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Semitica V iva' Band
Martine Vanhove
V
Herausgegeben von Otto Jastrow
La langue maltaise Etudes syntaxiques d'un dialecte arabe »périphérique«
1993
1993
Harrassowitz Verlag . Wiesbaden
Harrassowitz Verlag . Wiesbaden
Ouvrage publié avec le concours du C.N.R.S. (Centre National de la Recherche Scientifique), P aris.
A Antoine
Dans l es bibl iothèques, de grands dadais fréquentent assidûment l es rayons des ouvrages de thermodynamique et des l angues rares, Y apprennent par coeur la grammaire maltaise avant d'a l l er chasser l'al l igator albinos dans l es égouts de New York.
(D'après V de Thomas Pynchon)
Die Deutsche Bibliothek - CIP-Einheitsaufnahme
Vanhove, Martine:
La langue maltaise:études syntaxiques d'un dialecte arabe "périphérique« /
Martine Vanhove. Préf. de David Cohen. - Wiesbaden :Harrassowitz,
11) ISBN 3-447-03342-8
1993
(Semitica viva; Bd. NE:GT
© Otto Har rassowitz, Wiesbaden 1993
Das Werk einschlieBlich aller seiner Teile ist urheberrechtlich geschützt. Jede Ver wertung auBerhalb der engen Grenzen des Urheberrechtsgesetzes ist ohne Zustimmung des Verlages unzuIassig und strafbar. Das gilt insbesondere für Ver vielfaltigungen jeder Art, Übersetzungen, Mikroverfilmungen und für die Einspeicherung in elektronische Systeme. Gedruckt auf alterungsbestandigem Papier der Fa. Nordland Papier, Darpen/Ems.
Druck und Verarbeitung: Hubert & Co., Gattingen Printed in Germany
ISSN ISBN
0931-2811 3-447-03342-8
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TABLE DES MATIERES
Préface par David Cohen
xiii
Remerciements
xvii
Avant-Propos Système de transcription L'alphabet maltais Liste des abréviations et symboles Carte
1 8 11 12 15
Première partie : Données de base sur la morphologie verbale
17
1.
Le thème simple
1. Verbes à trois consonnes fortes 2. Verbes à deuxième radicale liquide l, n, ou r 3. Verbes à deuxième et troisième radicales semblables 4. Verbes avec un phonème virtuel /0/ 5. Verbes comportant une radicale semi-vocalique 6. Les verbes quadriconsonantiques 7. Les verbes "irréguliers"
17 17 18 19 20
22 25 26
II. Le système de dérivation
26 27 29 31
III. Les verbes d'origine étrangère "non-assimilés"
36
Deuxième partie : Valeurs et emplois des deux conjugaisons
39
1. Thèmes à modification interne du radical 2. Thèmes surdérivés 3. Thèmes dérivés à infixe ou à préfixe
1.
Considérations générales sur l 'aspect, le temps et le modal
39
II. Valeurs et emplois de la conjugaison suffixale
Remarques préliminaires
1. L ' aoriste
2. L ' antériorité dans le passé 3. Le parfait 4. Le parfait en composition avec deux adverbes 5. Le contexte de futur 6. Emplois modaux 7. Conclusion
II1. Valeurs et emplois de la conjugaison préfixale
Remarques préliminaires
1. L' expression des vérités générales
2. L' expression de faits habituels 3. En situation de concomitance 4. L' instance du commentaire général 5. En contexte de futur 6. Dans l ' instance du récit 7. Le parfait en composition avec deux adverbes 8. La simultanéité 9. Emplois modaux 10. Conclusion
Troisième partie : Valeurs et emplois des auxiliaires, particules verbales et préverbes 1.
Table des matières
Table des matières
viii
Remarques générales sur l'auxiL iarité
II. L'expression de la concomitance
Remarques préliminaires
1. La concomitance dans l ' accompli : le parfait
2. La concomitance dans l ' inaccompli : le progressif 2.1. 1?�Oedl ou I?etl + c. préf. 2.2. Le participe 2.3. Conclusion
III. L'auxiliaire l?a Oadl - lyb?08dl et l'expression des sous-aspects duratifs
Remarques préliminaires 1. L ' auxiliaire est à la conjugaison suffixale 2. L ' auxiliaire est à la conjugaison préfixale 3. L ' impératif et le prohibitif 4. Conclusion
45 45 45 47 48 55 57 65 72 73 73 73 74 75 77 79 81 87 88 89 99
101 101 107 107 108 112 113 134 150 153 153 160 162 169 171
ix
IV. Auxiliaires, particules et préverbes du futur
173 173 175 177 179 184 187 190 191 194 195 204 206 208 209 211
V. L'inaccompli dans le passé
213 213 215 216 217 218 218 220 221 222 223 224
VI. L'antériorité et L 'accompli futur
225 225
Remarques préliminaires 1. Iséyyerl + conjugaison préfixale 2. Iserl + conjugaison préfixale 3. Isel ou Isal + conjugaison préfixale 4. II:tal + conjugaison préfixale 5. Quelques considérations sociolinguistiques 6. Le système du futur dans un idiolecte 7. Le "futur du passé" 8. IOadl + conjugaison préfixale 9. likanl + conjugaison préfixale 10. Isel + likanl + conjugaison préfixale 11. likanl + préverbe de futur + conj. préfixale 12. I08ddl + pronom suffixe + Iséyyerl + c. préfixale 13. L' expression de l ' imminence par une phrase complexe 14. Conclusion Remarques préliminaires 1. Le procès en déroulement dans le passé 2. La valeur de passé d ' habitude 3. likGnl + conjugaison préfixale dans un récit 4. Ik�nl et les verbes sans conjugaison suffixale 5. La forme surcomposée Ik�nl + l ikanl 6. Ik�nl + In�?esl "manquant" 7. L' inversion de l' ordre auxiliant - auxilié 8 . Emplois modaux : l ' hypothétique 9. Un calque de l ' anglais "he used to" 10. Conclusion 1. Le "passé de deuxième degré" 2. L' accomp l i futur et le futur antérieur likGnl + c. suff. 3. Conclusion
VII. Les auxiliaires inchoatifs
Remarques préliminaires 1. L' auxiliaire Ibédal "commencer" 2. L' auxil iaire I?abadl "saisir" 3. L' auxiliaire Irémal "jeter" 4. L' auxiliaire IfétaI:t1 "ouvrir" 5. L' auxiliaire Itéla?1 "partir" 6. L' auxiliaire II:tabatl "entrer en collision, frapper" 7. L' auxiliaire II:tascll "venir à l ' idée ; survenir"
230 238 241 241 241 248 253 254 255 256 258
p
x
Table des matières 8. L' auxiliaire Isarl "devenir 9. D ' autres inchoatifs? 10. Conclusion
avoir lieu
Table des matières cuire"
VIII. Les auxiL iaires de "continuité du procès"
Remarques prél iminaires 1. L'auxiliaire Iba?aOI 2. L'auxiliaire Ik6mplal 3. L'auxiliaire liss6ktal 4. L' auxil i aire IZï;jdl "ajouter" 5. Conclusion
IX. L'auxiL iaire d'itératif IrÉgaOI
Remarques préliminaires 1. L' ordre des termes 2. Les compatibilités de IrÉgaOI 3. La périphrase est à la c. suff. ou préf. , à l'impératif ou au participe actif 4. La périphrase avec un auxiliaire ou une particule verbale 5. La négation 6. Ir Ég aOI est suivi d'un pronom copule 7. Le passage à la conjonction 8. Conclusion
X. Les auxil iaires modaux
Remarques préliminaires 1. Les auxiliaires "pouvoir" 2. Les auxiliaires "devoir"
XI. L'expression du passif par auxil iaires
Remarques préliminaires 1. La phrase nominale 2. La copule d'origine pronominale + participe passif 3. 1?6°cdl "assis" + participe passif 4. Ikï;jnl " être" + participe passif 5. L' auxil iaire Igï;jl "venir" + participe passif 6. L' auxiliaire Isafaol "devenir" + participe passif 7. Conclusion
XII. De quelques périphrases verbales "marginales"
1. IsÉyycrl "allant" et l'expression de l'intensif 2. I?abczi "sauter" 3. Les verbes Irai "voir" et Iwasal/ "arriver"
259 261 263 265 265 265 270 272 272 273 275 275 276 276 277 278 279 280 280 283 285 285 286 295 313 313 314 315 317 318 321 324 325 327 327 328 329
Quatrième partie : La phrase nominale et les constructions existentielles, locatives et possessives 1.
Phrase nominale, copules et verbe "être"
Remarques préliminaires 1. La phrase nominale à un terme 2. La phrase nominale à deux termes 3. La phrase nominale à trois termes avec pronom-copule 4. Construction avec 1?6°cdl "assis" 5. Les particules négatives 6. Le verbe Ikï;jnl ( c . s. ) - lik6nl ( c . p . ) "être"
II. Constructions l ocatives et existentieL Les
Remarques préliminaires 1. La construction avec lfï-I "dans" 2. La construction avec Icmml "là" 3. Construction avec lawnl "ici" 4 . Conclusion
III. L'expression de la possession
1 . Morphologie des pseudo-verbes "avoir" 2. Valeurs et emplois 3. Conclusion
xi
331 331 331 332 334 355 373 379 386 393 393 393 396 404 406 409 409 411 426
Conclusion générale
429
Annexe : extraits du corpus oral Texte n° 1 : La fabrication du pain à la maison dans les années vingt Texte n° 2 Callan et le coq Texte n° 3 Le vieil homme enterré vivant Texte n° 4 Les légendes de la formation de Maqluba et de Filfla Texte na 5 Poèmes
433
476 480
Liste des ouvrages cités
503
Index
513
434 460 466
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PREFACE
C' est une impression agréable, exaltante même, que de voir réa lisé par un de ses élèves, d' une manière qui lui paraît accom plie, un travail qu' il regrettait de ne pas être en mesure d' entreprendre lui-même. C' est le cas pour l ' ouvrage que je veux présenter en quelques lignes ici. C' est un peu dans l ' espoir de la voir prendre en charge ce projet, que j ' avais, en 1983 je crois, suggéré à Martine Vanhove de s ' initier à ce secteur important et délicat du domaine arabophone que sont la langue et la l ittérature maltai ses. J ' avais eu l ' occasion, au cours de ses études universi taires, de remarquer ses dons pour la recherche linguistique. La confiance que je plaçais en elle, j ' éprouve un grand plaisir à le dire, n'a pas été déçue. Le lecteur de ce livre m'en croira sans peine. L' intérêt des études maltaises pour plus d ' un domaine de la linguistique, Martine Vanhove en parle avec compétence dans l ' introduction qui suit. Et elle le montre dans l ' ensemble de l ' ouvrage, avec une maîtrise remarquable si l ' on songe qu' il s ' agit d'un premier travail d' envergure dans un domaine qui ne fournit aucun modèle quelque peu développé, celui de la syntaxe du maltais. I l est juste de dire que le sujet s'y prêtait par les ouvertures qu' il permet et qu' il méritait de grands efforts à cause de la négligence dont i l est l ' objet de la part des sémitisants et surtout des arabisants. Non pas que la langue maltaise soit un domaine inconnu. La recherche linguistique y est menée depuis plus d'un siècle, même si, en dehors de quelques apports dont ceux de Theodor Noldeke et Hans Stumme, l ' accession de ces études à un statut véritablement scienti fique, déterminé par une connaissance directe de la matière, est liée à l ' œuvre de notre contemporain Joseph Aquilina. Mais, même en comptant ceux de l ' Archipel, les ouvriers sont peu nombreux. Et pourtant, ne serait-ce que parce qu ' il a apporté une solution originale au problème que pose aux dialectes le passage à l ' usage écrit, sa prise en considération dans les études arabes ne peut être que d' un très grand profit.
pz
xiv
Préface
Martine Vanhove lui a accordé toute l'attention nécessaire et elle a pu en dégager des indications précieuses dans les domaines les plus divers. De ce point de vue, on ne peut qu'être impressionné par la multitude des aspects qu'elle envisage dans le développement de sa recherche : dialectologie historique et comparée de l'arabe , sémitologie, sociolinguis tique, l inguistique générale. D'où vient que malgré cette ampleur, le traitement appa raisse complètement cohérent et dominé ? Pour ma part j'y vois deux raisons principales et qui méritent d'être formulées, car il peut être utile aux chercheurs d'en prendre conscience. L'essentielle est peut-être, quoi qu'il puisse y paraître à premlere vue, le parti pris de clarté et de simplicité dans l'exposé, même dans les démontages les plus subtils des fonc tionnements syntaxiques. Martine Vanhove ne se permet aucune des obscures commodités terminologiques qui peuvent, à l'occa sion, masquer des insuffisances de l'analyse elle ne se réfugie en aucun cas dans les cadres tout faits que pourraient lui offrir diverses écoles . La deuxième raison est à mes yeux dans la rigueur avec laquelle toute formulation se trouve fondée sur une documenta tion irrécusable, rigueur scientifique allant de pair avec celle, d'ordre moral peut-être, qui ne dissimule rien des lacunes que l'enquête n'est pas parvenue à combler et des incertitudes qui demeurent. Elle va de pair aussi avec une volonté d'exhaustivité qui se manifeste dans tout l'ouvrage et dont le chapitre sur les auxiliaires est une des plus évidentes i llustrations. Mais rigueur et exhaustivité, il va sans dire, ne sont possibles que parce que l'auteur s'est donné la peine harrassante, pendant plusieurs années, de recueillir un vaste corpus, d'une remarquable diversité. Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté dans ce qui vient d'être dit, il faut c lairement indiquer que la démarche de Martine Vanhove ne consiste pas à accumuler des données et à les analyser. Elle ne répugne en aucune façon à situer les faits qu'elle relève en toute indépendance et les fonctionne ments qu'elle étudie dans la perspective théorique qui lui paraît le mieux les intégrer et qui en même temps y trouve une nouvell e confirmation. Mais elle n'en est jamais l'esclave et sait lui apporter les nuances et les modifications qu'imposent ses constatations. Ainsi par le sujet traité aussi bien que par la méthode mise en œuvre, l'ouvrage de Martine Vanhove ouvre, dans de saines perspectives scientifiques, la porte d'un domaine qu'on
Préface
xv
souhaiterait voir exploré dans toutes ses dimensions par elle même et tous les chercheurs, arabisants et sémitisants qui ' auront aperçu tout ce qu'il pourra apporter à leurs études. David Cohen Professeur émérite Directeur d'études
REMERCIEMENTS
C'est avec grand plaisir que je veux dire ICI ma gratitude envers David Cohen qui a su me faire partager son goût de la linguistique et du maltais. La confiance qu'il m'a témoignée, ses encouragements et ses conseils m'ont toujours été précieux. Je voudrais également remercier mon amie maltaise Antoi nette Camilleri ainsi que ses parents qui m'ont hébergée à chacun de mes séjours à Malte. La chaleur de leur accuei l , le dévouement et la compétence d'Antoinette sont pour moi des souvenirs inoubliables. Ma gratitude va aussi à mon amie Sandra Gojal qui, à Paris, n'a ménagé ni son temps ni sa patience pour répondre à toutes mes interrogations. Je ne voudrais pas oublier non plus tous ceux qui à Malte ou à Paris m'ont offert leur aide et leurs connaissances : le professeur Joseph Aqui lina, Joseph Cassar-Pullicino, ainsi que Marie-Rose Gatt, l e Père Edward Fenech, Albert Borg e t Oliver Friggieri, tous quatre enseignants à l'Université de Msida, Micheline Galley et Carmel Sammut. Ni mes amis Maria Calleja, Magdalen Mallia, Carmen Attard, Nadia et Joe Bonett qui m'ont fait rencontrer beaucoup de mes informateurs et m'ont offert leur aide sans compter. J'aimerais aussi exprimer mes remerciements à tous mes informateurs, trop nombreux pour être nommés ici ; sans leur patience ce travail n'aurait pu aboutir. Mes remerciements vont aussi à tous les membres de l'URA 1066 du C . N . R . S . et particulièrement à Marie-Claude Simeone Senelle, ainsi qu'à Dominique Caubet et Antoine Lonnet, qui m'ont fait l'amitié de relire avec attention une grande partie de la première mouture de cet ouvrage. Leurs observations et leurs critiques ont toujours été stimulantes. Je souhaite également remercier Jean Margain pour son aide compétente et amicale lors de la consultation des textes hébraïques. Merci enfin à Christine Bornon, Aziza Boucherit, Marie Claire Michel-Dropsy et à mon compagnon Antoine Lobstein qui ont bien voulu se partager la tâche ingrate de traquer les fautes, ainsi qu'à Jean-Michel Decuq qui a dessiné la carte qui figure ci-après . Paris, le 15 octobre 1992
Martine Vanhove
»
AVANT-PROPOS
La langue maltaise a pour ongme un d ialecte arabe, vraisem blablement proche des vieux dialectes citadins de Tunisie (O. Cohen 1988: 106 ) , apporté par les conquérants arabes en 870 . Elle est parlée par les quelque 350 000 habitants d ' un archipel situé au centre géographique de la mer Méditerranée, véritable carrefour commercial et stratégique sur ce qui fut la route des Indes. L ' archipel se compose des î les de Malte ( 247 km2 ) , Gozo (68 km2 ) et des ilôts de Comino, Cominetto et Filfla, ces der niers étant inhabités. L' arabe s ' y imposa au point que même la toponymie, sauf pour les noms des deux î les principales, ne semble conserver aucune trace de la ou des langues qui y furent précédemment parlées . Le maltais a toutefois connu un dévelop pement part iculier et on a coutume de le classer parmi les "dialectes périphériques" , au même titre que le dialecte arabe de Kormakiti à Chypre ou celui de Boukhara en Union Sov iétique en raison des bouleversements importants qu'i l s ont connus à la suite de contacts intenses avec d' autres familles de langues au cours de leur histoire. Celle du maltais se rattache aux liens étroits que l ' archipel a entretenus avec la Sicile puis l ' Ita lie et avec le monde chrétien après la fin de la domination arabe en 1090 ( pr ise de Mal te par le comte normand Roger , maître de l a Sicile) et l ' expulsion définit ive des derniers musulmans entre 1240 et 1250 par l ' empereur souabe de Sici le, Frédéric I I . Tout au long du Moyen Age, le sort de l ' archipel maltais sera lié à celui de la Sicile, l ' immigration en prove nance d' Ital i e sera encouragée , puis, en 1530 , Malte deviendra le bastion de la chrétienté avec l ' inst allation des Chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem ( Godechot 1981 ) . Par la suite, Malte continuera d' entretenir des relations privilégiées avec l ' Ita lie, l ' italien devenant la langue de culture, même après la domination britannique sur les î les à partir de 1800. Ces liens avec la Sicile et l ' Italie ont lai ssé une empreinte profonde sur la langue des habitants de l ' archipel et notamment sur la phonologie et le lexique, on s ' en rendra compte à la lecture des exemples qui i llustrent ce travail. L ' un des effets les plus spectaculaires de ces contacts a été l ' adoption d ' un
2
Avant-propos
alphabet off iciel en caractères latins en 1933, alphabet dans lequel sont désormais rédigés les documents de tous ordres l ittérature, presse écrite, etc. Quant à l ' anglais, son influ ence à Malte ne commencera à s'exercer qu' à partir du m i l ieu du XIXè siècle et seulement de mamere notable sur la langue depuis le mil ieu du XXè siècle par des emprunts facilit és par un b i linguisme quasi généralisé par le système scolaire. Devenue un état indépendant en 1964, Malte a adopté le maltais comme langue nationale mais maltais et anglais coexistent tous deux en tant que langues officiel les, de telle sorte qu' une partie de l ' enseignement scolaire et universitaire se fait en anglais et qu' i l existe une presse écrite et des documents administratifs en anglais. En septembre 1984, David Cohen et l' équipe du CNRS qu' i l dirigeait et dans laquelle j ' avais été accueillie au début de cette même année m' offrirent l a possibi l ité de me rendre à Malte et de recue i l l ir mes premiers corpus. La suite des enquê tes sur le terrain a pu se dérouler grâce à l ' appui scientifi que et financier du laboratoire au cours de nouveaux séjours d ' un mois chacun en 1985 et 1986, pendant lesquels j ' ai conti nué à recue i l l ir des corpus auprès d ' informateurs les plus divers. En 1987, l'équipe fit venir une de mes informatrices à Paris pour m ' aider dans le travail d' interprétation et de véri fication des données recueill ies et j ' ai profité du sejour en France d' autres amies maltaises pour procéder à quelques enre gistrements "sauvages" ( dont el les furent naturellement aver ties par la suite) de conversations spontanées sur des sujets de la vie quotidienne. En 1988, j ' ai bénéficié d'une allocation du service des "Aires culturelles" du Ministère de l ' Education Nationale pour une enquête sur la l ittérature maltaise. Les nombreuses interviews d ' écrivains que j ' ai alors réalisées ont également servi pour l ' étude l inguistique présentée lCI. Les deux premières années, la plupart des enregistrements se sont déroulés en compagnie d' amis maltais qui faisaient office de traducteurs . Par la suite, j ' ai été capable de comprendre et de m' exprimer en maltais sans trop de difficultés, j ' ai donc pu procéder seule aux entretiens avec les informateurs, mon seul souci étant d' intervenir le moins possible et de laisser parler les gens, ce qu' ils firent très volont iers. La phonologie et l a morphologie du maltais ayant suscité de nombreuses études, j' avais d' abord envisagé de faire une description syntaxique complète de l a l angue, les études sur l e
Avant propos
3
sujet étant très réduites et parcel laires, et de commencer par l' analyse du système verbal. Dans ce but , j ' ai fait répondre à un questionnaire adapté de celui mis au point par le LACITO (Bouquiaux et a L . éd. 1976) et procédé à l ' enregistrement de récits et d'un corpus de poésies orales. Les premiers dépouil lements mi rent à jour un système verbal tellement riche, que je me vis contrainte assez vite de me l imiter à sa seule analyse. Puis l ' examen des pseudo-verbes "avoir" m ' a conduit à étudier la phrase nominale ainsi que les expressions locatives et exis tentielles. Ce sont ces trois grands axes, le système verbal , la phrase nominale et les expressions existentiel les, locatives et possessives, qui constituent ce trava i l . Pour en faciliter la lecture, il est précédé d ' une brève description de l a morphologie verbale accompagnée de commentaires sur la vitalité des formes décrites.
Présentation des informateurs et du corpus Lors de mes enquêtes sur le terrai n , j ' ai essayé de diversifier les informateurs au maximum, afin d ' avoir une vue d' ensemble d' une langue dont les locuteurs sont peu nombreux et où la variation dialectale est suffisamment l imitée pour permettre l ' inter-compréhension entre tous les locuteurs. J ' ai pu le constater lorsque j'ai travai llé avec une amie de La Valette sur l' enregistrement effectué auprès d'un paysan de Mtanleb dont le parler est phonétiquement très différent du sien. Les Maltais s' accordent généralement pour reconnaître deux variétés principales de l eur l angue, d ' un côté un parler dit "standard" basé essentiellement sur celui de la capitale La Valette et de la vill e proche de Sliema et véhiculé par la télévision, la radio et l ' école, d ' un autre les "dialectes" parlés dans les villages et définis par opposition au parler "standard", mais qui ne forment pas un groupe homogène. Nombre de locuteurs vil lageo is, surtout parmi la population jeune, ont une prati que des deux variétés , l ' usage du di alecte étant le plus souvent réservé au cercle de la fami lle et des amis dans le périmètre du vil l age. Parmi la population âgée, on rencontre encore des locuteurs villageois qui ne par lent que leur dialec te. A l'inverse, la transmission des dialectes n' est pas tou jours assurée par les parents et certains jeunes locuteurs vil lageois n ' ont p lus à leur di sposition que l a variété "stan dard". Lors de mes enquêtes, j ' ai essayé de tenir compte dans la mesure du possible de ces facteurs pour le choix des infor-
4
Avant propos
Avant-propos
mateurs . Il s' est avéré que les disparités entre les étaient minimes en ce qui concerne l ' objet de ce travai l .
systèmes
Les informateurs : Les locuteurs du parler considéré comme "standard" sont marqués par un S. Ceux qui parlent le "standard" en plus de leur dialecte sont marqués par SD. Les locuteurs de dialectal seulement sont marqués par D. Les emplacements des localités où ils vivent ou dont i ls sont originaires sont marqués sur l a carte, à la fin de cette introduction ( p . 1 5 ) . A MALTE : S - Une secrétaire de La Valette, âgée de 27 ans S - Un enseignant de l'Université de Msida ( 40 ans ) S - Une enseignante d e l' Université d e Msida (55 ans ) originaire de Hamrun S - Un aumônier de Hal-Qormi âgé d'une cinquantaine d'années S - Quatre étudiants de 25 à 27 ans de Luqa, Zejtun et P jetà S - Une étudiante de 20 ans de Mgarr S - Treize écrivains âgés de 25 à 75 ans, dont 10 ont entre 30 et 45 ans . Deux d ' entre eux , âgés de 70 et 75 ans, sont originaires de Gozo et bilingues "standard" et "dialectal" Trois jeunes étudiantes âgées de 20 à 25 ans, originaires de Mgarr SD, Me lliena SD, La Valette S SD - Une jeune fille de Mosta, âgée de 1 8 ans, étudiante SD - Quatre chanteurs de Naxxar ( 60 ans) et de Zejtun (76, 67 et 45 ans) SD - Un enseignant de biologie du secondaire âgé de 45 ans, originaire de San G i lian SD - Le patron d ' un café de Marsaxlokk âgé de 45 ans SD - Un étudiant de 8irkirkara âgé de 26 ans SD - Le prêtre de la paroisse de Mel l iena âgé de 50 ans SD - Un lycéen de l7 ans de Melliena D Un paysan de Melliena âgé de 65 ans D - Un paysan de Mtanleb âgé de 75 ans D - Un pêcheur de Dingli âgé de 55 ans D - Une épicière de Attard âgée d' environ 80 ans. A GO ZO : SD Un ornithologue âgé de 45 ans, orIgmaire de Nadur SD - Le directeur d' une école agricole de Gozo âgé de 50 ans
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Un étudiant de 23 ans originaire de Nadur Une ancienne directrice d'école ménagère de Kerëem âgée de 70 ans D - Un sculpteur de Nadur âgé de 25 ans D - Une tisserande de Xagnra d ' une cinquantaine d' années D - Deux paysans (un homme et une femme) de Nadur âgés d ' une soixantaine d' années D - Une femme au foyer de 35 ans , propriétaire d ' un moulin à vent ( qui ne fonctionne plus ) à Nadur D - Une vanneuse de 85 ans de Xagnra D - Un paysan de Xagnra de 80 ans, ayant vécu 40 ans en Austra lie D - Un ancien sacristain de Xagnra âgé de 90 ans.
SD SD
Les entretiens effectués auprès de ces informateurs repré sentent au total 50 heures d' enregistrements. J'ai également uti l isé, très partiellement, des enregis trements que j ' ai effectués au cours de l ' été 1990 dans le ' vi llage de Mgarr à Malte auprès de locuteurs âgés. Il s ' agit de trois informateurs, deux femmes et un homme, âgés respective ment de 65, 90 et 76 ans, et qui ne parlent que le dialecte de leur village.
Contenu du corpus : Un des objectifs de la collecte des matériaux oraux, outre la constitution d ' un corpus de l ittérature orale, était d ' obtenir une grande diversité dans les sujets traités et les situations de communication afin de saisir la vie de la langue dans tous ses aspects. Les récits tiennent une place importante, mais ils sont pour la plupart émai llés de dial ogues, plus ou moins longs, soit constitutifs du récit, soit entre plusieurs informateurs. J ' ai aussi pris en compte l ' instance du commen taire général (voir ci-dessous les "commentaires d' une exposi tion " ) . Littérature oraLe des chants improvisés ( "gnana" , " spirtu pront " ) , des histoires comiques ; des légendes sur les pirates, des chapelles et des l ieux de Malte et de Gozo ; des poésies populaires de la tradition orale ; des histoires de voleurs. :
/"
des commentaires sur une exposi les tion à propos du folklore de la ville de Mel l i ena coutumes anciennes pour faire sa cour à une femme ; les fêtes Fo Lkl ore et h istoire Locale
Avant-propos
Avant propos
du village ; un récit sur le fonctionnement social et matériel d' une église ; un récit sur l a médecine traditionnelle par l es plantes ; un récit historique sur le bourg de H al-Qormi.
L ' un des documents littéraires les plus anciens écrits en maltais, si l ' on excepte une cantilène de vingt vers du XVème siècle, est une série de huit dialogues composés par le premier grammairien et lexicographe maltais dont les travaux soient parvenus jusqu' à nous , Agius De Soldanis, or iginaire de Gozo . Il publia une grammaire en 1750 où apparaissaient déjà quelques courts dialogues, mais c' est dans une seconde version, restée manuscrite et composée vers 1755, que De Soldanis les dévelop pa. Ils furent publ iés et commentés par Joseph Cassar-Pullicino dans un article paru en maltais en 1 947 ( voir l a l iste des ouvrages cités ) . Le document a été uti lisé dans ce travail, aux fins d' une brève i l lustration de fonctionnements anciens qui ont persisté jusqu' à nos jours . Certains exemples sont égale ment empruntés aux commentaires de Cassar-Pul l icino, au même titre que d' autres documents écrits que j ' ai intégrés à mon corpus.
6
: des récits et conversations sur des techniques anciennes et modernes : fabrication du pain ; le fonctionnement d'un moulin à vent des techniques artisanales vannerie, la technisculpture ; la fabrication du nougat traditionnel que de la pêche à la l igne du haut des falaises la construction d'une maison ; le système de distribution de l ' eau. Les techniques agricoles fabrication du fromage, de l a farine, culture ( ancienne ) du coton, de la pomme de terre, de l a canne à sucre (en Australie) explications sur le fonctionnement d ' une école agr ico le (é levages et cultures ) .
Les techniques
Une leçon d e l inguistique maltaise. Une conversation sur l ' état du cinéma à Malte. Treize entretiens avec des écrivains sur leur œuvre. Des conversations sur les événements quotidiens. Des informations télévisées avec interview de sportifs. Un questionnaire sur le système verbal inspiré de LACITO.
celui
du
Le sémitisant Hans Stumme a consacré plusieurs publica tions au corpus de l ittérature orale qu ' i l a rassemblé à Malte au tout début de ce siècle. J ' ai donc largement utilisé l ' un de ses recueils paru en 1904 : Maltesische Studien. Eine Samml ung Prosaïscher und poet ischer Texte in maL tesischer Sprache ( 124 pages ) . Ces textes ont été traduits en allemand dans un second volume intitulé Maltes ische Marchen, Gedichte und Ratsel in Deutscher Ü bersetzung. J ' ai procédé à un dépouillement systéma tique des textes n° l, VI, VIII, XIII à XVI, XVIII à XXXIV, XXXVI et XXXVII . Les traductions de Stumme ont été vérifiées avec l ' aide d ' une amie maltaise de La Valette . Les exemp les empruntés à ce recuei l ont été conservés dans l a transcription phonétique qu' en a donnée Stumme. Un autre aspect de la l ittérature orale, les proverbes, a également été pris en compte. J ' ai effectué un dépouillement systématique du gros volume publié par J. Aquilina en 1 972 : A Comparat ive Dictionary of Mal tese Proverbs ( 694 pages ) . I l contient plus d e 4630 proverbes.
7
Le maltais ayant en effet la chance d'être une langue écrite, i l aurait été dommage de se priver de l'abondante docu mentation que nous fournissent la littérature et les différents documents i mprimés dans cette langue. En me limitant à des ouvrages récents, j ' ai effectué un dépouillement systématique des œuvres suivantes CALLEJA, Anton "Ni kola ta' Xlendi" [Nicolas de Xlendi] ( p . 17-21 ) , une nouvelle dans Frak m i l l -Hajja [Fragments de vie ] . 1982. CALLEJA, Oreste : 4 Dramm i. Anestesija. éens perpetwu. Satira. Igsma UHrsa [4 Drames. Anesthésie. Bail à perpétuité. Satire. Corps fantômatiques ]. 1972.' Pièces de théâtre, 175 pages. J ' ai également fait usage du commentaire critique d ' O l iver Friggieri qui l' accompagne ( 1 1 pages). FRIGGIERI, O liver : Fil-ParLament ma jikbrux fjuri [Les fleurs ne poussent pas au parlement ] . 1986. Roman, 194 pages . MICALLEF, Bernard : "Tmien Kantunieri" [Huit coins ] ( p . 7-16 ) et "Stejjer tat-Tfal " [Histoires d ' enfants] (p. 17-20 ) , deux nouvelles dàns I l -Hajt ta' Malta u stejjer onra [Le mur de Malte et autres histoires]. 1988. Il -Mument. Journal hebdomadaire, organe du Parti National iste (démotrate-chrétien ) . Tro is numéros : 8 . 2. , 15. 2. et 29 . 2. 1987. SULTANA, Joe & GAUCI , Charles : L-Agnsafar [Les oiseaux ] . 1979. Ouvrage scientifique traitant des oiseaux. Seules l es préfaces et l ' introduction ont servi pour ce travail . (6 pages ) .
8
Avant propos
Avant-propos
D ' autres ouvrages ont fait l ' objet d ' une consultation parcellaire, soit pour l ' étude d ' une question preClse, soit parce qu' ils n' ont été lus que récemment et je n' en ai relevé que quelques points particuliers : I L -Bibbja. Traduction collective et anonyme de La Bible (Ancien et Nouveau Testaments) à partir de l ' hébreu et du grec, patron née par la Société Biblique de Malte. 1984. Ont été consultés les livres d' Esdras, Daniel et, en partie, Esaïe. Quelques sondages ont été effectués dans les autres l ivres. BORG, Albert : IL sienna [Notre l angue ] . 1988. Ouvrage de l in guistique, 329 pages. CASHA, Char les : Aktar praspar dwar Fra Mudest [D' autres excen tricités à propos du Père Modeste ] . 1974. Histoires humoristi ques pour enfants, 75 pages. EBEJER, Francis : IL -Hadd fuq il-bejt [Dimanche sur la terras se] . 1985. Pièce de théâtre, 81 pages.
Tous les exemples empruntés à des textes écrits ont été conservés dans l ' orthographe maltaise. Enf in, i l m' est arrivé parfois de citer des exemples illustrant des ouvrages ou des articles traitant de l i nguisti que maltaise. La source est systématiquement indiquée entre parenthèses après l ' exemple cité et figure dans la l iste des ouvrages cités en fin de volume.
Isi fricative dentale sourde Izl fricative dentale sonore If! fricative l abiodentale sourde Ivl fricative labiodentale sonore Ipl occlusive labiale sourde Ibl occlusive labiale sonore Iml nasale labiale Inl nasale dentale Irl l iquide vibrante apicale à un seul battement [r ] III l iquide latérale Iwl semi -consonne labio-vélaire Iyl semi-consonne palatale 1°1 il s ' agit d'un phonème "virtuel " qui provient, étymologi quement, de trois phonèmes différents : la fricative l aryngale sourde * Ihl, la pharyngale fricative sonore *Ir;'1 ou la vélaire fricative sonore */gl des autres var iétés d' arabe. I l ne correspond pas toujours à un trait acoustique audible mais il a des incidences sur la morphologie de la langue qui ont permis d' établir son statut phonologique (D. Cohen 1970: 129-13 1 ) . Voici la l iste des différentes réalisations phonétiques d e ce phonème : 1 . Avec Isl, lai et 181 : - en syl labe accentuée, all ongement de la voyel le Iso/, 1° si ou IsOcl [� ] lao/, 10al ou laOal [� ] 18°/, 1°81 ou 18°81 [S ] . - Pas d ' al l ongement (0) en syl labe post-tonique : I? arct! [? atct ] "elle coupa" . En syl labe pré-tonique, la voyel le peut-être longue ou mi longue selon les l ocuteurs, ou même bl�ève ( surtout devant le morphème suffixé du pI. ) : Imaoma1/ [mama 1 l , [ma. m a 1l ou [marnai ] "fait". 2. Avec une voye lle Iii, III ou 11;')/, la réalisation phonéti que dépend de la structure syllab ique et, dans un cas, de l' origine du phonème : - iO C( C) et I;')°C [t] : Ibi°t! [btt ] "je vendis" - °iCC [t ] : 10int! [tnt ] "j ' aidai" - °iCzC [il si Cz */hl : Ifoimt/ [fimt] "je compris" - ° i ( C ) ou °nc) [ay ] (ou ky ] chez certains locuteurs) [nayd Ü bm] "je leur lioïSl [yays ] "il vit" ; Inoidf-l-bml dis". 3 . Avec les voyelles lui ou lui, 10ul et 10ul ont une réali sation diphtonguée [aw ] quel le que soit l a pl ace de l ' accent : = =
SYSTEME DE TRANSCR IPTION Les consonnes I?1 occlusive laryngale sourde [hl fricative laryngale sourde II)I fricative pharyngale sourde [b ] fricative vélaire sourde Ikl occlusive palatale sourde Igi occlusive palatale sonore Ici affriquée palatale sourde Igl affriquée palatale sonore 151 fricative palatale sourde It! occlusive dentale sourde Idl occlusive dentale sonore Ici affriquée dentale sourde [2] affriquée dentale sonore
9
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
10
Avant propos
Avant-propos
[yl tfaw ] " i l s jettent" /y i tfou/ [mibâwt] "envoyé". /mibO Ut/ 4. /0/ est réalisé comme un glide [y ] après une voyel l e longue /1/ o u /i;:i/ et devant une voyelle brève [? �yct ] "assis". /?� O cd/ 5. /0/ est réalisé comme un gl ide [w] après /il/ et devant une voyelle brève : [mizrUwa] "semée" . /mizr Uoa/ 6. /io/ + voyelle est réalisée [y ] + voyel l e longue [y;lmd/ " i l fait". /io âmd/ 7. La réalisation de /coi/ est [cy l . 8 . /0/ en final e absolue est réalisé 0. 9. Laryngal isation de la voyelle adjacente (notée par un sous la voyel l e ) chez certains locuteurs v i l l ageois. 10. Les réalisations consonanti que [1) ] et semi-consonantique [y ] devant consonne ou en finale de mot ont été conservées dans la transcr iption phonologique. =
=
=
centrale mi-ouverte antérieure mi-ouverte antérieure ouverte
2. Voyelles longues : postérieure fermée il antérieure fermée ï centralisée moyenne ( diphtonguée ) � antérieure moyenne ë antérieure ouverte a La laryngalisation d' une voyelle est notée par un tilde sous la voyelle : �. Le système de transcrition de Stumme (1904) est expliqué dans son ouvrage p. 74-75. I l est seulement utile de noter ici que l e symbole [3] représente la pharyngale fricative sonore /<;'/, encore sporadiquement prononcée à l ' époque.
Lorsqu ' i l est fait référence à l ' arabe classique ou à d ' autres dialectes arabes, il peut apparaître sporadiquement les symboles suivants :
<;' x q g :Z:
t <;l �
Q t
d r
.1
j
ou .1 ou Q
fricative pharyngale sonore fricative vélaire sourde occlusive vélaire sourde fricative vélaire sonore fricative palatale sonore occlusive dentale emphatique sourde occlusive dentale emphatique sonore fricative dentale emphatique sourde fricative interdentale emphatique sonore fricative interdentale sourde fricative interdentale sonore l i quide dentale emphat ique l i quide alvéolaire sonore l i quide latérale emphat ique semi -voyelle palatale
Les voyelles 1 . Voyelles brèves u postérieure fermée ( phonème rare sous l'accent ) antérieure fermée postérieure m i-ouverte :) centrale moyenne [8 ]
11
L'ALPHABET MALTAIS b, é ( affriquée palatale sourde /6/), d, e, f, g ( affriquée palatale sonore /g/), g (occlusive palatale sonore), h (nota tion étymologique, correspond à la fricative laryngale sourde de l ' arabe classique ; elle n' est p lus prononcée), Ti (fricative pharyngale sourde /1)/), i, j (semi-consonne palatale /y/), k, l, m, n, gTi (notation étymologique, correspond à la fricative vélaire sonore /g/ et à la fricative pharyngale sonore /<;'/ de elles ne sont plus prononcées ), 0, p, q l ' arabe classique (occlusive laryngale sourde /?/), r, s, t, u, v, w ( semi consonne labio-vélaire), x ( fricative palatale sourde /5/), Z (fr icative dentale sonore /z/), z ( correspond à deux sons les affriquées dentales sourde et sonore d' origine italienne /c/ et [2]L Une apostrophe ' en fin de mot remplace la notation gn.
a,
Avant-propos
LISTE DES ABREVI ATIONS ET SYMBOLES
adj. ang. ar. ar. cl. c. chap. col. ou coll. c.p. ou cp c. préf. conj. préf. c.s. ou cs c . suff. conj. suff. dim. EPHE ex. f. ou fém. FUT. inv. it. l it. ou litt. m. ou masc. n. pl. prév. pro suff. provo (Q) sg. sic. TOB v.
o *
adjectif anglais arabe arabe classique commun chapitre collectif conjugaison préfixale conjugaison préfixale conjugaison préfixale conjugaison suffixale conjugaison suffixale conjugaison suffixale diminutif Ecole Pratique des Hautes Études exemple féminin futur invariable italien littéralement masculin note pluriel préverbe pronom suffixe proverbe exemples extraits du questionnaire singulier sicilien Traduction Œcuménique de la Bible verbe zéro forme reconstruite ou non admise
Avant-propos
13
Dans les exemples cités au cours du travail , les référen ces au corpus en annexe sont données entre parenthèses. Les chiffres romains indiquent le numéro du texte, les chiffres arabes, la ligne où l'exemple se situe.
