Études de politique fiscale de l’OCDE no 2
Mesurer les charges fiscales QUELS INDICATEURS POUR DEMAIN ?
ORGANISATION D...
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Études de politique fiscale de l’OCDE no 2
Mesurer les charges fiscales QUELS INDICATEURS POUR DEMAIN ?
ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES
ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES En vertu de l’article 1 er de la Convention signée le 14 décembre 1960, à Paris, et entrée en vigueur le 30 septembre 1961, l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) a pour objectif de promouvoir des politiques visant : – A réaliser la plus forte expansion de l’économie et de l’emploi et une progression du niveau de vie dans les pays Membres, tout en maintenant la stabilité financière, et à contribuer ainsi au développement de l’économie mondiale. – A contribuer à une saine expansion économique dans les pays Membres, ainsi que les pays non membres, en voie de développement économique. – A contribuer à l’expansion du commerce mondial sur une base multilatérale et non discriminatoire conformément aux obligations internationales. Les pays Membres originaires de l’OCDE sont : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Canada, le Danemark, l’Espagne, les États-Unis, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Islande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni, la Suède, la Suisse et la Turquie. Les pays suivants sont ultérieurement devenus Membres par adhésion aux dates indiquées ci-après : le Japon (28 avril 1964), la Finlande (28 janvier 1969), l’Australie (7 juin 1971), la Nouvelle-Zélande (29 mai 1973), le Mexique (18 mai 1994), la République tchèque (21 décembre 1995), la Hongrie (7 mai 1996), la Pologne (22 novembre 1996), la Corée (12 décembre 1996) et la République slovaque (14 décembre 2000). La Commission des Communautés européennes participe aux travaux de l’OCDE (article 13 de la Convention de l’OCDE).
Also available in English under the title: TAX BURDENS Alternative Measures
© OCDE 2000 Les permissions de reproduction partielle à usage non commercial ou destinée à une formation doivent être adressées au Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC), 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris, France, tél. (33-1) 44 07 47 70, fax (33-1) 46 34 67 19, pour tous les pays à l’exception des États-Unis. Aux États-Unis, l’autorisation doit être obtenue du Copyright Clearance Center, Service Client, (508)750-8400, 222 Rosewood Drive, Danvers, MA 01923 USA, ou CCC Online : www.copyright.com. Toute autre demande d’autorisation de reproduction ou de traduction totale ou partielle de cette publication doit être adressée aux Éditions de l’OCDE, 2, rue André-Pascal, 75775 Paris Cedex 16, France.
AVANT-PROPOS Cette publication est la seconde d’une nouvelle série d’études de politique fiscale lancées par l’OCDE. L’objet de cette série est de diffuser auprès d’un public plus large des travaux effectués par le Secrétariat de l’OCDE dans les domaines de la politique et de l’administration fiscales. Au fil des années, afin de répondre à la demande de plus en plus forte des décideurs, divers indicateurs ont été mis au point pour évaluer la charge fiscale. La présente étude examine certains des indicateurs les plus communément utilisés pour évaluer la charge fiscale des sociétés et des ménages. Elle fournit en outre, à titre d’exemple, des données provenant de sources diverses sur les taux d’imposition et les prélèvements fiscaux dans les pays Membres de l’OCDE. L’étude conclut que tous les indicateurs actuels examinés comportent au moins quelques graves insuffisances. Les résultats obtenus à l’aide de ces indicateurs doivent donc être interprétés en tenant compte de ces limites et évalués avec toute la prudence qui s’impose lorsqu’ils sont utilisés pour déterminer les actions à entreprendre. L’étude annonce également de nouveaux travaux qui seront entrepris dans ce domaine par le Groupe de travail sur l’analyse des politiques et les statistiques fiscales du Comité des affaires fiscales de l’OCDE. L’étude a été effectuée par le Groupe de travail sur l’analyse des politiques et les statistiques fiscales. Le projet a été piloté par Flip de Kam et W. Steven Clark du Secrétariat de l’OCDE (Affaires fiscales). L’étude est publiée sous la responsabilité du Secrétaire général.
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TABLE DES MATIÈRES Chapitre 1. Mesure de la charge fiscale....................................................................................................................... 1.1. 1.2. 1.3. 1.4. 1.5. 1.6.
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Introduction ............................................................................................................................................................. Taux d’imposition nominaux ................................................................................................................................. Rapports impôts/PIB ............................................................................................................................................... Taux moyens d’imposition..................................................................................................................................... Taux marginaux effectifs d’imposition.................................................................................................................. Structure du rapport ...............................................................................................................................................
7 7 9 10 11 12
Chapitre 2. Taux nominaux de l’impôt sur le revenu..................................................................................................
13
2.1. 2.2. 2.3. 2.4. 2.5. 2.6. 2.7.
Introduction ............................................................................................................................................................. La structure des impôts sur le revenu des personnes physiques.................................................................... Taux d’imposition « globaux » des revenus des personnes physiques .......................................................... Taux d’imposition implicites élevés pour les plus défavorisés........................................................................ Taux nominaux maximum par catégorie de revenu............................................................................................ La structure des taux d’imposition des bénéfices des sociétés....................................................................... Impôt sur les bénéfices des sociétés et imposition des actionnaires .............................................................
13 13 16 18 19 20 24
Notes .................................................................................................................................................................................
28
Chapitre 3. Rapports impôts/PIB ...................................................................................................................................
31
3.1. 3.2. 3.3. 3.4. 3.5.
Introduction ............................................................................................................................................................. Dépenses fiscales ou dépenses directes ............................................................................................................ Le régime fiscal des prestations de sécurité sociale ......................................................................................... La relation entre la base d’imposition et le PIB, et les effets du cycle économique .................................... Révisions de la mesure du PIB..............................................................................................................................
31 32 33 35 35
Notes .................................................................................................................................................................................
37
Chapitre 4. Taux moyen d’imposition et données micro-économiques nécessaires............................................
39
4.1. 4.2. 4.3. 4.4.
Introduction ............................................................................................................................................................. Deux cadres d’évaluation de la charge de l’impôt sur les sociétés ................................................................. Taux moyens implicites d’imposition .................................................................................................................. Taux moyens d’imposition rétrospectifs (ajustés sur la base des bénéfices) ................................................
39 41 42 49
Notes .................................................................................................................................................................................
52
Chapitre 5. Taux marginaux effectifs d’imposition.....................................................................................................
55
5.1. 5.2. 5.3. 5.4. 5.5. 5.6.
Introduction ............................................................................................................................................................. Définition des taux marginaux effectifs d’imposition......................................................................................... Analyse du cas d’absence d’impôt ....................................................................................................................... Analyse d’un impôt simple sur les bénéfices des sociétés............................................................................... Analyse de certains instruments ciblés de l’impôt sur les sociétés ................................................................ Limites de l’analyse en termes de TMEI .............................................................................................................
55 56 58 60 62 65
Notes .................................................................................................................................................................................
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
Chapitre 6. Utilité des différents indicateurs de la charge fiscale pour les pouvoirs publics ............................
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6.1. 6.2. 6.3. 6.4. 6.5. 6.6.
Introduction .............................................................................................................................................................. Résultats significatifs ............................................................................................................................................... Évaluation de la charge fiscale des biens d’équipements « anciens » ou « nouveaux » ............................... Évaluation de la charge de l’impôt sur les sociétés du point de vue de l’équité........................................... Évaluation de l’incidence de l’imposition des sociétés sur l’incitation à l’investissement........................... Conclusion.................................................................................................................................................................
77 78 80 82 85 88
Notes ..................................................................................................................................................................................
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Annexes aux chapitres 2.A. 2.B. 4.A. 4.B. 6.A. 6.B. 6.C.
Mesure du taux global légal de l’impôt sur les bénéfices des sociétés au Japon........................................... Les effets de l’imposition des dividendes et la déduction au titre de l’intégration des revenus ............... La classification des impôts de l’OCDE ................................................................................................................ Illustration de l’application de données micro-économiques........................................................................... Données rétrospectives et prospectives concernant les taux de l’impôt sur les sociétés ............................ Taux moyens implicites d’imposition – Exemple des effets du traitement des intérêts .............................. Conclusions sur le bien-fondé de l’analyse en termes de TMEI pour la politique fiscale ............................
93 95 97 99 103 104 105
Bibliographie ....................................................................................................................................................................
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Liste des encadrés 1.A. 1.B. 1.C. 2.A. 2.B. 2.C. 2.D. 3.A. 3.B. 3.C. 3.D.
Pourquoi les taux nominaux peuvent induire en erreur..................................................................................... Cas dans lesquels les taux nominaux sont significatifs....................................................................................... Pourquoi les rapports impôts/PIB peuvent induire en erreur ........................................................................... Les modalités de la déduction de base dans les pays de l’OCDE ................................................................... Taux d’imposition implicites élevés pour les plus défavorisés ........................................................................ Systèmes de comptes d’imputation (« Franking systems »).............................................................................. Taxe de péréquation ............................................................................................................................................... Y a-t-il ou non dépenses fiscales ? ........................................................................................................................ Comment les dépenses fiscales réduisent le rapport impôts/PIB .................................................................... Modalités de l’incidence du régime fiscal des prestations sociales sur le rapport impôts/PIB.................... Comment une révision du PIB peut abaisser le ratio impôts/PIB .....................................................................
8 9 9 14 19 25 26 32 33 34 36
Liste des tableaux 2.1. Barèmes des taux en vigueur de l’administration centrale pour l’imposition des personnes physiques (personne célibataire, sans enfant), janvier 1998 .................................................. 3.1. Ratios d’impôts et de dépenses publiques : un exemple (% du PIB) ..............................................................
15 34
Liste des graphiques 2.1. 2.2. 2.3. 5.1. 5.2.
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5.3. 5.4. 6.1. 6.2.
Taux d’imposition les plus élevés sur les salaires, 1998 .................................................................................... Taux d’imposition globaux les plus élevés, 1998 ................................................................................................ Taux légaux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés (1er janvier 1998)......................................................... Rendement de l’investissement dans le cas d’absence d’impôt...................................................................... Rendement de l’investissement dans le cadre d’un système simple d’impôt sur les bénéfices des sociétés ............................................................................................................................... Rendement et investissement dans le cas d’importations nettes de capitaux .............................................. Rendement et investissement dans le cas d’exportations nettes de capitaux ............................................... Indicateurs rétrospectifs des taux d’impôt sur les sociétés, 1995 ..................................................................... Indicateurs prospectifs de l’impôt sur les sociétés, 1998...................................................................................
17 20 21 59 61 64 64 78 80
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Chapitre 1
MESURE DE LA CHARGE FISCALE 1.1. Introduction Dans tous les pays Membres de l’OCDE, l’intégration rapide des économies nationales oblige les décideurs à réexaminer d’un œil critique les systèmes fiscaux existants. C’est dans le cadre de ce débat que les décideurs et autres parties concernées s’efforcent de mieux saisir l’incidence de la fiscalité sur l’investissement intérieur, la croissance de l’emploi et les résultats économiques globaux. Les décideurs craignent que les systèmes fiscaux actuels ne découragent l’activité économique et ne détruisent des emplois, mais le montant des allégements d’impôts qu’ils peuvent accorder est limité étant donné la nécessité de financer les dépenses publiques. Par conséquent, les considérations d’efficacité, de compétitivité et de rendement de l’impôt entrent en ligne de compte. Par ailleurs, la difficulté de plus en plus grande d’imposer les revenus du capital en raison de la mobilité croissante des capitaux risque d’aboutir à des pressions en vue d’un transfert progressif de la charge fiscale du capital sur la main-d’œuvre et la consommation, ce qui pose des problèmes d’équité et d’efficience. En réponse à la demande croissante, les analystes des politiques ont mis au point divers indicateurs permettant d’évaluer la charge fiscale et l’incidence des impôts sur l’activité économique. Cette étude examine les indicateurs les plus communément utilisés pour évaluer la charge fiscale : i) Taux d’imposition nominaux (section 1.2) ; ii) Rapports impôts/PIB (section 1.3) ; iii) Taux moyens d’imposition (section 1.4) ; iv) Taux marginaux d’imposition effectifs (section 1.5). L’étude est factuelle et comparative. Elle ne propose pas d’appréciation sur des systèmes fiscaux spécifiques ou sur des propositions particulières de réformes fiscales. En outre, elle fournit à titre d’exemple des chiffres permettant de mesurer l’incidence des systèmes fiscaux des pays Membres de l’OCDE, en utilisant des recherches théoriques récentes complétées par des données et des calculs effectués par le Secrétariat de l’OCDE. Dans ce dernier cas, les autorités nationales ont communiqué les données sur les agrégats macro-économiques, ainsi que les données particulières concernant les systèmes fiscaux nationaux qui ont été utilisées pour établir les tableaux. 1.2. Taux d’imposition nominaux Les indicateurs les plus simples et les plus souvent cités de la charge fiscale sont les taux d’imposition nominaux ou « légaux ». L’OCDE met à jour chaque année sa base de données fiscales, qui comprend des informations détaillées sur les systèmes d’impôt sur le revenu des personnes physiques et des sociétés des 29 pays Membres, et notamment des données sur les taux nominaux des impôts sur le revenu. Le chapitre 2 de cette étude examine les taux des impôts sur les revenus des personnes physiques et des sociétés. En 1998, dans les économies de l’OCDE, les taux maximums combinés de l’ensemble des impôts sur le revenu des personnes physiques variaient entre 33 pour cent (NouvelleZélande) et 66 pour cent (Belgique). Le chapitre 2 donne également des indications sur la dispersion des taux nominaux des impôts sur les bénéfices des sociétés, qui varient entre 28 pour cent (Finlande et Suède) et 57 pour cent (Allemagne). © OCDE 2000
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
Ces taux nominaux sont significatifs dans la mesure où ils ont une fonction importante de signal, déterminent en partie la valeur des allégements fiscaux et constituent en général un facteur important de la prise de décisions concernant l’investissement nouveau. Beaucoup s’empresseront cependant de faire observer que les indications données par les taux d’imposition nominaux sont incomplètes dans la mesure où les taux d’imposition effectifs sont en général moindres que ne l’indiquent les taux nominaux. En effet, les revenus des ménages et les bénéfices des entreprises déterminés conformément aux pratiques comptables normalisées peuvent être réduits par des dispositions spécifiques de la législation fiscale avant que les taux nominaux soient appliqués à une base d’imposition sensiblement réduite (revenus imposables, bénéfices). Par exemple, dans le cadre de la plupart des systèmes fiscaux, les particuliers peuvent différer l’imposition d’une partie de leurs revenus mise de côté en vue de leur vieillesse, et dans de nombreux cas, la valeur locative imputée des logements occupés par leurs propriétaires n’est pas soumise à l’impôt alors que les intérêts versés sont partiellement et même – dans des cas exceptionnels – intégralement déductibles. De même, les bénéfices des sociétés déterminés en suivant les pratiques comptables normales, peuvent être réduits en vertu de dispositions spécifiques de la législation fiscale, telles que des sy stème s a van tage ux d’a mort isse me nt , des in citat ion s fiscale s visan t à pro mou vo ir l’investissement dans la recherche-développement ou dans des régions particulières, des dispositions fiscales en matière de réserves et aussi en fonction de stratégies fiscales internationales (voir encadré 1.A).
Encadré 1.A.
Pourquoi les taux nominaux peuvent induire en erreur
Supposons que le bénéfice comptable s’élève à 100 unités et que le taux nominal de l’impôt sur les sociétés soit de 35 pour cent. Si le bénéfice imposable de cette entreprise n’est que de 60 unités, l’impôt sur les sociétés de 21 unités à verser correspond au taux nominal de 35 pour cent appliqué au bénéfice imposable de 60. Le taux moyen effectif d’imposition est dans ce cas beaucoup plus faible, puisqu’il s’élève à 21 pour cent : 21 unités versées sur un montant de bénéfice comptable de 100.
Il est clair que les taux nominaux d’imposition donneront une indication plus précise des charges fiscales effectives lorsque les contribuables ont des possibilités limitées de réduire leur base d’imposition à un niveau inférieur au salaire encaissé et au bénéfice comptable en utilisant ces allégements fiscaux spécifiques. Il s’ensuit que la charge fiscale effective des ménages ou des sociétés – considérées individuellement ou pour les ménages ou les sociétés considérés comme un groupe – ne peut être mesurée qu’en exprimant les impôts effectivement versés en pourcentage d’un indicateur ajusté des revenus ou des bénéfices*. Les taux nominaux tels qu’ils s’appliquent aux revenus ou aux bénéfices imposables sont révélateurs de l’incitation à mettre en œuvre des stratégies fiscales dans la mesure où ils déterminent généralement la valeur des déductions fiscales – par exemple, la déduction des intérêts versés (voir encadré 1.B) – concernant les déterminants des prix de transfert et la sous-capitalisation.
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* Cette autre méthode permet d’obtenir des taux moyens d’imposition et sera examinée plus en détail au chapitre 4. Comme on l’a noté à la section 4.3, certains ajustements au bénéfice comptable sont nécessaires pour mesurer exactement la charge fiscale des sociétés (par exemple, les ajustements en fonction de l’inflation, les pertes, les bénéfices étrangers).
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Mesure de la charge fiscale
Encadré 1.B. Cas dans lesquels les taux nominaux sont significatifs Si le taux nominal de l’impôt sur les sociétés dans un pays est de 35 pour cent, la valeur de la déduction d’une unité monétaire additionnelle d’intérêts est de 0.35 unité. Dans le contexte d’une société multinationale qui se demande comment comptabiliser les intérêts additionnels versés en vue de l’imposition, la comparaison à effectuer entre le pays A et le pays B porte donc sur les taux nominaux d’impôt sur les bénéfices des sociétés dans ces deux pays.
1.3. Rapports impôts/PIB Une autre méthode permettant d’étudier la charge fiscale du secteur des ménages ou des sociétés consiste à exprimer le montant total des impôts versés par ce secteur en pourcentage du produit intérieur brut (PIB). Comme on le verra au chapitre 3 de cette étude, les rapports impôts/PIB doivent être interprétés avec beaucoup de prudence. En fait, les rapports entre le montant global des prélèvements obligatoires et le PIB ne fournissent que des informations limitées sur la charge fiscale du secteur des ménages ou des entreprises comme le montre une analyse plus détaillée du rapport entre l’impôt sur les bénéfices des sociétés (IS) et le PIB. En premier lieu, ces rapports IS/PIB masquent des modifications de l’impôt sur les sociétés en pourcentage des bénéfices des sociétés. Pour le constater, on peut noter que le rapport entre l’impôt sur les sociétés et le PIB est déterminé par le produit de deux rapports : 1. l’impôt sur les sociétés divisé par le bénéfice des sociétés avant impôt ; et 2. le bénéfice avant impôt sur les sociétés en pourcentage du PIB. Le premier rapport, qui est un indicateur de l’impôt moyen sur les bénéfices des sociétés, varie avec le taux nominal de l’impôt sur les sociétés et avec l’assiette de cet impôt. Les variations de ce rapport reflètent donc essentiellement les changements de politique fiscale, l’efficacité de l’administration fiscale, la discipline fiscale et les stratégies fiscales – la manière dont les sociétés réagissent aux dispositions fiscales en vigueur. Le deuxième rapport, entre les bénéfices avant impôt et le PIB varie avec les fluctuations de la part des bénéfices des sociétés dans la valeur ajoutée totale de l’économie. Si la politique fiscale est maintenue constante – à supposer que les dispositions régissant les taux de l’impôt sur les sociétés et la base d’imposition restent fixes – et à supposer que les pratiques fiscales restent inchangées (administration, discipline fiscale), une baisse du bénéfice des sociétés en pourcentage du PIB aboutirait à une réduction du rapport entre l’impôt sur les sociétés et le PIB. Ce résultat pourrait être interprété à tort comme indiquant une réduction de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, alors qu’en fait cette valeur reste inchangée (voir exemple dans l’encadré 1.C).
Encadré 1.C. Pourquoi les rapports impôts/PIB peuvent induire en erreur Supposons que le rapport entre les recettes de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et la valeur du PIB dans les pays A et B soit respectivement de 2.5 et de 5 pour cent. On peut en déduire que la charge fiscale est plus élevée dans le pays B. Cependant, ce n’est pas forcément le cas. Si les gains des sociétés représentent respectivement 10 pour cent et 20 pour cent du PIB dans le pays A et dans le pays B, le taux moyen effectif d’impôt sur les sociétés est de 25 pour cent dans les deux cas, du fait que dans le pays A, les sociétés paient un impôt correspondant à 2.5 pour cent du PIB sur leurs bénéfices qui sont égaux à 10 pour cent du PIB, tandis que les sociétés du pays B paient le double en valeur relative sous forme d’impôt sur des bénéfices qui représentent en valeur relative le double de ceux du pays A. 9
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
Une seconde limite des rapports entre l’impôt sur les sociétés et le PIB résulte du fait qu’ils ne prennent en compte que l’un des nombreux impôts que versent les entreprises à l’aide de leurs gains. Dans un certain nombre de pays, d’autres impôts versés par les sociétés peuvent être importants. En particulier, les impôts sur le capital, les impôts sur les transactions financières et les taxes sur les salaires peuvent être importants. Un troisième problème est lié au fait que ces rapports incluent au dénominateur (PIB) des bénéfices négatifs (c’est-à-dire des pertes) qui devraient être exclus dans la mesure du taux moyen d’imposition effectif applicable aux entreprises bénéficiaires. Enfin, les rapports impôt sur les sociétés/PIB peuvent comporter des impôts versés au niveau des sociétés sur les gains distribués (c’est-à-dire des taxes de péréquation) que beaucoup considèrent comme des acomptes sur l’impôt sur le revenu des personnes physiques à verser aux actionnaires et qui ne devraient donc pas être inclus dans le montant de la charge fiscale des sociétés. 1.4. Taux moyens d’imposition Les taux moyens d’imposition constituent un troisième mode d’évaluation de la charge fiscale qui pèse sur les ménages ou les sociétés. Le recours à cet indicateur permet de résoudre en partie les difficultés que comporte une comparaison entre les taux nominaux et les rapports impôts/PIB. Leur principal avantage, par rapport aux taux d’imposition nominaux, est le fait qu’ils prennent en compte les impôts effectivement versés. Ils utilisent par ailleurs un indicateur répondant à une définition plus précise (ciblée) de la base d’imposition par comparaison avec les rapports prélèvements obligatoires/PIB. Pour calculer un taux moyen d’imposition applicable à un ménage donné, tous les impôts versés sont divisés par un indicateur du revenu du ménage défini comme la somme de la consommation et de la variation de l’actif net de ce ménage au cours d’une période donnée (c’est-à-dire une définition économique du revenu) ou encore évalué conformément à une définition juridique du revenu. Les taux moyens d’imposition sont surtout utilisés en pratique pour analyser la charge fiscale qui pèse sur les sociétés, ou sur le secteur des entreprises dans son ensemble (y compris les entreprises non constituées en sociétés) lorsque, comme on l’a noté, le dénominateur comporte un indicateur de l’excédent global des entreprises plus étroit que le PIB total. Les taux moyens d’impôts sur les sociétés tiennent compte de l’incidence des allégements spécifiques (par exemple, les abattements fiscaux pour investissements, les crédits d’impôts, les dispositions renforcées en matière d’amortissement, les dotations aux provisions pour couvrir les risques futurs) sur l’investissement marginal et inframarginal, les stratégies fiscales et autres facteurs qui déterminent l’impôt finalement dû. Par conséquent, les limitations inhérentes aux indicateurs de la charge fiscale tels que les taux nominaux et les rapports impôts/PIB se trouvent partiellement levées. On peut cependant observer des différences importantes dans le choix de la base d’imposition applicable (dénominateur du ratio moyen d’imposition).
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Pour calculer le taux moyen d’imposition applicable à une société, la méthode standard consiste à calculer le rapport entre le montant total des impôts effectivement versés sur les bénéfices de la société et un indicateur ajusté du bénéfice financier des sociétés, en effectuant des ajustements du bénéfice financier (comptable) de la société pour obtenir un indicateur du revenu réel (économique). Pour déterminer un taux moyen d’imposition applicable à toutes les sociétés, on calcule le rapport entre le montant total des impôts effectivement versés à l’aide des bénéfices des sociétés et « l’excédent d’exploitation » de l’économie, selon la méthode dite du taux d’imposition « implicite ». L’excédent d’exploitation du secteur des sociétés est un indicateur de la valeur ajoutée nationale au niveau des sociétés qui échoit aux apporteurs de capitaux (production brute, aux prix à la production, diminuée de la somme de la consommation intermédiaire et de la consommation de capital fixe des coûts salariaux (y compris les cotisations patronales de sécurité sociale) et des impôts indirects nets de subventions). Selon une autre conception, l’excédent d’exploitation des entreprises correspond aux revenus de source nationale des apporteurs de capitaux générés au niveau des sociétés et prenant la forme d’intérêts, loyers, redevances, dividendes et bénéfices non distribués. Les Comptes Nationaux fournissent aussi séparément (pour la plupart des pays) l’excédent d’exploitation des entreprises non constituées en sociétés. © OCDE 2000
Mesure de la charge fiscale
L’excédent total d’exploitation de l’économie diffère de la somme des bénéfices commerciaux et des bénéfices économiques réels des sociétés et des entreprises non constituées en sociétés pour un certain nombre de raisons. L’une des principales différences est l’inclusion dans l’excédent d’exploitation des intérêts versés (directement ou indirectement) aux ménages (épargnants). Cela rend moins significatifs les taux d’imposition implicites des sociétés et amène à limiter l’approche fondée sur ces taux aux analyses des taux moyens d’imposition des revenus du capital (ce qui revient à faire figurer les dettes et les fonds propres au dénominateur, tandis que l’impôt sur les sociétés et sur les revenus des personnes physiques applicables à ces sommes figurent au numérateur). Par conséquent, il est nécessaire de disposer d’indicateurs plus conventionnels des taux moyens de l’impôt sur les sociétés faisant correspondre les impôts sur les bénéfices des sociétés versés au montant de ces bénéfices. Toutefois, comme on le verra au chapitre 4, les taux moyens d’imposition assis sur les bénéfices obtenus à l’aide de données agrégées ou collectées au niveau de chaque entreprise peuvent comporter un certain nombre de lacunes, par exemple l’inclusion au dénominateur de bénéfices négatifs des entreprises déficitaires et l’inclusion au numérateur d’impôts nationaux nets sur des revenus de source étrangère (exclus du dénominateur). Théoriquement, des données microéconomiques détaillées devraient être utilisées pour permettre de faire correspondre comme il convient les impôts effectivement versés sur les bénéfices ajustés des sociétés au niveau de l’entreprise pour un échantillon représentatif d’entreprises. Des ajustements aux chiffres comptables des bénéfices des entreprises sont nécessaires pour améliorer la cohérence entre les montants qui figurent au numérateur et au dénominateur et pour s’orienter vers une définition exacte du revenu économique. Cette série de données micro-économiques permettrait de déterminer les erreurs de mesure des taux moyens d’imposition obtenus en utilisant des données globales, et d’établir des taux moyens d’imposition par secteur, par taille des entreprises (petites et moyennes entreprises ou sociétés multinationales) etc. L’OCDE effectue actuellement des travaux dans ce domaine mais il faudra du temps pour aboutir à des résultats significatifs, le problème résultant en partie du fait que beaucoup de pays ne sont pas actuellement en mesure de fournir les séries de données nécessaires concernant un échantillon représentatif d’entreprises. 1.5. Taux marginaux effectifs d’imposition Un autre moyen d’analyser la charge fiscale consiste à calculer le « coin » que les impôts enfoncent entre les taux de rendement avant impôts et après impôts à la marge, c’est-à-dire sur la dernière unité monétaire investie, lorsque l’avantage marginal de l’investissement couvre tout juste son coût marginal. Les taux marginaux effectifs d’imposition qui en résultent peuvent être calculés en prenant l’hypothèse d’un ensemble spécifique ou mixte d’investissements (bâtiments, machines, stocks) d’une source de financement spécifique ou mixte (bénéfices non distribués, émissions d’actions, endettement) et en se référant aux taux d’inflation observés dans le passé. Dans l’ensemble, les taux marginaux effectifs d’imposition sont calculés en déterminant, pour un groupe représentatif d’investisseurs et d’entreprises, le coin que crée la fiscalité entre les taux de rendement avant impôts et après impôts à la marge, compte tenu des taux nominaux d’imposition et des règles de base régissant les déductions fiscales et les crédits d’impôts. En théorie, les taux marginaux effectifs d’imposition mesurent l’incidence de la fiscalité sur les taux de rendement requis et par conséquent sur les incitations à l’investissement à la marge. Les taux marginaux effectifs d’imposition peuvent donner lieu à des comparaisons entre les projets d’investissement, les groupes d’investisseurs, les méthodes de financement et entre les pays. En 1991, l’OCDE a publié une étude intitulée L’imposition des bénéfices dans une économie globale qui comportait des travaux approfondis dans ce domaine. Comme le souligne le chapitre 5, les résultats de l’analyse en termes de taux marginaux effectifs d’imposition – une construction hautement théorique – doivent être interprétés avec la prudence qui s’impose, en tenant compte des hypothèses simplificatrices adoptées par la théorie néo-classique de l’investissement sur laquelle cette méthodologie est fondée. Par ailleurs, lorsqu’on calcule les taux marginaux effectifs d’imposition, une partie seulement du système fiscal est prise en compte et, par © OCDE 2000
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
exemple, la possibilité de constituer des provisions est laissée de côté. Enfin, les calculs portant sur les taux marginaux effectifs d’imposition reposent sur l’hypothèse selon laquelle les investisseurs paient l’impôt en fonction des taux nominaux. Il a déjà été expliqué que souvent les contribuables paient des taux effectifs moindres, ce qui s’explique dans une large mesure par des raisons qui ne sont pas prises en compte dans les calculs des taux marginaux effectifs d’imposition. 1.6. Structure du rapport La structure du rapport est la suivante. Le chapitre 2 commence par examiner les taux d’imposition légaux nominaux ou « affichés » qui constituent les indicateurs les plus simples de la charge fiscale mais ne fournissent que des informations limitées quant à l’incidence globale des systèmes fiscaux. Les structures des taux d’imposition sont examinées et les taux légaux « globaux » des impôts sur les revenus des personnes physiques et sur les bénéfices des sociétés sont chiffrés pour les pays de l’OCDE. Les problèmes d’intégration sont également brièvement traités. Le chapitre 3 est consacré à l’examen des rapports impôts/PIB, qui sont largement cités dans la presse destinée au grand public et utilisés pour effectuer des comparaisons internationales de la charge fiscale. Pourtant, comme l’explique le texte, ces indicateurs risquent d’induire en erreur et il faut garder en mémoire les différentes causes de distorsions lorsqu’on utilise de telles statistiques pour analyser l’évolution temporelle de l’incidence de la fiscalité et pour effectuer des comparaisons entre les pays. Le chapitre 4 examine un certain nombre d’indicateurs « rétrospectifs » du taux moyen d’imposition, qui peuvent être élaborés au niveau de l’économie globale, du secteur ou de l’entreprise. L’analyse des taux d’imposition implicites des sociétés, obtenus en utilisant les données des Comptes Nationaux, permet de conclure qu’ils donnent une indication très imprécise de la charge fiscale. Une préférence est manifestée pour les indicateurs du taux moyen d’imposition obtenus en utilisant le bénéfice économique comme dénominateur (base d’imposition) et l’accent est mis sur la nécessité de disposer de données micro-économiques (au niveau de l’entreprise) pour permettre d’effectuer les ajustements requis de la base d’imposition. Les travaux en cours dans ce domaine effectués par le Groupe de travail n o 2 en collaboration avec les pays de l’OCDE serviront à faire apparaître les différences entre les pays quant à l’importance des ajustements et à faciliter ainsi les comparaisons internationales des niveaux d’imposition. Le chapitre 5 examine ensuite des indicateurs « prospectifs » de la charge fiscale, qui comprennent des taux moyens d’imposition déterminés pour des projets d’investissements hypothétiques (ponctuels), dont beaucoup soutiennent qu’ils sont les plus significatifs pour l’analyse des décisions de localisation des sociétés. L’accent est mis plus particulièrement au chapitre 5 sur l’analyse des taux marginaux effectifs d’imposition du fait que l’utilisation de ce cadre est désormais largement répandue, l’objectif étant d’énoncer clairement ses hypothèses de base et ses limites en vue de permettre l’analyse des politiques fiscales. Le chapitre 6 conclut par une discussion sur l’utilité de ces différents indicateurs pour répondre aux questions courantes de politique fiscale faisant intervenir des considérations d’équité (le secteur des entreprises paie-t-il sa juste part ?) et d’efficacité des systèmes fiscaux (la fiscalité dissuade-t-elle les entreprises d’investir ?) qui se posent de plus en plus aux décideurs. La dernière sous-section comprend une brève conclusion et mentionne les travaux futurs qui seront effectués dans ce domaine par le Groupe de travail sur l’analyse des politiques et les statistiques fiscales du Comité des affaires fiscales de l’OCDE.
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Chapitre 2
TAUX NOMINAUX DE L’IMPÔT SUR LE REVENU 2.1. Introduction Les comparaisons des différents systèmes fiscaux commencent souvent par l’examen des taux nominaux maximums de l’impôt sur le revenu perçu par l’administration centrale. Toutefois, l’accent mis sur ces taux « affichés » risque d’induire en erreur. Dans ce chapitre, on commencera par comparer la structure des taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques en 1998, en utilisant des informations tirées de la base de données fiscales de l’OCDE. L’accent est mis sur les taux marginaux maximum d’imposition, c’est-à-dire sur le pourcentage le plus élevé d’impôts prélevés sur un dollar, un yen ou un franc supplémentaire de revenu (section 2.2). La plupart des études se limitent à la comparaison des taux maximums de l’impôt sur le revenu des personnes physiques perçu par l’administration centrale. Toutefois, dans 22 pays Membres de l’OCDE sur 29, les administrations infranationales prélèvent également des impôts sur les revenus des personnes physiques. Il est clair que ceux-ci doivent être pris en compte pour obtenir un aperçu complet des taux maximums d’impôt sur le revenu (section 2.3). Ce qui est peut être le plus surprenant, c’est que dans de nombreux cas, ce ne sont pas, à la marge (c’est-à-dire pour une unité additionnelle de revenus), les contribuables les plus riches qui sont soumis aux taux les plus élevés (section 2.4). La section 2.5 montre que dans un pays donné, les taux maximums nominaux varient sensiblement selon les catégories de revenus1. La discussion s’oriente ensuite vers un examen des taux nominaux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés. La structure des taux légaux de l’impôt sur les sociétés fait apparaître une diversité considérable entre les pays de l’OCDE (section 2.6). Les barèmes de taux peuvent être uniformes ou progressifs et peuvent comporter une surtaxe temporaire ou permanente. Dans certains pays fédéraux, il peut exister une imposition additionnelle au niveau de l’État, des provinces ou des cantons. De plus, les taux d’imposition peuvent différer selon le type de revenus des entreprises, selon que ces revenus sont mis en réserve ou distribués aux actionnaires, et même selon la capitalisation de l’entreprise, bien que cette distinction soit rare. Ce chapitre examine par ailleurs le problème dit « de l’intégration » qui se pose du fait de la coexistence d’une imposition des revenus au niveau de la société et au niveau de l’actionnaire (section 2.7). Diverses techniques peuvent être utilisées pour éviter la double imposition qui se produirait au cas où le revenu soumis à l’impôt au niveau de la société est également soumis à l’impôt au niveau de l’imposition des personnes physiques lorsqu’il est distribué aux actionnaires sous forme de dividendes. Ces considérations ont des conséquences sur la mesure de la charge fiscale des revenus du capital. Si toutefois, il est reconnu que des crédits d’impôts assurent un allègement d’impôt au niveau des actionnaires, il est possible de les laisser de côté dans l’évaluation de la charge de l’impôt sur les sociétés, qui constitue le sujet principal de cette étude. 2.2. La structure des impôts sur le revenu des personnes physiques La structure fondamentale des impôts sur les revenus perçus par l’administration fédérale ou centrale est pratiquement la même d’un pays de l’OCDE à l’autre. Un certain montant des revenus peut être exonéré d’impôt : c’est l’exonération personnelle. Dans certains pays, la première tranche de revenus n’est pas exonérée mais simplement imposée au taux zéro, ce qui a le même effet. Il existe © OCDE 2000
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une autre solution, qui consiste à imposer la totalité du revenu, tout en accordant une réduction de la charge fiscale sous forme d’un crédit d’impôt de base. Pour évaluer la réduction de la charge fiscale due à ces allégements fiscaux de base, ceux-ci peuvent être exprimés en pourcentage du salaire brut d’un ouvrier moyen dans chaque pays de l’OCDE. Selon les indications ainsi obtenues, le salaire d’un ouvrier moyen ne serait exonéré que de 3 pour cent en Grèce, de 7 pour cent en Corée, de 14 pour cent aux Pays-Bas et de 20 pour cent en France, tandis que le Royaume-Uni et les États-Unis accordent un allégement fiscal de l’ordre de 24 pour cent. En Suède, l’ouvrier moyen ne paie aucun impôt sur le revenu à l’administration fiscale car l’abattement fiscal est supérieur d’un dixième à son salaire. La réduction d’impôt correspondante pour les contribuables individuels est déterminée en appliquant le taux d’imposition marginal au montant de l’exonération personnelle ou de la tranche zéro (voir encadré 2.A). A l’exception de l’Allemagne, qui applique différentes formules fiscales, les revenus qui excèdent le seuil d’exonération ou qui ne sont pas imposés au taux zéro sont segmentés en plusieurs « tranches » d’imposition. Leur nombre varie selon les pays : la Suède applique une seule tranche d’imposition, l’Islande et l’Irlande en ont deux, tandis que l’Espagne, le Luxembourg, le Mexique et la Suisse en ont au moins huit. A l’intérieur d’une même tranche, tous les revenus sont imposés au même taux et ce taux augmente d’une tranche à l’autre. On obtient ainsi un impôt progressif : plus le revenu imposable total est élevé, plus la part de ce revenu qui échoit au fisc augmente – du moins en principe. Dans le cadre d’un système progressif d’impôt sur le revenu, l’avantage qui résulte pour les contribuables de l’exonération personnelle ou de l’imposition au taux zéro augmente à mesure qu’ils passent dans des tranches d’imposition plus élevées. En revanche, l’avantage qui résulte des crédits d’impôt est indépendant du niveau du revenu du contribuable (voir encadré 2.A). En 1998, neuf pays Membres appliquaient des crédits d’impôt de base : l’Autriche, le Canada, la Hongrie, l’Islande, l’Italie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, la Pologne et le Portugal.
Encadré 2.A.
Les modalités de la déduction de base dans les pays de l’OCDE
La déduction de base au titre de l’impôt sur le revenu peut être appliquée de différentes manières. Supposons que les pays A et B aient une structure de taux d’imposition identique comportant quatre tranches. Les premières 20 000 unités de revenu seront imposées à 20 pour cent, les 20 000 suivantes à 30 pour cent, les 20 000 suivantes à 40 pour cent et tout revenu de plus de 60 000 unités au taux maximum de 50 pour cent. Dans le pays A, les contribuables ont droit à une exonération personnelle de 10 000 (avant application des taux). La charge fiscale des titulaires de faibles revenus dans la première tranche se trouve donc réduite de 2 000, puisqu’ils économisent 20 pour cent de 10 000 (leur exonération). Pour les contribuables dont les revenus atteignent les tranches les plus lourdement taxées, l’impôt dû se trouve diminué de 5 000, car pour eux 50 pour cent d’un revenu de 10 000 va au fisc. Cet exemple permet de faire apparaître la manière dont l’allègement d’impôt, qui est déterminé par le taux marginal applicable aux 10 000 dernières unités, augmente avec le revenu. Dans le pays B, tous les contribuables peuvent demander à bénéficier d’un crédit de 3 000 déductible de leur impôt sur le revenu. Dans ce cas, la valeur de l’allégement fiscal est la même pour chaque personne physique quel que soit son niveau de revenu. Si le crédit est récupérable, cela signifie que la différence positive entre le crédit et l’impôt dû sera remboursée par le fisc. On aura alors un impôt négatif sur le revenu.
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Le degré de progressivité d’un barème de taux donné dépend du montant de la réduction fiscale de base mais aussi de la largeur des tranches d’imposition et des taux marginaux appliqués au revenu dans chaque tranche. On observe d’importantes variations de la largeur des tranches et des taux marginaux d’imposition du revenu, appliqués par les administrations centrales et celles-ci reflètent les différences d’approches des pays sur ce qui constitue – compte tenu des besoins financiers existants – une répartition équitable de la charge fiscale. © OCDE 2000
Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
Le taux d’imposition applicable aux revenus de la première tranche du barème varie entre un minimum de 0.8 pour cent en Suisse et des niveaux qui atteignent 25.8 pour cent en Belgique et 27.4 pour cent en Islande. Les taux marginaux maximums de l’impôt sur le revenu prélevé par l’administration centrale vont de 25 pour cent en Suède et 33 pour cent en Nouvelle-Zélande à 60 pour cent aux Pays-Bas. En Irlande et en Nouvelle-Zélande, les contribuables dont le niveau de revenu correspond à celui de l’ouvrier moyen sont déjà soumis à des taux marginaux maximums qui sont respectivement de 48 et 33 pour cent. En Allemagne, en Autriche, en Belgique, au Canada, en Finlande, en France, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, les salariés doivent gagner environ le double du revenu moyen avant de commencer à payer l’impôt au taux maximum. En revanche, les salariés suisses et américains ne sont pas soumis au taux maximum tant que leurs revenus n’ont pas atteint 10 fois celui d’un ouvrier moyen. Pour les salariés turcs, les revenus doivent dépasser 29 fois le montant du salaire moyen. Le tableau 2.1 résume la structure des taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques prélevé par les administrations centrales dans tous les pays de l’OCDE. Avant de tirer des conclusions définitives sur cette panoplie de barèmes d’impôt sur le revenu, il y a lieu de formuler trois remarques. La première, c’est que l’impôt effectivement à la charge du contribuable donne aussi lieu à diverses déductions comme celles accordées au titre des intérêts des Tableau 2.1. Barèmes des taux en vigueur de l’administration centrale pour l’imposition des personnes physiques (personne célibataire, sans enfant), janvier 1998a Type de déduction à la base
Australie Autriche Belgique Canada Rép. tchèque Danemark Finlande France Allemagne Grèce Hongrie Islande Irlande Italie Japon Corée Luxembourg Mexique Pays-Bas Nouvelle-Zélande Norvège Pologne Portugal Espagne Suède Suisse Turquie Royaume-Uni États-Unis
PE/ZR TC PE/ZR TC PE/ZR PE/ZR PE/ZR PE/ZR PE/ZR PE/ZR TC TC PE/ZR TC PE/ZR PE/ZR PE/ZR TC PE/ZR n.a. PE/ZR TC TC PE/ZR PE/ZR PE/ZR PE/ZR PE/ZR PE/ZR
Déduction en pourcentage du salaire de l’OMb
0.15 0.03 0.19 0.03 0.23 0.12 0.33 0.20 0.21 0.03 0.09 0.18 0.20 0.02c 0.09 0.07 0.25 0.08c 0.14 0.00 0.13 0.03 0.03 0.21 1.10 0.20 0.13 0.24 0.24
Taux standard minimum
Nombre de tranches
Taux standard maximum
Niveau d’application du taux standard minimum en % du salaire de l’OM
20 10 25.75 17.51 15 8 6 10.5 formule 5 20 29.31 26 19 10 10 61 3 8.85 15 18.8 19 15 17 25 0.77 25 20 15
4 5 7 4 5 3 6 6 4 4 6 2 2 5 5 4 7 8 3 3 3 3 4 8 1 10 7 3 5
47 50 56.65 31.3 40 29 38 54 53 40 42 34.31 48 46 50 30 46 35 60 33 32.5 40 40 47.6 25 11.5 55 40 39.6
1.4 2.3 2.2 1.8 5.9 1.1 2.2 2.2 2.1 2.5 2.0 1.8 0.7 3.5 7 5.5 2.4 7.5 1.9 1 1.1 4.7 4.5 4.6 1.1 10.4 28.5 1.8 9.7
n.a. = non applicable. OM = ouvrier moyen. PE/ZR = exemptions personnelles ou tranches à taux zéro. TC = crédit d’impôt. a) Les déductions ou abattements liés à des sources de revenus spécifiques ne sont pas inclus. b) Les chiffres qui figurent dans les colonnes PE/ZR et TC ne sont pas directement comparables (voir l’encadré A). c) Le crédit d’impôt est une fonction décroissante du revenu des personnes physiques. Ce pourcentage prend en compte le niveau du crédit d’impôt qui correspond au revenu d’un ouvrier moyen.
