FRANÇOISE-HÉLÈNE MASSA-PAIRAULT
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FRANÇOISE-HÉLÈNE MASSA-PAIRAULT
INTRODUCTION
Le sujet de cette table ronde implique certainement l'approche d'une pluralité de domaines, culturels, linguistiques, ethniques, dont le dénominateur commun est l'Italie antique à un moment bien précis de son histoire, le Ve siècle av. J.-C. A. Piganiol, qui s'intéressa, l'un des premiers, à l'École de Rome, aux questions de topographie romaine, et comprit la richesse de la question latine archaïque, A. Piganiol, évoquait encore en 1966, dans son histoire de la conquête romaine, la «nuit du Ve siècle». Or cette for mule lapidaire n'était pas si déplacée il y a seulement vingt ans. Elle reflétait aussi une tradition historiographique qui consiste, depuis Volt aire, à penser par siècles, à individualiser, dans le temps historique, des unités significatives. En outre, dans l'esprit de Piganiol, «la nuit du Ve siècle» n'était pas seulement la nuit de l'inconnu mais aussi la nuit par opposition à la lumière de la Grèce contemporaine, ou plus précisé ment,de la démocratie athénienne de Clisthène et de Miltiade, de Thémistocle et de Périclès. L'Italie à la même époque représentait, pour ainsi dire, un siècle de Périclès à rebours. Il serait trop simple d'attribuer à cette dernière considération une valeur purement idéologique, promue par toute la tradition des Lumièr es en France et filtrée par le courant positiviste de l'histoire. En effet, l'historien moderne ne saurait faire fi des questions constitutionnelles et politiques qui fondent la légitimité d'une telle comparaison GrèceItalie. Il doit seulement les poser en des termes compatibles avec le progrès des connaissances et la compréhension de la complexité des processus en présence tant en Grèce qu'en Italie. Une telle approche «méditerranéenne» des événements et des structures sociales doit nous aider dans la conquête de l'unité de notre thème. La question est de savoir dans quelle mesure nous pouvons envisager le Ve siècle en Italie comme un ensemble historique cohérent dans son principe et son dyna-
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misme. Or la conscience de cette cohérence nous paraît avoir été acqui se par étapes, et en profondeur, à l'issue d'un certain nombre de débats. Il y a vingt ans, au moment même où Piganiol évoquait la nuit du Ve siècle, le débat restait encore circonscrit au problème de la naissan ce de la République romaine auquel la fondation Hardt consacrait l'un de ses «Entretiens». Il s'agissait d'évaluer la rupture historique, réelle ou surestimée, produite par cet événement, mais les problèmes du Ve siècle à Rome et dans le Latium étaient au centre de l'attention, qu'il s'agît d'art ou de constitution, de tradition historique ou de documents épigraphiques et juridiques, comme les Fastes consulaires ou les lois des Douze tables. Le débat Alföldi-Momigliano sur la nature de la classis, de la plèbe et de Yequitatus primitif était au plus fort de son express ion.On n'avait point à disposition la somme de F. Coarelli sur le forum romain. On n'avait point encore retrouvé l'inscription de Satricum ni les restes du temple archaïque des Dioscures à Rome. Vingt ans après, notre horizon s'est élargi. Non seulement les docu ments dont nous disposons ont augmenté qualitativement et quantitat ivement sur l'ensemble des grandes aires archéologiques (et je n'ai pas à refaire l'histoire des découvertes qui ont marqué notre génération, en Grande Grèce et en Sicile, en Campanie et en Étrurie, en Italie centrale et padane), mais nous avons acquis une conscience toujours plus nette du caractère organique de l'histoire de l'Italie antique, d'une sorte d'in teraction fonctionnelle des différents domaines entre eux. À cet éveil les hellénistes ont contribué les tout premiers, non seulement en nous aidant à construire les ponts qui unissent plusieurs civilisations diffé rentes, mais encore en nous invitant à mieux discerner les liens des cités grecques et, spécialement, des cités italiotes, avec la réalité beau coup plus mouvante et incertaine qui caractérise les cités italiques. Ains i le débat, qui intéressait un arc de temps beaucoup plus long, se déve loppa à partir d'une direction de recherche lancée par G. Pugliese Carratelli, se concentra sur Rome et le Latium dans leurs rapports avec le monde grec. Par le biais de l'étude des cultes, la discussion s'étendait toutefois progressivement à l'Étrurie. Cette tendance, déjà affirmée dans les rapports de J. Heurgon et M. Pallottino au Congrès de Tarente en 1968, devenait dominante dix ans après au congrès promu à Rome par La Parola del Passato sur «Lazio arcaico e mondo greco». Lors de ce congrès, G. Colonna abordait l'examen du matériel de la nécropole de l'Esquilin et affrontait un thème en étroit rapport avec un aspect de la société romaine au Ve siècle. De même les rapports entre la Sicile et
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le monde tyrrhénien au Ve siècle étaient abordés dans une autre rela tion de Colonna, quelques années plus tard. C'est le moment où un inté rêt plus spécifique pour le Ve siècle paraît se déterminer dans un cer tain nombre de communications présentées lors des manifestations d'« Archeologia laziale». Instruits par vingt ans de débats, nous avons apparemment devant nous une double tâche : nous former une vision plus complète encore des corrélations entre les différentes réalités dites régionales; concent rer notre attention sur certaines périodes-charnières et les comprendre selon l'unité de principes qu'il tient à nous d'identifier. Le Ve siècle est sûrement l'une de ces périodes-charnières dont l'analyse a été jusqu'à présent malaisée. En effet cette dernière suppose coordination et effort conceptuel. La première est toujours difficile à réaliser entre plusieurs secteurs de la recherche séparés par la spécialisation académique. Le second implique le choix d'une perspective, la capacité de comparer, pour en déterminer les continuités profondes, mais aussi les différen ces et les ruptures, plusieurs périodes de l'histoire, plusieurs réponses, liées au fonctionnement social, que le temps sépare et unit. Pour définir le Ve siècle nous avons pris un risque en employant le terme de crise. Certes il ne s'agit pas d'être dupes d'une illusion modern iste.Dans l'acception toutefois où nous employons ce mot, le terme de crise ne saurait être totalement étranger à l'économie politique qui, du XIXe siècle à nos jours, a tant contribué à développer le champ de ce concept en compréhension et en extension. Nous n'oublions pas, natu rellement, que nous parlons de réalités antiques, d'économie, de formes de commerce et de monnaie, bien éloignées de la nôtre. Ce n'est pas sans raison, pourtant, que l'on aurait à chercher, même pour une période aussi reculée, un emploi pregnant du terme de crise au sens économique. Par exemple l'un des paramètres révélant la crise du Ve siècle en Étrurie méridionale est fourni par l'évolution statistique des importations de vases attiques. Mais ce n'est là qu'un paramètre, non l'analyse de l'économie dans ses rapports avec l'organisation sociale, nécessaire dans toute étude de ce genre. En réalité, nous employons le terme de «crise» au sens le plus ét ymologique du mot et dans ce sens ne croyons pas même nécessaire l'ombre d'un guillemet. Crisis, veut dire procès et jugement, débat et combat entre différents contendants, entre différentes réalités situées sur le même plan ou sur des plans distincts de l'existence. Quelles gran desactions entre forces opposées offre donc le Ve siècle en Italie? Le monde antique - reconnaît-on souvent - est un monde de cités
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et la crise du Ve siècle se définit comme l'ensemble des facteurs qui remettent en cause les situations acquises à la fin de l'époque archaï que dans le cadre des cités. Or la définition du politique en Italie ne présente pas partout des caractères unitaires, même si certaines typolo gies apparaissent avec plus d'évidence qu'autrefois. Les différentes aires de civilisation, les différents peuples italiques connaissent en effet des expériences aussi variées et articulées que possible en ce domaine. Même un état constitutionnel archaïque des plus élaborés, comme l'état correspondant à la Rome de Servius Tullius, admet en réalité une mult iplicité de niveaux du politique sans résoudre les éventuelles contradic tions entre ces différents niveaux. Songeons aux curies et aux centuries, aux tribus et aux pagi et à toutes les oppositions fondamentales peutêtre plus anciennes encore que Servius Tullius, révélées par le vocabul aire politique romain et justement soulignées autrefois par Momiglia no : classis/ infra classent, pîebs/populus, etc. Des modèles analogues ou, du moins, comparables, de cités ont cours dans le monde étrusque et italique et seule la progressive elucidation de la nature de ces modèles et de leur dynamisme permet d'envisager la constitution comme telle de l'histoire italique ou étrusque. Ces considérations ont été dévelop pées par M. Torelli en 1974 dans Dialoghi di Archeologia. Elles ont été encore au centre des enseignements d'un récent congrès d'Acquasparta sur la «naissance du politique dans le monde osco-lucanien ». Notre propos est évidemment différent dans la mesure où nous souhaitons étendre l'enquête géographiquement mais restreindre son application dans le temps et la limiter aux tensions et contradictions engendrées par les formes du politique déjà constituées ou en cours de constitution pendant le Ve siècle. Aussi, l'équilibre interne des communautés est-il au centre du dé bat et sous plusieurs aspects : les rapports entre les centres urbains et leur ager, entre les cités et les peuples des frontières ; en outre les rela tions entre les forces politiques et sociales constituant ces mêmes com munautés. Le monde archaïque était relativement ouvert et admettait certaines formes de mobilité et d'intégration sociale. Nous avons plu sieurs indices de la fin d'une telle situation au Ve siècle et nous devons les vérifier. Ces indices rejoignent les signes de mutation intervenues dans les formes mêmes de l'aristocratie, de son rôle et de son assiette sociale. Ils expliquent aussi la constitution de nouveaux groupes, entre autres, la naissance comme entité politique de la plèbe à Rome. Une autre série de questions soulevées par la fin des situations archaïques concerne les relations entre le monde grec et le monde itali-
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que. Les formes commerciales, politiques, et religieuses, médiatrices des contacts revêtaient une relative souplesse qui avait contribué à créer une sorte de koinè. Au Ve siècle cette koinè et les modes de son expression ne sont-ils pas aussi en question, ou du moins ne sont-ils pas à poser en des termes nouveaux? En effet entrent en ligne de compte non seulement l'évolution, également critique, des cités italiotes et de Sicile, non seulement la force d'impact de nouvelles réalités politiques et morales, comme la présence d'Athènes, mais encore les éléments nouveaux qui forment ou doivent former la polis, ou ce qui tient lieu de polis, dans le monde étrusque et italique. Les considérations que nous venons d'énoncer brièvement nous ont guidée dans l'élaboration du programme que vous avez sous les yeux. Je souhaite que nos débats soient fructueux et que cette crisis entraîne une lysis, une libération et une solution. À cet effet, un dernier sens du mot nous paraît important. Crisis c'est-à-dire discernement et sépara tion des éléments. De même l'unité de temps historique considérée, le Ve siècle, devrait nous aider à mieux concevoir le processus de la sépa ration des éléments contradictoires hérités de l'archaïsme et les diffi cultés qui ont précédé la création d'un autre état de choses. Françoise-Hélène Massa-Pairault
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II contributo che vorrei portare alla Tavola Rotonda, che ci vede qui riuniti grazie alla iniziativa degli amici francesi dell'École de Rome e del CNRS, concerne specificamente uno dei temi evocati nel pr ogramma : la città e il territorio. Beninteso nei limiti dell'Etruria meri dionale, che è l'Etruria che conosco meglio, soprattutto grazie agli anni in cui l'ho percorsa come archeologo della Soprintendenza di Villa Giul ia. Presumo che la scelta risulti opportuna nell'economia dell'incontro, stante anche la collocazione, imprevista, che il contributo si trova ad avere, quasi all'inizio dei nostri lavori. Città e territorio sono infatti due referenti di interesse generale, preliminari ad ogni altro tipo di inchie sta archeologica, e specialmente, direi, per il periodo e per i problemi che sono in discussione. Prima di entrare in argomento vorrei sottolineare un punto, sul quale credo possiamo tutti convenire. La crisi delle città etrusche, anche di quelle che ne sono state più acutamente toccate, cioè le città marittime del Meridione, data dal 460-450 in poi, dall'età di Cimone, potremmo dire, in termini di storia greca. La sua prima autentica manifestazione, sul piano politico-militare, non è la sconfitta navale di Cuma, che aveva visto ancora gli Etruschi nel ruolo attivo di aggressori e che sarà salutata dai Greci come una scampata minaccia di douleta, ma l'offensiva portata vent'anni dopo dai Siracusani nel medio Tirreno, dapprima scongiurata con i chrémata offerti ed accettati dal navarca Faillo, quindi culminata con l'occupazione temporanea dell'Elba nel 453 a.C. da parte di Apelle, che si è tentati di «leggere» come una rispo-
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sta all'espugnazione etrusca di Lipari avvenuta al tempo di Gelone1. È dagli anni intorno alla metà del secolo che crolla il flusso delle import azioni di ceramica attica, le produzioni artigianali ristagnano, l'edilizia pubblica praticamente si arresta, l'architettura e la pittura funeraria si irrigidiscono in moduli ripetitivi2. Quando gli Etruschi torneranno all'offensiva, nel 414-413, lo faranno sotto lo scudo di Atene e con forze esigue, dimostrando di non essere più una vera potenza navale. Credo che anche siamo tutti convinti che le circostanze esterne, la congiuntura internazionale, sulla quale si è un po' troppo insistito in passato, non siano sufficienti a motivare una crisi così vasta e coinvol gente.La perdita della talassocrazia nel Tirreno è stato indubbiamente un fattore scatenante, che ha pesato notevolmente sul versante dell'emporia e degli scambi. Non così la perdita della Campania, avvenuta quando la crisi era già in atto, né quella del Lazio, che riguarda solo una sfera d'influenza, non essendo mai stata la regione sotto il dominio etrusco3. Nulla infine autorizza a pensare che gli Etruschi abbiano avuto a soffrire, come i Latini e i Greci dell'Italia meridionale, per una accesa conflittualità con i loro vicini indigeni, Umbri e Sabini. I conflitt i con gli Umbri ricordati da Strabone e da Plinio il Vecchio sono infatti proiettati in un passato mitistorico, al tempo delle origini ο comunque della più antica espansione nella Valle Padana4. Prova ne sia che pro prio le città gravitanti sul Tevere e sulle altre vie interne della penisola, come Veio, Falerii, Volsinii e Chiusi, sono quelle che meno accusano i segni della recessione, specie sul piano artistico. Al contrario gli Umbri sembrano offrire ad esse nuove possibilità di espansione, almeno comm erciale, come mostra il caso di Todi5. Non direi che, per gli Etruschi dell'Etruria propria, gli Italici abbiano costituito un problema. 1 G. Colonna, in L'Etruria mineraria (Atti del XII convegno di studi etruschi e italici, Firenze-Populonia-Piombino 1979), Firenze, 1981, p. 446 sg. ; Id., Apollon, les Étrusques et Lipara, in MEFRA, 96, 1984, p. 557-578. 2 Per le importazioni attiche da ultimo M. Rendeli, in MEFRA, 101, 1989, p. 545579. 3 Sull'argomento si veda Etruria e Lazio arcaico (Quaderni del Centro di studio per l'archeologia etrusco-italica, n. 15), Roma, 1987, in particolare i contributi di chi scrive e di C. Ampolo, p. 55-93. 4 Ho riconsiderato da ultimo il problema nel convegno Gli Etruschi a nord del Po, Mantova 1986, i cui atti sono in stampa (Mantova, 1989, p. 12 sg.). 5 Contributi di vari autori, tra i quali si segnala quello di M. Torelli, in Verso un museo della città, mostra degli interventi sul patrimonio archeologico, storico, artistico di Todi, Todi, 1982, p. 49 sg.
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Accanto alla crisi della talassocrazia - che è crisi della identità e del ruolo mediterraneo degli Etruschi, in nome del quale erano stati fondati a Delfi i thesauroi di Agylla e di Spina e dedicato, secondo la mia opinione, il cippo dei Tirreni - occorre tenere conto di molti altri fattori. Vi è indubbiamente una crisi nei comportamenti sociali delle vecchie aristocrazie, che procede di pari passo col consolidarsi delle strutture urbane e porta in primo piano tendenze alla limitazione del lusso e dei consumi, ben documentate nel Lazio in campo funerario già dalla prima metà del VI secolo e poi ribadite nel V con le XII Tavole6. Ma nel contesto della più vasta crisi dei valori «arcaici» esaltati in spe cie dal mondo ionico e con esso messi in crisi dalle guerre persiane, anche le aristocrazie etrusche accennano a porsi una 'questione moral e', che va nel senso di una revisione e regolamentazione dei propri consumi, che tante attività produttive avevano alimentato7. Sul piano ideologico molti indizi convergono, a cominciare dall'apparizione nella pittura funeraria tarquiniese di demoni alati e di scene di viaggio, nell 'additare il progresso di una concezione ellenizzante dell'oltretom ba, ο almeno una ripresa di concetti come il soggiorno dei morti nelle isole dei Beati, implicanti in linea di principio una perdita di significato dei corredi deposti nelle tombe (con tutte le conseguenze che il fatto comporta sulla loro utilizzazione da parte nostra come indicatori ar cheologici)8. Sul piano politico la tendenza a rimuovere l'esibizione della ricchezza, relegandola piuttosto nella sfera del sacro, con fenomen i di accumulazione come quello noto per il santuario di Pyrgi9, è sta tainterpretata come un segno della trasformazione in senso oligarchi co dei ceti dirigenti delle città meridionali, sulla base di quanto è stato
6 G. Colonna, in Par. Pass., XXXII, 1977, p. 131-165; Id., in Italia omnium terrarum alumna, Milano, 1988, p. 492 sg.; C. Ampolo, in AION arch., VI, 1984, p. 71-102. L'assai maggiore intensità del fenomeno nel Lazio rispetto all'Etruria, Veio esclusa, non discen de ovviamente da ragioni etniche (come fraintende M. Torelli, in Storia di Roma, I, Tori no,1988, p. 255 sg.), ma politiche e culturali. 7 Rinvio al mio contributo in Archeologia laziale, IV, Roma, 1981, p. 229-232, e a quelli di G. Nenci e di M. Lombardo, in Forme di contatto e processi di trasformazione nelle società antiche, Pisa-Roma, 1983, p. 1019-1031, 1077-1103. 8 Cfr. I. Krauskopf, Todesdämonen und Totengötter im vorhellenistischen Etrurien. Kontinuität und Wandel, Firenze, 1987. 9 Grazie al saccheggio da parte di Dionigi il Vecchio di Siracusa nel 384 a.C. Cfr. G. Colonna, in Die Göttin von Pyrgi, Firenze, 1981, p. 30 sg. ; F. Prayon, ibid., p. 49 sg. (fonti).
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sottolineato per Sparta da D. Musti 10. Si avrebbe quindi verso la metà del V secolo una involuzione interna, una sorta di 'serrata del patriziat o', che proseguirà, in forme temperate per noi assai meglio conoscibil i, nei due secoli successivi. Ad essa, alla sua manifestazione acuta di V secolo, sarebbe da imputare in larga misura l'immagine offuscata che l'archeologia restituisce della prosperità dell'Etruria in quel periodo. Credo sia proprio in questo ambito di problemi che lo studio del rap porto intercorso tra città e campagna nel periodo in questione possa recare qualche lume. L'esame non può essere condotto che su un arco temporale ampio, poiché il V secolo, preso isolatamente, non basta a dar conto di quel che in esso è accaduto. Occorre considerare sia il mezzo secolo che lo ha preceduto sia l'intero secolo, ο quasi, che lo ha seguito. Proprio in questi due periodi hanno infatti avuto luogo due processi storici di fon damentale rilevanza nella prospettiva che ci interessa, rispetto ai quali 11 V secolo appare come una fase di transizione, una «Interimsperio de», come è stato definito sul piano della storia dell'arte11. Comincia mo dal periodo più antico. Nella seconda metà del VI e agli inizi del V secolo si produce un fenomeno sul quale è stata portata l'attenzione solo dall'inizio degli anni '70, ma che è ormai da tutti riconosciuto : voglio dire l'abbandono, nei casi estremi, ο comunque l'impoverimento, la destrutturazione spesso a poco più che villaggi dei centri urbani minori, i centri di seconda categoria, gli oppida del territorio, potrem mo dire, ricorrendo alla terminologia latina12. Il fenomeno è generale, concerne tutti gli insediamenti che si erano sviluppati, assumendo talora dimensioni cospicue, nella «seconda fase», post-villanoviana, del popolamento dell'Etruria meridionale, a partire dalla seconda metà dell'VIII e specialmente dalla prima del VII secolo. I centri che entrano
10 M. Torelli, Storia degli Etruschi, Bari 1981, p. 184 sg.; Id., L'arte degli Etruschi, Bari, 1985, p. 123 sg.; Id., in Rasenna, storia e civiltà degli Etruschi, Milano, 1986, p. 61-67. Cfr. D. Musti, Economia greca, Roma-Bari, 1981, p. 80 sg. 11 T. Dohrn, Die etruskische Kunst im Zeitalter der griechischen Klassik. Die Interim speriode, Magonza, 1982. 12 Ne ho trattato in Aspetti e problemi dell'Etruria interna (atti dell'VIII convegno naz. di studi etruschi e italici, Orvieto, 1972), Firenze, 1974, p. 258-260; in La civiltà arcai ca di Vulci e la sua espansione (atti del X convegno naz. di studi etruschi e italici, Grosseto-Roselle-Vulci, 1975), Firenze, 1977, p. 206 sg.; in Contributi introduttivi allo studio della monetazione etrusca (atti del V convegno del Centro internaz. di studi numismatici, Napol i, 1975), Napoli, 1977, p. 15 sg. Cfr. Torelli, Storia degli Etruschi, cit. p. 186-188.
