L’Organisation mondiale de la Santé (OMS), créée en 1948, est une institution spécialisée du système des Nations Unies qui agit en tant qu’autorité directrice et coordinatrice pour toutes les questions internationales de santé et de santé publique. Elle est tenue par sa Constitution de fournir des informations et des avis objectifs et fiables dans le domaine de la santé humaine, fonction dont elle s’acquitte en partie grâce à son vaste programme de publications.
Dans ses publications, l’Organisation s’emploie à soutenir les stratégies sanitaires nationales et aborde les problèmes de santé publique les plus urgents dans le monde. Afin de répondre aux besoins de ses Etats Membres, quel que soit leur niveau de développement, l’OMS publie des manuels pratiques, des guides et du matériel de formation pour différentes catégories d’agents de santé, des lignes directrices et des normes applicables au niveau international, des bilans et analyses des politiques et programmes sanitaires et de la recherche en santé, ainsi que des rapports de consensus sur des thèmes d’actualité dans lesquels sont formulés des avis techniques et des recommandations à l’intention des décideurs. Ces ouvrages sont étroitement liés aux activités prioritaires de l’Organisation, à savoir la prévention et l’endiguement des maladies, la mise en place de systèmes de santé équitables fondés sur les soins de santé primaires et la promotion de la santé individuelle et collective. L’accession de tous à un meilleur état de santé implique l’échange et la diffusion d’informations tirées du fonds d’expérience et de connaissance de tous les Etats Membres ainsi que la collaboration des responsables mondiaux de la santé publique et des sciences biomédicales.
Pour qu’informations et avis autorisés en matière de santé soient connus le plus largement possible, l’OMS veille à ce que ses publications aient une diffusion internationale et elle encourage leur traduction et leur adaptation. En aidant à promouvoir et protéger la santé ainsi qu’à prévenir et à combattre les maladies dans le monde, les publications de l’OMS contribuent à la réalisation du but premier de l’Organisation – amener tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible.
Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation Sous la direction de Margie Peden, Richard Scurfield, David Sleet, Dinesh Mohan, Adnan A. Hyder, Eva Jarawan et Colin Mathers
Organisation mondiale de la Santé Genève 2004
Catalogage à la source : Bibliothèque de l’OMS Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation/sous la direction de Margie Peden …[et al.]. 1.Accident circulation – prévention et contrôle 2.Accident circulation - orientations 3.Sécurité 4.Facteur risque 5.Politique gouvernementale 6.Santé mondiale I.Peden, Margie. ISBN 92 4 256260 2
(Classification NLM: WA 275)
© Organisation mondiale de la Santé 2004 Tous droits réservés. Il est possible de se procurer les publications de l’Organisation mondiale de la Santé auprès de l’équipe Marketing et diffusion, Organisation mondiale de la Santé, 20 avenue Appia, 1211 Genève 27 (Suisse) (téléphone : +41 22 791 2476 ; télécopie : +41 22 791 4857 ; adresse électronique :
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Table des matières
Avant-propos Préface Contributions Remerciements Introduction Chapitre 1. Données fondamentales
vii ix xiii xvii xix 1
Introduction 3 Un problème de santé publique 5 Décès, incapacités et traumatismes dus aux accidents de la circulation 5 Le coût économique et social des traumatismes dus aux accidents de la circulation 7 Changer des perceptions fondamentales 7 Les traumatismes dus aux accidents de la circulation : prévisibles et évitables 8 La nécessité de bonnes données et d’une approche scientifique 8 La sécurité routière, question de santé publique 9 La sécurité routière, question d’équité sociale 11 Des systèmes qui tiennent compte de l’erreur humaine 11 Des systèmes qui tiennent compte de la fragilité du corps humain 12 Le transfert de technologies des pays à revenu élevé 13 Le nouveau modèle 13 Approche systémique 13 Renforcement des capacités institutionnelles 15 Arriver à de meilleurs résultats 20 Responsabilité partagée 21 Fixer des objectifs 23 Partenariats dans les secteurs public et privé 26 Conclusion 28 Références 28 Chapitre 2. Incidence mondiale Introduction Sources de données Ampleur du problème Estimations mondiales Répartition régionale Estimations par pays
33 35 35 35 35 36 37
iv • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
Tendances des traumatismes dus aux accidents de la circulation Tendances mondiales et régionales Tendances dans certains pays Projections et prévisions Motorisation, développement et traumatismes dus aux accidents de la circulation Profil des personnes touchées par les traumatismes dus aux accidents de la circulation Types d’usagers de la route Traumatismes dus à des accidents de la circulation liés au travail Age et sexe Situation socio-économique et lieu Autres incidences sur la santé et répercussions socio-économiques Incidences sur la santé et répercussions sociales Répercussions économiques Prévention des accidents de la circulation : données et faits Pourquoi recueillir des données et constituer des dossiers sur les traumatismes dus aux accidents de la circulation? Sources et types de données Couplage des données Analyse des données Questions et préoccupations relatives aux données Autres questions Limites des sources de données utilisées dans le présent chapitre Conclusion Références Chapitre 3. Facteurs de risque Introduction Facteurs influant sur l’exposition au risque Motorisation rapide Facteurs démographiques Planification des transports, de l’utilisation des sols et des réseaux routiers Nécessité accrue de se déplacer Choix de modes de déplacement moins sûrs Facteurs de risque influant sur les accidents Vitesse Piétons et cyclistes Jeunes conducteurs et motocyclistes Alcool Médicaments et drogues à usage récréatif Fatigue du conducteur Téléphones cellulaires Manque de visibilité Facteurs relatifs à la route Facteurs de risque liés aux véhicules Facteurs de risque influant sur la gravité des traumatismes
38 38 39 40 42 43 43 45 47 50 51 52 54 56 56 56 60 61 61 64 64 65 67 73 75 76 76 78 79 79 80 81 81 83 84 84 88 89 90 91 92 93 93
TABLE DES MATIÈRES • v
Manque de protection anti-collision intégrée au véhicule Défaut de port du casque par les utilisateurs de deux-roues motorisés Défaut de port de la ceinture et non-utilisation de sièges pour enfants dans les véhicules automobiles Objets en bord de route Facteurs de risque influant sur les suites des traumatismes après les accidents Facteurs préhospitaliers Facteurs relatifs aux soins hospitaliers Conclusion Références Chapitre 4. Interventions Un réseau routier conçu pour une utilisation sûre et durable Gérer l’exposition aux risques par des politiques des transports et de l’aménagement du territoire Réduire la circulation automobile Encourager l’utilisation de modes de déplacement plus sûrs Minimiser l’exposition à des situations à haut risque Penser le réseau routier dans l’optique de la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation Souci de la sécurité dans la planification des réseaux routiers Intégrer des dispositifs de sécurité dans la conception des routes Mesures correctives aux endroits très accidentogènes Proposer des véhicules « intelligents », visibles et assurant une protection en cas d’accident Rendre les véhicules plus visibles Véhicules conçus pour assurer une protection en cas d’accident Véhicules « intelligents » Arrêter les principales règles de sécurité routière et veiller à leur application Fixer des limites de vitesse et les faire respecter Adopter des lois sur la conduite en état d’ébriété et les appliquer Médicaments et drogues à usage récréatif Horaires des chauffeurs dans les transports en commun et les transports commerciaux Caméras aux feux de circulation Rendre obligatoire le port de la ceinture et l’utilisation des sièges pour enfants et veiller à l’application de cette règle Rendre obligatoire le port du casque et veiller à l’application de cette règle Le rôle de l’éducation, de l’information et de la publicité La prestation de soins après un accident Chaîne d’aide aux accidentés de la circulation Soins préhospitaliers Le cadre hospitalier Réadaptation Recherche Conclusion Références
94 96 96 99 99 100 100 101 102 113 115 115 116 117 118 120 120 121 125 126 126 132 132 135 135 137 140 140 141 141 145 147 148 148 149 150 152 152 153 154
vi • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
Chapitre 5. Conclusions et recommandations
167
Principaux messages du rapport Mesures recommandées Conclusion
169 173 177
Annexe statistique Glossaire Index
179 215 221
Photo: © Banque mondiale Photo Lab.
