Les nouvelles proximités urbaines
GÉOO1~APHmS EN LIBERTÉ sous la direction de Georges Benko GÉOGRAPHIES EN LIBERTE est une collection internationale publiant des recherches et des réflexions dans le domaine de la géographie humaine, conçue dans un sens très large, intégrant l'ensemble des sciences sociales et humaines. Bâtie sur l'héritage des théories classiques de l'espace, la collection présentera aussi la restructuration de cette tradition par une nouvelle génération de théoriciens. Les auteurs des volumes sont des universitaires et des chercheurs, engagés dans des réflexions approfondies sur l'évolution théorique de la discipline ou sur les méthodes susceptibles d'orienter les recherches et les pratiques. Les études empiriques, très documentées, illustrent la pertinence d'un cadre théorique original, ou démontrent la possibilité d'une mise en oeuvre politique. Les débats et les articulations entre les différentes branches des sciences sociales doivent être favorisés. Les ouvrages de cette collection témoignent de la diversité méthodologique et philosophique des sciences sociales. Leur cohérence est basée sur l'originalité et la qualité que la géographie humaine théorique peut offrir aujourd'hui en mettant en relation l'espace et la société.
Déjà parus: 26. Villes et régions au Brésil L. C. DIAS et C. RAUD, eds., 2000
27. Lugares, d'un continent l'autre... S. OSTROWETSKY,
ed., 2001
28. La territorialisation de l'enseignement supérieur et de la recherche. France, Espagne et Portugal M. GROSSETTI
et Ph. LOSEGO, eds., 2003
29. La géographie du XXIe siècle P. CLAVAL,
2003
30. Causalité et géographie P. CLAVAL, 2003
31. Autres vues d'Italie. Lectures géographiques d'un territoire C. V ALLA T, ed., 2004
32. Vanoise, 40 ans de Parc national. Bilan et perspectives L. LASLAZ,
2004
33. Le commerce équitable. Quelles théories pour quelles pratiques? P. CARY, 2004
34. Innovation socioterritoriale et reconversion économique: le cas de Montréal J.-M. FONT AN, J.-L. KLEIN, D.-G. TREMBLA Y, 2005
35. Globalisation, système productifs et dynamiques territoriales. Regards croisés au Québec et dans le Sus-Ousetfrançais. R. GUILLAUME, ed., 2005 36. Industrie, culture, territoire S. DA VIET,
2005
37. Chroniques de géographie économique P. CLAVAL,
2005
38. Les clusters de l'aéronautique. EADS, entre mondialisation et ancrage territorial V. FRIGANT,
M. KECHIDI,
D. TALBOT,
2006
39. Géographie de l'Espagne R. MENDEZ, ed., 2006
40. Géographies et géographes P. CLAVAL,
2007
41. Quelles proximités pour innover? A. RALLET,
A. TORRE, eds. 2007
42. La politique introuvable? Expériences participatives à Recife P. CARY, 2007
43. Les nouvelles proximités urbaines A. RALLET,
A. TORRE, eds. 2007
Sous la direction de ALAIN RALLET ET ANDRE TORRE
Les nouvelles proximités urbaines
L 'HARMATTAN
Couverture: Manel Marzo-Mart, La porta, 1993 (bronze, 28x18x12).
(Ç) L'HARMATTAN,
2008
5-7, rue de l'École-Polytechnique;
75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com harmattan 1@wanadoo. fr diffusion .harmattan@wanadoo.
ISBN: 978-2-296-04572-9 EAN : 9782296045729
fr
SOMMAIRE
Introduction Pourquoi les villes existent-elles? Mérites et limites de la proximité urbaine Alain Rallet, André Torre
7
Partie I Où commencent et finissent les villes? Chapitre I Les modes de vie périurbains François Madoré
15
Chapitre II Les Nouvelles formes urbaines: entre multipolarisation et suburbanisation des emplois. Le cas de la Communauté d'Agglomération Dijonnaise (1990 - 1999) Catherine Baumon!, Françoise Bourdon
33
Partie II Le processus de métropolisation Chapitre III Varsovie, une nouvelle métropole Lise Bourdeau-Lepage
73
Chapitre IV La dynamique urbaine des régions métropolitaines brésiliennes
Mauro Borges Lemos, Sueli Moro, Elenice Biazi, Marco Crocco 89 Chapitre V Globalisation et urbanisation en Chine Cécile Batisse, Jean-François Brun, Mary-Françoise Renard
119
Partie III Les villes productrices de richesse
Chapitre VI Entreprises, acteurs immobiliers et acteurs publics: des proximités à reconstruire Louis-M Boulianne, Olivier Crevoisier, Jean Ruegg
137
Chapitre VII Salvador de Bahia: de l'ancien au nouveau centre des affaires. Proximité, fonctionnalité et prestige Elaine Norberto, Paulo Henrique de Almeida
159
Chapitre VIII Les projets de régénération urbaine où comment recréer la proximité Aude Chasseriau
181
Liste des auteurs
191
INTRODUCTION
POURQUOI LES VILLES EXISTENT-ELLES? MERITES ET LIMITES DE LA PROXIMITE URBAINE
ALAIN RALLET ANDRÉ TORRE
Les économistes ne sont pas toujours rapides, mais ils sont persévérants. Alors que les firmes fleurissaient depuis les débuts de la révolution industrielle, il a fallu attendre les travaux de Coase dans les années 30 pour donner une explication théorique de l'existence des entreprises. On pourrait faire la même remarque pour les villes, si ce n'est que la réponse peine à s'élaborer, en dépit des travaux remarquables d'auteurs tels que Fujita ou Thisse sur ce sujet. A une époque ou la majorité de la population mondiale vit dans des agglomérations urbaines, cette interrogation n'est pourtant pas sans intérêt. On connait, à ce sujet, l'admonestation célèbre de Lucas, dans son adresse aux membres du Jury des Nobel: mais pourquoi les gens cherchent-ils à se localiser à Manhattan ou Downtown Chicago, alors que l'espace abonde ailleurs? Pourquoi vouloir s'installer dans un lieu encombré, cher et pollué, alors que d'autres espaces, porteurs de paysages remarquables, restent souvent vierges de présence humaine pennanente? Et sa réponse, un peu décevante: c'est parce qu'ils recherchent la proximité des uns aux autres... En fait, derrière cette interrogation s'en profile une autre, plus fondamentale, sur l'existence des villes et de leur nécessité: pourquoi les villes existent-elles? Les villes ont de multiples dimensions (historique, politique, culturelle, économique, sociale, symbolique.. .), de sorte que la réponse excède toujours celle qu'on peut lui apporter au travers d'une approche disciplinaire. C'est la source d'insatisfactions, à moins de prétendre à un savoir totalisant. Mais il n'est pas inutile de confronter un objet complexe à une découpe disciplinaire. Cette confrontation enrichit la connaissance de l'objet mais surtout pousse l'approche disciplinaire à ses limites et donc à modifier ses lignes, intégrer de nouveaux phénomènes, forger de nouveaux concepts, bref à s'enrichir aussi. C'est tout l'intérêt d'une confrontation de l'analyse économique à l'objet ville: s'obliger à penser des phénomènes qui relèvent à l'évidence aussi de l'économie (comme la dimension économique des interactions sociales de proximité) mais qui lui échappent en partie. C'est aussi tout l'intérêt
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A. Rallet et A. Torre
d'une confrontation des approches économiques à celles venues d'autres disciplines, comme dans le présent ouvrage. Pourquoi les agents économiques recherchent-ils la proximité des autres agents et des infrastructures urbaines? Autant de sujets qui intéressent directement l'économiste et, au-delà, les spécialistes des relations de proximité. Se poser la question de l'existence des villes, c'est en effet déjà se poser celle des proximités urbaines, qu'il s'agisse de la proximité géographique ou de la proximité organisée. C'est tout d'abord de la proximité géographique dont il est question, qu'elle soit recherchée ou subie par les acteurs économiques: - recherchée par les agents individuels, qui trouvent dans la ville des aménités nombreuses (rencontres d'autres personnes, distractions, ressources humaines...) mais également une concentration de services et de loisirs permettant de satisfaire une partie importante de leurs besoins dans un espace de déplacement restreint et dans un temps limité. Recherchée aussi par les entreprises, qui y voient un débouché en termes de consommateurs et la possibilité de réaliser des économies d'échelles au niveau de la distnbution, ainsi qu'un approvisionnement immédiat et une grande richesse de compétences en termes de marchés locaux du travail ; - subie par l'ensemble de ces acteurs économiques, qu'il s'agisse des problèmes de congestion, de voisinage, de pollution, d'encombrement ou de prix du foncier. Les agents individuels parce qu'ils doivent supporter les volontés divergentes et les actions de leurs voisins (constructions, bornages, passages...), mais aussi les émissions toxiques, les bruits, les embouteillages, les risques sanitaires. Les entreprises parce qu'elles se trouvent confrontées à des problèmes d'acheminement des produits, de prix de la location ou de la construction des infrastructures de production, mais aussi à une compétition importante de la part de leurs concurrents directs. On considère souvent que la recherche de proximité géographique est suffisante à expliquer l'existence des villes. Mais il ne suffit pas d'être côte à côte pour communiquer ou travailler ensemble. Et les villes en offient l'exemple le plus pertinent avec l'habitat vertica~ qui nous met à proximité géographique immédiate de parfaits inconnus que nous croisons parfois dans l'ascenseur alors que ce sont les personnes qui vivent à la plus faible distance de nous! Encore faut-il, pour valoriser le potentiel offert par la proximité géographique, entretenir des relations avec ces personnes proches, la même remarque s'appliquant aux relations de coopération entre entreprises. Il ne suffit pas, pour des start ups, d'être co-localisées dans le silicon quartier d'une grande métropole pour interagir, échanger des connaissances et des savoir faire. Encore faut-il que les membres de ces organisations se connaissent, et, plus encore, désirent échanger et travailler ensemble,
Les nouvelles proximités urbaines
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se projettent ensemble dans des projets et des constructions communes. C'est à ce point qu'intervient la proximité organisée, avec ses déclinaisons en termes de logiques d'appartenance ou de similitude. Elle permet d'expliquer l'autre facette de la constitution et de la pérennité des agglomérations urbaines, c'est-à-dire l'importance des interactions humaines et productives. - la logique d'appartenance de la proximité organisée révèle comment les liens tissés au sein des réseaux d'acteurs et de personnes contribuent à l'activation des potentialités offertes par la proximité géographique d'un grand nombre d'autres acteurs économiques et sociaux et à la constitution de groupes ou de chaines de personnes physiques ou morales. L'appartenance à un même réseau, à une même organisation, permet d'entamer la discussion entre voisins sur les règles de vie communes, sur les projets de construction ou d'aménagement d'un espace de vie, mais aussi sur les règles à produire au sein d'un collectif de travail et de discuter des modalités techniques de production. La ville prend corps et existe par le biais de ce processus constitutif du lien social et productif: et facteur d'actions communes porteuses d'interactions. - la logique de similitude est fondée sur les ressemblances entre acteurs appartenant à des communautés de destin ou adhérant aux mêmes types de représentation. Elle renvoie, sur son versant positif: à la possibilité de mettre en commun les expériences et les projections des acteurs locaux, afin de les faire adhérer à un projet partagé, en particulier au sein de groupes unis par des origines géographiques ou des confessions communes. Ici également, la proximité permet la production de règles collectives, acceptées par toutes les parties prenantes de la négociation, ainsi que la production de croyances et d'anticipation partagées par les acteurs, compromis provisoire et révisable qui permet de tracer un sentier commun à des collectifs d'acteurs. Sur son versant négatif: elle ouvre la porte aux ségrégations urbaines, aux groupes de personnes qui se regroupent au sein de zones géographiques détenninées, alors que les nouveaux arrivants vont s'avérer incapables de s'insérer dans des communautés dont ils ne partagent pas les règles fondamentales. Les groupes d'acteurs qui partagent les mêmes systèmes de représentation, les mêmes valeurs, les mêmes liens communautaires, ont tendance à écarter les individus qui ne partagent pas ces références, et à constituer des groupes homogènes et isolés socialement et spatialement. Ces éléments montrent qu'existent deux principaux enjeux à la mise en œuvre d'une analyse des villes en termes de proximités: Tout d'abord, rendre compte de la diversité contradictoire de la ville.
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A. Rallet et A. Torre
Analyser la ville à partir de la question de savoir pourquoi et comment les agents économiques sont proches permet d'éviter de la saisir au travers d'un primat accordé soit à l'agglomération, soit aux nuisances. Il est de tradition d'aborder la ville à partir des bénéfices de l'agglomération en introduisant les nuisances comme bornes de ces bénéfices, où de partir des nuisances que la ville génère en faisant de la sauvegarde des bénéfices de l'agglomération le point limite du combat contre les nuisances. Un des intérêts de l'analyse en termes de proximités est d'envisager les bénéfices et nuisances de la ville comme l'expression d'un même mouvement et non comme des limites réciproques dont il faudrait trouver le point d'équilibre (la fameuse et introuvable taille optimale des villes). Ensuite, progresser dans l'appréhension du phénomène croissant de métropolisation. On connaît la difficulté à définir et cerner ce qu'est la métropolisation, ce qui ne revient pas à caractériser un type particulier de villes (les métropoles). On peut naturellement l'entendre en ce sens : la métropolisation serait l'ère des métropoles. Mais ce serait à notre sens manquer ce qui se cherche au travers de l'emploi de ce terme, car la métropolisation est une forme de dépassement de la ville, de tous les types de ville. C'est pourquoi on ne peut la réduire à un seul type; il s'agit d'un processus d'extension de la ville au-delà de ce qui fait la nature d'une ville, d'où la difficulté à le qualifier. A l'urbanisation comme processus correspond la ville comme forme. A la métropolisation comme processus ne correspond pas la métropole comme forme mais bien davantage la région métropolitaine (certains parlent aussi de régions de villes). On est au-delà de la « edge city », de la ville s'établissant aux limites d'elle-même dans une configuration particulière de noyaux urbains reliés par des axes et un tissu urbain plus ou moins dense. Le terme de région métropolitaine exprime cela: un processus d'urbanisation ayant un espace régional comme cadre d'organisation. Une ville qu~ s'organisant en dehors d'elle-même, deviendrait autre chose qu'une ville. On pourrait, à cet égard, caractériser la région métropolitaine comme un jeu particulier de distances et de proximités. C'est par exemple une forme d'organisation marquée à la fois par la proximité et par l'éloignement géographiques. La proximité car l'organisation métropolitaine continue de conférer les avantages de la proximité géographique à ceux qui en font partie. La distance car la densité, la complexité et l'étendue du tissu métropolitain font écran aux interactions, ce que les individus expriment en disant qu'il est plus facile d'aller d'une ville de province à Paris que de relier deux points éloignés de la région parisienne. Dans une ville, la proximité géographique et la proximité organisée peuvent se superposer à l'échelle de la ville toute entière
Les nouvelles proximités urbaines
Il
pour en faire un espace potentiellement homogène d'interactions (potentiellement, car la proximité organisée n'existe pas nécessairement, et: les relations aux voisins). Cet avantage disparait dans le cas dans la région métropolitaine, dont la grande taille et la densité font écran physique aux interactions. La proximité organisée doit alors se coupler à la proximité géographique à des échelles plus petites, donnant naissance, par exemple, à des clusters locaux intramétropolitains, ou à des phénomènes de ségrégations sociale et spatiale comme dans les cités ou les condominiums. A cet égard, un des problèmes de la région métropolitaine est bien de savoir comment reconstituer en son sein des cadres localisés d'exploitation des bénéfices issus de la superposition des proximités géographique et organisée. Cela donne lieu à un intéressant paradoxe, qu'avaient déjà soulevé des auteurs tels que Chamboredon il y a quelques années. La proximité organisée, d'essence non géographique, est généralement utilisée pour expliquer que les relations issues d'agents ou d'individus localisés dans un espace géographique donné excèdent et débordent cet espace. Elle sert à combattre l'illusion localiste. Or, dans le cadre métropolitain, c'est l'inverse qui se produit. La proximité organisée se nourrit du repli local pour pouvoir fonctionner. Plus même, alors que c'est son absence qui provoque les difficultés de communication dans les villes, c'est justement sa présence qui entraine des phénomènes négatifs de ségrégations spatiale et sociale dans les métropoles. Expliquer une organisation métropolitaine, c'est analyser la formation d'espaces micro-locaux fondés sur l'exploitation conjointe de la proximité organisée et de la proximité géographique et reliés entre eux par un système de flux dont l'efficacité, plus ou moins grande, génère des avantages ou des contraintes de nature spécifiquement métro po litaine. Expliquer l'organisation de la région métropolitaine, son fonctionnement, ses gains et ses limites, est aujourd'hui une des principales tâches de l'analyse spatiale. L'analyser comme une combinaison de proximités peut y aider.
Partie l
, OU COMMENCENT ET FINISSENT LES VILLES?
CHAPITRE I
LES MODES DE VIE PERlURBAINS
FRANÇOIS MADORE
INTRODUCTION
Un phénomène de dissociation relative entre la croissance démographique des aires urbaines et la localisation de l'emploi au sein de ces entités est observé depuis quelques décennies en France. D'un côté, la périurbanisation de l'habitat marque la fin de la ville européenne dense et compacte. De l'autre, «la périurbanisation de l'emploi est moins prononcée », même si le mouvement de diffusion centrifuge des activités économiques est également engagé, en particulier dans «les grandes aires urbaines de province les plus dynamiques» (Lainé, 2000). Cette évolution contrastée de la géographie résidentielle et de l'emploi est pour partie à l'origine d'un débat sur l'avenir de la ville, que celui-ci s'exprime autour du concept de la «métapole» (Ascher, 1995),de la «ville émergente» (DuboisTaine et Chalas, 1997) ou encore de la «ville éclatée» (May et al., 1998; Haumont et Lévy, 1998). La population périurbaine est bien évidemment au cœur de ce processus de dissociation relative entre résidence et emplo~ d'où l'intérêt d'observer ses pratiques spatiales, en cherchant à vérifier une double hypothèse. La première est que les pratiques citadines mises en œuvre par les périurbains sont toujours guidées pour partie par la recherche de la proximité, car certaines d'entre elles participent d'un ancrage dans la commune de résidence. La seconde hypothèse est que ce rapport à l'espace urbain s'accompagne d'un processus de « périphérisation » des modes de vie, autrement dit d'une fréquentation plus portée vers les polarités périphériques que vers le cœur de la ville, par comparaison avec celle des habitants des pôles urbains. Certes, de nombreux travaux visant à mieux comprendre le schéma de mobilité dite quotidienne des périurbains ont déjà été réalisés, en particulier au cours des années quatre-vingtt, mais il nous semble que les deux hypothèses qui sous-tendent cette réflexion n'y étaient pas véritablement posées de façon explicite. t On peut se reporter en particulier à l'ouvrage collectif Les périphéries urbaines, qui fait la synthèse, au milieu des années quatre-vingt, des recherches conduites sur le périurbain en France. Certaines contributions abordent plus spécifiquement la question de la mobilité quotidienne des périurbains, notamment celles de Nicole Croix et Jean Renard (1985), de Robert Hérin (1985) ou encore de Christian Pihet (1985).
16
1-
A. Rallet et A. Torre
METHODOLOGIE
Afin d'observer la dynamique de périurbanisation en France, l'Insee a mis au point, au milieu des années quatre-vingt-dix, une nouvelle approche territoriale de la ville fondée sur le zonage en aires urbaines (ZAD)(Le Jeannic, 1996). Celui-ci délimite en particulier des aires urbaines composées d'un pôle urbain et d'une couronne périurbaine. Les pôles sont des unités urbaines offiant plus de 5 000 emplois, sous réserve qu'elles ne soient pas sous la dépendance directe d'un pôle urbain plus important. Quant aux couronnes périurbaines, elles sont composées des communes où au moins 40% de la population active résidente ayant un emploi travaille dans le pôle urbain ou dans les autres communes de la couronne périurbaine. L'intérêt de ce découpage en aires urbaines est qu'illégitime statistiquement l'identité urbaine des communes marquées par le développement, depuis les années soixante-dix, de la périurbanisation, et qu'il offie de ce fait un cadre d'observation pertinent de la réalité des pratiques sociales en milieu urbain. C'est donc à l'échelle de ces aires urbaines que sera analysé ce phénomène de distanciation entre la résidence, qui se dilue dans les franges périurbaines, et l' emplo~ dont la concentration dans les aires urbaines reste nettement plus marquée. Quant à l'observation des pratiques spatiales de la population périurbaine, elle passe par la réalisation d'une enquête par questionnaire, qui permet d'appréhender, avec beaucoup de finesse, la diversité des schémas de mobilité mis en œuvre par la population et de vérifier la double hypothèse du maintien de la recherche de proximité dans certaines pratiques de l'espace et d'une «périphérisation» des modes de vie périurbains. D'où l'intérêt d'une approche monographique éclairée et mise en perspective par cette problématisation. Le matériau de recherche est donc constitué d'une enquête financée par la ville de La Roche-sur-Yon en Vendée, dans le but de saisir, à l'échelle de cette aire urbaine, les comportements de mobilité autres que ceux de nature résidentielle et la représentation de la centralité liée à ces pratiques. 1 000 enquêtes ont été réalisées en 2000 auprès de la population de l'aire urbaine, telle qu'elle a été définie par l'Insee en 19902.Celle-ci était composée, à l'issue de ce recensement, d'un pôle urbain constitué d'une ville isolée de 49 262habitants en 1999 et d'une couronne périurbaine rassemblant vingt communes et 44 624 habitants, soit 93 886 habitants pour l'aire urbaine (avec le zonage en aire urbaine de 1999,la couronne périurbaine a gagné quatre communes et atteint désormais 48 913 habitants). L'échantillon retenu pour cette enquête est représentatif de l'ensemble de la population occupant une résidence principale, les quotas ayant été établis en tenant compte du 2
Les 1 000 enquêtes ont été passées au cours des mois de mars et avril2000
du Deug
2 de géographie
au centre
universitaire
de La Roche-sur-Yon,
par treize enquêteurs étudiants
qui dépend
de l'Université
de Nantes.
17
Les nouvelles proximités urbaines
lieu de résidence en 1999,puis du sexe et de l'âge en 19903.L'objectif étant d'observer les pratiques spatiales d'une population périurbaine composée en majorité de couples biactifs ayant des enfants, ce sont les réponses données par les 475 individus enquêtés dans la couronne périurbaine qui vont être plus particulièrement exploitées. Trois types de pratiques vont retenir l'attention, car elles sont au cœur de la mobilité et du mode de vie des individus: les pratiques liées à l'emplo~ celles articulées autour de la ftéquentation des commerces et enfin les pratiques commandées par le recours aux services privés de base. Bien évidemment, l'adoption de la démarche monographique contient une mise en garde implicite, mais qu'il faut néanmoins rappeler, afin d'éviter tout risque de généralisation abusive. Chaque aire urbaine étant singulière, celle de La Roche-sur-Yon, par sa taille réduite, ne peut être considérée comme représentative de l'ensemble des aires urbaines ftançaises, a fortiori des plus peuplées. Toutefois, l'intérêt de la démarche tient à la mobilisation d'un vaste matériau d'enquêtes susceptible d'éclairer empiriquement certaines tendances des modes de vie périurbains. 11-
L'HABITAT ET L'EMPLOI DANS LES AIRES URBAINES FRANÇAISES: DES DYNAMIQUES CONTRASTEES
1. La dynamique de périurbanisation de l'habitat à partir des années soixantedix
La poursuite de l'urbanisation ne s'est jamais démentie en France tout au long des dernières décennies (Julien, 2001). En raisonnant à espace constant, c'est-à-dire en se référant à la définition des aires urbaines en 1990, l'intégralité des gains démographiques enregistrés dans l'hexagone depuis les années soixante est le fait de l'espace à dominante urbaine, dont la population a augmenté au rythme annuel moyen de +0,85%, alors que celle de l'espace à dominante rurale a été remarquablement stable à 13,6millions d'habitants (tableau 1).
3 Toutes les données du recensement en mars et avri12000.
de 1999 n'étaient
pas encore disponibles lorsque l'enquête a été réalisée
18
A. Rallet et A. Torre
Tableau J L'EVOLUTION
DE LA POPULATION DE L'ESPACE A DOMINANTE URBAINE EN FRANCE DE 1962 A 1999 (AIRES URBAINES 1990)
ET RURALE
Esp ace à dominante urbaine Esp ace à dominante rurale
32 812 13 613
71 29
44 891 13 627
77 23
+0,85 0,00
France métrop olitaine
46 425
100
58 518
100
+0,63
Source: Insee, recensement de la population 1962 et 1999
Néanmoins, cette poursuite de l'urbanisation a pris une nouvelle dimension au milieu des années soixante-dix, avec la dynamique de périurbanisation. En effet, toujours en se référant à la définition des aires urbaines françaises en 1990,le taux d'évolution annuel des pôles urbains est divisé par cinq entre 1962-1975et 1975-1990(+1,48% à +0,30%), alors que dans le même temps ce taux est multiplié par 1,7 (+1,34%à +2,28%)pour les couronnes périurbaines (tableau 2). Ainsi, la hiérarchie des taux s'est complètement inversée en peu de temps, la population des couronnes périurbaines augmentant quasiment huit fois plus vite que celle des pôles urbains entre 1975-1990.Au cours de la dernière période intercensitaire (1990-1999),les pôles urbains continuent à croître lentement (+0,27%), tandis que s'amplifie la poursuite du ralentissement de la périurbanisation déjà amorcé entre 1982-1990
(Choffe~2000): après avoir atteint son paroxysmeentre 1975-1982 avec +2,71%, le taux d'évolution annuel de la population des couronnes périurbaines recule à +1,89% entre 1982-1990, pour de nouveau diminuer entre 1990-1999 (+1,03%). Toutefois, les couronnes périurbaines progressent encore quatre fois plus vite que les pôles urbains et le ralentissement de la dynamique de périurbanisation, certes très sensible en taux, l'est beaucoup moins en effectifs.
19
Les nouvelles proximités urbaines
Tableau 2 L'EVOLUTION DE LA POPULATION DES POLES URBAINS ET DE LEURS COURONNES PERIURBAINES EN FRANCE DE 1962 A 1999 (AIRES URBAINES 1990)
Pôles urbains Couronnes p ériurbaines
+ 1,48 + 1,34
+0,30
+0,27
+0,71
+ 2,28
+ 1,03
+ 1,64
Rapport couronnes / pôles
0,91
7,60
3,81
2,31
Source:
Insee, recensement
de la population
1962 à 1999
La poursuite du dynamisme démographique des aires urbaines en France est donc moins le fait, depuis 1975, des pôles urbains, dont la progression est faible, que des couronnes périurbaines, qui enregistrent une forte augmentation de leur population, bien que ralentie depuis 1982. L'existence d'un solde migratoire légèrement négatif dans les pôles depuis 1975,mais fortement positif dans le périurbain (supérieur à +1% par an entre 1975-1990,voire à +2% entre 1975-1982)~ montre que la croissance de ces auréoles a été alimentée par des flux migratoires en provenance des pôles urbains, même si l'importance de la mobilité interne au périurbain n'est pas à négliger,,, comme l'a montré Martine Berger (1990) à partir du cas de l' Ile-de-France. Ainsi, l'essence urbaine de la périurbanisation ne fait pas de doute, ce phénomène n'étant en aucun cas révélateur d'une renaissance rurale. Même les chercheurs qui ont eu recours à un autre néologisme d'origine anglo-saxonne pour qualifier ce processus, en parlant de rurbanisation, dont la terminologie dit combien le sens profond du phénomène serait à chercher à la croisée de rural et de l'urbain, ont tendance, pour la plupart, à considérer ce fait géographique comme « l'une des modalités spatiales de la croissance urbaine» (Berger et al., 1980). D'ailleurs, il nous semble que l'usage équivoque de ce concept de rurbanisation a progressivement périclité au profit de celui de périurbanisation, sémantiquement plus proche de la signification socio-spatiale du phénomène. Sans doute faut-il voir dans cette substitution une forme de légitimation du postulat selon lequel la périurbanisation résulte bien du « développement d'une forme urbaine adaptée à l'état momentané des forces productives et des rapports sociaux» (Jaillet et Jalabert, 1982), postulat qui semble faire l'unanimité, ou peu s'en faut (Taffin, 1985; Chapuis, 1995; Jean et Calenge, 1997; Le Jeannic, 1997)4. 4 Quelques
extraits rendent compte de cette convergence d'appréciation sur le fait périurbain. Pour Claude Taffin (1985), « le développement des zones périurbaines n'est pas une nouvelle forme d'exode rural,
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A. Rallet et A. Torre
Quelles sont donc ces forces qui recomposent le système urbain à partir des années soixante-dix en France? Celles-ci relèvent d'abord des transformations de l'expression de la demande en logements des ménages. En première instance, toutes les études montrent que le moteur de la périurbanisation est l'accession à la propriété d'une maison individuelle neuve. Ce désir est fortement corrélé aux étapes du cycle de vie des individus, par un processus conjoint d'adaptation de la taille du logement et de la famille, notamment lorsque celle-ci s'agrandit. D'autre part, cette volonté d'accéder à la propriété d'un pavillon s'inscrit dans un contexte d'amélioration générale du niveau de vie des ménages. Ainsi, la progression beaucoup plus rapide, depuis les années soixante, des catégories moyennes et supérieures que des couches modestes au sein de la société française a été un puissant vecteur de développement de la propriété d'occupation du logement. Cette évolution, combinée au développement important de l'activité féminine et donc des couples biactifs, a accru considérablement la capacité d'autonomie économique des ménages, donc leur possibilité d'épargne et d'investissement. Les ménages ont donc développé des trajectoires résidentielles ascendantes en faisant correspondre à l'amélioration de leur statut socioprofessionnel une forme d'habitat plus valorisée, tant socialement que symboliquement, ce qui passe par l'accès à la propriété d'occupation d'une maison. Enfin, cette diffusion du modèle pavillonnaire en milieu périurbain n'a été rendue possible que par la généralisation de l'usage de l'automobile, qui «ouvre à chacun un vaste espace d'arbitrage en matière de localisation et d'enracinement résidentiel» (Orfeuil, 1995). Cependant, si la force du modèle résidentiel promotionnel axé sur l'accession à la propriété d'une maison semble consubstantielle au développement périurbain, ne négligeons pas l'évolution de la structure de l'offie. Pierre Bourdieu (1990)a bien souligné, à juste titre, combien « il est sans doute peu de marchés qui, autant que celui de la maison, so~ent non seulement contrôlés mais véritablement construits par l'Etat». Jamais la demande d'accession à un pavillon périurbain n'aurait pu s'exprimer avec autant de vigueur sans la mise en place de politiques d'encouragement à la propriété à partir des années soixante et soixante-dix (Heugas-Darraspen, 1994; Fribourg, 1998; Vorms, 1998).Les deux figures emblématiques de cette politique ont été d'une part l'instauration en 1977 du Prêt aidé à l'accession à la propriété (PAP) couplé à l'Aide personnaliséeau logement (APL)et, d'autre part, la mise en place du Prêt à taux zéro (PTZ), qui s'est substitué au PAP le mais bien le fait de la déconcentration des zones urbaines». Pour Robert Chapuis (1995), «la périurbanisation est une nouvelle forme de l'expansion urbaine, mais qui n'est plus, comme la banlieue traditionnelle, morphologiquement rattachée à la ville ». Pour Yves Jean et Christian Calenge (1997), il ne fait guère de doute que l'espace périurbain a« la qualité de sous-ensemble de la ville ». Enfin, pour Tholnas Le Jeannie (1997), «le phénomène de périurbanisation apparaît ainsi bien in fine comme un phénomène
local de débordement de la population d'un centre sur sa périphérie ».
Les nouvelles proximités urbaines
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1er octobre 1995. Au total, de 1977 à 1995, environ 1,5 million de ménages ont pu accéder à la propriété grâce à un prêt PAP,tandis que depuis sa mise en place en 1995,environ 950000 ménages ont bénéficié d'un PTZ. La périurbanisation de l'habitat est donc pour partie une conséquence de cette politique de solvabilisation de la demande, car il est clair que pour de nombreux ménages modestes candidats à l'accession à la propriété d'une maison, la seule alternative réaliste, compte tenu de la diminution de la rente foncière depuis le cœur du pôle urbain vers sa périphérie, a été de s'éloigner de la ville pour faire construire. Enfin, plus globalement, le développement de la propriété d'occupation de la résidence principale en France n'a été rendu possible que grâce à l'essor du crédit immobilier, qui a profondément modifié à la fois les modalités et le calendrier d'acquisition du logement. L'héritage, comme mode d'accession à la propriété, est en très net recul et l'âge auquel les ménages ftançais deviennent propriétaires a fortement diminué. Pour la génération 1908, l'âge médian d'accès à la propriété était de 56 ans, alors qu'il n'était plus que de 34 ans pour la génération 1952, soit un abaissement de 22 ans (Laferrère, 1999). 2. Une périurhanisation de l'emploi nettement plus limitée
Parallèlement à cette déconcentration des lieux de résidence à l'échelle des aires urbaines, la force d'attraction économique des pôles urbains s'est globalement maintenue, même si la géographie de l'emploi des agglomérations ftançaises a également été affectée par un mouvement centrifuge au profit des communes de banlieue mais aussi des couronnes périurbaines. En réalité, le choix de retenir comme espace de référence les aires urbaines en 1990occulte quelque peu la réalité de ce mouvement, dans la mesure où les pôles urbains ainsi définis comprennent des communes qui n'étaient pas encore incluses dans ce pôle au cours des années soixante. Ainsi, à l'échelle des aires urbaines ftançaises délimitées en 1990,le poids économique des pôles urbains, apprécié en nombre d'emplois, est passé de 90%en 1962à 92% en 1999,alors que, dans le même temps, le poids démographique de ces pôles s'est affaibli de cinq points, régressant de 87%à 82%. Or il ne fait aucun doute que si l'on raisonnait avec un référentiel spatio-temporel antérieur, on constaterait un déplacement plus net de l'emploi vers les périphéries urbaines. Néanmoins, malgré cette difficulté à apprécier de façon diachronique les dynamiques spatiales de la géographie économique des aires urbaines, il n'en demeure pas moins que le processus de périurbanisation concerne plus l'habitat que l'emploi (Lainé, 2000). L'inventaire communal réalisé en 1998 par l'Insee montre d'ailleurs bien le sous-équipement très marqué des communes
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A. Rallet et A. Torre
périurbaines prises dans leur totalité, c'est-à-dire englobant également les communes multipolarisées5, dont la population en 1990pèse pour un cinquième des communes périurbaines. 48 équipements, classés en trois groupes selon leur zone d'influence, ont été retenus pour hiérarchiser les communes. Le premier groupe est composé des six équipements de centres urbains, le second des vingt-six équipements de bo-qrgs-centres et le troisième des seize équipements de villages-centres. A l'aune de cette hiérarchie, on observe «le sous-équipement relatif des communes périurbaines en équipements de bourgs-centres» (Inra et Insee, 1998),définis comme les équipements intermédiaires. En fait, une proportion infime (4%) de communes périurbaines possède plus de la moitié des équipements de bourgs-centres, soit moitié moins que les communes du rural sous faible influence urbaine (7%)ou du rural isolé (8%)6: c'est dire si « le sous-équipement relatif» évoqué par l'Inra et l'Insee apparaît comme un doux euphémisme (tableau 3). C'est d'un véritable désert dont il s'agit, surtout que les communes périurbaines sont, en moyenne, plus peuplées que celles appartenant au rural sous faible influence urbaine ou au rural isolé, avec respectivement 850, 570 et 460 habitants en 1990. Quant aux équipements des villages-centres, définis comme les équipements de proximité, ils ne sont présents de façon significative que dans un quart des communes périurbaines : 24% d'entre elles seulement possèdent plus de la moitié de ces équipements. C'est, peu ou prou, la proportion observée également dans le rural sous faible influence urbaine et dans le rural isolé.
5
Les communes multipolarisées sont des communes rurales ou des unités urbaines situées hors des aires urbaines, dont au moins 40% de la population résidente ayant un etnploi travaille dans plusieurs aires urbaines, sans atteindre ce seuil avec une seule d'entre elles, et qui fonnent avec elles un ensetnble d'un seul tenant. Avec les couronnes périurbaines, elles fonnent les communes périurbaines. 6 Le rural isolé est fonné de l' ensetnble des communes rurales et des unités urbaines appartenant à l'espace à dominante rurale et n'étant ni pôle rural, ni sous faible influence urbaine, ni périphérie des pôles ruraux. Les pôles ruraux sont des communes rurales ou des unités urbaines appartenant à l'espace à dominante rurale, offumt de 2 000 à 5 000 etnplois et dont le nombre d'etnplois offerts est supérieur ou égal au nombre d'actifs résidents. Le rural sous faible influence urbaine est constitué de l'ensemble des colmnunes rurales et des unités urbaines appartenant à l'espace à dominante rurale, qui ne sont pas pôle rural et dont 20% ou plus des actifs résidents travaillent dans des aires urbaines. Quant à la périphérie des pôles ruraux, elle est constituée des communes rurales ou des unités urbaines appartenant à l'espace à dominante rurale, n'étant ni pôle rural, ni sous faible influence urbaine, et dont 20% ou plus des actifs résidents travaillent dans les pôles ruraux.
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Les nouvelles proximités urbaines
Tableau 3 LE NIVEAU D'EQUIPEMENT DES COMMUNES SELON A L'ESPACE A DOMINANTE URBAINE ET RURALE (AIRES URBAINES 1990)
LEUR APPARTENANCE EN FRANCE EN 1998
Espace à dominante urbaine Pôles urbains Communes p ériurbaines
47 4
81 24
13 300 850
Espace à dominante rurale Rural sous faible influence urbaine Pôles ruraux Périphérie des pôles ruraux Rural isolé
7 57 1 8
23 75 Il 22
570 3560 390 460
Source: Insee, inventaire communal 1998
Au total, il est clair que la périurbanisation est d'abord et avant tout un phénomène d'étalement résidentie~ alors que l'emploi est moins concerné par ce processus. Ce constat permet donc d'inférer l'hypothèse selon laquelle «la proximité des pôles urbains et l'importance des migrations entre les pôles et leur couronne contribuent probablement au sous-équipement relatif des communes périurbaines» (Inra et Insee, 1998), ce qui légitime pleinement notre questionnement portant observation des pratiques spatiales ou des modes de vie périurbains, à partir du cas de La Roche-sur- Yon. 111-
LES MODES DE VIE DES PERIURBAINS A LA ROCHE-SUR-YON
1. Les pratiques
spatiales des périurbains
Selon le découpage 1990de l'aire urbaine de La Roche-sur-Yon, la population du pôle urbain, dont les limites géographiques ont été pérennes d'un recensement à l'autre\ n'a augmenté que de 10%entre 1975et 1999,alors que celle de la couronne périurbaine a cru de plus de moitié: le poids démographique du pôle s'est donc affaibli de neuf points (tableau 4). En revanche, comme les évolutions enregistrées 7
Il est en effet constitué urbaines de l'Insee.
d'une ville isolée, soit d'une seule commune,
selon la nomenclature
des unités
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A. Ral/et et A. Torre
pour l'emploi ont été sensiblement identiques, avec une progression respective de +45% et +37%, le pôle concentre toujours plus des trois quarts de l'emploi de l'aire urbaine. Du fait de ce découplage entre une périurbanisation vigoureuse de l'habitat et, par contraste, l'inertie de la géographie des activités économiques, la sur-représentation de l'emploi par rapport à la population atteint 26 points en faveur du pôle en 1999,contre 16points en 1975. Tableau 4 L'EVOLUTION DE LA POPULATION ET DE L'EMPLOI DU POLE URBAIN ET DE LA COURONNE PERlURBAINE DE LA ROCHE-SUR-YON DE 1975 A 1999 (AIRE URBAINE 1990)
Pôle urbain Couronne p ériurbaine
44 713 28 407
61 39
49 262 44 624
52 48
24 179 7359
77 23
35 100 10 118
78 22
Aire urbaine 73 120 100 93 886 Source: Insee, recensement de la population 1975 et 1999
100
31 538
100
45218
100
Les données issues de l'enquête conduite en 2000auprès des 475 individus de la couronne périurbaine montrent que parmi les trois variantes de pratiques spatiales prises en compte pour apprécier le mode de vie des habitants de la couronne périurbaine de La RocheSUf-Yon8, celles liées aux achats sont les seules à être massivement orientées vers le pôle urbain (tableau 5).Pour 84% des ménages périurbains, les achats en grande surface sont généralement effectués dans l'un des trois hypermarchés ou l'un des neuf supermarchés yonnais9. Cette fréquentation des commerces du pôle urbain s'élève même aux neuf dixièmes pour les achats anomaux, mesurés à partir des achats de vêtements et de livres. Ces pratiques ne se différencient donc guère de celles développées par les habitants du pôle urbain, montrant bien l'uniformisation des comportements de consommation, appréciés en termes de lieux d'achat, entre les périurbains et ceux qui résident dans le pôle urbain.
8 Les tris croisés effectués pour mesurer les pratiques spatiales retenues (l'emploi, les achats et les services privés de base) selon le lieu de résidence (pôle urbain ou couronne périurbaine) sont tous fiables. Le résultat du test de Khi2 à 99% est très significatif pour les achats en grande surface et de vêtements, pour le lieu d'emploi, pour la fréquentation du salon de coiffure, de la pharmacie et du médecin généraliste. n est significatif pour les achats de livres. 9 Le terme «yonnais » fait toujours référence au pôle urbain de La Roche-sur-Yon. Il désigne soit les habitants de ce pôle (les Yonnais), soit des équipements (exemple, les hypermarchés et les supermarchés yonnais ).
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Les nouvelles proximités urbaines
Tableau 5 LES PRATIQUES SPATIALES (ACRA TS, EMPLOI, SERVICES) DES HABITANTS DE LA COURONNE PERlURBAINE DE LA ROCHE-SUR-YON EN 2000
Achats Grande surface Vêtements Livres
84 90 93
17 3 1
Emploi
54
21
Services Coiffeur Pharmacie Médecin généraliste
27 14 10
44 65 59
4 1 1
8 20 22
Il 20 5
473 472 357
17
343
9 6 9
459 473 471
Possibilité de réponses multiples dans certains cas: le total en ligne peut donc être supérieur à 100. Par ailleurs, pour le coiffeur, il faut compter également avec le domicile (12%) (Le résultat du test de Khi2 à 99% est très significatif pour les achats en grande surface et de vêtements, pour le lieu d'emploi, pour la fréquentation du salon de coiffure, de la pharmacie et du médecin généraliste. Il est significatif pour les achats de livres) Source: enquête auprès d'un échantillon 475 de la couronne périurbaine, 2000
de 1 000 habitants de l'aire urbaine de La Roche-sur-Yon,
dont
Les lieux d'emploi des périurbains de La Roche-sur-Yon sont également orientés, en majorité, vers le pôle urbain, même si celui-ci n'a plus l'exclusivité (tableau 5). En effet, parmi les actifs ayant un emploi interrogés lors de l'enquête, 54% travaillent à La Roche-surYon, contre seulement 21% dans leur commune de résidence. Le taux de migrants alternants est également très élevé, puisqu'il atteint les quatre cinquièmes, soit le taux observé à l'échelle des. couronnes périurb aines françaises, ce qui confirme la nature même du phénomène de périurbanisation, qui concerne essentiellement la résidence et peu l'emploi. En revanche, pour les services privés de base, les habitants de la couronne périurbaine de La Roche-sur- Yon fréquentent faiblement, voire rarement les services du pôle urbain (tableau 5). Seulement un quart a son coiffeur dans le pôle, le taux de fréquentation tombant même à un dixième environ pour la pharmacie ou le médecin généraliste. Ce sont les services situés dans les communes de la couronne périurbaine qui, pour l'essentiel, subviennent aux besoins de la population périurbaine, préférentiellement ceux de la commune de résidence à hauteur de la moitié ou des deux tiers.