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prêts hypothécaires et des contributions des salariés à des plans de retraite professionnelle, ou encore à diverses exonérations applicables par exemple à des gains en capital ou à des intérêts perçus. Les taux d’imposition effectifs dans les pays où les taux nominaux sont faibles mais où les abattements à la base – déductions et exemptions – sont limités pourraient donc bien être plus élevés que ceux appliqués par les pays qui ont recours à la fois à des taux élevés et à des systèmes d’exemption et de déduction plus généreux. La deuxième remarque a été formulée dès le début de ce chapitre, à savoir que dans la plupart des pays de l’OCDE, il existe également d’autres impôts sur le revenu que ceux qui sont dus à l’administration centrale. Enfin, les systèmes fiscaux sont souvent caractérisés par des particularités mineures qui compliquent quelque peu les choses sans avoir pour autant d’incidence majeure sur la vue d’ensemble que nous présentons ici. 2.2. Taux d’imposition « globaux » des revenus des personnes physiques Pour plusieurs raisons, les contribuables de la majorité des pays de l’OCDE sont souvent soumis à des taux marginaux d’imposition plus élevés que ne le laissent prévoir les taux généralement affichés ou taux « standard » de l’impôt sur le revenu qui sont indiqués dans le tableau 2.1. Il arrive que les administrations centrales appliquent des augmentations temporaires de l’impôt sur le revenu, comme la « surtaxe d’austérité » en Belgique ou « l’impôt de solidarité » en Allemagne, avec pour effet de majorer le montant total de l’impôt sur le revenu à verser. Par ailleurs, les ménages peuvent être amenés à verser des impôts sur le revenu au profit des collectivités locales ou régionales, des provinces ou des États, en plus de ceux versés à l’administration centrale. C’est le cas en Belgique, au Canada, en Corée, en Espagne, aux États-Unis, en Islande, au Japon, dans les pays nordiques et en Suisse. A l’intérieur d’un pays donné, les taux des impôts sur le revenu perçu par les collectivités locales et les États varient beaucoup. La base de données fiscales de l’OCDE indique à la fois les taux les plus élevés et les taux les plus faibles appliqués au niveau des États/des provinces et au niveau local dans chaque pays ainsi qu’une valeur moyenne « type ». Ce taux moyen des impôts sur le revenu prélevés par les niveaux d’administration infranationaux est identique à celui qui est déclaré dans la publication annuelle de l’OCDE sur la situation des salariés au regard de l’impôt et des prestations sociales2. Ces taux moyens sont utilisés ici. Dans un petit nombre de pays de l’OCDE, les impôts sur le revenu perçus par les niveaux d’administration infranationaux sont très importants. A titre d’exemple, en Suède, le taux maximum moyen des impôts sur le revenu perçus par les provinces et collectivités locales est de 31.7 pour cent, et excède donc le taux de 25 pour cent de l’impôt sur le revenu perçu par l’administration centrale. Dans certains pays, les impôts sur le revenu versés au niveau des États, des régions ou des collectivités locales peuvent être déductibles lors du calcul du revenu imposable par l’administration centrale ou fédérale. Cette déductibilité a été prise en compte dans la présentation des taux d’imposition « globaux » du graphique 2.1. Un autre élément à prendre en compte, notamment en Europe, est l’impôt que certains gouvernements nationaux perçoivent au titre des cultes. On trouve un tel impôt cultuel dans le système fiscal de l’Autriche, de l’Allemagne, des pays nordiques 3 et de la Suisse. Dans le tableau 2.1, l’impôt cultuel n’est inclus que dans les cas du Danemark et de la Suisse. On peut se demander s’il s’agit réellement d’un « impôt tel » qu’il est défini par l’OCDE et d’autres organisations internationales à savoir un paiement obligatoire, sans contrepartie, aux administrations publiques. L’expression « sans contrepartie » signifie ici que les prestations fournies par l’administration aux contribuables ne sont généralement pas proportionnelles à leurs paiements. En fait, la décision doit être prise pour chaque cas particulier, compte tenu des institutions spécifiques qui existent dans les pays concernés. 16
De même, il est parfois difficile de définir le régime des cotisations de sécurité sociale : s’agit-il réellement d’impôts ou bien de versements effectués en échange d’une forme de protection sociale ? © OCDE 2000
Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
Graphique 2.1. Taux d’imposition les plus élevés sur les salaires, 19981 Taux global
Taux standard
10
10
0
0
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1.
Le graphique n’indique que les (22) pays de l’OCDE où les taux d’imposition globaux applicables aux salaires diffèrent des taux standard les plus élevés appliqués aux revenus des personnes physiques par l’administration fédérale ou centrale. De gauche à droite, les pays sont classés par ordre de taux « globaux » décroissant. Source : OCDE.
D’une certaine façon, la réponse dépend de l’importance du lien qui existe entre ces paiements et la valeur des prestations offertes. Les programmes de sécurité sociale prennent essentiellement deux formes. Les recettes peuvent être affectées au financement de programmes qui, pour la plupart, couvrent l’ensemble de la population. Dans ce cas, la base d’imposition peut être identique – ou presque identique – à celle de l’impôt sur le revenu. Néanmoins, contrairement à la structure des taux de l’impôt sur le revenu, il existe souvent un plafond et les revenus supérieurs à ce plafond cessent d’être soumis à des cotisations. A côté des programmes couvrant l’ensemble de la population, la plupart des pays européens appliquent des programmes d’assurance sociale qui ne concernent que les salariés, ou une partie d’entre eux. La base d’imposition utilisée pour le financement de ces programmes est constituée par les salaires, généralement plafonnés – le plafond étant lui-même lié au montant maximum des salaires qui sont assurés contre les risques de chômage et d’invalidité. De plus, dans certains cas, ces paiements peuvent être effectués sur des comptes individuels, comme les plans de retraite. Le fait qu’il existe un lien relativement étroit entre les cotisations et les prestations les rend encore moins comparables à des impôts. Bien entendu, quand on considère les taux marginaux maximums, les cotisations de sécurité sociale ne sont significatives que lorsqu’elles ne sont pas plafonnées. Les cotisations – dans les pays où elles s’appliquent – sont généralement déductibles de l’impôt sur le revenu, sauf en Hongrie, en Norvège et au Royaume-Uni, par exemple. Dans le cas des taux marginaux globaux, l’OCDE prend en compte – s’il y a lieu – la déductibilité des cotisations de sécurité sociale. Du fait que l’impôt sur le revenu et les cotisations sociales sont très semblables quant à la base d’imposition qu’ils utilisent et quant à leurs effets économiques, ces deux prélèvements ont été pris en compte dans les calculs effectués pour établir le graphique 2.1. Celui-ci compare le taux maximum « standard » de l’impôt sur le revenu perçu par l’administration centrale avec les taux maximums © OCDE 2000
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« globaux ». Ces derniers incluent les effets combinés des augmentations temporaires de l’impôt sur le revenu perçu par l’administration centrale, des impôts sur le revenu perçus par les administrations et collectivités locales, des régions et des États, ainsi que des impôts cultuels 4 et des cotisations de sécurité sociale. Il n’est pas tenu compte ici des cotisations de sécurité sociale versées directement par les employeurs, bien qu’elles puissent en définitive être mises à la charge des salariés au cas où les négociations salariales ne leur sont pas favorables. Inversement, lorsque la demande de main-d’œuvre est forte, les salariés peuvent obtenir des augmentations de salaire supplémentaires et répercuter ainsi une partie de leurs impôts sur le revenu et de leurs cotisations sociales sur les employeurs. Cela étant, le présent chapitre ne prend en compte que les taux nominaux des impôts que la loi oblige les salariés à verser et ne tient pas compte des répercussions éventuelles de ces impôts sur les salaires. L’un des enseignements de l’analyse qui précède est que les écarts à la marge entre les titulaires des revenus les plus élevés domiciliés dans les différents pays Membres de l’OCDE sont plus étroits que l’on a tendance à l’imaginer et certainement moins importants que ce que les taux les plus visibles de l’impôt sur le revenu des personnes physiques perçu par les administrations centrales semblent indiquer. En fait, après l’inclusion de l’ensemble des impôts sur le revenu des particuliers, le taux marginal maximum s’élève sensiblement dans la plupart des pays, dépassant 60 pour cent en France et en Turquie (il est de 61 pour cent dans ces deux pays) au Danemark et en Suède (62 pour cent) ainsi qu’au Japon (65 pour cent) 5 et en Belgique (66 pour cent). Pour les contribuables américains, les taux d’imposition globaux les plus élevés se situent dans un intervalle compris entre 40 et 48 pour cent selon l’État de résidence. De ce fait, l’écart avec les contribuables résidant en Suède, qui est généralement considéré comme l’État providence par excellence, n’est que de 9 points. Il importe cependant de faire observer que les contribuables de Suède et de la plupart des autres pays de l’OCDE sont déjà soumis à des taux d’imposition maximums à des niveaux de revenus beaucoup plus faibles que les contribuables des États-Unis. 2.4. Taux d’imposition implicites élevés pour les plus défavorisés Ce ne sont pas nécessairement les particuliers appartenant aux groupes de revenus les plus élevés qui paient toujours les taux marginaux d’imposition maximum. Dans certains pays, la structure des taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques peut faire apparaître une ou plusieurs « bosses » que l’on pourrait comparer à un dos de chameau. Dans ces cas, les particuliers des tranches de revenus faibles ou moyens sont soumis à des taux marginaux d’imposition plus élevés que les très riches. Par exemple, on peut observer des bosses de taux « globaux » lorsque le taux marginal combiné de l’impôt sur le revenu et des cotisations de sécurité sociale plafonnées excède le taux de l’impôt sur le revenu applicable aux revenus supérieurs au plafond fixé à ces cotisations. Dans des circonstances exceptionnelles, le taux standard de l’impôt sur le revenu des personnes physiques peut également faire apparaître une structure comparable à « un dos de chameau ». Pendant la seconde moitié des années 1980, l’impôt fédéral sur le revenu applicable aux États-Unis a fait apparaître une structure de taux de ce type pendant quelques années. A l’époque, les revenus de la première tranche étaient imposés à 15 pour cent, tandis que ceux de la dernière tranche l’étaient à 28 pour cent. De ce fait, l’allègement fiscal pour les titulaires de revenus élevés était presque deux fois supérieur à celui qui s’appliquait aux titulaires de faibles revenus. Pour compenser cette déduction plus élevée au profit des contribuables aisés, le législateur a instauré une tranche imposable à 33 pour cent qui s’intercalait entre la première et la dernière tranche. Les taux de l’impôt fédéral sur le revenu applicables en Suisse font également apparaître une « bosse ».
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Ce qui est assez surprenant c’est que les titulaires de faibles revenus peuvent aussi être soumis à des taux marginaux très élevés qui dépassent même 100 pour cent dans des cas exceptionnels. Cela s’explique par le fait que ceux qui disposent des rémunérations les plus faibles sont non seulement soumis à des impôts plus élevés lorsque leur revenu augmente mais perdent aussi dans de nombreux cas le droit à des allégements fiscaux, à des subventions et à des prestations accordées en fonction du niveau de ressources, ce qui a le même effet qu’un impôt « implicite » (voir encadré 2.B). Le comportement des salariés dont le taux marginal implicite d’imposition est supérieur à 100 pour cent © OCDE 2000
Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
n’est rationnel que s’ils réduisent leur nombre d’heures de travail. Bien entendu, cela réduira leur salaire brut, mais ils paieront moins d’impôt et bénéficieront de déductions fiscales et de prestations plus élevées. De ce fait, leur revenu disponible net peut augmenter alors que le nombre d’heures de travail diminue.
Encadré 2.B.
Taux d’imposition implicites élevés pour les plus défavorisés
L’exemple suivant indique comment des taux d’imposition implicites élevés peuvent s’appliquer. Si le chef d’une famille disposant d’un seul revenu et ayant deux enfants trouve un emploi peu rémunéré après cinq années de chômage, le revenu net est le même en Finlande et en Suède que l’on travaille ou non. En d’autres termes, le taux d’imposition implicite est de 100 pour cent, du fait que chaque unité de revenu perçue se trouve annulée par une unité de prestations perdues. Dans le cas du Danemark et de la République tchèque, le taux implicite est de près de 100 pour cent ; en Allemagne et au Royaume-Uni, il est d’environ 80 pour cent, en France et aux États-Unis, il est d’environ 50 pour cent. Lorsqu’ils ont trouvé un emploi, les titulaires de faibles salaires peuvent être exposés à des taux d’imposition implicites similaires dans la mesure où les prestations liées aux ressources sont à nouveau supprimées à chaque augmentation (faible) de salaire. Source : OCDE, Systèmes de prestations et incitations au travail, édition de 1998, p. 35
2.5. Taux nominaux maximum par catégorie de revenu Comme le montre le graphique 2.2, les taux maximums « globaux » d’imposition des revenus des personnes physiques peuvent aussi varier selon les catégories de revenus. D’une manière générale, les revenus du travail sont plus lourdement taxés, surtout s’ils sont soumis à des cotisations affectées au financement des assurances sociales des salariés. D’autre part, au cours des quinze dernières années, un nombre croissant des pays de l’OCDE a instauré des taux moindres et uniformes pour certaines catégories de revenus du capital, telles que les intérêts et dividendes. C’est le cas par exemple de la Belgique, de la République tchèque, de la Grèce, de la Hongrie, de l’Italie, de la Pologne et des pays nordiques. L’instauration de taux d’imposition uniformes moindres pour les revenus du capital est souvent interprétée comme une réponse aux pressions croissantes de la concurrence fiscale entre les nations. Le capital financier, qui est extrêmement mobile a tendance à s’orienter vers les territoires dans lesquels il est imposé aux taux les plus faibles. Pour lutter contre la fuite des capitaux, les responsables de la politique fiscale peuvent décider de réduire la charge qui pèse sur les revenus du capital dans le cadre national. L’application de taux uniformes aux revenus du capital peut réduire la progressivité d’ensemble de l’impôt sur le revenu et compromettre l’effet redistributif de cet impôt. Dans certains pays, les mesures prises s’inscrivaient par ailleurs dans le cadre d’une stratégie plus générale destinée à réduire les pertes d’efficience dues à l’impôt par une diminution des taux, s’accompagnant de l’imposition de parts plus importantes de la base d’imposition des revenus du capital. Enfin, il est important de noter que beaucoup de titulaires de revenus élevés échappent au paiement des taux légaux les plus élevés qui sont indiqués dans le graphique 2.1. En premier lieu, du fait que dans un certain nombre de pays de l’OCDE, les revenus du capital – qui représentent souvent une part importante des revenus des contribuables aisés – ne sont pas imposés à des taux progressifs mais à des taux uniformes moins élevés (voir graphique 2.2). En second lieu, les travailleurs indépendants sont souvent sur-représentés parmi les titulaires de revenus élevés. Comparés aux autres groupes de contribuables, ils peuvent être mieux à même de limiter leurs obligations fiscales, soit légalement (en utilisant les déductions fiscales au profit des entreprises), soit illégalement (en sous-évaluant leurs revenus). © OCDE 2000
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Graphique 2.2. Taux d’imposition globaux les plus élevés, 19981 Dividendes perçus
Salaires
Intérêts des dépôts bancaires
20
10
10
0
0
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1. Le graphique n’indique que les (21) pays de l’OCDE où le taux global d’imposition des salaires diffère du taux global applicable aux dividendes et/ou aux intérêts. Source : OCDE.
Plus généralement, les pratiques d’optimisation fiscale ne font qu’une bouchée des taux d’imposition élevés. Par exemple, dans les pays où le taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés est sensiblement inférieur au taux maximum de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, les travailleurs indépendants peuvent être fortement incités à constituer leur entreprise en société et à se verser une rémunération limitée. A titre d’exemple, aux Pays-Bas, l’écart entre ces deux taux est de 25 points (35 au lieu de 60 pour cent). Dans les pays qui n’imposent pas les gains en capital, il sera conseillé aux contribuables de transformer leurs revenus du capital imposables en gains en capital exonérés d’impôt. Le résultat d’une optimisation fiscale réussie est souvent de réduire les revenus imposables et l’impôt versé par les titulaires de revenus élevés. 2.6. La structure des taux d’imposition des bénéfices des sociétés Pour un certain nombre de raisons, les pays de l’OCDE imposent les bénéfices au niveau de la société et non pas seulement au niveau des particuliers lorsque les bénéfices sont distribués aux actionnaires individuels. L’une des principales raisons de ce dispositif juridique est de lutter contre les possibilités de différer d’impôt qui risqueraient d’exister, question qui est examinée séparément ci-dessous. Le graphique 2.3 indique les taux légaux de base de l’impôt sur les bénéfices des sociétés applicables dans les pays de l’OCDE au 1er janvier 1998.
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Dans l’imposition des bénéfices des sociétés, on peut observer un certain nombre d’approches. En premier lieu, il existe des différences dans la détermination du revenu imposable, comme dans le cas de l’imposition des revenus de l’entreprise et des investissements au niveau des particuliers. Les actifs amortissables (par exemple, les machines et bâtiments) utilisés pour réaliser des bénéfices peuvent donner lieu à un amortissement fiscal linéaire ou dégressif à des taux qui excèdent ceux qui sont utilisés pour la comptabilité financière (ou plus généralement à des taux qui excèdent ceux de l’amortissement physique) afin d’encourager l’activité d’investissement. Les intérêts versés peuvent © OCDE 2000
Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
Graphique 2.3. Taux légaux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés (1er janvier 1998) En pourcentage 36.0
Australie
34.0
Autriche
40.2
Belgique
44.6
Canada 35.0
Rép. tchèque
34.0
Danemark 28.0
Finlande
41.7
France
56.7
Allemagne 40.0
Grèce Hongrie
19.2 38.0
Islande 32.0
Irlande Italie
37.0 46.4
Japon 30.8
Corée Luxembourg
37.5
Mexique
34.0
Pays-Bas
35.0
Nouvelle-Zélande Norvège
33.0 28.0
Pologne
36.0
Portugal
37.4
Espagne
35.0
Suède
28.0
Suisse
27.8
Turquie Royaume-Uni États-Unis
44.0 31.0 40.0
Notes : Le graphique indique les taux nominaux de base globaux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, en incluant les impôts prélevés au niveau national et infranational et les surtaxes. Les taux spécifiques (par opposition aux taux de base) de l’impôt sur les sociétés applicables dans certains pays (comme le Canada ou le Royaume-Uni) aux revenus des petites entreprises, aux revenus des industries manufacturières (par exemple en Irlande), aux revenus des services financiers, etc., ne sont pas indiqués (voir corps du texte). Le taux indiqué pour l’Allemagne est celui qui s’applique aux bénéfices non distribués, alors que le taux indiqué pour l’Italie exclut les réductions du taux de base résultant de l’impôt dual sur le revenu et exclut également l’impôt régional sur la production (fondé sur les dépenses) (voir texte). Source : Base de données fiscales de l’OCDE.
être déductibles en totalité ou seulement en partie sous réserve des limitations prévues par les règles en matière de sous-capitalisation6. De plus, les dividendes reçus de sociétés résidentes peuvent être déductibles, du fait que l’impôt sur les sociétés a été retenu à la source par la société qui les distribue, ou leur inclusion partielle peut être requise. Les dividendes étrangers peuvent être exonérés ou imposés tout en faisant l’objet d’un crédit d’impôt étranger, selon que les dividendes correspondent à un investissement de portefeuille ou à une prise de contrôle importante (directe) et selon que le pays de résidence du contribuable applique ou non un système fiscal fondé sur le critère de territorialité (de la source). Les conventions internationales visant à supprimer ou à limiter la « double imposition » auront également une incidence sur l’impôt qui doit être finalement versé. © OCDE 2000
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Les gains en capital peuvent être ou non imposés, et s’ils le sont, n’être inclus que partiellement dans les bénéfices imposables ou bénéficier de dispositions spécifiques en matière de report qui ont pour effet de différer l’imposition des gains réalisés par les sociétés sur les actifs s’ils sont utilisés, par exemple dans le cadre d’une activité industrielle ou commerciale similaire. Ces dispositions, ainsi que d’autres, sont importantes pour les comparaisons internationales du revenu imposable au titre de diverses activités industrielles ou commerciales. Comme on l’a noté ci-dessous, certaines de ces différences dans la détermination de la base de l’impôt sur les sociétés sont saisies par divers indicateurs des taux d’imposition effectifs (par opposition aux taux nominaux) des sociétés. En second lieu, la structure des taux nominaux d’imposition appliqués aux bénéfices imposables fait apparaître un degré de diversité considérable entre les pays de l’OCDE. Les barèmes d’imposition peuvent être uniformes ou progressifs et comporter ou non une surtaxe. Les pays fédéraux (par opposition aux pays unitaires) prévoient la possibilité de percevoir l’impôt au niveau des États, des provinces ou des cantons. Dans le cadre de systèmes cédulaires, des taux d’imposition différents peuvent s’appliquer aux différentes catégories de revenus des entreprises. Les revenus distribués peuvent être imposés à un taux légal différent de celui qui s’applique aux revenus non distribués et des taux d’imposition préférentiels ont également été instaurés en faveur des revenus des fonds propres par rapport aux revenus des créances. Si la plupart des pays ont adopté un taux uniforme de l’impôt sur les bénéfices des sociétés – correspondant à un taux fixe, invariable quel que soit le montant des bénéfices imposables des sociétés – d’autres appliquent des structures d’imposition progressives, le taux d’imposition applicable aux tranches les plus basses correspondant souvent à celui des « petites entreprises ». Au Canada, les premiers 200 000 dollars de bénéfice des entreprises sont soumis à un taux réduit à 12 pour cent de l’impôt fédéral sur les sociétés alors que le taux fédéral de base est de 28 pour cent et de même, au Royaume-Uni, les bénéfices sont imposés jusqu’à 300 000 livres à un taux de 21 pour cent applicable aux « petites entreprises » au lieu de 31 pour cent au 1er janvier 19997. La structure de l’impôt fédéral sur les bénéfices des sociétés des États-Unis est également progressive et comporte un taux maximum d’imposition de 35 pour cent applicable aux bénéfices imposables de plus de 10 millions de dollars8. Beaucoup de systèmes comportent une surtaxe qui s’applique à des taux légaux uniformes ou progressifs (c’est-à-dire une taxe sur l’impôt sur les sociétés à distinguer d’une taxe sur les bénéfices imposables des sociétés) et a souvent été instaurée à titre temporaire mais dont l’application est reconduite en pratique d’une année sur l’autre, ce qui lui donne un caractère pratiquement permanent. Autre aspect important : un certain nombre de pays Membres de l’OCDE ont des systèmes fédéraux, ce qui rend possible le prélèvement de l’impôt à un niveau intermédiaire infranational (par exemple, celui des États, des provinces ou des cantons). Par exemple, la plupart des États aux ÉtatsUnis et toutes les provinces du Canada prélèvent un impôt sur les bénéfices des sociétés. Les impôts sur les revenus prélevés par les États sont déductibles de l’impôt fédéral aux États-Unis, de même que les impôts cantonaux (et municipaux) sur les bénéfices en Suisse. Au Canada, les impôts sur les bénéfices prélevés par les provinces ne sont pas déductibles de la base de l’impôt fédéral. En revanche, le taux de base de l’impôt fédéral sur les sociétés du Canada est réduit de 10 points pour laisser une marge de manœuvre aux provinces, et accorder aux sociétés un allègement au titre de l’impôt sur les bénéfices perçu par les provinces. En Allemagne, les collectivités locales appliquent une taxe professionnelle (Gewerbesteuer) dont la base est similaire aux bénéfices imposables au titre de l’impôt fédéral sur les bénéfices (et déductible de ces bénéfices imposables) sous réserve de certains ajustements9. Au contraire, dans d’autres États fédéraux comme l’Australie, l’Autriche, la Belgique et le Mexique, seule l’administration fédérale (centrale) applique un impôt sur les bénéfices.
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On observe également une imposition au niveau local dans un certain nombre d’États unitaires. La Hongrie et le Luxembourg appliquent aussi une taxe professionnelle locale déductible à taux fixe. Au Japon, l’impôt sur les bénéfices des sociétés se compose de l’impôt national (perçu par l’administration centrale) de la taxe professionnelle perçue par l’administration locale et de la taxe d’habitation perçue par les préfectures et les municipalités. Le taux de la taxe professionnelle locale est progressif et si les © OCDE 2000
Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
collectivités locales adhèrent en général à une structure de taux normalisés (commune), les taux applicables à chaque tranche de revenu peuvent être majorés jusqu’à un niveau maximum (avec un plafond fixé par l’administration centrale, ses augmentations de taux donnant lieu à une réduction des transferts fédéraux). Le taux de 46.37 pour cent qui apparaît dans le graphique 2.1 est le taux standard global qui tient compte des liens entre les bases d’imposition applicables d’une année sur l’autre (ainsi qu’il est indiqué à l’annexe 2.A). Il existe en Italie un impôt local non déductible assis sur les dépenses désigné sous le nom de taxe régionale sur la production (IRAP) qui remplace l’ancien impôt local assis sur les bénéfices des sociétés (ILOR). Dans certains cas, des taux spécifiques d’impôt sur les sociétés s’appliquent à différents types de revenus des entreprises. En général, ces dispositions prennent la forme d’une déduction spéciale de la base de l’impôt sur les sociétés qui donne lieu à l’application d’un taux nominal spécifique aux revenus correspondants (certains préfèrent qualifier ce taux de taux effectif). Par exemple, si le taux de base de l’impôt national sur les bénéfices des sociétés est de 32 pour cent en Irlande, un taux spécial de 10 pour cent s’applique aux bénéfices des industries manufacturières et aux bénéfices des sociétés autorisées à exercer leurs activités dans le Centre international de services financiers de Dublin et dans la Zone franche de l’aéroport de Shannon, ainsi qu’aux bénéfices d’autres activités spécifiques10. Les bénéfices tirés de ces activités sont tout d’abord soumis à l’impôt au taux de base de 32 pour cent puis un allégement est demandé afin de ramener le taux effectif à 10 pour cent. De même, au Canada, une déduction applicable aux entreprises manufacturières et de transformation a pour effet de ramener le taux d’imposition fédéral applicable 7 points en dessous du taux de base. Un certain nombre d’autres pays de l’OCDE appliquent des régimes similaires visant un ensemble de secteurs qui vont des activités manufacturières aux activités financières. Les taux d’imposition qui figurent dans le graphique 2.3 font apparaître les taux légaux de base applicables aux autres activités. L’application des taux nominaux d’imposition peut aussi varier selon la politique de distribution des bénéfices des entreprises. En Allemagne, le taux de base de l’impôt sur les bénéfices des sociétés perçu par l’administration centrale est de 45 pour cent sur les bénéfices non distribués et de 30 pour cent sur les bénéfices distribués. Ce régime de fractionnement des taux nécessite la répartition des revenus entre trois fonds ou réserves principaux – revenus imposés au taux applicable aux bénéfices non distribués (EK45), revenus imposés au taux applicable aux bénéfices distribués (EK30) et enfin revenus exonérés d’impôt (EK0). Les revenus nationaux et les revenus imposables de source étrangère sont répartis entre EK45 et EK30, ou EK30 et EK0, selon le taux effectif de l’impôt sur les bénéfices des sociétés applicable aux revenus concernés. Une taxe de péréquation est appliquée dans la proportion (30/70) sur les revenus distribués à partir du fonds exonéré d’impôt EK0 (il y a des exceptions) afin de porter à 30 pour cent le taux d’imposition effectif, tandis que les remboursements sont effectués dans la proportion (15/55) sur les revenus distribués à partir de EK45 de manière à ramener le taux d’imposition effectif au taux de 30 pour cent. Cela permet de faire en sorte que les revenus distribués soient imposés à un taux uniforme de 30 pour cent, qui est utilisé comme base d’imposition des revenus distribués au niveau de l’actionnaire individuel (compte tenu de l’octroi de crédits d’impôt). Enfin, il y a lieu d’examiner l’application d’un taux différentiel selon la capitalisation de l’entreprise, que l’on peut observer dans le système italien où le taux de base de l’impôt sur les bénéfices des sociétés (IRPEG) est de 37 pour cent (impôt perçu par l’administration centrale). Un impôt dual sur le revenu (DIT) visant à encourager l’augmentation des fonds propres des sociétés, a pour effet de ramener l’impôt de base sur les bénéfices des sociétés (IRPEG) à 19 pour cent de la part du revenu imposable correspondant à un rendement fictif de 7 pour cent de l’augmentation nette des fonds propres de la société par rapport à l’actif net qui figure au bilan des sociétés pour la période comptable en vigueur au 30 septembre 1996 (c’est-à-dire qu’un taux réduit de 19 pour cent de l’IRPEG s’applique au bénéfice théorique obtenu sur l’augmentation nette des fonds propres). Un taux minimum moyen de 27 pour cent de l’IRPEG s’applique (c’est-à-dire que pour toute période, la moyenne des taux de 37 pour cent et de 19 pour cent de l’IRPEG ne peut être inférieure à 27 pour cent (en excluant l’IRAP). Le rendement théorique (« rendement ordinaire ») est fixé tous les 31 mars par le ministère des Finances11. © OCDE 2000
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2.7. Impôt sur les bénéfices des sociétés et imposition des actionnaires Parmi les fonctions d’un impôt sur les bénéfices des sociétés que l’on peut envisager, l’une des plus importantes est liée au prélèvement à la source, qui oblige les sociétés à verser l’impôt pour le compte de leurs actionnaires sur les revenus générés au niveau de la firme. Sans impôt sur les bénéfices des sociétés, les particuliers pourraient garder leurs bénéfices en réserve dans une société de manière à différer l’impôt et même éventuellement à y échapper définitivement au niveau individuel sur (la distribution de) ces revenus. Cependant, l’existence d’une imposition des revenus aussi bien au niveau des sociétés que des actionnaires pose un problème « d’intégration ». En l’absence de mécanismes d’intégration de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et de l’impôt sur les revenus des personnes physiques, les revenus des actions investies dans le secteur des sociétés sont soumis à une double imposition. En effet, les revenus qui sont soumis à l’impôt au niveau de la société le sont encore au niveau individuel lorsqu’ils sont distribués aux actionnaires sous forme de dividendes. La double imposition des revenus peut aboutir à un certain nombre de distorsions dans l’économie. Elle peut encourager les particuliers à renoncer aux avantages de la constitution de sociétés, ce qui peut aboutir à des pertes d’efficacité. Elle peut aussi faire baisser le niveau de l’épargne et celui de l’investissement des entreprises, ce qui entraîne des conséquences négatives pour la création d’emplois. Des mesures d’intégration destinées à atténuer la double imposition des revenus peuvent contribuer à compenser ou à supprimer ces distorsions (pour un examen des effets de l’imposition des dividendes et de l’allégement de la double imposition, voir annexe 2B). Les partisans de l’intégration soutiennent que l’allégement d’impôt accordé au niveau de l’actionnaire au titre de l’impôt sur les sociétés sous-jacent à une distribution de dividendes peut permettre d’abaisser le taux de rendement après impôt qu’une société doit obtenir pour attirer les actionnaires et leur offrir un taux de rendement après impôt compétitif sur leur investissement. L’intégration réussira plus ou moins à encourager l’investissement dans un projet donné en fonction d’un certain nombre de facteurs, notamment les caractéristiques du système d’intégration, la situation fiscale des actionnaires existants ou des nouveaux actionnaires qui apportent le capital et le type de capitaux utilisés pour financer le projet d’investissement (par exemple les bénéfices non distribués des sociétés, l’augmentation de capital par de nouvelles émissions d’actions, l’utilisation de capitaux empruntés). L’importance relative de ces facteurs peut différer selon la conception que l’on a de l’incidence de l’imposition des dividendes et les mesures destinées à atténuer la double imposition des revenus distribués. De plus, la double imposition des revenus distribués par les sociétés peut entraîner des distorsions dans la décision d’une entreprise quant aux modalités de financement d’un projet d’investissement et de distribution des bénéfices aux actionnaires. En général, la double imposition des dividendes perçus peut augmenter le coût relatif des nouvelles émissions d’actions comme source de financement par rapport à celui des bénéfices non distribués et de l’endettement. Un allégement au titre de l’intégration peut abaisser le coût de l’émission d’actions nouvelles (c’est-à-dire qu’il peut abaisser le taux de rendement après impôt sur les sociétés requis par les nouveaux actionnaires) et contribuer par conséquent à supprimer les distorsions fiscales induites par cette méthode de financement. Les méthodes d’intégration qui ont pour effet d’abaisser le taux effectif d’imposition des bénéfices distribués peuvent aussi réduire l’incitation à transférer aux actionnaires pour des raisons fiscales les bénéfices des sociétés par rachat d’actions plutôt que par distribution des dividendes12. 2.7.1. Les systèmes d’intégration dans les pays de l’OCDE
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Parmi les systèmes d’intégration, on peut distinguer ceux qui allègent partiellement ou intégralement la charge de l’impôt sur les bénéfices des sociétés au niveau de l’entreprise et ceux qui l’allègent au niveau de l’actionnaire. Comme exemple du premier cas, on peut citer le système de déduction applicables aux dividendes, qui consiste à accorder une déduction de l’impôt sur les bénéfices des sociétés au titre de l’impôt sur les bénéfices distribués. Parmi les systèmes qui © OCDE 2000
Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
comportent un allégement au niveau de l’actionnaire, on peut distinguer ceux qui exonèrent simplement les revenus distribués de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (par exemple le système d’exclusion des dividendes) et ceux qui au contraire incluent les bénéfices distribués dans le revenu imposable des actionnaires mais leur accordent un crédit d’impôt qui compense partiellement ou totalement l’impôt versé au niveau de l’entreprise (par exemple les systèmes d’imputation ou d’intégration au niveau de l’actionnaire). Dans la dernière catégorie de systèmes, il existe un certain nombre de possibilités. Comme on l’a noté, l’allégement fiscal accordé peut être partiel ou total. L’Allemagne, l’Australie, la Finlande, la France, le Mexique, la Norvège et la Nouvelle-Zélande appliquent tous des systèmes d’imputation intégrale. Des systèmes peuvent avoir pour effet de faire correspondre l’imposition au niveau de l’actionnaire et l’impôt sur les sociétés effectivement versé sur les bénéfices distribués. On peut comparer les systèmes de comptes d’imputation en vigueur en Australie et en Nouvelle-Zélande (encadré 2.C) aux systèmes de péréquation fiscale appliqués en Finlande, en France et au Royaume-Uni (encadré 2.D). On constate également d’autres différences (par exemple les crédits d’impôt dont bénéficient les actionnaires peuvent être ou non remboursables).
Encadré 2.C.
Systèmes de comptes d’imputation (« Franking systems »)
Dans le cadre du système d’imputation intégrale en vigueur en Australie, les sociétés de ce pays sont tenues de tenir un compte de produits nets (c’est-à-dire après impôt) afin d’enregistrer les revenus qui ont été soumis à l’impôt au niveau de l’entreprise – le compte de l’entreprise augmente chaque fois qu’elle paie l’impôt (ou reçoit un dividende après impôt ou « net » d’une autre société résidente) et diminue lorsque la société verse un dividende net. Les apports à un compte « d’imputation » d’une société au titre de l’impôt australien sur les bénéfices que l’entreprise a versés sont déterminés en multipliant le montant de l’impôt versé par un facteur (1 – u)/u, où u = 0.36 est le taux (uniforme) de l’impôt sur les bénéfices des sociétés de l’Australie. Lors de la distribution de D unités de dividendes versés à l’aide du compte d’imputation, les actionnaires individuels doivent inclure dans leur revenu imposable le montant des dividendes majoré du crédit d’impôt correspondant. En d’autres termes, l’inclusion dans le revenu imposable est donnée par la formule suivante : D{1 + [u/(1 – u)]}=D/(1 – u) Où u/(1 – u) est le crédit d’impôt correspondant au montant de l’impôt sur les sociétés versé pour D unités de dividendes. Le montant final de l’impôt sur le revenu des personnes physiques est donné par la formule suivante : m[D/(1 – u)] – D[u/(1 – u)] = D(m – u)/(1 – u) Où m indique le taux marginal de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable à l’actionnaire. L’effet net est le suivant : l’individu paie l’impôt sur le revenu des personnes physiques sur le montant des revenus distribués avant impôt sur les bénéfices des sociétés tout en bénéficiant d’un crédit d’impôt intégral sur le montant de l’impôt déjà versé lors de la distribution de dividendes au niveau de l’entreprise. Dans le cadre du système australien, le crédit d’impôt est totalement remboursable si l’impôt sur le revenu des personnes physiques qui est dû est insuffisant pour absorber la totalité du crédit. Le système norvégien est proche du système australien, avec cette différence que le taux nominal (uniforme) de l’impôt sur les revenus des personnes physiques applicable à l’actionnaire est de 28 %, taux exactement égal au taux nominal (uniforme) de l’impôt sur les bénéfices des sociétés (m = u) et que par conséquent aucun impôt additionnel n’est dû au niveau individuel.
On trouve d’autres systèmes de déduction fiscale partielle au Portugal, en Espagne et au Canada. Ces systèmes sont également similaires dans la mesure où aucune taxe de péréquation ne s’applique pour faire en sorte que le taux de l’impôt au niveau de la société soit égal au taux du crédit d’impôt de l’actionnaire. Dans le cadre du système portugais, la retenue à la source s’applique au taux de 25 pour cent et le contribuable a le choix entre un prélèvement libératoire sur les revenus distribués ou © OCDE 2000
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Encadré 2.D.
Taxe de péréquation
Les systèmes d’intégration applicables en Finlande et en France prévoient également une intégration totale, mais plutôt que de recourir à un compte « d’imputation » ils comportent une taxe de péréquation (taxe « compensatoire » en Finlande et « précompte mobilier » en France) pour faire en sorte que les revenus distribués soient imposés au niveau de la société à un taux correspondant aux crédits d’intégration accordés au niveau de l’actionnaire individuel. La taxe de péréquation est déductible de l’impôt de base sur les sociétés afin d’éviter la double imposition tout en faisant en sorte que les revenus distribués soient imposés au taux légal de base de l’impôt sur les sociétés. Le système du Royaume-Uni comporte une déduction partielle et non intégrale au titre de l’intégration. En particulier, le crédit d’impôt par unité de dividendes est de 0.25 et il est déterminé à l’aide de la formule [us/(1 – us)] où us est le taux de 20 pour cent applicable aux petites sociétés. Comme dans les systèmes mentionnés ci-dessus, les particuliers sont tenus d’inclure dans leur revenu imposable les dividendes majorés des crédits d’imputation. Un particulier imposable au taux le plus faible de l’impôt sur le revenu, qui est de 20 pour cent, ne paie aucun impôt additionnel sur un dividende (l’impôt sur le revenu des personnes physiques qui est dû compensant exactement le crédit d’impôt) alors que les contribuables soumis au taux d’imposition maximum supportent une charge fiscale additionnelle. Une taxe de péréquation connue sous le nom d’impôt anticipé sur les sociétés (« Advance Corporate Tax ») est due au taux de 20 pour cent sur les revenus distribués et peut faire l’objet d’un crédit d’impôt déductible de l’impôt de base sur les sociétés, ce qui aboutit à l’application au niveau de la société d’un taux d’imposition correspondant au degré d’imputation.
l’inclusion dans son revenu imposable du dividende majoré de la retenue à la source et du crédit d’impôt en demandant à bénéficier d’un crédit d’impôt pour les deux. Un système de retenue à la source s’applique aussi en Espagne. Au Canada, aucune taxe de péréquation ou retenue à la source ne s’applique aux revenus distribués aux actionnaires résidents qui bénéficient d’un crédit d’impôt au titre des dividendes au taux de 25 pour cent par unité de dividendes remplissant les conditions requises. Le taux du crédit correspond à un taux combiné théorique de 20 pour cent de l’impôt applicable au niveau fédéral et au niveau des provinces aux petites entreprises. En revanche, d’autres pays de l’OCDE parmi lesquels l’Autriche, la Belgique, les États-Unis, la Hongrie, le Japon, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne, la Suède et la Suisse appliquent des systèmes classiques, dans lesquels l’imputation est refusée. Dans le cadre de ces systèmes, les revenus sont imposés au niveau de la société et les bénéfices distribués après impôt sont à nouveau imposés au niveau individuel sans déduction directe au titre de l’impôt sur les sociétés versé lors de la distribution13. Parfois, une exonération limitée au titre des dividendes perçus s’applique dans le cadre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, comme dans le cas des Pays-Bas. Le débat reste ouvert sur les avantages et inconvénients respectifs de l’octroi d’une déduction totale, partielle ou d’une absence de déduction. 2.7.2. Prise en compte de la déduction au titre de l’intégration dans l’évaluation de la charge fiscale
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Comme on l’a noté ci-dessus, les crédits d’impôt permettent de réduire l’impôt au niveau individuel compte tenu de celui qui a été versé au niveau de la société sur les dividendes distribués. Le traitement des crédits d’impôt dans le cadre de l’évaluation de la charge fiscale dépend de la conception que l’on a du rôle du système d’impôt sur les sociétés. Si l’on considère que le rôle essentiel de l’impôt sur les sociétés est lié à la retenue à la source, lorsqu’on mesure la charge fiscale qui pèse respectivement sur les particuliers et sur les entreprises, le montant de l’impôt sur les sociétés applicable aux revenus distribués qui est considéré comme un acompte de l’impôt sur le revenu des personnes physiques – c’est-à-dire le montant du crédit d’impôt – doit être considéré comme faisant partie de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Par conséquent, la somme de l’impôt sur le revenu des personnes physiques mesuré sur la base des flux nets de trésorerie © OCDE 2000
Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
déduction faite des crédits d’impôt, et des crédits d’impôt obtenus sur les revenus distribués indique la charge de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. La charge de l’impôt sur les bénéfices des sociétés est alors déterminée en soustrayant le même montant de crédits d’impôts du montant des impôts sur les sociétés. Si toutefois on considère que l’impôt sur les sociétés est un prélèvement sur les entreprises en contrepartie des biens et services publics qu’elles consomment, la déduction au titre de l’intégration doit être considérée comme une réduction de la charge de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Dans cette optique, l’impôt sur les sociétés applicable aux bénéfices distribués n’est pas considéré comme un acompte d’impôt sur le revenu des personnes physiques mais comme un prélèvement à part entière sur les sociétés. Cette optique est également compatible avec l’octroi aux actionnaires d’une déduction au titre de l’impôt sur les sociétés sous forme de crédit d’impôt afin d’atténuer les distorsions résultant de la double imposition (c’est-à-dire afin d’abaisser le coût du capital et d’encourager l’épargne). Lorsqu’on mesure la charge fiscale totale qui pèse sur les revenus du capital, et qui inclut à la fois l’imposition au niveau de la société et de l’actionnaire, il n’est évidemment pas nécessaire de qualifier les crédits d’impôt de compensation de l’imposition à un niveau ou à l’autre. Toutefois, lorsqu’on mesure séparément la charge de l’impôt sur les sociétés, le problème se pose. La plupart des approches ne prennent pas en compte cette complication ou traitent implicitement la totalité de l’impôt sur les sociétés comme un prélèvement proprement dit sur les sociétés et n’opèrent pas d’ajustement compensatoire des impôts versés au titre de la déduction pour intégration.