Avant-propos
o z
>---<
�
o u
o N o o
15
PREMIERE PARTIE DONNEES DE BASE SUR LA MORPHOLOGIE VERBALE
Les tableaux des conjugaisons et des formes dérivées qui sont données ci-après, accompagnés de quelques commentaires, sont fondés en grande partie sur le parler d'une jeune femme de 26 ans, originaire de La Valette et issue d'un milieu bourgeois. Elle a reçu son enseignement secondaire dans un collège privé où l ' anglais était la langue d'enseignement, le maltais étant enseigné sur le même p ied qu' une langue étrangère. Son idio lecte présente quelques particularités qui seront indiquées et il est possible que les remarques portant sur la vitalité de certaines formes soient propres, pour partie seulement, à cette région et à cette classe sociale. Quelques points ont été complétés auprès de trois autres jeunes locuteurs de maltais "standard" âgés de 27 ans et origi naires de Pjetà, Luqa et Zejtun. Aucun d'entre eux ne par le une variante dialectale. Je me suis également référée constamment à l'abondante 1 documentation contenue dans la thèse d'Aquilina (1959). 1.
LE THEME SIMPLE
1. Verbes à trois consonnes fortes Ikltcbl - Iylktcbl "écrire" sg.
1
1. 2. 3.m.
conj. suffixaLe
ktib-t ktib-t kltcb
conj. préfixaLe
nl-ktcb ti-ktcb yl-ktcb
impératif
l-ktcb
Pour de plus amples détails sur la morphologie verbale, reporter aussi à Alexander Borg (1978), Schabert (1976) Vanhove (1990).
se et
18
pL
3.f. 1. 2. 3.
kltb-ct ktib-na ktib-tu kltb-u masculin
actif passif
n�zd miktUb
tÎ-ktcb ni-ktb-u ti-ktb-u yi-ktb-u
participes féminin
n�zla miktUba
i-ktb-u p l uriel
nizlÎn ( " descendant") miktubln
Le maltais présente une grande richesse vocalique dans ses thèmes verbaux six séquences vocaliques différentes pour la c . suff. et huit pour la c. préf. Comme l ' ont montré Saydon ( 1958) et D. Cohen ( 1970: 144) , ceci est le reflet d' anciennes différenciations phonétiquement conditionnées par la nature des consonnes (pharyngales, laryngales et anciennes emphatiques) ou, dans une moindre mesure, du timbre des voyelles étymologi ques. Voici le tableau de ces thèmes verbaux : conjugaison suffixale
CiCcC CcCaC CaCaC CaCcC CcCcC C:JC:JC
ce dernier cas seulement si les deux premIeres consonnes radi cales ne sont pas des consonnes d' arrière. Sinon la voyelle de disjonction est lai, ou bien I:JI quand la voyelle thématique du sing. est I:JI pour cause d ' harmonisation vocalique. 11:).ana?1 "étrangler, s ' enrouer" pL
yiCC:JC y:JCC:JC, y iCC:JC, ycCCaC yaCCaC, y:JCC:JC, yiCC:JC y:JCC:JC ycCCcC yiCC:JC
Le participe actif ne subsiste plus que pour un petit nombre de verbes, tous intransitifs (pour la l iste voir p. 134-5 ) . Le participe passif est plus répandu, mais sa formation n ' est pas automatique. 2. Verbes à 2ème radicale liquide l, n, ou r Au pl. de la c. préf. et de l'impératif une voyelle apparaît , de manière constante, après la 1ère consonne, si la 2ème radicale est une liquide Irl 11/ ou In/. Aquilina ( 1959 et 1965) et Sutcliffe ( 1936) classent aussi dans cette catégorie les verbes à 2ème radicale Im/, mais mes informateurs offrent un paradigme identique à celui des verbes à trois consonnes fortes, à l ' exception d ' un seul Isémaol "entendre" ( certains ont même un paradigme régulier ) . L a voyelle d e disjonction, toujours accentuée, est de timbre Iii si celle du thème du sing. est Ici ou bien lai, dans
conj. préfixal e
n:J-h6n?-u t:J-�6n?-u Y:J-1:).6n?-u
1. 2. 3.
impératif
3. Verbes à 2ème et 3ème radicales semblables 11:).assl "sentir" sg.
conjugaison préfixale
yiCCcC, yiCCaC, yiCCaC, yaCCcC, yiCCcC, y:JCC:JC,
19
Morphologie
Morphologie
pL
1. 2. 3.m. 3.f. 1. 2. 3.
conj. suffixale
1:).ass-éyt 1:).ass-éyt 1:).ass 1:).ass-ct 1:).ass-éyna 1:).ass-éytu 1:).ass-u/-éw
mascul in passif
ma1:).sUs
conj. préfixale
n-1:).:Jss t-1:).:Jss i-1:).6ss t-1:).:Jss n-1:).;ss-u t-1:).;ss-u i-1:).6ss-u
participes féminin
ma1:).sUsa
impératif
1:).;ss-u pl uriel
mal).susln
Le schème CaCC - iC:JCC est le plus fréquent. On trouve aussi CcCC - iCcCC, CcCC - iCcCC, CaCC - iCcCC et CaCC - iCaCC (pour un verbe : Igarrl - ligarrl "jeter des pierres"). La désinence de la 3ème pers. pl. de la c. suff. l a plus fréquente est -éw. Le préfixe t- s' assimile aux sifflantes, dentales ou affriquées initiales, le préfixe n- à Irl initial, de manière régulière pour le verbe Ir�dl "vouloir", mais seulement dans un débit rapide pour les autres. In-I s ' assimile toujours à Im-I. Aucun verbe de ce groupe n ' a de participe actif et les verbes intransitifs n ' ont pas de participe passif.
20
4.3. Verbes à 2ème radicale */h/
4. Verbes avec un phonème virtuel /"I
Lorsqu'i l est en seconde position dans la racine, */hl n' a pas eu les mêmes conséquences sur la morphologie du pl. de la c. préf. , de l'impératif et du participe passif que *le::1 et *1gl. La vocalisation de ces verbes est toujours du type CcocC ycC"cC, sauf pour le verbe Isaoarl - lyisOarl "veiller, faire des heures supplémentaires". La c. suff. suit le modèle des verbes à 2ème radicale *1e::1 ou *Igl (§ 4.2. p. 20 ) . Aucun de ces verbes n'a de participe actif.
4 . 1 . Verbes à 1ère radicale */e::/ , */g/ ou */h/ 10amell "faire" sg. 1. 2. 3.m. 3.f. p l . 1. 2. 3. impératif
conj. suffixale
conj. préfixal e
[a. mÜt] 10amÜ-t! [ n�mel] Ina-omell [a. mÜt] 10amiI-t! [t�mel ] Ita-omell [�me l ] 10amell [ y�me l ] Iya-omell 10aml-ct! [ �mlct] [Üme l ] Ita-omell [a. milna] 10amll-nal [ n�mlu] Ina-oml-ul [ t�mlu ] Ita-Oml-ui [a. mÜtu] 10amll-tul 10aml-ul [ �mlu] [ y�mlu] Iya-Oml-ui [ �mel] la-omel/ ; [ �mlu] la-oml-ui participe passif féminin
mascul in
If€:°cml "comprendre"
p l uriel
Aucun verbe de ce groupe n'a de participe actif. Les autres thèmes vocaliques sont °aCaC - ya °CaC, o:)C:)C y:)°C:)C et °cCcC - ycOCcC.
mascul in
conj. suffixal e
[mibawt] ImiboUt!
participe passif féminin
[ mibawta] ImibOUtal
[ Îfmu] Ii-fom-ul
participe passif féminin
ImifoUml [mifUma]
pluriel
ImifoUmal [mifumln]
ImifOumInl
_
conj. préfixale
[batt ] /bOat-t! [ nibat] [batt ] IbOat-tl [tfbat] [bat ] Ibaoat! [ yibat] [ b�tct ] IbaOt-E:t! [ tfbat ] [b�tna] IbOat-nal [nib�tu] [ b�ttu] IbOat-tul [ t ib�tu] [b�tu] IbaOt-ul [yib�tu] [ ibat ] Ii-boat! ; [ ib�tu] li-baOt-u/
[ nifmu] Ini-fom-ul [tifmu] ItI-fom-ul [yifmu] lyi-fOm-ul
1. 2. 3.
masculin
[mifUm]
4.2. Verbes à 2ème radicale */e::/ ou */g/
sg. 1 . 2. 3.m. 3·f. p l . 1. 2. 3. impératif
impératif
conj. préfixale
pl.
[ma. mUl l ImaomUl/ [ma. mUla] ImaomUlal [ mamuIIn] Imaomu1Inl
IbaOatl "envoyer"
21
Morphologie
Morphologie
Ini-boat! Itf-boat! Iyi-boat! lÜ-boat! Ini-baOt-ul Iti-baOt-ul lyi-baOt-ul
pluriel
[ mibawtIn] ImiboutInl
Le participe actif ne survit plus, à ma connaissance, que pour un seul verbe : [?€ïyct ] I?€ïocd/, [ ?tda] I?€ïodal, [?cdln] , l?cOdïnl "assis". Les autres thèmes sont CaoaC - y:)C":)C, C:)o:)C - yiC°:)C et CcocC - yiCo cc.
4.4. Verbes à 3ème radicale */e::/ ou */g/ Il ne sera question ici que de ces deux phonèmes étymologiques car lorsque */hl était en finale dans le verbe il est devenu II).I en maltais et la conjugaison est celle des verbes à trois consonnes fortes. Les verbes à 3ème consonne radicale *le::1 ou *1gl ont deux paradigmes différents selon que 1°1 est passé à la pharyngale sourde II).I à la 3ème pers. masc. sing. de la c. suff. ou qu'il a simplement disparu, cas le plus fréquent. Aucun d'entre eux n'a de participe actif. In€:zaol "se dévêtir"
conj. suffixale
sg. 1. 2. 3.m. 3.f. p l . 1. 2.
3. impératif
conj. préfixale
[nÎnza] nzayt [tInza] nzayt [yÎnza] [n€:za] In€:zaol [Ünza] [ nszat ] In€:zo-at! [ninzaw] nzay-na [Ünzaw] nzay-tu [yinzaw] [n�zaw] In�zo-ul [ inza] li-nzaol ; [ inzaw] li-nza-ui
Ini-nzaol IÜ-nza ° 1 lyi-nzaOI ItI-nzaOI Ini-nzO-ul IÜ-nzO-ul Iyi-nzO-ul
22
Morphologie participe passif féminin
mascul in
[minzUl).] /minzUl)./ [ minzŒa] /minzŒoa/
Morphologie
p l uriel
[ minzuayn] /minzuoln/
Le schème CcCao - yiCCaO est le plus fréquent. Les autres sont CcCao - ycCCao, CaCao - yiCCaO et CaCao - yaCCao. Les quelques verbes de schème CcCal). qui ont maintenu consonne forte ne sont pas pour autant alignés totalement la conjugaison des verbes à trois consonnes fortes. Le pl. identique à celui du verbe /nézao/ ci-dessus. Seul le présente des différences. /zébal)./ "peindre" sg.
con). suffixale
zbay-t ou zbal).-t zbay-t ou zbal).-t 3.m. zébal). 3.f. zcbO-�t 1. 2.
con). préfixale
nl-zboh ti-zboh yl-zboh ti-zbo�
une sur est sg.
Il existe également les schèmes WiCeC - yiCcC et WcCcC ycCc C. , Trois verbes ont un schème différent à la c. préf. /wcgao/ "avoir mal, souffrir" et /wéra/ "montrer" ont une voyelle longue /ïl/ après le préfixe désinentiel : /y-Ugao/ et /y-uri/. Le verbe /wéra/ ne peut avoir, en outre, qu'une 1ère syllabe /u-/ aux deux lères pers. du sing. et à toutes les pers. de la c. suff. /wa?af/ "tomber" a une voyelle /I;)/ : /y-&ï?af/. 5.2. Verbes à 2ème radicale semi-vocalique
pl.
5 . Verbes comportant une radicale semi-vocalique
Le maltais n ' a qu' une dizaine verbes à initiale /w/. Les lères et 2èmes pers. de la c. suff. ont deux formes possibles ( voir tableaux ci-après ) . L e participe actif ne survit plus avec cette fonction et le participe passif, de schème miCïlC, semble être en train de tomber en désuétude dans la langue parlée. Mon informatrice le remplace le plus souvent par le participe du thème dérivé à 2ème radicale géminée ( voir p . 27 ) .
sg.
pl.
1. 2.
wasal-na / usaI-na wasal-tu / usaI-tu wasl-u
na-sl-u ta-sl-u ya-sl-u
?om-t ?om-t 3.m. ?am 3.f. ?�m-ct ?8m-na 1. ?8m-tu 2. ?�m-u 3.
impératif
1. 2.
impératif
5 . 1 . Verbes à 1ère radicale semi-vocalique
23
masculin
sayy�m misyur
actif passif
?ïlm
?Œm-u
i-?Um-u
participes f�minin
saYYTa misyura
p l urie l ,
sayymï� ( "jeûnant" ) misyurïn ( "cuit, mûr" )
impératif
Le schème CaC - iCïC a une voyelle /i/ à toutes les autres pers. à syllabe doublement fermée de la c. suff. /sar/ "il devint", /sirt/ "je devins" . Le préfixe t- des 2èmes pers. et de la 3ème pers. fém. de la c. préf. s'assimile aux sifflantes, dentales et affriquées. Le participe passif n' est pas fréquent et mon informatrice utilise plus souvent celui des verbes à 2ème consonne radicale géminée. Les autres schèmes sont CI;)C - iCïlC, CI;)C - iCïC, °tC iOïC, DaC - i05C et CI;)l). - iCïl)..
a-saI
5 . 3 . Verbes à 3ème radicale semi-vocalique Schème CcCa - yiCCi : /mésa/ "marcher"
a-sl-u
sg.
con). suffixale
msey-t 2. m �ey-t 3.m. mesa 1.
cr;n). préfixal e
ni-msi ti-msi yi-msi
impératif
i-msi
24
Morphologie
Morphologie 3.f.
pL.
1. 2.
3.
msï;i-t mscy-na mséy-tu msc-w mascuLin mï;isi mibni
actif passif
6. Les verbes quadriconsonantiques
ti-msi ni-ms-u tl-ms-u i-ms-u yi-ms-u participes f�minin pLur �eL mï;isya misyïn mibniyya mibniyyln ( "construit" )
6.1. Le thème de base
On trouve aussi les schèmes CcCa - yaCCi, CcCa - ycCCi et CaCa yiCCi ( ces verbes ont la particularité d' avoir une finale /-at/ au lieu de /-ï;it/ à la 3ème pers. fém. sing. de la c. suff. /grat/ " elle s' est produite", qui se différencie ainsi du verbe "courir" : /grï;it/ "elle a couru " ) . Schème CcCa - yiCCa sg.
pL.
1. 2.
3.m. 3.f.
1. 2.
3.
passif
/méla/ "remplir" con). préfixaLe ni-mla tI-mla yi-mla tI-mla ni-mlé-w ti-mlé-w yi-mlé-w participes mascuLin féminin mimli mimliyya
25
impératif
i-mla
i-mlé-w pL uriel mimliyyln
On trouve aussi les schèmes CcCa - ycCCa, CaCa - yiCCa, C::JCa - y::JCCa et CaCa - yaCCa ( dont la désinence de la 3ème pers. fém. sing. est /-at/). La c. suff. est identique au groupe de verbes précédent. Je ne connais pas de participe actif pour ces verbes. Il existe également quelques verbes à 2ème et 3ème radica les semi-vocaliques, la seconde gardant une articulation conso na�tique stable, par ex. /téwa/ - /yItwi/ "plier" , /séwa/ /yiswa/ "valoir". Ils n ' ont pas, à ma connaissance, de parti cipe actif. _
Pour les nombreux verbes quadriconsonantiques, on distingue les types formels suivants : C1 VCZC3VC4 , ClVW/YC3vC4, C1 VCZWVC4, ClVCZC3VC3, C1 VCZC1 VCZ, C1 VCZC 1 VC3 et C1 VCZC3VCZ. I l y a cinq séquences vocaliques possibles : a-a, c-a, a-c, c-c et i-c. Ces voyelles sont identiques aux c. suff. et préf. Lorsque la 3ème radicale est une liquide, le groupe CZC3C4 est disjoint par une voyelle accentuée qui est /i/ en contexte consonantique non conditionnant ou /a/ en contexte condition nant. Si la 3ème consonne est une semi-voyelle /w/, elle perd son articulation consonantique et on entend pour le groupe CZC3C4 une voyelle de dis�onction /u/ ultra-brève et non accen tuée entre Cz et C4 : [ wér ru ] , /\�crwru/ "ils ont terrorisé". Le participe passif est fréquent, mais pas de formation automatique. Il n ' y a pas de participe actif. Le préfixe t- des 2èmes pers. de la c. préf. s ' assimile aux consonnes sifflantes, dentales et affriquées. /séngd/ "balancer" con). suffixaLe 1. scngÎl-t sg. 2. scngÎl-t 3.m. séngd 3.f. séngl-ct 1. scngÜ-na pL 2. scngÜ-tu 3. séngl-u passif
masculin mséngd
impératif con). préfixaLe n-séngd séngd iS-séngd i-séngd iS-séngd n-séngl-u séngl-u iS-séngl-u i-séngl-u participes pLurieL féminin mscnglÎn mséngla
6.2. Le thème dérivé Ces verbes n ' admettent qu' une seul e forme dérivée à préfixe /t-/ qui s ' assimile devant les consonnes sifflantes, dentales et affriquées. Les voyelles restent les mêmes qu' à la forme de base. La conjugaison du thème dérivé ne diffère de celle du thème simple que par la nature du préfixe de la c. préf. qui est toujours vocalisé : /yi-tbandal/ "il est balancé".
r
26
Le thème a le plus souvent une valeur de réfléchi ou de passif. 7.
pL.
1.
2.
3.m. 3.f. l.
2.
3.
conj. préfixaL e je te donne in-tI-k it-tI-ni tu me donnes i-tI-ni il me donne it-ti-ni eLLe me donne in-tU-k nous te donnons it-tU-ni vous me donnez i-tU-ni ils me donnent
n-, et celle de radicale géminée.
factitif
représentée
par
le
thème
à
2ème
1. Thèmes à modification interne du radical
Les verbes "irréguliers"
Le maltais connaît quelques verbes qui, à la suite le plus souvent de la perte d ' une ou deux consonnes dans la totalité ou une partie des paradigmes , ont une structure syllabique qui ne correspond pas aux modèles donnés ci-dessus. Ces verbes et leurs paradigmes se trouvent dans Aquilina ( 1959 et 1965 ) . L e verbe Ital "donner" , lorsqu ' i l est suivi d ' un pronom suffixe complément connaît, en outre, une seconde conjugaison à la c. préf. et à l' impératif, très fréquente dans l a langue parlée : sg.
27
Morphologie
Morphologie
impératif
ti-ni
donne-moi
tU-ni
donnez-moi
II. LE SYSTEME DE DERIVATION Malgré une richesse apparente en thèmes dérivés (huit formes différentes) le système de dérivation du maltais apparaît à l' heure actuelle comme entièrement figé et non productif. Plus aucune création lexicale ne se fait par son intermédiaire. L' emprunt semble bien être le seul moyen de création vivant. Seulement quatre thèmes dérivés sur les huit sont numéri quement bien représentés (ce qui ne prouve rien quant à leur degré de vitalité ) : pour les quadriconsonantiques la forme à préfixe t- et pour les triconsonantiques celle à gémination de la 2ème radicale , celle à préfixe t- et 2ème radicale géminée et celle à préfixe n-. Nombre de termes d ' origine siculo-ita lienne se sont même adaptés aux trois premIeres. Les cinq autres thèmes ne sont plus que des vestiges. Aucun verbe n ' a tous l es thèmes dérivés. Deux valeurs essentielles ont survécu en maltais, celle de réfléchi-passif, représentée par des formes à préfixe, t- ou
1.1. Thème à 2ème consonne radicale géminée /kisscr/ "casser en morceaux" conj. préfixaLe conj. suffixaLe n-kisscr k issir-t 1. sg. t-kisscr kissir-t 2. i-kisscr 3.m. kisscr t-kisscr 3.f. kissr-ct n-kissr-u kissir-na 1. pL. t-kissr-u kisslr-tu 2. i-kissr-u kissr-u 3. participe pLurieL féminin mascuLin mkissrln mkissra mkisscr
impératif
kisscr
kissr-u
Les règles d' assimilation sont les mêmes que celles expo sées pour les verbes à deux radicales semblables (p. 19 ) . En outre, le préfixe /t-/ s' assimile à /n/. D ' une manière générale, les voyelles de la forme simple ou du nom correspondants sont maintenues dans le thème dérivé, mais la séquence i-c passe quelquefois à c-c. La séquence :)-:) du thème simple devient a-a au thème dérivé. Le participe a une valeur passive et seuls les verbes transitifs peuvent éventuellement en former un. Les verbes à 3ème radicale semi-vocalique d' origine arabe ou italienne ont tous une voyelle finale /i/ à la c. préf . Cette forme est essentiellement active et transitive. Elle peut n' être que l ' équivalent d' une forme simple correspondante, ou bien il peut arriver que la relation sémantique avec la forme de base ne soit plus perceptible. L' emploi intensif est présent mais secondaire. La valeur factitive ou causative s' est beaucoup développée du fait de la perte de la forme dérivée à préfixe hamza. Ce schème a aussi été très productif comme forme dénominative de racines triconsonantiques ou de mots d' emprunt. Le verbe /giddcb/ "traiter de menteur" est, comme à Alger Juif par exemple (M. Cohen 1912: 204 ) , un reste isolé de la valeur déclarative de cette forme .
28
1 . 2. Thème à allongement de la 1ère voyelle Ib�rckl "bénir" sg.
pL
con). suffixaLe
birIk-t 2. birIk-t 3.m. b�rck 3.f. b�rk-ct 1. birIk-na 2. birIk-tu 3. b�rk-u 1.
masculin
mb�rck
con). préfixaLe
impératif
n-b�rck t-b�rck i-b�rck t-b�rck n-b�rk-u t-b�rk-u i-b�rk-u
participe féminin
mb�rka
b�n:k
b�rk-u
pluriel
,
Les verbes d' origine étrangère qui ont été adaptés phoné tiquement à ce thème n' en partagent pas les valeurs sémanti ques , pas même celle de dénominatif . 1.3. Thème à allongement de la 2ème voyelle Isfarl "jaunir" sg.
pl.
mbirkln
Deux verbes à 1ère voyelle lai sont encore vivants Il).iircsi "surveiller" et I?iirarl "confesser". Il n ' y a pas de verbe à 2ème radicale semi-vocalique. Les rares verbes à 3ème radicale semi-vocalique ont une finale I-i/ à la c. préf. La grande majorité des verbes de ce thème comporte un 101 en 2ème radicale . Ce thème dérivé leur tient lieu de thème à 2ème radicale géminée. La voyelle thématique est articulée [t] ( parfois [ a ] ) à toutes les pers. de l a c. suff . , sauf la 3ème masc. sing. , ainsi qu' à toutes les pers. du pl. de la c. préf. Cette forme dérivée, totalement figée, est résiduelle en maltais et lexicalisée dans la conscience des locuteurs. Elle est très peu représentée, à peine une quarantaine de verbes . , assez peu USites en maJonte. 2 Beaucoup de verbes de ce thème n ' ont pas de forme simple ou de nom de même racine correspondants, mais sémantiquement ils expriment une action faite par le sujet par rapport à d' autres personnes ou objets. D ' autres sont de simples équiva lents de la forme simple. Les valeurs dominantes sont celles de causatif-factitif et de dénominatif. La valeur de conatif n ' est plus perceptible que pour un verbe : ItaOaml "nourrir" It�Ocml "savourer, goûter" . .
29
Morphologie
Morphologie
•
con). suffixale
sfar-t sfar-t 2. 3.m. sfar 3.f. sfiir-ct sfiir-na 1. sfiir-tu 2. sfiir-u 3. 1.
masculin
musfiir
con). préfixal e
ni-sfiir ti-sfiir yi-sfiir ti-sfiir ni-sfiir-u ti-sfiir-u yi-sfiir-u
participe féminin
musfiira
impératif
sfar
sf&r-u p l uriel
musfarln ( "pâle ")
Le parler de mon informatrice présente la particularité de conserver la longueur de la voyelle même en syllabe doublement fermée. Ce n' est pas la règle pour tous les parlers maltais, ni même en "standard". Il n ' existe pas de verbe à 3ème radicale semi-vocalique. La valeur du thème est celle d'une forme dénominative, fondée sur des adjectifs. Elle marque l ' acquisition d' une qua lité physique ou morale. A part les verbes dérivés d' adjectifs de couleur, le schème est désuet ( surtout dans le parler de mon informatrice de La Valette ) et ne survit plus guère que dans la littérature. Il a eu tendance à être remplacé par le thème à 2ème radicale géminée. Toutefois, le degré de vitalité de cette forme dérivée ne semble pas être identique partout. Aquilina ( 1987 ) a même enregistré à Gozo des formes de ce type pour des termes d ' ori gine italienne : Ifnadl "devenir profond" et Iflacl "devenir hypocrite" inconnus de mes informateurs de maltais "standard". 2. Thèmes surdérivés
2
Dépouillement ( 1986 ) .
effectué
dans
le
dictionnaire
de
Schembri
2.1. Thème à préfixe /t-/ et à 2ème radicale géminée La conjugaison est analogue à celle du thème à 2ème radicale géminée (p. 27 ) , sauf les préfixes de la c. préf. qui sont
30
31
Morphologie
Morphologie
toujours vocalisés Ii/. La vocalisation est la même que pour les verbes sans préfixe correspondants. Le préfixe It-I s' assimile aux consonnes sifflantes, den tales ou affriquées. Les verbes à 3ème radicale semi-vocalique d' origine arabe ou italienne ont une c. préf . à finale I-a/. Le participe de schème mit-CvCCvC est d ' un emploi très rare. On y supplée par celui des formes à 2ème radicale gémi née. Seul, semble-t-il, ImizzÉ:wwcgl "marié" est bien vivant. Ce thème surdérivé a été aussi productif que celui sans préfixe correspondant, même pour les verbes fondés sur des emprunts à l ' italien. La valeur fondamentale est réfléchie-passive, l ' une ou l ' autre nuance dominant selon les verbes. Certains d' entre eux . , ont un sens plus proche du moyen ou du deponent mterne3 que du réfléchi. Un tout petit nombre de verbes a une valeur de réciproque.
me. Elle concerne principalement les verbes sans 2ème radicale 101. On trouve également la valeur de réfléchi de conatif. Aucun terme d' origine étrangère n ' a produit de verbe à ce thème, d' ailleurs en très nette régression dans le parler de mon informatrice : 60% des 42 verbes relevés dans les diction nair es d' Aquilina ( 1987) et Schembri ( 1986) lui sont inconnus.
2.2. Thème à préfixe It-I et à 1ère voyelle longue Le thème se forme par préfixation de t- au thème à voyelle longue après la 1ère radicale. Leurs conjugaisons sont analo gues. Les règles d' assimilation sont les mêmes que pour le thème précédent. Les formes avec voyelle lai sont plus nombreu ses qu' au thème sans préfixe. Le participe spécifique à ce thème n' est que très peu représenté. On y supplée par celui de la forme sans préfixe t correspondante. Il est de toutes façons d'un emploi rare. De même que pour le thème sans t-, cette forme dérivée comporte surtout des verbes à 2ème radicale 1°1, mais leur c . suff. est différente. Il y a une diphtongue [ c y l aux lères et 2èmes pers. et une voyelle longue [ t ] aux 3èmes pers. du fém. sing. et du pl. Les verbes à 3ème radicale semi-vocalique ont une c . préf. à finale I-a/. Ce thème résiduel est un peu plus représenté dans le parler que la forme sans préfixe correspondante. La valeur de réciprocité est encore présente en maltais mais elle tend à ne plus être sentie comme inhérente à la for-
3
Sur cette terminologie, voir M. Cohen ( 1911 ) .
3. Thèmes dérivés à infixe ou à préfixe 3 . 1 . Thème à infixe /-t-/ IntÉ:fa?1 "être dépensé" sg.
pL
conj. suffixa�e
ntcfa?-t ntcfa?-t 2. 3.m. ntÉ:fa? 3.f. ntÉ:f?-ct ntcfa?-na 1. ntcfa?-tu 2. ntcfa?-u 3. 1.
masculin
miftakar
conj. préfixa�e /
ni-ntcfa? ti-ntÉ:fa? yi-nt�fa? ti-ntcfa? ni-ntÉ:f?-u ti -ntÉ:f?-u yi-ntÉ:f?-u
participe féminin
miftakra
impératif
ntÉ:fa?
ntÉ:f?-u
p l uriel
m iftakrln ( "souvenu" )
Les voyelles sont les mêmes qu' à la c. suff . du verbe correspondant au thème simple. Seul le participe de Iftakarl "se souvenir" a survécu dans le parler de mon informatrice. La voyelle finale des verbes à 3ème radicale semi-vocali que est I-al à la c. préf. si le verbe est de sens passif, sinon cette voyelle est Ii/. Le maltais possède un thème dérivé hybride, pour deux verbes très vivants . Il est formé par infixation de -t- et allongement de la voyelle de la 1ère radicale. Il s' agit de Iftf,j°cml "être d' accord", et de Irtf,j°cdl "trembler". Ce dernier verbe a une conjugaison particulière dans le parler de mon informatrice. Le timbre de la voyelle thématique est hl (d' autres locuteurs ont une conjugaison calquée sur celle de Iftf,j°cm/, sauf aux 3èmes pers. sing. de la c. suff . ) . le.
La forme à -t- infixé apparaît elle aussi comme résiduel Elle comprend principalement des verbes à 1ère radicale
32 4
liquide ( 26 ) . De plus les nombreux doublets qu' elle présente avec la forme à préfixe n- ou nt- ( voir ci-dessous § 3 . 2 . 2. p. 33) conduisent à penser que le maltais est en passe d' éliminer ce thème comme catégorie morphologique distincte. Sur les 46 verbes relevés, 35, en majorité de sens purement passif, ont aussi une forme à préfixe n- ou nt-. Parmi ces 35 doublets, mon informatrice ne connaît que la forme à préfixe n- ou nt- pour 577. d ' entre eux et elle considère 67. des verbes à infixe -t comme rares et littéraires. Qu'ils soient ou non en relation avec une forme de base, la valeur de ce thème est essentiellement celle d'un réfléchi ou d ' un moyen, ou, moins souvent si l ' on ne considère que les verbes sans doublets, celle d ' un passif. 5 Aucun terme d' origine étrangère n ' a produit de verbe à ce thème.
3.2.2. Thème à préfixe /nt-/ 6 simple à préfixe /nt-/, Le maltais a développ é un thème formes deux des variante du précéde nt. L' usage a consacr é l ' une elles qu' ment fréquem pour certains verbes, mais il arrive souvent plus le mais , locuteur coexi stent, parfois chez le même s attestées pour selon les régions. Quand il y a deux variante celle à majorité en utilise rice informat mon le même verbe, à i�i�i �l e verbes des que d compren ne thème Ce préfixe nt-. , mItIa a autres s quelque t e yelle semi-vo , ) r , n , m liquide C L , italienne : le /b/, /0/ ou /?/ ainsi q� ' un verbe d' origine /Uza/ "utiliser ", /ntUza/ - /yintuza/ "être utilisé" . Les verbes à 1ère radicale semi-voc alique sont, à ma connaissance, au nombre de trois. Les deux premier s, /ntIrct/ pesé" et /ntizcn/ "être C/wlrct/ "hériter " ) "être hérité" Le e. paradigm le tout dans /w/ le C/wlzcn/ "peser" ) ont perdu ' en " anCI , t rer " mon / wcra (/ " montrer se troisièm e, /ntwcra/ verbe à 1ère radicale /?/) a conservé la semi-voy elle. /
/
3.2. Thèmes à préfixe /n-/ ou /nt-/ Les voyelles de ces thèmes sont les mêmes qu' à la forme simple correspondante et identiques pour les deux conjugaisons. Le participe est inexistant. Les verbes à 3ème radicale semi-vocalique ont toujours une finale /-a/ à la c. préf. 3.2.1. Thème à préfixe /n-/ : /ndal)al / "s'immiscer" sg.
pL
4
conj. suffixaLe ndl)al-t 2. ndhal-t 3.m. nd�l)al 3.f. ndcihl-ct ndh� l-na 1. 2. ndhal-tu 3. nd�l)l-u 1.
.
/
conj. préfixaLe n i-ndcil)al ti-ndcil).al yi -ndcil)al ti-ndcil).al ni-ndcil)l-u ti -ndcil).l-u yi-ndcil).l-u
33
Morphologie
Morphologie
impératif
"
/ntrcibat/ "être lié" conj. suffixaLe ittrabat-t 1. sg. ittrabcit-t 2. 3.m. ittrcibat 3.f. ittrcibt-ct ittrabcit-na 1. pL ittrabcit-tu 2. ittrcibt-u 3.
/
conj. préfixaLe ni-ntrabat ti-ntrcibat yi-ntrcibat ti-ntrcibat ni-ntrcibt-u ti-ntrcibt-u yi-ntrcibt-u
impératif
ntrcibt-u
Le parler de mon informatrice présente la particularité d' assimiler le n au t uniquement à la c. suff. , mais ceci n ' est pas valable pour l ' ensemble de l ' archipel, ni pour tous les locuteurs de maltais "standard" . ndcil).l-u
Ce dénombrement a été effectué d ' après le dictionnaire de Schembri ( 1986 ) qui compte 46 verbes de ce thème. . 5 P eu t-etre ' est-ce une coqUIlle qui fait dire à Borg ( 1988 : 245 ) que ces verbes peuvent être de sens réciproque. Aucun des verbes recensés dans les dictionnaires n ' a ce sens.
6 Cette forme est signalée dans le Nord Constantinois à Djidjelli et dans le Nord Oranais (Tlemcen, Traras ) . Voir Ph. Marçais ( 1977 : 67 ) .
34
Morphologie
3.2.2.1. Thème à préfixe /n-/ et infixe /-t-/
Lorsque l e verbe commence par l ' une des sifflantes /s/ ou /5/, et, pour un verbe seulement, /h/ ( /nl)t�.iV "être nécessaire" ) , l' élément /-t-/ d u préfixe vi �nt s e placer après la 1ère évitant ainsi l ' assimilation du /t/ du consonne radicale, préfixe. Ces verbes se conjuguent sur le modèle du thème à préfixe /n-/ (p. 32). 3.2.2.2. Thème à préfixe /n-/ et 1ère voyeLLe Longue
Les verbes à 2ème radicale /0/, trois à ma connaissance, ont dév� loppé un s?hème spécial avec allongement de la 1ère voyelle radIcale : /ng�od/ "être obligé" ( ce verbe est considéré comme rare par les jeunes locuteurs de "standard" ) , /nd6°cs/ "s' insi nuer", /nd�oc5/ "être surpris" ( rare) . La valeur de ces thèmes, numériquement bien représentés dans le parler, est principalement celle d ' un passif du thème simple. Il convient d' ajouter qu'ils sont en régression. Un 7 test portant sur 180 verbes effectué auprès de mon informa trice fait apparaître 20% de verbes inconnus et 10% qu' elle considère comme rares et littéraires. De plus, cette forme est concurrencée par une tournure périphrastique calquée sur l ' italien ( /gg/ "venir" + participe passif ) . l ' en ai même relevé un exemple (à Melliena) où l' auxi liaire est suivi d ' un verbe à la c. préf. à valeur passive : /I)alli tIgi tinstama°/ <pour elle-vient elle-est-entendue> "pour qu'elle soit entendue".
3.3. Thèmes à préfixe /st-/ /sténbal)/ "se réveiller" conj. suffixaLe 1. sg. stcnbah-t 2. stcnba�-t
7
conj. préfixaLe ni-sténbah ti-sténbat
Environ les deux t iers d ' un dépouillement d' Aquilina ( 1987) et Schembri ( 1986 ) .
35
Morphologie
des
impératif
sténbal)
dictionnaires
pL.
