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Laurent Papazian Antoine Roch
Le syndrome de d6tresse respiratoire aigu~
Springer
Laurent Papazian Service de rdanimation mddicale H6pital Sainte-Marguerite 13009 Marseille
Antoine Roch Service de rdanimation mddicale H6pital Sainte-Marguerite 13009 Marseille
ISBN-13 : 978-2-287-77985-5 Springer Paris Berlin Heidelberg New York 9 Springer-Verlag France, 2008 Imprimd en France Springer-Verlag France est membre du groupe Springer Science + Business Media
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Maquette de couverture : Nadia Ouddane
Collection Le point sur... Dirig& par Jean-Louis Vincent et Claude Martin
Dans la m~me collection : Jacques Alban&se - Le polytraumatisd, 2 0 0 3
Patrick Ravussin - Le patient neurochirurgical, 2 0 0 4
Claude Martin et Jean-Louis Vincent - Sepsis s&kre et choc septique, 2 0 0 5
Alexandre Mebazaa et Didier Payen - L'insuffisance cardiaque aigug, 2 0 0 6
Nicolas Bruder, Patrick Ravussin et Bruno Bissonnette - L a rdanimation neurochirurgicale, 2 0 0 7
Laurent Jacob - L'insuffisance rdnale aigug, 2 0 0 7
Yannick Mallddant et Philippe Seguin - Les infections intra-abdominales aigu& 2 0 0 7
Jean-Louis Teboul et Daniel De Backer - Les techniques de monitorage hdmodynamique en rdanimation, 2 0 0 7
Liste des auteurs ALLARDET-SERVENT J~r6me Service de r~animation m~dicale H6pital Sainte-Marguerite 270, boulevard Sainte-Marguerite 13274 Marseille Cedex 9 BAYLE Fr~d~rique Service de r~animation m~dicale et d'assistance respiratoire H6pital de la Croix Rousse 103, Grande rue de la Croix Rousse 69004 Lyon
CORNE Philippe Service de r6animation m~dicale et assistance respiratoire CHU Gui de Chauliac 80, avenue Augustin Fliche 34000 Montpellier Cedex 5 DEMORY Didier Service de r6animation polyvalente H6pital Font Pr6 1205, avenue Colonel Picot 83000 Toulon
BAZIN Jean-l~tienne Pble d'anesth~sie-r~animation HD Service de r~animation adulte et unit~ de transplantation h~patique CHU H6tel-Dieu 58, rue Montalembert 63003 Clermont-Ferrand Cedex 1
DONATI St6phane Yannis Service de r6animation m6dicale H6pital Sainte-Marguerite 270, boulevard de Sainte-Marguerite 13274 Marseille Cedex 9
CAPELLIER Gilles Service de r~animation m~dicale CHU Jean Minjoz Boulevard Fleming 25030 Besanqon
FASSIER Thomas Service de r6animation m6dicale et d'assistance respiratoire H6pital de la Croix Rousse 103, Grande rue de la Croix Rousse 69004 Lyon
CAYOT-CONSTANTIN Sophie P61e d'anesth~sie-r~animation HD Service de r~animation adulte et unit~ de transplantation h~patique CHU H6tel-Dieu 58, rue Montalembert 63003 Clermont-Ferrand Cedex 1
FLANDREAU Ghislain Service de r6animation m6dicale et d'assistance respiratoire H6pital de la Croix Rousse 103, Grande rue de la Croix Rousse 69004 Lyon
CHANQUES G6rald D6partement d'anesth6sie-r6animation B UF de r6animation et transplantation h6patique CHU Saint-l!loi 80, avenue Augustin Fliche 34295 MontpeUier Cedex 5
FOREL Jean-Marie Service de r6animation m6dicale H6pital Sainte-Marguerite 270, boulevard de Sainte-Marguerite 13274 Marseille Cedex 9
CONSTANTIN Jean-Michel P61e d'anesth6sie-r6animation HD Service de r6animation adulte et unit6 de transplantation h6patique CHU H6tel-Dieu 58, rue Montalembert 63003 Clermont-Ferrand Cedex 1
FUTIER Emmanuel P61e d'anesthgsie-rganimation HD Service de rganimation adulte et unitg de transplantation hgpatique CHU H6tel-Dieu 58, rue Montalembert 63003 ~Clermont-Ferrand Cedex 1
GAINNIER Marc Service de r6animation m6dicale H6pital Sainte-Marguerite 270, boulevard de Sainte-Marguerite 13274 Marseille Cedex 9 GRUSON-VESCOVALI Didier D6partement de r6animation m6dicale CHU Pellegrin Tripode 1, place Am61ie Raba-L6on 33076 Bordeaux GUI~RIN Claude Service de r6animation m6dicale H6pital de la Croix Rousse 103, Grande rue de la Croix Rousse 69004 Lyon et Universit6 Claude Bernard Lyon 1 et Creatis Inserm 630 CNRS 5515 Lyon JABER Samir D6partement d'anesth6sie-r6animation B UF de r6animation et transplantation h6patique CHU Saint-l~loi 80, avenue Augustin Fliche 34295 Montpellier Cedex 5 JOLLIET Philippe Service des soins intensifs H6pitaux universitaires de Gen~ve 24, rue Micheli-du-Crest CH- 1211 Gen~ve 14 Suisse JUNG Boris Service d'anesth6sie-r6animation B UF de r6animation et transplantation h6patique CHU Saint-l~loi 80, avenue Augustin Fliche 34295 Montpellier Cedex 5 LEMASSON St6phane Service de r6animation m6dicale et d'assistance respiratoire H6pital de la Croix Rousse 103, Grande rue de la Croix Rousse 69004 Lyon MANZON Cyril Service de r6animation m6dicale CHU Jean Minjoz Boulevard Fleming 25030 Besam;on
MERCAT Main D6partement de r6animation m6dicale et m6decine hyperbare CHU d'Angers 4, rue Larrey 49933 Angers Cedex 9 NAVELLOU Jean-Christophe Service de r6animation m6dicale CHU Jean Minjoz Boulevard Fleming 25030 Besanqon PAPAZIAN Laurent Service de r6animation m6dicale H6pital Sainte-Marguerite 270, boulevard Sainte-Marguerite 13009 MarseiUe PATRY CyriUe Service de r6animation m6dicale CHU Jean Minjoz Boulevard Fleming 25030 Besanqon PEREZ Didier Service de r6animation m6dicale CHU Jean Minjoz Boulevard Fleming 25030 Besanqon PUGIN J6r6me Service des soins intensifs H6pitaux universitaires de Gen~ve 24, rue Micheli-du-Crest CH-1211 Gen~ve 14 Suisse RICARD Jean-Damien Inserm Unit6 722, UFR de m6decine Paris 7-Denis Diderot, site de Bichat, 75018 Paris et APHP H6pital Louis Mourier service de r6animation m6dicale 92700 Colombes RICHARD Jean-Christophe Service de r6animation m6dicale H6pital de la Croix-Rousse 103, Grande rue de la Croix Rousse 69004 Lyon et Universit6 Claude Bernard Lyon 1 et Creatis Inserm 630 CNRS 5515 Lyon
RICHARD Jean-Christophe M. Service de r~animation m~dicale H6pital Charles Nicolle CHU de Rouen 1, rue de Germont 76031 Rouen ROCH Antoine Service de r&nimation m6dicale H6pital Sainte-Marguerite 270, boulevard Sainte-Marguerite 13009 Marseille ROUX Damien Inserm Unit6 722, UFR de m6decine Paris 7-Denis Diderot, site de Bichat 75018 Paris et APHP H6pital Louis Mourier service de r~animation m6dicale 92700 Colombes
SARGENTINI Cyril D~partement de r&nimation m~dicale et m~decine hyperbare CHU d'Angers 4, rue Larrey 49933 Angers Cedex 9 SEBBANE Mustapha Service d'anesth&ie-r~animation B UF de r~animation et transplantation h~patique CHU Saint-l~loi 80, avenue Augustin Fliche 34295 Montpellier Cedex 5 VARGAS Frederic D~partement de r~animation m~dicale CHU Pellegrin Tripode 1, place Am~lie Raba-L~on 33076 Bordeaux
SOMMAIRE
Avant-propos L. Papazian ....................................................................................................................
13
D~finition et ~pid~miologie du SDRA A. Mercat et C 5argentini ....................................................................................
15
Physiopathologie et I~sions induites par la ventilation J.-D. Ricard et D. Roux .........................................................................................
29
Imagerie du SDRA J.-C. Richard et C. 6u~rin .....................................................................................
51
M~canique respiratoire au cours du SDRA : interpretation de la courbe pression volume J.-C M. Richard et A. Mercat ................................................................................
71
Modes ventilatoires au cours du SDRA M. Gainnier ..........................................................................................................
83
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alv~olaire dans le SDRA J.-M. Constantin, M. Sebbane, S. Cayot-Constantin, B. Jung, E. Futier, G. Chanques, S. Jaber et J.-E-. Bazin .....................................................................
97
Ventilation non invasive au cours du SDRA B. Jung, M. Sebbane, P. Come, J.-M. Constantin et S. Jaber ................................
115
Ventilation m~canique en d~cubitus ventral au cours du SDRA C. Gu~rin, S. Lemasson, F. Bay~e, T. Fassier, G. Flandreau et J.-C. Richard ..........
127
Ventilations ~ haute fr~quence au cours du SDRA D. Demory et J. Allardet-Servent ..........................................................................
139
ToxicitE pulmonaire de I'oxygEne (02)
D. Perez, C. Manzon, J.-C. Navellou, C. Patry et 6. Capellier ..............................
151
Monoxyde d'azote et almitrine : int~r6t et limites Iors du SDRA
P. Jolliet ................................................................................................................
171
s au cours du SDRA J.-M. Forel .............................................................................................................
183
Optimisation de I'~tat hydrique au cours du SDRA A. Roch .................................................................................................................
195
Complications infectieuses pulmonaires au cours du SDRA 207
F. Vargas et D. Gruson-Vescovafi .........................................................................
Fibrose pulmonaire post-agressive J.-M. Forel et 5. Y. Donati
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223
Perspectives th~rapeutiques dans le SDRA J. Pugin .................................................................................................................
247
AVANT-PROPOS Laurent Papazian
Quarante ans! Quarante ans que Ashbaugh, Bigelow, Petty et Levine ont individualisd le syndrome de ddtresse respiratoire aigue (SDRA). Quarante ans, c'est peut-etre l'~ge de raison, celui off l'on devient plus prudent, en minimisant la prise de risque. De tr~s nombreux travaux et quelques dvolutions importantes dans le domaine du SDRA ont jalonnd ces derni~res anndes. Cet ouvrage, qu'il a dtd un honneur et un plaisir de coordonner avec Antoine Roch, a rduni des auteurs tr~s impliquds dans les progr~s de la prise en charge des patients prdsentant un SDRA. Ils se sont attachds ~i dcrire des chapitres souvent originaux et ont dfi faire preuve d'une grande rigueur dans l'exhaustivitd mais aussi d'un esprit de synth~se. Ce livre a l'ambition de venir modestement compldter certains ouvrages de rdfdrence antdrieurement publids en langue frangaise.
D finition et pid miologie du SDRA A. Mercat et C. Sargentini
D finition Dans leur publication princeps, Ashbaugh et Petty ddfinissaient le syndrome de ddtresse respiratoire aigue (SDRA) comme un syndrome clinico-radiologique associant une tachypnde, une cyanose rdfractaire ~i l'oxygdnothdrapie, une baisse de la compliance pulmonaire et une infiltration alvdolaire diffuse sur le clichd thoracique (1). Depuis sa publication en 1994, l'ensemble de la communautd internationale a adoptd la ddfinition du SDRA proposde par la confdrence d'experts amdricano-europdenne (CEAE) (2). Cette ddfinition repose sur des param~tres clinique, gazomdtrique et radiologique simples (tableau I). Ces crit~res sont aisdment applicables au quotidien, au moins chez les patients placds sous ventilation mdcanique puisque la mesure oh l'dvaluation de la fraction inspirde en oxyg~ne, ndcessaire au calcul du rapport PaO2/FiO2, est trSs ddlicate chez les patients sous oxygdnothdrapie en ventilation spontande. Bien que souvent critiqude, cette ddfinition a dtd utilisde dans la tr~s grande majoritd des essais thdrapeutiques ou des enqu8tes dpiddmiologiques rdcentes (3-6). I1 faut rappeler que cette ddfinition n'impose pas que le patient soit placd sous ventilation mdcanique invasive ou non, m8me si la plupart des dtudes dpiddmiologiques ne portent que sur les sujets ventilds. Tableau I - Crit~res diagnostiques du syndrome de ddtresse respiratoire aigue proposds par la Confdrence d'experts amdricano-europdenne (2). -
Insuffisance respiratoire d'installation aigue
- Opacitds parenchymateuses bilatdrales compatibles avec un oed~me pulmonaire - Absence d'dvidence clinique d'hypertension auriculaire gauche ou PAPO < 18 mmHg - PaO2/FiO2 < 300 (quel que soit le niveau de PEP) --+ acute lung injury 200 (quel que soit le niveau de PEP) ---> SDRA PAPO : pression artdrielle pulmonaire d'occlusion ; PEP : pression expiratoire positive.
16
Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
Confrontation anatomoclinique En l'absence de critEre indiscutable pouvant constituer un ,~ gold standard >>du diagnostic de SDRA, il n'est pas possible d'dvaluer de maniEre ddfinitive la pertinence des crit~res de la CEAE. Esteban et al. ont compare la ddfinition de la CEAE aux donn&s autopsiques obtenues chez 382 patients ddcEdds en r6animation apr& une durde mddiane de ventilation mdcanique de 4 jours (7). L'analyse r&rospective des dossiers a permis de retenir, au moyen des crit&es de la CEAE, le diagnostic prdmortem de SDRA chez 127 (33 %) de ces patients. Le diagnostic histologique de SDRA &ait retenu devant la constatation de dommages alvdolaires diffus (diffuse alveolar damage). Globalement, la pertinence de la ddfinition de la CEAE apparalt modErde avec une sensibilitd de 75 % (66 - 82) et une spEcificitE de 84 % (79 - 88). Les critEres de la CEAE apparaissent, dans cette &ude, plus pertinents pour les SDRA d'origine extrapulmonaire que pour ceux d'origine pulmonaire. Les principaux diagnostics anatomopathologiques retenus chez les patients class& comme ayant un SDRA selon les critEres de la CEAE et n'ayant pas de dommages alvEolaires diffus (~, faux positifs ,> ; n = 43) &aient les suivants : pneumonie (n = 32), hdmorragie alvEolaire (n = 4), ced~me pulmonaire hydrostatique (n = 3), embolie pulmonaire (n = 3), fibrose interstitielle (n = 1). A 1 oppose, les diagnostics cliniques retenus chez les 27 patients chez qui l'histologie a retrouvd des dommages alvEolaires diffus alors que les crit~res de la CEAE n'&aient pas prdsents (,, faux ndgatifs ,, ; n = 27) &aient : pneumonie (n = 12), oed~me pulmonaire hydrostatique (n-- 12), aucun diagnostic (n = 3). Ainsi, les pneumonies infectieuses semblent constituer les principales causes d'erreur diagnostique ~i partir des crit6res de la CEAE tant par ex&s que par ddfaut. I1 faut cependant noter que cette &ude a des limites m&hodologiques &identes puisque, d'une part, elle ne porte par definition que sur les patients ddcddds et, d'autre part, que la validitE du critEre histologique retenu n'est pas &ablie. ""
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Comparaison de diffErentes definitions En 1988, Murray avait propose une definition opdrationnelle du SDRA fond& sur l'identification d'un facteur de risque connu et sur le calcul d'un score (lung injury scare) ~ partir de quatre items : score radiologique, PaO2/FiO2, niveau de pression expiratoire positive (PEP), compliance effective du systEme respiratoire (8). Chaque item est cot~ de 1 ~i 4, un score supErieur ~i 2,5 ddfinissait le SDRA. Intuitivement, cette definition apparalt plus exigeante puisqu'elle ndcessite qu'un facteur de risque de SDRA connu soit prdsent et qu'elle tient compte du niveau de PEP et de la compliance du syst~me respiratoire. Les Etudes qui ont compare le lung injury score ~i la definition de la CEAE ont montrE que ces deux ddfinitions ne sdlectionnaient pas exactement les m~mes
Ddfinition et dpiddmiologie du SDRA
17
patients mais que le choix de l'une ou l'autre n'avait pas d'effet sur l'estimation de l'incidence du SDRA dans une population donnde de patients de rdanimation (9, 10). Par ailleurs, dans l'dtude de Moss et al., la ddfinition de la CEAE n'dtait pas moins pertinente que le lung injury scare quand ces deux ddfinitions dtaient compardes ~l une ddfinition du SDRA tr~s stricte fondde sur une sdrie de crit~res ddveloppde par les auteurs (9).
Crit re radiologique Le crit~re radiologique est certainement le point le plus critique du diagnostic de SDRA. La CEAE a retenu comme crit~re radiologique la prdsence d' ,, infiltrats bilatdraux ,~ sur le clichd de thorax. Le texte argumentaire prdcise que ces infiltrats peuvent etre discrets (~, mild ,,) mais qu'ils doivent etre compatibles avec un ced~me pulmonaire (2). Ce dernier point est souvent omis car non repris dans la version synthdtique des crit~res diagnostiques. I1 apparalt pourtant tr~s important pour exclure les patients prdsentant une hypoxdmie parfois profonde, en rapport avec des atdlectasies lobaires infdrieures tr~s frdquentes en pdriode postopdratoire notamment. Rubenfeld et al. ont dvalud la variabilitd inter-observateur du diagnostic radiologique de SDRA fondd sur le crit~re de la CEAE, en demandant ~i 21 experts internationaux d'interprdter 28 radiographies de thorax obtenues chez des patients intubds et hypoxdmiques (11). Ils rapportent un agrdment tr~s modeste (kappa = 0,55). Cette grande variabilitd inter-observateur pour le diagnostic radiologique de SDRA dtait essentiellement lide aux radiographies montrant des opacitds localisdes, des atdlectasies et des dpanchements pleuraux. Plus rdcemment, Meade et al. ont rapportd une meilleure concordance interobservateurs pour le diagnostic radiologique de SDRA (12). I1 est intdressant de noter que, dans cette dtude, il avait dtd ddcidd de ne retenir le diagnostic de SDRA que devant des opacitds diffuses. Cette restriction a tr~s probablement contribud ~i amdliorer la concordance, dans la mesure oil ce sont les formes radiologiquement non diffuses qui posent le plus de probl~mes. Enfin, ces auteurs ont montrd qu'une sdance d'interprdtation conjointe d'une sdrie de clichds permettait d'amdliorer la concordance diagnostique ultdrieure des participants. Cette constatation sugg~re qu'il serait utile, lors de la mise en place d'une dtude multicentrique, de rdunir les investigateurs pour une sdance d'interprdtation collective d'une sdrie de clichds thoraciques. Une telle sdance pourrait permettre de rendre le recrutement dans l'dtude plus homog~ne d'un centre ~l l'autre, au moins sur la prdsentation radiologique.
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Crit re gazom trique La ddfinition de la CEAE ne prdcise pas de condition particuli~re pour la ddtermination du rapport PaO2/FiO2. I1 est cependant bien &abli que les conditions ventilatoires ont une influence consid&able sur l'oxygdnation art& rielle au cours du SDRA et pourraient donc modifier la valeur du rapport PaO2/FiO2. Ainsi, un meme patient peut, ~l un moment donnd, rdpondre ou non aux crit~res de la CEAE en fonction des rdglages du respirateur : PEP, FiO2 ou volume courant. L'effet de la PEP sur l'oxygdnation art&idle au cours du SDRA est connu depuis la description du syndrome (1). Son influence sur le diagnostic de SDRA au moyen des crit~res de la CEAE a dtd tr~esbien illustrde par Estenssoro et al. (13). Ces auteurs ont dtudid l'dvolution du rapport PaO2/FiO2 dans les 24 premi~eres heures de ventilation avec PEP (environ 12 cmH20 en moyenne) chez 48 patients rdpondant aux crit~res de SDRA (n = 18) de la CEAE alors qu'ils &aient ventilds sans PEP. Apr~s 12 et 24 heures, respectivement, 25 (52 %) et 30 (62 %) des 48 patients inclus ne rdpondaient plus au crit~re gazomdtrique de SDRA (PaO2/FiO2 > 200). Plusieurs &udes physiologiques ont bien montrd qu'~i PEP constante, la rdduction du volume courant pouvait induire un d&ecrutement responsable d'une majoration de l'hypoxdmie (14, 15). Ainsi, le niveau de volume courant pourrait dgalement influencer le crit~re gazom&rique de SDRA. L'effet de la FiO2 sur le rapport PaO2/FiO2 est moins bien connu des cliniciens. Cependant, dans un mo&le thdorique de poumon prdsentant un shunt vrai pur, le calcul de la PaO2 thdorique ~ichaque niveau de FiO2 montre que le rapport PaO2/FiO2 n'est pas constant (16).
CritEre hEmodynamique Afin d'exclure de la ddfinition du SDRA les oe&mes pulmonaires hydrostatiques, le CEAE a ddcidd d'inclure l'absence d'hypertension auriculaire gauche dans la ddfinition du SDRA. I1 est prdcisd, que lorsqu'elle est mesurde, la pression art&idle pulmonaire d'occlusion (PAPO) dolt &re infdrieure fi 18 mmHg. Ce crit&re peut dventuellement poser probl~me puisqu'il exclut, a priori, tout patient porteur d'une dysfonction ventriculaire gauche sdv~re, sauf fi mesurer sa PAPO fi l'aide d'un cath&er art&iel pulmonaire. La moindre utilisation du cathdter artdriel pulmonaire, les frdquentes erreurs de mesure et les difficult& d'interprdtation de la PAPO chez les patients ventilds notamment avec un niveau assez dlevd de PEP (17) font perdre ~i ce crit~re, sinon sa pertinence, au moins beaucoup de son utilitd. Ferguson et al. ont analysd r&rospectivement les donndes hdmodynamiques invasives obtenues chez 71 des 120 patients inclus dans l'&ude canadienne sur la rdduction du volume courant, dtude dont les crit&res d'exclusion comprenaient l'existence d'une dysfonction ventricu-
Ddfinition et dpiddmiologie du SDRA
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laire gauche et/ou une PAPO supdrieure ~i 18 mmHg (18). Chez 58 de ces 71 patients (82 %), au moins une mesure de PAPO dtait supdrieure ~t 18 mmHg, un tel niveau de PAPO dtait relevd sur au moins 30 % des mesures chez 37 patients (52 %). Ainsi, ce crit~re hdmodynamique contribue certainement ~i la spdcificitd de la ddfinition proposde par la CEAE, mais ce gain de sp~cificitd se fait au prix d'une perte de sensibilitd en excluant les patients ayant ~i la fois un SDRA et une PAPO dlevde. Par ailleurs, une rddcriture plus moderne de ce crit~re devrait, ~t l'dvidence, faire rdfdrence en cas de doute clinique, ~i une approche non invasive fondde par exemple sur l'analyse des flux Doppler mitraux et veineux pulmonaire (19).
SDRA transitoires versus SDRA persistants Les crit~res de la CEAE permettent d'affirmer l'existence d'un SDRA sur un clichd de thorax et une mesure ponctuelle de PaO2. L'absence de tout crit~re d'dvolution facilite certainement l'inclusion dans les essais thdrapeutiques ou dans les cohortes des dtudes dpiddmiologiques. Cependant, cette ddfinition rdunit des patients tr~s diffdrents tant en termes de gravitd immddiate que de pronostic. Elle permet notamment de qualifier de SDRA des patients dont l'hypoxdmie sera tr~s transitoire. Cette difficultd est bien illustrde par l'dtude de Villar e t al., qui ont analysd l'dvolution de 56 patients rdpondant aux crit~res de SDRA selon les crit~res de la CEAE (20). Ces patients dtaient sdpards en deux groupes en fonction de l'existence, 24 heures apr~s avoir rduni les crit~res de SDRA, d'une hypoxdmie profonde persistante ddfinie par un rapport PaO2/FiO2 infdrieur ~t 150 mmHg sous une FiO2 de 50 % et avec une PEP de 5 cmH20. Selon ce crit~re, seuls 25 patients (45 %) prdsentaient un SDRA persistant contre 31 (55 %) un SDRA transitoire. Les SDRA d'origine traumatique dtaient plus frdquents dans le groupe SDRA transitoire (42 v e r s u s 16%). La frdquence des SDRA d'origine septique et le nombre moyen de ddfaillances viscdrales dtaient plus dlevds dans le groupe SDRA persistant (32 v e r s u s 10 % et 3 v e r s u s 1,5, respectivement). Les mortalitds de ces deux populations dtaient tr~s diffdrentes (68 % pour les SDRA persistants v e r s u s 23 %). Plus rdcemment, Ferguson e t al. ont rapportd des donndes assez voisines en analysant l'dvolution du rapport PaO2/FiO2 apr~s instauration de rdglages ventilatoires standardisds (FiO2 -- 1, PEP _> 10 cmH20, volume courant de 7-8 mL/kg) chez 41 patients considdrds comme potentiellement incluables dans un essai thdrapeutique puisque rdunissant les crit~res de SDRA de la CEAE (21). Apr~s standardisation de la ventilation, seuls 17 patients prdsentaient un SDRA persistant, les 24 autres patients voyant leur rapport PaO2/FiO2 augmenter au-del~t de 200 (SDRA transitoires). Les mortalitds en rdanimation de ces deux groupes dtaient tr~s diffdrentes : 53 % v e r s u s 12,5 %, respectivement. Ces donndes vont dans le sens de la proposition de la tr~s rdcente Confdrence d'experts de la SRLF sur le SDRA qui sugg~re d'introduire
20
Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
la notion de ~ SDRA confirmd ,, ddfini par la persistance d'un rapport PaO2/FiO2 -< 200 mmHg apr&s 24 heures de ventilation mdcanique avec une PEP > 5 cmH20 (22). Ce crit~re vise ~i sdlectionner les patients atteints d'oe&me pulmonaire ldsionnel avdrd, excluant les patients ayant pu prdsenter une hypoxdmie transitoire lide par exemple fi des atdlectasies basales bilat&ales. Cette notion de SDRA confirmd a d'ailleurs dtd utilisde de mani~re implicite dans plusieurs dtudes (23, 24).
Distinction ALI-SDRA La CEAE a ddfini l'acute lung injury (ALI) par un rapport PaO2/FiO2 infdrieur ou dgal ~t 300 et le SDRA comme une forme grave d'ALI (PaO2/FIO2 -< 200). L'objectif des experts dtait de rendre compte de l'existence d'un continuum entre des formes d'oe&me pulmonaire ldsionnel de gravitd moddrde et le SDRA. L'intdret de cette distinction a dtd largement remis en cause par plusieurs &udes, montrant soit que I'ALI de gravitd moddrde (200 < PaO2/FiO2 -< 300) dtait en fait assez rare, au moins chez les patients ventilds, soit surtout que la profondeur de l'hypoxdmie n'avait pas d'impact sur le pronostic (25, 26). L'intdret de la distinction entre ALl et SDRA a dtd rddvalud dans l'&ude ,, ALIVE ,, qui a mesurd l'incidence et le pronostic de I'ALI et du SDRA sur une population globale de 6 522 patients ayant sdjournd plus de 4 heures entre le 1e~ fdvrier et le 31 mars 1999 dans une des 78 unit& de rdanimation europdennes ayant participd ~t l'dtude (5). L'&ude a inclus 463 patients, soit 7 , 1 % du total des patients admis, dont 62 ALl et 401 SDRA. La mortalitd hospitali~re des patients atteints d'ALI &ait significativement plus basse que celle des patients souffrant de SDRA (33 versus 58 %). Les auteurs rapportaient une relation tr~s significative entre la profondeur de l'hypoxdmie ~i l'admission et la mortalitd. 12analyse par rdgression logistique ne permettait pas de ddmontrer que le rapport PaO2/FiO2 dtait un facteur pronostique inddpendant, mais cette m~me analyse montrait que le score de ddfaillances d'organe ,, LOD ~ et I'IGS II qui incluent le rapport PaO2/FiO2, &aient tout deux associds fi la mortalitd. Au total, un seuil de rapport PaO2/FiO2 fixd ~i 200 pour distinguer deux entitds distinctes que seraient I'ALI et le SDRA semble tout ~i fait arbitraire. Cependant, la profondeur de l'hypoxdmie, au meme titre que de nombreux autres facteurs lids au terrain (~ge, immunoddpression, &hylisme, cirrhose), ~i la cause du SDRA (traumatisme versus sepsis), au retentissement ventriculaire droit, aux ddfaillances d'organe assocides ou ~il'existence d'un barotraumatisme, doit &re prise en compte dans l'dvaluation globale du pronostic (27, 28).
Ddfinition et dpiddmiologie du SDRA
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Propositions de nouvelles definitions La ddfinition proposde par la CEAE est assez arbitraire et connalt des limites indiscutables. Cependant, il apparalt bien difficile aujourd'hui de proposer des crit~res diagnostiques plus objectifs ou plus pertinents. On peut d'ailleurs remarquer que les experts qui ont remis en cause les crit~res de la CEAE ont souvent proposd des crit&res tr~s lids ~l leur propre thdmatique de recherche. Ainsi, alors que les spdcialistes du sepsis souhaitent voir apparaltre dans la ddfinition du SDRA des crit~res attestant de l'activation de la cascade inflammatoire (29), les spdcialistes de la physiopathologie de l'oed~me pulmonaire ldsionnel souhaitent ajouter un crit~re attestant de l'augmentation de la permdabilit~ de la membrane alv~olocapillaire (30, 31). Ferguson et al. ont utilisd la mdthode Delphi pour mener une confdrence d'experts visant ~i dtablir une nouveUe ddfinition du SDRA (32). Les rdsultats de cette ddmarche mende en 2000 ont dtd rdcemment rapportds (tableau II). L'intdret potentiel de la mdthodologie utilisde est qu'elle repose sur une ddmarche formalisde permettant de garantir que les rdsultats reprdsentent assez objectivement l'opinion ,~ moyenne ,, des experts sdlectionnds. Les crit~res diagnostiques retenus apparaissent clairement plus exigeants que ceux de la CEAE. Leur application apparalt tr~s contraignante et impose des param~tres ventilatoires qui peuvent apparaitre aujourd'hui discutables (PEP >_ 10 cmH20 et volume courant de 8 mL/kg). Ces contraintes rendent, a priori, cette ddfinition tr~s difficilement utilisable en dehors d'dtudes prospectives. Une dvaluation de cette ddfinition sur une large population serait ndcessaire pour prdciser sa pertinence et savoir si elle aboutit ~i la sdlection d'une population significativement diffdrente de celle rdsultant de l'application des crit~res de la CEAE. Plus rdcemment, la SRLF a publid les rdsultats d'une confdrence d'experts sur la prise en charge ventilatoire du SDRA mende selon la mdthode RAND/UCLA (22). Cette confdrence propose de conserver la ddfinition de la CEAE. La proposition de Lemaire et Jardin d'adjoindre ~i cette ddfinition la notion de ,, SDRA confirmd ,, apparalt, au vu des donndes de la littdrature, tr~s pertinente (33). Son intdret pour la sdlection d'une population de patients plus homog~ne que celle rdsultant de la simple application des crit~res de la CEAE devra etre confirmd dans le cadre d'dtudes dpiddmiologiques de grande ampleur.
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Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
Tableau II - Crit~res diagnostiques du syndrome de d&resse respiratoire aigue proposals par Ferguson et al. (32). Le SDRA est ddfini par la pr&ence des crit~res 1 ~t 4 et d'au moins un des crit~res 5 et 6. Param&res
Crit6res
1. Hypoxdmie 2. Ddlai de survenue 3. Opacit& radiologiques
PaO2/FiO2 -< 200 mmHg avec PEP __ 10 cmH20 < 72 h Parenchymateuses bilat&ales atteignant au moins 2 quadrants sur le clichd de face Absence d'&idence clinique d'insuffisance cardiaque congestive (incluant les donn&s du cath&&isme cardiaque droit et/ou de l'&hocardiographie si cliniquement indiqu&) Compliance statique du syst~me respiratoire < 50 m L / c m H 2 0 (patient sddatd, VT de 8 mL/kg PIT, PEP > 10 cmH20) Pr&ence d'un facteur connu de SDRA direct et/ou indirect
4. Origine non cardiogdnique 5. Diminution de la compliance pulmonaire 6. Facteur prddisposant
PEP" pression expiratoire positive" VT" volume courant 9 PIT 9 poids iddal thdorique.
i pid miologie Incidence I2incidence du SDRA est tr& diversement ~valude dans la littdrature. Ainsi, les dtudes ayant utilisd la ddfinition de la CEAE rapportent des incidences annuelles allant de 20 ?i 80 pour 100 000 habitants pour I'ALI et de 15 ~ 60 pour 100 000 habitants pour le SDRA (34-36). Outre l'existence tout ?i fait concevable de rdelles diff&ences gdographiques de l'incidence du SDRA, ces diffdrences sont tr& probablement expliqudes par les difficult& m&hodologiques de recueil des donndes. Par ailleurs, comme le prdcise Rubenfeld, le diagnostic de SDRA if&ant posd qu'en rdanimation, son incidence en un territoire donn~ est tr~s li~ au nombre de services et de lits de rdanimation disponibles (34). Quoi qu'il en soit, l'&ude la plus r&ente et ~ila m&hodologie la plus solide rapporte les incidences les plus dlevdes (6). Les &udes rdcentes montrent que 15 fi 20 % des patients placds sous ventilation pour insuffisance respiratoire aigu~ prdsentent un SDRA.
Terrain et facteurs de risque En moyenne, les patients atteints de SDRA ont entre 55 et 65 ans, ce sont ~i plus de 60 % des hommes (34). Les principales affections ou circonstances pouvant &re ~i l'origine d'un SDRA sont exposdes dans le tableau III. Les pneumonies infectieuses sont de
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tr~s loin les premieres pourvoyeuses de SDRA, elles sont en cause dans plus de 40 % des cas, suivies par les sepsis sdv~res (25-30 %) et les inhalations de liquide gastrique (10-15 %) (5, 6). Dans son chapitre consacrd aux facteurs de risque, la CEAE distingue les SDRA lids ~aune atteinte directe (SDRA dits ,, pulmonaires ,,, par inhalation, pneumonie, noyade, contusion pulmonaire) des SDRA lids ~i une atteinte indirecte (SDRA dits ~, extrapulmonaires~,, par sepsis, polytraumatisme, transfusions, pancrdatite, circulation extracorporelle) (2). Plusieurs &udes exp&imentales et cliniques ont suggdrd que cette distinction pouvait &re utile, notamment pour adapter la ventilation m&anique ou prddire les effets de certains rdglages (PEP) ou de certaines manoeuvres (d&ubitus ventral, manoeuvres de recrutement) (37, 38). Les donndes publides restent cependant contradictoires (39, 40). Ainsi, l'analyse post hoc des donndes de l'&ude ,,ARMA ,, de I'ARDS network montre bien que si la cause du SDRA a une influence sur le pronostic, l'effet de la rdduction du volume courant sur la mortalitd ne ddpend pas du type de SDRA (41). Au total, il n'apparalt pas n&essaire d'inclure le type d'atteinte directe ou indirecte dans la ddfinition mSme du SDRA (22). Meme si certains sugg~rent qu'elles ~
Agressions pulmonaires indirectes Sepsis, choc septique Choc prolongd Polytraumatisme Pancrdatite aigue Transfusion massive Brfilures &endues Circulation extracorporelle Transfusion (TRALI) Crush syndrome
TRALI : transfusion related acute lung injury
Mortalit Meme si ce point reste discutd, plusieurs auteurs ont rapportd une diminution significative de la mortalitd du SDRA au cours de ces 25 derni~res anndes (fig. 1) (43). Les &udes les plus r&entes rapportent une mortalitd hospitali~re
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
allant de 41 ~i 58 % (5, 6). Les plus faibles mortalitds observdes dans les essais randomisds contr61ds rdcents sont probablement expliqudes par le fait que les patients inclus dans ces essais sont plus jeunes et en meilleur dtat de santd antdrieure que les patients non sdlectionnds des cohortes observationnelles. Les SDRA d'origine traumatique (contusions pulmonaires, polytraumatismes) ont une mortalitd plus faible que les SDRA d'autre origine et notamment que les SDRA associ~s ~i un sepsis : 24 versus 4 1 % dans l'dtude de Rubenfeld par exemple (34). Cependant, la cause du SDRA n'apparait pas comme un facteur inddpendant de mortalitd dans les analyses multivarides suggdrant qu'un ou plusieurs facteurs confondants, et notamment l'~ge, expliquent ces diffdrences (34). 8O 70 60
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Fig. 1 - l~volution de la mortalitd des patients atteints de SDRA, donndes du Harborview Medical Center (Seattle, WA, l~tats-Unis) (43).
Le tableau IV dnumSre les principaux param&tres associds fi la mortalitd au cours du SDRA. Le ddlai de survenue du SDRA par rapport ~i l'admission ~l l'h6pital ou par rapport au ddbut de la ventilation mdcanique (> 48 heures) semble avoir un impact sur la mortalitd avec une surmortalitd des SDRA tardifs sans que l'on puisse expliquer pour l'heure cette constatation (44, 45). Afin d'dvaluer l'effet propre du SDRA sur la mortalitd, Hudson et al. ont mesurd les mortalitds ajustdes en fonction de l'~ge et de la gravitd de patients prdsentant un facteur de risque de SDRA. La mortalitd des patients ayant prdsentd un SDRA dtait 3,3 fois plus dlevde que celle de ceux n'en ayant pas prdsentd. Ce ratio allait de 1,4 pour les sepsis ~i 5,6 pour les polytraumatismes et 8,6 pour les intoxications mddicamenteuses (46).
Ddfinition et dpiddmiologie du SDRA
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Tableau IV- Facteurs associ& ~t la mortalitd au cours du SDRA. Terrain Age dlevd Cirrhose Cancer, Immunoddpression
Gravit6 &at de choc acidose (pH < 7,30) ddfaillances d'organes
Atteinte pulmonaire pneumothorax PaO2/FiO2 bas (?) atteinte diffuse (TDM)
Traitement faible niveau de PEP grand VT balance hydrique positive
PEP : pression expiratoire positive ; VT :volume courant ;TDM : tomodensitom&rie.
Conclusion En raison de sa frdquence et d'une mortalitd qui, malgrd les progr~s accomplis, reste dlevde, le SDRA reste une prdoccupation majeure. Tout progr~s, meme de faible amplitude, permettant d'en diminuer l'incidence ou la mortalitd est susceptible d'avoir un impact tout ~t fait considdrable en termes de nombres de vies sauvdes.
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Physiopathologie et I sions induites par la ventilation J.-D. Ricard et D. Roux
Introduction Ventilation mdcanique et syndrome de ddtresse respiratoire aigue (SDRA) ont dtd intimement lids depuis la publication princeps du SDRA en 1967 (1), rapportant l'expdrience d'une jeune dquipe de Denver sur 12 patients prdsentant une insuffisance respiratoire aigue. Ces auteurs avaient en effet d'emblde remarqud, certes la profondeur de l'hypoxdmie dont souffraient leurs patients, mais aussi l'effet bdndfique de la pression expiratoire positive (PEP) sur l'am& lioration de l'oxygdnation (1). A peine trois anndes plus tard, Mead et Takishima (2), ~i partir d'un mo&le original de poumon, conceptualisaient la survenue de Idsions induites par la ventilation mdcanique (LIVM). Ce concept dtait vdrifid expdrimentalement quelques anndes plus tard par Webb et Tierney (3) et c'est dix ans plus tard que Dreyfuss et Saumon dtablissaient de fagon univoque le caract~re ldsionnel de cet ce&me pulmonaire induit par la ventilation mdcanique (4), montrant dgalement, grace ~i l'apport de la microscopie dlectronique, l'extraordinaire similitude des anomalies histologiques observdes au cours du SDRA et des LIVM (5). Nous aborderons dans ce chapitre les dldments de physiopathologie conduisant aux ldsions observdes au cours du SDRA et nous ddtaillerons les ddterminants des LIVM en analysant comment leur connaissance a influencd la fagon de ventiler les patients atteints de SDRA, et donc d'en modifier le pronostic. I1 n'est bien stir pas possible de faire en quelques pages l'analyse et la synth~se de plus de 30 ans de recherche sur les LIVM, mais c'est ce qu'a rdussi ~lfaire un ouvrage rdcent consacr~ ~ice sujet (6), vers lequel le lecteur pourra se tourner pour plus de d&ails.
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Physiopathologie du SDRA Histologiquement, le SDRA est caractdrisd par un oed~eme pulmonaire ldsionnel, en rapport avec une augmentation de permdabilitd de la membrane alvdolo-capillaire, rdalisant, dons ces formes les plus graves, les Idsions alvdolaires diffuses (en anglais diffuse alveolar damage), comportant un oed~me interstitiel et alvdolaire, des Idsions endothdliales et dpithdliales avec ddnudation de la membrane basale (7, 8). Au cours du temps, on observe une organisation de cet exsudat par des fibroblastes. Ainsi, il est classique de distinguer trois phases au cours du SDRA: une phase exsudative, au cours de laquelle apparaissent un oed~eme, des phdnom~nes hdmorragiques et tout le processus inflammatoire (afflux de polynucldaires notamment) en rdaction ~il'agression (quelle que soit sa nature), une phase fibroprolifdrative, faisant intervenir les mdcanismes de rdparation cellulaire (prolifdration fibroblastique avec sdcrdtion de collag~ne), et une phase de rdsolution des processus inflammatoires et fibrotiques, permettant une restitution ad integrum des fonctions pulmonaires (9). I1 est important de noter qu'il existe un certain chevauchement entre ces phases, et des phdnom~nes de rdparation apparaissent t6t dons l'dvolution du SDRA. De nombreux acteurs interviennent aux cours de ces phases, pour les initier, les amplifier, les rdguler, les inhiber. Les lecteurs pourront trouver une description aussi prdcise qu'exhaustive des diffdrents acteurs impliquds dans une remarquable revue de la littdrature (9). Comme indiqud plus haut, le SDRA est marqud par l'apparition d'un ced~me pulmonaire ldsionnel (phase exsudative) qui fait suite ~i une agression directe ou indirecte endommageant les surfaces dpithdliales et endothdliales. La rupture de cette barri~re conduit ~il'inondation alvdolaire avec un liquide riche en protides, en dldments figurds du sang, en fibrines, inactivant le surfactant. Les espaces alvdolaires sont ainsi recouverts de membranes hyalines. L'ensemble de ces phdnom~nes aboutit ~i une hypoxdmie sdv~re en raison d'un shunt intrapulmonaire et une baisse de la compliance pulmonaire, pierres angulaires du SDRA. De plus, la perte de la compartimentalisation de la rdaction inflammatoire peut contribuer ~i l'initiation ou ~i la pdrennisation d'un syndrome de ddfaillance multiviscdrale, fr~quemment observ~ chez les patients les plus gravement atteints. Une fois le processus ldsionnel ddclenchd, un processus de rdparation tissuloire va s'initier. I1 comprendra une hyperplasie des pneumocytes de type II, un remodelage de l'interstitium et des espaces alvdolaires avec prolifdration de cellules mdsenchymateuses et synth~se de prdcurseurs du collag~ne. Ces diffdrents phdnom~nes sont sous le contr61e de nombreux mddiateurs dont le TNF-o~, I'lL- 1, le transforminggrowth factoir-fl, le platelet-derivedgrowth factor et la fibronectine mais aussi de l' hepatocytegrowthfactor et le keratinocytegrowth factor. La rdgdndration de l'dpithdlium alvdolaire et des pneumocytes de type I passe par une prolifdration et une diffdrenciation des pneumocytes de type II.
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Cette &ape est fondamentale pour la rdgdndration car, si elle est entravde (nouvelle agression par exemple), une fibrose peut se ddvelopper suite 7t la migration des cellules mdsenchymateuses. Les myofibroblastes, sous l'influence des mddiateurs prdcitds, vont prolifdrer et synth&iser le collag~ne. La restitution ad integrum du poumon est l'aboutissement normal de la phase de rdsolution. Elle comporte la rdgression des phdnom~nes inflammatoires (notamment la polynucldose neutrophile alvdolaire) et le contr61e et la limitation de la fibroprolifdration. Le macrophage alvdolaire va jouer un r61e majeur en synthdtisant des cytokines anti-inflammatoires et en phagocytant les polynucldaires entrds en apoptose et reconnus gr~tce fi l'expression de rdcepteurs de surface spdcifiques. Par ailleurs, une activitd protdasique permet l'dlimination de l'exc~s de matrice extracellulaire. Des donndes cliniques rdcentes montrent que les sdquelles respiratoires des patients un an apr~s un SDRA sont moddrdes (~t l'inverse des sdquelles neuromusculaires), les principales anomalies &ant un discret syndrome restrictif ou une diminution minime fi moddrde du coefficient de diffusion du monoxyde de carbone (seuls 6% de ces patients prdsentaient une ddsaturation fi l'effort) (10).
Lien entre LIVM et SDRA I1 est intdressant de noter que 3 ans seulement apr~s la description princeps du SDRA, Mead et Takishima formulaient l'hypoth~se qu'un poumon ldsd puisse subir au cours de la ventilation des contraintes mdcaniques excessives et que le respirateur (par le biais de rdglages inapproprids) pouvait &re responsable des ldsions histologiques observdes chez les patients ddcddant de SDRA (2). Mead et Takishima avaient en effet calculd que la pression tissulaire ddveloppde dans les territoires pulmonaires entourant une zone atdlectaside pouvait ddpasser 140 cmH20, pour une distension correspondant ~ une pression transpulmonaire de 30 cmH20. La conclusion qu'en avaient tirde les auteurs &ait rdellement visionnaire : <~Les ventilateurs, en appliquant des pressions transpulmonaires dlevdes ~t des poumons non uniformdment recrutds de patients qui, sinon, mourraient d'hypoxdmie, pourraient &re responsable de l'hdmorragie et des membranes hyalines observdes chez ces patients apr~s leur dd&s ~ (2). Les &udes expdrimentales ont permis par la suite, outre la ddmonstration de l'existence meme de ces ldsions induites par la ventilation mdcanique, de mieux apprdhender leurs d&erminismes ainsi que les facteurs les favorisants (11). Pour autant, il aura fallu attendre pros de 30 ans pour que le concept expdrimental de LIVM reqoive une validation clinique par la ddmonstration d'une rdduction de mortalitd chez les patients ventilds pour un SDRA par le seul fait d'une rdduction du volume courant (12). Un des travaux princeps rut rdalisd par Webb et Tierney (3) qui ont montrd que la ventilation en pression positive intermittente (PPI) fi thorax fermd, avec
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
un pic de pression d'insufflation de 30 cmH20 pendant une heure produisait un oe&me pulmonaire interstitiel chez le rat. Avec une pression de pic de 45 cmH20 survenait encore plus rapidement un oe&me pulmonaire sdv~re avec inondation alvdolaire. Des pdriodes tr~s br~ves de ventilation en PPI avec pressions suffisamment dlevdes peuvent entralner un oe&me pulmonaire (4, 13). Chez le mouton, Kolobow (14) a montrd qu'apr~s deux jours de ventilation ?i thorax fermd en PPI avec une pression de pic ~i 50 cmH20, il existait une diminution de la compliance pulmonaire et des alt&ations sdv~res des dchanges gazeux, entrainant la mort d'un certain nombre d'animaux. L'aspect macroscopique des poumons dtait tr~s anormal, avec des zones de congestion intense.
Caract risation de I'oed me pulmonaire
la
ventilation m canique L'oe&me pulmonaire dfi fi la ventilation m&anique (VM) est le rdsultat ~i la lois d'une augmentation de la pression hydrostatique microvasculaire pulmonaire (responsable d'une augmentation de la filtration) et d'altdrations de la permdabilitd de la barri~re alvdolo-capillaire.
Arguments en faveur d'une augmentation de filtration C'est ce mdcanisme qui a dtd longtemps considdrd comme essentiel dans la gen~se de cet oe&me (3, 15). La ventilation mdcanique avec pression de pic dlevde et en l'absence de pression expiratoire positive (PEP) inactive le surfactant (16). Cette inactivation entralne une augmentation de la tension de surface alvdolaire, ce qui va diminuer la pression autour des capillaires alvdolaires (et donc en augmenter la pression transmurale), augmenter la filtration et favoriser la formation d'un oe&me hydrostatique (17). Par ailleurs, lorsque le volume pulmonaire augmente, le parenchyme exerce une traction radiaire sur les vaisseaux extra-alvdolaires (par le m&anisme ,,d'interddpendence pulmonaire ,,), ce qui augmente leur pression transmurale (18, 19). Parker (15) a aussi montrd qu'il existe une augmentation modeste (de l'ordre de 13 cmH20) de la pression microvasculaire pulmonaire chez des chiens ventilds ~i thorax ouvert avec une pression de pic de 64 cmH20. Cette augmentation de la pression hydrostatique vasculaire pulmonaire serait probablement encore moindre chez des animaux ~i thorax fermd (du fait de la baisse du retour veineux). De fait, chez le mouton ?i thorax fermd, Carlton (20) n'a retrouvd qu'une augmentation tr~s modeste des pressions vasculaires pulmonaires au cours d'une ventilation mdcanique avec PPI de 58 cmH20.
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I1 est donc clair que la pression microvasculaire pulmonaire n'augmente que de fagon tr~s moddrde au cours de la VM avec PPI dlevde, ce qui est insuffisant pour expliquer la rapiditd de survenue et la sdvdritd de I'm&me pulmonaire observd.
Arguments en faveur d'anomalies de perm abilit et endoth liale pulmonaires
pith liale
Modifications de la perm~abilit~ ~pith~liale alv~olaire sous I'effet des pressions ~lev~es dans les voies a~riennes Egan (21) a montr~, au cours de distensions statiques lobaires chez le mouton, que la permdabilitd dpithdliale augmente proportionnellement ~i la pression d'insufflation. Pour des pressions de l'ordre de 40 cmH20 (entralnant des distensions bien plus considdrables sur des lobes isolds que sur un poumon entier in situ), l'dpithdlium peut m~me devenir librement permdable ~i l'albumine. Chez l'animal entier, des altdrations sd%res de la permdabilitd alvdolaire au cours de I'm&me induit par la ventilation mdcanique sont tr~s probables, ainsi qu'en attestent les anomalies cellulaires observdes en microscopie dlectronique (4, 22, 23).
Modifications de la perm abilit endoth liale au cours des LIVM Parker (24) a montrd, sur lobe pulmonaire isold de chien, qu'une ventilation en PPI avec des pics de pression compris entre 45 et 65 cmH20 entralne rapidement une augmentation de la permdabilitd microvasculaire. En tdmoignaient ~i la fois l'augmentation du coefficient de filtration capillaire et la diminution du coefficient de rdflexion osmotique des protdines (qui traduit les propridtds de ~tamisage ~ des macromoldcules par l'endothdlium vasculaire). Afin d'apprdcier le r61e et l'importance des altdrations de permdabilitd microvasculaire, des rats ont dtd ventilds ~i thorax fermd en PPI avec une pression de pic ~i45 cmH20, pendant une durde variant de 5 ~i20 minutes (4). Un oed~me pulmonaire, apprdcid par l'augmentation de l'eau pulmonaire extravasculaire (ddterminde apr~s sacrifice de l'animal), survenait apr~s seulement 5 minutes de ventilation. L'importance de cet oe&me dtait proportionnelle fi la durde de la ventilation, avec inondation trachdale d~s la vingti~me minute. D'importantes altdrations de la permdabilitd microvasculaire dtaient prdsentes, ainsi qu'en tdmoignait l'augmentation du poids sec de poumon exsangue (qui traduit une accumulation de protdines qui ont extravasd dans le poumon) et de l'espace de distribution pulmonaire d'albumine radioactive prdalablement inject& par vole veineuse (tdmoin de la ~fuite ~ microvasculaire). La sdvdritd du
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
trouble de permdabilitd microvasculaire dtait telle que la concentration en protdines du liquide d'oed~me dtait proche de celle du plasma. Des altdrations de permdabilitd microvasculaire ont dgalement dtd mises en dvidence chez l'animal entier, par d'autres auteurs. Ainsi, Parker (15) a montrd par canulation de lymphatiques pulmonaires (ce qui permet d'analyser le ddbit et la concentration en protides de la lymphe pulmonaire, qui est en dquilibre avec l'interstitium, et donc d'obtenir un reflet de la formation et de la composition du liquide d'oed~me), chez le chien ~i thorax ouvert, que la ventilation en PPI ~i 64 cmH20 de pic de pression s'accompagnait d'une altdration de la permdabilitd microvasculaire. Des constatations similaires ont dtd effectudes par Carlton (20) chez le mouton, ~i thorax fermd. En rdsumd, l'oed~me pulmonaire des LIVM rdsulte ~i la fois de l'augmentation des pressions microvasculaires et d'anomalies de permdabilitd. Bien que la composante hydrostatique soit tr~s moddrde sur le plan quantitatif, son impact est ndanmoins substantiel. En effet, compte tenu des altdrations tr~s sdv~res de permdabilitd, toute augmentation de la pression microvasculaire aura un effet amplificateur considdrable sur la formation de l'oed~me. Cette synergie explique probablement la rapiditd de survenue et la sdvdritd de ce type d oedeme.
Aspects ultrastructuraux pulmonaires au cours des LIVM Le caract~re ~ldsionnel ~ de cet oed~me a dtd confirmd par l'analyse du poumon en microscopie dlectronique (4, 22, 23). Des anomalies importantes de la barri~re alvdolo-capillaire ont dtd retrouvdes. Au niveau de l'endothdlium capillaire, des cellules endothdliales dtaient ddcolldes de leur membrane basale. I1 en rdsultait la formation de bulles intravasculaires, remplies d'un liquide dont la densitd dlectronique pouvait avoisiner celle du plasma. Cet aspect de bulle intraluminale n'est cependant pas spdcifique de ce module particulier d'oed~me pulmonaire. Au contraire, il est retrouvd dans la plupart des modules d'oed~mes pulmonaires ,,Idsionnels~, (apr~s administration de toxiques comme l'acide oldique, par exemple). En revanche, on ne le trouve jamais au cours des ced~mes hydrostatiques. Au niveau de l'dpithdlium alvdolaire, les ldsions dtaient encore plus impressionnantes. Les cellules dpithdliales de type 1 dtaient tr~s souvent oeddmateuses et m~me lysdes. Leur desquamation mettait ~i nu la membrane basale alvdolaire. Dans la lumi~re des alvdoles, les ddbris cellulaires et la fibrine (contenue dans le liquide d'oed~me fiche en protides) formaient des membranes hyalines typiques, telles qu'on les observe dans les oed~mes non hydrostatiques et au cours du SDRA.
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D terminants des I sions induites par la ventilation m canique
R61esrespectifs de I'augmentation de pression dans les voies a riennes et de I'augmentation de volume pulmonaire Afin d'apprdcier ce point, des rats ont dtd ventilEs ~i thorax fermd, en faisant varier inddpendamment la pression dans les voies adriennes et le volume pulmonaire (22). Les effets de la ventilation ~ihaute pression-haut volume (PPI avec 45 cmH20 de pic de pression) ont Etd compares ~i ceux d'une ventilation ~i haute pression avec un volume courant normal (PPI avec 45 cmH20 de pic de pression et sangle thoraco-abdominale destinde ~ limiter le volume courant), et ~i ceux d'une ventilation fi haut volume courant et basse pression (en ventilant les animaux avec un poumon d'acier). Un oed~me pulmonaire avec troubles de permEabilitd est survenu dans les deux groupes ventilds avec un grand volume courant, quel que soit le regime de pressions dans les voies adriennes (22). Les lesions ultrastructurales prEcEdemment dEcrites ont ~galement dtd retrouvdes dans les deux groupes. En revanche, les animaux ventilEs avec une haute pression d'insufflation mais un volume courant normal n'avaient ni oed~me pulmonaire ni trouble de permdabilitd et l'examen de leurs poumons en microscopie Electronique ne montrait pas d'anomalie. Hernandez et al. (25) ont confirmd que ce sont les modifications de volume et non de pression qui sont responsables des anomalies observdes. Ces auteurs ont mesurd le coefficient de filtration capillaire pulmonaire de lapins ayant EtE ventilds en PPI ~l haute pression - haut volume ou haute pression volume normal (l'animal dtant ventild dans un pl~itre moulant le thorax et l'abdomen). Le coefficient de filtration dtait multiplid par 4 dans la premiere condition, alors qu'il demeurait inchangd dans la deuxiEme. Enfin, Carlton et al. (20), ont Egalement confirmd (par l'analyse de la lymphe pulmonaire, aprEs canulation chez le mouton) le r61e du volume et non de la pression dans les voies adriennes dans la gen~se de cet oedEme pulmonaire. I1 est important de noter que dans ces experiences la limitation des mouvements de la cage thoracique par une sangle ou un pl~tre augmente considdrablement l'dlastance de paroi thoracique, ce qui diminue d'autant la pression transpulmonaire (diffdrence entre pression intra-alvdolaire et pression pleurale), fii l'inverse, en l'absence de cette limitation, la pression transpulmonaire est trEs augmentEe. Ceci a fait dire ~i certains qu'il n'y avait pas lieu de faire la distinction entre baro- et volotraumatisme lorsque l'on considdrait uniquement la pression transpulmonaire (26). Si, in fine, c'est la pression transpulmonaire qui ddtermine le degrE de distension pulmonaire (et donc le risque de LIVM), ces
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expdriences ont eu le mdrite de montrer que la pression dans les voies a&iennes ne permettait pas d'apprdcier ce risque. En pratique, comme il n'est pas possible de disposer de la pression transpulmonaire, c'est donc bien stir l'importance du volume (tdl&inspiratoire) que l'on va apprdcier le risque de LIVM.
R61es de I'importance des augmentations de pression-volume et de la dur~e de I'agression ; effets de la taille de I'esp~ce L'existence d'un seuil de pression-volume pour la survenue de l'oe&me et des alt&ations de permdabilitd a dtd sugg&de par Carlton et al. (20). En effet, au cours d'expdriences durant 4 heures, ces auteurs ont observd que des moutons ventilds avec un pic de pression de 30 ou 40 cmH20 n'ont pas ddveloppd d'oe&me. Celui-ci survenait pour des pressions de l'ordre de 60 cmH20. Cela semblait apparemment en contradiction avec le fait que, chez de plus petites esp~ces telles que le rat, une pression de pic de l'ordre de 30 cmH20 entralne un ce&me pulmonaire (3). En fait, Tsuno et al. (27) ont montrd que, pour des pressions du meme ordre, un oe&me survient dgalement chez le mouton, ~i condition que la ventilation soit prolong& pendant 48 heures. Ces dtudes soulignent qu'il est capital de prendre en considdration non seulement le degrd de distension pulmonaire mais dgalement la durde de l'agression. Lorsque l'agression est moddrde, une rdversibilitd partielle des anomalies a dtd ddmontrde (13). Enfin, il est int&essant de noter que la taille de l'esp~ce animale semble ddterminer la durde de distension n&essaire ~i la survenue des anomalies. Ainsi qu'on l'a vu, chez le rat, des distensions de l'ordre de quelques minutes suffisent ~i induire un oe&me moddrd (4, 13) ; apr~s moins d'une heure d'hyperinflation, l'oe&me et les ldsions ultrastructurales sont extremement sdv~res (3, 4, 22). A l'inverse, dans des esp~ces plus grosses comme le mouton, plusieurs heures de ventilation sont ndcessaires pour observer des anomalies mod&des (20) et un oe&me sdv~re n'est constatd gdndralement qu'apr~s plus de 24 heures de distension (14). Ces diff&ences s'expliquent notamment par une dlastance du syst~me respiratoire tr~s diff&ente entre les esp~ces, et donc, pour un meme ordre de grandeur de VT, un stress mdcanique diffdrent (26).
Contributions respectives de I'hyperinflation et des grandes excursions de pression-volume ; effets de la PEP Le niveau de volume pulmonaire atteint en fin d'inspiration est un d&erminant essentiel de la gen~se des LIVM. I1 convient de dissiper une ambigu'itd sur la signification de la ,, pression de pic inspiratoire,, dans les dtudes expdrimentales sur les LIVM. En effet, la plupart de ces dtudes donnent la pression de pic comme reflet du volume tdl&inspiratoire. En fait, il est clair que chez l'homme
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et chez les gros animaux, du fait de la r&istance de la sonde trachdale et des voles a&iennes, la pression de pic est un mauvais reflet de la distension pulmonaire maximale qui est mieux apprdcide par la pression de pause t~ld-inspiratoire. Iddalement, c'est ce param~tre qu'il faudrait dgalement retenir dans les dtudes expdrimentales, puisque c'est le volume pulmonaire et non la pression qui est le responsable des anomalies observdes. Compte tenu du fait que d'une part ces animaux sont ventilds avec une frdquence tr~s basse afin d'dviter une hypocapnie trop importante (25/min, ce qui correspond 5 peu pr&s au quart de la frdquence spontande d'un rat) et que, d'autre part, les respirateurs pour petits animaux sont souvent de type volum&rique, la fin de l'inspiration n'est pas un ~
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
(ALVEOLI, ExPress, Lovs) &aluant l'int&& d'une PEP dlevde ne semblent pas en faveur de cet effet. Par ailleurs, il faut dgalement tenir compte de l'effet hdmodynamique de la PEP qui, en rdduisant le ddbit cardiaque, diminue la pression de filtration microvasculaire pulmonaire. De fait, chez des rats ventilds avec une pression de pic ~i 45 cmH20 et une PEP ~i 10 cmH20, l'administration de dopamine (afin de r&ablir une pression art&idle identique ~i celle des animaux ventilds sans PEP) entralne une majoration de l'oe&me par comparaison avec les animaux ne recevant pas de dopamine (31). Si le concept de LIVM ~l haut volume pulmonaire semble clairement dtabli tant d'un point de vue exp&imental que clinique, celui de LIVM ~ibas volume li~ ~i ,~ l'ouverture et la fermeture ,, d'unitds terminales pathologiques est plus discutd parce que, expdrimentalement, les r&ultats divergent et ddpendent du mo&le exp&imental utilisd, et parce q u e - comme indiqud plus h a u t - aucune des trois grandes dtudes randomisdes n'a montrd l'int&& de niveaux dlevds de PEP. I1 semble donc que cela soit bien le niveau de volume tdl&inspiratoire qui soit le facteur crucial. Ainsi, des rats ventilds avec un volume courant normal et ~ideux niveaux de PEP (10 et 15 cmH20) n'ont ddveloppd d'oed&me pulmonaire que pour le niveau de PEP le plus dlevd (31). De meme, un doublement du volume courant, qui dtait inoffensif en l'absence de PEP, produisait un oed~me pulmonaire lorsqu'une PEP de 10 cmH20 dtait appliqude (31).
M canismes potentiels des I sions induites par la
ventilation m canique Ainsi qu'on l'a vu plus haut, les anomalies du surfactant et l'augmentation de la pression hydrostatique transmurale microvasculaire ne peuvent rendre compte ni des troubles de permdabilitd, ni des ldsions cellulaires. La responsabilitd du recrutement et de l'activation des polynucldaires dans le poumon sous l'effet de la distension (32-34) pourrait expliquer une partie des alt&ations lorsque celles-ci surviennent apr~s plusieurs heures de ventilation, comme c'est le cas chez les gros animaux (14, 20, 33). Dans le meme ordre d'esprit, l'action de cytokines pro-inflammatoires produites localement du seul fait d'une ventilation m~canique agressive (35) a dgalement ~t~ dvoqu~e pour expliquer les ldsions observdes, meme si ce dernier point est encore ddbattu (36). Ndanmoins, ces diffdrents mdcanismes ne permettent pas d'expliquer la rapiditd extreme de survenue des troubles de permdabilitd et des ldsions chez de petites esp&ces comme le rat (3, 4, 13, 22). Cette rapiditd de survenue s'explique plus logiquement par des phdnom~nes mdcaniques. West et Mathieu-Costello ont observd, en microscopie dlectronique, des anomalies sdv&res de la barri&re alvdolo-capillaire lorsque la pression transmurale microvasculaire est dlevde au-delfi de 40 mmHg (37). Ce phdnom~ne qu'ils ont appeld capillary stress failure survient lorsque la contrainte pari&ale capil-
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laire pulmonaire est grossi~rement identique ~i celle d'une paroi aortique soumise ~i une pression transmurale de 100 mmHg (37). Les similitudes morphologiques entre les ldsions induites par la distension alvdolaire et celles du capillary stress failure sont remarquables (4, 13, 22, 37). De plus, la survenue du capillary stress failure est potentialisde par une distension pulmonaire associde (37). I1 semble donc que les ldsions alvdolo-capillaires de surdistension et le capillary stress failure reprdsentent les manifestations d'un meme spectre de ddfaillance mdcanique du poumon et que leurs effets soient synergiques. Que la rupture mdcanique entralne par la suite des phdnom~nes inflammatoires avec activation de macrophages et recrutement de polynucldaires par le biais de l'IL-8 est tr~s vraisemblable. En effet, de nombreuses donndes expdrimentales in vitro, ex viva et in viva ont montrd l'implication de ce mddiateur, puissant chdmoattractant des polynucldaires neutrophiles. In vitro, des macrophages alvdolaires humains (38) ou des cellules dpithdliales (39) subissant un stress mdcanique par dlongation sdcr~tent de l'IL-8. L'analogue chez le rat de I'IL-8, le MIP-2, est retrouvd dans le liquide broncho-alvdolaire de poumons ventilds ex viva ~i haut volume (35, 40), ainsi qu'in viva (40). Enfin, Belperio et al. ont dldgamment dtudid le r61e d'un dquivalent chez la souris de l'IL-8, la chdmokine CXC2 et ses rdcepteurs (41). Ils ont montrd que la libdration de mddiateur chez des souris dtait proportionnelle au volume courant utilisd (6 ou 12 mL.kg-~), et que le blocage de ce mddiateur ou de ses rdcepteurs par des anticorps abrogeait l'afflux de polynucldaires et rdduisait l'importance des ldsions pulmonaires. Les m~mes effets dtaient obtenus chez des animaux KO pour les rdcepteurs du CXC2 (41). I1 existe donc des donndes solides pour dtablir un lien entre stress mdcanique du parenchyme pulmonaire, IL-8, activation des polynucldaires neutrophiles et ldsions induites par la ventilation mdcanique.