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A. Rallet et A. Torre
Ainsi, parmi les trois types de pratiques spatiales retenus, deux sont structurés par un effet de mobilité à destination du pôle urbain (l'emploi et de façon encore plus nette les achats), alors que le troisième est au contraire marqué par un ancrage dans la commune de résidence (services privés de base). Cette pratique différenciée, de l'espace traduit pour partie la répartition très contrastée de l'offre. A la concentration du commerce et de l'emploi dans le pôle urbain s'oppose la diffusion beaucoup plus large des services privés de base dans la couronne périurbaine. En effet, une seule commune périurbaine sur les vingt possède une librairie et trois seulement ont une grande surface et un commerce de vêtements en 2000, alors que douze ont une pharmacie, quinze un médecin généraliste et dix-huit un salon de coiffure. Aussi, avec une offre commerciale marginale dans la couronne périurbaine, alors que celle-ci rassemble près de la moitié de la population, les pratiques d'achat des périurbains obéissent pour l'essentiel à la force d'attraction commerciale du pôle yonnais. En revanche, le développement des services basiques ayant suivi le déplacement du centre de gravité démographique du cœur de l'aire urbaine vers ses franges, leur fréquentation obéit pour l'essentiel à un principe de proximité géographique avec le domicile, ce qui réduit considérablement la mobilité à destination du pôle urbain. L'importance de l'effet de mobilité dans les modes de vie des périurbains yonnais va bien évidemment de pair avec un usage quasiexclusif de l'automobile comme moyen de déplacement. D'une part, la multi-motorisation est devenue la règle au sein de la population de la
couronne périurbaine: 70% des ménages enquêtés possèdent deux voitures ou plus, contre 45°A> pour les ménages du pôle urbain. D'autre part, l'usage exclusif de la voiture s'impose dans les déplacements urbains: 99% des habitants de la couronne périurbaine utilisent généralement la voiture lorsqu'ils effectuent un déplacement dans la ville de La Roche-sur- Yon, contre 80%des habitants du pôle urbain. 2. L'influence du lieu d'habitat des périurbains
antérieur sur les pratiques
spatiales
Plusieurs variables peuvent avoir une influence sur les pratiques spatiales des périurbains. L'incidence de trois d'entre elles a été mesurée pour la fréquentation des commerces et des services privés de base, car elles sont susceptibles d'avoir un impact sur ces pratiques: il s'agit du lieu de travail des habitants de la couronne périurbaine, de la distance entre leur commune de résidence et le pôle urbain et de leur lieu de résidence antérieur. Pour les deux premières variables, les tests du khi2 sont peu significatifs, ce qui veut dire que le lieu de travail des périurbains et la distance entre leur commune de résidence et le pôle urbain n'a qu'une
Les nouvelles proximités urbaines
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influence limitée sur leurs pratiques d'achat et de fréquentation des services, du moins à l'échelle de l'aire urbaine de La Roche-sur-Yon. Ce résultat apporte une double confirmation: d'une part, la fréquentation massive des commerces du pôle urbain yonnais par les habitants de la couronne périurbaine est largement déconnectée du lieu d'emploi ou de la distance à parcourir entre le domicile et ce pôle; d'autre part, même lorsque les périurbains fréquentent quotidiennement, dans le cadre de leur travail, le pôle urbain, ou qu'ils en sont proches géographiquement, ils optent majoritairement pour les services privés de base de leur commune de résidence. En revanche, le fait d'avoir déjà résidé dans le pôle urbain a une influence sur certaines pratiques spatiales des périurbains, en favorisant leur mobilité à destination du pôle. C'est le cas des achats en grande surface et de la fréquentation des services basiques, où le test du khi2 est significatif à très significatif, alors qu'il est peu significatif, au contraire, pour les achats anomaux. Un examen approfondi des pratiques spatiales liées à la fréquentation des services, selon la localisation du précédent logement, se révèle particulièrement instructif, à double titre. D'une part, si l'on retient comme fort probable l'hypothèse selon laquelle les périurbains dont le précédent logement était situé à La Roche-sur- Yon utilisaient les services du pôle urbain dans les mêmes proportions que ceux qui continuent d'y résider, soit à plus des quatre cinquièmes, on peut alors mesurer l'ampleur du transfert de fréquentation du pôle vers la couronne qui accompagne une mobilité résidentielle de même sens. En effet, le recours aux services privés du pôle urbain est toujours minoritaire pour ces anciens habitants de La Roche-sur- Yon, oscillant entre un cinquième (pharmacie et médecin généraliste) et, au plus, un tiers (coiffeur). On peut donc en conclure que si l'installation en couronne périurbaine n'a guère modifié les habitudes d'achats des néo-résidents périurbains, elle s'est en revanche accompagnée, pour la grande majorité d'entre eux, d'un changement de fréquentation des services privés de base. La distance-temps à parcourir entre le domicile et le service, autrement dit la proximité géographique entre l'offre et la demande, semble donc déterminante pour comprendre les pratiques spatiales des usagers de ces services. D'autre part, même si la fréquentation des services privés du pôle urbain reste toujours minoritaire quel que soit le lieu de résidence antérieur, le fait d'avoir résidé auparavant dans ce pôle s'accompagne d'un surcroît de fréquentation significatif de ces services. Des trois services considérés, le test du khi2 est le plus significatif pour le coiffeur et le médecin généraliste, la fréquentation étant la plus discriminée pour ce dernier: si 3% seulement des habitants de la couronne ont leur généraliste situé à La Roche-sur- Yon parmi ceux qui n'y ont pas résidé antérieurement, ce taux monte à 21%pour ceux dont le précédent logement était yonnais. Cette observation nuance le
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A. Rallet et A. Torre
rôle déterminant joué par la proximité géographique entre l'offre et la demande et laisse supposer qu'une autre dimension permet de rendre compte d'une partie de ces pratiques. En effet, de la pharmacie au coiffeur et au médecin généraliste, on passe d'une relation essentiellement basée sur un échange commercial à une relation marquée par une forme d'intrusion dans l'intimité de l'individu, qui touche à la fois au corps et à l'esprit. La relation de confiance devient alors essentielle. Aussi, selon l'importance accordée à cette relation et sa solidité, lorsque l'individu s'installe dans le périurbain après une étape résidentielle dans le pôle urbain, si dans la majorité des cas il choisit un nouveau coiffeur et un nouveau médecin parmi ceux de sa nouvelle commune de résidence, dans d'autres cas, il opte pour la fidélité, ce qui implique alors une mobilité dès qu'il recourt à ce service. Quant à la différence de fréquentation entre le coiffeur et le médecin généraliste, avec respectivement un tiers des anciens habitants du pôle urbain qui ont gardé leur coiffeur dans le pôle urbain, contre un cinquième pour le médecin, elle s'explique probablement par une question de temporalité dans le recours au service. On programme à l'avance son rendez-vous chez le coiffeur, ce qui est d'autant plus facile que pour les trois quarts des périurbains ayant résidé auparavant à La Roche-sur-Yon et qui ont gardé leur coiffeur dans cette ville leur lieu d'emploi est situé précisément dans le pôle urbain. En revanche, le recours au médecin généraliste est, le plus souvent, non programmé, d'où l'intérêt d'en choisir un qui soit proche du domicile. 3. La « périphérisation )) des pratiques spatiales des périurbains
Lorsque les pratiques spatiales des habitants du périurbain de La Roche-sur- Yon sont orientées en majorité vers le pôle urbain, elles sont plus souvent tournées, au sein de ce pôle, vers les centres commerciaux et les zones d'emploi périphériques, si on les compare aux pratiques des habitants du pôle yonnais. Les tests du khi2 sont notamment très significatifs pour les achats de vêtements et pour l'emploi, où la diversité spatiale de l'offre est très marquée, alors qu'ils sont peu significatifs pour les achats de livres, du fait sans doute d'une offre beaucoup plus limitée en périphérie. Ainsi, 58% des périurbains effectuent leurs achats de vêtements aux Flâneries, centre commercial situé au nord de la ville, le long de la voie express menant à Nantes, contre 42% des Yonnais (tableau 6). Ce centre, composé de grandes surfaces spécialisées ouvrant sur une rue intérieure et couverte, est au cœur d'une polarité périphérique emblématique des nouveaux lieux de vie qui ponctuent la «ville émergente» (Dubois-Taine et Chalas, 1997), puisqu'il jouxte un hypermarché, de nombreux autres magasins spécialisés, un multiplex cinématographique et sept restaurants. Fort logiquement, à cette plus
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Les nouvelles proximités urbaines
grande pratique de la polarité des Flâneries est associée une moindre fréquentation des commerces du centre, avec respectivement les deux tiers contre les trois quarts, la différence devenant encore plus significative lorsque l'on observe la fréquentation exclusive de ce cœur de ville: un peu plus du quart seulement despériurbains achètent en général leurs vêtements exclusivement dans le centre, contre pratiquement la moitié des habitants du pôle urbain. Au total, pour les habitants de la couronne périurbaine, les Flâneries font presque jeu égal avec le centre-ville pour les achats de vêtements (8 points de différence seulement au profit du second espace), ce qui est loin d'être le cas pour les habitants de La Roche-sur- Yon, qui continuent d'accorder une nette préférence aux commerces situés en cœur de ville (33points de différence). Tableau 6 LES LIEUX D' ACRA T DE VETEMENTS A LA ROCHE-SUR-YON PAR LES HABITANTS DE L'AIRE URBAINE SELON LEUR APPARTENANCE A LA COURONNE PERIURBAINE OU AU POLE URBAIN EN 2000
Centredont
centre-ville
ville exclusivement
Les Flâneries (p olarité p érip hérique) dont Flâneries
exclusivement
65,5 27,7
74,9 48,1
57,7 20,4
41,8 15,4
Total rép ondant s 426 474 (Le résultat du test de Khi2 à 99 % est très significatif) Source: enquête auprès d'un échantillon de 1 000 habitants de l'aire urbaine de La Roche-sur-Yon, 475 de la couronne périurbaine, 2000
dont
Cette tendance à la « périphérisation » de la pratique de la ville, observée à partir de l'étude du comportement d'achat de vêtements des habitants de la couronne périurbaine yonnaise, se retrouve également au niveau de l'emploi. Pour près de la moitié (440/0 exactement) des périurbains qui viennent travailler à La Roche-surYon, leur lieu d'emploi est situé dans l'un des cinq grands pôles d'activités périphériques10, alors que cette proportion n'atteint que le quart pour les habitants du pôle urbain, sachant que la part de ces cinq pôles périphériques dans l'emploi total de La Roche-sur- Yon est 10 Ces cinq pôles périphériques correspondent aux trois concentrations de zones d'activités économiques, soit la zone Nord (Acti-Nord et les Flâneries), la zone Sud (Acti...Sud, Les Jaulnières et Bene-Place) et la zone des Ajoncs au Nord-Est, et aux deux centres hospitaliers, à savoir le Centre hospitalier départemental (CHD) au Nord-Est et le Centre hospitalier sud (CHS) au Sud.
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A. Rallet et A. Torre
d'environ 38%en 1999.En revanche, le centre-ville est sous-représenté comme lieu d'emploi: parmi les périurbains dont l'emploi est situé à La Roche-sur- Yon, un cinquième seulement travaille dans le centre, contre plus du tiers pour les habitants du pôle urbain (35%),alors que cet espace central concentre un quart de l'emploi total de ce pôle. Au total, cette « périphérisation » des pratiques de la ville de la part des périurbains peut être lue comme une autre manifestation de cet effet de proximité géographique déjà évoqué et, corrélativement, comme une recherche d'optimisation de l'usage du temps (Desse, 2001), dans la mesure où les périurbains privilégient l'offre la plus accessible par rapport à leur domicile, donc la plus proche au termes de distance-temps. Ce phénomène ressort bien à l'examen du choix, par les périurbains, d'une grande surface à La Roche-sur- Yon: ceux-ci optent généralement pour celle qui est la plus proche de leur domicile. Ainsi, les habitants de la couronne périurbaine Nord fréquentent d'abord, à hauteur des deux tiers, le centre Carrefour Bellevue situé au Nord de La Roche-sur- Yon. Ceux de la couronne Est choisissent, pour près des trois quarts, le centre Leclerc des Oudairies situé également à l'Est de la ville. Les quatre cinquièmes des habitants de la couronne périurbaine Sud optent, quant à eux, pour le centre Leclerc de Toumefou situé au Sud. Enfm, les périurbains de la couronne Ouest fréquentent à hauteur des deux tiers le centre Carrefour de Saint-André situé également à l'Ouest, tandis que près de la moitié se dirigent vers le centre Leclerc de Toumefou, rapidement accessible depuis la route des Sables-d'Olonne à l'Ouest. CONCLUSION
Le mouvement de desserrement résidentiel des villes générateur d'un processus de périurbanisation s'inscrit dans une nouvelle structuration de l'espace urbain, où la ville traditionnelle axée autour d'un noyau central historique captant à son profit l'essentiel des flux de mobilité, notamment ceux liés à l'emploi et au commerce, s'efface au profit d'une polynucléarisation de l'espace géographique des villes. Dans ce nouveau système territorial, l'analyse des modes de vie des périurbains se révèle être un miroir et en même temps un facteur des mutations socio-urbaines. En effet, croissance spatiale des villes, développement de nouvelles centralités périphériques articulées autour du commerce ou des loisirs, délocalisation périphérique de l'emploi, multiplication des motifs et des parcours de déplacement sont autant de processus intriqués et qui expliquent et découlent tout à la fois d'un essor des mobilités quotidiennes, dessinant ainsi l'image de cette ville mobile et polycentrique. Toutefois, la notion de proximité géographique n'a par perdu tout sens au sein de cet espace urbain largement distendu et marqué
Les nouvelles proximités urbaines
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par la mobilité. Les modes de vie des périurbains oscillent ainsi toujours entre un effet de mobilité à destination du pôle urbain et un effet de proximité géographique avec le domicile, dessinant une multiterritorialisation révélatrice de la pluralité des ancrages socioterritoriaux. Cet effet de proximité se décline à différentes échelles, depuis la commune de résidence jusqu'à la polarité périphérique, véritable porte d'entrée dans la ville, à la fois d'un point de vue fonctionnel, commercial, ludique et donc social. Cette « périphérisation» des modes de vie se déroule selon une double logique, associant développement de I'habitat mais aussi des services à la personne dans les couronnes périurbaines et cristallisation d'une partie de l'activité et du commerce aux franges des pôles urbains. Cette double logique auto-corrélée révèle combien les dynamiques résidentielle et économique des aires urbaines, au-delà d'un antagonisme plus apparent que réel, s'auto-alimentent, reconfigurant le système urbain en lui offrant une nouvelle cohérence. REFERENCES Ascher F. (1995), Métapolis ou l'avenir des villes, Paris, Odile Jacob, 345 p. Berger M., Fruit J.-P., Plet F. et Robic M.-C. (1980), « Rurbanisation et analyse des espaces ruraux péri-urbains », L'Espace géographique, 4, 303-313. Berger M. (1990), « Les périurbains d'Île-de-France : stratégies de localisation », in Bonvalet C. et Fribourg A.-M. (eds.), Stratégies résidentielles, Paris, Ined, 369..383. Bourdieu P. (1990), «Un placement de père de famille. La maison individuelle: spécificité du produit et logique du champ de production », Actes de la recherche en sciences sociales, 81-82, 6-33. Chapuis R. (1995), «L'espace périurbain. Une problématique à travers le cas bourguignon », L'information géographique, 59, 113-125. Choffel P. (2000), «Les transformations des espaces urbains dans les années 90 : une périurbanisation au ralenti », Regards sur l'actualité, 15-28. Croix N. et Renard J. (1985), « Recherches préliminaires sur les populations et les espaces périurbains nantais », in Collectif: Les périphéries urbaines, Caen, Presses universitaires de Caen, 33-44. Desse R.-P. (2001), Le nouveau commerce urbain. Dynamiques spatiales et stratégies des acteurs, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 198 p. Dubois-Taine G. et Chalas Y. (eds.) (1997), La Ville émergente, La Tour-d'Aigues, L'Aube, 285 p. Fribourg A.-M. (1998), «Évolution des politiques du logement depuis 1950 », in Ségaud M., Bonvalet C. et Brun J. (eds.), Logement et habitat, l'état des savoirs, Paris, La Découverte, 223-230. Haumont N. et Lévy J.-P. (eds.) (1998), La ville éclatée. Quartiers et peuplement, Paris, L'Harmattan, 261 p. Hérin R. (1985), « Les espaces périurbains : des projets et des systèmes de valeurs inscrits dans l'habitat et les pratiques sociales », in Collectif, Les périphéries urbaines, Caen, Presses universitaires de Caen, 140-143.
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A. Rallet et A. Torre
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CHAPITRE Il
LES NOUVELLES FORMES URBAINES: ENTRE MULTIPOLARISATION ET SUBURBANISATION DES EMPLOIS LE CAS DE LA COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DIJONNAISE (1990 ; 1999)11
CATHERINE BAUMONT FRANÇOISE BOURDON
INTRODUCTION
Au cours des années 90, de nombreuses analyses théoriques et empiriques des espaces urbains ont pennis d'orienter fortement les débats sur la nature des configurations urbaines vers la question du passage d'une configuration urbaine monocentrique à une configuration multicentrique (Anas et al., 1998; Baumont et Le Gallo, 2000, Papageorgiou et Pines, 1999). D'un côté, le courant multicentrique, initié au début des années 1970 (Papageorgiou et Casetti, 1971, Papageorgiou et Mullally, 1976,Romanos, 1977)analyse comment le passage d'un centre à plusieurs centres affecte les distnoutions des densités résidentielles ou des valeurs foncières et s'interroge sur les formes fonctionnelles prises par ces fonctions de densités multicentriques en vue de les estimer (Griffith, 1981). Parallèlement, les théories de la formation des agglomérations, sous l'impulsion notamment des modèles non-monocentriques initiés en économie urbaine par Borukhov et Hochman (1977), Odland (1976)et Fujita et Ogawa (Fujita et Ogawa, 1982; Ogawa et Fujita, 1980; 1989), s'interrogent sur les mécanismes de formation de centres secondaires et sur les caractéristiques des configurations urbaines polycentriques: Il
Cette étude s'intègre dans le programme de recherche du LEG « Analyse écon01nique des nouvelles fonnes de suburbanisation dans les espaces urbains» soutenu par le contrat d'étude 2000-2002 de la Région Bourgogne « La recomposition urbaine dans la société de services et d'informations)) (sous la direction de Catherine Baumont et Jean-Marie Huriot), le Programme Aide à Projet Nouveaux 2000 du CNRS « Analyse économique des nouvelles formes de suburbanisation dans les villes françaises)) (sous la direction de Catherine Baumont) et le programme DARES-PUCA «Services, eInplois, territoires)) du Ministère de )) l'Equipement, des transports et du logetnent « Services aux entreprises et nouvelles centralités urbaines (sous la direction de Jean-Marie Huriot). Nous retnercions la Direction Régionale de l'INSEE Bourgogne et la Communauté d'Agglomération Dijonnaise pour les différentes informations qu'elles nous ont fournies. Nous reInercions égaletnent Julie le Gallo pour le géocodage de certaines données utilisées dans cette étude. Une pretnière version de cet article a été présentée aux 3èmesJournées de la Proximité« Nouvelles croissances )) et Territoires organisées par l'INRA-SAD et par la Faculté Jean Monnet de l'Université Paris Sud, Paris, 13-14 décetnbre 2001.
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A. Rallet et A. Torre
nombre et localisation des centres, caractéristiques du gradient des valeurs foncières et des fonctions de densités de populations... Ces différentes avancées théoriques ont fortement orienté les recherches empiriques sur les espaces urbains, afin notamment de tester la nature de la configuration spatiale (multicentrique vs monocentrique) et d'apprécier l'impact du phénomène de recomposition des centralités urbaines sur les fondamentaux de l'économie urbaine, i.e. la répartition spatiale des densités résidentielles et des valeurs immobilières (Baumont et Le Gallo, 2000).En retour, l'analyse empirique des espaces urbains polycentrique, en s'interrogeant sur la composition sectorielle des centres secondaires et sur les caractéristiques du système des centres économiques urbains, a permis d'approfondir ou de soulever des questions théoriques sur les facteurs d'agglomération et les logiques sectorielles de localisation des emplois dans les villes contemporaines (Boiteux-Grain et Guillain, 2004; Boiteux-Grain et Huriot, 2002,). En particulier, si l'on souhaite étudier les phénomènes contemporains de suburbanisation des emplois on s'attachera à évaluer à la fois l'ampleur quantitative de la déconcentration des emplois et à en cerner l'évolution qualitative: modification de la hiérarchie des centres, mouvements de spécialisation ou de diversification des centres, segmentation spatiale des emplois... Dans cette optique, il est intéressant de connaître, à différentes périodes, la composition par secteurs des activités économiques présentes dans chaque centre et de lier cette composition au caractère central ou périphérique des zones économiques. La suburbanisation des emplois sera alors marquée par différents phénomènes: un accroissement des emplois plus important en périphérie qu'au centre, l'émergence de nouvelles concentrations d'activités économiques dans la périphérie de la ville-centre initiale et un processus de différenciation des centres12.L'émergence de centres économiques concurrents du centre « historique» amène par ailleurs à étudier la composition sectorielle des centres périphériques et à repérer si les activités aujourd'hui considérées comme centrales comme les activités tertiaires supérieures tendent à se localiser davantage en périphérie (Boiteux-Grain et Guillain, 2004; Coffey et al., 1996; McMillen et McDonald, 1997; Sivitanidou, 1996). Si les phénomènes que nous venons de décrire sont assez bien documentés pour les grandes villes, il paraîtrait néanmoins hasardeux de conclure que seules les métropoles sont aujourd'hui concernées, car peu d'études ont en fait été réalisées sur des espaces urbains de taille plus modeste. En analysant l'organisation de la centralité au sein de la Communauté de l'Agglomération Dijonnaise et son évolution entre 1990 et 1999 nous souhaitons ici nous inscrire dans ce domaine d'investigation et étudier si certaines tendances préfigurant les 12 En toutes généralités, le phénomène de suburbanisation touche également la population un étalement urbain (cf Boiteux-Orain et Hunot, 2002 pour plus de détails).
et se manifeste par
Les nouvelles proximités urbaines
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d'investigation et étudier si certaines tendances préfigurant les phénomènes contemporains de suburbanisation des emplois y sont présentes. Par ailleurs, en nous référant aux méthodologies empiriques développées dans les études anglo-saxonnes, notre recherche s'appuie sur des décompositions sectorielles et géographiques fmes des activités économiques à une échelle intra-urbaine et se situe parmi les rares recherches menées en France selon cette grille d'analyse (cf Aguiléra, 2002, pour Lyon, Gaschet, 2000, pour Bordeaux et BoiteuxDrain et Guillain, 2004, pour l'Ile...de-France). Dans cet esprit, elle contribue aux études comparatives françaises (Bourdeau-Lepage et Hurlot, 2004). Pour analyser la multipolarité de l'espace urbain dijonnais, nous caractérisons dans un premier temps (Section 1) l'organisation spatiale des emplois et de la population en faisant référence aux modèles théoriques de la microéconomie urbaine et nous montrons qu'une organisation multicentrique de l'emploi total est bien présente sur le territoire de la COMADI(Communauté d'Agglomération de Dijon),
aussi bien en 1990 qu'en 1999.Nous observons un renforcement des pôles d'emplois périphériques au détriment des pôles d'emplois centraux. Une analyse plus qualitative de ce phénomène est alors réalisée à partir de l'étude des liens entre la localisation des pôles d'emplois, leur caractère mixte (résidentiel et économique) ou non et leur composition sectorielle (Section 2). A l'aide d'Analyses en Composantes Principales, nous pouvons préciser différents profils de pôles d'emplois opposant les pôles centraux, mixtes et plutôt spécialisés dans les activités tertiaires, aux zones économiques périphériques spécialisées dans les secteurs traditionnels (industries, commerces de gros, construction, services à la consommation). En confrontant, dans un dernier temps (section 3), ces différents résultats avec les schémas explicatifs et les formes de la suburbanisation, deux tendances sont mises en évidence: un phénomène de suburbanisation des emplois de services et un dynamisme marqué des zones périphériques à l'Est de l'agglomération dijonnaise. S'ajoute à cette tendance un rééquilibrage de la répartition des activités tertiaires entre les pôles centraux et les pôles périphériques. Ces observations nous conduisent, en conclusion, à une réflexion plus large sur les techniques mobilisées et sur les possibilités d'évaluer si les phénomènes de suburbanisation des emplois s'accompagnent d'un déclin de l'attractivité des zones centrales et d'une réorganisation résidentielle de l'espace urbain.
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1-
A. Rallet et A. Torre
L'ORGANISATION ET DES EMPLOIS
SPATIALE DE LA POPULATION DANS LA COMADI
Nous nous intéressons ici à l'organisation générale de l'emploi et de la population et nous souhaitons montrer que la configuration
urbaine de la COMADIest de type multicentrique. Pour cela nous nous appuyons sur les grands traits de l'organisation spatiale, issus des modèles de la microéconomie urbaine, pour rechercher à quel type de configuration urbaine théorique celle de la COMADIs'identifie le mIeux. 1. Principes théoriques
Les modèles de la microéconomie urbaine fournissent un cadre analytique pour saisir certains traits de l'organisation spatiale des activités économiques et de la population dans les espaces urbains. Les choix de localisation des agents sont ainsi définis sur la base d'arbitrage entre les avantages et les inconvénients de la centralité, ces avantages et inconvénients découlant en particulier du niveau des coûts de transport et des valeurs foncières, du degré des extemalités positives ou négatives générées par l'agglomération... Les modèles non monocentriques par exemple (Fujita, 1990,Fujita et Ogawa, 1982, Ogawa et Fujita, 1980, 1989), montrent sous quelles conditions, impliquant certains des éléments précédents, différentes configurations urbaines d'équilibre de type mono centri que, multicentriques ou mélangées peuvent émerger. En s'appuyant sur la valeur du ratio o/t où a exprime la sensibilité de l'activité productive aux économies d'agglomérationl3 et t la valeur des coûts de transport, Fujita et Ogawa (Fujita et Ogawa, 1982, Fujita, 1990) identifient les conditions d'émergence de ces différentes configurations. Ainsi, lorsque les bénéfices retirés de la concentration décroissent linéairement quand la distance entre les firmes augmente, alors aucune configuration d'équilibre de type multicentrique ne peut émerger tandis que la configuration monocentrique (a) émerge pour des valeurs élevées de alt et que la ville tend vers une structure mixte quand les valeurs de olt diminuent. Si les bénéfices retirés de l'agglomération décroissent de façon exponentielle avec la distance entre les firmes, alors des configurations d'équilibre multicentriques de type (b) ou (c) sont possibles. Dans ce cas, l'effet très local des économies
13Ce paramètre peut s'interpréter comme les bénéfices retirés par une fmne des interactions non marchandes avec d'autres finnes et on suppose que ce bénéfice diminue quand la distance entre les finnes s'accroît (cf par exemple, Fujita, 1990, 1994 ou Fujita, Thisse, 2000).
- -
37
Les nouvelles proximités urbaines
d'agglomération que traduit la forme exponentielle négative pennet la constitution de centres secondaires. a) Configuration
monocentrique
Ménages
(b) Configuration
M
duocentrique
Ménages
Firmes
(c) Configuration
M
Firmes
Ménages
Firmes
Firmes
M
tricentrique
Ménages
Firmes
Ménages
Firmes
M
Plus généralement, ces configurations correspondent à différents schémas d'associations géographiques des zones d'activités économiques et des zones résidentielles et elles peuvent être caractérisées par les grandes tendances suivantes: les zones d'emplois sont centrales et/ou périphériques, la concentration spatiale de l'emploi est très forte (dans les cas monocentrique ou multicentrique) et les densités résidentielles tendent à diminuer quand on s'éloigne du centre de l'espace urbain. Ce sont ces grandes caractéristiques qui nous intéressent ici. Autrement dit nous ne cherchons pas à tester les déterminants des choix de localisation ni à estimer leur impact sur l'organisation économique et résidentielle de la COMADI. 2. L'espace urbain de la COMADI: caractéristiques et données utilisées
La COMADIse compose en 2000 de 16 communes contiguës: la ville-centre Dijon et 15 autres communes-banlieues encerclant Dijon (cf Carte 1) : Ahuy, Chenôve, Chevigny Saint-Sauveur, Daix, Fontaine lès Dijon, Longvic, Marsannay la Côte, Neuilly lès Dijon, Ouges,
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A. Rallet et A. Torre
Perrigny lès Dijon, Quetigny, Saint-Apollinaire, Sennecey lès Dijon et Talant. Avec une surface totale de 172,4km? et une population totale de près de 239 000 habitants, la COMADIest un espace urbain de taille moyenne à l'échelle des agglomérations françaises et de taille très modeste comparativement aux aires urbaines généralement étudiées dans les recherches internationales. Carte 1 LES COMMUNES ET LES IRIS DE LA COMADI
Les données utilisées concernent l'emploi salarié et la population totale sans double compte pour les années 1990 et 1999. Elles proviennent des fichiers du recensement de la population et des fichiers SIRENE foumis par la direction régionale de l'INSEE Bourgogne. Les données d'emploi salarié dont nous disposons pour cette étude correspondent essentiellement à l'emploi privé. Ces données sont identifiées à la fois au niveau communal et à un niveau infra-communal (IRIS-2000@' voir Annexe) pour les communes de plus de 5 000 habitants (cf Annexe 1). Parmi les 16 communes de la COMADI, 9 sont irisées (Carte 1) et notre échantillon comprend finalement 114 unités spatiales d'observation (cf Annexe 2). Les procédures d'irisage des données sont très récentes et nous avons
pu bénéficier pour 1990 de cette possibilité. Finalement, l'emploi salarié du secteur privé, recensé et identifié au niveau des IRIS dans la base de données SIRENE s'élève à 74 493 emplois en 1990 et 70 770 emplois en 1999. A partir des données démographiques, économiques
39
Les nouvelles proximités urbaines
et cartographiquesl4, nous avons pu construire une base de données originale, tant au niveau des décompositions sectorielles que de l'échelle géographique, nécessaire à l'étude intra-urbaine des schémas de multipolarisation (les variables sont décrites en Annexe 3). 3. La nature de la configuration
urbaine de la COMADI
D'une manière générale, la configuration urbaine de la COMADI est marquée par une répartition inégale de l'emploi: les valeurs de l'indice de Gini sont respectivement de 0,77 pour 1990 et de 0,745 pour 1999. On remarque par ailleurs (Tableau 1) que 25% des emplois se regroupent sur seulement 6% du territoire, que 50% des emplois occupent 15 à 16,4% du territoire et que seuls 29 à 34% du territoire suffisent à capter 75% des emplois. Tableau 1 L'INEGALE REPARTITION
GEOGRAPIDQUE
DES EMPLOIS DANS LA COMADI
Des Analyses en Composantes Principales menées sur les 114unités urbaines de la COMADI,caractérisées par leurs coordonnées géographiques et les valeurs d'emplois et de population mesurées en niveaux et en densités, révèlent une nette opposition entre les unités spatiales centrales et périphériques. Pour 1990et 1999,la configuration urbaine est marquée par une répartition spatiale de l'emploi et de la population de type radioconcentrique où les unités spatiales se répartissent entre: des zones centrales plutôt riches en emplois et en population (IRIS dijonnais centraux), des zones intermédiaires moins densément peuplées et pauvres en emplois et des zones périphériques soit plutôt riches en emplois et pauvres en population (ZAC,ZI et Parcs tertiaires) soit plutôt pauvres en emplois et en population (Communes et IRISpériphériques résidentiels)15. Cette organisation peut être rapprochée d'une configuration urbaine théorique de type multicentrique où un centre économique est entouré d'une couronne résidentielle puis d'une couronne occupée par 14
Les données cartographiques ont été traitées par le logiciel ArcView(Ç)3.2 à partir de fond de carte à
l'îlot fournies par la direction régionale Bourgogne de l'INSEE. 15 Les résultats détaillés sont disponibles dans Baumont et Bourdon,
2002.
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A. Rallet et A. Torre
des activités économiques. Il existe, bien sûr, différentes nuances entre les configurations multicentriques théoriques et la configuration observée: les modèles non-monocentriques « décrivent» des espaces urbains simplifiés et cherchent à établir dans ce contexte certaines tendances à l'agglomération des firmes, qui sont le plus souvent considérés comme identiques. Ainsi, la non-isotropie de l'espace réel quant aux possibilités d'occupation du sol conduit dans notre cas à une asymétrie dans les localisations périphériques: la couronne périphérique est plutôt composée de zones économiques à l'est et de zones résidentielles à l'ouest. Nous constatons également que le centre de la COMADIest plutôt composé de zones mixtes, alors que le schéma multicentrique théorique suppose que les emplois s'agglomèrent au centre. L'identification des centres économiques permet de préciser le schéma multipolarisé des activités économiques de la COMADI. 4. L'identification
des pôles d'emplois
Les méthodes standards d'identification des centres s'intéressent principalement à la concentration des activités économiques et différents indicateurs de cette concentration peuvent être retenus: nombre d'emplois, densité brute ou nette d'emplois, ratio emploipopulation. Ces indicateurs sont calculés à partir de l'emploi total mais peuvent également être définis seulement par rapport à certaines catégories d'activités ou de fonctions économiques qualifiées de centrales (c'est le cas par exemple des activités tertiaires, des activités administratives ou des fonctions de décision). La méthode proposée par McDonald (1987)et enrichie par Guiliano et Small (1991)définit un centre comme «une zone ou un ensemble de zones contiguës dont l'emploi total est supérieur d'une part à un seuil donné E et d'autre part à l'emploi des zones qui l'entourent et dont la densité d'emplois est supérieure d'une part à un seuil donné D et d'autre part à la densité des zones qui l'entourent». Cette méthode est aujourd'hui la plus utilisée mais elle pose un certain nombre de questions relatives notamment à la fixation des valeurs des seuils et à la pertinence des concentrations d'emplois détectées (Baumont et al., 2004b). Des amendements nombreux ont été proposés, notamment pour tenir compte des spécificités des espaces urbains étudiés et des données disponibles. Dans notre cas, les éléments qui ont guidé nos choix sont les suivants: la taille modeste de l'espace urbain, l'hétérogénéité du découpage IRISvs communes et l'hétérogénéité de l'occupation emploi vs population. En effet, les zones centrales sont petites et souvent mixtes, tandis que les zones périphériques sont plus vastes et souvent mono-fonctionnelles. Ceci nous amène à privilégier des seuils
individuels d'emplois et à étudier la concentration avec deux indicateurs:
le ratio emploi/population et la densité d'emplois. En
41
Les nouvelles proximités urbaines
effet, si le ratio emploi/population permet de faire ressortir la mixité d'usage (McDonald, 1987, McDonald et McMillen, 1990), il s'avère délicat à utiliser compte tenu de la défmition du zonage IRIS (cf Annexe 1). Celui-ci est défini selon un critère de population et distingue les IRISde population des IRIS« inhabités» comme les zones d'activités économiques, les zones récréatives ou autres (cimetières, gares, étendues d'eau...). Le ratio emploi-population sur un tel zonage tend donc à faire ressortir les zones d'activités économiques au détriment des IRIS mixtes. La densité d'emplois permet de compenser cet effet pour les petites zones comprenant beaucoup d'emplois. C'est pourquoi nous considèrerons qu'une zone peut être identifiée comme un centre si elle satisfait le critère de seuil d'emplois età l'un au moins des critères de densités d'emplois ou de ratio emploi-population. Pour le seuil de densité d'emplois, nous avons retenu a priori la valeur de 10emplois par acre (soit environ 2 470 emplois au km2) suggérée par Giuliano et Small (1991).Pour fixer les seuils d'emplois, nous avons étudié la distribution de l'emploi total en 1990 et en 1999 et avons repéré, d'une part les valeurs indiquant une rupture dans cette distribution et d'autre part la valeur médiane de l'emploi de telle sorte que la moitié au moins des emplois de la COMADIsoit contenue dans les centres ainsi identifiés (Tableau 2). Tableau 2 ANALYSE DE LA DISTRIBUTION
[5000 - 5357]* 3 [4000 - 4999] 5 [3000 - 3999] 6 [2000 - 2999] 9 Il **[1600 - 1999] * valeur observée maximale ** valeur minimale pour regrouper
21,26 33,51 37,65 46,28 50,63
DES EMPLOIS ET SEUILS
[5000 - 5558]* [4000 - 4999] [3000 - 3999] [2000 - 2999] **[1400 - 1999]
au moins 50% de l'emploi
2 6 6 7 Il
15,28 39,21 39,21 42,98 51,23
cumulé
Il apparaît que pour identifier au moins 50% de l'emploi de la COMADI,il faut retenir un seuil de 1600 emplois en 1990 et de 1400 emplois en 1999: ce qui correspond dans les deux cas à Il zones. Ces seuils d'emplois apparaissent adaptés à la taille de notre territoire d'étude: pour l'aire métropolitaine bordelaise, Gaschet (2000)retient un seuil de 2000 emplois et pour l'lIe de France, Boiteux-Orain et Guillain (2004)retiennent un seuil de 5000 emplois. Toutes les zones qui satisfont le critère de seuil d'emplois satisfont les seuils choisis soit pour la densité d'emplois soit pour le ratio emploilpopulation. La localisation de ces zones sur le tenitoire de la COMADIpermet de
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A. Rallet et A. Torre
visualiser les contiguïtés entre les zones d'emplois (cf Cartes 2a pour 1990 et 2b pour 1999).
Carte 2a
Carte 2b LES paLES DE LA COMADI EN 1999
LES paLES DE LA COMADI EN 1990
Centres
90
IIIIIIII!!II
IIIIIIIIII
Centres
99
Nous observons alors que la multipolarisation de l'espace urbain de la COMADIs'organise autour de 5 pôles d'emplois, qualifiés soit de Pôle Central (à l'instar du CBD), soit de Pôle Multicommunal lorsqu'ils occupent de façon continue tout ou partie du territoire d'au moins deux communes, soit enfm de Pôle Isolé. Pour 1990(Tableau 3), il s'agit du regroupement des zones centrales de la ville de Dijon (Dl, D4, D6 et D64), du regroupement des zones d'activités périphériques au Nord (D63et Sapo3), du regroupement des zones d'activités au Sud (CoS, D27et L04), de la zone isolée QU5et de la zone isolée Perry. Tableau3 POLES D'EMPLOIS
Sud
« CBD » Ville-Centre (Dijon) « Multi -communes»
Nord
« Multi -communes»
Quétigny Perrigny
« Pôle isolé» « Pôle isolé»
Centre- Ville
EN 1990
Monge (D 1) ; Grangier (D4) Darcy (D6) ; La Gare (D64) Zone d'activités de Chenôve (Co8) Arsenal (D27 ; Dijon) Zone d'activités de Longvic (Lo4) Zone d'activités Nord-Est de Dijon (D63) Zone d'activités de Saint-Apollinaire (Sapo3) Zone d'activités de Quétigny (Qu5) Perrigny les Dijon
13 364 12 608
6957 3073 1 633
Pour 1999 (Tableau 4), on trouve également 5 pôles, cependant, le regroupement central ne comporte plus que 3 zones (Dl, D4 et D64), tandis que le regroupement Nord en comporte maintenant trois (D62,
43
Les nouvelles proximités urbaines
D63 et Sap03). Le regroupement Sud comprend 3 zones (COS,Lo4 et Ma3), la zone isolée QU5subsiste et une seconde zone isolée apparaît: la zone économique de Chevigny (Chs) tandis que la zone isolée Perry a disparu. Tableau4 POLES D'EMPLOIS
Sud
«Multi-communes»
Centre- Ville Nord
« CBD » Ville-Centre (Dijon) «Multi-communes»
Quetigny Ch ev igny
« Pôle isolé» « Pôle isolé»
EN 1999
Zone d'activités de Chenôve (Co8) Zone d'activités de Longvic (Lo4) Zone d'activités de Marsannay (Ma3) Monge (D 1) ; Grangier (D4) La Gare (D64) Zone d'activités Nord-Est de Dijon (D63) Zone d'activités la Toison-D'Or de Dijon (D62) Zone d'activités de Saint-Apollinaire (Sapo3) Zone d'activités de Quétigny (Qu5) Zone d'activités de Chevigny (Ch5)
Il 540
9644 9634
4014 1 421
On observe une certaine évolution de la hiérarchie des centres entre 1990et 1999: le pôle d'emplois Sud est devenu le centre le plus important tandis que le pôle d'emplois Nord concurrence très fortement le Centre-Ville. La faiblesse du centre Perrigny en 1990se confnme en 1999tandis que le centre Quetigny a gagné des emplois mais reste petit par rapport aux autres centres de la COMADI.Si nous comparons les zones retenues en 1990et en 1999,nous pouvons voir que, sur Dijon, une zone centrale a disparu (D6 : Darcy) ainsi qu'une zone au sud (D27: Arsenal) qui constituait une partie du pôle Sud de la COMADI.
En revanche, 3 zones périphériques
sont apparues (D62 : La
Toison d'Or, Ma3: ZAC de Marsannay la Côte et Ch5: Zone économique de Chevigny Saint Sauveur). Le poids des zones d'activités économiques s'est ainsi renforcé à la fm des années 90. Si ces différents résultats soulignent le caractère multicentrique de la COMADI et suggèrent un mouvement de recomposition de l'organisation de la centralité des zones centrales vers les zones périphériques, ils ne donnent cependant qu'une vision partielle de ce phénomène. Ses aspects qualitatifs notamment sont indéterminés puisque nous ne savons pas quels types d'activités économiques occupent quels pôles. Les analyses sectorielles que nous présentons maintenant permettent d'étudier cette question. ll-
LES LOGIQUES SECTORIELLES
DE LOCALISATION
Les modèles de la microéconomie urbaine permettent de décrire les logiques de localisation des activités économiques sur la base d'arbitrages entre les besoins de proximité géographique vis à vis des
44
A. Rallet et A. Torre
ménages et/ou vis à vis d'autres activités économiques, les besoins en accessibilité liés aux infrastructures de transport ou de communication et les besoins en emprise foncière. La proximité fait référence aux interactions non marchandes qui unissent les firmes, leurs fournisseurs et leur clientèle (firmes et ménages) et qui sont ainsi facilitées par la concentration. L'accessibilité est liée aux coûts de déplacement et de transport des individus, des marchandises et de l'information. La tendance à la diminution de ces coûts rend, toutes choses égales d'ailleurs, la concentration moins intéressante. Ogawa et Fujita (1980, 1989)examinent par exemple le cas où existent des interactions non marchandes entre les firmes et des coûts de déplacement entre les firmes et les ménages. Ota et Fujita (1993)distinguent par ailleurs les unités back-office des unités front-office: l'accessibilité conditionne les relations de front-office à back-office tandis que la proximité influence les interactions entre les front-office uniquement. Nous pouvons constater, d'une part, que le CBD et les centres périphériques répondent de manières différentes à ces besoins et que ces manières peuvent, d'autre part, évoluer dans le temps. Ainsi, l'organisation multicentrique des espaces urbains peut intuitivement être perçue comme une organisation économique efficace où les activités qui recherchent fortement les avantages de la centralité se regroupent au CBD tandis que les autres activités plus sensibles à l'accessibilité liées aux grandes voies de communication périphériques et à la disponibilité en sol en périphérie s'installent dans les centres périphériques. Par exemple, si on étudie pour chacune des zones composant les pôles d'emplois identifiés dans la section précédente, le nombre d'établissements et le nombre moyen d'emplois par établissement, on s'aperçoit que les zones centrales sont composées d'établissements nombreux et plutôt de petites tailles, tandis que les zones d'emplois en périphérie sont constituées de moins d'établissements mais de plus grande taille en moyenne. Ainsi, conformément à l'arbitrage opposant les avantages de la proximité aux coûts fonciers et compte tenu de la disponibilité en sol plus faible au centre qu'en périphérie, les petits établissements privilégient les localisations centrales et les grands établissements les localisations périphériques. Cependant, rien n'est encore dit sur la nature des activités qui sont sensibles à tels ou tels déterminants de localisation et si les pôles d'emplois périphériques, dont nous avons observé le poids croissant, ne pouvaient pas répondre également à certains aspects de la centralité. En effet, l'implantation, au cours des années 90, de Parcs Technologiques ou de Pôles Tertiaires d'Excellence en périphérie amène à s'interroger aujourd'hui sur l'attractivité de ces nouveaux
centres et sur la concurrence qu'ils peuvent faire au CBD. Les questions du déclin du CBDet de l'émergence des Edge Cities entrent par exemple dans cette problématique. Bien sûr, l'espace urbain que
45
Les nouvelles proximités urbaines
nous étudions est d'une taille très réduite par rapport aux aires métropolitaines dans lesquelles les créations de Edge Cities se manifestent et il n'est pas de notre propos d'essayer de transposer une telle manifestation à la COMADI.Nous allons simplement chercher à appréhender certains phénomènes liés aux logiques de multipolarisation des espaces urbains: quels secteurs occupent quels centres? Les centres sont-ils spécialisés ou diversifiés? Des phénomènes de recomposition économique de l'agglomération dijonnaise peuvent-ils être observés? 1. Analyse de la composition
sectorielle des zones d'emplois
L'application de notre méthode d'identification des centres, conduit, pour les raisons évoquées précédemment, à ne retenir qu'un nombre réduit de zones dfemplois centrales, alors qu'elles présentent des densités d'emplois souvent très fortes. Afin d'améliorer la représentativité des zones centrales dans notre étude sectorielle, nous avons diminué le seuil minimum d'emplois à 1000,tout en conservant la satisfaction d'au moins un des critères «densité d'emplois» et «ratio emploi-population». Comme nous souhaitons en outre pouvoir comparer l'organisation économique de la COMADIen 1990et en 1999 et en apprécier l'évolution entre ces deux dates, nous avons retenu les mêmes zones d'emplois pour ces deux années16: au total, notre échantillon comprend maintenant 22 zones, dont 9 zones centrales (Cartes 3). Disposant de données d'emplois répertoriées selon la nomenclature NAF700,nous avons pu construire 7 secteurs d'activités: l'industrie (IND), la construction (CONST), le commerce de gros (COMGR), les infrastructures de transport et de communication (INFTR),les services aux particuliers (SPART),les activités financières, immobilières et d'assurance (FIA) et les services aux entreprises (SENT)17.
16
Travailler sur un échantillon constant nous amène à retenir des zones qui ne satisfont pas les critères sur une des deux dates: il s'agit pour 1990 des zones D62 et FoS, pour lesquelles le seuil de 1 000 emplois n'est pas atteint, et pour 1999 des zones Perry et D27, pour lesquelles ni le seuil de 10 emplois par acre ni le ratio emploi-population égal à 1 ne sont satisfaits. 17 La composition de ces secteurs est donnée en Annexe 1. Notons que les emplois dans le secteur agricole et dans les administrations publiques n'ont pas été retenus compte tenu de l'incomplétude de la base de données dans ces secteurs.
46
A. Rallet et A. Torre
Carte 3 LES ZONES D'EMPLOIS DE LA COMADI (SEUIL A 1000 EMPLOIS)
Zones
d'emplois
90-99
Le choix de ces secteurs et le niveau de désagrégation auquel nous avons souhaité travailler permettent d'apprécier par exemple les choix de localisation des activités de bureaux (FIA,SENT),des activités nécessitant la proximité des consommateurs (SPART)ou des autres fmnes (SENT) ou des moyens de transport et de communication (INFTR)et des activités à forte emprise foncière (IND ou CONSTRou COMGR).Ces différentes variables sectorielles sont mises en relation avec des variables de localisation (DCENTRE),de population (pOP et DPOPAC), d'emploi global (EMP et DEMPAC) et d'établissements (NETABet MOETAB)18. L'étude des profils de localisation est réalisée à partir d'analyses en composantes principales complétées par une Classification Ascendante Hiérarchique. Pour 1990, les résultats des ACP (Tableau 5 et Carte 4) font ressortir trois types de profils de localisation.: 1/ le lien entre le secteur FIA, la forte population, le grand nombre d'établissements et les zones centrales (Axe 1),2/ le lien entre l'emploi et le commerce de gros (Axe 2) et 3/ le profil particulier de la zone de la Gare (D64),qui concentre les infrastructures de transport de la COMADI(Axe3).
18
Les caractéristiques
économiques
et sectorielles
de ces 22 zones sont données en Annexe 4.
47
Les nouvelles proximités urbaines
Tableau 5 ACP SECTORIELLE
(1990)
40,85
DPOP AC, POP, FIA,
Axe2 Axe3
22,03 18,50
NETAB vs DCENTRE EMP et COMGR INFTR, MOETAB et DEMPAC
Total
81,39
Axe 1
(+) Ch5, D63, Lo4 vs (-) Dl, D2, D4, D5, D6 (-) D63, D4, Co8, Lo4 (-) D64
Carte 4
ACP SECTORIELLE - 1990 : GRAPHE DES OBSERVATIONS ET CERCLE DES CORRELATIONS
Une Classification Ascendante des 22 zones d'emplois.
Hiérarchique
est effectuée
sur les 3 premières
coordonnées
factorielles
Tableau 6 CLASSIFICATIONS l(ijrounes Groupe Groupe Groupe Groupe Groupe Groupe
1 2 3 4 5 6
ASCENDANTES mERARCIDQUES
Dl, D2, D5, D6, D8, D9, DIO D4 D64 Co8, D63, Lo4 Qu5, D27, DI4 Ch5, D62, Fo5, Ma3, Peny, Sapo3, Sapo4
(1990)
DCENTRE vs POP, DPOP AC et SENT La Poste La Gare COMGR, CONST, IND et EMPTOT DCENTRE vs NETAB, DPOPAC et POP
48
A. Rallet et A. Torre
Le regroupement en 6 classes (Tableau 6) montre les particularités sectorielles des zones centrales ou périphériques ainsi que le caractère spécifique des zones de la Gare (D64)et de la Poste (D4). Les zones d'emplois centrales affichent leur caractère attractif pour les secteurs FIA et SENT. Deux types de zones périphériques apparaissent. Celles du premier type affichent leur caractère attractif pour les secteurs consommateurs d'espace comme l'industrie, le commerce de gros ou la construction. L'autre type de zones périphériques se constitue par opposition aux spécificités des zones centrales. Tableau 7 CARACTERISTIQUES
GENERALES DES GROUPES (1990)
Groupes
MDCentre
EMP90*
POP9O*
NETAB90*
MOETAB90
groupe 1
666,96
20,05
65,52
48,57
5,15
D4
206,88
8,58
9,05
17,53
6,10
D64
573,93
9,59
0,29
0,85
141,38
~roupe4
3971,95
31,53
1,60
13,26
29,65
2roupe 5
2633,66
13,14
14,94
9,75
16,80
17,10
8,60
10,05
21,22
groupe 6
5580,58
MDCentre : distance moyenne au centre des zones composant * en % par rapport à l'ensemble des 22 zones MOET AB : nombre moyen d'emplois par établissement.
les groupes
Les caractéristiques générales des groupes (cf Tableau 7) mettent en avant le pouvoir discriminant des critères de localisation,
d'emploi, de population et d'établissements entre les groupes 1 et 2 (centraux, les plus peuplés et avec le plus d'établissements), le groupe 5 (couronne intermédiaire et assez peuplé) et les groupes 4 et 6 (périphériques, les plus riches en emplois et avec les plus gros établissements). Pour 1999, les résultats des ACP font ressortir les profils suivants: II le lien entre les zones économiques périphériques peu peuplées et les secteurs industriels, de commerce de gros, de construction (Axe 1), 21le lien entre les secteurs FIA, les services aux particuliers et le nombre d'établissements (Axe 2) et 31les caractéristiques spécifiques de la zone D64 (Gare) en termes d'infrastructures de transport et de communication qui comporte très peu d'établissements (Tableau 8 et Carte 5).
49
Les nouvelles proximités urbaines
Tableau 8 ACP SECTORIELLE
Axe I
36,82
Axe2
23,99
Axe3 Total
19,33 80,14
(1999)
POP et DPOPACvs CONS T, IND, COMGR et DCENTRE ~TAJB,SPARTetFL\ INFTR, MOETAB et DEMPAC
(+) Co8, D63, Lo4 vs
(-) D4,
Dl D2, D5, D6, D8
(+) D4, Qu5, Co8 vs (-) Cb5, Perry, Sapo4 (+) D64
Carte 5
ACP SECTORIELLE - 1999 : GRAPHE DES OBSERVATIONS ET CERCLE DES CORRELATIONS
La Classification Ascendante Hiérarchique montre que le regroupement en 6 classes (Tableaux 9 et 10) permet encore de distinguer les zones centrales des zones périphériques, ce qui rend compte de l'importance du facteur localisation et des caractéristiques qui lui sont liées et isole à nouveau, du fait de leurs caractéristiques atypiques, les zones D4 et D64. Les zones des groupes 4, 5 et 6 sont à des distances moyennes assez élevées du centre, elles concentrent le plus d'emplois et les plus gros établissements. Le poids des zones
centrales du groupe 1 et de la zone D4 se retrouve au niveau de la population et du nombre d'établissements. La Classification ne fait pas ressortir de façon nette des spécificités sectorielles pour les différents groupes sauf pour les zones périphériques du groupe 4 qui apparaissent spécialisées dans les activités fortement consommatrices de sol et affichent le lien entre ces activités et les services aux entreprises.