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in crisi sono situati soprattutto, ma non esclusivamente, nelle parti interne della regione e sul versante tiberino : da Trevignano, Ceri, Monterano, S. Giovenale, S. Giuliano, Blera a sud, a Tuscania, Castel d'Asso, Acquarossa, Bagnoregio, Bolsena, Bisenzio, Grotte di Castro, Castro, Poggio Buco, Pitigliano, Sovana, Saturnia, Magliano, Orbetello a nord, con una elencazione che è lungi dall'essere esaustiva13. Naturalmente i casi più sicuri, al di là della casualità delle scoperte archeologiche, sono quelli dove la documentazione, oltre che consistente, è anche incrociata, concernendo sia l'abitato che i sepolcreti. Direi che il caso ottimale è uno solo, Acquarossa, oggetto di una esplorazione intensiva dell'abitato da parte della Scuola Svedese, accompagnata da ripetuti interventi sulla necropoli14. Ma anche per Bisenzio, Poggio Buco, la Civita di Bolsena, Tuscania l'integrazione dei dati provenienti dalla necropoli con quelli, meno abbondanti, dall'abitato è tuttavia significat iva15. Il caso meglio documentato di una tenue sopravvivenza è quello
13 Manca uno studio d'insieme. Su Acquarossa e il territorio volsiniese : G. Colonna, in St. Etr., XLI, 1973, p. 50-63 (su Grotte di Castro ora P. Tamburini, m Annali della Fonda zione per il museo C. Faina, II, 1985, 182-206; su Bagnoregio: G. Colonna, in Doctor Seraphicus, XXV, 1978, p. 43-52). Sul territorio vulcente : M. Cristofani e G. Colonna, in La civiltà arcaica di Vulci, cit., p. 189-207 e 235-257; Gli Etnischi in Maremma (a cura di M. Cristofani), Milano, 1981, contributi di M. Cristofani, A. Maggiani e M. Michelucci ; A. Maggiani-E. Pellegrini, La media valle del Fiora dalla preistoria alla romanizzazione, Pitigliano, 1985. Per il territorio ceretano e tarquiniese : G. Colonna, in St. Etr., XXXV, 1967, p. 12-26 (Ceri : Id., in St. Etr., LII, 1984, p. 14 sg.). Per l'agro falisco : T. W. Potter, The Changing Landscape of South Etruria, Londra, 1979. Per le necropoli a facciate rupes trila datazione di alcuni tipi al V secolo (E. Colonna Di Paolo, Necropoli rupestri del Viterbese, Novara, 1978, p. 5 sg., ili. 6, 9) è da restringere alla prima metà, e forse solo ai decenni iniziali del secolo. 14 Gli scavatori tendono oggi a datare l'abbandono dell'abitato nel penultimo quarto del VI secolo (Architettura etrusco nel Viterbese, Roma, 1986, p. 32, nota 63; p. 133), ment rele ultime deposizioni nelle tombe, invero nel periferico settore del Talone, scendono verso il 500 a.C. (da ultima A. Emiliozzi, in Studi di antichità in onore di G. Maetzke, II, Roma, 1984, pp. 281-289). 15 Bisenzio: K. Raddatz, in Hamburger Beiträge zur Archäologie, V, 1975, p. 22; IX, 1982 (1983), p. 121; J. Driehaus, in Si. Str., LUI, 1985 (1987), p. 58 sg., 62. Poggio Buco : da ultimo E. Pellegrini, La necropoli di Poggio Buco, Firenze, 1989, in stampa. La Civita di Bolsena: da ultimo K. Raddatz, in Mitteilungen zur Ur- und Frügeschichte, 5, 1983, p. 119 sgg. Tuscania: da ultima A. M. Sgubini Moretti, in Archeologia nella Tuscia, II, Roma, 1986, p. 242.
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di S. Giovenale, oggetto, recentemente di uno specifico dibattito16. So pravvivenze più ο meno lunghe nel corso del V secolo sono attestate anche per i centri più lontani da Vulci, come Sovana e Saturnia17. Parallelamente sorgono, in quantità più esigua, centri a quanto pare di nuova fondazione ο revitalizzazione : come Bomarzo e Orte sul Tevere, Sorrina nel cuore del Viterbese, Doganella nella bassa valle dell'Albegna, Regisvilla sul mare, mentre beninteso si sviluppano i porti di Pyrgi e di Gravisca18. A fronte di questo fenomeno sta, nel corso del IV secolo, quello in larga misura simmetrico della rioccupazione ο della revitalizzazione di molti dei centri che erano stati abbandonati ο declassati nel tardo VI secolo : basti citare i casi ben noti di Tuscania e di Sovana 19. Natural mentenon mancano anche in questa età fondazioni ex nihilo ο quasi, come Ghiaccio Forte, Musarna e la stessa Norchia, ο spostamenti di sede, come Ferento rispetto ad Acquarossa20. Tra i centri minori fioriti nel VII-VI secolo e quelli fioriti nel IV-III secolo sussistono, nonostante la patente diversità della situazione stori16 San Giovenale, materiali e problemi, Stoccolma, 1984, in particolare p. 104-107. Per le esili tracce di V secolo : I. Pohl, in Par. Pass., XL, 1985, p. 43-63. Ead., in Architettu ra etrusca nel Viterbese, cit., p. 129 sg. 17 Per Sovana, che forse si sottrae in parte alla destrutturazione entrando nell'orbita di Chiusi, come sembra provare la tomba delle due statue cinerarie : A. Maggiani, in Maggiani-Pellegrini, op. cit. a nota 13, p. 83 sg.; Id., in St. Etr., LV, 1987-1988 (1989), in stam pa.Per Saturnia: M. Michelucci, in Gli Etruschi in Maremma, cit. a nota 13, p. 110-112 (continuità, ma «con una densità demografica nettamente inferiore dalla metà del V alla metà circa del IV secolo a.C. »). 18 M. P. Baglione, II territorio di Bomarzo, Roma, 1976, (per l'unica iscrizione arcaica cfr. G. Colonna, in Gli Etruschi e Roma, Roma, 1981, p. 169 sg.); G. Nardi, Le antichità di Orte, Roma, 1980 (per l'unica iscrizione arcaica cfr. G. Colonna, in Si. Etr., XLIX, 1981, p. 274, n. 43). Per Sorrina si attende la pubblicazione delle ricerche svolte dalla Pro Ferento. Doganella : M. Michelucci e L. Walker, in La romanizzazione dell'Etruria : il ter ritorio di Vulci, Milano, 1985, p. 110-115; G. Colonna, in Rasenna, cit. a nota 10, p. 462; M. Michelucci, in Si. Etr., LV, 1987-1988 (1989), in stampa. Regisvilla : G. Colonna, op. cit., p. 462 sg. C. Morselli-Ε. Torturici, in // commercio etrusco arcaico, Roma, 1985, p. 27-40. 19 Rinvio alla relazione in Aspetti e problemi dell'Etruria interna, cit. a nota 12. Per Sovana : A. Maggiani, in La romanizzazione dell'Etruria, cit., p. 84-87, con bibl. 20 Ghiaccio Forte: P. Rendini, ibid., p. 131 sg.; G. Colonna, in Rasenna, cit., p. 499. Musarna: G. Barbieri-Η. Broise-V. Jolivet, in BA, 29, 1985, p. 29-38; H. Broise-V. Jolivet, in Si. Etr., LIV, 1986 (1988), p. 365 sg. Norchia : E. Colonna Di Paolo - G. Colonna, Norchia, I, Roma, 1978. Sulla data della nascita di Ferento : A. Emiliozzi, in Archeologia nella Tuscia, I, Roma, 1982, p. 44.
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ca, indubbie analogie strutturali. L'incombere del dominio aristocratico sui primi è provato dalle tombe monumentali, note per esempio a S. Giuliano, Blera, Tuscania, Castro21, e ancor meglio dai «palazzi», messi in luce nell'abitato, come ad Acquarossa e a Poggio Buco22, ο solo indiziati dal ritrovamento di terrecotte architettoniche, come nel caso di Tuscania e di Castel d'Asso23. Non può esservi dubbio che ques ticentri siano stati altrettante sedi di potere locale, monopolizzato da gruppi gentilizi che possedevano la terra e controllavano, spesso da posizioni strategicamente forti, le vie di comunicazione, traendone so stanziosi vantaggi. La crescita demografica di alcuni di essi, situati in posizioni particolarmente favorevoli, come Tuscania, Blera, Acquaross a, Bisenzio, ecc, portò allo sviluppo di attività artigianali e probabil mente alla formazione di un ceto «medio», che non si può non pensare interessato alla gestione della terra, in un sistema pur sempre rotante intorno alle famiglie dei domini. È a questo ceto che vanno riferite le tombe a camera con corredi di contenuta ricchezza e la maggioranza delle stesse tombe rupestri a dado, così tipiche della regione, spesso inserite in tentativi di pianificazione urbanistica che ricordano i noti precedenti ceriti e volsiniesi24. Considerazioni in tutto analoghe sono suggerite dagli oppida di IV-III secolo, a giudicare dall'emergenza di tombe monumentali di grande spicco, come a Norchia le tombe a temp io, Lattanzi e Smurina, a Castel d'Asso la tomba Grande, a Musarna le tombe Alethna, a Tuscania le Curuna, a Sovana le tombe della Sirena, Ildebranda e Grotta Pola, ecc, attorno alle quali si addensa un fitto tes-
21 Basti citare a S. Giuliano il tumulo Cima (da ultimo R. Romanelli, Necropoli dell'Etruria rupestre : architettura, Viterbo, 1986, p. 24-27), presso Blera il tumulo di Grott a Porcina (S. Quilici Gigli, Blera, Magonza, 1976, p. 238 sg.; R. Romanelli, op. cit., p. 29 sgg.) ; a Tuscania le tombe a forma di casa (A. M. Sgubini Moretti, in Architettura etrusca nel Viterbese, cit. a nota 14, p. 137-144), a Castro la tomba con monumentale terrazzaaltare (Ead., ibid. ; G. Colonna, in Rasenna, cit., p. 448 sg. : circa l'interpretazione è del tutto fuori strada M. Martelli, in Un artista etrusco e il suo mondo : il pittore di Micali, Roma, 1988, p. 27, nota 10). 22 M. Strandberg Olofsson, in Architettura etrusca nel Viterbese, cit., p. 81 sg. ; E. Pellegrini, op. cit. a nota 15. 23 E. Colonna Di Paolo-G. Colonna, Castel d'Asso, Roma, 1970, p. 53 sg., tav. 451, 2; A. M. Sgubini Moretti e L. Ricciardi, in Archeologia nella Tuscia, Roma, 1982, p. 133-148. 24 G. Colonna, in St. Etr. XXXV, 1967, p. 24. Per Orvieto : Id., in Annali della fonda zione per il museo C. Faina, II, 1985, ρ 101, sg., fig. 1.
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suto connettivo di tombe di medio e mediocre livello25. Né mancano negli abitati esperimenti di urbanistica regolare, come prova il caso di Musarna indagato dalla Scuola Francese26. Sembra pertanto lecito pensare che entrambe le fasi di vita dei centri urbani minori dell'Etruria meridionale, l'arcaica e Γ« ellenistica», rispecchino sostanzialmente il medesimo modo di produzione, basato sulla polarità domini - servi, ben nota dalle fonti letterarie classiche, ma presto temperata in entrambi i periodi dalla formazione di frange sociali intermedie, numericamente consistenti, viventi all'ombra dei do mini. Naturalmente la tendenza è più pronunciata nel IV secolo, ma non tale da far pensare ad un vero superamento del modo di produzio ne arcaico : basti pensare alla testimonianza, praticamente contempor anea, della profezia di Vegoia, la cui pertinenza ad ambito volsiniese è a mio avviso suffragata dal nome del destinatario, latinizzato in Arruns Velthymnus27 : non che, ovviamente, ai notissimi eventi che portarono alla rovina di Volsinii. Il popolamento per oppida del territorio sembra in conclusione essere stato la forma con la quale si manifesta, sul piano delle strategie insediative, il modo di produzione fondato sulla grande e media proprietà e sul lavoro dei servi. Veniamo ora a prendere in esame il periodo intermedio tra le due fasi di fioritura dei centri minori urbanizzati, periodo che comprende per intero il V secolo, che è al centro del nostro interesse, ma abbraccia anche il tardo VI e la prima metà del IV secolo. Qui i fatti sono assai meno chiari e il discorso deve necessariamente farsi più sfumato. Si è parlato per i decenni iniziali di uno spopolamento delle campagne, per lo più considerato nell'ottica di un processo di inurbamento, quasi che le città solo allora, alla fine del VI secolo, avessero acquistato un suffi ciente potere di attrazione e, di conseguenza, una reale consistenza demografica28. Di fatto, fra tutte le città dell'Etruria meridionale, Falerii compresa, solo per Tarquinia vi è traccia di un ampliamento dell'area urbana in quest'epoca, se veramente ad essa risale l'annessio ne delle alture su cui si trova l'Ara della Regina : ma per ora l'unico 25 Cfr. J. P. Oleson, The Sources of Innovation in Later Etruscan Tomb Design (ca. 350-100 B.C.), Roma, 1982, passim. 26 V. nota 20. 27 G. Colonna, in Annali della fondazione, cit. a nota 24, p. 112 sg. 28 È la tesi sostenuta da M. Cristofani (per es. in Prospettiva, 1, 1975, p. 15 sg., a proposito di Murlo; in La civiltà arcaica di Vulci, cit. a nota 12, p. 256 sg. ; in Gli Etruschi in Maremma, cit. a nota 13, p. 38).
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dato certo è la cronologia post-villanoviana dell'ampliamento29. Lo spopolamento delle campagne si rivela d'altra parte in larga misura illusorio. Laddove sono state condotte sistematiche perlustrazioni del terreno, come nell'agro veiente e falisco, e recentemente presso Tuscania e nell'agro vulcente30, si è visto, per quanto mi è noto, che proprio in questa età, nella seconda metà del VI e nel V secolo, i siti rurali cre29 Così mi esprimevo nella relazione letta al convegno, tenendo conto della lettura dello sviluppo urbanistico di Tarquinia avanzata da M. Torelli, in Miscellanea archaeologica T. Dohrn dedicata, Roma, 1982, p. 123, e della notizia di tombe villanoviane presso l'Ara della Regina (F. Buranelli, La necropoli villanoviana «Le Rose» di Tarquinia, Roma, 1983, p. 122, n. 20). Ma una volta accertata la modernità del preteso muro sbarrante alla radice il pian di Civita (P. Pelagatti, in Tarquinia : ricerche, scavi e prospettive, Roma, 1987, p. 34, tav. II, 2-3), cade ogni ragione cogente a favore dell'ampliamento, potendo le tombe citate coesistere con il nucleo abitativo dell'epoca indiziato nella stessa zona dell'Ara della Regina (Buranelli, ibid., p. 118, η. 1). Tutta la questione dello sviluppo di Tarquinia andrebbe del resto riconsiderata. Non vi è dubbio infatti che la necropoli «ge nerale » villanoviana, per riprendere il termine usato da Torelli per l'età arcaica sia quella estesa a ventaglio sui poggi a E della città storica, da Poggio Selciatello a Poggio Quarto degli Archi. Tale collocazione richiede che il nucleo primario dell'insediamento sia il vasto pian della Regina, contiguo alla Castellina (già sede di un villaggio protovillanovia no : F. Di Gennaro, in Etruria meridionale : conoscenza, conservazione, fruizione, Roma, 1988, p. 79, nota 27), e non il periferico pian di Civita (servito peraltro dal sepolcreto della Civitucola). Se mai è esistito un aggere nella strozzatura tra le due aree, esso avrà isolato, all'interno dell'abitato villanoviano, la parte cui era demandata la funzione di arx, analogamente a quanto supposto per la Castellina di Vulci (M. Guaitoli, in La romanizza zione dell' Etruria, cit. a nota 18, p. 58). 30 Per l'agro veiente e falisco si dispone delle ricerche della Scuola Britannica di Roma coordinate da J. B. Ward Perkins, delle quali offre una utile sintesi il lavoro di T. W. Potter citato a nota 13. Purtroppo i «tagli» prescelti nella organizzazione statistica dei dati e nelle carte di distribuzione, isolando da un lato il VII-VI e dall'altro il V-IV secolo (Potter, op. cit., p. 85-90, fig. 21, tab. 2 e p. 101 sg., fig. 25, tab. 3), non consentono una rappresentazione efficace del fenomeno (migliore al riguardo il campione settoriale di J. B. Ward Perkins - Α. Καηανε - L. Murray-Threipland, in PBSR, XXXVI, 1968, p. 70, fig. 7, con la distinzione « later etruscan (6th-5th centuries B.C) » e « republican roman » : i siti così distinti assommano a 28 per il primo periodo e 33 per il secondo, che abbraccia il ben più incisivo processo della colonizzazione romana). Cfr. anche M. Torelli, Storta degli Etruschi, cit. a nota 10, p. 114 e 186; P. Liverani, in PBSR, LII, 1984, p. 38 sg. Sul «progetto» Tuscania vedi per ora G. Barker, in L'alimentazione nel mondo antico: gli Etruschi, Roma, 1987, p. 20-22; G. Barker-T. Rasmussen, in PBSR, LVI, 1988, p. 25-42. I dati attualmente più eloquenti sono quelli ottenuti nell'agro vulcente nord-orientale, gravitante su Castro: M. Rendeli, in BAR, 243, 1985, p. 261 sg.; in Atti del II congresso internazionale etrusco, Firenze, 1985, in stampa; in Etruria meridionale, cit. a nota 29, p. 103 sg., fig. 2. Rispetto ai sette siti preesistenti ne sono registrati trentaquattro per il tardo VI e il V secolo.
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scono di numero. I dati della ricognizione di superficie trovano confer ma nei pochi riscontri di scavo finora disponibili : la « fattoria » di Casal e Pian Roseto nell'agro veiente vive dalla fine del VI ai primi decenni del IV secolo ed è la fattoria di un «cittadino», a giudicare dal nome graffito su una ciotola di bucchero, Laris Pataras31. Lo stesso arco di vita hanno la «fattoria» in località Girella nell'agro volsiniese e quella in corso di scavo in località Pianello di Castiglione in Teverina32. Ugual e cronologia è stata del resto assegnata dal Ward Perkins alle vaste opere di bonifica idraulica della campagna mediante cuniculi e pozzi, non che alla rete stradale minore dell'agro veiente33. Completa coerentemente il quadro l'apparizione dei piccoli santuari di campagna, tipi ca, specie dove meno è atomizzato il popolamento, di quest'epoca, dal Sasso di Furbara al Procoio di Ceri, da Punta della Vipera a Grotta Por cina, da Monte Becco al Ghiaccio Forte34. In considerazione di tutto questo già da tempo ho creduto opportu no introdurre nella discussione il concetto di una «colonizzazione inter na», coeva e in certa misura omologa a quella che portò nuove ondate di etruschi dal 525 circa nella Campania interna e nella Valle Padana. Colonizzazione interna che non si appoggiò se non eccezionalmente, in casi come quello di Doganella nella valle dell'Albegna35, a centri urbani di nuova fondazione, e nemmeno a centri preesistenti ristrutturati. Il modello dell'insediamento sembra al contrario essere stato quello delle assegnazioni individuali, vintane, applicato da Roma nella sua prima annessione di territorio etrusco, quella dell'agro già appartenuto ai Veienti : con assegnazioni prima alla plebe cittadina e poi a transfughi veienti, capenati e falisci gratificati nel contempo della cittadinanza, in 31 L. Murray Threipland - M. Torelli, in PBSR, XXXVIII, 1978, p. 62-121. 32 M. Cagiano de Azevedo, in NSc, 1974, p. 21 sg. ; G. Colonna, in Doctor Seraphicus, cit. a nota 13, p. 51. Per Castiglione in Teverina : V. D'Atri, in Si. Etr., LIV, 1986, p. 352 sgg. Alla stessa età dovrebbe risalire la fattoria di Podere Tartuchino nella valle dell'Albe gna : G. Barker, art. cit., p. 27 sg., mentre di VI secolo è giudicata quella in corso di scavo in località Macchia di Freddara (Allumiere) a cura di G. Gazzetti e A. Ziffero (che ringra zio per l'informazione). 33 T. W. Potter, op. cit. a nota 13, p. 95-101; S. Quilici Gigli, in L'alimentazione nel mondo antico, cit. a nota 30, p. 33-36. 34 G. Colonna, in Santuari d'Etruria, Milano, 1985, p. 149, con esemplificazione a cura di vari autori (p. 149-159). Cfr. anche I. E. Edlund, The Gods and the Place. The Loca tion and Function of Sanctuaries in the Countryside of Etruria and Magna Graecia (700400 B.C.), Stoccolma, 1987, con documentazione assai parziale per l'area in esame. 35 Cfr. nota 18.
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numero tale da consentire la creazione di quattro nuove tribù rustiche36. Colonie, ossia insediamenti urbani, Roma non ne stabilì che a Sutri e a Nepi, ai margini settentrionali del territorio annesso, in fun zione manifestamente di fortezze di confine, a ridosso dell'Etruria rimasta libera e dei Falisci37. Una funzione analoga, su scala di gran lunga minore, sembra avere avuto, nei confronti del territorio coloniz zato da Vulci alla fine del VI secolo, il «campo fortificato» di Rofalco, a ridosso della Selva del Lamone38, e in un certo senso anche Regisvilla nei confronti di quell'altra frontiera che è il mare, specie se l'aggere visto con la fotografia aerea è coevo all'abitato39. Né diversa sembra essere la motivazione di centri quali Orte e Bomarzo, al margine meri dionale del territorio volsiniese40. La supposta colonizzazione tardo-arcaica non potè ovviamente at tuarsi se non a spese dei centri urbani minori, rimasti fino allora di fatto indipendenti, centri che furono, come si è detto, distrutti ο più ο meno drasticamente ridimensionati. La posta in gioco fu probabilment e, prima ancora che il controllo delle vie di comunicazione, l'acquisi zione di nuove terre, da lasciare in comune ο da dividere tra i cittadini. Tutto lascia ritenere che l'ampliamento del territorio e la ristrutturazio ne della campagna siano stati voluti e perseguiti dai ceti urbani in asce sa,dal demos anelante al possesso della terra come lo sarà la plebe a Roma, ceti la cui espressione politica sembrano essere stati prima «condottieri» come i fratelli Vibenna e poi figure «tiranniche» come Porsenna ο Thefarie Velianas. È questa l'età in cui non solo si da un assetto totalmente nuovo al santuario portuale di Pyrgi ma si pone mano a una radicale ristrutturazione urbanistica del centro geometrico e politico della città di Caere, con l'impianto di imponenti edifici pubb lici, sia sacri che civili, al posto di sontuose dimore e sacelli che ven-
36 Per la prima assegnazione : Liv. V, 30, 8; Diod. XIV, 102, 4. Per la seconda : Liv. VI, 4, 4; 5, 8. Cfr. W.V.Harris, Rome in Etruria and Umbria, Oxford, 1971, p. 41 sg.; T. W. Potter, op. cit., p. 108 sg. 37 Funzione già avuta con ogni probabilità nel precedente assetto territoriale. Cfr. C. Morselli, Sutrium (Forma Italiae), Firenze, 1980, ed il mio cenno in La civiltà dei Fali sci (atti del XV convegno di studi etruschi e italici, Civita Castellana, 1987), Firenze, in stampa. 38 M. Rendeli, in La romanizzazione dell'Etruria, cit. a nota 18, p. 60 sg., fig. 42, e i lavori dello stesso a nota 30. 39 Cfr. bibl. a nota 18. 40 Cfr. bibl. ibid.