Effets de la distension pulmonaire sur des poumons pr alablement Bowton et Kong ont montrd que des poumons isolds agressds par de l'acide oldique ddveloppent plus d'oed~me lorsqu'ils sont ventilds avec un volume courant dlevd qu'avec un volume courant bas (42). Hernandez et al. (43) ont compard le coefficient de filtration capillaire pulmonaire de lapins ayant subi soit une agression isolde tr~s moddrde par l'acide oldique ou par la ventilation mdcanique, soit une agression combinde par ces deux facteurs. Alors que le coefficient de filtration restait inchangd apr~s l'une ou l'autre de ces agressions isolde (ce qui dtait le but recherchd), il dtait significativement plus grand apr~s agressions combindes. Ces deux dtudes ont dtd conduites sur des poumons isolds et non sur animal entier. D'autre part, elles n'ont pas dvalud si la majoration par la ventilation mdcanique des altdrations pulmonaires prdexistantes se faisait de fagon synergique ou simplement additive. En d'autres termes,
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l'effet rdsultant des deux agressions combindes n'est-il que la somme des deux agressions sdpardes ou, au contraire, est-il nettement sup&ieur ~iun simple effet de sommation? Afin de clarifier ces points, des rats ont dtd ventilds ~i thorax fermd avec un volume courant allant de 33 ~ 45 mL/kg de poids, selon les groupes, apr&s avoir regu pour certains une injection d'un toxique, l'alphanaphtyl-thiourde (ANTU), ~i dose faible afin de crder un ce&me pulmonaire discret. L'abondance de l'ce&me pulmonaire a dtd comparde chez les animaux ayant regu seulement I'ANTU, seulement la ventilation, ou bien les deux agressions. L'analyse statistique (recherche d'interaction au cours d'une analyse de variance ~i deux facteurs) a clairement montrd, que pour les degrds de distension les plus importants, l'effet des deux agressions dtait tr~s nettement synergique, alors qu'il dtait simplement additif pour des degrds moindres de distension (44). L'existence de cette synergie a dtd rdcemment confirm& (45). Un dldment-cld de cette synergie dtait l'importance de la ddtdrioration des propridtds mdcaniques pulmonaires avant la ventilation m&anique. En effet, la quantitd d'oe&me produite par la ventilation mdcanique ~i haut volume dtait inversement corrdlde fi la compliance quasi-statique du syst~me respiratoire mesurde au tout ddbut de la ventilation, avant que celle-ci ne puisse ajouter une quelconque altdration significative. Ces rdsultats ont dtd confirm& dans une dtude montrant qu'il dtait possible de ,, prddire ,, l'importance des LIVM, en fonction des propridtds de la courbe pression volume du syst~me respiratoire avant route ventilation (46). En plus des phdnom~nes ,, physiques ,,, qui rdduisent de fagon tr~s significative le volume pulmonaire ventilable, des phdnom&nes inflammatoires et/ou infectieux peuvent sensibiliser le poumon aux Idsions induites par la ventilation m&anique (47). En effet, il est possible d'imaginer une plus grande lib&ation de cytokines pro-inflammatoires dans le poumon et dans la circulation systdmique du fait d'une ventilation mdcanique ~i haut volume de poumons ddj~i Idsds par des processus inflammatoires. Bouadma et al. ont utilisd le mo&le d'ischdmie-reperfusion mdsentdrique pour dtudier cette question (48). Ce mo&le bien dtabli d'inflammation systdmique avec ldsions pulmonaires (49) aboutit ~i une augmentation des phdnom~nes inflammatoires lorsque le syst~me est soumis ~t une deuxi~me stimulation ou agression (en anglais the two-hit hypothesis (50)). Dans l'dtude de Bouadma et al. (48), les concentrations pulmonaires de cytokines pro-inflammatoires telles que TNF-., IL-1, ou IL-6 et les chdmokines MIP-2 dtaient significativement plus dlevdes apr~s 4 heures de ventilation mdcanique ~i haut volume chez les animaux ayant subi une ischdmie-reperfusion mdsent&ique que les animaux tdmoins. De fagon int&essante, cette diffdrence de concentration dtait dgalement observde avec des modalitds de ventilation moins agressives (6 mL.kg -~ et 10 mL.kg -~ de VT) sans toutefois atteindre ~i chaque fois la significativitd statistique. Les concentrations plasmatiques de ces mddiateurs dtaient dgalement plus dlevdes chez les animaux ayant subi l'ischdmie-reperfusion, cette fois-ci, quelle que soit la modalitd ventilatoire. Cette &ude sugg~re donc que des modalitds ventilatoires par ailleurs ,, inoffensives ,, le deviennent en prdsence d'une inflammation
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systdmique (ici, induite par une ischdmie-reperfusion m&entdrique). En restant dans l'idde des deux agressions successives (plus ~, proche ~, conceptuellement des conditions cliniques que la ventilation mdcanique ~i tr~s haut volume sur poumon sain), la meme dquipe a dtudid l'interaction entre ventilation mdcanique ~lhaut volume (30 mL.kg-' de VT) et choc hdmorragique avec rdanimation. Elle a montrd d'une part que la ventilation mdcanique ~i haut volume entrainait des concentrations pulmonaires et systdmiques de cytokines pro-inflammatoires significativement plus importantes chez des animaux ayant subi un choc hdmorragique que chez des animaux indemnes et, d'autre part originale, que la sdquence des deux agressions dtait importante puisque la concentration de cytokines pro-inflammatoires (ici I'IL-1,) dans le poumon dtait significativement plus importante lorsque la premiere ,, agression ,, dtait la ventilation mdcanique ~i haut volume, suivie du choc hdmorragique (51). Savel et al ont &udid l'effet de deux modalit& ventilatoires (6 et 15 mL.kg ~ de VT) chez des lapins prdalablement instillds ou non avec une solution de Pseudomonas aeruginosa (52). En l'absence de /2. aeruginosa, la permdabilitd alvdolaire aux protdines &ait augment& dans le groupe ventild avec 15 mL.kg ~ de V~ par rapport ~i celui ventild avec 6 mL.kg -~ de VT. La prdsence de/2. aeruginosa augmentait considdrablement la permdabilitd dpithdliale dans les deux groupes (52), l~t encore indiquant qu'un volume courant ~ inoffensif ~, pouvait s'avdrer, dans certaines conditions, ddldt~re. Utilisant un module de pneumopathie unilat&ale ~t P aeruginosa, Schortgen et al. ont dtudid l'effet de diffdrentes modalitds ventilatoires (VT rdduit (6 mL.kg ~) avec ou sans PEP 8 cmH20), VT rdduit en ddcubitus latdral gauche avec PEP ; V~ dlevd (27 mL.kg ~) en ZEP (et ventilation liquide partielle) sur la dissdmination bactdrienne et la rdaction inflammatoire (53). A l'exception de celle utilisant un V~ rdduit avec PEP, toutes les modalitds ventilatoires ont entralnd la dissdmination controlat&ale de P. aeruginosa. La dissdmination globale (locale et systdmique) de P. aeruginosa &ait significativement moindre dans les groupes d'animaux non ventilds, ou ventilds avec un VT rdduit avec PEP. Les concentrations plasmatiques de TNF-0~ dtaient significativement plus importantes dans les modalitds ventilatoires sans PEP (inddpendamment du V0 (53). Des rdsultats similaires, montrant la synergie entre infection pulmonaire et ventilation mdcanique en termes d'inflammation locale et systdmique, ont dtd obtenus par d'autres dquipes (54, 55). Ces rdsultats sugg~rent donc qu'en prdsence d'une infection pulmonaire, un volume courant m~me modeste peut aggraver des ldsions pulmonaires (52) et favoriser la dissdmination bactdrienne et la libdration de TNF-0~ (53). La PEP semble rdduire ces effets ddl&~res (53) comme suggdrd prdcddemment (56, 57). Lorsqu'on inverse l'ordre des agressions (ventilation puis challenge bactdrien), Lin et al. ont montrd que des animaux ventilds avec une ventilation fi haut volume pulmonaire dtaient plus sensibles ~t l'infection pulmonaire par/2, aeruginosa avec une dissdmination systdmique des bact&ies plus frdquente (58).
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L'ensemble de ces dtudes indique donc clairement l'importance de l'dtat du poumon avant l'instauration de la ventilation m&anique dans le risque et la susceptibilitd de ddvelopper des Idsions induites par celle-ci. L'importance de l'altdration des propri&ds mdcaniques et de la perte de volume pulmonaire ventilable est le d&erminant majeur du risque de ldsions accrues (59).
Prevention des I sions induites par la ventilation m canique : donn es exp rimentales Le p r i m u m mavens des ldsions induites par la ventilation mdcanique &ant une altdration du parenchyme pulmonaire causde par des contraintes mdcaniques rdgionales ou globales excessives, la premiere des interventions consiste ?i limiter ce stress mdcanique puis de rdduire l'inhomogdnditd de la ventilation et tenter de restaurer les propridtds mdcaniques pulmonaires. La rdduction du volume courant est dvidemment la premiere fagon de limiter la distension pulmonaire, en gardant ~i l'esprit que certains volumes courants, dits ~ inoffensifs ~ pour des poumons sains, ne le sont pas lorsque les poumons sont Idsds. L'intensitd de cette rdduction n'a pas fait l'objet de beaucoup d'dtudes expdrimentales en dehors du travail de Frank et al. (60) montrant un bdndfice ~i rdduire le volume courant jusqu'~i 3 mL.kg 1. Les zones non ddpendantes du poumon sont soumises ~iune pression transpulmonaire plus importante que les zones ddpendantes. Ce gradient s'accentue en prdsence d'une hdtdrogdnditd pulmonaire telle que celle rencontrde au cours du SDRA, et peut atteindre 10 cmH20 dans un module expdrimental de ldsions pulmonaires ~i l'acide oldique (61). En ddcubitus ventral, l'inflation rdgionale du poumon est plus homog~ne, ce qui attdnue le gradient de pression transpulmonaire, rdduisant les contraintes mdcaniques imposdes par la ventilation mdcanique. Expdrimentalement, ce positionnement rdduit les LIVM chez le chien (62). Son intdrSt en pratique est ddtailld dans le chapitre qui lui est dddid. L'application d'une PEP augmente la pression transpulmonaire et le volume tdld-inspiratoire. Comme indiqud plus haut, les dtudes sur la PEP ont montrd des rdsultats contrastds, parfois contradictoires. I1 semble que la nature du module expdrimental utilisd influence considdrablement l'effet de la PEP : plus le poumon est recrutable (ddpldtion de surfactant par exemple), plus l'effet de la PEP est bdndfique. A l'inverse, ce bdndfice n'est pas retrouvd avec un module plus ~ agressif ~ comme l'acide chlorhydrique. L'utilisation de niveaux dlevds de PEP devra donc 8tre discutde au cas par cas, et route dldvation importante de la pression de plateau suggSrera l'absence de recrutement par la PEP et un risque de surdistension des zones saines. Puisque la plus grande susceptibilitd du poumon ldsd h la ventilation mdcanique est lide ~t une altdration de ses propridtds mdcaniques, il est sdduisant de
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vouloir tenter de les restaurer afin de limiter les LIVM. Des substances comme le surfactant ou les perfluorocarbones, possddant des propridtds tensioactives, ont dtd dvaludes. Dans les modules oh l'agression pulmonaire est lide 5 la perte du surfactant (ddpldtion du surfactant par lavages rdpdtds au sdrum sald principalement), l'adjonction de surfactant exog~ne ou d'une substance ,~surfactant-like,, comme les perfluorocarbones en grande quantitd s'est avdrde particuli~rement efficace (63,64). En revanche, des quantitds de perfluorocarbones beaucoup plus faibles suffisent ~i limiter l'importance des LIVM dans d'autres modules (rdduction du volume pulmonaire adrd par inondation alvdolaire par du s&um physiologique, ou ventilation mdcanique ~i haut volume) (65). I1 a meme dtd montrd que des quantitds trop importantes de perfluorocarbones aggravaient les ldsions pulmonaires (45, 66). I1 n'est pas inint&essant de s'attarder sur les raisons de cette aggravation car elles permettent d'expliquer (67) - au moins en partie - l'dchec des dtudes cliniques comparant ventilation liquide partielle et ventilation m&anique conventionnelle (68, 69). Ainsi, deux dtudes exp&imentales, l'une avec des poumons prdalablement sains (66), l'autre avec des poumons ddj~i ldsds (injection d'alpha-naphtyl-thio-urde) (45) ont montrd de faqon concordante que des petites doses de perfluorocarbones permettaient d'abroger les ldsions pulmonaires induites par la ventilation m&anique ~ihaut volume alors que des doses plus importantes les aggravaient. L'emploi de doses plus importantes de perfluorocarbones s'accompagnait de pressions tdld-inspiratoires tr~s dlevdes alors que celles-ci dtaient plus basses que les tdmoins avec les petites doses. Tout se passait comme si, au lieu de recruter le poumon et d'augmenter son volume ventilable, les perfluorocarbones le diminuaient. Une dtude scanographique a confirmd cette hypoth~se, en montrant que les fortes doses de perfluorocarbones pidgeaient du gaz au sein du parenchyme pulmonaire, excluant ainsi ces territoires de la ventilation (66). Aussi, l'application d'un volume courant qui ne prenait pas en compte cette perte importante de poumon ventilable entralnait la surdistension des territoires pulmonaires les plus sains. II est regrettable que les dtudes cliniques randomisdes, en testant des doses trop importantes de perflubron, aient entralnd la fin (provisoire ?) de cette voie de recherche. I1 serait intdressant d'dvaluer cliniquement l'effet de petites doses (67), ou de nouveaux modes d'administration des perfluorocarbones (adrosol, vaporisation) (70, 71).
Implications cliniques Longtemps, le paragraphe ,, Relevance (sic) clinique ,, du chapitre LIVM des traitds de ventilation mdcanique ne pouvait qu'indiquer que, compte tenu de l'hdtdrogdnditd des ldsions pulmonaires au cours du SDRA et donc de l'inhomogdnditd de la distribution de la ventilation, certaines zones &aient tr~s probablement ~ risque de surdistension, et que des volumes courants tr~s dlevds (du meme ordre de grandeur que ceux utilisds exp&imentalement pour induire
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des ldsions pulmonaires sur des poumons sains) pouvaient sans doute y &re atteints. Depuis, ce concept expdrimental a regu une validation clinique indiscutable avec l'dtude du NIH montrant une diff&ence de mortalitd significative en ddfaveur du groupe de patients ventilds avec 12 mL.kg -~ de volume courant par rapport ~i ceux ventilds avec 6 mL.kg -~ (12). Les LIVM sont donc une rdalitd en clinique et ont dtd appeldes VALI (pour ventilator-associated lung injury) (72). Cette dtude (12) a clairement montrd les effets ddldt~res d'une ventilation inappropride sur des poumons pathologiques. Qu'en est-il sur des poumons sains ? En d'autres termes, peut-on crder des LIVM/VALI en dehors du contexte expdrimental ? Gajic et al. ont repris les param~tres ventilatoires de quatre services de rdanimation de la Mayo Clinic aux F,tats-Unis, en s'int&essant aux patients n'ayant pas les critSres de Idsions pulmonaires aigues ~i l'initiation de la ventilation m&anique (73). Plus de 30% de ces patients dtaient ventilds avec un volume courant ? 12 mL.kg -' (poids prddit), avec un volume courant ddpassant les mL.kg -' pour certains (73). PrOs de 25 % de ces patients (initialement indemnes de ldsions pulmonaires) allaient en d&elopper et l'importance du volume courant au ddbut de la ventilation m&anique &ait, en analyse multivariable, significativement associde ~i la survenue secondaire de ldsions pulmonaires aigues. Pour autant, il est intdressant de noter qu'il n'a pas dtd ndcessaire d'attendre les rdsultats de l'dtude de I'ARDSN et (12) pour que les cliniciens prennent en compte ce concept expdrimental de LIVM. Entre les anndes 70 et 80, l'utilisation de volumes courants atteignant 15 fi 20 mL.kg -~ &ait la r~gle (74-77). Quinze ans plus tard, les volumes courants utilisds dtaient situds entre 10 et 15 mL.kg -~. Par exemple, dans l'&ude de Gammon sur les facteurs de risque de barotrauma au cours du SDRA, le volume courant dtait de 11,5 mL.kg ~ (78). Cette impression de diminution progressive du volume courant (que l'on devinait grace ~i ces diff&entes dtudes sur le SDRA mais dont l'objectif principal n'dtait pas l'observation des pratiques) a dtd confirm& par une premiSre dtude internationale des pratiques ventilatoires appliqudes ~i pros de 1 600 patients dans huit pays diff&ents (79). Dans cette &ude, le volume courant moyen des patients ventilds pour SDRA n'dtait pas diffdrent de celui utilisd chez les patients ventilds pour une autre cause d'insuffisance respiratoire aigue et dtait de 8,7 mL.kg -' (79). Une deuxi~me dtude internationale (80), rdalisde deux ans plus tard avec un nombre encore plus important de patients (15 700), provenant de 20 pays diff&ents, montrait, sans ambigui'td, que la tendance observde de fagon ponctuelle ici et l~i, chez un nombre restreint de patients depuis quelques ann&s, correspondait bien ~i un changement des pratiques ventilatoires au cours du SDRA. En effet, en mars 1998, et donc plus d'un an avant que les premiers rdsultats de I'ARDSNet (12) ne soient connus, le volume courant moyen utilis~ au cours du SDRA &ait de 8,5 mL.kg 1 (80). Les legons des dtudes expdrimentales ont donc incontestablement permis une modification des pratiques cliniques en ce qui concerne la rdduction du volume courant qui a permis une amdlioration du pronostic au cours du SDRA
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(81). I1 est intdressant de noter qu'il n'en va pas de meme pour la PEP : comme indiqud plus haut, l'effet bdndfique de niveaux dlevds de PEP Nest pas retrouvd de faqon constante dans les dtudes expdrimentales (il est parfois m~me ddldt~re), expliquant sans doute (en pattie) les difficultds ~i mettre en dvidence cet effet chez l'homme (82, 83).
Conclusion Des volumes tdld-inspiratoires trop importants entrainent l'apparition d'un cedSme pulmonaire ldsionnel. Des ldsions pulmonaires prdexistantes rendent le poumon encore plus sensible aux effets ddldt~res de la ventilation mdcanique. La prise en compte de ces notions a permis une diminution notable de la mortalitd du SDRA. Cependant, il est important de s'assurer que cette prise en compte soit effective partout (84), et pour la majoritd des patients, y compris ceux dont le SDRA n'est pas encore avdrd (73).
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Imagerie du SDRA J.-C. Richard et C. Gudrin
Introduction L'imagerie pulmonaire est dtroitement lide au SDRA. La radiographie pulmonaire standard est intdgrde ~i son diagnostic opdrationnel et reste irremplagable pour le suivi quotidien des patients, mais prdsente des insuffisances majeures qui limitent son intdr~t clinique. L'utilisation de la tomodensitomdtrie thoracique au cours du SDRA a dtd introduite il y a un peu plus de 20 ans, et s'est ensuite considdrablement ddveloppde, en l'absence d'outil ahernatif d'exploration pulmonaire rdgionale vdritablement fiable. La tomodensitomdtrie a ainsi permis d'accroltre sensiblement la connaissance physiopathologique et l'dvaluation des thdrapeutiques ventilatoires du SDRA, mais son intdret en pratique clinique mdrite d'etre discutd et rddvalud. Depuis peu, de nouvelles techniques d'imagerie pulmonaire sont apparues, pour pallier les limites de l'examen tomodensitomdtrique, et vont probablement dlargir les indications potentielles de l'imagerie au cours du SDRA.
La radiographie pulmonaire et ses limites La radiographie pulmonaire est actuellement requise pour le diagnostic du SDRA. Elle est aussi utilisde quotidiennement au titre du monitoring des patients atteints de cette pathologie, que ce soit pour documenter le placement addquat des cathdters et de la sonde d'intubation, surveiller l'amdlioration ou la ddgradation des images parenchymateuses, ou ddtecter les complications du SDRA (pneumonie nosocomiale, pneumothorax, dpanchements pleuraux, atdlectasies). Les avantages de cette technique sont le cofit relativement faible et la rdalisation des clichds au lit du malade, au prix d'une irradiation moddrde (0,02 mSievert soit moins de 1 % de la dose annuelle d'origine naturelle). En revanche, la qualitd technique de ces radiographies est mddiocre, meme si l'utilisation de syst~mes digitalisds semble apporter un gain substantiel en qualitd. En rdanimation, si l'on exclut les repositionnements de cathdters, environ
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Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
30-40 % des radiographies pulmonaires aboutissent ~t une modification thdrapeutique (1). Au cours du SDRA, la performance diagnostique de la radiographie pulmonaire semble toutefois faible, que ce soit pour le diagnostic de pneumopathie nosocomiale, d'dpanchement pleural, de consolidation ou de syndrome alvdolo-interstitiel (2).
La tomodensitom trie pulmonaire Aspects techniques La tomodensitomdtrie repose sur la mesure de l'attdnuation des rayons X dans la mati~re, qui ddpend principalement de l'dnergie du rayon X incident et des caractdristiques de la structure dtudide (densitd physique, numdro atomique, densitd d'dlectrons). Dans les tissus biologiques, en utilisant des rdglages approprids, on peut considdrer qu'attdnuation et densitd physique sont lindairement relides (3) et les images scanographiques correspondent donc ~i une cartographie de la densitd pulmonaire. Ces images sont composdes d'une matrice de pixels qui sont les plus petits dldments indivisibles constitutifs de l'image scannographique. Chaque pixel de l'image repr&ente un voxel, c'est-~i-dire un volume de tissu ddpendant de la taille du pixel et de l'dpaisseur de coupe scanographique (1 ~i 10 mm usuellement). Le coefficient d'attdnuation lU mesurd dans chaque voxel est utilisd pour exprimer l'attdnuation en unitd Hounsfield (UH) selon la formule suivante : UH = 1 000)<(~voxel-~eau)/ILteau, ~eau &ant le coefficient d'attdnuation de l'eau. Avec cette m&hode de calcul, l'eau a une attdnuation de 0 UH, et l'air une attdnuation de -1 000 UH.
Analyse des images tomodensitom triques Analysequalitative L'analyse des images tomodensitom&riques peut se faire qualitativement, en utilisant la nomenclature radiologique standard, qui identifie quatre anomalies principales au cours du SDRA (fig. 1): 1- les opacitds en verre ddpoli, qui sont des opacitds parenchymateuses n'effa~ant pas les structures vasculaires et bronchiques ; 2- les condensations, qui sont des opacitds parenchymateuses sans distinction des structures vasculaires ; 3- l'dpaississement des septa interlobulaires ;
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4- les kystes. D'autres anomalies sont aussi frdquemment observdes : dpanchement pleural, bronchogramme adrique, pneumothorax. L'dvaluation de l'extension de ces anomalies permet d'obtenir des scores semi-quantitatifs (4). L'intdr& de cette analyse est limitd au cours du SDRA, dans la mesure off ces scores ne sont pas corrdlds aux mesures physiologiques (4), si l'on excepte une corrdlation entre l'extension des consolidations et l'importance de l'hypoxdmie (4).
Fig. 1 - Coupe tomodensitomdtrique d'un patient atteint de SDRA.
Analyse quantitative L'analyse quantitative des images tomodensitomdtriques n'est pas rdalisde en routine et requiert des logiciels dddids. Elle ndcessite que le scanner soit rdguli~rement calibrd pour quantifier de fagon fiable la densitd.
Analyse volumetrique L'analyse quantitative des images tomodensitomdtriques permet de mesurer le volume pulmonaire, qui correspond ~i la somme du volume des voxels contenant du parenchyme pulmonaire. En faisant l'hypoth~se que la densitd du tissu pulmonaire est dgale ~i 1 on peut ddduire la composition d'un voxel ~i partir de l'attdnuation exprimde en UH. Ainsi, un voxel prdsentant une attdnuation de -600 UH est composd de 60 % de gaz et de 40 % de tissu (incluant paren-
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
chyme pulmonaire, sang, oe&me, cellules inflammatoires). II est aussi possible de ddterminer le volume de gaz alvdolaire et le volume de tissu dans une rdgion pulmonaire avec les quatre dquations suivantes : volume de gaz alvdolaire = -UH/1 000 • volume rdgion pulmonaire si UH < 0; volume de gaz alvdolaire = 0 si UH > 0; volume de tissu = (1 +UH/1 000) • volume rdgion pulmonaire si UH < 0; volume de tissu = volume rdgion pulmonaire si UH > 0; Ainsi, la mesure du volume de gaz alvdolaire total lors d'une pause tdl&expiratoire permet d'estimer de fagon fiable la capacitd r&iduelle fonctionnelle. Ce type d'analyse a toutefois quelques limites : les mesures sont rdalisdes en condition statique (lors de pauses respiratoires) alors qu'on explore un phdnom~ne dynamique, l'analyse ne tient pas compte des redistributions du volume sanguin induit par la PEP par exemple, et l'injection de produit de contraste invalide la mesure (3).
Analysecompartimenta/e L'attdnuation radiologique permet de classer les voxels en fonction de leur degrd d'a&ation. On peut ainsi ddfinir, selon une m&hode ddveloppde par Gattinoni et al. (5), un compartiment hyperinflatd composd de voxels avec attdnuation comprise entre-1 000 et-901 UH, un compartiment normalement adrd composd de voxels avec attdnuation comprise entre -900 et -501 UH, un compartiment faiblement adrd composd de voxels avec attdnuation entre -500 et-101 UH et un compartiment non adrd composd de voxels avec attdnuation comprise entre- 100 et + 100 UH. Ces limites peuvent varier entre les auteurs (6) ainsi que la mani~re d'exprimer les donndes, ce qui peut expliquer certaines diff&ences de r&ultats. Ainsi, certaines dquipes expriment les diff&ents compartiments en fonction de leur volume (7) alors que d'autres le font en termes de poids du tissu dans le compartiment (5), arguant du fait que c'est le tissu pulmonaire du compartiment qui est soumis ~i l'hyperinflation. Ces diff&ences d'approche front que peu d'influence pour le compartiment non adrd (dont la densitd est comprise entre 0,9 et 1,1) mais donnent des rdsultats d'autant plus dloignds que l'a&ation est importante. Par exemple, pour un poumon de 2 kg avec une densitd dgale ~i 0,6, un compartiment hyperinflatd dvalud fi 10 % du volume pulmonaire, implique que seulement 1 % du parenchyme pulmonaire est soumis ~i l'hyperinflation. La comparaison de la quantitd de tissu au sein des zones non adrdes avec celles mesurdes dans une rdgion identique chez des sujets normaux a permis de ddfinir deux types d'atdlectasies: les atdlectasies par compression, au sein desquelles la quantitd de tissu est similaire ~l celle des sujets normaux, et les atdlectasies inflammatoires, dans lesquelles la quantitd de tissu ddpasse la moyenne + 1 d&iation standard de la quantitd de tissu des sujets normaux (8). La limite de ce type d'analyse est qu'il n'est pas possible de ddtecter l'association des deux mdcanismes au sein d'une mSme zone.
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Apport de la tomodensitomEtrie a la connaissance physiopathologique du SDRA Concept de baby lung Apr~s sa description initiale par Ashbaugh en 1967, le SDRA dtait considdrd comme un processus impliquant diffusdment le parenchyme pulmonaire, sur la base de l'aspect de la radiographie pulmonaire standard. Les premieres dtudes scanographiques rdalisdes presque deux ddcennies plus tard ont ddmontrd le caract~re hdtdrog~ne de l'atteinte pulmonaire, associant des rdgions pulmonaires radiologiquement normales ou quasi normales et des zones pulmonaires tr~s pathologiques. L'dtude conjointe de la mdcanique respiratoire et du scanner pulmonaire quantitatif a ensuite permis de ddmontrer que la compliance du syst~me respiratoire dtait &roitement corr~lde ~t la quantitd de parenchyme pulmonaire adrd (9). La mise en dvidence d'une compliance spdcifique normale (9) a ddmontrd que la diminution de la compliance au cours du SDRA n'dtait pas lide ~tune modification des caract&istiques dlastiques pulmonaires, mais quasi exclusivement lide ~t la rdduction du poumon adrd. Ces donndes tomodensitomdtriques ont fait dmerger le concept de ~,baby lung~ dans la mesure oft la masse du parenchyme pulmonaire adrd est dvalude ~i 200500g chez l'adulte atteint de SDRA, soit une valeur comparable ~i celle mesurde chez l'enfant sain de 5-6 ans (10). L'dmergence de ce concept, associde ~i la mise en dvidence, chez l'animal, de l'agression pulmonaire lide ~t la ventilation mdcanique ~t haut volume (volotrauma) (11), a eu un retentissement majeur sur les th&apeutiques ventilatoires du SDRA, avec tout d'abord la prise de conscience de la ndcessitd de rdduire les volumes courants pour s'adapter ~t la perte de volume adrd. Ceci a abouti ~tla ddmonstration clinique dans un essai thdrapeutique multicentrique nord-amdricain d'une surmortalitd lid ~t l'utilisation de volumes courants dlevds chez les patients avec SDRA (12). La deuxi~me consdquence est le ddveloppement du concept de <~poumon ouvert ~, qui vise ~i appliquer certaines thdrapeutiques ventilatoires pour recruter les zones pulmonaires non adrdes, sans que son implication clinique en termes pronostic n'ait dtd formellement ddmontrde ~t ce jour.
Le module de I'Eponge et ses limites Au cours du SDRA comme chez le sujet sain, les dtudes scanographiques ont ddmontrd que la densitd pulmonaire augmentait des rdgions non ddpendantes vers les rdgions ddpendantes en ddcubitus dorsal (13). Toutefois, au cours du SDRA, la densitd pulmonaire est dgale au double de celle observde chez le sujet sain, quel que soit le niveau auquel on la mesure sur l'axe sterno-dorsal (13), infirmant l'existence d'une distribution gravitationnelle de l'oe&me pulmonaire. II a donc dtd sugg&d que l'augmentation du poids du poumon dtait ~i l'origine d'une augmentation de la pression hydrostatique dans les rdgions
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
sous-jacentes, et donc d'un collapsus du poumon sous son propre poids. Ce mod&le, comparant le comportement du poumon ~t celui d'une dponge (14) implique que l'atdlectasie au cours du SDRA survient principalement en raison des forces gravitationnelles (atdlectasie de compression) et est distribude de fagon identique dans les lobes supdrieurs et infdrieurs. De plus, il imp|ique que les pressions critiques d'ouverture et de fermeture alvdolaires exprimdes en cmH20 soient au maximum dgales ~t la hauteur antdro-postdrieure du thorax. Enfin, il implique que l'augmentation de la pression dans les voies adriennes contrecarre la pression hydrostatique et aboutisse ~l des phdnom~nes d'ouverture-fermeture des petites voies adriennes dans certaines rdgions pulmonaires off la pression hydrostatique est supdrieure ~i la PEP et infdrieure ~i la pression tdl~-inspiratoire. Plusieurs donndes cliniques et expdrimentales remettent toutefois en cause ce module 9 l'augmentation de densitd est distribude non seulement selon l'axe sternodorsal, mais aussi cdphalo-caudal, suggdrant un r61e additionnel de la pression abdominale sur la survenue d'atdlectasies de compression (15) ; la ddmonstration expdrimentale de l'implication d'une inondation des petites voies adriennes (16) a remis en cause l'existence du phdnom~ne d'ouverturefermeture des petites voies adriennes, et peut expliquer ~i la fois l'aspect scanographique et celui de la courbe pression volume ; - les pressions critiques d'ouverture et de fermeture alvdolaires dans le SDRA ddpassent 50 cmH20 (17), ddmontrant l'implication d'autres facteurs ~i i'origine du collapsus pulmonaire. Malgrd ses limites, le module de l'dponge a rdcemment dtd confort~ par des donndes expdrimentales ddmontrant une dtroite corrdlation entre le gradient sterno-dorsal de pression pleurale mesurd chez le chien et le gradient de pression hydrostatique moddlisd sur les donndes du scanner (18). I1 est toutefois probable qu'il ne puisse pas expliquer ~i lui seul l'ensemble des phdnom~nes impliquds dans le SDRA, et que d'autres facteurs soient ?i l'origine des atdlectasies (rdsorption, altdration du surfactant, compression pulmonaire par le coeur en ddcubitus dorsal, influence de la pression abdominale). -
-
Modalit~s du recrutement et du d~recrutement alv~olaires Le scanner thoracique est devenu l'outil de rdfdrence pour mesurer le recrutement alvdolaire, qui est ddfini par la rd-adration de zones pulmonaires non adrdes caractdrisdes par une attdnuation des rayons X comprise entre -100 et +100 unitds Hounsfield (UH) (soit une densitd comprise entre 0,9 et 1,1). L'adjonction de zones faiblement adrdes dans la ddfinition du recrutement a dtd proposde (19), sans qu'il soit possible ~t l'heure actuelle de privildgier une mdthode sur l'autre. Alternativement, le ddrecrutement correspond ~ une perte d'adration. Au cours du SDRA, le recrutement alvdolaire est tr~s nettement prddominant dans les rdgions pulmonaires ddpendantes, massivement ddrecrutdes chez les patients en ddcubitus dorsal (17). Les dtudes scannographiques ont
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aussi ddmontrd, ~i la fois chez l'animal soumis ~i une agression pulmonaire par acide oldique (18) et les patients atteints de SDRA (17), que le recrutement dtait un phdnom~ne continu au cours de l'inspiration, confirmant les donndes thdoriques (20) et l'analyse des courbes pression-volume du syst~me respiratoire (21). 12analyse scanographique du recrutement permet aussi d'estimer les pressions critiques d'ouverture, c'est-~i-dire les pressions dans les voies adriennes auxquelles survient un recrutement alvdolaire suppldmentaire. Dans un travail portant sur 5 patients atteints de SDRA, les pressions critiques d'ouverture prdsentaient une distribution gaussienne avec un mode ~i 20 cmH20, mais leur valeur ddpassait 40 cmH20 chez certains patients (17). Des donndes ldg~rement diffdrentes ont dtd retrouvdes dans une dtude portant sur 26 patients avec Acute Lung Injury pr&oce (22), avec une distribution bimodale (30 et 40 cmH20). Cette large gamme de pressions d'ouverture a dtd rapportde ~a des origines physiopathologiques diffdrentes (6) : d'une part les atdlectasies de compression secondaires au collapsus des petites voie adriennes dont les pressions d'ouverture sont proches de 20 cmH20, et d'autre part les atdlectasies secondaires ~i un collapsus alvdolaire, dont les pressions d'ouverture peuvent ddpasser 40 cmH20 (6). ParallSlement, le ddrecrutement est lui aussi un phdnom~ne continu au cours de l'expiration (17), avec des pressions critiques de fermeture majoritairement situdes entre 5 et 10 cmH20, mais pouvant ddpasser 20 cmH20 chez certains patients (17). Ces donndes supportent l'utilisation de manoeuvres de recrutement au cours du SDRA chez l'homme, ensuite consoliddes par l'utilisation d'un niveau de PEP d'au moins 5 ~i 10 cmH20, qui peut toutefois 8tre nettement insuffisant pour emp&her le ddrecrutement chez certains patients (22).
Concept de potentiel de recrutement Le scanner peut aussi dvaluer le potentiel de recrutement des patients atteints de SDRA, c'est-~a-dire le pourcentage de poumon potentiellement recrutable, ainsi que le poumon non accessible au recrutement, c'est-~i-dire consolidd. Ces mesures ndcessitent une acquisition tomodensitomdtrique ?a PEP basse et une seconde au cours d'une manoeuvre de recrutement. Le tableau I rdsume les dtudes rdalisdes chez l'homme avec les diffdrences de protocole expdrimental et de population dtudide expliquant la variabilitd des rdsultats. I1 semble que des pressions d'insufflation trSs dlevdes (> 60 cmH20) soient susceptibles de recruter la quasi-totalitd du poumon, dans les SDRA pr&oces (22). Dans les formes plus tardives, la ,,recrutabilitd~ est plus faible et environ 25% du poumon reste consolidd. Chez 68 patients avec SDRA, Gattinoni et al. ont individualisd, en se basant sur la mddiane du potentiel de recrutement, un groupe ~i potentiel de recrutement dlevd (> 9 % du poids pulmonaire total) et un groupe ~i bas potentiel de recrutement (< 9 % du poids pulmonaire total) (23). Les patients ~ potentiel de recrutement dlevd avaient une agression pulmonaire plus sdvSre, comme en tdmoignent un poids pulmonaire total significativement plus dlevd, un rapport PaO2/FiO2 et une compliance du systSme respiratoire significativement plus
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bas, associds 5 une mortalitd significativement plus dlevde (41 v s 15 %). Dans ce travail, le potentiel de recrutement et I'IGS II dtaient les deux seuls facteurs prddictifs de dd&s en analyse multivaride (23). Les SDRA primaires post-infectieux dtaient significativement plus frdquemment observds dans le groupe ~ifort potentiel de recrutement (53 v s 21%), alors que les sepsis d'origine extrapulmonaire &aient significativement plus frdquents dans le groupe ~i bas potentiel de recrutement (50 v s 21%). Ces donndes vont 5 l'encontre de rdsultats ant& rieurs (24), dans lesquels la recrutabilitd dtait dvalude avec des niveaux de pression significativement plus faibles, et ces diffdrences s'expliquent probablement par des pressions critiques d'ouverture plus dlevdes dans les SDRA primaires post-infectieux. Tableau I - Potentiel de recrutement dvalud en tomodensitom&rie au cours de I'ALI/SDRA. M R = manoeuvre de recrutement 9 N R = non rapportd. l~tudes
Nombre de patients
Ddlai entre ddbut du SDRA et scanner (jours)
Pression maximale de la MR
Potentiel de recrutement (% poids pulmonaire)
Poumon consolidd (% poids pulmonaire)
5
4,6+3*
45 cmH20
6%+6*
NR
Gattinoni (23)
68
5+5*
45 cmH20
13%+11*
24%
Borges (22)
11
3,1+1,6"
60 cmH20
Environ 60 %
<5%
Crotti (17)
*moyenne+_ 1 DS
Description des anomalies tomodensitom triques du SDRA Caractrisation des anomalies tomodensitomEtriques au cours de I'Evolution du SDRA Au cours de la premiere semaine d'dvolution de la maladie, les opacitds en verre ddpoli sont prddominantes et correspondent ~i un oe&me interstitiel, associd un comblement alvdolaire partiel par de l'oe&me, des cellules inflammatoire et des ddbris cellulaires (6). Les condensations sont prddominantes dans les rdgions ddpendantes, alors que des zones scanographiquement normales sont principalement situdes dans les rdgions non ddpendantes. En l'absence de gudrison apr~s la premiere semaine d'dvolution, apparaissent des opacit& r&iculaires, associd 5 une dilatation des bronchioles dvocatrice d'un processus fibroprolifdratif. Des kystes apparaissent prdf&entiellement dans les rdgions non ddpendantes, et leur extension est corrdlde 5 la durde de ventilation mdcanique avec pression tdl&inspiratoire dlevde, sugg&ant l'impli-
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cation des rdglages de la ventilation mdcanique dans la gen~se de ces anomalies radiologiques (25). Plusieurs mois apr~s la phase initiale du SDRA, un aspect rdticulaire au scanner dvocateur de fibrose pulmonaire persiste dans plus de 80 % des cas (26, 27), et prddomine dans les rdgions antdrieures. L'extension de ces images rdticulaires est corrdlde ~i la durde de la ventilation mdcanique, mais ne ddpasse gdndralement pas 10% du volume pulmonaire (27). Des opacitds en verre ddpoli sont aussi retrouvdes chez 60% des patients, mais leur extension est souvent minime (27). Ces opacitds en verre ddpoli sont aussi suspectes d'etre la consdquence de fibrose intralobulaire (27), dans la mesure off elles sont frdquemment assocides ~i des bronchectasies de traction (26).
CaractErisation de sous-groupes de patients en fonction de I'aspect tomodensitom~trique L'analyse scanographique a permis d'identifier trois groupes de patients en fonction des caractdristiques de la distribution des zones pulmonaires hyperdenses ( 8 ) : SDRA lobaire (37% des patients), dans lequel les images pathologiques sont restreintes ~tcertains lobes ou segments, SDRA diffus (23 % des patients), dans lesquels les images pathologiques pulmonaires sont observdes diffusdment, et SDRA mixte (40% des patients) dans lequel la distribution des images est lobaire dans certaines parties du poumon et diffuse par ailleurs (8). Dans ces trois groupes, la perte d'adration dtait massive et similaire au niveau des lobes infdrieurs, associde fi une augmentation de la quantitd de tissu par rapport aux sujets sains. En revanche, au niveau des lobes supdrieurs, le groupe lobaire prdsentait une adration normale, ~i la diffdrence des autres groupes, avec toutefois un exc~s de tissu pulmonaire par rapport aux sujets sains (8). Ces trois groupes different par : - un taux de mortalitd plus dlevde dans les SDRA diffus (70% contre 40% dans les deux autres groupes) (28) ; - la prddominance de SDRA primaires dans les SDRA diffus et mixte (80% contre 50% dans les SDRA lobaires) (28) ; une compliance statique du syst~me respiratoire significativement plus basse dans les SDRA diffus par rapport aux SDRA lobaires (28), consdquence de la perte de volume adrde significativement plus importante dans les SDRA diffus (8) ; un point d'infection infdrieur sur la courbe pression-volume du syst~me respiratoire plus dlevd dans les SDRA diffus (prdsent dans 100 % des cas) par rapport aux SDRA lobaires (prdsent dans 73 % des cas) (28) ; un potentiel de rdponse diffdrent ~i l'application d'un niveau de PEP de 10 cmH20, ~i l'origine d'un recrutement alvdolaire significatif sans hyperinflation ddtectable dans les SDRA diffus. A l'opposd, le meme niveau de PEP ne produit qu'un recrutement alvdolaire moddrd dans les SDRA lobaires, sans amdlioration significative de l'oxygdnation (29), associd ~i l'apparition d'une hyperinflation principalement dans les lobes supdrieurs plus compliants (24). -
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Differences tomodensitom~triques entre SDRAprimaire et secondaire Le tableau II prdsente les diffdrences scanographiques entre SDRA primaire et secondaire au cours de la premiere semaine d'dvolution du SDRA. Toutefois, ces diffdrences ne sont pas valables au niveau individuel, et il est en pratique impossible de diffdrencier de fa~on fiable SDRA primaire et secondaire sur la base de l'analyse scanographique, probablement parce que la physiopathologie de l'atteinte pulmonaire n'est souvent pas univoque. Tableau II - Diffdrences scanographiques entre SDRA primaire et secondaire.
SDRA primaire
SDRA secondaire
Opacitds en verre ddpoli et condensations
Extension similaire des 2 anomalies (4)
Prddominances des opacitds en verre ddpoli (4)
Parenchyme normal
Extension identique dans les 2 groupes (4)
Extension identique dans les 2 groupes (4)
Distribution des condensations
Asymdtrique chez 30 % des patients (4) Prddominance dans les rdgions non ddpendantes (4, 50)
Asymdtrique chez 9 % des patients (4) Prddominance dans les rdgions non ddpendantes (4, 50)
Distribution des opacitds en verre ddpoli
Diffuse (4)
Prddominance dans les rdgions mddianes sur l'axe ventro-dorsal (4)
l~panchement pleural
Prdsent dans 55 % des cas (4)
Prdsent dans 59 % des cas (4)
Morphologie de l'atteinte pulmonaire (28)
Atteinte diffuse ou mixte dvocatrice (SDRA primaire dans 80 % des cas)
Interpretation des courbes pression-volume au cours du SDRA la lumi~re de la tomodensitom~trie La relation pression-volume au-dessus de la capacitd rdsiduelle fonctionnelle n'est en gdndral pas lindaire au cours du SDRA et son interprdtation complexe. L'utilisation du scanner a permi de mieux comprendre les ddterminants de la forme des courbes pression-volume inspiratoire et expiratoire.
Courbe pression-volume inspiratoire La pente initiale de la courbe est corrdlde ~ la quantitd de poumon adrd (9) au niveau de pression correspondant, mais n'a pas de lien avec la quantitd de tissu non adrd, c'est-~i-dire que la courbe pression-volume n'explore que le tissu pulmonaire adrd (9). Chez l'homme avec SDRA, le recrutement suit l'inflation, et donc ddbute avant le point d'inflexion infdrieur et se poursuit apr~s le point d'inflexion supdrieur, sans aucune correspondance avec les points d'inflexion
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supdrieurs et infdrieurs (17). D'autres dtudes semblent plut6t montrer que le recrutement ddbute au-dessus du point d'inflexion infdrieur (30). De toute fagon, ces donndes ont invalidd le postulat en vigueur ant&ieurement, qui considdrait que le maximum du recrutement survenait au niveau du point d'inflexion infdrieur. Les dtudes scanographiques ont toutefois confirmd l'intdr& de la courbe pression-volume ~i PEP 0 pour donner des indications sur la morphologie pulmonaire et la rdponse ~lla PEP (31). La prdsence d'un point d'inflexion inf& rieur est associde ~t un SDRA de type diffus ou mixte, et l'application d'un niveau de PEP rdgld ~i 2 cmH20 au-dessus du point d'inflexion s'accompagne d'un recrutement alvdolaire sans hyperinflation ddtectable. En revanche, l'absence de point d'inflexion infdrieur s'observe dans les SDRA de type lobaire, et l'application de 10 et 15 cmH20 de PEP induit une hyperinflation alvdolaire, sans recrutement ddtectable (31).
Courbe pression-volume expiratoire Le point d'inflexion supdrieur de la courbe pression-volume semble marquer le ddbut du ddrecrutement (17, 30). En dessous du point d'inflexion supdrieur, ddflation et ddrecrutement ne sont pas lindairement associds comme l'inflation et le recrutement sur la courbe pression-volume inspiratoire (17), suggdrant que la diminution du volume de gaz alvdolaire au cours de la ddflation ne s'accompagne pas systdmatiquement d'un collapsus pulmonaire.
Apports de la tomodensitom~trie dans le cadre de I'~valuation des th~rapeutiques du SDRA I~valuationde la r~ponse~ la PEP L'effet de la PEP au cours du SDRA est double. Tout d'abord, l'augmentation de PEP est associde fi la survenue d'un recrutement alvdolaire, dont l'importance ddpend du niveau de pression inspiratoire prdcddant la mesure (17), suggdrant que le tissu pulmonaire restant adrd en fin d'expiration est fonction du tissu qui a ~td rd-adrd en fin d'inspiration. Le prix ~i payer du recrutement alvdolaire par la PEP est l'apparition de zones hyperinflatdes, principalement dans les rdgions rdtrosternales, ddtectables au scanner chez plus de 30% des patients avec SDRA ventilds avec un niveau de PEP de 15 cmH20 (32). Dans la sdrie de Gattinoni, ce niveau de PEP dtait associd fi un recrutement alvdolaire correspondant ~i 50 % du potentiel de recrutement (23). Cette dtude sugg~re par ailleurs que l'augmentation de la PEP de 5 ~i 15 cmH20 est probablement inutile chez les patients fi faible potentiel de recrutement (recrutement de
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
quelques grammes de poumon), alors qu'un niveau de PEP supdrieur ~i 15 cmH20 chez les patients ~i fort potentiel de recrutement empeche un ddrecrutement cyclique de plus de 200 g de poumon (23) chez les patients ~i potentiel de recrutement maximal.
D~tection des I~sions pulmonaires induites par la
ventilation m~canique Deux composantes des Idsions pulmonaires induites par la ventilation mdcanique (LIVM) sont classiquement individualisdes (11) : les LIVM ~l haut volume, induites par la mise en tension excessive du parenchyme pulmonaire par des volumes courant dlevds, et les LIVM ~i bas volume, secondaires ~i des phdnom~nes d'ouverture-fermeture cycliques des petites voies adriennes. Le scanner thoracique permet de ddtecter l'hyperinflation pulmonaire (cf. supra), qui est une composante des LIVM ~i haut volume. La prdsence de ces zones hyperinflatdes au scanner chez les patients atteint de SDRA est suspectde d'etre associde ~i des LIVM, mais leur prdsence peut aussi ~tre la consdquence d'un emphys~me prdexistant. Par ailleurs, l'association de zones hyperinflatdes et non adrdes en dessous de la limite de rdsolution de l'appareil aboutira ~i la ddtection d'une adration moyenne normale. La sensibilitd du scanner pour ddtecter ces zones hyperinflatdes augmente donc lorsque la rdsolution spatiale augmente et que l'dpaisseur de coupe diminue. De plus, l'interprdtation des donndes du scanner n'est pas dvidente. En effet, le volume adrd des rdgions hyperinflatdes peut etre important au cours du SDRA (33), alors que la masse pulmonaire exposde ~i l'hyperinflation est faible, meme quand la pression de plateau est dlevde (45 cmH20) (17, 23). Par ailleurs, le scanner ne permet pas de ddtecter les zones soumises fi une tension de surface tr~s dlevde (surdistendues) sans etre hyperinflatdes. En ce qui concerne les LIVM ~i bas volume, la mise en dvidence d'un recrutement et d'un ddrecrutement alvdolaires au cours du cycle respiratoire est possible, par la ddmonstration d'une diminution des zones non adrdes en fin d'inspiration par rapport ~i l'expiration. L'interprdtation de ce phdnom~ne comme une ddmonstration de l'existence de phdnom~nes d'ouverture-fermeture cyclique est toutefois erronde, dans la mesure oia il peut aussi etre lid ~i une augmentation de l'adration d'alvdoles remplies de liquide ~i l'expiration (16). Outre la ddtection de situations suspectes d'Stre fi risque de LIVM, le scanner thoracique peut ddtecter les consdquences tardives des LIVM, c'est-~i-dire la prdsence de pseudokystes, ou de stigmates de fibrose.
R~ponse au d~cubitus ventral (DV) L'application du ddcubitus ventral (DV) s'accompagne, en moins de 10 minutes, d'une redistribution des zones les plus denses des rdgions dorsales en direction des rdgions ventrales maintenant ddpendantes (34). Cette redistribu-
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tion sugg8re que la mise en DV induit un collapsus des rdgions ventrales et un recrutement des rdgions dorsales, et est en accord avec le mo&le de l'dponge, m8me si une partie de la redistribution de densitd peut thdoriquement &re due ~i une redistribution de la perfusion (3). Toutefois, lorsqu'une stratdgie de recrutement maximal est appliqude avant la mise en DV (35), le recrutement des rdgions dorsales ne s'accompagne pas d'un ddrecrutement significatif des rdgions ventrales. En DV, la perfusion reste prddominante dans les rdgions postdrieures (36), si8ge d'un recrutement alvdolaire significatif, ~ l'origine d'une amdlioration des rapports ventilation-perfusion et donc de l'oxygdnation art&idle. Toutefois, l'aspect du scanner en ddcubitus dorsal ne permet pas de prddire la rdponse au DV en termes d'amdlioration de l'oxygdnation (37). Cependant, le recrutement alvdolaire induit par le DV est significativement plus important dans les SDRA lobaires que dans les SDRA diffus, alors que les zones hyperinflatdes sont significativement rdduites par la posture dans les formes lobaires mais pas dans les formes diffuses (35). Finalement, chez l'animal, la raise en DV semble rdduire la susceptibilitd pulmonaire aux LIVM (38), probablement par le biais d'une diminution de la tension pulmonaire dvalude au scanner, lide ~i une modification de la conformation pulmonaire. L'existence d'un tel phdnom8ne chez les patients atteints de SDRA est pour l'instant purement hypothdtique.
Ventilation protectrice Terragni et al. (33) ont rdcemment dtudid les caractdristiques tomodensitomdtriques de 30 patients avec SDRA, ventilds selon les recommandations actuelles (6 mL.kg' de poids thdorique, pression de plateau < 30 cmH20). Apr~s avoir calculd le pourcentage de poumon exposd ft. l'hyperinflation au cours de l'inflation du volume courant, les auteurs ont identifid deux groupes de patients : un groupe de 20 patients dans lesquels les zones hyperinflatdes ~i chaque insufflation reprdsentaient moins de 20 % du volume courant, et un groupe de dix patients chez lesquels ces zones hyperinflatdes ddpassaient 40% du volume courant. Ce dernier groupe prdsentait un compartiment non adrd significativement plus important, une pression de plateau significativement plus dlevde (28,9 + 0,9 vs 25,5 + 0,5 cmH20), et un taux significativement plus dlevd de cytokines pro-inflammatoires dans le liquide de lavage broncho-alvdolaire. Ces donndes ont quatre consdquences importantes : - les recommandations actuelles des rdglages du ventilateur au cours du SDRA ne sont vdritablement <~protectrices ~ que chez deux tiers des patients ; chez un tiers des patients qui sont ~i la lois massivement ddrecrutds et soumis une hyperinflation au cours du cycle courant, le volume courant ou la PEP pourraient &re substantiellement rdduits sous contr61e scanographique et le DV &re une indication de choix ; - le rdglage du volume courant devrait &re adaptd au volume pulmonaire adrd mesurd au scanner et non au poids prddit par la taille ; -
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
il n'y a pas un seuil de pression plateau de sdcuritd unique pour tous les patients et le seuil actuellement recommandd de 30 cmH20 est encore trop dlevd. -
Limites de la tomodensitomEtrie Malgrd son intdrSt scientifique indiscutable, l'utilisation du scanner thoracique prdsente plusieurs inconvdnients et limites au cours du SDRA. Tout d'abord, il gdn&re une irradiation importante (de l'ordre de 5 ~i 10 mSieverts, soit l'dquivalent de plus de 100 radiographies thoraciques standard), surtout en cas d'acquisitions multiples (patients dtudids dans plusieurs conditions de ventilation par exemple) et ~t haute rdsolution. Cette irradiation peut 8tre rdduite lorsqu'on limite l'acquisition ~l quelques coupes, mais l'extrapolation des rdsultats ~t l'ensemble du poumon est alors discutable (39). A l'heure actuelle, l'utilisation de coupes de 500/am aboutit ~l une limite de r&olution spatiale de l'ordre de 0,15 mm 3 soit dix alvdoles adrdes environ, ce qui fait que la tomodensitom&rie peut encore sous-estimer l'hdtdrogdnditd rdgionale de la maladie. Par ailleurs, jusqu'alors, la quasi-totalitd des &udes se sont ddrouldes en condition statique (pause tdld-inspiratoire ou expiratoire), ce qui limite l'extrapolation des rdsultats ~l des phdnom~nes dynamiques comme la ventilation artificielle. La complexitd de l'analyse quantitative tomodensitomdtrique empSche ~t ce jour son utilisation en routine. Finalement, l'inconvdnient majeur de la tomodensitomdtrie est la ndcessitd de transport du patient, qui majore les cofits et fait prendre au patient un risque que doit contrebalancer l'int&St de l'examen et ses implications cliniques potentielles.
Int r t clinique de la tomodensitom trie fii ce jour, l'intdrSt clinique d'un scanner thoracique systdmatique au cours du SDRA reste limitd, et en tout cas non formellement ddmontrd par des dtudes randomis&s. Une dtude rdtrospective relativement ancienne portant sur 74 patients atteints de SDRA a montrd que cet examen permettait de modifier la thdrapeutique dans 22 % des cas (40). Le tableau III liste les indications potentielles du scanner thoracique au cours du SDRA. Toutefois, l'apparition de nouvelles mdthodes diagnostiques disponibles au lit du malade (dchographie pleuro-pulmonaire, tomographie d'impddance dlectrique) permet d'dviter au patient le risque du transport, mSme si l'intdrSt clinique de ces nouvelles techniques demande ~i 8tre confirmd.
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Tableau III- Indications potentielles de scanner thoracique au cours du SDRA. D6tection de pathologies non d6tect6es par la radiographie pulmonaire standard
Atdlectasies 12panchements pleuraux Abc~s pulmonaires D6tection des complications de la ventilation m6canique Pneumothorax occultes Pseudokystes t~volution fibrosante Obtention d'informations r6gionales pour guider un geste diagnostique ou th&apeutique
Lavage broncho-alvdolaire Biopsie pulmonaire Drainage thoracique l~valuation des s6quelles morphologiques du SDRA
Nouvelles m6thodes d'imagerie du SDRA Depuis quelques ann&s, de nouvelles mdthodes d'imagerie pulmonaire ayant le potentiel d'etre appliqudes chez l'homme avec SDRA ont dtd ddveloppdes, soit de novo, soit par le biais d'une amdlioration de techniques ddjfi existantes.
Scanner fonctionnel Avec le ddveloppement de scanners multi-barrettes ~i acquisition rapide (300500 ms), l'acquisition des images peut maintenant &re dynamique et ouvre la perspective d'dtudes de phdnom~nes fonctionnels. L'dtude de la ventilation au scanner peut ainsi &re rdalisde en utilisant comme produit de contraste du xdnon inhald. L'dtude de la perfusion pulmonaire requiert l'injection de produit de contraste et l'utilisation d'un mod&le mathdmatique, et peut permettre de mieux apprdhender les anomalies microcirculatoires et les thdrapeutiques visant ~ modifier l'dtat de la circulation artdrielle pulmonaire au cours du SDRA. L'injection intravasculaire de xdnon permet de mesurer les rapports ventilation-perfusion rdgionaux, avec le possibilitd de mieux comprendre les mdcanismes impliquds dans les variations des gaz du sang au cours de l'application des thdrapeutiques du SDRA. L'dtude de la dynamique d'dlimination pulmonaire de produit de contraste injectd par vole intraveineuse pourrait permettre de diffdrencier oed~me pulmonaire hydrostatique et ldsionnel (41).
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Finalement, l'dvolution des capacitds de traitement des images permet maintenant de quantifier la ddformation pulmonaire locale par des techniques de registration, et permet de mesurer la tension rdgionale, avec la possibilitd d'amdliorer l'dvaluation au scanner des ldsions induites par la ventilation (42).
lchographie pleuro-pulmonaire L'dchographie pleuro-pulmonaire a ddmontrd une performance quasi dquivalente au scanner pour quantifier l'extension des dpanchements pleuraux, des consolidations et du syndrome interstitiel chez les patients atteins de SDRA (2). Cette technique pourrait donc etre utilisde pour identifier des groupes de patients au lit du malade, dans le but de leur appliquer des stratdgies ventilatoires adaptdes aux caractdristiques morphologiques pulmonaires. Par ailleurs, l'dchographie a un intdr~t potentiel pour la ddtection des pneumothorax, mais sa performance diagnostique au cours du SDRA n'a, ~i ce jour, pas dtd dvalude.
M thodes d'imagerie radio-isotopiquestomographiques La tomographie monophotonique (SPECT) et la tomographie par dmission (TEP) sont deux techniques radio-isotopiques utilisables au cours du SDRA, et dont l'intdret ne rdside pas dans leur rdsolution spatiale, nettement infdrieure ~i celle du scanner, mais dans leur sensibilitd de ddtection qui permet d'utiliser des concentrations de traceur qui ne perturbent pas la physiologie. L'utilisation de la TEP a permis de ddmontrer qu'il n'y a pas de modification significative de la perfusion chez les patients avec SDRA, par rapport ~i des sujets normaux, suggdrant l'existence d'une altdration sdv~re de la vasoconstriction pulmonaire hypoxique (43). I1 n'y a pas non plus de diffdrence significative de permdabilitd vasculaire mesurde en TEP entre les rdgions ddpendantes et non ddpendantes chez les patients atteints de SDRA en ddcubitus dorsal (44), en accord avec le module de l'dponge ddveloppd plus haut. Parmi les techniques TEP non encore appliqudes au SDRA figurent la mesure de la ventilation (45) et du recrutement alvdolaires (46), de l'expression pulmonaire d'un g~ne rapporteur ou de l'inflammation pulmonaire (47). Cette derni&re mesure est particuli~rement prometteuse, dans la mesure o~1 inflammation pulmonaire et Idsions induites par la ventilation sont dtroitement lides, et off il a dtd ddmontrd expdrimentalement que la TEP permet de ddtecter tr~s prdcocement les ldsions induites par la ventilation, avant l'apparition de ldsions histologiques significatives (47).
Imagerie du SDRA
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Tomographied'imp dance lectrique La tomographie d'impddance dlectrique (TIE) est une technique permettant d'obtenir des images tomographiques de la distribution de l'impddance dlectrique thoracique, en utilisant des dlectrodes disposdes de fagon circonfdrentielle sur le thorax. La TIE permet de ddtecter des variations rdgionales dans la proportion d'air et de tissu, bien que d'autres facteurs soient susceptibles de faire varier l'impddance (variation de I'm&me ou de la quantitd de sang). I1 existe expdrimentalement une relation lindaire entre le volume pulmonaire insuffld et les variations d'impddance thoracique. De plus, les variations d'impddance rdgionale au cours du cycle respiratoire correspondent essentiellement ~i la mobilisation de gaz alvdolaire, et sont bien corrdldes aux donndes du scanner au cours du SDRA (48). La TIE pourrait aussi ddtecter, en gdndrant des courbes pression-volume rdgionales, des profils dvocateurs de recrutement intra-cycle ou de surdistension (49), et pourrait donc permettre de ddtecter les situations ~irisque de ldsions induites par la ventilation. Au total, la TIE permet donc potentiellement d'explorer la ventilation rdgionale au lit du malade et d'aider aux rdglages du respirateur, mais reste pour l'instant dans le domaine de la recherche.
Conclusion Le scanner thoracique a dtd et reste un outil de recherche prdcieux pour amdliorer la connaissance physiopathologique du SDRA, et l'&aluation de ses th&apeutiques ventilatoires. Initialement purement descriptif, le scanner a dvolud pour fournir des informations quantitatives, avec une amdlioration continue de la rdsolution spatiale. Avec l'amdlioration de la rdsolution temporelle, le scanner thoracique peut maintenant &re rdalisd en condition dynamique pour apprdhender les phdnomSnes survenant au cours de la ventilation mdcanique. Finalement, alors qu'il fournissait des informations exclusivement anatomiques, il est en train d'dvoluer pour devenir une technique d'imagerie fonctionnelle. En revanche, aucune dtude n'a formellement ddmontrd son intdr& pour amdliorer le pronostic du SDRA. Pour certains, l'hdtdrogdnditd rdgionale de l'atteinte pulmonaire du SDRA, la variabilitd interindividuelle des caractdristiques de la mdcanique respiratoire ou de la rdponse aux thdrapeutiques ventilatoires (PEP, DV) pourraient justifier l'utilisation du scanner pour aider aux rdglages de la ventilation mdcanique (&aluation du ,, baby lung,,, recrutabilitd), mais ceci reste ~i prouver. Finalement, les nouvelles techniques d'imagerie pulmonaire sont prometteuses, soit parce qu'elles permettent d'dtudier des param~tres fonctionnels respiratoires rdgionaux au lit du malade, soit parce qu'elles ont le potentiel d'dvaluer de fagon non invasive de nouveaux
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Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
param~tres physiologiques pulmonaires c o m m e l'inflammation rdgionale. Si l'on excepte l'dchographie pleuro-pulmonaire, ces nouvelles techniques d'imagerie restent pour l'instant du d o m a i n e de la recherche clinique.
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M canique respiratoire au cours du SDRA: interpretation de la courbe pression volume J.-C. M. Richard et A. Mercat
Introduction Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue (SDRA) est une entitd clinique ddfinie par l'association d'une hypoxdmie et d'infiltrats pulmonaires bilatdraux survenant en l'absence d'insuffisance ventriculaire gauche (1). L'augmentation des pressions, mesurdes au niveau des voies adriennes lors de la ventilation contr61de en volume des malades atteints de SDRA, traduit la baisse de compliance thoracopulmonaire. Cette particularitd, observde &s les premieres descriptions du SDRA, s'explique en grande partie par la rdduction du volume pulmonaire accessible ~t la ventilation (2). Le concept de poumon de bdbd (~ baby lung ,~) est le fruit des dtudes physiologiques qui ont permis de mieux comprendre les anomalies de mdcanique respiratoire qui caractdrisent le SDRA (3). La courbe pression-volume (courbe PV) est l'outil qui ale plus contribud, ~ic6td du scanner thoracique, aux connaissances sur ce sujet (4). Cette mdthode initialement proposde pour ddcrire l'dvolution du SDRA s'est progressivement imposde comme un vdritable moyen d'investigation clinique avant de devenir un outil dont l'utilisation quotidienne pour le monitoring est aujourd'hui envisageable (5). Les nombreuses dtudes sur ce sujet publides depuis bient6t 40 ans ont conduit ~i faire de la courbe PV un moyen pddagogique incontournable pour apprdhender la physiopathologie du SDRA (6, 7). Nous aborderons dans ce chapitre les bases de mdcaniques respiratoires indispensables fi la comprdhension du SDRA. L'interprdtation classique de la courbe PV sera discutde en tenant compte des donndes rdcentes sur ce sujet. Nous envisagerons quelques applications cliniques afin d'illustrer les implications de ces concepts.
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M canique respiratoire et courbe PV: interpretation classique La courbe PV est habituellement enregistrde, alors que le malade est ventild sans pression expiratoire positive (PEP), du volume d'dquilibre de fin d'expiration jusqu'~l un volume proche de la capacitd pulmonaire totale (8). La courbe est enregistrde au cours d'une procddure pendant laquelle le syst~me thoracopulmonaire est insuffld soit tr~s lentement, soit par paliers. Ainsi, la pression mesurde dans des conditions statiques ou quasi-statiques refl~te la pression dlastique puisque la partie rdsistive de cette pression devient nulle ou ndgligeable. Ces prdcautions mdthodologiques, apparemment simples mais difficiles en pratique ~i appliquer rigoureusement, sont indispensables pour que la courbe puisse 8tre correctement interprdtde. L'aspect classique de la courbe PV au cours du SDRA est sigmoidal (fig. 1). La pente qui refl~te la compliance est globalement rdduite par rapport fi celle d'un sujet sain (8). Classiquement, on identifie sur cette courbe trois segments sdpards par deux points d'inflexion. La partie initiale prdsente une compliance trSs basse. Le point d'inflexion infdrieur sdpare ce premier segment de la partie centrale de la courbe caractdrisde par une pente maximale (compliance lindaire). Le point d'inflexion supdrieur prdc~de le troisi~me segment dont la compliance est plus ou moins rdduite selon les cas. Le point d'inflexion infdrieur est habituellement considdrd comme la pression ~i partir de laquelle le syst~me pulmonaire, en pattie ddrecrutd, s'ouvre subiteCPT
......................................................................................... ~...................................................................................................................................................
~~l...................................................... ...... J'...................................................... ~~~T~] ....................................... ~~l~~......... ~l~lr
C a F ................................................................................................................................ ~ ~l ~ j /
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0
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Pression (cmH20) Fig. 1 - Interprdtation classique de la courbe pression-volume au cours du SDRA. C P T : capacitd pulmonaire totale ; CRF : capacitd rdsiduelle fonctionnelle ; V R : volume rdsiduel ; Pinf, point d'inflexion inf~rieur ; Psup : point d'inflexion supdrieur.
Mdcanique respiratoire au cours du SDRA
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ment. La compliance lindaire maximale traduit les propridtds dlastiques du syst~me thoraco-pulmonaire alors que le point d'inflexion sup&ieur tdmoignerait de la surdistension survenant fi haut volume pulmonaire. C'est sur cette interprdtation classique que le concept de ventilation protectrice a dtd proposd (9). Le rdglage de la PEP ~i une valeur proche du point d'inflexion infdrieur a pour but de prdvenir les ph~nom~nes de fermeture-r~ouverture r~pdtds des voies adriennes alors que la rdduction du volume courant permet d'&iter que la pression de fin d'inspiration ne ddpasse le point d'inflexion sup&ieur. Malgrd de nombreuses limites, ce concept mdcanique reste d'actualitd car de nombreux travaux expdrimentaux sugg~rent qu'une approche ventilatoire basde sur ce principe permet de limiter les ldsions induites par la ventilation (6, 10). Cependant, certaines donndes physiologiques s'opposent 5 cette interprdtation classique (11, 12).
Compliance lin aire La baisse de compliance lindaire observde au cours du SDRA dtait initialement interpr&de comme le reflet des modifications des propridtds dlastiques du syst~me respiratoire (12). Le fait que la compliance rapportde au volume pulmonaire (compliance spdcifique) soit sub-normale ~ la phase aigue de la maladie conforte la thdorie du ,, poumon de bdbd ,, (13, 14). Ainsi, Gattinoni et all. ont pu montrer que la compliance lindaire dtait corrdlde au volume pulmonaire sain et pas 5 la quantitd de parenchyme ldsd (3). La pente de la courbe PV obtenue sans PEP refl~te donc vraisemblablement les propridtds dlastiques du volume pulmonaire ventild. Cette interpr&ation permet de comprendre pourquoi la PEP modifie l'aspect de la courbe PV. En effet, toute augmentation du volume pulmonaire accessible ~i la ventilation entrainera de facto une modification de la compliance si cette derni~re ddpend du volume pulmonaire ventild. Le SDRA peut &re considdrd comme un processus restrictif et hdtdrog~ne au sein duquel cohabitent des zones plus ou moins adrdes (6). La courbe PV refl~te l'hdtdrogdnditd du SDRA mais ddpend dgalement de ,~ l'histoire pulmonaire ,, qui traduit les propridtds mdcaniques pulmonaires pr&ddant la mesure, qui sont &roitement lides aux rdglages du ventilateur. Pour cette raison, la courbe PV est paradoxalement 5 la fois riche en informations et difficile d'interpr&ation.
Le point d'inflexion inf rieur Le point d'inflexion infdrieur indique le niveau de pression 5 partir duquel la parenchyme pulmonaire est recrutd (8). En effet, le rdglage de la PEP 5 un niveau proche du point d'inflexion inf&ieur entralne une diminution du shunt tdmoignant d'un effet de recrutement. Le point d'inflexion infdrieur ne doit cependant pas &re considdrd comme un point magique refl&ant la pression
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critique d'ouverture pulmonaire. Ainsi, il a dtd montrd chez des malades ventilds pour un SDRA que l'application de soupirs ou l'augmentation de la PEP permettait d'augmenter le recrutement alvdolaire par rapport ~ ce qui &ait observd lorsque la PEP &ait rdglde au point d'inflexion infdrieur (15, 16). Ces donndes indiquent que le recrutement est un phdnom~ne continu qui ddbute majoritairement au point d'inflexion infdrieur mais qui se poursuit bien audelhi. Cette interpr&ation est confortde par les observations faites sur la partie expiratoire de la courbe PV (courbe de ddflation) qui montrent que le point de fermeture pulmonaire survient h des pressions sup&ieures au point d'inflexion infdrieur (17, 18). Un travail r&ent combinant scanner et courbe PV confirme ce concept (17). Si on consi&re que la PEP agit principalement en &kant la fermeture pulmonaire pendant la phase expiratoire, le point d'inflexion inf& rieur pourrait indiquer la pression minimale ~i retenir pour le rdglage de la PEP.
Le point d'inflexion sup rieur I1 est classique de considdrer le point d'inflexion sup&ieur comme la pression partir de laquelle survient la surdistension alvdolaire (8). En effet, l'augmentation de pression au-dessus de ce point n'entralne qu'une faible augmentation de volume pulmonaire (faible compliance), comme ce qui est observd autour de la capacitd pulmonaire totale chez un sujet sain. Cette interpr&ation est corrobor& par les observations cliniques et exp&imentales qui montrent qu'une ventilation ddpassant cette limite entraine une aggravation des ldsions pulmonaires (10, 19, 20). Roupie et al. ont pu montrer sur un groupe important de malades atteints de SDRA que le volume courant devait &re r~duit autour de 6 mL.kg -1 pour dviter que la pression de plateau ne ddpasse le point d'inflexion supdrieur alors que la PEP dtait rdglde proche du point d'inflexion infdrieur fi 10 cmH20 en moyenne (21). Cette dtude ne permettait pas de savoir dans quelle mesure une stratdgie, basde sur la limitation de la pression de plateau en fonction du point d'inflexion supdrieur, pouvait influencer l'dvolution du SDRA. Deux dtudes prospectives randomis&s ont testd l'intdr& d'une stratdgie de ventilation protectrice titrde sur la courbe PV (9, 22). Les rdsultats de la premiere sont controversds mais ils suggSrent que l'optimisation de la PEP en fonction du point d'inflexion inf&ieur, associde ~i la rdduction du volume courant dans le but d'dviter de ddpasser le point d'inflexion supdrieur, permet de diminuer la mortalitd par rapport h une ventilation conventionnelle (jug& trop agressive dans cette &ude) (9). L'&ude de Ranieri et al. (22) montre que l'association PEP optimale et volume courant rdduit permet de diminuer la rdponse inflammatoire systdmique mddide par le systSme pulmonaire. Dans ces dtudes, il est cependant tr& difficile de faire la part entre pr&ention de, l'atelectrauma ~ lide h la PEP et prdvention de la distention lide h la rdduction du volume courant. Sachant que le parenchyme pulmonaire sain prdsente au scanner une densitd autour d e - 900 unit& Hounsfield, Viera et al. ont proposd de ddfinir le ddbut de la sur-distension au-
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dessous de cette valeur (23). Chez des patients atteints de SDRA, l'augmentation de la PEP au-dessus du point d'inflexion inf&ieur sur la courbe PV engendrait un recrutement alvdolaire alors que chez les malades ne prdsentant pas d'inflexion infdrieure, l'augmentation de la PEP dtait principalement responsable d'une distension pulmonaire. 12aspect de la courbe PV et de la radiographie pulmonaire des malades sujets ~i la sur-distension dtait tr~s diff&ent de celui observd chez les malades recruteurs dont l'atteinte semblait plus diffuse. Ces donndes sont tr~s intdressantes puisqu'elles sugg~rent que la courbe PV peut permettre de diffdrencier les malades recruteurs de ceux chez qui le risque de surdistension prddomine.
