COLLECTION
DE
L'ÉCOLE 191
FRANÇAISE
VASSILIKI GAGGADIS-ROBIN
JASON ET MÉDÉE SUR LES SARCOPHAGES D'ÉPOQUE IMPÉRIALE
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COLLECTION
DE
L'ÉCOLE 191
FRANÇAISE
VASSILIKI GAGGADIS-ROBIN
JASON ET MÉDÉE SUR LES SARCOPHAGES D'ÉPOQUE IMPÉRIALE
ÉCOLE FRANÇAISE DE ROME PALAIS FARNESE 1994
DE
ROME
- École française de Rome - 1994 ISSN 0223-5099 ISBN 2-7283-303-7
Diffusion en France: DIFFUSION DE BOCCARD 1 1 RUE DE MÉDICIS 75006 PARIS
Diffusion en Italie: «L'ERMA» DI BRETSCHNEIDER VIA CASSIODORO 19 00193 ROMA
SCUOLA TIPOGRAFICA S. PIO X - VIA ETRUSCHI, 7-9 ROMA
A Michel, mes amis
INTRODUCTION
Médée et Jason n'ont pas cessé d'intriguer les spécialistes de la civilisation gréco-romaine. Bien des études ont été consacrées a Jason et à Médée1. Alors que Jason est le héros épique, hors de pair, aimé d'Héra, secondé par Athéna, Médée domine le couple par l'i ntensité de sa personnalité, la force de son caractère, la virulence 1 Autant le mythe argonautique apporte des éléments riches et variés, autant les travaux cherchant à cerner ses aspects sont diversifiés : P. Friedländer, «Kri tische Untersuchungen zur Geschichte der Heldensage, I. Argonautensage», Rh. M. LXLX, 1914, p. 299-317 a cherché à reconstruire le mythe, C. Robert, Grie chische Mythologie. IL Die Griechische Heldensage : 3. Die grossen Heldenepen4, Berlin, 1921, p. 757-968 a contribué à l'étude du matériel mythologique, K. Meuli, Odyssee und Argonautika, Berlin, 1921 a étudié l'aspect merveilleux des «contes» que constitue le récit du voyage, L. Rademacher, Mythos und Sage bei den Griechen2, Munich, 1943, p. 208-237, enfin a donné une nouvelle interpréta tion du mythe, tandis que U. Von Wilamowitz - Moellendorff, Hellenistische Dichtung in der Zeit des Kallimachos II, 1924, p. 165 ss; ainsi que Id., «Exkurse zu Euripides Medea», Hermes XV, 1880, p. 482 ss a cherché les sources d'Apollonios de Rhodes, et l'ouvrage de E. Délage, La géographie dans les Argonautiques d'Apol lonios de Rhodes, Paris, 1930 reste essentiel pour l'étude de la géographie dans le poème. Ces études essaient de reconstituer la légende de la Toison d'or et de re trouver les origines de Médée; sur ce dernier point, deux théories s'opposent : ainsi pour Wilamowitz, l'origine de la magicienne est thessalienne; avant même que la fable prenne son caractère maritime, Jason tirait la toison des profondeurs de la terre, tâche dans laquelle il était aidé par Médée, fille de l'Hadès thessalien. Ensuite quand les Thessaliens se sont intéressés à la mer, la légende de l'e xpédition a été créée, en localisant Aia en Colchide, Médée est devenue fille d'Aiétès, de sa nature infernale primitive elle a gardé ses connaissances de la magie. Selon Robert, en revanche, Médée est d'origine corinthienne. Elle était la princi paledéesse de Corinthe qui cède par la suite sa place à Héra. En ce temps reculé, Jason pour conquérir la toison n'allait que sur le mont Pélion, très proche d'Iolcos, ce rite était en rapport avec le culte de Zeus Akraios et Médée n'y avait au cune place. Ce sont les Corinthiens qui ont donné son caractère maritime à l'ex ploit et qui ont lié Aia au mythe. Voir également la discussion dans L. Séchan, «La légende de Médée», REG XL, 1927, p. 234-310. Dans un autre domaine, J. R. Bacon, The Voyage of the Argonauts , Londres, 1925; et R. Roux, Le problème des Argonautes, Paris, 1949, ont étudié l'aspect religieux de la légende; V. Haas, «Jasons Raub des goldenes Vliesses im Lichte hethitischer Quellen» Ugarit-Forschungen 7, 1975, p. 227-233 a cherché les points communs de la légende de la Toison avec les mythes orientaux. Il en résulte que la toison étant un talisman royal qu'il faut conquérir pour accéder au pouvoir, le périple peut avoir un sens
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JASON ET MÉDÉE
exaltée de ses actes. Trois lieux géographiques, trois moments ja lonnent leur légende à tous deux : Aia en Colchide à l'extrême Est, Iolcos en Thessalie, Corinthe; la conquête de la Toison d'Or2, le meurtre de Pélias, le meurtre de Creuse, puis celui des enfants. De multiples parerga s'ajoutent a chacun des épisodes. La tradition remonte aux temps les plus anciens3. Homère, déjà, évoque en passant, comme bien connue, l'équipée de Jason 'Αργώ πασιμέλουσα4. Apollonios de Rhodes au temps de Ptolemée Phi-
initiatique. Par ailleurs, d'autres éléments comme la toison, le rôle de la mer, le jeune homme cherchant à reconquérir le pouvoir, les manipulations magiques, l'aide d'une prêtresse, constituent des points communs avec les mythes orientaux et particulièrement le mythe hittite. Plus récemment, d'autres études ont porté sur la genèse du mythe et ses premières représentations dans l'art figuré, bien que nous n'ayons conservé que peu de fragments des textes de haute époque; on citera des travaux de K. Schefold, Frühgriechische Sagenbilder, Munich, 1964, de H. von Steuben, Frühe Sagendarstellungen in Korìnth und Athen, Berlin, 1968; de K. Fittschen, Untersuchungen zum Beginn der Sagendarstellungen bei den Grie chen, Berlin, 1969; et de M. Vojatzi, Frühe Argonautenbilder, Wurtzbourg, 1982. Voir également la publication récente : Κ. Schefold, F. Jung, Die Sagen von den Argonauten, von Theben u. Troia in der klassichen u. hellenistischen Kunst, Mun ich, 1989. 2 L'expédition argonautique dépouillée de sa parure mythologique et consi dérée sous son éventuel aspect historique, constitue certainement l'indice d'une ancienne tentative de pénétration dans la Mer Noire, peut-être dans le but de co loniser, mais aussi dans celui de s'enrichir des métaux (cuivre, fer) et surtout de l'or existant dans ces régions. La Toison d'or ne serait qu'un symbole de ces res sources convoitées par les Grecs. Jusqu'en 1930, en Géorgie, on plaçait des peaux de moutons à longs poils dans l'eau des rivières descendant du Caucase, pour ré cupérer les pépites d'or qui s'y trouvaient. Strabon, 11,2,19 mentionne déjà ce pro cédé pratiqué par les Soanes. Sur la pénétration dans la Mer Noire et sur la fon dation des colonies qu'on situe autour de 680 avant notre ère, voir R. Carpenter, «The Greek Penetration of the Black Sea», AJA 52, 1948, p. 1-11; B. Labaree, «How the Greeks sailed into the Black Sea» AJA 61, 1957, p. 29-33; J. Bérard, Ex pansion et colonisation grecque, Paris, 1960, p. 98 et J. Boardman, Greek Over seas, Londres, 1980. L'expédition n'a cessé de stimuler l'intérêt des philologues, des historiens, des archéologues et même des navigateurs : en 1984, le trajet de l'Argô a été refait par une équipe composée de rameurs grecs, turcs, et sovié tiques. A bord d'un bateau long de 54 pieds, construit selon les techniques anti ques, ils ont relié en trois mois Volos en Thessalie, à Vani en Géorgie soviétique, au bord du Rion, le Phase antique. L'expédition était menée par T. Severin, voir son article «Jason's Voyage. In search of the Golden Fleece», National Geography, 09/85, p. 407-421. 3 Voir notre courte synthèse sur les sources littéraires; dans chaque chapitre iconographique, nous discutons également de la tradition littéraire. 4 Homère connaît l'expédition argonautique: dans l'Iliade (VII, 467-471; XTV,230; XXI,40; XXIII, 745-747), le poète mentionne Eunéos, fils de Jason et de la reine de Lemnos, Hypsipylé, qui règne sur l'île au moment de la guerre de Troie. Dans l'Odyssée, parmi les références au cycle argonautique, notons surtout XII,70, vers qui se rapporte à la nef Argô que Homère appelle Αργώ πασιμέλου-
INTRODUCTION
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ladelphe, Valerius Flaccus au temps d'Auguste, ont fixé un récit que tous ensuite ont repris. Apollonios ne raconte la légende que jus qu'au retour des Argonautes en Thessalie. Valerius Flaccus, qui adapte Apollonios en latin, fait de même. Le reste est complété par les mythographes. Euripide dans sa Médée, présentée aux Grandes Dionysies en 431, met en scène l'abandon de la princesse colchidienne et sa vengeance en utilisant ses ultimes moyens, la magie et le meurtre. Plus que les autres les textes d'Apollonios et d'Euripide ont été lus et appréciés. Plus que les autres, ils ont inspiré les ar tistes, notamment les sculpteurs de sarcophages. Certes, d'autres re présentations apparaissent ça et là, illustrant notamment le passage de Médée à Athènes, ses relations avec Egée et Thésée5; mais la tra dition des Argonautiques , telle que la représentent les sarcophages, forme un ensemble suffisamment cohérent pour faire l'objet d'une étude particulière. A partir du VIe siècle avant notre ère, date de la première re présentation attestée des deux protagonistes dans l'art figuré sur le coffre de Kypselos, jusqu'à l'époque impériale et même après, Jason et Médée ne cessent d'inspirer les artistes; néanmoins leurs images n'ont pas envahi les monuments antiques, comme c'est le cas d'autres figures mythiques, par exemple d'Héraklès. Dans l'ensemble du matériel représentant Jason et Médée, les sarcophages d'époque impériale forment un petit groupe homogène et très riche du point de vue de l'iconographie, dont l'étude minutieuse peut nous per mettre de mieux comprendre des documents moins éloquents. De puis l'inventaire des sarcophages effectué par C. Robert dans la série σα, «connue de tous». Il s'avère que l'épopée argonautique est antérieure aux poèmes d'Homère, voir K. Meuli, Odyssee und Argonautika, Berlin, 1921. 5 De ce fait nous n'étudions pas les représentations de Médée, en dehors du mythe des Argonautes. L'autre cycle dans lequel apparaît Médée est celui de Thé sée : quand elle fuit Corinthe, elle se réfugie à Athènes auprès du roi Egée, et elle essaie d'éliminer Thésée. Pour l'iconographie de Médée dans ce cycle, voir B. B. Shefton, «Medea at Marathon», AJA 60, 1956, p. 159-163, pi. 60-61; N. Al fieri, «Da Spina : un nuovo vaso con il mito di Egeo e Medea», Mèi A. Piganiol, II, Paris, 1966, p. 613-619; Ch. Sourvinou - Inwood, Theseus as Son and Stepson, (Institute of Classical Studies, suppl. 40), Londres, 1979, spécialement p. 29 pour la relation de Médée avec Thésée. Une base sculptée de trépied néo-attique, pro venant de l'Agora d'Athènes, a été rapprochée de l'iconographie de Médée, voir E. B. Harrison, Archaic and archaistic sculpture, (The Athenian Agora XI), Prince ton, 1965, p. 79-81, n° 128, pi. 30; B. B. Shefton, ibid., p. 156-163. La base a trois faces : sur la première figure un homme tenant un bâton qui serait Thésée, sur la seconde un homme drapé, interprété comme Egée, sur la troisième figure une femme drapée tenant une phiale. Une trace au niveau des hanches a été inter prétée comme un pli de l'espèce de cape que porte Médée, par exemple sur le re lief à trois figures du Vatican (notre fig. 58-59), mais cette trace peut bien être celle des ailes stylisées d'une Niké. Aucun sarcophage ne représente cette partie de la vie de Médée.
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JASON ET MÉDÉE
Die antiken Sarkophagreliefs6, où la datation des pièces reste parfois imprécise, deux exemplaires nouveaux liés à ce cycle iconogra phique sont apparus et ont donné lieu à des publications : le sarco phage de la catacombe de Prétextât par M. Gütchow en 19387, puis en 1968, l'exemplaire de Bale par M. Schmidt8. La série a été égal ement enrichie d'un sarcophage d'enfant d'Antalya grâce à la récente attribution iconographique de J. Marcadé en 19859. Cependant mal gré l'étude sommaire de G. Koch et de H. Sichtermann en 198010, dans l'ouvrage sur les sarcophages et quelques études iconogra phiquesgénérales11, il manquait une étude de synthèse sur les sarco phages représentant ces deux personnages. 6 C.Robert, Die antiken Sarkophagreliefs, II, Berlin, 1890, n° 188-203; et ibid.2, 111,3, Rome, 1969, p. 563. 7 M. Gütschow, «Das Museum der Praetextatkatakombe, Atti della Pontifìcia Accademia Romana di Archeologia, Memoria» 4, 1938, p. 29-78. 8 M. Schmidt, Der Basler Medeasarkophag, Bale, 1968. 9 J. Marcadé, «La polyvalence de l'image dans la sculpture grecque», Ειδωλοποια, Actes du colloque sur les problèmes de l'image dans le monde méditerranéen classique, (Lourmarin, 2-3/09/82), Rome, 1985, p. 27-39. 10 G. Koch, H. Sichtermann, Römische Sarkophage, Munich, 1982. 11 En dehors des articles de dictionnaires (voir Jessen, R E, IX,1, 759-771, s.v. Iason; Seeliger, Röscher Lexikon, 11,1, 63-88, s.v. Iason; H. von Geisau, Der Kleine Pauly Lexikon der Antike, 11,1322-1323, s.v. Iason; ainsi que Lesky, R E, XV,1,2964, s.v. Medeia; Seeliger, Röscher Lexikon, 11,2, 2482-2515, s.v. Medeia; H. von Geisau, Der Kleine Pauly Lexikon der Antike, III, 1126-1127, s.v. Medeia; E. Simon, EAA, IV, p. 950-957, s.v. Medea. Pour les Argonautes, voir R. Blatter, LIMC, I, s.v. Argonautai; H. von Geisau, Der Kleine Pauly Lexikon der Antike, I, 537-539, s.v. Argonautai; Ρ. Ε. Arias, EAA, I, p. 627-630, s.v. Argonauti), retenons l'étude de H. Heydemann, «Jason in Kolchis», H W Ρ XI, 1886, p. 1-23, sur l'iconographie de Jason en Colchide; L. Séchan, Etudes sur la tragédie grecque dans ses rapports avec la céramique, Paris, 1926, p. 396-422, 468-481; Id., «La légende de Médée», REG XL, 1927, p. 234-310, s'est occupé aussi bien du mythe (1927) que de l'icon ographie (1926) de Médée et Jason à Iolcos et à Corinthe; E. Simon, «Medeadarstellungen» Gymnasium 60, 1954, p. 203-227 a réalisé une étude iconogra phiquesommaire sur Médée; M. Schmidt, op. cit., a fait l'étude approfondie du sarcophage d'époque impériale de Bâle, exemplaire pratiquement complet et très important à cause de son décor; H. Meyer, Medeia und die Peliadèn, Rome, 1980 a récemment publié un travail consacré spécialement à l'iconographie du meurtre de Pélias; enfin il faut citer l'ouvrage collectif Medeia, dans les Cahiers du GITA, n° 2, 1986 intéressant pour la synthèse philologique diachronique qu'il fournit sur Médée, mais un peu décevant en ce qui concerne l'étude iconographique. Un grand nombre d'écrivains modernes ont écrit une Médée. Parmi les plus connus, citons Corneille, Grillparzer, Anouilh, à ces œuvres on peut rajouter de nombreux films. Pour un résumé sur les écrits modernes, voir aussi K. Heinemann Die tr agischen Gestalten der Griechen in der Weltliteratur II, (Das Erbe der Alten), Leipz ig,1920. Pour la carrière de Médée dans le monde byzantin, on se reportera aux travaux de K. Weitzmann, Greek Mythology in byzantine Art, Princeton, 1951, p. 93, 111, 134-136; et Id., Ancient Book Illumination, Cambridge, Mass., 1959, p. 71-79. Parmi les plus récentes apparitions de Médée dans l'art, on peut citer les peintures murales du Palazzo Fava à Bologne, exécutées en 1584, par les trois
INTRODUCTION
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Dans la présente étude, nous essaierons tout d'abord de classer chronologiquement les exemplaires, de préciser leur datation en nous appuyant sur l'étude du style et puis, à travers un catalogue iconographique des épisodes, nous nous efforcerons de relier les images aux différentes sources littéraires. Les sarcophages consti tuentla partie centrale de ce travail, à partir de laquelle nous avons procédé à un inventaire systématique des documents où appar aissent les deux personnages de Jason et Médée. Nous pensons en effet que la comparaison des sarcophages avec un matériel varié nous amènera à réfléchir sur les sources d'inspiration des sculpteurs romains et notamment sur la transmission des modèles iconogra phiques. Il est admis désormais que les marbriers romains compos aientles reliefs des sarcophages à partir de cahiers ou cartons de modèles, clairement caractérisés lorsque, pour étudier l'iconogra phie, on décompose les panneaux par scènes ou par groupes et qu'on les compare à des compositions antérieures. Par ailleurs, cette méthode comparative permet, à travers l'étude détaillée des sarco phages et des textes, de réexaminer des documents douteux ou trop hâtivement interprétés. Ainsi les sarcophages ne sont pas étudiés comme un groupe fermé et isolé, mais au contraire comme l'œuvre d'une longue tradition, fruit d'un processus iconographique muri. Nous avons également tenté, chaque fois que cela a été possible, de discerner l'influence qu'a eue la grande peinture sur la sculpture. Bien que ce travail n'ait aucune prétention philologique, nous avons donné une grande importance à la littérature ancienne, à son rôle comme source d'inspiration de l'art figuré; ainsi chaque témoignage concernant nos deux héros a été examiné lorsqu'il peut servir à éclairer le sens d'une image. Pourtant, malgré l'intérêt indéniable pour l'histoire de l'art que présentent ces reliefs, nous ne devons pas oublier qu'avant tout un sarcophage est un objet de la vie quotidienne, déjà fini ou à moitié achevé, choisi par le client chez un artisan, pour lui-même ou pour un parent proche. De ces clients nous ne savons presque rien. Nos exemplaires, échelonnés entre 125 et 210 de notre ère, au moment où l'on choisit plus volontiers l'inhumation, ne comportent aucune ins cription qui pourrait nous éclairer sur les croyances du propriétaire ou sur les raisons du choix de ce thème mythologique12. On s'inter-
frères Carracci Annibale, Agostino et Ludovico, natifs de Bologne qui ont décoré le Palazzo Fava des fresques illustrant le cycle de Jason et Médée (la jeunesse de Jason, la Toison, Pélias, les incantations de Médée etc.)· Voir, Catalogo Bologna 1584. Gli esordi dei Carracci e gli affreschi di Palazzo Fava, Bologne, 1984. 12 Pour la comphéhension des thèmes voir : Turcan, Sarcophages romains, p. 6-7 : «là, où l'homme de la rue voit une belle histoire, le philosophe allégoriste déchiffre des vérités sublimes».
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JASON ET MÉDÉE
roge sur le sens que pouvait avoir la représentation de la mort de Creuse, ou de Médée tuant ses enfants ou encore de sa fuite merveill euse,pour un habitant de Rome ou d'une province. Même si nous admettons que les différentes scènes de la Médée inspirent fortement ces représentations, la signification voire le symbolisme pour le pro priétaire du sarcophage nous en restent obscurs13. Le nombre restreint de nos sarcophages démontre que le mythe de Jason et Médée n'a pas joui d'une très grande popularité parmi les Romains, en comparaison avec d'autres mythes, par exemple avec celui de Méléagre ou avec celui de Dionysos. A l'heure actuelle, et d'après le grand nombre de catalogues de collections diverses, on peut penser qu'il ne reste plus de sarcophage entier inconnu r eprésentant ce cycle, mais parmi les richesses des réserves des mus ées doivent exister des fragments qui se laisseraient attribuer au cycle de Jason et Médée. Que notre étude serve à éclaircir quelque scène ou à reconnaître quelques restes de ces figures que nous avons tant observées, serait notre souhait le plus cher. *
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*
Le présent travail, achevé à la fin de 1991, représente une partie remaniée de notre thèse nouveau régime, soutenue à l'Université de Sorbonne-Paris I, en Juin 1989, préparée sous la direction de J. Marcadé, Membre de l'Institut. Le jury réunissait en outre F. Croissant, Professeur à l'Université de Sorbonne-Paris I, Président du Jury, R. Turcan, Membre de l'Institut, Rapporteur, B. Holtzmann, Maître de Conférences à l'Université de Sorbonne-Paris I, Rapporteur, et de J.-J. Maffre, Professeur à la Sorbonne. Qu'il nous soit ici permis de leur exprimer notre profonde gratitude pour avoir examiné notre travail et nous avoir fait bénéficier de leurs observations. Nous voudrions dire notre reconnaissance à tous ceux qui nous ont fourni les moyens de réaliser ce travail : M. O. Picard, Directeur de l'École Française d'Athènes, et M. Ch. Pietri (f), Directeur de l'É cole Française de Rome sans l'encouragement de qui la publication n'aurait pas vu le jour, tous deux nous ont ouvert les portes de leurs Institutions. M. J.-Y. Empereur, Secrétaire Général de l'École Fran çaise d'Athènes, ainsi que M. M. Lenoir, Directeur des Etudes pour l'Antiquité à l'École Française de Rome, ont facilité les conditions de notre travail à Athènes et à Rome. Le texte doit beaucoup à Mme S. Demougin et à M. D. Pralon 13 Cumont, Symbolisme, ne cite pas le symbolisme des sarcophages de notre cycle. Voir R. Turcan, «Les sarcophages romains et le problème du symbolisme funéraire», ANRW, II, 16, 2, 1978, p. 1700-1735.
INTRODUCTION
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qui l'ont lu et corrigé avec une minutie et une patience extrêmes. Qu'ils veuillent trouver ici l'expression de notre gratitude et de notre amitié. Il nous est très agréable de remercier ici tous ceux qui n'ont pas ménagé leur temps pour répondre à nos requêtes : Mme H. Arhweiler, Directeur du Centre Malher, Mme L. Kahil, Directeur du LIMC - CNRS; M. A. Pasquier, Musée du Louvre, Conservateur en chef des Antiquités grecques et romaines; Mme Ch. Pinatel, Musée du Louvre; M. C. Sintés, Musée de l'Arles Antique; Mlle J. Robin et Mme A. Pralong, G.D.R. Centre Malher-CNRS; Mlle P. Brack; les photographes du Centre Camille Jullian-CNRS, Aix-en-Provence; Mme L. Musso, Rome, Università degli Studi di Roma, Dipartiment o di Storia; M. Ph. Pergola, Rome, CNRS; Mme M. Sapelli, Rome, Museo Nationale Romano; Mme A. Galina-Zevi, Rome, Soprinten denza Archeologica di Ostia; M. P. Liverani, Museo Vaticano Profa no; M. Jung et Mme Schröder, Photothèque de l'Institut Allemand de Rome; Mme C. Morigi-Govi, Bologne, Museo Civico Archeologic o; Mme E. Pozzi, Naples, Soprintendenza di Napoli; Mlle A. Pelozi, Naples; Mme M. Schmidt qui nous a réservé un accueil chaleureux au Musée de Bâle; Mmes H. Hères et I. Kriseleit, Berlin, Staatliche Museen; M. Κ. Gschwantler, Vienne, Kunsthistorisches Museum; M. D. Eckardt, Weimar, Goethe Nationalmuseum; M. E. Hudeczek, Graz, Landes-museum Joanneum; Mme Z. Banki, Székesfehérvar, Fejer Megyei Museumok; Mme G. Gabrielli, Sopron, F. Liszt Mu seum; MM T. Kemenczei, F. Merenyi et M. Nagy, Budapest, Musée National Hongrois, Mme Th. Stefanidou-Tiveriou, Université de Salonique; ainsi que le personnel des École Françaises d'Athènes et de Rome, et ceux de l'École Américaine d'Athènes et de l'Institut All emand de Rome qui a répondu avec efficacité et amabilité à nos de mandes. Enfin, toute ma gratitude va à Michel Robin mon époux qui m'a soutenue avec dévouement tout au long de cette recherche.
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JASON ET MÉDÉE CONCORDANCE AVEC ANTIKE SARKOPHAGRELIEFS
N° ASR, II 188 189 190 192 192.a 193 194 195 196 197 198 199 200 201 202 203 111,3
CONSERVATION
NOTRE N°
FIGUR
Vienne Inv ASI 172 Louvre MA 410 Turin Inv 583 Rome MNR Inv 8647 Rome MNR Inv 8648 Perdu (Florence) Vatican Inv 1242 Louvre MA 283 Mantoue Vatican Inv 2326 Ostie, Palais Vescovile Rome MNR Inv 75248 Berlin SK 843B Rome MNR Inv 222 Naples Inv 3257 Marseille Musée Borely
13 5 6 18 19 1 9 4 3 15 7 8 2 21 10 25
24 7 8 29 30 1 13 6 5 26 9 10-12 2-4 32-34 14 48-50
Perdu (Cannes) Ostie Inv 10258
14 23
25 38-39
CHAPITRE I
CATALOGUE DES SARCOPHAGES*
1 - Fragment probablement de la face principale d'un sarcophage à guirlandes. Jadis à Florence au Palazzo Martelli. Jusqu'en 1965 dans le marché des antiquités à Rome, prétendu originaire de Sienne. Lieu de conservation actuel inconnu. H. 57cm; L. 84cm. Date : 130-150. * 125/130 ASR, II, n° 193, pi. LXII; H. Sichtermann, «Beiträge zu den Meerwesens arkophagen», AA, 1970, p. 217, pl. 4-6; ASR, V 1, p. 31 n° 79, fig. 47; RS, p. 159 n. 1, 234 n. 121, 262, 265. Figure 1.
Fuite de Médée.
2 - Cuve de sarcophage. Berlin. Staatliche Museen. Inv SK 843b. Trouvé en 1887 à Rome, à 700m du mur de la ville devant la Porte San Lorenzo. Acheté en 1891 par le musée. Marbre grec, gris bleu à gros cristaux avec des veines sombres. H. 64-67cm; L. 230cm; 1. 79cm; saillie du relief 7cm. Il reste la face principale entière endommagée par deux cassures verti cales (la première est après la femme assise, la seconde coupe en deux l'avant-dernière figure féminine de droite); quelques restaurations existent : sur le bras de Jason dans la deuxième scène et la jambe de l'enfant de droite dans l'avant-dernière scène, ainsi que sur les deux petits côtés (celui de droite est entier avec une cassure verticale presque au milieu, le petit côté de gauche est aussi cassé au milieu et emputé à gauche d'un morceau). Date : Fin du IIe siècle de notre ère (ASR) 130 à 150 (RS) * 150 * N.B. La date précédée d'un * est celle proposée par l'auteur dans la discus sionqui suit p. 21-35.
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JASON ET MÉDÉE
ASR, II, n° 200, pl. LXIV; ASR, III, 3, p. 562, n° 200; Schmidt, Medeasarkophag, p. 21, n. 30, pl. 26-28; RS, p. 159, 262. Figures 2-4.
Episodes de Corinthe.
3 - Cuve de sarcophage. Mantoue, Palazzo Ducale. Trouvé au XVIIe siècle à Rome. Marbre de Carrare. H. 65 cm; L. 228cm; saillie du relief 8cm. Seule la face principale est conservée. Jadis coupée en deux parties presque en son milieu, elle fut reconstituée par la suite au Musée de l'Acadé mie. Date : milieu du IIe siècle (A. Levi) 130-150 (RS) * 150 ASR, II, n° 196, pl. LXII; Levi, Palazzo Ducale di Mantova, p. 90-91, n° 189, pl. 102-104; GMRS, p. 41, n° 37, pl. 94, 1; H. Jung, «Zur Vorgeschichte des spätantoninischen Stilwandels» MWP, 1984, p. 59-74, fig. 2. Figure 5.
Episodes de Corinthe
4 - Cuve de sarcophage. Paris, Musée du Louvre Ma 283, Inv Mr 813. Origine précise inconnue. Ancienne collection Borghése. Entré au Louvre en 1808, actuellement en réserve. Marbre blanc à gros cristaux. H. 61cm; L. 228cm; 1. 24cm; saillie du relief 9cm. La face principale est endommagée par deux cassures recollées : la pre mière va de la gauche (à la hauteur de la poitrine de Jason) vers la droite (jusqu'à la main de Médée); la seconde est verticale, elle coupe le panneau
CATALOGUE DES SARCOPHAGES
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en son milieu le long de Creuse. Le petit côté droit est encore partiellement conservé, alors que celui de gauche est arraché. Plusieurs éléments ont été restaurés sur presque tous les personnages. Date : 130 à 150 (RS). vers 140 pour F. Baratte. * 150 ASR II, n° 195, pi. LXII; ASR, III, 3, p. 561; RS, p. 159, 262; Baratte, Cata logue, p. 92-95, n° 34. Figure 6.
Episodes de Corinthe.
5 - Fragment d'une cuve de sarcophage. Paris. Musée du Louvre Ma 410, Inv Mr 805. Origine inconnue. Jadis dans la collection Borghése, entré au Louvre en 1808. Actuellement en réserve. Marbre blanc micacé à gros cristaux. H. 65cm; 1. 166cm; saillie du relief 8cm. Il manque presque le quart gauche du panneau. Sur le fragment, il y a deux cassures verticales entre le deuxième et le troisième homme de gauche et entre la première et la deuxième femme, de gauche vers la droite. Date : vers 150 (F. Baratte) * 150 ASR, II, n° 189, pi. LXI; Baratte, Catalogue, p. 85-87 n° 30. Figure 7.
Taureaux, mariage.
Un moulage de ce sarcophage existe à Paris, Université de Paris I - Sorbonne, à l'Institut d'art et d'archéologie, rue Michelet, sur le palier entre le 3e et le 4e étage. 6 - Fragment d'une cuve de sarcophage. Turin. Musée archéologique. Inv 583?. Trouvé au XVIe siècle à Rome, transféré vers 1608 à Turin. Marbre. H. 52cm; L. 60cm; saillie du relief 10cm. Il ne reste plus qu'un petit bout du panneau qui ne constitue pas une scène entière. Date : époque antonine (ASR). * 150 Codex Coburgensis 32 n° 214.
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JASON ET MÉDÉE
ASR, II, n° 190, pl. LXI; Schmidt, Medeasarkophag, p. 10 n. 11; Baratte, Catalogue, p. 85-87. Figure 8.
Taureaux.
On sait par un dessin du Codex Coburgensis qu'à droite de cette scène, étaient représentées trois autres : la conquête de la toison, Médée méditant de tuer ses enfants et une dextrarum iunctio. Le panneau se rapprochait donc beaucoup de celui de Prétextât n° 12. 7 - Fragment de sarcophage. Ostie, dans un mur du Palazzo Vescovale ou Episcopio. Inv 10330. Trouvé à Ostie entre 1831 et 1834. H. 33cm; L. 42cm; saillie du relief 4cm. Ce document est très fragmentaire, il est cassé sur chaque côté vertical et à sa partie inférieure. La tête du personnage manque. Date : milieu du IIe siècle {ASR). * 150 ASR, II, n° 198, pi. LXII; Schmidt, Medeasarkophag, p. 36, 45 n. 4, pl. 20, 1; RS, p. 159 n. 1. Figure 9.
Fuite de Médée?
8 - Sarcophage entier avec son couvercle. Rome. Musée National Romain. Inv. 75248. Trouvé en 1911 à Rome dans une chambre funéraire au Nord de la Porte Majeure. Il contenait trois squelettes. lonnes
Marbre blanc à grains fins. Traces de peinture rouge autour des co et sur les ailes des dragons. Cuve : H. 55cm; L. 210cm; 1. 68cm. Couvercle : H. 24cm.
Sur la cuve plusieurs cassures le long du bord; manquent le bras droit de la Médée de la scène finale et les deux bras de l'enfant sur son épaule. Sur le couvercle cassure verticale au niveau de la deuxième figure féminine de gauche. Date : 150 - 160 (ASR). * 160 ASR, II, n° 191; ASR, III, 3, p. 561-562; RS p. 160 n. 13; L. Musso, Museo nazionale romano. Le sculture, 1, 2, Rome, 1981, p. 138, n° 38; H. Jung, «Zur Vorgeschichte des spätantoninischen Stilwandels», MWP, 1984, p. 59-74, fig. 3.
CATALOGUE DES SARCOPHAGES Figures 10 - 12
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Cuve : épisodes de Corinthe. Couvercle : Saisons.
9 - Couvercle d'un sarcophage. Vatican. Musées du Vatican. Inv 1242. Actuellement exposé dans la Galerie Chiaramonti. Connu depuis le mi lieu du XVIe siècle par un dessin du Codex Coburgensis; acquis par les Mus ées du Vatican au début du XIXe siècle. Marbre italien. H. 31cm; L. 193cm; saillie du relief 3cm. L'angle inférieur droit est cassé; quelques restaurations ont été faites sur la tête du premier et du deuxième personnage (Jason, garde du roi) de la troisième scène. Date : milieu du IIe siècle (ASR). * 160 ASR, II, n° 194, pi. LXII; ASR III 3, p. 561 n° 194; G. Von KaschnitzWeinberg, Sculture del Magazzino del Museo Vaticano, Vatican, 1936, p. 214 n° 473, pi. 81; Lippold, VM, III 2, p. 496-7 n° III; RS, p. 98 n. 15, 160 n. 5. Figures 13. Episodes de Corinthe. 10 - Fragment de cuve de sarcophage.
ignalé
Rome. Musée du Capitole. A la réserve. Ce fragment pourrait-être le n° 202 dans ASR II, sans illustration et s comme disparu par C. Robert. Marbre.
Il doit s'agir d'un fragment de la partie gauche de la cuve, qui est cassé sur les trois côtés, à l'exception de sa partie inférieure où le bord est encore partiellement gardé. Date : fin du IIe siècle. * 160 ASR, II, n° 202 (?); ASR, III 3, p. 563, n° 201.1; RS, p. 159 n. 1. Figure 14.
Remise des cadeaux à Creuse.
11 - Sarcophage d'enfant avec son couvercle. Antalya. Musée. Inv 1003. Marbre blanc. H. 48cm; L. 100cm; 1. 61cm.
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JASON ET MÉDÉE
La cuve est cassée en plusieurs endroits, le relief est estompé, détérioré en plusieurs points, mais lisible. Le sarcophage appartient au groupe de «Torre Nova», d'atelier pamphylien ou phrygien de l'époque des Antonine. Date : 150-155 (H. Wiegartz). juste après 155 (H. Waelkens). Wiegartz, Säulensarkophage, p. 62-63, 147, pi. 28; G. Ferrari, II commerc io dei sarcophagi asiatici, Rome 1966, p. 97-98, pi. 26, 2; 27, 1-2; Ν. Himmel mann, Der «Sarkophag» aus Megiste, Mayence, 1980, p. 11; RS, p. 500-502, 638; Waelkens, Dokimeion, Berlin, 1982, p. 52 n° 4; M. Strocka, MWP, 1984, p. 211-213 n. 73; Marcadé, Ειδωλοπούα, ρ. 34-37, pi. 5. Figure 15.
L'infanticide.
12 - Sarcophage entier avec son couvercle. Rome. Catacombe de Prétextât. Trouvé en multiples fragments dans la catacombe en 1932. Marbre blanc-gris à grains fins. Cuve : H. 59cm; L. 212cm; 1. 64cm. Couvercle : H. 15cm; L. 212cm. Il manque différents morceaux surtout au niveau de la partie gauche du panneau. Date : 150 à 170/180. * 170 Gütschow, Atti P.A.R.A., Memorie 4, 1938, p. 44-56; Schmidt, Medeasarkophag, p. 10 n. 11, pi. 29; GMRS, p. 36 n° 31, pi. 71 I, 74 2. Figures 16 - 23.
Episodes de Colchide, infanticide, mariage.
13 - Cuve de sarcophage. Vienne. Kunsthistorisches Museum. Inv AS I 172. Actuellement dans la Salle X (rez-de-chaussée) du musée. Trouvé à Naples. Acquis par le Musée de Vienne en 1889. Marbre blanc. H. 54cm; L. 160cm. Le relief est bien visible, il manque quelques bras des personnages, les pattes antérieures d'un des animaux et le visage de Médée. Date : 150 à 170/180 (ASR). * 170/180 ASR, II, n° 188, pi. LXI; RS, p. 153 n. 1, 262, 289 n. 9; Baratte, Catalogue, p. 85-87; Schmidt, LIMC I, 1, p, 354 n° 5 s.v Aiétès.
CATALOGUE DES SARCOPHAGES Figure 24.
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Episodes de Colchide.
14 - Fragment de sarcophage. Jadis dans un mur de la villa de M. de Courcel à Cannes dite «Villa Faust ina». Lieu de conservation actuel inconnu. Marbre? H. 64cm; L. 40cm. Il s'agit d'un fragment du milieu de la cuve, dont le bord inférieur est conservé. Date : IIe siècle (ASR) * 170/180 ASR, III 3, p. 563 n° 201.2. Figure 25.
Mort de Creuse, Infanticide.
15 - Fragment de sarcophage. Vatican. Musées du Vatican. Inv 2326. Actuellement exposé sur l'escalier Simonetti. H. 84cm; L. 98cm; saillie du relief 10cm. Marbre blanc. Etant donné la hauteur du fragment il provient probablement d'une cuve, sans doute de sa partie gauche. Il a été restauré en plusieurs endroits. Date : époque antonine (ASR). * 170/180 ASR, II, n° 197, pi. LXII; ASR, III 3, p. 561, n° 197; Lippold, VM, III 2, p. 52-54 n° 603, pi. 26. Figure 26
Remise des cadeaux et mort de Creuse.
16 - Fragment probablement d'un sarcophage. Rome. Dans un mur du Palazzo Primoli. (Via dei Soldati). H. 30cm. Date : * 170? Figure 27.
Toison.
Il est impossible de préciser la place exacte que pouvait avoir le fragment sur le panneau. Il subsiste seulement la partie supérieure du corps d'un homme nu, vu de profil vers la droite, portant un
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casque qui tend ses deux bras vers l'avant. La figure est cassée au ni veau de l'abdomen. La posture et la position du personnage, le port du casque nous font penser qu'il s'agit de Jason en train de décro cherla toison d'or. 17 - Fragment de sarcophage. Lieu de conservation aujourd'hui inconnu. Jadis il se trouvait dans le marché des antiquités en Suisse. Marbre. Il s'agit d'un fragment de la partie gauche probablement d'une cuve de sarcophage. La pièce était cassée à droite, en haut et en bas. Date : période antonine (M. Schmidt). * 180 Schmidt, Medeasarkophag, p. 25, pi. 12; RS, p. 159 η. 1. Figure 28 Remise des cadeaux à Creuse. 18 - Petit côté d'une cuve de sarcophage. Rome. Musée National Romain. Inv 8647. Provenant de la collection Cesi, jadis à la villa Ludovici. Marbre blanc grec avec une patine dorée. H. 66cm; L. 60cm; saillie du relief 9,5cm. Cassure aux deux extrémités gauche et droite. En haut, en plein milieu du relief, existe une perforation qui témoigne de l'utilisation du relief comme décor architectural à un certain moment. Date : Vers 150. * entre 160 - 180 ASR, II, n° 192, pi. LXI; ASR, III 3, p. 561; RS, p. 153 n. 2, 154 n. 7; B. Pal ma, L. De Lachenal, / marmi Ludovici nel Museo Nazionale Romano, Museo Nazionale Romano, I, 5, Rome, 1983, p. 189-190 n° 80. Figure 29.
Toison.
19 - Petit côté d'une cuve de sarcophage. Rome. Musée National Romain. Inv 8648. Provenant de la collection Cesi, jadis à la villa Ludovici. Marbre blanc, probablement grec. H. 66cm; L. 56cm; saillie du relief 9cm.
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L'angle inférieur gauche du relief est cassé, deux trous à la partie supé rieure témoignent de son utilisation à un certain moment comme décor ar chitectural. Date : Vers 150. * 160-180 ASR, II, n° 192a, pi. LXI; RS, p. 98 n. 15; B. Palma, L. De Lachenal, / marmi Ludovici nel Museo Nazionale Romano, Museo Nazionale Romano, I, 5, Rome, 1983, p. 190-193 n° 81. Figure 30
Mariage.
20 - Cuve de sarcophage. Ancóne. Musée National des Marches, en depot. Jadis à Rome à l'imprimerie Reale où il servait de fontaine. Connu de puis le XVIe siècle. H. 50cm; L. 219cm; saillie du relief 5cm. Marbre. La face principale est assez endommagée; de nombreuses cassures existent surtout sur la partie supérieure du panneau; les visages des person nagesont souvent disparu. Il reste des fragments des petits côtés. Date : milieu du IIe siècle (ASR). 170-180 à 200 (RS) * 170/180 ASR, II, n° 199, pi. LXIII; GMRS, p. 42, n° 38; RS, p. 159, 262. Figure 31.
Episodes de Corinthe.
Il existe un moulage de ce sarcophage en dépôt au Musée des Monuments antiques à Versailles, Salle des Pages, Grande Ecurie, Inv. Versailles n° 1556 A.B.C. 21 - Cuve d'un sarcophage. Rome, Musée National Romain. Inv. 222. H. 60cm; L. 220cm; 1. 67cm; saillie du relief 6cm. Marbre grec à grains fins, peut-être pentélique. La face principale est endommagée à plusieurs endroits : cassure diago naleà gauche. Le relief des petits côtés est également endommagé, surtout en ce qui concerne les visages des personnages. Date : première moitié du IIe siècle (ASR). 170/180 à 200 (RS). * 170/180
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ASR, II, 201, pl. LXV; ASR, III, 3, p. 562 n° 201; RS, p. 159 n. 1; L. Musso, Museo Nationale Romano. Le sculture, I, 2, Rome, 1981, p. 138-143 n° 38. Figures 32 - 34. Episodes de Corinthe. 22 - Cuve de sarcophage. Naples. Musée National. Inv 3257 (983). Actuellement en réserve. Marbre blanc. H. 71cm; L. 221cm; 1. 83cm. La face principale est endommagée par une cassure verticale au niveau de la troisième figure de gauche et en divers endroits du relief. Les deux pet its côtés sont également endommagés, sur celui de gauche il manque la tête de Jason. Date : IIe siècle de notre ère. * 170/180 A. De Franciscis, Guida del Museo Archeologico Nazionale di Napoli, Naples2, 1967, p. 28; Schmidt, Medeasarkophag, p. 45 η. 4; RS, p. 154 n. 6, 159. Figures 35 - 37 Episodes de Colchide et de Corinthe. 23 a - Fragment de sarcopage. Jadis à Ostie. Lieu de conservation actuelle inconnue. H. 25cm; 1. 22cm. Marbre. ASR III, 3, p. 544 n° 464. Date : * vers 180 Figure 38. 23 b - Fragment de sarcophage. Ostie. Musée Inv 10258. H. 23cm; L. 20cm. Marbre. ASR III, 3, p. 543 n° 465. Date : * vers 180 Figure 39. Tous deux ont été trouvés à Ostie lors des fouilles de 1831-34.
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Sur le fragment n° 23a (fig. 38) devant un παραπέτασμα se dé gagent deux figures d'hommes. Le premier à gauche dont la tête manque est vu de trois quarts vers la droite; il est habillé d'un mant eau qui lui laisse le torse nu et dont un pan s'enroule autour de ses bras croisés devant le ventre. Derrière lui on aperçoit un autre homme, dont le torse seulement est visible, de profil vers la droite. Sur le fragment n° 23b (fig. 39) on aperçoit à gauche une femme vue de face dont juste le torse est conservé; elle est habillée d'un chiton à manches, avec une ceinture sous sa poitrine. Le fond de la scène est aussi orné d'un παραπέτασμα. A droite à côté du gros nœud formé par l'étoffe se trouve une arcade dont sont conservés la partie haute avec un des piliers et le chapiteau. Un homme, dont seule la tête subsiste, tourné vers la droite, apparaît dans l'ouverture de l'arcade. Dans ASR les deux fragments sont classés parmi les «ungedeutet», pourtant l'œil exercé de C. Robert faisait déjà le rapprochement de la figure du fragment n° 23a avec l'homme aux pavots de la scène de la remise des cadeaux à Creuse, mais ne connaissant pas d'autres parallèles, il ne voyait pas le rapport avec le fragment n° 23b. Or, aujourd'hui il nous semble que l'iconographie de la cuve de Bâle nous permet de rapprocher ces deux fragments. Le fragment n° 23a représenterait la scène de la remise des cadeaux à Creuse; il reprend le schèma de l'homme situé tout à fait à gauche de la cuve de Bâle n° 24, Fig. 40, 41 avec toutefois un croisement plus net des bras, comme celui qu'on remarque sur l'homme aux pavots des autres sarcophages. Les arrachements qu'on apercevait au niveau du genou de l'homme de gauche, seraient les traces d'un des enfants. Le deuxième homme (à droite) serait-il le pédagogue qui accompagne les enfants chez Creuse et vient rendre compte à Médée, tel qu'on le voit dans le texte d'Euripide v. 1001-1007? Le fragment n° 23b ferait partie de la scène de la mort de Creuse, et celle du meurtre des enfants. La femme a le même vêt ement et le même emplacement que son homologue de la cuve de Bâle (fig. 42), sauf qu'ici elle semble être tournée vers la gauche, vers Creuse donc et non pas vers Médée. L'arcade, comme sur la cuve de Bâle, fait la transition entre les deux scènes, l'homme qui figure juste à droite se trouve exactement à la même place que le péda gogue de la cuve de Bâle, mais son jeune âge ne nous permet pas de le désigner ainsi. Il s'agit peut-être ici de Jason comme on le voit sur quelques vases représentant cette scène. Il nous semble que ces deux fragments étant si proches de l 'iconographie du sarcophage de Bâle, doivent provenir d'un même sarcophage illustrant les événements de Corinthe. Nous signalons également l'existence d'un troisième fragment (ASR, III, 3, p. 544 n° 470), provenant de mêmes fouilles qui re présente la partie inférieure d'un corps drapé (d'un homme?), avec à
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JASON ET MÉDÉE
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droite un petit reste de la draperie d'une figure assise peut-être fémi nine. Il appartiendrait peut-être à la partie droite de la scène de la remise des cadeaux. 24 - Sarcophage entier avec son couvercle.
Bâle. Antikenmuseum. Inv. BS 203. Acquis en 1962. Marbre blanc à cristaux moyens, probablement d'Asie Mineure. Cuve : H. 65cm (devant), 55cm (derrière); L. 217cm; 1. 65cm. Couvercle : H. 30cm; L. 137cm (en bas), 126cm (en haut); 1. 61cm. Hauteur des figures 60cm (cuve), 25cm (couvercle). La cuve est à peu près bien conservée. Il existe cependant une assez grande cassure horizontale en haut à droite de la face principale, qui a en levé la tête de la Médée de la troisième scène. Il y a aussi quelques petits dommages : la main droite de Creuse mourante est cassée; à la troisième scène le pied de l'enfant de gauche et le corps de l'autre ont disparu; la tête de Médée, sa main droite ainsi que quelques parties de sa robe sont cassées; les corps des serpents de la quatrième scène sont eux aussi endommagés. La partie gauche du couvercle manque, il est endommagé d'une cassure verticale et d'une autre oblique en bas à gauche. Date : vers 190 (M. Schmidt) * 200-210 Schmidt, Medeasarkophag, passim; RS, p. 87, 153, 159, 262, fig. 181; H. Jung, «Zur Vorgeschichte des spätantoninischen Stilwandels» MWP, 1984, p. 59-74, fig. 4. Figures 40 - 47 Couvercle : épisodes de Colchide Cuve : épisodes de Corinthe. 25 - Couvercle d'un sarcophage d'homme (?). Marseille. Musée Borély. Offert au Musée avant 1834 par Famin. Marbre blanc. H. 90cm; L. 158cm; 1. 47cm. Couvercle de sarcophage en forme de toit à double pente. Le relief se trouve dans le fronton du petit côté. Une partie de la moulure horizontale du fronton, son angle droit, ainsi que la partie supérieure de l'acrotère gauche sont endommagés. Date : basse époque gallo-romaine (Espérandieu) * 230-250 ASR, II, n° 203, pi. LXV; Espérandieu, Recueil général, p. 60 n° 64; RS, p. 299. Figure 48-50. Infanticide.
CHAPITRE II
ANALYSE STYLISTIQUE ET CHRONOLOGIE DES SARCOPHAGES
Les exploits et les aventures de Jason en Colchide, et sa ren contre avec Médée, ainsi que leur vie tumultueuse à leur retour en Grèce, ont inspiré aussi bien les poètes grecs et latins que les plasti ciens. Le cycle de ces deux personnages mythologiques est représenté sur un bon nombre de documents figurés d'époque grecque et impér iale1. Les sarcophages d'époque impériale décorés d'un ou de plu sieurs épisodes du cycle constituent un groupe, restreint par le nombre d'exemplaires recensés, mais homogène par l'iconographie. De surcroît, il se prête aisément aux recherches sur la plastique im périale. Le nombre total de sarcophages présentés dans ce travail s'élève à vingt-cinq, y compris les fragments2. La grande majorité de ces documents provenant d'Italie, il est généralement admis qu'ils ont été produits par des ateliers de Rome; mais on ne saurait nier l'importance de ceux d'Ostie. En revanche, 1 Les œuvres figurées connues de toutes les époques sont mentionnées et comparées entre elles dans les différents chapitres d'iconographie. 2 C. Robert, Die antiken Sarkophag-réliefs, volumes II et 111,3 avait recensé seize documents; depuis d'autres ont été identifiés. Nous l'avons fait pour deux documents nouveaux : le fragment d'Ostie, Musée Inv. 10258 (n° 23a-b, fig. 3839) et celui du Palazzo Primoli, à Rome (n° 16, fig. 27). Pourtant, il existait quel ques autres exemplaires actuellement perdus, pour lesquels nous ne possédons pas de documentation photographique. Ainsi un sarcophage illustrant le cycle de Médée à Corinthe se trouvait jadis aux pieds du grand escalier du Palazzo Gug lielmi à Civitavecchia qui a été détruit lors la seconde guerre mondiale (sur ce sarcophage disparu, voir Schmidt, Medeasarkophag, n. 4; ainsi que D. L. Page, Euripides, Medea, Oxford, 1938, p. LXVI n. 1 que l'auteur mentionne comme «a fine example»). Un fragment représentant probablement la fuite de Médée se trouve aussi à Ostie, à la Société Aldobrandini Inv Aid. 53, mais il nous a été im possible d'en savoir plus, ou d'avoir une photo. Il s'agirait d'un fragment compre nant l'angle droit de la face principale ainsi qu'une partie du petit côté droit; voir Schmidt, Medeasarkophag, p. 48 n. 56. Enfin nous devons mentionner qu'un frag ment, œuvre d'un faussaire, est apparu sur le marché des antiquités à Rome, Fig. 51. On y aperçoit à gauche la partie inférieure de la scène de la remise des ca deaux à Creuse, mais sous le siège de Creuse figurent des vases avec des fleurs et à côté d'un des pieds du suppose Créon, un masque de théâtre, une couronne et d'autres objets. Sur ce sarcophage, voir RS, p. 634 n. 68.
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JASON ET MÉDÉE
deux d'entre eux proviennent de régions éloignée de la capitale : la Gaule et l'Asie Mineure. La fourchette chronologique dans laquelle se placent nos exemplaires n'est pas très large3; leur production se situe entre la fin du règne d'Hadrien et le début de la période sévérienne. Comme nous le verrons par la suite, la plus grande partie de la série appartient à l'époque des Antonins (surtout entre 150 et 180), d'Antonin le Pieux à Marc Aurèle. La plupart des exemplaires (seize) a déjà été récensée par C. Ro bert qui en donnait une description détaillée. Leur datation, pourt ant, restait vague; souvent le deuxième siècle était cité sans autre précision. Dans sa synthèse, G. Koch4 place le groupe dans le IIe siècle. Puisqu'aucune information externe ne peut nous aider à dater ces œuvres, car leur contexte archéologique est presque toujours i nconnu5 et que ces sarcophages ne portent pas d'inscription, il faut, afin de pouvoir leur donner une place chronologique plus précise dans l'art impérial, se fonder sur leur étude stylistique ainsi que sur la comparaison avec des sarcophages appartenant à d'autres séries iconographiques. Pour la forme des cuves, ils appartiennent tous au groupe à cuve rectangulaire. Aucune cuve en forme de lènos ne représente le cycle qui nous intéresse. Un listel détermine les bords inférieur et supé rieur des panneaux. Le couvercle est aussi de forme rectangulaire, avec quelquefois des masques cormiers. Période Antonine Règne d'Hadrien (117-138) Nous plaçons en tête de la série le fragment appartenant à un sarcophage à guirlandes (n° 1, fig. 1) aujourd'hui disparu, et que nous datons d'un peu avant la fin du règne d'Hadrien, vers 125-1306. 3 La série est considérée par G. Koch dans RS, p. 159 comme constituant «eine geschlossene Gruppe». 4 Voir dans RS, p. 153-154, 159-160. 5 En effet le contexte archéologique est connu seulement pour deux de nos exemplaires : celui de Rome, Musée National Romain, Inv. 75248 (n° 8) qui a été trouvé dans une petite chambre funéraire, au Nord de la Porte Majeure et conte naittrois squelettes, alors que celui de la catacombe de Prétextât (n° 12) a été trouvé dans la catacombe même. 6 II s'agit à notre connaissance de l'unique exemplaire de sarcophage à guir landes qui représente un épisode du cycle de Médée. Croisille, Poésie et art, p. 55 n° 1, n. 217-18 ne reconnaît pas le type du sarcophage et cite la scène comme un cas à part. Les restes de la chevelure de l'Eros porteur de la guirlande, la guir lande elle-même, et la «lunette» dans laquelle se situe la scène sont à notre avis des arguments inébranlables pour l'identification. Ce fragment est daté habi tuellement de 130-50, voir RS, p. 265. Il a été dessiné pour la première fois au
ANALYSE STYLISTIQUE ET CHRONOLOGIE
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Malgré l'état fragmentaire de l'œuvre, la facture de la guirlande et de la scène figurée nous aident à la dater. La guirlande est touffue, composée de trois rangs de fruits (pommes, grenades, pommes de pin, grappes de raisins), et de fleurs assez grosses, d'épis de blé et d'une feuille de vigne. Tous les éléments sont traités avec beaucoup de minutie et témoignent de l'observation du monde végétal, ce qui reflète les goûts de l'époque7. L'attache se termine par des bandel ettes ondulées, aux extrémités élégamment tordues et aplaties qui sont de plus striées. Cette forme de guirlande a des parallèles sur deux sarcophages du même type provenant d'Ostie; le premier de la Via Labicana à sujet dionysiaque8, daté de la période 125-130, pré sente exactement les mêmes formes, mouvements et stries des band elettes; les fruits sont disposés de la même manière tandis que la
XVIIIe siècle par V. Franceschini, (cf. A. F. Gori, Inscriptionum Antiquarum Graecarum et Romanarum quae Extant in Etruriae Urbibus III, I, Florence, 1743, pi. XIII), comme étant une plaque continue, à la partie gauche de laquelle figu raient des Centaures marins et des Nymphes tenant un coquillage, d'où émerge le buste d'une femme. Il est très aisé d'apercevoir que les deux scènes appartiennent en effet à deux fragments indépendants l'un de l'autre, non seulement à cause de la différence iconographique, mais également à cause de la forme arrondie du bord droit du fragment. Le fragment de la scène marine a réapparu en 1965 dans le marché des antiquités à Rome, voir H. Sichtermann, «Beiträge zu den Meer wesensarkophagen», AA, 1970, p. 217, pl. 4-6, la découpe du bord gauche pouvait coïncider avec le fragment qui nous intéresse ici; le genou de la femme de gauche dépasse la cassure; sur le dessin on voit que ce même genou débordait sur la guir lande à gauche. Les deux fragments ont été taillés pour pouvoir être assemblés côte à côte sur un bâtiment. Tandis que le fragment de la scène marine a été daté vers 225-275 par H. Sichtermann, op. cit., p. 218 le fragment de Médée est à s ituer à notre avis entre 125-130, ce qui accroît l'écart chronologique entre les deux exemplaires. Ce type de sarcophage pouvait représenter sur sa face principale entre une et quatre guirlandes. Sur les sarcophages à guirlandes voir M. Honroth, Stadtrömische Girlanden, Vienne, 1971, passim; ce livre a pourtant été contesté, ainsi voir également les comptes rendus de P. Kranz, Gnomon 47, 1975, p. 77; et de W. H. Gross, Gymnasium 83, 1976, p. 83-85 ainsi que l'étude som maire mais très intéressante dans RS, p. 223-235. Etant donné l'état de notre fragment nous ne pouvons pas savoir combien de guirlandes, donc combien de scènes, comportait ce sarcophage; nous ignorons aussi le sujet iconographique des autres scènes, ainsi que l'emplacement exact de notre fragment dans l'e nsemble. C. Robert dans ASR, I, n° 193, le décrit comme appartenant à la partie gauche du sarcophage, ce qui nous paraît tout à fait incertain; sur les sarco phages à récit continu cette scène figure toujours à l'extrémité droite des pan neaux. La longueur de notre fragment étant de 84 cm, nous pouvons imaginer qu'il y avait deux guirlandes, donc deux scènes, ce qui lui donnerait une longueur totale d'environ 2 m, ce qui est tout à fait normal. 7 Sur le goût pour les formes végétales à l'époque d'Hadrien, voir Turcan, Sarcophages romains, p. 133-4. 8 Pour le sarcophage de la Via Labicana, voir Turcan, Sarcophages romains, p. 126-129; 133 et s., pl. 1.
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même feuille de vigne dessinée avec soin enveloppe la guirlande dans sa partie haute. Le second sarcophage, conservé au Musée d'Ostie Inv. 1139 appartient à la même époque et comporte une guir lande, soutenue par deux Erotes, de composition très proche de celle de notre exemplaire. Sur notre fragment, la scène qui représente Médée fuyant après le meurtre de ses enfants se situe au-dessus de la guirlande sur un sol rocheux, comme c'est le cas sur les sarcophages à guirlandes de l'époque que l'on vient de citer. A droite, près de l'attache, on aper çoit quelques boucles d'un personnage qui devait tenir la guirlande, un Eros à notre avis. La forme de ce type de sarcophage permet une composition aérée, développée dans le sens de la largeur. Le trait ement plastique enfin de la scène figurée nous offre un bon nombre de caractéristiques de l'art des années 125-130 : le chignon de Médée placé assez haut et strié avec élégance. La chevelure du cadavre en fantin sur son dos est traitée avec minutie et souci du naturel, ainsi que la rondeur des volumes et la légèreté des draperies. En dernier lieu, le sol rocheux incliné rend la scène plus naturelle.
Règne d'Antonin le Pieux (138-161) Six exemplaires peuvent être datés du règne d'Antonin le Pieux, ca 130 à 160. Parmi eux la majorité - cinq - datent plus précisément du milieu du siècle (autour de 150). Il s'agit des cuves de Berlin (n° 2, fig. 2-4), Mantoue (n° 3, fig. 5), Paris Louvre Ma283 (n° 4, fig. 6) et Louvre Ma410 (n° 5, fig. 7) et d'un fragment de Turin (n° 6, fig. 8)10. Les trois premières cuves sont décorées des mêmes épisodes co rinthiens et sont également composées de la même façon. Les f igures assez lourdes occupant toute la hauteur du panneau sont ran gées sur un seul et même plan, et se détachent du fond parfois orné d'un παραπέτασμα, d'une guirlande ou d'une stèle hermaïque. Les personnages se juxtaposent les uns à côté des autres. Certains d'entre eux comme Jason sont encore très proches des modèles grecs réintroduits sous Hadrien, comme cela se laisse voir dans le modelé des musculatures et le rendu plastique des formes. Les corps
9 Sur l'exemplaire du musée d'Ostie Inv. 113, voir M. Honroth, Stadtrö mische Girlanden, Vienne, 1971, p. 85 n° 81. 10 II s'agit des cuves : n° 2=Berlin, Staatliche Museen Inv SK843b; n° 3=Mantoue, Palazzo Ducale; n° 4=Paris, Musée du Louvre Ma283; et des fragments des cuves n° 5=Paris, Musée du Louvre Ma410; n° 6=Turin, Musée archéologique, Inv. 583(?).
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des personnages soulignent des axes verticaux qui sont les lignes principales de la composition. Les plis des draperies légères et presque transparentes sont délicats jusqu'au fignolage, comme par exemple ceux de la figure de Creuse assise. Le traitement plastique des coiffures relativement courtes, souples et ondulées, est animé par le même souci du travail fini. Ces caractéristiques se retrouvent très aisément sur de nombreux sarcophages à sujets dionysiaques de la même période, comme sur le sarcophage de Rome, Musée Natio nal Romain Inv 1303 n représentant un thiase, ou alors celui de Vé rone12 avec Dionysos, Ariane et un cortège où les lignes verticales prédominent et où le frémissement des draperies anime la composit ion. Le même rendu plastique des formes se retrouve sur le sarco phage de Méléagre à Istanbul, Musée Archéologique Inv. 210013, bien que le récit impose une composition différente. Pourtant, malgré les caractéristiques communes visibles sur les trois cuves, qui illustrent le style de l'époque la qualité du travail n'est pas égale. Ainsi on ne peut que remarquer la qualité d'exé cution de la cuve de Berlin (n° 2) aussi bien dans le détail que dans la conception générale de la composition, alors que les deux autres d'un travail moins gracieux et moins précis, ont été peut-être pro duits dans un atelier secondaire14. Le plan unique et la verticalité des figures se retrouvent égal ement sur la cuve fragmentaire du Louvre (n° 5, fig. 7) et sur le fra gment de Turin (n° 6, fig. 8) où figurent les épisodes colchidiens. Le dernier peut être aisément daté de 150 par comparaison avec le pre mier, à cause du modelé de la musculature de Jason et du trait inci séutilisé pour délimiter le contours des figures. Pourtant sur les deux panneaux le relief reste plat, mais la composition (surtout celle du n° 5) est à la fois sobre et équilibrée. Un fragment de cuve emmuré au Palazzo Vescovale ou Epi scopio d'Ostie (n° 7, fig. 9) date également du milieu du siècle. On
11 Pour le sarcophage de Rome voir ASR, TV, II, p. 180-182 n° 73, pi. 81, 1, 83 et Turcan, Sarcophages romains, p. 157 et s., pi. 15b. 12 Pour le sarcophage de Vérone voir ASR, TV, p. 198-199, n° 83 et Turcan, op. cit., p. 149-156, pi. 8c, 9. 13 Pour le sarcophage d'Istanbul, voir ASR, VI, p. 110, n° 81, pi. 68-72. 14 L'élégance et l'exactitude d'exécution de la cuve de Berlin la rapprochent également d'une cuve à lènos représentant un thiase conservée au Vatican, Belvé dère, voir ASR, TV, I, p. 126-128, n° 35, pi. 30 que l'auteur place entre 140 et 150. Notre Médée fuyant sur son char porte une tunique fluide et transparente animée par des jeux des plis fins et précieux, comme la Mènade dansante à gauche de la tête du lion sur la cuve du Vatican. De surcroît on remarque les mêmes coiffures courtes et lourdes encadrant joliment les têtes des personnages sur les deux exemplaires.
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aperçoit une figure féminine, drapée, très endommagée, en train de monter sur un char tiré par deux dragons ailés dont il ne reste que quelques parties des ailes et, sur le fond du relief, la ligne des corps sinueux. La draperie nerveuse qui colle au corps de la femme est un élément qui permet de proposer comme datation l'année 150. Pour tant ce document reste pour nous douteux et serait peut-être à ex clure de la liste des sarcophages de Médée15. Nous traiterons des problèmes iconographiques et de leur solution éventuelle dans le chapitre où nous analysons la fuite de Médée. Trois exemplaires peuvent être datés de la fin du régne d'Antonin vers 160 : la cuve à couvercle de Rome, Musée National Romain, Inv 75248 (n° 8, fig. 10-12) le couvercle du Vatican, Inv 1242 (n° 9, fig. 13) et le fragment de Rome, Musée du Capitole (n° 10, fig. 14). Sur le premier, le fond chargé de plusieurs παραπετάσματα et surtout l'alourdissement des figures nous aident à le placer vers 160. Les figures sont tassées sur elles-mêmes jusqu'à paraître naines, alors que les têtes des personnages sont trop grosses, ce qui caractér ise plutôt les figures de l'époque de Marc Aurèle16. Le couvercle du Vatican de forme très allongée (193 χ 31) comporte plus de scènes et de personnages que d'habitude. Le pan neau est limité à gauche par un pilier d'arcade, comme c'est souvent le cas sur des couvercles de cette époque17. Le sculpteur organise de façon maladroite cet espace trop long en essayant de meubler le vide entre les figures par un παραπέτασμα trop étiré. Produit de qualité inférieure, sa composition n'est pas maîtrisée et les personnages semblent n'avoir aucune relation entre eux. Le fragment de cuve du Musée du Capitole est un autre docu-
15 Ce document a été identifié par C. Robert, ASR, II, n° 198, suivi aussi par Schmidt, Medeasarkophag, p. 36, 45 n. 4 comme Médée fuyant sur le char merv eilleux. L'état de conservation du document ne permet ni de savoir ce qu'il y avait à gauche ni d'être sûr que les corps des serpents se trouvaient réellement à l'extrémité droite du panneau; on ne sait pas non plus si une autre scène ne figu rait pas à droite. Entre les deux replis inférieurs des dragons le bord du panneau semble bien rectiligne, mais pas vertical; plus haut se remarque une grande cas sure. Nous doutons que cela puisse suffire pour conclure en faveur d'un sarco phage du cycle de Médée. 16 Ces caractéristiques se retrouvent sur plusieurs sarcophages de la fin du règne d'Antonin le Pieux, autour de 160, voir Turcan, Sarcophages romains, p. 146-147, comme par exemple celui de Dionysos à Leningrad, à l'Ermitage voir ASR, III, p. 381-2, n° 212, pi. 220, 1. 17 Pour des piliers semblables sur des couvercles de la même époque voir les sarcophages de Méléagre : Rome, Musée du Capitole, ASR, VI, p. 85, n° 1, pi. 1; Bâle, Antikenmuseum, GMRS, p. 106-107, n° 73, pi. 73-77; ou Rome, Musée Nat ional Romain, ASR, VI, p. 113, n° 89, pi. 80a.
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ment de qualité secondaire qui peut être daté de la même époque18. La composition de la remise des cadeaux à Creuse est organisée se lon les modèles déjà connus, mais elle est assez chargée. De plus les personnages semblent poser sans vie, leur mouvements sont figés. L'exécution est assez maladroite; les plis des draperies sont plats, à peine incisés à certains endroits. Les bras et les mains des person nagessont mal dessinés, disproportionnés, presque aplatis. La pos ture de Creuse assise est tordue. Malgré les effets anecdotiques (dans le décor du siège ou du bouclier), cette pièce reste un produit d'atelier secondaire. On place également vers 155 un sarcophage d'enfant d'Antalya (n° 11, fig. 15), l'un des rares exemplaires, dans notre série, de prove nance provinciale. Il appartient à la série très bien datée, dite de Torre-Nova, des sarcophages à pilastres d'angle, originaires d'Asie Mineure19. L'atelier serait à rechercher en Pamphylie ou en Phrygie20. La face principale qui nous intéresse représente un épisode du mythe de Médée, mais d'une composition renouvelée. Règnes de Marc-Aurèle et de Commode (161-192) La fin de la période antonine est illustrée dans notre série par une œuvre majeure : le sarcophage entier de la catacombe de Prétext ât (n° 12, fig. 16-23), décoré d'épisodes colchidiens et corinthiens. Sur ce sarcophage daté par M. Gütschow21 d'entre 150 et 170/80 se manifestent toutes les caractéristiques du style de l'époque de MarcAurèle. Cette œuvre de bonne facture d'un atelier de la capitale peut être donc placée vers 170 et annoncer un grand nombre de change ments, perceptibles dans les œuvres postérieures. Tout d'abord, bien que sur la face principale figurent quatre scènes juxtaposées, la composition est organisée autour de Jason qui nu, vu de dos, dé croche la toison d'or; cette figure médiane attire le regard non seul ement à cause de la posture, - elle est à genoux sur un rocher -, mais aussi à cause de la qualité plastique et de l'harmonie de la musculat ure. De surcroît, deux des autres personnages de chaque côté sont tournés vers lui, ce qui accentue son rôle de figure axiale. Deux f igures héraldiques de Saisons sur le couvercle juste au-dessus de Ja-
n° 202 18 Le et ASR, fragment III, 3, dup.Capitole 563 n° 201, est en1. général daté de la fin du siècle, voir ASR, II, 19 La premier à avoir remarqué la série de Torre-Nova est R. Morey, The Sar cophagus of Claudia Antonia Sabina, SardL· V, I, Princeton, 1924, p. 23-25. Pour la dernière étude sur ce sujet, voir Waelkens, Dokimeion, p. 50-55 et 105-106. 20 Alors que Wiegartz, Säulensarkophage, p. 42-49 n. 70 pense à une origine pamphylienne de l'atelier, Waelkens, Dokimeion, p. 50-55 et 105-106 le situe en Phrygie avec pour centre Dokimeion. 21 Voir M. Gütschow, Atti P.A.R.A., p. 44-56.
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son le soulignent davantage. La mise en place des personnages en fonction du motif central se rencontre sur les sarcophages à clipeus du cycle de Dionysos de la même période où évidemment une telle composition est imposée davantage par l'iconographie22. Les person nagesse détachent bien du fond nu. Le mouvement est plus animé que sur les exemplaires des périodes précédentes à cause des quel ques draperies qui flottent gracieusement. Le déhanchement léger et harnonieux des deux figures féminines entourées de leurs voiles flot tants, (Médée dans les deux cas), renforce l'impression de mouve ment.Les barbes et les cheveux sont rendus plastiquement d'un tra vail au foret assez soigné, mais les visages restent immobiles avec une expression fixe et vague. La cuve du Kunsthistorisches Museum de Vienne (n° 13, fig. 24) où figurent seulement deux scènes de Colchide peut être datée ca 170-180. La mise en place des figures sur un fond nu peut paraître proche du style du milieu du siècle, mais le travail des coiffures courtes et des barbes23 et surtout la figure de Médée à l'extrémité droite est très proche tant par sa posture que par le traitement de sa draperie et de sa coiffure de celles de la cuve de la catacombe de Pré textât. Un argument complémentaire mais non parmi les moindres pour sa datation entre 170 et 180 est sa longueur très restreinte (160 χ 54), ce qui donne un rapport de 2,9. Un fragment de sarcophage qui se trouvait jadis à Cannes à la «Villa Faustina» (n° 14, fig. 25), où figurent une partie du lit de Creuse mourante, les enfants qui courent et Médée tenant l'épée, peut être daté comme le précédent exemplaire des années 170 à 180. Malgré son état fragmentaire, la pièce est caractérisée par le person nage de Médée habillée d'un chiton léger et fluide qui s'arrête gra cieusement sur sa poitrine, comme c'est le cas pour un bon nombre des sarcophages de la même époque. Elle est caractéristique de la décennie 170-180 par son étirement vers le haut, comme si elle tenait sur le bout de ses orteils, et également par l'inclinaison de sa tête et l'expression rêveuse et vide du visage. Le fragment de cuve des Musées du Vatican Inv 2326 (n° 15, fig. 26) est, elle aussi, une œuvre de très bonne facture que l'on peut dater des environs de 170-18024. Le dessin des draperies est remar-
22 Voir par exemple les sarcophages à clipeus du Latran Turcan, Sarcophages romains, p. 175 et ss, pi. 18b. 23 La coiffure courte, toute travaillée au foret du deuxième homme de gauche de notre exemplaire est identique à celle de Méléagre chassant le sanglier sur le fragment de Rome, Villa Medici, ASR, VI, p. 96, n° 33, pi. 7b qui est daté aussi autour de 180. 24 Le fragment du Vatican était daté par C. Robert ASR, II, n° 197 de l'époque antonine sans autre précision.
