans Ie cas des teU~travailleurs. Ces derniers, qUi evoluent a partir de centres satellites, de leur residence ou de sites clients, se trouvent a l'ecart des reseaux informels a l'interieur desquels se tissent des communications qUi s'averent cruciales dans la gestion des carrieres (CEFRIO, 2001).
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Les defis de la competence
Les stades de la vie professionnelle, de la vie personnelle et de la vie familiale Plusieurs auteurs, dont Sekaran, affirment ce qUi suit:
Les organisations sont en position d'elaborer leurs structures de faron ace que les individus soient motives adonner Ie meilleur d'eux-memes amesure qu'ils traversent les differents stades de la carriere, de la vie familiale et de l'epa nouissement personnel, avec pour resultat l'obtention de niveaux eleves de performance individuelle et de productivite organisationnelle. Cela demande toutefois une bonne comprehension des liens existant entre les besoins pro fessionnels, familiaux et personnels des employes tout au long de leur vie (1992, p. 28). Ces propos temoignent du fait que l'organisation moderne qui veut se ctevelopper dans un monde en pleine effervescence doit tenir compte de la complexite des caracteristiques psychologiques, sociologiques et demogra phiques de sa main-d'ceuvre, et elaborer des systemes de gestion des carrieres pouvant cadrer avec les stades de la vie professionnelle, de Ia vie personnelle (biologiques et psychoIogiques) et de la vie familiale. les stades de la vie professionnelle Chaque individu progresse sur Ie plan professionnel en passant par un certain nombre de stades (Hall, 1976). On peut relever quatre stades, a savoir l'expIo ration, l'etablissement, la mi-carriere et Ie declin (voir la figure 7.4). Le stade de l'exploration constitue la transition entre l'ecole et Ie marche du travail; c'est a ce moment qu'une personne fait l'experience de differents choix professionnels et de differents types d'organisations. Le stade de l'eta blissement est caracterise par l'appropriation d'un poste de travail et par Ie desir de gravir les echelons dans la hierarchie organisationnelle ou profes sionnelle. Par Ia suite, Ie stade de Ia mi-carriere s'accompagne d'un certain
LES QUATRE STADES DE LA VIE PROFESSIONNELlE Rendement
Deciin Etablissement
Exploration
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35
45
55
65
Age
Chapitre 7 \ Gerer les carrieres
nombre d'options, soit l'option de saisir des possibilites verticales ou horizon tales de mobilite et de relancer sa carriere, soit l'option de maintenir sa situa tion et de continuer a se developper professionnellement, ou encore l'option de stagner, cette situation etant Ie fait d'organisations qui ne sont plus en croissance et d'individus qui ont atteint Ie maximum de leur potentiel. Ce stade de Ia vie professionnelle souleve la question du plafonnement de la car riere, que l'on peut definir comme etant l'absence de mobilite, tant verticale qu'horizontale (Lemire et Amherdt, 1998; Veiga, 1981). Qu'il soit objectif ou subjectif, Ie plafonnement de la carriere entraine des consequences impor tantes pour l'organisation, comme la desaffection envers I'organisation, Ie depart ou encore la diminution du rendement (Lemire et Saba, 1997). Entin, au stade du declin, la personne en cause n'investit plus dans son recyclage ni dans son developpement professionnel; cela constitue Ie retrait psycholo gique de la sphere professionnelle.
Les stades de la vie personnelle
l!adulte passe par un certain nombre de stades de developpement personnel (Levinson, 1986). Au debut de sa vie adulte, une personne cherche a etablir son identite et a batir sa confiance en elle-meme. Apres cette peri ode d'incertitude, elle essaie de s'epanouir sur Ie plan personnel et de jouir de la vie, du moins un certain temps. Commence alors une autre periode d'incertitude ou les couples ont a choisir entre une plus grande realisation dans la carriere et la fondation d'une famille, et ce, alors que l'horloge biologique marque Ie temps de fas:on impor tante. QueUe que soit la voie privilegiee, un jour ou l'autre l'epuisement men tal guette, et une remise en question s'impose. Les gens qui avaient choisi la famille dirigent leurs energies vers Ie marche du travail et les gens qui avaient choisi la carriere centrent leur vie sur la sphere non professionnelle. Enfin, lorsqu'ils approchent de la retraite, les gens ont tendance a s'adonner a des loisirs ou a des causes qui leur permettront de s'epanouir Ie moment venu. Selon Sekaran :
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I Les defis de la competence Le pattern cyclique ou l'individu tend vers un but, se range pendant une courte per-iode, pour ensuite rediriger son energie vers un nouvel objecti{; semble etre un modele d'epanouissement personnel s'appliquant ala plupart des individus, sans distinction de sexe (1992, p. 30).
Cependant, certains chercheurs ont souUgne Ie fait que les stades de l'epa nouissement personnel de la femme et de l'homme different grandement. Cela s'explique en partie par les predispositions relationnelles de la femme et par les penchants egocentriques de l'homme (Bardwick, 1986; Gilligan, 1980). Cela peut egalement s'expliquer par Ie fait que les responsabilites familiales pesent plus lourd sur les epaules des femmes.
les stades de la vie familiale Sekaran (1992) a precise cinq stades de la vie des couples a deux carrieres: Ie debut du mode de vie a deux carrieres, Ie jeune couple marie sans enfant, les jeunes parents, les parents milrs et Ie nid vide. II est facile de deviner en cons tatant cette evolution que les stades de la vie familiale conditionneront les besoins familiaux et qu'ils auront par Ie fait meme un effet direct sur les objec tifs professionnels. Une organisation peut obtenir des gains importants en ajustant ses pratiques et ses structures en fonction de ces stades, par exemple en instaurant des services de garde, des horaires flexibles et d'autres pratiques orientees vers l'equilibre travail-famille (Conseil consultatif du travail et de la main-d'reuvre, 2002). la superposition des types de stades Comme on peut s'en douter, les stades de la vie professionnelle, de la vie per sonnelle et de la vie familiale ne sont pas mutuellement exclusifs et ne se deroulent pas separement. Us se superposent plutot et, ce faisant, creent a
Chapitre 7
I
Gerer les carrieres
certains moments une tension plus forte qui entraine une remise en question des choix anterieurs, des changements importants dans la carriere et meme une detresse psychologique pouvant laisser des marques indeIebiles. La crise du milieu de la vie ainsi que Ie syndrome du succes professionnel et de l'echec personnel (Korman, 1992) ne sont que quelques exemples de syndromes lies a des crises majeures de la trajectoire professionnelle et personnelle. Les orga nisations qUi eIaborent des strategies visant a tenir compte de ces types de stades et de leurs interactions ont plus de chances d'obtenir Ie rendement maximal des employes aux diverses phases de leur vie tout en respectant leur equilibre personneL
. . .Les pratiques de gestion des caTTieres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . .............. .
Pour faire face au deft consistant a gerer les carrieres, les organisations dis posent d'une panoplie d'outils qui se combinent pour former des strategies de gestion des carrieres. Certaines de ces pratiques sont particulieres au systeme de gestion des carrieres tandis que d'autres peuvent poursuivre diverses fins.
7.4.1 Les types de pratiques de gestion des carrieres Guerin et Wils (1992) ont mis au point une typologie de manH~re a categoriser l'ensemble des pratiques de gestion des carrieres. Ce systeme repose sur deux variables, soit, premierement, les diverses phases du processus de gestion, a savoir la planification, la mise en reuvre et Ie contrale, et, deuxiemement, la responsabilite des acteurs-cles, a savoir l'individu et l'organisation. L'individu est l'artisan de la gestion de sa propre carriere tandis que l'organisation gere l'ensemble des carrieres individuelles dans une optique de cohesion et en fonc tion de la poursuite de ses objectifs. Selon Guerin et Wils, «il est normal que l'organisation prenne ses decisions quant au systeme de gestion des carrieres mais egalement qu'eHe aide et influence l'individu dans la prise des decisions personneUes favorables aux objectifs organisationnels» (1992, p. 51). II n'y a Iii aucune «manipulation machiavelique », pour reprendre les paroles de ces auteurs, mais un processus iteratif d'ajustement qui permet, dans une certaine mesure, d'optimiser les besoins individuels et les besoins organisationnels. Le tableau 7.4 donne un apen;u de ces deux classes, ce qUi cree du meme coup six types de pratiques de gestion des carrieres. Nous presenterons les principales pratiques de gestion des carrieres asso ciees a la planification des carrieres et a la mise en reuvre des plans de carrieres.
La planification des carrieres La planification des carrieres consiste essentiellement a elaborer des diagnos tics, a fixer des objectifs et a concevoir des moyens d'atteindre ces objectifs. Elle comporte une dimension individuelle et une dimension organisationnelle.
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Les defis de la competence
LA TYPOLOGIE DES PRATIQUES DE GESTION DES CARRIERES
Source: Adapte de G. Guerin et T. Wils, «La gestion des carrieres: une typologie des pratiques», Gestion, vol. 17, nO 3, 1992.
La dimension individuelle de la planification des carrieres: l'aide it la plani fication individuelle de la carriere Le processus de planification individuelle de la carriere est connu depuis de nombreuses annees et bien documente a la fois dans les milieux universitaires et dans les milieux organisationnels (Feldman, 1988; Guerin et Charrette, 1983). Ce processus est compose de trois etapes. La premiere Hape, l'auto evaluation, permet a chaque individu de mieux connaitre ses forces, ses fai blesses, ses centres d'interet profession nels, ses ancres de carriere et son type de cheminement de carriere anterieur. La deuxieme etape, l'etablissement des possibilites, permet de passer en revue les differentes possibilites qUi s'offrent a l'individu, tant a l'interieur qu'a l'exterieur de l'organisation. Quant a la troisieme Hape, Ie projet individuel, elle per met d'elaborer un plan de carriere propre a chaque personne sans que celle-ci soit attachee a la meme organisa tion. Pour reaUser ces Hapes, l'organisation peut mettre sur pied des ateliers sur la carriere (des sessions interactives de formation), un centre de documen tation (con tenant des brochures, des guides, des cahiers d'exercices, des outils d'autodiagnostic, des videos, des fiches, des logiciels, des livres, des diction naires de professions et metiers) et un counselling sur la carriere (des conseils, un soutien individuel, une retroaction). Mentionnons que Ie counselling sur la carriere peut etre place sous la res ponsabilite du superieur hierarchique, du conseiller professionnel (interne ou externe) sur les carrieres ou du mentor, ou encore des trois. Le mentor est un intervenant qui occupe une place cruciale en matiere de gestion des carrieres et de developpement des personnes. II est souvent situe a un niveau plus eleve que celui du superieur immectiat de l'employe en question et il joue un role privilegie d'accompagnement, de soutien et de conseil face au developpement professionnel. On parle egalement de la relation mentor-protege pour definir la dynamique de l'encadrement du mentor.
Chapitre 7 \ Gerer les carrieres
La dimension organisationnelle de la planification des carrieres: les plans de developpement de carriere
De nombreuses organisations planifient leurs besoins en effectifs et Ie deve loppement de leurs ressources humaines, et ce, encore plus dans ~n contexte de penurie apprehendee ou reelle de main-d'reuvre. Par consequent, ces organisations se preoccupent de l'harmonisation des carrieres individuelles (et des plans qui ont He explicites precectemment) avec leurs besoins a court et along terme. Ces organisations tentent d'etablir une convergence optimale de la dynamique individuelle et de la dynamique organisationnelle par une mise en commun de plans individualises de carrieres qui precisent Ie deve loppement attendu des employes vises par ces plans. Ce plan agrege de developpement de carriere peut se faire selon deux approches. L'approche participative repose sur un role actif de l'employe tandis que l'approche directive est davantage determinee par les besoins de l'organisa tion. L'entretien sur la carriere, Ie parrainage par un mentor, la clarification des roles dans Ie parrainage et la formation des superieurs quant au role de mentor qu'ils doivent assumer sont des exemples de pratiques qui appuient la premiere approche. La planification de la releve est une pratique qui s'inscrit dans l'approche directive des plans de developpement de carriere. On peut la detinir comme etant «l'exercice par lequell'organisation cherche a identifier les emplois et les postes importants qui se libereront les pro chaines annees et tente de se constituer une banque de candidats potentiels (vivier) pour les remplacer. Cette activite vise principalement a pourvoir des postes de cadres de l'organisation. EIle est parfois designee sous Ie nom d'organigrammes de remplacement ou de succession» (Amherdt, 1999, p. 125). Ce processus, qUi s'inspire fortement du processus de la planification des ressources humaines decrit au chapitre 3, comprend sommairement quatre etapes 2 : • la determination des postes-des (la demande); • la designation des titulaires potentiels (l'offre); • l'examen des candidats (les individus plans de releve;
a haut potentiel) et l'elaboration des
• l'elaboration des plans individuels de developpement.
La mise en ceuvre des plans de carrieres Tout comme la planification des carrieres que nous venons de voir, la mise en reuvre des plans de carrieres comporte une dimension individuelle et une dimension organisationnelle.
2. Pour en connaitre davantage sur certaines experiences de planification de la releve, Ie lecteur peut consulter Ie numero special de la revue Effect;f (vol. 6, nO I, 2003) portant specifiquement sur la planification de la releve.
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Partie II
I Les defis de la competence
La dimension individuelle de la mise en reuvre : l'aide problemes individuels de carriere
a la resolution des
Au fur et a mesure qu'une personne s'investit dans la realisation de son plan de carriere, des etats de frustration, de decouragement, d'isolement, d'im puissance ou de stress apparaissent, prenant des formes differentes seIon les stades de la carriere, lesquels ont He representes a la figure 7.4. Au debut de la carriere de I'employe, c'est-a-dire au stade de l'exploration, afin d'eviter qu'il n'eprouve un choc brutal relativement a l'ecart entre la rea lite de l'organisation et l'ideal professionnel, l'entreprise peut mettre sur pied des programmes d'integration et de socialisation. Puis, lors du stade de ]'Ha blissement, au moment ou l'employe redefinit ses objectifs de carriere et de couvre son ancre, elle peut adopter des pratiques d'aide aux employes mutes ou promus (une visite de familiarisation, une assistance financiere, la re cherche d'un emploi pour Ie conjoint, une integration communautaire, etc.), des activiH~s d'aide a la gestion du stress ou un counselling sur la carriere specialise afin de prevenir les problemes d'epuisement professionnel ou Ie syndrome du superman ou de la superwoman. Au stade de la mi-carriere, lorsque l'employe redefinit son plan de carriere a cause de changements qui sont survenus dans sa vie personnelle, du retrecissement des possibilites et du plafonnement, l'or ganisation gagnera a se doter de pratiques de parrainage (mentorat), de con ges sabbatiques (des affectations speciales, des projets personnels, des etudes), de developpement professionnel continu (pour eviter la perception du pla fonnement), de counselling sur la carriere specialise et d'ateliers de prevention ou de gestion de crise de mi-carriere. Au dernier stade de sa carriere, celui du declin, au moment ou l'individu est sensible aux consequences du vieillisse ment (se manifestant a travers l'etat de sante, Ie stress, la diminution des capa cites, Ie plafonnement, etc.), I'entreprise peut mettre sur pied des pratiques de
Chapitre 7
I Gerer les carrieres
gestion du personnel age (une contribution differente it l'organisation), de
gestion individualisee de fin de carriere (un rythme et une intensite differents
en ionction des personnes) ou des activites de preparation it la retraite.
La dimension organisationnelle de la mise en reuvre : Ie developpement de carriere
Les plans de carrieres individuels et agreges cherchent it developper chez l'em
ploye de nouvelles competences, ce qUi lui permettra de relever de nouveaux
defis. Les plans elabores doivent servir de cibles et de guides, mais ils ne doi
vent pas contraindre les personnes et I'organisation au point que cela les
amenerait it ignorer Ies possibilites qUi se presentent, Iesquelles pourront
provoquer une revision des plans et du developpement de la personne dans un
contexte de flexibilite. La gestion des carrieres doit etre l'affaire a la fois des
individus qui ont des habiletes de planificateurs et de ceux qui ont des habi
letes de strateges (Mintzberg, 1994). Ainsi, il est primordial que }'emploi actue}
permette it son titulaire de combler une partie de ses aspirations de carriere.
Pour ce faire, l'organisation doit demontrer de la flexibilite et apporter des
transformations continues afin que l'employe puisse utiliser de maniere opti
male son potentiel, acquerir de fa~on continue de nouvelles competences et
raviver sa mobilisation.
Des pratiques de revision periodique de l'organisation du travail et de for mation continue, de meme que Ie monitorat du superieur immediat au moyen d'entretiens sur Ja carriere, peuvent repondre it ce besoin de flexibilite et d'ajustement des contenus de }Iemploi. Les pratiques de filiere d'emplois et de filiere professionnelle permettent egalement de mettre en ceuvre les plans de developpement de carriere. La filiere d'emplois consiste it revoir Ie contenu d'un emploi afin de I'inserer dans une sequence d'emplois permettant un cheminement qui respecte Ia logique des niveaux de complexite et Ies types de competences it acquerir. Pour ce qui est de la fWere profession nelle, elle facilite Ia progression de la carriere sans pour autant entrainer de change ments d'emplois. En effet, une filiere professionnelle, au meme titre qu'une filiere hierarchique verticale, est caracterisee par une suite de promotions accordees en fonction de l'acquisition de competences superieures. Contrai rement it ce qui se passe dans la filiere hierarchique, une per sonne peut faire carriere dans une fiIiere professionnelle sans jamais occuper de postes com portant des responsabiIites de gestion. On trouve ce type de filiere dans I'in dustrie des services informatiques, dans l'industrie des produits pharma ceutiques, dans les milieux universitaires, bref pour des postes associes principalement a Ia recherche et au developpement (ingenieurs, analystes programmeurs, chercheurs, professeurs d'universite), lesquels reposent sur la mise a jour perpetuelle des competences. Outre Ies diverses pratiques flexibles centrees sur I'organisation du travail et Ie contenu des emplois, I'organisation peut privilegier les mouvements de carrieres afin de mettre en ceuvre les plans de carrieres. Ainsi, les promotions internes, la rotation du personnel, Ies affectations temporaires et Ie design de reseaux de filieres d'emplois permettent de multiplier les mouvements sur Ie
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Les defis de la competence
marche interne. Les systemes d'appariement individu-emploi, de plus en plus informatises et animes par les directions des ressources humaines, sont un autre exemple de pratiques qui visent aharmoniser les plans de carrieres. En outre, des pratiques d'acces a la formation s'averent essentielles lorsque l'organisation veut concretiser les plans de carrieres. Le remboursement des frais de scolarite, les conges d'etudes et Ie developpement de programmes institutionnels, du genre ecole ou universite d'entreprise (comme on en trouve dans la plupart des grandes institutions financi(:~res canadiennes), sont des exemples, plus ou moins compliques, de pratiques permettant l'acces a la formation. Enfin, certaines pratiques orientees vers la resolution des problemes indi viduels de carriere peuvent devenir des enjeux organisationnels majeurs et, par Ie fait meme, des cibles strategiques d'activites de developpement de car riere pour toute une organisation ou un secteur d'activite. C'est Ie cas pour la gestion concernant les travailleurs de 55 ans et plus. Ainsi, les gouvernements federal et provinciaux de meme que Ies organisations privees et publiques entreprennent des actions visant a retarder Ie depart pour la retraite, a attirer les retraites sur Ie marche du travail et a agir avec souplesse de maniere a faciliter un passage lent et progressif a la retraite (Lamonde et autres, 2002).
7.4.2 Un constat sur les pratiques de gestion des carrieres On constate qu'il existe une panoplie de pratiques associees de pres ou de loin a l'activation d'un systeme de gestion des carrieres dans l'organisation. En plus de Guerin et Wils (1992), Amherdt (1999) en fait une nomenelature dans son ouvrage portant sur Ie chaos de carriere. On observe egalement qu'un certain nombre de ces pratiques sont propres au systeme de gestion des carrieres tandis que d'autres se rapportent a des sys temes traditionnels de GRH comme l'evaluation du rendement, la dotation, la formation ou la remuneration. Certaines de ces pratiques sont plus efficaces que d'autres, tout dependant des moments, des situations et des personnes. C'est la combinaison de ces pratiques, formant une configuration particuliere en fonction de certains facteurs (l'environnement externe, I'environnement interne, Ie profil des ressources humaines internes), qui constitue Ie systeme de gestion des carrieres d'une entreprise. II existe plusieurs typologies et taxonomies des profils organisationnels ou systemes de gestion des carrieres (Bernard et autres, 1992; Sonnenfeld et Peiperl, 1988; Wils, Laberge et Labelle, 1997). Bien que simpliste, la typologie de Sonnenfeld et Peiperl permet de com prendre ce qu'on entend par profil organisationnel de gestion des carrieres. Ces auteurs ont determine deux dimensions-eles de la GRH, soit Ie flot de main-d'ceuvre (les modes d'entree et de depart au sein des organisations) de meme que Ies criteres de mouve ment interne lies it Ia mobiIite verticale et a Ia mobilite horizon tale (Ie rende ment individuel ou Ie rendement de groupe). Le croisement de ces deux dimensions permet de degager quatre profils organisationnels de gestion des
Chapitre 7
I Gerer les carrieres
carrieres, soit l'academie, requipe de baseball, Ie club et la forteresse (voir le tableau 7.5). L'academie represente les entreprises dominantes dans leur secteur respec tH. Conditionne par Ie recrutement interne et Ie rendement individuel, ce profil organisationnel favorise la croissance personnelle. 11 est caracterise par un systeme de gestion des carrieres sophistique permettant de developper et de retenir les employes de talent. En ce qui concerne requipe de baseball, ce profil organisationnel valorise la creativite, mais souvent au detriment de la securite d'emploi. Caracterisee par Ie recrutement externe et Ie rendement individuel, cette strategie favorise Ie roulement (l'engagement est plutot faibIe) afin de permettre a l'entreprise de recruter des professionneis et des gestionnaires a l'exterieur. Dans ce type d'organisation, l'esprit d'equipe est important, mais tout Ie monde a la chance de devenir une etoile. Le club est un profil organisationnel centre sur Ie rendement collectif et Ie recrutement interne. Ce type, qUi se distingue par l'engagement envers l'or ganisation et la securite d'emploi, est present dans des entreprises qui valo risent la stabilite, la hierarchie et des missions qui transcendent les problemes de marche. Ce profil correspond tres bien aux gens qUi ont un cheminement lineaire, pour reprendre Ie terme de Driver (1980). La forteresse est caracterisee par Ie rendement collectif et Ie recrutement externe. Ce profil organisationnel, qui reuvre dans un environnement in stable, fait regulierement face a des crises necessitant des mouvements de main-d'reuvre importants (une decroissance, des reaffectations, un rede ploiement, etc.). Domine par Ie facteur structurant de Ia competitivite, il offre une certaine stabilite entre les crises, ce qui permet a ses membres de deve lopper Ie marche interne. II n'existe pas de bons ou de mauvais types de systemes de gestion des car rieres. 11 y a plutot des types qUi conviennent mieux a des moments, a des lieux, a des secteurs et a des personnes specifiques. Par exemple, l'academie est plus compatible avec les secteurs de l'automobile et des produits pharma ceutiques. L'equipe de baseball se retrouve davantage dans les entreprises de
LA TYPOLOGIE DES SYSTEMES DE GESTION DES CARRIERES
SOUTce: Adapte de J. Sonnenfeld et M.A. Peiperl, «Staffing policy as a strategic response: A typo logy of career systems ", Academy Management Review, vol. 13, nO 4, 1988.
or
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Partie II
I
Les defis de la competence
telecommunications, d'informatique et de consultation. Le club est plus repandu dans Ie secteur public, dans les banques, dans les compagnies ae riennes ainsi que dans les secteurs militaire et paramilitaire. Finalement, les domaines du commerce de detail, du textile et des ressources natureUes ont tendance a adopter Ie profil de la forteresse.
Conc1usion La gestion des carrieres est une pratique-cle d'une GRH renouvelee, surtout dans un contexte de bouleversement demographique creant une menace de penurie de talents. Les organisations d'avant-garde qUi mettent l'accent sur les competences individuelles et collectives sont forcees a innover dans la gestion des trajectoires professionneUes de groupes d'employes-cles, car les competences motrices d'une organisation se transmettent et se developpent davantage dans un contexte d'apprentissage lie a l'organisation du travail et aux communications organisationnelles que dans un contexte de formation traditionneUe. Ainsi, les experiences de travail deviennent significatives et necessitent une prise en charge a la fois par les individus et les organisations en vue de la planification, de la mise en ceuvre et du contrale des chemine ments de carrieres. Nous avons presente dans ce chapitre les caracteristiques qui motivent l'importance de la carriere et de la gestion des carrieres, de meme que les pratiques et les strategies organisationnelles de gestion des carrieres.
liI'L:n\1:~/·.:..
(J)
de r evision
o Qu'est-ce que la gestion des carrieres?
•
QueUes sont les ancres de carriere selon la theorie de Schein?
•
De queUe fa~on la taille d'une orga nisation et Ie secteur d'activite au quel elle appartient expliquent-ils certaines tendances en matiere de gestion des carrieres?
8 Quelles
relations etablissez-vous entre la gestion des carrieres et l'or ganisation qualifiante?
e plaident Expliquez les principales raisons qui en faveur de la gestion des carrieres dans les organisations.
e ristiques QueUes sont les principales caracte individueUes qui influen cent la carriere et la gestion des carrieres? " Demontrez en quoi la superposition des types de stades de la vie profes
sionnelle, de la vie personneUe et de la vie familiale a une incidence ma jeure sur la carriere et la gestion des carrieres.
o Comment pouvez-vous classifier les pratiques de gestion des carrieres?
CD Pourquoi la planification de la releve est-eUe une pratique de gestion des carrieres qui prend de plus en plus d'importance?
en>
QueUes sont les principales configu
rations de pratiques ou de strategies
de gestion des carrieres? Donnez quelques exemples d'entreprises que becoises que vous connaissez qUi adoptent des strategies precises.
Chapitre 7
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I
Gerer res carrieres
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Partie II / les defis de la competence
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Chapitre 7
I Gerer les carrieres
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Partie II
I Les defis de la competence
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SCHEIN, E. (1990). Career Anchors: Discovering your Real Values, San Francisco, Jossey-Bass.
Chapitre 7
I Gerer les carrieres
Ya-t-iJ encore de l'avenir chez Integrite? Integrite est une compagnie d'assu rances qUi (Euvre au Quebec depuis de nombreuses annees. Cette societe opere plusieurs succursales reparties a la fois en milieu urbain et en region. C'est une entreprise dynamique qUi jouit d'une bonne reputation. Andree, une ancienne analyste, est directrice de comptes com merciaux depuis six ans dans une suc curs ale de la Rive-Sud de Montreal. Ace titre, elle s'occupe des grosses entreprises clientes afin de leur offrir un porte feuille de services personnalises. Ses responsabilites toument principalement autour du developpement d'affaires, du service a la clientele et de la personnali sation de l'offre de service. Une petite equipe d'analystes et de conseillers la seconde. Avant son arnvee chez Integrite, Andree a travaille dans une caisse populaire comme conseillere, ainsi que dans un organisme public voue au financement de PME en voie d'implan tation. Andree est marit~e et a deux en fants en bas age. Ene s'est distinguee en terminant sa maitrise en administration entre ses deux grossesses. EIle a la repu tation d'etre une bonne travailleuse, loyale et disponible. De plus, elle sait ecouter les clients et elle procede a des analyses rigoureuses et approfondies. C'est d'ailleurs un gestionnaire nou vellement retrait€~ qui, en tant que men tor, l'a aidee a acquerir ses competences et a progresser dans I'organisation. Depuis l'an demier, Andree a un nouveau patron, Lolc. Comme vice president aux services aux entreprises, il est responsable de dizaines de directeurs de comptes commerciaux repartis dans diverses succursales de la region de
Montreal. Loic a Ie mandat de develop per les affaires a un rythme accelere afin qu'Integrite ne se laisse pas devancer par la concurrence. Pour cette raison, il exerce de la pression sur les directeurs de comptes commerciaux. Ainsi, il a recemment emis des reserves au sujet de l'attitude d' Andree et de ses fa\=ons de faire. II lui a mentionne qu'il aimerait qu'elle passe moins de temps au bureau ou a Ia maison a preparer des analyses et plus de temps a developper Ies affaires, par exemple en faisant davantage de re presentation dans les milieux d'affaires et en partiCipant a de nombreux evene ments Ie soir et meme Ie week-end. Andree en vient ainsi a se remettre en question, car elle est de plus en plus malheureuse dans son travaiL Elle se rend compte egalement que, pour gravir des echelons dans cette organisation, il faut faire d'enormes sacrifices sur les plans professionnel et personneL Elle n'est pas certaine que Ie jeu en vaille la chandelle. Chaque annee, Integrite donne la possibilite a ses employes d'assister a des ateliers sur la carriere et offre des services de counselling (extemes) a ses gestion naires. Andree decide de se prevaloir de ces services et accepte de se soumettre a une evaluation de son potentiel et de passer des entrevues. Lors d'une ren contre avec un conseiller de la direction des ressources humaines, bilan en main, elle prend conscience que ses centres d'interet se situent principalement dans l'analyse des enjeux d'affaires en ma tiere de protection aupres des entre prises. Elle aime faire de la recherche,
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Partie II
I Les defis de la competence
elaborer des scenarios d'offres de ser vices, rediger des rapports et convaincre les clients de suivre ses conseils. Apres mure reflexion, Andree cons i dere qu'elle serait plus heureuse dans un travail caracterise davantage par Ie contenu professionnel que par la ges hon et Ie developpement des affaires. Elle craint cependant qu'il ne soit pas possible pour elle de s'epanouir dans un tel type de travail chez Integrite. Elle songe donc a chercher bientOt un emploi dans une autre entreprise. Par contre, elle ne veut pas subir une baisse de son niveau de vie en acceptant une remuneration moindre. EIle a egale ment peur de souffrir d'une perte de reconnaissance sociale en acceptant dans une autre compagnie d'assurances un poste moins prestigieux.
Mis au courant de l'insatisfaction d'Andree par Ie conseiller de la direction des ressources humaines, LOlc demande a Andree de venir Ie rencontrer. Andree ne sait pas comment aborder cet entretien.
. , Comment Andree devrait-elle abor der cet entretien avec son patron? • Que suggereriez-vous a LOlc de faire ann de se preparer a cette rencontre avec Andree? . , Que suggereriez-vous a la direction des ressources humaines de faire pour mieux structurer ses activites de gestion des carrieres?
Les defis
dela
performance
Apres l'etude de ce chapitreI, Ie Iecteur devrait etre plus apte a: • Saisir l'utilite d'une bonne gestion du rendement des employes tant du point de vue des dirigeants d'entreprise que de celui des cadres hierarchiques ou des employes. • Comprendre Ie processus de gestion du rendement des employes, c'est-a-dire la planification, Ie suivi, l'evaluation, Ia reconnaissance et Ie developpement de leur rendement. • Com prendre l'importance de lier la gestion du rendement des employes au processus de planification strategique, aux valeurs et a la culture de l'organisation. • Decrire les competences qu'un superviseur doit acquerir - quant au coaching, ala delegation, a Ia gestion des con flits et a la gestion des equipes - pour optimiser Ie rendement individuel et coHectif. • Comprendre l'importance de se doter d'outils et de techniques adequats en matiere d'evaluation du rendement, soit Ies methodes et les criteres d'evaluation ainsi que les formulaires d'evaluation du rendement. • Pre parer un entretien d'evaluation du rendement, tant a titre d'evaluateur qu'a titre d'evalue, de maniere a en optimiser les retombees. • Comprendre l'importance de la competence et de la motivation des cadres en ce qUi a trait a l'evaluation du rendement de leurs subordonnes. • Comprendre les multiples facteurs influen\=ant Ie rendement au travail des employes. • Connaitre les principales conditions de gestion a respecter pour optimiser l'efficacite et l'equite d'un systeme de gestion du rendement. 1. Une version preliminaire de ce chapitre a fait l'objet d'une brochure ecrite par Sylvie St-Onge, La gestion du rendement au travail, et publit'e par l'Ordre des comptables gene raux Iicencies du Quebec (eGA) en 2003.
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Partie III
I
Les defis de la performance
Comment resoudre un conflit entre des employes 2 Vos deux adjointes, Carole et losee, sont des employees que vous appreciez pour leur autonomie et leur sens des responsabilites. Toutefois, depuis votre retour de vacances, vous avez constate qu'eUes se parlent peu et qu'elles s'evitent constamment. En discu tant avec Carole, vous apprenez qu'elle a presume qu'elle devait superviser losee pen dant votre absence, ce qui a donne lieu a quelques prises de bec. Comment pourriez vous intervenir sans pour autant aggraver Ie conflit entre elles ?
Enfin, rappelez-vous que l'objectif de La rencontre n'est pas que ces personnes de viennent les meilleures amies du monde, mais bien qu'elles puissent travailler en semble sans que leur querelle ait de conse quence negative sur Ie travail a executer. Adopter une methode de resolution
Une intervention reussie doit etre structuree. La methode suivante fait appel a la col laboration et vise un resultat «gagnant gagnant».
Utiliser des faits
Avant de vous lancer dans la gestion d'un con flit, il faut que vous soyez apte a cerner les faits al'origine du conflit en obtenant la version de chacune des parties concerm?es. Votre but doit etre de discerner la veri table raison du conflit en evitant de vous fier aux apparences ou aux perceptions et aux emotions des personnes concernees. Vous pourrez ensuite convoquer une ren contre avec les deux parties. Si Ie conflit est de nature interpersonnelle, attendez-vous a ce que Ie rationnel soU tres peu present lors de Ia rencontre. Dans un tel cas, concentrez-vous sur Ie probleme plutOt que sur les personnes. Tou tefois, laissez les gens verbaliser leurs senti ments. Cela les aidera a constater que leur differend est peut-etre sans veritable fonde ment ou base sur de mauvaises interpre tations, des decisions inexpliquees ou un manque d'information. Adoptez une attitude neutre envers la situation. Si les parties en cause croient que vous favorisez des Ie depart une option, votre intervention sera inef{icace.
2. F. Veillet, «Comment resoudre un conflit entre des employes ", Les Affaires, 21 septembre 2002, p. 38.
Chapitre 8 \ Gerer et evaluer Ie rendement au travail
Encourager la communication
Pour construire et entretenir un climat de travail positif, il est important que les points de vue differents soient acceptes. II est sain d'encourager ies divergences d'opinions et les discussions tranches et ouvertes. Le partage d'information, la communi cation et l'ouverture d'esprit ont pour effet d'ameliorer l'esprit d'equipe et d'eviter ou de limiter les prejuges, des elements essen tiels pour prevenir ies con flits en milieu de travail.
La gestion du rendement impUque toutes les activites liees a la planification, au suivi, a l'evaluation, a la reconnaissance et au developpement du rende ment des employes. L'objectif du systeme de gestion du rendement au sein d'une organisation consiste a ameliorer la contribution au travail de la grande majorite de son personnel soit 90% de sa main-d'reuvre - dont Ie rende ment s'avere acceptable. C'est d'ailleurs aupres de cette main-d'reuvre que Ie gain de rendement aura un effet significatif sur la valeur de l'entreprise. Cette main-d'reuvre dite typique exclut la minorite des employes des organisations - environ 10% - dont Ie rendement peut etre qualifie de problematique (5 %) ou d'excellent (5 %). Pour ceux-ci, des politiques particulieres sont souvent plus appropriees; i1 est question de mesures disciplinaires et d'assistance sociopsychologique (counselling) pour les employes difficiles et de gestion de la releve et des carrieres pour Ies employes ayant un excellent rendement. Ce chapitre porte sur Ie processus de gestion du rendement des employes en vue d'ameliorer son application au sein des organisations. Apres avoir traite de l'utilite de la gestion du rendement des employes, nous presentons les etapes d'un veritable processus de gestion du rendement du personnel, soit la determination des priorites, 1a planification du travail, Ie suivi du ren dement, l'evaluation du rendement et la reconnaissance du rendement. Plus precisement, nous nous penchons sur l'importance de lier la gestion du ren dement des employes au processus de gestion strategique, aux valeurs et a la culture des organisations. Ensuite, nous examinons Ie suivi du rendement ainsi que des competences que les cadres doivent acquerir en matiere de
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Partie III
I
Les defis de la performance
coaching, de de}{~gation et de gestion des conflits. Nous examinons egalement
les methodes d'evaluation du rendement utilisees Ie plus frequemment. Finalement, nous resumons les conditions qUi optimisent l'efficacite et l'equite du systeme de gestion du rendement des employes.
_
L'uti1ite de gerer le rendement Le rendement des employes est toujours gere. Ce qui varie, c'est la mesure dans laquelle Ie processus de gestion est officie!. Ainsi, dans plusieurs petites et moyennes entreprises, la gestion du rendement est officieuse (certains disent « informelle »). Le rendement des employes est alors gere au jour Ie jour par Ie proprietaire de l'entreprise ou par un groupe restreint de ses colI abo rateurs, sans qu'il y ait une politique, un formulaire ou des criteres connus et communs aux cadres pour evaluer Ie rendement des employes. Toutefois, lorsque Ie nombre d'employes augmente, l'absence de formalisation peut engendrer des iniquites, puisque chaque cadre evalue ses subalternes comme HIe veut, quand HIe veut, a partir de ses propres criteres, qu'il change sou vent au gre des subordonnes et du moment. II devient alors important de compter sur un processus officiel- c'est-a-dire qui s'appuie sur des politiques et des procedures ecrites - d'evaluation du rendement. En effet, lorsque l'eva luation du rendement est officielle, les criteres sont standardises et commu niques aux employes au moyen d'un formulaire d'evaluation du rendement qui doit generalement etre rempli une fois par annee a un moment preetabli.
La gestion du rendement des employes s'avere a la fois un enjeu strate gique, une source d'avantage concurrentiel et une activite-cle de la gestion des ressources humaines (Gosselin et St-Onge, 2000; St-Onge, 2000). II s'agit d'un enjeu de cteveloppement strategique dans la mesure ou les entreprises doivent reviser leurs criteres tradition nels de rendement pour atteindre des objectifs se rapportant a la satisfaction des clients, a la qualite, a l'innovation, au deve Ioppement de marches et a la reduction des couts. II est necessaire de reviser constamment Ie systeme de gestion du rendement pour s'assurer qu'il oriente toujours les efforts des employes vers les priorites de l'entreprise en etablissant
Chapitre 8
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Gerer et evaluer Ie rendement au travail
un lien entre Ies criteres du rendement individuel et Ies objectifs d'affaires. Quand les dirigeants d'entreprise changent de vision ou d'objectifs strate giques, ils doivent revoir leurs mesures traditionnelles de la performance de l'entreprise, etant donne qu'elles seront dorenavant, au mieux, inutiles ou non pertinentes et, au pire, nuisibles. Leur tache consiste alors a cerner Ies com portements et Ies resultats que les employes doivent modifier pour pouvoir atteindre les objectifs desires et a veiller a ce que ces resuitats fassent I'objet de nouvelles mesures de rendement, les mesures actuelles etant inefficaces. En somme, tout changement majeur d'orientation - qu'il s'agisse de la qualite totale, de l'ameIioration continue, etc. - risque de n'etre qu'un mirage s'il n'en traine pas de changement en matiere de gestion du rendement. D'ailleurs, les dirigeants d'entreprise nouvellement en poste utilisent souvent Ies mesures de rendement comme levier de changement strategique. On peut meme avancer qu'il n'y a pas de raison de me surer quelque chose si l'on ne veut pas Ie changer ou s'il n'y a pas d'amelioration ou de deterioration possible. La gestion du rendement des employes constitue une source d'avantage concurrentiel dans la mesure ou 52 % des 471 entreprises canadiennes ayant participe a une enquete (Societe Conseil Mercer, 1996) estiment que leur sys teme actuel de gestion du rendement procure une excellente valeur a leur entreprise. Vne autre enquHe (Hewitt & AssocU~s, 1995), qUi a ete menee aupres de 205 societes canadiennes et de 437 societes americaines, indique que les societes ayant un systeme de gestion du rendement font etat de bene fices et d'une productivite plus eleves, de meilleures marges brutes d'auto financement, d'un meilleur rendement sur Ie marche boursier et de titres d'une plus grande valeur que les societes qUi ne disposent pas d'un tel systeme.
Enfin, un processus de gestion du rendement procure des informations utHes a la prise de decision en matiere de gestion. Par exemple, des donnees sur Ie nombre quotidien moyen de dossiers termines par employe permettent de planifier les besoins en personnel selon les commandes a remplir. Par
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I Les defis de la performance ailleurs, Ie prom du rendement des employes aide it preciser les besoins en for mation ou it evaluer l'efficacite d'un plan de formation, d'un processus de selection ou d'un processus de promotion. La gestion adequate du rendement des employes it l'echelle de l'entreprise permet d'appliquer plus rapidement et plus equitablement une politique de gradation des mesures disciplinaires lorsque cela est requis. De plus, si les dirigeants veulent implanter un regime de remuneration basee sur Ie rendement, ils doivent l'appuyer sur un proces sus officiel de gestion du rendement. L'enquete de la Societe Conseil Mercer (1996) indique que les entreprises canadiennes sondees utilisent les resultats de l'evaluation du rendement surtout pour determiner Ies augmentations de salaire au merite (79 %) et pour conseiller les employes en ce qui concerne leur developpement (70%).
CD .......................................... Le processus de gestion du rendement
Un processus de gestion du rendement efficace devrait amener les employes it cruvrer it la realisation des buts que s'est fixes l'entreprise en mettant en rap port les criteres du rendement individuel et les objectifs d'affaires. Comme l'illustre la figure 8.1, un tel processus necessite de valoriser, d'evaluer, de recompenser et de ctevelopper les activites appropriees. Pour cela, il faut s'ap puyer sur des indicateurs ou des criteres du rendement organisationnel et du rendement individuel qui mesurent bien les bonnes choses. Un prealable it la conception de ce processus consiste it comprendre l'importance des relations existant entre la vision des dirigeants d'entreprise, la mesure du rendement organisationnel et la mesure du rendement individuel. En ce sens, les diri geants d'entreprise ont un role de premier plan it jouer en ce qui concerne la reussite du processus de gestion du rendement. Cette section vise it expliciter chacune des etapes d'un processus de gestion du rendement. Observons tou tefois que i'evaluation du rendement, qui consiste it porter un jugement sur la contribution d'un employe au cours d'une periode donnee, ne s'avere qu'une etape du processus de gestion du rendement.
lE PROCESSUS DE GESTION DU RENDEMENT Les personnes sont motives
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Chapitre 8 \ Gerer et evaluer Ie rendement au travail
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Voici un principe important sur lequel s'appuie ce chapitre: l'entreprise obtient ce qu'elle mesure, ce qu'elle suit et ce qu'elle recompense. Les employes realisent des taches et des activites dans leur travail. Cependant, il arrive souvent qu'ils ne sachent pas quelles choses ils devraient accomplir prioritairement pour augmenter la valeur de leur contribution. Un autre pro bleme tient au fait qu'on evalue leur rendement en fonction de criteres inap propries, ou encore qu'on recompense les employes pour avoir bien fait des choses inadequates. En vue d'ameliorer leur rentabilite, les dirigeants de la Banque Regionale deci dent d'evaluer la performance de leurs succursales et de leurs employes en fonction du nombre moyen de dossiers de pret traites. Le nombre de dossiers de pret traites par succursale et par employe a effectivement augmente. Toutefois, la rentabilite de la Banque reste probiematique puisque cela s'est fait au detriment de la qualite du suivi, entrafnant d'autres frais (par exemple, pertes sur prefs) (St-Onge et Magnan, 2000).
Un processus efficace de gestion du rendement repose sur des rapports etroits entre la vision des dirigeants d'entreprise, leurs valeurs, leur strategie d'affaires, leurs objectifs strategiques, les facteurs-cles de succes de l'organisa tion et les mesures de rendement tant organisationnelles qu'individuelles. D'abord et avant tout, un systeme de mesure du rendement doit se fonder sur une definition claire de la vision et de la strategie d'affaires de l'organisation et sur la communication de celles-ci a l'ensemble des employes. Ce point de depart est fondamental car il permet d'articuler une me sure du rendement organisationnel qUi amenera Ie personnel a adopter des attitudes et des com portements qUi appuieront la realisation des resultats vises. Pour €tabUr leur vision, les dirigeants doivent se demander ou Us veulent etre dans trois ans ou cinq ans. Afin de determiner les valeurs qui caracteriseront sa gestion, la direc tion doit se demander ce qUi la distingue des autres entreprises en ce qUi a trait a la maniere de faire, aux croyances, etc. Quant a la strategie d'affaires, elle correspond aux moyens que l'entreprise compte prendre pour survivre et rester concurrentielle et elle oriente les objectifs strategiques. Pour etablir les facteurs-cles de succes, les dirigeants d'entreprise doivent repondre a des ques tions comme celles-ci: «Que devons-nous faire pour reus sir ?}} « Qu'est-ce qui differencie les organisations performantes des organisatiOns moins perfor mantes dans notre industrie ?)} «Que veulent nos investisseurs (benefices, ren dement de l'actif, rendement des investissements, valeur economique ajou tee, valeur de l'action, montant des dividendes, etc.) et nos consommateurs (prix et qualite des produits et des services, expertise des employes, creneau particulier, delais de livraison, etc.)?» La dynamique de !'integration de la vision, des valeurs, de la strategie d'affaires, des objectifs strategiques, des facteurs-cles de suedes et des mesures du rendement organisationnel et du rendement individuel peut Hre ilIustree sous forme d'un tableau de bord de gestion (Kaplan et Norton, 1996; St-Onge et Magnan, 2000; Voyer, 1998). La figure 8.2 ilIustre plusieurs niveaux de
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I
Les defis de la performance
mesures du rendement (primaires, secondaires et tertiaires); ces diverses mesures doivent etre coherentes, pertinentes, facHes a communiquer et a comprendre si l'on veut que Ie systeme contribue a ameliorer Ie rendement organisationnel. Comme les pilotes qui se fient a leur tableau de bord pour diriger et contraler Ie vol de leur appareil, les dirigeants doivent considerer un ensemble de mesures de rendement pour s'assurer de la realisation des objec tits et du respect des priorites strategiques de leur entreprise. En outre, il est important d'equilibrer l'usage d'indicateurs financiers qUi preoccupent les investisseurs (benefices, valeur boursiere, respect des budgets, etc.) et d'indica teurs non financiers qUi preoccupent les clients (qualite des produits et des services, respect des deIais de livraison, etc.) meme si cela peut s'averer sou vent conflictuel. Pensons, par exemple, a l'effet negatif des depenses de recherche et developpement qu'exigent des produits a la fine pointe du deve loppement technologique (pour satisfaire les clients) sur les benefices a court terme de l'entreprise (que surveillent les investisseurs).
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Planifier le travail
afaire
Dans les relations que la direction etablit avec Ie personnel, il ne lui suffit pas de dire qu'elle veut maximiser les benefices ou satisfaire les besoins des clients. Elle doH exprimer en des termes precis des objectits ayant trait a l'aug mentation des benefices, a l'accroissement de la productivite, a l'amelioration des competences des employes, a l'amelioration de la qualite des produits, a l'augmentation de la satisfaction des clients, etc. Ces objectifs d'affaires sont importants puisqu'ils influencent la nature des criteres du rendement indi viduel retenus en vue d'evaluer, voire de remunerer, les employes. Ces criteres, qui sont lies a la realisation d'objectifs, doivent, pour etre efficaces, se traduire pour les employes dans des operations. En effet, il est preferable de transfor mer cette finalite en des operations que ces derniers maitrisent dans une cer taine mesure, telles que l'elimination des erreurs, la reduction des accidents du travail ou la reduction de l'absenteisme. Le choix des objectifs d'affaires peut amener les employes a accorder plus d'importance a certaines facettes de leurs responsabilites. Par c~ntre, si ces objectifs ne font pas reference aux besoins de l'organisation, cela risque d'inciter les employes a adopter des comportements nuisibles a la reussite a long terme de l'entreprise. Sur Ie plan des operations quotidiennes, i1 faut que Ie cadre et Ie subor donne ou les membres de son equipe s'entendent sur les responsabilites ou les activites importantes du poste ou de l'equipe. Par exemple, Ies responsabilites d'un representant commercial peuvent toucher aux ventes, au developpe ment de la clientele, a la gestion et aux relations avec d'autres acteurs dans l'entreprise. En ce qUi concerne les cadres, on peut cerner, par exemple, trois grandes responsabilites, a savoir la supervision des subordonnes, I'adminis tration des ressources materielles et financieres de l'unite ainsi que Ia qualite des produits et des services offerts aux clients tant a l'interieur qu'a l'exterieur de I'entreprise.
Chapitre 8
I Gerer et evaluer Ie rendement au travail
l'INTEGRATION DU PROCESSUS DE GESTION DU RENDEMENT Mission
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Vision Grande strategie d'affaires
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J. Barrette et J. Berard, «Gestion de Ia performance: lier Ia straH:;gie aux operations", Gestion, vol. 24, no 4, 2000, p. 54.
Source:
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I Les defis de la performance Par la suite, Ie cadre doit determiner avec Ie subordonne ou avec les mem bres de son equipe des criteres de rendement formules selon des objectifs de travail, des normes a respecter ou des comportements a adopter pour une pe riode preetablie. Toujours dans Ie cas d'un representant commercial, I'objectif a l'egard des ventes peut consister a augmenter Ie montant des ventes de 5 % au cours de Ia prochaine annee, alors qu'a l'egard du developpement de Ia clientele, l'objectif peut etre d'augmenter Ie nombre de clients de 3 % pendant la meme periode. En ce qUi a trait aux comportements, on peut considerer Ia qualite du suivi qu'un representant exerce aupres de ses clients apres avoir realise des ventes. Dne fois que les objectifs et Ies comportements desires ont ete determines, Ia discussion devrait porter sur Ie plan d'action, c'est-a-dire sur Ies moyens qu'on prendra pour atteindre Ies objectifs ou pour ameliorer les comporte ments. En d'autres termes, comment Ie representant devrait-il s'y prendre pour augmenter ses ventes, pour accroitre Ie nombre de ses clients ou pour ameliorer la qualite de son suivi aupres des clients? De quel type d'appui de son organisation et de son superieur immediat a-t-il besoin? Le contenu de cette discussion sur les responsabilites, les objectifs, les comportements atten dus et Ie plan d'action devrait faire I'objet de notes. Dans Ia mesure ou Ie superviseur se donne Ia peine de prendre des notes sur Ie sujet discute, ses su bordonnes seront plus encIins a consacrer leurs energies afin de realiser ce qui est attendu d'eux. En effet, lorsqu'on prend des notes, il y a moins de risques que les paroles soient oubliees ou qu'elles soient interpretees differemment au fil du temps.
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Exercer un suivi sur le rendement Lorsque la phase de la planification du travail est terminee, on passe a l'exe cution du travail. Pendant cette periode, l'employe tente d'atteindre les resul tats qui ont ete etablis et d'adopter les comportements qui sont attendus de lui, alors que son superviseur travaille avec lui en assumant un role de coach ou de facilitateur. Comme l'indique Ie tableau 8.1, pendant la phase de l'exe cution du travail, les cadres et les employes ont chacun leurs responsabilites propres (Grote, 1996). Les cadres ont Ia responsabilite non seulement de communiquer leurs attentes en matiere de rendement, mais aussi d'exercer un suivi sur Ie deroule ment du travail. Cela signifie qu'ils doivent rencontrer periodiquement leurs employes - individuellement et collectivement - pour discuter de l'avance ment des activites. Cette rencontre est importante car elle donne au super viseur l'occasion d'encourager les employes a maintenir leurs efforts, a mieux les diriger ou encore a les modifier selon des changements qui sont survenus dans l'environnement, etc. Nombre de problemes de rendement des employes sont dus en grande par tie a un manque de suivi de Ia part de leur superviseur. On oppose souvent Ie coaching au mode traditionnel de supervision autoritaire, ou Ie cadre agissait
Chapitre 8 \ Gerer et eva\uer Ie rendement au travail
LES RESPONSABllITES DES SUPERVISES ET DES SUPERVISEURS LORS DE l'EXECUTION DU TRAVAIL
comme un contra1eur qui, d'une part, avait 1a responsabilite de prendre seul les decisions et de donner des directives et, d'autre part, s'attendait it ce que ses subordonnes les appliquent, it detaut de quoi il devait sevir. Aujourd'hui, pour de multiples raisons, notamment la scolarite accrue des employes et une organisation du travail qui permet plus de flexibilite et d'autonomie, fap proche du coaching aupres des employes est pranee. On insiste alors sur l'importance pour 1es cadres d'agir comme des personnes qui facilitent Ie ren dement des employes en preconisant leur participation, la confiance mutuelle, l'information, l'imputabilite et la reconnaissance. D'ailleurs, une equipe de travail performante repose sur des prealables que ses membres doivent met tre en pratique, en particulier Ie chef d'equipe: la gestion du changement, la qualite des communications et la resolution des conflits. En matiere de ges tion des conflits, Ia mise en situation presentee au debut du chapitre s'avere fort eclairante, tandis que Ie tableau 8.2 presente un ensemble de questions susceptibles d'indiquer, d'une part, Ie niveau de competence d'un chef d'equipe et, d'autre part, Ie niveau de rendement d'une equipe de travail. Finalement, il est important de considerer que Ie processus de gestion du rendement s'inscrit dans un contexte. La figure 8.3 illustre Ie fait que Ie ren dement des employes est influence par diverses caracteristiques individuelles (comme les competences et les efforts), organisationnelles (comme les ressources, Ie groupe de travail, les equipements, l'organisation du travail et la qualite des biens et des services), environnementales (comme I'economie, Ie secteur d'activite et la concurrence) et de supervision. Aussi, pour evaluer un employe, un superviseur devrait analyser l'ensemble d'une situation de travail afin d'eviter de lui attribuer certains problemes de rendement alors que leurs causes echappent en partie a sa maHrise.
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Les defis de la performance
COMMENT ESTIMER LA COMPETENCE D'UN CHEF D'EQUIPE ET LA PRODUCTIVITE D'UNE EQUIPE?
Saurce: Adapte de F. Veillet, "Ameliorer j'efficacite d'une equipe de travail", Les Affaires, 5 avril 2003, p. 30, et de F. Veillet, "Les qualites it deveiopper pour diriger une equipe de travail», Les A{faires, 19 avril 2003, p. 34.
Chapitre 8
I Gerer et evaluer Ie rendement au travail
QUELQUES DETERMINANTS DU RENDEMENT INDIVIDUEL
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L'evaluation du rendement
. . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . L'evaluation du rendement comprend les aspects suivants: Ie formulaire d'evaluation du rendement, les methodes d'evaluation du rendement, l'en tretien d'evaluation du rendement et les sources d'evaluation du rendement. ~
8.6.1 le formu1aire d'eva1uation du rendement Un processus de gestion du rendement au travail implique a un moment au a un autre une evaluation formelle ecrite une fois par annee. Generalement, cette evaluation se tient au meme moment pour taus les membres d'une cate gorie de personnel a partir de criteres de rendement recenses dans un formu laire. Une enquete menee aupres de 309 organisations du Quebec comptant 200 employes et plus (St-Onge, Haines et Masse, 2001) montre qu'entre 75 % et 80% d'entre elles recourent a un formulaire pour evaluer Ie rendement de leurs cadres, de leurs employes de bureau et de leurs professionnels. Bien que ce soit une pratique courante, il faut se garder d'inserer dans un formulaire d'evaluation du rendement de I'employe une section visant a evaI uer son potentiel. II importe d'etablir une distinction entre l'evaluation du rendement et l'evaluation du potentiel ann d'eviter toute confusion tant chez les superviseurs que chez les subalternes. I:evaluation du rendement d'un employe consiste a porter un jugement sur son travail pendant une periode passee, habituellement au cours de I'annee precectente (voir Ie tableau 8.3). Quant a l'evaluation du potentie1, elle consiste a porter un jugement sur 1a capacite d'un employe a assumer des responsabilites futures differentes de celles qu'H a assumees a ce jour au superieures a ceUes-ci. L'evaluation du
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Les defis de la performance
potentiel est d'ailleurs inherente a toute decision de selection, ou l'on tente d'evaluer la capacite d'un candidat a assumer les responsabilites d'un poste donne. On peut exiger de toute personne qu'eHe atteigne et maintienne un ren dement satisfaisant dans son poste. Toutefois, on ne peut exiger d'elle qu'eUe ait du potentiel. Aussi, il est discutable de forcer les cadres a discuter de poten tiel avec tous leurs subordonnes. Pourquoi parler de potentiel si les augmen tations de salaire ne tiennent compte que du rendement? Pourquoi parler de potentiel alors qu'il n'y a pas de possibilite de mutation ou de promotion? Pourquoi parler de potentiel avec des employes desireux de conserver leurs responsabilites actuelles? Et ainsi de suite. En tentant de cerner deux objets tres differents - Ie potentiel et Ie rendement des formulaires d'evaluation sement Ie doute sur les aspects du travail qui comptent reellement. Dans cer tains cas, on accorde tellement d'importance au potentiel lorsque vient Ie moment de remplir Ie formulaire que les employes en arrivent a faire plus d'efforts pour demontrer leur potentiel que pour ameliorer leur rendement dans leur poste actuel. A vrai dire, les traits de personnalite sont au ca:ur de l'evaluation du potentiel. Comme un postulant n'a pas encore assume les responsabilites qu'on a l'intention de lui accorder, on doit examiner ses expe riences anterieures et sa personnalite de fa~on a estimer son potentiel de reus site dans un poste donne. Aussi, si l'on veut tenir compte des caracteristiques personnelles, il faut Ie faire au moment de prendre des decisions liees a la selection et aux promotions. Lors de l'evaluation du rendement du titulaire d'un poste, il est trop tard pour traiter de la personnalite; il faut plutot s'appuyer sur les comportements et les resultats. En pratique, on trouve trop de formulaires inadequats, qUi nuisent aux cadres plus qu'ils ne les aident it bien evaluer Ie rendement de leurs subor donnes. S'il est vrai que Ies employes ont tendance a dire que leur rendement est particulierement difficile a evaluer et qu'aucun ensemble de criteres ne peut Ie saisir entierement, il reste qu'avec ou sans formulaire, on porte des jugements sur Ie rendement des personnes. C'est pourquoi l'adoption d'un formulaire a l'avantage de standardiser les criteres de rendement pris offi ciellement en consideration et de garantir une certaine equite et une certaine
LA DISTINCTION ENTRE LE POTENTIEl ET LE RENDEMENT DES EMPLOYES
Chapitre 8
I Gerer et evaluer Ie rendement au travail
transparence. De plus, un formula ire d'evaluation adequat sur Ie plan legal permet de ne pas faire de discrimination ou d'evaluer les employes selon des criteres illicites. Ii faut rechercher certaines qualites en ce qui a trait au formulaire d'evalua tion. II faut non seulement se preoccuper de la pertinence et de la validite des criteres de rendement, mais aussi examiner la facilite d'utilisation du formu laire, Ie temps requis pour Ie remplir et son appropriation par Ies cadres qui s'en servent et par Ies personnes evaluees. Plus un formulaire est court et facile a comprendre, plus il a de chances d'etre rempli soigneusement par les cadres. Aussi, les professionnels des ressources humaines devront fa ire des compro mis entre, d'une part, la qualite et la quantite de l'information concernant Ie rendement et, d'autre part, les perceptions des intervenants - les dirigeants, les cadres et les employes evalues - face a d'autres caracteristiques qu'ils recherchent dans un tel formulaire. A cet egard, il est important de constituer un co mite de discussion compose de representants des categories de person nel vi sees, lequel procectera a l'elaboration et a la revision du formulaire tant sur Ie plan du contenu que sur celui de la forme, par exemple au cours du choix des responsabilites-cles, de la selection des enonces de comportements ayant pour but d'evaluer chaque responsabilite-cle et de la determination du poids relatif des objectifs et des responsabilites dans l'evaluation globale du rendement. En outre, Ie formulaire d'evaluation doit inclure les facteurs de succes, les objectifs d'affaires et les valeurs de l'entreprise. Le tableau 8,4 resume les principaies qualites d'un formulaire d'evaluation du rendement.
8.6.2 Les methodes d'evaluation du rendement Essentiellement, les organisations adoptent deux methodes d'evaluation du rendement, soit les echelles de notation et la gestion par objectifs (Petit et Haines, 2000).
Les echelles de notation L'echelle de notation consiste a presenter une liste d'enonces sur lesquels l'evaluateur doit porter un jugement sur une echelle allant, par exemple, de 1, ,dnsatisfaisant» as, «excellent». Retenons que la grande majorite des organisations utilisent une echelle a cinq niveaux de rendement (Conference Board of Canada, 1996) et qu'il est important de ne pas proposer plus de sept niveaux de rendement, sinon il devient difficile de differencier les cotes, et moins de trois niveaux de rendement, sinon il devient difficile de nuancer une appreciation. En general, les formulaires d'evaluation presentent des echelles de notation parce que ces dernieres sont facHes a comprendre et a remplir par les cadres et les employes evalues. Comme les enonces sont stan dardises, les evaluations ont aussi l'avantage d'etre comparables. Toutefois, la qualite des echelles de notation est fonction de la nature des enonces. I
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Partie III
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Les defis de la performance
LES PRINCIPALES QUALITI~S D/UN FORMULAIRE D/EVALUATION DU RENDEMENT
Les traits de personnalite Idealement, l'evaluation du rendement ne devrait pas porter sur des traits tels que l'enthousiasme, la sociabilite, Ie dynamisme, I'intelligence, la creativite ou Ie leadership. Quoique ce conseil soit donne depuis longtemps, la plupart des formulaires d'evaluation font reference a des traits de personnalite. Cette situation subsiste parce qu'il est facile de faire l'inventaire d'un ensemble de traits socialement desirables. De plus, Ie fait de se restreindre a des traits comme criteres permet d'evaluer tous les employes d'une organisation avec Ie meme formulaire. Cependant, en matiere d'evaluation du rendement, la sim plicite n'est pas synonyme de pertinence. Plus un formulaire contient de traits de personnalite, moins les superviseurs sont interesses a Ie remplir. Et Us ont parfaitement raison! Un formulaire fonde exclusivement sur des traits de personnalite n'est pas utile; pire, il est plutot nuisible. Comme Ie resume Ie tableau 8.5, les traits de personnalite sont difficiles a definir, a communiquer et a evaluer. lIs entrainent aussi les cadres a faire diverses erreurs d'evaluation. Par ailleurs, la presence ou l'absence de traits de personnalite n'aide pas a pre dire ou a indiquer la qualite du travail qu'effectue un employe en ce qUi touche aux comportements et aux resultats au travail, alors que c'est ce qui importe.
Chapitre 8 \ Gerer et evaluer Ie rendement au travail
DES RAISONS DE SE MEFIER DES TRAITS DE PERSONNALITE POUR l'EVALUATION DU RENDEMENT
Qu'est-ce qu'une personne sociable? Si l'on interrogeait 10 personnes sur ce point, chacune aurait une reponse differente. Dans une telle situation, chaque per sonne tente d'amener les autres a comprendre et a adopter sa propre definition de l'intelligence, du dynamisme, etc. D'autre part, les cadres sont rarement qualifies pour porter un jugement sur la personnalite des employes; s'ils Ie font, ils abusent tout simplement de leur autorite (ce sont des" supercadres» qui croient avoir la competence pour gerer la personnalite des autres !). D'ailleurs, meme les psychologues ciblent les comportements, et non la personnalite, en matiere de relation d'aide. Pourquoi? Parce que Ie fait de traiter de la personnalite menace inutilement l'estime de soi des personnes et n'indique pas precisement ce que ceUes-ci peuvent faire pour ameliorer leurs resultats. S'entendre dire que l'on est «moyennement sociable» a plutot Peffet d'un verdict irreversible qui rend l'etablissement d'objectifs impossible. Les gens peuvent changer leurs comportements mais pas leur personnalite, a moins d'etre prefS a y mettre des annees ... et encore. En outre, la presence (ou }'absence) d'un trait ne signifie pas necessairement }'adoption de comporte ments productifs ou l'obtention de bons resultats. Un c£imine} peut etre tres sociable et creatif de surcroit. Les comportements
Lorsque l'evaluation concerne des comportements, les employes savent pre cisement ce qu'ils doivent faire ou changer pour ameliorer leur rendement ou atteindre les resultats fixes. Si on les compare aux traits de personnalite, les comportements reduisent I'ambigulte ainsi que les problemes d'interpreta tion, de partialite et de generalisation abusive lors de l'evaluation du rende ment. Aussi, plutot que de reprocher it un employe de posseder ou de ne pas posseder un trait de personna lite, Ie superviseur devrait determiner les com portements que l'employe doit changer. Par exemple, au lieu de dire qu'un vendeur manque de sociabilite, il serait plus fructueux de relever les Com portements qu'on souhaiterait Ie VOir adopter: accueillir Ies clients avec Ie sourire, partager les taches d'entretien avec les autres vendeurs, exercer un suivi apres-vente aupres des clients, etc. Au lieu d'evaluer Ie sens de I'initiative d'un employe, il faut determiner les comportements lies a ce trait, comme «propose des idees constructives», «offre promptement son aide lorsque cela s'avere necessaire» et «assume des responsabilites sans qu'on Ie lui demande ».
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les defis de la performance
Au lieu d'evaluer Ie leadership d'un gestionnaire, il faut determiner les com portements vises, comme «etablit des priorites» et «obtient rapidement la collaboration des autres». Pour determiner les comportements dont l'evaluation tiendra compte, on peut preciser les responsabilites-cles associees a l'emploi ou a. la categorie d'emplois, c'est-a.-dire des facettes importantes du travail a accomplir. Par exemple, comme nous l'avons vu precedemment, on peut penser a trois responsabiIites-cles dans Ie cas des cadres: la supervision du personnel, la ges tion des ressources financieres et materielles de meme que la gestion de la qualite des produits et des services. Pour evaluer dans quelle mesure une per sonne assume chacune de ces responsabilites-cles, il peut eire interessant de proceder par ce qu'on appelle communement des incidents critiques, soit des comportements ou des faits qui distinguent un employe ayant un excellent rendement d'un employe ayant un rendement insatisfaisant. Le recours aux incidents critiques peut aider a. choisir les enonces de comportements visant a evaluer jusqu'a quel pOint une responsabiIite-cle est assumee. Ainsi, l'echelle de notation qu'on trouve a la figure 8.4 presente des comportements qui peuvent differencier des cadres qui gerent leurs subordonnes de maniere excellente de cadres qui les gerent de maniere inacceptable; on peut alors parler d'incidents critiques lies it la responsabilite de la supervision. Pour etre adequats, les enonces comportementaux visant a evaluer Ie ren dement sur chacune des responsabilites-cles doivent satisfaire a certaines exigences. Leur nombre doit eire suffisant pour qu'on puisse evaluer les mul tiples elements de la responsabilite, mais ils ne doivent pas eire trop nom breux car il faut eviter les enonces redondants. Autant que pOSSible, it chaque echelle doH correspondre un seul comportement. Les enonces doivent etre propres a chaque organisation, traduire les valeurs de celle-ci et cemer les dimensions importantes ou les attentes face aux titulaires. Comme Us per mettent une retroaction claire et precise sur Ie rendement, leur usage est prone par les tribunaux. Pour utiliser cette methode d'evaluation, Ie super viseur doit toutefois eire en mesure d'observer l'employe au travail afin de pouvoir accorder une cote. Les competences
Selon une enquete du Conference Board du Canada menee aupres de 219 organisations, bon nombre d'entre eUes disent utiliser la gestion par competences pour gerer Ie rendement des employes (Souque, 1996). Mais qU'entend-on par «competences»? En pratique, pour mettre au pOint leur modele de gestion par competences, la plupart des entreprises s'appuient sur des competences deja decrites dans des ouvrages (comme celui de Spencer et Spencer, 1993), Iesquels definissent les compHences comme etant des carac teristiques profondes et constantes de la personnalite teis Ie leadership, l'innovation, l'esprit d'equipe, la communication, la flexibilite ou la coope ration. Apres avoir recense les competences considerees par un groupe d'en treprises recourant a la gestion par competences, Zingheim, Ledford et Schuster (1996) ont constate qu'elles avaient tendance a mettre en avant les
Chapitre 8
I
Gerer et evaluer Ie rendement au travail
EXEMPlES DE COMPORTEMENTS PERMETTANT D'EVALUER LA SUPERVISION DES CADRES
memes competences, soit }'orientation vers Ie client, la communication, }'orientation vers l'equipe, l'expertise technique, l'orientation vers les resul tats, Ie leadership, l'adaptabilite et I'innovation. Sur ce dernier pOint, une
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Partie III
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Les defis de la performance
enquete de l'American Compensation Association (1996) revele que les mo deles de gestion par compHences utilises par les entreprises induent des com portements associes au rendement (94%, travail d'equipe, leadership, etc.), des attributs personnels (83 %, flexibilite, integrite, orientation vers les resul tats, souci du client, etc.), des connaissances (61 (Yo, gestion, produits de l'en treprise, etc.) et des habiletes techniques (55 %, comptabilite, vente, etc.). En somme, dans la pratique, les gestionnaires semblent regrouper sous Ie terme «competences II tous les criteres autres que ceux qui portent sur des resultats (tels les ventes, Ie nombre d'unites produites ou la realisation d'objectifs). Par consequent, dans la mesure OU une entreprise tient compte, de quelque fa~on que ce soit, des connaissances, des habiletes, des traits de personnalite, des aptitudes ou des comportements (tous des concepts differents des resultats) dans revaluation du rendement d'une categorie d'employes, eIle peut dire qu'eHe gere leur rendement en fonction de leurs competences. C'est pourquoi il faut faire preuve de prudence a l'egard des enquetes qui cherchent a evaluer la frequence de l'implantation de ce mode de gestion du rendement. Par ailleurs, la ou les competences correspondent a des traits de person nalite, on peut se demander en quoi la gestion par compHences ameliore les choses. Quels sont, en effet, la plus-value et Ie caractere innovateur d'un sys teme d'evaluation du rendement qui s'appuie en partie ou en totalite sur des traits de personnalite? Comme on Ie dit regulierement depuis de nombreuses annees, Ie fait d'evaluer des personnes sur la base de traits individuels est un processus subjectif, biaise et inutile a leur developpement. Par ailleurs, l'ex perience montre que Ie recours aux traits de personnalite comme criteres n'est pas considere comme valable devant les tribunaux. Que l'on qualifie ce genre d'exercice d'evaluation des compHences plutot que d'evaluation du rende ment ne Ie rend pas plus valable, pertinent ou utile. L'evaluation de toutes les categories de personnel repose sur un prealable: eviter les traits de personna lite et leur preierer des resultats et des comportements (ou des competences manifestees, suivant la terminologie employee par certains) directement lies au succes dans Ie poste. En conclusion, l'approche de Ia gestion par compe tences constitue davantage un changement de vocabulaire qu'un change ment de fond. Par ailleurs, ce changement n/est pas beneiique en soi, dans la mesure ou il a mene a utiliser ou a reviser des criteres rattaches a des traits de personnalite pour evaluer Ie rendement. Lorsque la gestion par competences sert a recourir davantage aux comportements ou a reviser ces derniers de maniere qu'ils correspondent mieux aux valeurs de l'entreprise, eUe peut s'averer saine, quoique cela n'assure pas la realisation des resultats ou des objectifs.
La realisation des resultats On peut egalement evaluer Ie rendement des employes en portant un juge ment sur leurs resultats, tels que la realisation de normes, ou standards - comme un taux d'unites produites a l'heure ou un cout par unite fabriquee -, ou de certains objectifs. Une enquete que la SociE>te Conseil Mercer (1996) a menee aupres de 471 entreprises canadiennes montre que les «buts-objectifs
Chapitre 8 ) Gerer et evaluer Ie rendement au travail
resultats» constituent les criteres de rendement les plus repandus; au total, 91 % des entreprises les utilisent. Lorsqu'il est question d'une evaluation en fonction des resultats, on parle de normes ou d'objectifs. Les normes de rendement - par exemple, «21 rap ports rempUs par jour», «un taux de reiet de 2 % des unites de production » sont souvent etablies a partir d'analyses de temps et mouvements et de don nees historiques de production. Ces normes doivent bien entendu etre revues quand d'importants changements se produisent dans Ie travail (sur Ie plan technologique, sur Ie plan de la repartition des taches, etc.). Elles servent sou vent a evaluer Ie rendement des employes de production et de bureau. La gestion par objectifs decrit un processus de gestion du rendement qui etablit d'abord des objectifs d'affaires, ensuite des objectifs par unite d'exploi tation (secteur, service, usine, etc.) et enfin des objectifs pour chaque employe. En pratique, la gestion par objectifs prend une varH~te de formes selon son caractere plus ou moins officieI, Ie taux de participation des subor donnes a la determination des objectifs, Ia qualite du suivi, etc. Au-dela de ces differences, la gestion par objectifs comprend essentiellement trois etapes:
• En debut de periode, Ie superieur et son subordonne s'entendent sur
des objectifs de rendement et discutent des moyens a prendre pour Ies
atteindre.
• En cours de peri ode, Ie cadre et l'employe se rencontrent regulierement pour discuter de la realisation des objectifs et pour decider ensemble d'eventuelles mesures correctives ou d'ajustements. • En fin de periode, Ie superviseur et l'employe se rencontrent pour examiner dans quelle mesure les objectifs preetablis ont ete atteints.
Cette approche est surtout utili see pour la gestion du rendement des cadres, la notion d'objectifs ayant ete davantage associee a la realisation de projets particuliers. Toutefois, il est possible d'etendre son utilisation aux pro fessionnels ainsi qu'aux employes de production et de bureau en etablissant des objectifs dits d'amelioration. Comparee aux enonces de comportements standardises, la gestion par objectifs permet d'individualiser Ies criteres de rendement etant donne que chaque employe a ses propres objectifs.
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Partie III
I Les defis de la performance La gestion par objectifs comporte toutefois certaines limites. D'abord, les objectifs fixes se bornent trop souvent it des elements facilement mesurables et realisables it court terme, comme Ie montant des ventes ou Ie nombre d'unites produites. Ils negligent alors des facettes du rendement qui sont plus difficiles it me surer ou dont la realisation requiert plus d'une annee, comme les demarches en vue de fideIiser les clients ou de developper un marche. Ensuite, cette approche peut etre une source de frustrations pour les employes evalues si leur superviseur ne considere pas suffisamment Ie fait que la reali sation des objectifs est partiellement determinee par des facteurs pouvant echapper it leur maltrise. Par exempIe, Ie nombre et la valeur des ventes effec tuees par des agents immobiliers sont tributaires du contexte economique. Par ailleurs, lors de l'utilisation de cette methode, il faut se mefier de deux ten dances que l'on peut observer parmi les subordonnes: la tendance it negocier avec Ie superviseur des objectifs facilement realisables et la tendance it adopter des comportements inadequats afin d'atteindre des objectifs. Finalement, il faut se rappeler qu'un seul constat sur la realisation d'un objectif n'a pas d'ef fet formateur pour l'empIoye et qu'il faut surtout discuter des facteurs qui influencent Ia realisation de cet objectif. La quasi-totalite des etudes portant sur la gestion par objectifs indiquent qu'elle entraine un gain de productivite (Rodgers et Hunter, 1991). Toutefois, ses atouts dependent du respect des diverses conditions de succes enumerees au tableau 8.6. Par exempIe, plutot que de se fixer un objectif vague du genre «ameliorer Ies benefices», il est preferable de viser I' objectif consistant a «atteindre un rendement de l'investissement de 14 % d'ici Ie 31 decembre 200X ». De meme, plutot que de viser l'objectif « mener une etude de marche sur Ie produit Z» il est recommande de fixer un objectif tel que «d'ici Ie 1er octobre, terminer une etude de marche permettant d'obtenir les informations A, Bet C sur Ie produit Z, et ce, a un colit maximal de 20000 $ ». I
L'approche mixte des resultats et des comportements L'experience nous enseigne qu'il est souvent preferable de recourir it la fois aux resultats (normes et objectifs) et aux comportements pour evaluer Ie rendement. Comme l'illustre la figure 8.5, ces deux facettes du rendement se distinguent et se completent. Dans la mesure ou l'on met l'accent sur l'un de ces deux types de criteres au detriment de I'autre durant une longue periode, des problemes surviennent. Lorsque seule Ia realisation de resultats compte, Ies employes seront plus tentes de prendre n'importe quels moyens pour par venir it ces fins. C'est Ie cas des representants commerciaux qui exercent une forte pression sur les clients pour conclure leurs ventes, ou des employes qui negligent la qualite afin de se conformer aux normes de production. Lorsque seule l'adoption de certains comportements compte, les employes adopteront les comportements valorises sans se preoccuper d'atteindre les resultats. C'est Ie cas d'un professeur d'universite qui se fait un devoir d'etre present a son bureau et d'assister it des reunions, mais qui ne se soucie pas de renouveler son materiel d'enseignement ou d'ecrire dans Ie domaine de ses competences.
Chapitre 8 \ Gerer et evaluer Ie rendement au travail
LES PRINCIPALES CONDITIONS DE PAR OBIECTIFS
sucds DE LA GESTION
Selon une methode mixte, Ies formulaires d'evaluation du rendement comprennent au moins deux sections. Dne premiere section porte sur les comportements (les moyens lies aux valeurs) et une seconde, sur les objectifs de rendement (les resultats lies aux objectifs d'affaires). Dans Ie calcul de la cote globale de rendement, Ie poids relatif de chacune des deux sections peut
LE RECOURS AUX RESULTATS ET AUX COMPORTEMENTS DANS L'EVALUATION DU RENDEMENT AU TRAVAIL
• Reposent sur des criteres individualises et flexibles (difficiles 11 comparer) • Prescrivent des buts 11 atteindre • Communiquent les priorites: utiles a I'orientation des efforts
• Reposent sur des criteres standardises et invariables (faciles 11 com parer) • Prescrivent des moyens a adopter • Communiquent les valeurs: utiles a la socialisation et a la formation
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varier en fonction de Ia categorie de personnel. Par exemple, pour Ie person nel de bureau et de production, un plus grand poids peut etre accorde a l'evaluation des comportements qu'a la realisation d'objectifs, alors que pour les cadres et les professionneIs, cela pourrait etre l'inverse. De meme, remarquons que Ie poids des divers enonces de comportements peut egalement varier en fonction de leur importance relative. Toutefois, it faut s'interroger sur la valeur du surplus de difficulte: si l'on determine un poids pour les divers enonces, ce dernier risque d'etre remis en question, sans compter que cela complexifie la compilation des resultats. II est preferable d'avoir des formulaires moins precis et moins compliques mais remplis que des formulaires longs et precis que les cadres repugnent
a remplir et que les employes critiquent.
Certes, it peut s'averer difficile de prescrire a certains employes des resul tats ou des comportements. Pensons, par exemple, aux travailleurs sociaux, aux psychologues ou aux psychiatres. II est hasardeux d'evaluer leur rende ment sur la base du nombre de clients rencontres dans une semaine, du nombre de dossiers menes a terme durant l'annee, et ainsi de suite. En outre,
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Gerer et evaluer Ie rendement au travail
il est douteux d'evaluer Ie rendement de chercheurs sur la base du nombre de
decouvertes durant l'annee, de leur ponctualite ou de leur assiduite aux reu nions. Aussi, on peut comprendre que dans certains cas, on doive retenir des traits de personnalite comme criteres d'evaluation.
8.6.3 L'entretien d'evaluation du rendement arrive souvent qu'on demande aux cadres de conduire des entretiens avec leurs employes pour faire, en fin de peri ode, un constat global et sommaire sur leur rendement. En plus de representer pour Ie gestionnaire un moment privilegie ou il peut exprimer sa reconnaissance a l'employe, l'evaluation annuelle lui permet de discuter avec celui-ci du developpement ou de l'ame lioration de son travail. Il est alors recommande d'orienter la discussion sur un nombre tres restreint de points a ameliorer (d'un a trois points). Il faut eviler de decourager l'employe; Ie fait de dresser une longue liste de choses a changer ne peut que Ie demotiver. Toutefois, bien des cadres eprouvent un malaise face a I'entretien, car ils ne savent trop comment Ie mener. A cet egard, les tableaux 8.7 et 8.8 lis tent certaines regles que Ie superviseur, d'une part, et Ie supervise, d'autre part, doivent respecter pour optimiser les bene fices d'un entretien d'evaluation du rendement. 11
Finalement, l'adoption de plus en plus repandue de modes d'organisation du travail centres sur les equipes autonomes incite nombre d'entreprises a se lES REGlES QUE lE SUPERVISELIR DOlT RESPECTER POUR OPTIMISER l'EFFICACITE DE l'ENTRETIEN D'EVALUATION DU RENDEMENT
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Partie III , Les defis de la performance
preoccuper davantage de la gestion du rendement de groupe afin de favoriser l'esprit de collaboration. II sera alors question de normes ou d'objectifs pour l'unite de travail et de rencontres de groupe ou l'on discutera de l'avancement des projets et de l'etablissement d'objectifs collectifs. Pour rendre plus efficace 1a retroaction donnee aux equipes, de nombreuses entreprises utili sent des moyens visuels qUi illustrent l'evolution des resultats (camme des graphiques, un thennometre OU les progres sont indiques, des affiches qui montrent 1a production de la journee). Toutefois, meme lorsqu'ils travaillent selon un mode d'organisation en equipe, les employes veulent recevoir une retroaction sur leur rendement individueL La retroaction sur Ie rendement de l'equipe n'entraine donc pas l'abandon de 1a retroaction sur Ie rendement individueL
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Gerer et evaluer Ie rendement au travail
lES REGlES QUE lE SUPERVISE DOlT RESPECTER POUR OPTIMISER l'EFFICACITE DE l'ENTRETIEN D'EVALUATION DU RENDEMENT
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8.6.4 Les sources d'evaluation du rendement au travail Au cours des annees 1990, Ie principal changement qu'on a observe en ma tiere de gestion du rendement au travail a trait a la nature des personnes aupres desquelles on collecte de l'information sur Ia contribution des em ployes. L'expression «retroaction multi source » (ou a 360°) qualifie Ie proces sus par lequel on collecte de l'information sur Ie rendement des employes en consultant plusieurs personnes qUi sont en mesure de porter un jugement a ce sujet, so it Ie superieur immectiat, les collegues, les subordonnes de la per sonne evaluee, l'employe evalue lui-meme (on parle alors d'autoevaluation), les clients internes ou externes, etc.
Une enquete de la Societe Conseil Mercer (1996) realisee aupres de 471 entreprises canadiennes indique que 31 % d'entre elles ont introduit l'evaluation du rendement par les pairs et l'evaluation du rendement du superviseur par les subalternes au cours des 2 annees precedentes, et que 21 %
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Gerer et evaluer Ie rendement au travail
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des autres organisations songent ales introduire dans l'annee qui suit. Ce resultat est conforme a l'enquete de Hewitt & Associes (1995) qUi montre que, dans pres de 62 % des 642 entreprises canadiennes et americaines partici pantes, les employes procectent a une autoevaluation de leur rendement. Quoique Ie superieur immectiat constitue la source d'evaluation dans
laquelle les employes ont Ie plus confiance (Gosselin, Werner et Halle, 1997),
Ie recours a d'autres sources d'evaIuation du rendement comporte des avan tages. Premierement, avec les nouvelles approches de gestion axees sur la qualite totaIe, sur l'amelioration continue, sur les equipes de travail et sur la participation des employes, il devient plus important de consulter l'employe lui-me me, ses collegues, les clients et les subordonnes afin de juger des diverses facettes du rendement des personnes. Deuxiemement, la credibilite d'une retroaction se trouve ameIioree dans la mesure ou Ie message est exprime par plusieurs sources d'evaluation.
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.~~~~~P.~~~~! .1~. !~!1.~~~~~~ L'evaluation du rendement influence les comportements et les attitudes des employes, et ce, encore plus lorsqu'eUe est liee a des recompenses. La derniere etape du processus de gestion du rendement - recompenser Ie rendement s'avere tres importante. En effet, les employes cherchent a accomplir les acti vites qui seront evaluees et surtout recompensees. Bon nombre de cadres voient dans l'evaluation du rendement un outil de contrOle, alors qu'elle s'avere d'abord et avant tout un outil de reconnaissance, de mobilisation et de developpement a l'egard de la quasi-totalite du personnel.
Un service de la production, par exemple, a commence it afficher les resultats du rendement de l'unite sur de larges panneaux que les employes pouvaient regarder it l'entree de l'usine. Au debut, les graphiques ont suscite de l'interet et des discussions parmi les employes. Toutefois, l'interet de ces demiers s'est vite resorbe. Lorsqu'on leur a demande la raison de ce fait, Us ont repondu qu'ils avaient d'abord cru que quelque chose resulterait de l'amelioration des resultats (comme un prix, line prime, une celebration ou meme Ie remer dement sincere d'lln dirigeant). Comme rien de cela ne s'est produit, ils ont aussitOt perdu leur interet pour cette pratique et sont retoumes it leurs acti vites normales. ld, une retroaction a ete donnee, mais elle n'etait pas liee a des recompenses (Hillgren et Cheatham, 1996, p. 18). Comme nous Ie verrons au chapitre 11, la reconnaissance et la recompense de la contribution de l'employe peuvent se faire sous une multitude de formes tant pecuniaires que non pecuniaires. Notons que l'efficacite d'une recom pense n'est pas proportionnelle a son couto A elles seules, la plupart des formes de renforcement, telles que les prix, les trophees ou l'argent, ont rarement une grande influence sur la motivation des employes au travail. Pour devenir efficaces, elles doivent etre couplees a des formes personnali sees de reconnaissance, comme les remerciements, les encouragements, les
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Partie III
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Les defis de la performance
felicitations ou I'ecoute. Ces dernieres formes ont l'avantage d'etre peu couteuses et de ne pas necessiter un chambardement des politiques de I'organisation.
8.7.1 Premiere regle: recompenser les bonnes choses Toutefois, il faut se mefier: les recompenses fonctionnent parfois trap bien! Celles-ci motivent les personnes a faire ce qu'il faut pour les obtenir. Aussi, dans la mesure ou les criteres d'octroi des recompenses sont inadequats ou desuets, les employes seront dans certaines occasions motives a faire des choses qui vont a l'encontre de la prosperite de l'entreprise. Avec l'approche axee sur la reconnaissance, il y a toujours un risque de recompenser des resul tats non appropries. Un programme de recompenses n'est reellement effi cace que lorsqu'i! influence les comportements des employes d'une maniere positive.
8.7.2 Deuxieme regle : choisir la bonne mesure du rendement L'efficacite d'un programme de recompenses repose egalement sur la qualite - reelle et, surtout, per~ue - de la mesure ou de I'evaluation du rendement. Les employes per~oivent-ils Ie systeme d'evaluation du rendement com me etant equitable? Pensent-ils que les personnes qui evaluent leur rendement ont les competences pour Ie faire et Ie font bien? Les cadres et les dirigeants d'entreprise ont tendance a priviJegier les me sures quantitatives et facilement accessibles du rendement parce qu'elles sont soi-disant plus objectives a leurs yeux et moins susceptibles d'etre sondees par les employes. Toutefois, on risque alors de retenir n'importe quel critere quan titatif ou seulement des criteres quantitatifs. Par exemple, l'etude de Gomez Mejia et Balkin (1992) montre que la plupart des chefs de service et des doyens d'universite s'appuient exclusivement sur les evaluations des etu diants pour evaluer l'enseignement des professeurs. Pourtant, les trois quarts des professeurs interroges s'accordent a dire que cette mesure reflete plus la popularite des professeurs que les connaissances acquises, Ie rendement des etudiants ou Ia rigueur des cours. Par ailleurs, Ies recompenses doivent souligner une contribution passee, et donc verifiable. Un programme de recompenses se deprecie quand il tient compte d'autres facteurs, aussi legitimes sOient-ils, comme les efforts, Ie po tentieI, les projets, Ia situation personnelle ou Ie besoin d'argent. Ainsi, un prix d'excellence ou de la releve d'excellence dans un domaine donne (par exemple, la recherche, l'enseignement, les affaires, les arts ou les sports) doit etre accorde en fonction de la qualite et de la quantite des realisations anterieures du candidat. Lorsqu'on considere d'autres facteurs tels que la qua lite d'un projet, il est plutot question d'une subvention ou d'un prix accorde au meilleur projet. De la meme maniere, un prix de pedagogie doit tenir compte strictement des realisations passees dans I'enseignement, une medaille d'or olympique, de la performance lors d'une epreuve sportive, un
Chapitre 8
I Gerer et evaluer Ie rendement au travail
prix d'architecture, de la qualite et du nombre de projets architecturaux prece dents, un prix de la rel<~ve d'excellence en affaires, des realisations du jeune homme ou de la jeune femme en matiere de gestion, et ainsi de suite. La regIe est tres simple: un prix ne se justifie que par les realisations anterieures. Malheureusement, cette regIe est rarement respectee. Cela explique pourq,":oi certains titres honorifiques perdent de leur credibilite aux yeux des employes.
8.7.3 Troish!me regle: lier les recompenses au rendement II faut oubHer Ie mythe selon lequelles salaires eleves, les bons avantages so ciaux et la securite d'emploi quasi absolue motivent les employes a accroitre leur rendement. Cela ne signifie pas que les employes ne soient pas satisfaits de ces elements. En fait, une genereuse recompense qu'on accorde egalement a tous les employes d'une entreprise les motive plus a demeurer au service de l'entreprise (les plus motives a rester n'etant pas necessairement les plus per formants) qu'a se surpasser (l'acces a la recompense n'etant lie ici qu'au fait de rester dans l'entrepnse ou de qUitter celle-d). Les recompenses peuvent motiver Ies employes a se surpasser dans Ia mesure ou eUes sont rattachees a leur rendement. Motiver ne veut donc pas dire contenter tout Ie monde, par exemple en nommant «employe du mois >} les employes a tour de role, mais s'assurer que les recompenses sont fonction du rendement, et surtout que cela est per\U comme tel par Ies employes. En effet, les perceptions des gens sont cruciales; ces derniers agissent d'ailleurs sur la base de leurs perceptions de la realite. II arrive souvent que Ie lien entre Ie rendement et la recompense soit reel mais qu'un manque de communication ou un climat de mHiance fasse en sorte qu'il ne soit pas per~u; en consequence, la recompense aura peu d'effet sur la motivation au travail.
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avec soin le systeme de gestion du rendement .Gther . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ~
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Comme Ie presente Ie tableau 8.9, Ie SUCcE~s d'un systeme de gestion du ren dement est fonction de la quaIite des techniques, de leurs utilisateurs et du contexte organisationnel. Ceia signifie que pour maximiser Ie succes d'un sys teme de gestion du rendement, il faut bien sur disposer d'un formulaire adequat, mais il faut surtout consacrer des efforts (et done du temps et de l'ar gent) en vue de Ie promouvoir et de l'expIiquer aux employes evalues et a leurs superieurs au moyen d'activites regulieres de formation et de communi cation. Quand bien meme on donnerait a quelqu'un un superbe banc de me nuisier, s'H ne comprend rien ala menuiserie, il ne fera rien de bon avec! Le meme raisonnement s'applique aux formulaires d'evaluation du rendement: ces outils ne peuvent pallier Ie manque de competences des evaluateurs. De maniere a optimiser l'efficacite d'un systeme de gestion du rendement, il est necessaire de respecter les conditions suivantes lorsqu'on elabore ce
systeme ou lorsqu'on Ie revise:
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Les defis de la performance
l'EFFICACITE DU SYSTEME DE GESTION DU RENDEMENT
• II faut se constituer une equipe d'elaboration du systeme efficace. • Il faut justifier l'elaboration d'un systeme ou la modification du systeme actuel du point de vue des dirigeants, des cadres et des employes.
• n faut preciser les attentes des dirigeants, des cadres et des employes. • n faut proceder a cette intervention durant une periode ou les relations du travail et Ie climat de travail sont bons.
• n faut etablir un echeancier et communiquer les etapes de l'elaboration ou de la revision du systeme. • Il faut tenir les dirigeants informes du deroulement du processus d'elabo ration ou de revision du systeme, et obtenir leur appui. • II faut obtenir l'avis des utilisateurs (cadres et employes) tout au long du processus en recourant a des groupes de discussion. • II faut limiter les attentes et ne pas se perdre dans les details. • II faut preterablement tester Ie systeme au sein d'une unite, d'un service ou d'un groupe. Le tableau 8.10 enumere les erreurs les plus susceptibles d'etre faites par les superviseurs. Par exemple, certaines etudes indiquent que les evaluateurs se montrent souvent indulgents dans l'evaluation du rendement de leurs employes afin d'eviter diverses consequences negatives liees notamment au climat de travail, aux relations du travail de me me qu'a la motivation et a la satisfaction au travail des employes (voir Morin, Murphy et Larocque, 1999, pour une revue de la litterature). Parmi les nombreux moyens permettant a l'evaluateur de limiter ces erreurs, on compte les suivants: appuyer son eva luation sur des criteres objectifs (resultats et comportements) et pertinents, ne pas comparer l'employe a sOi-meme, sonder ses jugements aupres d'autres evaluateurs, se metier des ruIlleurs en verifiant leur vera cite, evaluer une facette du rendement a la fois avant de porter un jugement global et prendre regulierement des notes sur Ie rendement.
Chapitre 8
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Gerer et evaluer Ie rendement au travail
QUELQUES ERREURS DONT LES CADRES DOIVENT SE MEFIE~ LORS DE l'EVALUATION DU RENDEMENT DE LEURS SUBORDONNES
II s'avere egalement important que la direction recompense ses cadres qUi savent reconnaitre leurs subordonnes dont les comportements et les paroles sont meritants: les cadres aussi ont besoin d'etre recompenses. Le tableau 8.11 presente un ensemble de questions qu'il faut se poser si l'on veut ameliorer la motivation des cadres a evaluer avec soin Ie rendement de leurs subordonnes. L'efficacite de la gestion et de l'evaluation du rendement est egalement fonction du contexte organisationnel. Consequemment, il est important que l'entreprise adopte une approche systemique de la gestion du rendement, qui se preoccupe de l'amelioration continue du rendement du groupe, des
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Les dtHis de la performance
systemes, des structures et des processus, et qUi recherche les veritables sources d'improductivite (Waldman, 2000). Ainsi, quoique la documentation preconise depuis belle lurette l'adoption de comportements de coaching, force est d'admettre leur absence de nom breux Heux de travail. En effet, il existe un ecart entre les dires des cadres et leurs actes quotidiens. Il y a aussi une difference entre, d'une part, assister a un cours ou lire sur Ie coaching et, d'autre part, modifier des comportements de supervision. A cet egard, les dirigeants ont la responsabilite de reperer les facteurs organisationnels susceptibles d'empecher I'adoption de comporte ments de coaching parmi les cadres. Par exemple, autant les normes de groupe peuvent etre contraignantes et nuire au rendement, autant eHes peuvent Ie promouvoir et Ie stimuler. Les dirigeants doivent veiller au maintien d'un climat ou les employes qui produisent «de la qualite en bonne quantite » sont respectes, ou chacun se sent responsable de son propre rendement et du ren dement de l'entreprise. Lorsqu'on vise l'amelioration de la productivite, il faut s'interroger sur Ie travail a faire et eliminer les taches superflues. Cela est particuIierement important dans Ie secteur des services ou l'on demande de plus en plus aux employes de faire des choses qui n'ont rien a voir avec leur qualification et Ie sens reel de leur travaiL Prenons Ie cas des infirmieres qui doivent remplir de nombreux documents, alors qu'eHes sont formees et embauchees pour assurer des soins aux patients. Ou encore prenons Ie cas des professeurs d'universite qui passent beaucoup de temps a sieger a des comites plutot que d'enseigner, de conseiller les etudiants, de faire de la recherche et de rediger des articles dans Ie domaine ou ils sont specialises. Au-dela ·d'un certain seuil, un tel elar gissement des taches n'est pas enrichissant: il diminue la motivation au tra vail des employes, car on leur demande d'executer des activites qui ne sont
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I Gerer et evaluer Ie rendement au travail
L'INFLUENCE DU CONTEXTE SUR LA MOTIVATION DES CADRES A EVALUER AVEC SOIN LE RENDEMENT DE LEURS SUBORDONNES
pas importantes pour leurs clients (dans nos exemples, les patients et Ies etudiants). Lorsque la procedure d'evaluation nuit a la qualite des services et des produits ou exige qu'on la neglige pour reussir a satisfaire les clients, il est essentiel de s'interroger sur sa pertinence et non sur son respect par les employes. II est evident que Ie fait de travailler dans un environnement syndique ou dans un environnement non syndique agit sur Ie type de gestion du rende ment. En general, les syndicats veulent proteger les employes des jugements arbitraires des cadres. Aussi, leur receptivite a l'egard d'un processus de gestion du rendement est susceptible d'etre plus grande dans les conditions suivantes. • Les criteres de rendement sont objectifs, standardises et s'appuient sur des donnees historiques.
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I Les defis de la performance • Les resultats des evaluations du rendement individuel n'influencent pas la remuneration individuelle des employes et sont utilises dans un but de formation seulement. • Le cUmat de travail est bon. • L es d"lngeants exercent un style de gestion transparent et communiquent
de l'information sur les resultats de l'entreprise. • Les dirigeants veulent partager les gains de rendement sous forme de regimes collectifs de remuneration. Depuis quelques annees, on commercialise des systemes informatises d'evaiuation du rendement des employes (par exemple, Avontos Performance Appraisal, Employee Appraiser d'Austin-Hayne ou enCOre Performance Now de KnowledgePoint). Selon Grote (1996), ces produits possedent certaines caracteristiques pouvant aider les evaluateurs inexperimentes. • Ils presentent une interface que les cadres peuvent assez facilement apprendre a utiliser. • lIs verifient si Ie cadre utilise des termes illicites ou illegaux dans son evaluation. • lIs presentent des formats et des contenus varies selon les categories de personnel. • lIs suggerent des exempies ann d'aider Ie cadre a appuyer ses felicitations ou ses critiques. • Ils donnent des recommandations et des conseils en matiere de gestion du rendement. • Ils suggerent des habiletes ou des competences liees a diverses categories de postes. • Ils permettent de cumuler regulierement de l'information sur Ie rende ment des employes. De meme que certains logiciels peuvent aider des personnes a remplir leurs declarations d'imp6ts, de meme les logiciels d'evaluation du rendement peu vent aider les cadres a mieux suivre et a mieux evaluer Ie rendement des employes. Toutefois, Ie parallele s'arrete la: les declarations d'imp6ts ne con tiennent que des donnees quantitatives, alors que la gestion du rendement impUque davantage d'elements a caractere qualitatif et interpersonnel qui ne peuvent etre traites par une machine. De plus, etant donne que ces logiciels sont conc;:us pour satisfaire la plus large clientele possible, ils y a des chances qu'ils soient peu appropries a un contexte ou la culture de gestion s'avere dis tincte. Comme Ie rapporte Noel (2000), aux Etats-Unis, un sondage realise cemment par I'American Management Association aupres de 2133 directeurs des ressources humaines montre que de plus en plus de grandes entreprises americaines enregistrent les appels telephoniques des employes, passent en revue leurs courriels, surveillent leurs connexions a Internet, consultent leurs fichiers informatiques, bloquent certains numeros de tell~phone ou l'acces a certains sites Internet. La moitie des participants disent avoir deja reprimande
Chapitre 8
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Gerer et evaluer Ie rendement au travail
des salaries pour avoir utilise a des fins personnelles Ie teI{~phone, Ie courrier electronique ou Internet, alors que Ie quart d'entre elles ont deja congectie un employe pour avoir fait une utilisation abusive de ces outils. Les entreprises qui recourent Ie plus aces methodes sont les banques, les sodetes de court age, les societes immobilieres et les compagnies d'assurances. Cependant, les cen tres d'appels seraient les plus grands adeptes de la surveillance systematique puisqu'ils comptabilisent les minutes pas sees au telephone de meme que Ie nombre de produits vendus et la qualite du service rendu. Un recours exces sif aux nouvelles technologies en vue de contr6ler Ie rendement des employes peut avoir un effet contre-productif sur Ie climat de travail et, consequem ment, sur la productivite du personnel. L'employeur est tenu d'offrir des conditions de travail raisonnables et respectueuses des personnes, tandis qu'un contr6le excessif - meme s'H prend une forme moins apparente compromet la satisfaction de cette exigence.
