Br` eve introduction ` a la th´ eorie des ensembles P({a, b, c, d, e}) =
n ∅, {a} , {b} , {c} , {d} , {e} , {a, b} , {a, c} , {a, d} , {a, e} , {b, c} , {b, d} , {b, e} , {c, d} , {c, e} , {d, e} , {a, b, c} , {a, b, d} , {a, b, e} , {a, c, d} , {a, c, e} , {a, d, e} , {b, c, d} , {b, c, e} , {b, d, e} , {c, d, e} , {a, b, c, d} , {a, b, c, e} , {a, b, d, e} , {a, c, d, e} , {b, c, d, e} , {a, b, c, d, e}
o
Fran¸cois Bergeron, D´ epartement de math´ ematiques, UQAM 11 mai 2011
2
Table des mati` eres 1 Ensembles et fonctions 1.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . 1.2 Ensembles . . . . . . . . . . . . . . . 1.3 Sous-ensembles . . . . . . . . . . . . 1.4 Op´erations de base sur les ensembles 1.5 Produit cart´esien . . . . . . . . . . . 1.6 Relation . . . . . . . . . . . . . . . . 1.7 Fonctions . . . . . . . . . . . . . . . 1.7.1 Bijections . . . . . . . . . . . 1.7.2 Injections . . . . . . . . . . . 1.7.3 Surjections . . . . . . . . . . 1.8 Compter les ´el´ements d’un ensemble
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1 1 1 3 4 6 7 8 10 11 13 14
Appendices
16
A Un soup¸ con de logique
17
B Axiomatique de la th´ eorie des ensembles
19
C Calcul formel 23 C.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 C.2 Th´eorie des ensembles et calcul formel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 D Notations
29
i
ii
` TABLE DES MATIERES
Chapitre 1
Ensembles et fonctions 1.1
Introduction
Les notions de la th´eorie des ensembles et des fonctions sont `a la base d’une pr´esentation moderne des math´ematiques. Immanquablement, on y fait appel pour la construction d’objets plus complexes, ou pour donner une base solide aux arguments logiques. En plus d’ˆetre des notions fondamentales pour les math´ematiques, elles sont aussi cruciales en informatique, par exemple pour introduire la notion de structures de donn´ees .
1.2
Ensembles
La th´eorie des ensembles a ´et´e introduite par Georg Cantor. On peut en donner une axiomatique rigoureuse qui n’est pas vraiment approfondie ici (voir cependant l’appendice B). C’est tout de mˆeme un aspect important de la question comme on va l’entrevoir ` a la section 1.8. La th´eorie suppose que les ensembles contiennent des ´el´ements, et on ´ecrit x ∈ A pour dire que x est un ´el´ement de A . Deux ensembles sont ´egaux si et seulement s’ils ont les mˆemes ´el´ements. Autrement dit, pour connaˆıtre un ensemble il faut savoir dire quels en sont les ´el´ements. Ainsi, on a les pr´esentations ´equivalentes {a, b, c} = {c, a, b} = {a, b, a, b, c, a, b, a}, d’un mˆeme ensemble qui contient les trois ´el´ements : a, b et c. Typiquement, sans les d´efinir tr`es rigoureusement ici, on commence par consid´erer des ensembles simples comme 1
Georg Cantor (1845–1918)
2
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS • L’ensemble des entiers naturels, N := {0, 1, 2, 3, . . . }; • L’ensemble des entiers, Z := { . . . , −3, −2, −1, 0, 1, 2, 3, . . . }; • L’ensemble des nombres rationnels, na Q := | a ∈ Z, b
b ∈ N,
et
o b 6= 0 ;
l’ensemble R des nombres r´eels, qui inclue les nombres rationnels et tous les nombres qu’on peut construire 1 ` a partir de ceux-ci par passage `a la limite ; l’ensemble des entiers naturels entre 1 et n [n] := {i ∈ N | 1 ≤ i ≤ n}; l’ensembles de lettres (minuscules) de l’alphabet A := {a, b, c, d, . . . , z}; ou encore des ensembles d’objets divers comme {•, •, •},
o` u
{♣, ♦, ♥, ♠}.
` partir de tels ensembles de base on construit des ensembles plus complexes au moyen A d’op´erations entre ensembles qui seront introduites dans les sections suivantes. Une axiomatique correcte de la th´eorie des ensembles explique comment proc´eder `a des descriptions admissibles d’ensembles de bases, et comment construire ensuite des ensembles plus complexes. Ainsi, on peut d´ecrire l’ensemble A = {x ∈ S | P (x)}, (1.1) des ´el´ements de S qui satisfont une certaine propri´et´e P (x), formul´ee sous forme d’´enonc´e logique (voir AppendiceA). Dans ce cas, la notion d’´egalit´e A = B, avec B = {x ∈ S | Q(x)}, correspond au fait que les propri´et´es P (x) et Q(x) sont logiquement ´equivalentes. On d´enote ∅, l’ensemble vide, qui ne contient aucun ´el´ement. Le nombre d’´el´ements (ou cardinal ) d’un ensemble fini A, est d´enot´e |A|, ou parfois aussi #A.
` voir dans un cours d’analyse. 1. A
1.3. SOUS-ENSEMBLES
1.3
3
Sous-ensembles
Si tous les ´el´ements de B sont aussi des ´el´ements de A, on dit que B est un sous-ensemble de A, et on ´ecrit B ⊆ A. On dit aussi que B est une partie de A. Se donner un sous-ensemble B, de k ´el´ements d’un ensemble A de cardinal n, correspond donc ` a
choisir k ´el´ements parmi n
.
L’inclusion d’ensembles poss`ede les propri´et´es suivantes. Pour tout A, B et C, on a a) ∅ ⊆ A, b) A ⊆ A, c) si A ⊆ B
et
B ⊆ A,
alors A = B,
d) si A ⊆ B
et
B ⊆ C,
alors
(1.2)
A ⊆ C.
Lorsque A et B sont d´ecrit comme en (1.1), on a B ⊆ A si et seulement si l’´enonc´e logique Q(x) =⇒ P (x) est vrai. On d´enote P[S] l’ensemble de tous les sous-ensembles de S : P[S] := {A | A ⊆ S }.
(1.3)
On dit aussi que P[S] est l’ensemble des parties de S. Par exemple, P[{a, b, c}] = {∅, {a}, {b}, {c}, {a, b}, {a, c}, {b, c}, {a, b, c}}. Pour chaque 0 ≤ k, on consid`ere aussi l’ensemble des parties ` a k-´el´ements de S : P k [S] := {A | A ⊆ S,
|A| = k }.
C’est donc
l’ensemble des possibilit´es de choix de k ´el´ements parmi n
Ainsi, on a P 0 [S] = {∅}, puis P 1 [S] = {{x} | x ∈ S}, et encore P 2 [S] = {{x, y} | x, y ∈ S,
et
x 6= y},
.
4
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS
et ainsi de suite jusqu’` a P n [S] = {S}, pour n ´egal au cardinal de S. Ainsi, si S = {a, b, c}, alors on a P 0 [S] = {∅}, P 1 [S] = {{a}, {b}, {c}}, P 2 [S] = {{a, b}, {a, c}, {b, c}}, P 3 [S] = {{a, b, c}}. Ces ensembles contiennent donc respectivement 1, 3, 3, et 1 ´el´ements, et leur union disjointe donne l’ensemble `a 8 ´el´ements P[S] vu plus haut. Attention, les ensembles {a, b, c}
et
{{a}, {b}, {c}},
sont diff´erents, puisqu’ils n’ont pas les mˆemes ´el´ements. Autrement dit, les accolades { et } ont un ici rˆ ole math´ematique important. Ce ne sont pas que de simples s´eparateurs comme en fran¸cais. On dit des ´el´ements {x, y} de P 2 [A] que ce sont des paires d’´el´ements de A. On a alors forc´ement x 6= y.
1.4
Op´ erations de base sur les ensembles
Une premi`ere op´eration de base entre ensembles est celle d’intersection, A∩B, entre deux ensembles A et B. C’est l’ensemble des ´el´ements qui sont communs `a ces deux ensembles. Plus pr´ecis´ement on a A ∩ B := {x | x ∈ A, et x ∈ B}. (1.4) Par exemple, on a {a, b, c, d} ∩ {1, b, 3, d} = {b, d}. D’autre part, l’union de A et B est l’ensemble A ∪ B := {x | x ∈ A,
o` u x ∈ B}.
(1.5)
Par exemple {a, b, c, d} ∪ {1, b, 3, d} = {a, b, c, d, 1, 3}. On v´erifie facilement que les ´egalit´es suivantes sont valables en g´en´eral, quels que soient les ensembles A, B, et C : (i) A ∩ ∅ = ∅,
(i)0 A ∪ ∅ = A,
(ii) A ∩ B = B ∩ A,
(ii)0 A ∪ B = B ∪ A,
(iii) A ∩ (B ∩ C) = (A ∩ B) ∩ C,
(iii)0 A ∪ (B ∪ C) = (A ∪ B) ∪ C,
(iv) A ∩ (B ∪ C) = (A ∩ B) ∪ (A ∩ C), (iv)0 A ∪ (B ∩ C) = (A ∪ B) ∩ (A ∪ C).
(1.6)
´ 1.4. OPERATIONS DE BASE SUR LES ENSEMBLES
5
Lorsque A ∩ B = ∅, on dit que A ∪ B est une union disjointe, et on ´ecrit alors A + B pour d´esigner cette union. Voir l’exercice ?? pour ce qui concerne les propri´et´es de l’union disjointe 2 . La diff´erence, A \ B, de deux ensembles A et B, est l’ensemble des ´el´ements de A qui ne sont pas dans B, i.e. : A \ B := {x ∈ A | x 6∈ B}. (1.7) En supposant qu’on a un ensemble S fix´e, on d´enote A le compl´ement de A dans S. C’est tout simplement un autre nom pour A := S \ A, qu’il est pratique d’utiliser lorsque le sur-ensemble S est clair dans le contexte. Ainsi, lorsqu’on fixe S = {a, b, c, d, e, f } et A = {b, c, e}, on a A = {a, d, f }. Si A = {x ∈ S | P (x)}, alors on a A = {x ∈ S | ¬P (x)}. Quels que soit A et B des sous-ensembles de S (donc des ´el´ements de P[S]), les identit´es suivantes sont valables (i) A = A, (ii) A ∩ A = ∅,
(ii)0 A ∪ A = S,
(iii) A ∩ B = A ∪ B,
(iii)0
(1.8)
A ∪ B = A ∩ B.
Pour une famille d’ensembles 3 {A1 , A2 , A3 , . . . , An }, on a les unions et intersections
n \
Ai ,
et
i=1
n [
Ai .
i=1
En fait, P[S] est toujours l’union (disjointe, voir Exercice ?? pour la notation) des ensembles P k [S], i.e. : ∞ X P[S] = P k [S]. (1.9) k=0
Comme P k [S] = ∅, si k est plus grand que le cardinal de S, cette sommation est en fait finie. On a donc ici deux descriptions du mˆeme ensemble.
2. Lorsque A et B ne sont pas disjoints (A ∩ B 6= ∅), on peut tout de mˆeme consid´erer leur union disjointe en for¸cant A et B a ` ˆetre disjoints. Plus pr´ecis´ement, on pose A + B = ({0} × A) ∪ ({1} × B).
On donne ainsi des couleurs distinctes aux ´el´ements de A et de B. 3. On exploite ici l’associativit´e de l’union et de l’intersection.
6
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS
On peut calculer r´ecursivement l’ensemble des parties `a k ´el´ements d’un ensemble S = T + {x}, avec x 6∈ T , en posant 1) A = S et k = |S|, A ∈ P k [S] ssi (1.10) 2) A ∈ P k [T ], o` u 3) A = B + {x}, et B ∈ P k−1 [T ].
1.5
Produit cart´ esien
Avant d’introduire la prochaine construction, rappelons que deux couples (a, b) et (c, d) sont ´egaux, si et seulement si on a les deux ´egalit´es a = c et b = d. Le produit cart´esien de A et B est l’ensemble de tous les couples (x, y), avec x ´el´ement de A et y ´el´ement de B. Autrement formul´e, on a A × B = {(x, y) | x ∈ A
y ∈ B}.
et
Si l’un des ensemble A ou B est vide, alors le produit cart´esien A × B est vide, i.e. : A × ∅ = ∅ × B = ∅.
(1.11)
Une illustration du produit cart´esien est donn´ee par {a, b, c, d} × {1, 2, 3, 4, 5} = {(a, 1), (b, 1), (c, 1), (d, 1),
(a, 2), (b, 2), (c, 2), (d, 2),
(a, 3), (b, 3), (c, 3), (d, 3),
(a, 4), (b, 4), (c, 4), (d, 4),
(a, 5), (b, 5), (c, 5), (d, 5)}.
Dans le cas des ensembles finis [n] = {1, 2, . . . , n} et [k] = {1, 2, . . . , k}, on constate que les ´el´ements du produit cart´esien [n] × [k] s’identifient aux cases d’un tableau (ou d’une matrice) ayant n lignes et k colonnes : ··· ··· ···
···
···
···
···
···
··· ···
···
1 2
···
n 1 2 3 4 5
···
k
Remarquons qu’on utilise ici des coordonn´ees matricielles, indexant les lignes du haut vers le bas, plutˆot que des coordonn´ees cart´esiennes pour lesquelles on indexerait les lignes du bas vers le haut. ` strictement parler, le produit cart´esien n’est pas associatif. Ainsi, les ´el´ements de (A × B) × C A sont de la forme ((x, y), z), avec x ∈ A, y ∈ B et z ∈ C ; tandis que ceux de A × (B × C) sont
1.6. RELATION
7
de la forme (x, (y, z)). On consid`ere cependant souvent une construction interm´ediaire, d´enot´ee A × B × C, dont les ´el´ements sont les triplets (x, y, z). Lorsque A, B et C sont des ensembles finis, les ´el´ements de A × B × C peuvent se repr´esenter sous forme de tableau tridimensionnel (un peu comme dans la Figure ci-contre). Plus g´en´eralement, on a le produit cart´esien multiple A1 × A2 × · · · × An = {(x1 , x2 , . . . , xn ) | xi ∈ Ai , 1 ≤ i ≤ n}. Lorsque Ai = B, pour tous les i, on obtient la puissance cart´esienne n-i`eme, B n := B × · × B}, | × B{z n copies
de l’ensemble B, avec B 0 := {∗}. Les ´el´ements de B n sont les n-tuplets (x1 , x2 , . . . , xn ), d’´el´ements de xi ∈ B. Il arrive parfois qu’on veuille ´ecrire plus simplement x1 x2 . . . xn , pour un tel ´el´ement. On dit alors qu’on l’a ´ecrit sous forme de mot.
1.6
Relation
Une relation R, entre les ensembles A et B, est simplement un sous-ensemble du produit cart´esien A × B, i.e. : R ⊆ A × B. Par exemple, pour A = {a, b, c, d} et B = {1, 2, 3}, on a la relation R = {(a, 1), (a, 2), (b, 3), (c, 2), (d, 1)}. Un exemple typique est la relation (entre ˆetres humains) : R :=
est un ancˆetre de .
Si H d´esigne l’ensemble des ˆetres humains (morts ou vivants), on d´efinit r´ecursivement R ⊆ H × H en posant : 1) a est le p`ere ou la m`ere de b, ou (a, b) ∈ R ssi (1.12) 2) (a, c) ∈ R et (c, b) ∈ R. La premi`ere clause amorce le processus, et la seconde affirme que
les ancˆetres de mes ancˆetres sont mes ancˆetres
Une relation R sur A est dite (a) r´eflexive si pour chaque x dans A, on a (x, x) ∈ R,
.
8
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS
(b) sym´etrique si (x, y) ∈ R entraine (y, x) ∈ R, (c) antisym´etrique si (x, y) ∈ R et (y, x) ∈ R entraine x = y, (d) transitive si (x, y) ∈ R et (y, z) ∈ R entraine (x, z) ∈ R. La plus simple des relations r´eflexives, sur un ensemble A, est la relation d’´egalit´e entre ´el´ements de A. Le sous-ensemble correspondant de A × A est clairement {(x, x) | x ∈ A}. Une relation d’´equivalence R sur A, est une relation qui est `a la fois r´eflexive, sym´etrique et transitive. Plutˆ ot que d’´ecrire (x, y) ∈ R, on ´ecrit souvent x ∼ y (ou x ≡ y), et on dit que x est ´equivalent `a y. Ainsi, ∼ est une relation d’´equivalence si et seulement si, pour tout x, y et z dans A, on a (a) x ∼ x, (b) si x ∼ y, alors y ∼ x, (c) si x ∼ y et y ∼ z, alors x ∼ z.
1.7
Fonctions
Apparemment, le terme fonction a ´et´e introduit par Leibniz. Pendant longtemps la d´efinition de cette notion n’a pas ´et´e tr`es claire. Dans l’encyclop´edie de d’Alembert, on dit ` a peu pr`es qu’une fonction est donn´ee par une formule impliquant une variable. Rappelons qu’aujourd’hui on s’accorde plutˆ ot sur le fait de donner une approche abstraite `a la notion de fonction (voir Section ??), en donnant seulement un crit`ere qui permet simplement de dire quand on a affaire `a une fonction. Entre autres, cela rend possible la d´efinition de l’ensemble des fonctions de A vers B. Ainsi, on consid`ere l’ensemble Fonct[A, B] dont les ´el´ements sont les relations fonctionnelles de A vers B, c’est-` a-dire que f ⊆ A × B, o` u (i) ∀x ∃y (x ∈ A, y ∈ B,
et
(ii) ∀x ∀y1 ∀y2 ((x, y1 ) ∈ f
et
(x, y) ∈ f ),
Gottfried Leibniz (1646–1716)
(x, y2 ) ∈ f =⇒ y1 = y2 ).
(1.13)
On a alors, pour chaque ´el´ement f de Fonct[A, B], une fonction f :A→B de source A et de but B. Il nous arrivera souvent de parler de la fonction f , si la source et le but associ´es sont clair dans le contexte. Pour A = {a, b, c} et B = {0, 1}, on a Fonct[A, B] = { {(a, 0), (b, 0), (c, 0)}, {(a, 0), (b, 1), (c, 0)}, {(a, 1), (b, 0), (c, 0)}, {(a, 1), (b, 1), (c, 0)},
{(a, 0), (b, 0), (c, 1)}, {(a, 0), (b, 1), (c, 1)}, {(a, 1), (b, 0), (c, 1)}, {(a, 1), (b, 1), (c, 1)} }.
1.7. FONCTIONS
9
Il y a donc 8 fonctions de A vers B. Observons que l’ensemble Fonct[∅, B] contient exactement un ´el´ement, quel que soit l’ensemble B. C’est la relation vide (qui est fonctionnelle par d´efaut), et on a explicitement Fonct[∅, B] = {∅}. (1.14) En utilisant ceci comme condition initiale, on peut calculer r´ecursivement l’ensemble des fonctions de A vers B lorsque A et B sont des ensembles finis. On a 1) f = ∅ et A = ∅, f ∈ Fonct[A, B] ssi (1.15) 2) f = g + {(x, y)}, avec x ∈ A, y ∈ B, et g ∈ Fonct[A \ {x}, B]. Pour f : A → B, et C un sous-ensemble de A, on a la restriction f C , de f `a C, d´efinie en posant f C := {(x, f (x)) | x ∈ C}. (1.16) Il en r´esulte donc une fonction f C : C → B. Quel que soit B, sous-ensemble de A, on peut d´efinir la fonction caract´eristique, B : A → {0, 1}, de B dans A, en posant ( 1 si, x ∈ B, B(x) := (1.17) 0 sinon. Cette fonction caract´erise le sous-ensemble B par le fait que B = {x ∈ A | B(x) = 1},
et
B = {x ∈ A | B(x) = 0}.
(1.18)
Dans le cas o` u R est une relation de [n] vers [k], la fonction caract´eristique R : [n] × [k] → {0, 1} correspondante ( 1 si, (i, j) ∈ R, R(i, j) := (1.19) 0 si, (i, j) 6∈ R, est une matrice n×k dont les coefficients sont des 1 ou des 0. On dit que R est la matrice d’incidence de la relation R. Par exemple, avec n = 3 et k = 4, la relation R = {(1, 1), (1, 3), (1, 4), (2, 2), (2, 3), (3, 1), (3, 4)} correspond ainsi ` a la matrice 1 0 1 1 R = 0 1 1 0 1 0 0 1 Dans le cas d’une relation fonctionnelle f , la matrice obtenue contient exactement un seul 1 sur chacune de ses lignes.
10
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS
Cette derni`ere construction est un cas sp´ecial de fonction de la forme M := [n] × [k] → A, `a valeur dans un ensemble A quelconque. Une telle fonction s’identifie naturellement `a une matrice n × k dont les coefficients sont choisies dans l’ensemble A, simplement en prenant M (i, j) comme valeur en position (i, j) dans la matrice. Ainsi, pour A = {a, b, c, d, e}, on a la matrice 2 × 3 a b c c a e qui correspond ` a la fonction sur [2] × [3], prenant les valeurs M (1, 1) = a, M (1, 2) = b, M (1, 3) = c, M (2, 1) = c, M (2, 2) = 1, M (2, 3) = e.
1.7.1
Bijections
Dans une premi`ere introduction ` a la th´eorie des ensembles, la correspondance ´etablie par une bijection f : A → B, entre les ´el´ements de A et ceux de B, est souvent introduite par une repr´esentation na¨ıve comme celle de la Figure 1.1. De fa¸con plus pr´ecise, on a la d´efinition suivante. Une fonction f de A vers B, est une bijection, si on a une fonction inverse f −1 : B → A, pour la composition, i.e. : f −1 ◦ f = IdA ,
et
f ◦ f −1 = IdB .
a b c d
1 2 3 4
(1.20)
Figure 1.1 – Repr´esentation na¨ıve d’une Il est tr`es facile de v´erifier qu’il ne peut y avoir qu’un bijection. inverse pour la composition, i.e. : Proposition 1.1. Pour toute fonction f : A → B, si g : B → A est telle que g ◦ f = IdA ,
et
f ◦ g = IdB ,
(1.21)
alors g = f −1 . Pour montrer que f : A → B est une bijection, il faut donc montrer qu’on peut construire une fonction qui satisfait (1.21). On d´esigne par Bij[A, B] l’ensemble (fini) des relations bijectives entre A et B, i.e. : ∼
Bij[A, B] := {f ∈ Fonct[A, B] | f : A −→ B}.
(1.22)
1.7. FONCTIONS
11
Il d´ecoule directement du principe ci-haut qu’on a Bij[A, B] = ∅, lorsque |A| 6= |B|. Observons que Bij[∅, ∅] = {∅} est de cardinal 1. La formule suivante permet de calculer r´ecursivement l’ensemble des bijections entre deux ensemble A et B de mˆeme cardinal fini : 1) f = ∅ et A = B = ∅, f ∈ Bij[A, B] ssi (1.23) 2) f = g + {(x, y)}, avec x ∈ A, y ∈ B, et g ∈ Bij[A \ {x}, B \ {y}]. Ainsi, pour A = {a, b, c} et B = {1, 2, 3}, on trouve Bij[A, B] = { {(a, 1), (b, 2), (c, 3)}, {(a, 1), (b, 3), (c, 2)}, {(a, 2), (b, 1), (c, 3)}, {(a, 2), (b, 3), (c, 1)}, {(a, 3), (b, 1), (c, 2)}, {(a, 3), (b, 2), (c, 1)} }. Il y a donc exactement 6 bijections entre les deux ensembles `a trois ´el´ements A et B. Le compos´e de fonctions bijectives est une fonction bijective, et l’inverse d’une fonction bijective est une fonction bijective. Pour tout ensemble fini A, l’ensemble Bij[A, A], des bijections de A vers A, forme un groupe pour la composition de fonctions, avec IdA comme identit´e. On dit habituellement d’une bijection de A vers A que c’est une permutation de A, et on d´esigne souvent par SA l’ensemble des permutations de A. Lorsque A = [n], on ´ecrit simplement Sn plutˆot que S[n] . Les permutations sont souvent d´enot´ees par des lettres grecques minuscules : σ, τ , θ, etc. On code souvent une permutation σ, de [n], sous forme d’une matrice carr´ee n × n de 0 et de 1, ayant un 1 dans chaque ligne, et un 1 dans chaque colonne. On dit que c’est une matrice de permutation. C’est en fait la fonction caract´eristique de la relation fonctionnelle sous-jacente.
1.7.2
Injections
Parmi les propri´et´es particuli`eres des fonctions, l’injectivit´e et la surjectivit´e sont tr`es certainement des notions importantes. Une fonction f : A → B est dite injective si et seulement si Pour chaque ´ el´ement y de B, il existe au plus un ´el´ement x de A tel que f (x) = y.
a
1 2
b c d
3
4
6 7
5 8
9
Autrement dit, la fonction f et un processus qui choisit des ´ el´ements f (x) de B, un pour chaque x dans A, tous distincts,
Figure 1.2 – Repr´esentation na¨ıve d’une injection.
12
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS
c’est-`a-dire qu’un ´el´ement ne peut-ˆetre choisi qu’une seule fois. Une formulation un peu plus technique (mais plus facile ` a manipuler) de cette d´efinition prend la forme suivante. Une fonction f : A → B est injective si et seulement si, pour tout x1 et tout x2 dans A x1 6= x2
implique f (x1 ) 6= f (x2 ),
(1.24)
ce qui ´equivaut (logiquement) ` a dire aussi que f (x1 ) = f (x2 )
entraine forc´ement x1 = x2 .
(1.25)
Il en d´ecoule (voir Exercice ??) que f est injective si et seulement si f admet un inverse ` a gauche, i.e. : il existe g : B → A tel que g ◦ f = IdA . En g´en´eral, un tel inverse `a gauche n’est pas unique, et il n’est pas un inverse ` a droite. On d´enote souvent par le symbole ,→ le fait qu’une fonction soit injective. On ´ecrit donc f : A ,→ B, pour dire que f est une injective. On d´esigne par Inj[A, B] l’ensemble des relations fonctionnelles f telles que f : A ,→ B soit une fonction injective de A vers B, i.e. : Inj[A, B] := {f ∈ Fonct[A, B] | f : A ,→ B}.
(1.26)
On calcule r´ecursivement l’ensemble des fonctions injectives de A vers B lorsque A et B sont des ensembles finis. On a (1) f = ∅ et A = ∅, f ∈ Inj[A, B] ssi (1.27) (2) f = g + {(x, y)}, avec x ∈ A, y ∈ B, et g ∈ Inj[A \ {x}, B \ {y}]. Observons que la seule diff´erence entre cette description et celle en (1.23) est dans la partie (1). La ressemblance n’est pas fortuite. Elle s’ensuit du fait qu’une injection entre deux ensemble de mˆeme cardinal est forc´ement une bijection (voir Proposition 1.2). Pour A = {a, b} et B = {1, 2, 3}, on a Inj[A, B] = { {(a, 1), (b, 2)}, {(a, 2), (b, 1)}, {(a, 1), (b, 3)}, {(a, 3), (b, 1)}, {(a, 2), (b, 3)}, {(a, 3), (b, 2)} }. Pour qu’il existe un injection f : A ,→ B, le nombre d’´el´ements de A doit n´ecessairement ˆetre plus petit ou ´egal ` a celui de B, i.e. : |A| ≤ |B|. On a donc Inj[A, B] = ∅, lorsque |A| > |B|. Le compos´e de deux fonctions injectives est toujours une fonction injective. De plus, si on a deux fonctions telles que le compos´e g ◦ f soit une fonction injective, alors f est forc´ement injective (mais pas n´ecessairement g).
1.7. FONCTIONS
1.7.3
13
Surjections
Une fonction f : A → B est dite surjective si et seulement si Pour chaque ´el´ement y de B, il existe au moins un ´el´ement x de A tel que f (x) = y.
1 5
3
4
6
7
b 8
9
Autrement dit, f est un processus qui choisit chaque ´el´ement y de B au moins une fois.
a
2
c d
Figure 1.3 – Repr´esentation na¨ıve d’une surjection.
Une fonction f : A → B est surjective si et seulement si elle admet un inverse ` a droite, i.e. : il existe g : B → A tel que f ◦ g = IdB . En g´en´eral, un tel inverse `a droite n’est pas unique, et il n’est pas un inverse ` a gauche si f n’est pas bijective. On d´enote souvent par le symbole le fait qu’une fonction est surjective. On ´ecrit alors f : A B, pour dire que f est une surjective. On d´esigne par Surj[A, B] l’ensemble des relations fonctionnelles surjectives de A vers B, i.e. : Surj[A, B] := {f ∈ Fonct[A, B] | f : A B}.
(1.28)
Pour qu’il existe une surjection f : A B, le nombre d’´el´ements de A doit n´ecessairement ˆetre plus grand ou ´egal ` a celui de B, i.e. : |A| ≥ |B|. On a donc Surj[A, B] = ∅, lorsque |A| < |B|. On peut calculer r´ecursivement l’ensemble des fonctions surjectives entre deux ensembles fins A et B par la r´ecurrence (1) f = ∅ et A = B = ∅, (2) f = g + h, avec C ⊆ A, y ∈ B, f ∈ Surj[A, B] ssi (1.29) g ∈ Surj[A \ C, B \ {y}], et h ∈ Fonct[C, {y}]. Le compos´e de deux fonction surjectives est toujours une fonction surjective. De plus, si on a deux fonctions telles que le compos´e g ◦ f soit une fonction surjective, alors g est forc´ement surjective (mais pas n´ecessairement f ). On montre facilement que Proposition 1.2. Une fonction qui est ` a la fois surjective et injective, est une fonction bijective. Autrement dit, Bij[A, B] = Inj[A, B] ∩ Surj[A, B]. (1.30)
14
1.8
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS
Compter les ´ el´ ements d’un ensemble
Lorsqu’on cherche ` a compter les ´el´ements d’un ensemble A, le probl`eme se d´ecompose souvent en un (ou des) probl`eme(s) plus simple(s), selon que l’ensemble `a ´enum´erer peut se d´ecrire en terme des constructions de base sur les ensembles. On d´emarre les choses en montrant (par r´ecurrence) que Th´ eor` eme 1.3. Si A et B sont des ensembles finis, respectivement de cardinal n et k, alors on a les ´egalit´es suivantes : (i) |A + B| = n + k, (iii) |P[A]| = 2n ,
(ii) |A × B| = n k, n (iv) |P k [A]| = , k
(1.31)
(v) |B n | = k n . Le probl`eme de compter les ´el´ements d’un ensemble fini est parfois difficile, et mˆeme dans certains cas pas encore r´esolu. Il donne lieu ` a un domaine des math´ematiques qu’on appelle la combinatoire ´enum´erative. C’est l’un des domaines de recherche dans lequel des professeurs du d´epartement de math´ematiques de l’UQAM se sont sp´ecialis´es. Il sont `a ce titre tr`es reconnus sur la sc`ene internationale. Pour en savoir plus ` a ce sujet, on peut consulter la page web du centre de recherche institutionnel Lacim : http://www.lacim.uqam.ca/
La biblioth` eque de Borges
(∗)
L’´ecrivain argentin Jos´e Luis Borges propose une vision amusante de la Biblioth`eque de Babel (La Biblioteca de Babel ) qui contient tous les livres (il y en a un nombre fini) de 410 pages qu’il est possible d’´ecrire avec les 25 lettres d’un certain alphabet. Cette nouvelle, traduite en plusieurs langues, dont le fran¸cais, d´ecrit l’existence des habitants de cette biblioth`eque, qu’ils ne quittent jamais. Les livres y sont dispos´es au hasard, et chacun des habitants est ` a la recherche d’un livre particuli`erement important pour lui : le catalogue des catalogues, la description de toute sa vie, pass´ee et future, la description de l’origine de la biblioth`eque, etc. On estime qu’il y a de l’ordre de 1080 atomes dans la partie observable de notre univers. Cependant, si on suppose qu’il y a 1000 caract`eres par page d’un livre de la biblioth`eque de Borges, alors le nombre de livres est 25410,000 ,
Jos´e Luis Borges (1906–1978)
´ EMENTS ´ 1.8. COMPTER LES EL D’UN ENSEMBLE
15
ce qui est quelque peu plus grand que le nombre d’atomes dont il est question. Il est donc un peu difficile de trouver assez de place (et de mat´eriel) pour ´eriger la biblioth`eque de Borges dans notre univers.
Le paradoxe de Russell La th´eorie des ensembles telle que formul´ee par Cantor n’´etait pas assez pr´ecise. Bertrand Russell l’a mis en ´evidence en soulignant qu’elle donnait lieu au paradoxe suivant. On consid`ere l’ensemble de tous les ensembles qui ne se contiennent pas eux-mˆ eme . En formule, c’est A = {x | x 6∈ x}. (1.32) La question qui se pose est de savoir si A∈A
o` u
A 6∈ A.
Hors on constate (avec Russel) que A∈A
implique
A 6∈ A,
Bertrand Russell (1872-1970)
et r´eciproquement ! C’est l` a le paradoxe. Attention, on consid`ere ici la notion d’ensemble `a la Cantor. Cette constuction n’est pas possible dans les versions modernes de la th´eorie des ensembles. En effet, pour rem´edier au paradoxe de Russel, on a ´echafaud´e plusieurs axiomatiques pr´ecises pour la th´eorie des ensemble. L’une des plus connue est celle dite de Zermelo-Fraenkel pr´esent´ee sch´ematiquement `a l’appendice B. C’est dans de tels contextes que les math´ematiciens travaillent maintenant.
16
CHAPITRE 1. ENSEMBLES ET FONCTIONS
Annexe A
Un soup¸ con de logique Pour d´evelopper des preuves, il est n´ecessaire de connaˆıtre les manipulations logiques de base. Nous allons ici en pr´esenter quelques principes. Cependant, notre pr´esentation est tr`es sommaire et un peu trop formelle pour une premi`ere exposition `a la logique math´ematique. Le lecteur est encourag´e `a consulter un livre d’introduction plus accessible. Informellement, un ´enonc´e (math´ematiques) est une phrase qui affirme un certain fait (math´ematique). L’important est de pouvoir d´eterminer si l’´enonc´e est vrai ou faux . Une preuve est constitu´ee d’un enchaˆınement de d´eductions logiques, `a partir de faits connus (ou d’axiomes), avec comme conclusion le fait que l’´enonc´e (qu’on cherchait `a prouver) est vrai. La forme d’une preuve d´epend fortement de la forme de l’´enonc´e ` a prouver. On d´ecrit ces formes possibles ci-dessous. ` partir d’´enonc´es connus A et B, on peut former de nouveaux ´enonc´es au moyen d’op´erations A logiques. On a les ´enonc´es : 1. (A et B), qui est vrai si et seulement si A et B le sont tous les deux, 2. (A ou B), qui est vrai si et seulement si A est vrai ou B est vrai, 3. (¬A), qui est vrai si et seulement si A est faux, 4. (A ⇒ B), qui n’est faux que lorsque A est faux et B est vrai, 5. (A ⇔ B), qui est vrai exactement quand A et B sont tous les deux vrai, ou tous les deux faux. Dans la description de chacune des op´erations on d´ecrit quel est la fa¸con de proc´eder pour prouver l’´enonc´e compos´e, ` a partir de ses composantes. L’op´eration d’´equivalence ⇔ permet de comparer la v´eracit´e d’´enonc´es logique. Ainsi, l’´enonc´e (A ⇔ B) se formule aussi A si et seulement si B, ou mˆeme (A ssi B). Ce sont diverse fa¸cons d’exprimer le fait que A soit vrai est ´equivalent au fait que B le soit. L’op´eration d’implication ⇒ correspond `a la d´eduction logique. Ainsi, l’´enonc´e 17
18
ANNEXE A. UN SOUPC ¸ ON DE LOGIQUE
(A ⇒ B) se formule aussi si A alors B. Ce sont diverse fa¸cons d’exprimer le fait que B soit vrai se d´eduit du fait que A l’est. Autrement dit, une preuve de (A ⇒ B) pourra se d´erouler comme suit. On suppose que A est vrai, et on montre qu’un enchaˆınement logique de d´eductions prouve que B l’est alors forc´ement. Dans une s´erie de manipulations logiques, il est agr´eable de savoir quand on peut remplacer une affirmation par une autre qui lui est logiquement ´equivalente (en esp´erant qu’elle soit plus facile `a montrer). Les r`egles du calcul des propositions expliquent quand il est possible de remplacer un ´enonc´e par un ´enonc´e qui lui est logiquement ´equivalent. On a par exemple : 1. ¬(A et B) si et seulement si (¬A ou ¬B), 2. ¬(A ou B) si et seulement si (¬A et ¬B), 3. (A ⇒ B) si et seulement si (¬B ⇒ ¬A), 4. (A ⇒ B) si et seulement si (¬A et B), 5. (A ⇔ B) si et seulement si (A ⇒ B) et (B ⇒ A) Chacun de ces cas repr´esente une strat´egie potentielle de preuve, si l’´enonc´e est de la bonne forme. Cette liste est incompl`ete, mais elle comprend les principales strat´egies usuelles. Certains ´enonc´es font intervenir une variable, et sont vrais pour certaines valeurs de cette variable. On ´ecrit P (x) pour ce genre d’´enonc´es, avec x la variable, et on dit qu’on a un pr´edicat. Informellement, c’est un phrase avec x comme sujet. Typiquement, on pense `a P comment ´etant une propri´et´e que x peut avoir (ou pas). Par exemple, on a – P (x) = (x est un nombre pair), ou – P (x) = (x est ´egal ` a 1), – etc. Pour chaque a, valeur possible 1 de x, on a un ´enonc´e P (a) qui est vrai si et seulement si a ` partir de pr´edicats donn´es, on peut former de nouveaux pr´edicats au poss` ede la propri´et´e P . A moyen des op´erations logiques : (P (x) et Q(x)), (P (x) ou Q(x)), (¬P (x)), etc. Bien entendu, on a des pr´edicats ` a plusieurs variables, prenant la forme P (x, y) par exemple. Au moyen d’un pr´edicat, on peut former les ´enonc´es logiques 1. (∀x P (x)), qui est vrai si et seulement si P (a) est vrai pour toutes la valeurs possibles de x, 2. (∃x P (x)), qui est vrai si et seulement si il existe a, une valeur possible de x, pour laquelle P (a) est vrai. On a les ´equivalences logiques 1. ¬(∀x P (x)) si et seulement si (∃x ¬P (x)), 2. ¬(∃x P (x)) si et seulement si (∀x ¬P (x)). 1. Dans un ensemble A donn´e.
Annexe B
Axiomatique de la th´ eorie des ensembles La pr´esentation ci-dessous ne vise qu’` a donner une id´ee de ce `a quoi peut ressembler une th´eorie axiomatique des ensembles. Le but vis´e est simplement de montrer qu’il existe une (des) axiomatique rigoureuse pour la notion d’ensemble. Dans un premier temps, le lecteur est encourag´e `a simplement survoler la description qui suit. Pour en savoir plus, il faudra suivre un cours sur le sujet, ou consulter un livre plus sp´ecialis´e, comme J.-L.Krivine, Th´eorie axiomatique des ensembles, Presses Universitaires de France, 1969. Il existe plusieurs syst`emes axiomatiques formels pour la th´eorie des ensembles. L’un des plus connu est le syst`eme ZFC de Zermelo-Fraenkel (avec l’axiome du choix). L’axiomatique ZFC se d´ecrie dans le contexte du calcul des pr´edicats avec relation d’´egalit´e. Toute la the´orie ´etant formul´e en terme d’ensembles, on doit se rappeler que les ´el´ements d’ensembles sont aussi des ensembles. Tout est, en quelque sorte, construit ` a partir de l’ensemble vide. Ainsi on aura les ensembles tous distincts ∅,
{∅},
{{∅}},
...
{∅, {∅}},
{{∅, {∅}}},
{{{∅, {∅}}}},
...
{∅, {∅}, {{∅}}}, {{∅, {∅}, {{∅}}}}, {{{∅, {∅}, {{∅}}}}}, . . . .. .. .. .. . . . .
(B.1)
La relation d’appartenance x ∈ A et la notion d’ensemble ne sont d´efinies que par le fait qu’elle satisfont les axiomes suivants. La relation d’inclusion A ⊆ B est d´efinie par (A ⊆ B)
ssi
∀x (x ∈ A ⇒ x ∈ B).
19
20
´ ANNEXE B. AXIOMATIQUE DE LA THEORIE DES ENSEMBLES
1) Axiome d’extensionalit´ e. Deux ensembles sont ´egaux, si et seulement si ils ont les mˆemes ´el´ements. En formule, ∀A ∀B [∀x (x ∈ A ⇔ x ∈ B) ⇒ (A = B)]. (B.2) 2) Axiome de la paire. Pour tous ensembles A et B, on peut construire un ensemble C dont les seuls ´el´ements sont A et B. Autrement dit, on permet ici de construire C := {A, B}. En formule, ∀A ∀B ∃C[∀x (x ∈ C) ⇔ (x = A ou x = B)].
(B.3)
3) Axiome de la r´ eunion. Pour tout ensemble A, on peut construire un ensemble B dont les seuls ´el´ements sont tous ceux qui sont ´el´ements des ´el´ements de A. Autrement dit, on permet ici la construction de l’ensemble [ B := x. x∈A
En formule, ∀A ∀B ∃C[∀x (x ∈ C) ⇔ (x = A ou x = B)].
(B.4)
4) Axiome de l’ensemble des parties. Pour tout ensemble A, on peut construire l’ensemble B des sous-ensembles de A. Autrement dit, on permet ici la construction de l’ensemble B := {x | x ⊆ A}. En formule, ∀A ∃B ∀x(x ∈ B) ⇔ (x ⊆ A).
(B.5)
5) Axiome de l’infini. Cet axiome permet de construire (au moins un) ensemble infini. C’est l’ensemble A := {
∅, {∅}, {∅, {∅}}, {∅, {∅}, {∅, {∅}}}, {∅, {∅}, {∅, {∅}}, {∅, {∅}, {∅, {∅}}}}}, . . .}.
Cet axiome permet aussi (avec les pr´ec´edents) de construire l’ensemble N des entiers positifs. En formule, ∃A (∅ ∈ A) et (x ∪ {x} ∈ A). (B.6)
21 6) Sh´ ema d’axiomes de compr´ ehension. Pour tout ensemble A, on peut construire le sousensemble B des ´el´ements de A qui satisfont une propri´et´e P (exprim´ee dans le langage de la th´eorie des ensembles). Autrement dit, on permet ici la construction de B := {x ∈ A | P (x)}. En formule, ∀y1 · · · ∀yn ∀A ∃B ∀x[(x ∈ B) ⇔ (x ∈ A et P (x, y1 , . . . , yn )).
(B.7)
Les yi sont ici simplement des param`etres auxiliaires dont on pourrait avoir besoin pour formuler plus facilement la propri´et´e P . On dit qu’on a un sch´ema d’axiomes, parce qu’il y a un axiome pour chaque choix de P . 7) Sh´ ema d’axiomes de remplacement. Pour tout ensemble A et toute relation fonctionnelle F , on a un ensemble B := {y | x ∈ A et F (x, y)}. Pour exprim´e ceci en formule (simplifi´ee 1 ), rappelons d’abord que F est une relation fonctionnelle, on ´ecrit Fonct(F ), si et seulement si Fonct(F )
ssi
∀x ∀y1 ∀y2 [(F (x, y1 ) et F (x, y2 )) ⇒ (y1 = y2 )].
Alors l’axiome se pr´esente comme Fonct(F ) ⇒ ∀A ∃B ∀y [y ∈ B ⇔ ∃x (x ∈ A et F (x, y))]. 8) Axiomes de fondation. Pour tout ensemble A non vide, il existe un ensemble B, appartenant a` A, qui n’a aucun ´el´ement en commun avec A, c’est-`a-dire que A ∩ B = ∅. En formule, ∀A[(A 6= ∅) et ∃B (B ∈ A et A ∩ B = ∅)].
(B.8)
9) Axiomes du choix. Pour tout ensemble A, d’ensembles non vide, le produit cart´esien des ´el´ements de A est non vide. En formule, Y [∀x ∈ A (x 6= ∅)] ⇒ x 6= ∅. (B.9) x∈A
1. La formulation plus juste fait apparaˆıtre des param`etres dans F comme dans l’axiome pr´ec´edent.
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´ ANNEXE B. AXIOMATIQUE DE LA THEORIE DES ENSEMBLES
Annexe C
Calcul formel C.1
Introduction
Les syst`emes de calcul formel permettent de manipuler concr`etement des objets math´ematiques abstraits de fa¸con rigoureuse. Cela va des nombres entiers, rationnels, r´eels ou complexes (et des calculs sur ceux-ci) ; ` a des manipulations d’op´erateurs sur des espaces de fonctions ; en passant par un vaste spectre de notions math´ematiques de l’alg`ebre, du calcul, de l’analyse complexe, de la th´eorie des nombres, etc. Une fa¸con tr`es efficace d’apprivoiser de nouvelles notions math´ematiques est d’apprendre `a les manipuler avec de tels syst`emes de calcul formels. Nous encourageons donc fortement les ´etudiants en math´ematiques ` a se familiariser avec ces syst`emes pour les accompagner dans tout leur apprentissage. Dans un syst`eme de calcul formel, une session de travail est habituellement un processus interactif qui consiste ` a donner au syst`eme une instruction de calcul (apparaissant en rouge dans ce qui suit). On obtient alors comme r´esultat la valeur du calcul demand´e (apparaissant en bleu). Dans notre cas, le syst`eme affiche automatiquement le symbole > chaque fois qu’il est prˆet `a effectuer une prochaine instruction. Le ; signifie la fin de l’instruction donn´ee, et la touche return (ou enter ) d´ eclenche le calcul. Ainsi, on peut demander de calculer > gcd(x36 − 1, x24 − 1) ; x12 − 1 Ici, la fonction Maple gcd trouve que x12 −1 est un 1 plus grand commun diviseur des polynˆ omes x36 − 1 et x24 − 1. 1. Puisque d´efinit a ` un multiple scalaire prˆet.
23
24
ANNEXE C. CALCUL FORMEL
En plus d’effectuer des calculs explicites, il est possible de donner des noms `a certains objets au moyen l’assignation := . On peut donc poser > x := 100 ; x := 100 Dor´enavant, x aura la valeur 100, et l’expression 2x prendra donc la valeur : > 2x ; 1267650600228229401496703205376 Il faut bien distinguer cette assignation de la relation math´ematique usuelle
=
d’´egalit´e.
Pour les fins d’une utilisation vraiment efficace des syst`eme de calculs formels, la capacit´e qui est de loin la plus importante est la possibilit´e de d´efinir de nouvelles fonctions (ou proc´edures) de calcul, `a partir de celles d´ej` a connues. On a ainsi un riche environnement de programmation sp´ecialis´e pour les math´ematiques. C’est nouvelles fonctions peuvent se d´efinir de nombreuses fa¸cons, mais celle qui est la plus naturelle est probablement via la r´ecursivit´e. Ainsi on peut introduire la fonction : > F := n− > if n ≤ 1 then 1 else F (n − 1) + F (n − 2) fi : Dor´enavant, F est la fonction d’une variable qui calcule (r´ecursivement) les nombres de Fibonacci. On aura donc : > F (20); 10946 Les changement de lignes et les espaces suppl´ementaires n’ont ici aucun effet sur le calcul. Ils ne servent qu’`a disposer la description de la fonction F de mani`ere plus agr´eable. Normalement, le r´esultat d’une telle instruction est d’afficher le texte de la fonction ainsi d´efinie. Le fait d’utiliser le : , plutˆ ot que le ; comme indication de fin de l’instruction, ´evite cet affichagee assez inutile. Nous allons illustrer dans cette annexe comment il est facile d’utiliser de tels syst`emes pour manipuler les objets combinatoires que nous avons rencontr´es dans ce texte.
C.2
Th´ eorie des ensembles et calcul formel
Tout syst`eme de calcul formel (Sage, Maple, etc.) permet, entre autres, de manipuler des ensembles, des listes, et diverses constructions les concernant (avec les adaptations n´ecessaires).
´ C.2. THEORIE DES ENSEMBLES ET CALCUL FORMEL
25
Ainsi, on peut donner le nom A ` a l’ensemble {a, b, c} en posant > A := {a, b, a, c, b, b} ; A := {a, b, c} Observons ici (comme le veut la th´eorie) que la r´ep´etition d’un ´el´ement n’a aucun effet. Bien entendu, on a aussi les op´erations usuelles sur les ensembles > {a, b, c} intersect {b, c, d} ; {b, c} > {a, b, c} union {b, c, d} ; {a, b, c, d} > {a, b, c} minus {b, c, d} ; {a} En passant, rien n’empˆeche d’utiliser abstraitement ces op´erations sur des ensembles B et C non sp´ecifi´es. Ainsi, on obtient > (B union D) intersect (C union D) ; (B ∪ D) ∩ (C ∪ D) > B minus B ; ∅ On peut tester l’´egalit´e d’ensembles, et l’appartenance `a un ensemble, en exploitant la fonction evalb qui calcule la valeur logique d’une expression. Ainsi, on a > evalb({a, b, c} = {b, c, d}) ; false > evalb({a, b, c} = {b, c, a}) ; true > b in {b, c, a} ; b ∈ {a, b, c} > evalb(b in {b, c, a}) ; true La fonction nops est tr`es g´en´erale. Elle permet de compter le nombre d’op´erandes dans une expression. En particulier elle donne le nombre d’´el´ements d’un ensemble. Cependant, pour faciliter la compr´ehension, il est possible de lui donner un synonyme en posant :
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ANNEXE C. CALCUL FORMEL
> card := nops : Par la mˆeme occasion, on se permet de mettre en place les autres synonymes : > ‘&+‘ := ‘union‘ : > ‘&-‘ := ‘minus‘ : L’utilisation du caract`ere & , dans &+ , est n´ecessaire en Maple lorsqu’on d´esire consid´erer de nouveaux op´erateurs binaires avec une notation infixe . C’est aussi une particularit´e de la syntaxe de Maple qui forcent l’utilisation des ‘ au moment de l’´etablissement de ces synonymes. Pour d´ecrire un ensemble de la forme {g(x) | x ∈ A}, on peut utiliser la fonction Maple seq qui permet de construire des s´equences de valeurs g(x) pour x variant dans A. Puisque l’ensemble A a d´ej`a ´et´e d´efini (mais pas g), on obtient : > {seq(g(x), x in A)}) ; {g(a), g(b), g(c)} ou encore, avec la fonction de Fibonacci F : > {seq(F (x), x in {1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9})}) ; {1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55}
Autres op´ erations. On peut d´efinir d’autres op´erations usuelles sur les ensembles comme cidessous. Si A = {x} + B, le calcul de l’ensemble P[A] des parties de A est bas´e sur la r´ecurrence : P[A] = P[B] + {C + {x} | C ∈ P[B]}.
(C.1)
Avec une syntaxe l´eg`erement diff´erente de celle d´ej`a utilis´ee, on exploite cette r´ecurrence pour obtenir la nouvelle fonction > P := proc(A) local x, B : if A = {} then {{}} else x := op(1, A) : B := A & − {x} : P (B) &+ {seq( C &+ {x}, C in P (B)} fi end :
(x est le premier ´el´ement dans A)
Apr`es avoir consid´er´e le cas sp´ecial A = ∅, on choisit x comme ´etant le premier ´el´ement de A, et la cinqui`eme ligne reproduit (presque fid`element) le membre de droite de (C.1). On obtient ainsi une fonction calculant l’ensembles P (A) des parties de A :
´ C.2. THEORIE DES ENSEMBLES ET CALCUL FORMEL
27
> P ({a, b, c}) ; {∅, {a} , {b} , {c} , {a, b} , {a, c} , {b, c} , {a, b, c}} Avant de construire le produit cart´esien comme op´eration binaire, on rappelle qu’en Maple un couple, normalement d´enot´e (x, y) dans des contextes math´ematiques, est plutˆot d´enot´e [x, y]. Ceci est du au fait que les parenth`eses usuelles sont r´eserv´ees `a d’autres fins syntaxiques. On pose donc > ‘&X‘ := proc(A, B) local x, y : {seq(seq([x, y] , x in A), y in B)} end : Alors, on obtient > {a, b, c} &X {a, b} ; {[1, a], [1, b], [2, a], [2, b], [3, a], [3, b]} et aussi > {a, b, c} &X {} ; ∅ comme il se doit. On peut maintenant obtenir la fonction qui calcule l’ensemble des relations entre A et B, simplement en posant : > Relations := (A, B)− > P (A &X B) : et donc on peut ensuite calculer que > Relations({a, b}, {x, y}) ; ∅, {[a, x]} , {[a, y]} , {[b, x]} , {[b, y]} , {[a, x], [a, y]} , {[a, x], [b, x]} , {[a, x], [b, y]} , {[a, y], [b, x]} , {[a, y], [b, y]} , {[b, x], [b, y]} , {[a, x], [a, y], [b, x]} , {[a, x], [a, y], [b, y]} , {[a, x], [b, x], [b, y]} , {[a, y], [b, x], [b, y]} , {[a, x], [a, y], [b, x], [b, y]} Pour calculer r´ecursivement l’ensemble des fonctions entre A et B, il suffit de poser > Fonct := (A, B)− > if A = {} then {{}} else x := A[1] : {seq(seq(f &+ {x, y} , y in B), f in Fonct(A &− {x}, B))} fi : et alors > Fonct({a, b}, {0, 1}) ; {{[a, 0], [b, 0]} , {[a, 0], [b, 1]} , {[a, 1], [b, 0]} , {[a, 1], [b, 1]}}
28
ANNEXE C. CALCUL FORMEL
Une construction similaire permet d’obtenir l’ensemble des mots de longueur k, sur un alphabet A, au moyen de la fonction Maple cat qui concat`ene deux mots. > Mots := (A, k)− > if k = 1 then A else {seq(seq(cat(w, x) , x in A), w in Mots(A, k − 1))} fi : > Mots({a, b, c}, 3) ;
aaa, aab, aac, aba, abb, abc, aca, acb, acc, baa, bab, bac, bba, bbb, bbc, bca, bcb, bcc, caa, cab, cac, cba, cbb, cbc, cca, ccb, ccc
Annexe D
Notations |A| : le cardinal d’un ensemble A, Section 1.2. [n] : l’ensemble usuel de cardinal n, Section 1.2. Q esiens d’ensembles, Chapitre 1. i∈I Ai et A × B : produits cart´ P i∈I Ai et A + B : unions disjointes d’ensembles, Chapitre 1. Bij[A, B] : l’ensemble des fonctions bijectives de A vers B, (1.22). f C : la fonction f restreinte au sous-ensemble C, (1.16). f k : k-i`eme it´er´e pour la composition de f , Section ??. Fonct[A, B] : l’ensemble des fonctions de A vers B, Chapitre 1. g ◦ f : compos´e de fonctions g et de f , (??). IdA : la fonction identit´e sur A, Chapitre 1. Inj[A, B] : l’ensemble des fonctions injectives de A vers B, (1.26). P : l’ensemble des parties, (1.3). P k : parties ` a k-´el´ements, 1.3). Sn : l’ensemble des permutations, (1.22). Surj[A, B] : l’ensemble des fonctions surjectives de A vers B, (1.28). χB : la fonction caract´eristique d’un sous-ensemble B, (1.17).
29
30
ANNEXE D. NOTATIONS
Index bijection, 10
antisym´etrique, 8 d’´equivalence, 8 ´egalit´e, 8 matrice, 9 r´eflexive, 7 sym´etrique, 8 transitive, 8
cardinal, 2 compl´ement, 5 diff´erence, 5 ensemble des parties, 3 paire, 4 ensemble vide, 2 fonction caract´eristique, 9 injective, 11 inverse, 10 inverse ` a droite, 13 inverse ` a gauche, 12 restriction, 9 surjective, 13
sous-ensemble, 3 union, 4 disjointe, 5
intersection, 4 matrice de permutation, 11 partie, 3 permutation, 11 produit cart´esien, 6 puissance cart´esienne, 7 relation, 7 31
Arithm´ etique (par Andr´e Joyal )
Ces notes ont ´et´e pr´epar´ees pour le camp math´ematique UQAM 2003 Math´ ematiques sur Internet: Wikipedia: The free encyclopedia. http://www.wikipedia.org/wiki/Mathematics Eric Weisstein’s World of Mathematics. http://mathworld.wolfram.com/
Synopsis: §0 §1 §2 §3 §4 §5 §6 §7
Au commencement ´etait Pythagore Arithm´etique et nombres premiers Fractions d´ecimales et congruences Une application a ` la cryptographie Racines primitives Fonctions arithm´etiques Produits Eul´eriens Bibliographie
0 Au commencement ´ etait Pythagore ´ ee, a Pythagore (572 a ` 501 avant notre `ere) est n´e sur l’ˆıle de Samos en mer d Eg´ ` proximit´e des cˆ otes de l’Asie Mineure (Turquie). Durant sa jeunesse il voyage en Orient pour y rencontrer sages, savants et chefs religieux. C’´etait l’´epoque des enseignements de Zoroastre en Perse, de Bouddha aux Indes, de Confucius et de Lao-Tzu en Chine (mais on ne pense pas que Pythagore ait rencontr´e ces personnages). Au terme de ses voyages Pythagore s’´etablit a ` Crotone, ville grecque d’Italie, pour y fonder une secte religieuse et philosophique. Sur le plan mystique les Pythagoriciens croient en l’immortalit´e de l’ˆ ame humaine et en la possibilit´e de la r´eincarnation. Sur le plan philosophique leur doctrine peut se r´esumer a ` ceci: la compr´ehension ultime des choses se trouve dans les nombres entiers. Les Pythagoriciens attribuent une valeur mystique a ` certains nombres et les classent selon leurs propri´et´es arithm´etiques ou g´eom´etriques. Ils disent qu’un entier est parfait s’il est ´egal a ` la somme de ses diviseurs propres. Par exemple, les nombres 6 et 28 sont parfaits car 6 = 3 + 2 + 1 et 28 = 14 + 7 + 4 + 2 + 1. Ils disent aussi que deux entiers sont amicaux si chacun est la somme des diviseurs propres de l’autre. Par exemple, 220 et 284 sont amicaux car on a 220 = 1 + 2 + 4 + 71 + 142 284 = 1 + 2 + 4 + 5 + 10 + 11 + 20 + 22 + 44 + 55 + 110. Ils introduisent les nombres triangulaires, carr´es, pentagonaux, hexagonaux. Par exemple, les nombres triangulaires sont 1, 3, 6, 10, 15, 21, . . .
• 1
• • • 3
• • • • • • • • • • 10
• • • • • • 6 1
• • • • • 15
• • • • • • • • • •
Les pythagoriciens utilisent ces repr´esentations pour obtenir diverses relations. Par exemple, la figure suivante illustre le fait que le n-i`ene nombre triangulaire Tn = 1 + 2 + 3 + · · · + n vaut
Tn =
• • • • •
n(n + 1) 2
∗ • • • •
∗ ∗ • • •
∗ ∗ ∗ • •
∗ ∗ ∗ ∗ •
∗ ∗ ∗ ∗ ∗
• • • • 16
• • • •
• • • •
• • • •
Les nombres carr´es sont 1, 4, 9, 16, 25, 36, . . .
• 1
• • • • • • • • • 9
• • • • 4
• • • • • 25
• • • • •
• • • • •
• • • • •
• • • • •
.
La figure suivante illustre le fait que la somme de deux nombres triangulaires successifs est un carr´e: • • • • •
10 + 15 = 52
∗ • • • •
∗ ∗ • • •
∗ ∗ ∗ • •
∗ ∗ ∗ ∗ •
La figure suivant illustre le fait que la somme des n-premiers nombres impairs est un carr´e: ? • ◦
2
4 = 1+3+5+7
? • •
?
? ? ? ?
.
√ On attribue a ` Pythagore la d´ecouverte que 2 est un nombre irrationel. En r´ealit´e, les grecs ne connaissaient pas le concept moderne de nombres r´eels, rationnels ou irrationnels. Pour eux, un nombre est avant tout un rapport entre des quantit´es de mˆeme nature. Deux quantit´es sont dites commensurables (co-mesurables) si elles sont multiples entiers d’une troisi`eme quantit´e; sinon elles sont incommensurables. Pythagore d´ecouvre que la diagonale d’un carr´e et son cˆ ot´e sont incommensurables. Pythagore est l’auteur d’une th´eorie math´ematique de l’harmonie musicale encore accept´ee de nos jours. Il mesure la hauteur du son ´emi par une corde vibrante par la longeur de cette corde. Aujourd’hui, on mesure la hauteur d’un son par sa fr´equence, c’est a ` dire par le nombre de battements par seconde. Nous d´ecrirons la th´eorie de Pythagore en utilisant la notion de fr´equence (la fr´equence d’une corde vibrante est inversement proportionnelle a ` sa longuer). En exp´erimentant sur des instruments comme la harpe, la lyre et la cithare, Pythagore d´ecouvre que les sons de fr´equences f , 2f , 4f , 8f , . . . etc sont semblables bien que de hauteur diff´erente. L’octave est l’intervalle musical s´eparant une fr´equence f de son double 2f . Par exemple, si f est un r´e alors 2f est un r´e situ´e dans l’octave suivant. Pythagore d´ecouvre aussi qu’il faut mesurer l’intervalle musical s´eparant deux fr´equences f et g par le rapport g/f (et non pas par la diff´erence g − f comme on pourrait le penser). Autrement dit, deux intervalles musicaux [f, g] et [u, v] sont ´equivalents si les rapports g/f et v/u sont ´egaux. Pythagore choisit de subdiviser l’octave [f, 2f ] en 12 intervalles musicaux ´egaux. Le choix de 12 n’est pas arbitraire car ce nombre poss`ede un grand nombre de diviseurs. Pour subdiviser l’octave [f, 2f ] en deux intervalles ´egaux il faut trouver une fr´equence interm´ediaire f < g < 2f pour laquelle g 2f = . f g 2
√ Ce qui donne g = f 2. Pour subdiviser l’octave [f, 2f ] en 12 intervalles ´egaux il faut trouver des fr´equence interm´ediaires f − f0 < f1 < f2 < f3 < f4 < f5 < f6 < f7 < f8 < f9 < f10 < f11 < f12 = 2f de sorte que f2 f3 f4 f5 f6 f7 f8 f8 f9 f10 f11 f12 f1 = = = = = = = = = = = = . f0 f1 f2 f3 f4 f5 f6 f7 f7 f8 f9 f10 f11 Si r d´enote ce rapport commun alors r12 =
f1 f2 f3 f4 f5 f6 f7 f8 f8 f9 f10 f11 f12 f12 2f · · · · · · · · · · · · = = =2 f0 f1 f2 f3 f4 f5 f6 f7 f7 f8 f9 f10 f11 f0 f
1
Par suite, r = 2 12 et fi = f ri . Les musiciens disent que l’intervalle qui s´epare fi et fi+1 est un demi-ton. Les fr´equences fi pour 0 ≤ i ≤ 12 forment une gamme chromatique. Si f0 est un do cette gamme est constitu´ee des notes suivantes: do,
do] ,
r´e,
r´e] ,
mi,
fa,
fa] ,
sol,
sol] ,
la,
la] ,
si,
do.
Une troisi`eme d´ecouverte de Pythagore concerne les harmoniques d’un son donn´e. Il d´ecouvre qu’un son de fr´equence f vibre en accord (en harmonie) avec les sons de fr´equences 2f, 3f, 4f, 5f, . . .. Les musiciens d’aujourd’hui disent que 3f est la quinte de f (mais c’est mal nomm´e). La fr´equence 3f est situ´ee dans 7 l’octave [2f, 4f ]. Comme 2 12 × 2 = 2.99661 ' 3, la quinte est la septi`eme note qui suit 2f dans l’octave [2f, 4f ]. Elle ´equivaut a ` la septi`eme note qui suit f dans l’octave [f, 2f ]. La quinte d’un do est un sol et la quinte d’un mi est un si.
Exercices pour la section 0 ´ Le volume II des Elements d’Euclide porte sur une forme d’alg`ebre g´eom´etrique. Les identit´es suivantes y sont d´emontr´ees g´eom´etriquement: 1. a(b + c + d + · · ·) = ab + ac + ad + · · ·
2. (a + b)a + (a + b)b = (a + b)2 3. (a + b)a = ab + a2 4. (a + b)2 = a2 + 2ab + b2 5. (a + b)(a − b) + b2 = a2
6. (2a + b)b + a2 = (a + b)2 7. a2 + b2 = 2ab + (a − b)2
8. 4ab + (a − b)2 = (a + b)2
9. (a + b)2 + (a − b)2 = 2(a2 + b2 ) Exercice 1: V´erifier chacune des identit´es ci-haut.
D’apr`es Pythagore, le carr´e de l’hypot´enuse d’un triangle rectangle est ´egal a ` la somme des carr´es des autres cˆ ot´es. Inversement, si la relation c2 = a2 + b2 est satisfaite alors le triangle de cot´es (a, b, c) est rectangle. Si a, b et c sont des nombres entiers, on dit alors que le triplet (a, b, c) est pythagoricien. Par exemple, les triplets (3, 4, 5) et (5, 12, 13) sont pythagoriciens. Il est interessant de rechercher tous les triplets 3
pythagoriciens. Si un triplet (a, b, c) est pythagoricien alors il en est de mˆeme triplet (na, nb, nc) pour tout entier n. On se limite a ` rechercher les triplets pythagoricien sans diviseurs communs. Exercise 2: V´erifier l’identit´e (attribu´ee a ` Platon) (2ab)2 + (a2 − b2 )2 = (a2 + b2 )2 . Trouver un grand nombres de triplets pythagoriciens sans diviseurs communs.
On dit qu’une suite de nombres a1
a2
a3
···
an
est en progression arithm´etique si la diff´erence entre deux termes successifs a i+1 − ai est constante. On dit que cette constante est la raison de la progression arithm´etique. Exercice 3: Montrer que la diff´erence an − ai entre le n-i`eme terme et le i-i`eme terme d’une progression arithm´etique de raison r vaut (n − i)r. Exercice 4: Montrer que la somme des termes a1 , a2 , · · · , an d’une progression arithm´etique de raison r vaut n(a1 + an ) n(n − 1) n(n − 1) = na1 + r = nan − r . 2 2 2 Le n-i`eme nombre triangulaire, carr´e, pentagonal, hexagonal, heptagonal, etc, est la somme des n premiers termes d’une progression arithm´etiques de raison 1, 2, 3, 4, 5, etc: nombres triangulaires carr´es pentagonaux ···
: 1 2 3 4 5 6 7 ··· : 1 3 5 7 9 11 13 · · · : 1 4 7 10 13 16 19 · · · ···
Exercice 5: Montrer que la n-i`eme nombre l-gonal vaut n + (l − 2)
n(n − 1) . 2
Si a0 , a1 , a2 , · · · est suite de nombres, posons ∆an = an+1 − an . Alors on a an = a0 + ∆a0 + ∆a1 + · · · + ∆an−1 Par exemple, comme on a ∆n2 = (n + 1)2 − n2 = 2n + 1, on obtient que 1 + 3 + 5 + · · · + (2n − 1) = n2 . De mˆeme, comme on a ∆n(n + 1)(n + 2) = (n + 1)(n + 2)(n + 3) − n(n + 1)(n + 2) = 3(n + 1)(n + 2) on obtient que 1 · 2 + 2 · 3 + 3 · 4 + · · · + n(n + 1) = 4
n(n + 1)(n + 2) . 3
Exercice 6: Trouver une expression pour la somme des n premiers nombres l-gonaux.
Exercise 7: Montrer que 12 + 2 2 + · · · + n 2 =
n(n + 1)(2n + 1) 6
Suggestion: Utiliser la d´ecomposition n2 = n(n − 1) + n. Si a0 , a1 , a2 , · · · est suite de nombres, posons ∆an = an+1 − an . Alors on a an = a0 + ∆a1 + ∆a2 + · · · + ∆an−1 Par exemple, comme on a ∆n2 = (n + 1)2 − n2 = 2n + 1, on obtient que 1 + 3 + 5 + · · · + (2n − 1) = n2 . De mˆeme, comme on a ∆n(n + 1)(n + 2) = (n + 1)(n + 2)(n + 3) − n(n + 1)(n + 2) = 3(n + 1)(n + 2) on obtient que 1 · 2 + 2 · 3 + 3 · 4 + · · · + n(n + 1) =
n(n + 1)(n + 2) . 3
Exercice 8: Montrer que 13 + 23 + · · · + n3 = (1 + 2 + · · · + n)2 Suggestion: Utiliser l’identit´e a2 − b2 = (a − b)(a + b) pour calculer la diff´erence du second membre. On d´efinit la k-i`eme puissance montante de n comme le produit des k entiers suivant n, a ` partir de n: (n)k = n(n + 1) · · · (n + k − 1). On pose (n)0 = 1 et k! = (1)k = 1 · 2 · 3 · · · k. Remarquer que (n)k =
(n + k − 1)! . (n − 1)!