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quable de netteté et d'équilibre. Pourtant le nombre des personnages plus important (six plus une stèle hermaïque), et la présence du πα ραπέτασμα chargent la composition. La jeune fille coiffée du chignon derrière Creuse est une figure caractéristique de ces années. D'autre part le visage ridé de la vieille nourrice donne du réalisme à la scène selon les principes de l'époque. La coiffure et la barbe de Créon à droite, courtes et bouclées, traitées en volume sont très proches de celles du compagnon de Méléagre sur le sarcophage d'Ostie25, daté de la même période. La hauteur importante du fra gment enfin (84 cm) est un élément supplémentaire pour sa datation autour de 170-180. Le fragment emmuré au Palais Primoli à Rome, Via dei Soldati (n° 16, fig. 27) sur lequel figure seulement le corps jusqu'aux hanches d'un homme nu, casqué les deux bras tendus en avant, où nous reconnaissons Jason, appartient sans doute à la même époque. On placera aussi vers 180, un autre fragment jadis apparu sur le marché des Antiquités en Suisse (n° 17, fig. 28) dont on ignore ac tuel ement le lieu de conservation. Il s'agit d'un fragment de l'extremité gauche d'une cuve appartenant à la scène de la remise de ca deaux à Creuse. Une femme à gauche est habillée du même chiton élégant que la Médée du fragment de Cannes (n° 14). Le traitement de la coiffure reflète le goût du soin et de la complication de cette époque : un foulard couvre le haut de la tête tandis que la masse des cheveux est tirée en formant un chignon lourd, haut placé sur la nuque dont les mèches sont traitées en un volume élégant. Par ail leurs les figures sont plus détachées du fond; cela crée un jeu de clair-obscur qui commence à apparaître sur les sarcophages de cette période26. Les deux petits côtés provenant probablement d'un même sarco phage conservés à Rome au Musée National Romain Inv. 8647 (n° 18, fig. 29) et 8648 (n° 19, fig. 30) peuvent être datés également du règne de Marc-Aurèle27. Le relief qui est très plat ne peut, à notre avis, être pris comme un élément permettant une datation haute car très souvent les petits côtés ne reçoivent pas un traitement aussi soi gné que le panneau de la facade principale28. En revanche on ob25 Le sarcophage de Méléagre, Ostie, Musée Inv 18621, voir ASR, VI, p. 96 n° 32, pi. 8-9. 26 Pour le jeu du clair-obscur voir par exemple le sarcophage de Méléagre au Vatican, Chiaramonti Inv. 1224, ASR, VI, p. 116, n° 98, pi. 86 mais qui est d'un travail moins abouti que notre exemplaire, ou alors le fragment du Metropolitan Museum à New York, Inv. 20187, ASR, VI, p. 114, n° 93, pi. 85a, b qui est de qual ité égale au notre. 27 Jusqu'à maintenant ces deux reliefs ont été datés de 150. 28 II existe de nombreux exemples sur lesquels la qualité du traitement des petits côtés ne peut égaler celle de la face principale : voir aussi quelques sarco-
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serve que dans les deux reliefs d'exécution assez sommaire, la composition reste simple, soulignée par des verticales; les formes ne sont pas bien maîtrisées; les parties nues des corps sont mal dessi nées et les draperies tombent lourdement. Ces traits n'expriment que la mauvaise qualité du travail ou le désintérêt de la part du sculpteur pour les petits côtés et non pas le style d'une époque29. Les cuves d'Ancóne (n° 20, fig. 32), Rome Musée National Ro main Inv. 222 (n° 21, fig. 32-34) et Naples Inv. 3257 (n° 22, fig. 3537) peuvent être datées de la période 170-18030. Alors que le nombre des scènes représentées est identique à celui des cuves des groupes précédents, pourtant certains points stylistiques communs les di fférencient du groupe placé entre 150-160 et les situent autour de 170180. La composition reste inchangée, hormis quelques détails, mais l'impression qui se dégage de ces trois œuvres est une impression de mouvement plus rapide et d'un «désordre». Les personnages, tout en ayant des attitudes semblables, font des mouvements un peu plus accusés; les têtes se penchent un peu plus; les draperies sont plus nerveuses, plus fluides, les παραπετάσματα sont ornés des plis plus creux. Le format allongé de la cuve d'Ancóne (219 x 50) de rapport 4,3 permet l'introduction des personnages supplémentaires, mais la jeune fille derrière Creuse assise est une figure typique des années 170-180 par son vêtement et sa coiffure ainsi que la femme débout derrière les enfants31. La cuve de Rome 222 (n° 21, fig. 32) de format aussi allongé (220 χ 50) que celle d'Ancóne et de rapport 4, 4, présente la même f igure de jeune fille derrière Creuse assise. La cuve de Naples (n° 22, fig. 35) est un spécimen encore plus caractéristique de la période de
phages du cycle de Méléagre, celui de Florence, Musée des Offices, ASR, VI, p. 93, n° 27, pi. n° 26, 38a,pi.52c. 39, 41, 52b, ou alors celui de Pisa, Campo Santo, ASR, VI, p. 94, 29 Quelques éléments iconographiques (la forme du rocher, celle de l'arbre) mais surtout le relief aplati, le traitement des draperies, des coiffures de nos deux reliefs se retrouvent sur les petits côtés d'un sarcophage du cycle de Dionysos, Naples, Musée National, Inv. 146 où l'on remarque la différence de traitement et de soin porté au relief de la face principale qui est d'assez bonne éxecution alors que celle des petits côtés reste fruste. 30 La cuve d'Ancóne n° 20 était datée du milieu de IIe siècle par C. Robert, ASR, II n° 199 et de 170 à 200 par Koch-Sichtermann RS, p. 159, 262. Celle de Naples n° 22 était datée du IIe siècle par De Franciscis, Guida del Museo Archeol ogicoNazionale di Napoli2, Naples, 1967, p. 28; et celle de Rome n° 21 de la pre mière moitié du IIe siècle par C. Robert, ASR, II, n° 201, et de 170 à 200 par Koch Sichtermann RS, p. 159 η. 1. 31 La même figure de jeune fille existe sur deux sarcophages du cycle de Mél éagre, Paris, Louvre Ma539, ASR, VI, p. 120-121, n° 116, pi. 103, 106, 109a et celui de Wilton House, ASR, VI, p. 123-124, n° 122, pi. 103a, 104b, 105b.
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Marc-Aurèle par son format (221 χ 71) qui a gagné en hauteur. Ainsi les personnages sont aussi plus élancés, mais cela impose par ai lleurs une économie de la composition. C'est l'exemplaire qui comporte des personnages les moins nombreux dans chaque scène : deux παραπετάσματα savamment placés encadrent le jeune homme aux pavots et Creuse mourante pour mieux souligner leur import ance. L'effet est immédiat, surtout pour la figure de Creuse, qui est de plus la figure médiane du panneau. Dans le troisième volume des ASR de C. Robert, figurent trois fragments provenant des fouilles d'Ostie de 1831-1834 (n° 23a-b, fig. 38-39)32. L'œil exercé du savant allemand a reconnu dans l'un des fragments des éléments de l'iconographie des sarcophages de Médée (le jeune homme tenant les pavots, les figures d'enfants arra chées au premier plan), mais il ne faisait pas le rapprochement entre les trois fragments. Il ne nous a été possible de retrouver qu'un seul des trois fragments, conservé actuellement au Musée d'Ostie Iny. 1025833. La coiffure de l'homme à côté du pilier d'arcade traitée par des mèches courtes striées et surtout la présence de ce pilier d'arcade orné d'un chapiteau sont des éléments de datation ca 180. De tels piliers figurent sur un grand nombre de sarcophages à sujets mythologiques34 qui sont datés du dernier quart du deuxième siècle de notre ère. Début de la période sévérienne (193-210) Une œuvre majeure tant par la qualité d'exécution que par l'état de conservation vient clore la liste chronologique des sarcophages de Médée issus des ateliers de Rome : il s'agit du sarcophage de Bâle, Antikenmuseum Inv BS 203 (n° 24, fig. 40-47) acquis en 1962. On croyait avant son acquisition que la série s'achevait sous le règne de Commode35, mais il nous semble que cette œuvre peut se situer dans la période sévérienne, au tout début du IIIe siècle, un peu après 200. Alors que le couvercle présente un relief assez «traditionnel», avec des scènes de Colchide36, la cuve est décorée selon la mode du nouveau siècle naissant. Elle a gagné en hauteur (65 cm), les figures elles-mêmes de 60 cm sont élancées, alors que la longeur (137 cm) a diminué. Cependant frappante est l'impression de surcharge et d'étouffement qui se dégage de la composition. Celle-ci, comme c'était 32 Pour les fragments d'Ostie voir ASR, 111,3 p. 543 et 544 n° 464, 465. 33 Sur la proposition iconographique que nous faisons, voir p. 18-20. 34 Pour les piliers supportant une arcade, voir notre chapitre sur le meurtre des enfants note 24. 35 Schmidt, Medeasarkophag, passim et RS, p. 87, 153-159. 36 Voir page 61-63 notre interprétation de la scène de gauche du couvercle.
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la mode alors, est organisée sur plusieurs étages. Les figures au pre mier plan, assises ou de taille plus petite à cause de leurs postures, sont resserrées par une foule de personnages qui émergent du fond à un niveau plus haut. La plupart des figures sont solidement déga gées du fond mais d'autres sont traitées dans un relief assez plat : ce la crée l'impression d'une foule grouillante. Les personnages ne posent plus les uns à côté des autres, comme c'était jusqu'alors le cas, mais s'émeuvent avec de contorsions, se regardent, se touchent, en un mot donnent l'impression de vie. Non seulement les volumes sont bien dégagés du fond, mais le traitement des surfaces est aussi accentué; les barbes, les cheveux sont striés de mèches profondes, tourmentées; les positions des personnages et les draperies entortil lées sont creusées avec une élégance un peu trop appuyée. La composition organisée sur plusieurs étages, le chevauchement des figures, le grand nombre des personnages, le jeu très prononcé de clair-obscur, les attitudes contrastées des corps incitent à proposer une date légèrement postérieure à 200. Le plus récent exemplaire qui clôt la série est un fragment d'un petit côté (en forme de fronton) du couvercle de sarcophage d'un atelier provincial, conservé à Marseille au Musée Borely (n° 25, fig. 48-50). Dans le fronton figure Médée portant l'épée, entourée des deux enfants qui implorent sa tendresse. Sur le coté droit figure le portrait du défunt. Il est représenté selon la mode des stèles en vogue à la même époque en Gaule37; il est vu de face portant la tu nique et le manteau, à la seule différence que l'espace du couvercle ne permet de sculpter qu'un buste. C'est un homme âgé, au front dé garni et profondément ridé, à la chevelure courte et bouclée. Il re garde droit devant lui. Ce portrait permet de préciser la date de la pièce autour de 240-250. Le relief du fronton malgré l'influence gr éco-romaine en ce qui concerne le choix du sujet38 est plat, sa facture est lourde et maladroite39.
37 Sur les stèles funéraires de la Gaule, voir F. Braemer, Les stèles funéraires de Bordeaux, Paris, 1959 et C. Nerzic, La sculpture en Gaule romaine, Paris, 1989, p. 225-244. 38 Le sujet des acrotères du couvercle appartient aussi à la mythologie grecque; dans celui de gauche figure Ulysse reconnu par sa nourrice, et dans ce lui de droite Oedipe interrogé par le sphinx. 39 J.-J. Hatt, «Les croyances funéraires des gallo-romains d'après la décora tion des tombes», RAE 21, 1970, p. 86; et Id., La tombe gallo-romaine1. Paris, 1986, p. 166 attribue ce couvercle à un atelier d'Arles, à cause de l'influence grécoromaine quant au choix du sujet; pourtant on doit noter que l'exécution du relief est beaucoup plus proche de la sculpture gallo-romaine que des sarcophages d'Arles qui se rapprochent du travail des ateliers de la capitale. D'autre part, les mythes grecs décorent la face principale alors que les petits côtés sont laissés à des sujets concernant la vie du défunt : scène de mariage, un portrait.
ANALYSE βΤΥίΚΉΟϋΕ ET CHRONOLOGIE *
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Mis à part les observations d'ordre stylistique qui nous ont servi à réviser la chronologie de ces sarcophages, on trouve de nombreux points communs entre ces œuvres pour la composition et l'organisa tion des panneaux. Les panneaux de façade principale, sont tous composés selon les principes du «style continu»40, comme on le voit sur un grand nombre de sarcophages de la même époque et de la même provenance. Les scènes se suivent les unes les autres, plus ou moins selon l'ordre du récit, sans coupure41; cette succession est fa vorisée par la forme rectangulaire et le format42 des cuves. Non seu lement rien ne sépare les scènes, mais elles débordent souvent l'une sur l'autre43. Un certain déséquilibre entre la place occupée par 40 J. M. C. Toynbee, The Hadrianic School, Cambridge, 1934, p. 164-165, 173, 183. En ce qui concerne le style de ces sarcophages voir G. Rodenwaldt, Über den Stilwandel in der antoninischen Kunst, Berlin, 1935; et particulièrement pour la fin de la période antonine, voir H. Jung, «Zur Vorgeschichte des spätantoninischen Stilwandels», Symposium über die antiken Sarkophage Pise 5-12/9.82, M W Ρ, Marbourg, 1984, p. 59-103. 41 Le pilier hermaïque dans la scène du meurtre des enfants ne sert pas à sé parer la scène, mais à préciser son contexte. La même remarque vaut pour le πα ραπέτασμα qui orne le fond de deux premières scènes des événements de Corinthe, il précise que la scène a lieu dans une pièce fermée, et non pas à l'ex térieur. 42 Les cuves entières se prêtent à des observations sur le format et le rapport hauteur/longueur : Rapport Date mero Lieu Dimensions 2 3 4 8 12 13 20 21 22 24
Berlin Mantoue Louvre Ma283 Rome MN75248 Prétextât Vienne Ancóne Rome MN222 Naples Bale
230 x 64 228 χ 65 228 χ 61 210x55 212x59 160 χ 54 219x50 220 χ 60 221 χ 71 217x65
3,59 3,50 3,73 3,81 3,59 2,96 4,38 3,66 3,11 3,33
150 150 150 160 170/80 170/80 170/80 170/80 170/80 210
A partir du tableau ci-dessus on constate que vers le milieu du IIe siècle le rapport de la longueur à la hauteur du panneau est au minimum de trois fois et demi, voire plus, alors que ce rapport diminue vers la fin du siècle. Pour des ob servations analogues sur le format des sarcophages, voir Turcan, Sarcophages ro mains, p. 48-51. 43 En ce qui concerne le débordement des scènes, voir par exemple la place des enfants dans la scène de l'infanticide, ou encore, Jason dans la scène de la mort de Creuse, qui pose sa main sur la main de Creuse assise. Bien évidemment dans notre étude, pour analyser chaque document, nous avons procédé comme si les scènes étaient séparées, et les «coupures» que nous avons imposées résultent
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JASON ET MÉDÉE
chaque scène se laisse observer sur nos sarcophages44. Ainsi les deux premières à gauche, (remise des cadeaux à Creuse et mort de celleci) occupent plus de la moitié du panneau, et les deux autres, (meurtre des enfants et fuite de Médée), occupent un espace plus restreint. Cela est-il dû à un calcul malencontreux de la part de l'ar tiste et à son incapacité de maîtriser l'espace de la composition, ou à un autre facteur? Comme on le remarquera par la suite, les deux premières scènes sont celles où apparaissent des éléments ayant trait à la vie du défunt (la lyre), ou aux coutumes funéraires (la guir landes de roses, la lampe), alors que les deux scènes suivantes ont plutôt une valeur mythologique et symbolique. L'artiste dans son dé sir de représenter quelques éléments de la vie réelle, aurait-il favori sé un léger déséquilibre dans la composition? Pourtant on observe aussi un déséquilibre pour les deux scènes de droite, en ce sens que la scène de la fuite de Médée, la dernière sur les panneaux, est plus développée. Le caractère merveilleux de son char est bien montré, alors que la scène où Médée médite de tuer ses enfants est resserrée entre les autres et presque cachée. Les commanditaires romains de ces sarcophages, malgré la forte valeur symbolique de la scène, avaient peut-être du mal à l'accepter, car ils étaient effarouchés par le crime de Médée. Les événements de Colchide, quand ils figurent sur la face principale d'un sarcophage, (Prétextât, Vienne, Paris : n° 12, 13, 5) présentent aussi ce déséquil ibre de la composition. Par exemple Jason, domptant les taureaux, occupe toujours beaucoup plus de place que le reste; mais l'icono graphie de la scène l'exige. Cependant ce déséquilibre s'estompe quand on considère la fa çon dont est exprimée, sur les panneaux, la tension dramatique du sujet. En effet l'expression en est excellente, surtout en ce qui concerne les événements qui se passent à Corinthe : on passe du mouvement lent de la remise des cadeaux qui prépare la vengeance de Médée, à une allure accélérée avec la mort de Creuse, puis au calme terrible de Médée avant l'infanticide, pour arriver finalement à un grand élan jusqu'à la course rapide et merveilleuse de la meurtière dans les airs. La composition des panneaux des sarcophages est inspirée des prototypes grecs, «Vorbild», dont la transmission est assurée par des moyens divers (l'existence des cahiers de modèles Bilderbücher est généralement admise)45. Ces reliefs ne sont pas uniquement ele la composition générale et de l'attitude de chaque personnage, mais aussi de la description que nous offre la tradition littéraire. 44 Sur le déséquilibre des scènes, voir J. M. C. Toynbee, op. cit., p. 164-165, 173; Baratte, Catalogue, p. 94. 45 K. Schef old, «Bilderbücher als Vorlagen römischen Sarkophage, MEFRA
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tration des textes antiques, en revanche ils témoignent de la conti nuité de l'art. On utilise des schémas iconographiques, quelquefois un peu transformés, pour accentuer le sens mythologique. Sur la frise principale des sarcophages, les scènes se mélangent, sans forc ément respecter l'ordre chronologique du récit ou les lieux, car le ré cit est supposé connu. Les formules classiques deviennent des images allégoriques, des analogies. Ainsi, Médée par sa parenté avec le Soleil est un symbole d'immortalité, alors que sa qualité de magi cienne la lie au monde des morts; le meurtre de ses enfants corres pondau tragique de la vie brève. Les exploits de Jason en Colchide symbolisent la Ptetas. Tous ces symboles sont appliqués à la vie du défunt. Quand on sait que, sur les sarcophages, on donnait souvent aux héros mythologiques les traits du défunt46, on n'est pas étonné de constater que Jason dans la scène de la Toison, sur le panneau de Prétextât et sur le couvercle de Bâle (n° 12, 24), est barbu, alors que partout ailleurs il a l'allure d'un jeune héros. Enfin, en ce qui concerne la technique de ces documents sculptés, on note une assez grande utilisation du foret, surtout pour les cheveux et les barbes, et un polissage attentif des reliefs, ainsi que l'utilisation de la couleur puisque sur la cuve de Rome MN Inv 75248 (n° 8), il existait encore jadis des traces de peinture rouge autour des colonnes et sur les ailes des dragons.
88, 1976, 2, p. 759-814 est le partisan par excellence de ces cahiers de modèles. Mais on doit considérer également la proposition intéressante de H. Froning, «Die ikonographische Tradition der kaiserzeitlichen mythologischen Sarkophag reliefs»,3dl 95, 1980, p. 322-341, où il est question de la transmission des mod èles par des objets moins encombrants et surtout moins onéreux, comme la vaisselle en métal avec un décor en relief, et même les moulages tirés de cette vaisselle; voir également notre chapitre sur la remise des cadeaux à Creuse. Sur les sarcophages en tant que copies d'oeuvres grecques, voir M. Bieber, Ancient Copies. Contributions to the History of greek and roman Art, New York, 1977, p. 215-219. 46 Sur la représentation du défunt à travers le héros : K. Schefold, «La force créatrice du symbolisme funéraire des Romains», RA, 1961, 261 surtout p. 202, ainsi que M. von Strocka, «Sepulkral-Allegorien auf dokimeischen Sarkophag en», MW Ρ, 1984, surtout p. 203-208.
CHAPITRE III
LES SOURCES LITTÉRAIRES
καθόλου δε τους παλαιούς μύθους ούχ άπλήν ουδέ συμπεφωνημένην ίστορίαν έχειν συμβέβηκε· διόπερ ού χρή θαυμάζειν, έάν τίνα τών άρχαιολογουμένων μή συμφώνως δπασι τοις ποιηταΐς καί συγγραφεοσι συγκρίνωμεν. Diodore de Sicile, IV, 44, 6 Tous les auteurs s'accordent sur le nom du père de Jason Ιάσων - : il s'agit d'Aison, qui est lui-même fils de Créthée et petitfils d'Eole. C'est ainsi que souvent Jason est appelle Aisonide1, ou Créthéide2, ou même, Eolide. En revanche, en ce qui concerne le nom de sa mère, Polymèle, ou Alcimédé ou Amphinomé, on peut distinguer plusieurs traditions3. La patrie de Jason se trouve à Iolcos, en Thessalie4, au pied du mont Pélion, dont Pagassai est le port5. Jason fut élevé sur le mont Pélion par le centaure Chiron et sa femme Chariclô, comme Achille et Aclépios. Certainement Chiron lui a enseigné l'art de la médecine (Pindare, Pythiques, IV, 211), comme on est en droit de le comprendre, par l'étymologie de son 1 Pour le nom du père de Jason, voir Hésiode {Théogonie, 993-994); Pindare (Pyth., IV, 217); Apollonios (Arg., I, 143). 2 Sur ce nom de Jason, Pindare (fr. 273); Phérécyde (fr. 58 Jacoby); Apollo nios (Arg., I, 411). 3 Les différentes traditions concernant le nom de la mère de Jason sont : 1. Polymèle, ou Polymédé, ou Polyphème fille d'Autolycos (Hésiode F18 Jacoby), et Hérodore (F104 Jacoby), de cette manière Jason se rapproche d'Ulysse qui est également un petit fils d'Autolycos. D'ailleurs l'ascendance n'est pas le seul point commun entre Jason et Ulysse. Leurs aventures aussi se ressemblent parfois : par exemple l'épisode des Sirènes, celui de Charybde et Scylla, celui des Symplégades etc. 2. Alcimède, fille de Phylacos et de la Minyenne Clymène, selon Phérécyde (F104a Jacoby); Stésichore (F54, 104b Jacoby); cette tradition démontre le «fond» minyen de la légende. Souvent les Argonautes en général, sont appelés Minyens. Et enfin 3. Amphinomé, ou Théognète, ou Rhoio, ou Skarphé, qui sont également des noms thessaliens. Pour plus de détails sur la généalogie de Jason, Seeliger, Röscher Lexikon, II, 1, 63-88, s.v. Iason, ainsi que Jessen, RE, LX, 1, 759771, s.v. Iason. 4 Sur Iolcos, voir Hésiode (Théogonie, 997); Pindare (Pyth., IV, 118); Apollo nios (Arg., l, 906). 5 Sur Pagassai, voir Apollonios (Arg., I, 260); Ovide (Met., I, 491).
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JASON ET MÉDÉE
nom : en effet Ιάσων provient d'ïacis qui signifie guérison. Selon Pindare (Pythiques IV, 111), le jeune Jason est confié par ses parents à Chiron pour ne pas être tué par son oncle Pélias qui a usurpé le pouvoir. Jason demande conseil au centaure avant de partir pour Iolcos et suivant ses conseils emmène Orphée6. Enfin quand l'e xpédition est prête à quitter la Thessalie, le centaure descend de la montagne pour saluer les héros7. Diodore (IV, 51) et le PseudoApollodore (I, IX, 28) donnent à Jason un frère. Promachos, que Pé lias tue, en même temps que ses parents, croyant que l'expédition argonautique avait échoué et voulant se débarrasser d'Aison son demifrère. Ibycos (fr. 301 Page) lui donne un sœur Hippolyté qui devient la femme d'Acaste, fils de Pélias. Médée - Μήδεια - est la fille d'Aiétès (Aimns), fils lui-même d'Hélios8; elle est ainsi la nièce de Circe la magicienne, et de Pasiphaé, femme de Minos, le roi de Crète. Sa mère est l'Océanide Idyie, ou alors la déesse Hécate9, Circé devenant dès lors sa sœur; ce qui ne fait que renforcer ses rapports avec le monde de la magie. Selon la tradition10, Médée a une sœur, Chalciopé, qui mariée à Phrixos, est bien disposée envers les Grecs, d'autant plus que ce sont ses deux fils qui plaident la cause des Argonautes auprès du roi Aiétès; elle essaie donc d'influencer Médée. Elle a également un frère, Apsyrtos, qui apparaît en la vietine dans la légende, puisque Médée le tue pour fa ciliter sa fuite de la Colchide. Sa patrie est Aia, en Colchide, région éloignée appartenant pour les Grecs au monde barbare. Une tradition bien établie attribue à Médée et à Jason deux fils, Phérès et Merméros11. Mais Hésiode, (ou le Pseudo-Hésiode) (Théo gonie, 1000) leur donne un seul fils, Médeios, mentionné également par le poète lacédémonien Kinaithon, qui selon Pausanias (II, 3, 9) leur attribuait en plus une fille, Eriopie. Homère, dans l'Iliade, bien qu'il ne parle pas directement de l'e xpédition, mentionne Eunéos, le fils de Jason et Hypsipylé, roi de Lemnos au moment de la guerre de Troie12. En revanche, dans YO-
6 Apollonios (Arg., I, 33); Hérodore, (fr. 39 Jacoby). Sur la relation de Jason avec le centaure Chiron, voir E. Robbins, «Jason and Cheiron : the Myth of Pin dar's Fourth Pythian», Phoenix (Toronto) 29, 1975, p. 205-213. 7 Apollonios (Arg., I, 553); Valerius Flaccus (Arg., I, 255). 8 Hésiode (Théogonie, 956-962); Pindare (Pythiques, TV, 8). 9 Selon Denys de Milet (fr. Tla Jacoby) et Diodore (IV, 51), Circé était la sœur de Médée. 10 Pour plus de détails sur la généalogie de Médée, voir Seeliger, Röscher Lexikon, Π, 2, 2482-2515, s.v. Medeia, et A. Lesky, RE, XV, 1, 29-64, s.v. Medeia. 11 Pour les enfants de Médée et Jason, voir la scholie à Euripide (Médée, 118); Apollodore (I, IX, 28); Pausanias (II, 3, 6); ainsi que dans notre chapitre XVII sur l'infanticide, la note 2. 12 Iliade, VII, 467-471; XIV, 230; XXI, 40; XXIII, 745-747.
LES SOURCES LITTÉRAIRES
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dyssée il fournit des renseignements plus nombreux : il évoque Pélias, roi d'Iolcos, Aiétès le frère de Circe13, la nef Argô connue de tous, Αργώ πασιμέλουσα14, le seul navire qui ait échappé aux Symplègades, en revenant du pays d'Aiétès, comme l'explique Circé à Ulysse en l'avertissant des difficultés qu'il doit rencontrer15. Dans la Théogonie (v. 992-1002) Hésiode (ou le Pseudo-Hésiode), (milieu du VIIIe siècle avant notre ère), résume très brièvement les travaux de Jason et offre la première référence à la toison et à Médée qui est qualifiée ά'έυσψυρον comme par exemple Amphitrite, ou les Océanides, qualificatif qui la place dans le rang des belles jeunes filles. Eumélos de Corinthe dans ses Korinthiaka mentionnait l'expédi tion argonautique. Corinthe se réclamant d'Hélios, le poète faisait régner Aiétès, d'abord sur Ephyra, avant d'émigrer vers Aia. Dans les Naupactica, postérieurs aux Korinthiaka, sont mentionnés égal ement les Argonautes16, les exploits de Jason en Colchide, ainsi que sa fuite avec Médée, et peut-être le meurtre d'Apsyrtos. Les Nostoi (fr. 6 Kinkel) faisaient allusion au rajeunissement d'Aison par Médée. Au VIème siècle avant notre ère, le poème concer nant la geste argonautique est déjà célèbre et compliqué, Peisandros de Camiros s'y référait dans son Héracleia (scholie à Apollonios, II, 98). Epiménide, à la fin du même siècle, selon Diogene Laërce (I, 111), avait composé un poème de 6500 vers sur le voyage de Jason en Colchide. Par ailleurs, l'expédition a intéressé également les logographes. Hécatée de Milet (VPme siècle) dans ses Généalogies, faisait allusion à la légende d'Argô; Phérécyde de Leros ou d'Athènes (VIème siècle) s'y référait également dans ses Généalogies. Parmi les poètes lyriques du VIe siècle, nous avons conservé quelques fragments de Mimnerme (fr. 11 Bergk), d'Ibykos (fr. 49 Bergk), et de Simonide (fr. 22 et 205) se rapportant à des épisodes de l'expédition. Pindare, dans sa IVe ode Pythique, dans la première moitié du Ve siècle avant notre ère (462), donne à grands traits un ré cit quasi complet de l'expédition, en faisant une synthèse des tradi tions antérieures. La rivalité de Pélias et Jason est explicite, comme le voyage vers la Colchide et les exploits qui s'y rattachent; la personn alitéhéroïque de Jason se dégage bien, alors que l'auteur ment ionne à peine l'intervention de Médée.
13 Odyssée, XI, 235-250 (Pélias); X, 136 (Aiétès). 14 Odyssée, XII, 70. 15 II a été soutenu par ailleurs que les navigations d'Ulysse s'inspirent pour une large part des aventures des Argonautes, voir P. Tannery, La géographie de l'Odyssée, Bordeaux, 1887, p. 24-35. 16 Pour les Naupactica, voir E. Diehl, RE., XVI, 2, 1975-1979, s.v. Ναυπακτία επη.
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JASON ET MÉDÉE
Nombreux sont les poètes tragiques à avoir pris comme héros Jason ou Médée17, mais c'est par la Médée d'Euripide qu'on a conser vé le déroulement des événements à Corinthe, où Jason et Médée se sont réfugiés, après le meurtre de Pélias à Iolcos : leur mésentente à cause du second mariage de Jason, la fin tragique de la rivale de Mé dée et l'infanticide de la magicienne. La version d'Euripide, si elle n'est pas entièrement novatrice18, est essentielle pour comprendre le personnage de Médée, tel qu'il a inspiré les artistes. L'auteur a fait le portrait de cette étrangère venue de l'Orient, abandonnée par son époux, dominée par la jalousie et par la haine qui ne recule devant rien, indomptable même par l'amour maternel. Médée, telle qu'elle a été créée par Euripide (bien que son auteur n'ait pas gagné le pre mier prix aux Grandes Dionysies de 431) et reprise par Sénèque, est devenue une figure légendaire universelle, passionnante et fasc inante pour les auteurs anciens et modernes. Au IIIème siècle avant notre ère, Apollonios de Rhodes a composé les Argonautiques , long poème érudit consacré à l'expédition19, qui fixe les différents épisodes à partir de la tradition antérieure, en y ajoutant des nouveaux, et en développant davantage les personnages
17 Un grand nombre de poètes tragiques a écrit des pièces sur Jason ou Mé dée : Neophron de Sicyone, Biotos, Karkinos, Dicaiogénès, Diogene de Sinope, Euripide le Jeune ont écrit des Médée. Eshyle avait écrit un Phinée, la tétralogie Argô, Hypsipyle, les Cabires, les Lemniens; voir B. Deforge, «Eschyle et la légende des Argonautes», REG, 1987, 1, p. 30-44. Sophocle avait composé : Athamas, Phrixos, les Lemniennes, Amycos, Phinée, les Colchidiennes, les Rhizotomoi, les Femmes Scythes, pour les fragments voir Pearson, ainsi que Nauck. Euripide avait écrit les Péliades et Egée, pièces qui présentaient Médée en Grèce, à Iolcos et à Athènes, et Hypsipyle dont on a conservé quelques fragments. Pour la légende des Argonautes chez les poètes tragiques, voir : R. Aélion, Quelques grands mythes héroïques dans l'œuvre d'Euripide, Paris, 1986, p. 119-149. Pour une syn thèse sur les sources écrites voir également : D. Pralon, «Médée», La Mère mauv aise Cahiers du CEFUP, Aix en Provence, 1982, p. 55-77. 18 Sur l'originalité de la Médée d'Euripide, voir notre chapitre d'iconographie concernant la vengeance de Médée sur ses propres enfants et la note 11 de ce chap itre. Aristophane le Grammairien ύποθεσις Μήδειας, nous renseigne sur la mal chance de la pièce à sa première représentation. La bibliographie sur cette tragé die d'Euripide et sur le personnage de Médée dans cette pièce est énorme; à titre indicatif on signale : Séchan, Tragédie grecque, p. 396-422, et ID., «La légende de Médée», REG XL, 1927, p. 234-310; K. Fritz, «Die Entwicklung der Iason-MedeaSage und die Medea des Euripides», Antike u. Abendland 8, 1959, p. 33-106; C. Charalampakis, «H 'εξέλιξιβ του μύθου της Μήδειας εις την ομώνυμη τραγωδίαν του Ευριπίδου», Πλάτων, XXIX, 1977, ρ. 236-250; G. R. Stanton, «The End of Med ea's Monologue : Euripides, Medea 1078-1080», Rheinisches Museum für Philo logie 130, 2, 1987, p. 97-106. 19 Sur Apollonios voir les commentaires de F. Vian dans sa traduction des Ar gonautiques, ainsi que E. Delage, La géographie dans les Argonautiques d'Apollo nios de Rhodes, Paris, 1930 passim.
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de Médée et Jason, leurs qualités propres, leur relation, ainsi que les intrigues divines dictant leurs actes, les exploits de Jason, la re contre du monde grec avec le monde barbare. A la lecture d'Apollonios, le personnage de Jason est ambigu; malgré les nombreux moments où l'Aisonide fait preuve de courage, de bon sens, et d'affabilité, il paraît pourtant être au second plan20; la figure de Médée, sans vraiment prédominer, se détache. L/έλικώπιδα κούρην - d'Hésiode devient - κούρη Αίήτεφ πολυφάρμακος dont, il est vrai, les sentiments et les actes sont guidés par Héra et Aphrodite mais reste une figure digne de sa parenté divine, pleine de courage et d'effronterie; figure sombre également qui n'hésite pas à attirer son propre frère dans un guet-apens, mais qui garde pourtant des réactions de jeune fille apeurée, devant Circe (sa tante), et dans la cour du roi Alkinoos. Sénèque suit d'assez près Euripide, mais quelques différences se font remarquer. La figure de Médée21 apparaît chez l'auteur latin da vantage sous l'emprise de la magie, du monde souterrain, au service de la haine et de la destruction. Elle accomplit un véritable acte de magie, pour arriver à ses fins, alors que chez le poète grec, il suffisait de mentionner que les cadeaux étaient empoisonnés auparavant. L'infanticide vient aussi plus abruptement chez Sénèque, puisque Médée n'attend pas d'être assurée d'une aide extérieure (Egée) pour agir. En deux mots, la Médée de Sénèque est un personnage plus in quiétant, nullement adouci par l'amour maternel. En revanche, le lec teur a pourtant envers Jason, figure faible et déplaisante aussi bien chez Euripide que Sénèque par sa lâcheté, un peu plus de symphathie puisque, loin d'être arrogant, Jason avoue être contraint de faire ce second mariage par peur d'Acaste, le fils de Pélias; c'est également par peur qu'il rejette les proposition de fuite faites par Médée. Euripide, Apollonios, et Sénèque sont déterminants, parce qu'ils ont contribué à peindre le portrait de deux personnages qui nous in téressent et à fixer leur personnalité, tels qu'ils ont été représentés par les artistes. On ne peut nier la valeur des textes du Pseudo-Apollodore, de Diodore de Sicile, d'Ovide et même des œuvres tardives telles que la Medea de Dracontius, ou les Argonautiques Orphiques; pourtant, tout en donnant parfois des versions différentes (intéressantes pour l'étude iconographique), ces auteurs suivent néanmoins la ligne gé nérale tracée par leurs prédécesseurs. 20 L'attitude de Jason dans les Argonautiques d'Apollonios, lors du vol de la toison d'or est décevante; terrifié, il se contente de suivre Médée, (Arg., TV, 149) Εϊπετο δ' Αίσονίδης πεφοβημένος. 21 Voir Croisille, Poésie et art, p. 43, 120; et A. Arcellaschi, Médée dans le théâtre latin d'Ennius à Sénèque, (CEFR 132), Rome, 1990.
ÉTUDE ICONOGRAPHIQUE
Lapidum hoc est praecipua natura restât, morum insania... Pline, Histoire Naturelle, XXXVI, 1
CHAPITRE IV
JASON MONOSANDALE À IOLCOS DEVANT PÉLIAS
Dans la vieille légende thessalienne, (et d'après Stésichore fr. 178-180 Page), Jason n'est pas l'ennemi de Pélias; c'est la raison pour laquelle sur le coffre de Kypsélos (VIème siècle avant notre ère), il participe aux jeux funèbres en l'honneur du roi (Pausanias, V, 17, 9-11). Cependant la version qui a prédominé mentionne leur rivalité qui devait être à l'origine de l'expédition en Colchide. Un oracle1 a prédit à Pélias que sa mort sera causée par un homme chaussé d'une seule sandale2, μονοκρηπις, μονοσάνδαλος. C'est par ce petit détail vestimentaire que Pélias reconnaît son ennemi et décide de le faire disparaître, ou tout au moins, de l'éloigner en lui demandant de ramener en Hellade la Toison d'or. L'accord conclu entre Jason et Pélias pour l'expédition3 marque leur rivalité, sans conflit ap parent.
1 Apollonios (Arg., I, 5) parle de façon générale d'un oracle; mais chez Pindare (Pyth., IV, 130) il s'agit de l'oracle de Delphes. L'oracle est aussi mentionné par Phérécyde (F60 Jacoby). 2 La cause de la perte de la sandale est chez tous les auteurs la même. Jason perd une de ses sandales en traversant le cours du fleuve Anauros; voir Apollo nios (Arg., I, 5-17). Mais en III, 66-75 Héra explique à Aphrodite qu'un jour où elle avait pris l'aspect d'une vieille femme, Jason revenant de la chasse a eu la courtois ie de lui faire passer l'Anauros sur ses épaules. Chez le Pseudo-Apollodore (I, DC, 16), Jason est obligé de traverser le fleuve, car il habite la campagne par amour de l'agriculture - πόθω γεωργίας έν τοις χωριοις διατελών -; cela se relie avec la ver sion de Phérécyde, où Jason, après avoir labouré près du fleuve, le traverse et ou blie de chausser son pied gauche. Le monosandalisme de Jason, dû en partie au hasard dans les textes anciens, a été analysé de différentes façons; il reflète cer tainement un rite d'inititation en rapport avec la revendication du pouvoir, voir J. Brunei, «Jason μονοίφηπΐβ», RA 4, 1934, p. 34-43; et W. Deonna, «Monokpnπίδεβ», RHR 112, 1935, p. 50-72 et le passage dans le monde des adultes, voir A. Brelich, «Les mpnosandales» Nouvelle Clio 7/9, 1955-57, p. 469-484. En tout cas, Jason arrive de la campagne pour affronter ses responsabilités d'adulte; sa san dale unique, élément de rupture avec l'orde naturel (là-dessus, voir Ph. Bruneau, «le triskèle dans l'art grec», Mèi. J.-B. Colbert de Beaulieu, Paris, 1987, p. 147-156, spécialement p. 152, où l'auteur fait du monosandalisme un substitut de la clau dication, et ainsi une rupture avec l'ordre naturel), est l'une des caractéristiques des héros qui assurent la liaison entre le monde sauvage et celui de la cité, voir P. Vidal-Naquet, Le chasseur noir, Paris, 1983, p. 116. 3 Selon Phérécyde et le Pseudo-Apollodore, c'est Jason lui-même qui suggère
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Phérécyde, (F60 Jacoby) mentionne que Jason arrive devant Pélias, lors d'un sacrifice au temple de Poséidon. La rencontre a lieu donc un lieu sacré. La même version est suivie par Apollonios (Arg., I, 12-17) : Jason vient participer au festin que Pélias offre à son père Poséidon. Par ailleurs, le Pseudo-Apollodore (I, IX, 16) s itue le sacrifice au bord de la mer. En revanche, chez Pindare (Pythique, TV, 124ss), Jason à l'âge de 20 ans, quitte le Centaure Chiron qui l'a élevé et revient à Iolcos pour réclamer l'antique dignité de son père, ce qui sous-entend que Pélias a usurpé le trône. Il ren contre Pélias sur la place de la ville, où le souverain arrive sur un char tiré par des mules. Pindare décrit de façon vivante et réaliste Jason à ce moment : très beau, il est habillé de la tunique des Mag netes, monosandale, portant deux javelots; une peau de panthère lui couvre les épaules. Dans l'art figuré, cette rencontre entre les deux rivaux qui dé terminera leur sort par la suite, figure sur deux peintures de Pompéi4. On peut aussi supposer une allusion sur certaines monnaies de Thessalie5. En revanche, la scène ne semble pas avoir inspiré les sculpteurs de sarcophages.
à Pélias de ramener la toison, lorsqu'il répond à sa question sur l'attitude à adopt er envers un citoyen qui voudrait tuer le souverain. Selon Diodore (IV, 40), Jason stimulé par les exploits de Thésée, veut faire quelque chose de mémorable; mais chez Apollonios (Arg., I, 902) son unique souhait serait d'être autorisé à vivre dans son pays, après son retour. Cependant cette expédition est due non seul ement aux craintes de Pélias, mais également aux désirs de la déesse Héra qui, se lon Apollonios (Arg., Ill, 66, 73), veut faire venir en Hellade Médée, pour tuer Pé lias, qui ne l'honore pas de sacrifices. Cette version remonte à Phérécyde (F60 Ja coby) et a été suivie également par le Pseudo-Apollodore (I, IX, 16). Chez Pindare (Pyth., IV, 261-276), Jason laisse les biens matériels, troupeaux, etc à Pélias, mais réclame le trône de son père; ce que le roi usurpateur lui promet, à condition qu'il réussisse à ramener la toison. 4 II s'agit de deux peintures de Pompéi : 1. R DC, 5, 18. De la maison dit «di Jasone» ou de l'«Amour Fatal». Naples, Musée national 11436. IIIème style. Vers 10 de notre ère. Voir : K. Schefold, La peinture pompéienne, (Latomus 108), Paris, 1972, p. 148, pi. 15; et 2. R VI, 16, 7. De la maison dit des «Amours dorés». Naples, Musée National. IIIème style, vers 40 de notre ère. Voir K. Schefold, ibid., p. 150; Croisille, Poésie et art, p. 30-31, pi. 2.1. Les deux peintures représentent exactement la même scène. Pélias se tient devant un temple - qui serait celui de Poséidon -, sur un escalier; il est couronné et accompagné de deux de ses filles. Il regarde inquiet vers la droite de la scène, où se trouve justement Jason, habillé d'un manteau, portant le bâton des voya geurs et rendu reconnaissable grâce à une seule sandale qu'il porte au pied droit. A côté de lui se trouve la table des sacrifices, auprès de laquelle s'affaire la tro isième fille de Pélias qui, elle aussi, porte un regard inquiet sur Jason. A gauche de la scène un homme amène un taureau pour la sacrifice. Les peintres de Pompéi suivent donc la version de Phérécyde et d'Apollonios de Rhodes. 5 II s'agit de : 3. AR Drachme de Larissa. Vers 480. Voir A. Moustaka, Kulte und Mythen auf thessalischen Münzen, Wurtzbourg, 1983, p. 135 n° 169, pi. 4. Au
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Un homme monosandale sur la cuve de Prétextât (n° 12), fig. 16, 17 pose quelques problèmes. A l'angle gauche du panneau de Prétextât se trouve un homme vu de trois quarts (fig. 16), la tête de profil vers la droite au visage détérioré, il ne semble pas être barbu, il est casqué, et porte une tunique courte sous une cuirasse à lam brequins. De la main gauche levée, il brandit une lance, alors que l'autre main est tendue en avant, en direction du personnage qui se trouve à côté de lui : il lui retire l'épée qu'il avait à la main. Le deuxième homme, nu, vu de dos a une barbe épaisse. Dans la main il tient encore le fourreau (pointe dirigée vers le bas) que son compagnon est en train de lui enlever. Son bras droit6 est tendu vers la droite, mais seul le revers de la main subsiste, les doigts bien ouverts. Sur le dos de ce personnage on aperçoit en diagonale, une bandoulière assez large. Il ne reste plus de traces de son casque. Le premier homme a été interprété comme l'écuyer de Jason7 et le second comme Jason lui-même, grâce à un petit détail8. Bien que ses jambes soient mutilées, les orteils sont encore conservés et présentent une particularité intéressante : le pied gauche était chaussé alors que le pied droit ne l'était pas. Il s'agirait donc de Ja son monosandale devant Pélias. On remarque que la scène qui suit à droite est celle où Jason dompte les taureaux furieux d'Aiétès en Colchide; il y a donc un malentendu en ce qui concerne les lieux d'action9.
droit : cheval marchant à gauche, au-dessus, une cigale couchée. Cercle en grénetis. Au revers : une sandale, une double hache et l'ethnique : Λ API/; 4. AR Obole de Larissa. Vers 480. Voir : A. Moustaka, ibid., p. 135 n° 171, pi. 4. Au droit : tête de profil à gauche de la Nymphe Larissa. Au revers : une sandale, carré incus et l'ethnique : Λ API; 5. AR Triobole de Larissa. Vers 470. Voir : A. Moustaka, ibid., p. 135 n° 172, pi. 4. Au droit : tête de profil à droite de jeune homme portant un pétase. Au revers : une sandale dans un carré incus et l'ethnique : Λ API. La san dale unique fait évidemment allusion à Jason, héros thessalien, mais elle présente une forme elliptique de la légende. Dans ce cas, la sandale devient l'attribut de Ja son par excellence (comme par exemple la massue pour Héraklès) sandale qui, sur la drachme est accompagnée d'une double hache, symbole elle-même du pou voir souverain. Ces trois monnaies datent du début du Vème siècle avant notre ère, alors que le motif de la sandale disparait par la suite du monnayage de Thessalie. En général pour l'iconographie des monnaies thessaliennes, voir A. Moustaka, Kulte und Mythen auf thessalischen Münzen, Wurtzbourg, 1983, p. 69-70. Le per sonnage de Jason et son attribut seraient chargés à ce moment d'un symbolisme politique bien spécifique, voir A. Moustaka, ibid. , p. 70. 6 Et non pas la main gauche comme l'indique M. Gütschow dans sa descrip tion Atti Pont. A.R.A., Memorie 4, 1938, p. 47 (19). 7 Voir GMRS, p. 36-37. 8 Voir M. Gütschow, ibid., p. 46. 9 Mais un tel mélange n'est pas rare sur les sarcophages, comme on le
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Le problème qui se pose est le suivant : s'il s'agit bien de Jason à Iolcos, quel récit a inspiré le sculpteur? Disons tout d'abord que l'image n'est conforme à aucun récit et que les deux personnages ne suffisent pas pour caractériser le moment important de la légende. En revanche on constate qu'à cause de l'homme à gauche, l'officier romain, la scène est démythifiée. On remarque également que le Ja son monosandale de cette scène se rapproche beaucoup du Jason qui s'empare de la toison d'or, par l'attitude (vu de dos, nu, bras le vé), par la barbe et par l'habillement (un manteau enroulé autour du bras gauche). Nous serions tenté de voir dans ce «Jason monos andale» et barbu plutôt qu'une image mythologique, une représen tation du défunt10, fait fréquent sur les sarcophages : le personnage mythologique qualifié par son courage, acceptant d'entreprendre l'expédition en Colchide, jugée impossible, sert ici à intensifier l 'image d'un homme pieux et vertueux. La barbe est un élément de plus d'humanisation de la figure mythologique11. Notons enfin que le panneau de Vienne (n° 13, fig. 24) comporte également à gauche un personnage dans la même pos ture que le «Jason» du panneau de Prétextât, mais, celui-ci n'est pas monosandale. D'ailleurs les deux hommes à l'extrémité gauche de ce panneau sont interprétés comme les Dioscures et appartiennent à la scène du domptage des taureaux12. En dehors donc de la cuve de Prétextât, Jason monosandale ne figure pas sur les sarcophages; pourtant nous avons constaté que, même sur cet exemplaire, le contexte mythologique n'est pas respecté et que la figure de Jason sert à exalter les qualités du dé funt. Il nous semble opportun d'exposer ici notre avis sur trois sta tues presque entières : Paris, Musée du Louvre Ma 83 13, fig. 52, constate même sur celui de Prétextât où dans la partie droite de la cuve, Médée prémédite de tuer ses enfants juste avant d'épouser Jason. 10 Cependant il faut également signaler qu'il existe un mélange iconogra phique.Le fait que l'officier de gauche ôte l'arme du personnage monosandale pourrait donner à croire qu'il s'agit de Jason en Colchide avant le domptage des taureaux, qui ne doit accomplir l'exploit que par sa force et son intelligence sans recourir à aucune arme. Son corps, enduit de l'onguent que Médée lui a procuré, est à présent invulnérable. 11 Sur la représentation du défunt à travers le héros mythologique, voir la note 46 de notre chapitre sur la chronologie. 12 Pour l'interprétation de ces deux hommes comme Dioscures, voir ASR, II, n° 188. 13 Paris, Musée du Louvre Ma 83, provenant de Rome, théâtre de Marcellus, plus tard à la villa Montalto/Negroni. Achetée en 1685 de la collection Montalto par Louis XIV et exposée à Versailles. Corps : Marbre pentélique, tête : marbre parien H. 177cm. La tête est antique mais n'appartient pas au corps. La plinthe en grande partie est moderne. Début du IIe siècle de notre ère. Voir : B. S. Ridg-
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Munich, Glyptothèque, Inv Gl. 287 14, Copenhague, Glyptothèque Ny Carlsberg, Inv I.N. 2798 15, toutes trois répliques romaines qui ont été, de temps à autre, interprétées comme représentant Jason monosandale16, et qui peuvent être identifiées à un Hermès ou un athlète avant ou après son entraînement à la palestre. A partir des ces trois statues17, se détermine le type iconographique du «Sandalenbinder», personnage masculin qui lie sa sandale. Le jeune way, «The date of the so-called Lysippean Jason», AJA 68, 1964, p. 115 n° 2, pi. 37, fig. 1-2; Glyptothek München. II, p. 465, n° 2. 14 Munich. Glyptothèque. Inv Gl. 287, trouvée en 1780 à Tivoli à la Villa d'Ha drien. Coprs : marbre pentélique. H. 143cm; 153cm avec la plinthe. Il manque la tête (jadis il y en avait une mais qui n'appartenait pas à la statue), les deux bras, et la jambe droite. Début du IIe siècle (époque de Trajan). Voir B. S. Ridgway, «The date of the so-called Lysippean Jason», AJA 68, 1964, p. 115, n° 3, pi. 37, fig. 3; Glyptothek München. II, p. 457-471, fig. 227-232. Ici la main droite étant originale, sa position est sûre, alors que toutes les autres statues sont restaurées à cet endroit. 15 Copenhague. Glyptothèque Ny Carlsberg. Inv I.N. 2798, trouvée en 1769 à Tivoli à la villa d'Hadrien, achetée en 1772 par la collection Lansdowne, elle est restée à Londres jusqu'en 1930, date de son entrée au musée. Marbre. H. 145cm; 162cm avec la base. C'est le seul exemplaire dont la tête originale est conservée. Voir P. Arndt, Glyptothèque Ny Carlsberg, p. 177-181, fig. 96-98; Β. S. Ridgway, «The date of the so-called Lysippean Jason», AJA 68, 1964, p. 113-128, n° 1; Glyptotek München. II, p. 457-471 n. 1.1. Cette statue nous fournit la preuve que la main gauche ne s'abaissait pas vers le pied droit, mais qu'elle reposait sur le ge nou droit : seule la main droite touchait la sandale. 16 Cette figure en ronde-bosse a été interprétée tout d'abord comme Jason à cause de l'arrivée de celui-ci à Iolcos en «monosandale», même Fuchs, Skulptur, p. 104, fig. 98 l'interprète encore comme Jason. Pourtant Marcadé, Signatures I, p. 71 mentionne le Pseudo-Jason du Louvre en parlant «d'un personnage re présenté appuyant le pied sur une eminence, attitude que l'on retrouve dans cer taines compositions en général tenues pour lysippiques». Par rapport à une des cription de Christodoros, Anth. Palatine II, 297 ss., on l'a identifié à Hermès, ap pelé par Zeus au moment où il attache sa sandale (ce qui explique son regard levé vers le haut); voir également Glyptothek München, II p. 458-460, η. 3, 5-6; le même type iconographique du dieu se retrouve sur des monnaies, voir : Glypto thek München, II, p. 466, η. 15. 17 Quelques torses fragmentaires et trois têtes ont été attribués au même type. Il s'agit de : Eregli (Perinthos), musée, voir : Glyptothek München. II, p. 465 n° 3. Side, musée, voir A. M. Mansel, Die Ruinen von Side, Berlin, 1963, p. 114116, fig. 91; Glyptothek München. II, p. 465, η° 4. Rome, Palais des Conservateurs, voir H. Lauter, «Drei Werke des Lysipp», AM 92, 1977, p. 165 η. 20, pi. 77-78; et Glyptothek München. II, p. 466, n° 8. Athènes, musée de l'Acropole, Inv 1325 (torse avec tête inachevée) voir C. Blümel, Greek Sculptors at Work, Londres, 1955, p. 59, 62-63, fig. 48; et Glyptothek München. II, p. 466, n° 5. En outre trois têtes ont été attribuées au même type par comparaison avec celle d'Athènes : Londres, British Museum, Inv 1785 surnommée «tête Fagan», voir A. H. Smith, Catalogue of Sculpture in British Museum III, Londres, 1904, p. 119. Copenhague, Glyptothèque Ny Carlsberg., Inv, I.N. 572, voir P. Arndt, Glyptothèque Ny Carls berg, p. 177-181, pi. 128, 129. Turin, musée, voir A. J. B. Wace, «Some Sculptures at Turin», JHS 26, 1906, p. 239-240, n° 4, pi. XVI
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homme, nu, est représenté avec son pied droit chaussé posé sur un rocher. Son corps est penché en avant, tandis que la tête est franchement tournée vers la gauche. Le bras gauche se place en avant, la main se pose sur le jambe droite, juste au-dessous du ge nou. De la main droite il est en train de tirer la lanière de sa san dale. Cette position des bras engendre un contre-balancement des épaules. Un manteau est posé sur la cuisse droite, et un tronc d'arbre sert d'élément d'appui. A côté du rocher, par terre, est pla cée la seconde sandale. L'œuvre est composée à partir de grandes lignes verticales et parallèles, avec une seule grande courbe formée par le mouvement du dos. En ce qui concerne l'auteur de l'origi nal, le nom de Lysippe fut d'abord prononcé, à cause de la struc ture de l'œuvre18. Cependant bien que d'autres refusent cette attr ibution, il est généralement admis que l'original est une création de l'école de Lysippe19. Examinons l'identification de ce personnage. L'homme fait un mouvement vers l'avant, de la main droite et touche sa sandale, pour la nouer ou la dénouer20 : il agit donc de façon délibérée sur cette chaussure. Or, selon la tradition littéraire, Jason arriva «mo nosandale» à la cour du roi Pélias parce qu'en traversant le fleuve Anauros grossi par l'hiver il perdit sa sandale dans la boue21. Donc, le motif du jeune homme attachant ou détachant sa sandale n'a rien à voir avec Jason. Sur les exemplaires du Louvre et de Munich, par terre, figure la seconde sandale qu'il vient d'ôter ou qu'il se pré pare de mettre. Ainsi on ne peut pas parler de sandale perdue. Et de surcroît, selon les textes, une telle œuvre n'a pas été attribuée à Lysippe22. 18 Selon Pline, NH, XXXIV, 65, Lysippe a introduit des innovations dans le canon des sculpteurs; on lui doit un système de proportions nouvelles : la tête de vient plus petite et le corps plus mince gagne en hauteur. 19 F. P. Johnson, Lysippos2, New York, 1969, p. 174, trouve le «Jason» trop avancé pour une œuvre de Lysippe. Il analyse son corps et son visage par rapport à l'Apoxyomène et trouve que le «Jason» est plus développé et très différent mor phologiquement. Il y voir plutôt l'œuvre d'Euthycratès, un des élèves de Lysippe. Dickins, Hellenistic Sculpture, p. 41 remarque de nouveaux détails du corps, no tamment à l'abdomen, qui étaient inconnus de Lysippe. B. S. Ridgway, «The date of the so-called Lysippean Jason», AJA 68, 1964, p. 121-128, bien qu'elle r econnais e la présence d'un certain écho de l'œuvre de Lysippe dans le «Jason», ne l'attribue pourtant ni au maître sicyonien ni à son entourage; elle le date beau coup plus tard, dans la deuxième moitié du IIe siècle avant notre ère. Son étude repose sur une étude des formes et de l'évolution des schémas et des modèles plastiques. 20 Ce qui lui a valu aussi le surnom de «Sandalenlöser». 21 Pour le détail de la légende, voir Apollonios de Rhodes, (Argonautiques, I, 8-11; III 66-73). 22 Voir P. Moreno, «Vita e Opere di Lisippo», Lysippe et son influence, Hellas et Roma V, Genève, 1987.
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Nous suivrons donc B. Vierneisel-Schlörb23 qui rejette complè tement le nom de Jason. En effet, il faut plutôt voir dans cette série la représentation d'un Hermès ou d'un athlète.
23 B. Vierneisel-Schlörb, Glyptothek München. Katalog der Skulpturen, II, Munich, 1979, p. 457-471.
CHAPITRE V
LA CONSTRUCTION DU NAVIRE ARGÔ
Une fois l'expédition décidée, de nombreux héros de toute la Grèce arrivent à Iolcos pour y participer1. Le voyage a lieu à bord du navire Argô2, devenu mythique, puisque même Homère {Odyssée, XII, 70), le mentionne comme 'Αργώ πασιμέλουσα connu de tous. Argô était considéré par les auteurs anciens, comme le premier bateau qui a pu dompter la mer, comme une nef très solide et le plus rapide des navires. L'expédition argonautique était perçue comme une extraordinaire prouesse humaine, thème souvent développé, même par les tragiques grecs et latins. Il est fabriqué en bois de pin de Pélion, (Euripide, Médée, 3-5), ou de chêne (Arg. Orph., 56-60). La déesse le dota d'une poutre faite du chêne divin de Dodone, élément
•Apollonios de Rhodes {Arg. I, 24-228) nous donne le catalogue le plus complet des Argonautes. Parmi les cinquante trois héros grecs (Jason compris) apparaissent des noms très connus comme Orphée, Herakles, Hylas, Zétès et Cal ais, Argos le constructeur d'Argô, Castor et Pollux, Méléagre; d'autres moins connus de nous mais célèbres par leur force ou leur ascendance par exemple Polyphèmos (un Lapithe), Corônos fils de Caineus, etc. Certains possédaient un don particulier qui devait trouver son utilité au cours de la navigation, comme par exemple Mopsos et Idmon tous deux devins, Lyncée doué d'une vue perçante sur humaine, Euphémos imbattable à la course, même sur l'eau, Erginos, Ancaios ex cellents pilotes, Tiphys habile à prévoir les tempêtes etc. Pindare (Pyth. IV, 299333) citait, parmi d'autres, les Dioscures, Orphée, Herakles, Echion et Erytos tous deux fils d'Hermès, les Boréades. 2 Le navire doit son nom, soit à Argos fils de Phrixos : voir Phérécyde (3F, 106 Jacoby), aussi F. Vian, in : Argonautiques , I, p. 244 n. 112; soit à Argos qui l'a construit suivant les conseils d'Athéna, présente à la construction. L'importance d'Athéna pour la construction du navire est attestée chez plusieurs auteurs : Apollonios (Arg., 1, 18-19, 111-114); le Pseudo-Apollodore, {Bibliothèque, I, LX, 16); Valerius Flaccus {Arg., 1, 22-95, V, 293-295). Il est ainsi appelle par Ovide, (Héroïdes VI, 41) la nef Tritonide (puisque selon la légende Athéna était la fille de Tri ton), tandis que, selon Valerius Flaccus, (Arg., I, 22-95), la déesse voulait à la fin de l'expédition, l'amener sur l'Olympe. L'auteur romain a pu s'inspirer d'Eratosthène (Καταστερισμοί, XXXV), selon qui Athéna a placé Argô dans les astres, car il était le premier navire à avoir traversé la mer inaccessible, et possédait le don de la parole; son image, du gouvernail jusqu'au mât, servait à donner du courage aux marins. Selon les Argonautiques Orphiques (v. 62-75), Héra voulant aider Ja son demande à Athéna de lui construire un bateau.
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qui lui donne le pouvoir de la parole3. Au moment où tout est prêt pour quitter le port de Pagassai, le navire pousse un cri terrible. Plus tard, pendant le voyage de retour vers la Grèce, après le meurtre d'Apsyrtos, selon Apollonios (Arg., IV, 580-588) et le Pseudo-Apollodore (I, IX, 24), la nef conseille également aux coupables de se faire purifier par Circé. En dehors du don de la voix, ce bateau est égal ement capable de réactions, refuser de mouiller par exemple au mo ment du départ : Argonautiques Orphiques (v. 237), mais il se laisse persuader par les chants mélodieux d'Orphée. La construction de l'Argo en présence de Jason inspire de véri tables tableaux dans la peinture d'époque impériale4 et sur des plaques Campana5, mais ce moment décisif pour l'expédition ne f igure sur aucun sarcophage. Le schéma iconographique utilisé (composition à trois figures) pour les plaques Campana (fig. 52-53) et pour la peinture est conforme au récit d'Apollonios (suivi par Va lerius Flaccus qui donne plus d'ampleur à l'épisode), chez qui la pré sence d'Athéna est très importante6. L'œuvre originale qui la pre-
3 Sur les qualités d'Argô : Eschyle {Argô, fr. 36 METTE); Apollonios {Arg., I, 525-527); Pseudo-Apollodore (I, DC, 16). 4 1. Peinture d'Herculanum, Naples, Musée National 9522. Vers 70. K. Schefold, Die Wände Pompejis, Berlin, 1957, p. 149; Croisille, Poésie et art, p. 32 n. 48, pi. 3, 1. Minerve est assise à droite, de profil vers la gauche. Au centre de la scène se trouve le navire devant lequel se tient un homme qui, touchant la proue de sa main gauche, se tourne vers la déesse. Tout à fait à gauche se tient un autre homme assis. Croisille considère que le personnage central est Argos, construc teur d'Argô et celui de gauche Jason. Nous ne pensons pas que la deuxième pein ture d'Herculanum H 1406, mentionnée par Croisille, Poésie et art, p. 32-33 n. 53, représente la construction de l'Argô. La présence de deux divinités, Minerve et Junon, et celle de deux jeunes gens ne suffisent pas : à notre avis, l'absence du ba teau est un argument négatif important. 5 Parmi les documents sculptés, l'épisode figure sur quelques plaques Camp ana, datées du Ier siècle de notre ère : 2. Louvre Inv 4144. H. 57cm; L. 51cm. 3. Rome, Villa Albani n° 181, fig. 53. 4. Londres. British Museum Inv D603. H. 64cm; 1. 56cm. 5. Londres, Soane Museum. 6. Bologne. Museo Civico. 7. Berlin. Antiquarium Inv 4609. Voir Römische Tonreliefs, VI, 1, p. 12-24, fig. 14-16, 32; Croisille, Poésie et art, p. 32, pi. 3, 2; 4. Le schéma général se rapproche beaucoup de celui de la peinture, mais la place des personnages est inversée. Jason figure au centre de la scène; tourné vers la déesse qui se trouve à gauche, il lui présente le mât. En revanche, Argos est représenté en pleine besogne, assis à cheval, sur une pièce de bois, en train de sculpter la proue du navire et tournant le dos à la divinité. Par comparaison avec les plaques Campana, l'homme au centre de la scène sur la peinture d'Herculanum Naples MN 9522), citée en note ci-dessus est, à notre avis, Jason plutôt qu'Argos. Cela paraît normal puisqu'Argos est un simple exécutant; Jason figure à côté de la déesse, en tant que chef de l'expédition et protégé d'Héra. Notre avis diffère donc de celui de J.-M. Croisille, voir notre note 4. 6 Voir note 2.
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mière a traité le sujet pourrait bien être une peinture grecque datant de l'époque classique. Deux peintres grecs ont en effet traité des su jets en rapport avec l'expédition des Argonautes : Mikon (deuxième moitié du Ve siècle avant notre ère) et Kydias de Kythnos (IVe siècle). On ne peut que faire des suppositions sur le sujet peint par ces deux peintres. Mikon avait représenté les Argonautes dans le temple des Dioscures à Athènes, dit également l'Anakeion; Kydias avait peint un tableau sur le même sujet. Une allusion à l'expédition argonautique figure, sur deux gemmes7. La nef Argô figure seule, sur le revers de quelques monnaies de Magnésie (Thessalie) d'époque impériale8.
7 8. Scarabée, cornaline. Londres, British Museum Inv 669 (jadis collection Castellani). Etrusque, Ve siècle avant notre ère. EASUN gravé. Richter, Gems I, p. 207 n° 845, 9. Gemme, sardoine. Collection Ralph Harari, (jadis collection Lord Southesk). Milieu du IVe siècle avant notre ère. Antike Gemmen, II, pi. XX, n° 26; J. Boardman, D. Scarisbrick, The Ralph Harari Collection of Finger Rings, Londres, 1977, n° 23, fig. 23. Sur ces deux gemmes figure une proue de navire à gauche, devant laquelle se tient un homme jeune, d'allure athlétique, nu, regar dantvers le navire et portant une chlamyde autour du bras gauche. L'inscription EASUN, ainsi que la présence de la proue malgré l'exiguïté de l'espace, ne laissent aucun doute sur le sujet représenté. Ces deux gemmes datent de l'époque clas sique et proviennent du contexte étrusque. Elles font penser à Hésiode, (Théogo nie 992-1002), où Jason est nommé ποιμένι λαών, pasteur d'hommes, allusion à sa fonction de chef parmi les meilleurs des Grecs qui formaient la troupe des Argo nautes, et à Pindare (JPythiques, IV), où l'accent est mis sur les qualités morales et physiques des Argonautes et de leur chef, et où l'Argô est le navire par excellence, «connu de tous». Ainsi, la proue et la figure d'un jeune homme juxtaposées suf fisent pour évoquer l'expédition argonautique; l'inscription vient préciser qu'il s'agit du chef des Argonautes, mais, il n'y a pas d'action spécifique. Nous ne sui vons pas Croisille, op. cit., p. 32 n. 43 qui pense que sur les gemmes Jason construit lui-même son bateau. Il existe également des gemmes italiques et des monnaies de Nicomédie où figure Argos seul construisant le navire, voir R. Blatt er,LIMC, II, s.v. Argos III. 8 II s'agit de monnaies impériales : AE. De Magnésie (Thessalie). IIPme siècle de notre ère. Au droit : buste de l'empereur. Au revers : bateau, Inscription : ΑΡΓΩ ΜΑΓΝΗΤΩΝ, voir A. Moustaka, Kulte und Mythen auf thessalischen Münz en,Wurtzbourg, 1983, p. 136 n° 175.
CHAPITRE VI
L'EXPÉDITION VERS LA COLCHIDE
Les Argonautes se sont mis en route pour la Colchide, une fois le navire Argô construit et les rites du départ accomplis. Les étapes du voyage sont identiques chez tous les auteurs à quelques détails et omissions près1. Les épisodes les plus marquants du voyage d'Iolcos vers la Colchide malgré l'importance et la richesse des détails dans la littérature, n'ont pas inspiré l'art figuré autant qu'on l'atten drait: ainsi pour les étapes à Lemnos, à Samothrace, à l'île des Dolions (meurtre du roi Kyzicos), les Symplégades etc. L'iconographie des sarcophages se montre sur cette phase de la geste argonautique décevante. En revanche, parmi les quelques épisodes2 qui ont donné nais sance à des œuvres d'art on peut citer : le combat de Pollux contre Amykos3 sur la ciste Ficoroni et una Kalpis lucanienne4 où l'on
1 Pindare, Pyth., IV, 340-374 résume en quelques mots le trajet. Apollonios de Rhodes Arg., I, 527 et ss. et II, le premier, fait le récit circonstancié du voyage; il est suivi par le Pseudo-Apollodore, Ovide, Valerius Flaccus. 2 Sur les représentations des Argonautes en général, voir R. Blatter, LIMC, II, s.v. Argonautai et Trendall, Cambitoglou, RVA I, p. 36 n° 3, pour les fragments d'un cratère, au musée de Tarente Inv 12570, 54946, 54943. 3 Le roi arrogant et inhospitalier des Bébryces, Amycos, engageait un combat de boxe contre tout étranger qui arrivait, avec le dessein de le tuer; il trouva un adversaire de taille en la personne de Pollux. Apollonios (Arg., II, 1163), décrit la lutte mais il semblerait que l'épisode était déjà formé au VIe siècle avant notre ère et qu'il fut rattaché plus tard à la geste argonautique. Selon le scholiaste d'Apollonios (Arg., II, 48), le poète épique Peisandros de Camiros le rapporta pour la première fois, dans son Héracleaia. 4 1. Ciste Ficoroni. Rome, Musée de la Villa Giulia Inv. 24787, signée par le graveur Novios Plautios. Milieu du IVe siècle avant notre ère. T. Dohrn, Die Ficoronische Ciste, Berlin, 1972, passim.', D. Rebuffat-Emmanuel, «A propos de la ciste Ficoroni», RA, 1975, 1, p. 73-79. Pour d'autres cistes, vases et monnaies re présentant le même sujet, voir T. Dohrn, ibid., p. 34-35. Pollux est en train d'a ttacher Amycos à un arbre, en présence d'Athéna. Le navire figure à droite, avec un grand nombre d'Argonautes. Nous pensons qu'il faut reconnaître Jason dans l'homme barbu, nu, debout, vu de dos, tenant une lance, à droite d'Athéna, car il se trouve plus près du navire qui est à sa droite, et non pas dans le jeune homme qui se trouve immédiatement à sa gauche, assis, vu de profil et qui mal gré sa proximité de la déesse et de la scène centrale, semble aussi distrait que bon nombre des Argonautes présents. T. Dohrn, Ibid, p. 17, se fondant sur sa
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JASON ET MÉDÉE
peut reconnaître Jason; l'épisode chez Phinée représenté dès le VIe siècle avant notre ère sur un grand nombre de vases5, et sur un relief en ivoire de Delphes6 de la période archaïque. Le chef de l'expédition est absent de ces documents; seuls les Boréades, principaux prota gonistes, y figurent. Pourtant sa présence est assurée par une ins cription sur un fragment d'un cratère à colonnettes corinthien trou-
place dans la scène, le voisinage de la déesse, et la couronne dans les cheveux, reconnaît en lui Jason. 2. Kalpis lucanienne. Paris, Cabinet des Médailles 442. Vers 420 av. notre ère. L. Marchese, «II mito di Amico nell'arte figurata», SE 18, 1944, pi. 8, 2; T. Dohrn, ibid., p. 29, fig. 4. Nous pensons que nous pouvons reconnaître Jason dans le personnage qui se trouve à l'extrémité droite tout près de la proue du na vire, barbu, nu, tenant deux lances. Pindare, Pythiques, IV, 164-168 fait tenir à Ja son deux lances lorsqu'il apparaît devant son oncle Pélias à Iolcos. La scène sur la ciste et la Kalpis pourrait être rapprochée, pour sa composit ion et l'attitude des personnages, de la tragédie de Sophocle, Amykos, (dont il nous reste quelques fragments) et de la peinture de l'Anakeion due à Mikon, Th. Ph. Howe, «Sophokles, Mikon and the Argonauts», AIA 61, 1957, p. 342-349 : es saie de démontrer l'influence du texte de Sophocle sur ces deux œuvres. Le poète tragique, outre le rôle important qu'il attribue à Athéna, montre Pollux non pas en train de tuer Amykos, mais de l'attacher solidement à un arbre jusqu'à ce qu'il promette qu'il ne s'attaquera plus aux étrangers. Le ciste et la kalpis représentent Amykos attaché et vivant, entourré par Athéna et les Argonaures attendant sa promesse. Howe suppose comme prototype de ces œuvres, la peinture de Mikon dans l'Anakeion que mentionne Pausanias (I, 18, 1). 5 Les Boréades délivrent Phinée des Harpyies, monstres ailés envoyés par Zeus, pour le souiller et lui ravir sa nourriture. L'épisode de Boréades et des Har pyies figurait (vers 570 avant notre ère), sur la première frise du coffre de Kypsélos (Pausanias, V, 18, 3), à proximité des Jeux funèbres de Pélias où Jason était présent : voir M. von Massow, «Die Kypseloslade», AM, 1916, p. 1-117; E. Simon, EAA TV, s.v. Kypselos, (arca di); et L. Lacroix, «Pausanias, le coffre de Kypsélos et le problème de l'exégèse mythologique», RA, 1988, 2, p. 243-261. Il faisait égal ement partie du décor du trône d'Apollon à Amyclées à la fin du VIe siècle avant notre ère (Pausanias, III, 18, 15), voir E. Buschor, M. von Massow, AM 52, 1927, 15; J. M. Woodward, «Bathycles and the Laconian Vase-painters», JHS 52 1932, p. 34 n° 12; R. Martin, «Bathyclès de Magnésie et le «trône» d'Apollon à Amyklae», RA 2, 1976, p. 205-218 et F. Prontera, «II trono di Apollo in Amicle : appunt i per la topografia e la storia religiosa di Sparta arcaica», Annali Fac. Lettere e Filos. Univ. Perugia, XVIII, 1980/81, p. 215-230. Pour un catalogue exhaustif de l'ép isode de Phinée, voir Vojatzi, Argonautenbilder, p. 113-117, ainsi que Κ. Schefold, Frühgriechische Sagenbilder, Munich, 1964, et ID., Götter u. Heldensagen der Grie chen in der Spätarchaischen Kunst, Munich, 1978, p. 70, 176-177, fig. 84, 231-232. La scène figure aussi sur un cratère apulien à volutes de Ruvo, Collection Jatta 1095, de la fin du Ve siècle avant notre ère : H. Sichtermann, Griechische Vasen in Unteritalien, Tubingen, 1966, p. 40 n° 36k, pl. 62-65; et F. Brommer, Vasenlisten3, Marbourg, 1973, p. 496-497. 6 Pour l'ivoire de Delphes, daté de 570-560 environ avant notre ère, voir P. Amandry, «Rapport préliminaire sur les statues chryséléphantines de Delphes», BCH 63, 1939, p. 86-119, pl. 35-36; et F. Croissant, «Tradition et innovation dans les ateliers corinthiens archaïques : matériaux pour l'histoire d'un style», BCH 112, 1988, 1, p. 91-166, surtout p. 139-149, fig. 75.