Le tableau 8.12 presente un ensemble de recommandations visant a s'assu rer qu'un systeme de gestion du rendement est gere de maniere equitable et efficace. L'enquete de Hewitt & Assodes (1995) montre d'ailleurs que la OU l~s system~s de gestion du rendement s'averent efficaces, les dirigeants parti Clpe~: actlve~ent a leur conception et a leur mise en place, et Ies employes partlClpent actlvement au processus de gestion du rendement. Bien entendu, la prise en consideration des principes U~gaux devient encore plus importante lorsqu'il faut gerer les cas d'employes ayant des problemes de rendement ou des comportements au travail inacceptables.
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Partie III
I
Les defis de la performance
RECOMMANDATIONS POUR RENDRE EQUITABLE ET EFFICACE LA GESTION D'UN SYSTEME DE GESTION DU RENDEMENT
Conclusion La gestion du rendement au travail est au creur des responsabilites des cadres en matiere de supervision. C'est d'abord sur eux que repose la qualite de cette activite. Pour aider les cadres a reI ever ce dHi, il n'existe malheureusement aucun systeme de gestion du rendement qui soit parfait ou qui fasse l'una nimite parmi Ie personnel. Toutefois, il est fort important de s'assurer que Ie systeme de gestion du rendement est gere adequatement et ne comporte pas de lacunes sur Ie plan legal. Par ailleurs, il est important d'insister sur Ie fait que Ie souci d'ameliorer Ia productivite et Ie rendement ne permet pas d'exploiter et de harceler des employes, et de leur imposer des conditions de travail nuisibles a leur sante physique et psychologique.
Chapitre 8 \ Gerer et evaluer Ie rendement au travail
(J)
de r evision
o rendement QueIle est J'utHite de bien gerer Ie des employes? • Qu'est-ce qUi distingue I'evaluation
o
du rendement de la gestion du rendement? Comment peut-on determiner les indicateurs de rendement qUi de vraient etre valorises dans une organisation?
e Qu'est-ce qui distingue I'evaluation
du rendement de l'evaluation du potentiel? QueUes sont les princi pales repercussions de cette diffe rence sur Ie processus de gestion du rendement?
" Pourquoi est-il important d'exercer un suivi sur Ie rendement des em ployes tout au long de l'annee?
CD
QueUes sont les principales respon sabilites d'un coach et les qualites qu'il faut posseder pour devenir un bon coach? . , Pourquoi faut-it eviter de recourir aux traits de personnalite pour eva luer Ie rendement des employes?
o Quels criteres et methodes les orga
nisations utilisent-eUes Ie plus sou vent pour evaluer Ie rendement de leurs employes? En quoi ces criteres et ces methodes se distinguent-ils et se completent-ils?
de leurs employes? Comment peuvent-Hs minimiser la possibilite de faire de telles erreurs ?
(f) A queUes conditions un
formulai~e
d'evaluation du rendement sera-t-II juge adequat et rempli convenable ment par les cadres et les employes? ~ Qu'entend-on
par
«retroaction
multisource» ?
(I) Quels sont les avantages lies
a
l'autoevaluation des employes?
(I) QueUes sont les principales condi tions qu'un cadre doit respecter pour optimiser Ie succes des entre tiens d'evaluation du rendement avec ses subordonnes? ~ Pourquoi
est-il important de former Ies cadres en matiere de gestion du rendement et queis sont les princi paux sujets sur Iesqueis ils sont susceptibles d'avoir besoin d'une formation?
~ Comment
peut-on optimiser Ia motivation des evaluateurs a eva luer avec soin Ie rendement de leurs employes?
f) QueUes sont les principales condi tions qu'un employe evalue doit respecter pour optimiser Ie succes de son entretien d'evaluation du rendement avec son superieur hierarchique?
CD Quelles caracteristiques peuvent aider a evaluer la qualite des objec
® Enumerez les regles a respecter pour
tifs de travail qui sont fixes pour un employe?
optimiser l'efficacite et l'equite d'un systeme de gestion du rendement.
(fi) De
queUes erreurs les cadres doivent-ils se metier lorsqu'ils pro cedent a l'evaluation du rendement
(Ii) Pourquoi la reconnaissance du ren dement est-elle imponante?
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Partie III
I
Les defis de la performance
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Chapitre 8
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I
Gerer et evaluer Ie rendement au
travail
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Partie III
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Les defis de la performance
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DAS,
H.
et
A.
Chapitre 8
I
Gerer et evaluer Ie rendement au travail
Le client est Toi 31
11 est 11 heures. Jeanne
Labonte, res ponsable du rayon des vetements pour femmes chez Longpre, attend depuis une dizaine de minutes devant Ie bureau du directeur du magasin, Marcel Sansfa~on. Lorsque la secretaire de M. Sansfa~on l'a appelee, Mme Labonte n'a pas pu savoir pourquoi il voulait la voir ce matin. Elle se demande si c'est a propos de M. Veilleux, un client qu'elle a refuse de servir la semaine derniere. Cetait un bon client. Au cours des der niers mois, il venait frequemment au magasin et achetait beaucoup. II cher chait alors des vetements de qualite pour sa mere. Par contre, les vendeuses se montraient de plus en plus reticentes a Ie servir. En effet, M. Veilleux se mon trait arrogant et faisait de plus en plus d'insinuations sur leur physique ou sur leur vie privee. La semaine dernil~re, 11 a meme demande a une vendeuse d'es sayer un vetement pour lui montrer l'allure qu'il avait. Cen etait trop. Mme Labonte lui a alors explique que la poIitique du service a la clientele du magasin n'implique pas de servir des clients qUi ne traitent pas respectueu sement les vendeuses. M. Sansfa~on a replique que, vu la quantite de vete ments qu'il avait achetes a ce jour au magasin Longpre, les choses n'en reste raient pas la et qu'il allait se plaindre. Mais Mme Labonte n'a pas bronche et Ie client est parti en l'insultant. Il est 11 h 20 lorsque M. Sansfac;on arrive au magasin. II fait alors entrer Mme Labonte dans son bureau.
Prendriez-vous un cafe, un lUS ou de l'eau? demande-t-il a Mme Labonte en lui faisant signe de s'asseoir. - De l'eau seulement... Merci. M. Sansfa~on demande a sa secre taire d'apporter un verre d'eau a Mme Labonte. II fait beau depuis quelques jours, n'est-ce pas? Comment va la famille? - Je n'ai pas de famille, monsieur. Je vis avec rna mere. - Bien... Vous etes avec nous depuis bientot un an, et je crois qu'il est temps que nous ayons une petite conversation. - Qui, monsieur, repond Mme Labonte. Je suis contente d'avoir l'occasion de vous parler. -
Mme Labonte se demande pourquoi elle est si nerveuse; les ventes du rayon des vetements pour femmes ont aug mente par rapport aux annees ante rieures, elle assume bien son role de responsable et elle gere bien son person nel constitue de six vendeuses. - Je voulais discuter avec vous ... M. Sansfa~on est interrompu par la sonnerie de son telephone cellulaire. II discute un peu avec son interlocuteur et convient avec lui d'un rendez-vous a l'heure du lunch. -
Bon, comme je Ie disais, reprend-il, )'aimerais
VOllS
pader de ... de votre
bon travail. Vous avez depasse les
3. Cas redige par Sylvie St-Onge et reproduit avec la permission des HEC Montreal. Ce cas est inspire de T. H. Stone et N. M. Meltz, "Performance Review at Berghoffs», Human Resources Management in Canada, Toronto, Harcourt Brace, 1999, p. 306-307.
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Partie III
I
Les defis de la performance
objectifs de ventes de votre rayon, Ie vol a I' etalage a baisse et les deux nouvelles vendeuses que vous avez engagees semblent tres competentes. Fiere d'elle, Mme Labonte se detend. - Merd, monsieur. J'apprede beaucoup ... - Mais je ne comprends pas, l'inter rompt M. Sansfa~on, que vous ayez mis dehors M. Veilleux, un si bon client. Vous savez que la politique du service a la clientele est tres impor tante pour Ie magasin, et comme res ponsable, vous devez agir comme un modele. Le reglement... - Je peux vous expliquer. .. commence a dire Mme Labonte. La politique, continue M. Sansfa~on, est la pour etre observee. Si, aujour d'hui, Ie magasin Longpre a cette reputation, c'est justement en raison de la qualite de son service ... Mais laissez-moi vous expliquer. .. l'interrompt Mme Labonte. 11 n'y a aucune explication, aucune excuse! la coupe M. Sansfa~on en haussant Ie ton et en frappant du poing son bureau. Chez nous, Ie client est roi! Je sais, monsieur, mais, voyez-vous, ce client ... - Un client doit etre traite avec con sideration. £t vous avez traite M. Veilleux d'une maniere irres pectueuse! Je ne peux tol€~rer cela de la part du personnel de vente, et encore moins d'une responsable! Avez-vous compris ce que ceia veut dire? Je ne veux pas que des clients se plaignent de la qualite du service offert dans mon magasin!
- Oui, monsieur, begaie Mme Labonte. M. Sansfa<;on se leve calmement, contourne son bureau et serre 1a main de Mme Labonte en ajoutant: - ]'ai confiance que de telles erreurs ne se repeteront pas. Tachez seule ment de rappeler a votre personnel de veiller a satisfaire les clients et assurez-vous d'etre un modele pour vos vendeuses. Bien. Je dois main tenant me rendre a un rendez-vous. Mme Labonte quitte Ie bureau, fois abasourdie, de~ue et fachee.
a la
Une fois qu'elle a referme la porte, M. Sansfa~on remet son manteau pour aller a son rendez-vous. II pousse un soupir de soulagement. « II n'est jamais facile de critiquer quelqu'un, pense-t-il, mais il faut bien que quelqu'un Ie fasse! Comme les affaires seraient agreables s'il n'y avait pas tous ces problemes avec les employes! »
o QueUes erreurs ou quels manque ments ce cas fait-it ressortir? Jus tifiez votre reponse.
8 D'apres
vous, queUes peuvent etre les incidences de cet entretien sur les attitudes et les comportements au travail de Mme Labonte et de son equipe?
. , Revisez Ie deroulement de l'entre tien et reecrivez Ie dialogue en tentant de demontrer comment M. Sansfa~on aurait pu mener un entretien du suivi plus efficace.
Chapitre 8
I Gerer et evaluer Ie rendement au travail
Deux poids, deux mesures4 ? Mme Larue, chef du service de re cherche en marketing des Aliments Sante, est tres anxieuse. Elle doit evaluer Ie rendement de deux nouvelles recrues universitaires, Sophie Ladouce et Louise Bontant, engagees il y a six mois pour combler deux postes de professionnel similaires. Cette evaluation vise princi paIement a transmettre aux nouveaux employes des informations qui les aide ront a obtenir une cote de rendement satisfaisant a la fin de leur annee de probation. Les commentaires que Mme Larue adresse a Sophie sont dans l'ensemble fort eIogieux. EIle a atteint les objectifs fixes. A ses yeux, Sophie est creatrice, dynamique et fait preuve d'un profes sionnalisme exemplaire. Sa tenue vesti mentaire est soignee; elle porte souvent un tailleur agence avec d'elegants acces soires. En fait, Mme Larue croit qu'elle est destinee a un brillant avenir chez Aliments Sante. L'evaluation de Louise est differente. Louise a atteint les objectifs de rende ment etablis, mais son attitude l'agace, bien qu'elle ne puisse rien lui reprocher en particulier. Louise ne se gene pas pour dire ce qu'elle pense. Son imagination et sa grande force creatrice la conduisent souvent a remettre en question les
pratiques etablies. Louise a tres rarement l'occasion de rencontrer des clients ou d'autres intervenants externes. Elle aime s'habiller confortablement i son vetement prefere est Ie jeans. Pour Mme Larue, cette apparence decontrac tee cadre difficilement avec la culture pronee par les dirigeants de l'entreprise. Mme Larue sait que Louise et Sophie sont plus que deux collegues de travail. Elles viennent de la meme region, elles ont obtenu leur B.A.A. a la meme uni versite et elles ont emmenage ensemble, a Montreal, apres avoir ete engagees chez Aliments Sante. Elle se demande d'ailleurs comment deux fiIles si diffe rentes peuvent etre de si bonnes amies.
o Les
criteres qu'utilise Mme Larue pour evaluer Ie rendement de Sophie et de Louise sont-ils appropries? Expliquez votre reponse.
e Mme Larue devrait-elle discuter avec Louise des traits de sa personnalite qui l'irritent? ]ustifiez votre reponse.
e Que peut faire une entreprise pour aider des gestionnaires comme Mme Larue a evaluer Ie rendement de leurs subordonnes ?
4. Ce cas a ete redige par Mario Giroux, sous 1a direction de Sylvie St-Onge. Reproduit avec 1a permission des HEC Montreal.
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Partie III
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Les defis de la performance
I!evaluation du Tendement de CaTolineS Depuis trois ans, Yves est chef de reception pour un important complexe hotelier, Le Chateau Carlton. Il a com mence a travailler dans cet hotel en tant que receptionniste a temps partiel alors qu'il etait etudiant. A la fin de ses etudes, il a ete engage comme reception niste a temps plein, pour ensuite etre promu au poste de chef de reception. Aujourd'hui, Yves rencontre Caroline, une receptionniste a temps plein, pour discuter de son rendement. Caroline est une personne reservee et peu volubile. Lorsqu'elle repond a un client, eUe se fait tres discrete et evite les conversations superficielles. Caroline a mis au point une banque de fiches per sonnalisees afin d'y noter les prefe rences des clients habituels. Elle n'hesite pas a faire parvenir aux chambres des bons clients des produits particuliers tels qu'un peignoir de bain, un panier de fruits ou une bouteille de vin mousseux. Son efficacite et sa discretion semblent appreciees par de nombreux clients. Plusieurs ont d'ailleurs loue la qualite de ses services sur Ie formulaire « Satisfaction des clients» remis a la reception de l'hoteL
Lors de l'entretien d'evaluation du rendement, Yves reproche a Caroline de ne pas assez discuter avec les clients. Rappelons ses propos: «Lorsque j' etais receptionniste, je n'hesitais pas a parler de tout et de rien avec les clients re guliers. Je les appelais meme par leur prenom afin qu'ils puissent trouver l'ac cueil chaleureux. Mes collegues de tra vail m'avaient meme surnomme "Ie bouffon de la reception" et les clients m'appreciaient justement pour mon sens de l'humour! »
A la fin de I'entretien , Caroline est tres de~ue. Yves lui a donne une cote de 3,5/5 pour la dimension «satisfac tion des clients » de son travaiL
o QueUe erreur cet incident critique met-il en evidence en ce qui con cerne 1'evaluation du rendement?
f) Au cours des semaines qui suivent l'entretien, Yves remarque une cer taine hostilite dans ses rapports avec Caroline. II ne comprend pas, car il ne voulait que l'aider. II vous de mande votre opinion et vos conseils.
5, Ce cas a ete rMige par Anabel Paquet-Gagnon, sous la direction de Sylvie St-Onge. Reproduit avec la
permission des HEC MontreaL
Apres l'etude de ce chapitre, Ie Iecteur devrait etre plus apte
a:
• Comprendre ce qu'est un employe difficile, l'importance d'intervenir ade quatement a son egard ainsi que les pieges et les prejuges a eviter face a lui. • Departager les roles et les responsabilites des cadres et des intervenants professionnels aupres des employes difficiles. • Decrire les etapes de I'intervention aupres des employes difficiles. • Distinguer Ie coaching et Ie counselling. • Distinguer Ie counselling offert par les cadres hierarchiques et Ie counselling offert par les professionnels comme mode d'intervention aupres des employes difficiles. • Traiter des principes et des regles relativement
a la demarche disciplinaire.
• Mener un entretien disciplinaire et rMiger un avis disciplinaire. • Traiter de l'intervention aupres d'employes coupables de violence en milieu de travail et des responsabilites des employeurs et des employes quant a la prevention de cette forme de violence. • Comprendre les rOles et les responsabilites des dirigeants, des cadres, des profession nels des ressources humaines, des syndicats et des compagnies d'assurances collectives en matiere de gestion des employes difficiles.
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Partie III
I
Les defis de la performance
Sachez gerer les employes aproblemes1
lIs sont la hantise des employeurs et font partie d'une categorie generique: employes a problemes. Dans leur environnement de travail, leurs collegues et leurs superieurs les qualifient de paresseux, de perfection nistes ou encore d'asociaux. Les programmes de formation OU ron apprend a transiger avec ces oiseaux rares sont tres populaires aupres des gestion naires qui ont souvent besoin d'aide. «D'abord, c'est une erreur de vouloir eta blir des categories d'empJoyes a probJemes. Ce sont tout simplement des gens qui deran gent par leur comportement. Ce ne sont pas des employes incompetents. C'est leur atti tude qui est en cause et qui detonne au sein du groupe» explique Johanne Rener, psy chologue industrielle. M"le Reney a elabore une methodologie d'intervention aupres des employes difficiles pour Cosel une firme de formation et de consultation pour cadres. 1
Les attitudes comportementales
Idealement, ceux qui embauchent souhai tent detecter ce type d'employes. « Lors des entrevues de selection, on fait trop rarement l'effort d'evaluer serieusement les attitudes comportementales des candi dats », estime Yolande Pilon, directrice du bureau de Trois-Rivieres d'Andre Filion et Associes, une societe specialisee en psy chologie industrielle et gestion de carriere. «L'entrevue est presque toujours centree sur les competences, constate-t-elle. En intro duisant un volet comportemental, if devien drait plus facile de reperer les attitudes indesirables. Certaines questions devraient etre orientees vers les centres d'interet du candtdat, ses experiences recentes ou sa volonte de se perfectionner.» l. M. De Smet, «Sachez gerer les employes
Dans les faits, les questions se limitent generalement a la motivation du candidat. Selon Anne-Genevieve Girard, on obtient I'effet contraire. «Un individu qui se montre tres enthousiaste lors de l'entrevue peut se reveler, une fois embauche, verbo moteur et hyperactif et if finira par irriter ses collegues. C'est paradoxaI, mais les qualites pour lesquelles on embauche un candidat seront parfois les defauts que l'on evoquera ensuite pour Ie licencier », fait remarquer la presidente de la firme en deve loppement organisationnel et en accompa gnement des gestionnaires, Anne-Genevieve Girard et Associes. L'intervention delicate du gestionnaire
Une fois qulune personne a ete reconnue comme ayant des problemes, il appartient a son superieur d'intervenir des qu'i/ Ie peut. C'est sans doute iei que Ie biU blesse, car la majorite des gestionnaires se sentent depourvus lorsqu'i/ s'agit d'etablir une strategie d'intervention a ce chapitre. Le plus gros probleme se pose en amont, c'est-a-dire avant meme que Ie cadre s'adresse a son subalteme. En realite, fes ges tionnaires affichent une tolerance presque sans limites envers les employes a problemes. « On dira qu'il s'agit la de travailleurs au caractere excentrique et qu'il faut res pecter ce trait de leur personnalite. Beau coup de cadres hesiteront a prendre leurs responsabilites. Ils ne reagiront qu'au mo ment all. la situation se sera considerable ment deUirioree », souligneM'ne Girard. Lorsqu'il etablira Ie dialogue avec un employe a problemes, Ie gestionnaire fera
a problemes», Les Affaires, 11 octobre 2003, p. 33.
face a un nouveau defi: celui de communi quer avec tact et efficacite ses attentes quant aux corrections aadopter. A cet egard, M"'le Reney conseille de ne jamais evoquer les causes de l'inconduite, d'€viter les accusations et, surtout, de ne pas decrire Ie comportement de l'employe comme s'it relevait d'une pathologie. «Le cadre doit etre concret dans son intervention, mentionne cette demiere. II insistera plutot sur l'impact negatif que la conduite de l'employe a sur l'entreprise et Ie travail de ses collegues. Par exemple, Ie gestionrzaire signalera qu'on ne peut com bIer a l'interne un poste dans l'equipe de l'employe a problemes. Personne ne veut se retrouver dans un environnement de travail desagn!!able. » Retroaction constructive
Le role du gestionnaire ne se limite pas a communiquer clairement ses attentes. II lui faut s'assurer que I'employe comprend bien, qu'il connait les actions qu'il doit faire en vue de modifier son comportement. «Le but ultime, c'est de provoquer un changement
radical chez l'employe. Ce demier doit etre amene it proposer un plan d'action. II est meme preferable de l'ecrire. Le document contiendra Ies engagements du travailleur. II fixera les objectifs a atteindre seion un calendrier precis», indique M"'le Reney. Une opinion entierement partagee par M»le Pilon. A. son avis, la demande de chan gement de comportement formulee par Ie gestionnaire doit etre sans equivoque. Le plan d'action devrait contenir une eva luation des forces et des faiblesses de l'em ploye, cibler les comportements a modifier et proposer un suivi rigoureux des progres realises. « Lorsque Ie gestionnaire exige de l'employe une transformation en profon deur, il mJe chez lui une grande insecurite. Il doit done s'engager a lui apporter une retroaction et l'assurer de son appui, soit par du coaching, une formation basee sur Ie savoir-etre, soit en lui accordant des mandais specifiques afin de mesurer les ameliorations en cours de route», ajoute M'ne Pilon.
Les employes difficiles (souvent appeles «employes-problemes») ne sont pas nombreux dans une organisation. Toutefois, leur presence peut exiger beau coup de temps des cadres et leur causer bien des soucis. Ce chapitre vise a ametiorer les connaissances et les competences en matiere d'intervention aupres des employes difficiles. Apres avoir defini les employes difficiles aux fi~s de ce ~hapitr~1 nous traitons des raisons pour lesquelles il est important ~ 1.nter~emr a,upres des employes diffidles ainsi que des pieges courants a eVIter a l~ur egard. Dans cette optique, nous expliquons les etapes que les cadres dOlvent respecter dans leur intervention aupres des employes difficiles. Par la suite, nous distinguons deux approches que l'on peut adopter a l'en droit des employes difficiles: Ie counselling (ou assistance sociopsychologique) et la discipline. Nous decrivons les avantages et les limites du counselling offert par les cadres et les professionnels par Ie biais des programmes d'aide aux empl~ye~ (PAE). En ce qui concerne la diScipline, nous etudions ses objectifs, les prmclpes a respecter, son contenu et les circonstances d'une enquHe
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Partie 11/
I
les defis de fa performance
disciplinaire. Nous nous penchons par la suite sur la tenue d'un entretien dis ciplinaire et sur la redaction d'un avis disciplinaire. Puis, nous examinons la question de la violence en milieu de travail, a savoir les multiples formes qu'elle peut prendre, la legislation a son sujet ainsi que les interventions visant a la contrer. Finalement, nous distinguons les roles et les responsabi lites des dirigeants, des syndicats et des compagnies d'assurances en matiere de gestion des employes difficiIes.
_
Les employes d.ifficiles : definition, importance
.et . . p1f!ges . . . . . . . a.eviter . . . . . .
~
Rondeau et Boulard detinissent les employes difficiles comme «des individus ou des groupes qui presentent un rendement inadequat ou qui adoptent des attitudes et des comportements juges inacceptables, compte tenu de ce qUi est generalement attendu en pareilles circonstances» (1992, p. 32-33). Quoique Ie nombre d'employes difficiles dans la main-d'CEuvre totale soit tres restreint, il ne faut pas pour autant negliger de traiter ces cas exceptionnels, car une gestion insuffisante de ces employes peut entraIner dans Ie milieu de travail de multiples consequences negatives et couteuses pour l'employe vise, ses collegues et la clientele, et nuire au climat de travail et a la conservation du personnel (voir la figure 9.1). Ajoutons que Ie probleme de l'employe difficile constitue fort probablement un probleme pour son conjoint ou sa conjointe, ses enfants et ses autres proches, et qu'il se repercute sur les attitudes et les comportements au travail ou a l'ecole de ces derniers. Par ailleurs, la gestion des employes difficiles pose un deti particulier a la societe, aux organisations, aux cadres hierarchiques, aux professionnels des ressources humaines et aux syndicats. On peut meme considerer que Ie deti consistant a gerer des employes difficiles est de plus en plus important, puisque leur nombre est susceptible d'avoir un rapport avec la frequence des divorces, des separations, des crimes, de la consommation de drogue et d'alcool, de l'abandon scolaire, etc. L'epuisement professionnel, les troubles nerveux et d'autres probh::mes psychologiques se sont accrus enormement chez les employes au cours de la derniere decennie, ce qui a provoque une hausse considerable des conges d'invalidite pour une courte et une longue duree. Seion une enquete de la societe Mercer, Ie cout median de l'absenteisme au travail en pourcentage de la masse salariale est passe de 2,7% en 1999 a 3,5% en 2000. Les absences de courte duree absorbent 2,1 % de la masse salariale (Noel, 2001). Du cote des cadres hierarchiques, trois grands pieges les guettent lorsqu'ils font face a un employe difficile: ne rien faire, congedier l'employe rapide ment et se concentrer sur la comprehension des causes du probleme comme un psychologue.
Chapitre 9 \ Intervenir aupres des employes ditt\ci\es
LE PROCESSUS DECISIONNEl A. l'EGARD DES EMPLOYES DIFFICILES
Arbre decisionnel du directeur
Evitement Congediement
Source: R. Richards, Discipline informelle: employes aprobiemes, Montreal, Association des compta bles generaux
licenci!~s
du Canada et CCH ectiteur, 2001, p. 3 (ColI. GRH).
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Partie III J Les defis de la performance
9.1.1 Premier piege: ne rien faire Face aux employes difficiles, une reaction trop courante des cadres hierar chiques consiste a nier Ie probU:me, a laisser les evenements suivre leur cours, a transmettre Ie probU:me a d'autres niveaux de l'organisation, a reorganiser Ie travail ann de r€duire les consequences du probleme, et ainsi de suite. II s'agit d'une strategie d'evitement. En un sens, l'intervention aupres des em ployes difficiles temoigne d'un respect a l'egard des autres employes qui font leur travail de fa<;on satisfaisante. Si l'employeur n'aborde pas les cas proble matiques, Ie rendement et Ie moral des autres employes en souffriront. Along terme, les employes n'acceptent pas de faire Ie travail des autres; certains employes souvent les meilleurs - peuvent meme quitter l'entreprise, avec tous Ies couts que cela entraine, parce que Ie climat de travail est devenu insupportable ou Ia charge de travail, inequitable. Par ailleurs, l'absence d'in tervention face aux employes qUi persistent a ne pas respecter les normes de rendement et de comportement peut avoir pour effet d'encourager les autres employes a accomplir les memes actions inappropriees. Ces derniers pourront y lire Ie message suivant: «Iei, quel que soit Ie rendement ou Ie comporte ment, il n'y a pas vraiment de consequences negatives. » En realite, de nombreux gestionnaires se sentent demunis ou impuissants lorsqu'il s'agit de prendre les mesures correctives qui s'imposent a l'egard d'un employe difficile. Dans bien des cas, ils sont confus et ils attendent de mieux comprendre la situation avant d'intervenir. Par contre, tant que Ie cas d'un employe difficile n'est pas regIe, les effets negatifs de ses comportements s'intensifient et peuvent prendre des proportions insoup<;onnees. II arrive souvent que l'organisation dans Iaquelle reuvrent les gestionnaires n'ait pas de politiques ou de pratiques etablies susceptibles de guider ou d'ap puyer leurs actions. Certains gestionnaires ont deja vecu avec des employes difficiles des experiences qUi les incitent a se metier d'eux ou a redouter leurs crises, leurs pleurs, leurs menaces, leurs sarcasmes, leur violence, voire leur silence. D'autres cadres hesiteront a intervenir aupres d'un employe difficile par crainte de montrer leurs propres faiblesses (comme une tolerance indue ou une grande emotivite), de se retrouver seuls face au probleme ou de devoir jouer Ie role ingrat de monter sans assistance Ie dossier de l'employe, les autres employes etant peu enclins a collaborer avec eux ou a temoigner officielle ment contre I'employe difficile. Certains gestionnaires s'illusionnent en se disant qu'une mesure strictement administrative, telle une reorganisation du travail, peut s'averer suffisante pour contourner Ie probleme pose par un employe difficile. Ou encore ils n'ont ni l'experience ni la formation neces sa ires pour faire face a ces situations particulieres ou les emotions risquent de s'exprimer rapidement. Par ailleurs, plusieurs cadres sont reticents a parler de leurs difficultes ou a demander de l'aide, car ils ont peur de mal paraitre ou de nuire a leur reputation de bon gestionnaire. Ils camouflent alors leurs sen timents sous des explications telles que celles-ci: «Je n'ai pas Ie temps de m'occuper de cet employe », «Apres tout, son comportement n'est pas si mau vais », «L'employe devrait resoudre lui-meme ses problemes », « <:=a ne sert a
Chapitre 9
I Intervenir aupres des employes difficiles
rien d'intervenir » « Je ne veux pas avoir it faire de 1a discipline), ou « Le temps arrangera Ies choses ». Pourtant, comme I'observent Kisfalvi et Lapierre, «c'est seulement lorsque nous prenons notre courage it deux mains et que nous faisons vraiment fac.e aux dilemmes humains qui nous confrontent inevitablement dans notre enVl ronnement de travail que nous pouvons marquer des progres dans nos roles de superieurs et ainsi diriger efficacement nos subordonnes» (1997, p. 80). Le cadre doit gerer les employes qu'il supervise, notamment en leur donnant des instructions claires en ce qui a trait aux normes de rendement a respecter et en s'assurant que ces dernieres sont respectees. Comme I'indique Gerin Lajoie, «ceIui qUi ne souhaite pas diriger ou sanctionner ne devrait pas Ie faire et serait avise de refuser une promotion qUi I'y menerait. C'est une partie con siderable du travail d'un cadre hierarchique» (1992, p. 244). Au nombre des consequences negatives decoulant du fait d'eviter de gerer les employes diffi dIes, dtons les suivantes. I
• Cela mine Ia reputation de leadership du cadre et alimente les
perceptions d'iniquite ou d'injustice parmi son equipe.
• Cela nuit au climat de travail et a Ia productivite du groupe de travail et
de l'organisation.
• Cela fait en sorte que Ie probleme de comportement persiste ou empire,
entrainant plus de couts, de plaintes, de pertes de temps, etc.
• Cela lance Ie message qu'il est acceptable de ne pas se conformer aux
normes, incitant du coup d'autres employes it se laisser aller.
• Cela mene les employeurs a adopter des mesures disciplinaires (par
exemple, Ie congediement) envers des employes sans avoir constitue
un dossier adequat et sans avoir respecte certaines regles (comme la
progreSSion et la proportionnalite des sanctions), et donc a assumer les
couts lies a la contestation de ces mesures disciplinaires par les employes
et leurs syndicats.
Finalement, soulignons qu'une gestion efficace des employes difficiles im plique aussi une certaine introspection de la part du cadre, puisqu'il se peut que ce dernier soit a la source du probleme. Les problemes emergent et per petuent dans des milieux propices, notamment dans un milieu ou les regles sont insuffisantes, dans certaines dispositions de conventions collectives, dans une organisation ou regnent les privileges, dans un climat de laisser-aller ou d'ignorance, dans un contexte axe uniquement sur les resultats, dans un milieu ou prectomine la peur des represailles, des griefs ou du derangement. Par ailleurs, des elements comme les suivants contribuent a expliquer les comportements et les attitudes d'un employe difficile: • une communication nebuleuse a l'egard des normes, des attentes, des politiques, de la culture d'entreprise, etc.; • une mauvaise sHection, Ie titulaire du poste n'ayant pas les competences et les connaissances pour faire son travail; • un manque de formation de l'employe;
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Les defls de la performance
• l'absence de recompenses et de reconnaissance; • Ie surcroit de travail ou les changements trop nombreux au travail; • un pietre environnement (un manque d'espace, des equipements desuets, etc.) ou une organisation du travail deficiente; • un traitement abusif de la part du cadre etfou des com~gues (par exemple, des remarques condescendantes, des attentes injustes et changeantes, de la discrimination, du harcelement).
9.1.2 Deuxieme piege: congedier l'employe rapidement Lorsqu'un cadre laisse croitre son irritation face au probleme d'un employe difficile sans exprimer celle-ci ni intervenir de maniere progressive, il peut en arriver a congedier l'employe avec fracas. Le congediement rap ide d'un employe peut etre Ie fait d'un cadre autocratique qui desire que l'employe obeisse inconditionnellement aux regles etablies et qui veut se servir de cette .attitude comme exemple aupres des autres employes. Voici certaines conse quences negatives de congediements abrupts. • Cela entraine des indemnites de depart ainsi que des couts de selection et de formation de nouveaux employes. • Cela ebranle Ie sentiment de securite chez les employes restants: subiront-ils Ie meme sort advenant un probleme de ce genre? • Cela nuit a la reputation de leadership du cadre et va a l'encontre des regles de justice en matiere de gestion (telles que Ie droit d'etre entendu ou Ie respect mutuel). • Cela risque de ne pas etre appuye - par les dirigeants, les professionnels des ressources humaines et Ie syndicat -, Ie cadre devant alors revenir sur sa decision et suivre une demarche disciplinaire preetablie.
9.1.3 Troisieme piege: se concentrer sur la comprehension des causes du probleme comme un psychologue Comme Ie montre Ie tableau 9.1, Ia principale distinction entre Ie counselling et Ie coaching~ une expression que nous avons vue dans Ie chapitre 8 traitant de Ia gestion du rendement, est que coaching se centre sur Ie travail et sur les faits alors que Ie counselling se centre sur la personne dans sa totalite. Dans son sens large, Ie counselling correspond aux retroactions (feedback), aux discus sions ou aux communications au cours desquelles une ou plusieurs personnes tentent d'aider une autre personne a resoudre un probleme actueI, a eviter un probleme potentiel ou a faire un choix. L'objectif du counselling consiste a aider I'employe a mieux composer avec sa situation de mani€~re qu'il devienne plus efficace. Pour y parvenir, on peut faire appel a diverses techniques comme l'ecoute active, I'utilisation judicieuse de questions, Ie reflet des sen timents ou la resolution de problemes. Le counselling peut etre effectue par des non-professionneIs, tels les cadres hierarchiques, et par des professionneis, tels Ies psychologues, les psychiatres et les travailleurs sociaux.
QUELQUES DIFFERENCES ENTRE LE COUNSELLING ET LE COACHING OFFERTS PAR LES CADRES HIERARCHIQUES
La plupart des superviseurs assument cette fonction de fa~on informelle et consacrent du temps a la discussion des problemes personnels que leurs employes cherchent a resoudre. En effet, lorsque les employes ont confiance
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en leur patron et Ie respectent, ils ont tendance a lui demander son avis sur differents aspects de leur vie. Les cadres doivent donc toujours, dans une cer taine mesure, faire du counselling et doivent etre formes a cet egard. Les raisons que l'on peut invoquer en faveur de l'intervention des superviseurs dans des activites de counselling sont les suivantes: • leur meilleure connaissance de l'employe (de son rendement, de ses habiletes, de ses forces, de ses ambitions, de ses besoins, de sa vie personnelle, etc.); • Ie fait qu'ils entretiennent souvent des relations quotidiennes avec l'employe, qu'ils sont generalement les premiers informes de ses difficultes ou les premiers a constater que l'employe a un probleme; • leur disponibilite et leur accessibilite plus grandes; • leur pouvoir d'intervention relativement a diverses caracteristiques situationnelles et organisationnelles; • la possibilite qu'ils ont de mettre en place les conditions qUi aideront l'employe a developper ses habiletes et a respecter les normes de rendement; • Ie fait que leur intervention evite la stigmatisation et n'implique pas necessairement l'eIaboration d'un programme d'aide aux employes ou Ie recours a d'autres formes d'aide comportant des couts; • Ie fait que leur habilete dans Ie counselling peut s'appliquer a leurs autres fonctions de supervision; • Ie fait que leur supervision implique souvent une relation d'aide informelle avec leurs subordonnes; • leur satisfaction de pouvoir aider leurs subordonnes et de se rendre compte qu'aux yeux de plusieurs, ils font bien leur travail; • leur attitude positive face aleur role d'aide, une dimension de leur travail per~e comme etant importante. Toutefois, quoique ces derniers arguments favorisent un counselling de supervision, il faut retenir que les cas les plus graves ou les plus particuliers doivent etre soumis a des ressources competentes a l'interieur ou a l'exterieur de l'organisation. II est important que les cadres conservent leur objectivite et leur impartialite a l'egard des problemes de leurs employes, qu'ils ne s'inge rent pas dans leur vie privee et qu'ils n'expriment pas d'opinions sur Ia capa cite ou la motivation d'un employe a resoudre ses problemes. Les conseils personnels doivent etre prodigues avec prudence par les cadres etant donne qu'ils n'ont pas de competence en la matiere ni de temps a accorder a un role requerant une aide importante. II y a alors un risque que leurs conseils soient inadequats, et meme qu'ils aggravent Ie probleme de l'employe. Comme on Ie voit, Ie counselling n'est pas sans danger. Y recourir, c'est ouvrir une boite de Pandore; en effet, ce qui semble un simple probleme d'absenteisme peut s'averer un probleme emotionnel profond qUi necessite l'aide d'un profes sionnel. Certains employes malheureux peuvent aussi etre d'habiles mani pulateurs qui ne veulent que profHer de mesures d'accommodation ou de
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Intervenir au pres des employes difficiles
privileges. Par ailleurs, des employes ayant des problemes ~er:onnels peuv~nt etre reticents a se confier a leur superviseur parce que celUl-Cl ne peut enVIsa ger la situation avec detachement, du moins pas autant qu'un pr.ofessi~nnel. 11 y a aussi Ie risque que, consciemment ou non, un superviseur tlenne compte de renseignements confidentiels pour prendre des decisions concer nant Ie travail (touch ant par exemple a des promotions); l'ouverture dont a fait preuve l'employe peut alors se retourner contre lui. Pour toutes ces raisons, un employe trouble devrait preoccuper son super viseur dans la mesure ou son rendement au travail devient insatisfaisant. Le cadre peut alors, me me si ce n'est pas son role, amener l'employe a recon naitre l'existence d'un probleme personnel et l'aider a trouver une solution. Par ailleurs, on est a tort porte a croire que les caracteristiques individuelles de l'employe sont la cause du probleme et que l'etablissement d'une relation d'aide entre Ie superieur et Ie subordonne pourra regler ce probh~me. Selon Rondeau et Boulard, Ie fait de vouloir «habiliter Ie gestionnaire a utiliser des methodes de counselling peut accentuer sa tendance a chercher la cause du probleme et a vouloir la traiter alors que son veritable rOle est plutot de se preoccuper des effets que produit ce probleme au plan organisationnel» (1992, p. 33). Les cadres n'ont pas la responsabilite de jouer au therapeute, au psychologue ou au psychiatre ni la competence pour Ie faire.
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A l'egard des employes difficiles, les superviseurs devraient accomplir essen tiellement les taches suivantes:
• s'assurer de la qua lite de Ia selection du personnel (par exemple, verifier les references et Ies experiences de travail des candidats); • reconnaitre les problemes de comportements, d'attitudes et de resuItats au travail; • documenter et maintenir a jour les dossiers des employes difficiles; • faire participer les employes a la recherche de solutions; • appliquer la demarche disciplinaire de l' organisation; • encourager l'utilisation du programme d'aide aux employes ou tout autre service professionnel avant que les problemes ne deviennent trop difficiles a traiter; • aider les employes a reintegrer Ie milieu de travaiL . ~i?si, Ie. superviseur doit d'abord constater Ie probleme de l'employe dlffIClle, pUIS documenter son cas et, entin, intervenir aupres de lui (voir Ie tableau 9.2).
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Les defis de la performance
LES ETAPES DE L'INTERVENTION AU PRES DES EMPLOYES DIFFICILES
9.2.1 Constater Ie probleme Rondeau et Boulard (1992) relevent quatre types de problemes; les resultats inacceptables, Ies attitudes et les comportements inacceptables, les relations interpersonnelles inacceptables et une contestation abusive de l'autorite.
Les resultats inacceptables Suivant ce type de probH~me, l'employe commet des fautes liees a l'execution de son travail. On parle alors de negligence, d'utilisation inadequate de l'equipement, etc. Le superviseur doit alors etablir en quoi et jusqu'a quel pOint les resultats de l'employe s'ecartent des normes et des seuils prescrits, et preciser les consequences negatives de cet ecart pour l'efficacite de l'unite. Plus l'ecart est important et repete, plus Ie probleme est critique. Par exempIe, une secreta ire a de la difficulte a s'adapter aux nombreux changements technologiques qUi surviennent dans son travail. Malgre Ie fait qu'elle a participe a plusieurs sessions de formation et qu'elle peut consulter plusieurs ouvrages sur les nouveaux logiciels a utiliser, elle continue a tourner en rond. Elle derange constamment ses collegues pour obtenir de l'aide souvent a propos de taches elementaires - et revient vite aux anciennes fa~ons de faire (logiciels, outils, techniques, etc.) pour realiser ses activites. Plusieurs de ses collegues se plaignent de son rendement et de la surcharge de travail que sa presence entraine pour eux.
Les attitudes et les comportements inacceptables Les attitudes et les comportements au travail de I'employe, ou la
fa~on
dont
il exerce son role, peuvent aussi etre juges incompatibles avec ce qui est nor
malement attendu de la part du titulaire du poste. II peut s'agir de problemes de Ia personnalite (comme l'agressivite ou l'hostilite), d'attitudes indesirables (com me la passivite ou Ie manque de motivation) ou de comportements deviants (comme l'absenteisme, les retards frequents, la consommation de drogue au d'alcool sur les lieux de travail, l'insubordination, Ie harcelement, Ie vol, Ie vandalisme, Ie manque d'hygiene personnelle ou Ie non-respect des regies en matiere de sante et de securite) qui menent a un rendement inadequat ou qui ont un effet negatif sur I'efficacite de l'entourage au travail.
Chapitre 9 \ Intervenir aupres des employes difficiles
Par exemple, il y a trois ans, un professionnel de recherche syndique ~ ete hospitalise pour une maladie psychologique, puis traite pendant plusleurs mois; il a alors pu beneficier de l'assurance salaire. Depuis lors, ses retours au travail se font de plus en plus courts et ses departs coincident regulierement avec les periodes de pointe de travail dans l'annee. Cette constante dans les comportements de I'employe a fini par exasperer ses collegues de travail et les chercheurs. Tous sont fatigues d'avoir a former des personnes pour remplacer Ie professionnel, d'ailleurs de moins en moins professionnel puisqu'il ne met plus a jour ses competences. Plusieurs songent meme a aboUr son poste ou a retenir les services d'un de ses rempla~ants, qui se sont tous averes plus competents et efficaces que Ie professionnel en question.
Les relations interpersonnelles inacceptables Ce type de probleme est lie a une dynamique de groupe malsaine basee sur des Iuttes de pouvoir, des rumeurs, des prejuges, etc. Jl inclut les mesententes et les conflits importants entre les employes, l'emergence de sous-groupes ayant des interets qui sont nefastes au travail (com me les membres de sectes ou de groupes de pression qui font de la propagande sur les lieux de travail), la presence de cliques qui nuisent au travail ou encore Ie rejet de certains employes qUi a pour effet de reduire la productivite de l'unite. A cet egard, comme Ie montre Ia mise en situation du debut du chapitre, il est important que les gestionnaires possedent des habiletes en matiere de gestion des con flits et de coaching.
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Une contestation abusive de l'autorite Les employes qui manifestent ce type de probleme remettent en question l'autorite du cadre, sa credibilite et sa far,:on de diriger en Ie critiquant, en Ie contestant ou en Ie defiant sans que la maladresse ou l'incompetence de ce dernier soit en cause, ce qui a une influence negative sur l'efficacite du groupe.
9.2.2 Documenter le cas de l'employe difficile Le gestionnaire doit documenter Ie cas de l'employe de far,:on que ceIui-ci puisse en prendre conscience, comprendre ses repercussions negatives sur l'efficacite de l'unite et reconnaitre la necessite de remedier au probleme. Pour cela, Ie gestionnaire doit tenir a jour Ie dossier de l'employe difficile en faisant des rapports d'evenements qui demontrent par des faits precis (comporte ments, resultats, etc.) l'existence du probleme ou du manquement, en interro geant les temoins et en notant leur version. La documentation necessite egale ment que l'on conserve et regroupe les divers documents, pieces ou objets permettant de faire la preuve d'un manquement (par exemple, des courriels, des rapports, des feuilles de presence, des seringues). Par ailleurs, il faut com prendre que certains employes prendront tous les moyens pour camoufler leurs faiblesses : demander la protection de leurs collegues, cteU~guer certaines de leurs responsabilites a des conseillers ou a des consultants en pre textant que ceux-ci ont l'expertise necessaire, s'engager dans des activites sociales ou dans differents comites de l'organisation afin de se rendre utHes en dehors de leur travail ou encore participer a des activites syndicales afin de mieux se detendre. En outre, Ie gestionnaire doit preciser en quoi les faits reproches a l'em ploye ctevient des normes ou des politiques existantes et quelles en sont les consequences negatives. A propos des politiques, un probleme courant est que bien des organisations n'ont pas de politiques institutionnelles balisant l'ethique, les actions a l'egard des fraudes, Ie harcelement en milieu de travail, etc. Lorsqu'elles ont prevu de telles politiques, celles-ci sont souvent perimees et inadequates au regard du contexte actuel. Le cadre doit egalement obtenir l'approbation de son superieur immediat, des dirigeants, des collegues de l'employe difficile et des professionnels des ressources humaines pour determiner la severite de la sanction et l'appliquer. De plus, il doit preparer differents scenarios ou seront precises les moyens qu'il est pret a prendre pour obtenir un changement de la situation (une mesure disciplinaire, un programme d'aide aux employes, l'arbitrage, etc.) et prevoir la reaction de l'employe selon divers resuitats (les critiques des autres employes, la revocation de sa decision par l'arbitre, Ie congediement de l'employe, etc.).
Chapitre 9 \ Intervenir aupres des employes difficiles
9.2.3 InteTveniT aupTes de l'employe difficile La demarche corrective effectuee aupres d'un employe difficile s'appuie simul tanement sur deux approches: la relation d'aide (qualifiee couramment de counselling) et l'approche disciplinaire. En effet, Ie cadre doit aider l'employe a modifier son comportement et lui faire prendre conscience du fait qu'il n'a pas Ie choix de changer; les developpements concernant ses comportements et ses attitudes seront cons ignes dans son dossier de fac,;on it appuyer une eventuelle mesure disciplinaire. Le cadre transmet it l'employe Ie message selon lequel il doit demontrer sa capacite it repondre aux attentes l(~gitimes de l'organisation it son egard. Nous verrons Ies differentes interventions au pres des employes difficiles qui necessitent Ie recours it plusieurs approches a la fois, allant de la relation d'aide - entre l'employe, son superieur et des pro fessionnels - a Ia demarche disciplinaire.
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.L~. ~~~.,!~~~l~'!!fI. ~~~~~ p~~ ~~~ .~~~~~~.~~~~~~~~~~~.~~ Le counselling d'encadrement correspond aux communications entre Ie super viseur et Ie subordonne visant a resoudre un probleme de rendement au tra vail. Le counselling peut Hre, it un extreme, tres spontane ou, it l'autre extreme, tres officiel.
9.3.1 Le counselling spontane et le counselling officiel On distingue deux types de counselling: un counselling spontane et un coun selling officiel ou formeI. L'objectif du counselling spontane est d'empecher qu'un probleme s'aggrave. Un cas typique est celui du cadre qui fait face a un subordonne qui arrive souvent en retard au travail; Ului dit quelques mots au sujet de ce nouveau comportement pour indiquer qu'il s'en preoccupe. Cette intervention montre a l'employe que Ie cadre exerce un suivi et cherche a reduire Ie risque de voir Ie probleme persister. Une intervention de cette nature donne la chance a l'employe de traiter du probleme et d'envisager des solutions. Par exemple, ces derniers temps, Pierre est arrive plusieurs fois en retard de 15 ou 20 minutes. Son superviseur lui fait alors la remarque suivante: {( Pierre, rappelle-toi que la journee de travail commence toujours a huit heures. » S'il continue a arriver en retard, Ie superviseur lui fera comprendre qu'U a observe la situation et que cela Ie preoccupe: «Pierre, j'ai remarque que tu arrives encore frequemment en retard. Nous avons deja parle de cela, et je m'en soucie. II est important que je sache que tu vas remedier a cette situation.» Si Pierre propose une explication, il importe que son superviseur l'ecoute et qu'il lui lance Ie deti de trouver une fac,;on de resoudre son probleme. II evitera de lui dire: {( <;a va pour cette fois», parce que cela peut inciter Pierre a continuer comme avant. Ce dernier doit comprendre que Ie non-respect de la ponctua lite est inacceptable et qu'illui appartient de trouver une maniere d'arriver a l'heure au travail.
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En ce qui concerne Ie counselling officiel, Ie superviseur y recourt des qu'il se rend compte que Ie counselling spontane ne donne pas les resultats voulus et que Ie probleme s'aggrave. Cette approche implique une discussion visant a aider l'employe a offrir la contribution au travail a laquelle son employeur est en droit de s'attendre. Le legislateur indique que les interventions du cadre aupres d'un employe difficile doivent se conformer aux exigences suivantes. • Le cadre doit exprimer clairement ses attentes a l'employe. • II doit agir de bonne foi avec l'employe en Ie soutenant et en Ie traitant avec consideration et respect. 11 s'agit de ne pas humilier l'employe ni de l'ignorer. Si ce dernier per\=oit que son superviseur se preoccupe de lui en tant que personne et apprecie certains aspects de son travail, il sera plus dispose a ecouter ses demandes et a changer. • II doit tenter de modifier Ie comportement de l'employe, et non sa personnalite. • II doit chercher a faire participer l'employe a la recherche d'une solution. Si celui-ci coopere, il reconnaitra qu'il est bien place pour trouver une solution et iI sera plus motive a effectuer des changements qu'il aura lui-meme proposes.
9.3.2 Les etapes de l'entretien de counselling officiel L'entretien de counselling avec un employe ayant un probleme de rendement important et persistant devrait etre constructif, c'est-a-dire oriente vers la resolution du probleme, et suivre les etapes suivantes.
Planifier l'entretien II est important que Ie cadre rencontre l'employe difficile en prive, dans un climat propice; il doit s' assurer que l' entretien ne sera pas interrompu par Ie telephone ou par des visiteurs. II doit placer l'entretien a un moment de la journee ou il dispose de suffisamment de temps.
Determiner le probleme et son importance Le cadre doit etablir un contact positif et respectueux avec l'employe afin que ce dernier sauvegarde son estime de soi et comprenne que son superviseur veut l'aider a apporter les changements necessaires. Toutefois, cela ne signifie pas que Ie superieur hierarchique doive etre evasif ou positif au point que l'employe ne saisira pas Ie but de l'entretien. Au contraire, Ie cadre superieur doit determiner clairement et sans detour la nature du probleme de l'employe en demontrant l'ecart entre son comportement et les normes, et en justifiant !'importance attachee au respect de ces dernieres. Pour ce faire, Ie cadre doit appuyer ses propos sur des observations concretes qu'il demandera a l'em ploye de corroborer. II doit aussi dire pourquoi ces faits representent un pro bleme pour l'organisation. Par exemple, it peut s'agir de preciser les effets negatifs du comportement de l'employe sur I'efficacite de l'unite de travail. L'objectif consiste it amener l'employe it reconnaitre son probleme ainsi que la necessite de Ie resoudre.
Chapitre 9
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Intervenir au pres des employes difficiles
Detinir la realite et s'y tenir Le cadre doit eviter de recourir aux traits de personnalite (paresseux, indis cipline, lunatique, etc.) ou encore d'exprimer des commentaires generaux ou vagues comme celui-ci: «Vous demontrez une mauvaise attitude.» On sug gere aussi au cadre de centrer la discussion sur un ou deux comportements problematiques importants. II faut se garder de dresser une liste de faits nega tifs, sinon l'employe restera sur la defensive. D'ailleurs, lorsqu'on resout un probleme fondamental, on peut generalement s'attendre a ce que les autres problemes se resolvent. S'il y a lieu, Ie cadre doit rappeler a l'employe les entretiens (spontanes ou officieIs) qu'ils ont eus precedemment sur Ie meme sujet et demontrer l'insuffisance de l'amelioration. Reprenons Ie cas de Pierre, Ie subordonne qui arrive en retard au travail. Son superviseur lui dit: « Pierre, nous avons discute a plusieurs reprises de tes retards au travail. Je veux aider tous mes employes a faire leur travail. Lorsque tu es en retard, cela ne reporte pas seulement ton travail, mais aussi celui de tes collegues. Mardi dernier, comme tu n'etais pas au bureau a huit heures, Marie Lambert a du prendre une heure de son temps pour faire ton travail et achever Ie rapport qui devait etre remis ce matin-Ia. La politique de l'entreprise etablit que la journee commence a huit heures, et je m'attends a ce que tous les employes soient ici a cette heure.»
Discuter avec l'employe difficile des raisons du probleme ou de sa persistance Apres avoir determine Ie probleme et justifie son importance, Ie cadre doit demander a l'employe les raisons du probleme - ou de sa persistance et ecouter sa reponse. Si Ie cadre utilise la technique de l'ecoute active, cela per mettra a l'employe de liberer ses emotions. n s'agit pour Ie cadre de se con centrer, d'ecouter et d'exprimer Ie fait qu'il ecoute par des expressions comme celles-ci: «Je vois», «O.K.» QueUes que soient les raisons que donne l'em ploye (des exigences exagerees, une supervision inadequate, des res sources insuffisantes, etc.), Ie cadre ne doit pas parler, ne doit pas alimenter les reac tions emotives de I'employe. Une fois que ce dernier a eu la possibilite de fournir ses raisons, Ie cadre peut reformuler ses idees. Ceia donnera l'occasion a l'employe de clarifier certains points s'il constate que Ie cadre ne l'a pas compris ou qu'il a mal interprete ses propos. Ceia permettra aussi au cadre de faire ressortir les contradictions dans les propos de l'employe, s'il y a lieu. Si l'on rep rend l'exemple precedent, Ie superviseur pourrait faire cette interven tion-ci: «Pierre, tu dis que tu es en retard parce que tu demeures loin et que la circulation est imprevisible. Quelquefois, c'est parce que tu dors profonde ment et que tu n'entends pas ton reveille-matin. »
Se mettre d'accord sur un plan d'adion pour corriger le probleme Une fois que l'employe a invoque ses raisons, Ie cadre et lui doivent envisager ensemble des solutions. Le cadre doH montrer a l'employe qu'il veut l'aider a regier son probleme; il doit aussi l'inciter a suggerer des solutions. Aussi, en reformulant les propos de l'employe, Ie cadre evitera de proposer les solutions
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Partie 11/
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Les defis de la performance
qui lui viennent a l'esprit (partir plus tot de la maison, acheter un autre reveille-matin, etc.). 11 amenera plutot l'employe a penser a des solutions pos sibles et a faire son choix. II lui dira par exemple: « Tu as explique pourquoi tu n'es pas a l'heure, mais cela ne change pas la situation. Selon la politique de l'entreprise, tous les employes commencent leur journee a huit heures. Comment vas-tu resoudre ton probleme?» Le cadre et l'employe doivent alors etabIir un plan en s'entendant sur les moyens a prendre pour corriger la situation et sur les delais a respecter. 11 s'agU ici de preciser les criteres qui serviront a evaluer dans queUe mesure Ie probleme sera corrige. Notons que Ie plan d'action sera d'autant plus detaille que Ie probleme est complexe. Le cas echeant, Ie cadre doit offrir un appui particulier a l'employe, sans pour autant abaisser ses exigences, en Ie guidant notamment vers un service de sante ou un programme d'aide aux employes.
PTf!ciser les mesures l'avenir
a prendre s'11 n'y a pas d'amelioration dans
Apres que l'employe et Ie cadre se sont entendus sur un plan d'action, Ie cadre doH communiquer les mesures qu'il devra prendre si aucune progression n'est observee pendant une periode determinee et indiquer que ces mesures sont appuyees par l'organisation. Avant de terminer l'entretien, Ie cadre resumera ce qUi a ete dit et decide, et deeIarera a l'employe qu'il croit qu'il peut s'ameliorer. II fixera la date d'un entretien de suivi, de deux a huit semaines plus tard, selon Ie type de probleme. II importe que Ie cadre consigne par ecrU ce qui a ete dit et coneIu lors de l'entretien, qu'il donne une copie de ce resu me en mains propres a l'employe, qu'Ului demande de la signer pour confir mer son accord avec son contenu.
Exercer un suivi Le cadre doit suivre Ie rendement de l'employe en prenant des notes. Si Ie probleme se regie consecutivement a l'entretien, il fera rapidement une retroaction spontanee a ]'employe afin de I'encourager a maintenir ses efforts et de lui montrer que ses progres sont remarques et apprecies. Si Ie cadre ne voit aucune amelioration, les entretiens de counselling subsequents devront etre realises sur un ton plus ferme. i'important est que Ie cadre persevere meme s'il peut etre tente de mettre fin au processus par manque de temps ou par manque de gout pour de tels entretiens. En fait, chaque fois qu'on ignore Ie comportement d'un employe difficile, cela incite ce dernier a maintenir ce comportement. Finalement, soulignons que Ie nombre d'entretiens officiels de suivi depend de la nature et de la frequence du probleme: les retards d'un parent celibataire qui a des problemes lies a la garde de son enfant ne sont pas du meme ordre que les retards d'un employe qui a de la difficulte a se reveiller.
Intervenir aupres des employes difficiles
Chapitre 9
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le counselling offert par les professionnels •
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Les employeurs optent de plus en plus pour une approche preventive a l'endroit des employes difficiles afin de reduire les incidences negatives, soit l'absenteisme, les accidents du travail, la reduction de la productivite et l'aug mentation des primes d'invaIidite. Un programme d'aide aux employes (PAE) propose un ensemble d'interventions visant a aider et a appuyer les per sonnes aux prises avec des problemes personnels qUi compromettent ou qui sont susceptibles de compromettre leur sante, leur equilibre psychologique et leur rendement au travail. Les services d'aide offerts par les PAE portent sur divers types de problemes familiaux, personnels ou professionnels tels que }'alcooIisme, la toxicomanie, les problemes d'ordre emotionnel, financier ou juridique, d'equilibre travail-famille, d'obesite et de carriere (l'anxiete causee par 1a retraite ou une promotion, etc.), qui influencent ou sont susceptibles d'influencer negativement Ie rendement au travail de l'employe.
L'objectif principal d'un PAE est d'aider un employe a retrouver un com portement et un rendement normaux au travail. Ses fonctions-cH'~s sont la designation, Ie traitement et la rehabilitation des employes qui ont des pro blemes risquant de nuire a leur rendement au travail. Notons toutefois que la plupart des PAE prevoient que les employes difficiles seront traites par des professionnels it l'exterieur de l'organisation. Le recours aux services de professionnels comporte certains avantages: des services plus qualifies, une confidentialite accrue, moins de conflits de role ou moins de biais pouvant resulter de la connaissance des causes du probleme, moins de risques pour Ie professionnel de se laisser ebranler par Ie probleme de l'employe et moins de risques pour l'employe de voir se retourner Ia situation contre lui a plus ou
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Partie III
I
Les
detis de fa performance
n:oi~s long terme (mefiance de son superviseur, possibilites de promotion redmtes, etc.). . L'intervention aupres des employes difficiles varie seion la nature du fonc tIOnnement du PAE - s'iI y en a un ou de l'aide de professionnels rendue a~cessible dans I'entreprise. En effet, suivant l'entreprise, I'ampleur des ser
VICes offerts et des responsabilites des cadres a l'egard des employes difficiles fluctuera. Toutefois, en general, Ie superviseur constate qu'un employe a un probleme de rendement ou de comportement et lui suggere de consulter Ie personnel du PAE, constitue souvent de professionnels se trouvant a l'exterieur de l'organisation. A titre de reperes, voici des signes qui peuvent indiquer un probleme de sante psychologique chez un employe: • des changements sur Ie plan de la sante physique: de l'insomnie, de la fatigue, des maux de tete ou de dos, des bnllures d'estomac, des palpitations, de la diarrhee ou de l'eczema; • des changements de comportements ou de resultats au travail: des absences et des retards frequents, une diminution de la qualite ou de la quantite du rendement, une augmentation des erreurs ou des accidents du travail, une consommation accrue de tabac, d'alcool ou de medicaments, une apparence ou des soins corporels negliges; • des changements psychologiques ou sur Ie plan des habiletes: une diffi culte de concentration et de memoire, la perte du sens de l'humour, une impatience, une agressivite ou une irritabilite soudaine et inexpliquee, des pleurs et des cris, une incapacite a prendre des decisions et a prendre des notes, de l'isolement et des problemes interpersonnels. La responsabilite du superviseur consiste a evaluer Ie rendement de l'employe difficile, a affronter ceIui-ci sans tenter de poser un diagnostic et a I'adresser au coordonnateur du PAE de l'entreprise pour verifier si Ie recours au programme peut I'aider it regler son probleme. Au cours de cette ren contre, Ie coordonnateur explique a l'employe Ie PAE et ses politiques. II etablit Ie premier contact avec un agent de reference externe susceptible de diagnostiquer son probleme et de diriger l'employe vers la personne externe qui lui offrira l'aide appropriee (un meclecin, un psychologue, un avocat, un conseiller familial, un conseiller en orientation professionnelle, etc.). Cet agent de reference doit prendre les arrangements avec Ie coordonnateur du PAE pour concilier les contraintes du suivi et ceIles de l'horaire de travail de l'employe. Si l'employe refuse toute forme d'aide et que son rendement ne s'ameliore pas apres deux ou trois mois, on lui fait rencontrer, sans que cela soit note a son dossier, un representant de la direction, un representant syn dical, Ie coordonnateur du PAE ou son superviseur. Cette personne precise it l'employe les consequences du probleme et l'avertit que des mesures disci plinaires seront prises s'il refuse l'aide du PAE (adhesion obligatoire). En fait, l'employe difficile est libre de recourir ou non a l'aide fournie par un PAE, mais it n'a pas Ie choix de changer son comportement ou son rendement. S'il accepte I'aide proposee et retrouve un niveau acceptable de rendement, aucune sanction ne sera prise a son endroit. Par contre, s'il refuse cette aide et que ses problemes persistent, la mesure disciplinaire sera appliquee.
Chapitre 9 \ Intervenir au pres des employes difficjles
L'employe rencontre un professionnel du PAE se trouvant a l'interieur ou a l'exterieur de l'organisation afin d'evaluer, et eventuellement de traiter, son probleme. Le coordonnateur du PAE dans l'organisation est alors informe de l'evolution de l'employe par Ie professionnel, qui lui fournit aussi reguliere ment des donnees sur l'utilisation de ses services et sur leur efficacite. Selon la politique de confidentialite du PAE, Ie coordonnateur donnera des renseigne ments au superieur immediat de l'employe sur sa demarche et s'informera de l'evolution du rendement de I'employe au travail en respectant Ie principe de confidentialite. Lorsque l'employe doit cesser de travailler pour etre suivi par Ie PAE, ses droits en matiere de salaire, d'avantages sociaux, de promotion, d'anciennete et de securite d'emploi sont maintenus. Lorsque les objectifs preetablis ont ete atteints, l'employe reprend Ie travail en etant soumis a une periode d'essai. Ason retour au travail, il peut decider de poursuivre des ren contres de counselling sur une base individuelle ou de groupe (par exemple, les Akooliques Anonymes) pendant plusieurs mois ou annees.
Pour terminer, on peut resumer les principales conditions de succes des PAE comme suit (Beaudoin, 1986): • l'adoption d'une politique officielle (ecrite) sur Ie PAE qui est largement diffuseei • l'etablissement d'une procedure uniforme pour appliquer la poHtique duPAE; • la confidentialite des informations assuree; • l'appui des dirigeants et du syndicat;
• Ie recours a un personnel professionnel; • la mise en place d'un mecanisme de suivi visant a appuyer les employes en cours de traitement et lors de leur retour au travail; • une intervention des superviseurs aupres des employes limitee aux employes qui ont un rendement au travail insuffisant;
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Partie III
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Les defis de Ja performance
• Ie remboursement ou Ie paiement de Ia totaIite ou d'une partie des services de counselling par l'employeur (assurance) i • un acces facile aux differents services offerts dans Ie but de venir en aide aux employes et aux membres de leur famille; • I'acces aux services de counselling pendant une periode limitee.
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L'approche disciplinaire . ...... ... .. . . .. . .
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Face a un employe qUi ne peut executer des taches en raison d'une maladie ou a la suite d'un accident, la direction doit adopter une mesure administra tive (par exemple, un conge de maladie ou une mutation) et non une mesure disciplinaire. L'approche disciplinaire englobe les mesures, consecutives a des infractions, qui visent a decourager d'autres infractions afin que Ie rendement au travail respecte les normes. L'enclenchement d'un processus disciplinaire s'avere un point toumant dans une intervention aupres d'un employe diffi cile. Cela survient generalement lorsque les demarches de counselling spon tane et de counselling officiel n'ont pas amene l'employe a ameliorer son rendement ou a corriger son comportement. De fait, la disCipline s'avere une mesure officielle reprouvant un comportement ou un resultat inapproprie et volontaire de l'employe, et ce, afin qu'il ne se reproduise plus. Cette mesure officielle prise par la direction d'une entreprise comporte une sanction telle qu'un avertissement, une reprimande, une suspension, un congediement, une retrogradation, une perte de salaire ou Ie retus d'une promotion. Le pro cessus disciplinaire s'applique aussi Iorsque des comportements deviants obli gent Ie cadre a intervenir immediatement parce que l'image de I'entreprise, la fideIite de ses clients ou I'atmosphere de travail est compromise. II peut egalement etre mis en ceuvre en raison de !'importance de la faute commise. Cette section vise a commenter Ies principes et les regles que Ies cadres doivent respecter lorsqu'ils amorcent une demarche disciplinaire (voir Le Corre & Associes, 1994; 1996, pour des informations plus detaillees).
9.5.1 La co11ecte des faits lies au probleme Tous les faits invoques pour justifier une mesure disciplinaire doivent avoir ete verifies i les rumeurs et les oUI-dire, meme probables, ne doivent pas eire pris en consideration sans avoir fait l'objet d'une verification. Si des per sonnes (des cadres, des collegues, des clients, etc.) etatent presentes lors de l'incident reproche, il faut les rencontrer Ie plus tot possible. II importe de consigner par ecrit les versions des temoins; preferablement, on dolt leur demander de signer une copie de ce document. Le superviseur doit prendre en
note toutes les raisons donnees par l'employe pour justifier ses retards, ses absences ou ses manquements (difficulte a se reveiller, bris du reveille-matin, panne de l'automobile, arret du metro, etc.). Comme la memoire est une faculte qui oubHe, il faut inscrire tous les details pertinents (l'heure et Ie jour de I'incident, ce que les temoins ont vu et entendu, les coordonnees des personnes en cause, etc.) puisque dans un contexte ou il y a un syndicat, un
Chapitre 9
I
lntervenir aupres des employes clifficiles
arbitrage sur une me sure disciplinaire peut survenir plusieurs mois apres I'adoption de celIe-ci. Dans certaines situations, notamment Ies cas de fraude ou de vol sur Ies Heux du travail, il faut reagir avec rapidite et rigueur. nest essentiel de cumuler des preuves soHdes et ctetaillees au sujet de I'evenement, qu'U s'agisse des lieux, du moment ou des declarations de collegues. Surtout, l'employeur doit eviter de porter des accusations ou d'appUquer des sanctions sur Ia base de presomptions sous pretexte qu'il a perdu con fiance en l'employe, sinon il s'expose a des poursuites pour diffamation ou atteinte a Ia reputation. Vne fois Ies preuves en mains, queUe que soit Ia sanction appliquee, I'employeur doit informer Ies autres employes de maniere que tout Ie monde sache que la fraude ou Ie vol est inacceptable dans I'organisation. Pour contr6ler des manquements comme Ie vol ou Ia consommation de drogue sur les Heux du travail, certains employeurs recourent a des methodes telles que la fouille d'employes ou la surveillance video. A cet egard, il importe que l'employeur se plie a certaines regles afin de respecter la vie privee des employes. S'il adopte une politique de fouille ou de surveillance video, il doit avoir des motifs serieux pour Ie faire; il doit aussi communiquer en detail cette politique aux employes et appliquer cette dernit:re uniformement. Afin de preserver la dignite de l'employe, la fouille des vetements ou la surveillance video d'un employe en particulier ne se justifie que si l'on soup~onne un metait. Dans Ie cas de la fouille, il est preferable de l'effectuer en prive apres avoir obtenu Ie consentement de l'employe. Dans Ie cas de la surveillance video d'un employe, laquelle ne peut etre faite qu'a l'exterieur de sa residence, elle est susceptible de permettre, relativement a un probleme d'absenteisme recurrent, de s'assurer de la veracite de ses allegations concernant une maladie ou des problemes physiques (Fournier, 1999).
9.5.2 L'examen des circonstances entourant le probleme La mesure disciplinaire imposee a un employe ne devrait pas entrer en con tradiction avec Ie contexte dans lequel il se trouvait. Par exemple, l'employe a-toil re~u une lettre de felicitations d'un cadre superieur? A-t-il obtenu une bonne cote de rendement annuelle ou une augmentation au merite alors que son superieur lui reprochait son rendement? De plus, tel que considere par les arbitres du travail, il faut etudier la possibilite selon laquelle Ie probh~me au travail reproche a l'employe est attribuable en partie a des problemes person nels (comme un divorce ou la maladie d'un proche) ou a la provocation d'un collegue ou d'un client.
9.5.3 La 1ega1ite du motif justtftant une meSUTe disciplinaiTe L'employeur doit s'assurer que Ie motif de la mesure disciplinaire est legal, sinon Ie salarie aura droit a deux recours, soit un grief s'il est syndique, soit une plainte devant l'autorite appropriee s'il n'est pas syndique. Le tableau 9.3 liste quelques lois, reglements et conventions qUi contraignent l'action des employeurs quebecois dans Ie domaine des mesures disciplinaires. Par
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Partie III ( Les detis de la performance
exemple, la Loi sur les normes du travail et la jurisprudence arbitrale balisent les interventions disciplinaires des employeurs en matiere de harcelement psychologique, d'absenteisme, de refus de travailler, etc. Plus precisement, dans les cas de congediements, les employes non syndiques qUi travaillent pour des employeurs assujettis a certaines compHences (federale, quebecoise et neo-ecossaise), et ce, apres un minimum particulier d'annees de service (par exemple, deux ans au Quebec selon la Loi sur les normes du travail, arti cles 124-128), peuvent contester leur renvoi. EXEMPlES DE lOIS, DE REGlEMENTS ET DE CONVENTIONS ENCADRANT lES ACTIONS DES EMPlOYEURS EN MATIERE DE MESURES DISCIPLINAIRES
Chapitre 9 f Intervenir aupres des employes difficiles
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9.5.4 Des normes de rendement et de comportement raisonnables et connues Pour demontrer ]a juste cause d'une mesure disciplinaire, l'employeur doit s'assurer qu'il a etabli et communique des regles raisonnables au sujet du comportement a adopter. Sinon, la sanction risque d'etre consideree comme arbitraire et d'etre per~ue comme resultant du caprice d'un cadre.
9.5.5 Une application immediate, objective et constante des normes de rendement Une me sure disciplinaire doit resulter d'une enquete objective du cadre, ou
l'employe a eu la possibilite de donner sa version des faits et ou la nature
. de la sanction est justiflee. Par ailleurs, l'organisation doit s'assurer d'une
certaine constance dans ses interventions aupres des cas problematiques afin
qu'elles soient per~ues par les autres employes comme etant equitables:
«l'arbitre per~oit tous les gestionnaires d'une entreprise, aussi vaste soit-elle,
comme n'etant qU'une seule et me me personne, et si la discipline est appli
quee de fa~on inegale ou meme incoherente d'un gestionnaire a l'autre, il
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Partie'"
I Les defis de la performance
vous en sera fait reproche» (Le Corre & Associes, 1996, p. 7). Vne application differente des mesures disciplinaires d'un gestionnaire a l'autre face a des cas semblables (des retards, Ie non-respect des pauses, l'absenteisme, etc.) rectuit aussi la credibilite ou l'equite du processus disciplinaire d'une organisation aupres des employes.
9.5.6 La gradation de la demarche disciplinaire Dans une demarche disciplinaire, la sanction doit s'averer en quelque sorte une solution (et non seulement une punition) qu'on adopte au nom de l'em ployeur pour amener l'employe a ameliorer son rendement ou son compor tement. La plupart des entreprises disposent d'un processus, officiel ou non officiel, d'approbation des mesures disciplinaires qUi varie selon Ie niveau hierarchique du cadre et la severite de la sanction envisagee. Toutefois, il est recommande qu'en tout temps, les cadres hierarchiques consultent les pro fessionnels des ressources humaines de leur entreprise pour determiner les sanctions, dont la severite sera fonction des fautes commises et des resultats a atteindre. Les professionnels des ressources humaines sont les personnes les mieux placees pour eviter les problemes d'injustice ou d'inegalite du traite ment qui font qu'un employeur applique a des employes des mesures disci plinaires differentes pour des manquements similaires. Ainsi, selon Ie principe de la gradation des mesures disciplinaires, l'em ployeur a recours a des sanctions d'une severite croissante. Les mesures disci plinaires les plus courantes sont la reprimande verbale, la reprimande eCrite, la suspension sans salaire a court ou a long terme et Ie congectiement.
La reprimande verbale Comme la reprimande verbale s'avere la forme de sanction la moins severe, sa portee est seulement corrective. La reprimande peut etre repetee. Toutefois, lorsque Ie cadre a averti pour la troisieme fois Ie meme employe pour la meme faute au cours d'une courte periode, it doit songer a d'autres mesures disci plinaires formelles. L'objet et la date d'un avertissement verbal peuvent aussi
Chapitre 9 ( lntervenir aupres des employes difficiles
etre transmis it l'employe au cours de sa communication sous forme d'un avis ecrit de correction que Ie cadre et l'employe seront invites a signer. Un avis ecrit de correction precisera Ie probleme reproche sous forme de faits, Ia correction attendue et l'expression de Ia confiance dans Ie fait que l'employe est en mesure d'apporter cette correction. Une copie de cet avis pourra etre consignee au dossier de I'employe.
La reprimande ecrite La reprimande ecrite, qui est essentiellement corrective, est une sanction sou vent utili see a la suite d'infractions mineures repetees, teis des retards, Ie non respect du temps des pauses ou des absences. En indiquant Ie serieux de la situation, Ie caractere officiel de l'ecrit vise a provoquer un changement. De plus, la reprimande ecrite permet de mieux defendre un eventuel congectie ment face aux tribunaux administratifs ou civils qui accordent peu de valeur aux reproches verbaux etant donne que ces derniers sont plus susceptibles d'etre «oublies>, ou nies par l'employe (Le Corre & Associes, 1994). La repri mande ecrite peut etre repetee plusieurs fois selon les caracteristiques de l'employe ou de sa faute ou selon les pratiques de l'entreprise.
La suspension sans salaire
a court ou along terme
La suspension a un caractere a la fois punitif et correctif. En general, on recourt it de courtes suspensions, soit d'un jour, de trois jours et d'une semaine selon la gravite de la faute, la repetition de cette faute et Ie dossier de l'employe. Lorsqu'on n'observe aucune amelioration de la situation apres deux ou trois suspensions, Ie congediement peut etre envisage.
A cet egard,
les pratiques suivies dans la rehabilitation d'un alcoolique ou d'un toxicomane peuvent etre instructives. [... J C'est la severite plut6t que la complaisance qui est la regie. On impose des sanctions Lourdes, de six sernaines au de trois mois, elles-memes conditionnelles a la participation a un groupe volontaire (comme Alcooliques Anonymes). On laisse begayer, c'est-a-dire qu'on repete avec severite les suspensions du salaire en cas de recidive. C'est la, semble-t-it une condition esserztielle de La rehabilitation. La remontee personnelle exige parfois d'avoir touche Ie fond. L'indulgence peut n'etre que complice de la perdition, ne foumissant que la corde requise a la pendaison (Gerin-Lajoie, 1992, p. 252).
Le congediement Cette sanction s'avere strictement punitive pour }'employe. Elle survient gene ralement lorsque }'employeur a epuise les precedentes mesures disciplinaires sans obtenir de resultats ou lorsque la faute est telle que l'employeur ne peut plus faire confiance it l'employe (par exemple, un vol ou une fraude). II est important de distinguer Ie congediement du licenciement. Un congediement est une mesure prise pour se de partir d'un employe qui ne repond pas aux normes de rendement de son poste pour diverses raisons, comme l'incompe tence ou des comportements inadequats. Quant au Iicenciement, il correspond
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Partie III
r Les defis de la performance
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davantage une mesure administrative associee it I'abolition d'un poste et liee it une reorganisation, it une rationalisation ou it une reduction d'effectifs. Pour faciIiter sa recherche future d'un empIoi, I'employe peut demander au cadre de remplacer Ie terme « congediement» par celui d'« abolition de poste» ou de «demission». II est risque d'acquiescer it cette demande: si l'employe porte plainte, il pouna alleguer qu'iI s'agit d'un congediement deguise. Pour la meme raison, il est deconseille d'ecrire une lettre de recommandation afin d'aider un employe congedie a se trouver un autre emploi. Par ailleurs, lorsqu'un employeur met fin it l'emploi d'un salarie, il doit lui donner un preavis raisonnable ou lui verser un salaire egal au montant gagne au cours de cette periode. Finalement, lorsqu'un employe veut demissionner de son empIoi, l'employeur devrait lui demander de prendre deux ou trois jours de re£lexion et de lui remettre une lettre indiquant clairement que sa demission a ete decidee de fac;;on libre et volontaire, et ce, afin de reduire Ie risque d'une pour suite pour congediement sans juste cause.
Pour etablir la severite d'une sanction, l'employeur doit tenir compte de divers facteurs. Toutefois, la gravite d'un manquement ou d'une faute peut justifier Ie non-respect de Ia gradation et I' octroi d'une sanction plus severe; ainsi, certains employeurs ont un reglement ou une politique disciplinaire qui precise des sanctions applicables a certaines fautes precises. Par exemple, un employeur peut vouloir transmettre une reprimande ecrite sans avertissement oral prealable lorsqu'un employe dissimule un travail incorrect, falsifie les donnees d'un rapport ou ne se conforme pas aux consignes de securite de l'entreprise. Par ailleurs, certains comportements peuvent it eux seuls justifier une suspension sans avertissement ecrit prealable. Pensons a l'employe qui menace son superieur, qui endommage ou detruit la propriete d'un employe ou de l'employeur, qui consomme de la drogue ou de }'alcool au travail, qui
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Intervenir aupres des employes difficiles
se presente au travail sous l'influence de l'alcool, qUi met en peril la securite d'autrui, qUi occupe un emploi qUi est en confHt d'interets avec ]'employeur, qui injure un client. On peut aussi imposer un congectiement, sans gradation prealable des sanctions, pour des raisons de harcelement sexuel au travail, d'agression al'egard d'un superieur, de fraude ou de vol d'un bien important, de vol par un detenteur d'un poste de confiance, de sabotage, d'atteinte it la securite d'autrui it travers une negligence grossiere. On peut resumer comme suit les principaux facteurs a prendre en consideration pour etablir la severite de Ia sanction: • la gravite du manquement (des retards, Ie vol d'equipement, etc.) ainsi que son caractere repHitif, intentionnel, premedite, public ou meme encourage (Ie nombre de personnes presentes, Ie caractere public de la faute, l'egarement ou une perte de contr6le momentanee, etc.); • les annees de service, Ie poste, Ie niveau hierarchique et Ie dossier de l'employe (des cotes de rendement favorables au cours des annees, les eloges ou les compliments re<;us, des mesures disciplinaires anterieures moins severes n'ayant pas donne de resultats, etc.); • la situation, la condition ou l'(~tat d'esprit de l'employe (un divorce, Ie deces d'un proche, etc.); • les consequences du manquement de l'employe (quant aux couts, a 1a reputation de l'employeur ou d'un collegue, etc.); • les politiques, les normes et la culture de gestion de l'employeur (l'existence et Ie traitement de cas similaires, etc.). En cas de doute ou d'hesitation a l'egard de la sanction a appliquer face au manquement d'un employe, l'employeur peut decider de Ie relever provisoi rement de ses fonctions, Ie temps de lui permettre de faire une enquete et d'analyser la situation. Le retrait provisoire des fonctions s'avere preferable a l'application hiitive d'une mauvaise sanction. Lors du retrait provisoire des fonctions, l'employeur se reserve la decision de remunerer ou non l'employe selon les resultats de l'enquete .
. . La conduite d'un entretien discip1inaire Lorsque Ie superviseur a pris la decision d'entamer une demarche discipli naire, il doit faire face a I'employe au cours d'un entretien aussi rapidement que possible, c'est-a-dire dans la journee meme, sans accepter d'excuses de la part de I'employe. Si ce dernier est convoque pour Ie Iendemain, il aura toute la soiree pour trouver une maniere de s'en sortir.
9.6.1 P1anifier 1'entretien disciplinaire Le cadre doit maitriser la situation et determiner it l'avance Ie moment, l'en droit et Ie contenu d'un entretien disciplinaire. II est preferable que cet en tretien ait lieu ailleurs que dans Ie bureau du cadre: ce dernier pourra ainsi
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Partie III
I Les defis de la performance quitter les lieux si I'employe se met en colere, l'insulte ou insiste pour pour suivre I'entretien. Lors d'un tel entretien, l'attitude du cadre doit etre calme, serieuse et ferme; adoucir Ies propos ne fait que brouiller les cartes et rendre la demarche plus difficile pour tous. Par contre, comme l'objectif consiste a corriger Ie probleme, Ie cadre sten tiendra aux faits de maniere precise et con cise en evitant de recourir a un langage emotif, agressif ou blessant, sinon cela ne ferait qu'accentuer les attitudes agressives ou defensives chez l'employe.
9.6.2 Preciser les faits reproches ainsi que leurs consequences et obtenir la version de l'employe Dans l'application d'une mesure disciplinaire, Ie cadre agit comme un repre sentant de l'employeur qui intervient pour sauvegarder les interets de l'en treprise; il n'intervient pas en son nom personnel et il ne cherche a satisfaire ses propres interets. Pour cette raison, Ie cadre doit exprimer avec exactitude la nature et I'importance du probU:me de l'employe en s'appuyant sur des faits. II doit aussi avancer les motifs veritables de Ia mesure disciplinaire (par exemple, des absences, des retards, Ie renIs de travailler en equipe, Ie refus d'utiliser une nouvelle technologie) et preciser les effets negatifs du com portement de l'employe sur I'efficacite de l'unite.
n faut reconnaitre que l'employe difficile pen,:oit certains avantages dans Ie fait de se comporter de la sorte, au nombre desquels se trouvent une charge de travail allegee, l'appui de ses collegues, une supervision reduite ou la sympathie accordee aux victimes. Dans ce contexte, Ie cadre tentera d'amener l'employe a reconnaitre son probleme; pour cela, il evitera de recourir a des qualificatifs blessants, mais il fera preuve de franchise. Le cadre doit consigner par ecrit les reactions ou la version de l'employe quant aux faits reproches. En outre, il peut demander a l'employe s'il veut lui reveler des faits supplementaires suscepti bles de justifier une sanction moins severe. De nombreux employes difficiles croient avoir plus de droits que d'obligations; c,est pourquoi les cadres doivent s'attendre a devoir refuter des accusations de harcelement, de discrimination, de xenophobie, etc. S'il y a lieu, Ie cadre doit rappeler a I'employe les entre tiens precedents - spontanes ou forme]s qu'ils ont eus a ce sujet et lui demon trer l'insuffisance de l'amelioration observee. S'il s'agit d'un entretien de congediement, Ie cadre doit etre Ie plus bref possible afin de limiter les possi bilites d'affrontement ou les reactions emotives de la part de l'employe. Rappelons qu'a ce stade-ci, l'echange empathique et l'engagement de I'em ploye dans la recherche d'une solution n'ont pas donne les resultats attendus. 9.6.3 Preciser la demarche disciplinaire Lorsqu'il entame une demarche disciplinaire, Ie cadre doit l'indiquer sans equivoque a l'employe en lui precisant la nature des prochaines mesures qu'il devra prendre si Ie probleme persiste et en soulignant que l'organisation appuie cette demarche. Pour reprendre l'exemple que nous avons vu prece demment, Ie cadre pourrait dire: «Pierre, au cours des derniers mois, nous avons dis cute a plusieurs reprises de tes retards. Nous avons dit que ceia nuit
Chapitre 9
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Intervenir aupres des employes difficiles
a ton travail et a celui de tes collegues. Cet entretien vise a te donner un pre mier avertissement. Si, au cours des trois prochains mois, tu arrives encore en retard, tu recevras un avis ecrit, puis une suspension, et finalement tu seras congedie. Cela correspond au processus disciplinaire de l'organisation. Je suis serieux et j'espere que tu vas maintenant trouver une solution a ce probleme.» II sera it souhaitable qu'un autre cadre assiste a l'entretien visant a communiquer un congediement, son unique role etant d'ecouter et d'obser ver. De plus, l'employe devrait qUitter l'organisation Ie plus rapidement pos sible apres un entretien de congectiement en emportant ses objets personnels.
9.6.4 ConsigneT le contenu et le deToulernent de l'entTetien Le cadre doit consigner par ecrit toutes les Hapes d'une demarche discipli naire et joindre cette piece au dossier de l'employe. II est souhaitable de prendre en note tout avertissement verbal; ce document doit etre date et signe par l'employe et Ie superviseur.
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La redaction d'un avis discip1inaire Idealement, une mesure disciplinaire devrait faire l'objet d'une lettre disci plinaire d'une page comprenant les points suivants (Le Corre & Associes, 1994; 1996; 2000): • • • • • • •
la liste des problemes et des mesures disciplinaires anterieurs; !'infraction actuelle; la correction requise; l'aide offerte; la sanction choisie; l'aspect positif de la mesure disciplinaire; la mise en garde, soit les mesures disciplinaires qui seront prises s'n n'y a pas d'amelioration.
De plus, Ie gestionnaire devrait communiquer verbalement a l'employe l'avis disciplinaire ecrit. Cette section vise a decrire les composantes d'un avis disciplinaire. Le tableau 9.4 presente un exemple d'avis disciplinaire visant a corriger un probleme d'absenteisme frequent de courte duree.
at L'intervent;on aupres des employes coupables de violence au travaU
Au cours des 10 dernieres annees, Ie nombre de reclamations a la Commission de la sante et de la securite du travail (CSST) pour dommages psychologiques aurait decuple, et pres de 2000 reclamations par annee seraient attribuables a la violence au travail, lesquelles peuvent etre admises comme lesions pro fessionnelles (Jolicc£ur, 2001).
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Partie 1/1
I
les defis de la performance
EXEMPlE D'AVIS DISCIPUNAIRE EN RAISON D'UN PROBlEME D'ABSENTEISME FREQUENT DE COURTE DUREE
Chapitre 9
I Intervenir aupres des employes difficiles
9.8.1 les multiples formes de violence en milieu de travail Comme l'indique Ie tableau 9.5, la violence sur les lieux du travail peut prendre diverses formes, et les employeurs ont la responsabilite de faire en sorte que Ie milieu de travail soit base sur Ie respect mutuel et de ne pas tolerer les agresseurs, qu'il s'agisse d'employes ou de clients. Des expressions comme «persecution collective», «harcelement professionnel », «intimidation» ou « brimade» peuvent qualifier une forme de Violence, laquelle est manifestee par une ou plusieurs personnes (des superviseurs, des cow.>gues, des subal· ternes) envers une autre personne ou un groupe de personnes. Mentionnons que si certains comportements enumeres dans Ie tableau 9.5 peuvent paraHre anodins et repandus parmi les employes, leur repetition au fil des jours, des semaines, des mois, voire des annees, constitue bel et bien de la violence au travail.
QUELQUES FORMES DE VIOLENCE EN MILIEU DE TRAVAIL
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Partie III
I Les defis de la performance
Source: Adapte d' A. Soares, « Un phenomene au pludeI : les violences», Effectif, vol. 4, nO 4, 200 I, p. 26-33, et de M. Jolicoeur, "La violence au travail nuit a la productivW~", Les Affaires, 26 mai 2001, p. 29.
9.8.2 Les lois et 1a jurisprudence en matiere de violence au travail En plus d'avoir interet a ne pas subir les consequences negatives qu'entraine la violence en milieu de travail (comme l'absenteisme ou l'invalidite a court ou a long terme en raison de detresse psychologique), les employeurs ont des responsabHites legales a assumer et ils s'exposent a des poursuites s'ils les ignorent. Le tableau 9.6 resume ces lois.
Chapitre 9
I
Intervenir aupres des employes difficiles
Apres avoir revu la jurisprudence arbitrale en matiere de violence au tra vail, Bouchard (2001) conc1ut qu'en general (et sauf s'il y a preuve de provo cation et de mauvaise foi de la part du superieur), les gestes de violence executes a l'egard d'un superieur entrainent Ie congediement immediat du fautif parce qu'ils impliquent aussi un comportement d'insubordination et que Ie fait d'annuler Ie congediement porte atteinte a la credibilite de l'employeur et mine son autorite aupres des autres salaries. L'auteure conclut egalement que l'existence de dispositions c1aires et non equivoques dans une convention collective ou dans une politique de l'entreprise (par exemple, une politique de tolerance zero) est un outil efficace permettant de faire cesser tous les comportements de violence dans Ie milieu de travail et pouvant li miter la latitude de l'arbitre lorsqu'il se prononce sur la validite d'une sanction (pensons a une convention collective ou il est ecrit que se battre sur les Heux .6 LES PRINCIPALES LOIS BALISANT LES RESPONSABILrrES DES EMPLOYEURS EN MATIERE DE VIOLENCE EN MILIEU DE TRAVAIL
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Partie III
I
Les defis de la performance
du travail constitue un motif val able de congediement). Sans de telles dispo sitions, l'employeur aux prises avec une situation de violence au travail devra analyser tous les faits entourant l'incident et decider de la sanction la lumiere des elements pouvant etre retenus par les arbitres pour determiner SI une sanction est appropriee (voir Ie tableau 9.7).
a
Comme Ie rappellent Blais et Perreault (2003), la Commission des relations du travail et les arbitres disposent d'un pouvoir discretionnaire Hendu dans Ie cas d'une plainte deposee pour harcelement psychologique etant donne que ce concept est flou et qu'il peut s'appliquer a des situations difficiles a regler. Plus precisement, seion l'article 123.15 de la Loi sur les normes du tra vail, ils peuvent ordonner a l'employeur, entre autres, de reintegrer Ie salarU~ dans son empIoi, de verser au salarie une indemnite jusqu'a un maximum equivalent au salaire perdu, de prendre les moyens necessaires pour faire
QUELQUES CONSTATS DE LA JURISPRUDENCE ARBITRALE EN MATIERE DE VIOLENCE EN MILIEU DE TRAVAIL
Chapitre 9
I
Intervenir aupres des employes difficiles
cesser Ie harcelement, de verser au salarie des dommages et interets punitifs et moraux, de verser au salarie une indemnite pour perte d'empIoi, de financer Ie soutien psychologique requis par Ie salarie pour une peri ode raisonnable determinee et de modifier Ie dossier disciplinaire du salarie victime de harcelement psychologique.
9.8.3 Les interventions pour contrer la violence en milieu de travail Les causes de Ia violence en milieu de travail sont multiples et les interven tions pour Ia contrer sont variees. Comme Ie montre Ie tableau 9.8, un rapport du Comite interministeriel sur la prevention du harcelement psychologique (2003) regroupe les sources et les interventions en trois categories: l'orga nisation du travail et les conditions de travail; Ie style de gestion; Ies valeurs organisationnelles. Ainsi, il est essentiel que les dirigeants manifestent une conduite exemplaire quant au respect qu'ils doivent aux employes et a leur diversite (par exemple, se comporter et s'exprimer avec courtoisie), qu'Us veillent a ce que Ie style de gestion n'alimente pas une competition excessive entre les employes et les services de l'organisation, et qu'ils adoptent, avec Ia participation des representants des employes, une politique contre Ie harce lement psychologique ou, a tout Ie mOins, qu'Us cessent de camoufler ou de banaliser les cas de harcelement psychologique. Au cours des dernieres annees, bon nombre d'organisations ont adopte une politique en matiere de violence (comme Bell Canada et Petro Canada). Par ailleurs, dans un contexte ou la main-d'
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Partie III
I
Les defis de la performance
Comite intenninisteriel sur la prevention du harcelement psychologique, Une strategie de prevention du harceiement psychologique au travail et de soulien aux victimes, rapport presente au ministre d'Etat aux Ressources humaines et au Travail et ministre du Travail, Quebec, fevrier 2003, p.27.
SOllrce:
Chapitre 9
I Intervenir aupres des employes difficiles
., Le partage des roles en matiere de gestion des employes difficiles ........................
Comme toutes les autres facettes de la gestion des ressources humaines, la ges tion des employes difficiles est une affaire de partenariat ou plusieurs parties exercent une influence. Cette section traite des responsabilites qu'assument les divers acteurs.
9.9.1 La direction, les cadres et les professionnels des ressources humaines C' est sur les epaules de la direction et des cadres que repose principalement I'Hablissement d'un climat de prevention visant a inciter les employes a se discipliner eux-memes ou a eviter que les probh~mes humains ne prennent de l'ampleur et ne persistent dans l'organisation. L'employeur a l'obligation d'edicter des regles raisonnables de conduite et de prouver que la sanction imposee repose sur une cause juste et suffisante. La sanction doit suivre imme diatement Ie manquement, elle doit etre coherente par rapport aux sanctions qui ont He appliquees par d'autres cadres en liaison avec les manquements similaires d'autres employes et eIle doit etre impersonnelle, c'est-a-dire ne pas tenir compte de la personnalite de l'employe fautif. Entre autres, les dirigeants et Ies cadres doivent veiller a communiquer et a expliquer aux employes Ies normes de l'entreprise dans ce domaine. Dans bien des cas, l'adoption et Ie respect d'une procedure ou d'une politique de gestion (comme une politi que en matiere d'absenteisme ou l'exigence d'un certificat medical), plus qu'une procedure diSCiplinaire, permettront de limiter les exces.
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Partie III
I
Les defis de la performance
Par ailleurs, les employeurs doivent s'assurer que certains modes de gestion n'incitent pas les employes a agir a l'encontre du bien de l'entreprise ou n'en trainent pas l'apparition ou l'aggravation de problemes humains. En fait, lorsqu'un groupe important d'employes eprouve des problemes de rendement ou de comportement - comme un taux d'absenteisme moyen de 2S jours par annee - il faut reconsiderer les processus de gestion qUi sont en place. Comme Ie probleme est institutionnalise, les dirigeants ont la responsabilite de Ie resoudre. A titre d'exemple, les conges de mala die genereux ou mal geres sont souvent la cause d'un probleme important d'absenteisme. Ainsi, la perte des journees de conge de maladie qui ne sont pas prises constitue une mesure sus ceptible d'entretenir une culture de l'absenteisme parmi les employes. La contribution des dirigeants et des professionnels du service des res sources humaines est egalement importante en matiere de gestion des employes difficiles. Selon Ie contexte, ces gestionnaires peuvent adopter des politiques dans divers domaines, que ce soit une politique de gestion de l'assiduite, une politique sur l'usage de l'alcool et des drogues au travail, une politique de gestion des conflits ou une politique de conduite ethique et professionnelle. Ils doivent communiquer aux employes certaines normes de I'entreprise et encourager ces derniers ales suivre. De meme, Us doivent gerer
des activites de formation pour expliquer les raisons sur lesquelles se fondent
les normes et pour creer un climat de travail positif. Par ailleurs, ils doivent s'assurer que Ie syndicat et les employes participent a l'etablissement des normes ou des politiques afin qu'ils y adherent davantage. Une organisation dans laquelle il n'y a pas de syndicat a d'ailleurs interet a se soucier de l'equite de sa gestion de la diSCipline, pUisque la presence ou la perception d'injustices it cet egard peut amener les employes a vouloir se syndiquer.
Chapitre 9
I Intervenir aupres des employes difficiles
9.9.2 Les syndicats Dans Ies entreprises ou il y a un syndicat, Ies mesures disciplinaires font l'objet de dispositions particulieres dans la convention collective. De fait, Ies syndicats ne s'opposent pas aux mesures disciplinaires imposees aux employes pourvu qu'elles reposent sur des regies raisonnables et connues, sur une cause juste et suffisante, et qu'elles soient appliquees uniformement. Vne procedure d'arbitrage de griefs, qUi est comprise dans presque toutes Ies conventions collectives, permet au syndicat de contester, au nom du salarie, Ie bien-fonde de mesures disciplinaires (telles qu'une suspension ou un licenciement) dans un certain delai. Si l'employeur ne demontre pas Ie bien-fonde de Ia cause ou si l'arbitre juge la sanction trop severe, ce dernier pourra revoir Ia sanction (par exempIe, en reintegrant un employe congectie) et demander une indem nisation it l'employe. En general, Ies syndicats sont reticents a prescrire dans une convention collective des sanctions particulieres pour des manquements donnes parce que ceia limite Ie pouvoir decisionnel de l'arbitre.
L'arbitrage de griefs en tant que mode de resolution de problemes n'est pas suffisant pour regler bon nombre de cas problematiques parce qu'il ne satisfait pas a certains prealables (comme 1'expertise, la confidentialite, l'absence de prejudice et l'absence de biais) et qu'il ne fait que corriger et non prevenir. Les syndicats souhaitent que leurs actions deviennent davantage preventives, c'est-a.-dire axees sur l'information et la sensibilisation des employes. Par exemple, Sylvestre (1996) decrit Ie reseau des 2000 deU~gues sociaux au sein des syndicats affilit'~s a Ia FTQ qui aident benevolement
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Partie III
I
Les defis de la performance
des pairs qUi vivent des problemes d'ordre personnel sur une longue periode (en moyenne 6 mois) a trouver des solutions a leurs problemes, lesquels sont, dans 40 % des cas, lies a des tensions psychologiques, a du stress et a des rela tions interpersonnelles difficiles. La l<'TQ experimente aussi dans certains syn dicats affilies la mise sur pied de collectifs de travail, soit des lieux le.s personnes qui vivent une situation diffidle semblable, comme une mise a pied, un changement de conditions de travail ou l'epuisement professionnel, peuvent dis cuter et adopter des actions collectives.
ou
9.9.3 Les compagnies d'assurances Depuis une quinzaine d'annees, les assureurs versent beaucoup plus de pres tations d'invalidite pour des problemes psychologiques. Afin de mieux contraler ces couts et de mieux aider les employes, les compagnies d'assu rances adoptent de plus en plus une approche de gestion integree ou preven tive face aux employes ayant des problemes personnels. Par exemple, elles effectuent un suivi aupres des employes qui s'absentent plus d'une quinzaine de jours pour en connaltre la cause, ou encore eUes offrent l'aide de profes sionnels aux employes afin qu'ils reviennent rapidement au travail a temps plein ou, si ce n/est pas possible, a temps partiel. En effet, l'experience a mon tre aux assureurs que plus les employes qui sont aux prises avec des problemes personnels s'absentent longtemps de leur travail, moins Us tendent a re prendre celui-ci; cela est encore plus vrai lorsque les clauses des polices d'assu rances sont telles que Ie manque a gagner est minime pour les employes qui touchent des prestations d'invalidite a long terme. La veritable aide, celIe qui incite l'employe a retrouver son etat anterieur, consiste pour plusieurs assureurs a apporter un appui davantage preventif (ne plus etre que des payeurs de pre stations) et a veiller a ce que l'employe invalide subisse un manque a gagner important par rapport a l'employe au travaiL
Conclusion La gestion des employes difficiles implique des decisions de gestion et des atti tudes particulieres. Toutefois, il faut se rappeler que l'employe difficile reste une exception. Pour la plupart des employes, Ie coaching, Ie counselling spon tane et Ie counselling officiel assures par les cadres suffisent a resoudre les pro blemes qu'eprouvent les employes au travaiL Dans ce chapitre, qui s'est surtout adresse aux superieurs hierarchiques des employes difficiles, nous avons fait plusieurs clarifications, notamment en matiere de counselling et de discipline, et resume plusieurs conseils recenses dans la litterature portant sur ces sujets. L'intervention aupIes des employes
difficiles restera toujours ardue et ctesagreable pour les cadres. Cependant, lorsque ces derniers sont plus conscients de leurs responsabilites, des limites de leurs roles, des principes a respecter et des approches a utiliser, ils ame liorent leurs chances d'intervenir de maniere efficace aupres des employes difficiles, ce qUi est dans l'interet de tous.