Interpretation moderne de la courbe PV La confrontation des donndes cliniques basdes sur la courbe PV et l'analyse du scanner laissent ~t penser que l'inflexion sup&ieure de la courbe traduit essentiellement la fin du recrutement qui s'op~re d'une faqon continue dans la partie lindaire entre les deux points d'inflexion de la courbe PV. La moddlisation mathdmatique du recrutement alvdolaire conforte cette hypoth~se (11, 12). Un point d'inflexion infdrieur marqud associd ~t une compliance lindaire conservde tdmoigne d'un fort potentiel de recrutement (24). L'inflexion inf&ieure lue sur la courbe de ddflation pourrait &re un bon indicateur du point de fermeture pulmonaire au-dessous duquel le ddrecrutement survient brutalement (17). Ce ,, concept mdcanistique ,,, remis en cause par Hubmayr (25) dans un article passionnant, a dtd depuis confortd par les rdsultats de plusieurs travaux expdrimentaux montrant un lien entre le point d'inflexion supdrieur et les modifications de recrutement alvdolaire (11, 25-28). Pour notre pratique, il est important de garder ~t l'esprit que la fin du recrutement s'associe indluctablement ~i un certain degrd de surdistension. D~s lots, le point d'inflexion supdrieur doit toujours &re considdrd comme une zone de pression ~i ne pas ddpasser sous peine de gdndrer des ldsions induites par la ventilation.
M thode de mesure de la courbe pression-volume du syst me respiratoire De nombreuses techniques diff&entes ont dtd proposdes pour enregistrer la courbe pression-volume au cours de la ventilation du SDRA (2, 5, 8). Chacune de ces m&hodes prdsente des avantages et des inconvdnients et surtout des limites qu'il faut connaltre pour analyser correctement la courbe enregistrde (29). On oppose habituellement les mdthodes dites statiques aux mdthodes dynamiques, les plus rdpandues actuellement. La pression mesurde pendant la ventilation prdrdglde en volume ddpend d'une part des propridtds rdsistives et d'autre part des propridtds dlastiques du syst~me respiratoire. Comme l'objectif de la courbe PV
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est de caract&iser les propri&ds dlastiques, il est n&essaire de s'assurer qu'elle est enregistrde dans des conditions off la pression rdsistive est soit nulle, soit ndgligeable. Pour ce faire, les mdthodes statiques proposent un enregistrement de la pression fi ddbit nul alors que les mdthodes dynamiques proposent d'enregistrer la procddure ~i un ddbit suffisamment faible pour pouvoir s'affranchir de la pression rdsistive. Les mdthodes statiques n&essitent donc l'enregistrement d'un grand nombre de points obtenus ~i des volumes courants diff&ents afin de reconstruire l'ensemble de la courbe pression-volume. Cette m&hode tr~s utilisde, largement documentde par l'dquipe de Ranieri et al. est longue et fastidieuse, bien que sa reproductibilitd soit excellente (30, 31). La technique dite de ,~la super seringue ,, &ait considdrde dgalement comme une mesure statique, elle est aujourd'hui compl~tement abandonnde. La seringue remplie d'un mdlange riche en oxyg~ne &ait connectde fi la sonde d'intubation du malade, puis la mobilisation du piston par paliers d'une centaine de millilitres permettait de reconstruire l'ensemble de la courbe en une seule manoeuvre qui prenait de ce fait environ une minute. De nombreuses artefacts lids principalement ~t la durde de cette procddure ont dtd largement ddcrits dans la littdrature. Par ailleurs, la ndcessitd de ddbrancher le malade de son ventilateur faisait courir un risque de ddsaturation au patient et modifiait l'histoire pulmonaire qui pr&ddait la mesure. La courbe PV peut &re enregistrde au cours d'une simple procddure d'insufflation ~i ddbit lent. Jonson et al. ont ddveloppd une technique particuli~rement adaptde ~i la mesure du recrutement alvdolaire en modifiant le contr61e du ddbit inspiratoire d'un ventilateur de type Servo 900 C (32). Depuis, les mdthodes dynamiques sont rdalisables sur la plupart des ventilateurs modernes, soit en adaptant les rdglages, soit grace ~ un logiciel permettant une automatisation de la procddure. Quelle que soit la mdthode utilisde, un certain nombre de pr&autions doivent etre prises afin que la courbe enregistrde puisse etre interpr&able. Le patient doit etre sufiqsamment sddatd pour que la procddure pendant laquelle est enregistrde la courbe PV puisse etre rdalisde sans que le patient ddmasque des efforts inspiratoires ou expiratoires qui rendraient ininterprdtable la mesure des pressions. La curarisation n'est pas indispensable comme cela a dtd montrd par Decaillot et al. (33) mais une sddation profonde est toujours n&essaire. Le ballonnet de la sonde d'intubation doit etre gonfld suffisamment pour dviter qu'une fuite apparaisse ~l la fin de l'insufflation. Ce pi~ge classique entralne une exag&ation du point d'inflexion sup&ieur en raison de la fuite qui peut apparaltre au-dessus de la pression de gonflage du ballonnet.
i valuation du recrutement alv olaire Le SDRA est une situation clinique par laquelle les poumons prdsentent une tendance naturelle ~i se refermer sur eux-memes (6). En effet, de nombreux facteurs comme la rdduction du volume courant, la FiO2 dlevde, la sddation, la position horizontale et les aspirations endo-trachdales rdpdtdes tendent ~i favo-
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riser le d&ecrutement alvdolaire. La PEP permet en augmentant le volume de fin d'expiration d'dviter ou de limiter ce phdnom~ne. Cet effet bdndfique a fait l'objet de nombreuses dtudes physiologiques et est ~i l'origine du concept dans laquelle la PEP pourrait maintenir le poumon ouvert. Ndanmoins, son niveau optimal reste controversd. C'est Katz et al. qui ont dtd les premiers h mettre en dvidence les effets de la PEP sur le volume de fin d'expiration (34). Dans ce travail, ils ont pu montrer que le recrutement induit par la PEP dtait <~tempsddpendant ,, puisqu'il dtait ndcessaire d'attendre une quinzaine de cycles respiratoires pour que le volume de fin d'expiration atteigne un nouvel dtat d'dquilibre. Malheureusement, dans cette dtude, la mdthode utilisde ne permettait pas aux auteurs de distinguer la variation de volume attendue avec augmentation de la PEP d'un effet lid au recrutement alvdolaire. Gr~tce ~t la courbe PV, le recrutement induit par la PEP a pu &re prdcisdment mesurd chez les patients ventilds mdcaniquement. Pour se faire, il est ndcessaire d'enregistrer une courbe PV ~tpartir de la position d'dquilibre sans PEP et de l'associer h une courbe PV enregistrde quelques minutes plus tard au niveau de PEP dtudid. En superposant ces deux courbes (courbe sans et avec PEP) sur un axe de volume commun, on peut mesurer prdcisdment la variation de volume induite par la PEP pour un niveau de pression donnde. C'est gr~tce 5_cette technique que Ranieri et al. ont proposd de mesurer le recrutement alvdolaire en PEP chez les patients atteints de SDRA (30). Les auteurs utilisaient la mdthode dite des occlusions multiples pour tracer des courbes PV avec et sans PEE La courbe en PEP dtait mesurde pendant une expiration pendant laquelle le niveau de PEP considdrd dtait brutalement interrompu (spirogramme expird passif). Cette mdthode, assez simple dans son principe, est fastidieuse h mettre en oeuvre au lit du malade. Les informations apportdes par l'association des courbes, sans et av.ec PEP, sont ndanmoins bien supdrieures h celles donndes par une simple courbe PV sans PEP. Ainsi des courbes PV en PEP ddcaldes vers le haut (axe de volume) tdmoignent d'un recrutement alvdolaire (fig. 2B), alors que des courbes en PEP qui restent superposables h la courbe sans PEP sugg~rent l'absence de recrutement. Dans ce cas, la PEP ddplace la courbe sur la droite (axe de pression), faisant craindre la survenue d'une surdistension de fin d'inspiration (fig. 2A). Maggiore et all. ont pu enregistrer des courbes PV, replacdes sur un axe de volume commun, ~i des niveaux de PEP ddcroissants compris entre 20 et 0 c m H 2 0 chez une quinzaine de patients atteints de SDRA (35). Cette dtude montrait que le recrutement induit par la PEP prdsent chez la majoritd des patients dtudids se poursuivait pour des niveaux de PEP bien supdrieurs au niveau d'infection inf&ieure. Ces donndes montrent que le recrutement est un phdnom~ne continu qui ddbute majoritairement autour de ce point d'inflexion infdrieur et qui se poursuit probablement bien au-del~i. Ces observations vont contre l'idde longtemps mise en avant selon laquelle la PEP pourrait &re rdglde selon un niveau optimal autour du point d'inflexion infdrieur. La moddlisation mathdmatique du recrutement alvdolaire aboutit ~i des courbes PV tr~s proches de celles observdes dans l'dtude de Maggiore et al. (24, 28).
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Malade non recruteur 2100
i
;1800
~(
~oo
E
"
A
E
1200
,~00
300 0 0
I0
2()
30
40
50
P (era H20) Malade recruteur 2100
Y
I
1800 1500 1200
e
r E:I
900 600 300
0
10
20
30
40
50
P (cm H20) Hg. 2 - Courbes pression-vohme multiples enregistrdes ~i des niveaux de PEP allant de 0 ~i 15 - 20 cmH20 chez deux patients atteints de SDRA, en phase aigue. Chez le patient A, l'augmentation du niveau de PEP n'entralne pas de recrutement significatif. Chez le patient B, les niveaux croissants de PEP induisent un d6placement de la courbe vers le haut, t6moignant de l'augmentation du volume pulmonaire pour un meme niveau de pression et attestant donc de la survenue d'un recrutement alvdolaire significatif.
Implications cliniques C o m m e nous l'avons ddj~i dit, l'effet de la PEP sur le recrutement alvdolaire a dtd largement 6tudi6 au travers des 6tudes physiologiques, cliniques ou expdrimentales. En revanche, les effets d'autres paramStres, tels que le volume courant, la pression de plateau ou m e m e la frdquence respiratoire sur le recrut e m e n t alvdolaire n'ont 6t6 6tudids que rdcemment. Si l'on consid~re qu'une
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rdduction excessive du volume courant pourra &re responsable d'une instabilitd alvdolaire, on peut imaginer qu'une stratdgie de protection pulmonaire, dont le niveau de PEP est insuffisant, pourrait majorer le d&ecrutement alvdolaire si la pression de plateau descendait en dessous d'une certaine pression critique d'ouverture. C'est ~ nouveau Ranieri et al. qui ont dtd les premiers ~l dtudier l'effet de la rdduction du volume courant sur les volumes pulmonaires en utilisant la technique de la courbe PV (31). Pour un meme niveau de PEP, le recrutement alvdolaire induit par la PEP semblait plus important lorsque les patients dtaient ventilds avec un petit volume courant que lorsqu'ils dtaient ventilds avec un grand volume courant. Les auteurs ont proposd comme explication ~i ces observations le fait que la rdduction de la pression de plateau et de la PEP puisse rendre les poumons davantage recrutables. Ces rdsultats sont diffdrents de ceux observds plus rdcemment par Richard et al. qui ont compard le recrutement alvdolaire obtenu avec un volume courant des volumes courants de 10 et 6 mL.kg -~ pour un niveau de PEP similaire rdgld au point d'inflexion infdrieur de la courbe PV (15). Le recrutement a dtd calculd par la diff&ence de volume pour une pression donnde entre la courbe en PEP et la courbe sans PEP. Les rdsultats de cette dtude montraient que la rdduction du volume courant, accompagnde comme attendu, d'une rdduction de la pression de plateau engendrait une instabilitd alvdolaire avec un ddrecrutement significatif. Ce ddrecrutement dtait compl~tement regagnd par l'application de deux soupirs consdcutifs. D'une fagon intdressante, ce phdnom~ne de ddrecrutement induit par la baisse du volume courant n'dtait plus significatif pour des niveaux de PEP autour de 14-15 cmH20. Bien que les rdsultats de l'dtude de Ranieri (31) et de Richard (15) semblent en apparence contradictoires, ils montrent que le volume courant peut influencer grandement le recrutement et donc le niveau de volume pulmonaire. La diffdrence entre ces dtudes dtait probablement li& fi_une diffdrence concernant la procddure utilisde pour enregistrer les courbes PV sans PEP. En effet, dans l'dtude de Ranieri et al. (31) les malades dtaient ventilds plusieurs minutes sans PEP avant l'enregistrement de la procddure alors que dans l'dtude de Richard et al. (15), la PEP dtait interrompue uniquement apr~s le cycle qui prdcddait l'enregistrement de la courbe PV. Cette diffdrence nous rappelle la difficultd d'interpr&ation des rdsultats de la courbe PV et l'impact de la procddure sur les rdsultats de cette technique. Pour dvaluer les effets respectifs de la PEP et de la pression de plateau sur le recrutement alvdolaire, Richard et al. ont compard le recrutement alvdolaire lid ~i une combinaison d'un volume courant de 10 mL.kg -~ associd ~i une PEP rdglde au point d'inflexion infdrieur ~i une stratdgie associant un volume courant rdduit et une PEP augment& de fagon ~i ce que la pression de plateau soit identique dans les deux conditions (36). D'une fagon int&essante, les rdsultats de cette dtude montraient que, pour une meme pression de plateau, la stratdgie associant un petit volume courant et une PEP importante induisait un recrutement tr~s significativement supdrieur ~i celui observd avec un grand VT et une PEP plus basse, rdglde au point d'inflexion inf&ieur. Ces rdsultats confirment que le ddrecrutement induit par la rdduction du volume courant est
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ndgligeable par rapport au recrutement gdndrd par l'augmentation de la PEP de 3 ~ 5 cmH20. Ces observations tr~s importantes pour la pratique nous rappellent que le volume courant influence le recrutement alvdolaire, mais de faqon bien moindre que la PEP. Ces rdsultats ont dtd confirmds par des donndes physiologiques obtenues par scanner qui comparaient des diffdrentes combinaisons de volume courant et de PEP (37).
Conclusion La courbe PV est un outil physiologique qui, confrontal aux donndes scanographiques, a permis de mieux comprendre les anomalies de mdcanique respiratoire qui caractdrisent le SDRA. Le concept de <, ventilation protectrice ,, basd sur les rdglages combinds de la PEP et du volume courant repose sur l'interprdtation de cette courbe. Recrutement et distension sont les deux phdnom~nes principalement incriminds dans la gen~se des ldsions induites par la ventilation. La courbe PV peut etre obtenue en routine clinique avec la majoritd des ventilateurs modernes de rdanimation et ainsi donner des indications cliniques simples, en particulier sur le potentiel de recrutement. Sa rdalisation et son interprdtation ndcessitent ndanmoins de nombreuses prdcautions mdthodologiques. L'utilisation de la courbe PV en routine n'est, pour l'heure, pas recommandde car le bdndfice clinique d'une telle stratdgie n'est pas actuellement ddmontrd.
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Modes ventilatoires au cours du SDRA M. Gainnier
Introduction La ventilation mdcanique est la pierre angulaire de la prise en charge du syndrome de ddtresse respiratoire aigue (SDRA). Ses modalitds font l'objet de controverses et de discussion depuis de nombreuses anndes. Seuls les modes de ventilation conventionnels sont envisagds dans ce chapitre. Les modes ventilatoires non conventionnels, comme la ventilation haute frdquence, font l'objet d'autres chapitres de ce livre.
Modes ventilatoires contr61~s Les deux modalitds d'approche ~, classiques ,, de la ventilation mdcanique du SDRA sont la ventilation ~i volume contr61de (VC ~ et la ventilation ~i pression contr61de (PC).
Ventilation a volume ou debit contr61E Cette modalitd ventilatoire est la plus utilisde au cours de la prise en charge du SDRA, y compris dans les enqu8tes les plus rdcentes sur les pratiques de la ventilation mdcanique au cours du SDRA, comme en atteste le travail de Esteban et al. sur la pratique de la ventilation mdcanique (1). Dans ce mode, chaque cycle mdcanique est ddlivrd avec un profil de ddbit inspiratoire prdddfini, la plupart du temps il s'agit d ' u n ddbit inspiratoire constant. La surface sous la courbe de ddbit reprdsente le volume courant qui est fixe et non influencd par les efforts inspiratoires du patient. Le cycle ventilatoire mdcanique est ddtermind par quatre rdglages : la forme du profil de ddbit (constant, ddcdldrant, sinuso'rdal, etc.), le volume courant (VT), la frdquence, le
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temps inspiratoire ou le rapport I/E qui reprdsente la consigne de cyclage dans ce mode (passage de la phase inspiratoire ~i la phase expiratoire) (2). L'avantage de cette modalitd ventilatoire est la garantie de la ddlivrance d'un VT constant. Toutefois, la pression dans les voles adriennes et la pression alvdolaire sont, dans ce mode, des variables ddpendantes du niveau du VT, de la pression totale de fin d'expiration (PEP totale), des caractdristiques mdcaniques du syst~me respiratoire et de l'effort inspiratoire du patient. Le choix du volume courant dans ce mode ventilatoire a une importance capitale lors de la prise en charge du SDRA par la ventilation mdcanique. Avant les anndes 1990, les consignes de rdglages du volume courant dtaient de l'ordre de 10 ~t 15 mL/kg de poids car l'objectif majeur de la ventilation mdcanique au cours du SDRA dtait la normalisation des gaz du sang. Dans les anndes 1990, un certain nombre de travaux expdrimentaux et cliniques (3-5, 6, 7-9) ddmontrent que la ventilation mdcanique peut avoir des effets ddldt~res sur la structure, la fonction pulmonaire, et in fine sur la survie des patients atteints de SDRA, surtout si on utilise des VT trop dlevds. Le poumon du SDRA est particuli~rement susceptible ~i une agression mdcanique du fait, entre autres, d'une rdduction de la capacitd pulmonaire. 12administration d'un VT trop dlevd expose ft. une surdistension pulmonaire susceptible de ldser le poumon mais un VT trop faible expose fi des phdnomSnes d'ouverture et fermeture alvdolaires dgalement capables de idser le tissu pulmonaire (6). Ces phdnom~nes sont accentuds par le ddficit en surfactant qui est une autre des caractdristiques physiopathologiques du SDRA. Les essais cliniques ayant dvalud le r61e du niveau de volume courant sur la mortalitd et la morbiditd de patient atteints de SDRA ont montrd que l'utilisation de VT de 12 mL/kg de poids iddal ou prddit dtait probablement ddldtSre par rapport fi 6 mL/kg (7, 8). Toutefois, ces essais ne ddmontrent pas que 6 ml/kg font mieux que 7 ou 8 mL/kg sur les variables pronostiques. Ceci est appuyd par le fait que les autres essais (10, 11) ayant dvalud le r61e du VT sur les variables pronostiques front pas montrd de diffdrence flagrante sur la mortalitd si on compare des VT allant de 7 ~i 10 mL/kg. Plus pertinent est probablement d'adapter le VT selon la pression de plateau qui est un bon reflet de la pression alvdolaire globale et donc du risque barovolotraumatique si la compliance paridtale est normale. Dans l'essai de I'ARDS Net (7), la pression de plateau moyenne dtait de l'ordre de 25 cmH20 pour les sujets ventilds ~i6 mL/kg de poids iddal. Pour la plupart des patients qui avaient une pression de plateau en dessous de 31 cmH20, le VT dtait sup&ieur ~i 6 mL/kg mais infdrieur fi 12 mL/kg. Une question se pose quant fi sur l'intdr& de rdduire le VT fi 6 mL/kg chez les sujets dont la pression de plateau (Pplat) ne ddpasse pas 30 cmH20 m8me si on utilise un VT de 10 mL/kg. Au cours d'une nouvelle analyse des donndes de I'ARDS net et pour rdpondre ~i la question <~y a-t-il un niveau de Pplat en dessous de laquelle la rdduction du VT perd de son intdr& ? ~, Hager et al. (12) montrent qu'il y a toujours un intdr& ~i rdduire le VT meme si la Pplat est en-dessous de 30 cmH20 pour un V , sup& rieur ~i 6 mL/kg. Cette notion tend ~i appuyer le fait que la rdduction du VT ne perd pas de son intdr& si le niveau de Pplat est ddj~i en dessous de 30 ~i
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35 cmH20. I1 apparalt donc tr~s difficile de recommander un niveau de VT iddal en r~gle gdndrale, meme si des bornes de 6-8 ml/kg et une Pplat ~t moins de 30-35 cmH20 constituent probablement des limites ~t ddpasser le moins souvent possible. I1 faut aussi tenir compte de la FiO2, de la PEP totale et de la compliance paridtale dans la rdflexion sur le VT en pratique courante. Enfin, ddlivrer des volumes courants trop faibles avec des niveaux de PEP trop bas expose au ddrecrutement, ~ l'augmentation de la FiO2 et peut-&re ~t des effets adverses en termes de ldsions induites par la ventilation mdcanique (atelectrauma). La forme de ddlivrance du ddbit peut &re modifide par le prescripteur si le ventilateur utilisd en offre la possibilitd. La nature iddale du profil de ddbit inspiratoire en VC ou en ventilation assist& contr61de (VAC) a fait l'objet de discussions (13-17). Le ddbit ddcdldrant semble assurer une rdpartition plus homog~ne du VT entre les unit& alvdolaires dont les constantes de temps sont diffdrentes par rapport au ddbit constant. Aucune dtude clinique n'a ddmontrd l'int&& d'utiliser tel ou tel profil de ddbit au cours du SDRA. En revanche, il semble qu'un ddbit inspiratoire dlevd, souvent plus de 60 L/min, soit ndcessaire au cours de la VAC car la demande ventilatoire des patients atteints de SDRA est souvent tr~s dlevde. Si le ddbit inspiratoire n'est pas suffisant, le travail ventilatoire des patients est accru. Le tdmoin d'un mauvais rdglage du ddbit inspiratoire en VAC est attestd par l'apparition d'une ddformation de la courbe pression-temps se manifestant par une concavitd dirigde vers l'axe des pressions sur la courbe pression-temps fournie par les ventilateurs (13-17). La valeur du ddbit peut &re modifide soit directement par le prescripteur si le ventilateur utilisd en offre la possibilitd, soit par l'intermddiaire de l'ajustement du temps inspiratoire ~t volume courant constant. En VC, la frdquence respiratoire est classiquement rdglde de mani~re ~i obtenir une PaCO2 rdsultant en un pH proche de la normale. Si on utilise une stratdgie de rdduction du volume courant sans modifier la frdquence respiratoire, la ventilation alvdolaire diminue avec pour corollaire une augmentation de la PaCO2 (hypercapnie permissive). C'est ce qu'ont bien montrd les premieres dtudes sur la rdduction du volume courant au cours du SDRA (10, 11). Cette hypercapnie ~ PEP totale constante est responsable d'une aggravation du shunt lide ~t un ddrecrutement alvdolaire et ~al'augmentation du ddbit cardiaque (18) avec dans l'ensemble une bonne toldrance clinique en dehors des pathologies cdrdbrales. On peut rdduire cette hyercapnie en augmentant la frdquence comme l'a montrd l'&ude du rdseau SDRA amdricain (7), malgrd l'usage d'un VT de 6 mL/kg de poids ~ iddal thdorique ,,. Ce bdndfice de l'augmentation de frdquence respiratoire sur la ventilation alvdolaire, et donc la PaCO2, est d'autant plus important que l'espace mort instrumental a dtd prdalablement rdduit (19). Ces frdquences respiratoires dlevdes peuvent &re responsables de la survenue d'une PEP intrinsSque (PEPi) significative qu'il faut obligatoirement mesurer par la technique de l'occlusion tdld-expiratoire (20,21).
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Ventilation pressioncontr61 e (VPC) Dans cette modalitd ventilatoire, l'objectifdu ventilateur est de pressuriser les voies a&iennes ~tun niveau de pression prdddfini par le prescripteur (22, 23). Cette pression appliqude au systEme respiratoire va directement influencer la courbe de ddbit qui sont, avec le volume, les variables ddpendantes dans ce mode contrairement au mode ~ivolume (ou ddbit) contr61d. La variable ddbit et la variable volume sont dgalement influencdes par les rdsistances et la constante de temps du systEme respiratoire (produit de la rdsistance par la compliance) (22, 23). Dans ce mode, le ddbit est ndcessairement exponentiellement ddcdldrant jusqu'~i la valeur nulle lors de l'inspiration, si on prolonge suffisamment la phase inspiratoire (en r~gle gEndrale au-del~i de trois constantes de temps) (24). I1 est possible d'ajuster la vitesse de pressurisation sur certains ventilateurs (pente de pressurisation). Le rEglage du rapport I/E et de la frEquence ne diff~re pas par rapport au mode volum&rique. Dans ce mode, la pression de pic n'existe plus, et cet dldment a conduit certains auteurs fi penser que ce mode ventilatoire avait un int&& pour minimiser le barotraumatisme (25, 26). Toutefois, la pression de fin d'inspiration (la pression de plateau) ~i niveau de PEP totale et volume courant identiques et ~i ddbit nul est la meme dans les modes volumEtriques et les modes en pression (27, 28). La diminution ou l'annulation de la pression de pic est directement en relation avec le caractEre exponentiellement ddcdldrant du ddbit inspiratoire (24). Dans ces conditions, le risque barotraumatique de la ventilation pression contr61de est le meme par rapport ~i la ventilation volumEtrique. En revanche, cette modalitd ventilatoire ne garantit pas le volume courant puisque le ventilateur n'a pas cet objectif (22, 23). Le caract~re variable du volume en fonction des caractdristiques mdcaniques du syst~me respiratoire du patient impose un r~glage de seuils d'alarme de volume dlevds (22, 23). L'objectif de volume courant ~i atteindre sera le meme qu'en ventilation volumdtrique, comme discutd plus haut, ce n'est que la mani~re d'y arriver qui change. Dans ce mode l'Evaluation du risque barotraumatique passe par la surveillance et la mesure du VT. L'avantage de ce mode est une meilleure synchronisation patient-ventilateur lors de l'inspiration si le patient a la possibilitd de ddclencher le cycle mdcanique (pression assistde contr61de) en raison d'un pic de ddbit inspiratoire dlevd. Ce pic de debit dlevd peut &re aussi un inconvdnient si l'effort du patient est important avec gdndration d'un VT dlevd, d'ofi l'importance de la surveillance du VT (14).
Volume contr61
versus
pression contr61Ee
En termes d'oxygEnation, ces deux modalitEs ventilatoires sont superposables. En effet, les quelques Etudes qui ont compard ces deux modalitEs ventilatoires au cours du SDRA ne montrent pas de diffdrence significative entre VC et PC,
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tant en termes d'oxygdnation que d'dlimination du CO2 et de retentissement hdmodynamique (27, 28). La rdpartition de la ventilation a dtd dvalude par des dtudes tomodensitomdtriques qui montrent que la distribution de la ventilation dtait discr~tement plus homog~ne en PC qu'en VC (29). La pertinence clinique de ces diff&ences assez minimes reste cependant ~i ddmontrer. Quelques dtudes ont compard la ventilation en pression assistde-contr61de (PAC) ~i la ventilation en volume assistd-contr61d (VAC) chez des patients gardant une activitd inspiratoire et donc capables de ddclencher le ventilateur. Ces dtudes (13, 15) montrent que, comparde ~i la VAC rdglde avec un ddbit inspiratoire assez faible, la ventilation en PAC permet de rdduire le travail respiratoire du patient. Cet avantage de la PAC est lid au pic de ddbit inspiratoire dlevd. I1 n'est plus observd quand la PAC est comparde ~i la VAC avec un ddbit inspiratoire dlevd. Esteban e t all. (30), dans un essai prospectif randomisd multicentrique, ont compard les effets de la VC (n = 37 patients) ~ ceux de la PC (n = 42 patients) sur la mortalitd et la morbiditd du SDRA. Dans les deux groupes, la pression de plateau a dtd infdrieure ou dgale ~i 35 cmH20. Aucune diffdrence n' ~td observde dans les caractdristiques cliniques des deux groupes ~i la randomisation. Les dchanges gazeux ont dtd identiques, en revanche la mortalitd dans le groupe VC dtait plus dlevde que dans le groupe PC (78 % vs 51%). Toutefois, les patients dans le groupe VC avaient un nombre de ddfaillances viscdrales ~i l'inclusion plus important (mddiane, 4 vs 2). Le ddveloppement d'une insuffisance rdnale pendant l'dtude dtait plus frdquent dans le groupe VC. En analyse multivaride, les facteurs inddpendamment associds ~ la mortalitd dtait la prdsence de deux ddfaillances viscdrales ou plus (odds ratio [OR], 4,61 - intervalle de confiance ~i 95 % [IC], 1,38 ~i 15,40) et d'une insuffisance rdnale aigue (OR, 3,96 ; IC 95 %, 1,10 ~i 14,28) mais pas le mode ventilatoire utilisd.
Ventilation contr61Ee rapport liE invers (VC-IRV) L'utilitd de la ventilation ~ rapport I/E inversd remonte aux anndes 1970 en pddiatrie dans le cadre de la ddtresse respiratoire ndonatale (31). Chez l'adulte, c'est Lachmann (32) qui a ddcrit l'usage de cette modalitd ventilatoire au cours du SDRA associd ~i la ventilation ~i pression contr61de, les rdsultats de cette premiere dtude dtaient ~i l'dpoque encourageants en termes d'oxygdnation et ont dtd suivis par d'autres (33-35). La ventilation contr61de ~i rapport I/E inversd peut &re rdalisde soit en pression contr61de, soit en volume contr61d. Pour passer en I/E inversd ~i partir d'une pression contr61de conventionnelle, il suffit d'augmenter la frdquence respiratoire et donc diminuer le temps expiratoire (Te) ~i temps inspiratoire (Ti) constant, ou de rallonger le Ti ~i frdquence fixe ou les deux. En ventilation volum&rique, pour passer en I/E inversd, il faut ralentir le ddbit ou augmenter la pause tdld-inspiratoire, ou augmenter la frdquence ~iTi constant, ce qui revient ~i diminuer le Te. Comme les pressions peuvent varier considdrablement, le risque barotraumatique est majeur dans ce
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mode en ventilation volumdtrique. L'objectif est de rdaliser une PEP intrins~que et d'augmenter la pression moyenne dans le syst~me respiratoire. Dans la littdrature, on retrouve un certain nombre d'dtudes attestant de l'efficacitd de cette technique pour amdliorer l'oxygdnation, mise sur le compte d'un meilleur recrutement en particulier sur les unitds alvdolaires ~a longue constante de temps (33-35). Le fait de prolonger la phase inspiratoire permettrait un tel recrutement sans pour autant gdndrer une PEPi majeure si le poumon est peu compliant et ~i donc une force de rappel dlastique dlevde. I1 n'y a pas de niveau absolu du rapport I/E au-dessus duquel il apparalt une PEPi, chaque patient a un I/E minimal au-dessus duquel ce phdnom~ne apparalt. Un autre avantage de l'augmentation du I/E est une rdduction de l'espace mort et donc une baisse de la PaCO2 ~l ventilation minute identique. Les m&anismes de cette rdduction seraient une homogdndisation de la ventilation. Ces modifications sont dans l'ensemble assez modestes. Aucune dtude n'a montrd de supdrioritd de cette technique de ventilation par rapport~ la ventilation conventionnelle ~i dgalitd de PEP totale (27, 36). Gdndrer une PEPi n'est pas sans danger du fait du caract~re hdtdrog~ne des poumons de SDRA, en effet la rdpartition d'une PEPi peut se faire de mani~re tr~s hdtdrog~ne dans ce type de poumon du fait des diffdrences majeures de constantes de temps. Les inconvdnients majeurs d'un tel mode sont des effets hdmodynamiques si l'augmentation des pressions est trop importante ou mal maltrisde, la n&essitd quasi obligatoire d'une sddation profonde et souvent d'une curarisation (37) et un risque barotraumatique.
Modes mixtes ou
d u a l modes
Les modes en pression ne garantissant pas le volume courant, de nombreux fabricants de ventilateurs proposent des modes ventilatoires hybrides fonctionnant en pression avec une rdgulation de la pression inspiratoire qui se fait en fonction d'un volume courant ,, cible ~ (VCRP chez Siemens | autoflow chez Dr~iger| VC+ chez Tyco | etc.). Dans ces modes, il existe une possibilitd de passage au cours d'un cycle ou de cycle ~i cycle ~i un mode avec un objectif de volume. Cet objectif peut &re atteint en passant dans le cycle mdcanique ~i une ventilation de type volumdtrique si le VT cible n'est pas atteint ou en modulant la pression d'insufflation de cycle ~icycle pour atteindre le VT cible au cours des cycles ventilatoires suivants. Aucun de ces modes n'a fait l'objet d'dvaluations rigoureuses au cours du SDRA. I1 n'existe aucune raison permettant de penser qu'ils puissent avoir un avantage significatif par rapport aux modes ventilatoires classiques et ils sont potentiellement dangereux.
Modes ventilatoires au cours du SDRA
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Modes ventilatoires autorisant une ventilation
spentan e Mode BIPAP-APRV Dans la prise en charge << traditionnelle ~ du SDRA, la ventilation spontande est inhibde pour forcer le patient ~i s'adapter aux rdglages ventilatoires ddterminds par le prescripteur. La ventilation contr61de rend quasiment obligatoire une sddation profonde ~i la phase aigue, voire une curarisation pour pouvoir atteindre cet objectif, ce d'autant plus que l'on adopte une stratdgie de rdduction du VT. Cette technique de ventilation empeche la contraction diaphragmatique et la capacitd du diaphragme ~t mobiliser les zones pulmonaires ddpendantes de la gravitd (zones postdrieure et infdrieure du poumon en ddcubitus dorsal). La curarisation pourrait encore accentuer ces phdnom~nes par un ddplacement cdphalique du diaphragme. Les inconvdnients d'une telle stratdgie seraient une amplification de l'hdtdrogdnditd pulmonaire et une aggravation des dchanges gazeux. Des modalitds ventilatoires permettant le maintien d'une activitd respiratoire spontande sont ~t la disposition des cliniciens sur bon nombre de ventilateurs de rdanimation comme la biphasic pasitive airway pressure (BIPAP) ou l'airway pressure release ventilation (APRV). La BIPAP et I'APRV, ddcrites pour la premiere fois par Stock et al. en 1987 (38), ne sont pas fondamentalement tr~s diffdrentes. L'APRV peut etre vue comme une CPAP dont le niveau de pression est diminud de mani~re intermittente sur de courtes pdriodes. La caractdristique essentielle qui distingue I'APRV des modalitds ventilatoires en pression est la possibilitd laissde au patient de ventiler spontandment autour d'un niveau de pression prdrdgld. Si le patient est sous sddation et curarisation, I'APRV correspond ~t une ventilation ~t pression contr61de avec rapport I/E inversd. La BIPAP correspond au meme type de modalitd ventilatoire avec une amdlioration de la synchronisation patient/machine lors du passage du bas niveau de pression au niveau le plus dlevd et inversement du fait de l'existence d'une fen&re de synchronisation. De la meme mani~re, si le patient est sous sddation et curarisation, la BIPAP correspond ~i une ventilation ~i pression contr61de avec ou non rapport I/E inversd. En prdsence d'efforts inspiratoires partiels, la BIPAP-APRV rdalise une assistance respiratoire partielle, mSant des cycles contr61ds en pression et des cycles spontands rdalisds sur un niveau de PEP variable. Maintenir une ventilation spontande pourrait jouer une r61e majeur pendant la ventilation mdcanique. Une amdlioration des rapports ventilationperfusion, du recrutement alvdolaire et du ddbit cardiaque, a dtd observde lorsque des cycles ventilatoires spontands sont possibles pendant la ventilation mdcanique. Comme les modes ventilatoires APRV-BIPAP appliquent la pres-
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sion de maniEre similaire 5. une CPAP, le patient contr61e la ffdquence et la durde de sa phase inspiratoire et expiratoire propre. Le patient n'est pas confine ~i un rapport I/E prdrdgld, il maintient un debit inspiratoire de type sinuso'l'dal comme lors de la ventilation spontande. La capacitd que possEde cette modalitd ventilatoire fi se plier aux modifications de la demande du patient en dtat critique amdliore au moins thdoriquement la toldrance de la ventilation mEcanique. La ventilation mdcanique conventionnelle pousse et distribue la ventilation prdfdrentiellement vers les zones pulmonaires non ddpendantes alors qu'en ventilation spontande le gaz est aspire dans les poumons et se distribue plus volontiers vers les zones ddpendantes. Un certain hombre de donndes obtenues chez des sujets en ventilation spontande puis places sous ventilation m&anique passive lors de l'anesth&ie montre que la ventilation mdcanique en pression positive ddtdriore les dchanges gazeux par augmentation du shunt intrapulmonaire. Par ailleurs, des travaux mends chez des sujets h poumons sains (39, 40) utilisant la tomodensitomdtrie pulmonaire montrent que des atdlectasies des regions d&lives surviennent trEs rapidement dans les suites immddiates de l'induction de l'anesthEsie gdndrale. Ce qui suggEre que des alterations de la ventilation surviennent trEs rapidement lorsque le systEme resp~rato~re est vennle pass~vement en vennlanon en pressrun posture. A 1 mverse, un certain nombre d'dtudes ont montrd une amelioration de l'oxygdnation et des rapports ventilation-perfusion lors du maintien de la ventilation spontande au cours du SDRA (41, 42). En rEgle gdndrale, ces Etudes montrent que I'APRV-BIPAP rdduit les pressions d'insufflation et les besoins en sedation et amdliore mieux l'oxygdnation par rapport aux modalit& ventilatoires conventionnelles. Ces modalitEs ventilatoires ont enfin un avantage pratique potentiel, c'est de permettre le passage d'une ventilation contr61de ~i une ventilation spontande sans changer de modalitE ventilatoire. Deux dtudes contr61des et randomisdes ont dtd publides sur l'usage de I'APRV au cours de l'insuffisance respiratoire aiguE. Putensen et al. (43) ont dtudid 30 patients ventilds 5. risque de SDRA dans les suites d'un polytraumatisme, dont plus de 50 % prdsentaient une insuffisance respiratoire aiguE hypoxdmique. Quinze patients ont dtd inclus dans le groupe APRV et 15 dans le groupe ventilation ~i pression contr61Ee. Les patients ont tous dtd curarisds dans ce groupe. L'dtude a durE 72 heures. Le rapport PaO2/FiO2 moyen dtait de 250 mmHg ~i l'inclusion dans les 2 groupes. Huit patients prdsentaient ddj~i des critEres d'ALI (n = 11) ou de SDRA (n = 5) dans les deux groupes. Les patients restants avaient des poumons probablement normaux. L'&olution de la compliance du systEme respiratoire, de l'oxygdnation art&idle, du shunt, du debit cardiaque et du transport artdriel en oxygEne apparaissait meilleure dans le bras BIPAP-APRV que dans le bras ventilation ~i pression contr61de. La BIPAP-APRV dtait associde fi une moindre posologie de sddatifs et de mEdicaments vasoactifs. Les durdes moyennes de ventilation (15 + 2 versus 21 + 2) et de sEjour en rdanimation (23 * 2 versus 30 + 2) &aient significativement plus courtes avec la BIPAP-APRV. La mortalitd n'dtait pas modifide. Varpula et al. (44) ont dvalud I'APRV avec ventilation spontande contre la pression contr61de 9
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intermittente avec aide inspiratoire sur les dchanges gazeux chez 33 patients en SDRA ou ALI. L'APRV a amdliord le rapport PaO2/FiO 2 par comparaison ~i la pression contr61de mais sans effet sur la mortalitd ou la durde de sdjour en rdanimation. Toutes les donndes prdcddentes semblent favorables ~i un usage plus large de I'APRV-BIPAP au cours du SDRA. Toutefois, les dtudes qui ont montrd un effet sur l'oxygdnation ont utilisd comme modes ventilatoires de comparaison des modalitds avec rapport I/E inversd ou des modalitds strictement contr61des, qui ndcessitent une sddation profonde et souvent une curarisation. D'autre part, les populations de patients inclus dtaient des sujets dont la gravitd de l'atteinte respiratoire dtait moddrde. I1 faudrait disposer de travaux comparant I'APRV avec des modalitds ventilatoires type VAC, comprenant une stratdgie de rdduction du volume courant proche de celle proposde par l'dtude de I'ARDS network (7) chez des patients atteints de SDRA sdv~res. Pour ce qui concerne la sddation, on peut faire des remarques similaires. En effet, lorsque I'APRV est comparde ~i un mode autorisant la ventilation spontande, comme dans l'dtude de Varpula et al. (44), les besoins en sddation de I'APRV sont identiques ~i ceux de la pression contr61de intermittente avec aide inspiratoire. L'APRV semble, pour certains, minimiser le risque de ldsions induites par la ventilation mdcanique, du fait de pressions moins importantes dans les voles adriennes par rapport ~l la ventilation classique (45-47). I1 convient de rappeler, ce propos, que la ventilation spontande autorise potentiellement une augmentation du volume courant dans les modes en pression. Par exemple, si la pression de I'APRV est rdglde ~i 25 cmH20 et que le patient gdn~re une pression inspiratoire de 12 cmH20, la pression transpulmonaire est de 37 cmH20, ce qui augmente le VT et reprdsente une valeur de pression transpulmonaire potentiellement dangereuse en termes de ldsions pulmonaires induites par la ventilation (48). Dans ces conditions, il paralt prdmaturd de penser que I'APRV-BIPAP rdduit le risque de ldsions induites par la ventilation. Un autre dldment ~i prendre en considdration est qu'une ndgativation excessive des pressions intrathoraciques par la ventilation spontande peut &re responsable d'une augmentation du travail respiratoire et cardiaque. Les muscles respiratoires de certains sujets peuvent se retrouver dans des conditions de charge ddfavorables, aggravant la sensation de dyspnde, car pour crder une diffdrence de pression suffisante pour assister la ventilation, les niveaux de pression haute doivent etre assez dlevds. D'autre part, si on augmente le nombre et la durde des pdriodes de relfichement de la pression, la pression moyenne alvdolaire peut diminuer, ce qui peut contribuer ~i aggraver l'hypoxdmie, inverse du but recherchd. Ce phdnom~ne peut en retour ndcessiter l'augmentation du niveau de pression. Enfin, dans le cas de patients avec une fatigue musculaire respiratoire importante ou avec une charge ventilatoire tr~s dlevde, il n'est pas dvident que les pdriodes de rel~ichement du niveau de pression suffisent fi_assurer un niveau de ventilation addquat. Le rdglage optimal de I'APRV-BIPAP n'est pas connu. Les difficult& lors de l'utilisation de ce mode sont de trouver le bon compromis entre assistance
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Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
mdcanique et ventilation spontande en jouant sur le niveau de sddation et sur le niveau d'assistance mdcanique, afin de permettre le maintien d'une activitd ventilatoire spontande suffisante sans induire une augmentation trop marqude du travail respiratoire du patient. Deux attitudes peuvent &re choisies (48): soit de ddlibdrdment proposer un temps de pressurisation inspiratoire long avec le risque d'augmenter le niveau de PEP intrins~que, ce qui va rdduire les besoins en PEP externe ; soit de rdduire ce temps mais avec une augmentation des niveaux de PEP externe. Aucune donnde ne permet de prdconiser telle ou telle attitude. Les deux dtudes prospectives randomisdes sur l'usage de ce mode ventilatoire au cours du SDRA en clinique humaine, dont une n'a pas montrd de diffdrence majeure en termes de survie, d'&hanges gazeux, de besoins en sddation (43, 44) reprdsentent un collectif de 45 patients soumis ~i I'APRV-BIPAE L'&ude de Putensen et al. est ambigu~ (43). Elle s'adresse ?i des patients polytraumatisds ~i risque de SDRA, qui reprdsentent une population particuliSre. Le groupe contr61e dans cette dtude a dtd curarisd pour des raisons peu claires pendant 72 heures. C'est dans ce groupe que l'oxygdnation s'est le plus ddgradde et ce de mani~re trSs profonde &s le premier jour de l'dtude alors qu'elle augmente dans le groupe APRV &s le premier jour dgalement (100 mmHg d'dcart en moyenne). Les patients sous APRV n'ont plus en moyenne les crit~res de SDRA &s le premier jour apr~s l'inclusion alors que les patients de l'autre groupe les gardent, avec un rapport PaO2/FiO2 ~i l'inclusion identique (250 mmHg), ce qui fait douter du caract~re comparable des deux groupes. L'utilisation de I'APRV-BIPAP au cours du SDRA reste encore trSs probldmatique compte tenu des nombreuses incertitudes sous-tendant son usage qui reste confind ?i des protocoles de recherche clinique et ~i certaines dquipes mddicales qui en maltrisent parfaitement la pratique.
Ventilation spontan e avec aide inspiratoire (VSAI) Une seule &ude est disponible sur l'usage de l'aide inspiratoire ~ila phase aigu~ du SDRA. Cereda et al. (49) ont rdalisd une &ude observationnelle portant sur 48 patients en ALI avec un rapport PaO2/FiO2 < 300 mmHg. Seuls des patients sous ventilation m&anique en pression positive et ayant une PaO2 > 80 mmHg et une PEP < ~i 15 cmH20 ont dtd indus. Ces patients ont dtd ensuite placds en VSM et surveillds pendant 48 heures. Si les patients se ddgradaient sous VSM, ils &aient replacds en ventilation conventionne|le. Sur 48 patients, 38 ont pu &re maintenus en VSAI. Les dix patients n'ayant pas toldrd l'aide inspiratoire (hypoxdmie, polypnde sup&ieure ~i40 cycles par minute, hypercapnie, instabilitd hdmodynamique) avait un dtat plus grave comme en atteste une durde plus longue d'intubation (20,2 _+ 19,2 jours vs. 9,2 _+ 13,5 jours), une compliance du systSme respiratoire plus basse (30,4 _+ 16,5 mL/cmH20 vs 41,7 -+ 15,0 mL/cmH20), un espace mort plus dlevd (VD/VT : 0,70 _+0,09 vs 0,52 _+0,10). Ainsi, il apparait possible d'uti-
Modes ventilatoires au cours du SDRA
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liser l'aide inspiratoire ~ la phase aigue du SDRA, au moins chez les patients de gravitd moyenne sans &at de choc associd.
Conclusion II n'y pas de consensus sur l'existence d'un mode ventilatoire iddal au cours du SDRA. Le choix de la modalitd ventilatoire est probablement moins important que la mani?ere dont le mode ventilatoire choisi est utilisd. Le mode VAC avec PEP reste encore la modalitd la plus utilisde, probablement parce que sa maltrise paralt plus facile au clinicien, et par le fait qu'elle permet un monitorage aisd de la pression de plateau et des caractdristiques mdcaniques du poumon de patients atteints de SDRA.
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Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alv olaire dans le SDRA J.-M. Constantin, M. Sebbane, S. C a y o t - C o n s t a n t i n , B. Jung, E. Futier, G. Chanques, S. Jaber et J.-E. Bazin
Introduction La ndcessitd d'une pression expiratoire positive (PEP) afin de limiter le collapsus tdld-expiratoire et l'hypoxdmie sdv~re est un concept aussi ancien que le SDRA (1). Apr~s plus de 10 000 articles publids sur le sujet, des recommandations claires sont toujours aussi difficiles ~t dtablir quant ~i la ,, PEP a d hoc ,, (2). Durant ces trente derni~res anndes, des niveaux de pression positive allant du plus bas (3) (pressions minimales quelle que soit la FiO2) au plus dlevd (4, 5) (shunt minimal, recrutement maximal) ont dtd recommandds. En 2007, une approche plus rationnelle du rdglage de la PEP, fondde sur la m~canique ventilatoire de chaque patient en prenant en compte le ratio recrutement/surdistension alvdolaire induits par la PEP devrait pouvoir etre proposde (6, 7).
D recrutement alv olaire Toute l'histoire du SDRA est faite de ddrecrutement. A la phase initiale, il est essentiellement dfi ~i l'inactivation, plus ou moins complete, du surfactant. De par ses propridtds tensioactives, une pression transpulmonaire de 10 cmH20 est suffisante pour maintenir << ouvert ~ un poumon sain. En cas de ddficit en surfactant (qualitatif et/ou quantitatif), la pression transpulmonaire ndcessaire pour maintenir les alvdoles ouvertes peut s'dlever jusqu'~t 25 cmH20, ce qui correspond fi une pression positive de 60 cmH20 (8). Rapidement, les alvdoles sont remplies d'un oed~me pulmonaire riche en protdines qui, d'une part, s'oppose aux dchanges au niveau de la barri~re alvdolo-interstitielle et, d'autre part,
98
Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
inactive le surfactant. Parall~lement, l'augmentation de la quantitd de tissus (oe&me), le poids du coeur, les pressions exercdes sur le diaphragme et les dpanchements pleuraux majorent le ddrecrutement. 12augmentation du poids des lobes pulmonaires et de l'eau extravasculaire pulmonaire est ~i la base d'un collapsus bronchiolaire tdld-expiratoire qui majore la perte d'adration. Les dtudes tomodensitom&riques ont montrd que le ddrecrutement correspondait fi une perte de gaz et fi un ex&s de tissus. La perte de gaz au niveau des lobes infdrieurs &ant plus importante que l'ex&s de tissus, il en rdsulte une diminution globale du volume pulmonaire selon un axe antdrio-postdrieur et cdphalo-caudal, le volume des lobes supdrieurs &ant conservd. Cette notion est fondamentale car lorsque l'on veut rdadrer les zones ddclives du poumon, ou zones ddpendantes, on s'expose ~i une distension des zones antdrieures et sup& rieures ou non ddpendantes. La recherche de ce compromis, nous le verrons plus loin, doit guider la stratdgie ventilatoire dans le SDRA. Au ddrecrutement constitutionnel du SDRA vient s'ajouter un ddrecrutement que l'on pourrait qualifier de , iatrog&ne ~. En effet, les aspirations trachdales rdp&des, la monotonie des cycles respiratoires et l'dventuelle surcharge hydro-sod& majorent le ddrecrutement. Cette composante est d'autant plus importante qu'elle est facilement accessible fi la thdrapeutique.
Lutte contre le d recrutement et recrutement alv olaire
Effets de la PEP Le recrutement alvdolaire se ddfinit par l a , rdouverture ~ d'alvdoles initialement collabdes. I1 a toujours dtd une prioritd dans la ventilation des patients en SDRA (5). En effet, la prdsence d'alvdoles non ventildes est un des dldments ddterminants du shunt intrapulmonaire et donc de la gravitd de l'hypoxdmie observde dans ce syndrome. Par consdquent, toute manoeuvre permettant d'obtenir un recrutement alvdolaire devrait se traduire par une amdlioration des &hanges gazeux. En rdalitd, la notion de recrutement alvdolaire est, d'une part, indissociable de celle de surdistension et, d'autre part, ne se rdsume pas ~i une diminution de la ~ perte d'adration ~,. On a longtemps accordd ~i tort ~i la PEP un r61e d'dldment recruteur. Or, ceci est compl~tement faux dans la mesure off le recrutement alvdolaire est un phdnom&ne actif, induit par le volume courant (VT) ou par la pression dynamique (9, 10). La PEP ne fait ,, que ,, s'opposer au d&ecrutement alvdolaire induit par le SDRA. C'est par commoditd de langage qu'on utilise le terme de
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alvdolaire dans le SDRA
99
<, volume recrutd par la PEP ~. En rdalitd, on devrait parler de <, volume alvdolaire non ddrecrutd grace ~i la PEP ,,. La morphologie pulmonaire est un ddterminant cld de la rdponse ~i la PEP. Les patients ayant un SDRA caractdrisd par une perte d'a&ation focale, prddominant au niveau des lobes inf&ieurs, sont moins rdpondeurs que ceux ayant une atteinte diffuse (11, 12). Le recrutement alvdolaire induit par la PEP s'explique par deux mdcanismes : prdvention du collapsus bronchiolaire en fin d'expiration (13) d'une part, et ddplacement de l'interface gaz/liquide de la bronchiole terminale vers l'espace alvdolo-interstitiel d'autre part (14). I1 ne faut pas confondre recrutement alvdolaire induit par la PEP et augmentation de volume pulmonaire induit par la PEP. Chez la plupart des patients ayant un SDRA, l'augmentation de la capacitd rdsiduelle fonctionnelle (CRF) qui rdsulte de la mise sous PEP est supdrieure au volume alvdolaire recrutd (15). Comme cela a pu &re ddmontrd chez l'homme par le scanner thoracique (12) ou exp&imentalement (16), recrutement alvdolaire et surdistension pulmonaire peuvent &re observds simultandment dans diffdrentes rdgions du parenchyme pulmonaire. La majoritd des patients atteints de SDRA ayant une distribution focale de la perte d'adration, les compliances respiratoires rdgionales sont hdtdrogSnes, crdant une sorte d'interddpendance lobaire (17) : le prix ~i payer pour maintenir l'adration tdld-expiratoire des lobes infdrieurs atdlectasids et/ou oeddmateux peut &re une surdistension des lobes sup&ieurs plus compliants. Les rdgions pulmonaires dont l'adration spontande ddpasse 80 % ddveloppent plus facilement une surdistension sous PEP que les zones pulmonaires moins bien adrdes (17). Les ldsions de barotraumatisme se localisent essentiellement dans ces zones initialement bien adrdes. Ces zones devenant encore plus adrdes (< 10 % de tissus) (18), il se met en place un cercle vicieux du barotraumatisme. Pour un niveau de PEP donnd, les zones pulmonaires atdlectasides, caractdrisdes par une perte massive d'adration sans exc~s de tissu pulmonaire, sont beaucoup moins facilement recrutdes que les rdgions pulmonaires oeddmateuses caract&isdes par une perte d'adration s'accompagnant d'un ex&s de tissu pulmonaire : il existe donc une relation inverse entre la recrutabilitd et le volume pulmonaire total ~i PEP nulle (17).
Rationnel pour les manoeuvres de recrutement alv olaire La PEP s'oppose au collapsus alvdolaire en s'opposant essentiellement au collapsus bronchiolaire. Elle est donc d'autant plus efficace que la pression exercde sur les bronchioles est faible. Lorsque celle-ci est importante, l'effet de la PEP se fera vers les zones non ddpendantes du parenchyme pulmonaire, en gdndrant de la distension alvdolaire plus qu'en s'opposant au d&ecrutement, fii l'opposd, l'application d'un niveau de pression positive sur un poumon prdalablement ~< ouvert ~ dvite la ~< fermeture ~ du poumon, et ce, pour des pressions plus basses. En effet, selon la loi de Laplace, P = 2y/r, la pression P ndcessaire ~i stabiliser une alvdole qui a une tension de surface g, est inverse-
100 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
ment proportionnelle ~i son rayon r. On peut en ddduire que la pression ndcessaire pour ouvrir une alvdole collabde est plus importante que celle permettant de la maintenir ouverte. De nombreuses dtudes animales ont montrd l'efficacitd des manoeuvres de recrutement alvdolaire (MRA) sur des modules de SDRA. I1 s'agit essentiellement de modules expdrimentaux de ddpldtion en surfactant (19-25). Dans un module expdrimental de lavage alvdolaire au sdrum sald chez le chien, Lim et al. (20) ont compard l'effet d'une MRA ~i la titration de la PEP sur la mdcanique respiratoire, l'oxygdnation et la morphologie pulmonaire au scanner. Les MRA entralnaient dans ce travail une adration pulmonaire tr~s supdrieure ~i celle obtenue avec l'augmentation de la PEP. Ces modifications morphologiques dtaient corrdldes h l'oxygdnation. Utilisant le m~me module de SDRA, mais chez le mouton, Fujino et al. (19) ont retrouvd une amdlioration de la PaO2 en appliquant une pression de 40 cmH20. Le recrutement optimal n'dtait pas obtenu d~s la premiere MRA, mais ~i la seconde MRA chez la plupart des animaux. En rdpdtant la MRA toutes les 30 minutes, l'effet bdndfique en termes d'oxygdnation n'dtait pas accompagnd de ldsions histologiques. I1 existe une littdrature abondante montrant l'efficacitd des MRA chez l'animal. I1 est cependant ndcessaire de ponddrer ces rdsultats. En effet, la plupart de ces mod&les expdrimentaux sont des lavages au sdrum sald, ce qui aboutit ~i une ddpldtion aigu~ en surfactant mais qui reste assez dloignde des ldsions histologiques du SDRA. Rosenthal et al. (26) ont dtudid la plupart des modules expdrimentaux de SDRA, rapportant une dvolution spontandment favorable en quelques dizaines de minutes pour tousles modules sauf pour l'injection intraveineuse d'acide oldique. Kloot et al. (27) ont dtudid la r6ponse aux MRA en termes d'oxygdnation et de volume pulmonaire dans trois situations diffdrentes : lavage au sdrum said, pneumopathie et injection intraveineuse d'acide oldique. L'amdlioration des param~tres mesurds n'dtait visible que dans le cas du lavage.
D termination du niveau de PEP ,, Tout est poison, rien n'est sans poison. Seule la dose fair qu'une chose n'est pas un poison ,, Paracelse (1493-1541). La recherche de la PEP ad hoc reste la cld de vofite de la rdanimation respiratoire. Le challenge pour le clinicien est de ddterminer au lit du patient le niveau de pression expiratoire qui permettra de maintenir un recrutement maximal en gdndrant le moins possible de surdistension et sans compromettre la stabilitd hdmodynamique du patient. Notons ~ ce sujet, qu'en dehors de l'hypovoldmie, la baisse du ddbit cardiaque et de la pression artdrielle induite par la raise en place d'une PEP a dtd bien dtudide et rapportde dans deux revues. I1 apparak que la PEP est real toldrde sur le plan hdmodynamique lorsqu'elle gdn~re de la surdistension (28, 29).
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alvdolaire dans le SDRA 101
La mesure du volume alvdolaire recrutd peut se faire schdmatiquement de deux fagons. La premiere, dite mdthode de rdfdrence, est tomodensitomdtrique. ~lpartir d' un scanner pulmonaire en ZEP et un en PEP, on calcule ~i l'aide d' un logiciel les diffdrents volumes pulmonaires. Le recrutement se ddfinit comme la rdduction de volume pauvrement ou non adrd entre ZEP et PEP (fig. 1). Darts le m8me temps, on peut calculer la part de distension et de surdistension apparues. Hdlas, cette technique n'est pas disponible en clinique. La seconde, dite mdthode des courbes pression-volume, permet de calculer le volume recrutd (fig. 2). Pour se faire, il faut rdaliser une courbe pression-volume en PEP et une en ZEP et ddterminer la diminution de CRF induite par le passage de PEP ~i ZEP (autrement appeld volume de rel~chement ou A CRF). Sur un meme graphique, on place la courbe en ZEP et celle en PEP en ayant pris soin de positionner le premier point au niveau du A CRF sur l'axe des Yr. Le volume recrutd se ddfinit comme la diffdrence de volume entre PEP et ZEP ~i une m8me pression (15 ou 20 c m H 2 0 classiquement). Si cette technique est rdalisable au lit du patient moyennant un dquipement simple, elle est relativement <, chronophage ,, et ne peut 8tre rdalisde tous les jours, voire plusieurs fois par jour en fonction de l'dvolution du patient ou pour tester diffdrents niveaux de PER En 2007, l'ensemble des fabricants de respirateurs de rdanimation proposent des modules automatisds pour la rdalisation des courbes pression-volume. Certains permettent une approche enti~rement automatisde et quantitative du volume recrutd. I1 s'agit pour l'un (Galildo | Hamilton Medical, Rh~iziins, Suisse) du suivi de la modification de .
Volume
(mL)
1 000
J
500
.l
i:
:
ZEP
......
PEP
:.N
r
i
,,
,
:,
i ,,,,,,,,,,,
-~-
~
m
-900 -800 -700
-600 -500 -400
-300 -200 -100
0
+100 UH
1 - Calcul du volume alvdolaire recrutd par la mdthode tomodensitomdtrique. Les histogrammes obtenus ~ partir du patient de la figure 3 montrent un ddcalage vers les zones normalement adrdes (> 500 UH) apr~s application de la PEP (donndes personnelles).
Fig.
102 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
2500
Volume(mL)
2000 -
y ...,,-
PEP
.........................
500
recrute
1 000 ..................................................... i-............................... ~[~ :
500
i 0
Pression(cmH20)
J
I
~
~
I0
~ I ''I
20
30
........ 40
Hg. 2 - Mesure du recrutement alvdolaire par Ia mdthode des courbes pression-volume. Une courbe en ZEP et une en PEP sont rdalisdes et placdes sur le m~me graphique. Le premier point de la courbe pression-volume en PEP est placd au niveau du D C R F sur l'axe des Y. Le volume recrutd correspond ~i la diffdrence de volume ~t une m~me pression donnde (15 c m H 2 0 dans cet exemple) entre la courbe en PEP et celle en ZEP.
l'hystdrdsis de la boucle pression-volume en fonction du niveau de PEP par exemple (fig. 3). L'autre (Engstr6m Carestation | General-Electric, Madison, Etats-Unis) propose une mesure de la CRF par double dilution ~i l'azote qui, couplde ~t une mesure dite ,, spirodynamique ,,, permet de calculer le volume recrutd par la PEP. Si les dtudes physiopathologiques en cours permettent de valider ces techniques chez les patients en SDRA, ces respirateurs pourraient reprdsenter une aide formidable pour le clinicien. Pour la premiere fois, on pourrait disposer au lit du patient d'un mat&iel initialement rdservd fi la recherche clinique. En attendant l'av~nement de ces nouveaux procddds, le clinicien devra donc se tier ~i diff&ents dldments ~i sa disposition pour choisir le niveau de PEP aat hoc. Ces dldments sont la morphologie pulmonaire, l'aspect de la courbe pression-volume en ZEP et la PaO2 ~t diffdrents niveaux de PEP (fig. 4). Chez la majeure pattie des patients ayant un SDRA coexistent des zones de parenchyme pulmonaire saines et des zones pathologiques (fig. 5). L'aspect morphologique de la perte d'a&ation a un impact fondamental sur l'aspect de la courbe pression-volume. Chez ces patients, la courbe pression-volume est la rdsuhante de deux courbes qui correspondent ~i chacune des deux rdgions pulmonaires : la premiere est le reflet des propridtds mdcaniques de la zone pulmonaire normalement adrde et la deuxi~me correspond au recrutement des zones pulmonaires non adrdes. Classiquement, il n'existe pas de point d'in-
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alvdolaire dans le SDRA 103
2500 V o l u m e
(mL)
A
2500. Volume
2000
i2oooi
15oo
i15oo i
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5000 mH~O) )5~176 cm.H20) o ~ Io 15 2o 2s 3o 3~ 40 4~!t............O.....................5...................!O............ !~ ............ 2o . . . . . . 2S. . . . . . . 30 ................,~5....................40.......... 4s Fig. 3 - Aspects des boucles pression-volume en ZEEP (A) et PEP 15 cmH20 (B) d'un patient prdsentant un SDRA de type diffus. On peut remarquer la franche diminution de l'hystdrdsis apr~s application de la PEP tdmoignant du potentiel de recrutement de ce patient (donndes personnelles).
flexion infdrieur du fait que les premiers millilitres administrds en ddbut d'inflation pdn~trent facilement dans la rdgion pulmonaire adrde et la distendent. Dans un deuxi~me temps, le poumon non adrd va etre recrutd sous l'effet de l'augmentation de la pression intrathoracique. L'examen de la courbe pressionvolume globale ne permet pas de prddire avec exactitude le recrutement alvdolaire ni le risque de surdistension, car les deux phdnom~nes apparaissent simultandment dans des rdgions pulmonaires diffdrentes. En d'autres termes, tenter de rdtablir ~t tout prix une adration pulmonaire normale en fin d'expiration ne peut etre obtenu chez un patient ayant une perte focale d'adration sans un risque important de barotraumatisme. II semble raisonnable, chez ces patients, de limiter les niveaux de PEP ~t 10 ou 11 c m H 2 0 et de rdaliser une titration croissante de la PEP. En cas d'impossibilitd ~t assurer une oxygenation satisfaisante avec ces rdglages, on peut proposer chez ce type de patients la raise en ddcubitus ventral. En effet, le ddcubitus ventral rdduit l'interddpendance lobaire en limitant l'expansion des parties cdphaliques du thorax prises ,, en tenaille ,, entre le rachis dorsal et le plan du lit et favorise, par l~i meme, le recrutement des rdgions pulmonaires juxta-diaphragmatiques. Cette rdduction considdrable du shunt amdliore les param~tres d'oxygdnation chez plus de 70 % des patients (30, 31). La stratdgie d'optimisation de la PEP doit etre diffdrente chez les patients prdsentant un SDRA avec une perte d'adration diffuse. Dans une configuration off la totalitd du parenchyme pulmonaire est insuffisamment ou non adrde en fin d'expiration, la courbe pression-volume devient une courbe de recrutement alvdolaire. Les points d'inflexion infdrieur et supdrieur indiquent les pressions ~t partir desquelles le recrutement alvdolaire commence et se termine. Cette notion est discutde et il apparatt que le point d'inflexion supdrieur pourrait correspondre plus au ddbut de la surdistension (32). Le point d'inflexion infdrieur correspond ~i la pression d'ouverture mais pas ~i la pression critique de fermeture (33). La pente de la courbe, dans sa pattie lindaire, refl~te le potentiel de recrutement alvdolaire. Avec une telle morphologie pulmonaire et meme si, en cas de SDRA, le poumon apparait oeddmateux et non pas collabd, le risque de surdistension reste minime, y compris pour des niveaux de PEP dlevds
104 Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
Titration de la PEP
5~7--.9~11 Pplat < 30 cmH20*
Titration de la PEP 2 4 ~ 2 0 ~ 1 8 ~ 1 4 ~ 1 2 ~ 10
* ou < 2 cmH20-1 en dessous du Psup
Pplat < 30 cmH20*
"D6cubitus Ventral Si ~chec
Strat6gies de sauvetage NOi-Almitrine-ECMO... Fig. 4 - Algorithme de rdglage de la PEP avec place des manoeuvres de recrutement alvdolaire au lit du patient.
(11, 12, 34). Dans ce contexte, il apparalt logique d'appliquer une manoeuvre de recrutement alvdolaire suivi d'une PEP dlevde (fig. 6). La manoeuvre de recrutement permettra de ~ rd-ouvrir ,, le parenchyme pulmonaire initialement collabd. La titration de la PEP devra se faire de fagon ddcroissante afin de sdlectionner la PEP la moins dlevde possible mais au-dessus de la pression critique de fermeture. Cette PEP a deux intdrets majeurs : le premier est d'amdliorer l'oxygdnation, le second est d'dviter le collapsus alvdolaire tdld-expi-
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alvdolaire dans le SDRA 105
Fig. 5 - Aspect tomodensitomdtrique d'un patient prdsentant un SDRA de type lobaire en ZEEP (A) et avec une PEP de 10 cmH20 (B). 12application de la PEP ne modifie pas l'aspect des zones de parenchyme condensd. Une analyse des densitds montrerait l'apparition d'une surdistension dans les zones initialement saines (donndes personnelles).
Fig. 6 - Aspect tomodensitomdtrique d'un patient prdsentant un SDRA de type diffus en ZEEP (A) et avec une PEP ~i 15 cmH20 (B). L'application de la PEP permet une adration pulmonaire sans surdistension (donndes personnelles). ratoire, ce qui d i m i n u e les ldsions d'ouverture-fermeture ~i la base du volot r a u m a et de la cascade inflammatoire, pour partie (35). A condition de rdduire le volume courant pour conserver une pression de plateau infdrieure ~i 3032 c m H 2 0 , le risque de surdistension reste m i n i m e (17).
Comment r aliser une manoeuvre de recrutement alv olaire De nombreuses manoeuvres de recrutement alvdolaire (tableau I) ont dtd proposdes durant ces derni~res anndes, sans qu'aucune d'elle n'ait fait la preuve de sa supdrioritd, essentiellement du fait de l'absence de comparaison vraie entre les diffdrentes techniques.
106 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Tableau I - R&apitulatif des principales manoeuvres de recrutement alvdolaire (MRA) utilis&s. CPAP" continuous positive airway pressure" Pplat 9 pression de plateau 9 V T " volume courant.
Type de Procddure
Intituld de la MRA CPAP (4, 5) Soupirs intermittents (39, 40) PEP croissantes (41) PEP 61ev6es (48)
Pression expiratoire positive (PEP) de 40 cmH20 pendant 40" Variantes 9 pression entre 35 et 60 cmH20 pendant 30 ~t 60" Augmentation de l'insufflation 1, 2 ou 3 fois par minute, cons&utifs ou non, aux ddpens du volume ou de la pression. 3 soupirs/min ~145 cmH20 de pression de plateau par exemple. Augmentation par paliers de 5 cmH20 de la PEP tous les 5 cycles en limitant la Pplat ~i 50 cmH20 puis retour ~i la ventilation initiale. PEP rdglde 10 cmH20 au-dessus du point d'inflexion infdrieur pendant 15 minutes. Rdduction du VT pour Pplat < 40 cmH20.
Pression contr616e Pression maximale 40 cmH20, augmentation de la PEP par paliers de 5 jusqu'~i 30 cmH20 sur 3 minutes. (20)
Hauts niveaux de CPAP Cette m&hode consiste ~t appliquer une pression expiratoire dlevde (35 ~i 60 cmH20) pendant un temps bref, de l'ordre de 30 ~i 40 secondes (27, 36, 37). Pour ce faire, on utilise le mode CPAP ( continuous positive airway pressure) du respirateur en rdglant le niveau de pression ddsird. Grasso et al. (38) ont dtudid 22 patients atteints de SDRA, ventilds selon la stratdgie proposde dans l'&ude du National Institue of Health (NIH), chez lesquels on appliquait MRA par l'intermddiaire d'une CPAP appliqude pendant 40 secondes ~i 40 cmH20. Les patients dtaient class& en rdpondeurs et non rdpondeurs selon qu'ils amdlioraient de plus de 50 % leur rapport PaO2/FiO2 apr~s la MRA. Apr~s deux minutes, les auteurs observaient une augmentation du rapport PaO2/FiO2 de 20 _+ 3 % pour les non rdpondeurs contre 175 _+23 % dans le groupe rdpondeur qui, par ailleurs, prdsentait une compliance pari&ale et pulmonaire plus grande que les non rdpondeurs.