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NOTES 1. Les sections 2.1-2.5 sont fondées sur l’étude de DeKam et Bronchi (1998). 2. Voir : OCDE, La situation des salariés au regard de l'impôt et des prestations sociales, 1998-1999 (tableau 2.5). Paris, 1999. 3. A l’exception de la Norvège. 4. Uniquement dans le cas du Danemark et de la Suisse. 5. En 1998, le taux maximum applicable au Japon a été ramené à 50 pour cent. 6. Les différences dans les taux légaux d’imposition des bénéfices des sociétés en vigueur dans les différents pays encouragent les entreprises qui effectuent des opérations transfrontières à comptabiliser les intérêts qu’elles versent (ainsi que les autres sommes déductibles de l’impôt) dans les pays à niveau d’imposition élevé de manière à réduire au minimum le montant des bénéfices imposables. En réponse à cette incitation à optimiser le régime fiscal applicable en transférant les revenus imposables hors des pays à haut niveau d’imposition (et vers les pays à faible niveau d’imposition), des règles en matière de « sous-capitalisation » peuvent être instaurées afin de limiter le montant des dettes (par rapport aux fonds propres ou aux actifs) qui peuvent être comptabilisées par une entreprise multinationale dans un pays donné (à haut niveau d’imposition), les déductions fiscales au titre des intérêts applicables aux dettes étant refusées au-delà d’un certain plafond. 7. Le taux réduit applicable au Canada, désigné sous le nom de taux d’imposition des petites entreprises, s’applique seulement aux 200 000 premiers dollars de bénéfices encaissés par les sociétés privées sous contrôle canadien. Par conséquent, les sociétés sous contrôle étranger et toutes les sociétés cotées (à la cote de marchés boursiers déterminés) se voient refuser la déduction fiscale. 8. Les bénéfices imposables sont imposés au taux de 15 pour cent jusqu’à 50 000 dollars ; au taux de 25 pour cent de 50 001 à 75 000 dollars ; au taux de 34 pour cent de 75 001 à 10 millions de dollars, les bénéfices supérieurs à 10 millions de dollars étant imposés au taux de 35 pour cent. Une taxe additionnelle de 5 pour cent est applicable aux bénéfices imposables compris entre 100 000 et 335 000 dollars (ce qui aboutit à appliquer un taux global de 39 pour cent aux bénéfices imposables dans cette tranche), ce qui a pour effet d’annuler les avantages résultant de l’application de taux progressifs inférieurs à 34 pour cent pour les sociétés dont les bénéfices imposables dépassent 100 000 dollars. 9. Les ajustements comprennent certaines dépenses qui peuvent être déduites de l’impôt fédéral sur les bénéfices des sociétés mais non de la taxe professionnelle locale et vice versa (par exemple, 50 pour cent des versements d’intérêts sur les prêts à long terme ne sont pas déductibles au titre de la taxe professionnelle). 10. Ces activités spécifiques comprennent une série d’activités de services subventionnées et orientées vers l’exportation ; la réparation de navires, certaines activités d’ingénierie, de services informatiques subventionnés, y compris la mise au point de logiciels, et des activités de transport maritime remplissant certaines conditions. 11. Les fonds propres nets sont majorés par des injections de capital en espèces (c’est-à-dire à l’exclusion des contributions en nature) des contributions au capital, des transferts des bénéfices courants aux réserves et des augmentations des réserves nouvelles constituées de primes versées en liaison avec l’émission d’actions. Les fonds propres nets sont diminués des réductions volontaires de l’actif net qui aboutissent à une diminution du capital et/ou des réserves (par exemple en cas de distribution de dividendes) ; en conséquence, les pertes encourues pour les différents exercices financiers ne réduisent pas le montant de l’augmentation de capital.
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12. Les mesures d’intégration peuvent aussi influer sur les décisions d’investissements de portefeuille transfrontières. Un trait caractéristique des systèmes fiscaux de nombreux pays de l’OCDE est le fait que, si le système fiscal du pays d’origine offre aux actionnaires individuels résidents un certain degré d’allégement de la double imposition au titre de l’impôt sur les sociétés applicables aux revenus distribués de source nationale, cet allégement n’est pas accordé par le pays d’origine dans le cas des dividendes de portefeuille de source étrangère. Par conséquent, dans ces pays sur la base des seuls facteurs fiscaux, les particuliers préféreraient généralement placer leur épargne sous forme d’actions nationales plutôt que d’actions étrangères même s’ils sont en mesure de compenser totalement la retenue à la source étrangère en demandant à bénéficier de crédits d’impôt étrangers. Toutefois, cela suppose que les taux de rendement
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Taux nominaux de l’impôt sur le revenu
après impôt sur les sociétés (avant impôt sur le revenu des personnes physiques) soient les mêmes pour les deux investissements. L’examen de cette question sort du cadre de la présente étude. 13. Les systèmes classiques d’imposition limitent l’allégement fiscal à une déduction au titre de l’impôt sur les sociétés versé. Cela signifie que l’impôt sur le revenu des personnes physiques est appliqué non pas au montant total du revenu avant impôt sur les sociétés qui sert de base à une distribution de dividende mais au montant du bénéfice après impôt sur les sociétés. Considérons une distribution mesurée par Y(1 – u) où Y représente les bénéfices avant impôt sur les sociétés et u représente le taux de l’impôt sur les sociétés. Dans le cadre des systèmes classiques, l’impôt sur le revenu des personnes physiques est applicable à Y(1 – u) et non à Y (ce qui signifie qu’une déduction de l’impôt sur les sociétés d’un montant de uY est accordée).
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Chapitre 3
RAPPORTS IMPÔTS/PIB 3.1. Introduction Le rapport impôts/PIB – qui fait apparaître la part des recettes fiscales totales dans le produit intérieur brut – est le principal indicateur agrégé utilisé par la publication annuelle des Statistiques des recettes publiques de l’OCDE pour mesurer l’importance de la fiscalité dans les pays Membres. Malgré les attraits que présente le fait d’exprimer les recettes fiscales en pourcentage du revenu global (valeur ajoutée) dans une économie donnée, cet indicateur présente d’importantes limites lorsqu’on souhaite comparer la charge fiscale et le rôle de l’État selon les pays et au fil du temps. De même, la part des dépenses totales des administrations publiques dans le PIB est un indicateur qui doit être interprété avec précaution. Les facteurs qui peuvent avoir une incidence sur le niveau et l’évolution des rapports impôts/PIB, qui peuvent varier selon les pays et affecter par conséquent la comparabilité des résultats, sont notamment les suivants : i) les proportions dans lesquelles les pays fournissent une assistance sociale ou économique par le biais de dépenses fiscales plutôt que de dépenses publiques directes1 ; ii) l’imposition ou l’exonération des prestations de sécurité sociale ; iii) les relations entre la base d’imposition, le PIB et le cycle économique ; iv) la mesure du PIB ; v) l’importance de la fraude fiscale et de l’économie souterraine, cette dernière n’apparaissant en général que de manière incomplète dans le montant du PIB ; et vi) les décalages dans le temps entre le fait générateur de l’impôt et sa collecte, notamment dans le cas de l’impôt sur les bénéfices des sociétés. Par ailleurs, lorsqu’on interprète les rapports impôts/PIB, il faut se souvenir du fait que les pays peuvent prendre des mesures – par exemple sous forme de réglementations – qui répondent à des objectifs similaires à ceux des programmes de dépenses financés par l’impôt et ont des effets économiques incitatifs et dissuasifs similaires à ceux des impôts et des dépenses, mais peuvent avoir des conséquences différentes quant à la taille du secteur public, mesurées par le rapport entre les recettes fiscales ou les dépenses publiques et le PIB. L’évaluation de la charge fiscale et du rôle de l’État dans une économie nécessite par ailleurs l’adoption d’une optique à plus long terme. C’est notamment le cas lorsque la population vieillit, car la « photographie » au cours d’une année isolée peut ne pas faire apparaître le montant des charges fiscales futures. En particulier, si on les compare aux pays qui appliquent des systèmes de retraite financés par répartition, les pays où des plans de retraite par capitalisation sont en vigueur permettent en général de différer l’impôt sur les cotisations déductibles ou exonérées, ainsi que sur les gains obtenus par le fonds de pension/l’assureur (ce qui aboutit à des recettes fiscales courantes plus faibles) jusqu’au versement de la pension de retraite à ses bénéficiaires (ce qui aboutit à des recettes fiscales futures plus élevées). © OCDE 2000
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
Ce chapitre examine comment les quatre premiers facteurs mentionnés ci-dessus, énumérés aux rubriques i)-iv) peuvent expliquer partiellement les différences structurelles dans les rapports impôts/PIB qui ne correspondent pas forcément à des différences véritables dans la charge fiscale sous-jacente qui pèse sur l’économie. Le cinquième facteur n’est pas examiné parce qu’il fait nécessairement intervenir la prise en compte de chiffres concernant l’économie souterraine dont la valeur exacte est incertaine. Le sixième facteur influe en particulier sur les comparaisons des niveaux d’imposition pour une année donnée. Outre ces facteurs, il est également important de reconnaître que chaque impôt a des effets économiques différents et qu’aucun indicateur synthétique unique n’est susceptible de faire apparaître tous les coûts économiques liés à l’impôt. 3.2. Dépenses fiscales ou dépenses directes Pour atteindre un ensemble d’objectifs économiques et sociaux, l’État peut intervenir sur le marché par la dépense publique. Il peut aussi utiliser un autre instrument, l’octroi d’avantages fiscaux comme substitut des dépenses publiques directes. Les « dépenses fiscales » sont définies comme des dépenses effectuées par le biais du système fiscal. La notion de dépense fiscale a été élaborée en tenant compte du fait que le système fiscal peut être utilisé pour atteindre des objectifs similaires à ceux des programmes de dépenses publiques mais que la prise en compte des coûts et avantages des mesures fiscales est souvent moins rigoureuse, rationnelle et observable que dans le cas des dépenses directes 2. Actuellement, une liste des dépenses fiscales figure dans les documents budgétaires annuels de plus de 10 pays de l’OCDE. Bien que la notion de dépense fiscale soit désormais bien acceptée, les définitions de ce qui constitue exactement un système fiscal « de référence » – utilisées pour identifier les dépenses fiscales comme des écarts par rapport à la norme – sont controversées. En fait, les normes implicites ou explicites (la structure « normale » de l’impôt) par rapport auxquelles les pays évaluent les dépenses fiscales varient considérablement (voir encadré 3.A).
Encadré 3.A.
Y a-t-il ou non dépenses fiscales ?
Si une déduction spéciale ayant pour effet d’abaisser le taux d’imposition effectif applicable aux revenus encaissés par les petites entreprises en dessous du taux nominal de base de l’impôt sur les bénéfices des sociétés est accordée, le taux de l’impôt applicable aux petites entreprises doit-il être considéré comme une dépense fiscale ou comme faisant partie de la structure normale des taux d’imposition ? Les différentes approches utilisées pour répondre à ces questions montrent que les pratiques des pays diffèrent en matière de présentation des comptes des dépenses fiscales. C’est l’une des raisons importantes pour lesquelles les montants des dépenses effectuées par le biais du système fiscal ne sont pas directement comparables d’un pays à l’autre.
Outre les problèmes posés par la définition d’un système fiscal « de référence », il y a plusieurs autres raisons pour lesquelles les comparaisons entre pays des données concernant les dépenses fiscales peuvent induire en erreur même si elles sont limitées à un secteur ou une activité particulière. On trouvera un examen complet de ces lacunes à la section V de l’étude sur les Dépenses fiscales que l’OCDE a publiée en 1996.
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Conformément aux explications qui figurent dans l’encadré 3.B, un pays qui préfère les dépenses fiscales aux dépenses publiques directes aura – toutes choses étant égales par ailleurs – un rapport impôts/PIB moindre que les pays qui optent pour des programmes de dépenses directes. © OCDE 2000
Rapports impôts/PIB
Encadré 3.B. Comment les dépenses fiscales réduisent le rapport impôts/PIB L’exemple théorique suivant montre comment la substitution de dépenses fiscales à des dépenses publiques directes peut affecter le rapport impôts/PIB. Supposons que les dépenses publiques totales dans le pays A soient égales à 50 pour cent du PIB et qu’un dixième du budget soit affecté à des incitations à l’investissement visant les entreprises privées. Pour stimuler l’investissement privé, le pays B utilise au lieu de subventions directes exonérées d’impôt des mesures fiscales d’incitation d’un montant équivalent correspondant à 5 pour cent du PIB. En conséquence, en termes nets, les investisseurs du pays B reçoivent de l’État une aide financière représentant la même part du PIB (5 pour cent) que les investisseurs du pays A. Toutefois, l’évaluation fait apparaître un montant total des dépenses et des impôts dans le pays B inférieur à celui du pays A dans des proportions égales à 5 pour cent du PIB. Par conséquent, le pays A pourrait réduire ses ratios d’imposition et de dépenses publiques en remplaçant les subventions directes par l’instauration d’allégements fiscaux équivalents. Malgré la suppression des incitations à l’investissement sous forme de dépenses directes, les investisseurs recevraient la même aide de l’État qu’auparavant puisqu’ils verseraient 5 pour cent du PIB de moins sous forme d’impôts sur les revenus et les bénéfices. Par conséquent, dans les deux cas, les entreprises considérées dans leur ensemble reçoivent exactement la même aide financière de l’État.
3.3. Le régime fiscal des prestations de sécurité sociale Le régime fiscal des prestations de sécurité sociale a également une incidence sur les rapports impôts/PIB et par conséquent les différences dans ce domaine n’influent pas de la même manière sur les rapports impôts/PIB selon les pays. Des allégements fiscaux peuvent être utilisés à la place des versements de transferts ou de subventions pour contribuer à la couverture des dépenses privées de santé, stimuler l’investissement en logement et faciliter l’accès à l’enseignement. Par exemple, l’exonération fiscale des prestations de sécurité sociale qui est pratiquée par certains pays constitue un moyen d’accroître les avantages après impôt qui résultent de ces programmes. Cependant, comme tous les pays n’adoptent pas cette approche, les comparaisons des rapports impôts/PIB en sont affectées (voir encadré 3.C). En pratique, le rôle des impôts directs et des cotisations sociales varie sensiblement d’un pays à l’autre. Par exemple, une étude récente de l’OCDE a montré qu’en 1995, l’impôt sur le revenu et les cotisations sociales versées par les bénéficiaires de prestations correspondaient à environ 5 à 6 pour cent du PIB au Danemark, aux Pays-Bas et en Suède, alors qu’en Australie, aux États-Unis, en Irlande et au Royaume-Uni, ces prélèvements représentaient moins de 0.5 pour cent du PIB3. Pour la Belgique, l’Allemagne, l’Italie et la Norvège, les impôts versés par ce groupe se situent dans la moyenne (0.5 à 3 pour cent du PIB). Ces différences dans les impôts directs versés par les bénéficiaires de prestations reflètent l’importance des dépenses sociales, le degré de ciblage de ces dépenses sur les titulaires de faibles revenus et le degré d’exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales de ces prestations. Par ailleurs, si les prestations sont exonérées d’impôt – ce qui se traduit par une base d’imposition globale moindre – les cotisations de sécurité sociale destinées à financer les programmes publics concernés ne sont pas déductibles dans un certain nombre de pays – ce qui a pour effet de rendre la base d’imposition plus large qu’elle ne devrait l’être – et vice versa, bien qu’il y ait d’importantes exceptions à cette règle. Dans le premier cas, l’érosion de la base d’imposition produite par l’exonération fiscale des prestations pourrait être largement compensée par la non déductibilité des cotisations de sécurité sociale. La forte augmentation du chômage dans un certain nombre de pays d’Europe continentale ainsi que le vieillissement progressif de la population ont exercé une pression à la hausse sur le niveau des dépenses de sécurité sociale. Comme le montant des revenus redistribués par le biais du système de sécurité sociale s’est accru, il en est probablement de même pour l’incidence budgétaire et statistique des différences dans les régimes fiscaux applicables aux transferts de la sécurité sociale. © OCDE 2000
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Encadré 3.C.
Modalités de l’incidence du régime fiscal des prestations sociales sur le rapport impôts/PIB
L’exemple suivant permet d’illustrer la manière dont le régime fiscal des prestations de sécurité sociale peut affecter le rapport impôts/PIB. Supposons que les dépenses publiques totales dans le pays A soient égales à 50 pour cent de son PIB et soient intégralement financées par l’impôt. Les traitements des fonctionnaires représentent le quart du budget public. Les dépenses publiques sur biens et services produits par le secteur privé absorbent un autre quart des crédits budgétaires. L’autre moitié du budget (égale à 25 pour cent du PIB) est versée sous forme de transferts qui sont imposés au niveau de leurs bénéficiaires à un taux moyen de 20 pour cent. Dans cet exemple, les bénéficiaires de prestations contribuent dans leur ensemble au dixième des recettes fiscales globales (5 pour cent du PIB). Il est indiqué que le pays B possède un secteur public de plus petite dimension, le niveau des impôts et des dépenses s’élevant à 45 pour cent du PIB. Cependant, si l’on examine de plus près son budget public et les programmes publics correspondants, on constate que du point de vue de l’incidence (nette) du secteur public sur le secteur privé, les deux pays se trouvent exactement dans la même situation. Les transferts de revenus du pays B représentent 5 pour cent du PIB de moins mais il n’impose pas ces revenus au niveau de leurs bénéficiaires. En conséquence, en termes nets les bénéficiaires de prestations qui vivent dans le pays B reçoivent la même part du PIB (20 pour cent) que ceux du pays A. Cependant, l’évaluation du niveau total des dépenses et des impôts dans le pays B montre qu’il est inférieur à celui du pays A dans la proportion de 5 pour cent du PIB. Il s’ensuit que le pays A pourrait réduire ses ratios d’impôts et de dépenses à concurrence de 5 pour cent du PIB uniquement en ayant désormais recours à l’exonération fiscale des revenus de transfert. Le poste budgétaire concernant les transferts se trouverait réduit dans la proportion de 5 pour cent du PIB sans que les bénéficiaires de prestations subissent une réduction de leur revenu disponible net. Le montant brut des prestations serait moins élevé mais du fait que les revenus de transfert seraient désormais exonérés d’impôt, leurs bénéficiaires pourraient consacrer le même montant qu’auparavant à l’acquisition de biens et services. Le tableau 3.1 ci-dessous résume les explications qui précèdent. L’incidence du régime fiscal des prestations de sécurité sociale peut être illustrée en prenant comme exemple l’aide de l’État aux familles ayant des enfants à charge. Cette aide peut être fournie de quatre manières différentes : 1) une prestation imposable pour enfants à charge ; 2) une prestation exonérée d’impôt pour enfants à charge ; 3) un crédit déductible de l’impôt sur le revenu des personnes physiques ; et 4) un abattement de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Le rapport impôts/PIB sera le plus élevé dans le premier cas et le plus faible dans le dernier, le revenu net disponible du ménage étant le même dans tous les cas. Les données disponibles montrent qu’il pourrait s’agir de montants considérables. Par exemple, dans le cas de l’Allemagne, le remplacement des allocations familiales par des crédits d’impôt en 1996 a représenté un montant de 20 milliards de DM (environ 0.5 pour cent du PIB)*.
Tableau 3.1. Ratios d’impôts et de dépenses publiques : un exemple (% du PIB) Pays
Traitements du secteur public et achats auprès du secteur privé Dépenses correspondant aux revenus de transferts Dépenses totales, rapport impôts/PIB Impôts sur les transferts Dépenses totales, raport impôts/PIB après correction en fonction des impôts applicables aux transferts Dépenses nettes correspondant aux revenus de transferts après impôts
A
B
25 25 50 5 45
25 20 45 0 45
20
20
* A la suite de la réforme intervenue en Allemagne, l’allocation pour enfants à charge qui était précédemment exonérée d’impôt (20 milliards de DM) et l’abattement pour enfants à charge (18 milliards de DM) ont été fusionnés dans le cadre d’un programme plus généreux de crédits d’impôt correspondant à une aide totale de 49 milliards de DM (chiffres de 1997). 34
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Rapports impôts/PIB
3.4. La relation entre la base d’imposition et le PIB, et les effets du cycle économique Une autre considération essentielle est le fait que les différences dans les rapports impôts/PIB ne reflètent pas nécessairement des différences de politiques fiscales entre les pays ou dans le temps. Pour illustrer cette remarque, il y a lieu tout d’abord de noter que le rapport global impôts/PIB est composé d’un certain nombre d’impôts qui figurent au numérateur4. Considérons l’un de ces éléments, par exemple le rapport impôt sur les bénéfices des sociétés (IS)/PIB. Ce rapport peut s’exprimer de la manière suivante : (IS/PIB) = (IS/Π) × (Π/PIB) (1a) où Π représente le bénéfice économique. Si τ* représente la charge effective moyenne de l’impôt sur les sociétés qui pèse sur le bénéfice économique des sociétés, de sorte que IS = τ* × Π, le rapport IS/PIB peut s’écrire de la manière suivante ; (IS/PIB) = τ* × (Π/PIB) (1b) Cette expression montre que des différences dans la valeur du rapport IS/PIB d’une période à l’autre et d’un pays à l’autre vont se produire non seulement du fait des différences d’une période à l’autre et d’un pays à l’autre entre les politiques fiscales menées – qui sont représentées par les différences dans la valeur de τ* – mais aussi du fait de différences d’une période à l’autre et d’un pays à l’autre dans le rapport entre le bénéfice économique et le PIB. Il s’ensuit que les différences dans ce rapport et plus généralement les différences dans le rapport global impôts/PIB d’une période à l’autre et d’un pays à l’autre ne peuvent être considérées comme des indicateurs directs des différences dans les politiques fiscales menées. En particulier, la contribution du capital au PIB telle qu’elle est représentée par le ratio (Π/PIB) peut se modifier dans le temps et par conséquent, on observera une variation du rapport (IS/PIB) au fil du temps, même si la politique fiscale reste constante. La part du PIB qui est effectivement soumise à l’impôt sur les bénéfices des sociétés peut varier avec l’évolution du cycle économique du fait que les entreprises demandent à bénéficier de mesures d’incitations fiscales dans des proportions variables ou par suite d’une intensification de l’activité d’optimisation fiscale. Le ratio (Π/PIB) peut différer selon les pays à un moment donné et par conséquent on peut observer des différences dans le rapport (IS/PIB) d’un pays à l’autre pour des raisons similaires. Un autre facteur important est lié au fait que l’accumulation de déficits fiscaux reportés par les sociétés sur les exercices ultérieurs et utilisés pour compenser l’impôt qu’elles doivent verser différeront d’une période à l’autre et d’un pays à l’autre à un moment donné. Ces différences auront une incidence sur le rapport IS/PIB – (selon la ventilation indiquée ci-dessus) et elles donneront lieu à des différences, d’un pays à l’autre, et d’une période à l’autre, dans la valeur de τ*, qui reflètent davantage les décisions passées de politique économique (par exemple, l’utilisation préalable d’incitations fiscales) que les priorités de la politique fiscale de la période en cours. Plus généralement, les rapports montant total des impôts/PIB et les autres rapports qui les composent et qui sont établis à partir de données globales relatives à l’impôt et au PIB (par exemple, les rapports impôt sur les sociétés/PIB) masquent d’importantes différences dans le traitement fiscal des bases d’imposition correspondantes et dans les relations entre ces bases et la valeur ajoutée brute dans l’économie, telle qu’elle est mesurée par le PIB. La conséquence est que les variations des rapports impôts/PIB d’une période à l’autre et d’un pays à l’autre peuvent ne donner que peu d’indications sur les différences dans la politique fiscale. Seul un examen plus approfondi des composantes des ratios tirés des données agrégées peut permettre de donner des éclaircissements sur les facteurs qui expliquent l’évolution observée de ces indicateurs. 3.5. Révisions de la mesure du PIB La mesure du PIB peut différer d’un pays à l’autre et d’une période à l’autre, ce qui rend difficiles les comparaisons des rapports impôts/PIB. En premier lieu, le degré d’exactitude avec lequel le PIB est mesuré par les agences statistiques des différents pays fait apparaître des variations considérables. En second lieu, l’importance de l’économie « noire » ou souterraine, qui n’est prise en compte que de © OCDE 2000
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manière partielle dans le PIB, diffère d’un pays à l’autre et semble importante dans un certain nombre de pays. Cependant, dans la mesure où aucun impôt n’est collecté sur ces activités, cette source d’erreur de mesure n’est peut-être pas très importante. Troisièmement, les chiffres indiquant le PIB font l’objet de nombreuses révisions, et notamment d’une révision et d’une mise à jour des estimations, qui n’ont pas nécessairement lieu au même moment pour tous les pays, ce qui traduit une amélioration des sources de données et des procédures d’estimation. En général, ces révisions ont également une incidence assez limitée sur les ratios d’imposition. Cependant, les chiffres indiquant le PIB peuvent connaître occasionnellement des changements plus fondamentaux lorsque les principes admis au niveau international pour évaluer le produit intérieur brut font l’objet d’un ajustement structurel. Cela s’est produit au milieu des années 80, lorsque le système des comptes nationaux de 1993 (ci-après désigné sous le nom de SCN 1993) a commencé à remplacer progressivement le système des comptes nationaux 1968 (SCN 1968) utilisé précédemment. Dans le calcul de leur produit intérieur brut, les 15 États membres de l’Union européenne sont tenus d’adhérer au système européen de comptes économiques intégrés (SEC) qui constitue essentiellement un développement du système de comptes nationaux bien qu’il en diffère par plusieurs de ses aspects5. A la suite de la révision actuelle du système de comptes nationaux, l’ESA 1979 a été remplacé par l’ESA 1995. Si l’on considère par exemple l’édition de 1999 des statistiques des recettes publiques, huit des quatorze pays de l’OCDE qui ne font pas partie de l’Union européenne déclarent encore leur produit intérieur brut selon le système des comptes nationaux de 1968. L’Australie, le Canada, la Norvège, la République tchèque et la Hongrie déclarent cependant leur PIB sur la base du SCN 1993. Au milieu de l’année 1999, 11 États membres de l’Union européenne avaient appliqué l’ESA 1995 pour évaluer leur PIB. Les estimations du PIB disponibles pour quatre membres de l’Union européenne – Autriche, Grèce, Luxembourg et Portugal – utilisent encore comme base le cadre du SCN 1968/ESA 1979, de même que dans le cas de la Suisse qui n’est pas membre de l’Union européenne. L’incidence du passage des « anciens » aux « nouveaux » indicateurs du PIB sur les ratios d’imposition peut être importante. Le cas du Danemark en offre un bon exemple (voir encadré 3.D).
Encadré 3.D.
Comment une révision du PIB peut abaisser le ratio impôts/PIB
La récente révision consistant à appliquer le cadre révisé SCN/ESA pour calculer la valeur du Produit intérieur brut a entraîné une majoration de 5.0 pour cent du PIB danois en 1997. L’effet isolé de cette révision du PIB a été d’abaisser le ratio d’imposition d’environ 2.5 points*. Par conséquent, la révision du PIB pourrait expliquer dans une large mesure les raisons pour lesquelles en 1997 – contrairement à la situation qui prévalait en 1994-1996 – le Danemark ne se trouve plus en tête de la liste lorsqu’on classe les pays de l’OCDE par ordre décroissant du rapport impôts/PIB. * Les différences ne sont pas seulement dues au remplacement de l'ancien système de comptes nationaux par le nouveau. Les données établies sur la base du SCN 1968 ne sont pas révisées, de sorte que les différences s'expliquent en partie par le passage du SCN 1968 au SCN 1993 et en partie par les révisions apportées aux données de 1997 qui devraient se traduire par des différences entre les données indiquées dans les questionnaires renvoyés en 1998 et dans ceux qui ont été renvoyés au second trimestre de 1999.
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Au cours des prochaines années, comme un nombre croissant de pays Membres de l’OCDE appliquent le cadre révisé SCN/ESA pour calculer la valeur du produit intérieur brut et procèdent à des révisions portant sur une période qui remonte plus loin dans le passé, la comparabilité des ratios d’imposition entre les différents pays et les différentes périodes s’améliorera. Cependant, il faut tenir compte des conséquences de la récente révision structurelle exceptionnelle des chiffres du PIB lorsqu’on analyse les ratios d’imposition indiqués dans l’édition de 1999 des statistiques des recettes publiques et cela constitue un argument de plus pour interpréter avec la prudence requise les ratios impôts/PIB6. © OCDE 2000
Rapports impôts/PIB
NOTES 1. Voir annexe II des Statistiques des recettes publiques dans les pays Membres de l’OCDE 1965-1979 (Paris, 1980) pour une analyse des problèmes qui se posent dans des cas-limites. 2. Si les pays exonèrent d’impôts certains éléments du revenu – par exemple les 5 000 premières unités monétaires d’intérêts perçus, de revenus de transfert encaissés ou de valeurs locatives imputées des logements occupés par leurs propriétaires – ou s’ils autorisent certaines déductions dans le calcul du revenu imposable – par exemple au titre des dépenses de santé exceptionnelles et des dons à des organismes charitables – ces exonérations et déductions sont généralement qualifiées de dépenses fiscales, c’est-à-dire de dispositions spécifiques correspondant à des dépenses publiques effectuées par le biais du système fiscal pour atteindre des objectifs économiques et sociaux. Voir : OCDE, Dépenses fiscales – Problèmes et pratiques suivies par les pays (Paris, 1984) et OCDE, Dépenses fiscales : Expériences récentes (Paris, 1996) pour un examen général des problèmes conceptuels posés. 3. Adema (1999), p. 30. 4. En particulier, le rapport global impôts/PIB, que nous pouvons désigner sous le nom de I/PIB peut être ventilé de la manière suivante : (I/PIB) = (IRPP/PIB) + (IS/PIB) + (X/PIB) où IRPP représente le montant des recettes de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, IS représente le montant des recettes de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et X représente toutes les autres recettes fiscales(c’est-à-dire les autres impôts, parmi lesquels les cotisations de sécurité sociale, les taxes sur les salaires et la main-d’œuvre, les impôts fonciers, les taxes sur la consommation, etc.). 5. Ces différences ne sont pas pertinentes pour les comparaisons impôts/PIB telles qu’elles sont indiquées dans les Statistiques des recettes publiques de l’OCDE. 6. Voir l’étude spéciale S.3 dans OCDE (1999), pages 34-38.
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Chapitre 4
TAUX MOYEN D’IMPOSITION ET DONNÉES MICRO-ÉCONOMIQUES NÉCESSAIRES 4.1. Introduction Comme on l’a noté au chapitre 1, les indicateurs de la charge fiscale qui rattachent les impôts versés par les ménages et/ou les entreprises au concept économique de revenu en général offrent un indicateur beaucoup plus révélateur de la charge et de l’incidence des systèmes fiscaux qu’une simple prise en compte des taux d’imposition nominaux (légaux). De même, ces indicateurs sont plus significatifs que les chiffres qui expriment les recettes fiscales en pourcentage du PIB. Le fait que l’on continue à s’intéresser au calcul des taux moyens d’imposition des revenus du capital, des revenus du travail et d’autres agrégats peut s’expliquer par au moins quatre considérations. En premier lieu, d’autres indicateurs qui présentent un intérêt pour la politique fiscale, notamment les taux d’imposition nominaux et les taux marginaux effectifs d’imposition ne prennent pas complètement en considération les facteurs qui déterminent la charge fiscale et les effets d’incitation. Les taux d’imposition nominaux, bien qu’ils soient susceptibles d’avoir une incidence sur l’incitation à l’investissement et l’incitation au travail, ne permettent pas de prendre en compte d’autres considérations fiscales tout aussi importantes (et peut-être encore plus)1. De même, les taux marginaux effectifs d’imposition, bien qu’ils prennent en compte un certain nombre de facteurs considérés comme jouant un rôle important en matière d’incitation à l’investissement et au travail, peuvent donner dans certains cas des indications trompeuses sur les effets incitatifs du système fiscal (voir chapitre 5). En revanche, les taux moyens d’imposition, du fait qu’ils incluent au numérateur le montant effectif de l’impôt collecté, prennent en compte implicitement l’effet combiné des taux nominaux de l’impôt sur le revenu, les déductions fiscales et les crédits d’impôt. Les taux moyens d’imposition tiennent compte également des effets des stratégies fiscales sur la base d’imposition nationale, ainsi que des allégements fiscaux qui résultent de pratiques administratives laxistes ou discrétionnaires. Par conséquent, les taux moyens d’imposition, s’ils sont mesurés avec exactitude, donneront une indication bien meilleure de la charge fiscale totale. De plus, ces taux peuvent être utiles pour expliquer les effets de la fiscalité sur les comportements et dans certains cas, ils peuvent constituer de meilleurs indicateurs que les taux marginaux effectifs d’imposition2. En second lieu, on a l’impression, peut-être à tort, que l’analyse en termes de taux moyens d’imposition constitue intrinsèquement un exercice plus simple que d’autres types d’analyses fiscales, par exemple l’analyse en termes de taux marginaux effectifs d’imposition. En particulier, il n’est pas nécessaire d’approfondir dans le détail les règles qui régissent la détermination des abattements au titre du coût du capital, des crédits d’impôt, du coût du capital financier, etc., qui doivent être pris en compte dans la formule des taux marginaux effectifs d’imposition. L’effet net de ces règles et des autres sur la charge fiscale est saisi dans l’évaluation du montant final des recettes fiscales. En troisième lieu, les responsables politiques souhaitent souvent connaître la manière dont le système fiscal exerce son incidence sur l’économie et ses agents – par exemple, le taux d’utilisation des allègements fiscaux spéciaux par les différentes couches socio-économiques ; le degré de redistribution des revenus entre les ménages qui résulte d’un barème progressif d’impôt sur les revenus des personnes physiques. En fait, les responsables politiques comme le public s’intéressent © OCDE 2000
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beaucoup à l’évaluation de l’équité dans l’application des programmes fiscaux spécifiques ainsi que de celle du système fiscal en général. Par exemple, des questions se posent concernant la manière dont la charge fiscale est répartie entre les particuliers et les sociétés, entre la main-d’œuvre et le capital et la manière dont cet équilibre s’est modifié dans le temps. On souhaite par ailleurs savoir plus exactement si le système fiscal a un effet dissuasif, incitatif ou neutre vis-à-vis de l’investissement et de la création d’emplois, avec souvent un intérêt tout particulier pour le régime fiscal applicable aux petites et moyennes entreprises. Des problèmes d’équité et d’efficacité se posent si les bénéfices des petites entreprises sont considérés comme surtaxés, ce qui fait baisser les bénéfices non distribués après impôt, qui constituent la principale source de financement des petites et moyennes entreprises. Quatrièmement, il est admis que, quelles que soient les forces ou faiblesses relatives des statistiques de taux moyen d’imposition, ces chiffres sont établis, cités, interprétés et utilisés pour servir de base aux débats de politique fiscale. C’est pourquoi, on cherche de plus en plus à mieux connaître les sources utilisées dans l’élaboration de ces statistiques, l’usage qui peut en être fait et ses limites. 4.1.1. Aspects de l’imposition des sociétés L’imposition des entreprises a joué un rôle essentiel dans les débats publics récents sur la place de la fiscalité. Étant donné les pressions de plus en plus fortes exercées par la concurrence sur les entreprises du fait de la libéralisation des flux d’échanges et d’investissements, les entreprises multinationales soulignent souvent la nécessité d’abaisser les taux de l’impôt sur les sociétés pour attirer les investissements directs étrangers et exercer un effet dissuasif sur les fuites de capitaux. En revanche, il est apparu que la charge fiscale était progressivement transférée vers les facteurs de production les moins mobiles, notamment la main-d’œuvre peu qualifiée, et la consommation, ce qui a suscité des demandes visant à accroître de la charge de l’impôt sur les sociétés, afin que les entreprises paient une part plus équitable de l’impôt pour financer les programmes publics. Ce débat a renforcé la demande d’indicateurs fiables de la charge de l’impôt sur les sociétés permettant d’effectuer des comparaisons entre les facteurs de production, les pays et les différentes périodes. Nombreux sont ceux qui soutiennent que ces demandes ne sont pas réalistes dans la mesure où le calcul de la charge de l’impôt sur les sociétés est artificiel, les sociétés étant simplement des formes juridiques par l’intermédiaire desquelles les particuliers peuvent effectuer des transactions. Par conséquent, il faudrait mettre l’accent sur la mesure de la charge fiscale qui pèse sur le capital, compte tenu non seulement des impôts sur les revenus perçus au niveau des sociétés, mais aussi de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux rendements obtenus par les apporteurs individuels de capital. Comme on l’a noté ci-dessous, la détermination de l’impôt sur les revenus des personnes physiques applicable au rendement de l’investissement n’est pas un exercice simple, et il faut avoir recours à des données microéconomiques pour procéder à des estimations fiables. Toutefois, cela mis à part, l’intérêt manifesté pour des indicateurs distincts de la charge de l’impôt sur les sociétés ne diminuera peut-être pas, et pourrait même, en fait, augmenter étant donné la distinction qui est souvent opérée entre les impôts applicables aux particuliers et les impôts applicables aux sociétés et les pressions continues qui s’exercent dans le sens du maintien du taux de l’impôt sur les sociétés à un faible niveau.