Photo: © OMS, P. VIROT
Avant-propos
Tous les jours, des milliers de personnes sont tuées ou blessées sur nos routes. Des hommes, des femmes ou des enfants qui marchent ou se déplacent à bicyclette ou à moto pour se rendre à l’école ou au travail, en encore qui jouent dans la rue ou qui font de longs voyages ne rentreront jamais chez eux et laisseront des familles et des communautés brisées. Tous les ans, des millions de personnes passeront de longues semaines à l’hôpital à cause de graves accidents et beaucoup ne pourront jamais vivre, travailler ou s’amuser comme avant. Les efforts déployés actuellement pour améliorer la sécurité routière sont minimes en comparaison de ces souffrances humaines croissantes. L’Organisation mondiale de la Santé et la Banque mondiale ont produit ensemble ce Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation. Il a pour objet de présenter un examen détaillé de ce que l’on connaît de l’ampleur, des facteurs de risque et des conséquences des accidents de la route, ainsi que des solutions pour prévenir ces accidents et en atténuer les répercussions. Le document est le fruit d’efforts concertés institutionnels et individuels. Sous la coordination de l’Organisation mondiale de la Santé et de la Banque mondiale, plus de cent spécialistes de tous les continents et de différents secteurs, dont les transports, le génie, la santé, la police, l’éducation et la société civile, ont collaboré à sa préparation. Les accidents de la circulation représentent un problème de santé publique croissant qui touche de façon disproportionnée des groupes d’usagers de la route vulnérables, y compris les pauvres. Plus de la moitié des personnes tuées dans des accidents de la circulation sont de jeunes adultes âgés de 15 à 44 ans, et il s’agit souvent de soutiens de famille. En outre, les accidents de la circulation coûtent aux pays à faible revenu et à revenu moyen de 1 % à 2 % de leur produit national brut, soit plus que la totalité de l’aide au développement qu’ils reçoivent. Cependant, il est possible de prévenir les accidents de la circulation et les blessures qui en résultent. Dans les pays à revenu élevé, un ensemble d’interventions classiques a permis de réduire sensiblement l’incidence et les conséquences des accidents de la circulation. Ainsi, les lois limitant la vitesse et la consommation d’alcool et rendant obligatoire le port de la ceinture et du casque sont appliquées et des mesures sont prises pour rendre la conception et l’utilisation des routes et des véhicules plus sûrs. La réduction du nombre des accidents de la circulation peut contribuer à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, qui visent à réduire de moitié l’extrême pauvreté et à faire reculer considérablement la mortalité infantile.
viii • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
La prévention des accidents de la circulation doit faire partie de tout un éventail d’activités plus général, comme le développement et la gestion de l’infrastructure routière, la conception de véhicules plus sûrs, un renforcement des lois, la planification de la mobilité, la prestation de services hospitaliers et de santé, les services de protection de l’enfance, et la planification urbaine et environnementale. Le secteur de la santé est un partenaire important dans ce processus. Il a pour rôle de renforcer la base de données probantes, de fournir des soins préhospitaliers, hospitaliers et de réadaptation appropriés, de défendre les patients et de contribuer à la mise en œuvre et à l’évaluation d’interventions. Le moment est venu d’agir. La sécurité routière n’est pas le fruit du hasard. Elle nécessite une ferme volonté politique et des efforts soutenus et concertés de la part de divers secteurs. En agissant maintenant, nous sauverons des vies. Nous demandons instamment aux gouvernements, et à d’autres secteurs de la société, d’adhérer aux principales recommandations du présent rapport et de les faire suivre d’effet. LEE Jong-wook Directeur général Organisation mondiale de la Santé
James D. Wolfensohn Président Groupe de la Banque mondiale
Préface
Plus de 3000 Kényans, âgés pour la plupart de 15 à 44 ans sont tués chaque année sur nos routes. Le coût de ces accidents pour notre économie dépasse les US $50 millions sans parler des pertes de vies humaines. Le Gouvernement kényan considère que les accidents de la circulation constituent un problème de santé publique majeur qui serait évitable par la prévention. En 2003, le nouveau Gouvernement de la National Alliance Rainbow Coalition a relevé le défi de la sécurité routière. Il a mis l’accent sur des mesures spécifiques visant à lutter contre le non-respect actuel de la réglementation routière et à rendre obligatoire l’installation de limitateurs de vitesse dans les véhicules du service public. Parallèlement à ces mesures, le Gouvernement a aussi lancé une campagne de sécurité routière de six mois et déclaré la guerre à la corruption, qui contribue directement et indirectement au niveau inacceptable des accidents de la route dans le pays. J’engage toutes les nations à mettre en œuvre les recommandations du Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation comme guide pour promouvoir la sécurité routière dans leurs pays. Muni de cet outil, j’ai l’intention pour ma part de bien travailler avec mes collègues des secteurs de la santé, des transports, de l’éducation et autres pour m’attaquer plus pleinement à ce problème de santé publique majeur.
Mwai Kibaki, Président de la République du Kenya
En 2004, la Journée mondiale de la Santé organisée par l’OMS sera consacrée, pour la première fois, à la sécurité routière. Chaque année, selon les statistiques connues, 1,2 million de personnes dans le monde trouvent la mort sur la route. Des millions d’autres sont atteintes, parfois pour la vie, dans leur chair. Cette hécatombe et cette somme de souffrances, qui frappent tout particulièrement les jeunes, n’épargnent aucun pays. Un patrimoine humain considérable se trouve ainsi anéanti, emportant aussi avec lui de très lourdes conséquences sociales et économiques. C’est dire combien la sécurité routière constitue aujourd’hui un enjeu majeur de santé publique, à l’échelle mondiale. L’inauguration officielle de cette journée aura lieu à Paris le 7 avril 2004. La France s’en trouve honorée. Elle y voit la reconnaissance des efforts importants de tous les Français qui se sont mobilisés afin d’enrayer l’insécurité et la violence routières à laquelle la France se trouve confrontée. Ces efforts ne portent leurs fruits que s’ils s’accompagnent d’une réelle volonté de refuser la fatalité, l’indifférence et la résignation qui entourent trop souvent les accidents de la route. La mobilisation de l’ensemble du Gouvernement français et des acteurs concernés, notamment des associations, a-t-elle permis, grâce à une politique déterminée de prévention et de contrôle, de faire reculer de 20 % le nombre de personnes tuées, qui est passé de 7242 en 2002 à 5732 en 2003. Si rien n’est encore acquis, un constat cependant s’impose : c’est bien par l’évolution des esprits et des mentalités que nous parviendrons, ensemble, à gagner ce combat collectif et individuel pour la vie.
Jacques Chirac, Président de la République française
x • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
Les morts et les blessés que font les accidents de la route représentent un problème de santé publique majeur et grandissant à l’échelle mondiale. Le Viet Nam n’est pas épargné. En 2002, le taux mondial de mortalité dû aux accidents de la circulation était de 19 pour 100 000 habitants ; dans notre pays, il atteignait 27 pour 100 000 habitants. Les accidents de la route font aujourd’hui cinq fois plus de morts qu’il y a dix ans. En 2003, un total de 20 774 accidents ont été enregistrés, faisant 12 864 morts et 20 704 blessés et coûtant des milliards de dông vietnamiens. Un des principaux facteurs contribuant à la multiplication des accidents de la route au Viet Nam est l’augmentation rapide du nombre des véhicules, et en particulier des motocyclettes, dont le parc s’accroît de 10 % chaque année. Près de la moitié des conducteurs de motocyclettes n’ont pas de permis et les trois quarts ne respectent pas les règles de la circulation. Par ailleurs, le développement des routes et autres infrastructures de transports n’a pas suivi la croissance économique rapide. Pour réduire le nombre de morts et de blessés, protéger les biens et contribuer à un développement durable, le Gouvernement du Viet Nam a créé en 1995 le Comité national de la sécurité routière. En 2001, il a lancé la politique nationale de prévention des accidents et traumatismes qui a pour objectif de ramener le nombre de morts par accident de la circulation à 9 pour 10 000 véhicules. Parmi les initiatives prises par le Gouvernement pour réduire les accidents de la route, de nouvelles règles de la circulation ont été adoptées et leur application a été renforcée. En 2003, le nombre d’accidents de la route a été réduit de 27,2 % par rapport à l’année précédente, et le nombre de morts et de blessés a baissé respectivement de 8,1 % et 34,8 %. Le Gouvernement du Viet Nam appliquera des mesures plus strictes pour réduire les accidents de la circulation par des campagnes de promotion de la santé, par un renforcement du système de surveillance et par la mobilisation des différents secteurs à tous les niveaux et par celle de la société tout entière. Le Gouvernement du Viet Nam accueille favorablement le Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation de l’OMS et de la Banque mondiale, et s’attachera à appliquer ses recommandations dans toute la mesure possible.