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vé près de Potidée7. Un épisode du voyage, figure certainement sur une métope du Monoptère de Sicyone8, sans qu'il soit possible de préciser lequel. Par ailleurs, nous savons que l'expédition des Argonautes a éga lement inspiré les peintres grecs. Mikon (deuxième moitié du Ve
7 Fragment d'un cratère à colonnettes corinthien. Trouvé près de Potidée. D'une collection privée en Grèce. Proche du Peintre de la cavalcade. Vers 575 avant notre ère. Vojatzi, Argonautenbilder, p. 71, 114 n° 39, pi. 6-10. La scène est composée de cinq personnages dont trois sont entièrement conservés. Jason (nom inscrit) figure à gauche, de profil vers la droite, nu, barbu, portant un bandeau dans les cheveux et une épée dans son fourreau au flanc gauche. Il se tient derrière un vieil homme assis sur un trône, de profil, tourné vers la droite, dont il est en train de toucher de ses deux mains, les yeux. L'homme assis est Phinée (nom inscrit), à côté de lui se tient son épouse Idaia (nom inscrit), devant lui la table avec les mets. A ces trois figures font face deux nommes dont seuls les jambes et les bras sont conservés, ils sont peints l'un en noir, l'autre en blanc, l'un d'eux tient la main droite de Phinée. Il s'agit des Dioscures, car le nom de Pollux est inscrit à côté d'eux. Cette scène est unique dans l 'iconographie de l'épisode, non seulement à cause de la présence des Dioscures à la place des Boréades; mais c'est bien la seule fois où Jason est présent et parti cipe même à l'action. On notera que Jason ainsi que les Dioscures touchent de leur mains Phinée; Jason en particulier le touche sur les yeux, que Zeus avait ren dus aveugles pour punir le devin d'avoir dévoilé toutes ses volontés aux mortels. Vojatzi suppose que Jason est représenté sur le cratère en train de guérir Phinée de sa cécité. Nous n'avons pas conservé de texte mentionnant clairement la guérision de Phinée lors du passage des Argonautes; ceci vaut même pour le récit d'Apollonios (Arg., II, 441-442) qui en garde peut-être le souvenir, car Jason déclare que si Phinée pouvait retrouver la vue, il serait lui-même aussi heureux que s'il retournait dans sa maison. En tout cas, ce fragment du VIe siècle avant notre ère, parmi les plus anciennes représentations du héros, est certainement lié à une tra dition ancienne où Jason apparaissait comme un guérisseur, ce qui semble nor mal puisqu'il avait été élevé par le Centaure Chiron, et que son nom étymologiquement se rapproche d'ïaais qui signifie guérison; les poètes tragiques Es chyle et Sophocle qui avaient composé chacun une tragédie du nom de Phinée se référaient peut-être à cette tradition. 8 Métope du Monoptère de Sicyone, au musée de Delphes. Vers 570. P. de la Coste-Messeliere, Au Musée de Delphes, Paris, 1936, p. 177-198. Cette métope constitue l'une des plus anciennes représentations de la geste des Argonautes. L'Argô devait être une pentécontère, selon F. Salviat, «Le navire Argô sur les mé topes sicyoniennes à Delphes», Archaeonautica 4, 1984, p. 213-222. L'auteur place le bateau sur trois métopes et non pas sur deux, comme on l'admettait jusqu'à présent. Sur le navire Argô, apparaissent deux personnages masculins jouant de la lyre, celui de gauche est Orphée dont le nom est inscrit; devant le bateau figure un cavalier, probablement l'un des Dioscures. En ce qui concerne le rôle exact des Dioscures sur cette métope et par extension sur le trésor en entier, voir J. de la Genière, «A propos des métopes du Monoptère de 'Sicyone' à Delphes», CRAI, 1983, p. 157-171 et G. Szeliga, «The Composition of the Argo Metopes from the Monopteros at Delphi», AJA 90, 1986, p. 297-305; ces deux auteurs tentent de rat tacher le monument à la Grande Grèce. Dans le même sens, voir B. S. Ridgway, The Archaic Style in Greek Sculpture, Princeton, 1977, p. 245 selon qui les métopes du Monoptère ont été sculptées par un artiste Grec de Sicile.
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JASON ET MÉDÉE
siècle avant notre ère)9 avait représenté les héros dans l'Anakeion d'Athènes, selon Pausanias (I, 18, 1). Pourtant nous ne pouvons pré ciser le sujet exact de cette peinture : il s'agissait soit du départ des Argonautes de l'Hellade, soit des jeux funèbres en l'honneur de Pélias, (car Mikon avait particulièrement soigné les chevaux d'Acaste), soit peut-être de l'épisode d'Amykos ou de Talôs. Kydias de Kythnos (IVe siècle avant notre ère)10 avait également peint un tableau des Ar gonautes que selon Pline, (NH, XXXV, 138), Hortensius l'orateur, l' émule de Cicéron (114-50), avait acheté 144.000 sesterces. Le sujet reste au demeurant imprécis. Nous ignorons complètement l'impor tancedu personnage de Jason dans ces peintures, cependant il semble plus probable que de telles œuvres aient été plus inspirées par l'ensemble des jeunes héros que par une seule figure.
9 Sur le grand peintre athénien Mikon contemporain de Polygnote, voir Reinach, Recueil Milliet2, p. 154-166. 10 Sur Kydias de Kythnos qui se rattache à l'école attique, voir Reinach, ibid. , p. 296-297.
CHAPITRE VII
EN COLCHIDE LA RENCONTRE AVEC LE MONDE BARBARE JASON ET AIÉTÈS
Le premier souci des Argonautes, quand ils arrivent en Colchide, où ils ne restent que quatre jours, est de dissimuler leur na vire sur les rives du Phase et d'aller par la suite au palais d'Aiétès présenter leur requête. Selon Apollonios (Arg. II, 1120-1156), ils ren contrent sur l'île d'Ares, par une forte tempête, les fils de Phrixos qui voyagent vers la Grèce et c'est en leur compagnie que les Argonautes arrivent au palais et où a lieu la rencontre avec le monde barbare. Pourtant selon une tradition tardive, les Argonautiques Orphiques, cette rencontre a lieu au bord du Phase. La nuit où les Argonautes parviennent au Phase, Aiétès est alarmé par un songe envoyé par Héra1 concernant Médée. Le matin, il demande qu'on lui prépare son char (v. 788 απήνη), pour se rendre au bord du fleuve, où il a l'habitude de sacrifier. Il invite ses filles à l'accompagner. Il monte alors dans son char en or, tout brillant dans son manteau également en or, digne d'un fils du Soleil, portant une couronne de flammes sur la tête et brandissant dans la main un sceptre, fulgurant comme un éclair. Arrivé au bord du fleuve, il aperçoit le bateau et les héros. Quand il s'approche, les Minyens, à cette vue merveilleuse, sentent leur cœur se glacer; Jason répond alors aux questions du roi et de mande la toison. Ce récit tardif2 s'éloigne d'Apollonios qui ment ionne l'ambassade constituée de Jason, de quelques Argonautes et de Phrixides, qui se rend au palais d'Aiétès pour présenter la de mande de la toison. Cependant il se rapproche en partie de Valerius
1 Selon ce rêve, dans le sein de Médée avait bondi un astre qu'elle avait re cueil i et amené vers le lit du Phase; l'astre à son tour l'avait ravie sur les eaux et l'avait emportée à travers le Pont Euxin. 2 On date en général les Argonautiques Orphiques du Ve siècle de notre ère, voir F. Vian, Argonautiques Orphiques, Paris, 1987, p. 46. Cependant, on note que déjà selon Pindare (Pythiques, IV, 375-379) les Argonautes à leur arrivée en Colchide, se battent contre les Colques au visage noir.
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Flaccus (Arg., V, 232-253 et 330-341) qui mentionne également des songes apparus à Aiétés et à Médée3. A notre avis, la scène fragmentaire à gauche sur le couvercle du sarcophage de Bâle n° 24, fig. 40-45 se situe en Colchide et le roi sur le char est Aiétès. Un homme âgé, barbu est monté sur un char tiré par deux ou trois mules. Il porte une tunique à manches et à haute ceinture, un manteau lui enveloppe les épaules, un bandeau ceint ses cheveux. Dans la main gauche il tient un long sceptre tandis que de la main droite, il touche son menton dans un geste qui exprime la surprise. Il regarde intensément vers la gauche. C'est vers cette di rection également que regarde l'homme qui se tient devant la roue du char, et qui de la main droite fait un geste comme pour l'arrêter. En revanche les deux autres hommes qui l'accompagnent se tournent tous deux vers l'homme sur le char. Il devait donc y avoir dans la partie gauche manquante quelque chose dont la vue inter loquait l'homme âgé et restait incompréhensible pour les autres. Il s'agit du moment où, Aiétès effrayé, découvre l'Argô et les Argo nautes au bord du Phase, tel que le poète des Argonautiques Or phiques (v. 802-857) qui a suivi une tradition littéraire antérieure, décrit cette scène. Nous ne suivons donc pas l'interprétation de la scène comme la rencontre de Jason et Pélias à Iolcos4. Nous comprenons mal la raison qui a incité le sculpteur, d'une part à suivre le récit de Pindare jusqu'aux détails d'anatomie ani male (forme particulière des queues des mules) et d'autres part à mélanger les deux modes vestimentaires. Nous remarquons égal ement que le char tiré par des mules - απήνη - n'est pas un attribut rare, ni spécialement lié à Pélias; chez Apollonios (Arg., Ill, 841, 1152), un tel char apparaît dans un contexte «barbare», car c'est une απήνη qui transporte Médée au temple d'Hécate pour son rendezvous avec Jason. Par ailleurs, le fait que les deux autres scènes du 3 Chez Valerius Flaccus, Arg., V, 230-258 Phrixos conseille lors d'un songe à Aiétès de veiller sur la toison et de se hâter de marier Médée; ibid., 336-340, le jour où Jason arrive en Colchide, Médée va se purifier au Phase de ses rêves de la nuit; elle a rêvé des actes impies qu'elle va commettre plus tard (une mer qui la sépare de son frère, de son père et d'enfants qui implorent sa pitié et qu'elle tue). 4 Schmidt, Medeasarkophag, p. 13-16, mentionne p. 15 également la version des Argonautiques Orphiques, mais elle la rattache à Pindare (op. cit., IV, 164-168) à cause des animaux qui tirent le char : ce ne sont pas des chevaux, mais des mules. En effet, selon Pindare, ibid., Pélias arrive dans un tel attelage, sur la place où il rencontre Jason monosandale. Schmidt, op. cit. , a pu identifier l'espèce ani male exacte. Pourtant sur le sarcophage l'homme en char, ainsi que les personnes qui l'accompagnent, sont habillés à la «mode barbare». A notre avis le mélange vestimentaire qui implique le mélange de deux mondes (grec et barbare) est diffi cileà expliquer. Comme nous le verrons par la suite, le souvenir qui a subsisté de la description que Pindare fait de l'épisode d'Iolcos, à notre avis est l'attribut de deux lances que Jason tient quelquefois sur certains documents.
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couvercle se situent en Colchide, tandis que celles de la cuve se placent à Corinthe, nous autorisent à penser que la scène de gauche a lieu plutôt en Colchide, et non pas à Iolcos. Nous ne suivons pas non plus K. Schefold5 qui interprète la scène comme Aiétès, à qui en revanche sied l'habit barbare, regar dant Médée tuer Apsyrtos. Tout d'abord tous les auteurs anciens sont unanimes à considérer qu'Aiétès n'assiste pas au meurtre de son fils, ensuite ce meurtre a lieu bien après les deux scènes qui se trouvent à droite sur le couvercle. Etant donné la qualité de ce sarco phage, nous ne pensons pas qu'il peut y avoir de confusion. Les Argonautiques Orphiques doivent suivre, pour cette partie, une œuvre certainement antérieure à Apollonios6, où la description de la rencontre au bord du Phase servait à suggérer la rencontre de deux mondes et à peindre l'audace des héros et de leur chef Jason. La scène du couvercle de Bâle représente exactement cette ren contre : Aiétès, caractérisé par son costume oriental, son bandeau, tenant son sceptre, traverse sur son char la plaine d'Aia et, en arri vant près du bord du Phase, est frappé par la vue du navire et des hé ros assemblés autour et il se souvient de son songe. Ses filles qui l'accompagnent dans le poème ont laissé leur place aux hommes de sa suite qui, n'étant pas prévenus, sont à la fois étonnés de la réac tion de leur roi et de la présence des étrangers. Si notre interprétation de la scène est exacte, l'action qui figure sur le couvercle de Bâle se situe en Colchide, plus particulièrement dans la plaine d'Aia; les scènes se suivent sans interruption ni confus ion.A gauche figure la rencontre des Argonautes et des Colques, juste avant les exploits de Jason en Colchide qui se situent à droite. Par ailleurs on peut aisément imaginer dans la partie gauche du couvercle, non conservée, la présence éventuelle du navire Argo et de la troupe des Argonautes, comme on le voit sur quelques vases de l'Italie du Sud et sur la ciste Ficoroni.
5 K. Schefold, «Bilderbücher als Vorlagen römischer Sarkophage», MEFRA 88, 1976, 2, p. 782 place bien la scène en Colchide, mais à notre avis l'identifica tion n'est pas exacte, il ne peut s'agir du meurtre d'Apsyrtos. 6 Essayer de placer chronologiquement cette œuvre et donner un nom à son auteur dépasse le cadre de notre sujet; pourtant on peut signaler que parmi les nombreux auteurs qui se sont occupés de la légende argonautique avant Apollon ios,Antimaque de Colophon, vers 400 avant notre ère, avait composé le poème Lydé, où il était question des aventures argonautiques en Colchide, voir F. Vian, Arg., I, p. XXXVIII.
CHAPITRE VIII
LA RENCONTRE DE JASON ET DE MÉDÉE
C'est l'un des premiers épisodes en Colchide qui a inspiré, semble-t-il, l'art figuré que la rencontre préliminaire entre Jason et Médée; celle-ci va désormais jouer un rôle très important dans l'a ccomplis ement des projets de Jason. Le moment exact et le lieu de cette rencontre sont vaguement évoqués chez plusieurs auteurs1, alors que chez d'autres, ils sont très développés. Pour Apollonios, il y a deux rencontres : la première (Arg. Ill, 275-298), se passe dans le palais même d'Aiétès, alors que les Argonautes arrivent accompagnés des Phrixides. Après cette pre mière rencontre où aucune parole n'est échangée entre les deux jeunes gens2, Médée brûle déjà d'amour pour Jason, alors qu'il ignore même son existence. Ce n'est que plus tard dans la journée, (Arg., Ill, 471-488), après avoir demandé la toison à Aiétès et après le refus indirect de celui-ci qui lui impose les épreuves, qu'Argos le Phrixide lui parle de l'aide éventuelle que Médée peut leur apporter3. Elle consent et fixe une entrevue à Jason pour le lendemain au temple d'Hécate (III, 736-739). C'est donc devant le temple d'Hécate qu'a lieu la véritable rencontre, celle qui va conditionner le cours des événements. Le temple se trouve hors de la ville, dans la plaine. Mé dée éloigne par ruse ses jeunes servantes, alors que Jason arrive en compagnie d'Argos et du devin Mopsos qui, en chemin, interprète
1 Pindare (Pythiques, TV, 384-395), dit seulement qu'Aphrodite enseigna des charmes à Jason pour séduire Médée; mais selon cet auteur (Pythiques, TV, 375379), les Argonautes en arrivant aux bords du Phase engagent la lutte contre les Colques au visage noir. Chez le Pseudo-Apollodore, il est question de l'amour de Médée pour Jason. 2 Chez Apollonios (Arg., Ill, 275-298) Médée, retenue au palais par Héra, les aperçoit la première, alors que d'habitude elle passe sa journée au temple d'Hé cate dont elle est la prêtresse. Elle alerte les autres de ses cris, étonnée de voir re venir les fils de Phrixos et de Chalciopé, sa sœur aînée. Eros envoyé par Aphrod ite la perce d'une flèche et depuis lors, elle ne peut s'empêcher de dévisager Jason. 3 Au palais, Chalchiopé demande à Médée d'aider par son art les étrangers, pour sauver également ses fils.
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comme favorables les croassements des corneilles nichées dans un peuplier. Cependant Jason se présente seul devant Médée, ses compagnons restant à l'écart. Médée figure ici comme une jeune fille tourmentée par son amour, incapable de s'exprimer, émue par la présence de Jason rendu par Héra aussi resplendissant que l'astre Seirios. Jason, malgré son émotion égale, finit par faire sa requête qui trouve satisfaction, car Médée lui remet le prométheion qui peut le rendre invicible. Valerius Flaccus décrit aussi ce moment important avec beau coup de détails4. Chez lui, les deux personnages se rencontrent pour la première fois le long du Phase (Arg., V, 336-376), où Médée se rend pour se purifier de ses rêves inquiétants de la veille5; elle est a c ompagnée de sa nourrice et des jeunes filles. Jason avec quelquesuns de ses compagnons, se rend au palais. Us demandent leur che min à Médée et les deux jeunes gens sont fascinés l'un par l'autre. La deuxième entrevue a lieu plus tard (Arg., VII, 325), dans le bois sacré d'Hécate où Médée remet à Jason la drogue pour vaincre les tau reaux. Pourtant son amour et sa décision sont décrits avec moins de spontanéité et de passion que chez Apollonios, car Médée se décide à trahir son père après de multiples interventions d'Héra et de Vé nus, après que les Argonautes ont aidé Aiétès à se débarrasser de ses ennemis, et après que le roi a refusé de leur remettre la toison. C'est également dans un bois sacré, mais de Diane, que Jason demande à Médée de l'aider, dans les Héroïdes, (XII, 67-94) d'Ovide tandis que dans les Métamorphoses, (VII, 74), ils se rencontrent dans la forêt sacrée où se trouvent les autels d'Hécate. Diodore (IV, 46) est le seul à donner une version complètement différente. La rencontre a lieu dans le sanctuaire d'Hélios dont Mé dée est la prêtresse, au bord de la mer, quand les Argonautes viennent d'accoster. Médée est prisonnière de son père, car elle re fuse d'immoler les étrangers et d'utiliser maléfiquement sa magie; elle propose aux Argonautes de leur donner la toison. Deux rencontres sont donc mentionnées en général dans les tex tes : la première à l'arrivée même des Argonautes, durant laquelle naît un amour passionné qui doit déterminer le sort de Médée et des Argonautes; la deuxième rencontre a lieu, de l'avis unanime des au teurs, dans un espace sacré, après que le roi a proposé des épreuves difficiles à Jason. Malgré l'importance de cet épisode, l'occasion qu'il offre aux au teurs de décrire la psychologie des personnages, à notre avis, il n'a
4 Voir là-dessus Croisille, Poésie et art, p. 34-36. 5 En effet Médée a perçu en rêve les crimes horribles qu'elle va commettre plus tard, contre son frère et contre ses enfants.
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jamais figuré dans l'art impérial. Il a été soutenu qu'une fresque de Pompéi6 représente ce sujet, mais cette interprétation nous semble peu probable. En revanche, la remise du promethéion à Jason a été représenté par les peintres de l'Italie du Sud au IVe siècle avant notre ère7. 6 II s'agit d'une fresque de Pompéi, R.VI, 14, 20, ajourd'hui disparue, IIIe style, vers 70 de notre ère. K. Schefold, Die Wände Pompejis», Berlin, 1957, p. 133; Croisille, Poésie et art, p. 35, pi. 5. La scène se situait dans un paysage montagneux : en arrière-plan mais très visible, une structure à colonnes, à l'int érieur de laquelle se trouve un autel où brûle un foyer, alors qu'une femme ailée vole au-dessus des flammes. Il s'agirait du temple d'Hécate et le personnage ailé serait la déesse, en présence de laquelle un couple est en train de s'enlacer devant le temple. Ce seraient Jason et Médée. A gauche, près de Jason, figure un guerr ier, tandis qu'à droite près de Médée, se trouve une femme, tous deux se détour nantdu couple (par discrétion?). Croisille identifie cette scène comme la ren contre de Médée et Jason devant le temple d'Hécate, scène qui serait composée d'après le récit de Valerius Flaccus ou d'Apollonios. Cependant cette identifica tion se heurte, à notre avis, à de nombreux problèmes. Apollonios fait assister de loin à l'entrevue les servantes de Médée et les compagnons de Jason qui restent à l'écart, mais il mentionne également une attitude réservée et timide de la part de deux jeunes gens. Croisille met cette peinture en rapport avec le texte d'Apollo nios (Arg. , IV, 94ss) où une autre entrevue plus osée près du navire Argô est ment ionnée, mais il remarque lui-même que cela a lieu près du navire et non devant le temple. En outre, il faut noter que d'une part Croisille traduit προσπτύξατο, du verbe προσπτύσσω, comme serrer dans ses bras, alors que F. Vian le traduit comme parler avec tendresse. D'autre part il s'agit chez Apollonios du moment où Médée, après avoir aidé Jason à triompher des exploits imposés par son père, consciente de la gravité de son acte et angoissée (IV, 15-20), ne pense qu'à fuir le palais et l'autorité paternels. Elle vient donc seule, en pleine nuit (IV, 54), à l'en droit où est ancré Argô, proposer aux Argonautes de fuir en enlevant la Toison d'or avec son aide. Dans ce cas, la présence du guerrier, de la femme, du temple et de la divinité n'ont plus rien à voir avec le récit. Par ailleurs on remarque que les personnages n'ont aucun attribut qui pourrait les caractériser. On ne peut penser que Valerius Flaccus est à l'origine de cette peinture, car il suit d'assez près Apollonios. Ainsi, pour les raisons exposées ci-dessus, nous considérons cette peinture comme douteuse. Notons que K. Schefold, op. cit., identifie cette scène à la rencontre de Protésilas et Laodamie. 7 Sur les deux vases mentionnés ci-dessous, figure le moment crucial où Mé dée remet à Jason la drogue qui va le rendre invulnérable; le gros coffret est le φωριαμος contenant les φάρμακα qui accompagne souvent la magicienne dans lart figuré. 1. Cratère à volutes apulien. Berlin F 3258. Probablement du peintre de Da rius ou des scènes infernales. Vers 340-335. E. Gerhard, Apulische Vasenbilder des Königlichen Museums zu Berlin, Berlin, 1845, pi. X; Trendall, Cambitoglou, RVA II, p. 533. La scène se situe sur le col du cratère. Médée est assise de profil vers la gauche, portant le bonnet phrygien sur la tête et une grande boîte de ses deux mains. Derrière elle à gauche se trouve un Boréade ailé, tenant une lance. A droite un jeune homme qui porte une épée pendue à son épaule et une lance, fait face à Médée et de la main droite il fait un geste; il s'agit certainement de Jason. La composition se termine à droite par deux Argonautes : le premier, vu de face,
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(suite de la note 6 de la page 67) est appuyé contre un rocher, il tient deux lances; le second est l'un des Boréades ailé. 2. Hydrie. Jadis en vente sur le marché de l'art de Naples (actuellement au musée de la collection Jatta?). IVe siècle avant notre ère. H. Heydemann, «Jason in Kolchis» HW Ρ 1886, p. 11, fig. 2; Simon, «Medeadarstellungen», Gymnasium 61, 1954, p. 211 n. 55. Médée de profil vers la gauche figure au centre, assise sur un rocher; elle porte le bonnet phrygien et tient des deux mains une grande boîte qu'elle est en train d'ouvrir. De chaque côté figure un Argonaute, portant une lance; celui de gauche, du fait qu'il porte un pétase et du fait qu'il est en face de Médée, est certainement Jason. Il s'agit du moment où Médée offre à Jason l'onguent magique qui va lui permettre de vaincre les taureaux monstrueux d'Aiétès. Hors la roche sur laquelle la magicienne est assise, aucun autre indice n'est donné sur le paysage. Il faut considérer cette peinture comme proche de la ver sion antérieure à ApoUonios où l'aide de Médée surtout au moyen de ses poisons est le point de plus important. L'identité de Médée est ici assurée par le bonnet phrygien; pourtant le type de la femme assise, tenant une grande boîte en trouverte, se retrouve en dehors des reliefs funéraires, sur des vases à scènes nupt iales d'Italie du Sud. Parmi les documents abondants, voir par exemple l'am phore du Musée National de Varsovie Inv 147391, CVA, Pologne, Varsovie, 4, Warszawa, 1967, pi. 41, ou le lebés de Ruvo de la collection Jatta, H. Sichtermann, Griechische Vasen in Unteritalien, Tübingen, 1966, p. 47 K67, pi. 106.
CHAPITRE IX
LES EXPLOITS DE JASON EN COLCHIDE LE DOMPTAGE DES TAUREAUX
Le premier jour en Colchide, les Argonautes rendent visite à Aiétès pour lui demander la Toison d'or. Apollonios, (Arg., Ill, 300 ss) donne la version la plus détaillée des événements, mais il n'était pas le premier à mentionner les exploits en Colchide; au contraire il suit ses prédécesseurs, comme par exemple Eumèlos (fr. 9 Kinkel), Phérécyde (F37 22 et 112 Jacoby) et Sophocle (Colchidiennes, fr. 336, 431 Pearson) qui connaissaient également les deux exploits de Jason. La même version est suivie par Lycophron (Alexandra, 1314 ss), par le Pseudo-Apollodore, (Bibliothèque, I, IX, 23) et par Ovide (Met, VII, 103-150; Héroïdes VI et XII). En revanche, dans les Naupactica (fr. 5 Kinkel)1, chez Pindare (Pythiques, IV, 224-241) et chez Hé siode, (Théogonie, 994-996) 2, il n'est question que de la lutte de Jason contre les taureaux3. Valerius Flaccus suit la version d'Apollonios, mais en changeant quelques détails : ainsi par exemple Aiétès demande aux Argonautes de l'aider contre ses ennemis et surtout contre son frère Perses, mais une fois assuré de la victoire, il impose les épreuves à Jason (Arg., VII, 32-77). Apollonios mentionne deux fois4 l'épisode des taureaux en fai1 Sur les Naupactica, voir C. Robert, Griechische Heldensage, p. 791 η. 4. 2 Hésiode (Théogonie, 994-996) mentionne les épreuves en général : Jason amena Médée après avoir achevé les douloureux travaux que lui dictait un roi ter rible et orgueilleux, Pélias : τελέσας στονόεντας άέθλους, τους πολλούς έπέτελλε μέγας Βασιλεύς ύπερήνωρ, υβριστής Πελίης και άτάσθαλος όβριμοεργός3 Diodore (IV, 45-48) ne mentionne pas du tout les travaux de Jason en Col chide puisque, chez lui, quand les Argonautes y accostent, ils rencontrent Médée et avec son aide volent la toison. 4 La première fois (Arg., Ill, 409-421), lors de l'entretien qui a lieu au palais entre Aiétès, les Argonautes et les Phrixides, ces derniers, qui plaident la cause des Argonautes, proposent au roi, en échange de la toison, d'utiliser l'aide des hé ros pour vaincre ses ennemis, les Sauromates. Aiétès arrive avec grand peine à maîtriser sa colère, pensant qu'on en veut à son pouvoir royal, mais empêché par
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sant à chaque fois intervenir des personnes différentes et en don nant des détails divers, ce qui prouve l'importance de cet exploit même chez cet auteur. Par ailleurs l'accomplissement de l'exploit lui-même donne l'occasion à ApoUonios de la décrire une troisième fois (Arg., Ill, 1278-1407) avec des termes qui font honneur à Jason. Après que les Argonautes ont demandé la semence au roi5 (Arg., Ill, 1175-1187) et que Jason dans la nuit a exécuté le rituel prescrit par Médée, le quatrième jour du séjour en Colchide, il accomplit les tra vaux imposés par Aiétès qui doivent normalement le mettre en pos-
les lois de l'hospitalité de tuer ses hôtes, il finit par résumer aux Argonautes l' épreuve qu'il leur impose et qu'il accomplit d'habitude lui-même, en y ajoutant des menaces (III, 434, 438) pour terroriser Jason. (Chez Pindare (Pythiques, IV, 398411), Aiétès met sous le joug les deux taureaux et laboure un peu devant tout le monde, avant Jason). Il s'agit d'abord de mettre au joug deux taureaux monst rueux que le roi élève dans la plaine d'Ares, taureaux aux sabots de bronze et soufflant le feu de leur muffle (III, v. 410 ταύρω χαλκόποδε, στόματι φλόγα φυσιόωντες) ensuite de labourer une parcelle de terre avec ces bêtes en semant les dents d'un dragon et enfin de maîtriser les hommes armés qui sortiront de terre. Aiétès refuse de donner la toison, non seulement parce qu'il ne veut pas se démun ir d'un objet de valeur, mais surtout à cause d'un oracle d'Hélios qui lui avait prédit qu'il perdrait la vie et le pouvoir s'il perdait la toison; voir ApoUonios (Arg., Ill, 514) qui est suivi par Diodore (IV, 47), et Hygin (Fables, 22), mais la tradition remonte à Hérodoros (31F9 Jacoby). Sur cet oracle, voir aussi F. Vian, in Argonautiques, III p. 128 n. 600. Médée est présente à cette entrevue, mais se tient s ilencieuse parmi les femmes. Quand Jason, distingué par sa beauté et sa grâce (Arg., Ill, 443-444) έν πασι μετέπρεπεν Αίσονος υιός κάλλεϊ και χαρίτεσσιν), quitte la salle avec Argos, Médée est déjà amoureuse de lui, mais se contente de le regarder en biais sous son voile (Arg., Ill, 445 λοξά παρά λιπαρή ν σχομένη θηεΐτο καλύπτρην). Le lendemain de l'entrevue avec Aiétès, c'est Médée elle-même qui décrit l'épreuve à Jason. Après le coup de foudre qu'elle a ressenti pour lui et les supplications de sa sœur, elle est disposée à lui donner une drogue, le prométheion pour l'aider à surmonter des épreuves surhumaines. Selon Pindare (Py thiques, IV, 391-395), Médée donne à Jason un onguent qui est fait d'huile et d'herbes capables de le protéger des douleurs : συν δ' έλαίφ φαρμακώσαισ' άντίτομα στερεαν οδυναν δώκε χρίεσθαι. Le lendemain, quand ils se rencontrent donc au temple d'Hécate, elle le lui donne et lui explique comment il faut s'en servir (Arg., Ill, 1025-1062), après avoir accompli des rites bien spécifiques en l'honneur d'Hécate. Comme la force de la drogue ne durera qu'un jour, elle lui conseille, une fois les taureaux attelés, de l abourer sans tarder, et quand les géants sortiront en grand nombre des sillons comme des épis (Arg., Ill, 1054 oi δ' ήδη κατά ωλκας άνασταχύωσι γίγαντες) de leur jeter une grosse pierre qui les fera s'entretuer afin de s'en emparer. Chez Va lerius Flaccus (Arg., VU, 467-473), Médée donne à Jason un casque infecté du poison de la Discorde qu'il faudra jeter au milieu des guerriers et qui aura la même utilité que la pierre. 5 II s'agit des dents du dragon gardien de la source d'Ares à Thèbes, tué par Cadmos; Athéna les avait partagées entre Cadmos et Aiétès. Cadmos les avait déjà utilisées pour créer le peuple de Thèbes, selon Phérécyde (F22 Jacoby).
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session de la toison. Il prend soin d'enduire son corps et ses armes de l'onguent magique6 - le prométheion - que Médée lui avait donné. L'exploit se déroule dans la plaine d'Ares, en face de la ville - αστεος άντιπέρηθεν7. Le peuple colque est assis sur les rochers du Cauc ase, alors que le roi se trouve près du fleuve8. Jason se présente au combat, nu, mais portant son casque9, son épée, son bouclier et sa lance, semblable à la fois à Ares et à Apollon. Il inspecte le terrain, la charrue en acier, le joug en bronze et pose sa lance et son casque contre la charrue. On distingue quatre moments10 dans sa lutte contre les taureaux, qu'il entreprend seul11. D'abord, quand les tau reaux apparaissent, enveloppés de la vapeur de leur souffle, il plante son bouclier devant eux {Arg., Ill, 1290-1298), les bêtes y donnent des coups sans aucun succès. Dans un deuxième temps (Arg., Ill, 13061309), il saisit d'abord le taureau qui est à sa droite et le traîne jus qu'au joug où il le fait tomber à terre en frappant sa patte d'un coup de pied (Arg. ν. 1309 βίμφα ποδί κρούσας πόδα χάλκεον). Il fait de même pour l'autre taureau, puis (v. 1306-1314) il jette loin de lui son bouclier et bien campé sur ses jambes, il maintient agenouillées les deux bêtes monstrueuses, tandis qu'un tourbillon de flammes l'en toure. Le spectacle est tellement impressionnant qu'Aiétès lui-même ne peut que l'admirer (Arg. 1314 Θαύμασε δ' Αίήτης σθένος άνέρος). Alors, (Arg., Ill, 1315-1319) comme convenu, les Tyndarides s'ap6 Le prométheion, selon Apollonios (Arg., Ill, 844-856), est une drogue, dans le cas de Jason un onguent qui doit son nom à Prométhée; elle est faite à partir du suc de la racine, ressemblant à de la chair fraîchement coupée, d'une plante qui avait poussé pour la première fois du sang de Prométhée sur le Caucase, et dont la fleur était de couleur safran. Médée, vêtue d'un manteau noir, a dû re cueil ir le suc dans une coquille de la mer après s'être baignée sept fois. C'est à peu près le même rituel qu'elle conseille à Jason d'accomplir avant d'utiliser l'onguent. Le prométheion était aussi mentionné par Sophocle, (Colchidiennes; Rizotomoi fr. 489 Nauck, où Médée est nue pendant la cueillette); par Sénèque (Medea, 708), et par Valerius Flaccus (Arg., VII, 355-363). Pour l'identification de la plante, voir F. Vian, in Arg., Ill, p. 135-136 n. 857. 7 Le pseudo-Apollodore (I, LX, 23) place la lutte dans le bois sacré, sousentendu du temple, peut-être du temple d'Héphaistos, puisque, selon cet auteur, les taureaux sont un cadeau du dieu à Aiétès. 8 II s'agit là d'une disposition naturelle, rappelant celle d'un théâtre, voir F. Vian, in Arg., Ill, p. 147. 9 Le casque sert à contenir les dents et non pas pour la défense de Jason qui est assurée par l'onguent magique. 10 Chez Pindare (Pythiques, IV, 412-423), seule la lutte contre les taureaux est mentionnée, de manière d'ailleurs assez brève. A la fin Aiétès ne peut étouffer un cri de douleur. 11 Apollonios ne précise pas si Médée regarde la lutte. Chez Valerius Flaccus (Arg., VII, 589-590) non seulement elle y assiste, mais encore elle aide Jason à maîtriser les deux taureaux. Chez Ovide (Met., 137), Médée également présente, entonne un chant magique pour l'aider dans son deuxième exploit, contre les guerriers armés, qui surgissent de la terre.
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prochent et lui donnent le joug qu'il fixe sur la nuque des taureaux, puis il attache le timon et, en mettant son bouclier derrière son dos, il commence à labourer. La lutte contre les taureaux est l'exploit le plus important du sé jour en Colchide, il est plus important même que celui de la toison, puisque dans les Naupactica et chez Pindare, elle constitue l'épreuve majeure. Dans l'art figuré, elle apparaît d'abord, à notre avis, sur des monnaies de Thessalie du Ve siècle avant notre ère, puis sur des sar cophages, une urne et des médaillons contorniates. Le schéma iconographique reste inchangé durant tout ce temps. L'exploit figure sur les cuves de Prétextât, Vienne, Paris Ma 410 (n° 12, 13, 5; fig. 16, 17, 24, 7), sur le fragment de Turin (n° 6, fig. 8), sur le petit côté gauche des cuves de Berlin et Naples (n° 2, 22 fig. 3, 36) sur le couvercle de Bâle (n° 24, fig. 40, 46), et comme décor d'une kliné sur la cuve d'Ancóne (n° 20, fig. 31). La scène comporte en moyenne trois personnages masculins, mais le «noyau» principal est constitué par Jason et les deux tau reaux. Ce groupe est toujours identique. Jason, nu, est vu de face, la tête levée et tournée vers la droite. Sa jambe gauche fléchie, l'autre touchant à peine le sol, il est représenté dans un mouvement instan tané très vif de son combat; il se lance et s'arc-boute pour ramener en les tenant par les cornes les têtes des taureaux, les deux bras dé ployés de chaque côté de son corps, les mains tenant solidement les cornes des taureaux. Son manteau flotte dans l'air derrière lui. C'est une figure pleine de vie, et de force, très proche des autres héros lors d'exploits analogues (par exemple Héraklès). Les corps des animaux sont représentés à l'arrière plan. Le joug est posé par terre sur les panneaux de Paris et de Bâle (n° 5, 24; fig. 7, 40, 46). A droite de ce groupe se trouvent les spectateurs, parmi lesquels le plus important est Aiétès qui, par sa présence, valide l'exploit12. Il est accompagné par un ou deux personnages, toujours des hommes, jeunes ou plus âgés, parfois barbus. Dans le cas des panneaux de Bâle et du Louvre, où un jeune homme se trouve à droite du roi, il s'agit certainement de son fils Apsyrtos. Ce dernier est par la suite tué par sa sœur Médée pour faciliter son départ. Ce sont là quelques rares représentations d'Apsyrtos13. 12 Pour l'iconographie d'Aiétès voir M. Schmidt, LIMC, I, s.v. Aietes. Il est le plus souvent assis sur un rocher, ce qui convient mieux au contexte de la scène. Pourtant sur le sarcophage de Vienne (n° 7, fig. 25), Aiétès est assis sur un beau siège à haut dossier et à pieds moulurés. De plus, ses pieds reposent sur un petit tabouret de forme triangulaire. Il porte un vêtement oriental, avec des pantalons. Il tient une grande lance ou un sceptre qui précise sa fonction. Sur le couvercle de Bâle, fig. 18 son sceptre occupe toute la hauteur du relief. 13 Sur le panneau de Paris (n° 11), il y a deux jeunes gens à droite d'Aiétès. C. W. Clairmont, LIMC, II, 1, s.v. Apsyrtos ne mentionne qu'une peinture de
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Sur le panneau de Vienne (n° 13, fig. 24), deux hommes à gauche de Jason se préparent à l'aider comme sur le couvercle de Bâle (n° 24, fig. 41, 47), où un homme barbu est tourné vers Jason. Ces figures peuvent être mises en rapport avec le récit d'Apollonios (Arg., Ill, 1315-1319) où les Dioscures apportent le joug à Jason14. La composition est divisée en deux : à gauche, c'est une compos itionanimée, dominée par la diagonale du corps de Jason, alors qu'à droite, nous avons des lignes verticales (les spectateurs) et une composition calme, figée. La même remarque s'applique au trait ement des surfaces : à gauche le corps nu de Jason et les taureaux sur lesquels glisse la lumière, tandis qu'elle va s'accrocher davantage, à droite, sur les plis des vêtements des spectateurs. Bien que sur les faces principales on dispose de plus de place, c'est sur le petit côté de Berlin (n° 2, fig. 3) que l'espace est le mieux maîtrisé, la composition est bien équilibrée, le dessin et le modelé réussis. En revanche, le petit côté de Naples (n° 22, fig. 36) présente une composition d'un autre type dont la symétrie simpliste a quel que chose qui rappelle les schémas «héraldiques», les animaux semblent flotter dans le champ, le modelé reste mou et sommaire. Nous constatons que la scène sur les sarcophages est inspirée du troisième chant d'Apollonios et particulièrement des vers 13061316; il s'agit du moment où Jason tient les deux bêtes bien solid ement par les cornes, alors qu'un tourbillon de flammes l'entoure, juste avant (v. 1315-19) que les Tyndarides ne lui apportent le joug, que d'ailleurs on voit, en particulier sur le couvercle de Bâle n° 24, fig. 46 et sur la cuve de Vienne n° 13, fig. 24. Aiétès est présent sur les longs côtés des cuves. En revanche, sur les petits côtés où la place manque, la scène se rapproche davantage de quatre drach meset d'une triobole en argent de Thessalie du Ve siècle avant notre ère15, sur l'avers desquelles figure un jeune homme dont le manteau flotte en arrière, domptant un seul taureau. L'origine thes-
Pompéi - aujourd'hui disparue - comme représentation d'Apsyrtos. Il ne tient donc pas compte de cette série des sarcophages. Sur ce point voir également, P. Blome, «Der Tod des Apsyrtos auf einem römischen Sarkophagdeckel», RM, 90, 1983, p. 201-209. n° 188. 14 Pour l'interprétation de ces hommes comme Dioscures, voir ASR, II, 15 II s'agit de : 1. AR Drachme. Pherai. Vers 470. 2. AR Drachme Larissa. Vers 440. 3. AR Drachme Larissa. Vers 430. Pour ces trois monnaies, voir A. Moustaka, Kulte und Mythen auf thessalischen Münzen, Wurtzbourg, 1983, p. 140 n° 194, 190, 191a, pl. 4, 5, 9. Sur l'avers : un jeune homme tourné vers la gauche, il dompte un seul taureau. Cercle de grenetis. Au revers : cheval et l'ethnique ΦΕPAI, ΛΑΡΙΣΑ. 4. AR Triobole. Larissa. Vers 430. 5. AR Drachme. Larissa. Entre 450-400. Voir A. Moustaka, Ibid., p. 135, 140 n° 170, 191b, pl. 4, 5. Même schéma que les précédentes, mais le jeune homme se dirige vers la droite.
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salienne des monnaies nous autorise à identifier Jason, malgré la présence d'un seul taureau au lieu des deux que nécessite l'exploit; le même mouvement violent du héros pour maintenir les deux an imaux féroces figure sur les deux types des documents. Le modèle qu'ont suivi les sculpteurs des sarcophages et d'une urne d'époque impériale16 pourrait à notre avis être une ronde bosse du Ve siècle. Le même schéma se transmet sur une série de onze médaillons contorniates17. Sur une des métopes Ouest du temple de Zeus à Olympie18, figurait un schéma très proche : celui d'Héraklès dompt antle taureau de Crète. Nous avons identifié Jason sur les monnaies du Ve siècle avant notre ère, en raison de leur origine thessalienne. Pourtant la carrière d'Héraklès et de Thésée comporte le même exploit, mais il s'agit alors de la lutte contre un seul taureau : Héraklès affronte le taureau de Crète19 et Thésée celui de Marathon20. Aussi, pensons-nous que les deux vases21 de la fin du IVe siècle reconnus comme illustrant la
16 6. Urne circulaire fragmentaire, en marbre, avec inscription. Maine (U.S.A.), Bowdoin College, Museum of Fine Arts. H. 35 cm; Diamètre 27 cm. Vers 140. Voir : K. Herbert, «A Roman Cinerary Urn at Bowdoin College», AIA 64, 1960, p. 76, pi. 17; Sinn, Marmorurnen, p. 227 n° 556, pi. 84 a, b. Jason figure seul en train de dompter les taureaux, le schéma iconographique est tout à fait identique à celui des sarcophages. En ce qui concerne la ronde-bosse, selon Pline NH XXXTV, 79, Lycios, élève de Myron, s'était montré digne de son maître entre autres par ses Argonautes, mais le sujet exact reste inconnu. 17 II s'agit de : 7. Londres, British Museum 76 et 77; 8. Vienne, Bundessamml ung von Münzen, Medaillen u. Geldzeichen Inv 32531; 9. Bern; 10. Paris Β Ν Ca binet des médailles 17215; 11. Naples, 16037 et 16038; 12. La Haye, Cabinet Royal des Monnaies; 13. Glasgow, Hunterian Museum; 13. Bologne 21; 14. Catalogue de vente G. de Falco, Naples. Pour la série complète, voir A. Alföldi, E. Alföldi, Die Kontomiat-Medaillons, I, Berlin, 1976, p. 46 n° 158, pl. 53, 11-12; 54, 1-9. Le héros figure au premier plan, maintenant les deux bêtes par les cornes, et tournant la tête vers la droite comme sur les sarcophages; il n'y a pas ici d'autres person nages. 18 Sur la métope d'Olympie, voir N. Yalouris, Olympia the Sculptures of the Temple of Z&us, Londres, 1967, fig. 78, datée vers 460 avant notre ère. 19 Pour la lutte d'Héraklès contre le taureau de Crète, voir Fr. Brommer, Her akles, Munster/Cologne, 1953; et J. Boardman, O. Palagia, S. Woodford, LIMC IV, s.v. Herakles. 20 Pour Thésée et le taureau de Marathon, voir Ch. Dugas, «L'évolution de la légende de Thésée», REG LVL 1943, p. 1-24; E. Paribeni, EAA, VII s.v. Teseo; B. B. Shefton, «Medea at Marathon», AJA 60, 1956, p. 159-163. 21 1. Cratère à volutes. De Ruvo. Naples 3252 (Inv 82261). Groupe du peintre du Sakkos blanc. Entre 330-310 avant notre ère. Threndall, Paestan Pottery, p. 98 n° 21; Trendall, Cambitoglou RVA II, p. 799 n° 29/200, pl. 382, 5-6. 2. Cratère en cloche Naples H 2413 (Inv 81415) de Santa Agata de Goti. 380-370 avant notre ère. Trendall, Cambitoglou, RVA I, p. 101 n° 4/262; Cambitoglou, Trendall, Apulian Red-figured Vase-peinters of the plain Style, Rutland, 1961, p. 23 (i), pi. 6, fig. 25-26.
LES EXPLOITS DE JASON EN COLCHIDE
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lutte de Jason représentent en réalité Héraklès22 ou Thésée23 et que l'exploit de Jason ne figure sur aucun vase. 22 Sur le cratère n° 1 de Naples 3252, un jeune homme, nu, agenouillé sur la jambe gauche seulement et tenant la massue, lutte contre un seul taureau. Plus haut, sur une sorte de balcon se tient une femme voilée qui regarde et fait un geste vers le jeune homme; à côté d'elle se tient un Eros. La scène est encadrée de chaque côté d'un arbre, sur lequel se trouvent des oiseaux. Sur l'arbre de droite s'enroule un serpent, alors que d'une branche de l'arbre de gauche pend une band elette. Au-dessus du héros dans le champ est accroché un bouclier. La scène a été interprétée par H. Heydemann, «Jason in Kolchis», HWP, Halle, 1886, p. 6-14, et par Trendall, Cambitoglou RVA II, p. 799 n° 29/200, pi. 382, 5-6, comme Jason luttant contre le taureau d'Aiétès, en présence de Médée. Le seul élément favo rable à cette lecture serait le bouclier, car Jason en utilise un lors de la lutte; néanmoins la preuve est mince car, la composition, la présence d'un seul taureau, des arbres et surtout de la massue, rapprochent cette image du cycle d'Héraklès. Même le serpent enroulé autour de l'arbre fait partie des travaux du héros au jar din des Hespérides. En fait cette peinture ressemble beaucoup à celle du col d'un autre cratère à volutes apulien, du peintre de Lucurgue. Collection Jatta à Ruvo, IVe siècle avant notre ère, voir H. Sichtermann, Griechische Vasen in Unteritalien, K72, pi. 120, 122, où se retrouvent les mêmes caractéristiques : un seul taureau, Héraklès agenouillé sur une jambe, derrière lui Iolaos tenant la massue et l'arc; de chaque côté : Athéna à gauche et Aphrodite avec Eros à droite. La femme voi lée sur le petit balcon du cratère de Naples 3252, pourrait bien être Aphrodite. Enfin, sur la face Β du cratère de Naples figure une Amazonomachie, qui est plus en rapport avec le cycle d'Héraklès qu'avec celui de Jason. Il vaudrait donc mieux considérer désormais cette image comme une représentation supplémentaire de la carrière d'Héraklès, nous rejoignons ainsi les chercheurs de la fin du XIXe siècle, H. Heydemann, ibid., souligne la «parenté» entre les deux héros. Les points communs de l'exploit ont donné lieu à une «parenté» iconographique entre Jason et Héraklès qui se perpétue tardivement, en effet, le relief d'un méd aillon du Palazzo Colonna, à Rome Fig. 54 qui date probablement du XVIIe siècle de notre ère et non pas de l'époque impériale, représente Jason portant la léonté et luttant contre deux taureaux, selon le type qu'on rencontre sur les sarco phages. C. Robert, ASR II, p. 203 n° 191 supposait que ce relief provenait d'un sarcophage antique, perdu au XVIe siècle. Cette hypothèse est insoutenable au jourd'hui, car il s'avère que le relief est post-antique; voir C. M. Brown, «Major and Minor Collections of Antiquities in Documents of the Later Sixteenth Centur y»,The Art Bulletin LXVI, 1984, p. 496-507, et L. Musso, «Rilievo all'antica con Giasone e i tori», in : Catalogo della Galleria Colonna in Roma, Sculture, Rome, 1990, n° 137, p. 254-256. 23 Sur le cratère en cloche Naples H 2413 (n° 2 note 21) figure un jeune homme agenouillé, tenant par les cornes un taureau qui nous semble devoir être placé dans l'iconographie de Thésée, alors que la scène a été interprétée comme repré sentant l'exploit de Jason. Derrière l'animal on aperçoit une femme tenant dans ses mains un rameau (de laurier?). Il s'agit de Médée, mais assistant à la lutte de Thé séecontre le taureau de Marathon. Une étude de B. B. Shefton, «Medea at Mara thon», AJA 60, 1956, p. 159-163 démontre que la magicienne peut assister au combat de Thésée en tenant soit une phiale, soit sa boîte et que Thésée se sert d'une massue, d'un bâton ou d'un couteau. La branche que Médée tient sur le cra tère de Naples fait partie des accessoires magiques qu'elle utilise d'habitude, par exemple en Colchide, quand elle endort le dragon en l'aspergeant d'une branche de genévrier qu'elle trempe dans une mixture : Apollonios (Arg., IV, 150-160).
CHAPITRE X
LES GUERRIERS NES DE LA TERRE
Le deuxième exploit imposé par Aiétès à Jason consistait à ense mencer une parcelle de terre avec une semence magique1 et à la l abourer avec les taureaux monstrueux, domptés auparavant. Les auteurs antiques2 qui mentionnent l'épisode donnent tous la même version qui est celle également d'Apollonios (Arg., Ill, 13551400). Jason après avoir labouré, chasse les taureaux et apaise sa soif dans le fleuve (v. 1349); il plie ses genoux pour les assouplir comme n'importe quel athlète qui vient de faire un grand effort phy sique. Déjà la terre commence à se remplir d'hommes armés et peu après on ne voit plus que leurs armes étincelantes. Alors Jason, sui vant la ruse suggérée par Médée, profite de sa force surnaturelle, et jette une énorme pierre au milieu d'eux. Les Colques hurlent d'ad miration, mais Aiétès reste muet. Les guerriers se ruent sur la pierre et s'entretuent, Jason intervient avec son épée pour les achever. Se lon Ovide (Met, VII, 136-138), Médée est présente, et craignant que Jason n'arrive pas à triompher des guerriers, entonne un chant ma gique pour l'aider3. Chez Valerius Flaccus, (Arg., VII, 644), Jason plonge ses armes dans la rivière après le combat, ce qui pourrait être un symbole de purification. Cet exploit aussi prodigieux que le premier, mais moins specta culaire, n'a guère trouvé d'écho dans l'art figuré4. 1 Sur la semence voir la note 5 du chapitre précédent. 2 Euripide (Médée, 479); Apollonios (Arg., Ill, 1355-1400); Pseudo-Apollodore (Bibliothèque, I, IX, 23); Ovide (Héroïdes, VI; XII); Valerius Flaccus (Arg., VII, 610-638). 3 Ovide, Métamorphoses, VII, 136-138 Pattuii et subito sine sanguine frìgida sedit; Neue parum ualeant a se data gramina, carmen Auxiliare canit secretasque aduocat artes. 4 Un seul document, à notre connaissance, a été interprété dans ce sens. Il s'agit d'un fragment de relief (probablement d'un sarcophage). Vienne Kunsthist orisches Museum, Antikensammlung Inv n° III 1062. Calcaire, H, 80; L. 58. Trouvé à Margaret. II-IIP siècle de notre ère. M. L. Krüger, Die Reliefs des Stadgebietes von Carnuntun I. Die figürlichen Reliefs, CSIR, I, 3, Vienne, 1970, p. 58 n° 332. Le fragment est très endommagé. On devine une figure masculine habil lée d'un chiton court; devant elle, par terre à droite, se trouve un objet rectiligne formant angle droit que Krüger considère comme une charrue. Le personnage
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(suite de la note 4 de la page 77)
tient dans la main (ou les mains?) un objet long : un bâton, des rênes? A l'arrièreplan, derrière lui figurent les jambes et le vêtement d'un personnage de très grande taille. La scène a été comprise comme provenant d'un sarcophage r eprésentant Médée, Jason et l'un des géants nés de la terre. Nous ne trouvons pas cette identification plausible, pour les raisons sui vantes : le personnage de petite taille (prétenduement Jason) porte chiton et manteau, alors que l'on sait que Jason laboure nu, en raison des flammes qu'ex halent les taureaux. L'objet par terre pourrait très bien être un char (et non pas une charrue), sur lequel est en train de monter le personnage de taille gigan tesque, si l'on en juge d'après la position de ses pieds. En outre, un certain temps s'écoule entre la fin du labour et la sortie de la terre des géants, alors qu'ici les deux moments seraient juxtaposés. En dehors de ces considérations, l'absence d'illustration de l'épisode dans le monde gréco-romain nous empêche d'accepter avec facilité son utilisation dans le contexte provincial. Nous sommes incapable de préciser quel modèle figuré suit cette œuvre. Bref, nous considérons que ce re lief n'est pas en rapport avec le cycle que nous étudions et que l'épisode en cause n'a pas été représenté dans l'art figuré.
CHAPITRE XI
LA CONQUÊTE DE LA TOISON D'OR
Après que Jason ait accompli ses épreuves, Aiétès, le roi, sou cieux de garder la toison qui lui procure la longévité ou lui assure la royauté, refuse de la lui céder. Médée, connaissant son père, propose aux Argonautes son aide pour voler la toison et s'enfuir avec eux. Cet épisode constitue le point culminant du séjour en Colchide; tous les auteurs qui traitent de l'expédition le mentionnent, et le rôle de Mé dée y est très important1. Chez Antimaque (fr. 65 Wyss), c'est Médée qui endort le dragon et qui mène l'action. Cette version est suivie scrupuleusement, semble-t-il, par Apollonios2. Egalement dans les Naupactica (fr. 52 Jacoby), Médée emporte de chez son père la toison qu'elle donne à Jason. Pour Hérodore (fr. 52-53 Jacoby), Aiétès, après l'exploit des taureaux, impose à Jason l'épreuve de la toison. Le héros tue le dra gon et emporte la toison, mais le roi invite ensuite les Argonautes à un banquet pour les tuer3. Dans le récit de Pindare {Pythiques, IV, 443-445), Aiétès ne refuse pas de donner la toison; il indique l'en droit où elle se trouve, car il ne croit pas Jason capable d'exécuter cet exploit. Pindare ne précise pas si Médée a aidé Jason; en re vanche, il mentionne que l'exploit a pu avoir lieu τέχναις c'est-à-dire grâce à des sortilèges. Nous imaginons donc qu'elle a pu conseiller le héros. Il est évident que cette version, la plus «héroïque», corre spondà l'esprit de la littérature la plus ancienne. Euripide {Médée 480-482) donne une version intermédiaire, car c'est Médée et non Jason4 qui tue le dragon, mais peut-être κτείνασα ne signifie-t-il que mettre hors du combat. 1 Seeliger Röscher Lexikon, II, 2, 2482-2515, s.v. Medea, (suivi par Croisille, Poésie et art, p. 37-40) distingue deux traditions différentes selon que Jason tue le dragon (Hérodoros, fr. 52-53 Jacoby; Naupactica fr. 52 Jacoby; Phérécyde, 3F51 Jacoby; Pindare Pythiques, TV, 443-445; Euripide Médée 480-482); ou que le monstre est endormi par Médée pour donner le temps à Jason de voler la toison, (Antimaque fr. 65 Wyss; Apollonios Arg. TV 87-88, 114-166). 2 Sur les sources d'Apollonios, voir F. Vian, in Argonautiques., TV, p. 6 n. 1. 3 De toute façon Aiétès veut à plusieurs reprises brûler le navire, voir Apollo nios (Arg., Ill 581-583, IV, 6-10, 223). 4 Euripide, Médée, v. 480-482 : δράκοντα θ', ος πάγχρυσον άμπέχων δέρος '
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Seul Apollonios (Arg., IV, 100-182), qui a suivi ses prédécesseurs et notamment Antimaque, donne une foule de détails sur le rituel magique dont use Médée pour endormir le dragon. Sa version a été suivie par les auteurs latins, Ovide, Sénèque, et Valerius Flaccus5. Pendant que son père réunit le peuple pour trouver le meilleur moyen de se venger, Médée, redoutant ce qui va suivre, prend la fuite en emportant dans son sein les drogues tirées de son coffret6. Elle va rejoindre les Argonautes et leur porpose de leur procurer la toison et de fuir avec eux la colère d'Aiétès, à condition que Jason tienne les promesses de mariage qu'il lui a déjà faites. Aussitôt elle monte dans le navire et ils se dirigent vers le pré appelé la Couche du Bélier (ibid., IV, 115-116 Κριού Εύναί). Les deux protagonistes se di rigent seuls vers le bois sacré, où sur un chêne se trouve la toison gardée par un dragon effrayant par sa taille, ses sifflements, et le bruit de ses anneaux. Médée le fixe dans les yeux en murmurant une incantation, tandis que Jason suit terrifié, (Εϊπετο δ' Αίσονίδης πεφοβη μένος). Le monstre s'endort complètement après que Médée, ayant trempé un rameau de genévrier* - άρκεύθοιο - dans une mixt ure, lui en a aspergé les yeux, en murmurant toujours des formules magiques. A ce moment seulement, Jason peut arracher la toison de l'arbre, tandis que Médée continue de s'occuper du dragon jusqu'à ce que Jason lui dise de regagner le navire. Voilà comment le héros thessalien parvient à accomplir son exploit, grâce à l'Amour et à la magie. Le poète des Argonautiques Orphiques (v. 890-1019) rapporte une autre version, où Médée ne joue qu'un rôle secondaire. L'action est menée par Orphée qui arrive devant l'enceinte imprenable, a ccompagné de Jason, Castor, Pollux et Mopsos, Médée suit à l'écart des autres, bien qu'elle connaisse les lieux et le moyen d'y pénétrer. Après qu'Orphée a accompli un rituel bien spécifique pour fléchir la gardienne de l'enceinte, Artémis, la muraille s'ouvre et ils arrivent devant l'arbre de la toison, où ils sont tous effrayés par les siffl ements du serpent, sauf Médée qui garde dans ses mains des plantes maléfiques άποθρίσματα £ιζ<δν. Orphée endort le serpent avec le chant de sa phorminx, et Médée encourage Jason à prendre la toi son. Philostrare le Jeune (Εικωνες, 11) décrit une peinture où Médée, Jason et Orphée fuient à bord de l'Argô, après le vol de la toison.
κτείνασ' άνέσχον σπείραις έσφζε πολυπλόκοις σοί φάος σωτήριον. άυπνος ών, 5 Ovide, (Héroïdes, VI, 13; XII, 49, 101-108); Sénèque, (Medea, 471, 703, 912); Valerius Flaccus (Arg., V, 230-258). 6 Apollonios, Arg., IV, 25 φάρμακα πάντ' άμυδις κατεχεύατο φωριαμοΐο. Dans l'art on représente très souvent Médée avec son coffret, le fameux φωριαμος.
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Les mythographes tardifs rapportent des explications plus matér ialistes sur la toison merveilleuse, (κοας, δέρας), tant désirée, la peau du bélier qui emmena Phrixos en Colchide7, et que les Argo nautes veulent chacun à son tour toucher, fascinés par sa beauté. Elle a la particularité d'être en or et d'assurer royauté et longévité à qui la possède; elle constitue aussi la dot de Médée. Grande comme la peau d'une génisse d'un an, elle est d'un rouge éclatant, comme une flamme. Aucun auteur ne précise ce que devient la toison une fois l'expédition revenue à Iolcos8. Il semble que le plus important ne 7 Palaiphatos, Περί άπιστων, XXXI, mentionne deux versions : selon l'une, la toison que Phrixos avait donnée à Aiétès n'était qu'une simple peau de bélier, mais les peaux étant rares, la fable se créa; selon l'autre, Phrixos n'aurait pas don néà Aiétès une peau, mais une peinture, (ou un portrait en or χρυσην είκονα) exécutée avec l'argent de Kôs, (mère de Pélops), au moment où Phrixos quittait l'Hellade. Le nom de cette femme Κώς aurait provoqué le malentendu avec le mot kôaç qui signifie toison. Selon Heraclite, (Περί άπιστων, XXIV, ... τοϋ δε Φρίξου σωθέντος έπιθυμητικώς έχειν τον Αίήτην, τον δέ Κριον διακωλύοντα και πειρώμενον άφθορον διατηρήσαι τον Φριξον άποδαρθήνοκ, και το δέρμα αύτοο προσπασσαλευθήναι, χρυσοϋν δέ προσαγορευθήναι δια το πιστότατον γεγενήσθαι). Phrixos et Hellé partent sur un petit bateau accompagnés de Krios («Bél ier»), leur pédagogue. Hellé meurt pendant la traversée, et à l'arrivée en Col chide, Aiétès désire Phrixos. Le pédagogue finit dépecé et sa peau clouée, parce qu'il s'y oppose. Par la suite, le bruit se répand que cette peau était en or. Diodore (IV, 47), rapporte une version très proche. Phrixos a été offert au gendre d'Aiétès, roi des Scythes, qui tomba amoureux de lui, mais Krios, son malheureux péda gogue, fut sacrifié aux dieux, son corps dépecé et sa peau clouée sur le temple. Aiétès la fit dorer afin de lui donner plus de valeur aux yeux des soldats qui la gardaient dans une enceinte, car un oracle lui avait prédit son vol par des étran gers. Selon un mythographe anonyme, (Περί άπιστων, III, ... άλλα βιβλίον έν δέρμασι γεγραμμένον περιέχον δπως δει γίνεσθαι δια χυμείας χρυσόν. είκοτως ούν οί τότε χρυσοϋν ώνόμαζον αυτό δια την έξ αύτοΰ ένέργειαν) la toison gardée par les Colques était une peau qui comportait la formule écrite concernant le mélange de plusieurs sucs pour fabriquer de l'or. Curieusement, encore au début de notre siècle, cette conviction faisait partie des croyances populaires, chez les habitants des villages de l'Agrafa, chaîne montagneuse au Nord de la Grèce continentale, s itués sur les Gomfi antiques, voir A. Arvanitopoulos, «Οι Αργοναυται από τοΟ μύθου είς την ΐστορίαν δια τής αρχαιολογίας», Πολέμων, 1947/48, ρ. 56-67. 8 Sur le sort de la toison, voir F. Vian, in Argonautiques, p. 163 n. 387. Pourtant, nous tenons à mentionner un vase, unique par son sujet : Cratère en calice d'Apulie. Paris, Louvre K127. Proche du peintre de l'Enfer. Vers 320/315. Trendall, Cambitoglou, RVA II, p. 539 n° 18/332, pi. 203, 3-4. A notre avis, ce vase est le seul à représenter la version mentionnée par Apollodore I, LX, 27 où Jason rentrant à Iolcos, donne la toison à Pélias, sur l'ordre duquel il était parti la conquérir en Colchide. La scène représente à gauche Médée, reconnaissable grâce à son bonnet phrygien; à côté d'elle se trouve un jeune homme vêtu d'un manteau rejeté en arrière, un pétase rejeté sur le dos et tenant dans la main droite deux lances, dans la main gauche la toison d'un bélier. Il ne peut s'agir que de Ja son tenant la toison d'or qu'il est en train de remettre à un personnage d'allure royale, tant par ses habits que par le sceptre qu'il tient dans la main gauche. Ce personnage est certainement Pélias recevant Jason, qu'une Niké vient couronner, à son retour en Hellade. Cette tradition a été oubliée; celle qui a prédominé est
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soit pas le prix gagné, mais le voyage entrepris, et les dangers sur montés, dans l'esprit des grands rites d'initiation. Le serpent gardien de la toison, est un adversaire redoutable par sa taille9 et par le fait qu'il ne peut être surpris puisqu'il ne dort jamais. Il terrorise par ses sifflements et par le bruit de ses anneaux. Pourtant il est vaincu par la volonté et les ruses d'Héra, et dépouillé de la toison. L'épisode de l'appropriation même de la toison d'or fut très souvent représenté dans l'art figuré. Les deux protagonistes peuvent y figurer, soit isolément, soit ensemble, soit accompagnés de plu sieurs personnages, face au terrible dragon. Jason vole la toison en présence de Médée et avec son aide, sur plusieurs documents : des vases, des reliefs, une gemme, une peinture murale. Sur quelques documents, la scène est enrichie par la présence d'autres personnages qui participent à l'action ou qui tout simplement y assistent. Les reliefs des sarcophages appar tiennent à cette série iconographique. La scène, composée autour des deux protagonistes placés de part et d'autre d'un arbre où est en roulé le serpent et d'où pend la toison, apparaît à la fin du Ve siècle avant notre ère. Cette scène figure sur les cuves de Prétextât, Vienne (n° 12, 13; fig. 16, 19, 24), sur le couvercle de Bâle (n° 24, fig. 40, 47), sur les pet its côtés de Naples et de Rome (n° 22, 18; fig. 37, 29) et certain ement aussi sur le fragment du Palazzo Primoli à Rome, (n° 16, fig. 27)10.
celle de la rivalité entre Pélias et Jason selon laquelle ce dernier, par l'intermé diaire de Médée, se venge de meurtre de ses parents. Un autre cratère attique en cloche, trouvé en 1976 à Portus lllicitanus (Es pagne), actuellement au musée d'Alicante, daté vers 420 avant notre ère. Voir E. Simon, «Un cratère en cloche d'époque classique à sujet colchidien» Le pont Euxin vu par les Grecs, Symposium de Vani 1987, Paris, 1990, p. 227-229; et R. 01mos, «About the attic red-figured crater with a colchian subject», ibid., p. 231234; représente la toison d'or mais dans un moment «pré-argonautique», quand Phrixos à son arrivée en Colchide l'offre au roi, et que deux femmes sont en train de l'examiner. Il s'agirait de Chalciopé (devenue l'épouse de Phrixos par la suite) et de la mère de celle-ci. Enfin sur un candélabre étrusque du musée archéologique de Florence, daté vers 250, voir K. Schefold, F. Jung, Die Sagen von den Argonauten, von Theben und Troia in der klassischen und hellenistischen Kunst, Munich, 1989, p. 19, fig. 6 figure un petit groupe insolite en bronze : un jeune homme auquel un person nageailé (Zéphyre?) sert à boire. La particularité est le manteau que le jeune homme porte enroulé autour de sa main gauche qui n'est autre que la toison du bélier. Il s'agirait de Jason. Notons que cette image ne se rapproche d'aucune source littéraire. 9 Selon Pindare (Pyth. , TV, 434), le serpent dépasse en long et en large un vaisseau de cinquante rameurs. 10 Mais on sait par le Codex Coburgensis, n° 214, 215 que la scène existait auss isur les panneaux du Louvre et de Turin (n° 5, 6).
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Un trait nous frappe tout de suite en ce qui concerne l'iconogra phie de cette scène sur les sarcophages, sa régularité. Le nombre des personnages est toujours identique : deux, Jason et Médée, la mise en scène ne présente que très peu de différences d'un exemplaire à l'autre11. Les deux personnages ont toujours la même place, Jason à gauche, Médée à droite, et la même attitude. Jason, toujours de dos, décroche de sa main droite la toison. Ce geste nous fait croire que le relief muré au Palazzo Primoli à Rome (Fig. 27) représente la même scène. L'homme qui y figure, casqué, fait ce geste, mais de ses deux mains. Le héros est toujours représent é nu, excepté sur la cuve de Vienne (n° 13, fig. 24), où il porte une cuirasse et des bottes. Sur l'exemplaire de Prétextât, de Bàie et de Naples (n° 12, 24, 22) il est barbu. Partout il est casqué et porte un bouclier sur l'avant-bras gauche; sur le relief de Bàie, il porte une épée12, mais ce sont là des armes dont il ne se sert pas pour obtenir la toison. Son attitude enfin est tout à fait caractéristique : de dos, agenouillé de la jambe droite seulement, sur un rocher, au pied même de l'arbre. Médée est toujours représentée à droite, de profil tournée vers la gauche. Sur l'exemplaire de Prétextât (n° 12, fig. 16, 19), elle apporte une coupe; sur celui de Bâle (n° 24, fig. 47) un plateau, et sur celui de Rome (n° 18, fig. 29) une pomme pour le serpent, tandis que sur celui de Vienne (n° 13, fig. 24) elle tient un rameau dans sa main droite. Sa longue tunique forme des plis lourds à gauche, tandis qu'à droite la jambe est fléchie et le pied ressort vers ce côté. Le fort dé hanchement, dû au style de l'époque que l'on observe sur la Médée de Prétextât ne se rencontre sur aucun autre relief. Elle est toujours voilée, et son attitude recueillie et modérée l'a souvent fait comparer à une prêtresse13. L'arbre qui se trouve toujours entre les deux protagonistes a un feuillage plus ou moins développé et réaliste. Au pied de l'arbre, sur le panneau de Prétextât, il y a un autel, qui se retrouve également sur quelques gemmes, où Jason figure seul devant l'arbre, elles datent de la même période que les sarcophages. Le serpent qui garde la toison ne semble pas aussi féroce que dans les textes. De taille 11 En revanche, son emplacement sur le panneau peur différer. Dans la major itédes cas, la scène est placée après celle qui représente Jason en train de dompt er les taureaux. Pourtant sur le panneau du Louvre (n° 4), lorsqu'il était complet, la scène se trouvait à gauche, en avant donc de la scène du domptage des tau reaux. Rien ne la sépare des autres scènes des reliefs, et aucune caractéristique supplémentaire ne vient souligner l'importance de cet exploit. 12 Jadis sur le sarcophage de Turin, Jason portait également l'épée, voir cidessus note 10. 13 Pour Médée comparée à une prêtresse, voir Schmidt, Medeasarkophag, p. 9.
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plus ou moins importante, il est enroulé autour de l'arbre. La Toison d'or, n'a aucun trait particulier non plus. C'est une étoffe un peu large et ce n'est que sur le couvercle de Bâle qu'on voit clairement la tête du bélier. La composition est toujours claire : trois lignes verticales (le corps de Jason, l'arbre, Médée), ranimées par les obliques créées par le mouvement déployé de Jason et les ondulations du serpent. L'iconographie des sarcophages suit le récit d'Apollonios. Jason et Médée sont seuls face au dragon. Médée utilise ses mixtures mag iques, indiquée par la coupe et la branche qui, selon l'auteur, serait du genévrier (Arg., IV, 156, άρκεύθοιο). Pourtant l'allure héroïque de Jason barbu incite à penser que la scène servait à exalter également la virtus du défunt. Cette mise en scène choisie par les sculpteurs des sarcophages a de nombreux points communs avec celle des vases à figures rouges de l'Italie du Sud, datés de 420/10 à 280 avant notre ère14, sur lesquels figurent les deux protagonistes ensemble. Bien
14 1. Cratère à volutes. D'Apulie. Munich 3268. Peintre de Sisyphe. Vers 420410. A. D. Trendall, Early South Italian Vase-painting, Mayence, 1974, p. 16, 48 n° B47, pi. 19, 20; Trendall, Cambitoglou, RVA, I, p. 16 n° 1/51. La scène se situe sur la frise inférieure de la panse du cratère. Le tronc de l'arbre, avec la toison et le serpent dressé au-dessus d'elle, se trouve à l'extrémité droite de la frise. Jason est juste à gauche de l'arbre, le pied gauche placé sur le das du tronc; de la main droite il tient l'épée, tandis que de la main gauche, il arrache la toison. Il porte le pétase. Derrière lui Médée, sa boîte à φάρμακα dans la main gauche, fait de la main droite un geste, pour endormir le serpent. Derrière eux se trouvent cinq Ar gonautes, tenant des lances, dont deux personnages ailés, qui sont certainement les Boréades. 2. Hydrie. De Lucanie. Paris, Louvre S 4042. Peintre de Brooklyn-Budapest. Vers 380-360. A. D. Trendall, Red-figured Vases of Lucania, Oxford, 1967, p. 112 n° 579; Trendall, RVP, p. 111 n. 4. L'arbre est au centre de la scène; seul le serpent s'y trouve, alors que la toison manque. Médée est assise à gauche sur des rochers, elle porte le bonnet phrygien, et tient dans ses mains une large coupe qu'elle tend au serpent; Jason, à droite, nu, porte le pilos, une épée dans la main droite et son manteau enroulé autour du bras gauche; il avance avec précaution pour tuer le serpent. Deux autres personnages, appartenant au monde divin assistent à la scène : une femme appuyée contre un muret, représentée dans une pose nonchal ante, fait un geste de son bras droit. Il s'agit certainement d'Aphrodite, qui a sus cité l'amour de Médée à l'égard de Jason. A gauche figure un jeune homme ailé, portant un épée, certainement Eros. Trendall, o.e., p. Ill η. 4 l'interprète comme Kalaïs. 3. Cratère en cloche d'Apulie. Turin, collection privée. Du peintre de Jason, de l'entourage du peintre de Lecce, daté vers 360-350. Trendall, Cambitoglou, RVA, I, p. 133, 5/294, pi. 43, 3-4; Trendal, RVP, p. 111 n. 4. Jason est à gauche, de face, portant une chlamyde et des bottes. Il tient une épée dans la main droite et il attaque le serpent. Médée figure à droite, portant chiton et manteau, le bonnet phrygien sur la tête et un vase, ou une petite boîte dans la main gauche; de la main droite elle touche le serpent. Derrière elle, par terre, est placée une grosse corbeille, certainement son φωριαμος. Sur une des branches de l'arbre est dé-
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que la place des personnages puisse varier, l'arbre reste ici aussi l'axe médian de la composition. Jason affronte avec la même ardeur le serpent (cratères de Munich n° 1, Leningrad n° 4, Naples n° 6), tan dis que Médée est ici caractérisée certainement sous l'influence du théâtre par son habit oriental; elle tend la coupe au serpent (hydrie du Louvre n° 2, cratère de Naples n° 6), ou bien elle tient son φωριαμος (cratères de Munich n° 1, Turin n° 3, Leningrad n° 4), alors que sur les sarcophages elle prend l'allure plus quotidienne d'une prê tresse voilée. En revanche, ces vases étant plus proches de la tradi tionchantant la geste argonautique, les autres Argonautes sont éga lement présents. Il faut souligner l'importance du cratère de Lenin gradn° 4. Sa composition complète, très équilibrée, est certa inement inspirée de la grande peinture.
ployée la toison, tandis que le serpent qui s'y enroule, de taille normale, semble menacer Jason. 4. Cratère à volutes. De Ruvo. Leningrad. Inv 1718=St422. Vers 360-340. Mo numenti inediti dell'Instituto V, 1849-1853, pi. XII; Trendall, A. Cambitoglou, RVA, I, p. 424 n° 16/55b. L'arbre feuillu, où se trouvent la toison et l'énorme serpent enroulé, occupe le centre de la scène et de la panse du vase. A gauche Ja son (nom inscrit), deux lances dans la main, est en train de combattre le serpent, aidé par cinq Argonautes dot Héraklès (nom inscrit) qui figure à droite avec sa peau de lion et sa massue. Kalaïs (nom inscrit), ailé, figure en haut à gauche. Par mi les Argonautes deux portent l'épée, la lance et le bouclier; celui de droite, vu de dos, est agenouillé, de la jambe droite seulement, sur un rocher. Médée se trouve en haut à droite, habillée, d'un riche chiton à manches, le bonnet phrygien sur la tête; elle porte un coffret de grande taille dans la main gauche, et un petit rameau dans la main droite. 5. Lécythe de Contrada Grande (au Nord de Paestum). Bochum. Inv S1080. IVe siècle avant notre ère. Trendall, RVP, p. 109-111, pi. 62b. L'arbre est au milieu de la scène. Médée figure à gauche (nom inscrit), habillée d'un riche chiton à manches et du bonnet phrygien. De la main droite elle nourrit le serpent, tandis que son pied gauche est placé sur un petit rocher. Jason (nom inscrit), est à droite, portant le pilos, un chiton court et une lance. Derrière lui se trouvent d'a bord un Argonaute, assis sur un rocher de profil vers la droite, tenant une lance et portant une chlamyde, un bonnet et des bottes, il tourne la tête en arrière; puis derrière lui un Eros qui tient une bandelette. A gauche derrière Médée se trouve Kalaïs (nom inscrit), pourtant représenté sans ailes, et portant une lance et une épée. 6. Cratère à volutes. De Paestum. Naples 3248 (Inv 82126). Fin IVème-début du IIP siècle avant notre ère. A. Trendall, Paestan Pottery, p. 96-98, fig. 62; ID, RVP, p. 344-45 n° 3/630, pi. 224c. Médée est à gauche portant un chiton et un bonnet phrygien, richement décorés. Elle tient dans la main gauche une patere où vient manger un énorme serpent peint en blanc enroulé autour de l'arbre. La toison pend à droite d'une branche de l'arbre feuillu. Jason figure barbu, habillé d'une tunique courte à manches et bottes; il porte une épée dans la main droite et est en train d'arracher la toison. A gauche et à droite de cette composition cen trale se trouvent deux Argonautes; celui de gauche tient une pierre, l'autre une lance.