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gono demolite41. Ed è anche l'età in cui, mentre l'alfabetizzazione si diffonde, come mostrano i graffiti vascolari, irrompono nell'etrusco scritto tratti fonetici «volgari», come la neutralizzazione e poi la sinco pe delle vocali brevi post-toniche, che toccano la loro acme nella prima metà del V secolo42. La crisi della grande proprietà gentilizia sembra indirettamente indiziata dal tracollo della esportazione marittima di vino, da Caere e soprattutto da Vulci, che lo studio delle anfore rinve nute in Gallia consente oggi di porre tra il 525 e il 500 a.C, quando il trend delle importazioni greche nelle stesse città non mostra alcun segno di declino43. È nel quadro storico così abbozzato che conviene ricercare le ragioni interne all'Etruria della recessione della seconda metà del V secolo. Purtroppo i dati oggi disponibili sull'organizzazione e lo sfrutt amento della chora, discendendo come sono quasi esclusivamente da ricerche di superficie, non consentono di apprezzare come si vorrebbe la diacronia degli insediamenti rurali, entro l'arco del V secolo. A posteriori però sappiamo che il supposto processo redistributivo, avvia to nel tardo VI secolo, non ha avuto il tempo e la forza per consolidars i, a parte il caso di Veio, che forse anche per questo è sempre più un'eccezione, destinata ad un tragico isolamento nel contesto etrusco. Altrove affiorano qua e là i segni di un rovesciamento della situazione, che preludono al ritorno nelle campagne delle forme tradizionali di sfruttamento. Nella parte meridionale dell'agro volsiniese, presso Grott e S. Stefano, troviamo già all'inizio di questo oscuro periodo una isola ta tomba aristocratica a quattro camere disposte in croce, con «atrio» 41 Come risulta dagli scavi condotti negli ultimi anni, sui quali informa M. Cristofani, in BA, 35-36, 1986, p. 1 sg., in particolare 11 sg. 42 Sul fenomeno da ultimo H. Rix, in Gli Etruschi : una nuova immagine (a cura di M. Cristofani), Firenze, 1984, p. 216 sg., par. 10-12. Secondo questo studioso la sincope agirebbe solo tra il 500 e il 450 (o, più precisamente, tra il 480 e il 460 : cfr. in L'etrusco e le lingue dell'Italia antica, Pisa, 1985, p. 34), sicché gli imprestiti successivi a tale data non ne sarebbero toccati (in Schriften des Deutschen Archäologen-Verbandes, V, 1981, p. 104 sg.). La possibilità di qualificare come tratto «volgare» la sincope vocalica risiede nel fat toche, come è ben noto, essa è certamente in relazione con analoghe tendenze variament e presenti nelle lingue italiche confinanti, dal latino al sabino e all'umbro; lingue perti nenti ad ambiti socio-culturali relativamente meno evoluti dell'etrusco. 43 B. Bouloumié, L'épave étrusque d'Antibes et le commerce en Méditerranée occident ale au VIe siècle av. J.-C, Marburg, 1982, p. 65 sg., con le precisazioni importanti, ma che non toccano la sostanza, di M. Py, in // commercio etrusco arcaico, cit. a nota 18, p. 87 sg.
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affrescato secondo i modi della pittura tarquiniese44. A Blera e presso Vetralla tombe isolate a facciata, con camera più sobriamente dipinta col solo motivo del kyma a onde, segnalano presenze gentilizie già pro babilmente verso la fine del V secolo, né molto più recente è la tomba dipinta di Bomarzo col sarcofago di Vel Urinates45. Il ricostituirsi di estese proprietà fondiarie è forse intuibile anche attraverso le frumentazioni romane, che attingono nel V secolo con crescente frequenza al surplus cerealicolo etrusco. Delle quattro frumentazioni in cui l'Etruria è coinvolta, tre sono della seconda metà del secolo (440, 433 e 411 a.C.) e concernono con ogni probabilità l'agro volsiniese46. Particolarmente notevole appare quella del 440, in cui il grano etrusco è ottenuto dal magnate Sp. Melio grazie alle sue relazioni personali, verosimilmente con aristocratici del genere del proprietario della tomba dipinta di Grotte S. Stefano. Tutto questo è certamente assai poco, ma lascia intravedere la ten denza verso la riconversione delle campagne al modo di produzione tradizionale, che restituisce ai principes il primato economico e politico forse in precedenza rimesso in discussione. Con eccezioni e sussulti, certo. A Veio nel 437 a.C. incontriamo un re dal nome illustre e dai connotati tirannici, Lars Tolumnius, che, secondo la tradizione riporta ta da Livio, avrebbe involontariamente decretato la morte degli ambas ciatori romani inviati a Fidene per un equivoco insorto nel gioco dei dadi cui era intento47. E sappiamo che nuovamente nel 403 i Veienti si
44 Catalogo ragionato della pittura etrusca (a cura di S. Steingräber), Milano, 1985, p. 283, n. 29 : R. Romanelli, op. cit. a nota 21, p. 56, fig. 38. Una datazione relativamente tarda, ossia posteriore alla metà del secolo, sembra richiesta dal soffitto displuviato con travatura in rilievo e soprattutto dal kyma a onde su un altissimo zoccolo a scacchiera policroma. 45 Blera : Catalogo ragionato, cit., p. 265, η. 1 ; E. P. Markussen, in Analecta Romana Instituti Donici, XIV, 1985, p. 17-36, p. 45 sg., fig. 28. Agro di Vetralla: S. Quilici Gigli, op. cit., a nota 21, p. 50-52, fig. 50-53. Bomarzo : Catalogo ragionato, cit., p. 265, n. 2 (man ca uno studio aggiornato del sarcofago, che comunque non è posteriore alla metà del IV secolo). A Tarquinia non a caso una delle tombe più «ricche» di fine V-primi decenni del IV secolo (M. Cristofani-M. Martelli, L'oro degli Etruschi, Novara, 1983, p. 208 sg., 306) si trovava nel periferico sepolcreto di Poggio del Cavalluccio, attraversato dalle vie che conducevano verso i centri dell'interno. 46 Rinvio alla mia trattazione in Annali per la fondazione del Museo C. Faina, II, 1985, p. 107-109. 47 Liv. IV, 17, 3. Per la questione della data (che potrebbe scendere al 428 ο al 426) : F. Cassola, in Riv. Storica Italiana, LXXXII, 1970, p. 5 sg.
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diedero un re, taedio annuae ambitionis, un re che le ricchezze e la superbia resero odioso alle altre città etrusche (meglio : agli oligarchi che governavano le altre città etrusche)48. Non a caso l'agro veiente è quello, come si è già ripetutamente accennato, in cui più capillare è stata l'occupazione della campagna e forse più tenace la conservazione della proprietà frazionata. Non porrei sul medesimo piano il caso di Caere, dove pure è attestato un re verso la metà ο poco prima del IV secolo da uno degli elogia di Tarquinia, secondo la convincente interpretazione di Torelli49. Anche in questo caso si tratta probabilmente di una temporanea restaurazione, poiché il sarcofago dello zilath Venel Tamsnie, recentemente scoperto, sembra anteriore, suppure di poco50. Ma già nel tardo V secolo non mancano tombe dall'austero carattere gentilizio, come quella delle Onde Marine e quella del sarcofago scolpi to conservato al Vaticano, che offre la prima raffigurazione di un tema destinato a grande fortuna nella città oligarchica : la pompa magistratuale51. Né si può trascurare l'enorme tesaurizzazione accumulata presso il santuario di Pyrgi nel corso del V secolo, come provano le monete greche rinvenute52, ο il cenno di Licofrone ad Agylla ricca di greggi, che presuppone una notevole estensione di terre lasciate a pascolo (probabilmente sui monti della Tolfa)53. Ma è indubbio che il primato nella direzione dell'affermazione oligarchica spetti a Tarquin ia, unica tra le città dell'Etruria meridionale in cui erano mancate anche nell'età tardo-arcaica importanti fondazioni templari e altre ope repubbliche di rilievo, in patente contrasto con la disordinata moltitu: dine di tombe a camera, spesso con qualche decorazione dipinta, ost inatamente segnalate da piccoli tumuli invece che da strutture a dado come altrove54. Una grande edilizia pubblica si ha a Tarquinia solo nel 48 Liv. V, 1,3-8: 5, 10. Cfr. M. Torelli, Elogia Tarquiniensia, Firenze, 1975, p. 73. 49 Op. cit., p. 70 sg. 50 G. Proietti, in St. Etr., LI, 1983 (1985), p. 557 sg. La cronologia va ristudiata tenendo conto dell'analisi delle tombe «del Comune» da me condotta in St. Etr., XLI, 1973, p. 335-337. La occorrenza del prenome Venel è un tratto fortemente conservatore, che bene si attaglia a un rappresentante dell'oligarchia del tempo. 51 Catalogo ragionato, cit., p. 268, η. 8, tav. 188; G. Colonna, in Rasenna, cit. a nota 10, p. 494, fig. 354. Per il sarcofago con pompa: F. Roncalli, in Rend. Pont. Acc, 51-52, 1977-1978, p. 3 sg.; Id., in Rasenna, cit., p. 662. 52 Cfr. nota 9. 53 Lycophr. Alex. 1241. 54 Sui tumuli, costruiti anche sulle tombe di pieno V secolo : R. E. Linington, in St. Etr., XLVI, 1978, p. 4-10; Id., in MEFRA, 92, 1980, p. 625 sg. Sulle tombe dipinte «mino-
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IV secolo, con le mura e il tempio dell'Ara della Regina55, quando il ceto dirigente locale imboccherà un nuovo corso, calandosi nel politico e assumendosi la gestione dello stato. Visti in questa prospettiva anche gli oppida della campagna, rifondati in funzione di un migliore sfrutt amento del lavoro dei servi da parte dei domini, finiscono con l'assume re una dimensione diversa, recuperando la funzione «coloniale» di occupazione strategica del territorio, messa in evidenza dalle fortifica zioni di cui si cingono. Non mi nascondo che quanto detto è segnato, più di quanto non si verifichi normalmente nelle nostre ricerche, dalla marca della provvi sorietà, fondato com'è su dati quantitativamente esigui e non sempre perspicui, che solo un più intenso impegno dell'archeologia militante nello scavo dei siti rurali potrà realmente migliorare. Ma credo che, nell'insieme, l'ipotesi di una involuzione oligarchica alla metà del V secolo, da altri avanzata, esca irrobustita dall'analisi condotta e acquisti anzi una maggiore plausibilità storica, come reazione a spinte «democratiche» verso il possesso della terra, che sembrano avere agitato le città etrusco-meridionali in età tardo-arcaica, mettendo in crisi il modo di produzione sul quale era fondato il potere dei principes. Mi auguro che tutto questo serva almeno ad avviare una proficua discussione. Giovanni Colonna
ri» : L. Cavagnaro Vanoni, in Tarquinia : ricerche, scavi e prospettive, cit. a nota 29, p. 243253. 55 G. Colonna, in Santuari d'Etruria, cit., p. 70-73. Ben poco aggiunge M. Y. Gold berg, in RM, 92, 1985, p. 107-125.
ADRIANO MAGGIANI
LA SITUAZIONE ARCHEOLOGICA DELL'ETRURIA SETTENTRIONALE NEL V SEC. A.C.
Anche per l'Etruria settentrionale, pur così diversificata al suo interno per strutture economiche, modelli di sviluppo, organizzazione sociale, il V secolo rappresenta un'epoca di grandi trasformazioni; e la diffusa convinzione che le città dell'Etruria settentrionale interna pre sentino un maggior equilibrio tra città e campagna rispetto a quelle dell'Etruria meridionale sembra definire piuttosto l'assetto territoriale che si viene a creare al termine del periodo di crisi, intorno alla metà del secolo1. Un primo approccio alla problematica offerta dal tema del conve gnopuò essere realizzato attraverso l'analisi della distribuzione della ceramica attica a figure rosse2. Nelle due carte che propongo ho rac colto, senza pretesa di completezza, i materiali relativi rispettivamente alla prima (fig. 1) e alla seconda metà del secolo (fig. 2). Ciò che appare abbastanza evidente, ferma restando la relativa attendibilità dei dati, basati quasi esclusivamente sulle provenienze certe 1 Ad es., M. Torelli, Storia degli Etruschi, Bari, 1981, p. 189. Un modello non molto dissimile è ipotizzato per la zona mineraria da M. Cristofani, in Etruria mineraria, Atti del XII Convegno di Studi Etruschi, Firenze, 1981, p. 441 (d'ora in avanti, Etruria minerar ia). 2 Scarsamente significativi i dati desumibili dallo spoglio del classico lavoro di J. D. Beazley. Per Chiusi, cfr. comunque il grafico redatto da J. Boardman, The Athenian Potte ry Trade, in Expedition, 21, 1979, p. 36, fig. 5 (rielaborati da M. Martelli, in Civiltà degli Etruschi, Firenze, 1985, p. 178 sg., fig. 14. Esemplare appare il caso di Volterra, sul quale ha già attratto l'attenzione M. Cristofani, in Ν SA 1973, Suppl., p. 78. Per i rinvenimenti della seconda metà del secolo, si vedano, per la regione che qui interessa, i dati raccolti da F. Curti, in Animino : scavo 1984. L'area della Paggeria medicea. Relazione preliminare , Firenze, 1987 (d'ora in avanti Animino, 1987) p. 78 sg. nota 7. Sui singoli siti, vedi più oltre.
ADRIANO MAGGIANI
24 ■ ISOLATO ▼ Da 2 α 5 BoltreS
Fig. 1 - Distribuzione della ceramica attica a figure rosse nell'Etruria settentrionale. Prima metà del V secolo a.C.
Fig. 2 - Distribuzione della ceramica attica a figure rosse nell'Etruria settentrionale. Seconda metà del V secolo a.C.
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o probabili del solo materiale edito (e dunque su una base documentale alquanto ridotta e incerta) è l'addensamento dei rinvenimenti attorno ai principali nuclei urbani nella prima metà del secolo, e un relativo trend diffusivo nella campagna nel corso della seconda metà (soprattutto ter zo quarto) in particolari territori, quali il Volterrano orientale, la Valdichiana, l'area a nord dell'Arno. Da questo quadro si ricava che dei centri maggiori uno solo risulta del tutto assente dalla rete di distribuzione del laceramica attica della seconda metà del V secolo, Vetulonia3. Il caso di Chiusi e del suo territorio si segnala come esemplare. Tra la saga di Porsenna e il dramma di Arrunte, aition della discesa celtica in Italia, si dovettero verificare notevoli trasformazioni economiche, politiche e sociali, che portarono da uno stato caratterizzato da forte concentrazione urbana e da una politica aggressiva ad un placido paese dalle terre fertili poco coltivate4. Il periodo compreso tra la fine del VI e i primi decenni del V secolo appare dominato, in campo artistico e nella sfera del rituale funerario, dalla produzione massiccia, massificat a si è detto, di cippi e urne in pietra fetida decorati a rilievo5; il diffu so benessere è sottolineato dalle forti importazioni di ceramiche attiche, cui si aggiungono le imitazioni etrusche, sia della tardissima tecni ca a figure nere, che di quella più recente a figure rosse sovradipinte ; si segnala in particolare il gran numero di prodotti dell'atelier vulcente di Praxias, che forse realizza in loco una succursale6, e che comunque indica un filone privilegiato di contatti con Vulci, confermato anche
3 I pezzi più recenti provenienti da Vetulonia sembrano quelli dal tumulo «del diavolino» e dall'area sacra di Costa murata, cfr. infra, nota 95. 4 Sulla questione, ad es. R. M. Ogilvie, Early Rome and the Latins, Glasgow, 1976, p. 151. Il fenomeno dello spopolamento delle campagne e dell'inurbamento delle gentes rurali è stato presupposto alla fine del VI secolo anche per altre località, cfr. M. Cristofani, in Aspetti e problemi dell'Etruria interna, Orvieto, 1971, p. 273, 277; M. Torelli, in DArch IV-V, 1971, p. 435 sg.; M. Cristofani, in Prospettiva, 1, 1975, p. 14 sg.; Id., in La civiltà di Vulci e la sua espansione, Firenze, 1977, p. 256 sg. 5 Sul problema, da ultimo, J.-R. Jannot, Les reliefs archaïques de Chiusi, Roma, 1984. 6 Sulla provenienza delle ceramiche attiche, ancora fondamentale R. Bianchi Bandinelli, Clusium, in MAL, XXX, 1925, passim. Sui rinvenimenti recenti, A. Rastrelli, in Le necropoli etrusche di Chianciano T., Siena, 1986, p. 84 sg., p. 138 sg. Sul gruppo Praxias, J. Beazley, EVP, p. 194, n. 38, 40, 42, 43; C. Laviosa, in BA, XLV, 1960, p. 309 sg., ha loca lizzato nella regione il luogo di produzione del ed. Gruppo Vagnonville. Sulla classe più di recente, J. Szilagyi, in Miscellanea C. Majewski oblata, in Archaeologia Polona, XIV, 1973, p. 95 sg. ; anche A. Rastrelli, art. cit., p. 94.
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dalla circolazione dei bronzi dell'apparato domestico e dal ridotto, ma sostanzioso, nucleo di specchi incisi, secondo un modello di percorso commerciale sperimentato da secoli7. La fase iniziale di questo periodo coincide sostanzialmente con l'apogeo dell'avventura di Porsenna, che segna da una parte la conclu sionedi un processo di coagulo intorno al centro di Chiusi delle princi pali basi della gestione del territorio e dall'altra una forte spinta espans ionistica lungo la valle del Tevere, di cui la tradizione romana delle origini della repubblica e la notizia pliniana di un Porsenna re di Orvie to sono le significative testimonianze storiche8. La recente statistica effettuata da Jean René Jannot sui rilievi chiusini ha evidenziato come, a fronte di tredici esemplari assegnabili alla fase 570-520/510 a.C. si scaglionino, tra il 520/510 e il 470/50 ben duecentocinquanta monum enti assegnati a circa 140 tombe, che consentono di ipotizzare un nucleo di circa settanta famiglie emergenti nel periodo considerato, corrispondente a due generazioni, cui bisogna aggiungere la decina di titolari di tombe dipinte, che verisimilmente rappresentavano il livello più alto della società9. Cifra di assoluto rilievo se rapportata al dato recentemente valorizzato per Tarquinia, che nello stesso periodo conta solo una decina di ipogei dipinti rispetto ai circa sessanta dei cinquant'anni precedenti (550-500 a.C.)10. La distribuzione, quando le pro-
7 Per gli specchi, cfr. il recente bilancio di P. Moscati, Ricerche matematico statist iche sugli specchi etruschi, Roma, 1984. Al V secolo possono atribuirsi i nn. V014, V 138, V 144 da Chiusi e V 097 da Città della Pieve. Alla medesima direttrice distributiva appar tengono d'altronde certo V 047 da Cortona e V 113 dalla Valdichiana. Un nucleo partico larmente consistente di specchi tardo arcaici è attestato a Perugia, dove giungono proba bilmente tramite l'importante via che si dipartiva da Orvieto. Forti legami tra Chiusi e Perugia sono d'altronde indiziati da opere quali il sarcofago dallo Sperandio (Jannot, op. cit., p. 42, fig. 155, p. 44, nota 3) che attesta la sicura presenza di maestranze chiusine nell'area. Meno certa appare l'alternativa chiusina (sostenuta da M. Cristofani, Statuecinerario chiusine di età classica, Firenze, 1975, p. 84, nota 4) rispetto a quella orvietana (avanzata da M. Torelli, Arie degli Etruschi, Bari, 1985, p. 145) per un'altra celebre opera della fine del secolo ο degli inizi del IV a.C, il «coperchio» bronzeo di Leningrado (A. J. Votschinina, Statua cinerario in bronzo di arte etrusco nelle collezioni dell'Ermitage, in SE, XXXIII, 1965, p. 318 sg.). 8 Sul problema, visto dal versante orvietano, cfr. G. Colonna, Cultura e società a Volsinii, in Annali della Fondazione per il museo Faina, II, 1985, p. 115 s. 9 Jannot, op. cit., p. 395 sg. Sulle pitture, Bianchi Bandinella op. cit.; J. Moretus, Peintures détruites de Chiusi, in Recherches d'archéologie et d'histoire de l'art, Lovanio; 1970, p. 81 sg. 10 S. Stopponi, La tomba della scrofa nera, Roma, 1983, p. 103.
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venienze sono note, di questi materiali sembra indicare una concentrazione del tutto prevalente attorno al nucleo urbano primario (Poggio Gaiella, Montollo, Marcianella, Poggio Renzo ecc.) e addensamenti in alcuni centri minori, a Chianciano e Dolciano soprattutto, ma anche se pur con un solo esemplare - a S. Casciano11 (fig. 3). Questa produzione, così peculiare, si esaurisce intorno ο poco pr ima della metà del V secolo. Le officine, attive verosimilmente alle porte della città, cessano repentinamente la produzione. Non vi sono indizi convincenti che le maestranze, che realizzavano cippi e urnette istoriat i, siano le medesime che hanno prodotto le altrettanto caratteristiche statue cinerario, che, attestate dalla seconda metà del VI secolo a.C, rappresentavano certo una alternativa, forse più costosa e in ogni caso certamente più legata a credenze e forme di culto funerario tradizional i (canopi in trono) che corre parallelamente a quella dei cippi12. È però soltanto con il secondo quarto del V secolo, più ο meno in conco mitanza con la caduta della produzione dei monumenti decorati a rilie vo,che le statue-cinerario, sottomesse ormai a una rigida specializza zione tipologica, divengono il monumento funerario più importante e praticamente esclusivo dell'aristocrazia chiusina13. Mentre l'area di distribuzione di cippi e urne era sostanzialmente addensata a ridosso del nucleo urbano, le provenienze note di statue sedute ο recumbenti forniscono un dato alquanto diverso. Se infatti tra le otto provenienze certe ο probabili di recumbenti si contano un esem plare a Chianciano, uno a Città della Pieve e forse uno a Sarteano14, contro cinque provenienze generiche da Chiusi, su dieci statue sedute, tra cui due teste adespote, si conoscono una provenienza da Chiancia no, una dalle vicinanze del Lago di Chiusi, una dalla lontana Marciano in Valdichiana e due forse dalla lontanissima Sovana, contro una sola
11 Bianchi Bandinelli fornisce, tra le provenienze urbane, il Podere Gallina (op. cit., col. 257), Podere Colle di Sopra (ibid., col. 275), Podere Montebello-La Pellegrina (ibid., col. 290), Fornace Marcianella (ibid., col. 323). Nel territorio, Cimbano (presso il Lago di Chiusi) (ibid., col. 412), Laviano (nelle vicinanze di Castiglion del Lago) (ibid., col. 420), Chianciano e S. Casciano (ibid., col. 389). 12 Sul problema, Cristofani, Statue cinerario, cit., p. 49 sg. 13 Cristofani, op. cit., p. 83; Torelli, Arte, cit., p. 147 sg. 14 In questo senso sembra doversi atenuare l'affermazione di una concentrazione a Chiusi, anche se la mancanza di dati affidabili circa la provenienza della stragrande mag gioranza dei pezzi rende incerta ogni conclusione in proposito, Cristofani, op. cit., p. 87.