Exercice 9: Montrer que ∆(n)k = k(n + 1)k−1 . En d´eduire que (1)k + (2)k + (3)k + · · · + (n)k =
(n)k+1 . k+1
On d´efinit la k-i`eme puissance descendante de n en posant (n)k = n(n − 1) · · · (n − k + 1). Remarquer que (n)k = 0 si n < k. Remarquer que (n)k =
n! . (n − k)! 5
Exercice 10: Montrer que ∆(n)k = k(n)k−1 . En d´eduire que (1)k + (2)k + (3)k + · · · + (n)k =
(n + 1)k+1 . k+1
Les coefficients du binˆ ome n n−1 n n−2 2 n 2 n−2 n n n (x + y) = x + x y+ x y +···+ x y + xy n−1 + y n 1 2 2 1 figurent dans le triangle de Pascal: 1 1 1 1
3
1
4
1
5
1 1 1
8
28
1
6
15 21
1 3
10
6 7
1 2
4
20 35
56
1
10
5 15
6
35 70
.
1 1
21
7
56
28
1 8
1
···
8 0
7 0
6 0
5 0
7 1
8 1
4 0
5 1
8 2
3 0
2 0
4 1
5 1
6 2
7 2
8 3
1 0
3 1
5 2
7 3
···
0 0
2 1
4 2
6 3
8 4
1 1
3 2
5 3
7 4
2 2
4 3
6 4
8 5
3 3
5 4
7 5
4 4
6 5
8 6
5 5
7 6
. 6 6
8 7
7 7
8 8
Exercice 11: (Pascal) Utiliser la relation (x + y)n+1 = (x + y)n (x + y) pour montrer que l’on a
n+1 n n = + . k k−1 k
Comparer avec la relation (n)k (n)k (n + 1)k = + . k! k! (k − 1)! En d´eduire que n! n (n)k = . = k! k!(n − k)! k Exercice 12: Montrer que l’on a n n−1 n−2 n−3 k−1 = + + +···+ . k k−1 k−1 k−1 k−1 6
On dit qu’une suite de nombres a1 , a2 , a3 · · · est en progression g´eom´etrique de raison r si ai+1 /ai = r. Exercice 13: Montrer que le rapport an /ai entre le n-i`eme terme et le i-i`eme terme d’une progression g´eom´etrique de raison r vaut r (n−i) . Exercice 14: Si x 6= 1, montrer que 1 + x + x 2 + · · · + xn =
xn+1 − 1 . x−1
En d´eduire que 1 + 2 + 23 + · · · + 2n = 2n − 1. Exercice 15: Montrer que la somme des n premiers termes d’une progression g´eom´etrique a 1 , a2 , · · · de raison r 6= 1 vaut an+1 − a1 rn+1 − 1 = a1 . r−1 r−1
1. Arithm´ etique et nombres premiers
Soit N l’ensemble des entiers positifs ou nuls. Si n ∈ N nous d´enoterons par nN l’ensemble des multiples entiers de n: nN = {na | a ∈ N}. Nous dirons qu’un entier n ∈ N divise un entier m ∈ N, et nous ´ecrirons n | m, si m ∈ nN. Exercice : Montrer que si 0 | n alors n = 0. Proposition 1.1. (i) On a n | mn, n | 0, 1 | n et n | n; (ii) si m | n et n | r alors m | r. (iii) si n | m et m | n alors m = n. (iv) si n | a et n | b alors n | (a + b). (iii) si n | a et n | a + r alors n | r. Preuve: (i) C’est clair. (ii) si n = mq et r = np alors r = mqp. (ii) si n = mq et m = np alors n = npq; donc 1 = pq si n 6= 0: dans ce cas p = q = 1 et n = m; si n = 0 alors m = 0p = 0. (iii) si a = np et b = nq alors a + b = n(p + q). (iv) si a = np et a + r = nq alors r = n(q − p). Definition 1.2: Nous dirons qu’un entier n > 1 est compos´e s’il admet une factorisation n = ab avec a, b > 1; sinon, nous dirons qu’il est premier.
Il y a 25 nombres premiers ≤ 100: 2 3 5 7 11 13 17 19 23 29 31 37 41 43 47 53 59 61 67 71 73 79 83 89 97 Le plus petit diviseur > 1 d’un entier est forc´ement premier. 7
Proposition 1.3. Tout entier compos´e n poss`ede un diviseur 1 < d ≤
√
n.
Preuve: on a une factorisation n = ab avec a < n et b < n. Si on avait a > √ Si n est compos´e alors √ √ b > n on aurait aussi ab > n n = n, ce qui est absurde puisque ab = n. CQFD
√ n et
√ Si un entier n > 1 n’est pas divisible par aucun nombre premier ≤ n alors il est premiers. Par exemple, 101 est premier car il n’est divisible ni par 2, ni par 3, ni par 5 et ni par 7. ´ La proposition 1.3 est a ` la base de la m´ethode du crible d’Eratosth` ene pour dresser la liste de tous les nombres premiers ≤ N . On proc`ede par ´elimination successive a ` partir des nombres impairs ≤ N . Par exemple, pour obtenir la liste des nombres premiers ≤ 100 on commence par faire la liste des nombres impairs ≤ 100 (` a l’exception de 2 que l’on ajoute a ` la liste): 2∗
3 5 7 9 11 13 15 17 19 21 23 25 27 29 31 33
35 37 39 41 43 45 47 49 51 53 55 57 59 61 63 65 67 . 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99. Di on ´elimine ensuite les multiples de 3 (sauf 3), il reste: 2 3∗ 5 7 11 13 17 19 23 25 29 31 35 37 41 43 47 49 53 55 59 61 65 67 71 73 77 79 83 85 89 91 95 97. Si on ´elimine ensuite les multiples de 5 (sauf 5), il reste 2 3 5∗ 7 11 13 17 19 23 29 31 37 41 43 47 49 53 59 61 67 71 73 77 79 83 89 91 97. Si on ´elimine ensuite les multiples de 7 (sauf 7), il reste 2 3 5 7∗
11 13 17 19 23 29 31
37 41 43 47 53 59 61 67 71 73 79 83 89 97. Le criblage est termin´e car 112 > 100. Il ne reste alors que des nombres premiers. On en compte 25. Tout entier n > 1 est un produit de nombres premiers. D´emontrons-le, mˆeme si c¸a peut paraitre ´evident. Si n n’est pas premier, divisons-le par son plus petit diviseur d1 . Ce dviseur est forc´ement premier. Si le quotient n/d1 n’est pas premier, divisons-le par son plus petit diviseur d2 . Si le quotient n/d1 d2 n’est pas premier, divisons-le par son plus petit diviseur premier d3 . Continuant ainsi, on obtient une suite d´ecroissante d’entiers n > (n/d1 ) > (n/d1 d2 ) > (n/d1 d2 d3 ) > · · · . Cette suite ne peut se prolonger ind´efiniment. Apr`es un certain nombre k < n de divisions le quotient q = n/d1 d2 · · · dk sera premier. On obtient alors une d´ecomposition en facteurs premiers n = d1 · d2 · d3 · · · dk · q. Th´ eor` eme 1.4. (Th´eor`eme fondamental de l’Arithm´etique) Tout nombre entier n > 1 se factorise en produit de nombres premiers. Cette factorisation est unique a ` l’ordre des facteurs pr`es. L’unicit´e de la factorisation peut paraitre ´evidente, du moins pour les entiers familiers. Comme on n’en trouve pas mention dans les textes anciens, elle semble avoir ´et´e admise par les mathmaticiens de l’antiquit´e 8
Mais qu’en est-il de la factorisation des entiers grands? Supposons par exemple que Pierre ait trouv´e une d´ecomposition en facteurs premiers 235711131719232931374143 = 4546201954997 · 51847923619 = p · q,
et que Paul en ait trouv´e une autre 235711131719232931374143 = 1239743299603 · 190128982181 = p0 · q 0 .
En quoi cela contredit-il notre intuition? L’unicit´e d’une d´ecomposition en facteurs premiers pourrait ˆetre vrai pour des entiers petits mais fausse pour certains entiers tr`es grands. Il ne faut pas oublier qu’il y a des entiers GIGANTESQUES, incroyablement grands. Consid´erons par exemple la suite entiers 1 + 2,
1 + 22 ,
2
1 + 22 ,
22
1 + 22 ,
1 + 22
22
2
,...
Quelle est la nature arithm´etique de l’entier occupant par exemple la 100e position de la suite? Il est physiquement impossible de d´ecrire le d´eveloppement d´ecimal de cet entier car l’univers semble trop petit. Malgr´e sa taille gigantesque, il faut r´ealiser qu’il est minuscule a ` comparer aux v´eritables g´eants qui peuplent en tr`es grande majorit´e l’ensemble des nombres naturels. Peut-ˆetre objecterez-vous que les entiers gigantesques ont peu d’importance. Mais vous conviendrez avec moi que c’est une bonne chose que de savoir que l’unicit´e de la factorisation est vrai pour tout les entiers sans aucune exception. La premi`ere d´emonstration est due a ` Gauss. Elle est bas´e sur le lemme suivant: Lemme 1.5. (Gauss) Si un nombre premier p divise le produit de deux nombres entiers alors il divise l’un des facteurs. Nous en donnerons une d´emonstration plus bas (apr`es la proposition 10) . On peut reformuler le lemme de la fa¸con suivante: si un entier q divise le produit mn de deux entiers sans diviser m et n, alors q n’est pas premier. Par exemple, remarquer que le facteur p = 4546201954997 de Pierre ne divise aucun des facteurs trouv´es par Paul. En effet, p est plus grand que chacun de ces facteurs. Donc p n’est pas premier. Pierre a fait une erreur. On voit que l’on peut montrer qu’un nombre est compos´e sans en calculer de facteurs! Rappelons que le plus grand diviseur commun de deux entiers non nuls a et b est le plus grand des entiers divisant a ` la fois a et b; on le d´enote par pgdc(a, b). Par exemple, le plus grand diviseur commun de 60 et de 72 est 12 car les diviseurs de 60 sont 1, 2, 3, 4, 5, 6, 10, 12, 15, 20, 30, 60, et les diviseurs de 72 sont 1, 2, 3, 4, 6, 8, 9, 12, 18, 24, 36, 72. On dit que a et b sont relativement premiers (ou sans diviseurs communs) si pgdc(a, b) = 1. Nous ´ecrirons a⊥b pour indiquer que a et b sont relativement premiers. Par exemple, on a 72 ⊥ 125. Le plus petit multiple commun de m et n est le plus petit des entiers > 0 divis´es a ` la fois par m et n; on le d´enote par ppmc(m, n). Par exemple, on a ppmc(60, 72) = 360. Th´ eor` eme 1.6. (Division euclidienne) Soit b un entier > 0. Alors pour tout entier a ∈ N il existe des entiers q et r tels que a = bq + r avec 0 ≤ r < b. Les entiers q et r sont d´etermin´es uniquement par a et b. Preuve: Soit q le plus grand des entiers ≤ a/b. Par definition, on a q ≤ a/b et a/b < q + 1. Par suite, qb ≤ a et a < (q + 1)b. Posons r = a − bq. Alors on a r ≥ 0 et r < b. Cela montre l’existence du couple (q, r). L’unicit´e est ´evidente car la condition 0 ≤ a − bq < b ´equivaut a ` la condition qb ≤ a < (q + 1)b, qui ´equivaut aux condition q ≤ a/b et a/b < q + 1. CQFD On dit que que r est le reste de la division de a par b, et que q le quotient. Le reste est nul ssi b divise a. 9
Lemme 1.7. Si a = bq + r avec r > 0, alors pgdc(a, b) = pgdc(b, r). Preuve: Si un entier d divise a et b alors il divise aussi r = a − bq par la proposition 2(i) et (ii). Inversement, si d divise b et r alors il divise a = bq + r par la mˆeme proposition. Cela montre que tout diviseur commun de a et b est un diviseur commun de b et r. En particulier, le plus grand diviseur commun de a et b est ´egal au plus grand diviseur commun de b et r. CQFD L’algorithme d’Euclide pour calculer le plus grand diviseur commun de deux entiers a, b ≥ 1 est l’un des plus anciens et l’un des plus importants de math´ematiques. Il est bas´e sur le lemme 5. On effectue successivement les divisions euclidiennes suivantes jusqu’` a l’obtention d’un reste nul: a = bq1 + r1 b = r 1 q2 + r 2 r1 = r 2 q3 + r 3
avec 0 < r1 < b avec 0 < r2 < r1 avec 0 < r3 < r2
··· rn−2 = rn−1 qn + rn
··· avec 0 < rn < rn−1
rn−1 = rn qn+1 + 0. Alors on a pgdc(a, b) = rn . Autrement dit, le pgdc(a, b) est le dernier reste non nul de la suite de division. En effet, d’apr`es le lemme, on a pgdc(a, b) = pgdc(b, r1 ) = pgdc(r1 , r2 ) = · · · = pgdc(rn−1 , rn ). Mais pgdc(rn−1 , rn ) = rn car rn divise rn−1 . Par exemple, on a pgdc(3456, 465) = 3 car 3456 = 465 · 7 + 201 465 = 201 · 2 + 63 201 = 63 · 3 + 12 63 = 12 · 5 + 3 12 = 3 · 4 + 0.
Calculons le pgcd entre le facteur p = 4546201954997 de Pierre et le facteur p 0 = 1239743299603 de Paul. 4546201954997 = 1239743299603 · 3 + 826972056188
1239743299603 = 826972056188 · 1 + 412771243415 826972056188 = 412771243415 · 2 + 1429569358 412771243415 = 1429569358 · 288 + 1055268311 1429569358 = 1055268311 · 1 + 374301047 1055268311 = 374301047 · 2 + 306666217 374301047 = 306666217 · 1 + 67634830 306666217 = 67634830 · 4 + 36126897 67634830 = 36126897 · 1 + 31507933 36126897 = 31507933 · 1 + 4618964 31507933 = 4618964 · 1 + 3794149 4618964 = 3794149 · 1 + 824815 3794149 = 824815 · 1 + 494889 824815 = 494889 · 1 + 329926
494889 = 329926 · 1 + 164963 329926 = 164963 · 1 + 0 10
Donc pgcd(p, p0 ) = 164963. On obtient par suite les factorisations p = 164963 · 27558919,
et
p0 = 164963 · 7515281.
Cela permet de calculer la factorisation suivante de l’entier de d´epart: n = 235711131719232931374143 = 6899 · 164963 · 7515281 · 27558919. La factorisation de Pierre s’obtient en regroupant les facteurs comme suit p · q = (164963 · 27558919) · (6899 · 7515281), et celle de Paul en regroupant les facteurs comme suit p0 · q 0 = (164963 · 7515281) · (6899 · 27558919). Le r´esultat suivant est la cl´e qui permettra de d´emontrer le lemme de Gauss. Th´ eor` eme 1.8. (Relation de B´ezout) Pour tout entiers a, b ≥ 1, il existe des entiers u, v ∈ Z tels que pgdc(a, b) = u · a + v · b. Preuve: On peut supposer que a ≥ b. Nous raisonnerons par induction sur b. Le r´esultat est ´evident si b = 1 et plus g´en´eralement si b | a car alors pgdc(a, b) = b = 0 · a + 1 · b. Sinon, on a a = bq + r avec 0 < r < b. Dans ce cas on a pgdc(a, b) = pgdc(b, r) par le lemme ?. Comme r < b on peut supposer (par l’hypoth`ese d’induction) que l’on a pgdc(b, r) = xb + yr pour des entiers x et y. Par suite, pgdc(a, b) = xb + yr = xb + y(a − br) = ya + (x − yr)b. CQFD
Proposition 1.9. Deux entiers a et b sont relativement premiers si et seulement si il existe des entiers u, v ∈ Z tels que 1 = ua + vb. Preuve: Si pgdc(a, b) = 1 alors il existe des entiers u, v ∈ Z tels que 1 = ua + vb d’apr`es le th´eor`eme 6. Inversement, supposons qu’il existe des entiers u, v ∈ Z tels que 1 = ua + vb. Tout diviseur commun d > 0 de a et de b doit diviser ua + vb = 1 par la proposition ?. Cela montre que d = 1. CQFD
Proposition 1.10. Si n⊥a et n⊥b, alors n⊥ab. Preuve: Si n⊥a, alors il existe des entiers s, t tels que 1 = sa + tn d’apr`es 9. De mˆeme, si b⊥n alors il existe des entiers u, v tels que 1 = ub + vn. En faisant le produit de ces ´egalit´es, on obtient que 1 = (sa + tn)(ub + vn) = (su) · (ab) + (sav + tub + tvn) · n. Elle entraˆıne par la proposition 9 que n⊥ab. CQFD Nous pouvons maintenant d´emontrer le lemme de Gauss: Si un nombre premier p divise le produit de deux nombres entiers alors il divise l’un des facteurs. Il suffit de montrer que si un nombre premier p ne divise pas deux entiers a et b alors il ne divise pas leur produit ab. En effet, si p ne divise pas a alors on a p⊥a puisque p est premier. De mˆeme, on a p⊥b. Par suite, p⊥ab par le proposition 10. CQFD 11
Nous pouvons maintenant d´emontrer le th´eor`eme fondamental de l’arithm´etique: Tout nombre entier n > 1 se factorise en produit de nombres premiers. Cette factorisation est unique a ` l’ordre des facteurs pr`es. L’existence d’une factorisation en facteurs premiers a d´ej` a ´et´e d´emontr´e. Il reste a ` d´emontrer l’unicit´e. Nous allons raisonner par induction sur n. Le r´esultat est clair si n est premier. On peut donc supposer que n est compos´e. Supposons que l’on ait deux factorisations en facteurs premiers n = p 1 p 2 · · · p k = q 1 q2 · · · qr . On peut ranger les facteurs en ordre croissant p1 ≤ p2 ≤ · · · ≤ pk et q1 ≤ p2 ≤ · · · ≤ qr . Nous allons montrer que k = r et que pi = qi pour tout 1 ≤ i ≤ k. Commencons par montrer que pk = qr . Le facteur pk doit diviser l’un des facteurs qj d’apr`es le lemme de Gauss. On a alors pk ≤ qr car on a qj ≤ qr . Le mˆeme raisonnement montre que qr ≤ pk . Nous avons montr´e que pk = qr . Par suite, n = p1 p2 · · · pk−1 = q1 q2 · · · qr−1 . pk Comme n/pk < n, l’hypoth`ese d’induction entraˆıne que k − 1 = r − 1 et que pi = qi pour tout 1 ≤ i ≤ k − 1. CQFD
Il est commode de regrouper les facteurs ´egaux d’une factorisation en facteurs premiers. Cela donne une factorisation dont les facteurs sont des puissances de nombres premiers distincts: n = pa1 1 pa2 2 · · · pakk . Si on accepte les exposants nuls, on peut ´ecrire que n = 2a 3b 5c · · · avec a, b, c, . . . ≥ 0. Il est facile d’obtenir tous les diviseurs d’un entier n a ` partir d’une d´ecomposition de cet entier en puissance de facteurs premiers. Si n = pa1 1 pa2 2 · · · pakk alors les diviseurs d de n sont de la forme d = pb11 · · · pbkk pour des exposants bi ≤ ai pour tout 1 ≤ i ≤ k. Il est facile de calculer le produit deux entiers a ` partir d’une d´ecomposition de ces entiers en puissance de facteurs premiers. Si m = pa1 1 · · · pakk et m = pb11 · · · pbkk alors on a De mˆeme, on a
mn = p1a1 +b1 · · · pakk +bk . pgdc(m, n) = pa1 1 ∧b1 · · · pakk ∧bk
et ppmc(m, n) = pa1 1 ∨b1 · · · pakk ∨bk ,
o` u a ∧ b d´esigne d´esigne le plus petit de deux entiers a et b, et o` u a ∨ b d´esigne d´esigne le plus grand. Proposition 1.11. Pour tout entier m, n ≥ 1, on a pgdc(m, n) · ppmc(m, n) = m · n. Preuve: C’est une cons´equence de l’identit´e a ∧ b + a ∨ b = a + b. CQFD En particulier, si m⊥n alors ppmc(m, n) = m · n. Voici quelques exemples amusants de factorisation. Le nombre Mn (a) = 1 + a + a2 + · · · + an−1 est compos´e si n est compos´e. En effet, l’identit´e xn − 1 = (x − 1)(1 + x + x2 + · · · + xn−1 ) entraˆıne que l’on a amn − 1 = (am − 1)(1 + am + a2m + · · · + a(n−1)m ) 12
et par suite que Mmn (a) = Mm (a)Mn (am ). On dit que l’entier Mn (10) est un repunit car son d´eveloppement d´ecimal est form´e du chiffre 1 r´ep´et´e n-fois.
M2 (10) = 11 = 11 M3 (10) = 111 = 3 · 37 1111 = 11 · 101
M5 (10) = 11111 = 41 · 271 111111 = 3 · 7 · 11 · 13 · 37
M7 (10) = 1111111 = 239 · 4649 11111111 = 11 · 73 · 101 · 137 111111111 = 32 · 37 · 333667
1111111111 = 11 · 41 · 271 · 9091
M11 (10) = 11111111111 = 21649 · 513239 111111111111 = 3 · 7 · 11 · 13 · 37 · 101 · 9901
M13 (10) = 1111111111111 = 53 · 79 · 265371653 11111111111111 = 11 · 239 · 4649 · 909091
111111111111111 = 3 · 31 · 37 · 41 · 271 · 2906161 1111111111111111 = 11 · 17 · 73 · 101 · 137 · 5882353
M17 (10) = 11111111111111111 = 2071723 · 5363222357
111111111111111111 = 32 · 7 · 11 · 13 · 19 · 37 · 52579 · 333667 M19 (10) = 1111111111111111111 = 1111111111111111111 11111111111111111111 = 11 · 41 · 101 · 271 · 3541 · 9091 · 27961 111111111111111111111 = 3 · 37 · 43 · 239 · 1933 · 4649 · 10838689
1111111111111111111111 = 112 · 23 · 4093 · 8779 · 21649 · 513239
M23 (10) = 11111111111111111111111 = 11111111111111111111111 111111111111111111111111 = 3 · 7 · 11 · 13 · 37 · 73 · 101 · 137 · 9901 · 99990001
On dit que l’entier Mn = Mn (2) = 2n − 1 est un nombre de Mersenne. Il est souvent premier si n est 13
premier.
M2 = 3 M3 = 7 M5 = 31 M7 = 127 M11 = 23 · 89
M13 = 8191 M17 = 131071 M19 = 524287 M23 = 47 · 178481
M29 = 233 · 1103 · 2089 M31 = 2147483647 M37 = 223 · 616318177
M41 = 13367 · 164511353 M43 = 431 · 9719 · 2099863
M47 = 2351 · 4513 · 13264529 M53 = 6361 · 69431 · 20394401
M59 = 179951 · 3203431780337 M61 = 2305843009213693951 M67 = 193707721 · 761838257287 M71 = 48544121 · 212885833 · 228479
M73 = 439 · 2298041 · 9361973132609 M79 = 2687 · 202029703 · 1113491139767
M83 = 167 · 57912614113275649087721 M89 = 618970019642690137449562111
M91 = 127 · 911 · 8191 · 112901153 · 23140471537 M97 = 11447 · 13842607235828485645766393
Marin Mersenne (1588-1648) est un moine mineur, math´ematicien et physicien, qui v´ecut a ` Paris. Il utilisa sa cellule monastique comme lieu de rencontres entre Pascal, Fermat et Roberval. Il d´efendit les id´ees de Galil´e. Il ´ecrivit l’Harmonie Universelle, un trait´e de physique-math´ematique. Mersenne affirma que M p est premier pour p = 2, 3, 5, 7, 13, 17, 19, 31, 67, 127 et 257, mais qu’il est compos´e pour les autres valeurs de p premier ≤ 257. L’affirmation de Mersenne contenait cinq erreurs: M67 et M257 sont compos´es alors que M61 , M89 et M107 sont premiers. L’historien des math´ematiques E.T. Bell [] raconte comment le math´ematicien am´ericain F.N. Cole pr´esenta sa d´ecouverte d’une factorisation de M67 lors d’une rencontre de l’Am´erican Mathematical Society en 1903. Sans prononcer un seul mot, Cole effectua la multiplication suivante sur un tableau noir:
193707721 × 761838257287 = 147573952589676412927 = 2 67 − 1.
Lorqu’il d´eposa sa craie, un tonnerre d’applaudissements ´eclata dans la salle. Les nombres premiers de 14
Mersenne pour p ≤ 257 sont les suivants: M2 = 3 M3 = 7 M5 = 31 M7 = 127 M13 = 8191 M17 = 131071 M19 = 524287 M31 = 2147483647 M61 = 2305843009213693951 M89 = 618970019642690137449562111 M107 = 162259276829213363391578010288127 M127 = 170141183460469231731687303715884105727 On connait aujourd’hui (juillet 2003) 39 nombres premiers de Mersenne. Le dernier M13466917 est le plus grand nombre premier connu a ` ce jour. Il comporte plus de 4 millions de d´ecimales. Les nombres premiers de Mersenne apparaissent dans le th´eor`eme d’Euclide sur les nombres parfaits (pour la d´efinition des nombres parfaits voir la section 0). Proposition 1.12. (Euclide) Si le nombre q = 2p − 1 est premier alors le nombre 2p−1 q est parfait. Preuve: Supposons q premier. Calculons la somme σ de tous les diviseurs propres de 2p−1 q. Ces diviseurs propres sont de deux formes: (i) les divieurs 1, 2 . . . , 2p−1 ; (ii) les divieurs q, 2q, . . . , 2p−2 q. Comme on a 2p − 1 = 1 + 2 + · · · + 2p−1
et
(2p−1 − 1)q = q + 2q + · · · + 2p−2 q
on obtient que σ = (2p − 1) + 2p−1 q − q = 2p−1 q. CQFD Les nombres parfaits d’Euclide sont pairs. Inversement, Euler a montr´e qu’un nombre parfait pair est forc´ement un nombre parfait d’Euclide. On ignore s’il existe des nombres parfaits impairs. On connait aujourd’hui (juillet 2003) 39 nombres parfaits. Le r´esultat suivant d’Euclide est fameux : Proposition 1.13. (Euclide) Il existe une infinit´e de nombres premiers. Preuve: Montrons que toute liste finie des nombres premiers est forc´ement incompl`ete. Si p 1 , p2 , . . . , pn sont des nombres premiers posons N = p1 p2 , . . . pn . Soit p un diviseur premier de 1 + N . Comme N et N + 1 sont relativement premiers, p ne peut diviser N . Donc p est diff´erent de pi (puisque pi divise N ). CQFD La preuve d’Euclide fournit un algorithme pour obtenir des nombres premiers de plus en plus grands: 2+1=3 2·3+1=7
2 · 3 · 7 + 1 = 43
2 · 3 · 7 · 43 + 1 = 13 · 139 2 · 3 · 7 · 13 · 43 · 139 + 1 = 3263443
2 · 3 · 7 · 13 · 43 · 139 · 3263443 + 1 = 547 · 607 · 1033 · 31051 ··· 15
L’algorithme n’est pas efficace car il faut factoriser des entiers tr`es grands, ce qui est difficile. Il a plusieurs d´emonstrations de l’infinitude des nombres premiers. Voici un argument heuristique dans ce sens. Intuitivement, la proportion des nombres entiers divisibles par un entier n donn´e est ´egale a ` 1/n. La proportion de ceux qui ne sont pas divisibles par n est par suite ´egale a ` 1 − 1/n. Par exemple, le tiers des nombres sont divisibles par 3 et les deux tiers ne le sont pas: ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Si m et n sont relativement premiers, le fait d’ˆetre divisible par m est une propri´et´e ind´ependante du fait d’ˆetre divisible par n. En effet, un entier est divisible par m et n ssi il est divisible par mn puisque m et n sont relativement premiers. La proportion des entiers divisibles par m et n est donc 1/mn. Cela implique que la proportion des entiers qui sont ni divisibles par m ni par n est donn´e par le produit
1−
1 1 1− . m n
En effet, cette quantit´e peut se calculer en retranchant de la proportion des nombres qui ne sont pas divisibles par n celle des nombres qui ne sont pas divisibles par n mais divisibles par m. La premi`ere vaut 1 − 1/n, et la seconde vaut 1/m − 1/mn. On trouve 1 1 (1 − 1/n) − (1/m − 1/mn) = 1 − 1− . m n En particulier, si p et q sont des nombres premiers distincts, la proportion des nombres entiers relativement premiers au produit pq est (1 − 1/p)(1 − 1/q). Par exemple, le tiers des nombres sont relativement premiers a ` 6 = 2 · 3: ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Plus g´en´eralement, si p1 , . . . , pn sont de nombres premiers distincts, alors le proportion des nombres entiers relativement premiers au produit p1 · · · pn est donn´ee par le produit 1 1 1 1− 1− ··· 1− . p1 p2 pn Par exemple, la proportion des nombres entiers sans diviseurs premiers ≤ 100 est donn´ee par 1 · 2 · 4 · 6 · 10 · 12 · 16 · 18 · 22 · 28 · 30 · 36 · 40 · 42 · 46 · 52 · 58 · 60 · 66 · 70 · 72 · 78 · 82 · 88 · 96 2 · 3 · 5 · 7 · 11 · 13 · 17 · 19 · 23 · 29 · 31 · 37 · 41 · 43 · 47 · 53 · 59 · 61 · 67 · 71 · 73 · 79 · 83 · 89 · 97 337785458319471925002240000 = .1203172905... = 2807455661493975149742813527 Plus g´en´eralement, le produit Y
p premier ≤n
1 1− p
repr´esente la proportion des nombres entiers dont tous les diviseurs premiers sont > n. Comme ce produit est non nul, il faut bien qu’il y ait des nombres premiers > n. Il y a donc une infinit´e des nombres premiers! Proposition 1.14. (Euler) On a 1 1 1 1 0= 1− · 1− · 1− · 1− ···. 2 3 5 7 16
Il existe donc une infinit´e de nombres premiers. Preuve: Intutivement, ce produit repr´esente la proportion des nombres entiers sans aucun diviseurs premiers! Cette proportion est nulle car tout nombre entier > 1 est divisible par un nombre premier au moins. ` ce sujet, voir l’exercice ? Nous allons Malheureusement, ce raisonnement souffre d’un manque de rigueur. A reproduire le raisonnement rigoureux d’Euler. Il repose sur le fait que la s´erie harmonique S =1+
1 1 1 1 1 + + + + +··· 2 3 4 5 6
diverge Pour le voir on peut en regrouper les termes comme suit: 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 + + + + + + + + + + + + + +··· S= + + 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 Si on remplace les termes de chaque groupe par le plus petit d’entre eux on obtient que 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 S≥ + + + + +··· + + + + + + + + + + + 1 2 4 4 8 8 8 8 16 16 16 16 16 16 16 16 1 1 1 1 =1 + + + + + · · · = ∞. 2 2 2 2 Remarquons maintenant que la s´erie g´eom´etrique 1 = 1 + x + x2 + · · · 1−x converge pour | x |< 1. Pour le voir il suffit d’utiliser l’identit´e 1 − xn+1 = 1 + x + x 2 + · · · + xn 1−x valable pour x 6= 1. La convergence provient du fait que xn+1 → 0 lorsque n → ∞ si | x |< 1. En particulier, la somme des inverses des puissances de 2 converge: 1 1−
1 2
=1+
1 1 1 + 2 + 3 +··· 2 2 2
Plus g´en´eralement, la somme des inverses des puissances d’un nombre entier n > 1 converge: 1 1−
1 n
=1+
1 1 1 + + 3 +··· n n2 n
Que peut-on dire de la somme des inverses des nombres entiers de la forme 2a 3b pour a, b ≥ 0. Elle converge car on a 1 1 1 1 1 1 1 1 1+ + 2 + 3 +··· 1 · 1 = 1 + 2 + 22 + 23 + · · · 3 3 3 1− 2 1− 3 . 1 1 1 1 1 1 1 1 + + 2+ 2 + +··· =1 + + + 2 + 2 3 2 2 · 3 23 3 2 · 3 24 De mˆeme, la somme des inverses des nombres entiers de la forme 2a 3b 5c converge car on a 1 1−
1 2
·
1 1−
1 3
·
1 1−
1 5
=1+
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 + + + + + + 2+ + + + ···. 2 3 22 5 2 · 3 23 3 2 · 5 22 · 3 24
On peut continuer ainsi en ajoutant un facteur 1 1−
1 p
=1+
1 1 1 + + 3 +··· p p2 p 17
pour chaque nombre premier p. Comme tout entier se d´ecompose uniquement en produit de facteurs premiers on obtient que 1 1 1 1 1 1 1 1 1 · · · ··· = 1+ + + + + +···. 2 3 4 5 6 1 − 21 1 − 31 1 − 51 1 − 71 Le second membre de cette derni`ere ´egalit´e est la s´erie harmonique qui diverge. Par suite, 1 1−
1 2
·
1 1−
1 3
·
1 1−
1 5
·
1 1−
1 7
· · · = ∞.
En inversant on obtient que 1 1 1 1 · 1− · 1− · 1− · · · = 0. 1− 2 3 5 7 CQFD
Proposition 1.15. (Euler) ∞=
1 1 1 1 1 1 1 + + + + + + +···. 2 3 5 7 11 13 17
Il existe donc une infinit´e de nombres premiers. Preuve: En prenant le logarithme du produit ∞= on obtient que ∞ = ln
1 1−
1 1−
1 2
·
1 2
+ ln
1 1−
1 1−
1 3
1 3
·
1 1−
1 5
+ ln
1 1−
≤
ln 4 n
·
1 5
1 1−
1 7
+ ln
··· 1 1−
1 7
···.
Pour continuer, on utilise ensuite le fait que l’on a ln
1 1−
1 n
pour tout n ≥ 2 (voir le lemme 16 qui suit). Par suite ∞ ≤ (ln 4) ·
1
2
+
1 1 1 1 + + + +··· . 3 5 7 11
CQFD
La d´emonstration du lemme 1.16 utilise le concept de fonction convexe. On dit qu’une fonction continue f (x) d´efinie dans un intervalle (a, b) est convexe si son graphe est courb´e vers le haut, comme un sourire. Il est facile de v´erifier qu’une fonction diff´erentiable f est convexe ssi sa d´eriv´ee f 0 (x) est croissante. Lorsque f est convexe, on a l’in´egalit´e f ((1 − t)x + ty) ≤ (1 − t)f (x) + tf (y) pour tout x, y ∈ (a, b) et pour tout t ∈ [0, 1]. Cette in´egalit´e traduit le fait que le segment de droite joignant les points de coordonn´ees (x, f (x)) et (y, f (y)) est situ´e au dessus du graphe de f dans l’intervalle [x, y] (si x < y). 18
Lemme 1.16. Pour tout n ≥ 2 on a
ln
1 1−
≤
1 n
Preuve: la fonction
ln 4 n
1 1−x
f (x) = ln
1 est diff´erentiable pour x < 1. C’est une fonction convexe dans l’intervalle (−∞, 1) car sa d´eriv´e f 0 (x) = 1−x est croissante pour x < 1. Comme f (0) = 0 on obtient en prenant x = 0 que f (ty) ≤ tf (y) pour tout y < 1 et t ∈ [0, 1]. En particulier, si y = 1/2 et t = 2/n on obtient l’in´egalit´e
2 1 1 f( ) ≤ · f( ) n n 2 pour n ≥ 2. Cela montre que l’on a
ln
1 1−
1 n
≤
2 ln 2 n
pour n ≥ 2. CQFD On peut observer que les nombres premiers grands sont plus rares que les petits. Par exemple, on trouve 25 nombres premiers dans l’intervalle [1, 100] et 21 dans l’intervalle [200, 300]. Dans le tableau suivant nous avons indiqu´e pour certaines valeurs de n, le nombre π(n, 100) de nombres premiers compris dans l’intervalle [n, n + 100]. n 0 102 π(n, 100) 25 21
103 16
104 11
105 6
106 6
107 2
108 2
109 7
1010 5
1011 7
1012 4
1050 0.
Le tableau montre que la valeur de π(n, 100) fluctue autour d’une moyenne qui va en d´ecroissant lorsque n croit. Il montre aussi que l’intervalle [1050 , 1050 +100] ne contient aucun nombre premier. D´enotons par π(n) le nombre de nombres premiers p ≤ n. Le math´ematicien Paul-Marie Legendre (1752-1833) a conjectur´e que π(n) est asymptotique a ` logn n : n π(n) ∼ . log n (n) tend vers 1 Je rappelle que deux fonctions f (n) et g(n) sont asymptotiques, f (n) ∼ g(n), si le rapport fg(n) lorsque n → ∞. Le math´ematicien Carl Frederic Gauss (1777-1855) fit une conjecture plus pr´ecise en 1849:
π(n) =
Z
n 2
dx . ln(x)
On peut reformuler la conjecture de Gauss en disant que la fr´equence des nombres premiers au voisinage d’un entier x grand est approximativement donn´ee par f (x) = Si x = 10n on a f (10n ) =
1 . ln(x)
1 .43429448 = . ln(10n ) n
Cette formule pr´edit qu’environ un nombre sur 10 est premier dans le voisinage de 10 4 , qu’environ un nombre sur 100 est premier dans le voisinage de 1043 et qu’environ un nombre sur 1000 est premier au voisinage de 10434 . Cela entraˆıne qu’il y au au moins 10431 nombres premiers ≤ 10434 . Bigre! Il y a ´enorm´ement de nombres premiers! 19
La pr´ecision de la formule de Gauss est remarquable. Par exemple, on compte 44 nombres premiers dans l’intervalle [1010 + 1, 1010 + 103 ] ce qui donne une fr´equence empirique de 44/1000. Le fr´equence th´eorique obtenue de la formule de Gauss est 43.4 f (1010 ) = . 1000 La conjecture de Gauss ´et´e d´emontr´ee par Jacques Hadamard et par Charles de La Vall´ee Poussin en 1896. On ne connait pas de m´ethode simple pour engendrer une infinit´e des nombres premiers. On conjecture qu’il existe un infinit´e de nombres premiers de Mersenne. Tout polynˆ ome p(n) a ` coefficients entiers admet des valeurs compos´ees pour une infinit´e d’entiers n. Toutefois, Euler a donn´e l’exemple remarquable du polynˆ ome p(n) = n2 + n + 41 qui prend des valeurs premi`eres pour tous les entiers n = 0, 1, . . . , 39: 41 43 47 53 61 71 83 97 113 131 151 173 197 223 251 281 313 347 383 421 461 503 547 593 641 691 743 797 853 911 971 1033 1097 1163 1231 1301 1373 1447 1523 1601 On a conjectur´e que le polynˆ ome n2 + 1 prend une infinit´e de valeurs premi`eres mais on ne sait pas le d´emontrer. Le math´ematicien Fermat (1601-1665) a conjectur´e que tous les nombres de Fermat n
Fn = 2 2 + 1 sont premiers. Les cinq premiers nombres de Fermat sont effectivement premiers: F0 = 2 1 + = 3 F1 = 2 2 + 1 = 5 F2 = 24 + 1 = 17 F3 = 28 + 1 = 257 F4 = 216 + 1 = 65537. Mais la conjecture de Fermat est fausse. Euler a trouv´e que F5 est compos´e: F5 = 232 + 1 = 4294967297 = 641 × 6700417. En 1880 le math´ematicien F. Landry a montr´e (` a l’ˆ age de 82 ans) que F 6 est compos´e: F6 = 264 + 1 = 18446744073709551617 = 274177 × 67280421310721. En 1970 Morrison et Brillhart d´ecomposent F7 en facteurs premiers en utilisant un ordinateur: F7 = 2128 + 1 = 59649589127497217 × 5704689200685129054721. En 1980 Pollard et Brent d´ecomposent F8 en utilisant une variante de l’algorithme de factorisation de Pollard: F8 = 2256 + 1 = 1238926361552897 × 93461639715357977769163558199606896584051237541638188580280321. En 1990 Lenstra, Lenstra, Manasse et Pollard d´ecomposent F9 : F9 = 2512 + 1 = 2424833 × 7455602825647884208337395736200454918783366342657
×74164006262753080152478714190193747405994078109751 9023905821316144415759504705008092818711693940737. 20
Le plus grand facteur premier de F9 est un nombre de 99 d´ecimales. Les nombres F10 et F11 ont ´et´e d´ecompos´e en facteurs premiers par Brent (1995 et 1988). Le plus grand facteur premier de F 11 est un nombre de 512 d´ecimales. Aujourd’hui, on sait que tous les nombres de Fermat Fn sont compos´es pour 5 ≤ n ≤ 50. L’un des plus beaux r´esultats sur les nombres de Fermat est du a ` Christian Goldbach (1690-1764). Th´ eor` eme 1.17. (Goldbach). Les nombres de Fermat sont relativement premiers deux a ` deux. Preuve: Partant de l’identit´e x2 − 1 = (x − 1)(x + 1) on montre que n
x2 − 1 = (x − 1)(x + 1)(x2 + 1)(x4 + 1) · · · (x2
n−1
+ 1).
Si on pose x = 2 on obtient que Fn − 2 = F0 · F1 · F2 · · · · · Fn−1 . Cette relation entraˆıne que tout diviseur commun a ` Fn et a ` Fk pour k < n est un diviseur de 2. Comme les nombres de Fermat sont impairs il faut que ce diviseur soit ´egal a ` 1.
Le r´esultat de Goldbach entraˆıne l’existence d’une infinit´e de nombres premiers. En effet, soit p n le plus petit diviseur premier de Fn . Si m 6= n alors pm 6= pn car aucun diviseur premier de Fm n’est un diviseur de Fn . Les nombres premiers de Fermat interviennent dans l’un des plus beaux r´esultats de Gauss. Depuis Euclide, les g´eom`etres ont voulu faire leurs constructions g´eom´etriques en utilisant uniquement la r`egle et le compas. Euclide avait donn´e une construction des polygones r´eguliers avec 3,4,5,6,8,10 et 12 cˆ ot´es. En fait, il est facile de doubler le nombre de cˆ ot´es d’un polygone d´ej` a construit. Vers 150 apr`es JC, Claude Ptol´em´ee obtient la valeur de sin 3o pour ses tables de trigonom´etrie en construisant le cot´e d’un polygone r´egulier de 120 = 8 · 15 cˆ ot´es. Mais Ptol´em´ee ne put trouver la construction du polygone r´egulier de 360 = 8 · 3 2 · 5 cˆ ot´es car il n’arrivait pas a ` construire le polygone de 9 cˆ ot´es. Gauss montra qu’un polygone r´egulier de n cˆ ot´es est constructible par r`egle et compas si et seulement la d´ecomposition de n en facteurs premiers est de la forme n = 2 a p1 p2 · · · pr avec p1 , . . . , pr des nombres premiers de Fermat distincts. Par exemple, le polygone de 17 cˆ ot´es est constructible car 17 = F2 . Ceux de 7 et de 9 cˆ ot´es ne le sont pas. Remarquer que les seuls nombres premiers de Fermat connus sont les cinq premiers F0 , F1 , F2 , F3 , F4 . Un grand nombres de questions sur les nombres premiers restent sans r´eponses. L’une concerne les nombres premiers jumeaux. On dit que deux nombres premiers p et q sont jumeaux si q = p + 2. Voici la liste des nombres premiers jumeaux ≤ 1000. (3, 5) (101, 103) (239, 241) (521, 523) (827, 829)
(5, 7) (107, 109) (269, 271) (569, 571) (857, 859)
(11, 13) (17, 19) (29, 31) (41, 43) (59, 61) (71, 73) (137, 139) (149, 151) (179, 181) (191, 193) (197, 199) (227, 229) (281, 283) (311, 313) (347, 349) (419, 421) (431, 433) (461, 463) (599, 601) (617, 619) (641, 643) (659, 661) (809, 811) (821, 823) (881, 883)
On croit qu’il existe une infinit´e de nombres premiers jumeaux mais on ne sait pas le d´emontrer.
Pour les applications, il est important d’avoir un algorithme permettant de calculer efficacement les coefficients u et v de la relation de Bezout. D’apr`es l’algorithme d’Euclide, le pgcd de deux entiers a et b 21
s’obtient comme le dernier reste non-nul rn de la suite de divisions suivantes: a = bq1 + r1
evec 0 < r1 < b
b = r 1 q2 + r 2
avec 0 < r2 < r1
r1 = r 2 q3 + r 3 ···
avec 0 < r3 < r2 ···
rn−2 = rn−1 qn + rn rn−1 = rn qn+1 + 0
.
avec 0 < rn < rn−1
Posons pi = qn+1−i . La suite p1 , . . . , pn est obtenue en renversant la suite des quotients q1 , . . . , qn . On d´efinit une suite (β0 , . . . , βn ) en posant β0 = 1; β1 = p 1 ; et βk = pk · βk−1 + βk−2
pour 2 ≤ k ≤ n.
Proposition 1.18. On a pgdc(a, b) = (−1)n (βn b − βn−1 a) Preuve: Nous utiliserons les matrices. Pour une autre d´emonstration, voir l’exercice ?. On a a q1 1 b = b 1 0 r1 q2 1 b r1 = ··· 1 0 r1 r2 qn 1 rn−2 rn−1 = rn−1 rn 1 0 Par suite, q1 a = 1 b Posons J =
1 0
q2 1
1 0
−q 1
1 0
−1
···
···
qn 1
1 0
rn−1 rn
.
−1 0 . Remarquer que 0 1 J
q 1 1 0
=−
Par suite
−a b
= (−1)n
0 1 1 q1
J =−
0 1 1 qn
0 1 1 q
−1
−1
J.
−rn−1 rn
et on obtient en inversant que (−1)
n
−rn−1 rn
=
=
0 1 1 qn
0 1 1 p1
···
0 1 1 q1
−a b
···
0 1 1 pn
−a b
Remarquer que (1, p1 ) = (β0 , β1 ) et que (βk−1 , βk )
0 1 1 pk+1 22
= (βk , βk+1 )
.
,
pour tout 1 ≤ k < n. Par suite, (0, 1)
0 1 1 p1
···
0 1 1 pn
= (βn−1 , βn ).
On obtient alors que (−1)n rn = (−1)n (0, 1)
−rn−1 rn
= (βn−1 , βn )
−a b
.
CQFD Voici un exemple d’application de la proposition 18. Le plus grand diviseur commun de a = 3456 et b = 465 est 3. La suite des quotients dans le calcul de ce plus grand diviseur commun est (7, 2, 3, 5). La suite renvers´ee est (5, 3, 2, 7). On obtient que β0 = 1; β1 = 5; β2 = 3 · 5 + 1 = 16; β3 = 2 · 16 + 5 = 37;
β4 = 7 · 37 + 16 = 275.
On a donc 3 = (−1)4 (275 · b − 37 · a) = −37 · a + 275 · b. Exercices pour la section 1 ´ Exercice : Dans notre exemple du crible d’Eratosth` ene, le premier multiple de 3 a ` ˆetre ´elimin´e est 9 = 32 , le premier multiple de 5 a ` ˆetre ´elimin´e est 25 = 52 et le premier multiple de 7 a `a ` ˆetre ´elimin´e est 49 = 72 . Pouvez-vous expliquer ces observations ?
Exercice : Montrer que pour tout entiers m, n, d ≥ 1, on a pgcd(dm, dn) = d · pgcd(dm, dn)
ppmc(dm, dn) = d · ppmc(m, n)
Suggestion: Utiliser les identit´es c + (a ∧ b) = (c + a) ∧ (c + b) et c + (a ∨ b) = (c + a) ∨ (c + b). Les exercices qui suivent portent sur les nombres de Mersenne g´en´eralis´es M n (a) = 1+a+a2 +· · ·+an−1 . Exercice : Si d = pgdc(m, n) montrer que pgdc(am − 1, an − 1) = ad − 1. En d´eduire que pgdc(Mm (a), Mm (a)) = Md (a). Suggestion: Si m < n utiliser l’identit´e an − 1 = an−m (am − 1) + an−m − 1 pour montrer que pgdc(am − 1, an − 1) = pgdc(am − 1, an−m − 1). En d´eduire que si n = mq + r alors pgdc(am − 1, an − 1) = pgdc(am − 1, ar − 1). Utiliser ensuite l’algorithme d’Euclide pour calculer le pgdc(m, n) et obtenir le r´esultat cherch´e. 23
Les exercices qui suivent portent sur les nombres de Mersenne doublement g´en´eralis´es: Mn (a, b) = bn−1 + abn−2 + a2 bn−3 + · · · + an−1 . Par convention, M0 (a, b) = 0 et M1 (a, b) = 1. On a ´evidemment Mn (a, b) = Mn (b, a). Exercice : D´emontrer les identit´es: Mmn (a, b) = Mn (a, b)Mm (an , bn ) et Mm+n (a, b) = am Mn (a, b) + Mm (a, b)bn .
Exercice : Si m = nq + r montrer que Mm (a, b) = Mn (a, b)Mq (an , bn )ar + bnq Mr (a, b).
Exercice : Supposons a et b relativement premiers. Si d = pgdc(m, n), montrer que M d (a, b) est le plus grand diviseur commun de Mm (a, b) et de Mn (a, b).
Exercice : Le but de cet exercice est de donner une autre d´emonstration de la proposition ?. Posons β−1 = 0 et (s−1 , s0 , . . . , sn ) = (rn , . . . , r1 , b, a). Remarquer que pour tout 0 < k ≤ n, on a βk = pk βk−1 + βk−2
et sk = pk sk−1 + sk−2 .
Montrer par induction sur k que l’on a
pour tout 0 ≤ k ≤ n.
β pgdc(a, b) = (−1)k k βk−1
sk . sk−1
Les exercices qui suivent ont pour but d’´etudier la d´ecomposition en facteurs premiers de n!. On a 1! = 1 2! = 2 3! = 2 · 3
4! = 23 · 3
5! = 23 · 3 · 5
6! = 24 · 32 · 5
7! = 24 · 32 · 5 · 7
8! = 27 · 32 · 5 · 7
9! = 27 · 34 · 5 · 7
10! = 28 · 34 · 52 · 7
11! = 28 · 34 · 52 · 7 · 11
12! = 210 · 35 · 52 · 7 · 11 24
Pour tout nombre premier p, soit ep (n) l’exposant de la plus grande puissance de p qui divise n. On a ep (mn) = ep (m) + ep (n). Par suite, n X ep (n!) = ep (k). k=1
Dans le tableau suivant nous avons indiqu´e les valeurs de e2 (n) par une colonne d’´etoiles:
∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ ∗ 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 On trouve que e2 (25!) = 1 + 2 + 1 + 3 + 1 + 2 + 1 + 4 + 1 + 2 + 1 + 3 = 22. C’est le nombre total d’´etoiles du tableau. On peut compter les ´etoiles horizontalement plutˆ ot que verticalwment. Il y a 12 ´etoiles de niveau 1, 6 de niveau 2, 3 de niveau 3 et 1 de niveau 4. On peut calculer le nombre d´etoile de niveau donn´e en utilisant [x], la partie enti`ere d’un nombre r´eel x. On a h 25 i
+
h 25 i
+
h 25 i
+
hni
+
hni
+
hni
+···.
h 100 i
+
h 100 i
e2 (25!) =
2 4 8 = 12 + 6 + 3 + 1 = 22
Exercice : Montrer que ep (n!) =
p
p2
p3
h 25 i
16 .
Par exemple, on obtient que h 100 i
+
h 100 i
+
h 100 i
+
+
h 100 i
= 50 + 25 + 12 + 6 + 3 + 1 = 97 2 4 8 16 32 64 h 100 i h 100 i h 100 i h 100 i e3 (100!) = + + + = 33 + 11 + 3 + 1 = 48 3 9 27 81 h 100 i h 100 i e5 (100!) = + = 20 + 4 = 24 5 25 h 100 i h 100 i e7 (100!) = + = 14 + 2 = 16 7 49 h 100 i h 100 i h 100 i h 100 i e11 (100!) = = 9, e13 (100!) = = 7, e17 (100!) = = 5, e19 (100!) = = 5, 11 13 17 19 h 100 i h 100 i h 100 i h 100 i = 4, e29 (100!) = = 3, e31 (100!) = = 3, e37 (100!) = = 2, e23 (100!) = 23 29 31 37 h 100 i h 100 i h 100 i e41 (100!) = = 2, e43 (100!) = = 2 , e47 (100!) = =2 41 43 47 h 100 i e51 (100!) = = 1 etc. 51 e2 (100!) =
Cela donne 100! = 297 · 348 · 524 · 716 · 119 · 137 · 175 · 195 · 234 · 293 · 313 · 372 · 412 · 432 · 472 · · 53 · 59 · 61 · 67 · 71 · 73 · 79 · 83 · 89 · 97 25
Cet exemple sugg`ere que l’exposant de 2 dans la d´ecomposition de n! est l´eg`erement inf´erieur a ` n, et que l’exposant de 3 est l´eg`erement inf´erieur a ` n/2. Remarquer que ep (n!) =
hni p
+
hni hni n n n n 1 n = + 3 +··· < + 2 + 3 +··· = . p2 p p p p p 1 − 1p p−1
En particulier, on a e2 (n!) < n. Pour calculer la diff´erence n − e2 (n!) il est bon d’exprimer n a ` la base 2. Par exemple, 100 = (1100100)2 = 26 + 25 + 22 et h 100 i
= 25 + 24 + 2 2 h 100 i = 24 + 23 + 1 4 h 100 i = 23 + 22 8 h 100 i = 22 + 2 16 h 100 i =2+1 32 h 100 i = 1. 64 Si on additionne les membres de droite par colonne verticale, on obtient e2 (100!) = (25 + 24 + 23 + 22 + 2 + 1) + (24 + 23 + 22 + 2 + 1) + (2 + 1) = (26 − 1) + (25 − 1) + (22 − 1)
= (26 + 25 + 22 ) − 3 = 100 − 3
La diff´erence 100 − e2 (100!) = 3 est la somme s2 (n) des bits du d´eveloppement binaire (1100100)2. Exercice: Montrer que e2 (n!) = n − s2 (n). Par exemple, comme 1000 = (1111101000)2 on obtient que e2 (1000!) = 10000 − 6 = 984.
Plus g´en´eralement, d´enotons par (a)p = a0 + a1 p + a2 p2 + · · · le d´eveloppement d’un entier a a ` la base p. Par d´efinition, on a 0 ≤ ai < p. Posons sp (n) = a0 + a1 + a2 + · · · . Exercice: Montrer que ep (n!) =
n − sp (n) . p−1
Par exemple, comme 106 = (1212210202001)3 on obtient que e3 (106 !) = (106 − 14)/2 = 499993.
2. Fractions d´ ecimales et congruences
La th´eorie des r´esidus est l’un des principaux outils de la th´eorie des nombres. C’est l’oeuvre de plusieurs g´en´erations de math´ematiciens, Fermat, Euler, Lagrange, Legendre et Gauss y ont contribu´es. Elle permet d’expliquer un grand nombre de ph´enomˆenes math´ematiques. C’est le cadre naturel pour r´epondre a ` plusieurs questions sur la p´eriodicit´e du d´eveloppement d´ecimal des nombres rationnels. Nous commencerons notre 26
excursion par ´etudier cette p´eriodicit´e. Elle conduit directement a ` des r´esultats fondamentaux de Fermat, d’Euler et de Lagrange, et elle conduit a ` des questions non encore r´esolues. On raconte que durant sa jeunesse, Gauss calcula le d´eveloppement d´ecimal de toutes les fractions 1/n pour n ≤ 1000. C’est un travail consid´erable. Certaines fractions ont une p´eriode comportant des centaines de chiffres. Ce faisant, Gauss accumulait un savoir empirique qui devait lui servir toute sa vie. Suivant son exemple, commencons par examiner le d´eveloppement d´ecimal de quelques fractions. La d´eveloppement d´ecimal d’une fraction comme 9/56 s’obtient par division successive. Comme 9 < 56 on multiplie 9 par 10 et on divise le r´esultat par 56. Le reste de cette division est 34. On multiplie ensuite 34 par 10 et on divise le r´esultat par 56. Le reste de cette division est 4. On multiplie 4 par 10 et on divise le r´esultat par 56. Le reste de cette division est 40, etc 90 = 56 × 1 + 34
340 = 56 × 6 + 4
40 = 56 × 0 + 40 400 = 56 × 7 + 8
80 = 56 × 1 + 24 240 = 56 × 4 + 16 160 = 56 × 2 + 48 480 = 56 × 8 + 32
320 = 56 × 5 + 40
Il n’est pas n´ecessaire de poursuivre les divisions car la p´eriodicit´e est manifeste. Cela donne que 9/56 = 0, 16071428571428571428571428571428571429... Le trois chiffre du d´ebut forment une partie transitoire suivie d’une partie r´ecurrente 714285 de longueur 6. Remarquer que la suite 714285714285 de longueur 12 est aussi r´ecurrente. On dit que la partie r´ecurrente de longueur minimale est la p´eriode du d´eveloppement. Dans notre exemple, cette p´eriode d´ebute a ` la 4 e d´ecimale. Nous ´ecrirons ˙ ˙ 9/56 = 0, 16071428 5. Remarquons a ` ce stade que les restes que l’on obtient en calculant le d´eveloppement d´ecimal de 9/56 sont identiques a ` ceux que l’on obtiendrait en divisant succesivement les nombres 90, 900, 9000, etc. En effet, 90 = 56 × 1 + 34
900 = 56 × 16 + 4 9 000 = 56 × 160 + 40
90 000 = 56 × 1607 + 8 900 000 = 56 × 16071 + 24
9 000 000 = 56 × 160714 + 16 90 000 000 = 56 × 1607142 + 48
900 000 000 = 56 × 16071428 + 32 9 000 000 000 = 56 × 160714285 + 40 Certaines fractions ont un d´eveloppement avec une p´eriode r´eduite a `0: ı 1/2 = 0, 500000000000000000... 1/4 = 0, 250000000000000000... 1/8 = 0, 125000000000000000... 1/5 = 0, 200000000000000000... 1/25 = 0, 040000000000000000... 27
Il est facile de voir que c’est le cas des fractions avec un d´enominateur de la forme 2 k 5r . En effet, on peut toujours les mettre sous la forme a/10n pour un entier a. Certaines fractions ont un d´eveloppement sans partie transitoire. Par exemple, 1/3 = 0, 333333333333333333... 2/3 = 0, 666666666666666666... 1/7 = 0, 142857142857142857... 2/7 = 0, 285714285714285714... 3/7 = 0, 428571428571428571... 4/7 = 0, 571428571428571428... 5/7 = 0, 714285714285714285... 6/7 = 0, 857142857142857142... 1/9 = 0, 111111111111111111... 2/9 = 0, 222222222222222222... 4/9 = 0, 444444444444444444... 5/9 = 0, 555555555555555555... 7/9 = 0, 777777777777777777... 8/9 = 0, 888888888888888888... Nous dirons que ces d´eveloppements sont strictement p´eriodiques. Pour y voir plus clair, calculons le d´eveloppement d´ecimal de 1/7. 10 = 7 × 1 + 3
10 = 7 × 1 + 3
102 = 7 × 14 + 2
30 = 7 × 4 + 2
103 = 7 × 142 + 6
20 = 7 × 2 + 6
104 = 7 × 1428 + 4
60 = 7 × 8 + 4
40 = 7 × 5 + 5
105 = 7 × 14285 + 5
10 = 7 × 1 + 3
107 = 7 × 142851 + 3
106 = 7 × 14285 + 1
50 = 7 × 7 + 1
Le premier reste a ` revenir est 3. Le reste qui pr´ec`ede est 1; il marque la fin de la premi`ere p´eriode et annonce la suivante. On voit sur cet exemple que la fin de premi`ere p´eriode du d´eveloppement de 1/n est marqu´e par un reste qui vaut 1. Pour tout entier n ∈ Z posons nZ = {na | a ∈ Z}. Definition 2.1 : Soit n un entier ≥ 0. Nous dirons que deux entiers a, b ∈ Z sont congrus modulo n si leur diff´erence a − b est divisible par n, autrement dit, si a − b ∈ nZ. Nous ´ecrirons a ≡ b mod n pour indiquer que a est congru a ` b modulo n.
Proposition 2.2. Soit n un entier > 0. Si x ≡ y d´enote la relation de congruence modulo n alors on a: (i) x ≡ x (r´eflexivit´e) (ii) Si x ≡ y et y ≡ z alors x ≡ z (transitivit´e ) (iii) Si x ≡ y alors y ≡ x (sym´etrie) 28
(iv) Si x ≡ y et u ≡ v alors x + u ≡ y + v et xu ≡ yv. Preuve: (i) On a n | (x−x) car n | 0. (ii) Si n | (x−y) et n | (y −z) alors n | (x−y)+(y −z) = (x−z). (iii) Si n | (x−y) alors n | −(x−y) = (y−x). (iv) Si n | (x−y) et n | (u−v) alors n | (x−y)+(u−v) = (x+u)−(y+v). De plus, n | x(u − v) + v(x − y) = xu − yv. CQFD La proposition suivante g´en´eralise la division euclidienne a ` tous les entiers de Z Proposition 2.3. (Division euclidienne des entiers dans Z) Soit n un entier > 0. Alors pour tout entier a ∈ Z il existe des entiers q ∈ Z et 0 ≤ r < n tels que a = nq + r. Les entiers q et r sont d´etermin´es uniquement par a et n. Preuve: Soit q ∈ Z le plus grand des entiers ≤ a/n. Par definition, on a q ≤ a/n et a/n < q + 1. Par suite, qn ≤ a et a < (q + 1)n. Posons r = a − nq. Alors on a r ≥ 0 et r < n. Cela montre l’existence du couple (q, r). L’unicit´e est ´evidente. CQFD
Proposition 2.4. Soit n un entier > 0. Tout entier a ∈ Z est congru modulo n a ` un et un seul entier r ∈ {0, 1, · · · , n − 1}. L’entier r est le reste de la division de a par n. Preuve: On a a = nq + r avec 0 ≤ r < n par division euclidienne. Donc a ≡ r mod n et r ∈ {0, 1, · · · , n − 1}. L’unicit´e de r provient de l’unicit´e du reste d’une division euclidienne. CQFD
Deux entiers a et b sont congrus modulo n ssi le reste de la division euclidienne de a par n est ´egal au reste de la division euclidienne de b par n. Proposition 2.5. Si b⊥n alors il existe un entier k > 0 pour lequel bk ≡ 1 modulo n. Preuve: Soit rk le reste de la division de bk par n. Les restes r0 , r1 , r2 , . . . , rn ne peuvent ˆetre tous diff´erents car 0 ≤ ri < n. On a donc ri = ri+k pour des exposants 0 ≤ i < i + k ≤ n. Dans ce cas, bi ≡ ri = ri+k ≡ bi+k
mod n.
Ce qui montre que n divise la diff´erence bi − bi+k = bi (bk − 1). Cela implique que n divise bk − 1 puisque n⊥b. CQFD
Definition 2.6: Soit a ∈ Z un entier relativement premier a ` n > 0. Nous dirons que le plus petit entier e > 0 tel que ae ≡ 1 mod n est l’ordre de a modulo n; nous le d´enoterons par ord(a; n).
Proposition 2.7. Soit a ∈ Z un entier relativement premier a ` un entier n > 0. Si e = ord(a; n) alors pour tout entier k > 0 on a ak ≡ 1 mod n ⇔ e | k. 29
Preuve: Posons e = ord(a; n). Si e | k alors k = qe pour un entier q. Par suite, ak ≡ aqe ≡ (ae )q ≡ (1)q ≡ 1 modulo n. Inversement, supposons que l’on ait ak ≡ 1 modulo n. Par division euclidienne on a k = eq + r avec 0 ≤ r < e. Par suite, 1 ≡ ak ≡ aqe+r ≡ aqe ar ≡ ar mod n On ne peut avoir r > 0 car cela contredirait la minimalit´e de e. Donc r = 0 et e | k. CQFD Proposition 2.8. Soit n > 0 un entier relativement premier a ` 10. Alors l’ordre de 10 modulo n est ´egal a ` la longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/n. Le d´eveloppement d´ecimal de 1/n est strictement p´eriodique. Par exemple, l’ordre de 10 modulo 11 est 2 car 102 ≡ 1 modulo 11 mais 10 6≡ 1 modulo 11. La longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/11 est donc 2. En effet, 1/11 = 0, 090909090909090909... Consid´erons maintenant les d´eveloppements d´ecimaux des fractions (r´eduites) a/n. 1/11 = 0, 090909090909090909... 2/11 = 0, 181818181818181818... 3/11 = 0, 272727272727272727... 4/11 = 0, 363636363636363636... 5/11 = 0, 454545454545454545... 6/11 = 0, 545454545454545454... 7/11 = 0, 636363636363636363... 8/11 = 0, 727272727272727272... 9/11 = 0, 818181818181818181... 10/11 = 0, 909090909090909090... Cet exemple et les autres sugg`erent le r´esultat suivant: Proposition 2.9. Si n est relativement premier a ` 10, le d´eveloppement d´ecimal des fractions r´eduites 0 < a/n ≤ 1 est strictement p´eriodique. La longueur de la p´eriode ne d´epend pas de a, seulement de n. Preuve: Soit ri le reste de la division de 10i a par n. Consid´erons la suite des restes r0 , r1 , r2 , . . . , rn . On a r0 = a. Soit e > 0 l’ordre de 10 modulo n. Montrons que re = a. En effet, comme on a 10e ≡ 1 modulo n, on a 10e a ≡ a modulo n. D’autre part, montrons que ri 6= a pour tout 0 < i < k. Raisonnons par l’absurde. Si on avait ri = a, on aurait 10i ≡ a modulo n. L’entier 10i a − a = a(10i − 1) serait alors divisible par n. Et aussi l’entier 10i − 1 puisque n⊥a. Mais cela contredirait la minimalit´e de e. CQFD Les fractions de d´enominateurs 11 se regroupent naturellement en 5 classes de 2 ´el´ements chacun: 1/11 = 0, 090909090909090909... 10/11 = 0, 909090909090909090... 2/11 = 0, 181818181818181818... 9/11 = 0, 818181818181818181... 3/11 = 0, 272727272727272727... 7/11 = 0, 636363636363636363... 30
4/11 = 0, 363636363636363636... 7/11 = 0, 636363636363636363... 5/11 = 0, 454545454545454545... 6/11 = 0, 545454545454545454... Deux fractions sont dans la mˆeme classe si le d´eveloppement de l’une est obtenue en d´ecalant celui de l’autre. Pour plus de clart´e, consid´erons un autre exemple: 1/21 = 0, 047619047619047619... 10/21 = 0, 476190476190476190... 16/21 = 0, 761904761904761904... 13/21 = 0, 619047619047619047... 4/21 = 0, 190476190476190476... 19/21 = 0, 904761904761904761... 2/21 = 0, 095238095238095238... 20/21 = 0, 952380952380952380... 11/21 = 0, 523809523809523809... 5/21 = 0, 238095238095238095... 8/21 = 0, 380952380952380952... 17/21 = 0, 809523809523809523... Dans ce cas, les fractions se regroupent en 2 classes de 6 ´el´ements chaque. Les fractions d’une classe s’obtiennent en multipliant l’une d’entre elle par les puissances de 10 et en conservant la partie fractionnaire. En effet, 1/21 = 0, 047619047619047619... 10/21 = 0, 476190476190476190... 100/21 = 4, 761904761904761904... 1000/21 = 47, 619047619047619047... 10000/21 = 476, 190476190476190476... 100000/21 = 4761, 904761904761904761... Chaque classe contient un nombre d´el´ements ´egal a ` la longueur de la p´eriode. Cette longueur est l’ordre de 10 modulo 21 d’apr`es ?. Consid´erons le cas g´en´eral des fractions de d´enominateur n > 0. Avec Euler, d´esignons par φ(n) le nombre de fractions r´eduites 0 < a/n ≤ 1. C’est aussi le nombre d’entiers 0 < a ≤ n relativement premier a ` n. φ(1) = 1 : 1/1. φ(2) = 1 : 1/2. φ(3) = 2 : 1/3, 2/3. φ(4) = 2 : 1/4,3/4. φ(5) = 4 : 1/5, 2/5, 3/5,4/5. φ(6) = 2 : 1/6, 5/6. φ(7) = 6 : 1/7, 2/7, 3/7, 4/7, 5/7, 6/7. φ(8) = 4 : 1/8, 3/8, 5/8, 7/8. φ(9) = 6 : 1/9, 2/9, 4/9, 5/9, 7/9, 8/9. φ(10) = 4 : 1/10, 3/10, 7/10, 9/10. φ(12) = 4 : 1/12, 5/12, 7/12, 11/12. 31
Si n est relativement premier a ` 10, les fractions r´eduites 0 < a/n ≤ 1 se regroupent en classes de d´ecalage, chacune ayant un nombre d’´el´ements ´egal a ` la longeur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/n. Nous avons montr´e que la longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/n divise φ(n). Autrement dit, l’ordre de 10 modulo n est un diviseur de φ(n). Plus g´en´eralement: Proposition 2.10. Si b est relativement premier a ` n, l’ordre de b modulo n est un diviseur de φ(n).