3.m. sténbal) 3.f. sténbl)-ct stcnbal)-na 1. stcnbah-tu 2. sténbl) ":'u 3. mascuLin misténbal)
yi-sténbah ti-sténbat ni-sténbl)-u ti -sténbh-u yi-sténb�-u participe féminin pLurieL mistcnbl)In misténbl)a
sténbl)-u
La forme du préfixe dépend de la structure syllabique du verbe. Elle est stv- ( la voyelle est /a/ devant /1)/ ou /0/, /c/ ailleurs) devant un groupe de consonnes : /stal)ba/ "se cacher" /stkcnn/ et st- devant une consonne suivie d'une voyelle "chercher refuge, s' abriter". Tous les verbes de ce thème ( et de sa variante ci-dessous ) ont un participe. Les quelques verbes à deux radicales semblables sont de schème stClvCZCZ. La c. préf. des verbes à 3ème radicale semi-vocalique est à finale /-a/. Deux verbes ont une f inale /i/ : /stal)a/ /yistl)i/ "avoir honte" et /sta?sa/ - /yista?si/ "demander" (ou /sa?sa/ - /isa?si/ forme "populaire" et très courante ) . L e radical des verbes à 2ème consonne radicale semi-voca lique est construit sur le thème simple : /str�l)/ "se reposer". Il conserve la même voyelle longue à la c. préf. , abrégée en /a/ aux deux conjugaisons aux personnes à syllabe doublement fermée ( /stral)t/ "je me suis reposé" ) . Le maltais connaît un autre schème avec ce préfixe où la 2ème radicale est géminée : StCIVCZCZVC3. C' est une simple variante du précédent qui n ' a produit que 3 verbes : /stl)ayyd/ "s' imaginer", /stl)arrcg/ "enquêter", et /stkérral)/ "détester" . Ils font partie des verbes qui ont u n comportement particulier au thème simple (2ème radicale semi-vocalique ou liquide) c' est ainsi que le maltais a remédié aux problèmes qu' ils posaient. /stl)arrcg/ "s' informer" conj. suffixaLe sg. stl)arrig-t 1. 2. stl)arrig-t 3.m. stl)�rrcg 3.f. stQ.arrg-ct pL. stQ.arrig-na 1.
conj. préfixaLe ni -stQ.�rrcg ti -stl)arrcg yi -stQ.�rrcg ti -stl)arrcg ni -stQ.arrg-u
impératif
stQ.arrcg
Morphologie
Morphologie
36 2. 3.
stl;tarrig-tu stl;tarrg-u masculin
mistl;tarrcg
ti-stl;tarrg-u yi-stl;tarrg-u participe féminin
mistl;tarrga
stl;tarrg-u
pluriel
mistl;tarrgln
Ce thème forme une série très limitée et fermée en maltais et comporte à peine une vingtaine de verbes. Les valeurs de désidératif, réfléchi interne et déclaratif ne sont plus que le reflet de l a conservation de termes isolés. III. LES VERBES D'ORIGINE ETRANGERE "NON ASSIMILES" Le maltais emprunte beaucoup de verbes, ou en fabrique à partir de noms d ' origine étrangère, qui ne se coulent plus actuelle ment dans le moule des schèmes simples ou dérivés hérités de l ' arabe. Par contre, en s' adaptant à la langue ils ont fourni un nombre limité de nouveaux schèmes cités par Aquilina ( 1965: 202-5) et dont je ne rappellerai que le plus productif : il consiste en un redoublement de la consonne initiale du verbe emprunté lorsque celui-ci commence par une consonne ou un groupe consonantique à 2ème élément liquide /immtrita/ "mériter" < it. meritare /iccékkya/ "vérifier" < ang. ta check Du point de vue des paradigmes de la conjugaison, tous les verbes non adaptés aux schèmes hérités de l ' arabe ont les mêmes désinences que ceux à 3ème radicale semi-vocalique (voir p. 23-4 ) et l a structure syllabique du radical est invariable. Ils peuvent être regroupés en deux catégories : a) c. suff. à finale /-a/, c. préf. à finale /-a/. Il s' agit des verbes d' origine italienne ou sicilienne à infinitif en -are ou -ari, de tous les verbes d' origine anglaise et des verbes formés à partir de noms empruntés. La désinence de la 3ème pers. fém. sing. de la c. suff. est /-atl. h) c. suff. à finale /-a/, c. préf. à finale /-i/. Ce sont les verbes d' origine italienne ou sicilienne à finale -ere, -urre, -orre ou -iri et de quelques-uns à finale -ire. La désinence de la 3ème pers. fém. sing. de la c. suff. est /-�tI. Aucun de ces verbes d' origine étrangère n' a de participe actif. Le participe passif, très fréquent mais pas de formation automatique, s ' obtient par suffixation de morphèmes empruntés à l ' italien au schème de la 3ème pers. masc. sing. : /-at/ pour le groupe (a), /-iltl pour le groupe ( b ) . Le fém. se forme par
37
le suffixe /-i/. Il Y a ajout du suffixe /-a/ et le p l . par quel ques exceptions à ces règle s. Pour tous ces verbes, le réfléch i se forme de mamere i /rill;t-/ (litt. " �me" ) périphrastique au moyen du pronom réfléch . . d'un pronom personnel suffixe . Le syntagme tend a se SUi Vi . arabe qUl posse' dent une répandre même pour les verbes d' origine forme dérivée de sens réflé chi : L i [. . .1 ssib rul1na fiha ( Borg 1988 : xi l
"Dans laquel le elle se trouve" en Le verbe /nsab/ "se trouver" est encore fréquent ma lta is. d' un Le passif est calqué de l' italien. Il est formé du passif e particip du suivi ) "venir" itt. l ( /g�/ auxili aire . ) verbe : /yigi ppumpyitl " i l est pompé " ( voir p. 320-5
DEUXIEME P ARTIE V ALEURS ET EMPLOIS DES DEUX CONJUGAISONS
I. CONSIDERATIONS GENERALES SUR L' ASPECT, LE TEMPS ET LE MOD AL Borg dans sa thèse parue en 1981 a amorcé l ' étude de l ' aspect pour le maltais. Son analyse, l imitée à quelques verbes de mouvement et dans laquelle il a aussi intégré les formes nomi nales du verbe : participes et noms d ' action, se situe dans l e cadre de la théorie localiste tel le que l ' a formulée Lyons (1 977 ) , entre autres. Le travail entrepris ici a voulu élargir le domaine de recherche à tous les types de verbes, mais le limiter aux seules formes intégrées dans le système verbal , ce qui é l imine, pour l ' aspect verbal , les noms d' action et les participes passifs que Borg avait inclus dans sa description. I l convi ent d ' abord d' éclaircir un premier point la notion même d' aspect verbal. L' hypothèse localiste n ' est qu' une des théories l inguistiques parmi toutes celles qui se sont intéressées à la question. Il est inuti le ici de refaire l ' inventaire des définitions qui en ont été données ( voir D. Cohen 1989 ) . Il suffira seulement de préciser que la démar che entreprise ici se situe dans un autre cadre que celui de Borg, celui de la réflexion menée par David Cohen, dont il fait le point dans un l i vre récemment paru, intitulé L'Aspect verbal (1989 ) . Les sémitisants, e t particulièrement les arabisants, sont familiarisés depuis longtemps avec le terme d ' aspect dont les caractéristiques sont intrinsèques au verbe lui-même dans sa fonction de prédicat (voir par ex. M. Cohen , 1924: 12 et D. Cohen, 1989: 42 l . Une des propr iétés du système aspectuel est de ne pas se rattacher à une référence extérieure , qu' i l s' agisse du locuteur ou de la situation temporelle. Ce que l e locuteur dit, i l le dit d u prédicat et non pas d e lui-même. S a seule intervention est d'ordre stylistique et réside dans l e choix qu ' i l fait d ' une forme p l utôt que d' une autre. Il
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Valeurs et emplois des deux conjugaisons
Aspects, temps et modal
convient d ' ajouter à cette définition le fait que l ' aspect s ' applique, en principe, à tous les verbes d'une langue donnée. Cette premlere approche abstraite de l ' aspect doit être précisée quant à son fonctionnement qui repose sur une opposi tion formel le et sémantique. Son fondement est ce que D. Cohen appel l e la "délimitation" , dont l ' expression la plus simple réside dans l a constatation qu' une relation prédicative a l ieu, en dehors de toute considération d ' ordre temporel . Du point de vue formel , s' opposent une forme qui marque la délimitation ( 8 ) et "une "forme d e base" ( A ) . Seul le premier terme de l' opposi tion ( B ) peut être défini de manière entièrement positive celui où l a limite est envisagée, où la relati on prédicative est considérée comme un événement, alors que le second, la "forme de base" ( A ) , se caractérise d' abord par le fait qu' aucune délimitation n' est prise en compte, que la relation prédicative y est posée comme générale, avec pour coroll aire que le procès exprimé par le verbe est considéré dans son déroulement . B peut donc être vu comme le terme marqué de l ' opposition. Ces deux formes verbales 8 et A correspondent respectivement, en arabe, et en maltai s, aux c. suff. et préf. , communément dénommées "accompl i " et " inaccompli". Le verbe, dans un système aspectuel, ne se réfère donc pas au moment de l ' énonciation, ce qui justifie que chaque forme verbale puisse être située, par contexte, aussi bien dans le passé que dans le présent ou le futur. Car ce qui est pris en compte c' est le degré d' achèvement ou de non achèvement du procès qui explique toutes les réal isations sémantiques de l ' opposition. De ce point de vue, i l a paru intéressant d' étudier les divers emplois en contexte des formes verbales du maltais pour voir si le fonctionnement du système repose encore sur de telles bases aspectue l les, s ' i l "transcende tout contexte" ou bien s ' i l a suivi une évolution particulière. La démarche est très classique, certes, mais elle a semblé nécessaire pour décider du caractère temporel ou aspectif, voire aspectivo temporel, du système verbal du maltai s . D' autant plus nécessai re que les grammaires traditionne l les (voir par ex. Sutcliffe 1936 ou Aquilina 1965 ) le présentent comme simpl ement temporel.
le plan de l a concomitance et fonder ainsi un système aspectif "relatif" et référencié dans lequel A et 8 sont scindés en deux "sous-aspects" a et (3 qui représentent respectivement un inaccomp l i général ( Aa), un inaccompl i concomitant ( A(3 ) , un accompli général (Ba) et un accompl i concomitant (8(3 ) . Qu' i l s' agisse de l ' un o u l ' autre terme de l ' opposition aspectuelle, donc que l a relation prédicative so it envisagée comme achevée (A) ou non achevée ( B ) , il est possible de considérer le procès sous deux angles différents ; soit défini aspectivement en lui même ou pour lui-même (a), soit concomitant à un autre événe ment ou à l ' acte de l ' énonciation ( (3 ) . On parle alors de progressif lorsqu ' i l s ' agit de la réali sation du concomitant ((3) dans l ' inaccompli A et de parfait pour la réalisation du concomitant ( (3 ) dans l ' accompl i 8 . "Le progressif (A(3 ) et le parfait (8(3) occupent donc des positions symétriques dans les deux aspects" ( D . Cohen 1989 : 96 ) . L a concomitance peut s e définir comme l e lien qui s e noue entre le moment de l ' énonciation et celui de l ' événement et non pas celui représenté par un point quelconque sur l' axe du temps. La notion de concomitance n ' est en effet pas à propre les moments de l ' énoncia ment parler une notion temporelle tion et de l ' événement peuvent être situés sur des points différents de l ' axe temporel tout en étant exprimés par une même forme verbale. Il faut auss i se garder d' envisager l a concomitance comme représentant tout le système aspectif. Elle est plutôt l ' expression forme l le de certaines caractéristiques sémantiques déjà contenues dans A et 8 . Symétrie n e signifiant pas identité, l e s valeurs sémanti ques des formes verbales sont différentes. Pour la "forme de base" ( A ) , (3 représente l ' inhérence qui est mise en valeur par le choix fait d'un moment du déroulement et qui , par consé quent, fait ressortir le déroulement lui-même, alors que pour l ' aspect "délimité" ( 8 ) , (3 soul igne l ' adhérence c' est-à-dire le "moment où est prise en considération cette adhérence avec ses effets constatés à ce moment . " ( D . Cohen 1989: 265 ) . S ' i l est question d' inhérence et d' adhérence, c'est que la mise en rapport du moment de l ' énonci ation et du moment de l' événement impl ique nécessairement celle du sujet avec le procès : i l y a inhérence du sujet sur le verbe lorsque le contenu verbal est considéré comme un procès en déroulement, et adhérence lorsque le verbe exprime un événement rapporté.
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Si, dans beaucoup de langues sémitiques en part icul ier, l' opposition fondamentale entre un aspect délimité ( 8 ) et un aspect non dél imité (A) constitue souvent l a totalité du système, ce n' est l a seule possible. Un système aspectif "absolu" à deux formes A et 8 peut en effet être dédoublé sur
Le terme de "parfait" mérite quelque éclairci ssement car , comme D . Cohen l e reconnaît lui-même, il est difficile d'en
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Aspects, temps et modal
donner "une définition qui se voudrait à la fois unitaire et concrète" ( 1989 : 115) à cause des val eur's variées qui se rencon trent "simultanément dans les mêmes états de l angue, représen tées dans des proportions diverses . " ( ibid. ) . Ces valeurs sont au nombre de trois , essentiell ement "le statif, qui nomme purement et simplement l ' état du sujet, le résultatif qui rapporte cet état à l ' accompli ssement du procès nommé par le verbe et l ' inci dent qui nomme un événement accompl i , rapporté à la situation prise comme référence . " ( ib id. 1 1 4 ) . C' est dans cette dernière valeur, la plus abstraite, qu' i l faut voir le fondement même du parfait dont D. Cohen ( ibid. 117) généralise ainsi l a définition "Résultat if ou plus généralement inci dent, le parfait est la forme aspect ive par laquelle sont mar quées dans une situation de référence, les traces ( qui peuvent constituer simpl ement une persistance psycho[ ogique de [ ' événe ment ) d ' un procès accompl i . " Ajoutons que le résultat d ' un procès n' est pas nécessairement de même nature sémantique que le procès lui -même.
tel le analyse passe, bien entendu, par l ' étude des éléments mis en œuvre les formes verbales elles-mêmes, y compris le participe actif de certains verbes, et aussi les auxil iaires, particules verbales ou préverbes .
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Ce croisement de l ' opposition aspect ive fondamentale accompli / inaccomp li par une autre opposition concomitant / non concomitant n' est pas la seule évolution qui puisse se produire au sein du système aspectif. Accompl i et inaccompli ! peuvent aussi se scinder sur le plan temporel sans qu' une scission exclue l ' autre. La temporalité assumée par le système verbal peut s ' exprimer dans le "temps situé" qui se définit par rapport à un repère chronologique sur l ' axe du temps, repère par rapport auquel les événements se situent il répartit l ' axe du temps en deux parties, avant et après lui . Ce repère est le présent qui "apparaît comme le moment où le passé se transforme en futur, c' est ce qui n' est plus le passé et ce qui n' est pas encore le futur. Moment idéal , puisqu ' au moment même où on le formule, ce moment n' est déjà plus. C ' est pourquoi la visée temporelle est ICI obl igatoirement extensive et que le "présent" contient un segment de passé affirmé et de futur prédit. Le présent est donc le non-passé et le non-futur et peut se définir comme tel . " (O. Cohen 1989: 8 I l I l conviendra donc de voir s ' i l y a eu en maltais d e tels développements aussi b i en sur le plan de la concomitance que sur celui de la temporalité et quelles en sont les limites. Une
Durée et aspect ont été fréquemment aSSOCles. Ainsi ( 1982 ( 1920 ) : 183 ) affirme que "la catégorie de l' "as let Meil pect" [, . . 1 embrasse tout ce qui est relatif à la durée et au degré d ' achèvement des procès indiqués par les verbes . " D. Cohen ( 1989: 17-8) cite encore Barbelenet , S axmatov, Vendryes ( 1923: 117) qui s ' est fait plus l apidaire que Mei l let "On appelle du nom d' aspect la catégorie de la durée. " Et, plus près de nous, une partie de l ' école générativiste ou les élèves de Guillaume . On a aussi parlé d ' une opposition duratif - non duratif en grec ancien ( Lyons 1970: 240- 1 ) ou en anglais pour le progressif et le non progressif ( Lyons 1970: 241 ) . 2 D. Cohen met en garde contre cette équation abusive : "Pour l ' aspect, ce n' est pas la durée qui est pertinente mais le déroulement. ,,3 Pour lui , "les concepts de durée, de procès et de dérou[ ement ne doivent pas être confondus. Le procès en tant que tel est constitué par la succession de ses phases identiques ou différentes, le déroulement nomme la succession el le-même et l e temps, mesuré dans la durée, est, pour notre conception, la condition nécessaire au déploiement de n' importe quel phénomène dynamique" (O. Cohen 1989:73 ) . La durée conçue comme " l e laps de temps plus ou moins étendu au cours duquel s ' est manifesté le phénomène nommé par le verbe [, . . 1 ne peut nullement consti tuer un discriminant aspectif" ( ib id. 73 ) . Par contre, D. Cohen ( 1984) a montré pour l ' hébreu et certains états de l ' araméen que cette notion temporelle de durée, qui n' est pas liée au temps situé puisqu' e l le n ' instaure pas de repère chronologique, pouvait entraîner une division, rare dans les langues, au sein du système aspectif. Elle aboutit en hébreu , par exemple, à l ' intégration de formes verbales exprimant un accompli et un inaccomp l i duratifs, signifiant "passer du temps à faire ou 4 faire plusieurs fOis", opposés à un accompli et un inaccompli,
. A l ' exceptlOn de Meil let, les auteurs et citations qui viennent d ' être mentionnés sont cités d' après D. Cohen ( 1989 : 72 ) .
2
3
!
C' est le cas des langues slaves notamment.
4
Séminaire EPHE du 9 décembre 1983 . Séminaire EPHE du 3 février 1 984.
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neutres de ce point de vue . Nous verrons que le maltai s développé une périphrase verbale spécifique pour le duratif .
a
M. Cohen ( 1924 : 265) faisait remarquer que "à côté des grandes divisions du temps ( passé, présent, futur ) et des temps relatifs ( passé antérieur, futur antérieur ) , des distinctions plus fines et accompagnées de notions accessoires peuvent soit situer l ' action dans une tranche minimum de temps, soit définir un mode d' accompl issement qui implique une relation avec la durée . " Il s ' agit dans le premier cas de l ' imminence, dans le second de l ' inchoatif, du terminatif et de la tranche centrale d'un procès. Les auxiliaires et particules verbales uti lisés à cette fin par le maltais seront aussi étudiés dans ce travail . Enfin, pour qu' une descri ption d ' un système verbal soit complète, il faut y ajouter les valeurs modales pour lesquelles 5 o . Cohen distingue deux plans différents : - Un emp loi "dépendentiel" marqué par la relation syntaxi que à l ' intérieur d ' un énoncé il peut s ' agir soit de la présence d ' une conjonction ou bien du fait qu' un verbe en suit un autre. Elle n' apporte pas de sens supplémentaire. "On parle [ . . . 1 de mode l orsque la l angue marque des relations de hiérar chie interne à l ' énoncé" (O. Cohen 1989 : 42 ) . - U n emploi qui implique l ' attitude e t l ' engagement du locuteur à l ' égard de la prédication dont il rend compte jussif, optatif, volitif, dubitat if, implicatif, conditionnel , etc . "les modes [ , . . 1 relèvent du rapport d u locuteur à l ' énon cé [ . . . 1 ce rapport concerne l ' attitude du locuteur" ( O . Cohen 1989 : 53 ) . C e dernier point m e semble rejoindre, e n partie, l a théorie développée par Cul ioli e t ses élèves q u i distinguent, entre autres, des modalités "épistémiques" exprimant di vers degrés de probabilité ou d' incertitude et des modalités "déon tiques" comme l ' ordre, la permission, le souhait, la volonté, la possibilité, la capacité, etc.
5
. VOIr par exemple séminaire EPHE 22. 04. 1983.
I I . VALEURS ET EMPLOIS DE LA CONJUGAISON SUFFIXALE
Remarques préliminaires Dans l ' introduction qui précède ce chapitre, il a été rappel é que la valeur d e l a c. suff. en arabe classique et dialectal était celle d ' un accompl i , d ' un "délimitatif" qui "apparaît en généra l sous ces trois réali sations fondamentales : l ' avènement de la relation prédicative est constaté soit dans le fait que constitue cette relation délimitée ( "i l vécut à telle époque" ) , soit dans son résultat ( " il est mort, i l a grandi " ) , soit dans le fait même qu' el l e se soit instaurée (marida "il est tombé malade" ) " ( O . Cohen 1989: 63 ) . Ces valeurs que i ' on peut nommer "aoriste" ou "narratif" d ' un côté et "parfait" de l ' autre, ne sont pas intrinsèques à l a forme verbale, mais l iées à l ' ins tance de l ' énonciation ( discours ou récit ) . Ce qui caractérise, en outre, cet aspect, c ' est sa neutralité vis-à-vis de la situation temporelle, la possibilité qu ' i l y a de l ' employer aussi bien en contexte de passé, de présent, que de futur. L' étude qui va suivre se propose de montrer quel s sont les emplois et les valeurs en maltais de cette conjugaison dans chacune des instances de l ' énonc iation, dans chacun des contex tes temporels, ainsi que ses emplois modaux.
1. L'aoriste Une des valeurs que peut revêtir l ' accompli est celle d ' un aoriste qui marque une "relation advenue et disparue" ( O . Cohen 1989:85 ) . Elle n' est donc pas incidente à la situation d ' énon ciation. Par conséquent il n' est pas surprenant de la rencon trer dans un contexte de passé, tel que celui du récit : "le récit constitué par lui -même, en dehors de toute spécification, explicite un contexte de passé. " ( D . Cohen 1989: 85 ) . Or, c' est justement à l ' accompli que "dans le récit, le passé se réalise [. . . 1 comme un aoriste nommant l ' événement révolu, un narra tif". ( ib id. 85 ) . Toutefois, il faut bien voir que la c. suff. dans ce cas n ' en reste pas moins fondamentalement un accompl i puisqu'el l e n e peut présenter l a relation prédicative que comme
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Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison suffixale
un événement dont on n' envi sage pas le déroulement, par opposi tion à la c. préf . qui sera étudiée dans le chap. suivant.
aut res qui sont à la c. suff. Le premier verbe contraste avec les autres comme la narration d ' un procès en déroulement par opposition à des événements rapportés. On reviendra sur cette valeur de la c. préf . dans le chapitre suivant .
1 . Igal;an n É zao l-l l bsa taO b mm-u l l bbcs l-iskuppa f b rma taO ma ra b-I-o:::mn é lla f t p-ca Qa s-scrdU ? d Ü ck it-t arag k8 l l -u sap Un b-I- l lma u t é l a? yi gri lcyn id-d â rl ( II , 29-33) "Cahan se dévêtit de la robe de sa mère, habil la le balai en 1 forme de femme en lui mettant la ghonnel la dessus, prit le coq, enduisit toutes les marches avec du savon et de l ' eau et partit en courant vers chez lui" 2. Igcw i �-sy âtc� ? abdu id-dyâ r t a Q-Q:::> m bi-l-gs bd b-k8 l bs , ? abdu blata kbïra minn cmmckk u schtU -Oa °al-I-bahar bi -o :::> m . â b-kb lbs u ffurm t i l -gzlra taO f i lflal ( IV, 27-30) "Les diables vinrent, ils prirent leurs maisons avec les pierres, avec tout, ils prirent un grand rocher de là et ils le lancèrent à la mer avec eux, avec tout, et l ' île de Filfla se forma" , , , 2 ' , , 3. Ik:::> nna y�na u :::>Q ra ta nigbdu sa f-l-aQQar ?tayn�-Q fi-layru b:::> m f-I- â rt u wa?aO tgs rbcbl <nous-étions moi et autre ( f . ) tiens nous-berçons jusqu' à dans-le-dernier nous-coupâmes-Iui dans-l' air boum dans-Iaterre et il-tomba i l-roula> "Nous étions moi et une autre , tiens, nous bercions et sou dain il nous a échappé en l ' air, boum ! sur le sol, et il est tombé, i l a roulé" Dans l ' exemple ci-dessus, il faut remarquer l ' opposition formelle entre le verbe "bercer" qui est à la c. préf. et les
1
Longue robe à capuche, ancien costume traditionnel des femmes.
2 Ital est un geste vocal qui ponctue phrases ou membres de phrases. I l est très fréquemment employé et est l' équivalent du français "ti ens" ou "hein".
4. lal l Ura bi-I-I éyl b a?aO m? ayycml "Alors la nuit i l resta éveillé" 5. lu dïn it-d fla al l a ib 6rck g�t i l ?udd6m u f 6 ?ctl <et cel le-ci la-fille Dieu i l -bénit elle-vint vers devant et el le-guérit> "Et cette fille, Dieu soit loué, elle se rétablit et guérit" 6. L-ewwel darba li Karl u Manju danal fil -kn isja b i l -kelb miegnu qajjem skandl u mar-ranal kol l u (Friggieri 1986 : 4 1 ) "La première fois que Charles Magne entra dans l' église en compagnie de son chien, un scandale s ' é leva dans tout l e village" 7. lil-gar a ss Qa 5 8 °:::> 1 immcns [ , . . 1 brasn 6 -Q k b l l-u nCQQayn 6 l-u s-sad l d tayn 6-l; I-Anddrc 6tl "Le garage a pris un travail immense [ . . . 1 nous l ' avons tout brossé, nous lui avons enlevé la rouil le, nous lui avons donné une sous-couche" 2. L'antériorité dans le passé M. Cohen (1 924 ) , qui étudiait les valeurs des aspects en contexte temporel dans une perspective contrastive et évoluti ve, faisait remarquer que l ' expression du "plus-que-parfait", c' est-à-dire d' un passé de 2ème degré, pouvait être assumée par la c. suff. : "la notion exprimée par le verbe peut être située dans un moment antérieur à un moment situé dans le passé ; ce temps relatif est un passé de deuxième degré. " ( ib id. 161 ). En maltai s, comme dans d ' autres dialectes arabes, l a c. suff.
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La conjugaison suffixale
seule peut suffire à marquer l ' antér iorité d ' un procès ou d ' un , 3 état par rapport à un autre en contexte de passe.
morphologique particulière pour l ' expression du parfait, c' est-à-dire d ' un accomp li dont on envi sage l e résultat ou l ' incidence par rapport à l ' acte d ' énonciation ou à un autre événement. La c. suff. , accompagnée ou non d ' un actualiseur, en . 4 permet l ' expresslOn.
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1.
/Oas k 6 nu ?st-ifittsa -Oa dawn i l -pir &ti Cas r & w-oa fi-I-wfud/ "Parce qu ' il s étaient en train de la chercher ces pirates, parce qu' ils l ' avaient vue dans la val lée" / 2. /d&na mar bi8s it I -oa d a ??a t-I d cas ssyl).it-I-u/ "Celui-ci est allé lui donner un coup de main parce qu' e l le l ' avait appelé" 3. /k 6 nst t a Omd [ sIn ] ikan il-w3.?t u il-[:)rn s al).an s É wwa u il-h8 bz ° 8 1a ksmm k É l lu i 0 8 1a/ ( I , 148-50) <el i e-était elle-met quand il-est l e-temps et le-four il chauffa juste et le-pain il-leva combien il -avait il-lève> "El l e mettait ( le pain) quand il fallait et que l e four avait bien chauffé et que l e pai r; avai t l evé comme il devait l ever" / , 4. /ma-k6 n-s yar yskk la?t-iJ-s sswwa ysw le lil-l-?attiJs/ "Il ne savait pas s ' i l l ' avait bien atteint ou non le chat" 5. /ma-kina -s y l fOmu kIf gi8t/ ( IV, 5-6) "Ils ne comprenaient pas comment elle était venue" 6. Kien jixraq L u kuLma gnamLet m iegnu ( O . Calleja 1972 : 6 1 ) "Il méritait tout ce qu' elle lui avait fait" 7. /la d arba l-l).:::>b z ?att ayt-u imb a o ad mOiJs 58 °:::> 1 t 6 °-i/ ( 1 , 146) "Puisqu ' une fois que j' avais coupé le pain, ensuite ce n' était plus mon travai l " /
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contextuelles de l ' accompl i à 3 . 1 . L' une des réalisations valeur de parfait est liée au fait que "dans le di scours l ' accompli est un événement vu comme achevé, mais présent par ses imp lications sur la situation au moment de l ' énonciation. " (D. Cohen 1989: 93 ) . Dans son étude sur le système verbal du français , Benveniste ( 1966: 244 ) notait que "le repère temporel du parfait est le moment du discours [, . . 1. Comme le présent , le parfait appartient au système linguistique du discours". La valeur de parfa it résuL tatif o u inc ident au présent peut donc se déduire du simple fait que l ' énoncé est situé dans l ' instan ce du discours. Il ne faut cependant pas oubl ier que le résul tat n ' est pas nécessairement de même sens que l e procès ( ou l ' état) nommé par l e verbe : 1. /dak ir-rcscrvw&r yi8n nift ak ar mcta bncw-Q./ "Ce réservoir, moi, je me souviens quand on l ' a construit" (ce réservoir dont on est en train de parler existe encor e ) 2. /yckk i nti sr a?t- o:::> m ° I d l lli sr a?t-o:::>m/ <si toi tu-volas-eux dis que tu-volas-eux> "Si c' est toi qui les as volés dis que tu les as volés" 3. /tinsI -s li yi8n twd l dt l).ad-d l ngli/ "N' oublie pas que je suis né à Had-Dingli" ( et cela a son importance pour ce dont / on par l e ) 5 4. /[d &n ] affariyy6 t l i rayt-o:::>m u sm ayt-o:::>m rayt-o :::>m b-OaynÉ y -ya u smayt-o :::>m b-widnÉ y-ya/
3. Le parfait Le maltais n ' a pas développé, dans son système verbal , comme le grec par ex. , ou certains dialectes arabes, de catégorie
3
Sur l ' utilisation de l ' auxiliaire /ki8n/, voir p. 225 sq.
4
Sur son expression facultative au moyen d ' un auxiliaire, dans le récit, voir p. 108-1 l . 5 Cette informatrice, originaire de Kerèem à Gozo, a une variante sans semi -consonne pour les démonstratifs pl. Ils se confondent alors avec ceux du masc. sg.
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" C e sont des choses que j' ai vues et entendues, j e l e s a i vues d e mes yeux e t entendues de mes oreil les" (et l' inci dence en est que ce que je viens de raconter est vrai ) 5. lu ?ala-I-u ?badn�-k taOti-Oa fastIdyu il dïn it-tfaylal <et i ls-dirent-à-Iui nous-prîmes-toi tu-donnes-elle ennui à celle-ci la-jeune-fille> "Et ils lui dirent : Nous venons de te surprendre à faire des ennuis à cette jeune fille" (= on te prend en flagrant délit ) 6. Qomt ! Qomt u gnandi l -gun. ( O . Calleja 1972: 144) <je-me-réveillai ! je-me-réveillai et chez-moi la-faim> "Je me suis réveillé ! Je me suis réveillé et j ' ai faim. "
3.2. La présence d ' un marqueur temporel de passé ( adverbe de temps par ex. ) ne change r ien à la valeur de parfait incident à l ' acte d ' énonciation. Dans l ' exemple ci-dessous deux locuteurs discutent d ' un problème de canalisations qui rouil lent et se mettent à fuir. Le coup de téléphone mentionné est en rapport avec le sujet de la discussion il y a donc persistance psychologique du procès dans le présent du locuteur, soulignée de surcroît par l ' appel en direction de l ' inter locuteur par un verbe marqué morphologiquement comme concomitant à l ' acte d' énonciation : I?ct-Üral l itt. "tu es en trai n de voir" : 1. I?ct-t�ra i l-b�rai) raz ccmplit-Ü-nal <en-train-tu-vois le-hier Rose el le-téléphona-à-nous> "Justement, hier Rose nous a tél éphoné" 3.3. L' incidence ( ou le résultat ) dans le présent du locuteur du procès ou de l ' état accomplis peut être explicitée par un marqueur temporel tel lissai "maintenant" ou lillaml "aujour d ' hui" : 1 . - Iminn fcyn yigi dak 71 <de où il-vient celui-là> - li)alIb li i)l ibna issal -" D ' où ça vient 7" - "Du lait que nous venons de traire" 2. Iméla ckk issa i)allast-ni/ "Et bien comme ça maintenant tu m'as payé !"
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Valeurs et emplois des deux conjugaisons
i 3. lillam marsalf8rn sar ?Is-u turist plc sl "Aujourd ' hui Marsalforn est devenu un l ieu touristique" 4 . ILlum din id-drawwa nqatgnet u l-uzu tal -bankijiet qata' wkol l id-drawwa taz-zewg siggijiet ( Casha 1 974 : 4 1 ) "Aujourd ' hui cette coutume a cessé et l ' usage des bancs a aussi mis fin à la coutume des deux chaises"
3.4. Il a été spécifié à plusieurs reprises que l ' accompli concomitant qu' est le parfait peut aussi se situer par rapport à un autre événement pris comme référence. L' ex. c i-dessous provient d ' un récit sur l ' ancienne tech nique de la moisson. La locutrice y fait mention d'un film car certaines de ses images sont en relat ion avec l a partie du récit qui concerne l ' usage d ' une faucille. La vision du film est donc considérée dans son incidence à un événement situé dans l ' instance du récit. Il y a là une persi stance psycholo gique d ' un événement qui s ' exerce dans la mémoire de l a narratrice : ,
"
,
6
1. Ikin-ibW:)m � ingd u l-b�rai) rayt film [ ' . . l u kin-cmm mara ta?taO l-i)atab kéWa mingd scw b1)al taO-na prccÎzI "Ils avaient une faucille. Et hier j' ai vu un film [ ' . . l et il y avait une femme qui coupait des fagots. Elle avait une faucille exactement comme l a nôtre " 3.5. M . Cohen ( 1924 : 2 1 1 ) affirmait que " l e parfait [la c . suff. l sémitique occidental peut être e loyé avec un sens n:jP présent pour un nombre l imi té de verbes dans chaque langue [ ' . . l soit parce que le simple énoncé de l ' action présente équivaut à son accompli ssement, soit parce que l ' action n' est énoncée qu' au moment même où elle est déjà accomplie . " Ces
6 Sur Ikin-émml voir p. 400-2.
7
C' est moi qui souligne.
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La conjugaison suffixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
verbes ne peuvent d ' ai lleurs être rendus que par des présents en français, par exemple. C' est ce type de fonctionnement dans le discours que D. Cohen ( 1989: 179) met en rel ief sous le terme de "parfait présent" ( repris de M. Cohen) pour l ' ougar itique : i l nomme "le procès qui se réal ise par le fait même qu' on l ' exprime" ( les ex. fournis sont des verbes déclaratifs ) ; une 7 autre valeur est celle de "statif qual itatif pour les verbes médio-passifs" ( ibid. 183 ) , une des réali sations possibles de l ' accompli concomitant, rappelons-le . Ces valeurs sont en géné ral l imitées à certaines catégories sémantiques que M. Cohen a définies ( en tenant l a l iste ouverte, le classement s ' avérant difficil e ) . De même , D. Cohen 0984: 313) a attiré l ' attention sur le comportement particulier , en hébreu biblique, de cer tains verbes "déponents internes" , "qui , plutôt que des états, nomment des procès en relation int ime avec le sujet : mouvement et attitudes corporelles, sentiments, sensations, opérations intellectuelles, etc . " Pour ces verbes la "c. suff. désign [ e l u n procès accompli résultant e n u n état", et "a valeur de présent" ( ibid. 314). En maltais, seulement une partie de ces verbes présentent encore un tel fonctionnement. Cependant, on ne saurait trop y insister , la valeur d ' accomplissement demeu re, ce qui différencie la forme à marques suffixées de la C. préf . , elle aussi interprétable comme un présent en contexte de discours.
a) Parmi les verbes "déponents internes" , ou encore "médio passifs", ni les verbes exprimant un sentiment, des énoncia tions solennelles, ni ceux appartenant à la catégorie des évaluations (classes données par M. Cohen) ne s ' utilisent ainsi. Toutefois, quel ques verbes "médio-pass ifs " , dans un contexte approprié, peuvent avoir une valeur de parfait présent ou statif qualitatif : ainsi /sar/ "devenir cuire" et /fï;P/ "guérir" : 1. /f:.yya m6rru sar il-l)In/ "Allons-y, il est temps ! " 2. /yal)seb li siret i l-faz5Ia/
53
"Il a été très malade et il a fai l l i mourir, mais maintenant il est guéri " (comparer avec l ' ex. 5 p. 47, où /fQ?/ a valeur d' aori ste ) .
b) Parmi les verbes de sensation, l a C. suff. des verbes exprimant l ' assouvissement de la faim est employée avec une valeur de parfait statif par tous les locuteurs, toutes généra tions et origines géographiques confondues 1. - /trld lktar/ - /lt sbayU ( 0 ) "Tu en veux encore ?" - "Non , je suis rassasiée" ou bien 2. - /lt mtlcyU ( 0 ) <non je-me-remplis> "Non, je suis rassasiée" (c' est-à-dire que je me suis rem plie, donc j' ai entièrement satisfait à ma faim, donc je suis rassasiée) Le verbe /sf:.bao / a aussi l e sens de "en avoir assez". Dans le discours il garde toujours cette valeur de parfait présent 3. Xbajt miU -priedki tiegnek bnaL ma darba kont xbajt b' taL papà ( Ebejer 1985 : 2 1 ) <j ' en-eu-assez de-les-sermons de-toi comme que fois j' étais j' en-eu-assez avec de-le-papa> "J ' en ai assez de tes sermons, comme un jour j'en ai eu assez de ceux de papa"
cl Les verbes de sens "rester" et "finir" connaissent eux aussi cette valeur de parfait présent ou statif à la C. suff. 8 /ba?ao/ et /fadal/ "rester", /spicca/ "fini r " , les deux pre miers seulement lorsqu' ils sont employés de manière imperson nelle à la 3ème pers. du masc. sg. La référence au présent peut être ou non expl icitée par un marqueur temporel dans l ' énoncé :
8
M. Cohen ( 1924 : 1 24 ) signale qu'en Egypte la C . suff. de ce verbe "peut servir de verbe d ' existence et de copule du pré sent. " Il recense des faits analogues en Syrie, dans la région du Tchad et à Constantine.
pt
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison suffixale
1. Ifi-l-f<3.tt ba?aO-I-na l)afna dyar bi-l-madUml "En fait il nous reste beaucoup de maisons en marbre" 2. lawnékk ma-ba?aO l)attl "Ici il ne reste personne" 3. 1° as il lUm ?;t:m ma-ba?aO-sl <parce-que aujourd' hui coton ne-i l-resta-pas> "Parce qu' aujourd ' hui du coton il n ' en reste plus" 4. Ikémmi l mitl)na fadai °awdcsl "Combien reste-t-il de moul ins à Gozo 7" 5. Isc:)tland l fbsa (f . ) cal mAmmi biss fadal-l-i s nlstri l ssal <Ecosse robe pour maman seulement il-resta-à-moi quoi j' achè te maintenant> "En Ecosse il ne me reste qu' une robe à acheter pour maman, maintenant" 6. IkIf in-QI s-sisttma taO llum ma-fadal-s pr:)bltmi taO l-Üma/ "Comme le système d ' aujourd' hui est conçu, il ne reste pas de problèmes d' eau" 7. Itlob biL -qawwa gnal l -bqija l i gnad fadal (Es. 37/4) <prie avec-la-force pour-le-reste que encore i l-resta> "Fais monter vers lui une prière en faveur du reste qui subsiste" ( TOB ) 8. lit i11Um dawk spiccawl <non aujourd ' hui ceux-là ils-terminèrent> "Non aujourd' hui ceux-là sont terminés" 9. - lissa di-s-sitwaccy5ni o �d-oa tczlstil <maintenant cette-la-situation encore-elle elle-existe> - /lt fi-l-prczént spicc�tI <non dans-le-présent el le-termina> - "Alors cette situation elle existe encore 7" - "Non, à présent elle est terminée" .
suff. avec un sens de parfait présent. Il se rencontre ainsi encore sporadiquement en maltais et je l ' ai relevé, par ex. , dans le roman de l ' écrivain Friggieri ( 1 986) ou chez de jeunes locuteurs de Nadur à Gozo et de Melliena à Malte : /foimtl ( "tu as compris") "tu comprends 7 " . La forme est désormais large ment concurrencée par la forme composée de l ' inaccompli conco mitant /?ct-tlfocml "tu es en train de comprendre 7"
54
d) I l convient de signal er, pour finir, le verbe /féocml "comprendre", régulièrement employé en arabe dialectal9 à la c.
=
4. Le parfait en composition avec deux adverbes Quand on veut mettre en relief la valeur de parfait, avec référence temporelle de passé proche, il est possible de faire appel à une construction syntaxique composée de deux adverbes, lO qu i ne sont pas des adverbes temporels, /Oad-I "encore" + pro nom suffixe, suivi de Ikcmml "combien" ou IkIfl "comment" qui précèdent immédiatement le verbe à la c. suff. L ' utilisation de l' adverbe 10ad-1 "encore" est révélatrice de la valeur résulta tive et incidente qui persiste dans ce parfait : par son sens même cet adverbe marque que le processus énoncé par le verbe a une impl ication dans la situation prise comme référence. Cette construction tend à se répandre, mais n ' a encore rien d' obl igatoire ( voir l ' ex. 5 § 3 . 1 . p. 50 ) . On est donc à un stade expressif rel evant de la stratégie du locuteur et non d ' une utilisation syntaxique systématique. Lorsque la construction n' est précédée d' aucun aux i liaire tempore l , le parfait est référencié à l' acte d' énonc iation, explicitant de surcroît un passé proche : 1. linsibU-l) o�d-u kcmm téla?1 <nous-trouvons-lui encore-lui combien il-partit> "Nous le trouvons qui vient juste de partir" ( donc il est absent. Remarquer le verbe de la principale "trouver" ) 2 . 10�d-ni kIf scmméyt-c k bl)al1ssa sandra/ <encore-moi comment je-ment ionnai-toi comme-maintenant Sandra> "Je viens de parler de toi à l ' instant Sandra" 3. Iscmméyt-Oa f dan l-al)l)ar rumanc li °â.d-ni kcmm spiccaytl <je-mentionnai -elle dans celui-ci le-dernier roman que encore
10
9 Par exemple dans l e dialecte tunisien d ' un village proche de Sfax ( Simeone-Senelle 1985-86: 72) .
55
Cet adverbe est à rattacher à la racine arabe "WD dont il ne subsiste plus en maltais que quelques formes dans le paradigme du verbe irrégulier I?all "dire" .
56
La conjugaison suffixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
-moi combien je-terminai> "Je l ' ai mentionnée dans ce dernier roman que je viens de terminer" ( Remarquer la différence avec les ex 8 et 9, p. 54, où /spicca/ avait valeur de parfait statif) 1 4 . /k1 itti-1) f -i déyn studént l i ° ;id-u h:mm béda ibabas in-n:)ti taO-l -py;inu sc-idéyy?-ck/ <si tu-donnes-lui dans-mains étudiant qui encore-lui combien il-commença i l-bégaie les-notes de-le-piano FUT-il-fatigue toi> "Si tu le mets entre les mains d ' un étudiant qui vient de commencer à pianoter , il t' ennuiera" 5. HaL l i naraw dan li gnadna kemm gnidna dwar is-sentenzi Lokattivi ( Borg 1988: 317 ) <pour nous-voyons celui-ci que encore-nous combien nous-dîmes autour la-phrase locative> "Pour que nous voyions ce que nous venons de dire à propos de la phrase locative" 6. IL -VaLetta PubL ishing gnadha kif narget gna LL -bejgn i L "Binder" ghaL L -ewweL voLum (publ icité) "Les Editions La Valette viennent de sortir pour la vente la reliure pour le premier volume" 7. /oandi wal)da li °;id-ni kIf ktibt si saoar Îl-u/ "J'en ai une que je viens d' écrire i l y a un mois" Si ce type d' accompl i concomitant est référencié à un autre événement situé dans le passé, le premier adverbe est précédé de l ' auxil iaire /kQn/ "être" ( le second adverbe n' est alors pas obl igatoire ) . 8 . /kQn °;id-ni kél l i crbaÜSil séna/ "Je venais d ' avoir 14 ans" 9. /k6nct °;id-oa kIf tél °ct/ <elle-était encore-e lle comment el le-partit> "Elle venait de partir"
10. [k�net 3Qda I)aslet lart l ( Stumme 1904 : 49, 1. 32) <el le-était encore-elle elle-lava le-sol> "Elle venait de laver le sol" 2 1 1 . /k6nu yaOmlu t-tfbcn imsarrab n}? i l -béyt li ikŒn1 °id-u kIf gQ mball at/ "Ils mettaient la paille mouillée sur la terrasse qui venait d' être battue"
5. Le contexte de futur Remarques préliminaires L' emploi de la c. suff. en contexte de futur est bien connu du 1 sémitique et de l ' arabe en particulier, ce que D. COhen, 3 pour qui "cet emploi de "futur antérieur" ou plus exactement d' accompli futur [ . . . 1 est un emploi proprement aspectif" ( 1984 : 339 ) , exprime ainsi ( ibid. 351 ) "l' accompl i peut aussi se référer à une période du temps postérieure à l ' acte d' énon ciation. Le procès envisagé b ien que non encore réal isé au moment où on parle est alors considéré dans son achèvement, soit qu' on insiste sur l e caractère inéluctable de cet achève ment, soit que le procès soit considéré comme achevé dans la période dont on parle ou comme antérieur à un autre procès lui-même situé dans le futur". Il ajoute ( ibid. 352) que "c' est la même antér iorité dans l' accomplissement qu' exprime la forme à suffixes dans les protases des phrases conditionnelles". Tout en insistant sur le caractère expressif de l ' utilisation de la c. suff. au futur "en arabe l ' opposition aspective est suspendue , l ' emploi de la forme accomplie n' étant , dans les conditions indiquées , qu' un choix expressif pour une affirma tion insistante" 0989: 9 1 ) , il précise aussi que "la présence de cette forme aspective dans des énoncés prédictifs est normale et régulière, lorsqu ' i l s ' agit par exemple de phrases doubles comportant une proposition hypothétique" ( ibid. 89 ) .