50
A. Rallet et A. Torre
Tableau 9 CLASSIFICATIONS
ASCENDANTES mERARCmQUES
Groupe 1
Dl, D2, D5, D6, D8, D9, DID, D14
Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4
D4 D64 Co8, D63, L04
Groupe 5 Groupe 6
D62, Qu5 Cb5, D27, Fo5, Ma3, Perry, Sapo3, Sap04
(1999)
DCENTRE et EMPTOTvs POP et DPOPAC La Poste La Gare COMGR, CONST, IND, SENT, EMPTOT SPART DCENTRE vs NETAB et DPOPAC
Tableau 10 CARACTERISTIQUES GENERALES DES GROUPES (1999) Groupes
MDCentre
EMP99*
POP99*
NET AB99*
MOETAB99
eroupe 1
715,60
17,55
74,24
43,81
4,49
D4
206,88
8,58
8,38
15,31
6,29
D64
573,93
8,55
0,55
0,42
225,72
2roupe 4
3971,95
32,80
1,43
15,55
23,66
eroupe 5
4605,29
14,06
0,81
12,10
13,03
eroupe 6
5242,63
18,46
14,59
12,81
16,16
MDCentre : distance moyenne au centre pour les zones composant en % par rapport à l'ensemble des 22 zones * MOETAB: nombre moyen d'emplois par établissement.
le groupe
Il faut noter que la composition des groupes 1, 5 et 6 en 1999 n'est plus identique à celle de 1990.Ainsi, la zone D14rejoint le groupe 1, la zone D62 quitte le groupe 6 et s'associe avec la zone QU5tandis que la zone D27rejoint le groupe 6. Ces modifications s'expliquent par les changements dans la structure générale et sectorielle des zones d'emplois entre ces deux dates. Par exemple, nous avions signalé que la zone D62 apparaissait dans l'échantillon commun alors qu'elle ne satisfaisait les critères qu'en 1999, alors que la zone D27 ne les satisfaisait qu'en 1990. La première zone a fortement gagné des emplois entre ces deux dates, alors que la seconde en a fortement perdu. Les résultats des ACPet les classifications se révèlent ainsi être un outil intéressant pour souligner ces modifications. Une analyse plus fme de la composition sectorielle des zones d'emplois nous pennet maintenant d'appréhender la composition des zones d'emplois en termes de spécialisation ou de diversification. 2. La spécialisation
des zones d'emploi
Pour chacune des zones d'emplois, nous avons calculé les coefficients de spécialisation et nous avons retenu les secteurs de spécialisation qui avaient les plus fortes valeurs. Nous avons indiqué,
51
Les nouvelles proximités urbaines
pour chaque secteur de spécialisation, la part que ces activités occupent dans l'emploi de la zone. Tableau 11 REPARTITION DES SECTEURS DE SPECIALISATION DANS LES ZONES D'EMPLOIS EN 1990
GROUPES ZONES Nbsect spec Groupe1
3
% (sect) 41,5 SPART)
coeff. spéc.
1,76 25,4 (SENT)
02
3
05
3
D6
3
2,88 ~6(SPART) 9 45,1 1,97 SPART) 1 40,5 1,77 SPART) 1 3,82 42,1 (SENT) 9
D8
3
30,3 (FIA)
Dl
2
09
4
47 (SPART)
D10
3
38,6 (SENT)
Groupe2
04
2
57 (SPART)
Groupe3
D64
1
97,6 INFTR)
% (sect)
13,3 (FIA) 27,2 (FIA)
coeff. spéc.
% (seet)
2,24 17,3 (FIA)
2,83
2,24 2 4,59 5 16,5 (SENT)
1,50 5
1,48 1,37 31,3 (SPART) l 2,48 5,12 27,3 (SENT) 5 2,05 1,87 6 20,6 (SENT) 1 3,50 2,92 9 17,3 (FIA) 7 2,49 3,95 23,4 (FIA) 8 3 6,38 9 15,6 1,78 1,97 COMGR) 16 (SENT)
8,1 (FIA) 13,7 (FIA)
Co8
3
28,6 (IND)
Lo4
3
b5,2 (!ND)
063
3
39,5 (!ND)
2
36,2 (IND)
1,42 26,8 (SPART) 1,15
014
2
b9,8 (IND)
D27
1
Qu5 Groupe6
2 4
37,4 (IND)
ChS
2
062
2
Fo5
4
Ma3
3
Perry
2
Sapo3
4
43,1 (IND)
Sapo4
1
82,6 (IND)
79,32 88,81
1,36 2,31 1
64,58 87,1 81,4 1,81 2
89,53 65,43
1,34
74,18
2,03 1 1,20 8
67,12 86,25
2,65
81,46 63,02
l,Dl 1
75,76 38,75
1,22 8
70,81
1,49 14,9 (CONST) 1,40 18,1 (INFTR) 1,18
2,69 b7,9 (!ND) 9 39,8 3,75 CONST) 8 36,4 l,59 SPART) 3 43,9 1,92 SPART) 1 4,87 74,4 (INFTR) 2
84,23
97,57
44,4 (IND)
2,78 7 b (FIA) 2,53 38,8 (INFTR) 8 40,1 1,75 SPART) 3 30,8 (!ND)
coeff. % emploi spéc.
80,42
3
GroupeS
% (seet)
23,8 (SPART) 1,04 11,2 1,42 COMGR) 2 10,7 (FIA) 1,20 9,5 (COMGR) 8
14,2 CONST) 1,14 16,1 3 22,4 (INFTR) 1,47 COMGR) 2,60 1,08 6 Il,5 (CONST) 3 9,6 (COMGR) l,57 1,98 20,9 9 21 (CONST) 3 COMGR)
Groupe4
coeff. spéc.
1,29 13,7 (CONST) 5 15,3 1,93 COMGR) 3 1,34 33,8 (!ND) 8 2,29 24,3 (CONST) 8 1,01 10,7 (CaNST) 3 20,1 2,53 1,72 COMGR) 8 3,29 8
8,8 COMGR)
1,11
79,2 81,28 75,22
16 (CaNST) 12,5 COMGR)
1,51 9,6 5 COMGR) 1,20 9
1,20 9
12,1 (SENT)
1,10 11,4 4 CaNST)
1,08 1
95,75 80,77 85,12 86,69 82,55
52
A. Rallet et A. Torre
Pour 1990 (cf Tableau Il), on remarque ainsi que les zones centrales D4 et celles du groupe 1 sont spécialisées dans les secteurs FIA, des services aux particulier et des services aux entreprises. Les plus forts coefficients de spécialisation pour chacun de ces secteurs sont respectivement enregistrés pour la zone République (D8), Monge (Dl) et Darcy (D6).Les zones des groupes 4 et 6 sont spécialisées dans les secteurs de la construction, du commerce de gros et de l'industrie. Les zones possédant les plus forts coefficients de spécialisation pour chacun de ces secteurs sont, dans le groupe 4, la zone industrielle de Longvic (L04) pour l'industrie et la zone industrielle nord-est de Dijon (D63)pour la construction et le commerce de gros. Dans le groupe 6, les plus forts coefficients de spécialisation sectorielle sont enregistrés pour l'industrie par la zone industrielle sud-est de Saint-Apollinaire (Sapo4), par la zone industrielle nord-est de Saint-Apollinaire (Sapo3) pour le commerce de gros et par la zone d'activités de la Toison-d'Or (D62)pour le secteur construction. Les zones du groupe 5 sont surtout spécialisées dans l'industrie (le plus fort coefficient de spécialisation est pour la zone Voltaire à Dijon (DI4)). Ces résultats, repris de façon synthétique pour les 6 groupes, montrent par ailleurs que le groupe 6 est aussi globalement spécialisé dans les infrastructures de transport et de communication tandis que le groupe 5 est aussi globalement spécialisé dans les services aux particuliers. Pour 1999, l'analyse des coefficients de spécialisation (Tableau 12)révèle une forme de recomposition sectorielle des zones d'emplois. Ainsi, les zones centrales du groupe 1 sont toujours fortement spécialisées dans les activités FIA et restent également spécialisées dans les services aux particuliers, mais elles conservent de justesse leur spécialisation dans le secteur des services aux entreprises. La zone Darcy (D6) présente le plus fort coefficient de spécialisation dans le secteur FIA et la zone Monge (D1) présente le plus fort coefficient de spécialisation dans les services aux particuliers. Les profils sectoriels de la Poste (D4),de la Gare (D64)et celui du groupe 4 qui contient les mêmes zones d'emplois qu'en 1990,restent inchangés. En revanche, les profils des groupes 5 et 6 se modifient entre 1990et 1999et l'explication n'est qu'en partie seulement liée à la modification de leur composition. En effet, si on réunit, pour chaque année, les groupes 5 et 6, on obtient globalement les mêmes zones (à l'exception de la zone D14). Ainsi, si ces zones gardent leur spécialisation dans les secteurs IND, CONST et COMGR,elles sont désormais plus nombreuses à être spécialisées dans les services aux particuliers (5 en 1999 contre 3 en 1990) et dans les services aux entreprises (5 en 1999contre 3 en 1990).Dans ces deux secteurs, les plus forts coefficients de spécialisation sont enregistrés dans la zone d'activités de la Toison-d'Or (D62) pour le secteur SPARTet dans la
53
Les nouvelles proximités urbaines
zone industrielle sud-est de Saint-Apollinaire (Sapo4) pour le secteur SENT. Tableau 12 REPARTITION DES SECTEURS DE SPECIALISATION DANSLES ZONES D'EMPLOIS EN 1999 GROUPES zones Nbsec spéc Groupe1
3 Dl
2
D2
3
D5
1
D6
3
D8
3
D9
2
D10
3
D14
1
Groupe2
D4
3
Groupe3
DM
1
Groupe4
4
% (sect) 46,4 (SPART) r74,1 SPART) 63,5 SPART) ~7,7 SPART) ~2,5 SPART) 133,9 SPART)
134(IND) ~1,8(IND)
D63
3
30,7 (IND)
GroupeS
3 D62
3
QuS
3 3
Groupe6 CbS
3
D27
4
FoS
3
Ma3
4
Perry
3
Sapo3
4
Sapo4
3
1,69 13,5 (SENT) 2,803 15,9 (FIA)
coeff. spéc.
% (sect)
coeff. spéc.
1,08
Il,7 (FIA)
2,16
48,2 (!ND) 49,7 SPART) 54,1 SPART) 46,4 SPART)
% (sect)
coeff'. % emploi spéc. 71,64 90,01
3,055
2,401 13,3 (SENT) 1,104 10,9 (FIA)
87,6
2,087
47,69
1,804 1,986 ~5,0(FIA)
4,797 12,8 (SENT)
1,068
90,33
1,281 60,4 (SENT)
2,53 20,1 (FIA)
3,853
84,34
K>5,5(INFTR) 3,687 Iso,s 1,911 ~1,0(FIA) ~SPART) 197,1 5,463 ~INFTR)
4
4
% (sect)
145,9(INFTR) 2,582 12,2 (SENT) 1,016 11,3 14,9 2,205 CaNST) 125,7(SENT) 2,13~ COMGR)
Co8
Lo4
coeff. spéc.
58,08 51,88
1,189
65,5 18,1 4,031 INFTR)
IS,6 1,69 17,9 (INFTR) 1,01 CONST) 12,4 1,088 ~0,2(SENT) 1,681 COMGR) 16,8 ~4,0 2,528 COMGR) 1,534 CaNST)
2,405 ~3,5(INFTR) 1,322 12 (CaNST) 1,87 12,6 (SENT) 1,04 10 'CO MGR) 12,1 2,046 18,5 (SENT) 1,54 COMGR) 11,1 8,5 1,754 CaNST) 1,169 COMGR) 14,6 ~,8 33,1 (lND) 1,63 l,51 (CONST) ~COMGR) 10,7 51,2 (!ND) 2,552 126(INFTR) 1,485 CONST) tn,3 31,4 (IND) 1,565 SPART) 1,183 13 (CaNST) 17,4 ~O,2(IND) 2,004 19,9 (SENT) 1,661 CaNST) 36,7 19,6 1,39 I/CONST) 2,063 16,7 (SENT) SPART) 14,2 129,4 1,114 CONST) ~8,6(INFTR) 2,737 SPART) 16,6 29,7 (IND) 1,479 ItCOMGR) 2,453 13,7 (SENT) 11,9 64,5 (IND) 3,219 122,7(SENT) 1,892 CONST)
89,61
1,018
97,07 12,4 1,64 COMGR)
1,83
79,9
1,829 9,5 (CaNST)
1,003
63,88
2,479 7,7 1,265 COMGR)
71,52 1,146
67,98
1,47
72,33
1,785
84,64
1,265
66,02
1,14
55,S
1,126
87,9
~,8 1,373 COMGR)
1,31
78,03
1,828 14,8 1,389 COMGR)
2,193
1,253
87,84 92,31
1,499 13,3 1,143 CaNST)
84,54
1,4
73,26 99,16
54
A. Rallet et A. Torre
Le groupe 5, composé des zones d'activités de Quetigny et de la Toison-d'Or à Dijon, présente un profil de spécialisation nouveau où se retrouvent à la fois des activités dites centrales (SENT et SPART) et des activités dites périphériques (COMGR).
Finalement, si l'on étudie la part occupée par les secteurs de spécialisation dans l'emploi des zones (Tableaux Il et 12),on s'aperçoit qu'ils représentent une part très importante (près de 80% en moyenne
pour chacune des deux années) allant des deux tiers à plus de 90% des emplois dans chaque zone. Une part très réduite des emplois se répartit ainsi dans les secteurs restants. Les secteurs les plus représentés en termes d'emplois sont les services aux particuliers pour les zones centrales et l'industrie pour les zones périphériques. Au contraire, dans les zones centrales, les plus forts coefficients de spécialisation sont enregistrés pour le secteur FIA. De même, lorsqu'une zone est spécialisée dans le secteur des infrastructures de transport et de communication, elle enregistre généralement de forts taux de spécialisation. D'une manière générale, plus le secteur est concentré sur l'agglomération et plus les coefficients de spécialisation sont élevés pour les zones concernées, alors que le secteur des services aux particuliers étant plus dispersé sur l'agglomération, il est plus difficile pour une zone d'être fortement représentative dans ce secteur, même si elle compte beaucoup d'emplois. De ces différents éléments, on peut fmalernent conclure que la plupart des zones d'emplois marquent fortement leur spécialisation dans un nombre réduit de secteurs et qu'elles font face à une absence de diversification de la part des autres secteurs (Combes, 2000). Une première synthèse de ces différents résultats montre que les logiques de localisation standard sont respectées en 1990.Les activités
« centrales» des secteurs FIA, des services aux particuliers et des services aux entreprises cherchent à exploiter les avantages de la centralités en termes d'accessibilité et d'interactions non marchandes. Les zones périphériques sont spécialisées dans les secteurs d'activités qui cherchent à éviter les coûts de la centralité (l'industrie, le
commerce de gros et la construction). En 1999, deux modifications intéressantes apparaissent: les services aux entreprises perdent leur image de secteur «central» et certaines zones économiques périphériques se diversifient par la localisation de services aux particuliers et de services aux entreprises. Cette évolution introduit une rupture dans les logiques de localisation du type «jobs follow jobs» observées dans les décennies précédentes. Elle traduit le dynamisme économique de quelques zones d'activités ainsi que le développement d'une zone d'activités économiques (la Toison d'Or) en périphérie. Seules les activités FIArestent « centrales ». L'analyse locale et sectorielle précédente met l'accent sur l'opposition bien marquée entre le centre et la périphérie et sur les
Les nouvelles proximités urbaines
55
tendances d'évolution différentes des zones centrales et périphériques. Ces résultats sont à rapprocher du contexte particulier dans lequel se situe notre étude. D'une part, elle s'inscrit dans un contexte de tertiarisation très forte de l'économie. D'autre part, notre période d'étude se situe dans les premières phases d'observation des mouvements de suburbanisation des emplois tertiaires supérieurs (Boiteux-Orain, Huriot, 2002), tels que les services financiers ou certains services aux entreprises comme le conseil, l'expertise, la R&D, les services juridiques et informatiques, la communication... Enfm, la tendance globale de l'emploi salarié privé sur la COMADIprésente une diminution de 5% entre 1990 et 1999. Dans un tel contexte, nous pensons que cette diminution globale peut masquer des variations sectorielles et géographiques: certains secteurs ont perdu des emplois tandis que d'autres en ont gagné et nous nous attendons à ce que le secteur tertiaire soit dynamique; certaines zones ont perdu des emplois alors que d'autres en ont gagné et nous pouvons rechercher si des phénomènes de suburbanisation des emplois sous-tendent ces évolutions. ill-
L'EVOLUTION TEMPORELLE: ENTRE MULTIPOLARISA TI ON ET SUBURBANISA TION
Les phénomènes de suburbanisation des emplois sont généralement caractérisés à partir de deux critères: II un accroissement plus important des emplois dans les zones périphériques que dans les zones centrales et 21une forte représentativité des activités tertiaires supérieures dans les zones d'emplois périphériques. Nous avons examiné ces deux critères pour la COMADI.
Compte tenu de la répartition géographique des zones d'emplois sur la COMADI(évaluée par la distance au centre: DCENTRE)et sur la base d'une représentation radioconcentrique de l'espace urbain, une décomposition en trois couronnes apparaît la plus pertinente (Tableau 13).Les zones d'emplois centrales composant le « Centre-Ville» sont comprises dans un rayon de 1 km et celles composant la « Périphérie» occupent une couronne située au-delà d'un rayon de 4 km. Seules 4 zones d'emplois se situent dans une couronne «Intermédiaires» mais il n'est pas pertinent de les rattacher soit au Centre-Ville soit à la Périphérie, compte tenu de leur localisation, sans introduire trop d'hétérogénéité dans ces 2 groupes. Néanmoins, nous gardons à l'esprit que les zones Intermédiaires sont plutôt éloignées du CentreVille et plutôt proches de la Périphérie.
56
A. Rallet et A. Torre
1. L'évolution Centre-Périphérie de l'emploi
L'analyse de la recomposition économique de la COMADIentre 1990et 1999est menée en travaillant à la fois sur l'emploi global et sur l'emploi par secteur et les résultats sont donnés en taux de croissance (Tableau 14). Tableau 13 DECOMPOSITION RADIOCONCENTRIQUE DE LA COMADI Couronne Centre-Ville
4 (206); D2 (306); Dl (344); D6 (449); D64 (574) 5 (676); D8 (776); D9 (1049); D14 (1056); DI0 1069)
Intermédiaire
27 (2233); F05 (3428); D63 (3638); Co8 (3906)
Périphérie
04 (4371); Sap04 (4381); D62 (4599); Qu5 (4612) a 03 (4652); Ma3 (5548); Perry (7529); Ch5 (8926)
Tableau 14 EVOLUTION
CENTRE-PERIPHERIE
rrX9099
EMP
NET AB CONST
K:entre Ville
-19,61
-8,98
Intermédiaire
8,27
15,61
Périphérie
16,16
COMADI
-4,79
DE L'EMPLOI
IND
COMGR
-28,79
-53,30
7,81
-19,24
56,54
2,26
1,42
-14,52
(1990 ; 1999)
INFTR
FIA
SPART
SENT
-41,85
22,83
-35,22
-12,16
-59,40
-22,62
-36,65
-43,10
-3,57
190,02
-25,57
14,03
26,00
101,81
105,14
127,46
-23,76
-18,62
10,77
-16,22
10,09
4,08
Globalement les zones d'emplois du Centre-Ville ont connu une forte dégradation de l'emploi (-19,61%),alors que les zones des pôles d'emplois périphériques sont caractérisées par un taux de croissance
de
16,16%
de l'emploi total. Ces résultats très contrastés, mis en
relation avec la baisse globale de l'emploi de 4,79%sur l'ensemble de la COMADI,révèlent bien une tendance à la ditninution de l'attractivité du centre contre une tendance au dynamisme de la périphérie. Deux explications, non exclusives, sont possibles. Ne disposant pas, dans notre base de données, des informations sur les destructions et créations d'entreprises et les changements de localisation, nous ne pouvons discriminer ces différents effets. Ainsi, certaines activités
Les nouvelles proximités urbaines
57
économiques peuvent se délocaliser et quitter le centre pour la périphérie où les charges foncières sont moins élevées et l'accessibilité meilleure: on assiste alors en partie à un simple transfert des emplois. Les activités concernées valorisent plus les facteurs précédents que les avantages retirés de la centralité. On peut également considérer qu'entre 1990et 1999,les activités traditionnelles occupant le centre ont été plus touchées par les difficultés économiques tandis que la périphérie a accueilli de nouvelles activités, notamment des activités tertiaires. La tertiarisation croissante des économies, la restructuration des systèmes productifs liée aux difficultés économiques et à l'essor des NTIC sont ainsi autant d'éléments qui concourent à expliquer les dynamiques différentes des zones centrales et des zones périphériques. L'évolution sectorielle des emplois entre 1990 et 1999 apporte un éclairage qualitatif à ces tendances. On constate que le Centre-Ville perd des emplois dans tous les secteurs, y compris les secteurs tertiaires traditionnellement centraux comme les secteurs FIAet SENT, sauf pour les activités de transport et de télécommunication (rappelons que les zones de la Gare et de la Poste occupent le Centre-Ville). En revanche, les zones périphériques gagnent des emplois dans tous les secteurs, sauf pour l'industrie. Nous constatons en particulier des taux de croissance positifs des emplois dans les secteurs tertiaires FIA, des services aux particuliers et des services aux entreprises. Les zones intermédiaires perdent globalement des emplois dans tous les secteurs sauf dans le secteur de la construction et des services aux entreprises. Face à ces évolutions économiques, on peut se demander si un phénomène plus complexe d'évolution de la configuration spatiale des emplois et de la population n'est pas en train de se produire. 2. Une recomposition
urbaine complexe
Mm d'appréhender les logiques de concurrence pour l'occupation des sols à l'œuvre au cours de la période d'étude, nous avons comparé l'évolution, entre 1990et 1999,des emplois par secteurs à celle de l'évolution de la composition résidentielle vs économique des différentes zones prises individuellement (Tableau 15). Nous pouvons alors observer quelques phénomènes de recomposition intéressants. En premier lieu, il apparaît que les pertes d'emplois dans les secteurs traditionnellement localisés au centre concernent pratiquement toutes les zones du Centre-Ville. Ceci est particulièrement sensible pour les services aux entreprises et les services aux particuliers. On observe parallèlement une progression de l'occupation résidentielle des zones centrales au cours de la période. De la même manière, les secteurs périphériques traditionnels comme l'industrie ou le commerce de gros sont en déclin dans pratiquement toutes les zones périphériques ou intermédiaires. En revanche, bon nombre de zones périphériques gagnent des emplois dans les services
58
A. Rallet et A. Torre
aux entreprises et dans les services aux particuliers, tandis que seules quelques-unes d'entre elles gagnent des emplois dans le secteur FIA. Ces dynamiques positives sur les services concernent principalement les zones économiques de la Toison-d'Or (D62),du nord-est dijonnais (D63), de Chevigny (Cb5), de Marsannay (Ma3) et de Quetigny (Qu5). Ces différents mouvements s'accompagnent naturellement d'une diminution (resp. augmentation) du nombre d'établissements dans la plupart des zones centrales (resp. zones périphériques). Il ressort ainsi de ces différents constats que les mouvements de recomposition sectorielle au sein des différents pôles d'emplois ne sont pas le fait de zones isolées, mais s'inscrivent au contraire dans une tendance plus globale. L'ensemble de ces résultats conforte, d'une part, la tendance quantitative de recomposition de la centralité au sein de la COMADIau bénéfice des zones économiques périphériques et au détriment des zones économiques centrales et suggère, d'autre part, une forme de recomposition qualitative (i.e. sectorielle) de cette centralité. Nous devons néanmoins nuancer nos propos sur trois points. En premier lieu, nous devons souligner que les analyses en taux de croissance doivent être relativisées par rapport aux volumes des emplois concernés. Ainsi les forts taux de croissance dans les services enregistrés dans les zones périphériques s'expliquent par le faible
niveau de ces emplois en 1990. Le deuxième point concerne le fait que nous ne disposions pas de l'emploi du secteur public, ce qui sousestime sûrement la réalité économique des zones d'emplois centrales. Le troisième point est que nous ne pouvons qu'évoquer ce phénomène de recomposition qualitative de formation de centres économiques tertiaires susceptibles de concurrencer les zones économiques centrales car ces phénomènes sont encore seulement naissants dans les grandes métropoles européennes. Un facteur explicatif important de la recomposition de l'espace dijonnais est sûrement la création de la Zone d'Activités Tertiaires et Commerciales de la Toison-d'Or au nord-est de la COMADIet ceci à proximité de zones économiques déjà existantes et faisant partie des zones les plus riches en emplois. La présence de voies de communication rapides à l'est de la COMADIest également un facteur important pour expliquer le dynamisme du pôle d'emploi Nord. De même l'implantation d'un échangeur auto-routier au sud-est de la COMADIconstitue sûrement un facteur explicatif du développement global de l'emploi dans la partie Est de la COMADI. Enfm, on peut noter que l'émergence en 1999du pôle d'emplois de Chevigny à proximité du pôle d'emplois de Quétigny (cf Carte Ib) permet de profiter de l'effet « boule de neige» créé conjointement par l'amélioration de l'accessibilité et de la proximité aux zones d'emplois. Dans cette perspective, la décision de créer un pôle d'excellence consacré aux activités tertiaires sur la commune de Chevigny ne peut qu'accentuer la dynamique positive de l'emploi à
Les nouvelles proximités urbaines
59
l'est de la COMADI.Ce dernier point illustre certes le rôle des grands agents dans l'aménagement de l'espace mais montre également comment les logiques économiques de localisation des activités interagissent avec ces actions. CONCLUSION
Notre étude de la recomposition économique de la COMADInous a conduits dans un premier temps à examiner le caractère multipolarisé de cet espace. Nous avons ainsi identifié plusieurs centres d'emplois pertinents, à la fois en 1990 et en 1999,confIrmant une tendance à l'organisation multicentrique de l'espace urbain dijonnais: le pôle d'emplois historique du centre-ville, 2 pôles d'emplois périphériques au Sud et au Nord de l'agglomération et 2 zones d'emplois isolées. Pour étudier l'éventualité d'un phénomène de
suburbanisation des emplois au cours des années 1990, nous avons recherché les liens existant entre la localisation des emplois et les secteurs d'activités. Nous avons ainsi mis en évidence un phénomène traditionnel de spécialisation des pôles périphériques dans les emplois industriels et de spécialisation du centre-ville dans les emplois de services aux particuliers et de services financiers, d'assurance et d'immobilier. Nous avons par ailleurs observé une recomposition de cette organisation spatiale des emplois en 1999: les pôles périphériques gagnent des emplois tertiaires alors que l'emploi au centre-ville tend globalement à diminuer. Ce phénomène reste à nuancer car nous ne disposions pas des données d'emplois du secteur public. Néanmoins, nous montrons qu'il existe un déséquilibre de la répartition des emplois dans la COMADIopposant l'ouest à l'est aussi bien en 1990 qu'en 1999. L'évolution sur cette période révèle de surcroît un dynamisme économique important au nord-est de la COMADI,ce qui tend à renforcer l'image d'un «vide» économique à l'ouest de l'agglomération.
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Les nouvelles proximités urbaines
61
Cette image reste cependant incomplète et d'autres traits de la recomposition économique de l'espace urbain peuvent être étudiés. En liaison avec l'importance croissante du rôle des services supérieurs dans les dynamiques spatiales, les logiques de localisation différenciées de ces services et de l'emploi en général offre une analyse complémentaire intéressante (Baumont et al., 2004a). Enfin, conformément aux enseignements théoriques des modèles de la microéconomie urbaine, on peut évaluer si et comment la multipolarisation de l'espace urbain dijonnais influence la localisation résidentielle. Les résultats de cette recherche servent ainsi de base à l'identification des formes fonctionnelles appropriées en vue de l'estimation de fonctions de densités résidentielles (Baumont et al., 2004b) et des valeurs immobilières (Baumont, 2004): un élément important étant le traitement des effets d'agglomération que nous avons mis en évidence dans cette étude. Enfm, en mettant en évidence le caractère complexe de la recomposition urbaine d'un espace urbain de taille moyenne, notre étude s'inscrit dans les débats en cours sur l'absence d'un scénario dominant dans la composition (Bingham et Kimble, 1995; Shearmur et Coffey, 2002) et le rôle des centres secondaires (McMillen, 2004)à l'échelle des aires métropolitaines. REFERENCES Aguiléra A. (2002), ({Services aux entreprises, centralité et multipolarisation. Le cas de Lyon », Revue d'Economie Régionale et Urbaine, 3, 397-422. Alvergne C.et Shearmur R. (1999), «Nouvelles centralités, nouvelles périphéries en Ile-de- France: les changements de logiques de localisation des services supérieurs », in Gollain V. et SalIez A. (eds.), Emploi et territoires en Ile-deFrance: Prospectives, Paris, Editions de l'Aube. Anas A., Arnott R. et Small K.A. (1998), «Urban Spatial Structures », Journal of Economie Litterature, 36, 1426-1464. Baumont C. (2004), Spatial effects in housing price models: do housing prices capitalize urban development policies in the Agglomeration of Dijon (1999) ?, Document de Travail, LEG, Dijon, n02004-04.. Baumont C. et Le Gallo J. (2000), «Les nouvelles centralités urbaines », in Baumont C., Combes P.-P., Derycke P.-H.et Jayet H. (eds.), Economie géographique: les théories à l'épreuve des faits, Paris, Economica (Bibliothèque de Science Régionale), 211-239. Baumont C. et Bourdon F. (2002), Centres secondaires et recomposition économique des espaces urbains. Le cas de la Communauté de l'Agglomération Dijonnaise (1990;1999), Document de travail, LATEC, Dijon, n02002-04. Baumont C., Bourdon F. et Guillain R. (2004), « Mutations urbaines et logiques de localisation des emplois: le cas de la Communauté de l'Agglomération Dijonnaise (1990; 1999) », Revue d'Economie Régionale et Urbaine, 4, 2004.
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64
A. Rallet et A. Torre
Annexe 1 LE ZONAGE L'appellation
mIS-2000@
mIS signifie Bots Regroupés pour l' Infonnation
L'mIS-2000@
est un découpage
infia-communal
disponible
Statistique pour toutes les communes
urbaines
d'au moins 10 000 habitants et la plupart des communes de 5 000 à 10 000 habitants (16 000 IRIS2000@ en France, dont 15 400 en métropole). C'est un petit quartier", qui se définit comme un ensemble " d'îlots (pâtés de maisons) contigus. Les IRIS-2000@ se déclinent en trois types de zones (INSEE, 2000) : IRIS d'habitat: IRIS-2000@ dont la population se situe entre 1 800 et 5 000 habitants. Ils sont homogènes quant au type d'habitat,
. . .
IRIS d'activité: IRIS-2000@ qui regroupent plus de 1 000 fois plus d'emploi salarié que de population résidente, IRIS divers:
IRIS-2000@
de superficie
parcs, zones portuaires...). Dans les bases de données couvrant plusieurs l'IRIS-2000@
pour les communes
(soit 34800
communes).
La nomenclature
découpées,
importante,
communes,
salariés et comptent deux
et à un usage particulier
(bois,
les données IRIS correspondront
soit à
soit à la commune pour les petites communes non découpées
NAF et les secteurs
A partir des fichiers SIRENE 1990 et 1999 de l'emploi décomposé selon la NAF700, nous avons construit par regroupement des codes APEN (Activités Principales Exercées) les secteurs d'activités suivants : Industries (IND) : APEN 10 à APEN 41
. .
Construction
.
Commerce de gros (COMGR)
.
Infrastructures
(CONST)
: APEN 45 : APEN
51
publiques, transport et communication
(INFTR)
: APEN
60
à APEN
64 +APEN90.
.
Finance, Immobilier et Assurance (FIA) : APEN
.
Services aux particuliers
.
804A
+ APEN 851 Cà APEN 852z
(SPART)
: APEN
50
65
à APEN
+ APEN
+ APEN 91 à APEN 95
Services aux entreprises (SENT)
: APEN 71 à APEN 74
52
67
70 55 +
+ APEN
+ APEN
APEN
Les nouvelles
proximités
65
urbaines
Annexe 2 LA COMAnI
NOM de la ZONE URBAINE AHUY
Code
EN 114 ZONES
Nombre d'Iris ou zones 1
NOM de la ZONE URBAINE LES HAUTS DE MONTCHAPET
Ahuv 9
CHENOVE
-
=
EUGENE
SPULLER
Code D45 D46
PISCINE VALENDONS PETIGNYS CHAUFFERIE CHAPITRE BIBLIOTHEQUE
Co1
SAINT EXUPERY VIEUX BOURG GRANDS CRUS
C04 C05
BALZAC
D51
ATELIERS SNCF
CoS
STALINGRAD
D52
MAIRIE - STADE
Co7
ZONE INDUSTRIELLE
CoB Cog
STRD
LA CHARMETTE
D47
Co2
FAUCONNET
D48
Co3
JOUVENCE
OUEST
D49
JOUVENCE
EST
D50
CHATEAU
- VISITATION
ZONE ECONOMIQUE DAf)(
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5
CHEVIGNY BREUIL - FLEURS CORCELLES - BAS DE CHANOT CENTRE VILLE - CLOS ST SAUVEUR
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Ch1
LOCHERES
GRESILLES
Ch2
CASTELNAU
Ch3
CHARLES
Ch4
CONCORDE
Ch5 Daix
1 66
DIJON
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CENTRE
DE GAULLE
D55 D56 D57
D59
CLOS DE POU ILL Y
D61
LA TOISON
D62
D OR
Z I NORD EST
D63
LA GARE
D64 D65
CORDELIERS
D2
SAINT MICHEL
D3
LE BOCAGE COMBE A LA SERPENT LE LAC
GRANGIER
D4
FONT AINE-LÈS-DIJON
J J ROUSSEAU
D5
DARCY
D6
LES ROSES
D7
REPUBLIQUE
DB
D66 5
VIEUX VILLAGE
Fo1
SAVERNEY
Fo2
SAINT MARTIN
Fo3 F04
CLEMENCEAU
Dg
MAJNONI ACTIVITES ECONOMIQUES
DAVOUT
D10
LONGVIC
PETIT CITEAUX
D11
SAINT PIERRE
D12
DOCTEUR LAVALLE
D13
VOLTAIRE
D14
LYAUTEY
D15
=
D54
D60
D1
=
D53
D58
MONGE
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Nombre d'Iris ou zones
BIEF DU MOULIN BOURG-VALENTINPREVOTS PARC POUSSOTSPOMMERETS ZONE INDUSTRIELLECOLOMBIERE MAR SAN NA Y -LA-CÔTE
F05 4 Lo1 Lo2 L03 L04 3
66
A. Rallet
PARC OES SPORTS
016
CHAMPMAILLOT
017
UNIVERSITES
018
LENTILLERES
019
PETITES
ROCHES
020
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Ma1
LE BOURG CHAMPAGNE
HAUTE
Ma3 Neuilly
1
OUGES
OUges
1
Perry
1
021
ABATTOIRS
022
CASTEL
023
STEARINERIE
024
CARROUSEL
025
GREUZE
026
ARSENAL
027
BEL AIR
028
LES HUCHES PLACE CENTRALEQUETIGNEROTS-PRE BOURGEOT ZONE ACTIV EUROPECAP VERT-GRAND MARCHE
LARREY
029
SAINT -APOLLINAIRE
BOURROCHES
OUEST
030
BOURROCHES
EST
031
TROIS
FORGERONS
032
LES VALENDONS
033
LA MONTAGNE
034
TIRE PESSEAU
=
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Ma2
NEUILL Y-LES-DIJON
ZAC
MANSART
=
PERRIGNY-LES-DIJON PLOMBIERES-LESDIJON QUÉTIGNY ATRIAS-VIEUX VILLAGE-GRAND CHAIGNET LA FONTAINE AUX JARDINS
1 Plomb 5
Qu1 Qu3 Qu3
Qu4
Qu5 4
NORD VILLAGE
Sapo1
SUD VILLAGE
Sapo2
NORD EST
Sapo3 Sap04
SUD EST SENNECEY
-LES-D IJON
Sennec
TALANT QUARTIER
01
Ta1
BELIN
037
QUARTIER
02
Ta2
PERDRIX
038
QUARTIER
03
Ta3
CHARTREUSE
039
QUARTIER
04
Ta4
ARQUEBUSE
040
QUARTIER
05
Ta5
TANNERIES
041
QUARTIER
06
Ta6
PROVIDENCE
042
EDOUARD CHAMP
CARRIERES FRANCOIS
BACQUIN POMPON
043 044
1 6
035 036
LE LAC
et A. Torre
TOTAL
114
Les nouvelles proximités urbaines
67
Annexe 3 NATURE
ET DEFINITION
VARIABLES
DES VARIABLES
NOM
Commentaires
Surface (SIG Arc-View@)
AREAAC
Surface en acres
Coordonnées des centroïdes
X-COORD
Longitude Latitude
(SIG Arc-View@) V-COORD DISTAB
Distance euclidienne entre les centroïdes des unités spatiales A et B
DCENTRE
Distance
euclidienne
du centroïde
d'une
unité au centre de la COMADIÎ Population totale (RGP + irisage)
POP90
(ou 99)
DPOP AC90
(ou 99)
Population Densité
totale
en 1990 (1999)
de population
en acres
en
1990
(ou 99) Emploi total (SIRENE + irisage)
EMP90 (ou 99)
Emploi total en 1990 (ou 1999)
DEMPAC90
Densité d'emploi
(ou 99)
RATI090 (ou 99)
en acres en 1990 (1999)
Ratio emploi total sur population en 1990 (1999)
Nombre d'établissements (SIRENE+irisage)
NETAB90 (ou 99) MOET AB90 (ou 99)
Nombre d'établissement en 1990 (ou 1999) Emploi moyen par établissement en 1990 ( 1999)
Emploi par secteur
IND90 (ou 99)
(SIRENE + irisage) CONST90 (ou 99) nomenclatures ACTETI0 etNAF700
COMGR90 (ou 99)
Elnploi dans l'industrie Emploi
dans
en 1990 (1999)
la construction
en 1990
( 1999)
Emploi dans le commerce de gros en FIA90 (ou 99)
1990 (1999)
Emploi dans les secteurs financiers, SENT90 (ou 99)
immobilier et d'assurance en 1990 (1999) Emploi dans
SPART90 (ou 99)
en 1990
(1999)
Emploi dans INFTR90
(ou 99)
en 1990
Emploi
les services aux entreprises
les services aux particuliers
(1999)
dans
les
Ïnftastructures
de
transport et de communication en 19990 ( 1999)
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Partie II
LE PROCESSUS DE METROPOLISATION
CHAPITRE III
VARSOVIE, UNE NOUVELLE METROPOLE
LISE BOURDEAU-LEPAGE
INTRODUCTION
Depuis la chute du mur de Berlin, de profondes modifications économiques, politiques et sociales ont vu le jour dans les Pays d'Europe Centrale et Orientale. Parmi ces transformations, la naissance de nouveaux acteurs économiques, leur adaptation aux conditions de l'économie de marché et notamment leur entrée dans les réseaux globaux modifient, jour après jour, les anciens équilibres entre les métropoles européennes. Certaines grandes villes comme Prague ou Varsovie suivent un processus original d'adaptation aux nouvelles conditions économiques, politiques et techniques qui résultent à la fois du poids de leur histoire et de leur capacité de transformation. Dans ses grandes lignes, l'évolution récente de la capitale polonaise est marquée par un étalement de la population, par une déconcentration de l'emploi avec l'apparition de pôles commerciaux en périphérie et par l'émergence d'un centre des affaires. La ville devient multipolaire tout en gardant un centre largement dominant en termes d'emploi (Bourdeau-Lepage, 2002). En 1996, Varsovie, avec une population de plus de 1,6 million d'habitants, occupait la Il èmeplace parmi les villes européennes après Budapest mais avant Prague. La position démographique de la capitale polonaise dans l'Europe élargie mais surtout son évolution spatiale et sectorielle conduisent à s'interroger sur sa place dans le réseau des métropoles européennes. Les métropoles sont des villes qui assurent la coordination d'activités économiques complexes à une échelle globale (Bourdeau-Lepage et Huriot, 2005b).Dans ce sens, le terme métropole est synonyme de ville globale (Bourdeau-Lepage et HOOot, 2005a). Elles concentrent une part importante des fonctions de coordination liées à la production et aux échanges, et sont spécialisées dans des fonctions stratégiques de décision, de contrôle et de création dans lesquelles la saisie, le traitement et la diffusion de l'information sont essentiels (Castells, 1998). Ces fonctions stratégiques peuvent être qualifiées de métropolitaines. Ces villes se caractérisent à la fois par une forte concentration urbaine et intra-urbaine de ces fonctions métropolitaines assurées par les services supérieurs (Bourdeau-Lepage & HOOot,2002). Elles organisent des interactions économiques de longue distance et entretiennent des relations intenses avec des villes
A. Railet et A. Torre
74
de rang identique dans une logique de réseau. Ainsi, une métropole présente deux dimensions majeures: une forte concentration de services supérieurs et une insertion dans un réseau global. L'évaluation de la capacité de Varsovie à se hisser au rang de métropole se fera à travers deux dimensions. Interne: sa spécialisation dans les services supérieurs (2) et son organisation spatiale (3); externe: son insertion dans les réseaux mondiaux (4). I-
DE L'ADMINISTRATIF A L'ECONOMIQUE : LES NOUVEAUX SERVICES SUPERIEURS
En Pologne, l'ouverture au marché a conduit à une modification profonde du cadre institutionnel. Au cours de la période de planification centralisée, les activités commerciales et de production étaient planifiées au niveau central. Les choix stratégiques concernant le niveau de la production étaient dans les mains de l'Etat. A l'aide du plan, l'Etat coordonnait l'ensemble des activités. Les entreprises étaient contrôlées par les ministères et organisées à travers des réseaux principalement verticaux et hiérarchiques. Le marché transforme le mode d'organisation de la production. A mesure que l'activité économique se libéralise, les besoins de coordination deviennent de plus en plus importants. Les anciennes règles et routines ne fonctionnent plus et les nouveaux acteurs adoptent de nouveaux comportements. Cette évolution conduit à une expansion des services et notamment des services liés à la production et à la finance. Ainsi, de nombreux métiers tertiaires émergent, surtout dans le secteur privé. La plupart de ces nouveaux emplois exigent une main-d'œuvre très qualifiée, rare sur le marché (Lehmann & Wadsworth, 1997).Ces tendances sont particulièrement marquées dans la capitale polonaise, qui constitue le plus grand bassin d'emploi du pays. La part des travailleurs varsoviens occupant un emploi dans les services, qui n'était en 1988que d'environ 58%, est de 76,4 % en 200119 (Dowall et alii, 1994et GUS, 2002). Cette modification de la structure de l'emploi est le résultat d'un processus original qui s'inscrit dans la durée avec la poursuite de la désindustrialisation de la ville. En effet, entre 1995et 2000,la capitale polonaise enregistre une augmentation de 4,8% de l'emploi alors que la tendance est à la baisse dans le pays, aussi bien dans les villes que dans les capitales régionales (cf tableau 1). Ce sont uniquement les activités tertiaires qui connaissent une 19
Il s'agit d'une estimation car il est impossible d'évaluer exactement le nombre de travailleurs occupant un emploi tertiaire avant la transition, en raison des profondes différences entre l'ancien système statistique et celui utilisé actuellement, chacun étant lié au système économique en vigueur. Les chiffres de ces deux périodes sont donc à comparer avec beaucoup de prudence.
Les nouvelles proximités urbaines
75
augmentation de l'emploi, de 15,3% pour les Services Marchands SM et de 2,1% pour les Services Non Marchands SNM(cf 7.1). Tableau 1 L'EVOLUTION
DE L'EMPLOI
ENTRE
Total des travailleurs en milliers 1995 2000
1995 ET 2000 EN POLOGNE
Evolution en %
dont: IC
SM
SNM
Pologne
-18,6
-2,8
-2,3
Ensemble des villes Ensemble des capitales
-21,3
-2,1
-1
-20,1
+ 4,3
+2,4
Source:
calculs effectués à partir de GUS (2002), tableau 23, p.42.
Entre 1995 et 2000, le pourcentage de l'emploi dans le secteur tertiaire progresse de 70,4%à 74,8%alors qu'il poursuit son recul dans l'Industrie-Construction (IC)en passant de 29,3%à 24,8%(cf tableau 2). La structure de l'emploi dans la capitale est très différente de celle du pays et même des capitales régionales, où les services comptent respectivement seulement 58,4% et 68,6% des travailleurs en 2000. Ainsi, Varsovie se distingue nettement par sa concentration d'emplois tertiaires, dont le niveau dépasse même celui des autres grandes villes (GV) polonaises20. En 2001, comme en 1995, la capitale est une des rares grandes villes polonaises spécialisées dans les services. La proportion de l'emploi tertiaire dans l'emploi total varsovien est 8% plus élevée que celle de la moyenne de ces 10 villes (cf tableaux 3 et Al).
20
Une « grande ville» compte plus de 300 000 habitants. liste dans le tableau 3).
fi en existe 10 en Pologne
avec Varsovie
(cf
A. Rallet et A. Torre
76 Tableau 2 LA REPARTITION
SECTORIELLE
Année
DES TRAVAILLEURS
Travailleurs en milliers
Ensemble de la Pologne Ensemble des villes Ensemble des capitales régionales
EN 1995 ET EN 2000
en % du total des travailleurs IC
Services
SM
SNM
9141
43,5
53,6
28,9
24,7
8170,7
39,7
58,4
31,4
27,0
7737,8
44,4
54,8
30,8
24,0
6920,3
39,1
60,2
33,7
26,5
2933,3
36,7
62,8
38,8
24,0
2780,8
30,9
68,6
42,7
25,9
2432,4
36,2
63,3
39,8
23,5
des différentes
activités
Source: calculs effectués à partir de GUS (2002), tableau 23, p.42. * La concentration est évaluée à l'aide des quotients de localisation Varsovie calculés par rapport à l'ensemble la Pologne (cf 7.2).
à
Tableau 3 LA CONCENTRATION* DES ACTIVITES DANS LES GRANDES VILLES POLONAISES EN 2001 Services Marchands total
FAI
SE
Services Non Marchands
Services
0,7
0,6
0,98
1,0
0,82
1,1
0,9
0,7
0,8
1,1
0,97
1,2
0,98
0,8
0,99
0,8
0,93
1,0
1,3
0,9
0,6
0,96
1,1
0,97
Lublin
0,8
1,0
0,8
0,8
0,5
1,5
1,05
Lodz
1,3
0,7
0,9
0,7
0,8
1,1
0,93
Poznan
1,0
1,1
0,98
0,8
0,9
1,0
0,98
Szczecin
1,3
0,9
0,7
0,9
0,5
1,2
0,92
Wroclaw moyenne GV
0,9
1,1
0,95
0,94
0,99
1,1
1,01
QL
I
C
Bydgoszcz
1,6
1,0
Gdansk
1,1
Katowice
1,2
Cracovie
des
1,0 1,0 1,0 1,0 1,0 1,0 1,00 Source: calculs effectués à partir de GUS (2002), tableau 5, p.18. La concentration est évaluée à l'aide des quotients de localisation des différentes activités calculés par rapport à la moyenne des 10 GV (cf 7.2).