Preuve: Soit e l’ordre de b modulo n. Nous allons diviser les fractions r´eduites 0 < a/n ≤ 1 en classes, chacune de cardinalit´e e. Pour cela, nous dirons que deux fractions r´eduites a 1 /n et a2 /n ont le mˆeme type, a1 /n ∼ a2 /n, s’il existe des entier i, j ≥ 0 tel que bi a1 ≡ bj a2 modulo n. On voit facilement que la relation ∼ est reflexive, sym´etrique et transitive. On d´efinit la classe C(a) d’une fraction r´eduite a/n comme l’ensemble des fractions r´eduites ayant le mˆeme type que a/n. Il reste a ` v´erifier que C(a) contient exactement e ´el´ements. Soit ri le reste de la division de bi a par n. Remarquer que re = a = r0 puisque be a ≡ a modulo n. Montrons que C(a) = {r1 /n, r2 /n, . . . , re /n}. On a ´evidemment {r1 /n, r2 /n, . . . , re /n} ⊆ C(a). Inversement, si a0 /n ∈ C(a), montrons que a0 = rk pour un entier 1 ≤ k ≤ n. On sait qu’il existe des entier i, j ≥ 0 tel que bi a ≡ bj a0 modulo n. On peut supposer i ≥ j, quitte a ` remplacer i par i + ue avec u assez grand. Dans ce cas, n divise l’entier bi−j a − a0 puisqu’il divise l’entier bi a − bj a0 = bj (bi−j a − a0 ) et que n⊥b. On peut donc supposer que j = 0, quitte a ` remplacer i par i − j. Pour le reste nous allons supposer que bi a ≡ a0 modulo n. Soit k le reste de la division de i par e. On a i = eq + k et par suite, bi ≡ bk modulo n. Donc a0 ≡ bi a ≡ bk a ≡ rk . Par suite, a0 = rk puisque 0 ≤ rk < n et 0 ≤ a0 < n. Montrons que C(a) contient exactement e ´el´ements. Pour cela il suffit de montrer que les fractions r 1 /n, r2 /n, . . . , re /n sont distinctes. Sinon on aurait rj = rj+k pour entiers 1 ≤ j < j + k ≤ e. Dans ce cas, n diviserait la diff´erence bj a − bj+k a = bj a(bk − 1), et il diviserait par suite l’entier bk − 1 puisque n⊥b et n⊥a. Cela contredirait la minimalit´e de e car 0 < k < e. CQFD
Si p est premier, alors φ(p) = p − 1 puisque tout entier 0 < a < p est relativement premier a ` p. En particulier, si p est un nombre premier ne divisant pas 10, alors la longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/p est un diviseur de p − 1. V´erifions ce r´esultat pour p ≤ 100. 1/3 =.3˙ ˙ 1/7 =.14285 7˙ 1/11 =.0˙ 9˙ ˙ 1/13 =.07692 3˙ ˙ 1/17 =.058823529411764 7˙ ˙ 1/19 =.05263157894736842 1˙ ˙ 1/23 =.043478260869565217391 3˙ ˙ 1/29 =.034482758620689655172413793 1˙ ˙ 1/31 =.03225806451612 9˙ ˙ 7˙ 1/37 =.02 ˙ 1/41 =.0243 9˙ ˙ 1/43 =.02325581395348837209 3˙ ˙ 1/47 =.021276595744680851063829787234042553191489361 7˙ ˙ 1/53 =.018867924528 3˙ ˙ 1/59 =.016949152542372881355932203389830508474576271186440677966 1˙ 32
˙ 1/61 =.01639344262295081967213114754098360655737704918032786885245 9˙ ˙ 1/67 =.01492537313432835820895522388059 7˙ ˙ 1/71 =.0140845070422535211267605633802816 9˙ ˙ 1/73 =.0136986 3˙ ˙ 1/79 =.012658227848 1˙ ˙ 1/83 =.0120481927710843373493975903614457831325 3˙ ˙ 1/89 =.0112359550561797752808988764044943820224719 1˙ ˙ 1/97 =.0103092783505154639175257731958762886597938144329896 90721649484536082474226804123711340206185567˙ Dans tous les cas, la longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/p divise p − 1. Cette longueur est exactement p − 1 pour p = 7, 17, 19, 23, 29, 47, 59, 61 et 97. On dit que ces nombres premiers sont longs. Conjecture 2.11. (Gauss) Il existe une infinit´e de nombres premiers longs. Empiriquement, il semble qu’un peu plus du tiers des nombres premiers sont longs. Emil Artin a conjectur´e que cette proportion est donn´ee par le produit Y
1−
p premier
1 1 1 1 1 1 = 1− 1− 1− 1− 1− ··· p(p − 1) 2 3·2 5·4 7·6 11 · 10 = .37395 . . .
On ne sait pas d´emontrer la conjecture de Gauss, et encore moins celle d’Artin. Proposition 2.12. (Euler) Si n est relativement premier a ` 10, alors n divise 10φ(n) − 1. Preuve: Soit k la longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/n. Alors n divise 10 k − 1. De plus, k divise φ(n) d’apr`es la proposition C. Posons φ(n) = kr. Remarquer que a − 1 divise toujours a r − 1: ar − 1 = (a − 1)(1 + a + a2 + · · · + an−1 ). En particulier, 10k − 1 divise 10kr − 1 = 10φ(n) − 1. Cela prouve que n divise 10φ(n) − 1. QED Proposition 2.13. (Fermat) Si un nombre premier p ne divise pas 10, alors il divise 10p−1 − 1. Preuve: En effet, φ(p) = p − 1. CQFD Les propositions 2.11, 2.12 et 2.13 se g´en´eralisent facilement au cas d’une base quelconque. Nous ferons cette g´en´eralisation dans le cadre de la th´eorie des congruences.
Exercices Exercice : Calculer le d´eveloppement d´ecimal de 1/81. Exercice : Calculer les d´eveloppements d´ecimaux de 1/9, 1/99, 1/999, etc. Ceux de 1/11, 1/111, 1/1111, etc. 33
Exercice : Calculer la longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/983 (Gauss a fait ce calcul a ` 17 ans)., aurait choisi de faire ce calcul avec un ordinateur).
On d´efinit classe de congruence d’un entier a modulo un entier n > 0 comme l’ensemble des entiers congrus a ` a modulo n. Nous d´enoterons cette classe par a. On a a = {x ∈ Z | x ≡ a mod n} = {a + nk | k ∈ Z} = a + nZ Par exemples, si n = 2 on a 0 = 2Z = {. . . , −6, −4, −2, 0, 2, 4, 6, . . .} 1 = 1 + 2Z = {. . . , −5, −3, −1, 1, 3, 5, 7, . . .}. Si n = 3 on a 0 = 3Z = {. . . , −12, −9, −6, −3, 0, 3, 6, 9, 12, . . .}
1 = 1 + 3Z = {. . . , −11, −8, −5, −2, 1, 4, 7, 10, 13, . . .} 2 = 2 + 3Z = {. . . , −10, −7, −4, −1, 2, 5, 8, 11, 14, . . .}.
Il y a exactement n classes de congruences modulo n. Deux entiers sont congrus modulo n ssi leur classe sont ´egales: a ≡ b mod n ⇐⇒ a = b. Nous d´enoterons par Zn l’ensemble des classes de congruence modulo n. On peut additionner et multiplier les ´el´ements Zn . Voici les tables d’addition et de multiplication pour 2 ≤ n ≤ 9. Z2 = {0, 1} = {0, 1}, +
0
1
×
0
1
0
0
1
0
0
0
1
1
0
1
0
1
+
0
1
2
×
0
1
2
0
0
1
2
0
0
0
0
1
1
2
0
1
0
1
2
2
2
0
1
2
0
2
1
+
0
1
2
3
×
0
1
2
3
0
0
1
2
3
0
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0
0
1
1
2
3
0
1
0
1
2
3
2
2
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0
1
2
0
2
0
2
3
3
0
1
2
3
0
3
2
1
Z3 = {0, 1, 2} = {0, 1, 2},
Z4 = {0, 1, 2, 3} = {0, 1, 2, 3},
34
Z5 = {0, 1, 2, 3, 4} = {0, 1, 2, 3, 4}, +
0
1
2
3
4
×
0
1
2
3
4
0
0
1
2
3
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0
0
0
0
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1
2
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1
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1
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2
4
4
0
1
2
3
4
0
4
3
2
1
Z6 = {0, 1, 2, 3, 4, 5} = {0, 1, 2, 3, 4, 5}, +
0
1
2
3
4
5
×
0
1
2
3
4
5
0
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1
2
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0
0
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0
1
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2
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1
2
3
4
5
0
5
4
3
2
1
Z7 = {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6} = {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6}, +
0
1
2
3
4
5
6
×
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1
2
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6
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1
2
3
0
3
6
2
5
1
4
4
4
5
6
0
1
2
3
4
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1
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2
6
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1
2
3
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5
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3
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2
6
6
0
1
2
3
4
5
6
0
6
5
4
3
2
1
Z8 = {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7} = {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7}, +
0
1
2
3
4
5
6
7
×
0
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2
3
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0
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1
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3
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5
6
7
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7
6
5
4
3
2
1
35
Z9 = {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8} = {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8}, +
0
1
2
3
4
5
6
7
8
×
0
1
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0
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2
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6
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6
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0
6
3
7
7
8
0
1
2
3
4
5
6
7
0
7
5
3
1
8
6
4
2
8
8
0
1
2
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5
6
7
8
0
8
7
6
5
4
3
2
1
La classe de congruence modulo 9 d’un entier n est particuli`erement facile a ` calculer a ` partir du d´eveloppement d´ecimal de n. En effet, comme on a 10 ≡ 1 mod 9 on a 10k ≡ 1 mod 9 pour tout k ≥ 0. Par suite a0 + a1 · 10 + a2 · 102 + · · · + ar · 10r ≡ a0 + a1 · · · + ar mod 9 Par example, 257593 ≡ 2 + 5 + 7 + 5 + 9 + 3 ≡ 2 + 5 + 7 + 5 + 3 ≡ 22 ≡ 2 + 2 = 4 modulo 9. 5
Comme application des congruences, v´erifions que le nombre de Fermat F5 = 22 + 1 est divisible par 641. Pour cela, il suffit d’´elever 2 au carr´e modulo 641 cinq fois: 22 ≡ 4 mod 641
24 ≡ 16 mod 641
28 ≡ 256 mod 641
216 ≡ 154 mod 641 232 ≡ −1 mod 641
D´ efinition 2.14: Nous dirons qu’un entier a est inversible modulo un entier n > 0 s’il existe un entier b tel que ab ≡ 1 modulo n. Par exemple, 4 est inversible modulo 9 car 4 · 7 ≡ 1 modulo 9. Si a est inversible modulo n, alors la congruence ax ≡ c mod n poss`ede une solution x = a −1 c o` u a−1 est l’inverse de a modulo n. Cette solution est unique modulo n. Par exemple, la congruence 7x ≡ 8 mod 9 a pour solution x ≡ 4 × 8 ≡ 5 mod 9 (car 4 est l’inverse de 7 modulo 9). Si a est inversible modulo n alors l’implication ax ≡ ay mod n ⇒ x ≡ y mod n est vrai. Autrement dit, a est concellable modulo n. En effet, si b est l’inverse de a modulo n alors on a bax ≡ bay mod n, et par suite, x ≡ y mod n car ba ≡ 1 mod n. Proposition 2.15. Un entier a est inversible modulo un entier n > 0 si et seulement si a est relativement premier a ` n. Preuve: Si a est inversible modulo n il existe un entier b ∈ Z tel que ab ≡ 1 mod n. On a alors ab − 1 = nk pour un entier k ∈ Z. La relation 1 = ab − nk implique que a est relativement premier a ` n d’apr`es la 36
proposition 9. Inversement, si a est relativement premier a ` n alors il existe des entiers u, v ∈ Z tels que 1 = ua + vn d’apr`es la proposition 9. On a alors 1 ≡ ua modulo n. CQFD Corollaire 2.16. Soit p un nombre premier. Un entier a est inversible modulo p ssi a 6≡ 0 modulo p Preuve: Si a 6≡ 0 alors p ne divise pas a. Donc p et a sont relativement premiers puisque p est premier. CQFD
Proposition 2.17. Si a est relativement premier a ` n > 0 alors il existe un entier e > 0 tel que ae ≡ 1 mod n. Preuve: Les classes de congruences modulo n des entiers 1, a, a2 , a3 , . . . , an ne peuvent ˆetre toutes distinctes car il n’y a n classes de congruence modulo n. On a donc ak ≡ ar modulo n pour des entiers 0 ≤ k < r ≤ n Mais on peut canceller le facteur ak dans la congruence ak ≡ ak ar−k puisque a est concellable modulo n. On obtient que 1 ≡ ar−k modulo n. Definition 2.18: Soit a un entier relativement premier a ` n. Nous dirons que le plus petit entier e > 0 tel que ae ≡ 1 modulo n est l’ordre de a modulo n; nous le d´enoterons par ord(a; n). Soit n un nombre entier relativement premier a ` 10. L’ordre de 10 modulo n est ´egal a ` longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/n d’apr`es la premi`ere partie. Par exemple, l’ordre de 10 modulo 7 est 6 car ˙ ˙ 1/7 = 0, 14285 7. L’ordre de 10 modulo 13 est ´egal a ` 6 car
˙ ˙ 1/13 = .07692 3.
L’ordre de 10 modulo 17 est 16 car ˙ ˙ 1/17 = 0, 058823529411764 7.
Proposition 2.19. Soit a un entier relativement premier a ` un entier n > 0. Pour tout entier k > 0 on a n | ak − 1
⇔
ord(a; n) | k.
Preuve: Posons e = ord(a; n). Si e | k alors k = qe pour un entier q. Par suite, ak ≡ aqe ≡ (ae )q ≡ (1)d ≡ 1 modulo n. Inversement, supposons que l’on ait ak ≡ 1 modulo n. Raisonnons par l’absurde en supposant que e ne divise pas k. On a alors k = eq + r avec 0 < r < e. Par suite 1 ≡ a k ≡ aqe+r ≡ aqe ar ≡ ar . C’est une contradiction car r < e et que a est d’ordre n. CQFD
Proposition 2.20. Soit a un entier relativement premier a ` mn > 0. Alors ord(a; ppmc(m, n)) = ppmc(ord(a, m), ord(a, n)). En particulier, si m et n sont relativement premiers, alors on a ord(a; mn) = ppmc(ord(a, m), ord(a, n)). 37
Preuve: Pour tout entier k > 0 on a ord(a; ppmc(m, n)) | k ⇔ ppmc(m, n) | k
⇔ m | k et n | k ⇔ ord(a; m) | k et ord(a; n) | k ⇔ ppmc(ord(a, m), ord(a, n)) | k.
Cela prouve que ord(a; ppmc(m, n)) = ppmc(ord(a, m), ord(a, n)). Corollaire 2.21. Soit a un entier relativement premier a ` n = pk11 · · · pkr r . Alors ord(a; n) = ppmc(ord(a; pk11 ), . . . , ord(a; pkr r )). Par exemple, l’ordre de 10 modulo 119 est ppmc(6, 16) = 48. Effectivement, on a ˙ ˙ 1/119 = 0, 00840336134453781512605042016806722689075630252 1. Soit φ(n) le nombre d’entiers 1 ≤ k ≤ n relativement premiers a ` n. On dit que φ est la fonction indicatrice d’Euler. On peut d´efinir φ(n) comme le nombre de fractions r´eduites 0 < k/n ≤ 1 de d´enominateur n. Un entier 1 ≤ k ≤ n est inversible modulo n ssi k est relativement premier a ` n d’apr`es 25. D´enotons par Un l’ensemble des ´el´ements inversibles de Zn . Si u, v ∈ Un alors uv ∈ Un . En effet, le produit de deux entiers relativement premiers a ` n est relativement premier a ` n. Voici la table de multiplication de U n pour 2 ≤ n ≤ 9. U2 = {1} = {1},
U3 = {1, 2} = {1, 2},
1
1
1
×
1
2
1
1
2
2
2
1
×
1
3
1
1
3
3
3
1
×
1
2
3
4
1
1
2
3
4
2
2
4
1
3
3
3
1
4
2
4
4
3
2
1
U4 = {1, 3} = {1, 3},
U5 = {1, 2, 3, 4} = {1, 2, 3, 4},
×
38
U6 = {1, 5} = {1, 5},
×
1
5
1
1
5
5
5
1
U7 = {1, 2, 3, 4, 5, 6} = {1, 2, 3, 4, 5, 6}, ×
1
2
3
4
5
6
1
1
2
3
4
5
6
2
2
4
6
1
3
5
3
3
6
2
5
1
4
4
4
1
5
2
6
3
5
5
3
1
6
4
2
6
6
5
4
3
2
1
×
1
3
5
7
1
1
3
5
7
3
3
1
7
5
5
5
7
1
3
7
7
5
3
1
×
1
2
4
5
7
8
1
1
2
4
5
7
8
2
2
4
8
1
5
7
4
4
8
7
2
1
5
5
5
1
2
7
8
4
7
7
5
1
8
4
2
8
8
7
5
4
2
1
U8 = {1, 3, 5, 7} = {1, 3, 5, 7},
U9 = {1, 2, 4, 5, 7, 8} = {1, 2, 4, 5, 7, 8},
Th´ eor` eme 2.22. (Euler) Si un entier a est relativement premier a ` un entier n > 0, alors on a aφ(n) ≡ 1 mod n. L’ordre de a modulo n est un diviseur de φ(n). Preuve: Soit x1 , x2 , . . . , xφ(n) une liste des ´elements de Un . Montrons la que la suite de classes a · x1 , a · x2 , . . . , a · xφ(n) ne diff`ere de la suite x1 , x2 , . . . , xφ(n) que par l’ordre des termes. En effet, on a a · xi ∈ Un puisque a ∈ Un et xi ∈ Un . Les ´el´ements a · x1 , a · x2 , . . . , a · xφ(n) sont distincts puisque a est cancellable modulo n. Cela 39
entraˆıne que tous les ´el´ement de Un figurent une et une seule fois dans la liste a · x1 , a · x2 , . . . , a · xφ(n) . (on pourrait aussi raisonner en utilisant le fait que la congruence ax ≡ y est r´esoluble pour tout entier y). On a donc φ(n) φ(n) Y Y a · xi = xi i=1
i=1
puisque la valeur d’un produit ne d´epend pas de l’ordre des facteurs. Mais on a φ(n)
Y
i=1
a · xi =
φ(n) φ(n) Y Y φ(n) Y xi a · xi = aφ(n) · i=1
i=1
i=1
car il y a φ(n) ´el´ements dans Un . On voit donc que φ(n)
φ(n)
aφ(n) · On peut canceller le produit
Qφ(n) i=1
Y
xi =
Y
xi .
i=1
i=1
xi de chaque membre car les facteurs xi sont concellables. Cela donne aφ(n) = 1.
Le r´esultat est d´emontr´e. Autrement dit, n | aφ(n) − 1. Donc ord(a; n) | φ(n) par la proposition 30. CQFD Corollaire 2.23. (Fermat) Si un nombre premier p ne divise pas un entier a alors on a ap−1 ≡ 1 mod p. L’ordre de a modulo p est un diviseur de p − 1. Preuve: En effet, φ(p) = p − 1. CQFD Le th´eor`eme 2.22 serait incomplet sans une formule permettant de calculer φ(n). Pour y arriver, nous utiliserons le r´esultat suivant: Th´ eor` eme 2.24. (Th´eor`eme Chinois) Soit m et n deux entiers relativement premiers. Alors pour tout couple d’entiers a et b, le syst`eme de congruences x ≡ a mod m x ≡ b mod n poss`ede une solution x. Cette solution est unique modulo mn. Preuve : Commen¸cons par montrer que le syst`eme le syst`eme de congruence x ≡ 1 mod m x ≡ 0 mod n poss`ede une solution e1 . La condition e1 ≡ 0 mod n signifie alors que l’on a e1 = nu pour un certain entier u. La condition e1 ≡ 1 mod m signifie que l’on a nu ≡ 1 mod m. Autrement dit, l’entier u est un inverse de n modulo m. Cet inverse existe d’apr`es la proposition 22 puisque n est relativement premier a ` m. Cela montre l’existence de e1 . On montre de mˆeme que le syst`eme de congruence x ≡ 0 mod m . x ≡ 1 mod n 40
poss`ede une solution e2 . La solution au probl`eme initial est alors obtenue en posant x = ae1 + be2 . En effet, on a ae1 + be2 ≡ a1 + b0 ≡ a mod m . ae1 + be2 ≡ a0 + b1 ≡ b mod n Il reste a ` d´emontrer l’unicit´e. Pour cela supposons que l’on ait une autre solution: y ≡ a mod m y ≡ b mod n. On a alors x ≡ a ≡ y mod m et x ≡ a ≡ y mod n. La diff´erence x − y est donc divisible par m et de n. Cette diff´erence est par suite divisible par ppmc(m, n). Mais on a ppmc(m, n) = mn puisque m et n sont relativement premiers. Cela montre que x ≡ y modulo mn. QED Voici un tableau illustrant le th´eor`eme chinois dans le cas m = 9 et n = 8. Les valeurs de a se trouvent dans la bordure horizontale sup´erieure et les valeurs de b dans la bordure verticale gauche. Par exemple, Le syst`eme de congruences x ≡ 5 mod 9 x ≡ 3 mod 8
a pour solution x = 59. 0
1
2
3
4
5
6
7
8
0
0
64
56
48
40
32
24
16
8
1
9
1
65
57
49
41
33
25
17
2
18
10
2
66
58
50
42
34
26
3
27
19
11
3
67
59
51
43
35
4
36
28
20
12
4
68
60
52
44
5
45
37
29
21
13
5
69
61
53
6
54
46
38
30
22
14
6
70
62
7
63
55
47
39
31
23
15
7
71
Proposition 2.25. Si m et n sont relativement premiers alors φ(mn) = φ(m)φ(n). Preuve: Il suffit de montrer que, dans le th´eor`eme chinois, l’entier x est relativement premier a ` mn si et seulement si l’entier a est relativement premier a ` m et l’entier b est relativement premier a ` n. Supposons que x soit relativement premier a ` mn. Alors x est relativement premier a ` m, donc a est relativement premier a ` m puisque x ≡ a mod m. De mˆeme, b est relativement premier a ` n. R´eciproquement, supposons que a soit relativement premier a ` m et b relativement premier a ` n. Alors x est relativement premier a ` m puisque x ≡ a modulo m. De mˆeme, x est relativement premier a ` n puisque x ≡ b modulo n. Donc, mn est relativement premier a ` x puisque m et n sont relativement premiers a ` x. CQFD
Voici un tableau illustrant le fait que φ(8 × 9) = φ(8)φ(9). Dans la bordure horizontale, nous avons marqu´e par une ´etoile la position des entiers relativement premiers a ` 9, et dans la bordure verticale, la position des entiers relativement premiers a ` 8. Dans le rectangle 8 × 9 nous avons marqu´e la position des entiers relativement premiers a ` 8 · 9. 41
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Proposition 2.26. Si n = pa1 1 · · · pakk avec ai > 0 et les facteurs premiers pi sont distincts, alors on a 1 1 ··· 1− . φ(n) = (pa1 1 − pa1 1 −1 ) · · · (pakk − pakk −1 ) = n 1 − p1 pk Preuve: On a φ(n) = φ(pa1 1 ) · · · φ(pakk ) d’apr`es 39 puisque les entiers pa1 1 , . . . pakk sont relativement premiers deux a ` deux. Si p est premier et a > 0 montrons que φ(pa ) = pa − pa−1 . Le nombre φ(pa ) s’obtient en retranchant de pa le nombre d’entiers 0 < k ≤ pa ayant un diviseur commun avec pa . Un entier k poss`ede un diviseur commun avec pa ssi k = pu pour un entier u. La condition 0 < pu ≤ pa ´equivaut a ` la condition 0 < u ≤ pa−1 . Ceci montre que le nombre d’entiers 0 < k ≤ pa ayant un diviseur commun avec pa est ´egal a ` pa−1 . CQFD
Exercices pour la section 2
Il est int´eressant de r´eduire le triangle de Pascal modulo un nombre premier p. Si p = 2, on obtient 0→ 1→ 2→ 3→ 4→ 5→ 6→ 7→ 8→1 On voit que
2n k
1 1 1 1 1 1 1 1 0
1 0
1 0
1
1 1
0 0
1 1
0
1 0
0 0
1 0
1 0 1
1 0
1 1 0 1
0
.
1 1 1 0
1 0
1
···
≡ 0 modulo 2 pour tout 0 < k < 2n .
Exercice : (Leibniz) Soit p un nombre premier. Montrer que pour tout 0 < k < p on a p ≡ 0 modulo p. k 42
Suggestion: Utiliser le fait que
p k
=
p! k!(p−k)! .
En d´eduire que pour tout paire d’entiers a et b on a
(a + b)p ≡ ab + bp
modulo p.
En d´eduire que si a1 , a2 , . . . , ak sont des entiers, alors on a (a1 + a2 + · · · + ak )p ≡ ap1 + ap2 + · · · + apk
modulo p.
En d´eduire que pour tout entier k on a kp ≡ k
modulo p.
Suggestion: Substituer ai = 1 dans la relation pr´ec´edente. En d´eduire le th´eor`eme de Fermat: si p ne divise pas k, alors k p−1 ≡ 1 modulo p. Exercice : Soit pn une puissance de nombre premier. Montrer que pour tout 0 < k < pn on a n p ≡ 0 modulo p. k Suggestion: Montrer par induction sur n que n
n
n
(x + y)p ≡ xp + y p mod p
Exercice : Soit a = a0 + a1 p + a2 p2 + · · · le d´eveloppement de l’entier a a ` la base p, et soit b = b0 + b1 p + b2 p2 + · · · le d´eveloppement de l’entier b. Montrer que a2 a1 a a0 · · · modulo p. ≡ b2 b1 b0 b Suggestion: Montrer que 2
2
(x + y)a ≡ (x + y)a0 (xp + y p )a1 (xp + y p )a2 · · · Remarque: Si b > a on pose ab = 0.
mod p
Exercice : Trouver tous les entiers n pour lequels ord(10, n) = 1, 2, 3, 4 et 5 respectivement. Dresser une table du d´eveloppement d´ecimal de 1/n. Exercice : (Fermat) Soit p un nombre premier. Si q est un diviseur premier de Mp = 2p − 1 montrer que q ≡ 1 mod p. Suggestion: Soit e l’ordre de 2 modulo q. Montrer en utilisant 30 que e | p. En d´eduire que e = p. Utiliser ensuite le th´eor`eme de Fermat 33 pour conclure que p divise q − 1. Ce r´esultat est a ` la base d’une m´ethode de Fermat pour trouver des diviseurs premiers d’un nombre de Mersenne Mp . Par exemple, cherchons un diviseur premier q de M11 . On a forc´ement q ≡ 1 mod 11. Il faut donc que q = 2n · 11 + 1 (puisque q est impair). Si n = 1, on obtient q = 23. On trouve effectivement que 211 − 1 = 23 · 89. Mersenne avait sagement exclu M11 de sa liste. Cherchons un diviseur premier de M13 = 8191. Il faut que q = 2n · 13 + 1 = n · 26 + 1. Comme 912 > 8191 on peut supposer que q < 91. Si 43
n = 1, on a q = 27 qui n’est pas premier. Si n = 2, 3 on a q = 53, 79. Mais on v´erifie que 53 et 79 ne divisent pas 8191. Nous avons montr´e que M13 est premier. Exercice : (Mersenne) Montrer que M17 et M19 sont premiers. Montrer que M23 et M29 sont compos´es. Aux exercices de la section 2 nous avons introduit des nombres de Mersenne g´en´eralis´es: Mn (a) =
an − 1 = 1 + a + a2 + · · · + an−1 a−1
o` u n > 0 et a > 1. Exercice : Soit p un nombre premier. Si q est un diviseur premier de Mp (a) ne divisant pas a − 1 alors on a q ≡ 1 mod p. Suggestion: Soit e l’ordre de a modulo q. Montrer que e | p. En d´eduire que e = p. Utiliser ensuite le th´eor`eme de Fermat pour conclure que p divise q − 1. n
Exercice : (Euler) Soit q est un diviseur premier de Fn = 22 + 1. Montrer que q ≡ 1 mod 2n+1 . Trouver un diviseur de F5 . Suggestion: Soit e l’ordre de 2 modulo q. Montrer que e | 2n+1 mais que e ne divise pas 2n . En d´eduire que e = 2n+1 . Utiliser ensuite le th´eor`eme de Fermat pour conclure que 2n+1 divise q − 1. n
Exercice : (Lucas) Soit q est un diviseur premier de Fn = 22 +1. Montrer que q ≡ 1 mod 2n+2 . Suggestion: n−2 n−1 Posons b = 22 (22 − 1). Montrer que b2 ≡ 2 modulo q. Soit e l’ordre de b modulo q. Montrer que n+2 e|2 mais que e ne divise pas 2n+1 . En d´eduire que e = 2n+2 . Utiliser ensuite le th´eor`eme de Fermat pour conclure que 2n+2 divise q − 1.
3. Une application ` a la cryptographie La th´eorie des nombres ressemble a ` un pur jeu intellectuel. Elle parait inutile sinon comme divertissement de l’esprit. Le math´ematicien Hardy, l’une des grandes figures de la th´eorie des nombres de la premi`ere moiti´e du 20e -si`ecle, ´etait fier de cette inutilit´e. Malheureusement, la th´eorie des nombres a trouv´e de nombreuses applications depuis 30 ans, particuli`erement dans les m´ethodes de cryptographie. Dans cette partie, nous d´ecrivons la m´ethode de cryptographie RSA du nom de ses inventeurs: Rivest, Shamir et Adleman. Nous aurons besoin du r´esultat suivant. Lemme 3.1. Si a est relativement premier a ` n et si k ≡ r modulo φ(n) alors ak ≡ ar mod n De plus, si ed ≡ 1 mod φ(n) alors
(ae )d ≡ a mod n.
Preuve: Supposons que k ≡ r mod φ(n). On a alors k = r + qφ(n). Donc ak = ar+qφ(n) = ar · (aφ(n) )q ≡ ar mod n car on aφ(n) ≡ 1 d’apr`es le th´eor`eme d’Euler. Par suite, si ed ≡ 1 mod φ(n) alors (ae )d ≡ aed ≡ a1 ≡ a mod n. CQFD 44
Nous pouvons maintenant d´ecrire la m´ethode de cryptographie RSA. Sa suret´e repose sur le fait qu’il est tr`es difficile de factoriser un nombre entier dont les facteurs premiers sont tous grands. Supposons qu’un personne que nous appellerons Fatima veuille s’assurer du secret des messages que d’autres personnes pourraient lui faire parvenir. Pour utiliser la m´ethode RSA, elle choisit deux nombres premiers p et q comportant une centaine de d´ecimales chacun. Il existe pour cela des algorithmes tr`es efficaces et nous n’en discuterons pas ici. Fatima calcule ensuite le produit n = pq et φ(n) = (p − 1)(q − 1). Elle choisit ensuite un nombre e relativement premier a ` φ(n) qu’on appelle la cl´e d’encodage. Elle calcule ensuite l’inverse d de e modulo φ(n). On dit que d est la cl´e de d´ecodage. Fatima fait parvenir n et e a ` toutes personnes souhaitant lui faire parvenir un message secret. Elle peut mˆeme afficher ces nombres publiquement. C’est pourquoi on dit que la crypthographie RSA est a ` cl´e publique. Fatima doit toutefois conserver secret le nombre d qui est la cl´e de d´ecodage. Toute personne souhaitant faire parvenir un message secret a ` Fatima utilisera n et e pour encoder le message. Par exemple, supposons qu’une personne que nous appellerons David veuille envoyer un message secret a ` Fatima. Pour ce faire, il d´ecoupe son message en une suite de segments represent´es par des nombres a1 , a2 , . . . inf´erieurs a ` n. Il doit s’assurer que chaque nombre ai est relativement premier a ` n. Cette condition est presque automatiquement satisfaite car la proportion des nombres relativement premiers a `n est donn´ee par 1 φ(n) 1 1− . = 1− n p q Cette quantit´e est tr`es proche de 1 car p, q > 10100 . David encode ensuite chaque nombre a par le nombre b ≡ ae modulo n. Il transmet ensuite par courrier la suite b1 , b2 , . . . des nombres encod´es. Pour d´echiffrer le message recu Fatima doit d´ecoder chacun des nombres bi . Pour d´ecoder un nombre b, elle calcule bd modulo n. En effet, si b = ae alors bd = (ae )d = aed ≡ a mod n d’apr`es le lemme 36. La message original est donc donn´e par la suite bd1 , bd2 , . . . modulo n. La suret´e de la m´ethode repose sur le fait que seule Fatima connait la d´ecomposition de n en facteurs premiers. Sans cette d´ecomposition on ne peut calculer ni φ(n) ni d.
La faisabilit´e de la m´etode RSA d´epend de la capacit´e de faire certains calculs sur ordinateur. En premier lieu, il faut disposer d’un algorithme permettant de choisir a ` volont´e de grands nombres premiers Comme les nombres premiers sont tr`es nombreux, il suffit d’un algorithme capable de reconnaitre rapidement si un grand nombre entier est premier ou non. On prend un grand nombre au hasard et on le rejette si l’algorithme ne le reconnait pas premier. Pour des nombres comportant une centaine de d´ecimales on est pratiquement certain de tomber sur un nombre premier apr`es un millier d’essais. Le tout peut se faire en une fraction de seconde avec un ordinateur. Pour coder (ou d´ecoder) un messages il faut pouvoir aussi calculer rapidement les puissances ar modulo n. Pour y arriver, on ram`ene l’op´eration d’exponentiation a ` des carr´es et a ` des multiplications. Voici comment. D´enotons par Q(x) le carr´e modulo n d’un nombre x. Si on applique k-fois l’op´eration Q on obtient une op´eration que nous d´enoterons Qk . On a Qk (x) = x2
k
mod n.
Tout entier peut s’exprimer comme une somme de puissances de 2 en le d´eveloppant a ` la base 2. Si r = alors on a Y ki Y ar = a2 ≡ Qki (a) mod n. i
P
i
2 ki
i
Cette m´ethode permet de ramener le calcul de ar modulo n a ` un petit nombre de multiplications modulo n. Nous allons illustrer la m´ethode RSA sur un exemple. Supposons que Fatima choisisse deux nombres premiers p et q dont le produit est n = pq =364615485029501136970713101143871109540079913994317049087258562868354903436255206 595580958951461147024129894416770392933752888490885711614193520646632973108 7514964112054543019336536216107629523597606330154669196064144182472739556974 5024624024389031158457256309464289437685407140982647270680267304240335788278869 16761701429264950573899186177. 45
Elle se garde de r´ev´eler la factorisation n = pq a ` quiconque. Supposons que Fatima choisisse ensuite la cl´e d’encodage suivante: e =6123604138321678046184813001752049505652789728277332451541769438270400457895 687807018014761011102762104690737156404901427472280629658843231303401722865971 79476547016660734615078156785793174374530940927 Elle v´erifie que e est relativement premier a ` φ(n) = (p − 1)(q − 1). Elle calcule ensuite l’inverse d de e modulo φ(n). Elle se garde de r´ev´eler d a ` quiconque. Fatima affiche les nombres n et e sur son site web. Supposons maintenant que David fasse parvenir a ` Fatima un court message repr´esent´e par un entier a < n relativement premier a ` n. Pour cela, il calcule b = ae modulo n et fait parvenir le r´esultat a ` Fatima par courrier ´electronique normal: b =1762574450192434510987812463067325686667802511010506542514351570390186321634415941048 1044239319582998436351975479479033307060956350192980883359851606273488853970490387337 10501248781742476679101486280942444125416108654765878947229366542117241214182262973848 457443434154882046217658220335999204849335380921733168767014435338280145415742442923. Pouvez-vous d´echiffrer le message de David a ` Fatima? Exercice: Fatima est math´ematicienne. Elle n’a pas choisit les nombres premiers p et q au hasard, car elle adore certains nombres premiers. C’est une grave erreur. Cette information peut suffire a ` d´echiffrer les messages destin´es a ` Fatima. En effet, les nombres premiers ayant fait l’objet d’une ´etude ont pour la plupart fait l’objet d’une publication. Il y en a quelques milliers au plus. On pourrait en faire l’inventaire. On pourrait chercher ensuite des diviseurs de n dans cet inventaire. Cela r´eduirait consid´erablement les calculs pour factoriser n. Par exemple, il y a moins de 40 nombres premiers de Mersenne connus. Chercher par ordinateur un diviseur de n parmi les nombres de Mersenne. Factoriser n. Calculer φ(n) et ensuite d. D´echiffrer le message secret de David a ` Fatima.
4. Racines primitives Soit p est un nombre premier ne divisant pas un entier a. D’apr`es le th´eor`eme de Fermat, l’ordre de a modulo p est un diviseur de p − 1. Si cet ordre est exactement p − 1 on dit que a est une racine primitive modulo p. Le nombre 10 est une racine primitive modulo p ssi la longueur de la p´eriode du d´eveloppement d´ecimal de 1/p est ´egale a ` p − 1. Dans ce cas, on dit que p est un nombre premier long. Examinons les valeurs de la fonction ord(a; p) pour 0 < a < p et p ≤ 17. a 1 ord(a; 2) 1 a 1 2 ord(a; 3) 1 2 a 1 2 3 4 ord(a; 5) 1 4 4 2 a 1 2 3 4 5 6 ord(a; 7) 1 3 6 3 6 2 a 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 ord(a; 11) 1 10 5 5 5 10 10 10 5 2 46
a 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 ord(a; 13) 1 12 3 6 4 12 12 4 3 6 12 2 a 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 ord(a; 17) 1 8 16 4 16 16 16 8 8 16 16 16 4 16 8 2 On voit par exemple que 3 et 5 sont des racines primitives modulo 7, et que 2,6,7 et 11 sont des racines primitives modulo 13. Sur la base de ces donn´es on peut conjecturer qu’il y a toujours au moins une racine primitive modulo p. Les puissances d’une racine primitive a0 , a1 , a2 , . . . ap−1 sont distinctes modulo p. En effet, si on avait ak ≡ ak+r mod p avec 0 < r < p on aurait 1 ≡ ar mod p ce qui est absurde puisque a est d’ordre p − 1. On en d´eduit que toute classe de congruence non nulle x ∈ Z p est de la forme ar pour un unique 0 < r < p − 1. L’exponentiation r 7→ ar fournit une bijection entre l’ensemble Zp−1 des classes de congruences modulo p− et l’ensemble Up des classes de congruence non nulle modulo p. La bijection inverse est une forme de logarithme loga (; p) : Up → Zp−1 . Par exemple, si p = 13 on peut prendre a = 2 comme racine primitive. On obtient r(mod 12) : 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 2r (mod 13) : 1 2 4 8 3 6 12 11 9 5 10 7 x(mod 13) : 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 log2 (x; 13) : 0 1 4 2 9 5 11 3 8 10 7 6 La relation ar as = ar+s entraˆıne que pour tout x, y ∈ Up on a loga (xy; p) ≡ loga (x; p) + loga (y; p) mod p − 1. Le logarithme permet de ramener la multiplication modulo p a ` une addition modulo p − 1. Mous allons d´emontrer l’existence d’une racine primitive modulo p pour tout nombre premier p. Nous aurons besoin de quelques r´esultats pr´eliminaires. Soit Un l’ensemble des ´elements inversibles de Zn . Lemme 4.1. Si un entier d > 0 divise l’ordre d’un ´element x ∈ Un alors ord(xd ; n) =
1 · ord(x; n). d
Si l’ordre de x ∈ Un est relativement premier a ` l’ordre de y ∈ Un alors ord(xy; n) = ord(x; n) · ord(y; n) Preuve: Posons r = ord(x; n). Montrons que l’ordre de xd est ´egal a ` r/d. On a (xd )r/d = xe = 1. Soit k > 0 d k dk d k et supposons que (x ) = 1. On a alors r | dk puisque x = (x ) = 1. Par suite (r/d) | k. Cela montre que l’ordre de xd est ´egal a ` r/d. Soit x, y ∈ Un et supposons que les entiers r = ord(x; n) et s = ord(y; n) soient relativement premiers. Il existe des entiers u, v ∈ Z tels que 1 = ur + vs d’apr`es ?. Remarquer que (xy)vs = xvs y vs = xvs = x1−ur = x. De mˆeme, (xy)ur = y. Montrons que l’ordre de xy est ´egal a ` rs. On a (xy)rs = xrs y rs = 1. Soit k > 0 et supposons que (xy)k = 1. On a alors xk = (xy)vsk = 1 et y k = (xy)urk = 1. Donc e | k et f | k. Par suite, ef | k puisque e et f sont relativement premier. CQFD Nous dirons qu’un ´el´ement g ∈ Un est d’ordre maximum si son ordre est ≥ a ` l’ordre de tous les ´el´ements de Un . Il est ´evident que Un contient un ´el´ement d’ordre maximum. 47
Lemme 4.2. Soit g ∈ Un un ´el´ement d’ordre maximum. Alors l’ordre de tout ´element de Un divise l’ordre de g. Preuve: Posons r = ord(g; n). Si x ∈ Un montrons que s = ord(x; n) divise r. Sinon, il existe une puissance a de nombre premier pa divisant s mais ne divisant pas r. L’´element z = xf /p est d’ordre pa par le lemme pr´ec´edent. Quitte a ` remplacer x par z on peut donc supposer que x est d’ordre p a . Soit pb est la plus grande b puissance de p divisant r. On a b < a puisque pa ne divise pas r. L’´el´ement y = g p est d’ordre r/pb par le a b lemme pr´ec´edent. Les entiers p et r/p sont relativement premiers car les entiers p et r/pb sont relativement premiers. Le produit xy est donc d’ordre pa · r/pb par le lemme pr´ec´edent. C’est une contradiction car pa · r/pb = pa−b · r > r et g est d’ordre maximum. CQFD Soit p un nombre premier. Nous voulons d´emontrer l’existence d’une racine primitive modulo p. Voici l’id´ee de la d´emonstration. Il s’agit de d´emontrer que Up contient un ´el´ement d’ordre p − 1. On peut toujours trouver un ´el´ement d’ordre maximum g ∈ Up . Posons r = ord(g; p). Nous voulons montrer que r = p − 1. On sait que r | p − 1 par le th´eor`eme de Fermat. Nous allons raisonner par l’absurde en supposant que r < p − 1. D’apr`es le lemme 44 on a ar = 1 pour tout a ∈ Up . Autrement dit, modulo p, le polynˆ ome X r − 1 a pour racine X = 1, 2, · · · , p − 1. On peut donc le diviser par (X − 1), (X − 2), . . . , (X − p + 1). Mais c’est impossible car X r − 1 est de degr´e r < p − 1. Le tableau suivant donne la valeur r d’une plus petite racine primitive modulo p pour p ≤ 89. p 2 3 5 7 11 13 17 19 23 29 31 37 41 43 47 53 59 61 67 71 73 79 83 89 r 1 2 2 3 2 2 3 2 5 2 3 2 6 3 5 2 2 2 7 2 5 3 2 3
5. Fonctions arithm´ etiques Nous dirons qu’une fonction f (n) (` a valeurs r´eelles) d´efinie pour tout n entier ≥ 1 est une fonction arithm´etique. La fonction indicatrice d’Euler φ est un exemple de fonction arithm´etique. Soit d(n) le nombre de diviseurs d’un entier n ≥ 1. La fonction d est une fonction arithm´etique. Soit σ(n) la somme des diviseurs d’un entier n ≥ 1. La fonction σ est une fonction arithm´etique. On d´efinit la somme f + g de deux fonctions arithm´etiques f et g en posant (f + g)(n) = f (n) + g(n). On d´efinit le produit de convolution f ? g en posant X f (d)g(n/d). (f ? g)(n) = d|n
Nous d´enoterons par δ la fonction arithm´etique d´efinie par n 1 si n = 1 δ(n) = 0 sinon. Proposition 5.1. On a (i) f ? g = g ? f (commutativit´e) (ii) f ? (g ? h) = (f ? g) ? h (associativit´e) (iii) f ? δ = δ ? f = f (unit´e) (iv) f ? (g + h) = f ? g + f ? h (distributivit´e) Preuve: D´emontrons (i). On a (f ? g)(n) =
X
f (a)g(b) =
ab=n
X
ba=n
48
g(b)f (a) = (g ? f )(n).
D´emontrons (ii). On a (f ? (g ? h))(n) =
X
f (a)(g ? h)(d) =
X
(f ? g)(d)h(c) =
ad=n
((f ? g) ? h)(n) =
dc=n
X X
f (a)g(b)h(c) = f (a)g(b)h(c) =
f (a)g(b)h(c)
ad=n bc=d
X
abc=n
X X
X
f (a)g(b)h(c)
dc=n ab=d
abc=n
D´emontrons (iii). On a (δ ? f )(n) =
X
δ(d)f (n/d) = f (n)
d|n
D´emontrons (iv). On a (f ? (g + h))(n) =
X
f (a)(g(b) + h(b)) =
X
f (a)g(b) +
ab=n
=
X
f (a)g(b) + f (a)h(b)
ab=n
ab=n
X
f (a)h(b) = f ? g + f ? h
ab=n
On d´efinit la fonction arithm´etique Z en posant Z(n) = 1 pour tout n ≥ 1. Pour toute fonction arithm´etique f , on a X f (d). (Z ? f )(n) = d|n
En particulier, (Z ? Z)(n) est le nombre de diviseurs de n. Donc Z ? Z est ´egale a ` la fonction d qui donne le nombre de diviseurs. On d´efinit la fonction arithm´etique I en posant I(n) = n pour tout n ≥ 1. On a X (Z ? I)(n) = d. d|n
Donc Z ? I est ´egale a ` la fonction σ qui donne la somme des diviseurs. On dit qu’une fonction arithm´etique f est multiplicative si f (1) = 1 et si on a f (mn) = f (m)f (n) pour m et n relativement premiers. Par exemple, la fonction indicatrice d’Euler φ est multiplicative d’apr`es ?. Une fonction multiplicative f est d´etermin´ee par ses valeurs f (pa ) pour p premier et a > 0. En effet, si n = pa1 1 · · · pakk alors f (n) = f (pa1 1 ) · · · f (pakk ). Lemme 5.2. Soient m, n > 0 des entiers relativement premiers. Tout diviseur d de mn est un produit d = ab pour un couple unique de diviseurs a | m et b | n. Proposition 5.3. Le produit de convolution de deux fonctions multiplicatives est une fonction multiplicative. Preuve: Soient f et g deux fonctions multiplicatives. On a (f ? g)(1) = f (1)g(1) = 1. Si m et n sont des entiers relativement premiers alors tout diviseur d de mn est un produit d = ab pour un couple unique de diviseurs a | m et b | n. Les entiers a et b sont relativement premier, de mˆeme que les entiers m/a et n/b. Par suite XX X mn mn )= f (ab)g( ) (f ? g)(mn) = f (d)g( d ab a|m b|n d|mn X X XX f (a)f (b)g(m/a)g(n/b) = f (a)g(m/a) f (b)g(n/b) = a|m b|n
a|m
= (f ? g)(m)(f ? g)(n). 49
b|n
Corollaire 5.4. Les fonctions d et σ sont multiplicatives. Si n = pa1 1 · · · pakk alors on a d(n) = (a1 + 1) · · · (ak + 1) et σ(n) =
pak +1 − 1 pa1 1 +1 − 1 · ···· k . p1 − 1 pk − 1
Preuve: Les fonctions Z et N sont multiplicatives. Donc aussi les fonctions d = Z ? Z et σ = Z ? I. Si p est premier et a > 0 les diviseurs de pa sont 1, p, p2 , . . . , pa . Par suite d(pa ) = a + 1 et σ(pa ) = 1 + p + · · · + pa =
pa+1 − 1 p−1
CQFD On d´efinit la fonction de Mœbius µ(n) en posant k µ(n) = (−1) si n est produit de k nombres premiers distincts; 0 sinon. Par exemple, µ(1) = 1, µ(2) = −1, µ(3) = −1, µ(4) = 0, µ(5) = −1 et µ(6) = 1. La fonction de Mobius est multiplicative. Si p est premier et a > 0 on a n −1 si a = 1 ; µ(pa ) = 0 sinon. Proposition 5.5. On a Z ? µ = δ. Preuve: La fonction Z ? µ est multiplicative puisque les fonctions Z et µ sont multiplicatives. Pour v´erifier que l’on a Z ? µ = δ il suffit donc de v´erifier que l’on a (Z ? µ)(pa ) = δ(pa ) pour p premier et a > 0. Mais a
(Z ? µ)(p ) =
a X i=0
µ(pi ) = µ(1) + µ(p) = 1 − 1 = 0,
ce qui donne le r´esultat cherch´e car δ(pa ) = 0. CQFD Corollaire 5.6. (Mœbius) Si f et g sont des fonctions arithm´etiques, alors les deux identit´es suivantes sont ´equivalentes X X g(d)µ(n/d) f (d) et (ii) f (n) = (i) g(n) = d|n
d|n
Preuve: L’identit´e (i) signifie que l’on a g = Z ? f et l’identit´e (ii) que l’on a f = µ ? g. Mais si g = Z ? f alors µ ? g = µ ? (Z ? f ) = (µ ? Z) ? f = δ ? f = f. Et si f = µ ? g alors Z ? f = Z ? (µ ? g) = (Z ? µ) ? g = δ ? g = g. CQFD Corollaire 5.7. Pour tout n > 0 on a X (i) n = φ(d)
et
(ii) φ(n) =
d|n
X d|n
50
µ(n/d) · d
Preuve: Pour d´emontrer (i) consid´erons d’abord un exemple avec n = 12. Les fractions de d´enominateurs 12 sont 1/12, 2/12, 3/12, 4/12, 5/12, 6/12, 7/12, 8/12, 9/12, 10/10, 11/12, 12/12 Parmi ces 12 fractions on trouve φ(12) = 4 fractions r´eduites: 1/12, 5/12, 7/12, 11/12; φ(6) = 2 fractions dont le d´enominateur r´eduit est 6: 1/6, 5/6; φ(4) = 2 fractions dont le d´enominateur r´eduit est 4: 1/4, 3/4; φ(3) = 2 fractions dont le d´enominateur r´eduit est 3: 1/3, 2/3; φ(2) = 1 fraction dont le d´enominateur r´eduit est 2: 1/2; φ(1) = 1 fraction dont le d´enominateur r´eduit est 1: 1/1. Comme il y a 12 fractions en tout on obtient que φ(1) + φ(2) + φ(3) + φ(4) + φ(6) = 12. Le mˆeme raisonnement montre plus g´en´eralement que l’identit´e (i) est vrai. L’identit´e (ii) est alors une cons´equence de (i). CQFD Ce r´esultat permet de donner une nouvelle d´emonstration de la proposition ?. la fonction φ est multiplicative car φ = I ? µ et les fonctions I et µ sont multiplicatives. Il suffit donc de calculer les valeurs φ(p a ) pour p est premier et a > 0. Mais on a φ(pa ) =
a X i=0
pa−i µ(pi ) = pa − pa−1 .
Exercices pour la section 5 Exercice: On d´efinit une fonction arithm´etique Λ en posant n a Λ(n) = ln(p) si n = p avec p premier et a > 0 0 sinon Montrer que l’on a ln(n) =
X
Λ(d).
d|n
6. Produits Eul´ eriens La s´erie
1 1 1 + s + s +··· 2s 3 4 a ´et´e consid´er´ee pour la premi`ere fois par Euler. Elle d´efinit la fonction zeta de Riemann. V´erifions que la s´erie converge pour s > 1. Si n ≥ 2 on a Z n 1 dx ≤ s ns n−1 x ζ(s) = 1 +
car la fonction x−s est d´ecroissante dans l’intervalle [n − 1, n]. Par suite ζ(s) − 1 ≤
∞ Z X
n=2
n n−1
dx = xs
Z
∞ 2
51
x1−s ∞ 21−s dx = | = . xs 1−s 2 s−1
Exercices 6.1. (Euler) Soit s un nombre r´eel > 1. Montrer que l’on a ζ(s) = p
1 1 1 − ps premier Y
Suggestion: Utiliser la s´erie g´eom´etrique 1 1 1 1 1 = 1 + ps + p2s + p3s + · · · . 1 − ps Exercices 6.2. Soit s un nombre r´eel > 1. Montrer que l’on a 1 1 1 1 1 + s + s + s + s +··· 2s 4 6 10 12 1 1 1 1 1 (1 − 2−s )ζ(s) = 1 + s + s + s + s + s + · · · 3 5 7 9 11 1 1 1 1 1 (1 − 21−s )ζ(s) = 1 − s + s − s + s − s + · · · 2 3 4 5 6 2−s ζ(s) = 1 +
Une remarque s’impose. On dit qu’une s´erie de la forme S = a0 − a1 + a2 − a3 + · · · avec an ≥ 0 est une s´erie altern´ee. Supposons que an ≥ an+1 pour tout n ≥ 0 et que an → 0 lorsque n croit. Dans ce cas la s´erie altern´e converge. En effet, consid´erons les sommes partielles S n = a0 − a1 + a2 − . . . + (−)n an . On peut voir que S1 ≤ S 3 ≤ S 5 ≤ · · · ≤ S 4 ≤ S 2 ≤ S 0 Comme l’´ecart S2n − S2n+1 = a2n+1 tend vers 0, on voit que les sommes partielles Sn s’approchent d’une limite S: S1 ≤ S 3 ≤ S 5 ≤ · · · ≤ S ≤ · · · ≤ S 4 ≤ S 2 ≤ S 0 . Par exemple, la s´erie harmonique altern´ee 1 − 1/2 + 1/3 − 1/4 + · · · converge. On peut mˆeme en calculer la somme. En effet, en int´egrant la s´erie g´eom´etrique 1 = 1 + x + x 2 + x3 + · · · 1−x on obtient que ln
x2 x3 x4 1 =x+ + + +···. 1−x 2 3 4
Si on substitue ensuite x = −1 on obtient que
ln 2 = 1 − 1/2 + 1/3 − 1/4 + · · · . Remarquons maintenant que la s´erie (1 − 21−s )ζ(s) = 1 −
1 1 1 1 1 + s − s + s − s +··· 2s 3 4 5 6
est altern´ee. Elle converge pour tout s > 0. Cela permet de d´efinir la fonction ζ(s) pour 0 < s < 1 en posant ζ(s) =
1 1 1 1 1 1 1− s + s − s + s − s +··· . 1−s 1−2 2 3 4 5 6 52
Exercices 10. Montrer que lim (s − 1)ζ(s) = 1
s→1
Suggestion: Utiliser le d´eveloppement 2x = ex ln 2 = 1 + x ln 2 + · · ·. On dit qu’une s´erie de la forme ∞ X an a1 a2 a3 a4 u5 = s + s + s + s + s +··· s n 1 2 3 4 5 n=1
est une s´erie de Dirichlet. Le produit de deux s´eries de Dirichlet est encore un s´erie de Dirichlet. En effet, ∞ X ∞ ∞ X ∞ ∞ ∞ ∞ ∞ X X X a n bm a n bm X cl an X bn X X an bm = = = = ns n=1 ns ns ms (nm)s ls ls n=1 m=1 n=1 m=1 n=1 l=1 mn=l
avec cl =
P
mn=l
a n bm .
Exercices 11. Si f (s) =
∞ X an ns n=1
montrer que l’on a ζ(s)f (s) = avec bn =
P
d|n
l=1
∞ X bn s n n=1
ad . En d´eduire que l’on ζ(s)2 =
∞ X d(n) ns n=1
et ζ(s)ζ(s − 1) =
∞ X σ(n) ns n=1
o` u d(n) est le nombre de diviseur de n et σ(n) la somme des diviseurs de n. Suggestion: Pour la seconde ´egalit´e, utiliser le fait que 3 4 5 2 ζ(s − 1) = 1 + s + s + s + s + · · · . 2 3 4 5 Exercices 12. Soit a(n) une fonction multiplicative. Montrer (en n´egligeant les questions de convergence) que l’on a ∞ Y X a(p) a(p2 ) a(p3 ) a(n) = 1 + + + + · · · . ns ps p2s p3s n=1 p premier
Pour tout nombre entier n > 0 posons k µ(n) = (−1) si n est produit de k nombres premiers distincts; 0 sinon. Par exemple, µ(1) = 1, µ(2) = −1, µ(3) = −1, µ(4) = 0, µ(5) = −1 et µ(6) = 1. On dit que µ(n) est la fonction de Mœbius. Exercices 13. Montrer que la fonction de Mœbius est multiplicative. En d´eduire que ∞ X µ(n) = ns n=1
Y
p premier
53
1−
1 1 = ps ζ(s)
Exercices 14. Soit a(n) une fonction d´efinie pour n entier > 0. Si b(n) = a(n) =
X d|n
Suggestion: Si f (s) =
P∞
a(n) n=1 ns
alors ζ(s)f (s) = f (s) =
n b(d)µ( ). d
P∞
b(n) n=1 ns .
P
d|n a(d)
montrer que
Donc
∞ 1 X b(n) . ζ(s) n=1 ns
7 Bibliographie J.H. Conway, K.R. Guy. ”The Book of Numbers” Springer-Verlag. New York, Berlin. ´ P. Damphousse. ”L’arithm´etique ou l’art de compter” Edition quatre a ` quatre, France. H. Davenport. ”The Higher Arithmetic”. Cambridge University Press. Jean-Paul Delahaye. ”Merveilleux Nombres Premiers” Belin, Collection Pour La Science. Paris. G.H. Hardy & E.M. Wright. ”An Introduction to the Theory of Numbers” Oxford Univ. Press. J-M. De Koninck A. Mercier. ”Introduction a ` la th´eorie des nombres” Modulo, Quebec. M. Krizeck, F. Luca & L. Somer. ”17 Lectures on Fermat Numbers” Sringer, CMS. New York, Berlin. Paulo Ribenboim. ”My Numbers, My Friends” Springer. New York, Berlin.
54
MAT 2250 Introduction à la théorie des groupes (à partir de notes de Luc Bélair et Christophe Hohlweg)
François Bergeron 13 décembre 2015
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ñ Université du Québec à Montréal Département de mathématiques Case postale 8888, Succursale Centre-Ville Montréal (Québec) H3C 3P8
2
Table des matières Page Table des Figures
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Avant-propos
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1 Groupes 1.1 Introduction à la notion de groupe . . 1.2 Définition de groupes . . . . . . . . . . 1.3 Exemples classiques . . . . . . . . . . 1.4 Table de multiplication d’un groupe . 1.5 Règles de calcul . . . . . . . . . . . . . 1.6 Sous-groupes . . . . . . . . . . . . . . 1.7 Ordre d’un groupe, ordre d’un élément 1.8 Le groupe symétrique Sn . . . . . . . . 1.9 Groupes engendrés par des réflexions . 1.10 Un groupe à la Galois . . . . . . . . . 1.11 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . .
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2 Actions de groupes 2.1 Groupes opérants sur des ensembles . . 2.2 Actions de SE . . . . . . . . . . . . . . . 2.3 Classes modulo un sous-groupe . . . . . 2.4 Orbites vs stabilisateurs . . . . . . . . . 2.5 Lemme de Burnside . . . . . . . . . . . 2.6 Morphismes d’actions, sommes d’actions, 2.7 Le système de cryptographie RSA . . . . 2.8 Le groupe des isométries du cube . . . . 2.9 Espaces homogènes . . . . . . . . . . . .
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. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . et actions . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
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11 . . 11 . 14 . 18 . . 21 . 22 . 24 . 27 . . 31 . 37 . 38 . 40
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . transitives. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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49 . 50 . 54 . 56 . 59 . . 61 . 63 . 66 . 69 . 72
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TABLE DES MATIÈRES 2.10 Le groupe SL2 pZq . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.11 Actions linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.12 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3 Morphismes de groupes 3.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . 3.2 Noyau d’un morphisme de groupes 3.3 Isomorphismes de groupes . . . . . 3.4 Automorphismes intérieurs . . . . . 3.5 Théorème de Cayley . . . . . . . . 3.6 Actions et morphismes de groupes 3.7 Tous les groupes finis . . . . . . . . 3.8 Exercices . . . . . . . . . . . . . .
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72 75 78
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83 . 83 . 85 . 87 . 88 . 88 . 90 . . 91 . 92
4 Groupes quotients et théorème d’isomorphie 4.1 Groupes quotients . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2 Théorème d’isomorphisme . . . . . . . . . . . . 4.3 Présentations (finies) de groupes . . . . . . . . 4.4 Sous-groupes d’un groupe quotient . . . . . . . 4.5 Groupes monogènes et cycliques . . . . . . . . . 4.6 A5 comme groupe des rotations du dodécaèdre 4.7 Groupes résolubles . . . . . . . . . . . . . . . . 4.8 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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97 97 99 . 101 102 103 105 108 108
5 Produits de groupes 5.1 Le produit direct . . . . 5.2 Le produit direct interne 5.3 Produits semi-directs . . 5.4 Exercices . . . . . . . .
113 113 115 117 119
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6 Groupes abéliens finis 6.1 Groupes cycliques . . . . . . 6.2 Groupes abéliens primaires 6.3 Décomposition primaire . . 6.4 Théorème principal . . . . . 6.5 Exercices . . . . . . . . . .
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121 . . 121 . 122 . 123 . 127 . 128
7 Les p-groupes, et théorèmes de Sylow 129 7.1 Les p-groupes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129 7.2 Théorèmes de Sylow . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130
TABLE DES MATIÈRES 7.3
Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5 132
A Théorie des groupes avec le calcul formel
135
B Rappels sur les ensembles et fonctions
137
Solutions de certains exercices
141
Bibliographie commentée
157
Index
161
6
TABLE DES MATIÈRES
Table des figures 1.1 1.2 1.3 1.4 1.5 1.6 1.7 1.8 1.9 1.10 1.11 1.12
Symétries d’un triangle équilatéral . . . . . . . . . . . . Cube de Rubik . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Retournements de matelas. . . . . . . . . . . . . . . . . Forme de la molécule C60 . . . . . . . . . . . . . . . . . Table de multiplication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Permutoèdre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Deux graphes de Cayley pour S3 . . . . . . . . . . . . . . Composition de permutations . . . . . . . . . . . . . . . Un cycle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Décomposition en cycles disjoints . . . . . . . . . . . . . Arrangement d’hyperplans dans R3 , correspondant à S4 Réflexions et arrangement de droites . . . . . . . . . . .
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12 12 13 14 22 26 27 32 34 36 37 38
2.1 2.2 2.3 2.4 2.5 2.6
Orbites dans C pour les translations et rotations Colorations du tétraèdre . . . . . . . . . . . . . . Treillis des sous-groupes de S4 . . . . . . . . . . . Rotations du cube. . . . . . . . . . . . . . . . . . Pavage du plan hyperbolique . . . . . . . . . . . Portion de pavage de R3 par le permutoèdre. . .
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52 62 65 69 74 82
3.1 3.2
Isomorphisme entre les symétries du triangle et S3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Graphe de Cayley de A5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
85 86
4.1 4.2 4.3 4.4 4.5
Graphe de Cayley du groupe libre . . . . . . . . . . . Les cinq cubes inscrits dans le dodécaèdre. . . . . . . Rotation du dodécaèdre . . . . . . . . . . . . . . . . Version réaliste d’un cube inscrit dans le dodécaèdre. Permutation des 5 cubes d’un dodécaèdre . . . . . .
5.1
Graphe de Cayley de Z3 ˆ Z3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
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. . 101 . 105 . 105 . 106 . 107 114
8
TABLE DES FIGURES 5.2
L’octaèdre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
118
TABLE DES FIGURES
9
Avant-propos Ce recueil est en cours d’amélioration. Il est bien de consulter la page internet du cours pour les mises à jour. On remercie d’avance ceux qui prendront la peine de signaler les erreurs de toute nature. La version électronique est dynamique, avec des liens vers plusieurs ressources externes. En particulier, pour les quelques figures ou images provenant d’autres sources, un lien permet de retrouver cette source. Dans tous ces cas, les images sont du domaine public. Les notes contiennent aussi parfois des allusions à des sujets plus avancés, ou externes au cours. Lorsque cela est possible, il y a aussi des liens vers des pages qui expliquent (en partie) ces notions.
10
TABLE DES FIGURES
Chapitre 1
Groupes La notion de groupe joue un rôle fondamental en mathématiques. C’est l’une des principales structures algébriques, avec celles d’anneau, de corps, modules, et espaces vectoriels. D’une part, elle formalise les propriétés de plusieurs des opérations bien connues entre des objets mathématiques divers comme les : nombres, vecteurs, matrices, fonctions, etc. D’autre part, elle donne un contexte clair pour discuter de transformations de toutes sortes : rotations, translations, symétries, etc. ; ou encore de manipulations d’objets. Elle est essentielle pour comprendre des aspects fondamentaux de la physique (théorie de la relativité, théorie des quantas), de la chimie (calcul des isomères), de la cristallographie (symétries des cristaux), de la cryptographie à clé publique (système RSA, courbes elliptiques), et de l’étude des codes correcteurs d’erreurs. Elle joue aussi un rôle fondamental en théorie de Galois 1 (qui étudie la résolution d’équations polynomiales), en théorie des nombres, en géométrie, et dans la théorie des invariants. Bref, c’est l’une des notions les plus intéressantes parmi celles élaborées par les mathématiciens.
1.1
Introduction à la notion de groupe
Souvent, un groupe décrit les transformations possibles d’un objet, ou les manipulations qu’on peut faire sur un objet. On suppose qu’appliquer à l’objet considéré une suite de transformations successives est aussi une transformation. On dira alors qu’on a « composé » les transformations pour en produire une nouvelle. On suppose aussi que défaire une transformation est une transformation. On dira que c’est Le dodécaèdre.
1. Due à Évariste Galois, 1811-1832.
11
12
CHAPITRE 1. GROUPES
à la transformation « inverse ». Le groupe est l’ensemble des transformations possible. Pour fixer les idées, on considère par exemple les diverses rotations du dodécaèdre (voir figure ci-contre), ou encore les symétries possibles d’un triangle équilatéral, comme l’illustre la figure 1.1. On constate qu’il y a 3 manières de faire effectuer une symétrie de rotation du triangle, et 3 symétries axiales (de réflexions).
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ñ Figure 1.1 – Les symétries d’un triangle équilatéral. Comme nous allons le voir dans ce cours, le fait d’en comprendre les transformations possibles permet de mieux saisir le rôle d’un objet, et d’en dégager les propriétés essentielles. Pour illustrer le sens de cette affirmation, considérons le fameux casse-tête qu’est le Cube de Rubik. Les mouvements possibles consistent à faire tourner une des 6 « faces » du cube de 90˝ , comme l’illustre la figure ci-contre. L’objectif est de ramener le cube à son état original (à savoir celui où les faces sont toutes d’une couleur uniforme), par une succession de tels mouvements. Dans ce contexte, on considère donc le « groupe » de toutes les suites possibles de rotation des faces. Comprendre ce groupe permet de comprendre comment résoudre le cube. Grâce à la théorie Figure 1.2 – Le Cube des groupes, on peut calculer 2 qu’il y a de Rubik. p38 ˆ 212 ˆ 12! ˆ 8!q{12 “ 43252003274489856000 états (positions) possibles du cube, dont une seule est la bonne (la solution). Lorsqu’on manipule le cube, on s’aperçoit rapidement que le résoudre n’est pas facile. Par essai et erreur, on découvre (assez) vite comment rendre une des faces à son état de couleur uniforme ; puis, un peu moins rapidement, comment s’approcher de la solution. Malheureusement, quand on en est tout proche, on s’aperçoit qu’il 2. La théorie aide à trouver la bonne formule.
1.1. INTRODUCTION À LA NOTION DE GROUPE
13
faut revenir en arrière (et défaire en partie ce que l’on a fait) pour arriver à la solution. C’est alors loin d’être évident. Heureusement, si on la connaît, la théorie des groupes permet d’organiser les étapes nécessaires. Donc, en un certain sens, le problème du Cube de Rubik est un problème de théorie des groupes appliquée. La manipulation du Cube permet d’illustrer beaucoup des concepts de base de la théorie. Même à la maison, la théorie des groupes trouve application. Dans un article du New York Times, on décrit (sourire en coin) les diverses manières de retourner un matelas grâce à la théorie des groupes pour en éviter la déformation. On considère d’abord que les coins du matelas sont étiquetés comme l’illustre la figure ci-contre 3 . Il y a trois manipulations possibles du matelas, illustrées à la figure 1.3.
Figure 1.3 – Retournements de matelas. Le matelas peut se retrouver dans l’un de quatre états, illustrés à la figure ci-contre, avec les diverses manipulations qui permettent de passer d’un état à l’autre. En un certain sens aussi, il y a une grande analogie avec la physique mathématique. Pour comprendre un objet physique (ou un phénomène), la clé consiste à comprendre le groupe des transformations de cet objet. Par exemple, dans la découverte du « buckminsterfullerène 4 », une molécule constituée de 60 atomes de carbone assemblés comme l’indique la figure 1.1, la théorie des groupes à permis de calculer le spectre de cette molécule avant même qu’on en ait trouvé des exemples dans la nature (autant sur Terre que dans l’espace). États et transitions pour le matelas. Cela détermine quelles sont les notions qu’on peut utiliser pour formuler les lois de la physique qui régissent le comportement de cet objet (ou phénomène). La théorie des groupes est donc cruciale pour dégager les théories de la physique. Ainsi, les lois de la relativité générale, les équations de Maxwell, et 3. Les figures sont celles du New York Times 4. Ainsi appelé en l’honneur de Richard Buckminster Fuller (1895–1983), le concepteur de la biosphère.