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Comme le montre la discussion, aucune des approches envisagées pour aborder ces questions ainsi que d’autres concernant la charge fiscale n’est sans présenter des lacunes, que l’on se fonde sur des données agrégées publiées ou sur des données au niveau de l’entreprise. Les problèmes que posent en général les données agrégées, à savoir ceux qui sont liés à l’impossibilité de procéder aux ajustements nécessaires pour assurer la cohérence de l’approche – dans ce cas, la cohérence entre les montants qui figurent au numérateur et ceux qui figurent au dénominateur – se retrouvent également ici. Par ailleurs, les données collectées au niveau des entreprises qui sont publiées, si elles présentent en principe cet avantage, posent d’autres problèmes concernant aussi bien le numérateur (le montant des impôts versés) que le dénominateur (les bénéfices). Les impôts versés peuvent concerner en partie des bénéfices encaissés au cours d’autres années et ne sont donc pas nécessairement liés aux bénéfices de l’année en cours. Par ailleurs, les comptes publiés par chaque entreprise peuvent ne pas faire apparaître séparément l’ensemble des impôts versés. En ce qui concerne le dénominateur, les © OCDE 2000
Taux moyen d’imposition et données micro-économiques nécessaires
bénéfices déclarés dans les comptes annuels traduisent des pratiques comptables nationales qui rendent plus difficiles les comparaisons internationales de taux d’imposition fondés sur des données collectées au niveau de l’entreprise. De plus, l’échantillon d’entreprises considéré peut ne couvrir que des secteurs spécifiques de l’économie et certaines années. Les taux moyens d’imposition calculés pour un secteur de l’économie, ne sont pas forcément représentatifs de la charge fiscale d’autres secteurs. Par ailleurs, on peut s’intéresser à l’examen de l’évolution des charges fiscales sur une période plus longue que celle pour laquelle des données détaillées au niveau de l’entreprise sont disponibles. En l’absence d’une série de données détaillées et représentatives collectées au niveau de chaque entreprise et couvrant les principaux secteurs de l’économie au cours de la période envisagée, les analystes de la politique fiscale doivent se tourner vers d’autres données et d’autres techniques d’estimation. Certaines des principales options disponibles sont examinées ci-dessous. 4.2. Deux cadres d’évaluation de la charge de l’impôt sur les sociétés Les taux moyens d’imposition obtenus pour les entreprises constituées en sociétés peuvent être calculés (avec un décalage tenant compte des délais de collecte et de traitement des données requises) comme le rapport entre l’impôt sur les bénéfices des sociétés et un indicateur du bénéfice ou surplus avant impôt. En général, l’accent est mis sur l’impôt national sur les bénéfices des sociétés (autrement dit, il n’est pas tenu compte de l’impôt étranger sur les revenus de source étrangère) appliqué aux sociétés résidentes, quel que soit leur propriétaire (national ou étranger). En principe, l’impôt sur les sociétés effectivement versé devrait être inclus au numérateur, mais plusieurs études établissant les taux moyens de l’impôt au niveau de l’entreprise sur la base de données tirées des comptes financiers utilisent le montant des impôts à verser tel qu’il est déclaré dans les documents comptables. Le bénéfice économique (par opposition au bénéfice comptable ou au bénéfice imposable) devrait figurer au dénominateur, ce qui pourrait nécessiter l’ajustement des bénéfices financiers en fonction de l’inflation, l’exclusion des entreprises déficitaires et une prise en compte spécifique du report des pertes sur les exercices ultérieurs, ainsi que d’autres ajustements éventuels pour assurer une concordance entre les montants qui figurent au numérateur et au dénominateur3. Dans l’évaluation des charges fiscales effectives, on peut distinguer deux types de cadres – les indicateurs rétrospectifs et les indicateurs prospectifs. Les indicateurs rétrospectifs du taux moyen de l’impôt sur les sociétés évaluent le taux moyen de cet impôt sur les bénéfices tirés du capital précédemment acquis (c’est-à-dire existant/installé) des entreprises. Ces cadres sont « rétrospectifs » en ce sens qu’ils évaluent le montant courant de l’impôt dû sur les bénéfices générés à partir du stock de capital accumulé dans le passé4. Dans la catégorie des taux moyens d’imposition rétrospectifs, on peut opérer une distinction entre les approches qui sont fondées sur des données agrégées (au niveau de l’ensemble de l’économie) y compris les taux d’imposition dits implicites, et celles qui sont fondées sur des données propres à chaque entreprise (micro-économiques) (qui peuvent être diffusés dans le public ou confidentiels). Les données obtenues au niveau de l’entreprise offrent l’avantage de pouvoir être agrégées pour permettre d’obtenir des taux spécifiques par taille de l’entreprise ou par secteur. On peut aussi envisager des taux moyens d’imposition prospectifs qui évaluent les impôts sur les sociétés en pourcentage du bénéfice avant impôt qui sera réalisé sur un investissement prévu. Tandis que les indicateurs rétrospectifs pourraient être les indices les plus appropriés, s’ils sont évalués avec exactitude, pour étudier les problèmes d’équité posés par le système fiscal, leur intérêt est peut-être limité lorsqu’on cherche à déterminer l’incidence du système fiscal en vigueur sur les investissements dans des capacités productives nouvelles. Cette seconde approche de l’évaluation des charges fiscales qui pèsent sur l’investissement nouveau répond bien à cette dernière préoccupation. Dans la catégorie des indicateurs prospectifs, on peut distinguer le taux moyen d’imposition utilisé dans les analyses de projet et les taux marginaux effectifs d’imposition. Les taux moyens d’imposition utilisés dans les analyses de projet considèrent un projet d’investissement isolé et mesurent le montant des impôts sur les sociétés à verser en pourcentage du bénéfice économique pour un montant déterminé (forfaitaire) de capital investi. Au contraire, l’analyse en termes de taux marginaux effectifs d’imposition évalue la charge fiscale à la marge, sur © OCDE 2000
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la dernière unité monétaire investie, en utilisant les modèles théoriques qui caractérisent un comportement d’investissement optimal. Ces indicateurs prospectifs sont traités dans le chapitre 5. Nous commençons ci-dessous par envisager l’analyse en termes de taux « implicites » d’imposition. Ces indicateurs ont été largement étudiés dans le passé récent, du moins dans le cadre européen. L’attrait qu’ils exercent peut s’expliquer dans une large mesure par le fait qu’ils peuvent être obtenus en utilisant des données publiées (tirées des Statistiques des recettes publiques de l’OCDE et des données des comptes nationaux). Pourtant, ils peuvent constituer des indicateurs très trompeurs de la charge fiscale, notamment dans les cas des taux d’imposition implicites des sociétés qui sont examinés ci-dessous. Les sections suivantes considèrent les taux d’imposition moyens rétrospectifs obtenus en utilisant des données agrégées et les résultats obtenus en utilisant des données micro-économiques. En ce qui concerne l’utilisation de données micro-économiques, si les résultats obtenus en utilisant les informations tirées des comptes financiers sont significatifs, nous sommes d’avis qu’il faudrait avoir recours aux données confidentielles collectées par les administrations centrales. Seules ces données sont suffisamment détaillées pour permettre d’obtenir le degré de précision nécessaire pour aboutir à des taux moyens d’imposition des sociétés cohérents sur le plan interne et à des indicateurs de la charge fiscale qui pèsent sur les revenus du capital et du travail. 4.3. Taux moyens implicites d’imposition De même que les indicateurs des taux moyens d’imposition fondés sur les bénéfices, les taux d’imposition implicites des sociétés obtenus pour l’économie dans son ensemble incluent les recettes agrégées de l’impôt sur les bénéfices des sociétés au numérateur. Toutefois, l’excédent d’exploitation des sociétés qui est déclaré dans les comptes nationaux figure au dénominateur 5 . Le bénéfice d’exploitation, qui diffère des définitions comptables des bénéfices des entreprises est mesuré brut, incluant les intérêts, loyers et redevances versés par les sociétés6. Pour cette raison et pour plusieurs autres, les variations des taux implicites d’imposition des sociétés dans le temps et d’un pays à l’autre ne peuvent être directement interprétées comme reflétant des changements de la politique fiscale ou des incitations à l’investissement, avec les conséquences qui en résultent quant à l’utilité de cet indicateur comme instrument de politique fiscale. La discussion qui suit traite des difficultés potentielles de la mesure des taux moyens « implicites » d’imposition pour les catégories suivantes de revenus et de facteurs de production : 1. revenus des personnes physiques (sous-section 4.3.1) ; 2. bénéfices des sociétés (sous-section 4.3.2) ; 3. capital (sous-section 4.3.1) ; et 4. main-d’œuvre (sous-section 4.3.4). La section suivante indique le mode d’utilisation des données micro-économiques pour traiter les problèmes qui ont été identifiés7. Dans l’examen de ces quatre taux moyens implicites d’imposition, des formules sont présentées pour faciliter la discussion. Bien qu’il soit admis que des variantes de ces formules puissent s’appliquer, les catégories de problèmes identifiés en général sont communes à toutes les formulations possibles, ce qui permet dans la plupart des cas de se référer à une représentation unique. Nous choisirons ici d’utiliser les formules qui figurent dans Mendoza et al. (1994), sauf indication contraire. 4.3.1. Taux moyens de l’impôt sur le revenu des personnes physiques Le taux moyen de l’impôt sur le revenu des personnes physiques peut s’exprimer de la manière suivante : tP = PIT1100/(W + PEI + OSPUE)
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(1)
où PIT1100 représente les impôts sur les revenus, les bénéfices et les gains en capital des particuliers (catégorie 1100 des statistiques des recettes publiques), W indique les salaires et traitements en espèces et en nature versés aux salariés, PEI représente les revenus de la propriété et de l’entreprise © OCDE 2000
Taux moyen d’imposition et données micro-économiques nécessaires
perçus par les ménages, et OSPUE représente l’excédent d’exploitation des entreprises individuelles privées8. Traitement des gains en capital La catégorie 1100 inclut l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux gains en capital (nets). Toutefois, le dénominateur exclut la base d’imposition correspondante (les gains en capital nets réalisés), ce qui implique un manque de cohérence entre le numérateur et le dénominateur du taux moyen d’impôt sur le revenu des personnes physiques. Cette distorsion pourrait être supprimée en principe en soustrayant du numérateur l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux gains en capital nets9 . Cependant, cette approche supprimerait une composante de l’impôt sur le revenu des personnes physiques qui est susceptible d’être importante. Une autre possibilité pourrait consister à ajouter au dénominateur les gains en capital nets réalisés par les particuliers résidents sur la vente/la cession de biens situés dans le pays. Ces informations seraient généralement fournies sur les déclarations d’impôts individuelles dans les pays qui appliquent cet impôt bien que, d’après les informations dont dispose le Secrétariat, il semble que peu de pays aient rassemblé ces données. Il y a peu de chances pour que les informations sur les gains nets en capital réalisés soient disponibles dans les pays qui n’imposent pas ces gains et pour que la comparabilité d’un pays à l’autre soit assurée il faudrait que l’ajustement du dénominateur ait lieu pour tous les pays. Cependant, pour les pays qui imposent les particuliers sur les gains en capital nets, il serait utile de déterminer l’importance, en termes quantitatifs, de l’omission des gains nets en capital réalisés du dénominateur du taux moyen d’imposition des revenus des personnes physiques. Prise en compte de la déduction au titre de l’intégration Les crédits d’impôt qui permettent d’atténuer la double imposition pour les actionnaires au titre de l’impôt sous-jacent sur les sociétés applicable aux dividendes perçus, sont généralement saisis dans les statistiques des recettes publiques à la rubrique 1100. On peut soutenir que la charge de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux dividendes perçus est mesurée d’une façon satisfaisante en réintégrant les crédits d’impôt dans la mesure où l’impôt, perçu au niveau de la société sur les bénéfices distribués est en fait un acompte de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable à ces montants. Cet argument est particulièrement puissant dans les systèmes où une taxe de péréquation est applicable aux revenus distribués au niveau de la société et où cette taxe donne lieu à un crédit d’impôt déductible de l’impôt normal sur les bénéfices des sociétés, le taux applicable permettant de compenser le crédit d’impôt accordé au niveau de l’actionnaire individuel. L’ajustement du taux moyen d’imposition en fonction de la déduction au titre de l’intégration consisterait à majorer le montant total des recettes de l’impôt sur le revenu des personnes physiques indiqué à la rubrique 1100 d’un montant théorique égal au total des crédits d’impôt obtenus au niveau de l’actionnaire individuel (et lorsqu’on mesure le taux moyen d’imposition des bénéfices des sociétés (voir ci-dessous) à réduire les recettes totales de cet impôt (catégorie 1200) du même montant). Selon le principe de la déclaration sur la base des décaissements, les chiffres indiqués dans les Statistiques des recettes publiques ne sont pas ajustés de cette manière. Le montant global des crédits d’impôt accordés aux actionnaires n’est pas déclaré séparément dans les statistiques des recettes publiques 1 0 . Cependant, ce montant (ou son estimation approximative) pourrait être tiré en principe de données concernant les contribuables individuels, ce qui nécessite dans certains cas des hypothèses simplificatrices concernant le report des crédits non utilisés. Des informations sur l’importance de l’ajustement requis constitueraient une autre contribution utile à l’analyse des données micro-économiques. Impôt sur les revenus des personnes physiques de source étrangère Les deux catégories que constituent les salaires et traitements versés aux salariés (W) et les revenus (recettes) de la propriété et de l’entreprise des ménages (PEI) couvrent les montants versés © OCDE 2000
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aux ménages par les producteurs résidents. Pour les pays qui imposent les particuliers résidents sur leur revenu mondial, l’indicateur de l’impôt sur le revenu des personnes physiques PIT 1100 au numérateur du taux moyen d’imposition inclut non seulement l’impôt national sur les revenus de la propriété et de l’entreprise et sur les salaires de source nationale mais aussi l’impôt national net sur les revenus de la propriété et de l’entreprise, ainsi que sur les salaires, de source étrangère 11. Cela pose la question de savoir quelle est l’importance de la distorsion occasionnée au taux moyen d’imposition du fait de cette asymétrie dans le mode de mesure. Lorsqu’on dispose de données micro-économiques qui identifient séparément les revenus de source étrangère, le montant net de l’impôt national sur ces montants peut être estimé en principe et soustrait du numérateur. Cela permet d’évaluer l’importance de ce facteur. 4.3.2. Taux moyens d’imposition des bénéfices des sociétés Le taux moyen d’imposition des bénéfices des sociétés peut s’exprimer de la manière suivante : tC = CIT1200 /OSC
(2a)
où CIT 1200 représente les impôts sur les revenus, bénéfices et gains en capital des sociétés et OSC représente l’excédent d’exploitation du secteur des sociétés (égal à l’excédent d’exploitation total des unités de production résidentes OS, diminué de l’excédent d’exploitation des entreprises individuelles privées, OSPUE. Caractère trop large de la notion d’excédent d’exploitation L’excédent d’exploitation OS C qui figure au dénominateur de l’expression (2a), bien qu’il soit mesuré net des salaires et traitements, inclut les intérêts versés, loyers, redevances et autres sommes déductibles des revenus comptables. La base utilisée dans l’équation (2a) est donc plus large que ce qui pourrait être considéré comme justifié lorsqu’on examine un taux moyen de l’impôt sur les bénéfices des sociétés. Par conséquent, il serait instructif d’examiner une autre base possible qui retranche d’OS C les sommes déductibles à des fins comptables (y compris les intérêts, loyers et redevances versés) au secteur des ménages et aux non-résidents. Si l’on désigne par ABY C , cet indicateur du revenu comptable ajusté, le taux moyen de l’impôt sur les bénéfices des sociétés peut aussi être mesuré de la manière suivante : tC^ = CIT1200/ABYC
(2b)
Les chiffres obtenus à l’aide de l’équation (2b) – ajustés afin d’exclure les entreprises déficitaires et l’impôt sur les sociétés applicable aux revenus de source étrangère (comme on le verra ci-dessous) – pourraient être désignés plus exactement sous le nom de taux moyens de l’impôt sur les sociétés12. Traitement des pertes Les données des comptes nationaux concernant la production et les revenus couvrent aussi bien les entreprises rentables que les entreprises non rentables. L’insertion des entreprises non rentables tend à abaisser l’excédent global d’exploitation dans l’économie13. Comme les sociétés déficitaires ne paient généralement pas d’impôt, l’inclusion de l’ensemble de ces entreprises n’aurait pas d’incidence sur le numérateur du taux moyen d’imposition des sociétés tout en réduisant son dénominateur. L’effet net est une augmentation du taux moyen d’imposition au-delà de ce que l’on observerait si les entreprises déficitaires étaient exclues.
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Certains soutiennent que, pour que le taux moyen d’imposition reflète exactement la charge fiscale des sociétés, il faudrait exclure les entreprises en situation déficitaire14. En d’autres termes, l’inclusion de ces entreprises tend à surestimer le taux moyen d’impôt sur les sociétés rentables. En utilisant des données micro-économiques, il serait possible de retirer les entreprises non rentables de l’échantillon, ce qui permettrait d’obtenir le taux moyen d’imposition applicable aux entreprises rentables. © OCDE 2000
Taux moyen d’imposition et données micro-économiques nécessaires
Différences de taux moyen d’imposition selon les secteurs L’un des inconvénients majeurs des taux moyens d’imposition des sociétés tirés de données globales est dû au fait que celles-ci n’indiquent pas les différences entre les secteurs quant à l’impôt qui pèse sur les sociétés. Cette lacune résulte du fait que les statistiques des recettes publiques ne comportent pas de ventilation par secteur des recettes de l’impôt sur les sociétés. Les comptes nationaux ne fournissent pas non plus la ventilation nécessaire15. On peut cependant obtenir des taux moyens d’imposition par secteur en utilisant des données micro-économiques tirées d’un échantillon représentatif de sociétés réparties selon leur numéro de classification par industrie. Lorsqu’on détermine les taux moyens d’imposition des sociétés par secteur, il est clair que l’utilisation de l’excédent d’exploitation des sociétés au dénominateur n’est pas appropriée16 . Il faudrait plutôt utiliser un indicateur ajusté du bénéfice comptable, tel que celui qui a été examiné ci-dessus et qui figure dans l’équation (2b). Le montant des taux moyens d’imposition étant obtenu en utilisant cette approche, il serait intéressant de déterminer si l’on observe des taux moyens d’imposition relativement faibles dans les industries ou secteurs dont les activités semblent généralement plus mobiles que d’autres (par exemple, le secteur des institutions financières par comparaison avec le secteur manufacturier)17. Impôt sur les sociétés applicable aux revenus de source étrangère Pour les pays qui imposent les sociétés résidentes sur leurs revenus étrangers – y compris les revenus de succursales étrangères, les dividendes reçus de filiales étrangères et autres revenus d’investissement de source étrangère – l’indicateur de l’impôt sur les bénéfices des sociétés CIT1200 qui figure au numérateur du taux moyen d’impôt sur les sociétés aura un champ d’application plus large que le dénominateur, qui n’inclut que l’excédent d’exploitation généré par des unités de production résidentes. Comme dans le cas du taux moyen d’impôt sur le revenu des personnes physiques, cela pose la question de savoir quelle est l’importance des distorsions entre l’évaluation des montants figurant au numérateur et de ceux figurant au dénominateur. Il serait également intéressant de savoir si ces distorsions se sont aggravées avec le temps comme on pourrait s’y attendre, étant donné l’intérêt accru pour les activités d’investissement transfrontières. Là encore, il pourrait être utile d’utiliser des données micro-économiques pour traiter cette question. 4.3.3. Taux moyen d’imposition des revenus du travail Le taux moyen d’imposition des revenus du travail peut s’exprimer de la manière suivante : tL = {[t P(W) + SSC2000] + PAY3000}/(W + SSCF2200)
(3)
où tP est le taux moyen d’imposition des revenus (totaux) des personnes physiques tel qu’il est indiqué à la rubrique (a). SSC2000 représente la somme des cotisations de sécurité sociale des salariés (SSCE2100), des employeurs (SSCF2200), des travailleurs indépendants et d’autres catégories telles que les bénéficiaires de prestations (SSCPUE2300), et des contributions qu’il n’est pas possible de ventiler entre ces trois catégories (SSCOTH2400). Enfin, PAY3000 représente les impôts sur les salaires et la main-d’oeuvre18. Impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux salaires L’approche communément adoptée lorsqu’on utilise des données globales pour mesurer un taux moyen d’imposition applicable à la main-d’œuvre consiste à estimer le montant de l’impôt sur le revenu des personnes physiques perçu sur les salaires et traitements en utilisant le taux moyen d’imposition des revenus des personnes physiques tP. Même lorsque les revenus du travail et du capital sont cumulés en vue de l’imposition au niveau individuel, une telle approche est critiquable lorsqu’on estime que le revenu total du travail est soumis – en moyenne pour les différentes catégories de contribuables – à une charge fiscale moyenne sensiblement différente de celle qui pèse sur les revenus du capital. © OCDE 2000
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En général, les revenus du capital sont concentrés entre les mains des titulaires de revenus élevés et, par conséquent, dans le cadre d’une structure de taux progressifs, ils sont soumis à des taux marginaux et moyens d’imposition plus élevés que les revenus du travail. En revanche, des avantages spéciaux ou des allégements fiscaux peuvent s’appliquer aux revenus du capital, de sorte que le taux moyen d’imposition applicable à ces revenus peut n’être pas sensiblement différent de celui qui s’applique aux revenus du travail. Le fait d’imposer cette hypothèse dans le cadre de l’exercice, comme le fait le modèle de taux moyen d’imposition lorsqu’il est fondé sur des données globales, constitue néanmoins une lacune de ce cadre d’analyse. En utilisant des données au niveau micro-économique – c’est-à-dire des données fiscales collectées au niveau du contribuable individuel – il devrait être possible d’obtenir des évaluations plus exactes des taux moyens d’impôt sur le revenu des personnes physiques applicables à des éléments distincts de revenu, notamment les salaires et traitements, les revenus imposables du capital, ainsi que les transferts (s’ils sont imposables), et d’examiner comment ces indicateurs peuvent être comparés à ceux qui sont obtenus en utilisant des données globales. Cela devrait être possible lorsque la série de données inclut, pour les contribuables individuels de l’échantillon, des chiffres déclarés séparément en ce qui concerne les éléments de revenu pour lesquels des ratios d’imposition sont calculés. L’annexe 4.B examine les moyens d’utiliser des données micro-économiques à cette fin et examine trois systèmes possibles à titre d’exemple : i) une imposition progressive des revenus combinés du travail et du capital (imposition globale) ; ii) le système i) comportant la prise en compte des revenus du capital à hauteur de 50 pour cent ; et iii) un système fiscal dual comportant une imposition distincte du travail et du capital. Comme le montre l’annexe 4.B, plutôt que d’utiliser t P dans l’équation (3), on peut obtenir un taux moyen de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable au montant total des salaires et traitements à partir d’un échantillon représentatif de contribuables de la manière suivante : tW = Σj(Wj/W) * (PITj/Yj) = Σjwj * tPj
(4)
où Wj indique les revenus salariaux du je contribuable d’un échantillon de n individus (j = 1, …, n) et où W = ΣjWj indique le montant total des salaires et traitements dans l’échantillon. PIT j indique le montant final de l’impôt sur le revenu des personnes physiques qui est dû par le je contribuable sur son revenu net total de Yj. L’équation (4) permet donc de déterminer le taux moyen de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux revenus salariaux t W comme étant la moyenne pondérée du taux moyen d’impôt sur le revenu des personnes physiques de chaque contribuable tPj, les pondérations w j = (Wj/W) attribuées à ces taux d’imposition individuels reflétant la répartition du total des salaires et traitements entre contribuables. L’utilisation de données micro-économiques pour obtenir une estimation plus précise du montant du taux moyen d’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux traitements et salaires permettrait de remédier à une insuffisance majeure de l’analyse en termes de taux moyen d’imposition fondée sur des données globales. 4.3.4. Taux moyen d’imposition des revenus du capital Le taux moyen d’imposition applicable aux revenus du capital peut s’exprimer de la manière suivante19 : tC = [tP(PEI + OSPUE) + CIT1200 + TIMP4100 + TFT4400]/OS
(5)
où TIMP4100 représente les impôts récurrents sur la propriété immobilière, TFT4400 représente les impôts sur les transactions financières et les opérations en capital, les autres variables t P, PEI, OSPUE, OS et CIT1200 ayant été définies ci-dessus. Impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux revenus de la propriété et de l’entreprise 46
L’approche généralement adoptée pour obtenir un taux moyen d’imposition des revenus du capital consiste à regrouper les sociétés et les entreprises non constituées en sociétés et à estimer © OCDE 2000
Taux moyen d’imposition et données micro-économiques nécessaires
l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux revenus du capital, y compris les revenus de la propriété de source nationale perçus par les ménages et les revenus des travailleurs indépendants, en utilisant un taux moyen global d’imposition des revenus des personnes physiques (tP). Cette méthodologie a été critiquée pour au moins deux raisons. En premier lieu, comme on l’a noté en ce qui concerne le taux moyen d’imposition de la main-d’œuvre, une erreur potentielle de mesure se trouve introduite lorsqu’on utilise un taux moyen d’imposition des revenus des personnes physiques obtenu en utilisant des données agrégées pour estimer l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable à des catégories spécifiques de revenus. En second lieu, le fait de traiter l’excédent d’exploitation des entreprises non constituées en sociétés (OSPUE) comme correspondant uniquement au rendement du capital, et l’impôt qui lui est applicable comme étant entièrement un impôt sur le capital, a été critiqué comme faussant les résultats, dans la mesure où le montant de cet excédent représente en fait à la fois le rendement du capital et du travail fourni par les entrepreneurs individuels20. On pourrait certes s’efforcer de ventiler OSPUE et l’impôt qui lui est applicable entre le travail et le capital, mais il est admis que le fractionnement de OSPUE entre ces éléments de travail et de capital restera toujours un exercice assez arbitraire. Une autre approche consisterait à traiter séparément les entreprises non constituées en société et à calculer un taux moyen d’imposition applicable aux revenus combinés des propriétaires d’entreprises individuelles. Il devient alors inutile d’imputer OSPUE à la combinaison (inconnue) des facteurs de production21 . Selon cette option, et en utilisant des données micro-économiques, on peut obtenir un taux moyen d’impôt sur les revenus des personnes physiques applicable aux OSPUE à partir d’une moyenne pondérée de (j = 1, … n) taux moyen d’impôt sur le revenu des personnes physiques tPj, la pondération zj = (Z j/Z) reflétant la répartition du revenu total des travailleurs indépendants Z = Σ jzj entre les contribuables de la manière suivante [voir aussi l’équation (4)] : tUE = Σjzj * tPj
(6)
On peut invoquer les raisons suivantes à l’appui d’un traitement séparé des entreprises non constituées en sociétés. En premier lieu, en effectuant l’analyse dans cette optique, on évite le risque d’obtenir des résultats faussés par un fractionnement assez arbitraire d’OSPUE entre ces différents éléments. Dans la mesure où les résultats finals obtenus en matière de taux moyen d’imposition seront plus fiables, les enseignements que l’on en tirera ne peuvent que s’en trouver accrus. En second lieu, lorsque les responsables de la politique fiscale ont intérêt à mesurer les taux moyens d’imposition pour des raisons tenant à l’équité du partage de la charge fiscale entre les salariés et les investisseurs, il n’est pas nécessaire de fractionner artificiellement les revenus de propriétaires d’entreprises non constituées en sociétés entre les revenus du travail et du capital, car dans ce cas, le travailleur et l’investisseur ne sont qu’une seule et même personne. Si l’on adopte cette dernière approche, on peut évaluer un taux moyen d’imposition des revenus du capital en excluant les entreprises non constituées en société, l’excédent d’exploitation des sociétés OSC apparaissant au dénominateur : tC = [(tPEI PEI) + CIT1200 + TIMP4100 + TW4200 + TFT4400 + TOTH6000]/OSC ●
(7a)
ou encore, en utilisant le montant ajusté du revenu comptable pour le secteur des sociétés (ABYc) : tC^ = [(tPEI PEI) + CIT1200 + TIMP4100 + TW 4200 + TFT4400 + TOTH 6000]/ABYC ●
(7b)
Les taux moyens d’imposition des revenus du capital qui figurent dans l’ensemble d’équations (7) diffèrent du taux moyen d’imposition figurant dans l’équation (5) à plusieurs égards. En premier lieu, comme on l’a noté, ils excluent le secteur des entreprises individuelles. En second lieu, ils incluent les impôts récurrents sur l’actif net TW4200, les impôts sur les transactions financières et les opérations en capital TFT4400 , et les autres impôts TOTH 6000 , que l’on pourrait juger nécessaire d’inclure dans un indicateur global du taux moyen d’imposition des revenus du capital22. En troisième lieu, plutôt que d’utiliser un taux moyen global d’imposition des revenus des personnes physiques (tP) pour estimer le montant de l’impôt sur les revenus de la propriété (PEI), l’équation (7) utilise un taux moyen d’imposition des revenus de la propriété qui pourrait être obtenu à partir d’une moyenne pondérée © OCDE 2000
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des taux moyens d’impôt sur le revenu des personnes physiques t Pj, les pondérations vj = (PEIj/PEI) reflétant la répartition des revenus de la propriété entre les contribuables. tPEI = Σjvj * t Pj
(8)
Pourtant, une autre possibilité consisterait à créer un nouveau taux moyen d’imposition applicable aux « entreprises » qui, comme le taux moyen d’imposition du capital indiqué au (5), regrouperait les sociétés et les entreprises non constituées en sociétés. Au numérateur, on inclurait l’impôt sur les bénéfices des sociétés ainsi que l’impôt sur les revenus des entrepreneurs individuels (le numérateur inclurait donc l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux revenus du travail et du capital générés par les entrepreneurs individuels). Le fait de traiter de cette manière l’OSPUE permet d’éviter les difficultés rencontrées lorsqu’on s’efforce de fractionner les rendements entre le travail et le capital. On pourrait choisir l’indicateur suivant du taux moyen d’imposition des entreprises : tB = tUE [(OSPUE – SSCPUE2300) + CIT1200 + TIMP4120 + TW4220 + TFT4400 + TOTH6000]/(OS – SSCPUE2300) ●
(9a)
Le taux moyen d’imposition des entreprises a une portée plus large que celui indiqué dans l’équation (2), puisqu’il inclut OS et non OSC = (OS – OSPUE) au dénominateur et qu’il inclut l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable au OSPUE et non pas seulement CIT1200 au numérateur. De plus, il prend en compte d’autres impôts sur les entreprises notamment les impôts récurrents sur la propriété immobilière TIMP 4120 , les impôts récurrents sur l’actif net TW 4220 , les impôts sur les transactions financières TFT4400, et les autres impôts TOTH6000. On peut aussi envisager une base plus étroite des revenus de l’entreprise (montant figurant au dénominateur) indiquant le revenu comptable ajusté des entreprises constituées ou non en société désignées ci-dessous par ABY : tB^ = tUE [(OSPUE – SSCPUE2300) + CIT1200 + TIMP4120 + TW4220 + TFT4400 + TOTH6000]/ABY ●
(9b)
Enfin, il y a lieu de noter que les deux équations bénéficient de l’utilisation d’un taux d’imposition des revenus des entrepreneurs individuels t UE obtenu à partir de données micro-économiques en utilisant l’équation (6), au lieu d’un taux moyen global d’impôt sur le revenu des personnes physiques tp. Impôt sur les sociétés applicable aux revenus de source étrangère Dans les pays qui appliquent des systèmes fondés sur la résidence, CIT1200 inclura une partie de l’impôt national net sur les revenus de source étrangère, l’excédent correspondant étant exclu du dénominateur, comme on l’a noté ci-dessus. Là encore, les données micro-économiques peuvent révéler l’importance de ce facteur. Retenue à la source applicable aux non-résidents sur les revenus de source nationale
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L’autre aspect à examiner est le traitement des excédents d’exploitation versés aux investisseurs non résidents. La plupart des pays (sous réserve de confirmation) incluent la retenue à la source applicable aux non-résidents sur les versements d’intérêts, dividendes, loyers et redevances dans la catégorie 1200. Toutefois, d’autres pays déclarent ce montant séparément dans la catégorie 1300 (impôt sur les revenus, bénéfices, gains en capital qui ne peuvent être répartis entre 1100 et 1200). Par exemple, le Canada et la Hongrie déclarent la retenue à la source applicable aux non-résidents dans la catégorie 1300. Dans le cas de la Nouvelle-Zélande, la retenue à la source applicable aux non-résidents qui constitue l’une des nombreuses rubriques de la catégorie 1300 est importante – elle représente près du tiers du montant total des recettes de l’impôt sur les bénéfices des sociétés déclaré à la rubrique 1200. Au Danemark et en Grèce, les éléments de la catégorie 1300 ne sont pas identifiés explicitement mais là encore les montants sont importants, près de la moitié du montant total des recettes de l’impôt sur les bénéfices des sociétés. Pour les pays qui déclarent la retenue à la source applicable aux non-résidents dans les statistiques des recettes publiques, ce montant devrait être inclus dans le taux moyen d’imposition des sociétés. © OCDE 2000
Taux moyen d’imposition et données micro-économiques nécessaires
4.4. Taux moyens d’imposition rétrospectifs (ajustés sur la base des bénéfices) Comme le montre la sous-section précédente, le recours aux données agrégées concernant l’excédent d’exploitation pour évaluer un taux moyen d’imposition applicable au secteur des sociétés comporte une lacune essentielle. Pour établir des indicateurs significatifs (interprétables) il faut que les impôts sur les sociétés payés soient déterminés en pourcentage du bénéfice économique en recherchant une cohérence entre les montants figurant au numérateur et au dénominateur en ce qui concerne le traitement des intérêts et des autres facteurs, notamment le traitement des pertes et des revenus de source étrangère. Il faut donc, pour pouvoir effectuer une évaluation exacte, avoir accès à des données suffisamment détaillées au niveau de l’entreprise. De même, pour pouvoir obtenir des indicateurs distincts de la charge fiscale pour différentes catégories de contribuables (par exemple les titulaires de faibles revenus ou de revenus élevés, les petites ou les grandes entreprises) pour différents facteurs de production (par exemple le capital ou le travail), pour des activités industrielles ou commerciales spécifiques (par exemple, la recherche et le développement, les industries manufacturières, les activités financières) et pour différentes régions et pays, il faut disposer d’informations et d’analyses plus détaillées que celles qu’offrent les taux nominaux d’imposition et les taux obtenus en utilisant des données agrégées concernant les impôts et les excédents. En général, ces données (confidentielles) ne sont collectées que par des agents publics qui sont seuls à y avoir accès. Cette section examine brièvement un certain nombre de problèmes posés par l’évaluation des taux moyens d’imposition des sociétés fondées sur les bénéfices puis envisage deux études récentes qui ont été effectuées à partir de données tirées des états financiers afin de déterminer des taux moyens d’impôt sur les sociétés dans le cadre de l’Union européenne. Elle conclut en soulignant la nécessité de disposer de données micro-économiques détaillées pour traiter comme il convient la question de la charge de l’impôt sur les sociétés23. 4.4.1. Ajustement du bénéfice (économique) des sociétés et de l’impôt sur les sociétés versé Les ajustements effectués pour obtenir un indicateur satisfaisant du bénéfice économique destiné à figurer au dénominateur pourraient consister à prendre en compte les points suivants. En premier lieu, afin d’obtenir à un indicateur de la charge fiscale qui pèse sur les entreprises rentables, les entreprises non rentables (c’est-à-dire celles qui subissent une perte économique (perte d’exploitation à l’exclusion des pertes en capital) devraient être exclues de l’échantillon (et par conséquent ne pas figurer au dénominateur puisqu’elles sont exclues du numérateur). Ce point a été évoqué à la section 4.3 dans le contexte du taux d’imposition implicite. En second lieu, il faudrait s’efforcer de déterminer si les effets du cycle économique faussent les résultats. Comme on l’a noté ci-dessus, les demandes d’exonération de la période en cours fondées sur des reports importants de pertes d’exercices antérieurs (à la suite d’une récession économique) peuvent aboutir à des taux moyens d’imposition faibles qui risquent d’induire en erreur. Des problèmes similaires se posent en ce qui concerne les demandes formulées pendant l’exercice en cours sur la base d’accumulations importantes d’abattements et de crédits d’impôt constituées au fil du temps et reportées sur la période en cours du fait de la faiblesse des bénéfices imposables des années antérieures. Dans de tels cas, une possibilité consisterait à établir, pour un échantillon représentatif d’entreprises et en utilisant des modèles micro-économiques de simulation, des montants théoriques d’impôts sur les sociétés payables dans des conditions où les demandes de déduction des pertes sont limitées. Beaucoup de pays disposent, au niveau de leur administration centrale, (ministère des Finances/des Recettes publiques), de modèles de ce genre qui permettent une évaluation de l’impôt sur les bénéfices des sociétés selon des hypothèses alternatives concernant par exemple les taux d’imposition révisés, les seuils d’imposition et les demandes effectuées sur la base de masses fiscales discrétionnaires24. S’il n’est pas possible de déterminer des taux tendanciels/normaux d’utilisation des pertes et de les prendre en compte dans des estimations révisées (théoriques) de l’impôt sur les sociétés, il pourrait être souhaitable de calculer les taux moyens d’imposition sur une période pluriannuelle et d’en faire la moyenne pour aboutir à des résultats qui atténuent les effets du cycle © OCDE 2000
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économique. Il est clair que l’utilité de cette estimation se trouvera amoindrie en cas d’instabilité de la législation fiscale au cours de la période considérée. Troisièmement, dans l’ajustement des revenus financiers (comptables) pour aboutir à un indicateur du revenu économique exact généré dans le secteur des sociétés, on pourrait envisager d’ajuster les bénéfices en fonction des effets de l’inflation. Ces corrections comprennent un ajustement en fonction de la consommation de capital (c’est-à-dire un ajustement en baisse des bénéfices comptables pour tenir compte du fait que les coûts effectifs d’amortissement du capital (de remplacement) excèdent ceux qui sont mesurés en utilisant les coûts historiques d’achat) et de même un ajustement au titre de l’évaluation des stocks (ce qui tend à réduire les bénéfices). D’autres ajustements possibles sont ceux en fonction de l’endettement des entreprises (c’est-à-dire la prise en compte de la baisse de la charge réelle de la dette résultant de l’inflation (non prévue) qui tend à accroître le montant du bénéfice économique) et, de même, un ajustement en fonction des pertes encourues sur les actifs financiers non productifs d’intérêt, notamment les espèces et les dépôts en compte courant (qui tend à réduire les bénéfices) 25. Quatrièmement, les déductions comptables en fonction des impôts courants et différés devraient être réintégrées dans les bénéfices financiers, y compris en ce qui concerne les impôts déductibles versés aux États ou collectivités locales. Les dividendes perçus (nationaux et étrangers) devraient être calculés sur une base nette, de même que les revenus d’investissements étrangers et les bénéfices de succursales étrangères. Les dividendes perçus dans le cadre national devraient également être calculés sur une base nette afin de ne pas comptabiliser deux fois les bénéfices nationaux qui sont distribués (ainsi qu’il est admis dans les dispositions fiscales prévoyant la déduction des dividendes versés entre sociétés). L’inclusion des dividendes au dénominateur aboutirait à une surestimation des bénéfices économiques nationaux et à une sous-estimation du taux moyen réel de l’impôt sur les sociétés. De même, les dividendes étrangers devraient être calculés sur une base nette, car leur inclusion nécessiterait l’inclusion au numérateur de l’impôt direct étranger (sur les sociétés) applicable aux revenus sous-jacents aux dividendes, au sujet desquels les informations ne sont généralement pas collectées. De plus, l’intérêt du public pour les indicateurs de la charge de l’impôt sur les sociétés se limite généralement à des considérations de fiscalité nationale. Pour une raison similaire, il y a lieu d’exclure les bénéfices des succursales étrangères. 4.4.2. Résultats récents concernant le taux moyen d’impôt sur les sociétés Comme on l’a noté ci-dessus, en théorie, les taux moyens de l’impôt sur les sociétés fondés sur les bénéfices devraient être mesurés en utilisant au dénominateur des bénéfices ajustés des sociétés qui peuvent différer (souvent sensiblement) des bénéfices comptables ou financiers du fait d’un certain nombre d’ajustements au titre de l’inflation, des pertes, des revenus de source étrangère et éventuellement d’autres facteurs. En pratique, les données disponibles ne sont généralement pas suffisamment abondantes pour permettre ces ajustements et par conséquent des indicateurs approximatifs sont établis. On peut citer comme exemple les indicateurs établis avec l’aide de Compustat data (pour les entreprises canadiennes et américaines) ou la base de données BACH de la Commission européenne. En général; ces études ont abouti à la conclusion que les taux moyens de l’impôt sur les sociétés sont moindres que ne l’indiquent les taux nominaux.
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Une étude récente effectuée à la demande du ministère néerlandais des finances illustre l’écart entre les taux nominaux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et le pourcentage moyen des bénéfices que les entreprises paient effectivement sous forme d’impôt. L’étude est fondée sur les comptes annuels de près de 3 000 entreprises manufacturières, pour la plupart cotées en bourse, établies dans tous les États membres de l’Union européenne. Cette étude montre, que pour la période 1990-1996, le secteur manufacturier de l’Union européenne a payé 27 pour cent d’impôts sur ses bénéfices, soit près de 10 points de moins que la moyenne des taux légaux (36.6 pour cent). Pour les sociétés allemandes, l’étude fait apparaître un écart de 11.5 points et un taux effectif de 38.5 pour cent. Ce taux effectif reste le plus élevé qui ait été enregistré dans un pays de l’Union européenne mais l’écart avec les autres économies s’est beaucoup plus réduit que ne le laisserait prévoir une © OCDE 2000
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comparaison des taux nominaux : le taux moyen déclaré pour l’Italie est de 35 pour cent, de 33 pour cent pour la France, de 32 pour cent pour les Pays-Bas et de 29 pour cent pour le Royaume-Uni. Il y a lieu de noter que l’étude effectuée à la demande du ministère néerlandais des finances met l’accent sur le secteur manufacturier et ne couvre pas d’autres secteurs de l’économie, tels que la banque et l’assurance, qui sont souvent considérés comme payant moins d’impôts. Par ailleurs, les chiffres concernant les gains ont été tirés des comptes annuels publiés par les entreprises concernées, ce qui fait apparaître des différences dans les pratiques comptables nationales. C’est le cas notamment pour des pays tels que l’Allemagne, où souvent une part importante des bénéfices est ajoutée aux réserves (occultes) ce qui réduit le dénominateur et fait augmenter le taux moyen d’imposition indiqué26. En fait, dans un rapport récent, la Bundesbank a indiqué que les comparaisons internationales – même si elles se fondent sur des comptes annuels harmonisés – posent des problèmes considérables, qui résultent notamment de différences institutionnelles dans le financement des sociétés, de différences dans les réglementations comptables nationales ainsi que d’incompatibilités statistiques et méthodologiques dans les données relatives aux bilans des sociétés27. La Bundesbank publie des statistiques sur les sociétés et les impôts qu’elles versent sur la base des comptes annuels d’environ 60 000 entreprises. Pour les années récentes, ces statistiques font apparaître un taux moyen d’imposition d’environ 35 pour cent 28 . Dans la mesure où les données relatives aux bénéfices qui sont utilisées reflètent les principes comptables appliqués en Allemagne, ce taux moyen d’imposition est beaucoup plus élevé que dans le cas où les impôts sur les bénéfices effectivement versés sont liés aux bénéfices industriels et commerciaux totaux encaissés en Allemagne. La même conclusion semble s’appliquer aux autres recherches analysant les « ratios d’imposition » des grandes entreprises allemandes, telles qu’elles sont citées dans l’étude récente du ministère fédéral des finances29. 4.4.3. Projet actuel d’établissement de taux moyens d’imposition sur la base de données micro-économiques Dans ce chapitre, on soutient que le calcul de taux moyens d’imposition en utilisant des données globales tirées des statistiques des recettes publiques et des comptes nationaux est susceptible de poser des problèmes méthodologiques importants. Le Groupe de travail sur l’analyse des politiques et les statistiques fiscales du Comité des affaires fiscales de l’OCDE a chargé des chercheurs universitaires d’effectuer des calculs, des vérifications et des comparaisons portant sur divers taux moyens d’imposition déjà publiés par Eurostat (1997), Mendoza et al. (1994) et Jarass et Obermair (1997). Leurs conclusions doivent être publiées à l’avenir dans une note de la série des Études de politique fiscale de l’OCDE. Les délégués au Groupe de travail ont également conclu que des données micro-économiques portant sur les contribuables individuels pourraient être appliquées utilement pour évaluer certaines lacunes potentielles ou « domaines de préoccupations » du fait que l’analyse en termes de taux moyens d’imposition fondée sur des données globales et des données au niveau des entreprises tirées de leurs états financiers ne comportent pas suffisamment de détails pour permettre une évaluation exacte des montants figurant au numérateur et au dénominateur. Au moment de la rédaction de ce rapport, un certain nombre de délégués s’efforcent, en liaison avec le Secrétariat, de parvenir à une meilleure appréhension du contenu des informations fournies par les taux moyens d’imposition établis pour diverses grandes catégories de revenus.
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NOTES
1. Ce problème se pose avec une acuité particulière dans le cas du capital, dans la mesure où les ajustements de la base d’imposition et/ou des crédits d’impôts liés à l’utilisation/à l’acquisition de capital peuvent jouer un rôle essentiel dans les décisions d’investissement et plus généralement dans la détermination de la charge fiscale globale qui pèse sur le capital. De même, les crédits d’impôt liés aux revenus du travail ou, du côté de la demande, aux salaires, peuvent jouer un rôle important dans la détermination du niveau d’emploi et de la charge fiscale qui pèse sur la main-d’œuvre. 2. Par exemple, les taux moyens de l’impôt sur les sociétés, s’ils sont établis de manière appropriée, pourraient constituer de meilleurs indicateurs de l’incidence de l’impôt perçu au niveau de la société sur l’activité d’investissement (par exemple, les décisions d’implantation) dans le cas où des rentes économiques sont obtenues. 3. Les ratios impôts/PIB sont également rétrospectifs. Indépendamment de leurs limites générales examinées au chapitre 3, les ratios de l’impôt sur les sociétés par rapport au PIB ne donnent que des informations limitées sur la charge fiscale qui pèse sur le secteur des entreprises. En particulier, ces ratios masquent des variations de l’impôt sur les sociétés en pourcentage des bénéfices des entreprises et des variations des bénéfices des entreprises en pourcentage du PIB. Voir section 1.3 où il est indiqué que le rapport entre l’impôt sur les sociétés et le PIB est déterminé par le produit de deux ratios : 1) l’impôt sur les sociétés divisé par le bénéfice avant impôt et 2) le bénéfice avant impôt sur les sociétés divisé par le PIB. Le premier ratio, qui représente le taux moyen effectif de l’impôt sur les sociétés varie avec l’évolution du taux nominal de l’impôt sur les sociétés et de la base de cet impôt. Les variations de ce ratio reflètent donc les changements dans la politique fiscale, ainsi que dans les pratiques administratives, les stratégies fiscales et la discipline fiscale. Le second ratio, qui représente les bénéfices avant impôt sur les sociétés par rapport au PIB variera avec les fluctuations dans la contribution du bénéfice des entreprises à la valeur ajoutée globale dans l’économie. En considérant la politique fiscale comme constante (c’est-à-dire en supposant que les règles qui déterminent les taux et la base de l’impôt sont fixes), une chute des bénéfices des sociétés par rapport au PIB ferait baisser le ratio impôt sur les sociétés/PIB. Ce résultat pourrait être interprété à tort comme indiquant une réduction du rapport entre l’impôt et les bénéfices des sociétés, alors qu’en fait cette valeur reste inchangée. 4. Les indicateurs rétrospectifs du taux d’imposition sont « moyens » et non « marginaux » en ce sens qu’ils ne sont pas théoriquement fondés sur des conditions d’équilibre faisant correspondre les bénéfices et coûts marginaux et prennent en compte les effets de la fiscalité sur les unités infra-marginales de capital (au niveau desquelles des rentes économiques peuvent être perçues) et non pas seulement les effets de la fiscalité à la marge (à ce niveau, les rentes sont entièrement épuisées). De plus, ils sont souvent qualifiés « d’effectifs » dans la mesure où ils saisissent diverses dispositions, en plus du taux légal de base de l’impôt, qui ont une incidence sur le montant de l’impôt dû. 5. S’il existe un certain nombre de variantes, le taux moyen implicite d’imposition des sociétés est mesuré de la manière suivante : AETR c (OS) = CIT AGG /OS c où CIT AGG indique les recettes agrégées de l’impôt sur les bénéfices des sociétés collectés au cours de l’année dans l’économie (déclaré dans la catégorie 1200 des statistiques des recettes publiques de l’OCDE) et où OS c indique l’excédent d’exploitation du secteur des sociétés et quasi-sociétés. 6. Dans le cas de l’Allemagne, on ne dispose que de chiffres indiquant l’excédent d’exploitation du secteur des sociétés et des entreprises non constituées en sociétés. Dans ce cas, les impôts sur les bénéfices de l’ensemble du secteur des entreprises peuvent être exprimés en pourcentage de l’excédent total d’exploitation de l’économie nationale.
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7. Les séries de données micro-économiques – en particulier les bases de données concernant l’impôt sur le revenu des personnes physiques et l’impôt sur les sociétés – qui peuvent être utilisées pour établir des estimations plus précises des taux moyens d’imposition applicables à diverses formes de revenus ne donnent en général pas d’indications permettant d’affiner les estimations du taux moyen d’imposition applicable à la consommation. Comme ce chapitre met l’accent sur l’application de ces séries de données microéconomiques, nous ne tenons pas compte des taux moyens d’imposition sur la consommation.