Cependant, la capitale n'attire pas de la même manière les différentes activités de services. Les services non marchands y sont
Les nouvelles proximités urbaines
77
sous-représentés. En 2000, ils emploient 20,7%des travailleurs contre 27% en moyenne en Pologne et un quart des travailleurs dans les grandes villes. Ce sont les services marchands qui se localisent à Varsovie. Ainsi, plus de la moitié des travailleurs varsoviens sont employés dans les services marchands, contre moins d'un tiers en
Pologne en 2000. De ce fait, la ville présente une concentration des activités tertiaires marchandes 70%plus élevée que l'ensemble du pays (cf tableau 2). Avec plus des trois quarts des travailleurs employés dans le secteur tertiaire, une forte spécialisation dans les activités tertiaires marchandes et son statut attractif de capitale, Varsovie concentre un grand nombre d'emplois qualifiés et engendre de nouvelles activités de haut niveau capables de répondre aux nouveaux besoins de coordination de l'activité économique. Ces activités produisent de nouvelles économies d'agglomération qui, en retour, favorisent la concentration des services supérieurs c'est-à-dire le plus haut niveau d'activités telles que la recherche, l'innovation, la finance, les activités liées à l'information et à la communication, en général des activités liées à la prise de décision et au contrôle (Sassen, 2002). En 2001, avec un tiers des travailleurs des grandes villes polonaises, Varsovie concentre plus de 43% des effectifs totaux des services aux entreprises de ces villes dans les services aux entreprises et près de la moitié des effectifs des activités fmancières. Par ailleurs, elle domine largement les autres grandes villes polonaises et constitue l'unique cas de spécialisation. Le degré de concentration des activités financières, évalué à partir du quotient de localisation, y est 50% supérieur à celui de l'ensemble des grandes villes (cf tableau 3). La capitale jouit d'une position particulière parmi les villes polonaises. Elle est le lieu privilégié d'installation des fonctions de décision des entreprises. En 2000, Varsovie concentre ainsi le tiers des sièges sociaux des 500 plus grandes entreprises polonaises. La ville enregistre également une explosion des sociétés de conseils. Entre 1989 et 1999, le nombre de ces sociétés est passé de 9 à 432 (Wilk,2001). L'expansion des services supérieurs dans la capitale ne se limite pas à ces seules activités. Les études notariées, les études d'avocats et les banques ont suivi une évolution comparable. En 2000, il existe 714 études d'avocats et 94 études notariées contre respectivement seulement 599et 65 en 1996(Wilk, 2001). La spécialisation de Varsovie dans les activités tertiaires supérieures modifie la configuration spatiale de la ville. Par leur choix de localisation très centrale, en raison notamment de leur besoin de contacts de face-à-face, et par leurs effets sur les comportements spatiaux des autres activités, les services supérieurs produisent une nouvelle organisation spatiale de la capitale. Cette réorganisation est à la fois un résultat et une condition de réalisation de la restructuration
A. Rallet et A. Torre
78
sectorielle, par le jeu complexe des économies d'agglomération et des processus cumulatifs (Bourdeau-Lepage & HOOot,2002). 11-
L'ESPACE DES SERVICES SUPERIEURS
La concentration des activités de commandement, de création, de traitement et de diffusion de l'information dans la capitale polonaise entraîne une nouvelle spécialisation des espaces et conduit à l'émergence d'un centre des affaires. Les communes périphériques se spécialisent dans les activités qui ont un important besoin d'espace, comme l'industrie, ainsi que dans les services qui suivent la population, tels que le commerce et l'éducation. On retrouve donc, à la périphérie, les activités qui y sont traditionnellement localisées. Au contraire, la commune centrale est fortement orientée vers les activités les plus sensibies aux économies d'agglomération, c'est-à-dire les activités tertiaires supérieures et les activités qui leur sont associées, comme l'imprimerie et la polygraphie (Bourdeau-Lepage, 2002). La commune concentre 86%des sociétés de conseils établies à Varsovie en 1999et plus de 90%des études notariées et d'avocats. Sur les 165 sièges des 500 plus grandes entreprises polonaises présents à Varsovie, les trois quarts sont localisés dans la commune centrale (cf tableau 4). Tableau 4 LA LOCALISATION
DE CERTAINES ACTIVITES SUPERIEURES DANS VARSOVIE
Sociétés de conseil en 1999
Etudes d'avocats en 2000
Etu~~s Agenc~s Sièges sociaux notanees Banques* commercIales en 2000 en 1999 bancaires *
Communes périphériques
13,7
8,1
8,5
15,5
9,3
23,0
Varsovie
100
100
100
100
100
100
97
165
Total des unités 432 714 94 206 Sources: calculs effectués à partir de Wilk (2001) et de Rzeczpospolita (2002). * au 30/06/2000.
Les nouvelles proximités urbaines
79 Carte 1
LES COMMUNES DE VARSOVIE (1994-2002) Légende:
D
La commune centrale Les communes périphériques
tNord
Mais au sein de la commune centrale, le choix de localisation des services supérieurs ne se fait pas au hasard. Par leur besoin d'échanger une information complexe et personnalisée, les services supérieurs sont très sensibles aux interactions informationnelles et privilégient la proximité (Gehrig, 2000; Sassen 2001).A Varsovie, ces activités se localisent principalement dans le quartier le plus central, Srodmiescie (l'hyper-centre). Ce quartier est également à la première place de restauration et d'hôtellerie de la ville et le lieu où siègent les ministères. L'hyper-centre peut être qualifié de centre des affaires. Sa domination dans les fonctions supérieures est très nette puisqu'il concentre plus de 40% des sociétés de conseil, des banques et des agences commerciales bancaires et plus de 63%des études d'avocats et notariées (cf tableau 4). Srodmiescie regroupe également 26% des sièges sociaux localisés à Varsovie (43 sièges), ce qui représente près de 9% des sièges des 500 plus grandes entreprises polonaises. La plupart relèvent de fonctions fmancières : l'hyper-centre rassemble la moitié des sièges d'entreprises fmancières de Varsovie. Ce quartier concentre aussi l'ensemble des sièges hôteliers de la capitale et 33,3% des sièges de Varsovie dans l'immobilier et les services aux entreprises. On y trouve également une part importante de l'activité de recherche et de développement de la ville (Bourdeau-Lepage & Huriot, 2002).
A. Railet et A. Torre
80 Carte 2
LA COMMUNE CENTRALE DE VARSOVIE (1994-2002) Légende: Hyper-centre,
D
Srodmiescie
Autres quartiers
t
Nord
Deux autres quartiers centraux, Mokotow et Wola émergent dans la répartition urbaine des fonctions supérieures. Même si ces activités y sont moins concentrées que dans l'hyper-centre, elles y sont nettement plus présentes que dans les autres quartiers centraux ou communes périphériques de la ville. Ce sont essentiellement les sociétés de conseil et les banques qui s'y localisent. Wola regroupe une bonne part des sièges dans les secteurs de la fmance et des transports et communication. Mokotow concentre des sièges dans la fmance et dans le commerce de gros et de détail. La polarisation des services supérieurs à Varsovie est renforcée par la forte concentration intra-urbaine de ces activités dans la capitale. L'espace des fonctions de décision, de contrôle et de création est quasiment réduit au quartier de Srodmiescie. Varsovie présente, dans ses grandes lignes, certains caractères qui font d'une ville une métropole. En facilitant les interactions internes et en favorisant les contacts nationaux ou internationaux, la capitale polonaise possède des atouts nécessaires (mais non suffisants) pour s'insérer dans le réseau des métropoles.
Les nouvelles proximités urbaines 111-
SERVICES
SUPERIEURS
81 ET RESEAUX
Les réseaux urbains mondiaux regroupent des villes qui ont des fonctions globales plus ou moins étendues dans la coordination de l'activité économique. Le rôle joué par chacune de ces métropoles est le fruit d'un processus évolutif, où la capacité d'adaptation est déterminante (Bourdeau-Lepage et Hunot, 2004). Varsovie s'ouvre depuis peu à l'extérieur, notamment avec la libéralisation du commerce et de l'activité économique. La perception de la ville par les décideurs économiques conditionne en partie le rôle et le rang qu'elle occupe dans le monde. D'autres éléments permettent de déterminer si la capitale polonaise fait partie des villes qui comptent, notamment l'évaluation de sa position dans le réseau des métropoles, en particulier en termes de services « avancés» aux producteurs. Les décisions des entreprises qui contribuent à faire l'avenir de Varsovie reposent sur l'image qu'ont les décideurs de l'attractivité de la ville pour les affaires et les investissements. Globalement, parmi les 30 villes qui montrent une attractivité significative en Europe, Varsovie se place au 22èmerang en 2003(Cushman & Wakefield Healey & Baker, 2003).Cette enquête, effectuée comme chaque année par une grande firme de conseil21,apporte des résultats détaillés sur la place actuelle et future de chaque ville dans les représentations des responsables selon de nombreux critères. 22% des fumes interrogées reconnaissent avoir des bureaux, produire, distribuer ou vendre à Varsovie (7èmeplace européenne). Cependant, moins d'un tiers des répondants connaissent bien Varsovie, beaucoup souhaiteraient avoir plus d'informations sur cette ville et pensent que Varsovie assure mal sa promotion. Les résultats détaillés par critère d'attractivité22 révèlent que Varsovie est peu attractive, par la qualité de la vie, la facilité des déplacements intra-urbains, la qualité de l'environnement (pollution), la langue, la qualité des télécommunications et la disponibilité en personnel qualifié. Au contraire, elle est attractive surtout par le coût du personnel (1ere place européenne),les incitations gouvernementales, le prix et la disponibilité des surfaces de bureau et l'accès aux marchés. Ainsi, l' attractivité de Varsovie repose sur des coûts faibles plutôt que sur la qualité du milieu et des infrastructures. Elle est plus potentielle que réelle. Les observations et les classements plus objectifs ont plutôt tendance à confumer ces représentations. Ainsi, Varsovie reçoit effectivement proportionnellement davantage de capitaux étrangers, que les autres villes polonaises. Près d'un quart des sociétés de droit 21 L'enquête
est réalisée auprès des responsables de 500 sociétés prises parmi les 15 000 plus grandes sociétés européennes. 22 Les questions sont en général du type « quelle est selon vous la meilleure ville pour le critère X ? Donnez votre premier, second et troisième choix». Les 30 villes sont classées selon leur score, calculé à partir du nombre de réponses qui les retiennent, pondéré par le rang du choix.
A. Rallet et A. Torre
82
commercial à participation étrangère se trouve dans la capitale contre respectivement 4,6% à Wroclaw, 4,5% à POZllan ou encore 3,3% à Cracovie23. Ensuite, sur le critère de la présence de services « avancés» aux producteurs, un inventaire mondial portant sur 123 villes est réalisé par le réseau Globalization and World Cities (Gawc ; Beaverstock et alii, 1999).Les services considérés sont la comptabilité, la publicité, les services bancaires et juridiques. Pour chaque type de service, les villes sont classées en trois catégories: centres leaders (3 pointS), majeurs (2 pointS) ou mineurs (1 point), selon le degré de présence des plus grandes firmes internationales de cette activité. Les quatre classements sont synthétisés en attribuant à chaque ville une note de 1 à 12 égale à la somme des points obtenus dans les quatre classements. Les villes sont ensuite regroupées en fonction de leur score en quatre grandes catégories: 10 Alpha World Cities (panni elles: Londres, Paris et New-York), 10Beta World Cities (notamment Bruxelles, Madrid et Moscou), 35 Gamma World Cities et 67 Evidence of World City Formation (par exemple, Lyon, Vienne). Varsovie se trouve dans la catégorie des villes mondiales de troisième catégorie (Gamma World Cities) panni 35 villes, avec une note de 5, juste après Amsterdam, Dusseldorf, Genève et Prague et à côté notamment de Rome et Stockholm, pour l'Europe. 35 villes seulement ont plus de 5 points. Varsovie est en bonne position (centre majeur) pour les services bancaires et les services juridiques. La ville est donc susceptible de tisser des liens plus ou moins étroits avec d'autres métropoles dans le monde. L'intensité de ces contacts peut être évaluée à travers les relations qu'entretiennent les grandes firmes de services avancés aux producteurs (la publicité, la comptabilité, la banque et la fmance, l'assurance, le conseil de gestion et le conseil juridique). Une étude de Taylor, Catalano et Walker a été menée en 2001, retenant 100fnmes24. L'intensité de présence d'une firme dans une ville est notée de 1 (absence de cette firme) à 5 (présence du siège social). Le degré de connectivité d'une ville dans le réseau des villes mondiales est d'autant plus important que les fmnes présentes dans cette ville le sont aussi, premièrement dans un grand nombre d'autres villes et deuxièmement avec une intensité plus grande. Pour chacune des villes, le degré de connectivité est exprimé en pourcentage de la connectivité maximum, c'est-à-dire de celle de Londres. Seules sont retenues les
villes ayant un pourcentage supérieur à 20%, soit 123 villes sur les 316 initiales. Varsovie occupe une position intermédiaire, avec un degré de connectivité compris entre 0,4 et 0,49%. En Europe, seules six villes (en dehors de Londres) présentent un niveau de connectivité plus important (compris entre 0,5 et 0,89). Il s'agit de Paris, Milan, Madrid, 23 Calculs effectués à partir de GUS (2001) et USW (2001). 24 Chaque firme est au moins présente dans 15 villes et sur plusieurs
continents.
Les nouvelles proximités urbaines
83
Bruxelles, Francfort, et Amtersdam. Varsovie se range dans le même groupe que Zürich, Barcelone, Lisbonne, Vienne, Hambourg et Copenhague ou encore Prague, Budapest, Moscou, Istanbul, pour ne citer que des villes d'Europe. La capitale polonaise est donc présente de façon significative dans le réseau des grandes villes mondiales. Elle fait partie des villes
qui comptent à l'Est, avec Budapest et Prague. CONCLUSION
L'évolution récente de Varsovie a été marquée par d'importants changements. En une décennie, la ville s'est spécialisée dans les services supérieurs, s'est recomposée spatialement et s'est positionnée dans les réseaux globaux. Elle a répondu à sa manière aux nouveaux besoins de coordination de l'activité économique. En Pologne, elle a été le terrain le plus fertile pour les investisseurs et les sociétés de services. Ses avantages initiaux tels que la main-d'œuvre plus qualifiée que la moyenne polonaise, les liaisons internationales mais également sa fonction de capitale, siège du pouvoir administratif et politique, ont joué un rôle essentiel. L'émergence de nouvelles activités économiques très demandeuses de contacts de face-à-face a modifié l'organisation spatiale de la ville. La croissance des services supérieurs a contribué à rejeter à la périphérie les autres services et activités de production. La ville présente ainsi une forte concentration urbaine et intra-urbaine des fonctions de coordination de l'activité de marché. Ces éléments l'ont amenée à lier des relations avec d'autres métropoles. Varsovie est reconnue comme une ville qui dispose d'une bonne position pour les services bancaires et juridiques. Elle constitue, pour les investisseurs, un point d'entrée à l'Est et dispose de certains atouts qui peuvent faire d'une ville une métropole. Dans le réseau des grandes villes européennes, son rôle n'est pas négligeable même si ses performances économiques et ses structures de production sont encore loin de celles de métropoles comme Londres ou Paris. Elle occupe avec Prague et Budapest, une position stratégique dans les Pays d'Europe Centrale et Orientale (Bourdeau-Lepage, 2007). Cependant elle ne bénéficie pas, comme la capitale tchèque, d'une bonne image, même si celle-ci s'améliore d'année en année. De plus, la ville ne fait pas suffisamment sa promotion, ce qui réduit son rayonnement international.
A. Rallet et A. Torre
84 REFERENCES
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- podstawowe
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Les nouvelles proximités urbaines
85
services à Varsovie) Varsovie, Université de Varsovie, Département de géographie et d'études régionales, 192 p.
NOTES METHODOLOGIQUES
1.
Regroupements
statistiques
Le découpage
utilisés
sectoriel repose sur la nomenclature
des regroupements ont été effectués. respectivement l'industrie extractive, d'électricité,
de gaz et d'eau.
Marchands
les secteurs:
I, transport
et communications;
J, activités
entreprises
(SE) ,. 0, les services
NACE
1 7 1. rev. 1, sur laquelle
les secteurs C, D et E de NACE 17, soit ainsi que la production et la distribution
correspond
au secteur
et réparation;
(FAl) ; K, immobilier,
sociaux et personnels;
F. De plus, H, hôtels location
P, les services
les Services
et restaurants; et services
domestiques
aux
et Q les
extra-territoriales. Les Services Non Marchands (SNM) rassemblent L, l'administration M, l'éducation et N, la santé et l'action sociale. N'est pas pris en compte le secteur primaire
constitué des secteurs A et B de NACE la pêche et l'aquaculture.
2.
(C)
G, commerce financières
collectifs,
européenne
(I) comprend manufacturière
La construction
regroupent
activités publique;
(sM)
L'industrie l'industrie
Quotient
17 c'est-à-dire
l'agriculture,
la chasse et la sylviculture
ainsi que
de localisation
Le quotient de localisation (QL) se définit comme le rapport de la part de l'activité i dans l'emploi de la zone j à la part que représente cette activité dans l'emploi de l'ensemble des zones. Le quotient de localisation Qij de l'activité i de la zone j s'écrit sous la forme suivante: E : travailleurs de la zone j employés dans l'activité i
._Ey/E}
QJ-
BlE
ij
avec:
Ej
: total des travailleurs
de la zone j
Ei
: total des travailleurs
de l'ensemble
l'activité Et Une valeur supérieure l'ensemble des zones.
des zones employés
dans
i
: total des travailleurs
de l'ensemble
à 1 signifie que cette activité est plus concentrée
des zones dans cette zone que dans
A. Rallet et A. Torre
86 ANNEXES Tableau Al LA CONCENTRATION
(EVALUEE A PARTIR DES QL) DE L'INDUSTRIE-CONSTRUCTION ET DES SERVICES DANSLES GRANDESVILLES POLONAISES (GY) EN 1995ET EN 2000.
Bydgoszcz
1,26
1,34
0,85
0,85
0,77
0,79
0,98
Gdansk
1,07
1,09
0,96
0,96
0,92
0,86
1,03
0,95 1,14
Katowice
1,17
1,17
0,91
0,93
0,99
0,96
0,76
0,87
Cracovie
1,10
1,09
0,94
0,96
0,88
0,88
1,05
1,Il
Lublin
0,93
0,93
1,04
1,03
0,85
0,77
1,35
1,49
Lodz
1,13
1,14
0,93
0,94
0,83
0,84
1,09
1,12
Poznan
1,05
1,02
0,97
0,99
0,94
0,99
1,01
0,99
Szczecin
0,98
1,04
0,99
0,97
1,01
0,91
0,95
1,07
Wroclaw
1,02
1,00
0,99
1,00
0,89
0,92
1,17
1,14
Total des GV 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 Source: calculs effectués en termes de nombre de travailleurs à partir de GUS (2002), tableau 23, p.42.
Tableau A2 LA REPARTITION SECTORIELLE DES TRAVAILLEURS DANSLES GRANDESVILLES POLONAISES (GV) EN 2001 Services Marchands dont Total
Industrie
Construction
Total
FA!
SE
Services Non Services Marchands
Bydgoszcz
100
34,6
7,0
30,4
3,3
Il,4
27,1
57,5
Gdansk
100
23,0
8,2
39,9
3,8
9,2
28,5
68,4
Katowice
100
25,7
8,3
43,3
4,5
Il,7
22,5
65,7
Cracovie
100
21,6
9,3
39,9
3,4
Il,2
28,9
68,7
Lublin
100
18,1
7,0
35,7
4,3
6,3
38,7
74,4
Lodz
100
29,3
4,7
37,4
3,6
9,7
28,3
65,7
Poznan
100
22,9
7,7
43,4
4,3
10,4
25,5
68,8
Szczecin
100
28,1
6,4
32,8
4,6
5,5
32,2
65,0
Wroclaw
100
20,5
7,7
41,9
5,0
Il,6
29,5
71,4
7,2 21,8 44,0 5,3 Il,7 Total des GV 100 Source: calculs effectués à partir de GUS (2002), tableau 5, p.18.
26,5
70,6
Les nouvelles proximités urbaines
87
Tableau A3 LE POIDS DES GRANDES VILLES POLONAISES (GV) DANS LES DIFFERENTES ACTIVITES EN 2001
Services Marchands Total en %
. Id. n ustrze C onstructzon
Total
dont: FA!
Services Non Services Marchands
SE
Cracovie
Il,1
10,9
14,3
10,0
7,2
10,6
12,0
10,8
Poznan
9,8
10,3
10,5
9,7
7,9
8,7
9,4
9,6
Lodz
9,4
12,6
6,2
8,0
6,3
7,9
10,1
8,8
Wroclaw
8,5
8,0
9,1
8,1
8,0
8,4
9,5
8,6
Katowice
6,9
8,1
7,9
6,8
5,8
6,9
5,9
6,4
Gdansk
6,1
6,4
7,0
5,5
4,4
4,8
6,6
5,9
Bydgoszcz
5,0
7,9
4,8
3,4
3,1
4,8
5,1
4,0
Szczecin
5,0
6,4
4,4
3,7
4,2
2,3
6,0
4,6
Lublin
4,6
3,8
4,5
3,7
3,7
2,5
6,7
4,9
Total des GV 100 100 100 100 100 100 100 100 Source: calculs effectués en termes de nombre de travailleurs à partir de GUS (2002), tableau 5, p.18.
CHAPITRE IV
LA DYNAMIQUE URBAINE DES REGIONS METROPOLITAINES BRESILIENNES25
MAURO BORGES LEMOS SUELI MORO ELENICE BIAZI MARCO CROCCO
INTRODUCTION
Le rôle structurant des activités urbaines dans le développement des relations d'échange dans un espace géographique a été un élément de continuité et de convergence de la littérature sur les dynamiques urbaine et régionale. Cet article analyse la norme de croissance des régions métropolitaines brésiliennes sur la base des facteurs d'agglomération et de désagglomération urbaine, qui permettent d'analyser les fragilités et les avantages de ces centres urbains, cruciaux pour la structuration du système de villes dans le réseau urbain du pays. Il présente une forte continuité théorique et méthodologique avec un travail antérieur sur les régions métropolitainesde la région Nordeste* (Lemos et Ferreira, 2001). Le choix de ces zones urbaines comme points cruciaux du réseau urbain brésilien se justifie par le fait qu'elles ont été identifiées comme des macro-pôles de l'espace régional pour l'ensemble de ce territoire par les résultats d'une étude du CEDEPLARqui a précédé la récente régionalisation (Lemos et al.)., 2000). Les régions métropolitaines de Sao Paulo et Rio de Janeiro y sont classifiées comme des macro-pôles nationaux ou principaux et celles de Belo 25 Ce travail fait partie de la recherche Dinâmica Demografica, Desenvolvimento Regional e Politicas Publicas (Dynamique démographique, Développement régional et Politiques publiques), financée par le PRONEX, consortium des agences de financement CNPQ/Capes/Finep, dans le champ Économie régionale du CEDEPLAR (Centro de Desenvolvimento e Planejamento Regional da Universidade Federal de Minas Gerais - Centre de Développement et de Planification régionaux de l'Université Fédérale de l'État de Minas Gerais). Traduction de Alain François * Les grandes Régions brésiliennes sont des divisions définies par l' Instituto Brasileiro de Geografia e Estatistica (IBGE, équivalent brésilien de l'INSEE) qui est responsable de la plupart des relevés de données du pays, que ce soit par recensement ou échantillons. Les cinq Régions, regroupements d'États brésiliens, sont les suivantes: Région Nord: Rondônia, Acre, Amazonas, Roraima, Amapa, Para et Tocantins; Région Nordeste: Maranhao, Piaui, Ceara, Rio Grande do Norte, Paraiba, Pernambuco, Alagoas, Sergipe, Bahia; Région Centre-ouest: Mato Grosso, Goias et Mato Grosso do Sul; Région Sud-est: Minas Gerais, Espirito Santo, Rio de Janeiro et Sao Paulo; Région Sud: Parana, Santa Catarina et Rio Grande do Sul (NdT).
90
A. Rallet et A. Torre
Horizonte, Curitiba, Porto Alegre, Brasilia/Goiânia, Salvador, Recife, Fortaleza, Belém et Manaus sont considérées comme les macro-pôles régionaux ou secondaires de neuf sous-systèmes urbains du pays. La région Centre-Ouest y est décrite comme un espace régional multipolarisé par Brasilia et Goiânia. Le noyau urbain de Manaus, quant à lui, a été classé comme un macro-pôle régional car il polarise un sous-système urbain propre, même s'il se situe bien au-dessous des autres macro-pôles dans la hiérarchie urbaine. Nous avons exclu Manaus et Goiânia en raison du peu de données les conçemant dans la Pesquisa por Amostra de Domicilios (Recherche par Echantillons de Domiciles - PNAD), sur laquelle ce travail se base. Les dix noyaux urbains considérés coïncident avec la définition officielle de régions métropolitaines (RMs) brésiliennes, en dépit des problèmes de leur délimitation géographique et du choix des communes inclues dans chaque RM depui~ que la Constitution de 1988 a délégué cette responsabilité aux Etats. Cette caractérisation des RMs comme noyaux urbains structurants de l'espace régional brésilien converge avec celle proposée par le travail IPEAlIBGEINESUR (1999)qui analyse de manière exhaustive le profil et les transformations du réseau urbain brésilien. La référence méthodologique et empirique de ce travail sur la hiérarchie urbaine a été développée au début des années 1990par le Département de géographie (DEGEO)de l'IBGE, principalement à partir
de l'étude Rede de influência das cidades (1993), Aglomeraçoes urbanas para fins estatistico e Tipologia dos municipios brasileiros (Réseau d'Influence des Villes, Agglomérations urbaines pour des Fins statistiques et Typologie des Communes brésiliennes). Cette ligne d'investigation a très certainement contribué de manière significative à la recherche qui a précédé le travail de régionalisation, car toutes deux présentent des ressemblances au niveau de la méthodologie et des résultats empiriques. Outre son introduction et sa conclusion, ce travail est organisé en quatre sections. La première discute les aspects théoriques qui fondent cette étude en ce qui concerne le traitement de la dynamique urbaine à partir des facteurs d'agglomération et de désagglomération. La deuxième analyse l'évolution récente du développement inégal des régions métropolitaines brésiliennes. La troisième présente la méthode d'analyse multivariée de traitement des données à partir d'indicateurs construits sur la base des variables du modèle de rente foncière urbaine de la première section. Les résultats sont discutés dans la quatrième section, où nous proposons une typologie de regroupement des RMs brésiliennes. Les conclusions suggèrent quelques grandes lignes de politiques publiques visant à un développement urbain mieux équilibré de ces régions et moins inégal dans le contexte macrospatial brésilien.
Les nouvelles proximités urbaines
1-
91
ASPECTS THÉORIQUES DE LA DYNAMIQUE URBAINE
Le traitement de la dynamique urbaine à partir de facteurs d'agglomération et de désagglomération représente une grande tradition en économie régionale, particulièrement depuis les travaux classiques de von Thünen (1826), qui analyse le phénomène de désagglomération des activités économiques à partir d'un centre urbain quelconque, et de Losch (1954), qui explique la constitution même d'un centre urbain en fonction des avantages économiques d'agglomération des activités dans l'espace. Le modèle de détermination de la rente foncière de von Thünen sera utilisé dans ce travail comme référence théorique de base pour expliquer le processus de structuration de l'espace urbain. Comme nous le verrons plus bas, son adaptation permet d'incorporer aussi bien les facteurs d'agglomération et que de désagglomération de la dynamique urbaine. L'organisation des activités économiques sous forme d'anneaux concentriques entourant un noyau urbain donné est expliquée par von Thünen comme le résultat de la constitution de la rente foncière à mesure que s'établit une compétition entre activités économiques pour une localisation la plus proche possible du marché, défini comme noyau ou centre urbain26.La localisation géographique des activités économiques dans le voisinage de ce lieu central va s'organiser de manière à minimiser les coûts combinés de production et de transport d'une offre de biens donnée (Fujita et al., 1999: 16). La compétition entre producteurs spécialisés pour se situer le plus près possible des lieux de ventes établit un gradient de rente foncière inversement proportionnel à la distance de ce noyau urbain. Ces activités sont supposées posséder des taux de profit différents et des coûts unitaires de transport relativement plus élevés pour les plus lucratives. Par ailleurs, il existe un compromis entre distance et rente foncière. La logique de la localisation veut que les activités les plus lucratives et ayant un coût unitaire de transport plus élevé se situent dans des anneaux plus proches du centre et que les moins lucratives se distribuent dans des anneaux plus éloignés. La compétition pour une meilleure localisation conduit à une capture du profit différentiel par les propriétaires fonciers sous forme de rente foncière qui, dans le cas d'activités développées dans les villes, est typiquement urbaine. Cette forme spécifique d'appropriation du surprofit synthétise donc les différents coûts intra-urbains découlant de l'aspect purement 26 Le modèle original de von ThOnen, qui explique la distribution des activités agricoles d'une ville, est adapté par Alonso (1964) pour expliquer la distribution des activités alentours d'un lieu central.
aux alentours urbaines aux
A. Rallet et A. Torre
92
géographique et ne tient aucun compte des différences de qualités du sol urbain et des prix hédoniques des biens. Il est clair qu'une fois libre de cette supposition abstraite, la valeur différentielle de la rente urbaine tend à augmenter, sans toutefois échapper à la loi fondamentale de sa détermination par la proximité géographique du lieu central de consommation de ces biens. Le modèle Thunéen peut être exprimé par l'équation (1), proposée par Lerne (1982),puis adaptée par Lemos et Diniz (2000)et Lemos et Crocco (2000) : r = (P,- P) - bqè( (1),
où: r = rente foncière urbaine par unité de superficie; P tjJ= prix de marché pratiqué dans ce centre urbain; P = prix de production défini par les coûts directs de production; h = tarif de transport par unité de produit et de distance; q8= production physique brute par unité de superficie; x = distance d'un point de localisation quelconque en relation au noyau du centre urbain. Par ailleurs, nous avons:
q =
q
~ (q
1
E
= qi (2)
où : q = production physique nette par unité de superficie; i = coûts d'infrastructure de la production physique superficie.
par unité de
Ainsi, si nous introduisons (2) dans (1), nous obtenons: r = (P (J- P) - bqix (3)
Il convient d'observer que l'équation (3) suppose l'incorporation intégrale du profit différentiel ou surprofit sous forme de rente foncière. Le coût du transport et de l'accessibilité par unité de superficie, hqix, dépend du tarif des transportes (h), de la quantité produite (q), du coût d'infrastructure urbaine (i) et de la distance (x). Si X est le rayon maximum du centre urbain, où r = 0, alors: en introduisant
P(J=P + bqiX (4) l'équation (4) dans (3), nous obtenons r = bqi (X -x) (5)
Si nous considérons que n
R
=l:/j i=l
:
Les nouvelles proximités urbaines
93
son expression nous fournit l'intégrale de l'équation (5) multipliée par l'extension du cercle de rayon x, en supposant que les augmentations de distance des activités par rapport au centre sont infinitésimales_ Le développement de l'équation (6) nous donne: R= R=
f
7!bqiX3
3
(7)
BQI(X-x)27tDX(6)
Comme le proposent Lemos et Crocco (2000:3), nous pouvons exprimer le pm du centre urbain (y) par unité de superficie urbaine comme une fonction de la production physique par unité de superficie et de la superficie urbaine totale. Ainsi: y
= q1lX2 (8)
avec: y = PIB du centre urbain par unité de superficie; 1tX2= superficie urbaine totale; À= constante monétaire.
Si nous mettons q en évidence, nous obtenons: q -~ - 7ZX2Â (9) En introduisant (9) dans (7), nous obtenons: bmYX3 biYX (10) = 37ZX2Â 3Â L'équation (10) montre que la rente totale d'une ville varie selon la taille de son agglomération urbaine et qu'elle s'exprime comme fonction du tarif unitaire du transport (h), du coût d'infrastructure urbaine (i), du niveau du PIB du centre urbain (f) et de la distance maximum des activités économiques par rapport au centre de l'agglomération (X). La rente foncière totale (R) exprime donc le coût R=
de croissance des villes et constitue une synthèse des facteurs de désagglomération urbaine.
L'augmentation de R peut être mieux observée en dédoublant l'équation (10), ce qui nous fournit des variables incorporant explicitement la population résidente. Ainsi, en manipulant le côté droit de cette équation au moyen d'une division et d'une multiplication de la population résidente (N) et de la superficie totale urbaine (1lX2),et en établissant le rapport de (N) à la force de travail employée (L), nous obtenons: R =
biYIL177ZX3
3Â
(11)
A. Rallet et A. Torre
94 où : YIL(productivité moyenne du travail) ; Jl ==LIN (taux de participation de la force de travail) ;
y
==
17 ==NI'JC%2 (densité
démographique).
Si nous réécrivons obtenons:
l'équation
(11) sous forme logarithmique,
nous
InR = Inb + Ini + ln y + InJL+ Inq + ln ~ + InX3 (12) 3Â
La dynamisation de l'équation (12) peut être obtenue au travers de sa différentiation :
.
...
R = b+ i+ Y+ Jl+ 17+3X (13)
L'équation (13) représente le taux de croissance de la rente foncière urbaine en temps discret et, économiquement, elle confère une double signification à R dans la dynamique urbaine en termes de facteurs d'agglomération et de désagglomération. D'un côté, sa croissance au travers des facteurs d'agglomération est due à l'expansion de la productivité urbaine, exprimée par le taux de croissance de la productivité du travail (y) et par le taux de participation de la population résidente à la force de travail (Jl). Comme la variation positive de ces facteurs réduit les coûts unitaires d'un centre urbain donné et attire ainsi de nouvelles activités vers ce centre, il est possible de maintenir la croissance de cette rente dans le temps. Ainsi la croissance de R reflète-t-elle une plus grande efficacité des activités économiques dans cette localité, qui permet une croissance du profit différentiel urbain. Alors, la croissance de R dépend de la croissance des facteurs d'agglomération urbaine, qui indiquent l'existence d'économies externes d'agglomération comme une synthèse des forces d'attraction de nouvelles activités vers cet espace urbain. Par ailleurs, la croissance de R au travers des facteurs de désagglomération entraîne une plus grande verticalisation urbaine, fournie par le taux de croissance de la densité démographique (11),une augmentation des coûts d'a~cessibilité (b et X) et des coûts urbains en infrastructure déficiente (i). Etant donné que la croissance de R dans ce cas est due à l'augmentation d'inefficacités à l'échelle supérieure de l'agglomération urbaine et aux coûts unitaires urbains plus élevés qui en résultent, sa non-durabilité dans le temps est évidente. Ces variables fonctionnent donc comme des forces repoussant certaines activités déjà établies et de nouvelles activités que d'autres localités essaient également d'attirer. L'idée d'un système de villes en compétition ouverte pour attirer de nouvelles activités et soumises à deux forces opposées, d'attraction et de répulsion, nous entraîne donc à relativiser la supposition simplificatrice du modèle monocentriste thunéen, c'est-à-dire d'un
Les nouvelles proximités urbaines
95
ensemble d'activités économiques situées dans le voisinage d'un seul centre urbain. Ainsi, un modèle théorique polycentrique serait constitué par un système de villes qui, en termes formels, pourrait être exprimé au travers de la transformation de l'équation (13) en un ensemble de n équations simultanées, où n représenterait le nombre de villes ou centres urbains. Dans ce système polycentrique, les facteurs d'agglomération et de désagglomération seraient alors interprétés comme relatifs en termes de compétition entre villes et synthétiseraient les avantages comparatifs urbains27. Le système de villes implique l'introduction d'un élément précieux dans l'analyse, celui de hiérarchie urbaine, présent dans l'argumentation théorique de deux auteurs considérés comme classiques en économie régionale, Christaller (1933)et Losch (1954).La hiérarchie urbaine est un gradient dont le sommet est représenté par les plus grandes agglomérations ayant des activités très restrictives en termes d'échelle, représentant les lieux centraux d'ordre supérieur; viennent ensuite les agglomérations moyennes, moins diversifiées mais présentant au moins un type d'activité exportatrice, puis les petites villes productrices de biens strictement résidentiels, avec un niveau de transportabilité bas ou inexistant (biens de consommation immédiate, comme boulangeries et services médicaux). Les restrictions plus générales des coûts de transports expliquent l'émergence de plusieurs systèmes de villes, avec leur zone de marché respective pour chaque type de bien, plus ou moins interconnectées par les flux des exportations interrégionales. Dans cette perspective, les régions métropolitaines brésiliennes composent les lieux centraux d'ordre supérieur du système ou réseau urbain du pays: les RMs de Sao Paulo et de Rio de Janeiro constituent des lieux centraux principaux au niveau national et, de plus en plus, au niveau sous-continental, alors que les autres RMs polarisent des soussystèmes urbains régionaux. Comme l'affirme Tolosa (1999),à mesure que la mondialisation transforme Sào Paulo, et à un moindre degré Rio de Janeiro, en villes mondiales, leur fonction en tant que centre de services dans la nouvelle division internationale du travail augmente, ce qui a des impacts sur l'importance relative des métropoles régionales brésiliennes, et plus particulièrement sur la production de quelques services et biens industriels plus sophistiqués. Dans notre cas, il convient de comprendre comment la dynamique urbaine dans le contexte d'un système de villes implique l'existence d'économies externes d'agglomération urbaine qui se traduisent par des villes de taille diverse. La plus grande contribution de la littérature sur ce point se trouve chez Henderson (1974),qui part de l'argument que les économies externes tendent à être une 27 Une modélisation économétrique permettant de résoudre a fait l'objet d'un travail des auteurs de ce texte.
ce système d'interactions
a été développée
et
A. Rallet et A. Torre
96
spécificité d'activités productives spécifiques, alors que les déséconomies dépendent de la taille de la ville comme un tout, indépendamment de ce qu'elle produit. Selon cet auteur, l'explication des villes de différente taille dans un système urbain repose sur le rôle de chacune d'entre elles dans la production de biens et de services. Dans la mesure où les économies d'échelle externes sont spécifiques à des activités particulières, chaque ville tend à se spécialiser dans quelques activités qui exigent des échelles efficaces minimales et différenciées de la taille des villes. Sous ce prisme, rien ne justifie qu'une ville de production textile ait une dimension dépassant ce qui lui suffit pour abriter un certain nombre d'usines de filage et tissage; de la même manière, une ville ayant des fonctions de centre financier doit être suffisamment grande pour absorber l'ensemble des opérations bancaires locales, régionales et nationales (Fujita et al., 1999:20).28 Le modèle de détermination de la rente foncière proposé inclut, de manière explicite, des facteurs de désagglomération liés aux déséconomies externes (rente foncière, densité de population, coûts unitaires intra-urbains et extension géographique urbaine) et des facteurs d'agglomération (productivité du travail et taux de participation de la force de travail), qui expriment indirectement les économies d'échelle internes et externes des activités d'une agglomération urbaine. Sur la base de ces facteurs, nous conduirons maintenant une analyse des avantages et désavantages comparatifs des sous-systèmes urbains polarisés par les métropoles brésiliennes. Avant de passer aux sections concernant les méthodes et résultats d'estimation de ces facteurs, nous présenterons quelques indicateurs qui synthétisent l'évolution récente de ces régions métropolitaines. 11-
LA DYNAMIQUE DIFFÉRENCIÉE DES RÉGIONS MÉTROPOLITAINES
Une caractéristique commune aux régions métropolitaines brésiliennes est leur grande taille absolue, en termes internationaux. Outre Sao Paulo et Rio de Janeiro, qui comptent plus de 10millions d'habitants, le tableau 1 montre que la plupart d'entre elles se situent entre 2 et 4 millions d'habitants. Même Belém, la plus petite RM, avait en 2000 une population supérieure à 1,5 millions d'habitants.
28
La question centrale de Henderson sur la relation entre économies externes et spécialisation productive des villes ne sera pas abordée dans ce travail. En raison de son importance, elle fera partie de la suite de la recherche, puisque la classification sectorielle de la PNAD permet son traitement empirique.
Les nouvelles proximités
97
urbaines
Tableau J ÉVOLUTION
DE LA POPULATION
1970
RM
Pop
PAR REGIONS
METROPOLITAINES
1991
1980 Pop
Gk
p
Pop
(1970-2000)
p
2000 p
Pop
Slo Paulo
8.139.730
% 8,74
12.588.725
10,58
4,81
15.444.941
% 10,52
1,93
17.178.071
% 10,13
1,22
1970-2000 2,52
Rio de Janeiro
6.891.521
7,40
8.772.265
7,37
2,55
9.814.574
6,68
1,04
10.104.704
5,96
0,33
1,28
Belo Horizonte
1.719.615
1,85
2.676.328
2,25
4,89
3.515.537
2,39
2,61
4.249.698
2,51
2,24
3,06
Porto Alegre
1.590.798
1,71
2.307.586
1,94
4,05
3.029.073
2,06
2,60
3.495.119
2,06
1,66
2,66
2,03
3,49 3,28
1.71 0,99 2,08 1,21 2,92
3.17 3,10 4,55
Curitiba
875.269
0,94
1.497.308
1,26
6,04
2.061.531
1,40
3,08
2.451.178
1,45
Salvador
1.147.821
1.766.582
1,48
4,75
2.496.521
1,70
3,35
3.018.326
1,78
Recife
1.790.934
1.23 1,92
2.386.461
2,01
3,07
2.919.979
1,99
1,91
3.316.451
2.24 1,96 1,47
Fortaleza
1.091.117
1.651.772
1,39
4,55
2.401.878
1,64
3,64
2.782.467
1,64
1.021.486
0,86
4,64
1.401.305
0,95
3,05 2,96
1.672.808
Belém
669.768
Brasilia
Fonte: FIBGE p
0,99
9,24
2.445.407
2,63
3.584.542
3,01
4,17
4.468.643
1.09 3,04
93.139.037
100,00
119.002.706
100,00
2,60
146.825.475
100,00
537.492
Média RMs BRASIL
- Censos
1.17 0,72 D,58
Demograficos
1970,
1.176.908
1980,
1991,
1.601.094
2.043.169
2,08
2,09
5.031.199
2,97
1,37
2,43
1,99
169.544.443
100,00
1,67
2,02
2000.
= Taxa de Crescimento MédioAnual
Ensemble, ces RMs représentent environ 30% de la population brésilienne. Selon les recensements de 1970,1980,1991et 2000, si cette proportion a été croissante au long des années 1970-80,les années 1990 semblent indiquer un renversement, ou pour le moins une stabilisation, de ce processus. L'importance de ce fait ne réside pas dans la
magnitude de ce renversement - encore faible -, mais bien plutôt dans le fait que pour la première fois depuis le début du processus d'industrialisation brésilien un renversement de la concentration urbaine de population semble prendre place en faveur principalement de villes de taille moyenne (Andrade et Serra, 2001). Comme nous le verrons plus bas, ce phénomène de renversement de la concentration peut affaiblir la pression pour plus d'infrastructure et d'équipements urbains, et mettre un terme à l'élévation des coûts urbains de ces agglomérations. Si cette tendance se confnmait, de nouvelles possibilités de politiques publiques de planification urbaine visant à une croissance métropolitaine plus ordonnée et équilibrée pourraient surgir, même si la plupart des RMs continue à augmenter plus que le taux moyen de croissance végétative de la population brésilienne (environ 2%). Bien que généralisé, ce phénomène se manifeste de façon bien différente selon les RMs. Si, d'un côté, la tendance à un refroidissement graduel de la croissance de population de la RM pauliste semble être confnmée par les données du recensement de 2000, de l'autre, quelques RMs présentent des taux qui, même décroissants, continuent au-dessus de la moyenne brésilienne, comme dans le cas de Belo Horizonte, Curitiba, Salvador, Fortaleza, Belém et Brasilia. En réalité cette croissance de population élevée reflète le plus grand dynamisme économique de ces régions métropolitaines, ces 30 dernières années, qui continuent ainsi à attirer un contingent significatif d'immigr~ts, principalement de régions déprimées de l'arrière-pays de leurs Etats respectifs
A. Rallet et A. Torre
98
Les données du tableau 2 révèlent qu'entre 1975/96ces 6 RMs ont présenté un taux de croissance de leur pm au-dessus de la moyenne des RMs. En contraste, les autres RMs ont présenté une croissance inférieure à la moyenne nationale, spécialement Rio de Janeiro, Porto Alegre et Recife. Ces différents taux de croissance ont abouti à un repositionnement relatif de ces métropoles dans le développement intra-régional : Curitiba émerge comme un nouveau pôle économique de la Région Sud pendant que Porto Alegre perd de son hégémonie régionale; Belo Horizonte se consolide comme un pôle économique important dans le macro-espace d'industries et de services de la région Sud-est et Rio de Janeiro passe par une stagnation économique relative; Salvador renforce sa position de principal pôle économique de la région Nordeste et Fortaleza surgit comme troisième pôle régional; Belém apparaît comme le pôle urbain, spécialement de services, de la frontière minérale de la région Nord. Par ailleurs, les taux relativement élevés de croissance du Pill de ces régions métropolitaines plus dynamiques ont causé une croissance soutenue du Pill per capita et un mouvement de comblement de la distance par rapport aux RMs considérées plus développées jusqu'aux années 1970. Les données du tableau 2 pour 1996montrent que Belo Horizonte a dépassé le niveau de Pill du centre urbain de Rio de Tableau2 ÉVOLUTION DU PIB ET DU PIB PER CAPITA PAR REGIONS METROPOLITAINES SELECTIONNEES (1975-2000) - BRESIL = 100
RM Sao Paulo Rio de Janeiro Belo Horizonte Porto Alegre Curitiba Salvador Recife Fortaleza Belém Brasilia
Média RMs BRASIL
1970 PIB 24,71 12,98 2,97 3,39 1,39 1,81 1,69 0,71 D,54 1,37 5,16 100,00
PIB per capita 259,93 175,72 147,34 187,64 130,54 134,93 86,36 56,51 69,48 189,97 184,76 100,00
1996 PIB 22,03 8,87 3,82 2,91 2A5 2,27 1,60 1,11 1,21 2,60 4,89 100,00
PIB per capita 213,62 141,02 155,84 141,04 171,64 130,26 81,22 67,88 124,19 226,64 162,69 100,00
Crese.Méd. Anual (%) PIB per capita PIB 2,15 -0,24 0,86 -0,35 0,97 3,96 1,96 -0,66 2,02 5,51 3,83 0,53 2,44 DAO 1,58 4,91 6,71 3,52 1,55 5,89 0,09 2A5 2,71 0,70
Fonte: FIBGE e Andrade e Serra (2000).
Janeiro, et il en va de même de Curitiba par rapport à Porto Alegre; en même temps le fossé entre Recife et Fortaleza a diminué. En outre, même si elle a maintenu un niveau de Pill per capita bien supérieur, la région métropolitaine pauliste a vu la distance relative qui la sépare des autres RMset de la moyenne brésilienne se réduire. Les données du tableau 3 confirment la littérature qui, sur la base d'évidences empiriques, indique que le processus d'industrialisation
Les nouvelles proximités urbaines
99
récent a été décisif dans ce repositionnement des régions métropolitaines brésiliennes. Le mouvement de relative déconcentration industrielle dans tout le pays, avec une perte de participation des centres industriels dominants (RMs de Sao Paulo et Rio de Janeiro), a commencé à s'intensifier à partir des années 70. Ce processus de renversement de la polarisation industrielle s'est également traduit non seulement par le surgissement de déséconomies d'agglomération de ces deux pôles nationaux, mais encore par celui d'économies d'agglomération dans les autres régions, plus particulièrement dans les autres régions métropolitaines (Diniz, 1993). D'un autre côté, ces données manifestent également le mouvement de nouvelle concentration industrielle des années 1990,indiqué par Diniz (2000).Ce renversement de tendance, comme semblent l'indiquer les données du PIB per capita et de la proportion du PIB industriel métropolitain de Sao Paulo, n'est certainement pas sans conséquences sur la dynamique urbaine métropolitaine, comme par exemple la possible recréation de quelques avantages d'agglomération des deux pôles principaux comme centres de services productifs modernes pour une zone de marché supranationale et la consolidation de désavantages d'agglomération chroniques dans les régions métropolitaines émergeantes, comme les problèmes d'infrastructure urbaine et les enclaves de pauvreté absolue. Nous utiliserons les variables proxi des facteurs d'agglomération et de désagglomération du modèle de détermination de la rente foncière urbaine, présenté dans la première section, pour mieux saisir les éléments déterminants de cette dynamique urbaine récente des régions métropolitaines brésiliennes. Ill-
MÉTHODOLOGIE
DE TRAITEMENT DES DONNÉES
Ces avantages et désavantages relatifs ont un impact sur les forces d'attraction et de répulsion synthétisées dans les facteurs d'agglomération et de désagglomération urbaine formalisés dans la première section. Le niveau de développement de la base d'industries et de services (spécialisation et diversification), l'offre d'infrastructure physique et sociale et de Sciences et Technologie, la disponibilité de moyens naturels et la proximité des centres principaux ont des effets positifs sur la productivité urbaine et sur le taux de participation de la force de travail eve ~) et négatifs sur le prix du sol urbain, expression directe de la rente foncière (R), et sur les variables de transportabilité et d'accessibilité
(T)eb).