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Par ailleurs le personnage de Jason attaquant avec deux lances le monstre sur l'arbre, permet d'identifier la scène sur une série de médaillons contorniates15 datant tous du IV- Ve siècle de notre ère, plus précisément après 357, jusqu'ici classés parmi les ungeklärte Szenen. Sur le revers, la scène est exactement la même sur toutes les pièces, ce qui fait croire à A. et E. Alföldi qu'il s'agit de copies d'un même original perdu. Un personnage masculin figure à gauche, ha billé d'une tunique courte; des deux mains il tient une lance qu'il di rige vers le haut à droite «contre» un arbre feuillu, dont le tronc est assez épais dans sa partie inférieure et à droite duquel se tient un serpent. Sans aucun doute, il s'agit de Jason, devant l'arbre de la toi son. La toison est absente, mais cette absence se constate également sur quelques gemmes et même sur des vases du IVe siècle avant notre ère : l'hydrie du Louvre S4042 n. 14, n° 2, le lécythe de Bo chum η. 14 n° 5. La toison n'est pas non plus très évidente sur les sarcophages de Vienne (n° 13, fig. 24) et Naples (n° 22, fig. 37). L' iconographie du héros n'est pas inconnue dans ce type de matériel, puisque ses exploits en Colchide (taureaux) figurent sur une série de médaillons contorniates; par ailleurs ce matériel donne une date f inale pour l'iconographie de Jason dans le monde gréco-romain. Quelques autres documents d'époque impériale représentent le même schéma inspiré des sources communes aux documents anté rieurs. Sur la fresque du musée de Trêves, datée du IIe siècle de notre ère, Jason est vu de face et tient l'épée comme sur le cratère de Tur in; sur deux fragments de médaillon d'applique, Jason, dans la même posture que sur la fresque, décroche la toison16. Une petite sé-
15 II s'agit de quatorze exemplaires : deux à Paris (BN, cab. des Médailles 17330, et coll. Seymour - De Ricci), trois à Milan (Musei Civici et Museo Teat rale), et un exemplaire à : New York, coll. Mabbott; Forli; La Haye, Cabinet Royal des Monnaies; Venise, Museo Civico; Vienne, Bundessammlung von Münz en,Medaillen und Geldzeichen; Bâle, coll. W. Niggeler; Londres, Β Μ; Glasgow. Hunterian Museum; et Cleto, Rimini, coli, Cucci. Tous les exemplaires datent du rV-Ve siècle de notre ère, après 357, voir A. Alföldi, et E, Alföldi, Die KontomiatMedaillons I, Berlin, 1976, p. 142-143 n° 423, pi. 178, 2-8; 179, 1-8. Face : buste de l'empereur Antonin le Pieux, légende : Antoni-Nvs Pivs (type Alföldi : Pius-Caracalla rV). 16 D'une part la fresque trouvée à Trêves, dans une salle à l'Est du palais préconstantinien, Trêves, Musée (Salle 23) datée du deuxième siècle de notre ère. Voir R. Schindler, Führer durch das Landesmuseum. Trier, Trêves, 1986, p. 76-77, fig. 231-232. Médée porte un diadème dans les cheveux et figure assise à droite nourissant le serpent, mais Jason tenant l'épée dans la main gauche (comme sur le cratère de Turin) est vu de face, dirait-on sur le point de fuir. D'autre part les deux fragments d'un médaillon d'applique, l'un trouvé à Sainte-Colombe (partie droite), musée archéologique de Lyon, l'autre trouvé à Vienne, collection Bizot (partie gauche); voir P. Wuilleumier, A. Audin, Les médaillons d'applique galloromains de la vallée du Rhône, Annales de l'Université de Lyon, 22, Paris, 1952,
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rie de plaques Campana17 se rapproche de l'hydrie du Louvre à cause de la posture de Médée et de l'attitude de prudence chez Jason. Enf in le stuc de la Basilique de la Porte Majeure à Rome18, malgré son iconographie peu banale, appartient également à la même série. On constate que l'hydrie du Louvre n° 2, les plaques Campana, la fresque de Trêves et le médaillon d'applique suivent un modèle commun : celui-ci devait être une peinture murale grecque du Ve siècle avant notre ère, où Médée figurait assise, dans une attitude calme, nourrissant le serpent pour faciliter la tâche de Jason, mod èle qui a dû se perpétuer grâce à l'influence du théâtre. Mais la plaque du Louvre se rapproche également des vases où les protagon istes ne sont pas seuls et surtout du lécythe de Bochum η. 14 n° 5, à cause de la présence à droite d'un Argonaute assis sur un rocher qui se tourne vers la scène principale, comme fait le groupe des trois Ar gonautes sur la plaque Campana. Il pourrait exister une deuxième plaque à droite où aurait été représenté le navire Argô, qui figure sur le cratère de New York à droite de la scène. Ces éléments qui tra-
p. 36-37, n° 28, pi. 3. Ils sont attribués au céramiste Felix. IIe siècle de notre ère. L'influence du théâtre sur cette production étant admise, (voir P. Wuilleumier, A, Audin, op. cit., p. 19-20), ces documents qui datent de la même époque que nos sarcophages sont fort intéressants. L'atelier de production de ces médaillons était considéré comme situé à Lyon ou à Vienne; il est actuellement à placer plus au Sud, dans la vallée du Rhône (Saint Péray), voir A. Desbat, «L'atelier de médail lons d'appliques de Saint-Péray». Archeologia, 255, 1990, p. 56-59. 17 II s'agit des plaques Campana : 1. Musée du Louvre, Inv 4193 (Campana 131), G. P. Campana, Antiche opere in plastica, Rome, 1851, I, pi. 63; Römische Tonreliefs, IV, 1, p. 115-6, fig. 220; Brommer, Denkmälerlisten, p. 169; Croisille, Poésie et art, p. 39, n. 95; 2. Plaque fragmentaire, Londres, British Museum Inv. D. 604, D. 605. H. B. Walters, Catalogue of the Terracottas, Londres, 1903, p. 401, n° D604, 605. 3. Fragment, Berlin, Antiquarium n° 41004, Römische Tonreliefs, IV, 1, p. 115, fig. 219 (fragment de Médée). Toutes ces plaques présentaient le même schéma que les sarcophages, mais Médée est à assise gauche. 18 Le stuc de la Basilique de la Porte Majeure à Rome, J. Carcopino, La basi lique pythagoricienne de la Porte Majeure, Paris, 1926, p, 326, 465; H. Mielsch, JRômische Stuckreliefs, Ergänzungsheft RM, 1975, p. 118-121 K16 représente la même composition, Médée, est à gauche, Jason à droite de l'arbre avec la toison. Il tient une épée, dans une posture étrange : il se tient à genoux sur une espèce de table (ou construction simplifiée) sous laquelle se trouve une autre table plus petite, avec une boîte posée dessus. Le stuc se rapproche de la gemme de Weimar, d' époque impériale (Goethehaus Museum. Inv n° 27, voir Antike Gemmen, p. 282 n° 27, pi. LXII; G. Femmel, Die Gemmen aus Goethes Sammlung, Leipzig, 1977, p. 49, 79) par le fait que Médée touche le serpent, em même temps qu'elle lui tend une coupe, où il vient manger. Au musée de Weimar (Kunstsammlung) se trouve un relief moderne en marbre blanc, exécuté en 1826, par P. Kaufmann, à partir de cette gemme, sur l'instigation de Goethe qui en était le propriétaire. Sur ce re lief, Médée et Jason ont échangé leurs places, ce qui induit en erreur Croisille, Poésie et art, p. 39 qui donne la description du relief comme étant celle de la gemme.
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hissent la composition d'une grande peinture. (Argonautes, rocher, bateau) figurent également sur un relief du Ve siècle de notre ère19. Hormis le schéma que nous venons d'étudier, où Jason et Médée agissent ensemble pour dérober la toison, il existe des documents re présentant chaque protagoniste seul devant le dragon. Ces schémas bien que très anciens n'ont pas été repris par les sculpteurs de sarco phages. a) Jason figure seul dans la gueule même du monstre20 sur un 19 Relief en calcaire, d'Egype, au Nelson Gallery-Atkins Museum, Kansas Ci ty. De la première moitié du Ve siècle de notre ère. Voir K. Weitzmann, Age of Spi rituality. Late Antique and Early Christian Art, Third to Seventh Century, Exposi tion New York, Metropolitan Museum of Art, 19.11.1977-12.02.1978, New York, 1979, p. 238-239, n° 214. Jason à gauche vu de dos, décroche la toison, Médée est à droite assise, derrière elle se tient une autre femme. Le navire Argo figure en haut à droite, alors que trois Colques sont également présents. 20 Sur les deux plus anciens documents l'identité du héros n'est pas sûre : 1. Fragment d'aryballe protocorinthien de l'Héraion de Samos. Samos Mus ée. Inv K3441, 3490, 3426, 3454, 3489. Fin VIIe siècle avant notre ère. G. Kopeke, «Heraion von Samos. Die Kampagnen 1961/65 im Südtemenos» AM 83, 1968, p. 282 n° 93, fig. 31, pi. Ill, 2. Vojatzi, Argonautenbilder, p. 89, 118 n° 60. On aper çoit la gueule ouverte d'un gros serpent, munie de la barbiche caractéristique, d'où émerge un personnage. La cassure est importante à cet endroit mais on dis tingue bien le torse, deux boucles de la chevelure et le bras du personnage. 2. Alabastre protocorinthien. Bonn, Akademisches Kunstmuseum Universitäts Inv 860. Vers 625-600, Vojatzi, Argonautenbilder, p. 89, 118 n° 59, pi. 11, 1. La même scène est conservée entière, le serpent est gros, enroulé plusieurs fois, et de sa gueule émerge un personnage barbu. 3. Coupe de Cerveteri. Vatican (jadis Museo Gregoriano Etrusco Inv 16545). Oeuvre de Douris. Vers 490-480. Beazley, ARV, p. 437 n° 116; Meyer, Medeia, p. 81-82 n° III Val, pi. 18, 1. La scène est la même que sur les vases précédents, mais elle est plus précise : d'un arbre derrière le serpent, d'où pend la toison, à droite, Athéna, munie de tous ses attributs et tenant la chouette dans la main, as siste, très attentive, à l'aventure de Jason (nom inscrit). 4. Miroir étrusque de Felsina. Bologne. Début Ve siècle avant notre ère. Brommer, Denkmälerlisten, p. 170; Meyer, Medeia, p. 83 n° III R3, pi. 19, 1. Sur le manche, Jason, de profil, est représenté sortant de la gueule du dragon. 5. Miroir étrusque. Berlin, Staatliche Museen. Inv Fr 148. Milieu du Ve siècle avant notre ère. Brommer, Denkmälerlisten, p. 170; Meyer, Medeia, p. 83 n° III S4, pi. 19, 2. Jason est représenté dans l'exergue, sortant de la gueule du dragon; de la main droite il tient l'épée pour se défendre, et de la main gauche une étoffe, la toi son, qu'il essaie d'emporter en fuyant. Son nom gravé, Heiasun, au dessus de lui, ne laisse aucun doute sur son identité. 6. Sardoine, opaque. Boston, Museum of Fine Arts 21.1203. Second quart du Ve siècle avant notre ère. Richter, Gems, I, p. 207 n° 846. Jason tout armé émerge du dragon jusqu'aux cuisses, casqué, bouclier et épée dans la main. Le monstre a une énorme gueule, munie de grandes dents, ce qui rappelle la coupe de Douris n° 3. L'image de Jason dans la gueule du monstre fait donc partie de la très an cienne iconographie du héros (si sur les vases n° 1 et 2 il s'agit bien de Jason) et pose de nombreux problèmes. Aussi, la scène de la coupe n° 3 a été interprétée comme la mort de Jason, C. Robert, «Die Jasonsage in der Hypsipyle des Euri-
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bon nombre de documents. On remarque que les plus anciennes r eprésentations (VIIe siècle) proviennent de la production corin thienne. La céramique attique crée une scène où la présence d'Athéna donne plus d'importance à l'exploit, alors que l'imagerie étrusque se rapproche de l'expression vivante et directe de l'art corinthien, mais cela doit être surtout dû à la forme d'espace bien particulière (miroirs) dont dispose l'artiste. Jason figure sur ces documents dans la gueule du serpent, par qui il a dû être avalé et régurgité. Cepen dantcette représentation pose problème car aucun texte ne ment ionne un tel détail, bien que le dragon ait beaucoup stimulé l'imagi nation des auteurs anciens. A notre avis, ces quelques documents t émoignent d'une tradition très ancienne et disparue où il était question d'un court «séjour» de Jason dans le ventre du dragon, lors de sa lutte contre celui-ci pour conquérir la toison; il en est sorti, donc il a vaincu le monstre. La déesse Athéna jouait peut-être un rôle dans cette tradition21, un rôle qu'elle a échangé avec Médée pour cette épreuve, mais qu'elle a gardé pour d'autres moments de l'e xpédition. On pourrait apercevoir un pâle reflet de cette tradition chez Pindare {Pythiques, IV, 434-35), où Jason tue le dragon qui tient justement la toison dans ses mâchoires : δ' Κεΐτο γαρ λόχμα, δράκοντος εϊχετο λαβροταταν γενύων,
pides», Hermes 44, 1909, p. 376-402 et spécialement p. 385 voit la mort de Jason sur la coupe de Douris. Cf. également la discussion de Meyer, Medeia, p. 83-98 qui reprend les avis antérieurs. Meyer, interprète cette scène comme la mort de Jason avalé par le dragon et rajeuni par Athéna. Il pense qu'on voit Jason vér itablement rajeuni sur le cratère de New York, M.M.34.11.7. Il s'appuie sur ces deux vases pour avancer l'hypothèse que le rajeunissement de Jason figure sur les métopes n° 32 et 26 du trésor I de l'Héraion du Silaris (voir P. Zancani-Montuoro, et U. Zanotti-Bianco, Heraion alla Foce del Sele, II, II primo thesauros, 1954, p. 350-354). La métope n° 26 représenterait Jason aux prises avec le dragon, et la métope n° 32 son rajeunissement par Médée en Colchide. La même scène a été in terprétée comme le rajeunissement de Jason en présence d'Athéna; mais en l'a bsence d'un texte mentionnant cette version de la légende ou même d'une allusion chez un auteur, nous tenons, pour notre part, qu'il s'agit d'illustrations d'une ver sion inconnue exprimant, non pas la mort de Jason, mais le caractère héroïque par excellence de sa lutte. A bien regarder la fameuse coupe de Douris n° 3, on observe que le corps de Jason ne s'affaisse pas inerte sur les dents du monstre; au contraire, il essaie de s'en extraire, puisque l'abdomen ne touche pas les dents du dragon. Athéna assiste aussi Jason, quand il s'empare de la toison sur le cratère de New York; mais le héros n'y est pas aux prises avec le dragon; au contraire, son apparence n'a rien d'athlétique, c'est pourquoi Meyer, ibid., p. 83-98 pense que Jason qui paraît ici très jeune a été rajeuni à la sortie du ventre du monstre. 21 L. Lacroix, «Jason et le dragon», Mél. J. Stiennon, Liège, 1982, p. 417-421, inteprète la présence d'Athéna comme la protection des dieux, sans laquelle les héros ne pourraient accomplir leur destin; il rapproche ce détail concernant Ja-
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b) Jason face à l'arbre de la toison figure sur un cratère à figures rouges, daté de 470/6022 et un grand nombre de gemmes23 : Le cra tère représente le héros face à l'arbre de la toison, beaucoup plus en treprenant que sur les gemmes. Il décroche la toison malgré la pré sence du serpent menaçant. Il est exact que Jason ici, bien qu'il soit actif, a un aspect chétif; cela a fait penser à H. Meyer24 que Jason fison de la légende de sainte Marguerite, ou de Sainte Marina dans la version grecque. 22 Cratère à colonnettes à figures rouges. New York, Metropolitan Museum 34.11.7. Du peintre du verger. Daté vers 470-460. Beazley, ARV, p. 524 n° 28; Meyer, Medeia, p. 82 n° III Va2, pi. 18, 2. Jason, barbu, entièrement nu, est en train de décrocher, d'un saut la toison; il pose son pied droit sur le tronc d'arbre au dessus duquel se dresse la tête menaç ante du serpent. Le corps du héros est fluet. Athéna, au centre de la scène, semble l'encourager d'un geste. A droite on aperçoit la proue d'un bateau et un homme barbu qui se tient tous près, de profil vers la droite, mais qui retourne la tête vers Jason. Il s'agit du timonier de l'Argô qui observe la scène, en même temps qu'il tient le timon. 23 Les gemmes représentent le même schéma que le cratère, mais Jason est seul et il n'y a pas d'action véritable : 1. Gemme. Paris, Cabinet des Médailles, n° 183. Etrusque tardif. G. Richter, Gems, I, p. 208 n° 848. 2 Gemme. Braunschweig, Herzog Anton Ulrich Museum. IIe-Ier siècle avant notre ère. AGD, III, p. 12 n° 8, pi. 2. 3. Gemme. Braunschweig, Herzog Anton Ul rich Museum. Ier siècle avant notre ère. AGD, III, p. 17 n° 24, pi. 4. 4. Pâte de verre, brune foncée. Hannover, Kestner Museum. Inv K675. Pre mière moitié du Ier siècle avant notre ère. AGD, IV, p. 38 n° 83, pi. 21. 5. Gemme. Hannover, Kestner Museum. Inv K635. Ier siècle avant notre ère Ier siècle de notre ère. AGD, IV, p. 192 n° 955, pi. 126. 6. Pâte de verre, bleu. Äugst, Römermuseum. Inv 63.8358. Ier siècle de notre ère. R. Steiger, «Gemmen und Kameen im Römermuseum Äugst», Ant Kunst 9, 1966, p. 44-47, pl. 9 n° 23. 7.a, b, c, d. Gemme, Copenhague, Thorvaldsen Museum. Inv 853-856. Epoque impériale. P. Fossing, Catalogue of the Antique Engraved Gems and Ca meos Thorvaldsen Museum, Copenhague, 1929, p. 52 n° 161, p. 53 n° 162, 163, 166, pl. III. 8. Pâte de verre, noire. Munich, Staatliche Münzsammlung. Inv A 844. Epoque impériale. AGD, I, 2, p. 133 n° 1403, pl. 139. 9. Gemme. Paris, Cabinet des Médailles, d'époque impériale. Richter, Gems, II, p. 68 n° 318. D'un exemplaire à l'autre quelques détails diffèrent : sur tous les exemp laires, Jason est casqué et tient un bouclier qui se dessine derrière lui. Sur les gemmes n° 4, 5, 9 il tient une lance; sur toutes les gemmes, sauf sur la n° 7d (inv 856), aux pieds de l'arbre est placé un autel, sur lequel on distingue (sur quelques exemplaires) une tête de bélier. Par ailleurs sur les exemplaires n° 7d, 5 et 9 le serpent manque. Jason, sur la majorité de ces gemmes, fait un geste particulier. Un de ses bras est plié et la main ouverte se dirige vers son visage. S'agit-il d'un geste de prière, ou d'une attitude de contemplation, ou de dialogue, ou bien le hé ros est-il en train de murmurer les incantations que, selon les textes, Médée uti lise pour endormir le serpent? Jason devant l'arbre, sur les gemmes, a la même attitude qu'Oedipe devant le sphinx sur d'autres, voir AGD, IV p. 38, 300 n° 84, 1754, pl. 21, 234; s'agirait-il plutôt d'un signe de dialogue? 24 Sur l'interprétation de H. Meyer, voir ci-dessus note 20. Un vase du même
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gure ici rajeuni. Nous préférons suivre J. D. Beazley qui y voit une maladresse du peintre25. A noter que Jason s'avance sans armes (protégé par Athéna?) et que le navire à droite est prêt à lever l'ancre, une fois la toison conquise. Les plus anciennes gemmes re présentant la scène datent du IIe siècle avant notre ère, et le type se perpétue jusqu'à l'époque impériale, mais le schéma y est un peu dif férent : Jason figure à gauche ou à droite de la scène, de profil, de bout, une jambe fléchie, dans une pose calme devant l'arbre, où pend la toison. c) Jason seul combattant le dragon, apparaît sur une gemme et sur deux vases à vernis noir et à reliefs26. Jason conquiert la toison sans l'aide de Médée sur un certain nombre de documents qui s'étendent du VIIe siècle avant notre ère jusqu'au IIe siècle de notre ère. L'image du héros combattant le monstre, par qui il est même avalé, remonte très faut et témoigne d'une tradition perdue pour nous. C'est à travers ces documents que le caractère véritablement héroïque de l'exploit de Jason s'exprime. Cette tradition ancienne ne fait aucune place à Médée.
peintre à Bologne, Museo Civico, Beazley ARV, 524 n° 20; Meyer, ibid., pi. 25, 2 représente un satyre qui vole la toison; derrière lui figure Dionysos. 25 J. D. Beazley, ARV, p. 524 n° 28 «The figures ofJason and Athena are in an abominable style, as if the painter had left them to a beginner to line in». 26 1. Scarabée, cornaline. Paris, Cabinet des Médailles n° 268. Ve siècle avant notre ère. Richter, Gems, p. 208 n° 847. Jason lutte contre un dragon de grande taille, et lui enfonce son épée dans le cou. 2. Amphore à anses torsadées. Achetée en Crète. Athènes, Musée National. Inv A2141. Fin du IVe siècle avant notre ère. F. Courby, Les vases grecs à reliefs, Paris, 1922, p. 209 n° B, fig. 33, 5; T. Dohrn, «Schwarzgefirnisste Plakettenva sen», RM 92, 1985, p. 77-106, spécialement p. 98, pi. 71, 2-3. La scène figure une fois sur la face A et deux fois sur la face Β de l'amphore. 3. Cratère à colonnettes. Londres, British Museum, Inv G29. Fin du IVe siècle avant notre ère. F. Courby, ibid. ; T. Dohrn, ibid., pi. 70, 1; 71, 1. Sur les deux vases Jason figure à gauche, vu de face, nu; de la main gauche il essaie d'éloigner le dragon qui s'est déjà enroulé autour de sa jambe gauche, alors que de la main droite il tient l'épée. On remarque l'absence de l'arbre et surtout l'attitude parti culière de Jason : jambe droite fléchie, attitude qui le caractérise sur un grand nombre de documents. Nous pensons que l'absence d'autres personnages ou d' éléments de la scène est ici favorisée par la technique de ce genre des vases : où la «vignette» appliquée sur la panse du vase se borne à l'essentiel de la scène. T. Dohrn, RM 92, 1985, p. 77-106, place l'atelier de ces vases à Alexandrie ou en Crète, tandis que F. Courby parlait d'un atelier attique. On doit signaler que le type de Jason combattant seul le dragon apparaît sur la face A de l'amphore n° 2 d'Athènes et sur la face Β du n° 3 è côté d'Héraklès assis tenant sa massue. Par ail leurs, le même schéma se retrouve sur des bases du IIIe siècle de notre ère, r eprésentant Héraklès luttant contre un dragon, voir E. Künzl, CSIR, Deutschland II, 1, Bonn, 1975, p. 31, n° 18; pi. 31-35. Cela pourrait porter à croire que sur nos vases il s'agit d'Héraklès luttant contre le dragon des Hespérides.
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Très peu de documents représentent Médée seule avec le dra gon. Le buste d'une femme de profil, entouré d'un serpent sur trois vases attiques du VIe siècle avant notre ère, a été interprété dans ce sens27. Sur le lécythe de Londres n. 27 n° 1, une inscription précise le nom du personnage ΜΗΔΕΙΑ. Les deux autres vases ont été inter prétés à partir de celui-ci. Il y a deux serpents, la toison manque, et il n'y a pas d'action véritable. La magicienne apparaît uniquement en buste, comme on trouve tant des personnages dans des scènes des anodoi28. Nous ne pensons pas qu'il s'agisse ici du serpent gardien de la toison. Ces vases, dont seul le lécythe de Londres atteste le nom du personnage, représentent, à notre avis, plutôt Médée divinité chthonienne que Médée dans l'épisode de la toison. L'intérêt de ces vases est dans le fait qu'on peut les mettre en rapport avec les textes relativement anciens qui mentionnent le caractère divin et chthonien de Médée29. La gemme de Braunschweig30, qui représente une femme face à un serpent peut être mise en rapport avec Hygie ou les Hespérides. 27 1. Lécythe attique. Londres, British Museum. Inv 1926.4.17.1. Figures noires. Vers 540. Beazley, ABV, 471 n° 117; Vojatzi, Argonautenbilder, p. 93, 119 n° 66, pi. 11, 2. 2. Lécythe attique à figures noires, de Ritsona, Thèbes, Musée. Inv. R.31.166=6022=E89. Vers 530. N. Kovσoλa, Αρχαιολογικό Mouasîo ins ©nßots, Athènes, 1981, fig. 18; Vojatzi, Ibid., p. 93, 119 n° 68. 3. Lécythe attique à figures noires. Wurtzbourg, Martin von Wagner Mu seum. Inv L 359. Vers 530. Beazley, ABV, 471 n° 118; E. Simon et alii, Führer durch die Antikenabteilung des Martin von Wagner Museums der Universität, Wurtzbourg, 1975, p. 100; Vojatzi, ibid., p. 93, 119 n° 67. Ces trois vases représentent un buste de femme, de profil vers la gauche (n° 1, 2) ou vers la droite (n° 3), et encadré de chaque côté d'un serpent. La femme sur le lécythe n° 1 porte une bandelette sur la tête, tandis que sur le n° 2 elle a un diadème orné de spirales. 28 Ce genre de bustes disproportionnés par rapport à la dimension du vase, ont été inteprétés comme appartenant à l'imagerie des anodoi, voir C. Berard, Anodoi, (Bibliotheca Helvetica Romana XIII), Neuchâtel, 1974, spécialement p. 43-45, mais l'auteur ne mentionne pas les lécythes de Médée. 29 II s'agit des auteurs pré-classiques, Eumélos, Simonide, Parmeniscos, Créophylos qui font apparaître le caractère chthonien de Médée à propos du meurtre de ses enfants. Voir notre chapitre concernant ce crime de Médée et les notes 3-8. 30 Gemme en sardoine. Braunschweig, Herzog Anton Ulrich Museum. AGD III, Wiesbaden, 1970, p. 29 n° 75, pi. 10. Une femme figure de profil vers la gauche, tenant une coupe, en train de nourrir un serpent enroulé autour d'un arbre. S'agit-il de Médée ou plutôt d'Hygie? On peut y reconnaître Médée à cause de la position de son pied droit qui est surélevé, comme celui de Jason devant le serpent. Pourtant sur un cratère à volutes de la Collection Jatta, H. Sichtermann, Griechische Vasen in Unteritalien, Tubingen, 1966, p. 50 n° 72, pl. 119-121, re présentant le Jardin des Hespérides, sous l'arbre où est enroulé le serpent-gar dien des pommes, figure une Hespéride (tournée vers l'arbre), qui pose son pied sur une amphore de la même manière que Médée sur la gemme.
LA CONQUÊTE DE LA TOISON D'OR
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Sur une stèle funéraire fragmentaire de Sopron (Hongrie) fig. 5731, on aperçoit Médée seule devant l'arbre, qu'occupe un serpent à plusieurs têtes disposées en ramifications autour du gros corps. Faut-il reconnaître, dans la trace de la structure architecturale à gauche un rappel de la tradition transmise par les Argonautiques Or phiques, (v. 890-1019) bu il est question d'une puissante enceinte protégeant le lieu où se trouvait la toison? Dans le même poème, quand Orphée, Jason et les Boréades, Mopsos et Médée arrivent de vant l'arbre, tous sont terrorisés par les sifflements du serpent, sauf Médée qui tient dans ses mains des plantes, allusion à ses talents de magicienne. Justement, sur ce document, on la voit dans une att itude calme et assurée, attendant seule à priximité du serpent redout able. Malheureusement on ne peut pas distinguer si à gauche se cache bien un personnage. La scène de la conquête même de la toison figure donc sur un grand nombre de documents peints et sculptés : on constate que les reliefs des sarcophages ne constituent qu'une petite partie du matér iel.Le schéma iconographique, malgré les légères variations dues aux modes ou aux exigences de chaque catégorie de matériel, reste inchangé au cours des siècles. Les documents les plus anciens comportent des détails héroïques de la légende, alors qu'à l'époque impériale sur les sarcophages la scène perd de son réalisme en se simplifiant. Les deux protagonistes se dépouillent également de leurs attributs mythologiques pour pouvoir mieux «s'adapter» à la vie humaine. Pourtant certaines attitudes trop imprégnées de sym bolisme sont maintenues, comme c'est le cas par exemple pour la posture de Jason, agenouillé devant le dragon32, attitude qui a perdu
31 Stèle funéraire fragmentaire en marble blanc, avec inscription de Sopron (Hongrie), (fig. 57) Musée F. Liszt. Inv. 55.208.1. Provenant d'une tombe à Hegyko (Scarbantia, Pannonie Supérieure), près de Sopron. Antiquitas Hungarica III, 1949, p. 83; J. M. C. Toynbee, «Greek Myth in Roman Stone», Latomus 36, 1977, 343-412. H. 232cm; L. 80cm; 1. 26cm. La partie conservée est presque la moitié droite du relief. Date : milieu du Ier siècle (d'après l'inscription), début IIe-milieu IIIe siècle (Toynbee, d'après le relief). D'après l'inscription, (voir Année Epigraphique, 1962, p. 10 n° 39), il s'agit de la stèle d'un homme. 32 Sur de nombreux documents illustrant la scène, et surtout sur les sarco phages, nous avons noté l'attitude peu banale de Jason devant l'arbre, agenouillé d'une jambe sur un rocher. Sur les vases du Ve siècle avant notre ère appartenant au cycle que nous étudions, la posture de Jason est encore un peu timidement es quissée; alors que sur l'amphore d'Athènes et le cratère de Londres (note 25 n° 2, 3) tous deux à reliefs et datés du IVe siècle avant notre ère, on le trouve dans la posture qu'il gardera jusqu'à l'époque imperiale. A notre avis, pourtant, c'est l'a ttitude de l'Argonaute à droite sur le cratère de Leningrad (note 14, n° 4) qui a ins piré les artistes des sarcophages. Ainsi se confirment une fois de plus les liens entre les reliefs des sarcophages et la grande peinture (dont on pressent le reflet sur ce cratère).
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JASON ET MÉDÉE
sur les sarcophage sa valeur symbolique, mais qui exalte les vertus du défunt.
Jason pose une jambe sur un rocher, non pas pour mieux arracher la toison, puisqu'elle se trouve à sa hauteur, mais pour marquer davantage le rite qu'il ac complit. Il faut, à notre avis, considérer ce demi-agenouillement comme étant l'expression d'un rite d'initiation. En effet, gagner la toison face à un rival redou tablepar ses qualités chthoniennes après un long périple et plusieurs épreuves, relève de l'initiation. R. Roux, Le problème des Argonautes, Paris, 1949, p. 403-405 rappelle également que les célébrants crétois arrachaient à genoux les arbres sa crés, et que la constellation de l'Agenouillé έν γονασιν était honorée dans l'Anti quité. D'ailleurs d'autres héros, à des moments périlleux de leur existence, se re trouvent dans la même attitude, par exemple Herakles et Oreste. Héraklès est agenouillé comme Jason dans sa lutte contre la biche de Gérynie, sur la métope d'Olympie, sur celle de l'Héphaisteion d'Athènes, sur la coupe à figures rouges du Louvre G263 et sur la mosaïque de Liria au Musée de Madrid, voir Fr. Brommer, Herakles, Munster/Cologne, 1953, p. 20-24, pi. 1, 2, 17, 31. Oreste est à moitié age nouillé, suppliant, sur Xomphalos de Delphes; il s'agir d'une ίκετεία, voir Borbein, Campanareliefs, p. 181-183 n° 964, 969. Nous tenons à souligner qu'en ce qui concerne Jason, à notre avis, il s'agit pas d'une προσκυνησις c'est-à-dire d'une prosternation, mais d'une attitude du héros au cours de son initiation. Sur le mot ifdes personnages agenouillés, voir F. T. Van Straten, «Did the Greeks kneel be fore their Gods?», BaBesch XLIX, 1974, p. 159-189.
CHAPITRE XII
LE MEURTRE D'APSYRTOS
La Toison une fois conquise, les Argonautes s'empressent de fuir la Colchide. Ils sont pourtant poursuivis par l'armée colque dirigée par Apsyrtos, le frère de Médée1. Suivant la légende, quelques jours plus tard, comme les héros ne connaissent pas la région, ils voient Apsyrtos leur fermer la route dans le delta de l'Istros. Médée se dé cide pour la deuxième fois à commettre un crime contre sa famille et à tuer son frère pour faciliter la fuite des Argonautes. Le meurtre se passe dans le temple d'Artémis selon Apollonios (Arg., IV, 452-481) : Apsyrtos est attiré par Médée et assassiné par Ja son2. Phérécyde (F3 F22 Jacoby), décrit Apsyrtos comme beaucoup plus jeune que Médée qui l'emmène sur l'Argô, à la demande de Ja son et des Argonautes; elle le dépèce sur les bords du Phase, où elle éparpille ses membres, pour retarder Aiétès qui poursuit les fugitifs. Hygin, (Fables, 26) suit la même tradition, mais le meurtre se passe dans le Pont. Il existe une troisième tradition qui serait la plus an cienne, remontant peut-être aux Naupactica (fr. 4, 7, 8 Kinkel) et suivie par Sophocle (Colchidiennes , fr. 343 Pearson), Euripide (Méd ée, 1334) et Callimaque (fr. 8 Pfeiffer) : elle fait d'Apsyrtos un petit enfant assassiné dans le palais même de son père. Ce premier crime véritable de Médée3, ou tout au moins ce crime accompli avec son consentement, ne semble pas avoir inspiré les artistes. Nous avons constaté la présence d'Apsyrtos sur les sar-
1 C'est la version d'Apollonios (Arg., IV, 338-506). 2 Apollonios, (Arg., IV, 338 ss.) Médée prend peur lorsque à l'embouchure de l'Istros, son frère Apsyrtos bloque le passage en réclamant qu'elle rentre au pays. Elle propose (v. 419) donc à Jason d'attirer Apsyrtos par des présents magnif iques (tunique) pour le tuer par la suite. Dans le temple d'Artémis, alors qu'elle est en train de discuter avec son frère, Jason sort de sa cachette et tue Apsyrtos d'un coup d'épée. Médée se voile les yeux, mais son frère, en succombant, lui roug itles habits du sang de ses mains. Aussitôt après Jason accomplit les rites apotropaïques pour se purifier du crime et enterre Apsyrtos. Pour l'analyse du per sonnage de Médée et sa traîtrise envers son frère, voir R. L. Hunter, 'Medea's Flight : the Fourth Book of the Argonautica', Cl Q XXXVII, 1, 1987, p. 129-139. 3 Ch. Dugas, «Le premier crime de Médée», Recueil Ch. Dugas, Paris, 1960, p. 109-114, pense que le meurtre d'Apsyrtos n'appartient pas à une tradition an cienne. Toutefois il était mentionné dans les Naupactica et par Phérécyde.
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JASON ET MÉDÉE
cophages, dans la scène du domptage des taureaux4, où il figure comme spectateur, aux côtés de son père. Nous ne pensons pas que l'on puisse reconnaître le meurtre d'Apsyrtos sur un couvercle de sarcophage de l'atelier de Rome5 dont l'interprétation pose, à notre avis, un certain nombre de problèmes. La lecture des scènes devrait se faire, selon P. Blome, de droite à gauche. La première scène à droite, composée de quatre personnages dont un couple en dextrarum iunctio, est interprétée comme la rencontre de Jason et Médée en présence des Dioscures. Immédiatement à gauche est re présentée de nouveau une dextrarum iunctio, à coté d'un arc qui pourrait représenter le palais d'Aiétès. La troisième scène figurerait le meurtre d'Apsyrtos à l'intérieur du palais, puisque le fond est orné d'un παραπέτασμα, devant lequel à droite, se penchent deux femmes dont une tient le corps d'un enfant inerte, une troisième (Médée?) se trouvant à gauche de la scène. La quatrième scène serait la fuite de la magicienne hors du palais paternel : Médée, l'épée à la main et Ja son essaient de monter sur le navire Argô. Enfin la dernière scène, est interprétée comme le mariage de Jason et Médée (en dextrarum iunctio de nouveau) en présence des Dioscures accompagnés de leurs chevaux et d'une jeune femme, tenant une boîte à gauche. Plusieurs remarques s'imposent devant cette exégèse. Tout d' abord la lecture de droite à gauche, qui est très rare6, ne se retrouve sur aucun sarcophage du cycle de Jason et Médée7. La longueur in habituelle du couvercle peut expliquer le nombre important des scènes, mais ne justifie pas à notre avis, la présence à trois reprises (!) d'une dextrarum iunctio, comprise comme une rencontre de Ja son et Médée ou leur mariage. Nous ne pensons pas comme P. Bloome8 que le goût poussé des Romains pour la Concordia constitue un argument solide. Le caractère répétitif de cette œuvre l'éloigné beaucoup des sarcophages du cycle que nous étudions, dont elle est pourtant contemporaine. Sans vouloir uniformiser ab4 En ce qui concerne Apsyrtos sur les sarcophages du cycle que nous étu dions, voir la scène du domptage des taureaux. 5 Couvercle : Rome Musée National. Inv 113195, récemment invoqué par P. Blome, «Der Tod des Apsytos auf einem römischen Sarkophagdeckel», RM 90, 1983, p. 201-209, pi. 73-76. Trouvé en 1932 à Marino. Marbre. H. 34 cm; L. 270 cm. Il est daté vers 170-180 de notre ère; voir également L. Musso, Museo Na zionale Romano. Le sculture I, 8, Rome, 1985, p. 346-349. 6 La lecture de droite à gauche se retrouve sur un couvercle du Musée Paul Getty à Malibu, illustrant le mythe d'Oreste et d'Iphigénie, Voir : G. Koch, Ro man Funerary Sculpture. Catalogue of the Collections, The J. Paul Getty Museum, Malibu, 1988, p. 14, n° 5. 7 Le fait qu'il s'agit d'un couvercle ne peut pas être un argument favorable, le couvercle du Vatican n° 9 ne présente aucune anomalie de ce genre. 8 Voir P. Blome, «Der Tod des Apsyrtos auf einem römischen Sarkophagdeck el», RM 90, 1983, particulièrement p. 206.
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solument la production des ateliers de Rome, on doit considérer qu'en 170-80 à l'apogée de la carrière iconographique de Jason et Médée sur les sarcophages, leur type est bien fixé. Cette scène se rapprocherait donc de la plus ancienne version s ituant l'épisode dans le palais. Mais comment expliquer l'ambiance féminine de ce meurtre, puisque Médée devait opérer seule? Par ail leurs, selon la tradition littéraire postérieure, personne n'y assiste à part Jason. Enfin, un dernier point négatif : on remarque que sur ce couvercle ne figurent que des événements marginaux de l'expédi tion; les exploits de Jason en Colchide, qui servent à le glorifier et à rappeler les vertus du défunt, sont ici absents.
CHAPITRE XIII
LE MARIAGE DE JASON ET DE MÉDÉE
Après le meurtre d'Apsyrtos, les Argonautes fuient vers l'Hellade. Lors d'un passage chez Circe, la tante de Médée magicienne comme elle, les deux meurtiers sont purifiés, et après avoir échappé aux Sirènes, ils arrivent à Corcyre1 où ils sont rattrapés par l'armée colque qui réclame Médée. Apollonios de Rhodes, (Arg., IV, 982-1169) décrit les ci rconstances du mariage, fêté et consommé hâtivement pour sauver Médée d'un retour forcé en Colchide. Cette version est suivie par le Pseudo-Apollodore, (Bibl, I, IX, 25). Pourtant la légende de Jason et Médée remonte à Antimaque (fr. 64 Wyss) qui situe leur union au bord du Phase juste après avoir conquis la toison. Pindare, (Pythique, IV, 395-97) et Diodore, (IV, 46) mentionnent les promesses de mariage faites par Jason avant de conquérir la toison. Chez les Tragiques, Euripide aussi bien que Sénèque, l'épisode n'est pas ex plicité, mais il est évident qu'il y a eu mariage. Valerius Flaccus, (Arg., V, 456) donne en Colchide un fiancé à Médée, Styrus, roi d'Albanie; le mariage avec Jason a lieu sur l'île Peucé du fleuve Istros, après le vol de la toison (VIII, 217-258). Enfin Dracontius, (Medea, 177-255), situe le mariage en Colchide, mais il en donne une version extravagante2. Selon Apollonios le mariage est préparé à la hâte, car le roi Alkinoos pressé par les Colques est décidé à rendre Médée à l'armée de son père à condition qu'elle soit encore vierge. Les Argonautes et le couple, prévenus par la reine Arété qui a de la sympathie pour la jeune fille, accomplissent les rites nécessaires3. Le mariage a lieu 1 Pour les différentes versions littéraires de l'escale à Corcyre, voir F. Vian, in Argonautiques., III, p. 33 n. 1-7. 2 Chez Dracontius le mariage se passe en Colchide (v. 220-255). L'auteur ne donne pas de détails, mais on apprend que Médée tombe amoureuse de Jason au moment même où elle s'apprête à le sacrifier à l'autel de Diane, car l'Amour lui a envoyé une de ses flèches (v. 177-181). 3 Apollonios (Arg., IV), les Argonautes mélangent le vin (v. 1128-1164), sacri fient des brebis et préparent la couche nuptiale où ils jettent la toison d'or (v. 1141-43); par la suite couronnés (v. 1155-60), mais brandissant leurs piques par crainte de l'ennemi, ils entonnent devant l'antre l'hyménée, au son de la c ithare d'Orphée.
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dans la grotte Macris, la couche nuptiale étant la toison d'or ellemême4. Héra manifeste son approbation en envoyant les Nymphes escorter Médée et en répandant mystérieusement le lendemain la nouvelle de l'hymen. C'est d'ailleurs la même déesse qui a incité Areté à agir en faveur du couple des fugitifs. Dans l'art figuré, le mariage de Jason et Médée se trouvait sur le coffre de Kypsélos que Pausanias (V, 18) a vu au sanctuaire d'Olympie5. La scène se situait au milieu de la deuxième bande (en commençant par le bas), juste après la représentation de Ménélas et Hélène. Médée figurait assise sur un trône, accompagnée à droite par Jason et à gauche par la déesse Aphrodite. Une inscription expli quait le sujet représenté. Le coffre de Kypsélos est généralement da té des environs de 5706; il s'agit donc d'une des plus anciennes r eprésentations des deux personnages. Cette représentation que l'on imagine solennelle, où Médée était figurée comme une divinité, nous rappelle Pindare, (JPythiques, IV, 384) qui mentionne l'impor tance d'Aphrodite pour l'aide que Médée porte à Jason; mais elle n'a rien à voir avec le mariage champêtre, clandestin et hâtif qu'on trouve chez Apollonios, dont le récit est également loin d'être suivi par les sculpteurs des sarcophages. Sur les cuves de Prétextât, et du Louvre (n° 12, 5; fig. 16, 21, 7), sur le petit côté de Rome (n° 19, fig. 30) et sur le couvercle du Vatican n° 9, fig. 13)7, figure une dex4 La toison constitue la dot de Médée. Chez Apollonios, {Arg., IV, 87-91), celle-ci se propose d'apporter la toison et demande en échange une promesse de mariage avec serment; voir C. Vatin, Recherches sur le manage, Paris, 1970, p. 70, 155, 180. 5 Pausanias V, 18, 3 : Μηδείας δε έπί θρόνου καθήμενης Ιάσων έν δεξιφ, τη δέ Αφροδίτη παρέστηκε· γέγραπται δέ και επίγραμμα έπ' αύτοΐςΜήδειαν 'Ιάσων γαμέει, κέλεται δ' Άφροδίτα. πεποίηνται δέ και ςίδουσαι ΜοΟσαι καί 'Απόλλων. 6 Pour le coffre de Kypsélos, voir notre note 17, du chapitre XV sur le raje unissement de Pélias. 7 Le petit côté d'un sarcophage provenant d'Aquincum et se trouvant au mus ée National de Budapest, (voir ASR, III, 3 n° 426; L. Ghali-Kahil, Les enlève ments et le retour d'Hélène, Paris, 1955, n° 199, pi. 88, 1; mais aussi E. Diez, «Nochmals : Helena - Menelaos», OJh 48, 1966-67, p. 94-108, et pour ce type de scène dernièrement K. Hamma, «The two Representations of Helen and Menel aos», The J. P. Getty Museum Journal 11, 1983, p. 123-129) interprété par C. Rob ert, ASR, III, 3 n° 426, comme la rencontre de Jason et Médée au temple d'Hé cate n'appartient pas, à notre avis, au cycle que nous étudions. Ce relief re présente une femme à gauche qui semble être vue de profil vers la droite; elle est habillée d'un manteau qui se drape autour de ses hanches, tandis que son torse est nu; de la main gauche, elle tient un pan de son manteau. L'homme figure à droite de face, nu, avec un manteau drapé autour de son épaule et de son bras gauche; sa main droite se tend vers l'épée qu'il tient dans son fourreau dans la main gauche. A gauche du relief derrière la femme se trouve un piédestal su rmonté d'une figure d'Eros. Nous constatons, compte tenu de l'étude de la scène sur les sarcophages, que Jason et Médée ne sont jamais représentés dans cette
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trarum iunctio entre un homme et une femme, scène qui a été inter prétée comme le mariage de Jason et Médée. On note immédiatement que la scène n'a pas de place fixe sur les panneaux. Dans deux cas, Prétextât et Louvre (n° 12, 5, fig. 16, 21, 7), elle figure à l'extrémité de la cuve. Sur la cuve de Prétextât, elle se trouve juste après le meurtre des enfants de Médée; sur le panneau du Louvre (n° 5, fig. 7), elle succède aux exploits de Jason en Colchide8. La femme figure le plus souvent dans la partie gauche de la scène. Sur le panneau de Prétextât, le couvercle du Vatican et le petit côté de Rome (n° 12, 9, 19), elle est représentée voilée. De la main gauche, elle fait un geste pour se dévoiler ou se voiler davantage et à petits pas elle s'approche de l'homme. Sur le panneau du Louvre (n° 5) elle a une attitude recueillie, la tête baissée, pratiquement ca chée par le voile. Par contraste l'homme y paraît beaucoup plus «affirmé». Il est habillé comme un officier romain, avec cuirasse, bottes, tenant l'épée (sur le couvercle du Vatican n° 9). Il regarde la femme à qui il donne la main. Le relief du petit côté d'un sarcophage à Rome (n° 19) fait exception, car l'homme y est représenté nu, à peine cou vert d'une chlamyde agrafée sur l'épaule et rejetée en arrière, casqué et tenant un bouclier. Il a une allure héroïque9. Sur trois exemplaires, ceux de Prétextât, du Louvre, du Vatican (n° 12, 5, 9), une figure féminine se place entre le couple. Voilée éga lement, immobile et impressionnante, elle regarde l'un des deux époux. Identifiée à Concordia ou à Junon Pronuba™, elle précise le posture. La nudité partielle de la femme, le fait que l'homme tire ou remet l'épée dans son fourreau et la présence d'Eros nous guident vers d'autres domaines iconographiques. Selon la tradition littéraire Eros est un des principaux respon sables(avec Héra et Aphrodite) de l'amour qui enflamme le cœur de Médée pour Jason. Chez Apollonios, (Argonautiques , III, 275-298) c'est dans le palais que Mé dée voit pour la première fois l'étranger et qu'Eros la perce de ses flèches. Chez Valerius Flaccus, (Argonautica, V, 341-362), ils se rencontrent le long du Phase, alors que Médée est accompagnée des jeunes Colchidiennes. Dans les deux contextes, la nudité de Médée n'a aucune raison d'exister. En effet, la scène a été identifiée comme les retrouvailles d'Hélène et Ménélas pendant Yllioupersis, voir L. Ghali-Kahil, ibid., n° 199; E. Diez, op. cit., p. 94-108, et K. Hamma, op. cit., p. 123-129). 8 La scène de la dextrarum iunctio avait aussi la même place sur le panneau de Turin, aujourd'hui fragmentaire. 9 Le Jason de cette scène se rapproche d'Héraklès ou de Thésée serrant la main d'une divinité (Athéna ou Poséidon), voir G. Davies, «The Significance of the Handshake Motif in Classical Funerary Art», AJA, 89, 1985, p. 627-628 n. 3, 4. 10 Cette figure féminine a d'abord été interprétée comme Junon Pronuba sur les sarcophages à sujets mythologiques, voir ÄS, p. 98 n. 6; Concordia comme di vinité, représente chez les Romains l'affection entre parents et l'union conjugale, voir E. Pottier, DA, 1, 2, 1434, s.v. Concordia. Junon Pronuba est celle qui ac-
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caractère matrimonial de la scène, car le motif de la dextrarum iunctio est également, comme nous le verrons, très populaire en dehors du contexte funéraire. Un autre personnage présent sur deux des sarcophages (Prétext ât et Louvre) fait aussi partie du contexte matrimonial. Il s'agit d'E ros, qui sur le panneau du Louvre est ailé et tient un arc11. Les scènes du Louvre et de Rome (n° 5, 19) sont à l'opposé l'une de l'autre. Alors que sur le petit côté de Rome, la composition simple, imposante, nous situe dans un monde mythologique, sur le panneau du Louvre l'ambiance semble plus quotidienne, plus ter restre. Ceci est certainement dû à la présence de deux personnages supplémentaires qui accompagnent le couple, le jeune homme à cô té de l'époux, et la nourrice à côté de l'épouse, comme cela se passait dans les cérémonies nuptiales, alors que sur le relief de Rome (n° 19) les personnages gardent quelque chose de leur caractère mytholo gique (nudité de Jason). Aucun mouvement vif n'anime la scène; les personnages semblent poser les uns à côté des autres. La composition est domi néepar des lignes verticales. Presque au centre de la scène existent formant un angle, deux obliques qui sont créées par les mains jointes des deux protagonistes12. Les personnages drapés prédo minent dans cette scène, les plis de leurs vêtements forment un en semble de lignes verticales qui meublent le fond de la scène et d'où émergent, au centre, les deux mains jointes placées dans l'axe. Ce pendant, le relief du petit côté d'un sarcophage de Rome (n° 19) pa raît plus dépouillé en raison du nombre de personnage qui est limité au minimum et du fait que Jason y figure nu. Si on admet que cette scène sur les sarcophages représente un mariage mythologique, alors se pose le problème de l'identification des personnages. Pour le mariage du panneau du Louvre, on peut penser qu'il s'agit de celui de Jason et de Médée, puisque la scène se trouve à la suite des événements en Colchide. Mais pour le panneau de Prétextât, où la scène se trouve placée à la fois après les événe ments de Colchide et de Corinthe, qui est la jeune épouse? Dans ce cas nous pensons que l'écart avec le sujet mythologique est encore plus évident. compagne la fiancée le jour du mariage et la mène vers l'époux voir J. A. Hild, DA, III, 1, p. 668-690, s.v. Juno. 11 A notre avis, sur le panneau de Prétextât également, Eros tient un arc vu la forme de ce qui reste et la façon dont il le tient, et non pas une torche comme le suggère M. Gütschow, Atti P.A.R.A., p. 46. 12 Grâce au dessin du Codex Coburgensis, on sait que sur le panneau de Turin dans la scène du mariage il n'y avait pas de dextrarum iunctio, en revanche l' épouse tenait son voile et l'homme faisait un sacrifice sur un autel placé au centre voir ASR, II, n° 190.
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Sur le couvercle du Vatican (n° 9), la scène se trouve à l'e xtrémité gauche du panneau et avant les épisodes qui ont lieu à Corinthe. On pourrait le considérer comme le mariage de Jason et de Creuse13. Finalement sur le petit côté d'un sarcophage à Rome (n° 19) la scène est isolée et sa composition simplifiée. On constate donc que la scène n'a pas une valeur mythologique précise. Elle est l'occasion de représenter un mariage romain, ce qui est peut-être une allusion aux événements de la vie des propriétaires de ces sarcophages14. Le motif de deux personnes se serrant la main se rencontre très fréquemment dans l'iconographie antique. Déjà dans l'art grec, la δεξίωσις apparaît sur plusieurs monuments, pas uniquement funér aires. Le motif se perpétue dans l'art impérial (où il exprime de fa çon générale la salutation, l'accord, ou le mariage) sur des monu ments de nature diverse, et entre autres sur des sarcophages à sujets mythologiques ou non15. La scène de mariage est représentée sur un grand nombre de sarcophages de types variés, utilisant pratique ment le même schéma que sur nos sarcophages16. Ainsi la scène du panneau du Louvre a exactement la même composition et la même nombre des personnages qu'un sarcophage de Mantoue17 qui, sur son extrémité droite, représente simplement un mariage romain. Comme on l'a déjà noté, il est difficile de déterminer chaque fois quelle est la femme qui épouse Jason18. D'ailleurs l'arbitraire dans l'emplacement des images suggère plutôt que la scène, fortement romanisée, est en rapport avec la vie du défunt et qu'elle a perdu de sa 13 On note par ailleurs que sur le couvercle du Vatican, n° 9, la femme paraît sortir d'une grande porte dont un des piliers est représenté à gauche. Selon Croisille, Poésie et art, p. 53 n. 200, le mariage de Jason et de Creuse a eu lieu sur la porte du temple de Soleil. 14 Sur ce point, voir également M. Gütschow, ibid., p. 46-47. 15 Sur ce motif, voir G. Davies, op. cit., p. 627-640; également M. Gütschow, ibid., p. 47. En revanche P. Boyancé, Etudes sur la religion romaine, Rome, 1972, p. 126-127, 131 n. 5 y voit «l'accord {concordici) des époux dans une scène à valeur symbolique» et non un mariage puisque le «mariage romain ne comporte aucun geste de ce genre». 16 Sur les sarcophages à scènes de mariage, voir RS, p. 97-106 et aussi G. Dav ies, ibid., p. 635-637; sur nos exemplaires il n'y a pas de παραπέτασμα au fond de cette scène. 17 Pour le sarcophage de Mantoue, voir RS, p. 99, n° 93. 18 Sur le panneau du Louvre (n° 5, fig. 7), peut-être s'agit-il d'une allusion au mariage de Jason et de Médée puisque la scène se trouve à la suite des exploits de Jason. Par contre, sur le couvercle du Vatican elle est au début des événements de Corinthe. Il s'agirait donc plutôt du mariage avec Creuse. Et enfin sur les exemp laires de Prétextât et jadis de Turin, l'affaire se complique encore, car la scène se trouve à la fois après les exploits de Colchide et le meurtre des enfants de Jason à Corinthe. Nous pensons que dans ce cas, l'éloignement du sujet mythologique est encore plus évident.
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JASON ET MÉDÉE
valeur mythologique; rien ne rappelle non plus la cladestinité dans laquelle se déroule le mariage de Jason et Médée à Corcyre. En revanche elle symbolise également la fides des époux et leur union dans l'autre vie19, bien qu'il soit choquant de constater que Jason qui est le type même du mari infidèle ait été choisi pour symbol iser cette fides. A notre avis, le coffre de Kypsélos est la seule œuvre d'art où f igurait le mariage de Jason et Médée; pour nous, la scène sur les sa rcophages fortement romanisée n'a pas de valeur mythologique, en revanche elle représente un moment de la vie des défunts. Le récit des auteurs anciens, malgré son caractère pittoresque, n'a pas inspi ré l'art figuré.
19 Voir Cumont, Symbolisme, p. 82, 87.
CHAPITRE XIV
LA MORT DE TALÔS EN CRÈTE
Le voyage de retour vers Iolcos, après le séjour à Corcyre, est long et donne lieu à plusieurs aventures1. Parmi ces épisodes seul ce lui de la mort du géant Talôs (Τάλως) en Crète a été l'objet de re présentations artistiques. Apollonios (Arg., IV, 1638-88) décrit l'ép isode avec une foule de détails, mais Talôs est attesté déjà depuis Simonide (fr. 568 Pace) et Sophocle, Dédale, (fr. 160 Pearson); le Pseudo-Apollodore (Bibl, I, IX, 26) le mentionne aussi2. Talôs, géant en bronze - χάλκειοβ -, issu de la famille des demidieux d'airain, selon Apollonios (Arg., IV, 1643), avait été donné par Zeus à Europe pour garder son île. Malgré tout, ce géant monst rueux, semblable à un énorme robot, avait quelque chose d'humain, puisqu'une veine située à sa cheville était pleine de sang3. Pourtant ce dernier survivant de l'ancienne génération des demi-dieux ne ré sistera pas au pouvoir magique de Médée. Quant au rôle de Médée, deux traditions différentes existent. D'après Apollonios (Arg., IV, 1654-1688)4, Médée commet le meurtre à distance (άπόπροθεν), et sans avoir recours à ses drogues, alors que le Pseudo - Apollodore
1 Apollonios (Arg., TV, 1223 ss.) décrit en détail le voyage de retour. 2 Selon le Pseudo-Apollodore (I, IX, 26), il avait été offert par Héphaistos à Minos. Le même auteur ajoute, pour la nature de Talôs, «certains disent qu'il était un homme d'airain (χαλκοος άνήρ), selon d'autres un taureau (oi δέ ταορον αυτόν λέγουσιν). Avec ses pieds d'airain, il faisait trois fois par jour le tour de l'île. 3 Selon Apollonios (Arg., 1646-48), une fine membrane - λεπτός ύμήν ζωηβ fermait la veine pour lui assurer ainsi la vie, alors que, selon le Pseudo-Apollo dore I, IX, 26, la veine qui parcourait le corps de Talôs de son cou à sa cheville, était fermée à son extrémité par un clou : - είχε δέ φλέβα μίαν από αύχένος κατατείνουσαν άχρι σφυρών κατά δέ το τέρμα τής φλεβός ήλος διήρειστο χαλκούς. 4 Médée, après s'être voilée pour se recueillir, invoque les Kères avec des in cantations et lance son hostilité sur Talôs par ses regards : (Apollonios, Arg. , TV, 1669-70 έχθοδαποΐσνν ομμασι); le géant heurte sa cheville sur une arête de pierre (v. 1679) πετραίφ στόνυχι χρίμψε σφυρόν; son sang pareil au plomb coule; il va cille et, tel un arbre que l'on abat, il tombe dans un immense fracas (v. 1688 κάππεσε δούπφ). C'est le procédé du mauvais œil qui fait peur en Méditerannée, même de nos jours (appelé la iettatura en Italie du Sud). Par ailleurs Médée étant descendante du Soleil, son regard est tout à fait caractéristique et puissant; làdessus voir également la note 14 de notre chapitre XVIII (la fuite de Médée).
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JASON ET MÉDÉE
rapporte trois autres versions qui reflètent une tradition différente. Dans deux des cas, c'est Médée qui débarrasse les Argonautes du danger de Talôs, soit en le rendant fou par ses drogues (δια φαρ μάκων αύτφ μανίαν Μήδειας έμβαλούσης); soit en lui promettant de le rendre immortel, pour lui ôter le clou fatal, (υποσχόμενης πονήσειν άθάνατον και τον ήλον έξελούσης). La troisième version met en scène Poeas, un Argonaute archer, (à peu près inconnu) qui inter vient parfois dans la légende d'Héraklès : il tue le géant d'une flèche sur la cheville (τινές δε αυτόν τοξευθέντα ύπο Ποίαντος είς το σφυρον τελευτήσαι λέγουσι). La mort de Talôs a inspiré surtout les artistes de l'Italie5. Médée figure sur trois vases représentant cette scène6, où l'on peut égal ement reconnaître Jason7. Cet épisode n'apparaît qu'après le milieu 5 Le personnage de Talôs seul, figure aussi sur des monnaies de Phaistos, avec son nom iscrit; voir B. V. Head, Ristona numorum2 Oxford, 1911, p. 476, fig. 254. Il est représenté ailé, portant des pierres dans les mains, parfois coiffé d'une couronne des rayons qui le caractérise comme une divinité solaire voir G. B. Cook, Zeus, Cambridge, 1914, p. 719-720. Notons qu'aucun texte ne ment ionne les ailes de Talôs. 6 La scène figure également sur un miroir étrusque, au Musée National Etrusque de la Villa Giulia (Inv 24885. D. Rebuffat-Emmanuel, Le miroir étrusque d'après la collection du Cabinet des Médailles, Rome, 1973, p. 510-512 n° 1314, pi. 22, 30) mais Médée est absente. Trois hommes sont représentés, nus, celui de gauche et celui de droite portent un casque; ils saisissent le personnage du centre au niveau de la taille, alors que celui-ci ne les touche pas. Les deux hommes casqués sont les Dioscures, l'homme au centre Talôs. Pour les représen tationsde Talôs, voir Buslepp, Röscher Lexikon, V, 22-37, s.v. Talos. 7 1. Cratère à volutes, à figures rouges du peintre de Talôs, de Ruvo. Collec tionJatta K14, Ruvo. Entre 430-405. (Beazley, ARV, 1338, 1; H. Sichtermann, Griechische Vasen in Unteritalien, Tubingen, 1966, p. 23 n° 14, pl. 1, 24-33). Face A : la mort de Talôs. La composition est très équilibrée. Le géant se trouve au mi lieu de la scène, son corps est peint en blanc pour suggérer sa nature métallique. Presque sans connaissance, il se laisse soutenir par les Dioscures, accompagnés de leurs chevaux. Médée dont le nom est inscrit, est à gauche, habillée d'un chiton à manches richement décoré, du Kandys (voir T. Linders, «The Kandys in Greece and Persia», Opuscula Atheniensia XV, 8, 1984, p. 109-114), portant le bonnet phrygien sur la tête et une boîte dans la main gauche. Tandis qu'à droite Poséidon et Amphitrite assistent à la scène, à gauche figure le navire Argô, sur l equel sont assis deux hommes regardant la scène, alors qu'un troisième est en train d'y monter en utilisant une échelle. Une épée dans le fourreau supendue à son épaule, il porte deux lances dans la main gauche; il pourrait s'agit de Jason. Face B : les deux hommes à gauche, couronnés et tenant une lance chacun, ont été identifiés aux Dioscures, à côté de qui se tient à droite Athéna; entre eux f igure une Niké volante. On remarque que le jeune homme à gauche est absolu mentidentique à celui que nous avons interprété comme Jason sur la face A. Héra à droite, couronnée, tenant une coupe, à côté d'un jeune homme couronné, ha billé d'une tunique courte richement ornée, tenant deux lances : Jason qui porte l'habit des Disocures de la face A (tunique brodée de scènes). 2. Cratère à colonnettes, à figures rouges, de Montesarchio. Au musée de Salerne. Daté vers 450-425 avant notre ère. A. Lesky, «Eine neue Talos-Vase», AZ
LA MORT DE TALÔS EN CRÈTE
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du Ve siècle avant notre ère, et seulement sur des documents peints. Ces vases n'ont inspiré aucun sarcophage, mais ils prouvent qu'un auteur antérieur à Apollonios avait développé l'épisode, qui avait été représenté dans la grande peinture, à en juger par l'équilibre et la r ichesse de la composition d'un des cratères (note 7 n° 1). Médée, principale protagoniste salvatrice, figure à terre (et non pas sur le bateau), sur un côté de la scène, tandis que le groupe des Dioscures et de Talôs en occupe le centre. Elle est caractérisée surtout par sa boîte à drogues. Sur les vases figure donc le moment final après la fascination subie par Talôs, quand celui-ci vient d'être blessé à la cheville : sa veine se vide de son sang et du même coup, il perd sa force. La fascination que décrit Apollonios est suggérée, puisque Ta lôs est figuré, mourant, mais les yeux ouverts, comme s'il était hyp notisé. Cependant le cratère de Salerne n. 2 n° 2 semble se rappro cher de la version transmise plus tard par le Pseudo-Apollodore (I, IX, 26), car Médée y assiste un homme (qui ne peut être que Jason), pour enlever le clou qui ferme la veine de Talôs et le maintient en vie. Jason est également reconnaissable, sur le cratère de Ruvo n° 1, grâce aux deux lances qu'il tient et peut-être aussi par la proximité de Médée, bien qu'il soit sur l'autre face du vase.
88, 1973, p. 115-119; G. D'Henry, SE 42, 1974, Scavi e scoperte, p. 508, pi. 82b. Le schéma est un peu différent. Alors que le géant est évanoui à droite dans les bras de deux hommes (les Dioscures?), à gauche une femme penchée en avant est en train d'aider un homme qui, agenouillé, s'affaire sur la cheville droite du géant. Il s'agit de Médée, reconnaissable grâce à une boîte qu'elle tient de la main gauche, en revanche le bonnet phrygien a laissé sa place à un bandeau large. L'homme agenouillé pourrait être Jason qui enlève le clou de la cheville de Talôs. Derrière eux se tient une femme, simple spectatrice ou une des compagnes de Médée. Se lon Apollonios (Arg., IV, 1296-1304, Médée avait reçu de la reine Arété à Corcyre, douze servantes comme cadeau nuptial. Près de la cheville de Talôs se tient une petite figure ailée, Thanatos. 3. Fragment de cratère à figures rouges, de la nécropole de Valle Trebba. Ferrara, Musée Spina. Daté vers 400. G. B. Montanari, «II mito di Talos su un frammento da Valle Trebba», Riv Ist IV, 1955, p. 179-189, fig. 1-4; Beazley, ARV2, 1340. Les deux Dioscures tiennent le géant de la même manière que sur le cratère G. 1. A droite est conservée la partie inférieure du corps d'une femme, vue de trois quarts, habillée d'un riche chiton. Il s'agit de Médée (la fin de son nom est conservée), mais aucun attribut ne subsiste. Entre Médée et Talôs, en bas de la scène, figure une petite figure ailée, Thanatos.
MÉDÉEET JASON APRÈS LA CONQUÊTE DE LA TOISON DOR
CHAPITRE XV
LA MORT DE PÉLIAS
Pélias, ordonnant l'expédition argonautique, n'imaginait pas que Jason réussirait et que les héros rentreraient sains et saufs avec la toison et accompagnés de Médée. Comme nous l'avons déjà vu, l'arrivée de Médée avait été préparée par Héra pour perdre Pélias, ce qu'Apollonios indique à deux reprises (Arg., Ill, 1135; IV, 242), bien qu'il arrête son récit une fois l'expédition arrivée à Pagases. Hésiode (Théog., 996), Mimnerne (fr. 11 voir Strabon 1, 46) ment ionnent Γύβριστής Πελίης à propos de l'expédition mais sans s'o ccuper de sa mort. Une étape supplémentaire dans l'information est franchie par Phérécyde (F60 Jacoby), et Pindare (Pyth., IV, 445-45) qui font de Médée la meurtière de Pélias ταν Πελίαο φονόν. Ce sontlà les plus anciennes mentions du crime dont Pélias fut la victime. Il faut remarquer que Médée agit pour aider Jason à se venger; pourt ant, primitivement, Jason n'est pas l'ennemi de Pélias. D'après Stésichore (fr. 178-180 Page), Jason assistait aux jeux funèbres à l'hon neur de Pélias (combattant contre Pelée), de même qu'il figurait sur le coffre de Kypsélos selon Pausanias (V, 17, 9-11). Les poètes tragiques se sont occupés davantage de cette légende. Ainsi Euripide écrivit en 455 av. J.C. les Péliades dont on a conservé quelques fragments (fr. 550, 601-616 Nauck). Un résumé des Péliades est transmis par Mosée de Chrorène dans les Rhétorìques III. Il s'agit de la version en arménien ancien de Progymnasmata d'Aphthonios d'Antioche transmise par Mosée. Le texte a été librement traduit en latin par Nauck1, L. Séchan résume l'essentiel, tandis que H. Meyer donne la traduction allemande exacte du texte2. Selon Euripide, Méd ée, après s'être embarquée avec Jason d'une province scythe, arrive en Thessalie, où elle exerce son art magique. Elle y a comploté contre le souverain du pays; en prenant comme prétexte le grand
liades.
1 Nauck, Tragicorum Graecorum Fragmenta3, Hildesheim, 1964, 550 s.v. Pé
2 Séchan, Tragédie grecque, p. 470-472; H. Meyer, Medeia, p. 41-44. Voir éga lement la traduction de V. Langlois, Collection des Historiens anciens et modernes de l'Arménie, Paris, 1880, p. 397-98. Par ailleurs, dans un papyrus fragmentaire d'Amsterdam, semble être question aussi du rajeunissement de Pélias, P. J. Sijpesteijn, «The Rejunevation Cure of Pélias», ZPE 9, 1972, p. 104-110.
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JASON ET MÉDÉE
âge de celui-ci et le fait qu'il n'a pas de descendance mâle, elle pro pose à ses filles de le rajeunir. Elle leur donne une preuve de ses ca pacités en mettant à bouillir dans un grand chaudron les morceaux dépecés d'un bélier. L'agitation même de la marmite bouillante et la création d'images artificielles de bélier, montrent que l'animal est vi vant. Par ailleurs Euripide dans sa Médée, (v. 9 et 485) mentionne r apidement les filles de Pélias3 qui, persuadées par Médée, tuèrent leur père. Sophocle en parlait dans son œuvre les Bhizotom.es (fr. 489-491 Pearson)4. Sénèque, Medea (133, 201, 473-76, 665) se réfère égal ement à ce crime sans s'y attarder. La poésie tragique grecque n'a pas inventé la légende, mais elle est à l'origine de son développement et de son enrichissement, telle qu'elle a inspiré les artistes. Chez le Pseudo-Apollodore Bibl., (I, IX, 27), on trouve la légende résumée en quelques points principaux : Jason, arrivé à Iolcos, après avoir donné la toison au roi, demande conseil à Médée sur la manière de se venger de Pélias, car ce dernier, désespéré de la réus site de l'expédition, a obligé ses parents et son jeune frère Proma chos à se tuer5. Médée va au palais et arrive à convaincre les filles du roi de couper en morceaux et de cuire leur père, enfin de le rajeunir par ses drogues : ή δε είς τα βασίλεια τοϋ Πελίου παρελθούσα πείθει τας θυγατέρας αύτοο τον πατέρα κρεουργήσαι καί καθεψήσαι, δια φαρ μάκων αυτόν έπαγγελλομένη ποιήσειν νέον· - après avoir fait la dé monstration avec un bélier qu'elle rajeunit en agneau - τοϋ πιστεβσαι χάριν κριον μελίσασα και καθεψήσασα έποίησεν άρνα. La version du Pseudo-Apollodore est suivie également par Ovide, {Met, 7, 297-349)6, Pausanias (VII, 11, 2), Lycophron {Alex., 175), a beaucoup inspiré les peintres des vases. On a supposé comme source commune de ces auteurs les Rhizotomes de Sophocle7. Diodore (IV, 51-53), suivi par Hygin {Fables, 24)8, reprend le 3 Le nombre des Péliades varie de deux à cinq dans les textes, sur les docu ments figurés apparaissent deux ou trois jeunes filles. Pour leur nom, voir Sé chan, op. cit., p. 473 n. 2. 4 Sur le sujet exact des Rhizotomes ainsi que sur la date de création de cette pièce et celle des Péliades d'Euripide, voir Séchan, Tragédie grecque, p. 468 n. 4-10, et Meyer, Medeia, p. 41 n. 120. Les Rhizotomes étaient probablement antérieures aux Péliades. Pour l'interprétation des fragments des Péliades voir Séchan, ibid., p. 472-474. Sophocle chantait également les aventures de Jason et Médée en Colchide dans ses Colchidiennes et ses Femmes Scythes. 5 Là-dessus voir aussi Valerius Flaccus, {Arg., I, 752-826), où Pélias tue les parents de Jason, enragé que son propre fils soit parti avec l'expédition. Le cra tère du Louvre K127, représente la remise de la toison à Pélias par Jason, unique illustration de la version du Pseudo-Apollodore, voir également notre page 81-82 n. 8. 6 Sur les sources d'Ovide voir Séchan, Tragédie grecque, p. 475 n. 1. 7 Séchan, ibid. p. 469-70 n. 7. 8 Sur le texte d'Hygin voir Meyer, Medeia. p. 43-44 n. 131.