14
CHAPITRE 1. GROUPES
les équations de Dirac décrivant les propriétés des électrons sont « invariantes » pour les transformations du groupe de Lorentz 5 . Grâce à ce fait, on peut fortement circonscrire leur formulation. Voilà pourquoi plusieurs livres de la physique moderne amorcent leurs exposés avec la théorie des groupes.
Figure 1.4 – Forme de la molécule C60 , la buckminsterfullerène, et la biosphère.
1.2
Définition de groupes La théorie des groupes est née de la convergence de plusieurs domaines : théorie des nombres, géométrie, résolution d’équations algébriques, etc. Elle s’est dégagée dans la seconde moitié du 19e siècle. C’est à Galois qu’on doit le terme « groupe », qu’il a utilisé un peu au sens de « regroupement » pour des transformations. On s’est ensuite aperçu qu’elle permettait d’unifier plusieurs notions considérées à l’époque, pour autant qu’on en isole les propriétés correctement. On trouve beaucoup des notions modernes sur les groupes dans le Traité des substitutions et des équations algébriques publié en 1870 par Jordan 6 . Abstraitement donc, un groupe est simplement un ensemble muni d’une opération avec de bonnes propriétés. Dans un premier temps, nous allons en donner une description précise, pour ensuite donner corps à la notion en présentant une famille d’exemples typiques. En ce sens, on procède donc à l’inverse de ce qui s’est produit historiquement.
5. Hendrik Lorentz, (1853-1928). Pour plus de détails, voir groupe de Lorentz. 6. Camille Jordan, (1838-1922).
1.2. DÉFINITION DE GROUPES
15
Loi de composition, ou opération. Pour la suite, on suppose que E est un ensemble non vide. On dit d’une fonction ˚ : E ˆ E Ñ E que c’est une loi de composition sur E, ou une opération binaire sur E. On note pE, ˚q le fait que l’ensemble E est muni d’une opération binaire. Dans ce cas, on utilise souvent une notation infixe, c’est-à-dire que ˚ : E ˆ E ›Ñ E,
avec
px, yq fi›Ñ x ˚ y,
où l’image de px, yq par la fonction « ˚ » est notée x ˚ y. Parmi les lois de composition, certaines possèdent des propriétés particulières qui les rendent plus intéressantes. Le choix de ces propriétés n’est pas arbitraire. En effet, c’est une vaste expérience mathématique qui a permis de dégager qu’elles sont les propriétés qui donnent à une loi de composition une structure suffisamment riche pour qu’elle ait un impact important sur l’étude d’un contexte dans lequel elle apparaît. Nous aurons maintes fois l’occasion de constater qu’une fois mises en évidence ces propriétés apparaissent toutes naturelles. On dit d’une loi de composition (opération) ˚, qu’elle est (1) associative si x ˚ py ˚ zq “ px ˚ yq ˚ z, pour tout x, y, z P E. (2) commutative si x ˚ y “ y ˚ x pour tout x, y P E.
On remarque que, si ˚ est associative, alors on peut écrire x ˚ y ˚ z au lieu de px ˚ yq ˚ z “ px ˚ yq ˚ z, puisqu’il n’y a pas d’ambiguïté sur la façon de faire le calcul. Bien entendu, toutes les lois ne sont pas associatives. Exemples. Par exemple, on a (a) Les opérations usuelles d’addition « ` » et de multiplication « ¨ » d’entiers (dans Z) sont toutes deux commutatives et associatives. Il en est de même pour les entiers modulo n, c.-à-d. dans Zn “ Z{nZ. Dans ce qui suit, on suppose que l’ensemble Zn est identifié 7 à t0, 1, . . . , nu.
(b) La loi de composition ‹ : px, yq fiÑ xy ` 1 sur N est commutative, mais pas associative. En effet, pour x, y, z P N, on a px ‹ yq ‹ z “ pxy ` 1q ‹ z “ pxy ` 1qz ` 1 “ xyz ` z ` 1,
et
x ‹ py ‹ zq “ x ‹ pyz ` 1q “ xpyz ` 1q “ xyz ` x ` 1. Les résultats sont donc sont manifestement différent si x “ z.
(c) On vérifie facilement que l’opération x ‹ y :“ xy , pour x et y dans N, n’est ni associative ni commutative. (d) Dans l’ensemble Mn pRq des matrices n ˆ n à coefficients réels, l’addition est une loi associative et commutative, tandis que la multiplication est une loi associative, mais pas commutative en général (voir Exercice 1.16). 7. C’est un léger abus de langage qui sera rediscuté au Chapitre 4.
16
CHAPITRE 1. GROUPES
Pour une opération ˚ sur E, et A Ñ E, on dit que l’ensemble A est stable pour ˚, si pour tout x, y P A on a x ˚ y P A. On dit parfois que A hérite de l’opération 8 de E. Autrement dit, ˚ est aussi une opération sur A car la fonction ˚ : A ˆ A ›Ñ A,
avec
px, yq fi›Ñ x ˚ y
est bien définie. On peut donc considérer la structure algébrique pA, ˚q. L’associativité est héréditaire, c.-à-d.que si ˚ est associative dans E, et A est stable pour ˚, alors ˚ restreint à A est aussi associative. En effet, l’égalité x ˚ py ˚ zq “ px ˚ yq ˚ z est vraie pour tout x, y, z P E, donc en particulier pour tout x, y, z P A sous-ensemble de E. On constate de la même manière que la commutativité est héréditaire. Nous aurons plusieurs exemples de cette situation dans ce qui suit. Considéré comme sous-ensemble de Z, l’ensemble Z˚ (des entiers non nuls) est stable pour la multiplication, mais Z˚ n’est pas stable pour l’addition, puisqu’on observe que 1 ` p´1q “ 0 R Z˚ . Élément neutre, et monoïdes. Tout comme c’est le cas de 1 pour la multiplication usuelle, ou de 0 pour l’addition, plusieurs opérations admettent des « éléments neutres ». Plus généralement, pour ˚ une opération sur E, on dit que pE, ˚q possède un élément neutre s’il existe un élément e P E, tel que x ˚ e “ e ˚ x “ x pour tout x P E ; . Un monoïde est un couple pE, ˚q, où ˚ est une opération associative qui admet un élément neutre. Un monoïde est dit commutatif, si l’opération est de plus commutative. Si pE, ˚q possède un élément neutre e, alors cet élément neutre est unique. En effet, soit e et e1 deux candidats, alors e “ e ˚ e1 “ e1 ˚ e “ e1 , et donc e et e1 coïncident forcément. Il est clair que si A Ñ E est stable pour ˚ et e P A, alors e est élément neutre pour pA, ˚q. Dès la petite école on apprend que les opérations de pZ, `q et pQ, ¨q sont commutatives. En algèbre linéaire on est confronté (souvent pour la première fois) à une opération non commutative : la multiplication de matrices. Éléments inversibles, et groupes. Une autre façon de concevoir la division de nombres x{y (resp. la soustraction x ´ y) et de penser qu’elle correspond à la multiplication de x par « l’inverse » multiplicatif 1{y, de y (resp. l’addition de l’inverse additif ´y). Cette approche est plus naturelle lorsqu’on cherche à généraliser, et on en arrive à la définition suivante. On dit que x P E est inversible dans pE, ˚q s’il existe y P E tel que x ˚ y “ y ˚ x “ e. Dans pZ, `q, l’inverse de x est ´x. Dans pQ˚ , ¨q, l’inverse de x est 1{x. Dans un premier cours d’algèbre linéaire, on montre qu’une matrice n ˆ n réelle est inversible pour la multiplication de matrices, si et seulement si son déterminant est non nul. On désigne habituellement par GLn pRq l’ensemble des matrices réelles de déterminant non nul. Nous sommes maintenant prêts à donner une définition précise de la notion de groupe. On dit que pE, ˚q est un groupe si pE, ˚q est un monoïde, et si tous les éléments de E sont inversibles. Un groupe pE, ˚q est dit abélien 9 , ou commutatif, si de plus l’opération ˚ est commutative. Par exemple, pZ, `q et pQ˚ , ¨q sont des groupes abéliens, mais pGLn pRq, ¨q ne l’est pas. 8. Rigoureusement parlant, on devrait dénoter ‹|AˆA la restriction de ‹ à A, mais il n’y a pas risque de confusion. 9. Du mathématicien norvégien Niels H. Abel (1802-1829).
1.2. DÉFINITION DE GROUPES
17
Notre définition de groupe est naturelle, mais légèrement redondante. Pour simplifier le travail de vérification qu’on a bien un groupe pG, ‹q, il est parfois utile de la reformuler un peu. De façon équivalente, on constate que pG, ˚q est un aussi groupe si et seulement si (1) ˚ est associative ;
(2) il existe e P G tel que, pour tout x P G, e ˚ x “ x ; (3) pour tout x P G il existe y P G tel que y ˚ x “ e.
( élément neutre à gauche) ; ( élément inversible à gauche).
L’implication directe est une conséquence immédiate des définitions. Supposons maintenant que pG, ˚q vérifie les trois conditions susmentionnées. Comme on sait déjà que ˚ est associative, il suffit de vérifier que pG, ˚q possède un élément neutre (à droite autant qu’à gauche), et que tout élément de G est inversible (aussi à droite autant qu’à gauche). Par hypothèse, chaque x P G admet un inverse à gauche y P G. Reste à vérifier que x ˚ y “ e. Or, comme y P G, il existe également z P G tel que z ˚ y “ e. On calcule alors que x ˚ y “ e ˚ px ˚ yq “ pz ˚ yq ˚ px ˚ yq “ z ˚ py ˚ xq ˚ y “ z ˚ e ˚ y “ z ˚ y “ e, ce qui donne la propriété désirée. De façon très semblable, pour voir que e (l’élément neutre à gauche) est aussi élément neutre à droite, on calcule comme suit. Pour x P G, on sait maintenant qu’il existe y P G tel que y ˚ x “ x ˚ y “ e, et on calcule que x ˚ e “ x ˚ py ˚ xq “ px ˚ yq ˚ x “ e ˚ x “ x. On observe que dans tout monoïde pE, ˚q, où l’élément neutre est noté e, l’inverse d’un élément, s’il existe, est unique. En effet, pour x P E, si y, y 1 P E deux inverses potentiels, alors y “ y ˚ e “ y ˚ px ˚ y 1 q “ py ˚ xq ˚ y 1 “ e ˚ y 1 “ y 1 . r. On vérifie Il sont donc forcément égaux. On peut donc parler de l’inverse 10 de x, et on le note x facilement (voir Exercice 1.3) que r x r “ x, et er “ e. (1.1) On dénote par E ˆ l’ensemble des éléments inversibles de E :
E ˆ :“ tx P E | x est inversibleu.
(1.2)
La proposition suivante fournit un outil général pour « construire » des groupes. Proposition 1.1. Si pE, ˚q est un monoïde, alors pE ˆ , ˚q est un groupe dont l’élément neutre est e. r. De plus, xÇ ˚ y “ yr ˚ x Démonstration. Il faut montrer que
10. La subtilité réside dans l’utilisation du « l »-apostrophe, qui souligne l’unicité.
18
CHAPITRE 1. GROUPES (1) ˚ est une opération sur E ˆ ; en d’autres termes, que E ˆ est stable pour ˚ ; (2) pE, ˚q est un monoïde d’élément neutre e ; (3) Tout élément de E ˆ est inversible.
Montrons d’abord (1). Il suffit de vérifier que si x, y sont inversibles dans E, alors x ˚ y l’est aussi dans E. On a r ˚ x ˚ y “ e “ x ˚ y ˚ yr ˚ x r “ px ˚ yq ˚ pÇ pÇ x ˚ yq ˚ px ˚ yq “ yr ˚ x x ˚ yq
Donc x ˚ y est inversible et son inverse est yr ˚ x r. En particulier, comme xÇ ˚ y est aussi inversible dans E ˆ (d’inverse x ˚ y), tout élément de E ˆ est inversible, ce qui montre (iii).
Montrons maintenant (2). On sait que E ˆ est stable pour ˚ donc par hérédité, ˚ est associative sur E ˆ . Puisque er “ e car e ˚ e “ e, alors e P E ˆ et donc pE ˆ , ˚q est un monoïde. Un monoïde pE, ˚q est donc un groupe si et seulement si E “ E ˆ .
Notation additive et multiplicative des groupes. Les conventions suivantes sont d’une utilisation généralisée, et pratique si on en comprend bien le sens. Cependant, elles mènent parfois à la confusion si on en ignore la portée. Lorsque le contexte est clair, on dit souvent que G est un « groupe » (sans mentionner l’opération), au lieu de pG, ¨q. Sauf mention contraire, on note habituellement les opérations de groupes multiplicativement : px, yq fiÑ xy, et on dit que ce sont des produits 11 . De plus, on écrit x´1 “ x r pour l’inverse de x P G, et l’élément neutre est noté 1, ou 1G . Dans le cas spécial où le groupe pG, ˚q est un groupe abélien, on note plutôt l’opération additivement : px, yq fiÑ x ` y, et r pour l’inverse de x P G, appelé aussi opposé on dit que ce sont des sommes. On écrit alors ´x “ x de x, et l’élément neutre est noté 0, ou 0G .
1.3
Exemples classiques
Les exemples classiques suivants (certains déjà mentionnés) apparaissent naturellement dans divers contextes des mathématiques. Leur variété souligne l’importance de la notion de groupe. Évidemment, les premiers exemples sont les plus simples. L’addition de nombres. L’addition de nombres complexes pa, bq fiÑ a ` b est une loi de composition sur C, et pC, `q est un groupe abélien d’élément neutre 0. De même
(a) pN, `q, pZ´ , `q, pQ` , `q, pR´ , `q et pR` , `q sont des monoïdes commutatifs. En effet, ces sous-ensembles sont stables pour `, et ils héritent donc de l’associativité et de la commutativité.
11. Bien que la plupart du temps ce ne sont pas des produits usuels.
1.3. EXEMPLES CLASSIQUES
19
Cependant tous leurs éléments ne sont pas inversibles. Observons que l’opposé de 2 n’existe pas dans (N, `q, ni pQ` , `q, ni dans pR` , `q ;
(b) pZ, `q, pQ, `q, pR, `q sont des groupes : il est clair que ce sont des monoïdes, où tous les éléments ont des opposés ; (c) Les ensembles Z˚ , Q˚ , R˚ , et C˚ (dans chaque cas privé de 0) ne sont pas stables pour `, puisque (par exemple) 1 ` p´1q “ 0 n’appartient à aucun de ces ensembles ;
(d) Pour tout n P N, on a que pnZ, `q est un groupe. En effet, on peut restreindre l’addition à nZ puisque nZ est stable pour l’addition. De plus, 0 P nZ, et donc pnZ, `q est un monoïde. Enfin, nk P nZ est inversible dans nZ, car son opposé est np´kq P nZ. La multiplication de nombres. La multiplication de nombres complexes pa, bq fiÑ ab est une loi de composition sur C, et pC, ¨q est un monoïde commutatif. Par ailleurs, puisque Cˆ “ C˚ , on a le groupe abélien pC˚ , ¨q, d’élément neutre 1. De plus,
(a) pN˚ , ¨q et pZ˚ , ¨q sont des monoïdes commutatifs, puisque les sous-ensembles correspondants sont stables pour ¨. Ils héritent donc de l’associativité et de la commutativité. Cependant, tous leurs éléments ne sont pas inversibles. Par exemple, l’inverse de 2 n’existe pas, ni dans N, ni dans Z.
(b) pQ˚ , ¨q et pR˚ , ¨q sont des groupes. Puisque ce sont des sous-ensembles stables de C˚ , il est clair que ce sont des monoïdes. De plus, tous les éléments sont inversibles. (c) Z´ n’est pas stable pour « ¨ ». En effet, le produit de deux nombres négatifs est positif.
(d) pour n P N˚ , on a que pnZ, ¨q est un monoïde si et seulement si n “ 1. En effet, on peut vérifier directement que nZ est stable pour la multiplication. Cependant, 1 P nZ si et seulement si n “ 1. Algèbre linéaire. Tout espace vectoriel est un groupe abélien pour l’addition de vecteurs (voir Exercice 1.6). De plus, pour n P N on constate que (a) pMn pRq, `q est un groupe abélien ;
(b) pMn pRq, ¨q est un monoïde (non commutatif) dont l’élément neutre est la matrice identité In . (c) Dans pMn pRq, ¨q, l’ensemble des inversibles est
GLn pRq “ pMn pRqqˆ “ tM P Mn pRq | détpM q “ 0u. En vertu de la proposition 1.1, pGLn pRq, ¨q est un groupe. On l’appelle le groupe linéaire. Il est non abélien si n ° 1. De plus, pABq´1 “ B ´1 A´1 (attention, ici l’ordre de multiplication est important, car l’opération n’est pas commutative).
20
CHAPITRE 1. GROUPES
Ensembles quotients Zn . Les entiers modulo n joue un rôle important dans plusieurs contextes. Ils sont introduits dans les tout premiers cours universitaires. On montre que (a) pZn , `q est un groupe abélien.
(b) pZn , ¨q est un monoïde commutatif, mais pas un groupe. (c) ppZn qˆ , ¨q est un groupe abélien.
On invite le lecteur à vérifier ces affirmations en exercice (voir Exer 1.5). Fonctions et bijections. On désigne par FonctpE, Eq l’ensemble des fonctions de E vers E. Observons que cet ensemble est toujours non vide, même si E est vide 12 . Comme d’habitude la composition de fonction est dénotée pf, gq fiÑ f ˝ g, avec pf ˝ gqpxq “ f pgpxqq. On désigne par SE l’ensemble des bijections de E vers E. Puisque, par définition, les bijections sont les fonctions qui admettent un inverse pour la composition de fonctions, c’est donc dire dire que SE “ pFonctpE, Eqqˆ .
(1.3)
On dit aussi de dans SE que c’est une permutation de E. Puisque la composition est une opération associative sur FonctpE, Eq (voir Exercice 1.10), il s’ensuit que pFonctpE, Eq, ˝q est un monoïde (non commutatif en général). La fonction identité IdE , telle que IdE pxq :“ x, est l’élément neutre dans pFonctpE, Eq, ˝q. C’est donc que pFonctpE, Eq, ˝q est un monoïde. L’égalité (1.3) implique que pSE , ˝q est un groupe. On dit que c’est le groupe symétrique, ou groupe des permutations, de l’ensemble E. Lorsque E “ t1 . . . , nu on écrit traditionnellement Sn plutôt que SE . Les éléments de Sn sont souvent représentés par des matrices 2 ˆ n. Ainsi, pour P Sn , on note “
ˆ
1 p1q
2 ... p2q . . .
˙ n . pnq
On écrit aussi souvent “ p1q p2q . . . pnq. Nous allons voir que les groupes symétriques jouent un rôle fondamental en mathématiques. Dans Sn , on omet souvent le symbole de composition de fonctions, et on note multiplicativement la loi de composition. On écrit alors ⌧ , plutôt que ˝ ⌧ , et l’identité est notée e (pour ne pas confondre avec le nombre 1, qui joue ici un autre rôle). Par exemple, les éléments de S3 sont (dans les deux notations) ˆ 1 1 ˆ 1 3
˙ ˆ 2 3 1 “ 123, 2 3 2 ˙ ˆ 2 3 1 “ 321, 2 1 2
ˆ 1 “ 213, 1 ˙ ˆ 2 3 1 “ 231, 3 1 3 2 3 1 3
˙
12. Il y a une et une seule fonction de H vers H, et c’est une bijection.
˙ 2 3 “ 132, 3 2 ˙ 2 3 “ 312. 1 2
1.4. TABLE DE MULTIPLICATION D’UN GROUPE
21
Transformations linéaires. Soit E un espace vectoriel, alors l’ensemble des transformations linéaires bijectives sur E, noté GLpEq, est un sous-ensemble de SE . Comme la composée d’applications linéaires est linéaire, on en déduit que pGLpEq, ˝q est un groupe. C’est le groupe général linéaire sur E. On verra plus tard, via la notion d’isomorphisme de groupes, que c’est (presque) le « même » groupe que GLn “ GLn pRq, quand E est un espace vectoriel réel de dimension n. Un autre groupe typique est le groupe spécial linéaire SLn pRq des transformations linéaires de Rn vers Rn , ayant déterminant 1. Ce sont des exemples de Groupes de Lie 13 .
Le groupe affine. Un groupe plus général (ici décrit pour Rn ) que celui de la dernière section est le groupe GAn pRq. Décrit en terme de matrices, c’est l’ensemble des transformations f de Rn vers Rn , de la forme X fiÑ f pXq :“ A X ` B, où A est une matrice n ˆ n de déterminant non nul, et B est un vecteur (colonne) dans Rn . Ici, X est aussi considéré comme vecteur colonne. L’inverse de f est f ´1 pXq :“ A´1 X ´ A´1 B. Le groupe affine transforme des droites dans des droites, des plans dans des plans, etc. Il préserve le parallélisme, les points milieu de segments, ou même le proportions sur une droite, etc. La géométrie affine correspond à étudier les théorèmes qui restent « invariants » 14 par transformations affines. Ainsi, parce que les concepts intervenants dans son énoncé sont préservés par les transformations affines, on peut ramener la preuve du fait que les trois médianes d’un triangle se coupent en un et un seul point, au cas du triangle équilatéral. En effet, il existe une (et une seule) transformation affine de R2 qui transforme n’importe quel triangle en un triangle équilatéral, et cette transformation envoie forcément l’intersection des trois médianes d’un des triangles dans l’autre. La géométrie projective correspond à faire une même démarche analogue avec le groupe « projectif », de même pour d’autres géométries. C’est l’idée du Programme d’Erlangen de Felix Klein.
1.4
Table de multiplication d’un groupe
On peut représenter un monoïde, ou un groupe, par sa table de multiplication. C’est une matrice (qui peut être infinie) telle que chaque ligne et chaque colonne est indexée par un élément ; à l’intersection de la ligne x et de la colonne y, on met le produit de x par y. Par exemple, la table de multiplication 13. Sophus Lie (1842–1899). 14. Il y a une notion mathématique précise, que nous ne présentons pas ici.
22
CHAPITRE 1. GROUPES
de S3 est e 132 213 231 312 321
e e 132 213 231 312 321
132 132 e 231 213 321 312
213 213 312 e 321 132 231
231 231 321 132 312 e 213
312 312 213 321 e 231 132
321 321 231 312 132 213 e
On remarque que S3 n’est pas abélien, car 231 ˝ 132 “ 213 “ 321 “ 132 ˝ 231. On peut clairement voir dans la table de multiplication les inverses de chaque élément. En effet, l’inverse de l’élément x est y si l’intersection de la ligne x avec la colonne y est e. Une façon de décrire un (petit) groupe fini consiste parfois à en donner la liste de ces éléments, puis à donner explicitement sa table de multiplication (en s’assurant qu’elle respecte l’associativité). Ainsi, on a le groupe dont les éléments sont G “ t1, a, b, ab, ba, abau, avec la multiplication donnée par la table de la figure 1.5. 1
a
b
ab
ba aba
1
1
a
b
ab
ba aba
a
a
1
ab
b
aba ba
b
b
ba aba
a
ab
1
ab
ab aba ba
1
b
a
ba
ba
b
a
aba
1
ab
aba aba ab
1
ba
a
b
Figure 1.5 – La table de multiplication du groupe G.
1.5
Règles de calcul
L’inverse d’un produit. On a déjà vu plus haut que si x, y sont dans un groupe G alors pxyq´1 “ y ´1 x´1 . Plus généralement, ´1 px1 x2 . . . xn q´1 “ x1n . . . x´1 2 x1 .
1.5. RÈGLES DE CALCUL
23
Comme le groupe n’est pas forcément abélien, on a en général pxyq´1 “ y ´1 x´1 “ x´1 y ´1 “ pyxq´1 , sinon xy “ yx car px´1 q´1 “ x. Par exemple, dans GL2 pRq, on a les matrices ˆ ˙ ˆ ˙ 1 1 1 1 x“ et y “ , 1 0 0 1 pour lesquelles on a
ˆ ˙ ˆ ˙ 1 2 2 1 xy “ “ yx “ . 1 1 1 0
Bien entendu, si G est un groupe abélien, noté additivement, alors l’opposé de x ` y est ´x ´ y “ ´y ´ x. Puissances d’éléments. Soit x P G et n, m P N alors l’associativité de l’opération du groupe G permet de définir le produit xn comme suit $ &xn´1 x si n ° 0, xn :“ %1 si n “ 0, où 1 désigne l’élément neutre du groupe. En notation additive, on a plutôt $ &pn ´ 1q ¨ x ` x si n ° 0, n ¨ x :“ %0 si n “ 0. De plus, on montre facilement (par récurrence) que xn xm “ xn`m ,
pou encore n ¨ x ` m ¨ x “ pn ` mq ¨ x en notation additiveq.
(1.4)
Attention, si le groupe G n’est pas commutatif, pxyqn “ xn y n . On peut seulement affirmer que pxyqn “ xy xy ¨ ¨ ¨ xy . looooomooooon 2n termes
Il est pratique de considérer aussi les puissances négatives, en posant pour n ° 0, que x´n :“ pxn q´1 “ px´1 qn . En notation additive, on a ´pn ¨ xq “ p´nq ¨ x. On vérifie alors que, pour tout m, n P Z, on a encore la règle des exposants (1.4) (de même pour la version additive).
24
CHAPITRE 1. GROUPES
1.6
Sous-groupes
On a vu précédemment que pour montrer que pA, ¨q est un groupe, pour A un sous-ensemble de G, il suffisait de montrer que A est stable pour l’opération, contient le neutre e de G, et que les inverses des éléments de A sont aussi dans A. C’est une notion qui mérite d’être explorée, et on pose la définition suivante. Soit H, un sous-ensemble stable de G, qui contient l’élément neutre e de G, et tel que l’inverse x´1 soit aussi dans H pour tout x P H. On dit alors que H est un sous-groupe de G. Si H est un sous-groupe de G, on écrit H § G. On voit facilement que H “ teu et G sont des sous-groupes de G. Un sous-groupe différent de G et de teu est dit sous-groupe propre. Pour montrer que pE, ˚q est un groupe, il est souvent plus facile de montrer que c’est un sous-groupe d’un groupe déjà connu. On a les (chaînes de) sous-groupes suivants : pnZ, `q § pZ, `q § pQ, `q § pR, `q § pC, `q; pQ˚ , ¨q § pR˚ , ¨q § pC, ¨q.
De plus, pour tout espace vectoriel, GLpEq § SE . Pour un groupe G, l’ensemble ZpGq “ tx P G | gx “ xg pour tout g P Gu est un sous-groupe de G appelé le centre du groupe G. C’est en fait un groupe abélien. En effet, eg “ ge “ g pour tout g P G donc e P ZpGq (et donc ZpGq est non vide). Soit x, y P G et g P G, alors pxyqg “ xpygq “ xpgyq “ pxgqy “ gpxyq donc xy P ZpGq et ZpGq est stable pour la loi induite par G. Finalement, si x P ZpGq et g P G, alors gx “ xg
ùñ
x´1 pgxqx´1 “ x´1 pxgqx´1
ùñ
x´1 g “ gx´1 .
Donc x´1 P ZpGq. Donc ZpGq § G. De plus, si x, g P ZpGq alors xg “ gx par définition, donc ZpGq est abélien. On observe que G est abélien si et seulement si ZpGq “ G. Proposition 1.2. Les seuls sous-groupes de pZ, `q sont de la forme nZ, pour n P N. Démonstration. Voir exercice 1.11. Proposition 1.3. Soit G un groupe. (1) Soit H Ñ G, alors H est un sous-groupe de G si et seulement si e P H et pour tout x, y P H on a xy ´1 P H. (2) Si H § G et K § H alors K § G (la relation § est transitive).
(3) L’intersection non vide d’une famille de sous-groupes de G est un sous-groupe de G. Démonstration. Voir exercice 1.12.
1.6. SOUS-GROUPES
25
Sous-groupes engendrés. Dans le groupe Z, avec l’addition, tout élément s’écrit sous la forme x “ loooooooomoooooooon 1 ` 1 ` ... ` 1. n-fois
Autrement dit Z est engendré par 1. C’est le plus petit sous-groupe de Z qui contient 1, en vertu de la proposition 1.2. Plus généralement, pour G un groupe et S Ñ G, on note xSy l’intersection de tous les sous-groupes de G qui contiennent S. C’est un sous-groupe de G (proposition 1.3) appelé sous-groupe engendré par S. Si G “ xSy, alors on dit que G est engendré par S, et que S est une partie génératrice de G. On dit des éléments de S que ce sont des générateurs de G. Lorsque S “ tsu, alors on dénote plus simplement 15 par xsy le sous-groupe engendré par s P G. Si G “ xsy on dit que G est monogène. La proposition suivante clarifie certains aspects de ces définitions. Proposition 1.4. Soit G un groupe et S Ñ G.
(1) Dans PpGq ordonné par l’inclusion, xSy est le plus petit sous-groupe de G contenant S. (2) Pour S “ H alors xSy “ teu. Sinon,
xSy “ tx1 . . . xn | n P N, xi P S ou x´1 i P S, pour tout 1 § i § nu. Les éléments de xSy sont les produits 16 constitués de générateurs ou de leurs inverses. En notation additive, on a xSy “ tx1 ` ¨ ¨ ¨ ` xn | n P N, xi P S ou ´ xi P S, pour tout 1 § i § nu. Démonstration. (1) Il faut montrer que xSy est le plus petit élément dans l’ensemble ⇤ “ tH P PpGq | H § G, S Ñ Hu. Par définition, si H P ⇤, alors H apparaît dans l’intersection de tous les sous-groupes de G qui contiennent S. En d’autres termes, xSy Ñ H. Donc xSy P ⇤ est bien le plus petit élément de l’ensemble ⇤ de tous les sous-groupes de G qui contiennent S. (2) Soit S ‰ H. Posons H “ tx1 . . . xn | n P N˚ xi P S ou x´1 P S pour tout 1 § i § nu. On i ´1 remarque que S Ñ H et si s P S alors e “ ss P H. Soit y “ y1 . . . yn et z “ z1 . . . zm des éléments de H, où yi , zj P S ou zi´1 , zj´1 P S. Alors ´1 yz ´1 “ y1 . . . yn zm . . . z1´1 .
15. Au lieu d’écrire xtsuy. 16. Rappelons qu’un produit vide (n “ 0) est égal à 1, et qu’une somme vide est égale à 0.
26
CHAPITRE 1. GROUPES Puisque yi zj P S ou zi´1 , zj´1 P S, yz ´1 est bien le produit d’élément de S ou de leurs inverses. Ainsi xy ´1 P H. On en déduit en vertu de la proposition 1.3 que H § G, d’où H P ⇤. En vertu de (1) on sait donc que xSy Ñ ⇤. Montrons maintenant l’inclusion inverse. Soit K P ⇤ et x “ x1 . . . xn P H avec xi P S Ñ K ou x´1 P S Ñ K. Donc, puisque K est un groupe, i ´1 P K pour tout 1 § i § n. D’où x “ x . . . x Ñ K. On en conclut que H Ñ K. xi “ px´1 q 1 n i Donc H est le plus petit élément de ⇤ pour l’inclusion. Autrement dit, H “ xSy par (1).
Exemples. (a) Z “ x1y est un groupe monogène pour l’addition. En effet, si n P Z est positif, alors n “ 1 ` 1 ` ¨ ¨ ¨ ` 1 ; et si n P Z est négatif, on a n “ looooooooooooooomooooooooooooooon p´1q ` p´1q ` ¨ ¨ ¨ ` p´1q. loooooooomoooooooon n fois
(b) nZ “ xny est aussi un groupe monogène pour l’addition.
|n| fois
(c) Zn “ x1y est encore un groupe monogène (pour l’addition).
(d) Posons ⌧1 :“ 213 et ⌧2 :“ 132. Alors S3 “ x⌧1 , ⌧2 y, car 321 “ ⌧1 ⌧2 ⌧1 “ ⌧2 ⌧1 ⌧2 ; 312 “ ⌧1 ⌧2 et 132 “ ⌧2 ⌧1 . D’où S3 “ te, ⌧1 , ⌧2 , ⌧1 ⌧2 , ⌧2 ⌧1 , ⌧1 ⌧2 ⌧1 u. (e) Posant
:“ 231, on vérifie que S3 “ x⌧1 , y. En effet, ⌧2 “ ⌧1 , 321 “ ⌧1 et
Ces exemples permettent d’observer que l’expression d’un élément comme produit de générateurs n’est pas unique. Ainsi on a, 321 “ ⌧1 ⌧2 ⌧1 “ ⌧2 ⌧1 ⌧2 dans S3 ; et 1 “ 1 ` 1 ` 1 ` 1 dans Z3 (noté additivement). On dit de telles expressions que ce sont des relations dans le groupe. D’autre part, les deux derniers exemples montrent que la partie génératrice d’un groupe n’est pas nécessairement unique (ici on donne deux façons de décrire S3 ). Une façon de visualiser comment un graphe se décrit en terme de générateurs est de construire le graphe de Cayley associé à ces générateurs. Les sommets du graphe sont les éléments du groupe. Pour chaque générateur s, on a un arc de g à h : g
s
/ h,
ssi
s g “ h.
“
2
“
´1 .
p23q
p34q e
p12q
Figure 1.6 – Permutoèdre.
On donne souvent des couleurs différentes aux arcs, selon les générateurs auxquels ils correspondent. Une autre habitude courante est de remplacer les arcs aller-retour qui correspondent à des involutions par une seule arête non orientée. Par exemple, on dit du graphe de Cayley du groupe S4 , pour les générateurs ⌧i “ pi, i ` 1q, que c’est le permutoèdre. Les arêtes bleues, rouges et vertes correspondent respectivement à la multiplication par les transpositions p12q, p23q et p34q. Les hexagones viennent de ce que p12qp23qp12qp23qp12qp23q “ e, et p23qp34qp23qp34qp23qp34q “ e, et les carrés de p12qp34qp12qp34q “ e. Bien entendu, un même groupe donne lieu à plusieurs graphes de Cayley différents, selon que l’on considère des systèmes de générateurs différents. Ainsi, le graphe
1.7. ORDRE D’UN GROUPE, ORDRE D’UN ÉLÉMENT
27
de Cayley pour S3 , avec les générateurs ⌧1 “ p12q et ⌧2 “ p23q donne le graphe de gauche dans la figure 1.7 ; tandis qu’avec les générateurs ⌧1 “ p12q et “ p123q, on obtient plutôt le graphe de droite de cette même figure. p13q
p13q
p132q
p123q
p132q
p123q
p23q
p12q
p23q
p12q
e p12q
p23q
e p12q
p123q
Figure 1.7 – Deux graphes de Cayley pour S3 . Proposition 1.5. Soit G “ xsy “ tsn | n P Zu un groupe monogène, alors G est abélien. De plus, la fonction f : Z Ñ xxy définie en posant f pkq :“ xk est surjective, et vérifie f pk ` `q “ f pkqf p`q ; et l’ensemble tk P Z| f pkq “ eu, est un sous-groupe de Z. Démonstration. Voir exercice 1.15.
1.7
Ordre d’un groupe, ordre d’un élément
On dit que G est un groupe fini, si G est fini en tant qu’ensemble. On dit alors du cardinal |G| que c’est l’ordre de G. L’ordre d’un élément x P G est l’ordre du groupe (monogène) xxy. On le note ordpxq. Si le groupe xxy est infini, on dit que l’ordre de x est infini, et on écrit ordpxq :“ 8. S’il est fini, on pose ordpxq :“ |xxy|. Le groupe monogène fini xxy est alors appelé groupe cyclique. Pour un groupe G fini, il est clair que ordpxq § |G|, pour chaque élément x de G, puisque xxy Ñ G. L’élément neutre e est le seul élément de G d’ordre 1. En effet, on a d’abord clairement |xey| “ |teu| “ 1. Réciproquement, si ordpxq “ 1 “ |xxy|, alors xxy “ txu. Comme tout sous-groupe de G contient e, on a e P xxy, et donc x “ e.
z2
z
e
z3
z4
z5
Groupe cyclique, z 6 “ e.
28
CHAPITRE 1. GROUPES
Évidemment, G est infini s’il contient un élément d’ordre infini x, puisqu’il contient l’ensemble infini xxy. On a (exercice) ordpxq “ ordpx´1 q. On dit des éléments d’ordre 2 dans G, que ce sont des involutions. Les involutions sont donc telles que x´1 “ x. Observons que dans pZ, `q, tous les éléments non nuls sont d’ordre infini et ordp0q “ 1 ! En effet si n “ 0, alors nZ “ xny est en bijection avec Z et est donc, de ce fait, infini. Parmi les groupes finis dits exceptionnels (voir Section 3.7), le plus grand est le groupe M , qu’on appelle le « Monstre ». Une des raisons est que son ordre est « assez » grand 246 ¨ 320 ¨ 59 ¨ 76 ¨ 112 ¨ 133 ¨ 17 ¨ 19 ¨ 23 ¨ 29 ¨ 31 ¨ 41 ¨ 47 ¨ 49 ¨ 71
“ 808017424794512875886459904961710757005754368000000000.
Le résultat suivant est une caractérisation importante de l’ordre d’un élément, qui met en évidence une propriété importante des groupes finis. Proposition 1.6. Dans un groupe G fini, l’ordre d’un élément x est la plus petite puissance de x qui donne l’élément neutre, c.-à-d. ordpxq “ mintn P N | xn “ eu. (1.5) Le groupe cyclique xxy s’écrit alors comme
xxy “ te, x, x2 , . . . , xn´1 u. Démonstration. On sait que
xxy “ txk | k P Zu
Comme x est d’ordre fini, l’ensemble txk | k P Zu l’est aussi. Donc il existe p, q tel que p ° q et xp “ xq . En effet, sinon xp “ xq impliquerait que p “ q et donc que la fonction Z Ñ xxy,
avec
k ބ xk ,
serait injective, et donc bijective. D’où xxy serait infini, ce qui contredirait notre hypothèse.
Puisque xp “ xq , on constate donc que xp´q “ e et p ´ q ° 0. L’ensemble tk P N˚ | xk “ eu Ñ N est donc non vide, il admet donc un plus petit élément n. Il s’ensuit que xn “ e et xxy “ te, x, x2 , . . . , xn´1 u et donc que ordpxq “ |xxy| “ n. Par exemple, l’ordre de S3 est |S3 | “ 6. On constate que dans S3 , on a ordpeq “ 1, ordp213q “ ordp132q “ ordp321q “ 2 (ce sont des involutions) et ordp231q “ ordp312q “ 3. Comme autre exemple, dans Z6 , on a ordp0q “ 1, ordp1q “ ordp5q “ 6, ordp2q “ ordp4q “ 3, et ordp3q “ 2 (donc 3 est une involution). Notez que, dans tous ces exemples, l’ordre d’un élément divise (sans reste) l’ordre du groupe ! On montrera plus tard que c’est un phénomène général. Dans le cas où les éléments
1.7. ORDRE D’UN GROUPE, ORDRE D’UN ÉLÉMENT
29
d’un groupe correspondent à des transformations d’un objet, comme les manipulations d’un cube de Rubik, le phénomène décrit par la Proposition 1.6 correspond à dire qu’on revient inévitablement à la configuration de départ en répétant une même transformation un nombre suffisant de fois. Ainsi, on doit répéter 105 fois la séquence qui consiste à tourner la face gauche d’un quart de tour dans le sens horaire puis la face avant d’une même façon, avant de revenir au cube dans sa position originale. Il y a une (autre) séquence de mouvements qui nécessite d’être répétée 1260, et c’est l’ordre le plus grand d’un élément du groupe du cube. Proposition 1.7. Soit n P N˚ , alors |Sn | “ n!. Plus généralement, si E et F sont deux ensembles de cardinal n, alors l’ensemble BpE, F q des bijections de E dans F est de cardinal n!. Démonstration. On montre l,’énoncé par récurrence sur n. Si n “ 1 il y a une et une seule fonction E “ txu Ñ F “ tyu, qui est clairement bijective. Donc BpE, F q “ 1 “ 1! dans ce cas. Supposons maintenant la propriété vraie pour n ´ 1 • 1 : si E 1 et F 1 sont deux ensembles de cardinal n ´ 1, alors |BpE 1 , F 1 q| “ pn ´ 1q!. Soit x P E. Alors, pour tout y P F , on a |Eztxu| “ |F ztyu| “ n ´ 1. Donc par récurrence, |BpEztxu, F ztyuq| “ pn ´ 1q! pour tout y P F . Si ↵ P BpEztxu, F ztyuq alors la fonction f : E Ñ F telle que f |Eztxu “ ↵ et f pxq “ y est une bijection de E dans F (à vérifier). Donc pour tout y P F , il y a pn ´ 1q! bijection de E dans F tel que f pxq “ y. C’est-à-dire que l’ensemble Ay “ tf P BpE, F q | f pxq “ yu est de cardinal pn ´ 1q! pour tout y P F . On peut vérifier que tAy | y P F u est une partition de l’ensemble BpE, F q (exercice). D’où ÿ ÿ |BpE, F q| “ |Ay | “ pn ´ 1q! “ |F | ¨ pn ´ 1q! “ npn ´ 1q! “ n!. yPF
yPF
Donc la propriété est vraie au rang n, et le lemme s’ensuit pour tout n P N˚ . Observons que, dans un groupe G, si ordpxq “ n alors x´1 “ xn´1 . En effet, xn´1 x “ xn “ e “ x xn´1 . En particulier, si G est un groupe fini engendré par S, alors tous les générateurs sont d’ordre fini et s´1 “ sd´1 , avec d “ ordpsq pour s P S. En vertu de la proposition 1.4, x P G s’écrit donc comme un produit de générateurs : x “ x1 . . . xm (avec xi P S), et on n’a nul besoin de considérer les inverses. En effet, pour obtenir une telle expression à partir d’un produit constitué de générateurs et de leurs inverses, il suffit de remplacer chaque inverse s´1 (pour s P S) par le mot sd´1 , où d “ ordpsq. Par exemple, S3 est engendré par ⌧ “ p12q et “ p123q, et p13q “ ⌧ ´1 . Mais est d’ordre 3, et donc ´1 “ 2 . On obtient donc p13q “ ⌧ . Le groupe pZ, `q et pZn , `q. Le groupe Z muni de l’addition est un groupe abélien d’ordre infini. Les seuls générateurs de Z sont 1 et ´1, puisqu’on ne peut avoir Z “ xny “ nZ que si tout entier
30
CHAPITRE 1. GROUPES
est multiple de n, ce qui force n “ ˘1. Z est d’ordre infini, tout entier non nul est d’ordre infini. Les sous-groupes de Z sont les nZ, avec n P N. Ce sont des sous-groupes monogènes, et les seuls générateurs de nZ sont ˘n. L’ensemble des sous-groupes de Z est donc en bijection avec N. Pour chaque n P N, l’ensemble Zn , muni de l’addition, est un groupe abélien d’ordre n. Proposition 1.8. Soit x P Zn et d “ pgcdpx, nq, alors ordpxq “ n{d. Démonstration. Considérons les deux entiers k :“ n{d et ` :“ x{d, pour lesquels on a pgcdpk, `q “ 1. En effet, si d1 divise k et `, alors d1 d divise x et n. Or d “ pgcdpx, nq, donc d1 “ 1. Calculant dans Zn , on a (en notation additive) k ¨ x “ kpdqq “ n d “ 0. En vertu de la proposition 1.6, il suffit donc de montrer que k est minimum pour cette propriété. Si k 1 § k est tel que k 1 ¨ x “ 0, alors k 1 x “ k 1 `d “ bn “ bkd, pour un certain b P Z. Il s’ensuit que k 1 ` “ bk. Comme k et l sont premiers entre eux, le lemme de Gauss entraîne que k divise k 1 , et donc k “ k 1 car k 1 § k. On observe que l’ordre des éléments de Zn divise l’ordre de Zn . Par exemple, l’ordre de 30 dans pZ42 , `q est 42{pgcdp30, 42q “ 7. En fait, comme on le verra au Chapitre 4, cette propriété est vraie pour tout groupe fini. C’est le théorème de Lagrange (voir Théorème 2.4). Proposition 1.9. Les seuls sous-groupes de pZn , `q sont les xky tel que k divise n (et d’ordre n{k). En particulier, la fonction kZ fiÑ xky est une bijection entre l’ensemble des sous-groupes kZ de Z tel que k divise n et l’ensemble des sous-groupes de pZn , `q. Démonstration. Soit H un sous-groupe de pZn , `q. Considérons K “ tx P Z | px mod nq P Hu. Montrons que K est un sous-groupe de pZ, `q contenant nZ. Observons que K est non vide, car 0 P K, car p0 mod nq P H. De même, puisque pn mod nq “ 0, on obtient que n P K. Soit x, y P K alors px ´ y mod nq “ px mod nq ´ py mod nq P H, car H est un sous-groupe de Zn . Donc K § Z. Comme K est un sous-groupe de Z, on sait qu’il existe k P N tel que K “ kZ. Puisque n P K “ kZ et nZ “ xny est le plus petit sous-groupe contenant n, on a nZ Ñ kZ. Donc tout élément de y P K s’écrit y “ qk et donc tout élément de H s’écrit sous la forme py mod nq “ q ¨ pk mod nq. D’où K “ xpk mod nqy. Puisque nZ Ñ kZ, on a que k divise n et donc pgcdpn, kq “ k. En vertu de la proposition 1.8, on conclut que |H| “ |xpk mod nqy| “ n{k. On laisse en exercice la dernière partie de la proposition. Corollaire 1.10. Soit n P N, alors
(1) x P Zn engendre pZn , `q si et seulement si pgcdpx, nq “ 1. (2) pZn qˆ est l’ensemble des générateurs de Zn .
1.8. LE GROUPE SYMÉTRIQUE SN
31
Démonstration. Exercice.
1.8
Le groupe symétrique Sn
Considérons plus en détail le groupe symétrique SE , des permutations d’un ensemble E de cardinal n. Pour faciliter la présentation, on choisit de prendre E “ t1, 2, . . . , nu, mais certaines de nos observations s’appliquent au cas général 17 . On a déjà montré que Sn , muni de la composition de fonctions, est un groupe d’ordre n!, qui est non abélien en général. C’est notre premier exemple de groupe fini non abélien (le groupe linéaire est un groupe infini non abélien). Comme nous allons le voir plus tard, tout groupe fini est une copie d’un sous-groupe d’un groupe symétrique (théorème de Cayley 18 ). La question de trouver tous les sous-groupes d’un groupe symétrique est donc étroitement liée à la classification de tous les groupes finis ! Voici quelques propriétés combinatoires du groupe symétrique. Une inversion 19 d’une permutation
P Sn est un couple pi, jq tel que :
1 § i † j § n et
piq ° pjq.
On dit du nombre d’inversions de la permutation P Sn que c’est la longueur de . Ce nombre est noté : `p q “ tpi, jq | 1 § i † j § n et piq ° pjqu. On établie facilement que `p q “ 0 si et seulement si “ e. En effet, il est clair que la longueur de e est 0, puisque e n’a pas d’inversion. Inversement, si `p q “ 0 alors on doit avoir p1q † p2q † ¨ ¨ ¨ † pnq, d’où “ 12 . . . n “ e. Par exemple, l’ensemble des inversions de “ 24513 est tp1, 4q, p2, 4q, p2, 5q, p3, 4q, p3, 5qu, et donc `p q “ 5. Dans S3 , on a `p123q “ 0,
`p213q “ 1,
`p132q “ 1,
`p231q “ 2,
`p312q “ 2,
et `p321q “ 3.
Une manière agréable de visualiser les inversions d’une permutation est d’utiliser la représentation suivante. On dispose sur chacune de deux lignes superposées les nombres de 1 à n, et on joint par une flèche le i apparaissant sur la ligne du haut à piq sur celle du bas. Ainsi, la permutation “ 31254 se représente comme suit : 17. Les exceptions à ce principe concernent les cas où on exploite l’ordre entre les entiers. Bien entendu, il n’y a pas d’ordre particulier qu’on puisse ainsi exploiter pour un ensemble E en général. 18. Arthur Cayley (1821-1895). 19. Observons que cette notion utilise l’ordre sous-jacent sur les entiers.
32
CHAPITRE 1. GROUPES 1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Le nombre d’inversions d’une permutation est alors le nombre de croisements dans la figure. La composition ⌧ , de deux permutations et ⌧ de Sn , correspond à superposer deux tels diagrammes de flèches, plaçant celui de au-dessus de celui de ⌧ . Ainsi, le composé de ⌧ “ 12435 et “ 31254 s’obtient en « suivant » les flèches dans la figure obtenue par cette superposition. Pour, 1 § i † n, 1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
⌧
⌧ Figure 1.8 – Composition de permutations la transposition adjacente ⌧i est la permutation qui échange i et i ` 1 et laisse fixe tout autre j P t1 . . . nuzti, i ` 1u. En formule, $ ’ &i ` 1 si j “ i, ⌧i pjq “ i si j “ i ` 1, ’ % j autrement.
Les transpositions sont des involutions, c’est-à-dire que ⌧i2 “ e, ou encore que ⌧i´1 “ ⌧i . Multiplier à droite par ⌧i revient à échanger piq et pi ` 1q dans , c.-à-d. ⌧i “ p1q p2q ¨ ¨ ¨ pi ´ 1q loooooomoooooon pi ` 1q piq pi ` 2q ¨ ¨ ¨ pnq.
Cela se voit bien sur un diagramme de flèches. Ainsi, on a
24513 “ 24153 ⌧3 “ 21453 ⌧2 ⌧3 “ 12453 ⌧1 ⌧2 ⌧3 “ 12435 ⌧4 ⌧1 ⌧2 ⌧3 “ ⌧3 ⌧4 ⌧1 ⌧2 ⌧3 . Observons ici que multiplier par ⌧i revient à augmenter ou diminuer la longueur par 1 ! Ce phénomène est général, comme le montre le lemme suivant.
1.8. LE GROUPE SYMÉTRIQUE SN Lemme 1.11. Soit
33
P Sn et 1 § i † n, alors `p ⌧i q “ `p q ˘ 1. Plus précisément, # `p q ` 1 si piq † pi ` 1q, `p ⌧i q “ `p q ´ 1 si piq ° pi ` 1q.
Démonstration. Posons “ a1 a2 . . . an où ai “ piq. Comme on l’a déjà observé, ↵ “ ⌧i “ a1 . . . ai´1 ai`1 ai ai`2 . . . an s’obtient à partir de en échangeant la i-ème et la i ` 1-ème lettre. On observe d’abord que toute inversion pk, lq “ pi, i ` 1q de correspond à une inversion pk 1 , l1 q “ pi, i ` 1q de ↵ et vice versa. Donc, si pi, kq est une inversion de ↵ alors pi ` 1, kq est une inversion de ↵ car ai “ piq “ ↵i`1 et pkq “ ↵k . En d’autres termes, le nombre d’inversions de différentes de pi, i ` 1q est égal au nombre d’inversions de ↵ différentes de pi, i ` 1q. Si ai “ piq † pi ` 1q “ ai`1 , alors pi, i ` 1q n’est pas une inversion de . Mais puisque ↵piq “ ai`1 ° ai “ ↵pi ` 1q, alors pi, i ` 1q est une inversion de ↵. Dans ce cas, ↵ a une inversion de plus que . Si par contre ai “ piq ° pi ` 1q “ ai`1 , alors pi, i ` 1q est une inversion de . Mais puisque ↵piq “ ai`1 † ai “ ↵pi ` 1q, alors pi, i ` 1q est une inversion de ↵. Dans ce cas, ↵ a une inversion de moins que . Nous sommes maintenant en mesure de démontrer la proposition suivante, qui permet de donner un système de générateurs pour Sn . Nous allons aussi voir qu’elle permet de comprendre d’une autre manière la longueur `p q. Proposition 1.12. Toute permutation
P Sn est un produit de `p q transpositions adjacentes.
Démonstration. Par récurrence sur `p q. Si `p q “ 0, alors “ e est l’identité, qui correspond au produit vide. Supposons `p q ° 0, alors “ e. Il existe donc i tel que piq ° pi ` 1q. Ainsi en vertu du lemme 1.11, `p ⌧i q “ `p q ´ 1 † `p q. Par hypothèse de récurrence, ⌧1 est égal à un produit de `p ⌧i q transpositions adjacentes. Donc “ ⌧i ⌧i´1 “ p ⌧i q⌧i (car ⌧i est une involution) est un produit de `p q transpositions adjacentes. Une autre utilité de la longueur est de permettre la définition suivante. On considère la fonction " : Sn Ñ t˘1u,
avec
"p q :“ p´1q`p q .
On dit de "p q que c’est le signe de la permutation . Dans un cours d’algèbre linéaire, on montre que ÿ détpaij q1§i,j§n “ "p q a1, p1q a2, p2q ¨ ¨ ¨ an, pnq , (1.6) PSn
pour toute matrice paij q1§i,j§n .
Corollaire 1.13. Pour tout , et ⌧ dans Sn , on a "p ⌧ q “ "p q"p⌧ q.
34
CHAPITRE 1. GROUPES
Démonstration. Il suffit de montrer que (1.7)
`p ⌧ q ” `p q ` `p⌧ q pmod2q.
En effet, on aura alors k P Z tel que `p ⌧ q “ `p q ` `p⌧ q ` 2k et donc que "p ⌧ q “ p´1q`p
⌧q
“ p´1q`p
q``p⌧ q`2k
L’égalité (1.7) est laissée en exercice.
“ p´1q`p q p´1q`p⌧ q pp´1q2 qk “ "p q"p⌧ q.
Ordre et cycles d’une permutation. La notion de cycle 20 est fondamentale dans le groupe symétrique. Elle rend possible une nouvelle décomposition des permutations. Cette permet décomposition, entre autres, de calculer différemment l’ordre. De plus, elle joue un rôle crucial dans plusieurs constructions. Pour 1 † p § n, on dit d’une permutation P Sn que c’est un un p-cycle (ou simplement que c’est un cycle) s’il existe p entiers distincts 1 § a1 , a2 , . . . , ap § n tels que pa1 q “ a2 ,
pa2 q “ a3 ,
...
paj q “ aj`1 ,
...
et
pap q “ a1 ;
avec de plus pbq “ b pour tout b R ta1 . . . , ap u. On dit de ces derniers b, que ce sont des points fixes de . La figure 1.9 représente un cycle de façon plus imagée. a1 a5
a2 a4
a3
Figure 1.9 – Un cycle. On dénote habituellement par pa1 , a2 . . . , ap q un tel cycle . Les parenthèses soulignent qu’on parle d’un cycle. Pour alléger la notation, on omet les virgules lorsque c’est possible. Notons que les points laissés fixes par n’apparaissent pas dans cette notation. On dit de p que c’est la longueur du cycle . Par définition, une transposition est un 2-cycle, et elle est de la forme pi, jq, pour i “ j. La transposition adjacente ⌧i , déjà vue, s’écrit donc aussi ⌧i “ pi, i ` 1q. Enfin, si p “ n, on dit qu’on a une permutation circulaire. Comme nous allons le constater, les permutations circulaires dans Sn , pour n ° 1, sont les seules qui n’ont pas de point fixe. Par exemple, la permutation ˆ ˙ 1 2 3 4 5 “ 24351 “ “ p1245q 2 4 3 5 1 20. Cette notion est générale, et s’applique aux permutations de tout ensemble fini E.
1.8. LE GROUPE SYMÉTRIQUE SN
35
est un 4-cycle dans S5 , car p1q “ 2, p2q “ 4, p4q “ 5 et p5q “ 1. Son seul point fixe est p3q “ 3. De plus, l’inverse de est aussi un 4-cycle. En effet, ´1 “ 51324 “ p1542q s’obtient en « lisant le cycle à l’envers ». Notons d’autres parts que 2 “ 45312 n’est pas un cycle, car 2 p1q “ 4, 2 p4q “ 1, 2 p2q “ 5 et 2 p5q “ 2. En général, le produit de cycles n’est pas un cycle. Plus généralement, on a la propriété suivante. Proposition 1.14. Si “ pa1 . . . , ap q P Sn un p-cycle, alors (1) ´1 “ pa1 , ap , ap´1 . . . a2 q est un p-cycle ; (2) ordp q “ p. (3) le signe de est p´1qp´1 . Démonstration. Voir exercice 1.32. Pour deux entiers p et q, plus grands ou égaux à 2, on dit que des cycles pa1 . . . , ap q et pb1 . . . , bq q sont à support disjoint, ou plus simplement disjoints, si ta1 . . . , ap u X tb1 . . . , bq u “ H. Par exemple, les cycles p1, 5, 4q et p2, 3q sont à support disjoint ; tandis que les cycles p1, 5, 2q et p2, 6, 3q ne le sont pas. Deux cycles à support disjoint commutent, c.-à.d. si et ⌧ sont des cycles à support disjoint, alors ⌧ “ ⌧ . Le but de toute cette discussion est la proposition suivante. Proposition 1.15. Toute permutation (différente de l’identité) s’écrit de manière unique, à l’ordre des facteurs près, comme produit de cycles à support disjoint (et donc qui commutent).
Plutôt que de démontrer cette proposition, nous allons illustrer le processus qui mène à cette décomposition pour une permutation particulière. La démonstration générale est laissée en exercice (ou voir [3]). Prenons “ 729158436 P S9 , et débutons avec 1. En calculant les images successives p1q “ 7, 2 p1q “ 4, et 3 p1q “ 1, on trouve que contient le cycle 1 :“ p174q. La plus petite valeur qui n’est pas couverte par ce cycle est 2, et on constate que c’est un point fixe de . Puis viens 3, qui « engendre » le cycle 2 :“ p3968q. Le seul nombre qui reste est maintenant 5, qui est un point fixe. La décomposition résultante est donc “
1 2
“ p174qp3968q “
2 1
“ p3968qp174q.
L’unicité de la décomposition provient de l’unicité des cycles qui la compose. On observe que les cycles de sont de la forme px, pxq, 2 pxq, 3 pxq, . . . , d´1 pxqq, où d est l’ordre de x.
Une façon agréable de mettre en évidence la décomposition d’une permutation en cycles disjoints est de représenter la permutation comme à la figure 1.10. Dans celle-ci, on joint les éléments de l’ensemble sous-jacent par une flèche i Ñ j, si piq “ j. On voit bien ainsi apparaître les cycles disjoints, pour le moins que le dessin soit fait correctement.
36
CHAPITRE 1. GROUPES 8 3 5 2
4
1
7
7
9
Figure 1.10 – La décomposition de la permutation 248736159 en cycles disjoints. Corollaire 1.16. Soit “ 1 . . . k P Sn une permutation en cycle décomposée en cycles disjoints, alors ordp q “ ppcmpordp 1 q, ordp 2 q, ordp 3 q . . . , ordp k qq. De plus le signe de est p´1qn´cp q , où cp q est le nombre de cycles de . Démonstration. Exercice. Par exemple, avec la permutation “ 729158436 P S9 de l’exemple précédent, on trouve de cette manière que ordp q “ 12, puisque c’est le plus petit commun multiple de 3 et 4, les longueurs des cycles de la décomposition de . Un problème amusant, et pas trivial, est de déterminer quel est le plus grand ordre possible pour un élément de Sn .
1.9. GROUPES ENGENDRÉS PAR DES RÉFLEXIONS
1.9
37
Groupes engendrés par des réflexions
Figure 1.11 – Arrangement d’hyperplans dans R3 , correspondant à S4 Le groupe symétrique fait partie (à isomorphisme 21 près) d’une famille de groupes de grand intérêt en recherche mathématique contemporaine. Ce sont des sous-groupes de GLn qui s’obtiennent en composant des réflexions 22 , c.-à-d. des matrices n ˆ n, à coefficients réels, dont le carré est l’identité et le déterminant est ´1. Autrement dit, les générateurs du groupe sont des réflexions dans des hyperplans (sous espaces vectoriels de dimension n ´ 1). On observe qu’une réflexion est son propre inverse. C’est le cas des matrices suivantes : ¨ ˛ ¨ ˛ ¨ ˛ 0 1 0 0 1 0 0 0 1 0 0 0 ˚1 0 0 0‹ ˚0 0 1 0‹ ˚0 1 0 0‹ ˚ ‹, ˚ ‹, ˚ ‹ ˝0 0 1 0‚ ˝0 1 0 0‚ ˝0 0 0 1‚, 0 0 0 1 0 0 0 1 0 0 1 0
qui engendrent le groupe S4 , des matrices de permutations. On s’aperçoit que ces matrices laissent fixes les vecteurs de la forme pa, a, a, aq. On peut donc considérer la trace de l’action de S4 sur le sous-espace vectoriel de dimension 3, orthogonal à ces vecteurs. Cette action est représentée à la figure 1.11. Dans la partie de droite de cette figure, les plans sont obtenus comme intersection 23 avec les hyperplans de réflexion. Il y a un plan pour chaque réflexion 24 dans le groupe. Pour que le groupe engendré soit fini, il y a de fortes contraintes sur les angles entre les hyperplans correspondant aux générateurs, comme on le voit à la figure 1.11, ainsi qu’à la figure 1.12. Dans la partie de gauche de la figure ci-haut, on voit l’intersection des plans avec la sphère de rayon 1. Les angles entre les plans sont ainsi mis en évidence, et le triangle rouge contient un angle de ⇡{2 et deux angles de ⇡{3. Ces contraintes sur les angles
21. Voir Section (3.3). 22. On en donne ici une définition un peu simplifiée. 23. Pour plus de détails, voir Swallowtail on the shore, dans la série de textes Snapshots of modern mathematics from Oberwolfach, No7/2014. 24. Attention, le groupe contient aussi d’autres éléments.
38
CHAPITRE 1. GROUPES
permettent de déterminer quels sont tous les groupes finis de ce genre. Un autre exemple que nous verrons plus tard (Voir Section 2.1) est le groupe « diédral ». Plus généralement, parmi les groupes engendrés par les réflexions, on retrouve les groupes de Coxeter 25 qui jouent un rôle fondamental dans plusieurs domaines des mathématiques, de la physique, et en cristallographie.
ò
ò
ò
ò
ò
ò
Figure 1.12 – Réflexions selon des droites d’angles 2 k ⇡{6, avec 0 § k § 2.
1.10
Un groupe à la Galois
Sur l’ensemble des expressions de la forme a ` b ⇣ ` c ⇣ 2 ` d ⇣ 3 ` e ⇣ 4,
pour
⇣ “ expp2 i ⇡{5q,
avec a, b, c, d, et e des nombres réels ; on considère les « transformations » f : C Ñ C telles que : (1) f px ` yq “ f pxq ` f pyq, pour tout x, y P C, (2) f px yq “ f pxq f pyq, pour tout x, y P C, (3) f prq “ r, si et seulement si r P R.
L’ensemble de ces transformations forme un groupe G pour la composition. En effet, les conditions ci-dessus entraînent que f pa ` b ⇣ ` c ⇣ 2 ` d ⇣ 3 ` e ⇣ 4 q “ a ` b f p⇣q ` c f p⇣q2 ` d f p⇣q3 ` e f p⇣q4 , avec
f p⇣q5 “ f p⇣ 5 q “ f p1q “ 1.
25. Les travaux de H.S.M. Coxeter, (1907-2003), ont inspiré plusieurs des oeuvres artistiques de M.C. Escher (1898-1972).
1.10. UN GROUPE À LA GALOIS
39
Autrement dit, la transformation f est entièrement caractérisée par la valeur de f p⇣q. Il n’y a que 4 choix possibles pour f p⇣q, ce sont les quatre racines 5e de l’unité différentes 26 de 1 : fk p⇣q “ ⇣ k ,
1 § k § 4,
avec la propriété fk ˝ fj “ fk j (loi des exposants). On observe que f1 est l’identité, et le groupe G est donc constitué de te, f2 , f3 , f4 u. On trouve, par un calcul direct qui exploite le fait que ⇣ 5 “ 1,
⇣ 6 “ ⇣,
⇣ 7 “ ⇣ 2,
...
que la table de multiplication de G est e e e f2 f2 f3 f3 f4 f4
f2 f2 f4 e f3
f3 f3 e f4 f2
f4 f4 f3 f2 e
Ce qui permet de constater que c’est bien un groupe. Sous une forme « déguisée » 27 , c’est en fait le groupe cyclique Z4 . La théorie de Galois ramène l’étude des racines de polynômes à l’étude d’un groupe de Galois qui lui est associé en généralisant la construction que l’on vient de considérer. Dans notre cas, nous avons calculé le groupe de Galois du polynôme ppzq “ a ` bz ` cz 2 ` dz 3 ` ez 4 .
Conclusion Pour de nombreuses utilisations en mathématique, en physique, et dans d’autres domaines, il importe de mieux comprendre la structure des groupes, et leurs propriétés. Parmi les problèmes centraux et encore de grande actualité : la recherche des plus petits ensembles de générateurs d’un groupe, où la détermination de tous ses sous-groupes, sont deux problèmes difficiles de la théorie générale des groupes. Un autre axe très important est la recherche en théorie de la représentation des groupes. Enfin, une des grandes réalisations des algébristes du XXe siècle a été de classifier tous les groupes finis (voir l’atlas des groupes finis Atlas des groupes finis). Nous allons développer dans la suite du cours quelques-unes des techniques de base développées pour répondre à de telles questions : morphismes de groupes, classes d’isomorphisme, groupes quotients, 26. Ceci résulte de la condition (3). 27. À ce sujet, voir la notion d’isomorphisme, Section 3.3.
40
CHAPITRE 1. GROUPES
etc. Par exemple, nous allons voir que si un groupe est monogène, alors c’est une « copie » de Z s’il est infini ou c’est une « copie » de Zn s’il est fini. Nous aurons alors classifié tous les groupes monogènes (et par ricochet aussi leurs sous-groupes et générateurs) !
1.11
Exercices
Exercice 1.1. Soit la loi de composition ‹ : pa, bq fiÑ ab ` a ` b sur R. Est-ce que ‹ est associative ? Commutative ? Exercice 1.2. Soit la loi de composition ‹ : pA, Bq fiÑ AB ` Id sur Mn pRq l’ensemble des matrices carrées n ˆ n. Est-ce que ‹ est associative ? Commutative ? Exercice 1.3. Montrer que l’inverse de l’élément neutre d’un groupe est égal à lui-même, et montrer que l’inverse de l’inverse de x est égal à x. Exercice 1.4. Soit E un ensemble muni d’une multiplication et d’une addition. On considère dans E la loi de composition ‹ : pa, bq fiÑ ab ` a ` b. (a) Posons E “ R. Est-ce que pR, ‹q possède un élément neutre ? (justifier). Lesquels des sousensembles de R suivants sont stables pour ‹ : N,
Q´ ,
Q`˚ ,
R,
et nZ.
(b) Mêmes questions avec E “ Mn pRq et E “ GLn pRq. Exercice 1.5. On considère les ensembles N˚ , Z, Z˚ , Q, Q˚ , Q` , Q`˚ , R˚ , R` , R`˚ , Z´ , Q´ et R´ . Parmi ces ensembles, lesquels sont des groupes ou des monoïdes pour : (a) l’addition sur R ; (b) la multiplication sur R. Justifier et préciser l’ensemble de leurs éléments inversibles. Exercice 1.6. Pour tout espace vectoriel V , déduire de la définition d’espace vectoriel que pV, `q est un groupe. En conclure que pMn , `q est un groupe. Exercice 1.7. Soit G un ensemble muni d’une loi de composition ˚. Montrer que pG, ˚q est un groupe si et seulement si (a) ˚ est associative ; (b) il existe e P G tel que pour tout x P G, x ˚ e “ x ; (élément neutre à droite) ; (c) pour tout x P G, il existe y P G tel que x ˚ y “ e. (élément inversible à droite). Exercice 1.8. Soit E un ensemble. (a) Montrer que pPpEq, Yq et pPpEq, Xq sont des monoïdes. Sont-ils des groupes ? (b) On considère dans PpEq la loi de composition pA, Bq fiÑ A B “ pA Y BqzpA X Bq
(Différence symétrique).
Montrer que pPpEq, q est un groupe. Quel est son élément neutre ? Quel est l’inverse de A ? Est-ce un groupe abélien ?
1.11. EXERCICES
41
Exercice 1.9. Soit n P N˚ .
(a) Montrer que pZn , `q est un groupe abélien de cardinal n.
(b) Montrer que pZn , ¨q est un monoïde commutatif. Est-ce un groupe ? (Justifier.)
(c) Montrer que ppZn qˆ , ¨q est un groupe abélien de cardinal 'pnq (la fonction d’Euler, dont la valeur est le nombre d’entiers relativement premiers à n, entre 1 et n ´ 1.)
(d) Soit la loi de composition ‹ : pa, bq fiÑ ab ` a ` b dans Zn . Est-ce que ‹ possède un élément neutre ? (Justifier.) Est-ce que pZn qˆ est stable pour ‹ ?
Exercice 1.10. Soit E un ensemble. Montrer que la composition de fonction munie l’ensemble FonctpE, Eq d’une structure de monoïde.