Soupirs intermittents La seconde technique fait appel ~i l'utilisation de soupirs, qui correspondent ~i une augmentation transitoire de la pression d'insufflation aux ddpens de la PEP ou du VT (13, 39). Pelosi etal. (40) ont dtudid dix patients ventilds de mani~re protectrice pendant 2 heures, suivies d'une pdriode de 1 heure o6 trois soupirs par minute ~i une pression de plateau de 45 cmH20 dtaient appliquds avec retour ~i la ventilation initiale au cours de l'heure suivante. Ils ont observd une augmentation du rapport PaO2/FiO2 ainsi que du volume expird, une diminution de l'admission veineuse et de la PaCO2 pendant la phase des soupirs. Ces effets &aient fugaces dans le temps avec un retour aux valeurs de base dans
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alvEolaire dans le SDRA 107
les 30 minutes qui suivaient l'arr& de la ventilation avec soupirs. Barbas et al. (41) ont Etudid dix sujets atteints de SDRA ventilEs avec une PEP rdglEe 2 cmH20 au-dessus du point d'inflexion infdrieur de la courbe pressionvolume associEe ~i un volume courant de 6 mL/kg. Les patients &aient ensuite randomis& en deux groupes. Un groupe recevait trois cycles en pression contr61de ~i 40 cmH20 pendant 6 secondes toutes les 3 heures. Le deuxiEme groupe recevait trois cycles en pression contr61de ~i40, 50, 60 cmH20 pendant 6 secondes toutes 3 heures. Les auteurs observaient une meilleure oxygenation &alude par le rapport PaO2/FiO2 dans le deuxi~me groupe apr~s une heure et, jusqu'~i 6 heures, sans altdration hdmodynamique majeure.
Application de niveaux de PEP croissants associ~s une ventilation ~ pression ou volume contr61~ Bugedo et al. (42) ont utilisd deux stratdgies de recrutement chez dix patients atteints de SDRA. L'une consistait ~i appliquer des niveaux de PEP croissants par paliers de 5 cmH20 jusqu'~i 30-40 cmH20 sur une ventilation fi volume contr61E, sans ddpasser 50 cmH20 de pression de plateau. L'autre consistait en des niveaux de PEP croissants par paliers de 10 cmH20 jusqu'~i 30 cmH20 sur une ventilation ~i pression contr61Ee maintenue ~t 20 cmH20. Une tomodensitomdtrie pulmonaire dtait rdalisde ~i diffdrentes &apes au cours de ces manoeuvres de recrutement. Les donndes recueillies montrent que de hauts niveaux de PEP ,, aErent >, le parenchyme pulmonaire sans altErer de maniEre majeure l'hEmodynamique, tout en amdliorant l'oxygEnation.
Recrutement manuel ~ au ballon ~ L'insufflation de volumes dlevEs manuellement avec un ballon est une des plus anciennes manoeuvres utilisEes, tant en anesthdsie qu'en reanimation. En clinique, l'absence de contr61e des volumes et des pressions insuffldes (qui peuvent &re supdrieures ~i 100 cmH20) rend cette manoeuvre dangereuse (43). L'utilisation du recrutement ,, au ballon >> doit &re proscrite en dehors de situations exceptionnelles.
Aspects cliniques des manoeuvres de recrutement
alv~olaire (MRA) La stratdgie ventilatoire utilisde, protectrice ou conventionnelle, influence probablement la rdponse aux MRA. La ventilation protectrice, qui fait appel ~l de faibles volumes courants, est gEndratrice de ddrecrutement alvdolaire (44).
108 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Les niveaux de PEP ne suffisent pas toujours ~i prdvenir ce ddrecrutement. Les MRA permettent de s'opposer, au moins transitoirement, au ddrecrutement alvdolaire et diminuent ainsi la baisse de la PaO2 observde lors de la rdduction de volume. Medoff et al. (45) ont rapportd la ndcessitd d'un niveau de PEP dlevd, au-dessus du point d'inflexion infdrieur sur la courbe pression-volume, afin de limiter le retour aux conditions initiales. Dans une dtude portant sur 11 patients, Richard et al. (10) rapportaient une diminution du volume recrutd par la PEP apras rdduction du VT de 10 ~l6 mL.kg -~. L'application d'une MRA permettait d'dviter ce ddrecrutement, mais pas plus qu'une augmentation de la PEP ~i 4 cmH20 au-dessus du point d'inflexion infdrieur. Ces donndes soulignent parfaitement la relation entre niveau de PEP et MRA. Outre le ddrecrutement alvdolaire induit par la rdduction du VT, l'utilisation d'une FiO2 proche de 100 % peut atre pourvoyeuse d'atdlectasies de ddnitrogdnation. En effet, la survenue d'un collapsus de ddnitrogdnation est un phdnomane d'apparition progressive qui vient aggraver les Idsions prdexistantes (40). Paradoxalement, les niveaux de pression ndcessaires ~i la levde de ces atdlectasies sont bien plus dlevds, de l'ordre de 30 cmH20 contre 12 ~i 20 cmH20 pour les atdlectasies de compression. L'utilisation de MRA permettrait donc de lever ces atdlectasies, qui semblent inaccessibles ~i la PEP lorsqu'elle est rdglde ~l un niveau proche du point d'inflexion infdrieur sur la courbe pression-volume. L'origine du SDRA, pulmonaire (SDRAp) ou extrapulmonaire (SDRAep), a dtd considdrde comme un facteur prddictif de rdponse aux MRA par certains auteurs (40, 46). Dans leur travail, Grasso et al. (38) ont dvalud l'effet des MRA chez 22 patients en SDRA (11 SDRAp et 11 SDRAep). I1 n'existait pas de diffdrence significative en termes de type de SDRA (6 rdpondeurs SDRAp et 5 SDRAep), mais les auteurs ont retrouvd une nette diffdrence en termes de durde de ventilation prdcddant l'apparition du SDRA : 7,1 _+1,5 j pour les non rdpondeurs versus I _+0,3 j pour les rdpondeurs. Les auteurs insistaient sur l'importante diminution de la compliance thoracique et pulmonaire chez les non rdpondeurs. La mesure de la pression oesophagienne leur a permis de mesurer la pression transpulmonaire durant la MRA. Celle-ci dtait de 18 cmH20 chez les non rdpondeurs et de 29 cmH20 chez les rdpondeurs. Cela souligne l'importance d'adapter le niveau de pression de la MRA ~i chaque patient. L'efficacitd des MRA s'explique par la levde du collapsus alvdolaire initid soit par les forces de compression externes, soit par les atdlectasies de rdsorption. Or, il coexiste au sein du poumon des patients atteints de SDRA, des zones caractdrisdes par la perte de gaz et d'autres off si~ge un oed~me alvdolaire majeur (17). La formation de cet oedame alvdolaire rdsulte pour partie d'une altdration de la clairance alvdolaire. Les mdcanismes actifs de rdsorption de l'oedame sont influencds par le mode ventilatoire (47). L'dquipe de Matthay a montrd que la rdduction du VT entralnait une dldvation de la clairance alvdolaire (47). D'apras les auteurs, la protection de l'dpithdlium alvdolaire par cette stratdgie ventilatoire est ~i l'origine de la rdsorption de l'oedame. Dans un travail mend chez 15 patients atteints de SDRA (48), nous avons montrd que l'application
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alvdolaire dans le SDRA 109
d'une MRA entralne, chez les rdpondeurs, une diminution de l'oe&me. II est probable qu'en diminuant les cycles d'ouverture-fermeture au niveau alvdolaire, les MRA permettent une rdsorption active de l'oe&me pulmonaire associde aux transferts de fluides de l'alvdole vers l'interstitium. Chez les non rdpondeurs, l'application d'une MRA entralne une diminution de la clairance alvdolaire. L'explication pourrait &re, comme le montrent les travaux de Malbuisson et al. (15), que chez les patients prdsentant une atteinte pulmonaire de type lobaire, l'augmentation de la PEP entraine une distension des territoires normalement ventilds avec un ddrecrutement dans les zones pauvrement adrdes. La position des patients peut dgalement influencer la rdponse aux MRA. Pelosi et al. (39) ont rdcemment dtudid dix patients avec un SDRA avant et apr~s manoeuvres de recrutement (soupirs), en d&ubitus dorsal puis ventral. Ils ont rapportd une augmentation de la PaO2 et de la capacitd rdsiduelle fonctinnelle dans les deux positions. Toutefois, le recrutement alvdolaire dtait plus complet en ddcubitus ventral. La PaO2 augmentait de 95 _+26 m m H g ~i 155 +- 3 mmHg lors du passage en ddcubitus ventral. I2application d'un soupir entralnait une augmentation significative de la PaO2 de 37 -+ 17 m m H g en ddcubitus ventral contre 16 +_ 11 m m H g en d&ubitus dorsal. Les auteurs concluaient que l'association de MRA et du ddcubitus ventral pourrait favoriser un recrutement optimal chez les patients initialement non rdpondeurs en associant deux mdcanismes diffdrents. Cette notion avait ddj~i ~td avancde chez l'animal par Cakar et al. (49), qui avaient montrd, dans un mo&le de SDRA ~i l'acide oldique, une amdlioration de l'oxygdnation significativement plus importante et plus durable pour les animaux en ddcubitus ventral.
Tolerance des man uvres de recrutement alv olaire (MRA) Meme si elles sont efficaces chez certains patients et semblent assez bien toldrdes, les MRA ne sont pas ddnudes de risques. Les effets secondaires les plus courants sont une altdration des conditions hdmodynamiques globales ainsi qu'une ddsaturation. Certains auteurs ont rapportd rdcemment une moins bonne toldrance des MRA chez les patients non rdpondeurs ~t ces manoeuvres (38). Claesson et al. (50) ont rdcemment dvalud l'effet de trois MRA (35, 40 et 44 cmH20) sur le ddbit cardiaque et la perfusion de la muqueuse gastrique chez 14 patients en SDRA. Les auteurs ont pu montrer une diminution significative du ddbit cardiaque fi chaque MRA, alors que la pression art&idle moyenne ne diminuait que pour la pression la plus dlevde. La perfusion gastrique n'dtait pas significativement diminude, m8me en comparant les donndes avant la premiSre et aprSs la troisi&me MRA.
110 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
La toldrance des MRA chez les patients neurochirurgicaux est encore tr~s discutde. Bein et al. (51) ont montrd que la rdalisation d'une MRA entralnait une augmentation de la pression intracrfinienne et une baisse de la pression artdrielle responsables d'une diminution de la pression de perfusion cdrdbrale de 72 _+8 mmHg ~i 60 _+ 10 mmHg. Dans le meme temps, la saturation veineuse jugulaire en 02 passait de 69 ~ 59 %. Notons que dans ce travail, la MRA utilisde dtait l'dquivalent d'une CPAP ~i 60 cmH20 pendant pr&s de 60 secondes, ce qui est tr~s au-dessus des pressions utilisdes usuellement. Wolf et al. (52) ont dtudid l'effet d'une stratdgie ,, d'open lung ,,, associant ventilation protectrice et MRA chez des patients prdsentant une hypertension intracr~nienne. Ils ne relevaient pas d'effet inddsirable grave et seuls deux patients avaient ndcessitd un traitement suppldmentaire de l'hypertension intracrfinienne apr~s MRA, et aucun n'avait dfi etre exclu de l'dtude pour intoldrance. I1 semble ndanmoins que l'usage des MRA en neurotraumatologie ndcessite une surveillance de plusieurs variables (pression intracr~nienne, saturation veineuse jugulaire, pression de perfusion cdrdbrale...) et une prudence particuli~re.
Conclusion Les MRA reprdsentent un point cld de la stratdgie de recrutement alvdolaire. Au demeurant, les facteurs prddictifs de rdponse aux MRA ne sont pas clairement dtablis ~ice jour. I1 semble que l'efficacitd et la toldrance aux MRA suivent les memes r~gles que la rdponse ~i la PEP (48). Lorsqu'elles sont indiqudes (patients avec une atteinte diffuse dans le cadre d'un SDRA prdcoce), l'efficacit~ des MRA est fortement lide ~i la ddtermination de la PEP ad hoc (10) (fig. 7). S'il est ndcessaire dans certains cas de rdpdter plusieurs MRA avant de recruter tout le poumon (19), la frdquence ~l laquelle il faut rditdrer ces manoeuvres sur le nycthdm~re n'est pas connue. Sur un plan physiopathologique, on peut penser qu'une MRA apr~s chaque acte ddrecrutant permettrait d'optimiser l'effet de la PEP. En tout dtat de cause, des dtudes randomisdes et contr61des sont ndcessaires afin de clarifier la place des MRA dans la prise en charge des patients en SDRA.
Pression expiratoire positive et manoeuvres de recrutement alvdolaire dans le SDRA 111
Fig. 7 - Analyse tomodensitomdtrique de l'effet d'une MRA chez un meme patient en fonction du niveau de PEP utilisde. Pour une manoeuvre identique, le recrutement alvdolaire n'est maintenu ~i 5 minutes que si le niveau de PEP est suffisant (PEP ad hoc). (donndes personnelles).
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Ventilation non invasive au cours du SDRA B. Jung, M. Sebbane, P. Corne, J.-M. C o n s t a n t i n et S. Jaber
Introduction Uintdr& de la ventilation non invasive (VNI) a dtd initialement reconnu pour le traitement des ddcompensations de bronchopneumopathies chroniques obstructives (BPCO) (1). D'autres indications sont actuellement reconnues et en particulier le traitement de l'oe&me aigu du poumon (2). En 2007, le traitement symptomatique de l'insuffisance respiratoire aigue (IRA) hypoxdmique par la VNI est controversd. Ainsi, la confdrence de consensus frangaise d'octobre 2006 portant sur les indications de la VNI a cotd ~ sans avantage ddmontrd ,~ la VNI dans I'IRA hypoxdmique (3). Cependant, certaines &udes ont rapportd l'intdr& de cette technique dans des sous-groupes de patients prdsentant un SDRA ou un acute lung injury (ALl). L'objectif de ce chapitre est de prdciser les indications et les modalitds de la rdalisation de la VNI devant un SDRA/ALI. La VNI comme technique exclusive de ventilation m&anique dans une stratdgie de limitation thdrapeutique ne sera pas abordde.
VNI et SDRA : physiopathologie Une seule dtude physiologique a ddcrit les effets de la VNI chez des patients en ALI (4). Chez 10 patients non BPCO prdsentant une IRA (PaO2/FiO2 < 300 mmHg), les auteurs ont randomisd 3 niveaux de k/2qI avec cross-over (CPAP 10 c m H 2 0 ; aide inspiratoire (AI) 15 c m H 2 0 avec PEP 5 c m H 2 0 ; AI 10 c m H 2 0 avec PEP 10 cmH20). Les courbes de pression oesophagienne et gastrique ont dtd enregistrdes pour chaque patient permettant le calcul du travail respiratoire. Les auteurs ont montrd que : 9 la VSAI-PEP diminuait le travail respiratoire par rapport ~i la CPAP seule ; 9 le rapport PaO2/FiO2 dtait plus dlevd avec une PEP ~ 10 c m H 2 0 que lorsque la PEP dtait ~i 5 c m H 2 0 ;
116 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
9 un niveau dlevd d'AI ~t 15 cmH20 diminuait le score de dyspnde par rapport fi un niveau de 10 cmH20. Les objectifs de la VNI dans le SDRA sont donc d'amdliorer l'oxygdnation en limitant le ddrecrutement par l'adjonction d'une PEP mais dgalement de diminuer le travail respiratoire du patient par l'effet combind d'une pression inspiratoire et expiratoire positive. Les effets positifs de la VNI sur l'adration pulmonaire ont dtd objectivds par une dtude observationnelle ~il'aide de coupes tomodensitomdtriques pulmonaires (5).
VNI et SDRA du patient immunocomp tent Les rdsultats des principales dtudes rapportdes sont rdsumds dans le tableau I. La plupart des dtudes rdalisdes ont inclus des patients prdsentant une IRA de novo en excluant les BPCO mais en incluant souvent des atteintes hdtdrog~nes telles qu'OAP, atdlectasie ou ALl (6-16). Les premieres dtudes rdalisdes dtaient observationnelles sans groupe contr61e (6, 7, 9, 12). En 1995, une &ude randomisde contr61de a compard VNI et traitement mddical chez 41 patients non atteints de BPCO prdsentant une IRA quelle qu'en soit l'dtiologie (6). La VNI ne permettait pas de diminuer nile taux d'intubation ni d'amdliorer le devenir des patients. Cependant, une analyse en sous-groupe montrait une amdlioration du pronostic chez les patients hypercapniques. Antonelli et al. (7) ont rapport~ ~i travers un essai randomisd contr61d chez des patients pr&entant une IRA avec PaO2/FiO2 < 200 mmHg sans antdcddents de BPCO ou d'immunoddpression, une amdlioration de la survie fi la sortie de la rdanimation ainsi qu'une diminution de la durde de sdjour en rdanimation et du recours l'intubation chez les patients trait& par VNI versus intubation. Uindication de l'intubation dtait port& devant la persistance d'une hypoxdmie (PaO2 < 60 mmHg avec une FiO2 > 65 %) ou la survenue d'une complication (encombrement bronchique, arr& respiratoire, etc.). Une dtude (12) a compard les rdsultats de la VNI chez des patients prdsentant une IRA avec ou sans hypercapnie. Contrairement fi Wysocki et al. (6), les auteurs retrouvaient un bdndfice de la VNI, quel que soit le niveau de capnie ft. la lois sur le risque d'intubation mais aussi sur le devenir du patient. Dans ces deux dtudes (7, 12), l'dtiologie de I'IRA dtait multifactorielle et en particulier pouvaient &re inclus des patients prdsentant un ce&me pulmonaire cardiogdnique. Une dtude prospective randomisde a dvalud l'intdr& de la VNI pour le traitement des patients prdsentant une pneumonie communautaire grave (8). Seuls 2 1 % des patients ayant dtd trait& par VNI ont dtd intubds contre 50 % dans le groupe contr61e, fii nouveau, une analyse post-hoc a montrd que la VNI avait surtout dtd efficace chez les patients ayant une BPCO (qui reprdsentaient plus de la moitid de l'effectif) contrairement aux patients non atteints de BPCO chez qui le devenir dtait identique, qu'ils soient trait& par VNI ou non. I2dtude de Jolliet et al. (13) conforte les rdsultats retrouvds par l'dquipe de
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Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
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Ventilation non invasive au cours du SDRA 119
Wysocki (6). Les auteurs (13) ont exclu les patients aux antdcddents respiratoires et ont ddcrit fi travers une sdrie observationnelle le traitement par VNI de 24 patients prdsentant une pneumonie hypoxdmiante dont plus d'un tiers de patients immunoddprimds. Alors que la VNI permettait d'amdliorer l'hdmatose, 66 % des patients ont dfi &re intubds, en moyenne 36 heures aprSs leur admission en rdanimation. Les patients qui ont dtd trait& par VNI exclusive avaient une durde de sdjour en rdanimation plus courte que les patients intubds, autorisant pour les auteurs la VNI dans cette indication fi la condition qu'elle soit rapidement dvalude pour ne pas retarder une intubation. Une dtude multicentrique espagnole (15) a prospectivement inclus l'ensemble des patients prdsentant une IRA hypoxdmique non hypercapnique et a randomisd l'indication de VNI v e r s u s un traitement mddical standard. Si la VNI a permis de diminuer le taux d'intubation dans l'ensemble de la population, seuls 15 patients sur 105 prdsentaient un SDRA. Sur ces 15 patients, 14 ont dtd intubds et 12 sont ddcddds, portant fi 80 % le taux de mortalitd du SDRA dans cette sdrie. En analyse multivaride, l'utilisation de VNI ou l'existence d'un oe&me pulmonaire cardiogdnique dtaient protectrices de l'intubation alors que l'existence d'un SDRA dtait le facteur de risque inddpendant d'intubation (odds ratio dgal ~i 28,5) et l'un des deux facteurs de risque de mortalitd ~i 90 jours (avec le score de gravitd SAPS II). Les auteurs concluaient ~i l'intdr& de la VNI comme premiSre ligne thdrapeutique de I'IRA hypoxdmiante non hypercapnique en dehors du SDRA. Une revue rdcente de la littdrature (17) a sdlectionnd 8 dtudes randomisdes contr61des dvaluant la VNI dans le traitement de I'IRA non hypercapnique en excluant les OAP cardiogdniques. Cette maltaanalyse (17) concluait au bdndfice de la VNI sur la diminution du taux d'intubation sans pouvoir conclure sur la mortalitd. Cependant, les auteurs ont inclus une dtude dvaluant la technique chez des patients immunoddprimds (18), une rdalisde en postopdratoire de chirurgie thoracique (19) et une dvaluant la VNI en situation d'IRA post-extubation (20), rendant complexe l'interprdtation de cette malta-analyse dans le cadre du SDRA. Une sdrie observationnelle a dvalud l'intdr& de la VNI dans le traitement de I'IRA survenant au ddcours d'une pancrdatite aigue grave (21). L'IRA dtait le plus souvent d'origine multifactorielle. Si 54 % des patients ont dtd trait& avec suc&s, la prdsence d'atdlectasies, d'opacitds alvdolaires bilatdrales et d'une distension abdominale dtaient des facteurs prddictifs d'dchec de la VNI (21).
Une dtude rdcente (22) a dvalud la VNI en premiere ligne thdrapeutique dans un groupe homog~ne de patients prdsentant un SDRA. Sur 147 patients monoddfaillants inclus, 54 % ont dvitd l'intubation. Un score SAPS II sup& rieur ~i 34 et l'absence d'amdlioration du rapport PaO2/FiO2 infdrieur ~i 175 m m H g fi la premiere heure dtaient les facteurs prddictifs d'une intubation. La mortalitd en rdanimation des patients trait& avec suc&s avec la u dtait particuli~rement faible (6 %) et la durde mddiane de sdjour en rdanimation infdrieure fi une semaine.
120 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
VNI et IRA postop ratoire L'IRA en postopdratoire de chirurgie thoraco-abdominale associe dysfonction diaphragmatique, atdlectasie et parfois SDRA. Plusieurs dtudes ont montrd des rdsultats positifs de la VNI utilisde comme traitement d'une IRA en postopdratoire de chirurgie abdominale et thoracique (10, 19, 23, 24). Chez 50 patients ayant dtd opdrds d'une lobectomie pulmonaire, la VNI en traitement d'une IRA postopdratoire a permis une rdduction du nombre d'intubations et une diminution de la mortalitd (38 vs 13 %) par rapport ~i un traitement mddial simple (19). Deux dtudes (23, 24) ont rdcemment montrd une amdlioration de l'oxygdnation (24) et une diminution du taux d'intubation par la VNI devant une IRA en postopdratoire de chirurgie digestive (23). Dans une sdrie prospective observationnelle, 6 6 % des patients prdsentant une IRA hypoxdmiante ont dtd traitds avec succ~s par la VNI seule dans l'dtude de Jaber et al. (24). Alors que la VNI curative semble etre intdressante en postopdratoire (10, 19, 23, 24), I'IRA est le plus souvent multifactorielle et il semble difficile de conclure quand ~i l'impact de la VNI dans le traitement spdcifique du SDRA.
VNI et SDRA du patient immunod prim I1 existe une surmortalitd des patients immunoddprimds intubds par rapport la population gdndrale des patients intubds en rdanimation (25, 26). L'enjeu de la VNI chez ces patients est de permettre le traitement dtiologique de 1'IRA sans avoir recours ~i une ventilation invasive. En 1998, une dtude observationnelle (27) a rapportd des rdsultats tr~s positifs de la VNI proposde comme traitement d'une IRA monoddfaillante chez des patients en hdmatologie. Malgrd un rapport PaO2/FiO2 initial fi 85 mmHg, 11 patients sur 16 appareillds avec une interface nasale ont survdcu ~i la rdanimation avec une durde de sdjour infdrieure ~i une semaine sans avoir recours ~i une intubation. La m~me dquipe (10) a rdalisd une dtude randomisde comparant la VNI au traitement mddical seul chez 40 patients prdsentant une IRA en postopdratoire d'une greffe d'organe solide. La VNI permettait de diminuer l'incidence de l'intubation par rapport au groupe contr61e. Cependant, parmi les 40 patients, seuls 15 prdsentaient un SDRA alors que dix patients prdsentaient une ddcompensation cardiaque. En analyse de sous-groupe, l'amdlioration pronostique concernait uniquement les patients prdsentant un OAP, dont 100 % dtaient intubds dans le groupe standard contre 0 dans le groupe VNI. I1 n'y avait en revanche aucune diffdrence entre les deux groupes lorsqu'on comparait les patients prdsentant un SDRA. Hilbert et al. (18) ont compard VNI et traitement mddical seul chez 52 patients immunoddprimds admis pour IRA. Le diagnostic le plus frdquemment retenu de I'IRA dtait une pneumonie mais l'incidence des ddcompensations
Ventilation non invasive au cours du SDRA 121
cardiaques assocides n'dtait pas rapportde. Les patients insuffisants respiratoires chroniques ou prdsentant une autre dysfonction d'organe dtaient exclus de l'&ude. Par rapport au traitement mddical seul, la VNI a permis la diminution du taux d'intubation (77 vs 4 6 % respectivement) mais surtout la diminution de la mortalitd en rdanimation (69 vs 38 % respectivement) et ~i l'h6pital (81 vs 50 % respectivement). Le bdndfice de la VNI semble avoir concernd surtout les patients en hdmatologie, neutropdniques ou non, plut6t que les patients dont la cause de l'immunoddpression &ait lide ~l une corticothdrapie, au VIH ou fi une transplantation d'organe solide. L'utilisation de la VNI dtait associde ~i une diminution des complications survenant au cours du sdjour. L'amdlioration du pronostic des patients d'onco-hdmatologie par la VNI a dtd confirm& dans une autre dtude cas-tdmoins comparant une pdriode historique off les patients dtaient pris en charge mddicalement puis intubds en cas d'dchec, et une pdriode off la VNI dtait proposde en premiere intention (28). I1 n'existe pas ~lnotre connaissance d'dtude randomisde contr61de ayant dvalud la VNI dans le traitement de la pneumocystose. Une dtude cas-tdmoin a compard le devenir des patients trait& par VNI aux patients qui avaient dtd intubds (29). La VNI a dtd exclusive chez 18 des 24 patients inclus dans l'dtude eta permis d'amdliorer la survie des patients par rapport aux patients intubds (75 % vs 38 % respectivement). I2amdlioration du pronostic dtait associde fi une diminution des complications infectieuses chez les patients trait& par VNI seule. Au total, il nous paralt raisonnable de proposer la VNI en premiere ligne comme traitement symptomatique des IRA du patient immunoddprimd, compte tenu de la mortalitd dlevde lorsque ces patients sont intubds. I1 faut relativiser les rdsultats tr~s positifs de la VNI chez le patient immunoddprimd car les dtudes ont inclus une majoritd de SDRA ou d'ALI mais dgalement d'autres causes d'IRA et en particulier atdlectasies et ddcompensations cardiaques. De plus, les rdsultats ne sont applicables que dans les m#emes conditions: patients monoddfaillants, 100 < PaO2/FiO2 < 200 mmHg, indication d'intubation rddvalude prdcocement. Ainsi, dans l'dtude d'Antonelli et al. (10), la gazomdtrie dtait rdalisde 1 et 4 heures apr~s l'introduction de la VNI et l'indication de l'intubation &ait port& si la PaO2/FiO2 &ait inf&ieure ~i 65 mmHg avec une FiO2 f> 60 % alors que, dans l'dtude de Hilbert et al., le rapport PaO2/FiO2 devait &re supdrieur ~i 85 mmHg pour poursuivre la VNI (18). Les principales indications d'intubation dans les dtudes dvaluant la VNI en premiere ligne d'une IRA sont rappeldes dans le tableau II.
VNI et SDRA en pratique Si l'on ddcide de ddbuter le traitement d'une IRA hypoxdmiante ou d'un SDRA par la VNI, plusieurs questions se posent : Quel mode ? Quelle(s) interface(s) ? Quelles contre-indications ? Quand s'arr&er et intuber ?
122 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
T a b l e a u I I - Indications de l ' i n t u b a t i o n si est rdalisde une V N I premiere au cours de I'IRA h y p o x d m i a n t e (6-8, 10, 11, 13, 15, 18, 22). -
1 crit~re majeur parmi
-
Coma
-
Augmentation de la frdquence respiratoire de plus de 20 % Augmentation de la PaCO2 de plus de 20 % ou pH < 7,30 Diminution du rapport PaO2/FiO2 de plus de 20 % ou PaO2/FiO2 < 65 m m H g sous FiO2 = 60 % Pression artdrielle systolique < 70 mmHg, troubles du rythme, bradycardie < 50/min
-
2 critSres mineurs parmi
Arr8t respiratoire, pauses respiratoires Impossibilitd de clairance des sdcrdtions
-
Intoldrance de la technique Encdphalopathie Agitation Pression artdrielle systolique < 80 m m H g PaO2/FiO2 < 150 m m H g persistant
Quel mode ? La CPAP n'a pas d'indication dans la VNI du SDRA (3). Peu d'dtudes ont dvalud la CPAP en dehors de I'OAP cardiogdnique. Une dtude multicentrique (11) a randomisd CPAP v s traitement mddical simple dans I'IRA hypoxdmiante non hypercapnique. Seuls 17 % des patients dtaient traitds pour un OAP cardiogdnique alors que pour 60 % le diagnostic retenu dtait un SDRA. Le taux de patients intubds, la durde de sdjour et la mortalitd hospitali~re dtaient comparables dans les deux groupes mais on notait plus d'effets inddsirables dans le groupe CPAP. Sur la totalitd du groupe CPAP (62 patients), quatre patients ont prdsentd un arr8t cardiaque au moment de l'intubation alors que l'on ne notait pas d'arret cardiaque dans le groupe contr61e. Le retard ~l l'intubation dtait la cause la plus probable dans le groupe CPAP.
Quelle interface ? Le choix de l'interface ne joue pas un r61e ddterminant. Si l'interface nasale ou l'embout buccal ne sont pas les interfaces de choix face ~i une IRA hypoxdmiante (3), le choix entre les diffdrents types d'interfaces naso-buccales, faciales ou les nouvelles interfaces de type ,, helmet ,, sont possibles (14, 30). II est cependant utile de bdndficier de plusieurs modules d'interfaces adaptdes en fonction des patients, limitant ainsi le risque de complications cutandes et amdliorant la compliance ~t la technique. Les interfaces englobant la totalitd du visage sont dgalement une possibilitd. Leur efficacitd n'a pas dtd comparde aux masques traditionnels, mais elles sont une arme suppldmentaire pour augmenter la toldrance du patient ~i des sdances prolongdes de ventilation. L'utilisation d'un humidificateur chauffant pourrait amdliorer la toldrance de la VNI par rapport ~i un dchangeur de chaleur (3). L'utilisation de l'humi-
Ventilation non invasive au cours du SDRA 123
dificateur diminue l'espace mort instrumental (31). Son utilisation avec le casque reste controversde car il apporte un surcrolt de vapeur d'eau pouvant g~ner le patient.
Quelles contre-indications ? notre connaissance, l'indication de la V2qI face fi un patient atteint de SDRA associd fi un dtat de choc n'a jamais dtd dvalude. I1 ne paralt pas raisonnable de recourir fi la VNI devant ce type de patient en dehors d'une limitation thdrapeutique (<~ do not intubate order ~). Les contre-indications classiques de la VNI sont rdsumdes dans le tableau III. La prdsence d'un dtat de choc, la valeur du score SAPSII, l'absence d'amdlioration du rapport PaO2/FiO2 aprSs 1 ~i 2 heures de VNI sont des facteurs prddictifs d'dchec de la VNI (tableau IV). Tableau I I I - Contre-indications absolues fi la VNI (3). Environnement inadaptd, expertise insuffisante de l'dquipe Patient non coop&ant, agitd, opposant ~ila technique Coma (sauf coma hypercapnique de l'insuffisance respiratoire chronique) l~puisement respiratoire I~tat de choc, troubles du rythme ventriculaire grave Sepsis sdv~re Post-arr& circulatoire immddiat Pneumothorax non draind, plaie thoracique soufflante Obstruction des voies a&iennes sup&ieures (sauf syndrome d'apndes du sommeil, laryngotrachdomolacie) Vomissements incoercibles Hdmorragie digestive haute T&rapldgie traumatique aigue ~ila phase initiale Traumatisme cranio-facial grave
Tableau I V - Facteurs prddictifs de l'intubation chez les patients prdsentant une IRA hypoxdmique sur coeur et poumons ant&ieurement sains (3). Avant la V N I
Frdquence respiratoire > 38 c/min Age > 40 ans Pneumonie communautaire Sepsis IRA postop&atoire par complication chirurgicale
A la I re heure apr?s la V N I
PaO2/FiO2 < 200 mmHg
Indications d'intubation I1 nous parait essentiel de rddvaluer l'indication de l'intubation tr~s rdguli~rement pour ne pas retarder son moment et aggraver le pronostic (3, 32). Les facteurs prddictifs de l'&hec de la VNI rapportdes par la rdcente confdrence de consensus sur la VNI (3) sont rapport& dans le tableau IV. L'ensemble des
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dtudes ayant montrd des rdsultats encourageants de la VNI dans I'IRA hypoxdmiante comportaient des indications d'intubation (7, 9, 12, 14-22). Les indications d'intubation sont regroupdes dans le tableau II. Lorsque la VNI a dtd rdalisde et que le patient doit &re intubd, la V2qI peut etre poursuivie comme technique de prdoxygdnation. La VNI en prdoxygdnation avant intubation a montrd une diminution de l'incidence des d&aturations par rapport ~i une prdoxygdnation utilisant un masque ~i haute concentration fi haut ddbit d'oxyg~ne (33).
Conclusion La VNI a dtd peu dvalude dans le traitement initial du SDRA contrairement aux dtudes portant sur l'insuffisance respiratoire aigue de novo. Le SDRA est un facteur prddictif d'dchec de la VNI et ce d'autant plus qu'il est compliqud d'une instabilitd hdmodynamique et/ou d'une ddfaillance neurologique. La VNI est donc une indication limite dans le cadre du SDRA. Le sous-groupe de patients immunoddprimds semble rdpondre particuli~rement ~l la technique, probablement du fait du pronostic sombre des patients immunoddprimds intubds malgr6 les progr~s constants de la rdanimation et de l'onco-hdmatologie. Si la VNI est proposde (tableau V), l'dvaluation de son efficacitd clinique et gazom&rique doit &re pr&oce et rigoureuse afin d'dviter tout retard ~il'intubation. Lorsque celle-ci devient ndcessaire, la VNI devrait &re poursuivie comme technique de prdoxygdnation.
Tableau V - V N I et S D R A " notre protocole local en 2007. Indication
-
Curative Prophylactique (en postopdratoire++)
Ventilateur
Ventilateur lourd de rdanimation
Humidification
Humidificateur chauffant (rdglages VNI)
Interface
Masque naso-buccal en premiere intention puis masque facial complet ou casque selon la toldrance du patient
Mode
VSAI-PEP pour S p O 2 > 90%, frdquence respiratoire < 35 c/min, volume courant expird 6-8 mL.kg -1 de poids iddal
Durde des sdances
30 ~i 60 min, rdp&des de fagon rapprochde
Surveillance gazom&rique
I re heure apr~s initiation de la VNI puis ~i la 4 e heure et 2/24 h au minimum
Intubation
Prdoxygdnation en VNI fi FiO2 100 %
Ventilation non invasive au cours du SDRA
125
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126
Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
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Ventilation m canique en d cubitus ventral au cours du SDRA C. Gudrin, S. Lemasson, E Bayle, T. Fassier, G. F l a n d r e a u et J.-C. R i c h a r d
Introduction Conduire la ventilation mdcanique en ddcubitus ventral (DV) amdliore l'oxygdnation chez les malades avec SDRA chez 70 % d'entre eux, ceci est maintenant largement documental (1). Les mdcanismes de cet effet sont de plus en plus clairs, notamment gr~tce aux donndes expdrimentales. Ainsi, sur un module de ddpldtion en surfactant, le DV provoque, dans les rdgions dorsales du poumon une rd-adration, une rdduction du shunt et une prdservation de la perfusion, facteurs qui, en association avec une ventilation plus uniforme, contribuent fi amdliorer l'oxygdnation (2). Toutefois, l'aune fi laquelle une thdrapeutique ventilatoire est actuellement jugde au cours du SDRA est moins son effet sur l'oxygdnation que sa capacitd ~i protdger le poumon des ldsions induites par la ventilation mdcanique (LIVM) (3), c'est-fi-dire ~tprotdger le plus possible d'unitds alvdolaires de la surdistension adrienne. Expdrimentalement, cette action du DV a dtd ddmontrde ~t plusieurs reprises (4-6). Chez l'homme, les arguments en faveur d'un r61e prdventif du DV sur les LIVM sont de plus en plus nombreux (7). Un autre organe ~i protdger au cours de la ventilation mdcanique est le ventricule droit, menacd par l'augmentation excessive de sa post-charge due ~t une pression expiratoire positive (PEP) dlevde (8). L'dconomie de PEP que permet le DV pourrait prdserver la fonction ventriculaire droite. Malgrd ces donndes expdrimentales, les arguments en faveur du bdndfice du DV dans le SDRA sont encore limitds chez l'homme. En effet, apr~s trois essais contr61ds randomisds publids ~i ce jour (tableau I), il apparalt que le DV n'augmente pas significativement la survie des patients par rapport au ddcubitus dorsal (1, 9, 10). Ne faut-il donc plus faire de DV ? Ou le rdserver aux situations de ~, sauvetage ,, en cas d'hypoxdmie sdverissime ? (11). Compte tenu des
128 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
rdsultats ndgatifs des essais cliniques et des risques lids au retournement (9), l'usage du D V pourrait quitter progressivement la pratique clinique, aboutissant ~l une perte d'expertise. La pratique du D V persiste toutefois en France : dans l'essai Express, le D V a concernd 18,8 % des malades du groupe distension minimale et 8,8 % des malades du groupe recrutement maximal (12). Le but de ce chapitre est de faire le bilan des donndes exp&imentales et cliniques rdcentes sur le DV au cours du SDRA. Les effets du D V sur la mdcanique respiratoire et sur les LIVM seront ddtaillds puis l'impact du D V sur le devenir des patients sera dtudid. Les techniques d'optimisation du D V seront ensuite abord&s, avant d'envisager les perspectives de recherche sur le D V dans le SDRA. Tableau I - Les trois essais randomis& contr61ds ayant testd la ventilation mdcanique en d&ubitus ventral chez des malades avec SDRA. Italie (i)
Nbre patients S D R A (%) Durde de D V par jour
.
DD
DV
152 (93,3)
152 (94,7)
(heures) pr&ue effectude
I
France (9)
Espagne (i O)
DD
DV
DD
DV
378 (28)
413 (33,9)
60 (100)
76 (100)
au moins 8 8
20 14 fijl, 20 ~j2, 19 ~j4 et j7
4 0 + 14 46+16 45+15 10,3 + 2,7p 8,1 + 1 , 9 m 8,1 + 2 , 0 m 9,7 + 2,9 7,9+3,4 7,5+3,2 73,4 + 18,3 65,7 + 20,4 65,7 + 20,9 125,3 + 48,8 155 + 59 150+ 59 45,1 + 11 44+11 4 4 + 12 7,38 _+0,09 7,39 +0,10
38+ 14 43+16 8,6 + 1,6 np 8,3 + 1,7 np 12+2 12+2 79+21 84+19 161 + 94 132 _+74 43+ 11 45+9 7,35 + 0,1 7,35 + 0,1
Randomisation 4 0 + 16
IGS II V T (mL/kg) PEP ( c m H 2 0 ) FIO2 (%) PaO2/FIO 2 PaCO 2 pH
9,6 + 3,2 72,7 + 18,7 129,5 + 49,5 44,2 + 11,8 N o n fourni
Crit6res de jugement Mortalit~
non modifide
Incidence
non dvalude
10,3 + 2,9 p
PAVM
significativement rdduite dans le groupe D V :
non modifide 15 % vs 18,4 %
2,14 vs 1,66 dpisodes / 100 patients/jour d'intu-
bation Oxygdnation
significativement meilleure en D V
Durde V M
inchang&
Effets secon-
l&ions de pression plus frdquentes en D V
daires
l&ions de pression, obstruction/ddplacement
frdquence non diff&ente entre les groupes
de sonde d'intubation plus frequents en D V DD : ddcubitus dorsal ; DV : ddcubitus ventral ; SDRA : syndrome de d&resse respiratoire aigue ; p : poids prddit par la taille ; m : poids mesurd ; np : non prdcisd ; IGS II :indice de gravitd simplifid II ; PAVM : pneumonie acquise sous ventilation mdcanique ; VM : ventilation mdcanique ; VT : volume courant ; PEP : pression expiratoire positive.
Ventilation mdcanique en d&ubitus ventral au cours du SDRA 129
Effets du DV sur la m canique ventilatoire
Effets sur la surdistension pulmonaire Chez 11 patients avec SDRA tr~s hypoxdmiques ventilds sans PEP externe, le DV supprime la PEP intrins~que et la distension pulmonaire et amdliore l'oxygdnation (13). L'explication avancde est une abolition de la limitation du ddbit expiratoire et une rdintdgration du compartiment pulmonaire ~i constante de temps longue dans la ventilation courante, ce qui amdliore la ventilation alvdolaire. Ces rdsultats sont des arguments indirects pour un effet protecteur du DV vis-fi-vis des LIVM ~i bas volume (14). En effet, chez les malades avec SDRA, la capacitd rdsiduelle fonctionnelle (CRF) et la rdserve de d~bit expiratoire sont rdduites, induisant une limitation du ddbit expiratoire (15) et donc un risque de surdistension, concernant surtout les rdgions ddpendantes du poumon en ddcubitus dorsal. En augmentant la pression transpulmonaire dans ces rdgions (16), le DV a deux effets : 1) homogdndisation de la distribution du volume courant (VT) dans le poumon, donc rdduction du risque de surdistension rdgionale ; 2) augmentation du ddbit expiratoire donc rdduction de la surdistension. Dans cette dtude (13), un faible niveau de PEP (6 c m H 2 0 ) avait le meme effet que le DV sur la limitation de ddbit expiratoire mais pas d'effet sur l'oxygdnation.
Effets sur la Pa02 et la PaCO2 Chez 25 patients avec SDRA primaire, PEP et DV ont des effets additifs mais pas synergiques sur l'oxygdnation et le DV n'est pas associd fi une rdduction de la PaCO2 (17), contrairement ~i l'dtude citde prdcddemment (13). Pour une meme ventilation-minute, la baisse de PaCO2 associde ft. une augmentation de PaO2 traduit une augmentation de la ventilation alvdolaire et, plus prdcisdment, une amdlioration de l'addquation entre la ventilation et la perfusion. Dans l'dtude de Gainnier et al. (17), l'augmentation de PaO2 associde fi une non-diminution de la PaCO2 indique soit une diminution du ddbit cardiaque, soit une augmentation de l'espace mort alvdolaire induites par la PEP. L'augmentation de l'espace mort alvdolaire pourrait refldter la surdistension et est un facteur pronostique (18). Gattinoni et al. (19) ont montrd que la rdduction de PaCO2, mais pas l'augmentation de PaO2, au cours de la premiere sdance de DV est associde ~i une meilleure survie ultdrieure en analyse multivaride, un rdsultat toutefois non retrouvd par d'autres (20). Puisque l'association DV et PEP ne diminuait pas la PaCO2 mais amdliorait l'oxygdnation, il ddcoule de l'&ude de Gainnier et al. (17) que la PEP devrait &re diminude en DV.
130 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Effets sur la pression transpulmonaire Chez dix patients avec SDRA sdv~re (PaO2/FiO2 < 100 sous FiO2 > 60 %), le rapport VT/CRF et la pression de plateau transpulmonaire sont rdduits avec le DV rdalisd dans des conditions particuli~res, ~i 60 ~ par rapport au ddcubitus dorsal dans la m8me angulation (7). Le rapport VT/CRF et la pression de plateau transpulmonaire reflStent les contraintes imposdes au poumon qui sont donc minimisdes par le DV.
Effets sur la distribution r gionale de la ventilation Plusieurs travaux sur modules expdrimentaux ont permis d'apprdhender les effets respectifs du DV et de la PEP sur la distribution rdgionale de la ventilation et de la perfusion pulmonaire. I1 a dtd largement montrd que le DV ne modifie pas de fagon majeure la perfusion pulmonaire qui reste prddominante dans les rdgions dorsales (21), suggdrant que la gravitd est un facteur mineur de la rdpartition du ddbit sanguin pulmonaire (22). L'effet respectif de la posture et de la PEP sur la distribution rdgionale de la ventilation a dtd rdcemment dtudid chez des animaux normaux (23). En ddcubitus dorsal ~i PEP nulle, la distribution verticale de la ventilation n'est pas lindaire mais unimodale avec le mode de la ventilation situde dans la rdgion centrale du poumon. Avec une PEP de 10 cmH20, le mode est ddplacd vers les rdgions dorsales. En DV ~t PEP nulle, la ventilation augmente de fagon lindaire des rdgions dorsales, non ddpendantes de la gravitd, vers les rdgions ventrales, ddpendantes de la gravitd : la ventilation est 3,2 fois plus importante dans les rdgions ventrales que dorsales. Avec une PEP de 10 cmH20, la lindaritd de la relation ventilationhauteur verticale du poumon disparait : la ventilation est homogdndisde sur la hauteur du poumon. L'hdtdrogdnditd iso-gravitationnelle de la ventilation est rdduite par la PEP dans les deux positions. La composante gravitationnelle de l'hdtdrog~n~it~ de la ventilation est augment~e en ddcubitus ventral et diminude en DV avec la PEP. L'hdtdrogdnditd de la ventilation est moindre en DV qu'en ddcubitus dorsal et minimale avec la PEP en DV. La PEP redistribue la ventilation vers les rdgions ddpendantes en ddcubitus dorsal et non ddpendantes en DV. Sur poumon agressd fi l'acide oldique, le DV augmente la ventilation des rdgions ddpendantes et uniformise le rapport ventilation/perfusion dans ces territoires sans effet additif avec la PEP (24). Chez l'homme, ces donndes peuvent etre approchdes par le scanner-X. Galiastou et al. (25) ont dtudid au scanner-X 21 malades avec SDRA (dont 11 post-trauma) ventilds avec un VT de 6 mL/kg et une PEP rdglde 3 ~i 5 cm H 2 0 au-dessus du point d'inflexion infdrieur. Un premier scanner a dtd rdalisd aprSs une manoeuvre de recrutement en ddcubitus dorsal (pression inspiratoire maximale de 40 cmH20, PEP 20 cmH20 pendant 40 secondes) et un deuxiSme scanner apr~s 30 minutes en DV. Le SDRA a dtd classd en lobaire (15 malades)
Ventilation mdcanique en ddcubitus ventral au cours du SDRA 131
ou diffus selon la classification proposde par Puybasset et al. (26). Le DV a induit, dans le SDRA lobaire, une diminution des rdgions pulmonaires surdistendues (zones avec unitds Hounsfield (UH) < -900) et non ventildes (UH entre - 100 et § 100) et une augmentation des zones bien ventildes (UH entre - 900 et - 500). La diminution des zones surdistendues dtait surtout observde dans les rdgions ventrales, alors que la diminution des zones non ventildes et l'augmentation des zones bien ventildes dtaient surtout observdes dans les rdgions dorsales. Chez ces malades avec SDRA lobaire, le DV a induit une diminution de la PaCO2 et une augmentation de la compliance du syst~me respiratoire. Enfin, en cas de SDRA diffus, le DV n'avait pas d'effet sur la PaCO2 et la compliance du syst~me respiratoire et a induit une diminution des rdgions non adrdes. Gainnier et al. (17) ont trouvd des rdsultats similaires, le DV ayant un effet sur l'oxygdnation en cas de SDRA focal. Au total, le DV a des effets physiologiques bdndfiques : amdlioration de l'oxygdnation sanguine, par un processus de recrutement alvdolaire ou par une redistribution de la ventilation et de la perfusion, homogdndisation de la distribution de la ventilation et des volumes pulmonaires adrds, rdduction de l'hyperinsufflation pulmonaire.
Effets du DV sur les I sions induites par la ventilation m canique Les LIVM ont schdmatiquement deux composantes. La premiere est la surdistension des espaces adriens distaux. Sa prdvention par des VT de 6 mL/kg de poids prddit par la taille augmente la survie chez l'homme (27). La deuxi~me est lide ~i des ldsions de cisaillement des espaces adriens distaux au cours de l'ouverture-fermeture rdpdtde ~i bas volume pulmonaire (14, 28). Sa prdvention par la PEP n'est pas associde ~i une rdduction de mortalitd chez l'homme (12, 29). Plusieurs arguments directs de prdvention/modulation des LIVM par le DV sont fournis par les modules expdrimentaux. Chez le chien agressd par acide oldique et VT dlev~ (pression transpulmonaire de 35 cmH20), une pdriode de 4 heures de DV ~i PEP 10 c m H 2 0 rdduit les ldsions histologiques des rdgions pulmonaires ddpendantes, par rapport ~t la meme durde en ddcubitus dorsal ~i PEP 10 cmH20, et les rend homog~nes sur l'ensemble du poumon (5). Des rdsultats similaires ont dtd obtenus chez des chiens ventilds pendant 4 heures avec un VT gdndrant une pression transpulmonaire de 35 cmH20, soit en ddcubitus dorsal, soit en DV (4). Chez des rats normaux, les LIVM dvaludes par scanner-X se mettent en place apr~s 73 minutes de ventilation mdcanique ddlivrde avec un VT de 34 mL/kg, soit 90 % de la capacitd pulmonaire des animaux, en ddcubitus dorsal contre 112 minutes en DV (6). Les contraintes imposdes au poumon sont distribudes de fagon plus homog~ne en DV (6). Le scdnario suivant est plausible : le DV, en favorisant l'homogdndisation de la
132 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
distribution de la ventilation et des contraintes imposdes au poumon par la ventilation mdcanique, rdduit le risque de LIVM. Chez l'homme, les arguments de prdvention/modulation des LIVM par le DV sont plus indirects. Chez des malades comateux non hypoxdmiques, le DV ~i faible dose (4 heures par jour) rdduit significativement le score d'agression pulmonaire (30) au cours du temps par rapport au ddcubitus dorsal (31). Ce rdsultat peut ~tre interprdtd comme une rdduction des LIVM par le DV. Papazian et al. (32) ont mesurd chez 39 malades avec SDRA les taux sanguins et pulmonaires (lavage broncho-alvdolaire) d'IL-8, IL-l[3, IL-6, TNF-0~ apr~s 12 heures d'application dans un ordre randomisd d'une des trois interventions suivantes : DV avec ventilation protectrice (n = 13), ventilation ~i haute frdquence en DV (n = 13) et ventilation ~l haute frdquence en DD (n = 13), chacune faisant suite ~i une pdriode de 12 heures de ventilation protectrice (VT 6,4 _+0,7 ml/kg, PEP 12 _+4 cmH20, pression plateau 25 • 6 cm H20) en ddcubitus dorsal. La production pulmonaire d'IL-8, IL-113 et IL-6 et le nombre de polynucldaires neutrophiles dans le lavage broncho-alvdolaire sont rdduits avec 12 heures de DV par rapport fi 12 heures de ddcubitus dorsal, le niveau de significativitd statistique dtant obtenu pour IL-113 et les polynucldaires neutrophiles. Les taux sanguins de cytokines ne sont pas diffdrents entre DV et ddcubitus dorsal. La ventilation ~i haute frdquence en revanche augmente la production pulmonaire d'IL-8 en DV et en DD et d'IL-1]3 en DV, sans effet sur les polynucldaires neutrophiles et les taux plasmatiques des cytokines. Ces rdsultats sugg~rent que le DV rdduirait l'inflammation pulmonaire et donc pourrait moduler les LIVM chez les patients en SDRA. Au total, de plus en plus d'arguments convergent, montrant que le DV a la capacitd de prdvenir ou retarder l'apparition des LIVM. I1 faut toutefois insister sur |e fait que c'est du bon usage du ventilateur que ddpend le devenir du malade avec SDRA. Une action thdrapeutique non ventilatoire chez un malade avec SDRA ne peut se concevoir qu'une fois optimisds les rdglages du ventilateur en accord avec les recommandations actuelles (11).
Comment optimiser la pratique du DV chez le malade ? Reignier et al. (33) ont montrd que la nutrition entdrale est moins bien toldrde en DV avec plus de vomissements et un rdsidu gastrique plus grand qffen ddcubitus dorsal. Ceci ne sugg~re pas d'interdire la nutrition entdrale en DV mais de l'associer, dans cette position, ~i des agents prokindtiques ou de positionner la sonde en post-pylorique ou de mettre le malade en DV avec inclinaison cdphalo-caudale. Bein et al. (34) ont montrd que le DV complet ~l 180 ~ permet fi_ une meilleure oxygdnation, une compliance pulmonaire plus dlevde et moins d'effet secondaire que le DV incomplet ~l 135 ~
Ventilation mdcanique en d&ubitus ventral au cours du SDRA 133
Le type de support sur lequel le malade est installd pendant le DV a-t-il une influence sur les donndes physiologiques ? Le DV est susceptible d'augmenter la pression abdominale avec plusieurs effets secondaires potentiels comme raggravation des ldsions pulmonaires (35) et l'ischdmie intestinale. Michelet et al. ont compard un matelas mousse classique (Aplot | ~i un matelas spdcifiquement ddveloppd pour rdduire la pression abdominale muni de coussins d'air qui s'adaptent au poids du patient (Nimbus | (36). Ils ont montrd que le matelas spdcifique limite l'augmentation de la pression abdominale et prdserve le ddbit sanguin hdpatique. En revanche, il n'y a pas de diffdrence d'oxygdnation et d'eau pulmonaire extravasculaire entre les deux supports. Une autre mani~re de minimiser l'augmentation de pression abdominale induite par le DV est de surdlever le thorax et le pelvis dans un plan horizontal. Chiumello et al. ont montrd que le fait de surdlever ces zones provoque une multiplication par deux de la pression ~i ce niveau sans bdndfice en termes d'oxygdnation (37). La surdldvation thoraco-pelvienne diminue la compliance de la paroi thoracique. Les auteurs ont d'ailleurs abandonnd cette pratique de surdldvation. Ces deux dtudes sugg~rent qu'installer un malade avec SDRA pour une sdance de DV en rdanimation sur un matelas standard sans surdldvation thoracopelvienne est une pratique suffisante. La durde des sdances de DV ne fait pas l'objet d'un consensus. La tendance actuelle est aux sdances longues, de plus de 12 heures. Ce point sera abordd dans les chapitres suivants.
Effets du DV sur le pronostic C'est une question cld qui a dtd abordde dans trois essais randomis& contr61ds multicentriques (tableau I) qui ont inclus des malades sous ventilation mdcanique en SDRA dans la m~me pdriode allant de 1998 ~ 2002. Tous trois ont d'emblde les limites de tout essai randomisd contr61d testant une pratique mddicale, ~i savoir l'absence de double aveugle et l'absence de placebo. Gattinoni et al., en Italie, furent les premiers ~i rapporter qu'en cas d'agression pulmonaire aigu~ le DV n'dtait pas associd fi une rdduction de mortalitd (1). Une analyse past-hac a montrd une rdduction significative de mortalitd ~l j l0 dans le groupe DV dans trois sous-groupes de malades : ceux avec le quartile d'indice de gravitd simplifid (IGS) II le plus dlevd (> 49), d'hypoxdmie la plus sdv~re (rapport PaO2/FIO2 ~< 88) et de VT le plus dlevd (> 12 mL/kg). Gudrin et al. (9) ont rdalisd un large essai randomisd contr61d en France pour tester l'hypoth~se que la mise prdcoce en DV de malades hypoxdmiques ,~ tout-venant ,, pouvait rdduire la mortalitd. Les patients dtaient inclus s'ils dtaient intubds pour insuffisance respiratoire aigu~ hypoxdmiante (PaO2/FIO2 < 300). L'essai avait dtd calibrd pour montrer une rdduction de mortalitd de 40 % dans le groupe contr61e laissd en d&ubitus dorsal ~130 % dans le groupe DV aux risques 0~ et [3 de 5 et 20 %. La valeur de 40 % de la mortalitd dans le
134 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
groupe contr61e ddcoulait d'une enquete de cohorte chez des malades hospitalisds en rdanimation en France et intubds avec PaO2/FIO2 < 300 (38). Huit cent onze malades ont dtd inclus de ddcembre 1998 ~t ddcembre 2002 et 791 analysds, 378 dans le groupe ddcubitus dorsal et 413 dans le groupe DV en intention de traiter. Le DV dtait rdalisd sur une base de 8 heures au moins par jour. La mortalitd ~ j28 apr~s randomisation fut de 31,5 % (119/378) dans le groupe contr61e et 32,4 % (134/413) dans le groupe DV (p = 0,77). La durde de la ventilation mdcanique et le taux de succ~s de l'extubation ne furent pas diffdrents. Toutefois, l'incidence des pneumopathies acquises sous ventilation mdcanique fut significativement plus faible en DV (1,66 versus 2,14 dpisodes pour 100 jours de ventilation mdcanique invasive, p = 0,045). Enfin, des effets inddsirables furent observds plus frdquemment dans le groupe DV comme l'intubation sdlective, l'obstruction de sonde d'intubation ou les ldsions cutandes de pression. Mancebo e t al. (10) ont rdalisd un ERC chez 136 malades avec SDRA, 60 inclus dans le groupe contr61e et 76 dans le groupe DV. Une des particularitds de cet essai randomisd contr61d est la longue durde des sdances de DV : ~i j l apr~s randomisation, la durde moyenne de DV dtait de 14 _+7 heures, ~t j2 de 20,4 _+3,4 h, ~tj4 de 18,7 _+4,8 h, ~tj7 de 19,4 h. La mortalitd fut de 58 % dans le groupe contr61e et de 43 % dans le groupe DV, cette rdduction de 25 % n'dtant pas significative statistiquement par manque de puissance dfi ~t une interruption prdmaturde de l'dtude. En analyse multivaride, l'allocation au groupe contr61e dtait un cofacteur significativement associd au ddc~s avec un rapport de cote de 2,53. Un des intdr~ts de cet essai randomisd contr61d a dtd de montrer la faisabilitd de sdances de DV prolongdes.
Ou porter I'effort de recherche sur le DV ? Un certain nombre de points sont clarifids. Le DV ne devrait pas etre proposd systdmatiquement ~itousles malades hypoxdmiques (9). Des sdances longues (> 12 heures) non fractionndes sont faisables et prdfdrables (10, 39). La mise en route la plus prdcoce possible est ~l encourager (10, 40). Le propre support du malade est suffisant sans supporter l'abdomen, en l'absence de raisons spdcifiques (36, 37). La prddiction de la rdponse au DV ne devrait passe limiter aux effets sur l'oxygdnation, d'ailleurs difficiles ~i dtablir (41, 42). L'intdret du DV est d'amdliorer l'oxygdnation en induisant un recrutement alvdolaire sans surdistension. Cette capacitd est lide en grande partie au type morphologique de SDRA qui devrait donc etre caractdrisd avant la raise en DV (26). La prddiction d'un effet du DV sur les objectifs prdcitds devrait intdgrer la compliance du syst~me respiratoire, la PaO2 et la PaCO2 (25). Toutefois, la prddiction de la recrutabilitd du poumon par la PEP sur des crit~res similaires a une rentabilit~ insuffisante et ne peut ~tre dlaborde au mieux qu'avec le scanner (43).
Ventilation mdcanique en ddcubitus ventral au cours du SDRA 135
Le niveau de preuve considdrd comme le plus dlevd actuellement doit ddcouler d'essais randomisds contr61ds portant sur un nombre important et calculd a priori de malades et testant l'effet d'une intervention sur la survie du malade. Nous avons vu que trois essais randomisds contr61ds n'ont pas montrd de bdndfice clinique du DV dans le SDRA saufen analyse post-hocsur la mortalitd ~t j l0 pour l'un (1) et sur l'incidence des pneumopathies acquises sous ventilation mdcanique pour un autre (9). La question est-elle rdglde pour autant ? Non, car chacun de ces trois essais comporte des limites mdthodologiques sdrieuses qui sont les suivantes : 1) manque de puissance (1, 10); 2) malades hdtdrog~nes (9) ; 3) ventilation mdcanique non protectrice (1, 9, 10) ; 4) durde de DV insuffisante (1, 9) ; 5) utilisation du DV chez les malades du groupe contr61e (1, 9, 10). Ces limites font qu'un essai bien construit sur le SDRA s'impose, intdgrant les recommandations les plus rdcentes, notamment concernant la ventilation mdcanique au cours du SDRA (11), recommandations qui dtaient absentes ~t l'dpoque o~ ces trois essais ont dtd dlabords. Si l'on admet cette ndcessitd, quel sous-groupe de SDRA cibler pour une dtude future ? La ddfinition opdrationnelle et consensuelle du SDRA (44) est rdguli~rement utilisde dans les essais randomisds contr61ds (27, 29, 45). La notion de SDRA confirmd, introduite rdcemment (46) et non encore validde, obdit ~t un souci d'homogdndisation de la ddfinition du SDRA. Le SDRA est confirmd si les crit~res de la ddfinition consensuelle sont confirmds apr~s 24 heures de ventilation mdcanique optimisde avec une PEP d'au moins 5 cmH20. Une telle approche avait dtd proposde par Villar et aL (47), montrant que la mortalitd dtait diffdrente selon que l'on utilise la ddfinition consensuelle ~t l'admission ou des crit~res r~dvaluds 24 heures plus tard. Ce concept de SDRA confirmd a dtd utilisd rdcemment dans une dtude analysde plus haut (32). A l'issue des donndes revues dans ce chapitre, il semble que deux sous-groupes de SDRA puissent etre des candidats ~i un nouvel essai randomisd contr61d testant l'effet du DV sur la mortalitd. Le premier est le sous-groupe de malades avec SDRA confirmd et le deuxi~me celui des malades avec SDRA lobaire. Ce dernier sous-groupe ndcessite toutefois la rdalisation d'un scanner thoracique car la radiographie pulmonaire est actuellement incapable de sdparer les SDRA lobaires des SDRA diffus (26). Un nouvel essai randomisd contr61d va ddmarrer en France au cours de l'annde 2007 portant sur les SDRA confirmds.
Conclusion Au cours des derni~res anndes, beaucoup d'dtudes ont confirmd l'effet positif du DV sur l'oxygdnation au cours du SDRA. Cet effet bdndfique se complete actuellement par la mise en dvidence d'une distribution homog~ne de la ventilation et des contraintes mdcaniques imposdes au poumon avec le DV, laissant penser que les ldsions induites par la ventilation mdcanique peuvent etre prdvenues ou retarddes par cette technique. Le DV devrait donc etre un dldment ~i
136 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
part enti~re de la prise en charge ventilatoire protectrice du SDRA. Le DV ne peut pas etre recommandd de fagon forte car manquent les preuves scientifiques de haut niveau. Un nouvel essai contr61d randomisd, ciblant les patients affectds de SDRA sdv~re et persistant et intdgrant les recommandations de bonne pratique de la ventilation mdcanique et du DV, est donc indispensable pour tenter de clarifier la place du DV dans notre arsenal thdrapeutique dirigd contre le SDRA.
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Ventilation mdcanique en ddcubitus ventral au cours du SDRA
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Ventilations haute fr quence au cours du SDRA D. D e m o r y et J. Allardet-Servent
Introduction La ventilation mdcanique conventionnelle (VMC) reprdsente la pierre angulaire de la prise en charge thdrapeutique des patients atteints du syndrome de ddtresse respiratoire aigu~ (SDRA). Paradoxalement, la VMC peut aussi engendrer des ldsions pulmonaires surajoutdes. Ce phdnom~ne, connu sous le terme de ldsions induites par la ventilation mdcanique, apparait lorsque les alvdoles sont surdistendues par l'utilisation d'un volume courant (VT) trop dlevd, ~i l'origine d'une rupture de la barri~re alvdolo-capillaire (1). Ces ldsions pulmonaires sont dgalement lides aux forces de cisaillement mdcanique exercdes par les ph~nom~nes d'ouverture-fermeture alvdolaires r~p~titifs. Ces ldsions mdcaniques stimulent la production de cytokines inflammatoires perpdtuant un cercle vicieux d'agression et inhibant la rdparation du tissu pulmonaire. En outre, la libdration des mddiateurs pulmonaires peut gdndrer une rdponse systdmique ~il'origine d'un syndrome de ddfaillance multivisc&ale (2). Ainsi, le but d'une ventilation protectrice pulmonaire n'est pas simplement d'amdliorer les dchanges gazeux mais aussi d'attdnuer la rdponse inflammatoire pour amdliorer la survie des patients en SDRA (3, 4). Parall~lement, d'autres techniques, alternatives et potentiellement moins ddldt~res que la VMC, se sont ddveloppdes. Le concept de ventilation ~l haute frdquence correspond ~i l'application d'un VT rdduit (1-3 mL.kg-1), souvent infdrieur ~i l'espace mort, ddlivrd fi une frdquence dlevde (F > 100 c/min). Un niveau permanent de pression dans les voies adriennes assure un recrutement alvdolaire efficace. I2utilisation d'un VT rdduit permet de minimiser les risques de surdistension durant l'inspiration, et de ddrecrutement durant l'expiration (5). Ainsi, la ventilation fi haute frdquence entre dans le cadre de stratdgies de ventilation dite protectrice. Dans ce chapitre, nous aborderons principalement
140 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
les deux techniques dtudides au cours du SDRA : la ventilation par oscillation haute frdquence (VOHF) et par percussion ~i haute frdquence (VPHF).
Principes de fonctionnement I2admission des gaz dans le circuit respiratoire ~i des frdquences tr~s dlevdes ne peut pas etre correctement assurde avec les circuits et valves des ventilateurs conventionnels, et ndcessite donc l'usage de syst&mes spdcifiques.
Ventilation par oscillation haute frdquence Comme toutes les techniques de ventilation ~i haute frdquence, la ventilation par oscillation ~i haute frdquence (VOHF) repose sur l'insufflation ~i haute frdquence (180-1 500 c/min) d'un VT souvent infdrieur ~il'espace mort anatomique (2-4 mL.kg-~). Un ddbit de gaz frais humidifids et rdchauffds, gdndralement entre 20 et 40 L/min, est achemind vers la partie proximale de la sonde d'intubation. Ce ddbit constant gdn~re une pression moyenne (mPaw) rdgulde par une valve pneumatique placde sur le circuit expiratoire. Un piston, solidaire d'une membrane de haut-parleur, entralne une oscillation pdriodique de la colonne de gaz, gdndrant un VT. La frdquence des oscillations, autour de la mPaw, est comprise entre 3 fi 15 Hertz. La colonne de gaz mise en mouvement varie entre deux valeurs extremes de pression, correspondant l'amplitude de pression ou pic ~t pic ou AP (fig. 1). Le pic ?i pic rdgld sur le respirateur indique, en pourcentage de la course maximale, l'amplitude des mouvements du piston et par consdquent les volumes de gaz insufflds et exsufflds ?i chaque cycle. Pour un patient donnd, le AP ddpend de la frdquence et de la puissance rdglde, du rapport I/E et des caractdristiques mdcaniques du syst~me thoracopulmonaire (6). La V O H F permet de dissocier les variations d'oxygdnation et d'dpuration du CO2. La pression moyenne assure le recrutement alvdolaire et, en compldment de la FiO2, rdgule directement l'oxygdnation. L'dpuration du CO2 ddpend de la frdquence et de l'amplitude des mouvements du piston (AP). Plus la frdquence rdglde est basse et plus la puissance est dlevde, plus le VT et les AP augmentent et plus l'dpuration de CO2 est efficace (7). Enfin, la VOHF se caractdrise par une expulsion active des gaz ?i l'expiration, grace au mouvement de recul de la membrane. Le risque de ,, trapping ~ gazeux est donc considdrablement rdduit (8). En pratique, le clinicien peut ajuster la frdquence, le ddbit, la pression moyenne, l'amplitude de pression (AP), le rapport I/E et la FiO2 (tableau I).
Ventilations 5 haute frdquence au cours du SDRA 141
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1 - Caract&istiques mdcaniques de la ventilation par oscillation 5 haute frdquence. AP 9 amplitude de pression o u . pic 5 pic >>; mPaw : pression moyenne ; Ti : temps inspiratoire.
Fig.
I - Algorithme de rdglage de la ventilation par oscillation ~t haute ffdquence ( V O H F ) . R M : manoeuvre de recrutement ; AP : amplitude de pression ou << pic ~ pic >>; m P a w : pression moyenne ; F : ffdquence (1 H z = 60 c/min) ; T i : temps inspiratoire ; 5. noter : 1 Hz = 60 c/rain.
Tableau
1. rdaliser RM : 40 c m H 2 0 pendant 40 sec 2. appliquer mPaw = VMC + 5 c m H 2 0 ou mPaw-- 30 c m H 2 0 * v&ifier permdabilitd de la sonde 3. rdglages initiaux : * gazomdtrie art&idle apr~s 15 min - FiO 2 = 100 % * objectif : - Ddbit = 40 L/min - F la plus haute - F=5Hz - AP le plus bas - Ti= 33 % - mPaw : prdvient le d&ecrutement - AP = PaCO 2 + 20 c m H 2 0 ou vibrations thoraciques
Mise
en
route
:
Haute SpO 2 > 93 %
1. rdduire FiO2 jusqu'~i 40 % (palier 10 %) 2. rdduire mPaw jusqu'5 22 c m H 2 0 (palier 2 cmH20) 3. basculer en ventilation conventionnelle pour sevrage
Basse SpO 2 < 88 %
1. rdaliser une RM : 40 c m H 2 0 pendant 40 s 2. augmenter mPaw jusqu'5 40 c m H 2 0 (palier 2 c m H 2 0 ) 3. augmenter FiO2 (palier 10 %)
Haute PaCO2 > 50 mmHg
1. augmenter AP jusqu'5 90 c m H 2 0 (palier 10 cmH20) 2. rdduire F jusqu'~i 3 Hz (palier 1 Hz) 3. ddgonfler ballonnet pour diminuer mPaw de 5 c m H 2 0
Basse PaCO2 < 35 mmHg
1. diminuer AP jusqu'5 40 c m H 2 0 (palier 10 cmH20) 2. augmenter F jusqu'5 7 Hz (palier de 1 Hz)
Oxyg6nation
PaC02
142 Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
Ventilation par percussion~ haute fr6quence La ventilation par percussion ~l haute frdquence (VPHF) est une technique hybride issue des recherches en a&onautique du Dr Forrest M Bird. Le ventilateur VDR-4 | (volumetric diffusive respirator 4) conduit un gaz ~i haute pression vers un piston (Phasitron| constituant une interface dynamique entre la source pneumatique de gaz et les propridtds mdcaniques du syst~me respiratoire du patient. Le piston comporte un premier orifice latdral permettant l'entrde d'air dans la chambre d'admission ~il'inspiration et crdant un effet Venturi. L'expiration ddpend du recul passif du piston permettant l'dvacuation des gaz par un second orifice lat&al. La vitesse de ddplacement du piston fait varier la frdquence de percussion du gaz, tandis qu'une variation biphasique du niveau de pression est superposde (fig. 2). Le volume courant est donc le rdsultat des cycles de percussion et des cycles de variation de pression (9). L'augmentation de la frdquence de percussion et de la durde du temps inspiratoire de chaque percussion sont tous deux associds ~l une diminution du VT (10). De m~me, l'augmentation de l'impddance du syst~me respiratoire s'accompagne d'une rdduction du VT (1 1). Plusieurs param~tres sont accessibles au rdglage par le clinicien : frdquence de percussion, durde de la percussion (I/E), durde des cycles inspiratoire et expiratoire et la frdquence de ces cycles de convection (I/E), pression de pic inspiratoire, pression expiratoire positive, et pression positive continue (tableau II).