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provenienza certa dalla necropoli urbana della Marcianella15 (fig. 4). Con il tracollo della produzione di cippi e urne decorate, e dunque con la probabile scomparsa di quel ceto sociale che aveva propiziato l'ex ploit del tardo arcaismo, l'affermazione del monumento funerario a tutto tondo, con il suo limitato numero di esemplari e con la sua distr ibuzione a maglie larghe all'interno dello stato chiusino, sembra anche sancire la cessazione dello squilibrio che si era instaurato tra centri minori del territorio e città, a tutto favore di quest'ultima. La particolare distribuzione di questi monumenti, che adombra certo anche una diversa occupazione del territorio da parte di una ari stocrazia più conservativa e legata a (diverse?) strutture della produzio ne agricola, preannuncia la fisionomia che caratterizzerà per oltre un secolo e mezzo l'insediamento nel territorio chiusino : piccoli centri iso lati, dominati da una aristocrazia che si serve per i suoi monumenti funerari d| maestranze gravitanti probabilmente attorno al polo urbano almeno fino al tardo V ο all'inizio del IV secolo a.C. e che in seguito, venuta probabilmente a cessare questa tradizione, richiama gli artigiani anche da centri più lontani16.
15 Cfr. Id., ibid., η. 7, p. 39 (da Chianciano), η. 10, p41 (vicinanze del Lago di Chiusi), η. 11, p. 41 (da Marciano), η. 2-3, p. 38 (da Sovana, cfr. A. Maggiani, in Etruschi in Marem ma, Firenze, 1981, p. 88); n. 1, p. 37 (Marcianella). 16 Su ciò, Cristofani, op. cit., p. 80 sg. Per il tardo V e per la prima metà del IV secolo a.C. sembra eloquente la constatazione dell'esistenza di opere isolate, sovente di alto livello, nelle quali si esplica talora anche un impiego sperimentale di materiali, quali l'alabastro, prima non utilizzati. Oltre al noto gruppo dal Bottarone (Cristofani, op. cit., p. 44, η. 19), mi pare fondamentale lo straordinario gruppo di Palermo (J. Thimme, Chiusinische Aschenkisten und Sarkophage der hellenistischen Zeit, in SE, XXIII, 1954, p. 57, nota 30, fig. 8-11) per il quale sono state proposte datazioni eccessivamente basse; il monumento va certamente rialzato alla prima metà del IV secolo a.C. La loro natura di opere eccezionali, che tuttavia non hanno attivato una tradizione locale, la dice lunga sull'assenza in loco di organizzate botteghe di scultura. Anche la distribuzione della ceramica attica, a partire dalla metà del V secolo, sem bra confermare che una nuova frattura si verifica soltanto verso la fine del secolo. Anche la presunta lacuna documentaria ipotizzata da L. Cimino, La collezione Mieli nel Museo di Siena, Roma, 1986, p. 13 per l'importante località di Castelluccio la foce, nodo cruciale sulla via dell'Ombrone, sembra infatti ben colmata dai materiali (cfr. ibidem, n. 412, stemless cup del Pitt, di Londra E 113; p. 411, del Pitt, di Bologna 417) almeno fino alla scomparsa del centro a favore di Cetona e Sarteano (considerazioni simili già in R. Bian chiBandinelli, in La Balzana, 1927, p. 8). Ceramiche attiche dell'avanzato V secolo anche a Pozzuolo-Gioella (Bianchi Bandinelli, op. cit., col. 419), S. Casciano (ibid., 381), Vaiano (ibid., col. 414).
Fig. 3 - Distribuzione di cippi e urne decorati a rilievo.
Fig. 4 - Distribuzione delle statue cinerarie di età classica.
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In ogni caso, il crollo della produzione di rilievi in pietra e la scom parsa delle tombe dipinte non si accompagna con l'eclisse del centro urbano, dato che vi sono indizi di una certa attivià adilizia promossa dalla committenza pubblica, attestata da un gruppo di antefisse della seconda metà del secolo17. Aristocrazia rurale inurbata dunque quella chiusina della fine del VI e della prima metà del V secolo, ma acculturata solo in parte, dato che di centinaia di monumenti funerari quasi nessuno è iscritto con il nome del defunto e anche su altri media le iscrizioni di quest'epoca sono molto rare. Eppure è probabilmente proprio qui che si elabora, agli inizi del secolo una moda grafica destinata a immediato e secolare successo, Quella corsivizzante, dato che la troviamo impiegata nella redazione di ben quattro sequenze alfabetiche di tipo subarcaico sul monumento funerario che sembra logico attribuire a uno scriba18. Pur sulla base di soli indizi, sembra insomma che nel corso del V secolo si sostituisca al modello di sviluppo urbano, tuttavia legato pro fondamente ad una economia agricola, un modello più arcaico di eco nomia rurale, con forte calo del centro primario a favore dei nuclei insediativi minori del territorio. Al probabile tracollo del modello urbano nel secondo quarto del V secolo si può tentare di trovare una spiegazione anche nella situazione storica regionale. Recentemente Giovanni Colonna, nel precisare le ca rat eristiche della compagine sociale di Orvieto, ha messo in forte rilie vola dimensione agricola della sua economia, richiamando in partico lare le frumentazioni romane del V secolo, che attingono largamente all'Etruria e in specie all'Etruria tiberina19. Se il quadro proposto è nelle linee generali pienamente convincente, si può tuttavia ipotizzare che questo monopolio della produzione ed eventualmente della esporta zione granaria sia conquista relativamente recente di Orvieto, da collo care nell'avanzato V secolo, epoca che coincide del resto con il periodo di più fulgido sviluppo delle fortune della città, che diviene frequentata e celebre sede della lega. L'ipotesi di una sostituzione di Orvieto a Chius i solo alla metà del V secolo sarebbe d'altronde in accordo con la noti zia di Vernio Fiacco, opportunamente valorizzata da Colonna per mo-
17 Cfr. CriiSTOFANi, op. cit., p. 80 sg. 18 G. Buof|iAMici, Epigrafia etrusca, Firenze, 1936, tav. VI, fig. 9; A. Maggiani, Le iscri zioni di Asciano e il problema del ed. m cortonese, in SE, L, 1982 (1984), p. 148, nota 3. 19 Colonna, Cultura e società, cit., p. 106.
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strare come si sia probabilmente verificata in quest'epoca la diffusione di culture granarie superiori al farro, cereale alla cui coltivazione Chius i rimase sempre fedele, se ancora in età romana la sua produzione era famosa20. Mi sembra infatti molto più difficile pensare che tale ipotesi valga per le frumentazioni più antiche, ad es. quella del 492 a.C. ; siamo ancora troppo vicini all'impresa di Porsenna e al suo «dominio» su Orvieto, per non ritenere che proprio Chiusi sia, in questa fase più anti ca,la produttrice del surplus granario, che poteva del resto essere age volmente veicolato attraverso il Chiana al Tevere. Ce lo dice l'insistenza con cui le fonti collegano Chiusi con Roma, non solo al tempo di Por senna, ma già nell'età di Tarquinio Prisco21. Proprio l'ipotesi di una dinamica storica che preveda il blocco del lavia fluviale al Tevere e l'incremento (razionalizzazione?) delle cultu re cerealicole da parte di Orvieto a partire da poco prima della metà del secolo potrebbe spiegare infatti anche la crisi che sembra investire Chiusi, e di cui è indizio il tracollo delle produzioni artistiche e probabil e conseguenza lo spopolamento del territorio, forse con movimenti di popolazione che possiamo immaginare, oltre che verso il nord e la Padania, anche proprio verso Volsinii22. Non molto dissimile appare, pur se in un quadro documentale assai meno ricco, la dinamica del popolamento nella Valdichiana, il fertile bacino a nord di Chiusi, da secoli anch'essa frequentatissima pista di transito. Quest'area, che si stende tra i due poli di Cortona e Arezzo, comprende alcuni centri minori che dimostrano in quest'epoca particolare vitalità. Cortona è praticamente ignota per questa età, e il poco che conosciamo fa rimpiangere di non saperne di più. L'ipogeo di Camucia ha restituito un consistente nucleo di vasi della metà del V secolo, prova della floridezza di un gruppo aristocratico, probabilment e legato ad antiche proprietà fondiarie23. L'eccezionale lampadario
20 Ibid., p. 109. 21 Sulla questione, anche G. Colonna, Ricerche sull'Etruria interna volsiniese, in SE, XLI, 1973, p. 71 sg. Sul commercio fluviale tra Chiana e Tevere cfr. Strabone, V, 2, 9. 22 La presenza di chiusini a Orvieto è già ipotizzata da H. Rix Etrusco mex rasnal = hat. Res publica, in Studi in onore di G. Maetzke, Roma, 1984, p. 458; e da A. Maggiani, Alfabeti etruschi di età ellenistica, in Atti del IV Convegno della Fondazione Faina, in stam pa. 23 E. Franchini, in SE XX 1948-49, p. 43 sg., tav. IV; 3-4 (Pitt, di Londra E 777 e Pitt, di Camucia, cfr. Beazley, ARV2, 1683). Dal territorio di Cortona sono attestate opere del Pitt, di Curtius (ibid., p. 935, η. 71), del Pitt, di Tarquinia 707 (ibid., p. 1111, η. 1), del Pitt.
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bronzeo, databile certamente nel tardo V secolo a.C. e forse prezioso arredo di un santuario extraurbano, rimanda, anche alla luce di recenti proposte interpretative del suo complesso programma iconografico, ad un ambiente di alta - se pur eclettica - cultura, fortemente ellenizzat a24. Poco più sappiamo di Arezzo. Le necropoli della città, individuate
angoloso (ibid., p. 953, η. 47). Sui rinvenimenti effettuati nel Cortonese, vedi ora il reper torio messo a punto da A. Cherici, Materiali per una carta archeologica del territorio di Cortona, in Cortona. Struttura e storia, Cortona, 1987, p. 141 sg. 24 II collegamento tra il numero dei beccucci del lampadario e il numero delle regio ni celesti secondo la dottrina etrusca, esplicitato da L. B. Van der Meer, The Bronze Liver of Piacenza. Analysis of a Politheistic Structure, Amsterdam, 1987, p. 28, apre interessanti prospettive per la comprensione del programma figurativo del monumento, nel quale già Bianchi Bandinelli aveva intuito « un qualche simbolismo cosmico », cf r. R. Bianchi Bandinelli, Etruschi e Italici prima del dominio di Roma, Milano, 1976, p. 201. Recenti interventi di pulitura del bronzo, mentre hanno fatto giustizia dell'inaccetta bile ipotesi di una aggiunta secondaria delle teste di Acheloo (teoria d'altronde abbandon ata dal suo stesso sostenitore, cfr. P. Bruschetti, Analisi tecnico-stilistiche, in Nuove le tture del lampadario etrusco, Cortona, 1988, p. 13 con lett.) ha contribuito ad una migliore leggibilità degli elementi della decorazione. Le protomi di Acheloo, dalla generalità degli studiosi considerate l'elemento stilisticamente più recente dell'intero complesso decorati vo trovano i loro più puntuali confronti, da una parte, nello straordinario bronzetto del Metropolitan Museum, fresca visitazione etrusca di motivi policletei datato all'ultimo quarto del V secolo (cfr. T. Dohrn, Die etruskische Kunst in Zeitalter der griechischen Klassik, Magonza, 1982, p. 29, tav. 11, 2) e dall'altra nell'altrettanto eccezionale cinerario bronzeo di Leningrado da Perugia (cfr. nota 7), particolarmente vicino sia negli elementi tipologici che stilistici (unica e profonda piega orizzontale al centro della fronte - che ritorna, ad es., nella testa dello Zeus da S. Leonardo - che provoca andamento lievemente bombato delle ossa sopraorbitali, profilo lievemente sinuoso del naso, labbra spesse e dischiuse, andamento dei capelli sulla fronte e sulle tempie; anche la sorprendente pre senza delle due enormi arricciature della barba sul mento non possono essere disgiunte dalla tipica trattazione inannellata e spiraliforme delle ciocche inferiori della testa perug ina). D'altro canto, la compresenza di elementi iconografici e stilistici che spaziano nell'arco di diversi decenni, sulla quale si è giustamente posto l'accento (P. Bruschetti, // lampadario bronzeo di Cortona, Cortona, 1979, p. 71 ; P. Grassi, Per un riesame del lampa dario di Cortona, in Nuove letture, cit., p. 20), con il riferimento immediato ad una tradi zione di officina di cui si deve presupporre la longevità, si pone come preciso Gegenstück critico a quanto sembra avvenire nella ceramografia contemporanea (cfr. F. Gilotta, Contributo alla ceramografia vulcente tardoclassica, in BA LXIX, 24 1984, p. 41 sg.). Il rif erimento conseguente ad un ambiente di variegato eclettismo culturale sembra porre in dubbio l'ipotesi chiusina più di recente reiteratamente proposta, e lascia incerta anche quella - ormai quasi una vulgata - della bronzistica orvietana.
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sul Poggio del sole hanno fornito pochi materiali della prima metà del V secolo e poco ο nulla della seconda metà25. Ma il panorama piuttosto scoraggiante dei rinvenimenti è ravvivato dall'acquisizione abbastanza recente di un eccezionale complesso deco rativo riferibile a un tempio cittadino, rinvenuto parte in Piazza S. Jacopo, parte nell'adiacente Via Roma26. Le terrecotte di rivestimento della sima rampante, con le scene di monomachie tra guerrieri a piedi ο a cavallo, con anatomie accentuate e proporzioni atticciate27 appaio no, come è stato notato, opera di artigiani che sperimentano, nel primo ventennio del secolo, nuovi modi di decorare il tempio28. Le fortissime affinità che legano questo ciclo con quelli di Satricum e di Faleri (Sassi Caduti) fanno pensare irresistibilmente ad una medesima maestranza che opera nei diversi centri, inventando ardite soluzioni, come i complessi gruppi acroteriali di Faleri, ο elaborando e vivificando tradizioni ormai al tramonto, come quella del fregio conti nuo nell'Etruria settentrionale29. Particolarmente significativi appaiono i minuti e malconci fram menti riferibili ad acroteri. Un primo gruppo è stato attribuito ad una figura di Turms, chiaramente riconoscibile dal coloratissimo berretto alato (Tav. I, 3). Piena di suggestione appare la presenza al sommo di un edificio in una città della quale in tutti i tempi si è sottolineata la vocazione per le attività produttive e la mercatura, del dio al cui corri spettivo latino Mercurius veniva contemporaneamente votato in Roma un tempio nella zona plebea dell'Aventino30.
25 P. Bocci, in // museo archeologico G. C. Mecenate in Arezzo, (d'ora in avanti, Museo di Arezzo), Arezzo-Firenze, 1987, p. 50 (kylix del Pitt, di Aberdeen, del 3° quarto del secol o); Ead., Postilla su Arezzo arcaica, in SE, XLVII, 1979, p. 63. 26 G. Maetzke, in BA, 1949, p. 251 ; Id., in Museo di Arezzo, p. 51 sg. 27 Che possono ricordare un po' quelle sui vasi di Phintias, cfr. ad es. J. Boardman, Athenian Red Figure Vases. The Archaic Period, Norwich, 1979, fig. 41, 2. 28 Sulla questione, M. Cristofani, in SE, XLVII, 1979, p. 87; M. Torelli, Arte degli Etruschi, Bari, 1985, p. 206; G. Colonna, Santuari d'Etruria, Firenze, 1985, p. 172. 29 II confronto appare assai puntuale tra le figure dei guerrieri della sima di Arezzo e il noto gruppo acroteriale da Satricum, cfr. A. Andren, Architectural Terracottas from Etrusco-Italiques Temples, Lund, 1941, tav. 36. Identità si riscontrano anche negli element i della decorazione strutturale, cfr. ad es. il tipo della cornice trasforata (Maetzke, op. cit. p. 53) che ritorna identico a Satricum (Andren, op. cit., tav. 152, 517). Sul problema, già intuito da Andren {ibid., p. 503, 1.3), cfr. anche M. Cristofani, in A/S, 1973, Suppl., p. 81. 30 Maetzke, in Museo di Arezzo, p. 53 sg. Per Roma, Torelli, Storia, cit., p. 200.
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Comunque sia, accanto a quella di turms mi sembra particolarment e interessante, non solo per la qualità - elevatissima - dell'esecuzione, sottolineare la presenza di un frammento di testa virile barbata, rinve nuta in Via Roma (Tav. 1,1); malgrado la distinta provenienza mi pare che l'ipotesi di Guglielmo Maetzke che si tratti di un medesimo comp lesso sia largamente persuasiva31. Il dettaglio della barba realizzata a chioccioline minute e finemente attorte, mentre conferma una cronologia attorno agli inizi del secolo, richiama irresistibilmente l'iconografia di Eracle, quale in Grecia com pare esattamente in quest'epoca : iconografia assunta in specie dal Pit tore di Berlino nella ceramica e dalle maestranze che eseguono le scul ture del tesoro degli Ateniesi a Delfi, tanto simili anche stilisticamente al complesso aretino32. Ad una figura dell'eroe si addice anche il fram mento di braccio dal grandioso tessuto muscolare, rinvenuto nella me desima area e finora rimasto praticamente inedito33 (Tav. I, 2). Sia che si voglia ricostruire un acroterio con due (?) personaggi (Turms ed Hercle), sia che li si voglia mantenere distinti, non c'è dubbio che ambedue le entità, mitologica e divina, appaiono perfettamente adeguate a sug gerire un momento di forte aggregazione politica e una connotazione non specificamente aristocratica della compagine sociale cittadina, sug gestione confermata anche dalla diffusione nella necropoli della sepol turasingola a inumazione e dalla mancata adozione del tipo di tomba a camera34. Non sappiamo di tiranni ad Arezzo; ma non è escluso che in quest'epoca vadano cercate le premesse delle laceranti e pericolose contrapposizioni di classe, che un secolo dopo poterono allarmare i
31 Maetzke, in Museo di Arezzo, p. 54. 32 Tra i numerosi confronti possibili, mi limito a citare le teste di Eracle del Pittore di Berlino (cfr. Boardman, op. cit., fig. 146, 1 ; 145; CVA Parigi, Louvre, I, tav. 6, 8, 7, 4), in opere datata tra il 500 e il 480 a.C. Sulle sculture del Tesoro degli Ateniesi, datate poco dopo il 500 cfr. J. Boardman, Greek Sculpture. The Archaic Period, Norwich, 1978, p. 159 sg. 33 II braccio, montato su perno di ottone (ma non esposto al pubblico) presenta una lunghezza, dalla spalla al gomito, di m. 0. 1 5 (braccio di Hermes, misurato nella stessa posizione, m 0.16); appare fortemente piegato ed era certamente sollevato, e dunque for serappresentato nell'atto di brandire la clava. Citato da P. Bocci, Appunti su Arezzo arcai ca, in SE, XLIII, 1975, p. 62. 34 Cfr. Ead., art. cit., p. 97 sg.
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capi della lega etrusca prima, e provocare addirittura l'intervento paci ficatore di Roma poi35. Il territorio aretino della Valdichiana conta invece presenze presti giose, soprattuto al livello delle offerte funerarie. E se non conosciamo esattamente la provenienza del cratere di Euphronios, rinvenuto «nei pressi di Arezzo»36 (ma da Marciano proviene la splendida coppa a fondo bianco di Liandros37), appare tuttavia certo che almeno nella seconda metà del secolo la documentazione archeologica aretina è tut ta, ο almeno in schiacciante maggioranza, nella campagna. Da Alberoro, una ventina di chilometri da Arezzo, proviene uno stamnos del Pit tore di Danae38, mentre la ricca necropoli di Casalta di Lucignano, al limite del territorio cui giungono elementi culturali chiusini, da cui provengono tra gli altri, la nota anfora del Pittore del dinos e tre note voli grandi vasi figurati etruschi, attesta l'esistenza di una ricca aristo crazia dai gusti ellenizzati39. Quest'area, agevolmente collegata a Chiusi, comunica tuttavia an che facilmente, attraverso il cosiddetto ager inter con la valle dell'Ombrone e la costa. Ed appare di non trascurabile interesse il fatto che da Trequanda, pochi chilometri a sud di Casalta, provenga un'iscrizione di V secolo di un venel spurina, portatore di un gentilizio che, se è attesta to in età arcaica in diverse località, sembra tuttavia costituire un signi ficativo precedente del rapporto che legherà, un secolo dopo, l'arist ocraziadi Arezzo con il più noto gruppo degli spurina, quello di Tarquinia 40 Certo le possibilità di un territorio che anche in seguito meriterà lodi per la sua feracità, non disgiunte dai vantaggi di trovarsi alla base del sistema di percorsi per l'Appennino, perfettamente vitale in quest'epoca (come dimostrano non solo le stipi votive, ma impianti tem plari imponenti come quello di Pieve a Socana), procedettero probabil-
35 Su ciò, vedi la convincente ricostruzione storica di M. Torelli, Elogia tarquiniensia, Firenze, 1975, p. 80. 36 P. Grassi, in Museo di Arezzo, p. 122. 37 L. Fedeli, in Civiltà degli Etruschi, Firenze, 1985, p. 216; Beazley, ARV2, p. 835. 38 Bocci, in Museo di Arezzo, p. 124. 39 Zamarchi Grassi, ibidem, p. 126 sg. Aperto rimane il problema, suscitato recente menteda M. Cristofani, in Rasenna, Milano, 1986, p. 139, di una possibile redistribuzione dei prodotti attici restituiti dalla Valdichiana in parte almeno da Spina, tramite il corso del Po e la valle del Reno. 40 NRIE 221.