Son Excellence M. Phan Van Khai, Premier Ministre de la République socialiste du Viet Nam
PRÉFACE • xi
En Thaïlande, les accidents de la route sont considérés comme l’un des trois principaux problèmes de santé publique du pays. Bien que le Gouvernement fasse tous ses efforts pour y remédier, on déplore chaque année plus de 13 000 tués et plus d’un million de blessés dans des accidents de la circulation, qui laissent plusieurs centaines de milliers de personnes handicapées. La grande majorité des tués et des blessés sont des motocyclistes, des cyclistes et des piétons. Le Gouvernement royal thaïlandais considère ce problème comme très urgent et en a fait une des priorités de son programme national. Nous sommes aussi conscients du fait qu’une prévention efficace et durable ne peut être mise en place que par une collaboration multisectorielle concertée. Pour s’attaquer à ce problème crucial, le Gouvernement a créé le Road Safety Operations Centre qui regroupe les différents secteurs du pays et les organismes gouvernementaux concernés ainsi que des représentants des organisations non gouvernementales et de la société civile. Ce Centre a lancé de nombreuses initiatives de prévention des accidents, y compris une campagne « Pas d’alcool au volant » ainsi qu’une campagne pour inciter les motocyclistes à porter des casques de sécurité et à conduire prudemment. A cet égard, nous sommes conscients du fait que de telles campagnes doivent comprendre non seulement un effort d’éducation et de relations publiques, mais aussi des mesures strictes pour faire appliquer la loi. Le problème des accidents de la circulation est assurément un problème très grave, mais c’est aussi un problème que l’on peut prévenir et auquel on peut s’attaquer par une action concertée de toutes les parties concernées. Nous avons bon espoir que, sous l’impulsion du Gouvernement et grâce à sa ferme détermination, nous réussirons dans nos efforts et nous espérons que d’autres rencontreront le même succès.
Thaksin Shinawatra, Premier Ministre de Thaïlande
Nous nous réjouissons que le Sultanat d’Oman ait contribué, avec d’autres pays, à porter la question de la sécurité routière devant l’Assemblée générale des Nations Unies et joué un rôle majeur dans la sensibilisation, à l’échelle mondiale, au problème de l’incidence croissante des accidents mortels de la circulation, en particulier dans les pays en développement. L’ampleur de ce problème a non seulement encouragé l’Assemblée générale des Nations Unies à adopter une résolution spéciale sur le sujet (N° 58/9), mais a aussi poussé l’Organisation mondiale de la Santé à proclamer l’année 2004 année de la sécurité routière. En prenant ces deux mesures importantes, les deux Organisations ont lancé le combat mondial contre les traumatismes causés par les accidents de la circulation, et nous espérons que tous les secteurs de notre société uniront leurs efforts pour atteindre ce noble objectif humanitaire. Le Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation est véritablement une lecture incontournable. Nous félicitons l’Organisation mondiale de la Santé et la Banque mondiale pour cette magnifique réalisation.
Qaboos bin Said, Sultan d’Oman
xii • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
Les systèmes de transports terrestres sont devenus une des composantes fondamentales du monde moderne. En accélérant les communications et la circulation des marchandises et des personnes, ils ont créé une révolution dans les relations économiques et sociales contemporaines. Toutefois, l’introduction des nouvelles technologies n’a pas été sans conséquences : la pollution de l’environnement, le stress urbain et la dégradation de la qualité de l’air sont directement liés aux systèmes modernes de transports terrestres. Mais surtout, ces transports sont de plus en plus à l’origine d’accidents de la circulation qui entraînent un nombre croissant de décès prématurés et de handicaps physiques et psychologiques. Les pertes subies ne se limitent pas à la réduction de productivité et aux traumatismes qui retentissent sur la vie privée des victimes. L’augmentation des coûts des services de santé et la charge accrue pesant sur les finances publiques posent également des problèmes très importants. Dans les pays en développement, la situation est encore aggravée par l’urbanisation rapide et non planifiée. Le manque d’infrastructures adéquates dans nos villes, ainsi que l’absence d’un cadre réglementaire approprié rendent la croissance exponentielle du nombre d’accidents de la circulation encore plus préoccupante. Les statistiques montrent qu’au Brésil, 30 000 personnes meurent chaque année dans des accidents de la route : 44 % d’entre elles sont âgées de 20 à 39 ans, et 82 % sont des hommes. Comme les autres pays d’Amérique latine, le Brésil prend de plus en plus conscience de la nécessité urgente d’inverser cette tendance. Le Gouvernement brésilien, par l’intermédiaire du Ministère de la Ville, a déployé des efforts considérables pour mettre au point et appliquer des mesures de sécurité routière et lancer des campagnes d’éducation et des programmes mettant l’accent sur la participation des citoyens. Dans le cadre de cette action, le Brésil a récemment adopté un nouveau code de la route qui a permis de faire baisser le nombre annuel de tués sur la route d’environ 5000. C’est là un progrès encourageant qui devrait nous inciter à aller encore plus loin dans cette voie. Les défis à relever sont énormes, mais nous ne devons pas nous dérober. C’est pourquoi la sécurité routière restera une priorité pour mon Gouvernement. La publication de ce rapport arrive donc à point nommé. Les données et les analyses qu’il présente fourniront un matériel très utile pour engager un débat systématique et approfondi sur un problème qui touche à la santé de tous. Mais, ce qui est plus important encore, c’est que ce rapport viendra renforcer notre conviction que des mesures préventives adéquates peuvent avoir des effets spectaculaires. La décision de consacrer la Journée mondiale de la Santé 2004 à la sécurité routière montre la détermination de la communauté internationale à assurer que les moyens modernes de transports terrestres deviennent de plus en plus une force au service du développement et du bien-être de nos populations.
Luis Inácio Lula da Silva, Président de la République fédérative du Brésil
Contributions
Conseils en matière de rédaction Comité de rédaction Margie Peden, Richard Scurfield, David Sleet, Dinesh Mohan, Adnan A. Hyder, Eva Jarawan et Colin Mathers. Directrice générale Margie Peden. Comité consulatif Eric Bernes, Suzanne Binder, John Flora, Etienne Krug, Maryvonne Plessis-Fraissard, Jeffrey Runge, David Silcock, Eduardo Vasconcellos et David Ward.
Contributions aux différents chapitres Chapitre 1. Données fondamentales Président du Comité technique : Ian Johnston. Membres du Comité technique : Julie Abraham, Meleckidzedeck Khayesi, Vinand Nantulya et Claes Tingvall. Rédactrices : Jeanne Breen avec la contribution de Angela Seay. Encadrés : Brian White (encadré 1.1), Hugo Acero (encadré 1.2), Adnan A. Hyder (encadré 1.3), Claes Tingvall (encadré 1.4) et Jeanne Breen (encadré 1.5). Chapitre 2. Incidence mondiale Président du Comité technique : Robyn Norton. Membres du Comité technique : Abdulbari Bener, Maureen Cropper, Gopalkrishna Gururaj, El-Sayed Hesham, Goff Jacobs, Kara McGee, Chamaiparn Santikarn et Wang Zheng-gu. Rédacteurs : Angela Seay avec la contribution de Andrew Downing, Meleckidzedeck Khayesi, Kara McGee et Margie Peden. Encadrés : Vinand Nantulya et Michael Reich (encadré 2.1), David Sleet (encadré 2.2), Ian Scott (encadré 2.3), Liisa Hakamies-Blomqvist (encadré 2.4), Chamaiparn Santikarn (encadré 2.5), Lasse Hantula, Pekka Sulander et Veli-Pekka Kallberg (encadré 2.6). Chapitre 3. Facteurs de risque Président du Comité technique : Murray MacKay. Membres du Comité technique : Peter Elsenaar, Abdul Ghaffar, Martha Hijar, Veli-Pekka Kallberg, Michael Linnan, Wilson Odero, Mark Stevenson et Elaine Wodzin. Rédactrice : Jeanne Breen. Encadrés : Joelle Sleiman (encadré 3.1), Anesh Sukhai et Ashley van Niekerk (encadré 3.2).