A. Rallet et A. Torre
100 1. La base de données
Ces variables ont été estimées ,grâce à des indicateurs, construits à partir de la base de données par Echantillon de Domiciles - PNAD, limitée au matériel disponible pour les années90 (1992, 1993, 1995, 1996, 1997, 1998et 1999).Malgré ses limites, cette base de données a des vertus qui justifient son usage dans des études d'économie urbaine et, en particulier, dans cette étude. Tableau 3 DISTRIBUTION DU pm INDUSTRIEL PAR GRANDES REGIONS ET ÉTATS SELECTIONNES (BRESIL=100)
Sudeste Sao Paulo
RMSP Interior Rio de Janeiro RMRJ Interior Minas Gerais RMBH Interior Sul Rio Grande do Sul RMPA Interior Santa Catarina
RMCU Interior Centro-Oeste Brasilia
Nordeste Bahia RMSA Interior Pernambuco RMRE Interior Ceara RMFO Interior Norte Para RMBE Interior Brasil Média RMs
Fonte: Andrade e Serra (1998)
1975
1985
1996 Tx
75,3 55,0 37,1 17,9 13,0 10,4 2,6 6,6 2,5 4,1 14,8 7,5 4,0 3,5 4,0 1,3 2,7 1,1 0,6 7,4 2,6 2,0 0,6 2,2 1,6 0,6 0,8 0,5 0,2 1,3 D,S 0,4 0,2 100,0 6,0
65,7 43,9 23,9 20,0 11,8 9,2 2,5 8,7 3,2 5,5 15,7 6,9 3,4 3,6 5,2 2,5 2,7 2,4 0,3 11,9 5,3 4,2 1,1 2,0 1,5 D,S 1,2 0,8 0,4 4,0 1,7 0,7 1,0 100,0 4,9
68,0 45,0 24,7 20,3 10,3 8,0 2,3 11,5 4,6 6,8 15,2 5,9 3,1 2,8 6,1 2,8 3,3 3,2 0,8 9,7 4,0 2,6 1,4 1,4 0,9 D,S 1,4 1,0 0,3 3,5 1,7 1,0 0,7 100,0 4,9
Var
1975/96
-9,60 -18, 14 -33,55 13,92 -21,00 -23,43 -11,23 73,70 88,86 64,70 2,48 -21,23 -22,23 -20,10 54,26 124,35 21,66 187,34 44,67 32,19 55,43 34,12 122,03 -35,67 -40,53 -23,46 76,13 89,20 44,97 166,76 216,23 182, 15 286,88 D,DO -18,19
Les nouvelles proximités urbaines
101
La construction des variables proxi des facteurs d'agglomération présents dans l'équation (13) de la Section 1 se base sur les critères suivants: . la variable productivité du travail (y) a été élaborée à partir des informations de la PNADsur le revenu personnel total (de toutes origines) et sur le nombre de personnes de la PEA employées; . la variable taux de participation de la force de travail (f.l)a été établie à partir de l'estimation de la PEA et de la population résidente, fournie par la PNAD ; . la variable coût de l'infrastructure urbaine (f.l)a été élaborée à partir de la variable domiciles reliés au réseau d'assainissement, choisie, car elle s'est avérée un élément de différentiation décisif quant à l'infrastructure des domiciles urbains après un test des divers autres indicateurs
d'infrastructure présents dans la PNAD. Les variables proxi des facteurs de désagglomération ont été construites sur la base des critères suivants: ... la rente foncière urbaine (R) a été estimée sur la base du loyer résidentiel moyen, considéré comme une bonne solution en raison du manque total d'informations fiables et comparables, au niveau inter-régional, sur le prix du sol urbain, sachant que plus le loyer résidentiel correspond au marché officiel des loyers, plus la qualité de la donnée est bonne29; - la variable densité démographique (Tl), proxy de la verticalisation urbaine, a été calculée en considérant constante la superficie métropolitaine du Recensement Démographique de 1991, pour éviter toute distorsion du dénominateur de l'indicateur; - la variable temps moyen entre domicile et lieu travail (h), proxy du coût d'accessibilité, est une information du temps de transport intra-urbain qui reflète autant la distance que la densité du trafic urbain. 2. La méthode d'analyse multivariée
L'ensemble constitué par 7 indicateurs économiques de 10 régions métropolitaines brésiliennes sur 7 ans compose un cadre informatif important et peut être évalué au, travers de techniques statistiques d'analyse de données multivariée. A partir de ces données, 29 L'équipe considérée
de recherche en économie régionale est en train de valider méthodologiquement stratégique pour les études en économie urbaine.
cette donnée,
102
A. Rallet et A. Torre
il est possible d'étudier la « caractéristique économique» de chaque région métropolitaine par une analyse conjointe des variables sélectionnées. Des groupes de régions surgissent des distributions semblables de variables; des mesures du degré de ressemblance entre régions sont également obtenues30. La première technique utilisée est l'analyse en composantes principales (ACP), qui permet de représenter chaque région métropolitaine par des indices résultant de combinaisons linéaires adéquates des 7 variables économiques sélectionnées. L'avantage de cette technique réside dans le fait qu'elle dispense de tout a priori. Cela implique qu'il n'y a nul besoin de faire des suppositions, ni pour ce qui est des variables en question, distribution normale par exemple, ni quant aux relations causales entre ces mêmes variables.31 La méthode ACP offre l'avantage de « laisser les variables parler d' ellesmêmes », car elle met en relief les principales variables qui expliquent la dispersion du nuage de points observé. Du point. de vue méthodologique, l' ACP ne peut que renforcer la compréhension de notre objet d'étude comme un système ouvert et organique.32 La technique ACPpermet donc de réduire le nombre de variables à considérer à un petit nombre d'indices (composantes principales), qui sont des combinaisons linéaires des variables originales. Une analyse des composantes principales cherche un minimum de combinaisons linéaires utilisées pour résumer les données, avec une perte minimum d'informations durant ce processus. C'est très utile pour essayer de trouver des groupes (clusters) de données. Les variables doivent être corrélées au début du processus et il ne faut faire aucune supposition initiale à propos de la distribution de probabilités des variables originales. Une description plus mathématique révèle qu'il s'agit de la transformation orthogonale d'un ensemble de variables corrélées en un nouvel ensemble de nouvelles variables noncorrélées. Le manque de corrélation des indices permet de mesurer des « dimensions» différentes dans les données. La première composante principale (Zl) représente le pourcentage le plus élevé de variation des données observées, la deuxième composante (Z2)montre la deuxième plus grande variation, et ainsi de suite. Ainsi, nous avons: Var (Zl) ~ Var (~) ?:... ~Var (Zp), où Var (Zi) désigne la variance de Zi dans l'ensemble de données considéré. Les variances de Zi sont obtenues à partir des valeurs propres de la matrice 30
Pour une discussion détaillée des méthodes d'analyse multivariée voir Mardia et al. (1988) et Manly (1986). Pour une méthode semblable à celle développé dans cet article, voir Kageyama et Silveira (1997), qui analysent les caractéristiques régionales de la modernisation agricole brésilienne. 31 TIconvient de souligner que l'utilisation d'un modèle dans notre section 2 n'a pour but que d'expliciter les variables que nous considérons importantes. Méthodologiquement, la description d'un modèle, dans la section 2, et l'utilisation d'une méthode statistique qui dispense toute modélisation ne constitue pas le moindre problème. 32 Pour une discussion des systèmes ouverts et organiques, voir Lawson 1997 ; Chick 1998 et Chick et Dow 2002.
Les nouvelles proximités urbaines
103
de covariance (ou de la matrice de corrélation). Et les vecteurs propres associés à ces valeurs propres ordonnées fournissent les coefficients des composantes principales, dont le premier est associé à la valeur propre la plus élevée et ainsi de suite. Une analyse des composantes principales, au travers des graphiques de paires de composantes, permet de visualiser des groupements de régions métropolitaines. L'avantage de ces groupements est qu'ils indiquent clairement pourquoi elles se regroupent, c'est-à-dire qu'ils fournissent la contribution de chaque variable à chaque composante et ce qu'elles représentent dans la variation totale. Un complément de cette analyse est l'utilisation de la technique de «clustering », où les RMs sont regroupées sur la base d'une mesure de distance (ou degré de ressemblance), qui considère toutes les variables en même temps. Une classification par groupements hiérarchiques des 10régions métropolitaines sera réalisée au travers d'une analyse de groupes. L'objectif d'une analyse de groupes est de regrouper les points multivariés, dans notre cas, les régions métropolitaines, en classes selon leur degré d'homogénéité et selon les caractéristiques économiques considérées. Il existe de nombreuses techniques d'analyse de groupes, qui doivent être choisies en fonction du type de variables concernées mais également du type de groupement désiré. Nous avons choisi la méthode hiérarchique par agglomération, qui a pour point de départ une matrice de « distances statistiques» (p. ex. distance euclidienne ramenée à la même échelle) entre les points multivariés (régions métropolitaines). Les points «les plus proches» en termes de ressemblance des variables sont sélectionnés par groupes. La deuxième plus petite distance entre les points fournit d'autres types de groupements incluant des points qui n'avaient pas encore été sélectionnés, et ainsi de suite. Les groupements seront présentés sous forme de diagrammes montrant la hiérarchie d'agglomération. Pour une meilleure compréhension, les tableaux de distances (ou degré de ressemblance) entre les RMsseront également présentés. Les tableaux dénommés «Matrice de Proximités », élaborés pour les années 992, 1996et 1999,présentent les valeurs numériques du degré de ressemblance entre régions, obtenues à partir de la distance statistique mentionnée. Les valeurs les plus basses indiquent les régions qui se ressemblent le plus selon les variables en question et, inversement, les valeurs les plus élevées indiquent les ressemblances les plus faibles entre RMs. Ces mêmes distances sont utilisées pour construire un dendogramme, représentation visuelle des groupements hiérarchiques. Les distances statistiques établissent des coefficients de groupements, disposés dans la colonne verticale et remis à la même
échelle pour les nombres entre 0 et 5, pour la combinaison de régions métropolitaines. Les lignes horizontales relient les cas regroupés et les associent à un niveau de ressemblance. Ainsi, sur un dendogramme,
A. Rallet et A. Torre
104
les groupes formés d'éléments individuels, où l'on considère la distance entre les points égale à zéro, se retrouvent au niveau le plus bas. Au fur et à mesure qu'augmente la distance (degré de ressemblance) entre les groupes, de nouveaux groupes se forment, jusqu'à ce tous les points se rejoignent en un seul groupe correspondant à la plus grande distance. Le processus d'analyse multivariée décrit ci-dessus a été réalisé
pour les années 1992, 1996 et
1999,
ce qui permet une comparaison des
régions métropolitaines selon leurs caractéristiques économiques, tous les 3 ans environ. Rappelons finalement que, en raison des différences d'unité entre variables, celles-ci ont toutes ont été normalisées. Le logiciel de statistiques S-Plus a été utilisé pour cette opération. Le cadre ci-dessous synthétise les légendes des variables à utiliser33: Cadre 1 Légende
Légende des Rég. Métropolitaines Rég. Métropolitaine Légende 1 Sâo Paulo m 2 Rio de Janeiro i 3 Belo Horizonte R 4 Porto Alegre Curiti ba h 5 b 6 Salvador y 7 Recife 8 Fortaleza 9 Belém 10 Brasilia pondérée par la rente foncière et la distance géodésique par rapport au centr6ïde de la Rég. Métrop. de Sao Paulo Légende y
*
IV-
des Variables Variable Productivité moyenne du Travail Taux de Participation Infrastructure Rente Foncière Urbaine Transportabilité Productivité du Travail*
FACTEURS D'AGGLOMÉRATION ET DE DÉSAGGLOMÉRATION DANS LE DÉVELOPPEMENT MÉTROPOLITAIN RÉCENT
Les résultats présentés dans les Tableaux 4 et 5 montrent clairement la hiérarchie urbaine des métropoles brésiliennes en termes d'incidence des facteurs d'agglomération et de désagglomération.
33
La procédure
d'inclusion
de la variable dérivée Y peut diluer le facteur de productivité
dans le résultat,
car elle signifie la perte de la variance originale associée à cette variable,. Toutefois, elle présente l'avantage, tout au moins apparente, d'introduire une variable de productivité du travail qui capte le coût des transports entre métropoles. En réalité, il était difficile de trouver un compromis clair pour ce problème.
Les nouvelles proximités urbaines
105 Tableau 4
FACTEURS D'AGGLOMERA TION PAR REGIONS METROPOLITAINES
RM
1995
y 1997
1999
1995
Ji 1997
1999
1995
i 1997
1999
Sao Paulo
115,85 103,26 85,58 100,90 103,95 69,71 61,24 59,85 85,99 125,05 100,00
115,35 104,96 82,79 92,78 102,59 80,59 59,50 61,38 74,91 133,61 100,00
122,81 118,05 87,97 110,31 102,43 79,67 74,86 67,33 86,18 150,39 100,00
101,51 97,93 101,20 107,32 106,79 99,90 89,18 98, 17 91,96 99,32 100,00
101,47 96,23 106,58 107,21 106,33 99,49 91 ,46 93,57 94,06 99,72 100,00
101,55 94,98 105,85 106,23 105,81 105,64 91,03 92,10 94,91 102,47 100,00
117,20 114,67 102,27 106, 18 73,72 79,55 41,18 26,56 29,30 104,72 100,00
117,09 111,84 102,94 102,30 77,34 77,47 49,72 33.19 48,54 109,53 100,00
114,62 108,14 104,07 100,78 90,60 87,54 47,50 45,43 47,82 111,95 100,00
Rio de Janeiro Belo Horizonte Porto Alegre Curitiba Salvador Recife Fortaleza Belém Brasilia Média RMs
Fonte: PNAD 1995, 1997 e 1999 y Produtividade média do trabalho (renda metropolitanapessoal = ~CàJJPM.ft)de participaçao (PEA(>opulaçao i ~t£ùutura
urbana
(domicilias
com rede coletora
de esgotoltota
de
Tableau 5 FACTEURS DE DESAGGLOMERATION PAR REGIONS METROPOLITAINES R RM Sao Paulo Rio de Janeiro Belo Horizonte Porto Alegre Curitiba Salvador Recife Fortaleza Belém Brasil ia Média RMs Fonte: R
= =
"b =
PNAD
Renda
1995, fundiaria
Verticalizaçao Transportabilidade
1995 117,53 90,92 88,21 100,57 89,35 67,02 61,25 53,57 102,95 122,26 100,00 1997
e 1999
urbana urbana
e Censo
(aluguel (densidade
urbana
1997 114,87 105,42 87.30 92,76 85,49 68,43 60,32 56,90 89,75 102,62 100,00 2000
domiciliar
1999 114,56 110,35 77,66 89,57 88,14 68,32 63,03 55,74 83,42 100,27 100,00 (dados
1995 218,77 198,53 70,43 51,14 24,47 131,62 153,59 79,26 133,20 32,97 100,00
TI 1997 218.30 194,95 71,41 51,41 24,73 133,47 153,90 79,73 134,75 33,76 100,00
1999 217,86 191,53 72,35 51,66 24,99 135,23 154,20 80,17 136,22 34,52 100,00
1995 107,70 118,39 92,38 76,76 84,54 87,76 81,66 80,46 64,11 84,70 100 00
b 1997 106,51 118,70 96,45 77,13 84,63 86,30 84,94 78,63 64,50 86,71 100,00
1999 110,88 113,46 93,89 73,15 85,31 85,25 85,81 80,33 68.50 88,04 100,00
preliminares)
médio)
demografica)
(tempo gasto do domicilio
ao trabalho)
D'un côté, les niveaux les plus élevés de productivité du travail (y) de Sào Paulo et de Rio sont suivis par les régions métropolitaines de la Région Sud, Porto Alegre et Curitiba. Belo Horizonte, Belém, Salvador, Recife et Fortaleza ne viennent que bien plus bas. L'inclusion de Brasilia provoque certainement une distorsion de la moyenne des RMs brésiliennes, puisqu'une partie substantielle du revenu de la capitale ne provient pas de la sphère productive de la ville mais de transferts venant du reste du pays. Les autres indicateurs de facteurs d'agglomération du développement métropolitain, taux de participation de la force de travail (Jl) et infrastructure urbaine (i), rapprochent Belo Horizonte des métropoles placées dans la partie supérieure de la hiérarchie de productivité, y compris au-dessus de Rio
106
A. Rallet et A. Torre
pour ce qui est du facteur taux de participation; il en va de même de Salvador, autre RMéconomiquement émergente et dynamique. Par ailleurs, les coûts urbains élevés de Sao Paulo et de Rio de Janeiro ont un impact sur les indicateurs de facteurs de désagglomération au travers du coût du sol urbain (R) et des indicateurs de transportabilité (1] et b). Les deux métropoles de la Région Sud et Belo Horizonte se distinguent car elles maintiennent des coûts urbains relativement bas par rapport à leurs niveaux de facteurs d'agglomération, ce qui entraîne des avantages comparatifs en termes de pôles urbains d'attraction de nouveaux investissements. Fortaleza est un autre cas intéressant en termes d'attraction, car elle possède des indices bien inférieurs à ses consœurs régionales, en particulier pour ce qui est des indicateurs de coût du sol urbain et de verticalisation. Ces coûts urbains plus bas sont effectivement les plus grands avantages comparatifs de cette métropole, au niveau non seulement régional, mais encore national, ce qui en fait la RM «meilleur marché» du pays en termes de localisation de nouvelles activités. Ces coûts plus bas plus compensent totalement le fossé qui la sépare de Salvador et de Recife, en ce qui concerne les facteurs d'agglomération, spécialement, la productivité urbaine et le taux de participation (yell). Belém se situe à l'autre extrême, avec des coûts urbains relativement élevés. Malgré son dynamisme économique,
principalement son niveau de productivité (y), elle présente de forts obstacles à son développement en fonction de son infrastructure
précaire (i), du prix élevé de son sol urbain (R) et de son indice de verticalisation élevé (1]). Nous présenterons ci-dessous les résultats de l'analyse multivariée qui permettent de comprendre le développement des RMs dans les années 1990(période 1992/999)au travers d'une interprétation conjointe des sept facteurs définis dans le modèle théorique, qui incluent la productivité pondérée Y. La première technique utilisée est l'analyse en composantes principales (ACP), qui nous fournit des indices ou composantes résultant de combinaisons linéaires de ces sept facteurs (les variables Xi pour i = 1,..., 7) au travers desquels chaque région métropolitaine,numérotée de 1 à 10,peut être représentée. Grâce à la valeur du coefficient de chacune des sept variables dans chaque composante, il est possible de déterminer sa contribution (positive ou négative) à la caractéristique prédominante de la composante. Les régions métropolitaines sont représentées par la
combinaison des valeurs des composantes 1 et 2 (ou d'autres, le cas échéant). Par définition, le nombre de composantes correspond au nombre de variables, dans notre cas sept. Néanmoins, il est possible de sélectionner un nombre minimum de composantes suffisant à expliquer la plus grande partie de la variance des variables. Comme il est usuel dans la littérature, nous adopterons un nombre de composantes qui explique entre 80% et 90% de la variance, car cela
Les nouvelles proximités urbaines
107
limite le nombre de composantes à deux ou trois pour chaque année. En raison des limitations d'espace pour une analyse exhaustive des composantes principales pour toutes les années, nous avons choisi les années 1992, 1996et 1999,qui représentent des intervalles d'à peu près trois ans dans la base de données de la PNAD. Nous présenterons les résultats de l'ACP dans des cadres,
diagrammes et graphiques, à commencer par l'année 1992. Le Diagramme 1 montre que les trois premières composantes suffisent à expliquer 95,4%de la variance des variables pour cette année, ce qui facilite une interprétation du profil des RMs restreinte à ces composantes. Diagramme
1
1992 Importance
relative des composantes
principales
Var ian 2 ces
Camp. 1
Camp. 2
Comp. 3
Camp. 4
Camp. 5
Camp. 6
Camp. 7
Les coefficients du Cadre 2 indiquent la prédominance de la productivité (y), de l'infrastructure (i) et de la rente foncière (R) comme les variables qui caractérisent la première composante, alors que les coûts urbains de verticalisation (1]) et de transportabilité (b) sont représentés positivement dans la composante 2 et le taux de participation (p) de manière négative. Il existe dans la troisième composante une claire prédominance et opposition des variables de désavantages d'agglomération, avec R et 1]positifs, sur les avantages, avec JLet Y fortement négatifs.
A. RaI/et et A. Torre
108 Cadre 2 COEFFICIENTS
1992 y JI i R Tl b Y
DES COMPOSANTES
PRINCIPALES
POUR 1992
Camp. 1 Camp. 2 Comp. 3 Camp. 4 Camp. 5 Camp. 6 Camp. 7 0,140 0,526 0,505 -0,111 -0,032 -0,201 -0,629 0,300 0,618 0,468 -0,734 -0,063 -0,541 -0,080 0,504 0,003 -0,125 -0,087 -0,753 -0,392 -0,053 0,247 0,726 0,462 -0,139 0,397 -0, 134 -0,061 0,609 0,411 0,656 0,017 0,071 -0,149 -0,051 0,707 0,033 0,330 0,524 -0,143 -0,265 -0,159 0,272 0,196 0,228 0,257 0,227 -0,792 -0,300
Dans le graphique 1, la distribution des RMs entre les deux composantes les plus importantes révèle des profils métropolitains relativement bien définis. Les deux pôles nationaux, Sào Paulo et Rio de Janeiro, ont une relation significative et positive à ces deux composantes, qui présentent une forte superposition des variables d'agglomération et de désagglomération. Par ailleurs, les RMs de la Région Sud et Brasilia ont une relation positive à la composante 1 et négative à la composante 2, indiquant qu'à part le coût du sol urbain (R), ces régions possèdent structurellement un développement efficace
qui combine les avantages d'agglomérations urbaines (y et Il) aux bas coûts relatifs (l] et b). A l'autre extrême nous retrouvons les RMs du Nordeste, prises à un cercle vicieux de prédominance des désavantages d'agglomération, avec une relation positive à la deuxième composante et négative à la première. Le cas de Belo Horizonte est particulier car il se rapproche de zéro sur les deux axes, avec une relation légèrement positive à la première composante. Graphique
1
pca-1992.~adl$
-1
O. 4
O. 2 Co
~ 2
O. 0 VJI R a.
-2
10
o.
-DA
-0.2
0.0 Camp. 1
0.2
-1
DA
Les nouvelles proximités urbaines
109
Comme pour 1992,le Diagramme 2 montre que les trois premières composantes expliquent plus de 90% de la variance pour 1996. Toutefois, ces composantes présentent des caractéristiques bien différentes de celles observées pour cette première année. La première composante a une importance relative bien plus grande, 67,7%, et présente, dans le cadre 3, des coefficients positifs avec une participation semblable aussi bien des variables d'agglomération (V,p, i et Y) que de désagglomération (R et b), à l'exception de Tlqui influence négativement et fortement la composante 2. La composante 3 est difficile à interpréter car les deux types de variables y ont une incidence positive et négative, avec un poids plus fort de l'influence
négative de la productivité (v) et du coût du sol urbain (R). Les métropoles brésiliennes possèdent une forte relation positive à la composante 1 et négative à la composante 2. En contraste, cette composante a une relation positive aux métropoles de second niveau, Belo Horizonte, Brasilia, Porto Alegre et Curitiba, qui présentent également une relation positive à la composante 1, c'est-à-dire qu'il existe de fortes évidences de ce que ces RMs des possèdent des avantages comparatifs nets d'attraction, dans la mesure où elles possèdent une forte relation positive à tous les facteurs d'agglomération et une relation négative aux facteurs de coût de transportabilité urbaine. Dans le cas des RMs du Nord et Nordeste, l'aspect commun est le rapport négatif à la composante 1, ce qui reflète aussi bien les coûts moins élevés du sol urbain (R) que les niveaux de productivité plus bas (v). La différence est due à la composante 2, où Fortaleza à une relation positive et confmne qu'elle est la métropole «meilleur marché» du pays, alors que Belém et Recife, principalement, présentent une combinaison problématique de relation négative aux deux composantes. Diagramme
2
1996 Importância
Var ian ces
relativa dos componetes
principais
3
Camp. 1
Camp. 2
Camp. 3
Camp. 4
Camp. 5
Camp. 6
Camp. 7
A. Rallet
110
et A. Torre
Les résultats de l'ACP pour 1999 ressemblent beaucoup à ceux de 1996,indiquant une possible contribution de la stabilisation monétaire à une stabilité des variables dans cette période. Graphique
pea - padroniz
2
- 1996
0.6
0.4
0.2 Co
y
~i 0.0 0.2
0.4
-3 ..DA
..0.2
0.0 Camp. 1
0.2
0.4
0.6
Cadre 3 COEFFICIENTS DES COMPOSANTES PRINCIPALES POUR 1996 1996 y u i R n b Y
Com .1 0,419 0,387 0,421 0,41 0,421 0379
Comp.2
Comp.6
0,342 -0,165
Comp.7 -0,701
-0,701 0,701
-0,89 -0, 165 o 143
0,43 -0 254
0,701
La variance expliquée par les trois premières composantes est semblable à la précédente, 92,6%, bien que le poids relatif de la seconde soit plus élevé, comme le montre le Diagramme 3. La première composante présente également des coefficients positifs pour les variables d'agglomération (y, Il, i e Y) et de désagglomération (R et b), à l'exception de 17qui influence cette composante de manière négative. La composante 2 reflète une prédominance des coûts urbains moins élevée, car elle présente une participation positive des variables
Les nouvelles
proximités
111
urbaines
d'agglomération (Jl, i) et négative de celles de désagglomération (h), alors que les variables typiques des grandes métropoles, coût du sol urbain (R) et niveau de productivité (y), contribuent de manière négative. La composante 3, pour sa part, répète les caractéristiques de la composante 2, spécialement par la forte influence positive du taux de participation de la force de travail (Jl)et de l'infrastructure urbaine (i). Le classement des RMs est fort semblable au précédent, même s'il fait ressortir plus nettement le groupement efficace de Curitiba et de Porto Alegre, un certain éloignement de Belo Horizonte, qui occupe clairement une position intermédiaire entre les extrêmes des RMsde la Région Sud et Salvador, une position isolée et privilégiée de Brasilia et une claire différence entre les caractéristiques des deux métropoles principales et celles de l'ensemble des métropoles régionales. Cadre 4 COEFFICIENTS
1999 Comp.1 0.463 y* 0.302 \ 0.489 R 0.433 11 b 0.299 Y 0.422 J.I.
Comp.2 0.398 -0.240 -0.679 -0.494 0.279
DE COMPOSANTE
Comp.3 -0.479 0.692 0.305 -0.201 0.214 0.210 -0.260
Comp.4 0.194 0.247
Comp.5 0.240 0.124
0.546 0.170 -0.575 -0.492
-0.407 0.669 -0.393 0.398
Diagramme 1999
Importância
PRINCIPALE
relativa
DE 1999
Comp.6 -0.406 0.808 -0.235 -0.265 -0.231
3
dos componentes
principais
Var ian ces 2
Camp. 1
Camp. 2
Camp. 3
Camp.
4
Camp.
5
Camp.
6
Camp. 7
Comp.7 -0.679 -0.171 0.111 0.442 0.117 -0.258 0.471
A. Rallet et A. Torre
112
Graphique 3
PCA
- padron - 1999 OA 54 10 0.2
/7V
3
Co 0.0 mp 2
6
8
ytiNta 9
0.2
_0 -1
R
7
b
DA
n 0,6 -0.6
-DA
0.0
-0.2 Camp.
0.2
DA
1
Ces résultats, qui indiquent une stabilité des caractéristiques des RMs en groupes relativement homogènes, deviennent plus clairs encore avec la technique de groupement hiérarchique d'analyse de groupes basée directement sur les composantes principales. Nous présenteront ci-dessous les matrices de proximité de toutes les variables parmi les dix RMs, sur la base du calcul de la distance euclidienne, et les diagrammes des groupements des RMs pour ces mêmes années 1992,1996et 1999. Les cadres 5, 6 et 7 montrent bien que Rio et Sao Paulo présentent une forte proximité entre leurs variables, et forment nettement un groupe métropolitain qui, en fait, polarise nationalement l'ensemble des régions brésiliennes. Les diagrammes 4, 5 et 6 illustrent clairement ce phénomène. Tout indique que les facteurs de désagglomération de ces métropoles contribuent à la constitution de métropoles de second niveau qui profitent de la déconcentration de certaines activités importantes des métropoles nationales (spécialement les activités industrielles), qui ont maintenu un niveau élevé de productivité urbaine grâce à une consolidation des prestataires de services hautement spécialisés pour le marché du réseau urbain national et de plus en plus sous-continental (Tolosa, 2000).Comme le montrent ces diagrammes, ces métropoles de second
niveau changent de « tronc» au cours des années 90 En 1992, elles se
Les nouvelles proximités
113
urbaines
présentent comme les branches d'un «tronc» séparé des deux métropoles nationales. En 1995 les RMs de Porto Alegre, Curitiba et Brasilia ont migré comme deux branches distinctes du «tronc» principal, et il en va de même de Belo Horizonte en 1996,qui migre vers la branche des métropoles de la Région Sud. Finalement Salvador migre vers ce «tronc» principal en 1999, constituant une branche propre avec Belo Horizonte, alors que Recife, Fortaleza et Belém sont toujours regroupées sur leur propre « tronc ». Cadre 5 MATRICE DE PROXIMITE
1:SP 1:SP 2:RJ 3:BH 4:PA 5:Cu 6:Sa 7:Re 8:Fo 9:Be 10:Br
2:RJ 0,002
0,000 0,333 0,481 0,595 0,464 0,725 0,902 0,794 0,363
0,467 0,752 0,675 0,550 0,754 0,957 1,000 0,551
1992 (TOUTES VARIABLES INCLUES)
Distance Euclidienne remise à l'echel e 5:Cu 3:BH 4:PA 6:Sa 7:Re 0,333 0,481 0,595 0,464 0,725 0,752 0,675 0,550 0,754 0,467 0,146 0,104 0,098 0,411 0,466 0,146 0,317 0,784 0,104 0,317 0,383 0,657 0,098 0,466 0,383 0,000 0,784 0,657 0,000 0,411 0,731 0,520 0,149 0,027 0,410 0,708 0,457 0,512 0,226 0,300 0,169 0,044 0,401 0,471 0,799
8:Fo 0,902 0,957
9:Be 10:Br 0,794 0,363 1,000 0,551 0,457 0,169 0,044 0,512 O,7OB 0,401 0,226 0,471 0,300 0,799 0,293 0,825 0,645 0,645
0,41 0,731° 0,520 0,149 0,027 0,293 0,825
Cadre 6 MA TRICE
1:SP 1:SP 2:RJ 3:BH 4:PA 5:Cu 6:Sa 7:Re 8:Fo 9:8e 10:8r
0,000 0,499 0,391 0,515 0,484 0,840 1,000 0,766 0,369
2:RJ 0,000 0,392 0,336 0,449 0,362 0,726 0,879 0,682 0,344
DE PROXIMITE
(TOUTES
VARIABLES
Distance euclidienne remise à l'échelle 3:BH 4:PA 5:Cu 6:Sa 7:Re 0,499 0,391 0,515 0,484 0,840 0,392 0,336 0,449 0,362 0,726 0,138 0,308 0,130 0,505 0,138 0,160 0,353 0,747 0,308 0,160 0,464 0,801 0,130 0,353 0,464 0,259 0,505 0,747 0,801 0,259 0,671 0,858 0,484 0,259 0,783 0,503 0,666 0,700 0,290 0,141 0,387 0,182 0,291 0,484 0,837
INCLUES)
8:Fo 1,000 0,879 0,671 0,858 0,783 0,484 0,259 0,280 0.899
9:Be 0,766 0,682 0,503 0,666 0,700 0,290 0,141 0,280
10:Br 0,369 0,344 0,387 0,182 0,291 0,484 0,837 0,899 0,706
0,706
Cadre 7 MATRICE
DE PROXIMITE Distance
1:SP 1:SP 2:RJ 3:BH 4:PA 5:Cu 6:Sa 7:Re 8:Fo 9:Be 10:Br
0,017 0,517 0,619 0,606 0,593 0,808 0,971 0,844 0612
2:RJ 0,017 0,524 0,653 0,613 0,597 0,675 0,843 0,750 0650
3:BH 0,517 0,524 0,165 0,006 0,101 0,548 0,543 0,571 0506
1999 (TOUTES
Euclidienne 4:PA 0,619 0,653 0,165 0,000 0,292 0,671 0,647 0,549 0,346
remise 5:Cu 0,606 0,613 0,006 0,000 0,272 0,627 0,587 0,562 0355
VARIABLES
INCLUES)
à l'echelle 6:Sa 0,593 0,597 0,101 0,292 0,272 0,372 0,400 0,392 0729
7:Re 0,808 0,675 0,548 0,671 0,627 0,372 0,006 0,213 0977
8:Fo 0,971 0,843 0,543 0,647 0,587 0,400 0,006 0,223 1000
9:Be 0,844 0,750 0,571 0,549 0,562 0,392 0,213 0,223 0,958
10:Br 0,612 0,650 0,506 0,346 0,355 0,729 0,977 1,000 0,958
A. Rallet et A. Torre
114 Diagramme 4 clusters hierarq. -euclideano -1992
CI ai I
~
Diagramme 5 clusters
- hierarq
padron
-
10 He igh t 3
Diagramme 6 clusters
~ Q) .2> I
Cf)
-
hier.
padron
-1996
Les nouvelles proximités urbaines
115
CONCLUSION
Comme notre processus de regroupement est dynamique, de nouvelles configurations peuvent surgir au cours du temps. C'est par exemple le cas si quelques RMs deviennent plus efficaces et profitent de fenêtres d'opportunité en termes de planification urbaine, qui leur permettent de dépasser les goulots d'étranglement que sont les coûts urbains, et si elles progressent vers un développement régional plus équilibré. Parmi les RMs périphériques, Fortaleza et Belém, pour des motifs différents liés aux caractéristiques analysées, seraient les plus fortes candidates possibles à une progression sur l'échelle hiérarchique métropolitaine, malgré de possibles coûts urbains élevés en raison des hauts niveaux d'inégalité et pauvreté qui les caractérisent. Par ailleurs, la tradition culturelle et le meilleur stock de capital humain de Recife lui font conserver toutes ses chances de redevenir un pôle urbain régional (Lemos et Ferreira, 2001). En ce qui concerne Salvador, sa récente progression dans la hiérarchie métropolitaine peut avoir atteint sa limite, pour le moins à moyen terme, en raison des énormes goulots d'étranglement, amplement exposés par la littérature, que sont la pauvreté, les inégalités et l'éducation, cette dernière y étant particulièrement déficitaire, y compris au niveau supérieur. Une difficulté jusqu'à présent infranchissable pour l'ensemble de ces RMs périphériques est le problème de leur voisinage, essentiellement dirigé vers la subsistance, ce qui limite la complémentarité productive et la division intra-régionale du travail, rendant impossible la transformation du développement urbain aujourd'hui atteint en un développement régional à long terme (Lemos et al., 2000). Pour ce qui est trois RMs consolidées au niveau secondaire, mis à part Brasilia, elles possèdent une localisation privilégiée qui renforce leurs avantages comparatifs dans l'intégration productive de villes du réseau urbain des Régions Sud et Sud-est, avec de grandes possibilités de consolidation économique de leur voisinage. Le surgissement précoce de coûts urbains élevés, ainsi que la verticalisation excessive de Belo Horizonte, combinés à de graves problèmes sociaux et le manque de dynamisme économique récent de Porto Alegre, qui se traduit par un taux de participation relativement bas et une stagnation de la productivité du travail, peuvent faire obstacle au développement urbain efficace de ces métropoles. Finalement, de nombreux défis guettent la progression de Sao Paulo et de Rio de Janeiro vers une polarisation des marchés régionaux de I'Hémisphère sud dans la prestation de services hautement spécialisés. La dualité urbaine de ces métropoles nationales est frappante. En effet, elles présentent une polarité croissante entre un marché du travail hautement qualifié, avec une production de services productifs intensifs à l'échelle urbaine, comme les services financiers,
116
A. Rallet et A. Torre
et des indices de violence, d'inégalité et de pauvreté absolue élevés. En ce début de nouveau millénaire, cette dualité continue à être un obstacle structurel à un développement urbain plus équilibré de ces macro-pôles métropolitains. REFERENCES Alonso w. (1964), Location and land use, Harvard University Press, Cambridge, MA. Andrade T. et Serra R (1996)., Estimativas para 0 Produto Interno Bruto dos Municipios Brasileiros: 1975, 1980, 1985 e 1996, Rio de Janeiro, IPEA (mimeo). Andrade T. et Serra R. (2001), «Crescimento Econômico nas Cidades Médias Brasileiras », Cidades Médias Brasileiras, Rio de Janeiro, IPEA. Christaller W. (1933), Central places in Southern Germany, Fischer, Jena(Ger.). Diniz C.C. (1993), «Desenvolvimento Poligonal no Brasil: nem desconcentraçâo, nem continua polarizaçao », Nova Economia, Belo Horizonte, 31, 35-64. Diniz C.C. (2000), A nova geografia econômica do Brasil: condicionantes e implicaçoes, XII Forum Nacional, Instituto Nacional de Altos Estudos, mimeo, Rio de Janeiro. Fujita M., Krugman P. et Venables A.J. (1999), The spatial economy: cities, regions and international trade, , The MIT Press, Londres. Fujita M. et Thisse J-F. (2002), Economics of agglomeration: cities, industrial location and regional growth, Cambridge University Press, Cambridge. Hoover E.M. Jr. (1937), Location theory and the shoe and leather industries, , Harvard University Press, Cambridge. Huriot J-M et Thisse J-F. (2000), Economics of cities: theoretical perspectives, Cambridge University Press, Cambridge. Henderson J.V. (1974), «The sizes and types of cities », American Economic Review,64, 640-656. IPEAlIBGE/NESUR (1999), Pesquisas: Caracterizaçao e Tendências da Rede Urbana do Brasil, Campinas, UNICAMP/IE, v. 1 e 2. Kageyama A. et E Silveira J.M. (1997), ({Agricultura e questâo regional », Revista de Economia e Sociologia Rural, 35, 2, 9-33. Lerne R.A. da Silva (1982), Contribuiçiio à Teoria da Localizaçiio Industrial, Sâo Paulo, USP. Lemos M.B. et Crocco M.A. (20003), Competitividade e dinâmica comparativa das regifJes metropolitanas brasileiras, XXVIII Encontro Nacional de Economia - ANPEC. Lemos M.B. et Diniz, C.C. (2000b), «Vantagens Comparativas da Area Metropolitana de Belo Horizonte no Contexto Nacional », Revista Econômica do Nordeste, Fortaleza, 31, Especial, 530-549.. Lemos M.B., Guerra L.P. et Moro, S. (2000), A nova configuraçlio regional brasileira: sua geografia econômica e os determinantes /ocacionais da industria, XXVIII Encontro Nacional de Economia - ANPEC.
Les nouvelles proximités urbaines
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CHAPITRE V
GLOBALISATION
ET URBANISATION
EN CHINE
CECILE BA TISSE JEAN-FRANÇOIS BRUN MARY-FRANÇOISE RENARD
INTRODUCTION
Le processus d'urbanisation, tel ~'il s'est produit en Europe et aux Etats-Unis au cours des 1gemeet 20 e siècles, diffère largement de celui que l'on observe aujourd'hui. On peut souligner les faits suivants (Cohen, 2003). Premièrement, l'échelle du changement actuel est sans précédent: l'urbanisation se produit à un rythme rapide, le nombre et la taille moyenne des grandes villes étant croissants et elle ne résulte plus seulement des migrations mais aussi de l'accroissement naturel. Deuxièmement, comme dans les pays ayant un niveau de revenu par tête élevé la majeure partie de la population vit déjà dans les villes, l'urbanisation concerne surtout les pays en développement, où se trouvent les plus grandes villes du monde. Troisièmement, la croissance de l'urbanisation dépend en partie de la globalisation. Même si elle réduit le besoin de proximité géographique, elle entraîne des changements dans l'organisation et la localisation des fmnes. L'objectif d'améliorer l'efficacité implique la recherche d'économies d'échelle et d'économies externes. Ainsi, le processus d'intégration internationale est souvent perçu comme l'une des causes de l'agglomération des activités et de l'urbanisation croissante des sociétés. Pour autant, agglomération et urbanisation ne sont qu'en partie des phénomènes équivalents. Le process:us d'urbanisation peut s'expliquer par la concentration des activités de services et par les économies externes, qui sont les deux éléments clés du processus d'agglomération. Mais le cas de l'urbanisation en Chine est assez particulier et repose aussi sur des décisions politiques. Comme l'a souligné Cohen (2003, p. 37), «La globalisation permet aux villes de rompre individuellement avec le destin collectif de leurs économies nationales. Des succès ou des échecs croissants dépendent de l'aptitude des gouvernements locaux à capitaliser les richesses de l'environnement local, à fournir une infrastructure moderne et à permettre une flexibilité du travail correspondant à la demande ». Ceci est particulièrement vrai en Chine, où la décentralisation a donné aux villes un pouvoir politique important. Mais elles sont surtout devenues des acteurs économiques de premier
120
A. Railet et A. Torre
plan, notamment en étant le partenaire direct des firmes multinationales lors de la signature d'accords de joint-ventures. La Chine connaît une rapide croissance de l'urbanisation. Depuis 1978, le gouvernement a mis en place des réformes fondamentales visant à en faire une économie de marché. L'un des aspects les plus importants de cette nouvelle politique a été la décentralisation, qui visait à donner plus de pouvoir aux gouvernements locaux et aux villes (Dulbecco, Renard, 2003).Un autre élément essentiel des réformes a été l'application de la « politique de la porte ouverte », qui a notamment proposé des mesures attractives à l'égard des investissements directs étrangers dans des Zones
Economiques Spéciales (ZES) créées dans quelques provinces côtières. Ces ZESont été un moteur de la croissance, particulièrement au niveau des villes. Celles-ci ont été petit à petit autorisées à signer des accords de joint-venture avec des firmes étrangères. Ces mesures ont été déterminantes dans le processus de transition; elles ont permis à la Chine d'améliorer l'efficacité de son économie et de devenir une puissance industrielle. La croissance des villes sera l'une des préoccupations du gouvernement dans les années à venir. Son objectif, tel qu'il est affiché dans le dernier plan quinquennal, consiste à réduire les inégalités entre provinces, mais aussi entre zones rurales et zones urbaines. Le gouvernement souhaite développer les infrastructures aussi bien à l'intérieur des provinces qu'entre elles. Cela soutiendrait la modernisation des provinces de l'intérieur et faciliterait la baisse de la concentration des activités dans les provinces côtières. Avec plus de 379millions de personnes vivant dans les villes en 1998, la Chine possède la plus importante population urbaine du monde. Elle a connu un processus d'urbanisation très particulier, résultant aussi bien d'une logique économique que d'une logique politique. Certains travaux se sont d'ailleurs intéressés à l'influence qu'ont pu exercer des défmitions « fluctuantes» des zones urbaines, sur le processus d'urbanisation lui-même (Chan, 1994,Zhang et Zhao, 1998). La prise en compte de la mondialisation a conduit certains auteurs à s'intéresser à la «ville globale» ou à «l'espace de la globalisation » dans une ville (par exemple Wu et Ma, 2004).On étudie alors pourquoi la ville peut se définir comme un «centre de commandes », comment les activités de services influencent l'organisation des villes. Néanmoins, certaines questions d'ordre empirique demeurent sans réponse, comme le fait de savoir si l'urbanisation est liée à l'ouverture de la Chine. Dans cette étude, nous examinons l' affmnation selon laquelle l'ouverture commerciale et l'Investissement Direct Etranger (IDE), peuvent partiellement expliquer ce processus durant les années 90. Dans la section II, nous présentons brièvement les faits saillants du processus d'urbanisation. Dans la section III, à partir de données sur
Les nouvelles proximités urbaines
121
les villes, nous testons l'impact de l'ouverture sur l'urbanisation avant l'accession de la Chine à l'OMC. Pour cela, nous utilisons différents sous-échantillons de villes et deux indicateurs d'ouverture: le commerce extérieur et l'investissement international. Nous observons que, dans la plupart des cas, l'ouverture ne semble pas avoir d'impact sur l'urbanisation et que lorsque cet impact existe le commerce et l'investissement ont des effets opposés. 1-
QUELQUES CARACTERISTIQUES D'URBANISATION EN CHINE
DU PROCESSUS
Quand le gouvernement communiste prend le pouvoir en 1949, plus des deux tiers de la population urbaine sont situés dans les provinces de l'est. Les régions côtières regroupent alors la moitié des villes chinoises, notamment la majeure partie des plus grandes. Les régions du centre, à dominante rurale, se composent plutôt de petites villes. Quant aux régions de l'ouest, elles sont entièrement rurales, à l'exception de quelques villes moyennes. En dix ans, la population urbaine des provinces de l'est a doublé, avec le développement très rapide de villes comme Shanghai. Cette croissance des villes ne s'observe pas avec autant d'intensité dans les provinces centrales où, malgré une augmentation de la population urbaine, la taille des villes demeure inférieure, ce qui peut s'expliquer par une augmentation du nombre des villes. Depuis le milieu des années cinquante jusqu'au début des réformes, la politique du gouvernement central a consisté à décourager la croissance des grandes villes34,à introduire un biais en défaveur des régions côtières, ce qui a favorisé le développement de villes de l'intérieur, comme Lanzhou, Wuhan, X'ian et Zhengzhou. Ainsi, en 1980, les régions centrales regroupaient un tiers de la population urbaine chinoise, alors que la moitié résidait dans les régions de l'est (National Bureau of Statistics, 1981). Avec la mise en place des réformes, l'urbanisation chinoise a suivi deux schémas: l'un correspond à un processus traditionnel d'urbanisation soutenu par le gouvernement et l'autre' correspond à une urbanisation spontanée conduite par le développement économique local et les forces du marché (Zhu, 1999).Ces forces du marché dépendent enJ'artie de l'ouverture. Au cours du 6è plan (1981-1985),l'urbanisation était encore très restreinte par le système du Hukou. Ceci reflète «le biais contre l'urbanisation et son association avec le capitalisme, la pollution morale occidentale et l'existence potentielle de forces contrerévolutionnaires» (Au et Henderson, 2002,p. 5). Dans le même temps, 34
Entre 1953 et 1978, le ratio d'urbanisation
a fluctué autour de 15% (Yusuf et Wu, 1997).
122
A. Rallet et A. Torre
la croissance des petites villes a été soutenue avec la possibilité de transférer le Hukou des zones rurales aux petites villes. Mais en raison du succès des réformes dans l'agriculture et de l'amélioration de la productivité qui en est résultée, un surplus de main d'œuvre est apparu dans les zones rurales. En conséquence, les migrations ont augmenté et le gouvernement est devenu moins strict. Le système de Hukou existe encore mais les contrôles ont beaucoup diminué et les règles se sont beaucoup modifiées dans les années 90. Il Y a maintenant une importante «population flottante ». Les villes sont devenues encore plus attractives avec la croissance du chômage ou du sous-emploi dans les zones rurales. Actuellement, le gouvernement chinois doit gérer à la fois des inégalités croissantes entre zones rurales et zones urbaines et des externalités négatives créées par l'urbanisation. De plus, la nouvelle politique urbaine a largement utilisé les villes comme moteur de la croissance. Elles représentent des pôles de croissance à travers les externalités et les effets de spillover. Guangzhou en premier lieu, puis Shanghai et Tianjin ont bénéficié d'une politique préférentielle grâce à l'ouverture internationale et à la création de zones économiques spéciales. Il s'agissait, pour le gouvernement, de définir des zones offrant des conditions préférentielles en matière de commerce international et d'investissement direct étranger. Il a ainsi défmi 5 Zones Economiques
Spéciales et 14 villes ouvertes. D'une façon générale, après des années de planification centralisée, les villes ont eu une plus grande autonomie et ont été des acteurs d'une logique de marché. Désormais, ce sont les villes elles-mêmes qui gèrent les migrations. L'assouplissement des critères de défmition des villes en 1984a été l'un des facteurs d'accroissement des niveaux d'urbanisation (Lee, 1989). Pendant la période Mao, la politique régionale consistait notamment en une recherche d'autarcie des différentes provinces pour des raisons de sécurité militaire. Elles n'avaient donc pas de spécialisation industrielle mais ont au contraire produit la plus large gamme possible de biens. Or, la concurrence internationale impose à la Chine d'améliorer son efficacité. Donc, l'un des principaux objectifs de la politique d'ouverture est d'exploiter l'avantage comparatif de chacune des provinces afin d'être plus compétitive dans le commerce international. Il en est résulté une spécialisation croissante. Le processus de globalisation impose maintenant de nouvelles contraintes aux provinces, qui doivent essayer de rechercher des économies d'agglomération. Fujita et Hu (2001) ont mis en évidence un accroissement de ces effets d'agglomération entre 1985et 1994. Ils interprètent cela comme un phénomène d'« autoagglomération» résultant de l'investissement direct étranger et de la politique commerciale. Mais cette agglomération croissante a surtout
Les nouvelles proximités urbaines
123
bénéficié aux provinces côtières, particulièrement à la province du Guangdong. En outre, le développement des TVE (Township and Village Enterprises) a facilité la transformation de zones rurales en zones urbaines. Leur croissance économique a permis une industrialisation rurale et la création de nombreux emplois. Jinjiang, dans la province du Fujian illustre ce processus d'urbanisation résultant d'une transformation des structures rurales et du développement des TYE. Dans les provinces comme Jiangsu, Zhejiang et Guangdong notamment, il y a de nombreux exemples de cette transformation de zones rurales en zones urbaines (Zhu, 1999). L'investissement direct étranger a aussi contribué largement à cette urbanisation spontanée. Il a fourni les fmancements nécessaires au nouveau développement urbain et a participé à la transformation des structures économiques (Zhu, 1999). Par exemple, le développement urbain de la ville de Fuqing, dans la province du Fujian, s'est appuyé principalement sur l'afflux important de capitaux étrangers, et l'on pourrait citer de nombreux autres exemples. II-
ANALYSE ECONOME TRIQUE DE L'URBANISATION AU COURS DES ANNEES QUATRE-VINGT-DIX
CHINOISE
1. Base de données
Les données provinciales sont tirées de l'édition chinoise: Comprehensive Statistical Data and Materials on 50 Years of New China (National Bureau of Statistics, 1999).Nous utilisons une base de données sur les villes issues de l'édition chinoise: Xin zhong gno cheng shi wu shi nian (National Bureau of Statistics, 1999),complétées par les données issues des Urban Statistical Yearbook (NBS,2000). De façon à présenter clairement la base de données que nous utilisons, il est utile de fournir une brève description de la structure administrative de la Chine. Le pays est divisé en 27 provinces plus 4 provinces ayant le statut de municipalité: Pékin, Tianjin, Shanghai et Chongquin35(voir annexe 1). La définition d'une zone urbaine a évolué au rythme des réformes (voir Zhang et Zhao, 1998, pour une description détaillée de tous les changements de statuts et de critères depuis 1949).La mesure des activités et de la population urbaine a été rendue extrêmement complexe par les nombreux changements de défInition et l'extension des limites des unités urbaines. Les unités urbaines en Chine appartiennent à deux catégories administratives: - les villes, qui ont reçu le statut administratif de municipalité (shi), dépassent pour la plupart 100 000 habitants, avec un biais
35
Ces villes dépendent
directement
du gouvernement
central.