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mente di pari passo con una attività urbana caratterizzata dalla presen za di artigiani metallurghi, anche se proprio nel V secolo dobbiamo registrare una lacuna nella quasi ininterrotta serie di bronzetti assegnab ili alla città a partire dall'alto arcaismo41. Particolarmente interessante appare la concentrazione di grandi vasi a figure rosse etruschi distribuiti nell'Etruria settentrionale inter na,da Volterra a Arezzo (e meno significativamente Chiusi e Perugia), che fanno ipotizzare una localizzazione in quest'area di piccole fabbri che che operano ispirandosi a modelli attici del periodo classico42. Non pare di poter scindere questo dato dalla problematica costituita dalle fabbriche di coppe a figure rosse etrusche, attive probabilmente già nel tardo V secolo a.C, una delle quali firmata dal vasaio Pheziu Paves, la cui connotazione servile è tutt'altro che dimostrata43. Da questo punto di vista di notevole interesse appare la presenza a Volterra, entro uno scarico di frammenti ceramici che annovera anche numerosi scarti di fornace (peraltro pertinenti a classi vascolari diverse) di frammenti di kylikes di questo tipo e di scadente livello tecnico44 (Tav. II, 1). Se ne potrebbe dedurre che nel tardo V secolo ο agli inizi del IV si siano att ivate fabbriche per rispondere ad una domanda ancora sostenuta, che non trovava risposta nei consueti canali di approvvigionamento costi tuiti dalle importazioni. Discorso unitario può farsi ora per il medio e basso Valdarno, per il quale il V secolo appare periodo di notevole floridezza. Innumerevoli 41 A quest'epoca si può riferire solo l'atleta dal Duomo vecchio Bocci, in Museo di Arezzo p. 61. 42 La questione è ora ampiamente riesaminata da F. Gilotta, Appunti sulla più antica ceramica etrusca a figure rosse, in Prospettiva, 45, 1986, p. 2 sg. Particolarmente significat ivi appaiono i vasi raccolti attorno alla «bottega dello stamnos di Bologna 824» (ibid., p. 5 sg., fig. 16-24), che si distribuiscono tra Valdichiana, Volterra e Chiusi, e dei quali è stata sottolineata la forte affinità con il gruppo delle kylikes atticizzanti studiate da P. Bocci, in Studi Fiumi, Pisa, 1979, p. 61 sg. 43 Da Grotti, dieci chilometi a sud di Siena, da dove proviene anche un cratere dei primi Manieristi, databile attorno alla metà del V secolo cfr. Aa.Vv., Siena. Le origini. Testimonianze e miti archeologici, Firenze, 1979, p. 78, n. 103. Un altro esemplare provie ne da Asciano, Poggio Pinci, Tomba II (E. Mangani, II museo di Asciano. I materiali da Poggio Pinci, Siena, 1983, p. 67, n. 226), in un contesto che prevede anche numerosi pezzi importati, quali una kylix del Pitt, di Heidelberg (ibid. n. 225) e uno stamnos bronzeo (n. 144), databile nella seconda metà del secolo. Sulla formula onomastica, Torelli, Arte, cit., p. 129. 44 Frammenti rinvenuti durante lo scavo della summa cavea del teatro di Volterra (scavi Maetzke).
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sono gli insediamenti indiziati non solo dalla ceramica attica, ma anche e soprattutto dalla peculiare cultura materiale, che richiama strett amente quella dei centri dell'Etruria padana : ceramiche figuline, cera miche grigie che sostituiscono il bucchero, impasti con inclusi di scisto sono gli elementi più appariscenti che collegano i molti centri, che sor gono sulle sponde dell'Arno e agli snodi da cui si dipartono i percorsi appenninici45 : così Artimino (con la poco nota Fiesole), a quanto pare unico erede e continuatore nel V secolo della tradizione locale della ste lefigurata46, per il quale è attestata una particolare fioritura nel terzo quarto del secolo; Montereggi, dove l'abitato sembra affiancarsi a un luogo di culto47; l'area del Bientina, con numerosi piccoli nuclei inse diativi, accompagnati dalle relative necropoli48; e giù lungo il fiume sino alla sua foce, dove il centro di Pisa appare sempre di più come il nucleo propulsore di tutto il bacino, a partire dalla seconda metà del V secolo a.C. po' I rinvenimenti e le ricerche degli ultimi anni hanno portato un di luce sulla cultura che caratterizza la città alla fine del VI e agli inizi del V secolo, cultura articolata sul segnacolo funerario di marmo, e dunque sull'attivazione di una tradizione artigiana, che deve forse la sua origine a maestranze specializzate, in rapporto di metecia con l'am biente indigeno, e che comunque appare il segno più macroscopico del lafioritura di un sito, la cui vocazione di approdo sulle rotte tirreniche
45 Sulle ceramiche con inclusi scistosi, in generale, cfr. A. Maggiani, Pisa, Spina e un passo controverso di Scilace, in La Romagna tra VI e IV secolo nel quadro della protostoria dell'Italia centrale, Bologna, 1985, p. 310, fig. 2; Ν. Panicucci-P. E. Bagnoli, in Terre e paduli. Reperti documenti immagini per la storia di Coltano, Pontedera, 1986, p. 98 sg. Sul leforti affinità tra ceramiche figuline dell'agro pisano e quelle dell'oltreappennino, cfr. Maggiani, art. cit., p. 312, nota 24. Su questi aspetti, anche D. Vitali, L'età del ferro nell'Emilia occidentale; dati conclusioni proposte, in Studi sulla città antica. L'EmiliaRomagna, Roma, p. 145. 46 Artimino 1987, passim; sulle ceramiche attiche, cfr. in particolare p. 78 sg., fig. 5156 : sembrano mancare frammenti riferibili alla prima metà del secolo, mentre sono rap presentati pittori della cerchia del Maestro della Pentesilea e il Pitt, del coperchio, oltre a frammenti di vasi completamente verniciati. Sulla stele di vipia vetés, Buonamici, op. cit., tav. XIX, 31. 47 Aa.Vv., L'abitato etrusco di Montereggi. Scavi 1982-85, Vinci, 1985. Sulle ceramiche attiche, cfr. ibid., p. 52 s., η. 165, 166 (kylix del Pitt, di Kodros). 48 Numerosi i rinvenimenti recenti nell'area dell'antico Lago di Bientina. Oltre alla vecchia letteratura, raccolta ad es. da Maggiani, art. cit., note 10, 11, 16, 20, cfr. G. Ciampoltrini-M. Zecchini, Capannori. Archeologia nel territorio, Lucca, 1987, p. 46 sg.
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si coniuga con l'importante ruolo di smistamento e penetrazione nell'entroterra, tramite il corso dell'Arno49 (fig. 5).
Piazza de 1 Duomo MARMORE Necropoli Δ Fortezze
Fig. 5 - Pisa. Carta di distribuzione dei rinvenimenti di età classica.
49 Sulle basi a protomi d'ariete, G. Ciampoltrini, Segnacoli funerari tardo arcaici di Pisa, in SE, XIL, 1981, p. 39 sg. Sui cippi a colonnetta, Id., / cippi funerari della bassa e media Valdera, in Prospettiva, 21, 1980, p. 74 sg. Sul problema dei marmi, in generale, M. Bonamici, L'uso del marmo nell'Etruria settentrionale, in Artigianato artistico, Firenze, 1985, p. 123 sg. Di particolare interesse il monumento marmoreo, che alla luce di recenti rinvenimenti va riferito a quest'area, studiato da M. Bonamici, in // Museo Bordini a Firen-
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II territorio che gravita su Pisa è caratterizzato anche da un parti colare costume funerario, che sembra perpetuare, fino in piena età classica (e oltre) usi della prima età del ferro : si tratta della sepoltura entro dolio con segnacolo esterno. Nuovi dati sulle necropoli della città vengono da recenti recuperi in loc. La Figuretta, dove sono stati raccolt i oltre venti cippi marmorei a colonnetta e a bulbo, nonché altri di tipo più raro e complesso50; più vicino alla periferia settentrionale della cit tà, in Via G. Pisano, il recupero di una decina di cippi a colonnetta si è accompagnato al rinvenimento di una sepoltura a incinerazione entro dolio, disfatta probabilmente già in antico51; al corredo apparteneva, tra l'altro, un cratere a volute raccolto in frammenti, riferibile a un pit tore del gruppo dei pionieri a figure rosse, con forti affinità con Euthymides e soprattutto con Smikros, il collaboratore di Euphronios52 (Tav. II, 5). La distribuzione delle importazioni attiche nel Valdarno sembra indicare che la funzione di mediazione della città diviene più important e a partire dalla metà del secolo. Pisa dovette incrementare in quest'epoca una sua politica di espansione, sia verso la Versilia (con gli insediamenti di S. Rocchino sul Lago di Massaciuccoli53 e di Pozzi di Seravezza, allo sbocco del Versilia54), sia verso il Bientina55 e la Garfagnana56. Tuttavia molti insediamenti sembrano di breve durata e c omunque in forte declino nello scorcio del secolo. D'altro canto, il dato di scavo di Piazza del Duomo a Pisa ha evize, Firenze, 1986, p. 204 sg., tav. 61-64. Sulla funzione di porto nelle rotte per il nord, cf. Ο. Pancrazzi, Pisa. Testimonianze di una rotta greco arcaica, in PP, 1982, p. 331 sg. 50 Recuperi effettuati nell'anno 1987. Il tipo di giacitura dei materiali ha fatto pensar e, qui come altrove, ad una situazione di deposizione secondaria, conseguente probabil mente alla sistemazione agraria di età romana. 51 Anche in questo caso i cippi, secondo le dichiarazioni dei rinvenitori si trovavano raggrupati entro un fossato. Oltre alla tomba di età tardo arcaica, sono stati rinvenuti resti di un'altra tomba, con ceramiche volterrane del HI secolo a.C. 52 Cfr. in particolare lo stamnos di Bruxelles, Boardman, op. cit., fig. 32; Beazley, AR V2, p. 20, 1. 53 Sull'insediamento di Campo Casali, M. Cristofani, in Archaeologica. Studi in onore di A. Neppi Modona, Firenze, 1975, p. 188. G. Fornaciari, in NSA 1970, p. 155. 54 Scavi della Soprintendenza archeologica, diretti da E. Paribeni e da chi scrive. Notizia preliminare nel Notiziario di scavi e scoperte, in SE, LV 1987, in stampa. Import antirinvenimenti, che attestano l'impianto di strutture fortificate sulle alture, a partire dal IV secolo a.C, sono ora oggetto di indagine a nord di Pietrasanta. 55 Su Bientina, cfr. nota 48. 56 Per i centri della Garfagnana, cfr. Maggiani, art. cit., passim.
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denziato come nell'avanzata seconda metà del V secolo - ο forse meglio nei decenni finali - esista una cesura nella sequenza stratigraf ica : dai livelli di abbandono ο di riempimento provengono numerosi frammenti riferibili ai pittori classici di skyphoi (cfr. ad es. un frammento di skyphos assegnabile alla cerchia del Pitt, di Penelope) (Tav. II, 3), nonché tardi pittori di coppe (ad es., un fr. riferibile a un continuatore del Pit tore del coperchio, forse al Pittore di Fauvel) (Tav. II, 4), nonché una rilevantissima quantità di frammenti di stemless cups attiche semplice mente verniciate e con decorazione a stampo, inseribili nella «Delicate Class» dell'Agorà57. Lo scavo ha portato anche al rinvenimento, nella medesima località, di una piccola stipe votiva, costituita da otto bronzetti femminili, due dei quali di tipo naturalistico, e sei schematici, la cui cronologia è determinata dal concomitante rinvenimento di un frammento di piccolo cratere attico della fine del secolo58. Il piccolo nucleo di statuette bronzee, rinvenute in situ, cui si aggiungono due frammenti di altre scoperti nelle vicinanze in livelli di scarico, confer ma la già proposta connessione tra l'Agro pisano e la Padania, dati i puntuali riscontri con tipi presenti in Garfagnana, Val d'Enza e Marzabotto, ai quali va' aggiunta una coppia di esemplari conservati al Museo di Bologna59 (Tav. IV, 1). Il cippo marmoreo di Arena metato, iscritto con il nome di lede kakus papnie, scoperto e studiato da Marisa Bonamici, consente, sulla base dei catatteri paleografici e dell'ortografia di ancorare almeno una parte di questa caratteristica produzione ad una cronologia, che nel caso specifico è quella degli anni attorno alla metà del secolo60. Ma il dato dimostra pure, nella singolarità della formula onomastica (che richiama quella per tanti versi simile, anche se non identica, dei Vornamengentilicia di età ellenistica di Perugia) l'esistenza di una struttura statale aperta, in fase di consolidamento e strutturazione. Nella formul a infatti l'apposizione del gentilizio papnie ad una formula onomastica
57 Per il Pittore di Fauvel, significativamente attestato a Spina ed Arezzo, cfr. Beazley, ARV2, p. 1285 sg. Sulla Delicate Class, cfr. Sparkes-Talcott, Athenian Agorà, XII, Princeton, 1970, p. 102 sg., tav. 22-23. 58 Cfr. per ora A. Maggiani, in Archeo 13, 1986, p. 34 sg. 59 Sul problema, cfr. Maggiani, art. cit. a nota p. 312. Indipendentemente Vitali, art. cit., p. 145, nota 40. Gli esemplari del Museo archeologico di Bologna mi risultano inedit i. 60 M. Bonamici, Problemi degli Etruschi di confine ; a proposito di una nuova iscrizio ne pisana, in SE, LV, 1987, in stampa.
Tav. I - 1-3. Arezzo, Museo archeologico. 1-2. Fr. della testa e del braccio destro di eroe (Eracle?). 3. Torso di Turms.
Tav. II - 1. Firenze, Museo archeologico. Ceramica etrusca a figure rosse dal teatro romano di Volterra. 2. Volterra, Museo Guarnacci. 3-4. Firenze, Museo archeologico. Frammenti atti cida Pisa, Piazza del Duomo. 5. Firenze, Museo archeologico. Da Pisa, Via Giovanni Pisano.
Tav. Ill - 1. Volterra, Museo Guarnacci. Cratere dalla necropoli di Montebradoni. 2. Vienna, Naturhistorisches Museum. Elmo bronzeo da Vetulonia, Mura dell'Arce.
Tàv. IV - 1. Firenze, Museo Archeologico. Pisa, Piazza del Duomo. Stipe votiva. 2. Casale Marittimo, proprietà privata. Base di cippo in marmo.
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che sarebbe stata già di per sé perfettamente sufficiente ad individuare il personaggio, sembra giustificarsi come esplicita volontà di apparte nenzaad una compagine cittadina. Il dislocamento periferico del mo numento, lungo il corso dell'attuale Serchio, sembra d'altronde dettata dalla volontà della città di rafforzare i confini dell'area più direttament e gravitante sul centro, presidiando lo sbocco del Serchio nella piana pisana, secondo un modello difensivo del quale fa parte forse anche la fortezza recentemente individuata sul vicino Monte Spazzavento, sign ificativamente prossimo a quello che sarà nel Medioevo il baluardo pisa nosul versante lucchese, il castello di Ripafratta61 (fig. 5). Per la cronologia del cippo di Arena e la possibile connotazione politico militare che l'insediamento di cui è testimonianza rivestiva, può apparire suggestivo il richiamo, alla situazione stratigrafica dell'im-
Fig. 6 - Pisa. Piazza del Duomo. Frammento di bacino in marmo.
61 Altra struttura simile è stata individuata più a est, immediatamente a monte dell'abitato di S. Giuliano, sul Monte Castellare, che domina la strada che dal Passo di Dante conduce verso la pianura lucchese (cfr. M. Cosci, Fotointerpretazione archeologica, in Quaderni dell'Istituto Dipartimento di archeologia e storia delle arti, Università di Siena, Firenze, 1988, tav. XI). Recenti indagini sul sito hanno evidenziato come in questo caso la cinta sia stata ampiamente rimaneggiata in età altomedievale ; ma il suo impianto risale certamente al pieno V secolo a.C, come dimostra la ceramica raccolta (bucchero, cerami ca attica, ceramica grigia, anfore etrusche e massaliote).
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portante sito di Romito di Pozzuolo, sul versante lucchese, che sembra repentinamente e drammaticamente abbandonato proprio poco prima della metà del secolo62. A completare il quadro àeW instrumentum lapideo di Pisa si deve infine menzionare la presenza di pezzi certamente importati, come il frammento di bacile con orlo a fascia (rinvenuto in Piazza del Duomo in strato databile tra la fine del V e gli inizi del III secolo a.C.) : il pezzo, di calcare-probabilmente marmo a grana grossa con pagliuzze grigia stre,a superficie perfettamente levigata, presenta somiglianze con un bacile dall'abitato di Spina, databile al V secolo a.C.63 (fig. 6). Lo stato della ricerca non consente di cogliere le ragioni dell'apparente tracollo pisano alla fine del V secolo a.C. e gli eventuali nessi con la invece inin terrotta fioritura del centro portuale immediatamente più a sud, Populonia, che non conosce flessioni sensibili nell'importazione di cerami che attiche fino al pieno IV secolo a.C.64. La singolarità di Populonia nel distretto settentrionale è stata più volte e anche di recente sottoline ata. Città frequentata da individui di condizione sociale non elevata, la città dovette conoscere nel V secolo anch'essa un momento particola rmente propizio, che non a caso coincide con il vivo interesse siracusano per questo settore del Tirreno settentrionale65. Forse favorita dalla par ticolare congiuntura internazionale, Populonia sembra ora non solo esercitare un più stretto controllo sulle miniere elbane, ma anche mun irsi di una adeguata cinta difensiva se, come sembrano indicare i recenti scavi, le mura dell'acropoli sono cronologicamente determinate da un terminus post quem agli inizi del V secolo66. Anche la necropoli, come è noto, ci offre il quadro di una variegata compagine sociale : accanto alle monumentali tombe a edicola, fastosamente decorate da acroteri litici ο rivestimenti fittili, presso una delle quali viene sacrifica-
62 T. Rasmussen, Archaeology in Etruria 1980-85, in Archaeological Reports, 32, 198586, p. 120 sg., fig. 27. 63 G. Sassatelli, L'Etruria padana e il commercio dei marmi nel V secolo a.C, in SE, XLV, 1977, p. 119, fig. 3 e (dall'abitato di Spina). 64 Su Populonia, M. Martelli, in Etruria mineraria, p. 415, 419. 65 Sulla questione, G. Colonna, ibidem, p. 443 sg. ; M. Cristofani, Gli Etruschi del mare, Milano, 1983, p. 84 sg. 66 Comunicazione verbale di Antonella Romualdi, che ha diretto lo scavo su un tratto delle mura dell'acropoli. Relazione preliminare nel Notiziario degli scavi e delle scoperte, in SE, LV, 1987, in stampa.
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ta all'inizio del V secolo una straordinaria biga di bronzo67, si raggruppano più modeste tombe a cassone, che si scaglionano numerose a part ire dal tardo VI secolo. Il corredo di alcune di queste pone in evidenza elementi esotici : ad es., la tomba n. 3 del Casone (scavo 1957), che ospi ta una sepoltura femminile, conteneva due fibule - una di tipo Certosa e una ad arco serpeggiante, certamente un tempo fornito di fermapieghe, che sembra rientrare in noti tipi settentrionali, attestati in ambito golasecchiano e atestino in età tardo arcaica - che possono suggerire una via per la definizione etnico-culturale del portatore68. L'intensa attività metallurgica, oltre che nella lavorazione del fer ro, si esplicò forse anche nella produzione di bronzi decorati, che tutta viaalmeno in parte Populonia importava da Vulci, provvedendo a redi stribuirli nelle lontane aree della Padania69. Il non numeroso, ma importante, patrimonio onomastico restituito dalle necropoli conferma la varietà della stratificazione sociale. Accant o ad indizi della presenza di grecofoni (oltre ai rari graffiti in greco, si segnalano anche i nomi greci etruschizzati, come karmu)70, numerosi sono i portatori di solo nome individuale, nei quali si possono ravvisare forse quelle maestranze specializzate che tanto dovevano contare in una città come Populonia. È sufficiente citare due casi. Il primo è quel lo di un metru, (forse nome greco etruschizzato)71, che firma, qualche decennio dopo la metà del secolo una stemless cup a figure rosse72. Senza entrare nel difficile problema del luogo di fabbricazione del 67 A. De Agostino, in NSA, 1957, p. 14 sg. 68 Ibidem, p. 6, fig. 5. Nella tomba sono presenti una fibula ad arco serpeggiante (cfr. P. G. Guzzo, Le fibule in Etruria dal VI al I secolo a.C, Firenze, 1972, 52, tav. XV, tipo Gì) del tipo Castelletto Ticino ο Sesto Calende (cfr. Aa.Vv., Studi sulla cronologia di Este e Golasecca, Firenze 1975, fig. 56, 4-5; Aa.Vv., Proposta per una cronologia delle fibule di Este, Firenze, 1976, p. 41, tipo XVI d, tav. 18, 4), e una fibula del tipo della Certosa (Guzz o,op. cit., p. 41, tav. IX, tipo VII, 3), non lontana da tipi noti ad Este III medio (Aa.Vv., op. cit., p. 31, tav. 21, 7. Sul problema delle basi economiche del demos cui è riferibile questo tipo di tomba, G. Colonna, in Etruria mineraria, p. 445 sg. ; contra, M. Cristofani, ibidem, p. 436. 69 Su ciò, Martelli, art. cit., in Etruria mineraria, p. 425. 70 Ead. in REE, 1981, n. 16. Un graffito, probabilmente in greco, è tracciato sul fon doesterno di una stemless cup attica, presumibilmente del terzo quarto del V secolo a.C, rinvenuta nelle vicinanze della Tomba del bronzetto di offerente, cfr. A. De Agostino, in NS, 1961, p. 74, n. 92, fig. 16; sul graffito, A. Maggiani, Populonia. Le iscrizioni di età tardo classica e ellenistica, in stampa. Su karmu, cfr. M. Martelli, in REE, 1975, n. 17, p. 213. 71 Su ciò; Torelli, Arte, cit., p. 129. 72 A. MiNTO, Populonia, Firenze, 1941, p. 237; Maggiani, art. cit., in stampa.