xiv • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
Chapitre 4. Interventions Président du Comité technique : Ian Roberts. Membres du Comité technique : Anthony Bliss, Jeanne Breen, Marcel Haegi, Todd Litman, Jack McLean, Ted Miller, Charles Mock, Nicole Muhlrad, Francesca Racioppi, Ralf Risser, Geetam Tiwari, Radin Umar, Maria Vegega et Dean Wilkerson. Rédacteurs : Jeanne Breen avec la contribution de David Sleet et Angela Seay. Encadrés : Ruth Shults, Dorothy Begg, Daniel Mayhew et Herb Simpson (encadré 4.1), Jeanne Breen (encadré 4.2), Frances Afukaar (encadré 4.3), Jeanne Breen (encadré 4.4), Mark Stevenson (encadré 4.5) et Olivier Duperrex (encadré 4.6). Chapitre 5. Conclusions et recommandations Président du Comité technique : Fred Wegman. Membres du Comité technique : Andrew Downing, Ben Eijbergen, Frank Haight, Olive Kobusingye, Brian O’Neill, Ian Scott, David Silcock, Rochelle Sobel, Eduardo Vazquez-Vela, Rick Waxweiler. Rédactrice : Margie Peden. Encadrés : Ian Roberts (encadré 5.1) et Roy Antonio Rojas Vargas (encadré 5.2). Annexe statistique Maureen Cropper, Kara McGee, Amy Li, Elizabeth Kopits, Margie Peden et Niels Tomijima.
Collègues réviseurs Julie Abraham, Frances Afukaar, Noble Appiah, David Bishai, Christine Branche, Walter Buylaert, Witaya Chadbunchachai, Ann Dellinger, Jane Dion, Claude Dussault, Rune Elvik, Brendan Halleman, Alejandro Herrera, Ivan Hodac, Hans van Holst, Regina Karega, Arthur Kellermann, Martin Koubek, Jess Kraus, Larry Lonero, Mary McKay, Kate McMahon, Rose McMurray, Isabelle Mélèse, Heiner Monheim, Frederick Nafukho, Krishnan Rajam, Elihu Richter, Mark Rosenberg, Mathew Varghese, Maria Vegega, Philip Wambugu, Rick Waxweiler, Geert Wets, Moira Winslow, Paul White, John Whitelegg et Ingrida Zurlyte.
Autres contributions Adielah Anderson, Abdulbari Bener, Anthony Bliss, Witaya Chadbunchachai, Carlos Dora, Marcel Dubouloz, Nelmarie du Toit, Randy Elder, Bill Frith, Sue Goldstein, Philip Graitcer, Marcel Haegi, Narelle Haworth, Christina Inclan, Arthur Kellerman, Rajam Krishnan, Risto Kumala, Larry Lonero, Stein Lundebye, Rick Martinez, Margaret McIntyre, Frederico Montero, Jim Nichols, Stephanie Pratt, Junaid Razzak, Donald Redelmeier, Richard Sattin, Ruth Shults, Rochelle Sobel, Grant Strachan, Leif Svanstrom, Tamitza Toroyan, Sebastian Van As, Hugh Waters et Wu Yuan.
Consultants dans les Régions de l’OMS Région africaine / Région de la Méditerranée orientale Abdallah Assaedi, Hussain Abouzaid, Sussan Bassiri, Abdhulbari Bener, Abdul Ghaffar, Mehdi Ghoya, Alaa Hamed, El-Sayed Hesham, Syed Jaffar Hussain, Mojahed Jameel, Tsegazeab Kebede, Meleckidzedeck Khayesi, Olive Kobusingye, Charlotte Ndiaye, Wilson Odero, Ian Roberts et Emmanuel Yoro Gouali. Région des Amériques Julie Abraham, Anthony Bliss, Bryna Brennan, Alberto Concha-Eastman, Martha Hijar, Eva Jarawan, Larry Lonero, Kara McGee, Margie Peden, Deysi Rodriguez, Roy Antonio Rojas Vargas, Mark Rosenberg, Angela Seay, Richard Scurfield, Anamaria Testa Tambellini, Maria Vegega, Elisabeth Ward et Rick Waxweiler.
CONTRIBUTIONS • xv
Région de l’Asie du Sud-Est / Région du Pacifique occidental Shanthi Ameratunga, Anthony Bliss, Li Dan, Sitaleki Finau, Gopalakrishna Gururaj, Ian Johnston, Rajam Krishnan, Robyn Norton, Munkdorjiin Otgon, Margie Peden, Chamaiparn Santikarn, Ian Scott, Gyanendra Sharma, Mark Stevenson et Madan Upadhyaya. Région européenne Anthony Bliss, Piero Borgia, Jeanne Breen, Andrew Downing, Brigitte Lantz, Lucianne Licari, Margie Peden, Francesca Racioppi, Ian Roberts, Angela Seay, Laura Sminkey, Agis Tsouros, Jaroslav Volf et Ingrida Zurlyte.
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Remerciements
L’Organisation mondiale de la Santé et la Banque mondiale souhaitent remercier les membres des comités, les personnes qui ont participé aux consultations régionales et aux examens par les pairs, les conseillers et les consultants de plus de 40 pays dont le dévouement, le soutien et les compétences ont rendu le présent rapport possible. L’Organisation mondiale de la Santé, la Banque mondiale et le Comité de rédaction souhaitent rendre un hommage particulier à Patricia Waller, disparue le 15 août 2003. Elle faisait partie du comité technique pour le chapitre 1, mais la maladie l’a malheureusement empêchée de participer à ses travaux. Nous saluons ses nombreuses contributions à la promotion de la sécurité routière dans le contexte de la santé publique. Elle était pour beaucoup une amie et un mentor. Le rapport a également bénéficié des contributions de plusieurs autres personnes. Nous remercions en particulier Jeanne Breen et Angela Seay d’avoir rédigé le rapport dans des délais très serrés, Tony Kahane de s’être occupé de la révision stylistique du texte final, Stuart Adams d’avoir écrit le résumé et David Breuer de l’avoir revu. Nous remercions aussi les personnes suivantes : Caroline Allsopp et Marie Fitzsimmons, pour leur précieuse assistance à la rédaction ; Anthony Bliss, pour son soutien technique sur les questions de transport ; Meleckidzedeck Khayesi et Tamitza Toroyan, pour leur aide dans la gestion et la coordination quotidienne du projet ; Kara McGee et Niels Tomijima pour l’assistance statistique ; Susan Kaplan et Ann Morgan, pour la correction des épreuves ; Tushita Bosonet et Sue Hobbs, pour la conception et la présentation graphiques ; Liza Furnival, pour l’indexation ; Keith Wynn, pour la production ; Desiree Kogevinas, Laura Sminkey et Sabine van Tuyll van Serooskerken, pour les communications ; Wouter Nachtergaele pour son aide en ce qui concerne les références ; Kevin Nantulya, pour l’aide à la recherche ; Anita Portier, pour la traduction du rapport intégral en français; et Simone Colairo, Pascale Lanvers-Casasola, Angela SwetloffCoff, pour le soutien administratif. L’Organisation mondiale de la Santé souhaite également remercier les organismes suivants de leur généreux concours financier à la préparation et à la publication du rapport : le Programme du Golfe arabe pour les organisations de développement des Nations Unies (AGFUND); la Fondation FIA ; le gouvernement flamand ; le Global Forum for Health Research ; l’Agence suédoise de développement international ; la Direction de la sécurité routière du ministère des Transports du Royaume-Uni ; la National Highway Traffic Safety Administration et les Centers for Disease Control and Prevention des Etats-Unis d’Amérique.