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Taux moyen d’imposition et données micro-économiques nécessaires
8. La suite de ce chapitre suit la pratique qui consiste à indiquer la catégorie d’impôt correspondante des statistiques de recettes publiques en indice à la variable fiscale. Pour une liste des catégories d’impôts des statistiques des recettes publiques, voir annexe 4.A. 9. Pour un certain nombre de pays, cet ajustement pourrait être effectué en utilisant les données des statistiques des recettes publiques. En particulier, la Corée, le Danemark, les États-Unis, la France, la Hongrie, l’Italie, l’Irlande, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse déclarent tous séparément à la rubrique 1120 les impôts sur le revenu des personnes physiques applicables aux gains en capital (nets). Toutefois, les autres pays qui imposent les particuliers sur les gains en capital nets (comme le Canada) ne déclarent pas séparément ce montant, ce qui montre que l’utilisation de données micro-économiques serait nécessaire. 10. Ces données sont déclarées pour certains pays dans des notes placées au-dessous des tableaux par pays. 11. Nous supposons ici qu’il est plus intéressant de mesurer un taux moyen d’imposition « selon le principe de la source » plutôt que « selon le principe de la résidence ». Un taux moyen d’imposition évalué selon le principe de la source détermine l’impôt national sur les revenus de source nationale, ainsi que sur les revenus versés à l’étranger. Dans les pays qui imposent leurs résidents sur leur revenu mondial, l’impôt national sur les revenus de source étrangère devrait être exprimé en principe déduction faite de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur les sociétés au numérateur du taux moyen d’imposition. Il faut noter qu’un taux moyen d’imposition déterminé selon le principe de la source ne tiendrait pas compte du montant total de l’impôt appliqué à la valeur ajoutée nationale, dans la mesure où les revenus versés à l’étranger ne sont généralement pas soumis à l’impôt étranger. Toutefois, étant donné l’intérêt que présente l’analyse en termes de taux moyen d’imposition pour évaluer l’impôt national, par opposition à l’imposition au niveau mondial, on peut soutenir qu’il y a lieu de laisser de côté l’impôt étranger sur les revenus de source nationale. (Il faut noter finalement que lorsqu’on applique un taux moyen d’imposition fondé sur la résidence, on souhaite inclure au dénominateur l’excédent national net des sommes versées à l’étranger, plus l’excédent étranger à recevoir par les contribuables résidents ; au numérateur, les postes correspondants incluent l’impôt national sur les sociétés net du montant applicable aux bénéfices des sociétés distribués/dus aux non-résidents, plus l’impôt national sur les revenus de source étrangère.) 12. Par ailleurs, les résultats de l’équation (2a) pourraient être utiles lorsqu’on s’intéresse au montant moyen d’impôt sur les bénéfices versé par les sociétés sur l’excédent généré dans le secteur des sociétés (le montant résiduel de l’impôt appliqué directement à ce surplus (en termes de flux) étant représenté pour l’essentiel par le taux moyen d’impôt sur le revenu des personnes physiques). 13. Lorsque, par exemple, les salaires versés par une entreprise excèdent ses recettes brutes, son excédent d’exploitation est négatif – le fait d’ajouter ce montant à l’excédent d’exploitation des entreprises rentables a pour effet d’abaisser l’excédent global d’exploitation. 14. Le principe général à suivre est que les pertes devraient être exclues à moins que les pertes subies dans le cadre d’une activité puissent être transférées en déduction de l’impôt sur les bénéfices réalisés dans le cadre d’une autre activité. Cela amènerait à exclure, pour le calcul du taux moyen d’imposition, les sociétés qui se trouvent dans une situation globalement déficitaire (dont les pertes ne peuvent être transférées à une entité distincte). Il faut noter que lorsqu’une entreprise donnée exerce à la fois une activité rentable et une activité non-rentable et qu’elle combine les revenus de ces activités en vue du calcul de l’impôt, transférant ainsi ses pertes, l’effet de ces pertes apparaît au dénominateur (baisse de OSc) et au numérateur (baisse de CIT1200) de façon symétrique et dans ces conditions, les pertes ne sont pas exclues. Il y a lieu également de noter que dans le groupe des entreprises rentables (résultats comptables positifs/bénéfices comptables) on peut distinguer celles qui paient des impôts et celles qui n’en paient pas. Ces dernières peuvent échapper à l’impôt grâce par exemple à des amortissements accélérés ou à des crédits d’impôt. Ces entreprises ne doivent pas être exclues de l’échantillon. 15. Si les chiffres des comptes nationaux faisant apparaître la répartition de l’excédent total d’exploitation (pour l’ensemble des entreprises, qu’elles soient ou non constituées en sociétés) entre les différents secteurs sont communiqués, la ventilation correspondante concernant les OSPUE n’est pas indiquée dans certains cas, et par conséquent, la répartition de l’excédent d’exploitation des sociétés ne peut être établie à partir de ces chiffres. 16. Pour le vérifier, on rappelle que l’excédent d’exploitation est évalué en incluant les versements d’intérêts, de loyers et de redevances (sauf pour les redevances concernant les biens corporels amortissables qui sont traités de la même manière que les coûts d’amortissement et soustrait des revenus bruts dans le calcul de l’excédent d’exploitation) et que ces versements sont imposés au niveau des fournisseurs de l’actif sous-jacent (financier ou réel). Par conséquent, lorsqu’on mesure un taux moyen d’imposition pour un secteur A, si les actifs financiers ou réels utilisés dans le secteur A sont fournis par le secteur B ou par le secteur des ménages, le numérateur du taux moyen d’imposition calculé pour le secteur A exclura l’impôt sur l’excédent versé sous forme d’intérêts/loyers/redevances inclus dans le dénominateur du taux moyen d’imposition pour le secteur A (ces revenus étant imposés dans le secteur B ou dans le secteur des ménages), ce qui implique un décalage entre le montant du numérateur et celui du dénominateur. Lorsqu’on calcule un taux moyen global d’imposition pour le secteur des sociétés résidentes dans son ensemble qui agrège l’excédent de toutes les
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sociétés résidentes au dénominateur, et la totalité de l’impôt sur les sociétés correspondant au numérateur, ce problème particulier ne se pose généralement pas, au moins en ce qui concerne les paiements de loyers et de redevances, à supposer que les fournisseurs de l’actif sous-jacent soient d’autres sociétés résidentes. Cependant, le problème se pose en ce qui concerne les versements d’intérêts aux ménages, par l’intermédiaire du secteur financier, dans la mesure où ces revenus seront soumis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques (exclu du numérateur du taux moyen d’imposition des sociétés). 17. Pour les pays dont les systèmes sont fondés sur le principe de la résidence, il pourrait être utile d’envisager pour chaque secteur un taux moyen d’imposition incluant l’impôt perçu sur les revenus de source étrangère (c’est-à-dire un taux pour lequel le dénominateur inclut les bénéfices des succursales étrangères, les dividendes, intérêts, loyers et redevances étrangers et le numérateur inclut l’impôt perçu dans le cadre national sur ces revenus). Dans la mesure où les revenus de source étrangère ne se voient appliquer qu’un impôt étranger faible ou nul, le taux moyen d’imposition pourrait représenter une estimation assez exacte du taux moyen global d’imposition applicable à ces revenus. 18. L’inclusion des cotisations de sécurité sociale (SSCF2200) et des taxes sur les salaires (PAY3000) versées par les employeurs au numérateur du taux moyen d’imposition de la main-d’œuvre (cette approche repose sur l’hypothèse selon laquelle ces impôts sont répercutés sur les salariés) signifie que le taux moyen d’imposition n’est pas un pur indicateur « d’incidence directe » (en d’autres termes, une certaine répercussion de l’impôt est prise en compte). 19. On peut soutenir que les catégories 4210 et 4220 qui s’appliquent aux « impôts récurrents sur l’actif net » (concernant les personnes physiques et les sociétés) qui peuvent être désignés par TW4200, et la catégorie 6000 représentant les « autres impôts » qui peuvent être désignés par TOTH 6000 et qui inclut les impôts sur les institutions financières et les droits de timbre, devraient être prises en compte dans le taux moyen d’imposition des revenus du capital. Il y a lieu de noter que TOTH 6000 est particulièrement important pour des pays comme l’Autriche où l’impôt sur les institutions financières représente environ le quart de l’impôt sur les bénéfices des sociétés (1200) ; au Japon, où TOTH6000 représente près du tiers de l’impôt sur les bénéfices des sociétés ; et en Turquie où il représente environ les deux tiers de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et trois fois l’impôt sur les bénéfices des sociétés. 20. Cette approche est adoptée par Mendoza et al. (1994) et dans une étude interne de la Commission européenne (1997). 21. Il faut noter que l’imposition des revenus du travail des salariés (à distinguer de ceux des propriétaires) d’entreprises non constituées en sociétés serait saisie dans le taux moyen d’imposition des revenus du travail des salariés. 22. Du fait de l’inclusion d’impôt sur les stocks (biens immobiliers et patrimoine), et sur certaines transactions, ces taux moyens d’imposition ne sont pas au sens strict des indicateurs des taux moyens d’imposition des revenus et pour cette raison, la préférence pour l’utilisation d’un indicateur ajusté du revenu comptable (ABYc) plutôt que d’un indicateur plus large de l’excédent d’exploitation (OSc) pourrait être moins forte. 23. L’utilisation de données micro-économiques ou de données au niveau du contribuable collectées par les autorités fiscales n’est pas non plus exempte de problèmes et de limites. Par exemple, souvent, les informations concernant les éléments de revenu exonérés d’impôt ne sont pas collectées. Ces sommes correspondent aux gains en capital exonérés d’impôt et aux revenus encaissés par les fonds de pension destinés aux personnes qui ont souscrit à des plans de retraite professionnelle. Dans ces cas, il est impossible de déterminer les revenus des ménages en suivant une définition économique des revenus. Les études effectuées pour remédier à cette omission sont sujettes à caution parce que les ménages effectuent souvent des fausses déclarations du montant de leurs revenus et de leurs impôts ou parce qu’ils sont réticents à communiquer ces informations aux enquêteurs. 24. Par le terme « masses fiscales discrétionnaires », nous désignons des masses (soldes n’ayant pas fait l’objet de demandes) de perte des années antérieures, des abattements fiscaux (par exemple, les abattements pour amortissements) et des crédits d’impôt, lorsque la date des demandes de déductions fiscales sur la base de ces masses est à la discrétion du contribuable (en général, avec des restrictions limitant les délais dans lesquels ces crédits peuvent être reportés d’une période à l’autre avant d’expirer). 25. Pour un examen de l’ajustement des revenus financiers (comptables) en fonction des effets de l’inflation, voir Holland et Myers (1979). 26. Handelsblatt, 4 mai 1999. 27. La Banque a comparé la rentabilité des entreprises en Allemagne, en France et aux États-Unis sur la période 1990-1995, en utilisant la base de données BACH de la Commission de l’Union européenne et elle a conclu que « la valeur des informations obtenues grâce à ces comparaisons internationales de rentabilité est beaucoup plus limitée – pour des raisons méthodologiques – qu’on ne le pense communément ». Voir Deutsche Bundesbank, Rapport mensuel, Octobre 1997, 33-43. 54
28. Bundesministerium der Finanzen (1999), pp. 10-11. 29. Op. cit., 12-14.
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Chapitre 5
TAUX MARGINAUX EFFECTIFS D’IMPOSITION 5.1. Introduction Comme on l’a vu au chapitre 4, on peut établir une distinction importante entre les indicateurs rétrospectifs et les indicateurs prospectifs des taux d’imposition. Dans le groupe des indicateurs prospectifs, on peut considérer les taux moyens d’impôt sur les sociétés utilisés dans les analyses de projet et/ou les taux marginaux effectifs d’imposition qui en principe sont mieux adaptés que des indicateurs rétrospectifs à l’évaluation de l’incidence de la fiscalité sur l’incitation à l’investissement. En effet, les décisions d’investissement sont par nature prospectives, et se fondent sur les anticipatio ns de flux futurs de bénéfices distribués après impôt grâce à la réalisation de l’investissement, corrigées à l’aide d’un taux d’actualisation qui reflète le coût marginal d’opportunité des fonds pour l’actionnaire. Si l’on se place d’un autre point de vue, l’impôt de l’année précédente sur les bénéfices générés grâce au capital acquis dans le passé peut n’être pas représentatif de la charge fiscale qui pèsera sur un investissement futur. C’est le cas même lorsque les réglementations fiscales restent inchangées d’une année à l’autre, étant donné que les versements d’impôts dépendent des demandes formulées en matière d’amortissement et de report des pertes sur les exercices ultérieurs, qui dépendent à leur tour du cycle économique et d’autres facteurs (non fiscaux). Les taux moyens d’imposition utilisés dans les analyses de projet sont déterminés en calculant, pour un projet d’investissement hypothétique, les bénéfices (pertes) avant et après impôt au cours de chaque période pendant la durée de vie de ce projet1. D’autres types de projets et flux de revenus correspondants peuvent être analysés, notamment les additions nettes au stock de capital existant et les nouveaux projets d’investissement comportant des coûts de démarrage aboutissant à des revenus négatifs les premières années. Des hypothèses différentes concernant les projets dénotent des dispositions fiscales différentes. Par exemple, dans le dernier cas, le régime fiscal des reports de pertes sur les exercices ultérieurs serait important. Dans les deux cas, les bénéfices avant et après impôt sont évalués pour la période en cours (en utilisant généralement un taux d’actualisation égal à une moyenne pondérée du coût des capitaux empruntés et des fonds propres) pour convertir le flux futur de bénéfices nets et d’impôts en montants comparables exprimés en valeur actuelle. La différence entre la valeur actualisée des bénéfices avant et après impôt est calculée afin de déterminer la valeur actualisée nette de la charge de l’impôt sur les sociétés. En divisant ce montant par la valeur actualisée des bénéfices avant impôt, on obtient le taux moyen d’impôt sur les sociétés concernant le projet considéré2 . Le système d’impôt sur les sociétés influe sur le taux moyen de l’impôt du fait qu’il détermine les bénéfices après impôt pour un flux donné de bénéfices avant impôt. Les modifications de la législation fiscale qui réduisent la valeur actualisée des bénéfices après impôt (c’est-à-dire augmentent la valeur actualisée des impôts sur les sociétés à verser) augmenteraient la valeur du taux moyen d’imposition, traduisant une réduction des incitations à l’investissement3. Les taux marginaux effectifs d’imposition (TMEI), autres indicateurs prospectifs des taux d’imposition, permettent d’évaluer l’incidence de l’impôt à la marge. Dans l’analyse de l’incidence de l’imposition du capital, cela correspond à l’incidence de la fiscalité sur la dernière unité de capital investi. Dans le cadre de l’analyse de l’incidence de l’imposition du travail, on met l’accent sur l’incidence de la fiscalité sur la dernière unité de main-d’œuvre employée. Compte tenu du thème © OCDE 2000
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central du chapitre précédent, nous mettrons l’accent ici sur les taux marginaux effectifs d’imposition des sociétés (TMEI©). Les taux marginaux effectifs d’imposition des sociétés (TMEI©) sont utilisés pour évaluer l’incidence de l’impôt sur les sociétés sur les investissements nouveaux en déterminant l’importance du coin fiscal qui s’établit entre les taux de rendement avant et après impôt sur les sociétés4. Les taux marginaux effectifs d’imposition des sociétés influent sur le taux nominal d’impôt sur les sociétés applicable aux bénéfices des entreprises et peuvent aussi influer sur certaines mesures d’incitation spéciales prises par le biais de la législation fiscale pour aider à la formation de capital. Les statistiques des TMEI© permettent aussi d’étudier les effets de la fiscalité sur le coût de financement (le coût des capitaux empruntés et/ou des fonds propres utilisés pour la formation de capital) compte tenu de la déductibilité fiscale des intérêts versés, et elles font intervenir explicitement ou implicitement les hypothèses concernant l’influence (ou l’absence d’influence) de la fiscalité au niveau de l’actionnaire (par exemple, les crédits d’impôt, les impôts sur les gains en capital) sur la fixation du taux utilisé par l’entreprise pour actualiser les flux futurs de revenus et le montant net de l’impôt dû qui est lié à la dernière unité de capital acquise. Pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec le modèle d’investissement néoclassique dont sont tirées les statistiques des TMEI©, l’interprétation de ces statistiques peut ne pas apparaître tout à fait clairement. En fait, trop souvent, les études qui utilisent cette forme d’analyse de taux d’imposition ont tendance à obscurcir plutôt qu’à clarifier les hypothèses sous-jacentes et la structure du modèle. Ce chapitre s’efforce d’expliquer l’analyse en terme de TMEI© d’une manière progressive et facile à utiliser pour mettre en lumière les concepts de base et mettre fin à la réputation de « boîte noire » de ces indicateurs. L’analyse technique est suivie d’un examen des principales hypothèses sous-jacentes et des limitations concernant les données dont il faut tenir compte lorsqu’on interprète les résultats concernant les TMEI, surtout lorsqu’ils sont utilisés pour influer sur les débats de politique fiscale. 5.2. Définition des taux marginaux effectifs d’imposition Un taux marginal effectif d’imposition déterminé en ce qui concerne les revenus du capital constitue un indicateur de la distorsion occasionnée par le système d’imposition des revenus sur un « investissement marginal » défini comme l’investissement dont le rendement est tout juste suffisant pour couvrir la totalité des coûts qui lui sont associés. En général, le taux marginal effectif d’imposition des revenus du capital utilisé dans la production (c’est-à-dire sous forme d’installations industrielles, de machines et de biens d’équipement) est déterminé de la manière suivante : TMEI = (Rg – Rn)/Rg
(1)
où Rg désigne le taux de rendement avant impôt sur les sociétés (net de l’amortissement) d’un investissement marginal et Rn désigne le taux de rendement réel après impôt sur les sociétés de l’épargne utilisée pour financer cet investissement. Le terme (Rg – Rn) est désigné sous le nom de coin fiscal marginal (MTW). Ce coin fiscal mesure la divergence entre les rendements avant impôt et après impôt qui résulte de l’imposition des sociétés et de l’imposition des revenus des personnes physiques. Plus précisément, le coin fiscal mesure la différence entre le taux de rendement réel avant impôt net de l’amortissement obtenu par l’entreprise sur la dernière unité de capital installé et le taux de rendement réel après impôt pour l’épargnant mesuré après déduction de la totalité de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et de l’impôt sur le revenu des personnes physiques payable sur ce rendement. En divisant ce coin fiscal par le taux de rendement avant impôt, on obtient le taux marginal effectif d’imposition. Par exemple, si le rendement avant impôt sur le dernier dollar de capital installé est de 0.10 $, et si le rendement correspondant après impôt pour l’épargnant est de 0.06 $, ce qui donne un coin fiscal de 0.04 $, le taux marginal d’imposition est de 0.4.
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L’indicateur du taux marginal effectif d’imposition qui figure dans l’équation (1) détermine l’incidence combinée des systèmes d’impôt sur les sociétés et d’impôt sur le revenu des personnes physiques sur les incitations à l’investissement dans le cadre national. Dans le cas d’une économie fermée, où les fonds utilisés pour l’investissement intérieur sont fournis uniquement par les épargnants résidents, il n’est pas possible (au sens strict) d’évaluer séparément l’effet d’incitation du système © OCDE 2000
Taux marginaux effectifs d’imposition
national d’impôt sur les sociétés et du système national d’impôt sur le revenu des personnes physiques sur l’investissement intérieur. Cette impossibilité d’isoler l’effet incitatif du système d’impôt sur les sociétés sur l’investissement s’explique par le fait que le coût du financement de l’investissement dépend du système d’impôt sur le revenu des personnes physiques dans le cas d’une économie fermée, étant donné que les épargnants résidents sont la seule source de financement – l’équilibre ne s’établit que lorsque l’épargne intérieure est égale à l’investissement intérieur. 5.2.1. Cas d’une économie ouverte de petites dimensions Dans le cas d’une économie ouverte de petites dimensions, lorsque les entreprises ont un accès illimité aux marchés financiers internationaux, l’effet incitatif du système d’impôt sur les sociétés sur l’investissement peut être évalué indépendamment de considérations relatives à l’impôt sur le revenu des personnes physiques (qui n’affecte que l’épargne). En particulier, le coin fiscal marginal (MTW) peut être ventilé en deux parties : MTW = (Rg – R) + (R – Rn)
(2)
où Rg et Rn sont définis comme ci-dessus et R représente le « taux d’intérêt mondial » auquel les entreprises peuvent accéder aux fonds fournis par les marchés financiers internationaux, considéré comme étant le taux réel de rendement avant impôt sur le revenu des personnes physiques que peuvent obtenir les épargnants résidents. Le premier terme de l’équation (2) calcule le coin fiscal résultant du système d’impôt sur les sociétés, qui mesure l’effet d’incitation à l’investissement du système fiscal national. Le second terme calcule le coin fiscal qui résulte du système d’impôt sur le revenu des personnes physiques, et qui permet d’évaluer l’effet d’incitation à l’épargne du système fiscal national. Ce chapitre met l’accent sur le cas d’une économie ouverte de petites dimensions et examine les déterminants du coin fiscal résultant du système d’impôt sur les bénéfices des sociétés (Rg – R) divisé par le rendement avant impôt Rg en mesurant le taux marginal effectif d’impôt sur les sociétés : TMEI© = (Rg – R)/Rg
(3)
où l’on interprète la valeur de TMEI© de la manière suivante : Valeur de TMEI©
Incidence sur l’investissement
TMEI© < 0 TMEI© = 0 TMEI© > 0
Encouragé Pas d’incidence (neutre) Dissuadé
Dans le cas où TMEI© est négatif, le système fiscal subventionne dans l’ensemble la formation de capital. Cela se produit lorsque la valeur actualisée des déductions fiscales et des crédits obtenus sur l’investissement excède le prix d’achat de l’actif. Dans le cas d’un TMEI© non nul, plus la valeur absolue du TMEI© est importante (c’est-à-dire plus TMEI© s’écarte de zéro), plus l’incidence du système fiscal sur l’investissement est forte. En principe, il existe un grand nombre de taux marginaux effectifs d’imposition que l’on pourrait souhaiter calculer et qui varient selon le type et la taille de l’entreprise, le type de décisions d’investissement, la source de financement et le type d’épargnant. Comme il n’est pas possible de calculer un taux distinct pour toutes les marges possibles qui peuvent exister dans l’économie, il est inévitable de procéder à une certaine agrégation. Les entreprises sont généralement agrégées au moins par grandes catégories de secteurs (par exemple les industries manufacturières, le commerce, les services, etc.), les biens d’équipement sont généralement agrégés entre les machines, les bâtiments et les stocks, tandis que les sources de financement peuvent ou non être agrégées et que les ménages sont pratiquement toujours agrégés en totalité. © OCDE 2000
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Avant d’examiner l’établissement d’un TMEI© tenant compte des divers paramètres de l’impôt sur les sociétés qui ont une incidence sur les avantages et coûts nets de l’investissement à la marge, il est utile de commencer par examiner les bases sur lesquelles repose le modèle dans le cas où il n’y a pas d’impôt. L’analyse examinée ci-dessous consiste à calculer le TMEI©pour le capital susceptible d’être amorti (par exemple, les machines et les bâtiments) en retenant l’hypothèse adoptée dans le cas d’une économie ouverte de petite dimension selon laquelle l’investissement national n’a pas d’influence sur les taux auxquels les fonds peuvent être obtenus et le coût financier du capital pour l’entreprise est déterminé indépendamment des taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Après avoir analysé le cas d’absence d’impôt à la section 5.3, l’incidence d’un système simplifié d’impôt sur les bénéfices des sociétés sur les comportements est examinée à la section 5.4 afin d’isoler les hypothèses de base sur lesquelles repose le modèle de TMEI prenant en compte la fiscalité. A la section 5.5, un TMEI© est établi pour un système plus généralisé d’impôt sur les bénéfices des sociétés qui inclut deux instruments ayant un effet stimulant sur l’investissement dans le cadre de cet impôt. 5.3. Analyse du cas d’absence d’impôt En l’absence d’impôt sur les bénéfices des sociétés, on peut montrer que dans le cas d’une économie ouverte de petites dimensions et dans des conditions de concurrence parfaite, une entreprise qui maximise ses bénéfices ajustera son stock de capital physique au cours de chaque période pour faire en sorte que les recettes nettes du capital installé à la marge (mesurées par Fk) soient suffisantes pour couvrir le coût du financement de ce capital (mesuré par Rf) et le coût du remplacement de la part du capital hors d’usage ou amorti au cours de la période de production (mesuré par δ) : Fk = (Rf + δ)
(4)
Il est important de noter que si, pour l’entreprise, le point mort se trouve au niveau de la dernière unité de capital installé, une rente économique (profit) peut être obtenue sur les unités inframarginales. Selon la condition d’équilibre donnée par l’équation (4), l’entreprise ne choisirait pas d’accroître son stock de capital au-delà du point d’équilibre (pour éviter de subir des pertes sur les investissements ultérieurs). Dans le cas d’absence d’imposition, le coût réel des fonds pour l’entreprise Rf est égal au taux réel de rendement requis sur les fonds propres exigé par les actionnaires R : Rf = R = (i – π)
(5)
Le taux de rendement requis que les entreprises doivent verser aux actionnaires pour les inciter à acquérir leurs actions, mesuré par R, est indiqué par le taux d’intérêt nominal applicable à un investissement alternatif (par exemple des obligations) de risque équivalent, désigné par i, moins le taux général d’inflation π. La condition d’équilibre (4) est intuitive et prévoit, comme on l’a noté ci-dessus, qu’il est optimal pour une entreprise d’investir en capital physique jusqu’au point où la recette marginale nette d’une unité additionnelle de capital installé (Fk) est égale au coût marginal représenté par (Rf + δ) et désignée de manière plus formelle comme le coût d’usage du capital5. Le coût d’usage du capital, qui est la valeur locative implicite du coût d’utilisation d’une unité monétaire (par exemple un dollar) de capital pendant une période donnée se compose de deux parties – la première partie est le coût réel de financement Rf fqui correspond aux paiements que l’entreprise doit effectuer au titre des fonds levés pour acquérir l’actif physique, et la seconde est le coût de consommation du capital (δ) qui résulte de la perte de valeur du capital due à l’amortissement6. Il y a lieu de noter que le taux réel de rendement requis avant impôt sur les sociétés, net de l’amortissement, obtenu par une entreprise sur un investissement marginal, désigné par Rg, est déterminé par l’expression suivante : Rg = Fk – δ 58
(6)
où Fk représente l’augmentation des recettes nettes (les recettes diminuées des coûts d’exploitation) générée par un accroissement d’une unité de son stock de capital physique désigné par k. L’une des © OCDE 2000
Taux marginaux effectifs d’imposition
hypothèses essentielles de l’analyse est que Fk diminue à mesure que le stock de capital augmente. Fk est évalué indirectement à partir des conditions théoriques qui caractérisent le comportement d’investissement d’une entreprise cherchant à maximiser son profit, ce qui laisse prévoir que l’investissement est effectué jusqu’au point où le bénéfice marginal d’un élément de capital d’une valeur d’un dollar par période est égal au coût de la détention du dollar de capital pendant la même période (comme on le verra ci-dessous). Une partie de Fk est absorbée pour maintenir la valeur réelle du stock de capital physique, dont on suppose qu’il se déprécie (c’est-à-dire que sa valeur diminue) du fait de l’usure et de l’obsolescence 7 – le symbole δ représente le taux exponentiel (amortissement dégressif) d’amortissement économique. Dans le cas de l’économie fermée, une partie du résidu représenté par (Fk – δ) va aux autorités fiscales sous forme d’impôt sur les bénéfices des sociétés et sur le revenu des personnes physiques [mesuré par (Rg – Rn)], et le reste va à l’épargnant (mesuré par Rn). Dans le cas d’une économie ouverte sur l’extérieur, une partie du résidu représenté par (Fk – δ) va aux autorités fiscales sous forme d’impôt sur les bénéfices des sociétés [mesuré par (Rg – R)], et le reste va à l’épargnant résident ou étranger (mesuré par R.) L’équilibre du marché dans le cas d’absence d’impôt est représenté dans le graphique 5.1, au point E0. La courbe d’investissement Ia représente le taux de rendement net d’amortissement (Fk – δ) pour différents niveaux d’investissement. La pente de la courbe est descendante conformément à l’hypothèse selon laquelle Fk diminue à mesure que le stock de capital augmente. La courbe d’investissement est conforme à la théorie néoclassique de l’entreprise selon laquelle les dirigeants de la firme n’entreprendront un investissement que s’il augmente la valeur sur le marché du capital de l’entreprise. Cette hypothèse est satisfaite si l’unité additionnelle de capital, qui s’ajoute à la capacité productive de l’entreprise, fournit un flux de revenus réels nets suffisant pour couvrir tous les coûts liés à l’investissement. La courbe d’offre de fonds, qui est horizontale au niveau du taux d’intérêt réel mondial Rf, illustre l’hypothèse d’une économie de petites dimensions ouverte sur l’extérieur selon laquelle les besoins en capital de l’économie nationale sont trop faibles pour influer sur le taux du marché R auquel les entreprises résidentes se procurent les capitaux. L’équilibre du marché se trouve réalisé au point E0 où la courbe Ia coupe la courbe d’offre de fonds. Les tableaux suivants résument les taux de rendement au point E0.
Graphique 5.1. Rendement de l’investissement dans le cas d’absence d’impôt Rg, R
Rg = R
E0
Ia
I0
Source : OCDE.
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I
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En ce qui concerne le calcul du taux marginal effectif d’imposition, on peut déduire des équations (3) à (6) : TMEI© = (Rg – R)/Rg = (Rf – R)/Rf = 0
(7)
Le tableau suivant résume les taux de rendement applicables et la conclusion évidente d’un taux marginal effectif d’impôt sur les sociétés nul en cas d’absence d’imposition.
Résumé des statistiques (cas d’absence d’imposition) Coût d’usage du capital
(Rf + δ) où Rf = R
Taux brut de rendement, net d’amortissement (Rg) Taux réel de rendement requis pour l’épargnant (coût réel des fonds) TMEI©
Rf R 0
5.4. Analyse d’un impôt simple sur les bénéfices des sociétés Considérons à présent l’introduction dans le cadre d’analyse d’un impôt sur les bénéfices des sociétés dans le cadre duquel ces bénéfices sont imposés au taux (u) et où le capital matériel peut être amorti sur le plan fiscal à un taux dégressif (α) égal au taux d’amortissement physique (δ) et où les coûts amortissables sont indexés sur le taux général d’inflation. En présence d’un tel système d’impôt sur les sociétés, on peut montrer que l’entreprise représentative va ajuster son stock de capital pour chaque période jusqu’au point où : Fk(1 – u) = (Rf + δ)[1 – uδ/(Rf + δ)]
(8)
Pour comprendre le dernier terme de cette équation, considérons le tableau suivant, qui représente le flux d’abattements au titre du coût du capital correspondant à l’investissement d’un dollar au cours d’une période t, qui fait l’objet d’un amortissement fiscal à un taux dégressif (α), supposé égal au taux d’amortissement économique δ. Dans le tableau, CCNA indique le montant du coût du capital non amorti en vue de l’imposition.
Mise en évidence de la valeur du flux d’abattement au titre du coût du capital
Période
t t+1 t+2 t+3 Etc.
CCNA en début de période
Abattement au titre du coût du capital
Valeur fiscale de l’abattement au titre du coût du capital
Valeur actualisée au début de la période t du flux d’abattements au titre du coût du capital
CCNA en fin de période
1 (1 – α) (1 – α)2 (1 – α)3
α α (1 – α) α (1 – α)2 α (1 – α)3
uα uα (1 – α) uα (1 – α)2 uα (1 – α)3
uα/(1 + Rf) uα (1 – α)/(1 + Rf)2 uα (1 – α)2/(1 + Rf) 3 uα (1 – α)3/(1 + Rf) 4
(1 – α) (1 – α)2 (1 – α)3 (1 – α)4
En résumant les cases qui figurent à la sixième colonne du tableau ci-dessus, on obtient l’expression suivante de la valeur actualisée pour l’entreprise, au début de la période t, du flux d’abattements au titre du coût du capital correspondant à l’investissement d’un dollar effectué au cours de la période t : 60
PVt = uαΣt(1 – α)x – t/(1 + Rf)x – t + 1
(9a) © OCDE 2000
Taux marginaux effectifs d’imposition
Le terme d’addition de l’équation (9a) se ramène à [1/(Rf + α)]. Si le taux d’amortissement fiscal (α) est égal au taux d’amortissement économique δ, la valeur actualisée est donnée par l’équation suivante : PVt = uδ/(Rf + δ)
(9b)
Le taux d’actualisation (Rf + δ) inclut le coût réel des fonds (Rf) plutôt que le coût nominal des fonds (Rf + π), où π indique le taux général d’inflation, dans l’hypothèse où le système d’abattement au titre du coût du capital est indexé en fonction de l’inflation. Si le système d’abattements au titre du coût du capital n’était pas indexé, le taux d’actualisation serait (Rf + π + δ), qui excède (Rf + δ) du montant du taux d’inflation, compte tenu du fait que la valeur actualisée pour l’entreprise des abattements au titre du coût du capital dans un système non indexé diminue à mesure que le taux d’inflation augmente. Il y a lieu finalement de noter que le taux d’actualisation inclut le taux d’abattement au titre du coût du capital, qui tient compte du fait que la masse des abattements au titre du coût du capital générés par un dollar d’investissement diminue au fil du temps, au taux de l’amortissement dégressif, à mesure que les abattements au titre du coût du capital sont demandés (utilisés). La condition d’équilibre de l’investissement donnée par l’équation (8) diffère de celle qui résulte de l’équation (4) pour le cas d’absence d’impôt, sur deux points importants. En premier lieu, comme les revenus de la vente de produits sont imposés au taux u, le bénéfice après impôt qui résulte pour l’entreprise de l’utilisation d’une unité additionnelle de capital est ramené de Fk à Fk(1 – u). En second lieu, l’entreprise étant en mesure de déduire de son revenu imposable, au cours des périodes futures, un flux d’abattements au titre du coût du capital sur ses investissements, le coût pour l’entreprise d’un dollar additionnel de capital diminue de [uδ/(Rf + δ)] dollar/cents, ce qui correspond à la valeur actualisée des abattements au titre du coût du capital liés à la dépense en capital. Dans le graphique 5.2, qui illustre ce cas, la courbe de l’investissement Ia représente le taux de rendement avant impôt sur les sociétés (Fk + δ) pour différents niveaux d’investissement, tandis que la courbe d’investissement Ib représente le taux de rendement après impôt sur les sociétés (Fk + δ)(1 – u) pour différents niveaux d’investissement. Le TMEI© dans ce cas simplifié peut s’expliquer de la manière suivante. Afin de verser aux actionnaires leur taux de rendement requis R, l’entreprise doit générer un taux de rendement avant impôt sur les sociétés de Rf/(1 – u) où Rf = R, sur lequel [u/(1 – u)]Rf est versé sous forme d’impôt sur les sociétés, ce qui laisse Rf = R dollars entre les mains des actionnaires. Avec l’instauration de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, seul l’investissement intérieur se trouve réduit. L’épargne intérieure n’est pas affectée dans l’hypothèse
Graphique 5.2. Rendement de l’investissement dans le cadre d’un système simple d’impôt sur les bénéfices des sociétés Rg, R Rg
R
E0 E1
Ia Ib Il
Source : OCDE.
© OCDE 2000
I0
I
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d’une économie ouverte de petites dimensions où le marché financier peut fonctionner sans que l’investissement intérieur soit égal à l’épargne intérieure. Le tableau suivant résume les taux de rendement applicables et le coin fiscal pour l’impôt sur les sociétés dans l’optique du TMEI© au nouveau point d’équilibre E1 pour lequel l’investissement intérieur se trouve réduit, alors que l’épargne intérieure (qui n’est pas indiquée) reste inchangée. Résumé des statistiques (cas d’un impôt simple sur les bénéfices des sociétés) Coût d’usage du capital
(Rf + δ)[1 – uδ/(Rf + δ)] = Rf + δ(1 – u) où Rf = R
Taux de rendement brut, net de l’amortissement (Rg) Taux réel de rendement requis pour l’épargnant (coût réel des fonds) TMEI©
Rf/(1 – u) R u
5.5. Analyse de certains instruments ciblés de l’impôt sur les sociétés Examinons à présent une version développée du modèle TMEI© dans une économie ouverte de petites dimensions qui prend en compte à la fois le financement par l’endettement et sur fonds propres, ainsi que deux instruments fiscaux susceptibles de stimuler l’investissement – un crédit d’impôt pour investissement et un amortissement accéléré au titre du coût du capital. 5.5.1. Instruments spéciaux dans le cadre de l’imposition des sociétés – un crédit d’impôt pour investissement sur les achats de capital physique, obtenu au taux ψ ; – un abattement pour amortissement dégressif ou accéléré, obtenu au taux (α > δ) – le système d’abattement au titre du coût du capital n’est pas indexé en fonction de l’inflation. Le coût réel du capital financier est tout d’abord déterminé ci-dessous. Puis, la condition d’investissement optimal est caractérisée en présence du crédit d’impôt pour investissement et de l’amortissement accéléré au titre du coût du capital. 5.5.2. Mesure du coût de financement Rf Afin d’acquérir un actif physique, une entreprise peut se procurer un financement à partir de deux sources principales : un financement par endettement (emprunt, émission d’obligations) et un financement sur fonds propres (bénéfices non distribués, émission de nouvelles actions). Désignons les taux nominaux de rendement payables aux épargnants au titre de l’endettement et des fonds propres de la société, tels qu’ils sont déterminés sur les marchés financiers mondiaux, par i et ρ, ce qui implique le taux de rendement moyen réel pondéré suivant pour les épargnants : R = βi + (1 – β)ρ – π
(10)
où les pondérations (β) et (1 – β) correspondent à la fraction de capital levée respectivement sous forme d’endettement et de fonds propres, et π est le taux général d’inflation. Étant donné que les versements nominaux d’intérêts sont déductibles du revenu imposable, le coût réel après impôt du capital financier pour l’entreprise peut s’exprimer de la manière suivante8 : Rf = βi(1 – u) + (1 – β)ρ – π
(11)
où u est le taux nominal de l’impôt sur les bénéfices des sociétés. 5.5.3. Analyse de l’équilibre de l’investissement
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La possibilité de disposer d’un crédit d’impôt pour investissement et d’un amortissement accéléré, réduit le coût d’acquisition du capital physique et influe par conséquent sur la valeur de Rg. Le crédit d’impôt pour investissement réduit le prix d’achat d’un dollar de capital à (1 – ψ) dollars. © OCDE 2000
Taux marginaux effectifs d’imposition
Considérons à présent la valeur actualisée pour l’entreprise des déductions générées par un système d’amortissement accéléré (non ajusté en fonction de l’inflation) : (1 – ψ)uα/(Rf + π + α)
(12)
où le flux est actualisé à un taux nominal (Rf + π) et non au taux réel Rf du fait de l’absence d’indexation du système d’abattement au titre du coût du capital. Le terme (1 – ψ) de l’équation (12) reflète l’hypothèse selon laquelle l’entreprise n’est autorisée amortir que le coût de l’investissement évalué net du crédit d’impôt obtenu sur son prix d’achat (en partant du principe que le crédit d’impôt pour investissement réduit le prix effectif d’acquisition pour l’entreprise d’un dollar de capital à (1 – ψ) dollars). Lorsqu’il n’est possible d’amortir sur le plan fiscal que le coût historique (prix d’achat) exprimé en dollars d’un actif (système d’amortissement fiscal non ajusté en fonction de l’inflation) la valeur réelle de la déduction autorisée diminue au rythme de l’inflation π. La combinaison du crédit d’impôt pour investissement et de l’amortissement accéléré réduit le prix effectif d’acquisition, mesuré en dollars (ou en d’autres unités monétaires) de un à : (1 – ψ – (1 – ψ)[uα/(Rf + π + α)]
(13)
Étant donné le coût de financement et la structure de l’impôt sur les sociétés exposés ci-dessus, on peut montrer que l’entreprise représentative ajustera son stock de capital k au cours de chaque période jusqu’au point où : Fk(1 – u) = (Rf + δ)(1 – ψ)[1 – uα/(Rf + π + α)]
(14)
Le coût d’usage du capital, indiqué du côté droit de l’expression, indique le coût pour l’entreprise de la détention d’un dollar (constant) de capital pendant une période donnée – ce coût est égal au coût réel d’amortissement financier et économique de la détention d’un dollar de capital pendant une période, donné par l’expression (Rf + δ), multiplié par le coût après impôt de l’acquisition d’un dollar de capital donné par l’expression (1 – ψ)(1 – uα/(Rf + π + α)). En divisant par (1 – u) et en soustrayant δ, on obtient le taux de rendement requis du capital avant impôt sur les sociétés : Rg = {(Rf + δ)(1 – ψ)[1 – uα/(Rf + π + α)]/(1 – u)} – δ
(15)
Le tableau suivant résume les taux de rendement déterminant la valeur de TMEI©, représentant le coin fiscal de l’impôt sur les sociétés qui détermine la distorsion de l’investissement dans le cas développé d’une économie ouverte de petites dimensions. Résumé des statistiques (modèle élargi d’économie ouverte de petites dimensions) Coût d’usage du capital
(Rf + δ)(1 – ψ)[1 – uα/(Rf + π + α)] où Rf = βi(1 – u) + (1 – β)ρ – π
Taux de rendement brut, net de l’amortissement Taux réel de rendement requis pour l’épargnant TMEI©
{(Rf + δ)(1 – ψ)[1 – uα/(Rf + π + α)]/(1 – u)} – δ R = βi + (1 – β)ρ – π (Rg – R)/Rg
Le cadre du TMEI© intègre dans un indicateur synthétique unique les influences diverses que ces considérations d’impôt sur les sociétés exercent sur l’incitation à investir, comme on le verra ci-dessous. Évaluation de l’incidence des mesures d’incitation à l’investissement dans le cadre de l’imposition des sociétés Incidence sur Rg et TMEI©
Incidence sur l’investissement
Augmente Diminue Diminue
Diminue Augmente Augmente
Diminue le coût effectif du capital physique
Diminue
Augmente
Diminue le coût effectif du capital physique
Diminue
Augmente
Augmentation du paramètre fiscal
Mécanisme de transmission
Taux de l’impôt sur les sociétés (u)
Diminue le rendement net sur les bénéfices des sociétés Diminue le coût du financement par l’endettement Augmente l’abattement au titre du coût du capital
Taux d’abattement au titre du coût du capital (α) Taux du crédit d’impôt pour investissement (ψ)
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Graphique 5.3. Rendement et investissement dans le cas d’importations nettes de capitaux
S(R)
Rg E0
R
E1
I(Rg)a
I(Rg)b I1
S0 = S1
I0
I, S
Source : OCDE.
Ces résultats concernant le TMEI reposent sur les hypothèses correspondant à une économie ouverte de petites dimensions, selon lesquelles 1) les décisions d’investissement des entreprises intérieures sont influencées par les dispositions relatives à l’impôt sur les sociétés ; 2) elles ne sont pas influencés par les dispositions concernant l’impôt sur le revenu des personnes physiques ; et 3) les décisions d’épargne des propriétaires de logements résidents sont influencées par l’impôt sur le revenu des personnes physiques mais non par l’impôt sur les sociétés.
Graphique 5.4. Rendement et investissement dans le cas d’exportations nettes de capitaux
S(R) Rg
E0 R E1
I(Rg)b I(Rg)a I1
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I0
S0 = S1
I, S
Source : OCDE.