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vaso, mi limito a segnalare che la grafia del testo è meridionale, ma il vaso è stato rinvenuto forse in associazione, certo contemporaneamente a un secondo vaso iscritto che menziona lo stesso nome : si tratta di uno skyphos attico più ο meno contemporaneo : l'iscrizione graffita sul fondo esterno suona metrus sud73. Qualunque sia il valore da dare al secondo termine, il primo lemma conserva senz'altro lo stesso nome al genitivo, redatto questa volta secondo la norma settentrionale. L'altro caso è costituito dalla singolarissima «lucerna da minatore», che pre senta sotto il piede il nome akius, in grafia riferibile al V secolo a.C. Sia che si tratti di una formula onomastica al nominativo, sia che si tratti di un genitivo di tipo meridionale (allora in contraddizione con il k), non si può' non rilevare l'identità del nome e dell'ortografia con l'iscr izione attestata nella stessa epoca a Marzabotto, forse a sottolineare i rappporti tra due centri dalla vigorose attività metallurgiche, che r ichiedevano probabilmente personale specializzato74. I pochi rinvenimenti di quest'epoca, e in particolare quelli di cera mica attica dall'Elba (anche qui più numerosi nella seconda metà del V secolo) si inscrivono in questo quadro di forte dinamismo del distretto minerario75. Alle spalle di Populonia e Pisa, con le quali comunicava rispettiv amente tramite le valli del Cornia e del Cecina da una parte e dell'Era dall'altra, Volterra conosce anch'essa nel tardo arcaismo un notevole benessere, testimoniato dalle pur non numerose sculture funerarie (ste le soprattutto, ma anche urne figurate), dalle tombe a camere multiple e dal noto ripostiglio di picoli nominali d'argento rinvenuto presso la città76. Con il V secolo la città sembra essersi data una cerchia di
73 Minto, op. cit., p. 239; Maggiani, art. cit., note 61-63. 74 A. RoMUALDi, in Civiltà degli Etruschi, Firenze, 1985, p. 146, 6.11; Maggiani, art. cit., in stampa. Per Marzabotto, G. Colonna, Le iscrizioni etnische, in Guida al Museo etru sco di Marzabotto, in Emilia preromana, 8, 1980, p. 18, n. 11. Da aggiungere, per complet ezza,la testimonianza (che ritengo però inaffidabile) di una presunta iscrizione akiu su una cista litica dalla Garfagnana, cfr. L. Banti, Luni, Firenze, 1937, p. 34, fig. 8. 75 A. Maggiani, in Elba preromana, fortezze d'altura, Pisa, 1979, p. 13, n. 70-72; Id., Rinvenimenti di età classica ed ellenistica all'isola d'Elba, in Etruria mineraria, p. 187 sg. Materiali tardo-classici sono ora comparsi anche a Castiglione di S. Martino, attestando che l'inizio dell'occupazione del sito data almeno dalla fine del V secolo a.C. 76 Sulla fase tardo arcaica, M. Martelli, Contributi introduttivi allo studio della monetazione etrusca, in AHN, 22, Suppl., 1976, p. 101 sg. ; F. H. Pairault, Note sur la stèle C1E 50, in Mélanges Heurgon, Roma, 1976, p. 741 sg. ; M. Cristofani, in Etruria mineraria, p. 435 sg.
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mura, mentre nella prima metà del secolo venne innalzato sull'acropoli un tempio, che ha restituito terrecotte decorative simili a quelle di Arezzo77. Importazioni attiche giungono alla città forse da Populonia : ai primi decenni del secolo va attribuito il bel cratere a calice (Tav. Ili, 1) proveniente da Montebradoni, attribuibile alla tarda produzione del Maestro di Berlino ο alla sua cerchia78. D'altronde, i pochi pezzi menz ionati da Beazley (ampiamente incrementati dai rinvenimenti recenti sull'acropoli) annoverano anche un'anfora di Polignoto79. Più di recent e, è stato recuperato nei fondi del museo Guarnacci un lotto di alcune centinaia di frammenti attici, la cui pertinenza a Volterra, per quanto non accertata, appare probabile : i materiali si scaglionano tra la fine del VI (scarsissimi frr. a figure nere) e la metà del IV secolo a.C, con particolari addensamenti nella prima metà del V e del IV80. Nel comp lesso emergono alcuni pezzi di notevole prestigio, come i due fram menti pertinenti a un vaso di forma chiusa, con rappresentazione di Nike volante, certamente del Pittore dei niobidi (Tav. Π, 2)81, ο lo stelo di kylix a figure rosse, di enormi proporzioni, che può essere riferito alla prima metà del secolo82. Dal punto di vista dei monumenti funerari, Volterra sembra, dalla fine del VI secolo, pienamente inserita nell'orbita di irradiazione della cultura pisana. Le forme più rappresent ate nelle necropoli pisane, le colonnette marmoree lisce ο con decora zionedi fogliette di smilax aspera a rilievo e le basi (di cippi a bulbo)
77 M. Cristofani, in NSA, 1973, Suppl. p. 81. 78 E. Fiumi, Volterra etrusco e romana, Pisa, 1976, fig. 104; G. Cateni, Volterra, Museo Guarnacci, Pisa, 1988, p. 37, tav. 19. Cfr. ad es. il cratere da Gela, CVA, Oxford, Ashmolean Museum, I, tav. XXI, 3, 4. Per la scena, cfr. anche il cratere a calice di Kleophrades, G. M. A. Richter, Athenian Vases in Metropolitan Museum of Art, New Haven, 1936, n. 12, p. 34, tav. 13. 79 Beazley, ARV2, p. 1031, n. 44. 80 I materiali sono stati recuperati con un vero e proprio intervento di scavo negli scantinati di Palazzo Tangassi, sede dal tardo Ottocento del Museo Guarnacci. I fram menti attici rappresentano una modesta percentuale del complesso del materiale ceramic o, composto in massima parte di frammenti usciti da atelier locali. 81 Per i due frr. riferiti al Pittore dei Niobidi, cfr. ad es. lo stamnos di Zurigo, ripro dotto. Das Tier in der Antike, Zurigo, 1974, p. 42, η. 246, tav. 41. 82 Η. Λ ; diam. dello stelo y. Della decorazione, si riconoscono scarse tracce, nel ton do interno, riferibili probabilmente a un personaggio con asta ο bastone.
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decorate da teste di ariete sono largamente diffuse qui, come sull'altro versante della valle dell'Arno, addirittura nell'Oltreappennino83. Il dossier di questi monumenti si è testé arricchito di un nuovo esemplare purtroppo frammentario, rinvenuto a Casale Marittimo, cen tro nel quale già nell'Ottocento erano state osservate le caratteristiche «pere» marmoree84 (Tav. IV, 2). Il centro di Casale ebbe certo una fun zione di mediazione tra Volterra e la costa populoniese (e forse la bassa regione pisana) che dovette essere particolarmente vivace nel VII e nel VI secolo ; venne a cessare probabilmente alla fine del VI ο agli inizi del V, epoca alla quale può comunque farsi risalire l'eccezionale elemento decorativo di un monumentale cratere bronzeo, di un tipo ben rappre sentato anche a Spina85. All'attività di maestranze specializzate nella lavorazione del duro marmo, così ben documentata ormai in questo settore d'Etruria dopo i lavori di Sassatelli, Ciampoltrini e Bonamici, si deve probabilmente anche un monumento straordinario come la testa Lorenzini, la cui cro nologia deve essere contenuta entro il primo ventennio del V secolo; certamente una statua di culto, che ha servito di modello ad una serie cospicua di nobili bronzetti che circolano nei santuari, così numerosi nel distretto settentrionale d'Etruria86. Al dinamismo del nucleo urbano nel corso della prima metà del secolo fa riscontro, nella seconda, la particolare floridezza dei centri del territorio a est della città, soprattutto in Valdelsa87, a Colle, Dome-
83 G. Sassatelli, Ancora sui marmi in Etruria nel V secolo a.C. : confronti volterrani, in SE, XLVII, 1979, p. 107 sg., tav. XXXV. Sugli esemplari pisani, cfr. nota 49; su quelli padani, cfr. nota 63. 84 Cfr. Ciampoltrini, art. cit. a nota 49, p. 38. La provenienza degli esemplari noti ai viaggiatori dell'Ottocento, individuata nel botro della Mercareccia, coincide abbastanza puntualmente con la probabile zona di ri nvenimento del nuovo esemplare, e va identificata con il principale nucleo della necropoli di età tardo arcaica relativo all'abitato certamente identificabile sulla collina di Casalvecchio (su cui, cfr. SE, XXIX, 1961, p. 249; XXI, 1963, p. 171. 85 Fiumi, op. cit., fig. 155. Cfr. E. Hostetter, Bronzes from Spina, I, Magonza, 1986, p. 18 sg., nota 16. 86 Bonamici, art. cit. a nota 49, p. 123; M. Cristofani, La testa Lorenzini e la scultura tardo arcaica in Etruria settentrionale, in SE, XLVII, 1979 p. 85 sg. 87 Fondamentale G. de Marinis, Topografia storica della Valdelsa in periodo etrusco, Firenze, 1977, p. 49 (stele figurate e iscritte da Montaione e Poggio dell'Aglione), p. 55 (grande tomba a camera con vestibolo centrale e cinque celle a Poggio a Issi), p. 57, 234 (ceramiche attiche da Certaldo), p. 55 (bronzetto da S. Gimignano).
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taia88, Barberino89, dove hanno sede nuclei aristocratici legati proba bilmente ad una economia agricola, mentre a Monteriggioni sembra ipotizzabile una dinamica simile a quella di Volterra, con forte adden samento dei rinvenimenti tra la metà del VI e la metà del V secolo a.C.90. Più a sud, lungo la costa, il tradizionale binomio Vetulonia-Roselle sembra risolto, almeno dalla fine del VI, a favore di quest'ultima, che si munisce forse anch'essa proprio allora di una cinta muraria91 e cert amente di un quartiere ben strutturato sulla collina sud, che prevede anche una certa attività artigianale92. Dunque il quadro che emerge è fortemente diversificato. Mentre tra la fine del VI e la fine del V si constata in molti centri un abbassa mentodel livello generale della ricchezza, di quel benessere diffuso che sembrava il segno del tardo arcaismo, esso non sembra comunque quas i mai risolversi in crisi senza ritorno. Le diverse economie rispondono in maniera diversificata alla mutata situazione interna e internazionale, talora incrementando le attività di base legate allo sfruttamento delle risorse agricole, ma probabilmente mutando tecniche e modelli, come Chiusi, Arezzo e forse Volterra, proiettando nel contempo anche i propri interesse verso il mercato e il commercio (come certamente la stes-
88 Cfr. Gruppo archeologico colligiano, Necropoli etrusco di Dometaia, Colle di Val d'Elsa 1981, p. 6, tav. 7, 8; tav. XII, XIII (grande tomba a camera con pianta a croce, con frammenti di urne e ceramiche attiche di V secolo a.C). 89 C. Cianferoni, S. Martino ai Colli. Un centro rurale etrusco in Valdelsa, Roma, 1984. Ceramiche attiche anche dalle vicinanze di Barberino, De Marinis, op. cit., p. 56. 90 R. Bianchi Bandinella in La Balzana, II, 1923, p. 14 sg. ; De Marinis, op. cit., p. 52 sg. Cfr. però, ibidem, p. 110. 91 Terminus post quern alla metà del VI secolo a.C, come risulta dal saggio sulla collina, dove sotto lo strato di schegge di lavorazione delle mura sono stati rinvenuti frr. arcaici, cf. D. Canocchi, in SE, XL Vili, 1980, p. 46. La contrazione dell'abitato, conse guente alla costruzione delle mura è dimostrata dalla circostanza che l'unica traccia di insediamento tardo arcaico ο classico è costituita da un muro a grosse pietre rinvenuto nella parte più meridionale della collina nord (cfr. M. Michelucci, in Roselle. Gli scavi e la mostra, Pisa, s.d., p. 53). Abbondante ceramica attica è stata restituita dagli scavi effettuat i lungo le mura (Canocchi, art. cit., p. 15), nonché lastre architettoniche di V secolo a.C. (P. Bocci, in La città etrusco e italica preromana, Bologna, 1970, p. 158, tav. XX b). 92 Ampia panoramica sulle importazioni attiche del V secolo a.C. e sul largo parellelismo con la situazione registrata a Populonia, è offerta da P. Bocci, in Etruria mineraria, p. 509 sg. e M. Michelucci, ibidem, p. 510. Interessante la constatazione del Michelucci sulla scarsisima presenza di ceramica attica a figure nere, tutta comunque della fine del VI secolo a.C.
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sa Arezzo, Cortona e Perugia); altri invece incrementando l'attività estrattiva e il controllo diretto sui mezzi di produzione, come Populonia; mentre la sola Pisa sembra interessata ad una politica di ampio respiro che la vede presente in Versilia, nella media valle dell'Arno e in Garfagnana. Solo una città sembra scomparire nel V secolo, e con essa un sist ema arcaico di concezione dell'assetto sociale, Vetulonia. Come è noto, all'inizio del secolo fu scoperto, sull'arce della città (cinta di mura di epoca incerta) un deposito di oltre un centinaio di elmi di bronzo di tipo Negau, schiacciati e contorti e gettati entro una grande fossa93. Molti di essi, almeno una cinquantina, recano sull'orlo della tesa - e più raramente sulla calotta stessa - un'iscrizione graffita, per tutti identica, haspnas. (Tav. Ili, 2). I calatteri epigrafici e il tipo del supporto94 fanno pensare ai primi decenni del V secolo a.C, mentre l'avvenuta probabile sincope posttonica potrebbe far abbassare la cronologia di qualche decennio, non oltre comunque la metà del secolo, che corrisponde alla datazione dei materiali attici più tardi rinvenuti nelle necropoli della città e nell'area presumibilmente sacra di Costa murata95. Qualunque sia il senso e la motivazione della deposizione degli elmi, il lemma, che non sembra spiegabile come teonimo, del resto non attestato, appare meglio riferibile alla sfera onomastica; si può dunque pensare a un gentilizio, formato su una base haspa, conosciuta in età recente come cognomen96. Il complesso degli elmi, attestando a quanto pare l'esistenza di un'armata di un clan familiare, richiama irresistibil-
93 L. Pernier, in Ausonia, IX, 1919, p. 13 sg., fig. 3-4; S. Gabrovec, in Atti del VI con vegno internazionale di Scienze preistoriche e protostoriche, III, Roma, 1966, p. 114 sg., in particolare p. 119, II, 5 (per gli esemplari confluiti al Museo di Vienna). 94 Cfr. ad es. Aa.Vv., La Romagna tra VI e IV secolo a.C, Bologna, 1981, p. 160 sg. tav. 82, n. 86.42 (tb. 2/1950), associato con ceramiche attiche del primo trentennio del V secolo a.C. 95 Notevoli attestazioni dal territorio, cfr. C. Curri, Vetulonia, in Forma Italiae, Regio VII, voi. V, Firenze, 1978, p. 25 (Val Beretta, Val d'Ampio, S. Germano, Poggetto Lepri, Selvello) ; D. Levi, in MAL, XXXV, p. 58 (Macchia del monte). Tra i materiali di più recent e rinvenimento, i termini inferiori sono costituiti da uno stamnos del Pittore di Sisifo, del 470-460 a.C. (A. Talocchini, in Etruria mineraria, p. 112) da Poggio Pelliccia e da una kylix del Pittore di Tarquinia, databile attorno al 450 {ibid. p. 119), da Costa Murata. Interes santetestimonianza di un tipo di architettura tombale meglio attestata a Populonia è la tomba a edicola di Scala Santa cfr. A. Minto, in Studi romani, 1913, p. 340; Id., SE, Vili, 1934, p. 109 sg., fig. 2. 96 Th.L.E., p. 170, s.v. haspa, da Chiusi, CIE, 2947.
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mente un episodio ben noto alla storiografia romana, e quasi contem poraneo : la guerra privata che la gens Fabia condusse contro Veio nel 481, risultasi nel disastro della Cremerà97. Forse anche il «ripostiglio» vetuloniese rappresenta il definitivo tramonto di un modo di intendere i rapporti sociali ormai desueto e destinato comunque a soccombere nell'età del conflitto delle classi. Addano Maggiani
97 Sulla questione, ad es. R. M. Ogilvie, Early Rome and Etruscans, Glasgow, 1976, p. 47 sg.
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Mi sia consentito in primo luogo di esprimere soddisfazione per l'invito che mi è stato rivolto e soprattutto per l'argomento che mi è stato proposto dagli amici della Scuola Francese. Può sembrare para dossale ma inserire l'Etruria Padana in un Convegno che ha per tema l'Italia del V secolo non è né usuale né scontato, e costituisce a mio avviso una occasione importante per avviarci al superamento di un cer tomodo di considerare quest'area settentrionale come una lontana e periferica emanazione della madre patria tirrenica, con l'inevitabile conseguenza di perdere di vista, in taluni casi, lo stretto parallelismo, anche cronologico, e le profonde connessioni che esistono tra questi due territori. Tra l'altro, mai come negli studi di questi ultimi anni si sono riscontrati tanti e così profondi legami, nell'uno e nell'altro senso, tra l'area tirrenica e l'area padana che non è più lecito ormai conside rare una semplice e attardata appendice della prima, ma che si present a in modo sempre più chiaro con una propria identità sia sul piano culturale che su quello delle vicende storiche. A questo elemento di soddisfazione si accompagna una grande preoccupazione per il difficile compito che mi aspetta. Nonostante il rischio quasi inevitabile di ripetere cose già note il modo migliore di portare un reale contributo alla discussione mi è sembrato quello di offrire un quadro della situazione padana nel corso del V secolo, pre sentando in modo sommario le principali acquisizioni di questi ultimi anni con l'aggiunta di qualche breve osservazione che vuole essere essenzialmente una proposta per il dibattito che seguirà. I limiti di tem poche giustamente ci sono stati imposti e che vorrei rispettare impon gonotra l'altro una drastica selezione all'interno delle molte questioni che andrebbero considerate. Ma anche a questo si potrà ovviare, even tualmente, in sede di discussione. Nel Catalogo della Mostra di Spina e dell'Etruria Padana (1960) e in
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alcuni scritti successivi G. A. Mansuelli l tirando le conclusioni di una attività quasi ventennale di scavo e di studio tracciava un quadro dell'area padana che tutti noi conosciamo bene e che è stato per molto tempo un autentico caposaldo. Alla centralità della Bologna villanovia na che controllava un ampio territorio compreso tra il Santerno e il Panaro, era subentrata nella seconda metà del VI secolo una organizza zione più complessa imperniata oltre che su Bologna, che ne costituiva comunque il fulcro, sulla città di Spina nell'Adriatico, priva di una pre cisa identità sul piano culturale, dedita esclusivamente all'importazione e alla redistribuzione della ceramica attica; e sul centro appenninico di Marzabotto nella Valle del Reno che avrebbe avuto una analoga funzio ne prevalentemente ricettiva rispetto all'Etruria tirrenica, caratteriz zandosi quindi per una relativa povertà nelle proprie manifestazioni culturali. Verso la Romagna, mentre Verucchio nota soltanto da pochi scavi ottocenteschi veniva classificata come fenomeno periferico del Villanoviano padano, si andò delineando di lì a poco una facies archeo logica che fu subito attribuita ai Celti, accreditando la cronologia alta di Livio per il loro arrivo a sud delle Alpi e per la loro espansione nella pianura padana. A ovest la documentazione archeologica alquanto fat iscente spinse lo stesso Mansuelli a parlare di superficiali coloriture etrusche su di un fondo culturale sostanzialmente anetrusco. È evidente che da allora molta strada è stata percorsa. Ci sono stati in primo luogo scavi nuovi e importanti come quelli di Verucchio nella Romagna e di Bagnolo S. Vito nel mantovano, oltre a scoperte isolate, ma sensazionali come quelle di Bologna (cippi di via Fondazza) e di Rubiera (segnacoli tombali con iscrizione etrusca) sulle quali dovremo tornare. Ma ci sono stati anche alcuni fondamentali progressi sul piano dello studio con una autentica reimpostazione del problema padano, da parte di C. Morigi Govi2 per la fase villanoviana e in modo particolare
1 Mi riferisco in particolare a G. A. Mansuelli, Lineamenti antropogeografici dell'Emilia Romagna dalla preistoria alla romanizzazione, in Preistoria dell'Emilia e Romag na,II, Bologna, 1963, p. 117-171; Id., La formazione delle civiltà storiche nella pianura padana orientale. Aspetti e problemi, in SE, XXXIII, 1965, p. 3-47. Altri contributi dello stesso Mansuelli sono elencati in G. Sassatelli, Bologna e Marzabotto. Storia di un proble ma, in Studi sulla città antica. L'Emilia-Romagna, Roma, 1983, p. 99-100 note 190 e 192. 1 R. Pincelli-C. Morigi Govi, La necropoli villanoviana di S. Vitale, Bologna, 1975; C. Morigi Govi, La prima età del ferro nell'Emilia e Romagna, in Atti XIX Riunione scienti fica dell'Ist. italiano di Preistoria e Protostoria in Emilia e Romagna (11-14 ottobre 1975), Firenze, 1977, p. 163-180; Ead., // tintinnabulo della «Tomba degli Ori» dell'Arsenale Miti-
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da parte di G. Colonna3 con diversi contributi veramente innovativi su Etruschi e Umbri nelle loro rispettive manifestazioni; sui Greci di Adria e sul problema della frequentazione dell'alto Adriatico; sulla precoce diffusione della scrittura in area padana e nelle aree settentrionali limi trofe. Ne è emerso un quadro di tutta la Valle del Po estremamente ricco e complesso dal quale credo sia utile partire per una rassegna dei principali aspetti e problemi dell'Etruria padana, problemi e aspetti che per comodità espositiva ho pensato di suddividere in cinque punti.