M6canismes du transport des gaz Les ventilations ~i haute frdquence se caractdrisent par l'application d'un volume courant rdduit, souvent infdrieur ~i l'espace mort des voies a&iennes.
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Fig. 2 - Caractdristiques m~caniques de la ventilation par percussion fi_ haute frdquence. PIP : pression de pointe inspiratoire ; PEP : pression tdld-expiratoire positive; CPAP : pression positive continue; I : temps inspiratoire (cycle de pression haute) ; E : temps expiratoire (cycle de pression basse).
Ventilations ~i haute frdquence au cours du SDRA 143
I I - Algorithme de rdglage de la ventilation par percussion ~ihaute frdquence (VPHF). PIP : pression de pointe inspiratoire ; PEP : pression tdl&expiratoire positive; PAP : pression positive continue ; F respi : frdquence des cycles de pression (I et E) ; F percu : frdquence des cycles de percussion (I et E) ; VMC : ventilation m&anique conventionnelle.
Tableau
Mise en route :
* v&ifier permdabilitd de la sonde * gazomdtrie art&idle aprhs 15 min
1. ddgonfler ldg~rement le ballonet 2. appliquer PiP = 2/3 VMC c m H 2 0 ou PiP = 25 c m H 2 0 3. rdglages initiaux : - FiO 2 = 100 % - F respi = 15 c/min -
I/E=
1/1 ( T I = 2 s e t T E = 2 s )
- F percu = 500 c/min - I / E = 1/2 - PEP/CPAP = 8 / 2 Haute SpO 2 > 93 %
1. rdduire FiO 2 jusqu2l 40 % (palier 10 %) 2. rdduire PiP jusqu'~l 20 c m H 2 0 (palier 5 cmH20) 3. rdduire PEP/CPAP (palier 2 cmH20)
Basse SpO 2 < 88 %
1. augmenter PiP jusqu'~i 80 c m H 2 0 (palier 5 cmH20) 2. augmenter PEP/CPAP (palier 2 cmH20) 3. augmenter FiO2 (palier 10 %)
Haute PaCO 2 > 50 m m H g
1. augmenter PIP jusqu'fi 80 c m H 2 0 (palier 5 cmH20) 2. rdduire CPAP jusqu'~i 2 c m H 2 0 (palier 2 cmH20) 3. rdduire F percu jusqu'~i 350 c/min
Basse PaCO2 < 35 m m H g
1. rdduire PIP jusqu'fi 20 c m H 2 0 (pallet 5 cmH20) 2. augmenter CPAP jusqu'~i 20 c m H 2 0 (palier 4 cmH20) 3. augmenter F percu jusqu'~i 900 c/min
Oxyg6nation
Ventilation
D~s lors, d'autres mdcanismes que la convection interviennent dans la ventilation alvdolaire. Six mdcanismes sont impliquds dans le transport des gaz (12) 9 9 ventilation directe par convection 9 elle correspond ~i la partie du ddbit inspiratoire qui atteint directement les bronchioles terminales et les unit& alvdolaires proximales, gdndrant des dchanges gazeux par un mdcanisme habituel de convection; 9 dispersion longitudinale (effet Taylor) 9 la rencontre de gaz entre zones de convection et de diffusion gdn~re des mouvements de tourbillons qui s'dtendent secondairement. Une partie de ces gaz frais peut alors se mdlanger au gaz alvdolaire et augmenter la part de la ventilation lide ~i la convection ; 9 phdnom~nes pendulaires (effet Pendeluft) 9 les diffdrences de constante de temps entre des unit& alvdolaires proches aboutissent ~i une rdpartition diff&ente des gaz. Les alvdoles les plus compliantes se remplissent prdcocement puis se vident jusqu'~i l'obtention d'un dquilibre avec les alvdoles adjacentes, gdndrant ainsi des mouvements de redistribution des gaz; 9 profil de vitesse asymdtrique 9 lorsque le rdgime d'dcoulement de l'air dans un conduit est de type laminaire, le profil de vitesse du flux est parabolique. La vitesse de l'air le plus proche des parois trachdobronchiques est plus
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faible que la vitesse de l'air situd au centre de la lumi~re du conduit. Avec la rdpdtition des cycles respiratoires, le front de gaz situd au centre de la lumi~re continue ~ progresser en distalitd tandis que le gaz situd en pdriphdrie ~i tendance ~i remonter vers la bouche, gdndrant l~i aussi des mouvements pouvant participer aux dchanges gazeux ; oscillations cardiogdniques : les contractions cardiaques crdent une agitation moldculaire sur les tissus avoisinants pouvant entralner des mouvements de gaz dans les unit& alvdolaires les plus proches du coeur ; diffusion moldculaire : la diffusion des moldcules au travers de la membrane alvdolo-capillaire peut entralner des mouvements dans les alvdoles voire dans les petites bronchioles adjacentes. Cependant, ce mdcanisme n'est pas spdcifique des ventilations ~i haute frdquence.
Application clinique Parmi ces techniques, la VOHF est celle la plus largement utilisde dans les unit& de rdanimation. La VPHF suscite dgalement un dlan flint&& ~i la suite de r&entes investigations.
Ventilation par oscillation haute frdquence I2expdrience de la VOHF en ndonatologie, qui a prdcddd celle chez l'adulte, a largement contribud au d&eloppement de la VOHF en pratique clinique. Plusieurs sdries observationelles ont retrouvd une amdlioration de l'oxygdnation avec la VOHF, conduisant ~ la rdalisation de nombreuses dtudes prospectives, randomisdes et contr61des dans les anndes 1980-90. La majoritd d'entre elles ne retrouvent pas de bdndfice en termes de mortalitd quant ~i l'utilisation de la V O H F mais plut6t un bdndfice ~ long terme sur la survenue de bronchodysplasies (13, 14). 12expdrience de la VOHF chez l'adulte est bien plus modeste, et limit& quelques dquipes. Plusieurs sdries observationelles ont dtudid l'effet de la VOHF, en tant que technique de sauvetage, lorsque des pressions dlevdes dtaient ndcessaires au maintien de l'oxygdnation en ventilation mdcanique conventionnelle. La plupart d'entres elle rapportent une amdlioration de l'hdmatose lors du passage en VOHF (15, 16). ~t ce jour, seuls deux essais prospectifs, randomisds et contr61& ont dtd conduits dans le SDRA. Derdak et al. (17), dans une dtude d'dquivalence, ont compard 76 patients dans le bras VOHF avec 76 patients dans le bras ventilation mdcanique conventionnelle (VT = 10 mL.kg -1 de poids iddal). I2objectif principal, soit le nombre de patients survivants sans ventilation mdcanique ~ 30 jours, n'&ait pas diffdrent entre les deux bras (36 % versus 31%, p = 0,69). La mortalitd brute dtait de 37 % dans le groupe VOHF contre 52 % dans le groupe
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ventilation m&anique conventionnelle ~t 30 jours (p = 0,10), et respectivement de 47 % et 59 % (p = 0,14) ~ 6 mois. Le rapport PaO2/FiO2 dtait sup&ieur dans le groupe VOHF pendant les 16 premieres heures du protocole, alors que l'index d'oxygdnation (IO - pression moyenne • FiO2 • 100 / PaO2) n'dtait pas diffdrent entre les deux groupes. La PaCO2 dtait plus dlevde dans le groupe V O H E Le nombre d'dvdnements inddsirables dtait comparable, notamment sur la survenue de fistule bronchopleurale et/ou de pneumothorax. Dans le meme temps, une dtude prospective, randomisde (18), multicentrique mais prdmaturdment interrompue devant le faible rythme d'inclusion, a compard 37 patients dans le bras VOHF avec 24 patients dans le bras ventilation mdcanique conventionnelle (VT = 8-9 mL.kg -1 de poids iddal). Le nombre de patients survivants sans oxyg~ne ou sans ventilation ainsi que la mortalitd brute n'dtait pas diffdrents entre les deux groupes. L'IO &ait meilleur avec la VOHF au cours des 48 premieres heures. Les patients prdsentant un IO dlevd ~i l'inclusion (IO > 30) semblaient ceux pouvant le plus bdndficier de la V O H E Si la VOHF devait amdliorer le pronostic des patients en SDRA, c'est en partie en rdduisant la rdaction inflammatoire pulmonaire. Cependant, peu de travaux ont dvalud cette hypoth~se. Papazian et al. (19), ont dtudi~ les effets de la VOHF, du d&ubitus ventral (DV) et de leur combinaison, sur l'oxygdnation et l'inflammation pulmonaire. Apr~s 12 heures de ventilation protectrice (VT6 mL.kg -~ de poids iddal, pression de plateau < 35 cmH20), les patients dtaient randomisds en trois groupes d'une durde de 12 heures 9ventilation conventionnelle-DV, VOHF-ddcubitus dorsal (DD), et VOHF-DV. Une amdlioration de l'oxygdnation dtait observde, quel que soit le mode ventilatoire en DV, contrairement au groupe VOHF-DD. 12interleukine-8 dans le liquide alvdolaire dtait significativement plus dlevde dans les deux groupes VOHF (VOHF-DD et VOHF-DV) en comparaison avec les groupes ventilation conventionnelle en DV ou DD. Le taux de polynucldaires neutrophiles dans le liquide alvdolaire &ait plus dlevd dans le groupe VOHF-DV que dans le groupe Ventilation conventionnelle-DV, mais moindre que dans le groupe VOHF-DD. Ainsi, la VOHF en ddcubitus dorsal n'apporte pas de bdndfice sur l'oxygdnation et semble meme associde ~t une rdaction inflammatoire pulmonaire plus intense. De ces dtudes, on peut donc retenir un bdndfice sur l'oxygdnation chez certains patients mais aussi un manque de puissance pour ddtecter un effet de la VOHF sur le pronostic. D'autre part, la durde de ventilation en ventilation mdcanique conventionnelle avant la mise sous VOHF reste tr~s disparate, allant de 2 ~i 5 jours, et jouant certainement un r61e important dans le bdndfice potentiel de celle-ci. Cependant, un dldment d&erminant est la mani~re d'appliquer la VOHF, et en particulier l'existence prdalable d'un recrutement alvdolaire. Dans un travail prospectif et randomisd portant sur 43 patients en SDRA, la VOHF permettait de prolonger le gain d'oxygdnation obtenu avec une pdriode de 12 heures de ddcubitus ventral rdalisd en ventilation m&anique conventionnelle (20). Le maintien de l'amdlioration des param~tres d'oxygdnation sous VOHF &ait parall~le ~i la rdduction de l'admission veineuse. Cette &ude sugg~re que la VOHF
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pourrait @porter un bdndfice lorsque le volume pulmonaire est prdalablement dlevd, en rdalisant un recrutement alvdolaire obtenu ici apr~s une sdance de DV. Dans le meme cadre, l'&ude TOOLS a dvalud l'int&& d'une stratdgie dynamique de VOHF, basde sur la rdalisation de manoeuvre de recrutement alvdolaire (21). Un algorithme, comprenant une manoeuvre de recrutement (40 c m H 2 0 pendant 40 s) lors de la mise en route et/ou lors de la survenue d'une hypoxdmie persistante (d&onnection du circuit, aspiration bronchique, persistance d'une FiO2 > 40 %), a dtd dvalud chez 25 patients en SDRA s~v~re. Au cours du s~jour, sept manoeuvres de recrutement ont dtd appliqudes par patient. Cependant, 3,3 % d'entre elles ont dfi &re interrompues du fait d'une mauvaise toldrance respiratoire (ddsaturation) ou hdmodynamique (hypotension). Le rapport PaO2/FiO2 a doubld apr~s la mise en route initiale (92 _+36 m m H g en ventilation m&anique conventionnelle, puis 200 _+ 117 m m H g en VOHF). La FiO2 dtait largement rdduite apr~s 12 heures de VOHF (respectivement 0,9 _+0,1 puis 0,5 _+0,2). Ainsi, ces deux dtudes sugg~rent que la VOHF apporterait un bdndrice lorsqu'une stratdgie de recrutement alvdolaire y est combinde. A l'inverse, l'application de la VOHF de facto ne semble pas associde 5 de rdels avantages. Ces donndes sont d'ailleurs en accord avec les &udes animales sur mo&le d'agression pulmonaire aigue. Alors que les premiers travaux ddmontraient une rdduction de l'inflammation et des ldsions histologiques avec la VOHF (22, 23), les &udes les plus r&entes ayant utilisd une stratdgie ,, open lung ,, ne retrouvent pas de diffdrence entre la VOHF et la ventilation m&anique conventionnelle (24, 25, 26). L'usage de la VOHF est dgalement associd 5 la survenue de certaines complications. Plusieurs travaux ont retrouvd une diminution du ddbit cardiaque, une augmentation de la pression veineuse centrale et de la pression art&idle pulmonaire d'occlusion au cours des 48 heures suivant sa mise en place (16, 17, 27). Ces perturbations dtaient gdndralement corrigdes aprSs un remplissage vasculaire. L'utilisation de pressions moyennes de ventilation dlevdes peut augmenter le risque de pneumothorax, atteignant une incidence de 21,8 % dans deux sdries (16, 17). Enfin, la VOHF ne permet pas de satisfaire les efforts respiratoires du patient car les variations de pression induites par les mouvements respiratoires peuvent activer les alarmes du ventilateur et entralner l'arr& des oscillations. L'usage de la VOHF chez l'adulte ndcessite donc une sddation profonde, voire une curarisation.
Ventilation par percussion haute fr quence Pfenninger et Minder furent les premiers 5 rapporter deux sdries de huit nouveau-ntis ventilds en HFPV pour maladies des membranes hyalines, avec une rdduction des pressions d'insufflation et une nette amdlioration de l'hdmatose (28). Chez l'adulte, Gallagher et al. ont utilisd la VPHF chez sept patients prdsentant une insuffisance respiratoire aigue, avec une amdlioration de leur oxygdnation (29). D'autres s&ies observationnelles au cours du SDRA, la plupart rdtrospectives, ont confirmd un bdndfice sur l'oxygdnation tout en rdduisant les
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pressions de pointe (30, 31). Le passage en VPHF n'dtait pas associd ~ila survenue d'effets ddldt~res hdmodynamiques dans ces sdries. Toutefois, aucun essai prospectif randomisd n'a dtd conduit ~i ce jour dans le cadre du SDRA. Dans la population de patients prdsentant un SDRA post-traumatique, plusieurs travaux ont ddmontrd l'intdr& de la VPHF et notamment en cas de neurotraumatisme associde. En effet, la VPHF permet, outre le bdndfice sur l'oxygdnation, de rdduire la PaCO2 sans augmenter les pressions d'insufflation et de limiter la survenue de poussdes d'hypertension intracrfinienne (32, 33). Cependant, l'usage prophylactique de la VPHF dans une population de patients chirurgicaux fi risque de ddvelopper un SDRA ne prdsentait pas d'avantage en comparaison avec la ventilation mdcanique conventionnelle (34). Cette technique pourrait donc &re bien adaptde ~i la traumatologie, mais la rdalisation d'un essai randomisd ~t large dchelle devient impdrative. La VPHF permet dgalement de mobiliser de fagon considdrable les sdcrdtions bronchiques et occupe une place importante dans la prise en charge des brfilds avec inhalation de fumdes d'incendies. Dans cette population, Reper et all. ont conduit trois travaux ddmontrant l'efficacitd de la VPHF sur la clairance des sdcrdtions et sur l'hdmatose (35). Ces rdsultats ont dtd obtenus pour des niveaux de pression moyenne similaires ~i ceux en VMC, mais avec des pressions de pointe plus basse. Enfin, du point de vue expdrimental, deux travaux tendent fi montrer un effet protecteur de la VPHF sur les ldsions pulmonaires. Cioffi et al., dans un module d'inhalation de fumdes chez le primate, retrouvent une rdduction des ldsions histologiques pulmonaires apr~s 7 jours de ventilation (36). Tr~s rdcemment, dans un module de ldsion pulmonaire aigue par inhalation de liquide gastrique chez le lapin, Allardet-Servent et al. ont compard la VPHF avec la VOHF et la ventilation conventionnelle protectrice (VT = 6 mL.kg -1) sur une durde de 4 heures (37). Les trois stratdgies, ddlivrdes ~i pression de distension alvdolaire comparable (15 cmH20), permettaient de rdduire de maniSre identique les Idsions histologiques pulmonaires et le taux de polynucldaires neutrophiles. De m8me, la mdcanique respiratoire et le rapport PaO2/FiO2 dtaient amdliords par les trois techniques, alors qu'une ventilation ~t haut volume (VT = 12 mL.kg -~) et sans PEP aggravait les dchanges gazeux et les ldsions histologiques. Ainsi, il semble que ces trois techniques soient capables de limiter les effets ddldt~res de la ventilation mdcanique agressive. Compte tenu de la faible diffusion et de la complexitd de ces techniques, la ventilation mdcanique conventionnelle reste donc ~i l'heure actuelle la technique de ventilation de rdfdrence, ~i condition de l'appliquer dans une approche protectrice.
Conclusion La ventilation ~i haute frdquence constitue, sur le plan thdorique, un concept iddal pour limiter le ddveloppement de ldsions assocides ~i la ventilation. La
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VOHF, au cours du SDRA, permet d'amdliorer transitoirement l'oxygdnation sans pour autant rdduire l'inflammation pulmonaire ou influer sur le pronostic. L'usage de cette technique doit donc rester ponctuel, au sein d'une dquipe exp&imentde, et limitd ~i certaines indications. L'&olution de cette technique passe certainement par une meilleure optimisation de celle-ci, comme l'app|ication prdalable d'une stratdgie de recrutement. La VPHF semble constituer une alternative intdressante chez les brfilds ou les traumatisds avec SDRA, mais son &aluation ~i large &helle reste ~i rdaliser.
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Toxicit pulmonaire de I'oxyg ne (02) D. Perez, C. M a n z o n , J.-C. Navellou, C. Patry et G. Capellier
Introduction Depuis la ddcouverte de la toxicitd de l'oxyg~ne (02) (<< poison vital ,,) par Lavoisier en 1785 et les travaux de Lorrain-Smith, la controverse persiste. Historiquement, les premieres descriptions de cette toxicitd concernent le poumon. Avec l'avancde des connaissances et des techniques, les mdcanismes physiologiques et physiopathologiques de cette toxicitd ont commencd fi_ &re ddcryptds. L'utilisation de 1'O 2 en clinique humaine reste imprdcise, d'autant que des possibilitds d'adaptation ~l cette toxicitd sont ddcrites. L'implication des hautes FiO2 dans l'entretien des ldsions pulmonaires des patients atteints de SDRA est possible et doit &re prdvenue par un ajustement de la FiO2 minimale pour atteindre les objectifs de saturation art&idle en 02. Toutefois, la difficultd est de diffdrencier les ldsions imputables ~i l'agression initiale ou secondaires fi la ventilation mdcanique, des Idsions lides fi une dventuelle toxicitd de 1'O2. I2atteinte pulmonaire prdalable (secondaire fi l'agression initiale) au cours du SDRA pourrait limiter cette toxicitd ; en effet les cellules ldsdes se situent dans les zones off la ventilation est faible protdgeant ainsi potentiellement le poumon des hautes FiO2. La rdponse inflammatoire locale et systdmique secondaire ~i l'agression pulmonaire peut modifier aussi (majoration ou diminution ?) le retentissement des hautes FiO2. La toxicitd pulmonaire de 1'O 2 a fait l'objet d'une revue descriptive prdcisant les mo&les et les ldsions observdes (1). Nous nous attacherons dans cette mise au point ~i prdciser les donndes physiopathologiques actuelles concernant les mdcanismes cellulaires et les phdnom~nes d'adaptations.
152 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Toxicit pulmonaire de 1'02 au niveau tissulaire
Modifications anatomiques I2atteinte pulmonaire comporte des modifications anatomiques qui ont dtd initialement ddcrites par Lorrain-Smith chez l'animal d'expdrimentation puis ensuite chez l'homme sain. Ces ldsions sont prdcdddes de modifications fonctionnelles respiratoires ddcrites beaucoup plus tard avec notamment les travaux de Clark et Lambertsen. Chez l'homme sain, les donndes sont fragmentaires mais les effets toxiques ddpendent aussi bien de la pression partielle d'oxyg~ne que de la durde d'exposition. Les sujets exposds font dtat de douleurs thoraciques et d'une sensation d'oppression thoracique apr~s 3 heures d'exposition une FiO2 de 1. Apr~s 4 fi 22 heures d'exposition ~i l'oxyg~ne, il apparalt une toux accompagnde de congestion nasale et d'irritation oculaire (2). Ces stigmates d'irritation trachdale sont retrouvds en endoscopie bronchique avec dryth~me, oed~me et prdsence de sdcr&ions. Si l'exposition se prolonge au-del~i d'une dizaine d'heures, des manifestations plus graves apparaissent, lides ~i une augmentation de la permdabilitd alvdolo-capillaire, du shunt intrapulmonaire et une diminution de la capacitd vitale (1). Chez l'animal d'expdrimentation, la toxicitd pulmonaire de 1'O 2 survient dans des ddlais variables selon les esp~ces, le protocole d'O2, la souche (gdndtique) qu'elle soit sauvage ou porteuse de ldsions prdalables ou assocides (exposition ~i l'endotoxine, la bldomycine ou la cordarone, etc.). Chez le rat, la mort survient en 72 heures avec altdrations de la barri~re alvdolo-capillaire et survenue d'un dpanchement pleural important. L'atteinte initiale (phase exsudative) porte sur les cellules endothdliales avec accumulation de plaquettes dans le lit capillaire pulmonaire prdcddant l'afflux de polynucldaires neutrophiles (3). Si l'exposition se prolonge au-delfi de 40 heures, les cellules endothdliales recouvertes de plaquettes augmentent de surface et de volume relatif. Apr~s 60 heures, ces cellules augmentent franchement de volume et de surface tout en &ant recouvertes de polynucldaires neutrophiles. Si l'hyperoxie persiste jusqu'~i la mort des animaux, on observe un ced~me pdrivasculaire, puis interstitiel et alvdolaire, avec destruction alvdolaire, accumulation interstitielle et alvdolaire d'dldments figurds du sang (polynucldaires neutrophiles, hdmorragie alvdolaire) et dpanchements pleuraux importants. Une dtude rdcente portant sur les effets de l'hyperoxie sur le contenu en eau de diffdrents organes chez le rat a montrd que la dysfonction endothdliale ~i l'origine de l'augmentation de la permdabilitd dtait spdcifique au poumon et non gdndralisde ~itousles organes (4). Des &udes en microscopie dlectronique (5, 6) ont montrd que la survie des animaux, expos& pendant 7 jours fi l'hyperoxie, ddpendait en partie du r&ablissement de la barri~re alvdolo-capillaire secondaire fi la phase de prolifdration des pneumocytes de type II (PlI). Enfin, lors de la phase de cicatrisation ou fibrose qui
Toxicitd pulmonaire de l'oxyg~ne (02) 153
suit l'envahissement de l'interstitium alvdolaire par des fibroblastes sdcr&ant du collag~ne, les septa s'dpaississent autour de zones emphysdmateuses. Chez les malades atteints de SDRA pour lesquels l'utilisation d'une haute FiO2 est parfois ndcessaire, on retrouve des ldsions histologiques pulmonaires similaires, rendant difficile la distinction des atteintes secondaires ~i 1'O2 de celles dues ~i la pathologie initiale ou induite par la ventilation mdcanique (7).
Modifications fonctionnelles Des modifications fonctionnelles respiratoires issues des donndes exp&imentales ddj~i anciennes (8) ont permis fi Clarck et Lambertsen l'dlaboration du concept de dose toxique par unitd pulmonaire (UPTD) basd sur la baisse de la capacitd vitale (CV). Plus rdcemment, les m8mes auteurs ont rdalisd une dtude chez l'homme sain soumis ~ides expositions continues d'O2 hyperbare, dans les limites de durdes permettant une rdversibilitd des signes cliniques de toxicitd (9). Les sujets ont dtd soumis aux niveaux de pression utilis& en plongde et/ou hyperbarie mddicale. Dans cette dtude, la prdcocitd des troubles fonctionnels respiratoires est fonction du niveau de PO2 et l'intensitd des signes est croissante avec la durde d'exposition. La diminution de CV est proportionnelle ~i la durde d'exposition et au niveau de PO2 confirmant les dtudes ant&ieures. Pour une baisse de CV de 10 %, la durde d'exposition, avec rdversibilitd des signes en 24 heures, sera de 6, 8 et 14 heures respectivement ~ 2,5, 2,0 et 1,5 ATA. Les auteurs retrouvent dgalement une baisse de tous les paramStres mesurds (capacitd inspiratoire et vitale, volume expird, volume de rdserve expiratoire, ddbit expiratoire, compliance statique et DLCO) en fonction du niveau de PO2 mais avec une variabilitd interindividuelle. Ainsi, il semblerait pratique de mesurer la CV ~iintervalle rdgulier pour d&erminer la toxicitd de 1'O2 pendant une exposition continue.
Toxicit pulmonaire de 1'O2 au niveau cellulaire Alterations secondaires aux radicaux libres de I'oxyg ne Les radicaux libres de l'oxyg~ne (RLO) produits majoritairement ~ l'&at basal par la chalne d'oxydordduction des mitochondries, jouent un r61e physiologique dans le maintien de l'homdostasie cellulaire. Dans des situations pathologiques, l'ex&s de production de RLO peut ddsdquilibrer la balance oxydant/anti-oxydant (stress oxydant). L'O2 est une moldcule hautement rdactive de par sa nature biradicalaire. Ses deux dlectrons libres vont rdagir avec les espSces radicalaires organiques produites physiologiquement, empechant
154 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
l'arrSt spontand des rdactions radicalaires par recombinaison (10). La toxicitd cellulaire de 1'O2 se traduit par des altdrations mitochondriales (11), des peroxydations lipidiques altdrant la fluiditd membranaire et les mdcanismes de transport, des altdrations des structures primaires des protdines par oxydation ou nitration et une diminution des ddfenses antioxydantes et des cassures de I'ADN entralnant la mort cellulaire (12). Cet effet toxique peut dgalement se manifester par l'induction de signaux de transduction de l'apoptose. La voie des MAP kinases (mitagen activated pratein kinase) entralne l'apoptose dans des cultures cellulaires de macrophages (13, 14). La mort cellulaire par apoptose ou ndcrose (selon les types cellulaires ou modules animaux dtudids) s'accompagne d'une augmentation de la permdabilitd des cellules endothdliales ou dpithdliales alvdolaires (15-18). Les polynucldaires neutrophiles (PNN), recrutds apr~s stimulation des macrophages alvdolaires par 1'O2, augmentent localement la quantitd d'esp~ces radicalaires (anion superoxyde, peroxynitrite et acide hypochloreux). Ils lib~rent leurs protdases, participant ainsi ~ila destruction du tissu pulmonaire. Les RLO pourraient aussi initier ou amplifier l'inflammation en augmentant l'expression de certains g~nes impliquds dans la rdponse inflammatoire. Ils pourraient activer certains facteurs de transcription comme le facteur de transcription nucldaire kB (NFkB), responsable de la production de nombreuses cytokines (IL-2, IL-6, TNFo:) et de la NO synthase inductible (NOS2). Pour la premiere fois, une ~tude rdcente a montrd in situ, dans un module de poumon isold perfusd de rats, le r61e central de la cellule endothdliale des capillaires pulmonaires dans la pathogdnie des ldsions pulmonaires (19). En effet, la cellule endothdliale constitue la premiere cible de la toxicitd de 1'O2. Apr&s moins de trente minutes sous hyperoxie, les auteurs ont mis en dvidence in situ la production d'anion superoxyde et ce de fagon continue et progressive tant que l'exposition se prolonge. Ils ont dgalement ddmontrd l'origine mitochondriale des RLO puisque la rotenone (inhibiteur du complexe I de la chalne respiratoire) bloque la production. I1 s'ensuit une cascade d'dvdnements avec augmentation du taux de calcium intracellulaire (secondaire au mdtabolisme de la xanthine et de l'hypoxanthine par la xanthine oxydase qui active la phospholipase C). Au sein de la cellule endothdliale, les canaux ~i la ryanodine (canaux calciques), stimulds par les RLO, participent ~i l'augmentation du calcium intracellulaire au-del~i des besoins cellulaires. Ce taux de calcium intracellulaire anormalement dlevd stimule la protdine kinase C et aboutit ~ila translocation du cytosol vers la membrane plasmique de la GTPase Racl. L'activation de Racl va 8tre ~i l'origine d'une source enzymatique de RLO par la stimulation de la NADPH oxydase. Finalement, un cercle vicieux s'installe avec une production de RLO ddldt~re pour la cellule endothdliale ~i l'origine des ldsions toxiques de 1'O2 (fig. 1). Sous l'influence du stress oxydant, la cellule endothdliale va exprimer ~isa surface des moldcules d'adhdsions ~ l'origine de l'infiltration pulmonaire, de la sdquestration et de l'activation de PNN et de plaquettes. La cascade d'dvdnements qui s'ensuivent se confond avec celle ddcrite au cours de la physiopathologie du SDRA (cf. Physiopathologie et ldsions induites par la ventilation de Ricard et Roux).
Toxicitd pulmonaire de l'oxyg~ne (O2) 155
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Fig. 1 - Schdma explicatifdes principales voles de production des RLO et de la gen~se du stress oxydant. La chaine respiratoire mitochondriale aboutit ~t la formation d'ATP et consomme de 1'O2. Une fuite physiologique de RLO participe au maintien de l'homdostasie cellulaire (signalisation redox). Dans les situations pathologiques, le risque est de ddsdquilibrer la balance oxydant/antioxydant crdant un stress oxydant. Les capacitds des enzymes antioxydantes sont ddpassdes malgrd leur prdsence intramitochondriale (SOD, catalase et glutathion), intracytoplasmique (SOD et catalase) et extracelluaire (glutathion), tandis que la concentration de RLO augmente entralnant les ldsions cellulaires. Uhyperoxie augmente la production de peroxyde d'hydrog~ne par la mitochondrie. Hle active aussi la production de RLO apr~s activation des cellules phagocytaires qui stimulent la NADP(H) oxydase. Les cellules souffrant d'ischdmie vont dgalement stimuler la production de RLO par la xanthine oxydase. Les RLO stimulent dgalement la xanthine oxydase et la NADP(H) oxydase et entr~nent une augmentation anormale du taux de calcium intracellulaire via l'activation de la phospholipase C (PLC). Finalement, un cercle vicieux s'installe avec une production de RLO ddldt~re pour les cellules. I : NADH ddshydrogdnase ; II : succinate ddshydrogdnase ; 1II : ubiquinol-cytochrome c oxydordductase- IV" cytochrome c oxydase 9V" ATP synthase 9 Q - coenzyme Q ou ubiquinol 9C" cytochrome C. mb ext et int : respectivement membrane externe et interne de la mitochondrie ; NOS : N O synthase.
156 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Meme si une production physiologique de RLO existe, l'organisme dispose de plusieurs syst~mes antioxydants. La premiere ligne de ddfense comporte des moldcules non enzymatiques et des enzymes. Les antioxydants non enzymatiques sont constituds de vitamines (C, E et b~tacarot~ne), d'oligo-dldments (zinc, sdldnium), du glutathion et de l'acide urique. Les enzymes antioxydantes sont la superoxyde dismutase (SOD), la catalase et la peroxydase (leurs actions sont rdsumdes dans la figure 1). En rdponse ~i l'attaque radicalaire, l'organisme rdagit en produisant de nova des protdines spdcialisdes comme la peroxyrddoxine, thiorddoxine, glutarddoxine et le syst~me h~me oxygdnase/ h~me rdductase. Un ddsdquilibre de la balance oxydant/antioxydant entrainant un ddficit en antioxydant joue probablement un r61e dans la pathogdnie de la toxicitd pulmonaire de 1'O2 mais aussi dans celle du SDRA. Malgrd de nombreux travaux, le r61e protecteur des enzymes antioxydantes reste controversd selon les modules utilisds. De nouvelles voies de recherche donnent un regain d'intdret ~i cette stratdgie (20). Plusieurs enzymes constituent la famille des SOD avec une forme mitochondriale (MnSOD ou SOD2), une enzyme cytosolique (Cu/Zn SOD ou SOD1) et enfin une forme prdsente au niveau des surfaces extracellulaires (Cu/Zn SOD ou SOD3). Des enzymes de synth~se produites ~i partir des sites actifs de la MnSOD ont dtd ddveloppdes (superoxyde dismutase mimics, SODm). Ces protdines de synth~se sont capables d'assurer la catalyse de la dismutation de l'anion superoxyde. Onze protdines diffdrentes ont dtd synthdtisdes. SODm 1 et 5 ont des propridtds anti-inflammatoires contre les Idsions de cellules endothdliales humaines induites par les PNN in vitra. Les SODm 1,10 ou 11 ont dgalement montrd des propridtds anti-inflammatoires sur des ldsions pulmonaires chez la souris (infiltration par les PNN et destruction dpithdliale). SOD 1 et 5 ont montrd, chez le chien, un effet bdndfique dans les ldsions d'ischdmie-reperfusion myocardique. Ces petites protdines synthdtiques (poids moldculaire de 450 daltons alors que la SOD native fait 31.2 Kd), appeldes aussi <,synzymes ,~ peuvent participer ~i la comprdhension des diffdrents mdcanismes par lesquels les RLO exercent leurs effets. Ils donnent un regain d'intdret ~il'dvaluation des antioxydants dans les agressions pulmonaires. Les diffdrents champs thdrapeutiques sont rdsumds dans la figure 2.
Effets pro-inflammatoires de la NO synthase 2 (NOS2) au cours de I'hyperoxie peut rdagir avec le monoxyde d'azote (NO), produisant le peroxynitrite (ONOO-). Extremement rdactif, ce dernier peut etre ~i l'origine de diverses rdactions d'oxydation et de nitration. En effet, il est potentiellement oxydant apr~s protonation, rdaction avec les groupements thiols ou les donneurs de NO pour former le radical hydroxyle (OH). I1 est dgalement potentiellement cytotoxique par (sulfhydryl)oxydation, lipoperoxydation ou apr~s ldsions sur I'ADN (21). Dans un module expdrimental de souris ddficientes pour le g~ne L~O2 -"
Toxicitd pulmonaire de l'oxygSne (02) 157
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Approche thdrapeutique antioxydante, d'apr~s Cuzzocrea et al. (20). Nouvelles voies de recherche off les protdines synthdtiques basdes sur des sites actifs de la MnSOD (SODm, superoxyde dismutase mimics) exerceraient une protection antioxydante au cours de l'agression radicalaire dans diffdrentes pathologies inflammatoires.
Fig. 2 -
de la NOS2 (souris KO ou knock-out), rhyperoxie entralne chez les souris sauvages une hypercellularitd du LBA avec augmentation des P N N et diminution des macrophages alvdolaires (22). Dans le LBA des souris sauvages, on retrouve dgalement une plus grande concentration de protdines, TNF0~, TBARS (thiobarbituric acid reactive substances, reflet de la lipoperoxydation) et une activitd lacticoddshydrogdnase plus importante que dans le LBA des animaux KO soumis ~i rhyperoxie. L'dvaluation semi-quantitative des ARNm NOS2 montre un niveau de transcription plus dlevd sous 95 % que sous 60 % de FiO2. Chez les souris KO pour la NOS2, ces modifications sont attdnudes. Ces donndes suggSrent un effet pro-inflammatoire du N O endog~ne chez les souris soumises ~i rhyperoxie. Ce r61e toxique du N O endog~ne n'est pas retrouvd dans toutes les dtudes, il pourrait mSme avoir des effets protecteurs antioxydants selon les conditions de mise en oeuvre (23).
Toxicit de 1'O2 sur la fonction membranaire Na/K ATPase 12hyperoxie entralne une augmentation de la permdabilitd alvdolo-capillaire puis un oed~me pulmonaire dans lequel le r61e de Na/K ATPase a dtd impliqud. Un module de poumon isold perfusd de rat sous hyperoxie pendant 60 heures a mis en dvidence des modifications de la rdsorption du sodium alvdolaire et de l'activitd de la pompe Na/K ATPase du PlI (24). Dans cette dtude, un stress
158 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
oxydant moddrd entralne une augmentation de la rdsorption paracellulaire sans modification de la rdsorption transcellulaire (Na/K-ATPase). Une ldsion oxydative moddrdment sdv&re entralne une activitd pompe qui se maintient, associde ~i une baisse du transport transcellulaire du Na. Enfin, un stress oxydant sdv~re entralne une chute du transport actif du sodium, responsable de l'ced~me alvdolaire. La baisse de l'activitd de la Na/K-ATPase est associde ~i des modifications de ses sous-unitds 0~1 et ~1. L'hyperoxie entratne une stimulation de la transcription des ARNm codant pour les deux sous-unitds mais seule la synth~se protdique de 0tl est augmentde. Les RLO, induits par l'hyperoxie, entratneraient des perturbations de la synth~se protdique de la sous unitd 131 ou stimuleraient sa ddgradation, responsables de la perte de fonction membranaire de la Na/K-ATPase aboutissant ~i l'ced~me pulmonaire (fig. 3). Na
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flux sodique paracellulaire Fig. 3 - Schdma rdsumant le transport du sodium ~itravers l'dpithdlium alvdolaire pulmonaire. Les oxydations induites par l'attaque radicalaire bloquent progressivement l'activitd de la NaK/ATPase (transport actif transcellulairedu sodium). Si le stressoxydant augmente, le passage paracellulaire sera, lui aussi, inhibd.
Toxicit de I'0 2 et immunit de la phagocytose
inn e 9 perturbation
L'hyperoxie (et les RLO qu'elle gdn~re) pourrait inhiber ou altdrer l'immunitd innde des patients atteints de SDRA et ainsi augmenter le risque de pneumopathie ou de ddc~s. Par la phagocytose et la destruction d'agents pathog~nes, le macrophage alvdolaire joue un r61e important dans l'immunitd innde par la production de RLO et de NO (25). L'hyperoxie limiterait les fonctions antimicrobiennes du macrophage alvdolaire 5 travers ses effets sur le micro
Toxicitd pulmonaire de l'oxyg~ne (02) 159
squelette d'actine (26). In vitro, apr~s 48 heures d'hyperoxie, la capacitd de phagocytose et de bactdricidie des macrophages murins est diminude malgrd une production augmentde de NO. On observe des modifications morphologiques (augmentation de taille, formation de pseudopodes) assocides ~t des ldsions structurales du microsquelette. En effet, la distribution corticale des filaments d'actine est moindre, la polymdrisation est intense mais au profit de la formation de fibres de stress et d'agrdgats d'actine dont l'oxydation est importante. La perte des capacitds de phagocytose des macrophages est dgalement constatde, in viva, chez des souris exposdes ~i l'hyperoxie. Le mdcanisme par lequel l'hyperoxie exerce son effet sur l'actine est mdconnu. Ces modifications pourraient etre similaires dans les macrophages alvdolaires de patients SDRA sous hyperoxie et expliquer l'observation d'une incidence dlevde de pneumopathies.
Toxicit de 1'O2 au niveau mol culaire voies de signalisation
Apoptose et oncose Les mdcanismes de la mort cellulaire secondaires fi l'hyperoxie front pas encore dtd compl~tement dlucidds. Elle peut etre secondaire ~t une ndcrose, une apoptose ou ~i une oncose. La ndcrose correspond ~i une perte d'intdgritd de la membrane plasmique, modification qui apparalt apr~s l'apoptose et l'oncose. L'apoptose est un phdnom~ne actif requdrant de l'dnergie et souvent lid fi une activitd de la protdine caspase 3. L'oncose, qui dtait confondue avec la ndcrose, s'accompagne du gonflement des noyaux, une vacuolisation du cytosol, des pertes de structures au niveau des mitochondries et des pertes de fonctions enzymatiques sans activitd caspase 3 ddtectde (27). Le type de mort cellulaire constatd in vitro est variable selon les conditions de culture et de transformation des cellules dpithdliales. Les facteurs de transcription stimulds JNK (jun kinase) et p38 appartiennent ~t la famille des MAPK (mitogen-activatedprotein kinase). Ces deux facteurs entralnent la mort cellulaire par oncose apr~s stimulation de la protdine AP-1, reconnu pourtant pour etre un facteur pro-apoptotique. L'incubation des cellules avec du peroxyde d'hydrog~ne entralne l'apoptose avec activation de la caspase 3 via les memes facteurs de transcription (fig. 4). Des cellules dpithdliales bronchiques humaines normales en culture primaire sous hyperoxie meurent par un phdnom~ne d'oncose (28). I1 ne s'agit donc pas d'un artefact de culture ni d'un effet secondaire fi la transformation des cellules mais bien d'un effet direct de l'hyperoxie. Dans un module de
160 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
ligndes cellulaires d'addnocarcinome humain apr~s agression oxydante (29), la mort cellulaire par ndcrose passe par la voie apoptogdnique de la caspase 8 via rinteraction Fas/fas ligand. Toutes les voies de signalisation qui s'ensuivent et aboutissent ~i ractivation de la caspase 9 sont mdconnues (29). La mort cellulaire au cours de rhyperoxie rdsulte de plusieurs voies de signalisations compliquant ainsi les interventions thdrapeutiques. Hyperoxie oncose JNK, p38 /
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/ H202 apoptose" caspase 3 F i g . 4 - Voies de signalisation menant soit ~i rapoptose, soit ~i roncose. J N K et p38 appartiennent ~l la famille des MAPK (mitogen-activatedprotein kinase). J N K ' j u n kinase " AP- 1 9 activated protein 1.
R61e de NF B Le facteur de transcription NFtcB semble impliqud dans la voie de signalisation et aurait plut6t un r61e protecteur. L'inhibition de NFtcB accdl~re les ldsions dpithdliales et diminue l'activitd MnSOD. Plusieurs dtudes avaient ddj~i montrd que NF~:B prdvenait rapoptose. NFK:B, sous forme inactive, est lid ~i la protdine I~cB0~ dans le cytoplasme (30). L'hyperoxie, apr~s activation de IKK (I~cB Kinase), entratne la phosphorylation et la ddgradation (ubiquinone) de I~B0~ permettant la translocation nucldaire de NF~B. Ainsi activd, NF~:B pourrait moduler rexpression de g~nes facilitant la survie sous hyperoxie comme celui de MnSOD ou de rinterleukine 6. Si rhyperoxie se prolonge, on observe un rebond de la synth~se d'I~cB0t et la mort cellulaire. NF~B prot~gerait les cellules dpithdliales humaines normales (en culture primaire) de la mort cellulaire (qu'elle soit apoptotique ou non) induite par hyperoxie. L'effet protecteur de NF~B est lid fi ractivitd de la sous-unitd p50. En effet, les souris KO pour la sous-unitd p50 de NF~B (hdtdrodim~re p50/p75) ont une ddgradation importante de rADN pulmonaire et une survie dcourtde sous hyperoxie. Chez rhomme NF~:B joue un r61e pivot dans la rdgulation de la rdponse inflammatoire ~i travers ractivation de la cascade cytokinique et la production d'autres mddiateurs de rinflammation. L'hyperoxie et les RLO qu'elle gdn&re sont impliquds dans la pathogdnie du SIRS, du syndrome de ddfaillance multiviscdrale et du SDRA. L'hyperoxie, comme le syndrome d'ischdmie/reperfusion, rendotoxdmie ou le volo/barotraumatisme, active NFK:B probablement via rlL 113 et le TNFo:. Chez
Toxicitd pulmonaire de l'oxyg~ne (02) 161
l'homme, plusieurs dtudes ont montrd que le taux de NFK:B dtait dlevd dans le LBA de patients atteints de SDRA et qu'il reprdsentait un marqueur de gravitd (31). Aucun lien n'a dtd retrouvd avec le niveau de FiO2. L'interfdron 2 (synthdtisd prdcocement par les lymphocytes T [(CD4§ et NK) sous l'action de NFK:B apparatt jouer un r61e d~s le ddbut de l'exposition ~i l'hyperoxie. L'inhibition de la synth~se d'IFNg chez la souris KO attdnue l'accumulation des PNN ~i la phase prdcoce ainsi que les ldsions pulmonaires induites par l'hyperoxie. En conclusion, l'hyperoxie entralne une augmentation du flux entrant d'O2 dans les cellules pulmonaires. Les RLO ainsi produits en exc~s induisent des seconds messagers entratnant des signaux de transduction qui, finalement, inhibent ou activent la mort cellulaire. Tous les mdcanismes ne sont pas dlucidds. NFK:B est capable d'entratner la mort cellulaire (via l'expression de g~nes de cytokines pro-inflammatoires) mais serait aussi susceptible d'augmenter l'expression de g~nes de survie. Les RLO induits par l'hyperoxie peuvent limiter la mort cellulaire via l'expression de protdines de stress (protdines de choc thermique ou HSP, le syst~me h~meoxygdnase ou HO1) apr~s activation du facteur de transcription STAT. L'activation du facteur de transcription AP-1 induit dgalement l'expression des g~nes de stress mais pourrait aussi entralner la mort cellulaire. Enfin, les ldsions de I'ADN induites par les RLO pourraient entralner la mort cellulaire apr~s stimulation de protdines de rdparation de I'ADN ddpendantes des cyclines telles que GADD45, GADD 153 ou P21 (32). L'hypoth~se de la toxicitd de 1'O2 est donc bien rdelle sous certaines conditions, comme une exposition prolongde ~i haute FiO2. Cette toxicitd va se manifester d~s que l'homdostasie cellulaire est perturbde avec une rupture d'dquilibre, entre la balance oxydant/antioxydant.
Effets de 1'O2 dans la physiopathologie du SDRA et de la ventilation m canique La physiopathologie et la ventilation mdcanique (VM) au cours du SDRA ont fait l'objet d'un chapitre distinctif dans cet ouvrage. Nous dvoquerons uniquement les aspects off 1'O2, assimild ~i un mddicament, pourrait etre impliqud dans l'initiation ou l'entretien de l'agression pulmonaire. Ce mddicament doit faire l'objet d'une prescription mais aussi d'une surveillance de ses complications dventuelles. Au cours du SDRA, l'agression alvdolaire aboutit ~i une destruction plus ou moins dtendue de l'endothdlium et de l'dpithdlium alvdolaire. Le but de la rdaction inflammatoire de l'organisme agressd est la protection (phagocytose et destruction du pathog~ne) et la rdparation tissulaire (prolifdration et diffdrenciation des PlI en PI). La VM va ajouter son propre retentissement pulmonaire aux anomalies cellulaires. L'augmentation des pressions intrapulmonaires, qui vise ~i recruter un certain nombre de zones exclues,
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s'accompagne d'une distension plus ou moins importante de zones restdes ouvertes. L'hyperinflation des zones saines constitue ainsi une nouvelle agression cellulaire responsable d'une rdaction inflammatoire. L'hyperoxie serait susceptible de limiter les possibilitds de r&up&ation de l'intdgrit~ cellulaire et d'entretenir ainsi les Idsions induites par la VM.
Les d terminants de I'agression et les effets secondaires de 1'0 2 Au cours d'un SDRA secondaire ~t une pneumopathie bact&ienne, par exemple, le pathog~ne induit des ldsions dpithdliales et endothdliales directement mais aussi indirectement via la rdponse inflammatoire de l'organisme agressd. La production de cytokines pro-inflammatoires aboutit ~t un recrutement massif de PNN. Ces derniers, en lib&ant leur contenu enzymatique (diastase, protdase) et des RLO, participent aux ldsions cellulaires. L'hyperoxie peut amplifier cette rdponse inflammatoire en stimulant la synth~se de cytokines pro-inflammatoire par les PlI et les cellules phagocytaires ainsi que la lib&ation excessive de RLO (fig. 1). L'attaque radicalaire ainsi gdndrde peut amplifier la rdponse inflammatoire initide par l'atteinte infectieuse et participer ~tl'aggravation des ldsions. Cette toxicitd de 1'O2 peut &re major& par la diminution des ddfenses antioxydantes (d&dquilibre de la balance oxydant/antioxydant ; fig. 1) et reprdsente donc un risque suppldmentaire. Le pronostic des patients atteints de SDRA est corrdld ~i l'importance et ~l la durde de la rdponse inflammatoire (33). Dans le LBA des patients atteints de SDRA, l'activitd diastase est augment& (34) et la persistance d'un nombre dlevd de PNN est un facteur de mauvais pronostic. L'hyperoxie peut aussi limiter la rdparation dpithdliale (conditionnant elle-meme la rdparation alvdolaire) en inhibant les fonctions du PlI. Le PlI (cellule cld de la rdparation alvdolaire) limite le passage des cellules inflammatoires et interstitielles vers l'alvdole et la prolifdration des fibroblastes (responsables de la fibrose). L'hyperoxie participe probablement ~i l'entretien de l'oe&me pulmonaire en inhibant l'activitd de la pompe Na/K ATPase du PlI (24). La PTHrP (parathyroid harmane-relatedpratein) est un facteur qui inhibe le PlI et dont la production est accrue par l'hyperoxie (35). Les patients atteints de SDRA ont, dans le LBA, un taux dlevd de PTHrP et il existe une corrdlation inverse entre la concentration de cette protdine dans le LBA et l'importance des ldsions (36). Le TGF-[3 est un inhibiteur du PlI et sa production est augment& par l'hyperoxie. L'activitd de synth~se de I'ADN au sein des cellules soumises ~i l'hyperoxie est inversement corrdlde ~i la concentration de TGF-[3 produit (37). L'hyperoxie peut aussi aggraver les ldsions pulmonaires en raison d'altdration des propridtds tensio-active et anti-infectieuse du surfactant. Les protdines du surfactant participent aux mdcanismes de ddfenses antimicrobiennes. Ces anomalies constatdes lors de l'hyperoxie (assocides ~i l'alt&ation de la phagocytose des macrophages alvdolaires) vont altdrer les capacitds de ddfense et pourraient favoriser la survenue de surinfections.
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Effets secondaires de 1'02 sur la mEcanique ventilatoire I2altdration des propridtds tensio-actives du surfactant par 1'O 2 peut perturber la compliance pulmonaire. Sans rentrer dans les ddtails de la mdcanique ventilatoire du SDRA (cf. Mdcanique respiratoire au cours du SDRA de Richard et Mercat), la ldsion du surfactant par 1'O2 peut participer ~i la formation de l'ced~me par augmentation de la tension de surface et etre responsable d'atdlectasie, source de ldsions de cisaillement pendant la VM. Les travaux anciens d'Enhorning avaient montrd qu'un ddficit en surfactant entralnait un shear stress. I1 est un des mdcanismes d'aggravation des ldsions pulmonaires induites par la VM (38). Plus rdcemment (39), les patients ddcddds de SDRA, et dont l'histologie retrouvait une surdistention sdv~re, avaient dtd exposds (par rapport ~i ceux dont la surdistention dtait moddrde) 7t des volumes courants (Vt) plus importants et des hautes FiO2 pendant plus longtemps. Chez ces patients, l'incidence de pneumothorax dtait plus dlevde (8/14 versus 2/12, p < 0,05) et le niveau de pression de crete plus important (56 +_ 18 versus 44 _+ 10 cmH20, p < 0,05). Le Vt dtait significativement plus dlevd (12 _+ 3 versus 9 -+ 2 mL/kg, p < 0,05) ainsi que la durde de ventilation ~i des hautes FiO2 (8,6 _+9,4 jours ~i FiO2 supdrieure ~i 6 0 % versus 1,9 -+ 2, p < 0,05). Des arguments expdrimentaux ont montrd qu'une hyperoxie meme moddrde augmente les ldsions pulmonaires lors de l'utilisation de hauts Vt (40, 41). I1 est admis depuis l'dtude ARDS Network (qui comparait des Vt de 6 versus 12 mL/kg) de ddlivrer aux patients atteints de SDRA une VM ~i bas volume courant associde ~i une pression expiratoire positive (PEP) pour limiter le collapsus alvdolaire et les ldsions induites par la ventilation (42). La stratdgie de l'dtude prdconisait l'utilisation de bas Vt associde ~i une stratdgie de PEP pour limiter le niveau de FiO2. La stratdgie de bas Vt autorise-t-elle l'utilisation de FiO2 plus dlevde en limitant l'agression de la VM ? Les dldments cliniques dont nous disposons ne permettent pas d'y rdpondre. Dans l'dtude ARDS Network (42), la FiO2 moyenne des premieres 24 heures dans le groupe bas Vt dtait significativement plus dlevde (0,56 _+ 0,19 versus 0,51 _+0,17 %, pour un objectif de PaO2 compris entre 55 et 88 mmHg ou de SpO2 entre 88 et 95 %). Dans l'dtude ExPress (qui compare deux stratdgies d'utilisation de la Peep au cours du SDRA), la FiO2 moyenne ~il'inclusion est identique dans les deux groupes (0,71 _+ 0,2) mais est statistiquement infdrieure ~i j l, j3 et j5 dans le bras recrutement maximal, respectivement 0,66 + 0,21 v e r s u s O , 5 5 + 0,19, 0,58 + 0,20 v e r s u s O , 4 6 + 0,17 et 0,56 + 0,20 versus 0,47 + 0,17 (A. Mercat, communication personnelle). Dans cette dtude, bien qu'il n'y ait pas de diffdrence de mortalitd entre les deux groupes, la durde de ventilation et le nombre de jours sans ddfaillance d'organes sont rdduits dans le groupe bdndficiant d'un recrutement maximal (par le rdglage de la PEP) associd ~t un Vt et une FiO2 plus basse.
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Tolerance la toxicit pulmonaire de 1'02 L'induction d'une toldrance ~i 1 ' O 2 a fait l'objet de nombreux travaux expdrimentaux (1). Une prd-exposition fi une hyperoxie augmente la durde de survie des animaux soumis secondairement fi une FiO2 de 1. Cette toldrance est variable entre les esp&ces, puisqu'elle est obtenue chez le rat, le chat, le lapin et le mouton mais pas chez la souris, ni le chien et le hamster. Diffdrentes cytokines peuvent induire une toldrance ~i l'hyperoxie (43). La sur-expression d'interleukines (IL) comme IL-6, 11 et 13 mais aussi de facteurs de croissances comme le GM-CSF (granulocyte-macrophage colony stimulating factor), le VEGF (vascular endothelial growth factor) ou le KGF (keratinocyte growth factor) inhibent les ldsions de l'dpithdlium et l'endothdlium secondaires ~ l'hyperoxie. Il existe dgalement une susceptibilitd inter-esp~ce dans l'induction d'une toldrance ~ l'hyperoxie. Chez la souris on observe une diff&ence de mortalitd selon les souches (44). La rdponse ~ la toxicitd de 1'O2 est complexe et int&esse plusieurs g~nes. L'administration prdalable intrapdritondale ou intraveineuse de faibles doses d'endotoxine (ET) induit une protection contre la toxicitd pulmonaire de 1'O2 avec une augmentation de la survie, m8me si l'injection a lieu 12, 24 ou 36 heures apr~s le ddbut de l'exposition (1). L'utilisation de faible doses progressivement croissantes sur 4 jours (0,01 10 ~g/kg) induit une protection contre une dose ldtale d'ET (25 rng/kg) tout en conservant l'effet protecteur contre la toxicitd pulmonaire de 1'O2. La protection contre la toxicitd pulmonaire aprSs injection d'ET chez le rat est associde ~. une diminution de l'infiltration pulmonaire de PNN, ~ une baisse de la concentration protdique et ~ une moindre cellularitd inflammatoire (PNN) dans le LBA (45). Les donndes cliniques montrant l'acquisition d'une tol&ance la toxicitd pulmonaire de 1'O2 sont difficiles ~ obtenir chez l'homme. La tol& rance ~ l'hyperoxie a dtd raise en dvidence chez des patients atteints de SDRA ventilds sous de hautes FiO2 pendant au moins 48 heures (46). Dans cette &ude rdtrospective, la durde de ventilation avec une FiO2 > 0,9 n'dtait pas diffdrente entre les patients survivants (5,6 + 1,1 ; 2-18 j) et ddcddds (5,9 + 0,5 ; 2-20 j). La durde totale d'exposition ~ une FiO2 de 0,5 &air significativement sup&ieure chez les survivants (16,5 + 2,6 versus 11,2 + 1 j). Des nouveau-ntis ont survdcu, sans sdquelle pulmonaire, ~ une ventilation prolongde (jusqu'~ 12 jours) avec une forte FiO2 (moyenne 0,92, extremes 0,80,95). De meme, un patient a survdcu apr~s une exposition ~ une FiO2 proche de 1 pendant 42 jours. Les mdcanismes de la tol&ance ~ l'hyperoxie ne sont pas dlucidds. MSme si les enzymes antioxydantes reprdsentent un syst~me ubiquitaire de protection, la divergence des rdsultats exp&imentaux laisse la possibilitd ~ d'autres mdcanismes de protection (1). L'augmentation de la production d'enzymes antioxydantes sous 02 n'est pas ddmontrde chez l'homme. La NOS2 pourrait &re l'enzyme cld de la toldrance ~ l'hyperoxie. L'inhibition de la NOS par L-NAME (inhibiteur non sdlectif de la NOS2) induit une augmentation du SIRS, du TNFo:, de l'IL l[3, de la permdabilitd
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vasculaire pulmonaire et de la gdndration d'anion superoxyde. Chez le rat, l'inhibition de la production endog~ne de NO par le L-NAME intrapdritondal diminue la survie sous 02 (47). L'administration d'un inhibiteur spdcifique de la NOS2 (aminoguanidine) s'oppose aux effets protecteurs obtenus par l'administration d'ET (48). La voie de signalisatj9 n qui induit la NOS2 apr~s injection d'ET est identique ~i celle de l'hyperoxie, ~i savoir NFkB (voir Vaie de signalisation de l'hyperoxie). Dans les macrophages alvdolaires de rats (49), l'hyperoxie entralne une augmentation de la synth~se de NO et de l'expression des ARNm de la NOS2 via la synth~se de NF~cB en synergie avec le LPS. Le g~ne de la NOS2 peut &re dgalement activd par des cytokines inflammatoires. L'hypoth~se du r61e protecteur du NO d'origine endog~ne via la NOS2 est difficile ~i ddmontrer. Ndanmoins, il existe des arguments exp&imentaux et clinique. Les glucocortico'l"des aggravent les ldsions pu|monaires induites par l'hyperoxie, inhibent NF~B, stimulent la synth~se d'ItcBa et r@riment l'expression du g~ne de la NOS2 (50, 51). Chez l'homme atteint de SDRA, les essais cliniques front pas montrd d'effets bdndfiques des cortico'fdes, voire ont mis en dvidence des effets secondaires aux doses dlevdes utilisdes. Chez des volontaires sains non fumeurs, le taux de NO retrouvd dans les voies respiratoires est proportionnel ~i la FiO2 (52). La concentration de NO baisse quand la FiO2 baisse. De plus, l'activitd de la NOS2 in vitro est ddpendante de la concentration d'O2. Ainsi, 1'O2 rdgule l'activitd de la NOS2 et la synth~se de NO. Dans une dtude prospective chez les patients de rdanimation, les auteurs ont essayd de discriminer les patients 5 risque de ddvelopper un SDRA de ceux atteints de SDRA par le dosage du NO ou le taux de nitrotyrosine (N3T) dans le LBA (53). Etaient considdr& 5 risque, les patients intubds ayant un traumatisme ou un sepsis 5 l'exclusion de ceux ayant une pathologie pulmonaire sous-jacente (asthme, BPCO). Le taux de nitrite, nitrate et N3T, dtait augmentd aussi bien dans le groupe des patients 5_ risque que celui ayant un SDRA, sans diffdrence significative entre les deux groupes. Au 1er jour du SDRA, le taux de nitrite et nitrate dtait significativement plus dlevd chez les patients ayant fait un sepsis qu'un traumatisme. Chez les patients ddcddds de SDRA, le taux de nitrite et nitrate dtait significativement plus dlevd que chez les survivants au 7 ~jour sans prdcision sur les rdgimes ventilatoires et les FiO2 utilisds. Ces donndes ne permettent pas de d&erminer la source du NO, qui pourrait &re synthdtisd par une autre voie que la NOS2 (NOS 1, 2, 3 ou mydloperoxydase des cellules phagocytaires). Ces rdsultats confirment l'implication du NO dans l'&olution sous traitement du SDRA. Le NO endog~ne a montrd des effets anti-inflammatoires pulmonaires en inhibant l'accumulation de PNN sous hyperoxie. I1 serait protecteur sur la barri~re endothdliale en pr&enant l'oe&me pulmonaire secondaire 5 l'augmentation unidirectionnelle de la permdabilitd aux protdines de la barri~re dpithdliale. Le NO aurait dgalement des propridtds antioxydantes sous hyperoxie en diminuant la concentration d'anion superoxyde. En effet, la rdaction du NO et de O2- est rapide (6,7 _+ 0,8 103 M -1 s-~) et donc comp&itive, avec la rdaction d'AberWeiss qui produit le radical hydroxyle (oxydant puissant). En rdsumd, les
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propridtds bdndfiques du NO dans les conditions d'hyperoxie sont une inhibition de l'adhdsion et de l'agrdgation plaquettaire, inhibition du chdmotactisme des PNN, arr8t de la gdndration d'anion superoxide, prdservation de la permdabilitd capillaire et une augmentation de l'hdmatose pulmonaire (rapport PaO2/FiO2). L'homdostasie cellulaire est assurde jusqu'~t un certain seuil de PtiO2 et des souffrances cellulaires apparaltront aussi bien en hypoxie qu'en hyperoxie. Des perspectives d'avenir s'ouvrent actuellement avec le ddveloppement de moldcules qui ciblent une voie mdtabolique particuli~re et spdcifique pour dviter la dilution d'un effet bdndfique potentiel (exemples des SODm, fig. 2). Un autre aspect de la recherche actuelle est le ddveloppement, ~i partir des connaissances apportdes par les modules animaux KO ou transgdniques, de moldcules qui interf~rent dans les voies de signalisation moldculaire (facteurs de transcriptions, facteurs de croissance, anticytokines) et qui permettraient ainsi de cibler l'effet thdrapeutique sur une voie mdtabolique bien prdcise.
Conclusion En pratique, quel est le seuil de FiO2 toldrable chez l'homme ? Existe-t-il un niveau de FiO2 sans risque pour le malade et qui permette d'obtenir les objectifs habituellement recommandds de SpO2 (88-95 %) ou de PaO2 (55-90 mmHg) ? Le seuil de FiO2 toxique est mal connu chez l'homme et, pour certains, les complications peuvent survenir lorsque celle-ci est supdrieure ~i 0,5 (1). Classiquement, le seuil de toxicitd de la FiO2 est de 0,6 et un compromis doit etre recherchd avec les risques lids au barotraumatisme et ~t l'hypoxdmie. L'adaptation rdguli~re de la FiO2 (protocole infirmier) sur les valeurs de SpO2 (avec contr61e rdgulier des gaz du sang) doit permettre de limiter les durdes d'exposition ~t des FiO2 de 1. En dessous de 0,85, les donndes expdrimentales et cliniques confirment la possibilitd d'exposition prolongde sans sdquelle. La mortalitd du SDRA reste importante et la toxicitd de 1'O2 peut s'exercer sur ce poumon ddj~t Idsd. I1 est important de vouloir la limiter tout en garantissant une oxygdnation tissulaire satisfaisante. Le ddveloppement d'outils mathdmatiques d'optimisation de la VM pourra peut-8tre ~tl'avenir aider le praticien ~trdaliser ce difficile compromis (54).
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Monoxyde d'azote et almitrine : int r t et limites Iors du SDRA P. Jolliet
Introduction Au cours des quinze derni~res anndes, deux moldcules de structure tr~s diff& rente, le monoxyde d'azote (NO) et le bismdsylate d'almitrine (BA), ont fait l'objet d'dtudes pharmacologiques, animales et cliniques visant ~i ddterminer leur place dans la stratdgie d'amdlioration de l'oxygdnation artdrielle chez les patients atteints de SDRA. Or, si ces deux agents sont bel et bien capables d'augmenter la PaO2 chez de nombreux patients, il n'est pour l'heure pas ddmontrd que cette amdlioration ait une influence favorable sur leur devenir. Aussi, pour l'heure, les indications cliniques ~i leur utilisation sont-elles difficiles ~ prdciser. Elles doivent reposer avant tout sur la situation particuli~re du patient au plan des dchanges gazeux et de l'hdmodynamique plut6t que sur une indication gdndrale ou une valeur arbitraire de fraction inhalde d'oxyg~ne (FiO2). Dans le prdsent chapitre, nous allons passer en revue les principales caractdristiques pharmacologiques et les effets physiopathologiques du N O et du BA, en tentant de ddgager des dtudes disponibles quelques lignes directrices quant ~i leur application clinique.
Le monoxyde d'azote inhal~ (NOi) Les bases Le N O est connu depuis de nombreuses anndes en tant que composant de la pollution atmosphdrique, &ant par ailleurs prdsent en quantitd dlevde dans les
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gaz d'dchappement des voitures et la fumde de cigarette (1). D'autre part, de nombreux travaux de recherche fondamentale ont ddmontrd que le NO joue un r61e clden tant que mddiateur dans de nombreux processus vitaux pour l'organisme, tels que la rdgulation du tonus vasculaire et bronchique, la transmission neuronale, l'activitd bactdricide des polymorphonucldaires et des macrophages et la modulation de la rdponse inflammatoire (1-3). Parmi ces nombreuses ddcouvertes, celle qui concerne de pros le SDRA est la ddmonstration que le facteur endothdlial responsable de la vasodilatation et le N O ne font qu'un (2, 4). C'est cette propridtd qui est mise en application lors de l'administration du N O en inhalation aux patients atteints de SDRA, en raison de son effet vasodilatateur sdlectif sur la circulation pulmonaire (5). Avant d'aborder les aspects physiopathologiques de cette approche, il est important d'en revoir bri~vement les bases biologiques. Notons qu'il ne sera pas question ici du N O gdndrd par les cellules de la rdponse inflammatoire (1). Dans les cellules endothdliales, l'enzyme N O synthase est responsable de la transformation de L-arginine en L-citrulline, le N O dtant gdndrd durant cette rdaction (3, 6). Le N O diffuse alors dans les cellules musculaires lisses voisines, o{1 il active la guanylate cyclase, enzyme catalysant la formation de GMP cyclique, lequel active une protdine kinase engendrant une relaxation de la cellule musculaire par le biais d'une d~phosphorylation de la chalne ldg~re de myosine (2, 3, 6). Dans la circulation pulmonaire, le N O agit notamment en attdnuant les effets de la vasoconstriction hypoxique (7). L'idde de mettre ~iprofit les effets vasodilatateurs du NO lors de SDRA repose sur un faisceau d'arguments issus d'dtudes cliniques. En effet, en schdmatisant quelque peu, on peut considdrer que dans cette affection coexistent des alvdoles saines, dont le rapport ventilation/perfusion (VA/Q) est quasi normal, et d'autres off ce meme rapport est tr~s abaissd voire nul, ce qui entralne un effet d'admission veineuse ou effet shunt, responsable de l'hypoxdmie (8, 9). A partir de cette situation de ddpart, l'amdlioration de l'hdmatose peut reposer soit sur la rd-ouverture (,, recrutement ,,) de territoires alvdolaires collabds, soit sur la manipulation pharmacologique des rapports VA/Q visant ~i augmenter la perfusion dans les territoires alvdolo-capillaires sains tout en la diminuant autant que possible dans les territoires ~ieffet d'admission veineuse. Le second de ces mdcanismes peut etre obtenu au moyen de l'administration par voie intraveineuse d'un agent vasodilatateur tel que le nitroprussiate de sodium ou la prostacycline (10). Toutefois, ceux-ci exercent alors des effets non sdlectifs, c'est-~i-dire que la vasodilatation s'effectue tant dans les territoires sains que dans ceux ayant un rapport VA/Q abaissd, ce qui comporte le risque de voir s'aggraver l'hypoxdmie (10). De plus, les patients atteints de SDRA dans le cadre d'un sepsis prdsentent souvent une hypotension artdrielle susceptible d'etre aggravde par la vasodilatation systdmique engendrde par l'agent utilisd. Or, le NOi permet d'dviter ces probl~mes, et ce pour plusieurs raisons: 9 l'administration de ce gaz par inhalation implique que sa distribution intrapulmonaire se fait essentiellement dans les territoires alvdolo-capillaires ventilds ;
Monoxyde d'azote et almitrine : intdrSt et limites lots du SDRA 173
9
sa haute solubilitd dans 1'eau comme dans les lipides lui assure un passage
rapide dans l'environnement juxta-alvdolaire (11) ; sa demi-vie tr~s br~ve, de l'ordre de 3-5-s (4), garantit que ses effets s'exercent localement, soit sans risque d'aggravation de l'hypotension par vasodilatation systdmique (12). Ainsi au plan conceptuel, en prdsence d'une situation dichotomique telle que reprdsentde dans la figure 1, le NOi devrait systdmatiquement amdliorer l'oxygdnation artdrielle et entrainer une diminution de la pression artdrielle pulmonaire (PAP). 9
A.
hypox.
i i i i il i!ii!!i!i iiiii!ii ii!ii!iii!i iii
Qva/Qt PAP
9
:~:~ ;~;~
hypox. Q v a / Q t v PAP
:;a ;~
i!i~i~ii~ii!i!i! ,iiii~ili~iiiiii~ii
v..oo
hypox.~ ~ t r
B~
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()~~"~
Qva/Qt
PAP
i
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Qva/Qt PAP
Fig. 1 - A) ModUle ~ideux alvdoles, l'une normalement perfusde et ventilde (rapport VA/Q = 1), l'autre totalement comblde (rapport VA/Q = 0), dans laquelle le sang veineux mSld ne s'oxyg~ne pas, entrainant un effet shunt ou d'admission veineuse (Qva/Qt) important, ainsi qu'une dldvation de la pression artdrielle pulmonaire (PAP) en raison d'une vasoconstriction hypoxique. B) Le monoxyde d'azote (NO) ne pdn~tre pas dans l'alvdole comblde, mais provoque une vasodilatation au niveau de l'alvdole saine, ce qui a deux consdquences : la perfusion dans l'alvdole comblde diminue au profit de celle de l'alvdole saine, ce qui attdnue le Qva/Qt, et la PAP diminue. C) Le bismdsylate d'almitrine (BA) renforce la vasoconstriction hypoxique dans l'alvdole comblde, oh la perfusion diminue au profit de celle de l'alvdole saine, rdduisant le Qva/Qt. En revanche, la PAP augmente. D) Effet combind du NO et du BA.