LA MORT DE PÉLIAS
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même fond de légende mais un peu différencié, rendu plus vivant, où apparaît très nettement le caractère rusé et effronté de Médée9, qui déguisée en prêtresse d'Artemis, arrive à convaincre les filles de Pélias de rajeunir leur père par cuisson. Les traits principaux de la version de Diodore et d'Hygin pourraient se rapprocher de la tradi tionthéâtrale, dans ce cas des Péliades d'Euripide10. 9 Diodore (IV, 51-53) : les Argonautes arrivent en pleine nuit en Thessalie, et veulent venger Jason, qui vient d'apprendre la mort de ses parents et de son frère, mais leur nombre n'est pas suffisant. Médée propose de tuer Pélias grâce à un piège Πελίαν άποκτενείν δόλω και τα βασίλεια παραδώσειν τοις άριστεΟσιν ακιν δύνως, en utilisant le pouvoir de drogues découvertes par sa mère Hécate et sa sœur Circé, moyens dont elle n'avait jamais usé jusqu'à ce moment pour la perte des hommes. (Denis de Milet fr. Tl Jacoby fait aussi de Médée et de Circé les filles d'Aiétès et Hécate). Son piège consiste à fabriquer une image creuse d'Artémis - 'Αρτέμιδος εϊδωλον κοίλον - où elle cache ses drogues. Puis elle entre en plein jour dans la ville après s'être métamorphosée en vieille femme. Dans les Pé liades, elle a le même déguisement, voir Séchan, Tragédie grecque, p. 472 n. 6. Elle agit en inspirée, et conseille à la foule qui accourt de partout pour la voir, de rece voir la déesse qui vient de chez les Hyperboréens pour favoriser la ville et son roi. Alors que le peuple rend hommage à la déesse, Médée entre au palais où elle réussit à fasciner le roi et ses filles; aidée par leur superstition, elle leur fait croire que la déesse, qui parcourt le monde dans les airs sur un char attelé de dragons, a choisi cette ville pour y établir son culte et lui a ordonné de rajeunir Pélias enfin de lui procurer une vie heureuse. Le roi est stupéfait de la voir rajeunie d'un coup (après s'être lavée), et d'apercevoir dans les airs les dragons d'Artemis, images trompeuses que Médée a fait naître - δια τίνων φαρμάκων είδωλα φαντασθηναι των δρακόντων. Alors que le roi, ses filles et la cour, complètement convaincus, lui de mandent de procèser au rajeunissement, Médée, en prétendant que le corps du roi ne doit pas être souillé par des mains d'esclaves, propose à ses filles de partici per à l'opération. Le consentement de Pélias est une affaire controversée voir Sé chan, ibid., p. 474-476. Dans la nuit, pendant le sommeil de Pélias, Médée pré tend qu'il faut cuire son corps dans un chaudron - έν λέβητι καθεψήσαι το σώμα τοΰ Πελίου -; pour tromper la réticence de ses filles, elle se sert d'un bélier et elle fait sortir du chaudron l'image trompeuse d'un agneau - δια τίνων φαρμάκων παρακρουσαμένην έξελεϊν έκ τοο λέβητος άρνος εϊδωλον -. Les Péliades se sou mettent, à l'exception d'Alceste. Pourtant Médée ne participe ni au découpage, ni à la cuisson de Pélias - την Μήδειάν φασι τοο μεν το σώμα κατακόπτειν ή καθέψειν άποστήναι. Sous le prétexte de devoir faire des prières à la lune, elle fait monter au faîte du toit les Péliades avec des toches (ce qui donne le signal aux Argo nautes d'agir), et elle fait passer le temps nécessaire en débitant de longues prières en colchidien. Les Argonautes attaquent le palais et se retrouvent face à face avec les Péliades, qui vont juste procéder à la cuisson du corps et qui, déses pérées, veulent se tuer; mais Jason s'y oppose; il transmet le pouvoir à Acaste le fils de Pélias, alors qu'il se charge des filles du roi qu'il fait épouser à des hommes de son choix. On remarque que Diodore est en opposition avec lui-même car en rv, 40 Pélias est privé de descendance mâle. Sur la remise du pouvoir à Acaste voir Séchan, ibid., p. 471 n. 3. Pausanias (VIII, 11, 2) rapporte qu'après la mort atroce de leur père, les Pé liades se sont réfugiées à Mantinée, où elles sont mortes. Leur tombe se trouvait dans la plaine de Mantinée au Nord-Est de la ville. 10 Voir Séchan, ibid., p. 470 n. 1, 5.
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JASON ET MÉDÉE
Hormis le parallèle possible des différents auteurs avec les Rhizotomes de Sophocle ou les Péliades d'Euripide, se dégage un fond commun de la légende : Médée agit seule, au palais, les Argonautes n'arrivent qu'après pour mettre fin à la supercherie. Pour cela, elle use de son art magique, ainsi que d'une ruse, qui ne consiste pas seulement à se déguiser en prêtresse, mais aussi à créer par en chantement des images trompeuses - είδωλα - à deux reprises pour convaincre son public. Un autre point nous semble important : Mé dée organise tout, mais ne participe pas physiquement au meurtre de Pélias. Plusieurs moments de l'épisode sont représentés dans l'art figu ré : le rajeunissement du bélier en présence ou non de Pélias, la consultation des Péliades entre elles sans Médée avant de procéder au rajeunissement de leur père11, les derniers préparatifs avant le r ajeunis ement du roi; pourtant ces images n'ont pratiquement pas eu d'influence sur les sculpteurs des sarcophages. Médée, dans cet épisode, est représentée comme un magicienne et non comme une meurtrière; elle crée la fascination nécessaire avec le rajeunissement prodigieux du bélier pour convaincre les Pé liades de tuer leur père. Elle prépare tout et elle leur montre la voie, mais elle ne trouche pas elle-même le roi. L'image de Médée dans l'art figuré est donc en parfait accord avec les sources écrites. Les plus anciennes représentations du rajeunissement du bélier (qui sous-entend celui de Pélias), se trouvent sur des vases et r emontent au dernier quart du VIe siècle avant notre ère12, mais nous 11 Pour la liste de tous les documents représentant le rajeunissement, même ceux où Médée ne figure pas, voir Meyer, Medeia, p. 3-16, 66-68; ainsi que Vojatzi, Argonautenbilder, p. 94-100, 119, 123. Le même sujet figure peut-être sur un lécythe trouvé au Céramique, son mauvais état de conservation ne nous permet pas d'identifier Médée, voir U. Knigge, Der Südhügel, (Kerameikos DC), Berlin, 1976, p. 117 n° 117, pi. 16, 1.6. Sur l'hydrie du peintre de la Villa Giulia, Cambridge, vers 450, CVA, Cambridge I, 1930, pi. 35, 1; 40, 8; Meyer, ibid., p. 10 n° I Val7, pi. 10, 2.3, trois Péliades sont en train de discuter. La Péliade du milieu porte la phiale pour le rituel, mais, une main au menton, elle hésite en regardant sa sœur à gauche qui tient l'épée. La dernière à droite part d'un pas rapide. Sur un moulage d'un vase à Hildesheim, Pelizaus-Museum 2974, Meyer, ibid., p. 14 I R23, pi. 14, 2 figurent deux jeunes filles fuyant vers la droite en qui Meyer voit les Péliades fuyant après la mort de leur père. Mais dans la partie haute du relief figure aussi une scène avec Dionysos, ce qui rend ce document douteux. 12 II faut aussi remarquer que les jeux funèbres en l'honneur de Pélias figu raient sur le coffre de Kypsélos, daté généralement de 570 environ : voir M. von Massow, «Die Kypseloslade», AM, 1916, p. 1-117; ainsi que E. Simon, EAA IV, s.v. Kypsélos (arca di), p. 427-432; L. Lacroix, «Pausanias, le coffre de Kypsélos, et le problème de l'exégèse iconographique», RA, 1988, 2, p. 243-261. La scène se trou vait à la première frise du coffre, à partir du bas; Jason figurait à la lutte contre Pelée (Ίασονι δέ και Πηλεϊ το έργον τής πάληβ έξ Γσου καθέστηκε). Donc, au VIe siècle avant notre ère, la vieille légende qui ne représentait pas Jason comme l'en-
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pensons reconnaître Médée seulement sur une amphore13. Au cours du Ve siècle, les représentations de cette scène se multiplient. Mé dée magicienne est reconnaissable grâce à divers gestes et à plu sieurs attributs. Le chaudron avec le bélier, presque toujours au centre de la scène, reste un élément important14. Cette scène, après
nemi de Pélias, coexiste avec celle présentant le meurtre de Pélias comme une vengeance. D'autres pensent que les jeux servaient à l'expiation du meurtre, voir Vojatzi, Argonautenbilder, p. 100-107 n° 98-116. Les jeux funèbres ont été aussi re présentés à la fin du VIe siècle avant notre ère sur le trône d'Apollon à Amyclées. Pausanias (II, 18, 15), mentionne la scène sans préciser si Jason était présent, voir également R. Blatter, LIMC, II s.v. Argonautai. 13 1. Amphore à figures noires du groupe de Médée. Londres, British Mu seum Β 221. De Vulci. Date : vers 510. CVA, British Museum, 4, 1929, pi. 54, Ib; Beazley, ABV, 321 n° 4; Meyer, Medeia, p. 4-5 n° I Va4, pi. 3, 1.2; Vojatzi, Argonauntenbilder, p. 94, 119 n° A 69, pi. 12,1. Médée se trouve à gauche du chaudron contenant le bélier. Elle est habillée d'une tunique et d'un manteau, et rendue reconnaissable grâce à son polos. Elle lève le bras gauche, main ouverte, tandis que sa main droite est fermée. A côté d'elle à gauche figure le vieux Pélias, assis sur un siège et tenant un bâton dans la main. A la partie droite de la scène se trouvent deux Péliades coiffées d'un dia dème, l'une d'entre elles lève le bras droit, certainement pour exprimer son étonnement du prodige qui se produit devant ses yeux. Nous pensons que le polos est un attribut sût, et caractérise davantage la figure de Médée comme une prêtresse; n'oublions pas que selon les sources littéraires, c'est en cette qualité qu'elle s'est présentée au palais de Pélias. En revanche la main gauche fermée seule ne peut constituer à notre avis, un indice suffisant pour identifier Médée. Simon, «Medeadarstellungen», Gymnasium 60, 1954, p. 207, identifie Médée, mais mit einer polosartigen Mitra. En revanche, Meyer, ibid., p. 21-24, définit la main fermée, chez Homère Iliade, II, 163 χειρ ααπτοβ, main redoutable (concernant Agamemn on), comme un élément permettant d'identifier Médée sur trois autres vases. Voir également la discussion sur ces vases Meyer, ibid., p. 17-24 : il s'agit des n° I Val-3. Tous trois sont des vases du groupe de Léagros, une hydrie, Londres, Bri tish Museum Β 328; une amphore, Kurashiki Ninagawa Museum, autrefois à la Cranbrook Academy of Arts, Bloomfield-Michigan n° 1929, 5; et l'amphore 1960. 315 du Fogg Art Museum à Cambridge, Massachussets. Ils datent tous du dernier quart du VIe siècle avant notre ère. En regardant attentivement ces images, on s'aperçoit que la prétendue Médée, placée à gauche du chaudron, n'a pas d'autre attribut particulier; en revanche elle fait les mêmes gestes d'étonnement que les Péliades. Nous pensons qu'il s'agit plutôt d'une des Péliades qui contemplent le rajeunissement du bélier. Vojatzi, ibid., p. 119, 120 n° A70; B72, 73 identifie égale ment Médée, mais sans apporter aucun argument critique. 14 Le bélier est tourné vers les Péliades ou vers Médée; cette dernière se place à gauche ou à droite la scène sans distinction; ainsi on ne peut pas trouver là un indice pour l'identification de la magicienne. Pour le type du chaudron sur ces vases voir S. Benton, ABSA 35, 1934-35, p. 74. 2. Oenochoé à figure noires du peintre d'Athéna. Paris, Bibliothèque Natio nale, Cabinet des Médailles 268. De Camiros. Date : 500-490. CVA, France, 10, 1931, pi. 62, 12; 64, 1; Beazley, ABV, 528 n° 43; Meyer, Medeia, p. 5 n° I Va5, pi. 3, 3. Médée se trouve à droite de la scène; de profil vers la gauche, elle porte sa main droite vers son visage, et dans la main gauche elle tient des branches qu'elle est en train de mettre dans le chaudron. On a l'impression qu'elle est en train de dé-
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avoir eu un grand succès au cours du Ve siècle, cesse d'être représen-
biter les formules magiques nécessaires : cela donne à la peinture une valeur par ticulière. A gauche du chaudron un homme barbu, qui a un bâton dans la main, est en train d'attiser le feu. La présence de cet homme est également rare. Il s'agit d'un serviteur ou peut-être de Jason. Meyer, ibid., p. 25 η. 42, pense qu'il peut s'a gir d'Acaste le fils du roi, ou de Pélias lui-même, ou d'un serviteur, étant donné que le personnage n'a pas d'allure majestueuse. Pourtant, on remarque qu'Acaste ne figure jamais sur cette scène; Pélias, parfois présent, est représenté âgé, dé bout ou assis mais n'y participe pas. Le même personnage figure sur l'hydrie du groupe de Léagros, Londres British Museum B328 (voir également notre note 13), à gauche du chaudron, assis par terre, derrière une Péliade. Sur l'œnochoé n° 2, il occupe une place plus importante, Breazley, ABV, 528, 43, pense qu'il s'agit d'un serviteur sur les deux vases. (Sur l'hydrie n° 5, qui est postérieure de dix ans, figure un homme dont le nom inscrit est Jason. Pourrait-il s'agir sur le vase n° 2 du même personnage? En revanche, on remarque que, dans la littérature, Jason est absent de l'épisode et qu'aucun homme n'aide Médée). 3. Œnochoé d'Italie à figures noires du peintre d'Athéna. Paris, Musée du Louvre F 372. Date : 500-480. E. Pottier, Vases antiques du Louvre II, Paris, 1901, p. 132, pi. 86; Beazley, ABV, 531 n° 1; Meyer, ibid., p. 5 n° I Va6, pi. 4, 1. Médée, à gauche, de profil vers le chaudron, tient dans la main droite un objet qui semble être une boîte; de la main gauche elle fait un geste vers l'animal. Il s'agit sans doute de son φωριαμος contenant les herbes magiques. De l'autre côté de la scène se trouve une femme gesticulante. 4. Coupe fragmentaire, à figures rouges. Musée Paul Getty, Malibu, Califor nie. Probablement d'Euphronios, signature fragmentaire. Date : vers 490. Meyer, ibid., p. 7 n° I Val2, pi. 8, 1; M. Ohly-Dumm, «Medeas Widderzauber auf einer Schale aus der Werkstatt des Euphronios», /. P. Getty Museum Journal 9, 1981, p. 5-21. Médée tient également sa boîte dans la main gauche, mais elle se trouve der rière le chaudron, de chaque côté duquel figure une Péliade. Le dessin de re constitution de la coupe la munit également d'un bâton semblable à celui du n° 6, sans que rien ne nous semble l'autoriser. 5. Hydrie de Vulci du peintre de Copenhague, à figures rouges. Londres, Bri tish Museum E 163. Date : 480-470. CVA, Grande Bretagne, British Museum 5, Londres, 1929, pi. 70, 4; Beazley, ARV, 258 n° 26; Meyer, Medeia, p. 8-9 n° I Val4, pi. 9, 2. Médée (nom inscrit) se tient de profil à gauche du chaudron, elle est ha billée d'un chiton et d'un himation, avec un bandeau dans les cheveux. De la main droite elle fait un geste vers l'animal, peut-être l'asperge-t-elle de quelque l iquide magique contenu dans la coupe qu'elle tient dans sa main gauche, et non pas du φωριαμος comme le prétend Meyer, ibid., p. 71. A droite du chaudron se trouve Jason dont le nom est également inscrit, appuyé sur son bâton de la main gauche, tandis qu'il tend la droite vers l'animal; ses cheveux sont blancs. Ce vase pose de nombreux problèmes : c'est la première fois que la présence de Jason est assurée dans cette scène. On a voulu expliquer ce fait de différentes façons : H. Heydemann, «Jason in Kolchis» II, HWP, 1886, p. 19 n. 48 pense que le peintre voulait nommer Aison et non Jason et qu'il s'agit du rajeunissement d'Aison. Meyer, Medeia, p. 71, trouve que cette confusion n'est pas possible en 480-470, étant donné le développement iconographique de l'épisode. En revanche, il pense que, ou bien l'on accepte de lire le nom de Pélias à la place de celui de Jason, (et dans ce cas le peintre de Copenhague devient le prédécesseur du peintre de Cléophon, qui a peint la même scène sur le cratère n° 10); ou bien l'on admet qu'il s'a git du rajeunissement de Jason; ce que fait Meyer qui met en rapport l'hydrie n° 5 avec le stamnos de Vulci attribué au même peintre. Munich, Staatliche Anti-
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tée, mais elle réapparaît sur une peinture murale de Pompéi du tro isième style15. kensammlungen, Museum antiker Kleinkunst 2408 WAF. Figures rouges. 480470, voir Beazley, ARV, 257-8, 1640; Meyer ibid., p. 8 n° I Val3, pi. 8-9. Sur la face A : une femme de chaque côté du chaudron. Meyer, voit dans celle de gauche Méd ée. Derrière elle, un jeune homme enveloppé dans un manteau et tenant un bâ ton a été interprété par Simon, «Medeadarstellungen», Gymnasium, 60, 1954, p. 207 comme Jason, rajeuni par la magicienne; il faut noter que cette figure est inachevée. Sur la face B, Pélias attend son tour, assis, tenant un long bâton, en touré de trois de ses filles. Les deux vases se compléteraient : sur l'hydrie n° 5 Mé dée va rajeunir Jason qui, de ce fait, a des cheveux blancs et s'appuie sur un bâ ton, tandis que sur le stamnos le prodige a déjà eu lieu. Dans les deux cas, l'image du bélier dans le chaudron signifie le rajeunissement. Meyer expliquerait davan tagele fait que le peintre s'est autorisé à créer ces exotische Bilder, car ces vases étaient destinés à l'exportation vers l'Etrurie. Nous ne sommes pas sûre de pou voir reconnaître Médée sur ce stamnos. Aucun signe particulier ne la caractérise. Par ailleurs, sans essayer de masquer les difficultés iconographiques de l'hydrie n° 5, nous tenons pourtant à dire que rien ne nous oblige à y voir le rajeuniss ement de Jason. En revanche, il est clair chez tous les auteurs que l'épisode du bé lier n'est qu'une ruse que Médée a utilisée à l'encontre des Péliades, qui doutaient de ses capacités. Jason avait-il besoin de preuves pour y croire? Enfin, en obser vantl'attitude de Jason sur l'hydrie n° 5, on constate qu'il n'a pas l'air hésitant de quelqu'un qui va passer une épreuve, (comme par exemple Pélias); il gesticule de la même façon que Médée (rituel de la magie) ou que les Péliades (étonnement) sur les différents vases. Le peintre n'aurait-il pas voulu évoquer l'épisode d'Iolkos en soulignant que Médée agit aussi pour aider Jason? 6. Stamnos de Vulci, à figures rouges du peintre d'Héphaisteion. Berlin Antiquarium 2188. Date : 470-460. Simon, «Medeadarstellungen», Gymnasium 60, 1954, p. 207, pi. 5, 1; Beazley, ARV, 297 n° 1; Meyer Ibid., p. 9-10 n° I Vaiò, pi. 10,1. Médée se trouve à gauche de chaudron. Elle porte le même habit que la femme de droite, et la même coiffure (cécryphale), mais à notre avis elle est identifiable grâce à une espèce de bâton (ou crochet) qu'elle tient dans la main droite, tandis que l'autre est levée en direction du bélier. La femme de droite est vue de face, sa main droite tendue tient une épée, il s'agit certainement d'une Péliade. 7. Lécythe à figures noires tardives du peintre de Beldam. Athènes Musée national 12805. C. H. E. Haspels, Athenian Black-figured Lekythoi, Paris, 1938, p. 179, 269 n° 58; Meyer, Medeia, p. 6 n° I Va9, pi. 6, 1-3. Malgré le mauvais état de conservation de la figure de Médée à gauche, on peut penser qu'elle tenait un ré cipient dans la main gauche, par comparaison avec l'hydrie n° 5. De l'autre côté du chaudron se trouve probablement une Péliade, tenant une épée. 8. Lécythe à figures noires tardives du groupe d'Haimon. Washington, Galle rie Corcoran. Beazley, ABV, 551 n° 330; Meyer, Medeia, p. 7 n° I Vali, pi. 7, 2-3. Il s'agit d'un document tout à fait particulier. Il faut reconnaître Médée dans la f igure assise sur un tabouret à droite du chaudron, très occupée par son activité magique. A gauche, une femme semble accompagner un homme barbu, pro bablement Pélias et une de ses filles. Le type de Médée assise est en rapport avec le soi-disant rajeunissement de Jason dont les peintres ornent les vases au Ve siècle. Il s'agit de l'unique rapport, à notre avis, entre ces deux scènes. 15 9. Peinture de Pompéi. De la Casa del gruppo dei vasi di Vetro (VI 13, 2). Naples, Musée national Inv III 477. 3e style. Κ. Schefold, Die Wände Pompejis, Berlin, 1957, 129 d; Meyer, ibid., p. 15 n° I M25, pi. 15, 1. Le rajeunissement a lieu en plein air devant une très grande architecture, à gauche du panneau. Médée, à
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Le même type de scène, un peu différenciée, rend véritablement compte des capacités de la magicienne et de l'énorme tromperie dont elle a usé pour arriver à ses fins. C'est sur un vase16 et sur les cé lèbres reliefs à trois figures17, fig. 58-59 que l'on trouve l'écho de l'i llusion que Médée a su créer, à travers l'ébullition de l'eau dans le chaudron, comme Euripide semble l'avoir mentionné dans ses Péliades. Sur les reliefs à trois figures entièrement conservés, Médée, à gauche, a complété son vêtement oriental, la kavôus fig. 59, par un bonnet phrygien, et porte son φωριαμοβ dans les mains. Sur l'exem plaire de Berlin, on voit l'emplacement des mains sur la boîte, mais elles ont été restaurées; sur celui du Vatican la main droite se place sur le couvercle de la boîte, comme si elle allait l'ouvrir. La Péliade de droite, songeuse, tenant l'épée, représente à la fois la Péliade ar mée qui est prête à «rajeunir» son père, et Alcèste la fille hésitante18.
gauche, lève une coupe au dessus de l'animal qui est dans le chaudron. A droite figurent trois Péliades, dont l'une est assise et pensive; à côté d'elle se trouve un petit enfant qui a été identifié comme Acaste. Le même sujet ornait une peinture de la Casa delle Vestale, aujourd'hui disparue. 16 10. Cratère en calice, à figures rouges. Peintre de Cléophon. Marché des antiquités suisse. Date : 440-430. Meyer, ibid., p. 12 n° I Va20, pi. 13,1. Médée se trouve à droite du chaudron; dans la main gauche elle tient sa boîte, tandis qu'elle tend la main droite vers l'animal. Il s'agit probablement, une fois de plus, d'un geste nécessaire au rituel magique. A gauche du chaudron figure Pélias de bout appuyé sur son bâton, portant la main droite vers ses yeux, pour se ressai sir après les images trompeuses qu'il vient de voir. Nous ne sommes pas d'ac cord avec Meyer, ibid., p. 35 pour qui le peintre a placé Médée et sa victime face à face pour montrer que c'est elle qui a tué Pélias. Dans le chaudron figure un bélier de grande taille, certainement pour rende l'effet de l'illusion et de la su percherie. 17 Les reliefs à trois figures : aux exemplaires du Vatican (fig. 58-59) et Berl in, (voir C. Blümel, Staatliche Museen zu Berlin, Berlin, 1931, p. 78 n° 187; H. Götze, «Die attische Dreifigurenreliefs» RM 53, 1938, p. 200-207; W. Fuchs, Die Vorbilder des neuattischen Reliefs, Ergänzungsheft XX, Berlin, 1959; Meyer, Medeia, p. 38-50; W. Fuchs, Skulptur, p. 519-520, fig. 607) et le fragment de la tête de Médée à New York (voir G. Richter, «A Head of Medea», Mèi. A. Rumpf, Cologne, 1952, p. 127-130, pi. 30, 31; Meyer, ibid., p. 40), on peut rajouter le fragment d'un quatrième exemplaire trouvé à Corinthe à l'Est de la fontaine Peiréné. H. 21cm; L. 23cm; épaisseur du relief 4cm. F. Johnson, Corinth IX, Cambridge, Massachuse tts, 1931, p. 121 n° 246; E. Harrison, «Hesperides and heroes : a note on the three-figure reliefs», Hesperia XXXIII, 1964, p. 76-82. Il s'agit de la tête de la Pé liade du milieu, ses cheveux sont bouclés et coiffés en chignon. Ce fragment, qui ne représente pas Médée, est très intéressant, car il provient de la seule copie trouvée en Grèce même. 18 Sur l'hydrie du peintre de la Villa Giulia, existent les deux types des Pé liades, voir ci-dessus la note 11. Voir aussi Vojatzi, Argonautenbilder, p. 95, 120 n° 74, pi. 13, 1 : fragment d'amphore à Erlange, Collection de l'Université. Vers 510. On ne peut oublier non plus que sur la deuxième frise du coffre de Cypsélos figu raient deux femmes travaillant avec des mortiers (Pausanias V, 18, 2 δύο δέ άλλας γυναίκας ές όλμους καθικνουμένας ύπέροις, φάρμακα είδέναι σφας νομίζουσιν); cer-
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Celle du milieu est en train de saisir le chaudron pour mieux voir les είδωλα qui en sortent. On remarque que le bélier ainsi que Pélias sont absents. En effet, ces reliefs sont presque l'illustration exacte des Péliades d'Euripide où les images trompeuses, les illusions que Médée créait ont décidé les Péliades quant au sort de leur père. H. Meyer19, tout en mettant en rapport ces reliefs avec l'œuvre d'Euri pide,y voit la réduction de deux schémas du rajeunissement (celui du bélier-celui de Pélias) en un seul. Nous pensons que moins qu'un schéma condensé, ces reliefs représentent exactement le détail parti culier donné par Euripide, dont on sent une réminiscence chez Diodore : la tromperie de Médée grâce à sa magie. Elle ouvre le φωριαμος, pour mieux laisser échapper les pouvoirs extraordinaires des ses plantes20, et ainsi captiver complètement la raison de Péliades. L'une d'elles, placée au-dessus des vapeurs maléfiques, est déjà prise au piège, et croit voir l'impossible; elle secoue le chaudron pour être encore plus sûre. L'autre, bien que songeuse, tient déjà l'épée, preuve de sa résolution, et se rend aussi aux pouvoirs des φάρμακα de Médée. Ainsi, à notre avis, nous devons mettre désormais21 ces re liefs en rapport étroit avec les Péliades créées probablement en 455, ce qui nous conduit plutôt pour la fonction des originaux (datant de la fin du Ve siècle), vers un monument chorégique, suffisamment cé lèbre en Grèce pour attirer les copistes. Les derniers préparatifs avant le rajeunissement de Pélias, fo rment la deuxième étape de cette légende. C'est sur le petit côté gauche du sarcophage de Prétextât (n° 12, Fig. 22), daté d'entre 170 et 180 de notre ère que figure pour la dernière fois dans le monde gréco-romain22 tains savants ont pensé aux Péliades, voir N. Papahatzis, in Παυσανίου Ελλάδος Περιηγήσεις V, p. 291 η. 2 ou aux Moires. Bien que Pausanias parle déjà des φάρ μακα, on ne saurait attribuer la qualité de magiciennes aux Péliades. En re vanche, à notre avis, il ne peut s'agit ici de représentations des travaux domest iques, comme il a été également soutenu, vu le programme iconographique gé néral du coffre; voir aussi L. Lacroix, «Pausanias, le coffre de Kypsélos, et le problème de l'exégèse iconogrpahique», RA, 1988, 2, p. 243-261. 19 Sur les reliefs à trois figures, Meyer, Ibid., p. 38. 20 En fuyant la Colchide, pour tuer son frère Apsyrtos, Médée l'attire égal ement en répandant dans l'air des drogues, voir Apollonios, (Arg., IV, 442-444 θελκτήρια φάρμακ' έπασσεν αίθέρι και nvoifjai). Voir également Macrobe, (Satur nalia, 5, 19, 9 vi noxii odoris) où Médée cueille, tête couverte, les herbes maléf iques, car leur ordeur pourrait l'empoissoner. 21 En ce qui concerne la pièce qui a inspiré le relief à trois figures, deux avis se partagent : pour G. Rodenwaldt, Dos Relief bei den Griechen, 1923, p. 57; et pour H. Götze, RM 53, 1938, p. 247 : il s'agit des Péliades d'Euripide; pour W. Amelung, «Herakles bei den Hesperiden», 80, BWP, 1923, p. 9 : ce sont les Rhizotomes de Sophocle. 22 Sur le petit côté du sarcophage de Prétextât, voir en outre M. Gütschow, «Pélias und seine Töchter», RM 49, 1934, p. 295-304, pi. 20. Pour les représenta tions de l'épisode au Moyen-âge voir K. Weitzmann, «Three Bactrians Silver Ves-
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l'épisode, mais il a orné auparavant des vases23 du Ve siècle avant notre ère et une peinture de Pompéi24. sel with Illustrations from Euripide», Art Bulletin XXV, 1943, p. 289-324 (pour les Péliades p. 307-318, fig. 13, 16). 23 11. Coupe fragmentaire à figures rouges du peintre d'Euaion. Bâle, Ant ikenmuseum. Date : vers 450. K. Schefold, «Die Basler Peliadenschale», AntKunst, 1978, 2, p. 100-106; Meyer, Medeia, p. 10-11 n° I Va 18, pi. 11, 12, 1. Ex térieur, face A : Médée (troisième figure de gauche) de sa main gauche tient la boîte. Quatre autre femmes figurent sur la même face. Face Β : Médée est re présentée au bout de la scène à droite, à côté du chaudron vide, tenant sa boîte; elle attend les trois Péliades, qui accompagnent le vieux Pélias, dont il ne reste qu'une partie de la robe et du bâton. Intérieur, dans le médaillon : à gauche le chaudron vide, devant lequel figure une Péliade tenant l'épée, tournée de profil vers la droite où se trouve Pélias, qui inquiet se tient la tête avec la main droite. Meyer, ibid., p. 35 rapproche cette image de celle du cratère du peintre de Cléophon, voir ci-dessus la note 16 n° 10. Nous ne sommes pas d'accord avec lui car sur la coupe, Pélias est invité par sa fille, l'épée dans la main, à entrer dans le chaudron, alors que sur le cratère, il n'est là que pour regarder le prodige. En re vanche, l'image du médaillon de la coupe de Bâle se rapprocherait plus de celle du cratère en calice à la manière du peintre de Pistoxenos, de Corneto au Musée de Tarquinia 685, daté vers 475/450. Meyer, ibid., p. 9 I Val5, pi. 9, 3 où Alkandra (inscription) tenant l'épée saisit la main de son père et l'entraine vers la gauche. 12. Coupe à figures rouges, de provenance inconnue. Musées du Vatican (ja dis Musée Grégorien) Inv 16538. Date : 450-430. Séchan, Tragédie grecque, p. 468 fig. 136; Meyer, ibid., p. 11-12 n° I Va 19, pi. 12, 2-3. Extérieur, face A : Médée se trouve à gauche de la scène tenant une grande boîte de la main gauche, et trois Péliades se dirigent vers elle. Le première amène le bélier, la seconde tient un grand récipient, la troisième une grosse boîte. L'une entre elles lève la main droite, index levé (en signe de réticence?). Face Β : Tandis qu'au milieu de la scène une Péliade tire de force le vieux Pélias de son siège, une autre attend, v igoureuse, l'épée dans la main gauche; une autre encore à gauche contemple tran quillement la scène, la main droite portée au menton, elle a été identifiée à Méd ée, parce qu'elle ne participe pas à l'action voir Séchan Tragédie grecque, p. 479 n.2-4; mais il s'agit plutôt d'Alceste, voir Meyer, ibid., p. 26. Médée serait donc ab sente de cette scène. Elle l'est aussi du miroir étrusque, musée de Pérouse, (coll. Guardabassi), où Pélias figure à gauche assis, tandis que de deux Péliades qui sont à droite, l'une l'épée dans la main invite son père à venir, l'autre songeuse, est assise et porte sa main au menton, ce qui rapproche ce miroir des reliefs à trois figures. 13. Pyxis d'Erétrie à figures rouges du peintre de Heidelberg 209. Paris, Mus ée du Louvre CA 636. Date : 450-425. Beazley, ARV, 1289 n° 25; E. Simon, «Medeadarstellungen», Gymnasium 60, 1954, p. 208; Meyer, ibid., p. 13 n° I Va21, pi. 13, 2-3. Il faut reconnaître Médée dans la figure qui se tient entre les deux co lonnes à droite de la scène, avec une boîte assez importante dans la main gauche, et un objet arrondi (rituel?) dans la main droite, à côté d'elle probablement un kalathos. Les deux colonnes signalent le palais de Pélias. A l'extrémité gauche de la scène, figure une autre colonne devant laquelle se tient Pélias, courbé par l'âge, appuyé sur son bâton, invité par ses trois filles à entrer dans le chaudron. La Pé liade à droite du chaudron tient une épée, sa sœur derrière tient deux objets ar rondis, tout à fait semblables à ceux tenus par Médée; en arrière plan figure le bél ier. 24 14. Peinture de Pompéi. Domus P. Dentati (?), aujourd'hui disparue. K.
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Sur ce petit côté du sarcophage de Prétextât figure un vieil homme barbu, coiffé d'un bandeau, vu de profil qui avance difficil ement vers la droite, appuyé sur un bâton noueux. Il tend la main droite à une jeune femme qui lui fait face. Entre ces deux person nages, au premier plan, est représenté un gros chaudron, derrière le quel se tient une autre jeune femme, vue de face, la tête tournée vers la gauche et qui fait un geste de sa main droite. Il s'agit de Pélias que ses deux filles invitent à entrer dans le chaudron où bout une solu tion magique destinée à le rajeunir, mais qui causera sa perte. Ce relief est directement lié à l'iconographie attique du Ve siècle avant notre ère, telle que nous l'avons observée sur les vases, en ce qui concerne le vieux Pélias25 et les Péliades. La Péliade qui, tout en regardant son père, lui fait un signe négatif de sa main droite est la réminiscence de la figpre d'Alceste, qui apparaît vers le milieu du Ve siècle avant notre ère sur les vases et qui d'un geste semblable ex prime sa réticence au procédé du rajeunissement26. En revanche, Médée est absente du relief comme sur un certain nombre des vases27. Malgré la rareté de cette scène sur les sarcophages et l'absence de Médée sur l'unique relief présentant Pélias, l'étude du matériel confirme la fidélité des images aux textes. Médée, quand elle est re présentée, apparaît surtout comme une magicienne, en train de dé biter les formules magiques pour faire naître l'illusion (vases n° 2, 5, 10, peinture n° 14). Sans armes, elle ne tient jamais l'épée et ne touche jamais la victime. En revanche, ses attributs, qui sont à la fin du VIe siècle le polos (n° 1), et les herbes (magiques, n° 5, 13, 14), laissent place à la boîte, φωριαμοε, au bâton (n° 6)28; le bonnet phry gien vient s'ajouter à l'habit grec qu'elle portait jusque-là, sans doute sous l'influence du théâtre. Il semblerait que les artistes attiques
Schefold, Die Wände Pompejis, 1957, p. 252 b; Meyer, Medeia, p. 15-16 n° I M26, pi. 15, 2. A gauche de la scène, une Péliade tenant l'épée, apparaît derrière une autre qui conduit le vieux roi vers le chaudron. A droite, une femme tient dans ses bras l'agneau; derrière elle se trouve Médée voilée qui tend la main droite dans laquelle elle tient une branche, certainement d'une plante nécessaire pour la magie. 25 Le personnage de Pélias appuyé sur son bâton se retrouve sur l'amphore n° 1 (note 13) datée de 510, sur le stamnos de Munich, daté de 480-70 (note 14 p. 116117), et sur le cratère n° 10 daté de 440-30 (note 16). 26 Alceste figure sur les coupes n° 11 et 12 (note 23) et sur l'hydrie du peintre de la Villa Giulia (note 11). 27 Voir ci-dessus note 11. 28 Meyer, ibid., p. 27 η. 51 appelle ce bâton pembolon, nous pensons qu'il s'a git du πεμπώβολον mentionné par Homère, Iliade I, 463, qui est un instrument de cuisine, une espèce de broche, beaucoup plus important que le bâton de Médée, dont on se sert également pour les sacrifices voir DA IV, 969a; V, 23a, 739a.
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JASON ET MÉDÉE
aient eu dans cette légende une prédilection pour la figure de Médée, qu'ils se plaisent à représenter comme magicienne aussi bien sur les vases, que dans la littérature; peu de temps après, le même foyer culturel créera la figure de Médée meurtière. * * * Viennent se greffer sur cette légende deux autres rajeunisse ments dont Médée est l'auteur, d'une part celui d'Aison le père de Ja son et d'autre part celui de Jason lui-même. Ces rajeunissements sont à placer avant la version selon laquelle Aison fut tué par Pélias et avant celle qui introduisit l'infidélité de Jason à Corinthe29. Les Nostoi (fr. 6 Kinkel); YArgument à Médée d'Euripide-, Ovide, (Met, 7, 159) mentionent le rajeunissement d'Aison fait à l'aide de diverses drogues cuites dans des chaudrons d'or. Celui de Jason est mentionné par Simonide et Phérécyde (FI 13a Jacoby) et par Lycophron, (Alex., 1315). Par ailleurs, selon Eschyle (fr. 50 et 113b Jaco by), Médée aurait rajeuni en les cuisant les nourries de Dionysos et leurs époux. Ces rajeunissements lui ont valu le tire d'éyavôpa Anth. Palat. 15, 26 (autel de Dosiadas)30. On remarque tout de suite que les auteurs ne donnent aucun dé tail quant au lieu ou à la manière du rajeunissement, et que cet épi sode n'a pas eu un grand écho. Quelques vases31 et un miroir ont été 29 Séchan, Tragédie grecque, p. 467 n. 1-3. 30 Dosiadas poète probablement Cretois, rapporte l'histoire de Jason et Mé dée en empruntant beaucoup d'éléments à Lycophron. 31 1. Lécythe du peintre de Sappho, de la nécropole de Gela. Syracuse Musée 20936. Vers 500. R. Bianchi Bandinella Mon. Ant. 30, 1925, p. 534; Meyer, Medeia, p. 66 n° II Val, pi. 16, 1. Au milieu de la scène se trouve le chaudron, dans l equel il y a une figure humaine apparemment masculine, de petite taille, qui gesti cule. De chaque côté du chaudron figure une femme. Celle de gauche est conser vée entièrement, et avance vers la droite, la main droite tendue et fermée, ce qui donne un argument à Meyer en faveur de Médée dans le rajeunissement de Jason. La femme de droite serait une Péliade. Pourtant la scène a été tantôt inter prétée comme la mort de Pélias, voir R. Bianchi Bandinelli, MonAL 30, 1925, p. 534; tantôt simplement comme une purification par le feu, voir C. H. E. Haspels, Athenian Black-figured Lekythoi, Paris, 1938. Voir également Meyer, Medeia, p. 66. Les deux lécythes qui suivent sont tous deux du peintre d'Haimon, et re présentent presque exactement la même scène. IL Lécythe de Vulci. Leyde, Rijksmuseum. Vers 490. CVA Pays-Bas, Leiden, 2, 1978, pi. 105, NL 199; Meyer, ibid., p. 66, 67 n° II Va2, pi. 16, 2. III. Lécythe de Chiusi. Chiusi, Collection Bonci Casuccini. Vers 490. R. Bianchi Bandinelli, Mon. Ant. 30, 1925, p. 534; Meyer, ibid., p. 67 n° II Va3, pi. 17, 1. De chaque côté du chaudron : une femme assise près du récipient, derrière elle un homme, barbu, tenant un bâton. Le petit homme dans le chaudron est en train d'en sortir avec grande enjambée. Meyer, interprète la scène comme Médée à gauche (tenant un bâton sur le vase n° III), les deux hommes sont identifiés à Aison (à droite), et Pélias (à gauche).
LA MORT DE PÉLIAS
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signalés32 représentant éventuellement la cuisson en vue du rajeu nissement d'un de ces deux personnages, sans pour autant que leur identité soit sûre33; nous exprimons les même réserves quant aux deux métopes du Trésor I de l'Héraion al Foce del Sele n° 32 et 33 34.
32 IV. Miroir étrusque. Paris, Bibliothèque Nationale Inv 1329, (coll. Oppermann). Fin IVe siècle. Meyer, Medeia, p. 67, 68 n° II S4, pi. 17, 2; D. RebuffatEmmanuel, Le miroir étrusque d'après la collection du Cabinet des Médailles, Rome, 1973, p. 553 n° 1329, pi. 47. A gauche Pélias assis sur une chaise; à côté de lui se trouve un jeune homme, Acaste, qui le tient de la main droite par l'épaule. Un grand chaudron se trouve à droite, à l'intérieur duquel figure un autre jeune homme, Jason ou Aison, qui fait un geste pour en sortir. Derrière lui est une femme, portant un diadème sur la tête, identifiée à Médée; à côté d'elle, une Péliade touche de la main l'homme assis. 33 Avant de dégager les points essentiels, on doit remarquer qu'en raison de la présence du feu, de la vivacité du personnage dans le chaudron, qui est en train presque d'en sortir, la scène a souvent été mise en rapport avec une purification par le feu, ce qui la rapproche du cycle de Démophon, le fils cadet de Céléos, roi d'Eleusis. Voir Meyer, ibid., p. 68, 69 η. 79; tandis que d'autres y ont vu Tantale assistant assis à la résurection de Pélops; voir également W. Burkert, Homo Necans, Berlin, New York, 1972, p. 114, sur la signification de la cuisson, symbole d'initiation. Si nous acceptons qu'il s'agit bien du rajeunissement de Jason, on r emarque que cette fois-ci le personnage est dans le chaudron même, le miracle étant déjà produit. Il n'y a plus aucun rapport avec l'image du bélier. Ainsi on ne saurait suivre H. Meyer qui voit un rajeunissement de Jason sur l'hydrie n° 5 et le stamnos de Munich, tous deux œuvres du peintre de Copenhague (voir également notre note 14 sur ces vases). Médée serait présente dans toutes les scènes, assise sur les lécythes de Leyde et de Chiusi, reconnaissable par sa main fermée, par le bâton, par le diadème; mais elle n'est plus caractérisée ni par son φωριαμος ni par son habit oriental. Cela nous inspire quelques doutes, puisque ces vases datent du début du Ve siècle, époque à laquelle l'iconographie de Médée magicienne dans l'épisode de Pélias est déjà établie. Quant aux autres personnages de la scène, la Péliade et les soi-disant Pélias, Acaste, ou Aison, nous inspirent égal ement des doutes. Car il s'agit de spectateurs de la scène. Faut-il à tout prix leur donner un nom? En quoi la famille de Pélias serait-elle concernée par le rajeu nissement de Jason? Les filles de Pélias, qui ont leur place dans le prodige concernant leur père, sont-elles utiles ici? Leur présence, ainsi que celle de Pé lias, implique qu'il n'y a pas de rivalité entre Jason et Pélias et que Jason arrive à Iolcos suffisamment vieux pour avoir besoin de rajeunir... 34 Métopes n° 32 et 33 du trésor I de l'Héraion al Foce del Sele. Musée de Paestum. Milieu du VIe siècle P. Zancani-Montuoro, U. Zanotti-Bianco, Heraion alla Foce del Sele, II, II primo thesauros, Rome, 1954, p. 350-354, pi. XXI, L, LUI 2, CI, CCII; Meyer, Medeia, p. 53-65, pi. 22. Les deux métopes se trouvaient sur le côté nord du trésor I, dans la moitié occidentale de la frise dorique. Sur la mé tope 32, dont n'est conservée que la moitié droite, figure un grand trépied d'où surgit jusqu'aux hanches un personnage, généralement interprété comme masc ulin; sa tête est endommagée (à notre avis il est difficile de distinguer à cause de l'état de conservation du document) : vu de face, il lève le bras gauche. Cette mé tope a été mise en rapport avec celle portant le n° 33, qui est aussi très endommag ée, surtout dans sa partie médiane. Deux femmes figurent, courant vers la droite; celle de droite élève contre sa tête, une phialé. Tout d'abord, ces métopes ont été interprétées par les fouilleurs comme le meurtre de Pélias voir : P. Zanca-
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JASON ET MÉDÉE
Ces «rajeunissements» ne figurent sur aucun sarcophage.
ni-Montuoro, et U. Zanotti-Bianco, ibid., p. 350; ce qui ferait de cette image la plus ancienne représentation du meurtre de Pélias, hypothèse qui a été d'ailleurs retenue pour la restitution des métopes au musée. Le personnage dans le chau dron serait Pélias, dans la partie manquante à gauche on a restitué Médée tenant l'épée et empoignant sa victime. Les femmes de la métope n° 33 seraient les Péliades fuyant après le meurtre. Bien que cette hypothèse soit intéressante, car elle nous procurerait un document rare pour l'époque, nous la tenons pour douteuse; de plus, par référence à l'iconographie de la scène sur les autres documents dont nous venons de traiter, Médée devrait être normalement absente de la scène. De surcroît il est contraire à la légende que Pélias gesticule dans le chaudron, puisq u'il a été dépecé auparavant. M. Schmidt, «Zur Deutung der Dreifuss-Metope Nr. 32 von Foce del Sele», Festschrift F. Brommer, Mayence, 1977, p. 274 souligne que, selon Strabon 6, 252; Pline N.H., III, 70, l'Héraion est une fondation de Jason, à ce moment on s'étonne qu'on ne se soit pas plus inspiré des exploits de Jason pour le décor de ce trésor. G. Pugliese Carratelli, «Minos e Cocalos», Kokalos 2, 1956, p. 89-103 y a vu la mort de Minos, roi de Crète, survenue en Sicile chez le roi Kokalos. Minos à la recherche de Dédale, qui se cachait chez le roi sicilien, fut ébouillanté dans son bain par Kokalos et ses filles qui ne voulaient pas lui livrer leur hôte. E. Simon «Die vier Büsser von Foce del Sele», Jdl 82, 1967, p. 275-281 lie le décor des métopes à la tradition péloponnésienne (Poseidonia-Paestum, Sybaris sont des colonies achéennes, voir J. Bérard, La colonisation de l'Italie méri dionale, 1957, p. 214; 391) et interpète la métope n° 32 comme Pélops cuit par son père Tantale dans un chaudron : à gauche il faudrait donc restituer Tantale. Se lon E. Simon la métope n° 32 fait partie du «cycle» des quatre grands criminels de la mythologie grecque, avec les métopes n° 36 (Sisyphe), 28-29 (Apollon, Arte mis, Tityos, Léto) et 26 (Ixion). Ils seraient représentés non pas dans leur châti ment, mais plutôt pendant leur acte impie. Dans cette hypothèse, la métope n° 33 n'a plus de rapport avec la 32, mais elle constitue un ensemble avec les métopes n° 30, 31 où il s'agit d'enlèvement d'Hélène par Thésée et Peirithoos, voir E. Si mon, ibid., p. 275-296. Meyer interprète la métope n° 32 comme le rajeuniss ement de Jason par référence à l'une des scènes d'une plaquette de terre cuite de Bâle, Antikenmuseum, probablement de Sicile. Plaque de revêtement d'un coffret en bois? Milieu du VIe siècle M. Schmidt, ibid., p. 265-275, pi. 71, 72. Sur cette pe tite bande d'argile (L. 49,5 cm; H. 9cm) figurent cinq scènes séparées entre elles par des colonnes. Dans l'avant-dernière scène à droite est représentée une composition à trois personnages : au milieu probablement un homme dans le chaudron, à gauche une femme tenant dans la main gauche une cruche, qui fait de sa main droite un geste (agressif?) vers l'homme; à droite un autre personnage probablement masculin. Meyer, ibid., p. 83-98 est partisan de la présence du ra jeunis ement de Jason sur les métopes du Trésor I de l'Héraion. Cet auteur lie la métope n° 32 avec la métope n° 26 où figure un homme aux prises avec un énorme serpent, il y voit la mort de Jason tué par le dragon (n° 26) et son rajeu nissement par Médée (n° 32). Schmidt émet aussi l'hypothèse du rajeunissement de Jason, dans ce cas la cruche de Médée contiendrait les drogues magiques. Mais on se demande qui peut être l'homme de droite et le rôle qu'il joue; par ail leurs la cruche ne nous semble pas être un argument en faveur de Médée. Enfin, les quatre autres scènes de la plaquette représentent des combats et probable ment l'apothéose d'Héraklès, ce qui nous éloigne de notre sujet.
CHAPITRE XVI
MÉDÉE SE VENGE DE LA FAMILLE ROYALE
Après les épisodes en Colchide, et ceux du retour à Iolcos, Corinthe est le troisième théâtre des aventures des personnages qui nous intéressent. Jason et Médée, s'établissent à Corinthe où ils vivent heureux pendant dix ans. La tragédie attique nous rapporte la tournure dramatique de leur vie; mais une autre version, antérieure semble-t-il et rapportée par Pausanias II, 3, 10-11, donnait d'autres raisons de leur arrivée à Corinthe, que nous examinerons dans le chapitre suivant. Jason par vanité, ou par amour pour la fille du roi de Corinthe Créon, veut contracter un nouveau mariage; Médée se voyant délaissée en pays étranger, décide de se venger d'abord de sa rivale. La plus ancienne mention développée de cette vengeance se trouve dans la Médée d'Euripide, créée en 431; l'hypothèse suppo santque Euripide s'est inspiré de Neophron ne tient plus guère1. Malgré les nombreuses reprises de cette légende, l'influence d'Euri pide semble prédominer2. Les événements de Corinthe donnent l'o ccasion de décrire pour la première fois le côté passionné du carac tèrede Médée. Il existe deux différentes versions sur le moyen qu'u-
1 Selon l'argument de Médée, Euripide a repris une pièce de Neophron de Sicyone. Nous connaissons peu de chose sur Neophron; pendant longtemps on a pensé que son activité se situait probablement au milieu du Ve siècle avant notre ère. Pour les fragments de sa Médée, voir L. Meridier, in Médée, Paris, 1976, p. 110-114. Mais la publication de nouveaux fragments de papyrus remet tout en question, voir G. Xanthakis-Karamanos, Studies in Fourth-Century Tragedy, Athènes, 1980, p. 173-177; il semble que l'importance du chœur ait diminué dans cette pièce, ce qui pourrait la situer au début du IVe siècle. Neophron serait alors l'imitateur d'Euripide, ce que Séchan, «La légende de Médée», REG XL, 1927, p. 251-262 avait déjà soupçonné. Par ailleurs, dans la pièce de Neophron, Médée dialogue avec la nourrice et le chœur; Jason et Egée semblent y avoir un rôle plus important. 2 On sait que Karkinos, Dicaiogénès et beaucoup d'autres avaient écrit des pièces portant le même titre; voir Séchan, Tragédie grecque, p. 397 n. 1. Pour les différentes Médée en latin, voir Croisille, Poésie et art, p. 42-43, et A. Arcellaschi, Médée dans le théâtre latin d'Ennius à Sénèque, Rome, 1990. Selon la scholie à Eur ipide, Médée, 273, Parmeniscos et Créophylos connaissaient aussi l'épisode des cadeaux empoisonnés.
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tilise Médée pour se venger : celle des cadeaux empoisonnés, et celle de l'incendie qui embrase le palais et ses habitants. Selon Euripide, Médée, 372-85, la magicienne décide d'utiliser la voie directe, dans laquelle elle excelle : le poison. Après avoir obtenu de Créon, qui veut la chasser du pays, un sursis et amadoué Jason, elle envoie à sa rivale3, nouvelle mariée, par l'intermédiaire de ses enfants, accompagnés de Jason et de leur pédagogue, une tunique fine et un diadème en or (v. 786 λεπτόν τε πέπλον καί πλόκον χρυσήλατον) présents magnifiques qu'elle tient de son grand père le Soleil (v. 955). Ces cadeaux, traités auparavant de façon spéciale, se trans forment en un feu dévorant la princesse dès que fascinée par leur beauté elle les porte. Euripide {Médée, 1160-1220), décrit toute l'hor reur de sa mort et de celle de Créon accouru à son aide. La version de la mort advenue par l'intermédiaire des vêtements a été suivie par le Pseudo-Apollodore (I, IX, 28), puis par Sénèque, (Medea, 570, 879-891) qui fait allusion à la remise des cadeaux sans décrire la scène, enfin par Valerius Flaccus (Arg., Vili, 233-236)4 et par Dracontius, (Medea), 484-493 qui décrit tous les ingrédients mag iques utilisés pour l'empoisonnement des objets. Pausanias (II, 3, 6) a vu dans l'Agora de Corinthe, une fontaine du nom de Glaucé, ou la malheureuse se serait jetée pour que l'eau la délivre des effets des poisons de Médée. Il existe une version parallèle, celle de Diodore (IV, 54) 5 selon la quelle Médée met le feu elle-même au palais, avec une petite racine découverte par sa sœur Circé, faisant ainsi mourir le roi Créon et sa fille. Seul Jason arrive à se sauver. Ovide, (Héroïdes, XII, 180)6, Hygin, (Fables, 25); et Apulée, (Met. i, 10) développent ce thème. C'est la première version, celle des cadeaux empoisonés, qui a inspiré les artistes et tout particulièrement les sculpteurs des sarco phages. La scène de la remise des cadeaux empoisonnés à Creuse est représentée sur huit cuves de sarcophages (Rome MN Inv 75248,
3 Euripide ne donne pas de nom à la rivale de Médée, qu'il appelle tout à tour Κρέοντος παΐδα 21, 700, 783; κόρη 1234; νεογάμον κόρη; νύμφην 888; Δέσποινα 1144. Pseudo-Apollodore Ι, IX, 28 et Diodore IV, 54 la nomment Γλαυκή Claucé. Dans la littérature latine elle est nommée Creuse (voir Sénèque, Medea, 405, 508, 817, 921; Ovide, Héroïdes XII, 53), nom que nous avons utilisé pour les reliefs des sarcophages. 4 Valerius Flaccus (Argonautiques , VIII, 233-236) précise que le péplos et la couronne avaient été offerts à Médée par Aphrodite lors de son mariage avec Jason. 5 Diodore IV, 54 rapporte également la version des cadeaux. 6 Ovide avait écrit aussi une pièce intitulée Médée, aujourd'hui perdue, qui devait se rapprocher de la pièce d'Euripide, selon ce qu'on peut déduire des Méta morphoses, VII, 391-397. Voir : A. Arcellaschi, Médée dans le théâtre latin d'Ennius à Sénèque, Rome, 1990, p. 247-266.
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Bâle, Berlin, Mantoue, Louvre Ma283, Ancóne, Rome MN Inv 222, Naples (n° 8, 24, 2, 3, 4, 20, 21, 22; fig. 10, 40, 41, 2, 5, 6, 31, 32, 35), où elle est toujours la première scène à gauche. Elle figure aussi sur quelques fragments de cuves (n° 15, 10, 17; fig. 26, 14, 28), sur le cou vercle du Vatican (n° 9, fig. 13), où elle a la deuxième place à gauche, et sur le fragment d'Ostie (n° 23a, fig. 38). Cette scène comporte en général six à sept personnages, avec deux exceptions : le sarcophage de Naples (n° 22) qui en présente cinq (la nourrice étant absente), et l'exemplaire de Bâle (n° 24) qui en présente le plus grand nombre - onze -. Les personnages sont en général partagés entre le monde masculin et le monde féminin, à proportion de 2 pour 2 ou de 3 pour 2 (Jason, le jeune homme aux pavots, la nourrice, une jeune femme, Creuse). La seule exception reste le sarcophage de Bâle où il n'y a qu'un homme et où toutes les autres figures sont féminines. La composition est nette et calme. Trois ou quatre personnages, debout dans des attitudes posées, se détachant bien du fond, sont placés les uns à côté des autres à gauche de la scène, tandis qu'une figure assise de profil vers la gauche, ferme le côté droit, (Jason à gauche accompagne ses enfants qui présentent les cadeaux à Creuse assise à droite), au centre de la scène sont souvent représentés une vieille nourrice et un jeune homme tenant des pavots. Cependant l'exemplaire de Bâle (n° 24) selon la mode au début de la période sévérienne dont date ce sarcophage (entre 200 et 210), présente une composition plus touffue, plus dense due au grand nombre des per sonnages. La scène est constituée ainsi, à gauche, de lignes verticales et pa rallèles, et d'une seule horizontale à droite7. Un jeu de quatre lignes obliques existe aussi, créé par le bras droit de Jason (deux obliques formant un angle), le bras droit du jeune homme aux pavots, et le bras droit de Creuse. On observe que ces lignes se placent dans la moitié supérieure du panneau : trois se dirigent de gauche à droite, celle du milieu peut être plus ou moins centrée, en fonction de la place qu'occupe le jeune homme aux pavots dans la scène8. Deux lignes obliques, en angle donc, commencent le panneau en haut et une autre oblique le ferme à droite9. Les deux bambins du premier 7 Cette ligne verticale passe au niveau des genoux de Creuse; elle peut être prolongée sur le péplos tenu verticalement par l'enfant de droite et sur les bras tendus, tenant la couronne, de l'enfant de gauche. 8 Le jeune homme aux pavots est généralement presque au centre de la scène, sauf dans le cas de Berlin (n° 2) où il est à droite; il est absent du panneau de Bâle (n° 24). 9 Cette composition se vérifie sur tous les sarcophages, même sur le cou vercle du Vatican (n° 9), malgré la longueur inhabituelle de la scène qui offre la présence d'un personnage supplémentaire. En revanche elle n'existe pas sur le
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plan constituent des verticales et servent aussi à créer un effet max imum de profondeur; le même effet est accentué dans le cas de l'exemplaire de Bâle (n° 24) par la présence des multiples têtes fémi nines, aux coiffures différenciées, qui se dégagent du fond, selon le style de la période de création de ce relief. Le παραπέτασμα qui orne souvent le mur du fond de la scène, sur sept exemplaires (ceux de Mantoue, Ancóne, le couvercle et le fra gment du Vatican, Rome MN Inv 75248, Bâle, Naples et sur le fra gment du marché des antiquités suisse (n° 3, 20, 15, 9, 8, 24, 22, 17), est suspendu à divers crochets ou aux colonnes. Il offre ainsi à la composition un jeu d'ondes horizontales qui sert à masquer le vide entre les personnages comme, par exemple, sur le sarcophage de Mantoue, et sur le couvercle du Vatican (n° 3, 9); dans le cas du sa rcophage «surpeuplé» de Bâle, il est à peine visible aux angles supé rieurs de la scène; enfin, sur l'exemplaire de Naples n° 22, il encadre juste le personnage central du jeune homme aux pavots. Les sarco phages du cycle de Médée ne sont pas les seuls qui disposent d'un παραπέτασμα, car cet élément existe sur toutes sortes de sarco phages10, des IIe et IIIe siècles qui traitent de sujets mythologiques ou non. Cette pièce d'étoffe sert évidemment à encadrer la scène pour mieux présenter les personnages11. S'il est probable que les reliefs des sarcophages sont souvent chargés de symboles12, nous ne devons pas pour autant oublier que ce type d'étoffe servait aussi sur la scène des théâtres antiques - d'où son nom13 - ni que l'épisode tel qu'il f igure est inspiré des pièces du théâtre. sarcophage de Bâle d'où Jason est absent, et où un jeune homme se trouve à gauche, tout au bout du panneau; le jeu des lignes y est tout à fait différent. 10 Rien qu'en feuilletant l'ouvrage de Koch - Sichtermann, RS, on voit presque partout de ces παραπετάσματα. Voici quelques exemples parmi ceux figu rés sur des sarcophages à sujets mythologiques : du cycle d'Adonis (RS n° 141 à Paris=ASÄ, II, 1 n° 4), du cycle d'Ares (RS n° 150 à Grottaferrata=ASÄ, III, 2, n° 195), du cycle d'Hippolyte, (RS, n° 170 à Pisa, Camposanto=ASÄ, II, 2, n° 164), du cycle de Marsyas (RS, n° 177, Rome, Palais Barberini=ASjR, III, 2, n° 196) etc. Pour les sarcophages à sujets profanes, voir par ex. une chasse au lion (RS, n° 81 à Barcelone=ASÄ, I, 2, n° 8), une scène de mariage (RS, n° 102 à Rome MN Inv 40799, et n° 105 au Vatican), etc. 11 On peut remarquer cela sur quelques panneaux ou couvercles de sarco phages, où l'on aperçoit deux personnages (ou Erotes) tenant une étoffe déployée devant laquelle pose un autre personnage, en entier ou simplement en buste. Ains i,par ex., le couvercle de Rome, RS, n° 248, ou encore le sarcophage du Vatican, RS, n° 255. Cette mise en scène se retrouve sur notre sarcophage de Naples (n° 22, fig. 35). 12 Selon Schmidt, Medeasarkophag, p. 18 : il s'agit de l'enveloppe terrestre dont l'âme doit se libérer; dans le même sens, M. Lameere, «Un symbole pytha goricien dans l'art funéraire de Rome», BCH 63, 1939, p. 43-85. 13 M. Bieber, The History of Greek and Roman Theater2, Londres, 1961, p. 124 n. 56, fig. 324.
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Parfois un autre jeu d'ondes est créé par d'épaisses guirlandes de feuilles de laurier qui décorent le fond, accrochées à des colonnes, comme par exemple sur les exemplaires de Berlin, Mantoue et Rome MN Inv 222 (n° 2, 3, 21). Sur le sarcophage de Bâle (n° 24), l'homme à gauche et la dernière femme à droite tiennent chacun une petite guirlande. Cette sorte de guirlande se retrouve sur de nombreux monuments funéraires14, elle a été identifiée comme une guirlande de roses15. En dehors de son éventuelle valeur symbol ique16, cet objet sur les sarcophages rappelle les dons entre amants et les guirlandes de fête que les époux échangeaient lors des cérémon ies du mariage17 et peut nous aider à identifier les défunts. Sur ce même fond on peut avoir également des éléments verti caux, les colonnes qui figurent sur cinq exemplaires (ceux de Berlin, Paris, Mantoue, Rome MN Inv 222 et 75248 n° 2, 4, 3, 8)18. On y trouve aussi deux autres objets : la lampe, qui figure sur le sarco phage de Bâle, bien visible placée sur un haut pilier, au-dessus de la tête de Creuse. M. Schmidt la met en rapport avec les cultes à myst ères. Pourtant, on peut aussi rapprocher cette lampe des croyances et des coutumes funéraires romaines19 où elle a, ainsi que la lumière qu'elle procure, une grande importance. Il s'agit certes d'une scène mythologique, mais également d'un décor de sarcophage; nous ne pouvons donc pas nier que nous nous trouvons dans un contexte fu néraire. Comme nous l'avons déjà vu avec l'exemple de la guirlande, il est des cas où les pratiques de la vie courante viennent enrichir, ré nover - actualiser - le contexte du mythe, en donnant une analogie à la vie terrestre. La lyre, qui se situe sur le même relief au second plan, entre Creuse et l'enfant portant la couronne, figure aussi sur de
14 Pour la guirlande sur les sarcophages, voir H. Sichtermann, Späte Endymion-Sarkophage, Baden-Baden, 1966, p. 30-65. Pour la guirlande sur les port raits de momies, K. Parlasca, Mumienporträts, p. 143-145, pi. F, H. 15 Sur l'utilisation funéraire des roses voir F. Cumont, Lux Perpetua, Paris, 1949, p. 45. 16 On peut évidemment penser à la valeur symbolique de la guirlande, Schmidt, op. cit., p. 19-20 la met aussi en rapport avec le récit des Métamorphoses d'Apulée et des cultes à mystères. Couronne d'immortalité ou couronne des justes, espoir de vie ou d'immortalité. Schmidt, ibid., et Ph. Derchain, «La cou ronne de la justification», Chronique d'Egypte 30, 1955, p. 225-287. 17 Voir R. Turcan, «Les guirlandes dans l'antiquité classique», JAC 14, 1971, p. 103; et ID, «Note sur les sarcophages de Prométhée», Latomus 27, 3, 1968, p. 631. 18 Ces colonnes peuvent être au nombre de trois (Berlin, Rome MN 75248), ou deux (Paris, Mantoue); avoir un chapiteau corinthien (Mantoue et peut-être Rome MN Inv 222, où on ne voit qu'une colonne) ou dorique. Elles sont des sym boles du palais pour Baratte, Catalogue, p. 92 n° 34. 19 Sur l'utilisation et le symbolisme funéraire de la lampe, voir F. Cumont, Lux Perpetua, Paris, 1949, p. 26, 48-51.
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nombreux sarcophages, sarcophages des Muses20 ou à sujets pro fanes21. Elle caractérise peut-être la défunte comme une femme cultivée22. La stèle hermaïque, autre élément vertical qui figure sur le fragment du Vatican (n° 15), est un objet insolite dans une scène qui se passe dans un lieu fermé, un palais, puisqu'on sait que les stèles hermaïques étaient principalement des éléments d'extérieur23. Les surfaces sont tantôt planes, nues, quand il s'agit des parties dénudées des corps, tantôt travaillées dans tous les sens, selon le jeu des draperies. Le rythme est alterné sur le haut des panneaux un corps nu, un corps drapé24; sur le bas des panneaux, nous n'avons que des draperies : seule exception, au premier plan, les corps nus des deux garçonnets. La lumière glisse sur les parties nues, alors qu'elle s'accroche sur les draperies. C'est en partie pour cela que la cuve de Bâle (n° 24) nous donne l'impression d'une composition plus touffue, car les seules parties des corps nus se situent à gauche, tandis que le reste des personnages sont des figures drapées, d'où un jeu d'ombre et de lumière plus important. Sauf les enfants, les figures sont développées dans l'espace sur toute la hauteur des panneaux (ce qui est valable pour toutes les scènes de ces sarcophages), quelquefois malgré leur attitude25. Les figures sont pratiquement sans mouvement, elles donnent l'impres sion de poser. Le seul personnage qui a une attitude un peu plus an imée est la nourrice qui, étant presque toujours à côté de Creuse26,
20 Pour la lyre sur les sarcophages des Muses, M. Wegner, Die Musensark ophage,(ASR, V, 3), Berlin, 1966, passim. 21 Marrou, Μουσικός άνήρ, ρ. 181-196, 209-230. 22 Selon Marrou, op. cit., p. 154 η. 2, la lyre est toujours aux mains d'un homme. 23 A moins que cela ne soit pas une stèle hermaïque mais un portrait. Par ail leurs, Croisille, Poésie et art, p. 54 n. 205 donne par erreur le n° 196 de ASR notre n° 3 Mantoue - comme ayant un hermès au fond de la scène. Pourtant on sait aussi qu'à l'époque romaine ces stèles servaient dans les demeures, à retenir les étoffes décoratives, comme on le voit sur certains reliefs. Mais ce n'est pas le cas ici, puisque la tête barbue ne soutient pas le παραπέτασμα. Sur l'exemplaire de Rome MN Inv 75248 (n° 8), on aperçoit un bout de παραπέτασμα qui dépasse audessus du chapiteau de la dernière colonne à droite. 24 Le rythme est cassé sur le couvercle du Vatican (n° 9), où trois torses nus (deux vus de face, un vu de dos) se succèdent, suivis de deux torses drapés. 25 Ainsi, la tête de Creuse assise arrive au même niveau que celles des person nagesdebout sur les exemplaires de Berlin, Paris, Rome MN Inv 75248 (n° 2, 4, 8). Pourtant la taille de cette même Creuse est correctement proportionnée sur les autres sarcophages où elle est conservée entière, par exemple le couvercle du Vatican, Mantoue, le fragment du Vatican, (n° 9, 3, 15), mais surtout l'exemplaire de Bâle (n° 24). 26 La nourrice se trouve toujours à côté de Creuse, sauf sur l'exemplaire de Berlin (n° 2) où elle se trouve à côté de Jason.
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semble lui parler plus ou moins vivement, en gesticulant sur les exemplaires de Mantoue, Ancóne, et sur le couvercle du Vatican (n° 3, 20, 9), lui touchant le bras (par exemple sur le sarcophage de Rome MN Inv 222 n° 21), en essayant de la disposer favorablement envers les enfants de Médée. Cependant le sarcophage de Bâle dé gage un peu plus de vie, à cause du mouvement vers la gauche des têtes des femmes qui sont à côté de Creuse et de l'expression inter rogative qu'on lit sur leurs visages; c'est aussi que le personnage de Creuse ne se tient pas immobile et calme sur son siège, mais se tourne vers l'arrière pour communiquer avec la femme qui se penche vers elle. Ce sont, comme nous l'avons déjà constaté, les ca ractéristiques du style de l'époque (entre 200 et 210). L'homme jeune qui figure très souvent à gauche au début des panneaux et de la scène a été identifié comme Jason. Il est présent sur tous les exemplaires entiers sauf sur celui de Bâle27. Il est tou jours habillé de la même façon et représenté dans la même attitude nonchalante. Tourné vers la droite, il s'appuie de son bras gauche sur un petit pilier; celui-ci est presque masqué par le manteau de Ja son28 sur les sarcophages de Berlin, Mantoue et Ancóne (n° 2, 3, 20), ou alors par l'un des enfants qui se trouve déplacé vers la gauche comme sur les sarcophages de Paris, Rome MN Inv 75248 et 222 et Naples (n° 5, 1, 9, 10). De la main droite Jason se tient la hanche (cinq exemplaires Berlin, Mantoue, Rome MN Inv 75248 et 222, Ancône n° 2, 3, 8, 21, 20). Le couvercle du Vatican (n° 9) fait exception, puisque Jason tient une lance de la main droite, et qu'à ses pieds, à l'arrière-plan, se trouve son bouclier29. La figure de Jason nous r amène vers des créations du IVe siècle avant notre ère. Le corps n'o béit pas à un axe rigide, mais à partir des hanches il bascule sur un côté; la position du bras droit sert également à rendre la figure tr idimension el e. Or ce sont là les principes des créations de Praxitèle et de Lysippe. Ces sarcophages sont sculptés, au moment même où l'on copie abondamment les œuvres des maîtres du IVe siècle; il est donc normal que les figures des sarcophages reprennent les mêmes rythmes de pondération. Sur trois exemplaires, Paris, Mantoue et Rome MN Inv 75248 (n° 4, 3, 8), Jason est placé dans un espace en-
27 Comme on le verra plus loin, Jason est absent de la cuve de Bâle; par contre il est omniprésent sur le couvercle du même sarcophage. Nous avons là une séparation nette entre les cycles des deux personnages. 28 Le Jason de cette scène est toujours drapé dans un manteau qui laisse son torse nu. Croisille, Poésie et art, p. 54 n. 205 affirme que Jason est nu sur le cou vercle du Vatican (n° 9), ce qui est inexact. 29 Ce bouclier appartient certainement au Jason de la scène suivante, parce que le Jason de la scène du mariage n'a généralement pas de bouclier.
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cadré par deux colonnes à chapiteaux doriques ou corinthiens. Ces trois sarcophages étant datés du milieu du IIe siècle, entre 150 et 160, on pourrait y voir l'influence du type des sarcophages à colonnes, produits à cette époque dans les ateliers de Rome30. Creuse, la dernière figure de la scène à droite, est assise sur un siège à haut dossier, dont souvent les pieds sont ouvragés et qui peut être posé sur une estrade, (voir les exemplaires de Berlin et de Paris n° 2, 4). Sur plusieurs exemplaires (Paris, Mantoue, fragment de cuve et couvercle du Vatican, Ancóne, Rome MN Inv 75248 et Bâle n° 4, 3, 15, 9, 20, 8, 24), Creuse pose ses pieds sur un petit tabouret. Le sarcophage de Bâle présente le siège le plus luxueux, puisque même le tabouret y est décoré de deux masques tragiques de théâtre31. Creuse est habillée d'un long chiton, elle porte très souvent un long voile sur la tête, le voile de la mariée32, quelquefois elle a des bracelets aux poignets. Elle est calmement assise, la main gauche appuyée sur le siège, l'autre posée sur le genou. Cette figure est assez froide, inexpressive. Sur trois exemplaires (Bâle, Ancóne et cou vercle du Vatican n° 24, 20, 9) on la voit faire un geste de la main droite vers les enfants, et cela est accentué sur la cuve de Bâle qui, comme on l'a déjà noté, comporte les figures les plus expressives. Ce personnage est évidemment d'une très grande importance pour cette scène, non seulement à cause du récit légendaire, mais aussi en rai son de sa place matérielle dans la composition; on remarque d'ail leurs que la majorité des comparses est tournée vers elle. En regar dantcette femme voilée, on songe aux personnages très semblables que l'on trouve sur les stèles funéraires classiques. La figure de la femme assise existe aussi sur d'autres sarco phages à sujet mythologique des ateliers de Rome; on pense à ceux du cycle de Bellérophon33, où elle représente Sthénébée, dans la scène d'adieu de Bellérophon à ses hôtes Proetos et Sthénébée34, et aux sarcophages du cycle d'Hippolyte35, où la femme drapée et as30 Pour les colonnes sur nos sarcophages, voir notre note 18. Sur les sarco phages à colonnes, voir W. Altmann, Architektur und Ornamentik der antike Sar kophage, Berlin, 1902, p. 52-56; P. Kranz, «Zu den Anfängen der stadtrömischen Säulensarkophage», RM 84, 1977, p. 349-380; RS, p. 76-80. 31 Voir Schmidt, Medeasarkophag, p. 23, 27. pour qui le masque n'est pas ici d'un simple motif décoratif. 32 Creuse porte ce voile sur tous les exemplaires, excepté le fragment du Vati can (n° 15). Ce voile fait plutôt partie du vêtement de la femme romaine, repris par les personnages mythologiques; on voit Phèdre et Sthénébée habillées de ce même voile sur les sarcophages illustrant leurs légendes. 33 Sur les sarcophages du cycle de Bellérophon, RS, p. 143, fig. 153, 154. 34 Pour la figure de la femme assise, prenons par ex. le n° 153 du cycle de Bellérophon, cuve de la Villa Doria Pamphili à Rome, Sthénébée est à droite du panneau. 35 Pour les sarcophages du cycle d'Hippolyte, RS., p. 150-153, fig. 170-172.