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Introduction
Les accidents de la circulation constituent un problème de santé et une crise de développement majeurs, et leur nombre devrait augmenter, si les Etats Membres ne s’attaquent pas véritablement à la question de la sécurité routière. Ce dossier préoccupe l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) depuis plus de quatre décennies. Dès 1962, un rapport de l’OMS parlait de la nature et de la dynamique du problème (1). En 1974, l’Assemblée mondiale de la Santé a adopté la résolution WHA27.59 déclarant que les accidents de la route constituent un problème de santé publique et appelant les Etats Membres à réagir (2). Depuis deux décennies, la Banque mondiale encourage ses emprunteurs à inclure des éléments relatifs à la sécurité routière dans la plupart de leurs projets de route et de transports urbains. Ces trois dernières années, les deux organisations ont intensifié leurs travaux sur la prévention des accidents de la circulation. C’est ainsi que l’OMS a créé, en mars 2000, le Département de la prévention de la violence et des traumatismes, qu’elle a élaboré et mis en œuvre une stratégie quinquennale pour la prévention des accidents de la circulation, et qu’une aide financière et humaine plus importante a été apportée à des activités de prévention des accidents de la circulation dans le monde (3). Dernièrement, l’OMS a décidé de consacrer la Journée mondiale de la Santé de 2004 à la sécurité routière. Au sein de la Banque mondiale, un groupe de travail interdisciplinaire a été constitué afin de s’assurer que ce dossier important soit considéré comme une question de santé publique majeure traitée conjointement par des spécialistes des transports et de la santé publique. Parmi les autres organisations internationales, la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe, le Fonds de développement des Nations Unies et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance ont tous augmenté leurs activités relatives à la sécurité routière ces dix dernières années. Début 2003, les Nations Unies ont adopté une résolution (A/RES/57/309) sur la crise mondiale de la sécurité routière (4), qui a été suivie par un rapport du Secrétaire général sur le même sujet présenté à la 58e Session de l’Assemblée générale des Nations Unies, plus tard la même année (5). En novembre 2003, les Nations Unies ont adopté une autre résolution (A/RES/58/9) demandant que l’Assemblée générale des Nations Unies se réunisse en séance plénière le 14 avril 2004. Cette réunion plénière viserait à sensibiliser davantage à l’ampleur du problème des accidents de la route avec blessures et à examiner la mise en œuvre du Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation à l’Assemblée générale des Nations Unies (6). Ce rapport conjoint de l’OMS et de la Banque mondiale sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation représente un élément important de la réponse à la crise mondiale de la sécurité routière. Il est destiné aux décideurs régionaux, nationaux et internationaux, aux organismes internationaux et aux professionnels clés des secteurs de la santé publique, des transports, du génie et de l’éducation, entre autres, et il vise à inciter à agir pour la sécurité routière. Il énonce des principes universels plus qu’un « plan d’action » mondial, car ses auteurs savent pertinemment qu’il faut définir les besoins locaux et adapter les « meilleures pratiques » en conséquence. Un résumé du rapport est également disponible sur http://www.who.int/violence_injury_prevention.
Objectifs du rapport Le présent rapport a pour thème central le fardeau des accidents de la circulation et le besoin urgent pour les gouvernements et les autres acteurs clés de redoubler d’efforts pour prévenir ces accidents.
xx • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
Il a pour objectif : — de sensibiliser davantage à l’ampleur, aux facteurs de risque et aux conséquences des accidents de la circulation à l’échelle mondiale ; — d’attirer l’attention sur le fait qu’il existe des mesures préventives face à ce problème et de faire connaître les stratégies d’intervention actuelles connues ; et — de demander une approche coordonnée de tout un éventail de secteurs face au problème. Le rapport vise plus particulièrement à : — décrire le fardeau, l’intensité, le schéma et les conséquences des accidents de la circulation à l’échelle régionale, nationale et mondiale ; — examiner les principaux déterminants et facteurs de risque ; — analyser les interventions et les stratégies possibles face au problème ; — recommander des mesures à l’échelle locale, nationale et internationale. À partir de ces objectifs, le rapport se divise en cinq chapitres décrits ci-dessous. Données fondamentales Le chapitre 1 explique comment l’approche de la sécurité routière s’est développée au fil des années. Il explique aussi que la forte hausse des accidents de la circulation entraînant des blessures prévue à l’échelle mondiale pour les deux prochaines décennies n’est pas inévitable, si les mesures voulues sont prises. Une approche multisectorielle et systématique est ensuite préconisée en matière de prévention et d’atténuation. Incidence mondiale Au chapitre 2 sont exposées les caractéristiques et l’ampleur du problème des traumatismes dus aux accidents de la circulation pour différents usagers de la route. La question clé de la collecte des données est examinée, ainsi que l’incidence des accidents de la route sur les personnes, les familles et la société en général. Facteurs de risque Le chapitre 3 décrit les principaux facteurs de risque et déterminants des accidents de la circulation et des blessures qui en résultent. Interventions Le chapitre 4 examine des interventions possibles et analyse leur efficacité, leur coût et leur acceptabilité par le public, lorsqu’il existe des données à ce sujet. Conclusions et recommandations Le dernier chapitre tire des conclusions et présente les principales recommandations du rapport pour tous ceux qui sont concernés par la sécurité des réseaux routiers.
Préparation du rapport Plus de cent spécialistes internationaux appartenant aux secteurs de la santé, des transports, de l’ingénierie, de la police et de l’éducation, entre autres, ainsi qu’au secteur privé et à des organisations non gouvernementales ont participé à la préparation du présent rapport. Un petit comité de rédaction a coordonné ce processus. Un comité technique composé d’experts du monde entier a dressé les grandes lignes de chaque chapitre. Les deux principaux rédacteurs ont écrit les différents chapitres du rapport, après quoi un réviseur en a affiné le style. Un comité consultatif a conseillé le comité de rédaction aux différentes étapes de la production du rapport.
INTRODUCTION • xxi
Une série de consultations a été organisée avec des spécialistes et des représentants des pouvoirs publics locaux dans les bureaux régionaux de l’OMS afin d’examiner les grandes lignes des chapitres et de recueillir des suggestions pour les principales recommandations du rapport. Au cours d’une réunion au siège de l’OMS à Genève, le comité technique a approfondi le fruit des consultations régionales relatives au chapitre 5, qui est le chapitre des recommandations. Avant la révision stylistique, tous les chapitres ont été soumis à l’examen impartial de scientifiques et d’experts du monde entier. Il leur a été demandé de commenter non seulement le contenu scientifique, mais aussi la pertinence de chaque chapitre par rapport à leur propre culture.
Que se passera-t-il après le rapport ? Nous espérons que le lancement du présent rapport marquera le commencement d’un long processus d’amélioration de la sécurité routière. Pour être efficace, le rapport doit encourager le débat à l’échelle locale, nationale et internationale, et les recommandations formulées doivent inciter à renforcer considérablement les mesures de prévention des accidents de la circulation dans le monde.
Références 1. Norman LG. Road traffic accidents: epidemiology, control, and prevention. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 1962. 2. Résolution WHA27.59. Prévention des accidents de la circulation routière. Vingt-septième Assemblée mondiale de la Santé, Genève, 7–23 mai 1974. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 1974. (http://www.who.int/ violence_injury_prevention/media/en/172.pdf, consulté le 17 novembre 2003). 3. Peden M et al. Stratégie quinquennale de l’OMS pour la prévention des accidents de la circulation. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2001 (http://www.who.int/world-health-day/2004/en/final_strat_fr.pdf, consulté le 30 octobre 2003). 4. Résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies 57/309 sur la crise mondiale de la sécurité routière (22 mai 2003). New York (NY), Nations Unies (http://www.unece.org/trans/roadsafe/docs/GA_R_57-309f.pdf, consulté le 30 octobre 2003). 5. Assemblée générale des Nations Unies. Rapport du Secrétaire général sur la crise mondiale de la sécurité routière (7 août 2003). New York (NY), Nations Unies (A/58/228) (http://www.who.int/world-health-day/2004/ infomaterials/en/un_fr.pdf, consulté le 30 octobre 2003). 6. Résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies A/RES/58/9 sur la crise mondiale de la sécurité routière (19 novembre 2003). New York, NY (Etats-Unis d’Amériques), Nations Unies (http://ods-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/ N03/453/45/PDF/N0345345.pdf?OpenElement, consulté le 30 décembre 2003).