Chapitre 9
I Intervenir aupres des employes difficiles
de r evision
o Comment peut-on definir Ie terme «employe difficile» ?
• Pourquoi est-il important d'inter venir adequatement aupres des employes difficiles? • Decrivez les trois pieges qui guettent Ie cadre place devant un employe difficile.
o QueUes sont les principales etapes
G) Presentez les principales sanctions disciplinaires selon leur gradation.
a. Comment Ie cadre doit-il mener un entretien disciplinaire?
d'une intervention face aun employe difficile?
® Comment
venients du counselling offert par les cadres, et donnez des con seils ou des recommandations a cet egard.
(i) QueUes sont les formes de violence
o Resumez les avantages et les incon CD
appliquent une demarche discipH naire. En d'autres mots, que doit faire un employeur pour eviter une poursuite ou un grief a l'egard d'une sanction disciplinaire qu'il impose?
Distinguez Ie counselling spontane et Ie counselling officieL
o tien Decrivez Ie deroulement d'un entre de counselling officiel au pres
d'un employe difficile en precisant les regles a respecter dans un tel entretien.
«3 Quels sont Ies objectifs et les carac teristiques d'un programme d'aide aux employes?
€) Resumez les principes et les regles que les legislateurs demandent aux employeurs de respecter lorsqu'ils
rediger un avis discipli naire? QueUes sont Ies principales composantes de celui-ci ? en milieu de travail ?
~ QueUes
sont les principales lois qui balisent les interventions des em ployeurs en matiere de violence au travail ?
~ Decrivez
les principales sources de harce1ement psychologique au tra vail. Donnez des exemples d'inter ventions susceptibles de contrer cette forme de violence.
~ Indiquez
les responsabilites des professionnels des ressources hu maines, des dirigeants d'entreprise, des syndicats et des compagnies d'assurances en matiere de gestion des employes difficiles.
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Partie III
I
Les defis de la performance
BEAUDOIN, O. (1986). Le counselling en milieu de travail, Montreal, Editions Agence d'Arc.
BOUCHER, G. (2002). «Quand un employe est pris dans Ie sac », Effectif, vol. 5, nO 2, p. 20-22.
BLAIS, 1. et R. PERREAULT (2003). «Les recours judiciaires en matiere de harcelement psychologique », Effectif, septembre-octobre, p. 36-39.
COMITE INTERMINISTERIEL SUR LA PREVENTION DU HARCELEMENT PSY CHOLOGIQUE (2003). Une strategie de prevention du hard:lement psychologique au travail et de soutien aux victimes, rapport presente au ministre d'Etat aux Ressources humaines et au Travail et ministre du Travail, Quebec, fevrier.
BOUCHARD, M. (2001). «En matiere de violence, la jurisprudence est claire», Effectif; vol. 4, nO 4, p. 50-51.
2. Question inspiree du materiel de formation de Me Andre Sassville, «La gestion disciplinaire au quoti dien: une approche proactive et engageante », Programme de f'ormation a /'intention des gestionnaires, HEC Montreal, 11 mars 2002. 3. Ibid.
Chapitre 9
Intervenir aupres des employes difficiles
DE SMET, M. (2003). «Sachez gerer les employes a problemes», Les Affa ires, 11 octobre, p. 33.
NOEL, K. (2001). «Les employes brillent par leur absence", Les Affaires, 31 mars, p.30.
DIAl, D., A. PAYANT, S. POllEBON et
PANET-RAYMOND, C. (2000). «Surveil ler ses employes par video requiert des raisons exceptionnelles», Les Affaires, 30 decembre, p. IS.
S. ST-ONGE (2003). Ie programme dJaide
aux policiers et (lUX policii:res du Service de police de la Ville de Montreal, Montreal, HEC Montreal, Centre de cas, nO 9 30 200301S. FOURNIER, N. (1999). «Jusqu'ou peut aller la surveillance video d'un employe?», Les Affaires, 13 novembre, p. 3S. GERIN-LAJOlE, J. (1992). Les relations du travail au Quebec, Boucherville, GaHan Morin Editeur. GUERIN, G. et autres (1997). «Les pra tiques d'aide a l'equilibre emploi-famille dans les organisations du Quebec », Relations industrielles, vol. 52, nO 2, p.274-303. JOLICCEUR, M. (2001). «La violence au travail nuit a la productivite », Les Affaires, 26 mai, p. 29. KISFALVI, V. et 1. LAPIERRE (1997). «Subordination et insubordination", Gestion, vol. 22, nO 21, p. 76-S0. LE CORRE & ASSOCIES (1994). Gestion moderne de fa discipline et du conge diement, Cowansville, Les Editions Yvon Blais. LE CORRE & ASSOCIES (1996). L'ap proche disciplinaire: choix de sallctions, modeIes et cas vfcus, Cowansville, Les Editions Yvon Blais. LE CORRE & ASSOCIES (2000). La ges tion pratique de I'absenteisme: tout ce que l'employeur doit savoir, Cowansville, Les Editions Yvon Blais. LEFEBVRE, M. (2001). «Un employe suspendu pour avoir fume une Cigarette a la cafeteria», Les Affa ires, 1er sep tembre, p. 24.
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a l'intention
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HEC Montreal. SOARES, A. (2001). «Un phenomene au pluriel: les violences », Effectif, vol. 4, nO 4, p. 26-33. SYLVESTRE, J. (1996). «Le syndicat: un acteur indispensable dans la gestion des problemes humains au travail ", dans Innover pour gerer les conflits, sous la direction de J. Belanger et autres, Quebec, Les Presses de l'Universite Laval, p. 176-180. VEILLET, F. (2002). « Comment resoudre la baisse de rendement d'un employe", Les Affaires, 11 maL p. 3S.
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Partie III
I
Les defis de la performance
GGIREES ................................................ .
;.
CENTRE CANADIEN D'HYGIENE ET LE CORRE & ASSOCIES (1996). L'ap proche disciplinaire: choix de sanctions, DE SECURITE AU TRAVAIL (2001). Prevention de la violence en milieu de tra modeles et cas V{~cus, Cowansville, Les vail, 2e ed., Hamilton, CCHST. Editions Yvon Blais. LE CORRE & ASSOCIES (1994). Gestion
moderne de la discipline et du conge
diement, Cowansville, Les Editions
Yvon Blais.
Chapitre 9
I
Intervenir aupres des employes difficiles
(( Je n'en peux plus4 ! » ClaUde est un employe de production ayant 10 ans d'anciennete dont les com portements et Ie rendement avaient toujours He exemplaires. Au cours de Ia derniere annee, il a eprouve de graves problemes financiers. Selon une rumeur qui circu]e, il boit beaucoup en dehors du travail II s'absente du travail plus souvent et sa productivite est plus faible tant sur Ie plan de Ia qualite que sur celui de la quantite. Lors de Ia derniere peri ode d'evaluation, son superviseur, M. Lafleur, a voulu aider Claude et ne pas empirer sa situation en lui accor dant les cotes «tres bon» ou «bon» pour tous les criteres du formulaire. Toutefois, pendant l'entretien d'evalua tion, il a reieve clairement les problemes de Claude au travail et il a insiste sur Ie fait que son employe devait y remedier dans les plus brefs delais. Au cours des mois suivants, Claude commet de plus en plus d'erreurs dans son travail; ses absences et ses retards se multiplient. Les autres membres de l'equipe ne peuvent plus supporter cette
situation et pressent leur superviseur d'intervenir. M. Lafleur n'a pas Ie choix: il doit s'adresser au service des res sources humaines. Des qu'il se trouve dans Ie bureau du directeur des res sources humaines, il lui dit: « Ecoute, je n'en peux plus: Claude doit etre congedie immediatement! »
o C ommentez
la
mamere
dont
M. Lafleur a gere Ie cas de Sylvain.
Quelles erreurs a-toil commises? Comment aurait-il dti gerer la situation?
8 Vous
etes directeur des ressources humaines dans cette organisation. Qu'est-ce que ce cas vous enseigne quant a Ia gestion des employes difficiles dans votre organisation? Qu'est-ce que la direction de l'orga nisation incluant Ie directeur des peut faire ressources humaines pour eviter qu'un tel cas ne se reproduise?
Les ec1ats de Dominique 5 Production Excel, une firme ou il n'y a pas de syndicat, vient de recruter a l'exterieur un nouveau directeur pour Ie service de l'entretien. Ce nouveau directeur compte plusieurs annees
d'experience et possede tous les atouts pour succeder au precedent directeur qui a occupe ce poste pendant 10 ans. De fait, il est vite accepte par les mem bres de son service.
4. Cas inspire de A. Paquet-Gagnon et S. St-Onge, "Un probleme en attire un autre", Centre de cas, HEC Montreal. S. Cas inspire de A. Paquet-Gagnon et S. St-Onge, !dJ n'est pire eau que I'eau qui darb" Centre de cas, HEC Montreal.
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Partie III
I
Les defis de la performance
Peu de temps apres son entree en fonction, il fait remarquer a Dominique, un membre de son equipe, que son rapport quotidien d'entretien est mal rempIi et qu'il doit Ie revoir. Hors de lui, Dominique, qui vit des problemes con jugaux, donne un coup de pied dans Ie photocopieur et, devant les autres mem bres de l'equipe, engueule son nouveau superviseur et Ie menace de gestes plus graves s'il continue de Ie persecuter de la sorte. Surpris et apeure, Ie directeur va aussitot discuter de cet incident avec son superieur et Ie directeur des res sources humaines. A leur connaissance, c'est la premiere fois qu'un incident de ce genre survient. Puis, au cours de conversations avec les autres membres de son service, Ie nouveau directeur apprend que les eclats de Dominique ne sont pas nouveaux. Certains de ses
collegues ont d'ailleurs appris
a
leurs
depens qu'il ne faut pas etre en desac cord avec Dominique. Le superviseur precedent, qui avait peur de lui, prete
rait ne pas intervenir pour ne pas jeter de l'huile sur Ie feu. Le dossier de Dominique ne comporte aucun avis disciplinaire.
NS
(!)
o situation? QueUes rHlexions vous inspire cette 8 Si vous
occupiez Ie poste de direc teur des ressources humaines chez Production Excel, que feriez-vous? De quoi tiendriez-vous compte au moment de recommander des me sures a prendre?
PTis la main dans le sac! Vous lisez ce qui suit dans un journal: «M. Larigueur, qUi etait directeur des finances, avait su garder la confiance de tous au sein de l'etablissement ou il travaillait depuis 20 ans. Toutefois, etant aux prises avec des difficultes financieres, il a commence ces derniers mois a manipuler les comptes et a frauder l'entreprise.» Plus loin, vous Iisez: «Marcel Le Droit, un employe d'entretien syndique, a ete pris en train de voler de la marchandise a son em ployeur, une municipalite pour laqueUe iI travaillait depuis 10 ans. La preuve est
faite qu'il volait de la marchandise depuis trois mois et la revendait pour faire de l'argent. »
Vous qui etes dirigeant d'entreprise, vaus canstatez que de tels exemples de
fraude semblent assez courants. Vous vous demandez alors ce qu'un em ployeur peut et doit faire face a la fraude.
Chapitre 9
I
Intervenir aupres des employes difficiles
Quai qu'elle fasse, Suzanne a tort! Suzanne est enseignante dans une ecole secondaire. EIle est tres compe tente, ses eleves l'aiment et plusieurs parents soulignent ses qualites de peda gogue. Elle adore son travail et son employeur. Cote personnel, la vie la comble aussi. Son seul probleme depuis qu'elle est arrivee dans cette ecole, il ya de cela trois ans, ce sont ses relations avec ses collegues de travail et son superieur immediat. Quoi qu'elle fasse, elle a tort. Plusieurs de ses collegues lui reprochent son habillement, ses atti tudes, sa personnalite, et ainsi de suite. D'autres, par Ifkhete ou par peur, ne veulent pas se meIer de cette affaire. Par del a les recriminations a son endroit, on !'ignore. Elle n'est pas invitee aux reu nions ni aux sorties. Elle fait constam ment l'objet de sarcasmes, de moquerie; elle a meme subi, recemment, un coup monte. Certains de ses collegues lui ont dit qu'ils avaient entendu une rumeur selon laquelle elle songeait a quitter
l'ecole. Elle tente souvent de parler a son superieur ou it des collegues, mais chaque fois, cela se retourne contre el1e. On lui dit alors qu'el1e imagine des choses, que Ies evenements, les com portements et Ies paroles qu'elle evoque sont anodins et justifies. II lui suffirait de faire plus d'efforts; apres tout, ses collegues s'entendent bien entre eux! Les attaques, les insultes et Ie mepris, qui sont Ie lot quotidien de Suzanne, l'accablent.
Vous enseignez dans une autre ecole secondaire de Ia region et connaissez Suzanne de longue date. Vous aimeriez l'aider, d'autant plus qu'il s'agit d'une employee si competente et devouee! Quels conseils lui donneriez-vous? ]ustifiez votre reponse.
•
Les defis des
conditions de travail·.
Apres l'etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Distinguer les composantes de la remuneration gIobale. • Comprendre l'importance de la gestion des salaires. • Reconnaitre Ies incidences du contexte environnementaI et organisationnel (lois, industrie, taille, presence syndicale, categorie de personnel, etc.) sur la gestion des salaires. • Distinguer les differents principes d'equite en matiere de gestion de la remuneration. • Expliquer les divers outils, techniques et methodes qui permettent d'opti miser Ie caractere equitable des salaires, notamment les methodes d'evalua tion des emplois, les enquHes de remuneration et les structures salariales. • Comprendre Ie concept d'equite salariale et connaitre la demarche pronee par la Loi sur l'equite salariale adoptee au Quebec en 1997. • Decrire certaines tendances dans Ie domaine de la gestion des salaires, notamment les bandes salariales elargies, les salaires bases sur les compe tences et Ie recours a I'informatisation et a la sous-traitance.
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail
Une prime ala rarete pour pa11ier la penurie de main-d'CEuvre1
Une prime a la rarete pennet de con
towner l'echelle salariale des entreprises, facilitant ainsi l'emballche et la fidelisa tion de travail/eurs fortement convoites. Paul Tremblay, directeur de la remu neration et des avantages sociaux chez Drakkar & Associes, utilise cette prime depuis line dizaine d'annees. Lorsqu'il etait chez la phannaceutique Novartis, il avait constate une penllrie d'employes de metiers et avait donc implante cette meSlire. «A differentes periodes, il devient pillS difticile d'attirer un certain type de tra vailleur. Mais cela ne dure generaiement que quelques annees. En offrant des sa iaires eieves des /'embauche, une entreprise se retrouve avec line echelle salaria/e trap lourde par rapport au marche lorsque /a penurie disparaft », explique M. Tremblay. Lars de 1a bulle technologique, par exemple, plusieurs firmes informatiques ont accorde de tres hauts salaires aux recrues, parfois plus de 80000 $. « Apres La crise, la main-d'ceuvre est devenue beau coup plus disponible, et les entreprises qui avaient octroye de hauts salaires ne pou valent plus les modifier», note M. Tremblay. Enquete salariale
Lors d'un processus d'embauche, une en treprise peut commander a l'exteme une enquete salariale qui lui indiquera les rea lites et tendances de chaque paste dans Ie marche actuel. Par la suite, l'emplayeur qui veut attirer Ie candidat de son choix peut lui proposer une prime et la duree de celle-ci (generalement pas plus de trois ans). Vne
fois la prime venue a echeance, lme autre enquete salariale permettra aux deux par ties de prolonger la prime, de I'augmenter au de I'annuler. «L'entreprise doit partager Ie resultat des enquetes salariales avec l'em ploye et inclure la prime a la rarete dans Ie contrat », conseille-t-il. Le montant de la prime dependra de la penurie dans Ie marclle. EIle peut, en moyenne, atteindre .10 000 $ pour un salaire annuel de 50000$, donc 20%. «La prime peut Nre utilisee avec des employes de tous les niveaux. Par exemple, certaines entreprises du domaine pharma ceutique disent souvent eprouver de la dif ficulte a attirer des medecins alors que d'autres, souvent situees en region, auront de la difticulte a recmter des electriciens ou des plombiers », mentionne M. Tremblay. Lorsqu'une prime a la rarete n'est pas renouvelee et qu'un employe voit son salaire diminuer de 60000 $ a 50000 $, l'employeur doit alors jOller cartes sur table. « Tout est une question de communication. Si la nouvelle enquete sa/ariaIe demontre que la penurie dans Ie domaine est dis parue, l'employeur dolt s'assurer que ces cone/usions serout bien comprises par ['employe", explique-t-il. Quant au risque de voir l'employe quitter l'entreprise, il est faible, selon M. Tremblay. «Le travailleur qui deciderait de quitter son poste pour tenter de trouver Ie mbne emploi ailleurs a 60000 $ ne reussira peut-etre pas puisque les salaires aurollt baisse partout, croit-il. Il existe des organisations a I'image des Yankees de
a la rarete pour pallier la penurie de main-d'o:;uvre ", Les Affaires, cahier special, 6 septembre 2003, p. A2.
1. M.-A. Dumont, «Une prime
Chapitre 10
New York (cette equipe de baseball a une masse salariale annuelle de 180 millions de dollars americains et offre des contrats faramineux), mais La situation n'est pas generalisee », estime M. Tremblay.
I Offrir des salaires equitables
o Expliquez de queUe fa<;on la gestion
de la remuneration permet d'opti miser l'atteinte d'objectifs souvent conflictuels.
8 Pourquoi est-il important de recou rir au concept de «remuneration globale» lors des activites de recru tement de personnel?
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Les pressions economiques font en sorte que Ie rendement des organisations constitue plus que jamais la preoccupation de leurs dirigeants. Dans ce con texte, les dirigeants prennent de plus en plus conscience du role strategique de la remuneration des employes dans l'amelioration des resultats de leur organisation et de l'importance d'une gestion efficace et efficiente des couts de main-d'ceuvre. Ce chapitre traite du deti consist ant a gerer de fa<;on opti male les salaires des employes, de maniere qu'ils incitent les employes a adopter les attitudes et les comportements desires, qu'ils satisfassent a divers principes d'equite et qu'ils respectent les lois. Plus precisement, nous detinissons d'abord les compos antes de la re muneration globale, dont Ie salaire. Ensuite, nous traitons de l'importance de bien gerer la remuneration, et plus particulierement les salaires. Nous insis tons egalement sur la necessite de gerer les salaires en fonction du contexte environnemental et organisationneL En effet, on ne gere pas les salaires de la meme fa<;on dans une PME que dans une grande entreprise, dans une entreprise localisee a Montreal que dans une entreprise situee dans une petite communaute, dans une entreprise ou il y a un syndicat que dans une entreprise non syndiquee, dans Ie secteur public que dans Ie secteur prive, etc. Puis, nous examinons les principes d'equite qu'il faut respecter en matiere de gestion de la remuneration et des pratiques de gestion visant a s'assurer du respect de ces principes. Nous abordons par la suite la question de la legalite, entre autres a travers la Loi sur l'equite salariale, qui a He adoptee en 1997 au Quebec. Nous ten tons egalement de demystifier les concepts-des lies a la ges tion des salaires, tels que l'evaluation des emplois et la methode des points et des facteurs, l'enquete salariale ou l'enquete de remuneration ainsi que les strutures salariales. Finalement, nous discutons de nouvelles tendances en matiere de gestion des salaires, comme les salaires bases sur les competences, les bandes salariales eIargies, Ie recours a l'informatisation et Ie recours a la sous-traitance.
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Les defis des conditions de travail
Le salaire : une composante de la remuneration globale •
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Les employes sont remuneres de diverses fac;ons pour la contribution qu'ils offrent a leur employeur. La remuneration dite globale comprend I'ensemble des retributions re<;ues par les employes pour leurs services ou leur travail. Comme l'indique Ie tableau 10.1, on peut subdiviser la remuneration globale en deux grandes composantes. Premierement, Ia remuneration directe inclut les salaires et les primes d'in convenients et la remuneration variable. Le salaire correspond au montant d'argent qu'un employe re<;oit pour son travail sur une base annuelle, men suelle, hebdomadaire ou horaire. D'habitude, les organisations procedent reguliE'rement a des ajustements de salaires de fac;on a tenir compte de l'aug mentation de l'indice des prix a la consommation (l'inflation), des salaires payes sur Ie marche ou encore du rendement ou des annees de service des employes. Certains employes peuvent recevoir des primes d'inconvenients ou des montants forfaitaires parce qu'ils realisent leur travail dans des conditions particulieres; des heures supplementaires, un quart de travail de soir ou de nuit, un travail dans des Heux eloignes, un travail de fin de semaine ou lors de conges, un travail dans des conditions dangereuses, et ainsi de suite. Par ailleurs, la composante variable de la remuneration directe couvre toutes les formes pecuniaires de reconnaissance les primes ou les montants forfaitaires (les bonis), les commissions, les actions, les options d'achat d'actions - que l'employe peut recevoir en vertu de regimes de remuneration qUi tiennent compte du rendement individuel et/ou collectif, comme les regimes de par ticipation aux benefices, de partage des gains de productivite, de partage de la realisation des objectifs, d'octroi d'actions ou d'options d'achat d'actions. DeuxiE:mement, la remuneration indirecte, soit une remuneration qui n'est pas versee en especes, comprend, d'une part, les avantages sociaux et Ie temps chome et, d'autre part, les avantages complementaires et les conditions de travail. Les avantages sociaux portent sur les regimes prives et publics de retraite et d'assurances qui visent a proteger les employes contre certains
LES COMPOSANTES DE LA REMUNERATION GLOBALE
Chapitre 10
I Offrir des salaires equitables
aleas de la vie tels que la mortalite, l'invalidite ou la maladie. Le temps chome consiste dans les jours de vacances et les conges payes offerts aux employes en vertu de Ia Loi sur Ies normes du travail ou encore, tres souvent, en sus des eXigences de cette derniere (par exempIe, des conges accordes lors de jours feries, des conges octroyes pour des raisons personnelles, des conges de maIa die, de maternite, de paternite, de deces ou de mariage). Les avantages com plementaires offerts aux employes comprennent les gratifications (perquisites) ou les depenses remboursees par l'employeur, com me les depenses liees a une automobile, aune place de stationnement, ades repas, ades frais de scolarite, a des conseils financiers ou a des programmes d'aide aux employes. Les conditions de travail ont trait, quant a elles, aux heures de travail ainsi qu'aux conges sans solde qui ont un impact direct et indirect sur la remuneration du temps travaille. Par exemple, I'octroi de conges sans solde aux employes implique des debours de formation a l'egard des employes rempla<;:ants.
Meme si ce chapitre traite principalement de la gestion des salaires comme composante de la remuneration directe, il s'avere important de comprendre Ie role que jouent les autres composantes de la remuneration. La gestion des regimes de remuneration variable et la gestion des avantages sociaux font d'ailleurs l'objet des chapitres 11 et 12 de ce livre. De fait, la maniere dont sont collectivement gerees toutes les compos antes de la remuneration est importante parce que cela influence les attitudes, les comportements et Ie ren dement des employes teis que la qualite de leur travail, la qualite du service qu'ils offrent aux clients, leur volonte d'acquerir de nouvelles competences, leur esprit de collaboration et leur volonte de se syndiquer. Etant donne que les differentes composantes de Ia remuneration portent des messages parti culiers, les dirigeants d'entreprise doivent s'assurer d'adopter ceux qui vehi culent Ies valeurs desirees. Comme Ie montre Ie tableau 10.2, la gestion de la remuneration globale implique des choix qUi auront des effets sur les atti tudes, les comportements et les resultats des employes. Pensons, par exemple, a la decision de tenir compte de l'anciennete plutot que du rendement dans la determination des salaires individuels, ou encore a l'adoption d'un regime de primes reconnaissant Ie rendement individuel plutot que Ie rendement de l'equipe.
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I Les defis des conditions de travail lES CHOIX STRATEGIQUES EN MATIERE DE GESTION DE LA REMUNERATION
Source: R. Theriault et S. St-Onge, Gestion de la remuneration: thiJorie et pratique, Boucherville, Gaeian Morin Editeur, 2000, p. 49-50.
Chapitre 10 \ Offrir des salaires equitables •
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L'impoTtance de la gestion des salaiTes
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Les choix en matiere de gestion des salaires sont importants puisqu'ils peu vent influencer la realisation de divers objectifs de remuneration, notamment ceux qui consistent aattirer et a retenir Ie personnel-cIe, a inciter les employes a adopter certaines attitudes ou certains comportements et, enfin, a contr6ler les couts. L'importance relative attribuee a chacun de ces objectifs variera d'ailleurs d'une entreprise a l'autre et meme d'une categorie de personnel a l'autre au sein d'une entreprise. Selon Ie contexte et les employes vises, les dirigeants d'entreprise pourront avoir diverses priorites: soit encourager l'in novation et la creativite en accordant des salaires bases sur les competences ou en elargissant leurs bandes salariales, soit accorder les meilleurs salaires sur Ie marche afin d'attirer ou de retenir les meilleurs employes, ou reduire les sal aires afin de reduire les couts de main-d'ceuvre. II est important d'etablir ces priorites puisqu'elles determinent la nature des poJitiques et des pratiques de remuneration. Par exemple, lorsque l'entreprise decide d'offrir des condi tions de travail concurrentielles aux employes de R&D, les enquetes de remuneration deviennent un outil majeur a cet egard. II faut egalement se preoccuper des objectifs de remuneration parce que ces derniers peuvent s'averer conflictuels. En effet, pour attirer et retenir Ie personnel-cle, une organisation peut offrir des conditions de remuneration tres avantageuses, mais cela augmentera ses couts de main-d'ceuvre. On comprend alors que la gestion de la remuneration correspond plus a un art qu'a une science. Dans ce domaine, il n'y a pas de solutions ideales, il y a seulement des solutions optimales. Par ailleurs, comme une solution particuliere ne reste jamais opti male a long terme, il faut Hre vigilant et apporter des modifications a la ges tion de la remuneration lorsque la situation change et que l'insatisfaction s'exprime. Sur Ie plan des couts, la gestion des sal aires est souvent fort importante. Ainsi, Ie fait d'accorder des augmentations de salaire aux employes accrolt non seulement la masse salariale, mais aussi Ie cout de certains avantages
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sociaux. Par ailleurs, Ie salaire constitue l'el{~ment principal de la remune ration globale d'un employe (iJ represente environ 60% de celle-ci) et il deter mine Ia valeur d'autres composantes telles que la paie de vacances au la valeur des regimes de retraite au d'assurances. De plus, les decisions en matiere sala riale ant des incidences economiques a long terme, difficilement reversibles, pour les entreprises. Toutefois, et comme Ie souligne Pfeffer (1998), on peut reduire les couts de main-d'~uvre non seulement en reduisant les salaires, mais aussi en augmentant la productivite du personnel. De meme, pour un employeur, un avantage concurrentiel a long terme se batit souvent plus grace a l'ameIioration de la qualite et a l'innovation des produits au des services que grace a la reduction des couts de main-d'~uvre.
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I Offrir des salaires equitables
Finalement, les composantes de la remuneration globale - notamment Ie salaire, les primes et les avantages sociaux - sont des variables qui influencent la satisfaction et la motivation des personnes au travail, des determinants importants de leurs comportements au travail (l'absenteisme, les retards, Ie roulement, l'acceptation d'une promotion, l'adhesion a un syndicat, etc.). Quoique la valeur qu'accordent les employes a chacune des composantes de la remuneration soit fonction de la capacite de celles-ci a satisfaire leurs besoins, besoins qUi varient dans Ie temps et selon leurs caracteristiques indi viduelles (age, sexe, qualification, etc.), il est important que les composantes de la remuneration soient gerees de maniere adequate, equitable et integree. Par ailleurs, il ne faut pas negliger de reconnaitre Ie caractere symbolique de la remuneration qui pennet d'expliquer, par exemple, pourquoi certaines personnes sont pretes a assumer plus de responsabilites pour une tres faible augmentation de salaire (surtout lorsqu'on deduit les imp6ts !).
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L'influence du contexte d'affaires sur la gestion des salaires On ne peut gerer efficacement la remuneration des employes sans tenir compte des caracteristiques du contexte organisationnel. Le tableau 10.3 pre sente une vue d'ensemble de facteurs contextuels internes et externes suscep tibles d'expliquer les choix qUi sont faits en matiere de remuneration. Par la suite, nous commenterons l'influence de certains de ces facteurs sur la gestion des salaires comme composante de la remuneration giobale. La capacite a payer des salaires concurrentieis est fonction de la possibilite pour une entreprise de reporter les augmentations de salaire sur les prix de ses produits ou ou de ses services, Iaquelle est determinee a la fois par I'etat de la concurrence dans son secteur d'activite et par }'etat de la demande de son pro duit ou de son service. Ainsi, plus la concurrence est vive, plus la demande de ses produits ou de ses services est faibIe, et moins l'entreprise peut compenser les hausses de salaire par des augmentations de prix pUisque cela reduira ses ventes et donc ses revenus. Par contre, moins il y a de concurrence, plus la demande de produits et de services est elevee, et plus une entreprise peut se permettre d'elre a la tete du marche en presentant la facture a ses clients. Ainsi, alors que l'etat de l'offre de main-d'ceuvre influe sur Ie taux minimal de salaire permettant d'attirer et de retenir les employes competents, l'etat de la demande de produits ou de services, ou encore l'ampleur de la concurrence dans Ie secteur d'activite, influe sur Ie taux maximal de salaire que l'entreprise peut se permettre d'offrir. Le secteur d'activite economique ou l'industrie s'avere un autre facteur a considerer puisqu'il conditionne Ie pourcentage des couts de main-d'ceuvre par rapport aux couts totaux d'exploitation. Par exemple, dans les entreprises de services ou les couts de personnel peuvent representer plus de 50 % des couts d'exploitation, les taux de salaires ont un effet direct sur leur com petitivite. Ces secteurs que l'on nomme «a predominance de main-d'ceuvre»
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I Les defis des conditions de travail EXEMPLES DE FACTEURS INFLUANT SUR LA GESTION DE LA REMUNERATION DES EMPLOYES
(people intensive), comme les secteurs de I'h6tellerie, du textile, de la chaussure et de l'enseignement, sont generalement alignes sur Ie marche ou se trouvent derriere lui au point de vue des salaires. A l'oppose, les entreprises dont les depenses d'exploitation sont davantage liees aux immobilisations qu'a la main-d'(X'uvre et que l'on nomme «a predominance de capital» (capital inten sive), telles les organisations (X'uvrant dans les industries de l'acier et de la petrochimie, offrent souvent de meilleures conditions de remuneration. Par , consequent, pour un meme poste exigeant des responsabilites et des compe tences similaires, une personne obtiendra un salaire different selon qu'elle tra vaille dans un secteur industriel plutOt que dans un autre. Soulignons que les
disparites salariaies par secteur peuvent aussi reposer sur des considerations politiques et historiques, Ainsi, les employes de bureau, d'entretien et de service travaillant pour une municipalite du Quebec obtiennent des salaires plus eIeves et de meilleurs avantages sodaux pour moins d'heures de travail que les employes des secteurs prive et public ayant des emplois similaires.
Chapitre 10
I Offrir des salaires equitables
Avec la mondialisation des marches, les entreprises canadiennes ont de plus en plus de difficulte a rester competitives. Plusieurs pays en voie de de veloppement allient la technologie de pOinte, une main-d'reuvre qualifiee et des salaires peu eIeves. Dans Ie contexte du libre-echange entre Ie Canada, les Etats-Unis et Ie Mexique, Ies entreprises canadiennes doivent reduire leurs couts ou accroltre leur productivite parce qu'elles ne sont pas souvent en mesure de faire supporter aux consommateurs une hausse des couts de main d'reuvre. Toutefois, un certain nombre de lois et de reglements peuvent in fluencer I'etat de cette concurrence et, par Ie fait meme, Ia possibilite pour Ies entreprises de repercuter des augmentations de salaire sur Ies prix des produits et des services. A titre d'exempIe, songeons aux accords portant sur les tarifs douaniers entre certains pays. Le critere du cout de Ia vie 2 (avec ou sans formule d'indexation) est sou vent utilise pour ajuster les structures salariaies en raison de sa simplicite, de son objectivite et de son equite apparente. Le recours au critere du cout de Ia vie se traduit par une indexation plus ou moins automatique des salaires, basee sur l'evolution d'un ou de plusieurs indices des prix a la consommation. Toutefois, a l'exception du personnel syndique de certaines organisations, i1 est plutot rare qu'une entreprise utilise seulement l'augmentation de l'indiee des prix a Ia consommation comme eritere d'augmentation de salaire.,
2. Cet indice est calcule suivant la valeur d'un panier de produits consommes par une population cible composee de families et de personnes vivant seules dans des centres urbains de 30000 habitants et plus. On etablit Ie coilt de ce panier de produits selon les achats effectues par la population cible dans une periode de reference durant I'annee. On met a jour reguli!?rement Ie contenu et la proportion des composantes de ce panier de maniere a tenir compte des changements qui se produisent dans la structure des achats. Ce panier comprend sept groupes de produits ayant chacun un poids respectif.
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La taille de l'entreprise constitue un autre facteur important a examiner.
Sur les plans international, national et provincial, les particularites des lois de l'impot et les disparites en matiere salariale pour des emplois similaires peuvent engendrer des delis. Ainsi, on tend a offrir de meilleurs salaires a Montreal que dans Ie reste du Quebec et en Colombie-Britannique qu'au Quebec. Pour qu'un Americain mute au Canada puisse maintenir son niveau de vie, il doit recevoir une hausse substantielle de salaire de maniere a com penser la hausse d'impots qu'il aura a assumer. Par ailleurs, la promotion d'un cadre superieur d'une unite d'affaires d' Allemagne aun poste de direction en Angleterre occasionne des problemes de remuneration etant donne que les salaires sont superieurs en Allemagne. La presence d'un ou de plusieurs syndicats, tant au sein d'une organisation que sur Ie marche, a aussi une incidence sur les sal aires (Benjamin, Gunderson et Riddell, 1998). En effet, la presence syndicale dans une entreprise est sus ceptible d'influer sur la gestion des salaires, parce que dans cette situation, on est plus porte a comparer les salaires qUi sont offerts aux employes avec ceux qui sont offerts par des organisations de reference, parce qu'on officialise et standardise davantage les conditions salariales et parce qu'on determine les salaires non pas en fonction du rendement individuel, mais en fonction des annees de service et/ou du cout de la vie. Par ailleurs, au sein d'une entreprise, les augmentations de salaire negociees pour les employes syndiques peuvent exercer une pression ala hausse sur les salaires d'autres groupes d'employes non syndiques qUi seront insatisfaits de leurs conditions de remuneration si elles ne s'ameliorent pas dans la meme proportion. Notons aussi que lors qu'une organisation n'est pas syndiquee, la presence de syndicats dans d'autres organisations et la possibilite que ses employes forment un syndicat ne sont pas sans influer sur les decisions en matiere de remuneration. Les entreprises non syndiquees offrent souvent des conditions de travail aussi allechantes, sinon meilleures, que celles que proposent les entreprises syndi quees concurrentes.
On gere aussi les salaires en fonction des caracteristiques des emplois et des employes au sein d'une entreprise. Ainsi, l'expertise et la rarete de certains groupes d'employes sur Ie marche contribuent a expliquer les meilleurs salaires qu'on leur accorde. Pensons aux plombiers, a certains specialistes de l'informatique, etc. Par ailleurs, on constate que, en plus des competences requises, les conditions de travail (les horaires, les voyages, la presence de la salete, etc.) ont un effet sur les salaires que l'organisation doit verser pour attirer et retenir Ie personnel dont elle a besoin. Par exemple, il est possible qu'un emploi d'eboueur ait une valeur egale a celIe d'un emploi de commis
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Offrir des salaires equitables
ala paie mais que l'eboueur soit bien mieux paye parce qu'il y a plus de candi dats interesses par Ie poste de commis. Enfin, certains groupes d'employes preferent etre payes en fonction du temps travaille, tandis que d'autres desirent que leur salaire soit base non pas sur leurs annees de service, mais sur leur rendement. Ainsi, a l'interieur d'une entreprise, les representants des ventes peuvent etre remuneres en grande partie a commission, les pro fessionnels et les cadres en fonction de leur rendement et les employes de production en fonction de leurs annees de service .
., Les principes d'equite en matiere de gestion de la remuneration Parmi les detis que doivent rei ever les dirigeants des organisations en ce qui concerne la gestion de la remuneration, Ie deti qui consiste a payer les employes d'une fa<;on qUi sera per<;ue comme etant juste est sans doute Ie plus exigeant. En Amerique du Nord, la gestion de la remuneration, dont une com posante est Ie salaire, repose sur les principes d'equite detinis au tableau 10.4: l'equite legale, l'equite externe, l'equite interne, l'equite individuelle, l'equite collective et l'equite du processus. Dans cette section, nous decrivons brieve ment ces divers principes d'equite et les techniques permettant de garantir leur application.
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Les defis des conditions de travail
LES DIFFERENTS TYPES D'EQUrrE ACONSIDERER EN MATIERE DE GES1"ON DE LA RE.MUNE.RA1"ON
10.4.1 Le principe d'equite externe ou la competitivite de la remuneration sur le marche Definition du principe d'equite externe La recherche de l'equite ext erne en matiere de gestion de la remuneration consiste a s'assurer que l'organisation offre une remuneration semblable a celIe qu'on trouve dans les autres organisations pour des emplois similaires. Comment l'organisation veut-elle gerer les sal aires ou les composantes de la remuneration globale de ses contremaltres par rapport au marche? La compe titivite de la remuneration est importante puisqu'elIe influence, entre autres, la capacite it attirer et a retenir Ie personnel, la rentabilite de l'entreprise ainsi que Ie desir des employes de se syndiquer. Ce type d'equite est d'ailleurs parti culierement important pour les categories suivantes de ressources humaines : celIes qui possedent des competences rares, ceIles qUi sont en contact avec Ie personnel d'autres entreprises et qui disposent alors de plus d'informations pour pouvoir negocier leurs salaires, et celles qui doivent composer avec des inconvenients, des risques et des prejuges dans l'exercice de leurs fonctions. Ces categories de res sources humaines comprennent les representants ou Ie personnel de vente, Ie personnel qualifie ou Ie personnel dont les compe tences sont rares (ingenieurs specialises, programmeurs, etc.), les vedettes sportives ou artistiques, les cadres superieurs, Ie personnel expatrie, les tra vailleurs autonomes, les eboueurs et les travailleurs du secteur minier.
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Offrir des salaires equitables
les politiques de remuneration Quoique Ia majorite des organisations disent avoir comme politique d'offrir une remuneration egale a celIe du marche, d'autres decident d'etre a la tete ou, au contraire, a la remorque du marche. Ce choix est important en raison de ses effets sur les couts de main-d'ceuvre, sur la capacite de recrutement et de conservation du personnel-de de meme que sur Ie ctesir des employes de se syndiquer. II est fonction de divers facteurs tels que la strategie d'affaires, la pression syndicale, Ie prestige et les habitudes de l'organisation, la capacite a payer, les autres activites de GRH et la presence de facteurs compensatoires comme la securite d'emploi, les horaires de travail et les perspectives de carriere. Ainsi, une forte majorite des entreprises disent offrir une remuneration egale a ceUe du marche parce que cette politique est Ia moins risquee ou qu'eUe facilite Ie recrutement et rectuit Ie nombre de departs d'employes com pelents. Certaines entreprises offrent une remuneration inh~rieure a celIe du marche afin de diminuer les couts de main-d'ceuvre ou parce que d'autres conditions de travail compensent Ie manque a gagner aux yeux des employes, notamment un horaire de travail flexible, des possibilites de promotion allechantes ou une localisation recherchee. Plusieurs petites entreprises du secteur de la haute technologie, qUi sont incapables d'offrir les salaires des gran des entreprises concurrentes, attirent leur main-d'ceuvre en offrant des options d'achat d'actions. De fait, les organisations qui decident d'etre a la tete du marche en ce qui concerne la remuneration de Ia totalite ou d'une categorie particuliere de leur personnel tendent a correspondre au profil suivant. • Elles ont des depenses d'exploitation davantage liees aux immobilisa tions qu'a la main-d'ceuvre, camme ceUes qUi ceuvrent dans I'industrie de }'acier. • Elles ont une certaine notoriete ou eUes veulent se batir ou maintenir une image de «bon payeur». • Elles peuvent annuler une hausse des couts de main-d'ceuvre en augmentant Ie prix des biens et des services offerts (jusqu'a ce jour, les organisations des industries informatique et pharmaceutique). • EUes ont une bonne situation financiere. • EUes ont des emplois difficiles a combler en raison de leur grande qua lification ou de leurs responsabilites (chercheurs, ingenieurs et program meurs specialises). Le cas de la firme Silicon Graphics, en Californie, montre comment la competitivite des conditions de travail va bien au-dela des salaires pour attirer, retenir et motiver certaines categories de personnel. • Elles ont des emplois ou des postes incertains, qui offrent peu de securite, qui sont tres risques ou dont les conditions de travail sont particulierement desagreables.
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Les defis des conditions de travail
L'enquete salariale ou l'enquete de remuneration Generalement, l'entreprise s'assure de la competitivite de la remuneration accordee aux emplois en realisant sa propre enquete salariale ou en consultant
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comprendpil)s de 1100tl empl.oyes,.offre des servi.ces a. QeS'ofganisatiofls • . secteurs. JJ:lat'tufat;~urier,.recreatif, .90uvememeptalettJe$ ·des communications. . . ..' .. . .'. sci:e:npfJque" .. .... .... ... . ..
. . . . • C.oR1~eto\Jteentreprise.Q\J secteur delahi;\t,n;e tectln¢lQgie,fes. dirigeants de. ..'. Silicott.Grapflic's dqi\leot.re'ever .ledtW/:·c()nsistatnta.·attirer,.; ~.·.reteniret~ motiver des,empIoY~$. (iontJescompetenCes' sont partic\Jn~res.·et. rareS\~ourcefairet]a.· ·. fi.rme•. reH\Jte..~. taJettt$».· puIs.·efle 'Ieurassigf!e 'i un'ipr~iet .ou.de$responsabilites.•. . . ·.·.·appfopri~s;fU~ks'as.sureaussjd~a.ct~rder. Utte r~m~n~ration<;Qrppetit~ve•. \loire> .... a\(aotageuse,'Pttfl'apport au·marche, P:our,·ceta,<eUeJeurQffr~ . ·n~~~ment.Cl~s . . . option~ .dtachat d~.il~tiqnS.i·.\Jne·(ornp9sante, .cQl)l'antt7·.tJeJar~rfl:un~.f'~tion .des ..... .·. emp'9;Yesdu·.. .$e(t~rCle .·. IJinforroiltique.' t}(lr9a~l~~t1on./propose .eg.ale~enfufle:···· . "'" d().u~tefil{ereslJrlepJan desprorootions! une.fifierep9ur·,es.~attdiclat$.quiveu~ . .·.. .• \'.I~nt.progress.eren ·assWTl~nt.des l'espon~tlilit~~de.~stiorl•.·etl'il:utrePQurceUX ., . iqui.SQu.hait.eot.. progressel'.dilnsle.!;lr:·carrie.re·.aech~iclleur~.(;ha~u~\
. '. re~u ~u.~. des,re:unlons inforrpeneStlad.ire;ctJonJ~urpe;rmetde·s~habl!t~rcQoforta~' . blement.p~reiemplede.porter des jeans, #e~·.s~9rtsl.des scttQ<:tale$~udeschaus~' .' s.ures ~esport, t:iltm~sph~re cor)Vivialequl re9n~<:tims.·Jientrepris~ rep?se ausst
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lJslt1~~Qrporatt\l ~ulture tOS\lP~O~)T.reward~»i
ACANews, ailtil1998, p; 16·18. Ct\ltarticlerelalt\lufieentrevue avecD
Chapitre 10
I Offrir des salaires equitables
des enquetes realisees par des tiers. Dans une enquete maison, I'entreprise cherche it obtenir de !'information sur la remuneration offerte par d'autres entreprises sur Ie marche en utilisant un ou plusieurs moyens comme l'en quete par telephone, Ie questionnaire ou I'entrevue. Elle peut egalement, moyennant un cout plus ou moins eleve, s'appuyer sur des enquetes effec tuees annuellement par des organismes gouvernementaux (par exemple, Statistique Canada, lnstitut de Ia statistique du Quebec, Conference Board of Canada, Travail Canada), des organismes professionnels (par exempIe, \'Ordre des ingenieurs) et des firmes-conseils (par exemple, Mercer Consultation en ressources humaines, Towers Perrin, Watson Wyatt Worldwide, Groupe-conseil KPMG, Groupe-conseil AON, Ie groupe Hay). Le recours a des enquetes saiariaies implique plusieurs decisions pour I'en treprise. D'abord, une entreprise doit preciser Ie marche des entreprises avec IesqueUes eUe se compare: s'agit-il des entreprises de Ia meme Iocalite, de la me me region, du Quebec, du Canada, de l' Amerique du Nord? Est-ce des entreprises de la meme industrie, de la meme taiIIe ? Et ainsi de suite. Le choix depend evidemment de la nature des emplois au sujet desqueis l'entreprise realise I'enqu€>te, notamment du marche ou sont recrutes les titulaires des emplois. Ce choix du marche peut faire l'objet d'un enjeu politique. Par exemple, les syndicats et les dirigeants ctefinissent des marches de reference differents seion leurs interets. Ensuite, comme l'entreprise n'a ni Ies moyens ni Ie temps de realiser des enquetes pour tous ses emplois, elle se contente souvent de collecter des donnees sur la remuneration d'un certain nombre d'emplois-reperes ou emplois-cles choisis en fonction de criteres listes au tableau 10.5. Pour obtenir des renseignements sur la remuneration des emplois-reperes, on peut proceder it un appariement entre Ie contenu et la remuneration des emplois-reperes et ceux des emplois semblables qu'on trouve dans d'autres entreprises. Cet appariement est souvent difficile a faire parce qu'il repose sur une courte description, communiquee par telephone ou dans un questionnaire, de chacun des emplois-reperes de l'entreprise qui realise l'enqu€>te ou des emplois a propos desquels un organisme externe effectue une enquete. Par aiUeurs, dans la mesure mll'on revoit plus frequem ment Ie contenu des emplois de manii::~re a accorder plus de t1exibilite, de lati tude et de responsabilites a leurs titulaires, il s'avere plus difficile de decrire succinctement leur contenu et de les rapprocher d'autres emplois. Compte tenu de la variete des composantes de Ia remuneration des employes, on devrait coBecter des renseignements sur Ie salaire de base, les points mini-maxi, les avantages sociaux, les gratifications, Ie temps moyen pour progresser du point minimal au point maximal de l'(~chelle salariale, etc. Toutefois, plus les renseignements demandes sont nombreux et complexes dans une enquete, moins les entreprises participantes sont en mesure d'ap porter leur contribution. En somme, les enquetes de remuneration indiquent Ies tendances globales du marche; leurs resultats restent imprecis etant donne que l'entreprise ne contrale pas la competence des participants a l'enquete, Ie soin apporte a y repondre, I'ampleur des renseignements demandes, etc.
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Partie IV
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Les defis des conditions de travail
lES CARACTERISTIQUES DES EMPlOIS-REPERES FAISANT l'OBJET DES ENQUETES SALAR\AlES au DE. REMUNERAllON
10A.2le principe d'equite interne ou 1a coherence dans 1a remuneration des differents emp10is de 1'organisation Definition du principe d'equite interne La recherche de requite interne consiste it s'assurer qu'au sein d'une organi sation, la direction offre une remuneration equivalente pour des emplois de meme valeur et une remuneration differente pour des emplois de valeur difte rente. II s'agit d'evaluer Ia valeur ou l'importance relative des emplois, et non pas les titulaires des emplois, ces derniers faisant plutot I'objet de l'evaluation du rendement (voir Ie tableau 10.7).
l'evaluation des emplois On s'assure de la coherence des salaires accordes aux differents emplois au sein d'une entreprise au moyen d'un processus d'evaluation des emplois. L'evaluation des emplois consiste a hierarchiser les emplois a l'interieur d'une organisation, en fonction de leurs exigences relatives, de far;:on a accorder des salaires de base proportion nels aux exigences des emplois. En general, l'entre prise constitue un comite d'evaluation des emplois qui a Ie mandat d'evaluer les emplois et de les reevaluer au besoin, par exemple lors d'une restructura tion ou d'un changement technologique. Quoique ron puisse recourir it d'au tres methodes d'evaluation des emplois (voir Ie tableau 10.6), nous insistons ici sur l'une de celles-ci, la methode des points et des facteurs, parce qu'elle est tres frequemment adoptee par les entreprises qUi veulent systematiser leur processus de determination des salaires. Cette methode, qu'il est assez facile d'expliquer aux employes, pennet de comparer les emplois sous divers angles. De plus, lorsque les responsa bilites des emplois sont modifiees (par exemple, lors d'un changement technologique ou d'une reduction des effectifs) ou creees, les emplois sont reevalues ou evalues ii. l'aide de la meme grille. Toutefois, Ie caractere chiffre ou quantitatif de cette methode lui procure une objectivite apparente ctant
Chapitre 10
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Offrir des salaires equitables
lES PRINCIPAlES METHODES D'EVAlUATION DES EMPlOIS
lA METHODE DES POINTS ET DES FACTEURS
Qualtt~ des
services et
des p.tGdtiits
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I Les defis des conditions de travail
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I Offrir des salaires equitables
donne que la determination des facteurs et des sous-facteurs, leur definition et leur poids relatif sont autant de decisions que les membres du comite d'evaluation doivent prendre subjectivement. Par ailleurs, il s'avere difficile de determiner, aux fins de requite salariale, des facteurs d'evaluation com muns a l'ensemble des emplois d'une meme famille ou d'une meme entre prise. Le tableau 10.8 presente un certain nombre de qualites que doivent idealement avoir les facteurs d'evaluation des emplois. II existe deux variantes de la methode des points et des facteurs: l'ap proche traditionnelle et l'approche structuree. Selon I'approche tradition nelle, Ie comite d'evaluation procede a. Ia lecture des descriptions d'emplois et evalue ceux-ci en fonction d'une grille. Ce comite peut elaborer une grille maison d'evaluation des emplois, c'est-a.-dire une grille propre a l'entreprise, ou il peut utiliser une grille preetablie, qUi a He preparee par une societe de consultants. Seion l'approche structuree, les titulaires des emplois evalues et leur superieur immectiat doivent remplir un questionnaire d'evaluation des emplois. Pour mettre au point ce questionnaire, Ie co mite d'evaluation choisit des facteurs d'evaluation et formule des questions a. choix multiple visant a determiner leur importance relative pour chaque emploi evalue. On peut trouver des questions de ce type: «Quelle experience requiert Ie poste? Deux ans ou moins, de 3 a 5 ans, de 6 it 10 ans, plus de 10 ans. «A queUe frequence Ie titulaire est-it en relation avec d'autres personnes? Rarement, a l'occasion, reguIierement, souvent, continuellement.» Lorsque Ie nombre d'employes est peu eleve (par exemple, moins de 100), la poncteration des facteurs est cteci dee par les membres d'un comite. Toutefois, lorsque Ie nombre d'employes est assez eleve, cette ponderation peut etre confirmee par une analyse de }>
LES CARACTERISTIQUES RECHERCHEES DES FACTEURS D'EVALUATION DES EMPLOIS
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Les defis des conditions de travail
regression multiple. L'approche structuree necessite moins de temps que l'approche traditionnelle d'evaluation en comite parce qu'eHe ne requiert pas de descriptions d'emplois et que les analyses statistiques faites par la « machine» aident les membres du comite d'evaluation a prendre leurs deci sions. Par an1eurs, les pressions l{~gales, sociales et poHtiques en vue d'i:rnposer l'equite salariale favorisent la participation des employes, qui pourront ainsi accroitre de fa~on optimale leur satisfaction envers les resultats de l'evalua tion des emplois.
10.4.3 Les principes d'equite individuelle et d'equite collective et les regimes de remuneration variable Un systeme de remuneration prone une certaine equite « individuelle» lorsque la remuneration des titulaires occupant un meme emploi dans l'en treprise tient compte d'au moins une caracteristique individuelle, comme les annees de service, Ie rendement, les competences ou l'experience. Par exemple, pour un groupe de travailleurs qui occupent un meme emploi, les salaires individuels peuvent varier en fonction de leur anciennete, de leurs competences et de leur experience. L'importance attribuee a cette forme d'equite varie d'une organisation a l'autre et meme d'une categorie de per sonnel a l'autre dans une meme entreprise. C'est Ie cas du personnel infirmier d'un centre hospitalier du secteur public, dont Ie salaire ne tient pas compte du rendement. Au sein d'une meme entreprise, les representants commer ciaux peuvent etre remuneres en grande partie a commission alors que les receptionnistes re~oivent un salaire en fonction de leur anciennete. On tient compte de la contribution individuelle des titulaires des emplois lorsqu'on etablit des echelles (ou des fourchettes) salariales faisant en sorte que les salaires individuels des titulaires d'emplois d'une meme classe pro gressent d'un point minimal a un point maximal selon leur anciennete ou leur rendement. De meme, on tient compte de la contribution personnelle lorsqu'on accorde d'autres formes de recompenses - telles que des primes, des commissions, des actions ou des options d'achat d'actions - en fonction de caracteristiques individuelles. Le recours aux regimes de remuneration visant a reconnaitre Ie rendement individuel, comme les salaires au merite, les com missions et la remuneration a la piece, sera traite au chapitre II. Par ailleurs, on prend en consideration l'equite «collective" lorsque la re muneration des employes varie en fonction du rendement de l'equipe, d'une unite administrative ou de l'organisation entiere. Il s'agit alors de rendre les employes admissibles a un ou plusieurs regimes collectifs de remuneration variable, soil a court terme (comme la participation aux benefices, Ie partage des gains de productivite ou la prime d'equipe) ou a long terme (com me l'achat d'actions, l'octroi d'actions ou l'option d'achat d'actions). Nous ver rons egalement ces regimes collectifs au prochain chapitre.
Chapitre 10
I Offrir des salaires equitables
10.4.4 Le principe d'equite du processus de gestion de la remuneration Le principe d'equite du processus de gestion de la remuneration consiste a s'assurer que les activites de remuneration sont gerees de fa~on juste et sont perc;ues ainsi par les employes. lei, it ne s'agit pas de se demander si la remuneration est suffisante (Ie «combien» ou la justice distributive), mais si les decisions et les mesures en cette matiere sont prises de fa~on juste (Ie «commenh). Le processus de gestion de la remuneration doit s'appuyer sur les regles d'equite suivantes. • II doit etre Ie plus possible standardise ou uniforme. • II ne doit pas favoriser les interets de certaines personnes, autrement dit il ne doit pas etre biaise. • II doit etre communique et explique aux employes. • II doit prevoir un mecanisme d'appel selon lequel les decisions peuvent etre revisees. • II doit permettre la participation des employes. • II doit etre etabli dans Ie respect des lois. • Il doit etre bien maitrise par les employes de maniere que ceux-ci puis sent exercer leur role par rapport a lui. Au-dela de l'equite du processus officiel de gestion de la remuneration, il faut se preoccuper d'un processus non officiel qui intervient entre les cadres superieurs et leurs subordonnes (d'aucuns parlent de justice interpersonnelle) au cours de l'actualisation de certaines Hapes du processus telles que l'eva luation du rendement et la determination du montant des augmentations individuelles de salaire. Les autres conditions it respecter pour s'assurer de requite du traitement interpersonnel sont les suivantes: la retroaction ade quate des resultats, la prise en consideration du point de Vue de l'employe, une explication suffisante des decisions de meme que l'expression de certains traits personnels teis que l'honnetete, la courtoisie et Ie respect. Plus un mode de gestion de la remuneration necessite la participation des cadres (pensons aux salaires en fonction du rendement ou des competences), plus ces derniers doivent etre formes pour pouvoir assumer leur role.
10.4.5 Le principe d'equite legale ou le respect des lois La gestion de la remuneration, et des salaires en particulier, est encadree par une multitude de lois et de reglements que les employeurs doivent s'assurer de respecter. Parmi ces lois, on peut enumerer les suivantes. • La Loi sur Ies normes du travail du Quebec et Ie Code canadien du travail, pour les employeurs de competence federale: Ils prevoient les conditions de travail minimales que tout employeur doit respecter (par exempIe, la semaine normale de travail, les conges payes ou les heures supplementaires).
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La Charte des droits et libertes de la personne du Quebec et la Charte canadienne des droits de 1a personne: Rlles interdisent, entre autres, de gerer la remuneration des employes sur la base de motifs discriminatoires illicites (par ex empIe, Ie sexe, Ie handicap ou la nationalite). Le Code du travail: n institue 1a negociation collective comme methode de determination des salaires et des autres conditions de travail dans les entreprises syndiquees. La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles: Les cotisations des employeurs assurent la protection financiere des tra vailleurs en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle. La Loi sur la sante et la securite du travail: Elle protege, entre autres, Ie salaire en cas de refus de travailler ou de retrait preventif et dans l'exer cice de certaines fonctions liees a la sante et a la securite du travail (comme celIe de representant a la prevention). La Loi facilitant Ie paiement des pensions alimentaires: L'employeur doit retenir a la source, sur Ie salaire du salarie vise par une ordonnance, des sommes a remettre au percepteur de la pension alimentaire. La Loi sur les impots: L'employeur doit retenir certains montants des salaires ou de toute autre remuneration verses aux employes et les transmettre au ministre du Revenu. La Loi sur Ie Regime de rentes du Quebec: L'employeur doit dectuire du salaire verse aux employes Ie montant prescrit a titre de cotisation et verser un montant equivalent afin de contribuer au regime public et universel de protection contre l'invalidite de longue duree et de retraite. La Loi sur les decrets de convention collective: Elle permet d'etendre juridiquement une convention collective incluant ses reglements a l'egard des salaires - a l'ensemble des employeurs et des salaries du Quebec ou d'une region determinee du Quebec dans Ie champ d'application defini dans Ie decret.
En raison du defi particulier qu'elle represente pour les employeurs, la Loi sur l'equite salariale, qui a ete adoptee en 1997 au Quebec, sera examinee plus loin dans ce chapitre.
aD .L~.s. ~~~1:'-~~~!~.s. ~~~~~i.~l.~s. Comme l'illustre la figure 10.1, une structure salariale montre la progression des salaires accordes a des classes d'emplois dont !'importance relative des responsabilites varie. Elle comporte deux axes: un axe horizontat OU l'on trouve les classes d'emplois, c'est-a-dire les groupes d'emplois dont les exi gences sont similaires et qui sont payes de la meme fa<;:on (meme salaire de base, meme salaire maximum, etc.), et un axe vertical, ou l'on trouve les echelles salariales qui correspondent a des emplois dont les salaires indivi duels de leurs titulaires sont geres de la meme fa<;:on.
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Offrir des salaires equitables
LA REPRESENTATION D'UNE STRUCTURE SALARIAlE
Salaire horaire ($)
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l
Ligne de la politique en matiere salariale
f
11 Ecart de 30% entre les maximums et les minimums des echelles salariales
10 9 8 7
200
400
600
800
1000
Points (evaluation des emplois)
Les caracteristiques des structures salariales influencent les comportements et les attitudes au travail, comme l'acceptation d'une promotion, Ie roule ment, la motivation a ameliorer son rendement ou ses competences ou encore Ie desir de joindre les rangs de l'entreprise. Par exempIe, une structure salariale qui reconnait l'anciennete favorise Ie maintien dans l'emploi. Vne
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les defis des conditions de travail
structure salariale {( a pente peu abrupte» - c'est-a.-dire ou il y a beaucoup de che~a,,:chements des echel1es salariales de classes d'emplois adjacentes et peu de differences entre les pOints milieux des classes d'emplois adjacentes - incite moins les employes a accepter des promotions. Plus les employes sont assu jettis a. une structure salariale «plate» qui offre peu d'incitations econo miques, plus ils ont tendance a attacher de l'importance aux titres des emplois et aux recompenses symboliques comme l'epaisseur de la moquette, la hau teur du dossier de la chaise ou Ie nombre de fenetres dans Ie bureau. Le mode traditionnel de gestion des salaires des employes comprend les etapes suivantes: l'evaluation des exigences des emplois (dont nous avons deja traite), Ie regroupement en classes des emplois dont la valeur est sem blable et la gestion d'echelles de salaires pour Ies differentes classes d'emplois.
10.5.1 Le regroupement des emplois en classes d'emplois On regroupe en classes Ies emplois qui comportent des responsabilites sem biables (selon Ie nombre de pOints obtenus si l'on considere la methode des pOints et des facteurs) pour deux raisons. Premierement, toute methode d'evaluation des emplois reste subjective (il est difficile de justifier Ie fait de remunerer differemment des emplois ayant obtenu un nombre semblable de points). Deuxiemement, la gestion et la communication des salaires par classe d'emplois se trouvent facilitees. En pratique, il est impossible de penser a gerer une droite de salaires ou un salaire different correspondrait a un montant total de points different, OU, par exemple, un total de 430 points equivaudrait a un salaire de 675,00$ et un total de 432 points, a. un salaire de 675,65$. Imaginons la complexite d'une telle gestion, sans compter la pression qu'exer ceraient les employes pour faire reevaluer les exigences de leur emploi, chaque point gagne equivalant a quelques sous de plus! Notons que Ie nombre de classes d'emplois est fonction d'une multitude de facteurs, notamment Ie Hombre et la nature des emplois et la taille de Fen treprise; cependant, ce Hombre ne doit pas etre trop eleve ni trop bas. D'une part, Iorsque Ie nombre de classes est trop eleve, les emplois de deux classes adjacentes risquent de ne pas etre per\Us comme ayant des exigences diffe rentes. D'autre part, lorsque Ie nombre de classes est trop bas, des emplois d'une me me classe risquent de ne pas eire per~us comme ayant des exigences semblables.
10.5.2 L'etablissement d'une echelle salariale pour chaque classe d'emplois On determine une echelle (ou fourchette) salariale propre a chaque classe d'emplois lorsqu'on veut tenir compte de l'equite individuelle c'est-a.-dire des caracteristiques individuelles, comme Ie rendement et l'anciennete dans la determination des salaires des employes. Si l'on ne tenait pas compte des caracteristiques individuelles, it n'y aurait qu'un taux de salaire par classe d'emplois. Lorsqu'on fait intervenir requite individuelle, les salaires des employes d'une meme classe d'emplois varient d'une personne a I'autre selon
Chapitre 10 [ Offrir des sa/aires equitables
un mode particulier de progression mini-maxi. Plus l'ecart entre Ie salaire minimal et Ie salaire maximal de l'echelle est grand, plus l'equite individuelle est valorisee. L'etendue de l'ecart mini-maxi varie en fonction de deux facteurs. Elle varie d'abord en fonction de Ia famille d'emplois; ainsi, dans les emplois de production, on observe generalement un ecart de 10% a 25 %; dans les emplois de bureau, de 20 % a 35 %; dans les emplois de cadres, de 30 % a 50 %. La raison de cela est que plus un emploi appartient a une classe d'emplois superieure, plus la remuneration du titulaire devrait etre fonction de ses ca racteristiques personnelles. L'Hendue varie ensuite en fonction de la taille ou du nombre des classes d'emplois: moins il y a de classes d'emplois, plus l'ecart mini-maxi de son echelle salariale est grand. Par ailleurs, il est impor tant d'observer que Ie contr6le de la compHitivite des salaires d'une structure salariale s'effectue a partir du pOint milieu des echelles de salaires. Par exemple, on s'assure que Ie point milieu de la classe dont fait partie un emploi-repere, pour lequel on collecte des renseignements sur les tau x de salaire offerts sur Ie marche, correspond au taux du marche si telle est la poli tique de l'entreprise.
10.5.3 La determination des salaires individuels des titulaires des postes de chaque c1asse d'emplois Les fourchettes salariales peuvent etre de trois types: avec des echelons, sans echelons ou mixte, c'est-a-dire avec des echelons jusqu'au point milieu de Fechelle, sans echelons apres. Pour Ie personnel syndique et pour Ie person nel de bureau, on trouve souvent des echelles salariales comprenant generale ment six ou sept echelons ou Ie salaire des employes est fonction de leur anciennete. Pour Ie personnel d'encadrement, les echelles salariales sont sou vent sans echelons; les augmentations de salaire individuelles sont alors determinees selon une grille de remuneration au merite qui est revisee sur une base annuelle. Dans la plupart des cas, l'augmentation de salaire des employes est liee ala fois a leur rendement et a leur position sur l'echelle salariale. Selon une enquete sur la remuneration globale menee au Quebec (Mongeau, 2003), dans tous les secteurs industriels, l'etendue des echelles est plus grande pour les professionnels et plus petite pour les employes de bureau.
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Les lois sur l'equite salariale Au Canada, la legislation relative a la discrimination basee sur Ie sexe dans Ia determination de la remuneration a evolue depuis les annees 1960. En 1956 et en 1964, Ie gouvernement federal et la province de Quebec adoptaient suc cessivement une loi oblige ant les employeurs a verser un salaire egal pour un travail egal. Sensiblement au cours de la meme periode, d'autres provinces canadiennes poussaient la loi un peu plus loin en obligeant les employeurs a payer un salaire egaI pour un travail similaire (par exemple, a l'epoque, un concierge par rapport a une femme de menage). En 1975, Ie Quebec devenait
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Les defis des conditions de travail
un precurseur en adoptant une loi contraignant les employeurs a offrir un ~alaire egal pour u~ tr,avail equivalent ou de valeur egale. Toutes ces lois visant a accorder un salalfe egal pour un travail soit egal, soit similaire ou equivalent reposaient sur un systeme de plaintes. Elles s'appuyaient sur Ie principe que la discrimination constitue l'exception (il s'agit alors d'une discrimination volontaire ou intentionnelle) et que l'employeur est presume innocent tant que sa culpabilite n'est pas demontree. En pratique, de telles lois ont eu une portee limitee puisque peu d'employees victimes de discrimination depo saient une plainte en raison de la difficulte a Hablir la preuve, du temps et de l'argent a consacrer cette demarche, et ainsi de suite. Le 11 novembre 1996, Ie Quebec adoptait une loi sur l'equite salariale (egalement appelee «relativite salariale») tant pour les employeurs du secteur prive que pour ceux du secteur public; ceUe loi est entree en vigueur Ie 11 novembre 1997. En somme, les employeurs doivent demontrer qu'il n'y a pas de biais discriminatoire dans les pratiques de gestion sur Ie plan de l'eva luation des emplois apredominance feminine en comparaison de l'evaluation des emplois a predominance masculine. Ainsi, on part du principe que la dis crimination constitue la regIe (il s'agit alors d'une discrimination systemique) et qu'il appartient aux employeurs de demontrer leur non-culpabilite. En 1988, l'Ontario a He la premiere province canadienne a adopter une loi sem blable tant pour Ies employeurs du secteur prive que pour ceux du secteur public. Par Ia suite, plusieurs autres provinces (comme Ie Manitoba, la Nouvelle-Ecosse, l'ile du Prince-Edouard et Ie Nouveau-Brunswick) ont adopte une loi sur I'equite salariale, mais pour Ie secteur public seulement.
10.6.1 La difference entre l'equite salariale et l'equite en matiere d'emploi L'equite salariale a pour objet de corriger les ecarts salariaux engendres par la discrimination systemique fondee sur Ie sexe al'egard des personnes qui occu pent des emplois dans des categories d'emplois a predominance feminine. Autrement dit, l'equite salariale vise a faire en sorte qu'au sein de chaque entreprise, la remuneration accordee a des emplois a predominance feminine de valeur X soit equivalente a la remuneration accordee a des emplois a pre dominance masculine de valeur X. Quant a l'equite en matiere d'emploi, eUe vise a fournir une representation equitable des membres des groupes «pro teges» (les femmes, les membres de communautes culturelles, les autochtones et les personnes handicapees) et a supprimer la discrimination dans Ie sys teme d'emploi (dans Ie recrutement, la selection, la promotion, la formation, etc.). Ces deux notions ont une finaBte commune: reduire I'ecart entre les hommes et les femmes pour ce qui est de la remuneration. On estime que cet ecart est d'environ 30 %, c'est-a.-dire que, pour chaque dollar que les hommes gagnent, les femmes gagnent 70 cents. En somme, la legislation sur requite salariale et la legislation sur requite en matiere d'emploi pronent des moyens differents et complementaires en vue de reduire l'ecart salarial entre les hommes et les femmes, un ecart qui s'explique par plusieurs facteurs, notamment la gheUoYsation des femmes, les
Chapitre 10 \ Offrir des salaires equitables
comportements au travail, Ie nombre d'heures travaillees par semaine, la representation syndicale, la mentalite de l'industrie, la discrimination dans l'evaluation des emplois et la presence limitee des femmes dans les emplois les plus remuneres. D'une part, l'equite salariale s'attaque it la sous-evaluation des eXigences des emplois it predominance feminine. Ainsi, une reevaluation des exigences de ces emplois devrait entrainer pour les femmes des hausses de salaire qui reduiraient l'ecart historique entre la remuneration des femmes et celle des hommes. D'autre part, l'equite en matiere d'emploi s'attaque a la sOliS-representation des groupes proteges - dont les femmes - dans certaines categories d'emplois, comme parmi les cadres superieurs ou dans les emplois de production ou d'entretien. Ainsi, une meilleure representation des femmes dans certains emplois devrait entrainer une hausse de leur remuneration, hausse qUi reduirait l'ecart entre les hommes et les femmes pour ce qui est de la remuneration.
10.6.2 La Loi sur l'equite salariale adoptee au Quebec La Loi sur l'equite salariale a soumis tous les employeurs du Quebec ayant plus de 10 employes a certaines obligations legales qui variaient en fonction du nombre moyen de leurs salaries inscrits au registre de chaque peri ode de paie entre Ie 21 novembre 1996 et Ie 21 novembre 1997. Le nombre d'employes, la syndicalisation des employes et Ie nombre d'unites d'accreditation sont autant de facteurs qUi influen~aient la demarche a suivre par les employeurs. Ainsi, les entreprises comptant entre 10 et 49 salaries devaient determiner les ajustements salariaux necessaires (obligation de resultat) de maniere it offrir une remuneration equitable aux categories d'emplois a predominance femi nine. Toutefois, ces entreprises n'etaient pas tenues de constituer un comit{~ d'equite salariale ni d'elaborer un programme d'equite salariale (aucune obli gation en ce qUi a trait it la demarche). Les employeurs ayant entre SO et 99 salaries devaient eIaborer au moins un programme d'equite salariale et etaient tenus d'adopter une demarche conjointe patronale-syndicale sur la demande d'un syndicat. Finalement, les employeurs ayant 100 salaries ou plus devaient eIaborer au moins un programme d'equite salariale et mettre en place un nombre correspondant de comites d'equite salariale. Ces derniers employeurs devaient nommer un comite d'equite salariale d'au moins trois personnes dont les deux tiers des representants seraient des salaries (designes par leur association accreditee ou par l'ensemble des salaries si une telle asso ciation n'existait pas) et la moitie, des femmes. La loi permettait aussi la cons titution de comites sectoriels representant des associations d'employeurs, des regroupements regionaux ou des associations sectorielles paritaires pour l'elaboration des programmes d'equite salariale. Les employeurs devaient egalement assumer la formation des membres du co mite d'equite salariale et leur permettre de s'absenter sans perte de salaire pour qu'ils puissent assister aux reunions du comite ou accomplir les taches associees a ce dernier. Ils avaient l'obligation de divulguer toute information necessaire a l'etablissement du programme et, a la fin du processus, d'afficher les resultats dans des endroits visibles et accessibles aux salaries vises par ce
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programme. En outre, ils devaient afficheI les Iesultats aux quatIe Hapes de la demarche d'equite salariale prevues par la loi, etapes qui sont decrites au tableau 10.9.
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.L~.s. ~~~~~~1.~~ ~~~~~!1.C.~~ ~~ ~~.t~~~~.~~.~~~~~C?~.~~~.~~~~~T.~~ L'environnement actuel des entreprises se trans forme ; les technologies evo luent, la concurrence se resserre, les produits et les services changent, Ie nombre de paliers hierarchiques diminue et Ia gestion s'appuie de plus en plus sur des modes d'organisation du travail flexibles qUi favorisent Ia LES QUATRE ETAPES D'UNE DEMARCHE D'EQUITE SALARIALE PREVUE PAR LA LOI SUR L'EQUITE SALARIALE ADOPTEE EN 1997
Chapitre 10
I
Offrir des salaires equitables
participation des employes. Dans ce ~lOuveau contexte ~:a~faiTe~, Ie m~de tra ditionnel de gestion des salaires. base sur les responsablhtes qUI se rattachent aux emplois, peut inciter les employes a refuser d'assumer des responsabilites supplementaires si elles ne correspondent pas a une promotion dans une classe d'emplois superieure, les porter a demander une reevaluation a la hausse de leur emploi afin d'obtenir une augmentation de salaire et entrainer une multiplication des niveaux hierarchiques et un grand nombre de classes d'emplois ayant un faible ecart mini-maxi qui s'avere difficiles a respecter, notamment pour Ie recrutement et la conservation d'un personnel haute ment qualifh~ comme les ingenieurs, les techniciens et les programmeurs. De fait, l'employeur doit tricher de plus en plus frequemment en offrant davan tage que Ie maximum de l'echelle salariale parce qu'il n'a pas Ie choix s'il veut attirer et retenir des employes competents. Ce changement de contexte et les limites des modes traditionnels de ges tion des salaires pressent certains employeurs de revoir leur mode tradition nel de remuneration et d'adopter entre autres deux approches: les bandes salariales eIargies et la remuneration basee sur les competences. En general, ces nouvelles approches sont implantees par des entreprises presentant Ies caracteristiques suivantes. • Elles ont reduit Ie nombre de niveaux hierarchiques. • Elles doivent realiser des changements organisationnels majeurs en ce qUi conceme la culture, la strategie d'affaires, Ie style de gestion, etc. • Elles veulent diminuer l'importance du titre des emplois et des promotions, mettre davantage l'accent sur la mobilite horizon tale et la flexibilite, et reduire !'importance de l'anciennete dans la progression des salaires. • Elles desirent reconnaitre davantage la contribution individuelle des employes qUi cherchent a favoriser Ie developpement des competences. • Elles veulent accorder un plus grand pouvoir discretionnaire aux cadres en ce qui a trait a la classification des emp}ois et a la determination et au contrale des sal aires de maniere a reduire les conflits lies a la sureva luation des emplois.
10.7.1 Les bandes salariales elargies QU'entend-on par «bandes salariales etargies» (broadbanding)? La reponse n/est pas simple. II est possible de distinguer deux methodes en cette matiere: }'approche de l'etargissement des bandes salariales (broad grades) et l'approche des bandes de cheminement de carriere (career bands) (Abosch et Hand, 1994; Abosch et Hmurovic, 1998; Gilbert et Abosch, 1996). Theriault et St-Onge (2000) differencient ces deux approches selon la representation montree au tableau 10.10.
L'approche de l'elargissement des bandes salariales Cette approche recouvre une variete de pratiques selon que l'on procede a un elargissement des classes d'emplois (une reduction de leur nombre) et a un
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Partie IV
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Les defis des conditions de travail
lES VARIEn~.S DE PRATIQUES D'ELARGISSEMENT DES BAN DES SAlARIALES
Source: R. Ther,iault et S. St-Onge, Gestion de la remuneration: theorie et pratique, Boucherville, GaHan Morin Editeur, 2000, p. 438.
allongement des echelles salariales (cellule A) ou a un elargissement des classes d'emplois (une reduction de leur nombre) ou a un allongement des echelles salariales (cellules B et C). Toutefois, quelle que soit la technique retenue, la plus grande individualisation des salaires qui en resulte influence plusieurs activites de gestion des res sources humaines, notamment l'evalua tion des emplois, l'evaluation du rendement du personnel et la gestion de leur carriere. La documentation portant sur les bandes salariales elargies traite surtout du cas ou l'on procede a l'elargissement des classes d'emplois et a l'allonge ment des echelles salariales (cellule A). II s'agit alors de regrouper un certain nombre de classes d'emplois de la structure existante (generalement quatre ou cinq) en une classe d'emplois elargie (appelee sou vent «bande d'emplois ») a laquelle on associe une echelle salariale plus etendue. Par exemple, l'ecart mini-maxi peut etre de 100% et plus alors que }'ecart traditionnel varie de 30 % aso %. Ces longues echelles salariales peuvent conserver certaines carac teristiques associees au systeme conventionnel d'administration des sal aires comme les points milieux ou les quartiles. Tres souvent, les salaires minimal et maximal de }'echelle associee a une nouvelle bande d'emplois correspondent au minimum de l'echelle salariale assocH~e a l'ancienne classe d'emplois la moins importante et au maximum de l'echelle salariale assocH>e a l'ancienne classe d'emplois la plus importante. En somme, cette pratique consiste a regrouper des emplois dont les exigences sont passablement differentes a l'in terieur d'une meme bande d'emplois et a faire correspondre a cette bande d'emplois des regles de determination et de progression des salaires permet tant de mieux reconnaitre les caracteristiques individuelles. Generalement, on opte pour cette approche de fa~on a reduire la lourdeur de l'administration des salaires et a rendre plus flexible la gestion des salaires.
Chapitre 10 \ Offrir des salaires equitables
Par ai1leurs, Ie changement apporte par plusieurs organisations en matiere de gestion des salaires peut etre classe dans les cellules B ou C. Ainsi, pour bien des organisations, Ie defi consiste areduire la lourdeur de l'administration des salaires en diminuant Ie nombre de classes d'emplois. Pour d'autres entre prises, l'unique preoccupation consiste a mieux reconnaitre la contribution individuelle. Aussi, l'elargissement des bandes salariales s'avere un concept vaste susceptible de regrouper bien des pratiques. Enfin, il faut observer que I'elargissement des bandes salariales est un concept relatif, en ce sens qU'une organisation peut affirmer qu'eUe utilise des bandes salariales elargies dans la me sure ou dIe se compare avec sa situation anterieure (et non pas avec Ies autres organisations). Ainsi, une organisation dont l'ecart entre les points mini-maxi des echelles s'eIevait a 20tM, peut dire qu'elle a procede a un elar gissement des bandes salariales dans la mesure ou elle a accru cet ecart a 35 %, et ee, meme si d'autres organisations de son secteur ont des echelles de salaires comportant des ecarts mini-maxi de 70 tYc) pour eette eategorie de personnel.
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I
Les defis des conditions de travail
L'approche des bandes de cheminement de caTTieTe L'approche des bandes de cheminement de carriere est plus radicale que l'approche de l'elargissement des bandes salariales etant donne qU'elle se dis tingue davantage des structures salariales traditionnelles et que Ie change ment est plus visible et plus important aux yeux des cadres et des employes. Cette approche consiste a analyser les emplois et ales regrouper en un nombre tres restreint de bandes de cheminement de carriere. Ces dernieres correspondent a des echelles de salaires tres longues, permettant une flexibi lite accrue. Generalement, on opte pour cette approche en vue de changer les comportements des employes ou de faciliter leur cheminement de carriere. Compte tenu du fait que Ie changement propose a une plus grande ampleur, un nombre tres restreint d'entreprises regroupent les emplois en bandes de cheminement de carriere. L'experience montre que la pertinence du recours aux ban des salariales eIargies dans une entreprise et Ie succes d'une telle demarche reposent sur les prealables suivants (Theriault et St-Onge, 2000). • Les dirigeants veulent rectuire Ie nombre de niveaux hierarchiques ainsi que les privileges ou les modes de reconnaissance (reels et symboliques) lies au poste ou au niveau hierarchique. • lIs tiennent it adopter des modes de gestion plus flexibles et moins bureaucratiques, et ils souhaitent faire preuve d'une plus grande transparence dans la gestion de la remuneration. • Ils s'attendent it ce qu'un mode de gestion des salaires leur permette de mieux recruter et de retenir les candidats competents, et ils desirent inci ter davantage les employes it prendre des initiatives en matiere de gestion. • Ils veulent davantage valoriser la reconnaissance de la contribution individuelle (equite individuelle) et investir dans l'adoption et la gestion de methodes ou d'outils efficaces pour mesurer la valeur des individus; consequemment, l'entreprise cherche a reduire !'importance de l'evalua tion des emplois et it investir moins dans la gestion de ce processus. • Les cadres veulent assumer davantage de responsabilites en matiere de gestion des salaires et ils detiennent les competences a cet egard. • Le systeme de remuneration actuel n'incite pas suffisamment les employes it adopter les comportements requis pour realiser la strategie d'affaires et atteindre les objectifs d'affaires. Finalement, certaines entreprises adoptent l'approche D. Dans ce cas, eIles conservent leurs classes d'emplois et leurs echelles salariales actuelles, tout en offrant d'autres composantes de remuneration susceptibles d'attirer ou de reconnaitre les compHences recherchees. Par exemple, l'Association cana
dienne de normalisation et Ie Syndicat canadien de la fonction publique se sont entendus sur la possibilite de verser une «prime pour competences recherchees », dont Ie montant et Ia forme seront determines par un orga nisme externe de remuneration, lorsque les echelles de remuneration ne per mettent pas d'attirer et de retenir certaines ressources-cU~s (Aldrige, 2002).
Chapitre 10
I
Offrir des salaires equitables
10.7.2 La remuneration basee sur les competences L'approche de la remuneration basee sur les competences consiste it lier une composante de la remuneration des employes (dans de nombreux cas, leur salaire) it la nature, ala variete ou a la specialisation de leurs compHences, de leurs connaissances ou de leurs habiletes. Toutefois, la remuneration basee sur les competences ne correspond pas du tout it une pratique unique, uniforme et standardisee comme plusieurs ecrits Ie laissent croire. Seion une enquete de I'American Compensation Association (1996), Ies applications les plus cou rantes de la remuneration basee sur les competences consistent a considerer des competences dans la determination des augmentations de salaire (42 %) et dans l'evaluation des emplois (15 %). Par ailleurs, une revue des ecrits sur Ie sujet permet de constater que la fa<;on de remunerer les competences tend a varier selon les categories de personnel comme les employes de production non specialises, les cadres et Ies professionnels.
Le cas du personne1 de production et de bureau II y a une multitude de fa<;ons de remunerer les competences des employes de production. Un exemple de structure salariale basee sur des series de compe tences permet d'etablir un salaire de base en fonction d'un ensemble de competences fondamentales que les employes doivent posseder lors de l'em bauche. Ensuite, les employes peuvent augmenter leur salaire en ameliorant leurs competences (notamment par des cours). La progression des salaires individuels est alors fonction du nombre et de la valeur des competences acquises. De tels regimes reconnaissent l'acquisition d'habiletes horizontales ou elargies, c'est-a-dire l'acquisition d'un grand nombre d'habiletes diverses mais comparables quant a leur difficulte. II peut s'agir d'apprendre toutes les activites d'une equipe de travail ou encore de maitriser toutes Ies activites d'un processus d'offre de service ou de production d'un bien. La figure 10.2 illustre une structure salariale basee sur les competences pour Ie personnel technique.
Le cas des gestionnaires Le plus souvent, l'adoption de l'approche de la remuneration basee sur les competences parmi les gestionnaires ne signifie pas l'abandon de la structure salariale traditionnelle basee sur les exigences relatives des classes d'emplois. En effet, Ie salaire de base des emplois d'encadrement continue alors d'etre determine en fonction des exigences relatives de ceux-ci. Toutefois, Ies augmentations de salaire des cadres dependent, en totaHte ou en partie, de l'acquisition de competences jugees critiques pour la reus site de l'entreprise. On privilegie souvent une telle fat;on de tenir compte des competences afin d'appuyer une revision des criteres de gestion du rendement. Par consequent, a l'egard des cadres et des professionnels, Ie passage des salaires au merite a celui des salaires selon les competences est davantage une question de seman tique, voire de types d'indicateurs pris en consideration.
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I Les defis des conditions de travail EXEMPLE DE STRUCTURE SALARIALE BASEE SUR LES COMPETENCES POUR DES TECHNIC/ENS 15,50 Competences optionnelles (6 cours)
,-.
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Competences optionnelies (3 cours)
14,50
Competences • optionnelles (1 cours)
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0
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Competences proposees Competences (220 points) proposees (120 points)
VI
13,50
Competences proposees (340 points)
13,00
Entree
Technicien
Technicien
Technicien
Technicien
I
II
III
IV
Source: Adapte de G.T. Milkovich et J.M. Newman, Compensation, 7e €d., Boston, Irwin, 2002.
Chapitre 10
I
Offrir des salaires equitables
Le cas des professionne1s et des specia1istes L'experience de Ia remuneration basee sur Ies competences pour Ies profes sionnels et les specialistes s'inscrit souvent dans Ie contexte de I'elargissement des bandes salariales. Bien que ce chapitre aborde de maniere successive les bandes salariales elargies et la remuneration basee sur Ies competences, ces approches peuvent etre implantees simultanement par une entreprise. On peut, par exemple, decrire pour chaque bande salariale les competences-cles requises par les emplois, les objectifs de developpement des titulaires de ces emplois ainsi que Ie type de formation recommandee pour les employes et son contenu. Au cours de la derniere decennie, seuls quelques auteurs ont etudie l'im pact de la remuneration basee sur les competences sur des indicateurs de ren dement objectifs. Murray et Gerhart (1998) ont analyse, sur une periode de trois ans, divers indicateurs de rendement au sein d'une entreprise manu facturiere americaine ayant un regime de remuneration basee sur les compe tences. Leurs resultats confirment que ce mode de remuneration augmente la productivite, reduit les couts de main-d'reuvre et ameli ore la qualite des pro duits. Au Canada, l'etude de Long (1993) menee aupres de 114 grandes organisations montre que la productivite des salaries pendant la peri ode 1985-1990 s'est amelioree davantage dans les entreprises qUi ont un regime de remuneration basee sur les competences que dans celles qUi n'en ont pas. Parent et Weber (1994) ont effectue une etude au sein de deux unites admi nistratives semblables de la societe Ford en Ontario, l'une utilisant la remune ration basee sur les competences et l'autre, un mode traditionnel de remune ration. Leurs resultats montrent qu'en comparaison de l'unite qUi a adopte la remuneration basee sur les competences, l'unite qui a conserve Ie mode tra ditionnel de remuneration enregistre une meilleure productivite mais obtient des resultats inferieurs en ce qUi concerne la qualite des produits, l'absen teisme et les accidents du travail. Theriault et St-Onge (2000) resument comme suit les principaies conditions de succes des modes de remuneration basee sur les competences. • L'entreprise doit etablir Ie type, Ie nombre et la valeur des competences dont elle a be so in pour fonctionner efficacement. • Elle doit prevoir les periodes necessaires pour atteindre Ie taux de salaire maximal et pour apprendre chacune des unites (ou series) de compe tences, incluant les periodes d'essai entre les formations. • Elle doit fournir aux employes des possibilites de formation adequates, frequentes et structurees leur permettant de progresser rapidement sur l'echelle des salaires. • Elle doit accorder les augmentations de salaire uniquement apres que les competences ont ete certifiees par une methode jugee valide, efficace et equitable; la certification devrait etre formelle, par exemple sous forme de diplome. • Elle doit prevoir une politique et des regles a suivre sur la formation et les salaires lors des changements technologiques, afin d'eviter de retribuer des competences desuetes.
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail • Elle doit implanter ce mode de gestion des salaires aupres d'une caH':gorie d'employes afin d'accroitre de manU~re optimale Ie sentiment d'equite interne et d'eviter les plaintes ou les griefs des employes. • Elle doit communiquer aux employes et aux cadres les objectifs poursui vis par ce mode de gestion des salaires, et former les superviseurs pour qu'ils accomplissent leur nouveau role en cette matiere. • Elle doit faire partidper les employes et Ie syndicat a la conception, it l'implantation et it l'administration de ce nouveau systeme de gestion des salaires. • EIle doit implanter ce mode de gestion des sal aires seulement dans un contexte ou la culture est egalitaire et axee sur la mobilisation, l'engage ment et la responsabilisation des employes.
10.7.3 L'impartition en matiere de gestion des salaires et la gestion des salaires Face a la complexite et au nombre croissant des lois en matiere de gestion des salaires, au nombre croissant de regimes de remuneration en cause, aux pres sions que subissent la direction et les employes afin qu'ils soient de plus en plus efficients et innovateurs, a la montee des couts des investissements dans la technologie permettant d'administrer les salaires et les avantages sociaux, plusieurs services des ressources humaines decident de confier a un tiers une partie plus ou moins importante de leurs activites de gestion de la remune ration, notamment ceIles qui ont trait aux saiaires et aux avantages sociaux, par exemple, l'administration et Ie caicul des avantages sociaux, la communi cation avec les employes ou Ie developpement et la comptabilisation des regimes. Le fait d'agir de la sorte permet aux professionnels de del€~guer cer taines taches routinieres et administratives a une res source exteme celle-ci pouvant realiser ces taches de maniere plus systematique et specialisee - et de se consacrer a d'autres activites plus strategiques ou a long terme telles que I'analyse des besoins et Ia conception de nouveaux produits et services. La decision de sous-traiter une partie des activites n'est pas simple. Plusieurs criteres doivent etre pris en consideration, non seulement I'economie d'ar gent, mais aussi la qualite et la rapidite des services, Ies attentes des employes, etc. L'impartition peut avoir de nombreuses incidences negatives: elle est susceptible d'engendrer de la confusion dans Ie personnel, qui ne sait alors plus trop vers qui se toumer, de faire intervenir un plus grand nombre d'in tervenants dans une transaction et d'augmenter Ie risque de perdre de vue Ies attentes et les besoins des employes en raison du moins grand nombre de contacts directs entre eux et la direction. En pratique, les organisations sous traitent une partie seulement de leurs activites de gestion sur une base tem poraire, ponctuelle ou reguliere.
Chapitre 10
I Offrir des salaires equitables
Conclusion Ce chapitre nous a permis de constater que la gestion des salaires est com plexe en partie parce que la notion d'equite en matiere de remuneration varie selon l'angle sous lequel on l'aborde (les lois, la maniere dont les salaires sont geres, etc.) et selon les personnes avec lesquelles les employes se comparent (les employes d'autres entreprises, ceux qUi font Ie meme travail qu'eux dans I'entreprise, ceux qui les supervise nt, ceux qu'ils supervisent, etc.). Afin d'etre en mesure d'optimiser Ie caractere equitable des salaires, nous avons resume diverses pratiques de remuneration, notamment les enquetes de remunera tion, les methodes d'evaluation des emplois, la remuneration basee sur les competences et Ies demarches d'equite salariale. Une analyse (Wright, 1998) des pratiques de remuneration adoptees par les entreprises du «Fortune SOO» les plus admirees atravers Ie monde revele que ces entreprises « championnes}} ont en commun non pas une pratique de remuneration particuliere, mais plutot un processus de determination de leurs modes de remuneration: toutes se soucie nt, en effet, de leur environnement externe et de leur environnement interne. En somme, ces entreprises se tien nent au courant de ce qui s'offre sur Ie marche sans essayer de copier Ie mar che. ElIes cherchent plutot a faire en sorte que leurs modes de gestion de la remuneration renforcent leur culture et leur strategie d'affaires et qu'Us soient difficilement imitables par les autres entreprises. On sait d'ores et deja que les nouvelles approches comme les bandes salaria1es elargies et 1a remuneration basee sur les competences - risquent de faire plus de mal que de bien lorsque leur implantation ne tient pas compte des besoins et de la situation propres a chaque organisation. Enfin, la gestion des salaires doit etre coherente par rapport aux autres acti vites de gestion des ressources humaines qUi sont traitees dans ce livre. Par
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Partie IV
I
Les defis des conditions de travail
exemple, Ie succes d'une politique de salaire au merite visant areconnaitre Ie rendement individuel des employes exige que l'activite de l'evaluation du rendement soH geree de fa~on appropriee et qu'elle soit bien comprise par Ie personnel. Par ailleurs, l'adoption d'une politique de promotion interne doit etre renforcee par une structure salariale qui prevoit des ecarts suffisants entre les salaires des titulaires d'emplois impliquant des niveaux de responsabilites differents. De plus, Ie fait d'offrir des salaires eleves dans Ie but d'aUirer un personnel competent ne sera efficace que si l'organisation procede a une selection soignee parmi Ie large reservoir de candidats plus ou moins compe tents qu'elle attirera.
de revision
o QueUes sont Ies composantes de Ia remuneration globale?
une organisation? Comment peut on obtenir cette competitivite?
8 Pourquoi
o Detinissez Ie concept d'equite sala
e plexe. L'equite est un phenomene com Ainsi, Ie meme salaire peut
(3 Apres avoir precise l'objectif de la
est-il important de gerer adequatement les sal aires des employes?
etre per~u comme etant plus ou moins juste selon les criteres sur Ies quels Ies employes s'appuient pour porter leur jugement. Detinissez les divers types d'equite ou de justice qui entrent en ligne de compte dans la gestion de la remuneration.
G QueUes lois encadrent la gestion des salaires des employes? Apres avoir consulte leurs sites Internet, illus trez leurs incidences respectives sur la gestion des salaires. "
Pourquoi faut-il s'assurer de la cohe rence des salaires au sein d'une orga nisation? Comment doit-on s'y pren dre pour obtenir cette coherence?
(it Pourquoi faut-il s'assurer de la com petitivite des salaires accordes dans
riale et distinguez-Ie de celui d'equite en matiere d'emploi. Loi sur l'equite salariale au Quebec, decrivez les etapes d'une demarche d'equite salariale.
I) Qu'est-ce que l'elargissement des bandes salariales comme nouvelle tendance en matiere de gestion des salaires? Quels sont Ies Ies avan tages, Ies inconvenients et Ies condi tions de succes de cette nouvelle approche?
(['j) Commentez Ies diverses approches
visant a gerer les salaires en fonction des competences. Quels sont Ies avantages, Ies inconvenients et les conditions de succes de ce mode de remuneration?
6) «L'impartition de la gestion des
salaires est un phenomene incon
tournable pour Ies entreprises.»
Commentez cet enonce.
Chapitre 10
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Offrir des salaires equitables
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Partie IV
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Chapltre 10 J Offrir des salaires equitables
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I Les defis des conditions de travail
La gestion des salaires chez Produits Exce1 3
Produits ExceL une grande firme spe
cialisee dans la fabrication de diverses fournitures de bureau en papier, a des groupes commerciaux dans plusieurs provinces canadiennes. Cette entreprise vient d'acquerir une autre firme, Papiers de Luxe inc., qUi ceuvre dans Ie meme secteur d'activite. Cette derniere firme, situee au Quebec dans une petite ville eioignee des grands centres urbains, fait face a de serieux problemes financiers. Min de decider de la fa~on dont la gestion de la remuneration des em ployes de Papiers de Luxe sera integree dans celle de Produits Excel, un profes sionnel de la GRH decide de faire une enquete sur les modes de gestion qu'on employait jusqu'ici dans cette PME fa miliale. Son enquete, faite a partir de documents et d'entrevues avec plusieurs membres du personnel, revele les eU~ ments suivants. 1. Les salaires des employes de pro duction varient de 6,75$ a 16,58$
l'heure. De plus, leur taux horaire est majore de 50 % pour Ie travail exe cute apres 180 heures par mois. 2. Les employes de production, qui sont tres polyvalents, ont adopte au fil des annees un mode de fonction nement par equipes de travail. lIs connaissent bien les rouages de leur service et pourraient formuler des suggestions pour accroitre Ie rende ment de l'entreprise. Ils evitent tou
3. Des salaires de base differents sont accordes a des employes occupant un meme emploi selon qu'ils sont autochtones ou non, ou selon qu'ils ont des personnes a charge ou non. 4. Les employes de bureau se plaignent
que leur salaire de base n'est pas pro portionnel aux responsabilites qu'ils ont a assumer. A ce sujet, la secre taire adjointe du service de la pro duction dit: «Je merite plus pour ce que je fais. Mon salaire n'est pas assez eieve si je Ie compare a celui qu'on accorde ames subordonnes.}> 5. Les salaires des employes de produc
tion et de bureau sont bien en dessous - souvent de pres de 18 % de ceux qui sont offerts sur Ie marche pour des emplois similaires. 6. Une dizaine de secretaires qui occu
pent un emploi similaire estiment qu'il est injuste que leur salaire res pectif ne tienne pas compte de leur anciennete dans l'entreprise. Elles de clarent: «C'est injuste de recevoir Ie meme salaire ou presque que celui ou celle qUi vient tout juste d'arriver!» 7. Certains professionnels deplorent qu'on ne considere pas leur rende ment individuel dans leur remune ration: «Qu'est-ce que c;:a me donne de me defoncer au travail? Au bout du compte, je suis paye comme ceux qui font Ie strict minimum!» a lance I'un d'eux.
tefois de Ie faire en pretextant ceci: «Qu'est-ce que .-,:a nous donnerait? Ce sera toujours ceux d'en haut qUi vont s'en mettre plein les poches! » 3. Ce cas a ete redige et mis it jour par Sylvie St-Onge. Reproduit avec l'autorisation des HEC Montreal.
Chapitre 10
8. Plusieurs contremaitres ayant un
bon potentiel refusent des promo tions. Selon eux, «les efforts a faire pour assumer des responsabilites supplementaires n'en valent pas Ia chandelle» . 9. La rumeur d'une eventuelle acquisi
tion de l'entreprise et la peur de voir leur poste aboli ameneront plu sieurs employees de bureau a consi derer les postes de production pour assurer leur avenir. Plusieurs d'entre elles se disent injustement payees lorsqu'elles comparent les exigences des emplois de bureau a celles des emplois de production.
I Offrir des salaires equitables
10. La gestion du systeme de remunera tion au merite, ou les augmenta tions de salaire sont fonction du rendement individuel, fait l'objet de plusieurs plaintes parmi les cadres. Par exemple, on deplore Ie peu de rigueur de l'evaluation du rende ment, Ie favoritisme que pratiquent certains dirigeants et Ie faible lien entre les montants accordes et l'evaluation re~ue.
Quel probleme d'equite est mis en evi dence par chacun des faits precedents (l'iniquite externe, interne, indivi duelle, collective, du processus ou legale)? Justifiez votre reponse.
Des problemes d'insatisfaction al'egard des salaires Meubles GrandMaison est une firme de fabrication de meubles fondee il y a SO ans; i1 n'y a pas de syndicat dans cette entreprise. Au fil des annees, la taille de l'entreprise s'est accrue et elle compte aujourd'hui pres de 125 em ployes dont l'anciennete moyenne est de 15 ans. Depuis quelques mois, plu sieurs employes se plaignent qu'i1s sont moins bien remuneres que certains de leurs collegues executant Ie meme tra vail ou un travail de valeur similaire. D'autres affirment que leur salaire est nettement inferieur a celui qu'offrent d'autres entreprises de la region. Cer tains contremaitres sont mecontents car Us soup~onnent qu'il existe une grande difference de traitement entre eux. Les
tensions montent puisque, lorsque les employes posent des questions au suiet des salaires, personne ne leur repond ou bien on leur donne des reponses vagues. On laisse alors entendre qu'il y a la une question de confiance et qu'il faut res pecter la confidentialite de l'informa tion sur les salaires. Apres avoir pris connaissance des plaintes des employes, la direction rea git en disant qu'elle n'est pas en mesure de verser les memes salaires que les grandes entreprises realisant d'impor tants benefices. Elle ajoute qu'on ne peut verser Ie meme salaire a des em ployes affectes a des taches similaires car il faut tenir compte de leur rendement et de leurs annees de service.
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail
L~entre~ri~~ n'a jamais fait d'enquete salanale m d evaluation des emplois. A ce jour, la direction a generalement paye ses employes en fonction de ce qu'elle pense qu'ils valent et de ce qu'elle croit pouvoir leur accorder. Avant la recente vague de plaintes a l' egard des sal aires, les employes etaient plutot satisfaits, estimant avoir un bon employeur qui se soucie d'eux et qui est pret ales aider lorsqu'ils traversent des periodes difficiles.
o Vous venez d'etre embauche comme directeur du personnel chez Meubles GrandMaison. A ce jour, Ie controleur de l'entreprise s'assurait de la gestion des salaires. Que suggererez-vous au president de l'entreprise de faire? Votre propo sition doit chercher a resoudre les problemes d'iniquite con states chez Meubles GrandMaison.
f) En supposant que Ie preSident de l'entreprise soit d'accord avec votre proposition, comment lui proposez vous de procecter pour resoudre les plaintes des employes? Decrivez les etapes de votre plan.