Exercice 1.11. (voir Proposition 1.2) Montrer que pour chaque n, l’ensemble nZ est un sous-groupe de Z. Si H est un sous-groupe de Z, montrer que H “ nZ, avec n égal au plus petit entier positif non null dans H. Exercice 1.12. (voir Proposition 1.3) Pour un groupe G, soit H un sous-ensemble de G contenant l’élément neutre e de G, et tel que xy ´1 est dans H pour tout x et y dans H. En choisissant x et y judicieusement, montrer que H contient l’inverse de tous ces éléments. Montrer que la notion de sous-groupes est transitive, et vérifier que l’intersection d’une famille quelconque de sous-groupes est un sous-groupe. Est-il vrai que l’union de sous-groupes est un sous-groupe ? Justifier votre réponse. Exercice 1.13. Soit G un groupe. On suppose que pour tout x P G on a x2 “ e. Montrer que G est abélien. Exercice 1.14. Soit G un groupe et soit a, b P G tel que a5 “ e et a3 b “ ba3 . (a) Montrer que a6 b “ ba6 ;
(b) en déduire que ab “ ba.
Exercice 1.15. (voir Proposition 1.5) Pour x élément de G un groupe, montrer par récurrence que xk`` “ xk x` , pour tout k et ` dans N. En déduire ensuite que cette propriété s’étend à tout Z. Puis, montrer que xxy est abélien, et que la fonction f pkq :“ xk est surjective sur xxy. Verifier que f pk ` `q “ f pkqf p`q, puis que tk | f pkq “ eu est un sous-groupe de Z. En conclure que f pkq “ e si et seulement si pk mod nq “ 0 pour un certain n P Z (voir Exercice 1.11). Exercice 1.16. Montrer que le centre ZpGq d’un groupe est un sous-groupe de G. Calculer le centre de GLn , et en conclure que GLn n’est pas commutatif. Exercice 1.17. Soit n P N˚ .
(a) Montrer que l’ensemble Opnq “ tM P Mn pRq | t M M “ Idn u est un sous-groupe de GLn pRq. C’est le groupe orthogonal. Rappelons que t M désigne la transposée de M .
(b) Montrer que l’ensemble SOpnq “ tM P Opnq | détpM q “ 1u est un sous-groupe de Opnq. C’est le groupe spécial orthogonal. Rappelons que "ˆ ˙ * cosp✓q ´ sinp✓q ˇˇ SOp2q “ ✓PR . sinp✓q cosp✓q
42
CHAPITRE 1. GROUPES
Exercice 1.18. Soit G un groupe et A Ñ G. Pour g P G on note gAg ´1 “ tgxg ´1 | x P Au. (a) Montrer que ZpAq “ tg P G | gx “ xg, pourtout x P Au est un sous-groupe de G.
(b) Montrer que gAg ´1 et A sont en bijection.
(c) Montrer que N pAq “ tg P G | gAg ´1 “ Au est un sous-groupe de G.
(d) Montrer que ZpAq § N pAq.
Exercice 1.19.
(a) Quel est le centre du groupe Sn , pour n P N˚ ?
(b) Montrer que G est un groupe abélien si et seulement si G est égal à son centre. Exercice 1.20. Montrer que les seuls sous-groupes de pZ, `q sont de la forme (nZ, `q, pour n P N. Exercice 1.21. Soit G un groupe. Montrer que
(a) Soit H Ñ G, alors H est un sous-groupe de G si et seulement si e P H et pour tout x, y P H, xy ´1 P H.
(b) Si H § G et K § H alors K § G (la relation § est transitive).
(c) L’intersection non vide d’une famille de sous-groupes de G est un sous-groupe de G.
Exercice 1.22. Soit G un groupe et H, H 1 deux sous-groupes de G. Montrer que H Y H 1 est un sous-groupe de G si et seulement si H Ñ H 1 ou H 1 Ñ H.
Exercice 1.23. Soit G un groupe. On dit que x et y sont conjugués dans G s’il existe g P G tel que x “ gyg ´1 . On notera x „ y. (a) Montrer que „ est une relation d’équivalence sur G. La classe d’équivalence de x P G est appelée classe de conjugaison de x.
(b) Soit x P G, montrer que l’ensemble Gx “ tg P G | gxg ´1 “ xu est un sous-groupe de G, appelé sous-groupe stabilisateur de x P G.
Exercice 1.24. Soit G “ xsy un groupe monogène. Montrer que (a) G est un groupe abélien.
(b) G “ tsn | n P Zu.
(c) La fonction f : Z Ñ xxy, définie par f pkq “ xk , est surjective et que f pk ` lq “ f pkqf plq.
(d) Si G est noté additivement, montrer que G “ tns | n P Zu.
Exercice 1.25. Soit G un groupe et g P G. Montrer que
(a) Si ordpgq “ 8 alors ordpg k q “ 8 pour tout k P N˚ .
(b) Si ordpgq “ n est fini et k P N˚ , alors ordpg k q “ n{pgcdpn, kq. (c) ordpg ´1 q “ ordpgq.
Exercice 1.26. Soit le groupe G “ Z12 .
1.11. EXERCICES
43
(a) Déterminer le sous-groupe H de G engendré par 6 et 8. Déterminer son ordre. (b) Caractériser les générateurs de G. (c) Quel est l’ordre de l’élément 9 ? Exercice 1.27. Soit n P N˚ , montrer que
(a) La fonction kZ fiÑ xky est une bijection entre l’ensemble des sous-groupes kZ de Z tel que k divise n, et l’ensemble des sous-groupes de Zn .
(b) Zn “ xxy si et seulement si pgcdpx, nq “ 1.
(c) pZn qˆ est l’ensemble des générateurs de Zn .
Exercice 1.28. On considère dans cet exercice le groupe symétrique S4 . Avec nos conventions, on a les transpositions adjacentes ˆ ˙ ˆ ˙ ˆ ˙ 1 2 3 4 1 2 3 4 1 2 3 4 ⌧1 “ “ 2134 ⌧2 “ “ 1324 ⌧3 “ “ 1243. 2 1 3 4 1 3 2 4 1 2 4 3 (a) Écrire tous les éléments de S4 comme un produit des transpositions adjacentes ⌧i ; (b) Calculer les ordres et les longueurs des éléments de S4 . (c) On considère les sous-groupes H “ x⌧1 , ⌧2 y ;
K “ x⌧2 , ⌧3 y
et L “ x⌧1 , ⌧3 y .
(1) Quels sont les ordres de H, K et L ? (2) Écrire la table de multiplication de ces sous-groupes. Sont-ils abéliens ? (c) Que remarquez-vous ? Exercice 1.29. (Relations de tresse) Dans Sn , avec ⌧i :“ pi, i`1q, montrer que pour tout 1 § i, j § n, on a ⌧i ⌧j “ ⌧j ⌧i , si |i ´ j| ° 1, et
⌧i ⌧j ⌧i “ ⌧j ⌧i ⌧j ,
Exercice 1.30. On considère la fonction : Sn Ñ Z 2
avec
si
|i ´ j| “ 1. p q :“ p`p q mod 2q.
(a) Montrer que peq “ 0, et que p⌧i q “ 1 pour tout 1 § i † n.
(b) Soit ⌧ P Sn . Par récurrence sur `p q, montrer que `p ⌧ q “ p`p q ` `p⌧ q mod 2q. (c) Montrer que p ⌧ q “ p q p⌧ q, pour tout , ⌧ P Sn .
Exercice 1.31. (a) Décomposer en cycles disjoints les permutations dans S3 et dans S4 .
44
CHAPITRE 1. GROUPES
Exercice 1.32. [Démonstration de la Proposition 1.14] Soit alors (a)
´1
“ pa1 , . . . , ap q P Sn un p-cycle,
“ pa1 , ap , ap´1 , . . . a2 q est un p-cycle ;
(b) ordp q “ p. (c) le signe de
est p´1qp´1 .
Exercice 1.33. Considérons les deux permutations suivantes de S9 : (a) Écrire
et ⌧ comme produits de cycles disjoints.
(b) Trouver l’ordre de (c) Écrire
“ 492517683 et ⌧ “ 719238465.
et de ⌧ .
et ⌧ comme produits de transpositions adjacentes.
Exercice 1.34. (Décomposition en cycles) Soit P Sn , montrer que comme produit de cycles disjoints (à l’ordre des facteurs près).
s’écrit de manière unique
Exercice 1.35. (Classe de conjugaison de Sn ) (a) Soit P Sn et ↵ “ pa1 , . . . , ak q un k-cycle. Montrer que k-cycle.
↵
´1
“ p pa1 q, . . . , pak qq est un
(b) Montrer que ↵, P Sn sont conjugués si et seulement si pour tout k, ↵ et de k-cycles dans leur décomposition en cycles disjoints. Exercice 1.36. Soit disjoints, alors on a
une permutation dans Sn et
“
1... k
ont le même nombre
sa décomposition de
en cycles
ordp q “ ppcmpordpc1 q, ordpc2 q, ordpc3 q, . . . , ordpck qq.
Montrer de plus que le signe de
est p´1qn´k .
Exercice 1.37. Montrer qu’on peut exprimer les transpositions ⌧i “ pi, i ` 1q comme produit de transpositions de la forme p1aq, pour 2 § a § n. En conclure que le groupe Sn est engendré par ces transpositions. Exercice 1.38. Établir la table de multiplication du groupe diédral D3 . Comparer avec la table du groupe S3 : que remarque-t-on ? Exercice 1.39. Soit Dm “ xs, ry le groupe diédral d’ordre 2m engendré par la rotation r d’angle 2⇡{m, et la symétrie s verticale. Soit t “ sr, montrer que t est une involution et que Dm “ xs, ty.
Exercices exploratoires Exercice 1.40 (Le jeu de taquin). Le jeu de taquin est constitué d’un damier 4 ˆ 4 sur les cases duquel sont disposées 15 tuiles carrées, avec une case vide. Les tuiles sont numérotées de 1 à 15. Un mouvement consiste à glisser une tuile voisine de l’emplacement vide, pour remplir cet emplacement.
1.11. EXERCICES
45
Les glissements se font verticalement ou horizontalement. La figure suivante illustre une succession de tels mouvements, avec la tuile déplacée marquée en jaune.
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9 10 12 15
13 14 11 15
13 14 11
9 10 11 12
9 10 11 12
9 10
13 14 15
13 14
13 14 11 15
15
À partir d’une configuration donnée, le jeu consiste à se ramener à la configuration de départ ; qui est celle où les tuiles sont rangées dans l’ordre croissant quand on les parcourt selon l’ordre habituel de lecture, avec la case vacante dans le coin inférieur droit. C’est la première configuration dans la figure ci-haut. Ce jeu a apparemment été introduit dans les années 1870, et ses aspects mathématiques sont discutés dans un article de l’American Journal of pure and applied mathematics en 1879. En 1891, Sam Loyd, un concepteur de casse-tête numériques et logiques, a proposé comme défi de trouver comment ramener la configuration suivante à la configuration de départ
1
2
3
4
5
6
7
8
9 10 11 12 13 15 14 Chaque configuration, qui laisse le coin inférieur droit vacant, correspond à une permutation de l’ensemble t1, 2, . . . , 15u, qui consiste à lire (dans l’ordre usuel) le numéro des cases. Le groupe G, des transformations (suites de glissements) qui laissent le coin inférieur droit vacant, peut ainsi être considéré comme sous-groupe de S15 . (a) Montrer que G est constitué de permutations paires. (b) En trouvant assez de générateurs de G, montrer que G “ A15 . (c) En déduire que le problème de Sam Loyd (voir ci-haut) est impossible à résoudre. (d) Pour chaque n, déterminer le groupe des transformations de la généralisation au damier n ˆ n du jeu de taquin. Pour démontrer plusieurs propriétés fondamentales de la théorie des fonctions symétriques, Schutzenberger 28 à introduit une adaptation du jeu de taquin à la combinatoire des tableaux de Young, ainsi 28. Marcel Paul Schutzenberger (1920-1996), est le grand-père mathématique de deux professeurs du Lacim : le centre de recherche en algèbre, combinatoire, et informatique mathématique de l’UQAM, fondé en 1990.
46
CHAPITRE 1. GROUPES
nommé en l’honneur d’un des pionniers 29 de la théorie de la représentation des groupes. Exercice 1.41. Soit A un ensemble fini quelconque, qu’on va ici appeler alphabet, dont les éléments sont appelé lettres. On dit d’une suite arbitraire a1 a2 ¨ ¨ ¨ an , avec n P N, de lettres dans A, que c’est un mot de longueur n sur A. On désigne par A˚ l’ensemble des mots de longueur quelconque sur A, et le mot de longueur 0 (ou mot vide) est dénoté par 1 ou ". On munit A˚ de l’opération de concaténation, c.-à-d. pa1 a2 ¨ ¨ ¨ an q ¨ pb1 b2 ¨ ¨ ¨ bk q :“ a1 a2 ¨ ¨ ¨ an b1 b2 ¨ ¨ ¨ bk , qui consiste simplement à coller ensemble les mots considérés. (a) Montrer que la concaténation est associative, avec le mot vide comme élément neutre. (b) Calculer le nombre de mots de longueur n sur un alphabet de longueur de k lettres. Avec cette opération, on dit que A˚ est le monoïde libre sur A.
Exercice 1.42 (Anneaux). La donnée d’une structure d’anneau sur un ensemble A, est la donnée de deux opérations sur A. La première est habituellement notée additivement, et elle fait de pA, `q un groupe commutatif, avec neutre noté 0 ; et la seconde est notée multiplicativement et fait de pA, ¨q un monoïde, avec neutre noté 1. On dit que l’anneau est commutatif si ce monoïde est commutatif. Vérifier que chacune des structures suivantes forme bien un anneau. (a) On fixe X un ensemble non vide, et soit RX “ tf | f : X Ñ Ru Rappelons qu’on dénote habituellement par 0, et 1 les fonctions constantes de valeur 0 et 1 respectivement ; et que les opérations usuelles sur les fonctions f ` g, f ¨ g, et p´f q sont caractérisées par les égalités pf ` gqpxq :“ f pxq ` gpxq, pf ¨ gqpxq :“ f pxqgpxq, p´f qpxq :“ ´f pxq.
On considère sur RX la structure d’anneau correspondante. (b) Avec les mêmes définitions, on considère la structure d’anneau sur CpRq, l’ensemble des fonctions continues de R dans R. (c) Pour un anneau unitaire A, et n • 1, on considère la structure d’anneau sur l’ensemble Mn pAq des matrices carrées n ˆ n à coefficients dans A, avec les opérations habituelles sur les matrices. Bien entendu, la matrice nulle et la matrice identité s’obtiennent en considérant que leurs coefficients correspondent aux éléments 0 et 1 de A, de la manière usuelle. 29. Alfred Young (1863-1942).
1.11. EXERCICES
47
(d) Pour A un anneau unitaire commutatif, et n variables x1 , . . . , xn , on considère l’anneau Arx1 , . . . , xn s des polynômes en les variables x1 , . . . , xn , à coefficients dans A. Les polynômes constants (incluant 0 et 1) correspondent aux éléments de A. Les opérations se définissent de la manière habituelle. Exercice 1.43. Soit A un anneau commutatif. Montrer que les éléments inversibles de Mn pAq sont les matrices dont le déterminant donne un élément inversible de A. (N.B. Le déterminant est défini de la même façon que pour les matrices réelles.) Exercice 1.44. Soit G “ ta ` bi | a, b P Zu, les entiers de Gauss, et pour z P G soit N pzq “ |z|2 . Vérifiez que G est un sous-anneau de C et que la fonction N : G Ñ N a la propriété N pxyq “ N pxqN pyq. Montrez que pour tous x, y P G, y ‰ 0, il existe q, r P G tel que x “ qy ` r et N prq † N pyq. (Notez que lorsqu’on représente G dans le plan complexe, on a N pxq † N pyq si et seulement si |x| † |y|q. Exercice 1.45 (Les quaternions de Hamilton 30 ). Soit R4 muni de l’addition et de la multiplication suivantes : pa1 , b1 , c1 , d1 q ` pa2 , b2 , c2 , d2 q “ pa1 ` a2 , b1 ` b2 , c1 ` c2 , d1 ` d2 q pa1 , b1 , c1 , d1 q ¨ pa2 , b2 , c2 , d2 q “ pa1 a2 ´ b1 b2 ´ c1 c2 ´ d1 d2 , a1 b2 ` b1 a2 ` c1 d2 ´ d1 c2 , a 1 c 2 ´ b1 d 2 ` c 1 a 2 ` d 1 b2 , a 1 d 2 ` b1 c 2 ´ c 1 b2 ` d 1 a 2 q
(a) Vérifier que p1, 0, 0, 0q est un élément neutre pour cette multiplication.
(b) Vérifier que R4 muni de cette addition et de cette multiplication forme un anneau. On appelle cet anneau l’anneau des quaternions et on le désigne par H. Exercice 1.46. Pour les valeurs p “ 3, 5, 7, 11, 13, trouvez le plus petit entier qui donne un générateur pour le groupe multiplicatif du corps Fp des entiers modulo p. Exercice 1.47. Soit K un corps fini de caractéristique p et ⇣ un générateur du groupe cyclique K ˚ . Montrez que ⇣ p est aussi un générateur de K ˚ . Exercice 1.48. On dit que A Ñ R est dense dans R si et seulement si, pour tout x P R et tout " ° 0, on a A X ty P R | |x ´ y| † "u “ H. (a) Montrer que tout sous-groupe de pR, `q est ou bien dense dans R, ou bien il existe n P R` tel que H “ nZ.
(b) Montrer que tout sous-groupe de pR, `q est soit dense dans R, soit monogène.
(c) Donner des exemples de sous-groupes non triviaux de R, qui sont dense dans R.
(d) Montrer les énoncés analogues pour le groupe des nombres complexes de normes 1, muni de la multiplication. 30. William Rowan Hamilton (1805-1865).
48
CHAPITRE 1. GROUPES
Exercice 1.49 (Groupes topologiques). Rappelons qu’une topologie sur un ensemble E est un sousensemble T de PpEq, dont les éléments sont appelés ouverts. On demande que (1) H P T , et E P T ;
(2) toute intersection finie d’éléments de T est dans T : O1 X ¨ ¨ ¨ X On P T ,
si
Oi P T ;
(3) toute réunion (pas nécessairement finie) d’éléments de T est dans T : § Oi , si @pi P Iq Oi P T . iPI
Une fonction continue entre deux espaces topologiques pE1 , T1 q et pE2 , T2 q est une fonction f : E1 Ñ E2 telle que l’image inverse de tout ouvert est un ouvert, c.-à-d. f ´1 pOq P T1 pour tout O P T2 . Par exemple, la topologie habituelle sur Rn consiste à dire que O Ñ Rn est ouvert si et seulement si pour tout x P O il existe " ° 0 tel que ty P Rn | distpx, yq † "u Ñ O, avec la distance euclidienne habituelle distpx, yq. On a une topologie sur Mn qui correspond à considérer que Mn “ Rnˆn . Un homéomorphisme d’espaces topologiques est une fonction continue bijective, dont l’inverse est continu. Un groupe topologique est un groupe muni d’une topologie, et dont l’opération est continue, ainsi que le passage à l’inverse, c.-à-d. pour tout g P G on a des fonctions continues h fiÑ g ¨ h, h fiÑ h ¨ g et h fiÑ h´1 . Les groupes de Lie sont des cas particuliers de groupes topologiques. Un isomorphisme de groupes topologiques est un isomorphisme de groupes qui est aussi un homéomorphisme. (a) Montrer que Rn avec l’addition vectorielle est un groupe topologique. (b) Montrer que GLn , Opnq, SOpnq, et SLn sont des groupes topologiques, avec la multiplication de matrices. (c) Montrer que si pE, T q est un espace topologique, alors l’ensemble HpE, Eq :“ tf | f : E Ñ E, f homéomorphismeu, avec la composition de fonctions comme opération, est un groupe.
Chapitre 2
Actions de groupes
Dans ce chapitre nous allons étudier les actions de groupes, c’est-à-dire des fonctions f : G ˆ E ›Ñ E, avec de bonnes propriétés qui assurent que f « respecte » l’opération de groupe. Intuitivement, la fonction f exprime en quoi le groupe G permet de « transformer » les éléments de E. Dans un tel contexte, on interprète f pg, xq, pour g P G et x P E, comme une certaine transformation de x selon g.
Hexaméthyltungstène.
C’est souvent la compréhension de ses actions qui permet de bien voir quel est le rôle que joue un groupe donné en mathématiques, ou dans d’autres domaines des sciences. En effet, reformulé pour des physiciens, c’est essentiellement le « principe de relativité » de Galilée 1 qui veut qu’une loi de la physique soit exprimée de façon indépendante de l’observateur. En ce sens, les chimistes utilisent la théorie des groupes pour identifier la forme d’une molécule. Pour exemple, une telle étude permet de déterminer que la molécule d’hexaméthyltungstène W pCH3 q6 à la forme décrite à la figure ci-contre.
Nous allons aussi développer un outil puissant pour l’étude des groupes : le Théorème de Lagrange 2 qui concerne une généralisation du quotient pZ, `q par son sous-groupe pnZ, `q, donnant le groupe pZn , `q “ pZ{nZ, `q. 1. Galilei Galileo, 1564–1642. 2. Joseph Louis Lagrange (1736–1813).
49
50
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
2.1
Groupes opérants sur des ensembles
On dit qu’un groupe G opère (à gauche) sur un ensemble E, si on a une fonction f : G ˆ E Ñ E, on écrit habituellement g ¨ x pour f pg, xq, telle que pour tout x P E, et tout g1 , g2 P G on ait (1) e ¨ x “ x, où e désigne le neutre de G, et (2) pg1 g2 q ¨ x “ g1 ¨ pg2 ¨ xq.
On dit aussi que f est une action de G sur E, ou encore que G agit sur E par f . Bien entendu, il peut y avoir plusieurs actions différentes d’un groupe sur le même ensemble. Pour G agissant sur E, et x dans E, l’orbite de x, notée Orbpxq, est l’ensemble de tous les points de E de la forme g ¨ x, pour g parcourant G. En formule, Orbpxq :“ ty P E : il existe g P G tel que y “ g ¨ xu. Il y a deux cas extrêmes. Le premier est le cas où il y a une seule orbite, on dit alors que l’action est transitive. Le deuxième cas est celui où chaque orbite ne contient qu’un seul élément, on dit alors que l’action est triviale. On désigne par E{G l’ensemble des orbites de l’action, c.-à-d. E{G “ tOrbpxq | x P Eu; et on constate aisément la proposition suivante. Proposition 2.1. Deux orbites distinctes, d’une action de G sur E, sont forcément disjointes. Démonstration. Voir exercice 2.1. Une autre façon d’interpréter la démonstration de cette proposition est de dire que l’action induit une relation d’équivalence sur E, définie en posant x ” y, si et seulement si Orbpxq “ Orbpyq. L’ensemble E{G est alors le quotient de E par la relation d’équivalence, les classes d’équivalences sont les orbites ; et E se décompose de façon unique comme une réunion d’orbites disjointes 3 ÿ E“ O. (2.1) OPE{G
Autrement dit, si E{G est fini, et si x1 , x2 . . . , xn sont des représentants des diverses classes d’équivalences concernées, alors E “ Orbpx1 q ` Orbpx2 q ` ¨ ¨ ¨ ` Orbpxn q, (2.2) 3. On utilise ici la notation A ` B pour l’union d’ensembles disjoints A et de B, plutôt que d’autres notations comme A Z B. Cette notation s’étend aux sommations.
2.1. GROUPES OPÉRANTS SUR DES ENSEMBLES
51
où l’utilisation de la somme entre ensembles souligne qu’on a Orbpxi q X Orbpxj q “ H, pour tout i “ j. C’est la partition en orbites disjointes de E. Le stabilisateur de x, noté Stabpxq, est l’ensemble des éléments de G qui fixe x, c.-a-d. que g ¨ x “ x. En formule, Stabpxq :“ tg P G : g ¨ x “ xu. Il est facile de voir (exercice) que c’est un sous-groupe de G. Parmi les exemples classiques, on a les suivants, plus ou moins classés selon le domaine des mathématiques concerné. Un sous-ensemble A de E est dit stable ou invariant pour l’action de G, si on a g ¨ x P A pour tout x P A, c.-à-d. g ¨ A Ñ A,
pour tout
g P G.
On peut alors restreindre l’action à A, pour obtenir une action G ˆ A Ñ A. On dit que c’est une sous-action. Les orbites d’une action de G sur E correspondent aux plus petits sous-ensembles Orbites (selon la NASA). non vides de E qui sont invariants pour l’action de G. Un sousensemble invariant A est forcément une réunion d’orbites, puisque x P A implique alors Orbpxq Ñ A. Ensembles et fonctions. Si G agit sur E, alors on peut se servir de cette action pour construire des actions de G sur les constructions ensemblistes faites à partir de E. Ainsi, on peut faire agir G sur le produit cartésien E ˆ E, en posant G ˆ pE ˆ Eq ›Ñ pE ˆ Eq,
avec
g ¨ px, yq :“ pg ¨ x, g ¨ yq,
pour px, yq P E ˆ E. Il est facile de vérifier directement que ceci donne bien une action de G. Autre exemple, si PpEq désigne l’ensemble des parties (sous-ensembles) de E, alors on a l’action G ˆ PpEq ›Ñ PpEq,
avec
g ¨ A :“ tg ¨ x | x P Au,
(2.3)
pour A dans PpEq. En particulier, l’ensemble vide est toujours un point fixe pour cette dernière action, c.-à-d. g ¨ H “ H. Il y a un grand nombre d’autres actions qui peuvent ainsi être construites. Ainsi, on a l’action de G sur l’ensemble FonctpF, Eq des fonctions de F vers E, quelque soit F . En effet, pour f : F Ñ E et g dans G, il suffit de considérer la fonction pg ¨ f q : F Ñ E, définie en posant pg ¨ f qpxq :“ g ¨ pf pxqq, pour tout x dans E. Encore une fois, c’est une action de G : G ˆ FonctpF, Eq ›Ñ FonctpF, Eq,
avec
pg, f q fiÑ g ˝ f.
L’étude des actions de groupes sur les ensembles finis correspond à une grande part de la combinatoire moderne. Un des problèmes typiques consiste à décrire explicitement la partition en orbites de telles actions. C’est souvent un problème difficile. On verra plus tard comment le groupe symétrique joue un rôle central dans ce contexte.
52
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Transformations du plan. Pour G “ pR, `q, et E “ C, on a l’action R ˆ C Ñ C,
avec
pr, zq ބ r ` z,
qui correspond aux translations horizontales du plan des complexes. L’orbite Orbpzq de z P C correspond à la droite horizontale qui passe par z, et Stabpzq “ t0u. On obtient donc C comme réunion d’orbites correspondant aux droites horizontales. Encore pour G “ pR, `q et E “ C, mais maintenant
Figure 2.1 – Orbites respectives, dans C, pour les actions par translations ou rotations. avec l’action R ˆ C Ñ C, avec p✓, zq fiÑ ei✓ z, correspondant aux rotations centrales du plan des complexes. Pour z P C, l’orbite Orbpzq est donc le cercle de centre 0 passant pas z. Encore une fois, StabpXq “ teu. Enfin, pour G “ pR˚ , ¨q et E “ C, on a l’action R˚ ˆ C Ñ C, avec pr, zq fiÑ rz, qui multiplie un nombre complexe par un réel non nul. Ce sont les homothéties du plan. Pour z P C, z ‰ 0, l’orbite Orbpzq correspond à la droite de direction z, à laquelle on enlève l’origine, et que Stabpzq “ t1u. D’autre part, pour z “ 0, l’orbite est Orbp0q “ t0u, et Stabp0q “ R˚ . Plus généralement, on s’intéresse à des groupes de transformations linéaires d’espaces vectoriels. On peut alors définir des actions de ces groupes sur les constructions faisant intervenir les espaces vectoriels de départ (produis directs, produits tensoriels, etc.). Il y a là de nombreuses connexions avec plusieurs des domaines des mathématiques et de la physique. A2
A1
s
ñ
r
A3
A0
O
A4
A5
Le groupe D6 agit sur l’hexagone.
Les isométries d’un polygone, groupe diédral. Pour un entier m • 3, on considère le polygone plan régulier convexe Pm à m sommets A0 . . . , Am´1 inscrits dans le cercle unité de centre O. Le groupe diédral Dm est le groupe des isométries du plan qui préserve Pm . On a donc que D3 est le groupe des isométries du triangle, D4 celui du carré, D5 celui du pentagone, D6 celui de l’hexagone, (voir la figure ci-contre), etc. On observe qu’un élément f P D4 (par exemple) est déterminé par une permutation des sommets A0 , A1 , A2 , A3 , où il est pratique de poser
2.1. GROUPES OPÉRANTS SUR DES ENSEMBLES
53
Ak :“ Apk mod 4q en général. On a donc A4 “ A0 , A5 “ A1 etc. Parmi les éléments de D4 on retrouve : l’identité e, la rotation r de centre 0 qui envoie Ak sur Ak`1 , la rotation r2 de centre 0 qui envoie Ak sur Ak`2 , la rotation r3 de centre 0 qui envoie Ak sur Ak`3 , etc. On remarque que r4 pA0 q “ A4 “ A0 donc r4 “ e. De plus, on a la symétrie orthogonale s, d’axe OA0 , la symétrie orthogonale t dont l’axe est la médiatrice du segment rA0 , A1 s, la symétrie orthogonale s1 d’axe OA1 et la symétrie orthogonale t1 dont l’axe est la médiatrice du segment rA1 , A2 s. On observe que t “ rs,
s1 “ r2 s,
t1 “ r3 s.
On vérifie que ce sont les seuls éléments de D4 , et donc D4 “ te, r, r2 , r3 , s, rs, r2 s, r3 su est d’ordre 2 ¨ 4 “ 8. Plus généralement, pour m • 3, on considère s la symétrie orthogonale d’axe OA0 , et r la rotation de centre O et d’angle 2⇡{m. On a alors spOq “ O
et
spAi q “ Am´i , pour tout 1 § i § m ´ 1,
rpAi q “ Ai`1 , pour tout 1 § i § m ´ 1, et rpAm´1 q “ A0 . Les transformations s et r préservent Pm , d’où on a la proposition suivante. Proposition 2.2. Soit m P N, m • 3, alors
(1) s, r P Dm . De plus, ordpsq “ 2, ordprq “ m, et srs “ r´1 .
(2) Dm “ xr, sy “ trk , srk | 0 § k § m ´ 1u est un groupe d’ordre 2m. Démonstration. (1) La première partie de la proposition est une conséquence de ce qui précède. Pour ce qui est de la deuxième partie : par définition, une symétrie vérifie s2 “ e et s “ e donc ordpsq “ 2. De plus, puisque rm pAi q “ Ai , rm (m • 3) fixe au moins trois points du plan, donc rm “ e et r, r2 . . . , rm´1 “ e donc ordprq “ m (le fait qu’une rotation d’angle 2⇡{m est d’ordre m est un résultat bien connu et que l’on vient de redémontrer). Maintenant : en posant Am “ A0 on a rsrspAi q “ rsrpAm´i q “ rspAm´i`1 q “ rpAi´1 q “ Ai Ainsi rsrs fixe plus de trois points du plan, donc rsrs “ e. D’où la relation srsr “ e.
(2) Les seules isométries qui préservent Pm sont :
(i) Les rotations d’angles 2k⇡{m, c’est-à-dire, les rk (e “ r0 ).
(ii) Les symétries d’axe OAk et celles passant par les médiatrices des segments rAi , Ai`1 s (qui peuvent être les mêmes, selon que si m est pair ou impair) : c’est à dire les srm´k . D’où le résultat.
54
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
La relation rsrs “ e suffit à construire Dm , pour peu que l’on sache que s2 “ e et rm “ e, on dit que Dm est présenté par les générateurs s, r et les relations s2 “ rm “ srsr “ e. On note ce fait comme suit Dm “ xs, r | s2 “ rm “ srsr “ ey. L’action par conjugaison de G sur G. Une autre action intéressante, de G sur lui-même, est celle obtenue en posant G ˆ G Ñ G, avec pg, hq fiÑ g ¨ h :“ ghg ´1 . C’est l’action par conjugaison. On a bien e ¨ h “ ehe´1 “ ehe “ h et
pg1 g2 q ¨ h “ pg1 g2 qhpg1 g2 q´1 “ g1 g2 hg2´1 g1´1 “ g1 pg2 ¨ hqg ´1 “ g1 ¨ pg2 ¨ hq. On dit de Orbphq que c’est la classe de conjugaison de h, et de ses éléments que ce sont les conjugués de h. On dit du stabilisateur Stabphq “ tg P G | ghg ´1 “ hu “ tg P G : gh “ hgu, que c’est le centralisateur de h, et on le dénote alors Cphq. Plus généralement, on considère sur E “ PpGq, l’action de G ˆ PpGq Ñ PpGq,
avec
g ¨ X “ gXg ´1 :“ tgxg ´1 : x P Xu.
Si X “ H est un sous-groupe de G, alors OrbpHq consiste en les conjugués de H, et StabpHq “ tg P G : gHg ´1 “ Hu est appelé normalisateur de H. On le dénote alors par N pHq. Si N pHq “ G, on dit de H que c’est un sous-groupe normal. Autrement dit, H est normal si et seulement si on a H “ gHg ´1 ,
pour tout
g P G.
On écrit alors, H Ÿ G. Il est clair que H est toujours un sous-groupe normal de StabpHq, c.-à-d. H Ÿ StabpHq. Nous allons voir plus loin que la notion de sous-groupe normal joue un rôle très important.
2.2
Actions de SE
Pour un ensemble (fini) E, on a plusieurs actions intéressantes du groupe G “ SE . La plus simple est l’action naturelle SE ˆ E Ñ E, avec g ¨ x “ gpxq.
2.2. ACTIONS DE SE
55
Plusieurs exemples s’obtiennent par des constructions ensemblistes classiques. Ainsi, on a l’action de SE sur les produits cartésiens # E ˆ E n´1 si n ° 1, E n :“ E si n “ 1. obtenue en posant
¨ px1 , x2 , . . . , xn q “ p px1 q, px2 q, . . . pxn qq,
pour les xi P E. On a aussi l’action de E sur l’ensemble PpEq des parties de E (voir (2.3)), obtenue en posant ¨ A :“ t pxq | x P Au.
Combinant ces deux constructions, on a l’action de SE sur l’ensemble des relations sur E, c.-à-d. sur l’ensemble PpE ˆ Eq : ¨ R :“ tp pxq, pyqq | px, yq P Ru. D’autres exemples classiques correspondent à des actions de SE sur l’ensemble FpEq des fonctions de E vers E. Ainsi, on a l’action par conjugaison ¨ f :“
´1
˝f ˝
,
pour f : E Ñ E ; l’action par composition à gauche ¨ f :“
˝ f;
ou l’action par composition à droite ¨ f :“ f ˝
´1
.
Observons, dans ce dernier cas, que le fait d’utiliser l’inverse assure qu’on a bien une action, puisque p ˝ ⌧q ¨ f
“ f ˝ p ˝ ⌧ q´1 “ f ˝ p⌧ ´1 ˝ “ pf ˝ ⌧
´1
“ p⌧ ¨ f q ˝ “
q˝
´1
q
´1
´1
¨ p⌧ ¨ f q.
On peut poursuivre ce genre de constructions dans toutes sortes de directions. C’est en fait le coeur d’une grande partie de la combinatoire, qui donne lieu entre autres à la Théorie des espèces de structures 4 . Les notions de stabilisateurs, d’orbites, et plusieurs autres concepts de la théorie des groupes y jouent un rôle 4. Développée par les mathématiciens de l’UQAM dans les années 1980. Voir un texte d’introduction disponible sur le web à l’adresse : http://bergeron.math.uqam.ca/files/2013/11/book.pdf.
56
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
fondamental. Exploitant des idées de la théorie des groupes (et de la théorie des catégories), la théorie des espèces (combinatoire) permet de résoudre de manière élégante (algébrique) un grand nombre de problèmes concernant des objets comme les fonctions, les graphes, les arbres, les permutations, les dérangements, les partitions, les ordres, etc. En plus de donner des fondements rigoureux à un large pan de la combinatoire énumérative, la théorie des espèces donne un riche contexte algébrique pour la construction de nouvelles espèces de structures. En plus de riches liens avec de nombreux domaines des mathématiques, elle a des applications en Physique théorique (diagrammes de Feynman, Théorie quantique des champs, etc.), Informatique théorique (Structures de données, Analyse de la complexité d’algothimes, Programmation fonctionnelle, Sémantique des langages de programmation, etc.), et dans l’étude de certains processus stochastiques.
2.3
Classes modulo un sous-groupe
S’inspirant de la relation de congruence modulo n dans Z : ssi
a ” b pmod nq
p´aq ` b P nZ,
on considère la définition suivante. Pour H sous-groupe d’un groupe G, on considère la congruence à gauche modulo H sur G, définie en posant g1 ” g2
pmod Hq ñ g1´1 q2 P H.
(2.4)
C’est une relation d’équivalence (voir la preuve ci-dessous), et on dit de la classe d’équivalence x H “ tg h | h P Hu,
pour
g P G,
que c’est une classe à gauche modulo H. On note G{H l’ensemble quotient résultant, c.-à-d. G{H :“ tg H | g P Gu
(2.5)
Pour G noté additivement, on écrit x ` H pour la classe d’équivalence de x modulo H. On retrouve alors la notation « usuelle » pour le cas G “ Z et H “ nZ, à savoir k ` nZ, pour k P Z ; et l’ensemble quotient est bien Zn “ Z{nZ. Observons que xH “ H si et seulement si h P H. Observons aussi que, pour x “ y, il est fort possible que xH “ yH. On vérifie (exercice) que cela ne se produit que dans la cas où xH “ yH ñ x´1 yH “ H ñ y ´1 xH “ H ñ x´1 y P H. (2.6) C’est le critère d’égalité de classes à gauche.
De façon toute similaire, on a une notion de congruence à droite modulo H, définie en posant x ”d y
ñ
xy ´1 P H.
2.3. CLASSES MODULO UN SOUS-GROUPE
57
On pose aussi que Hx “ thx | h P Hu. C’est la classe à droite modulo H. L’ensemble quotient résultant est noté HzG. Comme pour les classes à gauche, on a la caractérisation suivante des classes à droite y P xH ssi y ´1 P Hx´1 .
Pour G est abélien, les deux notions de classes à gauche et à droite coïncident, c.-à-d. que xH “ Hx pour tout x P G. On dit d’un sous-groupe tel que xH “ Hx, pour tout x P H, qu’il est normal. Nous approfondirons ces notions au Chapitre 4. Il est évident que tout groupe G contient au moins deux sous groupes normaux, dit triviaux. Il s’agit simplement du sous-groupe teu, et de G lui-même. Un groupe est dit simple si et seulement si ces seuls sous-groupes normaux sont ces deux sous-groupes triviaux. Un de aspect fondamental de cette notion est que : tout groupe fini peut se « construire » à partir des groupes finis simples (voir Section 3.7). Le fait que H soit un sous-groupe assure que la relation ”, définie en (2.4), est bien une « relation d’équivalence ». En effet la réflexivité découle de ce que e P H, puisqu’alors x´1 x “ e P H, et donc x ” x ; la symétrie découle du fait que tout élément est inversible dans H, ce qui fait que y ´1 x “ px´1 yq´1 P H, et donc x ” y si et seulement si y ” x ; et la transitivité du fait que H est stable. En effet, si x ” y et y ” z alors x´1 y P H et y ´1 z P H, et alors on a x´1 z “ x´1 yy ´1 z P H
ùñ
x ” z.
Reste à montrer que la classe d’équivalence de x est bien xH “ txh | h P Hu. On raisonne comme suit. Par définition, pour y P xH, on a h P H tel que y “ xh. Donc x´1 y “ h P H et il s’ensuit que x ” y. Réciproquement, soit y ” x, alors h “ x´1 y P H. Il existe donc h P H tel que y “ xh, ce qui prouve l’affirmation. Une propriété importante des classes à gauche (ou à droite) est soulignée par la proposition suivante. Proposition 2.3. Soit G un groupe et H § G, alors
(1) Pour tout x P G, xH, Hx et H ont même cardinal.
(2) Les ensembles quotients G{H et HzG sont en bijection. Démonstration. On montre d’abord que la fonction h fiÑ xh est une bijection de H sur xH (exercice). Posons f pxHq “ Hx´1 , pour tout x P G. La fonction f : G{H Ñ HzG est bien définie, à savoir que xH “ yH ñ x´1 y P H ñ H “ Hx´1 y ñ Hy ´1 “ Hx´1 . Montrons que f est une bijection. Elle est injective, puisqu’on a f pxHq “ f pyHq ñ Hy ´1 “ Hx´1 ñ xH “ yH. De plus, f est surjective, puisque Hx P HzG entraînef px´1 Hq “ Hpx´1 q´1 “ Hx.
58
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Cette proposition rend possible la définition suivante, pour tout H sous-groupe d’un groupe G. On dit du cardinal de l’ensemble quotient G{H (qui est égal au cardinal de HzG) que c’est l’indice de H dans G. On le note rG : Hs :“ | G{H | (2.7) Lorsque G{H est un ensemble fini, on dit que H est d’indice fini dans G. Par exemple, on a rZ : nZs “ n. L’indice peut donc être fini même si G et H sont infinis. Le théorème suivant permet de calculer l’indice. Théorème 2.4 (Théorème de Lagrange). Soit G un groupe fini et H § G alors |G| “ |H| ¨ rG : Hs. En particulier, l’ordre de tout sous-groupe de G divise l’ordre de G, et l’ordre de tout élément de G divise l’ordre de G. Démonstration. Comme ” est une relation d’équivalence, G{H est une partition de G. On obtient alors ÿ ÿ |G| “ |xH| “ |H| “ |G{H| |H| “ |H| rG : Hs. xHPG{H
xHPG{H
Puisque l’ordre de x P G est l’ordre du sous-groupe xxy, on obtient bien l’ordre de tout élément de G divise |G|. Corollaire 2.5. Pour G un groupe fini d’ordre n, alors xn “ e pour tout x P G. De plus, si p est premier, alors G est un groupe cyclique.
Démonstration. Soit x P G, d’ordre d. Le théorème de Lagrange assure que d divise |G| “ n. On a donc k P N tel que n “ d k, et on a donc xn “ xd k “ pxd qk “ ek “ e. La seconde partie est laissée en exercice. La prochaine étape de notre cheminement consiste à faire agir G sur G{H. Pour ce faire, on exploite l’action de G sur lui-même par multiplication à gauche : G ˆ G Ñ G,
avec
g ¨ h :“ gh.
On a bien e ¨ h “ eh “ h et pg1 g2 q ¨ h “ pg1 g2 qh “ g1 pg2 hq “ g1 ¨ pg2 ¨ hq, puisque c’est l’associativité de l’opération de G. Plus généralement, on considère E “ PpGq c’est-à-dire l’ensemble des parties de G. On a alors l’action de G ˆ PpGq Ñ PpGq,
avec
g ¨ X “ gX :“ tgx : x P Xu.
2.4. ORBITES VS STABILISATEURS
59
Si X “ H est un sous-groupe de G, on a vu plus haut que les orbites OrbpHq sont les classes à gauche de H, et StabpHq “ tg P G : gH “ Hu “ H. Pour tout sous-groupe H, le groupe G agit sur le quotient G{H en posant G ˆ G{H Ñ G{H, avec h ¨ pgHq :“ phgqH. (2.8) Il faut alors vérifier que cela est une « bonne définition ». En effet, rien n’assure (a priori) que l’effet de h sur g1 H sera le même que sur g2 H, pour g1 “ g2 avec g1 H “ g2 H. Le calcul suivant montre que cela est toujours le cas. Nous sommes maintenant presque prêts à aborder la classification des actions de groupes.
2.4
Orbites vs stabilisateurs
Comme on va le voir à la section 2.6, la proposition suivante ouvre la porte à la description de « toutes » les actions de groupes. Elle suggère aussi que la compréhension des orbites est importante. Proposition 2.6. Soit G un groupe agissant sur un ensemble E, et x P E, alors la relation « l’élément x est dans l’orbite de l’élément y » est une relation d’équivalence sur E. En conséquence, E est la réunion disjointe des orbites. Démonstration. Par définition, x P Orbpyq si et seulement si il existe g P G tel que y “ g ¨ x. La relation considérée est donc x „ y, si et seulement si il existe g P G tel que y “ g ¨ x. En prenant g “ e on voit que « „ » est réflexive. Comme y “ g ¨ x si et seulement si x “ g ´1 ¨ y, la relation est symétrique. Enfin, vérifier la transitivité correspond à constater que z “ h ¨ y et y “ g ¨ x entraîne que z “ phgq ¨ x. Autrement dit, le fait qu’on ait une relation d’équivalence correspond exactement aux propriétés qui caractérisent une action. On relie l’étude des orbites à l’étude des stabilisateurs via la proposition suivante. De plus la proposition révèle un lien important entre stabilisateurs d’éléments qui se trouvent dans une même orbite. Cela nous sera fort utile pour comprendre les actions transitives. Proposition 2.7. Pour tout groupe G opérant sur un ensemble E, et x P E, on a les propriétés suivantes. (1) Il y a une bijection entre Orbpxq et les classes à gauche de Stabpxq. En particulier, si Orbpxq est fini, alors Stabpxq est d’indice fini et | Orbpxq | “ rG : Stabpxqs. (2) Si Orbpxq “ Orbpyq, alors Stabpxq et Stabpyq sont conjugués.
60
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Démonstration. (1) Considérons les ensembles Orbpxq et tg Stabpxq : g P Gu (ce sont les éléments G{Stabpxq). Notons que g ¨ x “ g1 ¨ x
g 1´1 ¨ pg ¨ xq “ g 1´1 .pg 1 ¨ xq
ñ ñ
pg 1´1 gq ¨ x “ pg 1´1 g 1 q ¨ x
ñ
pg 1´1 gq ¨ x “ x
pg 1´1 gq ¨ x “ e ¨ x
ñ
g 1´1 g P Stabpxq
ñ On peut donc définir la fonction
g Stabpxq “ g 1 Stabpxq.
ñ
Orbpxq Ñ tg Stabpxq : g P Gu,
avec
g ¨ x fiÑ g Stabpxq,
qui donne une bijection. (2) Supposons y “ g ¨ x. Alors g ´1 ¨ y “ pg ´1 gq ¨ x “ x. Montrons que Stabpyq Ñ g Stabpxqg ´1 et g Stabpxqg ´1 Ñ Stabpyq. Soit h P Stabpyq, alors on a h ¨ pg ¨ xq “ g ¨ x
ñ
phgq ¨ x “ g ¨ x
ñ
g ´1 hg P Stabpxq,
ñ
g ´1 hg ¨ x “ x
et on a h “ gpg ´1 hgqg ´1 . Cela montre la première inclusion. Soit k P Stabpxq. On a gkg ´1 ¨ y “ pgkq ¨ pg ´1 yq “ gk ¨ x “ g ¨ pk ¨ xq “ g ¨ x “ y. Cela montre la deuxième inclusion. Corollaire 2.8. Soit G opérant sur E, où G et E sont finis. Soit E “ Orbpx1 q ` . . . ` Orbpxn q, la partition de E en orbites pour cette action (voir (2.2)). Alors |E | “
n ÿ
i“1
rG : Stabpxi qs.
Ce corollaire est à la base de beaucoup d’applications des groupes finis. En particulier, on a la suivante. Pour l’action de G sur lui-même par conjugaison, on a la partition en orbites G “ Orbph1 q ` . . . ` Orbphr q,
pour un bon choix de éléments h1 , . . . , hr . Notons que h P ZpGq
ñ
Orbphq “ thu,
où on rappelle que ZpGq désigne le centre de G. On conclut donc qu’on a la formule ÿ | G | “ | ZpGq | ` rG : Cphi qs hi RZpGq
(2.9)
2.5. LEMME DE BURNSIDE
2.5
61
Lemme de Burnside
Quand E et G sont finis, avec G agissant sur E, on s’intéresse souvent à calculer le nombre d’orbites de E pour cette action. Le lemme 5 de Burnside permet de transformer ce « difficile » calcul en un calcul plus facile du nombre moyen d’éléments de E qui sont fixés par les éléments de G. On désigne fixg pEq, l’ensemble des points fixés par g dans E, c.-à-d. On a alors l’énoncé suivant.
fixg pEq :“ tx P E | g ¨ x “ xu.
Théorème 2.9 (Lemme de Burnside-Cauchy-Frobenius). Pour toute action d’un groupe fini G, sur un ensemble fini E, on a 1 ÿ |E{G| “ | fixg pEq |. |G| gPG Démonstration. La preuve consiste simplement à calculer le cardinal de l’ensemble de deux manières. D’abord,
| tpg, xq P G ˆ E | g ¨ x “ xu |, | tpg, xq P G ˆ E | g ¨ x “ xu | “
ÿ
gPG
| fixg pEq |.
Utilisant la première partie de la proposition 2.7, c.-à-d. | G | “ | Stabpxq | ¨ | Orbpxq |, on trouve d’autre part ÿ | tpg, xq P G ˆ E | g ¨ x “ xu | “ | Stabpxq | xPE
“
ÿ
xPE
“ |G| “ |G|
|G| | Orbpxq | ˜ ÿ ÿ
1 |O| xPO
OPE{G
ÿ
¸
1,
OPE{G
“ | G | ¨ | E{G |.
Comparant les deux calculs, on trouve l’énoncé de la proposition.
5. Il n’est pas dû à William Burnside (1852–1927), qui l’a énoncé comme un lemme dans son livre : The Theory of Groups of Finite Order. Il semble plutôt dû à Ferdinand Georg Frobenius (1849-1917), ou même à Augustin Louis Cauchy (1789 -1857) avant lui. Depuis lors, c’est le surnom qu’on donne couramment à cet énoncé.
62
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES 3
4 1
2
Coloration du tétraèdre. (La face cachée est bleue) où p ¨ f qpxq :“ f p que
´1 pxqq.
Un exemple typique est le suivant. On considère l’ensemble des colorations des faces d’un tétraèdre avec k couleurs, à symétries près du tétraèdre. Autrement dit, deux colorations sont considérées comme équivalentes si on peut passer de l’une à l’autre via une des symétries du tétraèdre. Si les sommets du tétraèdre sont étiquetés t1, 2, 3, 4u, les faces s’identifient aux 4 sous-ensembles à trois éléments A :“ t1, 2, 3u, B :“ t1, 2, 4u, C :“ t1, 3, 4u, et D :“ t2, 3, 4u. Une coloration est une simplement une fonction tA, B, C, Du ›Ñ t1, 2 . . . , ku. Les symétries du tétraèdre correspondent exactement aux permutations de tA, B, C, Du, et l’action de sur une coloration f est de produire la nouvelle coloration ¨ f : tA, B, C, Du ›Ñ t1, 2 . . . , ku,
La présence de l’inverse assure qu’on a bien une action, puisqu’on calcule p⌧ ¨ p ¨ f qqpxq “ p ¨ f qqp⌧ ´1 pxqq “ fp
´1
p⌧ ´1 pxqq
“ f pp⌧ ˝ q´1 pxq “ p⌧ ˝ q ¨ f pxq.
Pour comprendre quand une coloration est fixée par une permutation, il suffit de considérer sa
Figure 2.2 – Autres colorations possibles du tétraèdre (la face cachée aussi est colorée). décomposition en cycles disjoints. En effet, toutes les faces qui sont dans le même cycle doivent être colorées de la même façon, et c’est la seule condition qui doit être satisfaite. Le nombre de colorations laissées fixes par une permutation est donc k p q , où p q est le nombre de cycles de (incluant les cycles de longueur 1). Rappelons que le type cyclique des permutations considérées est l’un des 5 partages de 4, et que le nombre de permutations ayant ces types respectifs sont : une permutation de type 1111 (qui fixe k 4 colorations), six permutations de type 211 (qui fixent k 3 colorations), trois permutations de type 22 (qui fixent k 2 colorations), huit permutations de type 31 (qui fixent k 2 colorations), et six de
2.6. MORPHISMES D’ACTIONS, SOMMES D’ACTIONS, ET ACTIONS TRANSITIVES.
63
type 4 (qui fixent k colorations). En sommant pour les 5 termes, et divisant par 24, on trouve par le lemme de Burnside que le nombre de k-colorations à symétries près du tétraèdre est : ˆ ˙ 1 4 kpk ` 1qpk ` 2qpk ` 3q k`3 3 2 2 pk ` 6 k ` 3 k ` 8 k ` 6 kq “ “ . 4 24 24 Les applications de ce genre mènent à la Théorie de Pólya 6 , qui considère en général l’énumération des structures discrètes modulo l’action d’un groupe.
2.6
Morphismes d’actions, sommes d’actions, et actions transitives.
Pour comparer deux actions G ˆ E Ñ E,
et
G ˆ F Ñ F,
de G, on considère les fonctions ✓ : E Ñ F qui « préservent » l’action. Plus précisément, on dit que ✓ est un morphisme d’action, si et seulement si on a ✓pg ¨ xq “ g ¨ ✓pxq,
(2.10)
pour tout g dans G, et tout x dans E. Soulignons que le sens de g ¨ p´q est différent à gauche de l’égalité ci-dessus. À gauche, c’est la première action qui est en cause, et à droite la seconde. Si ✓ est une fonction bijective, alors on dit que c’est un isomorphisme d’action. Informellement, deux actions isomorphes sont les « mêmes ». Un des problèmes centraux de la théorie des groupes est de « classifier » toutes les actions d’un groupe, à isomorphisme près. Se restreignant au cas fini pour simplifier l’histoire, une partie de la réponse débute par l’observation suivante. On peut introduire la notion suivante de « somme » d’actions de G. Si G agit sur deux ensembles (disjoints) E et F , on a une action de G sur E ` F , l’union disjointe des ensembles E et de F . En effet, on défini G ˆ pE ` F q Ñ pE ` F q en posant, pour z P pE ` F q, que g ¨ z se calcule avec l’action de G sur E si z P E, et avec l’action de G sur F si z P F . La proposition suivante est alors une traduction directe de la proposition 2.6, où chaque orbite correspond à une composante transitive. Proposition 2.10. Pour G et E fini, toute action de G sur E se décompose de façon unique en une somme finie d’actions transitives, c.-à-d. qu’on a un isomorphisme ' : E ›Ñ E1 ` E2 ` . . . ` Ek , avec k fixé, et les Ei uniques à isomorphisme près et à l’ordre des termes près. 6. Le théorème de Pólya originellement dû à John Howard Redfield, a été redécouvert par George Polya (1887-1985) qui en a souligné les applications à la classification des isomères.
64
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Cette proposition montre que la classification des actions d’un groupe (fini) se ramène à la classification de ses actions transitives (à isomorphisme près). Nous allons voir qu’il y en a un nombre fini. On amorce cette partie de notre histoire avec la proposition suivante, qui ne suppose pas que G ou E soit fini. Proposition 2.11. Pour tout sous-groupe H de G, l’action de G sur G{H définie en (2.8) est transitive. Démonstration. Il suffit d’observer que toute classe à gauche xH s’obtient évidement de la classe H par l’action de x sur H, c.-à-d. x ¨ H “ x H. La prochaine étape consiste à montrer que toute autre action transitive G ˆ E Ñ E, est isomorphe à l’une des actions G{H, pour un bon choix de H. Autrement dit, on cherche une bijection ✓ : E Ñ G{H, avec un candidat judicieux du sous-groupe H. La clé est la proposition 2.7. En effet, on a déjà observé que le stabilisateur de l’élément H de G{H est le sous-groupe H (donc H joue deux rôles distincts ici). Cela suggère d’utiliser la stratégie suivante. On choisit x P E (le choix n’a pas d’importance), et on pose H :“ Stabpxq. La bijection ✓ est alors définie en posant ✓pyq :“ g H
ssi
y “ g ¨ x,
et nous avons déjà vérifié que cela est une bonne définition. Bien entendu, l’inverse de ✓ est ✓´1 pg Hq :“ g ¨ x. Pour achever notre entreprise de classification des actions transitives de G, on doit déterminer quand deux sous-groupes H et K donnent des actions G{H et G{K qui sont isomorphes. On aura alors une « classification » complète (et sans redondance) des actions transitives de G, à isomorphisme d’actions près. La réponse à cette dernière question correspond aussi au cas particulier d’une seule orbite de la Proposition 2.7, et se reformule comme suit. Théorème 2.12. Toute action transitive d’un groupe G est isomorphe à une action de la forme G{H, pour H un sous-groupe de G. Deux telles actions G{H et G{K sont isomorphes, si et seulement si H et K sont conjugués. C’est donc dire qu’il existe g P G, tel que K “ g ´1 H g. Corollaire 2.13. Pour G fini, le nombre d’actions transitives distinctes de G est égal au nombre de classes de conjugaison de sous-groupes de G. Avec un système de calcul formel, on peut calculer explicitement tous les sous-groupes d’un groupe fini. Dans le cas particulier du groupe symétrique S4 , on obtient qu’il y a 30 tels sous-groupes, qui sont inclus 7 les uns dans les autres de la manière illustrée à la Figure 2.3. Le sous-groupe K4 (le groupe de Klein) est un sous-groupe normal de A4 , d’ordre 4. On constate qu’il y a 11 classes de conjugaison de sous-groupes de S4 , avec les sous-groupes d’une même classe de même couleur (non étiquetté). Les seuls 7. Un treillis est un ensemble ordonné avec certaines bonnes propriétés. Pour plus de détails, voir ici.
2.6. MORPHISMES D’ACTIONS, SOMMES D’ACTIONS, ET ACTIONS TRANSITIVES.
65
S4
A4
Légende : : xpijqy
: xpijqpklqy : xpijkqy
K4
: xpikjlqy
: xpijq, pklqy
: xpijq, pikqy
: xpijklq, pijq, pklqy
teu Figure 2.3 – Le treillis des 30 sous-groupes de S4 . sous-groupes normaux sont ceux qui sont étiquettés, c.-à-d. teu, K4 , A4 et S4 . Les premiers termes de la suite donnant le nombre de sous-groupes de Sn sont 1, 1, 2, 6, 30, 156, 1455, 11300, 151221, 1694723, 29594446, 404126228, 10594925360, 175238308453, . . . D’autres termes sont connus, le plus grand étant le 18-ième qui égal à 7598016157515302757. Pour l’instant, il semble difficile d’aller beaucoup plus loin dans le calcul de ces nombres. Les premiers termes de la suite donnant le nombre de classes de conjugaisons de sous-groupes de Sn sont : 1, 1, 2, 4, 11, 19, 56, 96, 296, 554, 1593, 3094, 10723, 20832, 75154, 159129, 686165, 1466358, 7274651, . . . Il ne semble pas qu’on en connaisse d’autres termes, et aucune formule n’est connue pour cette suite. Seul un calcul « brutal » permet de l’obtenir. La proposition suivante donne une autre indication de l’importance du groupe des permutations, sur laquelle nous reviendrons à la Section 3.5 Proposition 2.14. Soit G qui opère sur E. Pour g P G, posons g
Alors
g
: E Ñ E,
est une bijection de E sur lui-même.
avec
g pxq
:“ g ¨ x.
66
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Démonstration. Montrons que x P E quelconque. On a
g
est surjectif et injectif. Pou montrer la surjectivité, on considère
x “ e ¨ x “ pgg ´1 q ¨ x “ g ¨ pg ´1 ¨ xq “
g pg
Il s’ensuit que chaque x P E possède au moins un antécédent par g pxq “ g pyq, on a alors g
´1
´1
¨ xq.
g.
Pour l’injectivité, supposons
g¨x “ g¨y
¨ pg ¨ xq “ g ´1 ¨ pg ¨ yq
pg ´1 gq ¨ x “ pg ´1 gq ¨ y e¨x “ e¨y x “ y
Donc chaque z P E possède bien au plus un antécédent par
g.
Cette proposition donne une fonction : G Ñ SE , définie par pgq :“ g . C’est un exemple de ce qu’on appelle un « morphisme » de groupes au Chapitre 3. On verra alors que tout morphisme de groupe G Ñ SE correspond à une action de G sur E.
2.7
Le système de cryptographie RSA
La généralisation suivante du petit théorème de Fermat 8 (due à Gauss 9 ), se comprend bien du point de vue de la théorie des groupes. Ce n’est qu’un cas particulier du théorème de Lagrange. Comme on va le voir, le théorème rend possible 10 le système de cryptographie à clé publique « RSA ». Théorème 2.15 (Fermat-Euler). Soit n P N˚ et a un entier premier avec n alors a'pnq ” 1 pmod nq où ' est l’indicatrice d’Euler 11 . En effet, comme a est premier avec n, le sous-groupe xay qu’il engendre dans Zˆ n est un groupe multiplicatif d’ordre 'pnq. La conclusion est alors assurée par Lagrange. 8. 9. 10. 11.
Pierre Fermat, 1601-1665. Carl Friedrich Gauss (1777-1855). Cela n’est qu’une de ses nombreuses applications. Leonhard Euler, 1707-1783.
2.7. LE SYSTÈME DE CRYPTOGRAPHIE RSA
67
Les systèmes de cryptographie à clé publique sont de grand intérêt dans le contexte des transactions informatiques. L’algorithme RSA 12 est le plus connu, et il très simple à décrire avec les outils dont nous disposons maintenant. La sécurité du système RSA est basée sur le fait que la puissance modulaire est très facile à calculer, mais très difficile à inverser. Cette dernière difficulté repose sur la difficulté (même avec des ordinateurs très puissants) de factoriser de très grands nombres en nombres premiers. Nous n’avons besoin que du lemme suivant. Lemme 2.16. Si n “ pq avec p “ q nombres premiers, alors 'pnq “ pp ´ 1qpq ´ 1q. Démonstration. En effet, k § n n’est pas premier avec pq si et seulement si p ou q est diviseur de k. Donc k § n est premier avec n si et seulement si p et q ne sont pas diviseurs de k. Donc k P tab | 1 § a † p, 1 § b † qu de cardinal pp ´ 1qpq ´ 1q est l’ensemble des nombres plus petits que n et premiers avec n, d’où le résultat.
Le système RSA. Chaque intervenant, on l’appelle souvent Bob, se construit une clef publique, c.-à-d. un couple d’entiers pn, eq, de la manière suivante. (a) En premier lieu, Bob se génère 13 un couple de très grands nombres premiers p et q, qu’il gardera secret. Bob restera donc le seul à connaître p et q. Et il calcule n :“ pq.
(b) Bob génère ensuite un troisième grand entier e quelconque, mais relativement premier à 'pnq “ pp ´ 1qpq ´ 1q. L’entier e est donc inversible dans Z'pnq .
La clef publique pn, eq est alors partagée avec tous les autres intervenants (toujours en gardant p et q secret). Parmi ces autres intervenants se trouve Alice, qui cherchera à communiquer secrètement avec Bob. Pratiquement, il est impossible 14 de retrouver p et q à partir de n. Grâce à sa connaissance de p et q, Bob est en mesure de calculer facilement (avec l’algorithme d’Euclide) sa clef privée, c.-à-d. l’entier d tel que d est l’inverse de e dans Z'pnq . Sans connaître p et q, la valeur de 'pnq est « très » difficile à calculer (encore une fois dans un temps raisonnable), et c’est donc le cas aussi pour d. Voilà, tout est en place.
Chiffrement d’un message. Pour envoyer son message M (c’est un nombre plus petit que n) à Bob, Alice procède comme suit. Au moyen de la clef publique pn, eq de Bob, Alice calcule C ” M e pmod nq. Cela peut se faire très efficacement et rapidement. Alice publie le message C à l’intention de Bob. Tous les intervenants connaissent la clé publique de Bob, et le message codé d’Alice. 12. Rivest, Shamir et Adleman (1977). 13. Il existe des algorithmes “simples” et efficaces pour ce faire. 14. Ce n’est pas un théorème, mais on ne sait pas le faire dans un temps raisonnable (au moins quelques années), même avec les ordinateurs les plus puissants.
68
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Déchiffrement du message. Seul Bob peut déchiffrer le message C d’Alice. Il lui suffit de calculer C d modulo n. Le Théorème d’Euler-Fermat assure que le résultat est bien M , le message original d’Alice. Démonstration. En effet, C d ” pM e qd ” M ed ” M ¨ M 'pnqk “ M ¨ pM 'pnq qk pmod nq car ed ” 1 pmod 'pnqq (e “ d ´1 ). Donc si M est premier avec n, en vertu du théorème C d ” M pmod nq. Si M n’est pas premier avec n, puisque M † n, alors p divise M ou q divise M . Si p divise M alors M ed ” 0 ” M pmod pq. Si p ne divise pas M , alors le petit théorème de Fermat assure que M p´1 ” 1 pmod pq ùñ M ed ” M ¨ pM p´1 qkpq´1q ” M pmod pq. En procédant de même avec q, on en déduit que p et q divisent M ed ´ M donc n aussi divise M ed ´ M . D’où C d ” M ed ” M pmod nq. Puisque M † n, le résultat de ce calcul est M .
Exemple. En pratique, on s’attend à travailler avec de grands nombres premiers p et q comme les suivants : p “ 632382913902128079995508264334209792839330997 050865499213108496836190519861047497803309801 q “ 558218333272171098430334114939430707924967254 197312990249604572758081938867755300016964127. L’exposant e est lui aussi un grand nombre, comme e “ 150650905007553408748182082815984929359632269 852681585809504709739738485231104248045693804 710098188302655538010818866476054310788175542 136407374106205605523687223946800025812242019. Illustrons plutôt le processus avec de petits nombres comme p “ 7 et q “ 13. On a n “ 7 ¨ 13 “ 91, 'pnq “ p7 ´ 1qp13 ´ 1q “ 72 ;, et on peut choisir e “ 23. Alors,
2.8. LE GROUPE DES ISOMÉTRIES DU CUBE
69
(a) La clef publique est p91, 23q. (b) Après calcul, on trouve la clef privée est d “ 47. En effet 23 ¨ 47 “ 1 ` 15 ¨ 72 ” 1 pmod 'pnqq. Supposons que le message est M “ 8, alors le message crypté est C “ pM e mod nq “ p823 mod 91q “ 57. Pour décoder le message, on trouve bien pC d mod nq “ p5747 mod 91q “ 8.
2.8
Le groupe des isométries du cube
2 1
7
On considère un cube C comme une partie de avec l’action naturelle du groupe des isométries ISOR3 , sur R3 . Cette action donne aussi une action de ISOR3 sur l’ensemble PpR3 q des parties de R3 R3 ,
ISOR3 ˆ PpR3 q Ñ PpR3 q,
6
pour laquelle on ne conserve que les isométries qui préservent le cube, c’est-à-dire le stabilisateur de C ↵ pour cette action. Nous allons déterminer ce groupe à isomorphisme près. Puisque les distances et les angles sont conservés par le groupe, on peut considérer que 3 8 G permute les sommets entre eux. Ceci permet de considérer G comme un groupe de permutation des 4 5 sommets, via le morphisme de restriction ⇢ : G Ñ S8 , où ⇢pgq :“ g |tsommetsu . Un premier élément de G est ↵, la rotation d’angle ⇡{2 autour de l’axe vertical Figure 2.4 – Rotations du cube. passant par le centre des faces 1234 et 5678. Comme permutation, décomposée en cycles, ↵ s’exprime comme ↵ “ p1234qp5678q.
C’est donc un élément d’ordre 4. De même, on a la rotation , d’angle ⇡{2 autour de l’axe vertical passant par le centre des faces 1276 et 4385, qui s’exprime comme la permutation d’ordre 4 “ p1276qp4385q.
70
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
De plus, on considère , la rotation d’angle 2 ⇡{3 autour de l’axe qui passe par les points 1 et 8, telle que “ p246qp357q.
C’est donc un élément d’ordre 3, avec 1 et 8 comme points fixes ; et on calcule que 2 “ p264qp375q. Le groupe engendré par ↵, et donne toutes les isométries du cube qui en respecte l’orientation 15 . Restent les « réflexions » du cube, c.-à-d. les isométries d’ordre 2 qui renverse l’orientation. Pour les obtenir, il suffit d’ajouter la réflexion par rapport au plan 1487, dont la décomposition cyclique est :“ p26qp35q,
Image miroir
et dont les points fixes sont 1, 4, 7 et 8. On veut vérifier que le groupe G est engendré par ↵, , , et . Pour le voir, considérons l’orbite du sommet 1 ; on a clairement ↵p1q “ 2, ↵2 p1q “ 3, ↵3 p1q “ 4, p1q “ 2,
2 p1q
“ 7,
3 p1q
“ 6,
15. Quand on situe sa main droite en 1, avec l’index et le pouce pointant respectivement vers 2 et 4, alors le majeur pointe vers 6. Pour l’orientation inverse, on utilise la même règle avec la main gauche.
2.8. LE GROUPE DES ISOMÉTRIES DU CUBE
71
et on calcule directement que ↵ d’où ↵
2 p1q
“ 8, et ↵2
2
“ p18qp27qp36qp45q,
2 p1q
et
↵2
2
“ p15qp28qp37qp46q,
“ 5. On s’ensuit que l’orbite de 1 est Orbp1q “ t1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8u.
Autrement dit, il a une seule orbite pour l’action de G. C’est donc une action transitive. En vertu du théorème sur les actions transitives, on a que 8 “ | Orbp1q | “ rG : Stabp1qs “ | G |{| Stabp1q |, il suffit donc de calculer | Stabp1q | pour connaître l’ordre de G. On sait que et fixent 1, et donc Stabp1q contient le sous-groupe qu’ils engendrent. Comme 3 “ e et 2 “ e, il suffit de vérifier par calcul direct qu’on a 2 “ p37qp46q “ 2 , “ p24qp57q “ , pour conclure qu’on a (au moins 16 ) les 6 éléments distincts suivants dans Stabp1q : e,
,
2
,
,
,
et
.