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sise est Phèdre36. Il est à noter que les trois femmes Creuse, Sthénébée et Phèdre, sont des héroïnes dramatiques dont les amours se te rminent très mal, et que l'aventure de chacune a fait l'objet d'une tra gédie d'Euripide37. Entre les deux figures (Jason, Creuse) qui se placent chacune à une extrémité de la scène, d'autres viennent s'intercaler, c'est à dire le jeune homme aux pavots et la nourrice qui forment «un couple» presque toujours au milieu de la scène. Ils sont représentés plus ou moins éloignés l'un de l'autre, mais de façon quasi «standardisée». Sur l'exemplaire de Berlin, la nourrice se trouve à gauche, à côté de Jason, et le jeune homme à droite près de Creuse. Cette disposition est rare, car sur tous les autres exemplaires c'est le contraire : la nourrice est à droite, près de Creuse en train de lui parler. C'est elle qui assure la communication avec Creuse; en lui parlant et en gesti culant sur le sarcophage de Mantoue et le couvercle du Vatican (n° 3, 9); Croisille38 interprète cela comme un signe de stupeur. Nous pensons plutôt que la nourrice essaie d'influencer favorablement Creuse à l'égard des enfants. Sur d'autres sarcophages, le fait que de sa main droite elle touche le bras de Creuse exprime la communicat ion (exemplaires de Rome MN Inv 222 et 75248 n° 21, 8). Ce n'est que sur le sarcophage du Louvre (n° 4), qu'elle tient dans la main droite un objet rond. Elle est habillée d'une tunique qui lui laisse souvent l'épaule droite découverte; et porte un fichu court ou une es pèce de bonnet sur la tête. Sur son visage ridé on lit son âge avanc é39. Le jeune homme aux pavots qui se trouve la plupart du temps à gauche (sauf sur le sarcophage de Berlin) a aussi un type iconogra phique immuable. Sur tous les exemplaires, il est vu de trois quarts, tourné vers la droite; les bras croisés devant lui, il tient quelques branches de pavots dans la main gauche; il a un bandeau sur la tête. Sur quatre exemplaires, il tient en plus une torche dans la main
36 Sur le sarcophage d'Hippolyte de Pise, Camposanto, voir RS, n° 170 = ASR, III, 2 n° 164, Phèdre est à gauche du panneau. 37 Creuse dans Médée, trad, par L. Meridier, Paris, 1925; Phèdre dans Hippolyte, traduite par le même auteur en 1927; et Sthénébée dans une tragédie perdue portant le même nom, A. Nauck, Tragicorum graecorum fragmenta?, Hildesheim, 1964, n° 661-672. 38 Croisille, Poésie et art, p. 54 n. 203. Si l'on admet que ce geste est un signe de stupeur, cela signifie que la nourrice connaît déjà le pouvoir magique et fu neste de ces présents. 39 Le personnage de la nourrice existe aussi sur les sarcophages du cycle d'Hippolyte, voir ci-dessus notes 34, 35, ainsi que Ch. Picard, «Le motif de Phèdre amoureuse et de la nourrice : peinture et sculpture», A4, XLVI, 1955, p. 72-74.
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droite (les cuves de Rome MN Inv 75248 et 222, le fragment et le couvercle du Vatican n° 8, 21, 15, 9). Il a toujours une attitude calme, la tête légèrement baissée. Sur le fragment d'Ostie (n° 23a, fig. 38) ses bras sont croisés de manière plus nette. Il a d'abord été inter prété par C. Robert40 comme un personnage du cortège nuptial (Brautführer) ou comme le dieu Hymen ou comme Paranymphus41, puisqu'il tient quelquefois une torche abaissée dans la main et que l'on connaît la fonction des torches dans les cérémonies du mar iage42. On n'oubliera pas non plus que, dans la main gauche, il tient toujours des pavots dispensateurs de sommeil : pavots symboles du sommeil et par extension, de la mort43. Nous pensons que ce person nage toujours représenté dans cette scène n'est pas un simple figu rant, mais une figure chargée de symbolisme. Il ne sert pas à l'illu stration du texte ancien, mais il appartient à la fois à la vie courante (torche/mariage) et au monde des symboles, avec le symbolisme de la mort que nous venons d'évoquer. Il y a quelques cas où la composition se trouve enrichie par la présence supplémentaire d'un personnage féminin. Cela se produit sur quatre sarcophages : Ancóne, Rome MN Inv 222, fragment du Vatican et Bale (n° 20, 21, 15, 24). Sur les deux premiers (n° 20, 21), la femme semble jeune; coiffée d'un chignon, elle est placée derrière Creuse. Sur le fragment du Vatican, elle se trouve aussi derrière Creuse, mais à gauche, entre cette dernière et le jeune homme aux pavots. Elle a été considérée comme une femme de l'entourage de Creuse. Cette figure, comme nous l'avons déjà constaté44, est une création caractéristique des années 170/80, ainsi qu'en témoignent sa mise, sa coiffure, et son attitude. Sur le sarcophage de Bâle posté rieur d'environ trente ans, il ne s'agit plus d'une seule, mais de plu sieurs femmes qui regardent le jeune homme à gauche, ou qui parlent à Creuse; ce qui exprime davantage l'ambiance de la 40 Pour le jeune homme aux pavots, voir ASR, II, p. 205-217. 41 Croisille, Poésie et art, p. 54 n. 204, l'identifie à Paranymphus. 42 Mais la torche abaissée est également tenue par Eros, ce qui symboliserait l'extinction de la vie, voir Cumont, Symbolisme, p. 409 n. 3 et R. Stuveras, Le put todans l'art romain, Bruxelles, 1969, p. 33-40. En revanche Baratte, Catalogue, p. 92, n° 34 l'identifie comme Eros accablé par le destin tragique qui menace Creuse. 43 Cumont, ibid., p. 397. Les qualités soporifiques et antalgiques des pavots (papaver somniferum) étaient connues depuis longtemps. D'ailleurs si les pavots figurent dans l'art funéraire romain où ils sont chargés d'un symbolisme, ils f igurent aussi antérieurement dans le décor architectural des sanctuaires, par exemple à l'Asklépieion d'Epidaure, où leurs qualités médicinales sont peut-être en rapport avec la fonction du bâtiment qu'ils décorent voir E. Mantzoulidou, «H φυτική διακόσμηση των κλασσικών χρόνων», ΑΑΑ, 1981, 2, ρ. 208-229. 44 Pour la figure féminine supplémentaire, ASR, II, p. 205-217. Voir égal ement dans le chapitre II sur la chronologie p. 30.
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chambre princière et donne vie à la scène. A travers cette figure f éminine on peut expliquer, nous semble-t-il, le fragment de sarco phage n° 17 fig. 29 que nous datons de 180 environ. Il présente, en effet, à son extrémité gauche, une jeune femme dans une mise gra cieuse, chiton laissant l'épaule droite et une partie du buste dé couvertes, coiffure frisée avec chignon serré dans un foulard. Elle est accompagnée à droite par le jeune homme aux pavots45. Schmidt l'identifie à Médée accompagnant ses enfants chez Creuse; par le type de son vêtement, elle se rapprocherait d'Aphrodite46. Toutefois ce genre de vêtement est porté également par les défuntes47. Avant d'admettre que cette femme pourrait être Médée, nous devons nous rappeler qu'aucun texte ne mentionne Médée accompagnant ses en fants au palais lors de la remise des cadeaux. Au contraire, elle at tend chez elle le résultat de ses funestes présents48. Comme nous l' avons vu, la figure féminine sur les sarcophages n'a pas de place fixe : elle est deux fois derrière Creuse, une autre fois entre Creuse et le jeune homme, et pourrait aussi se trouver au début du panneau. Elle représente plutôt, dans ce cas, l'une des femmes qui entourent Creuse. Nous serions donc plutôt d'avis de rapprocher cette jeune femme du personnage féminin qui figure déjà sur quatre sarco phages et dont l'habit et la mise sont très proches de ceux de la «Mé dée» de notre n° 17. Au premier plan de la scène, et presque au centre, sont représent és les deux enfants de Médée, Phérès et Merméros, apportant à Creuse les cadeaux empoisonnés offerts par leur mère. Ce sont deux bambins sans aucun attribut mythologique ou symbolique, qui re ssemblent pourtant à des petits Erotes joufflus49. Ils sont habillés tous les deux d'un petit manteau léger qui laisse leur corps nu en grande partie. Le premier à gauche est toujours vu de profil, et tient sur un plateau - souvent ouvragé - la couronne; le second est tou jours vu de face et tient, à deux mains, plié dans son manteau, ce qui doit être le péplos. Cette régie qui se retrouve sur tous les sarco phages, ne correspond pas à la cuve de Bâle (n° 24), où les choses sont inversées : là, les enfants sont vus tous deux de profil et la cou45 Les pavots du fragment n° 17 ressemblent beaucoup à ceux du panneau du Louvre n° 4; ils sont traités de façon naturaliste, tandis que sur les autres exemp laires, ils sont stylisés. 46 Pour le rapprochement de cette femme avec Aphrodite, voir Schmidt, Medeasarkophag, p. 25-26. 47 Voir : P. Hommel, «Giebel und Himmel», Ist. Mitt., 1957, 7, p. 25 η. 65. 48 L'absence de Médée ici est normale puisque sa présence irriterait Creuse. Dans Euripide, Médée, v. 1144-49, la princesse fait un geste d'aversion rien qu'en voyant les enfants de Médée. 49 Pour l'Eros romain, R. Stuveras, Le putto dans l'art romain, Bruxelles, 1969.
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rönne, une grosse guirlande, est tenue par l'enfant de droite, celui qui est le plus près de Creuse. Sur le sarcophage de Berlin (n° 2), on aperçoit des fleurs dans le creux du péplos tenu par l'enfant. Ev idemment dans ce cas, la couronne et le péplos perdent de leur signi fication première d'objets magiques50. Peut-être ce petit changement iconographique est-t-il fait sous l'influence des sarcophages des Sai sons produits à la même époque51. D'ailleurs deux de nos sarco phages, Rome MN Inv 75248 et Prétextât (n° 8, 12), ont des cou vercles où figurent les Saisons. Nous venons de constater la fréquence de la remise des cadeaux à Creuse sur les sarcophages romains. En revanche la scène figure seulement sur deux vases : un cratère en cloche de Lucanie52 et sur un kalathos en argent datant environ du début de notre ère53. Le cra tère, postérieur d'une trentaine d'années à la tragédie d'Euripide, en est librement inspiré. Les objets sont présentés par une servante (f igure existant chez le poète, mais sans action); les enfants et Jason manquent. Mais le pédagogue qui ne figure jamais dans cette scène sur les sarcophages, est-il là pour suggérer la présence des enfants
50 Pour la scène des cadeaux sur la cuve de Berlin, Schmidt, op. cit., p. 20-22. 51 Sur les sarcophages des Saisons voir RS, p. 217-223. 52 1. Cratère en cloche à figures rouges, du peintre de Dolon. Trouvé en Lucan ie.Paris, Louvre CA 2193. Daté de 400. Séchan, Tragédie grecque, p. 398-400, pi. VII; A. D. Trendall, Red-figured Vases of Lucania, p. 100 n° 517 (247). Face A : la scène est composée de quatre personnages debout : à chaque extrémité, un homme, au milieu deux femmes. L'homme de gauche, barbu, tenant un long bâ ton dans la main, est en train de parler à la jeune femme qui est à côté de lui. Plu tôt que Jason, il s'agit de Créon (le personnage a l'air d'avoir un certain âge), par lant à sa fille qui, richement habillée (couronne sur la tête), est en train de rece voir les funestes cadeaux qu'une servante, à droite, lui présente. Celle-ci tient dans une main une étoffe, le péplos, et dans l'autre un coffret qui doit contenir le bijou empoisonné. Derrière elle se tient un homme âgé interprété comme le pé dagogue. Face Β : quatre éphèbes. 53 2. Kalathos en argent trouvé en 1958 à Wardt-Lüttingen. Bonn, Rhei nisches Landesmuseum Inv 58, 4. Fin du Ier siècle avant notre ère - début du Ier siècle après notre ère. E. Künzl, «Der augusteische Silbercalathus im Rheinis chen Landesmuseum Bonn», BJb 169, 1969, p. 321-391. La scène comprend cinq personnages, dont deux enfants. Un garçonnet arrive de gauche, portant un para solouvert et un vase à parfum. A côté de lui se tient Jason habillé de la même fa çon et dans la même attitude que sur les sarcophages. Derrière lui se trouve une colonne surmontée d'un vase, et ornée d'un bouclier. Un autre garçonnet à droite, habillé d'un petit manteau, tend une coupe (avec des fleurs ou des fruits) vers Creuse assise à droite, qui est également très semblable à la Creuse des sarco phages. Derrière elle figure une jeune femme habillée d'un chiton qui glisse sur son épaule gauche et d'un manteau, coiffée d'un chignon, tenant une torche. Une structure légère embellie de guirlandes et de bandelettes orne le fond de la scène, tandis qu'une base assez haute surmontée d'un baitylos ferme l'extrémité droite de la composition.
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de Médée? Les reliefs des sarcophages n'ont pas de point commun avec ce vase; en revanche ils se rapprochent davantage du kalathos, qui est très important54 en raison de quelques points communs et de quelques divergences : le type iconographique des protagonistes principaux (Jason, Creuse et en partie les enfants) est identique55. Les guirlandes56 se retrouvent aussi sur les sarcophages; la colonne sur l'exemplaire de Bâle (n° 24) fig. 40, 47 est surmontée presque du même vase. Comme on vient de constater sur les sarcophages, le nombre des personnages est plus important, généralement six; Jason y figure, tandis que Médée est toujours absente, ce qui est conforme aux sources littéraires et à l'action57. Les enfants sur le ka lathos tiennent les véritables cadeaux décrits par Euripide, une étoffe et une couronne. Ils apportent des objets féminins qui se s ituent mieux dans le contexte des cadeaux du mariage58. Pourtant, il ne faut pas négliger le fait que chez Euripide (v. 942-975) Médée en voie à sa rivale non pas des cadeaux nuptiaux, mais des présents pour demander la grâce de ses enfants qui, autrement seraient obli gée de la suivre dans son exil. La figure féminine à droite de la scène sur le kalathos se retrouve également sur certains sarcophages (n° 20, 21, 15, 24) fig. 31, 32, 26, 41, mais quelque peu différenciée. Sur les panneaux d'Ancóne et Rome MN Inv 222 (n° 20, 21) fig. 31, 32, elle a la même coiffure et le même vêtement (une épaule dénud ée), mais elle ne tient pas de torche. En revanche sur les sarco phages cet attribut est porté par le jeune homme qui souvent tient aussi des pavots. On observe que sur le kalathos, la main droite de cette femme se trouve sur le siège de Creuse, juste à côté de la main de celle-ci; petit détail mais intéressant, puisque sur les sarcophages 54 E. Künzl, «Der augusteische Silbercalathus im Rheinischen Landesmu seum Bonn», BJb 169, 1969, p. 374-376, suppose que cet objet est en rapport avec le second mariage de Tibère avec Julia qui a eu lieu en 11 avant notre ère, ou tout au moins du mariage d'un riche romain. 55 Sur le kalathos, Creuse est coiffée d'un foulard qui lui serre la tête, ce qui sur les sarcophages a été remplacé par un voile relativement court, détail mieux adapté à l'iconographie du mariage romain. 56 Nous ne donnons pas le même sens aux guirlandes (notes 15-17) que E. Künzl, ibid., p. 346-348 qui interprète les objets de la scène comme définissant un lieu sacré, un sanctuaire de Corinthe. Par ailleurs, E. Künzl, ibid., situe la scène en plein air, ce qui ne s'accorde pas avec les sources littéraires. 57 Voir également le fragment de sarcophage n° 17, fig. 28, sur lequel Schmidt voir Médée. Seul Dracontius, Medea, 510-521 mentionne que Médée pose la couronne elle-même sur la tête de Glaucé. Nous pensons qu'il est plus sage de ne pas suivre cet auteur tardif, dont la pièce comporte par ailleurs d'autres aberrations. 58 Ce changement est fait certainement pour arranger la deuxième lecture possible de la scène, celle d'un vrai mariage. Pourtant on remarque que sur le sa rcophage de Berlin (n° 2) fig. 19 dans le creux du péplos tenu par l'enfant figurent des fleurs, comme dans la coupe sur le kalathos.
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(n° 8, 20, 2) fig. 10, 31, 2, c'est Jason (appartenant à la scène sui vante) qui se trouve à cette place et qui souvent pose sa main de la même façon. Ainsi, à travers ces comparaisons se laisse apercevoir l'utilisa tion d'un modèle commun pour les reliefs des sarcophages et pour ce genre d'objets59 qui est sans doute une grande peinture; tout au moins cela est presque certain pour le kalathos60. Bien que nous manquions de témoignages sûrs, il semble se confirmer que la Mé dée d'Euripide a dû inspirer la grande peinture grecque. Nous igno rons si les premières créations peintes inspirées de la pièce étaient proches chronologiquement de la Médée; dans ce cas elles ont dû être reprises vers la fin de la période hellénistique61. C'est sans doute le reflet de ces créations, qu'il faut voir à travers le relief du kalathos. Un siècle et demi plus tard, les ateliers des sarcophages de Rome r eprennent le même sujet, probablement sous l'influence de la littéra turelatine (elle-même fortement inspirée d'Euripide) et bien év idemment du théâtre; en adaptant la composition à la dimension ré duite des panneaux, et en suivant le récit du poète tragique, ils ajoutent au besoin quelques figures nécessaires ou quelques objets et ils créent ainsi une scène inspirée de la mythologie grecque, en même temps qu'elle est vivant et évocatrice pour le commanditaire romain. On assiste ainsi à une diffusion de la légende grecque à tra vers des œuvres d'art, en même temps qu'à sa désacralisation. *
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La mort de Creuse figure sur huit panneaux (Rome MN Inv 75248, Bâle, Berlin, Louvre Ma283, Mantoue, Ancóne, Rome MN Inv 222, Naples; fig. 10, 40, 42, 2, 6, 5, 31, 32, 35), où elle occupe la deuxième place suivant le rythme de la narration et sur le fra gment de Cannes (n° 14, fig. 25) et sur le couvercle du Vatican (n° 9, fig. 13). Elle comporte en moyenne quatre personnages en majorité masc ulins, à côté d'une seule femme, avec une proportion de 3 pour 1, qui passe à 1 pour 1 sur l'exemplaire de Naples, et à 2 pour 3 sur le sarcophage de Bâle. On notera ici également la scène particulière59 Par ailleurs ces vases relativement faciles à transporter, servaient à trans mettre les modèles iconographiques. 60 Voir E. Künzl, ibid., p. 358-374 pour l'analyse stylistique et les rapproche ments avec la grande peinture. 61 Voir E. Künzl, ibid., p. 389. Par ailleurs l'hypothèse de Croisille, Poésie et art, p. 63-65 essayant de prouver que les reliefs des sarcophages sont inspirés de la pièce de Sénèque, ne sont plus valables. La Médée de Sénèque est postérieure au relief du kalathos, dont l'existence est ignorée par Croisille.
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ment peuplée du panneau de Bâle (n° 24, fig. 40, 42), et celle de Naples (n° 22, fig. 35), au contraire très pauvre en figures, avec seu lement deux personnages. La composition ici, contrairement au premier épisode, est agi tée, surtout vers la fin : un personnage debout (Jason) est placé à gauche; à côté de lui, un autre est courbé en avant (Créon se l amentant pour sa fille), tandis qu'à droite une figure sinueuse (Creuse mourante) ferme la scène. On observe donc à gauche, au début de la scène, une ligne verticale qui passe sur le personnage de Jason, et une autre tracée dans la partie supérieure du panneau, sur le deuxième homme à côté du héros. Une grande ligne courbe - créée par le corps de Créon - se ferme sur une oblique allant de la tête de Créon à son genou et à son pied droits. Deux angles sont ainsi créés, par le bras droit de Créon - il se tient la tête de la main -, par sa jambe et son pied gauche, posé sur le lit. Creuse - tête renversée, un pied par terre, un autre encore sur le lit, bras levés -, crée une grande ligne sinueuse, composée de deux courbes. Evidemment les vêtements de Créon et de Creuse forment tout un jeu des lignes par les multiples directions de leurs plis. Ce schéma est pratiquement identique sur tous les panneaux, sauf sur celui de Bâle (n° 24) où Créon et Creuse se trouvent au pre mier plan, encadrés par les figures du fond; ce qui souligne leur im portance. La même impression, mais accrue encore se dégage de l'exemplaire de Naples (n° 22, fig. 35); puisque Créon et Creuse y f igurent seuls. L'exemplaire de Bâle (entre 200/210), à cause de son nombre important de figures et de leur agitation fébrile, est remar quable par la profondeur de champ de la composition, ce qui pré cisément caractérise le style de l'époque. Le fond de la scène est souvent orné d'un jeu d'ondes, ondes fo rmées par un παραπέτασμα tout à fait semblable à celui de la pre mière scène, que l'on aperçoit sur sept exemplaires. Sur trois de ces exemplaires (Rome MN Inv 75248, Bâle et le couvercle du Vatican n° 8, 24, 9; fig. 10, 40, 42, 13), ce παραπέτασμα est une seule grande pièce d'étoffe continue qui couvre à la fois le fond de la scène de la remise des cadeaux à Creuse et celle de sa mort. Une continuité de l'espace est donc exprimée puisque les deux scènes se déroulent dans la même pièce, la chambre nuptiale de Creuse. Par contre le παραπέτασμα des panneaux du Louvre Ma283, Rome MN Inv 222, et Naples (n° 4, 21, 22), simplement accroché, couvre l'espace juste der rière Creuse comme pour la mettre davantage en valeur. Sur la cuve de Berlin (n° 2), c'est le «couple» Créon-Créiise qui est encadré de la sorte. Les figures de cette scène sont de nouveau développées sur toute la hauteur des panneaux, à l'exception toutefois de Creuse qui, cour béeen arrière, laisse quelques centimètres libres au-dessus de sa
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tête, où on a souvent représenté des flammes pour rendre l'épisode plus réaliste. La tête de Créon, bien qu'il se courbe en avant, atteint le bord du panneau, auf sur la cuve de Bâle où les proportions sont respectées. Le traitement des surfaces diffère de celui de l'épisode pré cédent. Le seul corps - à moitié - nu est celui de Jason à gauche, le reste de la scène étant occupé par des corps drapés, en mouvement, ce qui donne un rythme rapide à la scène. Tantôt les draperies collent aux corps et dessinent des plis fins ou larges et mettent en va leur les formes; tantôt elles viennent décorer de façon «froide» le lit, sans rapport avec la violence dramatique du tableau. Tandis que la mort de Creuse se déroule dans la partie droite de la scène, à gauche existent deux figures presque étrangères à l'ac tion, comme deux spectateurs : celle de Jason, armé ou non, et celle d'un autre homme identifié comme le garde du roi, dont on ne voit que le buste. Ces deux hommes qui semblent souvent s'entretenir62 ne portent pas beaucoup d'intérêt au drame de Creuse. On constate une distinction nette entre eux et les deux figures de droite63, Ils re gardent simplement ce qui se passe et ne font aucun geste pour in tervenir. En revanche, sur la cuve de Bâle, tous les personnages présents semblent touchés par la mort de Creuse représentée au pre mier plan. Les trois personnages64 qui entourent les deux malheu reux protagonistes, Créon et Creuse, bien qu'ils soient relégués dans une petite place en haut, au fond de la scène, expriment leur sent iment d'effroi par le mouvement de leurs bras, de leurs mains portées sur le front, et par leurs regards dirigés vers Creuse. Cette tendance à exprimer l'action dramatique n'est pas nouvelle, elle apparaît déjà vers 170. Jason est représenté sur les panneaux de six cuves (Rome MN Inv 75248 et 222, Berlin, Bâle, Paris, Mantoue, Ancóne n° 8, 20, 2, 23, 4, 3, 19) et sur le couvercle du Vatican (n° 9, fig. 13). Il se trouve tout à fait à gauche de la scène, presque toujours vu de face et souvent muni de ses armes. Il est absent de la cuve de Bâle (n° 24), comme il l'était de la première scène de ce sarcophage, ainsi que de la cuve de Naples (n° 22). Il était certainement absent aussi sur le fragment du Vatican (n° 15), puisque Créon est le premier person62 Sur les sept exemplaires où le garde du roi est présent, il tourne la tête vers Jason, sauf dans deux cas sur le couvercle du Vatican (n° 9) et sur la cuve de Rome MN Inv 222 (n° 21), où il regarde à droite, vers la scène. 63 La séparation en deux est accentuée par le fait que Créon tourne le dos aux deux hommes de gauche. 64 II s'agit d'un vieil homme barbu entouré de deux femmes, au-dessus des têtes de Créon et Creuse. Nous pensons que la femme visible au premier plan, à droite du lit de Creuse, et celle dont on n'aperçoit que la tête de profil, appar tiennent déjà à la scène suivante, car elle regardent vers la droite.
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nage conservé sur le fragment de cette scène. Jason, au repos, pose de face, la tête tournée vers la droite, le bras droit abaissé le long du corps; de l'autre main il tient un pan de son manteau comme on le voit sur les panneaux de Rome MN Inv 75248 et de Berlin n° 8, 2. Sur cinq exemplaires, il est représenté avec ses armes, bouclier, casque, lance65. Sur l'exemplaire du Louvre (n° 4), Jason est vu de profil vers la droite, la tête baissée, les deux mains jointes en avant, dans une attitude prostrée, semble-t-il66. Jason apparaît donc dans cette scène sous deux formes : tout d'abord comme guerrier posant calmement avec ses armes, indif férent au drame, ce type est le plus fréquent. Ou dans une attitude un peu plus modeste comme sur le sarcophage du Louvre (n° 4), où il est tourné vers le drame, comme s'il était davantage concerné67. Pourtant, sur la cuve de Rome MN Inv 222 (n° 21), les deux types coexistent : à côté de Jason, vu de face avec casque et bouclier, se trouve un autre homme vu de profil vers la droite, tenant une épée dans la main droite et qui rappelle le Jason de la même scène tel qu'il figure sur le sarcophage du Louvre (n° 5, fig. 7). Cet homme a été considéré par C. Robert68 comme le garde du roi (Doryphorus), toujours présent dans cette scène, mais qui est représenté de façon tout à fait différente sur les autres exemplaires69. A la suite apparaissent les deux personnes les plus importantes70
65 Sur le sarcophage de Berlin (n° 2) Jason a les trois armes. Parfois l'une de ces armes peut manquer, sur les exemplaires d'Ancóne, Rome MN Inv 75248 et 222 (n° 20, 8, 21), on voit seulement le bouclier et le casque posés par terre, tandis que sur le couvercle du Vatican (n° 9) Jason tient une lance et son casque est posé par terre. Sur le panneau de Mantoue (n° 3) on n'aperçoit que le bouclier par terre. 66 Voir Baratte, Catalogue, p. 92, n° 34. 67 Comparons-le à un jeune homme nu, affligé par la mort de Méléagre qui figure sur la face principale du sarcophage du cycle de Méléagre de Mainland, Collection G. Torno, daté de 170/80 ASR, XII, 6, p. 121, n° 117. 68 Sur le garde du roi, voir ASR, II, p. 215, n° 201. 69 Le garde du roi est toujours représenté de profil vers la gauche, vers Jason, sauf dans deux cas : sur la cuve de Rome MN Inv 222 et sur le couvercle du Vati can (n° 21, 9) où il est tourné vers Creuse mourante (à droite) et où il est armé d'une épée (n° 3), d'un casque et d'un bouclier (n° 9). Dans le cas où il se tourne vers Jason, il forme avec lui un groupe, tous les deux se consultant, presque indif férents à la scène. On remarque en revanche que dans les deux cas où il s'éloigne de Jason, et se rapproche par conséquent du drame à droite, il est plus personnal isé par son armement. 70 Sur le sarcophage de Naples (n° 22) où l'iconographie est réduite à sa plus simple expression, la scène n'est composée que de ces deux personnages. Sur le fragment du Vatican (n° 15), Créon est le premier personnage à gauche; on aper çoit également une partie du lit avec le pied droit en un pan de la draperie de Creuse; cela nous autorise à penser qu'ici également les figures secondaires de Jason et du garde n'étaient pas représentés.
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et les plus expressives de cette scène : Créon et sa fille Creuse en train de périr d'une mort atroce. Ils forment tous les deux un «couple» évoqué toujours de la même manière à quelques détails près71. Créon est représenté dans un instantané; tourné vers sa fille, im mobilisé de frayeur. De la main droite il se tient la tête, et avance l'autre main vers Creuse, déjà son pied gauche est posé sur le lit comme pour essayer d'intervenir, tandis que Creuse mourante se tourne vers l'extérieur dans un mouvement vif comme pour atténuer les douleurs qui la tourmentent72. Le type de Creuse se répète aussi à l'identique sur les différents exemplaires. Sur six d'entre eux, des flammes sont figurées au-des sus de sa tête : Berlin, Mantoue, Rome MN Inv 75248 et 222, Ancône, Naples (n° 2, 3, 8, 21, 20, 22). Son bras droit se lève au-dessus de sa tête, la main ouverte vers l'arrière, tandis que sa main gauche ouverte, est en général placée au niveau de la poitrine sauf sur le panneau d'Ancóne où Creuse est très fragmentaire. Un autre élément très important de la scène, aussi bien dans le mythe que dans l'iconographie, est le lit de Creuse, à la fois lit nupt ial et lit mortuaire73. Il peut être réduit à une sorte de simple estrade quadrangulaire, comme sur les exemplaires du Louvre, Mantoue, Rome MN Inv 75248, Ancóne (où il est orné d'un relief) et Berlin (n° 4, 3, 8, 20, 2)74, ou bien être plus développé, avec des coussins, des pieds sculptés et différentes autres parties décorées comme c'est le cas sur les sarcophages de Bale, Rome MN Inv 222, le fragment de Cannes75 et le couvercle du Vatican (n° 24, 21, 14, 9). La cuve de Bâle présente le lit le plus luxueux, décoré d'un relief
71 Créon est habillé d'une longue tunique à manches avec une haute et large ceinture et des sandales, ce qui constitue le costume du roi dans le théâtre de l' époque hellénistique Schmidt, Medeasarkophag, p. 28. D'ailleurs, sur le sarco phage du Louvre Ma 353, Priam figuré à genoux devant Achille porte le même vê tement que Créon voir Baratte, Catalogue, p. 47 n° 14. Créon est pratiquement le même partout, avec une petite différence sur la cuve d'Ancóne, où il est appuyé sur un bâton qu'il tient de la main gauche. Sur le sarcophage de Bâle son cos tume est richement décoré, est-il chaussé des mullei, voir H. R. Goette, «Mulleus, - Embas, - Calceus», Jdl, 1988, p. 401-464. 72 Cette attitude a été comparée à celle des Ménades : voir C. Dilthey, «Sar cophagi di Medea», Annali dell'Instituto di Correspondenza Archeologica, 1869, p. 34-35. 73 Sur la comparaison du mariage et de la mort, voir Schmidt, ibid., p. 27-28. 74 II s'agit bien d'un lit représenté de façon plus ou moins réaliste (voir aussi ASR, II, p. 205-217), et non pas d'un autel comme le soutient Croisille, Poésie et art, p. 54 n. 206-207. N'oublions pas que la mort de Creuse a lieu à l'intérieur de la chambre nuptiale. 75 Sur le fragment de Cannes, n° 14, fig. 25 on aperçoit l'extrémité du lit avec le matelas, le coussin, une moulure en forme de feuille et le pied sculpté.
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représentant Tellus76. Devant le lit se trouve un tabouret orné luimême de deux masques tragiques de théâtre. Sur ces images rien de particulier ne caractérise la robe empoi sonnée par Médée, et la présence de la couronne magique sur la tête de Creuse n'est pas toujours évidente. Seulement sur quelques exemp laires, on voit des flammes au dessus de sa tête précisant éven tuellement davantage le contexte mythologique. Il est loisible d'ima giner une allusion générale à la réelle souffrance des humains et peut-être des propriétaires du sarcophage77. La mort de Creuse en dehors des sarcophages figure sur deux vases de l'Italie du Sud78 et sur une urne d'Ostie fig. 60-61 d'époque impériale79. En comparant la scène des vases avec celle des sarco76 Sur le relief du lit voir Schmidt, Medeasarkophag, p. 27. 77 Sur les propriétaires du sarcophage, voir Schmidt, ibid., p. 27-28. 78 1. Cratère à volutes à figures rouges, du peintre de Darius, ou des scènes infernales. De Canosa (Apulie). Munich (Antikensammlung?) Inv 3296. Daté vers 340-335. Trendall, Cambitoglou, RVA II, p. 553 n° 18/283, pi. 195. La scène qui nous intéresse figure au centre du registre supérieur sur la panse du cratère. Creuse est en train de mourir, dans un naïskos à six colonnes ioniques et au toit à fronton qui suggère le palais de son père. La princesse est renversée sur un siège ouvragé; sa tête, portant la couronne néfaste, est posée sur le coussin du siège, tandis que son bras gauche est ballant, l'autre derrière la tête. Elle se trouve donc dans l'état de convulsion décrit par Euripide. Derrière elle, accourt un homme âgé, barbu, richement habillé, Créon qui se retourne en arrière comme pour de mander de l'aide. Devant la krèpis du naïskos se trouve un coffret entrouvert. Sur la frise du naïskos, au-dessus de Creuse est incrit KPEONTEIA (la fille de Créon); et le nom de Créon est partiellement visible. A gauche une femme arrive à la hâte, son nom ΜΕΡΟΠΗ nous indique qu'il s'agit de la mère de Creuse; tandis qu'à droite un jeune homme, habillé d'un manteau et avec un pétase rejeté dans le dos, arrive également au secours de la jeune fille. Il s'agit d'IIHIOTHZ (comme une inscription l'indique), le frère de Creuse. Selon Diodore (IV, 55, 5) Hippotès es saya plus tard d'obtenir réparation de Médée en justice. Ces deux figures qui n'apparaissent pas chez Euripide ont fait penser à certains que le peintre s'est inspiré d'autres sources. Sur ces figures inhabituelles et leur éventuelle source d'inspiration, voir Séchan, Tragédie grecque, p. 414-422. 2. Cratère à figures rouges, de Pomarico. Musée de Naples, coll. Santangelo 526. Daté du IVe siècle avant notre ère. Séchan, Tragédie grecque, ''p. 400-402, fig. 118. Cette fois la princesse est en train de s'effondrer au pied d'un siège luxueux. Elle porte la couronne, et essaie d'enlever le voile de sa tête. A gauche, Créon accourt, portant le sceptre; une femme, faisant probablement partie des servantes, s'éloigne. A droite, le pédagogue est en train d'éloigner les deux en fants. Par terre, presque aux pieds de Creuse, se trouve le coffret ouvert. En haut à droite une Erinye contemple le drame. C'est le moment où Créon, prévenu par les servantes, accourt, juste avant de toucher sa fille et de succomber avec elle. 79 Urne circulaire en marbre avec inscription, fig. 60-62. Ostie, Musée Inv 10. Trouvée en 1910 à Ostie près du théâtre. Date : 150-180. Voir R. Calza, Museo Ostiense, Rome, 1947, p. 46 n° 10; Sinn, Marmorurnen, p. 245 n° 635, pi. 93 c-D. De part et d'autre de la tabula figure une scène illustrant les exploits de Médée à Corinthe. A gauche est représentée la mort de Creuse. Le schèma est i ntégralement comparable à celui des sarcophages, mais la scène se limite au mini-
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phages, la première remarque porte sur Jason qui est toujours présent sur les sarcophages, alors qu'il ne figure pas sur les vases. La présence de Jason n'est pas conforme à la tragédie d'Euripide80; on a déjà constaté pourtant que Jason, simple spectateur sur les sarco phages, ne participe pas à l'action, et que les deux personnages prin cipaux sont Créon et Creuse, comme dans la pièce; d'ailleurs, sur le sarcophage de Naples (n° 22) fig. 35 et l'urne d'Ostie fig. 60-62, ils f igurent seuls. Nous venons de faire le rapprochement entre l'attitude de la femme de droite sur le kalathos en argent (n° 2, note 53) et le Jason de la scène de la mort de Creuse sur les sarcophages. Jason a pris la place de cette femme, mais pour des commodités iconographiques, il tourne la tête vers la droite. La position de sa main, qui reprend celle de la femme sur le kalathos, nous indique, que pour cette scène aussi, il faut chercher dans la grande peinture la source d'inspira tion. Le groupe des enfants et du pédagogue du cratère de Pomarico (n° 2, note 78) est certainement une allusion à la scène précédente, car on note que selon Euripide (v. 1001-1018), le pédagogue rentre avec les enfants, aussitôt la mission accomplie et rend compte à Médée de la grâce que ses enfants ont obtenue. En revanche, d'autres rapprochements sont possibles entre les reliefs des sarcophages et la peinture des vases. Le type de Creuse en flammes se rapproche de celle du cratère n° 1 par le mouvement s inueux du corps et l'air égaré dû à la douleur81. Aussi bien sur les vases que sur les reliefs, le péplos et la couronne empoisonnés ne sont pas du tout caractérisés. Cependant les sculpteurs des sarco phages placent le drame dans la chambre nuptiale même de la prin cesse (étoffe au mur, lit) et représentent les flammes qui l'ont em brasée au-dessus de sa tête (n° 2, 3, 8, 21, 20, 22; fig. 2, 5, 10, 31, 32, 35); en cela, ils sont fidèles au texte d'Euripide (v. 1137 νυμφικούς δό μους; 1187 νομα παμφάγου πυρός). La peinture des vases nous est d'un précieux secours pour un pet it détail, resté jusque là dans l'ombre. Il s'agit de l'objet figuré sur le sarcophage de Bâle (n° 24) fig. 40, 42, à droite de Creuse mourante, au pied du pilier d'arcade. Par comparaison avec les deux vases
mum des personnages : Créon et Creuse mourante. A droite : fuite de Médée sur son char à dragon ailés. 80 La présence ou l'absence de Jason, a poussé certains auteurs, en parti culier Croisille, ibid., p. 63-65 à y voir l'influence plutôt de Sénèque; pourtant ce lui-ci ne décrit ni la remise des cadeaux, ni la mort de Creuse. On pourrait penser à une influence d'Ovide qui a écrit également une Médée, mais cette pièce étant perdue le rapprochement serait hasardeux; voir également notre note 6. 81 Le groupe sinueux de Créon-Créixse sur les sarcophages reste une trou vaille des sculpteurs, inspirée peut-être des figures des Ménades.
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mentionnés ci-dessus, il s'agit d'un coffret82. Le sculpteur a insisté pour figurer ce coffret (caché derrière les enfants), il s'agit du coffret où Médée garde ses herbes maléfiques : dans ce cas c'est une allu sion à la magicienne qui est absente, mais dont l'œuvre horrible est représentée juste à côté. N'oublions pas que le φωριαμοβ est un attri butessentiel de Médée. Soit qu'il s'agit du coffret dans lequel la ser vante offre les funestes présents à Creuse, tel qu'on le voit sur le cra tère n° 1 de Lucanie. La femme à gauche qui s'éloigne affolée sur le cratère de Naples n° 2, est remplacée sur le sarcophage de Bale par les deux femmes gesticulantes. Sur ce même sarcophage, le pédagogue fait un léger geste vers les enfants, mais il se trouve derrière le pilier; en revanche une femme toute proche sur le cratère n° 2 fait un geste de protec tion vers eux, rappelant l'attitude du pédagogue. Ainsi, cette scène sur les sarcophages démontre bien par l'att itude des personnages, par l'ambiance qui y régne, qu'Euripide reste la principale source d'inspiration83. Mais comme cela est valable pour la scène précédente, l'inspiration peut être libre; vouloir déce ler une soumission totale de l'artiste à un texte, serait contraire au principe même de l'art.
82 Séchan, ibid., p. 407 n. 1 interprète ainsi le coffret figurant sur les vases. 83 Croisille, ibid., p. 63-65 hésite à reconnaître l'influence de la pièce d'Euri pide.Pour l'influence d'Euripide, voir Séchan, Tragédie grecque, p. 414-422.
CHAPITRE XVII
MÉDÉE SE VENGE SUR SES PROPRES ENFANTS
Le dernier crime de Médée, le plus horrible - έργον τλδσα δυσσέβαστον - c'est l'infanticide perpétré contre sa propre descendance; par là elle est devenue une figure mythologique inoubliable, fasc inante pour les auteurs dramatiques anciens et modernes1. La version du crime qui a prédominé et qui est passée à la postér ité est celle d'Euripide, où Médée tue les enfants qu'elle a eus de Ja son2 pour se venger de son infidélité. Mais avant d'exposer les traits essentiels de cette version, qui a été reprise par les auteurs latins, nous devons nous attarder un peu sur des versions différentes, et an térieures à celle d'Euripide. Pausanias (II, 3, 10-11) d'abord nous rapporte une version qu'il attribue à Eumélos (VIIIe - VIIe siècle avant notre ère)3. Hélios avait confié à Aiétès le pouvoir d'Ephyra (ancien nom de Corinthe), mais Aiétès partit en Colchide. Par la suite, le roi Corinthos n'ayant pas eu de descendance, les Corinthiens appelèrent Médée d'Iolcos pour lui donner le pouvoir, mais c'est Jason qui régna à sa place4. Médée, chaque fois qu'elle enfantait, enterrait le nouveau-né dans le sanc tuaire d'Héra5, dans l'espoir de le rendre immortel. A la fin elle 1 Sur le personnage de Médée dans la littérature moderne voir, Séchan, «La légende de Médée», REG XL, 1927, surtout p. 305-310, ainsi que «Medeia» Ca hiers du GITA 2, 1986. 2 Habituellement (par exemple chez Euripide) deux fils sont attribués à Méd ée, Phérès et Merméros; mais Diodore IV, 54 lui en attribue trois, Thessalos et Alcimènès qui sont jumeaux et Tissandros; parmi eux, un seul échappa à la ven geance de sa mère. Parmeniscos, scholie à Médée, 273 lui attribue quatorze en fants. D'après Pausanias II, 3, 9 dans les Naupactica, Merméros fut tué à la chasse par une lionne. 3 On place généralement Eumélos et son poème Korinthiaka au VIIIe-VIIe siècle, Will, Korinthiaka, p. 85 n. 2-4, 124-129, pourtant il se pourrait que le nom désigne plutôt una tradition corinthienne qu'un seul poète; voir également (fr. 3 Kinkel). 4 Pour cette version, voir également Séchan, Tragédie grecque, p. 590. 5 Pausanias, II, 3, 11 - Μηδεία δέ παΐδας μέν γίνεσθαι, το δε άεί τικτόμενον κατακρύπτειν αυτό ές το ιερόν φέρουσαν της Ήρας, κατακρύπτειν δέ αθανάτους έσεσθαι νομίζουσαν -; cet acte de Médée serait à l'origine d'un rituel primitif corre spondant à la κατακρυπτεία, cérémonie de caractère agraire et mystique, voir Will, op. cit., p. 89, 97-103.
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comprit que son effort était vain, et elle se fit découvrir par Jason qui ne voulant pas lui pardonner quitta Corinthe et revint à Iolcos; elle-même céda par la suite le pouvoir à Sisyphe et partit. La scholie à Euripide, Médée, 20 attribue la même version à Simonide. Quelques remarques s'imposent sur cette très ancienne version : Médée et son père Aiétès sont mentionnés ensemble, mais leur lia ison est maladroite; au contraire Médée vient έκ Ίωλκοο. On ne peut pas parler véritablement de meurtre, puisqu'il s'agit plutôt d'un rite d'immortalité6. La pratique d'inhumation que Médée utilise pour immortaliser ses enfants est une pratique magique (certes ineffi cace!) qui montre par ailleurs le caractère divin de Médée7. Eumélos attribue les enfants à Jason, mais certains ont pensé que les enfants étaient de Zeus8. La scholie d'Euripide, Médée, 273 rapporte que selon Parmeniscos les quatorze enfants de Médée (sept garçons et sept filles) furent massacrés par les Corinthiens sur l'autel d'Héra, quand les femmes de la ville se révoltèrent, ne voulant plus être dirigées par l'empoi sonneuse barbare, Médée. Une peste suivit ce crime, que le dieu consulté conseilla d'expier ne consacrant chaque année sept garçons et sept filles des meilleures familles de Corinthe au service divin dans le temenos de la déesse. Pourtant, dans la même scholie, Didyme qui déclare suivre Créophylos dit que Médée, après l'empo isonnement de Créon, s'enfuit à Athènes, en déposant sur l'autel d'Héra ses fils trop petits pour la suivre, et en pensant que leur père allait s'en occuper. Mais les proches de Créon les tuèrent et préten dirent par la suite qu'ils avaient été assassinés par leur mère en même temps que Créon. Pausanias (II, 3, 6-8) rapporte une autre tradition plus tardive, légèrement différente. A Corinthe, il mentionne après la fontaine Glaucé9, près de l'Odèon voisin, le monument funéraire des enfants de Médée, Merméros et Phérès - μνήμα έστι τοις Μηδείας παισίν·,
6 Cette pratique démontre le caractère primitif de divinité courotrophe de Médée, voir Will, Korinthiaka, p. 89 n. 4 et H. Jeanmaire, Couroi et Courètes, Lille, 1939, p. 298. 7 Séchan, ibid. , y voit une pratique magique, tandis que Will, Ibid. , p. 88-97, n'admet pas complètement le caractère magique de Médée en Corinthe. 8 Selon la scholie à Pindare, Olympiques., XIII, 74, 6 Médée habitait Corinthe où elle sauva les Corinthiens d'une famine; Zeus s'éprit de Médée qui, par crainte d'Héra, se refusa; c'est pourquoi la déesse lui promit de rendre ses enfants im mortels. En effet les Corinthiens leur rendirent un culte après leur mort, voir éga lement Séchan, Tragédie grecque, p. 590. Dans la même scholie les enfants de Jason et Médée sont appelés μιξοβαρβαροι. 9 II s'agit de la fontaine où la princesse se jeta pour éteindre le feu qui la dé vorait. Voir Will, ibid. , p. 90-92 sur les rapports entre le culte éventuel de Médée et celui de Glaucé.
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que les Corinthiens ont lapidés - Ιίαταλιθωθηναι - pour se venger des cadeaux qu'ils avaient apportés à Glaucé. Par la suite, à cause de ce crime, les nouveaux-nés des Corinthiens mouraient, jusqu'au mo ment ou l'oracle conseilla d'établir un culte annuel et de placer sur la tombe le δεϊμα10, figure ou sorte de stèle, représentant une femme horrible à voir. Le monument existait encore au temps de Pausanias, mais le voyageur précise que le culte ancien n'était plus respecté par les nouveaux habitants de Corinthe, venus s'y installer après la des truction romaine (en 146 avant notre ère). Ce culte était constitué par un rituel funéraire : porter l'habit noir de deuil (μέλαιναν φοροοσιν έσθήτα), se couper les cheveux (άποκείρονταί), ainsi que par des sacrifices aux enfants de Médée. Il était certainement en rapport avec la fête funéraire d'Akraia, mentionnée par la scholie de Médée, 1379. On observe donc un glissement mythologique en même temps que religieux. Du rite de l'immortalité qui produit un meurtre invo lontaire, lié à une divinité chthonienne de fécondité (Eumèlos), on passe au massacre intentionnel des enfants, dont cette fois, les au teurs sont les Corinthiens (Parméniscos), afin d'expliquer le culte établi attesté jusqu'à une époque tardive. L'association des deux ver sions produit celle de Créophylos qui fut développée et arrangée par Euripide, en donnant plus de relief au tempérament passionné de Médée. Après tout cela, la version d'Euripide semble «simplifiée» et son originalité a été mise en doute11. Il est fort probable qu'Euripide n'a fait que transmettre une version qui existait déjà chez Créophylos, étant donné qu'il présenta sa Médée en 431, aux Grandes Dionysies, peu avant la guerre du Péloponnèse, où Corinthe était hostile à Athènes. De ce fait, il est difficile d'imaginer que le poète osa présent er, le premier, une œuvre ou les ennemis d'Athènes n'étaient plus coupables du meurtre12. En revanche, on aperçoit dans la pièce d'Euripide une allusion aux deux versions préexistantes (meurtre in volontaire de Médée - lapidation par les Corinthiens, culte). Au v. 1378, Médée quitte la scène en déclarant qu'elle va porter ses enfants au sanctuaire d'Héra Akraia et inaugurer une fête et des cérémonies solennelles pour expier le crime. 10 Sur le sens de δεΐμα voir Will, ibid., p. 92-93; également N. Papahatzis, in Παυσανίου 'EXXaôos περιήγησις, II p. 75 n. 1 qui corrige le mot en Δεΐμω et y voit une simple personnification de la peur sans contenu mythique. Ne pourrait-il pas s'agir d'une sorte de «portrait» de Médée, horrible à voir, représentée dans toute l'horreur de son acte? 11 Sur les différentes opinions concernant l'originalité d'Euripide, voir Séchan, Tragédie grecque, p. 589-591; et Will, Korinthiaka, p. 90. 12 Voir également la scholie à Médée, 9 où selon Parméniscos Euripide reçut cinq talents des Corinthiens pour attribuer ce crime à Médée.
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II nous semble nécessaire de résumer les points importants de l'épisode chez Euripide. Le meurtre se passe à la fin de la pièce, mais il ne faut pas oublier que, déjà au début (v. 113-115), Médée aperce vant ses enfants qui viennent de rentrer du gymnase avec le péda gogue, prononce des paroles amères et agressives à leur encontre (ώ κατάρατοι παίδες). Pourtant elle ne décide de les tuer que plus tard (v. 792), après s'être assurée d'un refuge auprès d'Egée, roi d'Athènes13. Par la suite, alors que les enfants rentrent du palais où ils ont porté les présents fatals à Creuse, Médée s'adoucit à leur vue; v. 1019-1080, elle se livre à la tendresse et, perplexe, ne sait quel che min suivre : celui de l'amour maternel, ou celui de la vengeance. Elle décide d'oser, pour ne pas être la risée de ses annemis (v. 1049-1051). Après avoir écouté le récit de la mort de sa rivale, elle saisit son épée (v. 1244 λαβε ξίφος), résolue et consciente de son malheur14; elle entre dans sa maison où elle tue les enfants. Le meurtre ne se passe donc pas sur la scène, mais il est suggéré par les appels au secours des enfants. Par ailleurs v. 1312, le chœur dit à Jason d'ouvrir les portes et il les verra égorgés (πύλας άνοίξας σ<δν τέκνων όψει φόνον); bref le lieu du crime est clairement exprimé chez Euripide. Euripide a créé la figure de Médée qui, blessée de la trahison de son mari, se sentant seule en pays étranger, sous l'empire de la dou leur et de la jalousie, ose accomplir ce qu'aucune mortelle n'aurait envisagé. Les vers 1019-1080 constituent son monologue célèbre, d'une grande finesse psychologique, où l'on sent son cœur prêt à basculer dans l'amour ou dans la haine. Ce passage est très import antpour l'iconographie, car il a certainement inspiré un grad nombre de peintures. Cette version du crime est également mentionnée par le PseudoApollodore (I, IX, 28) 15. Diodore (IV, 54, 7), en rapportant le meurtre de Médée, précise (IV, 55) que les Corinthiens, désolés de tant de malheurs, ont enseveli les enfants selon le conseil de l'oracle d'Apol lon dans le sanctuaire d'Héra et leur ont rendu un culte. Chez Sénèque, deuxième auteur tragique dont on a conservé la description du crime, Médée se décide à accomplir le meurtre après avoir compris (v. 549) que c'est le meilleur moyen pour affliger Jason, puisqu'il se déclare très attaché à ses enfants. Par la suite, en delire, ravagée par la jalousie, elle accomplit des rites magiques
13 Euripide, Médée, 663-758. 14 Euripide, Médée, 1244-1250 : tout en s'encourageant à commettre l'horrible acte, elle sait qu'elle va être malheureuse par la suite : v. 1249 κάπειτα θρήνει -; ν. 1250 ...δυστυχής δ' έγώ γυνή. 15 Le Pseudo-Apollodore I, IX, 28 mentionne également la version du meurtre des enfants par les Corinthiens.
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contre sa rivale. Plus tard, en écoutant le récit de la mort de Creuse, elle se réjouit, laisse échapper sa fureur et son caractère véritabl ement maléfique, en s'excitant au meurtre (v. 893-955); en même temps son amour maternel la fait hésiter. Enfin, poussée par le spectre de son frère (v. 960-965), qu'elle a également tué et qui lui ré clame vengeance, elle tue un de ses enfants et elle monte avec sa nourrice sur le toit de sa maison; là, elle tue le second enfant, en pré sence de Jason, venu pour l'arrêter. Donc, chez Sénèque le meurtre se passe sous les yeux des spectateurs, si la pièce a été effectivement jouée16. Valerius Flaccus, Argonautiques , V, 335-340 fait allusion, sans s'y attarder, au crime de Médée, mais cette œuvre est inachevée. Dracontius, Medea, 531-556 mentionne également que Médée monte à la citadelle, où elle précipite ses enfants dans le bûcher17. La scène de l'infanticide et celle du vol de la toison d'or consti tuent les deux scènes les plus représentées du cycle que nous étu dions. On peut distinguer deux moments dans l'iconographie de cet épisode : Médée méditant de tuer ses enfants, donc avant le meurtre; et l'exécution du meurtre proprement dit. I. La scène figurant Médée en train de méditer le meurtre de ses enfants a eu le plus de succès auprès des artistes. On distingue deux types de Médée dans cette scène : une Médée débout et une Médée assise. Les reliefs des sarcophages de Rome représentent Médée, de bout, avec ses enfants dont le meurtre constitue la troisième scène sur huit panneaux de sarcophages : Berlin, Paris, Mantoue, Rome MN Inv. 75248 et 222, Ancóne, Bale, Naples, Prétextât (n° 2, 4, 3, 8, 20, 21, 24, 22, 12; fig. 2, 6, 5, 10, 31, 40, 35, 16), sur le couvercle du Vatican (n° 9, fig. 14) ainsi que sur le fragment de Cannes (n° 14, fig. 26). Elle comporte en général trois personnages - Médée et les deux garçonnets, à l'exception de l'exemplaire d'Ancóne (n° 20) où est pré sentée une figure féminine supplémentaire, ainsi que sur la cuve de Bâle où, on voit cinq personnages. Dans trois cas : Mantoue, Berlin,
16 II n'est pas sûr, en effet, que les pièces de Sénèque furent représentées; voir Croisille, Poésie et art, p. 56 n. 228, 376 n. 7, 378 n. 16 (qui considère que les tragé diesde Sénèque étaient jouées). A Arcellaschi, Médée dans le théâtre latin d'Ennius à Sénèque, Rome, 1990, p. 313-417. 17 Dracontius mélange donc des éléments de l'ancienne version, supposant le meurtre d'immortalité dans un lieu sacré, avec ceux de la version plus récente concernant le meurtre par vengeance. A cause du nom d'Héra Akraia, on a pensé que le sanctuaire d'Héra se trouvait sur l'Acrocorinthe, ce que croit Dracontius. Mais en réalité cela n'est pas une preuve pour la localisation du sanctuaire, puisque la déesse était déjà appelée Akraia à Argos, d'où elle a été introduite à Corinthe, voir Will, Korìnthidka, p. 82-85.
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couvercle du Vatican (n° 3, 2, 9; fig. 2, 5, 13), la scène est enrichie par la présence d'un pilier hermaïque. La scène est très calme; aucun mouvement n'annonce le meurtre abominable qui va avoir lieu. Médée, debout, tenant l'épée dans une des ses mains, regarde, la tête légèrement baisée, les deux enfants qui jouent à ses pieds. Les lignes verticales prédominent dans la composition : l'axe du corps de Médée et celui des deux enfants ou du pilier hermaïque. Au niveau de la partie inférieure du panneau, deux horizontales an iment la composition; elles sont créées par la draperie du manteau de Médée et par les bras des garçonnets qui se tiennent par les épaules. Ce schéma se vérifie sur tous les sarcophages représentant cette scène. En ce qui concerne le traitement des surfaces, la partie supé rieure des panneaux est en général occupée par le corps drapé de Médée dont seul le bras droit est nu, alors qu'à la partie inférieure se trouvent les deux garçonnets pratiquement nus, ce qui rapproche cette scène de celle de la remise des cadeaux à Creuse. Quant à la préméditation du meurtre des enfants, malgré son importance dans le mythe, son espace est restreint sur les panneaux et son iconographie limitée à un minimum de personnages. La composition s'organise selon deux possibilités. Ou bien les deux enfants sont placés, pourrait-on dire, devant Médée : c'est le cas sur trois panneaux18, Berlin, Louvre et Rome MN Inv. 75248 (n° 2, 4, 8); le manteau du premier enfant flotte légèrement en ar rière (n° 4, 2), mais l'espace de la scène précédente est respecté. Ou bien les enfants se placent à gauche, dans l'espace de la scène pré cédente, devant le lit de Creuse ou devant le παραπέτασμα qui décore le mur19; ainsi, la figure de Médée se dégage en pied. A noter que sur les panneaux où existe un pilier hermaïque (n° 3, 9), le premier en fant est placé à gauche, (devant le lit ou le παραπέτασμα de la scène précédente) et le second enfant se trouve devant le pilier hermaïque. Cette scène n'a pas de contexte précis. En dehors des quelques cas (2 au total sur 10) où un pilier hermaïque définit le lieu, la scène n'a pas d'autre élément caractéristique; elle est insérée entre celle de la mort de Creuse qui la précède et celle de la fuite de Médée qui la suit. Le pilier hermaïque qui figure sur le panneau de Mantoue et le
18 On remarque que, même dans ce cas, le premier des enfants est un peu dé calé vers la gauche et que sur ces trois panneaux il n'existe pas de pilier her maïque. 19 Comme on le voit sur le panneau de Naples et le fragment de Cannes (n° 14), sur ce dernier les enfants se trouvent devant le παραπέτασμα et sous la main de Creuse.
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couvercle du Vatican (n° 3, 9) est un pilier quadrangulaire surmonté d'une tête masculine, barbue, ceinte d'un bandeau. Elle est vue de profil vers la droite et regarde Médée presque dans les yeux. Ce pilier hermaïque pourrait désigner le lieu du crime comme étant un es pace sportif - palestre ou gymnase -, car Hermès protégeait les sports, l'école etc. et sa présence dans ces endroits était chose habit uelle20. Par ailleurs, des objets circulaires, par terre, entre les pieds des enfants que l'on pourrait identifier comme des cylindres21 ser vant aux exercices gymniques, apportent une preuve supplémentaire qu'il s'agit d'un lieu de sport. Les enfants se poursuivent vers la droite en jouant à la balle, balle que l'on voit très souvent entre les mains du garçonnet de droite, quand l'état de conservation du pan neau le permet. Les piliers hermaïques et les cylindres peuvent nous situer dans un gymnase; chez Euripide, (Médée, 46) les enfants rentrent de l'entraînement au gymnase - έκ τρόχων -, mais la meurtre a lieu à l'intérieur de la demeure de Médée. La cuve de Bâle présente sur ce point aussi quelques différences. Le pilier22 qui, comme nous l'avons déjà noté, est décoré, dans la partie située au-dessus de la traverse d'imposte (à la place du chapi teau) d'une tête masculine en relief, barbue et coiffée d'un turban. On constate que ce pilier n'a rien d'un pilier hermaïque23. Il n'est pas 20 Dans ce sens, voir H, Wrede, Die antike Herme, Mayence, 1986, p. 34-36. Aussi J. Delorme, Gymnasion, Paris, 1960, p. 364-365 : «ce type de représentation (le pilier hermaïque) était si répandu que Cicéron paraît le croire caractéristique du gymnase». 21 Ce cylindre est très visible au moins sur six exemplaires, Berlin, Paris, Mantoue, Naples, Vatican, fragment jadis à Cannes (n° 2, 4, 3, 22, 9, 14); sur les autres sarcophages il existe aussi quelques traces, mais qui sont à peine visibles. On voit les mêmes cylindres, sevant aux exercices gymniques, par ex. sur le fra gment de céramique du Museum of Fine Arts à Boston Inv. 10.191 a-b : A. Klein, Child Life in Greek Art, New York, 1932, pi. XXIII, Β η° 274. 22 Pour Schmidt, Medeasarkophag, p. 29 ce pilier est la limite de la scène de la mort de Creuse. 23 Croisille, Poésie et art, p. 55 n. 212 l'identifie à un Hermès. Schmidt, Me deasarkophag, avance pourtant l'hypothèse de Dionysos, en se posant la question de savoir si cela signifie que Médée sacrifie ses enfants sous les yeux de ce dieu. Il faut aussi considérer que l'épée de Médée (il en reste quelques traces) se dessinait sur le fût du pilier. M. Schmidt signale également que cette tête pourrait désigner un barbare quelconque, et cela en rapport avec les origines de Médée. La coiffure faite avec un turban caractérise souvent dans l'art grec les Indiens ou en général les Orientaux (voir H. Brandenburg, Studien zur Mitra, Münster, 1966, p. 1 ΜΙ 17); et également des personnages mythologiques comme par ex. Dionysos ou même le viril Héraklès (H. Brandenburg, ibid., p. 128-129). Dans le monde des mortels, les poètes peuvent être coiffés d'une coiffure analogue comme Anacréon, Alcée, voir là-dessus D. C. Kurtz, J. Boardman, «Booners», Occasional Papers on Antiquities, 2, The J. P. Getty Museum 3/1986, p. 35-70, étude très utile et claire sur les coiffures en turban, à propos du Kyathos 77. AE. 102 du musée P. Getty où on a probablement une représentation d'Anacréon portant le turban. En ce qui
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indépendant, puisque la tête ne le surmonte pas; sans doute fait-il partie d'un édifice construit. La forme triangulaire que prennent les deux angles en s'élargissant au-dessus de la traverse d'imposte in dique qu'il s'agit d'un pilier d'arcade. La femme au fond à gauche, dont la tête seule est visible, et l'homme, sont placés dans le passage de cette arcade. De telles arcades figurent sur d'autres sarcophages à sujet mythologique des ateliers de Rome24. Elles marquent une sépa ration et assurent le passage d'une scène située à l'intérieur (à gauche) vers une autre située à l'extérieur (à droite), là où le héros mythique trouve la mort. Nous ignorons si ces arcades et leurs pi liers ont une valeur symbolique particulière25. Nous doutons aussi concerne la petite tête sur notre sarcophage, le portrait d'un poète (ou le souvenir d'un portrait) ne nous semble pas insolite puisqu'il rattacherait davantage la scène au monde de la poésie et du théâtre, tout comme les masques qui figurent à deux reprises sur cette cuve. Pourtant un autre personnage, cette fois-ci du monde divin, peut porter cette coiffure : il s'agit de Sabazios, dieu d'origine «bar bare» (thrace ou phrygien), tel qu'on le voit par ex. d'après la tête en marbre de Rome, qui appartenait jadis à la collection de Maillé; voir R. Fellmann, «Der Sabazios-Kult» OrRR, p. 316-333, fig. II, 2, et sur des reliefs en bronze. Le rap prochement de la petite tête avec cette divinité devient très intéressant, puisque sur la même cuve, la figure féminine qui apparaît à l'angle du panneau, fait un geste qu'on pourrait rapprocher de l'iconographe de Sabazios. 24 Ces arcades apparaissent sur quelques sarcophages illustrant les mythes d'Hippolyte : sarcophage de Pise, voir ASR, III, 2, n° 164, 167-171, 179; RS, p. 150153; d'Adonis : sarcophage de Mantoue, voir ASR, III, 1, n° 13-14, 20-21; RS, p. 131-133; et de Thésée : sarcophage de Clieveden, voir ASR III, 3, n° 430; RS, p. 187. Sur les sarcophages d'Hippolyte un pilier d'arcade sépare les deux scènes qui ornent le panneau : à gauche l'annonce au héros de l'amour de Phèdre, et à droite la chasse au sanglier fatale. Sur ceux du cycle d'Adonis, le même pilier d'arcade sépare une scène de chasse d'une scène située à l'intérieur. Sur le sarco phage de Thésée un pilier semblable partage la scène représentant Thésée devant Minos à gauche, de celle de droite où figure l'abandon d'Ariane endormie à Naxos. Sur quelques-uns des exemples cités ci-dessus, l'arcade est représentée en perspective : c'est le cas pour ASR III, 2, n° 167-168, 170, 179 (cycle d'Hippolyte); ASR, III, 1 n° 14 (cycle d'Adonis). En revanche, sur le sarcophage d'Hippolyte conservé à Florence, Musée des Offices, Inv. 98, voir Mansuelli, Galleria degli Uffì zi,I, p. 237-238 n° 255 = ASR, III, 2 n° 171, le pilier est représenté exactement de la même manière que sur notre cuve de Bàie; il est orné également d'une tête vue de profil, avec des cheveux bouclés dans le vent, une tête de divinité du Vent. On note aussi que ces piliers peuvent recevoir un décor sur leur fût : sur l'exemplaire de Florence (cycle d'Hippolyte : trois garçons qui dansent); sur le sarcophage de Mantoue, (ASR, III, 1, n° 20 cycle d'Adonis : des Erotes); ou alors sur celui de Pise, dans l'écoinçon (ASR III, 2, n° 164 cycle d'Hippolyte : Niké tenant arc et torche); sur le sarcophage de Clieveden, (ASR, III, 3, n° 430 cycle de Thésée : Niké tenant une couronne). Pour les sarcophages cités ci-dessus on remarque qu'ils proviennent tous des ateliers de Rome qu'ils se situent entre le milieu du IIe siècle et le début du IIIe siècle de notre ère; et que l'arcade sert à faire le lien entre une scène située à l'intérieur et une scène de l'extérieur. 25 K. Schefold, «La force créatrice du symbolisme funéraire des Romains», RA, 1961, 2, p. 196 donne une valeur symbolique sux piliers qui se trouvent
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que l'on puisse les mettre en rapport avec le motif de la porte re présentée ouverte ou fermée sur bon nombre de monuments funé raires d'époque impériale, et qui a été interprétée tantôt comme la porte d'Hadès, tantôt comme le passage vers une autre vie26. Sur la cuve de Bàie, le pilier sépare deux mondes différents et situe, en le précisant, l'espace où a lieu la scène de droite. Si l'arcade constitue un passage comme le suggère aussi M. Schmidt27; cet élément archi tectural caractérise un espace extérieur (palestre, gymnase?) par op position à l'intérieur d'une demeure. Au bas de ce pilier on aperçoit une forme quadrangulaire ornée, dans ses parties supérieure et inférieure, d'une moulure, et que l'on prend de prime abord pour la base du pilier. Pourtant quand on re garde plus attentivement, on s'aperçoit que cette «base» serait trop large pour un pilier qui s'amincit vers le bas. L'œuvre est d'une trop bonne qualité pour que l'on puisse imaginer un malentendu de la part du sculpteur; d'autre part, ce détail du relief est placé au second plan et caché derrière les enfants : si le sculpteur a insisté pour re présenter cet objet, c'est certainement parce qu'il revêt d'une impor tancedans le mythe ou pour la compréhension de l'image. Serait-ce la boîte des tablettes qu'emportent les élevés allant en classe, ta blettes d'écriture que l'on voit sur certains vases représentant des scènes d'école28? Elle aurait pu tomber des mains des enfants quand la peur les a saisis. Ou alors il s'agit d'une boîte servant à contenir quelque chose; peut-être les cadeaux empoisonnés à Creuse. On pense aussi au φωριαμος de Médée, (seul chose qu'elle emporte quand elle fuit le palais paternel et son pays), et dans laquelle elle garde les herbes spécifiques à son art29. On doit pourtant noter qu'il s'agit là d'un exemple unique, puisque sur aucun autre de nos sarco phages ne figure un pareil objet. Sur ce même sarcophage, les en fants sont de nouveau placés à gauche de Médée, le premier à côté du lit de Creuse et l'autre devant l'arcade; mais la nouveauté réside en ce qu'au lieu de se poursuivre vers la droite dans leur jeu insouc iant, ils regardent Médée; le garçonnet de gauche fait un geste comme pour fuir vers la gauche et d'ailleurs il se tourne en partie souvent à gauche au début d'un panneau et d'où émergent les différents person nagesmythologiques. 26 Là-dessus voir B. Haartev, The Half-Open Door, Odense, 1977, et G. Davies, «The Door Motif in Roman Funerary Sculpture», Papers in Italian Archaeology I, {the Lancaster Seminar, BAR Supp. Series, 41 i), 1978, p. 203-220. 27 Schmidt, Medeasarkophag, p. 29-30. 28 Sur les scènes d'école, voir A. Klein, Child Life in Greek Art, pi. XXVIII, C.A. et XXIX A. 29 Apollonios parle de ce φωριαμοβ, contenant les herbes magiques que Mé dée apporte en quittant le palais de Colchide; pour ce détail voir notre chapitre concernant la mort de Creuse.
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dans cette direction. Les enfants ne se réfugient pas donc à l'int érieur de la maison (qui serait celle de Creuse), mais tout simplement vers notre gauche (vers leur droite), alors qu'à leur gauche (à la droite du spectateur) les attend la mort30. D'autre part, la scène comporte plusieurs personnages : un homme barbu d'un certain âge se tient à gauche de Médée, à côté du pilier, entre Médée et les enfants. C'est le pédagogue qui n'est pas i nconnu dans l'iconographie de l'épisode31. Essaie-t-il de sa main droite, que l'on aperçoit faire un geste, d'empêcher l'abominable crime? La peinture murale32 nous donne les premiers exemples du pédagogue présent à côte de Médée préméditant de tuer ses enfants, un fragment de céramique sigillée33 représente aussi le pédagogue, alors que sur le fragment de sarcophage d'Ostie (n° 23, fig. 39) le
30 Dans l'antiquité on n'attribuait pas la même valeur à la gauche ou à la droite. La gauche représentait la faiblesse, la maladresse, voir le défavorable, alors qu'au contraire la droite signifiait la force, le bon, le favorable, voir làdessus W. Deonna, le symbolisme de l'œil, Paris, 1965, p. 197. Ce n'est peut-être pas un hasard que Jason en Colchide attaque d'abord le taureau qui se trouve à sa droite, selon Apollonios, (Arg., Ill, 1306). 31 Nous ne suivons pas Croisille, Poésie et art, p. 58, qui affirme que le péda gogue apparaît seulement sur les peintures de Pompéi. Schmidt, op. cit., p. 31 s itue le pédagogue parmi les figures de spectateurs qui sont déjà très nombreux sur cette cuve. 32 1. Pompei R. VI, 9, 6-7. Naples Musée National 8977. Vers 70. K. Schefold, Die Wände Pompejis, Berlin, 1957, p. 4; Croisille, Poésie et art, p. 50, pi. 13. Médée est à droite de la scène et tient l'épée dans son fourreau de la main gauche. L'autre main repose tranquillement sur la poignée de l'épée. Elle tourne légèr ementla tête vers la gauche, où se trouvent ses enfants, mais son expression reste froide. S'apprête-elle à dégainer pour les tuer? Pourtant la figure n'est animée d'aucun mouvement. Les enfants jouent aux osselets à gauche sur un autel (?). Derrière eux, figure, dans l'ouverture d'une porte, le pédagogue qui suit leur jeu d'un regard fixe. 33 2. Fragment de céramique sigillée. De Mandeure (Doubs). Y. Jeannin, «Lampe et lot de céramiques de la fin du 1er siècle récueillis à Mandeure (Doubs)», Rev Arch de l'Est et du Centre Est XVII, 1966, p. 250-259. La scène pour le nombre des personnages, se rapproche de la peinture, mais elle garde son i ndépendance pour leur emplacement. Médée se trouve à gauche, tenant de ses deux mains jointes sur le ventre l'épée. Elle tourne également la tête vers la gauche, alors que les enfants se tiennent enlacés à droite. A l'arrière plan, au centre de la métope, figure le pédagogue. Pratiquement le même schéma (enfants rapprochés de Médée) a été utilisé sur les sarcophages. L'identification de la scène est incertaine sur une mosaïque. Antioche sur l'Oronte, maison du pavement rouge. Musée d'Hutikia. IIe siècle de notre ère. D. Levi, Antioch Mosaic Pavements, Princeton-Londres, 1947, p. 83-85, pi. XIII, a. Trois adultes et un enfant composent la scène. De Médée qui se trouve à droite, il ne reste plus qu'un peu de vêtement, les pieds, ainsi qu'une partie de la tête. L'en fant à gauche regarde vers Médée. Aucun attribut n'est conservé. La scène a été également interprétée comme représentant Andromaque et Astyanax.
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jeune âge de l'homme juste à côté du pilier d'arcade ne nous autorise pas de l'identifier comme le pédagogue34; il s'agit peut-être de Jason. A quelle scène appartiennent les deux femmes qui se trouvent immédiatement à droite du lit de Creuse? Schmidt35 pense qu'elles appartiennent à la scène de la mort de Creuse. Mais on ne peut né gliger le fait que la femme du fond est tournée vers la droite, vers Médée donc, ainsi que l'autre femme (probablement une nourrice) qui tout en gesticulant de la main droite, pose les doigts de sa main gauche sur la tête de l'enfant qui se trouve devant elle. Ces femmes sont alors en rapport direct avec les événements qui se passent à droite; pourtant, derrière elles, est suspendu le παραπέτασμα de la chambre nuptiale de Creuse. Les protagonistes (Médée et les enfants) se placent au premier plan, les figures du fond (pédagogue-nourrice) sont porteuses de sens, pour le contenu réel de la scène. Il s'agit de ceux qui, selon les textes, connaissant le tempérament de Médée et ses projets, ac compagnent les enfants dans leurs occupations, à l'école, à la palestre et surveillent Médée avec beaucoup d'angoisse. Leurs attitudes sont différenciées : la femme du fond observe, à moitié cachée dans l'obs curité de l'arcade; la nourrice se lamente déjà de ce qu'elle voit venir, elle pose sa main sur la tête d'un des enfants comme pour le protéger; le pédagogue qui, à moitié encore dans le passage de l'arcade, se trouve néanmoins près de Médée, est attentif et anxieux lui-aussi. Tout cela a pour effet d'accentuer le réalisme de la scène et rend en core plus redoutable la figure énorme et glacée de Médée, plongée dans d'horribles pensées exprimées par son mouvement lent. Justement, regardons cette Médée qui s'apprête à égorger ses en fants : elle est représentée de manière uniforme sur tous les pan neaux. Toujours debout, elle est vue de face, mais tournant la tête 34 Sur le fragment d'Ostie n° 23.b, fig. 38, 39), on aperçoit à gauche une femme vue de face dont juste le torse est conservé; elle est habillée d'un chiton à manches, avec une ceinture sous sa poitrine. Le fond de la scène est aussi orné d'un παραπέτασμα. A droite à côté du gros nœud formé par l'étoffe se trouve une arcade dont sont conservés la partie haute avec un des piliers et le chapiteau. Un homme dont la tête subsiste, vu de profil vers la droite apparaît dans l'ouverture de l'arcade, le fragment ferait partie de la scène de la mort de Creuse, et celle du meurtre des enfants. La femme a le même vêtement et le même emplacement que son homologue de la cuve de Bale, fig. 42 sauf qu'ici elle semble être tournée vers la gauche, vers Creuse donc et non pas vers Médée. L'arcade, comme sur la cuve de Bâle, fait la transition entre les deux scènes. Le jeune âge de l'homme (qui f igure juste à droite et semble intéressé, comme sur la cuve de Bâle, par la scène de droite), ne nous permet pas de l'identifier au pédagogue. Le cratère n° 20 nous autorise à penser qu'il s'agit peut-être de Jason. 35 Selon Schmidt, Medeasarkophag, p. 28-30 la figure de la vieille femme, à la bouche grande ouverte, serait la personnification de Γολολυγή dont il est ques tion dans Euripide, Médée, 1173.