124
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en faveur des agglomérations de plus d'un million d'habitants qui regroupent plus du tiers du nombre de citadins. Leur nombre a été multiplié par 3 entre 1978et 1998. - les bourgs (zhen) représentent l'élément majeur de la stratégie urbaine actuelle. Ils doivent absorber le surplus de main-d'œuvre agricole afin d'éviter un exode rural massif vers les grandes villes, redouté par les autorités chinoises. Ils étaient au nombre de 18 000 en 1998 contre 2664 en 1982. Les villes et les bourgs sont très étendus, ils incluent des districts ruraux habités par des paysans. Selon Zhang et Zhao (1998, p.331), " ...cities are ranked in three levels: the first is equivalent to the authority of a province, the second is equivalent to the authority of a prefecture, and the third is equivalent to that of a county". Le système hukou mis en place en 1958 permettait au gouvernement de contrôler ou d'impulser les migrations interrégionales. Le système de gestion actuel de l'état civil divise les Chinois en quatre groupes: urbains et ruraux, d'une part, et nonagricoles et agricoles d'autre part. La distinction urbain-rural dépend de la localisation administrative, alors que la distinction nonagricole/agricole est liée à l'activité. L'annuaire des villes recouvre l'ensemble des préfectures ayant le statut de municipalité sous tutelle provinciale. Sont donc exclus les cantons ruraux de ces préfectures. Nous avons considéré la population non agricole des zones urbanisées, dans la mesure où avec l'accélération de la croissance urbaine et l'augmentation du nombre de villes, la définition de la population urbaine est devenue plus restrictive, requérant non seulement de résider en zone urbaine mais également d'être engagé dans des activités non-agricoles (Zhang et Zhao, 1998, Chen et Coulson, 2001)36.Notons cependant qu'en raison d'une migration informelle des zones rurales vers les zones urbaines, les statistiques sous-estiment sans doute l'ampleur de la population urbaine en Chine liée à la difficulté de tenir compte des migrants enregistrés dans leur campagne d'origine mais installés durablement en ville, la population « flottante» (voir annexe 2). Il existe un certain nombre d'incohérences et d'ambiguïtés des données chinoises officielles concernant les villes et la population urbaine (les très nombreux changements de critères pour l'acquisition du statut urbain rendent difficiles l'obtention de séries statistiques homogènes sur longue période. L'entrée dans l'Organisation Mondiale du Commerce représente cependant un nouveau défi pour la Chine en termes d'ajustement des statistiques de la population urbaine et de l'urbanisation aux pratiques internationales). Dans trois cas, les 36Nous avons considéré la population urbaine au regard de son activité et non de son Hukou.
Les nouvelles proximités urbaines
125
observations ont été enlevées de la base de données afin de garantir une certaine cohérence des données: - les villes ayant subi un changement juridictionnel ont été enlevées de l'échantillon dans la mesure où il s'accompagne d'une forte variation du PIBpar tête; - les villes ayant connu de fortes variations dans la population non agricole et du PIB par tête non lié a priori à un changement juridictionnel sont également retirées de la base de données; - les villes, pour lesquelles des anomalies dans la population non agricole ont été détectées ont été supprimées, dans la mesure où ces anomalies ne peuvent être expliquées ou corrigées. L'échantillon couvre au final 132 villes sur l'ensemble du tenitoire, Tibet exclu. Les données sont des moyennes sur la période 1992-1998. 2. Impact de ['ouverture
sur ['urbanisation
L'équation estimée est la suivante: nonagripop c = a +
f3
7
+ f3I upoCp + f32 area pcc+ f33gdpcap
trade
P
+ f38 Idi
P
+ f39 tveP +
f3
10
+ f3 sec ond 4
BTS + f3 Il cap +
P
+ f35 tert c + f36 road
p
sez + E
12
OÙl'indice c (c = 1,...,132)indique que la variable correspond au niveau de la ville et l'indice p qu'elle correspond au niveau provincial. La variable expliquée, Nonagripop, représente la population non agricole totale de la ville, excluant les districts ruraux. Les variables explicatives sont: Les variables d'ouverture L'ouverture internationale est saisie à travers les échanges internationaux et les investissements directs étrangers. L'impact de l'ouverture est a priori ambigu. Si l'ouverture signifie donner la préférence aux importantes villes côtières, alors elle devrait se traduire par un accroissement de la concentration urbaine (Henderson, 2000). Cependant, la littérature de la nouvelle économie géographique considère que l'ouverture commerciale peut être vue comme un facteur de déconcentration urbaine dans la mesure où elle facilite l'accès au marché international et aux marchés intérieurs en limitant les coûts de transport (Ades et Glaeser, 1995; Fujita, Krugman et Venables, 1999). L'ouverture commerciale provinciale, TRADE, est saisie par la somme des exportations et des importations rapportée au PIB. Les IDE peuvent accroître la concentration s'ils sont localisés en
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quelques lieux. Par ailleurs, les entreprises doivent se localiser à proximité de ces zones attractives pour les IDE afm d'en bénéficier. L'investissement direct étranger rapporté au PIB, FDI, est supposé avoir un impact positif sur la population non agricole. Les variables de contrôle UPOC est la population urbanisée en dehors de la ville considérée. Comme dans les travaux de Ades et Glaeser (1995), il s'agit d'une variable de contrôle. La superficie de la province en km2, AREA, est également un facteur potentiel de concentration de la population non agricole, dont le signe est a priori ambigu. L'urbanisation croît avec le niveau de revenu par tête, mesuré par le PIB par tête de la province, GDPCAP.Une relation positive est attendue puisqu'un niveau plus élevé de PIB par tête signifie en général des activités plus diversifiées et un niveau plus élevé d'industrialisation. La croissance urbaine peut être liée au processus d'industrialisation, du fait, d'une part, de l'existence de rendements croissants dans le processus de production (Krugman, 1991),et d'autre part d'avantages naturels pouvant être à l'origine de la concentration de la population (Ellison et Glaeser, 1999).Rendements croissants et avantages naturels sont davantage complémentaires que substituables (Henderson, 1988).La concentration urbaine est positivement corrélée à la croissance des secteurs secondaire, SECOND,et tertiaire, TERT. Ce développement crée des incitations pour que les firmes et les employés s'installent dans les villes afin de bénéficier d' extemalités positives et d'effets de débordement. SECONDest mesurée par la part du secteur secondaire dans le PIB au niveau de la ville et TERT,par la part du secteur tertiaire dans le pm au niveau de la ville. Les infrastructures routières, ROAD,peuvent avoir deux effets opposés. En réduisant les coûts de transport, les routes peuvent soit renforcer l'attractivité des villes en en facilitant l'accès, soit faciliter la déconcentration des activités dans les villes voisines. Dans le cas de la Chine, l'influence des kilomètres de routes au niveau provincial est a priori peu évident. Cette variable, seule disponible pour tenir compte des infrastructures routières, ne donne qu'une information quantitative et non qualitative. La part des emplois des TVE (township and village enterprises) dans l'emploi total devrait jouer négativement. En effet, le fort développement de leur activité a permis une industrialisation rurale très spécifique à la Chine et ce dynamisme a été une incitation au maintien de la population dans les zones rurales. Dans le cas de la province du Fujian par exemple, Zhu (2000) montre que les TVE ont
Les nouvelles proximités urbaines
127
contribué à modifier la structure de l'emploi vers les activités industrielles. Nous avons également contrôlé les capitales de province, CAP, qui ont une attractivité d'autant plus importante qu'elles sont souvent le principal centre d'activité industriel, commercial et administratif de la province. C'est encore plus le cas pour Beijing, Tianjin et Shanghai, dont l'influence est saisie par une variable muette, BTS.Jusqu'en 1997, Chongqing faisait partie de la province du Sichuan avant d'acquérir le statut de « ville province », nous l'avons donc exclue de l'échantillon afin de garder une série homogène sur les années quatre-vingt-dix. La
variable muette
SEZ37
(zone économique spéciale) tient compte du
statut privilégié accordé à certaines villes, qui bénéficient en particulier d'une plus grande liberté pour investir, pour attirer les f1ITI1esexportatrices et les investisseurs étrangers favorisant ainsi leur expanSIon. Les variables sont exprimées en logarithme. Les coefficients obtenus peuvent donc s'interpréter en termes d'élasticités (constantes). 3. Résultats
Les résultats des Moindres Carrées Ordinaires (MCO) sont
reportés dans le tableau
138.
Les écart-types sont entre parenthèses.
Trois tests ont été menés et les p values sont reportées sous chaque équation. Premièrement, le test de Bera-Jarque ne rejette jamais (au seuil de 5%) l'hypothèse nulle de distribution normale des résidus. Dans l'équation 7, nous avons introduit une variable muette pour Suzhou. Deuxièmement, le test de White ne rejette jamais (au seuil de 5%) l'hypothèse nulle d'homoscédasticité. Troisièmement, le test RESET ne rejette pas (au seuil de 5%), l'hypothèse nulle de bonne forme fonctionnelle. Dans l'équation 3, la valeur du P est proche du
seuil de 5%. Nous avons mené des régressions sur deux échantillons: l'échantillon total des villes et un sous-échantillon de villes comprenant plus d'un million d'habitants. D'un point de vue statistique les données disponibles pour ces villes sont de meilleure qualité, plus homogènes et cohérentes. D'un point de vue économique, ces villes représentent une part importante de la population urbaine et un pouvoir d'attractivité nettement supérieur à celui de plus petites villes.
Les variables UPOC, GDPCAP, SECOND, TERT et CAP sont significatives et positives (équations 1 à 4). De nombreux articles montrent que la population non agricole en Chine tend à se concentrer 37
Les SEZ sont Shenzhen, Zhuhai et Shantou (Guangdong) créés en 1979, Xiamen (Fujian) en 1980 et l'île de Hainan en 1988. 38 Dans le tableau 1, (A) renvoie aux échantillons de villes de plus de 1 million d'habitants.
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dans les zones les plus riches (Kojima, 1995). Le PIB par habitant influence ainsi positivement la concentration de la population non agricole. Comme attendu, les parts des secteur secondaire et tertiaire dans le PIB influencent de façon très significative la concentration de la population non agricole. Enfin, la variable muette «capitale provinciale» est positive et significative. Kojima met en évidence le fort degré de concentration de la population au sein des capitales provinciales. On observe ce phénomène quel que soit le niveau de développement de la province considérée (équations 1, 3 et 7). La variable TVE donne des résultats intéressants lorsque l'échantillon est découpé en zones géographiques. Nous avons ainsi scindé notre échantillon entre les villes appartenant aux provinces côtières et celles localisées dans les provinces intérieures. Cette variable a un impact significativement négatif sur la population non agricole des villes des provinces côtières lorsque Beijing, Tianjin et Shanghai sont exclues de l'échantillon (équations 9 et 10). Dans les provinces intérieures (équations 7 et 8), la part des travailleurs dans les TVE est relativement faible par rapport à celle des provinces côtières, les produits des TVE étant principalement destinés à l'exportation. D'autre part, les TVE font preuve d'une plus grande efficacité et productivité dans les provinces côtières (DECD, 2002). Si nous considérons les provinces côtières (équations 3, 4, 9 et 10),l'attractivité des TVEsur la population n'apparaît significative que lorsque les villes provinces, Beijing, Tianjin et Shanghai, sont exclues. La variable Road a un impact significatif négatif lorsque l'on
considère les villes de plus de 1 millions d'habitants sur l'ensemble du territoire chinois (équation 2) ou sur les provinces côtières uniquement (équation 4). Les infrastructures routières ont une influence positive sur la population non agricole des villes appartenant aux provinces côtières lorsque BTS sont exclues de l'échantillon (équation 9). Ces résultats ne vont pas véritablement dans le sens des arguments développés par Henderson sur les pays en développement, arguments selon lesquels «increased infrastructure density strongly reduces urban concentration» (2002,p. 100). FDI n'a un effet plus significativement positif sur la population non agricole que pour les villes de plus d'un million d'habitants et SEZ n'a aucune influence sur la population de ces villes (équations 2 et 6). SEZ cependant a un impact négatif lorsque l'ensemble de l'échantillon est considéré (y compris lorsque BTS sont exclues; équations 1 et 5 respectivement)39.Ces résultats sont à mettre en parallèle avec ceux de Zhang (2002), qui montre que les principales forces agissant sur l'urbanisation sont les flux d'investissements directs étrangers.
39
Dans les équations exclue.
suivantes,
la variable
muette SEZ n'apparaît
jamais
significative
et a donc été
Les nouvelles proximités urbaines
129
Le commerce international n'intervient jamais de façon significative, excepté pour les villes côtières lorsque BTS sont exclues. Son impact est alors négatif (équation 9). Ce résultat rejoint I'hypothèse de Krugman et Livas. Il est à noter que ces villes sont situées dans les provinces les plus avancées dans le processus de réformes mis en place par les autorités chinoises. CONCLUSION
Le processus d'urbanisation en Chine est très spécifique en raison de sa forte dimension politique et de la contrainte pesant sur les migrations. Avec des villes de taille relativement moyenne par rapport aux autres pays en développement, notamment d'Asie, ce pays est sans doute dans la première phase d'une urbanisation intensifiée. A partir de données au niveau des villes, ce travail a cherché à mettre en évidence l'impact de la politique d'ouverture sur le processus d'urbanisation en Chine. Notre étude montre qu'au cours des années quatre-vingt dix, les investissements directs étrangers ont favorisé l'urbanisation des villes les plus importantes (de plus d'un million d'habitants). Au contraire, le commerce international a limité la concentration de la population urbaine pour les villes situées sur la côte. Il n'a cependant aucun impact lorsque l'on considère l'ensemble des villes de notre échantillon réparties sur l'ensemble du territoire chinois (à l'exception du Tibet). Les résultats semblent plus robustes en ce qui concerne les variables non liées à l'ouverture. Par exemple, la concentration urbaine de la population apparaît positivement liée au niveau de développement, mesuré par le pm par habitant, et à l'importance des secteurs secondaire et tertiaire dans l'économie. Les TVE, caractéristiques de l'économie chinoise, ont un impact négatif sur la concentration urbaine. L'entrée de la Chine dans l'OMC n'est pas couverte par notre échantillon. On peut s'attendre à davantage de libéralisation, une plus grande mobilité des personnes et du capital et en conséquence une augmentation de la concentration des activités et de la population dans les secteurs urbains prospères. En prévision de ce phénomène, le gouvernement central a lancé, en 2000, une politique de développement des provinces de l'Ouest, et essaye par ailleurs de promouvoir une croissance urbaine plus équilibrée.
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130 Tableau 1 VARIABLE EXPLIQUEE: (1) Upoc Area Gdpcap Second Tert Tve Road Trade Fdi BTS Capital Sez Intercept Nb obs F-test R2 BeraJarque White
RESET
RESULTATS ECONOMETRlQUES POPULATION NON AGRICOLE DANS LES VILLES (1992-1998)
0,3231 (3.14) 0,1780 (1.48) 0,2553 (3.16) 1,0999 (5.20) 0,7219 (5.99) -0,3190 (2.03) 0,0564 (0.32) 0,0635 (0.64) 0,1429 (1.26) 2,3921 (8.06) 1,0376 (8.54) -0,7089 (2.87) -10,2826 (5.86)
(2) (A) 0,5799 (5.01) 0,3639 (2.26) 0,3662 (2.80) 1,3681 (6.11) 0,7045 (2.18) -0,3378 (1.89) -0,3893 (1.80) -0,1282 (0.80) 0,2585 (2.19) 2,7512 (5.90) 0,6606 (3.69) -0,4610 (1.36) -1 t1273 (5.24)
(3)
-12,1245 (3.62)
132 53.26 0.75 0.35
57 75.68 0.86 0.64
65 22.28 0.79 0.25
32 63.27 0.41 0.84
129 34.23 0.68 0.37
54 44.19 0.82 0.62
67 23.27 0.71 0.13
25 34.99 0.87 0.40
62 14.22 0.42 0.37
29 83.26 0.83 0.82
0.80 0.37
0.70 0.24
0.87 0.07
0.24 0.30
0.71 0.46
0.71 0.26
0.71 0.35
0.58 0.35
0.32 0.61
0.14 0.72
0,5312 (4.08) 0,1638 (0.25) 0,3415 (2.63) 1,0032 (3.26) 0,7092 (3.73) -0,5212 (1.04) -0,0892 (0.16) -0,0206 (0.10) -0,2460 (1.37) 3,0293 (3.35) 1,0457 (5.13)
(4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) (A) (A) (A) (A) 0,8369 0,3256 0,5953 0,3950 0,2784 0,7463 0,9309 (3.01) (1.18) (4.21) (4.93) (4.12) (3.06) (4.81) 0,9760 0,1700 0,3477 0,2903 0,1308 -3,0626 -2,7993 (1.61) (0.55) (1.75) (1.26) (1.38) (2.17) (1.67) 0,5357 0,2566 0,3676 0,1444 0,3454 0,3879 0,5838 (2.39) (3.13) (2.65) (1.24) (2.11) (3.05) (2.86) 1,1820 1,1004 1,3746 1,1874 1,2865 0,9163 1,1689 (5.75) (3. 76) (3.12) (2.88) (3.66) (3.83) (5.08) 0,6928 0,7337 0,7219 0,6474 0,6887 0,7962 0,6534 (1.28) (1.31) (6.07) (2.18) (3.44) (1.54) (3.98) -0,3043 -0,3330 -0,3756 -0,2957 -0,0421 -2,7362 -3,0082 (O.72) (2.05) (1.57) (0.13) (2.23) (1.91) (1.90) -1,1706 0,0873 -0,3334 -0,1737 -0,0519 2,5507 2,1190 (1.35) (1.98) (0.49) (1.48) (0.85) (0.18) (1.93) -0,1366 0,0717 -0,1125 -0,0315 0,3613 -0,6072 -0,6929 (0.40) (0.73) (0.70) (0.13) (1.35) (1.98) (1.61) 0,0889 0,1377 0,2461 0,2537 0,1500 0,0386 0,2508 (1.37) (0.72) (0.22) (0.87) (0.27) (1.19) (2.09) 3,6943 (3. 73) 0,5872 1,0388 0,6623 1,0989 0,5920 1,0043 0,6408 (2.38) (5.14) (2.13) (8.57) (3. 72) (6.03) (1.75) -0,7288 -0,4915 (1.42) (2.93) -13,2285 -10,6166 -11,8209 -8,5086 -7,9713 -6,9821 -8,5984 (2.63) (5.17) (3.14) (2.20) (1.04) (5.98) (1.40)
Les t-Student sont entre parenthèses. Equation 1 : Echantillon total Equation 2 : Villes de plus d'un million d'habitants Equation 3 : Villes des provinces côtières Equation 4 : Villes de plus d'un million d 'habitants des provinces côtières Equation 5: Echantillon total à l'exception de Beijing, Tianjin, Shanghai Equation 6 : Villes de plus d'un million d 'habitants, à l'exception de Beijing, Tianjin, Shanghai Equation 7: Villes des provinces intérieures Equation 8 : Villes de plus d'un million d 'habitants des provinces intérieures Equation 9: Villes côtières à l'exception de Beijing, Tianjin, Shanghai Equation 10: Villes de plus d'un million d 'habitants des provinces côtières, à l'exception de Beijing, Tianjin, Shanghai
Les nouvelles proximités urbaines
131
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A. Rallet et A. Torre
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Annexe 1 ORGANISATION
ADMINISTRATIVE
Les nouvellesproximités urbaines
133 Annexe 2
VILLES DE L'ECHANTILLON Province pekin tianjin hebei hebei hebei hebei hebei hebei hebei shanxi shanxi shanxi shanxi shanxi inner mong inner mong inner mong liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning liaoning Jilin Jilin heilongjiang heilongj iang heilongjiang heilongjiang heilongjiang heilongjiang heilongjiang heilongjiang heilongjiang shanghai jiangsu j iangsu jiangsu jiangsu
Ville Beijing Tianjin Handan Tangshan Shijiazhuang Qinhuangdao Langfang Zhangjiakou Baoding Datong Taiyuan Yangquan Suzhou Changzi Baotou Chifeng Hohhot Shenyang Anshan Dalian Fushun Huludao Yingkou Liaoyang Fuxin Dandong Benxi Jinzhou Panj in Jilin Changchun Harbin Gigihaer Jiamnsi Yichun Shuangyashan Jixi Mudanjiang Hegang Daqing Shanghai Nanjing Wuxi Nantong Liayungang
ui ui ui ui ui ~ian ~ian ~ian ïangxi . iangxi handong handong han dong handong handong handong han dong handong handong han dong han dong handong enan enan
Ville Huayin Changzhou Zhenjiang Wenzhou Hangzhou Huzhou Ningbo Zhoushan Jiaxing Huainan Hefei Bengbu Huaibei Wuhu Anging Ma anshan Fuzhou Quanzhou Xiamen Nanchang Xinyu Linyi Jinan Zibo Weifang Taian Laiwu Zaozhuang Rizhao Qingdao Dezhon Jining Dongying Zhengzhou Luoyang Anyang Xinxiang Kaifeng Pingdingshan Jiaozuo Wuhan Yichang Ezhou Xiangfan Huangshi
Note: les villes de plus d'un million d'habitants apparaissent en gras.
unan angdong uangdong angdong angdong angdong angdong angdong angdong angdong angdong angxi angxi angxi angxi angxi ainan ichuan ichuan ichuan ichuan ichuan ichuan ichuan ichuan ichuan izhou izhou izhou
Ville Changsha Changde Hengyang Xiangtan Zhuzhou Shaoyang Guangzhou Zhanjiang Zhongshan Dongguan Qingyuan Shantou Yangjiang Maoming Jieyang Shenzhen Nanning Qinzhou Guigang Liuzhou Guilin Haikou Chengdu Neijiang Leshan Suining Mianyang Guangyuan Zigong Panzhihua Yibin Guiyang Zunyi Luipanzhui Kunming Xian Weinan Baoji Tianshui Lanzhou Xining Yinchuan Urumqi
Partie III
LES VILLES PRODUCTRICES
DE RICHESSE
CHAPITRE VI
ENTREPRISES,
ACTEURS IMMOBILIERS ET ACTEURS PUBLICS: DES PROXIMITES A RECONSTRUIRE
LOUIS-M BOULIANNE OLIVIER CREVOISIER JEAN RUEGG
INTRODUCTION
La réflexion présentée ici est issue d'un mandat de recherche
(Boulianne, Crevoisier, Ruegg, 2001) confié par des institutions publiques suisses actives au niveau de l'aménagement du territoire et de la promotion économique40 dans le but de pouvoir améliorer leur influence sur la localisation des entreprises dans leurs régions. Cette question de la localisation des entreprises est centrale en Suisse car les ressources financières des collectivités publiques proviennent essentiellement de l'imposition des personnes physiques, laquelle est évidemment influencée par le nombre d'emplois disponibles dans une circonscription fiscale et surtout par la qualité de ces emplois. Les cantons suisses se livrent ainsi une concurrence assez féroce afin d'attirer sur leur sol les emplois à haute valeur ajoutée même si, au départ, en raison de la diversité régionale du tissu économique, ils ne sont évidemment pas sur un pied d'égalité. Pour traiter cette thématique, nous nous sommes concentrés sur l'analyse de la décision concrète et effective qu'une entreprise est amenée à prendre lorsqu'elle opère un choix de localisation. Nous avons ainsi mené une recherche empirique auprès d'une cinquantaine d'entreprises de Suisse occidentale qui ont été sélectionnées sur la base de deux critères: l'entreprise devait avoir effectué un mouvement dans la période comprise entre 1998et 2000 (création de l'entreprise, implantation de la filiale d'une maison-mère située en dehors des territoires de référence, déménagement, agrandissement ou nouvel investissement sur place) et elle devait être implantée dans l'un des « sites41» (une dizaine) que nous avions préalablement défmis pour leur spécificité et leur diversité. Quant à la période de référence, nous l'avons définie sur la base d'une raison pratique d'abord: l'événement 40
Service chargé de soutenir les entreprises existantes (promotion endogène) et du démarchage des
entreprises en vue de nouvelles implantations (promotion exogène). 41 Un site abrite, dans un tenitoire délimité, des entreprises d'un secteur économique défini, le site a une double composante géographique et économique.
spécifique.
Ainsi
138
A. Raile! et A. Torre
devait être assez proche pour que nous puissions trouver des interlocuteurs susceptibles de répondre à nos questions, et d'une raison scientifique ensuite: nous tenions à intégrer dans l'étude les conséquences d'une évolution récente du marché de l'immobilier d'entreprise que nous savions importante. Ces premiers travaux ont débouché sur des résultats apparemment décevants. Les motifs permettant de justifier et de comprendre le choix de la localisation étaient relativement peu précis, parfois anecdotiques, et donnaient l'impression d'un certain amateurisme dans le processus de décision. Il était dans tous les cas impossible d'en déduire directement une typologie explicative et encore moins des conseils clairs pour les responsables des services publics. concernés. Pourtant, pour le territoire, ce choix est extrêmement riche de sens, a priori. Il va bien au-delà de la défmition de coordonnées géographiques et constitue plutôt une sorte de précipité d'un processus de « désancrage/réancrage » qui révèle et met enjeu des proximités à recomposer. Le présent article reprend l'ensemble de la démarche. Il est articulé en cinq parties. En première partie, du point de vue de l'entreprise, il est indispensable de relativiser, c'est-à-dire de contextualiser, l'importance du moment où une demande immobilière trouve à être satisfaite par une offre immobilière. Cette transaction n'est en effet que la pointe de l'iceberg, le révélateur d'un processus complexe de « désancrage/réancrage » au cours duquel l' entreprise est amenée à identifier ses « lois» de proximités avant de les mettre en négociation et de les réarticuler, le cas échéant. De ce réarrangement émergent des contraintes fortes qui conduisent à éliminer certaines localisations parce qu'elles menaceraient des proximités vitales pour l'entreprise. Mais, à l'inverse, ces contraintes sont rarement discriminantes au point de faire émerger une seule solution de localisation. En deuxième partie, nous nous interrogeons sur l'arbitrage des proximités que les entreprises doivent faire pour décider de leur lieu d'activité. En troisième partie, nous identifions les évolutions du secteur immobilier et les nouvelles logiques dominantes. En quatrième partie, nous soulignons les décalages qui apparaissent entre les arbitrages des entreprises et l'offre immobilière. En dernière partie, et du point de vue de l'acteur public cette fois, nous proposons des solutions « idéalisées» par type d'entreprises. Nous pensons que cette catégorisation est utile pour défmir la marge de manœuvre de l'acteur public et le lieu de son intervention.
Les nouvelles proximités urbaines
1-
MOBILITE DES ENTREPRISES:
139
LES ENJEUX DE LA PROXIMITE
La mobilité des entreprises fait l'objet d'une littérature abondante de la part des milieux scientifiques. Les études tendent cependant généralement à être basées sur les préceptes de l'économie traditionnelle, laquelle considère le prix du sol comme un élément déterminant de l'organisation des activités dans l'espace et le territoire comme un simple support, comme un bouquet de facteurs de localisation offerts aux entreprises qui les connaîtraient, les compareraient et à partir desquels elles effectueraient un calcul de maximisation renvoyant à la rationalité substantive de l' homo oeconomicus. Cette approche sert également de support aux pratiques de nombreuses institutions publiques qui espèrent, en attirant des emplois, pallier des problèmes économiques régionaux (voir par exemple: Commission of the European communities, 1993). Nous distinguerons donc deux catégories de facteurs. D'une part, celle qui relève du territoire et qui renvoie aux contraintes de proximité (clients, partenaires, marché du travail pour l'essentiel) et celle qui relève des besoins spatiaux et qui renvoie au type de localisation (espace rural, périurbain, centre ville) et au type de locaux (location ou propriété, zone d'activités, immeuble dédié, friche réhabilitée, etc.). Dans la majeure partie des cas, l'entreprise articule une demande immobilière qui est donc en fait un échantillon de choix possibles, d'où l'impression relevée ci-dessus d'un certain flou, d'une improvisation apparente quant aux motifs de localisation évoqués. Cette conception pêche pourtant par excès de simplification. L'observation de cas concrets de mobilité d'une entreprise montre que, de toute évidence, le processus de sélection des choix de localisation relève non pas d'une rationalité substantive, mais d'une rationalité procédurale (Simon, 1978),voire d'une rationalité située. Rationalité procédurale (Zimmermann, 2001; Bernard et Vincente, 2000) car, en cas de besoin, l'entreprise évalue les différentes options qui s'offrent à elle et, le cas échéant, reformule son projet initial, en tout ou en partie, en fonction de celles-ci. La solution optimale n'existe jamais. Les entreprises s'arrêtent et se contentent d'une solution satisfaisante. Mais aussi rationalité située dans le sens où les caractéristiques concrètes d'un territoire sont à chaque fois spécifiques. C'est-à-dire, en utilisant les termes de l'approche traditionnelle, que la combinaison des facteurs de localisation est spécifique pour chaque territoire et qu'elle ne correspond jamais exactement à une demande préétablie in abstracto par l'entreprise. Par conséquent, lorsqu'elle envisage un déplacement physique, l'entreprise entame un processus de confrontation avec une offre territoriale qui, d'une part, l'obligera à faire évoluer ses attentes (dans le temps) et à les moduler (dans l'espace) en fonction des
A. Rallet et A. Torre
140
caractéristiques des tenitoires susceptibles de l'intéresser. Elle s'engage dans unprocessus d'arbitrage des proximités. L'analyse économique traditionnelle s'arrête à l'idée que la présence d'un facteur de localisation dans une localité ou une région serait suffisante pour que l'entreprise se l'approprie automatiquement sous la forme d'une externalité. Or l'observation nous montre, ici encore, que l'existence d'une extemalité est à distinguer de l'existence d'une relation effective, d'une interaction directe, d'une proximité physique et organisationnelle avec le facteur en question. A une approche en termes d' extemalité, qui revient à évoquer une potentialité uniquement, il faut donc substituer une approche en termes d'interactions et d'articulation de proximités. De .plus, cette analyse néglige le rôle de l'organisation du marché de l'immobilier d'entreprise et sous-estime, par conséquent, l'incidence des transformations profondes que ce marché subit depuis quelques années. Enfin, elle ne dit rien sur la hiérarchisation des facteurs et sur la manière dont les entreprises en tiennent compte en fonction de leur agencement dans le temps. 11-
OU ALLER? L'ARBITRAGE DES PROXIMITES DE L'ENTREPRISE
La recherche empirique que nous avons menée est structurée à partir de sept profils d'entreprises dont les caractéristiques sont liées aux attributs des sites que nous avons prédéfinis. Mais, et c'est surtout cela qui est significatif, il s'avère possible d'associer à chacun de ces profils un comportement et des besoins spatiaux particuliers, en termes de site mais aussi de type de surface. Cette association est toutefois indirecte. En effet, pour comprendre les besoins il est nécessaire, en amont, d'identifier et de caractériser, pour chaque profil, la nature des relations de proximité que les entreprises entretiennent. Nous avons sélectionné ainsi un certain nombre de paramètres significatifs (tableau 1) et avons cherché à apprécier dans quelle mesure ils déterminent la localisation de l'entreprise. Ces conditions de proximité sont au nombre de trois. La condition « clients» concerne à la fois le marché (aire, localisation), le client en tant que tel (membre de la filière de production, distributeur, consommateur final) et la nature des liens entre l'entreprise et le client (fréquence et direction des relations). La condition de proximité « partenaires» spécifie à la fois la localisation des partenaires de l'entreprise (locale ou non) et leurs caractéristiques (co-prestataires, hautes écoles, entreprises de services ou de production, institutionnels, autres sociétés du groupe).
Les
nouvelles proximités urbaines
141 Tableau 1
DES CONDITIONS
DE PROXIMITÉ
AUX BESOINS
SPATIAUX
Surface en loeation, bonne accessibilité, aménités urbaines, friche, zone neutre (par rapport à la hiérarchie urbaine nationale) ::', Local, avec
contacts
fréquents en Suisse romande et au niveau international
National, international, autres entreprises, peu de déplacements vers les clients National et international
Relations fréquentes, et variées aussi en interne
Qualifiée, mobile, marché concurrentiel
Peu nombreux, interne, coprestataires, back office
Main d'œuvre indigène, qualification hétérogène
Variable
Importance de la disponibilité de personnel qualifié, et mobile, dans la région
Local et international
Qualifiée et concurrentielle, mobile
Local, relations fréquentes, hautes écoles
Qualifiée, disponible place
Peu, pas localement
Régional, Suisse romande pour le personnel qualifié
sur la
Surface en location, disponibilité de locaux, bonne infrastructure de communication, centralité et resti e Surface en location, hypercentre, locaux de prestige, qualité du cadre de vie Surface en location, recherche de locaux, structure de type «parc», péri-urbain, accessibilité Surface en location, proximité des centres de recherche, image du lieu (parc), bonne accessibilité Surface en location, périurbain, disponibilité de locaux, «établissementbulle» Surface en propriété, usines, zones d'activités «à la campagne» , accessibilité, main-d'œuvre, terrain à acheter bon marché
Loeaux disponibles au centre, polyvalents, prix compétitifs, accessibilité multi-modale, aménités urbaines, infrastructure NTIC Surfaces de bureaux au centre, infrastructure de transport, réseaux NTIC
Bureau de qualité (front office), bonne accessibilité urbaine, aménités Structure d'accueil aménagée, accessibilité régionale
Infrastructure d'accueil à structure légère, qualité technique des bâtiments, proximité de quelques artenaires Locaux bon marché, friche ou immeuble polyvalent, équipement NTIC, accessibilité Zone d'activités hors centre urbain, bon équipement
A. Railet et A. Torre
142
Enfin la condition « main d'œuvre» vise à caractériser l'aire de recrutement et la qualification de la main d'œuvre, d'une part et la nature de la relation entre l'entreprise et sa main d' œuvre, d'autre part (distinction entre un marché du travail dominé par l'offre qui privilégie la flexibilité du personnel ou par la demande qui implique une fidélisation du personnel). Ces trois conditions déterminent, pour chaque profil, un faisceau de relations représentatif des proximités nécessaires à la viabilité de l'entreprise. Elles permettent d'en déduire des besoins en termes de localisation et de sites/locaux qui se traduisent par des comportements spatiaux distincts (deux dernières colonnes du tableau 1) dont nous donnons ici les traits principaux: une appréciation des qualités de la surface (friche, immeuble dédié ou mixte, hébergement du type « parc d'entreprises» ou technopole, location/propriété, prix, représentation, contraintes environnementales) et du site (centre-ville, périurbain, zone d'activités) occupés par l'entreprise et la perception que l'entrepreneur en a (centralité, niveau de formation, cloisonnement/ouverture, neutralité/diversité, qualité de vie, dynamisme local). Service de place centrale nationale Le premier profil concerne les entreprises intéressées par l'effet de «place centrale» offert à la fois par la structure et le positionnement géographique du site, et par les caractéristiques urbaines en terme d'aménités, par exemple. L'accessibilité est un phénomène essentiel pour ce profil, notamment sa dimension multimodale, car les localisations envisagées par ces entreprises les invitent à considérer le pays tout entier. Ces firmes s'adressent au marché national, voire international; elles n'ont pas de partenaires locaux et recrutent leur personnel, qui est diversifié et mobile, sur le marché régional et national du travail. Service de place centrale régionale Le deuxième profil rassemble des filiales de grands groupes qui recherchent paradoxalement un ancrage local fort à travers des partenariats (stratégie top down). Il se distingue du profil précédent par son orientation sur le marché régional qui se matérialise par la localisation d'un établissement (filiale) sur ce marché, pouvant servir de base pour desservir un marché régional plus large. Dans ce cas de
Les nouvelles proximités urbaines
143
figure, la proximité de la clientèle régionale est déterminante, de même qu'une localisation en ville permettant de tirer parti des aménités urbaines disponibles. Service financier
(front office)
Le troisième profil renvoie à une logique de front office, requise pour réaliser des transactions avec une clientèle locale mais aussi internationale dans un environnement attractif. Comme pour les
profils 1 et 2, les entreprises du profil 3 choisissent une localisation dans un centre urbain bénéficiant d'une bonne accessibilité et de locaux de qualité. Elles sont également concernées par la promotion de la place économique suisse et régionale. Cette dernière, en plus de son savoir-faire, constitue à ses yeux un avantage comparatif décisif. Les entreprises de services fmanciers sont sensibles à la qualité de vie. Elles ont par exemple des exigences à l'égard de l'aménagement urbain et du système de transports (y compris des revendications liées aUmanque de places de stationnement en centre-ville). Jeune entreprise de service technologique (logique industrielle) Le quatrième profil concerne les jeunes entreprises indépendantes qui se trouvent dans une phase de changement rapide et qui sont sujettes à une mobilité forte à l'échelle régionale. Ces entreprises sont très liées à la disponibilité des ressources humaines et à la présence conjuguée des Hautes écoles et des services aux entreprises qu'elles mobilisent dans leur environnement proche pour se développer. Elles recherchent des structures légères pour abriter le cœur de l'entreprise seulement, car elles sous-traitent généralement la production à d'autres partenaires. Par certains côtés, elles poursuivent une logique proche des entreprises industrielles. Elles n'ont toutefois pas besoin d'infrastructure de production. Par conséquent, elles sont relativement mobiles dans le territoire. Les entreprises de ce profil seront donc intéressées par des structures d'accueil de type «parc d'entreprises» qui, en raison des prestations et services délivrés, leur permettent de concentrer leurs efforts sur le développement de leurs activités. Encore faut-il que ces structures d'accueil soient situées dans une localisation régionale centrale et accessible d'une part, et qu'elles offrent des locaux attractifs en termes de qualité du bâti, de fonctionnalité des espaces de travail et d'image. Quant à la question de la main d'œuvre, les entreprises de ce profil sont dépendantes à la fois de l'attribution en nombre suffisant des permis de travail et de la politique générale menée en faveur de la formation.
A. RaIlet et A. Torre
144 Start up de filière technologique
(technopole)
Le cinquième profil caractérise les jeunes entreprises, de taille modeste et indépendante, dont l'origine est liée à la recherche (création de spin off par de jeunes entrepreneurs). Il s'agit d'une logique de filière technologique dans laquelle la proximité avec les partenaires, voire les concurrents, est essentielle, et cela dans un espace à la fois local et international (logique d'archipel, capacité à articuler le local/global). Comme pour le profil précédent, la proximité des partenaires technologiques est déterminante. Leur jeune âge les rend très sensible aux coûts fixes, et leur potentiel est à mettre en relation avec leur précarité. Cette fragilité rend intéressante les structures légères d'accueil offrant de bonnes conditions économiques. L'enjeu pour ces entreprises, en cas de développement, réside dans leur capacité d'ancrage au sein de la région. C'est un profil intéressant mais dont les risques d'échec sont sensibles. Ce profil se rapproche de la logique du technopole, où il faut toutefois pouvoir passer progressivement et sans entrave d'une logique de filière Quxtaposition d'entreprises) à une logique de milieu innovateur avec une fertilisation croisée entre les entreprises. Entreprise technologique en agglomération (milieu) Ce profil d'entreprises technologiques en milieu urbain est très lié au système de production. Il présente certaines similitudes avec les profils 4 et 5. Le fonctionnement des entreprises implique de nombreux partenaires, avec des échanges fréquents, en réseau. La différence majeure, par rapport aux profils précédents, tient dans leur plus grande maturité et dans une autonomie qui a pu être gagnée vis-àvis des partenaires technologiques, d'une part et des services aux entreprises (indispensables dans la phase de création de la société), d'autre part. Actives dans les nouvelles technologies, ces entreprises travaillent localement et sont aussi ouvertes au marché international. Elles puisent dans leur environnement les informations et les connaissances scientifiques, techniques ou commerciales qui sont nécessaires à leur développement. Souvent localisées en zone péri-urbaine, ces entreprises ont besoin de locaux compatibles avec leur flexibilité. Elles ne recherchent pas des structures d'accueil (style parc technologique), mais sont intéressées à des surfaces rapidement disponibles, facilement accessibles, bien équipés en NTIC,offrant certaines facilités (secrétariat, cafétéria,...) et louées à un prix abordable. Ces entreprises se situent dans une logique de milieu ayant un potentiel d'innovation.
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Industrie hors centre urbain Les entreprises de ce profil tirent parti d'une dynamique locale et d'une main-d'œuvre stable pour réussir sur un marché national et international compétitif. Elles sont peu demandeuses d'externalités urbaines spécifiques. Un emplacement à la « campagne» est privilégié afin de réduire les coûts de production. Pour ce profil d'entreprises, les conditions de localisation sont importantes: la qualité du site (zone d'activités à la « campagne »), la proximité d'une main-d'œuvre souvent formée au sein des entreprises, l'accessibilité routière principalement, des conditions d'acquisition de terrain et des bâtiments économiquement intérçssantes sont des critères déterminants. Malgré les images d'EpinaI, ce profil d'entreprises a toujours sa place en Suisse. En dépit de coûts de production réputés élevés, il demeure en effet possible. d'être compétitif par rapport à des pays comme l'Allemagne et la France dont les charges sociales et le nombre plus faible d'heures travaillées pénalisent les entreprises. A partir de ces différents énoncés, il est évidemment possible de mettre en exergue des similitudes entre profils. Ainsi les entreprises liées à la technologie (profils 4, 5 et 6) ont des besoins spatiaux comparables, notamment en termes d'infrastructures d'accueil, qui varient avec leur stade de développement. Pour les plus jeunes, des locaux disponibles dans des structures du type parcs mi-privés/mipublics (Y-Parc à Yverdon ou PSE à Ecublens) sont attractifs. En outre, la proximité de ces parcs avec les Hautes écoles renforce encore leur attrait pour les start-up à contenu technologique. Pour les entreprises à un stade de développement plus avancé (au-delà de trois ans), des localisations périurbaines sont recherchées (Jordil Parc à St-Sulpice ou usine relais de Müller AGdans le canton de Neuchâtel). Mais au-delà de ces remarques, deux enseignements majeurs doivent être mis en évidence: Les besoins spatiaux des entreprises exercent une discrimination relative. Dans le fond, plusieurs sites - ou plusieurs
implantations dans le même site - de Suisse romande sont susceptibles de satisfaire les besoins spatiaux des entreprises d'un même profil. L'examen des décisions concrètes des entrepreneurs suggère alors que ceux-ci retiennent souvent le premier choix disponible envisageable et qu'ils consacrent en général un minimum de temps pour trouver quelque chose qui convienne. Pour ce faire, il faut alors insister sur l'importance du réseau de relations personnelles. A l'exception du profil 7 (industrie hors centre urbain), toutes les entreprises tendent à être locataires de leurs locaux. Compte tenu
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des nombreuses mutations qui interviennent dans l'environnement des entreprises, la location offre des avantages indéniables. Elle satisfait les acteurs qui sont à la recherche de solutions offrant la meilleure flexibilité possible. Surtout, elle leur permet d'éviter d'immobiliser des capitaux qu'ils peuvent investir dans le capital productif: l'entreprise peut concentrer ses ressources fmancières et humaines sur le développement de ses produits uniquement. Enfin, la location laisse l'entreprise plus libre de négocier son entrée en jouissance, la durée du bail, les montants consacrés à la remise en état des locaux (lorsqu'ils ne sont pas neufs) et elle offre plus de flexibilité à l'entreprise pour délocaliser, agrandir ou suivre de nouvelles orientations stratégiques nécessaires à sa pérennité. Or, et cela est encore plus remarquable, l'attitude des entreprises est à la fois confortée et rendue possible aujourd'hui par le comportement des banques dont la politique en matière d'octroi de crédit revient à considérer la propriété immobilière comme une charge plutôt que comme un atout pour l'entreprise.42 Pour toutes ces raisons, le marché de la location est alors indéniablement devenu bien plus attractif que celui de l'acquisition foncière et/ou immobilière qui était encore la règle il n'y a pas si longtemps. Cette dernière tendance, qui n'est pas spécifique à la situation helvétique, invite alors à examiner comment, dans ce nouveau contexte, l'acteur immobilier s'organise pour être présent sur le marché de la location. ID-
QU'OFFRIR? LES NOUVELLES LOGIQUES DE L'ACTEUR IMMOBILIER
Le secteur immobilier joue un rôle charnière important entre l'entreprise en quête de nouveaux locaux et l'acteur public sensible à l'organisation du territoire. Avec la crise de l'immobilier de la fm des années quatre-vingt et le début des années quatre-vingt-dix, ce secteur a connu une véritable mutation dont nous expliquons les tendances avant de dégager quelques stratégies d'entreprises immobilières actives sur le marché de l'immobilier d'entreprises et d'expliciter leur perception de la demande qui émane des entreprises. 42 Ce changement de politique des institutions bancaires tire évidemment sa rationalité des nouvelles structures de financement qui prennent appui sur la levée de capitaux sur les marchés boursiers. Mais il faut également relever que plusieurs banques suisses, qui étaient lourdement impliquées dans les prêts hypothécaires, ont réagi à la crise immobilière de la fin des années quatre-vingt en se désengageant complètement de ce secteur et en externalisant les compétences qu'elles avaient souvent développées à l'interne, en marge de leurs activités principales, imitées en cela par de grandes entreprises et des régies nationales qui ont également cédé leur parc immobilier à des acteurs spécialisés.