On constante donc que | Stabp1q | • 6, ce qui entraîne que | G | • 48. Nous allons obtenir une borne supérieure pour l’ordre de G, grâce à un théorème d’un chapitre ultérieur. On remarque que les isométries du cube échangent entre elles les diagonales de ce cube. En effet, une isométrie envoie les paires de points les plus éloignés du cube dans des paires de points de la même nature. Les diagonales sont précisément les segments dont les extrémités sont de telles paires. On peut donc considérer la restriction de G au groupe des permutations de ces quatre diagonales. Celles-ci correspondent aux quatre sous-ensembles de paires de sommets t1, 8u, t2, 5u, t3, 6u et t4, 7u. On a donc un morphisme ✓:GÑS , pour :“ tt1, 8u, t2, 5u, t3, 6u, t4, 7uu, obtenu en posant Soit
✓pgqpti, juq :“ tgpiq, gpjqu. :“ p18qp25qp36qp47q,
l’application antipode par rapport au centre du cube. C’est un élément de G, qui laisse globalement fixe chaque diagonale de sorte que sa restriction à l’ensemble des quatre diagonales est l’application identité. D’autre part, soit g est un élément de G tel que ✓pgq “ e autre que l’identité. Comme g “ e, on peut choisir i tel que gpiq “ i. Pour fixer les idées, disons que i “ 2. On a ✓pgqpti, juq “ ti, ju, pour 16. En fait il n’y en a pas d’autres, mais nous n’avons pas besoin de le savoir aux fins de l’argument.
72
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
toutes les diagonales. En particulier, ✓pgqpt2, 5uq “ tgp2q, gp5qu “ t2, 5u, et donc gp2q “ 5 (puisqu’on a supposé gp2q “ 2). Comme on doit aussi conserver les autres distances, par exemple celle entre 1 et 2, on doit avoir que gp1q est voisin de gp2q. Cela force gp1q “ 8. De même on trouve gp3q “ 6 et gp4q “ 7. On trouve donc que g est forcément égal à . On a donc kerp✓q :“ te, u “ tg P G | ✓pgq “ eu (nous allons revenir plus tard sur cette notation). Par le théorème des isomorphismes (voir 4.4), on obtient | G |{| kerp✓q | “ | G{ kerp✓q | § | S | Dans notre cas, cela correspond à | G |{2 § 24. En conclusion globale, on trouve qu’il y a | G | “ 48 isométries du cube.
2.9
Espaces homogènes
Dans son « programme d’Erlangen » de 1878, Felix Klein propose d’approcher systématiquement la géométrie via la théorie des groupes. Cela correspond à des actions transitives de groupes. Plus précisément, on suppose que E est un espace topologique sur lequel un groupe G agit transitivement. Intuitivement, le groupe détermine la géométrie de E. Comme, par transitivité de l’action, on peut passer de n’importe quel point x P E à n’importe quel autre point y “ g ¨ x, on dit que l’espace E est homogène parce que tous les points se « comporte » de la même façon. Utilisant le Théorème 2.12, la construction d’espaces homogènes se ramène à choisir un groupe G, et un sous-groupe H de G. Parmi les groupes qui jouent un rôle particulièrement intéressant dans ce contexte, on retrouve les groupes de Lie GLn , Opnq, ou encore GAn (le groupe général affine). Ainsi, la géométrie de la sphère correspond à Opnq{Opn ´ 1q, et la géométrie affine à GAn {GLn . Au 7e congrès international de mathématiques, qui a eu lieu en 1924 à Toronto, le mathématicien français Elie Cartan à fait une présentation invitée intitulée La théorie des groupes et les recherches récentes en géométrie différentielles. On a accès sur le web à cette référence historique, expliquant pour un public général cette approche et ses liens avec la théorie de la relativité. La section suivante approfondie, dans un cas particulier, certaines questions reliées à ce sujet.
2.10
Le groupe SL2 pZq
Le groupe des matrices n ˆ n, à coefficients entiers et de déterminant 1, est dénoté SLn pZq. Le cas particulier n “ 2 est déjà très intéressant. On peut montrer qu’il est engendré par les matrices ˆ ˙ ˆ ˙ 0 ´1 1 1 S :“ , et T :“ , 1 0 0 1
2.10. LE GROUPE SL2 pZq
73
avec les relations S 4 “ Id, et pST q6 “ Id. La matrice T est d’ordre infini, puisque ˆ ˙ 1 n n T “ , pour tout n P Z. 0 1 Comme T “ S 3 pST q, le groupe SL2 pZq est aussi engendré par les deux matrices S et ST . On observe que ˆ ˙ ˆ ˙ a b ´c ´d S “ , c d a b
et
ˆ ˙ ˆ ˙ a b a ` nc b ` nd T “ . c d c d n
On peut exploiter ceci, et la division euclidienne dans Z, pour déterminer comment écrire toute matrice de SL2 pZq comme produit de la forme ˆ ˙ ˆ ˙ˆ ˙ˆ ˙ˆ ˙ ˆ ˙ˆ ˙ a b 1 n1 0 ´1 1 n2 0 ´1 0 ´1 1 nk “ ¨¨¨ , c d 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 0 1 avec ni P Z. Pour trouver une telle expression, on procède avec l’algorithme suivant 17 , en faisant agir le groupe sur lui-même par multiplication à gauche. Si c “ 0 et |a| • |c|, applicant la division euclidienne de a par c, on trouve q et r tels que a “ qc ` r, avec |c| ° r • 0. Alors, on observe que ˆ ˙ ˆ ˙ ˆ ˙ ˆ ˙ r b ´ qd ´c ´d ´q a b ´q a b T “ , et donc ST “ . c d c d c d r b ´ qd On réapplique l’étape précédente, ˆ ˙ jusqu’à ce qu’on se retrouve dans le cas c “ 0. Or, les seules matrices a b dans SL2 pZq de la forme sont les matrices 0 d ˆ ˙ ˆ ˙ 1 n ´1 n et “ S2T n, 0 1 0 ´1 puisque leur déterminant est ad “ 1, ce qui force a “ d “ 1 ou a “ d “ ´1. Par exemple, on trouve ainsi que ˆ ˙ 17 46 “ T 2 ST ´3 ST ´2 ST ´2 ST 2 S 2 . 7 19 Action de SL2 pZq sur le plan hyperbolique. Sans tenir compte de l’aspect géométrique, une réalisation du plan hyperbolique H est simplement l’ensemble des nombres complexes dons la partie imaginaire est positive : H :“ tz “ x ` iy | x, y P R, y • 0u. 17. C’est essentiellement l’algorithme d’Euclide.
74
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Pour chaque matrice dans SL2 pZq, on a une transformation, dite de Möbius 18 , du plan hyperbolique, qui correspond à ˆ ˙ az ` b a b ¨ z :“ . (2.11) c d cz ` d Comme on calcule que ˆ ˙ ˆˆ ˙ ˙ ˆ ˙ ˆ ˙ a 2 z ` b2 a 1 b1 a 2 b2 a 1 b1 ¨ ¨z “ ¨ c 1 d1 c 2 d2 c 1 d1 c 2 z ` d2 “ “
a1 pa2 z ` b2 q{pc2 z ` d2 q ` b1 c1 pa2 z ` b2 q{pc2 z ` d2 q ` d1 a1 pa2 z ` b2 q ` b1 pc2 z ` d2 q c1 pa2 z ` b2 q ` d1 pc2 z ` d2 q
pa1 a2 ` b1 c2 qz ` pa1 b2 ` b1 d2 q pc1 a2 ` d1 c2 qz ` pc1 b2 ` d1 d2 q ˆ ˙ a 1 a 2 ` b1 c 2 a 1 b 2 ` b 1 d 2 “ ¨z c 1 a 2 ` d 1 c 2 c 1 b2 ` d 1 d 2 “
C’est bien une action de SL2 pZq sur H, puisqu’on vérifie aussi par calcul direct que A¨z est dans H, pour
Figure 2.5 – SL2 -pavage de Klein du plan hyperbolique, et sa version circulaire. tout A P SL2 pZq. On remarque, pour A dans SL2 pZq, la matrice p´Aq donne la même transformation que A, c.-à-d. A ¨ z “ p´Aq ¨ z. Travailler modulo l’identification de ces deux matrices donne lieu au 18. August Ferdinand Mobius (1790-1868). Voir le vidéo expliquant les transformations de Möbius.
2.11. ACTIONS LINÉAIRES
75
groupe modulaire. Les transformations qui correspondent aux générateurs S et T sont respectivement S : z fiÑ ´1{z,
et
T : z :ބ z ` 1,
et ces transformations engendrent toutes celles qui correspondent à (2.11). Chaque orbite de cette action contient un et un seul élément dans la région tz P C | |
2.11
Actions linéaires
Pour une action G ˆ V Ñ V , où V est un espace vectoriel (sur Q, R, C, etc.), on dit que l’action est linéaire si (en plus des axiomes d’actions) on a (a) g ¨ px ` yq “ g ¨ x ` g ¨ y, pour tout x, y P V et g P G, et
(b) g ¨ p↵ xq “ ↵ pg ¨ xq, pour tout x, g, et ↵ un scalaire.
On dit aussi d’une telle action que c’est une représentation linéaire du groupe G, et on parle de la représentation 21 V . Si G agit sur deux espaces vectoriels V et W , alors on a une action linéaire de G sur l’espace vectoriel V ‘ W , définie en posant g ¨ pv ` wq :“ g ¨ v ` g ¨ w. Dans ce cas, on dit qu’on a une somme d’actions. Bien entendu, on a la somme de plusieurs actions. Tout comme dans le cas des actions, un isomorphisme allant d’une action linéaire G ˆ V Ñ V à une action linéaire G ˆ W Ñ W est une transformation linéaire inversible ✓ : V Ñ W , telle qu’on ai le diagramme commutatif GˆV
/V ✓
Idˆ✓
✏
GˆW
✏ / W,
ce qui signifie que g ¨ ✓pvq “ ✓pg ¨ vq, pour tout v P V et tout g P G. L’étude et la classification des actions linéaires (à isomorphisme près) font l’objet de la théorie de la représentation des groupes, qui est un domaine de recherche particulièrement actif. Pour un groupe fini, les deux théorèmes de base 19. Uber die Transformation der elliptischen Funktionen und die Auflosung der Gleichungen funften Grades, Mathematische Annalen, 1878. 20. Julius Wilhelm Richard Dedekind (1831-1916). 21. Malgré le fait qu’on puisse avoir deux actions différentes sur le même espace V , c’est l’habitude dans le domaine de s’exprimer ainsi. Dans la plupart des cas, cela ne porte pas à confusion.
76
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
de la théorie 22 affirment d’abord que toute action se décompose de manière unique (à isomorphisme près) en une somme d’actions dites « irréductibles » ; puis qu’il y a un nombre fini (à isomorphisme près) d’actions irréductibles, pour chaque groupe G. Le nombre de ces actions irréductibles est égal au nombre de classes de conjugaison d’éléments du groupe. En un certain sens, c’est une version plus riche du fait qu’on a une partition en orbites pour un ensemble muni d’une action. Par exemple, une action du groupe des permutations S3 agit sur R3 correspond à poser ¨ px1 , x2 , x3 q :“ px
´1 p1q
,x
,x
´1 pp2q
´1 p3q
q.
La présence de l’inverse assure qu’on a bien une action. En effet, on calcule qu’on a bien où
⌧ ¨ p ¨ px1 , x2 , x3 qq “ ⌧ ¨ py1 , y2 , y3 q,
“ py⌧ ´1 p1q , y⌧ ´1 p2q , y⌧ ´1 p3q q, “ px
´1 p⌧ ´1 p1qq
“ pxp⌧
,x
´1 p⌧ ´1 p2qq
yi “ x ,x
´1 piq
´1 p⌧ ´1 p3qq
,
q´1 p1q , xp⌧ q´1 p2q , xp⌧ q´1 p3q ,
“ p⌧ q ¨ px1 , x2 , x3 q.
La linéarité est évidente. La décomposition de cette action en action irréductible correspond à décomposer l’espace vectoriel R3 en somme directe de deux sous-espaces V et W , où (a) V “ tpx, x, xq | x P Ru, autrement dit une droite de R3 ;
(b) W “ tpx, y, zq | x ` y ` z “ 0u, autrement dit un plan orthogonal à la droite V .
L’invariance de ces sous-espaces se déduit facilement de la définition. Comme V est de dimension 1, il est forcément irréductible. On montre aussi que W est irréductible. Une autre façon d’envisager tout ceci est de constater que tout vecteur s’écrit de manière unique comme combinaison linéaire de la forme px, y, zq “ a p1, 1, 1q ` b p1, ´1, 0q ` c p1, 0, ´1q, où il suffit de poser a “ px ` y ` zq{3,
b “ px ´ 2 y ` zq{3,
et
c “ px ` y ´ 2 zq{3.
L’effet de toute permutation sur px, y, zq est de la forme ¨ px, y, zq “ a p1, 1, 1q ` b p1, ´1, 0q ` c p1, 0, ´1q, pour certaines (jolies) expressions b et c . Le calcul des expressions en question est un exercice intéressant et important à savoir-faire pour d’autres contextes du genre. C’est un des défis de la théorie de la représentation des groupes. Par exemple, la théorie de la représentation des groupes cycliques mène à la notion de transformée de Fourier discrète pour effectuer ces calculs. 22. Pour des espaces vectoriels sur des corps de caractéristique 0. Le cas de caractéristique fini est aussi connu, mais la théorie est plus complexe.
2.11. ACTIONS LINÉAIRES
77
Invariants polynomiaux. Une famille d’exemples particulièrement importante consiste à considérer les groupes finis de matrices n ˆ n agissant sur les polynômes à n variables. On a donc G § GLn pCq un tel groupe, avec ¨ ˛ a11 a12 . . . a1n ˚ a21 a22 . . . a2n ‹ ˚ ‹ g“˚ . .. .. ‹ . . . ˝ . . . . ‚ an1 an2 . . . ann qui agit sur un polynôme f pz1 , z2 , . . . , zn q, en remplaçant dans f les variables zi par zi fiÑ a1i z1 ` a2i z2 ` . . . ` ani zn . On dit alors qu’un polynôme f est G-invariant si et seulement si on a g ¨ f “ f , pour tout élément g du groupe G. Cette notion joue un rôle fondamental en théorie de Galois et dans une foule d’autres domaines (comme en physique). En particulier, si G est le groupe des matrices de permutations (c.-à-d. dont les coefficients aij sont tous 0, sauf un 1 par ligne et un 1 par colonne), on dit des polynômes G-invariants qu’ils sont symétriques, et l’action du groupe correspond à permuter les variables. Plus explicitement, pour n “ 3, un polynôme f px, y, zq est symétrique, si et seulement si f px, y, zq “ f px, y, zq “ f py, x, zq “ f py, z, xq “ f pz, x, yq “ f pz, y, xq, et on a les exemples suivants de tels polynômes e1 px, y, zq “ x ` y ` z,
e2 px, y, zq “ x y ` x z ` y z
(2.12)
e3 px, y, zq “ x y z.
Le cas n “ 3 du théorème fondamental des polynômes symétriques, dû à Newton 23 , affirme que tout polynôme symétrique f px, y, zq s’exprime comme somme de produit des trois polynômes e1 , e2 , et e3 ci-dessus. Par exemple, on voit facilement que Dpx, y, zq “ px ´ yq2 px ´ zq2 py ´ zq2
(2.13)
est un polynôme symétrique. Le théorème de Newton assure qu’on peut trouver une expression pour D “ Dpx, y, zq en terme de e1 , e2 , et e3 . On trouve en effet que D “ e21 e22 ` 18 e1 e2 e3 ´ 4 e32 ´ 4 e31 e3 ´ 27 e23 .
(2.14)
C’est le discriminant (l’analogue de b2 ´ 4a c) pour les polynômes de degré 3. Plus explicitement, le polynôme en la variable t pt ´ xqpt ´ yqpt ´ zq “ t3 ´ e1 t2 ` e2 t ´ e3 , 23. Sir Issac Newton (1643-1727).
78
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
a (au moins ) deux racines 24 égales si et seulement si son discriminant est nu, D “ 0. On observe que l’expression des coefficients e1 , e2 , et e3 du polynôme (attention aux signes), en terme de ses racines, donne précisément les expressions (2.12). Par exemple, pour le polynôme t3 ` 3 t2 ´ 9 t ` 5, on a e1 “ ´3, e2 “ ´9, et e3 “ ´5. A priori, on ne connaît pas ses racines, et on ne peut utiliser la formule (2.13) pour calculer le discriminant. Par contre, la formule (2.14) est facilement calculable, et on trouve D “ p´3q2 p´9q2 ` 18 p´3qp´9qp´5q ´ 4 p´9q3 ´ 4 p´3q3 p´5q ´ 27 p´5q2 “ 0.
On conclut donc que le polynôme a deux racines égales que l’on ne connaît toujours pas. Autrement dit, le polynôme est de la forme pt ´ aq2 pt ´ bq, pour certaines valeurs de a et de b qu’on pourrait chercher à trouver, si on le désire.
2.12
Exercices
Exercice 2.1 (Voir solution 2). Pour une action de G sur E. Montrer que tout sous-ensemble invariant de E est une réunion d’orbites, et que l’orbite de tout élément x P E est le plus petit sous-ensemble invariant contenant x. Exercice 2.2 (Voir solution 3). Montrer que le groupe A4 ne possède pas de sous-groupe d’ordre 6 (même si 6 est un diviseur de 12 qui est l’ordre de A4 ). Exercice 2.3 (Voir solution 4). Dans cet exercice nous allons établir des propriétés de base du groupe symétrique Sn . (a) Considérons l’action naturelle du groupe symétrique Sn sur l’ensemble t1, 2, . . . , nu et soit P Sn . En considérant l’action induite du sous-groupe H “ x y engendré par et les orbites de cette action, donner une autre démonstration du fait que se décompose en un produit de permutations cycliques disjointes ou cycles disjoints, c.-à-d. “ looooomooooon pi1 , . . . , is q . . . pj 1 , . . . , jt q, looooomooooon 1
k
avec ti1 , . . . , is u X tj1 , . . . , jt u “ H. Vérifier que des cycles disjoints commutent entre eux et que la décomposition ci-dessus est unique à l’ordre des facteurs près. (b) Pour une décomposition d’un entier n sous la forme d’une somme n “ µ1 ` µ2 ` . . . ` µk ,
avec
µ1 • µ2 • . . . • µk • 1,
on dit que µ “ pµ1 , µ2 , . . . , µk q est un partage de longueur k de n, et on écrit µ $ n. Les µi sont les parts du partage µ. On désigne ppnq le nombre de partages de n. Par exemple pp4q “ 5, puisqu’on a les 5 décompositions de 4 suivante 4, 24. Ce sont ici x, y et z.
3 ` 1,
2 ` 2,
2 ` 1 ` 1,
1 ` 1 ` 1 ` 1.
2.12. EXERCICES
79
L’unique décomposition “ 1 . . . k d’une permutation P Sn , en un produit de cycles disjoints i , détermine un partage du nombre n, pour laquelle µi égal à la longueur de i . Montrer que les classes de conjugaison du groupe Sn sont en correspondance bijective avec les partages de n. (c) Montrer que le nombre de permutations, dans la classe de conjugaison qui correspond à un partage µ, est donné par la formule n! 1d1 d1 !2d2 d2 ! ¨ ¨ ¨ ndn dn !
(2.15)
où chaque d` “ d` pµq est le nombre de parts égale à ` dans µ.
Exercice 2.4.
(a) Soit g : C Ñ C un automorphisme d’anneaux de C, c.-à-d. un automorphisme du groupe additif pC, `q mais qui a aussi la propriété que gpxyq “ gpxqgpyq pour tous x, y P C. Vérifier que pour tout x P Q, on a gpxq “ x. (Aide : vérifier d’abord que gp1q “ 1.)
(b) Soit f P QrXs un polynôme à coefficients dans Q, et soit
E “ tz P C : f pzq “ 0u l’ensemble des racines de f . Soit G le groupe des automorphismes d’anneaux de C. Vérifier que pour tout z P E et tout g P G on a gpzq P E, et que l’opération de G ˆ E dans E définie par g ¨ z “ gpzq donne une action de G sur E. (Rappel : l’opération dans le groupe G est la composition des fonctions.) Exercice 2.5. Soit f P QrXs et G le groupe des automorphismes d’anneau de C. On sait que G agit de façon naturelle sur l’ensemble L “ tz P C : f pzq “ 0u des racines de f . (a) Montrer que deux racines de f qui appartiennent à la même orbite doivent être racines d’un même facteur irréductible de f dans QrXs.
(b) Déduire de (a) que si f n’a pas de racine multiple et que l’action de G sur L n’a qu’une seule orbite, alors f est irréductible dans QrXs. Exercice 2.6. Soit un groupe G opérant sur un ensemble E et soit Y Ñ E. Montrer que tg P G : g ¨ y “ y, pour tout y P Y u est un sous-groupe de G. Exercice 2.7. Soit G un groupe et H § G, montrer que (a) si x P G alors xH “ H si et seulement si x P H ;
(b) si x, y P G alors xH “ yH ñ x´1 yH “ H ñ y ´1 xH “ H ñ x´1 y P H ; (c) si G est abélien, alors xH “ Hx pour tout x P G ;
(d) si x, y P G, alors y P xH ñ y ´1 P Hx´1 ;
(e) si x P H, alors la fonction h fiÑ xh est une bijection de H sur xH. (f) En déduire que xH, H et Hx ont même cardinal.
80
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES
Exercice 2.8. On considère G “ S3 .
(a) Trouver tous les sous-groupes de S3 ;
(b) Pour tous les sous-groupes H de S3 , calculer G{H. Exercice 2.9. Soit G un groupe d’ordre p premier, montrer que G est cyclique. Exercice 2.10. Soit G un groupe et H, K deux sous-groupes finis de G. (a) Montrer que si |H| et |K| sont premiers entre eux, alors H X K “ teu.
(b) On pose n “ rH : H X Ks. Soit txi | 1 § i § nu un système de représentants des classes de H{H X K. (i) Montrer que txi K | 1 § i § nu est une partition de HK.
(ii) Montrer que
|HK| “ |KH| “
|H||K| . |H X K|
Exercice 2.11. Soit G un groupe abélien d’ordre |G| “ nm où n et m sont premiers entre eux. Soit H et K deux sous-groupes de G tel que |H| “ n et |K| “ m. Montrer que G » H ˆ K.
Exercice 2.12. Soit G un groupe et H1 , . . . , Hn des ì sous-groupes de G d’indice fini. Montrer par récurrence sur n P N˚ que l’indice du sous-groupe ni“1 Hi est fini. Exercice 2.13. Soit G un groupe et x, y P G d’ordre fini tel que xy “ yx. Montrer que : (a) xy est d’ordre fini ;
(b) si ordpxq “ n et ordpyq “ m sont premiers entre eux, alors ordpxyq “ nm.
Exercice 2.14. (Formule de l’indice) Soit H un sous-groupe d’indice fini d’un groupe G et K § H. Le but de ce problème est de montrer que K est d’indice fini dans G si et seulement si il est d’indice fini dans H, ainsi que la formule suivante : rG : Ks “ rG : HsrH : Ks. (a) Si K Ñ H, notons I Ñ G un système de représentant des classes à gauche modulo H et J Ñ H un système de représentant des classes à gauche H{K modulo K. Montrer que (i) ⇤ “ IJ est un système de représentant des classes G{K ;
(ii) ⇤ est en bijection avec I ˆ J.
(b) Montrer que rG : Ks “ rG : HsrH : Ks.
(c) En déduire que K est d’indice fini dans G si et seulement si il est d’indice fini dans H.
Exercice 2.15. Soit
"ˆ ˙ * a b G“ ; a, b, c P R et ac ‰ 0 0 c
2.12. EXERCICES
81
(a) Vérifier que G est un sous-groupe de GL2 pRq et que G agit sur R par l’opération ˆ ˙ ax ` b a b ¨x“ 0 c c (b) Déterminer l’orbite de 0 et le stabilisateur de 0 pour cette action. Exercice 2.16. On dit d’une bijection f : R3 Ñ R3 que c’est une isométrie si elle conserve la distance entre les points, c’est-à-dire que pour tous points P, Q P R3 on a dpf pP q, f pQqq “ dpP, Qq. Par exemple, une rotation est une isométrie, une symétrie par rapport à un plan fixé (image miroir) est aussi une isométrie (N.B. Il y en a d’autres). (a) Montrer que les isométries forment un sous-groupe du groupe SR3 de toutes les permutations de R3 . Soit ISOR3 le groupe des isométries de R3 , vérifier que ISOR3 agit sur R3 par l’action naturelle ISOR3 ˆ R3 Ñ R3 , définie par f ¨ P “ f pP q.
(b) Montrer qu’on peut considérer une action de ISOR3 sur les ensembles de n points, en posant f ¨ A :“ tf pP q |P P Au, pour tout A “ tP1 , P2 , . . . , Pn u, avec les Pi des points distincts deux à deux.
Exercices exploratoires Exercice 2.17 (Autre preuve du théorème de Wilson 25 ). Cet exercice a pour but de proposer une preuve du théorème de Wilson qui exploite les notions de ce chapitre. Théorème 2.17 (Wilson). Soit n P N, n • 2, alors n est premier si et seulement si pn ´ 1q! ” ´1 pmod nq. (a) Pour p premier, montrer dans Zp que x “ pp ´ 1q! est le produit de tous les éléments du groupe abélien Zˆ p. (b) Soit G un groupe abélien fini et x le produit des éléments de G. (i) Si |G| est impair, montrer que x “ e ;
(ii) si |G| est pair et G ne contient qu’une involution alors montrer que x est cette unique involution ; 25. John Wilson (1741-1793).
82
CHAPITRE 2. ACTIONS DE GROUPES (iii) si |G| est pair et G contient plus d’une involution, montrer que x “ e (difficile).
(c) En déduire la preuve du théorème de Wilson.
Exercice 2.18. Si X est un espace topologique (voir Exercice 1.49), et G est un groupe topologique, on dit qu’on a une action continue de groupes X ˆ G Ñ X, si les fonctions x fiÑ g ¨ x et g fiÑ g ¨ x sont continues quelques soient x P X et g P G. (a) Montrer que l’action usuelle de GLn sur Rn est une action continue.
(b) Montrer que l’action par multiplication à gauche et l’action par conjugaison sont des actions continues d’un groupe topologique G sur lui-même. (c) Décrire la notion d’isomorphisme pour les actions continues de groupes.
Figure 2.6 – Portion de pavage de R3 par le permutoèdre. Exercice 2.19 (Construction du permutoèdre). (a) Montrer qu’on peut réaliser géométriquement le permutoèdre dans R3 , en considérant que ses sommets sont les permutations des 4 points p0, ˘1, ˘2q.
(b) En déduire qu’on peut paver l’espaces avec des copies du permutoèdre. Une partie de ce pavage est illustré à la figure 2.6. (c) On peut obtenir tous les permutoèdre de ce pavage par des translations du permutoèdre « de base ». Identifier le group de ces translations.
Chapitre 3
Morphismes de groupes Dans tout contexte mathématique, il importe de bien comprendre comment comparer les objets qui sont considérés, cela permet de mieux comprendre leur rôle. Lorsque ce contexte est algébrique, on parle de morphisme. Ce sont les fonctions entre structures algébriques de même nature qui « respectent » les opérations considérées. Dans notre cas, ce sont les fonctions qui respectent les lois de composition de groupes. Les morphismes de groupes sont de première importance pour la théorie des groupes.
3.1
Définition
Pour deux groupes pG, ¨q et pG1 , ˚q, un morphisme (ou homomorphisme, comme les anglophones) de groupes, de G vers G1 , est une fonction ✓ : G Ñ G1 telle que ✓px ¨ yq “ ✓pxq ˚ ✓pyq,
pour tout x, y P G.
(3.1)
De façon rigoureuse, il faudrait toujours distinguer les lois de décompositions de G et de G1 . Cependant, le contexte permet généralement de bien faire la nuance, sans avoir à explicitement adopter des notations différentes. Ainsi, ci-dessus il n’y aurait pas eu d’ambiguïté à écrire ✓pxyq “ ✓pxq✓pyq. En effet, comme ✓pxq et ✓pyq sont dans G1 , l’opération à considérer dans le membre de droite est forcément celle de G1 . Pour la même raison, on écrira souvent simplement e pour l’élément neutre de chacun des deux groupes. On dit d’un morphisme de G vers lui-même que c’est un endomorphisme de G. On note HompG, G1 q l’ensemble des morphismes de G vers G1 , et EndpGq l’ensemble des endomorphisme de G. Il est clair que ces deux ensembles sont non-vides, puisqu’on a toujours au moins le morphisme trivial ✓ : G Ñ G1 , qui envoie tous les éléments de G sur l’élément neutre de G1 . Le signe " : Sn Ñ t`1, ´1u est un 83
84
CHAPITRE 3. MORPHISMES DE GROUPES
morphisme de groupes 1 surjectif, de même que le déterminant dét : GLn Ñ R˚ (où R˚ est muni de la multiplication). On dit d’un morphisme surjectif que c’est un épimorphisme, et on utilise la notation 2 / / G1 .
✓: G
/ / Zn définie par ⇡pkq “ pk mod nq est un épimorphisme. Comme Pour tout n P N˚ , la fonction ⇡ : Z un le verra plus tard, c’est un cas spécial de « surjection canonique ». Si H est un sous-groupe de G, alors l’inclusion ◆ : H Ñ G, telle que ◆pgq “ g, est un morphisme de groupes injectif. On dit d’un morphisme injectif, que c’est un monomorphisme, et on écrit
✓: G
/ G1 .
On dit d’un morphisme bijectif que c’est un isomorphisme. S’il existe un isomorphisme entre deux groupes, on dit qu’ils sont isomorphes 3 , avec la notation ✓: G
„
/ G1 .
Deux groupes isomorphes ont les propriétés algébriques. Par exemple, la fonction ✓ : Z2 Ñ t`1, ´1u définie en posant ✓p0q :“ 1 et ✓p1q :“ ´1 est un isomorphisme de groupes. En effet, on a ✓p0 ` 1q “ ✓p1q “ ´1 “ 1 ¨ p´1q “ ✓p0q✓p1q, ✓p0 ` 0q “ ✓p0q “ 1 “ 1¨1 “ ✓p0q✓p0q, ✓p1 ` 1q “ ✓p0q “ 1 “ p´1q ¨ p´1q “ ✓p1q✓p1q. Autrement dit, « additionner » dans Z2 revient au même que de « multiplier » dans t`1, ´1u. De manière plus imagée, la Figure 3.1 illustre comment le groupe des symétries du triangle est isomorphe au groupe S3 . Les premières propriétés générales des morphismes de groupes sont les suivantes. Proposition 3.1. Si ✓ : G Ñ G1 et (1) ✓peq “ e ;
: G1 Ñ G2 sont des morphismes de groupes, alors
(2) ✓px´1 q “ ✓pxq´1 pour tout x P G ; (3) H § G entraîne ✓pHq § G1 ;
(4) H 1 § G1 entraîne ✓pH 1 q § G, où ✓pH 1 q :“ tx P G | ✓pxq P H 1 u. (5)
˝ ✓ : G Ñ G2 est un morphisme de groupes.
Démonstration. Pour montrer (1), considérons x P G. On a 4 ✓pxq e “ ✓pxq “ ✓pxeq “ ✓pxq✓peq, 1. 2. 3. 4.
La structure de groupe sur t`1, ´1u correspond à l’opération de multiplication. Avec une flèche spéciale qui indique la surjectivité Du grec « ◆ o& » (isos) pour « même », et « µo⇢'⌘ » (morphè) pour « forme ». Ne pas oublier que le sens de e dépend du groupe sous-jacent au produit considéré.
3.2. NOYAU D’UN MORPHISME DE GROUPES 3
2
1
ބ 123
1
3
ބ 312
œ 3
1
2
ބ 231
2
ñ
2
ބ 213
2
3
ބ 321
ñ
3
ñ
1
1
ñ
2
85
3
1
ބ 132
Figure 3.1 – Isomorphisme entre les symétries du triangle et S3 . et donc ✓pxq✓peq “ ✓pxq e. Multipliant à gauche par l’inverse de ✓pxq, on trouve ✓peq “ e. On établit ensuite (2) facilement. En effet, comme ✓pxq ✓pxq´1 “ e “ ✓peq “ ✓pxx´1 q “ ✓pxq ✓px´1 q,
on en déduit que ✓px´1 q “ ✓pxq´1 . Ensuite, pour prouver (3), soit H un sous-groupe de G, et soit y1 , y2 P ✓pHq. Alors il existe x1 , x2 P H tel que ✓px1 q “ y1 et ✓px2 q “ y2 . Comme x1 x´1 2 P H on obtient, en vertu de (2), que ´1 y1 y2´1 “ ✓px1 q✓px2 q´1 “ ✓px1 q✓px´1 2 q “ ✓px1 x2 q P ✓pHq.
Puisque e “ ✓peq P ✓pHq, on conclut que ✓pHq § G1 . La preuve de (4) est laissée en exercice. Pour (5), soit x, y P G, posons ⌘ :“ ˝ ✓, et donc ⌘pxq “ p✓pxqq. Montrons que ⌘px ¨ yq “ ⌘pxq ¨ ⌘pyq. Puisque ✓ et sont des morphismes de groupes on calcule que ⌘px ¨ yq “ p✓px ¨ yqq “ p✓pxq ¨ ✓pyqq “ p✓pxqq ¨ p✓pyqq “ ⌘pxq ¨ ⌘pyq, ce qui montre l’assertion. On en déduit immédiatement le résultat suivant : Corollaire 3.2. pEndpGq, ˝q est un monoïde.
3.2
Noyau d’un morphisme de groupes
Le noyau d’un morphisme ✓ : G Ñ G1 , noté kerp✓q, est le sous-groupe de G formé de l’image inverse de e par ✓, c.-à-d. kerp✓q :“ tg P G | ✓pgq “ eu.
86
CHAPITRE 3. MORPHISMES DE GROUPES
La terminologie viens du terme allemand « kern », qui signifie noyau. C’est une notion naturelle qui apparaît dans de nombreux contextes algébriques (voir Exercice 3.14). Ainsi, on obtient le groupe alterné, noté An , comme sousgroupe de Sn , en considérant le morphisme de groupes qui associe à une permutation son signe, " : Sn Ñ t`1, ´1u. On a donc An :“ kerp"q “ t P Sn | "p q “ 1u, On dit aussi des éléments de An que ce sont des permutations paires. Par exemple, A5 admet comme générateurs les permutations paires p12345q et p12qp34q ; et le graphe de Cayley correspondant est celui de la Figure ci-contre. Les flèches bleues correspondent à la composition avec le cycle p12345q, et les arêtes rouges correspondent à la composition avec la permutation p12qp34q, qui est d’ordre 2. Ces dernières arêtes ne sont pas Figure 3.2 – Graphe de Cayley de orientées ; elles vont dans les deux sens. Le composé des deux A5 , pour les générateurs p12345q et générateurs donne une permutation d’ordre 3, qui correspond à p12qp34q. suivre en alternance les arêtes rouges et les arêtes bleues autour des faces hexagonales de la figure. Les pentagones sont les classes à gauche du sous-groupe engendré par p12345q. Ignorant l’orientation des arêtes, on constate que le graphe est celui qui décrit la molécule de C60 du chapitre 1. On montre, voir l’exercice 3.2, que les éléments de A5 sont d’ordre 1, 2, 3, ou 5. e
D’autre part, on considère aussi l’image d’un morphisme ✓ Imp✓q :“ ✓pGq “ t✓pxq | x P Gu. Il découle de la Proposition 3.1, que Imp✓q est aussi un sous-groupe de G1 . Comme l’indique la proposition suivante, la nature du noyau et de l’image d’un morphisme détermine certaines propriétés fondamentales du morphisme. Proposition 3.3. Si ✓ : G Ñ G1 est un morphisme de groupes, alors (1) le noyau kerp✓q est un sous-groupe normal de G ; (2) ✓ est injectif si et seulement si kerp✓q “ teu ; et (3) ✓ est surjectif si et seulement si Imp✓q “ G1 . Démonstration. Si g est dans kerp✓q, alors ✓px´1 gxq “ ✓pxq´1 e ✓pxq “ e,
3.3. ISOMORPHISMES DE GROUPES
87
et donc x´1 gx est dans le noyau, pour tout x dans G. Ceci montre que kerp✓q est normal. Supposons maintenant que ✓ injectif. Soit x P kerp✓q, alors ✓pxq “ e “ ✓peq. Comme ✓ est injectif, x “ e. Supposons maintenant que kerp✓q “ teu. Soit x1 , x2 P G tel que ✓px1 q “ ✓px2 q, alors eG1 “ ✓px1 q ¨ ✓px2 q´1 “ ´1 ✓px1 ¨ x´1 2 q. Donc x1 ¨ x2 P kerp✓q “ teu, d’où x1 “ x2 .
3.3
Isomorphismes de groupes
Comme on l’a déjà mentionné, un morphisme de groupes ✓ P HompG, G1 q est un isomorphisme de groupes si la fonction ✓ est inversible. On dit d’un isomorphisme de G dans G que c’est un automorphisme de G. L’ensemble des automorphismes est noté AutpGq. Par exemple, si ✓ : G Ñ G1 un monorphisme alors les groupes G et Imp✓q sont isomorphes. Proposition 3.4. Pour tous groupes G et G1 . 1. Si ✓ : G Ñ G1 est un isomorphisme, alors ✓´1 : G1 Ñ G est aussi un isomorphisme. 2. AutpGq est un groupe pour la composition. 3. AutpGq est un sous-groupe de SG . Démonstration. Il faut seulement montrer que ✓´1 est un morphisme de groupes. À cette fin, soit x, y P G1 . Comme ✓ est un morphisme de groupes, et ✓ ˝ ✓´1 “ Id “ IdG1 , on a x ¨ y “ Idpxq ¨ Idpyq “ ✓p✓´1 pxqq ¨ ✓p✓´1 pyqq “ ✓p✓´1 pxq ¨ ✓´1 pyqq.
Appliquant ✓´1 à chaque membre de cette égalité, on trouve
✓´1 px ¨ yq “ ✓´1 pxq ¨ ✓´1 pyq.
Les énoncés (2) et (3) sont des conséquences immédiates de ce qui précède. En associant ceci aux résultats précédents, on conclut qu’un morphisme de groupes ✓ est un isomorphisme, si et seulement si Imp✓q “ G et kerp✓q “ teu. On dit que deux groupes G et G1 sont isomorphes s’il existe au moins un isomorphisme de groupes ✓ : G Ñ G1 . On dit alors aussi que G et G1 sont dans la même classe d’isomorphisme et on note ce fait G » G1 . La relation » est une relation d’équivalence (sur l’ensemble des groupes contenus dans un « univers » donné). Deux groupes isomorphes ont exactement les mêmes propriétés algébriques. Ainsi, G est abélien si et seulement si G1 est abélien (à vérifier en exercice). Pour tout x P G, et tout isomorphisme ✓, on a que ordp✓pxqq “ ordpxq. Si G » G1 , alors pour tout n P N, le nombre d’éléments de G d’ordre n est égal au nombre d’éléments de G1 d’ordre n. De plus, deux groupes isomorphes ont forcément le même ordre. Remarque. La réciproque n’est pas vraie, car S3 et Z6 ont le même ordre, mais ne sont pas isomorphes. En effet, Z6 possède 2 éléments d’ordre 6, tandis que S3 n’en possède pas. Une autre différence significative est que Z6 est abélien, tandis que S3 ne l’est pas.
88
CHAPITRE 3. MORPHISMES DE GROUPES
3.4
Automorphismes intérieurs
Pour tout groupe G, et g P G, la fonction 'g : G
/ G
définie par
'g pxq :“ gxg ´1 ,
est un automorphisme de G qu’on dit être intérieur. On note IntpGq le groupe des automorphismes intérieurs de G. Pour voir que 'g est un automorphisme on calcule d’abord, pour x, y P G que 'g pxq'g pyq “ pgxg ´1 q pgyg ´1 q “ gx pg ´1 gq yg ´1 “ gx e yg ´1 “ g xy g ´1 “ 'g pxyq. De plus, 'g inverse admet comme inverse 'g´1 . En effet, 'g´1 ˝ 'g pxq “ 'g´1 pgxg ´1 q
“ g ´1 pgxg ´1 qpg ´1 q´1 “ g ´1 pgxg ´1 qg “ x.
Donc 'g´1 ˝ 'g “ IdG . De même, on vérifie que 'g´1 est inverse à droite de 'g . On observe que IntpGq peut être bien plus petit que G. Par exemple, si G est abélien, alors IntpGq “ teu. Proposition 3.5. Soit G un groupe. Alors IntpGq § AutpGq. Démonstration. Exercice.
3.5
Théorème de Cayley
Nous allons voir dans cette section que le groupe symétrique joue un rôle central en théorie des groupes. Dans le cas fini, la proposition suivante montre qu’on peut toujours se ramener aux groupes Sn . Une façon d’interpréter le théorème principal de la section est alors de dire que tous les groupes finis se retrouvent (à isomorphisme près) à l’intérieur d’un des groupes Sn , pour un certain n. Autrement dit, bien connaître Sn permet de connaître tous les groupes finis. Proposition 3.6. Soit E un ensemble non vide.
3.5. THÉORÈME DE CAYLEY
89
(1) Si E et F ont même cardinal, alors SE » SF ; (2) Si |E| “ n, alors SE » Sn . Démonstration. Si E et F ont même cardinal, alors il existe une bijection f : E Ñ F . Il suffit de montrer que la fonction ↵ : SE Ñ SF ,
↵pgq :“ f ˝ g ˝ f ´1 ,
avec
est un isomorphisme de groupes. Procédant presque exactement comme à la section précédente, on vérifie facilement que l’inverse de ↵ est ↵´1 :“ SF Ñ SE , avec ↵´1 phq :“ f ´1 ˝ h ˝ f . Ne reste plus qu’à montrer que ↵ est un morphisme de groupe. À cette fin, soit g, g 1 P SE , alors ↵pg ˝ g 1 q “ f ˝ g ˝ g 1 ˝ f ´1
“ f ˝ g ˝ IdE ˝ g 1 ˝ f ´1 “ f ˝ g ˝ IdE ˝ g 1 ˝ f ´1
“ pf ˝ g ˝ f ´1 q ˝ pf ˝ g 1 ˝ f ´1 q La proposition est donc démontrée.
“ ↵pgq ˝ ↵pg 1 q.
Le théorème qui suit est conceptuellement d’une grande importance. Il est dû au mathématicien anglais Arthur Cayley (1821-1895), un des pionniers de la théorie des groupes. Théorème 3.7 (Théorème de Cayley). Tout groupe G est isomorphe à un sous-groupe de SG , le groupe de ses permutations. Démonstration. Il suffit de construire un morphisme de groupes injectif : G Ñ SG . Pour chaque g P G, on considère la fonction g : G Ñ G, définie en posant g pxq :“ g ¨ x. C’est une bijection, appelée translation à gauche par g (exercice). En outre, g P SG et son inverse est p g q´1 “ g´1 . Donc la fonction : G Ñ SG , avec pgq :“ g , est bien définie. En calculant comme suit, on vérifie que est un morphisme de groupes. En effet, pour g, h P G, on a (exercice) pgq ˝ phq “
“ “
g
˝
h
gh
pghq.
D’autres parts, est injectif. En effet, si g P kerp q alors g “ Id. Donc g pxq “ gx “ x pour tout x P G, et donc g “ e. On conclut donc que est un monomorphisme de groupe, de G vers SG . Par exemple, comme |Z3 | “ 3, la conjonction de la Proposition 3.6 et du Théorème de Cayley permet de conclure que Z3 est isomorphe à un sous-groupe de S3 . Il suffit de prendre celui engendré par 1 “ 231 “ p123q. C’est en fait le seul sous-groupe d’ordre 3 dans S3 .
90
CHAPITRE 3. MORPHISMES DE GROUPES
3.6
Actions et morphismes de groupes
On reformule souvent les actions de groupes en terme de morphismes de groupes. Ainsi, à une action ↵ : G ˆ E Ñ E on fait correspondre le morphisme de G dans le groupe SE des permutations de E, en r : G Ñ SE , défini par considèrant la fonction ↵ rpgq “ ↵g , ↵
avec ↵g : E Ñ E la fonction définie en posant ↵g pxq :“ g ¨ x. La vérification que cette fonction est bien défini, et qu’elle constitue bien un morphisme de groupes est laissée en exercice (voir 3.3). Inversement, à un morphisme ' : G Ñ SE on fait correspondre l’action ' : G ˆ E Ñ E, définie par 'pg, xq “ 'pgqpxq. Ceci établie une bijection entre actions de G sur E, et morphismes de G vers SE . Dans le cas où l’action est linéaire, on considère plutôt un morphisme de G vers le groupe GLpV q. Si dimpV q “ d, on dit que la représentation est de dimension d. De manière très explicite, si V “ Cn , une représentation linéaire de G est donc une fonction ⇢ :“ G Ñ GLn qui associe à chaque élément g de G une matrice n ˆ n à coefficients complexes ⇢pgq, avec les conditions (1) ⇢peq “ Id, et
(2) ⇢pghq “ ⇢pgq⇢phq, avec à droite le produit matriciel.
Ainsi, on a la représentation linéaire de S3 définie en ¨ ˛ ¨ 1 0 0 0 ⇢peq “ ˝0 1 0‚, ⇢p213q “ ˝1 0 0 1 0 ¨ ˛ ¨ 0 0 1 0 ⇢p321q “ ˝0 1 0‚, ⇢p231q “ ˝1 1 0 0 0
posant ˛ ¨ 1 0 1 0 0‚, ⇢p132q “ ˝0 0 1 0 ˛ ¨ 0 1 0 0 0‚, ⇢p312q “ ˝0 1 0 1
˛ 0 0 0 1‚, 1 0 ˛ 1 0 0 1‚. 0 0
Plus généralement, on a une représentation de Sn obtenue en posant que ⇢p q est la matrice paij q1§i,j§n , avec # 1 si pjq “ i, aij :“ 0 sinon. Le signe d’une permutation est égal au déterminant de la matrice ainsi obtenue, c.-à-d. détp⇢p qq “ "p q. Un autre exemple est la représentation de GL2 , telle que ¨ 2 ˛ 2 a ab ab b ˆ ˙ ˚ac ad bc bd‹ a b ‹ fiÑ ˚ ˝ac bc ad bd‚. c d c2 cd cd d2
3.7. TOUS LES GROUPES FINIS
91
Bien entendu, les représentations de dimension 1 (sur le corps des complexes) sont des morphismes de groupes ⇢ : G Ñ C˚ , le groupe des nombres complexes non nuls avec la multiplication. Si g P G est d’ordre n, alors on doit avoir ⇢pgqn “ ⇢pg n q “ ⇢peq “ 1. La valeur de ⇢pgq est donc
⇢pgq “ e2ki⇡{n “ cosp2k⇡{nq ` i sinp2k⇡{nq, pour un certain k. C’est une des racines ne de l’unité. Plus généralement, on a la proposition suivante. Proposition 3.8. Si G est un groupe d’ordre n, et si ⇢ : G Ñ GLn pCq est un morphisme de groupes (une représentation linéaire), alors les valeurs propres de ⇢pgq sont des racines ne de l’unité, pour tout g dans G. Démonstration. Comme g n “ e, il s’ensuit que ⇢pgqn “ 1. On a donc que la matrice 5 ⇢pgq est annulée par le polynôme xn ´ 1. Ses valeurs propres sont donc des racines de ce polynôme, et on a prouvé l’assertion.
3.7
Tous les groupes finis
La classification des groupes finis peut maintenant prendre un sens précis. En effet, on peut chercher à donner la liste de tous les groupes d’un ordre donné, à isomorphisme près. Pour n § 16, on en trouve une liste complète sur le site suivant : Liste des petits groupes. La suite donnant le nombre de groupes d’ordre n se trouve dans « On-line Encyclobedia of Integer Sequences ». Les premiers termes sont : 0, 1, 1, 1, 2, 1, 2, 1, 5, 2, 2, 1, 5, 1, 2, 1, 14, 1, 5, 1, 5, 2, 2, 1, 15, 2, 2, 5, 4, 1, 4, 1, 51, 1, . . . Les valeurs qui « ressortent » dans cette suite correspondent aux nombres de groupes d’ordre 2n . La suite des nombres de groupes en question (voir https ://oeis.org/A000679) est 1, 1, 2, 5, 14, 51, 267, 2328, 56092, 10494213, 49487365422, . . . Nous verrons au Chapitre 6 comment on peut construire tous les groupes abéliens fins, et donc (en principe) les compter. On a maintenant une classification complète des groupes simples finis, qu’on trouve ici : Liste des groupe finis simples. En principe, cela permet de construire tous les groupes finis. Parmi ceux-ci, on a des familles infinies : 5. C’est plutôt une transformation linéaire, mais on peut reformuler en terme de matrice.
92
CHAPITRE 3. MORPHISMES DE GROUPES – La famille les groupes Zp pour p premier, qui n’ont aucun sous-groupe non trivial. – La famille des groupes alternés An , avec n • 5. Le fait que ces groupes soit simples entre dans l’explication de Galois du fait qu’il n’y a pas de formule par radicaux pour les racines de polynômes de degré supérieur ou égal à 5. – Avec 16 familles de groupes de Lie.
Puis on a 26 groupes dits « exceptionnels », qui ne font pas partie de ces familles infinies. Le plus petit est le groupe de Mathieu M11 , d’ordre 7920, et le plus grand est le Monstre (voir Section 1.7). Bien entendu, du fait cette classification, il y a un groupe simple d’ordre p pour tout nombre premier p ; et il y a un groupe d’ordre n!{2 pour tout entier n • 5. Pour les autres entiers k, il plus rare d’avoir un groupe simple d’ordre k. Excluant les nombres premiers et les nombres de la forme n!{2, la liste des entiers k pour lesquels il existe un groupe simple d’ordre k débute comme suit : 168, 504, 660, 1092, 2448, 3420, 4080, 5616, 6048, 6072, 7800, 7920, 9828, 12180, 14880, 25308, . . .
3.8
Exercices
Exercice 3.1. On utilise ici la notation rks6 pour désigner la classe de l’entier k modulo 6, et la notation rks3 pour désigner la classe de l’entier k modulo 3. On considère les groupes pZ6 , `q et pZ3 , `q et la fonction / pZ3 , `q , ✓ : pZ6 , `q définie en posant ✓prks6 q :“ rks3 . (a) Montrer que ✓ est bien définie, à savoir qu’on a toujours que si rks6 “ rms6 alors rks3 “ rms3 .
(b) Montrer que ✓ est un morphisme surjectif. (c) Déterminer le noyau de ✓.
(d) Généraliser ces énoncés à pZn , `q et pZd , `q, pour d divisant n ; et les démontrer.
Exercice 3.2. Montrer que la décomposition en cycles disjoints des éléments de A5 est : soit de type 11111, soit de type 221, soit de type 311, ou de type 5. Donner un règle calculatoire simple pour déterminer quels sont les types des permutations dans An , pour n quelconque. Exercice 3.3 (Voir solution 10). Soit G un groupe et E un ensemble. Vérifier qu’une action de G sur E correspond à un morphisme de G dans le groupe SE des permutations de E, de la manière suivante. (a) Soit ↵ : G ˆ E Ñ E une action de G sur E. Vérifier que l’application ↵ ˜ : G Ñ SE , définie par ↵ ˜ pgq “ ↵g , est un morphisme, où ↵g pxq “ g ¨ x.
(b) Soit ' : G Ñ SE un morphisme. Vérifier que l’application ' : G ˆ E Ñ E, définie par 'pg, xq “ p'pgqqpxq donne une action de G sur E. (c) Vérifier que les correspondances ↵ fiÑ ↵ ˜ et ' fiÑ ' établies en (a) et (b) sont inverses l’une de l’autre.
3.8. EXERCICES
93
Exercice 3.4. Soit ✓ P HompG, G1 q et H 1 § G1 . Montrer que ✓pH 1 q § G1 . Exercice 3.5. Soit G, G1 et G2 trois groupes, montrer que (a) G » G ;
(b) G » G1 ñ G1 » G ;
(c) si G » G1 et G1 » G2 alors G » G2 .
Exercice 3.6. Soit ✓ : G Ñ G1 un morphisme de groupes injectif. (a) Montrer que G » ✓pGq “ Imp✓q.
(b) Montrer que ordp✓pxqq “ ordpxq, pour tout x P G.
(c) Si G » G1 et n P N. Montrer que le nombre d’éléments de G d’ordre n est égal au nombre d’éléments de G1 d’ordre n, et définissant une bijection entre les deux ensembles correspondants.
Exercice 3.7. Soit G “ xxy un groupe monogène. On considère la fonction ✓ : Z Ñ G, telle que ✓pkq :“ xk . (a) Montrer que ✓ est un morphisme de groupes surjectif. (b) Montrer qu’il existe n P N tel que kerp✓q “ nZ. (c) Si G est infini, montrer que G » Z.
(d) Si G est fini d’ordre n, montrer que G » Zn .
Exercice 3.8. (Translation à gauche) Soit G un groupe. Pour chaque g P G, on considère la fonction g : G Ñ G, définie en posant g pxq :“ g ¨ x. (a) Montrer que
(b) Est-ce que (c) Montrer que
g g
P SG et que p
´1 gq
“
g ´1 .
est un morphisme de groupes ? g
˝
h
“
gh
pour tout g, h P G.
Exercice 3.9. Soit G un groupe. On utilise ici les notations de la section 3.4. (a) Montrer que l’ensemble IntpGq des morphismes intérieurs du groupe G est un sous-groupe de AutpGq. (b) Soit g, h P G, montrer que 'g “ 'h si et seulement si g ´1 h appartient à ZpGq, le centre du groupe G. (c) Montrer que si G est fini, alors |IntpGq| § |G|.
(d) Calculer IntpS3 q et IntpZn q.
Exercice 3.10. Montrer que
(a) le groupe diédral Dm est isomorphe à un sous-groupe de Sm . (b) Zn est isomorphe à un sous-groupe de Sn .
94
CHAPITRE 3. MORPHISMES DE GROUPES
Exercices exploratoires Exercice 3.11. Définir la notion de morphisme, de monomorphisme, d’épimorphisme, et d’isomorphisme de monoïdes. Pour toute bijection f : E Ñ F , on considère la fonction f
: FonctpE, Eq Ñ FonctpF, F q,
qui envoie g P FonctpE, Eq sur f ˝ g ˝ f ´1 . Montrer que f est un isomorphisme de monoïde. Comme pour les groupes, on désigne respectivement par kerp✓q et Imp✓q, le noyau et l’image d’un morphisme de monoïde ✓ : M Ñ M 1 , avec les définitions évidentes. Montrer qu’on a (a) Le noyau kerp✓q est un sous-monoïde de M . (a) L’image Imp✓q est un sous-monoïde de M 1 . (b) ✓ est injectif si et seulement si kerp✓q “ teu ;
(c) ✓ est surjectif si et seulement si Imp✓q “ M 1 .
Exercice 3.12. Rappelons (voir Exercice 1.41) que le monoïde libre A˚ est constitué de l’ensemble des mots a1 a2 ¨ ¨ ¨ an , et que sa loi de composition est la concatenation. On considère ici le cas où A est un ensemble fini. (a) Soit f : A˚ Ñ M un morphisme de monoïde (et donc M est un monoïde). Montrer que f est entièrement caractérisée par sa valeur sur chaque lettre. Autrement dit, si f et g sont deux tels morphismes, alors on a f “ g si et seulement si f paq “ gpaq pour tout a P A.
(b) Soit M un monoïde fini. En imitant la preuve du théorème de Cayley, montrer qu’il existe un monomorphisme de monoïdes ' : M Ñ FonctpM, M q, où l’opération pour ce dernier monoïde est la composition de fonctions. Est-ce que la démonstration demeure valable si M est infini ?
(c) Définir la notion d’action d’un monoïde M sur un ensemble E. Montrer que la donnée d’une action M ˆ E Ñ E est équivalente à la donnée d’un morphisme de monoïde M Ñ FonctpE, Eq.
(d) Pour une action d’un monoïde M sur E, et tout élément x de E, montrer que l’ensemble des éléments de M qui fixent x est un sous-monoïde (définition ?) de M .
(e) Montrer que la donnée d’une action du monoïde libre A˚ sur un ensemble E est équivalente à la donnée d’une fonction (quelconque) A ˆ E Ñ E. Voir la notion de monoïde syntaxique en théorie des automates. Exercice 3.13. On rappelle que le groupe SL2 pZq est un groupe infini engendré par les matrices ˆ ˙ ˆ ˙ 0 ´1 0 ´1 S :“ , et R :“ , 1 0 1 1 et qu’on a les relations S 4 “ Id et R3 “ S 2 . Pour toute représentation linéaire ⇢ : SL2 pZq Ñ C˚ ,
3.8. EXERCICES (a) Montrer que
95 ˆ ˙12 a b ⇢ “ 1, c d
pour tout
ˆ ˙ a b P SL2 pZq. c d
En conclure que ⇢pAq “ expp2ki ⇡{12q pour un certain 0 § k † 12, pour tout A dans SL2 pZq.
(b) Montrer qu’il y a un nombre fini de représentations linéaires de SL2 pZq dans C˚ . Les trouver toutes. Exercice 3.14. Définir les notions de noyau et d’image pour les morphismes d’anneaux commutatifs et les morphismes d’espaces vectoriels (alias transformations linéaires). Puis montrer que (a) Le noyau d’un morphisme d’anneaux commutatifs est un idéal. Rappelons qu’un ideal J d’un anneau commutatif A, est un sous-groupe additif de A, tel que a ¨ x est dans J, pour tout x P J et tout a P A.
(b) Le noyau d’un morphisme d’espace vectoriel est un sous-espace vectoriel.
(c) Dans les deux cas, montrer qu’un morphisme ✓ est injectif, si et seulement si kerp✓q “ t0u.
En théorie des catégories, on donne des définitions qui unifient tout ces concepts.
96
CHAPITRE 3. MORPHISMES DE GROUPES
Chapitre 4 H
Goupes quotients, et théorème d’isomorphie
G
G{H
Dans ce chapitre, nous allons développer d’autres outils importants pour la construction et l’étude de groupes, la notion de groupes quotients ; et le premier théorème d’isomorphisme. Nous généraliserons ainsi la construction de la structure de groupe sur le quotient pZ, `q par son sous-groupe pnZ, `q. Nous montrerons alors que l’étude des groupes cycliques et monogènes se réduit à celle des groupes pZ, `q et pZn , `q.
4.1
Groupes quotients
Pour que l’ensemble quotient G{H admette une structure de groupe héritée de celle G, comme c’est le cas pour Zn qui hérite sa de celle de Z, il faut imposer à H certaines conditions. C’est la notion de « normalité ». Rappelons qu’un sous-groupe H d’un groupe G est dit normal si xH “ Hx pour tout x P G. On écrit alors H G. Par exemple, le centre du groupe ZpGq est normal dans G. En effet, si x P G, alors xg “ gx pour tout g P ZpGq. Donc xZpGq “ ZpGqx. Le groupe IntpGq, des automorphismes internes de G, est un sous-groupe normal de son groupe d’automorphisme AutpGq. Tout sous-groupe d’un groupe abélien G est normal. Enfin, l’intersection de sous-groupes normaux est un sous-groupe. Attention, la relation « » n’est pas transitive. Autrement dit, on peut avoir K H et H G, sans que H G. On trouve un exemple de cette non-transitivité dans S4 (exercice). Par contre, si K 97
98
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
est sous-groupe de H, lui-même sous-groupe de G, alors K
G
ùñ
K
H.
En effet, on a xK “ Kx pour tout x P G donc aussi pour tout x P H. En un certain sens, l’intérêt principal des sous-groupes normaux est leur rôle dans la proposition suivante, qui décrit la construction de « groupe quotient ». Proposition 4.1. Soit G un groupe, et N un sous-groupe normal de G, alors l’opération G{N ˆ G{N ›Ñ G{N
telle que
pxN q ¨ pyN q :“ xyN
(4.1)
muni G{N d’une structure de groupe. On l’appelle le groupe quotient de G par N . L’élément neutre est la classe à gauche N , et l’inverse de x N est pxN q´1 “ x´1 N . La fonction ⇡ : G Ñ G{N définie en posant ⇡pxq “ xN est un épimorphisme de groupes dit canonique, et son noyau est kerp⇡q “ N . Démonstration. En fait, le seul élément un peu moins évident dans la preuve de ce théorème est de montrer que le produit est bien défini, c.-à-d. que pour xN, x1 N, x1 N, y 1 N tel que xN “ x1 N et yN “ y 1 N , il faut montrer que xyN “ x1 y 1 N . Puisque N G, on calcule que x1 y 1 N “ x1 N y 1 “ px1 N qy 1 “ pxN qy 1 “ xy 1 N “ xpy 1 N q “ xyN. Le reste est ensuite direct. On a l’associativité, parce que pxN ¨ yN q ¨ zN “ pxyN q ¨ zN “ pxyqzN “ xpyzqN “ xN ¨ pyN ¨ zN q; l’élément neutre est bien N , puisque xN ¨ N “ xN “ N ¨ xN ; et l’inverse est bien celui qui été annoncé, puisque xN ¨ x´1 N “ xx´1 N “ N “ x´1 N ¨ xN. Calculant que ⇡pxyq “ xyN “ xN ¨ yN “ ⇡pxq ¨ ⇡pyq, on constate que ⇡ est un morphisme de groupes clairement surjectf. De plus, on a déjà vérifié l’égalité suivante kerp⇡q :“ tx P G | xN “ N u “ N. Ce qui achève la preuve. La proposition suivante souligne que les sous-groupes normaux coïncident avec les noyaux de morphismes de groupes.
4.2. THÉORÈME D’ISOMORPHISME
99
Proposition 4.2. Soit G un groupe et H § G, alors H G si et seulement si il existe un morphisme de groupes ✓ : G Ñ G1 tel que H “ kerp✓q. En particulier, kerp✓q G, pour tout morphisme de groupes ✓ : G Ñ G1 . Démonstration. Si H G, il suffit de prendre ✓ “ ⇡ : G Ñ G{H. Réciproquement, il suffit de montrer que kerp✓q G : soit x P G et g P kerp✓q, alors ✓pxgx´1 q “ ✓pxq✓pgq✓pxq´1 ✓pxqe✓pxq´1 “ e car g P kerp✓q et ✓ est un morphisme de groupes. Ainsi xgx´1 P kerp✓q, le noyau est donc normal dans G. Les groupes quotients permettent, entre autres, de faire des arguments par récurrence dans les groupes finis. Pour en donner un exemple, rappelons que l’ordre d’un élément x est le plus entier naturel n (s’il existe) tel que xn “ e, où e désigne l’élément neutre de G.
Lemme 4.3. Si G est un groupe abélien fini dont tous les éléments ont une puissance de 3 comme ordre. Alors le cardinal de G est aussi une puissance de 3. Démonstration. On procède par récurrence | G | sur le cardinal de G. Soit G tel que ordpgq est une puissance de 3, pour tout g P G. Choisissons un élément h P G, autre que e, ayant l’ordre k ordphq “ 3k . Puisque g “ 0, on a k “ 0. Posons H “ te, h, . . . , h3 ´1 u. Si G “ H alors on a fini, puisque | G | “ | H | “ 3k . Autrement, on a H Ä G, avec 2 § | H | † | G |. L’hypothèse de récurrence est que le résultat est vrai pour tous les groupes abéliens finis dont le cardinal est plus petit que | G |. Or, | G{H | “ | G |{| H | ce qui est plus petit que | G |, puisque | H | • 2. De plus, comme G est abélien, et donc H est normal, on a bien que G{H est un groupe abélien. Pour pouvoir utiliser l’hypothèse de récurrence, il faut vérifier que l’ordre de tout élément de G{H est une puissance de 3. À cette fin, n considérons l’épimorphisme naturel G Ñ G{H, pour lequel g fiÑ gH. Par hypothèse, g 3 “ e pour un n n certain n. On a alors pgHq3 “ g 3 H “ eH “ H, le neutre de G{H. En conséquence, 3n est un multiple de ordpgHq, et donc ordpgHq est une puissance de 3. L’hypothèse de récurrence s’applique donc àG{H, et | G{H | est une puissance de 3. Disons | G{H | “ 3` . On calcule alors que | G{H | “ | G |{| H | “ | G |{3k “ 3` ce qui entraîne | G | “ 3k`` , et donc que | G | est une puissance de 3. Cela complète la récurrence.
4.2
Théorème d’isomorphisme
Les « théorèmes d’isomorphie » ont pour but de décrire la structure et les propriétés générales des morphismes de groupes. Ils en donnent des décompositions canoniques. Dans une autre terminologie plus moderne, on dit l’énoncé suivant correspond à décrire la propriété universelle du quotient de groupes.
100
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
Théorème 4.4 (d’isomorphisme). Soit G un groupe, N G et ⇡ : G Ñ G{N la surjection canonique. Si ✓ : G Ñ G1 est un morphisme de groupes tel que N Ñ kerp✓q, alors il existe un unique morphisme ' : G{N Ñ G1 tel que ✓ “ ' ˝ ⇡. De plus (1) si N “ kerp✓q alors ' est un monomorphisme ; (2) si ✓ est un épimorphisme, alors ' l’est aussi.
Plus spécifiquement, si ✓ est un épimorphisme, et N “ kerp✓q, alors ' est un isomorphisme. On peut formuler ce résultat en terme du diagramme commutatif suivant G ⇡
✏✏
G{N
✓
/8 G1
D!'
Si ✓ : G Ñ G1 est un morphisme de groupes, alors G{ kerp✓q » Imp✓q (exercice). Par exemple, en vertu du théorème de Lagrange, le groupe alterné An “ kerp"q est d’ordre |An | “ n!{2. Pour un autre exemple, on a pC{R, `q » pR, `q. En effet, on observe d’abord que R C, car pC, `q est abélien. De plus, on a un épimorphisme de groupes ✓ : C Ñ R, défini par ✓pa ` ibq “ b. Son noyau est kerp✓q “ R. En vertu du théorème d’isomorphisme, il existe donc un isomorphisme ' : C{R Ñ R, comme annoncé. Démonstration du théorème 4.4. L’unicité de ' se vérifie comme suit. Soit ' et '1 , tels que ✓ “ ' ˝ ⇡ “ '1 ˝ ⇡. Pour x P G on a ✓pxq “ ' ˝ ⇡pxq “ '1 ˝ ⇡pxq, donc 'p⇡pxqq “ '1 p⇡pxqq. Donc pour tout xN P G{N on a 'pxN q “ '1 pxN q, et donc ' “ '1 .
Pour l’existence, on débute en montrant que la fonction ' : G{N Ñ G1 , définie par 'pxN q :“ ✓pxq, est bien définie. Autrement dit, si xN “ yN alors on veut vérifier que ✓pxq “ ✓pyq. Or, l’hypothèse implique que x´1 yN “ N , et donc x´1 y P N Ñ kerp✓q. Il s’ensuit que ✓px´1 yq “ e. Puisque ✓ est un morphisme, il en découle que ✓pxq✓pyq´1 “ e, et donc que ✓pxq “ ✓pyq. La fonction ' est donc bien définie. Pour le reste de l’énoncé du théorème, on montre d’abord que ' est un morphisme de groupes. En effet, pour xN, x1 N P G{N on constate que 'pxN ¨ x1 N q “ 'pxx1 N q “ ' ˝ ⇡pxx1 q “ ✓pxx1 q “ ✓pxq✓px1 q “ ' ˝ ⇡pxq' ˝ ⇡px1 q “ 'pxN q'px1 N q.
Maintenant, si pour tout y P G1 on a x P G tel que ✓pxq “ y (✓ est un épimorphisme), alors 'pxN q “ ' ˝ ⇡pxq “ ✓pxq “ y;
et donc ' est un épimorphisme. D’autre part, lorsque N “ kerp✓q, on a kerp'q “ tN u. En effet, si 'pxN q “ e, alors ✓pxq “ e et donc x P N ; mais alors x P N et xN “ N . On en conclut que ' est bien un monomorphisme.
4.3. PRÉSENTATIONS (FINIES) DE GROUPES
101
Corollaire 4.5. Si G est un groupe simple, alors les morphismes de groupes non-trivaux ✓ : G Ñ H sont forcément des monomorphismes. Démonstration. Si ✓ n’est pas trivial, alors son noyau n’est pas égal à G. Comme G est simple, la seule autre possibilité est que kerp✓q “ teu, et donc ✓ est un monomorphisme.
4.3
Présentations (finies) de groupes
a
e b
Une autre conséquence des résultats précédents est de permettre les constructions suivantes. Comme l’illustrent les groupes engendrés par des réflexions, plusieurs groupes se décrivent naturellement en terme de générateurs et de relations. Plus explicitement, pour chaque ensemble fini S, on construit d’abord le groupe libre FS sur l’ensemble S des générateurs. Les éléments de FS sont les suites finies x1 x2 ¨ ¨ ¨ xn , de « lettres » xi “ s ou xi “ s´1 pour s P S ; avec la condition que xi “ x´1 i`1 . Autrement dit, deux lettres consécutives dans le « mot » x1 x2 ¨ ¨ ¨ xn ne sont pas l’inverse l’une de l’autre. Par exemple, Fta,bu “ te, a, a, b, b, ab, ba, ab, ba, ab, ba, ab, ba, aba, . . .u.