La remuneration basee sur les competences chez Bon Biscuit4
V oici
les bribes d'une conversation entre M. Sanschagrin, directeur de la production, et M. Sansouci, directeur des res sources humaines, tous deux de la firme Bon Biscuit. M. Sanschagrin: Nous faisons face gros probleme. Les employes de l'usine veulent se syndiquer. Je pense qu'ils sont mecontents de la nouvelle fa~on dont ils sont payes.
a un
gerer. Les contremaitres sont aussi me contents de ce nouveau mode de remu neration; ils ont peur de perdre leur emploi. Us ne voient pas l'avantage qu'il ya 11 s'occuper de la formation de leurs subordonnes et de leur rotation Ii diffe rents emplois. Us trouvent tout cela compUque et inutile! M. Sansouci: Ha!... Mais je croyais que les employes devaient etablir eux memes leur calendrier de rotation.
M. Sansouci: C'est incroyable! Nous venons d'implanter un systeme de remuneration tres innovateur.
M. Sanschagrin: Selon les contre maitres, c'est impossible.
M. Sanschagrin: OUi... mais peut etre que la remuneration basee sur les competences n'est pas adaptee 11 notre entreprise ou qu'elle est trop difficile a
Analysons ce mode de remuneration basee sur les competences, de sa con ception a sa gestion, afin de pouvoir poser un diagnostic sur la situation qUi
4. Ce cas a He redige par Dominique Gagnon, sous la direction de Sylvie St-Onge. Reproduit avec l'autorisation des HEC Montreal.
Chapitre 10
regne chez Bon Biscuit. Mais avant tout, nous dresserons un portrait de cette entreprise.
L' entreprise Bon Biscuit La firme Bon Biscuit est associee au do maine de l'alimentation. Depuis 1920, cette societe fabrique principalement des biscuits au chocolat et a la gUi mauve, de meme que d'autres sortes de biscuits. Face a l'engouement des con sommateurs pour les aliments sante, elle a recemment ajoute une nouvelle gam me de produits baptisee Nouvel Age Sante. II s'agit de biscuits de grains entiers dont la fabrication requiert une nouvelle chaine de fabrication. La con currence feroce due a l'accord de libre echange fait aussi ressortir Ie besoin de moderniser les procedes de fabrication des autres sortes de biscuits. L'age moyen des 250 employes dont 200 sont affectes a la production est de 45 ans et leur anciennete moyenne chez Bon Biscuit est de 25 ans. Ils ne sont pas syndiques. La scolarite moyenne des employes de Ia pro duction est Ie secondaire cinq. Cette entreprise familiale a toujours mise sur Ie respect des employes; les cadres y assument bien leur role de « donneurs d'ordres» qui recompensent Ies bons coups! Auparavant, la remuneration des employes de la production tenait compte des exigences relatives des emplois, des salaires offerts sur Ie marche pour des emplois similaires et de l'anciennete des employes. La politique de remuneration de Bon Biscuit consiste a payer un salaire egal a celui qui est offert par les entreprises syndiquees de l'industrie. Le president de Bon Biscuit veut rehausser Ie blason de sa societe en amor~ant une demarche en vue d'obte nir une norme ISO 9000. II est conscient que la modernisation des equipements
I Offrir des salaires equitables
accrolt la monotonie et Ie caractere rou tinier du travail, et requiert de nouvelles habiletes pour les faire fonctionner, les entretenir et les reparer. Dans ce con texte, il veut implanter un mode d'orga nisation du travail base sur Ie travail en equipe et Ia rotation des emplois de ma niere a varier Ies tiiches et a augmenter les competences des employes. Selon ses dires, «des employes plus polyvalents auront une vision plus globale du pro cessus de production et comprendront mieux les consequences de leurs gestes ». II veut aussi augmenter la motivation au travail des employes en permettant, entre autres, a ceux qui ont atteint Ie maximum de leur echelle salariale d'ac croitre leur remuneration. Apres avoir assiste a la conference d'un consultant, il decide d'adopter un mode qui remu nerera les employes de la production en fonction de leurs competences.
La conception du mode de remune ration basee sur les competences Le mode de remuneration basee sur les comp€iences que la firme Bon Biscuit a retenu est semblable a celui qU'une entreprise americaine du meme secteur a recemment mis en place. Quoique Ie consultant externe recommande d'in clure certains employes dans Ie comite d'eIaboration de ce mode de remunera tion, la direction refuse en pretextant que Ie temps presse et que cela est inu tile puisqu'il ne fait pas de doute que Ie mode de remuneration de l'entreprise americaine, qu'on adopte presque tel quel, est une reussite. Dans un premier temps, on decide de mettre en place Ie mode de remune ration basee sur les competences pour les employes de la nouvelle chaine de fabrication des biscuits Nouvel Age Sante. On veut ainsi roder ce mode de remuneration, avant de l't.~tendre aux
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Partie IV
I
Les detis des conditions de travail
autres chaines de fabrication. En aucun temps, Ie comite ne discute de la possi bilite de rendre les vendeurs-livreurs et les employes de bureau admissibles a ce mode de remuneration. Le consultant suggere aussi de redi ger un guide de I'empIoye expliquant Ie fonctionnement du mode de remune ration et les grilles d'evaluation des competences. « 5i jamais des cours de formation etaient offerts aux employes, explique+i1, ce guide pourrait s'averer un outil de consultation utile. La di rection trouve la suggestion valable, mais elle prefere attendre que Ie mode de remuneration soit bien rode avant d'en decrire les caracteristiques sur papier. >}
La definition des competences Les competences correspondent aux dif ferentes etapes de la production. Aux cinq etapes de la production correspon dent les cinq series de competences sui vantes: Ie melange, la mise en moules, la surveillance de la cuisson, l'assaison nement (ou Ie gla~age, selon Ie cas) et l'embaUage. Chaque serie de compHences ren ferme trois niveaux refietant, par ordre croissant, Ie degre de difficulte de la tache. Ainsi, Ie niveau 1 de la serie 1 -Ie melange - exige la capacite a verifi~r, 1~ recette a faire, Ie niveau 2, la capaClte a entretenir et a nettoyer les melangeurs, et Ie niveau 3, la capacite a demonter, a remonter et a reparer la machinerie au besoin. Les cinq series et les trois niveaux de competences respectifs sont decrits a l'annexe 1. Quoique les competences evaluees soient simples, elles necessitent Ie ma niement de machines de haute techno logie. Il est vrai que plusieurs etapes de
la fabrication sont contr6H~es par ordi
nateur, mais il faut quand meme une verification humaine pour s'assurer continuel1ement de l'exactitude des machines. Les employes doivent d'ail leurs arreter Ia chaine de fabrication en cas d'anomalie, car Ie controle de la qualite se fait tout au long du processus de fabrication. Afin de repondre aux besoins actuels de la production, Ie comite decide d'in citer les employes a acquerir Ie niveau 2 dans chacune des series de competences avant de passer au niveau 3. Selon Ie comite, cela favorise la polyvalence des employes et leur permet de mieux com prendre l'ensemble du processus de pro duction. De plus, Ie contingentement du niveau 3 se justifie, un seul employe competent Hant suffisant pour reparer et demonter chaque type de machine.
La formation et la rotation des employes Cinq employes de la production et un cadre participent a un stage de forma tion offert aux hats-Unis par Ie four nisseur du nouvel equipement. La regIe de l'anciennete au sein de l'entreprise a ete suivie quant au choix des cinq em ployes participants (certains ont t?ute fois refuse de se joindre au groupe etant donne qu'ils prevoyaient prendre leur retraite l'annee suivante). Apres une for mation theorique et pratique d'une duree de quatre mois, les membres du groupe re~oivent un certificat de competence. La longue duree ~e cet;.e formation s'expJique par Ie faIt qu II faut suivre des cours de mecanique et d'electronique pour obtenir Ie niveau 3 de competences. Des cours d'info~m~ tique lies au fonctionnement des eqUl pements sont egalement offerts par Ie fournisseur.
Chapitre 10
Seion les modalites du mode de remuneration basee sur les competences implante par l'entreprise americaine, la formation, les promotions et les licen ciements sont fonction de l'anciennete et des competences des employes. Cette politique n'a pas ete adoptee par la direction de Bon Biscuit. En effet, seul Ie critere de l'anciennete est applique a la selection des employes a des fins de formation et de rotation des emplois: les plus anciens ont la preseance sur les plus jeunes. L'apprentissage des competences s'ef fectue entre pairs, c'est-a-dire que les employes forment eux-memes leurs col legues de travail. Les employes ont donc leur mot a dire dans l'evaluation de la capacite d'un collegue a accomplir une tache de fa~on autonome. Le directeur des ressources humaines de Bon Biscuit a d'ailleurs offert un cours de six heures sur l'evaluation des competences. Apres une formation entre pairs de deux mois, Ie mode de remuneration prevoit une peri ode de mise en pratique d'un mois afin de favoriser l'assimilation des con naissances et des habiletes nouvelle ment acquises. Lorsque les employes atteindront Ie niveau 2 des cinq series de competences, on effectuera la rota tion des postes tous les mois.
I Offrir des salaires equitables
des competences des employes peuvent etre retardees si Ie camet de cornman des necessite une production a plein rende ment.
L'evaluation et la remuneration des competences L'evaluation d'une competence est effec tuee par un collegue «formateur» a la suite de la peri ode de formation entre pairs d'une duree de deux mois. L'em ploye est aussi evalue par son superieur ala fin de la periode de mise en pratique d'un mois. Pour recevoir son certificat, l'employe doit etre capable d'effectuer la tache sans aide et de regler une serie de problemes de production lors d'une simulation. Si I'employe echoue, il doit reprendre les periodes de formation entre pairs et de mise en pratique avant de pouvoir demander une reevaluation de la competence visee. Aucune revi sion ou mise a jour des competences acquises n'est effectuee; Ie comite estime que la rotation des emplois assure l'actualisation des competences. La grille d'evaluation des compe tences retenue par Ie co mite est exacte ment celle qUi est utilisee par la societe americaine. Elle presente une liste de criteres permettant d'evaluer Ia capacite des employes a effectuer Ies taches liees au niveau de competences vise. Les eva luateurs peuvent noter leurs remarques dans une colonne prevue a cette fin.
Le comite est d'avis aussi que l'ap prentissage des competences doH se faire dans un ordre precis. Ainsi, l'em ploye doit avoir acquis Ie niveau 1 de toutes les series de competences avant de passer au niveau 2 d'une autre serie de competences. De Ia meme maniere, il faut avoir atteint Ie niveau 2 dans
Le comite du mode de remuneration basee sur Ies competences decide d'ac corder une valeur pecuniaire egale a chaque niveau de competences afin
chaque serie de competences avant de
d'eviter la course aux competences les
passer au niveau 3. II est pn§vu que l'ordre ou la vitesse d'acquisition des series de competences sont fonction des exigences de la production. Ainsi, la formation, la rotation ou l'evaluation
mieux remunerees. Ainsi, quoique Ie niveau 3 soit manifestement plus diffi cHe a obtenir, il rapporte la meme somme que Ie niveau 1 ou Ie niveau 2. La remuneration d'un employe est
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Partie IV
I
Les defis des conditions de travail
reajustee a 1a periode de paie suivant 1'attestation d'un nouveau titre de com petences, une fois que Ie directeur de la production a approuve I'augmentation de salaire recommandee par son supe rieur immediat.
Les reactions des intervenants it I'implantation et it la gestion du mode de remuneration Les nombreux changements organisa tionnels apportt~s par la direction qui ont trait a l'obtention de la norme ISO, au travail en equipe, a la formation, au nouvel equipement, aux nouveaux pro dUits, etc. - effraient les employes de production. lIs voient d'un mauvais ~il Ie nouveau mode de remuneration basee sur les competences qu'on leur impose. Plusieurs croient que la seule raison d'etre de ce nouveau mode de muneration est d'accroitre leur produc tivite. Plusieurs employes de production estiment que 1a rotation des emplois ameliore leur qualite de vie au travail, car elle diminue Ie caractere routinier de leurs taches et leur accorde Ie pouvoir d'arreter la chaine de fabrication. Ils apprecient aussi Ie fait que leur su perieur ait maintenant un role de «coordonnateur de la formation» et qu'j] puisse leur permettre. de faire certaines verifications de routme. Chez Bon Biscuit, la notion de patron est dorenavant remplacee par celIe de collaborateur ou de coach. Ii circule meme une rumeur voulant que la direc tion songe a creer des postes de chefs d'equipe, qUi seraient occupes a ~our de role par les employes de productIOn, et qu'elle envisage de confier aux equipes de travail la gestion de leur propre budget.
La gestion du mode de remuneration basee sur les competences se heurte principalement au probleme de l'eva luation (1'attestation) des competences acquises. Certains employes s'insurgent contre Ie fait que ce soit un pair qUi les evalue. D'autres se plaignent qu'ils ne sont pas evalues de la meme fa~on par leurs collegues et par leur superieur im mediat, la nature et l'ampleur des exi gences variant d'un individu a I'autre. On met aussi en doute les habiletes de formation des collegues. Les employes formateurs sont mecontents parce qu'ils ne sont pas remuneres pour cette fonc tion supplementaire alors qu'ils sont les seuls a avoir atteint Ie niveau 3 de competences. Certains employes de production trouvent que les possibilites de forma tion et d'augmentation de salaire sont trop restreintes. Alors qu'on leur avait dit que Ie processus d'acquisition d'un niveau de competences prendrait trois mois, ils constatent qu'il faut plutot cinq mois pour passer d'un niveau a I'autre. Le mecontentement des employes de production augmente a mesure qu'ils se rendent compte que Ie niveau 3 de com petences est tres difficile a acquerir; plusieurs echouent apres avoir repris la formation. On se demande si Ie mode de remuneration ne vise pas a plafonner les competences au niveau 2 et si lion veut reellement favoriser la polyvalence parmi les employes. D'~utres e~t~ment que l' experience acqUlse anteneure ment devrait entrer en Ugne de compte dans les possibilites d'avancement, et non seulement l'anciennete. Encore aujourd'hui, certains em ployes de production ne voient pas Ia necessite d'apprendre toutes les taches liees a la production. D'autres pensent
Chapitre 10
I Offrir des salaires equitables
que les employes des services de la reception et de l'expedition devraient etre vises par Ie mode de remuneration mis en place. Quant aux employes de bureau, ils sont mecontents car ils crai gnent que les augmentations de salaire accordees aux employes de production en vertu de leur mode de remuneration soient plus elevees que les leurs. Les employes du service de la paie trouvent Ie mode d'attribution des augmenta tions de salaire difficile a gerer. II faut verifier l'attestation des titres de compe tences, s'assurer de l'approbation des personnes en cause et ecouter les plaintes de ceux qui reclament leur augmenta tion de salaire sans delai alors que rien n'a He ecrit a ce sujet.
d'entre eux craignent aussi de perdre leur emploi si la fonction de chef d'equipe est creee. La resistance de certains cadres est telle qu'ils limitent l'acquisition de competences et la rota tion des employes en pretextant des contraintes de production. Selon eux, cela ne changera d'ailleurs rien a moyen terme alors que Ies employes - notam ment ceux qui auront atteint Ie niveau 3 - se plaindront de ne plus pouvoir augmenter leur salaire. Les commen taires de certains cadres et employes au sujet du mode de remuneration basee sur les competences sont presentes a l'annexe 2.
Par ailleurs, les contremaitres trou vent difficile d'assumer leurs nouvelles responsabilites et leur nouveau role de coach. Plusieurs d'entre eux considerent la formation et la rotation des emplois comme une perte de temps entrainant des goulots d'etranglement dans Ie pro cessus de production. Huit mois apres l'implantation du mode de remunera tion basee sur les compHences, des changements s'averent encore neces saires. « Ces modifications continuelles entrainent d'enormes pertes de temps! » estiment certains cadres. Plusieurs
o Decrivez
les caracteristiques du mode de remuneration basee sur les competences, de son implantation et de sa gestion qUi contribuent a expliquer pourquoi il n'a pas mene aux resultats escomptes. Entre au tres, quelles conditions de succes n'ont pas ete respectees? ]ustifiez votre reponse.
f) Proposez et expliquez des mesures susceptibles d'ameliorer l'efficacite du mode de remuneration basee sur les competences chez Bon Biscuit.
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail lES COMPETENCES REMUNEREES CHEZ BON BISCUIT
Chapitre 10
I Offrir des salaires equitables
COMMENTAIRES RECUEILLIS AU PRES DES CADRES DE BON BISCUIT
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Apres avoir lu ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte it: • Comprendre !'importance de la reconnaissance du rendement au travail et les perspectives theoriques mises en avant Ie plus frequemment it leur sujet. • Connaitre les resultats des recherches ayant analyse les effets des incitations pecuniaires et non pecuniaires sur divers indicateurs de la performance individuelle. • Constater la multiplicite des formes de reconnaissance ou de recompenses qu'on peut accorder au travail. • Connaitre les divers types de regimes de remuneration variable ainsi que leurs particularites, leurs atouts et leurs limites respectives. • Expliquer les conditions de succes des programmes de reconnaissance et des regimes de remuneration variable. • Comprendre les reactions et les attentes des syndicats it l'egard de la remuneration variable.
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Partie IV
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les defis des conditions de travail
Quand une banane est mei11eure que de l'argent1 Avez-vous deja entendu parler du Golden Banana Award? L'histoire de ce prix est bien connue des employes de Hewlett Packard. Plusieurs ingenieurs cherchaient la solution aun probLeme technique impor tant depuis des semaines. Finalement, ['un d'eux I'a trouve. Son patron, embalIe et n'ayant rien d'autre sous la main, lui offre une banane de sa boite a lunch! Par La suite, Hewlett-Packard a fait faire un tro phee qui est remis a tous ceux qui font un bon coup dans ses usines. Cette histoire s'est vite transformee en exemple a suivre lorsqu'iJ est question de mobilisation. «Le salaire est important, mais ce qui motive les gens au travail, c'est la recon naissance. Les gens veulent se faire dire qu'i/s font un bon boulot et ils veulent avoir du feed-back. <;:a ne coute rien et ~'a fonc tionne. Quand Ie gestionnaire voit quelque chose qu'il apprecie, il doit Ie dire a ce moment precis », explique Andre Savard, associe chez Dessureault, Savard, Caron et Assodes, une finne de consultation en ressources humaines et en organisation. « Les meilleurs programmes de recon naissance sont ceux qui coutent Ie moins cher et qui sont centres sllr la relation patron-.mbordonne », ajoute-t-i/. Le gestion naire joue un role de premier plan dam Ia mobilisation de ses employes. Sa responsa bilite fondamentaie, selon M. Savard, est de definir et d'expliquer ses attentes en plus de reconnaitre Ie comportement voulu en don nant de la retroaction. Par ex empIe, sl I'objectif est Ie service a la clientele, Ie ges tionna;re doit observer les compOitements de ses employes et encourager les mesures
prises par ces derniers pour atteindre ['objectif. « On s'occllpe des gens quand Us font mal leur travail, lance M. Savard. II faut faire l'inverse. » Le consultant a identifie plusieurs outils de reconnaissance non moneta ires ayant un impact direct sur la mobilisation des em ployes. Les gestionnaires doivent feliciter, informer, remerder verbalement ou par ecrit, ecouter et demander l'avis des employes, ecrire une note positive au dossier person nel, communiquer aux gens des propos positifs venant dlune tierce personne ou encore souligner un progres meme sl ['objec tifnlest pas encore atteint. «Les gens veulent dll feed-back. C'est ce qUi ressort des sondages» I £lit M. Savard, qui croit que la reconnaissance non mone taire motive davantage que l'argent. «La fierte motive les etres humains. Quand un patron prend la peine de parler a un empLoye et de Ie felidter, ce dernier se sent valorise. II slagit dlune source de motiva tion enorme. »
Les outils de valorisatlon « La reconnaissance non moneta ire est plus puis sante que Ies mecanismes monetaires parce qu'elle est immediatel alors que les mecanismes monetaires, comme Ies bonis, sont annuels", explique Denis Chenevert, professeur adjoint en ressources humaines aux HEC Montreal. « L'employe ne pen;oit plus Ie lien entre son comportement et la recompense qu'on lui octroie, ajoute-t-il. L'avantage avec fa reconnaissance non moneta ire, c'est qulon
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L R.C. Simard, "Quand une banane est meilleure que de l'argent», Les Af(aires, 21 decembre 2002, p. 23.
Chapitre 11
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Reconnaitre Ie rendement au travail
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• //identification: les employes vont etre peut l'ajuster aux besoins de l'individu. Un mobilises slits partagent les valeurs de resto, une fin de semaine dans une auberge, l'organisation. II faut developper un une partie de golf, ou toute autre petite sentiment d'appartenance et solidifier attention qui fera platsir a I'employe. Ies liens des individus. ActivWJs so La tape dans Ie dos peut aussi bien faire ciales, partys, accessoires promotionneis l'affaire. » et projets communs sont des moyens de Line COte, cofondatrice du Groupe favoriser I'appartenance. Reseau Consen une firme de consultation en ressources humaines, voit dans l'absen • La participation: il faut responsabiliser tiHsme, Ie taux de roulement eIeve et les les employes, leur donner la formation nombreux griefs des signes d'employes non necessaire pour etre performants et mobilises. atteindre les objectifs. Participer a la « Un employe mobilise, c'est quelqu'un prise de decision ou organiser des qui, volontairement, va etre pret a deployer equipes de travail semi-autonomes don de I'energie dans Ie but d'atteindre les nent un sens au travail et mobilisent objectifs de I'entreprise, et de se coordonner les employes. avec les autres membres de son equipe. La M. Chenevert, des HEC Montreal, sou force d'une entreprise, c'est son personnel, ligne qu'un climat de confiance est une et c'est ce qui la differencie des autres. condition essentielle a la reussite de toute C'est un avantage concurrentiel », souligne strategie mobilisatrice. «L'environnement M"le COte, une specialiste en gestion des doit etre propice. Si les employes pensent ressources humaines. que ['information vehicuIee est erronee ou II existe, selon elle, trois moyens effi que les pratiques de promotion ne sont pas caces pour developper un sentiment de justes, les leviers ne fonctionneront pas. » mobilisation, apres la reconnaissance monetaire. • L'information: un employe va etre mo bilise s'il comprend ce qu'on attend de lui. II faut partager l'information et Ie Expliquez les changements qui pour tenir au courant des objectifs et des pro raient Hre apportes au sein d'une jets d'investissement ou de rationalisa equipe de travail ou d'une organisation tion. Le journal interne ou l'intranet pou~ ~ue les emp~~y~s se montrent plus sont des moyens efficaces de communi motIves ou mobIllses au travail. Enu cation utilises par les entreprises. Sonder merez les actions et les gestes concrets Ie pouls des employes et leur donner que les employes et les dirigeants des moyens de s'exprimer est aussi pourraient entreprendre pour rendre essentiel. Ie milieu de travail plus motivant et «La grande tendance, dit M"le Cote, mobilisant. c'est que les entreprises font des sondages sur Ie climat organisationnel et sur la notion de clientele. Cela permet de verifier si les employes sont mobilises et preoccupes par un projet commun. »
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I Les defis des conditions de travail
Partie IV
Ce chapitre vise a rendre conscients les dirigeants et les cadres (actuels et futurs) qu'il est important de reconnaitre ou de recompenser Ie rendement des employes. Aux fins de ce chapitre, les termes «reconnaissance» et «recompense» sont utilises comme synonymes. Toutefois, i1 convient d'ob server que plusieurs auteurs utilisent Ie terme «reconnaissance» pour traiter des modes de recompense autres que ceux qui sont lies a la remuneration, comme les concours, les mentions honorifiques ou les remerciements. Dans ce chapitre, nous expliquons comment l'approche axee sur la recom pense peut agir comme catalyseur du rendement. Nous traitons d'abord des fondements theoriques mis en avant pour commenter l'effet presume des recompenses et de la remuneration variable sur Ie rendement individuel, de groupe et collectif. Nous presentons ensuite une synthese des recherches ayant analyse l'efficacite de divers modes de recompense. Nous exposons l'ensemble des formes de reconnaissance non pecuniaires que les dirigeants d'entreprise et les cadres peuvent utiliser pour souligner la contribution au travail ainsi que les atouts de ces formes et leurs conditions de sucd~s. Puis, nous decrivons de maniere detaillee les divers regimes de remuneration va riable qu'on peut implanter pour recompenser Ie rendement individuel, de groupe ou collectif. Ensuite, nous examinons la gestion des regimes de remu neration variable dans un contexte ou l'on trouve un syndic at. Finalement, nous insistons sur les principales conditions de succes qui doivent etre prises en consideration dans la gestion des regimes de remuneration variable.
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L'importance recompenser la contribution au travail . . . . . . . . . . . . de . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. ...... .
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Lorsque l'on parle de recompenses, de reconnaissance et de remuneration va riable, bien des croyances reposent sur des prejuges plus ou moins fondes. Cette section presente d'abord les principales theories associees au recours aux recompenses. Elle reprend ensuite un recent sommaire des resultats des etudes ayant analyse l'efficacite des recompenses (St-Onge, 2003).
11.1.1 Les fondements theoriques Seion Morin, «la motivation correspond aux forces qui entrainent des com portements orientes vers un objectif, forces qUi permettent de maintenir ces comportements jusqu'a ce que l'objectif soit atteint. La motivation confere trois caracteristiques a toute conduite: Ia force, la direction et la persistance» (1996, p. 122-123). Bien qu'il existe des dizaines de theories de Ia motivation au travail, Ie tableau 11.1 resume l' essentiel du message des theories les plus connues. Apres avoir revu pres d'une quarantaine de theories de la motiva tion, Ford (1992) a fait une synthese claire destinee aux milieux de travaiL
Chapitre 11
Reconnaftre Ie rendement au travail
Selon cet auteur, la motivation au travail reposeralt sur trois grands prealables les objectifs, les emotions et Ie sentiment de competence - auxquels on peut associer les principes suivants. • Un environnement appuyant: une personne doit travailler dans un environnement appuyant refietant ses caracteristiques personnelles telles que ses competences et ses habiletes. • La reduction des contraintes directes: il faut reduire les contraintes et les obstacles a la realisation des objectifs de travail d'une personne. • Le realisme: les competences et l'environnement de travail doivent etre adequats et correspondre aux objectifs que la per sonne desire atteindre. • La facilitation de l'action: il faut actualiser ou utiliser les competences de la personne. • La retroaction: une per sonne doit pouvoir connaitre les progres qu'elle accomplit au travail et obtenir une retroaction. • Des changements graduels: it faut changer petit a petit les objectifs et Ie contenu du travail. • L'activation des emotions: it faut toucher les emotions d'une personne (plaisir, joie, etc.). • Le respect: une personne doit etre respectee, ne pas etre traitee comme si elle etait interchangeable. • Un fonctionnement unique: on doit tenir compte des caracteristiques propres a la personne. • La fixation des objectifs: il faut qu'une personne ait plusieurs raisons de faire une chose ou d'atteindre un objectif. On dolt ainsi l'amener a se fixer des objectifs personnels. Ses buts devraient etre clairs, juges importants, coherents, non conflictuels, difficiles mais realistes et atteignables de diverses fa(,:ons.
LES PRINCIPAUX FONDEMENTS THEORIQUES AU SUJET DE L'IMPACT DES REcoMPENSES SUR lE RENDEMENT INDIVIDUEl
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail
Chapitre 11 \ Reconnaitre Ie rendement au travail
Source: Adapte de S. St-Onge, {( La remuneration: ~a ne change pas Ie monde, sauf que ... ", Les Cahiers des let;ol1s inaugurales, Montreal, HEC Montreal, 25 avril 2003, p. 16.
11.1.2 L'impoTtance des Tecompen ses : les Tesultats des TecheTches Bon nombre de chercheurs ont tente de tester la theorie de l'{"valuation cogni tive (voir Ie tableau 11.1) selon laquelle les recompenses extrinseques ont un effet negatif sur la motivation intrinseque des personnes. Apres avoir revu ces recherches (la plupart realisees en laboratoire aupres d'elE~ves), St-Onge (2000) constate que leurs resultats divergent: des resultats appuient cette hypothese, d'autres l'infirment et d'autres encore montrent que l'effet des recompenses extrinseques sur la motivation intrinseque depend de variables contextuelles comme la nature et les caracteristiques du travail, les valeurs des personnes ou la maniere dont les recompenses sont octroyees. Vne autre synthese des resultats des etudes (voir les meta-analyses de Cameron et Pierce, 1997; Eisenberger et Cameron, 1996) indique que Ie presume impact negatif des recompenses sur la motivation intrinseque est limite a une combinaison de conditions particulieres qUi ne sont pas courantes dans les organisations. Apres avoir analyse les resultats des etudes portant sur l'efficacite de di verses formes de renforcements (pecuniaire, non pecuniaire, social) en milieu organisationnel au cours des 20 annees precedentes, Stajkovic et Luthans (1997) concluent ceci : • L'octroi de recompenses augmente Ie rendement des employes tant dans les entreprises manufacturieres que dans les entreprises de services, mais de fa~on nettement plus importante dans Ie secteur manufacturier. • L'effet des recompenses pecunia ires sur Ie rendement des employes est beaucoup plus important que celui des recompenses non pecuniaires dans Ie secteur des services, alors que Fon obtient Ie resultat inverse dans Ie secteur manufacturier.
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail • Co~pare aux autres modes de renforcements etudies, Ie renforcement socIal ou v~rba~ (compliments, felicitations, etc.) a un effet significative ment plus eleve sur Ie rendement des employes, et ce, tant dans Ie secteur manufacturier que dans Ie secteur des services. Finalement, les resultats d'autres syntheses (voir les meta-analyses de Gupta et Mitra, 1998; Jenkins, Mitra et Shay, 1998) montrent que Ies inci tations pecuniaires ameliorent de maniere importante Ie rendement en ce qUi a trait a la quantite, et ce, quels que soient la nature des taches realisees et Ie contexte de l'etude. Par ailleurs, les resultats des etudes (au nombre de six seulement) qui ont analyse Ie lien entre les incitations financieres et la quaI ite de la production n'observent pas d'effet significatif.
En somme, les recompenses ne sont ni mauvaises ni bonnes en soi: les recompenses tangibles peuvent etre plus ou moins benefiques ou plus ou moins nuisibles. Tout est dans la maniere de Ies gerer. Les recompenses tangi bles sont susceptibles d'avoir des effets negatifs, mais ces demiers peuvent eire repen§s, limites et evites. EIles doivent eire considerees comme des outils d'in formation (la communication des normes de rendement a atteindre) et de retroaction (sur Ie rendement passe) contribuant a augmenter Ie sentiment de controle et de competence des employes, qui est un prealable a leur motiva tion. Aussi, une conclusion exprimee par Gomez-Mejia et Balkin (1992) semble encore adequate: les consequences perverses associees a la presence de recompenses sont probablement moins importantes que celles qu'entraine leur absence (comme ils Ie disent, «elles sont un moindre rna!»). Ne pas accorder de recompenses ou encore les accorder en fonction d'autres criteres que Ie rendement - comme l'anciennete ou les resultats a des tests de con naissances - est symptomatique: cela cree une culture peu orientee vers Ie rendement qui attire et retient non pas Ies employes Ies plus performants, mais ceux qui ont Ie plus d'experience et de connaissances. D'apres Baker, Jensen et Murphy, «un examen soigne des critiques a l'egard des systemes de remuneration bases sur Ie rendement n'indique pas qu'ils sont inefficaces mais plutot qu'Us sont trop efficaces» (1988, p. 597). Reconnaissons toutefois que Ie fait de traiter de l'efficacite des pratiques de reconnaissance n'est pas une chose simple. En effet, la gestion des pratiques de reconnaissance peut viser divers objectifs, autres que celui de la motivation au travail, objectifs qui peuvent meme s'averer conflictueis. II faut done se demander en quoi ces pratiques sont efficaces et quel probleme l€ Ies cherchent a resoudre. En effet, les pratiques de reconnaissance peuvent etre utili sees pour motiver Ies employes, pour les attirer et les retenir, pour appuyer la strategie d'affaires ou un changement organisationneI, pour communiquer des valeurs et renforcer une culture, pour remplacer ou bonifier un regime de remuneration, pour faciliter la transition eventuelle a un regime collectif de remuneration variable, pour reconnaitre les rendements exceptionnels, pour reconnaitre les suggestions, et ainsi de suite. L'efficacite s'evalue en fonction de Ia realisation de l'objectif vise.
Chapitre 11 1 Reconna'itre Ie rendement au travail
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Les regles a respecter face du rendement
ala reconnaissance
·u~~ ~t~de' ~e~~ie' ~ue meme si pres de 50% des employes se disent satisfaits de leur remuneration, seulement 34% d'entre eux estiment que leur employeur reconnait actequatement leur rendement (Wilson, 1998). Cette section traite de deux grands principes a l'egard de la gestion des recompenses en milieu de travail: preferer la reconnaissance a la punition et ne pas oct royer de recompenses de maniere abusive (Theriault et St-Onge, 2000).
11.2.1 Premiere regle : preferer la reconnaissance ala punition Si la plupart des cadres disent privilegier un style de supervision axe sur la reconnaissance, en pratique, ils semblent davantage adopter une approche axee sur Ie contrcle. Pour bon nombre de cadres, les punitions et Ie contrcle sont per\Us comme etant efficaces pour modifier a court terme des compor tements ou des resultats. Leur adoption nourrit donc leur illusion de maitriser la situation et correspond a l'image traditionnelle des patrons. Par ailleurs, les cadres sont peu conscients des effets negatifs a long terme du recours aux punitions et au contrcle. En effet, comme ces derniers mettent l'accent sur les normes minimales a respecter et sur ce qui ne doit pas etre fait, ils risquent d'inciter les employes a faire Ie minimum ou a eviter d'avoir un mauvais rendement (la peur d'etre punis). J:accent mis sur les punitions amene les employes a adopter divers comportements qui, bien qu'efficaces a court terme, s'averent souvent improductifs a long terme. A titre d'exemple, pensons aux employes qui, pour respecter les nOImes, manipulent les don nees de production, privilegient la quantite au detriment de la qualite ou adoptent des methodes de travail plus rapides mais plus risquees. L'approche
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Partie IV r Les defis des conditions de travail
punitiv:- SUscite egalement un climat de metiance entre les dirigeants et les e~p:oyes, lequel favorise justement ce que Ie controle vise a prevenir: Ia neglIgence ?an>s Ie. travail. En somme, plus on insiste sur les punitions, plus ':s employes redUl~ent le~r .engagement en cherchant a contourner Ie sys teme, et plus on dOlt multiplIer les modes de contr6le pour s'assurer que leurs comportements et leurs resultats resteront a peine satisfaisants. C'est Ie cercle vicieux des punitions. L'approche axee sur la recompense est utilisee moins frequemment parce qu/eUe exige, contrairement a ce qu'on pourrait etre porte a eroire, de bien meilleurs cadres que l'approche axee sur la punition. En effet, les punitions sont associees a des normes minimales generalement bien detinies et appuyees par la hierarchie, alors que les recompenses sont associees a la reali sation d'objectifs que les cadres doivent detinir et justifier, et ce, d'autant plus que celles-ci sont convoitees et donc susceptibles de faire des envieux parmi les employes. II faut que les cadres traitent de fa~on differenciee leurs subor donnes, qu'Us justifient l'octroi de recompenses et qu'ils fassent face aux employes mecontents de leurs decisions. En effet, lorsque des personnes ne re~oivent pas la recompense qu'elles s'attendaient a obtenir pour une raison quelconque, elles tendent a percevoir cela comme une punition. II revient alors au superviseur de remettre les choses en perspective. Par ailleurs, Ies dirigeants d'entreprise et les cadres ont egalement moins tendance a recourir a l'approche axee sur la recompense parce qu'ils sont peu sensibilises a ses effets positifs et qu'ils voient souvent plus d/inconvenients (Ie temps et l'energie requis, Ie risque d'envenimer Ie climat dans l'equipe, etc.) que d'avantages dans Ie fait d'evaluer et de recompenser Ie rendement de leurs subordonnes. S'ils pensent ne pas etre suffisamment formes a recon naftre adequatement Ie rendement de leurs employes, il ne faudrait pas etre surpris qu'ils recourent peu frequemment aux programmes de recompenses et se bornent a appliquer l'approche axee sur Ie controle pour Iaquelle ils obtiennent d'ailleurs souvent plus de reconnaissance. Les cadres et les dirigeants devraient etre sensibilises aux atouts de l'ap proche axee sur les recompenses. Comme cette approche indique aux em ployes ce qu'ils doivent viser, eUe les motive a se depasser ou, encore, a faire ce qui devrait etre fait. II faut se rappeler qu'une personne ameliore ses chances d'obtenir ce qu'elle desire si elle y rattache certaines recompenses. Par exemple, les employes sont plus susceptibles d'etre creatifs, engages, flexibles ou cooperatifs lorsque Ie mode de gestion de leur entreprise reconnait la crea tivite, l'engagement, la flexibilite et l'esprit d'equipe. En somme, l'approche axee sur les recompenses favorise un climat de confiance ou les superviseurs et les dirigeants per~oivent les employes comme etant responsables et desireux de faire des efforts, et ou les employes ont une impression favorable de leur superviseur et de la direction. Certes, la dichotomie punitions-recompenses est surement simpliste 10rs qu'il s'agit de comprendre une attitude complexe comme la motivation au travail. II est important de se rappeler qu'un recours minimal au controle
Chapitre Y\ \ Reconnaltre Ie rendement au travail
s'avere necessaire pour guider l'action des employes et que l'adoption de punitions est inherente Ii l'intervention aupres des employes difficiles. L' ob jectif n'est pas d'eliminer les punitions et Ie contrOle, mais plutot d'amener les cadres et les dirigeants Ii recourir davantage aux recompenses qu'aux puni tions dans la supervision quotidienne des employes.
11.2.2 Deuxieme regIe: ne pas octroyer de recompenses de maniere abusive Comme en toute chose, il faut se metier de l'abus des recompenses. Oetroyer trop de recompenses ou des recompenses trop eIevees peut etre nuisible parce que cela correspond alors a une forme de manipulation des employes. Le recours excessif aux recompenses peut inciter les employes a faire juste ce qu'il faut pour recevoir celles-ci et Ii leur attribuer la cause de toutes leurs actions. Dne utilisation abusive des recompenses peut egalement amener les employes Ii adopter divers comportements qui, bien qu'ils permettent d'obte nir une recompense, risquent de s'averer improductifs a long terme. Comme dans Ie cas du recours excessif aux punitions, les employes peuvent, dans l'espoir d'obtenir une prime, etre tentes de fausser les donnees de production, de privilegier la quantite au detriment de la quaJite ou d'adopter des me thodes de travail plus rapides mais moins slires. En fin de compte, si l'on insiste trop sur les recompenses tangibles (argent, primes, etc.), les employes seront peut-etre tentes de s'engager seulement dans des activites qui leur rap porteront un benefice et de negliger les aspects de leur travail qUi ne sont ni mesures ni recompenses (comme la creativite ou la disponibilite). Aussi, Ie fait de trop mettre l'accent sur la remuneration peut reduire la motivation intrin seque des personnes, c'est-a-dire !'incitation a faire des choses pour la satis faction qu'elles procurent en soL On doit alors faire appel a d'autres recompenses pour pousser les personnes a executer d'autres actions. C'est Ie cercle vicieux des recompenses. Selon Kohn (1993), il faut se metier des recompenses pour les raisons suivantes. • El1es peuvent punir. Comme la plupart des employes ne rec;oivent pas les recompenses qu'ils attendaient pour diverses raisons, l'impact d'une recompense est Ie meme que celui d'une punition. • Elles peuvent nuire aux relations. Les recompenses peuvent inciter les employes a se concurrencer plutot qu'a collaborer et a cooperer. Elles peuvent aussi amener les employes a se montrer plus reticents a consulter leur superviseur et a lui exprimer leurs difficultes parce qu'ils veulent lui pia ire et l'impressionner afin d'obtenir Ia meilleure recompense possible. De leur cote, en ayant a octroyer des recompenses, les superviseurs peu vent etre mains prompts a aider leurs subordonnes sous pretexte qu'ils doivent atteindre seuls leurs resultats pour (>tre recompenses. • £lIes peuvent nuire a la resolution des problemes. Plus l'on recourt aux recompenses, plus les employes ont tendance a se preoccuper des resul tats lorsqu'ils doivent s'interroger sur les causes d'un probleme de rendement pour Ie resoudre.
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Partie IV
Les defis des conditions de travail
• Elles peuvent reduire la prise de risques et Ia creativite. Plus un envi ronnement est axe sur les recompenses, mOins les personnes veulent pr.endre de risques, e~plorer et faire des essais parce que les recompenses a!lmentent la peur d echouer, de falre des erreurs et de ne pas obtenir de recompenses. • Elles peuvent rectuire l'interet pour la tache. Plus l'on inslste Sur les re compenses, plus Ie personnel s'interesse a elIes, plus n per~oit son travail comme un prealable a leur obtention, et moins il considere son travail comme etant une source de satisfaction et de valorisation personnelles (recompenses intrinseques). En conclusion, l'approche axee sur les recompenses n'est pas une panacee; eUe risque meme d'engendrer des problemes serieux si elle est mal geree.
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La varh~te des formes de reconnaissance ou
de recompenses
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S'ils veulent creer un climat favorable ou tout au moins non prejudiciable au rendement, les dirigeants et les cadres dOivent celebrer celui-ci, Ie reconnaitre ou cesser de Ie considerer comme un duo Le tableau 11.2 liste sept formes de recompenses, soit la communication, les comportements, les symboles ho norifiques, la visibilite, les biens, services et primes ponctueUes, les conditions de travail et la remuneration. Dans cette section, nous decrivons les six pre mieres formes de recompenses, alors que dans la prochaine section, nous examinons la septieme forme, so it la remuneration variable. Avant de presen ter ces differentes formes de reconnaissance non pecuniaire, il est important de noter qu'eHes sont souvent utilisees et gerees simultanement. Le recours a plusieurs de ces formes sur une base continue et simultanee est d'ailleurs recommande .
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LES DIVERSES FORMES DE RECOMPENSES OU DE RECONNAISSANCE
Chapitre 11
I
Reconnaltre Ie rendement au travail
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Partie IV ) Les detls des conditions de travail
Source: S. St-Onge, « Reconnaitre les performances », Montreal, Gestion, 2000, p. 94 (Coli. Racines du savoir).
11.3.1 La communication Le gestionnaire peut communiquer directement sa reconnaissance et ses feli citations aux employes meritants en leur telephonant, en leur envoyant une note dans lequel illeur dira «merci », « bon travail» ou «continuez», en allant les remercier a leur bureau, et ainsi de suite. 11 s'agit de gestes simples, mais qui sont faits peu souvent, l'attitude adoptee couramment etant plutot de ce genre-ci: «si nous ne disons rien, c' est que nous sommes contents», «nous n'avons pas de temps a accorder a ces bagatelles», «nous communiquons notre appreciation au cours de l'entrevue annuelle d'evaluation du rende menh, etc. Comme la simple retroaction continue sur Ie rendement est l'une des formes de reconnaissance les plus importantes pour motiver une per sonne, l'absence de retroaction peut avoir un effet plus nuisible sur la moti vation que Ia punition. 11.3.2 Les compoTtements
On peut egalement exprimer sa reconnaissance par des comportements: une tape dans Ie dos, une poignee de main, etc. De meme, on peut temoigner son appreciation notamment en se montrant pret a aider des personnes et ales appuyer lorsqu'elles en ont besoin, en leur communiquant une information
Chapitre 11
I Reconnaitre Ie rendement au travail
privilegiee, en leur demandant leur avis avant de prendre une ~eci~ion ou en leur deIeguant La presentation d'un dossier a I'occasion d'une reumon. 11.3.3
les symboles honorifiques L'excellence peut aussi etre reconnue au moyen de symboles comme des trophees, des prix, des titres et des diplomes honorifiques ou des plaques murales. Par exemple, certaines Hrmes commanditent en nombre limite une serie d'ceuvres d'art (telles que des sculptures ou des peintures) afin de recon naitre les realisations exceptionnelles de certains employes. Des stylos ou des voyages peuvent aussi etre accordes aux employes meritants. En vertu de son programme de Reconnaissance de la contribution significative a sa mission, les employes du College de Rosemont sont invites asoumettre aun comite de selection la candidature d'un de leurs pairs, selon une serie de criteres tou chant entre autres a I'initiative, a l'innovation, a la qualite du service ou a la productivite (Larivee, 2001).
11.3.4 La visibilite II est egalement possible de recourir a la reconnaissance sociale pour recom penser les employes dont Ie rendement s'est avere exceptionnel. La regIe selon laquelle on doit recompenser en public et critiquer en prive est generalement appropriee. II s'agit alors pour Ie superviseur de feIiciter un employe devant ses pairs, de souligner la contribution particuliere d'un ou de plusieurs em ployes a un dossier ou a un projet au cours d'une reunion avec la direction, de joindre au dossier des employes une lettre reconnaissant leurs realisations, de communiquer celles-ci dans Ie journal et sur les tableaux .d'affichage de l'entreprise, de demander aux meilleurs employes de faire un expose sur les trucs du metier a l'intention de leurs collegues, et ainsi de suite. La Federation des caisses populaires Desjardins de Montreal et de l'Ouest-du-Quebec gere un concours intitule «Les Abeilles d'or» afin de reconnaitre les caisses qui enre gistrent Ie meilleur rendement dans divers secteurs (Gagnon et St-Onge, 1995). Les decisions du jury de ce concours sont devoilees a l'occasion d'un gala suivant l'assemblee generale annuelle de la Federation. Dne caisse popu laire qui gagne une Abeille d'or acquiert de la visibilite et de la notoriete a l'in terieur et a l'exterieur du Mouvement Desjardins.
11.3.5 Les biens, les services et les primes ponctuelles On peut egalement reconnaitre Ie rendement en accordant des objets, des ser vices, des montants forfaitaires ou des conges supplementaires. Ces recom penses peuvent prendre la forme de cadeaux (chandails, montres, bijoux, etc.), de prise en charge de frais (repas, voyages, sorties, etc.), de billets pour des evenements culturels ou sportifs, d'abonnements a des dubs de condi tionnement physique, de prix en argent, de coupons lies a un catalogue de prix, etc. On peut aussi offrir une place de stationnement ou encore per mettre l'acces a un materiel de bureau privilegi{~. Certaines Hrmes rendent
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I Les defis des conditiom de travail
admiS~i?les a une :oterie les employes qui ont ete assidus au travail pendant une penode d~nnee. On trouve egalement dans certaines entreprises un pro gra~~e de ~~lmes de reconnaissance immediate (spot bonus) qUi alloue aux supeneurs hierarchiques un budget leur permettant de reconnaitre sur Ie-champ Ies performances des employes soit en especes (une somme de 25 $ ou de 100$) ou sous une forme materielle (des billets pour des evenements sportifs ou culturels, des bons de repas dans certains restaurants, etc.). Par ailleurs, il existe des regimes de primes qualifiees de «stimulation» a !'inten tion notamment du personnel de vente et des conjoints. Ces primes peuvent inclure toutes sortes de biens de consommation, des voyages, des services, etc. Le marche pour ces primes de stimulation est assez bien organise et il existe une association, la Canadian Premiums and Incentives Association dont Ie siege social est a Toronto, qUi publie regulierement des renseignements au sujet de ses activites et de ses membres. Certaines organisations expriment leur reconnaissance en remettant divers cadeaux ou en organisant des soirees a I'occasion de Noel ou lors des vacances annueUes. Par exemple, chez Cascades, et sans que cela fasse l'objet d'une politique ecrite, les employes sont recompenses a chaque tranche de cinq ans d'anciennete. On leur remet alors soit un tableau, une bouteille de porto, un sac en cuir, une bague, une montre au meme un voyage (Larivee, 2001). Chez Birks, on souligne souvent la performance des meilleurs vendeurs lars d'un gala ou d'une reunion annuelle des ventes en leur accordant une montre dont Ie prix vade de 500 $ a 7000 $ (Vallerand, 2003). Toutefois, au-dela d'un certain montant et a moins que cela ne soit requis par Ie travail, de tels biens, services, voyages ou primes constituent un avantage imposable. 11.3.6 Les conditions de travail On peut temoigner de la reconnaissance a l'egard des employes en modifiant leurs conditions de travail. Ainsi, une responsabilite speciale ou supplemen taire peut etre octroyee aux employes meritants. Par exemple, les cadres dont les employes sont les plus assidus peuvent etre nommes a un comite ch~rge de se pencher sur Ie probleme de l'absenteisme dans l'entreprise. On pe~t ega lement offrir des conditions de travail privilegiees aux meilleurs employes: un horaire flexible, Ie choix du quart de travail, l'acces a un cours de formation, Ie droit a une journee de conge supplementaire, etc. Toutes les approches rela tives a la reorganisation du travail-l'enrichissement des taches, la rotation de postes, les groupes autonomes, les cercles de qualite, etc. peuvent aussi etre considerees. Pensons egalement aux diverses activites sociales que l'on peut proposer aux employes (pique-nique, soiree du temps des fetes, etc.) pour rendre compte de leur valeur.
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Reconna/tre Ie rendement au travail
Les atouts des recompense,s non pecuniaires et Jes conditions de leuT succes ~,~~ .di~~~~e~' f~r~~s' d~' ~~~o'~~~~~~s non pecuniaires possed.ent plusieurs atouts si on les compare aux regimes de remuneration vanable (voir Ie tableau 11.3). QUELQUES ATOUTS DES RECOMPENSES NON PEcUNIAIRES
Source: S. St-Onge, "La remuneration: <;a ne change pas Ie monde, sauf que ... ". Les Cahiers des le,¥ons inaugurales, Montreal, HEC Montreal, 25 avril 2003. p. 18.
Toutefois, les modes de recompenses non pecuniaires doivent etre geres adequatement pour s'averer efficaces, sinon ils risquent d'etre inutiles, voire nuisibles. Le tableau 11.4 resume les principales conditions de succes de ce mode de reconnaissance. Un des principaux problemes que comporte la reconnaissance non pecuniaire est qu'on ne croit pas toujours qu'elle ait de l'importance aux yeux des employes ou que leur gestion doive etre rigoureuse et formelle. Pour etre benefiques, les recompenses doivent etre considerees comme des outils d'information (communication des normes a atteindre) et de retroaction (sur Ie rendement passe) qUi contribuent a augmenter !'im pression de contrOle et de competence des employes, un prealable a leur moti vation. En contexte organisationnel, les regimes de recompenses peuvent etre un vehicule permettant de communiquer les comportements, les resultats et les valeurs qUi sont dorenavant essentiels a la reussite, au renforcement des strategies d'affaires et a la realisation d'un changement strategique.
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Partie IV \ les defis des conditions de travail
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RECOMMANOATIONS POUR OPTIMISER lES RETOMBEES DES PRATIQUES DE RECONNAISSANCE
Source: S. St-Onge, «La remuneration: \a ne change pas Ie monde, sauf que... ", Les Cahias des ierons inauguraies, Montreal, HEC Montreal, 2S avril 2003, p. 19.
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La remuneration basee sur 1e rendement individue1 Le rendement au travail des employes peut egalement Hre reconnu de fa~on pecuniaire. Selon Theriault et St-Onge (2000), les divers modes de remunera tion dite variable ou basee sur Ie rendement peuvent etre classifies seion Ie niveau de rendement cibIe, soit Ie rendement individuel, Ie rendement de l'equipe ou Ie rendement collectif, tel qu'illustre au tableau 11.S. Les formules de remuneration variable reconnaissant Ie rendement indivi duel sont les formules les plus frequemment implantees. Nous faisons ici reference a la remuneration dite au merite, aux primes, aux commissions et a la remuneration a la piece.
Chapitre 11
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Reconnaltre Ie rendement au travail
LES DIFFERENTS REGIMES DE REMUNERATION VARIABLE
11.5.1 Le sa1aire au merite Au Canada, Ie salaire au merite represente Ie regIme de remuneration des cadres qui, depuis longtemps, s'avere Ie plus populaire. Cette forme de remuneration consiste a tenir compte du rendement individuel des employes dans la determination de leur augmentation (generalement annuelle) de salaire. Quoique Ie salaire au merite soH tres repandu, les resultats des recherches effectuees sur leur efficacite sont peu encourageants (Heneman, 1992; St-Onge, 1998). Un des probH~mes qu'entraine Ia remuneration au merite vient du fait qu'elle reconnalt Ie rendement annuel des employes au moyen d'une augmentation de salaire, c'est-a-dire d'une recompense a vie (une annuite). Aux fins du contrOle des couts, la reconnaissance du rende ment au moyen d'augmentations de salaire n'est pas avantageuse parce que cela augmente la masse salariale a long terme et, consequemment, les couts des avantages sociaux. Par ailleurs, des grilles d'augmentations de saiaire, comme celle qui est presentee au tableau 11.6, sont souvent con~ues par les professionnels des ressources humaines. Afin de contraler les couts des salaires des employes, les augmentations de salaire tiennent compte non seulement du rendement des employes, mais aussi de leur position sur leur echelle salariale. Ainsi, a l'interieur d'une meme echelle salariale et pour une meme cote de rendement, plus Ie salaire actuel d'un employe est €leve, moins son augmentation de salaire sera grande. Le fait de considerer Ia position sur l'echelle salariale reduit Ie lien entre Ie rende ment et l'augmentation de salaire, ce qUi attenue Ie caractere motivant de cette derniere. De plus, l'aspect permanent et cumulatif des augmentations salariales empeche d'etablir un lien rendement-recompense etroit, et ce, surtout en ce qUi a trait aux employes ayant un tres bon rendement, c'est-a-dire ceux que,
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EXEMPLE DE MATRICE DE SALAIRE AU MERITE PRESCRIVANT l'AUGMENTATION DE SALAIRE EN FONCTION DU RENDEMENT ET DE LA POSITION SUR l'EcHELLE SALARIALE
* Ratio comparatif = (salaire de l'employe!salaire correspondant au point milieu de son echelle) x 100.
justement, on voudrait recompenser 1 En pratique, l'ecart est souvent faible (environ 2 %) entre les augmentations de salaire qui sont accordees aux plus meritants et celles qui sont versees aux moins meritants. En effet, les superviseurs hesitent a accorder des augmentations de salaire importantes aux employes exceptionnels parce qu'elles amenent trop vite ces derniers au sommet de leur echelle salariale, ce qUi ne laisse plus de marge de manceuvre pour les motiver dans I'avenir. En outre, les superviseurs se sentent souvent obliges d'accorder des hausses de salaire equivalentes a celle du coO.t de la vie a tous les employes dont Ie rendement est satisfaisant; il reste alors peu de fonds pour recom penser les employes exceptionnels. Consequemment, l'augmentation de salaire devient vite un droit acquis aux yeux des employes. Par ailleurs, la marge discretionnaire trop mince dont disposent Ies cadres pour differencier les augmentations de salaire ne les incite pas a accorder beaucoup d'attention au suivi du rendement des employes, car la difference de rendement revet alors un caractere plus symbolique que reel; d'autre part, cet ecart ne motive pas les employes aaccroitre leur rendement, car Ie jeu n'en vaut pas la chandelle. Vne difference d'augmentation de salaire de 1,5 % sur un salaire impose a 50% permet seulement de se payer un cafe de plus par jour dans Ie distributeur automatique ... Finalement, la remuneration au merite repose souvent sur une evaluation du rendement faite par les cadres a partir de criteres inadequats (non pertinents, subjectifs, inconnus, etc.) ou par des evaluateurs incompetents (mecon naissance du travail, absence de suivi, etc.). En principe, tout Ie monde est
d'accord avec l'idee que les augmentations de salaire doivent etre fonction du rendement individuel. En pratique, cependant, tout Ie monde estime que son rendement est mal evalue.
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Reconnaitre Ie rendement au travail
11.5.2 les primes La formule des primes reconnait le rendement des employ~s ~u moyen de montants forfaitaires verses en sus du salain:~. En raison des hmltes que com porte la formule du salaire au merite, plusieurs entreprises recourent aux primes pour recompenser Ie rendement individueL Par exemple, une enquete de la firme-conseil Hewitt & Associes (1996) indique que IS % des 132 entre prises canadiennes participantes ont HabU un tel regime pour au moins une categorie de personne1. En effet, les superviseurs ont une plus grande marge de manceuvre pour accorder aux employes exceptionnels des primes d'une valeur significative puisqu'elles ne s'inb~grent pas dans leur salaire. La formule des primes permet aussi d'etablir un lien rendement-recompense plus etroit sachant que leur montant n'est, du moins officiellement, fonction que du rendement des em ployes: on ne tient pas compte de leur position sur l'echelle salariale comme c'est Ie cas de la formule du salaire au merite. Si on les compare aux augmen tations de salaire, les primes peuvent egalement permettre de contrOler davantage les couts de main-d'ceuvre: comme elles sont versees en sus des salaires, elIes n'augmentent pas les couts des avantages sociaux. Enfin, etant donne que les montants des primes accordees aux sub or donnes peuvent etre plus eleves et plus differencies, les superviseurs subiront une plus forte pression pour mieux gerer et mieux evaluer Ie rendement de leurs subordonnes. En effet, dans la mesure ou un cadre accorde a un subor donne une prime de SOOO $ et a un autre une prime de 2000 $, il doit etre en mesure d'expliquer cette difference. Toutefois, quoique la reconnaissance du rendement individuel au moyen d'augmentations de salaire soit critiquee depuis longtemps, son usage reste tres repandu, et peu d'entreprises optent pour Ie recours aUK primes, dont l'efficacite potentielle est pourtant jugee plus eIevee. II faut croire que derriere ce changement de forme de recompense se cache un changement important de valeurs. Theoriser sur d'eventuels changements en matiere de remunera tion est beaucoup plus facile qu'implanter ces changements. La maniere dont une organisation a traditionnellement gere son systeme de remuneration constitue une contrainte, puisqu'elle explique en partie les valeurs actuelles des employes. Ainsi, meme s'H peut s'averer preferable pour la direction d'une organisation de reconnaitre Ie rendement individuel a l'aide de primes plut6t qu'a l'aide d'augmentations de salaire, cela peut se reveler irrealiste ou inac ceptable pour les subordonnes et me me pour les superieurs hierarchiques. La plupart des superieurs hierarchiques choisissent la formule des augmentations de salaire parce qU'eUe leur permet de dire qu'ils respectent Ie principe de reconnaissance du rendement sans faire trop de vagues ou, si l'on aime mieux, sans faire de differences notables entre les diverses recompenses! Du point de vue des subordonnes, la fomlUle des primes est plus risquee, et il n'est pas certain qu'ils desirent qu'on recompense Ie rendement en differen ciant davantage les montants accordes aux uns et aux autres.
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Partie IV
I Les detis des conditions de travail En pratique, plusieurs organisations optent pour une approche mixte ou hybrid~. Par exem~lle, \e ren~~me~t des employes est IeCOnnu. -pat u.n~ au.g mentatIOn de salane tant qu lIs n ont pas atteint Ie sommet de leur echelle salariale; apres qu'ils ont atteint ce sommet, leur rendement est reconnu par une prime.
11.5.3 Les commissions Les commissions constituent la principale forme de remuneration variable pour Ie personnel des ventes. Elles correspondent it un pourcentage des ventes (en dollars ou en unites) qui peut etre constant, croissant ou decroissant selon Ie montant des ventes obtenu. Certains representants commerciaux sont exclusivement payes it commission alors que d'autres sont en partie payes it commission. En general, on suggere de reduire la portion variable (les com missions) de la remuneration du personnel des ventes dans les cas suivants. • Lorsque les ventes sont plutot faciles it realiserj cela ressemble alors a une prise de commandes etant donne que la clientele est stable et fidele. • Lorsque les comportements des vendeurs doivent respecter certaines normes; Ie montant des ventes est important, mais ce n'est pas Ie seul crihhe recherche. • Lorsque Ies ventes sont souvent realisees en equipe; elIes resultent alors d'un effort colIectif qu'il est difficile de departager entre plusieurs personnes.
Chapitre 11
11.5.4 La remuneration
I Reconnaltre Ie rendement au travail
ala piece
Cette forme de remuneration incitative regroupe tous les regimes de remune ration qUi payent les employes en fonction du nombre d'unites produites. Ce mode de remuneration, probablement Ie plus ancien et Ie plus radical, pre sente Ie lien Ie plus €troit entre Ie rendement et la recompense. Aujourd'hui, ce type de regimes est peu frequent puisqu'il exige que Ies employes aient une maitrise elevee de la rapidite et de la qualite du travail, ce qui est de plus en plus rare. II convenait davantage a l'industrie manufacturiere traditionnelle qu'au secteur des services contemporain, lequel est marque par des change ments technologiques frequents, par une priorite accordee a la satisfaction des clients et a la qualite, et par l'interdependance des taches des employes. Finalement, les syndicats s'opposent a ce mode de remuneration en raison de la difficulte a €tablir et a maintenir Ie standard de production equitable, soit la remuneration par piece produite. lls ont souvent peur que les employeurs n'utilisent ce mode de remuneration dans Ie seul but d'exploiter les employes. Ils craignent aussi que Ia remuneration a la piece ne nuise a la sante et a la securite du travail et que Ies employes ne perdent leur emploi si la producti vite augmente.
11.5.5 Les conditions de succes de la remuneration basee sur le rendement individuel Comme les recherches l'ont montre a ce jour (voir la section 11.1.2), Ia remu neration variable visant arecompenser Ie rendement individuel n'est pas effi cace en soi; cela depend de la fa~on de gerer ces regimes. Le tableau 11.7 resume les principales regles a respecter pour optimiser l'efficacite des regimes de remuneration basee sur Ie rendement individuel. Un des problemes qu'occasionne couramment ce type de regimes est qu'il a tendance a cibler un ou quelques indicateurs de rendement, ce qUi incite les employes a satisfaire aces indicateurs (comme Ie montant des ventes ou Ie nombre d'unites ven dues) au detriment d'autres indicateurs (comme Ie developpement de la clien tele ou Ie service apres-vente) aussi importants, sinon plus, pour Ia reussite de l'entreprise a long tenne. Par ailleurs, il est important d'insister sur Ie role primordial que jouent les cadres; ceux-ci doivent en effet relever Ie rendement individuel, Ie suivre, Ie mesurer et Ie recompenser. Ils doivent s'approprier Ie regime de remuneration variable et accepter d'assumer leurs responsabilites a cet egard. Pour optimiser leurs competences et leur motivation, ils doivent participer a la conception, a l'implantation et a la gestion du programme. Un tel mode de remuneration exige beau coup d'eux. Si les cadres n'agissent pas de maniere a appuyer les programmes de remuneration et de gestion du rendement, ces derniers ne seront pas efficaces. En fait, les cadres hierarchiques sont les premiers responsables de l'effica cite des programmes de recompenses. Si les professionnels des res sources humaines sont charges d'eIaborer, d'implanter et de contrOler ces pro grammes, les cadres hierarchiques doivent, pour leur part, repondre de leur
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail efficacite, de leur integrite et de leur credibilite. En consequence, Us doivent s'engager it toutes les etapes de la mise SUt pied des programmes de recom penses et etre tenus pour responsables de leur succes. A l'egard d'un prix d'ex cellence, que ce so it dans les domaines de la recherche, de l'enseignement, des affaires, de l'architecture, etc., cela signifie que les cadres superieurs doivent proposer des candidats. Si l'on se contente de demander aux candidats et a leurs collegues de soumettre des candidatures, cela ne garantira nullement que les meilleurs seront de la partie. Dans ces conditions, les laureats, soit ceux qui agiront comme modeles, pourraient ne pas etre les meilleurs eh~ ments. Pour la credibilite meme du regime, II faut s'assurer que les personnes qUi ont accompli les realisations les plus remarquables figureront parmi les candidats au concours. Quant aux specialistes des res sources humaines, ils sont responsables de de l'implantation et du respect des politiques des programmes de remuneration variable; ils doivent en outre conseiller les cadres a ce sujet. l'E~laboration,
1.7
lES PRINCIPAlES REGlES lIEES A l'OPTIMISATION DE l'EFFICACITE D'UN REGIME DE REMUNERATION BASEE SUR lE RENDEMENT INDIVIDUEl -
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• Le rendement indivjduel des titulaires des emplois est reperabreefsac~ntri button estmesmable. .' ntlUalxes des empiois sont autonomes. et la realisation des n::~'l,,,,,,,,",, ac'perla,. ,,"C".U'Ltiu,ULIO;' des emplois ont '(me marge discl'etionnaire,
de leur. travail.
./LaeoQperation entre employes n'est pas primordiale et la cOlr:nt:!m:ition.~~ntt,e eu:xpeut aVoir de sains effets sur Ie rendement. • culture et les valeurs de gestion appuient ]es re,lm;aUonsijnq:lVil:1~j~Ut~S~ • rendement individuel varie substantiellementd'un "'1""""'''' • Les titulaires des emplois admissibles au regime rel=l!!!~.ellterJlt rentle} pour l'organisation . •' .Les salaires de base accordes aux employes admisSibles reFotnpenses 3C(;ordees $Ont significative s P~/'''='O N,""i" competents et motives en ce qUI
re<::onnalss.m(:e du rendement.
L~nrl(;Ucateulrs de rendement consideres ne sOQt
.U:l;9~"~' equilibres (parexemple, quantite.
cour:t terme versus long terme) et
• Le de remuneration variable doit etre simple, facUe a<:Qi~tJ'l'etla.I:e les employes et per\=ll comme etant gete {iemaruereequitabJe, Source: Adapte de S. St-Onge, "La remuneration: <;:a ne change pas Ie monde, sauf que ... », Les Cahiers des ierOrlS inauguraies, MontreaL HEC Montreal, 2S avril 2003, p. 26.
Chapitre 11
I Reconnaitre Ie rendement au travail
aD ...................................................... La remuneration basee sur le rendement de l'equipe
Pour accroitre la flexibilite de leur main-d'reuvre, de plus en plus d'entreprises nord-americaines adoptent un mode d'organisation du travail base sur des equipes ou des groupes de travail. Ce courant appuie l'implantation de regimes de remuneration qUi favorisent la cooperation et la collaboration, et l'abandon de regimes reconnaissant Ie rendement individuel qui entrainent la competition et decouragent la cooperation entre les employes. Dans la plu part des cas, l'argent est reparti egalement parmi les membres de l'equipe, en fonction de la realisation de resultats. Dne telle recompense peut etre octroyee sous une forme pecuniaire (une prime) ou sous une forme non pecuniaire (des objets ou des journees de conge). Les regimes de remuneration de groupe ont plus de chances d'etre efficaces lorsqu'on veut favoriser la cohesion entre les membres d'une equipe et lorsque Ie rendement au travail est surtout une question d'effort collectif, ou l'apport respect if de chaque personne est difficile it mesurer. Par ailleurs, il faut reconnaitre que de tels regimes ont parfois si bien reussi it accroitre 1a cohesion it l'interieur d'un groupe qu'on a du 1es abandonner parce que cette cohesion se faisait au detriment de la cohesion entre les diHerents groupes, un autre prealable au succes global de l'entreprise. On peut songer it la compe tition entre les employes qUi travaillent it differents quarts de travail, ou it 1a non-collaboration entre les vendeurs de differentes succursales d'un com merce de detail lorsque la prime depend du chiffre d'affaires du commerce ou ils travaillent. Finalement, si la pression des collegues peut inciter les employes difficiles ou les employes qui ont un faible rendement a s'ameliorer, elle peut egalement inciter les meilleurs employes it reduire leurs efforts et leur cadence.
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La remuneration basee sur le rendement collectif Les regimes collectifs de remuneration variable remunerent tous les employes d'une organisation ou une proportion importante d'entre eux en fonction du rendement de l'entreprise ou d'une unite administrative. On peut separer en deux groupes les regimes de remuneration basee sur Ie rendement collectif: 1es regimes it court terme et les regimes it long terme. Le tableau 11.8 de la page 495 etablit une distinction entre les principaux regimes collectifs de remuneration variable. Les regimes collectifs it court terme prennent en consideration Ie rende ment annuel de l'organisation, alors que les regimes collectifs it long terme tiennent compte des indicateurs de rendement a long terme de l'organisation. Les principaux regimes collectifs de remuneration variable it court terme con sistent dans les regimes de participation aux benefices, les regimes de partage des gains de productivite et les regimes de partage du sucd~s. D'autre part, les regimes collectifs a long terme tiennent compte du ren dement organisationnel sur une periode de plus d'une annee. Ces regimes
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I
Les dEWs des conditions de travail
sont Ie plus souvent destines aux cadres superieurs. Toutefois, une minorite croissante d'organisations etend la participation ces regimes l'ensemble des employes. II peut s'agir de regimes bases sur Ie rendement boursier (comme l'octroi ou I'achat d'actions et l'option d'achat d'actions) ou de regimes bases sur Ie rendement comptable (comme Ies droits a Ia plus-value des actions, Ies actions simulees et les unites de rendement). Ces regimes visent a inciter les detenteurs d'actions a se preoccuper davantage du rende ment a long terme de l'organisation, ou a adopter davantage Ie point de vue des actionnaires. On souhaite ainsi que les detenteurs d'actions soient moins tentes de prendre des decisions d'affaires qui ameliorent Ie rendement a court terme au detriment du rendement a long terme, comme une diminution des efforts de recherche et developpement, une baisse de la qualite des produits, une reduction des investissements dans les equipements ou la manipulation des resultats comptables.
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11.7.1 La participation aux benefices Le regime de participation aux benefices consiste dans Ie partage d'une por tion des benefices de l'organisation ou d'une unite de l'organisation avec l'ensemble des employes ou une categorie de ceux-ci sous la forme d'un mon tant forfaitaire (et parfois d'actions) immediatement ou a terme. Ce type de regime collectif, qui est Ie plus ancien, reste encore aujourd'hui celui que les entreprises adoptent Ie plus frequemment. Sa popularite repose surtout sur Ie fait que Ie benefice correspond a un indicateur de rendement organisationnel important, facile a communiquer aux employes et mesurable tant dans l'or ganisation entit'.'re que dans ses divisions. La princlpale falblesse de ce regime tient au fait qu'il est difficile pour les employes de voir un lien entre leurs efforts (ou leur rendement) et les profits de l'entreprise, puisque de nombreux autres facteurs qu'i1s maitrisent tres peu influencent les benefices.
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I
Reconnaltre Ie rendement au travail
LES CARACTERISTIQUES DES PRINCIPAUX REGIMES COLLECTIFS DE REMUNERATION VARIABLE
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Les defis des conditions de travail
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ReconnaTtre Ie rendement au travail
Source: Adapte de R. Theriault et S. St-Onge, Gestion de Ia remuneration, Boucherville, GaHan
Morin Editeur, 2000, p. 572-578.
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I Les defis des conditions de travail
11.7.2 Le partage des gains de productivite En vertu du regime de partage des gains de productivite, on distribue une por tion des gains de productivite de l'organisation ou d'une unite de l'organisa tion parmi les employes (souvent les employes de production) sous la forme d'un montant forfaitaire une ou plusieurs fois pendant l'annee. Ce type de regime collectif est apparu dans les annees 1930. Par ailleurs, il doit etre implante dans un milieu ou l'on a compile des donnees sur la productivite durant une periode d'environ cinq ans afin de pouvoir etablir un standard de productivite qui permettra de calculer Ie gain realise. On trouve ce type de regime surtout dans les entreprises manufacturieres; certaines experiences sont aussi realisees dans Ie secteur public. Comparativement au regime de participation aux benefices, Ie regime de partage des gains de productivite permet aux employes qui en profitent de percevoir un lien plus etroit entre leurs efforts et Ie rendement attendu, puisqu'il concerne les employes d'une unite d'affaires seulement et cible leurs efforts sur une mesure du rendement - la productivite qu'ils controlent davantage que les benefices. Quelle que soit la formule de partage des gains de productivite retenue, les gains de productivite sont generalement fonction des couts de main-d'ceuvre. Ce type de regime exige des dirigeants d'entreprise qu'ils acceptent de verser des primes lorsqu'il y a gain de productivite, peu importe }'ampleur des benefices (inexistants, faibles ou negatifs). Selon la formule de gain retenue, ils peuvent etre amenes a verser des primes lorsque l'amelioration de la pro ductivite provient d'une amelioration des equipements et non d'une amelio ration de la contribution des employes. Par ailleurs, les recommandations des employes admissibles a ce regime ont souvent trait a des modifications en ce qui touche a l'organisation du travail. Aussi, il faut que la direction soit prete a faire face a la pression en cette matiere. En outre, au til des annees, les em ployes peuvent se montrer plus sceptiques envers Ie regime s/il devient de plus en plus difficile d'ameliorer la productivite. De plus, lorsqu'une entreprise comporte plusieurs unites d'affaires et qU'elle dispose d'un regime distinct par unite, il peut etre frustrant pour les employes de constater que les primes des
Chapitre 11
Reconnaltre Ie ren dement au traval'I A
employes sont plus elevees au sein des unites dont la productivite est la plus faible et OU ies possibilites de l'ameIiorer sont plus grandes.
l1.7.3le paTtage du succes Le regime de partage du succes ou de la realisation des objectifs d'affaires (goal or success sharing plan) permet de partager une portion du gain de rendement de l'organisation ou d'une unite, mesure selon la realisation d'objectifs d'af faires, avec l'ensemble du personnel ou une categorie de celui-ci en versant en sus du salaire un montant forfaitaire. Les objectifs d'affaires sont fixes seion les points de vue financier, operationnel et comportementaL On parle, par exemple, de reduction des couts, des accidents ou de l'absenteisme, ou encore de l'amelioration de la qualite, du service ou de la satisfaction des clients. De plus en plus d'organisations adoptent un regime de partage du succes parce qu'i! comble les limites des regimes de participation aux benefices et de partage des gains de productivite. En effet, n tient compte d'autres facteurs que les benefices ou les gains de productivite, comme la qualite, la reduction des accidents du travail ou la satisfaction des clients, facteurs que les employes controlent davantage et qui ne comportent pas necessairement de «gains» a court terme. Pour etre efficace, Ie regime de partage du succes necessite un processus de communication des objectifs d'affaires et des resultats tout au long de l'annee. II faut aussi que les objectifs fixes soient juges realistes par les employes. Ce regime est souvent adopte par les entreprises qui veulent se doter d'un regime incitatif appuyant une culture d'amelioration continue: au til des annees, la nature et la difficulte des indicateurs de rendement evoluent selon les resultats de l'organisation et Ia pression de la concurrence. Dans ce contexte, la remuneration incitative devient un levier strategique.
11.7.4 l'octToi ou l'achat d'actions Dans un regime d'octroi d'actions, on donne des actions ou on les octroie a un prix inferieur it leur valeur sur Ie marche boursier. Dans la plupart des cas, les personnes ne peuvent vendre pendant une peri ode donnee (habituelle ment quatre ou cinq ans) les actions octroyees, mais eUes peuvent recevoir des dividendes et exercer leur droit de vote it partir du moment de I'octroi des actions. Par ailleurs, un regime d'achat d'actions permet d'acheter des actions d'une entreprise au cours d'une courte peri ode (de un a deux mois) a un cer tain prix (fixe ou variable) ou, encore, selon un mode de paiement particulier (fixe ou variable).
11.7.5 l'option d'achat d'adions Un regime d'option d'achat d'actions accorde Ie droit (1'option) d'acheter des actions d'une entreprise, a un prix fixe d'avance (prix de levee) durant une periode donnee (generalement de 5 it 10 ans). La recompense potentieUe des detenteurs d'une option correspond alors it la difference entre la valeur des actions sur Ie marche boursier au moment ou ils decident de lever leur option
e··
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Partie IV
I
Les defis des conditions de travail
et ~e prix de. levee de le~r option. Au moment de la levee de l'option, Ies actIOns acqUlses peuvent etre conservees ou revendues immediatement.
Pour les cadres superieurs, Ie regime d'option d'achat d'actions represente l'incitation a long terme la plus utilisee en Amerique du Nord, mais aussi la plus contestee (St-Onge et autres, 1996; 1999). Selon les detenseurs de ce mode d'incitation, les options auraient les principaux avantages suivants: elles ameliorent Ie rendement a long terme des entreprises tout en soutenant les inten~ts des actionnaires, elles aident a recruter et a retenir des personnes, elles minimisent les pertes et maximisent Ie potentiel de gain des detenteurs d'une option, et elles offrent une remuneration avantageuse sur Ie plan fiscal. Les detracteurs de ce mode de remuneration variable estiment que les options n'ameIiorent pas Ie rendement a long terme des entreprises, qu'elles s'ap puient sur une mesure inadequate du rendement, qu'elles diluent Ies avoirs des actionnaires et qu'elles augmentent Ia remuneration de maniere inacceptable. Plusieurs petites entreprises dans Ie secteur de la haute techno}ogie offrent des options a l'ensemble de leur personnel parce qu'elles ne sont pas en mesure de leur verser une remuneration concurrentielle. La perspective de faire de l'argent avec ces options, si les actions de l'entreprise com mencent a se negocier sur Ie marche boursier ou si elles prennent beaucoup de valeur, retient les employes dans l'entreprise.
11.7.6 L'efficacite des regimes bases sur le rendement collectif Comparativement aux regimes de remuneration du rendement individuel et du rendement de n~quipe, les regimes de remuneration du rendement collec tif ont l'inconvenient de rMuire Ie lien entre l'effort individuel et la realisa tion du rendement attendu (quant aux profits, aux gains de productivite, ala
Chapitre 11 \ Reconnaitre Ie rendement au travail
valeur des actions, etc.), qUi constitue un prealable a la motivation a ameIiorer son rendement. On constate egalement Ie probleme des employes paresseux ou parasites (free riders), ou qui reduisent leurs efforts au travail tout en profi tant de ceux de leurs collegues. Enfin, la plupart des regimes bases sur Ie ren dement collectif se fondent sur une formule de partage des resultats qui doit evoluer mais qu'il est fastidieux de modifier parce que les employes se mon trent sceptiques a l'egard de ces changements. Dne recension des recherches (St-Onge, 2003 i Theriault et St-Onge, 2000) indique que l'efficacite des divers regimes collectifs de remuneration variable s'avere une question de foi, de volonte et de moyens. En effet, les preuves empiriques confirmant une relation positive entre differents regimes collectifs de remuneration et diverses mesures de rendement organisationnel doivent etre interpretees avec reserve, compte tenu des faits suivants. • Les etudes sont peu nombreuses et comportent des limites mHhodologiques. • Les resuitats des etudes divergent quant a I'importance du lien positif entre la presence ou I'adoption d'un regime de remuneration du rendement collectif et Ie rendement des organisations. • Certaines etudes permettent de constater qu'un regime de remuneration du rendement collectif peut n'avoir aucun impact ou avoir un impact negatif sur Ie rendement des organisations. Les histoires de cas publiees a propos des regimes collectifs de remunera tion rap portent beaucoup plus souvent les succes que les echecs. Toutefois, I'experience montre que dans plusieurs entreprises, ces regimes ont He abandonnes. La meilleure garantie du succes d'un regime collectif de remuneration variable consiste a veiller a respecter une condition importante: il doit exister dans l'entreprise une culture de participation, de communication et d'infor mation. En effet, de tels regimes requierent des dirigeants d'entreprise un engagement financier (Ie partage des benefices ainsi que l'absorption des couts de gestion des regimes) de meme qu'un changement d'attitude it l'egard de la relation cadres-employes, caracterisee par l'echange de renseignements et l'engagement des employes. En theorie, la plupart des regimes collectifs n'exigent pas un style de gestion participatif, mais en pratique, Ie climat de partenariat, qUi se distingue par l'echange d'information et l'engagement des employes, semblerait Hre l'une des conditions de leur succes, voire la princi pale. De fait, Ie partage des benefices n'est pas un geste ponctuel et annueI; c'est plutot un processus continu de communication et d'education auquella direction doit consacrer des efforts constants, du temps et de l'argent. Par ailleurs, aussi efficace soit-il, un regime collectif est toujours susceptible de devenir inefficace et doit, en consequence, faire l'objet d'un audit continuo
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Les defis des conditions de travail
Les syndicats et la remuneration variable
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La presence ou l'absence d'un syndicat constitue un facteur important lors qu'i1 est question de la remuneration variable. Au Canada, bon nombre d'en quetes montrent que la presence d'un syndicat rMuit fortement la probabilite qu'i1 y ait un regime collectif de participation aux benefices (Betcherman et autres, 1994; McMullen, Leckie et Caron, 1993; Wagar et Long, 1995). Toute fOis, on ne sait pas si cette situation est due au fait que les syndicats s'oppo sent it ces regimes ou plutot au fait que les employeurs des entreprises syndiquees ne desirent pas mettre en place de tels regimes. D'apres Heneman et autres (1997), pour qU'un regime collectif de remuneration obtienne I' acceptation du syndicat, les gestionnaires et les dirigeants doivent: • se montrer ouverts aux nouvelles formes de remuneration comme celles qui sont basees sur les competences; • presenter Ie regime collectif de remuneration comme un moyen de repondre a la concurrence etrangere ou nationale plutot que comme un moyen d'etabHr un avantage concurrentieI; • vouloir partager ouvertement avec Ie syndicat toute I'information concernant la position concurrentielle de I'entreprise; • vouloir reduire Ie nombre de jugements discretionnaires .des cadres a I'egard de l'evaluation du rendement individuel et de Ia determination des recompenses en privilegiant des criteres objectifs et equitabIes; • s'appuyer sur des standards de rendement objectifs, bases sur Ies resultats passes de I'entreprise; • solliciter la participation des representants des employes a certains processus de prise de decision traditionnellement reserves aux cadres (comme la planification strategique); • etablir un climat de confiance entre les dirigeants et Ie syndicat; • offrir des salaires et des modes de resolution de griefs equitables; • reunir des budgets de recompenses importants; • accorder des recompenses egales aux employes et non des recompenses fondees sur leur rendement individuel.
Chapitre 11
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Reconna'itre Ie rendement au travail
Conclusion Les regimes de reconnaissance ou de recompenses - qu'ils soient de nature pecuniaire ou non pecuniaire - ne sont pas efficaces en soi i ils peuvent etre autant des catalyseurs que des barrieres au developpement. En somme, l'ap proche axee sur les recompenses risque d'engendrer des problemes importants si sa gestion n'est pas adequate. La reconnaissance du rendement, par quelque forme de recompense que ce soit, doit respecter plusieurs conditions pour s'averer efficace. Le tableau 11.9 presente les principales conditions de succes des regimes de reconnaissance au de remuneration variable.
SYNTHESE DES PRINCIPALES CONDITIONS DE SUCcES DES REGIMES DE RECONNAISSANCE OU DE REMUNERATION VARIABLE
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Les defis des conditions de travail
Les dirigeants d'entreprise doivent considerer dans leur ensemble les diverses formes de recompenses presentes dans leur entreprise et les gerer de fa~on integree et coherente. II est d'ailleurs preferable dans bien des cas d'im planter un ensemble de programmes de recompenses de maniere a contre balancer les limites de chacun des programmes. Les recompenses sont des outils de communication qui doivent vehiculer les messages desires, c'est a-dire ceux qui aident l'entreprise a atteindre ses objectifs. II ne s'agit pas d'imiter les autres organisations, mais de se demander: «Que voulons-nous reconnaitre? La creativite? l'esprit d'equipe? la competitivite? la croissance continue? la productivite a court terme?» Cette reflexion, qui s'avere essen tielle, permet de determiner les formes de reconnaissance Ies plus efficaces et de diminuer Ie risque de recompenser des comportements negatifs et indesi rabIes plutot que des comportements que Fon souhaite encourager. Finalement, la recompense n'est pas suffisante a elle seule pour changer la culture d'entreprise et resoudre un grave probleme de productivite. C'est un ensemble integre de modes de reconnaissance (soit des promotions, des primes, une formation, une plus grande autonomie, la participation, etc.) qui pousse les employes a s'engager dans leur travail, a se surpasser et a s'inte resser a leur entreprise. L'entreprise doit egalement faire une analyse de sa propre situation afin d'etablir les formes de reconnaissance prioritaires. Avoir la rapidite avec laquelle certaines organisations sont pretes a revoir leur sys teme de remuneration et leur peu d'empressement a reviser simultanement leurs autres modes de reconnaissance (comme les conditions de travail et la visibilite), force est de constater que, pour plusieurs dirigeants et cadres, Ie plus penible n'est pas de verser de I'argent mais de devoir abandonner des pri vileges, d'en partager d'autres ou encore d'en accorder de nouveaux. De plus, pour que les recompenses soient efficaces, il faut que les employes aient une certaine securite d'emploi et un salaire decent. Along terme, on ne peut s'at tendre a ce que les employes se surpassent s'ils sont sous-payes ou s'ils vivent avec la peur constante de perdre leur emploi.
. (J) de revision
o ment Le fait de recompenser Ie rende a un effet posit if sur Ie rende «
e
ment des employes.» Commentez et nuancez cette affirmation. Resumez Ie message des theories tant du domaine de la psychologie que de celui de l'economie qui sont souvent avancees pour com menter l'effet probable des recom penses sur les comportements et Ie rendement au travail des employes.
• A travers
les annees, bien des cher cheurs se sont penches sur les effets des recompenses sur Ie rendement et les comportements individuels. Plus recemment, plusieurs cher cheurs ont analyse l'ensemble de leurs resultats de maniere qualita tive ou quantitative (meta-analyses). Comment pourriez-vous resumer leurs conclusions quant a I'efficacite des recompenses?
Chapitre. 11 \ ReconnoItre Ie rendement au travail
les inconvenients lies au fait de pro ceder au moyen d'augmentations de salaire ou de primes?
. , En plus de la remuneration, de quelles ta(:ons l'entreprise peut elle reconnaitre Ie rendement des
employes? " «En dehors de I'argent obtenu en vertu des regimes de remuneration variable, les recompenses que les employes peuvent recevoir ne sont que des gadgets inutiles et ineffi caces.» Commentez cette opinion.
I) Quelles sont les
principales condi tions de succes des regimes de remu neration visant a remunerer le rendement individuel?
~ Quels
types de regimes de remune ration les dirigeants peuvent-ils implanter pour reconnaitre Ie ren dement collectif tant a court terme qu'a long terme? De£inissez ces divers regimes et discutez de leurs avant ages et de leurs inconvenients respectifs.
o Quels sont les atouts et les princi
pales conditions de succes des regimes de reconnaissance non pecuniaire qui visent a reconnaitre la contribution au travail ?
o Quels types de regimes de remune ration les dirigeants peuvent-ils implanter pour reconnaitre Ie ren dement individuel? De£inissez ces divers regimes et discutez de leurs avantages et de leurs inconvenients respectifs.
(8 La direction de votre entreprise songe a reconnaitre de maniere offi cielle Ie rendement individuel de ses cadres. Quels sont les avantages et
G) QueUes sont les principales condi tions de succes des regimes de remuneration visant a remunerer Ie rendement collectif?
f!
L'efficacite des regimes de recon naissance ou de remuneration va riable est fonction de la fa\=on dont ils sont geres. QueUes sont les prin cipales conditions de sued's de ces regimes?
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Partie IV
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les defis des conditions de travail
. . . . . . . ... .. . ... . . .. . .. . . . .. . . . ... . . . .. . . ...... .. .. ~
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I Les defis des conditions de travail
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Chapitre 11
I ReconnaTtre Ie rendement au travail
Les pratiques de reconnaissance de l'usine IBM (Bromont)2
L'
usine IBM a Bromont, au Quebec, inauguree en 1972, compte aujourd'hui plus de 2500 employes. Au cours des annees, les activites de l'usine ont evo lue: ses operations sont passees de l'assemblage de machines a ecrire a la fabrication et a la verification de pro duits de haute technologie. Au cours de cette periode, l'usine de Bromont a maintenu son objectif de fabriquer des produits de meilleure qualite a un prix de revient moins eleve que toute autre usine IBM ou encore que tout autre con current dans Ie monde. Aujourd'hui, l'usine se specialise dans la mise sous boitier et la verifica tion de composantes electroniques qUi entrent dans la fabrication de toute la gamme de produits IBM et d'autres fabricants. En fait, elle figure parmi les leaders mondiaux en technologie de montage sous boitier. Depuis Fouver ture de l'usine, IBM y a investi plus de 850 millions de dollars pour integrer les plus recentes technologies et faire en sorte qu'elle reste concurrentielle. Au jourd'hui, l'usine de Bromont genere des revenus annuels d'exportation de plus de trois milliards de dollars. Les pratiques de reconnaissance
A l'usine IBM de Bromont, les pratiques de reconnaissance font partie integrante d'un processus de gestion strategique des ressources humaines qui vise trois objectifs:
• premierement, attirer une main d'reuvre concurrentielle en recrutant les candidats les plus qualifies; • deuxiemement, maintenir une main d'reuvre competente en encou rageant Ie developpement de competences qUi sont importantes pour Ie succes de l'entreprise; • troisiemement, garder une main d'reuvre motivee en reconnaissant et en recompensant adequatement les realisations, en accordant une remu neration juste et equitable et en offrant un milieu de travail favorable au bien-etre des employes. Les pratiques de reconnaissance sont egalement gerees comme faisant partie de la remuneration globale des em ployes ou l'on retrouve d'autres composantes comme Ie salaire, la remuneration variable et les avantages sociaux. Environ 1 % des couts de remuneration sont lies aux pratiques de reconnaissance. Les pratiques de reconnaissance ont He mises en place dans Ie but de recon naitre les champions et les realisations en equipe. Le processus de reconnais sance repose sur des pratiques corpora tives et locales de reconnaissance (ces deux categories sont decrites ci-apres). Dans les deux cas, l'octroi des recom penses doit etre suggere par Ie superieur immediat de l'employe.
2. Ce cas, qui a ete redige avec la collaboration d'Isabelle Aubin, a ete publie dans la Gazette du travail, vol. 3, nO 3, 2000, p. 80-82. Par ailleurs, Jean-Marc Prevost, directeur ressources humaines et commu nications, et Jean-Guy Fournier, directeur communications, IBM Canada-Bromont, ont collabore a la redaction de ce cas.
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail
Comme l'entreprise valorise la trans parence et la visibilite des pratiques de reconnaissance, les employes peuvent lire, sur Ie reseau intranet, des sections du manuel de direction donnant de I'in formation sur Ie sujet (par exemple, criteres et moment de I'octroi). Les laureat des recompenses sont aussi communiques dans Ie journal de l'entreprise. En sus des recompenses, les dirigeants encouragent leur personnel d'encadrement a temoigner leur recon naissance de maniere informelle aux membres de leur equipe.
Le programme de recompenses Le programme de recompenses est gere dans toutes les divisions d'IBM. Ce pro gramme comporte six categories de re compenses, chacune d'entre elles ayant un volet pecunia ire (voir Ie tableau 1). Avant d'octroyer une recompense a un employe dans Ie cadre de ce pro gramme, Ie superieur immectiat doit justifier sa recommandation a son supe rieur hierarchique. La demande est en suite analysee et revisee par Ie directeur des ressources humaines qUi s'assure de la coherence des decisions d'octrois a travers I'usine. Le vice-president de l'usine doit egalement approuver les octrois de recompenses dont Ie montant est important. Un plan previsionnel de la distri bution des recompenses octroyees en vertu du programme formel est eIabore chaque annee. Ce plan consiste a don ner une approximation du nombre de recompenses qui devraient etre allouees par service selon leur nombre d'employes.
Le programme local (informel) de recompenses C' est apres avoir consult€> les directeurs sur les formes de reconnaissance suscep tibles d'interesser les employes qu'un programme local de reconnaissance, propre a l'usine, a ete cree il y a trois ans. Ce programme octroie annuelIe ment un budget aux directeurs pour qu'ils reconnaissent rapidement la con tribution particuliere des employes. La valeur des recompenses varie entre 20 $ et 100 $; on y retrouve des cheques cadeaux pour aller au restaurant, au Cinema, au golf ou aux quilles. Egale ment, on offre des voyages en avion, des forfaits detente dans des hotels, des forfaits pour la famille (zoo, centre fau nique), etc. Cette liste de reconnais sance est revisee chaque annee selon la retroaction des employes que Yon recueille de fa~on informelle. La forme de recompense octroyee est decidee par Ie superieur immectiat quoiqu'il soit, bien entendu, en fonction de l'ampleur de la contribution de l'employe.
Le sulvi des pratiques de reconnaissance Au fil des annees, la rigueur de la ges tion des pratiques de reconnaissance s'est accrue, et ce, principalement a l'egard du suivi. Tous les mois, Ie direc teur des ressources humaines et la direc tion revisent l'ensemble des processus de gestion des ressources humaines, dont les pratiques de reconnaissance. On s'appuie alors principalement sur Ie plan de gestion previsionnel1e d'octroi des recompenses formelles pour s'as surer de l'equite de leur distribution au sein de l'usine. On realise aussi des
Chapitre 11
PROGRAMME DE RECOMPENSES CHEZ IBM
I ReconnaTtre Ie rendement au travail
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Partie IV
I
Les delis des conditions de travail
rencontres trimestrielles avec les direc
teurs en chef et les directeurs d'usine
afin de s'assurer de l'uniformite de la gestion des reconnaissances dans les di vers services de l'usine. De plus, certains sondages aupres des employes permet tent de connaitre leurs opinions a l'egard des diverses activites de gestion des ressources humaines, dont la ges Hon des recompenses. La reconnaissance, un ingredient essentiel it la reussite L'usine de Bromont jouit d'une reputa tion d'excellence au sein de la firme IBM ainsi que dans la communaute d'af faires tant au Canada qu'en Amerique du Nord. L'efficacite de sa gestion des res sources humaines, et plus precise ment la mise en Q'uvre de son pro gramme de recompenses et de ses pratiques de reconnaissance, n'est pas etrangere aux succes obtenus depuis de nombreuses annees.
o tuelles QueUes caracteristiques contex
favorisent l'adoption et Ie succes des pratiques de reconnais sance a cette usine ? Expliquez votre reponse. •
QueUes pratiques de reconnaissance adoptees a l'usine IBM de Bromont peuvent etre facilement envisagees et adoptees par d'autres entreprises? QueUes pratiques de reconnaissance peuvent etre plus difficilement en visagees et adoptees par d'autres entreprises? Pourquoi?
La remuneration des conseillers en mode c'hez Beau Mec3
F
ondee en 1983, Beau Mec est une des organisations les plus dynamiques du Quebec dans Ie secteur de la vente au detail de vetements. Des sa creation, son proprietaire, Lawrence Roughman, a choisi Ie vetement sport chic pour hommes comme seul et unique produit. Aujourd'hui, Beau Mec domine dans ce creneau; elle a 50 boutiques reparties
au Quebec, un chiffre d'affaires de 40 millions de dollars et un peu plus de 500 employes. Entreprise solide au po tentiel de croissance evident, Beau Mec doit son succes a sa strategie d'affaires ciblee ainsi qu'a sa capacite a innover et a s'adapter aux besoins changeants de sa clientele.
3. Ce cas a ete redige par Mario Giroux, sous la direction de Sylvie St-Onge. Reproduit avec la permission des HEC Montreal.
Chapitre 11
La direction de Beau Mec a toujours accorde a la gestion des ressources hu maines une attention particum~re. Elle est convaincue que la satisfaction du client passe par la satisfaction des em ployes. D'ailleurs, les vendeurs sont appeles «conseillers en mode }', ce qUi reflt~te bien leur role au sein de l'entre prise. Comme ils sont en contact avec les clients, iIs ont la responsabilite de cultiver une relation de confiance afin de les fideliser et de les amener a se sen tir chez eux. Le personnel se partage les activites liees a l'exploitation d'une boutique: de la reception des marchan dises jusqu'a l'entretien menager des Heux de travail. Les conseillers en mode ne sont pas syndiques. La majorite d'entre eux travaillent a temps partiel, 20 % du personnel est feminin et la moyenne d'age est de 30 ans. Vne bou tique type comprend un directeur, un conseiller en mode qUi agit au besoin comme assistant du directeur et de cinq a sept conseillers. Contrairement a une pratique cou rante dans ce secteur, la famille Roughman a toujours cru que la meil leure fa\,on d'etablir un climat d'en traide et de collaboration parmi son personnel de vente consiste a donner un salaire de base con venable, sans commission, qui varie selon l'ancien nete et Ie poste. Des avantages sociaux superieurs a ce qui s'offre sur Ie marche et un escompte sur Ia marchandise s'ajoutent au salaire de base. Jusque-Ia, ces pratiques semblaient repondre aux besoins des conseillers en mode et de la direction. Au cours de la derniere annee, Lawrence Roughman est decede. Son fils Charles, jusqu'aloIs vice-president aux achats, a pris la releve. Charles, qui a etudi(~ dans une grande universite americaine, croit a l'impact positif de la remuneration variable individuelle sur
I ReconnaTtre Ie rendement au travail
1a motivation et le Iendement des em ployes au travail. Au cours des derni~re~ annees, il a d'ailleurs recommande a plusieurs reprises a son pere de modifier Ie mode de remuneration des conseillers en mode. Certes, les resultats financiers de l'entreprise etaient tres bons, mais ils ne lui paraissaient pas optimaux. D'apres lui, les conseillers ne se preoc cupaient pas assez du volume des ventes realisees par leur boutique.
A peine trois mois apres son acces sion a la presidence de l'entreprise, Charles Roughman informe les direc teurs des succursales des nouvelles poli tiques de remuneration des conseillers en mode. Au cours des prochaines semaines, Ie salaire de base sera gra duellement ramene a environ 30 % de ce qu'il etait et un regime de remunera tion a la commission sera mis en place. II incombe au directeur de chaque succursale d'expliquer aux conseillers en mode cette nouvelle formule de remuneration. Les resultats des ventes realisees au cours des quatre mois suivants sont encourageants. Le volume des ventes a augmente de 10%. Quant au salaire moyen des conseillers, il a crU de 2 %. Charles est satisfait: les ventes et la re muneration des employes augmentent. Que demander de plus? Comme tous les six mois, la direc tion de Beau Mec rencontre les direc teurs de succursales dans un hotel de Montreal. A l'ordre du jour, il y a une discussion sur les incidences du nou veau mode de remuneration. Plusieurs problemes sont souleves. Derriere des chiffres de ventes interessants se ca chent certains problemes. D'une part, l'atmosphere de travail a change dans les boutiques. Plutot que
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail
de coHaborer entre eux, les conseillers en mode se disputent de plus en plus les bons clients et negligent les autres. On s'accuse mutuellement de «voler» des clients. Par ailleurs, les conseillers de boutiques differentes s'aident de moins en moins afin d'offrir un bon service aux clients (que ce soit par l'envoi de vetements, par Ie fait d'adresser des clients a une autre succursale, et ainsi de suite). De plus, les conseillers en mode ont commence a negliger Ies activites qui n'augmentent pas directement leurs chiffres de ventes, comme l'entretien, l'etiquetage ou la reception des mar chandises. Par ailleurs, les conseillers ayant plus d'anciennete tiennent de plus en plus a travailler lorsque la fre quentation est la plus forte, Iaissant Ies periodes creuses aux nouveaux em ployes. Les conseillers atemps plein exi gent des directeurs qu'ils limitent Ie recours a des employes a temps partie I pour qu'ainsi, leurs ventes augmentent. Certains conseillers qUi etaient grande ment apprecies par la clientele ont quitte l'entreprise pour aller travailler chez des concurrents. D'autre part, Ies plaintes des clients se multiplient. Certains clients criti quent Ia pression exercee par Ies con seillers en mode. D'autres disent avoir He negliges au profit de clients plus « payants}). Le service apres-vente s' avere de moins en moins une preoccupation pour Ies conseillers, qui font peu
d'efforts pour accroitre la clientele. On constate meme la perte de clients regu liers qui avaient J'habitude de venir acheter des accessoires ou des vetements complementaires (des chaussettes, des sous-vetements, des cravates, etc.). Charles Roughman ecoute les remar ques et Ies constatations des directeurs de succursales. Selon lui, il s'agit sure ment d'une peri ode d'adaptation qui devrait tirer a sa fin. II demande aux directeurs de reunir leurs conseillers en mode pour leur expliquer J'importance de continuer a travailler ensemble comme une grande equipe et d'offrir un bon service a tous les clients, gros ou petits.
o Pourquoi Ie nouveau mode de remuneration n'a-t-il pas donne Ies resultats escomptes? Expliquez ses effets sur les attitudes et Ies com portements des employes.