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Evolution du secteur immobilier: les grandes tendances L'évolution du secteur immobilier est marquée par une professionnalisation accrue des acteurs. Outre l'incidence déjà relevée du comportement des banques, deux autres facteurs principaux permettent de mieux comprendre les raisons de cette professionnalisation : La clientèle internationale de même que les sociétés nationales de grande dimension tendent effectivement à externaliser les fonctions liées à l'immobilier en les confiant aux acteurs de l'immobilier d'entreprises. Pour elles, les décisions relatives à une nouvelle implantation ont un caractère trop discontinu dans le temps pour justifier le développement de compétences à l'interne. En outre, la connaissance des dispositifs légaux propres à chaque pays en matière de fiscalité, de droit du travail, de politiques sociales et environnementales, de droit foncier, d'aménagement du territoire est tellement pointue qu'elle est désormais l'affaire d'acteurs hautement spécialisés. Les entreprises vont alors recourir aux services d'un interlocuteur unique qui maîtrise le marché et qui est capable d'offrir un conseil polyvalent couvrant une large palette de prestations. Le développement des NTICinvite les acteurs de l'immobilier à être présents sur Internet pour informer du contenu de leur portefeuille. Par extension, il oblige les acteurs de l'immobilier à redéfinir leur rôle et à revoir leur stratégie d'alliance avec des groupes homologues internationaux, nationaux, voire régionaux. La professionnalisation du secteur immobilier peut être illustrée par plusieurs phénomènes. En termes de prestations: la vente, qui était souvent l'activité principale, est complétée par le marché de la location fort prisé par les entreprises. Mais à ces tâches, somme toute classiques, de nouvelles viennent s'ajouter comme lefacility consulting. Ce terme d~signe tous les services dont une entreprise a besoin pour s'installer dans de nouveaux locaux. Ils concernent principalement: la recherche de sites potentiels, le conseil et l'analyse stratégique, l'analyse du marché de l'immobilier, l'analyse des conditions légales en vigueur dans le pays
ou le canton hôte, l'analyse de la fiscalité - et la négociation d'aides fiscales éventuelles -, la recherche de financement, la réalisation éventuelle d'un projet immobilier, la négociation des conditions de bail de location ou de contrat d'achat. Le facility consulting combine donc, au sein d'une seule firme spécialisée dans l'immobilier d'entreprises, les compétences qui étaient précédemment réalisées par
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une agence immobilière traditionnelle, un bureau d'ingénieurs et d'architectes, une entreprise générale, une agence bancaire, un bureau d'avocats, un notaire, etc. Son émergence confmne la modification de l'importance que l'immobilier a pour l'entreprise. Elle est une fonction utilitaire qu'elle doit évidemment satisfaire mais qui n'est plus déterminante pour consolider un dossier de demande de crédit auprès d'une institution de financement. Le facility consulting va alors
aussi de pair avec la tendance des entreprises à louer plutôt qu'à acheter leurs locaux. En termes de caractéristiques du parc immobilier: avec le passage d'une stratégie d'acquisition immobilière à une pratique de location, l'entreprise transfère le risque lié à l'immobilier aux nouveaux acteurs de l'immobilier. Ce sont eux qui gèrent un parc immobilier (figure 1). Dans l'exercice de cette activité, ils tendent à adopter un comportement qui vise à augmenter leur rentabilité et à accroître l'intérêt qu'ils représentent pour leurs actionnaires, tout en réduisant les risques. Figure 1 CONFIGURATION
Cas 2 : l'entreprise
D'ACTEURS LORS D"UN CHANGEMENT
SPATIAL
est locataire
Les nouveaux acteurs de l'immobilier vont alors avoir tendance à reproduire une attitude conservatrice: valorisation du parc existant plutôt que nouvelle construction, intérêt pour des immeubles de standing occupant une position centrale dans la ville plutôt que pour des immeubles difficiles à qualifier dans des sites peu stratégiques. Toute nouvelle construction n'est pas inconcevable pour autant. Elle continue à présenter un intérêt pour les acteurs de l'immobilier mais seulement si elle est liée à une demande précise, spécifique et fiable d'une entreprise-cliente bien identifiée susceptible de louer la majeure partie des surfaces offertes par le nouveau projet.
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En termes de couverture territoriale et/ou de spécialisation: malgré la crise, le marché de l'immobilier continue à être assez opaque. Cette opacité n'est pas perçue négativement. Elle participe plutôt à limiter les risques de concurrence, à définir et à légitimer les compétences de l'acteur immobilier. Un des moyens les plus sûrs pour composer avec cette opacité revient alors soit à constituer un groupe assez important coté en bourse, soit une société régionale spécialisée. Les sociétés cotées en bourse détiennent un portefeuille très complet. Elles ont une envergure nationale voire internationale grâce à des partenariats avec des homologues étrangers et grâce à leur clientèle composée essentiellement de sociétés internationales et nationales. Ces sociétés poussent à une professionnalisation du marché (spécialisation des savoir-faire, partenariats internationaux, intégration des compétences). La structure de leur capital a une incidence sur les localisations et les types d'objets qu'elles privilégient: elles gèrent une offre correspondant à la demande des entreprises les plus rentables à savoir les entreprises de type place centrale (immeubles de standing dans les grands centres urbains). Si elles sont parfaitement à même d'offrir les prestations requises pour une nouvelle construction, elles ne s'engageront pourtant que si une demande précise existe. Enfin, elles sont prêtes à investir sur certaines friches bien localisées pour autant que les bâtiments puissent facilement être réhabilités et que les investissements publics récents (transport, aménagement des espaces publics) garantissent des plus-values. Les sociétés régionales (familiales) sont souvent actives depuis fort longtemps. Elles disposent d'un parc immobilier et d'une clientèle locale et régionale solide (entreprises nationales et régionales, commerce et particuliers). Elles étendent leurs opportunités d'affaire par une stratégie de partenariat avec d'autres sociétés similaires. Soucieuses de préserver leur identité, elles sont volontiers sélectives dans leurs alliances et sont poussées par les grandes sociétés cotées en bourse à se spécialiser. Plusieurs options s'offrent à elles:
- spécialisation géographique: elles vont chercher à préserver leur caractère d'acteur généralistes mais dans un secteur géographique précis et restreint; - spécialisation par type de prestation: elles se spécialisent dans un domaine d'activité particulier (location, gérance par exemple) et tissent des relations de donneurs d'ordre/sous-traitants avec d'autres fIImes complémentaires afin de couvrir un territoire qui soit le plus grand possible;
- spécialisation par type de marché: elles se concentrent sur les grands centres urbains pour réaliser des opérations d'envergure
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et laissent à d'autres acteurs, plus petits, les marchés régionaux plus spécifiques et moins porteurs. Malgré cela, ces sociétés régionales restent prises dans une logique d'offre. Leurs moyens sont limités pour mieux connaître la demande (dans le secteur de l'immobilier d'entreprises). Elles sont donc démunies pour anticiper et pour développer une stratégie qui lui soit adaptée. Elles restent prudentes face aux opérations immobilières sur des friches (immeubles ou terrains) qui comportent des risques et exigent des savoir-faire qu'elles hésitent à développer. Quand la rentabilité leur paraît assurée, elles restent actives dans le domaine de la construction, le plus souvent dans les agglomérations des grands centres. Au cours de nos travaux., nous avons rencontré un troisième type d'acteur immobilier, qui est presque devenu anachronique: les sociétés de gestion patrimoniale. Ce sont des sociétés actives dans différents domaines qui possèdent un parc immobilier restreint qu'elles n'ont jamais aliéné. Leur clientèle est essentiellement composée de particuliers et de PME. Les bâtiments souvent largement amortis et les contraintes financières réduites autorisent ces sociétés à développer des projets de localisation intégrant des objectifs allant au-delà des seuls objectifs de rentabilité. Ces sociétés peu nombreuses sont relativement peu sensibles aux évolutions de l'ensemble du secteur de l'immobilier et continuent à poursuivre des stratégies atypiques. Elles sont souvent des partenaires de choix pour les collectivités publiques. Perception de la demande des entreprises Les sociétés immobilières disposent d'informations indirectes par rapport à la demande. Plus précisément, elles tendent à déduire la demande par rapport à la manière dont l'offre est conditionnée par l'action publique (plans d'urbanisme). De même, elles confirment la tendance générale d'un marché de l'immobilier d'entreprises orienté vers la location plutôt que vers l'achat. Par contre, elles ne disposent pas d'une connaissance fine de la demande qui serait issue des entreprises elles-mêmes, souvent par manque de données concernant leur fonctionnement (ignorance du rôle de la proximité) et leur manière de choisir un site ou une localisation. Elles s'appuient essentiellement sur leurs propres expériences tirées de la gestion de leur parc immobilier et mettent rarement à profit les échanges d'information avec d'autres partenaires économiques. Mais cette connaissance insuffisante de la demande des entreprises joue finalement un rôle mineur. Le report du risque de l'entreprise sur les sociétés immobilières (figure 1) constitue la clef pour comprendre l'évolution du marché de l'immobilier d'entreprise. Le marché immobilier est en mutation notamment parce que, du côté
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de la demande, les entreprises privilégient le marché de la location afm de pouvoir affecter l'essentiel de leurs ressources à leurs activités propres. Cette évoh.~tion a de nombreuses conséquences. Elle oblige les acteurs de l'immobilier à se repositionner et à intégrer une vaste palette de compétences (facility consulting). Dans ce contexte émergent alors de grandes fmnes spécialisées, cotées en bourse, intéressées à satisfaire une clientèle internationale spécialisée dans les activités économiques les plus porteuses. En termes de stratégie, ces firmes immobilières adoptent un comportement assez conservateur visant à limiter les risques immobiliers qui désormais reposent sur elles et non plus sur les entreprises. Elles privilégient les sites centraux et les objets de qualité élevée (standing, conception, architecture). Il s'ensuit une tendance à la standardisation de l'offre immobilière et à une concentration des activités économiques. IV-
ARBITRAGE DES PROXIMITES ET OFFRE IMMOBILIERE QUELSDECALAGES?
:
Concernant la localisation des immeubles et la qualité des locaux, notre analyse permet de dégager des distorsions entre l'offre immobilière et la demande des entreprises (tableau 2). Les entreprises interrogées dans le cadre de nos investigations ont souvent signalé l'importance pour elles de l'effet milieu ou de l'effet place centrale (profils d'entreprise 1 à 5). L'effet milieu constitue une extemalité positive que l'offreur et le demandeur cherchent à capter sans toujours être en mesure de la maîtriser. Le seul cas que nous
avons rencontré - où le comportement de l'acteur immobilier a une incidence réelle sur cet effet milieu - est lié à une société qui mène une gestion patrimoniale de son parc immobilier situé dans un quartier central et aujourd'hui très prisé du centre de Lausanne. Mais ce cas est atypique quand bien même un tel comportement présente un intérêt évident. Dans leur stratégie visant à minimiser le risque, les acteurs de l'immobilier privilégient les objets situés dans des sites offrant une bonne centralité. Mais, dans ce créneau, nous assistons à une relative pénurie de l'offre qu'il est difficile de combler. Des possibilités existent pourtant qui passeraient par la réhabilitation de friches urbaines. Si les sociétés immobilières parmi les plus grandes ont amorcé une stratégie d'acquisition des biens immobiliers issus des restructurations de grands groupes (secteurs bancaires, assurances, télécommunications), elles ne se lancent pas systématiquement dans la réhabilitation de ces friches. Elles ne les remettent sur le marché que si l'investissement reste mesuré et que si elles ont des garanties quant à l'existence d'une demande effective. Les sociétés immobilières avancent que la réhabilitation des friches nécessite des savoir-faire
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A. Railet et A. Torre
spécifiques pour être à même d'en évaluer la faisabilité.43Ce contexte freine les petites aussi bien que les grandes régies immobilières qui ne veulent pas se retrouver à assumer un risque trop grand. Certaines des entreprises que nous avons interrogées ont une demande minimale en termes de locaux (locaux grands et bon marché pour des start-up, par exemple). Or elles estiment que les sociétés immobilières ne répondent pas ou trop peu à leur demande. Il y a là une distorsion évidente du marché. Les premières ressentent une situation de pénurie à laquelle les secondes ne sont pas tentées d'apporter une solution, d'abord parce qu'elles possèdent encore d'autres objets à offrir et ensuite parce qu'elles n'ont pas intérêt à investir dans une nouvelle construction ou à réhabiliter une friche. Certains acteurs immobiliers sont même assez fatalistes en reconnaissant cette inadéquation et en admettant que leur portefeuille puisse contenir des biens à la fois trop mal situés et trop mal conçus et qui donc resteront vacants faute de trouver preneur. Enfm, si les parcs scientifiques constituent une réponse possible, les gérances immobilières admettent que les conditions de location peuvent être dissuasives pour les jeunes entreprises. Elles signalent leur impuissance à améliorer la situation, pour des raisons de rentabilité essentiellement. La question des délais a également été soulevée. L'acteur public - ou plus précisément les procédures qui découlent des régulations dont l'acteur public a la responsabilité - est cité comme responsable du décalage temporel qui existe entre le moment où l'entreprise exprime sa demande et celui où l'acteur immobilier est en mesure de fournir une offre. Cette critique concerne essentiellement les délais requis pour obtenir les permis de construire nécessaires soit pour une nouvelle construction, soit pour une réhabilitation/rénovation. Elle est d'autant plus vive chez les acteurs actifs sur la scène internationale dont les clients, qui n'ont évidemment aucune idée de l'environnement législatif suisse, espèrent s'établir en six mois quand il faut compter en moyenne un an et demi pour obtenir toutes les autorisations requises. Enfm et d'une manière très générale, il faut encore relever que cette évolution entre des entreprises locataires et des acteurs immobiliers «nouveaux» propriétaires a également des incidences régionales. Précédemment, les entreprises de régions périphériques trouvaient facilement une solution immobilière dans leur milieu d'implantation en assumant, comme propriétaire, l'éventuel risque lié au portage financier de leurs surfaces et à la difficulté de leur revente 43
Un des grands enjeux concernant la réhabilitation des friches concerne le manque d'informations minutieuses relatives à l'évaluation des frais (et délais) liés à l'assainissement de parcelles qui ont pu être contaminées par des usages industriels antérieurs. Voir à ce sujet Valda et Westermann 2004.
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éventuelle. Dans le système actuel, et en dehors des entreprises du profil 7, elles ont plus de difficulté à trouver une offre correspondant à leurs besoins puisque les sociétés immobilières ne vont pas spontanément investir en dehors des régions centrales. Il y a donc là aussi un décalage régional à ne pas sous-estimer. Comme déjà avancé ci-dessus, la stratégie de réduction des incertitudes adoptée par les acteurs immobiliers, plus encore que le manque d'information sur la demande des entreprises, explique les cas de distorsion entre l'offre immobilière et la demande des entreprises. La manière dont la question des délais d'octroi des permis de construire est soulevée par les sociétés immobilières illustre bien ce nouveau contexte. Comme les sociétés immobilières attendent que la demande de l'entreprise soit manifeste pour y répondre, les locaux ne sont évidemment pas prêts au moment où l'entreprise exprime ses besoins. La tendance est alors de reporter la responsabilité de cette situation sur l'acteur public perçu comme procédurier et lent à décider. Au-delà de la question de la responsabilité, le mécanisme qui conduit à privilégier des situations où l'incertitude est réduite a surtout des conséquences économiques dommageables pour les jeunes entreprises. Quand bien même les sociétés immobilières auraient conscience de leur demande en locaux bons marchés, elles ne seront pas tentées d'y répondre au vu du rapport trop défavorable entre la rentabilité de telles surfaces et le risque qu'elles encourent. v-
RECONSTRUCTION DES PROXIMITES: DE L'ACTEUR PUBLIC
DES ACTIONS CIBLEES
Nous sommes entrés dans une ère où la mobilité et la flexibilité s'imposent aux acteurs économiques avec de nouvelles règles de fonctionnement des marchés. Cela est vrai pour les entreprises, les sociétés immobilières et également pour l'acteur public, notamment s'il veut développer et renouveler le tissu économique et influencer les choix faits par le secteur privé. Il s'agit d'inscrire les actions concrètes du court terme dans une perspective à plus long terme qui réponde aux objectifs territoriaux voulus par les autorités publiques. Du point de vue de l'acteur public, les enseignements principaux à tirer des nouvelles pratiques organisationnelles et spatiales des entreprises et des sociétés immobilières invitent à envisager des approches ciblées sur des profils d'entreprise, sur certains sites et sur certains acteurs immobiliers particulièrement concernés par ces sites. L'enjeu est de définir des stratégies capables de rétablir des combinaisons vertueuses. De telles actions passent par la réarticulation différenciée de certaines relations de proximités entre ces différents éléments (tableau 2).
A., RaI/et et A. Torre
154 Profils d'entreprises et régionale
1 et 2 : Services de place centrale nationale
Les grandes sociétés de l'immobilier tendent à développer une stratégie d'autonomisation à l'égard de l'acteur public, grâce à la maîtrise de compétences nombreuses et relativement complexes (facility consulting). Elles attendent de l'acteur public qu'il participe à limiter les incertitudes du marché en se concentrant sur la définition à long terme de conditions-cadres propices à l'investissement immobilier (stratégie claire en termes de secteurs économiques et d'entreprises visées, politique des transports et de la formation). Elles souhaitent également qu'il soit flexible et disponible pour négocier l'établissement d'une nouvelle entreprise. Les sociétés immobilières régionales, plus petites, se sont organisées pour développer l'information concernant l'offre de locaux. En revanche, elles sont pour la plupart peu à même d'analyser et de connaître les stratégies territoriales des entreprises (recherche de partenariats, existence d'un effet milieu, effet d'entraînement du secteur institutionnel, impact des Hautes écoles sur la localisation des entreprises. . .).
Elles
n'arrivent
pas
à
cumuler
suffisamment
d'expériences pour développer un sens analytique et prospectif. Elles souhaiteraient donc renforcer leurs liens avec l'acteur public et profiter, notamment, des services de facilitation (information économique locale, types d'entreprises implantées et besoins en locaux) qu'il est le plus souvent parfaitement à même d'offrir déjà aujourd'hui. En outre, et afin de réduire ou de baliser les incertitudes du marché, l'acteur public devrait s'engager à faire une promotion active des sites stratégiques dont il a connaissance auprès des destinataires finaux (les entreprises), mais aussi auprès des sociétés immobilières. Ce rôle d'intermédiaire ou de passeur de l'information paraît en effet indispensable à la fois pour coordonner la demande et pour la rendre visible. Cette tâche est de nature à réduire la prise de risque. Elle peut donc influencer favorablement les sociétés immobilières régionales pour qu'elles osent investir dans des sites qui, du point de vue urbanistique, peuvent représenter des enjeux importants en termes d'intérêt public. Profil d'entreprises 3 : Services financiers Le marché existe et fonctionne, notamment parce que ces entreprises disposent de capacités fmancières suffisantes pour que leur demande soit prise en compte par les sociétés immobilières actives dans ce secteur. L'acteur public n'a donc pas à intervenir au-delà de ses prérogatives usuelles.
Les nouvelles proximités urbaines
155 Tableau2
POUR UNE REPONSE CmLEE DE LA PART DE L'ACTEUR PUBLIC, EN FONCTION DES PROFILS D'ENTREPRISES
Relative pénurie de l'offre sise dans le parc existant du centre ville, construction envisagée si la demande est bien identifiée Par rapport aux grandes sociétés immobilières: Action actuelle perfectible Par rapport aux sociétés immobilières régionales: Inciter au développement de l'offre dans des sites stratégiques (réhabilitation des friches, de locaux en centre ville)
Profil d'entreprises agglomération
Par rapport aux sociétés immobilières régionales: Marché vertueux ne nécessitant pas l' intervention
de l'acteur public pour le moment
Pénurie et/ou offre insuffisante fournie par la construction etloula réhabilitation (partenariats ublic- rivé) Par rapport aux sociétés immobilières régionales: Inciter au développement d'une offre spécifique (secrétariat, restauration intégrée), participer à la réalisation de projets bon marché et situés dans des sites stratégiques (dans les ands centres
Par rapport aux sociétés immobilières régionales: Veiller au maintien d'une offre adaptée dans le périurbain proche des grands centres.
6 : Entreprises technologiques
Par rapport aux sociétés immobilières régionales et/ou locales: Action actuelle adéquate (mise en zone de terrains d'activités)
en
Ces entreprises, qui en sont à un stade de développement relativement avancé (au-delà de trois ans) recherchent et trouvent des solutions périurbaines. Plusieurs sociétés immobilières régionales actives dans la gérance et/ou dans la construction produisent des locaux répondant à cette demande L'action de l'acteur public ne semble pas déterminante au-delà du rôle de passeur d'information déjà explicité ci-dessus (profil d'entreprises 1 et 2, action auprès des sociétés immobilières régionales).
A. Rallet et A. Torre
156 Profil d'entreprises
7 : Industries hors centre urbain
La politique traditionnelle du zonage reste pertinente pour ces entreprises qui continuent à miser sur la propriété pleine et entière du bâtiment et du terrain. L'action actuelle de l'acteur public est donc adéquate et il n'a, de ce fait, pas à intervenir au-delà de ces prérogatives usuelles. Profils d'entreprise 4 et 5 : Jeunes entreprises de service technologique et start-up de filière technologique
Reste alors un domaine de l'immobilier d'entreprise où une attention particulière de l'acteur public est requise. Il concerne l'insuffisance de surfaces avantageuses et d'un standing suffisant situées dans les environs immédiats des aménités urbaines qui, en termes de proximités, sont indispensables à leur viabilité. Par rapport à cette demande, toute politique s'appuyant seulement sur le zonage montre clairement ses limites. Il y a lieu d'envisager des actions plus ambitieuses. L'enjeu est de parvenir à mettre sur le marché des surfaces flexibles et disponibles à la location auprès d'entreprises dont la faible capacité financière ne permet guère de constituer une demande intéressante pour les sociétés immobilières. Ce n'est sans doute pas à l'Etat de se substituer à ces dernières. Mais il ne peut pas non plus ne pas se préoccuper de jeunes entreprises dont l'existence est essentielle au renouvellement du tissu économique. Dès lors, et en veillant à nuancer les interventions (les besoins des start-up inscrites dans une filière technologique sont différents de ceux des jeunes entreprises de service technologique) l'acteur public pourrait jouer un rôle actif d'animateur de l'offre et de la demande qu'il pourrait décliner en suivant différentes partitions en fonction du contexte local. Nous en énumérons quelques-unes pour illustrer le propos: Obtenir activement l'appui des sociétés de gestion patrimoniale lorsqu'elles existent et possèdent des terrains ou des immeubles dans des sites stratégiques. Veiller à offrir des surfaces pour des entreprises privées dans des programmes de construction dont l'acteur public est lui-même le maître d'ouvrage. Mener des politiques foncières actives (exemple: acquérir et mettre en droit de superficie d'anciens terrains industriels dont l'acteur public assurerait l'assainissement si nécessaire).
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Développer des partenariats public-privé (exemple: constitution d'une fondation d'économie mixte chargée de monter des opérations immobilières destinées aux entreprises visées ou de fournir des prêts hypothécaires à des conditions préférentielles à des sociétés immobilières). Tels sont alors quelques exemples possibles de la nature de l'intervention publique qu'il y a lieu désormais de concevoir pour reconstruire les proximités lorsque, en raisons des évolutions économiques actuelles, la demande immobilière d'entreprises (dont l'existence relève d'un intérêt économique général) n'est plus en mesure d'être satisfaite par les acteurs immobiliers. CONCLUSION Il est utile de rappeler l'importance pour les acteurs publics de maîtriser ce qui distingue la rationalité située de la rationalité procédurale. Ils sont en effet liés au territoire institutionnel, à un territoire dans lequel s'exercent leurs prérogatives et qui est clairement délimité par une frontière politique et administrative (Ruegg 1996) tandis que d'autres acteurs, comme les entreprises et les acteurs immobiliers, fonctionnent davantage selon une logique qui reprend les caractéristiques du réseau. Le type d'implantation qu'une entreprise est susceptible de choisir résulte de la confrontation qu'elle opère dans le temps et dans l'espace entre les différentes solutions possibles à un moment donné. De plus, cette confrontation est menée selon un jeu « à deux étages »: une fois que les différentes possibilités territoriales ont été déterminées, l'insuffisance ou l'inadéquation de l'offre immobilière disponible dans la région ou l'agglomération retenue est susceptible de réactiver d'autres options territoriales jugées satisfaisantes elles aussi. Nous ne sommes donc pas seulement en présence d'un processus de rationalité procédurale, avec une entreprise qui serait capable de calculer de manière définitive ses préférences à un moment donné, mais plutôt d'une rationalité située dans le sens où l'environnement joue un rôle actif dans l'élaboration de la représentation que l'entreprise se construit, d'une manière dynamique et itérative, de sa future implantation. Dans ce contexte, l'acteur public doit dorénavant jouer un rôle à la fois plus conséquent et plus nuancé que par le passé. Il doit moduler son intervention en tenant compte des besoins de proximité différenciés des entreprises. Il peut jouer un rôle d'interface en informant les acteurs immobiliers de la diversité de ces besoins. Il peut enfin, et surtout, donner des signaux clairs aux sociétés immobilières et, dans la mesure du possible, s'engager avec elles dans le montage
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A. Rallet et A. Torre
de projets en partenariat afin que certains types de locaux requis par des entreprises bien spécifiques soient offerts sur le marché.
REFERENCES Bernard P.E. et Vicente J. (2000), Modèles décentralisés d'interactions et coexistence spatiale des modes de coordination, Revue d'économie industrielle, 93, 95-116. Boulianne L.-M., Crevoisier O. et Ruegg J. (2001), Nouvelles pratiques organisationnelles des entreprises: conséquences spatiales pour le territoire et l'aménagement du territoire, C.E.A.T., Lausanne. Commission of the European Communities (1993), New location factors for mobile investisments in Europe, Regional development studies, Luxembourg. Gilly J.-P. et Torre A. (2000), Dynamiques de proximité, L'Harmattan, Paris. Ruegg J. (1996), «Champ du management territorial », in Decoutère S. et al (eds.)., Management territorial, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, Lausanne, 11-24. Simon H. (1978), Rationality as process and as product of thought, American Economic Review, 68 (2), 1-16. Valda A. et Westermann R. (2004), La suisse et ses friches industrielle - Des opportunités de développement au cœur des agglomération,. ARE/OFEFP, Berne. Zimmermann J B. (1997), Nomadisme et ancrage territorial des activités industrielles et technologiques, Colloque OIPR-CRDT, Paris.
CHAPITRE VII
SALVADOR DE BAHIA : DE L'ANCIEN AU NOUVEAU CENTRE DES AFFAIRES PROXIMITE, FONCTIONNALITE ET PRESTIGE44
ELAINE NORBERTO PA VLa HENRlQVE DE ALMEIDA
INTRODUCTION
Un voyageur étranger qui arrive à Salvador de Bahia et remonte la sinueuse avenue Antônio Carlos Magalhaes, où s'est installé le Central Business District, peut facilement observer qu'il s'agit d'un quartier récent: la largeur des voies et les façades des bâtiments en témoignent. Le promeneur sera particulièrement frappé par les deux types d'architecture d'extérieur: de grandes tours à façades miroitantes et des bâtiments dont les volumes et les murs colorés s'efforcent d'incarner les formes pures de la géométrie spatiale. Ces tours sont construites le long de 4 ou 5 avenues qui serpentent au cœur d'un vaste quartier à la topographie irrégulière. L'épicentre de ce nouvel espace n'est pas une place au sens traditionnel du terme. Il s'agit d'une aire triangulaire, animée par un flux très dense de véhicules. On y trouve d'un coté le centre
commercial Iguatemi - une des plus grandes réussites du genre au Brésil, il reçoit tous les jours environ cent mille personnes - et de l'autre la gare routière qui relie Salvador à d'autres villes de l'état de Bahia. C'est à cette station que le centre commercial doit une bonne part son succès. Iguatemi est aujourd'hui l'un des deux plus grands centres de loisirs de la ville. A la base du triangle, notre voyageur observe un énorme bâtiment arrondi, dont la forme évoque une arène romaine. C'est un des temples de l'Eglise Universel du Royaume de Dieu, une vrai « multinationale de la foi» .d'origine brésilienne, avec des filiales dans plusieurs pays d'Europe et aux Etats-Unis. Avant d'arriver à l'Avenue Trancredo Neves, où notre voyageur s'étonnera peut être des formes irrégulières et audacieuses d'un bâtiment en verre et acier nommé « Casa do Comércio », une sorte de monument au capital commercial, il se souvient qu'il est bien dans
~ous remercions Didier Uri pour les remarques et les suggestions dont il a fait bénéficier ce texte. Nous restons bien entendu seuls responsables des idées qui y sont défendues. Nous remercions aussi Simon Barthélémy pour la révision de la version française de ce texte
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une métropole du tiers monde: à sa gauche, une immense favela grimpe sur la colline, histoire de ne pas passer inaperçue. Outre des bureaux, la «Casa do Comércio» abrite un grand théâtre et des amphis de dimensions variables, faisant écho à la structure en acier du Centre de Conventions, situé un peut plus loin. Centre de loisir, temples, théâtres, restaurants, services aux entreprises et à la personne: ce lieu est non seulement devenu le cœur économique de la ville, mais aussi son centre tout court. Quoique si le voyageur demande « où se trouve le centre ville », il est plus probable qu'on le renvoie vers l'ancien Centre Historique. L'absence de fenêtres dans les façades de plusieurs de ces bâtiments nouveaux, aux conséquences importantes en termes d'illumination et d'aération naturelles, a suscité de fortes critiques de la part d'architectes et d'urbanistes de l'Université Fédérale de Bahia. Ces immeubles ont selon eux sacrifié la fonction à la forme. Leur fonctionnement dépend ainsi de la climatisation et de la lumière électrique, alors qu'ils sont situés à deux kilomètres de la mer et dans une ville dont la luminosité naturelle est une des plus intenses au monde. Mais cela ne vient pas nécessairement à l'esprit de notre voyageur, peut être touché par le style pop de ces bâtisses. Autant de signes de contemporanéité relativement inattendus dans la ville la plus ancienne du Brésil. Cet article analyse les facteurs décisifs dans la création et la dynamique du Central Business District (CBD)de Salvador de Bahia. Dans la première partie, de nature plutôt descriptive, nous présentons quelques caractéristiques de la ville de Salvador, les causes de déclin du vieux centre d'affaires et la création du nouveau CBD.Les grandes entreprises immobilières et l'Etat sont à l'origine de ce processus. Pour mieux expliquer ces transformations et ces déplacements, nous nous penchons dans la deuxième partie sur la pertinence des facteurs fondés sur la fonctionnalité de l'espace, facteurs mis en relief par la littérature relative aux centres d'affaires en Europe et aux Etats-Unis. Sans nier l'importance manifeste de ces derniers, nous soutenons cependant qu'on ne peut réduire l'analyse du processus à cet aspect:
l'attractivité du nouveau site - et la dynamique qui en découle - est due également à des facteurs de l'ordre du symbole et de l'image. La troisième partie cherche à montrer, en s'appuyant sur la littérature du marketing des services, que la localisation des entreprises fait partie de leurs stratégie d'image et de signalisation de la valeur des services qu'elles offrent.
Les nouvelles proximités urbaines
1-
161
LA CREATION DU NOUVEAU CENTRE DES AFFAIRES A SALVADOR
1. Transformations
de la vüle et émergence
d'une tertiarisation
nouvelle
Avec une population de 2,5 millions d'habitants, Salvador, capitale de l'état de Bahia, est l'un des plus importants pôles urbains du Brésil. Certes, elle se situe loin derrière les deux global et gateway cities brésiliennes que sont Sao Paulo et Rio de Janeiro, mais sa dynamique démographique et économique est comparable à celle de toutes les autres métropoles régionales du pays. Bien entendu, cela est vrai surtout pour ce qui concerne la croissance du nombre d'habitants et, par conséquent, pour ce qui est de la taille absolue du marché de la ville. Si l'on considère le PIB local, Salvador n'est qu'à la septième place des plus grandes métropoles brésiliennes. Située dans le Nordeste du Brésil, l'une des régions les plus pauvres du pays, la capitale de Bahia se caractérise encore par le taux de chômage métropolitain le plus élevé du Brésil, par la faiblesse de son niveau de
vie moyen (revenu médian de 1 200 dollars par an) et par une polarisation sociale très accentuée. Jusqu'au début du XIXe siècle, Salvador demeure la place forte des marchés du Nordeste brésilien; mais elle perd sa position dominante dans l'économie brésilienne à mesure que les exportations de sucre déclinent, et ce malgré l'expansion des cultures du cacao, du tabac et d'autres produits primaires destinés à l'exportation. Après avoir connu une période de relative stagnation au début du xxe siècle, la ville reprend la voie d'une croissance rapide au cours des années 1950-1970, grâce à la découverte du pétrole dans sa région périphérique. Cette croissance s'est intensifiée lors de la vague d'investissements du «miracle brésilien» (1968-1973)et reste soutenue dans les années suivantes grâce aux primes et subventions accordées par l'état fédéral, qui permettent d'attirer de nouvelles industries, y compris les grandes usines du pôle pétrochimique de Camaçari, situé au Nord de son aire métropolitaine. La ville connaît alors une forte immigration d'origine rurale du fait de la perspective d'emplois industriels. Ceux-ci se révèlent être un mirage puisque l'industrie qui s'installe est une industrie de pointe, donc automatisée. La population passe de 630000 habitants en 1960à 1 million en 1970,puis à 1,5million en 1980. Suivant la tendance commune aux régions métropolitaines les plus importantes du pays, le secteur de services absorbe la majorité de la population active et la proportion des travailleurs du tertiaire augmente pendant les années 1990. D'après l'Enquête Mensuelle sur l'Emploi (Pesquisa Mensal de Emprego de l'Institut Brésilien de Géographie et de Statistique - lEGE), au sein de la population active occupée de la Région Métropolitaine de Salvador, cette proportion est
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A. Rallet et A. Torre
ainsi passée de 68,51%en janvier 1991à 71,62%en janvier 2001,tandis que dans l'industrie (bâtiments et travaux publics compris), le nombre
de travailleurs chutait à la même période de 20,70/0 à 16,4% de la population active. Selon la vision traditionnelle de l'économie géographique, encore hégémonique aujourd'hui à Bahia, Salvador semble un exemple parfait de la «théorie de la base ». On dit alors que se développent à Salvador, comme dans d'autres villes des pays sousdéveloppés, des services modernes liés à une industrie exportatrice et un secteur tertiaire «hypertrophié» ou «refuge », caractérisé par la présence du micro commerce de détail, de services à la personne et domestiques. Cette interprétation s'inscrit dans un cadre théorique fortement marqué par le dualisme: d'un côté, l'industrie et les services « modernes» seraient créés par la base exportatrice; de l'autre côté, les services «éponge» seraient le résultat de l'exode rural (pour ce type d'interprétation, se reporter à Jany-Catrice, 1993). Ce mode traditionnel d'analyse interprète l'expansion des services à Salvador comme une preuve de son retard économique. Pourtant, dès les années 1980et 1990,il est évident qu'on assiste à un processus de tertiarisation nouveau. Il s'agit selon nous d'un phénomène qui ressemble de plus en plus aux transformations observées dans les métropoles des pays développés. La vague de tertiarisation à Salvador se matérialise spatialement par un nouveau Central Business District (CBD) qui concentre des services aux entreprises, des services publics et des sièges sociaux. Cette concentration engendre à son tour la multiplication des quartiers d'habitations aux alentours (pour les cadres et les employés qui travaillent dans ces nouveaux bureaux) et, par conséquent, l'expansion de l'offre de services à la personne et de services aux ménages.
Cette croissance des services, comme le notent Noyelle (1994) et d'autres, découle de trois grandes tendances contemporaines. En premier lieu, le développement accéléré des services aux entreprises, notamment des services à forte valeur ajoutée, qui figurent parmi les secteurs les plus dynamiques de l'économie urbaine contemporaine, y compris dans les métropoles régionales. En second lieu, l'internationalisation de ces services avancés: conseil, comptabilité, finances, gestion de santé et bien d'autres45. Troisièmement, la «décentralisation », c'est-à-dire le départ des activités de service des anciens centres villes vers les banlieues ou vers les nouveaux quartiers d'affaires.
45
D'abord,
en raison de l'implantation
de succursales
de grandes entreprises
multinationales
Mais aussi du fait de l'expansion vers l'extérieur d'entreprises locales d'Odebrecht,
le plus important
exportateur
brésilien de services (ingénierie
-
de services.
c'est le cas, à Salvador,
et management
de projets).
Les nouvelles proximités urbaines 2. Le déplacement
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du centre des affaires
Pour bâtir la ville de Salvador, les Portugais ont choisi un site traversé du nord au sud par une faille géologique, ce qui leur a permis de construire une ville sur deux niveaux bien marqués, à l'image de Lisbonne. Le vieux centre de Salvador est ainsi caractérisé par une organisation verticale de l'espace. Dans la partie basse de la ville, face au port, ont été construits les bâtiments du grand commerce d'exportation et d'importation et ceux du petit commerce assurant les relations entre la capitale et son hinterland, les terres autour de la Baie de Tous les Saints. La partie haute était occupée par l'administration, les habitations et les immeubles commerciaux. A la fin du XIXe siècle, s'impose une nouvelle organisation horizontale et fonctionnelle de l'espace. Les nouveaux quartiers résidentiels séparent riches et pauvres, habitation et travail (Fernandes et Gomes, 1992).La partie haute du vieux centre-ville est désormais occupée surtout par le commerce de détail, la majeure partie de l'administration publique ainsi que les bureaux et les cabinets des professions libérales. Enfin, la partie basse de ce centre-ville fait l'objet d'agrandissements successifs: jusqu'aux années 1960, le commerce de gros, les sièges sociaux et les institutions fmancières, très fortement liées au mouvement d'exportation et d'importation, restent concentrés aux alentours du port. Cette concentration s'explique facilement par des arguments classiques. En premier lieu, la structure du réseau collectif de transport intra-urbain (tramway, bus, ascenseurs publics) transfonne l'ancien centre en quartier le plus accessible de la ville. De plus, des économies d'agglomération typiques se réalisent: la concentration de sièges sociaux, d'entreprises de services divers et de bureaux créent des externalités positives et permet des diminutions des coûts de transaction. Ce n'est qu'au début des années 1970 que les limites à l'expansion du vieux centre de Salvador deviennent évidentes. Le problème principal est alors le trafic dans les rues et les avenues trop étroites, héritage du XIXe siècle, voire de l'époque coloniale. D'autres obstacles, qui se sont aggravés au cours des années suivantes, se sont opposés à la multiplication des établissements dans le vieux centre. Au début des années 1990, l'Institut Miguel Calmon, un organisme de recherche et de lobbying lié aux grandes entreprises, mène une enquête auprès des firmes encore installées dans le vieux centre, pour comprendre les problèmes de localisation qu'elles rencontrent (IMIC, 1992). L'Institut ne découvre rien de nouveau, mais souligne les déficiences vérifiées depuis plus de vingt ans. Parmi les problèmes alors mentionnés, citons:
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- le déficit d'accessibilité: des rues et des avenues trop étroites, l'insuffisance du nombre de places de parking et le faible nombre de voies vers le reste de la ville; - l'absence de lieux de loisirs, de services culturels et de restaurants pour les cadres supérieurs; - le manque d'équipements hôteliers; - les conditions difficiles d'accès à l'aéroport ; - l'insécurité, surtout le soir, quand le petit commerce de détail encore présent ferme ses portes; - l'absence d'espace disponible pour l'implantation de nouvelles entreprises ou pour l'extension des entreprises en place, en raison non seulement du manque de terrains libres, mais aussi de l'existence d'aires architecturales préservées, soumises à la législation de protection du patrimoine historique. A Salvador, le déplacement du centre des affaires est le résultat d'une intervention orchestrée par le Gouvernement de Bahia et par les entreprises immobilières, au premier rang desquelles Odebrecht S. A., une entreprise d'origine bahianaise devenue une grande multinationale, avec des compétences dans de multiples secteurs d'activités. Leur action démarre entre la fm des années 1960et le début de la décennie suivante. De nouvelles avenues sont ouvertes afm de créer un nouvel axe Nord-Sud, qui relie des espaces encore videsmais que se sont déjà appropriées les entreprises immobilières - à l'aéroport et aux nouveaux quartiers d'habitation des classes moyennes locales. Ensuite, le Gouvernement implante son nouveau centre administratif (le Centro Administrativo da Bahia) sur ce nouvel axe, à mi-chemin entre l'aéroport et le vieux centre-ville. Enfin, l'Etat et le capital immobilier installent quelques établissements stratégiques au cœur du futur Central Business District: la nouvelle gare routière de la ville, un grand centre commercial régional, le premier hypermarché de la capitale, et quelques grands immeubles de bureaux (voir Scheinowitz, 1998). C'est alors que commence la migration des entreprises de l'ancien centre-ville. L'exode, qui débute dans la deuxième moitié des années 1970, s'accélère dans les années 1980 et s'achève dans la décennie 1990.Un sondage réalisé en 2001par une entreprise de conseil (Urban Science do Brasil) révèle que si 36% des firmes du nouveau
centre y démarrent leurs activités, 43% sont originaires du vieux centre des affaires (les autres sont pour la plupart des filiales d'entreprises provenant d'autres villes brésiliennes) (Gazeta Mercantil, 2000). Ce qui s'est produit est d'une certaine manière la conséquence de deux cercles, l'un vicieux, l'autre vertueux. Dans le vieux centre, les pouvoirs publics réduisent leurs investissements, l'infrastructure et l'environnement urbain se dégradent, ce qui incite des entreprises à partir; les immeubles se vident et se dévalorisent, ce qui fait baisser
Les nouvelles proximités urbaines
165
davantage les investissements privés et publics et entraîne une émigration accentuée des entreprises et des habitants46. Le nouveau centre, quant à lui, se caractérise par un phénomène de « dépendance du sentier », c'est-à-dire que les choix de localisation des entreprises sont fortement influencés par les options prises par les entreprises qui les ont précédées. Ce qui induit rapidement une dynamique irréversible. S'il est vrai que ce mouvement n'est pas surprenant, puisque les entreprises de services se caractérisent par leur mobilité, il faut souligner que ce processus est déterminé avant tout par la concentration de l'offre immobilière. Il s'agit alors de préciser quelles sont les caractéristiques de ces nouveaux espaces adaptées aux entreprises qui se déplacent, aussi bien en termes d'infrastructure et d'environnement, qu'en ce qui concerne le design interne des bâtiments et des bureaux. Le sondage déjà cité de l'Urban Science do Brasil (Gazeta Mercantil, 2000)identifie quelques avantages de la localisation dans le nouveau centre, listés d'après des entretiens avec les dirigeants d'entreprises qui se sont récemment déplacées. Les points évoqués font écho aux facteurs d'explication de l'exode du vieux centre énumérés dans le sondage d'IMIC : - la proximité de nombreux autres établissements de services qui offrent une grande variété de produits: agences bancaires, centres commerciaux, agences de voyages, entreprises de marketing et de publicité, organismes de conseil, audit et comptabilité, hypermarchés etc. - la concentration des services à la personne est aussi essentielle; les cadres et les employés ont besoin de lieux de restauration (restaurants, cafés, fast-foods), de transports (taxi et bus), de services de loisirs (centres commerciaux, cinéma), d'hôtels et d'agences de voyage, d'agences bancaires, de commerces de détail et de services de santé (pharmacies, cabinets, cliniques) ; - la concentration des sièges sociaux, ce qui renvoie à la question de la proximité; - les conditions d'accessibilité et de stationnement pour les clients et pour les prestataires de service qui se déplacent; - la proximité des quartiers habités par les familles aisées, qui constituent le public cible pour nombre d'établissements localisés dans le nouveau centre.
46
En effet, le vieux centre de Salvador est le seul quartier de la ville où le nombre d'habitants diminue. La population, de 118245 habitants en 1970, est de 76091 habitants en 2000. La Mairie estime qu'en 2015, en l'absence d'une politique de reconversion du site, il n'y aura plus que 48 500 habitants (PDDU, 2001).