174 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Effets du NOi en clinique La premiere dtude sur l'utilisation du NOi chez dix patients atteints de SDRA a dtd publide par Rossaint et al. en 1993 et elle a ddmontrd que les effets ddcrits ci-dessus, soit augmentation du rapport PaO2/FiO2 soit diminution de la PAP, pouvaient etre obtenus en clinique (5). L'analyse des rapports VA/Q au moyen de la technique d'dlimination des gaz inertes multiples a montrd une diminution de la proportion de territoires alvdolaires ~i rapport VA/Q abaissd et nul (5). Dans la m8me dtude, les auteurs ont dgalement observd que l'utilisation d'un vasodilatateur (prostacycline ou PGI2) par voie systdmique diminuait la PAP mais s'accompagnait des effets secondaires prdvisibles (aggravation de l'indgalitd VA/Q, hypotension systdmique) ddcrits ci-dessus (5). Plusieurs dtudes ont par la suite confirmd ces rdsultats quant ~i l'effet du NOi sur l'hdmatose et la PAP (13-18). Toutefois, le taux de rdponse, c'est-~i-dire d'amdlioration significative de l'oxygdnation, variait de 35-80 % des patients environ, alors que le module de la figure 1 laisserait prdvoir un taux de 100 %. Bien entendu, ceci ddcoule de la diffdrence dvidente entre un module ~i deux alvdoles et la complexe rdalitd des patients avec SDRA. L'hypoth~se la plus vraisemblable est qu'au sein de poumons ldsds de maniSre hdtdrog~ne, comme c'est souvent le cas dans le SDRA, le N O puisse diffuser vers des territoires mal ventilds, o~a il serait responsable d'une augmentation de la perfusion, donc d'un abaissement suppldmentaire du rapport VA/Q, source d'une aggravation de l'hypoxdmie (19). Cette hypoth~se a dtd confirmde par Hopkins et al. dans une dtude animale comparant les effets du N O dans un module de shunt pur, proche du module de la figure 1, et dans un module ~i bas rapport VA/Q. L'oxygdnation dtait amdliorde dans le premier cas, diminude dans le second (19). Cette m8me influence des rapports VA/Q avant l'inhalation de N O a dtd retrouvde dans une autre dtude animale par Gust et al. (20). Au plan thdorique, on peut concevoir que plus le nombre de territoires alvdolaires ayant un rapport VA/Q proche de la norme est grand, plus l'effet du NOi devrait 8tre marqud. Dans le cas du SDRA, ceci signifie qu'une optimisation de la pression expiratoire positive (PEP), une manoeuvre de recrutement ou encore le recours au ddcubitus ventral sont autant de mesures qui pourraient potentialiser les effets du NOi sur l'oxygdnation. Dans cette optique, Papazian et al. ont ddmontrd que le ddcubitus ventral et le NOi avaient en effet des effets additifs sur l'oxygdnation chez 14 patients (21). Au-delfi de la variabilitd du taux de rdponse au NOi, se pose la question de l'impact de ses effets favorables au plan de l'oxygdnation et de la PAP sur le devenir des patients. Or, sur ce plan, force est de constater que les rdsultats sont ddcevants. Apr~s la phase d'enthousiasme suscitde par les rdsultats de Rossaint et al. (5), deux dtudes prospectives ont examind l'effet du NOi sur le devenir de patients atteints de SDRA auxquels du NOi dtait administrd de mani~re continue (17, 18). Toutes deux ont enregistrd une amdlioration de l'hdmatose chez environ 60 % des patients, mais ni l'une ni l'autre n'a montrd de diffdrence de mortalitd entre le groupe NOi et le groupe contr61e (17, 18). Les
Monoxyde d' azote et almitrine intdret et limites lors du SDRA 175
diffdrentes dtudes publides sur le sujet, qu'elle soient centrdes sur les patients avec SDRA ou sa forme plus ldg~re I'ALI (~, acute lung injury ,,), ont dtd rdcemment colligdes dans une malta-analyse (22). Les deux messages importants ~l retenir sont que" 1) le NOi augmente l'oxygdnation artdrielle chez une majoritd de patients, mais cette amdlioration est inconstante au plan quantitatif et elle est de nature transitoire ; 2) l'administration de NOi n'influence pas la mortalitd. Les auteurs de cette malta-analyse concluent que les dldments ~i disposition actuellement ne permettent pas de recommander l'administration systdmatique de NOi aux patients en cas de SDRA ou ALl (22). Ils rejoignent en cela les recommandations rdcentes d' un groupe d' experts europdens, qui prdconise le recours au NOi uniquement en tant que traitement de sauvetage chez les malades prdsentant une hypoxdmie tr~s sdv~re et rdfractaire (23). Ces recommandations ne sont pas tr~s surprenantes dans la mesure off le ddc~s par hypoxdmie rdfractaire est une raretd dans le SDRA, la mortalitd rdsul~ t tant avant tout du processus initial ou d ~ une ddfaillance polyvlscerale (24). Quant ~i l'dldvation de la PAP, d'origine multifactorielle, son incidence est elevee' ' dans le SDRA (25, 26), mais aucune dtude n'a~ice jour ddmontrd que son traitement par un vasodilatateur n'influence le pronostic des patients. En pratique, le clinicien se trouve donc souvent partagd entre son ddsir d'apporter un soutien maximal ~i un patient dont l'hdmatose est dangereusement compromise et la voix de la raison sous forme d'absence de donndes ddmontrant que l'ajout de NOi apporte un bdndfice en termes de survie. Aces considdrations, il faut ajouter diffdrents aspects qu'il est important de garder ~i l'esprit lorsque 1.on envisage . . . d admmlstrer du NOi 9 9 tout arret complet de l'inhalation de NOi provoque de mani~re rapide une ddtdrioration de l'oxygdnation et une dldvation le la PAP, cette derni~re pouvant aller jusqu'~i provoquer un collapsus hdmodynamique (27) ; 9 le contact prolongd entre le N O et 1'O2 gdn~re du NO2, agent irritant pour les voies adriennes et gdndrateur de methdmoglobine dans le sang, la quantitd de N O 2 produite dtant directement proportionnelle ~i la fraction inhalde de N O (28) ; 9 le N O rdagit avec 1'O2 pour produire diffdrents radicaux libres dont les effets pro-inflammatoire sont susceptibles d'aggraver les ldsions alvdolaires initiales du SDRA (28). I1 faut toutefois noter que le N O exerce une multitude d'effets ~ila fois pro- et anti-inflammatoires dont le rdsultat final, et par extension un dventuel effet ddldt~re sur un patient donnd, est tr~s difficile ~i prdvoir (28) ; 9 le NOi inhibe la fonction des thrombocytes, ce qui peut reprdsenter un danger chez les patients ayant une diath~se hdmorragique, en particulier intracr~mienne (28, 29). I1 n'est pas exclu que certains des dldments ci-dessus puissent rendre compte des rdsultats ndgatifs des dtudes cliniques citdes plus haut, la toxicitd du NOi ayant annuld les effets bdndfiques de celui-ci (22). Cette hypoth~se n'est pour l'heure pas confirmde. Dans tous les cas, lors d'administration de NOi ~i un patient, il semble logique de viser fi utiliser la concentration inhalde la plus
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basse possible amdliorant l'hdmatose (de l'ordre de 5-10 ppm), et d'assurer un monitorage addquat de cette concentration ainsi que des mdtabolites toxiques du NO dans le mdlange gazeux expird (23, 30). Malheureusement pour l'heure, peu de dispositifs permettant un monitorage continu de ces param~tres existent sur le marchd, et leurs principaux ddfauts sont leur manque de convivialit~ et leur cofit opdrationnel tr~s dlevd.
Le bism sylate d'almitrine (BA) Les bases Le BA a dtd ddveloppd au ddbut des anndes 1980 en tant que substance exergant le double effet d'augmenter la ventilation-minute par stimulation des chdmordcepteurs carotidiens et aortiques et d'amdliorer l'oxygdnation artdrielle grace au renforcement de la vasoconstriction hypoxique rdsultant en une plus grande homogdnditd des rapports VA/Q (31). Le BA est une moldcule unique, ne possddant pas de lien de parentd directe avec d'autres agents pharmacologiques existants (31). Base faible d'un poids moldculaire de 477, le BA est liposoluble ce qui lui conf~re un volume de distribution dlevd, de l'ordre de 1015 L/kg (31, 32). Le BA est dlimind par mdtabolisme hdpatique suivi d'une excrdtion biliaire avec recirculation entdro-hdpatique. Ces diffdrentes caractdristiques entralnent une longue demi-vie d'dlimination, m8me apr~s une pdriode d'administration de quelques jours seulement (31, 32). Initialement, les espoirs cliniques dtaient centrds sur les consdquences favorables potentielles d'un traitement par le BA chez les patients atteints de BPCO (33). Ces espoirs n'ont pas trouvd confirmation, en particulier quant ~i la place exacte du BA par rapport ~i d'autres traitements tels que 1'O2 au long cours et au vu d'effets secondaires possibles (notamment polyneuropathie, bien que cet aspect soit controversd, aggravation d'hypertension pulmonaire) lors d'utilisation prolongde (31).
Effets du BA en clinique Une autre application du BA a dtd envisagde, ~isavoir celle de l'insuffisance respiratoire hypoxdmique, notamment le SDRA. En effet, les expdriences animales initialement rdalisdes avec cette substance ont permis de ddmontrer que les effets favorables sur l'oxygdnation dtaient inddpendants de ceux exercds sur la ventilation minute, et que ces effets dtaient dus hun renforcement de la vasoconstriction hypoxique (34). Des rdsultats similaires ont dtd retrouvds chez rhomme (35). Ces donndes ont suscitd l'espoir que les mSmes effets pourraient s'exercer chez des
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patients atteints de SDRA. En effet, ~i la lumiSre des consid&ations physiopathologiques ddcrites plus haut, l'effet d'admission veineuse rdsultant de la prdsence de territoires alvdolo-capillaires ~i rapport VA/Q tr~s abaissd ou nul pourrait thdoriquement &re en partie corrigd non pas au moyen d'une vasodilatation augmentant la perfusion dans les territoires sains comme le fait le NOi, mais grace ~i un renforcement de la vasoconstriction hypoxique diminuant la perfusion dans les territoires malades (fig. 1). La premiSre dtude structurde par Reyes et aL chez huit patients a montrd une augmentation des indices d'oxygdnation pendant que ceux-ci recevaient une perfusion continue de BA ~i 0,5 mg/kg d'une durde de 30 minutes (36). De mani~re pr&isible, la PAP a augmentd durant la perfusion de BA, mais de mani~re non significative. Des rdsultats identiques ont dtd obtenus par ces m8mes auteurs, et l'analyse par la technique d'dlimination des gaz inertes multiples a ddmontrd une augmentation de la perfusion des territoires sains au d&riment des territoires off le rapport VA/Q dtait tr~s abaissd ou nul (37). Ces rdsultats encourageants ne doivent pas faire oublier que le renforcement de la vasoconstriction hypoxique conduit obligatoirement ~i une dldvation de la rdsistance vasculaire pulmonaire et donc de la PAP. Cette derni~re a dtd observde dans les dtudes &des ci-dessus, mais semble avoir dtd modeste et non accompagnde d'effets cliniques. Toutefois, lors de perfusion de doses dlevdes de BA (de l'ordre de 16 btcg/kg/min), l'dldvation de la PAP, m8me moddrde, peut conduire ~t une diminution de la fraction d'Qection du ventricule droit, il est vrai sans consdquence clinique dvidente (38). Ainsi, m8me si aucune dtude n'a dairement ddmontrd la survenue d'effets ddldtSres sur l'hdmodynamique pulmonaire et le coeur droit lors de perfusion continue de BA, il semble dvident que la prudence doit s'imposer chez les patients prdsentant une hypertension pulmonaire marqu& avant toute administration de ce mddicament. Cette prudence s'impose d'autant plus que la demi-vie du BA est longue.
Effets combin s du NOi et du BA en clinique De mani~re caricaturale, on peut rdsumer les effets du N O et du BA en disant que si tous deux augmentent la perfusion dans les territoires alvdolo-capillaires sains, le premier le fait en attirant le ddbit sanguin pulmonaire dans les territoires sains tandis que le deuxi~me repousse ce ddbit loin des territoires malades. D~s lors, il est tentant d'imaginer que l'administration conjointe de ces deux substances pourrait s'avdrer particuli~rement bdndfique, et ce pour deux raisons: 1) les effets favorables additifs sur l'oxygdnation art&idle, permettant d'utiliser chaque substance ~i une dose plus faible et diminuant par l~i-meme leurs effets secondaires ; 2) l'attdnuation par le N O de l'dldvation de PAP induite par le BA (fig. 1). Wysocki et aL ont observd chez 17 patients que l'association de N O ~iune concentration inhalde de 5-10 ppm et de BA ~iraison de 0,5 mg/kg administrde en perfusion continue sur 30 minutes exergait des effets additifs sur l'oxygdnation art&idle, tandis que l'dl&ation de la PAP
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induite par le BA dtait normalisde par le N O (39). Des rdsuhats comparables ont dtd document& par Lu et al. chez un petit groupe de six patients (40). Ils ont dtd confirm& par la suite chez 48 patients par le mSme groupe d'investigateurs (41). fii noter que, dans cette derniSre dtude, la dose optimale, quant son effet sur l'oxygdnation dtait de 4 btcg/kg/min, est infdrieure ~i celle de 16 ~cg/kg/min utilisde dans les premieres dtudes citdes plus haut. Enfin, Papazian et aL dans une dtude effectude chez 41 patients, retrouvent l'effet additif de l'association NOi (10 ppm) et BA, ce dernier administrd en perfusion continue de 16 l.tcg/kg/min (42). Toutefois, cet effet du BA n'est pas documental chez les patients en choc septique qui regoivent de mani~re concomitante de la noradrdnaline. Ces rdsuhats sont en contradiction avec ceux de Gallart et aL, citds ci-dessus (41). I1 est possible que cette diffdrence rdsulte d'un niveau de PAP prd-almitrine plus dlevd dans l'&ude de Papazian et aL que dans celle de Gallart et al. (43). Dans tous les cas, dans une dtude ultdrieure, Roch et aL ont documental une amdlioration de l'oxygdnation chez 15 patients avec SDRA et choc septique, tous recevant de la noradrdnaline (44). II semble donc que l'administration de noradrdnaline n'exclut pas la possibilitd d'obtenir une amdlioration de l'oxygdnation. Notons, comme discutd plus haut dans le paragraphe consacrd au NOi, qu'il est possible d'optimiser encore l'effet additif du NOi et du BA en recrutant des territoires alvdolaires. Ainsi, Jolliet et al. ont observd chez 12 patients qu'en cas d'augmentation significative de l'oxygdnation en rdponse fi la mise en ddcubitus ventral, l'ajout de l'association NOi/BA apportait une augmentation suppldmentaire, supdrieure ~icelle qui ddcoulait de l'administration isolde de l'un ou l'autre de ces agents (45). Dans tous les cas, une surveillance attentive des paramStres biologiques refldtant la fonction hdpatique et du lactate plasmatique devrait s'imposer, dans le mesure off une dtude a documental une dysfonction hdpatique avec dldvation de la lactatdmie, lors de l'administration de BA (46). Ces deux phdnom~nes se sont corrigds une lois la perfusion de BA stoppde. Udldvation de la bilirubine avant la perfusion de BA constituait un facteur prddictif de la survenue de cette complication (46).
Conclusion Les donndes actuellement disponibles ddmontrent que l'administration de NOi ou de BA entralne une amdlioration de l'hdmatose chez une proportion variable de patients atteints de SDRA. De plus, l'association de ces deux agents permet d'augmenter encore cette amdlioration. Ndanmoins, pour l'heure, aucune dtude n'a ddmontrd que cet effet sur l'oxygdnation s'accompagnait d'un bdndfice en termes de durde de ventilation mdcanique, temps de sdjour en rdanimation ou fi l'h6pital, ou n'influen~ait la mortalitd. Par consdquent, les m&a-analyses et recommandations d'expert sur le NOi concluent que l'administration systdmatique de NOi ne saurait pour l'heure &re prdconisde. Aucune
Monoxyde d'azote et almitrine : intdr& et limites lors du SDRA 179
analyse systdmatique n'a dtd pratiqude sur le BA, probablement en raison du faible nombre de patients dtudids, mais il est fort probable que les conclusions seraient similaires. Sur ces bases, il semble logique que les cliniciens s'abstiennent d'un recours systdmatique fi l'un ou l'autre de ces agents chez les patients atteints de SDRA. Leur utilisation occasionnelle chez un patient donnd prdsentant une hypox~mie sdv~re et rdfractaire doit &re hiss& ~ l'apprdciation du clinicien, en pr&ant une attention particuli~re ~i leurs effets secondaires.
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180 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
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Monoxyde d'azote et almitrine : intdret et limites lots du SDRA
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Curarisation au cours du syndrome de d tresse respiratoire aigui J.-M. Forel
Introduction Les curares non ddpolarisants sont des agents pharmacologiques bloquant la transmission neuromusculaire par liaison compdtitive aux rdcepteurs cholinergiques au niveau de la jonction neuromusculaire (plaque motrice). L'utilisation des curares au cours du syndrome de d&resse respiratoire aigue (SDRA) s'int~gre dans le cadre des thdrapeutiques adjuvantes de ce syndrome. L'effet d'une curarisation lors du SDRA a peu dtd dtudid. Le possible effet bdndfique des curares sur les dchanges gazeux au cours du SDRA est ~i mettre en balance avec le risque allergique et leurs effets ddldt~res neuromusculaires. I1 n'existe pas de recommandation claire concernant l'utilisation de curares lors du SDRA en rdanimation bien qu'ils restent frdquemment utilisds.
Utilisation des curares au cours du SDRA Au ddbut des anndes 90, Hansen-Flaschen et aL ont montrd dans une enqu&e multicentrique nord-amdricaine portant sur 164 h6pitaux que les curares &aient utilisds (au moins une administration) chez 98 % des patients ventilds (1). Plus rdcemment, une enqu&e danoise portant sur 49 rdanimations rapporte que les curates sont utilisds par 65 % des rdanimations et que 20 % des patients hospitalisds en rdanimation recevaient des curares (2). Dans l'dtude ARMA du <
>comparant deux stratdgies de rdglage du volume courant (12 vs 6 mL.kg-1), l'utilisation des curates concernait 25 % des 902 patients indus prdsentant un SDRA (3). Plus rdcemment, Arroliga et aL ont montrd que les curares dtaient utilisds chez 9 % des 5 183 patients adultes ventil& indus dans leur dtude, ce chiffre atteignant 38 % chez les 231 patients prdsentant un SDRA (4).
184 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Ces donndes confirment une utilisation non marginale des curares en rdanimation et particuli~rement lors d'un SDRA. Dans ces &udes (1, 2, 4), les indications de curarisation les plus souvent &des sont la facilitation de la ventilation m&anique et l'amdlioration des dchanges gazeux. L'hypoxdmie est un facteur pronostique encore ddbattu chez les patients en SDRA. Toutefois, Brun-Buisson et le groupe de l'dtude ALIVE montrent que la mortalitd augmente avec la diminution du rapport PaO2/FiO2 mesurd fi l'admission, particuli~rement pour un rapport PaO2/FiO2 infdrieur ~i 150 mmHg (5). Dans l'dtude ALIVE, la mortalit~ hospitali~re &ait de 41,4 % pour les patients prdsentant un rapport PaO2/FiO2 > 150 m m H g ~i l'admission et de 62,5 % chez ceux avec un rapport PaO2/FiO2 ~< 150 m m H g (p -- 0,001) (5). Bien que la ventilation mdcanique constitue, en dehors du traitement dtiologique, la modalitd universelle de prise en charge des malades en SDRA, elle reprdsente par elle-meme une agression pulmonaire suppldmentaire pouvant majorer voire reproduire les ldsions histologiques assocides au SDRA (l&ions induites par la ventilation m&anique) (6). Chez l'homme, une stratdgie de ventilation protectrice (rdduction du volume courant ~i 6 mL.kg -~ de poids prddit et pression de plateau ~< 30 cmH20) compar& ~i une stratdgie ventilatoire ,, traditionnelle ~ (volume courant ~i 12 mL.kg 1 de poids prddit et pression de plateau ~< 50 cmH20) permet une rdduction de la mortalitd associde au SDRA (3). Les patients soumis ~i une ventilation avec un volume courant rdduit pourraient ndcessiter des posologies de sddatifs, opio'ides et curares plus importantes que ceux soumis ~i une ventilation mdcanique avec volume courant de 12 mL.kg 1 (7). Toutefois, Kahn et aL montrent que la ventilation ~i petit volume courant n'augmente pas l'utilisation de la sddation (benzodiazdpines, propofol, opio'ides) ou des curares comparde ~i une ventilation ~i volume courant ~, traditionnel ~ (8). Ndanmoins, il a dtd montrd qffen ventilation assist& contr61de, les patients sddatds avec un score de Ramsay ~iV prdsentaient malgrd tout des efforts inspiratoires dont certains seulement &aient rdcompensds (9). Enfin, certaines techniques comme la ventilation par oscillation ~i haute frdquence (HFOV), certaines stratdgies comme l'hypercapnie permissive, la mise en ddcubitus ventral ou bien l'administration de surfactant ndcessitent souvent le recours ~i la curarisation (10, 11). Ainsi, bien que leur responsabilitd dans la survenue de complications neuromusculaires soit discutde, l'utilisation des curares en rdanimation pour amdliorer les &hanges gazeux et/ou la m&anique ventilatoire reste largement empirique et controversde (12).
Effets de la curarisation sur le rapport ventilation/ perfusion et la m canique thoraco-pulmonaire Iors du SDRA Soulignons d'emblde que la majoritd des dtudes disponibles portent sur la curarisation sur de courtes p&iodes (heure) de patients ~i poumons sains lors d'anesthdsies pour procddures chirurgicales. Lors du SDRA, l'utilisation des
Curarisation au cours du syndrome de ddtresse respiratoire aigue 185
curares peut etre justifide par la ndcessitd de limiter une activitd musculaire excessive gdndrant une baisse de la compliance, une augmentation des pressions des voies adriennes ou une impossibilitd d'augmenter le temps inspiratoire. Cependant, bien que leur utilisation clinique soit frdquente lors du SDRA, plusieurs travaux sugg~rent que la curarisation associde ~i l'anesthdsie pourrait modifier le rapport ventilation/perfusion et ddtdriorer les dchanges gazeux (1315). Ainsi, il a dtd ddmontrd que des atdlectasies surviennent rapidement apr~s anesthdsie, paralysie musculaire et ventilation mdcanique chez des sujets ~i poumons sains (14). Tokics et al. ont ddmontrd qu'il existe un shunt localisd dans les rdgions pulmonaires gravitd-ddpendantes (zones dorsales) lors d'une anesthdsie avec curarisation (14). La formation d'atdlectasies pulmonaires pendant l'anesthdsie a dtd documentde par des dtudes tomodensitomdtriques. Ainsi, Brismar et al. montrent, chez des sujets ~i poumons sains apr~s sddation et curarisation, des opacitds qui reprdsentent 4,8 % de la surface pulmonaire sur une coupe scanographique rdalisde au-dessus des coupoles diaphragmatiques (15). Aucune corrdlation avec une perturbation de l'hdmatose n'dtait rapportde dans cette derni~re dtude. I1 est ~t noter que 9 des 16 patients du travail de Brismar et al. dtaient ventilds en oxyg~ne pur, circonstance pouvant favoriser la survenue d'atdlectasies par adsorption (15, 16). Par ailleurs, ces anomalies morphologiques ont totalement rdgressd apr~s l'application d'une pression expiratoire positive (PEP) (10 cmH20) pendant 5 minutes (15). Une diminution de la capacitd rdsiduelle fonctionnelle (CRF) li~e ~i la sddation et/ou la curarisation dtait d~s lors suspectde. Chez six patients ~ipoumons sains, une diminution des dimensions de la cage thoracique dans son axe antdropostdrieur et transversal ainsi que dans le sens cdphalo-caudal (ascension des coupoles diaphragmatiques) a dtd retrouvde apr~s sddation et curarisation (17). La fermeture des petites voies adriennes (atdlectasies des rdgions ddclives ddpendantes) a dtd rapportde au poids du poumon et ~ une perte du tonus musculaire qui cause ~i son tour un ddplacement cdphalique du diaphragme qui ne s'oppose plus alors ~i la pression intra-abdominale exercde sur le poumon (14). Toutefois, l'intensitd de ce ddplacement cdphalique du diaphragme est de moindre importance dans le travail de Krayer et al. (18). La diminution de la CRF en rapport avec la formation d'atdlectasies des zones ddclives ddpendantes de la gravitd est une des causes majeures d'hypoxdmie postopdratoire et un argument frdquemment utilisd par les ddtracteurs des curares. Le probl~me est que, lorsque seule la curarisation est dvalude (patients sddatds chez qui les mesures sont effectudes avant puis apr~s curarisation), il n'est pas retrouvd de modifications des propridtds mdcaniques de la cage thoracique ni des poumons et pas d'effets ddldt~res sur l'oxygdnation (19). Cette derni~re dtude a dtd faite en rdanimation, chez des patients ~i poumons pathologiques (SDRA, contusions pulmonaires, ced~me pulmonaire cardiogdnique) ventilds avec une PEP ~i 5 cmH20 (19). Cette modeste PEP pourrait suffire ~i contrebalancer les effets ndfastes de la curarisation et surtout de la sddation. C'est ce que sugg~re un travail rdalisd chez des patients ~i poumons sains, sddatds et curarisds, qui montre qu'un faible niveau de pression (14 cmH20) suffit ~i obtenir la
186 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigu~
meilleure compliance thoraco-pulmonaire (20). Ces rdsultats sugg~rent une fermeture des petites voies adriennes plut6t que la survenue de vraies atdlectasies par collapsus alvdolaire. Westbrook et al. ont montrd que la paralysie musculaire n'induit pas une modification significative de la CRF ou des propridtds dlastiques du poumon chez des sujets anesthdsids aux poumons sains (21). En fait, la sddation induit une diminution de la CRF qui n'est pas majorde par la curarisation. La sddation induit une augmentation des pressions transpulmonaires avec une diminution de la compliance pulmonaire. La curarisation induit cependant une augmentation presque significative (mesure sur un petit effectif de patients) de la compliance de la cage thoracique (22).
Effets de la curarisation sur les changes gazeux Iors du SDRA Effets sur I'oxyg nation Chez le nouveau-nd et l'enfant, les travaux rdalisds ont montrd des rdsultats contradictoires en termes de modification de l'oxygdnation aprSs curarisation (23-26). Ainsi, alors que le pancuronium amdliore l'oxygdnation dans quelques travaux (23, 26), il semble ddtdriorer les dchanges gazeux dans d'autres dtudes (24, 25). Le tableau I prdsente les principales caractdristiques et les rdsultats des dtudes mendes chez des patients adultes et portant sur les effets de la curarisation sur les dchanges gazeux. Coggeshall et al. rapportent un cas clinique off la curarisation amdliora les dchanges gazeux (22). Etudiant neuf patients prdsentant une insuffisance respiratoire aigu~, sddatds de fa~on peu profonde, Bishop n'a retrouvd aucune modification de l'oxygdnation lide ~il'administration d'un curare (27). Les effets d'une curarisation dtaient dvaluds 10 minutes aprSs l'administration de pancuronium. Lagneau et al., chez 102 patients en ddtresse respiratoire aigu8 avec un rapport PaO2/FiO2 < 200 mmHg, retrouvaient une amdlioration moddrde mais significative du rapport PaO2/FiO2 aprSs 30 min et aprSs 2 heures d'administration de cisatracurium, quel que soit le niveau de curarisation (deux ou aucune rdponse au train de quatre) (28). Gainnier et al. n'observent aucune modification de l'hdmatose apr~s une heure de curarisation dans un groupe de 28 patients prdsentant un SDRA avec un rapport PaO2/FiO2 < 150 mmHg (avec une PEP d'au moins 5 cmH20) (29). Les patients dtaient compards fi un groupe de sujets aux caractdristiques similaires mais qui recevaient un placebo. Si la curarisation entralne la formation et/ou la majoration de zones d'atdlectasies pulmonaires, les curares pourraient induire une hypoxdmie plusieurs heures apr~s le ddbut de la paralysie musculaire. Ceci a justifid la rdalisation d'un travail chez 56 patients en SDRA (PaO2/FiO2 < 150 mmHg avec une PEP d'au moins 5 cmH20) off il a dtd observd une amdlioration de l'oxygdnation survenant d~s
Curarisation au cours du syndrome de ddtresse respiratoire aigue 187
la fin d'une pdriode de 48 heures de curarisation (train de 4 dgal ~i 0) chez les patients curarisds compards aux patients recevant le placebo (29). Cette amdlioration de roxygdnation dans le groupe curarisd persistait jusqu'~t la 120 ~ heure de l'dtude (28). Parall~lement, dans ce travail, il a dtd possible de diminuer significativement le niveau de PEP et la FiO2 dans le groupe curarisd, ce qui s'dtait rdvdld impossible chez les patients recevant le placebo. La pression de plateau a aussi baissd de fagon significative chez les patients curarisds (29). Plus rdcemment, Ford et al. confirment dans une dtude randomisde contr61de mende chez 36 patients pr&entant un SDRA avec un rapport PaO2/FiO2 ~< 200 mm Hg et trait& 48 heures par cisatracurium ou placebo, une amdlioration du rapport PaO2/FiO2 mmHg dont la cindtique d'amdlioration est superposable au travail de Gainnier et al. (29, 30).
T a b l e a u I - Princi, pales caractdristiques et rdsultats des travaux cliniques &udiant les effets
des curates sur 1 oxygdnation de patients adultes, n : n o m b r e de sujets inclus ; RC : dtude randomisde et contr61de ; N R N C : &ude n o n randomisde et non contr61de ; Rda : rdanimation ; BO : bloc opdratoire ; S D R A : syndrome de ddtresse respiratoire aigue 9 ALl 9 acute lung injury; I R A : insuffisance respiratoire aigue sans prdcision.
Auteurs (rdfi)
n
Type Lieu de Type de pathologie d'dtude rdalisation pulmonaire
Curare
Bishop (27)
9
NRNC
Rda
4 ALI 5 SDRA
Pancuronium
Coggeshall
1
Cas
Rda
1 SDRA
Pancuronium
20
NRNC
BO
20 . poumons sains ,,
Pancuronium
6
NRNC
BO
6 ~, poumons sains ,,
Pancuronium
Conti (19)
13
NRNC
Rda
9 ALI 4 SDRA
Pancuronium
Tokics (14)
10
NRNC
BO
10 ,, poumons sains ,,
(22)
Brismar (15) Hedenstierna
(17)
Durde de l'administration Un
bolus Boll
rdpdtds
Un
bolus Un bolus Un
bolus
i Un Pancuronium ! bolus i
Effets sur les dchanges gazeux Pas d'effet Amdlioration de l'oxygdnation Non mesurd Non interpr& table car FiO 2 inconnu Pas d'effet Non interpr& ,.table car FiO2 i lnconnu
Am4lioration 102 IRA avec PaO2/FiO 2 Cisatracurium 2 heures:de l'oxygdnation < 200
Lagneau (28)
102
RC
Rda
Gainnier (29)
56
RC
Rda
56 SDRA 48 (PaO2/FiO2 Cisatracurium heures < 150)
iAmdlioration persistante de roxygdnation
Forel (30)
36
RC
Rda
36 SDRA 48 (PaO2/FiO2 Cisatracurium heures ~< 20O)
Amdlioration persistante de l'oxygdnation
188 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Effets sur la PaC02 L'effet sur la PaCO2 n'a pratiquement pas dtd dtudid. Conti et al. ne montrent aucune variation de PaCO2 apr~s une dose de pancuronium chez 13 patients ventilds pour ddcompensation de bronchopneumopathie chronique obstructive ou traumatisme (dont quatre SDRA) (19). Lagneau et al. n'observent aucun changement des PaCO2 mesurdes avant cisatracurium et pendant 2 heures apr~s l'administration du curare (28). Les travaux de Gainnier et al. et de Forel et al. montrent que la PaCO2 n'est pas influencde par l'administration en continu de cisatracurium pendant 48 heures (29, 30).
Hypotheses expliquant I'amelioration de I'oxyg nation apr s curarisation Iors du SDRA Les mdcanismes par lesquels les curares pourraient amdliorer l'oxygdnation restent largement inconnus. Plusieurs mdcanismes sont dvoquds : 9 la paralysie musculaire induite par les curares pourrait rdduire la consommation d'oxyg~ne lide au travail ventilatoire ; 9 la paralysie musculaire pourrait faciliter la ventilation mdcanique en prdvenant les mouvements respiratoires spontands responsables d'une ddsadaptation du ventilateur et d'une ddgradation de l'hdmatose ; 9 la paralysie musculaire pourrait augmenter la compliance de la paroi thoracique et amdliorer la mdcanique ventilatoire lors du SDRA ; 9 la paralysie musculaire permettrait une meilleure adaptation fi la ventilation mdcanique et une meilleure satisfaction des crit~res protecteurs de rdduction des ldsions assocides ~l la ventilation mdcanique, enfin ; 9 les curares pourraient prdsenter un effet anti-inflammatoire propre contribuant ~i la rdduction des ldsions pulmonaires du SDRA et de la ventilation mdcanique et ainsi amdliorer l'oxygdnation. La diminution de l'activitd ventilatoire spontande s'accompagne d'une augmentation de la compliance thoraco-pulmonaire totale du fait d'une meilleure adaptation au ventilateur et d'une diminution de l'activitd musculaire expiratoire (22). Cette augmentation cliniquement significative de la compliance thoraco-pulmonaire totale semble d'autant plus nette chez les patients en SDRA que leur compliance thoraco-pulmonaire totale est initialement basse. La modification des rapports ventilation/perfusion pulmonaires induite par les curares pourrait aussi etre ~i l'origine d'une amdlioration de l'hdmatose, tant en termes d'oxygdnation (diminution des zones ~t bas rapport ventilation/perfusion ou zones 3 de West), que d'dlimination du CO2 (diminution de l'espace-mort physiologique). En fait, bien qu'envisagde par Bishop, une diminution du shunt intrapulmonaire n'a jamais dtd ddmontrde (27). En outre, comme prdcddemment mentionnd, la curarisation de sujets aux poumons sains en ddcubitus dorsal et
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anesthdsids entralne la majoration des zones 3 de West (atdlectasies des rdgions pulmonaires ddpendantes), une diminution de la CRF du fait du ddplacement cdphalique du diaphragme et une augmentation du shunt intrapulmonaire (14, 17). Toutefois, chez les patients avec ldsions pulmonaires de SDRA, l'augmentation par les curates de la compliance thoraco-pulmonaire (tr~s altdrde dans le SDRA) est susceptible de majorer la CRF et de diminuer le shunt intrapulmonaire. Enfin, la modification des rapports ventilation/perfusion pourrait etre en relation avec une redistribution plus homog~ne de la perfusion pulmonaire permise par l'application de pressions pulmonaires plus basses, favorisant ainsi la perfusion des zones ventildes. La curarisation pourrait aussi changer la distribution de la ventilation inddpendamment de modifications de la CRF et de la mdcanique ventilatoire en homogdndisant les rdpartitions de delta-CRF lides ~ la PEP et du volume courant. Finalement, un des mdcanismes de l'effet favorable d'une curarisation prdcoce sur l'oxygdnation au cours du SDRA pourrait etre la possibilitd d'optimiser la ventilation protectrice lors de la phase prdcoce et inflammatoire du SDRA. En effet, la paralysie musculaire facilite l'adaptation au ventilateur, le rdglage prdcis des volumes courants et des niveaux de pression permettant de limiter le ddrecrutement alvdolaire survenant lors des pdriodes de ddsadaptation du ventilateur (12). De plus, la curarisation permet la toldrance d'une hypercapnie ~ permissive ,,, frdquente lors de la ventilation protectrice et responsable de ddsadaptations entralnant une dldvation des pressions et des volumes chez le sujet non curarisd. Le volo- et le barotraumatisme pulmonaires sont responsables de ldsions pulmonaires induites par la ventilation mdcanique (6, 31, 32). Ces ldsions sont assocides ~ila notion de biotraumatisme dont la libdration de mddiateurs de l'inflammation constitue une des expressions (6, 34, 35). La stratdgie ventilatoire influence la libdration pulmonaire et systdmique (ddcompartimentalisation) des mddiateurs de l'inflammation et les stratdgies de ventilation protectrices sont assocides ~iune moindre libdration de cytokines proinflammatoires (3, 33-37). Dans un travail randomisd contr61d rdcent, nous avons dvalud les effets du cisatracurium sur la rdaction inflammatoire pulmonaire et systdmique chez 36 patients prdsentant un SDRA (PaO2/FiO2 <~ 200 mm Hg sous PEP i> 5) et ventilds avec une stratdgie ventilatoire protectrice (volume courant entre 4-8 mL.kg -~ de poids prddit, pression de plateau <~ 30 cmH20) (30). Une diminution au cours du temps des concentrations alvdolaires d'interleukine (IL)-8 dtait observde chez les patients curarisds (p = 0,034). Quarante-huit heures aprSs la curarisation, les concentrations alvdolaires d'IL-113 (p = 0,005), d'IL-6 (p = 0,038) et d'IL-8 (p = 0,017) dtaient plus basses chez les patients curarisds que chez les contr61es. Par ailleurs, une diminution au cours du temps des concentrations sdriques d'IL-6 (p = 0,05) et d'IL-8 (p = 0,003) dtait observde chez les sujets curarisds. Quarante-huit heures apr~s la curarisation, les concentrations sdriques d'IL-l~3 (p = 0,037) et d'IL-6 (p = 0,041) dtaient plus basses chez les patients curarisds que chez les patients recevant le placebo (30). En outre, cette seconde dtude de notre groupe confirme l'existence, sur 36 malades en SDRA, d'une augmentation durable du rapport PaO2/FIO2 chez les malades curarisds compards au groupe placebo (p < 0,001) (30). Ainsi, une curarisation
190 Le syndrome de d&resse respiratoire aigue
prdcoce ~tla phase initiale du SDRA diminue la rdponse pro-inflammatoire associde au SDRA et ~i la ventilation mdcanique. Cette dtude sugg~re qu'une curarisation pr&oce peut accroltre les effets bdndfiques d'une stratdgie de ventilation protectrice lors de la phase initiale du SDRA. Un effet anti-inflammatoire par action pharmacologique directe du cisatracurium, inddpendant de la paralysie musculaire, ne peut &re exclu dans ce travail (30, 38).
Effets secondaires musculaires et neuro-musculaires de la curarisation au cours du SDRA Les myopathies de rdanimation sont particuli~rement assocides ~t un traitement par cortico'/des. Les neuropathies axonales surviennent le plus souvent dans un contexte de sepsis grave ou de ddfaillance multivisc&ale (39-41). Les myopathies peuvent comporter histologiquement une part de n&rose. I1 semble que l'immobilisation (favorisde par les curares) rende les muscles plus sensibles ~i l'action des cortico'l'des. I1 est ?i noter que les myopathies surviennent rarement chez des patients ayant requ des curares sans adjonction d'une corticothdrapie (42). Une atteinte axonale isolde est tr~s rare chez les patients curarisds (39-41). Le choix du curare n'est pas non plus anodin. Ainsi, les composds stdro'l"diens (vdcuronium, pancuronium) sembleraient davantage favoriser la survenue de myopathies de par leur analogie structurale (39-41). De plus, ces derniers ont des m&abolites actifs, ce qui n'est pas le cas des benzylisoquinolines (atracurium, cisatracurium) qui sont mdtabolisdes en composds inactifs par les estdrases plasmatiques. Des myopathies ont cependant dtd rapportdes avec les benzylisoquinolines (39-41). Sur un large effectif de 95 patients, De Jonghe et al. montrent que les curares ne font pas partie des facteurs de risque de pardsie musculaire, alors que le sexe fdminin, la persistance de plusieurs ddfaillances viscdrales, la durde de ventilation m&anique et surtout l'administration d'une corticothdrapie sont des facteurs de risque inddpendants de survenue de ces pardsies acquises en rdanimation (43). En l'dtat actuel des connaissances, la responsabilitd des curares (sans corticothdrapie associde) dans la pathogen~se des neuropathies et myopathies de rdanimation n'est pas clairement ddmontrde.
Aspects pratiques et perspectives de la curarisation au cours d'un SDRA Comme ddj~i prdcisd plus haut, il existe peu de recommandations concernant la curarisation des patients ventilds (12). En raison des altdrations rdnales frdquentes en rdanimation, le choix de la mol&ule semble se porter sur celles n'ayant pas de mdtabolite actif comme l'atracurium ou le cisatracurium. I1 est
Curarisation au cours du syndrome de ddtresse respiratoire aigue 191
cependant 5 noter que le temps de rdcupdration aprSs arr& d'une infusion continue de cisatracurium est extr8mement variable. AprSs 48 heures d'administration, il est en moyenne d'une heure avec des extremes de 20 et 175 minutes (44, 45). En France, le seul curare prdsentant une autorisation de mise sur le marchd pour une utilisation en rdanimation est le cisatracurium. Toutefois, d'autres produits plus anciens (pancuronium, vecuronium, atracurium) sont largement utilisds en clinique. La surveillance par train de quatre ne semble pas modifier les temps de rdcupdration par rapport 5 la surveillance clinique pour des curarisations de 48 heures (44). La profondeur du niveau de curarisation 5 obtenir en rdanimation est discutde. Dans les deux dtudes randomisdes contr61des conduites par notre groupe, la curarisation dtait profonde (0 rdponse au train de 4) (29, 30). Deux dtudes randomisdes et contr61des ddmontrent le bdndfice d'une curarisation continue de 48 heures sur l'oxygdnation des patients en SDRA lorsque la curarisation intervient dans les 48 premiSres heures des critSres de SDRA (29, 30). Gainnier e t al. ont dgalement montrd une tendance 5 l'augmentation du nombre de jours vivant sans ventilation mdcanique au 60 ~ jour chez les malades curarisds (19 + 20 vs 10 + 17 jours, p = 0,07) ainsi qu'une tendance ~i la rdduction de la mortalitd en rdanimation (46 % vs 7 1 % , p = 0,057) (29). Ces rdsultats sont encourageants mais concernent de faibles collectifs de patients prdsentant un SDRA. L'effet sur la mortalitd d'une curarisation systdmatique de 48 heures 5. la phase initiale du SDRA est en cours d'investigation (NCT00299650). Une rdduction de mortalitd lide 5 une curarisation prdcoce lors du SDRA modifierait de maniSre importante l'image ndgative de la curarisation dans cette pathologie.
Conclusion L'utilisation des curares chez les patients mdcaniquement ventilds et prdsentant un SDRA est controversde et largement empirique. Peu d'dtudes ont dtudid leurs effets sur les &hanges gazeux et sur la mdcanique ventilatoire lors du SDRA. Deux dtudes randomisdes contr61des ont montrd qu'une curarisation pr&oce de 48 heures lors du SDRA est associde 5 une amdlioration persistante de l'oxygdnation. Ce rdsultat pourrait &re en relation avec la paralysie musculaire induite par les curares qui peut diminuer la consommation d'oxyg~ne lide au travail des muscles respiratoires. La paralysie musculaire peut dgalement faciliter l'adaptation ~i la ventilation mdcanique en emp&hant les phdnom~nes d'asynchronisme ventilatoire et leurs consdquences ddldt~res sur l'hdmatose. Par ailleurs, les modifications de compliance de la paroi thoracique induite par la paralysie musculaire peuvent amdliorer la ventilation mdcanique lors du SDRA. Cependant, ces hypotheses restent controversdes. Des donndes r&entes sugg~rent que la curarisation prdcoce lors du SDRA diminue les taux pulmonaire et systdmique de cytokines pro-inflammatoires assocides au SDRA et 5 la
192 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
ventilation mdcanique. Cet effet anti-inflammatoire pulmonaire et systdmique pourrait rdsulter d'une meilleure homogdndisation dans la distribution de la ventilation, du renforcement du caract~re protecteur de la ventilation mdcanique permis par la paralysie musculaire, mais dgalement d'un effet anti-inflammatoire propre au cisatracurium. Enfin, l'implication des nouveaux curares (benzylisoquinolines) dans la survenue de neuro-myopathies de rdanimation est remise en cause dans la littdrature rdcente. Des dtudes ultdrieures sont donc ndcessaires pour prdciser les mdcanismes responsables de l'amdlioration de l'oxygdnation et ddterminer l'impact d'une curarisation prdcoce sur le pronostic des patients en SDRA.
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Optimisation de I' tat hydrique au cours du SDRA A. Roch
Position du probl~me La prise en charge ventilatoire du syndrome de ddtresse respiratoire aigue (SDRA) a fait de gros progr~s ces derni~res anndes. Pendant la meme pdriode, de nombreuses thdrapeutiques non ventilatoires ont dtd dvaludes. Parmi elles, la modulation de l'dtat hydrique et de la pression oncotique plasmatique des patients a fait l'objet d'dtudes, certaines prometteuses, d'autres ddcevantes dans leurs effets physiologiques et sur le pronostic. Le SDRA est notamment caractdrisd par un oed~me pulmonaire dfi ~i une augmentation de la permdabilitd capillaire pulmonaire. A la phase prdcoce du SDRA, un dtat septique associd est le plus souvent responsable d'une hypovoldmie. ?tce stade, l'optimisation hdmodynamique par un remplissage prdcoce et adaptd a fait la preuve de son importance pronostique (1) et une politique de restriction hydrique peut se solder par une aggravation hdmodynamique et des dysfonctions d'organes assocides, qui conditionnent la mortalitd des patients prdsentant un SDRA (2). Dans un second temps, la stabilisation h6modynamique est gdndralement associde ~iune reprise de la diur~se et une diminution du poids corporel. Le passage d'une phase ~i l'autre est souvent complexe et difficile ~i distinguer mais c'est probablement en identifiant la transition entre ces deux phases que l'on peut ddtecter le moment oll une politique d'optimisation de la balance hydrique sur un versant restrictif est possible. Apr~s avoir rappeld les bases physiopathologiques, ce chapitre ddtaillera les principales 6tudes cliniques ayant permis de progresser dans l'optimisation de l'dtat hydrique au cours du SDRA.
Consequences de I'ced~me pulmonaire au cours du SDRA M8me si l'ced~me pulmonaire n'est, par certains aspects, que le reflet de l'importance des ldsions de la barri~re alvdolo-capillaire, il retentit tout de m8me ~i plusieurs niveaux sur la fonction respiratoire (3). L'augmentation de l'eau
196 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
pulmonaire entraine prdcocement une diminution de la compliance pulmonaire, responsable d'une augmentation du travail respiratoire. Au stade d'oed~me alvdolaire, le shunt est responsable d'une hypoxdmie. L'oed~me interagit avec la ventilation mdcanique pour faciliter l'inflammation pulmonaire en rendant le poumon hdtdrog~ne sur le plan ventilatoire, pour altdrer le surfactant et pour majorer les ldsions de la barri~re alvdolo-capiUaire. Enfin, l'oed~me est un des principaux ddterminants de l'hypertension artdrielle pulmonaire, par l'hypoxdmie mais aussi par la compression vasculaire pulmonaire qu'il entratne. Ainsi, toute tentative pour rdduire l'oed~me peut potentiellement avoir des effets bdndfiques sur la fonction respiratoire, voire le pronostic. Cependant, les donndes permettant d'dvoquer un r61e pronostique de la quantitd d'oed~me chez les patients en SDRA ou fi risque de SDRA sont tr~s limitdes. En 1987, Simmons et al. ont observd que l'dvolution du poids corporel et de la balance hydrique chez des patients en SDRA (4) dtait corrdlde au pronostic, sans toutefois dtablir de relation de cause ~i effet entre eux. De meme, le r61e pronostique de la quantitd d'eau pulmonaire a dtd suggdrd. Rdcemment, Sakka et al. (5) ont analysd rdtrospectivement 373 patients de rdanimation et ont notd que la quantitd maximale d'eau pulmonaire mesurde pendant le sdjour dtait un facteur prddictif pronostique. Cet effet pronostique de la quantitd d'oed~me, mesurde par thermodilution, n'dtait cependant pas retrouvd chez les patients prdsentant un SDRA. Par ddfinition, les patients prdsentant un SDRA ont un oed~me pulmonaire important, de l'ordre de 15 ~i 20 mL.kg -1 de poids corporel (6, 7) et il est probable que d'autres facteurs, extrapulmonaires, auront un impact pronostique plus marqud. A ce titre, on peut rappeler que l'importance de l'hypoxdmie est un facteur pronostique controversd au cours du SDRA (8, 9). Au total, il est de bon sens de penser que limiter l'oed~me pulmonaire ou accdldrer sa rdsorption puisse etre bdndfique. Cependant, le r61e pronostique meme de la quantitd d'oed~me pulmonaire reste incertain.
Le SDRA : oed me I sionnel ou h modynamique ? I1 existe, en conditions physiologiques, un passage de liquide de la lumi~re capillaire vers l'interstitium. En effet, l'endothdlium prdsente une certaine permdabilitd d'une part, et, d'autre part, le bilan des forces s'exergant de part et d'autre de l'endothdlium se fait en faveur d'une extravasation de liquide (10). Les mouvements de fluide ~i travers les endothdliums, et notamment l'endothdlium pulmonaire, sont assez correctement estimds par la loi de Starling, qui exprime le fait que le flux net de filtration est le produit de la conductance hydraulique de la barri~re de la surface d'dchange par la pression efficace de filtration. Cette dquation s'dcrit ainsi : Jv = K [(Pc- Pi) - S (rtc-rti)], off Jv est le flux de liquide ~i travers la paroi capillaire, K est le coefficient de filtration hydraulique capillaire, refldtant la permdabilitd ~i l'eau de l'endothdlium, Pc est la pression hydrostatique capillaire, Pi est la pression hydrostatique intersti-
Optimisation de l'dtat hydrique au cours du SDRA 197
tielle, S est le coefficient de rdflexion oncotique, pc est la pression oncotique capillaire et pi est la pression oncotique interstitielle. La premiere pattie de l'dquation reprdsente le gradient de pression hydrostatique, qui tend ~i faire sortir le liquide des vaisseaux. La seconde partie reprdsente le gradient de pression oncotique, qui s'oppose ~i cette transsudation de liquide. L'influence de la pression oncotique sur le flux liquidien ~ttravers l'endothdlium est modulde par le coefficient de rdflexion oncotique (s), qui reprdsente la permdabilitd de l'endothdlium aux substances oncotiquement actives. Schdmatiquement, deux principaux mdcanismes peuvent concourir ~tl'augmentation de l'eau pulmonaire et dventuellement ~i l'inondation alvdolaire : d'une part l'augmentation de la pression microvasculaire pulmonaire, d'autre part l'augmentation de la permdabilitd de la barri~re alvdolo-capillaire. Au cours du SDRA, l'augmentation de la permdabilitd endothdliale est l'dldment fondamental ?i la formation de l'ced~me pulmonaire (11). Sur un plan hydrodynamique, le coefficient de filtration hydraulique capillaire augmente et le coefficient de rdflexion aux substances oncotiquement actives diminue, voire tend vers zdro dans certaines zones. Ainsi, le gradient de pression oncotique, qui normalement s'oppose ~t la formation d'oed~me, n'intervient plus ou peu. Par consdquent, une augmentation donnde de pression hydrostatique entralnera une augmentation plus importante du flux sortant liquidien si la permdabilitd de la barri~re alvdolo-capillaire est accrue. Ceci a dtd bien illustrd par les travaux expdrimentaux, ddj~t anciens, de Guyton (12), montrant que l'oed~me se forme plus vite et ~tun seuil de pression hydrostatique plus bas lorsqu'on a prdalablement ldsd la barri~re alvdolo-capillaire avant d'augmenter progressivement la pression de l'oreillette gauche (fig. 1). De plus, d'autres travaux expdrimentaux ont montrd qu'une diminution, meme modeste, de la pression capillaire pulmonaire par vasodilatation ou diminution de la voldmie effectude prdcocement dans un module d'ced~me ldsionnel peut limiter la formation d'oed~me pulmonaire (13-15). En clinique, meme si la prdsence d'une pression d'occlusion de l'art~re pulmonaire (POAP) infdrieure ~i 18 mmHg a dtd retenue comme ndcessaire pour poser le diagnostic d'oed~me ldsionnel, elle n'exclut pas qu'il y ait une part hydrostatique ~t cet ced~me, d'autant plus que la POAP sous-estime la pression de filtration capillaire. Si le coefficient de filtration hydraulique capillaire est doubld, la pression hydrostatique critique ne sera plus que de 10 mmHg. Cette notion qu'il n'existe pas de pression capillaire normale en cas d'ced~me de permdabilitd constitue une justification thdorique ~tlimiter la pression de filtra, tion pulmonaire en cas d'oed~me Idsionnel ou chez un patient ~t risque et donc ~t mesurer ou ~t estimer la pression capillaire, qui en est un reflet assez fid~le. La plupart des travaux cliniques ont montrd que la majoritd des patients prdsentant un SDRA ont une POAP supdrieure aux valeurs critiques de pression de filtration lorsque la barri~re est ldsde (tableau I). Sachant que la POAP est infdrieure ~t la pression hydrostatique capillaire, on peut supposer que ces patients prdsentent le plus souvent une pression capillaire au-del~i de la pression critique. Ces hypotheses doivent cependant etre moddrdes par les limites ~t la
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0
10
1
I
. . . . . . . . . . . . . . . I
20 30 40 Pression OG (mmHg)
I
50
Fig. 1 - Accumulation de I ' m & m e pulmonaire en fonction de la pression dans l'oreillette gauche (OG). Lorsque la permdabilitd de la barri~re est normale, l'eau pulmonaire n'augmente pas jusqu'~i 20 m m H g de pression O G car le ddbit lymphatique augmente avec l'augmentation du ddbit de filtration (a). Puis le syst~me lymphatique est saturd et l'eau s'accumule dans les manchons p&ibronchovasculaires (b). Enfin, l'eau pulmonaire augmente plus vite lors de l'inondation alvdolaire (c). Lorsque la barri~re est ldsde, sa perm&bilitd est augment&, I ' m & m e se forme ~i un seuil de pression O G plus bas et se constitue plus vite. D'apr&s Guyton (12).
fiabilitd de la mesure de POAP chez les patients ventilds mdcaniquement, gdndralement avec une PEP dlevde et une rdpartition des zones de West modifide.
Tableau I - Valeurs moyennes de pression artdrielle pulmonaire moyenne (PAPM), de pression capillaire pulmonaire (PCP) et de pression d'occlusion de 'art~re pulmonaire (POAP) dans plusieurs dtudes cliniques ayant dtudid ces 3aram~tres chez des patients en SDRA. n
PAPM
PCP
POAP
D'aprks rdf&ence
15
40 + 2
27 + 2
22 + 1
Collee (16)
10
28 + 1
17 + 1
13 + 1
Radermacher (17)
18
34 + 2
25 + 1
17 + 1
Benzing (18)
7
27 + 3
15 + 1
10 + 1
Rossetti (19)
8
27 + 3
28 + 2
15 + 1
Benzing (20)
Malgrd tout, on voit l'intdret potentiel de limiter la pression microvasculaire pulmonaire au cours de la pdriode ob la permdabilitd de l'endothdlium est augment&. Cependant, ceci est difiqcile ~i envisager en pratique pour plusieurs raisons. La premiere est qu'~t la phase prdcoce de |'agression pulmonaire inflam-
Optimisation de l'dtat hydrique au cours du SDRA 199
matoire, o{i l'oed~me se forme, la stratdgie thdrapeutique est le plus souvent orientde vers la restauration hdmodynamique systdmique, associant remplissage vasculaire et vasopresseurs, ces traitements ayant un objectif assez contradictoire avec la diminution de la pression capillaire pulmonaire. La seconde raison est la difficultd de mesurer ou d'dvaluer la pression de filtration capillaire pulmonaire. Certains facteurs comme la vasopldgie et l'hypovoldmie concourent ~t diminuer la pression capillaire pulmonaire alors que la production locale de mddiateurs vasoconstricteurs ou la ddpression myocardique peuvent l'augmenter. De plus, la pression effective de filtration est la rdsultante complexe des pressions artdriolaire, capillaire et veineuse, toutes trois pouvant etre affectdes par des mddiateurs vasomoteurs ~i effets contradictoires. Au total, garder une pression capillaire pulmonaire basse se conqoit surtout prdcocement, ~i la phase off la permdabilitd est augmentde. En faire un objectif thdrapeutique reste cependant difficile ~i envisager, notamment car la pression capillaire est difficile ~t mesurer.
R sorption et drainage de I'(ed me pulmonaire Comme nous l'avons vu, le SDRA est notamment caractdrisd par un oed~me pulmonaire. L'exc~s d'eau pulmonaire est ~t la fois alvdolaire et interstitiel. La partie de l'eau interstitielle en exc~s et qui ne va pas inonder les alvdoles est en petite partie drainde par le rdseau lymphatique. La partie du liquide qui n'est pas drainde par le rdseau lymphatique, car il est saturd, s'accumule dans le tissu conjonctif l~che pdribronchovasculaire des hiles, qui constitue le premier site d'accumulation de l'oed~me pulmonaire. Ces zones prdsentent une rdsistance tr6s faible fi_ l'dcoulement du fluide et une compliance importante. Ainsi, comme la pression interstitielle reste faible, la rdsorption de l'oed~me interstitiel ne peut pas ou peu se produire par rdabsorption vasculaire pulmonaire, le rdgime de pression restant en faveur d'une transsudation du secteur vasculaire vers l'interstitium. En revanche, le drainage interstitiel ddpendra de la capacitd du ddbit lymphatique ~t augmenter, ainsi que de la capacitd des manchons pdrihilaires ~i se drainer dans le mddiastin et de l'oed~me interstitiel ~i s'dvacuer vers la pl~vre puis le syst~me lymphatique. Ainsi, le drainage de l'oed~me sera augmentd si la pression auriculaire droite diminue et si la pression pleurale est basse. Une lois dans les alvdoles, l'eau est absorbde de l'alvdole vers l'interstitium en suivant un transport ionique actif transdpith~lial qui crde un gradient osmotique menant ~t une rdabsorption d'eau vers l'interstitium (21). Par la suite, cette eau suit le circuit de drainage de l'ced~me interstitiel. Ainsi, la rdsorption de l'ced~me alv~olaire ne se fait pas par un vase communiquant avec la circulation pulmonaire. Au cours du SDRA, le transport actif d'ions et de liquide par l'dpithdlium est altdrd en raison de la rupture de la barri~re alvdolo-capillaire et d'une dysfonction des cellules dpithdliales. La rdabsorption de l'eau ndcessite
200 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
que la fuite liquidienne soit prdalablement rdduite par la diminution de la permdabilitd endothdliale mais aussi possiblement par des modifications de la forme des cellules dpithdliales rendant l'dpithdlium plus solidement impermdable. La clairance liquidienne alvdolaire est altdrde chez une majoritd des patients prdsentant un SDRA et le maintien d'une clairance normale ou son augmentation serait associd ~i un meilleur pronostic (22). Au total, on peut thdoriquement amdliorer la clairance de l'oe&me pulmonaire interstitiel et faciliter les mdcanismes de pr&ention de l'oe&me en diminuant la pression veineuse centrale et en diminuant la pression pleurale. Une stimulation parall~le de la rdsorption de l'oe&me alvdolaire vers l'interstitium pourrait &re compldmentaire.
Restriction hydrique et diur tiques : tudes cliniques et consequences pratiques De ce que nous avons vu plus haut, meme s'il est possible que la limitation de la pression capillaire pulmonaire et la facilitation du drainage de l'oe&me par une restriction hydrique puissent limiter l'oe&me ou en faciliter l'dlimination, on ne sait meme pas s'il y a un quelconque intdret ~i diminuer l'oe&me pulmonaire. Nous verrons ainsi que les donndes actuelles de la litt&ature ne permettent pas d'dtablir que des effets bdndfiques de la restriction passent par un effet sur la fonction pulmonaire. En dehors des th&apeutiques ventilatoires ou des inotropes, on peut thdoriquement diminuer la pression capillaire de deux mani~res, en diminuant la voldmie ou en vasodilatant les vaisseaux pulmonaires. La vasodilatation sdlective pulmonaire, notamment par monoxyde d'azote (NO) inhald ou prostaglandines, a fait l'objet de travaux expdrimentaux dans des mo&les d'oe&me ldsionnel. Dans certains d'entre eux, une diminution de l'eau pulmonaire ou de la permdabilitd endothdliale a pu &re rattachde ~i une baisse de la pression de filtration capillaire (15). Cependant, la plupart des travaux cliniques chez les patients en SDRA front montrd que des effets modestes de ces drogues sur la pression capillaire pulmonaire (17-19) et les dtudes de grande ampleur les plus rdcentes n'ont pas mis en dvidence de bdndfice pronostique ~i l'utilisation systdmatique de N O inhald en cas de ldsion pulmonaire aigue ou de SDRA (23). La restriction hydrique plus ou moins associde fi un traitement diurdtique permet, quant ~i elle, de diminuer la pression capillaire pulmonaire et la pression veineuse centrale. Le probl~me de la restriction hydrique est qu'elle est souvent difficile en raison de l'dtat hdmodynamique souvent prdcaire des patients. Jusqu'~i rdcemment, seuls quelques travaux prospectifs avaient dtd mends et avaient suggdrd une diminution de la morbiditd respiratoire en cas de restriction hydrique. En 1990, Humphrey et al. (24) ont suggdrd que la dimi-
Optimisation de l'dtat hydrique au cours du SDRA 201
nution interventionelle de la POAP chez les patients en SDRA amdliorait la mortalitd. Ce travail prdsentait cependant de tr~s nombreuses limitations. Dans un dchantillon tr~s limitd dtudid de fagon r&rospective, les auteurs montraient que chez les patients chez qui on rdussissait ~i faire baisser la POAP de 25 %, la mortalitd dtait plus basse que chez ceux chez qui on n'y arrivait pas. En aucun cas le lien entre diminution de POAP et pronostic ne pouvait etre dtabli. En 1992, Mitchell et al. (7) ont randomisd 101 patients de rdanimation. Chez 52 patients, l'hydratation dtait basde sur la mesure de l'eau pulmonaire par double dilution et 49 patients dtaient monitor& par cathdter arteriel pulmonaire et POAP. Dans le groupe monitord par mesure de l'eau, la stratdgie d'hydratation dtait basde sur une restriction des apports hydriques associde ~i l'usage de vasopresseurs si l'eau dtait supdrieure ~i 7 mL.kg 1 ou sur un remplissage prdfdrentiel en cas d'eau pulmonaire basse, alors que dans l'autre groupe, l'objectif de POAP dtait de 10 m m H g si l'hdmodynamique dtait normale, 18 m m H g en cas d'hypotension. Au-del~i de ces chiffres, on utilisait des vasopresseurs ou des vasodilatateurs en fonction de la tension, en dessous on privildgiait le remplissage. La stratdgie basde sur la recherche d'une eau pulmonaire basse a rdsultd en une durde de ventilation et de sdjour en rdanimation plus courte qu'en cas de stratdgie basde sur la POAP. Le bilan hydrique cumuld sur les trois premiers jours dtait de + 2 litres dans le groupe ~ POAP ,, alors qu'il dtait nul dans le groupe ~ eau pulmonaire ,,, dans lequel la POAP a aussi significativement diminud. L'eau pulmonaire a diminud de 25 % dans le groupe ,, eau pulmonaire ,, alors qu'elle n'a pas changd dans l'autre groupe, sugg&ant que c'est bien sur la diminution de l'eau pulmonaire que la restriction hydrique a agi et a influencd le pronostic. I1 n ' y a pas eu d'augmentation des besoins en vasopresseurs. En plus de montrer l'intdr& d'un bilan hydrique nul par restriction hydrique en cas de SDRA, cette dtude suggdrait que la mesure de l'eau pulmonaire pouvait &re utile en clinique et non pas seulement pour la recherche. I1 est ~ noter que cette dtude est la seule ~i avoir fortement suggdrd qu'une stratdgie de balance hydrique nulle amdliore la morbiditd des patients par l'intermddiaire d'un effet pulmonaire, ici sur l'oe&me. Une de ses limites notables &ait un ~_gesignificativement plus dlevd dans le groupe monitord par la POAP. Paradoxalement, ce n'est que rdcemment qu'un essai multicentrique randomisd a dtd mend sur l'int&& de la restriction hydrique (25). Cette &ude, aussi appeld FACTT, pour fluid and catheter treatment triaa a dvalud une stratdgie de restriction hydrique plus ou moins associde ~_un traitement diur&ique, prescrit en l'absence d'hypotension et d'insufiqsance rdnale chez des patients en ldsion pulmonaire aigue ou en SDRA. Les patients dtaignt indus dans l'&ude environ 48 heures apr~s leur admission en rdanimation. La d&ision de remplir ou de diur&iquer le patient dtait fonction de l'existence d'une oligurie et du niveau de pression veineuse centrale ou de pression art&idle pulmonaire d'occlusion. Schdmatiquement, le but dtait d'obtenir une PVC de 8 m m H g ou moins dans le groupe ,~ restriction ,, ou de 14 m m H g dans le groupe , lib&al ,,. Chez les patients monitor& par un cathdter artdriel pulmonaire, les objectifs de POAP
202 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
dtaient de 12 mmHg dans le groupe ,, restriction ,, et de 18 mmHg dans le groupe ,~ libdral ,,. Le protocole dtait suivi pendant 7 jours apr~s l'inclusion du patient, mais n'dtait plus suivi en cas d'hypotension. La stratdgie restrictive a rdsultd en un bilan hydrique nul sur 7 jours alors que le bilan hydrique dans le groupe libdral dtait de + 6 litres sur 7 jours. La stratdgie restrictive a discr~etement amdliord l'oxygdnation des patients et a augmentd le nombre de jours sans ventilation (14,6 + 0,5 vs 12 + 0,5, p < 0,001) mais sans influencer la mortalitd ~t 60 jours, qui dtait l'objectif principal de l'dtude. Cette dtude a confirmd l'impression que la limitation des apports hydriques chez les patients en ddfaillance respiratoire isolde pouvait limiter la morbiditd respiratoire sans aggraver les autres dysfonctions d'organes. Cependant, l'exclusion des patients hdmodynamiquement instables ou avec une insuffisance rdnale rend impossible la gdndralisation de ces rdsultats et d'en faire un ~ gold standard ~ pour la gestion de l'dtat hydrique de tout patient en SDRA. De plus, l'absence d'effet sur la mortalitd nous rappelle que la gestion des apports hydriques chez les patients de rdanimation ne se rdsume pas ~l etre libdral ou restrictif. Chez la plupart des patients, le SDRA s'inscrit dans le cadre d'une inflammation systdmique prdcoce et gdndralisde, responsable d'une dysfonction hdmodynamique. A ce stade, la restauration hdmodynamique basde sur un remplissage prdcoce constitue une des pierres angulaires de l'amdlioration du pronostic (1). Ce ffest qu'une fois passde la phase initiale d'instabilitd qu'une politique d'apport hydrique raisonnable visant un bilan hydrique nul peut contribuer ~tdiminuer la durde de ventilation et de sdjour des patients (26). Au vu de la littdrature, il est possible que l'effet bdndfique de la restriction passe aussi par des mdcanismes extra-respiratoires. Ainsi, les patients traitds de mani~re restrictive dans l'dtude FACTT (25) prdsentaient un statut neurologique meilleur, peut-etre parce que les patients dtaient ddsddatds plus t6t car ayant un meilleur dtat respiratoire, peut-etre aussi parce qu'ils ont pu avoir un oed~me cdrdbral moins important. De meme, les patients traitds de mani~re restrictive recevaient moins de transfusions, dont on sait le r61e ddldt~re potentiel en rdanimation (27). Une version simplifide de l'algorythme utilisd dans l'dtude FACTT a dtd publide par I'ARDS Network et commentd darts une revue rdcente sur le sujet (28).