8 Queis
criteres ou principes faut-il prendre en consideration dans Ie choix, l'implantation et la gestion d'un nouveau mode de remunera tion du personnel de vente?
. , Pour atteindre les resultats escomp tes, queUes autres possibilites au raient pu etre envisagees en matiere de remuneration des employes? Justifiez votre reponse.
Chapitre 11
I
Reconnallre Ie rendement au travail
La difficile implantation d'un regime de remuneration variable Paul Cardinal, comptable agree, oc· cupe Ie poste de contr6leur au sein d'une PME dans Ie secteur manufac· turier. Bien que l'entreprise ou il travaille reste rentable, ses benefices et sa part de marche diminuent. Pour redresser la situation, il s'avere important de main tenir des normes de qualite elevees, de reduire Ie nombre de pieces defectueuses et de travailler plus efficacement pour ameliorer la productivite. L'entreprise compte 200 employes de production non syndiques, tous payes a l'heure. Les relations du travail sont bonnes et l'entreprise s'appuie sur cet atout pour retenir ses employes de production, etant donne que les salaires qu'elle leur offre sont inferieurs a ceux qu'accordent les entreprises syndiquees de l'industrie. En retlechissant aux moyens d'ame liorer Ie rendement de I'organisation, M. Cardinal songe a revoir Ie mode actuel de remuneration des employes, lequel ne tient pas compte de la pro· ductivite. Selon lui, si une partie de la remuneration des employes de pro· duction etait Bee a leur rendement indivlduel, cela augmenterait leur motivation au travaiL Par exemple, il jongle avec l'idee d'instaurer un regime de remuneration variable ou les em ployes recevraient 80% de leur salaire de base actuel, Ie reste etant fonction du nombre d'unites produites au-dela d'un certain seuiL Seion ses estimations ini tiales, un tel mode de remuneration pourrait permettre aux employes d'ac croitre leur remuneration de 30 %.
Avant d'aller de l'avant, Paul Cardinal decide de reunir les contre maitres pour obtenir leur avis sur ce pro jet. Plusieurs contremaitres se disent favorables a l'idee. Certains s'interro gent sur les normes de rendement: qUi decidera des seuils et quels seront ces seuils? Qui revisera ces seuils? D'autres contremaitres se demandent quel sera l'effet de ce changement sur la coope ration entre les travailleurs ou sur la qualite de leur travail. Selon un contre maitre, un tel regime de remuneration risque de nuire au climat de travail: les employes remettront en question les normes et hesiteront a atteindre ceUes ci de peur qu'on ne les eleve des qu'un seuil sera atteint. Un autre contremaitre rencherit: «J'ai deja travaille pour une entreprise qUi avait un tel mode de remuneration variable: Ies employes cherchaient a dejouer Ie systeme, allant jusqu'a cacher des pieces finies qu'ils recuperaient quand un membre du groupe etait en retard.» Un autre cadre relate Ie cas d'une entreprise concur rente syndiquee qui verse de meilleurs sal aires et qui a mis en place un regime de partage des gains de productivite: i1 semble d'ailleurs qu'ils doivent consa crer beau coup de temps aux reunions et a la gestion de ce regime. Un contremaitre evoque aussi Ie cas d'une division des centres de service a l'auto mobiliste de Sears, aux Btats-Unis, qui, dans Ie but d'augmenter sa part de marche, a etabli un systeme de remu neration incitative basee sur Ie montant de Ia facturation de chaque unite d'exploitation. La-dessus, les journaux
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Les defis des conditions de travail
ont rapporte que cette recompense a tellement motive les employes a maxi miser Ie montant de leurs services que la firme a He reconnue coupable d'avoir facture a ses clients des reparations et des pieces fictives totalisant plusieurs millions de dollars. Sur un autre ton, des cadres se demandent si Ie fait de chan ger Ie mode de remuneration necessi tera plus de travail ou de reunions pour les contremaitres, qui sont deja fort occupes et peu formes a cet egard. Certains contremaitres se demandent pourquoi ils ne seraient pas egalement admissibles a une remuneration va riable, la difference de sal aires entre les employes et les contremaitres faisant deja l'objet de tant de plaintes. La reu nion se poursuit, chacun racontant des cas ou posant des questions auxquelles les reponses ne sont pas evidentes. « Manifestement, se dit M. Cardinal, la remuneration est une affaire plus com plexe que je ne Ie pensais! »
o tremaitres Commentez les reactions des con a l'egard d'un eventuel regime de remuneration variable.
f) Quels facteurs do it-on prendre en consideration pour juger de la perti nence d'un regime de remuneration variable et de ses conditions de succes?
Apres I'etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Comprendre la nature des avantages sociaux comme composante de la remuneration globale. • Decrire les differents regimes d'avantages sociaux offerts par 1'Etat et par l'employeur. • Presenter les enjeux actuels de la gestion des avantages sociaux au sein des entreprises. • Reconnaitre les pratiques visant a favoriser l'equilibre travail-famille comme une composante introduite de plus en plus sou vent dans les avantages sociaux. • Comprendre la fonction des programmes d'aide aux employes. • Implanter des pratiques de gestion susceptibles de favoriser une saine gestion des avantages sociaux selon la situation de l'organisation.
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Partie IV
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Les defis des conditions de travail
Les regimes personnalises sont populaires1
C
onsidertis comme un puissant incitatif pour attirer et fideJiser de bons candidats, les regimes collectifs personnalises ne ces sent de gagner en popularite. "Les employes desirent qu'on leur offre des options pour choisir leur programme d'avantages sociaux et les employeurs cana diens font tout pour rt!pondre a ce besoin }), sou/igne Lucie Paquet, conseillere en avan tages sociaux chez Hewitt. Avec un regime d'avantages sociaux per sonnalise, les employes peuvent choisir Ie type et Ie niveau de protection qui convien nent Ie mieux a leurs besoins. Par exempIe, pour Le plan dentaire, L'employe peut opter pour Ie remboursement des soins de base (examen, plombage, etc.) ou choisir une couverture plus large qui inclut des traite ments d'orthodontie, explique N[Yfle Paquet. Generalement, les travailleurs jeunes et celibataires optent pour un niveau de pro tection minimal alors que les employes maries ayant des enfants choisissent une protedion plus complete. Controle des coOts
Les raisons qui poussent une entreprise a mettre en place un regime personnalise sont nombreuses. Repondre aux besoins des em ployes en est une. « Les entreprises se servent aussi de ce moyen pour attirer de nouveaux employes ou garder les gens en place, ex p/ique i\,pne Paquet. (.:a fait partie du porte feuille global offert aux employes qUi comprend La remumiration, Ie regime d'as surance, les vacances, etc. Par ailleurs, offrir un regime personnalise permet de (reiner la hausse du cmU des avantages sociaux. })
1.
Selon ;\1me Paquet, les petites entreprises ont une marge de manmuvre plus restreinte. En general, Ies produits sont plus standards et plus structures, mais ceia ne Ies empeche pas d'offrir certaines options. Les soins medicaux et dentaires demeu rent Ies avantages offerts les plus populaires dans Ie cadre d'un regime personnalise. Selon l'etude de Hewitt, les employes profi tent de la possibilite de pouvoir changer leurs options d'avantages sociaux et ef{ec tuent au moins une modification a leur regime personnel lors de chaque periode de renouvellement. L'administration des regimes personna lises ou flexibles est plus complexe qu 'un regime traditionnel dans lequel l'employe n'a pas de choix a faire. Les employeurs peuvent l'administrer ou en confier la tikhe a un intermediaire en assurance ou a un consultant. Selon Marie-Josee Le Blanc, chef de l'unite d'assurances collectives chez Mercer, Consultation en ressources humaines, Ie cout d'une assurance collective depend de la generosite de l'employeur. « Le cout moyen des avantages sociaux peut varier entre 4 % et 8 % de la masse salariale. Par employe, la valeur moyenne est de 3000 $ a 4000 $ par annee, precise t-eIle. Une entreprise peut decider d'offrir un salaire au-dessus de la moyenne de son industrie et partager Ie coUt du programme d'assurance avec ses employes. D'autres pref(:rent offrir un salaire se situant sur la mediane et proposer un programme complet d'assurance dont Us assument fa totalite des couts. »
R.c. Simard, «Les regimes personnalises sont popu]aires », Les ilffaires, cahier special, 10 mai 2003, p. 1S.
Chapitre 12
De nouveaux produits
Les employeurs doivent faire face a de nouvelles demandes, a de nouveaux pro duits et a l'augmentation des couts des services protessionnels. Cela a entraine l'emergence des comptes de gestton de sante. Ce nouveau phenomime est offert en plus du regime d'assurance. «C'est comme un compte de banque dans lequell'employeur depose une allocation
I
Optimiser les avantages sociaux
au debut de l'annee, explique Nf"Ie Le Blanc. L'employe peut choistr de rembourser des depenses medicales admissibles avec ce compte selon ses besoins. Si la limite du regime est de 200 $ pour des lunettes et que celles-ci coutent 500 $, l'employe peut pulser les 300 $ non rembourses par son regime d'assurance. Chaque employe pren dra ce dont il a besoin. »
Les avantages sociaux constituent une composante importante de la remu neration globale (voir Ie chapitre 10). De fa~on generale, ils representent une part significative des couts salariaux et s'ajoutent a ceux-ci. Par exempIe, Ie total des couts des avantages sociaux et du temps chome dans l'adminis tration publique quebecoise s'elevait a 34,4 % du salaire en 2002 (Institut de la statistique du Quebec, 2002). On prevoit d'ailleurs, avec l'escalade des couts des assurances medicaments et invalidite, une augmentation de ces couts de l'ordre de 15 % par annee associee aux regimes d'assurances collectives (Picard, 2003). Le vieillissement de la population et la montee en fleche de l'invalidite pour des causes psychologiques seraient a l'origine de cette aug mentation des couts. Les avantages sociaux correspondent ainsi a une pro portion importante des couts de main-d'reuvre qui peuvent influencer la competitivite des organisations. Tant pour l'employe, dont la qualite de vie depend en partie des avantages sociaux, que pour les organisations, qui trouvent dans les avantages sociaux des facteurs de competitivite, ou pour l'Etat, qui vise habituellement a assurer une protection minimale, les avant ages sociaux sont une source de question nement qui interpelle les valeurs individuelles et collectives dans les orga nisations et dans Ia societe. Le present chapitre aborde plusieurs enjeux qui concement l'offre d'avantages sociaux. II definit d'abord les avantages sociaux, puis il explique leur utilite. II decrit ensuite les divers regimes d'avantages sociaux et traite finalement des regimes flexibles et des ctefis que pose la gestion des avantages sociaux .
. . Definition des avantages sociaux . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ~
Les employes sont remuneres de diverses fa~ons pour leur prestation de tra vail. Leur remuneration dite globale comprend Ie salaire de base, les avantages sociaux et la remuneration variable. Dans ce chapitre, nous explorons Ies
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Partie IV
I Les defis des conditions de travail avantages sociaux, que l'on associe ordinairement a. la remuneration indirecte, c'est-a.-dire it la remuneration qui n'est pas versee en especes aux employes. Les avantages sociaux comprennent les regimes prives et publics de retraite et d'assurances qui vi sent a. proteger les employes contre divers aleas de la vie, comme la mortalite, l'invalidite et la maladie. De meme, Us comprennent les gratifications ou les avantages complementaires que rec;:oit l'employe en relation avec Ie poste qu'il occupe, comme une automobile, une place de stationnement, des frais de repas ou des frais de scolarite rembourses. Les avantages sociaux incluent aussi les jours de vacances et de conge que les employeurs offrent a leur personnel en vertu de la Loi sur les normes du tra vail - mais ils vont tres souvent au-dela des exigences de cette loL Parmi les jours de vacances ou de conge, il y ales jours feries, les conges pour des raisons person nelles, les conges de maladie, de maternite, de paternite, de deces et de mariage.
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Les avantages sociaux et le rendement
. . . ... .. . . . . .. . . . .. .. . . . . . . .. . .. .. . . . . . Les avantages sociaux offerts par les employeurs procurent aux employes une protection contre les aleas de la vie - une meilleure protection que les regimes publics -, des avantages fiscaux, etc. Mais qu'en est-il de l'utilite des avantages sociaux du pOint de vue de l'employeur? II faut reconnaitre que les avantages sociaux representent une part importante des couts de main-d'reuvre de l'employeur. Cependant, sur Ia base de plusieurs temoignages, il appert que Ies avantages sociaux peuvent egalement aider l'organisation a devenir un employeur de choix, faciliter la conservation du personnel, renforcer la culture d'entreprise, favoriser des gains de productivite et ameliorer Ie service a. la clientele. ~
12.2.1 Devenir un employeuT de choix Selon un sondage effectue par une association americaine en 2001, 79 % des personnes considerent que les avantages sociaux sont tres importants dans leur decision d'accepter ou de refuser un emploi (EBRI, 2002). Les avantages sociaux representent donc une consideration importante dans toute activite de recrutement (Martocchio, 2000). Acet egard, certaines organisations jouis sent d'une reputation enviable d'employeur de choix qui leur confere un avantage au point de vue du recrutement. Des magazines comme Fortune et Les Affaires publient annuellement un classement des entreprises qUi offrent des milieux de travail ou il fait bon travailler. Qu'ont ces entreprises en com mun? Bien sur, des avantages sociaux qui facilitent la vie de leurs employes. On y trouve une grande souplesse qui permet au personnel de composer avec les eXigences de l'equilibre travail-fa mille. Par exemple, ces employeurs offrent des canges pour permettre a chaque employe d'avoir une activite benevole, de repondre a. une urgence familiale ou de s'occuper d'affaires personnelles. On observe egalement dans ces entreprises Ie financement
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I
Optimiser les avantages sociaux
d'activites physiques et sportives, des conges sabbatiques, des garderies sub ventionnees en milieu de travail, un service de nettoyage a sec, une cafeteria gastronomique et d'autres avantages superieurs aux normes de l'industrie. Il faut toutefois reconnaitre que les avantages sociaux disponib1es chez ces emp10yeurs de choix sont souvent trop couteux pour 1a petite ou moyenne entreprise (PME). Mais cela ne veut pas dire que la PME ne puisse pas, grace a son offre d'avantages sociaux, retirer un avantage au point de vue du recrute ment. Une simple couverture de base peut representer un avantage appre ciable dans l'entreprtse de plus petite taille.
12.2.2 Faciliter la conservation du personnel Le salaire et les bonis sont quelques-unes des formes de remuneration a ca ractere pecuniaire qUi traduisent une relation d'echange economique entre l'employe et l'employeur. Les avantages sociaux sont d'une tout autre nature. On propose des avant ages sociaux pour repondre aux besoins particuliers des employes (comme les conges parentaux) et leur valeur est davantage sym bolique que pecuniaire. L'employeur qUi offre des avantages sociaux a ses employes transmet Ie message suivant lequel i1 se soucie de leur bien-etre. II en resulte souvent des gestes de reciprocite de la part de l'employe qUi temoignent de son appreciation. La relation d'emploi entre l'employe et son organisation devient alors davantage axee sur l'engagement affectif et la reciprocite que sur la transaction financH~re (Baron et Kreps, 1999). De far;on concrete, cela revient a dire que Ies avantages sociaux peuvent servir a fideliser les ressources humaines et a favoriser leur conservation dans I' entreprise.
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I Les defis des conditions de travail
12.2.3 Renforcer la culture d'entreprise Chaque organisation a sa propre culture ou «personnalite» qui la distingue des autres organisations, et les avantages sociaux peuvent de toute evidence transmettre des messages qui sont susceptibles de renforcer cette culture (Dolan et Garcia, 1999). Par exemple, la firme Cascades mise, entre autres, sur un regime de vacances avantageux et des bourses d'etudes pour les enfants d'employes pour temoigner de sa culture fondee sur des valeurs de qualite de la vie et de responsabilite sociale. De meme, pour exprimer les valeurs de sa mission consistant a fabriquer, a distribuer et a vendre les produits laitiers de la meilleure qualite, la firme Ben et Jerry's inclut a l'intention de chaque employe dans ses avantages sociaux trois pintes de creme glad~e, de yogourt glace et de sorbet chaque jour! La fac;on de gerer les avantages sociaux peut aussi renforcer la culture d'entreprise. Ainsi, l'entreprise qui adopte des regimes d'avantages sociaux flexibles transmet un message sur l'importance qu'elle accorde it l'autonomie des personnes. En outre, l'entreprise qUi favorise la participation des employes it la determination des avantages sociaux temoigne d'une culture de gestion participative.
12.2.4 Favoriser des gains de productivite Le lien entre les avantages sociaux offerts aux employes et leur productivite ne fait pas l'objet d'un large consensus. On peut toutefois envisager des situa tions ou les avantages sociaux favorisent des gains de productivite. Une garderie en milieu de travail, par exemple, pourrait reduire les absences des employes causees par l'utilisation de services de garde moins accessibles et peut-Hre moins fiables. La couverture de certains traitements medicaux pourrait avoir pour effet de reduire les soucis financiers et ainsi d'accroltre la concentration au travail. La formule de conges de maladie adoptee peut in fluencer la frequence des absences des employes. Par ailleurs, certains avan tages sociaux conferent un statut qui peut susciter la motivation. Ainsi, un privilege concernant Ie stationnement ou un abonnement it un club de golf prestigieux peuvent Hre une source de fierte et de motivation au travail.
Chapitre 12
Optimiser les avantages sociaux
12.2.S AmelioTeT le seTvice ala clientele Les recherches empiriques et les experiences d~ di~erses organis.ations con vergent actuellement sur Ie constat selon lequel 11 eXIst: une relat!On .entre la disposition affective des employes au service a la clientele et les reactlOns des clients. Lorsque les employes affectes au service a la clientele demontrent leur bonne humeur par une attitude positive, des salutations courtoises, des sourires, etc., les clients sont plus satisfaits (Tsai et Huang, 2002). Autrement dit, plus la satisfaction au travail des personnes qUi s'occupent du service it la clientele est elevee, plus la satisfaction de la clientele servie sera grande. n devient de plus en plus evident que les employes satisfaits rendent les clients satisfaits. On sait aussi que les avantages sociaux representent un levier permettant d'ameIiorer la satisfaction au travail des employes Gudge, 1993). C'est donc dire que Ie fait d'investir dans les avantages sociaux revient a in vestir dans l'ameIioration du service a la clientele. Est-il possible de penser qu'un employe insatisfait qui ne re~oit aucune consideration de Ia part de son employeur sera porte aaccueillir ses clients avec un sourire ... authentique? En somme, plusieurs facteurs de rendement sont de nature a justifier l'in teret des employeurs pour Ies avantages sociaux et leur saine gestion. Nous pourrions ajouter l'interet non pecuniaire pour Ie bien-etre des employes que certains designent comme une preoccupation plut6t paternaliste.
. , .Les. . regimes d'avantages sociaux offerts par l'Etat . . .. . . . . . .. .. . . . . . .. .. . .. . . . ... .. .. . .. . . . .. .. . "
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Certains avantages sociaux decoulent des regimes administres par l'Etat (voir Ie tableau 12.1), Ces regimes d'avantages sociaux publics et universels assurent une protection minimale aux travailleurs par rapport aux aleas les plus serieux de la vie. II s'agit d'une charge financiere importante qu'assume l'Etat dans plusieurs societes developpees. L'assurance medicaments du Quebec, par exemple, coutait 2,13 milliards de dollars en 2002, et l'on prevoit une croissance annuelle des couts de ce regime public de 15,70/0 jusqu'en 2008.
12.3.1 Les soins hospitalieTs et medicaux Les soins hospitaliers couvrent les frais de sejour en salle et les soins infirmiers dispenses aux patients, l'utilisation d'une salle d'operation, les examens de laboratoire, les medicaments, les services diagnostiques et les soins d'urgence en consultation externe. Les regimes publics d'assurance maladie portent essentiellement sur les services diagnostiques et les soins d'urgence en con sultation externe. L'assurance maladie peut aussi inclure les soins dentaires dispenses aux enfants et les examens de la vue annuels.
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Partie IV \ les detis des conditions de travail
lES PRINCIPAUX REGIMES D'AVANTAGES SOCIAUX PUBLICS
12.3.2 La protect;on du revenu Les regimes publics peuvent aussi inclure l'attribution de prestations en cas de retraite, d'invalidite, de deces et de perte d'emploi. Ainsi, les programmes de revenus de retraite versent des rentes de retraite selon un pourcentage de la moyenne annuelle du revenu gagne. Aussi, en cas de deces, Ies regimes publics prevoient des prestations de deces et une rente de base au conjoint et aux enfants a charge. On a egalement prevu un supplement de revenu garanti qUi accorde des prestations a toute personne de 6S ans et plus qui beneticie de la pension de securite de la vieillesse et dont les res sources financieres n'atteignent pas un certain seuil. L'assurance emploi est un autre regime de protection du revenu qUi prevo it Ie remplacement temporaire du revenu des particuliers entre deux emplois. Notons aussi que les regimes publics d'assu rance automobile accordent des indemnites de remplacement du revenu dans Ie cas d'une invalidite causee par un accident de la route. De plus, la legisla tion sur les accidents du travail (voir Ie chapitre 13) prevoit une indemnisa tion des accidents du travail sans egard a la responsabilite. Entin, l'aide sociale attribue des prestations basees sur la difference existant entre Ies besoins d'une farnille ou d'une personne seule et les revenus dont elle dispose.
12.3.3 Les heures de travaH et le temps chome remunere Les normes minimales de travail prevoient generalement la semaine normale de travail, les repos, la periode annuelle de vacances, les jours feries et la remuneration des heures supplementaires. Les normes minimales precisent
I Optimiser les avantages sociaux
Chapitre 12
que Ie travail effectue au-deli) de 1a semaine nonnale de travail doH etre remu Mentionnons egalement que les normes n conge de maternite et Ie droit a1a salariee d'etre reinstallee dans d nt U ~rue • 'd • son poste avec les avantages dont elle aurait beneficie si elle etalt emeuree au travail. D'autres normes accordent un conge al'occasion de 1a naissance de son enfant ou de l'adoption d'un enfant. En 2001, environ 216000 Canadiens ont prls un conge parental, dont seulement 21 500 hommes. Bref, 1es normes minimaies definissent Ie contenu obligato ire du rapport de travail par l'eta blissement de conditions minimales d'execution du travail (Gagnon, 2003),
nele en heures supplementaires,
. , Les regimes d'avantages sociaux offerts par 1'emp1oyeur •
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Les regimes d'avantages sociaux offerts par l'employeur, ou regimes d'avan tages sociaux prives, procurent des indemnites ou des prestations qUi s'ajoutent de maniere volontaire aux avantages de base offerts par les regimes publics (voir Ie tableau 12.2). Ces avantages font la difference entre les employeurs qUi investissent de fa\=on minimale dans leurs ressources humaines et ceux qui y investissent beaucoup. LES PRINCIPAUX REGIMES D'AVANTAGES SOCIAUX PRIVES
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I Les defis des conditions de travail
12.4.1 Les soins de sante
~n grar:d nombre d'employeurs offrent a leur personnel des regimes de soins
~ s~nte d~n: la protec~ion est plus etendue que ceUe des regimes publics. Amsl, un regIme complementaire de soins hospitaliers permet a l'employe d'obtenir Ie remboursement complet du transport en ambulance une chambre privee ou semi-privee a l'h6pital. Un tel regime d'assurance ~ollec tive couvre ainsi les frais supplementaires lies a l'hospitalisation qui ne sont pas couverts par Ie regime public. Les employes d'une entreprise bene£icient ainsi d'une protection qu'ils ne pourraient s'offrir au me me cout sur une base individuelle. Les regimes complementaires de soins medicaux remboursent generale ment les frais assumes par les employes et les personnes a charge pour: • • • • • • • • •
les soins de sante a l'etranger; les medicaments sur ordonnance i les protheses et d'autres appareils medicaux; Ie materiel de soins optiques ou les soins dentaires requis accident; les soins requis en clinique privee; Ies soins infirmiers dispenses en service prive; la location d'appareils ou d'equipements mecticaux; Ies examens de Iaboratoire; I'appareil de radiodiagnostic (Ie scanner);
ala suite d'un
• etc. On trouve egalement dans les entreprises des ententes qui offrent une couverture des soins d'acuponcture, de psychotherapie, de massotherapie, de naturopathie, de dietetique, etc. On constate d'ailleurs que Ie massage sur chaise en milieu de travail est devenu un avantage offert pour aider les employes a rectuire leur stress. Par exemple, la societe Eddie Bauer propose des massages deux fois par semaine a ses employes stresses. Avec la popularite que connaissent les medecines alternatives, on observe egalement un nombre croissant de regimes qui couvrent les soins de sante de nature plus preventive comme l'acuponcture et la naturopathie. D'autres regimes complementaires de soins de sante induent les medicaments, les soins dentaires et les soins optiques. Parmi ces regimes, la couverture des medicaments represente assure ment Ie plus grand centre de depenses.
12.4.2 Les regimes de prestations d'invaHdite Les regimes de prestations d'invalidite offrent une protection du revenu dans Ie cas d'une invalidite imputable a une maladie ou a un accident. Pour ce qui est de l'invalidite de courte duree, la per sonne peut recevoir son salaire selon Ie regime de conges de maladie ou selon une autre formule. Apres une cer taine periode d'absence (par exempIe, 10 jours ouvrables), si la per sonne n'est
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Optimiser res avantages 50ciaux
toujours pas en mesure de reprendre son travail, elle se tr~uve en situa.tion d'invalidite de courte durce; si cette periode se prolonge, SUIt alors une sItua tion d'invalidite de longue duree. Dans ces differentes situations, 1a p~rsonm~ re<;oit, en vertu de son regime d' assurance invalidite, une prestatlOn qUl represente habituellement de 50 % a 75% de son salaire brut. La problematique de l'epuisement professionnel, ou burnout, n'est pas etrangere a l'augmentation importante des couts des regimes de prestation d'invalidite. Au Quebec, les problemes de sante mentale (Ie stress, l'anxit§te, l'epuisement, la depression, etc.) coutent quelque quatre milliards de dollars annuellement, et Ie nombre de cas augmente constamment (Trudel, 2003).
La description precectente du syndrome du burnout est bien sur queIque peu caricaturaIe, mais elle est destinee a en montrer tous les aspects possibles. Chaque personne etant differente, les reactions seront donc differentes, qu'il s'agisse des symptomes ou de Ia fa<;on d'y faire face. Quoi qu'il en soit, il faut savoir que si ce syndrome ne constitue pas une maladie en tant que teIle, il peut neanmoins conduire Ii une veritable depression et a des pathologies egalement bien reelIes, comme l'infarctus du myocarde ou l'uIcere de l'estomac. Seion Michel Vezina, professeur a l'Universite Laval, de 35% a 40% des problemes de sante mentale seraient attribuables au travail. La surcharge de travail, les relations tendues avec les superieurs, les conflits et les ambigultes
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I les defis des conditions de travail entourant les roles de meme que Ie manque de reconnaissance et d'autono mie ,~an~ la prise de ctec~sion ne sont que quelques-uus des facteurs l' origine de I epUlsemen: ~rofesslOnne.L II ~aut aussi reconnaitre que les personnes qui on! ten~ance a etre perfectlOnmstes et qui sont portees a travai11er sans relache nsquent davantage de sombrer dans l'epuisement.
a
12.4.3 Les regimes d'assurance vie et d'assurance accident L'assurance vie est destinee a couvrir les frais funeraires et a procurer une cer taine securite financiere aux conjoints et aux autres personnes a charge survi vantes. II s'agit d'une des plus vieilles formes d'avantages sociaux qui etaient assumes au XIX e sieele par les fratemites, ou unions, qui y consacraient une petite partie de Ia cotisation syndic ale (Hebert et autres, 2003). L'assurance accident garantit des prestations dans Ie cas ou Ie salade subit une blessure grave ou meurt it la suite d'un accident. Par exemple, si l'employe est victime d'une mort accidentelle ou d'une mutilation, iI peut recevoir (lui ou la personne survivante) une prestation qui represente generalement un pourcentage de son salaire. L'assurance vie pour voyages d'affaires est un cas particulier. Ainsi, Chez IBM, Ie regime d'assurance vie pour voyages d'affaires prevoit des allocations pour I'employe, ou un membre de sa famille, en cas d'accident causant Ia mort, une mutilation, Ia cecite ou la surdite tandis qu'll voyage dans Ie cadre de ses fonctions.
12.4.4 Les regimes de retraite Les regimes de retraite prives a I'intention des employes permettent it ces demiers d'epargner tout en beneticiant d'un abri fiscal et de toucher un revenu regulier it Ia retraite. Avec les regimes de retraite it cotisations
Chapltre 12 ) Optimiser les avantages sociaux
determinees, la cotisation versee est fixe, mais la rente versee est variable,
dependant du rendement de,s placements ,et d'autres fa~eurs. Dans Ie~
a catisations determinees, les employes assument l,e nsque .des re~de ments de la caisse de retraite. Avec les regimes de retraite a prestatlOns deter minees, la rente est plutot fonction d'un montant fixe pour chacune des annees de service ou d'un pourcentage du salaire ou d'une moyenne des salaires d'un certain nombre d'annees. Dans Ies regimes a prestations deter minees, l'employeur assume Ie risque des rendements de la caisse de retraite. Bref, il existe plusieurs formules, et Ie lecteur interesse pourra consulter un ouvrage de reference sur Ie sujet (par exemple, Theriault et St-Onge, 2000).
reghnes
La gestion des regimes de retraite est habituellement assuree par un comite de retraite. Son role consiste a administrer les regimes, a veiller au respect des lois, a preparer les releves personnalises annuels de retraite, a contrOler la ges tion des fonds, a etablir les rapports actuariels, etc. Par ailleurs, au regard de la strategie de l'entreprise, des decisions importantes s'imposent quant au financement des regimes de retraite, a l'age de la retraite et aux avantages offerts au personnel retraite. C'est pourquoi la direction de l'entreprise a interet a se poser les questions suivantes. • La contribution au regime de retraite sera-t-elle assumee par }'employeur seulement ou partagee entre l'employeur et les employes? • Vaut-il mieux avoir des regimes de retraite differents selon les categories d'emplois? • Est-il acceptable de la part de l'entreprise de prendre un conge de cotisations ou de negocier des reductions de benefices avec les employes pour eponger un deficit budgetaire? • La formule de la retraite anticipee saura-t-elle repondre adequatement aux imperatifs de la reduction des couts d'exploitation? • La retraite progressive represente-t-elle une solution avantageuse pour garder plus longtemps dans l'emploi la main-d'a:uvre d'experience? • Apres la retraite, l'employe continuera-t-il a profiter de l'assurance sante et des autres benefices? Ainsi, au-dela de la complexite administrative des regimes de retraite, il ne faut pas perdre de vue les enjeux strategiques et ethiques de ces avantages sociaux.
12.4.5 Les regimes de remuneration du temps chome Les jours feries, les conges parentaux et les vacances sont les principales com posantes des regimes de remuneration du temps chame. Certains jours feries
sont imposes par la loi pour souligner une fete nationale ou religieuse. II existe d'autres jours chomes prevus par les politiques des entreprises. Ainsi, une personne pourrait avoir droit a une journee de conge a la suite du deces d'un proche. Parfois, il s'agit aussi de conges mobiles que les employes peuvent utiliser quand bon leur semble pour s'acquitter d'obligations
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I Les defis des conditions de travail personnelles. Dans tous ces cas, l'employe re\=oit sa remuneration normale mais ne travaille pas. Certains employeurs offrent un conge parental a la suite de la naissance ou de l'adoption d'un enfant. En fait, ces employeurs versent un supplement aux montants prevus par la 10L Par exemple, chez Merck Frosst, la bonification du conge de maternite permet aux employees de recevoir leur plein salaire pen dant 18 semaines. Comme nous Ie verrons plus loin dans ce chapitre, une telle bonification du conge de maternite represente une pratique reconnue d'aide it l'equilibre travail-famille. Les vacances offrent aux employes une plus longue periode d'absence de leur milieu de travail qui, en principe, leur permet de «recharger leurs batte ries ». La duree des vacances est couramment liee a l'anciennete de l'employe. Par exemple, l'employe pourrait avoir droit a deux semaines de vacances apres une annee de service, it trois semaines apres trois annees de service et a quatre semaines apres huit annees de service. L'employeur doit evidemment respecter la legislation portant sur les normes minimales dans l'attribution des vacances. Ainsi, en France et en Suede, Ie l(~gislateur a prevu cinq semaines de vacances, alors qu'au Quebec, l'employe qui a plus d'une annee de service continu a droit a deux semaines de vacances.
12.4.6 Les avantages sociaux complementaires Les personnes travaillant pour une organisation peuvent beneficier de plu sieurs autres avantages sociaux. Par exemple, bon nombre d'entreprises four nissent un vehicule a leur personnel. Aussi, plusieurs employeurs offrent une place de stationnement a leur personnel ou palent les frais de stationnement. De meme, certains employeurs offrent des rabais a leurs employes it l'achat de leurs produits et de leurs services. Les associes chez Sears, par exemple, bene ficient d'un rabais de 20% sur l'achat de vetements et de 10% sur les autres marchandises. D'autres organisations donnent a leurs cadres et a leurs pro fessionnels la possibilite d'assister it des congres ou a des conferences, ou s'acquittent de leurs frais d'adhesion a des associations professionnelles. Cer taines organisations mettent a la disposition de leur personnel une cafeteria et assument une partie ou la totalite des couts du repas. Plusieurs avantages sociaux complementaires sont aussi offerts aux per sonnes affectees a l'exterieur du pays (St-Onge et autres, 2002). Les expatries profitent generalement de primes d'eloignement, d'un logement paye et d'ecoles privees pour les enfants. En particulier, l'aide it la famille peut egale ment comprendre les avantages suivants: • • • •
un programme d'adaptation i Ie dedommagement du conjoint en raison de la perte d'un emploi; l'aide a la recherche d'un emploi pour Ie conjoint; l'octroi d'un montant permettant de compenser la perte de revenu du conjoint; • l'aide a Ia recherche d'un etabllssement d'enseignement pour les enfants;
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Optimiser les avantages sociaux
a l'intention de la famille. Certaines entreprises proposent egalement a leurs expatries des cours de langue et une formation interculturelle. Bref, l'affectation a l'etranger repre • un programme d'aide
sente un cas particulier qUi exige que Fon tienne compte de la situation fami Hale de la personne et que l'on offre des avantages sociaux complementaires susceptibles de faciliter l'adaptation a une culture etrangere.
Les programmes d'aide aux employes Dans la categorie des avantages sociaux comph~mentaires, on trouve egale ment les programmes d'aide aux employes, qui offrent des services de consul tation confidentiels et professionnels visant a aider les employes et parfois les membres de leur famille a regler une vaste gamme de problemes personnels. En moyenne, environ de 7 % a 8 % des employes d'une entreprise font appel aux services d'un programme d'aide aux employes au cours d'une annee. Les professionnels du programme d'aide aux employes aident ces personnes a composer avec toutes sortes de situations, comme les suivantes: • la detresse psychologique et l' epuisement; • l'alcoolisme et la toxicomanie;
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les problemes lies au jeu; les relations conjugales tendues; la violence conjugale; la mediation familiale; Ie choc consecutif a une crise organisationnelle i les conseils juridiques ou financiers; I' orientation professionnelle; l'aide a la relocalisation; la consolidation d'equipes; l'aide aux gestionnaires aux prises avec des employes ayant des problemes d'attitudes; • la gestion du stress. Le recours a un programme d'aide aux employes est volontaire. Comme l'indique Poissant, «on ne peut pas forcer un employe a chercher de l'aide s'il ne Ie veut pas; it moins, bien sur, que la securite de ses collegues de travail ne soit en peril» (2000, p. 20). Par ailleurs, l'utilisation que fait I'employe de ces services est avant tout orientee vers un processus d'aide it court terme. Dans l'eventualite ou des services sont necessaires it plus ou moins long terme, les professionnels du programme suggerent a l'employe une formule adaptee it ses besoins. Enfin, la demande adressee a un programme d'aide aux employes s'avere une demarche confidentielle. Les conseillers etant affilies a des ordres professionnels, ils sont donc lies par Ie secret professionnel et tenus de respec ter un code de deontologie. Par ailleurs, aucun nom n'est mentionne lors de la facturation aux clients et les statistiques remises a l'employeur sont denominalisees. L'employe re~oit generalement une carte professionnelle indiquant Ie numero a composer si Ie besoin se presente.
Les programmes de mieux-etre ou de prevention Au cours des dernieres annees, on a egalement pu constater l'emergence de programmes de mieux-etre qu'adoptent des entreprises qUi veulent promou voir la sante de leurs ressources humaines. II s'agit parfois de mesures assez simples, comme Ie fait de diffuser de l'information sur une saine alimenta tion, mais parfois aussi de programmes structures de sante et d'activites physiques, comme Ie programme «Batissez-vous une sante» en vigueur chez Home Depot Canada. L'approche preventive est alors privilegiee. Par exemple, un programme de conditionnement physique pourrait etre elabore avec l'aide des conseils d'un physiotherapeute vis ant a prevenir les lesions dorsales. Certaines entreprises assument les couts de la pratique d'activites physiques, comme l'abonnement a un centre de conditionnement phYSique. D'autres entreprises, telles que les pharmacies Jean Coutu, ont ouvert une salle de con ditionnement physique sur les Heux de travaiL Les pauses exercices et les pro grammes de nutrition qui favorisent Ia sante et Ie mieux-etre des employes sont aussi adoptes par de plus en plus d'organisations. Parfois, une specialiste de la nutrition veille sur la composition des plats prepares a la cafeteria en
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Optimiser les avantages sociaux
milieu de travaiL De telles initiatives favorisent 1a sante et done 1a reduction de I'absenteisme, l'augmentation de Ia productivite ainsi qu'une diminution des primes d'assurance et des couts en matiere de sante et de securite du tJ:avail. Les p1"Qg1"ann-nes d'activite physique au travail encouragent non seule ment un mode de vie sain chez Ies travailleurs, mais aussi une reduction de l'absenteisme de I'ordre de 70%, selon l'Institut canadien de Ia recherche sur la condition physique et Ie mode de vie.
Les pratiques favorisant l'equilibre travail-famille Toujours dans Ia categorie des avantages sociaux compU:mentaires, on trouve les pratiques favorisant l'equilibre travail-famille (voir Ie tableau 12.3). Ces pratiques ont comme fondement Ia croyance que ce qui se passe au travail peut avoir des repercussions sur Ia famille et que ce qui se passe dans la sphere familiale peut avoir des repercussions sur Ie travail. Une personne qUi connalt une situation de couple avec deux enfants a charge et un conjoint qui a une lES PRATIQUES 0'AIDE
A l'E.QUILIBRE TRAVAll-FAMlllE
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carriere peut ressentir certaines tensions liees a la conciliation de ses respon sabilites familiales et professionnelles. II en resulte un conflit travail-fa mille qui est susceptible de se traduire par une augmentation du stress, de la con sommation d'alcool et par une insatisfaction au regard du travail et de La vie en general (Greenhaus & Parasuraman, 1999). Pour aider leurs employes a rectuire les tensions liees a l'equilibre travail famille, plusieurs organisations ont mis en place des assurances collectives, des conges pour des motifs personnels, des horaires de travail flexibles, des services de garde en milieu de travail et d'autres mesures. Par exemple, dans Ie cadre de son programme Travail-Vie-Famille, la Banque Royale accorde des conges de courte duree pleinement remuneres et des conges sans solde de longue duree, et fournit une orientation vers des ressources externes ade quates. La Banque Nationale, quant a elle, a He la premiere entreprise a creer une garderie en milieu de travail (ou creche d'entreprise) au Quebec. Fait interessant, entre 1991 et 2000, Ie nombre de garderies en milieu de travail au Canada a presque double, passant de 176 a 338 (Barbeau, 2001).
Les services d'information et de reference peuvent aussi aider les per sonnes ayant des responsabilites familiales a trouver rapidement des services de proximite avec des prestataires de services designes. Par exemple, un portail qUi contient de l'information sur les services de garde d'enfants dans la region et sur les places disponibles en cas d'urgence pourrait faciliter les demarches des parents travaillant pour l'entreprise. Par ailleurs, les employes du groupe Danone peuvent faire appel a une societe d'assistance chargee de trouver une
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I Optimiser les avantages sociaux
d' un employe, est malade. I1 existe ,. donc, de toute evidence, une multitude de solutions a la problematlque de l'equilibre travail-famille. Certaines de ces solutions prenne~t la . for:n e d'avantages sociaux; d'autres solutions concernent davantage lorgamsatlOn du travail et, en particulier, l'amenagement du temps de travail. Ainsi, pour faciliter l'equilibre travail-famille et, consequemment, accroitre les attitudes positives des employes envers leur organisation, certaines organisations im plantent l'horaire flexible, Ie travail partage, la semaine de travail reduite ou Ie travail a temps partiel volontaire.
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.L~.s. ~~~':I~~~.e.s. ~~~~~~~ .~~~~~~~~.~~. ~~>:1.~ ~(. ~~~~~~~~~ .)~ Les avantages sociaux flexibles de style «cafeteria» sont de plus en plus populaires. Alors qu'en 1993, seulement 4 % des organisations offraient des avantages sociaux flexibles ou personnalises ou prevoyaient en offrir, ce pour centage a monte en fleche pour atteindre 72 % en 1998 et 93 % en 2002 selon les sondages effectues par Hewitt (Brown, 2002). L'approche des avantages sociaux flexibles est fort simple. On attribue a chaque employe un budget ainsi qu'une liste d'avantages sociaux disponibles. I:employe peut ensuite se procurer les avantages sociaux selon ses besoins et ses preferences et dans les !imites de son budget. Reprenons l'exemple presente au debut de ce chapitre. Dans Ie cas d'un plan dentaire, l'employe pourrait opter pour Ie rembour sement des soins de base (un examen, des plombages, etc.) ou choisir une couverture plus large qUi inclut des traitements d'orthodontie. La flexibilite des regimes permettrait a un nouvel employe ayant de jeunes enfants d'affecter une plus grande part de son budget a l'assurance vie et aux services de garde. Chaque employe dispose ainsi d'une marge de mana:uvre plus importante dans la selection du type et du niveau de couverture qui lui convient. Cette autonomie plus grande dans Ie choix des avantages sociaux pourrait se traduire par des attitudes plus positives des employes envers leur employeur. Par ailleurs, l'utilisation d'avantages sociaux flexibles permet aux organisations de mieux repondre aux besoins d'une main-d'a:uvre de plus en plus diversifiee. L'approche dite flexible donne egalement la possibilite aux organisations de n~aliser des economies, car elle favorise une selection plus judicieuse des avantages sociaux. De plus, elle responsabilise les employes face a leurs avantages sociaux. Cette approche les aide a mieux comprendre les avant ages sociaux disponibles et a prendre conscience des couts qui sont en cause. Il faut savoir, toutefois, que l'implantation de cette approche ajoute a la complexite de la gestion des avantages sociaux. Les regimes d'avantages sociaux flexibles comportent cependant des in convenients ou des limites. Pour les employeurs, Us coutent plus cher et sont plus complexes a implanter et a gerer. En effet, les employes ont tendance a choisir les avantages qu'ils sont les plus susceptibles d'utiliser, ce qui mene a une augmentation des couts. En ce qui concerne !'implantation et la gestion de ces regimes, il faut ameliorer Ie travail de communication afin de bien
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Les defis des conditions de travail
expliquer aux employes les choix qui leur sont offerts. L'employeur dolt aussi sonder regulh~rement ses employes pour s'assurer que les mesures offertes repondent a leurs besoins. De plus, l'adoption de tels regimes requiert 1a formation d'un plus grand nombre de comites d'assurance, 1esquels cherchent it favoriser la communication entre les employeurs les employes, les actuaires-conseils et les assureurs de maniE~re que les enjeux des regimes soient bien compris, que ceux-ci considerent les besoins des employes et qu'il soU possible d'en contrOler les couts . j
. . .L ~ ~~.s.t~?:n. d.~s. ~~~~~~~~.s. ~?~~~~~
La gestion des avantages sociaux doU viser a respecter Ie critere de la perti nence et celui de la comprehension de la part des employes. Le critere de la pertinence signifie que les avantages sociaux doivent s'adapter aux besoins et aux preferences des ressources humaines. C'est pourquoi il faut accorder une grande importance a l'analyse des besoins. Quant it la comprehension des avantages sociaux de la part des employes, elle resultera de la qualite du tra vail de communication qU'effectuera l'entreprise.
12.6.1 L'analyse des besoins Pour que les avantages sociaux apportent Ie maximum de benefices, ils doivent repondre aux besoins des employes. Notons que les besoins peuvent etre fort differents d'une entreprise a l'autre. Par exemple, dans une entreprise ou les vendeurs se rendent frequemment a l'etranger, Ie regime d'assurance collective devrait normalement couvrir les frais medicaux engages it l'etranger. Ainsi, une analyse des besoins s'impose afin de s'assurer que les avantages sociaux offerts correspondent a la situation propre a l'entreprise. Une fa~on de veiller a ce que les avantages sociaux refietent la situation de l'entreprise, et en particulier, les besoins et les preferences des ressources humaines, consiste a consulter les employes. Dans certaines organisations, cet exercice de consultation est pris en charge par un co mite d'assurance regrou pant les representants de la direction et des employes. De meme, la consulta tion s'effectue souvent par voie de sondage electronique ou traditionnel. Quel que soit Ie moyen utilise, cette consultation devrait se faire sur une base reguliere, surtout lorsqu'il se produit des changements dans la situation de l'entreprise (par exemple, une croissance marquee), ou au moment du re nouvellement de la police d'assurance collective, surtout lorsqu'il y a une augmentation appreciable de la prime. Afin de garantir la pertinence des avantages sociaux, certaines organisations favorisent 1a participation des employes a leur conception et a leur implantation. Par ailleurs, de fa~on it favoriser l'equite externe, les entreprises ont interet a considerer les avantages sociaux offerts par leurs principaux concurrents. A cet egard, les societes de consultants disposent generalement d'informations sur les avantages sociaux offerts selon Ie secteur d'activite.
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Optimiser les avantages SOCli'lU'll •
12.6.2 La communication L'entreprise doit renseigner ses employes au sujet des avantages sociaux qui leur sont accessibles. Un travail de communication dans ce sens peut aider les employes a mieux com prendre les couts des avantages sociaux et donc ales apprecier davantage. La gestion des avantages sociaux exige qu'une attention particuHE':re soit portee a la communication. L'employeur devrait ainsi prevoir une reunion avec ses employes pour leur expliquer Ie fonctionnement des regimes d'avantages sociaux et pour les sensibiliser a une utilisation judicieuse de ceux-ci. La reunion est aussi une occasion de repondre aux questions des employes. Bien sur, il existe plusieurs autres moyens de communication. On utilise souvent des livrets qui decrivent les avantages sociaux disponibles chez l'employeur; les employes peuvent les consulter au besoin. Par exemple, un employe pourrait verifier dans son livret d'avantages sociaux si l'achat de lunettes pour ses enfants sera rembourse en vertu de son regime. Les rei eves personnalises favorisent aussi la comprehension des avantages sociaux. Par exemple, un employe pourrait de cette maniere savoir combien il a cotise a son regime de retraite et obtenir une projection de sa rente a la retraite. Soulignons aussi que pour retirer des benefices au point de vue du recrute ment, l'entreprise peut transmettre aux candidats une information sommaire sur les avantages sociaux disponibles. A la suite de l'embauche, la tenue d'une reunion d'information avec les nouvelles recrues constituerait une mesure souhaitable pouvant etre integree dans un programme d'orientation (voir Ie chapitre 5). II est egalement souhaitable de voir a ce que chaque nouvelle recrue ait l'occasion de rencontrer un specialiste des avantages sociaux qui pourra l'aider a faire ses choix. Enfin, des mesures speciales de commu nication, comme des ateliers de preparation a la retraite, permettent de pre senter les modalites d'application du regime de retraite aux personnes qui approchent de l'age de la retraite.
12.6.3 Le support informatique et la gestion des avantages sociaux L'informatique et les reseaux de communication modernes facilitent la ges tion des avantages sociaux. Grace au support informatique, les gestionnaires ont acces aux dossiers individuels des employes et aux statistiques globales. De plus, l'entreprise peut recevoir les formulaires des assureurs par Internet. De leur cote, les employes peuvent consulter l'etat de leurs avantages sociaux et effectuer les changements en mode libre-service. Ils sont meme en mesure de transmettre leurs reclamations directement a l'assureur par voie elec tronique. Les solutions informatiques offrent ces avantages ainsi que les possibilites suivantes. • Elles permettent de produire des rapports de fin d'exercice, y compris les releves de la Commission de la sante et de la securite du travail, des regimes de retraite et de cessation d'emploi.
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Les defis des conditions de travail
• Elles permettent de tenir it jour les paiements de conges de maladie, de jours feries et de jours de vacances. • Elles permettent de recuperer des renseignements sur Ie profil d'absenteisme des employes. • £lIes permettent d'etablir des rapports ponctuels it partir d'une base de donnees detaillee et structuree.
12.6.4 L'impartition de la gestion des avantages sociaux Parfois, les entreprises font appel it un fournisseur de services pour qu'il admi nistre les services de la paie et des avantages sociaux. Le support informatique maintenant disponible facilite la mise en reseau de telles solutions. Dans cer tains cas, il est moins couteux de faire faire la gestion des avantages sociaux a l'exterieur de l'entreprise. Mais Ie principal motif evoque est l'acces a une expertise externe qUi permet it l'entreprise de concentrer ses efforts sur ce qu'elle fait Ie mieux. Aussi, grace it diverses technologies comme un systeme de reponse vocale interactive et un guichet Internet, les employes peuvent acceder rapidement et en tout temps aux renseignements relatifs aux services et aux avantages sociaux.
12.6.5 La gestion des avantages sociaux dans les petites et moyennes
entreprises La gestion des avantages sociaux dans les petites et moyennes entreprises pose parfois probleme. C'est que ces entreprises n'ont pas souvent les moyens de rivaliser avec l'offre d'avantages sociaux de la grande entreprise. Leur marge de manreuvre est en effet plus restreinte. Par exemple, les PME peuvent diffi cilement offrir plusieurs des mesures d'equilibre travail-famille que peut implanter la grande entreprise. Le souci du controle des couts des avantages sociaux est aussi plus present dans les PME: «un dirigeant de PME [... ] a reuni recemment ses employes pour leur demander de restreindre, dans la mesure du pOSSible, les ordonnances de medicaments non indispensables» (De Smet, 2003, p. 17). Dans ces circonstances, les PME doivent generalement miser sur un pro gramme d'avantages sociaux qui procure une protection de base seulement. Par ailleurs, l'offre d'avantages sociaux comprend generalement des produits plus standards et plus structures, qui peuvent egalement com porter certaines options.
12.6.6 La gestion des avantages sociaux en milieu syndique Par la voie de la negociation collective, les syndicats ont reussi it obtenir pour leurs membres de nombreux avantages sociaux qui n'existaient tout simple ment pas au debut de Pere industrielle (Milkovich, Newman et Milkovich, 2001). En milieu syndique, ces avantages sociaux sont generalement consignes dans la convention collective et ils representent une part plus
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Optimiser les avantages sodaux
importante de la remuneration que dans Ie secteur prive. En outre, les, salaries en milieu syndique per~oivent la negociation collective comme etant la meilleure garantie en ce qUi a trait a l'obtention d'avantages sociaux comple mentaires (Hebert et autres, 2003). Quant it la gestion meme des avantages sociaux en milieu syndique, Ie plus souvent, un comite forme d'un nombre egal de representants de l'employeur et de representants des employes en assure une bonne partie. Par exemple, ce comite pourrait etre charge des aspects suivants de la gestion des avantages sociaux: • etudier tous les aspects des regimes de retraite, d'invalidite de longue duree et d'assurance vie; • analyser l'evolution des regimes; • discuter des hypotheses actuarielles; • faire des recommandations.
12.6.7 Des avantages sociaux pour les travai11eurs autonomes On observe dans plusieurs societes une croissance constante du nombre de travailleurs autonomes. Ces personnes, malheureusement, se trouvent sou vent dans une situation precaire causant une certaine insecurite financiere. N'etant pas attaches de maniere stable a un employeur en particulier, les tra vailleurs autonomes ne peuvent beneiicier des avantages sociaux disponibles chez un employeur ou chez un autre. Ils doivent donc prevoir eux-memes des assurances pour les biens, en matiere de responsabilite civile, en cas d'in validite, de maladie grave, voire une assurance salaire qui puisse couvrir les depenses minimales de la vie quotidienne. Cependant, il existe maintenant pour les travailleurs autonomes des produits comparables aux couvertures d'assurance collective dont beneficient les salaries des grandes entreprises.
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_ .L~. ~~.f~ .~~. ~<:>!l.t!?l~. ~~~. ~':l~.t~. ~~.S. ~y~.~~~~~~. ~':l~~~~~ Avec la croissance des avantages sociaux offerts en milieu de travail, de plus en plus d'employeurs s'inquietent de la croissance fulgurante des couts asso cies aux avantages sociaux. Dans l'industrie de l'automobile aux Etats-Unis, la situation est d'ailleurs plutat dramatique, alors que les trois grands construc teurs comptent maintenant plus de retraites titulaires d'une pension que d'employes. Leurs 524000 retraites res:oivent non seulement une pension, mais aussi la couverture des frais de so ins medicaux. n en resulte que les couts des avantages sociaux chez ces trois constructeurs nuit a leur capacite a faire concurrence aux autres constructeurs, selon certains analystes (Colvin, 2003). Pour contraler cette croissance des couts, les entreprises en question cher chent a trouver la couverture optimale dans les parametres de couts accepta bles, et ils pretent particulierement attention aux primes d'assurance. Le contrale des primes d'assurance collective represente un defi de taille. En effet, Ie montant de la prime par employe peut varier considerablement d'une organisation a l'autre. La prime d'assurance salaire, par exemple, varie selon l'age des employes. Dans une entreprise de service en demarrage ou la moyenne d'age est de 28 ans, la prime sera evidemment inferieure a celle qu'on trouve dans une entreprise de camionnage ou la moyenne d'age est de 47 ans. Cependant, en tant que mesure de contrale des couts, tous les cinq ans environ, lors du renouvellement de ses ententes avec les fournisseurs, l'employeur aurait interet a retourner sonder Ie marche en demandant des soumissions. D'autres mesures de contrale des couts consistent
a reduire la couverture,
a augmenter Ie montant de la franchise ou encore a proposer aux employes d'assumer une plus grande part des couts. La reduction de la couverture con siste a ne plus inclure certains avantages sociaux. Par exemple, une organisa tion pourrait decider de ne plus offrir Ie programme de remboursement des frais d'achat de lunettes. L'augmentation du montant de la franchise repre sente une autre mesure. La franchise est la part du dommage qui est assumee par l'assure. Plus la franchise est elevee, plus l'employe doit assumer une part importante des couts. Enfin, Ie fait de proposer aux employes d'assumer une plus grande part des couts concerne les modalites de financement du regime. Par exemple, une entreprise qUi finans:ait 80 % des couts des soins de sante pourrait reduire sa contribution a 70 %. Une entreprise pourrait aussi adopter
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Optimiser les avantages sociaux
comme politique de ne pas offrir d'avantages sociaux aux emplo~es en pe riode de probation. II est a noter que ces differentes mesures sont egalement adoptees lorsque l'entreprise se trouve en difficulte et qu'elle doH, comme condition de survie, reduire ses couts d'exploitation.
Certaines mesures de contr6le des couts moins draconiennes consistent a demander aux employes de fournir des justificatifs mecticaux pour obtenir des soins de professionnels comme les massotherapeutes ou les physiothera peutes. Mentionnons egalement une approche plus proactive consistant a implanter un programme qui fait la promotion de la sante. Si Ie programme atteint ses objectifs, Ie personnel sera en meilleure sante et moins souvent absent pour cause de maladie, ce qui contribuera a reduire les couts des avan tages sociaux.
Conclusion Les avantages sociaux representent des couts importants. II serai! donc nor mal que l'entreprise fasse les efforts necessaires afin d'assurer leur pertinence et leur comprehension. Ce chapitre presentait plusieurs regimes d'avantages sociaux. II importe, bien sur, de saisir leurs fonctions dans la relation d'em ploi, et surtout de prendre les mesures necessaires pour assurer une saine ges tion des avantages sociaux. Chaque organisation a la responsabilite de faire un bilan a cet egard. Ainsi, l'organisation doit se demander notamment si ses regimes d'avantages sociaux repondent aux besoins et aux preferences de ses employes, s'ils contribuent a contr6ler Ie stress et l'epuisement au travail, et s'ils favorisent la conservation de ses meiIleurs employes. Ainsi, la gestion des avantages sociaux exige de l'entreprise une attention particuliere et surtout des interventions qui sont de nature a favoriser la per tinence et 1a comprehension des avantages sociaux.
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Par ailleurs, la gestion des avantages sociaux s'opere dans un cadre legal qui varie d'une juridiction a l'autre. Une bonne comprehension de ce cadre legal permet d'effectuer des interventions appropriees en matiere d'avantages sociaux. En outre, la situation de l'entreprise est un important facteur a con siderer a l'egard de la determination des avantages sociaux, qu'il s'agisse de sa strategie, de sa taille, de son secteur d'activite ou de la presence d'un syndicat. La reussite de la gestion des avantages sociaux s'appuie sur une comprehen sion adequate de ces differents elements contextuels.
(J) de revision
o QueUes composantes de la remune ration globale sont incluses dans les regimes d'avantages sociaux offerts aux employes?
f) QueUes raisons peuvent inciter les
employeurs a offrir des avantages sociaux a leurs employes?
e Decrivez les principales
categories d'avantages sociaux offerts par l'Etat.
o En quoi Ie phenomene de l'epuise ment professionnel a-t-il contribue
a augmenter les couts des avantages sociaux?
"QueUes mesures d'aide publiques et privees sont susceptibles d'aider les personnes ayant des enfants a charge a mieux concilier leur travail et leur famille?
o controle Faites une liste des mesures de des couts des avantages
sociaux et, pour chaque mesure, expliquez l'impact attendu sur Ie contrNe des couts et sur la satisfac tion au travail des employes.
o Comment la gestion des avantages sociaux est-eUe influencee par la presence d'un syndicat?
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I Optimiser les avantages sociaux
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Chapitre 12
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Le PTogTamme d'a"ide aux poliders et aux policieres du Service de police
de la Ville de Montrea12 Le Service de police de la Ville de Montreal: hlstorlque, mission, valeurs et objectifs Le Service de police de la Ville de Montreal (SPVM) a ete forme en 1972 du regroupement des forces policieres des 28 municipalites de l'ile de Montreal. AUjourd'hui, avec plus de 4000 em ployes, ce service est Ie deuxieme plus important corps policier municipal du Canada. Structure selon un modele de police « de proximite}) reposant sur des postes de quartier, Ie SPVM re~oit l'appui de plusieurs partenaires tant parmi Ies institutiOns, les groupes et les orga nismes communautaires que parmi les citoyens. La mission du SPVM consiste a pro mouvoir la qualite de la vie de tous les cit oyens sur Ie territoire de la Ville de Montreal, et ce, en respectant Ies droits et libertes prevus par les Chartes que becoise et canadienne. De fa~on plus precise, Ie SPVM vise la reduction de la criminalite, l'amelioration de la secu rite routiere et Ie developpement d'un milieu de vie paisible et securitaire sur son territoire. Pour realiser sa mission et ses objectifs, Ie SPVM s'appuie sur les principes de gestion suivants: • l'excellence et l'amelioration con tinue dans ses rapports avec les -------
citoyens, dans ses offres de services et dans sa gestion; • Ie respect de ses employes, la recon naissance de leurs actions et la satis faction de leurs aspirations; • Ie respect des droits et libertes des citoyens; • Ie respect des lois et des reglements de maniere a inspirer un sentiment de confiance et de credibilite parmi Ies citoyens.
Les conditions de travail des policiers du SPVM Les policiers occupent un role-de au SPVM. La majorite d'entre eux doivent intervenir quotidiennement dans des situations oil la violence prend diverses formes, telles que l'abus de drogues, la violence physique, la negligence phy sique et affective, la destruction de biens d'autrui, la violence familiale, les mau vais traitements envers les animaux, les agressions sexuelles, la violence verbale et psychoIogique, l'intimidation, I'ex ploitation financiere, Ie harcelement, Ie meurtre ou les crimes gratuits. Quoique les policiers aient ete formes ace type de travail, la frequentation quotidienne de la violence com porte un risque certain pour leur sante psychologique.
2. Ce cas a ete rMige par Debora Diaz, Annie Payant, Silvana Pozzebon et Sylvie St-Onge. Les auteures remercient toutes les personnes qui ont participe il la realisation de ce cas, et plus particulierement Normand Martin, chef de section du Programme d'aide aux policiers et aux policieres du Service de police de la Ville de Montreal. Elles remercient egalement les BEC Montreal de leur appui financier. Par ailleurs, Ie Programme d'aide aux policiers et aux policieres du Service de police de la Ville de Montreal a re<;:u Ie prix «Engagement et Action prolongee - Equipe" lors du gala annuel du Service de police de la Ville de Montreal pour l'annee 2003.
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D'autres caracteristiques du travail des policiers peuvent aussi avoir un effet negatif sur leur equilibre psychosocial. En effet, le personnel de police doit assu mer l'autorite que son poste lui confere a l'egard des citoyens, et cela, parfois dans un contexte de manque de re connaissance, voire de respect, pour l'accomplissement de son travail. Les policiers doivent, it l'occasion, travailler seuls ou dans des lieux isoles; its suivent souvent des horaires de travail irregu Hers ou ils peuvent etre engages dans Ie demantelement de reseaux de fraude et de stupefiants. Le personnel policier doit egalement composer avec divers change ments. Pensons it l'affectation d'un nou veau partenaire de travail, a la mutation dans un nouveau quartier ainsi qu'a l'absence de collegues tues ou blesses dans Fexercice de leurs fonctions, et ce, dans un milieu reconnu pour les liens etroits qui existent entre collegues. Les conditions et les exigences du travail des policiers interferent souvent avec leur vie personnelle et leur vie familiale. On peut songer aux horaires atypiques de travail et it la grande dispo nibilite qu'on exige d'eux. Pris en semble, ces facteurs font que Ie personnel policier peut subir du stress simul tanement sur les plans individuel et familial, stress qUi est susceptible de nuire a la qualite de son rendement au travail et a sa sante, et d'entrainer des couts pour l'employeur (par exemple, l,augmentation de l'absenteisme et du roulement, la baisse de productivite, la hausse des primes d'assurance accident ou la hausse des frais medicaux). Finalement, sous son uniforme, Ie policier reste un etre humain avec des va leurs, des emotions et des attentes qui lui sont propres. Les conditions et les exigences particulieres de son travail risquent d'alimenter des angoisses et
des emotions pouvant ~' ~XptimeT exte rieurement ou interieurement par de l'agressivite, du stress, de l'anxiete, de 1a depression, etc. La presence des nom breux agents stressants lies it cet emploi devient d'autant plus importante que Ie personnel pol icier porte des armes. En effet, l'acces aux armes peut s'averer cri tique lorsqu'une personne traverse des situations de crise et qu'elle est plus fragile sur Ie plan emotionnel. Le Programme d'aide aux policiers et aux policieres Les origines de ce programme
La direction du SPVM reconnait Ie ca ractere stressant du travail de son per sonnel policier. Quoiqu' elle encourage les policiers a exprimer leurs opinions et a discuter entre eux de leurs experiences professionnelles, Ie caractere complexe et intime de certaines emotions peut etre difficile a partager. Cela explique pourquoi la direction du SPVM a decide d'adopter dans les annees 1980 un Programme d'aide aUx employes a Fin tention de son personnel policier. Le Programme d'aide aux employes admet que certains problemes person nels ou professionnels peuvent nuire it la sante physique et mentaIe du person nel policier et, par consequent, reduire leur rendement au travail et la qualite du service aux citoyens. A ses debuts, Ie programme d'aide traitait surtout les cas d'employes aux prises avec divers pro blemes importants d'attitudes au tra vail, d'alcoolisme ou de toxicomanie. Ces employes etaient diriges vers Ie programme par leur superviseur qUi souhaitait obtenir un rapport d'evaIua tion psychologique. L'intervention des superviseurs, en brisant Ie caractere confidentiel du processus, nuisait a Ia reputation du programme. De fait, it
Chapitre 12 \ Optimiser les avantages sociaux
l'epoque, peu de policiers faisaient con fiance aux responsables du programme d'aide et tres peu y recouraient sur une base volontaire. Preoccupee par l' echec apparent des debuts du Programme d'aide aux em ployes, la direction decide, conjointe ment avec Ie syndicat, la Fraternite des policiers et policieres, de creer un comite paritaire charge de proposer et d'adopter des mesures qui feraient en sorte que Ie programme d'aide reponde mieux aux besoins des employes et du SPVM. En mars 1990, ce comite paritaire met sur pied Ie Programme d'aide aux policiers et aux policieres, lequel est toujours en place aujourd'huL Ce programme offre des services de consultation, d'informa tion, d'evaluation et de recommanda tion sans exigence de contr6le medical et dans Ie respect de la confidentialite et de l'anonymat. Des lors, la frequenta tion de ce programme d'aide ne risque plus de nuire aux usagers dans leurs chances d'avancement, leur securite d'emploi, leur reputation, etc. La nature des services offerts Le Programme d'aide aux policiers et aux policieres s'adresse aux membres du personnel policier du SPVM, indepen damment de leur statut hierarchique, et ce, jusqu'a un an apres leur retraite. Les membres de la famille immediate du policier sont aussi admissibles. Ce pro gramme s'appuie sur les principes d'autonomie et de responsabilisation, Ie personnel policier y recourant sur une base volontaire. Le Programme d'aide aux policiers et aux policieres offre six categories de services:
• la consultation psychologique; • l'intervention de crise et de post traumatisme lors d'evenements majeurs;
• l'aide au gestionnaire en matiere de gestion d'employes en difficulte; • la sensibilisation des nouvelles re crues du corps de police et !'informa tion destinee a elles; • la formation des superviseurs nou vellement promus; • l'aide au personnel des unites d'in tervention specialisees. I.e Programme d'aide aux policiers et aux policieres propose aussi deux ser vices connexes, soit la prevention du suicide et Ie Programme d'intervention post-traumatique. Le programme intitule «Prevention par l'action du risque et de l'intention suicidaire» (PARIS) a ete elabore en 1995, apres que les membres du comite paritaire ont convenu d'adopter une approche proactive en matiere de pre vention du suicide pour Ie personnel policier. Ce faisant, la direction de l'en treprise et la Fraternite des policiers et policieres exprimaient leur volonte de reduire a zero l'incidence du suicide parmi Ie personnel policier. L'objectif du programme de prevention, dont Ie theme est «Ensemble pour la vie}), con siste a informer les employes du SPVM au sujet de la problematique du suicide et des comportements des policiers en difficulte afin qu'ils puissent intervenir rapidement et de fac;:on approprh~e, Ie cas echeant. Ce service, conc;:u par les psychologues du Programme d'aide aux policiers et aux policieres en collabo ration avec des experts du monde universitaire, s'avere une des premieres initiatives du genre pour Ie personnel policier dans Ie monde. Dans Ie cadre du programme PARIS, la prevention implique l'aide ponc tuelle, constituee par l'ecoute, Ie soutien et la recommandation, a l'intention des
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Les defis des conditions de travail
policiers en difficulte ou aux prises avec divers problemes (lies, par exemple, a la situation familia Ie, a la dependance, a J'hom osexuaJite, au choc consecutif a une fusillade). Plus precisement, Ie PARIS comporte quatre volets. Le pre mier volet, nomme «Tournees des uni tes», consiste a rencontrer Ies employes dans leurs unites de travail respectives afin d'ameliorer leur comprehension du suicide. Ces tournees permettent d'etablir un consensus d'equipe sur la prevention du suicide et sur l'aide a apporter a des collegues en difficulte. Le deuxieme volet correspond a la for mation offerte aux commandants, aux superviseurs, aux gestionnaires et aux deIegues syndicaux pour qu'ils puis sent intervenir de maniere preventive au pres des policiers en difficulte. Le troisieme volet, Ie programme «Policiers Ressources », permet a des policiers benevoles et formes par les profession nels du Programme d'aide aux policiers et aux policil'~res d'aider leurs confreres en leur offrant un service telephonique d'aide et d'ecoute. Le quatrieme volet du PARIS consiste dans sa promotion aupres du personnel de l' organisation. D'autre part, Ie service d'« Inter vention post-traumatique» vise a aider Ie personnel policier et Ies membres de leur famille a traverser des evenements particulierement traumatisants, comme Ie fait d'avoir connu la mort violente d'un confrere, d'avoir du faire feu sur autrui ou d'avoir ete implique dans un accident grave. Lorsque de teis evene ments surviennent, les psychologues du Programme d'aide aux policiers et aux policieres se rendent sur les lieux et offrent un service d'ecoute active ainsi que des seances de debriefing it l'inten tion du groupe de travail et de la fa mille. Par exemple, la crise du verglas, en janvier 1998, et Ie passage a l'an
2000 representent deux evenements qUi averes stressant~ \10Ut les l1oli ciers et les membres de leur famille et au COUfS desquels ce service a ete utilise.
se sont
Finalement, notons que Ie Programme d'aide aux policiers et aux policieres est un service d'aide gratuit ou Ie nombre de rencontres avec les psychologues affectes au programme est illimite. Cependant, si Ie psychologue du service d'aide adresse Ie policier a des specialistes externes, les couts de ces visites sont assumes a parts egales par Ie Regime d'assurance maladie de la Fraternite des policiers et policieres et par l'employeur, jusqu'a concurrence de 1000 dollars. Au-dela de ce maximum, l'employe paie 50% des frais de consul tation d'un specialiste externe et I'em ployeur detraie l'autre tranche de 50%. Les intervenants
L'equipe du service d'aide au personnel policier est composee de trois psy chologues internes qui re\=oivent les demandes de consultation et d'un quatrieme psychologue qui ceuvre it temps partiel au volet prevention du suicide. Ces psychologues sont sous la direction d'un responsable du Programme d'aide aux policiers et aux policieres, qui est au service du SPVM depuis 12 ans. Quoi que ce responsable releve, sur Ie plan administratif, du service des ressources humaines du SPVM, son role et ses res ponsabilites sont determines par Ie comite paritaire du Programme d'aide aux policiers et aux polici(:res. Les membres de l'equipe du service d'aide au personnel policier ont une for mation et de l'experience en psycholo gie clinique, et ils sont tous couverts par un contrat d'assurance responsabilite professionnelle. En plus de leur role de consultant, ils ont un role de formation et de recherche d'information au pres du personnel. Par exemple, afin de
Chapitre 12
comprendre la vie quotidienne des
policiers et leurs besoins, les membres de l'equipe peuvent accOIIlpagner cer
tains policiers dans leurs missions. En outre, Ies professionnels internes ont dresse une liste de competences liees au savoir-etre, qu'ils ont introduites dans Ie programme de gestion par competences ado pte par I'organisation. Le comite paritaire du Programme d'aide aux policiers et aux policieres est compose de deux representants de la Fraternite des policiers et policieres et de deux representants de l'employeur, soit un membre du conseil de gestion du service et Ie responsable de la gestion du personnel. Ce comite est responsable de l'orientation, de la promotion et de l'evaluation de l'efficacite du pro gramme d'aide ainsi que de la formula tion des recommandations susceptibles d'optimiser ses resultats. Entin, les professionnels qui sont consultes par Ie programme d'aide ou qUi y participent peuvent egalement etre appeU~s a jouer un role d'expert-conseil aupres du service des ressources hu maines et de la direction dans l'elabora tion de politiques ou de programmes de prevention ou de gestion de la sante. La communication et fa formation
La promotion du Programme d'aide aux policiers et aux policieres s'est toujours effectuee par la distribution d'affiches et de depliants d'information, de meme que par la publication d'articles dans les journaux internes. Depuis peu, l'in formation touchant a ce programme se fait egalement par Ie biais d'une page Web (www.spcum.qc.ca/fr/sup_adm/ rnpradmf.asp). Entre decembre 1997 et Ie debut des annees 2000, un conseiller du programme d'aide a rencontre toutes les unites pour faire connaitre Ie programme PARIS (qUi, rappeions-Ie,
Optimiser les avantages sociaux
signifie« Prevention par l'action du risque et de l'intention suicidaire») et sensi biliser Ie personnel a la problt>matique du suicide. Toutefois, selon Ie respon sable du Programme d'aide aux policiers et aux policieres, Ie principal atout pro motionnel repose sur les recommanda tions des collegues de travail qui ont deja eu recours aux services de ce programme. Les superviseurs ont tous rec,:u une formation pour les aider a reperer les employes en difficulte, a interagir avec ces derniers et a leur transmettre de l'in formation sur Ie programme d'aide. Par ailleurs, des seances de formation ou d'information sont aussi offertes aux nouvelles recrnes du personnel policier ainsi qu'au personnel nouvellement promu a des postes de supervision. L'accessibilite aux dossiers et leur traltement
Le Service de police de la Ville de Montreal met tout en a:uvre pour pro teger la confidentialite du service d'aide et l'anonymat des utilisateurs. Les con seillers peuvent etre joints directement par telephone pendant les heures habi tuelles de bureau, soit de 9 heures a 17 heures, et il est possible de composer un numero de telephone 24 heures par jour pour les services d'urgence. Le ser vice de consultation est situe loin de tout etablissement du SPVM et la dispo sition des locaux limite Ies possibilites de rencontre entre les clients. Deux salles d'attente fermees sont amenagees pour la clientele et les bureaux de con sultation sont a l'abri des regards. Par ailleurs, Ie dossier de chaque client est attribue a un seul conseiller et gere dans Ie respect des regles strictes de confiden tialite. Si une evaluation du programme doit etre faite, toutes les donnees sont alors compilees de maniere agregee afin de respecter l'anonymat des usagers.
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Partie IV I Les defis des conditions de travail
Le SPVM cherche aussi a s' assurer qu'on offre rapidement les interven tions d'aide afin de limiter les inci dences negatives des problemes sur la vie professionnelle et personnelle des policiers. Comparativement aux pro grammes d'aide aux employes d'autres entreprises, Ie Programme d'aide aux policiers et aux policieres de la SPVM est plus flexible et permet aux employes de recevoir l'aide necessaire, peu importe Ie nombre de rencontres requises. Quelques donnees sur I'efflcacite du programme d'alde
La revision du Programme d'aide aux policiers et aux policieres en 1990 a per mis a celui-ci de quintupler les de mandes d'aide soumises par les employes dans un delai d'un an. Dans l'ensemble, les gestionnaires ont davantage ten dance a recommander a leurs employes de recourir au programme d'aide et a consulter pour eux-memes. Un recent sondage montre que 8S % des super viseurs ont dirige au moins un de leurs employes vers Ie programme d'aide depuis son implantation. Aujourd'hui, ce dernier est utilise par 280 personnes, soit 6 % des policiers, pour un total de 2000 consultations par annee. Bien en tendu, Ie recours au Programme d'aide aux policiers et aux policieres augmente lors d'evenements majeurs dans lesquels les policiers sont impliques. Seul Ie PARIS, so it Ie volet du pro gramme d'aide qui est lie a la preven tion du suicide, a fait l'objet d'une evaluation officielle par des experts de l'Universite du Quebec a MontreaL Cette etude ponctuelle, effectuee dans Ie cadre de la strategie globale d'action face au suicide adoptee par Ie gouverne ment du Quebec et financee par Ie mi nistere de la Sante et des Services sociaux, a revele que Ie programme implante au
SPVM a atteint ses objectifs de sensibili
sation et de prevention. Le nombre de deces de poHciers par suicide, qUi Hait en moyenne de deux par annee dans les annees 1980 et de un par annee au debut des annees 1990, a ete rectuit a zero au cours des sept dernieres annees, soit depuis l'implantation du pro gramme de prevention «Ensemble pour la vie ».
o Decrivez les caracteristiques du tra
vail des policiers qui les exposent a des risques eIeves de problemes de sante mentale au travail ou de vio lence au travail. Distinguez entre les facteurs de risque lies au milieu de travail et les facteurs de risque lies au contexte social.
f) Quelles sont les consequences pour les entreprises des problemes de san te mentale ou de violence au travail ?
e tionnelles Quelles caracteristiques organisa favorisent l'efficacite du Programme d'aide aux policiers et aux policieres mis en place par Ie SPVM? Expliquez votre reponse.
o Quels
traits du programme d'aide aux employes contribuent a son sucd~s? Ces traits peuvent-ils etre facilement envisages et implantes dans les programmes d'aide aux employes d'autres organisations? ]ustifiez votre reponse.
" Le programme d'aide aux employes n'est qu'un des moyens d'interven tion pour faire face aux problemes de sante mentale ou de violence au travail. Precisez ces divers moyens d'intervention et comparez leur role et leur efficacite.
Chapitre 12
I
Optimiser les avantages sociaux
comment lnstauTeT une c.u'tuTe \Ta:va:\\-fam'\\\e ?
Lundi matin, Mme Aube, la direct rice des ressources humaines, qui est aussi votre superieure immediate, vous con voque a son bureau. «n faut faire plus pour aider nos employes a concilier Ie travail et la famille! declare-t-elle tout de go. Malgre nos efforts, les employes nous disent que Ie conflit entre Ie travail et la famille est encore une source de stress pour eux. » Elle faisait reference au rapport du consultant qui avait sonde les employes dans Ie cadre d'une vaste enquete sur la qualite de la vie au travail. Mme Aube veut que les travailleurs de votre organisation soient soutenus dans leur demarche pour concilier Ie travail, la vie familiale et la vie personnelle, et elle vous confie Ie mandat visant a faire evoluer la situation. Les objectifs recher ches consistent a rectuire les conflits entre la vie professionnelle et la vie familiale, a faciliter Ie recrutement, a ameliorer la productivite et a favori ser l'avancement des femmes vers Ie sommet de l'organisation. Elle vous explique que l'organisation a conside rablement evolue depuis son arrivee il y a plus de 10 ans. A cette epoque, elle tra vaillait comme assistante aux achats et ses patrons, qui etaient des hommes pour la plupart, negligeaient les ques tions familiales. «La famille est une responsabilite personnelle », disaient-ils. Au cours des dernieres annees, avec l'arrivee des femmes et des personnes formant des couples a double carriere, l'organisation a reagi en implantant quelques mesures comme Ie conge pa rental et Ie travail a temps partiel volon taire a la suite d'un conge de maternite. Ces mesures sont fort appreciees, mais
votre patronne veut plus que de simples politiques et programmes. Elle tient ace qu'un veritable changement culture I soit amorce ! Apres votre rencontre avec Mme Aube, vous etes quelque peu inquiet, car meme si votre mandat est tres clair, vous doutez qu'il soit possible de faire evoluer la situation dans une organisa tion qui valorise surtout la competence technique et tres peu toute autre consi deration. En effet, votre entreprise a su devenir Ie chef de file des solutions technologiques de simulation et de contr6le-commande d'avant-garde dans l'aeronautique civile, Ie marche mili taire et la marine. C'est en misant sur les compHences specialisees de ses em ployes, en majorite des ingenieurs, que l'entreprise a connu une croissance sou tenue. Aujourd'hui, l'entreprise realise un chiffre d'affaires annuel depassant Ie milliard de dollars et emploie plus de 6000 personnes au Canada, aux Etats-Unis et dans Ie reste du monde. Elle investit environ 10 % de son chiffre d'affaires en recherche et developpe ment, ce qui lui permet de developper continuellement des produits de for mation innovants qUi repondent aux besoins de ses clients.
o Quelle
demarche adopterez-vous pour executer votre mandat consis tant a ameliorer l'equilibre travail famille chez les employes?
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Quels changements proposerez-vous?
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Partie IV r Les detis des conditions de travail
Une cTise des TeSSOUTces humaines en vue: l'epuisement profes
sionnel guette si Tien n'est fait 1 Patrons et employes se dirigent vers une des ressources humaines » et I'absen teisme pour cause d'epuisement profession nel ira en augmentant si rien n'est fait pour ameIiorer leurs relations, stimuler les communications, diminuer leur charge de travail et reconnaftre la valeur du boulot accompli par Ie personnel. Apres les crises de ['emploi, de la preca rite et de l'insecurite economique, voici que pointe la crise des ressources humaines. Tel est Ie constat dresse par Jean-Pierre Brun, professeur ala Faculte des sciences de I'administration de l'Universite Laval et titulaire de Ia Chaire en gestion de la sante et de la securite du travail dans les organisations. II a depose, hier, /'etude qualitative et quantitative que son equipe a menee dans un hOpital, a l'Universite Laval, dans une pepiniere et dans une industrie du secteur metallurgique. Entre avril 2000 et no vembre 2002,3142 personnes ant ete inter rogees. II ressort que 43 % d'entre elles presentent un niveau eleve de detresse psychologique. «Le probleme est en crois sance », constate Jean-Pierre Brun. Au Quebec, au Canada, aux Etats-Unis, en Europe, c'est partout pardI, et dans taus les secteurs. « Les etudes dans Ie monde con vergent », resume-t-il. Cette crise des ressources humaines entrafne une augmentation importante de l'absenteisme pour troubles psychologiques. «C'est la pointe de I'iceberg, c'est ce qui nous alerte », poursuit Jean-Pierre Brun, dont l'etude est financee par l'Institut de recherche en sante et securite du travail du « crise
Quebec. Et quand des gens, surtout les gestionnaires, «sont la de corps, ma;s pas d'esprit », Ie chercheur dit qu'ils souffrent de «presenUiisme». Selon lui, if y a «des solutions a portee de main» a la surcharge de travail, a Ia faible reconnaissance par Ies collegues et Ie patron, aux relations difficiles avec la direc tion, au manque de communications et au peu de participation aux decisions. « 11 faut tabler sur des solutions existantes et ame liorer les pratiques plutOt que d'en creer de nouvelles ", soutient-il. Souvent, la moitie du chemin est deja faite, dU-il, en enume rant Ies reunions d'equipe, les outils d'eva luation, les moyens de communication et les preuves de reconnaissance qui pour raient etre multiplies, ameliores, develop pes, «pour une gestion plus humaine des ressources ». Si rien n'est fait, « on s'en va vers une crise, une fracture, une perte de loyaute ». Les con flits se multiplieront dans les entre prises. L'absenteisme augmentera. Actuelle ment au Quebec, six millions de joumees sont perdues chaque annee en raison de problemes de sante men ta Ie. L'epuisement professionnel guette les travailleurs. Mais les problemes de sante mentale prennent toutes sortes de visages: irritabilite, desen gagement, absenteisme chronique, violence, depression nerveuse. Et Us ant taus, evidem ment, des repercussions sur la vie familiale et personnelle des travailleurs. Le risque de presenter un haut niveau de detresse psychologique est de deux a trois fois plus eleve pour les employes des secteurs etudies que pour Ia population
1. M. Laferriere, «Une crise des ressources humaines en vue: I'epuisement professionnel guette si rien n'est fait, craint un expert de Laval ", Le Solei/, 12 decembre 2002, p. A4.
Apres l'etude de ce chapitre, Ie Iecteur devrait etre plus apte
a:
• Enumerer Ies phases historiques qu'a traversees Ie cadre legal global de la sante et de la securite du travail, en particulier en ce qui concerne la responsabilite patronale dans ces situations. • Connaitre les principales statistiques, les principales donnees financieres et les principaux mecanismes de fonctionnement de ce domaine d'activite. • Nommer les mandats de la CSST et expliquer de queUe la cotisation d'un employeur a la CSST.
fa~on
est determinee
• Connaitre les gestes a faire s'il se produit un accident du travail et expliquer les notions importantes relatives a l'admissibilite de toute reclamation pour lesion professionnelle. • Connaitre les distinctions entre les types de prevention primaire, secondaire et ter tiaire, et nommer certaines conditions d'efficacite en matiere de gestion de la preven tion, ainsi que certains mecanismes de gestion consideres comme les plus efficaces. • Enumerer les principales composantes d'un programme de promotion de la sante au travail. • Definir en quoi consiste Ie stress au travail et nommer certaines composantes d'un programme efficace de gestion du stress au travail. • Expliquer ce qu'est un programme d'aide aux employes et discuter de l'efficacite relative d'une telle approche.
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Partie IV
I
Les defis des conditions de travail
Chapitre 13 \ Promouvoir un milieu de travail sain
qUl?becoise en general. Mais la situation est plus preoccupante en milieu hospitalier, ou les employes ont 6,2 fois plus de risques que la population quebi?coise d'atteindre un haut niveau de detresse psychoIogique. n y a urgence d'agir, fait valoir Jean-Pierre Brun. A ceux qui s'etonneraient d'apprendre que Ies professeurs souffrent de detresse psychologique, Ie chercheur precise que Ia « sous-charge ,> de travail peut aussi etre source de stress, ainsi que Ie manque de reconnaissance et Ia qualite du travail. «II en va du devoir des organisations et de zrEtat de s'assurer que chaque personne puisse conserver et meme developper sa sante psychologique en travaillant», a-toil conclu en plaidant pour «un savoir-vivre de qualite au cceur de nos organisations ».
o Comment
se manifeste ce que Jean-Pierre Brun qualifie de crise qui menacerait les ressources humaines au Quebec? Quelles en sont les principales causes?
• Dans queUe mesure votre expe rience personneUe en milieu de travail vous permet-elle de partager ce diagnostic?
e Quels moyens pourraient etre pris pour prevenir, sinon corriger, une telle situation?
e Quels liens pouvez-vous etablir entre la situation decrite dans cet article et la gestion habituelle des enjeux de sante et de securite du tra vail dans des organisations que vous connaissez?
Toutes les personnes qui s'interessent au monde du travail ont pu noter que les problemes de sante et de securite du travail sont devenus tres preoccupants au sein des organisations, non seulement a cause des couts de plus en plus eIeves qu'ils generent, mais aussi acause des lois et des regles adoptees par les gouvemements dans ce domaine ainsi que des medias qui accordent une importance accrue a cette facette du fonctionnement des organisations. Des incidents spectaculaires mais malheureux, comme ceux de Bhopal (contami nation d'une region de l'Inde et plusieurs milliers de morts a la suite d'une fuite de gaz toxique dans une usine de Union Carbide), de Terre-Neuve (nau frage d'une plate-forme de forage et noyade des nombreux travailleurs qUi s'y trouvaient) et de la mine Westray en Nouvelle-Ecosse (mort de 26 mineurs), ne sont que quelques exemples des evenements qui contribuent a maintenir cet interet. On ne s'etonnera donc pas d'apprendre que les parties syndicale et patronale en font regulierement l'objet de leurs prises de pOSition. Par exemple, Ie president de la plus importante centrale syndicale du Quebec denont;ait recemment l'inertie de nombreux employeurs en ce qUi conceme la mise en place des moyens de prevention des accidents du travail dans les organisations quebecoises.
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Partie IV
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Les defis des conditions de travail
13.1.2 Les considerations legales Au-dela des considerations humanitaires, la deuxieme raison pour les em ployeurs de se preoccuper des enjeux lies a la sante et a la securite du travail concerne les considerations legales et les consequences susceptibles de ternir la reputation d'une entreprise et de ses dirigeants lors de situations qui
'I
Chapitre 13
!
Promouvoir un milieu de travait sain
En raison de ses dimensions obligatoirement r{:duites, Ie present chapitre ne constitue qu'une introduction a ce domaine vaste et complexe qu'est la sante et la securite du travail. Les points suivants sont abordes: les raisons d'intervenir, les etapes du developpement du cadre legal par lequel l'£tat a impose des obligations aux employeurs en cette matiere, les donnees globales concernant la sante et la securite du travail au Quebec, la gestion des acci dents du travail et des maladies professionnelles, la gestion de la prevention et la promotion de la sante au travail.
. , Les raisons d'intervenir n y a au moins quatre bonnes raisons qui devraient convaincre les gestion naires de mieux gerer les dossiers de sante et de securite du travail.
13.1.1 Les consideTations hurnanitaiTes La premiere raison de la necessite de mieux gerer les dossiers de sante et de securite du travail reside dans des considerations humanitaires: per sonne ne devrait sciemment mettre en danger l'integrite physique et la sante de qui que ce soit. 11 faut cependant reconnaitre que, d'une part, plusieurs emplois com portent des risques qu'il est souvent tres difficile d'eliminer et que, d'autre part, les individus prennent souvent des decisions qUi mettent leur sante en jeu (prenons, par exemple, Ie simple fait de fumer I). Ainsi, en ce qui concerne Ie premier facteur, S8 travailleurs au Quebec seraient morts en 2002 des suites de maladies respiratoires causees par l'exposition a l'amiante. En matiere d'ac cidents du travail, les entreprises quebecoises, meme parmi les plus pres tigieuses, sont regulierement montrees du doigt (Les Affaires, 2003) et invitees a ameliorer leurs pratiques en matiere de sante et de securite du travail. Quant aux caracteristiques individuelles qui sont liees a la presence d'acctdents du travail, l'age est malheureusement un facteur majeur, les jeunes (c'est-a-dire les personnes de moins de 2S ans) au travail ayant plus tendance a etre impliques dans des accidents que les autres categories d'age.
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Partie IV
I
Les defis des conditions de travaif
poursuite contre son employeur, mais il devait alors prouver que ce dernier
et~i,t re:pons~ble de l'accident. Ce fardeau de la pIeuve etait tre& diU\Cil~ et tres co~teux a assumer. Vers la fin de cette periode, certains employeurs par
hum~:llsme ou ~n .vertu d'une saine gestion, ont contribue a. la creatio~ des .premIeres aSSoClatlOns pour la prevention des accidents dans les uSines. Evldemment, un dossier vierge en matiere d'accidents entrainait a. cette epoque-Ia. comme aujourd'hui, une prime d'assurance reduite. Le ~ontexte juridique a cependant continue d'etre celui du droit civil ou du droit coutu mier (common law), c'est-a.-dire que Ie fardeau de Ia preuve revenait au plai gnant, Ie travailleur devant demontrer la responsabilite de I'employeur. 13.2.2 La responsabilite patronale individuelle Dans tous les pays industriellement avances, des lois sont apparues pour cor riger Ies principaux abus du systeme en place. En 1885, Ie Quebec a adopte I' Acte des manufactures de Quebec afin de proteger Ia vie et la sante des enfants et des femmes au travail, et d'enoncer les premieres regies en matiere d'inspection des Heux de travail. Le grand changement est cependant survenu en 1909, a 1a suite d'une Commission roya1e d'enquete sur 1es accidents du travail au Canada. Le Quebec a alors adopte Ia Loi concernant 1a responsa bilite des accidents dont 1es ouvriers sont victimes dans leur travail et 1a repa ration des dommages qui en resuitent. Cette 10i etabHssait Ie principe de la responsabilite individuelle de I'employeur et l'obligation pour Ie patron d'in demniser un accidente. Toutefois, Ies lacunes de cette 10i sont rapidement devenues evidentes (Tobin, 1987), de telle sorte que Ie 1egislateur quebecois s'est enfin decide, en 1931, a. suivre I'exemple de l'Ontario en adoptant 1a Loi des accidents du travail, ce qui allait permettre de passer a une troisieme periode.
13.2.3 La responsabilite patronale collective Cette 10i marquait «la naissance d'un nouveau regime d'indemnisation et la fin d'une epoque 2 ». Si Ies travailleurs accidentes renon~aient a intenter des actions individuelles, sauf en cas de malveillance ou de negligence flagrante dans Ie respect des obligations patronales en la matiere, les employeurs accep taient d'etre les seuls a financer collectivement un regime d'indemnisation et d'assurance responsabilite sans egard a la faute. A partir de Ia promulgation de cette loi, Ie systeme d'indemnisation des accidentes du travail allaH etre administre par une commission gouvernementale. Par ailleurs, la mutuelle d'assurance disposerait des fonds pour verser avec diligence les indemnites appropriees aux travailleurs accidentes. Cette troisieme periode a dure pres de SO ans, avant que Ie H~gislateur ne soit determine a intervenir de nouveau.
2. Extrait d'un texte anonyme intitule «Le regime quebecois de sante et de securite du travail, de 1885 nos jourS)} (voir Ie site Internet de la CSST: www.csst.qc.ca).
a
Chapitre 13
I
Promouvoir un milieu de travail sain
rendent evidente la delinquance de ces derniers. Nous reviendrons un peu
pluS loin
SUI
ce cadre legal.
13.1.3 Les considerations financieres
La troisieme raison est strictement financiere : il peut en couter tres cher de ne pas investir dans des mecanismes de prevention des accidents du travail ainsi que dans la mise en place des moyens susceptibles de prevenir Ia deterioration de Ia sante physique et mentale des travailleurs alors que, comme nous Ie verrons dans ce chapitre, ces memes investissements peuvent entrainer, a certaines conditions et dans certaines circonstances, des benefices importants. A cet egard, mentionnons que, selon une etude de Sante Canada (2002), les problemes de sante mentale au travail greveraient pres de 14% des benefices annuels nets des societes canadiennes, soit 16 milliards de dollars par annee. Et ces couts ne tiendraient pas compte des couts rattaches a l'embauche et a la formation des employes absents, aux beures supplementaires que doivent faire leurs collegues pour compenser leur absence, a la baisse de productivite des personnes malades restant en poste, etc. On ne s'etonne donc pas d'ap prendre que 54 % des organisations ayant repondu a une enquete n§cente de Watson Wyatt (2000) aient declare que l'augmentation des demandes de reglement consecutives a des problemes psycbologiques soit leur principal sujet d'inquietude en matiere de sante au travail.
13.1.4 L'amelioration du c1imat de travail Enfin, la quatrieme raison de l'importance de se preoccuper davantage de la sante et de la securite du travail concerne l'amelioration du climat de travail et des relations patronales-syndicales dans l'entreprise. En effet, les syndicats et les travailleurs seront naturellement plus portes a collaborer avec la direc tion si celle-ci accorde de l'importance a ces questions. Par contre, la negli gence dans ce domaine est plutot une source de conflits entre les differentes parties.
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Un bref retour en arriihe Les fa~ons de traiter les problemes de sante et de securite du travail ont traverse quatre grandes periodes, qui vont de la revolution industrielle a la periode des annees 1979 et 1985.
13.2.1 La revo1ution industrielle Au cours du XIX€ siecle et au debut du XX€ siecle, a cause de l'effet combine de la revolution industrielle et du liberalisme economique, la conception domi nante en matiere de sante et de securite du travail etait que Ie travailleur vic time d'un accident etait la plupart du temps considere comme responsable de son propre malheur. II pouvait sans doute, dans de rares cas, engager une
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Partie IV
I Les detis des conditions de travail Le droit de retour au travail
Leddr~it de retour au travail oblige l' employeur reintegrer le travaiUeur qui re ~VIent capable d'occuper son emploi ou un emploi equivalent avec Ie s.al~lIe et les ~vantages qui y sont lies. Ce droit doit s'exereer dans les delais fIxes par Ia 1m, soit deux ans si l'etablissement compte plus de 20 travailleurs, et un an dans les autres cas. Afin de proteger Ie droit de retour au travail, la CSST met tout en ceuvre pour maintenir Ie lien d'emploi entre Ie travailleur ayant subi une lesion professionnelle et son employeur. Pour faciliter la rein tegration du travaHleur dans son milieu de travail, une intervention rapide et la collaboration de toutes les parties, soit Ie travailleur, ses representants, son employeur, les medecins et la CSST, sont essentielles. De plus, cette fac;on de faire donne tout son sens au droit a la readaptation, puisque ces deux droits ont Ie meme objectif: Ie retour au travai1.
a
Le droit
a Ja readaptation
Ce droit s'applique au travailleur ayant subi des dommages physiques ou psy chiques tels que les consequences de sa lesion professionnelle compromettent sa reinsertion sociale et professionnelle. L'objectif de la readaptation est de faciliter Ia reintegration dans Ie travail en eliminant ou en attenuant l'inca pacite physique et en aidant Ie travailleur a surmonter les consequences per sonnelles et sociaies de sa lesion professionnelle. On cherche a rHntegrer Ie travailleur d'abord dans son emploi ou, si cet emploi n'existe plus, dans un autre emploi chez son employeur ou ailleurs sur Ie marche du travail. L'assignation temporaire L'assignation temporaire est une mesure liee a I'objectif de Ia readaptation. Elle vise a favoriser Ie prompt retour au travail du travailleur ayant subi une lesion professionnelle, meme s'il n'est pas encore tout a fait remis. Elle permet a son employeur de l'affecter a une autre tache en attendant qu'il puisse occu per de nouveau son emploi ou un emploi convenable. La mesure d'assigna tion temporaire s'applique avec I'accord du medecin traitant et conserve au travailleur Ie salaire et Ies avantages rattaches a I'emploi qu'il occupait avant son accident ou sa maladie professionnelle. Pour clore ce retour en arriere, nous presentons deux points de vue con tradictoires sur Ie sens de cette evolution. Ainsi, dans une analyse approfondie des fondements du regime etabU au Quebec en matiere de sante et de securite du travail, Bernier (1987) explique que, durant 40 ans, soit de 1931 a 1971, l'aspect financier du regime a ete maitrise, I'evolution des couts etant rela tivement stable et strictement justifiee par Ia hausse du cofit de la vie et quelques changements sOcioeconomiques. Cependant, en 1974, en 1979 et en 1985, Ie legislateur aura it bouleverse Ies regles traditionnelles de finance ment du regime, d'abord en revalorisant retroactivement les rentes qUi devaient etre versees aux accidentes du travail, puis en ajoutant au regime de nombreuses autres mesures dites sociaIes, dont les couts totalisent annuelle ment des centaines de millions de dollars. Ces couts sont assumes par les employeurs, qui en seraient venus de plus en plus a considerer la cotisation
Chapitre 13
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Promouvoir un milieu de travail sain
13.2.4 Les reformes
En 1979 et en 1985, l'Assemblee nationale du Queb;c a ad~pte cou~ s~r cc;up
deux loiS importantes qui constituent maintenant 1 essen tiel d~ la legtsla:lon quebecoise en matiere de sante et de securite du travail. Il s'aglt de la LOl sur la sante et la securite du travail, qui a ete adoptee Ie 21 decembre 1979 et qui est entree en vigueur Ie 10 janvier 1980, et de la Loi sur les accidents du tra vail et Ies maladies professionnelles, en vigueur depuis Ie 19 aout 1985.
La Loi sur la sante et la securite du travaH Cette Ioi poursuit Ie tres ambitieux objectif de «1'elimination a la source meme des dangers pour la sante, la securite et l'integrite physique des tra vailleurs ». Elle consacre Ie paritarisme en etabl1ssant « des mecanismes de par ticipation des travailleurs et de leurs associations, ainsi que des employeurs et de leurs associations ala realisation de cet objet ». La Loi sur la sante et la secu rite du travail prevoit qu'un nouvel organisme, institue sous Ie nom de Commission de la sante et de la securite du travail (CSST), vient remplacer la Commission des accidents du travaiL Organisme paritaire, la CSST est dirigee par un conseU d'administration compose du president et d'un nombre ega1 de representants des travailleurs et des employeurs. Cette loi introduit egalement Ie retrait preventif et Ie droit de refuser d'executer un travail dangereux. Selon la loi, un travailleur a Ie droit de refuser d'executer un travail s'H a des motifs raisonnables de croire que ce travaill'expose, lui ou une autre personne, a un danger. Dans ce cas, il doit en aviser son employeur et lui donner les raisons de son refus. Ii doit ensuite demeurer disponible sur les lieux de travail pour executer d'autres taches, Ie cas echeant. Aucune sanction ne peut etre imposee a un travailleur parce qu'il a exerce ce droit. La 10i innove egalement en accor dant a la travailleuse enceinte ou qui allaite un droit au retrait preventif. Elle mene egalement a la creation, en 1980, d'un organisme de recherche, l'Institut de recherche en sante et en securite du travail, qui releve de la CSST. Cet organisme s'appelle maintenant l'Institut de recherche Robert-Sauve en sante et en securite du travail (IRSST).