12 11
Abréviation fréquente de la parti cule /yckk/ "si".
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13
Sur les formes composées avec /ik6n/, voir p. 229-38. Dans le chapitre consacré à l ' araméen.
.......
58
Nous allons voir maintenant ce qu' i l est advenu de cet emploi d' accompli futur en maltais.
5 . 1 . Comparaison avec d'autres dialectes arabes En maltais, l ' utilisation de la c. suff. dans un contexte de futur, même modal , est des plus réduite. Elle a disparu dans les phrases concessives, dans l ' expression de la promesse ou de l ' optatif, et pratiquement totalement de l ' apodose de phrases hypothétiques marquant l ' irréel du présent, alors que c ' est encore possible dans de nombreux dialectes. Sauf pour les phrases hypothétiques , je n ' en ai trouvé aucun exemple dans les corpus que j ' ai étudiés , oraux comme écrits, pas même dans les 14 proverbes recensés par Aquilina ( 1972 ) . Ne pouvant négliger le fait que ceci soit le fruit du hasard, j ' ai fait traduire par une informatrice de La Valette, 15 les exemples donnés pour d' autres dialectes arabes. Aucune des phrases traduites ne fait apparaître une c. suff. seule. C' est toujours la forme à marques préfixales qui est utilisée ou bien une périphrase verbale avec un auxiliaire ( ex. 6 et 7 ) : - Concessives : 1. "Où que tu ailles, je te trouverai ! " Ikulf�yn tmur ( c . p. ) inslb-z:: kl Inn ma msIti ( c . s. ) , nZ8bf-8kl ( Fès) 2. "Qui que ce soit qui vienne, dis-lui que nous sommes allés au cinéma ! " Ikulmln ylgi ( c . p . ) °Id-l-u l i m;rna t-t:3kisl Iskun ma za ( c . s . ) , gUl l-u msina l-8s-sinimal (Fès) 3. "Quel que soit le moment où tu viendras , je t ' attendrai" ltÎstaO tÎgi ( c . p . ) kul l mum�nt nistz::nn I-kl
14
La conjugai son suffixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
. V Olr par ex.
ceux en rapport avec Dieu dans le 1er chapitre les expressions optatives n° 3, 26 , 36, 65, 67 qui comportent toutes une c. préf. 15 Il s ' agit de ceux relevés dans les articles de Caubet ( 1985-6 ) Tauzin ( 1 985-6 ) , Doss ( 1985-6 ) , de Boucherit ( 1 987 ) , ainsi que dans l' ouvrage de S inger ( 1984: 299 ) . et particulièrement
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Ints8nna-k fuqas ma zIti ( c . s. )1 (Fès) 4. "Quoique tu trouves, amène-le moi ! " Ikull ma isslb ( c . p . ) gib-U- l-il 16 Illi Zb8fti ( c . s . ) , zIb-u l-il ( Fès) 5.
- Irréel du présent : "Si Sandra venait tout de suite, nous irions à La Valette" lyEkk sandra tfgi ( c . p. ) fssa imm;rru ( c . p . ) I-bdt/ <si Sandra elle-vient maintenant nous-allons la-ville> luka zat ( c . s . ) amina daba, uka msïna ( c . s . ) I-fasl ( Fès ) "Si Amina venait tout de suite, nous irions à Fès"
- Autres énoncés : 6. "Quand tu l ' auras mis dedans" Im�ta tkun daQQalt-u ( périphrase) gEwwa/ Imnaln-daxxalt ( c . s. ) ak-elÇ'aÇlm�t/ (Tunis Musulman) 7.
"Wenn du diese hineingetan haben wirst" "Demain à la même heure, je serai en route pour Gozo ( Nouakchott ) " 10�da f -l-ist�ss QIn inkUn s�yyra ( périphrase ) kyn o&wdd/ <demain dans-le-même temps je-suis allant (f. ) vers Gozo> Iged Çlark 8�-�obh ndur n"ud vett mseyt ( c . s . ) sor nwaksot/ ( Mauritanie)
5.2. D'une survivance de la conjugaison suffixale dans l 'apo dose de phrases conditionne l l es
Dans l ' apodose des phrases hypothétiques marquant l ' irréel du passé, les verbes employés sont dans leur quasi-totalité à une forme composée de l ' auxiliaire likUnl " i l est" suivi de la c. suff . ( pour des exemples voir p . 68 § 6 . 3 . ) . Toutefois, dans un exemple relevé dans une poésie chantée improvisée, le verbe est simplement à la c. suff. : 1 . Iii k�llEk ?alb-Ek bhal t�O-ii ' Illum ma-dQalt-s °al din il-gl�dal
16
Une c . suff. en maltais aurait forcément impl iqué un passé "tout ce que tu as trouvé".
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La conjugaison suffixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
d' Aquilina ( 1959 et 1965) ne signalent cet usage. Il s' agit probablement là d' une survivance dans un contexte particulier, et marqué au passé. Nous verrons qu' un tel usage est impossible dans les phrases doubles marquant le potentiel, par exemple (voir p. 65-6 § 6 ) .
"Si tu avais eu un cœur comme le mien" "Aujourd' hui tu ne serais pas entré dans cette querelle" Vella ( 1970: 297 ) en donne égal ement deux exemples 2. lli k6ku gcyt ( k6ku ) fral).t ( ou k::mt nifral). lI "S' i l l ' avait fait il te l ' aurait dit"
5. 3 .
je-suis-
j' étais
Lorsque j' avais fait traduire les phrases hypothétiques tirées d' ex. dialectaux arabes (vo ir p. 65-6 § 6. ) , mon infor matrice de La Valette m' avait fait part de la poss ibilité d' en tendre parfois, dans la langue parlée, une apodose contenant une c. suff . simple dans une phrase double marquant l ' irréel du passé. Elle avait forgé l ' ex. ci-après : 4. Ik6ku gï8t il-b 6ral). m8rna l-bal).ar/. <si el le-vint le-hier nous-allâmes la-mer> "Si elle était venue hi er, nous serions al lées à la mer" Il s' agit du même type de construction que l ex 5 du paragraphe ci-dessus à Fès, mais elle aurait été impossible en maltais avec un adverbe situant l ' énoncé à un autre moment que le passé. '
61
.
Enfin, i l faut signaler que l ' emploi de la c. suff. dans l ' apodose des irréelles du passé était aussi connu au XVI l lè siècle. Aquilina ( 1972) en donne un exemple dans un proverbe relevé chez De Soldanis ( 1750 ) : 5. Li kont nafek qatt ma dannaLte k f'darek ( p . 164, provo 13 ) <si j ' étais je-sais-t oi jamais ne je-fis-en trer-toi dans mai son-toi> "Si je t' avais connu, je ne t' aurais jamais fait entrer dans ta maison" Selon mon informatr ice, cette construction n ' est pas très fréquente. N i la grammaire de Sutcliffe ( 1936 ) ni les ouvrages
Comparaison entre l ' hébreu e t l e maltais dans une traduc tion de la Bible
Puisqu' on a la chance qu' il existe une ( et même plusieurs ) tra duction de la Bible, il m ' a semblé intéressant de comparer l e texte maltais et le texte hébraïque des prophéties pour voir c e qu' il était advenu d e la c. suff. e n maltais dans c e contex te. "Le genre prophétique en particulier fait usage parfois de cette conjugaison pour donner à l ' annonce d ' un événement à venir une force particulière en le présentant comme accompli, ce qui est la valeur normale de la c. suff. " (D. Cohen 1984: 308 ) . Or, il se trouve que les traductions des passages escha tologiques de la Bible en maltais ne font que rarement apparaî tre une utilisation de la c. suff. dans ce contexte de futur. Parmi les 119 références données par Driver ( 1892 : 17-20) ou Gesenius ( 1909 : 323 ) , et qui comportent une c. suff. en 17 hébreu, 98 sont rendues d ' une manière équivalente en français 18 : les deux langues se sont accordées un petit et en maltais 19 nombre de fois ( 13) pour traduire respectivement par un temps du passé et par une c. suff . , mais la grande majorité des références hébraïques (86) ont été rendues soit par un présent ( une c. préf . en maltais) soit par un futur. Voir par exemple : Rt. 4/3 Nagnomi,
l i reggnet l ura m i l l -innawi ta' tbign b iééa mill -ghalqa l i kel l u nuna El imelek
17 18
que
el le-retourna
en-arrière
Mowab,
de-Ies-environs
se
de
La traduction consultée est celle de la T . O . B . ( 1975 ) .
La traduction maltaise de la Bible consultée est la dernière en date, œuvre collective dont la première édition est de 1984. Elle a été faite à partir de l ' hébreu et du grec.
19 Il s' agit de : 2 Ch. 23/1, 46/lf ; Jr. 51/41 1/12 et Zao 11/2 .
;
1215 Am.
;
Es. 5/2
;
8/23, 9/1-6, 15/6b, Ps. 30/12, 68/3lb
15/8, Mi.
;
63
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison suffixale
Moab, FUT el le-vend morceau de-le-champ que i l-avait frère nous Elime lek> "Noémie, celle qui est revenue de la campagne de Moab , vend une parcelle de terre qui était à notre frère Elimélek" (TOB) Gn. 15/18 LiL nislek nagfi.ti d in l -art <à progéniture-toi je-donne celle-ci la-terre> 20 "C' est à ta descendance que je donne ce pays,, (TOB ) Es. 5/13 Gnalhekk U-poplu t iegfi.i jitturrufnawh <pour-cela le-peuple de-moi i ls-bannissent-Iui> "C' est pourquoi mon peuple sera déporté" (TOB)
Il pourrait également dans certains cas y avoir des rai sons de style au choix des traducteurs maltai s . Le passage de 22 Es. 24/4-12 (je laisse de côté le verset 4 qui a été traduit par une série de phrases nominales à prédicat participial ) est peut-être révélateur de ce point de vue tout ce qui est description d ' une situation à venir est rendu par une c. suff . , tout ce qui est activité humaine non subie ( deux verbes ) égale ment à venir est à la c. préf. : jitniehdu "ils soupirent" et ignajtu "ils crient" ( ce n ' est pas un verbe qui est employé en hébreu ) . Il faut remarquer que dans ce passage, le français rend 9 verbes sur 22 par un passé composé. Voici ce passage dans la traduction française de la TOB. J ' ai indiqué entre parenthèses la forme verbale ut i l isée en maltais.
62
Pour 4 références, le maltais a traduit par une c. préf. alors que le français préférait utili ser un temps du passé, passé simple ou passé composé ( Gn. 30/13 ; Es. 17111b, 51111b ; Jb 5/23 ) . Restent 15 références pour lesquelles l' inverse s' est produit : l e maltais a une c. suff . comme l ' hébreu alors que le 2 français a un présent ou un futur . 1 Il est difficile de dire si le maltais fait preuve dans ce cas d ' une fidélité servile au texte bibl ique ( qu ' i l est loin de toujours avoir, nous l ' avons vu) mais une bonne partie des versets peut s' exp liquer par la valeur de parfait présent liée à cette forme verbale et au sens du verbe choisi pour rendre celui de l ' hébreu s.
15/2 qtajtha li nnaUas lU Gnamalek j ' ai décidé de < je-décidai -elle que je-fais-payer à Amaleq faire payer A. > "Je vais demander compte à Amaleq" ( TOB ) Lm. 3/54 jien spiééajt <moi je-terminai Je suis fini" et non pas "j'ai fini"> "Je suis perdu !" (TOB) =
20
D. Cohen ( 1 984 : 308) signale que "une forme comme nattatï(y) l itt. "J ' ai donné" est souvent employée dans les promesses divines à Israël . " Un rapide sondage effectué dans la traduc tion maltaise offre toujours un équivalent à la c. préf. dans ce cas . 21 Il s' agit de : 1 S. 15/2 ; Lm. 3154 ; Es. 5/25, 10/28-31, 24/4-12, 29/20, 33/3, 3111 1 , 48/33b, 5118.
33/5b,
33/14,
60/1
Jr.
25/38,
s.
"La terre a été profanée ( c . s . ) par ses habitants, car ils ont transgressé ( c . s. ) les lois, ils ont tourné ( c . s. ) les préceptes, ils ont rompu ( c . s. ) l ' al l iance éternelle. 6. C' est pourquoi la malédiction dévore (c. s . ) la terre, ceux qui l ' habitent en portent ( c . s . ) la peine. C' est pourquoi les habitants de la terre se consument ( c . s . ) , i ! n ' en reste ( c . s . ) que très peu . 7. Le vin nouveau est en deuil ( c . s . ) , la vigne dépérit (c . s . ) , tous les bons vivants gémissent ( c . p . ) . 8. Le son joyeux des tambourins a cessé ( c . s . ) , le tumulte des gens en liesse a pris fin (c. s. ) , l e son joyeux de l a harpe a cessé ( c . s . ) . 10. La cité du néant s ' est effondrée ( c . s . ) , toutes les maisons sont fermées ( c . s . ) , inaccessibles. 11. Dans les rues, on réclame ( c . p . ) du vin, toute all égresse a disparu (c. s. ) , l a joie est bannie ( c . s . ) d u pays. 12. Il ne reste ( c . s. ) dans la ville que désolation et la porte, démolie ( c . s. ) , est en ruines ( c . s. ) . Il est évident qu' i l est difficile d e juger d u degré de vitalité de cette utilisation de la c. suff. dans une langue de traduction, mais i l est intéressant de constater que ce n' est que rarement ( un peu plus souvent que le français tout de même ) que le maltais a utilisé une c. suff. comme le texte hébraïque.
28/2,
22
. D nver préc ise que le verset 9 est à part.
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison suffixale
En tout cas le jeu stylistique du maltais ne correspond pas régulièrement à celui de l ' hébreu. De plus, selon D. Cohen 0984 : 308) " l ' emploi [ de la c. suff. comme futur 1 paraît moins fréquent qu ' on ne l ' indique parfois. Bien des exemples donnés sont des interprétations subjectives et la c. suff . peut y être rendue par un accompli dans le passé . " Est-ce le cas pour les formes traduites par une c. suff. en maltais 7 Pour le moins, l' emploi largement majoritaire de la c. préf. ou d ' un futur confirme les faits observés dans mon corpus et me semble révélateur du caractère extrêmement marginal de la c. suff. en contexte de futur.
En réalité nous n' étions pas arnvees du tout, mais sur le point de l ' être. La réponse implique que l ' endroit où nous devions nous rendre n' était plus très loin de l ' endroit où nous nous trouvions.
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5.4. Les emplois expressifs de futur Les seuls cas d'utilisation de la c. suff. en contexte de futur qui restent encore vivants recouvrent en fait un emploi qu' on pourrait qualifier de métaphorique pour exprimer l' imminence. C' est la s ituation extra-linguistique qui détermine ce contexte de futur. Il s ' agit toujours de contextes de discours et les verbes sont le plus souvent des verbes de déplacement. Ainsi pour /téla?/ "partir,, 23 : le départ de trois jeunes maltais était régulièrement ponctué d ' un /tla?na b:)ys/ litt . "nous sommes partis boys" , c' est-à-dire "on s ' en va les gars". La même formule se retrouve sous la plume de l' écrivain Friggieri 0986 : 3 ) : 1 . u jekk trid, tista' t igi m iegni. TLaqna ? qaL KarLu Manju. <et si tu-veux, tu-peux tu-viens avec-moi . Nous-partîmes 7 il-a-dit Charles Magne> "Et si tu veux, tu peux venir avec moi. On y va 7 dit Charles Magne" 2. - /fcyn °ï dïk id-déir 7/ - /wasalna/ <- où elle celle-là la-maison 7 - nous arrivâmes> - "Où est cette maison 7" - "Nous sommes arrivées".
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C' est le même emploi métaphorique qui permet de répondre /spiccayt/ "j' ai fini" alors qu' on est seulement sur le point d' avoir terminé quelque chose ( tout comme en français). Brincat ( 1977: 48-49 ) avait également signalé cet emploi de la c. suff . en contexte de futur pour exprimer "une action qui se déroulera peu après, mais qui est considérée comme déjà advenue dans la mesure où l ' on est tout à fait sûr de son accomplissement" ( un' azione che si svolgerà di li a poco, ma che viene considerata come già avvenuta in quanto si è del tutto sicuro deI suo compimento ) . Il donne comme exemples : 2. Hawn gejt "l' arrive tout de suite" 3. Did-darba rbanna "Cette fois-ci, on va gagner" certains de vaincre )
( c ' est-à-dire que nous sommes
Tous ces exemples sont à la 1ère pers. , ce qui n ' a rien de surprenant puisqu' i l s' �i t ( avec la seconde) de la personne du discours par excellence. Ces emplois demeurent tout de même marginaux, mais parti cipent de ce "choix expressif pour une affirmation insistante" dont parle D. Cohen ( 1989 : 91 ) .
6. Emplois modaux 6 . 1 . Comparaison avec quelques dialectes arabes
23 Dans nombre de parlers arabes ( Syrie, Palestine notamment ) , c' est l a c . suff. d ' un autre verbe de mouvement qui est utilisée dans ce sens /mslna/ litt. "nous nous en allâmes" c' est-à-dire "on y va" . Merci à Marie-Claude Simeone-Senelle de me l ' avoir rappelé.
L' utilisation modale de la c. suff. semble être plus réduite en maltais que dans d ' autres dialectes arabes. Ceci n' est notam-
24 Voir Benveniste 0966: 237-250 ) .
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
L a conjugaison suffixale
ment pas possible dans la protase de phrases hypothétiques marquant l' irréel du présent ou le potentiel. Là où certains dialectes arabes ont une c. suff . , le maltais ne peut employer que la c. préf. ou une forme composée. Voici à titre de compa raison les traductions maltaises d' exemples tirés de quelques dialectes arabes 25 :
1. /li ma-?adbu-06-s k6nct to?tol-06-1-u/ "S' i ls ne l' avait pas attrapée, elle la lui aurait tuée" 2. /k6ku ?�Oda [ga1 26 si sptar Îl-oa li milrrct u k6ku spicc�t u ilnki k6ku l;allcynI-Oa fcyn k6nct/ <si assise dedans quoi hôpital depuis-elle que elle-s' en-alla et si elle-termina et même si nous-laissâmes-elle où elle était> "Si elle était restée dans un hôpital il y a longtemps qu' elle serait p assée, et elle serait morte, et même si nous l' avions laissée où elle était" 3. /k6ku bil?aO l)ay k�n ikUn w6l)cd mil-l-pililstri taO-l-ilrti maltlyya m:::.>dérna/ <si il-resta vivant il-était il-est un de-les-piliers de l' art (f. ) maltaise moderne> "S' i l avait été encore en vie, il aurait été l ' un des piliers de l' art maltais contemporain" 4. /li k6ku igif6ri kélli Iktar nus bnt ntstri lktar l)wéyycg/ "Si, en fait, j' avais eu plus d' argent, j ' aurais acheté plus de vêtements" 5. /ma-k6n-s yar yckk la?tU-s séwwa ycw It lil-l-?attUs/ "Il ne savait pas s'il l ' avait bien atteint ou non le chat" 6. /yckk kéWom till;-l)om y6l)du l)s6b-oom wilra/ (III, 27-8) <si ils-avaient de-eux ils-prennent pensée-eux après> "S' ils en avaient à eux, ils s ' en occuperaient après" 7. /k�n ikUn al;y�r k6ku tlil?na/ ( Q ) "Il aurait mieux valu que nous partions"
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1. "Si elle vient demain, nous irons à l a mer" /yckk t igi ( c . p. ) o�da imm;rru l-bill;ar/ <si elle-vient demain nous-allons la-mer> /Ila zat ( c . s. ) g8dda, nmsiu l-81-bl;ar/ (Fès) 2. "Si la réunion s ' achève de bonne heure, je reviendrai te voir avant midi" /yckk il-lil?Oa tispIcca ( c . p . ) km6ni nérgaO nigi nar�-k ?ilbd n:::.>f sino�r/ <si la-réunion elle-finit tôt je-reviens je-viens je-vois-toi avant midi> /eza hell?et (c. s . ) el-galsa badri ?arga"lak ?abl eçl-çlohr/ ( Le Caire) 3. "Si j ' ai tout terminé nous irons l ' écouter" /yckk inkUn spiccilyt kblbs immbrru nisimou-l;/ <si je-suis j ' ai -fini tout nous-allons nous-entendons-lui> /ila kam81t ( c . s. ) kulSi nrol;o nS8m"oh/ ( Alger) 4. "Si elle venait tout de suite, nous irions à La Valette" /yckk tigi ( c. p . ) Issa immbrru I-bdt/ <si elle-vient maintenant nous-allons la-ville> /Ila zat ( c . s. ) amïna daba, nmsiu I-fas/ ( Fès)
6.2. Emploi dans la protase de phrases marquant l ' irréel du passé L' emploi modal de la c. suff. est obligatoire dans la protase de phrases hypothétiques exprimant l ' irréel du pas sé, toujours , introduites par l ' une des conjonctions /li/, /k�ku/ ou la locution conjonctive /li k6ku/, éventuellement reprise en tête de l' apodose, ou le potentiel dans le passé, introduit par /yckk/ ( nous venons de voir que ce n' est plus possible en maltais pour l' irréel du présent ou le potentiel ) :
25 Il s' agit de ceux relevés dans les articles ( 1985-86 ), Doss ( 1985-86) et Boucherit ( 1987 ) .
de
Caubet
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6.3. Emplois en dépendance d'un auxiliaire La c. suff. peut dépendre, directement ou en séquence, de quelques auxiliaires, eux-mêmes à la c. suff. ou à la c. préf. Les nuances aspect ives, temporelles ou modales impliquées par
2 6 Les occurrences qui ne correspondent pas au parler "standard" sont données en transcription phonétique large entre crochets.
-
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison suffixale
la périphrase verbale seront étudiées dans la 3ème partie consacrée aux auxiliaires (p. 101 sq l . Ce qui nous intéresse ici, c ' est que la forme verbale n'est pas libre :
6.4. Emplois comme complément d'un autre verbe ou en subor données
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1 . 1° as tkun °:J1 6t u ml�t il-I émbi k 8 l l-ul ( I , 87-8) "Car elle avait levé et rempli toute la cuvette" 2. lu dina k�n i)ataf il w ai)da tf ayla mal d yya u i)b Î -oa g:J dan l-Oarl <et celui-ci il -était il-attrapa à une jeune-fille maltaise et i l-cacha -elle dedans celui-ci la-grotte (m. » "Et celui-ci avait attrapé une jeune fille maltaise et l ' avait cachée dans cette grotte" 3. lai)na stayna °am i lna ckkl <nous nous-pûmes nous-fîmes ainsi> "Nous, nous aurions pu faire comme ça" 4. Itradiccy S ni li m i ssna zamm é ynal "Une tradition que nous aurions dû garder" 5. Ir é gaO mar °and miss 6r-ul (III, 68-9 ) "Il est retourné chez son père" Pour être complet, i l convient d' ajouter un dernier cas où se suivent un auxiliaire marquant la "tranche centrale d ' un procès" ( l ' expression est de M. Cohen 1924) et une c. suff. La construction est "correcte" et le sens de la périphrase est rigoureusement i dentique, selon mon informatrice de La Valette, à la même tournure avec c. préf . , util isée habituellement. Les exemples proviennent principalement de la presse écrite : 6. Imbagnad kampla qa l l i ... ( I l -Mument 8 . 2 . 1987 , p. 7 ) <ensuite i l-continua i l-a-dit que> "Ensuite il a continué à dire que . . . 7. Kamplew naqsu r-riservi barranin tal -Bank éentral i ( I l Mument 15.2. 1 987, p. 2) <elles-continuèrent elles-diminuèrent les-réserves étrangères de-la-Banque Centrale> "Les réserves en devises étrangères de la Banque Centrale continuèrent à baisser" La même tournure serait impossible avec le verbe Ib a?aOI employé comme auxi l iaire avec le même sens que Ik ;mpla/.
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Il existe un petit nombre d' emplois de la c. suff. en dépen dance, soit d ' un autre verbe, soit dans des propositions subor données à valeur de but, soit dans les subordonnées exprimant le temps . La forme verbale n ' en garde pas moins ses valeurs pleines d ' accompl i qui ont un caractère marqué par rapport aux emplois comparables de la c. préf.
a) Lorsqu ' un verbe à la c. suff. dépend d' un autre verbe, i l fonctionne alors comme complément d u premier. Le procès est considéré comme achevé. La construction est plutôt rare, et ne semble fonctionner qu' après les verbes de mouvement. Voici les seuls exemples que j ' ai pu relever. Tous proviennent d' un usage littérair e de la langue ( poésie orale, conte, littérature écrite ) : 1. lil-kur ani l i m::wt str ayt-°:Jml "Les chapelets que tu es allé acheter" (tu les as achetés, c' est fait ) 2. i l -Pir jaL nareg f i l-kuridur u mar qagnad ndejn ras it-tarag ( Casha 1974 : 39) "Le prieur sortit dans le corridor et alla s' asseoir sur l e palier" 3. u mar qal l u hekk ( Dan. 2/24 ) <et il-alla il-a-dit-à-Iui ainsi> "Et il alla le lui dire" 4. [talbastimént sem30ui), urâi) 3ami llu-ssinjâl ilkaptân, b le s jîgi i)déli) ] ( Stumme 1904 : 38, 1. 23-24 ) <de-le-navire ils-entendirent-Iui, et-il-vit-Iui il-fit-àlui-un-signal le-capitaine pour i l-vient à-côté-Iui> "Les gens du navire l' entendirent, et le capitaine le vit lui 27 faire signe pour qu' i l vienne près de lui,,
27
Stumme a traduit différemment : "Die Leute auf dem Schiffe harten ihn, und er sah dass ihm der Kapitan ein Zeichen gab, er mage naher kommen".
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison suffixale
Les trois premiers exemples ont été considérés comme "corrects", mais le quatrième où le premier verbe n' est pas un verbe de mouvement, a été senti comme a-grammatical par mon informatrice de La Valette.
conjonct ion. Ces énoncés, ressentis comme des "fautes" par les informateurs, sont peu fréquents dans mes corpus oraux, mais le seraient beaucoup plus selon eux. Dans les trois seuls exemples que j ' ai relevés ( le premier et le dernier à Gozo - Nadur et Xagnra - et le second à La Valette ) il semble que le sentiment d' incorrection soit lié au fait que le procès décrit par l e verbe de la subordonnée ne puisse être envisagé sémantiquement comme achevé, délimité.
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b) Quand on veut spécifier qu' un procès accomp li, il est possible d' employer la proposition finale :
a effectivement été c. suff. dans une
1. li ssa dan b�s ° a?ad °am i lt-I-u SI l;�gal <maintenant celui-ci pour i l-coagula tu-mis-à-Iui quoi chose> "Alors celui-ci pour qu' i l ait pris, tu lui as mis quelque chose 7" 2. Isi kcmm d � mct b�s s &rct ckk/ "Combien de temps ça a pris pour qu' elle soit devenue ainsi 7" 3. lil -l;;bz b�s s é taO yinb 6 1; r�d ik U n ittimbr & t bi-I-b; l l taO l-gvé rnl "Le pain, pour qu' i l ait pu être vendu, il avait dû être tamponné avec le cachet du gouvernement" 4. IL -gnadu biex fietek, biesek ; u int biex tfutu, aqleb fuq ( Aquil ina 1972 : 89, provo 70) et toi pour "L' ennemi pour te tromper, il t ' a embrassé ; et toi , pour le tromper , retourne-toi contre lui !" ( remarquer l ' opposition des formes verbales après biex dans les 2 membres de phrase) 5. ank i l-annar l ibsa sura ta' nies l i kel lha nadulha b iex difnuha fiha (O. Cal leja 1972: 5 1 ) <même la-dernière robe image d e gens que elle-avait i l s-pr i rent-à-elle pour i ls-enterrèrent-elle dans-el le> "Même la dernière robe présentable qu' elle avait ils la lui ont prise pour l ' enterrer dedans" 6. KeU i nnallas paga ta ' xahrejn biex xtrajtu ( O . Call eja 1972: 113) <j' avais je-paie paye de deux-mois pour j' achetai-lui> "J' ai dû payer deux mois de salaire pour l ' acheter" Si les ex. ci-dessus sont considérés comme "corrects", il n'en va pas de même pour certains autres emplois de la c. suff. dans des subordonnées de but introduites ou non par une
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7. Idawwarni -oa b�s l;arrikni -oa biss/ <nous-tournâmes-e l le pour nous-bougeâmes-elle seulement> "Nous l ' avons tournée seulement pour que nous la bougions" (pour que nous l' ayons bougée) 8. IccmpI U -I-o:::>m b�s k é W:::>m ylgul "Ils l eur ont téléphoné pour qu' ils vi ennent" ( "pour ( leur dire) q u ' i l s devaient venir " ) 9 lu dak l i ° a md il-kurcir l ss r é gaO b a Oat ° amd Iii san gwannl <et celui-là que il-fit le-crucifix il-revint i l -envoya il fit à San Gwann> "Et celui qui avait payé pour le crucifix il a renvoyé ( de l ' argent) pour payer pour San Gwann" ( pour qu ' i l ait payé ) =
cl La c. suff. peut aussi être employée dans les subordonnées circonstanciel les de temps introduites par I? abd mal "avant que" ou Isak é mm/ "jusqu'à ce que" quand le locuteur veut insi ster sur l ' accompl issement du procès
1. I?abd ma l;ar? U-o:::>m ma-kinU -s kunt énti / "Av �nt qu' i l s pe les aient brûlés, ils n' étaient pas contents" 2. I?abd ma fctl;u t-tr�?1 "Avant qu' i l s n'aient ouvert la route 7" 3. Ke U i noqgnod nistennieh sakemm wasal lura (Friggieri 1986: 97) <j ' avais je-m' assois j' attends-lui jusqu' à-ce-que i l -arriva en-arri ère> "J'ai dû rester à l' attendre jusqu ' à ce qu' i l so it revenu"
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Valeurs et emplois des deux conjugaisons
7. Conclusion Dans l ' i llustration qui vient d' être donnée des emplois de la c. suff. , on constate un certain nombre de convergences avec les valeurs de l ' accompli en sémitique et dans les dialectes arabes en particulier aoriste et passé antérieur dans le récit, parfait dans le discours. On a soul igné l ' apparition d' une construction syntaxique particulière pour l ' expression de cette dernière valeur , avec référence temporel le à un passé proche, au moyen de deux adverbes non temporels. Il existe aussi des emplois qui sont en très nette régres sion : le nombre des verbes médio-passifs ou déponents-internes susceptibles d' être util isés avec une valeur de présent est très réduit ; en contexte de futur, seuls subsistent des utili sations expressives dans le discours, ainsi que l ' emploi margi nal, et senti aujourd' hui comme peu correct, dans l ' apodose de phrases hypothétiques marquant l ' irréel du passé. La comparai son avec le texte biblique a aussi montré que la c. suff. était diffici lement compatible avec l ' énoncé prophétique. On a vu également qu' il ne subsiste que très peu d' emplois modaux : la c. suff. apparaît encore dans la protase des hypothétiques marquant l ' irréel du passé , mais plus dans celles marquant le potentiel ou l' irréel du présent . Par contre elle peut encore être uti l isée après un verbe auxi li aire ou comme complément d'un autre verbe pour souligner l ' achèvement du procès ou de l ' état décrit par le verbe. Si le nombre des emplois de la c. suff. est en régression, on ne peut pourtant pas soutenir avec Borg ( 1 988 : 67 ) qu' elle exprime "un voyage unique et complet qui s' est produit à un moment du passé" ("vjagg wiened u snifi li gara f ' xi mument fil passat" ) . Décr ire l ' accomp l i comme nécessai rement lié au passé est réducteur, même pour le maltais.
III. VALEURS ET EMPLOIS DE LA CONJUGAISON PREFIXALE
Remarques préliminaires M. Cohen ( 1924 : 21 9 ) faisait remarquer pour l ' arabe dialectal que "dans l' ensemble l ' imparfait [= c. préf. l y a gardé son indépendance à l' égard du temps". Telle est encore la situation du maltais à l ' heure actuelle où cette forme verbale se rencontre régul ièrement aussi bien en contexte de présent que de passé ou de futur, dans l ' instance du discours comme dans l ' instance du récit. Nous verrons que, même si la c. préf. a , dans la majorité des cas, perdu la possibil ité d' exprimer l ' inaccompli concomitant (13) au profit d' autres formes ( voir p. 112 sq ) , elle a conservé, pour l ' essentiel, son fonctionne ment aspectuel dans sa valeur d' inaccompl i général ( x ) . La valeur primordiale de cette conjugaison est l ' énoncé d ' un procès ou d'un état envisagés dans leur déroulement et non pas comme un événement délimité et achevé, quel le que soit l a période temporelle o ù l e contexte la situe. L a local isation dans le temps sera donc déterminée par des éléments extérieurs au verbe lui-même : outils grammaticaux ( adverbes de temps, etc. ) , présence d ' un exposant temporel Uki8n/ "il était" ) , ou encore le contexte tout entier déterminé par l ' instance de l' énonci ation.
1 . L'expression des vérités générales La c. préf . est normalement util isée pour l ' expression de valeurs non dél imitatives comme les vérités générales à valeur proverbiale ou non, donc des assertions achroniques. 1.
Baqra tajba tinb iegn f' pajjizha ( Aquilina 1 972: 190, provo 8 ) "Qui va l oin se "Une bonne vache se vend dans son pays" ( marier sera trompé ou veut tromper" ) 2 . /imma vi:ra arti ma-taOmi l-s gUdiccyu l-arti taOmc1 csp:::> z ic cy5ni tipprczcnÜ-l-ck i l-fatti kIf in-oOma/ =
--
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Valeurs et emplois des deux conjugai sons
<mais vraie art (f. ) ne-elle-fait-pas jugement l ' art el le fait exposition el le-représente-à-toi les-faits comme que-eux> "Mais c ' est vrai qu 'un art ne juge pas, l ' art expose, te représente les faits tels qu' i ls sont" 3. /l-éwwd wal).da tigi it-t:)llcranca/ "D' abord vient la tolérance" 4. /taf li ?attŒs yisbl). fénck/ "Tu sais qu' un chat ça dépèce un lapin" 5. /oŒma l- irgrill li im8rru l-kacca mus in-ni sa/ ( Q ) <eux les-hommes que il s-vont la-chasse ne-Iui-pas les-femmes> "Ce sont les hommes qui vont à la chasse, pas les femmes" 6. /cmm car zOIra 1 tal).t dIn il -knIsya I).€:lwa illi g:) fi-ca nsIbu si st�twi taO-l-g€:bc l li yirraprczcntaw il-mad8nna/ "Il y a une petite grotte sous cette jolie église où on trouve des statues en pierre qui repr ésentent la Madone"
La conjugaison préfixale
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"Moi, je marche sur les epmes, mais toujours pieds-nus. Le dimanche seulement je mets des sandales" 3. [ irrâgel tî3eI s al).I).âr u j�kol itfâl ! l ( Stumme 1904 : 6, 1. 36-7 ) "Mon mari est un sorcier et il mange les enfants ! " 4 . lissa déyycm S81tU f dicémbru yann�r frar taOmd bec sItal <maintenant toujours d ' habitude dans décembre janvier février el le-fait peu pluie> "Alors toujours, d' habitude, il pleut un peu en décembre, janvier, févr ier" 5. /sikwIt i Oidu stéyycr f{p-oa/ <souvent ils-disent histoires sur-elle> "Souvent on raconte des histoires à son sujet" 6. /kull sl).In nidl).:)l cmm gcw nibda nizfcn il-walc yQn/ "A chaque fois que je rentre là-dedans je me mets à danser la valse, moi"
3. En situation de concomitance 2. L'expression de faits habituels L ' utili sation de la c. préf . en contexte de discours permet de présenter un procès comme se déroul ant de manière habituelle, générale et pas uniquement restreinte au moment de l ' énoncia tion. Cette valeur est fréquemment soulignée par la présence d' adverbes dans l ' énoncé comme /d€:yycml "toujours", IsikwIU "souvent" , etc . : 1. /tl).:)bbŒ-1). l-baytar1 2.
1 En principe, le terme qui dés igne la grotte est masculin, mais dans l ' idiolecte de mon informateur de San Gilian il est le plus souvent ( mais pas toujours ) féminin.
En situation d' inter locution, dans un nombre de cas très limité, la c. préf . peut aussi être uti li sée dans des contextes où il y a concomitance avec l ' acte d' énonciation ou un autre événement pris pour référenc e, à la place de la forme à préverbe spécifique ( voir p. 1 1 2 sq ) . Elle se rencontre parfois avec une valeur de "présent actuel " dans des phrases interrogatives, qu i , on le sait, conservent souvent des emploi s devenus désuets dans l ' énoncé assertif . D. Cohen ( 1984: 300, 306-7 ) a déjà constaté un phéno mène paral lèle en hébreu bibl ique ( où c' est le part icipe qui , en principe, marque la concomitance ) : " i l semble bien qu' avec une valeur de présent actuel, la c. préf . se présente normale ment sous la forme interrogative . " ( i bid. 306 ) . Il ajoute ( ibid. 307) : "Il faut noter cependant que le participe de son côté, est communément util isé dans une phrase interrogative", ce qui est aussi le cas pour la forme à préverbe en maltais comme nous le verrons. En ce qui concerne la c. préf . , un énoncé du type /s-inti taOmcl/ ( l itt. quoi-toi tu-fais) peut aussi bien être traduit par " Que fais-tu ( en général ) ? " que par "Qu' es-tu en train de faire ( en ce moment ) ?" selon le contexte .
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La conjugaison préfixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
1. 15 inti t�Omd cmm HPI "Qu' est-ce que tu fais ( es en train de faire) l à-haut 7" 2. 15 int iss�yyarl - I?ct-ins�yyar il-l�l)aml ( Q ) - <en-train-je-fais-cuire la-viande> "Qu' est-ce que tu fais cuire 7" - "Je suis en train de faire cuire la viande" (dans la réponse figure la forme spécifique du concomitant ) 3. [ 5inti t�mel âli 7 1 [ kî3at nistr�l) l ( Stumme 1904 : 62, 1 . 21-2) - <en-train je-me-rep os e> "Que fais-tu ici 7 " - "Je suis en train de me reposer"
Dans chacun de ces exemples le verbe aurait pu être précédé de la particule de concomitance I?ctl ( pour des ex. voir p. 131-3) comme dans les réponses. Simpl ement, l ' expres sion de la concomitance par une forme marquée n' est encore que facultative dans les phrases interrogatives. A l ' inverse, si une question comporte une forme de concomitance, sa reprise n' est pas forcément nécessaire dans la réponse. Voici le seul exemple que j ' en aie relevé :
6. qed ifettet fit-tè u jmaxtar ( O . Calleja 1972: 97 )
<en-train il-remue dans-le-thé et il-se-goinfre> "Il est en train de remuer son thé et de se goinfrer"
Enfin, il existe un petit groupe de verbes qui ne peuvent jamais recevoir une particule ou un préverbe de concomitance . Il s' agit d e ceux qui expriment des modalités o u certains états en rapport intime avec le sujet, des verbes qui, par leur sémantisme, peuvent être classés comme "moyens" ou "déponents internes" /r�dl "vouloir", /sétaOI "pouvoir", Ist�?1 "souhai ter", Il)t�gl "être nécessaire", Il)abbl "aimer", Iyafl "savoir". Il en est de même pour tous les verbes sans c. suff. que signale Borg ( 1988 : 83 ) dans son idiolecte à savoir, outre " 2 Iyaf/, Iyismu/ "s' appeler" , lisusl "insister", lil)Ufl "s' activer", litUl/ "durer", lyisbal)1 "ressembler,,3. Pour ces ver bes, l' opposition morphologique entre inaccompli concomitant ou général n' est pas marquée. En voici un ex. dans une situation de concomitance : /
J ' ai rencontré une fois dans mon corpus une situation de concomitance exprimée par une simple c. préf . aussi bien dans la question que dans la réponse : 5. - 15 i nt t�Omd mari - It6l)u nifs/ - - <elle-prend souffle> - "Que fais-tu Marie 7 - Elle se repose" ( C' est une tierce personne qui a répondu à sa p lace ) Lorsqu' une conjugaison à préverbe du concomitant apparaît en tête d'un énoncé, les verbes des propositions coordonnées qui suivcnt ne portent pas obl igatoirement cette marque. La c . préf. apparaît alors comme une forme neutre en construction séquent ielle, une fonction de l ' inaccompli général telle que la définit D. Cohen ( 1989 : 149 ) :
'
7. Jien taL-vaniLja rrid (O. Calleja 1972: 8 )
<moi de-la-vanille je-veux> "Moi, j ' en veux une (une glace) à la vanille" (l' enfant ses parents sont devant la boutique du marchand de glaces)
4. - 15 ? ct-t�O m dl - In�rmi ti5yul
<je-jette "tissue"> - "Qu' es-tu en train de faire 7 " - "Je jette un mouchoir en papier"
77
et
4. L'instance du commentaire général Il est un cas où l ' opposition habituellement marquée en maltais entre inaccompli général et concomitant se trouve neutralisée à savoir dans l ' instance du commentaire général ou de la "cons� tatation atemporelle où se manifestent les énoncés généraux qui peuvent faire partie du récit comme du discours" (D. Cohen 4 1989 : 84 ) . La forme utilisée est celle de la c. préf. simple. 2
Ce verbe a le préfixe caractéristique de la 3ème pers. masc. sing. de la c. préf. , qui reste invariable, mais la conjugaison s' effectue au moyen des pronoms personnels suffixés qui varient en genre, nombre et personne.