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Taux marginaux effectifs d’imposition
Le niveau de l’épargne et de l’investissement dans le cas d’une économie ouverte de petites dimensions est indiqué dans le graphique 5.3 lorsque l’économie est importatrice nette de capital. Le graphique 5.4 envisage le cas où l’économie est exportatrice nette de capital. Dans le cas où l’économie est importatrice nette de capital et en l’absence d’impôt, le niveau de l’investissement dans l’économie étant donné par I0 et le niveau de l’épargne par S0, la différence entre l’investissement et l’épargne intérieure, représentée par le montant (I0-S0) est financée par des entrées de capitaux étrangers. Avec l’instauration d’un impôt sur les sociétés, l’investissement se trouve ramené de I0 à I1 (dans l’hypothèse où le taux de rendement avant impôt Rg excède le taux d’intérêt mondial R)9. Cependant, l’épargne intérieure n’est pas affectée dans la mesure où les ménages résidents peuvent continuer à bénéficier du même taux de rendement sur leur épargne. Avec l’introduction de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (qui n’est pas envisagée dans le graphique 5.3), l’épargne intérieure baisserait en-dessous de S0, mais l’investissement intérieur ne serait pas affecté dans la mesure où il serait possible de faire face à la réduction de l’épargne au moyen d’un accroissement des entrées nettes de capitaux. Dans le cas d’un pays exportateur net de capitaux représenté dans le graphique 5.4, en l’absence d’impôt, l’investissement est à nouveau indiqué par I0, l’épargne par S0, et l’excès de l’épargne intérieure sur l’investissement intérieur (S0-I0) représente l’épargne investie dans des actifs étrangers. L’investissement baisse de I0 à I1 du fait de l’application d’un impôt sur les bénéfices des sociétés (à supposer là encore que Rg excède R) et l’épargne n’est pas affectée. Dans ce cas, l’instauration d’un impôt sur le revenu des personnes physiques (qui n’est pas indiqué) aurait pour effet de ramener l’épargne en-dessous de S0 mais l’investissement intérieur ne serait pas affecté dans la mesure où les entreprises pourraient continuer à se procurer des financements aux taux internationaux. 5.6. Limites de l’analyse en termes de TMEI Cette section envisage l’analyse en termes de taux marginaux effectifs d’imposition, en s’efforçant d’évaluer d’un point de vue critique son utilité comme guide pour la formulation de la politique fiscale. On mettra l’accent ici sur les TMEI applicables à l’investissement en capital (physique)10. Les taux marginaux effectifs d’imposition ont été largement préconisés comme indicateurs synthétiques de la combinaison des interactions d’une série de paramètres fiscaux liés aux décisions d’investissement, et comme indicateurs des comparaisons des dispositions fiscales d’une période à l’autre, d’un secteur à l’autre et d’un pays à l’autre. Cet intérêt largement partagé a encouragé beaucoup de spécialistes à consacrer du temps et des efforts à la mesure, à la classification et à la promotion des TMEI comme indicateurs de référence pour guider les décisions de politique fiscale. Compte tenu de cette évolution, il est important de réfléchir aux nombreuses mises en garde liées au cadre sous-jacent afin que les résultats de l’analyse en termes de TMEI et leur utilisation puissent être replacés dans la perspective qui convient. Les questions examinées ci-dessous montrent que l’analyse en termes de TMEI peut être fructueuse si elle n’est pas poussée au-delà de ses limites. Les TMEI doivent être considérés comme des variables auxiliaires approximatives qui permettent de résumer, à un niveau global, les interactions de diverses dispositions fiscales concernant l’investissement en capital. Les TMEI fournissent par ailleurs un cadre utile pour identifier les différents mécanismes par lesquels la politique fiscale pourrait influer sur le comportement en matière d’investissement – par le biais de l’imposition du rendement de l’investissement ; par le biais de l’incidence des déductions fiscales et crédits d’impôt sur le prix d’achat effectif d’unités additionnelles de capital et par le biais des effets possibles de l’imposition au niveau des sociétés et des actionnaires sur le coût des fonds (capital financier). Cependant, les TMEI ne fournissent pas une évaluation définitive de l’incidence des politiques fiscales sur les flux effectifs d’investissement ou sur les stocks de capital. Parmi les principales hypothèses généralement invoquées, beaucoup ne peuvent être soutenues dans de nombreux cas, ce qui rend difficiles les comparaisons entre secteurs ou pays. Par ailleurs, la mesure des TMEI soulève en général des problèmes posés par les données et leur agrégation, de sorte que même si les hypothèses de base sont valables, les statistiques qui en résultent peuvent s’écarter de la réalité. De plus, du fait © OCDE 2000
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
du cadre d’équilibre partiel statique à partir duquel les statistiques des TMEI sont obtenues, l’analyse en termes de TMEI elle-même est incapable d’évaluer les réactions de l’investissement et du stock de capital aux variations de l’impôt, les possibilités de substitution des facteurs de production, les problèmes de délai, les effets sur la distribution des revenus, les réactions en termes de stratégies fiscales et tout un ensemble d’autres questions qui doivent être traitées lorsqu’on cherche à évaluer divers contextes de politique fiscale. Un examen approfondi de l’ensemble des problèmes conceptuels et des problèmes concernant les données abordés dans ce chapitre montre que les statistiques relatives aux TMEI et les comparaisons entre secteurs ou pays ne peuvent être considérés comme des indicateurs fiables de l’influence de la fiscalité sur l’investissement ou comme des guides pour la mise en place de la politique fiscale. L’objet de ce chapitre est de fournir une documentation de base concernant certaines mises en garde à appliquer à l’analyse en termes de TMEI afin de favoriser la mise en œuvre d’un consensus sur l’utilité des statistiques des TMEI comme guide d’évaluation des positions et options de la politique fiscale. La mise en œuvre d’un consensus est importante pour s’assurer que l’importance donnée à ces dispositions dans les discussions de politique fiscale à l’intérieur et en dehors du cadre de l’OCDE soit exacte et cohérente. La sous-section suivante examine les principales hypothèses sur lesquelles repose l’analyse conventionnelle en termes de TMEI et pose la question de savoir si l’on peut considérer que ces hypothèses sont valables dans tous les cas. Dans la mesure où ce n’est pas le cas, il faut se montrer prudent dans l’utilisation des statistiques des TMEI comme base de comparaison de l’influence nette de la politique fiscale sur les incitations à l’investissement d’un secteur à l’autre et d’un pays à l’autre. La sous-section 5.6.2 examine une série de problèmes posés par les limitations relatives aux données et par les techniques d’agrégation, ce qui aboutit à une nouvelle mise en garde concernant l’utilisation des statistiques des TMEI pour l’analyse des politiques fiscales. 5.6.1. Fiabilité des hypothèses sous-jacentes. Cette sous-section examine d’un point de vue critique six hypothèses sur lesquelles repose l’analyse en termes de TMEI. Concurrence parfaite et absence de rente économique La plupart des modèles utilisés pour calculer les taux marginaux effectifs d’imposition supposent que l’entreprise représentative opère sur des marchés de concurrence parfaite et considère les prix des produits comme une donnée. Bien que cette hypothèse puisse se trouver vérifiée dans certains secteurs et dans certains pays, elle n’est pas valable dans la plupart des cas ni la plupart du temps. Par exemple, les entreprises disposent souvent d’un pouvoir de monopole jusqu’à un certain degré. Il y a donc lieu d’inclure au dénominateur de l’indicateur du TMEI un indicateur de l’élasticité de la courbe de demande d’investissement de l’entreprise représentative11. Cependant, pour pouvoir disposer de données sur cette élasticité et sur la manière dont elle varie entre les secteurs, les pays et les périodes, il faudrait accéder à des données détaillées par entreprise qui ne sont généralement pas disponibles pour les analystes.
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Le modèle suppose par ailleurs que l’entreprise investit jusqu’au point où le bénéfice marginal après impôt de la dernière unité de capital installé est tout juste égal au coût marginal après impôt. Ce résultat est fondé sur l’hypothèse selon laquelle tout d’abord les plans d’investissement de l’entreprise sont motivés par l’objectif de la direction qui consiste à maximiser les fonds propres pour les actionnaires et en second lieu que le capital investi est infiniment divisible. Dans un certain nombre de cas, les plans d’investissement d’une entreprise peuvent n’être pas motivés par un comportement de maximisation de la valeur. D’autres objectifs de la direction peuvent intervenir et/ou une entreprise peut bénéficier de rentes économiques (pures) importantes – grâce à des barrières à l’entrée dans l’industrie ou à d’autres facteurs – de sorte que les plans d’investissement ne sont pas poussés jusqu’au point où le bénéfice net du projet est égal à son coût marginal net. De plus, les projets d’investissement forment généralement un tout et ne sont pas infiniment divisibles. Dans de © OCDE 2000
Taux marginaux effectifs d’imposition
tels cas, l’investissement en capital peut se poursuivre jusqu’au point où des rentes économiques sont obtenues à la marge (ces rentes n’étant pas réalisées, dans la mesure où l’acceptation d’un projet d’investissement additionnel, qui suppose une importante augmentation discontinue du stock de capital, peut ramener les bénéfices nets d’un projet en-dessous de ses coûts nets). Dans de tels cas, où des rentes économiques sont obtenues à la marge, des variations (relativement faibles) des TMEI générées par des variations des taux d’impôt sur le revenu des personnes physiques, des crédits d’impôt pour investissement et/ou d’autres paramètres des TMEI – ne devraient pas influer sur le niveau d’investissement comme le suppose l’analyse conventionnelle des TMEI. Baisse de la productivité marginale du capital La théorie néo-classique de l’investissement sur laquelle repose l’analyse en termes de TMEI suppose que la productivité marginale du capital, qui est le montant additionnel de production générée par une unité additionnelle de capital installé, diminue à mesure que l’importance du stock global de capital s’accroît. Cela donne un résultat d’équilibre où les entreprises investissent jusqu’au point où la valeur après impôt de la production additionnelle générée par l’investissement à la marge est tout juste égale à son coût après impôt. L’hypothèse des rendements décroissants à la marge est adoptée dans la plupart des modèles de TMEI qui étudient les investissements en capital physique réel, en recherche-développement et en capital humain. Cependant, cette hypothèse peut n’être pas valable dans tous les secteurs, dans tous les pays et pour toutes les périodes. Les nouveaux éclairages donnés par les travaux récents sur la théorie de la croissance par exemple, montrent que le capital de connaissances génère des rendements croissants en termes de production à la marge12 . Les apports de capital physique et humain génèrent des connaissances et les connaissances contribuent à produire du capital humain additionnel. Comme il est possible que le taux de rendement du capital augmente plutôt que de diminuer lorsque le stock de capital augmente, en l’occurrence le capital de connaissances, l’extension de l’analyse en termes de TMEI aux investissements en capital de connaissances pourrait être inadaptée et aboutir à un indicateur trompeur sur l’incidence de la fiscalité13. Structure financière et conditions d’arbitrage sur le marché L’un des domaines les plus complexes et controversés de l’analyse en termes de TMEI porte sur le choix de l’hypothèse d’arbitrage sur le marché financier à retenir dans la détermination du coût des fonds pour l’entreprise représentative (r). Des complications surviennent du fait que les systèmes d’impôts sur le revenu appliquent des traitements distincts aux différents types de financement et aux différents types d’épargnants. De plus, l’incertitude règne sur le plan empirique quant à la question de savoir dans quelle mesure les charges fiscales (ou les allégements fiscaux) liés aux rendements financiers sont supportés par les entreprises ou par les épargnants et quant à l’importance, aux modalités et à la date des arbitrages portant sur le traitement fiscal différentiel des actifs financiers au niveau de la société ou de l’investisseur individuel. Il y a beaucoup de problèmes empiriques non résolus et l’on peut s’attendre à ce que les réponses varient selon la période, le pays et même le secteur considéré. Beaucoup d’hypothèses concernant l’arbitrage ont été utilisées dans les différents travaux effectués. Celles-ci ne seront pas examinées d’une manière exhaustive ici mais un examen rapide des hypothèses possibles en matière d’arbitrage dans le cadre de l’approche dite « r fixe » est révélateur14. L’approche « r fixe » suppose que tous les projets rapportent le même taux de rendement après impôt sur les sociétés. Pour un épargnant donné, cela signifie que tous les projets (nationaux) rapportent le même taux de rendement après impôt sur le revenu des personnes physiques. Les différences dans le régime fiscal de revenus d’investissement applicables aux différents investisseurs impliquent que les taux de rendement après impôt sur le revenu des personnes physiques varieront d’un épargnant à l’autre. Dans le cadre où r est fixe, il existe plusieurs possibilités. L’une des approches possibles consiste à supposer que l’arbitrage au niveau de l’entreprise égalise le coût après impôt du financement par l’endettement avec le coût (non déductible) du financement sur fonds propres, sans opérer de © OCDE 2000
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distinction entre les bénéfices non distribués et les émissions de nouvelles actions 15. Une autre approche consiste à admettre que les dividendes ont une certaine valeur intrinsèque pour les actionnaires (ils peuvent jouer un rôle d’indicateur) et que les entreprises comparent ces avantages intrinsèques au coût fiscal des dividendes par rapport au rachat d’actions, augmentant les versements de dividendes jusqu’à ce qu’elles soient indifférentes à la marge entre un financement par l’émission de nouvelles actions et par des bénéfices non distribués16. Une autre méthode consiste cependant à supposer que les taux de rendement applicables aux bénéfices non distribués et aux émissions de nouvelles actions sont obtenus de telle manière que chaque solution rapporte le même taux de rendement après impôt sur le revenu des personnes physiques que celui que procure l’endettement. Lorsque le régime fiscal diffère selon les contribuables, par exemple selon qu’ils sont résidents ou non résidents, il est nécessaire d’identifier un « actionnaire marginal » dont le régime fiscal joue un rôle dans la détermination du coût de financement après impôt sur les sociétés. L’identification d’un tel contribuable n’est pas toujours évidente. Ayant choisi un actionnaire représentatif, on peut recourir à la « nouvelle approche » de l’imposition des dividendes (voir annexe 2B) selon laquelle les impôts applicables aux dividendes ne jouent aucun rôle dans la détermination du coût du capital. On peut aussi considérer les bénéfices non distribués comme représentant la source marginale du financement sur fonds propres. Enfin, on peut préférer utiliser une moyenne pondérée des coûts des bénéfices non distribués et des nouvelles émissions d’actions. Dans ces derniers cas, on admet généralement que le taux de rendement des obligations après impôt doit être utilisé comme le coût d’opportunité de référence. Cependant, même dans cette hypothèse, on peut choisir une obligation donnée et le taux d’intérêt correspondant en tenant compte du fait que les taux des obligations varient en fonction de l’échéance et du risque, la théorie offrant peut d’indications. La question est rendue plus complexe par le fait que les entreprises recourent de plus en plus, à des degrés divers selon les secteurs et les pays, aux nouveaux produits financiers (produits dérivés) alors que la plupart des études en termes de TMEI ne prennent en compte que les obligations et fonds propres conventionnels, laissant ainsi de côté la part la plus active des marchés financiers. De plus, les facteurs utilisés pour pondérer les différents coûts de financement (soit dans la détermination d’un coût global de financement, soit dans la pondération des différents TMEI, chacun étant fondé sur un instrument unique de financement) sont généralement fondés sur des données moyennes rétrospectives, qui dans certains cas, peuvent n’être pas représentatives de projets d’investissement marginaux tournés vers l’avenir. Le choix d’une hypothèse particulière en matière d’arbitrage et le fait de maintenir sa valeur fixe dans les différents calculs portant sur les TMEI ne pose pas de problème si l’exercice consiste à s’efforcer de résumer les différences dans le régime fiscal des différents projets d’investissement, dans le cadre des hypothèses retenues en matière d’arbitrage et dans d’autres domaines. Cependant, comme pour les autres hypothèses et paramètres qui interviennent dans l’établissement de statistiques des TMEI, les résultats qui montrent que les incitations à l’investissement dans un type de projet sont plus ou moins faussées par l’impôt que dans le cas d’un autre type de projet ne sont pas plus fiables que les hypothèses sous-jacentes elles-mêmes. Cela résulte du fait que la présence (ou l’absence) de divers paramètres fiscaux dans l’expression du coût de financement dépend uniquement de l’hypothèse d’arbitrage. Lorsque la condition d’un arbitrage correct varie dans le temps ou selon les pays ou les secteurs, les statistiques des TMEI qui utilisent une hypothèse d’arbitrage fixe dans les différents cas aboutiront à des comparaisons inexactes des incitations à l’investissement d’une période à l’autre, d’un pays à l’autre et d’un secteur à l’autre. Compensation des pertes
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L’analyse en termes de TMEI suppose implicitement que les systèmes fiscaux traitent les recettes et les pertes de manière symétrique, ou en d’autres termes, autorisent une compensation intégrale ou parfaite des pertes. Pour que cette symétrie soit vérifiée, les gouvernements doivent offrir aux contribuables une possibilité de remboursement intégral des dettes fiscales négatives (ou un dispositif © OCDE 2000
Taux marginaux effectifs d’imposition
équivalent, tel que le report sur les exercices ultérieurs des pertes fiscales et des crédits d’impôt inutilisés avec intérêt). En pratique, ce n’est jamais le cas. Les systèmes fiscaux n’offrent en général qu’une compensation imparfaite des pertes. Bien que la plupart des systèmes d’impôt sur les sociétés comportent des dispositions relatives au report des pertes sur les exercices antérieurs et ultérieurs, celles-ci ont généralement une durée d’application limitée et le report des pertes sur les exercices ultérieurs ne comporte pas d’intérêt. De plus, le taux de l’impôt sur les sociétés applicable au report sur les exercices antérieurs ou ultérieurs peut différer de celui qui est applicable aux bénéfices courants. En principe, les paramètres relatifs aux abattements au titre du coût du capital et aux crédits d’impôt pour investissements qui sont utilisés pour déterminer le coût net du capital physique doivent être ajustés de manière à tenir compte des situations de perte fiscale afin de refléter la valeur actualisée (prévisible) de la déduction fiscale qu’ils représentent. De même, les déductions d’intérêts doivent être actualisées dans la détermination du coût de financement par l’endettement. Du côté des recettes, le taux de l’impôt sur les sociétés applicable aux recettes marginales doit être actualisé dans les cas de report des pertes sur les exercices ultérieurs17. Ces ajustements jouent dans des directions opposées et par conséquent, il n’est pas possible de dire a priori si une compensation imparfaite des pertes augmente ou diminue les taux d’imposition effectifs. L’impossibilité de prendre en compte la compensation imparfaite des pertes signifie que les TMEI se trouvent faussés, soit positivement, soit négativement, et à un degré variable selon les secteurs, les pays et les périodes, dans la mesure où la situation fiscale déficitaire des entreprises (compte tenu de l’accumulation de pertes fiscales) varie selon les secteurs, les pays et les périodes. Les positions déficitaires subissent l’influence de toute une série de facteurs, parmi lesquels le pourcentage d’entreprises en phase de démarrage et d’entreprises parvenues à maturité, les différences de périodicité des cycles économiques ainsi que dans la vulnérabilité aux chocs économiques, ainsi que les différences quant aux dispositions fiscales d’incitation à l’investissement applicables pendant la période en cours et dans le passé (ces dispositions prenant largement en compte dans de nombreux pays les pertes fiscales). Les analyses effectuées selon cette approche sont en outre faussées par le fait que les dispositions régissant les transferts de pertes au sein des groupes diffèrent d’un pays à l’autre. Le peu d’informations dont on dispose sur ces facteurs laissent prévoir que l’effet net de ces distorsions pourrait être important. Par exemple, au milieu des années 80, des estimations ont montré qu’au Canada, la part des entreprises qui ne payaient pas d’impôt était beaucoup plus élevée qu’aux États-Unis18 . En particulier, près de 50 pour cent des investissements effectués au Canada et 80 pour cent des investissements effectués aux États-Unis étaient le fait d’entreprises intégralement imposables au cours de cette période, le montant d’impôt versé variant sensiblement d’un secteur à l’autre. Traitement des risques (incertitudes) Le traitement des risques est étroitement lié à la question de la compensation des pertes. L’analyse en termes de TMEI utilise souvent des anticipations statiques et admet l’hypothèse d’une certitude parfaite. On suppose donc que les entreprises s’attendent à ce que les valeurs futures de tous les paramètres de l’expression du TMEI, y compris les taux d’imposition, restent inchangés par rapport à leur valeur de la période en cours, et que les prévisions portant sur ces valeurs soient exactes. On soutient souvent que ces hypothèses sont contraires à la réalité. Les modifications fréquentes du Code des impôts attestent le caractère non statique des taux d’imposition et des paramètres, et en outre, des réformes fiscales futures sont souvent annoncées. Par ailleurs, l’évolution future des prix des produits et des moyens de production, ainsi que des taux d’intérêt et des taux d’inflation est généralement incertaine, ce qui laisse supposer que les entreprises envisagent un intervalle de valeurs probables pour ces paramètres plutôt que de leur assigner une valeur unique fixe, lorsqu’elles évaluent les incitations à l’investissement qui leur sont applicables. C’est le cas en particulier lorsque le projet est à long terme et que les capitaux engagés ne sont pas facilement réversibles ; on examinera plus en détail ci-dessous la question de l’irréversibilité du capital. Les travaux effectués suggèrent que l’analyse en termes de TMEI opère une distinction entre différents types de risques, parmi lesquels le risque de revenu et le risque de capital19. Le risque de © OCDE 2000
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revenu se réfère à l’incertitude concernant les revenus nets futurs du fait de l’évolution stochastique des prix des produits, des moyens de production ou de la demande à laquelle l’entreprise doit faire face. Le risque de capital se réfère à l’incertitude concernant le taux d’amortissement économique du capital installé qui s’explique soit par le fait que le prix d’achat futur du capital est inconnu, soit par un taux stochastique d’amortissement physique ou d’obsolescence. Si le système fiscal accorde une compensation intégrale des pertes ou si le traitement qu’il applique est proche d’un tel système, il peut n’être pas nécessaire d’ajuster les TMEI en fonction du risque de revenu car dans ce cas, le gouvernement participe sur un pied d’égalité aux profits et pertes de la société – par exemple en partageant 35 pour cent des bénéfices et 35 pour cent du risque de revenu, dans l’hypothèse où le taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés est de 35 pour cent. Le coût du risque de revenu est donc implicitement déduit en totalité dans le cadre d’un système de compensation intégrale des pertes, aucune distorsion additionnelle d’origine fiscale n’étant instaurée pou r les in ve stisseme nts comportant des risqu es en te rmes de re ve nu par rapport à des investissements comparables sans risque. La situation est cependant différente pour les investissements comportant des risques en termes de capital. Dans la plupart des pays, les abattements pour amortissement sont fondés sur le coût initial de l’actif et par conséquent, ils ne changent pas en cas de variation imprévue de la valeur vénale du capital installé, comme cela peut se produire en cas de changement technologique imprévu ou de modification imprévue du régime fiscal. Par conséquent, même lorsque des impôts négatifs sont remboursés, le système fiscal ne comporte pas de déductions de la totalité du coût du risque de capital et par conséquent, l’expression des TMEI doit prendre en compte cette distorsion d’origine fiscale concernant les actifs à risque. Le risque en termes de capital peut être pris en compte dans la théorie en augmentant le taux d’amortissement économique (sans augmentation équivalente du taux d’amortissement fiscal). Cependant, en pratique, il est difficile d’évaluer la prime de risque correspondant au risque en termes de capital. Certains ont soutenu que la valeur d’une entreprise sur le marché est égale à la valeur de ses actifs et que par conséquent, les fluctuations de la valeur sur le marché correspondent aux variations de la valeur des actifs sous-jacents20 . Selon cette optique, les modèles de fixation des prix des actifs pourraient être utilisés pour évaluer la prime de risque en termes de capital. Cependant, d’autres travaux ont montré que c’est la corrélation entre le coût économique de l’amortissement et la consommation qui est significative, et que cette corrélation pourrait être négative, ce qui impliquerait que les estimations effectuées à l’aide des modèles de fixation des prix des actifs pour déterminer les primes de risque en termes de capital seraient inadaptés21. Irréversibilité du capital La plupart des analyses en termes de TMEI laissent non seulement de côté les complications qui résultent de l’incertitude, mais elles supposent aussi implicitement que les investissements en capital sont réversibles en totalité et sans coût. Il est évident que cette affirmation n’est pas valable pour la plupart des catégories de capital. Le capital est souvent spécifique à certaines activités ou à certains secteurs et lorsque ce n’est pas le cas, le coût de son transfert d’une installation donnée à une autre peut être important. Si la conversion du capital vers d’autres usages est extrêmement coûteuse, sinon impossible, on peut considérer l’investissement comme irréversible.
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Les recherches entreprises pour déterminer les conséquences de l’irréversibilité pour l’évaluation de la demande de capital et les TMEI ont été relativement limitées bien que ce facteur apparaisse important 22. Les données disponibles sur les conséquences de l’irréversibilité du capital montrent que le TMEI applicable au capital irréversible peut être sensiblement plus élevé que celui qui s’applique au capital totalement réversible, selon le niveau et le type de risque, et qu’il augmente généralement avec le risque de revenu et de capital 23. Par conséquent, si l’on ne tient pas compte de cet aspect, cela tend à fausser la comparaison entre secteurs ou entre pays des résultats de l’analyse en termes de TMEI du fait que les caractéristiques de chaque investissement en termes de risques sont très différents d’un cas à l’autre. © OCDE 2000
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5.6.2. Limitations tenant aux données La sous-section précédente a examiné les problèmes théoriques liés à l’analyse en termes de TMEI. Cette section examine les limites de cette analyse qui tiennent aux problèmes de données. Les problèmes essentiels que l’on rencontre en matière de données résultent peut-être du fait que beaucoup de variables nécessaires ne peuvent être observées en raison du caractère prospectif des décisions d’investissement. Un autre problème est lié à l’incertitude qui règne lors de l’établissement des modèles quant aux technologies de production utilisées par l’entreprise « représentative ». Un autre problème encore résulte du fait que l’agrégation est inévitable, étant donné que l’on ne dispose pas en général de données au niveau de l’entreprise. On examinera brièvement ci-après certaines des difficultés rencontrées dans l’obtention de valeurs représentatives de s pr in ci pau x pa ra mè t re s u t ilis é s d an s le s é qu at io n s st an da r ds de s TM EI e n mat iè r e d’investissement. Paramètres fiscaux au niveau de l’entreprise Les expressions des TMEI en matière d’investissement comportent généralement un taux d’impôt sur les bénéfices des sociétés et un terme qui mesure la valeur actuelle des abattements pour amortissement demandés sur une unité d’investissement à la marge. Les taux de crédit d’impôt pour investissement peuvent également intervenir s’ils sont applicables. En général, on utilise les taux nominaux courants d’impôt sur les sociétés, les abattements au titre du coût du capital et les taux des crédits d’impôt pour investissement malgré le fait que les prévisions concernant les valeurs futures de ces taux peuvent n’être pas statiques, et que la compensation intégrale des pertes n’est généralement pas autorisée. Le problème qui se pose au concepteur de modèles est lié au fait que les valeurs des paramètres fiscaux (et de prix) qui interviennent dans l’équation des TMEI doivent être celles prévues par ceux qui prennent les décisions d’investissement. La difficulté résulte du fait que les processus d’élaboration des prévisions correspondantes (dont on peut s’attendre à ce qu’ils varient selon les cas d’investissement) sont généralement inconnus. De même, on ne dispose pas d’informations détaillées sur les positions déficitaires des entreprises qui ont été observées dans le passé ou qui sont prévues pour l’avenir, ce qui rend très incertain l’ajustement des valeurs des paramètres en vue de tenir compte de la compensation imparfaite des pertes – et par conséquent ce facteur n’est souvent pas pris en compte. Par ailleurs, le taux approprié d’actualisation des abattements futurs au titre du coût du capital n’est pas du tout clair. Dans le cas où l’amortissement fiscal n’est pas indexé en fonction de l’inflation, il est convenu d’utiliser un taux nominal. Mais faut-il que le taux nominal corresponde directement au terme réel du coût de financement qui intervient dans l’équation du TMEI ou faut-il que ce soit le taux nominal des obligations publiques, compte tenu du fait qu’au moins pour une entreprise imposable, le flux de déductions fiscales est plus ou moins certain ? Les responsables des investissements peuvent aussi utiliser quelque autre taux (inconnu). Une autre complication liée à l’actualisation des paramètres fiscaux pour tenir compte de la compensation imparfaite des pertes est liée à la question de savoir comment prendre en compte les possibilités d’optimisation fiscale. Lorsqu’il existe pour les contribuables des incitations à transférer les bénéfices nationaux à l’étranger, par exemple par le biais de techniques de fixation des prix de transfert et de structures financières répondant à des motivations fiscales, l’utilisation du taux nominal d’impôt sur les sociétés dans l’équation des TMEI a tendance à surestimer le taux auquel les revenus d’investissement sont imposés à la marge. La question se pose cependant de savoir comment prendre en compte cet effet avec précision. En particulier, dans quelle mesure le taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés doit-il être ramené en-dessous de sa valeur légale ? La réponse pourrait varier selon les secteurs et les pays et l’on peut s’attendre à ce qu’elle varie dans le temps à mesure que le pourcentage d’entreprises de l’économie nationale qui effectuent des opérations au niveau mondial (et les possibilités d’optimisation fiscale au niveau mondial) s’accroît et que l’ensemble de techniques très élaborées d’optimisation fiscale évolue. De plus, les possibilités dont disposent les entreprises pour se livrer à des pratiques d’optimisation fiscale sur la base du taux nominal d’imposition dépend de © OCDE 2000
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l’existence éventuelle et de la portée des dispositions visant à préserver la base de l’impôt national sur le revenu (par exemple, en ce qui concerne les dispositions en matière de prix de transfert et leurs modalités d’application, ou les réglementations en matière de sous-capitalisation). De plus, pour certains projets d’investissement (de l’étranger), les taux d’impôt sur les sociétés applicables à l’étranger auront une influence sur les projets d’investissement nationaux, ce qui signifie que le recours aux taux nationaux de l’impôt sur les sociétés pour expliquer les incitations à l’investissement dans le cadre national peut induire en erreur. En général, les taux d’imposition applicables à l’étranger auront une incidence lorsque les investisseurs étrangers sont imposés dans leur pays d’origine sur leurs revenus de source étrangère à des taux qui excèdent les taux applicables dans le pays d’accueil. L’importance de la prise en compte des investisseurs étrangers et de leur situation fiscale varie selon les secteurs, les pays et les époques. Les données chronologiques sur les structures des investissements de l’étranger ne constituent pas en général un indicateur fiable de l’importance de l’investissement étranger et le plus souvent on ne dispose pas d’informations prospectives sur les projets d’investissements étrangers dans le pays. De plus, pour représenter exactement à l’aide d’un modèle les interactions entre les systèmes fiscaux nationaux et étrangers, il faudrait disposer de renseignements détaillés sur l’ensemble des opérations effectuées au niveau mondial par les investisseurs étrangers afin de déterminer les possibilités d’optimisation fiscale dont ils disposent. Une approche simplificatrice qui est souvent utilisée de manière implicite consiste à admettre que les taux d’imposition intérieure (du pays d’accueil) excèdent ceux du pays d’origine des investisseurs étrangers. Mais même si c’était le cas, le taux légal d’imposition applicable sur le plan intérieur peut être supérieur à celui auquel les bénéfices de source nationale sont imposés dans la mesure où des montants importants de bénéfices obtenus dans le cadre national peuvent être transférés vers des pays à taux d’imposition faibles ou nuls. Les paramètres fiscaux au niveau de l’actionnaire Les taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques interviennent également dans l’analyse en termes de TMEI, aussi bien dans la détermination du rendement net pour les épargnants que, selon l’hypothèse retenue en matière d’arbitrage, dans le calcul du coût des capitaux pour l’entreprise. Les taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques à prendre en compte incluent généralement un taux d’impôt sur les revenus (ordinaires), un taux d’imposition des dividendes et un taux effectif d’imposition des gains en capital (réalisés). Différents montants du coin fiscal peuvent être évalués pour divers groupes d’épargnants, ainsi que pour diverses catégories de rendements de l’investissement (intérêts, bénéfices non distribués, émissions de nouvelles actions). Étant donné le nombre de combinaisons possibles, les TMEI sont généralement calculés pour des groupes importants d’épargnants (par exemple les ménages résidents, les organismes exonérés d’impôts). Pour le groupe des ménages résidents (imposables) un taux moyen pondéré d’impôt sur le revenu est généralement nécessaire. Si elles sont disponibles, les informations sur les revenus d’investissements des années précédentes pour les différentes catégories de revenu imposable sont utilisées pour déterminer les pondérations. Elles peuvent être appropriées pour le calcul de séries chronologiques (rétrospectives) de TMEI mais risquent d’induire en erreur pour l’établissement de TMEI de la période en cours ou prospectifs. De même, lorsque le rendement net pour les épargnants est évalué à partir d’une moyenne pondérée des rendements des intérêts, des bénéfices non distribués et des émissions de nouvelles actions, un dispositif de pondération qui se fonde sur des données chronologiques risque de donner une représentation erronée de la répartition effective des rendements des fonds utilisés pour financer l’investissement courant ou futur à la marge.
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Un certain nombre d’expressions que l’on trouve dans les travaux effectués en vue d’évaluer le rendement net pour les épargnants comprennent un terme désignant le taux d’imposition des gains en capital. L’un des problèmes qui se pose à cet égard quant aux données dont on dispose résulte du fait que si, en pratique, les gains en capital sont soumis à l’impôt sur la base de leur réalisation, le modèle des TMEI suppose qu’ils sont imposés sur la base des droits constatés. Par conséquent, il faut déterminer un taux d’imposition effectif type applicable à l’équivalent du gain en capital constaté. Afin © OCDE 2000
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de convertir un taux légal d’imposition des gains en capital (évalué sur la base de la réalisation), en un montant équivalent de gains constatés, il faut formuler des hypothèses concernant la durée prévue de détention des actions. Les auteurs de modèles de TMEI doivent en général se fonder sur des informations chronologiques sur la période moyenne de détention de certains paniers d’actions, qui peuvent aboutir à une estimation peu fiable de la période moyenne de détention prévue des actions d’entreprises dans un secteur, dans un pays et à une époque donnée. Par exemple, les périodes optimales de détention requises pour bénéficier d’un régime fiscal préférentiel varieront selon les pays et dans le temps. Un taux d’actualisation approprié doit également être choisi. L’approche est inévitablement ponctuelle et sujette à des erreurs de mesure. Comme on l’a noté ci-dessus, les taux d’imposition au niveau de l’actionnaire peuvent aussi intervenir dans la formule permettant de déterminer le coût de financement pour l’entreprise. Comme les différents groupes de contribuables – tels que les ménages résidents, les institutions financières, les organismes exonérés d’impôts, les investisseurs non résidents – sont soumis à un régime fiscal différent, il faut effectuer un choix pour identifier l’actionnaire « marginal » ou la « clientèle fiscale » dont le régime fiscal doit être pris en compte pour déterminer le coût des capitaux (tel qu’il est capitalisé dans le cours des actions). Il ne faut pas s’attendre à ce que l’identité du groupe d’actionnaires marginaux ait une importance identique pour les différents secteurs étant donné l’importance variable des groupes d’investisseurs (par exemple, les ménages résidents, les institutions financières, les organismes exonérés d’impôts et les non-résidents) selon les secteurs, les pays et les époques. Pourtant, en général, on ne dispose pas d’informations suffisantes pour identifier les groupes d’actionnaires marginaux et l’on procède à un choix arbitraire en supposant que les valeurs utilisées sont constantes dans tous les cas (concernant les contribuables résidents). Amortissement économique L’un des principaux paramètres qui interviennent dans les expressions des TMEI en ce qui concerne le capital amortissable est le taux (réel) d’amortissement économique24. Ce taux ne peut en général pas être observé et doit être déterminé par déduction. Souvent, il n’existe pas de marché d’occasion pour un grand nombre de biens d’équipement et même lorsqu’ils existent, les auteurs de modèles de TMEI ne disposent pas en général d’informations sur les prix auxquels ces biens sont échangés. L’approche généralement retenue consiste à utiliser les informations communiquées (et souvent datées) sur les durées d’utilisation et à admettre des hypothèses arbitraires concernant l’évolution de l’amortissement (par exemple, une évolution exponentielle). L’un des principaux problèmes posés par l’évaluation de l’amortissement économique, qui est souvent négligé, réside dans le fait que ce terme devrait tenir compte non seulement de l’usure matérielle mais aussi des variations prévues des prix relatifs (c’est-à-dire la variation de l’indice des prix des biens d’équipement par rapport à celui des prix des produits). Les variations prévisionnelles des prix relatifs peuvent résulter d’un certain nombre de facteurs. Par exemple, l’annonce de l’application imminente aux biens d’équipement, de nouvelles technologies qui rendront obsolètes les biens d’équipement déjà en service réduirait la valeur de ces derniers. De même, l’annonce d’un crédit d’impôt pour investissement visant les dépenses en capital effectuées après une certaine date future aurait pour effet de faire baisser la valeur du stock de capital actuellement en service. Toute une série de facteurs de ce type pourraient influer sur les décisions d’investissement, mais les informations sur ces facteurs sont généralement inconnues et ne sont pas prises en compte par les auteurs de modèles de TMEI. Taux de rendement requis Un certain nombre de problèmes conceptuels liés au choix de l’hypothèse appropriée en matiè re d’arbitrage et de structu re fin an cière o nt déjà été examiné s. Au minimum, il est généralement nécessaire de choisir un taux d’intérêt représentatif, et selon l’hypothèse en matière d’arbitrage (ou de non-arbitrage), un indicateur indépendant du coût des fonds propres pourrait être également nécessaire. © OCDE 2000
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Dans la mesure du coût du financement par l’endettement, le choix d’un taux d’intérêt approprié est généralement arbitraire. Les taux d’intérêt varient selon l’échéance des dettes et l’évaluation du risque de marché, qui est généralement fonction de la situation financière de l’entreprise emprunteuse et de la valeur de ses actifs. En principe, il faudrait utiliser une sorte de moyenne pondérée des taux d’intérêt mais en général, on dispose de très peu d’informations permettant d’orienter le choix des taux d’intérêt à retenir et des pondérations à utiliser. Lorsque les taux de rendement des actions sont mesurés d’une manière indépendante (au lieu d’être considérés comme déterminés conformément à une condition d’arbitrage) on peut utiliser l’une des méthodes d’estimation suivantes. Par exemple, on peut utiliser les multiples de capitalisation (price-earnings ratios) ajustés (ou leurs réciproques) qui sont indiqués pour divers indices d’actions. Cependant, cette approche ainsi que d’autres souffrent du fait qu’elles sont essentiellement rétrospectives, et reflètent les résultats obtenus dans le passé en matière de gains plutôt que les résultats futurs prévus et risquent donc de constituer des indicateurs peu fiables des taux de rendement requis futurs. Taux d’inflation Un autre facteur clé de l’équation des TMEI est le taux d’inflation prévu, qui est soustrait du coût nominal des fonds pour obtenir une estimation de leur coût réel. Comme pour les autres paramètres, c’est la valeur prévue de ce taux, et non pas nécessairement sa valeur pendant la période en cours qui est significative. Cependant, les conditions dans lesquelles les investisseurs effectuent leurs prévisions concernant ce taux ne sont pas claires. Dans certains cas, il peut être procédé à des prévisions statiques, alors que dans d’autres, diverses techniques de prévision peuvent être utilisées. Un indicateur moyen de TMEI ferait en principe intervenir une moyenne de ces techniques d’estimation, qui bien entendu, ne sont pas connues. Souvent, l’analyse en termes de TMEI consiste simplement à adopter une hypothèse concernant le taux d’inflation prévu et à montrer au moyen d’une analyse de sensibilité que les résultats obtenus en termes de TMEI différeront sensiblement selon le taux d’inflation futur envisagé. Si l’intention est simplement d’agréger dans un indicateur synthétique l’effet combiné des différents paramètres fiscaux qui semblent influer sur l’investissement et de comparer cet effet dans différents cas d’investissement afin de faire apparaître les différences de régime fiscal, une telle approche ne posera en général pas de problèmes.
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NOTES 1. En général, les bénéfices (pertes) avant impôt sont établis sur la base d’estimations des recettes, salaires, amortissements et coûts des intérêts correspondants dans le cadre de structures de capital fixe ou variables. Le montant des impôts dus est déterminé en appliquant le taux légal d’imposition et les dispositions régissant la détermination de la base d’imposition, les crédits d’impôt, le traitement des pertes et autres dispositions fiscales applicables. 2. On mesure le taux moyen d’impôt sur les sociétés retenu dans l’analyse de projet à l’aide du ratio ATRc(PROJ) = PV(CIT)/PV(Y) où la valeur actualisée au moment (t) de l’impôt net sur les sociétés qui est dû est donnée par PV(CIT) = PV(Y) – PV(Y*), où PV(Y) indique la valeur actualisée du bénéfice avant impôt des sociétés PV(Y) = Σns = 1[Ys/(1 + Rf)s], PV(Y*) indique la valeur actuelle du bénéfice après impôt sur les sociétés PV(Y*) = Σns = 1([Y*s/(1 + Rf)s], où Ys et Y*s indiquent les bénéfices avant et après impôt sur les sociétés au cours des périodes (s ≥ t), et Rf indique le coût des capitaux pour l’entreprise (taux d’actualisation). 3. Il faut noter que la réduction de l’incitation à l’investissement peut aussi apparaître dans les calculs concernant le taux de rendement interne (IRR) correspondant. En particulier, un taux de rendement interne réduit (Rf) interviendrait parallèlement à une augmentation de la valeur actualisée des versements d’impôt sur les sociétés (c’est-à-dire la valeur de Rf dans le calcul de l’IRR {NPV = 0 = –X + Σs(Y*)/(1 + Rf*) s } diminuerait, NPV indiquant la valeur actualisée nette du projet pour un investissement initial de X unités monétaires). 4. Les coins fiscaux et les taux marginaux effectifs correspondants peuvent aussi être obtenus compte tenu de l’imposition au niveau de l’actionnaire en évaluant en pourcentage le coin fiscal entre les taux de rendement avant et après impôt sur les sociétés (TMEI global). Il y a lieu également de noter que l’on peut déterminer des taux marginaux effectifs moyens d’imposition. Un taux marginal effectif moyen d’imposition est une moyenne pondérée de taux marginaux effectifs d’imposition distincts, dont chacun a été déterminé pour un investissement d’un type donné – caractérisé par le type d’actif (machines, bâtiments, stocks, etc.) le type de financement (capitaux empruntés, bénéfices non distribués, émission d’actions nouvelles) ou par type d’épargnants (particuliers, sociétés mères, organismes exonérés d’impôt, etc.). 5. Certains utilisent le terme coût du capital pour désigner le coût d’usage du capital – cela peut prêter à confusion dans la mesure où le terme coût du capital est aussi utilisé de manière imprécise pour désigner le coût financier du capital, c’est-à-dire le coût que représente pour l’entreprise l’obtention d’un financement (il y a lieu de noter que le coût financier du capital Rf est un élément du coût d’usage du capital). 6. Plus généralement, le coût de consommation du capital inclut aussi la variation de la valeur de l’actif dû aux variations de son prix par rapport à l’indice général des prix – nous ne prenons pas cet élément en considération dans notre analyse. 7. L’étude ne tient pas compte des changements dans la valeur réelle du stock de capital dus aux changements de son prix d’achat relatif [variation de son prix d’achat par rapport aux variations de l’indice général des prix (c’est-à-dire les gains réels en capital résultant de la détention de capital physique)]. 8. Dans l’ensemble de cette note, on suppose que l’entreprise représentative dispose toujours d’un revenu imposable suffisant dont elle puisse déduire des abattements au titre des intérêts et du coût du capital. 9. Si les incitations à l’investissement (par exemple les crédits d’impôt pour investissement, les abattements au titre du coût du capital) dans le cadre du système d’impôt sur les sociétés sont suffisamment importantes pour que la valeur de Rg, compte tenu du système fiscal se trouve inférieure à la valeur de Rg en cas d’absence d’impôt, I1 excède I0. L’épargne reste inchangée. 10. Si les différentes sortes d’impôt influent sur diverses décisions d’allocation des ressources prises par les entreprises et les ménages, cette note met l’accent sur les limites de l’analyse en termes de TMEI appliquée aux investissements en capital (qui sont de diverses catégories, parmi lesquelles les investissements physiques, les investissements en recherche-développement et les investissements en capital humain) étant donné que les principales difficultés et problèmes posés par cette analyse se trouvent concentrés dans ce domaine. 11. En particulier, si l’on admet que le monopoleur maximise ses bénéfices, le terme [1 – (1/h)] devrait apparaître au dénominateur, où h est l’élasticité de la demande (positive pour une courbe de demande dont la pente est orientée à la baisse).