La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles Quant a la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, elle instaure un nouveau regime de reparation des lesions professionnelles et amorce en plus une rHorme de plusieurs aspects, dont la protection du revenu, les plaintes ainsi que la revision et l'appel des decisions rendues par la CSST. Cette 10i cree d'ailleurs un nouvel organisme d'appel, la Commission d'appel en matiere de lesions professionnelles. Independante de Ia CSST, cette commission releve du ministre de la Justice. La loi attribue en outre de nou veaux droits aux travailleurs victimes de lesions professionnelles: Ie droit au retour au travail et Ie droit a la readaptation en vue d'une reinsertion socia Ie et professionnelle de l'accidente.
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distribution des depenses pour J'annee 2001, elles sont reparties entre les depenses dites de reparation des lesions professionnelles (1816425000 $), les depenses pour couvrir les programmes de prevention (96851000 $), les depenses affectees au programme «Pour une maternite sans danger» (134337000$), Ie financement de tribunaux administratifs (51148000$) et enfin les frais d'administration (360591000 $). Ainsi, on constate, entre autres choses, que de 1986 a 1994, les depenses de prevention ont augmente de pres de 50%. Pendant la meme peri ode, les ctepenses affectees au pro gramme «Pour une maternite sans danger» ont augmente de 1SO %. Quant aux revenus, ils sont principalement constitues des cotisations ver sees par les employeurs. En 1994, ces cotisations atteignaient plus de 1,5 mil liard de dollars. En 2001, les cotisations des employeurs atteignaient la somme de 1611100000$ et couvraient 76,2% des depenses totales, les autres revenus se composant essentiellement (pour 23,8% du total) de revenus de placements et d'interets sur les cotisations. Dans certains secteurs d'activite economique, les cotisations que les employeurs doivent verser a la CSST ont evolue d'une fa(,:on demesuree par rapport a l'evolution de la masse salariale. Par exemple, dans Ie secteur de la sante et des services sociaux, les cotisations ont connu, entre 1984 et 1995, une croissance de plus de 400% (passant de 36,8 a IS 1 millions de dollars) alors que la masse salariale n'a augmente, durant la meme periode, que de 80%. Apres quelques annees d'une gestion financiere exemplaire donnees recentes sont donc redevenues inquietantes.
a la CSST, les
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Promouvoir un milieu de travail sain
payable a la CSST comme une surtaxe deguisee imposee aux entreprises, surtaxe qui, au surplus, serait «nuisible a leur capacite concurrentielle». Un autre expert tient un discours oppose. En effet, Brody (1987) signale que, plutot que de critiquer les couts eleves du systeme, les employeurs devraient promouvoir la prevention comme moyen de reduire les couts de la reparation. Seion ce specialiste, Ies couts indirects des accidents du travail atteignent des sommes coiossaies puisqu'ils «peuvent representer une pro portion de 4 a 30 fois Ies couts directs ». Le faible investissement en preven tion s'expliquerait, seion Brody, par «I'illusion du syndrome de I'iceberg», c'est-a-dire l'ignorance, par les employeurs, de l'ampleur des couts indirects (ou non assures) des accidents du travail et des maladies professionnelles. Cette ignorance menerait a une {( sous-estimation de la rentabilite de la pre vention et, par Ie fait meme, a un sous-investissement en ce domaine}). Comme on peut Ie constater, les defis a reIever en matiere de sante et de securite du travail soulevent les passions, et les positions des uns et des autres ne sont pas facilement conciliables. Pour mieux situer Ie debat, voyons main tenant quelques donnees globales sur I'ampleur du phenomene au Quebec.
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L'ampleur des problemes relatifs a la sante et a la securite du travail A partir des statistiques pubIiees par la CSST, on constate que, de 1988 a 2000, Ie nombre total de demandes d'indemnisation pour des accidents du travail est passe de 255 188 a 155046, soit une diminution de 60,7%. Pendant la meme periode, Ie nombre de demandes d'indemnisation pour des maladies professionnelles est passe de 6717 a 9844, soit une augmentation de 68,2%. Par ailleurs, Ie nombre de deces survenus a la suite d'accidents du travail ou de maladies professionnelles couverts par la CSST est passe de 128 en 1988 a 180 en 2000, atteignant un sommet de 243 en 1989. Pendant une peri ode anterieure a ces donnees, soit de 1976 a 1985, Ie nombre des lesions profes sionnelles pour lesquelles il y a eu indemnisation a augmente de 70%, a un rythme moyen de 6% par annee. Pendant la meme periode (1976-1985), Ie nombre total des travailleurs assures n'a augmente en moyenne que de 1,9% par annee. Globalement, et compte tenu de la duree des interruptions de tra vail consecutives a ces lesions professionnelles, environ cinq millions de jours de travail seraient ainsi perdus chaque annee, au Quebec, a cause des acci dents du travail et des maladies professionnelles.
13.3.1 L'evolution des depenses et des revenus de la CSST De 1986 a 1994, les depenses de la CSST (qui ne representent pourtant que la pOinte de l'iceberg en ce qui a trait a l'ensemble des couts de sante et de securite du travail) ont ctepasse, en 1991, Ie cap des 2 milliards de dollars, pour ensuite etre ramenees aux environs de 1,5 milliard en 1994, pour finalement se situer a un peu moins de 2,5 milliards en 2001. Quant a la
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• Elle ~herche a permett:e aux ~ravailleurs de recouvrer Ie plus rapidement possIble Jeur autonomle physIque, sociale et professionnelle. • Elle vise Ie maintien du lien d'emploi et l'application du droit de retour au travail. • ElJe indemnise les travailleuses enceintes ou qUi allaitent lorsque celles-ci bene£icient d'un retrait preventif dans Ie cadre du programme «Pour une maternite sans danger ». En matiere de financement: • La CSST ales pleins pouvoirs, dans les limites imposees par la loi, pour fixer et percevoir les primes d'assurance des employeurs tenus de contribuer a son fonds d'indemnisation. • Elle doit veiller a ce que les employeurs assujettis soient inscrits et classes aux fins de la tarification. • Elle assure Ie partage des couts du regime entre les employeurs en fonction des divers modes de tarification mis en place. Une re£orme visant une plus grande equite a ete instauree en 1999. Elle permet de calculer des primes qui reconnaissent davantage les efforts deployes par les employeurs en matiere de prevention et de maintien du lien d'emploL • Le financement de la CSST provient des cotisations per~ues aupres des employeurs et des revenus de placement. Le mandat d'indemnisation et de readaptation est parfois appele un man dat de reparation. La reparation comprend la readaptation des travailleurs victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles de meme que l'indemnisation, soit Ie versement aux travailleurs (ou a leurs bene£iciaires) de diverses indemnites telles que les suivantes: • • • •
les les les les
indemnites relatives a l'incapacite temporaire ou permanente; indemnites de remplacement du revenu; indemnites relatives a des dommages corporels; indemnites de deces.
Comme dans tout regime d'assurance, ces indemnites (ou prestations) sont financees a l'aide de cotisations versees par les employeurs. Nous exam i nons maintenant la maniere de fixer cette partie de la facture annuelle de n'importe quel employeur que constitue la cotisation a la CSST.
13.3.3 Les cotisations versees par les employeurs
ala CSST
Les cotisations versees par les employeurs a la CSST sont etablies a partir d'une evaluation annuelle des besoins financiers de la CSST. Ceia permet d'en arriver, sur la base de la masse salariale de l'ensemble des employeurs, a un taux moyen provinciaL Puis on essaie de tenir compte des risques, qui sont evidemment differents seion les secteurs d'activite economique. Cela produit une serie de taux par secteur. A l'interieur des secteurs, on precise ensuite des
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I Promouvoir un milieu de travail sain
13.3.2 Les mandats de la (SST La Commission de la sante et de la securite du travail est un assureur public dont la mission premiere consiste a servir les travailleurs et les employeurs du Quebec. Elle administre Ie regime de sante et de securite du travail du Quebec. La CSST administre sept lOis, dont les deux plus importantes sont la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et la Loi sur la sante et la securite du travail. La CSST est chargee de trois grandes missions, soit la prevention inspection, l'indemnisation et la readaptation, ainsi que Ie financement. En matiere de prevention-inspection: • La CSST elabore, propose et met en CEuvre une politi que de sante et de securite du travail. • EIle fait la promotion de la sante et de la securite du travail et soutient les efforts concertes des travailleurs et des employeurs pour eliminer les dangers dans les milieux de travail. EIle subventionne ces partenaires en ce qui a trait a la sante et a la securite du travail. • Eile veille au respect des lois et des reglements. • Elle mene des enquetes dans les cas d'accidents graves ou mortels, impose des mesures correctives et peut mettre les employeurs negligents a l'amende. En matiere d'indemnisation et de readaptation: • La CSST assure aux travailleurs victimes de lesions professionnelles l'ensemble des services auxquels ils ont droit.
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13.4.1 L'evenement dec1encheur et la declaration du salar1e Des ~u'il s'estime victime d'une lesion professionnelle, Ie travailleur (ou son representant dans Ie cas d'un deces ou d'une incapacite a agir) doit en aviser son superieur immediat dans les plus brefs delais possibles et remplir un for mulaire de declaration d'accident du travail ou de maladie professionnelle. Si ceia est necessaire, l'employeur doit pouvoir fournir Ies premiers soins ou les premiers secours a tout travailleur victime d'une lesion professionnelle. Si Ie travailleur doit s'absenter de son travail en raison de sa lesion, Ie salaire prevu pour cette journee (celIe de l'accident) lui sera verse a 100% par son employeur. Ce paiement ne sera pas rembourse par la CSST (article 59). Si l'absence doH se poursuivre, les 14 premiers jours seront payes par l'em ployeur a 90% du revenu net du salarie, et l'employeur sera ensuite rem bourse par la CSST. Pour toute absence consecutive a une lesion profession nelle et dont la duree se prolonge au-dela d'un quinzieme jour, c'est normalement la CSST qui assume directement Ie paiement des indemnites de remplacement du revenu du salarie, sauf si une convention collective force l'employeur a verser ces indemnites directement au salarie. Ces sommes seront alors remboursables par la CSST, si Ie cas est juge admissible.
13.4.2 les criteres d'admissibilite Toute reclamation pour une lesion professionnelle n'est pas automati quement admissible. II faut d'abord savoir en quoi consiste une lesion pro fessionnelle. Selon la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, il s'agit d'« une blessure ou une maladie qui survient par Ie fait ou a l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la recidive, la rechute ou l'aggravation» (article 2). La loi definit l'accident du travail de la fa~on suivante: «un evenement imprevu et soudain attribuable a toute cause, survenant a une personne par Ie fait ou a l'occasion de son travail et qUi entraine pour eUe une lesion professionnelIe)} (article 2). Notons que c'est l'evenement qui doit etre imprevu et soudain, et non la douleur ressentie. Par exemple, Ie fait pour un salarie de ressentir de la douleur (a la tete, au cou ou dans Ie dos) ne suffit pas pour conclure a une lesion professionnelle admissible, puisque meme si la douleur est, imprevue et soudaine, eUe ne constitue pas en soi un evenement accidenteL A l'inverse, si un salarie trebuche sur un obstacle inhabituel, tombe et se casse un membre, l'accident du travail sera evidemment beaucoup plus facilement admissible. Il faut aussi comprendre la notion importante que constitue la maladie professionnelle. A l'article 2 de la Loi sur les accidents du travail et les ma ladies professionnelles, l' expression est definie de la fa~on suivante: «une ma ladie contractee par Ie fait ou a l'occasion du travail et qui est caractt",ristique de ce travail ou reliee directement aux risques particuliers de ce travail». Aux articles 29 et 30 de la loi, on revient sur Ie concept de «maladie presumee professionnel1e» et de «maladie professionnelle sans presomption)}. Ainsi, il
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qui ant des niveaux de unI"te's , c'est-a-dire des regroupements d'entreprises d' 't' 'g"t du taux ' .que risque comparables. On obtient alms des taux um e. Il sal chaque employeur situe dans cette unite doit, en princip~, payer. ,A t~tre d'exemple, signalons qu'en 2001, Ie taux moyen des cotisatlOns payees a la CSST a ete de 1,89 $ pour chaque tranche de 100 $ de salaire assurable. Le taux moyen par secteur Hait de 4,86 $ pour Ie groupe 1 comprenant Ie secteur du batiment et des travaux publics, I'industrie chimique, Ie secteur de la foret et des scieries, Ie secteur des mines, des carrieres et des puits de petrole, et finale ment Ie secteur de Ia fabrication de produits en metaL Au sein du groupe 2, ce taux Hait de 3,72 $ pour l'industrie du bois (sans les scieries), de 2,68 $ pour l'industrie du caoutchouc et des produits en matiere plastique, et de 3,31 $ pour Ie secteur de la fabrication de produits mineraux non metalliques. Quant aux unites, elles comportaient des taux tres variables. En 1990, une reforme de la tarification a permis d'introduire trois regimes particuliers de tarification: Ie regime au taux de I'unite, Ie regime a taux per sonnalise et Ie regime retrospectif. Le regime au taux de l'unite (regime «non personnalise») s'applique aux employeurs de petite taille (93% des cas). Le regime ii taux personnalise s'applique a des employeurs dont Ia masse salariale est suffisamment importante (6% des cas). L'experience de ces employeurs, c'est-ii-dire l'historique de leurs depenses en matiere de sante et de securite du travail, est consideree dans Ie calcul de Ia cotisation. Un «degre de person naIisation» refiete Ia proportion de l'experience dont on tient compte dans Ia determination du taux de cotisation personnalise. Par exemple, un degre de personnalisation de 40 % signifie que 40 % du taux de cotisation est fonction de l'experience de l'employeur et 60%, de l'experience de son unite. Le regime retrospectif, enfin, s'adresse aux rares employeurs (1 % des cas) qUi ont un degre de personnalisation de 100%. Signalons aussi que Ie taux personnalise est calcule a partir de I'ensemble des depenses connues de l'employeur pour les trois annees precedentes. Par exemple, pour Hablir Ie taux personna lise de 1997, on calcule I'ensemble des depenses connues de 1993, 1994 et 1995. La determination de la cotisation payable a Ia CSST ne constitue cepen dant qu'une partie minime des activites de gestion relatives a Ia sante et a la securite du travail. Dans Ia prochaine section, nous abordons Ie dHi de Ia ges tion quotidienne des enjeux de sante et de securite du travail et presentons quelques mecanismes de gestion qu'un employeur peut utiliser dans ce domaine.
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La gestion des accidents du travail et des maladies professionnelles Dans cette section, nous presentons les principales Hapes du suivi des cas d'accidents du travail au de maladies professionnelles. Nous insistons sur les notions fondamentaies que tout gestionnaire devrait maitriser.
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13.4.4 Le suivi administratif II taut eviter que des rapports d'enquetes ne fassent que s'empiler sur des tablettes et tombent dans l'oubli. Pour garantir un suivi, il est preferable de designer des responsables de la mise en reuvre des mesures correctives, de prevoir des echeanciers a respecter et de consigner ces renseignements sur un registre con~u a cet effet. Le sui vi administratif des dossiers de sante et de securite du travail implique egalement qu'on s'assure que toutes les demarches prevues dans la loi seront realisees conformement aux droits et aux obligations de l'employeur et du salarie (ou des salaries) en cause.
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La gestion de la prevention
. . . ... .. . .... ... .. .. .. .. .. Les experiences accumulees et les recherches effectuees sur Ie sujet demon trent clairement que, pour etre geres d'une fa~on efficace, les dossiers de sante et de securite du travail doivent etre abordes com me tout autre important probleme de gestion. Pour reprendre les termes de Simard, « I'experience de nombreuses entreprises montre que Ie dossier de sante et de securite du tra vail est non seulement gerable, mais que les entreprises qui Ie gerent effica cement en retirent divers avantages interessants au plan economique et concurrentiel» (1990, p.I-2). Le cas de l'entreprise Natrel illustre bien cette affirmation. Apres quatre annees d'efforts, cette entreprise a en effet reussi a diminuer son taux de cotisation personnalise a la CSST de 4,15 $ a 1,58 $. ~
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Promouvoir un milieu de travail sain
y aura presomption de maladie professionnelle si deux conditions sont rer~
plies: le travailleur est atteint d'une maladie mention~ee a, l'a~ne~e 1 de la 01 et il a exerce un travail correspondant a cette maladle d apres I annexe. Par ailleurs, si Ie travailleur est atteint d'une maladie non prevue a l'annexe I, il devra demontrer la relation entre cette maladie et son travail. En d'autres termes, et selon ce que prevoit la Ioi, Ie travailleur devra «demontrer a la Commission que sa maladie est caracteristique d'un travail qu'il a exerce ou qu'elle est relH~e directement aux risques particuliers du travail ». Dne derniere notion qu'il importe de connaltre en matiere d'admissibilite concerne la presomption de lesion professionnelle. En effet, Ie legislateur a prevu, a l'article 28 de la Ioi, qu'« une blessure qUi arrive sur Ies Heux du travail alors que Ie travailleur est a son travail est presumee une lesion professionnelle». Dne telle presomption, lorsqu'elle slappUque, fait que Ie travailleur n'a pas a demontrer l'existence d'un evenement imprevu et soudain; il n'a qu'a demontrer la presence concomitante des trois elements constitutifs de la pre somption, soit l'existence d'une biessure, sur les lieux du travail, alors que Ie travailleur est a son travail. Pour renverser une telle presomption, l'employeur (ou son representant) devra demontrer l'absence de I'un de ces trois elements.
13.4.3 Le processus d'enquete et d'ana1yse QU'elle soit eventuellement jugee admissible ou non, toute declaration d'un salarie relative a un accident du travail ou a une mala die professionnelle doit declencher un processus d'enquete et d'analyse. Ce processus vise, d'une part, a valider l'admissibilite de la reclamation presentee et, d'autre part, a bien cerner les causes de la situation problematique de fat;:on qu'on puisse prendre les mesures pour eviter qu'une telle situation se reproduise. A l'instar de Boisvert (1992), il faut se poser les questions suivantes. • • • • •
QUi menera l'enquete? Sur quoi faut-il enqueter? Quand faut-il enqueter? Ou faut-il enqueter? Comment faut-il enqueter?
L'enquete sur l'accident ne doit pas etre un pretexte pour chercher des coupables. On doit plutot essayer de refleter d'une maniere valide Ies faits decrits par Ies personnes rencontrees et Ies circonstances entourant ces evene ments. Dans Ies cas plus complexes, on peut constituer des groupes de travail pour analyser les faits et proposer des voies de solution. Par aillenrs, il faut aussi etre conscient dn fait que certains travailleurs (qui ne representent cependant qu'une minorite) peuvent etre tentes de tricher et de pretendre faussement qu'ils sont victimes de lesions. II s'agit d'un petit jeu dangereux susceptible d'entrainer des consequences dramatiques pour les tra vailleurs en cause.
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Une conception integree de 1a sante et securite du travaiJ
L~s ~ccidents du travail et les maladies professionnelles n§sultent d'une com bmalson de facteurs techniques, organisationnels et humains et il faut Con c~voir ~es solutions ~Ui tiennent compte de l'interdepe~dance de ces dImensIOns. De plus, I une des approches les plus efficaces consiste a solli citer la collaboration des gestionnaires, puisqu'ils sont souvent les seules per sonnes capables d'apporter des solutions veritables aux causes fondamentales des probU:mes de sante et de securite. Un engagement c1air de ]a haute direction Toutes les entreprises qui ont reussi a mettre au point une approche efficace en matiere de sante et de securite du travail se caracterisent par un enga gement clair et ferme pris a cet egard par les membres de la haute direction. Cet engagement peut se manifester de plusieurs fa.;ons. Un premier signe tres important de cet engagement touche a la formulation et a la diffusion d'une politique formelle de gestion de la sante et de la securite du travail, politique qui accorde vraiment la priorite a ces questions. Un deuxU~me indice de cet engagement est lie aux res sources consacrees a la gestion, en particulier Ie statut attribue a la personne responsable de ce dossier. Un troisieme indice concerne les attitudes et les comportements des membres de Ia direction. Si ces derniers ne respectent pas les regles de securite et d'hygiene et n'en font pas une promotion active, il sera a peu pres impossible de convaincre les chefs de service et Ies employes d'attribuer de !'importance a ces questions.
Une responsabiJite c1arifiee et partagee Dans toute entreprise, queUe qu'en soit la taille, une personne precise doit etre identifiee comme ayant Ia responsabilite de planifier, de coordonner et d'evaluer l'ensemble des demarches et des facettes relatives a ce dossier. Si la responsabilite doit etre claire (une personne precise est responsable), elle doit en meme temps etre partagee, c'est-a-dire que Ie responsable du dossier doit partager son pouvoir d'intervention avec plusieurs autres intervenants, au premier rang desquels on doit trouver Ies chefs de service, les employes eux memes et les membres d'un comite de sante et de securite du travaiL Le responsable du dossier doit donc se comporter com me un coordonnateur de ressources dans des processus orientes vers la resolution de problemes et la realisation d'objectifs. Seion Michel Perusse (2004, p. 214), «a l'avenir, ces intervenants seront de moins en moins souvent des executants, mais de plus en plus des gestionnaires et des strateges. On valorisera chez eux moins leurs connaissances techniques que leurs competences en relations interperson neUes et en gestion. »
Un ensemble adequat de mecanismes de gestion On peut regrouper les activites de gestion de la sante et de la securite du travail en quatre volets, soit les aspects juridiques et politiques, les aspects techniques, les aspects administratifs et les aspects informationnels. Ce sont les aspects techniques (en particulier l'organisation du travail) et les aspects
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Promouvoir un milieu de travail sain
On distingue trois niveaux de prevention: la prevention primaire, la pre vention secondaire et la prevention tertiaire (Boisvert, 1992). La prevention primaire a trait a la determination et a l'evaluation des risques avant que ne survienne un accident ou une maladie professionnelle. Ces moyens com prennent notamment les examens medicaux, les analyses de taches (compor tant evidemment un accent particulier sur la sante et la securite du travail) et les inspections des Heux de travail. La prevention secondaire concerne toute action qui vise a controler et a reduire Ie niveau de gravite d'une situation. Les mesures regroupees a l'interieur de cette categorie comprennent, par exemple, l'elaboration de plans d'action, c'est-a-dire des documents decrivant des objectifs a atteindre, des strategies a utiliser et des gestes specifiques a faire. On y trouve egalement l'etablissement de reglements internes relatifs a la sante et a la securite du travail, des activites d'information et de formation et la clarification des roles des differents intervenants. Ce deuxieme type de prevention permet d'atteindre des niveaux d'efficacite un peu plus eleves. Quant a la prevention tertiaire, qui intervient apres les faits, elle regroupe l'ensemble des actions qUi sont entreprises une fois que l'accident du travail ou la maladie professionnelle a eu lieu. Cest une prevention qualifiee de pas sive et post-traumatique, qUi est essentielle, mais dont l'efficadte est limitee.
13.5.1 Les facteurs de succes dans la gestion preventive des problemes de sante et de securite du travail Au-dela de la distinction qui precede entre les trois types de prevention, i1 apparait que la gestion efficace de la prevention dans Ie milieu de travail implique la determination des caracteristiques des entreprises qUi ont reussi a mettre au pOint une telle approche. Sans pretendre traiter cette question de fa~on exhaustive, nous expliquerons sommairement les quatre aspects sui vants: une conception integree de la sante et de la securite du travail, un engagement clair de la haute direction, une responsabilite clarifiee et partagee, et un ensemble adequat de mecanismes de gestion.
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des activites d'in.formati~n et de formation a des fins de prevention, Ie chan gement de certames habItudes de vie a I'aide de differents programmes (un cours pour, ce:ser d; fumer, un programme de conditionnement physique, etc.): la ~reatiOn d un environnement de travail favorisant des habitudes de VIe sames (des politiques sur Ie tabac, des initiatives visant a minimiser l'exposition a des facteurs de risque comme Ie bruit excessif ou les substances neurotoxiques) et les programmes d'aide psychologique aux employes (surtout pour les cas d'alcoolisme et de toxicomanie).
Apartir de reponses obtenues des dirigeants d'entreprises manufacturieres, Durand et autres observent «qu'un nombre eleve d'entreprises (34 sur 51) manifestaient de l'interet pour les trois niveaux [... ] de promotion de la sante» (1995, p. 426). Les trois activites de promotion de la sante considerees comme potentiellement les plus efficaces etaient liees au tabagisme, a la nutri tion et a l'activite physique. Cette recherche indique egalement que, meme s'ils sont majoritairement favorables a des programmes de promotion de la sante au travail, la plupart des participants ne s'y engagent pas, soit parce qu'ils per~oivent des difficultes relatives a leur implantation, soit parce qu'ils ne sont pas convaincus de la rentabilite de telles initiatives. En effet, Ie sys teme de sante quebecois (et canadien) exige deja des entreprises qu'elles con tribuent financierement au regime de sante et de securite du travail ainsi qu'au regime plus general d'assurance sante; la situation est tres differente dans les entreprises americaines, ou les employeurs sont plutot appeles a con tribuer directement au financement des primes d'assurance sante de leurs employes. C'est surtout cela qui expliquerait qu'en matiere de programmes de promotion de la sante au travail, « Ies initiatives les plus serieuses sont venues en tres grande majorite d'entreprises situees aux Etats-Vnis» (Durand et autres, 1995, p. 430). Parce qu'ils reduisent Ie taux d'absenteisme, qu'ils ameliorent les attitudes et Ie moral des employes, et qu'Us contribuent a une amelioration sensible de la sante au travail des employes qui y participent, les programmes de pro motion de la sante au travail constituent, aux yeux de Pepin et Dionne Proulx, «une pratique de gestion prometteuse", qUi ne pouna jamais cepen dant «se substituer a un programme d'amelioration des conditions de travail ou d'organisation du travail, qUi permettent Ie mieux d'eliminer Ie maximum de dangers (physiques, biologiques, psychosociaux) a la source}) (1996, p. 49). Parallelement a l'interet croissant pour ces programmes, on peut noter un interet accru pour la problematique du stress au travail, comme nous Ie verrons maintenant.
13.6.2 Les programmes de gestion du stress Compte tenu des changements de plUS en plus frequents auxquels doivent se soumettre les membres des organisations qui veulent survivre dans Ie con texte de turbulences actuel, les problemes de sante d'origine psychologique ont augmente dans tous les pays industrialises. Pour expliquer la detresse psychologique, Ie stress est la plupart du temps mis en cause. Et, comme Ie
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I Promouvoir un milieu de travail sain
averes les plus importants pour expli~uer ,1~S succes relatifs ou l'efficacite des entreprises en matiere de sante et de secunte du tra vaiL Parmi les aspects administratiis, les eH~ments les plus importants sont generalement les suivants: Ie climat general de securite, le st~t;It du po;te de coordonnateur, la composition et Ie fonctionnement du eomlte de sante et de securite du travail et, finalement, les mecanismes de controle du respect des regles relatives a la sante et a la securite du travaiL administratifs qui se sont
Par ailleurs, certains chercheurs (entre autres, Simard, Levesque et Bouteiller, 1988) ont constate que les entreprises qui ont obtenu les meilleurs resuItats en matiere de sante et de securite du travail ont surtout utilise les moyens de gestion suivants: des inspections regulieres et systematiques des Heux de travail, une analyse des postes de travail, des enquetes approfondies sur les accidents, un entretien preventif de l'equipement, des mesures correc tives concernant la machinerie, une formation des contremaitres et des employes aux comportements securitaires et a l'utilisation des protecteurs individuels, etc. Les comites de sante et de securite du travail sont aussi presentes comme un mecanisme susceptible, a certaines conditions, d'apporter une contribu tion importante a la gestion efficace du dossier. Les approches participatives (comme les comites paritaires) ont en effet des limites, comme Ie souIigne Bernier, selon qui, "avant meme de songer au paritarisme, les gestionnaires doivent avoir assume l'integralite de leurs responsabilites et avoir Ie contr6le de leur gestion» (1987, p. 208).
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La promotion de la sante au travail Jusqu'a ces dernieres annees, les preoccupations relatives a la sante et a la securite dans Ie milieu de travail ont surtout porte sur les accidents du travaiL Cette situation est en train de changer et les preoccupations relatives aux ma ladies professionnelles (et donc a la sante au travail) prennent de plus en plus de place. Un sondage realise en 1991 par la firme Deloitte et Touche indique que 85 % des dirigeants de 250 entreprises europeennes estimaient que «les consequences des problemes environnementaux pour l'hygiene et la securite du personnel etaient critiques ou importantes» (Boiral, 1997, p. 49). Dans cette section, nous traitons des programmes de promotion de la sante au travail, des programmes de gestion du stress, des programmes d'aide aux employes et des programmes de lutte contre la violence au travaiL
13.6.1 Les programmes de promotion de 1a sante au travan
Selon Pepin et Dionne-Proulx, un programme de promotion de la sante au travail peut se definir comme «un ensemble d'activites educationnelles, organisationnelles et environnementales qUi a pour but d'ameliorer la sante des employes et de reciuire les couts relies aux soins de sante» (1996, p. 45). Ces activites comprennent notamment la sensibilisation des travailleurs par
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Partie IV
I les detis des conditions de travail
13.6.3 Les programmes d'aide aux employes Selor; Sylvest.re, les premiers programmes d'aide aux employes ant ete crees aux Etat:-U.ms au ~ebut du xx e sieele, en meme temps que les premiers pastes de «secretalIes SOClaux» d'entreprises qui devaient «etudier les conditions de bien-etre des employes et suggerer differentes ameliorations» (1990, p. 892). Un peu plus tard, les programmes d'aide aux employes sont apparus comme des programmes destines a venir en aide aux employes alcooliques. Plus recemment, ils ont aussi ete associes it des mecanismes d'aide it des employes affliges par diverses formes de toxicomanie. Aujourd'hui, les programmes d'aide aux employes peuvent etre definis comme «un service subventionne par un employeur et destine it aider les employes it trouver de l'aide (sinon des solutions) a des problemes divers tels que l'alcoolisme, la toxicomanie, des problemes de depression, de sante mentale, de relations familiales, et d'autres probl(:mes d'ordre personnel [... J susceptibles d'avoir une influence negative sur Ie rendement au travail de ces employes» (Spicer, 1987, cite dans Burgess, 1995). Au-delit de leur valeur humanitaire, ces programmes fournissent-ils a l'or ganisation qui s'en sert des benefices au moins aussi eleves que leurs couts? Une evaluation rigoureuse de !'impact economique d'un programme d'aide aux employes est tres difficile, puisque, d'une part, la constitution de groupes de controle est it peu pres toujours absente et que, d'autre part, l'attribution it ce programme de consequences organisationnelles positives (comme la reduc tion de l'absenteisme, du nombre de cas de depression ou du nombre de cas de violence dans Ie milieu de travail) implique qu'on tient compte des autres causes susceptibles d'influencer ces variables dependantes. Autrement dit, si la situation s'ameliore, est-ce vraiment grace au programme d'aide aux employes? Par ailleurs, les programmes d'aide aux employes comportent Ie desavan tage d'etre une strategie exclusivement centree sur l'individu, alors qu'« il est preferable que les mesures d'aide couvrent l'ensemble de l'organisation plutot que les individus» (Bourbonnais et Comeau, 1997). Les conclusions d'une recherche evaluative realisee par Sonnenstuhl et Trice (1990) vont dans Ie meme sens. Ces auteurs soutiennent en effet que Ie counselling seul est insuf fisant et inefficace; il doit etre complete par la possibilite au sein de l'en treprise de placer I'employe devant la necessite de modifier ses comporte ments (ce que ces auteurs appellent la positive confrontation).
13.6.4 Les programmes de lutte contre la violence au travail Comme nous I'avons mentionne dans Ie chapitre 9, Ia violence dans les orga nisations constitue un phenomene emergent que les specialistes de la GRH et de la sante et de Ia securite du travail doivent essayer de mieux comprendre et auquel ils doivent chercher des solutions. Depuis 1990 au Quebec, environ 2000 reclamations par annee attribuables a la violence au travail sont admises a titre de lesions professionnelles. Par ailleurs, la notion de violence au travail est en train d'evoluer pour s'appliquer tant a la violence psychologique (par
Chapitre 13
I Promouvoir un milieu de travail sain
souligne Dionne-Proulx, {( lorsque les tranquillisants de typ~ valium, tranxene, etc., sont les medicaments les plus couramment prescnts par Ies medecins aussi bien au Canada qu'aux Etats-Unis, c'est la preuve qu: les stresseurs au la perception de ceux-ci ont des effets ~e~a:ifs su: Ia sante des individus» (1991, p. 179). Le stress est toutefois une reahte relatlVement com plexe qui a fait l'objet d'une plHhore d'articles et de !ivres OU l'on peut trou ver a peu pres autant de definitions du concept qu'il y a d'auteurs. Pour les besoins de cette discussion, nous emprunterons la definition suivante de Cartwright et Cooper: «un stress est toute force qui place une fonction psy chologique ou physique au-dela de ses limites habituelles de stabilite et qUi produit une tension a l'interieur de l'individu» (1997, p. 5). Apartir de cette definition, on peut donc constater que Ie stress, c'est d'abord une realite objective (des stimuli ou des sources de tension exterieurs a 1'1ndividu), mais c'est surtout une realite subjective qui amene la personne a ressentir une tension qui, dans certains cas, peut etre pen;:ue comme etant stimulante (Ie « bon» stress), et qui, dans d'autres cas, sera pen,:ue comme etant ecrasante et menant a Ia detresse emotive. Les programmes de gestion du stress devraient, selon Dionne-Proulx (1991), comprendre les quatre categories d'activites suivantes: des activites de diagnostic; des activites d'information sur Ie stress, ses consequences poten tielles sur Ia sante et son management; des activites de promotion et de main tien d'une bonne sante physique; enfin, des activites de modification des conditions de travail. L'importance de ce dernier type d'activites est soulignee par Bourbonnais et Comeau, qui soutiennent, en prenant pour appui Ies travaux presentes lors d'une conference internationale sur Ie stress a Washington en 1995, que « les interventions visant a reduire Ie stress au tra vail, lorsqu'elles sont orientees exclusivement sur les individus, sont peu effi caces et qu'il est necessaire d'intervenir egalement sur les organisations S1 on veut obtenir des resultats significatifs et durables» (1997, p. 18). De queUes fas:ons Ie stress est-il susceptible de se transformer en detresse, en epuisement professionnel ou burnout? Les reponses a cette question va rient, mais celle de Mongeon et Sylvain (1995) consiste a dire que les causes d'un tel epuisement professionnel se repartissent en fonction de caracteris tiques !iees, d'une part, a l'emploi (un manque de contrale des conditions de travail, un manque de relations significatives, des responsabilites sans pou voir, une surcharge de travail, etc.) et, d'autre part, a la per sonne (un sens exagere du temps qui presse, un sens exagere de la competition, une person nalite de type A, etc.). Le defi des organisations pour contrer Ia detresse psychologique se resumerait aux quatre activites suivantes: essayer de faire participer les employes aux decisions qUi les concernent; faciliter l'acces a des activites de formation et de soutien i susciter des occasions de discuter direc tement du stress, de ses manifestations et de ses consequences possibles; mettre en reuvre des programmes d'aide aux employes. Voici d'ailleurs une synthese sur ce dernier sujet.
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Partie IV
I
Les defis des conditions de travail
d'indernnisation, de readaptation et de retour au travail que les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles.
Conclusion NOllS avons d'abord vu dans ce chapitre que Ies questions relatives a la sante et a la securite du travail font partie des responsabilites de tout employeur depuis au moins 1931, mais que les obligations patronales recentes en cette matiere sont surtout Ie resultat des importantes lois promulguees en 1979 (Loi sur la sante et la securite du travail) et en 1985 (Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles). Ces lois sont necessaires puisque les accidents du travail et les maladies professionnelles continuent de provoquer des consequences negatives pour un trop grand nombre de travailleurs et d'entreprises. De plus, Ie dossier de la sante et de la securite du travail com porte de lourdes depenses directes (les cotisations a. la Commission de la sante et de la securite du travail) et des depenses indirectes encore plus lourdes. II est done tres important pour tout employeur de savoir non seulement com ment reagir lors d'un accident du travail, mais surtout comment (c'est-a.-dire par quels mecanismes concrets) prevenir de tels evenements, d'autant plus qu'une telle demarche de prevention peut etre tres rentable, comme Ie demontrent Ie cas de l'entreprise Natrel (que nous avons vu precedemment) et celui de la Ville de Mascouche (qui fait l'objet du cas analyse a. la fin de ce chapitre). En matiere de promotion de Ia sante au travail, nous avons pu cOllStater que les programmes existants sont encore relativement peu developpes et que les efforts a. faire doivent, pour etre efficaces, depasser Ie strict niveau des indi vidus pour englober Ie cadre organisationnel et les causes des situations pro blematiques. Le cas de la violence au travail, qui a ete brievement evoque, demontre que ces situations doivent etre abordees de la meme fa<;on que les autres situations de sante et de securite du travail, soit a l'aide des mecanismes associes a 1a prevention primaire, secondaire et tertiaire. Encore unAe fois, par consequent, l'engagement des gestionnaires est sollicite .. ll apparalt, comme l'ont signale a plusieurs reprises 1es instigateurs du Pro)et Mllle~a (Heat~, 1989; Project Minerva Canada, 1993), que 1a formatio~ en ~~st~o~ de:ralt comporter une composante obligatoire portant sur les en)eux lIes a 1 enVlfon nement ainsi qu'a 1a sante et ala securite du travail.
Chapitre 13
I Promouvoir un milieu de travail sain
exemple, Ie harce1ement psychologique au travail) qu'a la violence physiq~e.
Au-dela de ce que nous avons indique dans Ie chapitre 9 portant sur la gestlOn . ployes difficiles 1a prevention des manifestations de violence (phy d es . I stion des em sique et psychologique) envers le personnel concerne aUSSl a ge enjeux de sante et de securite du travail, et passe par l'eIaboration de moyens qui relevent des trois categories de prevention deja decrites: la prevention primaire (avant les faits), la prevention secondaire (pendant les faits), et la prevention tertiaire (apres les faits). I
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En ce qui concerne la prevention primaire, les moyens disponibles com prennent les elements suivants: une formation repondant a la qualification necessaire ainsi qu'a la nature des taches, des compHences en liaison avec les fonctions it exercer, un encadrement professionnel capable de prendre en charge des situations compliquees, une bonne circulation de l'information, un systeme transparent de communication, l'entraide entre collegues ainsi qu/entre superviseurs et subordonnes, une conception des locaux et une organisation du travail adequates, en bref, «un savant melange unique a chaque situation de dispositifs d'alerte, simples, discrets et con~us de maniere a provoquer une reponse tres rapide de collegues, de la securite ou de la pOlice3 ». Pour ce qUi est de la prevention secondaire, les moyens a utiliser vi sent a desamorcer une crise de violence en train d'avoir lieu. Une telle crise passe habituellement par les quatre phases suivantes: l'alarme (phase pendant laquelle l'agresseur devient nerveux et excite), l'escalade, Ie passage a l'acte et la reduction de la tension associee a la recuperation. La phase d'alarme demeure la plus favorable au desamor~age de la crise par une seule personne (apte a utiliser les propos et les comportements appropries). S'il y a passage a l'acte, on recommande de laisser Ie soin a des experts (policiers, agents de securite, psychologues, ou negociateurs specialement entraines) de s'occuper de la situation. En ce qUi a trait a la prevention tertiaire, on recommande de fournir Ie plus rapidement possible de l'aide non seulement aux agresseurs, mais aussi aux victimes, ainsi qu'a toute autre personne susceptible d'etre perturbee par les evenements. On conseille donc de tenir des rencontres avec des experts de la relation d'aide aux victimes d'actes criminels ou d'actes de violence. On devrait aussi inscrire sur un registre tous les actes de violence et instaurer des programmes de diagnostic des causes possibles de ces situations de maniere a proposer des corrections appropriees. 11 serait egalement fort utile de mettre sur pied un programme de signalement ou de denonciation de toute situation de violence de sorte qu'une personne qui est temoin d'un acte de violence commis envers un salarie sache ou et comment signaler de tels actes sans· craindre des prejudices ou des sanctions. Les victimes d'actes de violence doivent aussi, comme Ie prevoit la loi, pouvoir profiter des memes processus
3. Tire du site de la Chaire de gestion de la sante et de la securite du travail de l'Universite Laval: http://cgsst.fsa.ulavaLca.
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Les defis des conditions de travail
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Chapitre 13
I Promouvoir un milieu de travail sain
de revision
o Nommez et expliquezont lescaractense
qu.a~I:
grandes pedodes qui
&
Ie cadre l{:gal de la sante et de la securite du travail. Comment ont evolue, au cours des dernieres annees au Quebec, les donnees relatives aux accidents du travail, aux maladies profession neHes ainsi qu'aux deces causes par les uns et les autres?
. , QueUe est la principale source de revenus de la CSST et pourquoi les employes n'ont-Us pas l'obligation de contribuer au financement de la CSST?
" Definissez les categori.es de pr~v~n tion primaire, secondaIre et tertIaIre. Nommez certaines mesures com prises dans chacune de ces categories.
«!) Aquoi se rHere-t-on lorsqu'on parle de conception integree de la sante et de la securite du travail ?
0) Nommez trois moyens que la direc tion d'une entreprise peut prendre pour manifester clairement son en gagement en faveur d'une gestion efficace de la sante et de la securite du travail.
o Pourquoi dit-on que la responsabi
lite d'un coordonnateur du dossier de sante et de securite du travail doit it la fois etre clarifiee et partagee?
o QueUes sont les principales sources de depenses de la CSST?
" QueUes sont les deux principales lois quebecoises relatives it la sante et it la securite du travail et com ment les mandats de la CSST se rattachent-ils it ces lois?
(I) Nommez cinq mecanismes de ges tion de la prevention consideres comme tres efficaces. ~ Nommez
quatre activites suscepti bies de faire partie d'un programme de promotion de la sante au travail.
CD Comment
la cotisation d'un em ployeur it 1a CSST est-eUe determi nee selon que cet employeur peut disposer d'un regime au taux de l'unite, d'un regime au taux person nalise ou d'un regime retrospectif?
• QueUes sont, en matiere de paie ment des indemnites de remplace ment du revenu, les obligations de tout employeur lorsque survient un accident du travail ?
(3 QueUes sont les principaies notions
a connaltre pour decider de l'admis
sibilite d'une reclamation pour une lesion professionnelle? Expliquez ces notions.
~ Qu'est-ce
que Ie stress'! Indiquez quatre activites susceptibles de faire partie d'un bon programme de ges tion du stress.
(rD Qu'est-ce qu'un programme d'aide aux employes et quelle semble etre la principale limite quant a l'utilisa tion efficace d'un tel programme?
4i
Discutez du theme de la violence au travail (ses causes, sa nature et ses effets) et presentez une strategie d'intervention comportant au moins deux moyens pour chacune des trois categories habitueUes de ges tion preventive.
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I les defis des conditions de travail
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Une reduction importante des accidents du travai1 a Mascouche4 Grace a la collaboration de ses em ployes et en vertu d'ententes signees avec les syndicats, la Ville de Mascouche a mis en place des structures qui ont permis une reduction des accidents du travail et une nette diminution des frais, qUi sont passes de 166414 $ en 1995 a 3529 $ en 1999.
«C'est la preuve que lorsque to us collaborent, on peut arriver it regler des problemes», a pour sa part declare Jean-Marc Desnoyers de la Fraternite des policiers. «On n'est pas la pour s'affron ter mais pour travailler ensemble », de rencherir Serge Prairie, du Syndicat des cols bleus.
«Cette annee, pres de 12 kilometres de fosses ont ete faits par les employes de la Ville et aucun accident n'a ete signale », a declare Ie maire Richard Marcotte, pour illustrer l'augmentation de la securite qu'on peut observer chez les travailleurs it l'emploi de la munici palite. «La situation etait problematique depuis 1996 et il fallait l'ameliorer», a t-il explique. Ce sont les ententes inter venues avec les sections locales 2118 et 2005 du Syndicat canadien de la fonc tion publique (cols blancs et cols bleus) et avec la Fraternite des policiers de Mascouche qui ont permis d'aboutir aux resultats actuels.
Les statistiques de la Commission de la sante et de la securite du travail du Quebec (CSST) montrent que les sommes versees aux employes sont 47 fois moindres qu'en 1995 et que l'amelioration a ete graduelle annee apres annee. Commentant les nouvelles structures mises en place a Mascouche, Ie directeur du Service des finances Luc Tremblay affirme: «n s'agit d'un pro gramme sans precedent qUi n'existe dans aucune autre ville! »
«Nous etions surtout preoccupes par la sante de nos membres. Les chiffres montrent que celle-ci s'est amelioree et si ceia permet en plus it la Ville de faire des economies, c'est tant mieux!)} a dit Michel Gratton, president du Syndicat des cols blancs.
o Quelles sont, a votre avis, les causes
principales du succes enregistre quant it Ia reduction des accidents du travail?
8 Pourquoi, it votre avis, de tels exem pies d'une collaboration fructueuse entre un employeur et Ies syndicats qui representent les salaries sont-ils si rares?
4. Tire de P. Pilette, "Reduction importante des accidents de travail il Mascouche )', La Revue, l'hebdo des gens d'actions, wlIlrw.larevue.qc.ca.
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I Promouvoir un milieu de travail sain
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...
les defis
dela
democratie au travail
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Partie V
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Les defis de la democratie au travail
Le Fonds de solidarite a qui etait necessaire1
20
ans : une revolution syndicale
Directeur des communications a la Federation des travailleurs et travail leuses du Quebec (FTQ), l'auteur a He, en 1983, l'un des premiers employes du Fonds de solidarite FTQ, dont it fut vice president aux communications. II a ecrit l'histoire des debuts du Fonds dans Solidarite inc. (Editions Quebec Amerique, 1991).
Quand je repense aux debuts du Fonds de solidarite de Ia FTQ qui furent embaI lants mais tellement dif/iciles, je suis fasci ne de voir ['importance quIa aujourd'hui au Quebec cette grande institution economique collective, dont c'est Ie 20e anniversaire de fondation. Le Fonds est devenu une reussite incontestable, mais cWait loin d'etre evi dent if y a 20 ans. Ii n'y avait pas de route et il a fallu Ia tracer, mais il est vrai qu'un long voyage commence toujours par un petit pas. C'est Ie 23 juin 1983, al'initiative de la FTQ que l'Assemblee nationale du Quebec adoptait la loi 192 creant Ie Fonds de solidarite des travailleurs du Quebec. Voue au maintien et a la creation d'emplois, Ie Fonds commencera a recueillir les epargnes des membres de la FTQ et du grand public en fevrier 1984. Le president de la FTQ Ie regrette Louis Laberge, et son secretaire general, Fernand Daoust, avaient reussi a con vaincre Ie premier ministre Rene Levesque et son ministre des Finances, Jacques Parizeau, de la necessite de ce fonds original d'inves tissement dans les entreprises queMcoises. Le palTain du projet de loi elait Ie ministre
de la Concertation et de l'Emploi, Robert Dean, zm ancien vice-president de la FTQ. Le projet avait ete evoque pour la pre miere fois par Laberge lors du celebre Sommet economique de Quebec, tenu en avril 1982 par Ie gouvernement du PQ en plein c(£ur de la pire crise economique sur venue iei depuis la depression des annees 1930. M. Laberge, que je qualifierai de visionnaire pragmatique, a dit souvent par La suite que Ie Fonds de solidarite etail Ie projet Ie plus revolutionnaire qu'il ait jamais realise dans sa vie. Pour Ie seconder dans cette tache, il etait aIM chercher un homme pour qui j'ai toujours eu Ia plus grande estime, Claude Blanchet, un finan cier aguerri et un soeial-democrate con vaincu, qui fut president-directeur general du Fonds pendant 13 ans. Trois grands objectlfs
La «patente a Louis Laberge», ainsi que l'avaient baptisee ses detracteurs, visait trois objectifs de taille. Le premier etait de deve/opper l'emploi et l'economie queM coise grace ades investissements en capital de risque dans les PME. Le second etait d'ineiter les membres de la FTQ et tOllS les contribuables amieux preparer leur retraite, grace au regime d'epargne-retraite du Fonds et a ses economies d'impot. Le troisieme objecti" qu'on oublie trop souvent, etait la formation economique des travailleurs et travaillellses, de fafon a accroftre leur participation et lellr influence dans les entreprises et l'economie. C'est ains; que Ie
1. L. Fournier, «Le Fonds de solidarite a 20 ans: une revolution syndicate qui etait necessaire», Le Devoir,
23 juin 2003.
Apres l' etude de ce chapitre, Ie Iecteur devrait etre plus apte
a:
• Comprendre l'importance des syndicats comme acteurs au sein des systemes de relations du travail. • Connaitre les principales institutions syndicales et leurs structures decisionnelles. • Decrire les roles susceptibles d'etre joues par les syndicats dans une entreprise. • Comprendre Ie processus de syndicalisation. • Exposer les principales composantes du cadre des relations du travail.
h~gal
de la syndicalisation et
• Apprecier Ies principales obligations et les droits des parties dans Ie cadre de ces processus.
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Les defis de la democratie au travail
Le Fonds de solidarite de la FTQfut une revolution syndica/e necessaire. II est la preuve que si Ie mouvement syndical veut continuer, i1 faut d'abord qu'U change, qu'i[ sache s'adapter et se renouveler, qu'U entre dans la modemite. Je continue de croire que Ie Fonds compte parmi ce que les syndicats ont fait de meilleur au Quebec.
o A votre
avis, queUe influence Ie Fonds de solidarite de la FTQ a-t-il exercee sur l'evolution du syndica lisme au Quebec?
fj Pourquoi l'engagement d'une cen trale syndicale comme la FTQ dans un tel fonds souleve-t-il autant de passions, de controverses? . , Lorsque Ie Fonds de solidarite devient l'un des actionnaires d'une entreprise, queUes consequences cela entraine-t-il pour les relations patronales-syndicales dans cette en treprise? QueUes attitudes et queIs comportements cela suppose-t-il de la part des membres de la direction de cette entreprise ?
--------,--------------------._-----------Le nouveau paradigme en relations indus trielles prend maintenant assise sur Ie com promis et la concertation et non sur l'ar frontement continuel et perpetuezZ.
Nous avons vu dans Ie chapitre 1 que les syndicats sont l'un des acteurs importants de tout systeme de gestion des res sources humaines. La presence syndicale (reelle ou apprehendee) dans les organisations impose aux dirigeants d'entreprise une nouvelle dimension a gerer, dimension qUi prend principalement la forme d'une serie de contraintes. Toutefois, la premiere contrainte a laquelle doivent s'astreindre des dirigeants consiste a confronter leurs connaissances et leurs attitudes a l'egard de la realite syndicale avec ce qu'on pourrait qualifier de test de la realite. Dans ce chapitre, nous presentons Ie contexte contemporain des rapports collectifs de travail, c'est-a-dire des relations entre les employeurs et les organisations syndicales. Nous abordons ensuite Ie systeme dans lequel ces rapports interviennent. Ce systeme est decrit a l'aide d'une perspective qui a pris de plus en plus d'ampleur a partir des annees 1980, celle des choix strategiques. Puis, nous traitons des notions relatives aux structures syndicales. Par la suite, nous examinons Ie fonction nement des centrales syndicales du Quebec et d'une centrale patronale. Finalement, nous exposons les principaux parametres du cadre legal du pro cessus de syndicalisation et des relations du travail.
2. G. Trudeau et D. Veilleux, « Le monopole nord-americain de representation syndicale des chemins", Relations industrielle.l, voL 50, nO 1, 1995, p. 9-38.
a la croisee
Chapitre 14
Fonds est devenu la plus grande ecole syn dicale de formation economique. Eref, il s/agissait aussi de favoriser fa concertation syndicaLe-palronaLe et d' avancer dans la voie de La democratie economique. Il est facile aujourd'hui de dire que tout ceTa allait de soi maintenant que Ie Fonds de solidarite compte plus de 550 000 actionnaires, que son actif depasse les 4 milliards de dollars, qu'il a contribue it sauvegarder, a maintenir et it creer pres de 100 000 emplois par ses investissements dans quelque 2000 entreprises quebecoises, et qu'il est la plus importante societe de capital de developpement au Quebec. £...] Et contrairemenl a ce que craignaient ses detligreurs, it n'est pas devenu Ie sauveteur de taus les «canards boiteux ». Pour convaincre les syndiqUl!s de con tribuer au Fonds, nous avons pu nous appuyer, au sein de la FTQ sur un puissant reseau de militantisme, grace a l'action benevole et perseverante des responsables locaux - sumommes familierement les « RL » que nous avons formes dans tous les syndicats. Ils sont aujourd'hui plus de 2500, en incluant les «RL» de la CSQ et de la FlIQ deux organisations syndicales qui ont adhere par la suite au projet de fa FTQ. Trahir la dasse ouvriere 7
Comme on pariaH de capital de risque et de collaboration avec les patrons, cela en inquietait, voire en indignait, plusieurs, y compris dans les rangs de la FTQ. Meme si Ie projet fut vote a plus de 80 % lors du congres de la centrale, oil il fut appuye mas sivement par les syndicats du secteur prive et surtout critique par les syndicats du secteur public, l'opposition n'a pas desarme pendant des annees, au sein et a l'exterieur de la FTQ. Elle se manifeste encore aI'occa sion chez des factions liees a la gauche radicaie, tout comme au sein des milieux patronaux les plus reactiorlnaires, preuve que Ies extremes se rejoignent.
I Gerer les rapports collectifs de travail
Les attaques parfois mesquines au em preintes de catastrophisme, dirigees surtout cantre notre presumee « trahison de la classe ouvriere », furent les episodes les plus douloureux a vivre en ce qui me concerne, moi qui faisais du syndicalisme depuis mes debuts dans Ie joumalisme 15 ans plus tOt. Pourtant, comme Ie dil un vieil adage syn dical, on peut s'asseoir ala meme table que les patrons sans coucher dans Ie meme lit. Les succes du Fonds ont ouvert les yeux a bien des sceptiques, mais je n'ai pas lu ou entendu d'autocritiques de la part de ceux qui furent les plus farouches contempteurs du projet. Pour mernoire, je rappel/erai seulement les bnllots publies a I'epoque, dans Le Devoir et La Presse, par deux professeurs marxistes de I'UQAM, Jean-Marc Piotte et Louis Gill, afin de demolir Ie projet apeine naissant. Sous un titre ravageur, «Le Fonds de solidarite: un Tricofil national», rtffe rence a la faillite retentissante d'une entre prise de textile de Saint-Jerome, Gill invitait les syndiques de la FTQ a « refuser massi vement de se laisser engager dans cette entreprise de mystification, dans cette voie de faillite ». Quant a Piotte, il exhortait les syndiques a rejeter Ie Fonds en leur disant qu'Us y perdraient leurs epargnes, accusant la FTQ du crime de «concertation avec Ie PQ ». Je n'oublie pas non plus ce porte parole de la CSN qui avait ecrit, dans Le Devoir, que sa centrale avait deja son fonds de solidarite: c'etail son {i:mds de greve! Douze ans plus tard, la CSN mettait sur pied son Fondaction sur Ie modide du Fonds de la FTQ. Pourquoi rappeler ces vieilles histoires? D'abord pour montrer que Ie changemel1l exige des efforts patients et qu'il n'est pas facile a faire accepter, autant chez les gens dits de gauche que de droite. Ensuite pour montrer Ie chemin parcouru et l'evolution extraordinaire qui s'est produite malgre tout, en particulier dans les mentalites.
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industries de l'automobile et de l'aviation, ont fait des concessions salariales et collabore Ii l'implantation de nouvelles approches de travail (comme les equipes semi-autonomes de travail et \e regimlt de partage des gains de pro ductivib~) de fa~on Ii aider 1a direction 11 traverser des peri odes difficiles. Et meme si 1a situation economique s'est amelioree ces dernieres annees, les cas ou 1a partie syndicale a ete demandee en renfort pour aider l'entreprise a se retablir sont encore nombreux.
Chapitre 14
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Gerer les rapports collectifs de travail
Le..nouveau contexte des rapports col1ectifs ..... ............................. .
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L.. po,&-,:Hon dQ. p-rQ.~uQ.
taus les syndicats a evolue au cours des dernieres annees. Ainsi, selon Lapointe et Belanger (1996), leur position a l'egard des nouvelles formes d'organisation du travail, qui ant souvent une incidence sur les modes de GRH, s'est modifiee. Ainsi, certains syndicats, comme la CSN et la FrO, qUi s'opposaient a ces nouvelles approches, pretextant qu'elles dimi nuaient l'importance de la convention collective, affaiblissaient les syndicats en cooptant leurs chefs, accroissaient Ie pouvoir des dirigeants sur les salaries et deterioraient les conditions de travail en augmentant la charge de travail et en reduisant l'emploi, y resistent un peu moins. Par contre, d'autres syndicats, comme ceux qUi sont affilies a la CSD, songeant plutot qu'ils s'affaibliraient s'ils restaient a l'ecart, se sont montres plus ouverts. Ils estimaient que ces nouvelles approches etaient inevitables et que la participation des syndicats a leur introduction contribuerait, au contraire, a reduire les risques et a faire un pas vers la democratie industrielle. Ce changement d'attitude des syndicats resulte aussi des pressions exercees par Ie nouveau contexte d'affaires. Aujourd'hui, plusieurs entreprises sont moins a l'abri de la concurrence qu'auparavant (pensons a Bell Canada). Par ailleurs, on decentralise et on fragmente de plus en plus Ies negociations des conditions de travail a l'echelle des usines au moment oule recours a la greve s'avere de moins en moins possible devant un employeur qui menace de fermer ses portes. Finalement, les nouvelles formes d'organisation du travail exigent plus de flexibilite et une reduction des regles qUi ont historiquement donne du pouvoir au syndic at, comme les augmentations de salaire en fonc tion de l'anciennete, la procedure de reglement des griefs, la classification etroite des emplois, les lourdes structures salariales et les politiques relatives aux mouvements du personnel. Les diverses pressions qui se font sentir ont pour effet que les syndicats sont dorenavant plus ouverts (certains diront qu'ils y sont contraints) a l'egard des nouveaux modes de gestion. Aujourd'hui, les preoccupations des syndicats concernent davant age l'equite du processus de changement. Ainsi, ils se posent les questions sui vantes: «Quel type de changement pouvons-nous favoriser? Comment devons-nous y participer ? Quelle formation devons-nous acquerir pour suivre l'employeur dans ce processus de changement? Quelles conditions devons nous obtenir pour veiller a la defense des interets de nos membres ?»
L'etablissement et Ie maintien de relations patronales-syndicales harmo nieuses et efficaces sont devenus au cours de la premiere moitie des annees 1990 une priorite pour la majorite des organisations syndiquees. Certains auteurs, comme Audet et Grise (1994), ont souligne la necessite d'etablir un partenariat patronal-syndical. Ce partenariat exige, d'un cote, que les syndi cats jouent un role plus important de partenaire economique et social tant a l'interieur qu'a l'exterieur des entreprises et, d'un autre cote, que les dirigeants fassent confiance a leurs nouveaux allies, en partageant davantage avec eux l'information, Ie pouvoir et Ie capital, et en les invitant, au besoin, a contri buer a la relance de l'entreprise. Ainsi, plusieurs syndicats, comme dans les
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e~emple, en ~atiE~re de discipline). Les principales activites prop res Ii un sys teme de ~elatIOns duo travail concernent, entre autres choses, la negociation de c.onvenho~s collectIves, l'arbitrage de differends entre les parties, la resolu
hon des gn,efs/,le .recours a ~a greve ou au lock-out, les communications avec les en::pl~yes am,sI que les seances possibles de mediation au de conciliati.on, Les ~rmCl~aux ~esu1tats s'expriment par une certaine paix industrieIle, par 1a relatIve satIsfactIOn des parties et par des conditions de travail particulieres. lIs facilitent au inhibent 1a realisation des objectifs fondamentaux poursuivis en matiere de gestion des res sources humaines, a savoir l'efficacite, l'efficience et l'equite. Des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (Kochan, McKersie et Cappelli, 1984; Kockan, Katz et McKersie, 1986) ont remis en question ce modele traditionnel des relations du travail en soulignant qu'i1 est trop centre sur Ie processus de negociations collectives, ce qUi amene les specialistes et les observateurs a negliger l'importance de decisions prises a d'autres niveaux et ne leur permet pas de reconnaitre plusieurs changements importants qui influent pourtant beaucoup sur les rapports collectifs de tra vail. Ces chercheurs ont donc propose un nouveau modele qUi comporte trois niveaux de deciSions, soit Ie niveau superieur, au se prennent les decisions strategiques de l'organisation, Ie niveau intermectiaire, ou les representants de la direction rencontrent les representants des salaries et negocient les regles traditionnelles contenues dans la convention collective, et Ie niveau inferieur, c'est-a.-dire les Heux de travail ou s'exerce la relation entre les chefs de service et les employes (voir la figure 14.1). Comme l'illustre la figure 14.1, les strategies de relations du travail, tant dans leur elaboration que dans leur mise en reuvre, sont influencees par des facteurs externes et des facteurs internes. Par exemple, des changements qui sont intervenus sur Ie marche des biens et des services ont fait que ces marches sont passes d'une situation de croissance, qUi avait caracterise la pe riode des annees 1945 a 1975 (les «trente glorieuses »), a. une situation de matu rite, ou l'offre de produits etait superieure a. la demande. Dans un tel contexte, les dirigeants d'entreprise ont modifie radicalement leurs strategies de rela tions du travail. Au lieu de rechercher la paix industrielle a tout prix de fac;on a. maximiser la production, ils ont pre£ere mettre l'accent sur Ie controle des couts de main-d'reuvre, sur l'augmentation de la productivite et sur la modi fication des regles de travail. Cela a amene des strategies patronales vigou reuses visant, par exemple, a amener les syndicats a faire des concessions, voire a fermer les installations traditionnelles syndiquees et a repartir a. zero dans un contexte non syndique. Cependant, deux variables internes (Kochan, McKersie et Cappelli, 1984) limitent la latitude des employeurs dans Ie choix de leurs strategies. II s'agit du niveau des negociations (au du degre de cen tralisation) ainsi que du taux de syndicalisation. Ainsi, dans un contexte ou les employes d'une entreprise sont deja massivement syndiques et au les negociations sont centralisees, les pratiques patronales possibles relevent davantage de la cooperation patronale-syndicale.
Chapitre 14
I Gerer les rapports collectifs de travail
Finalement, il faut souligner que ce n'est pas seulement la presence d'un syndicat qui influence la gestion des ressources humaines, mais aussi la vo lonte de l'employeur d'eviter une eventueIle syndicalisation. Une GRH defi ciente (souvent due it des dirigeants et it des cadres qui n'assument pas adequatement leurs responsabilites en ce qui a trait it la GRH) entralne sou vent la syndicalisation des employes (Ie syndicat comblant alors les faiblesses des gestionnaires). Cela explique pourquoi les organisations non syndiquees, et qui veulent Ie rester, doivent souvent offrir des conditions de travail aussi allechantes, sinon meilleures, que ceIles qu'accordent les entreprises syndi quees concurrentes. Plusieurs entreprises non syndiquees, comme IBM, ont d'ailleurs des pratiques de GRH plus couteuses et des conditions de travail plus genereuses que celles de bon nombre d'entreprises syndiquees concurrentes.
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Le systeme des relations du travail Les relations du travail peuvent se definir comme etant l'ensemble des rap ports individuels et collectifs qui s'etablissent entre, d'une part, un ou plu sieurs employeurs et, d'autre part, les employes representes ou non par un ou plusieurs syndicats. Ces relations peuvent se comprendre plus aisement si 1'0n recourt au concept de systeme pour les representer. Le modele traditionnelle plus connu des relations du travail (Dunlop, 1958) comporte trois groupes d'acteurs (les gouvernements, les employes et les patrons) lies par une ideo logie commune et influences par un environnement dont les composantes delimitent Ie pouvoir relatif des parties, puis les resuItats que produit ce systeme. Ces resultats consistent en un ensemble de regles portant soit sur des contenus (par exemple, un niveau de salaire), soit sur des processus (par
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14.2.1 Les strategies patrona1es face aux syndicats Nous decrirons brievement les trois strategies patronales les plus repandues: la st:ategie d'evitement (tenter de rester .it l'abri de la syndicalisation), la strategie d'affrontement ou d'opposition et, enfin, la strategie d'acceptation, laquelle peut aller dans certains cas jusqu'a Ia cooperation. Achaque strategie correspond un eventail de tactiques. La strategie d'evitement comporte notamment Ie recours a des poIitiques et a des procedures de GRH dites progressistes (com me des procedures internes de reclamation ou d'appel en cas d'injustices res senties, des services de counselling, un systeme efficace de communications internes, des sondages frequents d'attitudes et d'opinions). La firme IBM illustre parfaitement cette strategie de rapports collectifs de travail. On peut aussi constater Ie recours a divers mecanismes de gestion participative et a une plus grande participation des employes dans l'entreprise (par Ie biais des cercles de qualite, des groupes semi-autonomes de production, etc.). Finalement, une telle strategie com porte une politique articulee relative aux comportements a adopter et aux arguments a utiliser aupres des employes dans une campagne de syndicalisa tion de fas:on qu'ils soient portes a demeurer non syndiques. La strategie d'affrontement ou d'opposition en ce qUi touche a la presence syndicale comporte des tactiques comme celles qui visent a discrediter Ie syn dicat en place et a tenter de lui faire perdre sa certification. De telles strategies auraient ete utilisees avec SUCct~s dans Ie secteur des banques (Brody, Seaver et Tremblay, 1993). D'autres tactiques consistent a fermer les installations ou les syndicats ont reussi a s'introduire (VOir, par exemple, Ie cas des restaurants de la chaine McDonald's), a n'ouvrir de nouvelles installations (greenfield sites) que dans des milieux ou les probabilites de syndicalisation sont faibles et a ne proceder a des changements technologiques (investissements) que dans les milieux ou les employes ne sont pas syndiques. Entin, la strategie d'acceptation de la presence syndicale comporte des tactiques dont Ie but est d'obtenir avec Ie syndicat Ie meilleur arrangement possible. Ces tactiques supposent de la part de l'employeur et de ses represen tants des attitudes conciliantes. Dans un climat de recherche conjointe de solutions a divers problemes, l'employeur s'engagera dans des rencontres frequentes de preparation a des negociations, de negociations proprement dites, d'administration des conventions collectives de meme que de partici pation a des comites conjOints reunissant des representants des parties syndi cale et patronale. Des regimes de participation aux benefices, des programmes d'amelioration de la qualite de la vie au travail ainsi que des comites de dia logue patronal-syndical representent d'autres initiatives de cooperation. lndependamment des strategies patronales de relations du travail, il n'en demeure pas moins que les syndicats occupent une place importante dans les organisations puisque Ie taux de syndicalisation au Quebec se situe a environ 40 %. Le phenomene syndical au Quebec et au Canada constitue donc une realite incontournable d'autant plus importante que son influence se fait
Chapitre 14 \ Gerer les rapports collectifs de travail
UN CADRE D'ANALYSE DES CHOIX STRATEGIQUES EN MATIERE DE RElATIONS INDUSTRIELLES
Source: Adaptee de T.A. Kochan, H.C. Katz et R.B. Mckersie, The Transformation of American Industrial Relations, New York, Basic Books, 1986.
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I Les defis de la democratie au travail LES PRINCIPAUX FACTEURS D'ADHESION AU SYNDICALISME
Comme Ie montre la figure 14.2, Ie degre d'adhesion au syndicalisme peut etre influence par la legislation du travail. Ainsi, la syndicalisation massive du secteur public au Quebec a He fortement soutenue par la loi de 1964 portant sur Ie Code du travail. De meme, la syndicalisation des employes du secteur de la construction depend largement de la loi de 1968 concernant les relations du travail dans l'industrie de la construction. Un travailleur qUi, autrement, n'en aurait peut-etre pas Ie goilt se voit fortement incite a joindre les rangs d'un syndicat si, en vertu de certaines dispositions legales ou convention nelles, la cotisation syndicale est de toute fa\on prelevee sur son salaire ou si l/adhesion est obligatoire pour conserver son emploi. Le deuxh!me facteur - peut-etre Ie plus important - qui permet de com prendre et de predire l'adhesion au syndicalisme concerne les attitudes des salaries envers I'organisation. L'aspect determinant est leur insatisfaction ou meme leur frustration al'egard de ce qu/ils pen;oivent comme etant une situa tion injuste ou inequitable tant sur Ie plan des conditions de travail (Ie salaire, les avantages sociaux) que sur Ie plan des pratiques de gestion (les decisions arbitraires des responsables hierarchiques, les comportements inappropries, I'insecurite d'emploi). Seion diverses recherches (Brett, 1985), cette perception de l'iniquite suscite un interet initial envers Ie syndicalisme; puis, cet interet est accru par une variable additionnelle, soit la perception d'un manque d'in fluence des salaries sur Ies conditions de travail. D'autres travaux de recherche
Chapitre 14
I Gerer les rapports collectifs de travail
sentir dans quasiment toutes les entreprises, que les employes y soient syn diques ou non. Pour mieux comprendre cette realite, nous verrons dans la prochaine section les motifs qui incitent les travailleurs a se joindre a des syndicats.
14.2.2 Les motifs d'adhesion
a une organisation syndicale
Trois facteurs contribuent a expliquer l'adhesion d'un groupe de salaries a une organisation syndicale. Ces facteurs sont Ie caractere (favorable ou non) de la legislation du travail, les attitudes des salaries envers l'organisation de meme que les attitudes des salaries envers Ie syndicalisme (voir la figure 14.2).
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GD .L~.S. "!1.~t.i~.~~ !~~~~~~~~ .'!-~~ ~~~~~~~.T.~S. ~r:n.~~c.~l.~~ Les e~ploy~s ~yndi:tues .d'une entreprise peuvent soit faire partie d'un seul syn~hcat: sOlt :tre repartls entre plusieurs syndicats. En vertu du principe de la hberte syndlCale, qui est la liberte pour un employe d'adherer a un syndi cat de son choix, la situation particuliere d'une entreprise depend d'abord des choix exprimes par les employes, puis du cadre legal qUi vient delimiter ces choix. Dans certaines situations, les employes d'un meme employeur se retrouvent dans une douzaine de syndicats differents affilies souvent a des centrales syndicales concurrentes. Par exemple, les employes de l'Universite de Sherbrooke sont repartis entre au moins cinq syndicats locaux et deux autres organismes (associations d'employes) qui representent des groupes par ticuliers. Les employes du journal La Presse, a Montreal, sont repartis entre une quinzaine de syndicats differents. Ces syndicats locaux peuvent etre des entites juridiques distinctes (comme a la CSN et a la CSD) ou n'etre que des sections d'un syndicat local plus large, dont la composition exacte est deter minee par les statuts d'une «union» (comme a la FTQ). Les structures d'un syndicat local peuvent varier considerablement selon la taille (Ie nombre de membres), Ie secteur d'activite ou les traditions syndi cales. La figure 14.3 illustre un mode de fonctionnement typique. Les mem bres eiisent parmi eux des personnes qui occuperont les postes de president, de secretaire et de tresorier, et qUi les representeront en tant que delegues ou membres de comites, dont les deux plus importants sont Ie comite de nego ciation et Ie comite de griefs. Certains syndicats locaux ont assez de ressources pour s'offrir les services d'employes permanents qu'on designe de diverses manieres, notamment sous les titres d'agent d'affaires, de conseiller ou de permanent syndical. De teis employes se retrouvent egalement dans les autres institutions dont la plupart des syndicats locaux font partie ou auxquels Us s'affilient. LA STRUCTURE D'UN SYNDICAT LOCAL
Comite des griefs
Chapitre 14
I Gerer les rapports collectifs de travail
indiquent que plus les employes sont insatisfaits de leurs conditions de tra vail, plus leur tendance a favoriser la syndicalisation est prononcee (Premack
et Hunter, 1988).
Ainsi, l'employeur qui souhaite influencer les perceptions de ses e~p!oyes peut agir sur trois tableaux: celui de la participation des employes a. des comites de discussion sur les conditions de travail (a titre d'exemple, la fume Bombardier Produits recreatifs, a Valcourt, fait appel depuis des annees a des comites de relations du travail, meme si ses employes ne sont pas syndiques), celui de l'information sur Ie caractere equitable des conditions de travail (ce qui peut se faire efficacement par Ie biais des memes comites de relations du travail) et celui du contrale des pratiques de gestion, en particulier des com portements des divers cadres, directeurs de services et superviseurs. Ce con trale peut s'effectuer au moyen de politiques claires destinees aux responsa bles hierarchiques, de la formation, de sondages d'attitudes et d'opinions et du suivi des resultats de ces sondages (par exemple, en demandant a un res ponsable hierarchique dont les comportements sont decries par ses employes de se deplacer vers une autre position dans l'entreprise ou meme de quitter celle-ci, avant que la situation ne degenere en conflit). Le troisieme facteur qui influence l'adhesion eventuelle des employes a un syndicat concerne les attitudes des employes envers les organisations syndi cales. Par exemple, ont-ils la perception qu'un syndicat est vraiment capable de changer les conditions qui leur deplaisent? Quels avantages Ie syndicat est il susceptible de leur apporter? Les avantages per<;:us du syndicalisme seront compares aux inconvenients per<;:us (Ie montant de la cotisation, les posSibi lites de greve, etc.) et les employes prendront une decision favorable ou non selon Ie resultat de leur evaluation. Pour certains employes, l'adhesion au syn dicalisme est pIut6t Ie resultat d'un choix ideoIogique ou politique; dans ce cas, l'employe y adhere sur la base de ses convictions. Par exemple, l'employe a qui, dans son milieu familial ou ailleurs, l'on a inculque des valeurs qui mettent l'accent sur la collectivite et Ie partage aura tendance a adherer plus facilement a un syndicat qu'un employe dont les valeurs sont axees sur l'in dividualisme et la competition avec les autres. Ainsi, certains travailleurs professionnels pourraient juger l'action collective imposee par un syndicat contraire a leurs valeurs professionnelles d'autonomie relative. Au Canada, en regIe generale, les gens ont des opinions assez favor abIes envers Ie syndica lisme; c'est du moins ce que revelent divers sondages. Nous aborderons plus loin dans ce chapitre les mecanismes juridiques qui encadrent les rapports collectifs de travail. Voyons pour l'instant comment fonctionnent les syndicats. Cela suppose de se familiariser avec les structures syndicales et les principales centrales syndicales. Ces connaissances sont essentielles pour tout employeur qui souhaite interagir de fa<;:on intelligente et efficace avec un ou plusieurs syndicats.
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La federation La federation est Ie regroupement sur la base du metier ou du secteur indus triel de tous les syndicats locaux d'une meme centrale syndicale. Vne fede ration fournit aux syndicats locaux les services techniques qui sont au cceur meme de la vie syndicale, soit ceux qui concernent la negociation et l'appli cation des conventions collectives du secteur industriel ou du metier en ques tion. Au Quebec, Ie mot « union» est frequemment utilise par reference aux groupements syndicaux dont les noms anglais sont international union ou national union. « L'union est alors une organisation syndicale formee de sec tions locales a qui elle a accorde UIle charte pour grouper les salaries dans les industries ou les metiers designes dans ses statuts)} (Dion, 1986, p. 496).
La centrale syndicale La centrale syndicale est un regroupement de federations (ou unions), de con seils centraux et d'autres organismes intermediaires. Ce regroupement agit habituellement au niveau d'un Etat. Aux Etats-Vnis, la principale centrale syndicale est la FAT-COl (Federation americaine du travail et Congres des organisations industrielles). Au Canada, c'est Ie CTC (Congres du travail du Canada). Au Quebec, on trouve la FTQ (Federation des travailleurs et travail leuses du Quebec), la CSN (Confederation des syndicats nationaux), la CSQ (Centrale des syndicats du Quebec) et la CSD (Centrale des syndicats demo cratiques). Le tableau 14.1 presente des donnees relatives a la repartition des effectifs syndicaux au Quebec entre les diverses centrales existantes. Ainsi, ce tableau permet de constater que pour les 8189 conventions collectives signees en 2002, la FTQ a agi comme representant syndical dans une proportion de 52,6 % des cas, et que ces conventions touchaient 42,2 % des salaries vises par l'ensemble de ces conventions. Au deuxieme rang vient la CSN, qui a ete en cause dans 21,2 % des conventions et qui a represente 18,2 % des salaries vises. La CSQ n'a agi comme representante que dans 1,6% des conventions, mais a tout de meme represente 10,4% des salaries vises. Quant a la CSD, eIle est intervenue dans 5,7 % des conventions collectives et a represente 3,4 % des salaries. Enfin, des syndicats independants ont He actifs dans 16,6% des con ventions et ont represente 25,3 % des salaries vises.
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.L~.s. ~~~.t!~~~~. ~~~~i~~~~~.~~. ~~~~.~~ Dans cette section, nous traiterons successivement de la Federation des tra vailleurs et travailleuses du Quebec (FTQ), de la Confederation des syndicats nationaux (CSN), de la Centrale des syndicats du Quebec (CSQ) et de la Centrale des syndicats democratiques (CSD). Nous verrons ensuite brieve ment les syndicats independants ainsi qu'une centrale patronale, Ie Conseil du patronat du Quebec (CPQ).
Chapitre 14 , Gerer les rapports collectifs de travail
14.3.1 Les types de syndicats
n existe deux types de syndicats locaux: les syndicats de metiers et les syndi cats industriels. Historiquement, les premiers syndicats locaux etaient des syndicats de metiers, tels que des typographes ou des pressiers dans l'industrie de l'imprimerie, ou des charpentiers dans l'industrie de la construction. Les ancetres de ces syndicats sont Ies corporations de metiers (ou fraternites, ou guildes) de l'ere preindustrielle. D'ailleurs, plusieurs des syndicats actuels por tent encore des noms qUi les rattachent a des groupes corporatifs constitues au cours des XVII e et xvm e siecles. Vers la fin du xvm e siecle, avec la montee en puissance de Ia bourgeoisie appelee a remplacer les aristocrates camme classe dominante, les syndicats ont ete declares illegaux parce qu'on estimait qu'ils nuisaient it la liberte de manreuvre des dirigeants d'entreprise. Ils etaient consideres comme des «conspirations restreignant la liberte de commerce ». ee n'est qu'au caurs du XIX e siecle (pour l'Angleterre et la France), et meme au debut du x.x e siecle (pour les Etats-Unis et Ie Canada) que les gouvemements ont ete amenes a legiferer d'abord pour decriminaliser Ie fait de s'associer en vue de negocier collectivement, ensuite pour accepter Ia negociation collec tive en tant que mecanisme adequat de determination des conditions de tra vail et, enfin, pour obliger les employeurs dont les employes sont syndiques it negocier «de bonne foi» avec eux. Un deuxieme type de syndicat local est apparu dans les grandes entreprises ou les distinctions de metiers n'etaient plus pertinentes; il s'agit des syndicats industriels. Dans ce cas, la base de regroupement des membres n/est plus Ie metier, mais plutOt Ie simple fait d'occuper un emploi donne dans l'entre prise. Cette forme de syndicalisme s'est developpee en meme temps que cer taines industries, comme celIe de l'automobile.
14.3.2 Les types d'afflliation Certains syndicats locaux peuvent etre independants, mais la plupart d'entre eux choisissent de se regrouper pour se donner des moyens, des services, et jouir, si pOSSible, de la force du nombre. Ainsi, les syndicats locaux s'ins crivent dans trois ei(:ments de structure, soit un conseil central (ou conseil du travail), une federation (ou une «union») et une centrale syndicale.
Le conseil central Sur un territoire donne (habituellement une ville), Ie conseil central repre sente tous les syndicats locaux affilies aune meme centrale syndicale; il s' agit d'un regroupement interprofessionnel de syndicats, en ce sens qu'on y trouve plusieurs metiers et plusieurs secteurs industriels confondus. Ces conseils cen traux ont generalement pour mandat de « coordonner, soutenir et stimuler la vie syndicale a l'interieur d'un territoire determine et de promouvoir les interets [... ] des travailleurs [... ] aupres des pouvoirs publics [... ] ainsi que des organismes collectifs» (Dion) 1986, p. 123).
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les defis de la democratie au travail
provinciale en ce sens qu'elle est une forme volontaire (donc facultative) de regroupement sur Ie territoire du Quebec des sections locales d'unions nationales et internationales egalement affiliees au CTC. Le CTC reconnait cependant Ie caractere particulier de la FTQ. En 1974, Ie congres du CTC votait a l'unanimite une resolution accordant a la FTQ la competence quant a la formation syndicale et aux conseils du travail, avec les res sources affe rentes. En 1993, la FTQ obtenait aussi Ie droit d'exercer, conjointement avec Ie CTC, une competence internationale, et une entente etait condue entre Ie CTC et la FTQ en ce qui a trait aux res sources financieres requises par la FTQ.
Notons, par ailleurs, que ce sont les «unions» internationales et cana diennes qui ont decide de creer Ie CTC et la FTQ pour en faire des organismes de representation et de coordination, et non des organismes de direction et de contraIe. En fait, les unions ont jalousement conserve la plupart des pou voirs; eBes ont egalement conserve la gestion des services techniques fonda mentaux (la negociation et l'application des conventions collectives) et des fonds (en particulier les fonds de greve). Le role principal de la FTQ et du CTC est de promouvoir les interets de ses membres syndiques aupres des gouvernements et des medias. La structure interne de la FTQ, qUi est illustree a la figure 14.4, comporte principalement un congres, qui represente l'autorite supreme de la Federation. Lors de ce congres qui se deroule tous les trois ans, les differentes sections locales affiliees ont droit a une delegation d'au moins une personne. D'autres personnes peuvent s'ajouter suivant Ie nombre de membres que compte la sec tion locale. Entre les congres, la Federation est dirigee par un conseil general comprenant des membres deIegues par les structures quebecoises des syndicats
LA STRUCTURE DE LA FTQ
Conseil general
Bureau
Niveau
Source: Site Internet de la FTQ: http://ftq.qc.ca.
Chapitre 14
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Gerer les rapports collectifs de travail
REPARTITION DES CONVENTIONS COLLECTIVES ET DES SALARIES AU QUEBEC EN 2002 SELON l'AFFILIATION SYNDICALE
a Le terme «Independants» doit etre considere dans Ie sens d'une non-affiliation a une centrale syndicale. b La categorie «Autres» comprend la Federation americaine du travail - Congres des organi sations industrielles (FAT-COl), Ie Congres du travail du Canada (CTC), la Confederation des syndicats canadiens (CSC) et la Federation canadienne du travail (FCT). c Le total des elements peut etre different de la somme a cause des arrondissements. Source: La convention collective au Quebec, 2003, p. 16, tableau 1.7, extrait du Fichier de gestion des relations de travail, ministere du Travail, 17 mai 2002.
14.4.1 La Federation des travailleurs et travailleuses du Quebec {FTQ}3 La Federation des travailleurs et travailleuses du Quebec est la centrale qui compte Ie plus de membres au Quebec. Elle represente environ 44% des syndiques quebecois. Elle regroupe pres de 60 % des syndiques du secteur prive, qUi forment la majorite de ses membres. Elle est egalement bien implantee dans les services publics, ou elle represente entre autres la majorite absolue des syndiques de l'administration munidpale et du secteur parapublic (comme Hydro-Quebec), ainsi que les fonctionnaires federaux et Ie personnel de la Sodete des postes. La FTQ ne constitue pas a proprement parler une centrale syndicale au meme titre que la CSN, la CSQ ou la CSD. Formellement, elle releve du Congres du travail du Canada (CTC), la principale centrale syndicale cana dienne. Comme l'i1lustre la figure 14.4, la FTQ constitue une federation
3. Presque toutes les informations presentees iei sont tirees du site Internet de la FTQ: http://ftq.qc.ca.
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Les defis de la democratie au travail
L'ORGANIGRAMME DE LA CSN EN JANVIER 2000
Legende:
Provenance de la composition Et elu par
-t
Organisations affiliees
Contr61e du mandat
~
Centres de decision
SOUTce: Site Internet de la CSN: http://csn.qc.ca.
Les structures decisionnelles de la CSN sont d'abord Ie congres, auquel assistent pres de 1000 deIegues des syndicats locaux, des federations et des conseils centraux. Entre Ies congres, l'autorite majeure est Ie conseil conte deral (environ 168 personnes), puis Ie bureau confederal (environ 50 per sonnes) et, finalement, Ie comite executif (6 personnes).
Chapitre 14
I Gerer /es rapports collectifs de travail
(unions) quebecois, canadiens et internationaux, et ~ar l~s c?nseils, r.egionaux. Le conseil general compte environ ISO personnes qUI se reumssent a mtervalles reguliers au minimum trois fois par annee. Ses resp~ns~bi1i.tes consis~e~t it donner suite aux orientations prises pendant Ie congres, a onenter Ia Federa tion entre les congres, a statuer sur les recommandations du bureau et a revoir l'expedition des affaires courantes par Ie bureau. Enfin, Ie bureau se compose de 19 personnes occupant les postes suivants: une presidence, un secretariat general, et 17 vice-presidences (13 vice-presidences issues des syndicats, 1 des conseils generaux et 3 du caucus des femmes deU~guees au congres). Le bureau est charge d'expedier Ies affaires courantes entre Ies seances du conseil general, auquel il se rapporte. n siege au moins une fois par mois. Rappelons que la FTQ ne dispose formellement que du pouvoir que les syndicats locaux et les unions veulent bien lui reconnaitre selon les circons tances. De plus, Ie caractere facultatif de l'adhesion a la FTQ des sections locales (qui peuvent s'en desaffilier assez facilement) oblige les dirigeants de la FTQ a etre tres attentifs aux consequences des politiques adoptees et des positions detendues. En 1983, apres avoir reussi a convaincre Ie gouvernement et de nombreux autres sceptiques (tant de gauche que de droite), la FTQ lan~ait une organisa tion qui a11ait changer de fa~on considerable les orientations des centrales syndicales au Quebec: il s'agit de la creation du Fonds de solidarite de la FTQ, dont il a He question dans la mise en situation de ce chapitre.
14.4.2 La Confederation des syndicats nationaux (CSN) Deuxieme centrale syndicale au Quebec quant a l'importance numerique, la CSN constitue une veritable centrale syndicale autonome et possede sur ses elements constituants un pouvoir plus grand que la FTQ. De plus, cette cen trale syndicale se targue d'etre plus a gauche que la FTQ. Suivant une tradi tion bien implantee au sein de la CSN et contrairement a ce qui existe dans les unions internationales et canadiennes, chaque syndicat local forme une entite juridique distincte, c'est-a-dire qu'il fait l'objet d'une accreditation separee. Par ailleurs, l'adhesion d'un syndicat local a la CSN (il Y avait 2700 syndicats 10caux en 2000) entraine une affiliation obligato ire non seule ment a la centrale (par Ie biais de Ia participation aux congres), mais aussi aux deux institutions suivantes: l'une des 9 federations professionnelles de la CSN et l'un des 13 conseils centraux. Les federations professionnelles (a droite dans l'organigramme de la figure 14.5) sont en quelque sorte l'equivalent des unions. Elles regroupent Ies syndicats Iocaux qUi se situent dans des secteurs sembiables ou connexes. Elles fournissent a leurs syndicats et a leurs membres des services it caractere professionnel portant sur Ia negociation et sur l'application des conventions collectives. Quant aux conseils centraux (a gauche dans l'organigramme de la figure 14.5), Us regroupent les membres sur une base territoriale. Leur rOle est de promouvoir la solidarite de tous les syndiques affilies a la CSN dans leur territoire, independamment du secteur d'activite dans lequel ils travaillent.
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du Syndicat national des employes de I'aluminium d'Alma, du Syndicat des fonctionnaires de la province de Quebec (SFPQ) ou du Syndicat des profes sionnels du gouvernement du Quebec (SPGQ). Ce phenomene illustre a la fois la diversite des modes d'organisation syndicale et un certain malaise des employes syndiques devant les prises de positions de certains dirigeants des centrales syndicaJes reconnues.
14.4.6 Les organisations patronales En matiere de relations du travail, comme en plusieurs autres matieres d'ailleurs, les employeurs ne sont pas portes a s'associer puisque Ie systeme economique dans Iequel nous vivons suppose que Ies entreprises sont en concurrence. Ainsi, la plupart des entreprises (environ 90%) negocient indi viduellement leurs conventions collectives. Malgre cet etat de fait, les em ployeurs comptent sur divers organismes pour contrebalancer Ie pouvoir syndical aupres des medias et de diverses autorites gouvernementales. Le prin cipal organisme patronal qui joue ce role est Ie Conseil du patronat du Quebec (CPQ), cree officiellement en 1966 (Dufour, 1980). Le CPQ est une federation d'associations patronales deja existantes dont quelques-unes sont dites horizontales (ou territoriales) et d'autres sont dites vertic ales (ou selon des secteurs particuliers de l'activite economique). Plus d'une centaine d'associations patronales distinctes sont membres du CPQ, qui fait egalement appel au soutien financier d'environ 300 entreprises qui ont Ie statut de « membres corporatifs ». Les dirigeants et les employes du CPQ redi gent des memoires et les presentent au gouvernement, organisent des confe rences de presse, participent a des colloques, a des congres, a des emissions de radio et de television, publient des bulletins d'information et des brochures, et organisent diverses sessions d'etude. Le CPQ emet egalement des avis sur les projets de loi ou de regiement susceptibles d'avoir un effet sur Ia vie des entreprises. II s'assure d'une representation patronale adequate dans divers organismes gouvernementaux, teis Ie Conseil consultatif du travail et de la main-d'reuvre, la Commission sur la sante et la securite du travail ou Ia Commission des normes du travail. Les entreprises representees par Ie CPQ ont a leur service environ 80% de la main-d'reuvre du Quebec.
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des rapports col1edifs de travail .L'encadrement . . . . . . . . . . . . . . .juridique . .. .. . . . . . . . . . ....... . . . . . . ..... . . . . .... . ~
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14.5.1 Le partage de la juridiction entre le federal et les provinces au Canada Sur Ie plan juridique, Ie regime canadien des relations du travail est tres decen tralise. Le gouvernement federal a historiquement pris l'initiative d'encadrer par une serie de regles les rapports colleetifs de travail, mais c'est Ie Conseil prive du Parlement britannique qUi, a l'occasion d'une decision rendue en 1925 (Ie fameux cas Snyder), a tranche en faveur du principe d'une juridiction
Chapitre 14
I
Gerer les rapports collectifs de travail
14.4.3 La centrale des syndicats du Quebec (CSQ) La troisieme centrale en importance a longtemps ete connue sous le nom de Centrale de l'enseignement du Quebec (CEQ). Ce n'est que lors de son 36e congres tenu en 2000 que la CEQ a change de nom pour devenir la Centrale des syndicats du Quebec (CSQ) et ainsi mieux refleter 1a diversite de ses effectifs, composes non seulement d'enseignants, mais aussi d'employes du secteur public et du secteur prive. Constituee legalement en centrale syndi cale depuis 1972, la CSQ s'appuie sur un congres biennal qui dirige sa destinee et sur un conseil general qui prend toutes les mesures necessaires a la realisa tion des decisions du congres. Le conseil general se reunit 4 ou 5 fois par annee et reunit environ 300 delegues. Entre les reunions du conseil general, un con seil intersectoriel comptant une vingtaine de personnes agit comme autorite de coordination et de decision. Les structures prevoient aussi un conseil exe cutif compose de cinq personnes dont Ie mandat consiste a s'occuper des affaires courantes ainsi que de l'organisation et du fonctionnement des ser vices. Notons egalement que les operations de negociation sont coordonnees par deux autorites: Ie conseil intersectoriel des negociations et Ie conseil general des negociations.
14.4.4la Centrale des syndicats democratiques (CSO) Au debut des annees 1970. la Confederation des syndicats nationaux a ete secouee par une grave crise ideologique, une partie de ses membres et de ses dirigeants refusant d'endosser les positions radicales enterinees par Ie congres et Ie conseil confederal de la CSN. On peut mesurer l'ampleur de cette crise en soulignant qu'elle s'est traduite par Ie depart de pres de 100000 membres. Environ 30000 de ces personnes ont choisi de s'associer pour creer, lors d'un congres de fondation qui a eu lieu en juin 1972, une nouvelle centrale ou Us se sentiraient plus a raise, surtout sur Ie plan ideologique. Aujourd'hui, cette centrale compte environ 4 % des employes syndiques du Quebec et represente essentiellement des employes du secteur prive. Sur Ie plan des structures, la CSD comporte quatre corps constitues de decision: un congres, qUi se tient toutes les annees impaires et ou seuls les syndicats locaux sont representes, une assemblee pleniere, qUi se deroule entre les congres aux annees paires, un conseil de direction, qui se reunit de fa~on statutaire au moins cinq fois par annee, et un comite executif de quatre membres elus au scrutin secret par les delegues officiels du congres. Par ailleurs, des regroupements regionaux offrent des services de soutien de la vie syndicale (des services de communications, de formation, de documentation et de representation); de meme, des regroupements professionnels (federa tions) fournissent des services techniques de negociation et d'application de
conventions collectives.
14.4.Sles syndicats independants Environ 25 % des syndiques au Quebec ne sont affilies a aucune des quatre centrales syndicales que nous venons de presenter. C'est Ie cas, par exemple,
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I Les detis de la democratie au travail particulier les processus d'accreditation, de negociations collectives et d'appli cation de conventions collectives. Nous traiterons ici du processus d'accre ditation, tandis que les deux autres aspects seront abordes dans Ie prochain chapitre.
14.5.2 Le processus d'accreditation syndicale Pour profiter des droits conferes par Ie Code du travail, un syndicat doit abso lument etre accredite, d'ou l'importance du processus d'accreditation, qUi occupe d'ailleurs une large place dans Ie Code du travail, soit les articles 21 a 51. L'accreditation syndicale consiste dans la reconnaissance officielle par Ia Commission des relations du travail qUi accorde a l'association qUi la re~oit l'exclusivite de representation, soit Ie monopole de la representation syn dicale, a I'egard d'un groupe donne de salaries a des fins de negociation et d'application d'une convention collective. Comme Ie stipule Ie paragraphe b de l'article 1 du Code du travail du Quebec, une association accreditee est «l'association reconnue par decision de la Commission comme representant de l'ensemble ou d'un groupe des salaries d'un employeur ». Les regles specifiques relatives a l'accreditation sont cependant precedees par la proclamation de la liberte d'association des salaries, et par la protection de cette liberte par la reference aune serie de pra tiques interdites.
La liberte d'association L'article 3 du Code du travail du Quebec enonce de la fa~on suivante Ie principe du droit d'association des salaries: «Tout salarie a droit d'appartenir a une association de salaries de son choix et de participer a la formation de cette association, a ses activites et a son administration.» Mentionnons ce pendant que les salaries dont on parle doivent etre des salaries au sens du con trat de travail du Code civil, soit, «Ie salarie qui, moyennant remuneration, fournit une prestation de travail a une autre personne a laquelle il accepte de se subordonner);. Les trois elements precedents que constituent Ie travail, la remuneration et la subordination juridique sont ceux qu'on examine dans certains litiges pour determiner si certaines personnes se qualifient comme salaries ou exercent plutot leur travail en tant qu'entrepreneurs independants. De plus, Ie Code du travail indique que diverses personnes ne peuvent avoir recours a la representation syndicale au sens du Code du travail et sont donc nommement exclues. II s'agit, par exemple, des personnes qui sont associees ala gestion d'une entreprise, « a titre de gerant, surintendant, contremaitre ou representant de l'employeur dans ses relations avec ses salaries ». D'autres exclusions portent sur les administrateurs ou officiers d'une organisation, les fonctionnaires du gouvernement dont l'emploi a un caractere confidentiel, Ies procureurs de la Couronne et Ies membres de la SOrete du Quebec (pour lesquels on trouve une loi a part, la Loi sur Ie regime syndical applicable a la SOrete du Quebec). D'autres exclusions, finalement, resultent de la decision des legislateurs, qui peuvent toujours recourir a des lois speciales, comme ce
Chapitre 14
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Gerer les rapports collectifs de travail
principale des provinces en matiere de relations du travail. Dans cette affaire, on remettait en question la constitutionnalite d'une loi federaie de 1907 par laquel1e des services de conciliation avaient ete offerts aux parties dans tout differend partout au Canada. En se basant sur les articles 91 et 92 de l'Acte de I' Amerique du Nord britannique (AANB) maintenant appele Loi constitu tionnelle de 1867, Ie Conseil prive de Londres a statue que la loi federale etait ultra vires puisque, sur la base de l'article 92, alinea 13 traitant de «propriete et de droits civils », les provinces detenaient la competence legislative pour encadrer les rapports collectifs, Ie gouvernement federal ne conservant qu/une competence dite d'exception pour reglementer les relations du travail dans les secteurs d'activite que la Constitution du Canada a places sous son autorite. Depuis cette decision, les lois f€~derales du travail ne s'appUquent qu'aux entreprises relevant de la juridiction federale en vertu de l'article 91 de l'AANB. Ce sont principalement Ie transport par navire, les chemins de fer, la telegraphie, l'aeronautique, la radiodiffusion, les banques, toute entreprise que Ie Parlement du Canada declare d'interet national par une loi (comme Bell Canada) et tout ouvrage, entre prise ou affaire ne relevant pas du pouvoir legislatif exclusif des provinces. Bien sur, les lois federales du travail s'appli quent egalement aux employes du gouvernement federal et du service postal. Dans tous les autres secteurs, ce sont les lois provinciales qui s'appUquent aux relations du travail. Pour Ie Quebec, on estime generalement que la juridiction provinciale s'etend a pres de 90% des salaries. Ce partage de juridiction ne concerne pas que les rapports collectifs de travail. U s'etend egalement a ce qu'on peut qua lifier de regime des conditions generales de travail, ou regime des normes du travail. II en va de meme pour l'ensemble de lois plus recentes portant sur les droits de la personne. Ainsi, la Charte canadienne des droits et libertes enchassee dans la Constitution canadienne de 1982 etablit les droits a l'ega lite et aux libertes fondamentales qui doivent etre respectes dans toutes les lois canadiennes, alors que, d'une part, la Loi canadienne sur les droits de la personne ne s'applique qu'aux secteurs de juridiction federale, et que, d'autre part, la Charte des droits et libertes de la personne ne s'applique qu'aux secteurs de juridiction provinciale. En matiere de relations du travail au Quebec, Ie cadre juridique pour les entreprises et les employes qUi sont de juri diction provinciale est surtout constitue du Code du travail du Quebec. Un certain nombre d'autres lois ont egalement une influence dans la determination des conditions de travail. Ce sont, principalement, la Loi sur les normes du travail, la Loi sur les decrets de conventions collectives et la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'ceuvre dans l'industrie de la cons truction. Toutefois, Ie Code du travail se distingue de ces lois en ce sens qu'il ne fixe pas de conditions de travail; sa particularite tient plutot au fait qu'il met a la disposition des parties (les employeurs et les salaries regroupes en associations) une serie de moyens leur permettant de s'entendre sur toute question relative aux conditions de travail. Les principales dispositions du Code du travail concernent directement les relations du travail, et en
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I Les detis de la democratie au travail l'ingerence, la domination, l'entrave ou Ie financement d'une association de salaries par un employeur, Ie recours a l'intimidation ou aux menaces pour influencer Ie choix des salaries de se joindre ou non a telle association ou, d'une far;on plus generale, Ie recours a tout moyen de contrainte, sous forme de menace ou de sanction, en vue d'amener un salarie a s'abstenir ou a cesser de participer a une association de salaries. II est egalement illegal pour un employeur de refuser d'employer une personne parce qu'elle est ou a ete membre d'une association de salaries. Selon l'article 16 du Code du travail, «Ie salarie qui croit avoir ete illegale ment congedie, suspendu ou deplace a cause de l'exercice d'un droit lui resul tant du present Code doit [... J soumettre sa plainte par ecrit a la Commission des relations du travail dans les 30 jours du congectiement, de la suspension ou du deplacemenh. Par ailleurs, I'article 17 stipule qu'il y aura presomption en faveur du plaignant et que l'employeur aura Ie fardeau de la preuve si Ies quatre conditions suivantes sont remplies. • Le plaignant detient Ie statut de salarie au sens du Code du travail. • II a exerce un droit lui resultant du Code, c'est-a-dire une activite syndicale legitime. • Il a ete congectie, suspendu, deplace ou soumis a une autre sanction par I' employeur. • II Y a concomitance entre l'activite syndicale du plaignant et la mesure patronale dont il se plaint. L'employeur (ou son representant), qui a Ie fardeau de la preuve, doH demontrer que Ie salarie a commis une faute, que cette faute a ete la cause de la sanction, et qu'il s'agit d'une cause serieuse, par opposition a un pretexte. Si, malgre les representations de l'employeur, Ia plainte du salarie est accueil lie, la Commission des relations du travail dispose, en vertu de l'article 15 du Code du travail, d'un pouvoir de redressement de la situation dont la nature varie evidemment selon Ie geste accompli par l'employeur. Ainsi, la Commission peut emettre une ordonnance d'annulation de la sanction, ou de cessation des mesures dont se plaignait Ie salarie. Elle peut aussi « ordonner a l'employeur de reintegrer ce salarie dans son emploi avec tous ses droits et privileges dans les huit jours de la signification de Ia decision et de lui verser, a titre d'indemnite, l'equivalent du salaire et des autres avantages dont l'a prive Ie congediement, Ia suspension ou Ie deplacement».