Problemi del popolamento e trasformazione del sistema padano nella seconda metà del vi secolo Non vorrei dare l'impressione di partire da troppo lontano, ma riguardo al problema del popolamento occorre fare alcune precisazioni sulla lunga stagione villanoviana ed orientalizzante per capire meglio le grandi trasformazioni che si verificarono nella seconda metà del VI secolo. A partire dal IX secolo nel territorio ad est della città (S. Vitale, Savena e Cà dell'Orbo) ed a partire dagli inizi dell'VIII secolo nel sito della futura Bologna, si registra una consistente ed improvvisa concentrazione demografica4 per spiegare la quale non sono sufficienti - allo tare di Bologna, in ArchClass, 23, 1971, p. 211-235; C. Morigi Govi-S. Tovoli, La tomba Melenzani 22. Osservazioni sul Villanoviano III a Bologna, in SE, XLVII, 1979, p. 3-26. 3 G. Colonna, Ricerche sugli Etruschi e sugli Umbri a nord degli Appennini, in SE, XLII, 1974, p. 3-24; Id., / Greci di Adria, in RSA, 4, 1974, p. 1-21 ; C. Morigi Govi-G. Colonn a, L'anforetta con iscrizione etrusco da Bologna, in SE, XLIX, 1981, p. 67-93; G. Colonna, La più antica iscrizione di Bologna, in Studi e documenti di archeologia, II, 1986, p. 57-66. Sul problema delle più antiche testimonianze alfabetiche si veda anche G. Sassatelli, Graffiti alfabetici e contrassegni nel villanoviano bolognese. Nuovi dati sulla diffusione dell'alfabeto in Etruria padana, in Emilia preromana, 9-10, 1981-1982 (ed. 1984), p. 147255 ; Id., Nuovi dati sulla diffusione dell'alfabeto in Etruria padana, in La Romagna tra VI e IV secolo a.C. nel quadro della protostoria dell'Italia Centrale (Atti del Convegno, Bologna 1982), Bologna, 1985, p. 99-141. 4 II rapporto tra il più antico popolamento villanoviano (IX secolo), documentato prevalentemente nella pianura a est di Bologna (ma anche a nord, nell'area dell'attuale quartiere fieristico), e quello più recente che dagli inizi dell'VIII secolo pare concentrarsi nell'area della futura città storica, resta ancora da chiarire sia per quanto riguarda le motivazioni (i regimi alluvionali del Savena, lungo il quale si trovavano i villaggi più anti chi, non bastano a spiegare un fenomeno di così vaste proporzioni) sia per quanto riguar da la dinamica di questo spostamento. Di sicuro si può dire che la convergenza verso
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stato attuale della documentazione - le scarse testimonianze della pre cedente età del bronzo. Eventuali nuove scoperte, sempre possibili, potranno forse attenuare questo divario, ma difficilmente potranno col marlo. Come già è stato detto in modo molto autorevole da M. Pallottino e da M. Torelli5, a monte di questo popolamento sta probabilmente un fenomeno di parziale colonizzazione dall'esterno che dopo una pr ima fase di assestamento si caratterizza per la progressiva e capillare occupazione di un vasto territorio circostante a scopi eminentemente agricoli. L'ipotesi che al notevole incremento demografico della grande Bologna villanoviana abbiano contribuito anche gruppi venuti da fuori sembrerebbe trovare un ulteriore elemento di supporto nell'onomastica delle più antiche iscrizioni bolognesi dove accanto a nomi dal carattere largamente locale come Venu, Ukvi, Remesalu si trovano nomi come UneiOa e Ana che rinviano all'Etruria, ο come Aie che sembra ricolle garsialla Romagna degli Umbri6. Prescindendo da queste ultime con siderazioni sulle quali non vorrei insistere troppo trattandosi di fatti alquanto posteriori al primo popolamento villanoviano per i quali si l'area dell'attuale centro storico, documentata dalla crescita improvvisa delle grandi necropoli occidentali di Via A. Costa, provoca un sensibile calo demografico nelle necrop olipiù orientali e più antiche (S. Vitale, Savena e Ca' dell'Orbo) e si caratterizza per una precisa scelta territoriale nel senso cioè che la vasta area compresa tra l'Aposa e il Ravone viene utilizzata solo ed esclusivamente per l'abitato, mentre i sepolcreti si dispongono all'esterno di essa. Questa netta distinzione tra l'area dell'abitato, per quanto ancora costituito da nuclei distinti di capanne, e le zone adibite a sepoltura non sembra presenta re eccezioni. È vero infatti che lo Zannoni segnala resti di abitazioni anche oltre il fiume Aposa, ma è altrettanto vero che tali resti erano fatiscenti e di non facile lettura, a detta dello stesso Zannoni. E anche ammettendo che in talune aree di sepoltura fossero present i strutture diverse dalle tombe (che tra l'altro potrebbero anche non riferirsi ad abitazion i), resta sempre il fatto che nell'area prescelta per l'abitato, cioè nel terrazzo compreso tra l'Aposa a est e il Ravone a ovest, non ci sono assolutamente sepolture, almeno fino alla metà del IV secolo, con un'assenza oltremodo significativa. Sul problema si veda G. Sassatelli, Topografia e «sistemazione monumentale» delle necropoli felsinee, in La fo rmazione della città preromana in Emilia Romagna (Atti del Convegno, Bologna, 1985), Bologna, 1988 p. 197-202. Sulla dinamica del popolamento tra IX e Vili secolo si veda La necropoli villanoviana di Ca' dell'Orbo a Villanova di Castenaso. Problemi del popolamento dal IX al VI secolo a.C. (Mostra), Bologna, 1979, p. 9-13 (D. Vitali); p. 13-17 (C. Morigi Govi-S. Tovoli). Per altri dati di più recente acquisizione si veda anche La formazione del lacittà in Emilia Romagna (Mostra), Bologna, 1987, p. 70-83, con bibliografia. 5 M. Pallottino, Riflessioni sul concetto di villanoviano, in Miscellanea archaeologica Tobias Dohrn dedicata, Roma, 1982, p. 67-71; Id., Etruscologia, Milano, 1984, p. 55-57, 112 e soprattutto p. 148-150; M. Torrelli, Storia degli Etruschi, Bari, 1981, p. 38, 43-44. 6 Colonna, La più antica iscrizione di Bologna. . . cit., p. 64-66.
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potrebbero proporre anche altre spiegazioni, è evidente che pure in area padana alla solidarietà tribale dei piccoli villaggi dell'età del bronz o,tra loro sostanzialmente equivalenti, si sostituisce un polo primario ed emergente che controlla un vasto territorio circostante, subordinan done l'assetto alle proprie esigenze economiche (Fig. 1). Che tale riorga nizzazione fosse progressiva e partisse da Bologna lo dimostra tra l'al tro il divario cronologico tra le più antiche testimonianze di quest'ult ima e quelle dei siti più lontani che sono anche i più recenti, e la cui cronologia mostra un processo di espansione e di controllo ancora in atto nel corso del VII secolo. A nord tale territorio si spingeva fino quas i al Po come documentano i rinvenimenti di Bondeno, di Argenta e di San Martino in Spino, quest'ultimo probabilmente in prossimità di una direttrice commerciale7; a sud si addentrava moderatamente all'inter no delle valli appenniniche8; ad ovest si estendeva sicuramente oltre il fiume Panaro come mostrano i recenti rinvenimenti di Rubiera nella Valle del Secchia e quelli di Carpi nell'alta pianura a nord-ovest di Bologna9. Mentre a occidente di questo vasto comprensorio bolognese si registra una sorta di vuoto demografico, a oriente si sviluppa l'altro grande polo villanoviano della Regione, cioè Verucchio10, nell'alta Vall edel Marecchia, abbarbicato su una altura difesa naturalmente e distante dal mare appena 15 Kilometri proprio come molte città dell'area tirrenica, specie di quella meridionale. Forse meno popolato di Bologna, ma sicuramente coevo per quello che riguarda la prima fase di frequentazione del sito, Verucchio sembra più proiettato verso il
7 Si veda ora M. Calzolari, Tre nuovi siti dell'età del ferro nel territorio di Bondeno, in Quaderni della Bassa Modenese, I, 2, 1987, p. 86-93, con bibliografia precedente sui sin goli siti. 8 II problema è ancora poco studiato. Si vedano comunque, limitatamente alla Valle del Reno, le considerazioni di G. A. Mansuelli, Contributo alla conoscenza del popolament o pre-protostorico emiliano : la Valle del Reno, in Atti X Riunione scientifica dell'Istituto italiano di preistoria e protostoria (Verona, 21-23 novembre 1965), Verona, 1966, p. 201210; e anche D. Vitali, II villanoviano nella Valle del Reno : due tombe inedite da Spertica no presso Marzabotto, in Studi in onore di F. Rittatore Vonwiller, voi. II, Corno, 1982, p. 777-792. 9 L. Malnati-G. Bermond Montanari, L'Emilia occidentale, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 139-164, con bibliografia precedente sui singoli siti. 10 Per Verucchio rimando a G. V. Gentili, Testimonianze dell'abitato villanoviano ed «etruscoide» di Verucchio, in La formazione della città preromana (Convegno). . . cit., p. 79-103; e G. V. Gentili, Verucchio, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 207261, entrambi con tutta la bibliografia precedente.
Fig. 1 - Carta dell'Etruria padana tra IX e VI secolo a.C. con indicazione approssimativa del territorio controllato da Felsina.
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mare, più culturalmente arroccato nelle sue fastose manifestazioni di età orientalizzante e soprattutto permeato di forti coloriture meridional i dovute essenzialmente al ruolo svolto dal Tevere come diretta e facile via di comunicazione verso l'Etruria di Veio e di Tarquinia11. Anche gli Etruschi di Verucchio ebbero sicuramente un loro territorio. Esso ci appare tuttavia assai meno definito di quello bolognese, oltre che per un probabile difetto di documentazione, per la diversa natura del cent ro, meno interessato allo sfruttamento agricolo della pianura e più attento al controllo della via verso l'Etruria sulla quale si trovava, oltre che più proiettato verso il mare. Tornando al tema di Bologna e del suo territorio, il recente rinven imento a Rubiera nel Reggiano di due cippi cilindrici12 riccamente decorati a bassorilievo con motivi del repertorio orientalizzante e due lunghe iscrizioni etrusche una delle quali menziona uno ζίΐαθ non è pri vo di implicazioni anche per il problema dei tempi, dei modi e delle conseguenze di questa antica espansione etrusca nella pianura padana. Il titolo di ζϊΐαθ, il più antico in assoluto di tutta l'area etruschizzata, compresa quella tirrenica, designava probabilmente un'alta carica mili tare13 per la quale viene spontaneo pensare in questa età (i due cippi sono stati datati rispettivamente alla fine del VII secolo e agli inizi del VI) a episodi come la battaglia del Ticino con i Celti di Belloveso, emblematica a mio avviso di una situazione di palese conflittualità tra i gruppi che stavano a ridosso del Po per il controllo e il mantenimento dei territori acquisiti. Più tardi, anche la spedizione di Etruschi padani, Umbri e Dauni, contro Cuma e la Campania, forse in conseguenza di una forte pressione celtica, si presenta con i caratteri di una iniziativa militare, bene organizzata14. L'importanza di questi due episodi, ma direi soprattutto del primo, inducono a pensare che dietro lo zilad di 11 Si veda in particolare G. Bartoloni, Relazioni interregionali nell'VIII secolo a.C. : Bologna- Etruria Miner aria-Valle Tiberina, in Studi e documenti di archeologia, II, 1986, p. 45-56. Si veda anche G. Colonna, // Tevere e gli Etruschi, in // Tevere e le altre vie d'ac qua del Lazio antico, Roma, 1986, p. 90-97. 12 G. Bermond Montanari, Rubiera, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 141-147. 13 In questo senso G. Colonna, // lessico istituzionale etrusco e la formazione della cit tà (specialmente in Emilia Romagna), in La formazione della città preromana (Conveg no).. . cit., p. 35. 14 Ancora Colonna, art. cit. a nota precedente, p. 35 con bibliografia; M. Torelli, / Galli e gli Etruschi, in Celti ed Etruschi nell'Italia centro-settentrionale dal V secolo a.C. alla romanizzazione (Atti del Colloquio, Bologna, 1985), Bologna, 1987, p. 5.
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Rubiera, impegnato in questa lontana terra di confine a difendere l'Etruria padana, anche militarmente, se necessario, dagli attacchi che potevano venirle da nord, ci fosse con ogni probabilità, direttamente ο indirettamente, la lunga mano di Felsina, grande centro propulsore di questa agguerrita presenza etrusca che proprio in quegli anni si era spinta ormai fino quasi al Po. Riesce difficile infatti, per episodi di que sta portata, pensare ad iniziative condotte autonomamente da piccole comunità locali. Il prevalente assetto in chiave di produzione agricola non deve far cidimenticare che questa più antica Etruria padana aveva una organiz zazione itineraria altrettanto stabile e feconda, a garanzia di contatti e di relazioni molto strette con l'area tirrenica. Episodi come l'acquisizio ne della scrittura e le prime esperienze di scultura monumentale in pie tra15; importazioni come gli skyphoi dipinti a chevrons delle tombe Melenzani 22 e Benacci 888 16, Y aryballos panciuto di tipo protocorinzio della tomba Certosa 16917, Yalabastron corinzio transizionale della tom baAureli 1118 si spiegano con una lunga e costante frequenza di rap porti tra le due aree, naturalmente attraverso i valichi dell'Appennino. Gli esiti di questa frequentazione del resto arrivano anche più a nord come dimostrano ancora una volta la diffusione assai precoce della scrittura, l'arrivo di merci preziose come il bacile di Castelletto Ticino, il frammento di anforone squamato ceretano di Quinzano d'Oglio e Yaryballos protocorinzio di Este19. Almeno da una certa età in poi la maggior parte di tali rapporti doveva avvenire attraverso la valle del Reno e questo fatto non può essere dimenticato quando si valuta sotto il profilo cronologico la docu mentazione di un'area come quella di Marzabotto che si trova appunto in questa valle. La cronologia alta di alcuni materiali20 non è sufficien15 Si veda in proposito G. Colonna-F. W. v. Hase, Alle origini della statuaria etrusca : la tomba delle statue presso Ceri, in SE, LII, 1984 (ed. 1986), p. 53-54. Per la scrittura rimando ai lavori citati a nota 3. 16 Morigi Govi-Tovoli, art. cit. a nota 2. 17 M. Martelli, Un aryballos cumano-pithecusano da Bologna, in StudUrb, LV, 19811982, p. 73-78. 18 Da ultimo C. Morigi Govi, in Civiltà degli Etruschi (Mostra), Firenze, 1985, p. 106107, n. 3. 17. 19 Gli Etruschi a nord del Po (Mostra), voi. I, Mantova, 1986, rispettivamente p. 81-84; 60-61 e 84-85 ; 92-94. 20 Si tratta di due uova di struzzo (perdute) e di alcuni « vasi corinzi » : un aryballos globulare, un balsamario ad anello di cui resta un piccolissimo frammento ed uno sky-
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te a mio avviso per rialzare la cronologia del primo insediamento «co loniale» (uso questo termine tra virgolette, anche perché su di esso dovremo tornare tra poco). Eventuali materiali della prima metà del VI ο anche della fine del VII secolo, tra i quali si dimentica troppo spesso che ci sono anche numerose fibule di bronzo a sanguisuga, a navicella e a drago21 di produzione locale ο forse di derivazione bolognese, pos sono costituire semplicemente le tracce di una più antica frequentazio ne del pianoro che non ha rapporti diretti con la prima «colonia», cioè con l'insediamento della seconda metà del VI secolo, e va valutata alla stessa stregua dei piccoli nuclei villanoviani di Sperticano, di Canovella
phos con fregio di animali, variamente datato nell'ambito della prima metà del VI secolo. Sono tutti visibili in una fotografia del vecchio Museo, ma non di tutti è sicura la prove nienza. Per lo skyphos in particolare già il Brizio escludeva perentoriamente che fosse stato trovato a Marzabotto, mancando qualsiasi notizia sul ritrovamento ed essendo allora perfettamente conservato (attualmente è frammentario e lacunoso in conseguenza della distruzione del museo avvenuta nel 1943) per cui si poteva pensare ad un acquisto da parte del conte Aria. Anche deìYaryballos e di una delle due uova di struzzo ignoriamo le circostanze del ritrovamento. Sappiamo invece che l'altro uovo di struzzo fu trovato sporadico nel sepolcreto orientale; e il balsamario ad anello faceva parte del corredo di una tomba a fossa dello stesso sepolcreto (E. Brizio, in MonAL, I, 1889, cc. 274-275 e 420; Id., in Atti e memorie della Deputazione di storia patria per le province di Romagna s. Ili, III, 1885, p. 216, tav. V, 6,6a e 6b. Si veda anche Sassatelli, Bologna e Marzabotto. . . cit., p. 110 con bibliografia. Per l'uovo di struzzo Torelli, in SE XXXIII, 1965, p. 334 n. 1 e pp. 340-341, con datazione alla prima metà del VI secolo. Per lo skyphos, L. Malnati, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 129, con bibliografia. Per altri dati su queste più antiche ceramiche di Marzabotto, A. Grenier, Bologne villanovienne et étrusque, Parig i,1912, p. 98 nota 3 e p. 172; O. Montelius, Civilisation primitive en Italie, Stoccolma, 1895, tav. 109 n. 17 e H. Payne, Necrocorinthia, Oxford, 1931, p. 189. Il balsamario ad anello rientra perfettamente nel gruppo dei «balsamari a ciambella» individuato da P. Mingazzini, Vasi della Collezione Castellani, I, Roma, 1930, p. 149-150, con attribuzione di alcuni esemplari a produzione rodia, sia pure dubitativamente. A questi rinvenimenti ottocenteschi si è aggiunto di recente un coperchietto di pisside in avorio, riferito ad età tardo-orientalizzante, trovato in un pozzo dell'area urbana per la quale si veda L. Malnat i, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 129, con bibliografia precedente. 21 Rinvenute in vari settori dell'area urbana, sempre comunque in giacitura secondar ia. Brevi cenni in Aa. Vv., Guida alla città etrusco e al Museo di Marzabotto, Bologna, 1982, p. 32, 44, 61, 65. Per due esemplari a sanguisuga dall'area della fonderia si veda L. Malnati, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 135. Solo da uno studio che ne precisi cronologia e provenienza potranno venire dati utili per chiarire questa più antica frequentazione del pianoro e i suoi eventuali rapporti con Bologna.
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o di Ramonte22, dislocati a poca distanza l'uno dall'altro lungo la stes saValle del Reno, in chiara funzione itineraria. Lo stesso discorso vale in fondo anche per Bologna. La presenza di frammenti di una coppa tipo Siana nella Necropoli dei Giardini Marg herita23 non significa che la seconda «colonizzazione» della città e dell'area padana debba risalire così indietro nel tempo, ma significa soltanto che la Bologna tardo-orientalizzante aveva contatti con Adria dove la precoce presenza dei Greci, forse Ioni alla ricerca di nuovi merc ati, si può datare ormai al 580-560 sulla base del più antico materiale di importazione tra cui guarda caso un frammento di coppa tipo Siana e due frammenti di crateri corinzi con sirene24. Tutto ciò consente a mio avviso di riaffermare che solo a partire dal 540-530 ha inizio quel processo di riorganizzazione dell'area padana che porta a un profondo mutamento del quadro culturale e provoca anche una vistosa trasformazione del popolamento. Rialzare indiscr iminatamente tale data significherebbe tra l'altro perdere di vista il qua dro storico generale in cui tale evento va collocato, cioè le ben note vicende che si verificarono nel Tirreno poco dopo la metà del VI secol o.Del resto la concomitante comparsa di coppe dei Piccoli Maestri sia a Marzabotto che a Bologna25, e di alcuni frammenti ceramici coevi nell'abitato di Spina26 sta ad indicare che solo a partire da questo momento ha inizio la radicale trasformazione dell'area padana attra verso la rifondazione dei vecchi centri come Felsina e attraverso la fon dazione ex novo di città come Spina, Marzabotto e Mantova (Fig. 2). A proposito di Felsina vorrei accennare brevemente ad un'altra questio ne. Non ci sono elementi probanti per sostenere che la prima metà del VI secolo sia stato per il capoluogo padano un periodo di crisi, come si 22 Su questi siti e sul loro rapporto con Bologna rimando ai lavori di G. A. Mansuelli e D. Vitali, citati a nota 8. 23 H. A. G. Bruder, Siana Cups I and Komast Cups, Amsterdam, 1983, p. 265, n. 310. 24 G. Bermond Montanari, Ceramica attica a figure nere del Museo archeologico di Adria, in BA, XLIX, 1964, p. 289-303; Colonna, / Greci di Adria. . . cit., p. 12-13, nota 44; e Bruder, Siana Cups... cit., p. 239, η. 41. Si veda anche, più in generale, G. Bergonzi, Società della tarda età del ferro, loro articolazioni e relazioni : l'area adriatica tra VI e IV secolo a.C, in La Romagna tra VI e IV sec. a.C. (Convegno). . . cit., p. 70-74, con bibliograf ia. 25 Da ultimo Colonna, / Greci di Adria. . . cit., p. 20, nota 80 con bibliografia prece dente. 26 F. Berti, Spina. L'abitato alla luce degli ultimi scavi, in La Romagna tra VI e IV sec. a.C. (Convegno). . . cit., p. 194-196, fig. 12 e 13.
Fig. 2 - Carta dell'Etruria padana tra la fine del VI e gli inizi del IV secolo a.C. con indicazione dei principali centri etruschi.
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trova sovente ripetuto. Il vuoto apparente che si registra nella docu mentazione archeologica è infatti casuale e dipende dal modo disordi nato con cui furono scavati i due principali sepolcreti appartenenti a questa fase, cioè l'Arsenale Militare e il sepolcreto Arnoaldi27. Del resto proprio attorno al 600 ο poco dopo Felsina si esprimeva con i due monumentali cippi di via Fondazza e con la lunga iscrizione dell'anforetta Melenzani28, due documenti dietro ai quali si intravede una città fiorente sul piano economico e piena di risorse su quello culturale. Se si accetta l'ipotesi di una crisi nella prima metà del VI secolo si finisce poi con l'attribuire le grandi trasformazioni della seconda metà del VI secolo ad un programma che si prefiggeva di rivitalizzare un sistema economico ormai consunto e asfittico. Anche se non è improbabile che il vecchio modello produttivo cominciasse a mostrare i segni del tempo, sarei piuttosto cauto nell'infatizzare questa eventuale crisi ed eviterei comunque di pensare ad un vero e proprio dissesto economico per il comparto padano nella prima metà del VI secolo. Ciò significa che la sua riorganizzazione partiva da altri presupposti ed aveva altri intenti. Se le prime avvisaglie di questo nuovo assetto si collocano tra il 540 e il 530 con la presenza di alcune avanguardie nei centri che saran no di lì a poco fondati ex-novo, soltanto a partire dal 520-510 si assiste ad un reale potenziamento di tutta l'area. I caratteri essenziali di que sta riorganizzazione balzano all'occhio se solo si analizza la carta del popolamento nelle due fasi29. Nei periodi villanoviano ed orientalizzant e tutta l'area attorno a Bologna risulta densamente popolata con pic coli nuclei la cui fitta dislocazione fino ad una distanza di 25-30 chilo metri dal capoluogo (ma ce ne sono anche a 40-50 km di distanza) risponde ad esigenze prevalentemente agricole. Nel successivo periodo felsineo, cioè a partire dalla metà del VI secolo questa capillarità del popolamento attorno a Bologna cede il passo ad alcuni significativi
27 C. Mori« Govi, Problemi artistici e cronologici del villanoviano IV a Bologna, in Atti e memorie della Deputazione di storia patria per le Province di Romagna, n.s. XX, 1969, p. 21-22. Per alcuni brevi cenni sul modo caotico di condurre gli scavi in questi due sepolcreti si veda anche Sassatelli, Graffiti alfabetici. . . cit., p. 217 e p. 236. 28 Per i primi G. Bermond Montanari, in La formazione della città (Mostra), cit., p. 83-88. Per la seconda vedi nota 3. 29 In mancanza di lavori più aggiornati, indicazioni utili si possono comunque trarre da R. Scarani, Repertorio di scavi e scoperte dell'Emilia e Romagna, in Preistoria dell'Emil ia e Romagna, II, Bologna, 1963, con particolare riguardo alle carte del popolamento emiliano nelle diverse fasi cronologiche.