3
Tous ces verbes sont donnés ici à la 3ème pers. masc. sing. de la c. préf . , mais leur paradigme varie régulièrement.
4
Pour des observations analogues sur l ' utilisation du "présent simple" en anglais, voir par ex. Bouscaren et aL ( 1987 : 14 ) .
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Valeurs et emplois des deux conjugaisons
Ceci apparaît tout à fait nettement dans deux de mes corpus. Le premier est du domaine du discours : il s' agit de la visite guidée d ' une exposition. A chaque fois qu' une forme ver bale est liée à la désignation d ' un objet précis, le locuteur uti lise la c. préf. Le second appartient au récit et concerne les commentaires scemques qui accompagnent les pièces d ' O . CaUeja ( 1972) l a forme verbale décrit l e déroulement des activités des personnages et non pas le fait qu' el les soient concomitantes à la situation imaginée par l ' auteur. Par contre la forme à préverbe apparaît lorsqu'une action se déroule en concomitance avec une autre et n' est pas inscrite dans une succession (ex. 4 ) . 1 . /awnékk nar�w w�l:).da mi-s-scrratUri antIki li ?cOdin nOldu/
< ici-ainsi nous-voyons une de-les-serrures anciennes que assis ( pl . ) nous-disons> "Ici, nous voyons l ' une des serrures anciennes dont nous sommes en train de parler" 2. limb�oad nar�w awnékk il-?�fas/ <ensuite nous-voyons ici-ainsi les-claies> " Puis nous voyons ici les claies" 3. Imur l ejn is-sodda, ino l l l -ingravata minn gnonqu. Roza tqum nofsha mis-siggu [, . .1 Fredu idur u jpoggi fuq tarf is-sodda. Roza tinzel malajr b i l-qiegnda. Subgnajha jduru maz-zibeg tal -kuruna, tgedwed xi naga [, . .1 Fredu jfittex fil-bwiet [, . .1 Inares l ejha gnal ftit .. . (p. 47) < il-va vers le-lit, il-défait la-cravate de cou-lui. Rose se lève moitié-elle de-la-chaise [ . . . ] Fred tourne et s ' assoit sur extrémité le-lit. Rose descend vite avec-l' assise. Doigts -elle ils-tournent avec-les-perles de-le-chapelet, elle-mar monne quoi chose [ , . . 1 Fred cherche dans-les-poches [, . . 1 Il regarde vers-elle pour un-peu . . . > " I l va vers le lit, défait l a cravate de son cou. Rose se lève à moitié de la chaise [ . . . ] Fred tourne et s ' assoit au bord du lit. Rose se rassoit vite. Ses doigts tournent sur les perles du chapelet, elle marmonne quelque chose [ . . . 1 Fred cherche dans les poches [ , . . 1 I l la regarde un instant" 4. jimxi lejn fejn qed jara l - qamar (p. 150 ) < il-marche vers où en-train i l-voit la-lune> " I l marche vers où il est en train de voir la lune"
La conjugaison préfixale
79
5. En contexte de futur 5 . 1 . La c. préf. , même sans marqueur temporel donné par la phrase, peut avoir une valeur de futur. I l s ' agit d ' un "futur général" "indiquant seulement que le procès se produira à un moment ultérieur dont il n' est pas spécifié s ' i l est imminent ou pas" (D. Cohen 1984: 309 ) . Cet emploi est aussi fréquent en arabe dialectal ou classique. 1 . [forsi-rrâgel tî3�k mâ j�kolniesl ( Stumme 1904 : 6 , 1. 38-3 9 )
"Peut-être que ton mari ne nous mangera pas" 2. /?�lt-I-u s�?si IiI mïn iO�ddi l-éwwcl/ <elle-a-dit-à-Iui demande à qui il-passe le-premier) "Elle lui a dit : demande à celui qui passera en premier" 3. /?�lt-I-u niSl:).tŒ-l:). g::> l-bïr °as inkélla nin?�bdu u nél:).lu l-l:).abs/ <elle-a-dit-à-Iui nous-jetons-lui dedans le-puits car autre ment nous-sommes-pris et nous-sommes-collés la-prison) "Elle lui a dit : "Nous le jetterons dans le puits car sinon nous serons pris et jetés en prison" 4. /?�l-l-u taf s t�Omd/ ( I II, 58 ) "Il lui a dit : tu sais ce que tu vas faire 7" 5. /b�s minn-oa tistaO t6hu si fUt halÎb taO-l-m6oza mcta ngïb . il-m6°::>z yirou/ ( III, 18-9 ) <pour de-elle tu-peux tu-prends quoi peu lait de-la-chèvre quand j' apporte les-chèvres elles-paissent> "Pour que grâce à elle tu puisses prendre un peu de lait de la chèvre quand j' amènerai les chèvres paître" 6. /ckk kïf nircivI-oa inl:).�lls-ck/5 ( Q ) 6 "Dès que je l ' aurai reçue, je te payerai,, 7. /f6rsi mil-I-fd�l t60-u n�omd si :Q.�ga 8l:).ra/ "Peut-être qu'avec ses restes je ferai quelque chose d' autre"
5
Souvent, dans les dialectes arabes, c ' est une c. suff. qui est ut ilisée dans ce type de phrases. 6 L' énoncé maltais serait identique pour rendre "dès que je l a reçois, je t e payerai " .
jiiP
La conjugaison préfixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
80 8. [ i lgurnâta
kolla
7 I�kun -mî3� k ,
imma
bil l�I
nctl)roc
nIsraql
( Stumme 1904 : 20 , 1. 4-5) ''Toute la journée je serai avec toi , mais le soir je sortirai voler" 9. Gnada n igi u naraw fejn qiegnda L -nasra ( Casha 1974 : 37) <demain je-viens et nous-voyons où assise le -dommage ( f . » "Demain je viendrai et nous verrons où se trouve le dégât" 10. DaLwaqt jixegnLu kuL L imkien ( O . Cal leja 1972: 147) "Bientôt ils vont allumer partout"
5.2. C' est aussi , le plus souvent , la forme verbale qui appa raît dans l' apodose à valeur de futur d ' une phrase hypothé 8 tique marquant le potentiel : 1. /yEkk ma-t::>?08d-s kw�t nikastigi-k/ ( Q )
5.3. La c. préf . n' exprime pas comme en hébreu (voir D . Cohen 1984: 309 ) le futur "relatif" . I l est marqué par des formes composées, qui seront étudiées dans la suite de ce travail, différentes selon qu' i l s' agit d' un "futur du passé" c' est-à-
8
Sic. L' accentuation sur la première syllabe est très étrange.
Pour son expression au moyen d ' une part icule de futur, p. 183-4 § 3 . 3 . et 4.3. 9 /ik/ est une forme abrégée très courante de /YEkk/.
dire d' "un procès ultérieur à un autre procès dans le passé" , ,,10 . ou d un " passe' du f utur exprimant "un procès non encore réalisé, mais qui se réaliserait avant un autre procès annoncé" . Dans le premier cas o n aurait en maltais une c. préf . avec préverbe de futur, éventuellemen t précédée de l ' auxiliaire temporel /k�n/ "il était" , dans le second une périphrase composée de /ikOn/, c. préf. du verbe " être", SUIVl d ' un verbe à la c. suff. Voici, à titre de comparaison, la traduction des c. préf . de deux versets de la Bible, cités par D. Cohen ( 1984 : 309) : Jon. 4/5 . teL L a ' gnaL ih gnarix hemmhekk, u qagnad tantu, gnad deL L , b iex jara x'kien se jigri m i L L -bel t "Il se fit là une cabane, s ' y assit à l ' ombre attendant de voir ce qui se passerait dans la ville" ( TOB) Jg. 6/26 u toffrih manruq b i L -natab ta' L -Asera Li tkun qaééatt <et tu-offres-Iui brûlé avec-les-fagots de l ' Asera que tu-es tu-coupas> "Et tu l ' offriras en holocauste sur le bois du poteau sacré que tu auras coupé" (TOB ) .
<si ne-tu-restes-pas calme je-punis-toi > " S i t u n ' e s pas sage j e t e pun irai" 2. /yEkk n8l)r::>g ingib-O �-l-Ek/ ( Q ) <si je-sors j' apporte-el le-à-toi> "Si je sors, je te l' apporterai" 3. /Imma l-lizir Issa ik9 l)allEyt-O-I-Oa smmÉ:kk f8rsi ma-tl)alls -É:k-s dïn/ <mais l e-drap mai ntenant si tu-laissas-Iui-à-elle là-ainsi peut-être ne-elle-paye-toi-pas cel le-ci> "Mais le drap, alors, si tu le lui as laissé là-bas , peut être qu' elle ne te payera pas".
7
81
6. Dans l' instance du récit 6.1. D. Cohen ( 1989 : 93 ) fait remarquer que "dans le récit [ ' . l l' inaccompli [ fonctionne l comme un imparfait . " Tel est aussi l e cas d e la c . préf . e n maltais . E l l e est uti l isée, dans c e contexte d e passé , pour énoncer que le prédicat e s t envisagé dans son déroulement et non pas comme un événement achevé comme ce serait le cas avec une c. suff. ( voir ci-dessus p. 45-7 ) . Cette utili sation d e l a c . préf. n e s e fait toutefoi s pas dans n'importe quel les conditions un récit ne peut en effet débuter par un verbe à la c. préf. seule. Très fréquemment, elle se trouve dans une construction séquentielle : le premier verbe d ' un énoncé est à la c. préf . mais précédé de l ' auxiliaire du passé /k�n/ "il était", puis, dans la suite du récit, la présence de cet auxil iaire n ' a plus .
voir 10
Les expressions sont reprises de D. Cohen ( 1984 : 309 ) .
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison préfixale
rien d ' obligatoire et l ' on peut avoir toute une sene d' énoncés ne comportant que des c. préf . avant de retrouver une indica tion temporel l e quelconque. Comme la périphrase avec Ik�n/, la présence d' une c. préf. dans le récit énonce une habitude en plus du fait qu' elle marque le prédicat dans son déroulement, ainsi que le remarquait M. Cohen ( 1924 : 182) à propos de ce fonctionnement qu ' i l nommait "passé duratif" "il peut aussi décrire un procès en cours d ' accompli ssement dans le passé ou une situation et enfin exprimer une habitude. " On remarquera dans le second exemple ci -dessous que la c. préf . seule apparaît après les marques de coordination lui "et" et Imbaoadl "ensuite", mais l orsque la séquence cesse d ' être marquée formellement, l ' auxiliaire temporel est de nouveau uti l isé :
travai llent même qui U -va l ' école e l L es-trava i l L ent la-mai son et comment elLes-peuvent e U es-aident> "Les jeunes filles du vil lage, comme ça elles travaillaient, même celles qui allaient à l ' école. Elles travaillaient à la maison et elles aidaient comme elles pouvaient" 4. Ik6nu yikla-°::Jm l)afna missiriyy6t-na ?abcl isayyra-°::Jm u yikl a-°::Jm kcmm ncyyln u kcmm mi syurlnl "Ils en mangeaient beaucoup nos ancêtres, avant. Ils les faisaient cuire et ils les mangeaient aussi bien crus que cuits" 5. Ima-kina-s yiseu im::Jrru ° al-I -l)6bz mal li y6l)r::Jg mil-I-f6rnl ( 1 , 194-5) "Elles ne pouvaient pas aller chercher le pain dès qu' i l sortait d u four" 6. li � sa [g� l I-IÉn; bi al)na ?att l!la-k6nna nnadfa-l) prccIz [gal l-lcmbi dcyycm yib?aO si fUt °agïnl 0, 117-9 » <maintenant dedans la-cuvette ( m . ) nous jamais ne-nous-étions nous-lavons-lui precIs dedans la-cuvette toujours U -reste quoi un-peu pâte> "Alors dans la cuvette, nous, jamais nous ne la nettoyions avec précision, dans la cuvette il restait toujours un peu de pâte"
82
ll
1. Imous ( J , 5-6 )
k�n
yigi
taO-I-l)8bz
u
ylstru
il-l)8bz
minn
°and-ul
"Ce n' est pas que le boulanger venait et qu' on achetait le pain chez 1 ui" 2 . II-Éwwcl kQn 1 2 y::P5°du ifarfra-l) tayycb imba°ad prbta-l) mac sulSin u yaOmla-l-oa ?Is-Oa rabb;ita tayycb dan l-irbÎt u dak iz-zarao yaOmla-l) ?attaO ?attaO imbaoad sl)ïn ik8W::Jm tmgn ?att6t k�n yaOmlu g::Jcc zOïrl < le-premier il-était ils-dépoussièrent-Iui ils-s' asseoient bien puis Us-attachent-Iui avec mutuellement et Us- font à-el le comme-elle liens bien celui-ci le-lien et celui-là le-blé Us-fant-lui botte botte puis quand Us-ont huit bottes il-était i ls-font tas petit> "D' abord ils le dépoussiéraient bien, et puis ils les atta chaient ensemble et ils en fai saient comme des liens, un bon lien, et ce blé ils le mettaient en bottes, et puis quand ils avaient huit bottes , ils faisaient un petit tas". 3. lit-tfayl6t taO-r-ral)al ckk k6nu yal)dmu anki mïn imur l-isk5la yal)dmu id-dar u kïf ylstOu i OInul ( 1 , 257-60) < les-jeunes-fil les de-le-vi llage ainsi elles-étaient elles-
6.2. La même valeur d' inaccompli d' habitude dans le passé se retrouve pour les c. prÙ. dans des récits relatant des activités qui avaient l ' habitude de se reproduire autrefois, lorsqu ' un énoncé est introduit par le pseudo-verbe "avoir" IkÉllul qui exprime un aoriste ( voir p . 413 ) . S i le récit débute par Ik�nl "être" à la c . suff. dans son sens plein de verbe d' état et non plus comme auxil iaire , les c. préf. des verbes processifs qui suivent décrivent simplement "un procès en cours d' accomp lissement dans le passé" ( ex. 3) : 1. IkÉl lna da?sÉyn skaffa cal tapp6sta u [ n?td5-l) lI C I , 224-5 )
II 12
Sur cette négation, voir p. 383 ( ex. 8 ) .
Ik�nl exposant temporel peut ne pas s ' accorder en nombre. Voir p. 214.
83
<nous-avions quelque-peu étagère pour exprès et nous-posons lui> "Nous avions une sorte d' étagère spéciale et nous l ' y met tions"
84
2. lu k é W a si l).att iO l n-oal 0, l75 )
<et elle-avait quoi personne i l-aide-elle> "Et elle avait quelqu' un qui l' aidait" ( pour l ' aider ) 3. Ibnt fi-t-t i�P a n 8ms:)t s a Or-il CV, poème n° 3) <j' étais dans-la-fenêtre je-peigne cheveux-moi> "]' étais à la fenêtre, je me coiffais l es cheveux"
6.3. Une autre condition poss ible à l ' utilisation de la c . préf. dans u n récit, est la présence e n tête d' énoncé d ' un adverbe temporel du passé. I l peut s' agir d' une habitude ( ex. 2 et 3) ou de la description "d'un procès en cours d' accomplisse ment dans le passé" comme dans l ' exemple 1 où la c . préf . s' oppose au verbe qui suit à l ' aspect délimitatif. Des énoncés de cet ordre ne sont toutefois pas très fréquents dans mon corpus. Les trois qui ont été relevés proviennent d ' un locuteur de Mtanleb âgé de 74 ans et de proverbes. I i i l).Î -ya nigbd Ô -l). nigbdÔ -l). nigbdÔ -l). k 8nna y�na u 8l).ra ta n i gbdu sa f-l- al).l).ar ?tayn 6 -l). fi-l-ayrul "Une fois mon frère nous le bercions, nous le bercions , nous le bercions, nous étions moi et une autre, tiens, nous ber cions et soudain il nous a échappé en l ' air" 13 gnax it-trova 2. I l -b ieran ibign L- immarinat u U um ta' abbet tura sab ( Aquilina 1972, provo 61, p. 335 ) "Hier il vendait des marinades et aujourd ' hui il roule sur l ' or car il a trouvé un trésor" 3. Min dari jagnt i miet (Aquilina 1972, provo 16 p. 280 ) "Qui autrefois donnait est mort" 1. Id arba
13
L a conjugaison préfixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
Selon Aquil ina, l ' expression "ta' abbet" est une façon popu laire de dire "riche" . Elle est composée de la préposition "ta' '' , "de" et du latin "habet", "il a " .
85
6.4. Dans un récit exprimant une suite d' événements advenus, où les verbes sont donc en principe à l a c. suff. , certains d' entre eux , sauf le premier, peuvent être cependant à la forme préfixée. Il s' agit d ' un de ces usages narratifs que D. Cohen (1984 : 29 1 ) a qualifiés de "conjonctifs" à propos d ' une soi disant valeur de "duratif dans le passé" prêtée par Cantineau à la c. préf. dans le dialecte arabe de Palmyre : "après un verbe à une forme aspective marquée, les autres verbes sont à la forme neutre, c' est-à-dire à la c. préf. sans préverbe, l ' as pect restant celui de la forme marquée" . Simeone-Senelle ( 19856 : 77 ) a repris ce classement modal de cet emp loi de la c. préf . : "dans une suite de procès, dans l ' instance du récit, le premier procès est "marqué" quant à l ' aspect, et les autres procès, dépendant implicitement du premier procès, sont à la conj. préf. qui est ici une forme neutre, non marquée du point de vue du temps et de l ' aspect. " Un tel classement "modal" est également possible en maltais. Dans cette présentation l ' accent n'a été porté sur le contexte du récit que pour éviter qu' on assimile une fois de plus c. préf. et présent. La seule valeur qui pourrait éventuel lement être déduite du contexte est celle d'un aoriste. Elle n ' est ni celle d ' un présent ni celle d ' un imparfait comme dans les cas étudiés ci-dessus. L' emploi de la c. préf . avec valeur d ' aoriste relève du domaine stylistique . Elle est ressentie par les auditeurs comme donnant plus de force, de vivacité, au récit. Il semble bien que, pour le locuteur, ce soit une manière de revivre, de faire revivre une scène . 14 Cela me paraît être particulièrement le cas dans un corpus recueilli auprès d ' un locuteur de Mtanleb (hameau reculé du sud-ouest de l ' î l e de Malte ) et dans certains textes du recue i l de Stumme :
14
L es ex. re I eves, ' peu nombreux au demeurant, de cet usage, concernent presque exclusivement des verbes de perception, de dép lacement et de préhension, trois catégories sémantiques pour lesquelles A. Roth ( 1987 ) avaient remarqué un fonctionnement styl istique particulier, dans le récit, pour l ' inaccompli en p dans le par 1er arabe de Kormakiti . Si l ' on ne peut plaquer le détail de son analyse sur le maltais, il y a cependant une valeur que maltais et arabe de Kormakiti semblent partager, c' est celle d ' un fonctionnement " conclusif" , particulièrement net dans l ' ex. de Stumme ci-après ( i l s ' agit d' ailleurs de la fin d'un récit ).
86
La conjugaison préfixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
1. Ikin-émm w�hcd [pl)3 ! -ck ] ckk .
inglÎz k�n [t::>] i OÎd-I-i k�mon k�mon yi dl)::>l il-[gabb:5na] Cal !:labta taO s�oa [ s�téyn] y�!:lu zcwg l)ars�t °ckkl "Il y en avait un comme toi , comme ça, Anglais qu' il était tiens, il me dit "Come on , come on" , il entre dans la cabane sur le coup d' une heure, deux heures, il jette un coup d' œil comme ça" 2. Ifi lfla darba [ murna t::> ] l)a-noÎd-I-ck [ immurru ] fi lfla yipawwa l-bal)ar tla?na cal [ �r ] lapsil "Filfla, on y est allé une fois, tiens, je vais te dire, nous al lons à Filfla, la mer gross it. Nous étions partis pour la grotte de Lapsi" 3. lil-[ guma ] l-�l)ra sibt sup [ . . . ] u nitlao np tal)t il l)arrUb u [ nura ] kaoak ckk zOïr °ckk ;ira da?sékk séwda u sl)ïn rayt ckk y�n °i dtl "La semaine dernière j ' ai trouvé un serpent [ suit une des cription du serpentJ et je monte là-haut sous le caroubier et je vois un kagnak1 comme ça, petit, comme ça, regarde, de cette taille, noire 16 et quand j ' ai vu ça, moi , j ' ai dit" 4. IOas il-kl�b k�nu sikwÎti yitil?u [ waraY-b] u dal)al [gal skSra u [ mm:5r ] nigri u na?bd-u w-[ crbatt-u] u ?éOdt-u [ ga l skSral
15 Le "kagnak" est une pâtisserie très commune à base de graines de sésame, en forme d ' anneau. L ' emploi de ce terme fait allu sion à la forme du serpent. 16 Le fémi nin s' explique probablement par le fait, que l ' infor
mateur a oublié qu' i l avait utilis,é le qu ' i l pense au nom d' unité féminin IkaOka/.
col lectif
Ikaoakl
et
5.
87
"Car les chi ens étaient silencieux, ils partent derrière lui et i l est entré dans un sac et je pars en courant et je l' attrape et je l ' ai attaché et je l ' ai mis dans un sac" [ ettorka [ . . 1 gibûwa ) oddiemu, bies ji kkondannauwa 3albicca la-3amlitlu. j�mel gardarûm-bizz�It j�li, jitfa!:ll)a gafie!:l] ( Stumme, dial ecte de Rabat ( Malte ) , p. 52, 1 . 26-28) "La Turque [ . . ] i ls l ' ont amenée devant lui pour qu' on la condamne pour ce qu ' elle lui avait fait. I l met un chaudron avec de l ' huile à boui llir, il la jette dedans"
Tous ces exemples sont aussi intéressants du point de vue de l ' util isation de la c . suff. comme forme marquant une rupture stylistique . Quand un verbe n' est plus senti comme étant en dépendance syntaxique d'un autre, le locuteur emploie une forme à suffixe qui fait alors fonction de ponctuation de l' énoncé. Le phénomène a été remarqué pour d ' autres langues chamito-sémitiques comme le berbère ( Gal and-Pernet 1973-74: 6566) ou l ' ougar itique par ex . , pour lequel D. Cohen ( 1989: 181 ) observait notamment que "dans une succession cp-cs, l a forme cs peut indiquer l ' achèvement des processus nommés par les formes cp. " C' est d' ailleurs ainsi que l ' on pourrait interpréter les deux derniers verbes de l ' ex. 4 ci-dessus.
7. Le parfait en composition avec deux adverbes Nous avons vu dans le chapitre précédent (p. 55-7 ) que lorsque la c. suff. est employée dans une construction syntaxique comportant l ' adverbe IOad-1 "encore" , éventuellement suivi d ' un autre adverbe Ikcmml "combien" ou Ikïfl "comment", e l le exprime un parfait. La même construction est possible avec la c. préf . avec la même valeur . Je n ' en ai cependant rencontré que deux exemples dans tous mes corpus, tous deux sans le second 7 adverbe, 1 et tous deux à Gozo. La construction est connue des autres informateurs et sentie comme rapprochant encore plus du
17 Même si je n ' ai pas relevé d ' exemple avec cet adverbe, son util isation est possibl e, selon mon informatrice de La Valette.
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Valeurs et emplois des deux conjugaisons
moment présent que son équivalent avec c. suff. Elle est donc plus fortement expressive et marque une incidence plus grande dans le présent du locuteur. 1. Idïk o�d-ni nirranga-Oal
"Cel le-là, je viens juste de la réparer" ( et non pas "je la répare encore" ) 2. IOidt-I-u issa o�d-u iO idi-I-na sl;ïn spiccayna mi-d-da??1 quand encore-lui <j' ai-dit-à-Iui maintenant i l-dit-à-nous nous-finîmes de-la -sonnerie> "Je lui ai dit "il vient de nous ( le ) dire à l ' instant, quand nous en avons eu fini avec la sonnerie"
La conjugaison préfixale
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4. /al).na u nfbnu l).a-nissuggirfssu naomlu ?Is-u arcl
<nous et nous-construisons FUT-nous-suggérons nous-faisons comme-lui "arch"> "Pendant que nous construirons, nous suggérerons de faire comme une arche" 5. U jkunu bhaL aghsafar mahruba, bhaL bejta mtajra, iL -bniet ta' Mowab, huma u jaqsmu L -Arnon (Es. 1 6/2) <et elles-sont comme oiseaux échappée, comme nichée chassée, les-filles de Moab, elles et elles-traversent l ' Arnôn> "Et elles seront comme des oiseaux en fuite, comme une nichée chassée, les filles de Moab, tandis qu' elles traverseront l ' Arnôn"
9. Emplois modaux 8. La simultanéité Le maltais connaît une construction converbiale particulière pour exprimer qu'une action a lieu de manière simultanée à une autre action ou à un état. Elle est formée d ' un pronom personnel indépendant, suivi de la conjonct ion de coordination lui "et" et d'un verbe à la c. préf. ( sauf pour les verbes de mouvement et d' attitudes, voir p. 134-5 ) accordé avec le pro nom. Quant au verbe de l' autre membre de la phrase, il peut être à l' une ou l ' autre des deux conjugaisons. La construction converbiale se rencontre donc en tout contexte, passé, présent ou futur , discours ou récit. Vella ( 1970: 293) dans sa thèse signale la même construction dans le dialecte libyen de Benghasi. Elle n ' avait été relevée ni par Cesàro ( 1 939) pour Tripoli ni par Panetta ( 1949) pour Benghas i. 1. lu y6na u indawwar l-éwwc1 norb:)t awnékkl
<et moi et je-tourne le-premier je-lie ici-ainsi> "Et en tournant, d ' abord je fais un l ien ici" 2. lint u t6bl trïd tl;al lI-o:)m fi]? nar bassl "En mangeant, tu dois les laisser à feu doux" 3. wiegbu L-Fra hu u jghin L i [ éorg jitL a ' miLL - iLma ( Casha 1974 : 4 ) "Répondit le Frère tandis qu' il aidait Georges à sortir de l ' eau"
9.1. L' éventualité et la possibilité Lorsque le maltais veut exprimer des valeurs modales d' éventua lité, ou de possibilité, l ' usage de la c. préf . est suffisant. Elles peuvent être rendues en français par un conditionnel ou le verbe "pouvoir". Les deux premiers ex. sont issus d ' un questionnaire et traduisent les énoncés anglais "he would do that for me" ( ex. 1 ) et "he ' d like to come with me" ( ex . 2 ) . 1 . /oUwa yaOmcl dan °aÜy-yal ( Q )
"Lui , il ferait ça pour moi" 2. lyist6? yfgi m6°-il ( Q ) " I l aimerait venir avec moi" 3. Idak l-imséykcn scrdU? sa?ay-[ h ] marbutIn °as ma-nnchhu -l U-s dawk [ il-sp�k] li °andu mac sa?ay-[h]/ (II, 10-12) "Ce pauvre coq, ses pattes sont attachées, pourquoi ne lui enlèverion s-nous pas ces ficelles qu' i l a aux pattes ?" 4. Iy�n ?att ma-oadd6 t-l-i minn mohh-i li dawk t a?tah-h:)m/ · <moi jamais ne-il-pass a-à-moi d� esprit-mo i que �e�x-Ià tu coupes-eu x> " Mo i , i l ne m' était jamais venu à l ' e sprit que ceux-là on pouvait les couper"
90
L a conjugaison préfixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
9.2. L' optatif La c. préf. permet l ' expression d' un désir ou d ' un souhait . Elle est alors précédée de locutions telles que /yalla/, litt. "ô Dieu", ou /mank li/8 "pas même que", ou encore d ' une invocation de Dieu /alla/. Lorsque le locuteur veut maudire quelqu' un ou quelque chose il peut également utiliser le verbe /l;ara?/ "brûler", figé à la 3ème pers. du masc. sing. de la c. préf. : 1 . /yalla tmut da?skémm °amÜt-l-i l;s�ra/ ( Q ) <ô-Dieu tu-meurs autant tu-fis-à-moi mal> "Puisses-tu mourir pour tout le mal que tu m ' as fait ! " 2. Jal la s-sul tan ignix najja twila ( Neh. 2/3 ) <ô-Dieu le-sultan il-vit vie longue> "Puisse le sultan vivre longtemps ! " 3 . /mank li eïS l;ayya twila/ ( Q ) <pas-même que tu-vis vie longue> "Puisses-tu vivre longtemps ! " 4 . A l la jilnqek ! ( Aquilina 1987 : 721) "Que ( l a punition) divine t ' atteigne !" 5. A l l a jnarsna minn kul l deni ! ( Aquilina 1987: 507 ) "Que Dieu nous protège du mal ! " 6 . I l-fekruna, wara l i diemet tielgna mas-seL l um disgna disgnin
sena,
waqgnet
u
qalet
:
janraq
dinha
ra: h (> marrah > voir" (Beaussier ) . "
narrah)
"puisse-t-il
être,
puisse-t-on
le
7. [�bni , nirrak �ssîp �ss�b� t6rgi milwîja ! l (p. 50, 1 . 14) "Mon fils, puisses-tu trouver les sept oranges tordues !" 8. /narra-l; yéOrr;?/ ( Aquilina 1959:340) "Puisse-t-il se noyer ! "
Trois formes sont possibles pour marquer l ' interdiction. La plus fréquente consiste à postposer l ' élément de négation /-s/ à la forme verbale. On trouve aussi une forme emphatique avec la négation discontinue fla . . . si, ou parfois même sans /-s/ :
u
l -gnagla
Aquilina ( 1959: 340 ) ajoute la particule /narra/, variante /nirra/, + pronom suffixe + c. préf. Elle n' est apparue que dans les textes recueillis par Stumme ( 1904 ) . Selon mon infor matrice de La Valette elle fait aujourd' hui très archaïque. Aquilina ( 1972: 247) explique ainsi son ongme "narra (+ pron . suffix, exclamation ) , for man "who" + ra "saw", giving
/mank/ provient de l' italien "manco" ( Aquilina 1990: 778b ) .
marra by regressive assimilation of the two liquids n and r, and the substitution of the initial liquid m by n. Cp. Ar. man
9.3. L e prohibitif
( Aquilina 1972, provo 6, p . 319) "La tortue, après qu' elle eut passé 99 ans à monter l ' échel le, tomba et dit : maudite soit cette hâte ! "
18
91
1. /tibza o_s/ "N' aie pas peur !" ou "Ne t' inquiète pas ! " 2 . /tins�-s tigbr;d il-b€ïb waray-k/ "N' oublie pas de tirer la porte derrière toi !" 3. /la-tal;sib-s li l;a-niggrangya/ "Ne crois pas que je vais devenir muet ! " 4. F'dar l-onrajn l a tgnid l i tanseb, l a tiftan bieb u l anqas issaqsi bosta ( Aquilina 1972, provo 19, p. 220) "Dans la maison des autres, ne dis pas ce que tu penses, n' ouvre pas de porte et ne pose pas de questions ! "
92
9. 4 . Le cohortatif La c. préf. y est le plus souvent précédée de ll;al 9 ou d ' un verbe à l ' impératif, fréquemment fi�é au sg. I l s ' agit de 0 "laisse ! " , pl. Il;allu/, léyyal "viens !" pl. lr:.yyéw/, Il;allil ou de 11msil "marche !" figé au sg. léyyal et Il;al peuvent se combiner. La c. préf. est rarement employée seule avec cette valeur et les exemples proviennent tous de poésies chantées improvisées. 1. /l).a -mma?dru na?ra l-franclzi nar�w s tOïd martIn/ <pour-nous-méprisons un-peu les-Français nous-voyons quoi elle-dit Martine> "Méprisons un peu les Français et voyons ce qu' en dit Martine ! " 2 . Il;a-nold-I-f:.k hmm y�n kap�cil <pour-je-dis-à-toi combien moi capable> "Laisse-moi te dire combien je suis capable ! " 3. ll;allU-oom ikantaw yr:.kk irldul ( Q ) "Qu' ils chantent s ' i l s veulent ! " 4. ll;allU-l; yitla?1 ( Q ) < laissez-lui i l-part> " Qu ' i l parte ! " 5 . Il;all i nk6mplu da?séyn awnékkl "Continuons un peu ici" 6. Il;alli ylkbr:.r ikUn yaf1 "Qu' il grandisse et il saura ! " 7. Ejjew nisimgnuh dan iL -nsieb ta' L -gnageb (Ebejer 1985: 1 8 ) "Ecoutons-la, cette merveilleuse pensée ! "
1 9 Pour Il;al particule d e futur, voir p. 184-7. Il;al fonctionne "pour", "afin de" . aussi comme subjonction à valeur f inale C' est ce sens que j ' ai conservé dans la traduction mot à mot. 20
La conjugaison préfixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
Il;allil fonctionne aussi comme subjonction avec le sens de "pour", "afin de". C' est de cet impératif qu ' Aquilina ( 1979 : 83 ) fait provenir l a particule Il;a/.
93
8 . léyya mm6rrui "Allons-y ! " 9 . léyya nIftl;u t-dj?a bi-I-li:yl l;a eaddi l-�ryal "Aujourd'hui son usage ce n' est pas qu' i l est fini. Disons les choses comme elles sont ! " 1 1 . 11msi mm6rrui ( Q ) <marche nous-allons> "Allons-y ! " 1 2 . Imxi nfittxuh (Casha 1974: 62) <marche nous-cherchons-lui> "Cherchons-le ! " 13. léyya l;a-no6dd-ooml "Que je les compte ! " 14. Imi:l a naozlu t6ro? tayybal 21 "Alors choisissons les bons chemins ! "
9.5. Emplois e n dépendance d'un auxiliaire La c. préf. peut être utilisée en dépendance avec tous les auxiliaires, que ceux-ci soient conjugués par marques préfixées ou suffixées , et avec toutes les particules verbales. Voici juste deux énoncés à titre d' i llustration. Pour une étude détaillée, je renvoie à la 3ème partie consacrée aux auxiliai res (p. 101 sq ) . 1 . 16mm-u bd�t tOayyati <mère-lui el le-commença elle-crie> "Sa mère s' est mise à crier"
21
L' accord de l ' adjectif au fém. sg. avec un nom au p l . est possible en maltais , mais fait plutôt l ittéraire. Voir Caubet et aL. ( 1989 ) . L ' ex. est tiré d ' une poésie chantée improvisée.
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La conjugaison préfixale
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
2. /dlk il-gcbla bit?Ou iOida-I-oa l-gébla taO [ dcritwt l/
"Cette pierre, ils ont continué à l' appeler la "Pierre de Dragut"
9.6. Emplois comme complément d'un autre verbe De manière beaucoup plus fréquente qu' à la c. suff. , un verbe à la c . préf. peut être employé comme complément d ' un autre verbe, quelle que soit sa forme. Après un verbe de mouvement ou d ' attitudes , il implique une valeur soit de but, soit de simultanéité avec le premier procès : 1 . /méla l lum ta sl;In m:>rt nistri il dak it-tuff&il;/
"Il s ' assoit pour se reposer un peu" 3. /in-nitnna k6nct tl;aIÜ-bm tlnzlu t05mu/ "Grand-mère vous laissait descendre nager 7" 4. /k:mt dl;alt t°itnni mit°-na/ "Tu étais entré pour chanter avec nous" 5. /fW5du kull;itdd ?am itértcr/ "Le matin tout le monde s ' est levé en frissonnant" 6. /gcy ivénvcn/ "Il arrive en fonçant" 7. /mitrrct tigri ggIb-I-i stik8r/ <elle-sortit elle-court elle-apporte-à-moi "sticker"> "Elle est sortie en courant (pour ) m' apporter un autocollant" 8. /dan Ou li ppruvityt nci°md fi-l-poczÎyya/ "C' est ce que j' ai essayé de faire dans la poésie" 9. /sébOct tisténna/ <elle-se-rassasia ell e-attend>
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"Elle en a eu assez d ' attendre "
10 . /y�n niringritccya 1 6mm-i w-il miss6r-i l i darréw-ni ncil;dcm/ ( l , 263-4)
<moi je-remercie à mère-moi et-à père-moi que ils-habituè rent-moi je-travaille> "Moi, je remercie ma mère et mon père qui m' ont habituée à travai ller" 11. /méla ?att ma-smityt-08m iOldu l i . . ./ "Alors tu ne les a jamais entendus dire que . . . " 12. /dak y6n?8s nistri issa y�n uk611 g6b8n taO-l-munt�nyi/ "Il ne manquerait plus que maintenant, moi aussi, j' achète du fromage de mon� a�ne l" jitl;arr�k l ( Stumme 1904: 46, 1 . 1-2) 13. [urât �ttornanet /
<et-eUe-vit le-volant il-bouge> "Et elle a vu le volant bouger" 14. /yitl;.ciyyru yaOmla-oa sa llum/ "Ils avaient envie de le faire jusqu' à maintenant"
9.7. Emploi dans les phrases conditionnelles La c. préf . se rencontre aussi dans la protase de phrases hypothétiques marquant aussi bien l ' irréel que le potentiel. Elles ont respectivement pour marqueurs /k6ku/ ou /li/, et /yckk/. Des exemples en ont déjà été donnés p. 65-7. En voici quelques autres : 1 . /imma yckk tmur tins6-s tlgbcd il-b6b warity-k/
<mais si tu-vas tu-oublies-pas tu-tires la-porte après-toi> "Mais si tu sors , n ' oublie pas de tirer la porte derrière toi" 2. /k&iku ma-y�f-s bi-I-kélb cinki f-I-éwwd wcil;da ncil;scb k�n iw6gb-u kdb biss/ <si ne-tu-sais-pas avec-le-chien même dans-Ia-première une je-pense il-était i l-répond-Iui chien seulement> "S' i l ne savait pas à propos du chien, même dans la première
22
Le "tornanett" était une garniture en toile accrochée en bas du lit, haut à cette époque.