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CHAPITRE 1
Données fondamentales
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CHAPITRE 1. DONNÉES FONDAMENTALES • 3
Introduction Les traumatismes dus aux accidents de la circulation constituent un problème de santé publique mondiale majeur mais négligé dont la prévention efficace et durable passe par des efforts concertés. De tous les systèmes auxquels les gens ont affaire quotidiennement, celui des transports routiers est le plus complexe et le plus dangereux. On estime à près de 1,2 million le nombre de personnes qui meurent chaque année dans des accidents de la circulation dans le monde, et les blessés pourraient être au nombre de 50 millions, soit la population combinée de cinq des plus grandes villes de la planète. La tragédie que masquent ces chiffres retient moins souvent l’attention des médias que d’autres types de tragédies, moins fréquentes mais plus inhabituelles. Le pire, c’est que sans des efforts redoublés et de nouvelles initiatives, le nombre total des décès mondiaux et des traumatismes imputables à la circulation routière devrait augmenter de quelque 65 % entre 2000 et 2020 (1, 2) et de 80 % dans les pays à faible revenu et à revenu moyen. La majorité de ces décès touchent actuellement des « usagers de la route vulnérables » – piétons, cyclistes et motocyclistes. Dans ces derniers, les décès parmi les occupants des voitures continuent de prédominer, mais les risques par habitant auxquels sont confrontés les usagers de la route vulnérables sont importants. Le présent rapport, qui est le premier rapport important sur la prévention des accidents de la circulation publié conjointement par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et la Banque mondiale, montre combien les deux organismes sont préoccupés par l’effet préjudiciable de réseaux de transport routier peu sûrs sur la santé publique et sur le développement mondial. Le rapport affirme, premièrement, que le niveau de décès et de traumatismes imputables à la route est inacceptable et, deuxièmement, qu’il est dans une large mesure évitable. Il est donc urgent de reconnaître que la situation s’aggrave sur les routes et de prendre les mesures qui s’imposent. La prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation et leur atténuation
devraient recevoir la même attention et les mêmes ressources proportionnellement que d’autres problèmes de santé importants, si l’on veut éviter les pertes en vie humaine et les traumatismes de la route, ainsi que leurs répercussions dévastatrices sur le plan humain et le coût économique énorme pour la société. Le rapport a trois grands objectifs : • Sensibiliser davantage et amener à renforcer les engagements et à prendre des décisions plus informées à tous les niveaux – y compris dans les gouvernements, les secteurs professionnels et les organismes internationaux –, afin que des stratégies de prévention des traumatismes dus aux accidents de la route scientifiquement éprouvées puissent être mises en œuvre. Toute réponse efficace au défi mondial de la réduction du nombre des victimes de la circulation passera nécessairement par une large mobilisation de tous ceux qui sont concernés à l’échelle locale, nationale et internationale. • Justifier valablement le changement d’optique qui s’opère depuis quelques années, tout particulièrement lorsque des recherches approfondies ont été entreprises sur la nature du problème des traumatismes dus aux accidents de la circulation et sur ce qui constitue une bonne prévention. L’idée est que le tribut à payer à la mobilité et au développement économique doit être remplacé par une vision plus globale où l’on met l’accent sur la totalité du système circulation routière. • Aider à renforcer les institutions et à former de réels partenariats afin de rendre les systèmes routiers plus sûrs. Ces partenariats devraient exister horizontalement entre différents secteurs administratifs et verticalement entre différents paliers de gouvernement, de même qu’entre les pouvoirs publics et les organisations non gouvernementales. Au niveau administratif, cela signifie établir une étroite collaboration entre les secteurs des transports, de la santé publique, des finances, de la justice et d’autres encore qui sont concernés. Le rapport vise donc principalement les décideurs et les spécialistes clés de tous les secteurs et
4 • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
à tous les niveaux, l’objectif étant de proposer un cadre d’action stratégique. Des principes universels, plutôt qu’un plan d’action d’application mondiale, sont énoncés. La raison en est qu’il faut toujours
tenir compte de la situation locale, afin que des pratiques exemplaires éprouvées ailleurs puissent être affinées et adaptées pour des interventions locales à la fois pertinentes et fructueuses.
TABLEAU 1.1
Principales causes de mortalité dans le monde par groupe d’âge, 2002 Rang
0−4 ans
5−14 ans
15−29 ans
30−44 ans
45−59 ans
*60 ans
Tous âges
1
Infections des voies respiratoires inférieures 1 890 008
Maladies infantiles 219 434
VIH/SIDA 707 277
VIH/SIDA 1 178 856
Cardiopathie ischémique 1 043 978
Cardiopathie ischémique 5 812 863
Cardiopathie ischémique 7 153 056
2
Maladies diarrhéiques 1 577 891
Accidents de la circulation 130 835
Accidents de la circulation 302 208
Tuberculose 390 004
Maladies céré brovasculaires 623 099
Maladies céré brovasculaires 4 685 722
Maladies céré brovasculaires 5 489 591
3
Insuffisance pondérale à la naissance 1 149 168
Infections des voies respiratoires inférieures 127 782
Traumatismes auto-infligés 251 806
Accidents de la circulation 285 457
Tuberculose 400 704
Bronchopneumopathie obstructive chronique 2 396 739
Infections des voies respiratoires inférieures 3 764 415
4
Paludisme 1 098 446
VIH/SIDA 108 090
Tuberculose 245 818
Cardiopathie ischémique 231 340
VIH/SIDA 390 267
Infections des voies respiratoires inférieures 1 395 611
VIH/SIDA 2 818 762
5
Maladies infantiles 1 046 177
Noyade 86 327
Violence interpersonnelle 216 169
Traumatismes auto-infligés 230 490
Bronchopneumopathie obstructive chronique 309 726
Cancers de la trachée, des bronches et des poumons 927 889
Bronchopneumopathie obstructive chronique 2 743 509
6
Asphyxie et traumatisme à la naissance 729 066
Paludisme 76 257
Infections des voies respiratoires inférieures 92 522
Violence interpersonnelle 165 796
Cancers de la trachée, des bronches et des poumons 261 860
Diabète sucré 749 977
Maladies diarrhéiques 1 766 447
7
VIH/SIDA 370 706
Maladies tropicales 35 454
Incendies 90 845
Maladies céré brovasculaires 124 417
Cirrhose du foie 250 208
Cardiopathie hypertensive 732 262
Maladies infantiles 1 359 548
8
Cardiopathie congénitale 223 569
Incendies 33 046
Noyade 87 499
Cirrhose du foie 100 101
Accidents de la circulation 221 776
Cancer de l’estomac 605 395
Tuberculose 1 605 063
9
Malnutrition protéinoénergétique 138 197
Tuberculose 32 762
Guerre 71 680
Infections des voies respiratoires inférieures 98 232
Traumatismes auto-infligés 189 215
Tuberculose 495 199
Cancers de la trachée, des bronches et des poumons 1 238 417
10
MST à l’exclusion du VIH 67 871
Malnutrition protéinoénergétique 30 763
Troubles hypertensifs 61 711
Empoisonnements 81 930
Cancer de l’estomac 185 188
Cancer du côlon et du rectum 476 902
Paludisme 1 221 432
11
Méningite 64 255
Méningite 30 694
Hémorragie maternelle 56 233
Incendies 67 511
Cancer du foie 180 117
Néphrite et néphrose 440 708
Accidents de la circulation 1 183 492
12
Noyade 57 287
Leucémie 21 097
Cardiopathie ischémique 53 870
Hémorragie maternelle 63 191
Diabète sucré 175 423
Maladie d’Alzheimer et autres démences 382 339
Insuffisance pondérale à la naissance 1 149 172
13
Accidents de la circulation 49 736
Chutes 20 084
Empoisonnements 52 956
Guerre 61 018
Infections des voies respiratoires inférieures 160 259
Cancer du foie 367 503
Diabète sucré 982 175
14
Troubles endocriniens 42 619
Violence 18 551
Maladies infantiles 48 101
Noyade 56 744
Cancer du sein 147 489
Cirrhose du foie 366 417
Cardiopathie hypertensive 903 612
15
Tuberculose 40 574
Empoisonnements 18 529
Avortements 43 782
Cancer du foie 55 486
Cardiopathie hypertensive 129 634
Cancer de l’œsophage 318 112
Traumatismes auto-infligés 874 955
Source : Première version du projet de l’OMS sur le fardeau mondial des maladies pour 2002 (voir Annexe statistique).