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vers la gauche36. Elle est habillée d'un chiton léger, sans manches, avec une ceinture sous la poitrine et d'un manteau dont un pan passe de l'épaule autour du bras gauche, tandis que l'autre pan s'enroule comme une large ceinture autour des hanches. Sur les panneaux du Louvre et de Bâle (n° 4, 24), le chiton laisse nu le sein gauche, alors que sur celui de Prétextât (n° 12) il est bouffant autour du buste. Elle a les cheveux déliés sur les épaules et porte souvent un bandeau. De la main gauche elle tient le fourreau, tandis que la droite, tendue en avant, elle brandit l'épée, comme sur une série restreinte des gemmes d'époque impériale37. Evidemment, l'arme est détériorée sur plu sieurs exemplaires. Sur le panneau de Prétextât, comme jadis sur ce lui de Turin, elle tient de la main gauche l'épée dans son fourreau. Médee regarde ses enfants, en brandissant l'épée; elle se prépare psy chologiquement à commettre l'infanticide, tandis qu'eux ne se dou tant de rien, continuent à s'amuser tranquillement. Comme on l'a dé jà vu, seule la cuve de Bâle montre un mouvement d'angoisse et de fuite de la part des enfants; on peut se demander si le visage de Médée exprimait également de façon plus marquée ses pensées. Cependant la figure de Médée dans cette scène, malgré une iconographie bien établie, pose un problème. Sur la cuve d'Ancóne (n° 20, fig. 31), le tableau comporte deux figures féminines. Une pre36 Médée tourne toujours la tête vers la gauche, sauf sur le sarcophage de Rome MN Inv. 222 (n° 21, fig. 32) où son visage est vu de face. 37 Particularité du panneau du Louvre (n° 4) : Médée tient un pan de sa dra perie de sa main droite, à la place de l'épée. Série des gemmes : 3. Pierre gravée. Berlin Inv. 4354 (mais aussi deux ré pliques Inv. 4355, 4356). Ier siècle de notre ère. Voir : Antike Gemmen II, p. 180, pi. 37 n° 42. Médée, de face, se trouve à gauche, tenant l'épée dans son fourreau; ses mains sont croisées sur le ventre. A droite les enfants jouent sur un autel dé coré d'une branche. Derrière l'autel, se trouve une colonne surmontée d'une f igure de Triton. 4. Camée, en sardoine. Paris, Cabinet des Médailles n° 146. Epoque impér iale. Richter, Gems, II, p. 146 n° 321. La composition diffère de la précédente, seulement pour la figure de Médée qui, est ici vue de profil. Les enfants sont assis aux pieds d'une colonne surmontée d'un vase. La présence de l'autel et de la co lonne, comme l'attitude de Médée et celle des enfants, rapprochent ces deux gemmes de la grande peinture. 5. Pierre gravée. Florence. Ier siècle de notre ère, Antike Gemmen II, p. 180, pi. 37 n° 44. Médée est à droite vue de face, tenant des deux mains l'épée; mais elle est un peu penchée en avant, un mouvement se dessine sur le bas de son vête ment. Elle tourne la tête vers la gauche, ce qui suggère qu'elle va passer à l'acte d'un instant à l'autre. Les enfants sont sur l'autel, au-dessus duquel est supendu un bouclier orné d'un gorgoneion. Cette gemme peut être mise en rapport aves les vases du IVe siècle avant notre ère. 6. Gemme, en sardoine. Lieu de conservation actuelle inconnu. 1er siècle de notre ère. Antike Gemmen II, p. 121, pi. 24 n° 43. Médée, de profil, tient une épée des deux mains. Devant elle, un seul enfant lève les bras, dans une attitude d'im ploration.
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mière à gauche, aux pieds de laquelle les enfants poursuivent leurs jeux, comme sur tant d'autres exemplaires. Cette femme porte un chiton sans manches, elle a les cheveux déliés sur les épaules, elle est vue de face tandis que sa tête se tourne de manière un peu farouche vers la droite. Elle porte un objet oblong dans la main gauche que Robert38 interprète comme un couteau ou un jouet d'enfant, tandis que Schmidt39 pense à une guirlande. Elle regarde en direction d'une autre femme qui a tout à fait les caractéristiques d'une Médée (ha bit, mouvement de la tête et des bras) et qui est d'ailleurs semblables à la Médée des panneaux du Louvre, de Mantoue, de Naples, de Rome MN Inv. 75248, et du couvercle du Vatican (n° 4, 3, 22, 8, 9). La première femme a été interprétée comme une servante, gar dienne des enfants, et la seconde comme Médée se préparant à commettre l'infanticide. C'est l'unique fois où la scène se présente de cette manière sur un sarcophage, mais cela pourrait être la clé pour comprendre une statue funéraire provenant d'Arles40 représentant le même sujet fig. 63. Cette statue, à cause du mouvement de la femme vers l'extérieur, comme si elle voulait protéger les enfants d'un dang er, et en raison du mouvement de refuge des enfants vers la figure centrale, a été identifiée comme Thusnelda, la femme du chef ger main Arminius dont parle Strabon (VII, 1, 4). Or, comme nous ve nons de le constater, sur le panneau d'Ancóne, où figurent deux 38 Sur cet objet, voir ASR, II, n° 199. 39 M. Schmidt, ibid., p. 31 η. 44. 40 7. Groupe probablement funéraire en calcaire, au Musée de l'Arles Anti que, Inv. Fan 92.00.445 trouvé en 1782 dans le cimetière du Haut Empire qui bor dait la voie d'Aix, aux pieds du rempart Est de la cité, fig. 62. H. 122 cm. Date : IIedébut du IIIe siècle de notre ère. Voir : E. Espérandieu, Recueil général, I, p. 101 n° 143; H. Schoppa, Die Kunst der Römerzeit in Gallien, Germanien u. Britannien, Munich, 1957, p. 108; G. Caputo, «Thusnelda combattente non Medea», la parola del passato 52, 1957, p. 60-65; F. Benoit, «La légende de Médée à Arles et à Mars eille», RA, 1959, II, p. 137-146; J.M.C. Toynbee, «Greek Myth in Roman Stone», Latomus 36, 1977, p. 395-396. V. Gaggadis-Robin, «Observations sur la statue de Médée à Arles», Mél. C. Vatin, Aix-en-Provence, à paraître. La composition est simple et la femme qui est la figure centrale est vue de trois quarts vers la gauche, la tête tournée de profil. De la main droite elle tire l'épée du fourreau qu'elle tient de la main gauche. Sa tunique, ornée à une de ses pointes d'un pompon, glisse sur son épaule et le manteau lui enserre le corps de très près. De chaque côté du personnage, au niveau de ses jambes, est représenté un garçonnet agenouillé et tourné vers l'extérieur, regardant le spectateur de face et s'agrippant au vêtement de la femme. Celui de droite porte une petite tunique et lève son bras doit vers la femme, tandis que celui de gauche est nu et essaie de se couvrir du manteau de la femme. Le groupe est heureusement équilibré, le mouvement à la fois vers la femme et vers l'extérieur qui lie les trois personnages crée une forte expression dramatique. Les plis du vêtement de la femme, bien qu'ils suivent le mouvement du corps, restent plats, sans dessin nerveux, mais l'œuvre dans son ensemble est quand même impressionnante et rigoureuse. G. Caputo, op. cit., interprète le sujet comme Thusnelda défendant ses enfants.
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femmes, celle de gauche se tourne vers Médée dans une attitude pro tectrice. Nous pensons qu'en un temps antérieur à la création des sarcophages (époque hellénistique tardive?), il y a eu des œuvres (peinte sous sculptées) qui représentaient un groupe composé de Médée voulant tuer ses enfants et d'une autre figure essayant de les protéger41. Ce groupe serait à l'origine également des œuvres où in tervient le pédagogue. Il est impossible de déterminer si ces œuvres relevaient d'une tradition littéraire particulière et perdue pour nous42, ou s'il s'agit seulement de créations de l'art figuré. La statue d'Arles, d'époque tardive, produite par un atelier provincial de sculpture funéraire très actif43, représente, à notre avis, le mélange de ces deux types (Médée meurtrière, femme protectrice). Cela donne cette ambiance particulière à l'œuvre qui la rend douteuse au point de vue iconographique au premier abord. La figure féminine pourrait ne pas être Médée mais la protectrice des enfants (d'où leur mouvement de refuge vers elle); elle a pourtant hérité de Médée l'épée. Son habit avec une manche qui glisse de l'épaule et le manteau descendant bas, drapé près du corps est différent de la Médée de cette scène, aussi bien dans la peinture que sur les sarcophages, qui a les bras libres. Sur deux reliefs provinciaux d'Intercisa, en Pannonie Inférieure44, 41 Des personnages dans des attitudes semblables de protection figurent sur les sarcophages de Bale n° 24, d'Antalya n° 11 et sur le trapézophore de Dion, voir ci-dessous note 65. 42 Chez Euripide, Médée, v. 1275-76 quand les enfants crient au secours, le chœur est prêt à intervenir. Ce détail aurait pu donner naissance à ce type de scène, pour estomper peut-être la cruauté de l'acte de Médée. Nous ne sommes donc pas d'accord avec P. Ghiron-Bistagne, «les avatars de la légende de Médée dans la tragédie post-euripidéenne et à l'époque gallo-romaine», Cahiers du GITA n° 2, 1986, p. 121-139, qui place la statue d'Arles dans une série qu'elle intitule «le suicide de la barbare». Rien à aucun moment ne démontre que Médée se suicide. Nous pensons que la statue d'Arles est une statue funéraire (puisqu'elle a été trou véedans le cimetière impérial), inspirée de l'iconographie des sarcophages, où la figure de Médée retrouve son symbolisme, plutôt qu'une «adaptation gallo-r omainedes combats entre Grecs (ou Romains) et barbares». 43 Voir : P. A. Février, «Sarcophages d'Arles», Congrès archéologique du Pays d'Arles, Paris, 1979, p. 317-359. 44 8. Relief (funéraire?) en calcaire. Fig. 64. Budapest, Musée des Beaux Arts. Inv. 16.1906.6. trouvé à Intercisa, Dunapelte (Pannonie Inférieure). H. 85cm; L. 63cm; 1. 20cm. Le relief est assez endommagé. Il y a des traces de couleur rouge sur les cheveux de Médée. Date : début IIe-milieu IIIe siècle de notre ère. Voir Archaeologica Hunganca XXXIII, 1954, p. 308 n° 193, pi. 67, fig. 2; J. M. C. Toynbee, «Greek Myth in roman Stone», Latomus 36, 1977, p. 395, iv. Il en reste la figure centrale de Médée, conservée jusqu'aux genoux. Elle est vue de trois quarts, mais sa tête est vue de face; elle tient l'épée dans sa main droite en la dirigeant vers son flanc gauche. Elle est habillée d'une tunique qui laisse libre son épaule gauche et d'un manteau drapé autour de ses hanches et autour de son bras gauche. Ce qui est étonnant dans ce personnage, c'est sa coiffure, de couleur rousse; elle est
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fig. 64 et de Kusel, en Germanie Supérieure fig. 6545, l'image de Mé-
composée d'un chignon, les cheveux sont relevés sur le haut de la tête où laissés libres, ils forment deux boucles en forme de volutes. C'est une coiffure que Médée n'a pas l'habitude de porter. En bas à droite il y a les traces d'un enfant, la tête et une main levées. L'exécution de l'œuvre est assez lourde. La catégorie du matériel à laquelle appartient ce relief est difficile à cerner. Le fait que la figure semble isolée et l'épaisseur du panneau peuvent nous mener vers les édicules funéraires. Nous remarquons que ce document ainsi que le relief n° 24, note 75 sont isolés, à cause de leurs formats et non de leur iconographie, et qu'ils proviennent tous deux de la province de Pannonie, l'un d'Intercisa, l'autre de Gorsium, villes dis tantes de trente km. Des recherches récentes ont montré le rapport étroit entre Intercisa et Gorsium, ainsi que l'éventuelle existence d'un sanctuaire qui se situe raità Gorsium, voir Barkoczi L., Az intercisai mitologikus es allatjelenetes dombrormürek idörendje es felhasznalasa, Archaeologiai Ertesitö 111, 1984, p. 170193). Les reliefs sculptés apparaissent à Intercisa au début du IIe siècle de notre ère; à ce moment et au IIIe siècle nous constatons l'usage de ces reliefs dans les tombes, en même temps qu'ils servent de décor aux édicules funéraires. Le maté riauviendrait de Gorsium car il n'y a aucune carrière de pierre à 40 km autour d'Intercisa. La fondation de ces villes camps datent du règne de Trajan (98-117). Lors d'une reconstruction vers la fin du IIe siècle on réutilisa le matériel de Gor sium. Sous Valerien en 260 eut lieu une deuxième destruction. Les reliefs à sujets mythologiques datent du IIe siècle et peuvent être mis également en rapport avec la commémoration en 147 sous Antonin le Pieux, des 900 ans de la fondation de Rome. A la lumière de cette nouvelle hypothèse, nos deux documents, ainsi que d'autres à sujets mythologiques provenant du même lieu, pourraient appartenir au décor architectural du sanctuaire et non plus au décor funéraire. Cette hypo thèse est très interessante, mais difficile à démontrer actuellement, par manque de précisions topographiques. 45 9. Relief fragmentaire funéraire(?) en grès rougeatre, fig. 65. Canton de Kusel (Germanie Supérieure), à l'Ouest de Heidelberg. Emmuré dans la nef gauche de l'église de St-Médard. H. 83cm; L. 113cm; 1. 23cm; épaisseur du relief 3cm. Le fragment conserve en partie ses bords inférieur et supérieur qui sont des bandeaux larges et plats. Le relief est cassé en deux dans le sens horizontal. L'état de conservation n'est pas très bon, mais la scène reste lisible. Date : début IIIe siècle de notre ère. Voir : E. Künzl, «Zwei Reliefs aus der Germania Superior : ar chaisierende Minerva und Fragment eines Medeazyklus», BJb., 173, 1973, p. 118131; RS, p. 300 n. 1; H. Cüppers, Die Römer in Rheinhnd-Pfak, Stuttgart, 1990, p. 190, fig. 100. Le fragment comporte deux scènes du cycle de Médée. La première à gauche représente Médée préméditant de tuer ses enfants. A gauche, nous ne distinguons que les hanches et les jambes, d'un garçon nu, vu de face immobile, à côté de lui se trouve une femme, vue presque de face dont la tête manque. Elle est vêtue d'une longue tunique. Sa jambe gauche est d'appui tandis que l'autre est l égèrement dégagée vers la gauche. La figure nous donne l'impression d'être légèr ementtournée vers la droite. Elle porte dans la main droite une épée et dans la main gauche un objet oblong (le fourreau selon E. Künzl) que nous distinguons mal à cause de l'état du relief. Au point de vue du modelé, et du traitement des surfaces, ce relief est beaucoup plus proche des œuvres graphiques que des reliefs de sarcophages. Si l'on essaie de retrouver le type de monument auquel appart ientce document, en considérant les deux bandeaux larges qui encadrent le re lief, on peut le comparer à la stèle de Iucundus de Mayence, (voir Espérandieu, Recueil général, 7, p. 334-335 n° 5824 : il s'agit d'une stèle à fronton, une partie pour l'inscription et une autre en bas pour le relief H. 158cm; L. 72cm) considé-
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dèe est directement inspirée des sarcophages, quant à la composit ion et aux attributs. Pourtant, sur le relief de Pannonie daté du IIe siècle de notre ère, Médée est tout à fait impressionnante. Sa tête ronde, bien pleine et sa coiffure inhabituelle lui donnent un air enjô leur et sympathique. Ses grands yeux ouverts et surtout la position de face de son visage la rendent très expressive et beaucoup plus v ivante qu'on la voit sur les sarcophages. Les trois rondes-bosses tardives et provinciales d'Aquincum46, fig. 66, d'Intercisa fig. 6747, et de Graz fig. 6848, sont très proches des rée par H. Gabelmann comme l'une des variantes des stèles de la région du Rhin; voir H. Gabelmann, «Die Typen der römischen Grabstelen am Rhein», Bjb 172, 1972, p. 65-140 surtout p. 69 fig. 4. Mais on s'aperçoit vite que la longueur du fragment, de 113cm, est excessive pour une stèle. La stèle de Iucundus a une lon gueur de 72cm seulement. S'agirait-il plutôt d'un fragment de sarcophage (d'en fant)? La liste des sarcophages de Germanie est fort courte, et surtout ceux à su jet mythologique sont rares, voir RS, p. 300-303. 46 10. Petit groupe en calcaire, fig. 66. Budapest. Torténeti Museum. Inv. Kat. 64.11.156. Trouvé à Aquincum, au cimetière impérial de Filatori. H. 81cm. Il est conservée avec sa base et en assez bon état, mais la tête du personnage manque. Date : IIe-IIIe siècle de notre ère. Voir V. Kuzsinszky, Aquincum, Budapest, 1934, p. 105-106, n° 11, fig. 50; G. Erdelyi, A Romai Köfaragas es Köszobrassat Magyar ror szagon, 1974, fig. 193; J. M. C. Toynbee, «Greek Myth in roman Stone», Latomus 36, 1977, p. 394, i. Médée est représentée à droite, vue de face; dans sa main gauche elle tient une très longue épée appuyée sur son épaule gauche; sa tête, qui manque, devait être tournée vers la gauche. Elle est habillée d'un chiton à cein ture haute et d'un manteau drapé autour des hanches; de son bras gauche, elle tient les deux extrémités de son manteau au niveau de son ventre. Le pan gauche du manteau forme un gros pli en diagonale à partir du ventre vers le genou qui, prolonge la ligne de l'épée. A gauche se trouvent les deux garçonnets nus, vus de face; ils sont blottis l'un contre l'autre. Ils se tiennent par l'épaule et chacun d'eux fléchit sa jambe placée à l'intérieur vers l'extérieur, ce qui donne de l'équilibre à la composition et crée une curieuse impression de nonchalance et d'indifférence par rapport au destin qu'on leur connaît. 47 11. Fragment d'un petit groupe funéraire(?) en pierre, fig. 67. Budapest. Musée des Beaux-arts. Inv. Itsz 62.114.1 Trouvé aux environs d'Intercisa (Dunapentele). H. 54cm; L. 38 cm; 1. 15cm. L'œuvre est très fragmentaire; la figure centrale sans tête est conservée jusqu'aux genoux, les deux petits enfants qui l'e ncadrent sont aussi endommagés. Date : IIe-IIIe siècle de notre ère. Voir : G. Erdel yi,op. cit., fig. 194; J. M. C. Toynbee, «Greek Myth in Roman Stone», Latomus 36, 1977, p. 394, ii. Médée en est la figure axiale. Vue de face, elle porte une tu nique et un manteau qui couvre ses épaules et vient se draper sur son ventre et autour du bras gauche. Des ses deux mains libres, elle tient l'épée dans son four reau appuyé contre l'épaule gauche. De chaque côté du personnage se trouve un petit garçon blotti contre la femme. Tout deux sont habillés d'une tunique et lèvent une main implorante vers Médée. 48 12. Groupe, probablement funéraire en marbre, fig. 68. Graz, Lapidarium, dans le parc du palais Eggenberg. Inv. Lapidarium n° 91. Trouvé à Poetovio (Ptuj). H. 79cm; L. 41cm; 1. 13cm à la base. La figure de droite est assez bien conservée, mais la tête manque, en revanche les personnages de gauche sont très fragmentaires. Date : début du IIe-milieu du IIIe siècle de notre ère. Voir : S. Ferr i,Arte romana sul Danubio, Milan, 1933, p. 103-4, fig. 106; J. M. C. Toynbee,
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sarcophages quant aux enfants et à l'attitude de Médée. Pourtant le groupe femme/enfant remonte au Ve siècle avant notre ère, avec la Proche et Itys du Musée de l'Acropole d'Athènes 1358, probablement d'Alcamène, (voir H. Knell, Antike Plastik XVII 1, 1978, pi. 1-9). La Médée incertaine de Florence fig. 6949 peut prendre un sens particulier si on la compare à la Péliade pensive des reliefs à trois f igures. En effet l'attitude du haut du corps - position des bras, mou vement de la tête - la rapproche de cette figure et convient à un ori ginal grec de la fin du Ve siècle. L'épée tenue par le personnage et la célébrité du relief ont pu provoquer la confusion; par ailleurs la Mé dée de Florence a le sein gauche dénudé, comme sur les sarcophages de Bale (n° 24) et du Louvre (n° 4). L'image de Médée pensive ou hésitante est donc très inspirée de «Greek Myth in Roman Stone», Latomus 36, 1977, p. 395 iii; Croisille, Poésie et art, p. 48 n. 158. Médée est représentée à droite, vue de face, la jambe gauche l égèrement fléchie en arrière. Elle tient l'épée dans son fourreau à deux mains, sur son flanc gauche. Elle porte une tunique et un manteau qui est placé sur l'épaule gauche et autour du bras. A gauche se trouvent les traces des enfants trop in formes pour pouvoir être décrites avec exactitude. Il nous semble que celui qui est plus près de Médée et qui est vu de face, tient dans sa main gauche un petit arc. La composition suit celle des sarcophages, mais le travail est assez lourd, le bras droit de Médée dirigé vers notre droite est d'un modelé maladroit. La jambe gauche fléchie anime un peu la draperie, mais les plus restent épais et schémat iques. 49 13. Statue en marbre. Florence, Musée (Loggia dei Lanzi). Fig. 69. Date : IP-IIP siècle, copie romaine d'un original grec de la fin du Ve siècle avant notre ère. Voir W. Amelung, Führer durch die Antiken in Florenz, Munich, 1897, p. 10-12 n° 6; Reinach, Répertoire, II, 1, p. 507 n° 7; R. Carpenter, «Observations on famil iarstatuary im Rome. The Peliad relief in the Lateran», Mem. Am. Ac. Rome 18, 1941, p. 62-70, pi. 21b; Simon, «Medeadarstallungen», Gymnasion 60, 1954, p. 212 n. 60; F. Benoit, «La légende de Médée à Arles et à Marseille», RA 1959, II, p. 138; Croisille, Poésie et art, p. 51 n. 177. L'œuvre représente une femme vue de face, la tête tournée, légèrement baissée vers la gauche. Elle a les jambes croisées, celle de droite en arrière, l'autre passée au premier plan. Le bras gauche repose sur le ventre, tandis que le droit est plié; le coude s'appuie sur la main gauche, et la main fermée - qui devait tenir un objet - se dirige vers le visage. Cette restitution est permise, bien que l'avant-bras soit moderne, car si la main était dirigée vers le menton, il y en aurait des traces. Elle porte un long chiton qui laisse le sein gauche découvert et un manteau qui, de l'épaule gauche descend sur le flanc et vient se placer à droite au-dessus du bras gauche. Elle porte également une fine bandelette attachée dans ses cheveux longs et des sandales. Cette femme fut ident ifiée d'abord comme Thusnelda, mais R. Carpenter fait remarquer que son habit est tout à fait grec et que des chaussures de même forme sont portées par Médée infanticide sur le vase de Canosa à Munich (notre n° 20, note 72). Il l'identifie à Médée par comparaison avec la Médée méditant le meurtre de ses enfants et avec la Péliade du relief de trois figures du Vatican. Nous sommes du même avis : son expression soucieuse et concentrée démontre la gravité de son acte. Outre les a rguments avancés par R. Carpenter, on doit aussi considérer que l'histoire de Thusnelda était trop peu connue pour inspirer des œuvres d'art de cette qualité et par la suite intéresser les copistes. Pourtant Simon, op. cit., n'accepte pas cet avis.
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la tragédie d'Euripide. Elle apparaît d'abord sur la peinture murale au 1er siècle de notre ère. Un siècle plus tard, le même type est repris par les sculpteurs pour les reliefs des sarcophages, et dans la ronde bosse. Pourtant, malgré l'influence évidente de la grande peinture sur les reliefs des sarcophages, quelques arrangements ont été opé rés pour la composition des panneaux. Le peu de place dont dispose la scène sur les reliefs suscite, une économie de composition exprimée par le minimum de person nages, Médée et les enfants. Le sarcophage de Bâle n° 24 fig. 40, à cause de la présence du pédagogue derrière Médée, est plus proche de la grande peinture que les autres panneaux. Le pédagogue est un personnage du théâtre, présent également sur les vases et les gemmes50. Les enfants occupés à leur jeu, sont presque toujours pla cés tous deux à gauche de Médée, point qui rapproche également les sarcophages de la grande peinture; on connaît une seule exception à cette règle : le couvercle du sarcophage de Marseille n° 25, fig. 48, où les enfants implorants encadrent Médée, mais à notre avis c'est la forme triangulaire qui nécessite cette disposition. Il faut considérer aussi que Médée tourne la tête vers la gauche, tout comme sur la peinture. La scène sur les sarcophages semble aussi calme que dans la grande peinture. La figure froide de Médée n'exprime ses pensées par aucun mouvement précipité; seule l'épée est un élément frap pant dans cette pose presque solennelle. Cependant un détail dif férencie les reliefs de sarcophages, comme nous l'avons déjà signalé, Médée y tient dans sa main gauche le fourreau et dans la main droite l'épée51. L'arme est donc dégainée et prête à servir. Alors que dans la peinture Médée est plongée dans des pensées lugubres, où l'on perçoit comme un écho de son monologue au théâtre, sur les re liefs cette scène calme n'est séparée que d'un moment du meurtre qui va suivre. Dans la peinture, la présence de l'architecture et l'autel domestique, situent la scène dans la maison de Médée, point qui nous rapproche d'Euripide52; en revanche nous avons vu que sur les sarcophages, la localisation du lieu du crime reste vague. Médée pensive et assise est toujours accompagnée de ses en fants et du pédagogue. Le sujet figure sur un petit sarcophage d'en-
50 Croisille, Poésie et art, affirme par erreur que le pédagogue apparaît seul ement sur la peinture de Pompéi. 51 L'épée est conservée sur les panneaux de Rome MN 75248 n° 8, fig. 10, Bâle n° 24, fig. 40, 42, Mantoue n° 3, fig. 5, sur le fragment jadis à Cannes n° 14, fig. 25 et sur le couvercle du Vatican n° 9, fig. 13. Le panneau du Louvre n° 5, fig. 22 se rapproche du couvercle de Marseille n° 25, fig. 48 par une petite particulari té : Médée tient à la place de l'épée un bout de son manteau. 52 On ne possède pas d'image illustrant la version de Sénèque, où Médée tue l'un des enfants sur le toit de sa maison.
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fant d'origine provincial, issu d'un atelier phrygien53 et conservé à Antalya (n° 11, fig. 22), sur la face principale duquel figure une scène qui manifeste du goût pour l'art de la capitale. Aux quatre angles du sarcophages existent des pilastres cannelés avec chapiteau à décor végétal et base moulurée. Les deux moulures lesbiques renversées qui décorent le socle de la cuve - décorées de feuilles d'eau - consti tuent, paraît-il, un motif étranger à l'atelier54. La scène comporte sept personnages dont quatre femmes, un homme et deux petits gar çons. La composition est claire; à chaque extrémité, un groupe composé d'un adulte avec un enfant (à gauche une femme agenouill ée se penche pour prendre dans ses bras un enfant, à droite un homme et un enfant partent vers la droite) et au centre une figure f éminine assise encadrée par une jeune femme qui lui tourne le dos. Sur la face arrière : Kinderhomos entre un Eros dansant à gauche et un putto à droite, tenant une bandelette à boules. Sur les petits cô tés : à gauche deux Erotes luttant, à droite un putto portant massue et leonté. En ce qui concerne l'interprétation iconographique de cette scène, l'avis de Wiegartz55 a été généralement admis, que la face principale de la cuve d'Antalya représentait le mythe des Niobides. La figure féminine centrale serait Niobé qui assiste au meurtre de ses enfants. En revanche, G. Ferrari56 la décrit inexactement sans mentionner l'enfant de la partie droite et l'interprète comme une scène du cycle dionysiaque. L'absence des dieux vengeurs a incité J. Marcadé57 à rechercher dans un autre mythe l'interprétation de la scène. Par ailleurs, le fait que le groupe de gauche rappelle Niobé protégeant sa plus jeune fille ne lui suffit pas pour y voir le mythe des Niobides; en effet la femme assise n'est pas forcement Niobé. On ne peut que constater avec J. Marcadé que les deux enfants semblent terrorisés et qu'ils fuient la femme assise au centre, ce qui l'amène à songer aux exploits meurtriers de Médée : «l'instant le plus dramat iquede l'histoire de Médée, quand pèse sur les fus de Jason la menace de l'infanticide». Médée est la femme assise sur laquelle s'est produit un glissement iconographique puisqu'elle emprunte des éléments du personnage de Creuse, dans la posture assise sur un siège qui a l'a llure d'un trône, d'où la polyvalence de l'image. Quelques observations dans ce sens s'imposent. Premier point :
53 Sur la localisation de l'atelier, voir Waelkens, Dokimeion, p. 52, n° 4. 54 Sur le décor des moulures, voir Waelkens, op. cit., p. 105-107. S'agirait-il d'un choix particulier du client? 55 Voir Wiegartz, Säulensarkophage, p. 62-63, 147, pi. 28. 56 Voir G. Ferrari, // commercio dei sarcophagi asiatici, Rome, 1966, p. 97-98. 57 Marcadé, Είδωλοποιία, ρ. 37.
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à gauche sur la face principale, est représentée une nourrice prenant dans ses bras un petit enfant comme pour le protéger. Les enfants et la nourrice sont des personnages toujours présents dans l'épisode de remise des cadeaux à Creuse, mais évidemment pas dans la même posture, alors que la nourrice est absente des sarcophages des Niobides. Dans les scènes de notre cycle où apparaît la nourrice, on ne remarque pas de liens si étroits entre elle et les enfants. C'est une femme âgée, placée plus ou moins près de Creuse, elle essaie de la disposer favorablement à l'égard des enfants, qui se trouvent à gauche, et apportent les cadeaux. Sur la cuve d'Antalya, la nourrice est jeune, et ses formes généreuses n'ont rien de commun avec le corps maigre de la nourrice de la remise des cadeaux; toutefois leurs chitons glissent de la même manière sur leurs épaules. En observant ces deux personnages serrés par la peur l'un contre l'autre, on se de mande si on ne pourrait pas mettre en rapport la cuve d'Antalya avec la scène du meurtre des enfants sur les sarcophages d'Ancóne et de Bale (n° 20, 24). Non pas qu'on y trouve la nourrice aussi étro itement liée à un enfant58, mais parce que, sur ces deux sarcophages, on sent l'effort pour exprimer une émotion, pour faire ressentir la peur des enfants et de l'entourrage. Par contraste sur les autres sar cophages, cette scène est agencée avec froideur comme une pose. Second point : la figure énigmatique du centre. La femme est as sise sur un siège à pieds moulurés, comme celui de Creuse sur les sarcophages des ateliers de Rome. Sur les exemplaires de Berlin et de Paris (n° 2, 4), il y a la même estrade sous le siège, et sur plusieurs panneaux (Paris, Mantoue, Bâle etc. n° 4, 3, 24), un tabouret de taille variable est glissé sous les pieds de Creuse, comme cela est le cas sur le panneau d'Antalya. La Médée d'Antalya est donc figurée comme Creuse dans la scène de la remise des cadeaux, alors qu'elle est toujours absente de cette scène et que, lors de la préméditation du meurtre des enfants sur les sarcophages issus des ateliers de Rome, elle est toujours de bout. L'attitude des deux femmes est également proche, mais, alors que Creuse pose une main sur le rebord du siège et l'autre sur sa cuisse, ce qui lui donne une attitude calme, nonchalante, la femme 58 Un fait peu banal : le même schéma de la nourrice à moitié agenouillée re cevant dans ses bras un enfant se retrouve sur le sarcophage de Mantoue illus trant l'Ilioupersis, voir ASR, II, n° 63; RMGS, p. 37, n° 32; RS, p. 154-155, n° 165. On y voit dans la partie droite du panneau, au beau milieu du combat, le même groupe nourrice enfant; alors que sur les sarcophages des Niobides, (sarcophage du Vatican), bien qu'il existe des groupes exprimant une émotion aussi forte, on ne trouve pas le même schéma. Pour les sarcophages des Niobides, ASR, III, 3, n° 312-321; RS, p. 169, n° 189-191; sur le sarcophage du Vatican, on aperçoit, à l'extrémité droite du panneau, une femme qui, de ses deux mains, serre contre son corps deux enfants.
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d'
Antalya, Médée est, nous semble-t-il, représentée en un instantané, dans un mouvement qui s'esquisse à peine59. Si l'on essaie de faire abstraction des cassures et d'imaginer la figure complète, on s'aper çoit que le côté gauche de son corps reste encore immobile, alors que son côté droit commence à bouger. Le pied droit glisse de l'e strade et se pose en avant sur le sol60, tandis que de la main droite elle prend appui sur le siège pour se lever. Elle regardait vers notre gauche, vers le groupe nourrice/enfant qui est plus proche d'elle, ce qui, à notre avis, explique au mieux les gestes d'effroi et les mouve ments plus francs que font les autres personnages de la scène. En outre, le fait qu'elle soit vue de face la rend encore plus impressionn ante, et l'on vient à se demander si le sculpteur, bien qu'il ait em prunté le «carton» du personnage de Creuse, ne l'a pas modifié de sa propre initiative, en représentant la femme de face, justement pour marquer une différence entre elle et la figure traditionnelle de Creuse aisément identifiable. Cette femme pourrait être prise pour la morte, grâce à des associations d'idées et d'images très anciennes, déjà sur les stèles funéraires. Les deux jeunes femmes qui se trouvent derrière Médée sont des figures supplémentaires de la scène. Elles ont la même fonction que toutes les femmes qui figurent sur la cuve de Bâle ou d'Ancóne (n° 3, 8). Reste que sur ces exemplaires n'existe pas le mouvement d'éloignement qu'il y a sur la cuve d'Antalya61. A Antalya le mouvement centrifuge exprime davantage la peur qui émane de la femme assise. Les femmes meublent le fond de la scène, mais elles lui confèrent également un aspect réaliste et lient la figure centrale, isolée sur son estrade, aux deux groupes latéraux. Le pédagogue qui emmène l'en fant pour lui éviter la mort, est présent également sur la cuve de Bâle. Ainsi, nous pensons que sur cette scène la femme du centre est Médée et non pas une mère dont les enfants sont morts avant elle62. 59 Pour le mouvement de Médée, voir Marcadé, Είδωλοποίία, ρ. 35. 60 Sur le sarcophage de Bâle, le pied gauche se trouve sur le tabouret alors que le pied droit est posé sur le sol, en passant derrière le gauche. 61 La fille de gauche qui tient son manteau au-dessus de sa tête, gonflé par le vent en forme de voûte, est une figure qu'on rencontre souvent sur les sarco phages des Niobides (Vatican : RS, p. 169, n° 180-191), ou des Leucippides (Vati can: RS, p. 157-158, n° 176); les manteaux gonflent par l'élan de la fuite pour se sauver. Quelques personnages mythologiques tiennent également de telles étoffes, par ex. Séléné descendant de son char sur les sarcophages d'Endymion, (Rome, RS, p. 145-146, n° 155-161), ou Demeter (sarcophage de Baltimore), ou Pluton (sarcophage de Vienne), sur les sarcophages de Persephone : RS, p. 175179, n° 203-206. Cette étoffe donc n'est pas exclusivement réservée aux femmes; elle ressemble fort par ailleurs à la voûte céleste et pourrait être dotée d'un sym bolisme Cumont, Symbolisme, p. 78. 62 M. von Strocka, « Sepulkral-Allegorien auf dokimeischen Sarkophagen»,
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Ce n'est pas la mère/Médée qui est la plus importante ici et à qui était destiné le sarcophage, mais les enfants. La scène pourrait avoir une valeur symbolique à cause, selon les sources, de l'héroïsation des enfants de Médée après leur mort. L'endroit où se trame le crime n'est pas davantage précisé. On doit donc imaginer cette scène dans un espace fictif où ne se reconnaît aucun élément matériel, mais où la mise côte à côte de schémas connus et choisis pour tels (et non pas pour leur rapport au mythe), donnent la clé de l'interprétation. La lecture de l'image n'est pas aussi nette que sur les sarcophages des ateliers de Rome, mais il est intéressant de constater une fois de plus l'existence et l'emploi fréquent des fameux «carnets de mod èles» ainsi que la popularité du mythe de Médée. Ce sarcophage est-il un produit local pour un client qui suivait de près les gouts de Rome? On constate que la cuve d'Antalya est datée du milieu du IIe siècle de notre ère, moment où les ateliers qui produisent des sarco phages à Rome s'inspirent du mythe de Médée. Pourrait-il s'agir autrement d'un produit fait pour l'exportation? C'était souvent le cas pour les sarcophages du type de Torre-Nova63, où le sculpteur s'inspirait des œuvres de la capitale et en copiait des schémas parfois sans les comprendre. Il sera difficile de conclure quant à la destination finale de ce sarcophage. Pourtant il ne nous semble pas que le sculpteur ait co pié des schémas seulement pour décorer une surface; il n'y a pas d'a berrations dans la composition, mais plutôt un nouveau souffle sur les images. On fait revivre un vieux mythe en l'illustrant avec des «cartons» qui ne lui sont pas forcément propres, mais qui peuvent être utilisés ensemble. Après la nouvelle interprétation de la scène de la cuve d'Antalya il s'avère donc que Médée ne figure pas assise dans cet épisode seu lement sur les peintures de Pompéi64. Un trapézophore65 de très MWP, 1984, p. 211-213 n. 73 suit Wiegartz, Säulensarkophage, p. 125, 147 et Hirnmelmann, Der «Sarkophag aus Megiste», p. 11 et interprète la femme comme une mère morte avant ses enfants. On a déjà remarqué plus haut que la femme d'An talya était assise sur un siège à pieds moulurés qui, comme celui de Creuse, fait partie d'un mobilier de luxe, il n'a rien à voir avec le scrinium sur lequel est assise la femme de la cuve d'Izmir C 274, C 275 qu'on compare à la Médée d'Antalya. 63 Les sarcophages de Torre Nova étaient exportés notamment vers l'Italie ou la Pamphylie, Waelkens, ibid., p. 50-51. 64 15. Peintures de Pompéi : R. IX, 5, 14-16 (fragmentaire). Musée de Naples 114321, IIP style, vers 10 et 111440, IVe style, vers 75. K. Schefold, Die Wände Pomp ejis, Berlin, 1957, p. 261-262. Même schéma sur les deux peintures : Médée se tient penchée en avant; la main droite soutient la tête, l'autre repose sur les cuisses en tenant l'épée dans son fourreau. A gauche se trouvent les enfants, le pédagogue regarde la scène, penché à une fenêtre. 65 16. Groupe fragmentaire en haut-relief en marbre blanc, décor d'un trapé zophore. Fig. 70-73. Dion, Musée (Macédoine, Grèce), Inv. 3036. Provenant d'une
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bonne execution provenant de Dion (Macédoine, Grèce), fig. 70-73
habitation. H. 70,5cm environ. Il manque la partie droite du groupe, ainsi qu'une partie du socle, les têtes des personnages et le bras droit de la femme assise. Date : Copie du milieu du IIe siècle d'un original datant de la fin du Ve siècledébut du IVe siècle avant notre ère. Voir : J. Marcadé, «Le souvenir possible d'une composition classique grecque dans deux documents d'époque romaine», Kanon, Mél. E. Berger, Bâle, 1988, p. 257-261, fig. 78, 2; Th. Stefanidou-Tiveriou, «Der Medea-Mythos in einer klassizistischen Komposition», AM 106, 1991, p. 282-308, pi. 79-82. Le groupe composé de trois personnages - deux femmes et un enfant - se trouvait sur une base rectangulaire, moulurée elle-même, en avant du pilier por tant le plateau de la table. A gauche, une femme agenouillée qui reçoit dans ses bras un enfant et, à droite, une autre femme assise. La scène est un instantané très touchant. La femme se penche pour accueillir l'enfant, plutôt un gros bébé bien rondelet, saute pour s'accrocher à elle. La femme assise à droite, de proport ions plus grandes, se trouve sur un siège placé sur une estrade; elle disposait également d'un tabouret pour ses pieds. Elle est vue de face, mais ses épaules sont légèrement tournées vers la droite. Son bras gauche prend appui sur la cuisse; dans la main, elle tient un fourreau que l'on aperçoit sous les plis de son manteau (Fig. 72), tandis que l'autre bras est cassé. Le pied gauche placé sur le tabouret; le genou (aujourd'hui cassé) était donc levé haut, la jambe droite allon géeet légèrement tournée vers notre gauche, le pied touchant le sol en avant de l'estrade. Son vêtement est composé d'abord d'une fine tunique qui glisse sur l'avant-bras droit en laissant découverte l'épaule (sur laquelle on aperçoit une mèche ondulée des cheveux), puis d'un manteau qui enveloppe le dos et vient se placer sur les cuisses, tandis que l'autre pan passe sur le bras gauche. Il s'agit d'une œuvre néo-attique de qualité, le travail de surface est très poussé, les plis de la draperie épousent bien le corps, les formes sont riches et gé néreuses. Le groupe très bien sculpté à l'avant, mais sommairement de dos, est un très haut relief fait pour être vu de face, qui perd tout son volume de profil et donne une impression de plat. Etant donné la composition identique du sarco phage d'Antalya, on peut imaginer la présence à droite d'autres personnages, le pédagogue et le deuxième enfant; ainsi peuvent s'expliquer les arrachements à droite au second plan. Par ailleurs, le trapézophore de Dion éclaire le relief d'Antalya. La présumée Médée de Dion tient bien un fourreau dans la main gauche, alors que sur le sa rcophage d'Antalya l'arrachement du marbre nous laissait un doute. Les figures se dessinaient en avant d'un pilier, cassé aujourd'hui, mais dont on voit la trace au revers, derrière le siège de Médée. Ce pilier servait à soutenir un plateau de table, son emplacement à cet endroit assure la position centrale de Médée et autorise tout à fait à supposer l'existence d'un autre groupe à droite. L'appartenance du groupe à un trapézophore peut être vérifiée grâce également à sa base, qui a une forme caractéristique : elle est composée d'un dé rectangulaire assez élevé, placé entre deux listels très saillants et moulurés. A l'angle inférieur gauche on r emarque un allongement du marbre qui continue sur la face latérale et qui n'est autre qu'un des petits pieds qui ornent habituellement les bases des trapézophores. On retrouve une base de forme très semblable d'une part sur une série de statuettes-trapézophores du Bon Pasteur datant du IVe siècle de n.è., du Musée d'Istanbul, Mendel, Catalogue, II, n° 648 (2674), 651 (488) et sur un groupe de Lè da et le Cygne du IIIe siècle, voir Mendel, ibid., Ill, n° 82 (1494); et d'autre part sur une série de trapézophores provenant de Salonique Stefanidou-Tiveriou, Τραπεζοφόρα, η° 4, 15, 25, 26 décorés de sujets mythologiques et datant du IIIe siècle
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datant du IIe siècle de notre ère, vient enrichir la série. C'est un groupe composé de deux femmes dont une assise sur une base rec tangulaire, et d'un enfant. On constate que le sarcophage d'Antalya et le trapézophore de Dion sont bien liés au type de Médée tel qu'il se développe au Ier siècle de notre ère dans la peinture. Un premier point commun consiste dans la représentation de Médée. L'héroïne tient le four reau de la main gauche aussi bien sur la peinture que sur les deux documents sculptés, mais la main droite, qui, sur la peinture, sou tient la tête, sur la sculpture tenait l'épée nue. La scène sculptée représente un moment juste postérieur à celui des peintures; Mé dée n'est plus seulement pensive ou hésitante, mais décidée à commettre le crime, Elle a tiré l'épée et fait un mouvement de sa jambe pour se lever : cela explique l'attitude de la nourrice ou du pédagogue, prêts à sauver, si possible, les enfants. Le pédagogue emmenant les enfants (absent du trapézophore de Dion) constitue le deuxième point. Son type existe également sur le cratère de Po-
(sauf le n° 25 qui est du IVe siècle). La forme de leur base et les quatres petits pieds amènent l'auteur à les attribuer à un atelier d'Asie Mineure StefanidouTiveriou, ibid., p. 19. Pourtant aucun des exemples mentionnés n'a une base aussi bien dessinée que celle du trapézophore de Dion. A Dion, bien que la hauteur de la base soit dans les normes - environ 24cm -, le dé rectangulaire est plus élevé que sur les exemplaires de comparaison et les deux parties saillantes sont très clairement décorées d'un sillon et moulurées, caractéristiques qui n'existent pas non plus sur les exemplaires auxquels on l'a comparé et qui, à notre avis, lui font une place à part. Ce haut relief nèo-attique, de très bonne facture, copiant une œuvre cer tainement attique - une ronde bosse de la fin du Ve siècle - début du IVe siècle avant notre ère, décorait une structure appartennant au mobilier privé. Mendel, Catalogue, II, p. 412-416 n° 648, émettait aussi l'hypothèse, reprise par d'autres, de l'utilisation architectonique de ce genre d'objets. Stefanidou-Tiveriou, Τραπεζοφόρα, p. 14 η. 13 remarque également que les trapézophores étaient faits pour être vus seulement de face : ils étaient placés devant un mur auquel s'appuyait un côté de leur plateau; ainsi était créée une structure stable, ce qui peut nous aider à comprendre la forme évidée du revers de la base. Quelle peut être la significa tion de l'image de Médée comme décor de trapézophore? Sur les documents ro mains (sarcophages, urnes), elle est revêtue d'un symbolisme funéraire. La quali té du traitement de notre groupe que l'on sent très fidèle à l'original, comme la netteté et l'équilibre du dessin de la base (qui justement, à notre avis, la font dis tinguer du tout-venant des bases semblables), pourraient peut-être placer ce do cument en tête de la série des trapézophores du nord de la Grèce. Il s'agit de l'œuvre d'un artiste ou d'un atelier néo-attique en Macédoine qui réunit des él éments d'Asie Mineure (la base) et de l'Attique (le groupe figuré) et qui pose par ailleurs le problème des créations néo-attiques dans la région de Macédoine. Ste fanidou-Tiveriou, ibid., p. 22 remarque que c'est au milieu du IIe siècle que commence l'influence attique sur les ateliers locaux, en même temps que dure l'importation des œuvres attiques.
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marico qui représente la mort de Creuse; c'est encore une preuve du mélange de ces deux scènes sur le sarcophage d'Antalya. Par ailleurs, la figure du pédagogue nous aide à déchiffrer un fra gment de sarcophage66, fig. 74 issu des ateliers de Rome, qui re présentait certainement la même scène et dont il nous a été im possible de repérer la localisation actuelle. Etant donné la hauteur du fragment (55cm), il appartenait probablement à un sarcophage mais il est impossible de déterminer l'emplacement exact du fra gment sur le panneau. Au premier plan on distingue une partie du corps d'un garçon, nu, de face, qui passe sa main sur le dos d'un autre garçon, agenouillé sur une structure moulurée, certainement un autel. Derrière eux se dessinent les plis du manteau d'une f igure, probablement masculine, dont, à droite, subsiste la main gauche, tenant un bâton noueux. C'est le pédagogue, dans une posture tout à fait semblable à celle du sarcophage d'Antalya. L'enfant agenouillé sur l'autel se retrouve dans la même scène, sur la peinture de Pompéi (n° 14). Ce fragment est fort intéressant, car il confirme que le sarcophage d'Antalya n'est pas isolé dans l 'iconographie des sarcophages; de plus il fait le lien entre nos deux documents sculptés et la peinture. Le sarcophage d'Antalya et le trapézophore de Dion s'insèrent alors plus nettement dans l'iconographie de cette scène, et il serait possible d'avancer quelques hypothèses sur le prototype que ces œuvres suivent. Il nous semble que la composition du sarcophage, assez aérée et constituée par trois groupes (nourrice/enfant-Médée-pédagogue/enfant), rapproche cette scène de la grande pein ture grecque, alors que la qualité d'exécution du relief de Dion nous rapproche d'un original grec de la première moitié du IVe siècle avant notre ère. A propos de la grande peinture, nous ne devons pas oublier que dans l'Antiquité, il y avait une peinture de Médée célèbre, œuvre de Timomachos de Byzance67. La représentation de Médée
66 17. Fragment de sarcophage. Il a été trouvé en 1854 à Rome, devant la Porte San Giovanni, entre la via Labicana et la via Tuscolana. Fig. 73. Hauteur : 55cm, largeur : 44cm. K. Dilthey, «Über die Darstellungen der kindermördenen Medea», AZ XXXIII, 1875, p. 63-65, pl. 8, 1. 67 Le peintre Aristolaos de Sicyone, fils de Pausias, avait également peint une Médée selon Pline NH, XXXV, 137. Cette œuvre aurait été peinte entre 338 et 334 avant notre ère, mais le sujet est douteux. Il s'agirait peut-être d'une al légorie politique où Médée symbolisait l'ennemi : voir Reinach, Recueil Milliet2, Paris, 1985, p. 261 n. 1. Sans vouloir participer au débat, qui dépasse le cadre de notre enquête, sur la chronologie de l'activité de Timomachos (voir Meyer, Medeia, p. 24 n. 33-38). On peut considérer que deux théories s'opposent; la
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était le dernier tableau de l'artiste, resté inachevé68. Nombreux sont les vers de l'Anthologie Palatine qui mentionnent cette Médée69; il semble que la peinture de Timomachos représentait l'état psychologique de l'héroïne, sa colère, sa fureur (θυμοβ, λυσσεί), se rapprochant ainsi de celle d'Euripide. Mais, concrètement, nous ignorons tout de la composition de l'œuvre et de l'attitude exacte de Méctée. Toutefois, certains pensent que la Médée de Timomac hos était représentée debout et voient dans une peinture d'Herculanum70, une copie de l'œuvre de Timomachos. Callistrate (Descriptions , 13), décrit une fameuse statue de Mé dée qu'il a vue en Macédoine71; elle représentait Médée armée de son épée - ξίφη φόρος -, en deuil (στολή τις πένθιμος); ses cheveux en désordre montraient son désordre intérieur (ήμελημένη θρίξ το αύχμηρον έπισημαίνουσα). Pourtant cette œuvre n'exprimait pas seulement la fureur et la passion, mais aussi la tendresse et la pi tié. Sans vouloir donner trop d'importance aux informations pas toujours exactes de Callistrate, la localisation de l'œuvre en Macé doine nous fait évidemment songer au groupe de Dion. II. Médée tuant ses enfants ne figure sur aucun sarcophage, en
première place Timomachos dans la première moitié du IIIe siècle avant notre ère, tandis que la seconde, qui semble maintenant moins probable suivant Pline NH XXXV, 136, en fait un contemporain de César; dans ce cas, Timomac hos serait un copiste. A deux reprises Pline NH, XXXV, 26 parle de deux œuvres de Timomachos de Byzance, un Ajax et une Médée que César dédia dans le temple de Venus Génitrix à Rome; en XXXV, 136 il précise que César les acheta 80 talents ce qui a fait penser que Timomachos était contemporain de César. Sur les deux datations de Timomachos, voir Simon, «Medeadarstellungen», Gymnasium, 60, 1954, p. 219 n. 92-93, qui prend part pour la datation haute. En fait la datation du IIIe siècle se confirme, voir également Croisille, Poésie et art, p. 44 n. 133. 68 Sur ce passage de Pline, voir Reinach, Ibid., n° 343. 69 Anthologie Palatine, XIII, 135-139, 143. 70 18. Peinture d'Herculanum. Naples, Musée National 8976. IVe style. Vers 75. K. Schefold, Pompejanische Malerei, Bale, 1952, p. 199, pi. 50; Croisille, Poésie et art, p. 50, pi. 14, 1. Médée figure seule, tenant l'épée dans son fourreau de ses mains jointes sur le ventre; sa tête est tournée vers la gauche. Nous sommes frap pésici par l'attitude angoissée du personnage : les yeux au regard tourmenté, les pouces pressés, le mouvement du corps, expriment son hésitation, son combat intérieur. Cela rapproche cette peinture de la pièce d'Euripide où comme nous l'avons vu, les mêmes sentiments sont exprimés dans un long monologue avant le crime. 71 Eis το xns Μήδειαβ άγαλμα Ειδον και την πολυθρύλητον έν οροις Μακε δόνων Μήδειαν.
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revanche on la retrouve sur des vases72, sur une gemme73, sur une fresque74 et sur un relief provincial75, fig. 75. 72 19. Amphore lucanienne de Noia (Campanie). Paris Bibliothèque Natio nale,Cabinet des Médailles Inv. 876. Peintre du British Museum F223. Entre 350 et 325. A. De Ridder, Catalogue des vases peints de la Bibliothèque nationale, II, Paris, 1902, p. 519 n° 876, pi. 25; A. D. Trendall, Red-figured Vases of Lucania, Ox ford, 1967, p. 325 n° 739. Médée est au centre de l'image, vue de face, debout, por tant un chiton richement décoré et un manteau attaché aux hanches, ainsi que le bonnet phrygien. De la main droite elle tient le fourreau, tandis que de la main gauche tenant l'épée, elle vient de transpercer un de ses fils qui gît mort, renversé sur un autel. De sa blessure à la gorge coule du sang. De la main gauche, Médée tire par les cheveux son autre fils qui essaie de s'enfuir. A droite, en haut de l' image, dans un espace séparé figure un homme barbu et âgé qui regarde la scène en portant sa main sur son front. Il s'agit certainement du pédagogue inquiet. Des bandelettes décorent le haut de la scène. 20. Cratère à volutes de Canosa (Apulie), à figures rouges. Munich (Ant ikensammlung?) Inv. 3296. Peintre de Darius, ou des scènes infernales. H. 117cm; Vers 340-335. Trendall, Cambitoglou, RVA II, p. 553 n° 18/283, pi. 195. La scène se situe dans la partie inférieure gauche de la panse du cratère. Médée, au centre, avance vers la droite, portnat un chiton richement orné et un haut diadème sur la tête. De la main droite, elle tient l'épée, de l'autre elle saisit par les cheveux son fils qui, nu et suppliant, se tient sur un autel. Derrière elle un homme jeune, nu, portant deux lances, s'éloigne en mettant sa main sur la tête d'un autre garçon qui tourne le dos à la scène. Cette fois-ci, il ne s'agit pas de la figure habituelle du pédagogue; les deux lances et l'allure athlétique du personnage pourraient nous aider à identifier Jason. 21. Amphore de Cumes, à figures rouges, à la manière du peintre d'Ixion. Par is, Louvre Κ 300. Vers 325, Trendall, Red-figured Vases of Lucania, Oxford, 1967, p. 338 n° 786, pi. 131, 3. Ici ne figurent que Médée et l'un de ses fils, à qui elle est en train d'enfoncé l'épée sous l'aisselle en le tenant par les cheveux. Médée porte un chiton à manches longues et un manteau drapé autour de ses hanches, une taenia dans les cheveux. Le fond de scène est orné d'une colonnade et d'un autel surmonté d'une statue de figure ailée. 73 22. Gemme. Londres, British Museum Inv. 3185. H. B. Walters, Catalogue of the Engraved Gems and Cameos, Greek, Etruscan and Roman in the British Mu seum, Londres, 1926, p. 303 n° 3185, pi. 32; K. Weitzmann, «Euripides Scenes in Byzantine Art», Hesperia XVIII, 1949, p. 172-175 (pour Médée 168-171), pi. 26, 6. Médée se tient de face au centre de la scène; elle vient juste d'enfoncer l'épée dans la gorge d'un de ses enfants implorant à genoux, tandis que l'autre gît déjà sur le sol. A gauche figure le vieux pédagogue gesticulant. 74 23. Fresque de Pompéi R. DC, 8, 3-6, Maison du Centaure. Naples Musée National. Fin du Ier siècle K. Schefold, Pompejanische Malerei, Bale, 1952, p. 279; Croisille, Poésie et art, p. 51, 61 n. 260, pi. 15, 1. Il s'agit d'une scène théâtrale. Mé dée se trouve à droite, tournée vers la gauche et porte le bonnet phrygien. Dans la main droite elle brandit l'épée nue en direction de ses enfants, tandis que dans la main gauche elle tient le fourreau vide. Le pédagogue figure à gauche avec les en fants effrayés, qu'il essaie de protéger. Ici, Médée n'égorge pas à proprement par ler ses enfants, mais elle est sur le point de le faire, ce qui pour certains rap procherait cette peinture de la pièce de Sénèque. 75 24. Relief fragmentaire en grès. Fig. 75 Székesfehérvar (Hongrie) Musée. Inv. 10413. De Gorsium (Pannonie Inférieure). H. 116cm; L. 110cm; 1. 29cm. Le re lief est incomplet dans sa partie supérieure et sur les côtés latéraux. Ce qui restait
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Les plus anciennes représentations de cet épisode se trouvent sur des vases de l'Italie du Sud, de la deuxième moitié du IVe siècle avant notre ère. Les peintres des vases n'hésitent pas à représenter la crime dans toute son horreur, ce qui éloigne ces images de l'esprit de la pièce d'Euripide où le meurtre était suggéré et non pas montré. Puisque Médée est désignée comme meurtrière sur les vases, ceux-ci se rapprochent de la tradition antérieure à Euripide, où le meurtre des enfants est en rapport avec le sanctuaire d'Héra; c'est ainsi que la présence de l'autel et des bandelettes pourrait s'expliquer, ils dé termineraient ici un lieu sacré. En revanche, le pédagogue est une figure du théâtre d'Euripide. Sur le cratère de Munich (n° 20, n. 72), l'homme de gauche tenant deux lances pourrait bien être Jason. Selon Sénèque, Jason assiste au meurtre du second enfant. Le poète aurait-il suivi une version an térieure autorisant cela, peut-être celle de Neophron qui donnait un rôle plus important à Jason76? Cette version aurait inspiré également a été cassé en trois morceaux et recollé. Date : début IP-milieu IIIe siècle de notre ère. Voir : G. Erdelyi, Antiquitas Hungarica III, 1949, p. 84-85; F. Jenö, Gorsium, 1976, p. 77 n° 25, pi. 37; J. M. C. Toynbee, «Greek Myth in Roman Stone», Latomus 36, 1977, p. 395 v; L. Barkoczi, Archaeologiai Ertesitö 111, 1984, p. 179, fig. 8. Le relief est limité dans sa partie inférieure par une large bande ornée de rin ceaux. Une bande semblable devait exister sur le côté gauche du relief d'après ce qui reste, mais son existence à droite est moins sûre. Médée dont la tête manque, figure au centre, vue légèrement de trois quarts vers la gauche. De la main droite, elle tient l'épée et de l'autre le fourreau. Elle est légèrement penchée au-dessus du cadavre d'un de ses enfants qu'elle vient de frapper de son épée. Elle a immobilisé la petite victime, nue à gauche sur le sol, en plaçant son pied droit sur le cou de l'enfant. Elle porte une tunique et un manteau drapé autour de son cou, qui flotte en arrière. L'enfant gît mort, tandis qu'à gauche un autre petit garçon également nu, vu de face, est en train d'implorer sa mère ne levant ses bras vers elle. Ce re lief est impressionnant par l'expression dramatique de la scène, mais la qualité du travail ne peut égaler l'émotion de l'image. L'exécution reste lourde : les plis du vêtement de Médée sont plats et ne soulignent pas le mouvement de la jambe. Du point de vue iconographique, c'est la première fois qu'un document sculpté représente Médée en train de tuer ses enfants. Ce relief s'éloigne beaucoup de ce que l'on a vu jusqu'à présent, et surtout des reliefs des sarcophages où la scène est calme et ne laisse présager en rien l'atrocité de ce qui va suivre, l'épée restant le seul objet angoissant. Cependant il se rapprocherait des vases du IVe siècle avant notre ère. Le pédagogue en est absent. Médée, l'épée dégainée dans la main, est en plein mouvement, et très proche du moment crucial du crime. Le document pose des problèmes en ce qui concerne sa fonction. A quel type de document ap partient-il? Ce n'est pas un sarcophage, à cause de sa hauteur, et de sa mise en page. Il peut s'agir d'un monument funéraire, justement en raison du sujet, mais pas d'une stèle, vu les dimensions du document. Un des parements d'un édicule funéraire conviendrait à l'épaisseur du document; mais cette fois-ci c'est la bande de droite, où il y avait probablement une scène, qui pose problème. Y avait-il en core une autre scène en bas, au-dessous de la bande à rinceaux? La question reste ouverte. 76 Les deux lances sont attribuées à Jason par Pindare, Pythiques, IV, 139 -
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le peintre; mais on ne possède pas de preuves sûres. On peut penser que Jason figure sur le fragment de sarcophage d'Ostie (n° 23, fig. 40), par comparaison au cratère n° 20. Le jeune âge de cet homme ne nous autorise pas à l'identifier avec le pédagogue, malgré la posi tion identique de la figure sur la cuve de Bâle. La fresque de Pompei (n° 23), est la seule à représenter cette version du crime, probable ment sous l'influence de la pièce de Sénèque; l'artiste souligne, par les costumes des personnages, que le meurtre se passe sur une scène de théâtre. Sur le relief de Gorsium (Pannonie), fig. 75, le seul docu ment sculpté représentant le meurtre proprement dit, Médée se rap proche des images des vases et des gemmes (n° 22, n. 73) par l'e xpression de sa cruauté, (même attitude d'imploration de l'enfant à droite). C'est certainement grâce à ce type d'objets, très faciles à transporter, que l'image de la Médée meurtrière a pu se perpétuer à une époque tardive et arriver jusqu'en Pannonie. Pour conclure sur la présence de Médée dans cette scène, on re tiendra qu'elle y figure selon trois types différents : pensive ou hési tant à commettre le crime (debout sur les sarcophages des ateliers de Rome, ou assise) décidée à perpétrer le forfait, et meurtrière : elle est alors caractérisée par l'épée qui prend sa signification par rap port au reste de l'image (enfants etc.)77. Au IVe siècle avant notre ère αίχμαΐσιν διδύμαισιν - lors qu'il arrive monosandale sur la place d'Iolcos. Par ail leurs la publication récente de nouveaux fragments de papyrus, voir G. Xanthakis-Karamanos, Studies in Fourth-Century Tragedy, Athènes, 1980, p. 173-177, nous montre maintenant que Neophron, vers le début du IVe siècle avant notre ère, dans sa Médée avait doté Jason d'un rôle plus important que celui qu'il joue chez Euripide; là-dessus voir notre note 1 du chapitre XVI. 77 On ne devrait pas interpréter comme Médée n'importe quelle femme, quel que soit le contexte, seulement parce qu'elle tient une épée. Nous donnons ici la liste des documents que nous tenons pour douteux : Cratère à volutes d'Apulie, du peintre de Darius. Princeton, Art Museum. Hauteur : 100cm. Vers 325. A. D. Trendall, «Medea at Eleusis on a Volute Krater by the Darius Painter», Record of the Art Museum Princeton University 43, 1984, p. 5-17; M. Schmidt, «Medea u. He rakles - zwei tragische Kindermörder», Studien zur Mythologie u. Vasenmalerei, Mèi Κ. Schauenburg, Mayence, 1986, p. 169-174, pl. 32, 1; Id., «Beziehungen zwis chen Eros, dem dionysischen und dem 'eleusinischen' Kreis auf apulischen Va senbildern», Images et Société en Grèce ancienne, Cahiers d'Archéologie romande, n° 36, Lausanne, 1987, p. 155-168, fig. 6-7. Face A : dans une construction, sem blable à un temple avec quatre colonnes et fronton, se trouve une femme voilée, en train de parler à un vieil homme tenant un bâton (pédagogue ou messager). Sur l'architrave du temple est inscrit ΕΛΕΥΣΙΣ ΤΟ ΙΕΡΟΝ, et sur la krépis devant la femme ΜΗΔΕΙΑ. Au-dessous de cette structure, deux jeunes hommes sont as sis sur un large autel. Cette scène centrale est entourée en haut à gauche d'une Niké couronnant Athéna assise, et en bas se trouvent deux jeunes gens (Dioscures?). En haut à droite figurent Demeter et Persephone, et en bas Héraklès. Face Β : scène dionysiaque. La scène de la face A a été interprétée, à cause des inscriptions, comme représentant Médée au sanctaure d'Eleusis après le meurtre de ses enfants; l'épisode illustrerait une œuvre littéraire perdue. Mais M. Schmidt
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sur l'amphore n° 23, l'héroïne est coiffée du bonnet phrygien, attri-
l'a rapprochée du passage de Diodore IV, 55 où Médée en fuyant de Corinthe, se réfugie d'abord à Thèbes, chez Héraklès qu'elle guérit de la folie qui lui a fait tuer ses enfants; ainsi M. Schmidt a démontré que dans cette scène Médée n'est pas une meurtrière, mais une divinité guérisseuse. Il s'agit donc du meurtre des en fants d'Héraklès. Coupe d'argent. Trouvée dans la nécropole royale de Méroé en 1924, Boston, Museum of Fine Arts. Milieu du Ier siècle de notre ère. F. Burkhalter, J. Arce, «La coupe de Méroé», BCH 108, 1984, p. 407-423. La scène est constituée de quatre adultes et de deux enfants. A gauche devant un homme assis sur une tribune, se trouve une corbeille contenant une étoffe (?). Un autre homme debout, s'avance vers la droite, tenant dans sa main gauche une hache à longue manche. Plus à droite, une femme dans une attitude de supplication, les bras tendus, est a c ompagnée de deux enfants. Enfin, un homme se dirige vers la gauche, vêtu d'une tunique courte et d'un manteau à capuchon; derrière lui, on voit une struc ture faite de trois blocs. Cette scène a été considérée comme le jugement de Créon concernant Médée. (On a d'abord cru que cette scène représentatit Au guste (à gauche) donnant a paix, le pardon et la tranquillité à l'Egypte, tandis que la femme, les enfants symboliseraient la Haute et la Basse Egypte : D. Dunham, BullMFA 23, 1925, p. 10; D. E. Strong, Greek and Roman Gold and Silver Pfote, 1966, p. 137 l'interprète comme un roi qui juge un homme; la femme et les en fants intercéderaient pour le condamné). Le personnage à gauche serait Créon; devant lui la corbeille contiendrait les voiles empoisonnés, alors que le deuxième homme serait un des ses gardes chargé d'exécuter ses ordres. La femme implo rante serait Médée, le dernier homme, le pédagogue; la structure représenterait la fontaine Glaucé symbolisant Corinthe. On aurait là, condensés en une seule scène, trois moments différents : le jugement de Créon, la remise des cadeaux, et le pédagogue qui recueille les enfants. La scène ne trouve aucun parallèle dans les documents que nous venons d'examiner. De plus nous n'avons aucun témoignage sur l'éventuel jugement de Créon. Certes, dans la tragédie d'Euripide Médée de mande et obtient un sursis d'un jour, mais l'épisode n'a rien d'officiel, puisque c'est une discussion «privée», à la quelle les enfants ne participent pas. Lampe. Avignon, Musée Calvet Inv. Κ 37. P. De Brun, S. Gagniere, Les lampes antiques du Musée Calvet d'Avignon, Carpentras, 1937, n° 48, pi. 13, 218; P. Ghiron-Bistagne, «Les avatars de la légende de Médée dans la tragédie posteuripidéenne et à l'époque gallo-romaine», Cahiers du GITA 2, 1986, p. 121-139. La scène représente un accouplement entre une femme et un homme allongé sur un lit. P. Ghiron-Bistagne place cette scène dans la série du «suicide de la bar bare», car elle pense que la femme est en train de se transpercer en même temps avec un poignard, tout en se regardant dans un miroir. Nous pensons que cette lampe n'a rien à avoir avec Médée et son iconographie. Nous avons déjà signalé que jamais Médée ne se suicide (voir ci-dessus note 42); par ailleurs son icono graphie n'a rien d'erotique. En revanche, à notre avis, cet objet serait à placer dans une série de lampes (ornées de même genre de sujet) qui s'inspirent de l 'iconographie des gladiateurs, non de celle des personnages mythologiques. Cette série comprend en dehors de la lampe d'Avignon, des spécimens à Bologne; à Montpellier (Société Archéologique Inv. 877, 922); en Suisse; en Allemagne (Coll. Houben à Xanten). Pour tous ces exemplaires voir K. Goethert-Polaschek, «Frag mente römischer Bildlampen aus Trier und Umgebung», Trierer Zeitschrift, 1987, p. 117-159. Très souvent Eros et gladiature sont étroitement liés, voir M.-Ch. Hellmann «Les représentations de gladiateurs sur les lampes romaines», Les Gladiat eurs,Exposition, Lattes, 1987, p. 83-85. Par ailleurs, une autre lampe d'Avignon,
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but montrant ses origines barbares; mais il disparaît très vite dans cette scène pour laisser à la magicienne une allure tout à fait grecque78. Comme pour la scène précédente le contenu légendaire de la scène a beaucoup perdu de sa valeur première.
Musée Calvet Inv. K. 25 a été aussi interprétée par P. Ghiron-Bistagne, comme Médée se suicidant avec l'épée. Mais cette lampe forme une petite série avec deux autres, l'une au musée de Seville et l'autre au Musée de Trêves Inv. 6245 (Kat 348), voir K. Goethert-Polaschek, Katalog der römischen Lampen des Rheinischen Landesmuseums Trier, Trierer Grabungen u. Forchungen, XV, Mayence, 1985, p. 242, pl. 47; la série est datée de 50 à 300 de notre ère. Là il s'agit d'un homme t enant un poignard, alors que devant lui au sol, est placée une amphore, très visible sur l'exemplaire de Seville. Il faut donc y voir plutôt une scène de la vie quoti dienne. 78 Le bonnet phrygien sur la fresque n° 23 (note 74) est certainement dû au fait qu'il s'agit d'une pièce de théâtre; il sert à mieux typer le personnage.
CHAPITRE XVIII
LA FUITE DE MÉDÉE APRÈS L'INFANTICIDE
Dans les premières versions de la légende, Médée fuit Corinthe pour Athènes sans détails particuliers1, après le meurtre de ses en fants. Euripide a développé cet épisode (v. 1292-1419) qui constitue la dernière scène de sa tragédie. Médée après avoir tué les deux en fants dans la maison, apparaît à Jason (qui arrive en espérant les sauver des mains des Corinthiens), sur un char tiré par des dragons ailés. L'attelage n'est pas proprement décrit dans le texte d'Euri pide2, mais simplement suggéré (v. 1319-1321), puisque Médée dit à Jason qu'il ne pourra jamais la toucher, car telle est la vertu du char que son grand père le Soleil lui envoie3. L'apparition merveilleuse du char est une fin de la pièce άπο μηχανής qui, d'ailleurs a été critiquée par Aristote, Poétique, 15, 374. La fuite sur le char est mentionnée par tous les auteurs après Euri pide5 et souvent elle apparaît dans l'art figuré. On ne peut s'empê1 C'est déjà la version d'Eumélos (voir Pausanias II, 3, 10-11 qui ne donne pas le lieu où se réfugie Médée), de Didyme et de Créophylos, (cf. la scholie à Euri pide, Médée, 273). Sur ces deux versions, voir notre chapitre précédent. 2 Le char est décrit dans l'argument de Médée v. 9-11. 3 Euripide, Médée, v. 1319-21 : Τοιόνδ' ...χειρί δ' όχημα ού ψαύσεις πατρός ποτέ. Ήλιος πατήρ δίδωσιν ήμΐν,... 4 Aristote, Poétique, 15, 37 : Φανερον ουν οτι και τας λύσεις των μύθων έξ αύτοΰ δει του μύθου συμβαίνειν, και μη ωσπερ έν τη" Μηδεία άπο μηχανής. 5 Le Pseudo-Apollodore, Bibliothèque, I, Di, 28; Sénéque, Medea, v. 1022; Dracontius, Medea, ν. 556-569. Valerius Flaccus, Arg., V, 451-454; et VII, 120 (où Circe fuit sur un char semblable) suivent la version d'Euripide. La tradition habi tuellement fait d'Athènes la ville où Médée trouve refuge; mais Diodore (IV, 55) cite Thèbes, où Médée fuit d'abord avec ses servantes chez Héraklès, car le héros lui avait promis déjà en Colchide, de l'assister en cas de besoin. Après l'avoir guér i de la folie qui l'a fait tuer ses enfants, elle part à Athènes, où elle se marie avec Egée. Par ailleurs Diodore (IV, 53) lie indirectement Médée avec un char tiré par des dragons ailés, puisque, à Iolcos, afin de convaincre Pélias et ses filles de ses qualités de prêtresse d'Artémis, elle crée les images trompeuses du char de la déesse qui est attelé de dragons ailés; c'est en effet sur un char semblable qu'elle fuit elle-même de Corinthe. Diodore rapporte-t-il le souvenir d'une tradition plus ancienne que celle d'Euripide, où justement apparaît davantage le caractère divin de Médée.