96
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
La conjugaison préfixale
( phrase ) je pense qu' il lui aurait répondu " shien" seulement" 3. liz-zgUr k�ku al).na rrldu nitOallmu l-francïz al "e' est sûr, c' est comme si nous voulions apprendre le fran çais, hein ! "
7. lu dak i l-l).;bz sC-[yO?5t]23 cmm b�s [yarga] yhlaO ftït 6l).orl 0, 115-6 ) <et celui-là le-pain FUT-il-reste là pour il-retourne il monte un-peu autre> "Et ce pain restera là pour remonter encore un peu" 8. lu ?ct-eld-I-i b�s nibzao °alI-kl <et en-train-tu-dis-à-moi pour j' ai-peur pour-toi> "Et tu es en train de me dire de prendre soin de toi" 9. Iy�n sakkart it-tr�? taO-I-gwérral Isab�s na?bad l-;l).ra taO-I-picii <moi je-fermai le-chemin (f. ) de-la-guerre> <pour je-saisis l ' autre ( f . ) de-Ia-paix> "Moi, j ' ai fermé le sentier de la guerre" "Pour prendre celui de la paix" 10. Ib�s Is-séms ma-tahtf-U-s malayr k�nu yaOmlu t-tlbcn . imsarrab fa? il-béytl <pour le-soleil (f. ) ne-elle-brûle-Iui-pas vite elles-étaient elles-mettent la-paille ( m . ) trempé sur l a-terrasse> "Pour que le soleil ne le brûlât pas tout de suite, elles mettaient de l a paille mouillée sur l a terrasse" 11. Iy�n bnt strayt si affariyy�t b�s n�l).u m�o-il <moi j ' étais j' achetai quoi affaires pour je-prends avec-moi> "J'avais acheté des affaires pour emporter avec moi" 12. lÜ-ni géwla? l).a np;ggi l-bayd go fï-l).1 <donne-moi panier pour je-place l ' œuf (coll . ) dedans dans-lui> "Donne-moi un panier que je mette les œufs dedans ! " 1 3 . Ikatarln iftah it-t�?al Il).alli y;l).rog i d-dul).l).inl (V, poème n° 4 ) <pour il-sort la-fumée (m. » "Catherine ouvre l a fenêtre" "Pour que l a fumée sorte"
9.8. Emplois e n subordonnées circonstancielles Nous avons vu (p. 69-71) que la c. suff . pouvait être utilisée dans des propositions circonstancielles temporelles ou finales pour une expression insistée de l ' accompli. Mais le plus souvent c' est la c. préf. qui est employée, quelle que soit la forme verbale dans la proposition principale : 1. Iw-il-furnira k�m:t taOmil-O;m-na sinténdi ?abcl ma taOmcl il-l).;bzl 0, 136-7) <et-Ia-boulangère elle-était elle-met-eux-nous évidemment avant que elle-met le-pain> "Et la boulangère nous les mettait évidemment avant de mettre le pain" , 2. Ima-git-nï-s f -r;is-na l i kéllna nippancyaw-l). ?abcl niÜlou fi-t-trtnl "Il ne nous est pas venu à l' esprit que nous devions le poinçonner avant de monter dans le train" , , 3. Ik�nu ihallU-oom wal).éd-oom go si Dar sakcmm imatul ( III, 6-7) "Ils les laissaient dans une grotte jusqu 'à ce qu' i ls meurent" 4. lu y�n bnt n�l).u pyaclr méta nira dak l-oarb61 ccléstil <et moi j ' étais je-prends plaisir quand je-vois celui-là le tamis bleu-ciel> "Et moi j ' étais contente quand je yoyais ce tamis bleu ciel " 5 . lu k�n iOidi-I-oom minn f cyn igiba-Oal <et i l-était il-dit-à-eux de où ils-apportent-elle> "Et i l leur disait d ' où la rapporter" 6. [3as ma-sêpc fê-norkot] ( Stumme 1904: 62, 1. 23) "Parce que je n ' ai pas trouvé où dormir"
97
9.9. Emplois dans les complétives Dans les complétives introduites par lIiI "que" ou Isil "quoi", le verbe est à l a c. préf. , même quand le verbe de l a princi pale est à la c. suff :
23
,
La forme standard est lyo?Oodl syllabe et 2ème voyelle brève.
avec
accent
sur
la
1ère
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
98
La conjugaison préfixale
1. /oal madw�r crboIn l).amsIn sena II-u k�nct si l).�ga spccy�li
dak iz-zm6n l i tlsr:>b da?sÉ:yn lumin�ta më1d in md16l).a/ <pour autour quarante cinquante an depuis-lui elle-était quoi chose spéciale celui-là le-temps que tu-bois un-peu l imonade "made in" Melliena> "Il y a environ 40, 50 ans, c ' était quelque chose de spécial de boire un peu de l imonade "made in" Melliena" 2. /issa l).argct m5da gdÎda li [ y i?tcu] saor-08m la [bcbÉuj/ (V, poème n° 6) <maintenant il-sortit mode nouvelle que elles-coupent che veux-elles à-la bébé> "Maintenant il est sorti une nouvelle mode de se couper les cheveux à la bébé" 3. Anna dejjem xtaqna L i n imlew dan il-vojt ( Sultana et al 1979 : 7 ) <nous toujours nous-désirâmes que nous-rempl issons celui-ci le-vide> "Nous avons toujours voulu combler ce vide" 4. /:)mm-u kÉ:Wa s taO md/ <mère-lui elle-avait quoi e lle-fait> "Sa mère avait à faire" 5. /k�n fI-l). l).afna s�O:>1 si islr/ "Il y avait beaucoup de travail à venir"
9.10. Emploi dans les relatives Dans les textes recueillis par Stumme, j ' ai relevé un exemple de relative, non introduite par un pronom relatif, où le verbe est à la c. préf. alors que celui de la principale est à la c . suff. I l s' agit encore d ' un emploi conjonctif : 1 . [ sama ill).os tall).anzîra, t�mel >uz >uz ] ( Stumme 1904:39,
uz >uz> "Il a entendu le bruit du cochon24 qui faisait ">uz >uz"
1. 7)
. Genera ' I ement, en ma ltaI· s , un anImal dont on ignore le sexe est désigné au féminin, qui sert de terme générique. 24
,
99
10. Conclusion Tous les emplois de la c. préf . qui viennent d ' être i l lustrés montrent à l ' évidence que cette forme n' est l iée ni à une référence temporel le ni à une instance de l' énonciation parti cul ières . Dans le couple qu' e lle forme avec la c. suff. , elle peut être déf inie à la fois positivement comme marquant un procès en déroulement et négativement comme une forme neutre. Cependant, le domaine de son fonctionnement tend à se restrein dre. Nous avons vu que celui de la concomitance lui est presque totalement interdit car elle y est très largement concurrencée par d' autres formes qui seront étudiés dans la partie suivante (p. 112 sq ) . D. Cohen ( 1989: 147 ) a souligné que la pénétration d' une forme de la concomitance dans le système de redondance d' une langue peut se faire graduellement "en investissant d' abord des contextes syntaxiques déterminés avant de s' étendre à d' autres . " De ce point de vue l ' énoncé interrogatif est en retard sur l ' énoncé assertif pui squ ' une forme de concomitance n'y est pas encore obligatoire. Par ai lleurs, au cours d'un échange de questions - réponses dans un dialogue nous avons vu que si une forme progressive apparaît dans la question, sa reprise n' est pas forcément nécessaire dans la réponse. Cette absence de marque me semble s' apparenter au fonctionnement séquentiel ou "conjonctif" de la c. préf. qui a été montré par ailleurs, la même analyse pouvant probablement expliquer la présence d'une c. préf. simple dans une réponse alors que la question ne comportait pas de forme marquée du concomitant . Nous avons vu également qu' une poignée de verbes de sens moyen ne connaissent pas d' opposition formelle entre concomitant et non concomitant. A part ces quelques cas marginaux, qui sont le souvenir d ' un état plus ancien, et que l ' on peut observer, avec des réalisations diverses bien entendu, dans tout système en évolution ( et un système n' est jamais figé ) , l ' utilisation de la c. préf . en maltais me semble refléter le deuxième stade de ( 1989: 147-8 ) , D . Cohen par énoncé fonctionnelle l ' évolution " n ' est plus uti lisé que dans a celui d e la "non-actualité" les assertions de nature générale ou pour exprimer les phénomè nes habituels, répétitifs, et aussi les faits et les événements qu i n' entrent pas dans la sphère de la constatation actuelle : futur, modal, etc. " En ce qui concerne le futur, le maltais connaît une nou vel le restriction, puisqu' i l n' est plus possible d ' utiliser la c. préf. si l e point de référence à partir duquel est envisagée la période à venir se situe dans le passé. A l ' inverse, nous
-
100
Valeurs et emplois des deux conjugaisons
avons vu deux développements nouveaux des emplois de l ' inaccom pli, qu' il n ' assume pas seul mais dans des constructions synta xiques particulières l ' expression encore très marginale et fortement expressive du parfait en composition avec l ' adverbe /°i:l.d/ "encore" et cell e de la simultanéité en composition avec un pronom personnel indépendant suivi de la conjonction de coordination. S i l ' on regarde maintenant les différentes valeurs expri mées par l es c. suff. et préf . , on s ' aperçoit que leurs domai nes d ' expression ont été restreints sur des plans différents : pour la première, c' est le contexte de futur et les valeurs modales qui ont pratiquement été éliminés alors que les valeurs générales et concomitantes sont toujours présentes ; pour la seconde, la concomitance et l ' actualité sont marginalisées, mais les valeurs générales et modales demeurent. Les principaux emplois non modaux de chacune d ' entre el les peuvent se résumer dans le tableau suivant, pour la majorité des verbes :
acc omp l i gé n é r a l con c om i t ant
c on j .
su f f .
i naccomp l i conj .
p r éf .
TROISIEME PARTIE VALEURS ET EMPLOIS DES AUXILIAIRES, PARTICULES VERBALES ET PREVERBES
1. REMARQUES GENERALES SUR L'AUXILIARITE Le système verbal du maltais ne repose pas uniquement sur les 1 deux formes verbales qui viennent d ' être analysées. Nous verrons que le participe actif, pour quelques verbes, est venu s ' y intégrer. Mai s ce qui a considérablement enrichi l e système, c ' est l ' ut ilisation d e nombreux auxil iaires, particu les verbales ou préverbes en combinaison avec la c. préf. l e plus souvent, e t parfois aussi avec la c. suff. o u le participe actif, voire le participe passif pour l ' expression du passif. Ces auxil iaires et particules permettent, pour reprendre une formule de D. COhen, 2 " l ' expression expl icite d ' éléments impli cites dans le verbe " , c ' est-à -dire qu' il s représentent concrè tement des potentialités contenues dans le verbe. Elles sont liées, au moins le plus souvent, soit à la fonction de relateur du verbe, et concernent alors la relation du l ocuteur avec l ' é noncé (temps et mode ) , celle du sujet avec le prédicat ( voix, concomitance : adhérence ou inhérence ) ou cel le du verbe avec
1
Il y a bien sûr aussi l ' impératif, mentionné dans le chapitre sur la morphologie. Il ne fera pas l ' objet d' une étude particu lière dans la suite de ce travai l . 2 Voir séminaires EPHE de 1983 à 1985, notamment ceux des 3 . 2 . 84, 20. 4. 84 , 27. 4 . 84 , 4. 1 . 85, 8. 2. 85. Les précisions qui suivent sont le condensé de plusieurs tableaux et explications que D. Cohen a donné sur les sèmes contenus dans le verbe. Tableaux qu' i l dit être "empiro-déductifs" , des potent ialités n' étant pas toujours faciles à apercevoir.
102
Auxiliaires, particules verbales et préverbes
soit a u contenu lexématique ( quantité l' objet ( parfai t ) moment début , milieu, fin) fréquence, durée, intensité soit encore à la consistance interne du prédicat (aspects ) . Ces différents plans de la relation peuvent s'interpénétrer au cours de l ' évolution des systèmes verbaux. D . Cohen a toutefois précisé à plusieurs reprises que les langues n' ont pas besoin de tout expl iciter. Le maltais, comme les autres l angues, a fait des choix. Nous verrons lesquels. Les termes d' auxiliaire, de particule et de préverbe méritent quelques explicat ions. De 1983 à 1985 D. Cohen a consacré ses séminaires de l ' EPHE à une recherche sur les auxil iaires dans une perspective dynamique de l ' évolution des systèmes et des formes, tout en s' attachant à en cerner les caractéristiques qu' i l a illustrées de nombreux exemples t irés principalement des langues chamito-sémitiques. Pl usieurs critè res de reconnaissance de l ' auxiliarité ont été défini s, dont le point de départ sémantique est l e fait qu' une périphrase verbale composée d ' un auxiliant et d ' un auxilié ne peut pas être égale à la somme de ses part ies mais qu'elle est une unité. Ce qui a pour corol laire que le sens général doit être partagé par les deux éléments, et qu' i l n ' est pas possible de distribuer les fonctions entre les deux formes. D. Cohen a dégagé un certain nombre de critères fonctionnels qu ' i l présente comme n' étant ni exhaustifs n i définitifs : - S ' i l y a unité, il est possible de commuter une forme mais pas les deux. Ainsi, pour prendre un exemple maltais, Iyi ebad y i doakl " i l commence à r ire" commute avec Iy i doaki "il rit", mais Iy;i?badl seul ne veut dire que "il saisit" et jamais "il commence". Donc l ' un des deux verbes, en l ' occurrence l' auxi li aire, change de sens si on l ' autonomise. Il ne peut permuter qu' avec l ' auxilié, alors que l ' auxilié peut permuter seul . Cela permet de reconnaître l ' é lément auxi l iaire. - Auxiliant et auxilié sont en construction asyndétique. 3 Asyndète ne signifie pas qu' il ne peut y avoir complément
3
D. Cohen a précisé qu' el le n' est pas en elle-même la preuve de l ' auxil iation. Formellement rien ne distingue Iy ;i?bad i i i y doaki de Iy do:::> l y doaki mais dans le premier ex. Iy i doakl est en fonction d ' auxi lié, la périphrase signifie "il se met à rire", alors que dans le second, ce deuxième verbe est en "il entre en riant" . Sémantiquement il fonction adverbiale est une somme et non une unité.
Généralités
103
d' objet, adverbe ou sujet entre les deux verbes mais que : a. on ne peut pas joindre les deux é léments de la périphrase par une coordination, ce qui les mettrait sur le même plan ; b. i l n ' y a pas d' auxi l iation quand on peut mettre une subjonction entre les deux éléments. - Il ne peut y avoir qu' un seul complément d' objet, celui de l ' auxilié ; en cas de commutation c' est lui qui reste : "il a lu un livre" commute avec "il lit un livre", mais "il a un livre" possède un sens différent . - Le sujet est le même pour l ' auxiliant et l ' auxi lié. - On ne peut pas répondre à une question ne comportant que l ' auxiliant ( par exemple "Qu' est-ce qu' i l va 7" en françai s ) . - U n processus d' abstraction est l e plus souvent nécessaire pour l ' auxi liaire. En effet, s ' i l y a unité, l ' élément auxi liant doit pouvoir entrer en relation avec le plus grand nombre de verbes possibles . Un des deux termes est donc plus général que l ' autre dans la périphrase et peut caractériser tous les verbes ou des classes entières de verbes, à condition que les auxiliaires constituent des classes fermées. Lorsque le sens de l ' auxiliaire n' évolue pas par rapport à son sens comme verbe plein, les autres critères de reconnaissance étant toujours présents, le processus d ' auxi li ar isation consiste alors en l ' intégration du sens du verbe dans l a construction périphras tique par exemple "commencer de", "finir de " . Dans de nombreuses l angues, certains verbes peuvent se construire avec un autre verbe pour complément. Mais pas tous : ainsi "manger" en français, pour ne prendre qu' un seul exemple. D . Cohen a, en outre, souvent fait remarquer qu' au cours de la formation des périphrases verbales , un même verbe auxi liaire pouvait prendre des valeurs différentes selon les formes utilisées : il n' y a pas que le sens qui compte mais aussi l a forme formes conjuguées, part ic ipes , infinitifs, impératif. Pour le maltais, ce phénomène a eu une importance considérable dans le dédoublement des aspects. D. Cohen a dégagé cinq c lasses de verbes parmi lesquelles les auxiliaires puisent leur source 1. être : copule ; "être dans" ; "rester , demeurer" ; "deve nir". 2. Verbes de mouvement : changement d' attitude ( par ex. "se lever " ) ; dép lacement : mouvement vers ( "aller " ) , changement de lieu ( " entrer " ) , mouvement loin de ( "séparer " ) . Le sème commun est l ' idée générale et abstraite du mouvement.
104
Général ités
Auxiliaires, particules verbales et préverbes
3. Verbes prendre et "ne pas prendre" : " laisser" ("abandon ner , permettre" ) ; " donner" "ne pas laisser", "être empêché, fai l l ir , manquer de" . Verbes de rapprochement psychologique (désirer , vouloir, devoir ) qui comportent aussi une idée de mouvement vers. 4. Faire et dire ( particulièrement développés dans les l an gues couchitiques ) . 5 . Métaphore. Cette classe ouverte, mais rare semble-t-il, est i llustrée, entre autres, par le verbe /mess/ "toucher" du maltais qui prend l e sens de "devoir" dans une construction périphrastique. Le maltais, comme classes 1 , 2, 3 et 5.
nous
le
verrons,
a
eu
recours
aux
Tous les auxiliaires ne sont pas présents dans un système avec la même prégnance. C' est qu ' i ls correspondent à des degrés d ' auxiliarité divers, pour des raisons qui sont, au moins en partie, le ref l et de stades d ' auxi l i ari sation différents du point de vue diachronique et dont D. Cohen a montré le déroule ment. Dans un premier temps, l e verbe a son sens plein. Puis, en second l ieu, il est utilisé sans contradiction avec le sens plein, mais est en partie métaphorisé. Dans un troisième temps, sans qu' i l y ait contradiction, le sens concret est évacué au profit d ' un sème plus abstr ait, l ' idée de mouvement par exemp le et non le mouvement en lui-même . La quatrième étape voit dispa raître la valeur lexématique du verbe mais la périphrase est limitée à des sujets animés, le processus d ' abstraction n ' est pas encore total. finalement, même l ' interdiction d ' un sujet animé disparaît. Ces deux dernières étapes sont abondamment il lustrées dans le système verbal du maltais. Pour déterminer le dynamisme d ' un auxiliaire, il conviendra donc toujours de chercher à savoir si n ' importe quel sujet est possible et aussi si n' importe quel verbe peut recevoir l ' auxiliaire. Un auxil iaire peut avoir pour base, en maltais comme dans d' autres l angues, un verbe ou une forme verbo-nominale. La périphrase verbale elle-même pourra être composée d ' un auxi liaire et d ' un verbe ou bien d ' un auxil iaire et d ' un participe. Toutefois, l ' évolution des pér iphrases verbales peut aussi s ' accompagner de trois stades de développement des formes auxi l iaires que D. Cohen énonce ainsi : 1. Le paradigme est "normal", l ' auxil iaire est morphologi quement un verbe ( ou une forme verbo-nominale ) .
105
2. L' auxil iaire est invariabl e et figé, mais il est encore reconnaissable comme un verbe ( ou un part icipe ) . C' est par exemple le cas en maltais de la particule de cohortatif /l:l� lli/, très souvent invariab le. Le paradigme peut différer selon que l ' on a affaire à l ' auxil iaire ou au verbe plein ainsi /mess/ est conjugué par les pronoms suffixes comme auxiliaire de sens "devoir" alors qu' avec son sens plein de "toucher" il est conjugué par les préfixes ou suffixes habituels pour les verbes. 3. L' auxi liaire est devenu une particule agglutinée au verbe auxi lié. Il n' est plus reconnaissab l e comme verbe ou participe que par l ' étymologie. On peut citer pour le maltais les pré verbes de futur /se-/ ou du concomitant /?et-/ qui provi ennent tous deux de part icipes actifs. Tracer des frontières entre auxi l iaire et particule n' est pas chose aisée, D. Cohen le reconnaît. Mais pour la commodité du lecteur , je tâcherai désormais de me plier aux emplois suivants seront appelées "auxi li aire" toute forme susceptible d' être fléchie, verbale ou participiale, "particule" toute forme invariable reconnaissable comme un verbe et qui comporte un accent propre, "préverbe" toute forme non identifiable en synchronie comme un verbe ou un participe et qui ne comporte pas d ' accent propre . La constitution des auxi l iaires, D. Cohen l ' a répété, est un exemple du passage constant dans les langues de la stylisti que à la syntaxe et enfin à l a morphologie. La stratégie du locuteur , à la recherche d ' une plus grande efficacité de son message, cherche à expl iciter, grâce à la syntaxe permise par la langue, un sème qu ' i l pense devoir mettre en rel ief dans ce but . Pui s , ce qui était au début une stratégie devient un phénomène syntaxique ( quas i ) obligatoire avant de s ' user jusqu ' à ce que l ' auxiliant et l ' auxilié ne forment plus qu ' un syntagme inanalysable synchroni quement .
-
I I . L'EXPRESSION DE LA CONCOMITANCE
Remarques préliminaires En maltais, comme dans tant d' autres dialectes arabes, le système aspectuel n' est pas resté figé dans une simple opposi tion entre un accompli et un inaccompli, mais celle-ci a été croisée par une opposition entre concomitant et non-conco mitant. Je rappellerai la définition que D. Cohen ( 1984 : 526 ) donne de la concomitance dans l ' accompli et dans l ' inaccompli "le procès qu ' il soit achevé (E) ou inachevé (A) peut être consi déré en tant qu' i l est défini en lui-même ou pour lui-même (<X) ou au contraire en tant qu ' i l est concomitant à un autre événement pris pour référence ou à l ' acte de l' énonciation lui-même ([3)" et ( 1989: 96) : "la réal isation de [3 dans A fonde le système de formes qui peut être défini comme le progressif ; la réalisation de [3 dans B fonde le système de formes qui peut être défini comme le parfait. " Il faut également souligner une fois de plus que le conco mitant n ' est pas un "temps " , mais qu' i l "se manifeste comme présent, passé ou futur, en foncti on de déterminations qui lui sont extérieures . " (D. Cohen 1984: 303 l . C e renouvellement du système aspectuel, c e "passage de l' aspect absolu à l ' aspect re latif" comme l ' appelle D. Cohen, 1 c' est-à-dire le passage d ' une opposition simple entre accompli et inaccompli à un dédoublement interne à chacun des aspects en concomitant et général , ne s' effectue pas nécessairement, dans l' histoire d'une langue, selon le même rythme, de manière parallèle et simultanée dans l ' accompli et dans l ' inaccompli. Les systèmes verbaux présentent souvent, en synchronie, une dissymétrie entre A et B, où seul l ' inaccompli A, par exemple, peut être dédoublé en général (<X) et concomitant ( [3 ) .
1
Voir Séminaire EPHE d u 09 . 01 . 1981, 0985-86 : 58 ) .
cité par
Simeone-Senelle
108
Auxiliaires, particules verbales et préverbes
Tel est le cas du maltais , où nous avons déjà vu que l ' expression de la concomitance dans l ' accompl i n' avait rien d ' ob l igatoire, même par des moyens syntaxiques comme l ' utilisa 2 tion d' adverbes (voir p. 55-7 et 87-8) alors que nous verrons son caractère obl igé dans l ' inaccomp l i , dans les phrases affir matives ou négatives, et de plus en plus dans les phrases interrogatives. La c. préf. y est l imitée à des usages d' inac compli général , alors que de nouvelles formes se sont dévelop pées pour l ' expression de l a concomitance, et ont été intégrées au " système de redondance de la langue", à sa syntaxe. En cela, le maltais fait partie de ces dialectes qui offrent, selon D. Cohen ( 1984 : 279 ) , " les systèmes les plus [3 ( non pauvres" , "ceux qui ne réalisent la dist inction IX concomitant concomitant ) que dans l ' un des deux plans A ( inaccomp l i ) ou B (accompli ) . Le plus souvent, mais non pas toujours, c' est l e plan A qui est concerné. Le système oppose un inaccomp l i dédoublé à un accompl i simple. C' est le cas de p lusieurs dialectes de sédentaires occidentaux. " Et notamment du maltais.
1. La concomitance dans Paccompli : le parfait Outre l ' emploi d' adverbes (voir p. 55-7 ) le maltais a la poss ibilité d' exprimer , de manière encore tout à fait margina le, le parfait, et ce uniquement lorsqu ' i l est référencié à un moment du passé dans le récit, au moyen d' une périphrase verba le composée d ' un auxiliaire : /l al)a?/ de sens premier "attein dre réussir à", qui est toujours à l a c. suffixaLe, suivi d ' un verbe auxilié lui aussi à l a c . suffixaLe. Tous les énoncés de mon corpus ont été relevés dans des récits, et les verbes sont tous à la 3ème pers. Aquilina, dans l ' article de son dictionnaire ( 1987 : 720-721 ) en fournit également des ex. à la 1ère pers. Il donne comme 6ème sens pour le verbe /l al)a?/ "To have just done s. th. , translating the Eng l . pluperf . tense and the fut. perf . 3 W ' taqt ktibt, 1 had written ; mhux ser inkun iUlaqt
2
Nous verrons que cette construction est aussi possible avec les deux formes de progressif qui seront étudiées ci-dessous.
3
Je n ' ai personnel lement recue i l l i aucun exemple de ce dernier "temps".
La concomitance
109
ktibtUha sa meta tasaL inti, shall not have written to her by the time you arr ive ) . " Il signale aussi , en 4ème sens, "faire qqc. , arriver à temps, réussir à", que le verbe soit employé seul ou suivi d ' un autre verbe ( quelles que soi ent les formes verbales utilisées ) . Or c' est, dans une construct ion asyndétique, le sens de "réussir à" qui est admis le plus souvent par mon informatrice de La Valette, qui n' accepte pas les traductions d' Aquilina citées c i-dessus. Il en va de même pour deux exemples de mon corpus qui m' avaient été traduits par de simples "pluperfects" par une informatrice de Mgarr ( Malte ) . Ces différences d ' interprétation pour un même énoncé montrent que la valeur de parfait dans le récit n' est pas admise au même degré par tous, et que /l al)a?/ n' a pas encore atteint pour tous les locuteurs de maltais, même " standard", le degré d' abstrac tion nécessaire pour en faire un vér itable auxil iaire. La constructi on, peu fréquente d ' ail leurs ( 8 ex. dans mon corpus, dont la moitié traduite par un "pl uperfect " ) , en est , de toutes façons, au stade expressif et non obl igatoire de la stylistique. Cependant, i l est remarquable que la périphrase soit compatible avec des sujets animés comme inanimés. Or il se trouve que les énoncés de mon corpus refusés par l ' informatrice de La Valette ( ex. 1 et 2) sont ceux qui ont un sujet inanimé . I l est donc probable qu ' i l y ait à ce niveau des différences de degré d' auxil iation, entre les divers parlers maltais. Les deux premiers exemples ci -dessous sont ceux qui sont 4 objet de controverse. Le premier est emprunté à un locuteur de Xagnra ( Gozo ) âgé de 80 ans environ, et le second à un locuteur de Hal -Qormi âgé d ' une cinquantaine d' années. Les 3ème et 4ème exemples ( écrits) ont été rendus par un parfait par les deux informatrices. Il faut signaler que dans le 3ème exemple figure l' auxi liaire /ki;ïn/ qui marque l ' antériorité du procès par rapport aux prédicats qui précèdent :
4
Dans mon article de 1987 , je citais un ex. de plus, que j' avais moi-même traduit, me fondant sur le modèle qui m' avait été offert par mon informatrice de Mgarr. C' était une erreur que m ' a confirmée une discussion ultéri eure avec elle. Le sens de "réussir à" n' est pas absent non pl us de la construction dans son idiolecte. Je le croyais réservé au cas où au moins un des deux verbes à la c. préf .
110
La concomitance
Auxiliaires, particules verbales et préverbes
1. Ik6lbs °6la l;labtÉ:yn ins:)mma Îzda bilkÉ:mm laha? °adda saoar u nOar it-tlctIn taO dicÉ:mbru taO dïk is-sÉ:na [ . . . ] il-précc
taO-d-d?6? [ . . ] rÉ:gaO cal li k�n ?abdl "Tout augmenta de deux sous. Enfin. Mais il venait à peine de se passer un mois ( "had passed" ) ( ou bien "il avait presque réussi à se passer un mois" ) , que le 30 décembre de cette année-là [ . . . ] le prix de la farine [ . . ] est revenu à ce qu' i l était avant" 2. lu lan?as k�n sc-yÜl;la? is-sAbm;:wln Cas is-sAbm8rIn l al;la? tb6°cdl <et ni il-était FUT-il-atteint le-sous-marin car le-sous marin il-atteignit il-s' éloigna> "Et il n' aurait pas atteint le sous-marin non plus, parce que le sous-marin venait de s' éloigner" ( " it had already gone far away " ) (ou bien "avait réussi à s ' éloigner") 3. Kien min iréieva L -ittra taL-promotion dakinhar stess Li mar jivvota. Daqsxejn tard. Kien Lanaq ivvutaL i ( I L -Mument 1 5 . 2. 1987, p. 24) "Il y en a un qui a reçu sa lettre de promotion le jour même où il est allé voter. Un peu tard. Il venait déjà de voter pour moL " 4. KarLu Manju niieL ii-iewg targiet L i Lanaq teLa' ( Friggieri 1986 : 13 1 ) "Charles Magne descendit les deux marches qu' il venait de monter" .
.
111
5
et passage au stade d ' auxiliaire, je donnerai ci-dessous un autre ex. que mon informatrice de Mgarr a traduit par le sens propre de "réussir à", et qui montre bien qu' il faut aussi tenir compte du contexte et non du sens du verbe auxilié, qui est le même que celui du premier exemple ci-dessus :
5. tgnaL L em b ' qantar aktar miL L i k ien gnadu tgnaLLem fii-imien koLLu l i lanaq gnadda ma' dik ié-éorma. (Friggieri 1986 : 119) "Il en apprit des tonnes de plus que ce qu' il venait d ' ap prendre pendant tout le temps qu' i l avait réussi à passer avec cette foule" Ici, le contraste est net avec l' autre expression du parfait dans le passé utilisé dans la proposition qui précède et rendue par la tournure avec l' adverbe gnadu : "kien gnadu tgnaLLem" ( voir p. 55-7 ) . Toutefois, lorsque Ilal;la?1 est auxiliaire de parfait, les locuteurs interrogés n' établissent pas de différence sémantique avec la construction formée de Ik�nl + adverbes + c. suff. Je dirai pour conclure, qu' il est intéressant d' être témoin, au sein d' une communauté linguistique réduite, des différents degrés d' auxiliarité d'une même périphrase verbale, même si nul ne peut prédire quelle sera sa fortune en tant que parfait dans le récit. Chez la locutrice de La Valette, Ilal;la?1 ne perd encore que très rarement son sens propre et n' est pas compatible avec un sujet inanimé, alors que pour Aquilina et la locutrice de Mgarr, le passage vers l' auxiliarité est plus avancé, Ilal;la?1 perdant plus souvent son sens concret au profit d'une plus grande abstraction, et pouvant fonctionner avec des sujets inanimés.
Pour mieux saisir cette frontière fluide qui existe entre conservation du sens propre du premier verbe de la périphrase 5
M. Cohen ( 1960: 129 ) faisait remarquer dans un article sur les auxiliaires en français que "les mêmes verbes sont aptes, concomitamment ou en succession dans le temps, à des usages différents : si on veut un terme savant, ils sont polyvalents. "
112
2. La concomitance dans l ' inaccompli
le progressif
Remarques préliminaires L' expression de la concomitance dans l ' inaccompli se marque de deux manières différentes selon qu' il s ' agit ou non de verbes de mouvement et d ' attitudes ( en fait, quelques-uns seulement ) . L e cas général est constitué au moyen d ' une périphrase verbale composée du participe actif du verbe /7 6 °cd/ "s' as seoir ; rester" qui s ' accorde en genre et en nombre mais qui est le plus souvent réduit à l ' état de simple particule abrégée et invariable : /7Ct/, précédant le verbe auxi lié à la c. préf. Dans ce cas l a particule est morphologisée. Elle ne porte pas 6 d ' accent propre , et aucun terme ne peut venir s ' interposer entre la particule et le verbe auxilié, alors que c' est possi ble avec la forme longue (voir ex. 2, p. 125 ) . /7Ct/ peut donc être considéré comme un préverbe . Il faut toutefois noter une exception à cette règle dans le dialecte de Mgarr, où j ' ai relevé l ' ex. suivant : 1 . /7ct i l-b atar yigb i d-o::>m/ <en-train la-mer (m. ) i l-tire-eux> "La mer était en train de les attirer au loin" ( récit)
6
Albert Borg ( 1981 : 146) le faisait déjà remarquer : "Qed [ . . . 1 occurs [ . . . 1 in a position preceding an imperfect form of the verb. In this position it is never stressed its occurrence do es not affect the stress pattern of the fol l owing (verba l ) form ; and it is always pronounced as a unit with the following imperfect. " Cette
constat ion
mérite
toutefois
d ' être
nuancée.
l ' inverse, Borg ( 1988 : 81 ) fait part de l ' inexistence de /7Ct/ chez certains locuteurs, sans malheureusement donner plus de , . . preCISIOns . 8 Pour quelques verbes décr ivant un mouvement ou une attitu de , il est aussi possible d ' employer leur participe actif . Ces deux procédés sont connus dans nombre de dialectes arabes modernes du Maghreb, comme le note D. Cohen ( 1984 : 279) : " l ' expression de la concomitance est assumée de deux manières différentes. Pour certains verbes, surtout intransitifs, dési gnant essentiellement des mouvements, c ' est le participe actif qui est uti l isé. Pour les autres , la forme est complexe , cons tituée par la c. préf. précédée d ' un auxiliaire qui lui-même , dans le cas où la nature morphologique en est encore apparente, se trouve être à la forme participiale. Dans le Maghrib orien tal et à Malte où ce type de système est le plus fréquent, i l est fait recours au participe actif d ' un verbe dont le sens plein est "s' asseoir" , , 9
2.1. /7 6 ·cd/ ou / 7ct/ + conjugaison préfixale 2.1 . 1 . Le progressif avec référence au discours
Le sujet se trouve placé entre /7Ct/ et le verbe. Selon mon informatrice de ce village, l ' énoncé est acceptable. I l s ' agit là d ' un cas part iculier dans un dialecte qui considère aussi l a particule comme détachable dans la phrase négative ( voir ci -dessous , p. 131 ) . L a plupart des locuteurs uti l i sent indifféremment les deux formes, longue ou contractée , avec toutefois une forte majorité de formes brèves. Cependant à Mgarr, Camil leri ( 1987: 54 ) , ori 7 ginaire de ce village, signale que seul /7Ct/ est uti l isé. A
7
113
La concomit ance
Auxi liaires, particules verbales e t préverbes
En
effet,
Dans son usage le plus courant, la tournure exprime la coïnci dence du procès ou de l ' état nommé par le prédicat verbal avec l ' acte d ' énonciation, équivalent à un présent actuel . Son uti l isation est généralement obligatoire, mai s interdite pour les verbes exprimant des modalités et pour tous les verbes sans c. suff. que signale Borg ( 1988 : 83 ) ( voir p. 77 ) . L ' emploi du préverbe /7ct/ est par ailleurs encore très largement faculta-
dans des enregistrements que j ' ai effectués au cours de l ' été 1990 à Mgarr auprès de locuteurs âgés ( de 70 à 90 ans ) qui ne parlent que le dialecte du vil lage, la forme longue /7 6 °cd/ est apparue aussi fréquemment que la forme courte. 8 "Fil-fatt hawn kel liema li jgnidu li qatt ma juzaw l-espres sjoni " qed" , imma dejjem "qiegned" , qabel l-Imperfett ta' verb li m' gnandux il-partiCipju prezent ( i nformazzjoni mogntija verbalment ) . " 9
Il est donc peu vraisemblable qu' i l s ' agisse l ' italien comme le pense Aquilina ( 1 979: 94-5 ) .
d ' un calque
de
114
La concomi tance
Auxil iaires, particules verbales et préverbes
tif avec le pseudo-verbe /ik ; l lu/ "avoir" (voir p. 415 ) et avec le verbe /kgn/ "être". Je voudrais également faire remarquer que les cas qui ont été cités p lus haut ( p . 75-7 ) de situations de concomitance exprimées par une c. préf. simple, sont suffisamment rares pour lo forme à ne pas remettre en cause l ' équation "progressif" préverbe ou auxil i aire. =
Les exemples comportant une forme de concomitance sont extrêmement nombreux , et _ i l n ' y a pas de restriction d' emploi, que l e sujet soit animé ou non, que le verbe soit "fort" ou siculo "faible", "actif" ou "médio-passif", d' origine arabe, ital ienne ou anglaise. I l n ' y a pas non plus de restriction sémantique portant sur l e verbe auxi l i é puisque celui -ci peut être un verbe de sens tout à fait opposé au sens propre de l ' auxi l iaire comme dans le premier exemple ci-dessous, ou bien lui-même ( ex. 15 ) . Dans les traductions en français, je n ' ai pas toujours util isé le syntagme "en train de" , non pas parce que la forme maltaise n' exprimerait pas un progressif, mais parce que son emploi en français me paraissait trop "lourd" 1. /it-t f fla l i w ieOct ? É oda Pum/ ( Q )
"La fillette qui est tombée est en train de se relever" 2. /z a ??-u frans ?ct-tintcfaQ-I-u/ "Son ventre, à Frans, il est en train de ballonner" 3. /oal � s il-QI n ?ct-y a Omcl t 6 0-u/ <parce-que le-temps en-train-il-fait de-lui> "Parce qu' il est en train de se faire tard" 4. /mln ? � Ocd ya?ra ° Dwa l-Qab I b taO-s-sDr zammDtI "Celui qui est en train de l ire est l ' ami de Monsieur Sammut" 5. /skuz � -ni i mma ? t Oda nikbnc é ntra n a ?ra fu? dawn/ <excuse-moi mais assise je-me-concentre un-peu sur ceux-ci> "Excuse-mo i, mais je suis en train de me concentrer là-dessus" 6. Qed nienu gost l i gnerqet (O. Calleja 1972: 151) <en-train je-prends goût que e l l e-se-noya> "Ça me fait plaisir qu'elle se soit noyée"
10
Je rappelle que le terme a été repris par D. pour désigner l ' inaccompli concomitant.
Cohen ( 1 989 )
115
7. /ygn ?ct-igaOI D -ni naom f l-oa di-I-b f cca s ; °:J1I ( I I I , 14-5 ) cette-le-morceau je-fais-elle en-train-ils-obl igent-moi <moi (f. ) travail> "Moi , i ls s �nt en train ? e me forcer à l � faire, ce boulot" 8 . /spccyalmcnt ?ct-nal ludi o�il si p:Jcz iyyi li cmm fi-l-Iaym st6n/ <spécialement en-train-je-fais-allusion pour quoi poésies que là dans-le-Limestone> "Spécialement , je suis en train de faire allusion à une poésie qu' il y a dans "Limestone" 11 9. /?ct-y a?aO u PD m Ou mi l-l-intclligé nca taO dak li ikDn/ de de- l ' intelligence lui i l-se-lève et <en-train-il -tombe celui-là que il-est> "Il s ' en moque totalement, lui, de l ' intel l igence de la per sonne en question" 10. /o f dt-I-u ?ct-n f bzao ? a l-I-i ?ct-nO f d-l-Ek f nzEl> en-traini l-a-dit-à-moi en-train-j' ai -peur <j ' ai-dit-à- lui je-dis-à-toi descends> "Je lui ai dit : " J ' ai peur " . Il m ' a dit : "Je suis en train de te dire de descendre !" Il. /il-l é yla kcmm kas é tts ?ct-n � ra/ /startY "Ce soir, combien je vois de cassettes" "branchées sur ces tables !" 12. Kul l ma jgnaddi z-zmien qed jidher li l -popl u fehem u qed ikompl i jifhem hekk kif l - ipokr iziya tar-regim t inkixef ( Il Mument 8 . 2 . 1987, p . 6 ) "Plus le temps passe et plus il est en train d ' apparaître que le peuple a compris et est en train de continuer à comprendre comment l' hypocrisie du régime se dévoile" 13. /?ct-nift a kar bh' � l a francI za tintcrcss a -k cmm si Q & ga l i ktibt fQ? il-fcrr:Jvi yya minn diz 3n ° a l parIgii elle-intéresse-toi Française comme <en-train-je-me-souviens là quoi chose que j ' écrivis sur le-chemin-de-fer de Dijon pour Paris>
11
Tournure idiomatique pour dire "une personne" .