CHAPITRE 1. DONNÉES FONDAMENTALES • 5
Un problème de santé publique
utilisateurs de deux-roues motorisés et des occupants d’autobus et de minibus (7, 8). En revanche, dans la Décès, incapacités et traumatismes plupart des pays à revenu élevé, la majorité des victidus aux accidents de la circulation mes se trouvent parmi les occupants de véhicules. Chaque jour dans le monde, près de 16 000 personCependant, si l’on prend les taux de létalité comnes meurent des suites de traumatismes. Ceux-ci paratifs (décès consécutifs à tout type d’exposition) représentent 12 % du fardeau mondial des maladies pour tous les usagers du réseau de circulation, ces ainsi que la troisième cause de mortalité générale différences régionales disparaissent. Presque paret la principale cause de décès dans le groupe d’âge tout, le risque de mourir dans un accident de la route des 1 à 40 ans (3). A l’échelle mondiale, la catégorie est bien plus grand pour les usagers de la route vuldes traumatismes est dominée par ceux subis dans nérables – piétons, cyclistes et motocyclistes – que des accidents de la route. D’après les données de pour les occupants des véhicules (8, 9). l’OMS, les décès consécutifs à ces accidents repréLe bilan de la route ne représente que la sentent à peu près 25 % des décès intervenant à la « pointe de l’iceberg » du gaspillage total en suite de traumatismes (4). ressources humaines et sociales qu’entraînent En raison des limites de la collecte et de l’analyse les accidents de la circulation. L’OMS estime que, des données relatives aux traumatismes, de problèmes dans le monde, entre 20 millions et 50 millions de sous-déclaration et de différences d’interprétation, de personnes sont blessées ou handicapées chaque les estimations du nombre annuel des décès imputaannée dans ces accidents, cette marge importante bles à la route varient. Les chiffres vont de 750 000 (5) tenant à la sous-déclaration considérable et conenviron, ce qui est probablement une sous-estimanue du nombre de victimes (10). tion, étant donné que le calcul repose sur des données En utilisant des données épidémiologiques de 1998, à 1 183 492 par an, ce qui équivaut à plus de tirées d’études nationales, on peut arriver à une 3 000 vies perdues par jour (voir Annexe statistique, estimation prudente de la proportion des décès, tableau A.2). des traumatismes nécessitant des soins hospitaliers Environ 85 % des décès imputables à la route, et des blessures légères, à savoir 1:15:70 dans la 90 % des années de vie corrigées de l’incapacité plupart des pays (11–18). perdues à cause d’accidents, et 96 % des enfants qui meurent des suites d’acci- TABLEAU 1.2 dents de la circulation dans le Évolution du classement des AVCIa pour les 10 principales causes du monde concernent des pays à fardeau mondial des maladies faible revenu ou à revenu moyen. Rang 1990 Rang 2020 Plus de 50 % des décès frappent Maladie ou traumatisme Maladie ou traumatisme de jeunes adultes appartenant au 1 Infections des voies respiratoires 1 Cardiopathie ischémique inférieures groupe d’âge des 15 à 44 ans (6). Maladies diarrhéiques 2 Dépression unipolaire majeure Chez les enfants âgés de 5 à 14 2 3 Affections périnatales 3 Accidents de la circulation ans et les jeunes adultes âgés de 4 Dépression unipolaire majeure 4 Maladies cérébrovasculaires 15 à 29 ans, les traumatismes dus 5 Cardiopathie ischémique 5 Bronchopneumopathie obstructive aux accidents de la circulation chronique Maladies cérébrovasculaires 6 Infections des voies respiratoires sont la deuxième cause de décès 6 inférieures dans le monde (voir tableau 1.1). 7 Tuberculose 7 Tuberculose Dans les pays et régions à faible 8 Rougeole 8 Guerre revenu – en Afrique, en Asie, dans 9 Accidents de la circulation 9 Maladies diarrhéiques les Caraïbes et en Amérique latine 10 Anomalies congénitales 10 VIH –, la majorité des décès imputables a AVCI : Années de vie corrigées de l’incapacité. Une évaluation du déficit de santé qui compte à la fois du nombre d’années perdues à cause d’une mort prématurée et de à la route concernent des piétons, tient la perte de santé découlant d’un handicap. des passagers, des cyclistes, des Source : Référence 2.
6 • RAPPORT MONDIAL SUR LA PRÉVENTION DES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
Dans beaucoup de pays à faible revenu et à revenu moyen, le fardeau des accidentés de la route est tel qu’ils représentent de 30 % à 86 % des admissions pour traumatisme (19, 20). On prévoit certes une diminution de 30 % des
décès consécutifs à des accidents de la route dans les pays à revenu élevé, mais les tendances actuelles et les projections pour les pays à faible revenu et à revenu moyen laissent présager une forte augmentation de la mortalité imputable aux accidents de la route entre
ENCADRÉ 1.1
Les tragédies humaines derrière les statistiques des accidents de la route Un week-end du printemps 2000, Ruth, 22 ans, et son frère Paul, 20 ans, rejoignirent leurs parents à la campagne, dans le Suffolk, pour leur 25e anniversaire de mariage. Le dimanche soir, après la fête familiale, Paul alla au cinéma avec un ami, à bord de la vieille Fiat Uno rafistolée de ce dernier. A minuit, la famille fut réveillée par quelqu’un qui frappait à la porte. Un policier venait leur annoncer qu’il y avait eu un accident de voiture et il demanda aux parents en état de choc de se rendre à l’hôpital voisin. Le pronostic était terrible. Paul souffrait d’un traumatisme crânien massif et les médecins ne pensaient pas qu’il survivrait. Fait étonnant, il ne semblait pas si mal. Il était certes couvert d’égratignures et d’ecchymoses, il avait la joue gauche entaillée, des doigts et un fémur cassés, mais la scintigraphie cérébrale ne laissait guère de doutes sur la gravité de son état. Paul fut transféré aux soins intensifs et, au bout de quelques heures, à l’unité régionale des soins intensifs neurologiques. Heureusement, un lit l’y attendait et l’on savait comment le soigner au mieux. Cependant, sa vie ne tenait qu’à un fil. Les traumatismes subis au cerveau et aux poumons étaient graves. Les médecins avaient décidé de le maintenir dans un coma artificiel jusqu’à ce que son état se stabilise. Quand ils le laissèrent se réveiller, cependant, les pires craintes de la famille se confirmèrent lorsque les médecins expliquèrent que des nerfs n’étaient plus reliés au tronc cérébral. Paul survécut et, aujourd’hui, trois ans plus tard, il continue de progresser, mais c’est très lentement qu’il sort d’un état végétatif où il réagissait à peine. Il ne peut toujours pas marcher, écrire ou parler, ce qui fait qu’il est très difficile de communiquer avec lui. Mais il sourit et sait montrer quand il est content ou exaspéré. Il peut manger et avaler. De plus, la coordination de sa main droite s’améliore et, si on l’y encourage, il arrive parfois à s’alimenter seul. Il reste doublement incontinent. Après quelques mois passés dans un centre hospitalier, Paul a suivi six mois de réadaptation fonctionnelle et, maintenant, il vit dans un foyer pour personnes très dépendantes, à 50 km de chez ses parents. Les séances de rééducation supplémentaires, les travailleurs de soutien et l’équipement nécessaire sont payés par des indemnités provisoires versées par l’assurance du conducteur. Sans cet argent et les efforts inlassables de ses parents, de sa sœur et d’autres encore, Paul n’aurait jamais autant progressé. Ses parents vont le voir une fois par semaine, en s’arrangeant souvent pour pouvoir s’entretenir avec les médecins, les administrateurs ou les thérapeutes. Paul passe la plupart des samedis chez eux, ainsi qu’une nuit par mois. Son père ne travaille à présent que trois jours par semaine à cause de tout ce qu’il y a à faire pour Paul. Ils ont aménagé leur maison en fonction du fauteuil roulant et des soins à prodiguer à Paul. La famille a appris à affronter le stress provoqué par le souvenir de l’accident et par ses conséquences. Cependant, ils ne pensent plus que « cela n’arrive qu’aux autres ». En fait, ils sont très inquiets face aux problèmes de la sécurité routière, à l’attitude des conducteurs et aux injustices du système juridique. Dans ce cas, le jeune conducteur roulait si vite qu’en essayant de négocier un virage, il avait accroché le bord du trottoir, traversé la chaussée et était monté sur un bas-côté avant que l’arrière de la voiture n’aille s’écraser contre un arbre. Paul, qui était assis à l’arrière, avait absorbé l’essentiel de l’impact. L’arrière de la voiture s’était détaché du reste, à cause du mauvais travail de « rénovation » effectué sur le véhicule rouillé, qui n’aurait jamais dû passer le cap de l’examen annuel obligatoire des véhicules (le test « MOT »). Le système a laissé tomber la famille de Paul en ne faisant rien au sujet du test MOT malhonnêtement passé et en ne retenant qu’une charge mineure contre le conducteur, pour excès de vitesse, sans tenir compte du fait que la vie de Paul est ruinée. En plus de leur souffrance, les parents de Paul doivent supporter les injustices de la loi qui, selon eux, ne prend pas convenablement en compte des accidents comme celui de Paul et ne prête pas assez attention aux blessures graves. La frontière entre la mort et les blessures peut être très ténue. Pendant des mois, la famille a pleuré le préjudice de Paul, qui avait devant lui tous les espoirs d’un jeune homme brillant et prometteur, espoirs depuis longtemps évanouis.