Figure 4.1 – Une portion du graphe où e désigne la suite vide, qui est l’élément neutre de ce groupe ; de Cayley du groupe libre Fta,bu . et où on écrit a à la place de a´1 pour faire plus joli. Le produit de deux suites ↵ “ x1 x2 ¨ ¨ ¨ xn et “ y1 y2 ¨ ¨ ¨ yk s’obtient simplement par concaténation de celles-ci : ↵ ¨ :“ x1 x2 ¨ ¨ ¨ xn y1 y2 ¨ ¨ ¨ yk , modulo les simplifications nécessaires, dues au fait que les dernières lettres de ↵ et les premières de sont telles qu’on doive simplifier. Ces simplifications s’effectuent en effaçant (récursivement) deux lettres consécutives, si elles sont l’inverse l’une de l’autre. Ainsi, on a pababbabq ¨ pbababaabq “ ababba bb ababaab “ ababb aa babaab “ abab bb abaab “ abababaab.
Pour S de cardinal plus grand ou égal à 1, le groupe libre est d’ordre infini. Si S n’a qu’un élément, alors FS s’identifie à Z (avec l’addition). Dans tous les autres cas, le groupe résultant n’est pas commutatif. Le début du graphe de Cayley du groupe F2 “ Fta,bu , avec les générateurs a et b, est illustré ci-haut. En principe, on continue le branchement à l’infini.
102
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
Bien qu’on interprète les relations comme un ensemble d’identités ↵ “ e, pour ↵ dans FS ; on les présente plutôt comme un ensemble (fini) dont les éléments sont les membres de gauche de ces identités. Techniquement donc, on se donne R un sous-ensemble fini de FS , en comprenant que ↵ P R correspond à l’identité ↵ “ e. Une présentation d’un groupe G prend la forme xS | Ry, avec R Ä FS ; et le groupe xS | Ry est le groupe quotient xS | Ry :“ FS {NR , où NR est le plus petit sous-groupe normal de FS qui contient R. Une façon de « construire » NR est de considérer le sous-groupe engendré par tous les conjugués ´1 ↵ , pour ↵ dans R et dans FS . Le groupe diédral Dm admet la présentation Dm :“ xr, s | rm , s2 , pr sq2 y,
ce qui « signifie » que rm “ e, s2 “ e, et pr sq2 “ e. On peut alors vérifier (exercice) que Dm contient exactement 2m éléments. On a aussi les présentations suivantes @ D Zn “ z | zn , @ D SL2 pZq “ s, r | s4 , r6 , @ D Sn “ s1 , . . . , sn´1 | s2i , psi si`1 q3 , psi sj q2 pour |i ´ j| ° 1 , @ D An “ c1 , . . . , cn´2 | c3i , pci cj q2 pour i “ j . Un même groupe peut avoir plusieurs présentations. Par exemple, on a @ D @ D A5 “ a, b | a2 , b3 , pabq5 “ c, d | c2 , d4 , pcdq5 , pc´1 d´1 cdq3 .
On a souvent des relations qui font intervenir le commutateur, ra, bs :“ a´1 b´1 ab, de deux éléments. On observe que ra, bs “ e ssi a´1 b´1 ab “ e ssi ab “ ba,
ce qui explique la terminologie. On peut montrer que tout groupe fini admet une présentation finie. Bien qu’on puisse parfois déterminer l’ordre d’un groupe à partir de sa présentation, c’est souvent un problème difficile. En fait le problème du mot, qui consiste à déterminer si deux mots donnent le même élément du groupe, est un problème indécidable. Informellement, cela signifie qu’il n’existe pas d’algorithme qui permette de décider (en toute généralité) si deux mots sont égaux. C’est le théorème de Novikov 1 . Cependant, on peut déterminer certaines classes de présentations de groupes pour lesquelles le problème du mot est décidable.
4.4
Sous-groupes d’un groupe quotient
Pour mieux circonscrire la structure du groupe quotient G{N , en particulier en ce qui concerne ses sous-groupes, la proposition suivante est fondamentale. 1. Voir Petr Novikov (1901-1975)
4.5. GROUPES MONOGÈNES ET CYCLIQUES
103
Proposition 4.6. Soit G un groupe, N G et ⇡ : G Ñ G{N l’épimorphisme canonique. Alors la fonction K fiÑ ⇡pKq est une bijection de l’ensemble des sous-groupes de G contenant N sur l’ensemble des sous-groupes de G{N . Autrement dit, L § G{N si et seulement si il existe N § K § G tel que ⇡pKq “ L. De plus, on a N K (puisque N G), et donc un groupe quotient K{N . D’autre part, grâce au théorème ci-dessus on sait que ⇡pKq § G{N . Ainsi, en vertu du théorème d’isomorphisme que ⇡pKq » K{N (exercice) ; et donc, par le théorème de Lagrange, |⇡pKq| “ |K|{|N | (exercice). Ceci mène à la formule |G{N | “ |G{K| ¨ |K{N |. Enfin, pour K “ xSy, on a ⇡pKq “ x⇡pSqy (exercice). Démonstration de la proposition 4.6. Soit K § G contenant N . Pour voir que ⇡pKq est un sousgroupe de G{N , on observe d’abord N P ⇡pKq car N Ñ K implique ⇡pN q “ N Ñ ⇡pKq. D’autre part, pour xN, yN ⇡pKq on a x, y P K, et donc xN pyN q´1 “ xy ´1 N “ ⇡pxy ´1 q P ⇡pKq. Il s’ensuit que ⇡pKq § G{N . Autrement dit, la fonction K Ñ ⇡pKq est bien définie. Reste à montrer qu’elle est bijective. Surjectivité : Soit L § G{N , posons K “ ⇡ ˚ pLq “ tg P G | ⇡pgq P Lu. Alors e P K car ⇡peq “ N P L. Si x, y P K alors puisque ⇡ est un morphisme de groupes on a ⇡pxy ´1 q “ ⇡pxq⇡pyq´1 P L car L § G{N , donc xy ´1 P K. Donc K § G. L’application est surjective. Injectivité : Soit K, K 1 deux sous-groupes de G contenant N tel que ⇡pKq “ ⇡pK 1 q. Par symétrie, il suffit de montrer que K Ñ K 1 pour montrer que K “ K 1 et donc son injectivité. Soit x P K alors ⇡pxq P ⇡pKq “ ⇡pK 1 q. Donc xN “ yN avec y P K 1 . Ce qui implique qu’il existe h P N tel que x “ yh. Puisque N Ñ K 1 , y, h P K 1 . En outre, puisque x “ yh et K 1 § G, on obtient que x P K 1 .
4.5
Groupes monogènes et cycliques
Un autre des résultats fondamentaux de la théorie des groupes ramène l’étude des groupes abéliens aux groupes monogènes et cycliques. À leur tour, on montre que ceux-ci sont forcément, à isomorphisme près, soit Z, soit Zn , pour n P Z. Plus précisément, on a le résultat suivant. Proposition 4.7. Soit G “ xxy un groupe monogène, alors (1) Si G est infini, alors G » pZ, `q. (2) Si G est fini d’ordre n, alors G » pZn , `q.
Démonstration. On considère ✓ : Z Ñ G définie par ✓pnq “ xn . Alors ✓ est un morphisme de groupes : ✓pn ` mq “ xn`m “ xn xm “ ✓pnq✓pmq (on notera que Z est un groupe noté additivement tandis que
104
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
G est noté multiplicativement). Il est clair que ✓ est surjectif. Si kerp✓q “ t0u alors G » Z. Si kerp✓q n’est pas 0 alors il existe n P Z tel que kerp✓q “ nZ car kerp✓q est un sous-groupe de Z et les seuls sous-groupes de Z sont les ensembles de multiples. Donc en vertu du théorème d’isomorphismes, G » Zn . Puisque n “ |G| “ |Zn “ n, on en déduit le théorème. Corollaire 4.8. Tout sous-groupe d’un groupe cyclique est cyclique. Démonstration. Soit G un groupe cyclique, alors G » pZ, `q ou G » pZn , `q. Les sous-groupes de G sont donc isomorphes à des sous-groupes de pZ, `q ou de pZn , `q qui sont tous cycliques. Donc par isomorphisme inverse, les sous-groupes de G sont cycliques (s’en convaincre en faisant l’exercice). Exemples. (a) Soit U “ tz P C : |z| “ 1u. On a U § pC˚ , ¨q et U » pR, `q{ † 2⇡ °.
(b) (Racines n-ième de l’unité) Soit n P N, on dit que z P C est une racine ne de l’unité si z n “ 1. On note Upnq l’ensemble des racines nième de l’unité. Soit n P N, alors Upnq est un sous-groupe cyclique fini de U isomorphe à Zn . Il est engendré par e2i⇡{n .
4.6. A5 COMME GROUPE DES ROTATIONS DU DODÉCAÈDRE
4.6
105
A5 comme groupe des rotations du dodécaèdre
Le groupe des rotations du dodécaèdre est isomorphe au groupe alterné A5 . Pour le voir, on raisonne comme suit. Pour chaque diagonale d’une face (joignant un sommet à un sommet de cette face qui ne lui est pas immédiatement voisin), on a un et un seul cube inscrit dans le dodécaèdre dont un côté correspond à cette diagonale. En fait, les 12 côtés de ce cube correspondent à une diagonale dans chacune des 12 faces du dodécaèdre. Comme chaque face (pentagonale) du dodécaèdre contient 5 diagonales, il y a 5 cubes différents inscrits dans le dodécaèdre (voir Figures 4.3 et 4.4). On les nomme t1, 2, 3, 4, 5u, et cela se répercute en une façon d’étiquetter les diagonales ; en donnant à chaque coté d’un cube l’étiquette du cube. Chaque rotation du dodécaèdre envoie un cube inscrit dans un cube inscrit, Figure 4.2 – Les cinq cubes inscrits puisqu’elle respecte les longueurs et les angles, et cela donne une dans le dodécaèdre. permutation des 5 valeurs des étiquettes des diagonales. D’autre part, deux rotations sont différentes si et seulement si elles font effectuer des permutations différentes aux 5 cubes. Manifestement, le composé de rotations correspond au composé des permutations de cubes correspondantes. On a donc un monomorphisme du groupe des rotations du dodécaèdre vers le groupe S5 , et on cherche à montrer que l’image de ce monomorphisme est le sous-groupe alterné A5 . Par le premier théorème d’isomorphisme, on pourra alors conclure que le groupe des rotations du dodécaèdre est isomorphe au groupe alterné A5 .
5 4 3
1 2
Figure 4.3 – Une rotation du dodécaèdre autour de l’axe joignant deux sommets opposés, et la permutation des 5 cubes correspondante.
106
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
On considère une rotation horaire de 2⇡{3 autour de l’axe joignant un sommet au sommet diamétralement opposé dans le dodécaèdre. Cette rotation laisse fixes (en leur faisant effectuer une rotation) exactement deux des 5 cubes inscrits. En effet, ce sont les deux cubes pour lesquels cet axe est aussi une grande diagonale ; ou encore, ce sont les deux cubes dont l’un des sommets est sur l’axe de rotation. Les 3 autres cubes sont permutés entre eux, et la seule possibilité est que c’est selon une permutation cyclique de longueur 3. Pour la rotation de la figure 4.3, les cubes numérotés 1 et 4, selon les diagonales du pentagone de la partie droite de la figure, sont laissés fixes. Les 3 autres cubes sont permutés selon la permutation cyclique p235q.
Figure 4.4 – Version réaliste d’un cube inscrit dans le dodécaèdre. Le dodécaèdre possède 20 sommets, et il leurs correspond 20 rotations horaires de 2⇡{3, comme celle décrite ci-dessus. À chacune de ces 20 rotations, on associe une permutation cyclique de longueur `˘ 3, et il y en a 20 différentes (puisque les 20 rotations sont différentes). Or, il y a exactement 20 “ 2 53 permutations cycliques de longueur 3 dans S5 , qui correspondent à choisir 3 des éléments de t1, 2, 3, 4, 5u avec deux cycles pour chaque choix. Il s’ensuit qu’on obtient exactement toutes les permutations cycliques de longueur 3 de S5 , en considérant les rotations décrites ci-haut. Bien entendu, en composant ces rotations on obtient d’autres rotations du dodécaèdre qui permutent les cubes selon d’autres permutations. Nous voulons voir qu’il en a 60, et qu’elles correspondent aux soixante permutations dans An . Le fait qu’il y a (au plus) 60 rotations du dodécaèdre est facile à établir. On choisit deux sommets adjacents A et B, et on « suit leurs traces ». Une rotation ✓ envoie le sommet A sur n’importe lequel des 20 autres sommets, et le sommet B sur l’un des 3 voisins de l’image de ✓pAq. Le choix de ce second sommet fixe la rotation. Il y a donc (au plus) 60 rotations possibles du dodécaèdre. Nous allons montrer ci-dessous (voir Lemme 4.9) que le sous-groupe A5 est engendré par les permutations cycliques de longueur 3. En vertu de notre raisonnement ci-haut, il y a donc exactement 60 rotations du dodécaèdre,
4.6. A5 COMME GROUPE DES ROTATIONS DU DODÉCAÈDRE
107
qui constituent (pour la composition) un groupe isomorphe à A5 . Lemme 4.9. Le sous-groupe alterné An , du groupe des permutations Sn , est engendré par les permutations cycliques de longueur 3. Démonstration. Par définition An contient toutes les permutations cycliques de longueur 3, puisque leur signe est positif. Pour voir qu’elles engendrent tout An , on rappelle que toute permutation peut s’exprimer comme produit de transpositions de la forme p1aq (voir Exercice 1.37), et que celles qui sont dans An s’expriment (par définition) comme un produit d’un nombre pair de ces transpositions, qui peuvent donc être regroupées deux par deux. Or, le produit p1aqp1bq est égal à la permutation cyclique p1baq. On a donc bien une expression de tout élément de An comme produit de cycles de longueur 3, tel qu’annoncé. La proposition suivante découle du fait que A5 est le groupe des rotations du dodécaèdre. Proposition 4.10. A5 est un groupe simple. Démonstration. Soit ' : A5 Ñ G un morphisme de group qui n’est pas injectif. Autrement dit, on suppose que kerp'q contient au moins un élément de A5 , autre que l’identité. Nous allons voir que la classe de conjugaison de g engendre forcément tout A5 , et donc que A5 n’a pas de sous-groupe normal propre. On rappelle d’abord (voir Exercice 3.2) que g est soit d’ordre 2, soit d’ordre 3, soit d’ordre 5, puis on utilise l’interprétation de A5 comme groupe de rotation du dodécaèdre pour conclure que la classe de conjugaison de g engendre tout A5 . En fait, nous l’avons déjà fait pour le cas où l’ordre de g est 3, puisque cela correspond aux permutations cycliques d’ordre 3. Ne reste plus qu’à faire de même pour les deux autres cas. Les rotations d’ordre 5 du dodécaèdre correspondent aux rotations autour de l’axe perpendiculaire à l’une des faces du dodécaèdre, qui est aussi perpendiculaire à la face opposée. Ces rotations permutent de façon circu3 5 laire les cinq cubes inscrits. On a exactement 24 telles 2 4 rotations, qui correspondent aux 6 façons de choisir deux 1 1 faces opposées, avec 4 rotations (différentes de l’identité) 5 3 4 2 pour chacun de ces choix. Or, il y a 24 permutations cycliques dans S5 , toutes appartenant à A5 . Pour deux faces adjacentes, comme à la figure ci-contre, le produit des permutations en question est une permutation cyclique d’ordre 3, ce qui nous ramène au cas déjà montré. Figure 4.5 – Permutation des 5 cubes, pour L’exemple ci-contre illustre ce fait, avec une rotation du dodécaèdre selon des faces. p13254q ˝ p12345q “ p153q.
œ
œ
108
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
Enfin, les rotations d’angle ⇡ autour de l’axe reliant le centre d’un côté du dodécaèdre au côté opposé, sont celles qui correspondent au type cyclique 221 (d’ordre 2). Par exemple, avec les deux faces de la figure ci-dessus et la rotation selon le centre du côté qu’elles partagent, on obtient la permutation des diagonales p23qp45q, avec la diagonale 1 laissée fixe (puisqu’on fait tourner le cube correspondant à 1 d’un angle ⇡ autour de l’axe qui relie le centre d’une de ses faces au centre de la face opposée). En composant deux telles rotations, pour des côtés issus d’un même sommet, on trouve une permutation cyclique d’ordre 5. On est encore une fois réduit au cas précédent. Par exemple, prenant le côté à la droite du sommet rouge de la figure, on trouve la rotation correspondant à la permutation p15qp34q, et le composé donne p13524q.
4.7
Groupes résolubles
Un groupe fini G est dit résoluble s’il existe une chaîne de groupes teu “ G0
G1
G2
¨¨¨
Gn “ G,
où chaque Gi est un sous-groupe normal de Gi`1 , avec l’ordre de Gi`1 {Gi un nombre premier. On dit alors que la chaîne ci-haut est une résolution du groupe G. Un groupe simple dont l’ordre n’est pas un nombre premier n’est donc pas résoluble. C’est le cas pour tout An , pour tout n • 5. En théorie de Galois, on associe à chaque polynôme un groupe fini, et on montre qu’il existe une formule par radicaux pour les racines du polynôme si et seulement si le groupe du polynôme est résoluble. On montre aussi qu’il y a des polynômes pour lesquels le groupe de Galois associé est An . Il s’ensuit qu’il n’existe pas de formule par radicaux donnant les racines d’un polynôme de degré plus grand ou égal à 5. On connaît de telles formules pour les degrés 2, 3 et 4. Un autre aspect intéressant de la théorie de Galois est qu’une résolution du groupe de Galois d’un polynôme donne une façon explicite de calculer ses racines. On a donc ainsi des résultats positifs, pour les polynômes dont le groupe est résoluble. En particulier, on peut trouver ainsi les formules générales pour les polynômes de degré 3 et 4. Tout cela est au menu du cours Théorie de Galois.
4.8
Exercices
Exercice 4.1. Soit G un groupe et H § G, montrer que les énoncés suivants sont équivalents. (a) H
G;
(b) xHx´1 “ H, pour tout x P G ; (c) x´1 Hx “ H, pour tout x P G ;
4.8. EXERCICES
109
(d) xhx´1 P H, pour tout x P G et tout h P H ; (e) x´1 hx P H, pour tout x P G et tout h P H.
Exercice 4.2. Soit G un groupe et H § G d’indice 2, montrer que H est normal dans G. Exercice 4.3. Soit G un groupe, montrer que IntpGq
AutpGq.
Exercice 4.4. Soit G un groupe et S Ñ G. Posons H “ xSy. (a) Montrer que si xSx´1 Ñ H pour tout x P G, alors H
(b) Si f : G Ñ
G1
G.
est un isomorphisme, montrer que f pHq “ xf pSqy.
Exercice 4.5. Dans le groupe symétrique S4 , on considère
H “ xp1, 2qp3, 4qy et K “ te, p1, 2qp3, 4q, p1, 3qp2, 4q, p1, 4qp2, 3qu. (a) Vérifier que K “ xp1, 2qp3, 4q, p1, 3qp2, 4qy.
(b) Montrer que H
K et K
S4 , mais que H n’est pas normal dans S4 .
Exercice 4.6. Trouver tous les sous-groupes de S3 , et déterminer ceux qui sont normaux. Exercice 4.7. Soit G un groupe et H, K § G, montrer que (a) si H
(b) H
G et K § G contenant H alors H
G ùñ H X K
K;
G;
(c) En déduire que l’intersection de sous-groupes normaux de G est un sous-groupe normal de G. Exercice 4.8. Soit G un groupe et H, K § G.
(a) Montrer que HK § G ñ HK “ KH.
(b) Montrer que si HK § G alors HK “ xH Y Ky. Est-ce que dans ce cas HK est abélien ? (c) Montrer que si H
G alors HK § G et H
HK.
Exercice 4.9. Soit ✓ : G Ñ G1 un morphisme de groupes, montrer que (a) si H G alors ✓pHq § ✓pGq, et que si ✓ est surjectif alors ✓pHq ✓ n’est pas surjectif ?
(b) Si H 1
G1 alors ✓´1 pH 1 q
Exercice 4.10. Si ✓ : G Ñ
G1
G1 . Est-ce vrai dans le cas où
G.
est un morphisme de groupes, montrer que G{ kerp✓q » Imp✓q.
Exercice 4.11. Soit n P N et d qui divise n.
(a) Montrer qu’il existe un morphisme de groupes injectif ◆ : pZd , `q Ñ pZn , `q.
(b) Montrer qu’il existe un morphisme de groupes surjectif ' : pZn , `q Ñ pZd , `q.
Exercice 4.12. Soit G un groupe, H G et K est un sous-groupe de G contenant H. On note ⇡ : G Ñ G{H le morphisme surjectif canonique. Montrer que (a) ⇡pKq » K{H ;
110
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
(b) si K “ xSy alors ⇡pKq “ x⇡pSqy ; (c) si K est fini, alors |⇡pKq| “ |K|{|H|. Exercice 4.13. Donner tous les sous-groupes de pZ20 , `q. Exercice 4.14. (Deuxième et troisième théorèmes d’isomorphisme) Soit G un groupe et H G et K § G. (a) Montrer que H X K G et K{pK X Hq » HK{H. (b) Si de plus K G et K Ñ H, montrer que H{K G{K et pG{Kq{pH{Kq » G{H. Indice : Se servir du premier théorème d’isomorphisme. Exercice 4.15. Soit G un groupe, montrer que si G{ZpGq est un groupe monogène, alors G est abélien. Exercice 4.16. Justifier les isomorphismes suivants : (a) pC{R, `q » pR, `q ; (b) pR{Z, `q » pU, ¨q ; (c) pC˚ {R`˚ , ¨q » pU, ¨q ; (d) pC˚ {R˚ , ¨q » pU, ¨q ; (e) pU{Upnq, ¨q » pU, ¨q ; (f) pC˚ {Upnq, ¨q » pC˚ , ¨q. Exercice 4.17. Soit G un sous-groupe d’indice fini dans pC˚ , ¨q, montrer que G “ pC˚ , ¨q.
Exercices exploratoires Exercice 4.18. Les groupes de Coxeter sont les groupes qui admettent une présentations W “ xS | Ry, avec les relation dans R de la forme pstqmps,tq pour toute paire s, t d’éléments de S. On demande que les mps, tq soient des entiers ; et que (1) mps, sq “ 1, (2) mps, tq • 2 si s est différent de t, (3) mps, tq “ mpt, sq. Pour que le groupe W soit fini, il y a de fortes contraintes sur les entiers mps, tq, et Coxeter a pu classifier toutes les possibilités de tels groupes qui soient irréductibles pour le produit (voir exercice (b) et (c)). Montrer que : (a) Deux générateurs s et t commutent si et seulement si mps, tq “ 2. (b) Si S “ S1 ` S2 avec mps1 , s2 q “ 2 pour tout s1 P S1 et s2 P S2 , alors W “ W1 ˆ W2 ,
pour W1 “ xS1 | R1 y et W2 “ xS2 | R2 y, avec des choix judicieux de R1 et R2 .
4.8. EXERCICES
111
(c) Si W1 et W2 sont deux groupes de Coxeter, alors on peut présenter W1 ˆ W2 comme un groupe de Coxeter. (d) Les groupes diédraux sont des groupes de Coxeter. (e) Le groupe symétrique Sn est un groupe de Coxeter. (f) Le groupe de Coxeter avec 3 générateurs s, t, r et les relations mps, rq “ 3, mpr, tq “ 3 et mps, tq “ 3 est infini.
112
CHAPITRE 4. GROUPES QUOTIENTS ET THÉORÈME D’ISOMORPHIE
Chapitre 5
Produits de groupes Le « produit direct » permet de construire de nouveaux groupes, à partir de groupes donnés. À l’inverse, on peut « décomposer » un groupe en produit direct, ce qui révèle sa structure. Nous allons décrire ces constructions et leurs propriétés.
5.1
Le produit direct
Pour deux groupes G, H, on considère sur le produit cartésien G ˆ H “ tpg, hq | g P G, h P Hu. l’opération de groupe obtenue en posant pg1 , h1 q ¨ pg2 , h2 q “ pg1 g2 , h1 h2 q. L’élément neutre est pe, eq, et l’inverse se calcule comme suit
pg, hq´1 “ pg ´1 , h´1 q.
En effet, on vérifie que pg, hq ¨ pe, eq “ pge, heq “ pg, hq pe, eqpg, hq “ peg, ehq “ pg, hq
pg, hq ¨ pg ´1 , h´1 q “ pgg ´1 , hh´1 q “ pe, eq
pg ´1 , h´1 q ¨ pg, hq “ pg ´1 g, h´1 hq “ pe, eq. 113
114
CHAPITRE 5. PRODUITS DE GROUPES L’associativité se vérifie aussi de même façon. C’est le produit direct (ou produit direct externe), de G avec H. On obtient ainsi, par exemple, le groupe Z ˆ Z ; ou encore le groupe Zn ˆ Zk , d’ordre n k. On observe que Z2 ˆ Z2 (d’ordre 4) n’est pas isomorphe à Z4 . En effet, dans Z2 ˆ Z2 on a g ` g “ e pour tout g, ce qui n’est pas le cas dans Z4 . Par contre, Z6 est isomorphe à Z2 ˆ Z3 . Plus généralement, comme on va le voir plus tard , Zn ˆ Zk n’est isomorphe à Znk , que si n et k sont premiers entre eux, c.-à-d. pgcdpn, kq “ 1.
La construction du produit direct se généralise aisément à plusieurs Figure 5.1 – Graphe de Cay- facteurs. Ainsi, pour n groupes G1 , . . . , Gn , on a le produit direct de ley de Z3 ˆ Z3 . groupes G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gn avec l’opération px1 , . . . , xn q ¨ py1 , . . . , yn q :“ px1 y1 , x2 y2 , . . . , xn yn q
(5.1)
On écrit aussi parfois ⇧ni“1 Gi , pour ce produit. On vérifie facilement (exercice) la proposition suivante. / G1 , pour 1 § i § n, sont des morphismes de groupes, alors on a un Proposition 5.1. Si ✓i : Gi i morphisme de groupe / G 1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ G1 ✓ 1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ ✓ n : G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gn n 1
définie en posant
p✓1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ ✓n qpx1 , . . . , xn q “ p✓1 px1 q, . . . , ✓n pxn qq,
pour px1 , . . . , xn q dans G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gn . Si les ✓i sont des monomorphismes (resp. épimorphisme, ou isomorphisme), alors ✓1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ ✓n est un monomorphisme (resp. épimorphisme, ou isomorphisme). Dans le cas où les ✓i sont des isomorphismes, l’inverse de p✓1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ ✓n q est p✓1´1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ ✓n´1 q, et c’est donc un isomorphisme. Pour chaque k, entre 1 et n, on a un monomorphisme de groupes ◆k : Gk Ñ G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gn , défini en posant ◆k pxq :“ pe, . . . , e, x, e, . . . , eq, loomoon k´1
et un épimorphisme de groupes ⇡k : G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gn Ñ Gk , simplement définis en posant ⇡k px1 , . . . , xn q :“ xk .
On dit de ◆k que c’est l’inclusion de Gk dans le produit, et de ⇡k que c’est la k e projection sur la composante Gk . On vérifie aisément que ⇡k ˝ ◆k “ Id, ou formulé en terme diagramme commutatif : Gk
◆k
/ G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gn Id
⇡k
✏ ( ✏
Gk
5.2. LE PRODUIT DIRECT INTERNE
115
De plus, l’image de Gk par ◆k est un sous-groupe normal du produit. Plus généralement, pour des sous-groupes Hi des Gi , le produit direct H1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Hn est un sous-groupe de G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gn , qui est normal si chacun des Hi l’est. On a alors (exercice) pG1 ˆ G2 q{pH1 ˆ H2 q » pG1 {H1 q ˆ pG2 {H2 q.
(5.2)
La propriété universelle 1 qui caractérise le produit direct de groupes fait l’objet de la proposition suivante. Proposition 5.2. Pour tout groupe H, et des morphismes ✓1 : H Ñ G1 et ✓2 : H Ñ G2 , il existe un unique morphisme ✓ : H Ñ G1 ˆ G2 , tel que ⇡1 ˝ ✓ “ ✓ 1 ,
⇡2 ˝ ✓ “ ✓2 .
et
On écrit alors ✓ “ p✓1 , ✓2 q, puisque f phq “ p✓1 phq, ✓2 phqq. Formulé en terme de diagramme commutatif, ceci prend la forme 6 GO 1 O
✓1
H
D!✓
⇡1
/ G1 ˆ G 2 ⇡2
✓2
(
5.2
✏✏
G2
Le produit direct interne
Les observations précédentes entraînent que le groupe G “ G1 ˆ G2 peut se décrire sous la forme G “ HK :“ txy | x P H et y P Ku, où H :“ G1 ˆ teu,et K :“ teu ˆ G2 sont des sous-groupes normaux de G d’intersection vide, c.-à-d. H X K “ teu. Ainsi, le produit est « réalisé » à l’intérieur de G. Cela mène à une version « interne » de la notion de produit directe, dont le définition passe par la proposition suivante. Proposition 5.3. Dans un groupe G, si H et K sont des sous-groupes normaux de G tels que H X K “ teu, alors G » H ˆ K.
1. Cela explique le « rôle » du produit direct.
et
G “ HK,
116
CHAPITRE 5. PRODUITS DE GROUPES
Démonstration. Considérons la fonction ' : H ˆ K Ñ G, avec 'px, yq :“ xy. La condition G “ HK dit précisément que cette fonction est surjective. C’est aussi un morphisme puisqu’on a les deux égalités 'ppx1 , y1 q ¨ px2 , y2 qq “ 'px1 x2 , y1 y2 q “ x1 x2 y1 y2
'px1 , y1 q ¨ 'px2 , y2 q “ px1 y1 q ¨ px2 y2 q “ x1 y1 x2 y2
Pour voir que les deux expressions résultantes sont égales, on observe que x2 y1 “ y1 x2 , ou autrement dit ´1 ´1 ´1 ´1 x2 y1 x´1 2 y1 “ e. En effet, on a d’abord x2 y1 x2 P K, car K est normal dans G, et donc x2 y1 x2 y1 ´1 ´1 ´1 est dans K. De mêmes façons, on vérifie que x2 y1 x2 y1 appartient à H. On a donc que x2 y1 x´1 2 y1 est dans l’intersection H X K “ teu, d’où l’assertion. Le morphisme ' est injectif, car 'px, yq “ e implique xy “ e, alors y “ y ´1 P H X K ; d’où x “ e, y ´1 “ e, et donc y “ e. D’où px, yq “ pe, eq. On conclut donc que ' est un isomorphisme. Cette proposition suggère de dire, pour un groupe G contenant deux sous-groupes normaux H et K satisfaisant les conditions de la proposition H, K, que G est le produit direct interne des sous-groupes H et K. Lorsque ceci est le cas, on dit que G se décompose comme produit direct de ses sous-groupes H et K. On dit aussi que H et K sont les facteurs de cette décomposition. Par exemple, Z6 est produit direct interne de ses sous-groupes x3y et x2y. Bien entendu, la notion de produit direct interne se généralise à plus de deux facteurs. Ainsi, G est le produit direct interne de ses sous-groupes normaux H1 . . . , Hn , si on a pour tout 1 § i § n, et
xi Y . . . Y Hn y “ teu, Hi X xH1 Y . . . Y H G “ H 1 H 2 . . . Hn .
Ainsi, Z30 est produit direct interne de ses sous-groupes x15y, x10y et x6y. On montre facilement une généralisation de la Proposition 5.3, à savoir que, si G est produit direct interne des Hi , avec 1 § i § n, alors G » H1 ˆ H2 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ H n . Bien entendu, comme dans le cas n “ 2, lorsque G est un tel produit direct interne des Hi , on dit qu’il se décompose en produit direct des Hi , et que les Hi sont les facteurs de cette décomposition.
On peut facilement déterminer une présentation du produit direct de deux groupes, pour lesquels on a des présentations. On montre la proposition suivante. Proposition 5.4. Pour des présentations G1 “ xS1 | R1 y et G2 “ xS2 | R2 y, avec S1 X S2 “ H, on a la présentation G1 ˆ G2 “ x S1 ` S2 | R1 ` R2 ` C y,
ou l’ensemble de relations suplémentaires
C :“ ta´1 b´1 a b | a P S1 , b P S2 u,
assure que tous les générateurs de G1 commutent avec les générateurs de G2 .
5.3. PRODUITS SEMI-DIRECTS
5.3
117
Produits semi-directs
Dans la foulée de la section précédente, il peut sembler naturel d’affaiblir les conditions de la proposition 5.3, en supposant que l’un des deux sous-groupes n’est pas nécessairement normal. La pratique montre que c’est une excellente idée. Ainsi, pour un groupe G, on considère deux sous-groupes N et H, avec seulement N supposé normal, et tels que N X H “ teu,
G “ N H.
et
Si tel est le cas, on dit que G est un produit semi-direct interne des sous-groupes H et N . On note 2 alors G “ N ¸ H, et on montre que tout élément g de G s’écrit de manière unique comme g “ n h, avec n P N et h P H. On a l’énoncé suivant, dont la preuve est laissée en exercice. Proposition 5.5. Le composé de l’inclusion N isomorphisme H
„
/ G avec la projection G
/ / G{N donne un
/ G{N. De plus, la fonction
' : H Ñ AutpN q,
telle que
'h pnq :“ h n h´1 ,
est un morphisme de groupes. Ici, on désigne par 'h l’image de h par ', c’est donc un automorphisme 'h : N Ñ N . Cette proposition ouvre la porte à la version « externe » du produit semi-direct, qui elle-même mène à plusieurs domaines de recherche contemporains (algèbre homologique, topologie combinatoire, cohomologie de groupes, extensions de groupes, etc.) dépassant tous le niveau d’un premier cours sur la théorie des groupes. Elle se décrit comme suit, et correspond essentiellement à « oublier » que N et H sont des sous-groupes de G. Rappelons qu’à la Section 3.6, on a montré qu’un morphisme ' : H Ñ AutpKq est équivalent à la donnée d’une action ' : H ˆ K Ñ K de H sur K, aussi désignée ici par '. On considère deux groupes K et H, et une action (arbitraire) ' : H ˆ K Ñ K. Ces trois ingrédients permettent de construire une structure de groupe sur l’ensemble K ˆ H (pas le groupe, l’ensemble), en posant pk1 , h1 q ¨ pk2 , h2 q :“ pk1 ¨ 'ph, k2 q , h1 ¨ h2 q.
Ainsi, ' « tord » le produit dans sa première composante. Le résultat est le produit semi-direct (externe), noté G “ K ¸' H. IL est clair qu’on récupère le produit direct usuel en choisissant pour ' l’action triviale 'ph, kq :“ k. On peut vérifier alors que K ˆ teu et teu ˆ H sont sous-groupes de K ¸' H, avec K ˆ teu normal. Par exemple, on peut montrer que le groupe diedral D2n est isomorphe au produit semidirect Zn ¸' C2 , avec ' : C2 Ñ Zn le morphisme 'i pkq :“ i k ; considérant que C2 “ t˘1u est muni de 2. L’ordre de N et H est important, puisqu’il indique quel est le sous-groupe (le premier) qui est forcément normal.
118
CHAPITRE 5. PRODUITS DE GROUPES
la multiplication. Autrement dit, '1 pkq “ k, et '´1 pkq “ ´k. Comme Zn est abélien, on a bien '´1 pk1 k2 q “ '´1 pk1 q'´1 pk2 q. Plus explicitement, la loi de composition de Zn ¸' C2 est comme suit : pk, 1q ¨ p`, 1q “ ppk ` ` mod nq, 1q,
pk, 1q ¨ p`, ´1q “ ppk ´ ` mod nq, ´1q, pk, ´1q ¨ p`, 1q “ ppk ` ` mod nq, ´1q,
pk, ´1q ¨ p`, ´1q “ ppk ´ ` mod nq, 1q.
Le groupe hyperoctaédral, Bn . Un exemple classique de produit semi-direct est le groupe Bn des matrices n ˆ n qui contiennent une et une seule valeur non nulle sur chaque colonne et sur chaque ligne, avec cette valeur égale soit à `1 soit à ´1. Ainsi, il y a 48 telles matrices pour n “ 3, par exemple celle-ci ¨ ˛ 0 ´1 0 0 ‚. g “ ˝1 0 0 0 ´1 Ce groupe est isomorphe au produit semi-direct pZ2 qn ¸' Sn , où 'p , pk1 , k2 , . . . , kn qq :“ pk
Figure 5.2 – L’octaèdre.
´1 p1q
,k
´1 p2q
,...,k
´1 pnq
q.
Ici, on considère que Z2 “ t`1, ´1u avec la multiplication comme opération. Ainsi, les 48 éléments de pZ2 q3 ¸' S3 sont des couples comme pp´1, 1, ´1q, 213q. La bijection, entre ces couples et les matrices décrites plus haut, associe au couple pk, q la matrice paij q1§i,j§n , telle que # kj si pjq “ i, aij :“ 0 sinon. Le groupe hyperoctaédral correspond aux symétries de l’hyperoctaèdre. Rappelons que l’hyperoctaèdre HOn est l’enveloppe convexe des 2 n points de la forme p0, . . . , 0, ˘1, 0 . . . , 0q, dans Rn . Le groupe Bn agit sur ces points, en permutant les coordonnées et changeant le signe. Ainsi, les sommets de l’octaèdre sont les six points A “ p1, 0, 0q,
A´ “ p´1, 0, 0q,
B “ p0, 1, 0q,
B ´ “ p0, ´1, 0q,
C “ p0, 0, 1q, et C ´ “ p0, 0, ´1q.
Les sommets portant le même nom (au signe près) sont opposés dans l’octaèdre. Avec l’élément g de B3 ci-haut, on calcule que g ¨ A “ B,
g ¨ A´ “ B ´ ,
g ¨ B “ A´ ,
g ¨ B ´ “ A,
g ¨ C “ C, et g ¨ C ´ “ C ´ .
On constate donc que les sommets opposés sont envoyés dans des sommets opposés. Bien entendu, c’est toujours le cas pour l’action de Bn sur HOn .
5.4. EXERCICES
5.4
119
Exercices
Exercice 5.1. Montrer que le produit direct de groupes abéliens donne un groupe abélien. Exercice 5.2. Montrer que le centre ZpG ˆ Hq, du produit direct de groupes, coïncide avec le produit direct des centres : ZpGq ˆ ZpHq. Exercice 5.3. Soient G, H des groupes. Selon l’ordre choisi pour faire le produit cartésien, on obtient deux groupes, G ˆ H et H ˆ G. Vérifier que l’application ✓ : G ˆ H Ñ H ˆ G définie par ✓pg, hq “ ph, gq est un isomorphisme. Exercice 5.4. Soient G, H des groupes abéliens. Alors G ˆ H est aussi un groupe abélien. Exercice 5.5. Soit G1 , . . . , Gn des groupes
(a) Vérifiez que l’opération que nous avons définie en (5.1) sur G1 ˆ . . . ˆ Gn est associative.
(b) Pour
une permutation dans Sn . Vérifier que l’application ' : G1 ˆ . . . ˆ Gn Ñ G
p1q
ˆ ... ˆ G
pnq
définie par est un isomorphisme.
' pg1 , . . . , gn q “ pg
p1q , . . . , g pnq q
Exercice 5.6. Soit H, K des groupes et G “ H ˆ K, A “ teH u ˆ K et B “ H ˆ teK u. Vérifiez que A Ÿ G, B Ÿ G, et que G{A est isomorphe à H et G{B isomorphe à K. Exercice 5.7. Soit G un groupe et Hi ⇥ G 3 ,i “ 1, . . . , n tels que G “ H1 H2 . . . Hn . Vérifiez que les énoncés suivants sont équivalents : î (a) Pour tout i, Hi X x j‰i Hj y “ teu.
(b) Tout élément g P G s’exprime de façon unique comme un produit d’éléments des Hi , à savoir g “ h1 h2 . . . hn , hi P Hi .
Exercice 5.8. Soit A un groupe abélien, B un sous-groupe de A, et ✓ : A Ñ B un morphisme tel que ✓pxq “ x si x P B (N.B. ceci n’entraîne pas que ✓ est une bijection.) (a) Montrer que si pour a P A on pose b “ ✓pa´1 q, alors a ¨ b P kerp✓q.
(b) Montrer que A est produit direct interne de kerp✓q et B.
Exercices exploratoires Exercice 5.9. (Voir Exercice 3.12) On dit d’un sous-ensemble L, du monoïde libre A˚ , qu’il est un langage reconnaissable s’il existe un morphisme de monoïde ✓ : A˚ Ñ M , vers un monoïde fini M , 3. C’est-à-dire que Hi est un sous-groupe normal de G.
120
CHAPITRE 5. PRODUITS DE GROUPES
et K un sous-ensemble de M tels que L “ ✓´1 pKq. Ici le terme langage est employé de manière tout à fait formelle, les éléments de L sont des mots (sans signification). (a) Montrer que le complément d’un langage reconnaissable est reconnaissable. (b) Définir la notion de produit direct de monoïdes, et utiliser cette notion pour montrer que l’intersection de deux langages reconnaissables est un langage reconnaissable. (c) En conclure que l’union de deux langages reconnaissables est un langage reconnaissable. Exercice 5.10. Montrer que le groupe de transformation du Cube de Rubik se décrit comme (voir Rubik’s Cube group) pZ73 ˆ Z11 2 q ¸ ppA8 ˆ A12 q ¸ Z2 q.
R
Chapitre 6
Q P
Groupes abéliens finis P `Q
Un groupe cyclique est abélien, et un produit direct de groupes finis cycliques est donc abélien. En fait, les groupes abéliens finis s’obtiennent tous de cette façon comme l’affirme le théorème suivant. Théorème 6.1. Tout groupe abélien fini est isomorphe à un produit direct de groupes cycliques. On représentera chaque groupe abélien fini comme un produit direct de certains de ses sous-groupes. Puisqu’on est dans les groupes abéliens, on n’aura pas à se préoccuper de la normalité des sous-groupes, qui est automatique. On pourra être plus précis dans la représentation en produit direct par une certaine unicité. Dans les groupes abéliens on utilise plus souvent la notation additive, et on parle alors de somme directe et on utilise la notation G ‘ H, et plus généralement H1 ‘ H2 ‘ . . . ‘ Hn .
6.1
Groupes cycliques
Un groupe G est dit cyclique s’il peut être engendré par un seul élément, c’est-à-dire s’il existe au moins un g P G tel que G “ xgy. Ainsi, le groupe additif des entiers pZ, `q peut être engendré par 1, mais n’est pas fini. De même, le groupe additif pZn , `q est cyclique puisqu’il peut être engendré par 1. Le groupe multiplicatif t1, ´1u est cyclique puisqu’il est engendré par ´1. Enfin, groupe multiplicatif µn des racines complexes ne de 1 µn :“ te2k⇡i{n | k “ 0, 1, . . . , n ´ 1u est un groupe cyclique puisqu’il peut être engendré par e2⇡i{n . 121
122
CHAPITRE 6. GROUPES ABÉLIENS FINIS Soit G un groupe et a P G. Considérons le sous-groupe de G engendré par a, noté xay. On a xay “ te, a, a´1 , a2 , a´2 , . . .u
On a deux cas. Si toutes les puissances de a sont distinctes alors xay est isomorphe à Z par l’isomorphisme Z Ñ xay défini par k fiÑ ak . Si deux au moins des puissances de a sont égales, disons ai “ aj ,avec i † j,alors on a aj´i “ e où j ´ i ° 0, et xay est isomorphe à pZn , `q, où n est le plus entier positif tel que an “ e, par l’isomorphisme Zn Ñ xay défini par k fiÑ ak . Cet entier n est appelé l’ordre de a, noté ordpaq, et est alors le cardinal de xay. Proposition 6.2. Soient G un groupe et a P G.
(1) Si am “ e, alors m est un multiple de ordpaq. (2) ordpa´1 q “ ordpaq.
Démonstration. (1) Supposons que ordpaq “ t, et que am “ e. On peut supposer que m • 0, car a´m “ pam q´1 . Faisons la division euclidienne m “ qt ` r, q, t P N, 0 § r † t. On obtient e “ am “ aqt`r “ aqt ar “ pat qq ar “ ear “ ar . Ainsi on ne peut avoir r ° 0 car cela contredirait la minimalité de t. Donc r “ 0 et m est un multiple de t. (2) En effet, on a la relation px´1 qn “ x´1 . . . x´1 “ px . . . xq´1 “ pxn q´1 . Donc xn “ e si et seulement si x´n “ e.
6.2
Groupes abéliens primaires
Pour un groupe abélien G, et p un nombre premier qui divise | G |, la composante p-primaire de G, notée Gppq, est définie comme Gppq :“ tx P G | il existe n P N, ordpxq “ pn u. Par convention on pose Gppq “ teu si p ne divise pas | G |.
Proposition 6.3. Pour p premier, et G un groupe abélien. Alors Gppq est un sous-groupe de G. Démonstration. On a e P Gppq puisque ordpeq “ 1 “ p0 . D’autre part, si x P Gppq, alors x´1 P Gppq car ordpx´1 q “ ordpxq. Pour x et y dans Gppq, en vue de montrer que xy P Gppq, on pose n “ n1 ` n2 , où n1 et n2 sont tels que ordpxq “ pn1 et ordpyq “ pn2 . On calcule alors que pxyqpp
nq
“ loooooooomoooooooon xy ¨ xy ¨ . . . ¨ xy “ loomoon xx . . . x ¨ loomoon yy . . . y “ xpp q y pp q , n
pn fois
pn fois
pn fois
n
6.3. DÉCOMPOSITION PRIMAIRE
123
car G est abélien. Il s’ensuit donc que pxyqpp
nq
“ xpp q y pp n
nq
“ xpp
n1 `n2 q
y pp
n1 `n2 q
“ pxpp
n1 q
qpp
n2 q
py pp
n2 q
qpp
n1 q
“ ee “ e.
On conclut que pn est un multiple de ordpxyq, de sorte que ordpxyq est forcément une puissance de p. Considérons par exemple Z6 “ t0, 1, 2, 3, 4, 5u. On a évidemment ordp1q “ 6, ordp2q “ 3, ordp3q “ 2, ordp4q “ 3, ordp5q “ 6, et | G | “ 2 ¨ 3. On constate que Gp2q “ t0, 3u, Gp3q “ t0, 2u. D’autre part, pour Z24 “ t0, 1, 2, . . . , 24u. On a | G | “ 23 ¨ 3. On obtient Gp2q “ t0, 3, 6, 9, 12, 15, 18, 21u, Gp3q “ t0, 8, 16u. Par définition même, Gppq est constitué de tous les éléments de G dont l’ordre une puissance de p. Proposition 6.4. Soit p un nombre premier et G un groupe abélien fini dont tous les éléments sont d’ordre une puissance de p. Alors le cardinal de G est une puissance de p. Démonstration. On a déjà fait le cas où p “ 3. Le cas général est identique en remplaçant partout 3 par p. Notons que, réciproquement, si | G | “ pn alors tous les éléments de G sont d’ordre une puissance de p. On dit d’un groupe que c’est un p-groupe si son cardinal est une puissance de p, un nombre premier. On dit aussi des p-groupes, que ce sont des groupes primaires, si on ne désire pas mettre en évidence le rôle du nombre premier p. Ainsi, les groupes Z9 , Z3 ˆ Z3 , Zn3 , et Z3 ˆ Z27 sont des 3-groupes.
6.3
Décomposition primaire
Nous allons montrer que tout groupe abélien fini est produit direct interne de ses composantes primaires. Théorème 6.5. Soit G un groupe abélien fini et | G | “ p↵1 1 . . . p↵k k où les pi sont premiers. Alors G est produit direct interne de ses composantes primaires Gppi q, en particulier G » Gpp1 q ˆ . . . ˆ Gppk q. Par exemple, comme on là déjà vu pour G “ Z30 , sous une autre forme, on a que G “ Gp2q Gp3q Gp5q, c.-à-d. G est produit direct interne des sous-groupes Gp2q, Gp3q, et Gp5q. En préparation de la preuve du théorème, on a besoin de certains résultats préliminaires. Lemme 6.6. Soit G un groupe abélien fini, dans lequel on a des éléments y1 , . . . , yn P G, respectivement tels que ordpyi q “ mi , avec les mi relativement premiers deux à deux. Alors ordpy1 . . . yn q “ m1 . . . mn .
124
CHAPITRE 6. GROUPES ABÉLIENS FINIS
Démonstration. Nous n’allons faire que le cas n “ 2 ; le cas général peut se faire par récurrence. Donc disons y1 , y2 avec ordpy1 q “ m1 et ordpy2 q “ m2 . À voir : ordpy1 y2 q “ m1 m2 . Il suffit de voir que si py1 y2 qm “ e alors m est un multiple de m1 m2 . Notons que xy1 y X xy2 y “ teu ; en effet posons H “ xy1 y X xy2 y, alors H est un sous-groupe de xy1 y et xy2 y, donc | H | divise m1 et m2 , d’où | H | “ 1 car m1 et m2 sont premiers entre eux. Supposons py1 y2 qm “ e. On a py1 y2 qm “ y1m y2m car G est abélien. On obtient y1m “ y2´m P H, donc y1m “ e et y2´m “ e “ y2m . Il s’ensuit que m est un multiple de m1 et m2 , donc un multiple de m1 m2 , car m2 et m2 sont premiers entre eux. Lemme 6.7. Soient G un groupe abélien et H1 , . . . , Hn des sous-groupes de G. Alors xH1 Y . . . Y Hn y “ H1 H2 . . . Hn . Démonstration. On a H1 H2 . . . Hn “ tg P G | Dhi P Hi , g “ h1 h2 . . . hn u Il est immédiat que chaque élément h1 h2 . . . hn , hi P Hi , appartient à tout sous-groupe de G qui contient H1 Y. . .YHn . Il suffit donc de voir que H1 H2 . . . Hn forme un sous-groupe de G qui contient H1 Y. . .YHn . Or si hi P Hi , alors hi “ e . . . ehi e . . . e P H1 H2 . . . Hn . Donc on a bien H1 Y . . . Y Hn Ñ H1 H2 . . . Hn . Puisque e P Hi , on a e “ e . . . e P H1 H2 . . . Hn . Par ailleurs, si x P H1 H2 . . . Hn , disons x “ h1 . . . hn , ´1 ´1 ´1 hi P Hi , alors x´1 “ h´1 “ h´1 P Hi on a bien n . . . h1 1 . . . hn , car G est abélien, et comme hi ´1 x P H1 H2 . . . Hn . Finalement, si x, y P H1 H2 . . . Hn , disons x “ a1 . . . an , ai P Hi , y “ b1 . . . bn , bi P Hi , alors xy “ a1 . . . an b1 . . . bn “ a1 b1 . . . ai bi . . . an bn , car G est abélien, et ai bi P Hi , de sorte que xy P H1 H2 . . . Hn . Démonstration du théorème 6.5. On a déjà vu que les Gppi q sont des sous-groupes normaux. Par le lemme précédent, on a C G n § π Gppj q “ Gppj q. ±n
1§i“j§k
i“j
Reste donc à voir que Gppi q X i“j Gppj q “ teu, puis que G “ Gpp1 q . . . Gppk q. À cette fin, soit ± x P Gppi q X ni“j Gppj q. D’une part, comme x P Gppi q, on a que ordpxq “ ptii pour un certain ti § ↵i . D’autre part, on peut écrire x comme un produit x “ x1 . . . xpi . . . xk
avec les xj P Gppj q, et donc ayant ordpxj q “ ptj , pour certains tj § ↵j . Par un des lemmes ci-dessus on a tk ti ordpx1 . . . xpi . . . xk q “ pt11 . . . px i . . . pk
Puisque les pi sont premiers deux à deux, la seule façon de réconcilier ces énoncés est que ti “ 0 et tj “ 0, pour tout j. On conclut donc que x “ e.
6.3. DÉCOMPOSITION PRIMAIRE
125
Maintenant, pour x P G, on cherche à construire des xi P Gppi q tels on a x “ x1 x2 ¨ ¨ ¨ xk . Pour ce faire, rappelons que ordpxq divise p↵1 1 . . . p↵k k , et donc ordpxq “ n “ pt11 . . . ptkk ,
0 § ti § ↵ i .
pour
Ainsi, si on pose ni :“ n{ptii , on a que pgcdpn1 , . . . , nk q “ 1. Il existe donc des entiers 1 n1
` ... `
k nk
1 n1
...x
i
tels que
“1
Il s’ensuit que Mais alors, par définition de ni ,
x“x px
i ni
x
2 n2
ti
qppi q “ x
on trouve donc l’expression désirée en posant xi :“ x Ceci achève la démonstration.
i ni
in
k nk
.
“e
, qui est bien dans Gppi q par l’égalité ci-dessus.
Corollaire 6.8. Soit G comme ci-dessus, | G | “ p↵1 1 . . . p↵k k . Alors | Gppi q | “ p↵i i . Démonstration. On a | Gppi q | “ pi i , où est i “ ↵i , pour tout i.
i
§ ↵i , mais comme | G | “ p1 1 . . . pk k , la seule possibilité
Le théorème précédent ramène l’étude de la structure des groupes abéliens finis, à celle des groupes abéliens finis primaires. Le théorème suivant décrit entièrement la structure de ceux-ci. Théorème 6.9. Tout p-groupe abélien fini est produit direct interne de groupes cycliques. Démonstration. Soit p premier. On procède par récurrence sur l’ordre des p-groupes abéliens finis. Soit G un p-groupe abélien fini, disons | G | “ pn . Si | G | “ p ; mais alors G » Zp et on a fini. Sinon, on a | G | “ pn , avec n • 2. Notons que G “ Gppq. Soit a P G d’ordre maximal, disons ordpaq “ pm avec m • 1. Par définition de m, on a évidemment ordpgq “ p↵ avec ↵ § m, pour tout g P G. Il s’ensuit que m g p “ e. Si ordpaq “ pn , alors G “ xay et on a terminé. Sinon, on a xay Ä G ; et le groupe abélien fini G :“ G{xay est d’ordre | G | “ | G{xay | “ | G |{| xay | “ pn´m † pn .
L’hypothèse de récurrence s’applique donc, et G est produit direct interne de sous-groupes cycliques, nommons-les Gi § G. Posant H “ xay, on a Gi “ x i y pour certains i “ bi H, et | Gi | “ ordp i q “ pmi . Pour tout b P G, posant “ bH, on a “ 1k1 . . . rkr , pour certains entiers ki , et alors bH “ bk11 . . . bkr r H.
126
CHAPITRE 6. GROUPES ABÉLIENS FINIS
En particulier,
b “ bk11 . . . bkr r ak ,
pour une certaine puissance k de a. Si on pose Ki “ xbi y, on a donc G “ K1 K2 . . . Kr H, (presque) comme voulu. Malheureusement, rien n’assure qu’on ait là un produit direct interne. Exploitant le fait que bi ani H “ bi H, nous allons trouver des « ajustements » an1 , . . . , anr de façon à rendre le produit ci-haut un produit direct interne. ppmi q
ppmi q
Puisque (par définition) i “ e, ou encore bi ppmi q s i bi “ a , pour certains si , et donc ppmi q ppm´mi q
pbi
q
“ pasi qp
Mais alors,
m´mi
ppmi q
H “ H, on a bi ppm q
c.-à-d.
,
ordpapp
m´mi q
bi
“ papp
P H. C’est donc dire que
m´mi q
qsi “ e
q “ pm i ,
car ordpaq “ pm . Il s’ensuit donc que si est un multiple de pmi , disons si “ ti pmi . On trouve ainsi que pbi a´ti qpp
mi q
ppmi q ´pti pmi q
“ bi
a
“ asi a´si “ e.
Nous allons constater qu’on peut maintenant corriger les bi , en posant b1i “ bi a´ti , et Hi :“ xb1i y. Observons que l’on conserve b1i H “ i , et donc on a bien G “ H1 . . . Hr H, comme auparavant. Reste plus qu’à vérifier que G est bien un produit direct interne de H1 , . . . , Hr , Hr`1 , écrivant Hr`1 “ H pour simplifier la présentation. il s’agit de voir que r`1 £ i“1
Hi “ teu.
± Autrement dit, pour x P Hi X j“i Hj , on doit montrer que x “ e. Autrement dit, on peut écrire x sous la forme x “ x1 . . . xpi . . . xr`1 , sachant que x P Hi et que les xj P Hj lorsque j ‰ i. Désignons par la classe xH. Les identités ci-dessus se traduisent j les classes xj H, pour j allant de 1 à r ` 1, et par alors en identités pour et les i : “ 1 . . . pj . . . r`1 , dans le groupe quotient G, avec P Gi , et les j P Gj , pour i ‰ j. En particulier, on a r`1 “ e, puisque Hr`1 “ H. Encore une fois, on utilise l’hypothèse de récurrence qui s’applique à G pour conclure que “ e, et j “ e, car on a un produit direct interne pour G. Autrement dit, x P H,
et
xj P H
6.4. THÉORÈME PRINCIPAL
127
Il ne suffit donc plus que de voir que H X Hi “ teu, pour tout i “ 1, . . . , r. Écrivant ni pour ordpb1i q, on a ni 1 ni i “ b1n i “ bi H i H “ eH “ e,
de sorte que ni est un multiple de ordp i q “ pmi . Mais pb1i qpp i q “ e, donc pmi est un multiple de ordpb1i q. mi D’où l’égalité ordpb1i q “ pmi “ ordp i q 1 . Considérant ensuite x P H X Hi , avec x “ b1k i , k † p . On 1k 1 k k m trouve xH “ e, et xH “ bi H “ pbi Hq “ i . La seule possibilité est donc k “ 0, car p i “ ordp i q. D’où x “ e, tel que voulu. m
6.4
Théorème principal
Théorème 6.10. Tout groupe abélien fini est isomorphe à un produit direct de groupes cycliques. Plus précisément, il est produit direct interne de sous-groupes cycliques. Démonstration. Découle des deux théorèmes précédents. Notons qu’on n’a pas une unicité directe : par exemple le groupe cyclique Z6 est aussi isomorphe au produit direct Z2 ˆ Z3 . Par contre, on peut noter que la décomposition d’un groupe abélien en produit direct interne de ses composantes primaires est unique puisque les composantes primaires sont complètement déterminées. D’autre part on a le résultat suivant. Proposition 6.11. La décomposition d’un p-groupe abélien fini en produit direct de groupes cycliques est unique au sens suivant. Soit G un p-groupe abélien fini et Gi , Hi des p-groupes cycliques tels que G » G1 ˆ . . . ˆ Gr et G » H1 ˆ . . . ˆ Hs
Alors r “ s et, à un réarrangement près, | Gi | “ | Hi | (donc Gi » Hi ). Démonstration. Ce résultat et la remarque précédente sur les composantes primaires permettent d’introduire une certaine unicité dans le théorème principal. Théorème 6.12. Tout groupe abélien fini possède une décomposition en produit direct interne de sous-groupes cycliques primaires, et cette décomposition est unique au sens où deux telles décompositions comportent le même nombre de facteurs de chaque ordre. 1. C’était le but de l’ajustement.
128
CHAPITRE 6. GROUPES ABÉLIENS FINIS
Pour G “ Zn , et n “ p↵1 1 . . . p↵r r . On note que chaque composante primaire Zn ppi q est cyclique. Ainsi, la décomposition primaire donne la décomposition dont il est question dans le théorème précédent : Zn “ Zn pp1 q ˆ . . . ˆ Zn ppr q
Une conséquence de l’unicité dans le théorème précédent est que tout p-groupe abélien fini qui est cyclique est indécomposable, c’est-à-dire qu’il ne peut pas être représenté comme produit direct de groupes plus petits. Une autre conséquence est qu’on peut produire la liste exacte (à isomorphisme près) de tous les groupes abéliens finis d’un cardinal donné. Par exemple, les seuls groupes abéliens finis d’ordre 8 sont (à isomorphisme près) l’un des trois suivants Z8 ,
Z2 ˆ Z4 ,
et
Z2 ˆ Z2 ˆ Z2
De façon similaire, pour 180 “ 22 ¨ 32 ¨ 5, on trouve de décomposition ne pouvant contenir que des 2-groupes de cardinal 2 ou 4, des 3-groupes de cardinal 3 ou 9, et des 5-groupes de cardinal 5. Les possibilités sont donc Z4 ˆ Z9 ˆ Z5 ,
Z4 ˆ Z3 ˆ Z3 ˆ Z5 , Z2 ˆ Z2 ˆ Z9 ˆ Z5 ,
Z2 ˆ Z2 ˆ Z3 ˆ Z3 ˆ Z5 .
On ne trouve donc que 4 tels groupes. En y réfléchissant correctement, on peut trouver une formule qui donne (toujours à isomorphisme près) le nombre de groupes abéliens finis d’un cardinal donné n.
6.5
Exercices
Exercice 6.1. Désignons par ordpzq l’ordre de l’élément z dans un groupe donné. Donnez un contreexemple pour vérifier que la relation ordpxyq “ ppcmpordpxq, ordpyqq n’est pas valide en général. Exercice 6.2. Montrer que dans un groupe abélien fini A, il existe pour tout diviseur d de | A |, un sous-groupe d’ordre d. (N.B. C’est en quelque sorte une réciproque du théorème de Lagrange pour les groupes abéliens.) Exercice 6.3. Soit n ° 1 un entier qui n’est pas divisible par le carré d’un autre entier plus grand que 1. Montrez alors que tout groupe abélien fini d’ordre n est cyclique. Exercice 6.4. Énumérer tous les groupes abéliens d’ordre 72, à isomorphisme près. Exercice 6.5. Les groupes Z12 ˆ Z72 et Z18 ˆ Z48 sont-ils isomorphes ? Exercice 6.6. Soit G un groupe abélien, H1 , . . . , Hn des sous-groupes, et H “ H1 H2 ¨ ¨ ¨ Hn . (a) Montrer que H § G. (b) Montrer que H est le plus petit sous-groupe de G qui contienne H1 Y ¨ ¨ ¨ Y Hn . Exercice 6.7. Faire la liste de tous les groupes abéliens finis d’ordre 252, à isomorphisme près. Justifier.
Chapitre 7
Les p-groupes, et théorèmes de Sylow Les théorèmes de Sylow 1 permettent de prédire l’existence de certains sous-groupes dans un groupe fini, seulement en considérant le cardinal du groupe.
7.1
Les p-groupes
Un p-groupe fini est un groupe fini qui possède pn éléments pour un certain n, avec p est un nombre premier. Proposition 7.1. Tout p-groupe fini possède un centre non trivial. Démonstration. Supposons | G | “ pn . Si G “ CpGq, on a fini. Sinon, considérons ÿ | G | “ | CpGq | ` rG : Cphi qs hi RCpGq
Notons que g P CpGq ñ Cpgq “ G et que g R CpGq ñ Cpgq Ä G ñ rG : CpGqs ° 1. Puisque G ‰ CpGq, on obtient que Cphi q Ä G pour au moins un i et alors rG : Cphi qs ° 1 pour tous ces i. Par ailleurs on a p divise rG : Cphi qs pour chaque i tel que Cphi q ‰ G. Ainsi on obtient pn “ | CpGq | ` p t
où t ‰ 0. D’où p divise CpGq, et en particulier CpGq ‰ teu, tel que voulu. 1. Ludwig Sylow, (1832-1918).
129
130
7.2
CHAPITRE 7. LES P -GROUPES, ET THÉORÈMES DE SYLOW
Théorèmes de Sylow
Plusieurs des notions et résultats précédents permettent de caractériser les sous-groupes d’un groupe fini donné. En particulier, on a vu que l’ordre d’un sous-groupe doit diviser l’ordre du groupe, ce qui réduit considérablement les possibilités. Cependant, cette contrainte n’est pas suffisante en général 2 pour caractériser l’ordre possible des sous-groupes. Par exemple, pour le groupe alterné A4 d’ordre 12 “ 2 ¨ 6, on n’a pas de sous-groupe d’ordre 6 (voir l’exercice 2.2). Nous allons chercher à déterminer (en partie) quand un groupe donné admet un sous-groupe d’ordre d, pour d divisant son ordre. En toute généralité, cette question est peut-être trop difficile. Cependant, en la restreignant au cas où d “ pn , avec p premier, on a les résultats remarquables de Sylow. Afin de les énoncer, on se donne la définition suivante. Pour un groupe fini G d’ordre | G | “ pn m, avec p premier ne divisant pas m, on dit qu’un sous-groupe de G est de Sylow si son ordre est pn . Autrement dit, c’est un p-sous-groupe d’ordre le plus grand possible. Théorème 7.2 (Premier théorème de Sylow). Soit G un groupe fini d’ordre | G | “ k. Alors, pour tout nombre premier p divisant k, le groupe G possède un sous-groupe d’ordre ps pour toute puissance s de p, telle que ps divise k. En particulier, G contiens un p-sous-groupe de Sylow. Théorème 7.3 (Deuxième théorème de Sylow). Soit G un groupe fini. Pour chaque diviseur premier p de | G |, les p-sous-groupes de Sylow sont conjugués. Théorème 7.4 (Troisième théorème de Sylow). Soit G un groupe fini, et p un diviseur premier de | G |. Soit Np le nombre de p-sous-groupe de Sylow de G. Alors Np “ rG : N pSqs, où S est n’importe quel p-sous-groupe de Sylow, et Np ” 1 pmod pq. Nous n’allons démontrer que les deux premiers théorèmes de Sylow. Pour le premier, on procède par récurrence sur l’ordre du groupe | G | “ pn m, et on utilise le cas particulier connu d’un sous-groupe d’ordre p pour les groupes abéliens. Démonstration du théorème 7.2. On suppose que | G | ° 1. Considérons l’action de G sur lui-même par conjugaison, et soit G “ Orbpx1 q ` . . . ` Orbpxr q la partition de G en orbites, avec les orbites ordonnées en ordre croissant de cardinalité. Considérons la relation déjà vue ÿ | G | “ | ZpGq | ` rG : Cpxi qs xi RZpGq
On distingue deux cas. Premièrement, p ne divise pas | ZpGq |. Alors p ne divise pas rG : Cpxi qs pour un certain i. D’où ps divise | Cpxi q |, puisque | G | “ rG : Cpxi qs ¨ | Cpxi q |, et on a aussi | Cpxi q | † | G |, car xi R ZpGq. Par récurrence, Cpxi q possède un sous-groupe H d’ordre ps , qui est en même temps un 2. Bien qu’elle le soit pour les groupes abéliens. Voir l’exercice 6.2.
7.2. THÉORÈMES DE SYLOW
131
sous-groupe de G d’ordre ps . Deuxièmement, p divise | ZpGq |. Alors ZpGq possède un élément d’ordre p, disons c. Soit H0 le sous-groupe engendré par c. C’est un groupe cyclique d’ordre p, qui est un n sous-groupe normal de G car c P ZpGq. Alors G{H0 est un groupe d’ordre p pm “ pn´1 m. Par récurrence, G{H0 possède un sous-groupe d’ordre ps´1 , disons K. Soit H “ ⇡ ˚ pKq, où ⇡ est le morphisme naturel G Ñ G{H0 . C’est un sous-groupe de G tel que H0 Ä H et H{H0 » K. D’où | H | “ | H0 | ¨ | K | “ ps . Ainsi H est un p-sous-groupe de G de l’ordre voulu, ce qui termine la preuve. Démonstration du théorème 7.3. Fixons un p-sous-groupe de Sylow S, avec G d’ordre pn m, et considérons un autre p-sous-groupe de Sylow S 1 . Rappelons qu’on désigne par G{S l’ensemble des translatés de S, et qu’alors |G{S| “ m avec le groupe G agissant transitivement, par translation, sur G{S. On a donc aussi une action par translation (pas nécessairement transitive) de S 1 sur G{S, obtenue par restriction de l’action de G aux éléments de S 1 . On obtient donc ÿ | G{S | “ rS 1 : StabS 1 pTi qs i
où T1 , T2 , . . . sont les translatés de S par les éléments de S 1 . On note que tous les rS 1 : StabS 1 pTi qs divise pn alors que p ne divise pas | G{S |. Il doit donc y avoir au moins un rS 1 : StabS 1 pTi qs qui soit égal à 1, disons pour Ti “ gS. On a donc S 1 ¨ gS “ gS. En particulier, S 1 Ñ gSg ´1 , et on doit avoir égalité puisque les deux ensembles ont le même nombre d’éléments. Ainsi S 1 et S sont conjugués, tel que voulu. Quelques remarques s’imposent sur ces théorèmes de Sylow. Si p est un facteur premier de | G |, alors G possède au moins un p-sous-groupe de Sylow, avec Np divisant | G | et Np ” 1 mod ppq. Les p-sous-groupes de Sylow forment une orbite pour l’action de G sur PpGq par conjugaison et Np est le cardinal de cette orbite qui est égale à rG : N pSqs. Un groupe fini G possède un seul p-sous-groupe de Sylow si et seulement si il possède un p-sous-groupe de Sylow qui soit un sous-groupe normal. Si Np,s désigne le nombre de sous-groupes d’ordre ps , alors on peut montrer que Np,s ” 1 mod ppq. Exemple. Supposons G un groupe d’ordre 30. On a 30 “ 2 ¨ 3 ¨ 5. Il y a au moins un 2-sous-groupe de Sylow, au moins un 3-sous-groupe de Sylow et au moins un 5-sous-groupe de Sylow. Les possibilités pour N2 sont 1, 3, 5, 15. Les possibilités pour N3 sont 1, 10. Les possibilités pour N5 sont 1, 6. Exemple. Tout groupe d’ordre 20 possède au moins un sous-groupe normal propre. En effet, on a 20 “ 22 ¨ 5 et N5 divise 20, N5 ” 1 mod p5q. Les possibilités pour N5 sont 1, 6, 11, 16. On voit que nécessairement N5 “ 1. Il n’y a donc qu’un seul 5-sous-groupe de Sylow et il doit être normal.