14.5.3 Le moment approprie pour adresser une requete
en accreditation
Si un groupe de salaries n'est pas deja represente par une association accre ditee, l'accreditation de ces salaries peut etre demandee en tout temps. Acet egard, Ia regIe du premier depot rend irrecevable toute requete chevauchant en totalite ou en partie, meme infime, toute requete qUi lui est anterieure. Pour les salaries deja representes par une unite accreditee, une requete en accreditation ne peut etre recevable que dans des cas bien precis.
Chapitre 14
I Gerer les rapports collectifs de travail
fut Ie cas pour les ectucatrices (au gardiennes d'enfants) en milieu familial et en familles d'accueil.
Les pratiques interdites Pour proteger Ie droit d'association des salaries prodame a l'article 3 du Code du travail, Ie legislateur a prevu les articles 12 a 14 qUi precisent les «pratiques interdites» de Ia part d'un employeur. Ces pratiques sont, par exempIe,
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• la division territoriale ou geographique des installations de l'employeur; • la mobilite de la main-d'ceuvre ou les exigences de l'execution du travail; • la paix industrielle qui ne doit pas etre troublee par la multiplication des groupes et des associations; • Ie simple bon sens exigeant que tous les salaries qui ont des interets communs ne forment qu'un seul groupe.
14.5.5 La verification du caractere representatif du syndicat Vne fois qu'un groupe distinct a ete defini (ou que Ie caractere approprie
d'une unite de negociation a ete determine), la question suivante a se poser au sujet du processus de negociation est celIe du caractere representatif de l'as sociation requerante. Ce caractere representatif comporte deux dimensions. La premiere dimension est celIe de la representativite au sens des pratiques interdites (articles 12 a 14). La seconde dimension est celIe de la democratie, ou plus simplement de l'obtention de la majorite absolue (50% des voix plus 1) a l'interieur de l'unite definie. Pour verifier la presence de ces deux dimensions, Ie Code du travail prevoit deux moyens. Le premier moyen consiste a determiner Ie nombre (et Ie pourcentage) de salaries de l'unite d'accreditation visee par la requete qui ont signe un formulaire d'adhesion et qui ont paye une somme de 2 $ a titre de cotisation syndicale de fa\=on a voir si elle dispose de la majorite absolue. Le deuxieme moyen consiste a proceder a un scrutin secret et a octroyer l'accreditation si l'association requerante obtient la majorite absolue des voix. Ce deuxieme moyen doit etre utilise dans les situations ou Ie calcul des effectifs (par Ie biais des formulaires d'adhesion) revele qu'entre 35 % et 50% des salaries sont membres de l'association. Notons ici qu'en vertu de l'article 32 du Code du travail, l'employeur n'est pas considere comme «partie interessee», en ce qui a trait a la verification du caract ere representatif de l'association requerante, c'est-a-dire qu'on ne lui permet pas d'intervenir. La situation est un peu differente pour ce qui est du caractere approprie de l'unite d'accreditation, l'employeur pouvant mani fester son des accord sur l'inclusion dans l'unite de negociation de certaines personnes visees par la requete en accreditation.
14.5.6 Les consequences de l'accreditation Des Ie depot d'une requete en accreditation, les relations du travail entre un employeur et ses salaries s'en trouvent modifiees. En vertu de l'article 25, l'employeur doit, dans les cinq jours de la reception de la requete, afficher dans un endroit bien en vue la liste complete des salaries de l'entreprise vises par la requete, avec la mention de leur fonction (poste occupe) respective. n doit aussi transmettre sans delai une copie de cette liste a l'association requerante. Si un vote s'avere necessaire, l'article 38 stipule que l'employeur est tenu de faciliter la tenue du scrutin. Finalement, l'article 59 indique que, «a compter du depot d'une requete en accreditation [... ], un employeur ne doit pas modifier les conditions de travail de ses salaries sans Ie consentement ecrit de chaque association requerante ».
Chapitre 14
I G€irer
les
rapports collectifs de travail
• Le cas de I'association accreditee mais inoperante. Si une convention collective n'a pas He conclue et si Ie differend n'a pas ete soumis a I'ar bitrage ou ne fait pas l'objet d'une greve ou d'un lock-out permis par Ie Code du travail, une nouvelle accreditation peut etre demandee 12 mois apres Ia date de I'accreditation ou 9 mois apres la date d'expiration d'une convention collective ou d'une sentence arbitrale en tenant lieu. • Le cas de l'association qui fait defaut de deposer sa convention collective. En ce cas, I'article 72 du Code du travail stipule que si, 60 jours apres Ia signature d'une convention collective, il n'y a pas eu depot de la convention collective (ou des modifications qu'on y a apportees) a la Commission des relations du travail, toute autre association pourra proceder a l'envoi d'une requete en accreditation a l'egard du groupe de salaries en cause. • Le cas de l'expiration d'une convention collective de courte duree (trois ans ou moins). En ce cas, il peut y avoir peri ode de maraudage, c'est-a-dire qu'une association rivale peut adresser une requete visant a deloger Ie syndicat en place. CeUe peri ode se situera entre Ie 90e et Ie 60e jour precedant la date d'expiration de Ia convention collective ou de la sentence arbitrale en tenant lieu. • Le cas d'une convention collective de longue duree (plus de trois ans). En ce cas, une demande d'accreditation (par une association rivale) peut etre adressee entre Ie 180e et Ie IS0e jour precedant la date d'expiration de Ia convention collective et a chaque deuxieme anniversaire subse quent (Ie 8e, Ie lOe, et ainsi de suite).
14.5.4 La verification du caractere approprie de l'unite requerante Dne notion importante dans Ie processus d'accreditation est celle de groupe distinct. Ainsi, selon l'article 21 du Code du travail, «Ie droit a l'accreditation existe a l'egard de la totalite des salaries de l'employeur ou de chaque groupe des dits salaries qui forme un groupe distinct». En d'autres termes, les reque rants doivent proposer une deSCription de l'unite d'accreditation, c'est-a-dire une liste des postes dont les titulaires feront partie du syndicat en train de nai'tre. Le groupe distinct peut etre constitue de tous les salaries d'une meme entreprise; il pourrait aussi n'etre constitue que d'un seul salarie. Dans une meme entreprise, on peut donc trouver plusieurs unites d'accreditation, ou une seule. Un groupe distinct de salaries a des fins d'accreditation, c'est soit celui sur lequell'association de salaries et l'employeur se sont entendus, soit celui que la Commission des relations du travail etablit en cas de desaccord entre les parties. Pour rendre une telle decision, les commissaires du travail s'inspirent habituellement des criteres suivants pour determiner l'unite appropriee : • la volonte des salaries exprimee librement; • l'histoire des accreditations, des negociations et des conventions collec tives chez cet employeur ou chez d'autres employeurs similaires et, s'il ya lieu, l'evolution de la structure de ]'entre prise ;
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Partie V \ Les defis de la democratie au travail
Chapitre 14
I
Cerer les rapports collectifs de travail
Lorsque I'association est accreditee, l'employeur he~ite .encore ~'autres obligations. Par exemple, il doit prelever a la source la cotisatIon syndIC ale ou son equivalent et en rendre compte a l'association accreditee. L'employeur est egalement contraint de negocier de bonne foi avec ce syndicat. Et s'il est im plique dans une greve ou un lock-out, il devra non seulement s'abstenir de faire appel a des briseurs de greve en vue de conclure une convention collec tive, mais aussi, a la fin du conflit, reprendre les salaries a son service au fur et a me sure de ses besoins et sans discrimination. Un autre effet de l'accre ditation concerne les decisions de l'employeur pendant l'application d'une convention collective. En effet, l'employeur devra s'attendre (et se preparer en consequence) a ce que ses decisions relatives aux conditions de travail ou aux statuts des salaries puissent faire l'objet de griefs susceptibles d'etre soumis a l'arbitrage d'une personne exterieure a l'entreprise. Pour chacun des salaries compris dans l'unite, l'accreditation entraine aussi comme consequence l'obligation de payer la cotisation, soit de contri buer au financement du syndicat. Par ailleurs, chaque salarie est lie par la seule convention collective conclue eventuellement par Ie syndicat, c'est a-dire que tout accord paralleIe ou individuel (conclu sans l'accord du syndi cat) sera considere com me illegal. De plus, chaque salarie sera tenu de se soumettre aux decisions collectives prises par Ie syndicat quant a l'exercice du droit de greve. En contrepartie, tout salarie dispose du droit d'etre traite d'une fa~on juste et loyale par son syndicat et beneficie d'un droit d'en appeler contre son syndicat dans certains cas (voir l'article 47.3 du Code du travail). Quant a l'association, l'accreditation lui confere l'exclusivite de represen tation a l'egard du groupe de salaries aux fins de la negociation d'une con vention collective et de son application. L'association doit cependant (article 47.2) defendre d'une fa~on juste, loyale et sans negligence les inten~ts de tous les salaries compris dans l'unite, qu'ils soient membres ou non du syn dicat. Elle doit aussi divulguer chaque annee a ses membres ses etats financiers, et proceder par scrutin secret pour Hire ses officiers, declarer une greve ou signer une convention collective (articles 20.1 a 20.3). Ainsi, les obli gations d'une association accreditee a l'egard des salaries peuvent donner lieu a des causes interessantes devant certains tribunaux, notamment devant la Cour superieure et la Cour d'appel. Avec les nouvelles regles relatives a la notion de harceIement prevues par Ia Loi sur les normes du travail, en plus des regles relatives aux droits de la personne, on peut dire, a tout Ie moins, que la situation sur Ie plan juridique est devenue plutot complexe.
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Partie V
I Les defis de la democratie au travail
o deQu'est-ce qui distingue un syndicat metier d'un syndicat industriel? 8 Parmi
les organismes auxquels ont recours les syndicats pour se donner des services, a quoi servent les conseils centraux et les federations ou unions?
o tantes Quelles sont les trois plus impor centrales syndicales du
Quebec? Indiquez pour chacune d'elles un trait distinctif.
CD En
quoi consiste Ie Conseil du pa tronat du Quebec (CPQ) et quelle est son utilite en matiere de rela tions patronales-syndicales ?
~ Enumerez cinq types d'entreprises
du secteur prive qui, meme si elles se situent au Quebec, sont de juri diction federale en matiere de rela tions du travail. Pourquoi en est-il ainsi? Qu'est-ce que cela implique concretement?
m groupe A quoi correspond Ie fait pour un de salaries d'etre accredite selon Ie Code du travail? Qui a droit a ce type d'accreditation? Nommez trois types de salaries qui n'y ont pas droit.
QNS ~
de discussion .....
@ Qu'appelle-t-on «pratiques inter dites» et quelle est la raison d'etre des articles 12 a 14 du Code du tra vail qui prohibent ces pratiques? Quels sont les moyens a la disposi tion du salarie qui se croit lese dans ses droits? Q) Le droit a l'accreditation existe a l'egard de chaque groupe de salaries qui forment un «groupe distinct»: que signifie cette notion et quelle est sa portee?
Cl Pour etre accredite, un syndicat doit aussi posseder un «caractere repre sentatif» : qu'est-ce que cela signifie?
® Lors d'une requete en accreditation, pourquoi un employeur pourrait-il refuser son accord en ce qui a trait au groupe distinct? De quelle fa<;:on et a que I moment doit-il agir s'il veut qu'on tienne compte de sa position? ~ Nommez
deux des principaux effets d'une accreditation syndicale pour chacun des groupes suivants: a) l'employeur; b) les salaries en cause; c) la nouvelle association accreditee.
Chapitre 14
I Cerer les rapports collectifs de travail
Le cadre juridique des relations du travail comporte d'autres regles, notamment d'autres articles du Code du travail qui concernent les processus de negociation et d'application de conventions collectives. Ces sujets sont abordes dans Ie chapitre suivant.
Conclusion La presence des institutions syndicales dans la societe et dans les organisa tions ainsi que les regles juridiques rattachees aux relations entre les diri geants d'entreprise et leurs employes representent des defis importants pour les gestionnaires, et en particulier pour les specialistes de la GRH. Non seule ment ils ont l'obligation de connaltre et de comprendre les regles appUcables a ces situations, puisque « nul n'est cense ignorer la loi », mais aussi its doivent adopter envers les employes et les syndicats une attitude d'ouverture sur la recherche active de solutions aux problemes qui preoccupent les employes. La gestion «proactive}) ou preventive des ressources humaines ne constitue pas une garantie que les dirigeants d'une entreprise n'eprouveront pas divers problemes dans leurs relations avec leurs employes et les syndicats qUi les representent; cependant, une telle approche permet generalement de preser ver a la fois l'efficacite, l'efficience, l'equite et la satisfaction des parties en cause. Par ailleurs, cette tache necessite beaucoup de temps et d'energie. II s'agit d'un projet a long terme auquelles gestionnaires doivent travailler sans reHl.che. De plus, les specialistes de la GRH ne peuvent a eux seuls relever ce defi; its doivent obtenir l'appui et la collaboration de l'ensemble des autres gestionnaires, en particulier des membres de la haute direction.
de revision
o Comment se caracterise, selon vous,
Ie changement d'attitudes de la plupart des syndicats resultant du nouveau contexte d'affaires? Sur quoi portent les preoccupations syndicales prioritaires?
8
Qu'est-ce que Ie modele elabore par des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology comporte de nouveau, selon une perspective sys temique, par rapport au modele tra ditionnel des relations du travail?
. , Expliquez sommairement les trois strategies patronales les plus
repandues en matiere de relations patronales-syndicales. . , Expliquez les trois principaux fac teurs consideres comme respon sables de la syndicalisation d'un groupe de salaries. "
Nommez trois moyens legaux mis a la disposition d'un employeur qui souhaiterait influencer les percep tions de ses employes a l'egard du caractere equitable des conditions de travail et des pratiques de gestion.
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Partie V
I
Les defis de la democratie au travail
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Chapitre 14
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Gerer les rapports collectifs de travail
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Chapitre 14
I Gerer les rapports collectifs de travail
Les sal aires des patrons d'Air Canada seraient moins touches: des respon~ sables syndicaux accusent le transporteur d'avoir fait volte-face4 Des responsables syndicaux accusent Air Canada d'avoir fait volte-face apres que Ie transporteur eut revele que les baisses de remuneration des patrons seraient moins importantes que ce qUi avait d'abord ete propose. Une porte parole d'Air Canada a indique jeudi que les gestionnaires verraient leurs salaires diminuer de 10% alors que les pilotes, par exemple, subiraient une baisse de remuneration de 15 %. Or, selon Dave Ritchie, un dirigeant de I' Association des machinistes et travailleurs de I'aero spatiale, I'employeur avait «laisse croire que tous les cadres encaisseraient des reductions de 15 % }). « Ils [la direction] avaient dit qu'ils feraient une chose et void qu'ils ont fait autre chose. Ace stade-d dans Ie match, vous ne pouvez plus faire volte-face ", a souligne M. Ritchie. Ces mesures - tou chant a la fois Ie personnel syndique et non syndique - s'inscrivent dans Ie pro jet d'Air Canada de rectuire de 1,1 mil liard de dollars ses couts de main d'reuvre de queIque 3 milliards. Des documents deposes cette semaine pre cisent que Ie president Robert Milton a touche l'an dernier une remuneration de 1,1 million, en baisse de 1 % sur celle de 2001. Selon Laura Cooke, d'Air
Canada, M. Milton sera Ie seul dirigeant
a subir une baisse de 15 %, contre 10 % chez les autres.
Pour leur part, les employes non syn diques devraient voir leur remuneration diminuer de 5 % ou moins. En outre, Robert Milton aurait droit a un fort dedommagement si Ie contrOle de la compagnie devait changer de mains; en vertu d'un accord de 1999, it pourrait quitter Air Canada et recevoir, sur une duree de trois ans, un montant evalue a cinq millions en salaire et primes.
o Quel principe fondamental de rela tions patronales-syndicales semble avoir ete viole dans la presente situation? • Dans l'hypothese ou l'employeur (en l'occurrence Air Canada) sou haite etablir une relation de confiance avec ses interlocuteurs syndicaux, queUes consequences, selon vous, entrainera la presente decision?
e Quelle
strategie de relations du travaill'employeur semble-toil avoir adoptee?
4. "Les salaires des patrons d'Air Canada seraient moins touches: des responsables syndicaux accusent Ie transporteur d'avoir fait volte-face», Presse Canadienne et Le Devoir, 5-6 juillet 2003.
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Apres l' etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte a: • Definir en quoi consistent les negociations collectives et expliquer les particularites des negociations collectives de travail. • Enumerer et expliquer les principaies regles juridiques qUi s'appliquent au processus de negociation collective de travail. • Connaitre Ies fa~ons de bien se preparer tant a long terme qu'a court terme avant de negocier. • Comprendre et expliquer Ie role du pouvoir de negociation. • Decrire les composantes de l'approche de la negociation raisonnee. • Connaitre et expUquer les principaux mecanismes d'application des conventions collectives.
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Partie V
I
Les defis de la democratie au travail
Bombardier prepare le transfert d'adivites de Toronto aMontreal1
Le
malheur de Toronto fera-t-ille bonheur de Montreal? N'ayant pas reussi a s'en tendre avec les syndiques de son usine De Havilland, situee a Downsview, en ban Heue de Toronto, Bombardier Aeronautique etudie queUes activites de production elle potmait rapatrier a Montreal. «II faut regarder qU'est-ce que nous pouvons demenager et ou est-ce que nous pouvons Ie mettre. C'est la-dessus que nous sommes en train de nous informer», a declare Ie porte-parole de Bombardier Aeronautique, John Paul Macdonald, en entrevue hier. L'usine De Havilland a rouvert lund; apres avoir ete fermee plus d'un mois, une mesure qui faisait partie du programme de reduction de coilts annonce par Bombardier Aeronautique a l'automne. Pourtant, ce n'est pas la joie parmi les rangs des employes: Ie blitz de negociations entrepris par Ie syndicat et l'employeur pour conclure une nouvelle convention collective n'a rien donne. « Bombardier a menace de reduire l'usine a la production des turbopropulses (ies avions a helice) si elle n'avait pas d'en tente au 31 janvier. Nous ne sommes pas parvenus a une entente», resume la direc trice nationale pour l'aerospatiale aux Travailleurs canadiens de l'automobile (TCA), Dawn Cartwright. Les syndiques torontois craignent donc que Bombardier ne Iaisse a Downsview que la fabrication des turbopropulses Dash 8 (beaucoup moins populaires depuis quel ques annees) et ne rapatrie a Montreal la production des jets d'affaires Global
Express et Global 5000. L'usine De Havilland fabrique aussi des ailes pour les Learjet assembles a Wichita, au Kansas. Un trans{ert de l'Ontario au Quebec serait evidemment une bonne nouvelle pour les syndiques de Montreal. «C'est sur que chez nous, (a reduirait les mises a pied. C'est 1000 jobs, rai des gens iei qui sont competents pour Ie {aire, qui sont qualifies, certifies », convient Michel Lauzon presi dent de la section 712 de l'Association intemationale des machinistes et travail leurs de I'aviation (AlMTA), affiUee a la FTQ. (Bombardier n'a pas confirme ['es timation de 1000 emplois evoques par M. Lauzon.) Si Bombardier trans{erait des activites de production de Torontol c'est probable ment Montreal quleUe Ies replacerait, car sa structure de couts y est moins eIevee, confirme John Paul Macdonald. « Ce nlest pas necessairement la {aute de Downsview non plus parce qu'ici nous avons des com mandes pour les jets regionaux. Quand notre ligne de production travaille conti nuellement, c'est sur que nos couts baissent en consequence », note Ie porte-parole de Bombardier. Mais l'avionneur ne veut pas parler du trans{ert du Global Express ou du Global 5000, un nouveau modele encore en test. « On limite (a en disant: certains elements de production. On ne parle pas de deme nager des avions au complet. Juste de menager certains elements de production comme une aile ou du fuselage ou une queue d'un avion, (a prend des mois et des mois de planification », dit John Paul
a
1. A. Krol, «Bombardier prepare Ie transfert d'activites de Toronto p. CI-C2.
a Montreal », Le So/eil, 6 fevrier 2003,
Chapitre 15 \ Negocier et appliquer une c.on'Jenticm c.o\\ec.ti'le •
Macdonald. Bombardier et les TCA n'ont prevu aucune date pour reprendre les m?go ciations au sujet de l'avenir de Downsview, mais les deux parties se disent ouvertes a la discussion. « Eventuellement les com mandes vont revenir, on prevott qu'll va y avoir une demande pour les turbopropulses et on veut que Downsview soit Ia place ou on va construire ces appareils-Ia », note Ie porte-parole de Bombardier. Les TCA veulent davantage. «II nous (aut une entente sur Ie traitement qui sera reserve aux gens qui seront deplaces par la restructuration », dit Dawn Cartwright. Environ 1200 syndiques travaillent actuel lement a Downsview, 400 d'entre eux n'ayant pas ete rappeles lundi.
o Quels sont les principaux enjeux de Ia negociation entre Ies syndiques de I'usine De Havilland it Downsview et les representants de la firme Bombardier?
f) Quelle semble etIe 1a stI~tegie / de negociation de BombardIer AeIO nautique dans cette negociation? . , La fermeture de l'usine pendant un mois et sa reouverture paItielle (avec 400 ouvriers de moins) apparaissent elles comme des evenements im portants dans Ie cadre de cette negociation? Comment ces faits sont-ils susceptibles d'influer sur Ia negociation en cours?
o Compte
tenu de l'environnement de I'entreprise et du syndicat dans cette negociation ainsi que de la dynamique interne de chacune des deux parties, queis sont les elements qui diminuent Ie pouvoir de nego ciation de chacune des parties et quels sont ceux qui l'augmentent?
" De queUes fa~ons Ies principes de Ia «negociation raisonnee» pourraient Us s'appliquer dans la presente situation .?
Plus la gestion des ressources humaines d'une organisation sera centralisee, bureau cratique, technocratique, inflexible, sans sou plesse et sans imagination, plus la strategie de negociation sera conflictuelle. A l'inverse, une gestion des ressources humaines proche des gens, souple, flexible et imaginative (avorisera ['implantation de strategies cooperatives 2.
Comme nous l'avons vu au chapitre 14, Ie taux de syndicalisation au Quebec se situait en 2001 it 40,4 %, avec un taux de 81,4 % dans Ie secteur public et un taux de 27,791.) dans Ie secteur prive. Ceia implique que de tres nombreux gestionnaires se tIOuvent regulierement dans la situation de devoir negocier des conventions collectives de travail et surtout de devoir veiller a 2. 1. Sexton, Initiation
afa negociatiorz collective, Quebec, Les Presses de l'Universite Laval, 2001, p. 100.
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Partie V
l
Les defis de la democratie au travail
l'application de ces conventions collectives. Ces deux obligations font l'objet du present chapitre. Pourquoi examiner ces sujets dans un livre cons acre a la gestion des res sources humaines, et dans quelle mesure ces notions sont-elles importantes pour des gestionnaires qui entendent, par exemple, reuvrer dans des secteurs non syndiques? A la premiere question, nous repondons que les negociations collectives exercent une influence determinante sur plusieurs autres facettes de la GRH et, comme l'indique la citation precedente, qu'elles sont egalement influencees par 1a gestion des ressources humaines; cette interdependance fait ressortir l'interH d'aborder ces sujets. A la deuxieme question, nous repon dons que Ie fait d'reuvrer actuellement dans des secteurs non syndiques ne garantit absolument pas que ces secteurs ne seront pas un jour syndiques. Aussi, Ie gestionnaire ou Ie cadre qUi opere pendant un certain temps dans un secteur non syndique voudra peut-Hre un jour acceder a un poste dans un secteur ou 1es employes sont syndiques (par exempIe, Ie secteur public); la connaissance des principes a respecter dans un tel contexte lui sera alors d'une grande utilite. En effet, comme Ie souligne Bernard Tremblay, de la Federation des commissions scolaires du Quebec: «Les conventions collectives [oo.J constituent des contraintes" de gestion importantes auxquelles Ie ges tionnaire [... J doH etre sensibilise et pour lesqueUes il se doit d'etre outille» (2003, p. 157). Par ailleurs, les principes et les mecanismes associes a l'obli gation de negocier avec des syndicats, puis d'administrer des conventions negociees, sont tout a fait applicab1es a plusieurs situations dans des entreprises non syndiquees, ou l'on trouve frequemment, par exemple, une procedure de plainte qUi ressemble etrangement a ce que prevoient Ies con ventions collectives. Ii
Ce chapitre est structure de la fa~on suivante. Dans la premiere section, nous presentons une definition de la negociation collective et nous expli quons brievement les caracteristiques de ce mecanisme de determination des conditions de travail. La deuxieme section est consacree a l'aspect legal du processus de negociation collective. On constate alors que, par-dela certaines facettes techniques, cet aspect legal est finalement assez simple. La troisieme section porte sur les aspects plus pratiques d'une negociation collective. Nous traitons, entre autres choses, de la nouvelle approche de negociation dite negociation raisonnee. Enfin, la quatrieme section concerne les mecanismes d'application d'une convention collective.
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.L~.s. ~~!~~~~!~~~i.~1:le~. ~~.1.~ ~~~~~~~~~~!'. ~~~l.~~~i~.~ La negociation collective s'inscrit dans les relations du travail. Les relations du travail peuvent se definir comme etant «I'ensemble des rapports et des con flits survenant entre les employeurs et leurs salaries, ainsi que leurs organi sations respectives s'il y a lieu, et dont l'encadrement est defini en partie par l'Etat» (Grant et Mallette, 1985, p. 606). Ces rapports et ces conflits naissent lors de la determination des conditions de travail. Le prinCipal mecanisme
Chapitre 15
I Negocier et appliquer une convention collective
qu'on analyse alors est celui des negociations collectives, meme si l'on admet que les conditions de travail peuvent etre determinees de plusieurs autres fat;:ons, par exemple sur la base d'une negociation privee entre un salarie et son employeur, a partir d'un decret ou d'une loi emanant de l'Etat, ou bien par une decision unilaterale de l'employeur, qu'il y ait ou non une consulta tion prealable des employes en cause. Ibute negociation implique deux par ties qUi disposent d'un pouvoir relatif et de la Iiberte de s'entendre ou de ne pas s'entendre. Si des parties choisissent de negocier, c'est soit qu'elles n'ont pas Ie choix d'agir autrement, soit qu'elles constatent que leurs interets sont a la fois divergents et convergents. C'est Ie cas, notamment, lors du renou vellement d'un bail entre un proprietaire et un locataire, ou lors de toute transaction commerciale entre un acheteur et un vendeur. Comme Ie rappelle Dion, une negociation est un «processus par lequel des personnes ou des groupes possMant des inten::ts divergents entrent en pourparlers, parfois accompagnes de pressions, afin d'en arriver it un accord qui leur sera mutuel lement benefique dans Ie reglement d'une affaire» (1986, p. 309). Vne nego ciation devient collective lorsque les enjeux de part et d'autre s'appJiquent a des groupes. Les syndicats et Ies employeurs sont sans doute les groupes qui interviennent Ie plus frequemment dans des negociations collectives. Vne negociation collective peut donc etre definie simplement comme un
processus de tractations entre une partie patronale et une partie syndicale. Comme Dion l'indique, il s'agit d'un «procede selon lequeI, d'une part, un employeur, une association d'employeurs et, d'autre part, un syndicat cherchent a en venir it une entente sur des questions relatives aux rapports du travail dans I'intention de condure une convention collective it Iaquelle Ies deux parties souscrivent mutuellement» (1986, p. 310). Ces tractations visent it determiner les conditions de travail qUi s'imposent aux salaries compris dans I'unite d'accreditation et les mecanismes de relations entre les deux par ties. Depuis 1935 aux Etats-Vnis et 1944 au Canada et au Quebec, les pouvoirs publics obligent les employeurs a negocier «de bonne foi» avec Ie syndicat ou les syndicats representant Ia majorite des salaries d'une entreprise ou un groupe particulier de salaries. Les negociations collectives dont il sera question dans ce chapitre repre sentent un type particulier de negociations, parce qu'il s'agit d'un processus reserve a des «associations accreditees », d'ou !'importance du processus d'ac creditation que nous avons explique dans Ie chapitre precedent. Par ailleurs, etant donne qu'il est soumis au Code du travail, Ie processus de negociation collective implique, de Ia part des personnes susceptibles d'y etre associees, la comprehension de quelques aspects Iegaux relativement simples que nous expliquerons dans Ia prochaine section. Outre cet aspect juridique, les negociations collectives possedent d'autres caracteristiques qui contribuent a leur particularite. D'abord, elles impliquent des parties qui dOivent, dans presque tous les cas, continuer de cohabiter et assumer les resultats des negociations de meme que les consequences de la fat;:on dont elles ont negocie. Cette caracteristique a elle seule devrait sensi biliser les negociateurs au fait qu'il importe d'adopter des comportements
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Partie V
I Les defis de la democratie au travail responsables et respectueux envers l'autre partie, laquelle ne doit pas, par exemple, €:tre envisagee comme un adversaire a abattre, mais plutot comme un partenaire a convaincre. Les negociations collectives sont certes influen cees par Ie pouvoir de negociation dont nous traiterons dans ce chapitre, mais, plus subtilement, elles impliquent Ie recours au conflit (ou plus souvent a la menace de conflit) comme mecanisme de resolution. Ensuite, les nego ciations collectives concernent Ie recours a des representants mandates, ce qui amene une distinction entre les negociations interorganisationnelles (c'est a-dire entre la partie patronale et la partie syndicale) et les negociations intra organisationnelles (c'est-a-dire a l'interieur de chacune des parties, entre les mandataires et leurs mandants), les secondes etant souvent plus difficiles et complexes que les premieres. Une dernit're caracteristique des negociations collectives a trait au fait qu'elles se terminent, dans a peu pres tous les cas, par la signature d'un docu ment legal (une convention collective) qu'il faut interpreter et appliquer judi cieusement. Ce document peut donc faire l'objet de conflits de droit, dont la manifestation ultime constitue l'arbitrage des griefs, ce dont nous traiterons en fin de chapitre. Nous abordons ce chapitre avec la conviction que, malgre la perception habituelle selon laquelle les relations du travail sont caracterisees avant tout par les conflits, il y a moyen d'instaurer et de maintenir dans les milieux de travail syndiques une relative harmonie. Les connaissances, les habiletes et les attitudes auxquelles se retere ce chapitre devraient contribuer a l'etablisse ment d'un tel climat
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L'aspect legal d'une negociation collective •
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Au Quebec, Ie regime actuel de negociations collectives est determine part i culierement par Ie Code du travail, dont les articles s'appliquent tant au secteur prive qu'au secteur public. Cependant, les secteurs public et parapu blic sont egalement couverts par une Ioi speciale adoptee en 1985, soU la Loi sur Ie regime de negociation des conventions collectives dans les secteurs publics et parapublics (L.R.Q., c. R-8.2). Cette loi prevoit entre autres choses des amenagements spedaux du regime de negociation, qui comporte par exemple l'existence de deux paliers ou la negodation sectorielle est Ia regIe et ou la negodation locale est l'exception. La loi prevoit aussi la constitution de groupements de negociation patronaux (tel Ie Comite patronal de nego dation) et syndicaux. La periode de negociation des secteurs public et para public est egalement speciale. Sauf indication contraire, les remarques qui suivent s'appliquent au secteur prive relevant de la competence provinciale.
15.2.1 L'avis de negociation Seule une association accreditee a Ie pouvoir legal de forcer un employeur a participer, «de bonne fob>, a des negociations collectives. Les negociations
collectives debutent au moment ou un avis de negociation a ete donne sui vant l'article 52 du Code du travail, ou est repute avoir ete donne suivant l'article 52.2. La partie qui donne l'avis de negociation (presque toujours la partie syndicale) doit en envoyer une copie au ministre du Travail Ie meme jour. Ce geste prend tout son sens a la lecture de l'article 58, qui stipule que cet avis declenche Ie compte a rebours (pour une peri ode de 90 jours) pour l'obtention par les parties du droit de greve ou de lock-out. Lorsque les parties negocient leur premiere convention collective, l'avis de negociation peut etre donne en tout temps a partir de la date de l'accredita tion. Une association nouvellement accreditee qui neglige de donner un avis de negociation sera reputee l'avoir donne 90 jours apres la date de l'obtention de l'accreditation, et la copie de l'avis sera reputee avoh ete rec;ue par Ie ministre Ie meme jour. Lors du renouvellement d'une convention collective ou d'une sentence arbitrale en tenant lieu, l'avis de negociation peut etre donne dans les 90 jours precedant l'expiration de la convention collective ou de la sentence arbitrale en tenant lieu. Si aucun avis n'est donne, l'avis sera repute avoir He donne Ie jour de l'expiration de la convention collective ou de la sentence arbitrale.
15.2.2 La conciliation Cette phase des negociations collectives avait auparavant beaucoup d'impor tance, parce que Ie l€~gislateur avait lie Ie droit de greve ou de lock-out a la demande, par l'une des parties, de designer un conciliateur (qu'on appelle parfois «mediateur») pour les aider a resoudre leur differend. La conciliation n'est plus une condition d'obtention du droit de greve. Elle constitue cepen dant, dans Ie contexte de la negociation d'une premiere convention collec tive, une etape obligatoire avant que l'une des parties puisse demander au ministre de soumettre Ie differend a l'arbitrage. Un conciliateur est un fonctionnaire du ministere du Travail. Le seul pou voir dont il dispose est de forcer les parties a assister a toutes les reunions auxquelles il les convoque. Selon Gagnon, «l'absence pure et simple d'une partie convoquee a une seance de conciliation la rendra susceptible d'une condamnation penale» (1996, p. 375). Ce qui justifie l'intervention d'un con ciliateur dans Ie processus de negociation, c'est la croyance que cette inter vention peut faire debloquer certaines situations entre les parties et faciliter l'obtention d'un accord. Selon les quelques recherches effectuees sur Ie theme de l'efficacite du processus de conciliation (ou de mediation), il semble bien que les resultats soient modestes. Entre autres choses, il apparait que la con ciliation volontaire n'est pas plus efficace que la conciliation obligatoire (Ross et Brossard, 1990; 1995).
15.2.3 Le droit de greve ou de lock-out En vertu du Code du travail du Quebec, seuls les policiers et les pompiers au service d'une municipalite ou d'une regie intermunicipale n'ont formellement
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Les detis de la democratie au travail
pas Ie droit, queUes que soient Ies circonstances, de recourir it Ia greve (ce qui n'a pas empeche ces groupes de salaries de recourir illegalement it la greve it plusieurs occasions). D'autres lois prohibent la greve dans Ie cas de groupes determines. Ainsi, la Loi sur Ia fonction publique interdit toute greve aux agents de Ia paix, aux gardiens de prison, aux gardes-chasse et aux inspecteurs d'autoroutes. Les membres de Ia Surete du Quebec n'ont pas non plus Ie droit de faire la greve, et leurs relations du travail sont soumises a une Ioi speciale, la Loi sur Ie regime syndical applicable a la Surete du Quebec. Pour taus les autres salaries membres de syndicats accredites en vertu du Code du travail, Ie recours it la greve h~gale est possible, sauf qu'il faut, dans chaque cas, respecter certaines conditions specifiques. La premiere condition concerne Ie respect du deIai prevu it l'article 58. Une deuxieme condition importante a trait aux caracteristiques du vote de greve des salaries (article 20.2): Ie scrutin doit etre secret, et son resultat doH indiquer une majorite calculee sur la base du nombre de membres «de l'association accre ditee qui sont compris dans l'unite de negociation et qUi exercent leur droit de vote ». De plus, Ies membres doivent avoir ete adequatement informes de la tenue d'un vote de greve au moins 48 heures a l'avance. Si Ie vote est posi tif, l'association doit «en informer par ecrU Ie ministre dans les 48 heures qUi suivent Ie scrutin ». Les «services publics» sont soumis a deux conditions additionnelles d'exercice du droit de greve: Ie maintien des services essentiels et l'avis prealable de greve. Notons que la participation a une greve illegale (ou a un lock-out illegal) peut donner lieu a une poursuite judiciaire (article 142). EIle peut egalement donner lieu a une action en dommages et interets sur la base des regies gene rales de la responsabilite civile. Certains groupes (par exemple, des patients d'un hopital et des eleves d'une ecole) ont meme deja obtenu l'autorisation d'exercer un recours coUectif contre un syndicat et des syndiques a la suite d'une greve illegale.
15.2.4 Les briseurs de greve Depuis Ie 1er fevrier 1978, plusieurs dispositions du Code du travail du Quebec restreignent considerablement la marge de manreuvre des employeurs dont les salaries sont en greve ou en lock-out. Malgre Ies hauts cris jetes par Ie Conseil du patron at, Ie legislateur a (presque) impose I'arret des activites dans une unite de negociation en greve ou en lock-out. II a banni Ie recours a ce qu'on appelle des briseurs de greve. Dorenavant, la marge de manreuvre laissee a l'employeur par l'article 109.1 du Code du travail pour remplacer des salaries en greve ou en lock-out se resume de la fa~on suivante. Dans l'etablissement touche par la greve ou Ie lock-out, l'employeur ne pourra utiliser les seuls services des cadres de cet etablissement ou d'un autre etablissement auquel appartiennent des salaries de l'unite de negociation en greve ou en lock-out que si ces cadres ont ete embauches avant Ie debut de la periode de negociation. Ces regles peuvent, dans certains cas, entrainer des poursuites legales.
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I Negocier et
appliquer une convention collective
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15.2.5 L'arbitrage possible du differend Selon Ie Code du travail, un difU:rend consiste en «une mesentente relative ou au renouvellement d'une convention collective ou a sa revision par les parties en vertu d'une clause la permettant expressement ». Par consequent, lorsqu'elles negocient, les parties patronale et syndicale tentent de regler leur differend. On se reU:re aussi au concept de differend en parlant de conflit de negociation ou de conflit d'interets. En cas d'echec de la nego ciation, les parties peuvent confier leur differend a un arbitre. Elles peuvent aussi se faire imposer un tel arbitrage.
a la negociation
Un arbitre de differend n'est ni un fonctionnaire ni un juge, et il agit sur une base ponctuelle. II peut etre choisi par les parties d'un commun accord, et nomme ensuite par Ie ministre du Travail. Si les parties ne s'entendent pas, Ie ministre nommera alors un arbitre de son choix, a partir d'une liste dressee annuellement par lui apres consultation du Conseil consultatif du travail et de la main-d'a:uvre (article 77). En ce qui concerne la conduite des seances d'arbitrage, l'article 83 du Code du travail specifie que l'arbitre a tous les pouvoirs d'un juge de la Cour superieure, sauf qu'il ne peut imposer l'emprisonnement. En fait, son mandat est d'elaborer ou de determiner Ie contenu d'une convention collective pour les parties et a leur place. La sentence rendue constitue Ie contenu d'une convention collective determinee par une tierce partie. Cette sentence a d'ailleurs, selon ]es termes de l'article 93, «l'effet d'une convention collective signee par les parties». Ces dernieres peuvent cependant s'entendre pour modifier Ie contenu de la convention en tout ou en partie. A defaut d'une entente contraire, les parties sont liees par la sentence arbitrale pour une duree d'au moins un an et d'au plus deux ans, seion la decision de l'arbitre. Le regime general d'arbitrage des differends prevoit que Ies parties sont, sauf exceptions, libres de recourir ou non a ce mecanisme, en ce sens qu'il faut Ie consentement des deux parties pour que la demande ecrite adressee au mi nistre soit valide. Ce choix a ensuite des consequences tres serieuses; les parties perdent alors Ie droit de faire marche arriere et de recuperer leur droit de greve ou de lock-out. On comprend sans doute mieux pourquoi Ie recours libre ou facultatif a l'arbitrage des differends n'est pas tres populaire. Les syndicats sont habituellement tres reticents a perdre leur droit de faire la greve au besoin, et les employeurs hesitent a confier a une tierce personne Ie pouvoir de determiner a leur place plusieurs regles importantes de fonctionnement et d'affectation des ressources de leur entreprise. L'arbitrage du differend peut devenir obligatoire dans Ie cas de la negocia tion d'une premiere convention collective d'un groupe de salaries vises par une accreditation. II faut alors, selon les articles 93.1 a 93.9, que l'interven tion d'un conciliateur se soit averee infructueuse, que l'une des parties ait demande au ministre de soumettre Ie differend a un arbitre, que la demande adressee au ministre ait ete faite par ecrit et qU'une copie ait ete envoyee a l'autre partie. Le ministre a alors la discretion de disposer de la demande.
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I Negocier et appliquer une convention collective
La premiere tache d'un arbitre dans de telles circonstances est de decider s'il devra determiner Ie contenu de cette premiere convention collective. Quelle que soit sa decision, il doit ensuite la communiquer aux parties et au ministre. $i cette decision est positive (l'arbitre annonce qu'il determinera Ies conditions de travail), cela entraine immectiatement les deux effets suivants: la fin d'une greve ou d'un lock-out en cours et Ie maintien ou Ie retablisse ment des conditions de travail prevues a l'article S9 du Code du travail. Le recours a l'arbitrage, en cas d'echec de la negociation, est aussi obliga toire dans tout differend mettant en cause· des policiers et des pompiers municipaux. Le differend sera detere par Ie ministre a un arbitre, soit a la demande d'une seule des deux parties, soit au moment ou HIe juge opportun, meme si aucune des parties ne lui en a encore fait la demande. L'arbitrage des differends sous toutes ses formes est relativement rare: ainsi, au Quebec en 1999-2000, des 2941 conventions collectives deposees au ministere du Travail, seulement 21 resultaient d'un arbitrage obligatoire, 3 d'un arbitrage voiontaire et 18 de l'arbitrage d'une premiere negociation collective (Ministere du Travail du Quebec, 2000).
81) .L~.s. ~~p~~~~ pT.~t.i~~~~ .~~~,!".e. !1.~~~~~~~~~'!". ~~~l.~~~i~.~ La negociation collective constitue un phenomene complexe et varie. Pour employer une expression familiere, l'aspect juridique ne correspond qu'a la pOinte de l'iceberg en ce domaine. Cependant, comme Ie signalent Boivin et Guilbault, « Ia comprehension du processus de negociation demeure tres problematique» (1989, p. 211), et ce, malgre les tres nombreuses recherches effectuees sur Ie sujet par des chercheurs de diverses disciplines. Les aspects pratiques sur Iesqueis nous nous pencherons sont, premiere ment, la preparation des parties et, deuxiemement, Ie concept de pouvoir de negociation. NOllS presenterons ensuite les etapes habituelles du modele traditionnel de negociation. Puis, nous examinerons un modele renouvele de negociation appele « negociation raisonnee )}. Nous terminerons cette section par I'analyse de deux autres facettes des negociations collectives: les struc tures de negociation et l'incidence des conflits.
15.3.1 Une preparation adequate des parties Pour que des negociations collectives se deroulent bien, il est essentiel que Ia phase preparatoire ait ete planifiee soigneusement et suivie dans ses moindres details. Comme Ie signaIe Sexton, «entamer une negociation collective sans preparation, c'est pionger a l'eau sans savoir nager» (2001, p. 104). On peut distinguer deux sortes de preparation: la preparation a long terme et la pre paration a court terme. La preparation a long terme commence Ie lendemain meme du jour ou la derniere negociation se termine. Deja, chacune des parties connatt divers
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problemes qui n'ont pas ete regles par la negociation et qUi, si l'on ne s'en occupe pas, reviendront sans doute a la prochaine seance de negociation. Il importe donc de se pencher sur ces problemes et d'y trouver des solutions, dans la mesure evidemment ou cela est pOSSible, ou du moins de demontrer qu'on essaie de faire quelque chose pour regler la situation. En effet, une cause fondamentale de l'echec possible des negociations collectives consiste a vouloir faire de ce processus legal Ie mecanisme par excellence de solution aux problemes de fonctionnement de l'organisation lies aux facteurs humains. Au contraire, les negociations collectives seront plus faciles et plus efficaces dans les situations ou, en dehors du cadre des negociations collectives, les diri geants auront fait des efforts pour trouver des solutions satisfaisantes aux problemes avant meme qu'ils ne fassent l'objet de revendications syndicales. Ces comportements de recherche con stante de solutions aux problemes humains dans l'organisation constituent ainsi l'un des principaux meca nismes de preparation a long terme a une negociation reussie. Egalement, les personnes appelees a representer les parties doivent prendre diverses ini tiatives pour se maintenir au fait de l'evolution des contextes juridique, economique, social et politi que. Comme preparation a court terme, les negociateurs doivent, dans une pre miere demarche, connaitre a fond la convention collective actuelle, s'H y en a une. La deuxieme demarche consiste ase procurer les conventions collectives du secteur ou de l'industrie et celles d'entreprises de la region, et d'en faire une analyse comparative. La troisieme demarche recommandee est de pro ceder a une collecte de donnees tant a l'interieur de l'organisation (les pro blemes de gestion poses par la convention) qu'a l'exterieur de l'organisation (une synthese de donnees economiques, sociales et politiques). Aussi, avant que ne debutent les negociations, il est important que, de part et d'autre, Ies negociateurs aient retlechi a l'orientation generale que devrait prendre la negociation, et qu'ils aient obtenu Ie mandat Ie plus clair possible de fa\on a ne pas devoir revenir trop souvent devant leur mandant. On suggere aussi (Sexton, 2001) d'examiner les negociateurs en place (leur personnalite, leur reputation, etc.) et d'evaluer Ie pouvoir de negociation des parties en presence.
15.3.2 Le pouvoir de negociation Le pouvoir de negociation, ou pouvoir de marchandage, est un autre concept que les specialistes des negociations collectives ont longuement etudie. On peut Ie definir comme etant la «capacite que possedent les parties contrac tantes dans une negociation collective de faire triompher leur position» (Dion, 1986, p. 357). Et Dion d'ajouter: Le pouvoir de negociation depend moins de la valeur persuasive de l'argu mentation dans les pOlirpariers que du rapport entre la capacite d'infliger Oll de supporter des sanctions economiques ou sociales et Ie cout, pour I'autre partie, de (aire des concessions plus ou moins completes aux demandes ou contre-propositions (ormulees. D'une (aron gemJraIe, Ie pouvoir de negocia tion est conditionne par Ia conjoncture economique, fa position strategique de
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chacune des deux parties, la solidite de leur situation {inanciere, Ie support exterieur sur lequel elies peuvent compter et sur l'opinion puhlique (1986, p.357).
Selon les principaux analystes de ce concept (entre autres Boivin, 1994; Chamberlain et Kuhn, 1986; Leap et Grigsby, 1986), les deux parties a une negociation collective en viendront a un accord lorsque chacune d'elles sera convaincue que les couts rattaches a la mesentente sont ou risquent d'etre superieurs aux couts rattaches a l'entente. Les couts rattaches a l'entente sont representes par l'acceptation du regle ment sur la base des propositions de l'autre partie, tandis que les couts rattaches a la mesentente sont representes par les pertes occasionnees (ou sus ceptibles d'etre occasionnees) par une greve ou un lock-out. Les couts ratta ches a une entente peuvent inclure, pour l'employeur, Ie cout relatif des aug mentations de salaire et des avantages sociaux, et, pour Ie syndicat, la possible remise en question du leadership et Ie renversement politique par des ele ments plus efficaces ou radicaux. Quant aux couts rattaches a une mesen tente, ils comprennent les salaires perdus par les employes en cas de greve, Ie risque de fermeture de l'entreprise et de perte definitive des emplois en ques tion, la mauvaise publicite associee au conflit et la perte possible de clients, la diminution de la production et les pertes de revenus decoulant des ventes annulees. Dans Ie secteur public, les couts d'un desaccord pour l'employeur sont surtout d'ordre poIitique, alors qu'ils sont principalement d'ordre economique dans Ie secteur prive. Un ingredient important du pouvoir de negociation en matiere de rela tions du travail concerne la capacite relative des parties a subir, sans trop de consequences negatives, un arret de travail. C'est ce que permettent, du cote syndical, les fonds de greve et, du cote patronal, certaines assurances, des sur plus d'inventaire ou des arrangements avec les principaux clients et four nisseurs. L'ideologie du rapport de force et une comprehension simpliste du pouvoir de marchandage (utilise par certains comme une fin en soi et non comme un moyen) amenent les parties a mettre en <Euvre toute une batterie de moyens. Du cote syndical, on veut faire en sorte qu'un conflit de travail soit Ie plus derangeant possible (d'ou l'importance des lignes de piquetage avec les risques de violence qui y sont associes) et provo que Ie maximum de couts pour la partie patronale (avec, par exemple, une campagne de boycottage des produits de l'entreprise). Du cote patronal, I'objectif est que les couts d'un desaccord soient surtout ressentis par les salaries (ce qUi impUque, dans certaines circonstances, de decreter un lock-out). Sans nier l'importance du concept de pouvoir de negociation, dont l'exa men par les parties peut aider a definir certaines orientations pratiques en matiere de negociation, il semble que Ie fait, pour certains negociateurs tant syndicaux que patronaux, de trop se concentrer sur Ie pouvoir de marchan dage ou sur Ie rapport de force est responsable de bien des echecs dans Ie domaine des negociations collectives. Ces negociateurs ont oublie ou decide de ne pas considerer qu'une negociation collective n'est pas seulement l'etablissement d'un rapport de force entre deux parties opposees, dont les
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interets sont divergents. Toute negociation collective implique une situation ala fois de conmt et de convergence d'interets. Meme si les interets divergents (par exemple, Ie niveau des salaires par rapport au niveau des profits) font ressortir Ie caractere inevitable du conmt, c'est la prise de conscience des interets convergents (par exemple, Ie fait que l'entreprise puisse continuer de fonctionner et d'offrir des emplois aux employes et des profits aux action naires) qui entraine finalement un reglement quelconque, auquel on parvient par un exercice plus ou moins complexe de marchandage comprenant des compromis. Un grand nombre de variables, tels les circonstances economiques, les facteurs politiques et les facteurs technologiques, influencent Ie pouvoir de negociation et illustrent en meme temps Ie caractere fluide et ambigu de ce concept. Sexton (2001) presente d'ailleurs un interessant modele d'estimation du pouvoir de negociation selon lequel ce dernier est fonction de facteurs financiers, economiques, psychologiques et comportementaux, sociopoliti ques et residuels. II ajoute qu'une fa<;on utile d'appUquer ce modele consiste a evaluer sur une echelle de 0 a 10 chacun des facteurs, puis de faire la som mation pour enfin voir, par rapport au total maximal possible de 50, com ment se situe chaque partie eu egard a son pouvoir de negociation. II rappelle cependant que plusieurs des variables a examiner sont subjectives; leur quan tification repose donc sur des jugements de valeur, avec les inconvenients que cela entraine. De plus, comme Ie signalent Fisher et Williams (1989), Ia situa tion ou une partie possede a un moment donne un pouvoir de negociation plus grand que celui de l'autre partie peut rapidement se transformer au profit de l'autre partie. On sa it que, d'une fa<;on generale, les syndicats et les em ployes ont un pouvoir de negociation plus grand en periode de prosperite economique, mais que Ies employeurs sont favorises en periode de recession. Boivin et Guilbault tirent des conclusions qUi vont dans Ie me me sens, puisque, selon eux:
Les circonstances ou les considerations qui peuvent modifie" influencer ou deplacer Ie pouvoir de negociation que possede chaque partie en presence sont innombrabIes, et il n'existe pas de mesure connue qui permette de quantifier et d'evaluer l'effet que chacun de ces facteurs peut avoir sur Ie pouvoir de negociation (1989, p. 232). Dans un texte classique sur la negociation collective, Walton et McKersie (1965) rappellent cette realite en insistant sur Ie fait que toute negociation collective presente des enjeux d'ordre distributif (ou les interets des parties sont divergents) et des enjeux d'ordre integratif (ou les interets des parties sont convergents). Bien que Ie premier type d'enjeux puisse facilement s'ac commoder des strategies d'affrontement du type «je gagne, tu perds », les enjeux d'ordre integratif devraient plutot forcer les parties a adopter des strategies ou toutes deux peuvent etre gagnantes. Dans un tel contexte, aucune des deux parties ne devrait essayer d'ecraser l'autre. Les negociations collectives pour raient alors constituer un mecanisme de resolution de problemes ou, dans Ie respect mutuel, les parties acceptent de faire des compromis pour formuler des solutions imaginatives a des problemes communs, solutions qui pour raient etre satisfaisantes pour Ies deux parties.
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Negocier et appliquer une convention collective
15.3.3 Le modele traditionnel de negociation collective Le modele traditionnel de negociation collective a He decrit tres adequate ment par Carrier (1980), selon qui les negociations collectives se deroulent habituellement en trois phases, soit la phase d'ouverture, la phase d'intensi fication et la phase de denouement (ou de conclusion).
La phase d'ouverture La premiere seance de negociation est «presque symbolique» (Ouellet, 1980). Il s'agit surtout de s'entendre sur Ie deroulement des rencontres ulterieures de negociation. Cette premiere seance se termine generalement par Ie depot des demandes syndicales et, stil y a lieu, des demandes patronales. La phase ini tiale des negociations se poursuit avec I'expression et l'exploration des reven dications initiales. Au cours de cette phase, les parties presentent a tour de role Ie raisonnement qui sous-tend chacune de leurs demandes. Les tactiques utilisees sont d'abord l'information et l'ecoute, puis la persuasion, ou I'on s'appuie sur des faits, des donnees comparatives ou des principes, en vue de convaincre l'autre partie du bien-fonde de ses revendications. Un element essentiel de succes, a cette phase des negociations, est l'exis tence d'un ecart entre les revendications initiales des parties et leurs prefe rences reelles, de fa\;on qu'il reste une marge de manreuvre et que des concessions eventuelles soient possibles. Mais meme si Ies demandes com portent un certain gonfiement, elles doivent pouvoir se justifier pleinement.
La phase d'intensification La deuxieme phase des negociations collectives deb ute au moment ou cha cune des parties a termine la presentation de ses revendications initiales. La strategie mise en reuvre au cours de cette phase des negociations consiste a amener l'autre partie a faire des concessions sur ses demandes initiales comme sur ses preferences reelles, tout en reussissant a conceder soi-meme Ie moins possible. Les moyens utilises pendant cette phase sont la persuasion, puis la coer cition, dont les deux principaies tactiques sont l'engagement et Ie bluff. Les tactiques de coercition visent a convaincre I'autre partie qu'il vaut mieux pour elle qu'elle fasse des concessions, parce qu'autrement, elle court Ie risque de subir Ies couts lies a une rupture des negociations et a un possible arret de tra vail. L'engagement consiste generalement a signifier a l'autre partie que, sur telle revendication, aucune autre concession ne sera faite et qu'a defaut de l'obtenir, il y aura rupture des negociations. Une partie peut rendre cet engage ment encore plus formel en Ie devoilant pUbliquement ou en l'entourant d'une publicite intensive. Mais cette tactique est dangereuse, et «les negociateurs experimentes ne l'utilisent d'habitude qU'avec beaucoup de parcimonie et de prudence» (Carrier, 1980, p. 487), car cela peut contribuer a bloquer les nego ciations plutot qu'a les faire progresser. Le bluff est une autre tactique de coer cition communement employee. EIle se presente sous la forme d'une menace ou d'une allusion quant a l'usage possible de moyens de pression, mais qui ne
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se rend pas jusqu'a l'engagement ferme, puisqu'on n'a pas necessairement l'intention de donner suite a cette menace. Le bluff ne peut fonctionner que si la menace est credible.
La phase de denouement La phase finale des negociations peut prendre deux formes. Dans Ie premier cas, les negociateurs, surtout s'ils sont experimentes, sentent qu'en raison des concessions reciproques qui ont ete subtilement annoncees, Us ont atteint une «zone de contrat» et qu'un accord final est possible. II reste a s'engager de far;on prudente et refIechie dans Ie demier droit des negociations, qUi represente un cycle delicat de concessions a diriger avec soin. Cette far;on de faire est la plus repandue, puisqu'au Quebec, 90% des negodations collectives menent a des accords sans que surviennent des arrets de travail. Dans Ie deuxieme cas, cependant, Ies negodateurs peuvent conclure qu'aucune zone de contrat n'est perceptible et que Ie conflit est presque ine vitable. Alors, les grands moyens (les ultimatums, les demiers delais, l'arret de travail) pourront etre pris pour que les negociations aboutissent. Notons toutefois que l'utilisation prematuree ou abusive des moyens de pression serait souvent provoquee par la presence, a la table de negodations, de nego ciateurs intransigeants ou inexperimentes. La phase finale implique donc la proposition judicieuse de concessions. II s'agit d'une manreuvre delicate, pUisque chaque partie veut eviter de faire des concessions prematurees, insuffisantes ou mal formulees. Comme Ie signale Sexton, les concessions ne doivent pas etre faites au hasard: «Si ces conces sions sont faites trop vite et de fas;:on definitive, eIles peuvent etre pers;:ues comme une marque de faiblesse et meme, a la rigueur, tuer la credibilite du negociateur qUi les fait» (2001, p. 103). On procede alors Ie plus souvent par signes, c'est-a-dire que, au lieu de faire franchement une concession, on utilise des moyens detoumes, des allUSions, des symboles. Par exemple, l'une des par ties pourra declarer a l'autre partie que «s'll y a entente sur Ie reste, i1 devrait y avoir moyen de s'entendre sur ce point ». L'usage des signes peut permettre graduellement qu'une veritable strategie de cooperation s'instaure entre les parties et que les negodations soient conclues. Les negociations collectives ne representent donc pas seulement (ni surtout) une epreuve de force; elles sont egalement une epreuve de savoir-faire.
Les quaJites d'un bon negociateuT Dans les textes decrivant Ie modele traditionnel de negociation collective, un autre sujet sur lequel on s'attarde conceme les qualites d'un bon negodateur. La liste qUi suit s'appuie sur les nombreuses listes de qualites requises des « bons» negociateurs et de comportements appropries qui leur sont attribues: • rester calme, se montrer patient, maitriser ses emotions et traiter l'autre partie avec respect j • posseder un sens eleve de l'integrite et disposer du courage necessaire a l'expression claire de ses convictions;
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Negocier et appliquer une convention collective
• parler et ecrire avec precision, ecouter attentivement, posseder un esprit creatif et savoir inspirer confiance (Boivin et Guilbault, 1989); • ne pas faire d'attaques personnelles, etre poli, positif, confiant et traiter d'egal it egal avec l'autre partie, sans la defier inutilement; • en plus de posseder l'expertise du contenu, faire preuve de doigte de maniere it dire les choses au moment opportun.
15.3.4 La nE!gociation renouve1ee: le modele de la negociation raisonnee Malgre un bilan plutot respectable (voir Bourque, 1995; Grant, 1990) et pro bablement it cause des abus commis par quelques praticiens, en particulier au cours des annees 1970, Ie modele traditionnel de negociation collective est souvent perpI d'une fa~on negative par diverses personnes. Cette relative desaffection explique sans doute la popularite croissante, au cours des annees 1990, d'un modele renouvele de negociation collective qualifie de negocia tion gagnant-gagnant (win-win), de negociation it gains mutuels, de nego ciation sur les interets ou de negociation raisonnee. Comme Ie souligne Bourque:
Les appellations utilisees pour qualifier ces nouvelles approches de la nego ciation collective renvoient Ie plus souvent Ii une vision idealisee des relations patronales-syndicaies qui seraient radicalement transformees par I'adoption d'une formule innovatrice aux effets quasi miraculeux (1996, p. 2). Introduits par Roger Fisher et William Ury (les auteurs du tres populaire livre Getting to Yes paru en 1981, puis traduit en fran~ais l'annee suivante sous Ie titre Comment reussir une negociation), les concepts de la negociation rai sonnee n'ont pas ete elabores essentiellement en fonction du contexte des
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negociations coll:c~ives de tr~vail; Us sont plutot destines a toute negociation
a~ sens l~r~e: M~IS II semble bIen que Ie domaine des relations patronales-syn
dlCales aIt ete mur pour ce produit puisque, des la parution de cet ouvrage, les concepts de la negociation raisonnee ont ete recuperes par de nombreux experts et specialistes en relations du travail, qui y ont vu un processus cen tre sur la resolution de problemes dans une perspective mutuellement avan tageuse pour les parties et un outil de facilitation de la demarche utilisee au cours de la negociation collective. La demarche preconisee par Fisher et Ury (1982) repose sur les quatre principes suivants: • Les personnes: il faut traiter separement les personnes et l'objet de la negociation, soit Ie differend qui est au centre des discussions entre les parties. • Les interets: il faut concentrer les discussions sur les interets des parties et les problemes a resoudre, et non sur des positions. • Les solutions: il faut generer un grand eventail de solutions possibles en faisant appel a l'irnagination des participants. • Les criteres: il faut s'entendre sur des criteres objectifs et verifiables d'evaluation des resultats avant de proceder a des choix. Le premier principe souligne que les negociateurs sont des personnes dotees d'une sensibilite et non des robots. Pour augmenter la probabilite de sucd~s des negociations, il est souhaitable que chaque partie s'y engage en demontrant une attitude de respect envers l'autre partie et en reconnaissant la legitimite du role joue par les representants de l'autre partie. Le deuxieme principe fait ressortir Ie fait que Ie modele traditionnel de negociation (axe sur l'expression des positions) risque de masquer les verita bles enjeux de la discussion. On augmente donc, encore une fois, la probabi lite de succes de la negociation en consacrant du temps et des efforts a une bonne comprehension des perceptions de chacune des parties sur les pro blemes a resoudre et des relations entre ces problemes et les interets legitimes de chacune des parties. Le troisieme principe signale l'importance pour les participants d'eIaborer ensemble un grand eventail de solutions avant de pro ceder a des choix de positions qUi peuvent s'averer prematurees. i'utilisation de la technique du remue-meninges (brainstorming) accentue la probabilite que, parmi les solu tions imaginees, plusieurs fassent l'affaire des parties dans la negociation. Le quatrieme principe, enfin, consiste a insister sur un accord prealable portant sur une liste de criteres justes et relativement objectifs (comme l'opi nion d'une tierce personne experte en la matiere) pour determiner la zone a l'interieur de laqueUe des solutions pourraient etre acceptables pour les deux parties. Cette activite contribue egalement it augrnenter la probabilite de succes de la negociation. En somme, la negociation raisonnee (a la maniere de Fisher et Ury) consiste it amener les parties a trancher les litiges sur Ie fond plutot que de discuter interminablement de leurs positions et des presumees
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concessions qu'elles sont pretes it faire et de celles qu'elles refusent absolu ment de faire. En plus de ces quatre principes, Fisher et Dry (1982) proposent trois outils complementaires susceptibles d'etre utilises dans Ie cadre d'une nego ciation raisonnee. Ce sont la «mesore» (ou «meilleure solution de repli»), Ie «jiu-jitsu» et la procedure a texte unique. La «mesore» incite les negociateurs a imaginer Fechec possible des nego ciations et a tenter alors de determiner la «meilleure solution de repli », c'est a-dire la solution susceptible d'etre appliquee en dehors d'un accord avec l'autre partie. Le « jiu-jitsu", de son cote, s'inspire d'un art martial pratique au Japon. Cette methode consiste a tenter d'utiliser la force de l'adversaire pour l'orienter vers ses propres fins. II importe donc de decouvrir sur quoi repose la position de l'adversaire au lieu de s'y attaquer. EViter de foumir une cible ou une position it attaquer, poser des questions plutot que de faire des affirma tions, attendre en vue d'obtenir des reponses, voila autant de gages de succes associes a cette methode. La procedure a texte unique, quant a elle, impUque Ie recours a une tierce personne dont Ie mandat est d'essayer de rapprocher les parties sur la base des criteres objectifs prealablement formules. Cette tierce personne entend les propositions des parties, etablit une premiere version du texte, recueille ensuite les critiques et ebauche une deuxieme version. Quand elle juge que Ie projet a atteint sa maturite, elle Ie soumet aux parties.
Avantages et inconvenients de la negociation raisonm'!e Selon divers specialistes des relations du travail, la negociation raisonnee comporte de nombreux avantages, mais aussi certains inconvenients. Au chapitre des avantages, elle permet d'enrichir la pratique de la negociation collective. Cette methode ne constitue cependant qu'un modele partiel de negociation, en ce sens qu'elle ne s'applique qu'au processus de la negocia tion integrative, c'est-a-dire ce type de negociation ou les enjeux correspon dent it des probU~mes a resoudre et ou les solutions peuvent Hre it l'avantage des deux parties. La negociation raisonnee ne conceme donc que l'une des composantes d'une approche globale de la negociation collective qui comporte it la fois des processus integratifs et des processus distributifs, ce deuxieme type de processus correspondant a des enjeux a somme fixe (les quels impliquent que si l'une des deux parties obtient, par exemple, SS %, I'autre n'obtiendra que 4S %) et faisant certes appel a des tactiques de persua sion, mais surtout a des tactiques de coercition. Pour ce qUi est des inconve nients de la negociation raisonnee, ils se resument aux trois suivants. • Cette approche minimise l'importance des con flits d'interets et des rapports de pouvoir, qui sont inevitables dans les negociations collectives. • Cette approche n'accorde pas suffisamment d'importance aux rapports que les negociateurs doivent entretenir, chacun de leur cote, avec leurs mandants. • Cette approche sous-estime l'importance de la confiance mutuelle comme prealable de la negociation raisonnee, de telle sorte que «les
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comportements preconises peuvent accroitre la vulnerabilite des per sonnes negociatrices en l'absence de relations de confiance bien etablies» (Bourque, 1996, p. 6). Cela ne signifie pas qu'il faille laisser de cote ces pratiques innovatrices qui valent la peine d'etre experimentees, surtout si l'on se souvient que Ie modele traditionnel de negociation continue est sans doute encore Ie modele le plus utilise dans la negociation collective.
15.3.5 Les autres aspects de la negociation collective dans le contexte nord-americain Pour conclure cette section, nous nous interesserons maintenant a. deux autres facettes de la negociation collective dans Ie contexte nord-americain: Ie degre de centralisation (ou de decentralisation) des structures de negocia tion et l'evolution recente de l'incidence des conflits de travail.
Le degre de centralisation des structures de negociation Les negociations aux F,tats-Unis ont ete plutot centralisees dans Ie passe, alors que les negociations concernant plusieurs etablissements et employeurs con stituaient 36% des cas en 1961 et 400/0 des cas en 1980. A cette epoque, de puissants syndicats americains, tels que ceux de l'automobile, de l'acier ou du transport routier (les fameux Teamsters), ont impose des structures de nego ciation collective relativement centraIisees, et cela d'autant plus facilement que Ie taux de syndicalisation dans ces industries etait relativement eleve. 1,' objectif poursuivi consistait a. harmoniser les salaires et les autres conditions de travail avec ceux qu'offraient it la fois l'entreprise et l'industrie, de maniere que Ie fait pour un etablissement d'etre syndique ne puisse constituer un handicap par rapport a. la concurrence (elle-meme syndiquee et soumise aux memes exigences). Apartir de 1980, et en particulier en 1988, on note cepen dant que, meme aux Etats-Unis, les negociations collectives ont de plus en plus tendance (a. 51 %) a. se derouler dans des structures decentralisees, c'est-a.-dire dans un etablissement a. la fois. Au Canada, les negociations collectives, qui sont principalement de com petence provinciale, se deroulent depuis longtemps surtout au sein de I'eta blissement seul (dans environ 55 % des cas). Toutefois, un pourcentage non negligeable de cas concerne plusieurs etablissements (environ 30%) ou plu sieurs employeurs a. la fois (environ 15 %). Au Quebec, la proportion des nego ciations collectives faisant intervenir un etablissement a. la fois atteint des sommets inegales ailleurs (environ 90%). Cette situation est confirmee par plusieurs analystes, dont Grant, qUi soutient ceci:
A part Ie secteur public, Ie secteur de la construction et celui des decrets de convention collective, Ie regime quebi'cois de relations industrielles se carac terise par son caractere decentralise et par la predominance des petites unites de negociation (1990, p. 34).
Ainsi, dans une analyse publiee en 1989, on constate que, sur 7883 con ventions collectives en vigueur, 69,9 % concernaient des groupes de
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49 salaries ou moins (Racine, 1989). Ce phenomene seraH notamment attri buable a une plus faible concentration industrielle au Quebec et a un plu ralisme syndical plus accentue.
L'evolution recente de la frequence des conflits de travail Les donnees portant sur la frequence des greves au Canada permettent de con stater que, tout au long des annees 1970 et jusqu'au debut des annees 1980, les con flits de travail ont provoque un nombre appreciable de jours personnes perdus, Ie maximum se situant en 1976 avec 11 544166 jours personnes perdus. On observe egalement que, meme au cours des annees les plus turbulentes, la proportion du temps perdu en conflits de travail par rap port au total du temps travaille n'a jamais atteint 1 %, Ie taux maximal enre gistre en 1976 etant de 0,59%. A partir de 1982, on assiste a une diminution importante du nombre de greves, mouvement qUi s'intensifie avec l'arrivee des annees 1990. Entre 1980 et 1993, Ie taux moyen de jours perdus par tra vailleur a chute de pres de 50%, passant de 0,60 jour a 0,35 jour. Le Quebec, pour sa part, s'est considerablement assagi au cours des der nieres annees en ce qui a trait a la frequence des conflits de travail. On se sou viendra, en effet, qu'au cours des annees 1970, «la belle province» detenait Ie titre peu enviable de championne des arrets de travail (avec, par exemple, pres de 7000000 de jours-personnes perdus a cause de conflits de travail en 1976). Cette mauvaise reputation ne correspond plus a la realite. En 1996, 392581 jours-personnes etaient perdus au Quebec a cause de conflits de travaiL Mais la meme annee, Ie Canada dans son ensemble enregistrait une perte de 3,3 millions de jours-personnes; cela signifie que la part du Quebec dans ce bilan n'etait que de 11,9 %, ce qui est nettement inferieur a son poids relatif sur Ie plan de l'activite economique. En ce qui touche a la competence federale en matiere de travail, signalons que meme Ie syndicat canadien des postes, pourtant repute tres militant, s'est modere au cours des dernieres annees.
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La convention collective L'aboutissement normal du processus de negodation collective, y compris Ie recours aux moyens de pression, est la signature d'une convention collective, que I'article 1 du Code du travail detinit comme etant «une entente ecrite re lative aux conditions de travail conclue entre une ou plusieurs associations accreditees et un ou plusieurs employeurs ou associations d'employeurs ». Notons que Ie legislateur s'est abstenu de definir Ia notion de conditions de travail, de sorte qu'il n'y a a peu pres pas de restrictions quant aux clauses que les parties peuvent inclure dans une convention collective. Ainsi, «la con vention collective peut contenir toute disposition relative aux conditions de travail qui n'est pas contraire a l'ordre public ni prohibee par la loi }I. La nullite d'une ou de plusieurs clauses d'une convention collective n'in valide pas l'ensemble de la convention. Une convention collective devient executoire a compter de la date de son depot au ministere du Travail. Ce depot a un effet retroactif a la date prevue, dans la convention collective, de son entree en vigueur ou, a defaut, a la date de sa signature. Le defaut d'effectuer Ie depot dans Ie delai de 60 jours apres la signature de la convention collec tive donne la possibilite a une association rivale d'adresser une requete en accreditation. La convention collective lie tous les salaries «actuels et futurs» vises par l'accreditation. Comme il n'est pas fait mention des anciens employes, les salaries qUi ne sont plUS au service de l'entreprise au moment de l'entree en vigueur de la convention ne peuvent reciamer, par exemple, qu'on leur verse des sommes retroactives, sauf si la convention contient une clause prevoyant expressement une telle obligation de la part de l'employeur. Rappelons que, malgre l'importance que revet Ia convention collective, celle-ci n'est pas Ie seul document legal encadrant la gestion des ressources
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I Negocier et appliquer une convention collective
humaines dans un contexte de syndicalisation, contrairement a ce que trop de gestionnaires ont tendance a croire. Les lois ayant une portee generale, comme la Charte des droits et libertes de la personne, Ie Code dvil du Quebec, la Loi sur les normes du travail ou la Loi sur la sante et la securite du travail, continuent de s'appliquer et doivent etre prises en consideration.
15.4.1 Le contenu type d'une convention collective En ce qui concerne les divers types de clauses contenues dans la convention collective, une classification commode (Tremblay, 2000) retient les categories suivantes. 1. Le cadre de la convention: les definitions, les regles d'interpretation,
Ie choix de la langue de redaction et d'interpretation prioritaire, Ie champ d'appIication de la convention, la reconnaissance syndicale par l'employeur, Ie but de la convention et, finalement, une reference a la non-discrimination. 2. Les droits de la direction: Ie financement, les investissements, les marches, les prix des produits et des services, les procedes de fabrication, la gestion du personnel, etc. 3. La vie syndicale: Ie regime syndical, la cotisation syndicale, la represen tation syndica]e, les activites syndicales, l'affichage, etc. 4. L'anciennete: les definitions, l'accumulation, la conservation et la perte de l'anciennete, les listes d'andennete, Ie retour au travail apres une absence, Ies fonctions possibles en dehors de l'unite, etc. 5. Les mouvements de main-d'ceuvre: les preferences quant aux principes applicables aux mouvements de main-d'ceuvre, les notions de qualifi cation, de probation et d'acces a la permanence, l'affichage, les postes temporairement vacants, les mises a pied, les preavis, les rappels au travail, etc. 6. l/adaptation professionnelle: les changements technoIogiques, les comites paritaires, les avis de changements technologiques, les mises a pied, Ies programmes de formation, etc. 7. La duree du travail: Ies notions de journee et de semaine normales de travail, les periodes de repos et de repas, la modification des horaires, Ies heures supplementaires, etc. 8. Les salaires, les primes et Ies autres frais: Ie taux de salaire, Ie bulletin de paie, la cessation d'emploi, les primes, Ie remboursement de frais engages, etc. 9. Les conges: Ies jours feries payes, Ie conge annuel paye, Ies conges mobiles, les conges pour evenements familiaux, les conges parentaux, Ies conges pour fonctions judiciaires, etc. 10. Les regimes collectifs: I'assurance collective, Ie regime de retraite, etc. 11. La sante et la securite: la prevention, les acddents du travail et les maladies professionnelles.
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12. Les comites de relations du travail: la composition du comite, la frequence des reunions, les responsabilites du comite, etc. 13. Les sanctions disciplinaires et les recours: les sanctions disciplinaires possibles, la procedure de reglement des griefs, l'arbitrage possible d'un grief, etc. 14. Les dispositions generales: l'impression de la convention, les annexes, les lettres d'entente, la reference aux lOis, etc. IS. La duree de la convention: les dates de debut et de fin, Ie rappel de salaire (<< retroactivite»), Ie maintien des conditions de travail, Ia modification, Ie renouveUement, etc. Les clauses des conventions collectives evoluent en fonction des strategies des parties, des enjeux et des resultats des negociations collectives (Bourque, 1993). Le contexte externe exerce aussi une influence determinante, comme l'iIlustrent les donnees presentees au tableau IS. 1 0\1 l'on compare la fre quence de clauses diverses dans des conventions collectives en 1981 et en 1989. Ainsi, on note en 1989 une presence accrue de clauses relatives a la sous-traitance, a la protection contre les mises a pied causees par la sous traitance, aux preavis de changements technologiques et aux indemnites de cessation d'emploi. Par ailleurs, on remarque une diminution de la presence de clauses plus «couteuses", comme celles qUi prevoient des indemnites de vie chere (c'est-a-dire des ajustements des salaires en fonction de l'evolution de l'indice des prix a la consommation) et celles qui prevoient des prestations supplementaires d'assurance emploi (ou assurance chomage).
15.4.2 Les mecanismes d'application d'une convention collective Vne fois signee, la convention collective constitue un ensemble de dispo sitions generales et particulieres qUi encadrent les decisions que prendront la direction et ses representants. Les clauses d'une convention collective soulevent inevitablement des problemes d'application et d'interpretation, qui necessitent, au minimum, une clarification des responsabilites entre les chefs de service et les specialistes d'un service des relations du travail. Meme si, en prinCipe, les chefs de service sont censes detenir l'autorite hierarchique et que les specialistes des relations du travail soient censes n'etre que des conseillers detenant une autorite consultative, en pratique, ces specialistes sont souvent appeU~s a formuler des « conseils » qui doivent absolument etre suivis. Les raisons les plus souvent invoquees pour justifier cette situation sont Ie soud de coherence et d'uniformite dans l'application des dispositions d'une con vention collective. II ne peut y avoir deux poids, deux mesures, et les chefs de service ne sont donc pas libres d'appliquer et d'interpreter la convention col lective comme bon leur semble, d'autant plUS que ces decisions peuvent faire l'objet de griefs dont Ie reglement engendre parfois des couts eleves. Malgre Ie fait que les chefs de service ont une serie de regles et de consi gnes a respecter, et qu'ils peuvent (et doivent en certains cas) faire appel aux « conseils» des specialistes des relations du travail, ils continuent d'exercer leur role de gestionnaire; cela implique qu'ils doivent prendre des decisions
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Negocier et appliquer une convention collective
LA FREQUENCE DE CLAUSES DIVERSES DANS DES CONVENTIONS COLLECTIVES DU QUEBEC (1981 ET 1989)
Fonds de pensiortetassuran~saIaire Volontariat des heUIes supplementaires Horaire flexible Semaine comprimee Conges de mater.qite Conge parental Source: R. Bourque, "L'objet de la negociation collective: adaptation ou innovation », dans La negociation collective du travail: adaptation ou disparition"? Actes du 48" congres des relations indus trielles, sous la direction de C. Bernier et autres, Quebec, Les Presses de j'Universite Laval, 1993, p. 101-102.
sur to ute une serie de sujets, dont plusieurs peuvent etre traites dans la con vention collective. Lorsqu'un employe sent que ses droits de salarie syndique sont lE~ses, du fait qu'un chef de service applique ou interprete la convention collective d'une maniere qui apparalt au salarie comme non conforme it ce que prevoit la convention collective, c'est generalement aupres de ce meme chef de service qu'il est invite it deposer une plainte formelle, appelee un grief. Cela correspond it la premiere etape habituelle de la procedure interne de reglement des griefs. Apres consultation (ou non) et dans un certain delai, Ie chef de service a la responsabilite de communiquer sa decision au salarie en cause. Cette decision peut prendre deux formes: ou bien Ie gestionnaire main tient son geste (il devrait alors Ie justifier de fa<;:on qu'idealement, Ie salarie en comprenne et en accepte Ie bien-fonde), ou bien i1 annonce au salarie qu'il s'est trompe (il devrait alors expUquer comment cette erreur pourra etre corri gee). 5i la decision rendue est jugee insatisfaisante par Ie salarie (ou Ie syndi cat), Ie grief peut etre soumis a. une deuxieme etape de la procedure de reglement des griefs, VOife a une truisieme etape. Si, aPIeS avoir franchi toutes les etapes prevues dans la convention collective, un grief n'a toujours pas He resolu a. la satisfaction du syndicat, il pourra etre soumis it l'arbitrage. Dans Ie contexte de Ia syndicalisation, les decisions des chefs de service peuvent donc etre renversees (ou modifiees) non seulement par Ie responsable des relations du travail, mais aussi par un arbitre de griefs, c'est-a.-dire un tiers
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Les defis de fa democratie au travail
exterieur a l'organisation et investi de pouvoirs quasi judiciaires cons ide rabIes. De nombreux chefs de service acceptent difficilement une telle situa tion. D'autres auraient plutot tendance, s'ils avaient Ie choix, a ne pas accorder d'importance au contenu de la convention collective et a continuer de gerer leur service comme si de rien n'etait. Ainsi, l'administration d'une convention collective exige que lion forme (en plus de les informer!) tous les chefs de service en ce qui touche au modele organisationnel de gestion des clauses de la convention collective. On doit les amener a prendre connais sance du nouveau contrat et des modifications apportees, et s'assurer qu'ils possedent les connaissances et les habiletes requises pour Ie role qu'on souhaite leur voir jouer.
15.4.3 L'arbitTage des griefs ou l'interpretation des conventions collectives Pour savoir interpreter correctement une convention collective, it faut con naitre ce qUi precede celle-ci, c'est-a-dire les regles prevues au Code civil du Quebec relatives au contrat de travaiL Ces regles viennent eclairer Ie droit de gerance de tout employeur. En effet, a la base de la relation du travail, on trouve un individu (l'employe) qUi accepte de vendre sa prestation de travail et de s'engager envers un employeur, Iequel, en retour, s'engage a lui fournir du travail et une remuneration approprU~e. Par Ie fait meme, )'employeur acquiert un pouvoir de direction sur l'employe, et ce droit n'est limite que par )'ordre public, soit I'ensemble des autres lois, par les bonnes mceurs et even tuellement par une convention collective. Quant aux regles d'interpretation, la regIe Ia plus commune est Ia regIe dite des droits residuaires, selon laquelle l'employeur possede taus les droits lies a la direction de l'entreprise sauf ceux qu'il a explicitement cedes dans Ie cadre de la negociation collective. Dans un tel contexte, un arbitre de griefs a la possibilite d'intervenir pour statuer sur la fa~on dont l'employeur a respecte ou non les limites de son droit de ge ranee; it est mandate pour verifier l'application et l'interpretation de la con vention collective. II doit aussi «s'assurer, en certaines circonstances, que l'employeur n'a pas agi de fa~on abusive, discriminatoire ou deraisonnable» (Morin et Blouin, 1994, p. 445). Seion Ie Code du travail, un grief concerne «toute mesentente relative a l'interpretation au a l'application d'une convention collective». Comme la greve et Ie lock-out sont interdits pendant la duree d'une convention collec tive, a mains qu'une clause particuliere ne stipule Ie contraire (articles 107 et 109), iI a faUu etablir un mecanisme de resolution des divergences d'opinions sur la signification des diverses clauses d'une convention collective ou de leur application. Ce mecanisme consiste dans la procedure de reglement des griefs, dont l'etape ultime, en cas de necessite, est I'arbitrage. En pratique, un grief represente une plainte formulee par un employe, seion laquelle l'employeur ou l'un de ses representants interprete mal au applique mal telle au telle disposition de la convention collective. La plupart des conventions collectives prevoient une au plusieurs etapes, assorties de delais, au la plainte en question pourra etre examinee et au I'employeur
Chapitre 15
I Negocier et appliquer une convention collective
pourra soit maintenir sa decision, so it la changer en donnant totalement ou partiellement raison a l'employe. A l'une ou l'autre de ces €tapes, l'employe peut decider de retirer sa plainte ou de la maintenir. II faut cependant noter que, sauf si la convention collective contient une clause explicite a l'effet contraire, un grief appartient a l'association accredi tee. Meme si un employe decide de retirer sa plainte, Ie syndicat peut, en vertu des articles 69 et 100 du Code du travail, continuer de pousser Ie grief a travers les €tapes de la procedure jusqu'a l'arbitrage. A}'inverse, il est impossible pour les salaries d'obtenir la nomination d'un arbitre par Ie ministre du Travail sans Ie concours de l'association accreditee, a moins que la Commission des rela tions du travail n'en soit arrivee a la conclusion (article 47.5) que l'association accreditee a viole I'article 47.2, qui traite de l'obligation d'une associa tion accreditee de representer equitablement tous les salaries del'unite de negociation. Si une convention collective ne prevoit aucune procedure interne de regle ment des griefs, Ie seul avis formel de grief transmis par une partie a l'autre, suivant les delais prevus, a pour effet d'enclencher Ie mecanisme de nomina tion d'un arbitre seion ce que prevoit l'article 100 du Code du travail. Comme dans Ie cas d'un arbitre de differends, un arbitre de griefs peut etre choisi d'un commun accord par les parties ou, a detaut d'une entente entre les parties, par Ie ministre. L'arbitre peut etre seconde par des assesseurs si, dans les 15 jours suivant sa nomination, il y a entente a cet effet entre les parties. L'arbitrage des griefs devient donc, dans la pratique quotidienne, un me canisme de controle externe des decisions prises par I'employeur (Morin et Blouin, 1994). Tout grief non resolu et auquell'une ou l'autre des parties de sire donner suite doit etre soumis a l'arbitrage; les parties n'ont pas la liberte de choisir un autre mecanisme de reglement. C'est dans ce sens que Ie recours a l'arbitrage, en cas de grief, est obligatoire. Des que Ies droits sur lesqueis une partie s'appuie decoulent exclusivement d'une convention collective, seul un arbitre de griefs a juridiction pour agir en tant que tierce partie neutre dans tous les cas de violation pretendue de la convention collective. La sentence arbitrale est sans appel, elle lie Ies parties et, Ie cas echeant, tout salarie en cause (article 101 du Code du travail). Ces termes indiquent bien qu'en matiere de grief, la juridiction arbitrale est exclusive. L'article 139 precise cette question en statuant que, «sauf sur une question de competence, aucun des recours extraordinaires prevus aux articles 834 a 850 du Code de procedure civile (chapitre C-25) ne peut etre exerce ni aucune injonction accordee contre un arbitre ». Retenons egalement que la sentence d'un arbitre de griefs doit etre fondee sur la preuve (article 100.11), c'est-a-dire sur Ies faits et les documents que lui soumettent les representants de chacune des parties.
Sauf en matiere de discipline, Ie role de l'arbitre de griefs se borne a !'in terpretation de la convention collective. Un grief sera normalement rejete si l'arbitre juge conforme a Ia convention collective Ia decision de I'employeur qui est en cause. Lorsqu'un grief est accepte, cela signifie normalement que l'arbitre considere que l'employeur a mal interprete ou mal applique une dis position d'une convention collective.
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I Les defis de la democratie au travail Vne autre cause frequente de rejet d'un grief est Ie non-respect des delais i on dit alors qu'il y a prescription, c'est-a-dire cessation d'un droit. L'article 71 du Code du travail stipule que « les droits et recours qui naissent d'une con vention collective se prescrivent par six mois a compter du jour ou la cause de l'action a pris naissance », ce qui a ete interprete comme Ie jour ou Ie plai gnant a pris connaissance des faits a l'origine du grief. La convention collec tive peut prevoir des delais plus courts, qui doivent alors avoir ete respectes. Ce sont des raisons de celerite, d'objectivite et d'efficacite qUi ont amene les parties et Ie U~gislateur a confier Ie traitement des griefs a un groupe parti culier de «juges d'occasion» plutot qu'aux tribunaux de droit commun. Vne evaluation serieuse du regime actuel d'arbitrage des griefs serait necessaire pour verifier jusqu'a quel point iI continue d'atteindre ses objectifs. Dans l'attente d'une telle evaluation, on peut encore mieux saisir les particularites des tribunaux d'arbitrage des griefs en les comparant aux tribunaux de droit communi comme Ie montre Ie tableau 15.2.
Conclusion La negociation collective est un processus de determination des conditions de travail qui implique des tractations entre une partie patronale et une partie syndicale. Le processus debute par un avis de negociation donne par l'une des parties. Son deroulement comporte habituellement trois phases: l'ouverture, !'intensification et Ie denouement menant soit a un conflit ouvert, soit a un reglement et a ]a signature d'une convention collective. Chacune des phases se prete a l'utilisation de divers moyens: I'information, 1'€~coute, la persua sion, Ies concessions, Ia coercition, Ie bluff et l'engagement.
LINE COMPARAISON ENTRE LES TRIBUNAUX D'ARBITRAGE DES GRIEFS ET LES TRIBUNAUX DE DROIT COMMUN
Source: F. Morin, Rapports collectifs du travail, Montreal, Themis, 1982, p. 475-476.
Chapitre lS
I Negocier et appliquer une convention collective
Au cours des negociations, l'une ou l'autre des parties peut demander l'in tervention d'un conciliateur. Ce dernier cherchera a favoriser un reglement entre les parties. A defaut d'un accord, les parties ont la possibilite legale de decreter soit une greve dans Ie cas des employes, soit un lock-out dans Ie cas de I'employeur. II faut alors respecter certaines conditions prevues par Ie Code du travail. Par contre, Ie recours a des briseurs de greve, c'est-a-dire des per sonnes appelees a remplacer Ies employes en greve, est a peu pres impossible, sinon tres difficile. Si les negociations echouent, les parties peuvent sou mettre leur differend a l'arbitrage (ou se voir imposer celui-ci). Elles sont alors liees au jugement rendu, a moins qu'elles ne s'entendent pour en modifier Ie contenu, en tout ou en partie. Le succes du processus de negociation collective repose sur diverses condi tions, dont les suivantes: • la perception des negociations collectives en tant que mecanisme de resolution de problemes dans Ie respect mutuel des parties; • la recherche par les gestionnaires, en dehors du contexte des negociations, de solutions satisfaisantes aux nombreux problemes concernant les droits des salaries; • une bonne preparation des parties en cause; • une approche positive de la negociation, par exemple l'adoption de la negociation raisonnee. L'aboutissement normal d'une negociation collective reside dans une con vention collective, dont les clauses constituent un ensemble de dispositions qui encadrent Ies decisions prises par Ia direction et n'importe lequel des gestionnaires. Ces clauses entrainent des problemes d'application et d'inter pretation, d'ou la necessite de clarifier les responsabilites des chefs de service et des specialistes des relations du travail.
(J) de r evision
o Nommez trois differences entre des
negociations collectives de travail et d'autres types de negociations cou rantes dans d'autres domaines du fonctionnement d'une entreprise, comme dans Ie marketing (les nego ciations avec des fournisseurs ou des clients) ou dans les finances (Ies negociations avec un banquier).
• Les negociations collectives debu tent au moment ou un avis de nego ciation a ete donne a l'autre partie ou est repute avoir ete donne.
a) Dans Ie cas d'une premiere nego ciation collective, quand cet avis peut-il etre envoye a l'autre par tie, et quand sera-t-il repute avoir He envoye? b) Dans Ie cas du renouvellement d'une convention collective, quand cet avis peut-il etre en voye, et quand sera-t-il repute avoir ete envoye ? c) Dans I'un ou l'autre des cas qui precedent, pourquoi est-il si im portant d'envoyer cet avis?
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Partie V
I Les defis de la democratie au travail
. , Nommez quatre conditions que doi vent respecter les membres d'un syn dicat regroupant des employes d'un service public pour pouvoir exercer legalement leur droit de greve.
o Que sont les briseurs de greve et a queUe condition un employeur peut-il faire appel legalement a de telles personnes ?
" Qu'est-ce qu'un arbitrage de diffe rends et pourquoi Ie recours volon taire a un tel processus est-il si rare?
e tion Decrivez cinq elements de prepara a court terme et a long terme a des negociations collectives. • Nommez quatre moyens que la par tie patronale ou la partie syndicale peut prendre (chacune de son cote) pour accroitre son pouvoir de nego ciation ou reduire Ie pouvoir de negociation de l'autre partie.
o Expliquez
l'affirmation selon la queUe toute negociation comporte des enjeux d'ordre distributif et des enjeux d'ordre integratif.
f) Precisez les tactiques susceptibles
d'etre utilisees a chacune des phases
traditionnelles collectives.
des
negociations
(li) Expliquez les quatre principes fon damentaux de la negociation rai sonnee, puis presentez deux des critiques adressees a cette approche en ce qui concerne son applicabilite a des negociations collectives de travail.
fD Quelle a ete,
au cours des dernieres annees, !'importance relative des con flits de travail au Canada et au Quebec?
. . Precisez deux clauses de conventions collectives qUi sont devenues plus frequentes entre 1981 et 1989 et deux autres clauses dont la frequence a diminue durant cette periode. ~ Pourquoi
dit-on que les chefs de ser vice ne sont pas libres d'appliquer et d'interpreter la convention collec tive comme bon leur semble, et queUes sont les deux consequences de cette situation?
4'1 Mentionnez et expliquez sommaire ment trois differences entre les tri bunaux d'arbitrage des griefs et les tribunaux de droit commun.
Chapitre 15
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Negocier et app/iquer une convention collective
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Negocier et appliquer une convention collective
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les defis de la democratie au travail
Nouvel1e Vi11e de Levis: 1es negociations avec 1es porn piers s'annoncent tendues. Les syndiques refuseront de porter 1'uniforrne tant qu'ns n'au rant pas un contrat de travan 3
,
«A moins que 1a Ville de Levis ne se montre particuW~rement conciliante, 1es pompiers de Levis refuseront de porter l'uniforme tant qu'ils n'auront pas un contrat de travail », a indique Ie presi dent du syndicat, Stephane Desbiens, hier. « Nos membres porteront jean et t-shirt. II s'agit de demontrer notre soli daTite et notre determination en vue des negociations. Celles-ci devraient re prendre a la fin d'aout ou au debut de septembre », a precise M. Desbiens. «Nous endosserons a nouveau l'unifonne si nous estimons que les negociations vont tres tres bien, ou que la Ville nous en fait la demande expresse et que nous evaluons que cela peut ameliorer Ie cli mat des pourparlers a la table », a ajoute Ie porte-parole des pompiers. Litige enterre, mais... Ce refus de porter l'uniforme a notamment ete Ie moyen pour les pompiers de protester, en fin de semaine, contre des mesures prises par leur direction au chapitre du rem placement et des heures supplemen taires. Litige qUi a He enterre a Ia suite d'une entente intervenue entre la direc tion et Ie syndicat, entente elle-meme plus tard enterinee par une majorite de pompiers reunis en assemblee generale. Selon les dispositions de l'entente, la direction du service U~ve son ordre de confinement aux casernes, paie les heures supplementaires et garde les
effectifs a leur niveau de base habitue!. Mais la pression reste entiere dans Ie ser vice, qui plus tOt ce printemps avait amene les porn piers levisiens a exercer une premiere ronde de moyens de pres sion, en refusant de laver les camions, par exemple. C'est que, comme les autres groupes d'employes municipaux, les pompiers levisiens n'ont pas encore conclu de contrat collectif de travail avec la nou velle grande ville de Levis. A temps par tiel, les 125 pompiers levisiens doivent compter avec 8 contrats de travail diffe rents herites des anciennes municipa lites. Des contrats qui font que Ie salaire des pompiers varie entre 10$ et 15 $ l'heure pour 1a garde en caserne, et entre 15 $ et 22 $ quand ils doivent combattre un incendie. Le statut precaire qui est Ie lot des porn piers actuels fait aussi qu'ils occu pent souvent deux emplois et font des semaines de 80 heures. Au total, selon M. Desbiens, les pompiers sont Ie groupe Ie plus mal nanti de la fonction publique levisienne. «Levis est une grande ville de 125000 habitants et nous revendiquons les conditions qUi y cor respondent. Ce que les membres veulent, c'est de devenir des pompiers perma nents. Nous voulons aussi les memes conditions salariales qu'ailleurs », a conclu M. Desbiens.
3. M. Saint-Pierre, «.K'ouvelle Ville de Levis: les negociations avec les pompiers s'annoncent tendues. Les syndiques refuseront de porter l'uniforme tant qu'ils n'auront pas un contrat de travail», Le Soleil, 24 juillet 2003, p. AlA.
Chapitre 15
o laEn theorie vous referant en particulier a des droits residuaires, quels moyens legaux l'employeur pourrait-il utiliser envers les employes qui suivent les consignes syndicales et refusent de laver les camions et de porter l'uniforme de service?
f) A votre avis, quels s~nt, pour la par tie patronale, Ies avantages et les inconvenients W~s au fait de tolerer, du moins pendant la periode des ne gOciations, les gestes illegaux com mis par Ies pompiers?
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Negocier et appliquer une convention collective
. , Dans Ie cadre de cette negociation, la strategie syndicale vous apparait elle appropriee? Quels sont deux autres eU:ments de preparation et de mobilisation qui pourraient etre utilises? . , Pour ce qui est du cote patronal, nommez Ies trois eU~ments les plus importants d'une bonne prepara tion a cette negociation. " Dans Ie cas present, pensez-vous que I'approche de la negociation raison nee pourrait etre utile? Appuyez votre position sur au moms deux arguments.
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Apres l'etude de ce chapitre, Ie lecteur devrait etre plus apte
a:
• Relever et comprendre les gran des tendances et les defis de la gestion des ressources humaines. • Comprendre les scenarios de redefinition de la profession «ressources humaines». • Comparer les preoccupations de la theorie et de la pratique en matiere de gestion des ressources humaines. • Determiner les enjeux lies humaines.
a l'evaluation de la gestion des ressources
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Partie V
I les defis de la democratie au travail
La gestion du capital humain, nouveau mode d'emploi'
La
haute direction de Toyota Motor Manufacturing North America a recemment ete renversee lorsqu'elle a pris connaissance des resultats d'un sondage interne aupres de ses salaries. Selon ceux-ci, leur perfor mance individuelle ne leur donnait aucune ment l'occasion de prendre du galon au sein de l'entreprise ni d'obtenir une augmenta tion de salaire substantielle. Autrement dit, ['entreprise depensait une fortune sur un programme qui ne fonctionnait pas / Plutat que d'investir dans de nouvelles ressources et de depenser beaucoup d'argent pour repenser tout Ie systeme de petformance, la direction a decide d'analyser la structure interne de son capital humain sur une base statistique. Resultat: dans les faits, les promotions allaient reellement aux employes les plus performants. La perception des employes ne correspondait donc pas a la realite, un probleme bien moins couteux a regler. Ere nouvelle de gestion du personnel « Comment se fait-il que les grandes entre prises possedent des outils sophistiques d'evaluation, tels que Ies systemes de ges tion des stocks ou les ratios financiers, mais qu'elles ne connaissent a peu pres rzen du retour sur l'investissement de leur per sonnel?» s'interroge Dave Kieffe" respon sable du Strategy and Metrics Group et auteur du livre Play to Your Strengths:
Managing your Internal Labor Markets for Lasting Competitive Advantage, qui sera lance Ie 15 octobre
a Montreal.
Selon lui, Ie probleme vient du fait qu'il n'existe pas d'outils pour mesurer et com parer les renseignements deja existants dans les bases de donnees sur les employes. Toutefois, avec l'augmentation de la ca pacite des ordinateurs, la qualite de l'infor mation sur Ie capital humain des societes est sur Ie point de s'ameIiorer considerable ment. M. Kieffer parle meme d'une «ere nou velle de gestion des ressources humaines ». Apprendre it lire les bases de donnees
Dans l'exemple de Toyota, la haute direc tion a utilise toute l'information qu'elle detenait sur chaque employe salaire, date de naissance, promotions, langues mai trisees, prix et recompenses, universites frequentees, etc. Elle a ensuite elabore, a l'aide de puis sants ordinateurs et de logiciels developpes a ['interne, des modeles pour faire ressortir Ies tendances generales. « L'objectif etait de comprendre Ia dynamique des mouvements dans l'organisation », dit M. Kieffer au cours d'une entrevue qu'il a accordee de son bureau, a New York. Par exemple, on peut decouvrir que les responsables du service des comptes clients en poste depuis plus de 2 ans ont 50 % plus de probabilites de quitter l'entreprise. «Avec l'analyse empirique, on arrive a un modele previsible permettant une ana lyse plus eclairee et offrant, par consequent, de meilleures chances de succes", dit-il. Ainsi, si Toyota s'etait seulement fiee au sondage, eUe aurait gaspille des millions
1. J.-S. Trudel, «La gestion du capital humain, nouveau mode d'emploi ", Les Affaires, 11 octobre 2003,
p.29.