116
La concomi tance
Auxiliaires, particu les verbales et préverbes
"Je suis en train de me souvenir, en tant que Française ça va t' intéresser, i l Y a quelque chose que j' ai écrit dans le train de Dijon à Paris" 14. Imil-l-crbo l n p::)(;z i yya li ?ct-yi dOru f-dIn il-g "Parmi les 40 poésies qui sont en train de paraître dans ce recue il, les dix dernières paraissent pour la première fois" 15. li ssa ?ct-t ; ?°:::l d maC nanni t-oal ( Q ) <maintenant en-train-elle-habite avec grand-mère-elle> "Maintenant elle habite avec sa grand-mère" 16. Gnandi Kuzza l i tfarfret qiegned nanseb gna[ iha b iex inzewwigha (De Soldanis 1755 dialogue n° 3, p. 117) " J ' ai Kuzza qui a grandi et je songe à l a marier" 17. N ispera li qed izzommhom l i fis-snana [ -mara (O. Calleja 1972 : 115) <j' espère que en-train elle-garde-eux-à-moi dans-la-chaleur la-femme> "J' espère que ma femme me les garde au chaud" 18. Il -gvern qed jistni jippubbl ika [-kontijiet tat-Tarzna gna U -1984 ( I l -Mument 15. 2. 1987, p. 2 ) < l e gouvernement en-train i l -a-honte i l-publie les-comptes de- l ' arsenal pour-Ie-1984> "Le gouvernement a honte de publier les comptes de l ' Arsenal pour 1984" 19. I?ct-ik ; llu pariri tayybin minn ° and si l).att 6l).:::lr 1 ( III, 64) <en-train-i l-a conseils bons de chez quoi quelqu' un-autre> " I l était en train de recevoir de bons conseils de quelqu ' un d' autre" ( récit) 20. kemm qed inkun generuz magnkom (O. Cal leja, 1972 : 84 ) "Comme je suis généreux avec vous ! " 21 . f'dinja wanda l i q iegnda tinqasam (Friggieri 1 972: 177 ) "Dans un monde en train de se diviser"
117
2.1.2 . Caractère facultatif de la répét it ion de l a marque du progressif
Nous avons vu ( p . 77, ex. 6) un emploi conjonctif de l a c . préf. après une forme d e progressif dans une proposition coordonnée. Je voudrais ICI mentionner que, dans les phrases doubles exprimant le déroulement simultané et concomitant de deux procès, dans lesquelles la proposition subordonnée est introduite par Iwa?t l i l "pendant que" , la présence du préverbe I?ctl n' est pas obl igatoire dans les deux membres de la phrase. Il suffit qu' i l soit employé dans l ' une des deux propositions, en tête ou non de l ' énoncé : 1. Iwa?t l i yirrakk; nta st S rya ?ct-y i nscgl ( Q ) "Pendant qu ' il raconte une histoire, il est en train de tisser" 2. Iwa?t li tkun ? É oda tipp;mpya t 6 l).u l-kbr "Pendant qu' elle serait en train de pomper, elle prendrait du chlore à ce moment-là" 3. Iwa?t li ? 6 °cd y "Pendant qu' i l est en train de l abourer, il est en train de chanter" ( "il est en train de chanter en labourant") =
2.1.3. Le progressif avec référence au futur a) L' imminence Il arrive, quoique très rarement dans mon corpus, que la forme de concomitance avec I?ctl soit util isée métaphoriquement pour exprimer un futur imminent. L' implication psychologique du locuteur est alors très forte . Il s ' agit de ce que D. Cohen ( 1984 : 587) a appelé, à propos du néo-araméen, une "utilisation expressive dans le discours , c ' est-à-dire lorsque le concomi tant inaccompli est essentiellement présent, de cette forme de concomitant pour des emplois élargis : pour le futur imminent d' une part et un présent actuel-duratif de l ' autre. " E l le est fréquente dans les langues, comme il le fait lui-même remar quer. Voici le seul exemple rencontré dans mon corpus :
118
La concomitance
Auxi l iaires, particules verbales et préverbes
1. In}? l-ant I k ?cOdl n nO l du �l)nal
<sur l ' ancien-temps assis ( pl . ) nous-disons nous> "De l ' ancien temps, nous allons parler, nous 7" ( rien n' avait été encore dit, que mon désir de l ' entendre raconter ses souvenirs) h) Le futur modal avec l 'auxil iaire lik6.nl
Le concomitant peut être situé dans un futur modal exprimant une potentialité ou une éventualité. Ce futur peut être référencié au présent du locuteur ou bien à un autre point de l ' énoncé. En proposition principale comme subordonnée, c' est la c. préf. du verbe "être" lik6.nl placé devant l a périphrase du concomitant qui en permet l ' expression. Le plus souvent, la construction peut être traduite par un conditionnel présent du français, car l e locuteur fait appel à l' imagination de son inter locuteur . i
1. lu yar � _Oa tklln ?ct-t � Omd il-m é kAp tkun ?ct-t Ü bcsl
<et i l-voit-el le elle-est en-train-el le-met le-"make-up" el le-est en-train-el le-s' habil le> "Et i l la verrait, elle serait en train de se maquil ler, elle serait en train de s' habiller" 2. Idlk °al €:kk tkun stirata ink é l la mé ta tkun ?ct-tissé rra tin?as am-I-ckl "Celle-là est donc tendue, sinon quand tu serais en train de l a scier, elle te casserait ( entre les mains ) " 3 . Im é ta ddur dlk tkun ?ct-t i tl)anl "S ' i l tournait, celui-là, il serait en train de moudre" 4. li mma l -vapOr i u I-fcrr::>v l yyi itO -ni cans nara n�s nitké l lcm l-vcdOta all 6.ra l) afna dr;ibi fu? i l -fcrnvl yya mbl)l)-i ikOn ?ct-i O é wdcnl <mais les-bateaux et les chemins-de-fer i l s-donnent-moi chan ce je-vois gens je-parle la-vue alors beaucoup fois sur le chemin-de-fer esprit-moi i l-est en-train-il-délire> "Mais les bateaux et les trains me donnent l ' occasion de voir des gens, de parler, ( de contempler ) la vue, alors, souvent, dans le train, mon esprit sera en train de dél irer" 5. u tkun qiegned isserranl i monn i wko l l (Friggieri 1986 : 7 ) <et tu-es assis tu-reposes-à-moi esprit-moi aussi>
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"Et tu serai s en train de me rassurer aussi" k � nct tkun rcyaccy3ni l)afna dr ;i bi cal dak l i ikUn l ?ct-y gri fi-l-mumÉ: ntl <et elle-était elle-est réaction beaucoup fois pour celui-là que i l-est en-train-il-se-passe dans-le-moment> "Et ça aura été souvent une réaction à ce qui aurait été en train de se passer à ce moment" 7. lu gé wwa nkun ?ct-n ig i nitmé yycl l <et dedans je-suis en-train-je-viens je-m' incl ine> "Et à l ' intérieur je serais en train de m ' en moquer" 8. Im é ta tkO nu ?cOdl n titké l lmu araw s y i gi l-é wwcll "Quand vous serez en train de par 1er, regardez ce qui vient en premier" 9. Min janzen il -basal ikun qed janzen il -nara ( Aqui l ina 1972: 533, prov. 109) "Qui conserverait des oignons, serait en train de conserver de la merde" 6. lu
2.1.4. Le progressif avec référence au passé a) Sans auxil ia ire Dans une phrase complexe, la forme du progressif peut apparaî tre en référence à un autre événement donné par l ' énoncé, en référence au passé qui peut être soit un verbe à la c. suff. , soit le contexte. La conjugaison à préverbe ou particule appa raît alors dans des relatives, complétives ou subordonnées circonstancielles. Si le passé est marqué par un adverbe temporel, elle peut se trouver en proposition indépendante : 1. Ira l-?att U sa mao-I-ban &nal
I?t oda t � bl il-l)asi si ( V, poème n° 21 ) " I l a vu une chatte dans le bananier" "En train de manger de l ' herbe" 2. Im a l l i tt é nda li ?ct-inl).&rcs lcy-l) ?am u l) arabl
i l-se
pt
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Auxiliaires, particules verbales et préverbes
"Dès qu' i l s' est aperçu que je l ' observais, il s' est levé et il s' est enfui" 3. lil-ba1;r In 1;asb O -1; li ?ct-y s on::?1 "Les marins ont pensé qu' il était en train de se noyer" 4. 11;s l bt-ck ?ct-tO I d °al-I-ist âmpal <je-pensai-toi en-train-tu-dis pour-l' image> "Je pensais que tu étais en train de ( l e ) dire à propos de l ' image" 5. [m l tta s â ma, l lli q�dîn is é mmu-tfâl t â1;1;oml ( Stumme 1904 :5, 1 . 16-17) "Quand il a entendu qu' ils étaient en train de mentionner leur s enfants" 6. [ k�n-é m râgel, )ê3�t iwâl)1;al ilkârti mal1;�tânl ( Stumme 1904 : 46, 1. 14) "Il y avait un homme en train de coller des affiches sur l e mur" 7. IOam i lt lcyl inl) ;ss-ni ?ct-niggs nncnl <je-f is nuit je-sens-moi en-train-je-deviens-folle> " J ' ai passé une nuit à me sentir en train de devenir folle" 8. Iwa?t li ?ct-y 6bl gQt tig 6gal "Pendant qu' il était en train de manger, une poule est venue" 9. [ sl)�n )�3�da t1;ûrës l âel), b é da jitÜuwëp l ( Stumme 1904 : 55, 1 . 35 ) "Alors qu ' elle était en train de le regarder, il s' est mis à bâiller" 10. Iniftak âr-oa ?cOdi n inc1;1; a -I-oa 1 dIkl <je-me-souv iens-elle assis ( p l . ) ils-enlèvent -à-elle à cellelà> "Je me souviens d ' elle, ils étaient en train de lui ôter ça" 1 1 . lia d ârba ?cOd i n nitk s llmu da?s s kk fij? 1;al ? ;rmil "Une fois, nous étions en train de parler de Hal-Qormi"
b) Avec L' auxiL iaire IkQnl On trouve fréquemment l ' auxiliaire du passé IkQnl "être" , placé devant la périphrase de concomitance. Il indique explicitement
La concomitance
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que celle-ci se réfère au passé. La construction se rencontre dans les mêmes types de phrases que celles des ex. ci-dessus : relatives, complétives, c irconstancielles, après adverbe tem porel, mais aussi en proposition indépendante, sans marqueur temporel autre que l ' auxil iaire IkQnl 1. Ikin- smm l) âfna s ; o::>l mil-l-?r lb bcyn dawk li k 6nu ?cOdi n y l ktbu I-p::>cz l yya fi-n-n ; fs is-sittiniyy6t u I-m::>vimé nt ?awm 6 n lcttcr a ryul "Il y avait beaucoup de travaux proches entre ceux qui écri vaient de l a poésie dans le milieu des années soixante et le Mouvement pour l e Réveil Littéraire" 2. link ;mpli n° Id si h. a ga fil? dak stcss l i bnt ?ct-nitké llcm ? âbdl <je-continue je-di s quo i chose sur celui-là même que j ' étais en-train-je-parle avant> "Je vais continuer à d ire quelque chose sur cela même dont j ' étais en train de parler avant" 3. 10as b i lli k �nct ? t Oda ddilr n âhscb l i l-ant énni k � nu mOils . s fil? il-b yt al "Parce que, puisqu ' i l (le moul in) était en train de tourner, je pense que l es ai les, c' est pas sur le toit qu' elles étaient, hein" 4. lu fra mud é st indOna li kQn ?ct-yitm€:yyd bI -1;1 <et Frère Modeste il-s' aperçut que il -était en-train-il-s' in cline avec-lui> "Et Frère Modeste s' est rendu compte qu' il était en train de se moquer de lui" 5. lil-gvs rn ra li 1-?IQ1; k � nu ?ct-y â Omlu i l-bcyy 6 0a mails °ill "Le gouvernement a vu que le profit, c ' était les vendeurs qui étaient en train de le faire, pas lui" 6. In lzlct 1;dcyn il-w 6d [ . 1 fcyn k 6 nct ? É oda t l gb::>r si l)s éyycsi <elle-descendit près la-vallée [, . . 1 où el le-était assise e lle-ramasse quoi herbes> "Elle est descendue dans la vallée, [ . . . 1 où elle était en train de ramasser des herbes" . .
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Auxiliaires, particules verbales et préverbes
7. lOI biss salv �t u salv �t °as k fu nct ? t Oda tl tbbl ( IV, 22-3 ) <elle seulement elle-fut-sauvée et elle-fut-sauvée car e ll e était assise elle-prie> "Elle seulement fut sauvée, et sauvée parce qu' elle était en train de prier" 8. Ida-l- a!:l!:lar k::mt ? 6 °cd nippr :5va n i ktcb rumanc satÎrikul "Dernièrement j' étais en train d ' e ssayer d' écrire un roman satirique" 9. Eh, kont qiegnda n istrien (O. Calleja, 1972: 47 ) <eh j ' étais assise je-me-repose> "Eh ! j ' étais en train de me reposer" 10. Idarba n i zlct s é bba minn cmm é kk k 6 nct ?ct-t a!:lsc1 i l-!:lwé yycgl "Une fois, une jeune fille est descendue par là. Elle était en train de laver du linge" Saydon ( 1935: 45) s ' élevait contre la tendance des écri vains à employer indûment la pér iphrase avec Ik�nl + I?ctl + c. préf. dans les circonstancielles de temps, à laquelle il préférait une construction sans la marque du concomitant "beaucoup d ' écrivains aiment un peu trop ce mot et ils l' introduisent même quand i l n ' est pas nécessaire ainsi au lieu de : xnin kont nikteb, ils disent : xnin kont qiegned nikteb. C' est une corruption de l ' écriture dont on doit se 1 débarrasser si l ' on veut écrire correctement. ,, 2 Un demi -siècle plus tard, force est de constater que son appel n ' a été entendu ni des écrivains ni d' aucun de ses compatriotes . . . et comme le montre l ' ex. 8 p. 87, c' est p lutôt Ik�nl qui est facultatif, non I?ct/. Ceci prouve que l ' expression de la concomitance, qui grignotait du terrain à l ' époque de Saydon, semble l ' avoir 13 acquis de nos jours. Le sentiment des jeunes locuteurs contem-
12
"Bafna kittieba jnobbuha ftit izzejjed din il-kelma u jdannluha mqar met a mhix menti ega ; hekk flok : xnin kont nikteb, ign idu : xnin kont qiegned nikteb. Dan tansir ta' kitba li jantieg wiened janarbu jekk irid jikteb bir-reqqa. " 13 I l convient d' ajouter, que la construction avec la c. préf. précédée de l' auxil iaire Ik�nl sert essentiellement à l ' expres sion du passé d' habitude. Ceci a pu favoriser l ' introduction de
La concomitance
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porains est que l ' exemple considéré comme correct par Saydon est "lourd". 1 . ifittex f� -art is-sigarett U k ien qed ipeJjep qabe� u l i kien waqagn lu waqt l i kien qed iqa l l eb fil -basktijiet (O. Calleja, 1972 : 5 1 ) "Il cherche sur le sol la c igarette qu' i l était en train de fumer avant et qui lui était tombée (des mains) pendant qu' il fouillait dans les paniers" 2. Iwa?t li k�n ?ct-ikc1l i m-ni ° awa k�n ?ct-y a Omc1 ucu!:l l i i dab!:lkul ( Q ) "Pendant qu ' i l était en train de me parler , lui, il prenait de grands airs" 3. Imé ta bnt ?ct-nikt i b-Oa k::mt ?ct-nO I d ° alf é yn ?ct-nikt f b- oal "Quand j' étais en train de l ' écrire, j ' étais en train de dire "Pour quelle raison est-ce que je suis en train de l ' écrire?" 4 . I �ra mé ta k�n ?ct-yisma O-nal Ik a ssa b f rra !:larbat-0 6 -1-oal "Regarde ! quand il nous écoutait" "Une caisse de bière il a liqui dée ! " 5. D i k i l -nabta l i D e Soldanis ki en qed jandem J'dan i l -Ms., Malta u Gnawdex kienu jgnoddu mal -85.000 run ( Cassar-Pulli cino 1947: 101 ) "Pendant que De Soldanis était en train de travailler sur ce manuscrit, Malte et Gozo comptaient environ 85. 000 âmes" 2. 1 .5. Le parfait en composition avec deux adverbes
La forme à préverbe I?ctl précédée des adverbes IOad-1 "encore" + pronom suffixe et Ikcmml "combien" ou IkIf l "comment" , dans
I?ctl dans ce type de phrases.
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Auxiliaires, particules verbales et préverbes
cet ordre, tout comme avec la c. suff. ou la c. préf . simple, peut également servir à exprimer le parfait. Elle fournit une illustration suppl émentaire et originale à la symétrie entre parfait et progressif constatée par D. Cohen, ce qu' i l souligne par l ' util isation du présentatif /ra/ dans certains dialectes maghrébins aussi bien avec la c. suff. qu' avec la c. préf . "ainsi se révèle la symétrie du parfait et du progressif par la marque commune qui les exprime à partir respectivement de l ' accompl i et de l ' inaccompli" (D. Cohen 1989 : 99 ) . En maltais l a marque commune ( les deux adverbes) ne fonctionne que pour exprimer le parfait, mais que l le que soit la forme verbale utilisée : c. suff . , c. préf. , forme à préverbe ou auxil iaire. Avec les formes du progressif, comme avec déjà l a c. préf. , la tournure est encore très marginale et très expressive. Je n ' en ai rencontré qu ' un seul exemple chez une jeune locutrice de 25 ans , originaire de Melliena : 1 . /?aI f -I-na dïk o � d-ni kcmm ?ct-inkdt i m-oa np it-tdd 5n/ en-train-je "Il nous a dit "Ce lle-ci , je viens tout juste de lui parl er au téléphone" I l faut préciser que la présence du second adverbe est obligatoire avec la forme à préverbe ( ce qui n' est pas le cas avec les deux autres conjugaisons ) , sinon le syntagme change de sens et /Oad-/ retrouve son sens propre de "encore", comme dans l ' exemple ci -dessous : 2. u gera hdejn Pietru l i kien ghadu qed iqum m i l l -art ( Casha 1974:64) <et i l-courut près Pierre qui il-était encore-lui en-train il-se-lève de-le-sol> "Et i l accourut près de Pierre qui était encore en train de se relever"
2 . 1 . 6. L'expression de l ' "habitude restreinte" On constate également, depuis les documents du XVI IIème siècle, et de plus en plus actuellement , l' emploi de la périphrase verbale dans des contextes que Borg ( 1981 : 151 ) a qualifiés de "restricted habit", c' est-à-dire des événements qui se repro duisent pendant un laps de temps plus ou moins long, mais
La concomitance
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limité. On peut considérer que c' est là une premlere étape vers le passage de la valeur de concomitant à celle d' inaccomp li général . Elle s' inscrit dans l e mouvement en spirale de l ' évolution du système verbal dans les dialectes arabes ( entre autres ) décrit par D . Cohen : après une première subdivision de l ' inac compli en un concomitant et un non-concomitant, il résume le stade suivant comme un "double mouvement qui conduit la marque de concomitant à se généraliser en marque de l ' indicatif dans son ensemble et de façon connexe, l ' ancienne forme de l a non-concomitance à restreindre son domaine à l ' expression d e la modal i té et de la dépendance. " (D. Cohen 1984: 296 ) . O n n ' en est pas encore l à e n maltais , mais l ' évolution est amorcée. La forme du progressif étant sentie comme plus expres sive, plus implicante, par les locuteurs, elle tend à être util isée de plus en plus dans des contextes auxquels elle n' avait pas accès auparavant. 1. sehebti donnha raddiena t izzonzonjani biex inzewwigha ghal iex hemm l -ohrajn ghadhom geJJLn u kull jum qeghdin jaqbzu (De Soldanis 1755 , dialogue n° 4, p. 117) <partenaire-moi comme-elle rouet elle-bourdonne-moi pour je marie-el le parce-que là les-autres encore-elles venant ( pl . ) et chaque jour assis (pl) elles-sautent> "Mon amie, elle est comme un rouet à me bourdonner ( dans les orei lles ) pour que je la marie, parce qu ' il y a les autres qui suivent et chaque jour elles trépignent (d' impat ience )" 2. [ mell- �nti 3al � k >ê3at k � l d arba tâsal > ab l i l ( Stumme 1904: 55, 1. 9) "Alors toi c' est pour ç a qu' à chaque fois t u arrives avant moi" ( lors d ' une série d' allers et retours limités dans le temps) 3. /dawn it-tig � g kcmm ?ct-ibl du fUt dIn i l-Dabta/ "Ces temps-ci , je ne sais pas ce qui m' arrive , je suis toujours fatigué"
126
Auxiliaires, particules verbales et préverbes
5. /ku l l yum ?et-y i mrad fUt i ktar/ ( Q ) "Chaque jour il est un peu plus malade" 6 . / i ktar ma i " addi z-zmÏ<'Jn i n?as '?et-y ai)dem/ ( Q ) "Plus le temps passe , moins il travaille" 7 . /i)afna dr �b i " andd d É yyem il-pers Ona l- ;i)ra l i "al Î -"a 14 I-pJez i yya ? t "da Ùgi mikt Oba address � ta il-pJez i yya mOïS ? t "da tink i teb " al-l-f ; lla/ "Souvent tu as ( présent à l ' espr it) toujours l ' autre personne pour laquelle le poème est écrit, adressé. Un poème n' est pas écrit pour la foule" 8. /naturalm É nt dÉ yyem dak li rrId yÏ<'Jn ?et-n" rd i mma ?ct niggarant i ssi f -1-ist É ss hIn l i bi -1 -m3 d kIf ?et-nitkÉ l l em bi-l- Ü ngwa li ?et-nO za b i-l-fraz É lla li ?et-ini) addem ink On ? � Ocd anki nift 6 "em/ "Naturellement, je dis toujours ce que je veux, mais en même temps je garantis par la façon dont je parle, par la langue que j ' ut i lise, par les phrases que j' emploie que je me ferai aussi comprendre" Les deux derniers exemples nous montrent que la frontière entre "habitude restreinte" et inaccompli général est perméa ble. On peut admettre pour l ' ex. 7, à la l imite, que la locution adverbiale en tête de la phrase, même contredite par celle qui suit Vdé yyem/ "toujours " ) ait pu entraîner la présence d ' un concomitant , mais il n' en va pas de même dans les exemples qui vont suivre.
14
Sic . Ce participe a été formé par un locuteur enseignant ( sa langue d' enseignement est l ' anglais) et poète, à partir de l ' anglais "to address", mais le terme admis par tous les locuteurs est /indiricc � ta/, d ' origine ital ienne.
La concomitance
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Par ail leurs, il est intéressant de noter la reprise du préverbe de concomitance dans toute la suite de verbes dans l ' ex. 8 qui est là pour donner une p lus grande force expressive à J ' énoncé, al ors qu' une simple suite de c. préf . après le premier verbe marqué comme progressif aurait pu suffire ( voir p. 77 ex. 6 ) .
2.1.7. La valeur d' inaccompli général Le processus du glissement de la valeur de concomitant à celle d' inaccompli général est en effet amorcé en maltais. Les exemples que j ' ai relevés se trouvent chez des locuteurs de diverses localités de l ' î le de Malte, âgés de 20 à 45 ans, mais Aquil ina ( 1972) cite déjà un proverbe ( un seul sur les 4630 qui constituent son recuei l ) énonçant une vérité générale et qui comporte la périphrase verbale avec /?et/. D. Cohen ( 1989 : 218) expli que ce type d' utilisation ( pour l ' anglais ) de la manière suivante "c' est le caractère réfé rentiel qui est à la base des usages particul iers, apparemment fort divers, qu'on peut relever pour cette forme [be + -ingl ; i l fonde aussi, dans la plupart des cas, l a dynamique par laquelle la construction périphrastique, en tant que forme marquée, empiète sans cesse, comme porteuse d ' une plus grande expressivité, sur le domaine de la forme simple". Le phénomène semble encore marginal en maltais, mais n ' en est pas moins symptomatique. La plupart des exemples ci-dessous sont tirés de discours d' intellectue ls : 1. Miskin dak il -agnma U fiz-zmien qiegned jittama ( prov. 51, p . 461 ) <pauvre celui-là l ' aveugl e qui dans-le-temps assis i l-espère> "Malheureux cet aveugle qui place son espoir dans le temps" 2. Qed n ittama l i minn hawn u ftit ienor ikun imissu hu (O. Calleja, 1972 : 97 ) <en-train-j ' e spère que de ici et un-peu autre i l-est il-tou che-lui lui> " J ' espère que bientôt ce sera son tour à lui" 3. /m é la ?et-t a Qseb li yÏ<'Jn da?sÉ: kk I z i tu get/ "Alors tu penses que moi , comme ça, je suis du genre facile"
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Auxiliaires, particules verbales et préverbes
"Lui, il est descendu en courant dans cette grotte qu' on l appelle désormais la Grotte de Hasan" 5. /° Î ya p�cziyya li tikbmûnika mao-I-bmunit � li ?ct-nO I s fI -oa/ <elle poésie que elle-communique avec-la-communauté que en train-je-vis dans-elle> "e' est une poésie qui communique avec la communauté dans laquelle je vis" 6. /ygn ? 6 °cd n � Qdcm tisbiQ �t li ° a ma mCQud I n mil-I-kunté st 2 mcditcrr �nyu ? 6 °cd n �Qdcm bi l sgn li ? 6 °cd uz �t ni? bi cca gzi ra fI-c-c é ntru kIf ° i dt-I-ck ? 6 °cd taO-I-mcditerr � n 5 � 6 � nippr va nw ssal dan l-ils n u daw it-tisbiQ t marbutIn fi QsRib li mOUs bi- I-f ;rs ° a wa mcditcrr� nyu/ <moi assis je-travail le comparaisons que el les prises de-Ie contexte méditerranéen assis je-travai lle avec langue (m. ) que assis uti l isé sur morceau î le dans-le-centre de-Ia Méditerranée assis comment j' ai-dit-à-toi j ' essaie je-conduis celui-ci l a-langue (m. ) et cel les-ci les-comparaisons l iées dans pensée ( coll. ) que ne-lui-pas avec-la-force eux méditer ranéen> "Je travaille des comparaisons qui sont tirées du contexte méditerranéen, je travail l e avec une langue qui est utilisée sur un bout d ' î le au centre de la Méditerranée, j ' essaie, comme je t ' ai dit, de conduire cette langue et ces comparai sons ensemble dans une pensée non forcément méditerranéenne" 7. /il-pr�bl t ma d� yyem tkiln i l-pnb l t ma financy�rya Qa-no I d-l ek ° al 6 s °as i nti déyyem ?et-t; P�t udy é nca vcram� nt ristrct ta all a ra Q �fna iniccyattIvi bQal dawn d éyycm ima tu fil? rUQ ;mm-o�m yew w �ra ftIti
1
Cet ex. pourrait aussi être interprété comme une "habitude restreinte" , puisque c ' est seulement à partir de l ' événement raconté dans la légende que la grotte a pris ce nom. Il n ' en reste pas moins qu' el le n ' en a jamais connu un autre, de mémoire d' homme. 2 /?gOcd/ devant un participe passif n' exprime pas la concomitance. Il est ici dans une autre fonction, celle de copule exprimant l ' existence. Voir p. 372 sq. /
La concomitance
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ta all a ra Q�fna iniccyattI vi bQal dawn déyyem imiltu fil? rilQ ; mm-o::>m ycw w�ra ftIti < le-problème (f. ) toujours el le-est le-problème financière FUT-je-dis-à-toi pourquoi car toi toujours en-train-tu-at teins audience vraiment restreinte alors beaucoup initiatives comme cel les-ci toujours ell es-meurent sur âme mère-eux ou après un-peu> "Le problème sera toujours financier. Je vais te dire pour quoi. Parce que toi, tu atteins toujours une audience vrai ment restreinte, alors beaucoup d ' initiatives comme celles-ci avortent toujours dès le début ou peu après" 17 8. Imma, barra minn dan, SutcL iffe qed ignid impl iéitament ukoU l i z-zewg binjiet huma ekwivalenti gnal xul xin (Borg 1988 : 257) <mais, hors de celui-ci, Sutcliffe en-train il-dit imp l icite ment aussi que les-deux constructions el les équivalentes pour mutuel lement> "Mais, à part ça, Sutcl iffe dit implicitement aussi que les deux constructions sont équivalentes" Cette phrase est à rapprocher d ' une autre du même auteur et qui lui est comparab le, où c' est une c. préf. simple qui a été utilisée : 9. L-espressjoni ' qed ' Sutcl iffe ma jitkeUemx fuqha diretta ment, imma fil -vokabolarju fl -artrtar tal -ktieb tiegrtu (1936: 271) igrtid l i 'qed' hija taqsira ta ' 'qiegned ' ( p . 80 ) < l ' expression "qed" Sutcliffe ne il -parle-pas sur-elle direc tement , mais dans-le-vocabulaire dans-le-dernier de-le-livre de-lui il-dit que " qed" e l le réduction de "qiegned"> "L' expression "qed", Sutcliffe n ' en parle pas directement, mais dans le lexique à la fin de son livre ( 1 936 : 271 ) il dit que "qed" est une contraction de "qiegned"" Cec i montre bien que chez un même locuteur, l ' usage de la forme du concomitant avec valeur d ' i naccompl i général n ' a encore rien d e très stabl e .
17
Sutcliffe est l ' auteur d' une grammaire datant de 1936.
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Auxil iaires, particules verbales et préverbes
La concomitance
2.1.8. EmpLois en dépendance C' est un fait extrêmement rare dans mon corpus . Je n ' en ai trouvé qu' un seul exemple, dans les indications scéniques accompagnant une pièce de théâtre, après l ' auxiliaire IbÉdal "commencer, se mettre à". Encore s' agit-il d ' un exemple contro versé : s ' il est accepté par mon informatrice de La Valette, celle de Mgarr le rejette et considère l ' utilisation de qed comme un "lapsus". Je ne sais s ' i l faut l' interpréter comme une coquille ou bien si l ' on est en droit de dresser un parallèle avec l ' utilisation, quasi-obligatoire el le, du participe actif pour les verbes de mouvement après cet auxiliaire C voir p. 244-5 ) et de considérer les divergences d ' opinion entre l es informatrices comme le reflet de deux stades d' évolution diffé rents dans la langue, l ' un marquant la concomitance dans ce cas, l ' autre non. Il conviendra d ' être attentif à cet emploi lors d' études ultérieures. 1 . Donnu rega ' beda qed jidLam C O . Calleja, 1972: 166) "Il semble qu' i l s' est remis à faire sombre"
"C' est-à-dire que tu n' es pas en train de donner de simples informations" 4. Imous ?ct-ikan i l-kÉlb li yiddctÜ-I-i s candi nOld-l-u mOus ?ct-ikan is-s6l). l i yiddctÜ-I-i 5 Candi nOId-I-u imma déyycm ?ct-naza rcgistri diffcrÉntii "Ce n' est pas le chien qui me dicte ce que je dois dire, ni le vieil lard, mais j ' util ise toujours des registres diffé rents" 5. Imous ?6°cd nOld Iii "Je ne suis pas en train de dire que On remarquera dans le 4ème exemple que la forme préverbée est uti li sée avec une valeur d' inaccompli général qui n' est donc pas réservée au seul énoncé affirmatif. Si l ' énoncé comporte un autre élément de négation, la négation du concomitant se fait par simple préfixation de lmal à I?ctl
2.1.9 . La négation a) L' expression de la concomitance dans une phrase négative est obligatoire, exactement de la même façon que dans une phrase affirmative. En "standard" , comme chez la plupart des locuteurs de dialectal , la négation se forme par antéposition à la périphrase verbale de la particule Im"usl litt. "ne-lui-pas", dont l ' accord en genre, en nombre et en personne avec le sujet est facultatif. Il ne s ' agit donc pas du morphème discontinu de la négation propre aux c. suff. et préf . 1 . Imin6s ?ct-nistÉnna li ikan ckk yQnl "Je ne m' attends pas à ce qu' il en soit ainsi" 2. Imous ?ct-niccayta tal "Je ne suis pas en train de plaisanter, tiens ! " 3 . ligif6ri mOus ?ct-taOti n[:)rmaccy5ni sémpl icil
131
sim
6. Xejn ma qed jogngobni C O . Calleja, 1972: 125 ) "Rien ne me plaît"
b) Camilleri ( 1 987 : 54 ) a relevé pour le dialecte de Mgarr (Malte ) la négation verbale disconti nue Ima . . . si accolée au préverbe, qui est la seule possible : 1. ma qedx imur ( Camilleri 1987 : 54 ) "Il n' est pas en train d' aller" 2. [ma-?Ét-s nal).diml (Vanhove 1987 : 3 8 ) "Je ne suis pas en train de travai ller"
2.1 .10. La concomitance dans L a phrase interrogative Il a été noté (p. 75-6 ) que n' était pas obligatoire dans
l ' expression de la concomitance les phrases interrogatives. Il
132
La concomitance
Auxi liaires, particules verbales et préverbes
faut cependant reconnaître que les exemples avec la périphrase largement ceux avec une simple corpus, un même locuteur peut verbale.
c' est de plus en de concomitance c. préf. Ajoutons ut iliser l' une ou
1. I?ct-âra SI l)�ga fi-I-blrl <en-train-tu-vois quoi chose dans-Ie-pui ts> "Tu vois quelque chose dans le puits 7" 2. [ si -grâlek , �bni 7 3�Idli s�ndck mintîs
plus rare, et dépassent très que, dans mon l ' autre forme
( auquel i l
ne se
Le progressif dans la phrase interrogative peut auss i être situé dans le passé au moyen de l ' auxil iaire Ik�nl :
71
(Stumme 1904 : 35 , 1. 24 ) "Que t' est-il arrivé, mon f i l s 7 Dis-moi c e que tu a s ! Tu ne manges pas 7" 3. Itaf °al6s ?ct-insémmi dInl "Tu sais pourquoi je suis en train de mentionner ça 7" 4. l iema xogrl.Ol qed tfittex ? ( O . Calleja, 1972: 130 ) "Quel travail cherches-tu 7" 5. U taf x' qed nanseb ? (O. Calleja, 1972: 109) <et tu-sais quoi en-train je-pense 7> "Et tu sais à quoi je suis en train de penser 7" 6. Idln ?Éoda tinstémal "Celle-ci , elle est en train d'être entendue 7" 7 . ImIn ?ct-itI-k dawn il-parfril ( I II, 73-4) "Qui est en train de te donner ces conse ils 7" Même pour l ' expression de 1 habitude restreinte", la forme à préverbe I?ctl peut être uti l isée dans une phrase interrogative, mais je n ' en ai encore rencontré aucun exemple avec une valeur d' inaccomp li général : "
9. Idc l iccyu ?ct-t61)d-ul <passe-temps en-train-tu-prends-Iui> "Tu prends ça ( comme) un passe-temps 7" livre que depuis qu ' i l est à l a retr aite )
133
'
8. It�yycb fssa l-pastUri dIn l-éwwcl d�rba li ?ct-t�Omcl da-l pastUril "Bien, alors les santons, c' est la première fois que tu en fai s , des santons 7"
10. Is k::mt ?ct-t�Omcl da-I-03dul "Que faisais-tu ce matin 7" 11. Dazgur kont qed tienu gost, jew dazgur ma kontx qed tienu gost ? (O. Calleja, 1972: 15 ) <sûr tu-étais en-train tu-prends goût, ou sûr ne tu-étais-pas en-train tu-prends goût> "e' est sûr que ça te faisait plaisir , ou b ien c' est sûr que ça ne te faisait pas plaisir 7 " O n remarquera dans c e dernier exemple que c ' est liaire temporel qui porte les morphèmes de la négation.
l ' auxi
2.1.11. La postposition de 1?6°cdl au verbe aux i l ié Dans deux énoncés de mon corpus, j ' ai relevé un renversement de l ' ordre habituel auxiliant - auxi l i é . Il semble, selon les com mentaires des informateurs, que cette tournure soit considérée comme p lus expressive. Mais dans le premier exemple ci-dessous où les deux termes de la périphrase sont séparés par un adverbe la postposition de 1?6°cdl est obl igatoire. L ' i nversion avec I?ctl est par contre impossible, ce qui confirme son statut morphologisé : 1. IOUwa y6k:::> 1 b iss ?6°cdl ( Q ) "Il ne fait que manger" 2. Hux niééajtaw qegndin, Rita ? Œbejer 1985 : 25 ) "N' est-ce pas que nous sommes en train de plaisanter, Rita 7 "
2 . 1 . 12. Concl usion Les nombreux exemples qui i llustrent cette partie de l ' ouvrage montrent sans conteste que la forme maltaise à préverbe I?ctl
134
La concomitance
Auxiliaires , particules verbales et préverbes
( ou avec l ' auxi liaire /?�Ocd/ ) comme tout syntagme exprimant la concomitance dans l ' inaccompli dans les dialectes arabes, peut se référer aussi bien à l ' acte d' énonciation, donc au présent du locuteur, qu ' à n'importe quel événement pris pour référence, quelle que soit sa situation temporelle. Nous avons vu également qu ' i l s' amorce très nettement une évolution mise en relief par D. Cohen ( 1984 et 1989) : l ' utili sation des formes progressives est en train d' envahir peu à peu le domaine de la c. préf. en prenant des valeurs d' inaccompli général. Pourtant, à la différence de ce qui se passe dans de nombreux autres dialectes arabes, on ne voit pas pour l ' instant poindre une nouvelle expression de la concomitance.
2.2. Le participe Remarques préliminaires A la forme de base, le participe actif n ' a survécu que pour un tout petit nombre de racines et aux formes dérivées la distinc tion formelle entre actif et passif a disparu où c' est essen tiellement la valeur de passif qui a subsisté. On comprendra donc aisément que le maltais n ' ait pas développé un système verbal où le participe actif aurait joué un rôle important, comme dans certains dialectes maghrébins par exemple ( voir par ex. Caubet 1989 ) . Néanmoins, comme i l a été dit au début d e ce chapitre, quelques verbes de mouvement et d' attitudes expriment le pro gressif au moyen du participe actif. En voici la liste com plète : /s�yycr/ /gcy/ /n�zcl/ /t�lao/ /d�Qcl/ /Q�rcg/ /m�si/ /r�sa?/ /oaddÉ:y/
"al lant" "venant" "descendant" "montant" "entrant" "sortant" "marchant" "approchant" 8 "passant,, 1
1 8 Morphologiquement,
/oaddÉ:y/
/t�la?/ "partant,, 19 /r�?cd/ "dormant" . 20 /sayycm/ " Jeunant A
pas
un
participe
actif,
,,
Ces participes s' accordent en genre et en nombre, mais ils n' ont pas incorporé de marque faisant référence à la personne, comme en néo-araméen occidental par exemple ( voir D. Cohen 1984 : 46 4 ) . On les trouve aussi bien dans les phrases affirma tives que négatives ou interrogatives.
2.2.1. L ' analyse d 'Al bert Borg La situation du participe actif au sein du système verbal est complexe, car il existe aussi pour tous ces verbes une conju gaison à préverbe /?ct/ ( ou auxi liaire /?� Ocd/ ) avec laquelle il est en concurrence. Avant de faire part de mes propres observations, il me semble nécessaire de résumer d ' abord le point de vue de Borg ( 1981 et 1988) sur la question qu' il est l e seul à avoir abordée en détail jusqu ' à présent. Son analyse ( 1988 : 88-92 ) , située dans le cadre de la théorie local iste, repose princ ipalement sur l ' ut i lisation du verbe /m�sa/ "marcher", dans son propre idiolecte : la forme avec préverbe /?ct-yimsi/ couvre l es trois valeurs de concomi tant, d ' habitude restreinte et d ' inaccompli général, alors que le part icipe actif /m�si/ ne peut exprimer que le concomitant
mais un schème de nom de métier de géminée d ' un verbe à 3ème radicale fonctionne comme u n participe e t est système d e concomitance. 19 Ce participe est d ' un emploi assez qu ' un 20 Ce ( sauf forgé
n ' est
135
la forme à 2ème radicale semi-vocalique. En fait i l totalement intégré dans l e
rare. Je n ' en ai rencontré ex. utilisé avec valeur de progressif dans mon corpus.
participe n' est pas apparu spontanément dans mes corpus après auxiliaire ) . Mon informatrice de La Valette m' a l ' exemple suivant : /tist�? fut biskuttlni/ - /lt, sayyma/
136
La concomitance
Auxil iaires, particules verbales et préverbes
et l ' habitude restreinte. Il en donne les exemples suivants : 36. éanni jimxi / qed jimxi mid-dar sa l-iskola kuljum <Jean i l-marche / en-train i l-marche de-la-maison jusqu ' à l ' école chaque-jour> "Jean marche de la maison à l ' école tous les jours" 37. éanni qed jimxi m id-dar sa l-iskola dan l -annar <Jean en-train il-marche de-la-maison jusqu ' à l ' école celui ci le-dernier> "Jean marche de la maison à l ' école ces derniers temps" 38. éanni qed jimxi mid-dar sa l - iskola bnal issa <Jean en-train il-marche de-la-maison jusqu ' à l ' école comme maintenant> "Jean est en train de marcher de la maison à l ' école en ce moment" 39. éanni miexi mid-dar sa l - isko l a bnal issa <Jean marchant de-la-maison jusqu ' à l' école comme-maintenant> "Jean est en train de marcher de la maison à l ' école en ce moment" 40. éanni miexi mid-dar sa l - iskola daz-zmien, gnax i l -karrozzi mhux qed jandmu <Jean marchant de-la-maison jusqu ' à l ' école celui-ci- le temps, car les-autobus ne-lui-pas en-train ils-travaillent> "Jean marche de la maison à l ' école ces temps-ci, parce que les autobus ne fonctionnent pas" Il signale, d' autre part, qu' i l y a des locuteurs pour lesquels une phrase telle que (38) serait inacceptable et pour qui seule la phrase (39) avec le participe est poss ible. De même ( 40 ) serait agrammaticale. Il y a donc des locuteurs pour qui la répartition des valeurs est parfaitement équilibrée entre les deux formes : i naccompli général et habitude res treinte pour la construction avec préverbe, concomitance pour le participe act if. Malheureusement, il ne donne aucune indica tion, même partielle, quant à la local isation géographique ou sociol inguistique de ce système. Enfin, il ajoute qu' une analyse du même genre serait nécessaire pour tous les verbes qui connaissent les deux formes de la construction préverbale et du participe actif. Il cite, à titre indicatif, le cas du verbe /téla?/ "partir" où la répar tition, dans son dialecte, n' est pas identique à celle qu' il connaît pour /mésa/ "marcher" mais à celle que connaissent les autres locuteurs dont le système vient d' être brièvement résumé
ci-dessus. Il cite dans son idiolecte :
les
exemples
suivants,
137 seuls
acceptables
21 41. l -ajruplan tielaq bnal issa < l ' avion partant comme-maintenant> "L'avion est en train de décol ler en ce moment" 42. l -ajruplan qed jitlaq kmieni daz-zmien "L'avion décolle tôt ces temps-ci"
Pour finir, je voudrais dire que Borg ( 1988 : 83 ) indique qu ' i l existe des locuteurs pour lesquels une construction avec préverbe /?ct/ SUIVI du participe actif serait acceptable. Malheureusement il ne donne pas ses sources. Par ailleurs, i l ne dit pas l ' avoir lui-même entendue, e t personnellement, elle m' est tout à fait inconnue. I l faudra donc vérifier cela un jour .