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11-
LOCALISATION, DE PROXIMITE
FONCTIONNALITE
ET CONTRAINTES
Les premières analyses concernant l'influence des télécommunications et des technologies d'information sur la localisation des services aux entreprises ont surestimé les effets de dispersion des nouvelles techniques. Nombre d'économistes ont suivi Toffler (1980), Kutay (1986)et d'autres, en pariant sur la diffusion du travail à domicile, sur le déplacement des activités de services vers les banlieues et même sur la dispersion des entreprises de services dans les petites villes de campagne. Ces auteurs des années 1980 se sont probablement eux-mêmes inspirés de quelques études parus dans les années 1960 et 1970 (Webber, 1968; Abler, 1970) qui ont été les premières à suggérer que les nouvelles technologies d'information et de télécommunication allaient faire disparaître le besoin de contacts directs dans le travail et donc la nécessité de concentrer les services dans les centres villes (voir Moss, 1987). Pourtant, malgré le développement des technologies télématiques, les employés de bureau préfèrent toujours une localisation centrale permettant ces contacts directs et un accès facile. En effet, la migration vers les banlieues ou vers les petites villes n'est une réalité que pour les services routiniers des back-offices et des cali centers, des systèmes de réservation des compagnies de voyage et de tourisme, du télémarketing ou encore des activités logistiques très dépendantes des autoroutes - stockage, commerce de gros etc. Il faut rappeler que les nouvelles technologies rendent possible, dans certains cas, les prestations à distance et permettent également de séparer spatialement les activités de production, de distribution et de management. Néanmoins, comme le notent Gilly et Torre (2000,pp. 10-11): « [...] la thèse selon laquelle l'importance croissante prise par les communications à distance et les échanges internationaux conduirait à une disparition du local au profit de relations décentralisées telles que la généralisation du télétravail ou la localisation des ménages à l'extérieur des métropoles est largement battue en brèche par la preuve empirique. » Dans la capitale de l'Etat de Bahia, le «cœur» des services supérieurs ne s'est pas déplacé vers la banlieue. Il serait plus juste de décrire le phénomène à Salvador comme une re-concentration dans un nouveau quartier central (voir la carte). Ce mouvement, comme on l'a déjà vu, peut être considéré comme le résultat caractéristique des « coûts» d'agglomération du vieux centre. En outre, il découle de l'attractivité engendrée par le nouvel espace de services. Comme nous l'avons souligné dans la section précédente, l'ouverture des nouvelles avenues dans une région jusqu'alors en friche a été l'une des conditions de la création du nouveau CBD. A
Les nouvelles proximités urbaines
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Salvador, comme dans plusieurs autres villes, l'épuisement des centres
des affaires dans le centre ville est, en grand mesure, dû à -
l'encombrement de la circulation (Alexander, 1979; Bateman, 1985). L'accessibilité des CBD est déterminée d'un côté par les distances courtes et moyennes, facilement parcourues par la marche et le trajet en automobile ou le transport public; de l'autre par les mouvements nationaux et internationaux de personnes, qui dépendent de plus en plus des trains à grande vitesse, des aéroports, des hôtels et des centres de conventions (Hall, 2000). Outre les conditions de circulation - accessibilité, parkingla fonctionnalité du nouveau CBD comprend aussi une dimension architecturale qui doit répondre aux nouvelles contraintes s'imposant aux bâtiments de bureau. De manière générale, l'espace doit être assez fonctionnel pour permettre l'intensification des échanges et, particulièrement, les échanges interpersonnels. 1. Architecture,
télématique
et proximité
A Salvador, comme dans d'autres villes du monde, les bâtiments du vieux centre deviennent peu à peu incompatibles avec les nouvelles formes de travail. Il ne s'agit pas seulement d'un manque d'espace ou d'accessibilité. L'architecture des bâtiments et la disposition des bureaux elles-mêmes peuvent constituer des obstacles. Comme les autres biens capitaux, les bâtiments vieillissent et deviennent physiquement et fonctionnellement obsolètes. Avec le temps, de nouveaux besoins apparaissent: l'agencement spatial interne, la circulation des travailleurs, la flexibilité des cloisonnements et la transparence des bureaux, des installations électriques capables de supporter la climatisation sans faire tomber en panne les ordinateurs... Comme le souligne Gat (1998), tout ceci contribue non seulement à faciliter (ou à perturber) le processus de travail dans les bureaux, mais affecte aussi le bien-être de l'employé. Comme dans d'autres métropoles, la re-concentration des services aux entreprises dans le nouveau CBD découle de trois types d'exigences: (1) un nouveau concept d'immeuble adapté aux besoins stricto sensu de la télématique; (2) une nouvelle conception du bâtiment de bureaux conforme aux nouvelles formes d'organisation du lieu de travail; (3) une adéquation architectonique et urbanistique aux nouvelles formes organisationnelles du point de vue symbolique, qui se traduit en termes de statut. Pour toutes ces raisons, l'infrastructure des immeubles dans le nouveau CBD est radicalement différente de celle du vieux centre. La plupart des nouveaux bâtiments sont équipés de réseaux câblés qui permettent le plein développement de la télématique. Grâce à leur connexion au réseau de fibre optique, les bureaux sont branchés en permanence sur Internet, l'intranet et la télévision (Gazeta Mercantil,
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A. Rallet et A. Torre
2000). Les bâtiments de dernière génération, dont les deux tours miroitantes du Salvador Trade Center construit par Odebrecht en sont l'illustration: elles sont surnommées les «immeubles intelligents» pour leur adéquation à la télématique, leurs mécanismes de sécurité, mais aussi pour l'automatisation des systèmes hydrauliques et électriques. Ils sont ainsi plus efficients, avec des taux des services moins élevés. Avant d'être un lieu de travail, l'immeuble moderne de bureau est une structure où l'information est produite, traitée et diffusée. En résulte la nécessité de concevoir des bâtiments qui prennent en compte les systèmes avancés de télécommunication et d'informatique, qui comportent des installations nécessaires au marketing téléphonique, et disposent ainsi d'infrastructures capables de supporter de hautes charges de consommation d'électricité et de communication téléphonique (Black, Roark et Schwartz, 1986; Moss, 1987; Moss et Townsend 2000). L'architecture de ces immeubles doit également favoriser les échanges interpersonnels. Moss et Townsend (2000p. 36) ajoutent que « [...] de nouvelles demandes se manifestent pour un design intérieur de bureau qui élimine les frontières entre les fonctions afin d'encourager les interactions humaines ». De ce fait, l'architecture intérieure de ces immeubles s'est soumise à l'impératif de flexibilité. Duffy (1969)est l'un des premiers à avoir observé que les immeubles modernes de bureaux sont de plus en plus conçus pour faciliter l'échange d'informations direct grâce à des réunions, des conférences et des conversations informelles proches du watercooler. Dans un papier plus récent, Duffy et Tanis (1993)ont éclairci les rapports entre ce nouveau type d'architecture de bureau et les nouvelles formes d'organisation du travail. Pour eux, le bureau conventionnel, dérivé du taylorisme, est devenu incompatible avec les nouvelles façons de produire dans des organismes pour lesquels l'information est la matière première et où la coproduction est la règle. Ils soulignent que les nouvelles formes de travail évoluent de la départementalisation vers l'organisation par projet, des structures verticales vers les réseaux horizontaux, du pouvoir autoritaire vers le pouvoir collégial, de l'aliénation des tâches simples à la résolution de problèmes complexes. Le travail exige donc aujourd'hui plus d'interactions, plus de collaborations, plus d'autonomie individuelle et, en même temps, plus d'espaces de groupe et d'espaces partagés, ainsi qu'un usage plus intermittent de l'espace. D'où le recours à des bâtiments et des bureaux d'une conception différente, avec des salles et des surfaces plus vastes, des cloisons mobiles, des réseaux de fibre optique et autres innovations. A Salvador, la soumission de l'architecture intérieure des immeubles aux contraintes de flexibilité a une cause supplémentaire: plusieurs de ces bâtiments, surtout les plus récents, ont été construits
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non pas dans la perspective d'une vente de bureaux, mais dans l'objectif de mettre en location des surfaces à tailles variables selon les différents types d'usagers. 2. Interaction
et accessibilité
L'importance des contacts directs pour la productivité des employés dans les services aux entreprises est bien soulignée par la littérature spécialisée. Goddard (1973)a été l'un des premiers à montrer que si le téléphone est utile pour établir des contacts préliminaires, les réunions interpersonnelles restent indispensables pour les discussions les plus importantes, celles dont le résultat est incertain. Après Goddard, Gad (1979),Schwartz (1979)et beaucoup d'autres, on sait que le besoin de ce type de contacts explique en grande partie l'existence d'économies d'agglomération dans les CBD.C'est encore plus net dans le cas des services supérieurs, tels que les services financiers, les services aux entreprises, les industries culturelles et le tourisme, qui font partie des activités les plus synergiques et les plus dépendantes des échanges directs d'information (Hall, 1999).Le développement des télécommunications dans les années 1980et 1990n'a pas modifié cette réalité. Gotlmann (1983) ou plus récemment Gat (1998) ajoutent très justement que les contacts directs sont facilités par les déplacements à pied et par les ascenseurs. La marche est souvent le mode d'accès horizontal le plus rapide dans les CBD, et surtout, le mouvement horizontal et vertical à l'intérieur des grands édifices rend le contact direct encore plus facile et multiplie donc les bénéfices de la proximité. « L'expansion des grandes tours dans les centres villes peut même être considérée comme une manifestation architecturale des besoins de communication et d'interaction des employés de bureau» (Marshall et Wood, 1995). Le besoin d'interaction interpersonnel comme un facteur décisif dans la localisation des bureaux a été souligné dès le début des années 1970par des chercheurs suédois. Thomgren (1970)a montré que malgré l'essor des technologies de télécommunication, l'essentiel du travail de bureau dépendait toujours de la proximité géographique. Tornqvist (1970) a exposé les avantages des contacts directs: (1) ils sont plus flexibles, puisqu'ils permettent une coordination et une adaptation continues; (2) ils peuvent mobiliser une gamme très vaste de moyens d'échange d'informations (du papier au geste) ; et (3) ils favorisent la diminution des malentendus et des incertitudes. Ces hypothèses de la recherche suédoise ont été suivies dans d'autres pays (Goddard, 1975; Daniels, 1975; Alexander, 1979; Gad, 1979). Les complexes de bureaux commencent alors à être décrits comme fondés sur un réseau dense de liaisons locales, où les contacts directs sont fréquents, surtout pour les échanges d'informations
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A. RaI/et et A. Torre
stratégiques. Cependant, le besoin en rapports interpersonnels va bien au-delà des échanges pendant le travail proprement dit et s'avère d'une importance cruciale pour entretenir les clients effectifs ou potentiels. Evoquant les aspects propres au marketing d'affaires, Cova et Salle (2003)affirment que, à la différence d'autres formes de business to business, les grandes affaires se caractérisent par la discontinuité des transactions économiques dans le temps. Pour contourner cette discontinuité économique, les entreprises doivent maintenir le contact avec leurs clients en permanence via les rapports sociaux interpersonnels. Ce besoin d'entretenir les rapports sociaux n'est pas exclusif à la sphère du big business, il devient une pratique du monde des affaires dans son intégralité, comme on peut facilement le constater dans l'abondante littérature de marketing relationship. Au déjeuner ou à l'apéritif en sortant du travail, les rapports sociaux entretenus par la fréquentation des mêmes restaurants, cafés, club de fitness, cinéma, etc., sont importants pour les cadres et les employés du bureau. Il ne s'agit pas seulement d'entretenir des rapports entre fournisseurs et clients, mais aussi de favoriser leur circulation dans le marché du travail local. L'attractivité du nouveau CBDà Salvador s'explique par tous ces facteurs. ID-
LA DIMENSION SYMBOLIQUE DE LA LOCALISATION
L'espace occupé par le vieux centre des affaires de Salvador a pour la dernière fois fait l'objet d'un aménagement intense lors de la
deuxième partie du XIXe siècle. Englouties dans une multitude d'immeubles sans autre caractéristique que la laideur, quelques façades sont encore admirables. Elles gardent la mémoire de cette époque où prédominait le style éclectique. Le site est encore riche de symboles du passé: un des plus remarquables est le bâtiment de
l 'Instituto do Cacau, de style «années 30 », témoin d'une période glorieuse, lorsque grâce à l'Etat de Bahia le Brésil était le plus grand exportateur mondial de cacao. Dans la partie haute du vieux centre ville, les hôtels particulier de la période coloniale, en ruines, étaient habités il y a encore 10 ans par les couches sociales les plus marginalisées. Au début des années 1990, cette partie de la ville a été réhabilitée, et la cité coloniale renaît
de ses cendres. Rénové tant du point de vue architectural que social, le vieux centre ville devient le nouveau Centre Historique. La stratégie gouvernementale a consisté à écarter les anciens habitants. Pour les maintenir à l'écart, rassurer les touristes et assurer les services qui leur sont voués, cet espace est l'objet d'une vigilance policière de tous les instants. Mais la partie basse de la ville est restée à l'écart de ce processus de renouveau.
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Dans le monde des affaires, notre société valorise l'actuel, le contemporain. En matières technologique, institutionnelle et organisationnelle, l'innovation est une valeur; les pratiques sociales et les objets sont soumis à des transformations permanentes. Ces mouvements instaurent leurs propres signes d'identification, ainsi que la temporalité de leur renouvellement (Castoriadis, 1975). Dans la dynamique relationnelle par laquelle les territoires gagnent du sens, le Central Business District à Salvador est devenu un espace qui, du point de vue symbolique, s'oppose au centre des affaires précédent comme le «nouveau », le «riche» et le « contemporain» s'opposent au «vieux », au «pauvre» et à 1'« obsolète ». De par la largeur de ses avenues aux voies multiples, l'architecture innovatrice et originale de ses immeubles, les caractéristiques des bâtiments de bureaux qui y ont été construits, mais aussi de par le profil des gens qui y circulent, cette localisation acquiert la connotation de « chic» et de « branchée », par opposition au vieux centre devenu synonyme d'« anachronique» et de « dépassé». Une des idées-forces dans la pensée sociale contemporaine est que tout ce qui existe, tout ce qui circule dans une société existe dans et par les significations qui lui sont attribuées (C. Castoriadis, 1975;
M. Sahlins 1980,entre autres). Cette valorisation - ou dévalorisationsymbolique contribue à la valorisation / dévalorisation concrète des différents espaces urbains et par conséquent à rendre certains territoires plus attractifs que d'autres. C'est une composante non négligeable dans les choix de localisation des entreprises. 1. Localisation
et prestige
Aux caractéristiques déjà évoquées, il faut en ajouter une autre, non négligeable pour comprendre les enjeux symboliques du Central Business District de Salvador: la réputation du lieu s'imprègne de l'image des entreprises qui s'y sont installées. Dès que le gouvernement eut lancé la construction des réseaux routiers du site à la fin des années 60, deux grandes multinationales brésiliennes ayant un important niveau d'activités à Salvador - la Petrobras S.A. et l' Odebrecht S.A- y implantèrent leurs sièges régionaux, ce qui a fortement contribué à accroître l'attractivité du lieu. En plus des facilités d'ordre pratique, parmi lesquelles la proximité des clients effectifs et potentiels, bien soulignée par la littérature spécialisée, la proximité de certaines entreprises est génératrice de valeur symbolique. La taille, l'image et la réputation de ces entreprises dans le monde des affaires confèrent «statut» et « prestige» au quartier dans lequel elles s'installent. Celui-ci devient ainsi un site prestigieux et dégage une image de « réussite ». Pour les
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entreprises plus petites, moins connues et moins réputées, s'y installer apporte des gains d'image. L'image prestigieuse d'un quartier contribue donc à son l'attractivité. La relation positive entre prestige et attractivité n'est pas nouvelle et figure parmi les constats des recherches empiriques récentes sur les choix de localisation des entreprises de services (entre autres: Nahm, 2000; Van Criekingen, Lennert et Bachman, 2003; Jakobsen et Onsager, 2003).Néanmoins, ce constat n'est guère l'objet d'analyse, à la différence des aspects constitutifs de la fonctionnalité de l'espace: le prestige est considéré comme un facteur mineur (Jakobsen et Onsager, 2003), ou traité comme allant de soi (Nahm, 2000), ou encore confondu avec des variables de nature fonctionnelle (Van Criekingen, Lennert et Bachman, 2003). Premier exemple: l'étude des facteurs de choix de localisation des bureaux entre différentes villes d'un pays. Jakobsen et Onsager (2003) ont ainsi interrogé les plus grandes entreprises installées en Norvège. Le « prestige» apparaît classé en huitième place, derrière des facteurs correspondant à trois autres conditions: la proximité géographique du marché du travail spécialisé, la proximité d'autres
acteurs - fournisseurs, clients, partenaires et administrations, avec les avantages informationnels qui en découlent - et la proximité d'autres unités de l'entreprise. Parmi les entreprises installées à Oslo, le « prestige» a une note de 2,8 sur une échelle de 1 à 6 ; les auteurs en concluent sans plus d'analyse que cela paraît être un avantage de localisation de petite importance (p. 25). Autre exemple: Nahm (2000)analyse les données d'une enquête sur les facteurs ayant influencé les choix de localisation des entreprises de services dans une même ville, à Séoul. Cette enquête distingue les entreprises selon les différentes régions dans lesquelles elles sont installées. Pour celles du CBD, le facteur prestige est classé en 4ème place. Pourtant, l'observation de Nahm à ce propos est confmée dans une note de bas de page. Il évoque la contribution « très suggestive» de Archer et Smith (1994) pour qui les explications traditionnelles de la tendance à la concentration des bureaux dans les
CBD - besoin de contacts directs, économies d'échelle et de variété, accessibilité - ne suffisent pas à rendre compte du phénomène, car la recherche du prestige et d'une image respectable serait un facteur essentiel. Selon Nahm, cet aspect est encore plus important dans le cas des sociétés non occidentales. Dernier exemple: l'étude réalisée par Van Criekingen, Lennert et Bachman (2003) s'interroge sur la relation entre localisation géographique et espace fonctionnel des entreprises de services à la production. A la suite d'enquêtes auprès d'entreprises dans sept villes européennes, ils ont constaté que 1'« image du lieu », le « prestige» est
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un facteur assez important dans leur choix d'installation47. D'après les entreprises interrogées, pour la plupart de dimensions modestes, le prestige est classé en moyenne en septième place derrière six conditions qui correspondent en fait à trois facteurs: l'accessibilitéroute, parking, transport public et accès - la proximité avec les clients et les prix (fonciers et immobiliers). Dans cette enquête l'évaluation du facteur «prestige» est assez
dispersée, de Barcelone où elle occupe la 1ère place - selon un échantillon d'entreprises où prédomin~nt celles ayant leur clientèle
dans l'agglomération - à Strasbourg (15eme place), où l'échantillon est constitué majoritairement d'entreprises dont la clientèle est européenne ou mondiale. En effet, les entreprises dont la clientèle est internationale sont moins susceptibles de rechercher du prestige dans le lieu d'installation; notons que, dans certains contextes, comme à Salvador de Bahia, c'est même la logique inverse qui semble à l' œuvre: ce sont ces entreprises qui confèrent du « statut» au site qu'elles choisissent. S'interrogeant sur l'interprétation des résultats, Van Criekingen, Lennert et Bachman examinent la méthode d'obtention des réponses: celles-ci pourraient être biaisées parce qu'elles correspondraient à un processus de rationalisation a posteriori et non aux raisons véritables des choix effectués. Peut-être, mais n'est-ce pas dans un processus de rationalisation que se formulent justement des raisons considérées comme légitimes d'avoir procédé d'une telle ou telle façon? Parmi ces motifs il est significatif que figure l'image prestigieuse du lieu. En tout état de cause, les auteurs semblent ne pas noter la différence de nature entre le «prestige» et d'autres critères, de proximité ou financiers, identifiés dans la création des différentes sortes de ce qu'ils appellent des « espaces fonctionnels ». Depuis les travaux de T. Veblen, des auteurs issus de différentes traditions théoriques ont analysé la relation entre consommation et prestige dans la société contemporaine (Baudrillard, 1972; Elias 1985; Bourdieu 1979et bien d'autres). Il ressort de ces différentes approches l'idée commune du rôle du prestige dans les « luttes» de classement des individus et des groupes sociaux. Dans leur démarche de construction d'identité, les entreprises n'échappent pas à cette dynamique, et elles ne peuvent ignorer en général cette dimension de prestige, qui exerce ses effets notamment sur leur choix de localisation. Comme nous allons le montrer maintenant, cette contrainte apparaît encore plus importante pour les entreprises de servIces.
47
Le questionnaire a proposé aux entreprises une échelle qui va de « pas du tout important»
27 critères auxquels à « très important».
attribuer
une note entre 1 et 5, selon
174 2. Localisation,
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services et signalisation
de valeur
Dans le cadre de sa réflexion sur les sources des avantages concurrentiels, Porter souligne le rôle fond~ental que la signalisation de la valeur peut jouer dans les affaires. A propos de son analyse de la différenciation du produit, il établit une relation entre réalisation de la valeur et perception du client. Pour l'auteur, quelle que soit la réalité de la valeur créée, « les clients ne paieront pas une valeur qu'ils ne perçoivent pas» (Porter, 1986: 176). Telle est la condition pour la création d'un surprix ; ainsi, l'avantage concurrentiel dû à la différenciation dépend de la perception du produit par le client. Pour l'auteur, la perception subjective du produit par le client peut-être aussi importante que la contribution réelle de la firme à la détermination du niveau de différenciation atteint. Une firme qui ne crée qu'une valeur modeste mais la signale efficacement, peut obtenir un prix plus élevé qu'une firme qui crée une valeur plus élevée, mais qui la signale mal. De cette façon, l'obtention d'un avantage concurrentiel devient redevable d'une signalisation adéquate et efficace. Encore plus nécessaires que pour les marchés des biens, dont la matérialité permet l'évaluation et la comparaison - plus ou moins approfondies - avant l'achat, les signaux de valeurs sont fondamentaux pour orienter les acheteurs dans le marché des services. Intangibles par défmition, les services ont la particularité d'être difficiles à apprécier avant d'être achetés; conséquemment, à l'abri des processus d'inspection et de vérification a priori. Pour cela, l'entreprise doit aménager dans son environnement ce qui est apparent, ce qui est tangible, car tout cela devient des signes à partir desquels, par métonymie ou par métaphore, les acheteurs jugent la qualité du service offert. En conséquence, depuis les installations jusqu'à la décoration et à la façon de s'habiller du personnel, tout ce qui est visible ou perceptible peut être objet d'un traitement stratégique (Levitt, 1991). Dans leur ouvrage Servuction, devenu une référence dans la littérature sur les services, Eiglier et Langeard (1987)soulignent ce rôle de vecteur de communication du support physique d'un système de service et affmnent le besoin de l'utiliser de façon tactique: les services requièrent une mise en scène faisant appel à un décor et à un placement des acteurs. «Comme au théâtre, la mise en scène n'est pas une fin en soi, elle doit être au service d'une idée» (p. 68). Dans cette perspective, le support physique fait partie du système de communication de l'entreprise. Cette idée, développée particulièrement pour l'architecture et la décoration, s'est diffusée rapidement dans la littérature de marketing de services (Lovelock, 2001)
Les nouvelles proximités urbaines
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Autant que les installations, la localisation peut être lue comme message. Cette idée trouve appui dans les théories de la communication de «l'école de Palo Alto». Etablissant une relation entre comportement et communication, cette approche retient comme l'un de ses axiomes cette formule «on ne peut pas ne pas communiquer» (Watzlawick et alii, 1972). Cet axiome peut être valable dans un champ beaucoup plus vaste que celui pour lequel il a été établi, car tout ce qui est perceptible communique. D'ailleurs, l'idée que toute chose peut être lue comme message n'est pas neuve:
Plotin (205 à 270 av. JC ), le principal philosophe grec du néoplatonisme, affirme que «tout est signe, le sage est celui qui lit en toute chose» (notre traduction). L'esthétique de la communication, à son tour, peut aussi contribuer à comprendre la dimension symbolique du territoire. Selon Greenberg (2003), tout ce qui est passible d'expérience, tout ce qui rentre dans le champ de l'attention peut être vécu esthétiquement. L'expérience esthétique est inséparable d'un jugement de valeur, d'un verdict de goût. Notre appréhension du monde se fait à partir des jugements de valeur esthétique, à savoir, sur la base d'une évaluation en termes de «j'aime» et «je n'aime pas», termes entre lesquels d'infmies gradations sont possibles. Comme argument en faveur de l'hypothèse de l'objectivité du goût, Greenberg affIrme que le « meilleur goût» à chaque période ne doit pas être associé à des individus isolés, mais qu'il « circule et se fait sentir par les voies impénétrables propres à une atmosphère.» (2003, p. 71).Les territoires urbains, comme toutes choses, sont vécus
sur le mode esthétique. Indépendamment des goûts individuels, l'esthétique contemporaine du nouveau CBD acquiert sa valeur par opposition à celle du vieux centre ville abandonné. Au fond, les choix d'implantation des entreprises s'insèrent dans l'ensemble des aspects soumis à ce que Berry (cité par Levitt, 1991) appelle la « gestion de l'évidence », dont l'objectif est de signaliser leur valeur. C'est pourquoi la dimension symbolique des territoires, les messages qu'ils véhiculent en permanence, sont fondamentaux pour comprendre leur attractivité: c'est là aussi que se joue la dynamique de localisation des centres des affaires. CONCLUSION
La ville de Salvador a connu un processus de croissance rapide à partir des années 1950, suite à la découverte de pétrole dans ses alentours et à l'implantation d'un pôle pétrochimique au nord de son aire métropolitaine dans les années 70. Cette croissance industrielle a été suivie d'une diversification et d'une complexification des services aux entreprises, mais aussi des services à la personne, car ces
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transformations ont entraîné l'émergence de nouvelles classes moyennes. Ce processus a mis en évidence l'épuisement des possibilités d'expansion du vieux centre d'affaires, situé depuis des siècles dans le secteur du port. Jusqu'au début des années 1970, ce dernier abritait encore le commerce de gros, les sièges sociaux et les institutions fmancières. Mais la configuration du quartier posait de nombreux problèmes, dont l'épineuse question des embouteillages quotidiens, donc de la difficulté d'accès. A la 'fin des années 60, l'Etat a mis en œuvre un plan de réorientation de l'espace urbain avec l'ouverture de nouvelles avenues permettant l'expansion vers des aires encore inutilisées. .. mais préalablement achetées par des entreprises immobilières locales. Ces avenues définissent un nouvel axe Nord-Sud qui relie la ville à l'aéroport, sur lequel se sont stratégiquement implantées des institutions et des entreprises: le centre administratif du Gouvernement, la gare routière, un grand centre commercial, les sièges des deux plus grandes entreprises brésiliennes et quelques immeubles de bureaux. La voie était ouverte et le chemin de la nouvelle expansion urbaine indiqué. Ce nouveau quartier a concentré les services spécialisés et est devenu rapidement le cœur économique de la ville. A l'extrémité sud de cet axe, le nouveau Central Business District de Salvador s'est installé progressivement à partir des années 70. L'installation du CBDà cet endroit est due autant aux problèmes du vieux centre d'affaires qu'à l'attractivité du nouvel espace institué. Attractivité qui s'explique certes en partie par sa fonctionnalité, déjà évoquée dans la littérature qui analyse la localisation des CBDdans les pays développés. Cette fonctionnalité se manifeste en l'occurrence à différents niveaux: au cœur du nouveau centre économique de la ville, il réunit tout d'abord les conditions qui permettent les économies d'agglomération et une intensité d'échanges interpersonnels par la fréquentation commune d'un espace riche en services de tous ordres: restaurations, loisirs, services à la personne etc. Ensuite, par sa position géographique, il permet un accès facile autant à la ville qu'aux districts industriels du nord de la Région Métropolitaine de Salvador, aussi bien à la gare routière et aux réseaux routiers qu'à l'aéroport. L'architecture des bâtiments de bureaux répond aux besoins infrastructurels de la télématique et s'avère plus adaptée aux nouvelles formes d'organisation du travail favorisant les interactions humaines. Néanmoins, l'analyse de l'attractivité du nouveau CBD ne peut se limiter à cerner les causes fondées sur la fonctionnalité de l'espace. Nous devons aussi prendre en compte des facteurs d'ordre symbolique
ou d'image. L'image du quartier - «contemporain », «riche », « branché », «chic» - se défmit par opposition à l'allure d'autres
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quartiers de la ville. La proximité des grandes entreprises, les « meilleures », apporte aussi au quartier une image de «réussite ». Cet aspect est particulièrement important pour les entreprises plus petites ou moins réputées. Immatérielle par définition, la production des services est contemporaine de leur utilisation. Beaucoup plus encore que sur le marché des biens, dont la matérialité permet une évaluation préalable à l'achat, les entreprises opérant sur les marchés de services doivent orienter les acheteurs par la mise en valeur de la qualité des services offerts. La localisation des bureaux dans certains quartiers fait partie de ces stratégies de signalisation et d'image.
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CHAPITRE VIII
LES PROJETS DE REGENERATION URBAINE OU COMMENT RECREER LA PROXIMITE
AUDE CHASSERlA U
INTRODUCTION
Depuis quelques années, le développement des villes s'effectue selon deux directions quelque peu opposées. D'une part, la ville s'étend vers ses périphéries, englobe de plus en plus de communes, «péri-urbanise» la campagne proche. On assiste d'autre part à une densification de la ville sur elle-même, à une polarisation des activités sur certains lieux de la cité, plus particulièrement le centre-ville et quelques centralités secondaires vers lesquels s'observe un retour évident des populations et des activités. Concentration et polarisation liées à la métropolisation s'opposent à l'expansion périphérique toujours plus grande de la ville. C'est dans ce contexte que s'inscrit la régénération urbaine comme un des moyens de maîtriser l'expansion urbaine et de densifier la ville sur elle-même. Ce processus consiste en effet à reconquérir les friches urbaines laissées à l'abandon dans ou à proximité des centres-villes par l'extinction ou la délocalisation de certaines activités de même qu'à revitaliser les quartiers en déclin économique ou social. La régénération urbaine participe pleinement des recompositions urbaines contemporaines liées au phénomène de métropolisation. A travers l'exemple de la régénération urbaine à Nantes et à Saint-Nazaire, il est possible d'observer comment la proximité joue un rôle important dans l'aménagement urbain et plus particulièrement les recompositions urbaines actuelles. La notion de proximité est devenue très importante dans beaucoup de disciplines universitaires, en géographie comme ailleurs. En aménagement urbain, la proximité est aujourd'hui l'un des fers de lance de l'urbanisme volontaire, revenant sans cesse dans le discours des aménageurs, des spécialistes et surtout des élus (services de proximité, police de proximité...). On aurait presque envie de dire « la proximité fait vendre» ! Pourtant, le revers de la médaille existe. S'il est assez frappant de constater que, la plupart du temps, « la proximité est présentée comme un facteur positif» (Allain, 2000), la proximité «peut en même temps être redoutée, car créatrice de coûts supplémentaires d'encombrement ou de désagréments sociaux quand elle se fait promiscuité» (Hurlot, 1998). Un projet d'aménagement urbain n'est pas obligatoirement
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efficace sous prétexte qu'il se base sur des principes de proximité. L'exemple de la régénération urbaine est intéressant à ce niveau puisqu'il décline aussi bien les aspects négatifs que les aspects positifs de la relation proximité/recompositions urbaines. 1-
LA REGENERATION URBAINE
Depuis la fin de la seconde Guerre Mondiale, les villes n'ont cessé de croître, démographiquement, spatialement et économiquement. Mais le passage d'une économie et d'un système productif de type «fordiste» à une économie «post-fordiste» a entraîné de très nombreuses mutations dans les villes européennes (Martens et Vervaeke, 1997). On a assisté d'une part à une désindustrialisation et une tertiairisation poussée des métropoles et villes moyennes, et d'autre part à une mondialisation et une globalisation de l'économie, et donc à des redistributions importantes de main d'œuvre, ce qui a eu de nombreuses conséquences sociales. Ces diverses transformations de l'économie et de la société se sont traduites dans le tissu urbain par une réorganisation des territoires urbains. Le centre-ville, notamment, s'est trouvé de plus en plus concurrencé par la périphérie, petit à petit abandonné par les catégories aisées de la population et les activités principales, et marqué par un environnement physique en détérioration progressive. Le centre comme le péricentre ont été affectés par les fermetures et délocalisations de nombreuses industries, celles-ci laissant derrière elles des quartiers, des villes voire des régions entières sinistrées (Anderson, 1998) et regorgeant de friches. A cela s'ajoutent les problèmes que connaissent les grands ensembles construits en périphérie: concentration de populations défavorisées, chômage, ghettoïsation, dégradation physique. Dans ce contexte de crise de la ville prend forme le concept de régénération urbaine. Le concept en lui-même a d'abord fait école dans le monde anglo-saxon, sous l'expression d'urban regeneration. La Grande-Bretagne, qui a été le premier pays européen à connaître la révolution industrielle puis la désindustrialisation, a dû faire face plus précocement aux problèmes de dégradation des centres-villes et à la nécessaire reconversion de nombreuses friches urbaines, et ce dès les années 1970. C'est pour répondre à ces problèmes que le concept de régénération urbaine est apparu. Il désigne une politique globale, qui vise à remettre en état, à rendre à nouveau forte et saine partie ou totalité d'une ville qui ne l'était plus. Mais outre le fait de résoudre une crise urbaine, la régénération doit aussi et surtout permettre à la ville un développement futur harmonieux et durable. Le concept ne fera son apparition en France que plus tardivement, à partir des années 1980,sous le terme de renouvellement
Les nouvelles proximités urbaines
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urbain, mais, à l'exception de quelques différences issues du contexte national et de l'histoire urbaine de chaque pays, les principes en sont les mêmes. La régénération d'un secteur en déclin passe tout d'abord par une politique publique d'amélioration du cadre de vie: infrastructures, espaces publics, environnement, et est souvent marquée par la réalisation d'un projet phare, pouvant par exemple correspondre à la réhabilitation d'un bâtiment du site. A ces actions s'ajoutent des politiques publiques d'aide sociale aux populations et de développement économique visant à attirer de nouveaux investisseurs et activités sur le secteur. La régénération s'effectue ensuite par les initiatives de ces investisseurs privés (programmes immobiliers, nouvelles entreprises.. .). Ainsi le processus se base sur un partenariat public/privé: les collectivités locales entreprennent un certain nombre d'actions physiques, sociales et économiques afin d'attirer les investisseurs privés qui se chargeront du financement du reste du projet de régénération. Ce principe de partenariat doit toutefois s'adapter au contexte politique et économique du pays et il semble mieux fonctionner en Grande-Bretagne qu'en France où la mainmise de l'Etat et des collectivités locales sur l'urbanisme est encore très forte. Partenariats, mise en relation des acteurs, proximité entre centreville et secteurs en déclin... traiter de la régénération urbaine oblige à faire souvent appel à la notion de proximité pour aborder les principes mêmes des politiques à l'origine d'une partie des recompositions urbaines actuelles. Ces recompositions ont d'ailleurs souvent pour but de recréer une proximité disparue ou tout simplement oubliée, trop souvent remplacée par une désagréable promiscuité. 11-
LA FRICHE URBAINE: QUESTIONS DE PROMISCUITE, D'ACCESSmILITE ET DE PROXIMITE
Le processus d'apparition d'une friche urbaine s'effectue dans la durée suite à la disparition progressive des activités principales du site. Cette disparition peut être due à des mutations ou innovations technologiques, des délocalisations, des pratiques d'urbanisme, des comportements collectifs, etc. (Chaline, 1999). Pour ces diverses raisons, certaines activités, notamment celles qui ont besoin d'espace ou qui sont polluantes, abandonnent leur localisation à proximité du centre-ville. C'est le cas par exemple à Nantes des chantiers navals sur l'extrémité de l'lIe de Nantes, ou bien de la biscuiterie LU. Le fait que ces friches ne soient pas immédiatement réutilisées entraîne une dégradation progressive du tissu urbain qui les entoure. Il s'agit dès lors de l'un des premiers effets pervers de la proximité en ville, ou peut-être devrait-on parler dans ce cas de promiscuité même s'il n'est pas question ici d'individus. Le quartier des chantiers navals à Nantes,
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A. RaZ/et et A. Torre
par exemple, était, il y a plusieurs décennies, animé par l'activité des chantiers et des industries et entrepôts qui les entouraient (soustraitants, gare de l'Etat, entreprises de service...). La vie ouvrière du quartier s'organisait autour à travers l'habitat, les cafés, commerces et services. Une véritable identité et vie de quartier animait l'ensemble. Après la seconde guerre mondiale, l'activité des chantiers a commencé à diminuer entraînant alors des réductions d'effectifs, plans sociaux, licenciements, mais aussi une baisse d'activité dans les entreprises qui leur étaient liées. L'arrêt total de l'activité des chantiers en 1987mais aussi un peu plus tôt de la gare de l'Etat a fmalement eu raison de cette vie du quartier: commerces et services ont peu à peu fermé, les logements se sont vidés, l'environnement s'est dégradé. C'est ce que deux auteurs anglo-saxons (Medhurst et Parry Lewis, 1969)ont appelé la «spirale de la dégradation»: la présence de la friche réduit l'attractivité du quartier, les entreprises ferment ou se délocalisent, la population la plus aisée s'en va, les commerces ferment, l'environnement physique se dégrade ce qui contribue un peu plus au défaut d'attractivité du secteur. La proximité de la friche étend une image négative sur l'ensemble du quartier et la spirale de dévalorisation est souvent difficile à emayer sans intervention extérieure. Dans le quartier de l'lIe Sainte-Anne, où se situaient les chantiers navals de Nantes, se localise principalement, dans un habitat dégradé, une population hétérogène de retraités et d'étudiants pour qui ce quartier ne constitue qu'une étape brève du parcours résidentiel. La vie de quartier y est en effet insignifiante, l'identité inexistante, la population indifférente. Ce sont là les effets pervers de la proximité d'une friche industrielle, dans un quartier dont la vie était, à l'origine, basée sur un principe plus positif de proximité: proximité des entreprises (d'où économies d'échelle), proximité des logements et des commerces, proximité des habitants entre eux (catégories sociales identiques). Le quartier était construit sur une proximité géographique et économique mais aussi sur une proximité sociale, telle qu'elle est défmie par Allain (2000): «la similitude des conditions socioéconomiques des ménages et l'affmité culturelle des personnes ». La question de la proximité géographique conduit à poser aussi celle de l'accessibilité ou de la proximité organisationnelle. L'exemple nantais montre des friches industrielles contiguës au centre-ville. A l'époque de la prospérité des chantiers navals, leur site était facilement accessible depuis le centre-ville (ponts, transports en commun, voirie adaptée). Aujourd'hui, ce même site se retrouve enclavé et peu accessible: disparition des transports en commun menant au site, démolition du pont transbordeur en 1958remplacé dix ans plus tard par un pont routier à quatre voies facilitant non plus l'arrêt mais la traversée du secteur pour rejoindre le centre-ville depuis le sud de l'agglomération. L'une des premières opérations menées par la
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municipalité au début de la régénération du quartier, suite à la construction du nouveau Palais de justice sur les anciennes friches, a été de créer une ligne de bus allant jusqu'au cœur du site puis une passerelle piétonne reliant le quartier au centre-ville. Le quartier portuaire de Saint-Nazaire est un autre exemple flagrant de cette contradiction entre proximité géographique et inaccessibilité (cf figure 1). La ville s'est en effet développée à partir de et en lien avec son port et les chantiers navals qui le jouxtent (schéma A) : les artères principales reliaient ainsi le centre-ville et le secteur portuaire. Après la seconde guerre mondiale, la cicatrice laissée par la base sous-marine allemande sur les quais a coupé symboliquement et psychologiquement la ville de son port. La reconstruction s'est alors effectuée selon un axe parallèle au port (la nouvelle rue principale) mais sans communication directe avec lui (l'espace entre le port et les secteurs résidentiels étant réservé, selon les principes de zonage en vigueur à la reconstruction, aux futures extensions des activités portuaires, extensions qui n'ont pas eu lieu en raison de la crise des années 1970). Le centre-ville s'est ainsi développé en excluant totalement le port de son champ de vision (fig. 2 et 3). La régénération du secteur portuaire à la fin des années 1990 débute alors par le réaménagement de rues et d'axes de communication entre la ville et son port (fig. 4) pour y faciliter l'accès et renouer avec une identité oubliée. Proximité géographique ne signifie pas toujours proximité organisationnelle surtout lorsqu'on aborde le problème de l'accessibilité des sites sans laquelle aucune forme de proximité n'est possible. Et si, pour de nombreux élus, la présence de iliches contiguës au centre-ville peut s'avérer gênante en termes d'image, elle peut rapidement se transformer en un atout incontournable (vaste espace libre à transformer près du centre) lorsqu'un projet de régénération urbaine parvient à recréer une proximité en lieu et place de cette promiscuité. ill-
REGENERER OU RECREER LA PROXIMITE
La régénération urbaine consiste généralement en un nombre plus ou moins important de projets urbains visant chacun certains éléments spécifiques des quartiers en déshérence: bâtiments, voirie, espaces publics, équipements, structures sociales. La philosophie qui sous-tend ces différents projets est de recréer un véritable espace de vie qui s'inscrit pleinement dans le tissu urbain. Les habitants du quartier concerné comme la population du reste de la ville doivent pouvoir se réapproprier l'espace et y trouver un sens au travers d'activités allant de l'emploi à la simple promenade. Il s'agit bien ici de recréer la proximité sous toutes ses formes et non pas simplement
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de juxtaposer un nouveau quartier dans la ville, relié aux autres par différents accès. Une friche urbaine par exemple est souvent dépourvue de toute proximité sociale et organisationnelle. L'objectif sera alors d'y recréer une identité basée sur du lien social entre les habitants, sur des liens économiques entre de nouvelles activités installées sur le site, et surtout sur des liens avec le reste de la ville. L'une des premières étapes consiste souvent à recréer une proximité à la fois physique et fonctionnelle par un désenclavement et la réalisation d'infrastructures de transport et de communication adaptées. Cette étape initiale est généralement prise en charge par les collectivités locales et permet, à long terme, l'investissement d'autres acteurs. Outre la simple fonction d'accessibilité, la régénération urbaine recrée dès lors une proximité spatiale et organisationnelle observable au travers de certains symboles du désenclavement et de l'invitation faite à la population de se réapproprier le lieu. Il s'agit, dans la plupart des cas, de matérialiser ce lien physique retrouvé par la construction d'une infrastructure particulière, généralement un pont ou une passerelle, symbole du rattachement du site au reste de la ville. A Nantes, l'exemple de la passerelle piétonne précédemment citée qui relie le centre-ville à l'ancien quartier des chantiers navals montre d'ailleurs, par sa fréquentation toujours grandissante, un début de succès dans cette réappropriation qui n'aurait peut-être pas eu lieu avec les seuls ponts routiers donnant accès à ce quartier de l'lIe de Nantes. A Saint-Nazaire, l'architecte du projet Ville-Port a quant à lui construit une passerelle montant de la rue et des places publiques vers le toit de la base sous-marine qui sert aujourd'hui de point de vue sur l'ensemble de la ville, depuis le port jusque vers le centre. Au-delà de cette proximité physique différente d'une simple question d'accessibilité, la régénération cherche aussi à recréer une proximité économique. Très souvent, les secteurs en friche sont caractérisés par une absence presque totale d'activité économique. L'objectif de la régénération est alors de relancer un ou plusieurs types d'activité en attirant de nouvelles entreprises, de nouveaux services et commerces, sans pour autant laisser libre cours à tous les investisseurs. Une véritable proximité est recherchée entre tous ces acteurs afm que la régénération soit effective et réussie. Il ne s'agit pas d'une simple similitude dans les entreprises ou les activités choisies ni d'une simple contiguïté mais bien d'une proximité dans le sens où les investisseurs doivent non seulement pouvoir travailler de concert avec les collectivités locales pour mener à son terme le projet de régénération en cours, mais aussi être capable de créer des réseaux et des pôles d'excellence (projets particulièrement prisés par les élus locaux en terme de marketing urbain) dans certains domaines, en lien avec d'autres entreprises ou grandes écoles déjà présentes dans l'agglomération. Ainsi, à Nantes, un pôle d'excellence sur les biotechnologies devrait être créé, dans le cadre du projet lIe de Nantes,
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sur l'un des sites des anciens chantiers navals, en lien avec le Centre Hospitalier Universitaire et la faculté de médecine situés à quelques centaines de mètres du site, sur l'autre rive de la Loire. A travers ces différents types de partenariats entre acteurs privés mais aussi avec les acteurs publics, la régénération tend à recréer certaines fonnes de proximité disparues dans les secteurs en friche. Les projets de renouvellement urbain abordent aussi une nouvelle forme de proximité entre acteurs locaux et population grâce à la question de la participation des habitants et de la démocratie participative. L'implication de la population résidente dans le processus de régénération urbaine est de plus en plus fréquente et ces nouvelles formes de gouvemance favorisent le développement de la proximité sociale au travers de ces nouveaux types de partenariats. Enfm, un des éléments majeurs de la régénération reste l'espace public. C'est en effet sur l'espace public que se base et s'opère la régénération du point de vue des politiques publiques. Les collectivités locales prennent ainsi en charge la requalification de ces espaces afm de faciliter ensuite l'attraction des nouveaux investisseurs. De plus, l'espace public est un vecteur de proximité sociale et d'appropriation des lieux et joue, par conséquent, un grand rôle en aménagement urbain. Il permet en effet de décloisonner les quartiers, de rétablir des liens entre les gens en facilitant leur déambulation ou en leur proposant diverses manifestations, à l'image de la fonction que l'espace public occupait dans les villes de l'Antiquité avec l'agora grecque ou le forum romain. Les villes ont eu tendance, au cours du dernier siècle et surtout récemment avec la question de l'insécurité, à privatiser de plus en plus leur espace et à réduire l'étendue des espaces publics. Résidences fermées et sécurisés, squares et parcs privatifs, impasses privées fermées par des barrières se multiplient dans la plupart des grandes agglomérations. Il paraît donc important de recréer et d'aménager de nouveaux espaces publics dans les secteurs en recomposition où les collectivités locales peuvent encore racheter des terrains vacants. Dans les quartiers en régénération, l'espace public permet, de façon idéale, une mixité à la fois fonctionnelle et sociale en laissant à chacun la possibilité de s'approprier le territoire. Les architectes travaillant pour la Communauté Urbaine sur le projet lIe de Nantes ont ainsi en charge de réhabiliter l'ensemble des espaces publics du quartier des anciens chantiers navals. Leurs plans (Chemetoff et Berthomieu, 1999) proposent d'ailleurs de recréer un cheminement piéton (en cours de réalisation) sur les berges de la Loire et le long des anciens chantiers afm de favoriser la réappropriation du site et du fleuve par la population nantaise. Ainsi, le secteur est devenu un lieu de promenade privilégié des Nantais et un site apprécié pour les expositions et manifestations culturelles. Au sein du même projet, l'ancienne gare de l'Etat réhabilitée a été transformée par la municipalité en Maison des syndicats, la place centrale ainsi que
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l'ancien hall de la gare (devant accueillir les futures stations des transports en commun de l'île) restant dévolus à l'usage public. Enfin à Saint-Nazaire, l'espace libre entre la rue principale du centre-ville et la base sous-marine a été conçu comme une grande place publique, accueillant animations temporaires et jeux pour enfants, permettant un accès attractif au complexe touristique et culturel développé directement dans la base sous-marine. La régénération urbaine consiste donc à recréer la proximité sous diverses formes, à reconstruire la proximité dans les secteurs où elle a disparu, car c'est en grande partie sur des principes de proximité que se base la « ville du futur ». IV-
LES ENJEUX DE LA VILLE DURABLE
La régénération urbaine, en basant son processus sur des principes de proximité, participe pleinement d'une volonté de développement urbain durable. Le développement durable est aujourd'hui l'un des thèmes privilégié des politiques urbaines, environnementales et économiques de nos sociétés. Si l'on se réfère à la défmition donnée par les Nations Unies (CMED, 1988), le développement durable doit répondre «aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins ». Cette définition montre bien la double exigence du développement durable, à la fois sociale et écologique. Le développement durable appliqué à la ville est un modèle émergent qui met en place un «mode d'organisation fondé sur un principe de proximité» (Emelianoff, 1999).Trois traits spécifiques caractérisent la ville durable: elle se refait continuellement sur le temps long; on y observe une compacité ainsi qu'une mixité sociale et fonctionnelle; elle cherche à retrouver un débat démocratique local. Les enjeux portés par la ville durable sont fondés sur des logiques de proximité et de connexité. On les retrouve dans de nombreuses actions ou principes d'aménagement urbain, et notamment dans la régénération urbaine. Il s'agit d'abord de l'environnement qu'il est nécessaire de préserver, de rendre sain, ainsi que de s'en rapprocher. Cette volonté de rapprochement avec la nature est notamment parfaitement visible dans les projets d'aménagement et de régénération où une place importante est faite aux espaces verts, aux nouvelles plantations d'arbres, aux squares et aux jardins. On note aussi l'importance grandissante que prend la préservation du patrimoine, notamment le patrimoine industriel. La ville se refait continuellement certes, non plus en rasant et en reconstruisant selon
les principes de la rénovation urbaine en cours dans les années 1970 en France, mais en réhabilitant et en réutilisant pour de nouvelles fonctions d'anciens bâtiments à l'abandon. C'est aussi l'un des
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principes de la régénération urbaine dans le sens où les projets visent à renouer avec l'histoire locale et patrimoniale. A Nantes comme à Saint-Nazaire, les bâtiments des secteurs en friche (direction des chantiers navals, gare de l'Etat, nefs de construction, base sousmarine) ont été intégrés dans les projets de régénération et réhabilités pour servir les nouvelles fonctionnalités tertiaires des lieux. En ce qui concerne les territoires de la ville, la durabilité s'exprime par la volonté de relier les territoires les uns aux autres, de retrouver une certaine compacité et ne plus s'étendre démesurément vers la périphérie, et retrouver aussi à l'intérieur des territoires une mixité à la fois sociale (afin d'éviter les ghettos aussi bien riches que pauvres) et fonctionnelle (mettre un terme aux cités dortoirs ou aux quartiers d'affaires vides de toute population la nuit par exemple). L'obectjf est de pouvoir recréer, comme dans le cas de la régénération urbaine, une vie de quartier dans les secteurs où il n'yen a plus, le thème du quartier étant d'ailleurs devenu l'un des fers de lance de la politique locale avec les animations de quartier, les comités consultatifs de quartiers ou les procédures DSQ(Développement Social du Quartier). L'articulation des différents territoires de la ville passe par l'abolition des coupures, qu'elles soient physiques ou sociales. Un exemple parlant dans ce domaine est celui de «l'urbanisme de coutures» utilisé à Strasbourg pour régénérer la ville. La construction du réseau de tramway avait en effet pour objectif de « recoudre» les territoires et les quartiers les uns aux autres (Emelianoff, 1999).Enfin, l'un des enjeux de la ville durable est de remettre le pouvoir démocratique entre les mains des citoyens, dans le sens où il apparaît de plus en plus nécessaire de recréer un dialogue et une proximité entre les élus et les habitants de la ville, retrouver un système de valeurs communes, une proximité culturelle. Le développement urbain durable impose une prise en compte constante de la proximité, et la régénération urbaine, qui entre dans la mouvance de la durabilité, tente d'intégrer la proximité dans ses propres enjeux, et pas seulement d'en être affectée de façon passive. CONCLUSION
Le développement urbain durable impose aujourd'hui une prise en compte constante et une préservation ou une recréation de la proximité. La régénération urbaine, devenue un des outils du développement durable dans les villes, tente d'intégrer la proximité dans ses propres enjeux, notamment au travers de la volonté de mettre en place des partenariats et des synergies entre les acteurs et au travers des efforts faits pour favoriser la réappropriation des anciens secteurs de friches. Les recompositions urbaines liées aux projets de renouvellement urbain posent constamment la question de la
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proximité, que celle-ci devienne promiscuité ou simple question d'accessibilité. La réussite, ou l'échec, des différents projets tient d'ailleurs bien souvent dans le fait que la proximité sous toutes ses formes a été, ou non, effectivement rétablie.
REFERENCES Allain R. (2000), « La proximité et la pensée sur la ville », in ESO - Travaux et Documents de l'Unité Mixte de Recherche 6590, 14, 7-12. Anderson A. (1998), Politiques de la ville: de la zone au territoire, Paris, Syros, 285p. Chaline C. (1999), La régénération urbaine, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, n03496, 127 p. Chemetoff A. et Berthomieu I.L. (1999), L 'lie de Nantes, le plan guide en projet, Editions MeMo, Nantes, 95 p. Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement (1988), Notre avenir à tous, Rapport Brundtland, Montréal, Eds. du Fleuve, 454 p. Desse R-P. (1993), « Saint-Nazaire ou le centre retrouvé: un exemple d'urbanisme commercial novateur », Norois, 40, 158, 235-252. Emelianoff C. (1999), La ville durable, un modèle émergent. Géoscopie du réseau européen des villes durables (Porto, Strasbourg, Gdansk), Université d'Orléans, Thèse de doctorat en Géographie, 745 p. HOOot J-M. (dir.) (1998), La ville ou la proximité organisée, Paris, Economica, 237 p. Martens A. et Vervaeke M. (eds.) (1997), La polarisation sociale des villes européennes, Paris, Anthropos, 304 p. Medhurst F. et Parry Lewis I. (1969), Urban decay: an analysis and a policy, Basingstoke, Macmillan, 174p.
LISTE DES AUTEURS Catherine Baumont Université de Bourgogne Laboratoire d'Economie et de Gestion (UMR 5118 CNRS) Pôle d'Economie et de Gestion, BP 26 611 21066 Dijon cedex - France catherine. baumont@u-bourgogne. fi Cécile Batisse CERDI 65, boulevard François Mitterrand 63000 Clermont-Ferrand
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