CHAPITRE 1. DONNÉES FONDAMENTALES • 7
2000 et 2020. De plus, d’après les tendances actuelles, d’ici 2020, ces accidents occuperont probablement le troisième rang des causes d’années de vie corrigées de l’incapacité perdues (voir tableau 1.2).
TABLEAU 1.3
Le coût économique et social des traumatismes dus aux accidents de la circulation D’un point de vue économique, le coût des traumatismes dus aux accidents de la circulation est estimé à plus ou moins 1 % du produit national brut (PNB) des pays à faible revenu, 1,5 % du PNB des pays à revenu moyen et 2 % du PNB des pays à revenu élevé (5). Le coût économique direct des accidents de la route dans le monde est estimé à 518 milliards de dollars américains, le coût pour les pays à faible revenu – 65 milliards de dollars américains – dépassant la totalité des sommes perçues au titre de l’aide au développement (5). Il est probable, en outre, que le coût pour les pays à faible revenu et à revenu moyen soit largement sous-estimé. En utilisant des données et des méthodes de calcul plus détaillées, le coût annuel (direct et indirect) des traumatismes dus aux accidents de la route dans les seuls pays de l’Union européenne (UE), qui représentent 5 % des accidents mortels dans le monde, dépasse 180 milliards d’euros (207 milliards de dollars américains) (9, 21). Pour les Etats-Unis d’Amérique, le coût en capital humain des accidents de la route en 2000 est estimé à 230 milliards de dollars américains (22). Si l’on faisait des estimations comparables du coût économique direct et indirect des accidents de la route dans les pays à faible revenu et à revenu moyen, il est probable que le coût économique total de ces accidents dans le monde dépasserait l’estimation actuelle de 518 milliards de dollars américains. Les accidents de la route pèsent lourd non seulement sur les économies nationales et régionales, mais aussi sur les ménages (voir encadré 1.1). Au Kenya, par exemple, plus de 75 % des victimes de la route sont de jeunes adultes économiquement productifs (23). Malgré les coûts économiques et sociaux importants, cependant, on investit assez peu dans la recherche-développement sur la sécurité routière, comparé à d’autres dangers pour la santé (voir tableau 1.3). Il existe, toutefois, des solutions au problème rentables, éprouvées et acceptables pour le public.
VIH/SIDA
Financement de la recherche-développement dans le monde sur différents thèmes Maladie ou traumatisme
en millions de dollars US
Classement des AVCI en 1990
Classement des AVCI en 2020
919–985
2
10
Paludisme
60
8
—
Maladies diarrhéiques
32
4
9
Accidents de la circulation
24–33
9
3
Tuberculose
19–33
—
7
AVCI : Années de vie corrigées de l’incapacité. Source : Référence 24.
Cependant, les fonds sont rares pour les interventions, même dans bien des pays très actifs en matière de sécurité routière qui cherchent tous à réduire encore le nombre de victimes (25–28). En bref, les efforts déployés actuellement en ce qui concerne la sécurité routière ne sont pas à la hauteur de la gravité du problème. Les déplacements routiers présentent des avantages pour la société, mais le prix qu’elle paie pour cela est très élevé.
Changer des perceptions fondamentales Le présent rapport vise principalement à communiquer à un auditoire plus vaste concerné par la gestion de la sécurité routière, les connaissances et les opinions actuelles en ce qui concerne la prévention des traumatismes dus aux accidents de la route. La publication du dernier rapport mondial important de l’OMS sur la sécurité routière remontant à plus de 40 ans (29), les perceptions, la compréhension et les pratiques relatives à la prévention des traumatismes dus aux accidents de la route ont considérablement évolué – en fait, il y a eu un changement de paradigme – parmi les professionnels de la sécurité routière du monde entier. La figure 1.1 expose les principes directeurs de ce paradigme. Certains gouvernements, certaines organisations et certains particuliers en accepteront plus facilement et plus volontiers les implications. Les principes en question ne seront pas tous adoptés d’emblée. En fait, il faudra du temps pour qu’ils soient fermement établis, même dans les pays où des mesures énergiques sont prises pour renforcer la sécurité routière.
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,E CHANGEMENT DE PARADIGME DE LA SÏCURITÏ ROUTIÒRE
,ES SECTIONS SUIVANTES EXPLIQUENT CONCRáTEMENT EN QUOI CETTE NOUVELLE FAÀON DE PERCEVOIR ET DE TRAITER LA S£CURIT£ ROUTIáRE INmUE D£JÜ SUR LE RENFORCEMENT DES CAPACIT£S ET SUR LES POLITIQUES )L Y EST £GALEMENT QUES TION DES TYPES DE MESURES QUI SE R£VáLENT FRUCTUEUSES ET DES POINTS DE D£PART POUR LE D£VELOPPEMENT INSTITU TIONNEL ET LA FORMULATION DE PROGRAMMES ,E CHAPITRE EXAMINE PLUS EN D£TAIL CERTAINS DES PROGRAMMES ET DES INTERVENTIONS RELATIFS Ü LA S£CURIT£ ROUTIáRE QUI PEUVENT äTRE ADAPT£S ET ADOPT£S AU NIVEAU LOCAL ,ES TRAUMATISMES DUS AUX ACCIDENTS DE LA CIRCULATION PRÏVISIBLES ET ÏVITABLES 3I LON A TOUJOURS N£GLIG£ LE i PR£JUDICE w POUR LA SANT£ PUBLIQUE CEST EN PARTIE PARCE QUON PENSAIT QUE LES
COLLISIONS ET LES TRAUMATISMES R£SULTAIENT D£V£NE MENTS AL£ATOIRES QUI NARRIVAIENT QUAUX AUTRES CES £V£NEMENTS £TANT CONSID£R£S COMME IN£VI TABLES DANS LES TRANSPORTS ROUTIERS ,E RISQUE DACCIDENT EST ASSEZ FAIBLE SUR LA PLUPART DES TRAJETS PRIS INDIVIDUELLEMENT MAIS LES GENS SE D£PLACENT BEAUCOUP DE FOIS PAR JOUR PAR SEMAINE ET PAR AN ,A SOMME DE CES PETITS RISQUES EST CONSID£RA BLE ,E TERME i ACCIDENT w QUI EST LARGEMENT EMPLOY£ PEUT DONNER LIMPRESSION PROBABLEMENT INCONS CIENTE QUILS SONT IN£VITABLES ET IMPR£VISIBLES AUTRE MENT DIT QUIL EST IMPOSSIBLE DE LES G£RER ,ES AUTEURS DU PR£SENT DOCUMENT UTILISENT £GALEMENT LE TERME i COLLISION w POUR MONTRER QUIL SAGIT DUN £V£NEMENT OU DUNE S£RIE D£V£NEMENTS QUE LON PEUT ANALYSER RATIONNELLEMENT ET AUXQUELS ON PEUT REM£DIER &ACE