Chapitre 16
de dollars sur Ie developpement d'un pro gramme qui, tout compte fait, fonctionne assez bien. Fire, elle l'aurait peut-etre rem place par un systeme moins efficace. Faire des liens avec la performance
Par ailleurs, la all cette analyse devient par ticulierement interessante, c'est quand on la fusionne avec les resultats de la perfor mance economique de l'entreprise. «L'etape de ['analyse permet de decou vrir les eles pour biWr la meilleure equipe possible. LWape suivante traduit en termes economiques chacune de ces eles. Voila ce qui a vraiment change la faron de faire», affirme M. Kieffer, aussi membre du parte nariat international de Mercer. Quand Ie directeur de la production rencontre la haute direction et suggere l'achat d'un equipement, it Ie justifie avec des gains quantifiables de temps, de per formance et d'argent attendus avec cet equipement. De la meme faron, grace a I'analyse interne du personnel, Ie directeur des res sources humaines pourra justifier la mise en place d'un nouvel avantage social par les gains de performance et de revenus qui seront realises.
I
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
Un avantage concurrentiel bien reel
Pourquoi les entreprises seraient-elles em ballees par ces nouveaux outils de gestion ? A cause de l'avantage concurrentiel qu'ils procurent, repond M. Kieffer. Aujourd'hui, quand une pratique reussit dans une entreprise, elle est automatique ment copiee par ia concurrence. Souvent, son application est un echec parce que Ie con texte dans lequel evolue l'autre entreprise est different. Et lorsqu'elle est un succes, cela veut dire que la pratique novatrice est exportable. Brer, l'avantage concurrentiel disparaft a mesure que cette pratique devient la nouvelle norme. Dans un proche avenir, ces avantages se developperont au sein des organisations a partir de leur capital humain, en fonction des individualites et du contexte.
o dePourquoi la pratique de revaluation la GRH est-eIle importante dans Ie contexte actuel? • Qu'est-ce qui rend si difficile la penetration de cette pratique dans les entreprises?
Les organisations innovatrices sont caracterisees par une gestion des res sources humaines renouvelee (Statistique Canada, 2003), plus adaptee aux detis de la societe des annees 2000. Dans un contexte ou, comme nous l'avons vu dans les chapitres 1 et 2, les forces de l'environnement convergent vers une transformation des organisations et du marche du travail, it est imperatif de repenser la GRH traditionnelle et d'innover dans les pratiques et Ie position nement des acteurs. De Ii\ vient l'importance d'indiquer en quoi la gestion des ressources humaines est interpellee par ces forces de l'environnement et de deer ire les tendances qui se profilent a l'horizon. Pour ce faire, nous avons demande ades dirigeants de trois gran des organi sations de partager leurs retlexions avec nous sur Ie sujet. Ainsi, Guy Delisle,
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Partie V
les defis de la democratie au travail
directeur de la performance organisationnelle a Alcan, Fran\,ois Giroux, sous secretaire aux politiques au Secretariat du Conseil du Tresor du gouverne ment du Quebec, de meme que Genevieve Fortier, vice-presidente RH chez Reitmans, presidente de J'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agrees du Quebec et presidente du Conseil canadien des associations en ressources humaines (CCARH), ont accepte de debattre des gran des tendances en matiere de gestion des ressources humaines qui se dessinent sur l'ecran radar de leur organisation pour les cinq prochaines annees. Cette mise en commun des idees sera completee par certains constats que l'on fait dans la presse d'affaires ainsi que dans la litterature. Afin de saisir l'ampleur du renouvellement de la GRH et des defis qu'elle devra relever, nous avons divise ce chapitre en trois parties. Premhhement, nous faisons un bref rappel theorique des parametres du renouvellement de la GRH. Deuxiemement, en nous inspirant de la vision de nos collaborateurs, nous examinons les enjeux qUi se presentent pour l'organisation en ce qui a trait aux ressources humaines. Troisiemement, toujours en nous appuyant sur les r€flexions de nos collaborateurs, nous decrivons succinctement les enjeux auxquels font face les professionnels des ressources humaines qui ceuvrent dans les organisations .
. , ............................................... Les parametres du renouvellement de la GRH
Guerin et Wils (1992; 1996; 1997) ont fait la demonstration d'une mutation d'un paradigme traditionnel de la GRH a un paradigme renouvele. Le ta bleau 16.1 presente certaines caracteristiques de ce modele renouvele. Ce modele renouvele est encore tres pertinent dans l'optique d'une meilleure comprehension de la place occupee par la GRH dans les organisa tions. Malgre des pas importants qui ont ete faits au cours de la derniere decennie, les acteurs de la GRH ont encore beau coup de travail a accomplir pour rendre cette fonction de gestion pleinement legitime dans l'organisa tion. Par contre, certaines organisations ont demontre que Ie developpement
LES PARAMETRES DU RENOUVELLEMENT DE LA GRH
Chapitre 16
I
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
de l'organisation est d'abord et avant tout stimule par une direction des ressources humaines influente qUi place les enjeux lies aux ressources humaines au premier plan des priorites organisationnelles2 . II est important d'observer ces experiences, qui doivent servir de modeles.
16.1.1 Une gestion plus strategique La gestion des ressources humaines est appelee a devenir encore plus strate gique. Ce faisant, la dimension «ressources humaines}} sera prise en consi deration dans la formulation de la vision, de la mission, des strategies et des valeurs de gestion d'une organisation. Bien que cette affirmation ne soit pas recente, la credibilite de la GRH repose sur une approche previsionnelle et in tegree, soit la mise en reuvre d'une strategie relative aux ressources humaines qUi s'articule autour de quelques objectifs economiques et sociaux significa tifs et de grappes de pratiques-cIes qui presentent de la coherence. Ainsi, la strategie relative aux ressources humaines trouve sa U~gitimite dans la triade de l'environnement, a savoir l'adaptation a l'environnement externe (incluant l'environnement sectoriel), a l'environnement organisationnel (incluant la strategie, la technologie, la structure et la culture) et a l'environnement des ressources humaines du marche interne (incluant 1a diversite sociodemo graphique et la composition de la main-d'reuvre). Une fonction « ressources humaines» strategique implique donc une capacite a influencer a priori les 2. Le concours des IRIS de l'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agrees du Quebec donne de nombreux exemples de ces organisations innovatrices.
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Partie V \ Les d€!fis de la d€!mocratie au travail
~~cision~ (par des analyses)" a influencer simultanement les decisions (par I evaluatIOn des effets des scenarios et des choix strategiques potentiels) et a aligner a posteriori les mesures liees aux ressources humaines sur la triade de l'environnement (Wils, Le Louarn et Guerin, 1991). Vne gestion strategique des ressources humaines s'eloigne donc d'une gestion eparpillee, a la piece et centree sur les activites.
16.1.2 Une gestion p1us cu1ture11e Les hommes et les femmes qUi interagissent dans les milieux de travail sont a la fois l'objet et Ie sujet de la GRH, en ce sens que l'objet est gere par les pra tiques, tandis que Ie sujet con~oit, developpe, implante et evalue les memes pratiques. Les hommes et les femmes font donc partie d'un microcosme qUi est nourri par une culture, c'est-a.-dire par des va leurs qUi prennent forme dans des discours, des comportements, des processus decisionnels, des pra tiques, des artefacts et des symboles. La culture organisationnelle joue un role fondamental dans la vie des organisations. Elle est plus souvent emergente qu'imposee i par consequent, elle est extremement difficile a gerer. Les spe cialistes et les gestionnaires sont des acteurs-cles qui doivent a la fois com prendre la culture emergente et susciter des transformations culturelles visant a appuyer Ies changements organisationnels (Dolan et Garcia, 1999).
16.1.3 Une gestion p1us participative et partagee La responsabilisation est au centre de la reorganisation du travail et de l'inno vation dans les pratiques de GRH. La GRH devient plus participative car eHe implique un nouveau partage des activites et des decisions strategiques et operationnelles entre les differents acteurs. La fonction «ressources humaines» devrait etre au centre de toutes les transformations du milieu de travail. Cela implique une sensibilisation a la participation, de meme qu'une habilitation a la participation, surtout pour les gestionnaires, qui deviennent de plus en plus responsables de la gestion de leurs ressources humaines, et pour les employes, qUi developpent de plus en plus leur employabilite. Comme nous l'avons mentionne dans Ie chapitre 1, la GRH n'est plus la responsabilite premiere de la direction des ressources humaines; elle est une responsabilite partagee OU les cadres superieurs, les gestionnaires, les syndicats et les employes se transforment davantage en acteurs dynamiques. Certains auteurs avancent Ie concept d'acteur coHectif (BHanger, 1996) pour exprimer cette convergence d'idees et d'energies par rapport a la GRH.
16.1.4 Une gestion plus (entTee SUT l'individu La GRH, longtemps marquee par la standardisation et la depersonnalisation, est appelee a. devenir plus flexible et plus soup Ie afin de s'adapter a une diver site de plus en plus grande et surtout de respecter Ie caractere unique des personnes. Vne politi que uniforme et standardisee ne convient plus a des categories d'employes ou s'observent de nombreuses differences quant a l'age,
Chapitre 16
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Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
a l'anciennete, a l'origine ethnique, aux acquis professionnels, aux projets de carriere, etc. Sans aller jusqu'a accorder a chacun sa propre convention collective, il reste que chaque employe devrait avoir la conviction qu'il est apprecie et traite de maniere equitable. L'equite, qui constitue un des objec tifs ultimes de la GRH, ne devrait donc pas etre poursuivie exclusivement au moyen de mesures collectives, mais egalement au moyen de mesures indi viduelles dans Ie plus grand respect des differences. En outre, une GRH plus centree sur l'individu devra considerer d'abord et avant tout les besoins de croissance et d'epanouissement de chacun. La GRH doit relever Ie defi consis tant a mettre en valeur l'identite et l'integrite des personnes, ce qUi n'a pas toujours ete compatible avec une conception plus administrative et produc tiviste de la GRH. Depuis quelques annees, l'approche de la gestion par competences a gagne en popularite, et l'on constate que de grandes entreprises, tout comme de petites entreprises, mettent sur pied des systemes de GRH (dotation, forma tion, gestion des carrieres, remuneration) qui appuient la logique de l'acquisi tion et du developpement des competences dans l'organisation. Cette logique permet aux personnes de se developper dans un contexte de polyvalence et de mobilite et, ainsi, de personnaliser la GRH. EIle permet egalement de batir la competence collective, c'est-a-dire la synergie des competences indivi duelles qui devient l'avantage concurrentiel et Ie moteur de l'organisation. Cette tendance assod§e au renouvellement de Ia GRH va dans Ie sens de Ia trans formation des organisations en des organisations plus apprenantes, qui font fructifier Ie capital humain en elevant Ie capital des competences de sa simple dimension individuelle a sa plus noble dimension collective (Le Boterf, 1997).
16.1.5 Une gestion plus evaluative et informatisee La GRH devra se preoccuper davantage de l'evaluation de son efficacite et de sa valeur ajoutee dans l'organisation. Pour ce faire, Ie developpement de sys temes d'information de GRH, integres dans ceux de l'organisation, en vien dront a transformer substantiellement Ie role de la direction des ressources humaines et des gestionnaires (Ulrich, Losey et Lake, 1997) en les Iiberant de taches fastidieuses ayant trait a la collecte, a la saisie, au traitement, a l'ana lyse, a la transmission et a Ia diffusion de I'information, ce qui leur laissera plus de temps pour gerer les systemes humains. Les technologies de l'infor mation permettent la personnalisation, la delocalisation, I'interaction, Facces aux sources d'information, la gestion en temps reel et la virtualite. Ces carac teristiques des technologies de l'information transformeront radicalement les professions de gestionnaire et de specialiste des ressources humaines (Audet, 2000). En effet, une grande proportion des taches liees a la gestion des personnes au travail consiste en un travail administratif comportant une faible valeur ajoutee et n'apportant pas une contribution significative au developpement de I'organisation. Certains services de gestion de la paie, de sante et de securite, de gestion des avantages sociaux, de dotation et meme de formation seront de plus en plus «assistes» par l'informatique, voire «impartis». Le temps et l'energie qu'on gagne ainsi devraient etre accordes a
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les defis de la democratie au travail
des activites de gestion ayant une valeur ajoutee a la fois pour les personnes et pour l'organisation. Dans un ouvrage portant sur la reingenierie de la fonction «ressources humaines ", Spencer (1995) affirmait deja que les technologies transforment radicalement la GRH. Celles-ci ont des repercussions sur l'impartition, sur l'automation (les systemes experts), sur l'integration des pratiques dans des systemes d'information de gestion des ressources humaines, sur la decentrali sation de la prestation des services aux ressources humaines et, entin, sur les rOles et les competences des professionnels des ressources humaines.
16.1.6 Une gestion plus internationale et ouverte sur le monde
Acette enumeration des tendances en matiere de GRH, nous pourrions ajouter une gestion plus intemationale des ressources humaines. En effet, un monde economique et social plus ouvert, moins reglemente et ayant une plus grande mobilite entraine une problematique particuliere. Une multinationale ou une entreprise-reseau implantera ses activites de production et de services non pas en fonction des Heux, mais en fonction du portrait de la main-d'a:uvre et de la fas:on dont elle est geree. La GRH devient donc un enjeu majeur dans la decision d'une entreprise quebecoise et canadienne relativement au rede ploiement de ses ressources et de ses activites au pays de meme que dans certains Etats americains, dans des regions du Mexique ou ailleurs dans Ie monde. Que les dirigeants adoptent une approche ethnocentrique (l'instau ration de la culture d'origine dans toutes les filiales etrangeres) ou geocen trique (l'instauration de la mixite des cultures et des identites nationales a tous les niveaux et dans tollS les lieux d'une organisation), Ie defi de la gestion intemationale des ressources humaines est maintenant devenu une realite incontoumable (Saba, 2001).
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La vision de quelques praticiens : les enjeux
p~~~ Xc:»~~~~i~~.t~~:n. Cette analyse theorique qui provient du monde universitaire relativement aux deiis de la GRH tient-elle encore la route? QueUe evolution de la GRH peut-on constater, aUjourd'hui, sur Ie terrain? Ce passage d'une GRH tradi tionnelle a une GRH renouvelee s'est-il realise '! La r€flexion que nous avons menee a cet egard avec des dirigeants d'organisations privees et publiques nous conduit a rei ever des tendances en fonction de la realite et du langage de ces demiers. Comme on pourra Ie constater, les tendances qu'ils ont pre cisees rejoignent en grande partie l'analyse plus theorique qui precede, tout
en se fondant sur une logique differente. En ce qui conceme Ies enjeux qui se presentent pour l'organisation, cinq tendances-cles se dessinent: • l'adaptation des organisations au bouleversement demographique du marche du travail;
Chapitre 16
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I
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
1a legitimite de la GRH au moyen de pratiques liees a l'evaluation; la conformite de la GRH avec l'environnement legal et reglementaire i l'etablissement d'une remuneration giobaie mieux adaptee au contexte; Ie deveioppement d'un corps de connaissances sur la GRH dans Ies PME.
16.2.1 L'adaptation des organisations au bouleversement demographique du marche du travail Comme nous l'avons vu en detail dans Ie chapitre 2, Ie vieillissement de la population, l'arrivee d'une nouvelle generation de citoyens sur Ie marche du travail (la generation Y), Ia lutte pour l'egalite des sexes et Ie recours a !'im migration pour combler Ie deficit demographique sont des forces demo graphiques convergentes qui font surgir de nouvelles problematiques qui menacent Ia stabilite du marche du travail et des organisations. Parmi ces problematiques, celles qui meritent que l'on s'y attarde sont Ia gestion de la releve (incluant les pratiques d'attraction et de conservation du personnel), la gestion des travailleurs experimentes et la gestion de la diversite.
La gestion de la releve Les specialistes ne s'entendent pas sur l'ampleur de la crise qUi guette les organisations en matiere de penurie de main-d'ceuvre. Certains pretendent que la situation est aiarmante et que les forces vives de la societe doivent se serrer les coudes pour trouver des solutions innovatrices a ce probleme. D'autres, par contre, affirment qu'il y a exageration et que Ie marche du tra vail s'ajustera grace a quelques mesures correctives. Les «dirigeants-temoins» que nous avons consultes ont elabore un ensemble de moyens visant a dresser un inventaire des zones critiques de leur organisation, a faire un inventaire evolutif (des scenarios de depart) des categories d'employes ainsi qu'a deter miner les employes a haut potentiel et Ies employes critiques. Le grand defi qu'ils doivent reIever reside dans la mise sur pied d'initiatives innovatrices de developpement pour ces types d'employes et surtout d'acceleration du cycle de developpement. La gestion de Ia releve est particulierement critique pour la categorie des dirigeants. On parle maintenant d'une crise de leadership associee a l'absence de reIeve de haut niveau dans les organisations. On observe une enorme diffi culte a combler les postes-cles car les exigences quant aux compHences sont de plus en fortes et Ie reservoir se retredt, d'autant plus que les nouvelles generations de leaders potentiels n'ont pas les memes attentes et Ies memes ambitions que leurs aines face au travail et a la carriere. Cette crise sera accen tuee non seulement par l'arrivee de la generation Y sur Ie marche du travail, mais egalement par la feminisation de celui-ci. n y a peu de modeIes femlnins dans les equipes de gestion et les conseils d'administration. De plus, H n'est pas assure que les femmes de la reIeve epouseront les modeles de leaders et Ie style de gestion qui ont He privilegies jusqu'a present (Baudoux, 1998).
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I
Les defis de la democratie au travail
La gestion de la releve entraine dans son sillage Ie renouvellement des pratiques d'attraction et de conservation du personnel. En effet, dans un contexte de penurie, les entreprises doivent se montrer sous leur meilleur jour, eIles doivent developper un pouvoir d'attraction et seduire Ie talent qui se fera plus rare. Des entreprises comme Alcan, Camoplast ou Merck cherchent a se positionner en tant qu'employeurs de choix et rafflnent leur offre d'emploi afin d'acquerir un avantage concurrentiel sur Ie marche du tra vail. Les dirigeants-temoins avancent que, dans ce contexte de rarete et de differenciation des organisations, il y aura des gagnants et des perdants, et que ces derniers risquent de payer un prix important pour leur absence de stra tegies en matiere de gestion de la rei eve. Non seulement il faudra que les dirigeants usent de creativite en matiere d'attraction, mais ils devront deployer beaucoup d'efforts pour retenir Ia main-d'reuvre acquise et develop pee cherement sur plusieurs annees. Ce n'est pas Ie nombre de pratiques en cette matiere qui comptera, mais plutot la qualite de certaines pratiques, telles que la reconnaissance du rendement, la remuneration globale, la dotation, la gestion des carrieres et l'organisation du travail.
La gestion des travailleurs experimentes S'il est vrai qu'il faut accroitre les efforts quant a la gestion de la releve aupres des nouvelles generations de travailleurs, cela ne doit pas se faire au detriment des travailleurs d'experience de 45 ans et plus. En effet, dans un univers comme celui de Ia fonction publique ou plus de 20000 postes seront a combler au cours des prochaines annees, rappelons que plus de 3S 000 employes resteront sur Ie marche du travail. Ces travailleurs, qUi seront actifs pendant encore lO, 15 ou 20 ans, doivent etre formes, reconnus et apprecies. Ils doivent egalement avoir des possibilites de carriere et, surtout, ils doivent etre stimules et incites a transferer les connaissances et les savoirs, souvent tacites, qu'ils ont acquis tout au long de leur vie active au travail (Commerce, 2003; L'Actualite, 2003). Les organisations auront egalement besoin du soutien de I'Etat dans la r€:forme des politiques de retraite afin de pouvoir allier Ie salaire, les cotisations et les rentes dans un contexte de retrait echelonne du marche du travail. Elles seront egalement appelees a innover en matiere de retrait progressif du marche du travail en mettant a contribution les travailleurs experimentes en matiere de formation, de coaching, de mentorat, d'enca drement des recmes, de recherche et developpement, et ainsi de suite.
Chapitre 16
I
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
La gestion de la diversite Selon une croyance populaire, la societe d'aujourd'hui de meme que les orga nisations seraient dessinees, structurees et dynamisees par la generation des baby-boomers. Le choc demographique attendu au cours des annees a venir change Ie regard sur les personnes et les groupes qui composeront les organi sations. Un meilleur equilibre est requis entre les plus vieux et les plus jeunes (les baby-boomers et la generation V), entre les hommes et les femmes, entre les Quebecois de souche et les immigrants. Bref, les organisations doivent non seulement etre representatives de la vie en societe, mais, a certains egards, prendre Ie leadership pour provoquer les choses, servir de modeles et creer un effet d'entrainement sur d'autres institutions.
16.2.2 La h!gitimite de la GRH au moyen de pratiques liees al'evaluation Les grandes entreprises qUi sont presentes sur les marches boursiers commen cent a subir des pressions pour qu'elles demontrent la qualite de leur gestion des ressources humaines et l'importance de considerer Ie facteur humain dans les decisions d'affaires. Bien entendu, Ie mot «equitable)} vient qualifier de plus en plus les marques de cafe, de chocolat ou de vetement. Cependant, des grandes entreprises comme A1can ou Domtar sont evaluees periodiquement a partir du Dow Jones Sustainability Index (2003), une procedure d'evaluation qui etablit un rangement des entreprises qui cherchent a faire la preuve de leur renommee a travers Ie monde, y compris aupres des marches financiers. Cette procedure vise a mesurer Ie rendement des organisations en matiere de monitorat des activites de GRH (l'evaluation de la GRH), l,ajustement de la remuneration (liee aux enjeux d'affaires) seion Ie contexte, Ie developpement des ressources humaines, la gestion du rendement, l'ethique, Ie caractere scientifique de la dotation, la variation de la force de travail et la responsabi lite sociale. On semble ainsi demontrer Ie fait que la valeur d'une organisation depend aussi de la qualite de la gestion des gens qUi y travaillent. Une telle demarche dans Ie monde des affaires rend les actions de gestion des res sources humaines de plus en plus legitimes et durables. Elle force aussi les organisa tions a se doter de processus et d'outils innovateurs d'evaluation et d'infor matisation de la GRH. Car, sans un systeme d'information sur les ressources humaines perfectionne, il devient presque impossible pour une organisation de colliger et d'analyser les informations requises pour obtenir par la suite son « bulletin)}.
Definition de l'evaluation de la GRH La
lt~gitimite
de la GRH passe de plus en plus par la capacite des specialistes,
des dirigeants et des gestionnaires a evaluer Ies politiques, les programmes et les pratiques rattaches aux ressources humaines, et surtout a faire la demon stration d'un lien entre ceux-ci et Ie rendement et Ie progres d'une organisa tion. I.e Louarn et Wils (2001) ont illustre ce phenomene a travers un modele de l'escalier (voir la figure 16.1).
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I Les defis de la democratie au travail lE MODELE DE l'ESCAlIER DE lE lOUARN ET WllS
Source: Adaptee de J..Y. Le Louarn et T. Wils, L'evaluation de la gestion des ressources humaines, Paris, Editions Liaisons, 2001, p.43.
Dans ce modele, la GRH englobe l'ensemble des politiques et des pratiques de nature administrative, operationnelle et strategique, qui constituent la cible de revaluation de Ia GRH. Ces politiques et ces pratiques produisent des effets, intentionneis ou non, que I'on appelle «resultats RH» et qui sont lies aux attitudes (la satisfaction, la motivation, l'engagement, Ia mobilisation, etc.) et aux comportements (Ie roulement, l'absenteisme, la participation, les accidents du travail, les arrets de travail, Ie sabotage, etc.). Ces resultats RH ont a leur tour des effets directs et indirects sur les resultats organisation nels, plus specifiquement sur la qualite et sur Ies couts (la rentabilite). Finalement, les resultats organisationneis conditionnent Ie succes et la perennite d'une orga nisation. L'evaluation de la GRH doit donc faire la demonstration de la contribution de cette fonction de gestion au succes de l'organisation en eta blissant un lien logique entre Ies pratiques de GRH, Ies resultats RH et les resultats organisationnels. Bref, Ies professionnels et Ies gestionnaires doivent prouver de fa<;:on plus systematique la relation existant entre I'efficacite de la GRH et I'efficacite organisationnelle. Comme l'efficacite organisationnelle est un concept qui se fonde sur Ies valeurs des individus et des groupes, il ne faut pas se surprendre si I'on trouve dans la documentation et la pratique une multitude de significations attribuees a ce concept. Morin, Savoie et Beaudin (1994) ont mis en evidence les quatre constats suivants dans leur recherche d'une conception integree de I' efficacite organisationnelle. • L'efficacite organisationnelle est un concept multidimensionneI, en ce sens que Ies organisations poursuivent simultanement plusieurs resultats et que ces multiples representations revelent de nombreuses facettes et dimensions. • L'efficacite organisationnelle est un concept hierarchique, en ce sens qu'il se mesure d'abord et avant tout par Ia maximisation des resultats et la minimisation des couts. Par la suite, la satisfaction des employes et celle des clients apparaissent comme des moyens a prendre ou des contraintes a respecter pour atteindre Ies objectifs de I'organisation.
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Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
• L'efficacite organisationnelle est un concept antinomique, en ce sens que les dimensions et les indicateurs sont souvent contradictoires et conflic tuels, resultant d'une confrontation des perceptions du concept de la part des groupes d'interets gravitant dans l'organisation et autour d'elle. Cette situation exige des dirigeants et des gestionnaires qu'ils soient ouverts et fassent constamment des choix. • L'efficacite organisationnelle est un concept operant, en ce sens que c'est un construit social qui conditionne les comportements des individus et les fa\=ons de penser en fonction des representations qu'ils se font de l'efficacite. Ainsi, revaluation de l'efficacite de la GRH pourrait se definir comme un processus systematique et formalise visant a porter un jugement sur la legiti mite, l'efficacite et l'efficience des pratiques, des politiques, des programmes et des activites de GRH con~us et implantes par la direction des ressources humaines, la haute direction et les gestionnaires, incluant une comparaison avec des parametres internes (normes, objectifs) ou externes (etalonnage).
Un modele d'evaluation de la GRH Comme l'indique Ie modele presente dans la figure 16.2, l'evaluation de l'effi cacite de la GRH met en relation les strategies en matiere de ressources humaines et la responsabiIite partagee de la GRH entre les acteurs prioritaires de l'organisation. L'evaluation de la GRH est centree sur la legitimite, l'efficacite et l'effi cience de la strategie en matiere de ressources humaines. Ce processus permet d'interroger la legitimite des objectifs economiques et sociaux qUi reposent en partie sur la mission, les orientations strategiques et les valeurs de gestion de l'organisation. n permet egalement d'interroger la legitimite des pratiques liees aux ressources humaines, tout comme leur efficacite (Ie degre de realisa tion des objectifs vises par les pratiques) et leur efficience (Ie rapport entre les resultats atteints et les ressources necessaires). La legitimite des pratiques est une dimension importante de l'evaluation, car une pratique peut etre efficace et efficiente, mais pas necessairement legitime eu egard aux valeurs de l'or ganisation et de la societe ou encore a la conformite a des lois. Par exemple, la pratique de la remuneration peut atteindre ses objectifs consistant a attirer des employes, ales mobiliser et ales amener a innover avec une utilisation optimale de la masse salariale, tout en allant a l'encontre de l'equite salariale et des valeurs de justice distributive dans l'organisation. Le modele met aussi en evidence !'importance d'evaluer la pertinence des pratiques de GRH pour appuyer les objectifs economiques et sociaux de la GRH (Dyer et Holder, 1988). Une autre dimension de l'evaluation fait reference aux acteurs de l'or ganisation. Ainsi, Ie processus d'evaluation se centre-t-il uniquement sur la mission de la direction des ressources humaines, ses roles et les activites qui sont de son ressort exclusif, ou egalement sur les responsabilites de GRH devolues aux hauts dirigeants et aux superieurs hierarchiques? Ce modele d'evaluation de la GRH nous porte a croire que les pratiques d'evaluation devraient etre legion dans les organisations. Dans la realite, il en
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I Les defis de la democratie au travail UN MODELE D'EVALUATION DE L'EFFICACITE DE LA GRH
Socialisation Evaluation Formation Gestion des carrieres Remuneration Sante et securite Communication Relations du travail Mobilisation et motivation Climat
va autrement. Les travaux de Le Louarn et Wils (2001) ainsi que Ies recherches de Betcherman et autres (1994), de Dolan, Gregoriades et Belout (1995) et de Tsui et Gomez-Mejia (1988) nous permettent de tracer Ie portrait suivant de la situation. • On estime, seion la meilleure hypothese, que moins de Ia moitie des orga nisations quebecoises ont un plan de ressources humaines (un embryon de strategie) integre dans 1a p1anification strategique globa1e de l'organi sation. Toujours selon la meilleure hypothese, au Quebec, environ une entreprise sur trois pratiquerait l'evaluation de la GRH sur une base plus ou moins formelle. • Quand il y a evaluation de la GRH, elle se fait surtout sur une base informelle et irreguliere.
Chapitre 16
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Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
• On observe un manque de rigueur dans l'evaluation, en ce sens que
beaucoup de dirigeants font l'hypothese que si Ie rendement des em
ployes est evalue positivement, cela veut dire que la GRH est efficace.
• Les entreprises qui evaluent leur GRH sont des entreprises de grande
taille, plus dynamiques et en meilleure sante.
• Les entreprises qui evaluent leur GRH ont une direction des ressources humaines bien organisee, pourvue de bons moyens et integree dans la haute direction de l'organisation. Dans ces organisations, l'evaluation est une responsabilite partagee entre la haute direction et la direction des res sources humaines. • La direction des ressources humaines en tant que service est la dimension la plus evaluee, et les methodes qualitatives et quantitatives mesurant les opinions des «clients» de ce service sont les plus utilisees.
Pourquoi faut-il evaluer la GRH ? De nombreuses raisons peuvent expUquer la volonte des membres d'une organisation d'evaluer la GRH. Les objectifs poursuivis et les avantages de l'evaluation sont regroupes dans Ie tableau 16.2. Devant autant d'avantages de l'evaluation de la GRH, comment peut-on expUquer la diffusion relativement faible de cette pratique dans les organi sations? Rappeions que Ie concept d'efficacite est multidimensionnel et antinomique. Rappeions egalement que Ies systemes humains, par opposition aux systemes techniques et economiques, sont difficilement mesurables. Le ."~U16.2
LES RAISONS DE l'EVALUATION DE LA GRH
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les defis de la democratie au travail
Louam et Wils (2001) de meme que Voyer (1994) parlent quant a eux des mythes a combattre en ce qUi concerne la mesure. Ils avancent entre autres les mythes suivants. • On ne peut mesurer ce qUi est humain, on ne dispose pas d'outils simples a utiliser et d'informations adequates. • La mesure est mena~ante, la precision est essentielle pour que la mesure soit utile, et la mesure subjective n'est pas serieuse. • La pratique de I'evaluation a nettement tendance a bureaucratiser et a complexifier Ies choses et souvent, Ies organisations multiplient Ies evaluations sans savoir vraiment pourquoi elles font celles-ci ni a quoi serviront les fruits de leur travail. t
Les methodes d'evaluation de la GRH Les methodes d'evaluation de Ia GRH sont nombreuses. Le Louarn et Wils (2001) en distinguent trois types: les methodes qualitatives, Ies methodes quantitatives et les methodes financieres. Les methodes qualitatives Les methodes qualitatives d'evaluation de la GRH reposent sur la perception, les impressions ou Ie jugement des acteurs qui gravitent autour de l'organisation. La reconnaissance par les pairs est une methode d'evaluation qui s'appuie sur Ie jugement des pairs assoch~s souvent au monde professionnel. Ceux-ci decement un prix, une mention ou une recompense en raison de l'implanta tion d'une pratique specifique de GRH (com me la formation) ou de l'histo rique de la GRH d'une organisation. Les prix du Mouvement quebecois de la qualite, de Ia Chambre de commerce du Quebec, de l'Institut d'administration publique de Quebec ou encore les IRIS de l'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agrees du Quebec en sont des exemples. L'audit, qui est rattache au concept de verification, est une methode d'eva Iuation qUi consiste a porter un jugement sur Ie degre de conformite des acti vites de GRH soit avec des objectifs preetablis, soit avec des lois en vigueur ou avec certaines prescriptions du milieu professionnel fondees sur la theorie des meilleures pratiques (best practices) ou du modele ideal. On peut egalement affirmer qu'« il s'agit principalement de verifier si les politiques et les procedures prevues pour la GRH sont effectivement respectees par Ies specialistes du service des ressources humaines, et surtout par les superieurs hierarchiques» (Petit et autres, 1993, p. 723). Comme on l'observe, cette approche interpelle les princi paux acteurs de la GRH (Ia direction des ressources humaines, la haute direction et les gestionnaires), et chacun peut faire l'objet d'une evaluation.
Les methodes quantitatives Pour pallier les faiblesses des methodes qualitatives, les methodes quantita tives permettent une evaluation chiffree des activites de GRH. Les methodes les plus reconnues sont Ie sondage d'opinion, les indicateurs de resultats et I' etalonnage.
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Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
Le sondage d'opinion est une methode quantitative d'evaluation qui con siste a demander par questionnaire l'opinion de membres de l'organisation sur Ia gestion des ressources humaines. On utilise cette methode surtout pour mesurer la qualite du service offert par la direction des ressources humaines a ses differents clients (les employes, les gestionnaires, les dirigeants, les syndi cats, les consultants). La methode du sondage d'opinion a longtemps ete as so ciee a l'approche des constituantes multiples (multiple-constituency approach) qui a He documentee par Tsui (1990). Quant aux indicateurs de resultats, il s'agit d'une methode consistant a ela borer des indicateurs qui permettent de mesurer des resuitats en matiere de ressources humaines. Ces resuitats peuvent etre associes aux ressources hu maines comme telles (les caracteristiques biographiques des employes, la pro ductivite, I'absenteisme, Ie taux de roulement, etc.), ala gestion des res sources humaines (les valeurs, Ia qualite de la supervision, Ie dimat de travail, Ie posi tionnement syndical, etc.) ou encore au service des ressources humaines (la mission du service, la place dans l'entreprise, la productivite du service, etc.). Cette methode demande de mettre en relation des variables dependantes (comme Ie roulement) avec des variables independantes (comme l'age, I'an ciennete ou Ia productivite) afin d'etablir des liens. Le bilan social chez Cascades, qUi est devenu une tradition, represente une fa~on simple et perti nente d'utiliser des indicateurs de resultats 3 .
L'etalonnage (benchmarking), tout comme l'audit qui exige que l'on eta blisse la conformite de la GRH avec un modele ideal, permet d'etablir des com paraisons avec une ou plusieurs entreprises a partir d'indicateurs de resultats. 3. Voir Ie rapport annuel 2002 de Cascades, p. 34-35.
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I Les defis de la democratie au travail Cependant, une organisation qUi se transforme pour adapter une «meilleure pratique» copiee chez un concurrent ou un voisin n'obtiendra pas forcement les memes resultats. Ce n'est pas l'imitation mais la mise en ceuvre qUi garan tit Ie SUccE~S. Les methodes financhhes Les methodes financieres sont des methodes quantitatives, mais elles reposent sur une logique economique et comptable qui va bien au-dela du simple cal cuI. Parmi ces methodes, on trouve la comptabilite des ressources humaines, la methode couts-benefices et Ie tableau de bordo La comptabilite des ressources humaines, aussi appelee «comptabilisation des ressources humaines)}, est une methode qui vise a determiner la valeur des res sources humaines, de la meme maniere que les comptables mesurent la valeur de tous les autres actifs d'une organisation. La difficulte reside dans la tentative pour attribuer une valeur economique au capital humain. Combien vaut un investissement dans la mise a niveau de la qualification profession nelle et des competences? Le salaire actualise reflete-t-il entierement la valeur d'une personne ? Combien vaut la reconstruction d'une equipe de travail pour qu'eUe offre un bon rendement a court terme? Voila autant de questions sans reponses qui rendent difficile l'utilisation d'une telle methode. La methode couts-benefices, qUi inclut des methodes derivees comme celIe de l'utilite economique et celle du rendement de l'investissement humain, consiste a etablir les consequences economiques des comportements des em ployes associes a l'absenteisme, aux retards, a la produetivite, aux accidents du travail, au roulement, aux arrets de travail, etc. Cette methode, qUi s'appa rente a la comptabilite analytique, permet de determiner aussi bien des cate gories de benefices que des categories de couts, et surtout de les quantifier. Par exemple, il est possible d'etablir que l'absenteisme ou Ie roulement de telle categorie d'employes coute un million de dollars par annee. Un investisse ment de 200000 $ dans l'ameIioration des conditions de travail de ces em ployes permettrait de reduire Ie taux de X %, ce qui ferait economiser environ 10% par annee. Ainsi, l'investissement dans un tel programme serait rentabi lise en deux ans it peine. Pour reprendre les propos de Le Louarn et Wils (2001), la GRH aura it un effet sur les resultats lies aux ressources humaines, resultats qui, a leur tour, auraient un effet sur les resultats organisationnels. La methode du tableau de bord, qui s'inspire des travaux de Phillips (1996) et de Kaplan et Norton (1996), repose sur une theorie du rendement de la firme et permet de presenter au gestionnaire un ensemble d'indicateurs de maniere synthetique et systematique afin de l'aider a prendre de meilleures decisions. Le Human Resources Effectiveness Index et Ie Balance Scoreboard sont deux applications de cette mHhode 4 .
4. Pour une explication sommaire de ces deux applications, Ie lecteur peut consulter l'ouvrage de Le Louarn et Wils (2001, p. 98-106).
Chapitre 16
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Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
Un constat a propos de l'evaluation de la GRH Comme nous venons de Ie demontrer, l'evaluation de la GRH est une pratique qui se repandra de plus en plus dans les organisations modernes. En effet, il y a trop d'energie, de temps et d'argent investis dans les differentes activites de GRH pour qu'on n'en mesure pas la valeur, les incidences financieres et la contribution. II existe cependant d'enormes difficultes a surmonter avant de pouvoir instaurer systematiquement une telle pratique, de sorte que les pro chaines annees seront sans doute fructueuses en ce qui touche aux recherches visant a mettre au point des cadres de reference adequats ainsi que des approches et des methodes qui soient a la fois mobilisatrices et efficaces. Les travaux de Le Louarn et Wils (2001) sont des signes encourageants a ce propos.
16.2.3 La conformite de la GRH avec l'environnement legal et reglementaire La legislation et Ia reglementation en matiere de travail et de main-d'ceuvre colorent Ie paysage de l'economie quebecoise et canadienne, ce qUi constitue sans doute une particularite de cette economie. Les recentes dispositions de la Loi sur les normes du travail concernant la protection contre Ie harcelement psychologique ou celles qui ont trait a I'equite salariale requierent enorme ment d'energie de la part des equipes de professionnels des ressources hu maines qui peinent pour expliquer aux gestionnaires et aux administrateurs l'importance strategique de telles mesures. Au Quebec, les couts de la confor mite de la GRH dans les entreprises, principalement les PME, ont d'ailleurs entraine la mise sur pied d'un secretariat a l'allegement reglementaire et administratif relevant du Conseil executif du gouvernement du Quebec. Preside par Bernard Lemaire et Raymond Dutil, des entrepreneurs respectes du monde des affaires, Ie groupe de travail (compose de representants patronaux et syndicaux) a depose une serie de rapports qui confirment Ie fardeau que representent les lois et les reglements imposes aux entreprises et recomman dent un certain nombre de pistes visant a alleger pour ces entreprises Ies couts de conformite de la GRH avec l'environnement U:gal et reglementaire. Ce chantier, qui est parseme d'embuches, s'appuie sur l'equilibre fragile entre la protection des salaries (de leur emploi, de leur revenu et de leur sante) et Ie rendement des entreprises (a travers une plus grande flexibilite).
16.2.4 L'etablissement d'une remuneration globale mieux adaptee au contexte Cautionnee par les institutions du travail et les conventions collectives, l'ap proche traditionnelle visant a etablir l'uniformite et Ia rigidite de la remunera tion est de plus en plUS remise en question par les employeurs. La tendance actuelle est de tenir compte davantage du contexte global de la remuneration, ce qUi fait une plus grande place aux avantages sociaux personnalises de meme qu'a la flexibilite du temps de travail assode par exemple aux pratiques d'equilibre travail-famille. Par contre, les lois actuelles du marche sont intrai tables pour ce qui est du caractere concurrentiel de la remuneration directe,
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I Les defis de la democratie au travail en ce sens que les entreprises se doivent d'offrir un salaire de base et des bonis qUi ne les declassent pas sur ce que l'on appelle Ie marche de reference. Cette pratique de la remuneration est d'autant plus importante dans un contexte de gestion de la releve, d'attraction et de conservation des meilleurs elements. Les entreprises sont donc portees a cibler la remuneration en respectant les caracteristiques personnelles des employes (leurs competences et leur rende ment), en liant une partie variable au rendement des unites d'affaires et des equipes, en soutenant les valeurs intrinseques sur lesquelles se fonde l'organisation du travail (la polyvalence, la flexibilite, Ie travail en equipe, la transparence, etc.) et surtout en s'adaptant au marche de reference. Les fonc tionnaires provinciaux qui reuvrent dans la region de Gatineau, les analystes financiers du ministere des Finances qui travaillent dans Ie centre-ville de Montreal, les agents de services correctionnels des centres de detention et les travailleurs de la sante de la Cote-Nord ne sont que quelques exemples des caracteristiques d'un marche de reference qui entrai'ne des actions specifiques en matiere de remuneration. Ce constat est partage par une etude menee recemment par DBM et Ie Globe & Mail aupres d'experts en ressources humaines venant de toutes les regions du Canada qui se sont penches sur l'avenir du travail en 2003. On y mentionne Ie fait que Ies travailleurs seront de plus en plus nombreux a recevoir un salaire de base assorti de primes.
16.2.5 Le developpement d'un corps de connaissances sur la GRH dans les PME La vitalite de l'economie canadienne et quebecoise depend en grande partie du dynamisme des PME. Or, ces dernieres s'en remettent souvent a un entre preneur homme-orchestre qui prend toutes les decisions relativement a l'attribution des ressources. Ainsi, les PME ne disposent pas de ressources professionnelles speciaUsees (un service des res sources humaines), elles sont
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Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
dependantes du calendrier des operations et des camets de commandes, et eIles font souvent Ies frais d'une guerre de priorites entre les autres fonctions de l'organisation (approvisionnement, marketing, administration, R&D, pro duction, etc.). Bref, les PME sont plus ou moins bien pourvues en ce qui con ceme les strategies, les pratiques, Ies outils, Ies ressources et Ies moyens permettant de gerer leur personnel. Cependant, il n'en demeure pas moins qu'elles font face aux memes enjeux que les grandes entreprises en matU~re d'attraction, de conservation et de gestion de la releve dans un contexte de penurie de main-d'~uvre. Un appel a la professionnalisation de la GRH dans les PME est lance par l'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agrees. Ce cri d'alarme rejoint les preoccupations des ministeres et des organismes gouvemementaux (tels que Ie ministere du Travail, Developpement ressources humaines Canada ou Emploi-Quebec), qui sont conscients de la fragilite des PME en ce qui a trait a la GRH. L'ordre du jour des acteurs du marche du travail comprend une rHorme des politiques pubJiques (les credits d'impot, l'aide a l'emploi, Ie soutien de la formation professionnelIe, l'apprentissage continu, les mesures actives de retour sur Ie marche du travail, etc.), un enseignement plus pertinent dans les ecoles de gestion, des regroupements de ressources (par secteurs, par regions, par com munaute d'affaires), Ie recours a des systemes d'information souples, et ainsi de suite.
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La vision de quelques praticiens : les enjeux pour les professionnels des ressources humaines Les dirigeants-temoins que nous avons rencontres sont unanimes face a Ia na ture de la transformation que doit subir Ie role des professionnels des ressources humaines et des unites administratives a }'interieur desquelles ils evoluent. Ainsi, Us ont releve les trois tendances suivantes: • Ie renforcement du role de partenaire strategique; • l'equilibre entre la centralisation et la decentralisation des activites de GRH; • Ie renouvellement de Foffre de service pour qu'elle soit mieux ciblee et a valeur ajoutee.
16.3.1 Le renforcement du role de partenaire strategique Comme la litterature Ie mentionne depuis les annees 1980 (Guerin et Wils, 1997) et comme nous l'avons souligne anterieurement, la fonction «res sources humaines» est appelee a devenir de plUS en plUS strategique. Ulrich (1997) a martele, au cours de la derniere decennie, Ie discours d'un partena riat plus strategique de Ia direction des ressources humaines avec Ie reste de l'organisation. Comme nous l'avons vu dans Ie chapitre 1, la direction des ressources humaines peut se positionner selon deux axes (operationnel a
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court terme, strategique a long terme et centre sur les processus ou sur les per sonnes) dans quatre types de roles, a savoir: • un role de partenaire strategique (d'affaires); • un role d'agent de changement; • un role d'expert en procedure administrative; • un role de representant du personnel. D'apres la litterature scientifique (Galambaud, 2001 i Le Louarn et Wils, 2001; Ulrich, 1997; Wright, Dyer et Takla, 1999) et professionnelle (Effectif, 2001), il semblerait que les directions des ressources humaines ont encore de la difficulte a entrer dans la logique des roles de partenaire strategique et d'agent de changement. En effet, meme si ron a beaucoup documente cette transformation des roles des directions des ressources humaines, les energies deployees par les professionnels des ressources humaines se concentrent sou vent sur Ie soutien du fonctionnement operationnel de l'organisation et sur Ie respect de la legislation du travail. Des activites comme la paie, l'equite salariale, l'administration des regimes d'assurances, la sante et la securite du travail, la diSCipline, l'administration des conventions collectives, pour ne citer que celles-la, sont alors privilegiees au detriment d'activites de soutien des strategies d'affaires, de soutien de la gestion de projets complexes (techno logiques ou non), de changement organisationnel, de gestion de la releve, de conseil a la haute direction en matiere d'acquisition ou de fuSion, etc. Les forces convergentes de l'environnement que nous avons decrites dans Ie chapitre 2 ainsi que les enjeux lies aux ressources humaines pour les organi sations que nous venons de presenter rendent obligatoire une transformation majeure des roles des directions des ressources hUmaines. II ne s'agit plus de parler de cette transformation ou d'ecrire a son sujet, mais de passer a l'action et d'accelerer Ie rythme de transformation des rOles que jouent les profession nels des res sources humaines. Plus que jamais, les dirigeants d'entreprise ont besoin d'une expertise de haut niveau quand vient Ie temps d'analyser les enjeux des decisions de crois sance, de diversification, d'acquisition et de fusion. Ces gestionnaires sont conscients des incidences que de telles decisions ont sur la culture organi sationnelle, sur la conservation des talents, sur la stabilite requise pour mobi liser les troupes derriere une organisation qui redessine ses front1t:res. Les professionnels des ressources humaines sont appeles a poser les «bonnes questions» aux dirigeants afin de mettre l'accent sur l'indispensable cohe rence qui donne un sens au travail des employes. Par contre, iI devient diffi cile, voire impossible, pour les directions des ressources humaines de remplir cette fonction si les dirigeants d'entreprise ne leur donnent pas la possibilite de se positionner et de prendre leur place, d'etre des partenaires actifs dans les lieux ou se prennent les decisions strategiques. En contrepartie, les profes sionnels des ressources humaines doivent insister sur les enjeux d'affaires ainsi que sur la mise en a:uvre des strategies ou des programmes relatifs aux ressources humaines, et non seulement sur les enjeux humains et sur les enjeux de GRH. Pour ce faire, ils doivent ajouter de nouvelles competences
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I
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
dans leur portefeuille, comme Ia gestion strategique et Ia comprehension de l'evolution du secteur d'activite, Ia gestion du changement, la gestion budgetaire et financiere, l'analyse couts-benefices et Ia mesure du progres, l'influence «politique» ou la gestion de projet. Les directions des ressources humaines doivent egalement etre cap abIes de systematiser ces nouvelles competences et de les traduire dans des strategies davantage articulees autour des grands enjeux de I'organisation. Si elles passent a cote de tels defis, elies se confineront dans des roles secondaires et se borneront a effectuer des actions desincarnees et compliquees, ce qui ouvrira la porte toute grande a I'impartition aupres de consultants qui, eux, s'accapareront Ies responsabilites strategiques en matiere de GRH.
16.3.2 L'eql.l,i1ibre entre la centralisation et la decentralisation des activites de GRH Une des grandes preoccupations relatives a l'organisation du travail dans les services des res sources humaines touche a Ia decision de favoriser soit Ie prom de generaliste, soit celui de specialiste. 11 semblerait que Ia tendance actuelle consiste a decentraliser la GRH aupres de petites equipes de generalistes agiles et flexibles qui appuient les unites d'affaires, et particulierement les gestion naires operationnels qui voient augmenter leurs responsabilites et leur imputabilite en matiere de GRH. De fa\=on generale, ces equipes relevent directement des dirigeants de ces unites administratives. Pour ce qUi est de I' expertise specifique, elle prend deux formes. Premierement, n y ales profes sionnels experts localises dans des sieges sociaux qui agissent comme specia listes pour des enjeux comme Ies regimes de retraite et d'assurances, la sante et la securite du travail, l'expertise juridique, Ie developpement organisation nel ou la gestion du changement. Ces equipes d'experts, qUi ont une taille de plus en plus petite, se doivent d'avoir une vision strategique et de procurer de Ia valeur ajoutee a la gestion des ressources humaines. Les organisations ont besoin de ces experts qui peuvent retlechir aux solutions appropriees et deve lopper des contenus, des outils et des processus adaptes aux particularites de l'organisation. Deuxiemement, il y ales generalistes qui reuvrent dans des ser vices des res sources humaines decentralises et qUi doivent acquerir une exper tise specifique afin de servir de reference aupres des collegues de leur unite et d'autres unites d'affaires. Des entreprises les appellent des semi-specialistes, lesquels offrent des conseils en matiere de gestion du rendement et de plani fication de la releve. Les specialistes et les semi-specialistes ont avantage a tra vailler en reseau afin de stimuler l'appropriation des conseils et de l'expertise du siege social par les unites d'affaires.
16.3.3 Le renouvel1ement de l'offre de service Les professionnels des ressources humaines sont appeles a renouveler leur offre de service a l'interieur de l'organisation. Cette offre de service doit etre plus strategique de maniere a tenir compte de trois facteurs importants, soH Ie transfert des responsabilites aupres des gestionnaires operationnels, les technologies de l'information et l'impartition.
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I
les defis de la democratie au travail
Le transfert des responsabilites L'acteur-cle de la GRH est Ie gestionnaire (Ie cadre hierarchique ou Ie gestion naire operationnel), celui qui agit comme superieur immediat et qui doit atteindre ses objectifs de rendement, de production, de service a la clientele, de rentabilite, etc. Pour pouvoir realiser ces objectifs, Ie gestionnaire doit avoir la marge de manreuvre requise et les competences necessaires qUi lui permet tront d'organiser Ie travail, de placer les bonnes personnes dans les bons postes, de developper ses ressources humaines, de les evaluer, de reconnaitre leur travail, d'avoir une communication adequate, et ainsi de suite. Trop long temps, ces gestionnaires s'en sont remis a l'expertise des professionnels des ressources humaines et ont abdique leurs responsabilites en matiere de GRH. Oepuis quelques annees, de nombreuses organisations ont renverse la vapeur et accorde une importance particuliere au nouveau decoupage des responsa bilites en matiere de GRH et au developpement des competences en GRH. Les professionnels des ressources humaines dirigent desormais leurs efforts vers leur role de soutien-conseil aux gestionnaires et d'accompagnateur. Ainsi, its se substituent beaucoup moins aux gestionnaires quant a la gestion de leurs employes.
Les technologies de l'information La dotation est une activite qui se transformera completement en raison de l'impartition et des technologies de I'information. Par exemple, de plus en plus de sites Internet, par Ie biais d'organismes publics ou d'organismes prives, per mettent une meilleure circulation de l'information concernant Ie marche du travail et bouleversent les processus traditionnels de recherche et d'offre d'em plois. Un autre exemple de la revolution des technologies de l'information est sans aucun doute la popularite croissante des reseaux intranets, qui modifient du tout au tout la communication organisationnelle et Ia gestion de l'infor mation dans les entreprises. Qu'on Ie veuiIle ou non, les relations avec les employes et entre eux ne seront jamais plus les memes, a Fere du cyberespace. L'arrivee des progicieIs de gestion integree, des intra nets et des applications technologiques specialisees dans la GRH permettent aux professionnels de la fonction «ressources humaines» de se delester des taches administratives routinieres afin de se consacrer a des activites plus strategiques. La multipli cation des sites specialises de recherche d'emploi et de placement, l'emer gence du tt~letravail et de l'apprentissage electronique (e-learning) de meme que Ie deploiement d'intranets de nouvelle generation inspires par les appli cations de gestion de Ia relation client (customer relationship management) ne sont que quelques exemples de ce changement. La gestion des dossiers, Ie suivi des absences, la paie et les notes au personnel sont autant de taches qui peuvent etre automatisees. Plus encore, certaines de ces applications techno logiques peuvent fournir de l'information avaleur ajoutee aux professionnels des res sources humaines et aux gestionnaires, qui pourront ainsi prendre des decisions pertinentes en matiere de gestion du rendement, de gestion des competences, de gestion de Ia releve et des carrieres, etc. Cependant, l'expe rience des dernieres annees met en evidence Ie fait que ces applications ont
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I
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
du mal a livrer leurs promesses. Beaucoup d'entreprises n'ont pas obtenu les succes escomptes en matiere d'implantation de progiciels (Le Devoir, 2003). Les fonctionnalites sont souvent sous-utilisees et les systemes sont d'une telle complexite qu'ils deviennent ingerables, sans compter qu'ils necessitent excessivement de ressources. Les dirigeants ont aussi sous-estime les efforts et Ie temps requis pour procecter a la reingenierie des processus d'affaires en matiere de ressources humaines, reingenierie provoquee par l'implantation des progiciels de gestion integre. Bref, les technologies de l'information sont une occasion pour reconstruire les directions de ressources humaines autour des enjeux strategiques de l'organisation et pour professionnaliser davantage Ie metier de conseiller en ressources humaines. Peut-etre y aura-toil moins de personnes dans les directions des ressources humaines Ii l'avenir, mais ces per sonnes disposeront des outils pour intervenir de fa\=on plus strategique et plus significative. En definitive, il faut souhaiter que les organisations sortent gagnantes de cette nouvelle situation. L'impartition Apres avoir constate que certaines activites de GRH apportent peu de valeur ajoutee dans la vie d'une organisation et que l'administration de ces activites est couteuse en techniciens et en professionnels Ii l'interne, de plus en plus d'organisations ont pris la decision d'impartir de telles activites aupres d'en treprises specialisees (Saba et Menard, 2000). Vne enquete americaine indi quait en 2003 que les cinq principales activites de GRH imparties etaient, dans l'ordre, l'aide individuelle aux employes, la gestion des regimes de retraite, la gestion des regimes d'avantages sociaux (assurances), la formation et la paie. L'abandon de la prise en charge de telles activites qui, bien qu'importantes, sont Ii la peripherie des reels enjeux lies aux ressources humaines dans les milieux de travail, permet de degager des ressources et une certaine marge de manceuvre afin d'investir davantage dans des activites qui sont au cceur des enjeux rattaches it la prosperite et au progres de l'entreprise, it savoir Ie deve loppement organisationnel, Ia gestion du changement, Ie developpement des competences, Ia gestion de la releve et du personnel-cle, Ia remuneration giobale ainsi que la gestion des processus et de l'organisation du travail.
Conclusion La fonction « ressources humaines» et la direction des ressources humaines sont interpellees par la transformation continuelle des organisations et de la societe en general. Meme si, en theorie, on laisse entrevoir Ie passage d'une GRH traditionnelle a une GRH renouvelee, il reste que, dans la pratique, cette transformation bute contre une multitude d'embuches et que les racines d'une GRH plus operationnelle, administrative et technique sont encore tres presentes. Pour pouvoir etablir une comparaison avec la litterature sur ce sujet, nous avons demande it des dirigeants de grandes organisations quebe coises de preciser certaines tendances qui marqueront, durant Ies prochaines
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Partie V
I Les detis de la democratie au travail annees, l' evolution de Ia fonction «ressources humaines}} et du role des pro fessionnels a:uvrant dans les services des ressources humaines. Apres avoir fait une breve synthese des parametres du modele renouveU~ de la GRH, nous avons expose les tendances en matiere de GRH en fonction des enjeux pour l'organisation et pour les professionnels des ressources humaines. Sur Ie plan des enjeux pour l'organisation, cinq tendances ont attire notre attention, soit l'adaptation des organisations au bouleversement demogra phique du marche du travail, Ia Iegitimite de Ia GRH au moyen de pratiques liees it l'evaluation, la conformite de Ia gestion des ressources humaines avec l'environnement legal et reglementaire, l'etablissement d'une remuneration globale mieux adaptee au contexte et Ie developpement d'un corps de con naissances sur Ia GRH dans les PME. Sur Ie plan des enjeux pour Ies profes sionnels des ressources humaines, trois tendances importantes ont ete dece lees, soit Ie renforcement du role de partenaire strategique, l'equilibre entre Ia centralisation et la decentralisation des activites de GRH et Ie renouvellement de l'offre de service pour qu'elle so it mieux ciblee et it valeur ajoutee. De tels detis nous permettent de constater que Ies roles traditionnels de la direction des ressources humaines et des gestionnaires sont remis en question et que Ie renouvellement des roles entraine Ie developpement de nouvelles competences.
de revision
o Quels sont les defis du renouvelle
f) Decrivez les methodes d'evaluation
8 En quoi
o Quels
ment de la GRH?
une gestion internationale des ressources humaines viendra t-elle changer la pratique de la ges lion des res sources humaines?
. , Detinissez l'evaluation de la GRH.
o Pourquoi est-il important de mesu
rer la contribution de la GRH au succes de l'organisation?
" Quels sont les passages obliges entre l'evaluation de la GRH comme telle et Ie succes de l'organisation? CD QueUes sont les principales dimen sions de l'efficacite de la GRH?
de la GRH. sont les avantages et les inconvenients de ces methodes d'evaluation?
f) Pourquoi est-il si important de deve lopper un corps de connaissances specifiques it la GRH dans les PME?
([i) QU'entend-on lorsqu'on dit que les directions des ressources humaines doivent jouer un role encore plus strategique?
Q) En quoi l'offre de service des di rections des ressources humaines devra-t-elle evoluer au cours des prochaines annees? Pourquoi?
Chapitre 16
AUDET, M. (2000). «Technologies de l'information et de la communication et ressources humaines: un rendez-vous avec l'histoire)}, dans Nouveau contexte,
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I
Faire de la GRH une source de valeur ajoUtl<;e
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I
les defis de fa democratie au travail
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Chapitre 16
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Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
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Partie V
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Les detis de la democratie au travail
La reingenierie inquiete les syndicats 5
L'operation de restructuration gouver nementale se fait en catimini et selon un echeancier trop serre, ont denonce hier des syndicats de Ia fonction publique du Quebec. Le manque de transparence et Ia pre cipitation du Conseil du Tresor, qui mene Ie dossier, apparaissent d'autant plus importants que Ia machine de Ia reingenierie de l'F,tat fonctionne a plein regime depuis plusieurs mois et qu'eHe a franchi hier une premiere etape d'ana lyse dans les ministeres. «Nos craintes transcendent Ie dossier syndical, a affirme hier Michel Gagnon, president de I' Association des inge nieurs professionnels du gouvernement du Quebec. La demarche du gouverne ment se fait sans connexion societale. La reingenierie, ~a ne devrait pas seuIe ment Signifier, pour Ie gouvernement, se delester, ~a pourrait vouloir dire ameliorer les services en place. »
Dans un document interne du Conseil du Tresor (sous-secretariat a Ia reingenierie) concernant les obstacles pressentis sur la voie de la revision de FEtat, que rendait public hier Le Devoir; on souligne que Ie gouvernement fonce avec son projet sans avoir obtenu de consensus social sur Ies missions essen tieHes de I'Etat, donc sans adequation avec «Ies valeurs fondamentales de la societe quebecoise ».
De la bousculade Du cote du Syndicat des professionnels du gouvernement du Quebec (SPGQ), on s'inquU~te de FaIlure du processus, qui s'apparente de plus en plus a une bousculade. «Les fonctionnaires ne sont pas dupes. Ils veulent faire des reflexions serieuses, mais Us ne veulent pas etre entraines dans un tourbillon ou les enjeux ne sont pas clairs. Pour que l'operation soit credible, il faut que Ie gouvernement associe les artisans de la fonction publique. L'a b c du parte nariat, c'est que tu commences par ton capital a l'interne», a affirme Carole Roberge, presidente su SPGQ. Mme Roberge et son vis-a.-vis de I' Association des ingenieurs assurent ne pas etre retractaires a. une revision de la taille et du role de VEtat. Ils nklament toutefois une plus grande rigueur.
«Tout se fait en cachette, a soutenu Michel Gagnon. On ne connait pas les premisses qui sous-tendent la reinge nierie. Le gouvernement part de dogmes qUi n'ont pas ete demontres, a savoir que Ie prive coute moins cher, qu'il est plus efficace et qu'il est capable de tout. » M. Gagnon a fait valoir que Ie parte nariat prive-public ne peut etre consi dere comme une panacee. Les couts d'emprunt pour Ie secteur prive sont necessairement plus eieves, comme l'a demontre l'exemple du pont de la
5. K. Levesque, (, La n:'ingenierie inquiete les syndicats », Ie
])evoil~
1er octobre 2003, p. A3.
Chapitre 16
Confederation qUi relie Ie Nouveau Brunswick a l'tle du Prince-Edouard. «(:'a coute 4S millions de dollars de plus que si Ie gouvernement avait lui meme emprunte, comme I'a souligne la verificatrice generale », a observe M. Gagnon. Pour Ie Conseil du Tresor, les syndi cats demeurent l'un des principaux obstacles a la reingenierie. Les mesures de securite d'emploi, l'anciennete, les regles relatives aux contrats d'entreprise dans Ies reseaux et les droits de retour dans la fonction publique sont autant de problemes que devra affronter Ie gouvernement. II en va de meme des contraintes Iegislatives telles que Ies articles 4S et 46 du Code du travail.
I
Faire de la GRH une source de valeur ajoutee
(f) '-.!-J
o Les syndicats ont-ils raison de de
noncer ainsi Ie projet gouvernemen tal de reingenierie? Pourquoi ?
8 Quels
sont les grands dCfis, en matiere de res sources humaines, du chantier de la reingenierie de l'Etat ?
e Outre la reingenierie, quelles tendan ces en matiere de GRH observe-t-on dans les organisations publiques?
o Comment devraient se comporter les directions des ressources hu maines devant une telle transfor mation organisationnelle?
•
Index A
abri fiscal, 528
absenteisme, 676
accident(s) de travail, 113, 676
caracteristiques individuelles liees aux,
557
couts indirects des, 563
deces survenus a Ia suite d', 563
demandes d'indemnisation pour des,
563
enquete sur 1', 569
Hapes du suivi des cas d', 567
formula ire de declaration d', 568
prevention des, 558
accreditation
consequences de I', 614
unite d', 613
accreditation syndicale
processus d', 610
accueil, 227
achat d'actions, 436, 499
acquisition, 55
des ressources humaines, 182
externe des competences, 115
Acte
de l' Amerique du Nord britannique, 609
des manufactures de Quebec, 560
acteur{s)
collectif, 664
de la GRH, 19-29
sociaux,62
actions
achat, 436, 499
octroi, 499
option d'achat, 436, 499-500
activites de GRH, 24
centralisation, 681
decentralisation, 681
Adecco Personnel, 207
adoption de politiques de GRH, 35
affaires, 323
contexte, 423
affichage des postes, 199
agences de placement, 206-207
privees, 207
publiques, 206
agent
de bord, 210
de changement, 28, 680
de la paix, 630
agilite organisationnelle, 18
aide sociale, 524
Alcan, 213, 241
alcoolisme, 531
Alimentation Couche-Tard, 181
alliances, 142
American Compensation Association, 449
analyse
de l'organisation, 254
des besoins en formation, 252
des individus, 256
des mouvements internes, 108
des postes, 152-153, 190, 256
des taches, 256
du milieu de travail, 191
du roulement, 108
graphologique, 225
anciennete, 199
ancres de carriere, 294
annonces dans les journaux, 202
applications technoIogiques specialisees, 682
apprentissage, 262, 271
organisationnel, 286
approche
disciplinaire, 384-391
ethnocentrique, 666
sociotechnique, 132, 148
strategique en matiere de GRH, 18
systemique appliquee a Ia GRH, 15
approche institutionnelle du travail, 14
aptitudes, 195
administratives, 224
cognitives, 217
intellectuelles, 223
mecaniques, 224
physiques, 224
arbitrage de griefs, 403
arbitre
nomination d'un, 649
arret de travail, 635, 676
article, 59, 614
aspirations, 294
assignation temporaire, 562
Association(s)
accrectitees, 610, 627
mais inoperante, 613
•
Index
canadienne des relations industrielles 9
'
des salaries, 610 des sciences administratives du Canada, 9
patronales, 608
pour la prevention des accidents dans
les usines, 560
qui fait dHaut de deposer sa convention
collective, 613
assurance(s)
automobile, 524
collective, 526
invalidite, 519
maladie, 523
medicaments, 519
vie, 528
Assurance-vie Desjardins-Laurentienne, 539
Atelier d'usinage Aero, 118
attrition, 116
audit, 675
autoevaluation, 257
autoformation, 240, 248
automation, 666
automatisation, 105, 114
autonomie, 139
autorite, 30
de conseil, 33
fonctionnelle, 33-34
hierarchique, 24, 33
avantage(s)
complementaires, 418
concurrentiel, 5, 18, 294
avantages sociaux, 189,418,519
complementaires, 530
couts des, 541
t1exibles de style ,< cafeteria", 535
gestion des, 535-536
offerts par l'employeur, 525
personnalises, 677
prives, 525
avis disciplinaire, 393
B
B&Q, 114
bandes
de cheminement de carriere, 445, 448
salariales, 451, 446-447
elargissement des, 445-446
Banque
de France, 104
I'\ationale, 180, 236, 534
Royale, 267, 534
Bernier, 562
besoins, 294
en formation, 247,254
en ressources humaines, 104
biais, 348
perceptuels, 222
Bombardier, 116, 228, 269
Bourbonnais, 576
boycottage des produits de l'entreprise, 635
brainstorming, 640
briseurs de greve, 615
broadbanding, 445
Brody, 563
bureaucratie, 294
burnout, 527
buts de la gestion des ressources humaines, 6
C cadres hierarchiques, 25, 183
et la GRH, 23-24
Cafe Starbucks, 98
candidats, 183
candidatures spontanees, 206
capacite
a payer, 423
organisationnelle, 18
capital
intellectuel, 181,240
capitalisme «sauvage", 13
carriere, 189, 198
nomade, 289
Cartons Saint-Laurent, 257
Cascades, 241
Centrale des syndicats, 116
democratiques (CSD), 602, 607
de Quebec (CSQ), 602, 607
centres autonomes de profits et de couts,
142
cercles de qualite, 146
chaine de valeur, 72
Chambre de commerce du Montreal
metropolitain, 21
changement, 5]
organisationnel, 18, 22
Charte
de la langue franc;:aise, 187, 387
des droits et libertes de la personne, 185,
217, 223, 387, 397, 438, 609, 645
cheminements de carrieres, 291
Cisco Solutions, 205
classes d'emplois, 445
Index.
clients, 71
climat de travail, 250
coach,74
coaching, 240, 250,265, 327, 348, 350, 370,
371,668
Code
canadien du travail, 437
civil du Quebec, 387, 397, 645, 648
criminei, 397
du travail du Quebec, 387, 438, 609,
627, 628, 630, 648
coefficient de fideIite, 216
College Pro, 203
Comeau, 576
Comite(s)
d'assurance, 536
d'equite salariale, 443
patronal de negociation, 628
sectoriels, 443
Commission, 436, 490
d'appel en matiere de lesions
professionnelles, 561
de la sante et de la securite du
travail (CSST), 561
des droits de la personne, 217
des relations du travail, 612
royale d'enqu€ t e sur les accidents du
travail au Canada, 560
communication, 537
compagnies d'assurances, 404
competences, 96, Ill, 238, 289, 297, 445
de la main-d'ceuvre, 254
distinctives, 96
en supervision, 30, 31
provinciales, 642
competences-cles, 451
competitivite, 55
comportement(s), 23, 333-335, 338-339
deviant, 367
modeles, 267
conception
de la £Irme basee sur les ressources, 18
des postes de travail, 151
concertation, 63
concessions salariales, 592
conciliateur, 629
conciliation
obligatoire, 629
travail-famille, 64, 77-78
volontaire, 629
concurrence, 423, 424
conditionnement, 532
conditions de travail, 203, 481, 598-599, 626
determination des, 626
mecanisme de determination des, 626
conference-discussion, 266
conflits, 318, 633
de travail, 642
frequence des, 643
proportion du temps perdu en, 643
conge
d'assiduite, 419
de maternite, 525, 530
parental, 113, 529-530
pour des motifs personnels, 534
sabbatique, 118
congetiiement, 367, 370, 389-390
Congres du travail du Canada (CTC), 603
connaissances, 195
Conseil
central, 601
consultatif du travail et de la
main-d'ceuvre, 632
du patronat du Quebec (CPQ), 608, 630
considerations financieres, 559
constituantes multiples, 675
Constitution canadienne de 1982, 609
construction, 118
contexte d'affaires, 591
contrat social, 166-168
convention(s) collective(s), 96, 188-189,
199,262,387,403,538,627-628,644
administration d'une, 648
clauses des, 646
contenu type d'une, 645
de travail, 625
mecanismes d'application d'une, 646
modele organisationnel de gestion des
clauses de la, 648
negociation d'une premiere, 629, 632
renouvellement d'une, 629
convergence d'inter€ t s, 636
cooperation patronale-syndicale, 594
cote de rendement, 488
cotisation syndicale, 615
taux moyen paye par les employeurs,
565
versee par les employeurs, 564
Couche-Tard, 246
counselling, 302, 304, 370-371
entretien, 378-380
offert par les professionnels, 381
•
Index
officiel, 377
spontane, 377
couts de la main-d'reuvre, 118
credibilite du res pons able du service des
ressources humaines, 31
crise
du milieu de la vie, 301
criteres
de reussite professionnelle, 211
CSD,602,607
CSN, 602, 605
conseils centraux, 605
federations professionnelles de la, 605
syndicat local a la, 605
CSQ, 602, 607
CSST
cotisation a la, 566
depenses, 563
financement, 565-566
finances de la, 564
groupe I, 567
groupe 2, 567
indemnisation et readaptation, 565
indemnites
de deces, 566
de replacement du revenu, 566
relatives Ii des dommages corporels,
566
relatives a l'incapacite temporaire
ou permanante, 566
mandats de la, 565
missions de la, 565
prevention-inspection, 565
regime
a taux personnalise, 567
au taux de l'unite, 567
retrospectif, 567
reparation, 566
revenus, 563
taux
d'unite, 567
moyen des coUsations payees a la,
567
moyen provincial, 566
par secteur, 566
trois regimes particuliers de tarification,
567
erc, 602
culture, 22
d'entreprise, 191, 197
organisationnelle, 664
curriculum vitre, 219
cycle(s)
de vie, 58
economiques, 105, 109
D Dave Ulrich, 26
deces relies au travail, 556
decision(s)
d'embauche, 227
de selection, 184-185
de£icience du critere, 211
defis
de la competence, 37
de la democratie au travail, 37
des gestionnaires, 4
du rendement, 37
du renouvellement, 37
lies a la determination des conditions
de travail, 37
demande
de produits et de services, 423
demande de travail, 104
methodes subjectives de previSion, 105
methodes objectives de previSion, 106
demographie, 58-62
demonstration, 265
description
des postes, 191
realiste des postes, 210
detresse psychologique, 78
defi des organisations pour contrer la,
575
deux volets de la concurrence, 20
developpement
de carriere, 287
des ressources humaines, 93, 239, 258
organisationnel, 239, 247
Developpement des ressources humaines
Canada, 207
diagnostic, 17
Diesel Marketing, 531
differences entre la fonction «ressources
humaines» et Ie service des ressouces
humaines, 19
entre la gestion des ressources humaines
et les relations industrielles, 8
differend(s)
arbitrage des, 632
arbitrage possible du, 632
arbitre de, 632
Index.
mettant en cause des poliders et des
pompiers municipaux, 633
regime general d'arbitrage des, 632
direction
des ressources humaines, 183,249,663,
680
dirigeants
de l'organisation, 351
d'entreprise et la GRH, 20-23
discrimination, 185, 441
fondee sur Ie handicap, 226
indirecte ou systemique, 186
diversite culture lIe, 61
division du travail, 130
DMR,247
documenter Ie cas de l'employe difficile, 376
Domtar, 227
dotation, 181-182
Dow Jones Sustainability Index, 669
drive system, 12
droit(s)
it l'egalite, 111
de la personne, 226
de refuser d'executer un travail, 561
du travail, 14
Dunlop, 14
Dyer, 28
dysfonctions, 135
E ecart mini-maxi,441
echelles de notation, 331
echelle salariale, 440, 436, 446, 439
point milieu, 439
point de contr61e, 439
chevauchement, 439
ecole elargie des relations humaines, 14
economie
immateriel, 54
savoir,54
effet
de contraste, 349
de halo, 349
de l'information recente, 349
discriminatoire, 186
efficacite, 132, 671
de la GRH, 670
organisationnelle, 670
efficience, 132, 671
e-fonnation, 267
elargissement des taches, 150
e-leamig, 267
Elton Mayo, 14
embauche, 113
empIoi(s), 69
it predominance feminine, 442
it predominance masculine, 442
dasses d', 439, 440
co mite d'evaluation des, 432
de longue duree, 288
evaluation des, 432
partage, 533
processus d'evaluation des, 432
temporaire a temps partiel, 533
emplois-des, 439
emplois-reperes, 432, 439
employabilite, 286, 664
employes, 166
difficiles, 363, 365, 366, 373
problemes, 365
syndiques, 427
temporaires, 201
employes-des, 292
employeur de choix, 242,520
empowennent, 65
enfants a charge, 533
engagement, 137, 198
enjeux d'affaires, 680
enjeux d'ordre
distributif, 636
integratif, 636
enquete
de remuneration, 430
salariale, 430
enrichissement des taches, 119, 150
enseignement cooperatif, 205
entrepreneurs independants, 610
entreprise(s)
culture d', 522
non syndiquees, 593
taille de I', 426
entretien
disciplinaire, 391-393
entrevue, 152
de selection, 186, 221
environnement, 51, 292
de travail favorisant des habitudes de
vie saines, 574
externe, 101, 103, 109, 351
epuisement professionnel, 78, 113, 527, 575
equilibre travail-famille, 300, 533
•
Index
equipes, 328, 493
de travail, 145-150
autogerees, 29, 74, 147
semi-autonomes, 147-149
equite, 665
collective, 428, 436
du processus de gestion de la
remuneration, 428, 437
en emploi, 110
en matiere d'emploi, 202, 442
externe, 428, 536
individuelle, 428, 436, 440
interne, 428, 432
legale, 428, 437
principes d', 427
salariale, 435
demarche d', 444
erreur, 348
centrale, 349
d'attribution, 349
de clemence, 349
de severite, 349
de similarite ou de ressemblance, 349
ESl Technologies, 208
etablissement d'enseignement
et de formation, 204
etalonnage, 674
Etat, 66
etude de cas, 225, 266
etudes specialisees en GRH, 7
evaluation, 17
de la formation, 269
du potentiel, 108
du rendement, 242, 317-354
multisource, 242
evaluation du rendement, 189, 329
entretien, 341-342
formulaire, 329
sources, 344-345
evaluer les cadres, 31
evenements speciaux, 203
examens
genetiques, 225-226
medicaux, 225
exercice du courrier, 225
eXigences professionnelles normales, 185
expert en procedure administrative, 680
expertise, 426
expose, 266
extrapolation, 106
F facteurs de succes, 323
d'evaluation des emplois, 435
famille,64
FAT-COl, 602
Federation, 602
canadienne de l'entreprise independante, 196
de natation du Quebec, 192-194
des infirmieres et infirmiers du Quebec, 199
des travailleurs et travaiUeuses du quebec (FTCU, 602, 603
FedEx, 257, 264
feminisation du marche du travail, 61
fermetures
d'usines, 115
temporaires, 118
fidelite, 216
filiere
d'emplois, 305
professionnelle, 305
fiscalite, 424
flexibilite, 18, 74
fonctionnelle, 74
numerique, 74
foires d'embauche, 203
fonction
publique, 242
res sources humaines, 6
forces et faiblesses, 96
fordisme, 136
formation, 114, 188, 238, 250
continue, 75, 236, 239, 244
sur mesure, 250
dans Ie milieu de travail, 264
de base, 244
de speciaJistes des relations industrielles, 8
en entreprise, 236
«en plein aif», 269
hors du milieu de travail, 264
initiale, 245
professionnelle, 238, 609
qualifiante, 75
virtuelle, 267
formulaire
de demande d'emploi, 217
d'evaluation, 331
du rendement, 332
Index.
formulation des strategies, 17
fourchettes
salariales, 436, 440
France Telecom, 116
FTQ. 602
caractere particulier de la, 604
structure interne de la, 604
fusions, 55
G gains mutuels, 168-169
garderie, 533
en milieu de travail, 534
gardes-chasse, 630
gardiens de prison, 630
gel
de l'embauche, 115-116
des salaires, 118
generaliste, 681
generation Y, 59, 75
geocentrique, 666
gestion
a flux tendu, 134
centree sur l'individu, 664
culturelle, 664
de la diversite, 669
de la main-d'ceuvre dans l'industrie de
la construction, 609
de la releve, 667
de la remuneration, 420, 427-428
de projet, 168
des carrieres, 119,286, 447
des connaissances, 240, 286
des dossiers, 682
des salaires, 421, 432
du stress, 574-575
evaluative et informatisee, 665
internationale, 666
par competences, 238, 665
par les resuItats, 72
par objectifs, 337, 339
participative, 664
mecanismes de, 596
previsionnelle, 93
«proactive» ou preventive des
ressources humaines, 617
strategique, 681
des ressources humaines, 664
travailleurs experimentes, 668
gestion du rendement, 317-354
des employes, 317
des membres de leur equipe, 24
processus, 322
systeme de, 348,354
utilite, 320-322
gestionnaires, 165-166
goal or sucess sharing plan, 499
Google, 181
Gosselin, 18
gradation
de la demarche disciplinaire, 388
graphologie, 226
greve
droit de, 615, 629
vote de, 630
illegale, 630
briseurs de, 630
unite de negociation, 630
GRH
adaptee au contexte d'affaires, 20
confonnite de la, 677
couts de conformite de la, 677
dans les PME, 678
evaluation de la, 669
paradigme
renouvele, 662
traditionnel de la, 662
renouvellement de la, 662
griefs, 260, 615, 647
arbitrage des, 628, 648
arbitre de, 647, 649
procedure de reglement des, 648
groupe Danone, 534
groupes
corporatifs, 601
d'ameIioration, 146-147
de projet, 147
de travail, 493
semi-autonomes, 74
H habiletes, 195
harcelement, 615
en milieu de travail, 402
psychologique, 399-400
sexuel, 115
haute direction, 165
hauts potentiels, 292
•
Index
heures supplementaires, 113, 524-525
Home Depot, 180
horaire(s)
a la carte, 533
de travail flexibles, 534
variable, 156, 533
Hutchison Avenue Software, 197
Hydro-Quebec, 111
immigration, 61, 107, 110
impartition, 75, 142, 538, 666, 682-683
en matiere de gestion des salaires, 452
importance
de la qualite des ressources humaines et
des systemes, 18
strategique, 32
symbolique, 32
impot, 426
indicateurs, 674
Industrial Relations Systems, 14
industrie, 423-424
du textile, 90
infirmieres, 110
informatique, 537
informatisation, 105
iniquite, 598
innovation, 98, 189, 197
inspecteurs d'autoroutes, 630
Institut
canadien d'information sur la sante, 93
de recherches psychologiques, 226
instruments de selection, 214, 217
integration, 304
des nouveaux employes, 227
intensification du travail, 139
interdependance entre les personnes et les
emplois, 7
intergenerationnel, 135
international union, 602
Internet, 57, 205, 537
intervention
aupres des employes difficiles, 374
intranets, 682
invalidite, 524
de courte duree, 526
de longue duree, 527
inventaire
de personnalite de l'Universite de
Californie, 224
des effectifs, 108
des ressources humaines, 108, 200-201
investissement
al'etranger, 113
jeu
d'entreprise, 266
de rOle, 225, 266
jiu-jitsu, 641
Jouets Bojeux, 205
journal, 153
de l'entreprise, 199
jours feries, 524, 529
juridiction
arbitrale, 649
jurisprudence arbitrale, 398
juste-a-temps, 139
justice
interpersonnelle, 437
K kaizen, 147
knowledge management, 240
L La Presse, 600
Labelle, 28
leadership, 667
fort axe sur la communication, 22
lecture dirigee, 266
legislateur, 67
legitimite, 671
lesions les plus frequentes chez les jeunes, 558
lesion(s) professionnelle(s)
absence consecutive a une, 568
depenses dites de reparation des, 564
presomption de, 569
liberalisme economique, 559
liberte d'association, 610
Iibre-echange, 425
licenciements, 115
!ignes de piquetage, 635
lock-out
droit de, 629
unite de negociation, 630
logiciels, 352
Index.
Loi(s), 68, 386,426, 437, 452
cannadienne sur les droits de la
personne, 609
concernant la responsabilite des
accidents dont les ouvriers sont
victimes, 560
du travail, 68
et la jurisprudence en matiere de
violence au travail, 397
et les reglements, 424
facilitant Ie paiement des pensions
alimentaires, 438
federaies du travail, 609
sur l'acces a I'egalite, 111
sur 1a fonction publique, 630
sur 1a protection des renseignements
personnels dans Ie secteur prive,
188, 220
sur la sante et la securite du travail, 397,
438, 561, 645
sur l'equite salariaIe, 441-444
sur Ie regime de negociation des
conventions collectives dans Ies
secteurs publics
et parapublics (L.R.Q.), 628
sur Ie Regime de rentes du Quebec, 438
sur Ie regime syndical applicable a la
Surete du Quebec, 610, 630
sur Ies accidents du travail et les mala
dies professionnelles, 387, 438, 561
sur les decrets de conventions
collectives, 438, 609
sur les impots, 438
sur les normes du travail du Quebec,
386, 397, 419, 437, 609, 615
sur l'exercice des droits des personnes
handicapees, 187
M main-d' ceuvre
etat de l'offre de, 423
temporaire, 113
Maison Simons, 181
maladie presumee professionnelle, 568
maladies professionnelles, 568
sans presomption, 568
presomption de, 569
formulaire de declaration, 568
deces survenus a la suite de, 563
demandes d'indemnisation pour des,
563
etapes du suivi des cas de, 567
mandat, 634
manque
de temps, 25
d'expertise des cadres hierarchiques, 25
manuel de l'employe, 227
maraudage, 613
marche de reference, 678
marche
de l'emploi, 201
des biens et des services, 103
du travail, 62, 103, 293
externe, 293
interne, 293
Massachusetts Institute of Technology, 594
masse salariale, 117-118, 421, 245
McDonald's, 197
medicaments, 523, 526
meilleures pratiques, 674
membres de 1a SUrete du Quebec, 630
menaces et opportunites, 96
mentor, 302
mentorat, 240, 304, 668
Mercer, 118
Merck Frosst, 530
mesure(s)
administratives ou disciplinaires, 24
de rendement, 324
disciplinaire, 386, 367, 403
mesures correctives, 570
methode(s)
couts-benefices, 676
Delphi, 105
de recrutement, 209
des points et des facteurs, 432
d'evaluation de Ia GRH, 444, 674
du tableau de bord, 676
financieres, 676
qualitatives, 674
quantitatives, 674
methodes d'evaluation des emplois
classification des emplois, 433
comparaison avec Ie marche, 433
methode des points et des facteurs, 433
rangement des emplois, 433
methodes d'evaluation du rendement, 331
approche mixte des resultats et des
comportements, 338-341
competences, 334-336
realisation des resultats, 336
mi-carriere, 304
Michelin, 116
•
Index
Microsoft, 181, 203
ministere du Travail, 644
Minnesota Multiphasic Personality
Inventory (MMPI), 224
mise en ceuvre des strategies, 17
mises a pied temporaires, 118
mission, 325
mobilisation, 471
mobilite internationale, 422
modele(s)
allemand, 139-140
cooperatif, 77
d'alignement,98
d'estimation du pouvoir de negociation,
636
d'organisation du travail, 136
dit de l'entreprise ouverte, 34
feminins, 667
japonais, 139
suedois, 140
mondialisation, 54, 291
des marches, 425
motivation, 472
a apprendre, 257
a la vente, 226
des cadres, 351
intrinseque, 475
mouvements
des relations humaines, 14
internes, 112, 115
mutation, 112, 183
N national union, 602
Natrel, 245, 570
negociateur
qualites d'un bon, 638
negociation(s)
a gains mutuels, 639
avis de, 628
centralisation des structures de, 642
collectives, 14,626-627,634,636
decentralisation des structures de, 642
des contrats de travail, 29
d'une convention collective, 25
gagnant-gagnant, 639
intraorganisationnelles, 628
integrative, 641
interorganisationnelles, 628
objet de la, 640
pouvoir de, 628, 633-634
raisonnee, 639, 641
sectorielle, 628
structures de, 633
sur les interets, 639
negociation collective, 538, 626-627
aspect legal d'une, 628
modele traditionnel, 637
phase de denouement, 638
phase d'intensification, 637
phase d'ouverture, 637
succes du processus de, 651
negocier «de bonne fob, 627
niveaux de decisions
inferieurs, 594
intermediaires, 594
superieurs, 594
Nokia, 116
nominations, 201
norrnes de rendement et de comportement,
387
note de service, 200
nouveau regime de reparation des lesions
professionnelles, 561
nouvelles technologies, lOS, 134
nutrition, 532
o objectifs, 339
d'apprentissage, 259, 261
strategiques, 323
obligations patronales, 578
observation, 152
octroi d'action, 436
offre
de service, 681
de travail, 107-110
exteme de travail, 109
interne de travail, 107
optimiser
Ie transfert des apprentissages, 273
les apprentissages, 272
Ordre
des conseillers en ressources humaines
et en relations industrielles agrees
du Quebec, 9-10
des ingenieurs du Quebec, 203
organigrammes de remplacement, 303
organisation
apprenante, 75, 240
qualifiante, 286
scientifique du travail, 13
Index.
organisation du travail, 130-132, 243, 255
qualifiante, 138
nouvelle formes d', 591
organisation syndicale, 599
motifs d'adhesion a une, 597
orientation, 228
P PAE, 381
paix syndicale, 593
paritarisme, 561
parrainage, 304
partage
des gains de productivite, 436, 498
du travail, 117
partenaires
d'affaires, 27, 96, 120
strategiques, 27, 679-680
partenariat, 30, 63, 77
patronal-syndical, 77, 591
participation, 664
aux benefices, 436, 494
parties
preparation des, 633
penurie
de main-d'CEuvre, 93
de res sources humaines, 110
qualitative, 111, 114
quantitative, 110, 112
perfectionnement, 239
performance organisationnelle, 133
personnalite, 195, 225
traits, 332, 333
personnel
competent, 454
de recherche et developpement, 430
expatrie, 422
syndique, 425, 441
perspective
capitaliste et liberale, 12-13
dans Ie domaine de la GRH, 12-18
institutionnelle, legale et politique, 14-15
psychologique, 12, 14
scientifique ou techniciste, 12-13
strategique, 16
Perusse, Michel, 592
petites et moyennes entreprises (PME), 196
pharmacies Jean Coutu, 532
philosophie de gestion, 227, 294
placement electronique, 207
plafonnement
de la carriere, 299
plainte, 626
plan
d'action, 379-380
de carriere, 293
de formation, 258
planification
de la carriere, 287
de la releve, 108, 303
des carrieres, 301
des res sources humaines, 90, 93
du remplacement, 108
du travail, 324
operationnelle, 242
des ressources humaines, 91, 101
strategique, 95
des ressources humaines, 91, 242
pluralisme syndical, 643
PME, 55, 196, 521, 538
policiers, 629
politique(s), 30
de GRH, 34
de l'entreprise, 441
de retraite, 668
en matiere salariale, 439
polyvalence, 142
pompiers, 629
potentiel, 199, 330
pratiques
d'aide a l'equilibre travail-famille, 189
de gestion, 598
de reconnaissance, 486
pratiques interdites, 611
domination, 612
entrave, 612
financement, 612
ingerence, 612
recours a tout moyen de contrainte, 612
precarisation du travail, 70
precticteurs, 213
premiere impression, 349
preparation
court terme, 633
de la releve, 247
long terme, 633
presence
de professionnels des ressources
humaines, 25
syndicale, 426, 427
prestations d'invalidite, 526
Index
prevention
primaire, 571
programmes, 556
secondaire, 571
tertiaire, 571
prime(s), 436, 489
d'eloignement, 530
d'equipe, 436
d'inconvenients, 418
privatisation, 75
probl~mes particuliers lies a la supervision, a
l'lmproductivite ou au climat de travail
25 '
procedure a texte unique, 641
processus, 72
d'affaires, 143
de dotation, 189
de gestion strategique, 17
d'enquHe et d'analyse, 569
de planification strategique, 3D, 32
production
allegee, 134, 139
a valeur ajoutee, 72
juste-a-temps, 134
productivite, lOS, 113, 522, 676
profession nels, 451
des ressources humaines, 96
et de la GRH, 24-25
profil des compHences, 190, 195
progiciels de gestion integree, 682
programme(s)
d'acces a l'egalite, lIS, 187
d'accueil, 227
d'aide aux employes, 381, 531, 576
de mieux-Hre, 532
de prevention, 564
d'equite salariale, 25
de retraite anticipee, 115
d'orientation, 228
progression verticale, 289
projection des tendances par indexation, 106
Projet Minerva, 578
promotion, 112, 182
interne, 454
Provigo, 236
punition,477
Q qualite
de la GRH, 20, 23
de la vie, 522
au travail, 139
totale,244
questionnaire, 152
questions
comportementales, 221
de mise en situation, 221
R
rapport sociaux, 131, 165
rapports collectifs
nouveau contexte des, 591
rapports collectifs de travail, 594
encadrement jurldique des, 608
ratio
de selection, 209
historique moyen, 31
rationalisation des effectifs, 71
readaptation
droit a la, 561-562
recherches en GRH, 9
recompenser, 472
recompenses, 480
extrinseques, 475
non pecuniaires, 475, 485
pecuniaires, 475
reconnaissance, 345, 448, 480
du rendement, 477
non monetaire, 470
par les pairs, 674
recrue, 229
recrutement, 182, 196
de cadres, 207
de la main-d'ceuvre, 239
externe, 113, lIS, 197-199, 201
international, 210
interne, 197-199
redimensionnement (downsizing), 116, 134
reduction
des effectifs, 22, 104, 115-116
des salaires, 118
du temps de travail, 116
force de travail, 115
references, 220
regime d'indemnisation, 560
nouveau, 560
et d'assurance responsabilite sans egard
a la faute, 560
regime
bases sur Ie rendement collectif, 500-501
Index.
collectifs de remuneration variable, 436
d'apprentissage, 240
de reconnaissance ou de remuneration
variable, 436, 503
des conditions generales de travail, 609
des normes du travail, 609
regimes bases sur Ie rendement
boursier, 494
comptable, 494
regimes collectifs
acourt terme, 493
a long terme, 493
regimes de retraite
acotisation determinees, 528-529
a prestations determinees, 529
regime de partage
des gains de productivite, 495-497
du succes, 495-497, 499
regime de participation
a la propriete, 495-497
aux benefices, 495-497
regIe dite des droits residuaires, 648
reingenierie des processus, 13, 143
d'affaires, 683
relation(s)
appropriees avec les autres services, 24
d'emploi, 162
humaines, 14
industrielles, 8
patronales-syndicales, 559, 591
relation(s) du travail, 167, 626, 648
activites propres a un systeme de, 594
modele traditionnel, 593
regime canadien, 608
specialistes d'un service des, 646
strategies de, 594
systeme des, 593
relativite salariale, 442
releve, 108
remue-meninges, 640
remuneration, 189, 482
ala piece, 491
basee sur les competences, 445, 449
competitivite de la, 428
directe, 418
du temps chome, 529
gestion de la, 420, 427-428
globale, 418, 519, 677
indirecte, 418, 520
politiques de, 429
variable, 418, 486, 502
remuneration basee sur Ie rendement
collectif, 493
de l'equipe, 493
individuel, 486-492
rendement, 330
normes de, 337
recompenser, 345
rendement individuel
determinants, 329
rencontres d'information, 203
renforcements, 475
Reno-Depot, 180
reorganisation, 130
du travail, 113
representant du personnel, 680
ou un intermediaire entre les employes
et les cadres, 27
representation syndicale
au sens du Code du travail, 610
reprimande
ecrite, 389
verbale, 388
requHe en accreditation, 612
reseaux,57
informels, 297
responsabilisation, 65, 73
responsabilite(s), 141
de l'employeur, 560
en matiere de GRH, 20, 23
sociale, 522
familiales et professionnelles, 29
res semblances, 8
ressources humaines
avantage concurrentiel, 20
comptabilisation des, 676
direction des, 673
plan de, 672
restructuration, 104, 151
resultats, 338-339
RH,670
retards, 676
retrait, 528
progressif, 113
retour au travail
droit au, 561-562
retrait preventif, 561
droit au, 561
retraite, 107,299, 306,524,537
anticipee, 116, 529
caisse de, 529
comite de, 529
•
Index
preparation 11 la, 537
progressive, 529
retroaction, 72
revenu
protection du, 524, 526
revolution
des ressources humaines, 16
industrielle, 559
roles, 141
roles des professionnels
de la GRH, 6
des ressources humaines, 26
rotation des postes, 265
roulement, 676
S
salaire(s), 418, 422
au merite, 487-488
gestion des, 421, 423
salaries
«actuels et futurs» vises par
l'accrectitation, 644
au sens du contrat de travail du Code
civil,610
sante, 532
physique, 354
psychologique, 354
sante au travail
promotion de la, 578
sante et securite
comites de, 556
sante et securite du travail
activites de gestion relatives 11 la, 567
comites de, 573
conception integree, 572
efficacite des entreprises en matiere de,
573
facteur de succes dans la gestion preven
tive des problemes de, 571
formulation et diffusion d'une politique
formelle de gestion de la, 572
suivi administratif des dossiers de, 570
sante mentale au travail
problemes de, 559
sante phySique et mentaIe
deterioration, 559
SAS, 116
satisfaction
11 l'egard des activites de dotation, 188
au travail, 523
des «clients», 270
Saturn, 247
savoir-faire, 225
savoirs tacites, 668
scolarite, 63-64
scrutin secret, 614
secret entourant Ie rendement des
organisation, 23
secteur(s)
d'activite economique, 423, 424
de la haute technologie, 429
de la sante et des services sociaux, 564
industriels, 441
municipal, 424
non syndiques, 626
prive, 424
public, 424, 635
tertiaire, 69
securite
finandere, 528
selection, 182,211
semaine
comprimee, 155-156,533
de travail rectuite, 116
normale de travail, 116, 524
sentence arbitrale, 632, 649
sentiment d'urgence face aux concurrents, 23
series chronolOgiques, 106
service(s)
11 la clientele, 92, 523
de garde en milieu de travail, 534
des ressources humaines, 19
decentralises, 681
Shell, 241
sida, 227
sites de recrutement du reseau Internet, 206
Smurfit-Stone, 245
socialisation, 228, 304
Societe Conseil Mercer, 196
soins
dentaires, 526
de sante, 526
hospitaliers, 523, 526
solution de repli, 641
sondage
d'opinion, 674
eIectronique, 536
Sonnenstuhl, 576
soud de la coherence et de l'equite dans les
dedsions de GRH, 35
sous-traitance, 75, 114, 142
specialistes, 451, 681
Index.
spot bonus, 484
stages, 204
strategie(s), 16, 17, 254, 323
d'affaires, 94-95, 189
de l'organisation, 27
d'agent libre, 97
d'engagement, 97
de GRH, 17
de l'analyseur, 98
de reduction des coilts, 197
directrice, 94
du detenseur, 98
du prospecteur, 98
fonctionnelle, 94, 97
formulation, 96
mise en ceuvre, 96-97
organisationnelle, 98
paternaliste, 97
patronales, 594 (Voir aussi strategies
patronales face aux syndicats)
realisable, 95
secondaire, 97
souhaitable, 95
strategie de domination
par l'innovation, 101
par la qualite, 99
par les coilts, 99
strategies patronales face aux syndicats
acceptation, 596
affrontement ou opposition, 596
evitement, 596
strategos, 16
stress, 78, 139
structure(s)
en reseau, 142
matricielle, 147
mecaniste, 141
organique, 142
organisationnelle, 141
salariale, 438-441, 450
syndicales, 600
suivi du rendement, 326
supervision, 354
des employes, 24
surplus
de main-d'ceuvre, 93
qualitatif de ressources humaines, 115,
119
suspension, 389
syndicalisation, 443, 593
employes du secteur de la construction,
598
massive du secteur public au Quebec,
598
taux de, 594, 625
au Quebec, 596
syndicalisme
adhesion au, 599
syndicat(s), 29, 166, 189,351,403,424,426,
597
caract ere representatif du, 614
de metiers, 601
financement du, 615
independants, 602, 607
industriels, 601
local, 600
obligation de negocier avec des, 626
preoccupations des, 591
recours collect if contre un, 630
systeme(s), 15
d'education, 109
de gestion
des carrieres, 199, 307
du rendement, 353
integre, ou ERP, 92
d'information
de gestion des ressources humaines,
666
en ressources humaines (SIRH), 120,
199
de GRH, 5,15
informatique des ressources humaines,
201
informatises d'evaluation du rende
ment, 352
ouvert, 15
T
tableau
de bord, 324
de remplacement, 108,201
taux
de ch6mage, 109
de natalite, 109
de IOulement, 107
Taylor, 130
taylorisme, 135, 136, 145
technique
de formation, 265
•
Index
technologies, 56-58
de l'information, 240, 665, 682
et de la communication (TIC), 267
tel€~activites} 57
telephonistes, 113
teletravail, 157-158
temps
chOme,419
de travail, 157
partiel, 113
plein, 113
testes)
d'aptitudes, 223-224
de centres d'interet, 225
de depistage
de drogues, 225
du VIH, 225
de personnalite, 224
de selection, 223
d,honnetete, 225
personnel WonderIic, 223
situationnels, 225
Texas Instruments, 229
theorie(s)
de l'apprentissage, 271
de l'evaluation cognitive, 474
des attentes, 473
toxicomanie, 531
Toyota, 190
traitement differe, 118
transfert
des apprentissages, 248, 271-273
des connaissances, 76
des responsabilites, 682
transformation de I'organisation du travail
facteurs critiques, 163
legitimite, 163-164
travail, 65, 290
a domicile, 70, 533
a duree determinee, 70
a temps partiel, 70, 117
amenagement du temps de, 535
atypique, 70, 158
autonome, 70
Climat de, 559
competence federale en matiere de, 643
interimaire, 70
normes minimales de, 524
organisation du, 424, 535
partage, 70
prestation de, 519
prescrit, 132
travailleurs
autonomes, 539
de moins de 25 ans, 558
tribunaux administratifs
financement des, 564
tribunaux de droit commun, 650
Trice, 576
trois types d'autorite, 32
u Unilever, 213
Union des producteurs agricoles, 208
unite d'accreditation, 443, 627
Universite
de Montreal, 227
de Sherbrooke, 600
du Quebec, 237
utiIite
des politiques de GRH, 35
d'un instrument de selection, 217
V
vacances, 524, 529
valeurs, 65, 323, 664
validite, 221
conceptueIle,214
concomitante, 214
de contenu, 214
d'un instrument de selection, 214
predictive, 215
verification des references, 220
victimes d'actes criminels au d'actes de
violence, 577
vie
familiale, 298, 300
personnelle, 298, 299
privee, 225
professionnelIe, 298
vieillissement, 59, 196
de la population, 90, 667
VIH,226
violence au travail, 395, 398, 400-401, 578
formes, 395
programmes de lutte c~ntre la, 576
violence (physique et psychologique)
prevention des manifestations de, 577
virtualisation, 134
virtualite, 57
vision, 323 325
Volkswagen, 116
volume de travail, 118