Modulation de la pression oncotique : effets de I'administration d'albumine D'un point de vue hydrodynamique, en cas de baisse de la pression oncotique plasmatique, illustr~e en clinique par l'hypoprotiddmie/l'hypoalbumin~mie, l'oed~me pulmonaire se forme ~i une pression hydrostatique plus basse, car le gradient de pression oncotique entre plasma et interstitium diminue. Ainsi, expdrimentalement, alors que l'oed~me commence ~i une pression de l'oreillette gauche de 24 mmHg lorsque la pression oncotique est normale, il commence d~s 11 mmHg lorsqu'elle est rdduite (12). L'hypoprotiddmie facilite donc
Optimisation de l'dtat hydrique au cours du SDRA 203
l'oe&me pulmonaire hydrostatique. Ceci est potentiellement important chez les patients en rdanimation chez qui l'hdmodilution et le catabolisme s'associent pour diminuer la protiddmie. Cependant, l'importance de la pression oncotique dans la limitation du flux ne se congoit que si la barri~re est intacte. En cas de ldsion endothdliale, l'oe&me interstitiel sera d'autant plus riche en protdines que le plasma le sera, limitant thdoriquement l'int&& d'augmenter la pression oncotique plasmatique. Ainsi, dans des mo&les animaux, l'augmentation de pression oncotique ~l la phase prdcoce d'un oe&me ldsionnel ne se |imite pas ~i la formation d'oe&me (13). En analysant une cohorte de 455 patients septiques, donc ~i risque de SDRA, Mangialardi et aL (29) ont trouvd que l'hypoprotiddmie dtait un prddicteur ind& pendant de survenue de SDRA. Par la suite, la m~me dquipe (30) a dvalud l'int&& d'une stratdgie de traitement diurdtique associd ?i un remplissage par albumine chez des patients en SDRA ayant une protiddmie inf&ieure ?i 50 g/L. Trente sept patients ont dtd indus, 19 recevant l'association d'albumine (75 g/j) et de furos& mide pendant 5 jours, et 18 recevant des placebos. Lorsque la protiddmie dtait sup&ieure ~i60 g/L dans le groupe traitd, les traitements dtaient remplacds par des placebos. La perfusion continue de furosdmide dtait ajustde pour obtenir une perte de poids d'au moins 1 kg par jour sans ddpasser 8 mg/heure de furosdmide. Dans le groupe traitd, les patients ont prdsentd un rapport PaO2/FiO2 discr~tement et transitoirement meilleur que dans le groupe placebo, sans autre effet bdndfique ou ddldt~re, notamment sur la fonction rdnale. Dans un second travail (31) et afin de distinguer les effets de l'albumine et des diur&iques, les memes auteurs ont randomisd 40 patients, 20 recevant du furosdmide seul, les 20 autres recevant furosdmide et albumine (75 g/j) pendant 3 jours. Lorsque la protiddmie &ait sup& rieure ~i 80 g/L dans le groupe traitd, l'albumine dtait remplacde par un placebo. L'albumindmie a augmentd de 13 g/L dans le groupe albumine + furosdmide, atteignant 30 g/L en fin de traitement, eta augmentd de 3 g/L dans le groupe furosdmide seul, atteignant 20 g/L en fin de traitement. L~i encore, les effets se rdsumaient ~t une discrete amdlioration de l'oxygdnation lorsque l'albumine dtait associde au traitement diur&ique par rapport au traitement diur&ique seul. Une large &ude randomisde (32) a montrd que le remplissage par albumine dtait dquivalent au remplissage par s&um said chez les patients de rdanimation. ?i l'heure actuelle, les donndes cliniques tr~s limitdes ne permettent pas de recommander l'administration d'albumine dans le but d'amdliorer la fonction pulmonaire et la morbiditd respiratoire chez les patients en SDRA.
Augmenter la r sorption de I'oed me alv olaire : un objectif compl mentaire Cet aspect th&apeutique n'implique pas ~i proprement parler une manipulation de la balance hydrique des patients. I1 m&ite cependant d'etre dvoqud car il montre bien que la rdsorption de l'oe&me alvdolaire ne se fait pas par la
204 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
manipulation des pressions vasculaires, mais passe par la stimulation d'un transport actif d'eau de l'alvdole vers 1'interstitium, ce qui serait compldmentaire des stratdgies favorisant le drainage de l'oed~me interstitiel. Malgrd des Idsions dpithdliales sdv~res, la clairance alvdolaire reste le plus souvent stimulable pharmacologiquement. Plusieurs travaux expdrimentaux ont montrd que l'administration exog~ne d'agonistes de I'AMPc, notamment les [32 agonistes, accdldrait la rdsolution de l'oed~me, qu'il soit hdmodynamique ou ldsionnel (33). L'action des [32 agonistes passe principalement par l'augmentation de la quantitd et de l'activitd des pompes Na/K de la membrane basale et des canaux sodium de la membrane apicale des pneumocytes, dont l'effet est de majorer le gradient de sodium entre alvdole et interstitium, et donc l'absorption d'eau. R~cemment, une ~tude clinique (34) a montrd que l'administration de salbutamol intraveineux ~l la dose 15 lug/kg/h pendant 7 jours chez des patients en SDRA permettait de diminuer la quantitd d'eau pulmonaire mesurde par thermodilution transpulmonaire, sans toutefois affecter l'oxygdnation, la durde de ventilation et le pronostic. Cependant, il s'agissait d'une dtude prdliminaire n'ayant inclus que 40 patients.
Conclusion Un contr61e de l'dtat hydrique des patients en SDRA sans dtat de choc ni insuffisance rdnale, visant ~i obtenir une balance hydrique nulle, augmente significativement le nombre de jours sans ventilation mdcanique (25). En revanche, les patients avec ddfaillance hdmodynamique doivent faire l'objet d'un remplissage vasculaire prdcoce et adaptd (1). Les stratdgies de remplissage agressif et de restriction sont donc compldmentaires et devraient iddalement se succdder dans le temps chez un meme patient dont l'dtat hdmodynamique se stabiliserait progressivement. Actuellement, un traitement par albumine ne semble pas justifid pour limiter l'oed&me pulmonaire et la morbiditd respiratoire.
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Complications infectieuses pulmonaires au cours du SDRA E Vargas et D. Gruson-Vescovali
Introduction Le syndrome de ddtresse respiratoire aigui5 (SDRA) de l'adulte et la pneumonie infectieuse sont dtroitement lids. D'ukne part, la pneumonie est une cause d'alvdolite inflammatoire pouvant elle-meme avoir des crit~res cliniques et biologiques de SDRA dans pros d'un tiers des cas, d'autre part, l'dvolution d'un SDRA peut aussi se compliquer d'une vdritable surinfection pulmonaire. Nous focaliserons notre exposd sur ce dernier type de complications. L'incidence des surinfections pulmonaires survenant au cours de l'dvolution d'un SDRA varie d'une dtude ~i l'autre selon la mdthodologie utilisde. Elle est estimde entre 15 et 76 %, selon les dtudes comportant ou non une vdrification anatomo-pathologique (1-6). L'autopsie de patients ddcddds de SDRA a frdquemment documental une colonisation et/ou une infection bactdrienne secondaire, non diagnostiqude auparavant (2, 4). Ainsi, les complications infectieuses pourraient etre deux fois plus frdquentes en cas de SDRA par rapport aux situations sans SDRA (1). Elles augmenteraient potentiellement la morbiditd du SDRA en provoquant le ddveloppement de complications septiques graves et l'apparition d'autres ddfaillances d'organes (7). Les complications infectieuses seraient favorisdes par les mdcanismes ldsionnels physiopathologiques existant au cours du SDRA ou bien par les ldsions alvdolaires consdcutives ~ila ventilation mdcanique. La surinfection pulmonaire n'est pas surprenante puisqu'il a dtd ddmontrd que les macrophages et les polynucldaires semblaient moins fonctionnels (8, 9). Leur fonction phagocytaire semble etre altdrde lors de toute ventilation mdcanique prolongde, augmentant le risque d'infection associd ~i la durde de la ventilation (8-10). L'oed~me pulmonaire, l'hypoxie, l'acidose, l'inflammation locale, l'dldvation des diastases sont tous des facteurs inhibant la phagocytose, la synth~se de surfactant alvdolaire, la capacitd de migration et la bactdricidie des polynucldaires neutrophiles.
208 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigu~
Ces anomalies favoriseraient le clivage des immunoglobulines et la translocation bactdrienne. Le SDRA survient le plus souvent chez des patients ddj~i hospitalisds, voire ddj~i ventilds m&aniquement depuis plusieurs jours. Certains d'entre eux ont m~me ddj~i re~u des antibiotiques (11). Ces facteurs de risques de pneumonies nosocomiales sont les m~mes que pour les patients sans SDRA qui prdsenteront au cours d'une rdanimation lourde une pneumonie associde ~i la ventilation m&anique. Une seule dtude multicentrique a analysd les facteurs de risque d'acquisition d'une surinfection pulmonaire au cours de l'dvolution d'un SDRA sur 134 patients (12). Dans cette dtude, les patients atteints de SDRA dont l'dvolution s'est compliqude d'une pneumonie nosocomiale avaient exactement les m~mes caract&istiques cliniques et biologiques que les patients avec SDRA qui n'ont pas ddveloppd d'infection : &iologie du SDRA, scores de gravitd ou de ddfaillances d'organes, antibiothdrapie antdrieure, ratio PaO2/FiO2, compliance statique, pression de plateau. Si la surinfection pulmonaire semble &re favorisde par les ldsions alvdolaires du SDRA et de son traitement, son incidence est certainement sous-estimde, en partie par la difficultd diagnostique.
Diagnostic clinique Les signes cliniques d'une pneumonie nosocomiale compliquant l'dvolution d'un SDRA ne sont pas plus spdcifiques que ceux prdsents lors d'une pneumonie associde ~l la ventilation mdcanique en dehors d'un contexte de SDRA (1). La fi~vre, les expectorations purulentes, l'auscultation pulmonaire anormale sont souvent prdsentes en dehors de toute infection. Un syndrome de rdponse inflammatoire systdmique souvent associd au SDRA rend difficile l'interprdtation de la fi~vre et de l'hyperleucocytose sanguine..La radio de thorax en position demi-assise semble ddj~i bien souvent anormale pour visualiser de nouvelles images. Les anomalies radiologiques prd-existantes rendent moins dvidente la suspicion de pneumonie associde. Les signes radiologiques, souvent diffus, persistent un long moment quelle que soit l'dvolution du SDRA. Le scanner thoracique n'a pas dtd dvalud avec un objectif de diagnostic de surinfection pulmonaire. I1 semble certain qu'en utilisant seulement les crit~res cliniques, biologiques et radiologiques, un diagnostic de pneumonie nosocomiale survenant lors de l'dvolution d'un SDRA pourrait &re rdalisd par exc~s. Ndanmoins, il faut bien avoir des signes de suspicion d'infection pulmonaire. Au chevet d'un patient traitd pour un SDRA, les crit~res cliniques et biologiques de suspicion de pneumonie acquise sous ventilation mdcanique (PAVM) restent les m~mes qu'en dehors d'un contexte de SDRA : prdsence de trois des quatre crit~res suivants : fi~vre > 38,3 ~ leucocytes sanguins > 10 O00/mm 3, sdcr~tions trachdales purulentes ou apparition d'une nouvelle opacitd alvdolaire. Une abondance et une purulence des sdcr&ions trachdales, une diminution du ratio
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PaO2/FiO2 ou une nouvelle image radiologique sont prdsentes dans moins d'un cas sur deux avec complications infectieuses pulmonaires de SDRA (7). Les param~tres ventilatoires ne sont pas couramment utilisds dans l'dvaluation des PAVM. De mani~re intuitive, on pourrait s'attendre ~i ce que le ddveloppement d'une PAVM induise des modifications notables en termes d'oxygdnation, de pressions ou de volumes. Dennesen et al. ont recueilli les caractdristiques ventilatoires (mode ventilatoire, volume courant, volume minute, pression de crete, pression moyenne, niveau de pression expiratoire positive et ratio PaO2/FiO2) le jour du diagnostic de PAVM, ainsi qu'au cours des deux et quatre jours prdcddents (13). Trente-trois patients ayant ddveloppd une PAVM dtaient compards ~i 33 patients contr61es apparids. Seule une ldg~re diffdrence d'oxygdnation (PaO2/FiO2 ~i218 vs 264 mmHg) dtait constatde, mais seulement le jour du diagnostic. Aucun autre crit~re ventilatoire ne diffdrait entre PAVM et contr61es aux temps dtudids. La valeur prddictive positive d'une nouvelle image radiologique ou d'une ddsaturation dtait voisine de 60 %. Ainsi, les caractdristiques de la ventilation mdcanique ne semblent pas 8tre influencdes par le ddveloppement d'une PAVM. L'analyse de ces variables peut donc difficilement 8tre prise en considdration en termes d'argument diagnostique. Le clinical pulmonary infection score (CPlS) n'a pas dtd dvalud spdcifiquement au cours de la suspicion de pneumonie nosocomiale au cours du SDRA. I1 combine des informations cliniques mais aussi des caract~res subjectifs (tempdrature, nombre de leucocytes, volume et aspect des sdcrdtions, param~tre d'oxygdnation), radiologiques et bactdriologiques (tableau I) (14). Une valeur de ce score supdrieure ~ six permet de prddire une pneumonie avec une sensibilitd de 72-85 % (15, 16). I2incorporation de ce syst~me de notation dans un algorithme clinique de diagnostic a permis de rdduire sensiblement la prescription d'antibiotiques (17). Cependant, ce score a plusieurs inconvdnients. Son utilisation a dtd validde par un nombre restreint d'dtudes et un nombre restreint de patients (14, 15, 18). Enfin, sa spdcificitd est relativement faible, conduisant ~iun traitement antibiotique inutile chez plus de la moitid des patients (19). Un score supdrieur ou dgal ~i 6 a dtd tout de m~me utilisd dans les crit~res de ddfinition d'une suspicion d'infection pulmonaire au cours de SDRA dans la mdthodologie d'au moins une dtude comportant des patients avec SDRA (20). En r~gle gdndrale, pour le diagnostic d'une PAVM, la stratdgie de n'utiliser que les crit~res cliniques a l'avantage de ne pas passer ~i c6td d'un patient ayant besoin d'un traitement et de ne pas avoir recours ~i des techniques de prdl~vements bactdriologiques. Cette attitude a malheureusement conduit ~i une surestimation des diagnostics de pneumonie et fi une consommation excessive d'antibiotiques inutiles. Elle ne devrait plus etre utilisde seule. Du fait d'une sensibilitd et d'une spdcificitd encore plus faibles en prdsence d'un SDRA, les signes cliniques et biologiques sanguins de pneumonie nosocomiale ne peuvent raisonnablement pas suffire au diagnostic. A partir du moment oft ces signes existent, la rdalisation de procddures microbiologiques spdcialisdes, incluant des cultures quantitatives, semblent incontournables.
210 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigu~
Tableau I - Score clinique de pneumonie CPIS ( clinical pulmonary infection score). Temp6rature (~ Entre 36,5 et 38, 4 Entre 38,5 et 38,9 > 39 et < 36
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Globules blancs (/mm 3) Entre 4 000 et 11 000 < 4 0 0 0 o u > 11000 Formes immatures ~ 50 %
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S&r~tions trach~ales Absence de s&r&ion trachdale Prdsence de s&r&ions trachdales non purulentes Prdsence de s&r&ions trachdales purulentes
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Oxygenation : PaO2/FiO2 (mmHg) > 240 ou SDRA < 240 sans SDRA
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Radiographie pulmonaire Pas d'infiltrat Infiltrat diffus Infiltrat localisd
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Progression de l'infaltrat pulmonaire Pas de progression radiologique Progression radiologique
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Culture des aspirations trach6ales Peu de bact&ies pathog~nes poussant en culture ou absence de pousse Beaucoup de bactdries pathog~nes poussant en culture Bact&ies pathog~nes ~i l'examen direct apr~s coloration au Gram
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Diagnostic microbiologique Si le diagnostic de pneumonie nosocomiale est assez difficile en dehors du contexte de SDRA, il l'est encore plus chez un patient atteint de SDRA. Les hdmocultures sont positives dans 8 ~i20 % des cas de PAVM. PrOs de 50 % des patients suspects de PAVM pr6sentant des hdmocultures positives ont un autre foyer infectieux (21). Cet examen semble donc surtout int&essant pour ddpister un deuxi~me foyer infectieux, lorsqu'il existe une discordance entre les micro-organismes isolds dans les hdmocultures et ceux dans les poumons. Le rendement des hdmocultures n'a pas ~t~ sp&ifiquement analys~ lors de suspicion de surinfection pulmonaire au cours du SDRA. Leur rdalisation reste tout de mSme indispensable. Plusieurs techniques bactdriologiques quantitatives ont dtd largement &udi&s lors de suspicion de PAVM. Les plus satisfaisantes semblent &re les plus distales, moins contamin&s par la colonisation trachdo-bronchique obligatoire de tout patient sous ventilation m&anique. Le lavage bronchioloalvdolaire (LBA), la brosse tdlescopique dirig& protdg& (BDP), le cath&er protdgd, avec l'aide ou
Complications infectieuses pulmonaires au cours du SDRA 211
non de la fibroscopie sont utilisds en routine. Toute approche diagnostique, queUe qu'elle soit, a ses propres limites. M~:me l'utilisation des mdthodes considdrdes les plus sensibles et les plus spdcifiques, tels l'examen direct et les cultures quantitatives de LBA ou de la BDP, ne peut pas empecher un taux de faux ndgatifs ou de faux positifs d'environ 10-30 % (2, 7). Face ~iune suspicion de PAVM, quel que soit le contexte, les techniques diagnostiques considdrdes <, invasives >, permettent d'amdliorer l'identification des patients rdellement infectds en les distinguant des patients seulement colonisds. Ces stratdgies invasives entrent dans une ddmarche de bon usage des antibiotiques en rdanimation puisqu'elles facilitent la ddcision de ddbuter ou non un traitement par antibiotiques et amdliorent le choix de l'antibiothdrapie empirique initiale. Quelques dtudes ont meme ddmontr6 qu'eUes avaient un impact favorable sur le devenir des patients infectds (22-24). Un prdl~vement invasif par BDP ou LBA a fait sa preuve dans le diagnostic de PAVM, dans l'amdlioration de la survie au 14~jour de pneumonie et dans la moindre utilisation d'antibiothdrapies inutiles (24). La prdsence de bactdries dans l'arbre trachdo-bronchique peut etre le tdmoin aussi bien d'une probable infection pulmonaire que d'une simple colonisation bronchique sans infection du parenchyme pulmonaire. I1 semble dvident que le choix d'une culture non quantitative d'une aspiration trachdale permettrait un prdl~vement plus rapide, non invasif et g~nant moins l'oxygdnation ddj~i difficile d'un patient atteint de SDRA. Une aspiration trachdale simple et une rdalisation d'une culture quantitative a dtd proposde dans le diagnostic de PAVM. L'avantage des techniques non bronchoscopiques est l'absence de besoin de matdriel et de bronchoscopiste. Ceci pourrait avoir un avantage dconomique et les infections croisdes entre patients pourraient etre aussi dvit~es. Le contexte du SDRA ne devrait pas modifier le raisonnement en termes de stratdgie diagnostique. I1 s'agit de patients le plus souvent ventilds mdcaniquement depuis plusieurs jours et le choix d'une technique permettant un acc~s direct aux voies adriennes et au poumon afin d'orienter le prdl~vement dans la zone correspondant ~i une nouvelle image radiologique semble rationnel. Bien stir, dans le SDRA, essentiellement d'origine extrapulmonaire, les images radiologiques sont initialement diffuses et bilatdrales, rendant difficile la visualisation d'une nouveUe image. Chez ces patients, le prdl~vement devrait etre effectud dans les segments postdrieurs du lobe infdrieur droit (25, 26). On peut se demander s'il existe une mdthode diagnostique plus addquate au contexte d'une surinfection pulmonaire de SDRA. En effet, les deux mdthodes les plus largement et rigoureusement dtudides que sont la BDP et le LBA, seraient a priori moins facilement rdalisables en cas de patients tr~s hypoxdmiques comme lors de SDRA. Ces deux techniques sont rdalisdes le plus souvent avec l'aide d'une fibroscopie qui pourrait ajouter un risque thdorique de complication d'hypoxdmie majorde. En fait, les risques de la bronchoscopie sont minimes, meme chez le patient tr~s hypoxdmique. L'adjonction d'une curarisation de courte durde sous bonne surveillance permettrait de prdvcnir un dpisode d'hypoxdmie sdv~re. Une dtude conduite chez des patients atteints
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de SDRA montre que ces prdcautions limitent le risque de ddsaturation : une saturation infdrieure ~i 90 % ne fut observde que chez 5 % des patients (27). Peu d'dtudes ont analysd la toldrance des techniques bronchoscopiques et non bronchoscopiques au cours du SDRA (26, 28). Une rdcente analyse anglaise a compard ces deux techniques lors d'une dtude randomisde en cross over (29). Lors d'une suspicion de PAVM, chaque patient avec SDRA allait avoir deux LBA : l'un avec endoscopie et l'autre sans. L'ordre de rdalisation dtait randomis~. Chacune des deux procedures dtait sdparde d'une heure. Les auteurs anglais n'ont pas fait de bronchoscopie en cas de SpO2 < 90 % avec une FiO 2 80 %. Un LBA dtait rdalisd avec trois aliquots de 50 mL chacun de sdrum sald isotonique par une technique endoscopique classique et, en l'absence de fibroscopie, par un cathdter (diamStre de 4 mm et longueur de 60 cm). Les patients dtaient mis sous FiO2 100 % et avaient une sddation pour un objectif de score de Ramsay ~i 6. Les param~tres hdmodynamiques et ventilatoires avaient dtd rdpertorids durant la procddure et dans l'heure suivante. La durde de rdalisation du LBA dtait plus longue de quatre minutes en moyenne si l'endoscopie dtait utilisde. Durant la procddure bronchoscopique, la frdquence cardiaque et la pression artdrielle systolique s'dlevaient plus significativement, avec l'apparition de troubles de la repolarisation. La ventilation mdcanique dtait rdduite de 60 % en moyenne avec l'endoscopie contre seulement 36 % sans endoscopie (p < 0,001). Meme si le nombre de patients inclus dtait faible, cette dtude a permis de confirmer que les techniques non endoscopiques avaient tout de m8me moins de consdquences ventilatoires et hdmodynamiques et qu'elles prenaient moins de temps. Dans une autre dtude, Steinberg et al. ont confirmd une chute des volumes ventilds et un ddrecrutement avoisinant les 50 % (27). Cette diffdrence semble 8tre expliqude par le plus gros diam~tre du fibroscope et par une aspiration plus forte. Les ddsaturations avaient dtd estimdes fi 2 % dans l'dtude de Perkins et al. (29), plus frdquemment dans le groupe endoscopie. Lors de ces travaux, l'absence d'utilisation systdmatique de curares durant la procddure pourrait 8tre une explication de l'augmentation des risques mineurs des techniques utilisant l'endoscopie. M~me si la toldrance des examens diagnostiques n'~tait pas l'objectif primaire, plusieurs limites aux prdl~vements invasifs avaient dtd fixdes dans la mdthodologie des rares dtudes sur la surinfection pulmonaire des SDRA. Ainsi, Chastre et al. avaient exclu du groupe de patients allant bdndficier d'un LBA avec endoscopie tout patient ayant un ratio PaO2/FiO2 < 70 mmHg (30). La frdquence des complications de ddsaturation per fibroscopie dtait mineure : deux dpisodes/56 patients. Certains auteurs, comme l'dquipe de Meduri, ont m8me analysd le bdndfice de la rdalisation d'un LBA bilatdral chez 111 patients avec SDRA (31). I1 s'agit ndanmoins de l'dtude qui rapporte le plus de complications, m8me si le taux de 8 % s'est avdrd faible. Les auteurs ont ddcrit un arret cardiaque, trois bradycardies et six ddsaturations. Aucun ratio PaO2/FiO2 n'est citd dans la mdthodologie limitant la procddure de l'endoscopie bronchique. Dans une autre dtude, Bauer et al. ont rapportd un faible taux de complications :six cas/55 patients. Le ratio PaO2/FiO2 moyen dtait de 100 (20). L'dtude
Complications infectieuses pulmonaires au cours du SDRA 213
dtait en fait une analyse microbiologique et ne donnait aucun ddtail des paramdtres d'oxygdnation durant la procddure. Au total, la technique non endoscopique semble n'apporter que de modestes avantages lorsque celle-ci est comparde raisonnablement fi une seul LBA. Le choix de l'utilisation ou non d'un fibroscope est soumis aux limites du ratio PaOe/FiO2 que l'on se fixe. Aucun seuil particulier de ratio PaO2/FiO2 n'est admis pour la rdalisation d'une technique invasive de diagnostic de surinfection pulmonaire lors d'un SDRA. I1 semble ndanmoins que celui ci-soit situd entre 70 et 100 mmHg. Sur le plan du rendement diagnostique, la sensibilitd et la spdcificitd semblent comparables entre les techniques invasives avec ou sans endoscopie. Le LBA dchantillonne un plus large territoire pulmonaire que les autres techniques. I1 ndcessite une technique fibroscopique de bonne qualitd pour dviter la contamination du liquide obtenu et assurer une localisation correcte du fibroscope. Cela ndcessite une injection d'au moins 120 mL de sdrum sald en trois ~i six dchantillons. Le LBA permet une analyse rapide par un examen direct apr~s coloration du liquide recueilli. La BDP est un cath&er ~i double lumi~re ayant l'avantage d'dviter rdellement toute contamination lors du prdl~vement. Dans une stratdgie diagnostique bactdriologique d'une PAVM, d'autres techniques de prdl~vements non bronchoscopiques, fi l'aveugle, permettent un recueil du poumon profond.
Quelles sont les m thodes diagnostiques au cours du SDRA les plus utilis es et valu es dans ia litt rature ? Lors d'une dtude de Sutherland et al. sur 105 patients atteints de SDRA, l'incidence de pneumonie nosocomiale dtait faible : 15 % (32). Cette incidence faible pouvait &re expliqude par l'antibiothdrapie empirique introduite dans cette dtude avant la rdalisation du LBA lors de 179/201 cas. Pour qu'un prdl~vement distal protdgd soit sensible et spdcifique de pneumonie nosocomiale, il ne faut pas qu'une antibiothdrapie soit changde ou administrde avant celui-ci. M8me une seule dose d'antibiotique peut engendrer un rdsultat faussement ndgatif des examens microbiologiques (direct ou culture) (33). Une autre limite de cette dtude dtait que les prdl~vements alvdolaires avaient dtd rdalisds ~i des dates prdddtermindes entre j3 et j21 de l'dvolution du SDRA, et non au moment de la suspicion clinique d'une pneumonie acquise sous ventilation mdcanique. L'dquipe de Chastre a permis le diagnostic par la BDP et le LBA chez 50 % des 56 patients atteints de SDRA (30). Les auteurs avaient rdalisd sous fibroscopie un LBA (avec examen direct et culture bactdrienne) et une BDP ~i partir du moment off le ratio PaO2/FiO2 dtait supdrieur ~i 70 mmHg et en l'absence de trouble hdmodynamique. Ils n'avaient pas ddcrit de corrdlation entre la
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survie ou la sdvdritd du SDRA (PaO2/FiO2, durde de ventilation mdcanique, compliance statique pulmonaire) et les rdsultats des prdl&vements alvdolaires. En utilisant une mdthode rigoureuse de diagnostic, l'incidence des pneumonies nosocomiales serait ainsi plus dlevde (multiplide par deux) chez les patients atteints de SDRA par rapport aux patients sans SDRA. La complication infectieuse pulmonaire surviendrait plut6t au cours de la deuxi~me semaine d'dvolution du SDRA (30). L'dtude de Chastre est la seule analyse rdalisant systdmatiquement un examen direct du LBA § une culture du recueil de LBA § une BDP. I1 semble exister une bonne corrdlation entre ces trois types d'examen microbiologique, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif. Pour la moitid des dpisodes infectieux, la culture de la brosse, celle du LBA, et l'examen direct du LBA donnent des rdsultats cohdrents. Pour l'autre moitid, deux des trois examens ont eu des rdsultats cohdrents. La difficultd par rapport ?i un patient sans SDRA est que l'apparition d'images nouvelles puisse etre masqude par les images bilatdrales diffuses ddj~i prdsentes du fait du SDRA. En termes de procddure invasive diagnostique : alors, quel c6td pulmonaire investiguer ? Meduri et al. ont utilisd le LBA par endoscopie bilatdrale pour diagnostiquer une PAVM compliquant un SDRA chez 111 patients. Le fibroscope dtait nettoyd entre les deux gestes : l'extdrieur par de l'alcool et l'intdrieur par de l'eau stdrile. Les auteurs retrouvent une incidence de pneumonie de 43 % chez 94 patients (31). Parmi les LBA positifs, 60 % ne l'dtaient que d'un c6td. Le taux de faux ndgatifs variait de 26 ~i 32 %. Les dpisodes infectieux avec rdsultats positifs bilatdraux dtaient le plus souvent polymicrobiens. Parmi les patients avec un rdsultat positif des deux c6tds : l'addquation des rdsultats entre les deux c6tds dtait de 82 %. Dans cette dtude, le taux des leucocytes dans le LBA dtait significativement plus dlevd en cas de complications infectieuses pulmonaires : 67 vs 60 %. L'intdret de la rdalisation d'un LBA des deux c6tds pulmonaires en pratique de routine face ~i une suspicion de pneumonie acquise compliquant un SDRA, ne semble pas ndanmoins prouvd par cette dtude prospective monocentrique amdricaine. Une dtude multicentrique regroupant onze centres frangais a analysd l'incidence et les facteurs de risques d'une surinfection pulmonaire chez des patients atteints de SDRA (ratio PaO2/FiO2 moyen ~i 113 mmHg), dont le diagnostic avait dtd fait dans les 72 heures (12). Face ~i une suspicion clinique de pneumonie (crit~res classiques), une fibroscopie bronchique avec un LBA ou une BDP ou bien un pr~l~vement distal prot~gd dtaient rdalisds. L'analyse ne s'~tait pas rdellement focalisde sur les pratiques diagnostiques microbiologiques mais plus sur les facteurs de risque d'acquisition d'une pneumonie et l'impact sur la survie des patients avec SDRA. De meme, aucune analyse de toldrance et d'incidents au cours de la procddure diagnostique invasive n'avait dtd rdalisde dans cette dtude multicentrique. Toujours est-il que sur plus de 130 patients inclus, 73 dpisodes de pneumonies ont dtd rdpertorids, avec une plus grande fraction de PAVM tardives (> 5e jour d'dvolution) (12). Les auteurs insistaient sur l'importance d'un prdl~vement protdgd le plus distal possible pour une meilleure spdcificitd de la culture bactdriologique.
Complications infectieuses pulmonaires au cours du SDRA 215
Dans une &ude barcelonaise, une BDP per fibroscopie a dtd rdalisde chez 55 patients avec SDRA d'origine extrapulmonaire le plus souvent (20)' Les auteurs ont mSme rdalisd une brosse de chaque c6td pulmonaire au cours de la mSme fibroscopie. La culture microbiologique de ces deux brosses a dtd comparde ?i la ,~ simple ,, aspiration trachdale rdalisde juste avant. Les prdl&ements pulmonaires avaient dtd cependant rdalisds systdmatiquement le premier jour de diagnostic de SDRA, pas forcdment lots d'une suspicion de pneumonie acquise. Ainsi, seulement 12 patients sur 55 avaient une suspicion clinique de pneumonie infectieuse lors des prdl~vements. Celle-ci a dtd microbiologiquement confirm& chez seulement sept patients. La plupart des autres patients &aient colonisds &s le premier jour du SDRA, dont un tiers avec des microorganismes potentiellement rdsistants. La concordance entre l'aspiration trachdale et les deux brosses dirigdes protdgdes ne fut pas excellente (~: = 0,43). La culture de l'aspiration trachdale a permis d'iso|er plus de bact&ies que la procddure invasive, surtout des germes potentiellement pathog~nes (entdrobactdries et streptocoques). Le rendement des m&hodes dtait le suivant dans l'&ude : aspiration trachdale 36 %, brosse dirig& ?adroite 16 %, brosse dirig& ~i gauche 25 %, combinaison des deux brosses (effectudes chez 33 patients sur 55) 25 %. Dans cette analyse, une colonisation bactdrienne a dtd diagnostiqude dans plus de 40 % des cas (dont un tiers des cas par des germes potentiellement rdsistants). Malheureusement, dans cette &ude rdcente, plus de la moitid des patients avaient re~;u une nouvelle antibioth&apie dans les 72 heures pr&ddant les procddures diagnostiques microbiologiques. Les auteurs attirent notre attention sur la possible atteinte multifocale de la pneumonie compliquant un SDRA, s'&endant ~i plusieurs parties du poumon et incriminant sans doute plusieurs micro-organismes diffdrents. Cette hypothSse n'a jamais fait l'objet d'analyses sp&ifiqucs. Les rdsultats de l'&ude multicentrique fran~aise avaient rdvdld une incidence de pneumonie polymicrobienne document& de 24 % (12). Les rdsultats du LBA bilatdral dans l'&ude de Meduri et al. suggdraient aussi une incidence d'infection diffuse et polymicrobienne du mSme ordre (31). Ndanmoins, il n'existe pas ~i ce jour d'dtude publide ddmontrant l'int&& majeur de la rdalisation systdmatique de prdlSvements multiples chez les patients ventilds pour SDRA et suspects de surinfection pulmonaire. L'incidence dlevde (66 %) d'une colonisation bronchique antdrieure ?i la pneumonie nosocomiale compliquant le SDRA a dtd ddmontr& par Delclaux et al. (34). En effet, les auteurs ont analysd la colonisation et l'infection bact& riennes chez 30 patients atteints de SDRA, par cultures quantitatives d'dchantillons rdpdtds recueillis par prdlSvements protdgds sdquentiels (toutes les 48-72 heures). Un LBA dtait aussi rdalisd si le rapport PaO2/FiO2 &ait sup& rieur ~i 60 mmHg. L'auteur trouve une incidence de pneumonie nosocomiale de 60 % avec le plus souvent une colonisation ant&ieure par le mSme microorganisme. La durde de ventilation m&anique moyenne avant PAVM &ait de plus de 23 jours. L'int&& de l'analyse de Delclaux et al. (34) est la faisabilitd et le bon rendement d'un prdl~vement distal protdgd avec ou sans fibroscopie
216 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
chez un patient atteint de SDRA, potentiellement tr~s hypoxdmique. M~me si ce prdl~vement ~t l'aveugle n'est pas aussi distal que lors d'une fibroscopie et qu'il va explorer essentiellement le territoire droit pulmonaire, il s'est rdvdld d'une excellente concordance avec les LBA rdalisds au m~me moment. Cette concordance est voisine de 90 %. Ndanmoins, pour le diagnostic de pneumonie acquise sous ventilation, ce type de prdl~vement est moins spdcifique que les autres prdl~vements invasifs et a dtd peu validd dans ce contexte. I1 est cependant largement utilisd en rdanimation off l'endoscopie bronchique n'est pas facilement disponible. Ce prdl~vement distal protdgd avait dtd aussi utilisd pour &aluer et suivre la colonisation bact&ienne entre le premier jour de SDRA et l'dventuelle PAVM. Dans cette dtude, une colonisation bronchique prdcddait l'acquisition de la pneumonie dans pros de 70 % des cas (34). M~me si les rdsultats des dtudes sur la place des marqueurs biologiques sont parfois discordants, selon la nature de la population dtudide et le seuil de concentration retenu, le dosage de la procalcitonine plasmatique semble trouver sa place dans l'aide au diagnostic de nombreux syndromes infectieux sdv~res. En revanche, peu d'&udes ont dtd consacrdes au rendement du dosage sdrique de la procalcitonine au cours de la surinfection pulmonaire. L'utilisation de marqueurs inflammatoires comme le TREM 1 a dtd analysde par l'dquipe Nanc&nne (35). Utilis& chez les patients sous ventilation m&anique, la ddtection rapide de sTREM-1 dans le liquide de lavage alvdolaire apparait utile pour confirmer ou infirmer le diagnostic de pneumonie bactdrienne. Certains des patients inclus avaient un SDRA. Mais il s'agissait de SDRA prdcoces. Aucune autre dtude ne s'est focalisde sur l'int&& des marqueurs biologiques sdriques ou alvdolaires dans le diagnostic des surinfections pulmonaires au cours de SDRA.
I pid miologie bact rienne I1 n'existe pas de diffdrence en terme d'&ologie bactdrienne entre les PAVM survenant chez les patients atteints de SDRA et ceux n'ayant pas de SDRA. L'&ologie est comparable ~itoute PAVM sans contexte de SDRA, mais survenant tardivement, le plus souvent apr~s une semaine de ventilation mdcanique. De m~me, l'&ologie bactdrienne semble comparable aux PAVM survenant chez des patients avec antibioth&apie prdalable (36). Dans les dtudes de Chastre et Delclaux (30, 34), les Pseudomonas sp. et Staphylococcus aureus repr&entaient les deux germes les plus frdquents (20 %). I1 semblait exister plus de Staphylococcus aureus metirdsistant M dans le groupe de patients atteints de SDRA ainsi que plus de bacilles ~t Gram ndgatif r&istants. En fait, l'&ologie bact&ienne est comparable ~t celle largement publide lors des PAVM tardives, survenant apr~s plus de 7 jours de ventilation m&anique (31). La plupart des &udes sur les pneumonies acquises au cours du SDRA ont rdvdld une incidence assez faible de pneumonie prdcoce, moins d'un tiers des cas, survenant avant le 5e jour de venti-
Complications infectieuses pulmonaires au cours du SDRA 217
lation mdcanique. Les bactdries responsables de PAVM chez les patients atteints de SDRA seraient sans doute plus rdsistantes du fait du nombre plus dlevd d'antibiothdrapies antdrieures (administrdes pour la cause du SDRA par exemple). Les bacilles ~i Gram ndgatif non fermentants reprdsentaient pros de 50 % des micro-organismes isolds dans l'analyse multicentrique frangaise (12). Plus de 80 % des Staphylococcus aureus dtaient mdti-rdsistants. Meduri et al. retrouvaient Pseudomonas dans 43 % des LBA positifs (31). Vidaur et al. retrouvaient significativement plus de Pseudomonas dans le groupe de PAVM et SDRA que chez les patients avec PAVM sans SDRA (37). La colonisation et l'infection bactdriennes au cours des premieres 24 heures de l'dvolution d'un SDRA ont dtd rdcemment dvaludes par une dquipe espagnole (20). Lors du suivi de 55 patients avec SDRA, Bauer et al. (20) ont rdalisd une aspiration trachdale et, sous endoscopie, une brosse dirigde protdgde dans les deux champs pulmonaires droit et gauche, avec cultures quantitatives des prdl~vements recueillis. Cette mdthode a permis de diagnostiquer une pneumonie nosocomiale prdsente d~s jl de SDRA dans 13 % des cas. Pseudomonas sp. a dtd le plus frdquemment responsable d'une infection. L'ensemble des procddures diagnostiques d'infection nosocomiale pulmonaire pouvant pdrenniser ou aggraver les crit~res de SDRA peuvent se rdvdler pourtant ndgatives. Ces faux ndgatifs des prdl~vements pulmonaires sont difficiles ~i dvaluer dans la littdrature. L'dquipe de Laurent Papazian a ddmontrd la faisabilitd d'une biopsie chirurgicale au cours du 7 e jour d'dvolution de 100 patients atteints de SDRA non rdsolutif avec un ratio PaO2/FiO2 moyen de 129 mmHg (38). Tous les patients avaient eu un LBA ndgatif avant la biopsie pulmonaire. Si la fibrose dtait confirmde chez 53 patients sur 100, une infection bactdrienne dtait associde dans plus de la moitid des cas. L'intdret de ces biopsies chirurgicales avaient dtd ddjfi ~i plusieurs reprises analysdes auparavant. Bien stir, leurs indications dtaient plus une absence d'amdlioration d'un SDRA que la suspicion d'une pneumonie infectieuse compliquant un SDRA (39, 40).
Incidence des surinfections pulmonaires en fonction des traitements du SDRA Quelques dtudes expdrimentales n'ont pas retrouvd d'effets ddldt~res sur les ldsions alvdolaires dues ~i E. coli en cas d'utilisation d'hypercapnie permissive (41). L'application d'une forte pression alvdolaire pourrait faciliter les translocations bactdriennes entre les alvdoles et les capillaires (42). Ndanmoins, dans un module expdrimental d'infection pulmonaire ~t Pseudomonas aeruginosa, l'application de manoeuvres de recrutement lors d'une ventilation protectrice n'a pas provoqud de translocation (43). Ce rdsultat a dtd confirmd par une autre
218 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigu~
dtude exp&imentale avec des manoeuvres de recrutement limitdes dans le temps (44). Quelques dtudes ont compard la position ventrale au ddcubitus dorsal en termes d'incidence de PAVM. Beuret et al. l'ont compard chez des patients comateux lors d'une analyse randomisde chez 25 patients. L'incidence des PAVM dtaient certes diminude de 18 % dans le groupe ventral, mais sans diff& fence significative (45). Guerin et al., lors d'une dtude multicentrique randomisde &aluant le d&ubitus ventral au cours du SDRA (8 heures/j), rapportaient une diminution significative de PAVM dans le groupe ventral (831413 patients vs 911378 patients, p = 0,04 ; OR = 0,65 [IC95 % : 0,510,83]) (46). Ce rdsultat n'a pas dtd confirmd par l'dtude multicentrique espagnole (47). En effet, 9 patients sur 60 (15 %) en ddcubitus dorsal vs 14176 (18 %) patients en DV ont eu une PAVM (1o= 0,65). I1 est difficile de conclure puisque la prdvention d'acquisition de pneumonies nosocomiales comprend certes des mesures posturales, telle la position demi-assise (position >t 40~ mais aussi de nombreuses autres mesures efficaces. Les corticoYdes ont dtd dvaluds lors de SDRA non rdsolutifs. R&emment, Meduri et al. n'ont pas retrouvd plus de complications infectieuses dans le groupe de patients trait& par m&hylprednisolone, voire un peu moins (48). Ce r&ultat existait aussi dans l'dtude multicentrique d'ARDS network (49).
I volution et Mortalit Ni la colonisation, ni l'infection prouvde n'auraient d'influence sur la mortalitd des patients atteints de SDRA. Ndanmoins, aucune &ude n'a de m&hodologie correcte pour rdpondre ~i une telle question. Dans l'&ude de Chastre et al., la mortalitd des patients ayant une PAVM compliquant un SDRA est identique fi celle des patients ayant une PAVM sans SDRA (52 vs 47 %) (30). Seule la durde de ventilation mdcanique diff&ait. L'&ude multicentrique fran~aise a rapportd un taux de mortalitd de 57 %. I1 n'existait pas de diff&ence de mortalitd des patients atteints de SDRA selon la prdsence ou non de PAVM (12). Peu d'&udes ont analysd les facteurs d'am& lioration d'une PAVM sous traitement en prdsence ou non de SDRA. Une dquipe espagnole a r&emment analysd les param~tres d'amdlioration sous traitement antibiotique empirique de PAVM selon la prdsence associde ou non de SDRA (37). Les auteurs ont analysd plus de 90 patients atteints de PAVM, dont 20 patients avec SDRA. Plus de 70 % des dpisodes de PAVM en dehors d'un contexte de SDRA vont prdsenter une normalisation de la temp&ature et une augmentation du ratio PaO2/FiO2 au-del~i de 250 mmHg dans les trois premiers jours. La normalisation de la leucocytose et la disparition des opacitds radiologiques sont plus tardives. Chez les patients atteints de PAVM compliquant un SDRA, la temp&ature se normalise plus lentement et seulement 30 % d'entre eux avaient une temp&ature < 38 ~ apr~s trois jours de traite-
Complications infectieuses pulmonaires au cours du SDRA 219
ment. Le ratio PaO2/FiO2 est plus difficile ?i analyser meme si, dans cette dtude, il commence ~i s'amdliorer uniquement apr~s une semaine de traitement antibiotique. Dans le groupe de patients avec SDRA, ce ddlai d'amdlioration semble supdrieur ~i une semaine de traitement antibiotique pour la leucocytose et la radiographie pulmonaire.
Conclusion Si la surinfection pulmonaire semble &re favorisde par les Idsions alvdolaires du SDRA et de son traitement, son incidence est certainement sous-estimde, en partie par la difficultd diagnostique. Comme pour toute suspicion de PAVM, les seuls crit~res cliniques et biologiques ne suffisent pas pour le diagnostic positif. La n&essitd d'une stratdgie microbiologique quantitative semble certaine. Aucun type de prdl~vement microbiologique avec culture bact&ienne quantitative n'a ddmontrd sa sup&ioritd. Le ddbat entre prdl~vements invasifs ou non n'est pas moindre dans le contexte de SDRA puisque l'oxygdnation semble vraiment peu perturbde lors des prdl~vements invasifs avec fibroscopie, lorsque la procddure est scrupuleusement et raisonnablement respect&. La survenue d'une surinfection pulmonaire au cours du SDRA, souvent due ?i des micro-organismes potentiellement rdsistants aux antibiotiques, ne semble pas augmenter la mortalitd.
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Fibrose pulmonaire post-agressive J.-M. Forel et S. Y. D o n a t i
Introduction La fibrose pulmonaire post-agressive est l'dvolution possible d'un syndrome de d&resse respiratoire aigu/~ (SDRA) non r&olutif. Elle va venir grever de fagon importante le pronostic du SDRA. L'incidence de cette complication est peu connue, mais les quelques dtudes dans lesqueUes sont rdalisdes des biopsies pulmonaires retrouvent une fibrose dans environ 50 % des cas des SDRA non r&olutifs (1, 2). La physiopathologie et les ddterminants d'une &olution du SDRA vers une fibrose pulmonaire post-agressive sont encore tr~s mal connus mais laissent entrevoir de nouvelles perspectives th&apeutiques. Le diagnostic repose essentiellement sur l'histologie. La corticoth&apie demeure ~i ce jour la seule th&apeutique proposde mais largement discutde.
L~sions pulmonaires, r~paration et fibroproliMration Iors du SDRA
L~sionspulmonairesdu SDRA Quelle que soit l'origine pulmonaire ou extrapulmonaire du SDRA, les ldsions histologiques pulmonaires se prdsentent comme un dommage alvdolaire diffus caract&is6 par la destruction de la barri~re alvdolo-capillaire (3). La destruction des pneumocytes de type I (PI), l'altdration des pneumocytes de type II (PlI), les anomalies de la membrane basale et de la synth~se du surfactant contribuent ~il'activation de processus inflammatoire et de la coagulation avec infiltrats alvdolaire et interstitiel de cellules inflammatoires. Un oe&me alvdolaire riche en protdines est
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prdsent dans l'espace alvdolaire (3). Lors de cet dtat pro-inflammatoire, le recrutement et l'activation des polynucldaires neutrophiles (PMN) sont au premier plan et impliquent plusieurs cytokines dont l'interleukine-8, des diastases et des moldcules d'adhdsion (4). Le ddsdquilibre entre cytokines pro- et anti-inflammatoires pourrait jouer un r61e central dans la sdvdritd du SDRA, les processus de rdparation tissulaire et de fibroprolifdration. )i l'image d'autres processus fibroprolifdratifs pulmonaires (fibrose pulmonaire idiopathique) ou extrapulmonaires, la persistance d'un dtat pro-inflammatoire, en relation avec un processus infectieux ou non, pourrait jouer un r61e ddterminant dans la survenue de la fibrose lors du SDRA (5).
R paration pulmonaire et fibroprolif ration Iors du SDRA La phase prolifdrative ou de rdparation tissulaire se caractdrise par l'organisation de l'exsudat alvdolaire et interstitiel. En rdponse au dommage alvdolaire diffus et la rdaction inflammatoire, les cellules mdsenchymateuses et les myofibroblastes vont envahir le versant dpithdlial et endothdlial de la barri~re alvdolo-capillaire ldsde. L'activation de l'angiogen~se participe dgalement ~ ce processus. L'activation de la coagulation conduit au ddp6t de fibrine qui constitue une matrice extracellulaire (MEC) provisoire. Les PlI, les fibroblastes et myofibroblastes proliferent. La stimulation des fibroblastes et des myofibroblastes aboutit ~i la synth~se de collag~ne et d'autres constituants de la MEC. Une fibrose jeune est visible d~s le 1 0 e jour du SDRA (3). Le succ~s de la rdparation alvdolaire se caractdrise par la rd-dpithdlialisation alvdolaire par diffdrentiation des PlI en PI et la reconstitution d'une architecture alvdolaire normale (6). Classiquement, la phase de rdparation tissulaire fait suite ~ la phase inflammatoire, mais plusieurs travaux ont bien soulignd l'intrication entre ces deux phases. De meme, classiquement tardive, la fibroprolifdration faisant suite ~ la phase prolifdrative est un phdnom~ne tr~s prdcoce lots du SDRA (7). Le procollag~ne III, marqueur de la synth~se du collag~ne III, s'dl~ve dSs les premiers jours du SDRA. Les processus de rdparation cellulaire et tissulaire s'int~grent dans un continuum entre la phase inflammatoire et l'dventuelle dvolution vers la fibrose ou la gudrison. La phase de fibroprolifdration dolt etre envisagde comme un dldment ~ part enti~re du processus de rdparation tissulaire. Plusieurs arguments sugg~rent qu'une dysrdgulation de ce processus fibroprolifdratif lors de la rdparation tissulaire est au coeur de l'dvolution du SDRA vers la fibrose pulmonaire. Les facteurs qui ddterminent l'dvolution du SDRA soit vers la rdparation ad integrum, soit vers la fibrose pulmonaire, sont inconnus.
Pathogen se de la fibrose post-agressive La physiopathologie de la fibrose post-SDRA est complexe et demeure largement mdconnue. Cette mdconnaissance est en partie expliqude par l'absence de modules expdrimentaux de fibrose post-agressive recrdant les conditions du
Fibrose pulmonaire post-agressive 225
SDRA humain apr~s agression pulmonaire directe ou indirecte. Bien qu'dloignd de l'dvolution fibrosante d'un SDRA humain, le module le plus souvent utilisd dans la littdrature est celui de l'exposition fi la bldomycine (8). Par ailleurs, des mdcanismes physiopathologiques communs avec la fibrose pulmonaire idiopathique ou apr~s irradiation ou dans le cadre d'une connectivite existent. L'impact de l'agression pulmonaire lide ~lla ventilation mdcanique sur la fibroprolif~ration demeure ~i ce jour non explord. Les principaux mdcanismes moldculaires impliquds dans la pathogen~se de la fibrose post-agressive sont prdsentds ci-apr~s.
Transforming growth factor-13(TGF-13) Le TGF-~ est un facteur de croissance et de transformation cellulaire capable d'induire la prolifdration des cellules mdsenchymateuses et la synth~se de la matrice extracellulaire (MEC). Des 3 isoformes de TGF-[3 (TGF-[3 1, 2 ou 3), le TGF-[31 semble le plus impliqud dans la physiopathologie de la fibrose pulmonaire. II a dtd montrd dans le module animal de ldsions pulmonaires ~i la bldomycine que la synth~se de TGF-~ prdc~de la production de collag~ne (9). Plus rdcemment, dans un module de ldsion pulmonaire aigue induite par le nickel, Wesselkamper et al. montrent que l'activation des g~nes du TGF-[3 joue un r61e central dans l'installation des ldsions (10). Les zones de production de TGF-131 sont localisdes dans les zones ldsdes et de fibrose histologique. Les cellules sdcrdtrices de TGF-[31 sont nombreuses : cellules dpithdliales bronchiolaires et alvdolaires (pneumocytes), macrophages, cellules endothdliales, fibroblastes, myofibroblastes et polynucldaires dosinophiles (9). Dans un module expdrimental ~i la bldomycine, bien que la production de TGF-[31 soit tr~s importante d~s le 3 e jour, le TGF-[31 est essentiellement prdsent dans les fibroblastes des zones de fibrose pulmonaire ~i partir du 8~ jour apr~s l'exposition ~i la bldomycine (11). TGF-[31 stimule la prolifdration et le recrutement des fibroblastes, permet la diffdrentiation des fibroblastes en myofibroblastes, induit la synth~se de la MEC en exergant un r61e de promoteur sur les g~nes des collag~nes I, III, IV, V, de la fibronectine et des protdoglycanes (9). TGF131 stimule l'angiogen~se et inhibe les mdtalloprotd'/nases matricielles et les activateurs du plasminogdne. Budinger et al. ont montrd que les taux alvdolaires de TGF-131 sont dlevds ~i la phase initiale du SDRA et que le liquide alvdolaire issu de ces malades active in vitro le promoteur du g~ne du collag~ne I (12). Lors de l'dvolution de la ldsion pulmonaire aigue, une sdcrdtion autocrine et un rdtrocontr61e positif du TGF-~3 sur sa propre sdcrdtion sont ddmontrds. En outre, le TGF-[3 pourrait activer des signaux de survie antiapoptotique pour les fibroblastes. La surexpression du g~ne du TGF-[31 entralne une fibrose sdv~re chez l'animal. Les modules permettant un blocage (total ou partiel) de l'activitd du TGF-~31 ont montrd la possibilitd de prdvention ou de rdduction des ldsions de SDRA mais aussi de fibrose induite par la bldomycine (9). Le TGF-131, en se fixant sur un rdcepteur spdcifique, entraine
226 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
l'activation de la voie de signalisation cellulaire Smad3. Cette voie Smad3 apparalt d&erminante dans le contr61e de la fibrose, son inactivation permettant une inhibition du processus fibroprolifdratif dans plusieurs mo&les animaux (radiation, bldomycine) (13). I1 faut noter dgalement que la liaison ~i l'intdgrine 0~v136, fortement exprimde sur les cellules dpithdliales lors de la phase inflammatoire, permet l'activation du TGF-]31. Signalons qu'une vole de signalisation du TGF-[3 inddpendante de Smad-3 et faisant intervenir cAbelson tyrosine kinase (c-Abl) a dtd r&emment ddcrite (14). L'inhibition de c-Abl par l'imatinib mesylate rdduit les ldsions de fibrose induite dans le mo&le animal ~t la bldomycine (15). Par ailleurs, le facteur de transcription peraxysam praliferator-activated receptor ~ (PPAR7) constitue une autre voie de rdgulation du TGF-[3 en investigation. I1 a dtd montrd sur des cultures de fibroblastes pulmonaires que les agonistes de PPAR7 (ddrivd de la prostaglandine D2 et thiazolidinediones) inhibent la diff&entiation des myofibroblastes et la production de collag~ne induite par le TGF-[3 (16). L'implication du TGF-[3 lors du processus normal de rdparation tissulaire est en faveur d'une anomalie de sa rdgulation lors de l'&olution du SDRA vers la fibrose.
Autres facteurs de croissance D'autres facteurs de croissance interviennent dans la rdgulation de la rdparation pulmonaire et dans la fibrose pulmonaire. Le keratinocyte growth factor (KGF ou fibroblast growth factor-7) et l'hepatocyte growth factor (HGF) reprdsentent de puissant facteurs mitogdniques sur les PlI (17). Le KGF, essentiellement sdcrdtd dans le poumon par les fibroblastes, induit la prolifdration des PlI et leur transdiffdrenciation en PI. Plusieurs mo&les expdrimentaux objectivent un effet protecteur du KGF sur les ldsions pulmonaires inflammatoires et celles de fibrose lorsque le KGF est administrd avant l'agression pulmonaire. KGF inhibe l'apoptose des pneumocytes et active le signal de survie rdguld par PI3FUAkt (18). Toutefois, son implication lors de la phase fibroprolif&ative du SDRA reste largement mdconnue. L'HGF poss&de un effet protecteur sur les ldsions pulmonaires inflammatoires et sur la fibrose dans des mo&les expdrimentaux avec prd- et post-traitement. La sdcrdtion d'HGF par les polynucldaires neutrophiles pourrait jouer un r61e positif dans la rdparation dpithdliale alvdolaire en entrainant une prolifdration des PlI. Chez le rat recevant de la bldomycine, Gazdhar et al. ont r&emment montrd que le transfert du g~ne HGF permet de rdduire l'apoptose dpithdliale et d'accroltre la prolifdration des pneumocytes mais aussi de rdduire l'expression du TGF-~I aboutissant ~t un amdlioration de la rdparation tissulaire alvdolaire et ~i une rdduction de la fibrose pulmonaire (19). Krein et al. ont montrd que les taux d'insulin-likegrowthfactor-1 (IGF-1) sont corrdlds ~tla quantitd de collag~nes I et III suggdrant que IGF-1 joue un r61e dans le processus de fibroprolif&ation lots du SDRA (20). Enfin, des taux alvdolaires dlevds de transforming growth factar-cz (TGF-cz) et de platelet derived growth factor (PDGF) sont associds aux
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marqueurs de fibroprolifdration lors de la fibrose et du SDRA et peuvent induire une stimulation des fibroblastes (21). Chez l'animal, l'inhibition du PDGF attdnue les ldsions de fibrose induites par les radiations ou la bldomycine (22). Le r61e du vascular endothelium growth factor (VEGF) demeure largement ddbattu (23). Plusieurs travaux montrent des rdsultats contradictoires. L'hypoth~se la plus solide sugg~re que le VEGF et ses rdcepteurs joucnt un r61e trophique dans les phdnom~nes de rdparation et de rd-dpithdlialisation alvdolaires. Le ddfaut de restauration des taux de VEGF lors de la phase ~, tardive ,, du SDRA pourrait participer ~t la fibroprolifdration.
Interferon y (IFN-y) L'IFN-y inhibe le ddp6t du collag~ne et la prolif&ation des fibroblastes dans un mo&le de ldsions pulmonaires ~l la bldomycine. Ces effets sont lids ~ila rdgulation ndgative exercde par I'IFN-y sur le g~ne du TGF-13. L'IFN- 7 exerce dgalement une rdgulation ndgative sur l'expression des protdoglycanes induites par le TGF-131. La protdine-10 induite par I'IFN-y inhibe la ddposition de la MEC et l'angiogen~se (6).
Cytokines Le tumor necroisfactor a (TNF-o0 joue un r61e central dans le d&eloppement de la fibrose pulmonaire. Le mo&le de fibrose pulmonaire apr~s bldomycine retrouve une dldvation du TNF-cz entre le 5~ et le 15 e jour. Le pr&traitement de souris avec un anticorps anti-TNF-o~ bloque la ddposition du collag~ne. Par ailleurs, les souris n'exprimant pas le g~ne du TNF-o~ prdsentent moins de ddp6ts de collag~ne et de ldsions d'alvdotite apr~s exposition ~i la bldomycine, compar6e aux souris exprimant le g~ne. Un mo&le de ldsions chez la souris exposde ~t la bldomycine et n'exprimant pas le rdcepteur du TNF-0t ddmontre le r61e esscntiel du TNF-o: et de son r&epteur dans la rdgulation du TGF-]3 et de la fibrose pulmonaire (24). Son effet profibrosant direct reste controvcrsd (6). L'interleukine- 1~ (IL- 113) exerce un effet pro-inflammatoire associd secondairement ~i une dldvation des taux alvdolaires de TGF-]31 et de PDGE L'inhibition de IL-l[3 attdnue les Idsions de fibrose lors de mo&les expdrimentaux (24). L'Interleukine-10 (IL-10), cytokine anti-inflammatoire, inhibe l'activitd mydloperoxidasique et l'expression de TNF-0~ dans un mo&le murin de ldsion pulmonaire ~i la bldomycine. Les cytokines dites Th2 (IL-4 et -13) sont assocides ~t la fibrose induite par la bldomycine et l'inhibition de I'IL-13 rdduit la rdponse fibrosante.
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CC chmokines MCP-1/CCL2 et MIP-10~/CCL3 sont des chdmokines impliqudes lors de la phase inflammatoire du SDRA. La souris ddficiente pour le g~ne CCR2, rdcepteur de MCP-1/CCL2, est protdgde de la fibrose induite par la bldomycine. La rdgulation de CCL2 et CCL3 semble largement ddpendante de I'IL-13 et de la voie de signalisation MAPK/ERK (24). L'hypoth~se d'un effet des CC chdmokines sur le recrutement des monocytes/macrophages influen~ant l'axe cellules dpithdliales/myofibroblastes lors de l'dvolution vers la fibrose est proposde, mais n'a pour l'instant jamais dtd validde chez le patient prdsentant une fibrose postSDRA.
CXC chmokines et angiogen se Le r61e des chdmokines de type CXC dans l'angiogen~se et le remodelage vasculaire paralt fondamental. La balance entre l'effet angiogdnique des CXC chdmokines ~i motif ELR § (IL-8/CXCL8, ENA-78/CXCL5) et l'effet angiostatique des CXC chdmokines ~i motif ELR- (CXCL9, IP-10/CXCL10, CXCL11) pourrait jouer un r61e ddterminant dans le remodelage vasculaire et la fibrose pulmonaire post-agressive (25). Dans un module expdrimental ~i la bldomycine, la stimulation du rdcepteur de type CXCR3 par la CXCL11 induit un effet angiostatique et une rdduction de la fibrose pulmonaire. Cet effet anti-angiogdnique semble dtroitement rdguld par I'IFN-y (26). Le rdcepteur CXCR3 des CXC chdmokines angiostatiques semble jouer un r61e fondamental dans la fibrose induite par la bldomycine. L'origine des fibroblastes et myofibroblastes pulmonaires pourrait rdsulter de l'activation, la prolifdration et la migration vers l'alvdole de fibroblastes rdsidant dans l'interstitium. Cependant, une modification du phdnotype des cellules dpithdliales vers un ph~notype ,, fibroblaste ,~est avdrde. Enfin, le r61e des fibrocytes circulants issus de progdniteurs mddullaires reste hypothdtique lors de la phase fibrosante d'un SDRA. Cependant, plusieurs travaux expdrimentaux avec la bldomycine plaident pour l'implication des fibrocytes circulants d'origine mddullaire comme source de fibro/myofibroblastes alvdolaires. Les CXC chdmokines et leurs rdcepteurs, en particulier CXCL12 et CXCR4, pourraient jouer un r61e important dans le recrutement des fibrocytes vers le poumon (25). Ainsi, la ddpldtion en CXCL12 dans un module murin de fibrose ~i la bldomycine diminue les ddp6ts de matrice extracellulaire et le nombre de myofibroblastes (27). Ces donndes issues pour l'essentiel de travaux sur le module ~lla bldomycine et des cas de fibrose interstitielle chronique ndcessitent des 6tudes de confirmation dans le SDRA. Keane et al. montrent chez des patients en SDRA depuis 3 ~i 5 jours que la balance entre CXC chdmokines ~i motif ELR § et ELR- est en faveur des CXC chdmokines ~i effet angiogdnique (ELR § (28). Cette surexpression des CXC chdmokines angiogdniques est
Fibrose pulmonaire post-agressive 229
corrdlde au niveau de fibroprolifdration quantifide par les concentrations alvdolaires de procollag~nes I et III (28). Ce travail montre le r61e important des CXC chdmokines lots de la phase fibroproliferative du SDRA via la rdgulation de l'angiogen~se.
M talloprot inases et angiogen se Les mdtalloprotdinases sont responsables du renouvellement et de la ddgradation des protdines de la MEC dont les collag~nes, mais leur implantation ~l la surface cellulaire les implique plus largement dans la rdgulation des signaux cellule-MEC et entre cellules. La MMP-7 ou matrilysine, en coordonnant l'expression de la chdmokine KC murine (dquivalente de l'IL-8), est un dldment important de la rdgulation du recrutement des polynucldaires neutrophiles et de l'inflammation. DSs les premiers jours du SDRA, les produits de ddgradation du collag~ne IV et le procollag~ne III sont les tdmoins d'une augmentation du renouvellement de la MEC et des modifications de la membrane basale. Les MMP-2 et -9 (gdlatinases) ainsi que le TIMP-1 (leur inhibiteur) sont augmentds dans le liquide de LBA lors du SDRA (29). Des arguments expdrimentaux sugg~rent que MMP-2 et-9 jouent un r61e dans le remodelage de la MEC provisoire et assurent donc la rdgulation de la rd-dpithdlialisation alvdolaire (30). Delclaux et al. ddmontrent que l'activitd antiprotdasique est largement prddominante lots du SDRA (31). En outre, Corbel et al. montrent que lorsque le rapport MMP-9/TIMP-1 est < 1, c'est-~i-dire lorsque l'activitd antiprotdasique domine, une fibroprolifdration est associde au SDRA (30).
REgulation de la matrice extracellulaire (MEC), glyco-aminoglycanes et fibronectine La rdgulation du ddp6t d'une matrice extracellulaire (MEC) provisoire et l'organisation de cette matrice constituent la pierre angulaire de l'dvolution fibrosante du SDRA (32). Le ddsdquilibre entre une synth~se excessive et une ddgradation insuffisante de la MEC est le principal phdnom~ne impliqud. Les glyco-aminoglycanes, et en particulier le hyaluronane, sont des composants de la MEC qui s'accumulent lors du module ~i la bldomycine. Noble et al. ont ddmontrd que la ddgradation du hyaluronane induit une stimulation des macrophages et une production de chdmokines inflammatoires via la stimulation des toll-like-receptor 2 et 4 et de la protdine My-D88 (33). Cette ddgradation du hyaluronane est sous la ddpendance des macrophages et ndcessite la protdine transmembranaire CD44. En outre, le CD44 est impliqud dans la migration des fibroblastes. La fibronectine, glycoprotdine de la MEC dont l'expression est stimulde par TGF-[31, interagit avec les autres protdoglycanes de la MEC et avec les fibro-myofibroblastes.
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Apoptose I2apoptose cellulaire participe fi la rdparation tissulaire, ~i la rdsolution du SDRA et ~t la pathogen~se de la fibrose pulmonaire (34). L'apoptose pourrait jouer un r61e bdndfique ou ddldt~re en fonction des cibles cellulaires concerndes. En effet, si l'apoptose des cellules inflammatoires (neutrophiles, macrophages), des myofibroblastes et des fibroblastes peut etre bdndfiques, a contrario, l'apoptose des cellules ~pithdliales alv~olaires peut ~tre ddldt~re. I1 a dtd montrd que l'apoptose des pneumocytes est prdsente lors de la fibrose pulmonaire induite par la bldomycine et que la localisation des pneumocytes apoptotiques est celle des zones de fibrose. L'activation de Fas/Fas ligand est retrouvde dans les cellules dpithdliales lors du module ~i la bldomycine et chez des patients prdsentant une fibrose pulmonaire idiopathique mais aussi dans le liquide de lavage alvdolaire de patients en SDRA et ,, acute lung injury (ALl) ,,. Le blocage pharmacologique de l'apopotose dpithdliale par inhibition des caspases prdvient la ddposition du collag~ne. D'autres arguments plaident pour le r61e joud par l'apoptose dpithdliale dans le ddveloppement de la fibrose post-agressive. L'activation de l'apoptose lide ~iFas des cellules bronchiolaires et alvdolaires induit une fibrose pulmonaire (34). Cependant, les modules de souris exprimant ou n'exprimant pas les g~nes des rdcepteurs Fas prdsentent des rdsultats contradictoires. D'autres facteurs pro-apoptotiques comme p53, p21 et BAX (homologue de Bcl-2) sont augmentds dans les pneumocytes d'animaux exposds ~t la bldomycine, de patients prdsentant une fibrose pulmonaire idiopathique et ceux pr~sentant un SDRA/ALI (35). Ces dldments sugg~rent que la fibrose pulmonaire est secondaire ~i la mort par apoptose des cellules dpithdliales alvdolaires et soutiennent avec force l'hypoth~se que la rd-dpithdlialisation de l'espace alvdolaire est l'dldment cld de la prdvention de l'dvolution vers la fibrose pulmonaire. Concernant l'apopotose des cellules inflammatoires, plusieurs dtudes ont montrd le r61e de l'apoptose des polynucldaires neutrophiles dans la rdsolution du SDRA et l'importance des moldcules membranaires de surface (CD44) et de la voie Fas/FasL (35). La phagocytose des neutrophiles apoptotiques s'accompagne d'une diminution de la production de cytokines pro-inflammatoires telles que IL-113, IL-8, GM-CSF, TNF-0~. Elle induit dgalement l'augmentation de mddiateurs anti-inflammatoires tels que TGF-131, prostaglandine E2 et platelet-activating factar (PAF) (35). Enfin, il a dtd rdcemment montrd que la r~solution du SDRA ndcessite l'apoptose des cellules inflammatoires mais dgalement l'apopotose des cellules mdsenchymateuses impliqudes dans le processus fibroprolifdratif. Horowitz et al. ont mis en dvidence une population de cellules mdsenchymateuses alvdolaires caractdrisde par l'activation d'une voie de signaux de survie cellulaire (anti-apoptotique) impliquant (PKB)/Akt (voie de la serine-threonine kinase et protdine kinase B) et Bcl-2 chez les patients prdsentant un SDRA persistant (36). Ce travail est en faveur de l'hypoth~se d'un dquilibre entre les facteurs pro- et antiapoptotiques pulmonaires ddterminant l'dvolution vers une fibrose ou une restitution de l'architecture pulmonaire normale.
Fibrose pulmonaire post-agressive 231
Coagulation et fibrinolyse Lors du SDRA, plusieurs travaux ont soulignd l'activation des mdcanismes de coagulation en faveur d'une activitd procoagulante et antifibrinolytique : augmentation du tissue factar (TF), du facteur VIIa, du facteur X TF-ddpendant, du plasminogen activator inhibitor-1 (PAl-i) (37). La production de facteur tissulaire (TF) joue un r61e central dans l'activation des cascades de la coagulation conduisant ~i la production de thrombine et de fibrine (38). La ddposition intra-alvdolaire de fibrine prdcSde la phase de ddp6t de la MEC et de fibroprolifdration lors du SDRA. L'inhibition de la vole du TF - facteur VII empeche la fibrinoprolifdration. Une activation des systSmes antifibrinolytiques est dgalement observde dans les liquides de LBA de patients prdsentant une fibrose pulmonaire idiopathique. Dans le module animal de fibrose induite par la bldomycine, les souris n'exprimant pas le plasminog~ne ou l'urokinase plasminagen activator (uPA) prdsentent plus de ldsions de fibrose que les contr61es. Dans ce m8me modSle, la surexpression du PAI-1 accentue la fibroprolifdration (37). Soulignons aussi que PAI-1 est fortement induit par le TGF-~31 et pourrait reprdsenter un mddiateur de la fibrose ddpendant du TGF~. A contrario, l'augmentation de l'activitd du uPA attdnue les ldsions de fibrose. La thrombine, en activant directement le rdcepteur ~, 1)rotease-activated receptors-1 ,~ (PAR-l), augmente la synthSse de la MEC, la prolifdration et la diffdrenciation en myofibroblastes des fibroblastes. L'inhibition de la thrombine et de son rdcepteur PAR-1, chez le rat exposd ~lla bldomycine, attdnue les ldsions de fibrose pulmonaire. Le modSle de souris n'exprimant pas le rdcepteur PAR-1 est protdgd de la fibrose post-bldomycine (37). Enfin, chez l'animal, l'administration intratrachdale de protdine C activde inhibe la fibrose induite par la bldomycine (39).