Exemple. Tout groupe d’ordre 2n possède au moins un sous-groupe normal propre. En effet, il possède au moins un sous-groupe d’ordre 2n´1 qui est alors d’indice 2 et donc normal. Exemple. Tout groupe d’ordre 30 possède au moins un sous-groupe normal propre. En effet, il suffit de voir qu’au moins un parmi N2 , N3 , N5 vaut 1. On a déjà vu que N2 “ 1 ou 3 ou 5 ou 15, N3 “ 1 ou 10, N5 “ 1 ou 6. Montrons que N3 “ 1 ou N5 “ 1. Sinon, on aurait N3 “ 10 et N5 “ 6. Disons
132
CHAPITRE 7. LES P -GROUPES, ET THÉORÈMES DE SYLOW
K1 , . . . , K10 les 3-sous-groupes de Sylow, d’ordre 3, et H1 , . . . , H6 les 5-sous-groupes de Sylow, d’ordre 5. Puisqu’une intersection Hi X Hj est un sous-groupe de Hi et Hj et que son ordre est un facteur de 5, on a Hi X Hj “ teu si i ‰ j. De façon semblable Ki X Kj “ teu si i ‰ j. Les Hi fourniraient donc au moins 24 éléments différents de e et les Ki au moins 20, ce qui donneraient au moins 44 éléments différents dans G, ce qui est absurde. Donc on doit avoir N3 “ 1 ou N5 “ 1, tel que voulu. Proposition 7.5. Soit G un groupe fini et H, K des sous-groupes de G. Alors on a la relation | HK | “
|H | ¨ |K | |H X K |
Démonstration. Déjà vu dans un exercice. Exemple. Tout groupe d’ordre 48 possède au moins un sous-groupe normal propre. En effet, on a 48 “ 24 ¨ 3. Considérons N2 . D’après les théorèmes de Sylow les possibilités sont N2 “ 1 ou N2 “ 3. Si N2 “ 1, alors il y a un seul 2-sous-groupe de Sylow et il est normal, on a fini. Si N2 “ 3, soient H et K deux 2-sous-groupes de Sylow distincts, ici d’ordre 16. Considérons | H X K |. Les possibilités sont | H X K | “ 1, 2, 4, 8. Si | H X K | † 8, alors d’après la proposition précédente | HK | ° 64, ce qui ne peut être le cas. Donc on doit avoir | H X K | “ 8. Alors H X K est un sous-groupe d’indice 2 à la fois dans H et dans K, donc normal dans H et dans K. Mais alors H et K sont tous deux inclus dans le normalisateur de H X K dans G, et on a sûrement | N pH X Kq | • | HK | “ 32. Puisque | N pH X Kq | doit aussi être un facteur de 48 on doit avoir | N pH X Kq | “ 48. Donc N pH X Kq “ G, autrement dit H X K est normal dans G, et on a trouvé un sous-groupe normal de G.
7.3
Exercices
Exercice 7.1. En s’appuyant sur le fait que tout p-groupe possède un centre qui ne se réduit pas à l’élément identité, démontrez que tout groupe d’ordre p2 est abélien. (Aide : passez à un groupe quotient.) Exercice 7.2. Soit p un nombre premier et G l’ensemble suivant de matrices à coefficients dans le corps Zp des entiers modulo p $¨ , ˛ & 1 a b . G “ ˝ 0 1 c ‚ : a, b, c P Zp % 0 0 1
(a) Vérifier que G est un sous-groupe de GL3 pZp , qu’il a p3 éléments, et qu’il n’est pas abélien.
7.3. EXERCICES (b) Vérifier que le centre de G est formé des matrices $¨ & 1 0 CpGq “ ˝ 0 1 % 0 0
133 suivantes , ˛ t . 0 ‚ : t P Zp 1
Exercice 7.3. Montrez que tout groupe d’ordre 96 possède au moins un sous-groupe normal propre. Exercice 7.4. Soient A et B deux sous-groupes d’un groupe G. On considère l’action de B sur PpGq par translation à gauche. Montrez que StabB pAq “ A X B.
Exercice 7.5. Soit G un groupe fini opérant sur un ensemble E. Montrez que si G n’est pas isomorphe au groupe additif Z2 et que E possède un élément dont l’orbite possède exactement deux éléments, alors G possède au moins un sous-groupe normal propre. Exercice 7.6. Si un groupe d’ordre 104 ne contient pas de sous-groupe normal d’ordre 8, combien a-t-il de sous-groupes d’ordre 8 ? Exercice 7.7. Soit G un groupe fini et T G. Soit p un nombre premier et supposons que p ne divise pas rG : T s. Montrez que T contient tous les p-sous-groupes de Sylow de G. Exercice 7.8. Soit p un nombre premier.
(a) Montrer que dans un groupe d’ordre 4p, un p-sous-groupe de Sylow est toujours normal si p • 5.
(b) Est-ce vrai pour p “ 3 ? Justifier.
Exercice 7.9. Montrer que tous les groupes d’ordre plus petit que 60 possède au moins un sous-groupe normal propre, sauf les groupes dont l’ordre est un nombre premier. Exercice 7.10. (a) Montrer que tout groupe d’ordre 20 possède au moins un sous-groupe normal propre. (b) Vérifier que l’opération de R˚ ˆ C dans C définie par r ¨ z “ rz constitue une action du groupe multiplicatif R˚ sur l’ensemble des nombres complexes C. Pour chaque z P C calculer Stabpzq et décrire géométriquement Orbpzq dans le plan complexe. (c) Vérifier que le groupe des isométries de l’icosaèdre possède un sous-groupe d’ordre 2 qui est normal.
Exercices exploratoires Exercice 7.11. Soit G un groupe fini, et soit p le plus petit diviseur premier de | G |. Supposons que G possède un sous-groupe H tel que rG : Hs “ p. Le but est de montrer que H G. Rappelons que (voir (2.8)) G opère par translation à gauche sur l’ensemble E :“ G{H “ tH, x1 H, . . . , xp´1 Hu, et qu’il s’ensuit (voir Proposition 2.14) qu’on a un morphisme de groupes ' : G Ñ SE . (a) Montrer que kerp'q Ñ H.
134
CHAPITRE 7. LES P -GROUPES, ET THÉORÈMES DE SYLOW
(b) Soit K :“ tf P SE : f pHq “ Hu. Montrer que K est un sous-groupe de SE et que | K | “ pp ´ 1q!. (c) Soit L “ t'phq : h P Hu l’image de H par '. Vérifier que L est un sous-groupe de K et en déduire que | L | divise pp ´ 1q!. En particulier, | L | est relativement premier à p.
(d) Montrer que | L | divise | H |.
(e) En déduire que | L | “ 1, et que H “ kerp'q. Conclure que H
G.
Annexe A
Théorie des groupes avec le calcul formel Pour se familiariser avec des notions mathématiques, le calcul formel est des plus efficace. L’idée est de rester le plus près possible de la présentation mathématique, et d’utiliser l’ordinateur comme un outil de manipulation d’objets mathématiques abstraits. Bien que nous n’allons montrer dans ce chapitre comment le faire qu’avec le système de calcul Maple, plusieurs autres outils sont accessibles. Le système « open source » Sage est un bon exemple, et on accède au tutoriel qui montre la façon d’utiliser Sage pour la théorie des groupes à l’endroit suivant doc.sagemath.org. Comme la grande majorité des systèmes de calcul formel, Maple est un système interactif fonctionnant sous le mode « question/instruction–réponse/résultat ». Une introduction générale à Maple est disponible dans le texte Calcul formel (avec Maple) (F. Bergeron 2014). En mode d’intercation classique (worksheet mode), un symbol « ° » indique que le système est prêt à recevoir une instruction. Pour avoir accès aux outils de manipulation de groupes, on donne l’instruction suivante (qui se termine par « : » pour signifier qu’on ne s’attend pas à une réponse). ° with(GroupTheory) :
On peut obtenir de l’aide sur les outils alors rendu disponible avec l’instruction : ° ?GroupTheory
On peut construire des groupes classiques (groupe alterné, groupe diédral, groupe général linéaire, groupe de permutations, etc.), en trouver des propriétés (ordre, transitivité, primitivitée, calculer le treillis des sous-groupes). On peut construire de nouveaux groupes à partir de groupes donnés (produit direct), trouver tous les groupes d’un certain ordre, etc. Par exemple, on peut définir le groupe alterné, trouver son ordre, et vérifier s’il est transitif de la façon suivante : ° G :=AlternatingGroup(7)) : 135
136
ANNEXE A. THÉORIE DES GROUPES AVEC LE CALCUL FORMEL G=Ar7s
° GroupOrder(G) ; 2520 ° IsTransitiveG ; true Pour obtenir la suite dont les termes donnent le nombre de groupes de « petite » cardinalité, on fait comme suit : ° [seq(nops(AllSmallGroups(k)),k=1..32)] ; [1, 1, 1, 2, 1, 2, 1, 5, 2, 2, 1, 5, 1, 2, 1, 14, 1, 5, 1, 5, 2, 2, 1, 15, 2, 2, 5, 4, 1, 4, 1, 51] Ces groupes peuvent être décrits de plusieurs façon, par défaut ils sont présentés comme sous-groupes d’un certain Sn , avec leur générateurs écrits en notation cyclique. Ainsi, on obtient ° AllSmallGroups(8) :map(print,%) : x p1, 2, 4, 6, 8, 7, 5, 3q y x p1, 2, 5, 3qp4, 6, 8, 7q, p1, 4qp2, 6qp3, 7qp5, 8q y x p1, 2qp3, 7qp4, 6qp5, 8q, p1, 3qp2, 5qp4, 8qp6, 7q, p1, 4qp2, 6qp3, 8qp5, 7q y x p1, 2, 6, 3qp4, 8, 5, 7q, p1, 4, 6, 5qp2, 7, 3, 8q, p1, 6qp2, 3qp4, 5qp7, 8q y x p1, 2qp3, 5qp4, 6qp7, 8q, p1, 3qp2, 5qp4, 7qp6, 8q, p1, 4qp2, 6qp3, 7qp5, 8q y
Pour les groupes de permutations, comme le groupe du cube de Rubic : ° RubiksCubeGroup() ;
G :“ x p6, 25, 43, 16qp7, 28, 42, 13qp8, 30, 41, 11qp17, 19, 24, 22qp18, 21, 23, 20q, p1, 14, 48, 27qp2, 12, 47, 29qp3, 9, 46, 32qp33, 35, 40, 38qp34, 37, 39, 36q, p1, 17, 41, 40qp4, 20, 44, 37qp6, 22, 46, 35qp9, 11, 16, 14qp10, 13, 15, 12q,
p3, 38, 43, 19qp5, 36, 45, 21qp8, 33, 48, 24qp25, 27, 32, 30qp26, 29, 31, 28q, p1, 3, 8, 6qp2, 5, 7, 4qp9, 33, 25, 17qp10, 34, 26, 18qp11, 35, 27, 19q,
p14, 22, 30, 38qp15, 23, 31, 39qp16, 24, 32, 40qp41, 43, 48, 46qp42, 45, 47, 44q y on peut calculer le stabilisateur et l’orbites d’éléments. Le groupe général linéaire, sur un corps fini à q éléments, correspond à GLpn, qq. Son ordre dépend de q de manière polynomiale, et on obtient son ordre comme suit : ° GroupOrder(GL(3, q)) ; ` 6 ˘` ˘` ˘` ˘` ˘` ˘ q ´ 1 q6 ´ q q6 ´ q2 q6 ´ q3 q6 ´ q4 q6 ´ q5
Annexe B
Rappels sur les ensembles et fonctions
1 5
a
2 3
b
4 6 8
c
7 9
d
La théorie des ensembles a été introduite par Georg Cantor. On peut en donner une axiomatique rigoureuse qui n’est pas discutée ici. Un ensemble est une collection d’objets. La théorie suppose que les ensembles contiennent des éléments, et on écrit a P A pour dire que « a est un élément de A » ou que « a appartient à A ». Si a n’est pas un élément de A, on écrit a R A et on lit « a n’appartient pas à A » ou « a n’est pas dans A ». L’appartenance (ou pas) à un ensemble doit être claire. Autrement dit, cette appartenance ne doit pas être question de point de vue, on d’interprétation. Comme pour tout concept mathématique, il est important de bien comprendre quand deux ensembles sont égaux. La règle est toute simple (mais on l’oublie parfois) : « Deux ensembles sont égaux si et seulement si ils ont les mêmes éléments. » Autrement dit, pour « connaître » un ensemble il faut savoir dire quels en sont les éléments. Deux façons typiques de décrire un ensemble consistent à : soit, donner la liste de tous ses éléments (quand il n’en contient pas trop), soit via la description d’une propriété qui caractérise ses éléments. L’écriture E “ tx1 , x2 , ..., xm u signifie donc que E est composé des éléments x1 , x2 , . . . , xm ; il peut y avoir des répétitions d’éléments : par exemple, ta, b, au représente le même ensemble que ta, bu. On a donc les présentations équivalentes ta, b, cu “ tc, a, bu “ ta, b, a, b, c, a, b, au, d’un même ensemble qui contient les trois éléments : a, b et c. L’ordre dans lequel on écrit les éléments n’importe pas : par exemple, tb, au représente le même ensemble que ta, bu. Fréquemment, on se donne une propriété P pour définir un ensemble. On écrit A “ tx P E | x possède P u pour dire que A est l’ensemble des éléments de E qui possèdent la propriété P . Pour montrer qu’un élément x de E est en fait dans A, il suffira donc de montrer que x a la propriété P . 137
138
ANNEXE B. RAPPELS SUR LES ENSEMBLES ET FONCTIONS Typiquement, on commence par considérer des ensembles de base comme A :“ ta, b, c, d, . . . , zu, N :“ t0, 1, 2, 3, . . . u,
Z :“ t. . . , ´3, ´2, ´1, 0, 1, 2, 3, . . . u,
Q :“ ta{b | a P Z,
b P N, et b “ 0 u,
C :“ tx ` i y | x, y P Ru,
où R désigne l’ensemble ds nombres réels, ou encore des ensembles d’objets divers comme t‚, ‚, ‚u,
ou
t|, }, ~, u.
L’ensemble qui ne contient aucun élément est, par définition, l’ensemble vide, et on le représente par le symbole H. Un singleton est un ensemble à un élément. Si a “ b, alors on dit de l’ensemble ta, bu que c’est une paire. Rappelons que ta, bu “ tb, au, et que ta, au “ tau n’est pas une paire.
Remarque. Il a été historiquement bien établi que l’imprécision de la définition d’un ensemble peut engendrer des paradoxes (voir par exemple le paradoxe de Bertrand Russell (1872-1970) dans tout bon livre de logique). Pour éviter cela, nous ne travaillerons qu’avec un petit nombre d’ensembles bien étudiés et stables. Tous les ensembles considérés s’obtiennent à partir de l’ensemble vide et d’axiomes de construction d’ensembles. Un ensemble E est fini si on peut écrire E “ tx1 , . . . , xn u, avec n P N fixé. Si les éléments xi sont tous distincts, alors on dit que l’entier n est le cardinal de E et on le note : n “ |E|. Par convention |H| “ 0. Un ensemble E est infini s’il n’est pas fini. Par exemple, t1, 3, 6, 7, 8, 9, 10, 34u est fini, mais N ne l’est pas. On dit que A est un sous-ensemble de E, si tous les éléments de A appartiennent à E. On dit aussi que A est contenu dans E et on écrit A Ñ E. C’est la relation d’inclusion. Les ensembles H et E sont des sous-ensembles particuliers de E. Tout autre sous-ensemble de E est un sous-ensemble propre. Si A n’est pas un sous-ensemble de E, on écrit A Ü E. Par exemple, on a N Ñ Z Ñ Q Ñ R Ñ C. Ce qui signifie que N Ñ Z , Z Ñ Q , etc., mais aussi que N Ñ Q. On dit que l’inclusion est transitive. Il est clair que tout sous-ensemble d’un ensemble fini est fini. On note PpEq l’ensemble des sous-ensembles de l’ensemble E : PpEq “ tA | A Ñ Eu. Par exemple, pour E “ t1, 2, 3u, on a PpEq “ tH, t1u, t2u, t3u, t1, 2u, t2, 3u, t1, 3u, Eu. Si |E| “ n, alors |PpEq| “ 2n . Pour montrer qu’un ensemble A est inclus dans un ensemble E, on doit montrer qu’un élément quelconque de A est forcément aussi un élément de E. Autrement dit que : x P A ñ x P E. Montrer que A “ E équivaut à montrer que A Ñ E et E Ñ A. La différence de deux ensembles A et B, notée AzB, est l’ensemble défini par AzB “ tx P A | x R Bu.
139 Si le contexte fait en sorte que l’ensemble E est clair, et si A Ñ E, alors on écrit parfois Ac :“ EzA. On dit que Ac est le complément de A (dans E). Dans le cas d’un ensemble de nombres E, qui contient 0, on écrit souvent E ˚ pour l’ensemble Ezt0u. Deux couples pa, bq et pa1 , b1 q sont égaux, si et seulement si a “ a1 et b “ b1 . On admet le cas a “ b, pour obtenir le couple pa, aq. Soulignons que l’ordre gauche droite est important, c.-à-d. pa, bq “ pb, aq sauf si a “ b. Pour deux ensembles A et B, le produit cartésien de A et B est l’ensemble A ˆ B “ tpa, bq | a P A, b P Bu. On observe que H ˆ E “ E ˆ H “ H. En effet, il n’existe pas de couple pa, bq tel que a P E et b P H. En général A ˆ B “ B ˆ A. Le cardinal de A ˆ B est le produit du cardinal de A et du cardinal de B. Par exemple, le plan cartésien est R2 “ R ˆ R. Pour n P N, et E est un ensemble, le produit cartésien n fois de E est l’ensemble défini par récurrence E n “ E ˆ E n´1 , avec E 0 :“ tEu (c’est un singleton, un ensemble à un seul élément), dont les éléments sont appelés n-uplets. On écrit d’habitude x “ px1 , x2 , . . . , xn q,
où
xi P E,
pour un élément de E n , et alors l’unique élément de E 0 s’écrit x “ p q. Il est facile de voir qu’il y a une bijection (naturelle) entre E n ˆ E k et E n`k ; mais, à strictement parler, ces deux ensembles ne sont pas « égaux ». En effet, les éléments du premier ensemble sont de la forme ppx1 , . . . , kk q, py1 , . . . , yn qq, tandis que ceux du deuxième sont de la forme (très similaire, mais différente) px1 , . . . , kk , y1 , . . . , yn q. Il est souvent « correct » de les identifier, mais il faut parfois faire attention. On peut donner un sens mathématique précis à au terme « naturel », mais intuitivement cela signifie que la notion s’impose. Pour tout ensemble E et tout singleton t‹u, on a aussi une bijection naturelle ⌘ : E ›Ñ E ˆ t‹u,
avec
⌘pxq :“ px, ‹q.
L’union, de deux ensembles A et B, est l’ensemble formé de tous les éléments qui appartiennent à A ou à B (ou aux deux). On le note A Y B, et donc A Y B :“ tx | x P A ou x P Bu.
140
ANNEXE B. RAPPELS SUR LES ENSEMBLES ET FONCTIONS
L’intersection de deux ensembles A et B l’ensemble des éléments communs à A et B. On le note A X B et donc A X B “ tx | x P A et x P Bu.
Pour tout A et B, on a l’inclusion A Ñ A Y B. De plus, A X B est un sous-ensemble de A et de B. D’autre part, A X B “ A si et seulement si A Ñ B. Si A X B “ H, on dit que A et B sont disjoints. Si A et B sont disjoints, on écrit souvent A ` B pour l’union de A et de B. On dit que c’est l’union disjointe 1 . Les principales propriétés de ces opérations sur les suivantes sont les suivantes. Pour A, B, C des ensembles, alors 1. A X A “ A et A Y A “ A (idempotence) ;
2. A Y B “ B Y A et A X B “ B X A (commutativité) ;
3. A Y H “ A et A X H “ H ; et si A Ñ B alors A Y B “ B et A X B “ A (existence d’éléments neutres). Bien que ce soit l’une des notions les plus importantes des mathématiques, la définition rigoureuse moderne de la notion de fonction n’apparaît qu’au XIXe(en 1837). Elle est due à Johann Dirichlet (1805-1859). Dans le langage de la théorie des ensembles, elle prend la forme suivante. Soit A et B deux ensembles. Une fonction f , de A vers B (on écrit f : A Ñ B), est une règle qui associe à chaque élément de a un unique élément de B. Plus techniquement, f est un sous-ensemble de A ˆ B, et on écrit f paq “ b si et seulement si le couple pa, bq appartient à ce sous-ensemble. Pour que f soit une fonction, il suffit que 1. pour tout a P A, il existe un b tel que f paq “ b, et 2. si f paq “ b et f paq “ c, alors b “ c.
Une fonction f de A vers B, est une bijection, si on a une fonction inverse f ´1 : B Ñ A, pour la composition, c.-à-d. : f ´1 ˝ f “ IdA , et f ˝ f ´1 “ IdB . (B.1) Une fonction f : A Ñ B est injective si et seulement si, pour tout a et tout b dans A a “ b
ùñ
f aq “ f pbq,
(B.2)
ce qui équivaut (c’est la contraposée) à dire aussi que f paq “ f pbq entraine forcément b “ b.
(B.3)
Une fonction f : A ñ B est dite surjective si et seulement si pour chaque élément y de B, il existe au moins un élément x de A tel que f pxq “ y. On montre qu’une fonction qui est à la fois surjective et injective est une fonction bijective, et inversement. Par définition 2 , deux ensembles ont le même cardinal si et seulement si il existe une bijection entre les deux ensembles. Pour A et B donnés, on désigne par B A ou FonctpA, Bq l’ensemble des fonctions de A dans B. 1. On préfère ici la notation A ` B pour l’union disjointe de A et de B, plutôt que les notations A Y¨ B ou A Z B. 2. La définition est nécessaire pour des ensembles infinis.
Solutions de certains exercices Exercices du chapitre sur les groupes Solution 1. Soit G un groupe et ZpGq son centre de G. On veut vérifier que ZpGq est un sous-groupe. Notons que e P CpGq. Ensuite, si g1 et g2 sont dans ZpGq, pour chaque h P G on aa g1 g2 h “ g1 hg2 ,
car
“ hg1 g2 ,
car
g2 P ZpGq
g1 P ZpGq,
et donc g1 g2 P CpGq. De plus, pour g P ZpGq et h P G, on a par définition de ZpGq que hg “ gh, d’où hg ´1 “ g ´1 h. On conclut que g ´1 P ZpGq, ce qui achève de montrer que ZpGq est un sous-groupe.
Exercices du chapitre sur les actions de groupes Solution 2 (Exercice 2.1). Pour G qui sur E, et F un sous-ensemble invariant pour cette action. On observe d’abord que toute orbite est un sous-ensemble invariant pour l’action de G. En effet, si y P Orbpxq on a y “ h¨x pour un certain h P G ; et alors, pour tout g P G, on a g ¨y “ g ¨ph¨xq “ pghq¨x, d’où g ¨ y est dans Orbpxq. Ensuite, si x P F , comme g ¨ x P F pour tout g, il s’ensuit que Orbpxq Ñ F . Clairement, on a § F Ñ Orbpxq, xPF
puisque x P Orbpxq. D’autre part, l’inclusion Orbpxq Ñ F , pour tout x P , entraîne que § Orbpxq Ñ F, xPF
d’où l’égalité, et F est bien une réunion d’orbites.
On a observé ci-haut que Orbpxq est un sous-ensemble invariant auquel appartient x. De plus, Orbpxq est contenu dans tout sous-ensemble invariant contenant x. Donc Orbpxq est le plus petit sous-ensemble invariant auquel x appartient.
141
142
SOLUTIONNAIRE
Solution 3 (Exercice 2.2). Pour voir que A4 n’a pas de sous-groupe d’ordre 6, on rappelle qu’il contient les 12 éléments A4 “ te, p12qp34q, p13qp24q, p14qp23q, p123q, p132q, p124q, p142q, p134q, p143q, p234q, p243qu. Ces éléments de A4 sont d’ordre 1,2 ou 3, et donnent les groupes cycliques suivants : T H2 K1 K3
“ “ “ “
teu, te, p13qp24qu, te, p123q, p132qu, te, p134q, p143qu,
H1 H3 K2 K4
“ “ “ “
te, p12qp34qu, te, p14qp23qu te, p124q, p142qu, te, p234qp243qu.
Pour avoir un sous-groupe H § A4 de cardinal 6. Comme A4 ne possède que des éléments d’ordre 1, 2 ou 3, seulement 4 éléments d’ordre 2, un sous-groupe d’ordre H devrait posséder au moins un élément d’ordre 2, et un élément d’ordre 3. Par exemple, si p12qp34q P H et p123q P H, devrait aussi contenir les éléments p132q “ p123qp123q,
p12qp34qp132q “ p143q,
p12qp34qp123q “ p243q,
p123qp12qp34q “ p134q,
ce qui donne déjà 7 éléments (en comptant e), ce qui serait impossible par hypothèse. De même que H doit contenir au moins un Hi et un Kj , mais on vérifie (cas par cas) qu’on a alors xHi Y Kj y “ A4 . Solution 4 (Exercice 2.3). On considère l’action naturelle du groupe symétrique Sn sur l’ensemble ⌦ :“ t1, 2, . . . , nu. Décomposition d’une permutation en cycles disjoints. H “ x y sur ⌦. La décomposition de ⌦ en H-orbites donne
Pour
P Sn , considérons l’action de (B.4)
⌦ “ ⌦1 ` . . . ` ⌦k , où chaque ⌦i peut s’écrire sous la forme ⌦i “ t!i , p!i q, 2 p!i q, . . . , !i :“ minp⌦i q est le plus petit élément de l’orbite ⌦i . Posons i
de sorte que les cycles
i
:“ p!i , p!i q, . . . ,
`piq´1
p!i qq,
`piq´1 p!
i qu,
en supposant que (B.5)
sont disjoints (par (B.4)), et respectivement de longueur `piq. On constate que “
(B.6)
1 2... k
peut s’écrire comme produit de cycles disjoints, par le calcul suivant. Pour j P ⌦, si j R ⌦i , alors i pjq “ j par construction, et donc 1 2 . . . k pjq “ i pjq, pour l’unique i tel que j P ⌦i . Mais alors j “ prq p!i q, pour un certain 1 § r † `piq, et i pjq
“
ip
prq
p!i qq “ p
prq
p!i qq “ pjq.
SOLUTIONNAIRE
143
Ainsi a que 1 . . . k pjq “ pjq, pour tout j P ⌦. Soit maintenant “ pa1 , . . . , al q, et ⇢ “ pb1 , . . . , bm q des cycles disjoints respectivement de support A “ ta1 , . . . , al u et B “ tb1 , . . . , bm u. Alors, laisse fixe les éléments de B, et ⇢ laisse fixe ceux de A. De sorte que pour j P ⌦, on a $ $ ’ ’ si j R A ` B, si j R A ` B, &j &j ⇢pjq “ ⇢pjq si j P B, et ⇢ pjq “ ⇢pjq si j P B, ’ ’ % % pjq si j P A, pjq si j P A. On a donc bien ⇢ “ ⇢ , donc les cycles disjoints commutent. L’unicité de la décomposition en cycles disjoints, correspond à l’unicité de la décomposition en orbites.
Les classes de conjugaison de Sn . Considérons, comme en (B.6), la décomposition 1 . . . k de en cycles disjoints de longueurs respectives `p i q “ µi , qu’on suppose ordonné de façon à ce que µ1 • µ2 • . . . • µk . Désignons encore une fois par ⌦i le support de i . Comme ce sont les H-orbites de ⌦ pour H “ x y, on a que n “ µ1 ` µ2 ` ¨ ¨ ¨ ` µk est un partage de n qu’on dénote ⇡p q. Inversement, pour tout partage pµ1 , µ2 , ¨ ¨ ¨ , µk q de n, on peut considérer la permutation “ p1, 2 . . . m1 qpm1 ` 1, . . . , m2 q . . . pmk´1 ` 1, . . . , mk q
où
mi :“ µ1 ` ¨ ¨ ¨ ` µi .
Ainsi donc, les mi sont les sommes partielles consécutives de µ. En particulier, mk “ n. Il s’ensuit qu’on / / Pn , où Pn désigne l’ensemble des partages de n. Pour montrer qu’il y a a une surjection ⇡ : Sn bijection entre l’ensemble Cn , des classes de conjugaison de Sn , et l’ensemble Pn , il suffit de voir que et ⌧ sont conjugués si et seulement si ⇡p q “ ⇡p⌧ q. Or, si et ⌧ sont conjugués, il y a une permutation ⇢ telle que ⌧ “ ⇢ ⇢´1 . Il s’ensuit que ⌧ “ p⇢ 1 ⇢´1 qp⇢ 2 ⇢´1 q . . . p⇢ k ⇢´1 q, et on constate que les p⇢ i ⇢´1 q sont des cycles disjoints de même longueur que les sition en cycle de ⌧ , et donc ⇡p q “ ⇡p⌧ q. En effet, on a piq “ j
ssi
⌧ p⇢piqq “ ⇢pjq,
comme le montre le calcul ⌧ p⇢piqq “ ⇢pjq
ñ
ñ ñ ñ
Les cycles de ⌧ s’obtiennent donc de ceux de
⇢ ⇢´1 p⇢piqq “ ⇢pjq ⇢ piqq “ ⇢pjq
piq “ ⇢´1 ⇢pjq piq “ j.
en remplaçant i par ⇢piq.
i,
c’est la décompo-
144
SOLUTIONNAIRE
Inversement, si les partages associés sont égaux, c.-à-d. ⇡p⌧ q “ ⇡p q, on cherche à montrer que et ⌧ sont conjugués. Pour ce faire on ordonne les décompositions en cycles de chacune des permutations en ordre décroissants de cycles (l’ordre entre deux cycles de même longueur n’importe pas), pour obtenir
⌧
“
1 2... k
“ ⌘1 ⌘2 . . . ⌘k ,
avec `p i q “ `p⌘i q, et chaque cycle débutant par le plus petit élément de son support comme on l’a fait plus haut en (B.5). On construit alors une permutation ⇢, qui sera telle que ⌧ “ ⇢ ⇢´1 montrant ainsi que et ⌧ sont conjugués, de la façon suivante. Par construction ⇢ est telle que ⌘i ⇢ i ⇢´1 . Pour terminer la description de ⇢, soit a0 le plus petit élément du cycle i , et b0 le plus petit élément du cycle ⌘i correspondant, et donc de même longueur `. On défini ⇢ comme suit, avec ar :“ r pa0 q, et br “ ⌧ r pb0 q, a0
a6 i
a1
a5 a4
a3
b0
b6
⌘i
a2
b1
b5 b4
b3
b2
autrement dit ⇢p r pa0 qq :“ ⌧ r pb0 q. Ainsi ⇢ est bijective, parce qu’on a des décompositions en cycles disjoints, et possède les propriétés voulues par construction. L’énumération des permutations dans la classe de conjugaison correspondant à un partage µ s’obtient directement en choisissant comment disposer les entiers de 1 à n dans les cycles. Illustrons par un exemple. Considérons le partage µ “ 22111 de 7. Une permutation cyclique de ce type prend la forme pabqpcdqpeqpf qpgq, pour ta, b, c, d, e, f, gu “ t1, 2, 3, 4, 5, 6, 7u. On considère les 7! permutations “ 1 2 3 4 5 6 7 de t1, 2, 3, 4, 5, 6, 7u. Pour chacune de ces permutations, on construit une décomposition cyclique de la forme voulue en prenant pabq “ p
1 2 q,
pcdq “ p
3 4 q,
peq “
5,
pf q “
6,
pgq “
7.
Toutes les permutations de la classe de conjugaison saont clairement obtenues ainsi. Cependant, on a plusieurs qui donnent la même décomposition cyclique. Ainsi, on a pabqpcdqpeqpf qpgq “ pdcqpabqpf qpgqpeq “ pbaqpdcqpf qpeqpgq “ ¨ ¨ ¨ En fait, dans chaque cas il y a 48 permutations qui donnent la même décomposition cyclique. Ces 48 possibilités correspondent au produit des 8 façons de présenter les deux cycles de longueur 2, par les 8 façons de présenter es 3 point fixes. Une preuve générale plus conceptuelle passe par le calcul du stabilisateur d’une permutation cyclique fixé de type µ, pour l’action par conjugaison. Le nombre de
SOLUTIONNAIRE
145
permutations dans ce stabilisateur est le denominateur de la formule (2.15). Pour le voir, on constate qu’une permutation appartenant au stabilisateur s’obtient en permutant les cycles de même longueur (c’est le facteur di !), puis en « tournant » chaque sur lui-même (il y a i telles rotations qui donne le même cycle, ce qui donne le facteur idi ). Solution 5. Pour p un nombre premier, et G un groupe d’ordre p2 , montrons que G est abélien. On sait déjà que le centre de G est non trivial, et on a donc un élément x P ZpGq distinct du neutre x ‰ e. Si ordpxq “ p2 , alors G “ xxy est cyclique, et donc G abélien. Sinon, on a forcément ordpxq “ p, de plus H “ xxy est un sous-groupe normal de G, et G{H est un groupe d’ordre p. En particulier, G{H est cyclique, et on a G{H “ xyHy “ tH, yH, . . . , y p´1 Hu, pour un certain y dans G. On adonc la décomposition de G en classes à gauches disjointes G “ H ` yH ` . . . ` y p´1 H. Autrement dit, tout élément g de G s’exprime sous la forme g “ y i xj . On calcule alors, pour g1 “ y i xj , g2 “ y k xl , que g 1 g 2 “ y i xj y k xl
“ y i y k xj xl , “ y “ y
car
x P ZpGq
car
x P ZpGq
i`k j`l
x
k`i l`j
x
k i l j
“ y yxx
“ y k xl y i xj , “ g2 g1 , ce qui montre que G est abélien.
Solution 6. Pour G agissant sur E, et Y Ñ E, on veut montre que H “ tg P H | g ¨ y “ y, pour tout y P Y u, est un sous-groupe de G. Or, H “ tg P G | g P Stabpyq, pour tout y P Y u “ est l’intersection d’une famille de sous-groupes, d’où H § G.
£
yPY
Stabpyq,
146
SOLUTIONNAIRE
Solution 7. Le groupe
"ˆ ˙ * a b G“ | a, b, c P R, a “ 0, c “ 0 . 0 c
est un sous-groupe de GL2 pRq. En effet, on voit d’abord que Id P G, en prenant a “ c “ 1 et b “ 0. Puis, pour ˆ ˙ ˆ ˙ a b e f A“ , et B“ , 0 c 0 g avec a, c, e et g non-nuls, on constate que la matrice ˆ ˙ ae af ` bg AB “ 0 cg
est de la forme voulue, et AB P G puisqu’on a aussi ae et cg non-nuls. On calcule aussi que ˆ ´1 ˙ a ´ba´1 c´1 ´1 A “ , 0 c´1 et donc A´1 P G, puisque a´1 et c´1 sont non-nuls. On conclut que G est un sous-groupe. On veut ensuite montrer que G agit sur R par l’opération ˆ ˙ ax ` b a b A ¨ x :“ ¨x“ . 0 c c
Pour ce faire, on calcule aissément que Id ¨ x “ x, puis que ˆ ˙ ex ` f A ¨ pB ¨ xq “ A ¨ g a ppex ` f q{gq ` b “ c aex ` af ` bg “ cg “ pABq ¨ x, ee qui achève de montrer qu’on a une action. Notons ensuite que A¨0“
ˆ ˙ a¨0`b b a b ¨0“ “ . 0 c c c
Clairement b{c prend toutes les valeurs réelles, et donc Orbp0q “ R. De plus, A ¨ 0 “ b{c est si et seulement si b “ 0, d’où "ˆ ˙ * a 0 ˚ Stabp0q “ | a, c P R , 0 c ce qui achève la solution.
SOLUTIONNAIRE
147
Solution 8. Soit G :“ ISOR3 l’ensemble des isométries de R3 . Par définition, f P G si et seulement si dpf pP q, f pQqq “ dpP, Qq,
pour tous points P et Q dans R3 . Clairement la fonction identité préserve les distance. On observe ensuite que, pour f et g dans G, dpf pgpP qq, f pgpQqqq “ dpgpP q, gpQqq “ dpP, Qq,
et donc f ˝ g est dans G. D’autre part,
dpf ´1 pP q, f ´1 pQqq “ dpf pf ´1 pP qq, f pf ´1 pQqqq “ dpP, Qq,
et on déduit que G est un sous-groupe du groupe SR3 , des fonctions inversibles de R3 dans lui-même. Or, on a déjà vu qu’on a l’action naturelle SR 3 ˆ R 3 Ñ R 3 ,
avec
f ¨ P “ f pP q.
Celle-ci induit l’action voulue sur son sous-groupe G “ ISOR3 .
Solution 9. Pour p premier on considère $¨ , ˛ & 1 a b . G “ ˝0 1 c ‚ | a, b, c P Zp , % 0 0 1
le groupe des matrices triangulaires supérieures à coefficients dans le corps Zp . Prenant a “ b “ c “ 0 on constate que G contient la matrice indentité. On calcule ensuite que le produit de deux matrices triangulaires supérieures est aussi une matrice triangulaire supérieure : ¨ ˛¨ ˛ ¨ ˛ 1 a b 1 d e 1 a ` d e ` af ` b ˝0 1 c ‚˝0 1 f ‚ “ ˝0 1 f ` c ‚, 0 0 1 0 0 1 0 0 1 de même pour l’inverse
¨ ˛´1 ¨ ˛ 1 a b 1 ´a ac ´ b ˝0 1 c ‚ “ ˝0 1 ´c ‚. 0 0 1 0 0 1
Il s’ensuit que G est un sous-groupe de GL3 pZp q. Comme on peut choisir a, b et c librement dans Zp , l’ordre de G est p3 . On constate que G n’est pas abélien avec l’exemple suivant ¨ ˛¨ ˛ ¨ ˛ 1 1 0 1 0 0 1 1 1 ˝0 1 0‚˝0 1 1‚ “ ˝0 1 1‚ 0 0 1 0 0 1 0 0 1 ¨ ˛¨ ˛ ¨ ˛ 1 0 0 1 1 0 1 1 0 ˝0 1 1‚˝0 1 0‚ “ ˝0 1 1‚ 0 0 1 0 0 1 0 0 1
148
SOLUTIONNAIRE Enfin, on calcule que
$¨ , ˛ & 1 0 t . ZpGq “ ˝0 1 0‚ : t P Zp % 0 0 1
est le centre de G comme suit. D’abord, on a bien la commutation ¨ ˛¨ ˛ ¨ ˛ 1 0 t 1 a b 1 a b`t ˝0 1 0‚˝0 1 c ‚ “ ˝0 1 c ‚ 0 0 1 0 0 1 0 0 1 ¨ ˛¨ ˛ ¨ ˛ 1 a b 1 0 t 1 a t`b ˝0 1 c ‚˝0 1 0‚ “ ˝0 1 c ‚ 0 0 1 0 0 1 0 0 1
Ne reste plus qu’à voir qu’il n’y a pas d’autres éléments dans ZpGq. Pour cela, on cherche x, t, et z tels que les matrices suivantes soient égales ¨ ˛¨ ˛ ¨ ˛ 1 x t 1 a b 1 x ` a b ` xc ` t ˝0 1 z ‚˝0 1 c ‚ “ ˝0 1 c`z ‚ 0 0 1 0 0 1 0 0 1 ¨ ˛¨ ˛ ¨ ˛ 1 a b 1 x t 1 a ` x t ` az ` b ˝0 1 c ‚˝0 1 z ‚ “ ˝0 1 z`c ‚ 0 0 1 0 0 1 0 0 1
ce qui équivaut à c x “ a z, pour tous a, c P Zp . La seule solution de ces équations est x “ z “ 0. On a ainsi vérifié que le centre de G est bien tel qu’annoncé.
Exercices du chapitre sur les produits directs de groupes Exercices du chapitre sur les morphismes de groupes Solution 10 (Exercice 3.3). À une action ↵ : G ˆ E Ñ E on fait correspondre un morphisme de G r : G Ñ SE , défini par dans le groupe SE des permutations de E, en considèrant la fonction ↵ rpgq “ ↵g , ↵
avec ↵g : E Ñ E la fonction définie en posant ↵g pxq :“ g ¨ x. C’est bien une bijection de E vers E, puisqu’elle admet l’inverse ↵g´1 : ↵g´1 p↵g pxqq “ ↵g´1 pg ¨ xq “ g ´1 ¨ pg ¨ xq “ x.
SOLUTIONNAIRE
149
r est bien défini. Vérifier que ↵ r est un morphisme, correspond à voir que les Donc ↵g est dans SE , et ↵ bijections ↵gh et ↵g ˝ ↵h coïncident. En effet, pour tout x P E, on a ↵gh pxq “ pghq ¨ x
“ g ¨ ph ¨ xq
“ ↵g p↵h pxqq
“ p↵g ˝ ↵h qpxq D’autre part, à un morphisme ' : G Ñ SE on fait correspondre l’action ' : G ˆ E Ñ E, définie par 'pg, xq “ 'pgqpxq. Écrivant g ¨' x pour 'pgqpxq, on vérifie comme suit qu’on a une action de G sur E. En effet, pour x P E, on a e ¨' x “ 'peqpxq “ Idpxq,
car 'peq “ Id. Ensuite, pour g, h P G et x P E, on calcule que g ¨' ph ¨' xq “ g ¨' p'phqpxqq
“ 'pgqp'phqpxqq
“ p'pgq ˝ 'phqqpxq “ 'pghqpxq
“ pghq ¨' x, et donc on a bien une action. r et ' fiÑ ' sont inverses l’une de l’autre. En effet, on a Les correspondances ↵ fiÑ ↵ rpg, xq “ ↵ ↵ rpgqpxq “ ↵g pxq “ g ¨ x “ ↵pg, xq,
r “ ↵. Réciproquement, pour tout g et x, ce qui montre que ↵
r 'pgqpxq “ 'g pxq “ 'pgqpxq,
r r “ '. On a donc tout montré. pour tout x et g, et donc 'pgq “ 'pgq pour tout g, d’où '
Exercices du chapitre sur les groupes quotients Solution 11 (Exercice 4.6). Dans le groupe symétrique (avec les permutations présentées comme produit de cycles disjoints) S3 “ te, p12q, p13q, p23q, p123q, p132qu,
150
SOLUTIONNAIRE
on cherche à trouver tous les sous-groupes ; et, parmi ceux-ci, déterminer ceux qui sont normaux. Par le théorème de Lagrange l’ordre d’un sous-groupe doit être un diviseur de 6 (l’ordre de S3 ), les possibilités sont donc 1, 2, 3, et 6. On note que p12q, p13q, et p23q sont des éléments d’ordre 2, engendrant chacun un sous-groupe d’ordre 2. Ce sont les transpositions. D’autre part p123q et p132q sont des éléments d’ordre 3. Ce sont les permutations cycliques. Comme p123q ˝ p123q “ p132q, ils donnent lieu à un sous-groupe d’ordre 3. Enfin, deux transposition quelconque engendrent tout S3 . C’est le cas aussi pour une transposition et une permutation cyclique. Les seuls sous-groupes possibles sont donc les suivants : ordre 1 : H1 “ teu,
ordre 2 : H2 “ te, p12qu,
H3 “ te, p23qu,
ordre 3 : H5 “ te, p123q, p132qu,
H4 “ te, p13qu,
et
ordre 6 : S3 . Parmi ceux-ci, les seuls qui sont normaux sont H1 , H5 , et S3 . C’est évident pour H1 et S3 . Pour H5 , cela résulte du fait que le conjugué d’une permutation circulaire est aussi une permutation circulaire (voir solution 4), ce que sont tous les éléments de H5 (sauf l’identité). Tous les autres (qui sont en fait conjugués les uns des autres) ne sont pas normaux. En effet, on a p13q H2 p13q´1 “ H3 ,
p12q H3 p12q´1 “ H4 .
et
On a le treillis d’inclusion 8 @ SO 3 d
*⌦
xp12qy f
⇣0
xp23qy ^
?
xp13qy O
4T.N ?
teu
où H
,
K signifie que les sous-groupes en questions sont conjugués.
2R
xp123qy :
SOLUTIONNAIRE
151
Exercices du chapitre sur les groupes abéliens finis Solution 12. Pour un groupe abélien fini A, et d diviseur |A|, et on cherche à montrer que A possède un sous-groupe d’ordre d. C’es là la réciproque du théorème de Lagrange pour les groupes abéliens. Pour ce faire, soit |A| “ p↵1 1 . . . p↵nn la décomposition de |A| en facteurs premiers distincts. On a donc d “ pk11 . . . pknn avec ki § ↵i . À cette fin, on considère la décomposition A » App1 q ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Appn q, de A en produit direct des composantes primaires. Il suffit de montrer que chaque Appi q admet un sous-groupe d’ordre pki . En effet, supposons qu’on ait Hi † Appi q tel que |Hi | “ pki . Alors H1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Hn † Appi q ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Appn q et
|H1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Hn | “ |H1 | ¨ ¨ ¨ ¨ ¨ |Hn | “ pk11 . . . pknn “ d.
Le sous-groupe H est donc le groupe cherché. On se ramène donc à considérer le cas des p-groupes. Soit donc G un p-groupe, de cardinal |G| “ p↵ , et d un diviseur de |G|, c.-à-d. d “ pk , pour 1 § k § ↵. On veut voir que G possède un sous-groupe d’ordre pk . Considérons la décomposition de G en sous-groupes cycliques : G » G 1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gr , avec |Gi | “ p↵i , pour certains ↵1 § ¨ ¨ ¨ § ↵r . Si k “ ↵i pour un certain i alors le sous-groupe Gi fait l’affaire. D’autre part, si k “ ↵i1 ` ¨ ¨ ¨ ` ↵is pour certains ↵i1 § ¨ ¨ ¨ § ↵is , alors teu ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ teu ˆ G↵i1 ˆ teu ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ G↵i2 ˆ teu ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ G↵is ˆ teu ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ teu est un sous-groupe de G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gr qui est d’ordre d. Comme G est isomorphe à G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gr , il possède aussi un sous-groupe d’ordre d. Sinon, soit i0 l’indice maximum tel que ↵1 ` ¨ ¨ ¨ ` ↵i0 † k. Alors on a ↵1 ` ¨ ¨ ¨ ` ↵i0 † k † ↵1 ` ¨ ¨ ¨ ` ↵i0 ` ↵i0 `1 ,
avec
k ´ p↵1 ` ¨ ¨ ¨ ` ↵i0 q † ↵i0 `1 .
Comme G↵i0 `1 est cyclique d’ordre p↵i0 `1 , il possède un sous-groupe d’ordre pk´p↵1 `¨¨¨`↵i0 q , disons Hi0 . Observons que G↵i0 `1 » Zp↵i0 `1 et xp↵1 `¨¨¨`↵i0 `1 ´k y est un sous-groupe d’ordre pk´p↵1 `¨¨¨`↵i0 q de Zp↵i0 `1 . Mais alors, G↵1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ G↵i0 ˆ Hi0 ˆ teu ˆ teu ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ teu est un sous-groupe de G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gr d’ordre p↵1 p↵2 ¨ ¨ ¨ p↵i0 ¨ pk´p↵1 `¨¨¨`↵i0 q “ pk “ d. Encore une fois, G, étant isomorphe à G1 ˆ ¨ ¨ ¨ ˆ Gr , possède aussi un sous-groupe d’ordre d.
152
SOLUTIONNAIRE
Solution 13. Pour un groupe abélien fini G dont l’ordre |G| “ n n’est pas divisible par le carré d’un entier plus grand que 1, on cherche à voir que G est cyclique. L’hypothèse assure que |G| “ p1 . . . pk , où les pi sont des nombres premiers distincts. On a la décomposition de G en produit direct de ses composantes primaires : G » Gpp1 q ˆ . . . ˆ Gppk q, pour laquelle |Gppi q| “ pi . Donc Gppi q » Zpi ,
et
G » Zpi ˆ . . . ˆ Zpn .
Par ailleurs, Zn » Zpi ˆ . . . ˆ Zpn . D’où G » Zn et donc G est cyclique. Solution 14. On cherche à énumérer tous les groupes abéliens non isomorphes d’ordre 72 (à isomorphisme près). On a 72 “ 8 ¨ 9 “ 23 ¨ 32 . Pour G abélien d’ordre 72, on a G » Gp2q ˆ Gp3q,
|Gp2q| “ 23 ,
et |Gp3q| “ 32 .
Considérant les possibilités pour Gp2q et Gp3q on trouve la liste suivante (par le théorème d’unicité pour la décomposition en p-groupes cycliques) : 1) Z8 ˆ Z9 ,
2) Z2 ˆ Z4 ˆ Z9 ,
3) Z2 ˆ Z2 ˆ Z2 ˆ Z9 , 4) Z8 ˆ Z3 ˆ Z3 ,
5) Z2 ˆ Z4 ˆ Z3 ˆ Z3 ,
6) Z2 ˆ Z2 ˆ Z2 ˆ Z3 ˆ Z3 ,
tous non isomorphes, et il n’y a pas d’autres cas. Solution 15. Pour B un sous-groupe d’un groupe G, on considère l’action de B sur les parties de G par translation à gauche. On veux montrer que, pour tout (autre) sous-groupe A de G, on a StabB pAq “ A X B. On a d’abord que A X B Ñ StabB pAq, puisque chaque g P A X B est tel que gA “ A, étant donné que g P A. D’autre part, par définition, si g P B appartient à StabB pAq alors gA “ A. In s’ensuit en particulier que ge “ g P A, ce qui montre que StabB pAq Ñ A X B. On a donc montré l’égalité cherchée.
SOLUTIONNAIRE
153
Exercices du chapitre sur les p-groupes et théorèmes de Sylow Solution 16. Soit G un groupe d’ordre 96 “ 25 ¨ 3. Considérons N2 , le nombre de 2-sous-groupes de Sylow. On a N2 ” 1 modulo 2, et N2 divise 96. Les possibilités sont N2 “ 1 et N2 “ 3. Si N2 “ 1, alors l’unique 2-sous-groupe de Sylow est normal, par le 2e théorème de Sylow. Si N2 “ 3, soient H, K deux 2-sous-groupes de Sylow ; ils sont d’ordre 32. L’intersection H X K est un sous-groupe d’ordre 2, 4, 8 ou 16. Si | H X K | § 8, alors | HK | “ •
|H | ¨ |K | |H X K | 32 ¨ 32 “ 128 8
ce qui est trop dans un groupe d’ordre 96. Ainsi, on doit avoir | H X K | “ 16. Alors | HK | “
32 ¨ 32 “ 64 16
Par ailleurs, H X K est d’indice 2 dans H, et aussi dans K, d’où H X K H et H X K K. Cela entraîne que HK Ñ N pH X Kq, le normalisateur de H X K. D’où | N pH X Kq | • 64. Comme | N pH X Kq | doit aussi être un diviseur de 96, on doit avoir | N pH X Kq | “ 96, et donc N pH X Kq “ G, ce qui revient à dire que H X K est un sous-groupe normal. Solution 17. Pour un groupe G d’ordre 104 “ 23 ¨ 13, on suppose qu’aucun sous-groupe d’ordre 8 n’est normal. Les sous-groupes d’ordre 8 sont les 2-sous-groupes de Sylow. Leur nombre, N2 , est impair et divise 104. Les possibilités sont N2 “ 1 ou N2 “ 13. Si N2 “ 1, alors l’unique 2-sous-groupe de Sylow serait normal par le 2e théorème de Sylow, mais cela ne peut être le cas par hypothèse. La seule possibilité qui reste est N2 “ 13, et il y a donc 13 sous-groupes d’ordre 8. Solution 18. Pour G un groupe fini, soit p le plus petit diviseur premier de | G |, et H • G tel que rG : Hs “ p. Dénotons par E “ tH, x1 H, . . . , xp´1 Hu l’ensemble des translatés à gauche de H. On considère le morphisme ' : G Ñ SE qui correspond à l’action de G sur E par translation à gauche, et on pose K “ tf P SE | f pHq “ Hu, et L “ t'phq | h P Hu. On veut montrer que H est un sous-groupe normal de G. Par définition, pour g P G, 'pgq est la permutation de E 'pgqpxi Hq “ gxi H. On a que kerp'q Ñ H. En effet, supposons g P kerp'q, on a alors en particulier, on a gH “ H et donc g ¨ e “ g P H, tel que voulu. On vérifie ensuite que K est un sous-groupe de SE de cardinal
154
SOLUTIONNAIRE
| K | “ pp ´ 1q!. En effet, K est le stabilisateur de H pour l’action naturelle de SE sur E. En fixant H, il reste pp ´ 1q éléments de E à permuter et tous les cas se réalisent. On a donc | K | “ | Sp´1 | “ pp ´ 1q!. Montrons maintenant que L est un sous-groupe de K, dont le cardinal divise donc pp ´ 1q! . En effet, L est l’image de H par le morphisme '. C’est donc un sous-groupe de SE . D’autre part, pour f P L, avec f “ 'phq pour un certain h P H, on a f pHq “ 'phqpHq “ hH “ H, puisque h P H. Donc L Ñ K tel qu’annoncé. Montrons ensuite que | L | divise | H |. À cette fin, considérons la restriction ' |H : H Ñ L, xd ' à H. Par le théorème des isomorphismes, ' |H se factorise à travers un isomorphisme de H{ kerp' |H q sur l’image de ' |H qui est L, d’où | H | “ | kerp' |H q | ¨ | L |.ce qui montre l’affirmation. résultat. On a en fait | L | “ 1 et H “ kerp'q. En effet, par les arguments ci-haut, | L | † p et | L | est un diviseur de | H |, donc aussi un diviseur de | G |. Par l’hypothèse faite sur p, la seule possibilité est que | L | “ 1. Mais alors ' envoie tous les éléments de H sur l’élément neutre de SE , ou autrement dit H Ñ kerp'q. On conclut que H “ kerp'q comme voulu.
Exercices exploratoires Solution 19. Plus généralement, si « ‹ » est une opération sur B, les propriétés de ‹ sont en général vérifiées pour les fonctions f : X Ñ B et g : X Ñ B, quelque soit X, muni de l’opération f ‹ g définie en posant pf ‹ gqpxq :“ f pxq ‹ gpxq, pour tout x P X. Dans chaque cas, on se ramène en effet à vérifier que la propriété est satisfaite dans B. Par exemple, si ‹ est une opération commutative dans B, alors on a une opération commutative correspondante dans B X , l’ensemble des fonctions de X dans B. En effet, on calcule ainsi pf ‹ gqpxq “ f pxq ‹ gpxq “ gpxq ‹ f pxq “ pg ‹ f qpxq, en observant que l’étape du milieu correspond à la commutativité de ‹ pour B. Il en est de même pour l’associativité, l’inverse, l’élément neutre (qui correspond à la fonction constante dont la valeur est le neutre pour ‹ dans B), etc. Donc, si pB, ‹q forme un groupe (abélien), alors c’est le cas aussi pour pB X , ‹q.
(a) En utilisant le principe ci-dessus, on conclut que pRX , `q et pRX , ¨q sont des groupes abéliens. La distributivité de la multiplication sur l’addition dans R entraîne qu’on a la même propriété dans RX , par le même principe.
(b) Pour montrer que l’ensemble CpRq des fonctions continues de R vers R est a bien un anneau, avec les opérations comme ci-dessus ; il suffit d’observer que CpRq est un sous-ensemble de RR fermé pour l’addition, l’inverse additif et le produit de RR . En effet, la somme et le produit de deux fonctions continues donne une fonction continue, et l’inverse additif d’une fonction continue est une fonction continue.
SOLUTIONNAIRE
155
(c) Pour voir qu’on a bien un anneau en considérant l’ensemble Mn pAq, des matrices carrées n ˆ n à coefficients dans A, avec les opérations habituelles sur les matrices ; on part du fait déjà connu que Mn pAq forme un anneau dans le cas où A est un corps. On remarque en effet que les seules propriétés des corps utilisées dans la démonstration classique sont celles d’anneau unitaire. Les calculs sont exactement les mêmes qu’on fait dans un cours d’algèbre linéaire, omis le calcul de l’inverse de matrices qui n’intervient pas ici. (d) On sait déjà que Arx1 , . . . , xn s forme un anneau dans le cas où A est un corps. Encore une fois, les seules propriétés des corps utilisées dans ce cas sont celles d’anneau unitaires commutatif, et on a donc le résultat par les arguments classiques. Solution 20. Sur les entiers de Gauss Zris “ ta ` bi | a, b P Zu,
on a la norme
N pa ` biq :“ a2 ` b2 .
L’ensemble Zris forme un sous-anneau de C, qui contient clairement les entiers Z (posant b “ 0). En effet, pour x “ a ` ib et y “ c ` di dans Zris, on constate que x ` y “ pa ` cq ` ipb ` dq, x ´ y “ pa ´ cq ` ipb ´ dq,
xy “ ac ´ bd ` ipad ` bcq
qui sont bien tous de la forme ↵ `
i, avec ↵ et
in Z. De plus, N pxyq “ N pxqN pyq puisque
pac ´ bdq2 ` pad ` bcq2 “ pa2 ` b2 qpc2 ` d2 q
Pour tout x et y dans Zris, avec y “ 0, il existe q et r dans Zris tels que x “ qy ` r,
et
N prq † N pyq.
Pour le voir, on commence par calculer q “ e ` f i, où „ ⇢ „ ⇢ ac ` bd abc ´ ad e :“ 2 et f :“ , c ` d2 c 2 ` d2
avec r↵s désignant l’entier le plus près de ↵ P R. Ensuite, on pose simplement r :“ x ´ q y. Il est facile de vérifier que N prq † N pyq par calcul. Solution 21. Pour K un corps fini de caractéristique p et ⇠ un générateur de K ˚ , on cherche à montrer que ⇠ p est aussi un générateur de K ˚ . La fonction 'p : K Ñ K, défini par 'p pxq :“ xp est un automorphisme de corps de K. En particulier, il induit un automorphisme du groupe multiplicatif 'p : K ˚ Ñ K ˚ qui envoie le générateur ⇠ sur un autre générateur 'p p⇠q “ ⇠ p , puisqu’un automorphisme de groupe préserve l’ordre des éléments, et donc 'pxn q “ 'pxqn “ 1 si et seulement si xn “ 1.
156
SOLUTIONNAIRE
Bibliographie
[1] F. Bergeron, P. Leroux, et G. Labelle, Combinatorial Species and Tree-like Structures, Encyclopedia of Mathematics, Cambridge University Press, 1998. 497 pages. Une rééddition des premiers chapitres est disponible sur le web. C’est la théorie développée à l’UQAM, présentée pour le niveau des études avancées. Une introduction plus accessible est donnée au chapitre 6 des notes Introduction à la combinatoire algébrique. Cependant, pour l’aspect théorie de Pôlya, il faut voir la version papier complète du livre. [2] F. Bergeron et C. Hohlweg, Arithmétique et géométrie classique, disponible sur le web, 2014. 262 pages. [3] J. Calais, Eléments de théorie des groupes, Presses Universitaires de France, 1984. (QA174.2C25) [4] E. Cartan, La théorie des groupes et les recherches récentes en géométrie différentielles, Congrès international de Mathématiques, Toronto, août 1924. Voir sur le web cette référence historique, expliquant entre autres certains liens avec la théorie de la relativité. [5] N. Carter, Visual Group Theory, MAA’s Classroom Ressource Material series, 2009. Disponible en version papier et électronique. Il s’accompagne d’un logiciel libre qui permet d’explorer des propriétés des groupes est disponible à l’adresse http://groupexplorer.sourceforge.net. [6] C.A. Daul, Applications de la théorie des groupes à la chimie, disponible sur le web, pour voir en quoi la théorie des groupes intervient en chimie. [7] J. H. Conway, R. T. Curtis, S. P. Norton, R. A. Parker et R. A. Wilson, Atlas of finite groups, Clarendon Press Oxford, 1985. (QA171A86) C’est la compilation des résultats de la classification des groupes finis. [8] F.M. Goodman, Algebra : Abstract and Concrete, Disponible sur le web. En anglais, mais très bien présenté avec un point de vue original soulignant le rôle des symétries en mathématiques. [9] A. Kostrikin, Introduction à l’algèbre, Éditions MIR, 1986. (QA154.2K6714) [10] S. Lang, Structures algébriques, InterEditions, 1976. (QA251L2514) [11] F. Liret et D. Martinais, Algèbre 1re année, 2e édition, Dunod, 2003. (QA155L47.2003) 157
158
BIBLIOGRAPHIE
[12] J.S. Milne, Group Theory, 135 pages. Disponible sur le web. Un bon livre en anglais, qui porte sur la matière de cours, mais qui va plus loin sur certains sujets. Aussi avec une bonne bibliographie classique, citant les meilleures sources. Son site personnel contient aussi d’autres notes de cours sur une vaste gamme de sujets. [13] G. Polya, Comment poser et résoudre un problème. Dunod, 1962. (QA11P614) Un classique pour apprendre à réfléchir aux mathématiques, ou au moins à y penser autrement. [14] S. Sternberg, Group Theory and Physics, Cambridge University Press, 1995. Un très bon livre pour aller plus loin. C’est du niveau des études avancées.
Alphabet grec A, B, , , E, Z, H, ⇥, I, K, ⇤, M,
↵: : : : ": ⇣: ⌘: ✓: ◆: : : µ:
alpha bêta gamma delta epsilon dzéta êta thêta iota êta lambda mu
N, ⌅, O, ⇧, P, ⌃, T, ⌥, , X, , ⌦,
159
⌫: nu ⇠: xi o: omicron ⇡: pi ⇢: rhô , & : sigma ⌧: tau : upsilon ': phi : khi : psi !: omega
160
BIBLIOGRAPHIE
Index Abel, Niels H., 16 action, 50 à gauche, 50 ensemble d’orbites, E{G, 50 fonctions composition à droite, 55 composition à gauche, 55 conjugaison, 55 isomorphisme, 63 linéaire, 75 isomorphisme, 75 somme, 75 morphisme, 63 orbite, 50 par conjugaison, 54 sous-ensemble invariant, 51 sous-ensemble stable, 51 sur un ensemble, 50 transitive, 50 triviale, 50, 117 action de groupe continue, 82 agit, 50 alphabet, 46 alterné, groupe An , 86 anneau, 46 commutatif, 46 automorphisme intérieur, 88 bijection, 140 Burnside, William, 61
Cantor, Georg, 137 Cartan, Elie, 72 Cauchy, Augustin Louis, 61 Cayley, Arthur, 31, 89 centralisateur, 54 centralisateur, CpHq, 54 centre, ZpGq, 24 commutateur, 102 composante primaire, 122 concatenation, 46 congruence à droite, 56 à gauche, 56 classe à gauche, 56 conjugaison action par, 54 classe de, 54 conjugué, 54 Coxeter, H.S.M., 38 cryptographie RSA, 66 Dedekind, Julius Wilhelm Richard, 75 dense, 47 diédral, Dm , 52 Dirichlet, Johann, 140 ensemble H, 138 C, 138 Ñ, 138 de relations, 55 différence, 138 161
162 élément, 137 ensemble vide, 138 intersection, 140 N, 138 PpEq, 138 paire, 138 produit cartésien, 139 Q, 138 R, 138 réunion, 139 singleton, 138 sous-ensemble, 138 union, 139 union disjointe, 140 Z, 138 ensemble d’orbites, E{G, 50 ensemble quotient, G{H, 56 entiers de Gauss norme, 155 Zris, 155 espace homogène, 72 Euler, Leonhard, 66 Fermat, Pierre, 66 fixe, 51 fonction, 140 action à droite, 55 action à gauche, 55 bijection, 20 composition, 20 continue, 48 ensemble de, 20 identité, 20 inverse, 140 permutation, 20 surjective, 140 fonction d’Euler, 'pxq, 41 Frobenius, Ferdinand Georg, 61 générateur, 54
INDEX Galileo, Galilei, 49 Galois, Évariste, 11 Gauss, Carl Friedrich, 66 groupe, 16 monstre, 28 p-groupe, 123 abélien, 16 somme directe, 121 action, 50 alterné, An , 86 centre, ZpGq, 24 commutatif, 16 cyclique, 27, 103 indécomposable, 128 de Coxeter, 110 des automorphismes intérieur, IntpGq, 88 diédral, Dm , 52 endomorphisme, 83 fini, 27 formule de l’indice, 80 général linéaire, GLpV q, 21 général linéaire, GLn pRq, 16 générateurs, 25 groupe quotient, G{N , 98 hyperoctaédral, Bn , 118 indice d’un sous-groupe, 58 isomorphe, 84 libre, 101 monogène, 25, 103 morphisme de groupes, 83 notation additive, 18 notation multiplicative, 18 ordre, 27 ordre d’un élément, 27 orthogonal, Opnq, 41 primaire, 123 résoluble, 108 règles de calcul, 22 simple, 57 sous-groupe, 24
INDEX normal, 57 sous-groupe engendré, 25 sous-groupe propre, 24 spécial linéaire,SLn , 21 spécial orthogonal, SOpnq, 41 symétrique, 31 symétrique, SE et Sn , 20 table de multiplication, 21 topologique, 48 hériditaire, 16 Hamilton, William Rowan, 47 homéomorphisme, 48 homothéties, 52 hyperoctaédral groupe, 118 hyperoctaèdre, HOn , 118 idéal, 95 inclusion, 138 indécidable, 102 indice d’un sous-groupe, rG : Hs, 58 fini, 58 invariant, 51 involutions, 28 isomorphisme, 63 premier théorème d’, 99 jeu de taquin, 44 Jordan, Camille, 14 Klein, Felix, 21 Lagrange, Joseph Louis, 49 langage reconnaissable, 119 lettre, 46 libre, groupe, 101 Lie, Sophus, 21 loi de composition, 15 élément inversible, 16
163 élément neutre, 16 associative, 15 commutative, 15 sous-ensemble stable, 16 Lorentz, Hendrik, 14 Mobius, August Ferdinand, 74 monoïde, 16 libre, 46 monstre, 28 morphisme, 63 epimorphisme, 84 automorphisme, 87 intérieur, 88 isomorphisme, 84, 87 monomorphisme, 84 noyau, kerp✓q, 85 trivial, 83 mot, 46 longueur, 46 vide, 46 Newton, Sir Issac, 77 nombre addition, 18 complexe racines de l’unité, 104 multiplication, 19 normal, 57 sous-groupe, 57 normalisateur, N pHq, 54 Novikov, Petr, 102 opération élément inversible, 16 binaire, 15 inverse, 17 stable, 16 opère à gauche, 50 opposé d’un élément, 18
164 orbite disjointes, 51 partition, 51 orbite, Orbpxq, 50 partage notation µ $ n, 78 part, 78 partition orbites disjointes, 51 permutation circulaire, 34 cycle, 34 longueur, 34 paire, 86 signe, "p q, 33 transposition, 34 point fixe, fixg pEq, 61 Polya, George, 63 polynôme invariant, 77 présentation, 54 présentation de groupe, 102 générateurs, 101 relations, 102 problème du mot, 102 produit cartésien, 139 produit direct externe, G ˆ H, 114 inclusion, 114 interne, 116 decomposition, 116 facteurs, 116 projection, 114 propriété universelle, 115 produit direct, G ˆ H, 114 produit semi-direct externe, 117 interne, 117 K ¸' H, 117
INDEX quotient de groupes propriété universelle, 99 réflexion, 37 Redfield, John Howard, 63 relation, 54 représentation dimension, 90 représentation linéaire, 75 rotation, 52 Russell, Bertrand, 138 Schutzenberger, Marcel Paul, 45 simple, groupe, 57 sous-action, 51 sous-groupe de Sylow, 130 normal trivial, 57 normal, H G, 97 sous-groupes de Sn nombre de, 65 nombre de classes de conjugaison, 65 stabilisateur, Stabpxq, 51 stable, 51 Sylow, Ludwig, 129 théorème d’isomorphisme, 99 de Cayley, 89 de Lagrange, 58 de Sylow, 130 de Wilson, 81 topologie, 48 transformation de Möbius, 74 transitive, action, 50 translation du plan, 52 Wilson, John, 81 Young, Alfred, 46