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12. Le capital de connaissance lui-même est considéré comme le produit des investissements en recherche, qui font apparaître des rendements décroissants à la marge (en effet, le doublement des sommes investies dans la recherche et dans l’acquisition de connaissances, tous les autres facteurs restant constants, n’aura pas pour effet de doubler la quantité de connaissances nouvelles produites). Toutefois, l’accroissement du capital de connaissances génère des montants croissants de production à la marge (du fait de retombées qu’il n’est que partiellement possible de s’approprier). 13. Voir par exemple les travaux de Romer (1989, 1994) qui traitent le capital de connaissances comme ne donnant pas lieu à une rivalité (ce qui signifie qu’il peut être partagé avec d’autres pour un coût d’opportunité nul) et comme pouvant faire au moins partiellement l’objet d’une exclusion. 14. Comme l’indique le texte, l’approche « r fixe » considère le taux de rendement après impôt sur les sociétés comme fixe pour tous les projets d’investissement. Au contraire, l’approche « p fixe » considère les taux de rendement avant impôt sur les sociétés comme fixes pour tous les projets. La dernière approche n’est pas considérée comme une hypothèse d’arbitrage concernant le mode de fonctionnement des marchés financiers mais plutôt comme une technique d’évaluation de la manière dont un projet particulier sera imposé dans le cadre des différents systèmes possibles d’imposition et de financement.. Des hypothèses concernant l’arbitrage restent nécessaires dans le cadre de l’approche « p fixe ». Lorsque les TMEI sont calculés séparément pour chaque source de financement, par exemple comme dans le cadre de la méthode King et Fullerton (1984), l’approche « p fixe » suppose que pour les entreprises, le coût après impôt du financement par l’endettement soit le même que pour le financement sur fonds propres [et qu’il soit égal au coût commun des fonds (r)]. 15. Cela pourrait se produire par exemple si le taux d’intérêt augmente avec le montant des fonds empruntés (par exemple du fait d’un risque accru de faillite) de sorte que les entreprises continuent à recourir à un financement par l’endettement moins onéreux (les intérêts étant déductibles) jusqu’au point où les coûts de l’endettement et des fonds propres s’égalisent. Voir par exemple, Bradford et Fullerton (1981). 16. Voir Poterba (1987). 17. Dans le cas d’un report des pertes sur les exercices antérieurs, il n’est généralement pas nécessaire de procéder à un ajustement. La valeur de la réduction du report des pertes sur les exercices antérieurs résultant des recettes additionnelles générées par un investissement marginal est déterminée par le taux de l’impôt sur les sociétés en vigueur pendant la période en cours (à supposer que le taux de l’impôt sur les sociétés de la période en cours et celui de la période à laquelle s’applique le report sur les exercices antérieurs soient identiques). 18. Voir Mintz (1988) et Altshuler et Auerbach (1990). 19. Voir Auerbach (1983), Gordon (1985), Bulow et Summers (1984) et Gordon et Wilson (1989). 20. Voir Bulow et Summers (1984). 21. Voir Gordon et Wilson (1989). 22. A l’exception des travaux de Bertola et Caballero (1991) et McKenzie (1992). Pindyck (1991) passe en revue les recherches antérieures. 23. Bertola et Caballero (1991) présentent un modèle qui généralise l’extension du coût d’usage du capital de Jorgenson à un contexte caractérisé par un capital et un risque irréversibles. MacKenzie (1992) utilise la même approche pour examiner les conséquences de l’irréversibilité et des différentes sources de risque pour la mesure des TMEI. 24. Ce paramètre d’amortissement, joint au coût réel de financement, détermine le coût (en termes de flux) de la détention d’une unité monétaire de capital pendant une période donnée.
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Chapitre 6
UTILITÉ DES DIFFÉRENTS INDICATEURS DE LA CHARGE FISCALE POUR LES POUVOIRS PUBLICS 6.1. Introduction Ce dernier chapitre compare divers indicateurs possibles de la charge de l’impôt sur les sociétés et donne des indications sur leur validité pour l’analyse des politiques. Les deux questions traitées à ce sujet sont d’une part la détermination de la charge fiscale applicable au stock de capital détenu dans le secteur des sociétés, qui est importante pour évaluer l’équité du système fiscal et en particulier la répartition de la charge de l’impôt et d’autre part l’évaluation de la charge fiscale applicable aux biens d’équipement récemment acquis, qui présente de l’importance pour la détermination des incitations à l’investissement, pour les problèmes d’allocation efficace des ressources et de poursuite des objectifs correspondants. Pour effectuer cette évaluation, le chapitre compare : – les taux nominaux (légaux) de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, y compris les surtaxes et impôts sur les bénéfices/les entreprises appliqués par les niveaux d’administration infranationaux, désignés sous le nom de STAT ; – les ratios impôt sur les bénéfices/PIB, désignés par les lettres ATR (GDP) ; – les taux moyens implicites d’imposition des sociétés désignés par les lettres ATR (implicite) ; – les taux moyens (historiques) d’impôt sur les sociétés obtenus en utilisant des données propres à chaque entreprise, désignés par les lettres ATR (firme) ; – les taux moyens de l’impôt sur les bénéfices des sociétés utilisés dans le cadre de l’analyse de projet, désigné par les lettres ATR (proj) ; et – les taux marginaux effectifs de l’impôt sur les sociétés désignés par les lettres TMEI. A titre d’exemple, la section 6.2 indique les valeurs de chacun des indicateurs mentionnés ci-dessus, le champ d’application étant limité à dix pays de l’OCDE qui sont membres de l’Union européenne. Les chiffres font apparaître des différences considérables, aussi bien entre les pays de l’Union européenne, qu’entre les différents indicateurs calculés pour chaque pays. Ainsi qu’il est expliqué ci-dessous, contrairement aux taux nominaux d’imposition, qui sont fixés par les règlements et aux ratios impôts/PIB, qui sont également obtenus ex post à partir de données déterminées, les valeurs des autres indicateurs dépendront essentiellement des hypothèses formulées et bien entendu des impôts pris en compte. Cela met en lumière la nécessité de vérifier de manière approfondie les niveaux des taux d’imposition compte tenu de ces considérations lorsqu’on compare des valeurs concernant différents pays ou secteurs, notamment lorsqu’on utilise les comparaisons de taux d’imposition pour déterminer les actions à entreprendre. Dans l’évaluation de la charge de l’impôt sur les bénéfices qui pèse sur les entreprises opérant dans un pays donné, il est particulièrement nécessaire d’effectuer une distinction entre la charge fiscale qui pèse sur les biens d’équipement existants et celle qui pèsera sur les investissements futurs. La mesure de la charge fiscale applicable aux biens d’équipement existants est un indicateur qui risque d’induire gravement en erreur si l’on cherche à déterminer la charge fiscale qui pèsera sur les investissements futurs et vice-versa (section 6.3). Parmi les indicateurs possibles de la charge de l’impôt sur les bénéfices © OCDE 2000
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des sociétés qui pèsent sur les biens d’équipement existants, les meilleurs sont les taux moyens d’imposition obtenus en utilisant des données au niveau de l’entreprise ou des données agrégées. Ces chiffres nécessitent certains ajustements et doivent être interprétés en tenant compte du fait qu’il s’agit d’indicateurs « d’incidence directe » ne tenant pas compte de la répercussion possible de l’impôt sur les sociétés (section 6.4). La section 6.5 examine l’opportunité d’utiliser des taux d’imposition prospectifs, en mettant l’accent sur le cadre de taux marginaux effectifs d’imposition couramment utilisé à des fins d’analyse des politiques fiscales. La section 6.6 contient une brève conclusion. 6.2. Résultats significatifs Le graphique 6.1 présente des taux nominaux d’impôt sur les bénéfices des sociétés et trois indicateurs rétrospectifs de la charge de l’impôt sur les sociétés. Les taux d’imposition nominaux, les ratios impôts sur les sociétés/PIB et les taux moyens implicites d’imposition des sociétés concernent l’année 1995 tandis que les taux moyens d’imposition (historiques) au niveau de l’entreprise sont une moyenne établie pour la période 1990-1996. Comme on se fonde sur des taux d’imposition rétrospectifs concernant le montant effectif des impôts à verser (tel qu’il a été mesuré) ces indicateurs ne sont disponibles qu’avec retard, contrairement aux taux d’imposition prospectifs établis sur la base des informations de la période en cours sur la fiscalité et les paramètres financiers. Par ailleurs, le taux d’imposition implicite pour l’Allemagne inclut au numérateur non seulement l’impôt sur les bénéfices des sociétés mais aussi une estimation de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de la taxe professionnelle applicable aux revenus des travailleurs indépendants1 (les chiffres servant de base aux graphiques 6.1 et 6.2 sont indiqués à l’annexe 6.A). Parmi les dix économies de l’Union européenne indiquées dans le graphique 6.1, c’est l’Allemagne qui a enregistré le taux nominal le plus élevé d’impôts sur les bénéfices des sociétés, y compris la taxe professionnelle (plus de 56 pour cent), suivie de la Belgique et de l’Irlande. En même temps, l’Allemagne apparaît comme ayant le ratio impôt sur les sociétés/PIB le plus faible, puisqu’il est à peine
Graphique 6.1. Indicateurs rétrospectifs des taux d’impôt sur les sociétés, 1995 STAT
ATR (firme)
ATR (implicite)
ATR (PIB)
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Sources :
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STAT (1995) : Base de données fiscales de l’OCDE ; ATR (firme) [moyenne pour 1990-1996] : Buijink, Janssen et Schols, 1999 ; ATR (implicite) [1995] : De Haan et Volkerink, 2000 (à paraître) ; ATR (PIB) [1995] : Statistiques des recettes publiques de l’OCDE, 1998.
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Utilité des différents indicateurs de la charge fiscale pour les pouvoirs publics
supérieur à 1 pour cent. Ce résultat s’explique dans une large mesure par l’importance du secteur des entreprises non constituées en sociétés en Allemagne, alors que dans les autres pays, c’est le secteur des sociétés qui est prédominant. Par conséquent, bien que l’impôt sur les bénéfices des sociétés soit beaucoup plus faible que ne l’indique le taux d’imposition légal en Allemagne, sa position au dernier rang pour le rapport impôt sur les sociétés/PIB résulte de la contribution relativement moindre des bénéfices des sociétés au PIB de l’Allemagne. Pour les autres pays également, le rapport impôt sur les sociétés/PIB n’est pas représentatif de la charge fiscale réelle pesant sur les revenus du capital au niveau de la société, pour les raisons indiquées à la section 3.4. Les séries chronologiques de taux moyens d’imposition des sociétés (rétrospectifs) obtenues en utilisant des données au niveau de chaque entreprise manufacturière permettent d’illustrer l’effet des abattements, déductions et crédits d’impôt spéciaux ainsi que de l’optimisation fiscale dans l’abaissement du taux effectif de l’impôt sur les sociétés en-dessous du niveau indiqué par le taux légal. Cet indicateur montre également que l’importance de ces considérations varie beaucoup selon les pays. En particulier, l’écart entre les taux d’imposition nominaux et les taux d’imposition déterminés sur la base des bénéfices diffère de façon marquée, puisqu’il s’échelonne entre à peine un demi point en Suède et 24 points en Irlande, tandis que pour la Belgique et l’Allemagne, les taux correspondants sont respectivement de 19 et 18 points. Dans le cas du Royaume-Uni et de la France, on observe un écart de 4 points alors qu’aux Pays-Bas cet écart est à peine supérieur à 3 points. L’écart moyen non pondéré entre les taux nominaux et les taux d’imposition déterminés sur la base des bénéfices est de 9.6 points dans les pays de l’Union européenne. Il est par ailleurs frappant de constater qu’aussi bien dans le cas de l’Italie que dans celui du Royaume-Uni, le taux implicite d’imposition apparaît plus élevé que le taux légal. Ce résultat met en lumière le risque d’incohérence comme celles qui sont exposées à la section 4.4 entre les sommes figurant au numérateur et au dénominateur, ce qui amène à mettre en doute la pertinence de ces indicateurs, point sur lequel nous reviendrons ci-dessous. Le graphique 6.2 indique les taux nominaux de l’impôt sur les sociétés pour les dix pays en 1998 et compare ceux-ci avec deux indicateurs prospectifs qui sont respectivement les taux moyens d’imposition des sociétés utilisés pour l’analyse de projet et les taux marginaux effectifs d’imposition des sociétés, également calculés pour 1998. Pour la plupart des pays, à l’exception de la France et de l’Espagne, les taux marginaux effectifs d’imposition apparaissent bien inférieurs aux taux légaux, ce qui s’explique par l’existence de dispositions fiscales spécifiques prévoyant un régime préférentiel de déductions. De même, pour les nouveaux investissements évalués sur la base de projets (ponctuels) les taux moyens d’imposition sont inférieurs aux taux légaux, et ce sont les entreprises allemandes et françaises qui sont soumises aux taux moyens d’impôt sur les sociétés les plus élevés (plus de 45 pour cent). Pour certains pays, les taux d’imposition applicables à un projet sont très inférieurs aux taux légaux, ce qui s’explique par l’existence de dispositions fiscales spécifiques prévoyant des allégements fiscaux préférentiels. La France, où le taux applicable aux projets est supérieur au taux légal de l’impôt sur les bénéfices des sociétés fait exception à cet égard. Cela s’explique par le fait que le calcul du taux d’imposition applicable à un projet donné fait intervenir une taxe professionnelle locale dont la base est différente de celle qui est utilisée pour le calcul de l’impôt sur les sociétés2. En fait, l’écart des taux d’imposition possibles indiqués dans les deux graphiques fait apparaître les possibilités dont disposent les groupes d’intérêts et les décideurs pour choisir les indicateurs de la charge fiscale qui reflètent le mieux leur évaluation du système fiscal en vigueur et la manière dont ils devraient évoluer. La suite de ce chapitre traite de deux problèmes de fond essentiels concernant l’imposition des revenus du capital au niveau de la société et examine les avantages et inconvénients relatifs des mesures examinées à la section précédente pour faire face à ces problèmes. Les deux domaines sur lesquels nous mettons l’accent sont les suivants : – la charge de l’impôt sur les bénéfices des sociétés applicable au capital existant, du point de vue de l’équité (section 6.3) ; et © OCDE 2000
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Graphique 6.2. Indicateurs prospectifs de l’impôt sur les sociétés, 1998 STAT
ATR (proj.)
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Moyenne de l’UE Suède Espagne Italie Irlande France Belgique Autriche Pays-Bas Royaume-Uni Allemagne 0
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Sources : Taux légaux : Base de données fiscales de l’OCDE ; ATR (proj) : Price Waterhouse Coopers, 1998 ; METR : Baker et McKenzie, Amsterdam, 1999.
– la charge de l’impôt sur les bénéfices des sociétés applicable au capital nouvellement acquis, du point de vue du comportement en matière d’investissement et de l’efficience (section 6.4). 6.3. Évaluation de la charge fiscale des biens d’équipements « anciens » ou « nouveaux » L’évaluation de la charge de l’impôt sur les bénéfices des sociétés applicable aux entreprises qui opèrent dans un pays donné comprend essentiellement une analyse de l’imposition des revenus obtenus sur des actifs détenus au niveau de la société – y compris le capital financier (espèces, obligations, actions), le capital matériel (bâtiments, machines et biens d’équipement) et les terrains, les stocks, et le capital immatériel (brevets, marques de fabrique) 3. Dans cette évaluation, il est essentiel d’opérer une distinction entre la charge de l’impôt sur le revenu applicable aux biens d’équipement existants en la comparant à la charge qui pèserait sur les investissements futurs. Cette distinction entre la charge fiscale applicable au capital « ancien » et celle qui pèse sur le capital « nouveau » est essentielle pour l’analyse des politiques pour deux raisons principales. En premier lieu, une évaluation de la charge fiscale applicable au capital existant ou « ancien » est particulièrement importante pour la politique fiscale en ce qui concerne l’équité du système fiscal alors qu’une évaluation de la charge fiscale qui pèserait sur le capital « nouveau » est particulièrement importante pour l’analyse des incitations à l’investissement et des objectifs correspondants de politique économique. En second lieu, l’évaluation de la charge de l’impôt sur le revenu qui pèse sur le stock de capital existant diffère souvent sensiblement de celle qui s’applique au capital nouvellement acquis.
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L’écart entre la charge fiscale applicable au capital « ancien » et celle qui est applicable au capital « nouveau » apparaît du fait que le stock de capital existant du secteur des entreprises comporte un mélange d’actifs financiers et non financiers de catégories, de millésimes et de caractéristiques fiscales divers acquis dans le passé. Considérons tout d’abord le fait que l’impôt sur les sociétés dû pour la période en cours sur les revenus tirés de ce stock de capital existant dépendra de la composition particulière des actifs détenus. Il en sera donc de même du montant de l’impôt sur les sociétés payable © OCDE 2000
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par unité de revenu généré. Par conséquent, les taux moyens d’impôt sur les sociétés observés dans le passé, évalués en pourcentage du bénéfice économique, différeront du taux d’imposition effectif des sociétés applicable au capital acquis à la marge (ou d’une moyenne pondérée de ces taux marginaux d’imposition) dans la mesure où l’investissement prévisionnel (ou une moyenne pondérée de cet investissement) se compose d’un ensemble d’actifs différents soumis à un régime fiscal variable, et notamment à des aides fiscales particulières. Les taux d’amortissement fiscal varient selon les catégories d’actifs, certains types de revenus peuvent être inclus dans la base d’imposition à des taux différents, des dispositions différentes s’appliquent en général aux revenus selon qu’ils sont générés dans le cadre national ou qu’ils sont de source étrangère, etc. Une évaluation de la charge fiscale applicable au stock de capital existant pourrait donner une indication trompeuse de la charge fiscale qui pèse sur le capital nouvellement acquis en raison des autres dispositions qui entrent en jeu pour relier une période d’imposition à la suivante. A cet égard, l’un des facteurs les plus importants est le traitement fiscal des pertes. La plupart des systèmes fiscaux autorisent les entreprises à reporter sur les exercices ultérieurs leurs pertes (industrielles ou commerciales) autres que les pertes en capital en déduction de l’impôt dû au titre des années futures, en tenant compte du fait que l’exercice fiscal (c’est-à-dire une période d’imposition de 12 mois) constitue une construction artificielle4. A titre d’exemple, supposons qu’une entreprise enregistre une perte d’exploitation (c’est-à-dire un bénéfice imposable négatif) au cours d’une année mais enregistre un bénéfice l’année suivante. L’entreprise ne paie pas d’impôt la première année mais elle est imposable la seconde. En principe, l’impôt dû devrait être déterminé en permettant le report sur les exercices ultérieurs (avec intérêt) de la perte encourue la première année, en déduction du revenu imposable positif de l’année suivante afin de donner un résultat fiscal similaire à celui qui aurait été obtenu si la période d’imposition ne s’était pas limitée à une seule année. Pour une année donnée, le stock existant de pertes reportées des exercices antérieurs sur les exercices ultérieurs et déductibles du bénéfice imposable de la période en cours, dépendra, entre autres facteurs, du positionnement de cet exercice dans le cycle économique. La masse des pertes reportées sur les exercices ultérieurs est par exemple relativement importante à la suite d’une récession économique. Par conséquent, la charge fiscale pesant sur le capital existant qui est évaluée au cours d’une année où des reports relativement importants des pertes sur les exercices ultérieurs sont demandés (c’est-à-dire au cours d’une année où les paiements d’impôts sur les sociétés sont relativement faibles) risque d’amener à une sous-estimation de la charge fiscale applicable au capital nouvellement acquis. De même, on peut faire observer que les systèmes qui prévoient des crédits d’impôt pour investissement permettent souvent de reporter sur les exercices ultérieurs les crédits non utilisés en déduction de l’impôt dû pour les années à venir. Par exemple, les crédits d’impôt au titre de la recherche-développement sont souvent obtenus par des entreprises qui n’ont pas encore développé ou mis sur le marché un produit, et qui par conséquent, ne sont redevables d’aucun impôt sur les bénéfices dont ils pourraient déduire le crédit. Des reports de crédits d’impôt sur les exercices ultérieurs pourraient être instaurés pour exercer un effet stimulant. La répartition des demandes de report des crédits d’impôt sur les exercices ultérieurs, de même que celle des demandes de report des pertes dépendra de l’incidence du cycle économique, qui a tendance à entraîner une expansion et une contraction des bénéfices, et de la base d’imposition. Par conséquent, en présence de dispositions prévoyant le report sur les exercices ultérieurs, un indicateur de la charge fiscale fondé sur l’impôt sur les sociétés dû au titre de la période en cours peut donner des informations fausses sur la charge fiscale qui pèse sur le capital nouvellement acquis. Enfin, il y a lieu de remarquer que l’impôt sur les bénéfices applicable aux gains nets en capital réalisés, bien qu’il soit significatif pour évaluer la charge fiscale qui pèse sur les actifs existants des sociétés, risque de ne pas l’être pour l’évaluation de la charge fiscale qui pèse sur l’investissement à la marge. Un ajustement en fonction des taux d’intérêt (taux d’actualisation) du marché ou des anticipations concernant la rentabilité future du capital existant, du fait qu’il cause un ajustement des prix des actifs donnant lieu à des gains ou à des pertes en capital, aura une incidence sur l’impôt dû au titre de la période en cours sur les cessions de capital lorsque ces gains/pertes sont assujettis à l’impôt, ce qui est le cas dans beaucoup de systèmes. Si les variations des prix des actifs peuvent affecter les décisions © OCDE 2000
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d’investissement, l’incidence potentielle de l’imposition des gains en capital sur le comportement en matière d’investissement peut différer sensiblement de celui qui peut être saisi à partir des taux moyens d’impôt sur les sociétés qui sont influencés par les gains/pertes en capital réalisés sur les cessions, pendant la période en cours, de capital acquis au cours des périodes précédentes. Les facteurs notés ci-dessus se présentent même lorsque la politique fiscale est considérée comme constante dans le temps. Les différences de charge fiscale entre le capital ancien et le capital nouveau ont tendance à être encore plus prononcées lorsque la politique fiscale se modifie d’une période à l’autre, ce qui est souvent le cas. Considérons par exemple les conséquences d’une réforme selon laquelle des barèmes d’amortissement accéléré sont remplacés par des taux qui reflètent plus étroitement l’amortissement économique, auquel cas, les effets de réduction d’impôt de l’ancien régime d’amortissement tendraient à sous-estimer la charge fiscale qui pèse sur l’investissement nouveau. L’évaluation de la charge fiscale applicable aux revenus tirés du capital amortissable acquis les années précédentes, donnant lieu à des déductions fiscales à des taux qui diffèrent nettement des taux d’amortissement applicables aux biens de capital acquis au cours de la période en cours, ne serait pas représentative de la charge fiscale applicable à l’investissement nouveau5. En résumé, le fait que l’impôt sur les bénéfices dû par une société ou un groupe de sociétés au titre d’une année donnée résulte d’un amalgame de facteurs d’ordre fiscal concernant les revenus générés sur le stock de capital existant – qui peuvent différer, pour un certain nombre de raisons, des facteurs fiscaux concernant un investissement futur – a pour conséquence que l’impôt sur les sociétés évalué au titre d’une année antérieure (ou même au titre de l’année en cours) par rapport aux bénéfices financiers (ajustés) pourrait être un indicateur risquant d’induire gravement en erreur au sujet de la charge fiscale du capital « nouveau » et vice versa. Ces points sont abordés et développés cidessous aux sections 6.4 et 6.5, qui traitent du choix entre les différents indicateurs possibles de la charge fiscale à des fins d’analyse fiscale. 6.4. Évaluation de la charge de l’impôt sur les sociétés du point de vue de l’équité La conception de la politique en matière d’impôt sur les sociétés comporte souvent la recherche d’un équilibre entre les considérations de rendement, d’équité, d’efficience, de « compétitivité » et éventuellement d’autres considérations (par exemple, la simplicité), les divers groupes étant d’avis différents quant au dosage le plus approprié, quant à la manière dont on doit y parvenir et quant aux modalités selon lesquelles il faut mesurer la charge fiscale qui en résulte. Presque tout le monde est d’accord pour estimer que les sociétés devraient supporter une partie au moins de la charge fiscale. L’imposition au niveau de la société est nécessaire pour éviter les possibilités de différer d’impôt qui pourraient exister. Par ailleurs, des considérations d’équité obligent à reconnaître que les sociétés, et non pas seulement les individus, bénéficient des dépenses publiques et notamment de la mise en place d’infrastructures et des dépenses administratives effectuées pour la mise en œuvre des cadres légaux et réglementaires. En outre, la fiscalité des sociétés permet l’imposition dans le pays de la source pour les investisseurs exonérés d’impôt et non résidents qui risqueraient d’échapper au versement de leur part du financement des dépenses publiques soutenant les activités des entreprises.
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Lorsqu’on évalue la charge de l’impôt sur les sociétés pour rechercher, dans un souci d’équité, si le secteur des entreprises paie actuellement « une part équitable », l’approche qui est généralement adoptée consiste à déterminer l’impôt sur les sociétés qui est dû en pourcentage du bénéfice (ajusté) obtenu au niveau de l’entreprise à l’aide du stock de capital existant. Le dosage particulier d’actifs qui donne lieu au versement d’impôts au titre de la période en cours n’est généralement pas significatif, l’accent étant mis seulement sur le montant total de l’impôt sur les sociétés versé par rapport au bénéfice – au sens où pour le fisc, « tout est bon à prendre » sur les bénéfices générés par le secteur des sociétés6. Étant donné les décalages avec lesquels les données concernant l’impôt sur les sociétés et les bénéfices sont collectés et diffusés, il faut en général se référer aux données évaluées au cours des années antérieures (c’est-à-dire l’année la plus récente pour laquelle les données requises sont disponibles). © OCDE 2000
Utilité des différents indicateurs de la charge fiscale pour les pouvoirs publics
Si l’on examine les indicateurs fiscaux possibles, il est clair que le taux nominal d’impôt sur les sociétés ne peut être utilisé isolément pour évaluer la charge fiscale qui pèse sur les entreprises. Cela résulte essentiellement du fait que l’impôt dû par une société, et par le secteur des sociétés dans son ensemble, dépend non seulement du taux nominal mais de toute une série de dispositions ayant une incidence sur la base d’imposition7. Les ratios fiscaux globaux constituent une référence commune pour l’évaluation des systèmes fiscaux. Depuis qu’ils ont été publiés pour la première fois en 1973, les Statistiques des recettes publiques de l’OCDE ont constamment présenté les recettes fiscales globales en pourcentage du produit intérieur brut (PIB). Sont également indiqués les impôts sur les sociétés en pourcentage du PIB, les impôts sur le revenu des personnes physiques en pourcentage du PIB et les ratios similaires pour d’autres agrégats fiscaux globaux. Toutefois, les ratios impôts/PIB risquent d’induire en erreur comme indicateur de la charge fiscale. Comme on l’a vu au chapitre 3, les ratios impôts sur les sociétés/PIB sont problématiques dans la mesure où ils fluctuent avec les variations de la part des bénéfices des entreprises dans le PIB même lorsque la part de l’impôt dans les bénéfices des sociétés reste constante (section 3.4). De plus, les rapports entre l’ensemble des impôts et le PIB induisent en erreur comme indicateur de la charge fiscale nette dans les différents pays dans la mesure où ils ne tiennent pas compte des dépenses fiscales et du fait que les pays n’ont pas recours dans les mêmes proportions aux dépenses directes et aux dépenses fiscales (section 3.2). En outre, le traitement fiscal des prestations sociales influe sur les ratios d’imposition (section 3.3). Des taux moyens d’imposition rétrospectifs (historiques) obtenus en utilisant des données recueillies au niveau de la firme ou globales sur les impôts effectivement versés et les bénéfices financiers (ajustés) obtenus pourraient cependant constituer des indicateurs fiables de la charge de l’impôt sur les bénéfices des sociétés. Ces indicateurs prennent en compte à la fois les effets des dispositions fiscales en vigueur et des dispositions passées, notamment en ce qui concerne les taux nominaux, les abattements pour amortissement, le traitement des réserves, le traitement des pertes (c’est-à-dire le régime de report des pertes en capital, des autres pertes et de celles qui correspondent à des incitations fiscales, ainsi que les dispositions concernant les déductions applicables aux groupes complexes), les crédits d’impôt et les dispositions correspondantes en m a t i è r e d e r e p o r t , le s a u t r e s l o i s e t r è g le m e n t s f is c a u x , l ’o p t i mi s a t i o n f i s ca l e e t l e s ajustements/déductions fiscales accordés sur une base discrétionnaire par l’administration fiscale. Pour évaluer comme il convient les taux moyens d’imposition, il faut que les entreprises qui ont des revenus négatifs (entreprises déficitaires) soient exclues et que des ajustements soient opérés en fonction de l’inflation, comme il est indiqué au chapitre 5. Les indicateurs fondés sur les bénéfices qui incluent au numérateur les impôts effectivement versés nécessitent évidemment que les données en question soient accessibles, et en général seul le ministère des Finances ou ses organismes d’analyse économique les détiennent. Les impôts déclarés dans les états financiers peuvent ne pas rendre compte exactement des montants d’impôt qui sont dus. La raison principale est que les impôts qui figurent dans les états financiers correspondent au montant des impôts qui sont théoriquement dus sur les bénéfices financiers (comptables) alors que ceux-ci peuvent être différents des bénéfices imposables. L’une des principales raisons de cette différence concerne le régime applicable aux amortissements. Lorsque le capital fait l’objet d’un amortissement accéléré en vue de l’imposition, les déductions fiscales pour amortissement excéderont les charges d’amortissement retenues dans les documents financiers qui sont fondés sur les durées de vie économique estimées des actifs. Par ailleurs, les contribuables peuvent librement décider de la date de leur demande de déduction pour amortissement (de même que pour les demandes de déductions portant sur les masses de pertes reportées sur les exercices ultérieurs qui n’ont pas fait l’objet d’une demande et aussi éventuellement des crédits d’impôt pour investissement qui n’ont pas été demandés). Dans la mesure où les déductions prises en compte dans le calcul des impôts à verser qui figurent dans les documents financiers diffèrent des demandes effectivement présentées en vue de l’imposition, il y aura des différences entre les comptes financiers et les versements d’impôt réellement effectués. © OCDE 2000
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Ce problème de fiabilité du montant des impôts déclaré dans les états financiers a amené les analystes de la politique fiscale extérieurs à l’administration à rechercher d’autres méthodes. L’une de celles-ci est l’approche des taux d’imposition implicites fondée sur des données globales qui mettent en relation le montant des impôts effectivement versés au cours de l’année tel qu’il figure dans les Statistiques des recettes publiques avec les excédents d’exploitation déclarés dans les Comptes Nationaux. Toutefois, les taux moyens implicites d’imposition sont des indicateurs très incertains de la charge fiscale qui pèse sur le capital au niveau de la société pour trois raisons essentielles. Tout d’abord, l’excédent d’exploitation, qui apparaît au dénominateur des taux moyens implicites d’imposition des sociétés inclut les intérêts, loyers et redevances perçus qui sont imposés au niveau des épargnants individuels. Comme le numérateur n’inclut que l’impôt sur les bénéfices des sociétés, il y a un décalage entre les sommes qui figurent au numérateur et celles qui figurent au dénominateur8. Ce décalage fait des taux moyens implicites d’imposition des estimateurs peu fiables de la charge de l’impôt sur les sociétés et des incitations à l’investissement des entreprises. En second lieu, dans les pays qui imposent les sociétés résidentes sur leurs revenus de source étrangère, un décalage supplémentaire entre les montants qui figurent au numérateur et ceux qui figurent au dénominateur se trouve introduit, dans la mesure où l’excédent d’exploitation n’inclut que les bénéfices nationaux – c’est-à-dire que les revenus étrangers sont exclus du dénominateur, tandis que l’impôt intérieur net applicable à leur montant est inclus au numérateur. En troisième lieu, la prise en compte, pour la détermination de l’excédent d’exploitation, d’entreprises dont les revenus sont négatifs, amène à surestimer les taux moyens d’imposition implicites des sociétés. Pour que l’indicateur des taux moyens d’imposition des sociétés soit exact, il faudrait exclure ces entreprises, mais un tel ajustement n’est pas possible lorsqu’on se réfère aux données des comptes nationaux. Les taux moyens prospectifs d’imposition fondés sur des projets et les taux marginaux effectifs d’imposition (TMEI) fournissent des informations limitées sur la charge fiscale qui pèse sur le capital utilisé dans le secteur des sociétés pour deux raisons principales. En premier lieu, ces deux indicateurs n’évaluent le montant de l’impôt à verser que sur le capital nouvellement acquis. Les indicateurs de taux d’imposition qui en résultent donneront probablement une représentation erronée de la charge fiscale applicable au capital déjà installé ou « ancien » pour les raisons indiquées à la section 6.3. En second lieu, les taux moyens d’imposition tirés de l’analyse de projet et les TMEI tirés des conditions d’équilibre indiquent la charge fiscale liée à une série d’hypothèses (concernant par exemple les taux de rendement, la politique en matière de financement et de distribution, les taux de report d’utilisation des pertes et les taux d’inflation ainsi que les taux d’intérêt anticipés) qui peuvent n’être pas représentatives des valeurs effectives déterminant les niveaux de bénéfices des périodes passées (ou en cours) les structures d’investissement et les impôts versés. Par ailleurs, le choix des pondérations utilisées pour obtenir une moyenne des différents taux moyens d’imposition ou TMEI par projet, (chacun étant établi à partir d’un ensemble différent d’actifs et de secteurs) qui soit représentative de la charge fiscale pesant sur le capital des sociétés pour l’économie dans son ensemble, constituerait nécessairement un exercice arbitraire. De plus, de tels indicateurs laissent en général de côté les possibilités d’optimisation qui peuvent en pratique ramener la charge fiscale bien en-dessous de celle qui résulterait de l’application d’hypothèses simples concernant la structure financière. Malgré le fait que ces modèles ont fonctionné selon différentes séries d’hypothèses concernant les variables principales, ils donnent une indication très schématisée et par conséquent limitée de la charge fiscale effective pesant sur les entreprises, qui ne peut être pleinement saisie que par référence au montant effectif des impôts sur les sociétés versés.
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En résumé, les meilleurs indicateurs possibles de la charge de l’impôt sur les bénéfices des entreprises sont généralement les taux moyens d’imposition rétrospectifs fondés sur les bénéfices, qui sont obtenus en utilisant des données établies au niveau de l’entreprise ou des données globales concernant le montant effectif des impôts versés. Les indicateurs sont plus fiables lorsque les bénéfices sont ajustés pour tenir compte des pratiques qui donnent lieu à un décalage entre les bénéfices déclarés dans les registres comptables et les bénéfices économiques réels et lorsque les bénéfices font l’objet d’un nouvel ajustement pour permettre une plus grande cohérence entre les montants figurant au numérateur et au dénominateur (surtout en ce qui concerne le traitement des © OCDE 2000
Utilité des différents indicateurs de la charge fiscale pour les pouvoirs publics
pertes et des revenus de source étrangère) et pour tenir compte de l’inflation. Ces chiffres doivent être interprétés en tenant compte du fait qu’il s’agit d’indicateurs « d’incidence directe » qui ne tiennent pas compte de la répercussion possible de l’impôt sur les sociétés sur les consommateurs (sous forme d’une élévation des prix) et sur les salariés (sous forme d’une baisse des salaires). 6.5. Évaluation de l’incidence de l’imposition des sociétés sur l’incitation à l’investissement Les décideurs sont conscients depuis longtemps des obstacles à l’investissement qui peuvent résulter de l’imposition des revenus du capital. En fait, l’un des principaux objectifs des réformes fiscales entreprises dans un certain nombre de pays de l’OCDE au cours de la période 1985-1989 était une réduction des distorsions induites par l’impôt dans la répartition du capital entre les différents actifs, secteurs et sources de financement. Les années 1990 ont connu une inversion partielle de cette tendance, un certain nombre de pays ayant instauré des incitations fiscales spécifiques à l’investissement et des régimes fiscaux préférentiels pour attirer une part plus importante de l’investissement de capitaux qui sont de plus en plus mobiles. Si les taux nominaux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés sont souvent mentionnés comme étant importants dan s les cas où l’impôt a effe ctive men t une incide nce sur les décisions d’investissement, ils sont en général pris en compte parmi d’autres facteurs d’ordre fiscal (par exemple les mesures d’incitations spécifiques à l’investissement) déterminant l’impôt qui sera finalement dû sur les investissements prévus9. En fait, on dit souvent que le taux nominal de l’impôt sur les sociétés n’influe généralement pas par lui-même sur la localisation du capital réel (c’est-à-dire productif) mais qu’il oriente plutôt le choix entre le financement par l’endettement et le financement sur fonds propres (structure financière) et les stratégies de transfert de revenus, notamment en ce qui concerne les prix de transfert. En particulier, pour les investissements en biens d’équipement des industries manufacturières et autres activités industrielles ou commerciales pour lesquelles les facteurs non fiscaux jouent un rôle déterminant dans les choix en matière de localisation, les structures de financement et les prix de transfert sont de plus en plus utilisés de manière à laisser des bénéfices aussi faibles que possible (c’est-à-dire des coûts aussi élevés que possible) dans les territoires à haut niveau d’imposition afin de réduire au minimum la charge fiscale de l’entreprise au niveau mondial. Des taux moyens d’imposition rétrospectifs (historiques) risquent d’être des indicateurs imprécis des incitations à l’investissement. Comme on l’a noté, les taux implicites d’impôt sur les sociétés sont des indicateurs très imprécis, ce qui s’explique dans une large mesure par le fait que l’excédent d’exploitation est mesuré en incluant les intérêts versés (voir annexe 6B pour un examen des conséquences pour l’évaluation des incitations à l’investissement). En ce qui concerne les taux moyens d’imposition fondés sur les bénéfices, le pourcentage des revenus de l’année précédente que représente l’impôt de l’année précédente pourrait être un bon indicateur de la charge de l’impôt sur les sociétés pour l’année en cours mais donne peu d’indications en ce qui concerne l’incidence du système fiscal sur le capital nouvellement installé. De plus, les mêmes raisons qui font des taux moyens d’imposition rétrospectifs fondés sur le montant des bénéfices des indicateurs utiles de la charge fiscale qui pèse aussi bien sur le capital « ancien » que sur le capital « nouveau » risquent d’en faire des indicateurs qui induisent en erreur concernant l’incidence de la fiscalité sur les investissements nouveaux. En effet, les décisions d’investissement, fondées sur la valeur actualisée attendue des recettes après impôt et des coûts futurs sont fondamentalement tournées vers l’avenir. Même lorsque les réglementations fiscales sont restées stables pendant un certain nombre d’années, les demandes de déduction pour l’année en cours d’une masse de coûts du capital non amortis, qui intègrent les effets des dispositions en matière d’amortissement et des structures d’investissement des années précédentes, peuvent n’être pas représentatives des demandes de déduction pour amortissement formulées pendant la période en cours et les périodes futures sur l’investissement prévu. Des considérations similaires sont valables en ce qui concerne les crédits d’impôt pour investissement et autres dispositions qui entraînent un report des réductions d’impôt d’une année sur la suivante. © OCDE 2000
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Les taux moyens d’imposition prospectifs fondés sur des projets, qui évaluent les bénéfices après impôt et les coûts des investissements envisagés, peuvent constituer en principe des indicateurs utiles du freinage de l’investissement dû aux impôts sur le revenu. Des travaux récents ont mis l’accent sur l’importance de l’analyse en termes de taux moyens d’imposition dans le cadre des décisions d’investissement direct étranger ou plus généralement pour l’analyse des comportements d’investissement lorsque les investisseurs doivent choisir entre deux ou plusieurs projets concurrents (par exemple, en raison de contraintes au niveau du financement ou de la demande qui limitent le montant total des engagements en capital) et s’attendent à bénéficier de rentes économiques (c’est-àdire de taux de rendement excédant les taux minimum requis) 10 . Cependant, ces indicateurs sont généralement obtenus pour un ensemble simplifié d’hypothèses concernant le marché et les conditions de financement et ils omettent par conséquent diverses considérations qui ont une incidence matérielle sur l’impôt réellement dû – notamment des dispositions fiscales complexes, des stratégies d’optimisation fiscale, des mesures discrétionnaires prises par l’administration fiscale qui peuvent n’être pas exactes ou représentatives, et par conséquent ne pas saisir exactement l’incidence globale de la fiscalité. Des problèmes similaires se posent en ce qui concerne l’utilisation des TMEI. Par exemple, les structures de financement retenues comme hypothèses dans les deux variantes nationales et transfrontières des modèles de TMEI laissent en général de côté l’utilisation de dispositifs de financement (comme les sociétés de portefeuille) extraterritoriaux et les dispositions de conventions fiscales qui sont d’une importance essentielle pour la détermination du coût des capitaux. La tâche qui consiste à déterminer les structures de financement sur lesquelles doivent reposer les investissements futurs dans chaque secteur de l’économie d’un pays donné est considérable et pour cette raison, ces informations ne sont pas prises en compte dans les données déclarées. Toutefois, des erreurs importantes dans la détermination des caractéristiques de cet élément essentiel de l’investissement rendent peu significatives les statistiques ainsi obtenues. Le problème prend de plus en plus d’importance au fil du temps à mesure qu’un nombre croissant d’entreprises et qu’une part croissante de l’investissement total, aussi bien direct que de portefeuille, ont recours à des structures extraterritoriales – aussi bien en ce qui concerne les investissements d’entités nationales que d’investisseurs étrangers. En outre, on peut mettre en doute la pertinence d’autres hypothèses sur lesquelles reposent les estimations sectorielles, considérées en général comme constantes d’un pays à l’autre et d’une période à l’autre. On peut trouver au chapitre 5 de cette étude un examen de l’ensemble des difficultés rencontrées dans l’élaboration de modèles sur le comportement d’investissement et dans le traitement des problèmes d’évaluation des données. En résumé, les indicateurs prospectifs de la charge fiscale des sociétés qui sont tirés de modèles de projets/de modèles économiques, ne peuvent être utilisés isolément pour analyser l’incidence de la fiscalité sur l’investissement. Il faut avoir recours à d’autres sources d’information, notamment celles qui sont fondées sur des enquêtes. Le chapitre 5 a examiné la notion de taux marginaux effectifs d’imposition ainsi qu’un certain nombre de problèmes posés par ce type d’indicateur particulier pour rappeler les limites de l’analyse en termes de TMEI pour donner des orientations utiles en matière de politique fiscale. Les sections 5.5 et 5.6 présentent une liste assez longue des problèmes conceptuels et des problèmes de données liée au cadre d’analyse des taux marginaux effectifs d’imposition. La présente section apporte des éléments aux débats en examinant l’utilité des modèles de TMEI aux fins de l’analyse des politiques fiscales dans les cas où les hypothèses sous-jacentes sont considérées comme valables et où l’on dispose des données requises. Il s’avère que, même dans ce cas assez peu probable, la capacité de l’analyse en termes de TMEI de fournir des indications utiles pour l’établissement de la politique fiscale est limitée, pour au moins trois raisons.