SystEme r nine-angiotensine I2angiotensine II stimule la prolifdration des fibroblastes et la production de collagSne. Dans un module par inhalation acide, la souris ,, knock-out ~ pour l'enzyme de conversion de l'angiotensine II majore ses ldsions de SDRA comparde ~i la souris non ddficiente. Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine II ou du rdcepteur de l'angiotensine II ont ddmontrd expdrimentalement un effet protecteur sur les ldsions de la phase aigu~ du SDRA (40). L'angiotensine II induit l'expression de TGF-~31 et les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine II ou du rdcepteur de l'angiotensine II rdduisent l'apoptose dpithdliale et la ddposition du collag~ne (41). Leur effet antifibrosant semble rdsulter de la rdduction des ldsions inflammatoires initiales. Aucun travail n'est disponible ~i notre connaissance dans le SDRA humain.
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Vision d'ensemble Les processus de rdparation pulmonaire et de fibroprolifdration interviennent pr&ocement &s la phase inflammatoire du SDRA. L'hypoth~se d'une rdponse inflammatoire intense et persistante et celle d'anomalies de la rdgulation du processus de rdparation tissulaire lors du SDRA pourraient &re responsables d'une dysrdgulation de la rdponse fibroprolif&ative conduisant vers la fibrose post-agressive. Un dquilibre, dont les mdcanismes ne sont pas connus, entre facteurs pro- et anti-fibrotiques pourrait ddterminer l'dvolution vers une fibrose ou une restitution de l'architecture pulmonaire normale lors du SDRA. Les cytokines pro-inflammatoires sdcrdtdes par les cellules inflammatoires (neutrophiles, macrophages, lymphocytes), dpithdliales et endothdliales (TNF-0~, IL-1 13, IL-4, IL-13, CC chdmokines) exercent de mani~re directe ou indirecte (activation du TGF-]31) une action profibrosante. L'activation de certaines CXC chdmokines exerce une action profibrosante par action directe sur la prolifdration et le recrutement des fibro/myofibroblastes, mais dgalement par des mdcanismes indirects en rdgulant l'angiogen~se pulmonaire. Le r61e du TGF13, et en particulier TGF-]31, semble primordial dans la pathogen~se de la fibrose post-agressive. L'activation par le TGF-]31 de plusieurs voies de signalisation cellulaire (Smad3, c-Abl,) conduit ~t la stimulation des fibro/myofibroblastes et aux ddp6ts de collag~ne et des protdines de la matrice extracellulaire. D'autres facteurs de croissance comme I'HGF, le KGF, I'IGF-1 sont dgalement impliquds dans la rdgulation de la fibroprolifdration. L'activation de la coagulation occupe une place importante dans la constitution d'une matrice extracellulaire provisoire. L'inhibition de la thrombine et de son rdcepteur PAR-1 exercerait un effet antifibrosant. L'apoptose des cellules inflammatoires et mdsenchymateuses pourrait reprdsenter un dldment cld dans le processus de rd-dpithdlialisation alvdolaire qui semble prdvenir l'&olution vers une fibrose post-agressive. Inversement, l'apoptose des pneumocytes favoriserait la fibrose. Les m&alloprotdinases, les glycoaminoglycanes de la matrice extracellulaire, les facteurs d'angiogen~se et l'angiotensine II semblent dgalement participer ~i la pathogen~se de la fibrose post-agressive.
Diagnostic d'une fibrose post-agressive I l ments cliniques faisant suspecter le diagnostic Meduri et al. ont rapportd que la fi~vre et l'hyperleucocytose sont prdsentes dans 80 % des cas lorsque le SDRA &due vers une fibrose (42). Cela pose le probl~me du diagnostic diff&entiel avec une infection nosocomiale et en particulier une pneumonie acquise sous ventilation mdcanique. L'auscultation
Fibrose pulmonaire post-agressive 233
pulmonaire rdv~le classiquement des r~lles crdpitants. Une hypoxdmie persistante apr~s 7 jours d'dvolution ou l'absence de diminution d'au moins un point du score de Murray (ou lung injury score) (43) fait entrer le SDRA dans un caract~re non rdsolutif dont la fibrose est une des &iologies possibles. Ndanmoins, chez des patients pour lesquels une biopsie pulmonaire transbronchique dtait rdalisde, le rapport PaO2/FiO2, la PaCO2, le niveau de pression expiratoire positive et la ventilation minute dtaient similaires, qu'ils soient porteurs ou non d'une fibrose (44). L'augmentation de l'espace mort et la diminution de la compliance pulmonaire sont en faveur d'une dvolution vers la fibrose. De meme, la diminution de l'efficacitd des manoeuvres de recrutement ou du ddcubitus ventral sur l'hdmatose peut faire suspecter une telle &olution. L'apparition d'une dysfonction ventriculaire droite lide ~il'hypertension art&idle pulmonaire peut aussi faire craindre une dvolution fibrosante. Ndanmoins, une telle dysfonction peut se retrouver en cas de SDRA sans fibrose sous-jacente. D'autre part, les difficult& de sevrage de la ventilation mdcanique peuvent &re lides ~i la prdsence d'une fibrose post-agressive. Au total, les signes cliniques et biologiques standards sont totalement aspdcifiques, permettant seulement de suspecter l'dvolution vers une fibrose et doivent conduire ~t des explorations paracliniques plus contributives.
EI6ments radiologiques du diagnostic La radiographie thoracique permet en gdndral la mise en dvidence d'un syndrome interstitiel ~t type d'opacit& lin&ires, avec parfois images pseudokystiques. La tomodensitom&rie (TDM) thoracique (surtout en coupes fines) retrouve un syndrome interstitiel diffus ~i type d'opacitds r&iculaires et de plages en verre ddpoli (dpaississement des parois alvdolaires) qui prdservent les contours broncho-vasculaires, les opacitds confluentes de la phase exsudative ayant, par ailleurs, totalement ou partiellement rdgressd. D'autres ldsions s'y associent avec une distorsion de l'architecture pulmonaire et la prdsence de bulles et d'images pseudo-kystiques souvent sous-pleurales, et pour lesquelles les hypotheses varient : infarcissements pulmonaires, ddtersions de zones abc& ddes, ldsions de baro-volotraumatisme. Cependant, la prdsence d'opacitds rdticuldes peut aussi se retrouver en phase pr&oce du SDRA, en cos d'oe&me et d'inflammation limit& ~i l'interstitium (SDRA secondaires notamment). L'intdr& principal de la T D M dans le cadre du SDRA non rdsolutif serait en fait la caractdrisation du degrd de fibrose ainsi que son caract~re r&ersible sous cortico'/des, mais la place de la T D M n'a jusqu'~i maintenant pas dtd dtudide dons ce contexte. D'autre part, fi notre connaissance, aucune dtude n'a permis d'dtablir une relation directe entre images T D M et fibrose prouvde histologiquement. La T D M permet donc seulement d'&oquer le diagnostic de fibrose post-agressive et dventuellement d'orienter les prdl~vements biopsiques.
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I ldments biologiques du diagnostic Les marqueurs de l'inflammation (hyperleucocytose, vitesse de sddimentation, fibrinog~ne, plaquettes, CRP) ne sont d'aucune utilitd pour le diagnostic positif de fibrose. La cytologie du liquide de lavage broncho-alvdolaire (LBA) retrouve en gdn~ral une hypercellularit~ oil pr~dominent les PMN. Le diagnostic diffdrentiel avec une pneumopathie infectieuse peut, 1~ aussi, etre confondant. Le dosage sanguin ou alvdolaire des cytokines et autres mddiateurs impliquds dans la pathogen~se de la fibrose post-agressive n'a pour le moment aucun intdr8t en pratique clinique. Cependant, les taux alvdolaires de procollag~ne III pourraient prdsenter un intdrSt diagnostique. Le niveau de N-terminal procollag~ne peptide III (NPCP-III) est un marqueur de synth~se du collag~ne III. En dehors du SDRA, des taux dlevds de N-PCP-III sdrique peuvent etre retrouvds en cas de sarco'idose, de fibrose pulmonaire idiopathique, ainsi qu'au cours de pathologies extrapulmonaires telles que cirrhose, mydlofibrose et polytraumatisme. Ceci conduit ~i une interprdtation difficile des taux sanguins. Les procollag~nes I et III sdriques et alvdolaires sont retrouvds d~s les premiers jours du SDRA, ce qui rend compte d'une rdponse fibroprolifdrative tr~s prdcoce lors de l'agression et de la rdparation pulmonaire (45, 46). Des concentrations alvdolaires dlevdes de N-PCP-III d~s les premiers jours du SDRA sont assocides ~i sa mortalitd (46, 47). Chez des patients en SDRA, Clark et aL (47) ont montrd une dldvation prdcoce des taux de N-PCPIII alvdolaire chez les non survivants. Dans l'dtude de Meduri et al., une augmentation significative des taux alvdolaires de procollag~nes I et III est retrouvde chez les patients qui prdsentent un SDRA persistant et chez les nonsurvivants (45). En outre, en cas d'dvolution favorable du SDRA sous corticothdrapie (mdthylprednisolone 2 mg.kg ~ initialement), Meduri et al. ont montrd une diminution des taux alvdolaires de procollag~nes I e t III (45). Plus rdcemment, une corrdlation a dtd retrouvde entre le taux de N-PCP-III alvdolaire et la diminution de compliance du syst~me respiratoire obtenue par la rdalisation de courbes pression-volume chez 17 patients en SDRA (48). Cependant il n'existe ~i ce jour aucune dtude ddmontrant la relation entre dldvation des taux alvdolaires (et afortiori sdriques) de N-PCP-III et une fibrose prouvde histologiquement.
Diagnostic de certitude ' les biopsies pulmonaires Histologie de la fibrose post-agressive L'analyse histologique du poumon demeure l'examen de rdfdrence pour le diagnostic de fibrose post-agressive. D'un point de vue macroscopique, le poumon est gris p~le avec une surface lisse lide ~i la prdsence de tissu conjonctif jeune. La fibrose est constitude d'un ddp6t anarchique endo-alvdolaire et septal de collag~ne III puis I, sdcrdtd essentiellement par les fibroblastes. Les espaces
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alvdolaires et les capillaires vont alors s'obstruer, perturbant consid&ablement l'architecture et la fonction pulmonaire, fii ce stade, l'oe&me a le plus souvent disparu et une ndovascularisation intra-alvdolaire apparalt. Au stade de fibrose constitude, on observe un aspect rugueux du poumon, parfois en pavd, avec une tranche de section p~le et d'apparence spongiforme. De nombreuses zones kystiques ainsi que des cicatrices fibreuses sont de plus souvent observdes.
Techniquesde biopsiepulmonaire La biopsie transpari&ale (ou percutande) peut &re rdalisde sous amplificateur de brillance, tomodensitom&rie ou dchographie avec une aiguille spdcifique. La rentabilitd de cette technique est discutable compte tenu de la petite taille des dchantillons et du risque de pneumothorax chez un patient ventild. La biopsie transbronchique (BTB) est rdalisde sous endoscopie bronchique. Quatre ~i sept biopsies sont rdalisdes dans le m8me territoire, de fagon ~i permettre une analyse histologique et microbiologique. Quelques dtudes ont montrd la faisabilitd et la sdcuritd de cette technique chez des patients soumis ~t une ventilation invasive (44, 49). I1 est ~i noter que l'administration concomitante de monoxyde d'azote chez les patients en SDRA peut &re g8nde durant l'endoscopie. Dans une dtude rdcente portant sur 38 patients ventilds mdcaniquement, porteurs d'une infiltration pulmonaire inexpliqude, un LBA et des BTB dtaient successivement rdalisds (50). La rentabilitd diagnostique des BTB dtait de 63 contre 29 % pour le LBA. Dans le sous-groupe de patients porteur d'un SDRA en phase tardive (11 patients), le diagnostic dtait dtabli dans 64 % des cas (50). En prenant en compte les diffdrentes &udes sur le sujet, les BTB permettent un diagnostic en moyenne dans 40 % des cas. Ndanmoins, la rentabilitd de cette technique est controversde du fait de la petite taille des dchantillons et de leur faible hombre, ce qui rend parfois difficile une dtude histologique de qualitd (seuil de vingt alvdoles pour une analyse histologique satisfaisante). Une dtude comparant la BTB et la biopsie chirurgicale fi thorax ouvert chez vingt patients porteurs d'une infiltration pulmonaire chronique ddmontre la supdrioritd de la technique chirurgicale avec un diagnostic &abli dans 94 % des cas pour la biopsie chirurgicale contre 59 % avec la BTB (51). Cependant, certains arguments plaident encore en faveur de cette derni~re, comme la simplicitd de mise en oeuvre et la possibilitd de r~pdter l'examen. Les risques de cette technique, outre ceux inhdrents ~l l'endoscopie bronchique, sont essentiellement le pneumothorax, le pneumomddiastin et l'hdmoptysie. La BTB doit &re rdalisde en dehors de toute anomalie de la coagulation ou des plaquettes et en dehors de tout traitement anti-coagulant ou anti-aggrdgant. L'hypertension art&idle pulmonaire est une contre-indication relative. Les dtudes chez les patients ventilds mettent en dvidence une incidence de 12 % de pneumothorax drain& et de 11% d'hdmorragies mod& rdes (44, 49, 52).
236 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
La biopsie pulmonaire par thoracoscopie mddicale n'est pas adaptde fi des patients en situation respiratoire prdcaire car elle ndcessite la rdalisation d'une pneumosdreuse. Cette technique de prdl~vement n'est donc pas conseillde dans le cadre du SDRA. Les biopsies pulmonaires chirurgicales sont rdalisdes par thoracotomie dans le contexte du SDRA en raison de l'impossibilitd de rdaliser une intubation sdlective. Ces biopsies ~i thorax ouvert peuvent etre rdalisdes au lit en rdanimation. Dans notre expdrience, seul un tiers des biopsies est rdalisd au bloc opdratoire en cas de risque hdmorragique ou de symphyse pleurale prdvisible. La rdalisation en rdanimation est d'un grand intdret chez des patients difficilement transportables du fait d'une frdquente instabilitd hdmodynamique, et de param~tres ventilatoires imposant des rdglages malaisds ~i assurer ~i l'aide des ventilateurs de transport ou d'anesthdsie usuels. Les anticoagulants doivent etre arretds avant la biopsie. Le chirurgien doit choisir avec le rdanimateur le c6td du prdl~vement. Le choix se portera de prdfdrence sur le c6td le plus pathologique, sauf si l'on suspecte une symphyse pleurale ou en cas d'antdcddent de chirurgie d'exdr~se pulmonaire du m~me c6t~. Ces ~l~ments sont apprdcids grace aux antdcddents du patient, ~i la radiographie thoracique et au mieux sur les donndes de la TDM. Le patient est positionnd en ddcubitus dorsal. Un billot est placd le long de l'omoplate homolatdrale ~i la biopsie afin de l'incliner de 15 degrds environ. Le membre supdrieur homolatdral est maintenu en abduction. Un dlectrocoagulateur monopolaire est indispensable pour l'hdmostase. Une thoracotomie antdrolatdrale d'environ dix centim~tres est rdalisde dans le cinqui~me espace intercostal, l'acc~s dtant facilitd par un petit dcarteur. Une exploration du parenchyme pulmonaire et de la cavitd pleurale est rdalisde. Le liquide pleural est prdlevd (pour une analyse cytologique et microbiologique) et dvacud. Un soin particulier est portd ~i l'hdmostase en raison des troubles de la coagulation frdquemment retrouvds au cours du SDRA et majords par certaines thdrapeutiques comme le monoxyde d'azote. Une seule, mais large biopsie, est rdalisde sur une zone qui apparait comme macroscopiquement pathologique. Elle est le plus souvent effectude au niveau de la lingula, du lobe moyen ou des lobes infdrieurs. La biopsie est effectude ~i la pince mdcanique ~i agrafage lindaire. Le respirateur doit etre momentandment ddconnectd, ceci afin de limiter l'dpaisseur des tissus pour assurer une meilleure adrostase. Le prdl~vement parenchymateux est ensuite ddcoupd et conditionnd. Deux drains, un antdrieur et un postdrieur, sont insdrds, puis placds en aspiration. La paroi thoracique est ensuite refermde plan par plan, le plus souvent sans drainage paridtal. La durde moyenne de l'intervention est de trente minutes. La surveillance postopdratoire est clinique, gazomdtrique et radiologique. Les fuites parenchymateuses pulmonaires et les pertes sanguines par les drains sont quantifides. Aucun ddc~s peropdratoire directement imputable fi la biopsie ne semble ~tre rapportd dans la littdrature (1, 2). L'impossibilitd d'effectuer une biopsie pendant la procddure en raison d'une mauvaise toldrance respiratoire et/ou hdmodynamique est exceptionnelle. Les complications postopdratoires gdndralement rapportdes sont des bullages prolongds au niveau du
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drainage thoracique (15 ?i 20 % des cas), parfois associds ~i un pneumothorax, refl&ant la mauvaise compliance pulmonaire. L'&olution de ces complications est le plus souvent favorable. Les autres complications ~t type d'hdmorragies ou d'infections parenchymateuses, pleurales ou pari&ales sont rarement observ&s (1, 2). Cette technique de biopsie pulmonaire chirurgicale par thoracotomie est celle recommandde par la derni~re confdrence d'expert de la Socidtd de rdanimation de langue franqaise (SRLF) en 2005, et c'est celle que nous utilisons dans notre pratique (53). Les biopsies pulmonaires chirurgicales par thoracotomie ndcessitent, pour une prise en charge optimale, une bonne concertation entre le rdanimateur, le chirurgien et les diff&ents laboratoires. La biopsie pulmonaire rdalisde par le chirurgien est divisde en cinq parties et chaque fragment est conditionnd de faqon spdcifique pour une analyse histologique, bact&iologique, virologique, parasito-mycologique et immunologique. Le prdl~vement ~i visde histologique est adressd au laboratoire d'anatomie pathologique ~t l'dtat frais, dans un flacon sec, sans ajout d'aucun liquide. L'acheminement doit alors se faire dans les meilleurs ddlais, au maximum dans l'heure qui suit le prdl~vement. Le pathologiste peut ainsi examiner la piece ~t l'dtat frais et donner un premier avis. Si la biopsie est de petite taille ou que le prdl~vement ne peut &re pris en charge dans l'heure par le pathologiste, il convient de fixer alors la totalitd du prdl~vement dans du formol ou du liquide de Bouin. Apr~s cette fixation, le fragment subit une ddshydratation et une inclusion en paraffine. Sont alors rdalisds plusieurs plans de coupes histologiques colordes par l'hdmatoxyline dosine. L'analyse histologique est ensuite systdmatique et passe en revue tous les compartiments du parenchyme pulmonaire : lumi~re alvdolaire, interstitium, vaisseaux, voies a&iennes, pl~vre. Le pathologiste note la distribution des ldsions, la prdsence d'une inflammation et son type (aigue, suppurde, chronique, granulomateuse) ainsi que la prdservation ou non de l'architecture pulmonaire globale. En cas de fibrose post-agressive, le pathologiste devra la typer : fibrose jeune avec prdsence de foyers fibroblastiques ou fibrose mutilante constitude. Bien stir la prdsence d'images spdcifiques est dgalement recherchde (prolif&ation tumorale, lymphome, agent infectieux visible en histologie, effet cytopathog~ne viral, etc.). En fonction de l'aspect en morphologie conventionnelle et du contexte clinique, l'analyse peut &re compldtde d'une immunohistochimie par utilisation d'anticorps spdcifiques. En moyenne, la lecture histologique de la biopsie peut se faire 24-48 heures apr~s le prdl~vement. Enfin, le dernier fragment peut &re congeld dans l'azote pour une &ude de biologie moldculaire ou d'immunofluorescence, ou dans le glutaralddhyde pour une dtude en microscopie dlectronique.
Inter~t de la biopsie pulmonaire chirurgicale Deux raisons essentielles vont pousser le clinicien ~i faire rdaliser un prdl~vement de parenchyme pulmonaire dans le cadre du SDRA : 9 ddgager une dtiologie potentiellement curable, lorsque des examens moins invasifs comme le lavage bronchoalvdolaire n'ont pas dtd contributifs ;
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9 mettre en dvidence une fibrose post-agressive de faqon 5_instaurer un traitement par corticoides, qui semble contribuer ~t une amdlioration de la survie (54). Cette corticothdrapie potentiellement immunosupressive n'est pas sans risque en cas d'infection pulmonaire en particulier sur le plan viral. Dans une sdrie de 36 patients prdsentant un SDRA et bdndficiant d'une biopsie pulmonaire chirurgicale, un cytomdgalovirus dtait mis en dvidence dans 50 % des cas (2). Une biopsie pulmonaire pourrait donc &re indiqude lorsque le SDRA n'dvolue pas favorablement au bout de cinq 5 sept jours (absence de diminution du lung injury score [LIS]) (43). Cette indication devra &re discutde au cas par cas, avec le chirurgien, en fonction des bdndfices attendus et des risques encourus. Les consdquences cliniques du rdsultat d'une biopsie pulmonaire rdalisde dans le cadre d'un SDRA peuvent &re majeures. Des modifications thdrapeutiques peuvent &re dictdes par les rdsultats anatomopathologiques et/ou microbiologiques : instauration d'une corticothdrapie en cas de fibrose, instauration ou modification d'un traitement anti-infectieux, notamment mise en place d'un traitement antiviral dans le cadre d'une infection ~i cytomdgalovirus ou Herpesvirus (2). 12estimation d'un pronostic peut, de la m~me fagon, &re totalement modifide par ces rdsultats en cas de ddcouverte d'une dtiologie potentiellement curable ou d'un diagnostic de cancer pulmonaire primitif ou secondaire (lymphangite carcinomateuse). Dans une dtude rdcente, la rdalisation de 100 biopsies pulmonaires chirurgicales pour SDRA non rdsolutif, avec LBA non contributif, permettait de constater la prdsence d'une fibrose dans 53 % des cas (1). On peut donc consid&er que, sans cette preuve histologique, pros de la moitid des patients en prdsence d'un SDRA non rdsolutif aurait re~u une corticoth&apie non justifide. D'autre part, sur l'ensemble des patients porteurs d'une fibrose, plus de la moitid d'entre eux &aient porteurs d'une infection concomitante n&essitant un traitement anti-infectieux avant l'administration d'une corticoth&apie immunosuppressive. Cette dtude montre dgalement que les patients ayant eu une biopsie pulmonaire contributive (c'est~i-dire permettant une modification de la th&apeutique) ont significativement un meilleur pronostic en termes de survie (67 % de survie en cas de biopsies contributives contre 14 % en cas de biopsies non contributives) (1). Compte tenu de notre expdrience et des recommandations r&entes, nous proposons une attitude pratique en cas de suspicion de fibrose post-agressive dans le cadre d'un SDRA non rdsolutif. Apr~s environ sept jours d'dvolution malgrd un traitement adaptd et si le LBA est ndgatif, une biopsie pulmonaire chirurgicale sera proposde et un traitement sp&ifique instaurd &s la connaissance des rdsultats. En prdsence d'une fibrose post-agressive, un traitement par cortico'/des sera instaurd (tableau I), &entuellement de faqon diffdrde apr~s instauration d'un traitement adaptd en cas d'infection concomitante.
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Tableau I - Protocole de corticothdrapie proposd en cas de S D R A non rdsolutif causd par une fibroprolifdration ou une fibrose pulmonaire prouvde (54). Mdthylprednisolone intraveineuse en 4 injections quotidiennes et relais oral (prednisolone) en une prise quotidienne d~s que possible jl-j14: j15-j21 j22-j28 j29-j30 j31-j32
2 mg.kg -1 : 1 mg.kg -1 : 0,5 mg.kg -~ : 0,25 mg.kg -I : 0,125 mg.kg -1
Traitement de la fibrose post-agressive Corticothrapie Les cortico'l"des ont une large action inhibitrice sur les ddfenses de l'h6te, incluant une inhibition de la transcription des cytokines pro-inflammatoires (TNF0~, IL10~, IL-1~3, I L - 2 , - 3 , - 5 , - 6 , - 8 , - 1 2 , GM-CSF), une inhibition de l'activation des neutrophiles, une action synergique avec des cytokines antiinflammatoires (IL-4, -10, -13), et une suppression de la synth~se de la phospholipase A2, de la cyclo-oxygdnase et de la N O (monoxyde d'azote) synthase inductible (55). Du fait de ces propridtds, la corticoth~rapie ~i fortes doses durant une courte pdriode a dtd proposde en phase prdcoce du SDRA, dans la plupart des cas chez des patients septiques, afin d'obtenir une rdsolution rapide et de prdvenir une dvolution vers une fibrose post-agressive. Dans quatre dtudes randomisdes, trois concernant la prdvention du SDRA dans le cadre du choc septique (56-58) et une concernant des SDRA constituds (59), le traitement par cortico'l"des a diminud de fagon significative la durde de ventilation mdcanique. En revanche, ces dtudes n'ont pas montrd de bdndfice ni en termes de prdvention ou d'amdlioration du SDRA, ni en termes de mortalitd avec mSme, pour certaines, une augmentation de la mortalitd sous cortico~'des. Seuls les SDRA relevant d'dtiologies particuli~res (pneumocystose, pneumopathies dosinophiliques, certaines pneumopathies lides ~i une maladie auto-immune ou ~i une maladie de syst~me) sont reconnus comme pouvant bdndficier d'une corticothdrapie en phase prdcoce. Ndanmoins, certains auteurs, dont Meduri, pensent que l'dchec de cette corticothdrapie n'est pas lid au fait qu'elle soit utilisde en phase prdcoce mais plut6t au caract~re court de son administration (60). Cependant, la corticothdrapie comme traitement prdventif d'une dvolution vers la fibrose post-agressive ne doit pas 8tre retenue dans l'dtat actuel des connaissances. Les cortico'/des ont aussi une action inhibitrice sur la prolifdration fibroblastique et le ddp6t de collag~ne, notamment au niveau pulmonaire. Dans le cadre d'un SDRA non rdsolutif, cette cortico-
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thdrapie permettrait de plus de rdtablir l'homdostasie entre un facteur IB nucldaire en exc~s et une altdration fonctionnelle des rdcepteurs 0c aux glucocorticoides (60). Ce traitement a donc dtd proposd en phase tardive de fibroprolifdration et de fibrose post-agressive. Plusieurs cas cliniques et une petite dtude randomisde ont suggdrd son intdret en terme, de diminution de la mortalitd (54). L'dtude randomisde de Meduri et al., bien que concernant un faible effectif de patients, et bien que comportant des biais mdthodologiques, a longtemps dtd la rdfdrence permettant de justifier une corticothdrapie en cas de SDRA non rdsolutif (54). Ndanmoins, une dtude randomisde contr61de publide rdcemment et mende par I'ARDS network n'a pas montrd de rdduction de mortalitd dans le groupe recevant la mdthylprednisolone (61). Cette dtude concernait 180 patients en SDRA depuis 7 ~i 21 jours. Le protocole de corticothdrapie utilisd dtait empruntd ~i l'dtude de Meduri, et demeure d'ailleurs le protocole habituellement utilisd en pratique clinique (tableau I) (54). Malgrd l'absence de bdndfice en termes de mortalitd ~i 60 jours (objectif principal de cette dtude), une amdlioration de la fonction respiratoire (augmentation du rapport PaO2/FiO2 et de la compliance thoraco-pulmonaire) dtait retrouvde dans le groupe sous cortico'/des. On observe, d'autre part, dans le groupe sous cortico'/des une rdduction de la durde de ventilation mdcanique et de sdjour en rdanimation. Un rdsultat important dans l'analyse en sous-groupes est l'observation d'une surmortalitd significative lorsque la corticothdrapie est ddbutde apr~s le 13 e jour de SDRA, ce qui laisse supposer une fixation des ldsions fibrotiques ~i ce stade, aux ddpens de la fibroprolifdration plus sensible ~i une corticothdrapie. Cette dtude comportait ndanmoins quelques biais avec, tout d'abord, une sdlection initiale tr~s importante (5 % des patients dligibles inclus), ayant comme traduction un taux de mortalitd global dtonnement bas pour des SDRA non rdsolutifs (moins de 30 %). D'autre part, l'arret du traitement dtait relativement brutal en cas de sevrage ventilatoire de plus de 48 heures, et ne suivait pas en ga le protocole proposd par Meduri (54). Enfin, l'absence d'analyse anatomopathologique dans cette dtude fait suspecter le fait que certains patients non porteurs de fibrose ne pouvaient bdndficier d'une corticothdrapie. L'analyse en sous-groupe sugg~re d'ailleurs cette hypoth~se. En effet, chez les patients comportant un bas niveau de procollag~ne III dans leur LBA, donc prdsentant un moindre degrd de fibroprolifdration, la mortalitd dtait significativement plus dlevde en cas de corticothdrapie (35 vs 9 %, p < 0,05) (61). D'autre part, on peut penser que certains d'entre eux dtaient porteurs d'une contre-indication d'ordre infectieux ~i la corticothdrapie. Comme nous l'avons vu plus haut, l'dtude de Papazian et al. a montrd rdcemment que 53 % seulement des patients en SDRA non rdsolutifs dtaient effectivement porteurs d'une fibrose ou d'une fibroprolifdration mises en dvidence sur des biopsies chirurgicales et que plus de la moitid d'entre eux avait une contre-indication microbiologique ~l une corticothdrapie systdmique, du moins sans administration au prdalable d'un traitement anti-infectieux (1). La confdrence d'expert de la SRLF de 2005 recommande d'ailleurs d'obtenir une preuve histologique avant d'entreprendre une corticothdrapie (53). D'autres
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dtudes randomisdes contr61des sont ndcessaires avant toute conclusion ddfinitive. Actuellement, dans notre pratique clinique, nous proposons dans le cadre d'un SDRA non rdsolutif, en cas de preuve anatomopathologique de l'existence d'une fibrose pulmonaire, une corticoth&apie par m&hylprednisolone selon le protocole proposd par Meduri comportant une ddcroissance progressive des doses administrdes (tableau I) (54). Ce protocole s'accompagne des mesures assocides habituelles en cas de corticothdrapie prolongde (protection gastrique, prdvention des troubles ioniques, traitement du diab~te induit, limitation de l'utilisation des curates), ~t laquelle nous ajoutons une surveillance bactdriologique systdmatique par la rdalisation bi-hebdomadaire d'aspirations trachdales compldtdes par d'autres prdl~vements selon les points d'appel en cas de suspicion d'infection. La complication ~t redouter, surtout en cas d'administration concomitante de curares, est la myopathie acquise, potentiellement rdversible mais entralnant souvent des difficultds lors du sevrage de la ventilation, et donc un risque de prolongation du sdjour en rdanimation.
Perspectivesth6rapeutiques Les ldsions de fibrose pulmonaire post-agressive reprdsentent une destruction irrdversible de l'architecture pulmonaire normale. Les perspectives th&apeutiques de la fibrose post-agressive reposent donc en l'dtat actuel des connaissances sur une stratdgie de traitement prdventif ou prdcoce. L'expdrience largement issue du traitement par cortico'/des des fibroses pulmonaires idiopathiques installdes a ddmontrd son inefficacitd. Une meilleure connaissance de la physiopathologie et particuli~rement des m&anismes moldculaires impliquds permet d'envisager de nouvelles cibles th&apeutiques. Trois processus physiopathologiques cruciaux dans l'dvolution du SDRA vers la fibrose pourraient reprdsenter des cibles thdrapeutiques : 9 l'intensitd et la persistance d'un dtat pro-inflammatoire ; 9 la qualitd et la rapiditd de la phase de rd-dpithdlialisation alvdolaire ; 9 la rdgulation de la fibroprolif&ation et en particulier le contr61e de la prolifdration des fibro-myofibroblastes, des ddp6ts de matrice extracellulaire et de collag~ne. Des traitements rdgulateurs de la phase inflammatoire du SDRA pourraient permettre un contr61e de l'dvolution fibrosante. L'inhibition de l'dlastase des neutrophiles impliqude dans le recrutement des polynucldaires neutrophiles pourrait rdduire les ldsions inflammatoire et par suite la fibrose post-agressive (4). Un essai dans le SDRA humain testant le Depelestat | est actuellement en cours mesurant la compliance pulmonaire et le taux de procollag~ne III comme reflet de l'dvolution fibrosante du SDRA (NCTO0455767). Rdcemment, Meduri et al. ont proposd une stratdgie de corticothdrapie prolongde (28 jours) ~i posologie moddrde (mdthylprednisolone ~i 1 mg.kg -1) reposant sur le concept de rdgulation des m&anismes inflammatoires impliquds lors des diffdrentes phases du SDRA (62). Ces auteurs ont montrd l'effet bdndfique de cette stra-
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tdgie d'immunomodulation sur la rdsolution plus rapide du SDRA, ce qui sugg~re une dvolution vers la fibrose post-agressive moins frdquente (62). Toutefois, dans ce travail, la fibrose n'dtait pas dvalude. La modulation de la rdaction pro-inflammatoire initiale du SDRA par inhibition spdcifique du TNF-0t ou d'autres cibles reste du domaine de la recherche. La place des inhibiteurs de la voie de l'angiotensine II n'est pas documentde ~i ce jour dans le SDRA. La modulation de l'dtat pro-inflammatoire et pro-coagulant lors de la phase initiale du SDRA fait l'objet de travaux de recherche, en particulier avec la drotr~cogine a activ~e (39). L'effet antifibrotique de I'IFN- 7, d~j~i expdrimentd sans succ~s dans le cadre de la fibrose pulmonaire idiopathique, n'a pas dtd dtudid dans le cadre de la fibrose post-SDRA. La modulation du TGF-[~ 1 pourrait reprdsenter une autre piste thdrapeutique pertinente, ce d'autant que des expdrimentations animales sont encourageantes. Cependant, hce jour, les dtudes portant sur le TGF-[31 lors du SDRA humain sont encore au stade descriptif. L'inhibition de c-Abl par l'imatinib mesylate pourrait reprdsenter une piste de recherche (15). L'utilisation de facteurs pharmacologiques modulant la rd-dpithdlialisation alvdolaire n'a pas dtd investigude en clinique humaine ~i ce jour.
Pronostic d'une fibrose post-agressive La mortalitd du SDRA demeure de l'ordre de 30 ?i 40 %. Les biopsies pulmonaires de patients ddcddds au cours ou au d6cours d'un SDRA montre que plus de 50 % d'entre eux pr6sentent une fibrose pulmonaire dtendue (44). Toutefois, l'imputation directe de la fibrose sur la mortalitd du SDRA est discutde dans le contexte infectieux et de ddfaillance d'organes frdquemment associd au SDRA non rdsolutif.
Conclusion Le SDRA peut 6voluer vers une fibrose post-agressive qui est associde ~ u n mauvais pronostic. La pathogen~se et les ddterminants de l'dvolution du SDRA vers une fibrose post-agressive sont encore tr~s mal connus. L'intensitd et la persistance d'un dtat pro-inflammatoire pourraient favoriser une dysrdgulation de la fibroprolifdration d~s les phases inflammatoire et de rdparation et aboutir ~t une fibrose. D'autres mdcanismes concernant la capacitd de rd-dpithdlialisation alvdolaire faisant suite aux ldsions de SDRA sont dgalement impliqu6s dans la pathogen~se de la fibrose post-agressive. Ces mdcanismes impliquent au premier chef les phdnom~nes d'apoptose et de prolifdration/diffdrentiation des cellules dpithdliales, endoth6liales et mdsenchymateuses. Les r61es du transforming growth factor-~l, des facteurs angiogeniques, de l'activation de la
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coagulation, du syst~me rdnine/angiotensine semblent ddterminants dans la constitution de la fibrose post-agressive. La biopsie pulmonaire reprdsente le seul moyen d'affirmer le diagnostic de fibrose, elle a l'avantage d'dliminer d'autres pathologies (infection en particulier virale, ndoplasie). Chez pros d'un patient sur deux suspects de fibrose post-agressive, la biopsie pulmonaire infirme ce diagnostic. La corticoth&apie reprdsente le seul traitement disponible ~i ce jour. Elle reste tr~s discutde quant ?i son efficacitd sur la rdduction de la mortalitd, une meilleure comprdhension de la physiopathologie de la fibrose post-agressive devrait permettre le ddveloppement de nouvelles stratdgies thdrapeutiques, reposant essentiellement sur une modulation prdcoce de l'inflammation et de la fibroprolifdration.
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Perspectives th rapeutiques dans le SDRA j. Pugin
Quelques rappels de d finitions Le syndrome de d&resse respiratoire aigue (SDRA) se ddfinit comme une altdration aigue de l'oxygdnation art&idle en relation avec un oe&me aigu du poumon non cardiogSne (1-3). Ce syndrome survient chez des malades prdsentant au moins un facteur de risque : une pneumonie, un sepsis, une inhalation de liquide gastrique, ou un polytraumatisme, par exemple. I1 se caract&ise sur la radiographie du thorax par des infiltrats alvdolaires et interstitiels <, floconneux ,, bilatdraux (1). Histologiquement, dans sa forme aigue, on note des ldsions alvdolaires diffuses avec un infiltrat alvdolaire riche en protdines et en neutrophiles ainsi que des zones hdmorragiques (2). La ~ ldsion dldmentaire ,, du SDRA est une destruction aigu~ de la barri~re alvdolo-capillaire (2, 4, 5). Bien que tr~s fine, cette barri~re est complexe, composde de deux monocouches cellulaires (endothdliale et dpithdliale) sdpardes par une membrane basale riche en dlastine et collagSne de type IV (4). Sur le versant dpithdlial, le surfactant forme dgalement une membrane protectrice aux fonctions multiples. Cette barriSre emp&he l'exsudation plasmatique en condition physiologique et permet la rdsorption d'un oe&me alvdolaire par un mouvement actif d'ions et d'eau par l'dpithdlium alvdolaire. Elle contr61e en outre la migration des cellules du compartiment vasculaire ~il'espace alvdolaire. Des dtudes en microscopie dlectronique ont mis en dvidence des ldsions endothdliales capillaires pulmonaires, ainsi que des ldsions de la membrane basale et de l'dpithdlium alvdolaire (4, 5). La formation d'un oe&me alvdolaire et l'instabilitd alvdolaire, en partie lide ~i une perte du surfactant, sont responsables des troubles sdv~res de l'oxygdnation art&idle (6). Cette phase du SDRA est caractdrisde par des phdnomSnes inflammatoires et de coagulation intra-alvdolaires intenses. TrSs rapidement, on observe une prolif&ation des pneumocytes de type II, mais dgalement une migration interstitielle et alvdolaire de myofibroblastes, ainsi qu'une apposition de collagSne (phase fibro-prolif&ative) (2). Cette rdaction permet dans certains cas une cicatrisation capable de restaurer
248 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
une architecture alvdolaire parfaite mais, dans de nombreux cas, engendre une fibrose ddfinitive (phase fibrotique) (7, 8).
Quelques considerationsphysiopathologiques Malgrd de nombreux travaux expdrimentaux et cliniques, la physiopathologie du SDRA reste en grande partie encore incomprise. Dans certains cas, les moldcules gdndratrices de l'inflammation pulmonaire sont connues. En cas de pneumopathie sdv~re, il s'agit de moldcules bactdriennes qui vont activer les macrophages alvdolaires et induire un recrutement intra-alvdolaire de polynucldaires. Dans d'autres cas, des ldsions directes par des substances acides ou des fumdes toxiques peuvent induire les memes mddiateurs pro-inflammatoires. Dans les SDRA d'origine extrapulmonaire, comme lors de sepsis ou de polytraumatisme, la pathogen~se de l'inflammation alvdolaire est encore moins claire. Dans tousles cas, bien qu'une prddisposition gdndtique soit fortement suspectde, les raisons pour lesquelles un malade va ddvelopper un SDRA et l'autre pas restent assez mystdrieuses. L'inflammation alvdolaire est gdndralement pergue comme ndfaste et gdndratrice de ldsions cellulaires pulmonaires (9, 10). Une inflammation neutrophilique intense gdn~re des quantitds importantes de radicaux libres de l'oxyg~ne et de l'azote (NO) ainsi que des protdases toxiques (11). Ces mddiateurs inflammatoires sont capables de ldser les membranes cellulaires et les membranes basales et jouent certainement un r61e dans la destruction aigue de la barri~re alvdolo-capillaire. Toutefois, cette thdorie physiopathologique est, en partie, prise en ddfaut par l'dchec de la corticothdrapie dans les phases aigue (12) et tardive (13) du SDRA, pourtant caractdris~es par une inflammation et une fibroprolifdration. Une explication plausible de ce paradoxe est que, lors de SDRA en relation avec une infection bactdrienne pulmonaire ou extrapulmonaire, la rdaction inflammatoire est essentielle pour combattre l'infection. Couper cette r~action dquivaut ~i donner un avantage ~i l'infection et ~i pdjorer la situation, du sepsis notamment (14). I1 est aussi important de rdaliser que l'inflammation est en grande partie compartimentalisde et concentrde au niveau alvdolaire lors de SDRA (15-17). Le compartiment systdmique est, lui, profonddment anti-inflammatoire voire immunosupprimd (18). La prolongation de la survie de ces malades sous ventilation mdcanique et cet dtat d'immunosuppression sont aussi un risque de ddvelopper une infection nosocomiale, notamment pulmonaire, avec une mortalitd associde fi cette complication (18, 19). I1 est dvident que la mort des cellules formant la barri~re alvdolo-capillaire joue un r61e dans la pathogen~se du SDRA (20). Malgrd des recherches intenses dans ce domaine, il n'est toujours pas clair si apoptose ou ndcrose prddomine dans la mort cellulaire pulmonaire observde lors de la phase aigue (21, 22). I1 est en revanche relativement bien ddmontrd que les cellules inflam-
Perspectives thdrapeutiques dans le SDRA 249
matoires intra-alvdolaires ont une espdrance de vie plus importante que les leucocytes sanguins, ceci en relation avec l'expression de g~nes anti-apoptotiques (23). L'apoptose des cellules dpithdliales et des neutrophiles alvdolaires joue certainement un r61e important dans la phase de rdsolution du SDRA (20, 24). Dans la phase aigue, il est &entuellement envisageable d'interf&er avec l'apoptose dans l'idde de diminuer les ldsions de la barri~re alvdolo-capillaire. Toutefois, cette meme approche thdrapeutique pourrait &re thdoriquement ddldt~re dans la phase de rdsolution, emp&hant une clairance des cellules alvdolaires en surnombre.
L sions pulmonaires induites par la ventilation m canique Le mddecin en soins intensifs a certainement une responsabilitd involontaire dans la pathogen~se du SDRA (25). Le SDRA est un syndrome relativement nouveau, reconnu il y a moins de 40 ans. Avant l'av~nement de la ventilation mdcanique, la mortalitd de ce syndrome dtait effroyable, voisine de 100 % (26). I1 est &ident que la ventilation en pression positive des malades avec SRDA a considdrablement amdliord leur pronostic (3). I1 reste toutefois vrai que, m~me de nos jours, un bon tiers des malades avec SDRA va en mourir (27). Un autre tiers va souffrir de sdquelles tant pulmonaires qu'extrapulmonaires apr~s la sortie de l'h6pital (28, 29). La prolongation de l'espdrance de vie de ces malades sous respiration mdcanique engendre un nouveau syndrome qui a tendance ~l se complexifier avec le temps. Le SDRA a donc dvolud dans le temps d'une maladie hypoxdmiante aigu~ et mortelle vers un syndrome plus chronique et multisystdmique, qui pourrait m~me motiver une modification de son appellation (30). Une constatation qui date de plus de 20 ans est que la ventilation mdcanique peut elle-m~me entralner ou majorer les ldsions pulmonaires du SDRA (31, 32). Cette situation est maintenant bien ddcrite sous le terme de ~ ldsions induites par la ventilation mdcanique ,, ou ,, ventilator-induced lung injury (VILI) ,, (33, 34). Ces ldsions ddpassent la notion de barotraumatisme (35) et font intervenir celle du ,, biotraumatisme ,, (36). Cet effet de la ventilation mdcanique sur l'activation du tissu pulmonaire a pu &re moddlisd tant au niveau cellulaire (37) qu'animal (38). I1 est maintenant admis que la ventilation de ces malades avec des volumes et des pressions d'insufflation relativement bas, tout en maintenant les poumons ouverts avec l'aide d'une pression positive en fin d'expiration (PEP), limite ces ldsions (39-42). La ventilation mdcanique engendre un stress mdcanique inhabituel sur des voies adriennes et des alvdoles fragilisdes et enflammdes. I1 est exp&imentalement bien ddmontrd que la ventilation mdcanique active le poumon de faqon synergique lorsque ce dernier est enflammd, quelle qu'en soit la cause (37).
250 Le syndrome de ddtresse respiratoire aigue
Le SDRA, une affection syst mique I1 est devenu exceptionnel de voir un malade ddcdder d'hypoxdmie rdfractaire et ceci gr~tce aux progr~s de la ventilation mdcanique. L'essentiel des ddc~s est actuellement dCl ~t des complications infectieuses secondaires, ~i la dysfonction d'organe multiple et ~t l'impossibilitd de sevrer certains malades avec insuffisance respiratoire chronique dans le cadre d'un SDRA fibrosant. La ~, systdmisation ~ du SDRA est un v~ritable probl~me. Le malade avec SDRA souffre le plus gdndralement d'une dysfonction d'organe multiple (43), ressemblant ~tla situation du sepsis ou de l'ischdmie-reperfusion (44). La participation de la ventilation mdcanique ~t ces effets systdmiques et ~t la dysfonction d'organes associde au SDRA est plus que probable (45). Les organes atteints en pdriphdrie du poumon sont typiquement : le rein (insuffisance rdnale aigue), le tube digestif (atrophie muqueuse, ildus paralytique), la musculature respiratoire et systdmique (neuro-myopathie), ainsi que le cerveau (perte neuronale, troubles cognitifs) (46). Ces dysfonctions d'organes entralnent de toute dvidence des sdquelles ~t long terme chez les malades survivant un SDRA (28, 29). D'importantes recherches sont actuellement mendes pour approcher les mdcanismes physiopathologiques liant la dysfonction pulmonaire du SDRA avec celles des organes ~i distance. Le malade avec SDRA a de bonnes chances, en plus de la ventilation mdcanique, de recevoir de nombreux traitements pharmacologiques systdmiques ou par inhalation pulmonaire. I1 est plus que probable que ces traitements (antibiotiques, cat~cholamines, glucocortico'/des, diurdtiques, curares, sddatifs, monoxyde d'azote, etc.) jouent dgalement un r61e sur les fonctions immunitaires, de coagulation et mdtaboliques des organes et participent ~t la pathogen~se du SDRA et de ses complications (18, 25). Avec l'amdlioration du taux de survie des malades avec SDRA, il est aussi devenu dvident qu'ils ne rdcupdraient pas si bien que cela apr~s leur sdjour en rdanimation, voire apr~s la sortie de l'h6pital. Par exemple, moins de la moitid des patients ayant souffert d'un SDRA ont repris leur travail une annde apr~s la sortie de l'h6pital. Ces malades souffrent de faiblesse musculaire importante, d'insuffisance respiratoire et de troubles neuropsychologiques sous forme de troubles cognitifs, de ddpression et de syndrome de stress post-traumatique (47, 48).
Th rapie du SDRA : lemons du pass Une fagon brSve et un peu provocatrice de rdsumer la recherche clinique sur le SDRA est que la seule Etude randomisde et contr61de qui ait ddmontrd un effet clair sur la mortalitd est l'dtude de 1'(( ARDSnet ~ (42). Cette dtude a montrd que les patients ventilds avec des volumes courants de 6 mL/kg avaient un pronostic meilleur que ceux qui dtaient ventilds avec 12 mL/kg (42). I1 est
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toutefois dvident que le pronostic du SDRA s'dtait ddjfi amdliord avant que cette &ude ne soit publide (27). Bien que non prouvd scientifiquement, il parait plus que probable que les malades avec SDRA ont bdndficid des avanc&s de ces derni~res ddcenies en mddecine intensive, notamment pour ce qui est du soutien des organes. Les thdrapies non ventilatoires qui ont probablement influencd positivement la survie des malades avec SDRA et qui font actuellement partie du traitement habituel sont les suivantes : la gestion de l'h~modynamique (cat&holamines, diur&iques), l'dpuration extrardnale, la prdvention et le traitement des infections nosocomiales, la nutrition (entdrale), la pr&ention des thromboses veineuses profondes, de l'embolie pulmonaire, des saignements digestifs, des escarres, la gestion de l'analgosddation et le monitorage (49). A tel point qu'il serait difficilement envisageable, voire &hiquement impossible, d'effectuer des essais cliniques avec ou sans les th&apies ou mesures pr&entives citdes ci-dessus. La mortalitd actuelle des malades avec SDRA est voisine de 35-40 % (27). Ce qui implique aussi que toute &ude visant ~i avoir un impact significatif sur la mortalitd doit gdndralement recruter plus de 500 ~i 1 000 malades, ce qui difficile ~i organiser et excessivement cher. Bien que la plupart des essais cliniques aient dtd ndgatifs dans le SDRA, nous avons beaucoup appris sur ce syndrome en conduisant cette recherche. I1 vaut donc la peine de bri&ement les revoir et d'en tirer des enseignements pour le futur (50).
Ventilation mEcanique En l'absence de th&apies spdcifiques, une faqon d'apprdhender le traitement du SRDA est de soutenir la fonction respiratoire et les organes ddfaillants, en limitant le plus possible les Idsions iatrog~nes induites par nos th&apies de rdanimation. La ventilation m&anique est bien stir au premier plan de ces traitements de support. Comme sugg&d pr&~demment, il apparalt que la meilleure stratdgie ventilatoire actuelle est celle qui induit peu d'&irement cyclique sur un tissu pulmonaire ldsd ou enflammd, tout en maintenant le poumon ouvert (39-42). La ,, ventilation protectrice ,, conventionnelle consiste fi insuffler des volumes courants considdrds comme ,, bas ,~ (autour de 6-7 mL/kg), en augmentant la capacitd rdsiduelle fonctionnelle ~t l'aide de la PEP. On assiste actuellement ~ une augmentation de la proportion de patients en SDRA ventilds en aide inspiratoire (, pressure support ,,) (51). Ce mode ventilatoire a l'avantage thdorique de diminuer les pressions moyennes dans les voies adriennes et de diminuer le risque d'air trappd et donc de surdistension pulmonaire. II s'agit lfi ~i nouveau d'une ddrive logique, mais non test& scientifiquement. II faut toutefois avouer qu'une certaine proportion de malades en SDRA sdv~re ne tol~re pas un tel mode ventilatoire. Le maintien d'un ~ poumon ouvert ~ permet thdoriquement une meilleure oxygdnation par une amdlioration du rapport ventilation/perfusion. Le risque
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d'une telle approche est toutefois de surdistendre le tissu pulmonaire et de gdndrer des ldsions induites par la ventilation mdcanique (52). I1 sera important dans le futur d'identifier des indices d'addquation de la ventilation mdcanique qui ne soient pas (uniquement) basds sur le rapport PaO2/FiO2, Ces indices devraient iddalement intdgrer la notion de surdistention pulmonaire (augmentation de l'espace mort, diminution de la compliance pulmonaire, signal biologique ?) (53, 54). Malgrd de nombreuses dtudes dans ce domaine, le clinicien ne poss~de toujours pas de mdthode simple et comprdhensible pour ddterminer le bon niveau de PEP (55). Les thdrapies suivantes ont dtd testdes dans le but de minimiser la distension d'un poumon hyperinflammatoire et/ou peu compliant: ventilation ~i haute frdquence (~ jet-ventilation ~), ventilation en oscillation ~i haute frdquence, ventilation liquide partielle aux perfluoro-carbones, insufflation intratrachdale d'oxyg~ne, techniques de recrutements, techniques extracorporelles d'oxygdnation et d'extraction de CO2 (56, 57). Ces dtudes, dans leur ensemble, n'ont pas ddmontrd de bdndfice par rapport ~i une ventilation mdcanique conventionnelle. I1 en est de mame pour les thdrapies positionnelles lors du SDRA (essentiellement ventilation en ddcubitus ventral) (58). Certains bdndfices physiologiques ont dtd notds avec l'administration intrapulmonaire de surfactant, mais l~i dgalement, pas d'effet notable sur la mortalitd (59, 60). Ces dtudes nous rappellent, si besoin dtait, que, lors du SDRA, le poumon (et le reste de l'organisme) est malade et qu'il ne suffit pas d'amdliorer le sympt6me ,~ hypoxdmie ~ pour influer sur le pronostic du SDRA.
Therapies inhal es De grands espoirs ont dtd fondds sur le monoxyde d'azote inhald (iNO). Un grand nombre de patients amdliorent leur rapport PaO2/FiO2 et diminuent leurs pressions artdrielles pulmonaires sous iNO. Toutefois, des essais cliniques randomisds front pas permis de ddmontrer un bdndfice du iNO sur la mortalitd des patients avec SDRA (61). Nombre d'dtudes expdrimentales ont montrd que le NO, notamment par son association avec les radicaux libres de l'oxyg~ne et la gdndration de peroxynitrite, avait des effets ddldt~res au niveau pulmonaire. Bien qu'il n'y ait pas de bdndfice ddmontrd du iNO dans une population de SDRA, de nombreux cliniciens l'utilisent en Europe, ne serait-ce que dans l'indication de ~ passer un cap ~ lors d'une hypoxdmie rdfractaire. D'autres investigateurs ddlivrent actuellement de la prostacycline ou un de ses ddrivds par inhalation aux malades avec SDRA (62). Le r61e immunomodulateur et potentiellement antifibrotique de cette prostaglandine pourrait avoir un avantage sur l'iNO et mdrite d'etre testd cliniquement. Les 13-agonistes - en plus de leur effet bronchodilatateur- permettent d'accdldrer la clairance de l'oed~me alvdolaire ldsionnel (63). Ces agents ont dtd ddlivrds par voie intraveineuse dans l'dtude BALTI (64), mais il est thdorique-
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ment envisageable de les administrer par ndbulisation. Bien qu'il existe une relation entre la rapiditd de clairance de l'ced~me alvdolaire et les chances de survie (65), il reste toutefois ~i prouver que d'accdldrer cette clairance pharmacologiquement permet d'amdliorer la survie de patients avec SDRA. Une nouvelle tendance qui se dessine est aussi l'administration d'antibiotiques en inhalation plut6t que par voie parentdrale pour traiter les surinfections pulmonaires des patients avec SDRA (66, 67). Les excellentes concentrations tissulaires obtenues avec cette vole d'administration devraient nettement contrebalancer les risques de ddveloppement de rdsistances bactdriennes. De plus, une application antibiotique topique a l'dnorme avantage de diminuer les effets secondaires et autres interactions systdmiques. D'une mani~re gdndrale, la voie d'administration intrapulmonaire, par ndbulisation notamment, devrait se ddvelopper dans un futur proche pour un certain nombre d'indications. I1 parah effectivement plus que logique d'atteindre le poumon directement lorsque celui-ci est malade, comme c'est le cas dans le SDRA, que d'utiliser un traitement parentdral. Ceci est particuli&rement vrai pour la rdaction immuno-inflammatoire qui est compartimentalisde au niveau pulmonaire.
Therapies vis e anti-inflammatoire Les traitements parentdraux fi visde anti-inflammatoire (glucocortico~'des, antiprostaglandines, antidlastase neutrophile, kdtoconazole) ou antioxydants (lysophylline, N-acdtylcystdine) ont dtd globalement ddcevants dans le traitement du SDRA (68-70). Ceci ne remet toutefois pas en cause le r61e pathogdnique de l'inflammation intra-alvdolaire, mais indique seulement que ni la bonne cible, nile bon ~, timing ,,, ni la bonne voie d'administration, ni la bonne dose n'ont dtd identifids. 12inflammation pulmonaire du SDRA est particuli~rement ddpendante de deux mddiateurs : l'interleukine (IL)-1~3 (16, 17, 71-74) et l'IL-8 (72, 75, 76). Le premier est une cytokine pro-inflammatoire extr8mement puissante et bioactive dans l'espace alvdolaire (16, 17) et le deuxi~me est une chemokine responsable de l'attraction des polynucldaire neutrophiles (77). L'inhibition de ces mddiateurs a montrd, suivant les modules expdrimentaux, des rdsultats prometteurs dans le SDRA (77-79). Un aspect probldmatique ddj~i abordd est que, lors d'infections bactdriennes (notamment pulmonaires !), la rdaction inflammatoire est essentielle pour se ddbarrasser des germes. Interfdrer avec la rdponse inflammatoire est donc ~i double tranchant. I1 apparah de plus en plus dvident que le SDRA est une maladie systdmique <<nourrie ~ par une rdaction pulmonaire inflammatoire et fibrosante intense (30, 46). Les mddiateurs responsables d'une telle ,, dissdmination ,, de la maladie pulmonaire aux organes pdriphdriques seraient des cibles potentiellement intdressantes, mais restent ~iidentifier. Le r61e de la ventilation mdcanique est d'ailleurs suspectd comme facteur favorisant ce phdnomSne de dissdmina-
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tion (80, 81). Un candidat intdressant est I'HMGB1, un mddiateur proinflammatoire ,, tardif ~,, initialement identifid dans le sepsis et qui conditionne la mortalitd dans de nombreux modules animaux (82-84). Cette moldcule fait partie d'une famille croissante de mddiateurs dits ~ de danger ,, ou ,, alarmines ~ (85, 86). Ces mddiateurs endog~nes, en gdndral libdrds lors de dommages tissulaires, activent des voies pro-inflammatoires localement ou ~i distance (85, 86). Ils amplifient nettement les rdponses inflammatoires induites par les bactdries. L'HMGB 1 semble mddier, en tout cas en partie, l'inflammation pulmonaire et pourrait atre responsable du syndrome de rdponse inflammatoire systdmique (,~ SIRS ,,) observd lors de SDRA (83). L'avantage de ddvelopper des thdrapies dirigdes contre les moldcules endog~nes du danger (anti-HMGB 1, par exemple) est de ne pas s'opposer ~i la rdaction inflammatoire induite par les moldcules bactdriennes- supposde bdndfique- mais ~i l'inflammation excessive lide aux dommages tissulaires, typique des malades en rdanimation (87, 88). De tels inhibiteurs sont dgalement ~i l'dtude et proche d'etre testds cliniquement (89). La rdaction anti-inflammatoire systdmique est majeure en cas de SDRA et certains mddiateurs ont des propridtds immunosuppressives, comme I'IL-10 par exemple. Un ddficit immunitaire tant sur la voie innde qu'adaptative a dtd mesurd chez les patients avec SDRA, ce qui les met ~irisque de ddvelopper des infections bactdriennes et virales secondaires et parfois mortelles (18). I1 est en thdorie envisageable de bloquer cette rdaction immunosuppressive systdmique (anti-IL-10) (90), voire de stimuler l'immunitd avec des moldcules comme l'interfdron y (91) ou le GM-CSF (92). Toutefois, ces moldcules ont aussi des effets secondaires (93) et sans un monitorage prdcis de la rdponse immuno-inflammatoire, il sera difficile de ,, titrer ,, le bon dosage de ces agents thdrapeutiques (94).
Intervenir sur la coagulation 7 L'activation de la coagulation intrapulmonaire dans le SDRA n'est pas une notion nouvelle. Un certain degrd de coagulation intravasculaire existe chez de nombreux malades avec SDRA, prddominant au niveau des capillaires pulmonaires (95). Ces altdrations de perfusion alvdolaire dues ~l des microthromboses n'ont certainement pas un effet bdndfique sur les dchanges gazeux. I1 est dgalement dtabli que le plasma exsudant ~i l'intdrieur des alvdoles coagule, les membranes hyalines n'dtant que le tdmoin histologique des ddp6ts de fibrine. Cette coagulation intra-alvdolaire est certainement mddide par l'expression du facteur tissulaire par les pneumocytes et par l'apport des facteurs de coagulation prdsents dans le plasma (96). Cette expression de facteur tissulaire est constitutive dans l'espace alvdolaire, mais peut atre accrue par les mddiateurs inflammatoires. La gen~se intra-alvdolaire de thrombine a tr~s probablement un r61e d'amplification de l'inflammation alvdolaire. I1 est dgalement dtabli que la prdsence de fibrine (et de ses produits de ddgradation) va stimuler une rdac-
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tion profibrotique intra-alvdolaire, avec une recrutement de (myo)fibroblastes qui vont sdcrdter du collaghne. Cette rdaction peut &re considdrde comme une rdponse addquate dans le cadre d'une tentative de cicatrisation du poumon ~i une ldsion de la barrihre alvdolo-capillaire. Toutefois, dans un certain nombre de cas, cette rdaction peut engendrer des ldsions fibrosantes permanentes. I1 est donc ldgitime d'envisager de bloquer les rdactions procoagulantes, que ce soit au niveau systdmique ou intra-alvdolaire, dont les bdndfices seraient en m4me temps anti-inflammatoires et antifibrosants (97). Bien que faisant partie de l'arsenal thdrapeutique de certains centres, l'hdparine n'a jamais dtd test& formellement dans l'indication du SDRA. Les moldcules recombinantes fi_ visdes antithrombotiques ont dtd ddveloppdes essentiellement dans l'indication du sepsis sdv?~re : la protdine C activde recombinante humaine (rhuAPC), l'antithrombine (AT naturelle et rhuAT) et l'inhibiteur de la vole du facteur tissulaire recombinant (rTFPI) (98-100). En rdanimation, seule la protdine C activde (~ drotrecogin alfa activated ,,, Xigris | a trouvd son indication dans les dtats septiques graves (99). Une dtude de phase II parrainde par le NIH am&icain avec une infusion IV de protdine C activde est en cours dans l'indication du SDRA (101). En raison de l'importance de cette coagulation intra-alvdolaire, il pourrait 4tre envisagd d'administrer des agents antithrombotiques par ndbulisation, pour autant que le compartiment alvdolaire puisse 4tre cibld (102). Les effets secondaires systdmiques, notamment les risques hdmorragiques systdmiques, seraient certainement restreints avec cette vole d'administration.
Identification des patients risque L'analyse de la prddisposition gdndtique fait actuellement des progr~s importants et la discussion de son apport potentiel au traitement de malades de rdanimation est incontournable dans un chapitre sur les perspectives th&apeutiques (103-105). On peut imaginer son apport en tout cas ~t trois niveaux : 9 identification des patients ~i risque de ddvelopper un SDRA ; 9 identification des patients ~i mauvais pronostic lors de SDRA ; 9 pharmaco-gdn&ique (106-108). Les techniques de gdnotypage sont de plus en plus rapides et performantes, rendant leur utilisation quasiment ,, bedside ,, (105). Un nombre croissant de polymorphismes gdndtiques sont associds ~ une augmentation de risque de ddvelopper un SDRA ou ~ un risque vital en cas de SDRA. I1 convient maintenant de mettre en association ces diffdrents risques afin d'affiner les capacitds pronostiques d'une telle analyse. I1 est toutefois difficilement envisageable que l'analyse gdndtique seule permettra de prendre des ddcisions ddfinitives sur la poursuite d'une rdanimation par exemple. En revanche, il est concevable qu'un gdnotypage permettra dans un futur proche l'enr61ement de malades dans des dtudes de prdvention du SDRA ou d'admi-
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nistrer un traitement particuli~rement indiqud ~t un malade au profil gdndtique ,~ 5. risque ,,.
Recherche dans le SDRA :le futur Contrairement ~. un certain nombre de prddictions faites par la communautd scientifique suite ~i la ,~ ddmocratisation ,, de la gdnomique et de la protdomique, on n'assiste pas actuellement ~i une rdvolution dans l'approche de ddveloppement de nouveUes thdrapies dans le domaine du SDRA. La logique et la sdquence de d&eloppement des mddicaments restent celles d'il y a 20 ou 30 ans, c'est-~i-dire : comprendre la pathogen~se de l'affection, identifier les voies de signalisation et moldcules potentiellement ddldt~res, gdndrer des inhibiteurs pharmacologiques ou biotechnologiques, reproduire l'affection dans des mo&les cellulaires et animaux, tester le mddicament sur ces mo&les pour finalement passer aux &udes cliniques, avec ses diffdrentes phases. Dans cette logique, l'observation et l'investigation cliniques gardent un r61e essentiel et valorisent l'importance d'une recherche ~, translationnelle ,, par des dquipes de cliniciens et des chercheurs fondamentalistes pointus. Un dcueil habituel dans le processus d'identification de cibles ou dans l'essai de m~dicaments est la relative pauvretd des mo&les exp&imentaux en ce qui concerne le SDRA. Le SDRA est de toute dvidence un syndrome difficile ~i reproduire dans sa complexitd. Un mo&le animal mimant le SDRA humain ndcessiterait d'etre prolongd dans le temps (plusieurs jours) et d'avoir ses diff& rentes phases de ldsions pulmonaires, sans oublier ni cette dimension de ddfaillance d'organe multiple, ni les th&apies de support que les rdanimateurs prodiguent ~ileurs malades. Les mo&les animaux actuels utilisent des dldments ddclenchants des ldsions pulmonaires souvent peu en rapport avec ceux du SDRA humain (bldomycine, hyperoxie, acide oldique, acide chlorhydrique, endotoxine, ddpldtion en surfactant, etc.). Ces mo&les sont pour la plupart suraigus et ne traduisent pas la sdquence pathogdnique observde chez le malade. Toutefois, avec la comprdhension rdcente de l'importance de ~ hits ,~multiples pour gdndrer le SDRA et de l'importance de la ventilation mdcanique, on voit apparaltre des mo&les plus complexes, d'animaux ventilds et ~ r~anim& ,,. Ces mo&les seront certainement utiles dans l'identification de nouvelles cibles et pour tester des nouvelles moldcules et autres stratdgies th&apeutiques. L'indication du SDRA reste intdressante pour les laboratoires pharmaceutiques, car il s'agit d'une affection ~i mortalitd dlevde pour laquelle il n'existe encore aucune moldcule enregistrde. Toutefois, le d&eloppement de mddicaments dans cette indication est complexe pour les raisons dnoncdes ci-dessus, notamment dans sa moddlisation. L'incidence du SDRA n'est non plus pas tr~s importante et les dtudes cliniques extremement coCtteuses. I1 est dgalement probable que des mddicaments ddveloppds et enregistrds dans d'autres indications puissent &re utiles dans l'indication du SDRA. Le SDRA se ddveloppant
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la plupart du temps sur plusieurs heures, voire plusieurs jours, il serait aussi intdressant de ddvelopper des thdrapies pr&entives chez des patients fi risque. Prddire la moldcule qui rdvolutionnera le pronostic du SDRA est impossible. Compte tenu de nos connaissances physiopathologiques actuelles, il est raisonnable de penser qu'une mol&ule prdvenant la destruction de la barri&re alvdolo-capillaire devrait avoir un impact prdventif et thdrapeutique positif. Cette destruction obdit ~i un processus complexe, avec une part de mort cellulaire (endothdliale et dpithdliale), une part de destruction de la membrane basale et d'inactivation du surfactant. De nombreux produits endog~nes sont suspectds de gdndrer ou d'aggraver les ldsions de cette barri~re. Les radicaux libres de l'oxyg~ne et de l'azote, par leurs effets toxiques sur les membranes cellulaires, les protdases plasmatiques activdes et les protdases leucocytaires dans leur capacitd de destruction des membranes et des jonctions intercellulaires sont de sdrieux candidats. En amont de cette destruction, vient le blocage d'une rdaction inflammation ddldt~re et de l'attraction des polynucldaires vdritables concentrds de produits potentiellement nocifs. Comme indiquds ci-dessus, les mddiateurs clds sont I'IL-I~ que peuvent s&r&er les macrophages et les cellules dpithdliales alvdolaires et l'IL-8 qui peut &re produite par n'importe quelle cellule pulmonaire. Ces mddiateurs sont thdoriquement des cibles intdressantes pour le ddveloppement d'inhibiteurs (avec les limitations indiqudes ci-dessus), dont l'administration pourrait se faire par adrosolisation, d'ailleurs. Ces mddiateurs peuvent &re bloquds directement ou, comme dans le cas de l'IL-113, indirectement en inhibant la caspase-1. Une inhibition des phdnom~nes de coagulation intra-alvdolaires devrait &re tent&. Finalement, le blocage de mddiateurs responsables de la ~ systdmisation ,~ du SDRA permettrait de lutter contre la dysfonction d'organe multiple associde ~i cette affection et pdjorant de toute dvidence le pronostic de nos malades. 12accdldration de la cicatrisation de la barri&e alvdolo-capillaire a aussi dtd proposde comme une option thdrapeutique intdressante. La thdrapie cellulaire rentre dans le cadre de ce type de thdrapie : rdparation endothdliale ou dpithdliale par des cellules souches. Des facteurs de croissance dpithdliaux (keratinocytegrowthfactor [KGF] et hepatocytegrowthfactor [HGF]) ont aussi donnd des rdsultats encourageants dans des modules de SDRA (109).
cc P r i m u m non nocere La totalitd des mddicaments utilisds en rdanimation sont associds ~i des effets secondaires, souvent importants et potentiellement graves. II est impossible de terminer ce chapitre sans mentionner que, dans de tr~s nombreux cas en rdanimation, une abstention thdrapeutique est souvent la meilleure option. Dans le cas du S D R A - une affection aigue et potentiellement rdversible- il est raisonnable de proposer, en l'absence de thdrapeutique sp&ifique avdrde, de soutenir la fonction respiratoire et les organes ddfaillants en comptant sur les capacitds
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de cicatrisation pulmonaire. Une situation simi|aire serait la ndcrose tubulaire rdnale aigue. Notre r61e de rdanimateur se bornerait ~i diminuer les risques iatrog~nes lids fi nos manoeuvres et aux thdrapies annexes. L'histoire de la ventilation m&anique dans le SDRA est ddifiante ~i ce sujet. I1 y a ~i peine 20 ans, les buts th&apeutiques dtaient tr~s diff&ents : la normalisation des gaz sanguins dtait la r~gle. Actuellement, on tend ~i dtirer le poumon le moins possible, conscient des l&ions induites par la ventilation m&anique. Le but de notre prise en charge de malades avec SDRA ne devrait-il pas simplement se borner ~i traiter efficacement l'affection de base (gdndralement le facteur ddclenchant du SDRA) et ~i ,, passer un cap ,, avec un soutien respiratoire le moins ddldt~re possible et un soutien des organes et dvitant toute iatrogdnie ?
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