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cher de penser que Médée retrouve sur ce char en partie son carac tèrede divinité6. Chez Sénèque, Médée du toit de sa maison où elle est montée avec sa nourrice, s'entretient avec Jason; elle lui jette les cadavres des enfants et s'enfuit sur son char7. Dans l'art figuré, Médée, après l'infanticide, fuit triomphante, en emportant parfois les cadavres de ses enfants. On distingue deux types de Médée dans cette scène : Médée debout, et Médée assise. Quelquefois d'autres personnages assistent à la scène, parmi les quels on peut reconnaître Jason. Médée fuyant triomphante et debout clôt en général le décor des sarcophages des ateliers de Rome. En effet cette scène est la der nière qui figure sur huit cuves : Berlin, Mantoue, Louvre Ma283, Rome MN Inv 75248, Ancóne, Rome MN Inv 222, Naples, Bale, (n° 2-4, 8, 20-22, 24; fig. 2, 5, 6, 10, 32, 35, 40) et sur le couvercle du Vatican (n° 9, fig. 13). Elle figurait en outre sur un fragment de sa rcophage à guirlandes aujourd'hui perdu (n° 1, fig. 1) et peut-être sur le fragment d'Ostie (n° 7, fig. 9). La scène est dominée par le personnage de Médée et par le char merveilleux envoyé par son grand-père le Soleil, où sont attelés des dragons ailés et qui occupe toute la partie droite de la scène. Les exemplaires de Rome MN Inv 222 et de Bale (n° 21, 24) présentent en plus une femme, en bas à l'extrémité droite du panneau. La composition est dominée par des courbes et des lignes s inueuses : le corps de Médée dans son mouvement crée une onde semblable à celui de Creuse mourante; les dragons en forment d'autres, et la roue du char souvent visible en bas du panneau, forme un cercle parfait. Le seul angle dans tout ce dédale d'ondes est formé par le bras droit de Médée qui brandit parfois l'épée. Ainsi à côté de Médée dont la draperie s'envole sous l'effet du mouvement rapide et colle à son corps en laissant découvert son bras droit, se trouvent les corps écailleux et rugueux des serpents, dont la surface est incisée avec précision pour dessiner les petites et les grosses écailles. Par la suite les ailes déployées en arrière, r eprennent ce même motif d'écaillés, recouvrent le char; et souvent f inement incisées, elles décorent le fond de la scène. Bien évidem ment ces corps des serpents donnent lieu à un jeu d'ombre et de lu mière qui n'existe sur aucune autre partie des panneaux. La figure de Médée dans cette scène prédomine. Elle est vue de profil dans un mouvement rapide vers la droite, mais son visage
6 Demeter fait aussi usage de chars semblables. 7 II n'est pas précisé dans cette pièce si Médée s'enfuit seule ou avec sa nourr ice; en tout cas dans les représentations figurées elle apparaît seule sur le char.
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lorsqu'il est conservé8 se tourne violemment vers le spectateur; la bouche est souvent entrouverte, et ses cheveux bouclés sont déliés sur les épaules. Cette position caractéristique de la tête donne à la f igure de Médée un côté surnaturel, qui possède la force d'expression des figures impressionnantes des Gorgones de la période archaïque. Médée est habillée d'un tunique longue à rabat et d'un manteau dont un pan flotte en arrière, mais qui est maintenu en passant sous le bras droit et en se croisant dans le dos. Cet habit caractérise Médée dans cette scène, aucun exemple n'en présente la moindre variante. Cette constatation nous a fait examiner le fragment d'Ostie (n° 7, fig. 9) dont l'état fragmentaire ne nous permet pas d'identifier aisément Médée. En effet, on observe que l'habit de la femme est composé d'une tunique à rabat, sans manches et d'un manteau qui passe en diagonale de l'épaule gauche sous le bras droit, puis sur le ventre. Cela pourrait donc être l'habit de Médée fuyant sur son char. Demeter sur les sarcophages de Persephone, porte très souvent un manteau qui gonfle autour de sa tête, et dont un des pans s'enroule autour de sa taille, formant une ceinture plus ou moins large quel quefois posée en diagonale comme sur le sarcophage de Baltimore9; en revanche, celui de Médée, croisé dans le dos, a un aspect plus nerveux; pourtant cette différence est due au style de l'époque. L'exemplaire de Baltimore date du tout début du IIIe siècle. Sur le fragment d'Ostie n° 7, on distingue au-dessus de la tête de la femme quelque chose qui fait saillie. Ce sont des cheveux bouclés (Médée?) ou alors une trace de manteau gonflé autour de la tête (Demeter?); il est difficile d'en tirer une conclusion satisfaisante. Un autre détail apparaît quand on examine le vêtement. La figure du fragment n° 7, conservée jusqu'aux genoux, est vue de profil, en train de monter dans le char. On aperçoit donc sa jambe gauche fléchie à côté des ailes du serpent. On ne voit pas ce mouvement de la jambe si clair ement chez Médée, car la figure est de profil, et, à l'endroit où on pourrait apercevoir la jambe gauche, sont placés en général le char ou les ailes des serpents. Par ailleurs, la scène se situe toujours à la partie droite du panneau sur les sarcophages, donc l'espace se trouve limité et la scène ne peut pas être très développée en largeur. Avons nous là une figure de type «hybride», tenant à la fois des deux personnages Médée et Demeter, ou Demeter que l'on a trop vite identifiée à Médée? Tant que le relief continuera à être difficilement accessible, nous resterons incapables de trancher. Sur quelques exemplaires (Berlin, Mantoue, Bâle, Vatican n° 2,
8 Le visage de Médée est détérioré sur les panneaux de Naples, Ancóne, et le fragment d'Ostie (n° 22, 20, 7). 9 Voir : RS, p. 175-179, fig. 204.
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3, 24, 9), surtout quand leur état de conservation le permet, on aper çoit une épée brandie dans la main droite de Médée10 avec laquelle elle vient d'égorger ses enfants. Sur les deux premiers exemplaires (n° 4, 6) on voit à côté de la roue du char jeté à terre, le fourreau. Les deux malheureux enfants figurent à l'état de cadavres : l'un sur l'épaule gauche de Médée11 dans une attitude renversée très im pres ionnante, avec ses bras pendants dirigés vers le sol, qui rajoute du réalisme à la cruauté de Médée et à la scène. L'autre est visible sur quelques panneaux seulement (Berlin n° 2, Mantoue n° 3, Ancône n° 20, Rome MN Inv 222 n° 21, Bâle n° 24), où le petit corps est jeté dans le char et seule sa jambe est visible12. A l'extrémité des panneaux le char et les corps extraordinaires des serpents ailés ferment la composition. Le char n'est pas toujours bien visible. Le meilleur exemple se trouve sur la cuve de Bâle où il est décoré de feuilles d'acanthe et où l'essieu de la roue est orné d'une tête de lion, par ailleurs sur les panneaux de Berlin, de Mant oue, de Rome MN Inv 222, de Naples et sur le couvercle du Vatican on aperçoit également une des roues du char. L'attelage, constitué toujours de deux serpents, est développé en largeur dans la partie in férieure des panneaux. Les ailes et les gros anneaux des corps y sont déployés, tandis que les cous et les têtes des monstres sont placés dans la hauteur des panneaux. Sur la cuve de Bâle le char est déve loppé surtout en hauteur, alors que les ailes viennent juste au dessus de la roue, les corps des serpents se déploient de haut en bas mais à côté du char, tout-à-fait à droite du panneau. Le mythe de Médée n'est pas le seul où interviennent des serpents attelés à un char. Les cycles de Persephone (sarcophages)13 et de Triptolème (sarcophages et un plat en argent14 comportent également de tels attelages extra ordinaires. 10 Sur l'exemplaire de Mantoue, l'épée n'est pas conservée, mais on devine sa présence à la façon dont la main est fermée. 11 II figure sur tous les panneaux excepté sur celui de Naples (n° 22, fig. 35) et sur le fragment d'Ostie (n° 7), en raison de son état de conservation. 12 Sur l'exemplaire de Bâle quand on regarde le relief de biais, on s'aperçoit que le corps et la tête de l'enfant sont entièrement sculptés. 13 II s'agit du char de Demeter à la recherche de sa fille, l'attelage est consti tué de deux dragons qui sont dans la plupart des cas ailés (14 sur les 18 sarco phages mentionnés dans ASR, III, 3) voir par ex. le sarcophage de Rome au Palais Rospigliosi, ASR, III, 3, n° 363 = RS, p. 175-179, n° 203. Schmidt, Medeasarkophag, p. 32, compare la Médée de cette scène à la Séléné des sarcophages d'Endymion; pourtant nous pensons que la démarche et l'attitude de Demeter (même mouvement rapide, même attelage de serpents) se rapprochent davantage de ceux de Médée, alors que Séléné qui se trouve en plein milieu du panneau des cend de son char en se tournant vers Endymion endormi, voir le sarcophage du musée du Capitole : RS, p. 144-146 n° 156-161. 14 Voir l'attelage de Triptolème recevant les grains de blé sur les deux sarco-
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Comme nous l'avons évoqué dans notre chapitre de chronologie, le fragment appartenant à un sarcophage à guirlandes (n° 1, fig. 1) présente une composition plus aérée. Médée, le sein droit dénudé, ce qui n'existe sur aucun autre sarcophage, porte le cadavre de son en fant sur l'épaule gauche, alors que son pied est à peine posé sur le char, celui-ci s'élève déjà dans les airs. Ce développement dans l'e space est dû uniquement au type du sarcophage. Enfin, sur les panneaux de Rome MN Inv 222 et de Bâle (n° 21, 24), tout-à-fait à droite sous le char, apparaît une figure féminine. Sur celui de Rome, il s'agit d'une femme visible jusqu'aux hanches, allongée, torse nu, qui de sa main droite montre la scène; sur celui de Bâle n'est représentée que la tête, la bouche entrouverte, le regard dirigé vers la scène, la main droite, ouverte et levée avec l'annulaire et l'auriculaire plies. Il s'agit de la Terre, Tellus, qui figure souvent sur les sarcophages à sujets mythologiques dans une attitude semb lable15, et aussi sur les sarcophages à sujets profanes16. Dans la plu part des cas, elle se trouve sous les chars qui sont en mouvement ou même en train de s'envoler17, ou sous des figures volantes18. Il s'agit de la Terre au-dessus de laquelle s'élève l'âme du défunt19. Sur le panneau de Bâle Tellus, fait ce geste de la main droite appelé trop f acilement «Benedictio Latina»20, par analogie à celui en usage dans l'église romaine, qui n'est pas un geste caractéristique de Tellus. Sa-
phages illustrant son cycle, celui de Wilton House (Angleterre) ASR, III, 3, n° 432 = RS, p. 187-188, n° 210 et celui du Louvre MA 3571 : Baratte, Catalogue, p. 118121, n° 48; également sur un plat en argent d'Aquilée conservé à Vienne, F. Matz, «Zum Silberteller aus Aquileia in Wien», MW Ρ, 1964, p. 23-31, pi. 12. 15 Parmi les sarcophages du cycle d'Endymion, de Marsyas, de Persephone, de Phaeton et de Prométhée prenons comme exemple celui de Perséphore à Rome, Palais Rospigliosi : ASR, III, 3, n° 363 = RS, p. 175-179, n° 203, où Tellus a la même attitude que sur notre exemplaire de Rome (n° 9). Sur d'autres sarco phages, elle tient une corne d'abondance par ex. sur celui du cycle de Persephone à Rome, Musée du Capitole : ASR, III, 3, n° 390 = RS, n° 205; comme également sur le sarcophage d'Endymion, Louvre MA 1335, Baratte, op. cit., p. 71-75, n° 25. 16 Par exemple le sarcophage d'un enfant au Musée Torlonia, voir Cumont, Symbolisme, p. 337-338, pi. XXXVII, 2. 17 Tellus est sur un char qui s'envole, sur le sarcophage d'Endymion Louvre MA 1335, et sur ceux de Persephone à Rome, Palais Rospigliosi, et Musée du Ca pitole, cités tous les trois à la note 15; et également sur un sarcophage du cycle de Prométhée à Naples, RS, p. 183-184, n° 216. 18 Tellus figure sous des figures volantes sur un sarcophage d'Endymion à Rome, Palais Doria : RS, p. 144-146, n° 161; ou sur un sarcophage du cycle de Phaeton à Rome, Villa Borghese ASR, III, 3, n° 338 = RS, p. 180-183, n° 213. 19 Pour le symbolisme de Tellus, F. Cumont, Symbolisme., p. 337-338, 488. 20 F. Cumont, Religions orientales, Paris, 1929, p. 61, 228 n. 61; Cumont, Symb olisme, p. 221 n. 4, 393 n. 6, 442 n. 3; Ch. Blinkenberg, Archäologische Studien, Copenhague, Leipzig, 1904, p. 66-128; H. Seyrig, «Quatres stèles de Thasos», BCH 51, 1927, p. 178-233, pi. IX-X.
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bazios, dieu d'origine thrace ou phrygienne, fait souvent ce geste21, ainsi que le héros thrace22; tous deux ont des pouvoirs sur le monde des morts23. Ce geste a été interprété comme un geste de prière, de bénédiction, mais aussi comme donnant le pouvoir d'adoucir la fé rocité des fauves et par extension celle de la mort. Parmi le grand nombre des mains votives du culte de Sabazios, il en existe avec un serpent enroulé sur le revers,24. Sur notre sarcophage, Tellus a un serpent enroulé à son cou qui se dirige vers la main faisant ce geste. Dans le culte de Sabazios, culte à mystères, les croyances dans l'audelà étaient importantes25. Pourrait-on supposer que Tellus, sur le sarcophage de Bàie, non seulement représente la Terre qu'aban donnent les défunts, mais encore à travers ce geste bien particulier, constitue une allusion au culte de Sabazios qui pourrait nous don ner des indications sur la vie du défunt? Sur la même cuve existe une autre allusion probable, à cette divinité (la petite tête barbue et enturbannée sur le pilier) et sur le couvercle, figurent l'arbre avec le serpent et la peau de bélier qui sont tous trois des éléments de l 'iconographie de Sabazios. Le type de Médée qui prédomine sur les reliefs funéraires d' époque impériale (sarcophages, urnes26, fig. 62), est inspiré des 21 R. Fellmann, «Der Sabazios-Kult», OrRR, Leyde, 1981, p. 316-334, pi. I-VI. Il existe des statuettes du dieu accomplissant ce geste et également des mains vo tives (mains de Copenhague MN n° 1355) voir Ch. Blinkenberg, op. cit., 66-128. R. Turcan, Les cultes orientaux dans L· monde romain, Paris, 1989, p. 289-324. 22 Sur le héros thrace, G. Kazarov, Oie Denkmäler des thrakischen Reitergottes in Bulgarien, Budapest, 1938, p. 7. 23 On retrouve également ce geste sur deux stèles funéraires de Salonique, voir : G. Mendel, Catalogue, III, n° 966, 968. Le cavalier qui fait ce geste se trouve devant un autel et un arbre où s'enroule un serpent. Mais le geste a été mal compris et interprété comme pour tenir un javelot. Z. Goceva, LIMC, II, s.v. Asklépios (in Thracia) n° 25*, 30* cite deux reliefs votifs de la même époque (II-IIIe siècles de notre ère) que les stèles de Salonique où on voit le cavalier faisant le même geste, avec une dédicace à Asklépios. Pourtant le geste n'est pas aussi évident, car l'éloignement du bras ne suffit pas pour parler de «Benedictio Lati na » ; il faut que les doigts fassent ce geste bien particulier. 24 II s'agit de ceux du groupe C établi par Ch. Blinkenberg, ibid., p. 178-233, fig. 33, voir aussi Die römische Bronzen der Schweiz, II, Avenches, p. 84 n° 89, pi. 55-56. 25 Sur le culte de Sabazios, R. Fellmann, ibid., spécialement p. 318-320, et R. Turcan, Les cultes orientaux dans le monde romain, Paris, 1989, p. 289-324. 26 1. Urne cinéraire, rectangulaire, conservée avec son couvercle. Musée de Volterra. Inv 497. Trouvée lors des fouilles de la nécropole de Portone, tombe A, en 1874. Terre cuite (spécimen unique au point de vue technique dans la product ion de Volterra). H. 35 cm; L. 61 cm. Date : Peu après la première moitié du IIIe siècle avant notre ère (E. Fiumi, datée grâce au matériel de la tombe). Mais cette urne isolée par son matériau et sa technique, serait l'une des plus anciennes pro ductions de Volterra. G. Körte, / rilievi II, Berlin, 1890, p. 5 n° I, 2; E. Fiumi, SE 25, 1957, p. 367-411, fig. 7; Corpus delle urne etnische di età ellenistica. 1, Urne vol-
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vases27, par exemple de l'amphore n° 7 (direction vers la droite);
terrone 1, I complessi tombali, Florence, 1975, p. 56 n° 61; F.-H. Pairault, Urnes, p. 175. Cuve : la fuite de Médée est représentée de façon tout-à-fait originale. La scène entière est vue de face, ainsi Médée ne fuit pas vers la droite comme nous sommes habitués à le voir sur les sarcophages, mais son char merveilleux nous fait face, et deux serpents ailés se déploient de part et d'autre. Les anneaux des deux dragons médians enlacent chacun le cadavre d'un enfant, représenté le corps pendant, la tête vers le bas. Les corps des deux dragons extérieurs appar aissent à travers les rayons des roues qui sont vues en perspective. Sur le char se tient Médée, vue de face, habillée d'un chiton et tenant dans la main droite l'épée. Elle est légèrement penchée vers la gauche. Le personnage frontal, placé au centre et en haut de la scène, encadré par les serpents, accentue l'effroi. De chaque côté de la scène se trouve un homme : à gauche un homme nu, vu de face, la tête et le bras droit levés. Il est agenouillé sur la jambe droite, tandis que l'autre jambe est allongée vers le centre de la scène. Derrière lui, flotte son manteau, qui s'enroule autour de son bras gauche. L'homme à droite est également vu de face, il a la même attitude, mais, il est vêtu d'une tunique courte, de pantalons, de bot tines et d'un manteau qui flotte derrière lui et lui enveloppe la tête. Ces deux hommes sont interprétés comme Jason à gauche et le pédagogue à droite. 2. Urne circulaire en marbre avec inscription. Maine (U.S.A.), Bowdoin Col lege, Museum of Fine Arts. De provenance inconnue, offerte en 1927 au musée par E. P. Warren. H. 35 cm; Diamètre 27 cm. Elle a été cassée (deux fragments principaux et de nombreux morceaux), puis recollée. Date : vers 140. Voir : K. Herbert, «A Roman Cinerary Urn at Bowdoin College», AIA 64, 1960, p. 76, pi. 17; F. Sinn, Marmorurnen, p. 227 n° 556, pi. 84 a-b. Deux scènes figurent sur le relief de cette urne : l'une illustrant les exploits de Jason, l'autre ceux de Méd ée. A l'une des extrémités du relief, à gauche de l'inscription, est représentée la fuite de Médée sur un char merveilleux. Le schéma est identique à celui des sar cophages. Médée a sur l'épaule le cadavre de son enfant, elle est vue de profil dans l'attitude qui la caractérise; et regarde de face vers les spectateurs. Devant le char et sous l'inscription, se trouve une figure féminine vue de face qui de chaque bras enlace une corne d'abondance. Il s'agit dans doute de Tellus, personnage dé jà lié à la fuite de Médée sur les sarcophages de Rome MN Inv 222, et de Bâle n° 21, 24, fig. 32,40. 3. Urne circulaire en marbre avec inscription. Ostie. Fig. 62 Musée Inv 10. Trouvée en 1910 à Ostie près du théâtre. H. 29 cm; Diamètre 34 cm. Date : 150180. Voir : R. Calza, Museo Ostiense, Rome, 1947, p. 6 n° 10; Sinn, Marmorurnen, p. 245 n° 635, pi. 93 c-d. La deuxième scène est celle de la fuite de Médée sur un char tiré par des serpents ailés. Ici aussi le schéma iconographique suit de très près celui des sarcophages : la magicienne a la tête tournée de face, un cadavre d'enfant sur l'épaule gauche et l'épée dans la main droite. On voit apparaître une jambe d'enfant en bas du char. 4. Fragment d'urne en marbre (partie juste au-dessous de la tabula). Vatican. Musée du Vatican. Magasin Inv 4319. H. 10,5 cm; L. 24 cm. Date : vers 150. Voir Sinn, Marmorurnen, p. 254 n° 672, pi. 96 d. On aperçoit une figure probablement féminine allongée (la tête manque). La partie inférieure de son corps est drapée. Elle lève la main droite, tandis que de l'autre elle prend appui sur le sol. A gauche, il y a un reste de relief très difficile à identifier que Sinn interprète comme la trace d'un serpent de l'attelage de Médée lors de sa fuite de Corinthe. La figure a l ongée est identifiée à Tellus et l'urne comme appartenant au cycle de Médée. 27 5. Hydrie à figures rouges, du peintre de Policoro, trouvée à Policoro. Tarente, Musée. Entre 440-370 avant notre ère. Trendall, Red-figured Vases of Luca-
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mais l'attitude triomphante de l'héroïne est plus apparente sur les reliefs. Quelques différences existent sur les sarcophages : Médée f igure seule, souvent elle tient l'épée, le port de son manteau est carac téristique, mais elle ne porte pas de bonnet phrygien. Les ailes des dragons restent une invention des sculpteurs qui les rapproche des sources littéraires, car sur les vases il s'agit de simples corps serpent ins. Nous avons constaté l'expression pathétique et presque
nai, p. 58 n° 286, pi. 26, 3; 27, 3. Médée, dont le nom est inscrit, fuit dans les airs, sur son char, vers la gauche. Elle porte le bonnet phrygien. Les enfants gisent sur le sol, l'un nu, l'autre enveloppé d'une draperie. Un homme agenouillé se tenant la tête en signe de détresse, est près d'eux à gauche; il s'agit sans doute du péda gogue. A droite un homme jeune, barbu, nu, tenant une épée, fait un geste vers le char. C'est Jason qui ne peut venger ses enfants. 6. Fragment de la panse d'un vase. Berlin Ouest, Musée Inv 30916. Cercle du peintre de Lycurgue. Vers 360-40. Trendall, Cambitoglou, RVA I, p. 419 n° 16/18, pi. 152, 5. Sur ce fragment subsiste en partie Jason, barbu essayant d'atteindre le char, et en partie un des dragons. Le char fuyait vers la droite. Ce vase ainsi que le précèdent se rapprochent de la version d'Euripide, où Jason arrive pour sauver ses enfants et se trouve devant le meurtre accompli; on sait que dans la Médée de Neophron (début IVe siècle avant notre ère), Jason avait une place plus import anteencore. 7. Amphore du peintre de Darius, de Ruvo. Naples, Musée 3221 (Inv 81954). Vers 340-335. Trendall, Cambitoglou, RVA II, p. 497 n° 18/43, pi. 178, 1. Deux jeunes gens arrivent à gauche portant des lances, un troisième (Jason?) sur un cheval poursuit Médée qui fuit sur son char vers la droite. Médée est habillée d'un chiton, ses cheveux ceints d'un bandeau. Le vent gonfle son voile autour de sa tête. Un des cadavres est à peine visible entre les roues, l'autre se trouve par terre derrière le char. L'épée est jetée à terre. Devant le char figure une Erinye. 8. Sur le cratère à volutes de Munich Inv 3296 (p. 173, n. 72), daté entre 340335; à droite de l'infanticide, figure un char vu de face, tiré par deux dragons. Le conducteur est un personnage masculin, vu de face, dont le nom est inscrit, ΟΙΣ ΤΡΟΣ, voir Séchan, Tragédie grecque, p. 407-422. De la droite, un homme barbu, nu, tenant une épée et un bâton, accourt : c'est Jason dont le nom est inscrit. Il est suivi d'un doryphore. Bien qu'il n'ait pas véritablement de scène de fuite, ce vase forme une série avec les trois précédents à cause de la présence de Jason et des gens qui lui viennent en aide. 9. Vase en argent. Aujourd'hui perdu. Trouvé en 1897 dans un trésor, à Cre maste, près de Cyzique. En 1900 il appartenait à la collection Walters à Balti more, d'où il a disparu. E. Babelon, Gazette des Beaux-Arts 41, 1899, p. 360; E. Künzl, «Der augusteische Silbercalathus im Rheinischen Landesmuseum Bonn», BJb 169, 1969, p. 391-392. Il s'agissait de Médée fuyant sur son char en emportant les cadavres de ses enfants. Bien que nous ne connaissons par d'illu stration de l'objet, il semble se rapprocher de la scène figurant sur les sarcophages et les urnes, voir ci-dessous note 33. 10. Gemme fragmentaire. Antike Gemmen, pi. 37 n° 32. Médée apparaît de profil, transportant le cadavre d'un enfant sur son épaule gauche et tenant l'épée dans la main droite. Cette image est très proche des sarcophages, mais le char manque.
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nante du visage de Médée dans cette scène; elle ne se retrouve que sur les sarcophages. Ce détail se rapproche du fait que les descen dantsdu Soleil dont Médée fait partie sont caractérisés par l'éclat re doutable de leurs yeux qui lancent au loin des feux pareils à ceux de l'or, comme le dit Apollonios à plusieures reprises28. Les reliefs des sarcophages avec un fragment d'une peinture de l'hypogée de Massyaf29, constituent les derniers documents où figure Médée, celle-ci y retrouve grâce à son attelage, sa posture et l'expres sion de son visage, le prestige digne d'une petite-fille du Soleil et d'une divinité funéraire30. Sur cette peinture les personnages sont reconnaissables, grâce à leurs noms inscrits. La scène devait se pré senter comme sur les vases, puisque Médée se trouvait plus haut que Jason, son voile flottait en arrière. Le type de Médée assise après le meurtre, tenant son enfant mort, apparaît pour la première fois à travers un petit groupe funé raire de Tarente31, qui se rapproche par sa composition de l'urne de Volterra n° 1 (position frontale de Médée, char encadré par des ser pents) et sur une petite série de statuettes en terre-cuite32 fig. 75 (da28 Sur l'éclat des yeux des descendants d'Hélios, voir Apollonios, Arg., Ill, 886 : les Colques, évitent le regard de Médée quand elle traverse la ville; IV, 613 Circe a le même éclat des yeux; IV, 727-729 Circé reconnaît Médée grâce à cette particularité et IV, 1669 Médée fascine Talôs grâce à l'éclat de ses yeux. 29 Voir F. Chapouthier, «Les peintures murales d'un hypogée funéraire près de Massyaf», Syria, XXXI, 1954, p. 172-211, fig. 18. 30 En effet nous pensons que sur les sarcophages, surtout dans cette scène, Médée est en rapport avec les croyances sur l'au-delà. Une figure appartenant à la fois au royaume des ombres et celui de la lumière. Pourtant Cumont, Symbol isme,ne considère pas le symbolisme de Médée. 31 11. Petit groupe en calcaire appartenant certainement à un fronton déco rant un monument funéraire. Bonn, Akademisches Kunstmuseum. Problement de Tarente. H. 16 cm; L. 13 cm. Date : vers 333/320 avant notre ère. Voir : N. Himmelmann, «Ein tarentinisches Kalkstein-Fragment in Bonn», Studien zur Mythologie u. Vasenmalerei, Festschrift K. Schauenburg, Mayence, 1986, p. 193195. Médée, caractérisée par son bonnet phrygien, est vue de face, certainement assise, tenant le corps d'un enfant enveloppé dans une étoffe. Etant donné que sous la tête de l'enfant subsistent les vestiges d'un serpent, faut-il penser qu'elle est assise sur son char merveilleux? Elle est assise comme une déesse, tenant l'épée dans une main, encadrée de serpents, avec le cadavre de son enfant à ses ge noux. Cela rapproche ce groupe de la tradition antérieure à Euripide, où le carac tèredivin de Médée est plus évident. Si le groupe se plaçait vraiment dans le fron ton d'un monument funéraire comme le suppose N. Himmelmann, op. cit. les corps des dragons devraient replir les angles de la composition; par ailleurs Mé dée retrouverait ici la fonction de divinité funéraire qu'elle avait avant Euripide, voir Pausanias II, 3, 6-8. 32 12.a Statuette en terre cuite. Naples. Musée National Inv MN 20337. (Jadis à la collection Gargiulo, entré au musée en 1856). Fig. 76. D'Akragas. Restes de couleur rouge et grise. Exécutée avec deux matrices, elle est recomposée de deux fragments. H. 13,5 cm; L. 13 cm; épaisseur maximale 4 cm. Voir : R. Kekule, Die Terrakotten von Sicilien, Berlin, Stuttgart, 1884, p. 21, fig. 45; A. Levi, Le terrecotte
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tèe entre 200 et 250), où figure Médée sur le char tourné à la droite, portant le bonnet phrygien. Il n'y a pas de traces de cadavres, ni d'épée; la figure est calme et majestueuse. La scène a surtout inspiré les artistes de l'Italie du Sud. En effet, elle figure sur des vases italiotes et sur des terre-cuites de Sicile. Les deux types coexistent (debout, assise), mais celui de Médée debout qui apparaît au milieu du Ve siècle avant notre ère, est le plus ancien. C'est ce type qui a inspiré les sculpteurs des sarcophages et des urnes33; en ce qui concerne la trasmission des modèles, on pourrait, malgré le manque d'informations sûres, alléguer l'importance du
figurate del Museo Nazionale di Napoli, Florence, 1926, p. 179 n° 795; Croisille, Poésie et art, p. 75. 12.b Statuette. Bologne. Museo Civico. Inv G 973. De Sicile. Date : première moitié du IIP siècle avant notre ère. Voir : F. Winter, Die Typen der figurlichen Terrakotten, II, Berlin-Stuttgart, 1903, p. 196 η. 5 ; A. Levi, Le terrecotte figurate del Museo Nazionale di Napoli, Florence, 1926, p. 179 n° 795. Les deux statuettes sont absolument identiques. Il en existait une troisième à Berlin qui a disparu pendant la seconde guerre mondiale, elle portait le n° TC5029, et elle avait été achetée en 1846 en Italie. Un négatif portant le n° 3966, existe encore aux Archives du Staatliches Museum. L'exemplaire ment ionné par E. Vinet «Médée, terre cuite inédite» RA, 1845, p. 355-364, comme nouveau n'est autre que celui de Naples. Médée est représentée assise dans son char; les deux dragons se déloient en avant vers la droite. Elle est habillée d'un chiton et d'un manteau drapé sur l'épaule et le bras gauche. De la main gauche elle tient les rênes, de la droite, elle s'appuie sur le siège. Elle est coiffée d'un bon netphrygien. Le siège du char est orné d'une tête d'oiseau. C'est bien un rare do cument sculpté où Médée (reconnaissable à son bonnet oriental), apparaît tran quillement assise, sans le mouvement caractéristique de la tête, et sans trace de son infanticide. Pourtant on ne peut pas oublier qu'elle utilise l'attelage envoyé par le Soleil, seulement après avoir tué ses enfants et pour échapper à Jason. Gall i,«Medea Corinzia nelle tragichi classici e nei monumenti figurati», RAAN 24, 1906, p. 301-366 et surtout p. 360 y voyait Médée qui voyage sur son char et non pas une infanticide, mais les deux actions sont liées. 33 Nous ne pensons pas que la fuite de Médée soit figurée sur un relief de Flavia Solva. Graz Musée, Inv 112. Marbre blanc. Hauteur 225 cm; Largeur. 105 cm. Fin du IIe siècle de notre ère. E. Diez, «Ein hervorragendes Monument norischer Grabmalkunst», OJh 40, 1953, p. 83-93. La surface du relief est très détériorée. Etant donné ses dimensions, il devait faire partie d'un pilastre à l'intérieur d'une tombe. La scène qui pourrait représenter Médée, se trouve en haut du panneau. On distinque une figure féminine montant sur un char tiré par des serpents, et dont le bras levé tenait, paraît-il, l'épée. En l'état actuel, à droite s'agit-il vraiment d'un corps d'enfant, comme l'écrit E. Diez, ou d'une cassure? Les deux scènes qui se trouvent au-dessous appartiennent au répertoire bucolique : a) à gauche un homme assis jouant de la flûte, à droite un homme assis portant le bonnet phryg ien, et un chien; b) un berger et des animaux. La première scène représenterait Orphée et la seconde Paris. Bien que selon la tradition Orphée, fût un des Argo nautes, nous ne saurions déterminer ses liens avec la fuite de Médée. L'ambiance bucolique des deux autres scènes nous fait penser que la femme en char est Dé-
LA FUITE DE MÉDÉE APRÈS L'INFAlSmCIDE
189
vase en argent34. Jason a aussi sa place dans cette scène sur les vases. Cela est dû à l'influence de la tragédie au Ve et IVe siècles avant notre ère; mais le héros est absent des documents d'époque impériale. L'amphore n° 7, vu sa composition, pourrait bien être le reflet d'une peinture murale du IVe siècle avant notre ère.
méter qui a un rapport plus direct et plus juste avec la nature et les animaux. La confusion de Médée avec une déesse est également possible sur une peinture fragmentaire d'époque impériale d'une Villa d'Afrique du Nord, à Dar Bue Ani mera. Voir : M. Borda, La pittura Romana, 1958, p. 305, 309; Schmidt, Medeasarkophag, p. 35, pi. 23; on y voit le torse d'une femme, la tête de face; derrière elle se trouve un croissant de lune, elle tenait peut-être un arc. Malgré l'attitude du personnage qui se rapproche de celle de Médée, il s'agit plutôt de Diana-Luna, comme le remarque Schmidt, car aucune trace d'enfant ne subsiste sur l'épaule de la femme; alors que la déesse Luna est dressée dans un grand nombre de do cuments, sur un attelage de chevaux, debout avec sa draperie gonflée autour d'elle. Nous avons également exposé notre avis p. 181 sur le fragment de sarco phage d'Ostie n° 7, fig. 9 qui a été interprété comme la fuite de Médée et où pourr aits'agir de Demeter. 34 E. Babelon, Gazette des Beaux-Arts 41, 1899, le décrit p. 360 ainsi : «Médée emportant, sur un char traîné par deux dragons, les cadavres des deux enfants qu'elle vient de tuer». A noter également qu'à la fin du XIXe siècle, on connaissait l'iconographie de Médée surtout par les sarcophages. L'ouvrage de C. Robert, Die antiken Sarkophagreliefs, II date de 1890; donc il est fort probable que Babelon ne décrit pas la scène avec plus de détails parce qu'elle se rapprochait de celle des sarcophages. Nous avons constaté l'importance sur le plan iconographique de ce genre d'objets, dans le chapitre concernant la remise des cadeaux à Creuse, à pro pos du kalathos en argent.
CONCLUSION
Malgré l'ancienneté de la geste des Argonautes, les deux prota gonistes, Jason et Médée, semblent n'avoir été représentés qu'à part irdu début du VIe siècle avant notre ère. Le coffre de Kypselos, do cument sculpté sur lequel figurait, entre autres, leur mariage en pré sence d'Aphrodite, constitue leur première représentation connue, et on peut se demander si la conquête de la Toison ne perd pas à ce moment un peu de son importance, au profit du mariage qui serait ici perçu comme le but final du voyage argonautique. Les docu ments figurés di VIe siècle avant notre ère (vases) antérieurs à la tra gédie attique, transmettent une image des deux personnages dif férente de celle qui est suggérée par les poètes tragiques. Jason y f igure seul, en véritable héros, ou aux prises avec le redoutable dragon, digne d'être le chef d'une expédition dangereuse. Quant à Médée, après le coffre de Kypselos, elle ne réapparaît dans l'art qu'un bon siècle plus tard sur un lécythe, où elle est encadrée de deux serpents; son identité y est précisée par une inscription et la présence des serpents souligne les rapports de la princesse divine avec le monde chthonien et la magie. La tragédie attique, d'abord, et la poésie hellénistique ensuite, ont fixé la représentation des deux protagonistes, principalement centrée autour des événements tragiques de leur existence, telle qu'elle s'est transmise jusqu'à nous. Tout au long de cette étude, nous avons assisté à la désacralisation du contenu de la légende. Les schémas iconographiques ont été transmis par des objets d'art : des vases, des statues originales ou des copies, par la peinture murale, le mythe devient sujet artistique et se démythise. Les sarcophages d' époque impériale ainsi que les reliefs provinciaux tardifs témoignent de la continuité dans l'utilisation des modèles, comme de l'influence des auteurs grecs. Ils peuvent éclaircir le sens d'œuvres isolées et ils sont le support où l'on saisit le mieux le rapprochement de la l égende et de la vie humaine, où les passions des personnages myt hiques expriment le tragique de la vie, tout particulièrement pour Médée. Plutôt que le symbolisme on devrait considérer l'analogie de ces scènes sur les sarcophages. Nos exemplaires représentent en maj orité les épisodes tragiques de Corinthe, où apparait le personnage de Médée tel qu'Euripide et Sénèque l'ont mis en scène. Il est évident
192
JASON ET MÉDÉE
que le rôle du théâtre est important dans le choix des différentes scènes de la légende comme décor des sarcophages. Différents dé tails : les παραπετάσματα, les masques tragiques, les habits des per sonnages, la présence du pédagogue, soulignent le lien entre le théâtre et ces reliefs. On constate donc une analogie entre les pièces théâtrales, la vie des héros mythiques, la vie et la mort des humains. Les scènes choisies, exploits héroïques de Colchide, mariage, évoquent les vertus du défunt. Jason et Médée s'humanisent sur les sarcophages, pendant que leurs attributs suggestifs (monosandalisme, boite à φάρμακα, habit oriental) si appréciés des artistes anté rieurs disparaissent, pour faire place à des figures plus réelles, plus proches de la vie des humains; quelques objets quotidiens : lyre, livre, viennent rendre plus familières les scènes. Ainsi les images ac quièrent plus de force, en même temps qu'elles transmettent une l eçon morale que les marbriers romains tiraient de la légende. Seule Médée sur les sarcophages retrouve la physionomie caractéristique d'une petite-fille du Soleil au regard étincelant qu'aucun mortel n'ose affronter. La figure de Jason, cuirassé comme un officier ro main dans la scène de la remise des cadeaux à Creuse, ou celle du mariage rappelle la vie du défunt. Son image héroïque dans les épi sodes de la Colchide traduit l'espoir de l'héroïsation. La mort atroce de Creuse, l'infanticide, expriment le tragique de la mort. Alors que le mythe perd de sa valeur première, ces images l'intègrent davan tagedans la société romaine. Dans l'art figuré en général, le chef des Argonautes apparaît ra rement seul : il est plutôt accompagné de Médée ou encadré de ses compagnons. Sa carrière iconographique n'atteint pas la notoriété d'autres héros, comme par exemple Héraklès, avec qui, parfois, il peut être confondu (épisode des taureaux, ou du dragon). En luimême son personnage n'a pas un type bien fixe; le monosandalisme et les deux lances qu'il tient parfois peuvent être ses seuls attributs. Dans la tragédie attique, le héros se banalise et devient médiocre, jusqu'à avoir un comportement anti-héroïque. On le remarque plus tard encore sur les reliefs des sarcophages où Jason quoique présent dans les épisodes de Corinthe, n'agit pas. Médée, en revanche, se prête davantage aux jeux iconogra phiques, et son personnage, enrichi d'un certain nombre d'attributs, acquiert un type plus fixe que celui de Jason. C'est à la fin du Ve siècle avant notre ère qu'elle apparaît vêtue du riche costume orient al et du bonnet phrygien, qu'elle possède en commun avec d'autres personnages orientaux, comme les Amazones ou Ganymède. Ce vê tement, qui précise l'origine du personnage, s'affirme certainement sous l'influence de la tragédie grecque. Puis, au cours du IVe siècle, les images de Médée orientale sur les vases de l'Italie du Sud se mult iplient. Cependant le costume oriental ne constitue pas son seul at-
CONCLUSION
193
tribut : le φωριαμος, la boite contenant ses poisons, la coupe, les branches d'une plante, ou un bâton peuvent également la désigner, alors que sur les documents représentant l'infanticide, seule l'épée caractérise le personnage. Tous ces attributs ne qualifient pas la prê tresse bénéfique, mais la magicienne meurtrière, rusée et effrontée qui d'abord, selon les souhaits d'Héra, tue Pélias, et ensuite, sous l'emprise de sa passion et par soif de vengeance, n'hésite pas à tuer ses propres enfants. Jason est une pâle figure à côté de Médée, aussi bien dans l'art figuré que dans la littérature. Alors que, pendant l'expédition, Jason nous séduit par ses qualités de chef, quand les travaux difficiles se profilent, il ne prend plus d'initiative et se contente de laisser la mag icienne dominer les situations délicates (dragon, Talôs) ou le ven ger (Pélias). Son manque de caractère et sa confusion intérieure se manifestent surtout dans les textes, lors des épisodes de Corinthe. Comparée à cette figure mythologique décevante, Médée, person nage complexe, malgré son caractère occasionnellement sangui naireet repoussant, prend un relief exceptionnel. On n'a pas assez souligné que, tout d'abord, la meurtrière fut une princesse-prêtresse, utilisant de façon bénéfique ses connaissances de la magie. Le sou venir de cet ancien aspect de son personnage réapparaît encore dans la littérature impériale comme chez Diodore. Au départ, Médée est une de ces figures d'essence divine qui cède la place à une grande di vinité (Héra); certaines versions de sa légende laissent apercevoir ses liens avec celle-ci même à une époque tardive; sa transformation en meurtrière passionnée, à cause de la lâcheté de son époux, est sou lignée dans la tragédie attique. Le personnage créé par Euripide man ifeste malgré tout la douleur de sa décision horrible. La nature de Médée est double : humaine-divine; en outre, elle est liée à la fois au monde de la lumière (comme descendante du Soleil) et à celui des ténèbres (comme magicienne); enfin son origine barbare, au sens grec du terme, peut justifier son comportement extraordinaire. Tout au long de cette recherche, nous avons constaté des di ssemblances, entre autres psychologiques, entre ces deux person nages. Leur destinée diffère jusqu'à la fin, puisque Jason, héros dé chu, incapable de surmonter sa faiblesse, trouve la mort, soit frappé par un débris de l'Argô (Euripide, Médée, 1388), soit en se suicidant après l'infanticide (Diodore, IV, 55). En revanche, la meurtrière bar bare, Médée, la magicienne qui représente le monde chthonien, la passion, après avoir erré de Colchide à Iolcos, à Corinthe, à Athènes (sans laisser la trace d'un culte nulle part) se marie avec Achille, dans l'île des Bienheureux, après la mort de ce dernier (Apollonios, Arg., IV, 814-816; Apollodore, Epitome, V. 5; Lycophron, Alexandra, 174, 789). Dans cette légende, le rôle des dieux est impressionnant. Long-
194
JASON ET MÉDÉE
temps les deux personnages agissent sous la protection, et suivant les conseils et les intrigues de différentes divinités (Athéna, Apollon, Héra, Aphrodite), mais à la fin de leur vie commune, chacun agit l ibrement, sans l'intervention d'un dieu. Cela est en rapport avec la conception de la condition humaine chez les poètes tragiques. Il est étonnant que le protégé d'Héra, Jason, trahisse volontairement les liens conjugaux que régit Héra; de son côté, non seulement, Médée, décide selon son θυμός, son être irrationnel propre, de commettre un acte impie, mais encore elle retrouve, après le crime, une allure di vine. Dans l'art figuré, le reclassement de la magicienne à un rang divin s'exprime par tous les documents qui montrent sa fuite sur un char merveilleux.
TABLEAUX ICONOGRAPHIQUES Seuls les épisodes illustrés par des sarcophages et par d'autres œuvres figurent dans les tableaux ci-dessous. n. = note n° = numero - = avant notre ère 1. Jason monosandale (p. 45 à 51) DATE
SARCOPHAGES
- 480 à - 470
Monnaies de Larissa (Thessalie) n. 5
10 40 n° 12 Prétextât
170
DIVERS
Peinture de Pompéi n. 4 n° 1 Peinture de Pompéi n. 4 n° 2
2. Domptage des Taureaux (p. 69 à 75) DATE
SARCOPHAGES
- 470 à - 400 140
Monnaies de Thessalie n. 15 n° 1 à 5
150
n° 2 Berlin n° 5 Louvre 410 n° 6 Turin
170
n° 12 Prétextât
170 à 180
n° 13 Vienne n° 22 Naples
200 à 210
n° 24 Bâle
IVe siècle
DIVERS
Urne n. 16 n° 6
Contorniates n. 17
196
JASON ET MÉDÉE 3. La conquête de la Toison d'or (p. 79 à 94) * Jason et Médée ensemble
DATE
♦Jason seul
· Médée seule
SARCOPHAGES
DIVERS
- 625 à - 600 -610 à -600
♦ Alabastre n. 20 n° 2 ♦ Aryballe n. 20 n° 1
- 540 à - 530
• Lécythes n. 27
- 490 à - 480
♦ Coupe n. 20 n° 3 ♦ Miroir n. 20 n° 4 ♦ Sardoine n. 26 n° 1
- 490 à - 400 - 475 à - 450
♦ Sardoine n. 20 n° 6 ♦ Cratère n. 22 n° 7
- 450 à - 440 - 420 à - 410
♦ Miroir n. 20 n° 5 * Cratère n. 14 n° 1 * * * *
- 380 à - 280
Hydrie n. 14 n° 2 Cratère n. 14 n° 3 Cratères n. 14 n° 4 et 6 Lécythe n. 14 n° 5
- IIe siècle
♦ Amphore n. 26 n° 2 ♦ Cratère n. 26 n° 3 ♦ Gemmes n. 23
Ier siècle IIe siècle
* Plaques Campana n. 17 ♦ Médaillon n. 16
-310 à -300
160/180
* n° 18 Rome
170
* n° 12 Prétextât * n° 16 Rome P. Primoli
170 à 180
* n° 13 Vienne * n° 22 Naples
200 à 210 IIe à IIIe siècle IIIe siècle IVe à Ve siècle
* n° 24 Bâle
• Stèle de Sopron n. 3 1 * Fresque de Trêves n. 16 ♦ Contorniates n. 15
TABLEAUX ICONOGRAPHIQUES
197
4. Le mariage de Jason et de Médée (p. 99 à 104) DATE
SARCOPHAGES
= -570
DIVERS Coffre de Cypsetos
150 160 160 à 180 170
n° n° n° n°
5 9 19 12
Louvre Vatican Rome Prétextât
5. Médée se venge de la famille royale Les cadeaux (C) et la mort (M) de Creuse (p. 125 à 145) DATE
SARCOPHAGES
DIVERS Cratère n. 52 n° 1 C Cratère n. 78 n» 1-2 M Kalathos n. 53 n° 2 C
-400 - 340 à - 335 -20 150
n° 2 Berlin C M n° 3 Mantoue C M n° 4 Louvre 283 C M
160
ri° 8 Rome C M n° 9 Vatican 1242 C M n° 10 Rome Capitole C
170
n° 15 Vatican 2326 C
170 à 180
n° 20 Ancóne C M n° 21 Rome 222 C M n° 22 Naples C M
180 à 190
n° 23a Ostie C
200 à 210
n° 24 Bale C M
Urne n. 79 M
198
JASON ET MÉDÉE 6. Médée se venge sur ses propres enfants (p. 147 à 177) I = l'infanticide même DATE
π = Médée assise
SARCOPHAGES
DIVERS
- 350 à - 325
Amphores Cratère n. 72 I
10
Peinture de Pompéi n. 64 n° 14 Peintures de Pompéi n. 64 n° 15; n. 70 n° 18 π Peinture de Pompéi n. 74 n°23I
70 à 75
100
Frgt sigillée n. 33 n° 2
Ie siècle
Gemmes n. 37 n° 3-6
150
n° 2 Berlin n° 3 Louvre 283 n° 4 Mantoue
150 à 155
n° 1 1 Antalya π
160
n° 8 Rome 75248 n° 9 Vatican
170 à 180
n° 12 Prétextât n° 20 Ancóne n° 21 Rome 222 n° 22 Naples Frgt perdu n. 66 n° 17
IIe siècle 200 à 210
Trapézophore n. 65 n° 16 Ι π
Gemmes n. 73 n° 22 I n° 24 Bale
IIe e IIIe siècles
Statues n. 40 n° 7, n. 49 n°13 Groupes n. 46, 48 n° 10-12 Reliefs n. 44 n° 8, n. 75 n°24I
IIIe siècle
Relief n. 45 n° 9
TABLEAUX ICONOGRAPHIQUES
199
7. La fuite de Médée (p. 179 à 189) π = Médée assise DATE
SARCOPHAGES
- 400 à - 370
Hydrie n. 27 n° 5 Frgt de vase n. 27 n° 6 Amphore n. 27 n° 7 Vase perdu n. 27 n° 8 Petit groupe n. 31 n° 11 π
- 360 à - 320
Urne n. 26 n° 1 π
-240 125 à 130 140 à 160
n°
1 perdu
150
n° 2 Berlin n° 3 Mantoue n° 4 Louvre 283 n° 7 Ostie
160
n° 8 Rome 75248 n° 9 Vatican
170 à 180
n° 20 Ancóne n° 21 Rome 222 n° 22 Naples
IIe siècle 200 à 210
DIVERS
Urnes n. 26 n° 2-4
Gemme n. 27 n° 10 n° 24 Bâle
ABRÉVIATIONS ET BIBLIOGRAPHIE
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202
JASON ET MÉDÉE
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Fig. 1 - Sarcophage aujourd'hui perdu. Cat. n° 1.
Fig. 2 - Berlin Staatliche Museen. Face. Cat. n° 2.
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ν* Fig. 3 - Berlin Staatliche Museen. Petit côté gauche. Cat. n° 2.
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Fig. 4 - Berlin Staatliche Museen. Petit côté droit. Cat. n° 2.
Fig. 5 - Mantoue Palazzo Ducale. Cat. n° 3.
Fig. 6 - Louvre MA 283. Cat. n° 4.
Fig. 7 - Louvre MA 410. Cat. n° 5.
Fig. 8 - Turin Musée Archéologique. Cat. n° 6.
Fig. 9 - Ostie Palais Vescovale. Cat. n° 7.
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Fig. 11 - Rome MN Inv 75248. Petit côté gauche. Cat. n° 8.
Fig. 12 - Rome MN Inv 75248. Petit côté droit. Cat. n° 8.
Fig. 13 - Vatican Inv 1242. Couvercle. Cat. n° 9.
Fig. 14 - Rome Musée du Capitole. Cat. n° 10.
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Fig. 16 - Catacombe de Prétextât. Face. Cat. n° 12.
Fig. 17 - Catacombe de Prétextât. Face, détail de la partie gauche. Cat. n° 12.
Fig. 18 - Catacombe de Prétextât. Face, détail du milieu. Cat. n° 12.
Fig. 19 - Catacombe de Prétextât. Face, détail du milieu. Cat. n° 12.
Fig. 20 - Catacombe de Prétextât. Face, détail de la partie droite. Cat. n° 12.
Fig. 21 - Catacombe de Prétextât. Face, détail de la partie droite. Cat. n° 12.
Fig. 22 - Catacombe de Prétextât. Petit côté gauche. Cat. n° 12.
Fig. 23 - Catacombe de Prétextât. Petit côté droit. Cat. n° 12.
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Fig. 24 - Vienne Kunsthistorisches Museum. Cat. n° 13
Fig. 25 - Jadis à Cannes villa Faustina. Aujourd'hui disparu. Cat. n° 14.
Fig. 26 - Vatican Inv 2326. Cat. n° 15.
Fig. 27 - Fragment de sarcophage. Rome. Palazzo Primoli. Cat. n° 16.
Fig. 28 - A
Fig. 29 - Rome Musée National Inv 8647. Petit côté gauche d'un sarcophage. Cat. n° 18.
Fig. 30 - Rome Musée National Inv 8648. Petit côté droit d'un sarcophage. Cat. n° 19.
2
yT Fig. 31 - Ancóne. Musée National des Marches. Cat. n°
Fig. 32 - Rome Musée National Inv 222. Face. Cat. n° 21.
Fig. 33 - Rome Musée National Inv 222. Petit côté gauche. Cat. n° 21.
Fig. 34 - Rome Musée National Inv 222. Petit côté droit. Cat. n° 21.
Fig. 35 - Naples Musée National. Face. Cat. n° 22.
Fig. 36 - Naples Musée National. Petit côté gauche. Cat. n° 22.
Fig. 37 - Naples Musée National. Petit côté droit. Cat. n° 22.
Fig. 38 - Perdu, jadis au musée d'Ostie. Cat. n° 23.
Fig. 39 - Ostie. Musée Inv 10258. Cat. n° 23.
Fig. 40 - Bale. Sarcophage et son couvercle. Cat. n° 24.
Fig. 41 - Bale. Face, détail de la partie gauche. Cat. n° 24.
Fig. 42 - Bale. Face, détail du milieu. Cat. n° 24.
Fig. 43 - Bale. Face, détail de la partie droite. Cat. n° 24.
Fig. 44 - Bale. Face, détail de l'angle inférieur droit. Cat. n° 24.
Fig. 45 - Bale. Couvercle, détail de la partie gauche. Cat. n° 24.
Fig. 46 - Bale. Couvercle, détail du milieu. Cat. n° 24.
Fig. 47 - Bale. Couvercle, détail de la partie droite. Cat. n° 24.
Fig. 48 - Marseille Musée Borély. Petit côté du couvercle. Cat. n° 25.
Fig. 49 - Marseille Musée Borély. Cou vercle détail de l'antéfixe gauche. Cat. n° 25.
Fig. 50 - Marseille Musée Borély. Couv ercle détail de l'antéfixe droite Cat. n° 25.
Fig. 51 - Sarcophage faux. Rome marché des antiquités.
Fig. 52 - Statue. Louvre Ma 83.
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Fig. 53 - Plaque Campana. Rome. Villa Albani.
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Fig. 54 - M
Fig. 55 - Plaque Campana. Louvre 4193.
Fig. 56 - Stuc. R
Fig. 58 - Relief à trois figures. Vatican Inv 9983.
Fig. 57 - Relief. Sopron, Musée F. Liszt Inv 552081.
Fig. 59 - Relief à trois figures. Vatican Inv 9983. Détail (Médée).
Fig. 60 - Urne. Ostie Musée Inv 10.
Fig. 61 - Urne. Ostie Musée Inv 10.
Fig. 62 - Urne. Ostie Musée Inv 10.
Fig. 63 - Statue. Arles Musée.
Fig. 64 - Relief. Bu
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Fig. 65 - Relief. Médard (Kusel, Germanie Supérieure).
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Fig. 66 - Petit groupe. Budapest, Torténeti Museum.
Fig. 67 - Petit groupe. Budapest, Musée des Beaux Arts.
Fig. 68 -
Fig. 69 - Statue. Florence. Loggia dei Lanzi.
Fig. -70 - Trap
Fig. 71 - Trapézophore. Dion (Macédoine, Grèce).
Fig. 72 - Trapézoph
Fig. 73 - Trapézophore. Dion (Macédoine, Grèce). Détail du groupe de gauche.
Fig. 74 - Fragme
Fig. 75 - Relief. Székesfehérvâr. Musée Inv 10413.
Fig. 76 - Statuette. Naples MN Inv 20337.
CRÉDIT PHOTOGRAPHIQUE
DAIR = Deutsches Archäologisches Institut Rom. Photothèque. Fig. 1 - Sarcophage aujourd'hui perdu. Cliché DAIR 6534. Fig. 2-4 - Berlin Staatliche Museen. Clichés du musée SK 8267, SK 8266, SK 8268. Fig. 5 - Mantoue Palazzo Ducale. Cliché DAIR 62122. Fig. 76 - Louvre MA 410. Fig.' 283. Cliché des Musées Nationaux. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig.
8 - Turin Musée Archéologique. Cliché DAIR 741526. 9 - Ostie Palais Vescovale. Cliché DAIR 74693. 10-12 - Rome MN Inv 75248. Clichés DAIR 63545, 63549, 722986. 13 - Vatican Inv 1242. Couvercle. Cliché du musée. 14 - Rome Musée du Capitole. Cliché DAIR 751302. 15 - Antalya Musée. Cliché A. Davesne. 16-23 - Catacombe de Prétextât. Clichés DAIR 72488, 68926, 68925, 72492, 68924, 72494, 72499, 72498. Fig. 24 - Vienne Kunsthistorisches Museum. Cliché du musée A623. Fig. 25 - Jadis à Cannes villa Faustina. Cliché DAIR 372. Fig. 26 - Vatican Inv 2326. Cliché de l'auteur. Fig. 27 - Rome, Palazzo Primoli. Cliché DAIR 742859. Fig. 28 - Aujourd'hui perdu. D'après Schmidt, Medeasarkophag, fig. 12. Fig. 29 - Rome MN Inv 8647. Cliché du musée 188424. Fig. 30 - Rome MN Inv 8648. Cliché du musée 188426. Fig. 31 - Ancóne. MN des Marches. Cliché DAIR 61252. Fig. 32-34 - Rome MN Inv 222. Clichés DAIR 692502, 692505, 692504. Fig. 35 - Naples Musée National. Cliché de la Soprintendenza Archeologica delle Province di Napoli e Caserte, Napoli. N° 5696. Fig. 36-37 - Naples Musée National. Cliché DAIR 62841, 62842. Fig. 38 - Aujourd'hui perdu. D'après ASR III, 3, n° 464. Fig. 39 - Ostie. Musée Inv 10258. Cliché du musée n° Se. Sar 960. Fig. 40-47 - Bale. Clichés du musée, Niggli. Avec l'aimable autorisation de M. Schmidt. Fig. 48-50 - Marseille Musée Borély. Clichés : CNRS, A. Chéné, G. Réveillac, Centre Camille Jullian. N° 65724-65726. Fig. 51 - Rome marché des antiquités. Cliché DAIR 704023. Fig. 52 - Louvre Ma 83. Cliché des Musées Nationaux. Fig. 53 - Rome. Villa Albani. Cliché Alinari 27603. Fig. 54 - Rome Palazzo Colonna. Cliché DAIR 822293. Fig. 55 - Louvre 4193. Cliché des Musées Nationaux. Fig. 56 - Rome. Basilique de la Porte Majeure. Cliché DAIR 412085.
212 Fig. Fig. Fig. Fig.
JASON ET MÉDÉE
57 - Sopron, Musée F. Liszt Inv 552081. Cliché du musée. 58-59 - Vatican Inv 9983. Cliché de l'auteur. 60-62 - Ostie Musée Inv 10. Clichés Soprintendenza d'Ostie N° R2545. 63 - Arles, Musée de l'Arles antique. Cliché CNRS, A. Chéné, G. Réveillac. Centre C. Jullian N° 72544. Fig. 64 - Budapest. Musée des Beaux Arts Inv 1619066. Cliché du musée. Fig. 65 - Médard (Kusel). D'après E. Künzl, Bjb 173, 1973, fig. 2. Fig. 66 - Budapest Torténeti Museum. Cliché du Musée. Fig. 67 - Budapest Musée des Beaux Arts. Cliché du Musée. Fig. 68 - Graz Lapidarium. Cliché du musée. Fig. 69 - Florence. Loggia dei Lanzi. Cliché Alinari 2507. Fig. 71 - Dion. Avec l'aimable autorisation de Th. Stefanidou-Tiveriou. Fig. 71-73 - Dion. D'après l'Album de l'Office du Tourisme Grec, 1985, fig. 237, 238, 242, 243. Fig. 74 - Jadis à Rome. D'après K. Dilthey, AZ XXXIII, 1875, pi. 8, 1. Fig. 75 - Székesfehérvar. Musée Inv 10413. Cliché du musée (F. Gelengser). Fig. 76 - Naples MN Inv 20337. Cliché de la Soprintendenza Archeologica delle Province di Napoli e Caserte, Napoli. N° 543.
INDEX Achille : 142 η. 71, 193. Adonis : 128 η. 10, 154 η. 24. Aiétès : 1 η. 1, 38, 39, 47, 61, 62, 63, 65, 69, 70 η. 4, 71, 72 η. 13, 77, 79, 81 η. 7, 96, 147, 148. Aison : 37, 38, 122. Amour cf. Eros. Amykos : 57 η. 3 et 4, 58, 60. Analogie : 191, 192. Antimaque : 79, 80, 99. Antonin le Pieux : 22, 24-27. Aphrodite : 41, 45 η. 2, 65 η. 1, 75 η. 22, 100, 101, 126 η. 4, 135, 191, 194. ApoUonios de Rhodes : 1 η. 1, 2, 3, 40 η. 19, 41, 45 η. 1 et 2, 46, 50 η. 21, 53 η. 1, 54, 57 η. 1 et 3, 59 η. 7, 61, 62, 65, 67, 69, 71 η. 6, et 11, 73, 75 η. 23, 77 η. 2, 79, 80, 84, 95, 99, 105, 107, 111, 187, 193. Apsyrtos : 39, 54, 63, 72 η. 13, 95, 96, 99, 119 η. 20. Arbre : 75 η. 22, 80, 82, 83, 85, 86, 88 η. 20, 90, 91 η. 26, 93, 184. Arcade : 19, 26 η. 17, 31 η. 34, 144, 154, 155, 157. Argo : 39, 53, 54, 57, 59 η. 8, 62, 63, 80, 87, 88 η. 19, 90 η. 22, 95, 96, 106 η. 7, 193. Argonautes : 4 η. 11, 38, 53 η. 1, 55, 57, 59, 60, 61, 63, 65, 66, 68 η. 7, 69, 74 η. 16, 79, 80, 87, 93 η. 32, 113 η. 9, 188 η. 33, 191, 192. Argonautiques Orphiques : 41, 53 η. 2, 54, 61 η. 2, 62, 63, 80, 93, 106. Argos : 53 η. 1 et 2, 54 η. 4 et 2, 55 η. 7, 65. Arles : 32 η. 39. Artémis-Diane : 66, 80, 95, 99, 124. Asie Mineure : 22, 27 η. 19 et 20. Athéna : 1, 53 η. 2, 54 η. 6, 57 η. 4, 58, 70 η. 5, 75 η. 22, 88-89 η. 20 et 21, 106 η. 7, 194.
Bélier : 84, 112, 114, 115, 118, 119, 120 η. 23, 184. Bonnet phrygien : 81 η. 8, 121, 173 η. 72 et 74, 176, 185 η. 27, 186, 187 η. 31, 188, 192. Boréades : 58 η. 5, 59 η. 7, 68 η. 7, 84 η. 14, 93. Centaure : 22-23 η. 6, 37, 38, 46, 59 η. 7. Chalciopé : 38, 65 η. 2 et 3. Char : 26, 34, 61, 62, 63, 179, 180, 182, 187 η. 31, 188. Chiron : 37, 38, 46, 59 η. 7. Chronologie : 22-33. Circe : 38, 39, 41, 54, 99, 113 η. 9, 126, 187 η. 28. Clair-obscur : 29 η. 26, 32. Coffre de Kypselos : 3, 45, 58 η. 5, 100 η. 5, 104, 112, 114 η. 12, 118 η. 18, 191. Ciste Ficoroni : 57 η. 4, 63. Coffret : 80 η. 6, 143 η. 78, 145. Colchide : 1, 2, 31, 38, 45, 57, 61, 62, 63, 69, 72, 79, 81 η. 7, 89 η. 20, 95, 97, 101, 102, 103, 147, 155 η. 29, 192. Commanditaire ou défunt : 5, 35, 48, 103, 129, 130, 135, 138, 143, 167, 183, 184, 192. Commode : 31. Composition : 27, 29, 30, 32, 34, 73, 84, 85, 87, 102, 103, 127, 132, 134, 138, 139, 152, 159 η. 40, 164, 165, 180. Corcyre : 99, 104, 105, 107 η. 2. Corinthe : 2, 4 η. 11, 40, 62, 102, 103, 125, 126, 147, 148, 151 η. 17, 191. Créon : 125, 126, 139, 140, 141 η. 69 et 70, 142, 143 η. 78, 144, 148. Crète : 91 η. 26, 105. Creuse : 2, 27, 29, 30, 31, 34, 103 η. 13 et 18, 126, 127, 129, 130, 131, 132, 133, 134, 135, 138, 139, 140, 141 η. 69 et 70, 142, 143, 144, 148, 149, 150,
214
JASON ET MÉDÉE
152, 155, 156, 157, 165, 166, 171, 180, 192. Demeter : 167 n. 61, 180 n. 6, 181, 182 n. 13, 188 n. 33, 189 n. 34. Dextrarum iunctio : 96, 101, 102, 103. Diodore de Sicile : 38, 41, 66, 69 η. 3, 70 η. 4, 99, 112, 113 η. 9, 126, 143 η. 78, 147 η. 2, 150, 179 η. 5, 193. Dionysos : 6, 25, 26 η. 16, 28 η. 22, 30 η. 29, 122, 153. Dioscures : 53 η. 1, 55, 59 η. 7 et 8, 73 η. 14, 96, 106 η. 6 et 7. Dracontius : 41, 99 η. 2, 126, 137 η. 57, 151. Dragon : 26, 79, 82 η. 9, 84, 88, 89 η. 20, 91 η. 26, 113 η. 9, 124 η. 34, 179, 180, 186, 191, 192, 193. Eidolon : 113 η. 9, 114. Endymion : 167 η. 61, 182 η. 13, 183 η. 15, 17 et 18. Eros : 22 η. 6, 24, 65 η. 2, 75 η. 22, 84 η. 14, 100 η. 7, 102, 128 η. 11, 135, 165. Eschyle : 40, 54 η. 3, 59 η. 7, 122. Eumélos : 39, 69, 92 η. 29, 147, 148, 149, 179 η. 1. Euripide : 3, 38 η. 11, 40 η. 18, 41, 77 η. 2, 79 η. 4, 95, 99, 111, 112, 113, 114, 118, 119, 122, 125, 126, 133, 136, 137, 138, 143 η. 78, 144, 145, 147, 148, 149, 150, 153, 157 η. 35, 160 η. 42, 164, 172 η. 70, 174, 179, 186 η. 6, 187 η. 31, 191, 193. Flamme : 140, 143, 144. Fleurs : 23. Fuite : 96, 181-189. Gaule : 22, 32 η. 37. Gemme : 55 η. 7, 82, 87 η. 18, 88 η. 20, 90 η. 23, 91, 92 η. 30, 158 η. 37, 164, 173, 186 η. 10. Genévrier : 75 η. 23, 80, 84. Glaucé cf. Creuse. Guirlande : 9, 22 η. 6, 24, 34, 129, 136, 137, 159, 183. Hadrien : 22-24. Hécate : 38, 62, 65, 66, 67 n. 6, 70 n. 4, 113 n. 9. Héra : 1, 41, 45 n. 2, 61, 65 n. 2, 66, 82, 100, 101, 106 n. 7, 147, 148, 149, 150, 151 n. 17, 174, 193, 194.
Héraklès : 3, 53 n. 1, 72, 74 n. 19, 75 n. 22, 91 n. 26, 94 n. 32, 101 n. 9, 106, 124, 153 n. 23, 179 n. 5, 192. Hésiode : 37 n. 1, 38, 39, 41, 55 n. 7, 69 n. 2, 111. Hippolyte : 128 n. 10, 132, 133, 154 n. 24. Homère : 2, 38, 53, 121 n. 28. Hygin : 70 n. 4, 95, 112 n. 8, 113, 126. Infanticide : 24, 34, 40, 41, 147-177, 179, 180, 188 n. 32, 193. Iolcos : 2, 4 n. 11, 37, 38, 40, 45, 57, 105, 147. Jason : passim. Kalathos : 120 n° 13, 136-137, 138, 144. Kydias de Kythnos : 55, 60 n. 10. Lampe : 34, 129. Lénos : 22, 25 n. 14. Lumière (jeux de) : 73, 130, 180. Lycophron : 69, 112, 122. Lyre : 34, 129-130 n. 20, 192. Lysippe : 50 n. 18, 19 et n. 22, 131. Macris : 100. Marc-Aurèle : 22, 26, 27-31. Mariage : 99-102, 127 n. 10, 137 n. 58, 142 n. 73, 192. Médée : passim. Médaillon contorniate : 74 n. 17, 86 n. 15. Méléagre : 6, 25, 26 n. 17, 28 n. 23, 29 n. 28, 30 n. 31, 53 n. 1, 141 n. 67. Merméros : 38, 135, 147 n. 2, 148. Mikon : 55, 58 n° 2, 59, 60 n. 9. Modèle : 5, 24, 27, 34, 35, 74, 138, 168, 188, 191. Monnaie : 46-47 n. 5, 55 n. 8, 72, 73 n. 15. Monosandale : 45-51, 192. Mosaïque : 156 n. 33. Naupactica : 39 n. 16, 69, 72, 79, 95. Neophron : 125, 174, 175, 186 n° 6. Nostoi : 39, 122. Nourrice : 29, 102, 127, 130, 133, 157, 166, 167, 171, 180 n. 7. Orphée : 38, 54, 59 n. 8, 80, 93, 99 n. 3, 188 n. 33. Ovide : 41, 53 n. 2, 57 n. 1, 66, 69, 71 n. 11, 77 n. 3, 80, 112 n. 6, 122, 126, 144 n. 80.
INDEX Ostie : 21, 23, 24 η. 9, 26, 29, 31, 127, 156. Parapetasma : 19, 24, 26, 29, 30, 96, 103 η. 16, 128, 130 η. 23, 139, 152, 157, 192. Pausanias : 38, 45, 58 η. 5, 60, 100 η. 5, 111, 112, 113 η. 9, 118 η. 18, 125, 126, 147, 148, 149, 179 η. 1, 187 η. 31. Pavot : 19, 31, 127, 128, 133, 134, 135, 137. Pédagogue : 19, 81 η. 7, 126, 136, 143 η. 78, 144, 145, 150, 156, 157, 164, 165, 167, 168, 170, 171, 173 η. 72 et 74, 174, 175, 185 η. 26, 192. Peinture : 5, 46 η. 4, 54 η. 4, 60, 66-67 η. 6, 72 η. 13, 80, 81 η. 7, 82, 86, 87, 93 η. 32, 117 η. 15, 120 η. 24, 138, 150, 156 η. 31 et 32, 158 η. 37, 160, 164, 168, 170, 171-173, 175, 187, 188 η. 33, 189, 191. Pélias : 2, 4 η. 11, 38, 39, 40, 45, 46, 60, 62, 81 η. 8, 111-124, 179 η. 7, 193. Péliades : 111, 112 η. 3, 113-119, 121, 163 η. 49. Pélion : 1 η. 1, 37, 53. Pharmaka : 68 η. 7, 84 η. 14 η° 1, 113 η. 9, 119, 192. Persephone : 181, 182, 183 η. 15 et 17. Phaéton : 183 η. 18. Phase : 61, 62 η. 2 et 3, 63, 66, 95, 99. Phérécyde : 37 η. 2 et 3, 46, 53 η. 2, 69, 95, 111, 122. Phérès : 38, 135, 147 η. 2, 148. Phinée : 58 η. 5, 59 η. 7. Phorìamos : 68 η. 7, 80 η. 6, 84 η° 3, 85, 116 η. 3, 118, 119, 121, 155, 192. Pindare : 37-39, 46, 53 η. 1, 55 η. 7, 57 η. 1, 61 η. 2, 62 η. 4, 65 η. 1, 69, 70 η. 4, 71 η. 10, 72, 79, 82 η. 9, 89, 99, 100, 111, 148 η. 8, 174 η. 76. Plaque Campana : 54 η. 5, 87 η. 17. Pollux : 57, 58, 80. Phrixos : 38, 61, 65 η. 2, 80-81. Promachos : 38, 112. Prométhéion : 66, 68, 71 η. 6. Pseudo-Apollodore : 38, 41, 45 η. 2, 54, 57 η. 1, 69, 71 η. 7, 99, 105, 107, 112, 126, 150, 179 η. 5, 193. Sabazios : 154 η. 23, 182, 184. Saisons : 27, 136.
215
Schéma : 35, 54, 72, 73 η. 15, 74, 86, 87 η. 17, 88, 90 η. 23, 91, 93, 103, 119, 139, 156 η. 33, 166 η. 58, 168. Selène : 167 η. 61, 182 η. 13, 191. Sénèque : 40, 41, 71 η. 6, 80, 99, 112, 126, 138 η. 61, 144 η. 80, 150, 151, 164 η. 52, 174, 175, 179 η. 5, 180. Serpent : 82-84, 86, 87 η. 18, 88 η. 20, 90, 92, 93, 184, 187 η. 31, 191. Septime Sévère : 31-32. Sophocle : 40, 59 η. 7, 58 η° 2, 69, 71 η. 6, 95, 105, 112, 114. Stèle hermaïque : 24, 29, 33 η. 41, 130, 152, 153. Symbolisme : 35, 94, 104, 128-129, 134, 135, 154, 156 η. 30, 160 η. 42, 167 η. 61, 168, 170, 183 η. 19, 187 η. 30, 191. Stuc : 87 η. 18. Talôs : 60, 105-107, 193. Taureaux : 48, 69-75, 96, 192. Tellus : 143, 183, 184, 185 η. 26. Théâtre : 71 η. 8, 87, 121, 127, 128, 132, 138, 142 η. 71, 164, 175, 192. Thessalie : 1, 2, 37, 38, 55, 73, 111, 113 η. 9. Thésée : 3 η. 5, 74 η. 20, 75 η. 23, 101 η. 9, 124, 154 η. 24. Thusnelda : 159, 163 η. 49. Timomachos de Byzance : 171-172. Torche abaissée : 134 η. 42. Thiase : 25. Urne : 72, 74 n. 16, 143, 144, 184 n. 26, 185, 187. Ulysse : 32 n. 38, 37 n. 3, 39 n. 15. Valerius Flaccus : 3, 53 n. 2, 54, 57 n. 1, 62 n. 3, 66, 67 n. 6, 69, 70 n. 4, 71 n. 6 et 11, 77, 80, 99, 112 n. 5, 126, 151, 179 n. 5. Vases : 57 n. 4, 58 n. 5, 59 n. 7, 68 n. 7, 74 n. 21, 81-82 n. 8, 84 n. 14, 85 n. 4-6, 88 n. 20, 91 n. 26, 92 n. 29, 106-107 n. 6 et 7, 115 n. 13 et 14, 118 n. 16-18, 120 n. 23, 136, 143, 173, 174, 185, 188, 189, 191, 192. Venus cf. Aphrodite. Vertu ou Virtus : 84, 94, 97, 192. Zeus : 1 η. 1, 59 η. 7, 74, 105, 148.
TABLE DES MATIÈRES
Page Introduction
1
Concordance avec Antike Sarkophagreliefs Chap. I - Catalogue des sarcophages Chap. II - Analyse stylistique et chronologie des sarcophages. Chap. Ill - Les sources littéraires
8 9 21 37
Étude ICONOGRAPHIQUE Chap. IV - Jason monosandale devant Pélias Chap. V - La construction du navire Argô Chap. VI - L'expédition vers la Colchide Chap. VII - La rencontre avec le monde barbare : Jason et Aiétès Chap. VIII - La rencontre de Jason et Médée Chap. IX - Les exploits de Jason : les taureaux Chap. X - Les guerriers nés de la Terre Chap. XI - La conquête de la Toison d'Or Chap. XII - Le meurtre d'Apsyrtos Chap. XIII - Le mariage de Jason et de Médée Chap. XIV - La mort de Talôs en Crète
45 53 57 61 65 69 77 79 95 99 105
Médée et Jason après la conquête de la Toison d'Or Chap. Chap. Chap. Chap.
XV - La mort de Pélias XVI - Médée se venge de la famille royale XVII - Médée se venge sur ses propres enfants XVIII - La fuite de Médée après l'infanticide
Conclusion
111 125 147 179 191
218
JASON ET MÉDÉE
Tableaux iconographiques
Page 195
Abréviations et bibliographie
201
Illustrations
H.T.
Crédit photographique
211
Index
213
Table des matières
217