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En premier lieu, l’analyse en termes de TMEI n’indique pas l’ampleur effective des réactions des dépenses d’investissement aux mesures fiscales d’incitations (ou de dissuasion). Pour pouvoir évaluer les réactions de l’investissement, il est nécessaire de bien appréhender les techniques de production © OCDE 2000
Utilité des différents indicateurs de la charge fiscale pour les pouvoirs publics
utilisées. En d’autres termes, les conditions du premier ordre à partir desquelles sont établies les équations des TMEI n’expliquent pas l’élasticité ou la sensibilité de la demande d’investissement à des variations du coût (d’usage) du capital (une analyse statique comparative comportant des précisions sur les techniques de production est nécessaire). Un abaissement du taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés ou une augmentation du taux d’abattement au titre du coût du capital ou du crédit d’impôt pour investissement aura pour effet de réduire le coin fiscal. Cependant, le modèle des TMEI n’indique rien de la date ni de l’amplitude de la réaction de l’investissement et par conséquent de l’incidence finale exercée sur le stock de capital. Cette lacune est d’une importance fondamentale dans la mesure où l’incidence de la fiscalité sur la formation de capital constitue le concept essentiel pour évaluer l’influence de la fiscalité sur la demande globale et la croissance économique. En second lieu, lorsqu’il est utilisé pour évaluer les incitations à l’investissement en R-D et en capital humain, domaines dans lesquels la théorie suggérerait l’utilisation d’incitations fiscales positives (coins fiscaux négatifs) pour pallier les insuffisances du marché (c’est-à-dire le sousinvestissement dû à l’absence d’évaluation des effets de débordement) – le cadre des TMEI ne donne pas d’indication sur le montant souhaitable de l’incitation fiscale. Ce point (lié à celui qui est mentionné ci-dessus) résulte du fait que le cadre des TMEI n’offre pas d’explication des déterminants sous-jacents des stocks de capital correspondants, et a fortiori sur leur valeur optimale. Sans ce cadre, les auteurs de modèles de TMEI sont trop souvent tentés de mettre l’accent sur les statistiques de TMEI d’un pays qui déclare les aides fiscales les plus généreuses et de considérer cette valeur comme la norme ou l’objectif que les autres pays devraient s’efforcer d’atteindre en matière de TMEI. Un tel raisonnement n’est cependant pas très convaincant dans la mesure où le degré d’aide fiscale risque d’être excessif par rapport à l’optimum qui n’est pas mesuré. En troisième lieu, le cadre d’analyse d’équilibre partiel ne permet pas de traiter de l’incidence des changements de politique fiscale sur d’autres demandes de facteurs de production (par exemple, la main-d’œuvre) et sur les prix. Il ne prend pas non plus en compte les effets redistributifs ni les effets transitoires. Enfin, il n’envisage pas non plus les liens entre la fixation des paramètres fiscaux et les recettes et par conséquent, l’incidence budgétaire des politiques fiscales. En résumé, beaucoup de problèmes essentiels auxquels se trouvent confrontés les décideurs dans l’évaluation de la politique fiscale sont tout simplement laissés de côté. Ce fait pourrait être le plus problématique, étant donné la nécessité d’envisager un large éventail de questions lorsqu’on recommande d’apporter des modifications à la politique fiscale. Cette constatation assez décevante amène à poser la question suivante : pourquoi l’analyse en termes de TMEI a-t-elle suscité tant d’intérêt ? On pourrait soutenir que cet intérêt a été dû à la simplicité relative avec laquelle ce cadre pouvait être utilisé pour intégrer les interactions entre les dispositions fiscales qui semblaient influer sur le comportement en matière d’investissement et pour saisir cette influence nette dans un indicateur synthétique unique. Les réglementations fiscales constituent souvent une question embarrassante, en particulier pour les non-fiscalistes, et la perspective de prendre en compte leur effet net dans un seul indicateur synthétique est évidemment attrayante. Toutefois, en réalité, ni le fonctionnement des systèmes fiscaux, ni les déterminants du comportement en matière d’investissement (ni l’interaction entre les deux) ne sont si simples. En fait, après avoir examiné les forces et les faiblesses de l’analyse en termes de taux marginaux effectifs d’imposition, le groupe de travail sur l’analyse des politiques et les statistiques fiscales du Comité des affaires fiscales a formulé à sa 58e réunion de mai 1999, une déclaration soulignant la nécessité de faire preuve de prudence dans l’utilisation de l’analyse en termes de TMEI pour la détermination des actions à entreprendre. Cette déclaration reconnaît que l’analyse en termes de TMEI offre un cadre commode pour résumer à un niveau assez général les interactions entre les réglementations fiscales concernant l’investissement et pour identifier les diverses voies par lesquelles o n pe ut s’a tte n dre à ce que l a po lit iqu e fisca le in flu e su r le co mpo rte me n t en mat ièr e d’investissement. Cependant, on rencontre, lorsqu’on utilise des TMEI, beaucoup de problèmes difficiles d’ordre conceptuel et tenant aux données disponibles. Voir annexe 6.C pour une reproduction de la déclaration. © OCDE 2000
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6.6. Conclusion Au fil des années, en réponse à la demande croissante des décideurs, divers indicateurs permettant d’évaluer la charge fiscale ont été mis au point. La présente étude a examiné certains des indicateurs les plus communément utilisés pour évaluer les charges fiscales qui pèsent sur les contribuables, en mettant particulièrement l’accent sur les sociétés. En outre, elle a fourni à titre d’exemple des chiffres provenant de sources diverses sur les taux d’imposition et les charges fiscales dans dix pays Membres de l’OCDE. Plus précisément, au cours des quinze dernières années, l’analyse des effets économiques de la fiscalité s’est de plus en plus fondée sur le calcul des taux marginaux effectifs d’imposition (TMEI). Cependant, un examen attentif de l’ensemble de problèmes conceptuels et de problèmes de données examinés au chapitre 5 laisse entendre que les statistiques de TMEI et les comparaisons entre secteurs dans les pays doivent être utilisés avec prudence comme indicateurs de l’influence de la fiscalité sur l’investissement ou comme guides pour la détermination de la politique fiscale. L’étude conclut que tous les indicateurs actuels qui ont été examinés présentent au moins quelques lacunes importantes. Les résultats fondés sur ces indicateurs de la charge fiscale ainsi que sur d’autres doivent donc être interprétés en tenant compte de leurs limites et évalué avec la prudence qui convient lorsqu’on les utilise pour traiter de questions de politique fiscale. D’autres travaux seront entrepris dans ce domaine par le groupe de travail sur l’analyse des politiques et les statistiques fiscales du Comité des affaires fiscales de l’OCDE.
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NOTES 1. Ainsi qu’il est expliqué au chapitre 4, un taux moyen implicite d’impôt sur les sociétés inclut au dénominateur l’excédent d’exploitation des sociétés, tiré des comptes nationaux, et au numérateur l’impôt sur les bénéfices des sociétés. Dans le cas de l’Allemagne, les données des comptes nationaux indiquent seulement l’excédent d’exploitation total (du secteur des entreprises constituées ou non en sociétés), ce qui rend nécessaire l’inclusion au numérateur d’une estimation de l’impôt sur le revenu des personnes physiques perçu sur les revenus des entreprises non constituées en sociétés (les cotisations de sécurité sociale versées par les travailleurs indépendants ont été exclues). Le taux moyen d’imposition pour l’Allemagne peut être considéré comme un taux d’imposition moyen des bénéfices des sociétés. 2. La taxe professionnelle est prélevée sur une base qui inclut la valeur locative des bâtiments et des biens d’équipements majorée d’un pourcentage des salaires mais qui est plafonnée à un certain pourcentage de la valeur ajoutée variable avec le montant du chiffre d’affaires réalisé par la société. 3. Un examen complet de la charge fiscale qui pèse sur les revenus du capital consiste à non seulement l’imposition des bénéfices des sociétés, mais aussi l’imposition des revenus correspondants au niveau de l’actionnaire, compte tenu des dispositions (éventuelles) qui intègrent ces deux niveaux. Les décideurs sont toutefois également intéressés par la question plus précise de la charge de l’impôt sur les sociétés qui fait l’objet de cette note. 4. Certains pays autorisent également les entreprises à reporter leurs pertes sur les exercices antérieurs en déduction de l’impôt dû pour les années précédentes. La déduction des pertes sur les exercices antérieurs est en général plus avantageuse que celle qui porte sur les exercices ultérieurs à moins que les pertes puissent être reportées sur les exercices ultérieurs avec intérêt (en raison de l’évolution de la valeur de la monnaie dans le temps). 5. Dans la plupart des systèmes fiscaux, les taux d’amortissement fiscal (ou de provisions pour épuisement des ressources) applicables au capital acquis au cours des années précédentes continuent à s’appliquer aux stocks de capital non amorti, même lorsque de nouveaux taux d’amortissement sont instaurés. Cela évite des gains/pertes en capital imprévus sur le capital existant à la suite de l’instauration d’un nouveau régime fiscal. 6. Si l’incidence finale de l’impôt sur les bénéfices des sociétés est incertaine (en effet, il existe une répercussion partielle incertaine de l’impôt sur la main-d’œuvre par le biais de réductions de salaires, et sur les consommateurs par le biais de hausse des prix) une augmentation de l’impôt sur les bénéfices des sociétés se traduira, à condition que les actionnaires supportent effectivement une partie de l’impôt, par une augmentation en pourcentage de la charge fiscale applicable aux propriétaires-actionnaires de sociétés. 7. De même, des comparaisons de l’impôt sur le revenu des personnes physiques limitées aux structures de taux des systèmes appliqués par les administrations centrales induisent en erreur du fait que trois pays de l’OCDE sur quatre prélèvent des impôts additionnels sur les revenus des personnes physiques. Les cotisations de sécurité sociale et les impôts cultuels peuvent majorer encore les taux marginaux maximum des impôts sur le revenu (section 2.3). On peut également montrer que les titulaires de revenus élevés ne sont pas les seuls concernés par ces taux marginaux. En fait, beaucoup de titulaires de faibles revenus s’exposent à des taux marginaux allant jusqu’à 100 pour cent et – dans des cas exceptionnels – encore plus du fait qu’à la suite d’une augmentation de leur revenu non seulement ils paient davantage d’impôt mais ils s’exposent aussi à perdre des prestations versées en fonction des ressources (section 2.3). 8. Il est possible de remédier au décalage entre le numérateur et le dénominateur d’un taux moyen d’imposition pour lequel l’excédent d’exploitation figure au dénominateur en incluant au numérateur, avec l’impôt sur les bénéfices des sociétés, une estimation de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux revenus d’investissement (auquel cas, le taux moyen d’imposition n’est plus seulement un indicateur portant sur l’impôt sur les sociétés). 9. Les considérations fiscales, parmi lesquels les taux légaux d’imposition et les dispositions fiscales préférentielles sont souvent citées comme déterminant les décisions concernant la localisation d’activités industrielles ou commerciales très mobiles (c’est-à-dire celles qui peuvent s’implanter dans différents sites pour une faible différence de coûts autres que fiscaux) comme celles des centres administratifs et de distribution. 10. Voir par exemple Devereux et Griffith (1998).
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ANNEXES AUX CHAPITRES
Annexe 2.A.
MESURE DU TAUX GLOBAL LÉGAL DE L’IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS AU JAPON On utilise l’approche suivante pour obtenir le taux global d’impôt sur les bénéfices des sociétés au Japon. On définit les variables suivantes : t = taux effectif global de l’impôt sur les sociétés uc = taux national de l’impôt sur les bénéfices des sociétés up = taux combiné de la surtaxe préfectorale et municipale ub = taux de la taxe professionnelle sur les entreprises (déductible) Le calcul examiné ci-dessous utilise les valeurs suivantes applicables aux 1er janvier 1998 :
Taux national de l’impôt sur les bénéfices des sociétés Taux (normal) préfectoral de l’impôt sur le revenu Taux (normal) municipal de l’impôt sur le revenu Taux combiné préfectoral + municipal Taux de la taxe professionnelle
uc up ub
0.345 0.051 0.123 0.173 0.111
On considère une augmentation de ¥ 1 du bénéfice de l’entreprise au cours de l’année t. Cela génère pour cette année la charge fiscale suivante : uc(1 + up) + u b
(1)
Cependant, la taxe professionnelle est déductible au cours de l’année suivante t + 1. Cette incidence sur le revenu imposable de l’année t + 1, indiquée par (–ub), réduit les bases d’imposition des impôts nationaux, préfectoraux et municipaux ainsi que de la taxe professionnelle de l’année t + 1. Ce lien de causalité se répercute également sur les années ultérieures. En particulier, comme la taxe professionnelle de l’année t + 1 est déductible l’année t + 2, la réduction de la taxe professionnelle au cours de l’année t + 1 entraîne une augmentation du revenu imposable au cours de l’année t + 2 (c’est-à-dire une déduction moindre de la taxe professionnelle) qui entraîne à son tour une augmentation des impôts nationaux, préfectoraux et municipaux ainsi que de la taxe professionnelle au cours de l’année t + 2. L’augmentation de la taxe professionnelle au cours de l’année t + 3 implique une réduction des bases d’imposition l’année suivante et ainsi de suite, l’effet exercé pour chaque année suivant l’année t se réduisant au fil du temps. Cet effet peut être illustré de la manière suivante. Admettons que u* désigne le taux combiné de l’impôt national, préfectoral et municipal sur le revenu [c’est-à-dire que u* est égal à uc(1 + up)] pour simplifier la notation. L’effet fiscal global d’une augmentation des bénéfices de l’entreprise au cours de l’année t est donné par l’équation suivante : t = (u* + ub)∆Xt + (u* + ub)∆Xt + 1 + (u* + ub)∆Xt + 2 + (u* + ub)∆Xt + 3 + (u* + ub)∆Xt + 4 … etc.
(2)
où ∆Xs représente la variation du revenu imposable au cours d’une année donnée telle qu’elle est indiquée par les équations suivantes : ∆Xt = +1 ∆Xt + 1 = –ub∆Xt = –ub ∆Xt + 2 = –ub∆Xt + 1 = –ub(–ub) = (ub)2 ∆Xt + 3 = –ub∆Xt + 2 = –ub(ub)2 = –(u b)3 ∆Xt + 4 = –ub∆Xt + 3 = –ub(–ub)3 = (u b)4 … etc. En substituant ces valeurs dans l’équation (2), on obtient l’expression suivante : t = (u* + ub)(1) + (u* + u b)(–u b) + (u* + ub)(ub)2 + (u* + ub)(–ub)3 + (u* + ub)(ub)4 + … etc.
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(3)
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
que l’on peut ramener en simplifiant à l’expression suivante : (4) t = (u* + ub)[1 – ub + (ub)2 – (ub)3 + (ub)4 + …] etc. ou, sous une forme plus abrégée : t = (u* + ub)Z (5) où : (6a) Z = [1 – u b + (ub)2 – (ub)3 + (ub)4 + …] etc. Pour résoudre cette équation pour la valeur de Z, on multiplie Z par le facteur (–ub). Cela donne l’expression suivante : (6b) Z(–ub) = –ub + (u b)2 – (u b)3 + (u b)4 + … etc. Si l’on soustrait à présent l’équation (6b) de l’équation (6a), cela donne : (6c) Z(1 + ub) = 1 En divisant par (1 + ub), on obtient la valeur suivante pour Z : (6d) Z = 1/(1 + u b) Si l’on substitue cette solution dans l’équation (5), on obtient l’expression suivante pour le taux légal combiné d’imposition des bénéfices des entreprises au niveau national, préfectoral et municipal ainsi que de la taxe professionnelle : (7) t = (u* + ub)/(1 + ub) Si l’on substitue les valeurs indiquées ci-dessus dans le tableau ci-dessus, on obtient une valeur de 0.4637.
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Annexes aux chapitres
Annexe 2.B.
LES EFFETS DE L’IMPOSITION DES DIVIDENDES ET LA DÉDUCTION AU TITRE DE L’INTÉGRATION DES REVENUS
La question de l’incidence de l’imposition des dividendes sur l’investissement des entreprises et inversement de l’incidence des dispositions en matière d’intégration des revenus qui ont pour effet d’atténuer la double imposition des revenus distribués a fait l’objet d’analyses et de débats considérables. Un certain nombre de théories concurrentes ont été proposées et testées, et les données dont on dispose montrent que l’incidence de l’imposition des dividendes (ou inversement de la réduction de l’impôt sur les dividendes) n’est pas uniforme dans tous les cas mais dépend plutôt d’un certain nombre de facteurs qui peuvent varier d’un cas à l’autre. L’optique « traditionnelle » Selon l’optique dite « traditionnelle », la double imposition des revenus des fonds propres réduit sensiblement le niveau d’investissement des sociétés et l’introduction de dispositions en matière d’intégration pour alléger la double imposition devrait avoir une incidence positive sur la formation de capital et la croissance économique. Cette optique repose sur l’hypothèse selon laquelle le paiement de dividendes présente une certaine valeur intrinsèque, indépendamment du fait qu’il constitue un moyen de verser des revenus aux actionnaires. Par exemple, les dividendes peuvent servir de signal montrant aux actionnaires que la société qui les leur distribue est prospère (Miller et Rock 1985). De plus, les actionnaires qui ne sont pas toujours certains que les dirigeants prennent les décisions les plus favorables à leurs intérêts peuvent considérer la distribution de revenus comme un moyen de fixer une limite au pouvoir discrétionnaire des dirigeants sur l’utilisation des gains de la société (Jensen 1986.) Selon les tenants de l’optique traditionnelle, ces considérations signifient que les actionnaires accepteront un rendement après impôt moindre sur les actions de sociétés ayant des taux de distribution des dividendes plus élevés. Cependant, si l’on a davantage recours aux dividendes plutôt qu’au rachat d’actions comme autre moyen de distribuer les revenus des sociétés aux actionnaires, cela impose un coût fiscal à ces derniers. En effet, les dividendes perçus sont généralement imposés à un taux effectif plus élevé que les gains en capital. Par conséquent, on peut s’attendre à ce qu’une société augmente son taux de distribution des dividendes jusqu’au point où les avantages intrinsèques (non fiscaux) de l’augmentation des dividendes à la marge sont compensés par la charge fiscale nette qui résulte d’une distribution additionnelle de bénéfices d’un dollar. Cette charge fiscale nette est égale à la différence entre le taux effectif de l’impôt sur le revenu des personnes physiques applicable aux dividendes perçus par l’actionnaire et le taux effectif d’imposition (sur la base des droits constatés) applicable à ses gains en capital. Par conséquent, selon l’optique traditionnelle, une augmentation du taux effectif d’imposition des dividendes aboutirait à une réduction des distributions de dividendes et par conséquent, à une augmentation du coût du financement sur fonds propres de l’entreprise. Une réduction de l’impôt sur les dividendes par l’adoption de mesures d’intégration aurait pour effet d’abaisser le coût du capital pour les entreprises et de permettre une augmentation de l’investissement. L’optique « nouvelle » (ou l’optique de la « capitalisation fiscale ») Les tenants de l’optique dite « nouvelle » ou de la « capitalisation fiscale » soutiennent que l’imposition des dividendes n’a pas d’incidence sur les décisions d’investissement des entreprises parvenues au stade de la maturité qui financent leurs investissements à la marge en utilisant leurs bénéfices non distribués. L’optique nouvelle, contrairement à l’optique traditionnelle, ne suppose pas que le transfert de bénéfices aux actionnaires par la distribution de dividendes présente une valeur intrinsèque (c’est-à-dire que les dividendes et les gains en capital sont des substituts parfaits) et suppose que les entreprises ne peuvent racheter les actions. Les impôts sur les dividendes ne découragent pas l’investissement financé au moyen des bénéfices non distribués dans la mesure où le coût de ces bénéfices est indépendant du taux d’imposition des dividendes, dans l’hypothèse où l’on prévoit que le taux d’imposition des dividendes restera constant. Ce résultat est dû à l’hypothèse (d’arbitrage) selon laquelle l’actionnaire ne peut échapper à l’imposition des dividendes sur les revenus non distribués par l’entreprise – ces revenus seront soumis à l’imposition des dividendes s’ils sont distribués au cours de la période où ils sont générés et investis dans un autre actif ou au contraire si les revenus sont mis en
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Mesurer les charges fiscales : quels indicateurs pour demain ?
réserve au sein de l’entreprise et distribués par la suite. La valeur actuelle de la charge fiscale est la même selon les deux options (en supposant que le taux effectif d’imposition des dividendes reste constant). En ce sens, les fonds propres se trouvent « piégés » au sein de l’entreprise. L’optique nouvelle consiste donc à admettre que les impôts sur les dividendes qui se trouvent capitalisés dans le prix des actions, ont une incidence sur ce prix mais n’ont pas d’incidence sur l’investissement. Il ne faut pas s’attendre à ce que des mesures d’intégration encouragent l’investissement des sociétés mais plutôt à ce qu’elles aient pour seule conséquence l’obtention d’un gain exceptionnel pour les actionnaires existants. Il faut souligner que l’optique nouvelle telle qu’elle est résumée ci-dessus s’applique aux entreprises parvenues au stade de la maturité qui sont en mesure de financer entièrement leurs dépenses d’investissement au moyen de leurs bénéfices non distribués et n’ont pas besoin de recourir à de nouvelles émissions d’actions qui constituent en général une forme coûteuse de financement sur fonds propres. On peut cependant s’attendre à ce que les impôts sur les dividendes et les allégements de ces impôts aient une incidence sur les décisions d’investissement d’entreprises « immatures » nouvellement créées ou en expansion rapide dont les besoins de financement des investissements dépassent les bénéfices non distribués disponibles et qui ont donc besoin d’une nouvelle injection de fonds propres. Contrairement à celui des bénéfices non distribués, le coût d’une augmentation de capital augmente avec le taux d’imposition des dividendes dans la mesure où les détenteurs de capital extérieurs à l’entreprise peuvent échapper à l’impôt sur les dividendes en investissant ce capital dans un autre actif, par exemple des obligations, qui n’est pas soumis à cet impôt. Par conséquent, dans les cas où l’investissement est financé à la marge par de nouvelles émissions d’actions, on peut s’attendre à ce que les mesures de réduction de la double imposition abaissent le coût du financement sur fonds propres et accroissent par conséquent l’investissement des entreprises, ce qui constitue un résultat cohérent avec celui de l’optique traditionnelle. L’optique de la « clientèle fiscale » L’optique de la « clientèle fiscale » met l’accent sur le fait que les taux d’imposition effectifs des dividendes et des gains en capital diffèrent selon les investisseurs, ce qui a pour conséquence que les investisseurs présentant certaines caractéristiques fiscales ont davantage de chances de détenir certains actifs que ceux qui présentent d’autres caractéristiques fiscales. Par exemple, les investisseurs soumis à des taux d’imposition des dividendes relativement faibles auront tendance à préférer les actions pour lesquelles le taux de distribution des dividendes est relativement élevé alors que ceux qui sont soumis à des taux d’imposition des dividendes élevés auraient tendance à favoriser les actions « de croissance » ayant des taux de distribution des dividendes faibles. Les préférences pour le risque et les coûts de transaction peuvent aussi varier d’un groupe d’investisseurs à l’autre. Dans ces conditions, un groupe d’investisseurs qui bénéficie d’un régime fiscal relativement plus favorable sur les revenus d’un investissement particulier en fonds propres et peut montrer une préférence pour cet investissement pour des raisons non fiscales (par exemple, la préférence pour le risque) peut surenchérir sur d’autres investisseurs et apparaître comme l’actionnaire « marginal » de l’entreprise. Il est important de noter que c’est le taux d’imposition des dividendes applicable à l’actionnaire marginal qui est pris en compte dans la détermination des coûts des fonds propres de l’entreprise et qui influe par conséquent sur le niveau d’investissement qu’elle entreprend ainsi que sur la valeur de ses actions sur le marché.
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Annexes aux chapitres
Annexe 4.A.
LA CLASSIFICATION DES IMPÔTS DE L’OCDE 1000 Impôts sur le revenu, les bénéfices et les gains en capital 1100 Impôts sur le revenu, les bénéfices et les gains en capital des personnes physiques 1110 Sur le revenu et les bénéfices 1120 Sur les gains en capital 1200 Impôts sur le revenu, les bénéfices et les gains en capital des sociétés 1210 Sur le revenu et les bénéfices 1220 Sur les gains en capital 1300 Non ventilables entre les rubriques 1100 et 1200 2000 Cotisations de sécurité sociale 2100 2200 2300 2400
A la charge des salariés A la charge des employeurs A la charge des travailleurs indépendants ou des personnes n’occupant pas d’emploi Non ventilables entre les rubriques 2100, 2200 et 2300
3000 Impôts sur les salaires et la main-d’œuvre 4000 Impôts sur le patrimoine 4100 Impôts périodiques sur la propriété immobilière 4110 Ménages 4120 Autres agents 4200 Impôts périodiques sur l’actif net 4210 Personnes physiques 4220 Sociétés 4300 Impôts sur les mutations par décès, les successions et les donations 4310 Impôts sur les mutations par décès et les successions 4320 Impôts sur les donations 4400 Impôts sur les transactions mobilières et immobilières 4500 Autres impôts non périodiques sur le patrimoine 4510 Impôts sur l’actif net 4520 Autres impôts non périodiques 4600 Autres impôts périodiques sur le patrimoine 5000 Impôts sur les biens et services 5100 Impôts sur la production, la vente, le transfert, la location et la livraison de biens et la prestation de services 5110 Impôts généraux 5111 Taxes sur la valeur ajoutée 5112 Impôts sur les ventes 5113 Autres impôts généraux sur les biens et services 5120 Impôts sur des biens et des services déterminés 5121 Accises 5122 Bénéfices des monopoles fiscaux 5123 Droits de douane et droits à l’importation 5124 Taxes à l’exportation 5125 Impôts sur les biens d’équipement 5126 Impôts sur des services déterminés 5127 Autres impôts sur les transactions et les échanges internationaux 5128 Autres impôts sur des biens et services déterminés 5130 Non ventilables entre les rubriques 5110 et 5120
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5200 Impôts sur l’utilisation des biens ou l’autorisation d’utiliser des biens ou d’exercer des activités 5210 Impôts périodiques 5211 A la charge des ménages au titre de véhicules à moteur 5212 A la charge d’autres agents au titre de véhicules à moteur 5213 Autres impôts périodiques 5220 Impôts non périodiques 5300 Non ventilables entre les rubriques 5100 et 5200 6000 Autres impôts 6100 A la charge exclusive des entreprises 6200 A la charge d’autres agents que les entreprises ou non identifiables
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Annexes aux chapitres
Annexe 4.B.
ILLUSTRATION DE L’APPLICATION DE DONNÉES MICRO-ÉCONOMIQUES Cette annexe donne des exemples de la manière dont des données micro-économiques (données concernant des contribuables individuels) pourraient être utilisées pour permettre d’obtenir des évaluations plus exactes de l’impôt sur le revenu des personnes physiques collecté sur divers éléments de revenus (par exemple, les salaires et traitements, les revenus imposables du capital, les transferts). Ces informations permettraient d’examiner la manière dont les taux moyens d’imposition applicables à la main-d’œuvre et au capital (voir sous-sections 4.4.3 et 4.4.4) obtenus en utilisant des données micro-économiques peuvent être comparés à ceux obtenus en utilisant des données globales. Cet exercice devrait être possible lorsque l’ensemble des données inclut, pour les contribuables de l’échantillon, les chiffres déclarés séparément en ce qui concerne les éléments de revenus pour lesquels des ratios d’imposition sont calculés. Cas (1) : Imposition progressive des revenus combinés du travail et du capital (approche globale) Considérons un cas simplifié qui comprend un échantillon de trois contribuables, dont deux ont des revenus identiques qui consistent surtout en traitements et salaires tandis que le troisième encaisse sensiblement plus de revenus d’investissements. Supposons en outre que le système fiscal national applique un barème progressif d’impôt sur le revenu des personnes physiques :
Barème légal de l’impôt sur le revenu des personnes physiques Tranche de revenu ($) Taux d’imposition
0-5 0
5-25 0.20
25 et plus 0.30
Le tableau suivant contient des données micro-économiques qui font apparaître les traitements et salaires ainsi que les revenus d’investissements des trois contribuables et l’impôt qu’ils ont à verser, ainsi qu’une évaluation de leurs taux moyens et marginaux d’imposition. Des chiffres globaux sont également indiqués. La partie grisée du tableau indique les donnés globales qui seraient tirées des comptes nationaux et des statistiques des recettes publiques de l’OCDE dans cet exemple simplifié. Les résultats montrent que près des deux tiers des traitements et salaires sont imposés au niveau des particuliers à un taux moyen d’impôt sur les revenus des personnes physiques de 15 pour cent. Il apparaît que les revenus d’investissement sont surtout perçus par les contribuables auxquels s’applique un taux moyen d’imposition plus élevé, qui est de 21 pour cent. Lorsqu’on connaît la répartition des salaires et des traitements entre les contribuables, il est possible de calculer une moyenne pondérée de ces taux individuels, les pondérations reflétant la distribution de la part des revenus du travail selon les contribuables. De même, on peut obtenir un taux moyen pondéré applicable aux revenus imposables des investissements. De plus, les données micro-économiques permettent d’observer les taux auxquels certains flux de revenus sont imposés à la marge au niveau des individus, de sorte que l’on peut calculer une moyenne pondérée des taux marginaux d’imposition pour chaque catégorie de revenu. Le tableau 2 compare ces résultats avec ceux qui peuvent être obtenus à partir de données agrégées et permet de montrer que l’utilisation de données micro-économiques permet d’obtenir davantage d’informations.
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Cas (1) Données micro-économiques et agrégées Salaires et traitements
Individu 1 Revenu Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
Revenus d’investissement
Revenu combiné
2
20 (0.2)15 = 3 (3/20) = 0.15
18 0.15 0.20
Individu 2 Revenu Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
0.15 0.20
18
2
0.15 0.20
Individu 3 Revenu Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
20 (0.2)15 = 3 (3/20) = 0.15
0.15 0.20
20
20
0.21 0.30
40 (0.2)20 + (0.3)15 = 8.5 (8.5/40) = 0.213
0.21 0.30
Données agrégées Revenu Impôt Taux moyen d’imposition
56 (36/56)0.15 + (20/56)0.213
(4/24)0.15 + (20/24)0.213
Taux marginal moyen d’imposition
(36/56)0.20 + (20/56)0.30
(4/24)0.20 + (20/24)0.30
80 14.5 (14.5/80) = 0.181
24
L’encadré gris indique les données disponibles au niveau agrégé.
Comparaison des résultats du Cas (1)
Taux moyens d’imposition Salaires et traitements Revenus d’investissements Taux marginaux moyens d’imposition Salaires et traitements Revenus d’investissements
Données agrégées (mave )
Données micro-économiques (m W et mI)
0.181 0.181
0.173 0.203
n.d. n.d.
0.236 0.283
Le cas suivant (2) (voir ci-dessous) est identique au premier, mais envisage un taux d’intégration des revenus du capital de 50 pour cent, tandis que le cas (3) (voir également ci-dessous) envisage un système dual d’impôt sur le revenu. Dans les résultats indiqués pour les cas (2) et (3), les montants obtenus en matière de taux moyen d’imposition en utilisant les données globales n’apparaissent pas sensiblement différents de ceux qui sont obtenus en utilisant des données micro-économiques. Ces résultats ne sont donnés bien entendu qu’à titre d’exemple et indiquent que cet exercice a pour seul objet de vérifier l’exactitude de l’analyse en termes de taux moyen d’imposition fondée sur les données des comptes nationaux et des statistiques des recettes publiques. Si les taux d’imposition progressifs appliqués aux revenus du travail atteignaient la fourchette de 50 à 60 pour cent à des niveaux de revenus imposables relativement faibles, l’écart entre les taux moyens d’imposition obtenus en utilisant des données agrégées et ceux obtenus à partir de données micro-économiques serait sensiblement plus important.
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Annexes aux chapitres
Cas (2) Imposition progressive des revenus combinés du travail et du capital (approche globale), taux d’intégration de 50 pour cent pour les revenus du capital.
Barème légal des taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques Tranche de revenu ($) Taux d’imposition
0-5 0
5-25 0.20
Salaires et traitements
Individu 1 Revenu Revenu imposable Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
Revenus d’investissement
Revenu combiné
2 1
20 19 (0.2)19 = 2.8 (2.8/20) = 0.14
18 18 0.14 0.20
Individu 2 Revenu Revenu imposable Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
0.14 0.10
18 18
2 1
0.14 0.20
Individu 3 Revenu Revenu imposable Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
25 et plus 0.30
20 19 (0.2)19 = 2.8 (2.8/20) = 0.14
0.14 0.10
20 20
20 10
0.138 0.30
40 30 (0.2)20 + (0.3)5 = 5.5 (5.5/40) = 0.138
0.138 0.15
Données globales Revenu Revenu imposable Impôt Taux moyen d’imposition
56 56 (36/56)0.14 + (20/56)0.138
(4/24)0.14 + (20/24)0.138
Taux marginal moyen d’imposition
(36/56)0.20 + (20/56)0.30
(4/24)0.10 + (20/24)0.15
80 68 11.1 (11.1/80) = 0.139
24 12
L’encadré gris indique les données disponibles à un niveau agrégé.
Comparaison des résultats du Cas (2) Données agrégées (mave )
Données micro-économiques (mW et m I)
Taux moyens d’imposition Salaires et traitements Revenus d’investissements
0.139 0.139
0.139 0.138
Taux marginaux moyens d’imposition Salaires et traitements Revenus d’investissements
n.d. n.d.
0.236 0.142
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Cas (3) Système dual d’imposition (imposition distincte des revenus du travail et des revenus du capital)
Barème légal des taux de l’impôt sur le revenu des personnes physiques Tranche de revenu ($) Taux d’imposition des revenus du travail Taux d’imposition des revenus du capital
0-5 0 0.20
5-25 0.30 0.20
25 et plus 0.30 0.20
Salaires et traitements
Revenus d’investissement
Revenu combiné
Individu 1 Revenu Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
18 (0.3)13 = 3.9 (3.9/18) = 0.217 0.30
2 (0.2)2 = 0.4 (0.4/2) = 0.20 0.20
20 4.3 (4.3/20) = 0.215
Individu 2 Revenu Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
18 (0.3)13 = 3.9 (3.9/18) = 0.217 0.30
2 (0.2)2 = 0.4 (0.4/2) = 0.20 0.20
20 4.3 (4.3/20) = 0.215
Individu 3 Revenu Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal d’imposition
20 (0.3)15 = 4.5 (4.5/20) = 0.225 0.30
20 (0.2)20 = 4 (4/20) = 0.20 0.20
40 8.5 (8.5/40) = 0.213
56 8.4 (12.3/56) = 0.22
24 4.8 (4.8/24) = 0.20
80 17.1 (17.1/80) = 0.214
(36/56)0.30 + (20/56)0.30
(4/24)0.20 + (20/24)0.20
(36/80)0.3 + (20/80)0.3 + (4/80)0.2 + (20/80)0.2
Données agrégées Revenu Impôt Taux moyen d’imposition Taux marginal moyen d’imposition
L’encadré gris indique les données disponibles à un niveau agrégé.
Comparaison des résultats du Cas (3) Données agrégées (mave)
Données micro-économiques (m W et mI)
Taux moyens d’imposition Salaires et traitements Revenus d’investissements
0.214 0.214
0.22 0.20
Taux marginaux moyens d’imposition Salaires et traitements Revenus d’investissements
n.a. 0.2
0.3 0.2
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Annexes aux chapitres
Annexe 6.A.
DONNÉES RÉTROSPECTIVES ET PROSPECTIVES CONCERNANT LES TAUX DE L’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS
Les tableaux suivants indiquent les données à partir desquelles ont été établis les graphiques 6.1 et 6.2 qui figurent au chapitre 6.
Données utilisées pour le graphique 6.1. Indicateurs rétrospectifs des taux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, 1995 STAT
ATR (firme)
ATR (implicite)
ATR (PIB)
56.7 33.0 35.0 34.0 40.2 36.7 38.0 37.0 35.0 28.0 36.5
38.5 29.0 31.8 17.7 21.0 32.8 13.9 35.3 24.1 27.5 26.9
17.6 40.6 22.2 7.6 29.5 21.0 na 51.4 20.5 28.2 26.3
1.1 3.3 3.3 1.6 3.0 1.6 2.9 3.6 1.9 3.0 2.9
Allemagne Royaume-Uni Pays-Bas Autriche Belgique France Irlande Italie Espagne Suède Moyenne de l’UE
Sources : Les taux légaux de l’impôt sur les bénéfices des sociétés STAT sont tirés de la Base de données fiscales de l’OCDE (1995). Les taux ATR fondés sur des données collectées au niveau de la firme ATR (firme) qui indiquent des moyennes pour la période 1990-1996 sont tirés de Buijink, Janssen et Schols (1999). Les taux implicites de l’impôt sur les sociétés ATR (implicite) sont tirés de De Haan et Volkerink (2000), tandis que les taux de l’impôt sur les sociétés par rapport au PIB, ATR, (PIB), sont obtenus à partir des Statistiques des recettes publiques de l’OCDE, 1998.
Données utilisées dans le graphique 6.2. Indicateurs prospectifs des taux de l’impôt sur les sociétés, 1998
Allemagne Royaume-Uni Pays-Bas Autriche Belgique France Irlande Italie Espagne Suède Moyenne de l’UE
STAT (1998)
ATR (proj)
TMEI
56.7 31.0 35.0 34.0 40.2 41.7 32.0 41.3 35.0 28.0 36.4
47.2 30.3 31.8 35.0 31.8 47.5 21.8 40.6 33.1 21.0 32.1
37.0 22.3 23.2 27.0 23.5 40.7 22.3 17.7 32.8 17.2 24.3
Sources : Les taux moyens d’imposition sur la base de projets sont tirés d’une étude de 1998 effectuée par l’entreprise PriceWaterhouseCoopers, à la demande du ministère des Finances des Pays-Bas. Les statistiques des TMEI sont tirées d’une étude de 1999 effectuée par l’entreprise Baker & McKenzie, également à la demande du ministère des Finances des Pays-Bas.
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Annexe 6.B.
TAUX MOYENS IMPLICITES D’IMPOSITION – EXEMPLE DES EFFETS DU TRAITEMENT DES INTÉRÊTS Les taux effectifs moyens implicites d’imposition (ATR) incluent l’excédent d’exploitation au dénominateur, celui-ci est évalué en intégrant les versements d’intérêts, de loyers et de redevances. Cette annexe illustre les conséquences de l’intégration de l’excédent d’exploitation plutôt que du bénéfice (évalué net de ces dépenses) dans le dénominateur, en mettant l’accent sur les conséquences du traitement des intérêts. Les deux scénarios envisagés dans le tableau ci-dessous diffèrent en ce que le taux d’intérêt qui est supposé applicable aux dettes est de 10 pour cent dans le premier cas et de 15 pour cent dans le second (pour un même niveau d’endettement de 400 unités monétaires). Comme les intérêts versés sont déductibles de l’impôt, l’impôt sur les bénéfices des sociétés est moins élevé dans le scénario 2 que dans le scénario 1. L’excédent d’exploitation est le même dans les deux cas, étant mesuré en intégrant les intérêts. Par conséquent, le taux moyen implicite d’impôt sur les sociétés évalué en divisant l’impôt sur les sociétés par l’excédent d’exploitation est moindre dans le scénario 2. Si l’on observe les seuls taux moyens d’imposition implicites des sociétés, on pourrait conclure que la politique suivie en matière d’imposition des sociétés est différente entre les deux cas, et en particulier que le taux effectif d’impôt sur les sociétés est moindre dans le scénario 2, alors qu’en fait, la politique en matière d’impôt sur les sociétés est inchangée. On pourrait aussi (à tort) conclure que les incitations à l’investissement seraient plus importantes dans le scénario 2, avec un taux moyen d’imposition moindre alors qu’en fait, les résultats d’un calcul de taux de rendement faisant apparaître une réduction de la rentabilité du fait de l’augmentation des intérêts versés dans le scénario 2 montrent que les incitations à l’investissement se trouvent en fait réduites et non renforcées. Ces erreurs résultent de l’utilisation de l’excédent d’exploitation, tiré des données des comptes nationaux (qui n’indiquent pas séparément les données concernant les bénéfices).
Scénario 1
Scénario 2
1000 400 600 200 (100)
1000 400 600 200 (100)
100
100
(40) (@10%)
(60) (@15%)
60
40
(24) 36
(16) 24
Taux de rendement des fonds propres
6% (36/600)
4% (24/600)
Taux moyen implicite effectif de l’impôt sur les sociétés Taux moyen implicite effectif de l’impôt des bénéfices des sociétés
24% (24/100)
16% (16/100)
40% (24/60)
40% (16/40)
Actifs Endettement Fonds propres Recettes Moins salaires, amortissement = Excédent d’exploitation Moins intérêts = Bénéfice IS (@40%) Bénéfice après impôt
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Annexes aux chapitres
Annexe 6.C.
CONCLUSIONS SUR LE BIEN-FONDÉ DE L’ANALYSE EN TERMES DE TMEI POUR LA POLITIQUE FISCALE Le Groupe de travail no 2 du Comité des affaires fiscales a formulé à sa 58e réunion de mai 1999 la déclaration suivante, qui souligne la nécessité de faire preuve d’une extrême prudence dans l’utilisation de l’analyse en termes de TMEI pour la politique fiscale. « Un domaine important de l’analyse économique concerne les considérations d’efficience liées à l’imposition des revenus du capital et aux changements de politiques qui pourraient améliorer l’allocation des facteurs de production – notamment le capital matériel, la R-D et le savoir-faire – et réduire ainsi le plus possible les pertes sèches ou l’excès de charges fiscales. L’analyse en termes de taux marginaux effectifs d’imposition et la notion qui lui est étroitement liée de coût d’usage du capital ont fortement stimulé les réflexions dans ce domaine. L’analyse en termes de TMEI fournit un cadre utile pour l’identification des différents moyens par lesquels la politique fiscale pourrait influer sur le comportement en matière d’investissement – par l’imposition du rendement de l’investissement ; par l’incidence des abattements fiscaux et des crédits d’impôt sur le prix d’achat effectif du capital ; et par les effets possibles de l’imposition au niveau de la société et de l’actionnaire sur le coût des fonds (capital financier). Les taux marginaux effectifs d’imposition offrent par ailleurs une méthode commode pour faire une synthèse générale des interactions entre les principaux paramètres fiscaux concernant l’imposition des revenus du capital et comparer le régime applicable en vertu du Code des impôts aux différentes activités d’investissement, ainsi qu’aux différents secteurs, aux différents pays et aux différentes périodes. Étant donné les attraits qu’elle présente du fait qu’elle permet de générer des statistiques synthétiques du prix du capital ajusté en fonction de l’impôt, l’analyse en termes de TMEI a été largement utilisée par les universitaires, comme par les chercheurs du secteur privé et les décideurs pour analyser les effets de la fiscalité sur l’investissement. En fait, l’analyse en termes de TMEI a fourni dans une large mesure les fondements théoriques des réformes fiscales instaurées dans beaucoup de pays de l’OCDE du milieu à la fin des années 80 qui ont eu pour effet d’élargir la base et d’abaisser les taux d’imposition des revenus des différents types de capital pour obtenir des gains d’efficience. De plus, beaucoup d’analystes continuent de recourir à cette méthodologie, qui suscite toujours autant d’intérêt, et qui est toujours autant appliquée et réexaminée, ce qui donne lieu à des modifications utiles permettant de mieux saisir et évaluer les effets de la fiscalité sur le prix du capital. Tout en reconnaissant l’utilité de l’analyse en termes de TMEI, beaucoup d’analystes recommandent la prudence compte tenu du fait que pour certaines décisions d’investissement, on constate que les résultats obtenus peuvent fournir des indicateurs peu fiables des incitations à l’investissement et de l’incidence de la fiscalité sur ces incitations. L’analyse en termes de TMEI, comme d’autres formes d’analyse économique, formule un certain nombre d’hypothèses simplificatrices qui peuvent n’être pas valables dans certains cas. Ces appels à la prudence soulignent la nécessité d’évaluer la portée des hypothèses sous-jacentes dans l’interprétation des résultats. Cette nécessité est particulièrement évidente lorsque les statistiques des TMEI sont considérées comme un guide pour la conception de la politique fiscale ».
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LES ÉDITIONS DE L'OCDE, 2, rue André-Pascal, 75775 PARIS CEDEX 16 IMPRIMÉ EN FRANCE (23 2000 02 2 P) ISBN 92-64-27137-6 – n° 50900 2000