2.2.2. La forme à préverbe avec l es verbes de mouvement En étudiant de près mes corpus, je me suis rendue compte que les occurrences de la construction préverbale sont extrêmement rares (à peine 2% ) en comparaison du participe actif. Pour 200 ex. environ avec un participe, je n ' en ai relevé que 5 avec préverbe apparus spontanément dans des enregistrements, aux quels vi ennent s' ajouter 19 autres provoqués par un travail de traduction sur questionnaire, et 2 i ssus de documents écrits. Parmi les 5 ex. spontanés recueillis, deux sont employés avec un sens métaphorique du verbe auxilié, ce qui peut expliquer le recours à la forme à préverbe au lieu du participe actif : 1. /lssa ?ct-nlgi fI-oa/ <maintenant en-train-je-viens dans-elle> "Maintenant, je m ' en souviens !" ( locutrice de 25 ans de Mel li ena. Le même exemple se retrouve chez O. Calleja 1972: 1 1 9 )
21
L' emploi de ce verbe a été jugé peu naturel dans ce contexte par mon informatrice de La Valette. Elle lui préfère /séyycr/ "allant" .
138
La concomitance
Auxi liaires, particules verbales et préverbes
2. /dan I)ascb Üli ?�Ocd iOaddI-1) bi-z-zm�n/ "Il a pensé qu ' i l était en train de se moquer de lui" ( l ocu teur de 45 ans de San G il ian. La même construction se trouve dans le commentaire de Friggieri 1972: 177) Il faut également classer, avec ces deux exemples qui viennent d ' être cités, un autre énoncé où le sujet de la construct ion à préverbe est un inanimé , une maquette de bateau mentionnée plus haut dans le récit, et où l ' auxilié n' est pas non plus utilisé dans son sens propre de "marcher" , mais dans celui de "fonctionner" : 3. /ari-I) dan dan Issa ?ct-yimsi/ ( encore) maintenant" "Regarde-le celui-ci, il fonctionne ( locuteur de Xagnra à Gozo, 85 ans) Restent deux exemples, tous deux avec le verbe /I)arcg/ "sortir". Dans le contexte, un paysan de Nadur ( Gozo ) est en train d' expliquer à des étudiants comment, chez lui , i l fabri que les fromages que nous avions sous les yeux. Une ense ignante de Hamrun reprend les expli cat ions . Son intervention se situe donc dans l ' instance du commentaire général 1. /dan s;rns li ?ct-y;l)ng minn awn/ "C' est du petit lait qui sort par ici" 2. /kïf ?ct-taraw dan ?ct-y;l)r::>g I)afna mlnn-u/ "Comme vous voyez, de ça, i l en sort beaucoup"
beau
139
2.2.3. Le système d 'une Jeune l ocutrice de La Valette Le système qui a pu être dégagé à partir du quest ionnaire, auprès d'une jeune locutrice de La Valette, est encore diffé rent des deux autres décrits par Borg et il est valable pour tous les verbes énumérés au début de ce paragraphe. Il peut être résumé ainsi : Inaccompli général dans le discours ou le récit : c . préf. Habitude restreinte + instance du commentaire général : forme à préverbe Progressif : participe actif Les deux dernières valeurs qui apparaissent dans ce résumé proviennent des commentaires qu' elle faisait . Pour elle, l a différence entre deux phrases tel les que 1. /l-ayruplin ?ct-yldl)::>l f-I-ayrup;rtl < l ' avion en-train-il-entre dans-l ' aéroport> "L' avion est en train d' atterrir sur l' aéroport" 2. /l-ayruplin d�Qcl f -l-ayrup;rtl < l ' avion entrant dans-l' aéroport> "L' avion est en train d ' atterrir sur l' aéroport" réside dans le fait que dans le 2ème exemple on voit l ' avion pendant tout le temps qu ' i l atterrit , alors que dans le premier cas il s ' agit de la simple description d'un événement telle qu' on pourrait l a rencontrer dans un reportage. Dans l ' instance du commentaire général, pour les verbes de mouvement et d ' atti tudes, c' est donc la forme à préverbe qui est utilisée par cette locutrice, comme dans mon corpus, et non la c. préf. simple comme on l ' a vu p. 77-9 .
Le paysan, qui était poussé par un souci pédagogique différent, avait uti l isé le participe actif, entre ces deux interventions de l ' enseignante.
Voici mai ntenant quelques i llustrations d' habitude res treinte avec la forme à préverbe d' abord (ex. 1 à 6 ) , du conco mitant avec le participe ensuite ( ex. 7 et 8) :
Autant qu' on puisse en juger sur ce nombre réduit d ' occur rences, l ' utilisation de la forme à préverbe semble être réser vée , dans mon corpus, à deux situations particulières : un em ploi métaphorique du verbe auxilié et l ' instance du commentaire général .
1. /?ct-ylmsi / ?ct-y;Qng / ?ct-y;r?::>d I)afna da-I-ahhar/ / <en-train-il -marche en-train-i l-sort / en-train-il-dort beaucoup ce-le-dernier> "Il marche / il sort / il dort beaucoup ces temps-ci" 2. f?ct-yinzcl / ?ct-imar / ?ct-yitlao il-klabb I)afna da-lal)l)ar/
140
La concomitance
Auxi l iaires, particules verbales et préverbes
<en-train-il-descend 1 en-train-il -va 1 en-train-il-monte le club beaucoup ce-le-dernier> "Il descend 1 il va 1 il monte souvent au club ces temps-ci" 3. I?Et-y i dl).lu I).afna n9S da-I-al).l).ar f-I-ispt;lrl <en-train-ils-entrent beaucoup gens ce-le-dernier dans-l' hô pital> "Il entre beaucoup de monde à l ' hôpital ces temps-ci" 4. lil-I).at ?Et-yÉrsa? \:lafna IEyn is-satt da-I-a\:ll).arl "Le poisson s' approche beaucoup de la côte ces temps-ci " 5 . I?ct-yigi I).afna id-d�r da-I-al).l).arl <en-train-il-vient beaucoup la-maison ce-le-dernier> "Il vient souvent à la maison ces temps-ci" 6. l?ct-iOaddu I).afna kar8cci minn di-t-tr&J? da-I-al).l).arl cette-la-rue de voitures beaucoup <en-train-elles-passent ce-le-dernier> "Il passe beaucoup de voitures dans cette rue ces temps-ci" 7. IguzÉ r&J?Ed issal <Joseph dormant maintenant> "Joseph est en train de dormir maintenant" 8. IOaddcyyin I).afna karr8cci minn di-t-tr6? bl).aIissal <passant ( pl . ) beaucoup voitures de cette-la-rue comme-main tenant> "Il passe beaucoup de voitures dans la rue en ce moment"
2.2.4. Le progressif dans le discours
1. Reqsin l ejn l -elezzjoni mhux bezgnanin l i riesqa l -gurnata ta ' l -ezami ( I l -Mument 15 . 02. 1987 , p. 6)
( pl . )
vers
les-élections
approchant (f. ) la-journée de l ' examen>
<presque toi aussi passant ( f . ) de processus créatif pendant que en-train-tu-l is la-poésie> "Toi aussi tu es presque en train de passer par un processus créatif quand tu l i s de la p oési e " 3. IOidt- I-u da-I-kÉlb taO-t-tali m6si m�o-na ar�-I).I avec-nous marchant de-le-untel ce-le-chien <j' ai-dit-à-l ui regarde-l ui> "Ce chien d ' untel, il est en train de "Je lui ai dit marcher avec nous, regarde-le !" 4. I�ra �ra marIyya taO p�ntu �lla ib6rEk dIga t610a bi-l ftayyar u al).na o�d-na nizlÎnl 0 , 250-1 ) "Croyez-m oi , je dors à moitié ! " 6. [mari féI sélra ? >altlu sélra ittiec >alla j�n ukol sêir ittiec l ( Stumme 1904 : 39, 1 . 9 ) <Marie où allant (f. ) ? el le-a-dit-à-lui allant (f. ) le mariage ! il -a-dit-à-elle moi aussi al lant le-mariage> "Marie, où vas-tu ? Elle lui a dit : "Je vais au mariage". Il lui a dit : " Moi aussi je vais au mariage" (i ls sont en route)
2.2.5. La référence au futur
Pour ce qui est du corpus spontané et de la littérature, la valeur dominante est partout très nettement celle d ' un inac comp l i concomitant. La référence peut être l ' acte d ' énonciation lui-même, donc le présent du locuteur . Le participe actif se rencontre aussi bien en énoncé affirmatif qu' interrogatif :
141
ne-lui-pas
apeurés
que
"Nous sommes en train d' approcher des élections, pas effrayés que le jour de l ' examen approche" 2. Ikw�zi int uk811 °adÉ:yya minn pr::lcÉ:ss krcattIv wa?t li ?ct ta?ra l-p::lcz iyyal
a) Le participe actif peut être utilisé pour exprimer concomitan ce avec un autre événement situé dans l ' avenir 1. ly6na niSt6? nar�-oa gÉyya lara minn sbtL3.ndl en-arrière (f. ) venant je-vois-elle je-souhaite <moi Ecosse> " Moi, j ' aimerais la voir en train de revenir d' Ecosse ! "
la
de
h) D e plus, contrairement à l a construction périphrastique avec I?ctl, la valeur de futur immi nent est fréquente pour le parti cipe actif, surtout pour IsÉyycrl "allant" ( qui a d ' ai lleurs donné naissance à une parti cule de futur ) et IgEyl "venant" . Cet emploi est possible e n proposition indépendante ou en
142
Aux iliaires, particules verbales et préverbes
subordonnée complétive . L' imminence peut se situer par rapport au présent du locuteur comme par rapport à un moment du passé ( ex. 3 et 5) : 1. Iy�n s�yyra 1-?udd6s1 <moi allant (f. ) la-messe> "Je vais à la messe" ( elle est encore à la maison) 2. Anna sejrin ié-éirku mà ? (O. Cal leja 1972 : 6 ) <nous al lant ( p l . ) le-cirque maman ? > " O n v a a u cirque maman ?" 3. Isl)In s�mou l-al)bar l i gcyyln yilaObu l-guv�ntus ?al.1-I-il "Quand ils ont entendu la nouvelle que la Juventus allait venir jouer , ils m' ont dit . . . " 4. Il)a-tlll)?-u 1 l)�nri - gcy °alfy-yal "Tu vas le rencontrer Henri ? - I l vient me chercher" 5. Il)sibt-ck mintIs g�yyal <je-pensai-toi ne-toi -pas venant (f. » "Je pensais que tu ne viendrais pas" 6. Idiina ° andu raOay bi-l-fanal l)6rcg l)a-y;l)r:)g minn g:::> l-oarl "Celui-ci, il a un berger avec un fanal sur le point de sortir, qui va sortir de la grotte" 7. IdWa wara n:::>f siniirl ( Q ) <partant ( f . ) après midi> "Je pars cet après-midi" 8. If sl)In d6l)d il-l�ylal ( Q ) "A que lle heure rentres-tu ce soir ?" 9. l°;ida rbda ° and ;mm-il ( Q ) <demain dormant (f. ) chez mère-moi> "Demain je dors chez ma mère" c) Le participe actif peut aussi être situé dans un futur modal , au moyen de l ' auxiliaire li k.1nl "il est", dans des subordonnées complétives, circonstancielles de temps ou dans la protase de phrases conditionnelles :
1. ImIn ik.1n m6si minn wara l)ayt da?s�kkl
La concomitance
143
"Celui qui passerait par derrière un mur de cette taille" 2. Meta l-qamar ikun immejjel juri l i jkun gej il-maLtemp ( Aquil ina 1972: 520 , prov o 13) " Quand la lune est de biais, ça montre que le mauvais temps viendra" 3. Im�la sl)In sc-tti-o;m-I-u sl)In al)na nk.1nu scyyrlnl <donc quand FUT-tu-donnes-eux-à-lui quand nous nous-sommes allant (pL » "Alors quand les lui donneras-tu? Quand nous nous en irons !?" 4. Iwa?t illi ikQnu rc?dln f dak l-istéss l)In yitblddlul "Pendant qu ' ils seraient en train de dormir, au même instant ils se transformeraient" 5. Im�ta tkun g�yya l-f�stal " Quand la fête viendra" 6. [ sl)ên tkûn sêlral ( Stumme 1904:55 , 1. 22) "Et si tu passais près d ' un champ"
2.2.6. La référence au passé a) Comme la construction à préverbe ou particule, le progressif exprimé par le participe actif peut aussi se référer au passé. e' est le cas dans les relatives et les complétives d' énoncés situés dans le passé : 1. lu sadattant n;ira tcmp ikl)al t6la? minn g:::> l-punéntl <et entre-temps je-vois temps bleu partant de dedans l ' ouest> "Et entre temps je voyais le mauvais temps qui était en train de partir de l ' ouest" (récit) 2. Imalli yilml)u °asfQr °addÉ:y fI zmgn il-pass;ir il-kaccatQri k6nu yiftl)u n-n;irl "Dès qu' ils apercevaient un oiseau en train de passer au temps de la migration, les chasseurs ouvraient le feu"
144
La concomitance
Auxi liaires, particules verbales et préverbes "
,
,
, ' 22 ' 3. Irayni8-k pr5pyu di8Qd awm:kk gr;wwa l-istudy5s n}? sa?ay-k m�si kw&zi norm&lil <nous-vÎmes-toi proprement entrant ici -ainsi dedans les studios sur pieds-toi marchant presque normal> "Nous t' avons vu proprement en train d' entrer ici dans les studios sur tes pieds, marcher presque normalement" 4. lallGra méta nQarsu lr;y l-iSkaffa u naraw li I-Q:)bz r6sa? °a-t-tm�m bnt immGr °and il-furn&ral ( l , 11-3) "Alors quand nous regardions vers l ' étagère et que nous voyions que le pain était en train d' approcher de la fin, j' allais chez la boulangère" 5. ISQln bnt nara-o:)m sr;yyrln r;kk nI? pâlal "Quand je les voyais en train de marcher comme ça sur une pelle"
b) Le participe actif peut également être précédé de l ' auxi liaire du passé Iki8n/, dont l' ut ilisation est possible en proposition principale ou indépendante comme en subordonnées : 1. In-nies kienu reqdin ( O . Cal leja 1972 : 24 )
"Ces filles étaient en train de dormir dans un seul lit, et dans la chambre où elles dormaient, il y avait un autre lit" 3. II-ingiltÉrra ittÉnda li k�nr;t gÉyya l-gwÉrral
22
La forme admise par les dictionnaires est "proprju" , mais, si elle s' écrit , elle n' est que très rarement prononcée ainsi. Voir Fenech ( 1978 : 33 ) .
145
"L' Angleterre s' était rendu compte que la guerre était en train d' approcher" 4. Iwa?t li ki8n m�si bi-ca Qâd-oa g8 °aPal "Pendant qu' i l était en train de marcher avec elle, il l ' a emmenée dans un champ"
2.2.7. Le parfait en composition avec deux adverbes Le participe actif précédé des adverbes IOad-1 "encore" + pron. suff. et, éventuellement, Ikr;mml " combien" ou Iklfl "comment " , dans cet ordre, tout comme avec l es trois autres formes verba les qui viennent d ' être étudiées , peut également servir à ex primer le parfait. Dans ce cas la tournure est encore très mar ginal e, mais très expressive. Elle m ' a été commentée comme rap prochant encore plus du présent du locuteur. Voici les 2 seuls ex. que j ' ai relevés (tous 2 écrits et sans le 2ème adverbe ) 1. hu uko L L gnadu gej m i L l -funeral (O. Calleja 1972: 54) "Lui aussi vient tout juste de rentrer des funérailles" 23 2. jien kien gnadni gej minn Mal ta (A. Calleja, 1982: 1 7 ) <moi il -était encore-moi venant de Malte> "Moi, je venais juste d' arriver de Malte"
2.2.8. L'expression de la simul tanéité Nous avons vu (p. 88-9) qu' il existe une tournure syntaxique particulière pour exprimer la simultanéité de deux procès ou états : pronom personnel indépendant + conjonction de coordi nation lui " et" + c. préf. Pour les verbes de mouvement et d' attitudes, on ut ilise le participe · actif. Aquil ina ( 1965: 221 ) il n'en signale aussi la possibi lité d ' utiliser l a c. préf. est apparu qu' un seul exemple ( écrit, dans une critique litté raire ) dans mon corpus
23
Sic. En principe , selon mon informatrice de La Valette, l ' au xiliaire aurait dû s' accorder . Elle a trouvé cela surprenant sous la plume d ' un écrivain.
146
Auxiliaires, particules verbales et préverbes
La concomitance
1. huma u jorqdu jiftakru fix-xewqat tagnhom ( Friggieri 1972: 186) <eux et ils-dorment ils-se-souviennent dans-les-désirs de-eux> "Pendant qu' i ls dorment ils se souviennent de leurs désirs" Comme pour le syntagme composé avec la c. préf. , la simul tanéité peut se situer en référence au présent ou au passé. La référence au futur n' a pas été relevée, mais elle est possible. 2. /inti u n6zla minn taO kaIips ° a-r-ramla/ "Quand tu descends de Calypso vers Ramla" 3. /al)na u geyyIn kÉlli l-klIns8r ta mar u l)ar ig-I-i bll-u/ <nous et venant ( p l . ) j' avais le-cleanser de M. et il-sortit à-moi tout-lui> "Comme nous venions, j' avais le démaqui l lant de Marie, et i l m ' a entièrement fui " 4 . /ahna u t d °In rayna dIk bi manka ?Is-Oa Id/ <no�s et montant (pl. ) nous-vîmes cel le-là avec manche comme elle main> "Comme nous montions, nous avons vu cel le-là avec un manche comme une main" 5. /da-I-05du al)na u seyyrIn il-?;ila rayt caPa sabIl)a/ "Ce matin comme nous allions à Qala, j ' ai vu un beau champ" 6. /oÛwa u � 6si fi-t-tr6? wa?Oat-I-u cicra/ û udîehel, mâr fi lbiep talkantîna] ( Stumme, 1904 : 35, 1. 9 ) "En entrant, il est allé à la porte des cuisines" /
/
2.2.9. L 'hab itude restre inte Dans un certain nombre de cas, pas très fréquents dans le corpus, mais chez tous les l ocuteurs, le participe actif des verbes /mar/ "aller" et /g�/ " venir" peut avoir une valeur d' habitude restreinte :
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1 . /il -kasÉtts taO martfn fI-o:)m geyyIn beyn awn u d-dar ÜO-na si tlett darb6U "Les cassettes de Martine , ça fait longtemps qu' elles circu lent entre ici et notre maison, environ trois fois" 2. /l-oawdsln m-oad-nI-s imm6rru marsalf6rn ekk l ibsln kIf g� spÉci seyyra l-bal)ar/ "Nous les Gozitains, nous n' allons plus à Marsalforn habillés co me 'a ve�ait, comme si tu llais à ! a mer" � � S 3 . /[lywa] l)ald kbar taO gam�m geyyIn minn HP i l-bal)ar fI zm�n il-gam6m/ "Oui, d ' énormes flots de tourterel les viennent par dessus la mer à la saison des tourtere lles" /
2.2.10. L ' inaccompU généraL Le participe d ' inaccompl i cas quand le Il peut aussi
actif peut également être utilisé avec une valeur général , même dans les proverbes . C' est souvent le part icipe n ' est pas employé avec son sens propre 25 s' employer dans l ' instance du commenta ire général
gnan-nizLa ( Aquilina 1972:339, provo 93) "La vallée descend toujours" 2. Dejjem sejrin gnaU -agnar ( ibid. p. 454, provo 3 ) "Nous allons toujours vers le pire" 3 . IZ-zmien gnaddej u L-mewt riesqa dejjem ( ibid. p. 468, provo 99 ) "Le temps passe et la mort approche toujours" 1 . IL -wied dejjem sejjer
24
/
Le mot standard pour "oui" est /Iva/.
25 Le même phénomène se produit en arabe marocain de Fès ( Caubet 1989: 687 ) .
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4. Hekk sejra id-dinja ( Fr iggieri 1 986 : 62)
"Ainsi va le monde" 5. /dln l-id�ya taO k::mservaccy:5ni ?alb il-pr:)gr�ss par i passu mesyIn flimk�n/ "Cette idée de conservation au cœur du progrès, de pair , ils vont ensemble" 6. /per8 k�nu yaOmlu ?Ts-u 1).8fra kbIra kbfra kbIra kbIra t�IOa ekk spâcyu/ <mais ils-étaient ils-font comme-lui trou (f. ) grande grande grande grande montant ( f . ) ainsi spacieuse> "Mais ils faisaient comme un très très grand trou qui montait comme ça, spacieux" 7. /k�net uzanca géyya mil-l-gr�gi/ <el le-était usage venant (f. ) de-les-Grecs> "C' était un usage qui venait des Grecs" 8. /issa aw géyya l-kcIna/ <maintenant ici venant (f. ) la-cuisine> "Alors, ici, vient la cuisine" 9. /dïn il -mitl).na g�yya min-n-nâl).a taO-l-mâma t�O-i/ "Ce moulin vient du côté de ma maman"
2. 2.11. Empl ois modaux Le participe actif peut être employé en dépendance après des auxiliaires modaux et ceux marquant l ' inchoatif ou la tranche 6 centrale du procès , 2 au lieu de la c. préf . comme avec les autres auxiliaires. C' est la règle chez tous mes informa- teurs avec /béda/ "commencer", /ba?ao/ "continuer à" ( sens premier "rester" ) , /iss8kta/ "continuer ". Par contre mon informatrice de La Valette considère que son emploi après /?abad/ "se mettre à" ( sens premier "saisir") et /k8mpla/ "continuer" est incor-
26 La variété d ' arabe dialectal ( marocain de Fès ) décrite par Caubet ( 1989: 688) présente le même emploi après l ' auxiliaire bqa "rester, continuer".
La concomitance
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rect alors qu' il est utilisé par d' autres locuteurs (il f igure, en outre, dans le dictionnaire d' Aquilina ( 1 987: 672) . Je n e suis pas en mesure d e dresser une carte d e l ' exten sion géographique du participe actif employé après ces deux derniers auxiliaires, et je ne pourrai indiquer que ceux de mes informateurs qui l' ont utilisé : un locuteur de Kerèem à Gozo pour /?abad/ ; un professeur d ' université originaire de Birkir kara et l ' écrivain o . Calleja pour /k8mpla/. En outre, un vieil homme de Xagnra à Gozo l ' emploie aussi après /réma/ "se mettre à" ( sens premier "jeter" ) . Aquilina ( 1987 : 465 ) signale également l e même emploi avec /I).abat/ "to begin, commence, try (to do s. th. , indicating a tentative effort ) " ( sens premier "frapper " ) et donne l ' exemple "na bat gnaddej gna l l -anjar, imma rega' mar L ura, suivant there was sorne improvement but he relapsed" . Aucun des verbe s d e mouvement considérés ici n' est apparu dans mon corpus, oral comme écrit, après cet auxil iaire. Voici quelques exemples 1 . imissek tkun rieqda dak i L -nin ( Ebejer 1985 : 17 )
"Tu devrais être en train de dormir en ce moment" 2. [ béda géT likel 'oddfem ilmistidnînl ( Stumme 1904: 42, l. 35) "La nourriture se mit à arriver devant les invités" 3. /ycI).8d-I-:Jk il-barmÎl taO-I-k8nbs tâl).taf 1-�I).:Jr tibda n�zd/ "Il te prend le seau de ciment, tu attrapes l ' autre, tu te mets à descendre" 4. /oaml-u fi-l-bUt u béda m�si céklcm céklcm lcyn id-dâr/ "Il l ' a mis dans sa poche et il s ' est mis à marcher tout dou cement, tout doucement vers la maison" 5. /all Ora béda I).�rcg I).âfna dul).l).ân/ "Alors il s ' est mis à sortir beaucoup de fumée" 6. /u kïf wasal ins8mma ?al-I-u fb?aO t�lao/ <et comment il-arriva enfin il-a-dit-à-Iui continue montant> "Et en arrivant, enfin, il lui a dit : "Continue à monter !" 7. /allOra ba?Ou ° addcYYIn/
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8. Iklf tlb?aO d6l)Ja cmm labirintl
"Comme tu continues à entrer, il y a un labyrinthe" 9. lu ba?aO sÉyycr ° and l-imi).allcfl <et i l-continua allant chez le-juge> "Et il a continué à aller chez le juge" 10. Fredu jibqa' sajjem (O. Calleja 1972: 49 ) "Fred continue de jeûner" I l . 10as ya?bad h6rq'V "Parce qu' il se met à sortir" 12. u ssokta m iexi ftit 'il quddiem ( Friggieri 1986: 139) <et i l-continua marchant un-peu vers devant> "Et il a continué à avancer" 13. lik::)mpli sÉyycr ckk bi-I-prcp::lZisYAnsl "Il continue d' avancer comme ça avec les prépositions" 14. se jkompl i tiela' sa fuq nett ( O . Cal leja 1 972: 123) "Il continuera de monter jusqu ' en haut" 15. IrÉma gcy iS-s::)o::>l/ "Le travai l s' est mis à venir"
2.2.12. La négation Comme pour la construction avec préverbe ou auxiliaire, la négation du participe se forme avec la particule négative Imousl l itt. "ne-Iui-pas" , mais toujours accordée en genre, nombre et personne avec le sujet : 1. IQslbt-ck mintIs gÉyyal
<je-pensai-toi ne-toi-pas venant ( f . » "Je pensais que tu ne viendrais pas"
2.3. Conclusion D. Cohen 0984 : 28 1 ) faisait remarquer que le type de dialectes dont le maltais fait partie "est celui où l ' évolution du système paraît amorcée seulement. Les préverbes constituent des marques très largement facultatives . " L' étude du corpus a permi s de montrer qu' elles sont devenues obligatoi res en
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maltais contemporain, sauf rares exceptions comme l ' énoncé interrogatif ou les verbes modaux. Ce dialecte arabe est en train d' évoluer vers un système où les formes du progressif empiètent de plus en plus sur le domaine de la c. préf . , celui de l ' inaccompl i général, qu' il s' agisse de la forme à préverbe ou particule, ou du participe actif. On a même remarqué que le participe actif s' employait dans l' instance du commentaire général pour les verbes de mouvement et d' attitudes. Le maltais n ' en est cependant pas encore au stade où les deux formes s' opposent sur la base d ' un indi catif à un modal. Mais, comme il a été dit dans la conclusion de l' étude sur la forme à préverbe , aucune forme de remplacement pour l ' expression de la concomitance n' apparaît. Il faut remarquer aussi que le participe actif, sauf dans le cas marginal où il est précédé d' adverbes spécifiques , ne peut jamais exprimer le parfait en maltais. Ce n' est pas le cas dans de nombreux dialectes arabes, par exemple en marocain de Fès ( Caubet 1 985-6 ) , à Tunis Musulman ( Singer 1984 ) , en tuni sien de la région de Sfax ( Simeone-Sene lle 1985-6) en hassa ' nlya (Tauzin 1985- 6 ) , au Liban ( Wild 1964 ) , en égypti �n du Caire ( Doss 1985-6 ) , en arabe soudanais de Khartoum (Ahmed Ali ' Mil ler 1985-86 ) . Enfin, il n' est peut-être pas inutile de faire un bref récapitulatif de toutes les expressions possibles du parfait abordées dans les chapitres précédents. Le cas le plus fréquent est l ' util isation de la c. suff . , accompagnée ou non de mar queurs temporels. Les diverses nuances de parfait sont l iées à l' instance de l' énonciation et à certaines classes sémantiques de verbes . P ar ail leurs , l ' emploi d' adverbes non temporels 10adl "encore" et Ikcmml "combien" ou Ikïfl "comment" , dont le premier marque sémantiquement l ' incidence , commence à pénétrer dans le système verbal . Les deux adverbes se présentent tou jours dans un ordre fixe et perdent alors leur sens propre pour former une unité avec le verbe qu' i ls précèdent directement et pour expli citer un parfait temporalisé. Ils peuvent précéder toutes les conjugai sons , avec une forte majorité de c. suff. toutefois. Les formes d' inaccompli, c. préf. , forme à préverbe et participe actif, sont encore du domaine de l' expressivité. Enfin, on aperçoit se dessiner, avec l ' auxi l iaire Ilaha?/ un ' nouveau parfait du récit qui n' est pas stabil isé dan� le système chez certains locuteurs il existe toujours une importante restriction d' occurrence, l ' incompatibilité avec des sujets inanimés .
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Auxiliaires, particules verbales et préverbes
Le système composé des c. suff. et préf. , de la forme à particule ou préverbe et du participe actif peut être résumé, sans tenir compte des évolutions amorcées, dans le tableau suivant : accomp L i
gén é ra l c on c om i t ant
c. suff.
I I I . L'AUXILIAIRE /?a:ad/ - /y�?·od/
i nac c omp L i
c.
pr éf .
/?ï;j ° c d/ ou / ? c t / + c . p . ( ou part i c i p e act i f , v . de mo u v ement )
ET L'EXPRESSION DES SOUS-ASPECTS DURATIFS
Remarques préliminaires D. Cohen a toujours rejeté la notion de durée comme étant pertinente pour la définition de l ' aspect. Néanmoins, il recon naît qu ' i l peut y avoir, "très rarement, une opposition quanti tative de durée dans les aspects" ( séminaire EPHE du 9. 12. 1983 ) . Il s' est d' ailleurs attaché à le démontrer pour certains états de l ' hébreu et de l ' araméen ( D . Cohen 1984 ) , qui ont utilisé principalement à cette fin le participe actif avec ou sans verbe "être" pour auxi liaire. Le maltais a également développé une opposition durative dans les deux aspects accompli et inaccompli, mais au moyen d' autres éléments que l' hébreu ou l ' araméen, à savoir un auxiliaire /?aO ad/ qui a plusieurs sens comme verbe plein "s' asseoir ! ; rester 2 ; se tenir debout ; s' arrêter ; habiter" .
1 Dans le sens de " s ' asseoir" , /?aOad/ est aujourd'hui l e plus souvent ( ce n' était pas encore le cas à l ' époque des textes recueillis par Stumme 1904) suivi de son participe actif au féminin, précédé de la préposition /bil "avec" et de l ' article, ce qui est une manière courante d' adverbiali ser un substantif en maltais : /?aOad bi-l-?Éoda/ "Il s' est assis" Le verbe , dans ce sens, est concurrencé par un autre verbe d' origine italienne : /p;gga/. 2 Le néo-araméen occidental connaî t un verbe de sens "rester"
pour l ' expression du duratif : "la durée prolongée sans aucune valeur inchoative est exprimée normalement par le verbe ismer dont le sens premier est "rester" . " ( D . Cohen 1984: 486 ) .
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Auxi l iaires, particules verbales et préverbes
Il peut apparaître aux deux conjugaisons, suivi de la c. préf . d'un verbe auxi l ié. D . Cohen (voir les considérations génér ales introduisant la 2ème partie p. 43 ) a souligné l ' importance qu' i l y a aussi à considérer les facteurs morphologiques dans la constitution et la fonction des auxi l iaires. En voici une c' est en effet le même verbe, illustration supplémentaire mais à une forme différente, celle du participe actif, qui , nous l ' avons vu, a fourni l ' expression de la concomitance dans l' inaccomp li. La périphrase ainsi formée constitue par el le-même l ' ex pression de la durée et n' est en aucun cas liée à une éventuel le nature sémantique durative des procès, ainsi que D . Cohen ( 1984 : 324 et 33 1 ) l ' a suffisamment répété pour l ' hébreu et l ' araméen. Elle peut caractériser toutes sortes de verbes , à l ' exception toutefois de lui-même et des verbes d' état pour lesquels je n ' ai pu obtenir aucun exemple. Il faut cependant remarquer que lorsque le pseudo-verbe "avoir" est employé, en composition avec le verbe "dire" , dans le sens figuré de "se quereller", il peut être auxi lié par /?aOad/ ( alors invariable, voir p. 418-20 ) : 1. /y6?o::>d ik6Wa 5 tOrd/ ( Q ) "El le n' arrête pas de se quereller" il permet aussi Le duratif recouvre diverses nuances bien de souligner la multiplicité d ' un procès, sa répétition, que la durée de l' action, ou, plus rarement, l ' effort nécessai re pour l a mettre en œuvre ( qui impl ique nécessairement une durée ) . On souligne par l ' emploi de la périphrase que le procès n' est pas instantané. Il n' est pas facile de rendre en français ce sous-aspect que notre langue ignore. Je m ' efforcerai de pallier cela, à chaque fois que possible, par des moyens lexicaux. Lorsque, parfois, j ' ai conservé l ' un des sens propres de l ' auxiliaire ( "rester " ) dans la traduction, ce n ' est pas parce qu' il le conserve effectivement, mais parce que je n ' ai pas vu d' autre moyen ( peut-être à tort ) de faire passer la nuance en français. Voici des exemples pour chacune des trois valeurs énoncées ci-dessus :
Le duratif
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2. /wara ?aOdu i°f:ddU-1). u iO ayytu m6o-u h. adU-I-u s-sf:rd{P/ ( II , 14-5 } "Après qu ' ils l' eurent menacé à plusi eurs reprises et qu' il s lui eurent crié après, ils l u i prirent le coq" 3. /méta inti t6?o::>d tigi tigb::>r il-bayd 51).1n tr1d int mOus séwwa/ "Quand tu n' arrêtes pas de venir ramasser les œufs quand tu le veux toi , ce n' est pas bien" 4. /Imma li n6?o::>d nippr 5va nIktf:b bi-Is6n 61).::>r biâs nikbmphi , , mac l-awturi taO-I-payylzi 1-::>1).rayn mOIS val laptna/ <mais que je-m ' assois j' essaie j' écris avec-l angue autre pour je-concurrence avec les-auteurs de-les-pays les-autres ne elle-pas "val lapena"> "Mais que je m' efforce d' essayer d' écrire dans une autre langue pour concurrencer les auteurs des autres pays, ça ne vaut pas la peine" Ces valeurs, au moins pour les deux premières, sont celles exprimées par le participe ou l e composé participial dans ( principalement Néhémie pour certains textes de la Bible l' hébreu et Esdras et Daniel pour l ' araméen) ainsi que D. Cohen (1 �84: 317-328 ) , à la suite de M. Cohen ( 1924: 145 } , l ' a mis en éVIdence. Or si l ' on regarde les traductions maltaises des versets cités , pour l' hébreu bibl ique, 3 par D . Cohen, dans lesquels le duratif apparaît, on s' aperçoit qu ' i l n' est jamais rendu par la périphrase avec /?aOad/. Il l ' est soit par une simple c. suff. , soit par un auxi liaire inchoatif, comme dans
3 Il paraît difficile de tenir compte de l ' araméen biblique dans la comparaison de son système verbal avec celui du maltais. En effet, l ' opposition aspective y repose sur une base �utre �ue celle d' une opposition entre accompli et inaccompli, a saVOIr une opposition aspect ive entre un duratif et un non duratif. En hébreu, comme en maltai s, l ' opposition durative n' est qu 'une subd ivision de l ' opposition fondamentale entre accompl i et inaccompl i .
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Le duratif
Aux i liaires, particules verbales et préverbes
4 soit même, une fois, par un certaines traductions françaises, auxil i aire signifiant "continuer à". Cel a ne remet pourtant pas en cause l ' existence d' une opposition durative en maltais, et il faut bien plutôt voir dans ces traductions le résultat de la méconnaissance de cette valeur en hébreu malgré les remarques 5 de M. Cohen par exemple, ou, plus près de nous, les travaux de D. Cohen, méconnaissance qui n ' a pu qu' être alimentée par langues des les dans sous-aspect duratif d ' un l ' absence traductions occidentales que les traducteurs maltais n ' ont pas manqué de consulter, même s' ils ont travaillé directement à partir de l ' hébreu. Enfin, pour être complet, i l convient de signaler que l ' auxili aire /?aOad/ n' est pas absent de la traduction maltaise de la B ible. On en relève même un exemple dans Néhémie, alors que la forme hébraïque correspondante est un s imple participe pluriel, non duratif, puisqu' i l n' est pas précédé de l ' auxiliaire wa-Y8hI(y). Les traducteurs maltais ont peut-être senti là une nuance durative que l ' hébreu n' avait pas éprouvé le besoin d' exprimer dans la forme verbale : 5. Gozwè, Bani [. .] qag1i.du jg1i.aLlmu L-Ligi L iU-popLu ( 817 ) "Yéshoua, Bani, [ , . . 1 expliquaient la loi au peuple" (TOB ) .
sens
4
à
Le verbe /qa"ad/ dans les dialectes arabes a souvent l e 6 d ' un inchoatif lorsqu ' i l est utilisé comme auxil iaire. I l
D. Cohen ( 1984: 323) cite l ' exemple de Esdras 4/4 dans l a traduction d e la Bible d e Jérusalem. Mme Galand-Pernet m ' a fait remarquer qu ' i l s' agit aussi pour les traducteurs occidentaux d' une tentative de rendre l ' idée de la durée par un auxiliaire inchoatif, qui ne marque pas unique ment de façon étroite le début d ' un procès, mais également sa poursuite, donc s a durée. 5 Il disait ( 1924: 145 ) à propos de la forme hébraïque du duratif, qu' elle exprimait "une action qui prend un certain temps à s' exécuter ou qui peut se décomposer en p lusieurs actes répétés". 6 "Se mettre à" est, avec "continuer à" , un des sens revêtus par /qa"ad/ dans bon nombre de dialectes maghrébins , ce qui n ' est jamais le cas en maltais. Voir par ex. Beaussier ( 1958: 816a) pour l e premier sens et Boris ( 1958: 502) pour le second.
157
faut souligner que cela n' est pas le cas actuellement en maltais pour /?aOad/, qui peut lui-même auxilier, lorsqu ' i l a une valeur de procès multiple, un auxiliaire inchoatif, ainsi que le montre l ' exemple suivant, forgé à ma demande par mon informatrice de La Valette : 6. /kull méta mm6rru naraw-oa l-isptâr t6?°:Jd ta?bad tÎbki/
"A chaque fois que nous al lons la voir à l ' hôpital, elle se met tout le temps à pleurer" .
I l n' est cependant pas impossible, même s ' il n ' y en a aucune attestation, que /?aOad/ ait pu aussi avoir ce sens inchoatif à une certaine époque de l ' histoire du maltais et avoir ensuite évolué vers une expression de la durée. Cette l ' inchoativité évolution sémantique n ' est pas surprenante représente le début de cette durée et implique souvent l e prolonge �ent d e celle-ci. O n le verra e n maltais pour l ' auxi l i aire /bcda/ "commencer" et D . Cohen ( 1984: 485 ) en donne un exemple pour le néo-araméen de Ma"lma à propos de deux auxiliaires inchoatifs *q"y ( de sens premier "s' asseoir") et *tqn : "signalons enfin la phrase suivante où les deux formes semblent contraster de façon significative, dégageant pour *q"y u!]e valeur de pUEe durée : hinn qa"yin ?itqen "aLma tyiUun sohrin grapp-s-soba "pendant ce temps7 ( litt. "eux assis" ) , les gens se mirent à Utqen ) venir pour passer l a soirée avec les vieux". " Ce duratif ne doit pas être confondu non plus avec l a notion accessoire d e temps marquant l a "tranche centrale d u procès" : "continuer à " , qu' exprime aussi /qa"ad/ dans certains "Continuer à" implique effectivement une dialectes arabes. durée, mais de nature différente puisqu' elle n' en marque qu' une la poursuite d ' un procès déjà entamé. Nous verrons partie qu' il y en a plusieurs express ions en maltais. Tous les infor mateurs ont bien insisté sur le fait que la périphrase avec /?aO ad/ n' implique en rien que le procès ait pu commencer avant
7
C' est moi qui souligne.
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L e duratif
Auxil iaires, particules verbales et préverbes
le moment de l ' énoncé (ce qui est le cas avec "continuer à" ) et qu' i l se poursuivra après. Un énoncé où les deux constructions sont employées permettra de mettre en relief cette différence. Dans le contexte, des pirates poursuivent une jeune fille qui réussit à se cacher dans une grotte dont l ' entrée est preste ment obturée par la toile d ' une araignée : 7. /alli1ra ba?Ou °addcyyIn ma-?aOda-s ifhtSu fI-oa/
"Alors, ils ont continué d' avancer, chercher dedans ( dans la grotte ) "