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addensamenti : il primo e il più importante lungo la Valle del Reno fino al crinale appenninico; il secondo verso Modena lungo la fascia pede montana e il terzo lungo la Valle dell'Enza con una situazione che sem bra speculare alla stessa Valle del Reno. Queste linee di infittimento stanno ad indicare che il nuovo assetto del territorio padano non risponde più, ο perlomeno non risponde esclusivamente ad esigenze di carattere agricolo (dico questo perché è impensabile che un'attività come l'agricoltura venisse improvvisamente declassata e dimenticata). Esso sembra invece finalizzato ad una riorganizzazione itineraria tesa al rafforzamento ο alla creazione di vie commerciali attrezzate e sicure che garantissero da un lato rapidi contatti con l'area tirrenica e favoris sero dall'altro un consistente smercio di prodotti verso nord. Sono in ultima analisi le direttrici del traffico commerciale a costituire l'ossatu ra di questo nuovo sistema di aggregazione che, non va dimenticato, si realizza attraverso la forma urbana, la sola capace di ristabilire quella superiorità economico-sociale posseduta un tempo dai primi coloni di età villanoviana ed ora verosimilmente in pericolo ο comunque in fase critica per l'incalzare degli eventi e di alcune grandi trasformazioni sul piano storico e sociale. Alla rivitalizzazione delle vie per il commercio si accompagna una profonda riorganizzazione del sistema produttivo interno, come vedre mo tra poco, secondo le linee di un organico progetto economico relat ivamente ai prodotti da destinare allo smercio. La stessa dislocazione di centri come Bologna e Marzabotto lascia intendere che la Valle del Reno costituiva la principale via di comunicazione fra la pianura pada na e l'Etruria tirrenica (oltre che la più antica visti i precedenti villano viani ed orientalizzanti). La Valle dell'Enza, più ad ovest, doveva costi tuire un'altra importante direttrice di traffico e come tale funzionò anch'essa da polo aggregatore per la demografia30. I rapporti molto
30 Sulla questione Colonna, Ricerche sugli Etruschi e sugli Umbri. . . cit. ; e, più di recente, A. Maggiani, Pisa, Spina e un passo controverso di Scilace, in La Romagna tra VI e IV secolo. . ., cit., p. 307-319, entrambi con bibliografia precedente. Si veda anche G. Ciampoltrini-P. Notini, Un insediamento etrusco nell'alta Valle del Serchio, in SE, LUI, 1985 (ed. 1987), p. 72-75, con posizione scettica sulla consistenza del popolamento etrusco nella Valle del Serchio e quindi, di fatto, sull'importanza dell'asse Serchio/Enza. Per una piena valorizzazione di questa via, anche in una prospettiva più antica della seconda metà del VI secolo, si veda Colonna, in La Romagna tra VI e IV secolo a.C. (Convegno). . . cit., p. 353, con richiamo al frammento di bucchero con motivo animalistico di produzione vetuloniese-rosellana, rinvenuto a Scandiano e privo di confronti più a est.
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stretti e privilegiati con quel settore dell'Etruria settentrionale che sta a nord di Pisa (Valle del Serchio) ne fanno una realtà importante all'i nterno di questo nuovo sistema. Almeno per la «fase Certosa» non credo tuttavia all'ipotesi che essa potesse costituire (o fosse addirittura rior ganizzata con questo intento) una alternativa alla Valle del Reno, in concorrenza con Bologna, considerando la stessa fondazione di Marzabotto una iniziativa antibolognese per la possibilità che essa offriva di raggiungere la zona occidentale direttamente da questo nuovo centro appenninico attraverso vie trasversali come la Valle della Venola senza essere costretti a passare dalla «vecchia capitale»31. È una ipotesi a mio avviso poco credibile proprio perché mi pare strano che Bologna abbia consentito ο comunque abbia accettato di buon grado la realizza zione di una via alternativa e concorrenziale a quella che lei stessa ave varifondato e che controllava da vicino, senza considerare la difficoltà di questa ipotetica via « trasversale » dal percorso notevolmente accident ato32.Si può pensare se mai che dopo avere avviato questa ampia rio rganizzazione, Bologna abbia provveduto in qualche modo al riordino di un vasto comparto occidentale imperniato sulla Valle dell'Enza, in aggiunta, non certo in concorrenza alla via del Reno, e sempre comun que sotto il suo parziale controllo. Restano ora da spiegare dinamica e caratteristiche di questa rio rganizzazione padana per la quale non si è esitato a parlare di una vera colonizzazione, da parte dell'Etruria interna e di Chiusi in particolare, secondo una consolidata ipotesi di G. A. Mansuelli33; con una parteci pazione del distretto volterrano ο da parte dello stesso santuario fede rale, stando alla tradizione, come ha di recente sottolineato M. Torell i34.Un piccolo contributo alla soluzione di questo problema può veni re dalla documentazione epigrafica.
31 G. A. Mansuelli, Marzabotto. Dix années de fouilles et de recherches, in MEFRA, 84, 1972, p. 136-138. Si veda anche L. Malnati, Marzabotto: la fase arcaica, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 128. Per un breve cenno alla questione, Sassatelli, Bologna e Marzabotto. . . cit., p. 125, con altra bibliografia. 32 Per passare dalla Valle del Reno a quella parallela del Samoggia seguendo la Val ledella Venola, occorre risalire da Marzabotto, che si trova a poco più di 150 metri s.l.m., fino quasi a 800 metri di altezza per poi ridiscendere alla stessa quota sul versante oppos to. 33 Mi limito a ricordare Mansuelli, Marzabotto. Dix années de fouilles. . cit., p. 138. 34 M. Torelli, / Duodecim Populi Etruriae, in Annali della Fondazione per il Museo «Claudio Faina» II, 1985, p. 51-52; Id., / Galli e gli Etruschi, cit. a nota 14, p. 5.
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Escludendo la Romagna che costituisce un problema a parte sotto questo aspetto, le iscrizioni dell'area padana sono circa centotrenta35 di cui 20 da Bologna, 12 da Marzabotto, poco più di un centinaio da Spi na, 63 da Adria, 20 da Mantova, 7 dall'Emilia occidentale, 5 da Monterenzio e 1 da Monteguragazza. Tale nucleo, abbastanza consistente e sicuramente destinato ad aumentare, non deve tuttavia essere conside rato in modo unitario. Di queste iscrizioni infatti solo 72 si riferiscono al V secolo ο al più tardi ai primi decenni del IV e sono così distribuite : 20 da Bologna, 12 da Marzabotto, 3 da Adria (su un totale di 63), 18 da Spina (sul totale di un centinaio circa), 11 da Mantova (su un totale di 20), le 7 dell'Emilia occidentale e l'unica dal santuario di Montegurag azza. Questa distinzione cronologica mi pare importante. Il primo dato che se ne ricava è una relativa omogeneità sul piano quantitativo della documentazione epigrafica, venendo meno l'apparente divario tra le iscrizioni di Spina e quelle degli altri centri padani. Non solo tale diva rionon esiste per tutto il V secolo, ma sul piano della pura e semplice quantità, senza tenere conto cioè di altri elementi come il formulario, la destinazione e la complessità delle iscrizioni, ne esce confermato il pr imato di Felsina, vera capitale dell'Etruria padana. Solo dopo la metà del IV secolo Spina raggiunge livelli di scrittura assolutamente impen-
35 Tale cifra è puramente indicativa dato che una documentazione epigrafica così frammentaria come quella padana non è facile da valutare anche sul piano meramente quantitativo. Per ciascun sito mi limito ad indicare quei testi dai quali si può risalire a questo conteggio. Bologna : per le iscrizioni sulle stele, Sassatelli, art. cit. a nota 4, p. 236-237 (elenco completo) ; per le altre iscrizioni, CII, I Suppl., 101 ; C/7, // Suppl., 1 ; CII, IH Suppl, 17; e infine REE, 1976, nn. 1-3 (Villa Cassarini). Marzabotto : G. Colonna, in Emilia preromana, 8, 1980, p. 114 (elenco completo, cui forse si può aggiungere REE, 1968, p. 229 n. 3, considerandola un'iscrizione nonostante l'esiguità della parte conservat a). Spina : G. Uggeri, Primo contributo all'onomastica spinetica, in Studi storico-linguistici in onore di F. Ribezzo, Mesagne, 1978, p. 331-399; elenco da integrare con REE, 1979, n. 216; REE, 1980, n. 2-52 ed REE, 1981, n. 2-11. Per Adria occorre rifarsi a G. B. PellegriniG. Fogolari, Iscrizioni etrusche e venetiche di Adria, in SE, XXVI, 1958, p. 103-154; G. B. Pellegrini, Nuove iscrizioni etrusche e venetiche di Adria, in Scritti in onore di L. Banti, Roma, 1965, p. 261-273; e inoltre REE, 1974, n. 229; REE, 1980, n. 1. Mantova : REE, 1983 n. 1-16; da integrare con l'elenco di CII, Appendice, p. 3 n. 8 a-k; si veda inoltre M. Pandolfini, Le iscrizioni etrusche del Mantovano, in Gli Etruschi a nord del Po (Mos tra), voi. I, Mantova, 1986, p. 116-123. Emilia Occidentale : Colonna, Studi sugli Etruschi e sugli Umbri. . . cit., p. 4. Monterenzio : D. Vitali, Monte Bibele tra Etruschi e Celti : dati archeologici e interpretaziune storica, in Celti ed Etruschi (Colloquio). . . cit., p. 371. Monte guragazza : REE, 1974, n. 232.
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sabili nel secolo precedente, ma si tratta di un fatto nuovo che si manif esta in un quadro storico profondamente mutato sul quale dovremo tornare. Per quanto riguarda l'onomastica nei centri etruschi della pianura padana, è stato osservato36 che mentre a Felsina si ha un uso quasi generalizzato del gentilizio, a Spina prevalgono nettamente i nomi indi viduali ad indicare una componente etrusca priva di antiche origini gentilizie e quindi recentemente integrata all'interno del corpo civico rispetto al quale si configura come ceto imprenditoriale ο forse anche subalterno. A tale proposito credo tuttavia si debbano considerare bene sia la diversa cronologia delle iscrizioni37 sia la loro diversa destinazio ne nei due centri posti a confronto : le formule binomie di Bologna, incise su segnacoli tombali, hanno un evidente carattere monumentale e «pubblico», mentre quelle di Spina, graffite su ceramiche deposte nelle tombe hanno di fatto un ruolo più modesto e per così dire «privat o», e del resto anche a Bologna le iscrizioni su instrumentum sono costituite da nomi singoli. Tenendo conto delle precisazioni cronologiche di cui si è detto vorrei osservare infatti che a Bologna le 14 iscrizio ni su stele sepolcrali hanno tutte prenome e gentilizio; ma le tre graffite su ceramiche deposte in tombe38 sono costituite da nomi singoli, due dei quali sono sicuramente dei prenomi. A Marzabotto su 10 iscrizioni onomastiche 3 sono binomie, 5 sono costituite da un nome unico che però è un gentilizio e soltanto in 2 il nome unico è un prenome. Anche in quest'ultimo caso le iscrizioni per così dire «pubbliche» come la dedica nel santuario delle acque ο i nomi dei proprietari apposti a cru dosu dischi fittili con pomoli di presa, sicuramente coperchi di dolio ο di pozzo39, presentano una formula binomia con prenome e gentilizio 36 M. Cristofani, Varietà linguistica e contesti sociali di pertinenza nell'antroponimia etrusca, in ΑΙΩΝ (Annali del Seminario di studi del mondo classico. Sezione linguistica), 3, 1981, p. 61-64 e, più di recente, M. Cristofani, Processi di trasformazione socio-economica nell'Etruria Padana fra VI e V secolo a.C, in La formazione della città preromana (Conveg no).. . cit., p. 52-53. 37 II nucleo più consistente delle iscrizioni spinetiche si colloca tra il 325 e il 250 (Cristofani, Varietà linguistica e contesti sociali. . . cit., p. 61), mentre le iscrizioni di Bolo gna sono tutte di V secolo, prescindendo naturalmente da quelle pre-Certosa. 38 Si tratta delle iscrizioni CII, I Suppl. n. 101 ; CII, II Suppl. n. 1 (con lettura veltur successivamente emendata in velQur; CII, III Suppl. n. 17. 39 Sulla funzione di questi dischi, G. Colonna, REE, 1974, p. 204-205 e, più di recente, G. Colonna, L'aspetto epigrafico, in Lapis Satricanus (Scripta Minora V), Roma, 1979, p. 69. Per i dischi di Marzabotto credo vada esclusa l'ipotesi di strumenti da vasaio nel senso
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oppure un unico elemento onomastico che però è sicuramente un gent ilizio. Tutto ciò mi pare doppiamente significativo dato che anche in questo caso ci troviamo di fronte a un centro di frontiera, una sorta di «mercato interno» ο di «città carovaniera» con un forte ceto imprendit oriale e con tutte le caratteristiche della colonia, paragonabile per cert iversi aWemporion di Spina. Mentre l'unica iscrizione di Monteguragazza, una solenne dedica santuariale, contiene 2 formule bimembri e le tre di Adria databili al V secolo sono costituite da prenome e gentilizio, quelle sicuramente ono mastiche dell'Emilia occidentale (tre) sono monomie, ma per lo meno in una di esse (venarnes) il nome unico è un gentilizio. Tra quelle di Spina, che per il V secolo non sono più di 18, si registrano soltanto due formule binomie, ma tra i nomi singoli alcuni hanno sicuramente la funzione di gentilizio. È indubbio che la documentazione spinete si diversifica sotto questo aspetto da quella degli altri centri padani, ma ciò potrebbe essere dovuto, come già si è detto, alla loro diversa desti nazione.. E inoltre quella prevalenza di nomi individuali che sembrereb be autorizzare l'ipotesi di un ceto privo di origini gentilizie ο comunque di recente integrazione all'interno del corpo civico si manifesta in tutta la sua evidenza in età molto tarda, comunque successiva alla metà del IV secolo, quando l'Etruria Padana si è ormai dissolta. Per una valutazione di questo fenomeno che ha un esatto parallelo ad Adria (3 iscri zioni di V secolo contrapposte ad almeno 60 iscrizioni tarde) bisogna tener conto quindi della nuova situazione storica che si era creata dopo la metà del IV secolo, situazione sulla quale torneremo più avanti. Quanto alle indicazioni che tale documentazione epigrafica offre in rapporto al problema di una eventuale colonizzazione dall'esterno, mi limito a qualche breve commento. A Spina, per quanto la situazione sia poco chiara trattandosi prevalentemente di prenomi, accanto a nomi
indicato da C. Curri-S. Sorbelli, in SE, XLI, 1973, p. 254-255 (supporti distanziatori per la cottura di ceramiche sovrapposte in pile) se non altro per l'assenza di qualsiasi traccia di calore dovuta ad una permanenza prolungata e ripetuta in camera di cottura. La stes sapresenza delle iscrizioni urta a mio avviso con l'ipotesi di semplici sostegni da utilizza re nella cottura delle ceramiche. Non resta che pensare a coperchi di grandi doli ο di pozzi per cui l'iscrizione, più che indicare il vasaio che li ha fabbricati dovrebbe indicare il proprietario di ciò che chiudevano ο coprivano. La loro relativa frequenza nell'area delle fornaci fa pensare a manufatti già apprestati, in attesa di essere consegnati ai rispettivi committenti. Del resto sempre a Marzabotto è altrettanto frequente il rinven imento di questi dischi all'interno dei pozzi delle case.
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bene attestati in Etruria, troviamo nomi di buona tradizione locale come le forme in -u e in -iu40. Non va dimenticato poi che tra i pochi gentilizi riferibili al V secolo, quello di una lekythos conservata ad Oslo, ma forse proveniente da Spina41 è in -alu, formante che si riallaccia al suffisso patronimico -alo di ambito leponzio-ligure e che è tipico dei gentilizi di area padana, pur non mancando qualche rara attestazione in area tirrenica42. A Bologna, accanto a famiglie con profonde radici in area tirrenica come i kaikna, i satina e i kadle, ci sono famiglie di antica e sicura origine padana {titlalu, —Jusvalu, pluksalu, —Jnalu43. A Marzabotto prevalgono nettamente le forme tipicamente padane in -alu (αχαΐη, kraikalu, niritalu, sualu), cui seguono quelle in -u ο in -iu44, anch'esse frequenti a nord dell'Appennino, mentre mancano completa mente i gentilizi in -na, oltre ad essere piuttosto rari i nomi individuali attestati in area tirrenica. Tutto questo, come è già stato osservato45, porta quanto meno ad attenuare l'ipotesi di un movimento coloniale organizzato, con afflusso di gente nuova dall'esterno. Certo non si può escludere che ci siano stat imovimenti migratori verso l'area padana, originati dalla pressione demografica e dall'esigenza di trovare nuove terre. Ma tale fenomeno, stando alla documentazione onomastica, non dovette raggiungere pro porzioni vistose e non fu sicuramente determinante per le città di nuo vafondazione in area transappenninica. Qui infatti una consistente fet tadella popolazione - e questo è molto chiaro soprattutto a Marzabotto - era costituita da gruppi locali. Non penserei tuttavia, sempre per restare a Marzabotto, ad una città nata per iniziativa della comunità villanoviana della Valle del Reno, attirata sul pianoro di Misano dalle nuove possibilità di mercato e delle conseguenti attività produttive. Penserei invece che tale comunità villanoviana, troppo esigua per dare luogo, da sola, ad una realtà così importante ed estesa come la città di
40 Rimando per una verifica all'elenco di Uggeri, Primo contributo all'onomastica spinetica. . . cit. 41 L'ipotesi è di G. Colonna, REE, 1978, n. 139. 42 Cristofani, Varietà linguistica e contesti sociali. . . cit., p. 62. 43 Sassatelli, art. cit. a nota 4, p. 242-244. 44 Colonna e Gentili, REE, 1974, p. 203-210; Colonna, in Emilia Preromana, 8, 1980, p. 114, con molti refusi tipografici emendati nell'estratto pubblicato a parte. 45 Colonna, // lessico istituzionale etrusco. . . cit., p. 36, con l'ipotesi di un'iniziativa da parte della comunità locale della Valle del Reno e delle valli limitrofe per la fondazione della «colonia».
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Marzabotto, possa avere rappresentato soltanto un punto di riferiment o e di coagulo per una iniziativa che vedrei concepita altrove. E per via dei nomi padani in così netta maggioranza, oltre che a gruppi della Valle del Reno si potrebbe pensare anche ad individui venuti da Bolo gna, concretamente impegnati in quella complessa riorganizzazione di tutta l'area padana all'interno della quale questa città ebbe un ruolo di primissimo piano. Pur non dovendosi escludere a priori un movimento di persone dall'area tirrenica, credo si possa dire che questo processo di rifondazione interessò principalmente gli Etruschi padani e se ci fu dall'esterno una spinta sul piano organizzativo ed economico, essa si avvalse in prevalenza di risorse umane locali.
Le città dell'Etruria padana e il loro assetto interno sul piano urbanistico, politico-istituzionale e produttivo Per questo secondo punto vorrei partire da Marzabotto sofferman domi su un importante aspetto produttivo della città cioè quello della metallurgia, specializzata sia nella lavorazione del ferro che nella fusio ne del bronzo. Già nella preliminare pubblicazione degli scavi da lui condotti in un isolato urbano G. A. Mansuelli46 aveva posto l'attenzione sulla grande quantità di scorie, presumibilmente di lavorazione, nei vani affacciati sulla plateia A, vani che proprio per questo furono inter pretati come officine per la lavorazione del ferro. L'ipotesi ha poi tro vato conferma nel rinvenimento di un paio di tenaglie da fabbro ferrai o, sicuramente utilizzate per la fucinatura, cioè per il riscaldamento e la successiva martellatura di piccole barre di metallo. Ma esisteva nella città anche una grande officina per la fusione del bronzo, i cui elementi sono abbastanza noti su un piano generale, ma per la quale manca ancora una adeguata pubblicazione47. Da quanto si può osservare in una fotografia realizzata al momento dello scavo (Tav. I, 1), l'atelier era dotato di un forno circolare diviso in due camere da un piano orizzont ale a graticola, probabilmente del tipo ben documentato nella zona 46 G. A. Mansuelli, La casa etrusco di Marzabotto. Constatazioni nei nuovi scavi, in MDAI(R), LXX, 1963, p. 44-62. 47 G. V. Gentili, Esplorazione di una fonderia di bronzo. Nota preliminare, in SE, XXXVI, 1968, p. 116-117. Non solo manca una esauriente relazione di scavo, ma è diffici le rendersi conto sia dell'organizzazione di questo atelier, sia delle caratteristiche di alcu nestrutture importanti come ad esempio il forno a graticola.
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industriale di Populonia e in Val Fucinala48. Più che di un vero forno fusorio dovrebbe trattarsi di un forno per la riduzione del rame dal minerale che lo conteneva, ο anche, con minore probabilità, di un for no per la scorificazione del ferro49. Che l'attività prevalente di questa officina fosse la lavorazione del bronzo è provato dalle matrici di fusio ne in argilla annerite nella parte interna dal calore del metallo che vi veniva colato (Tav. I, 2, Fig. 3, Tav. II, 1,2 Fig. 4). Alcune di queste si riferiscono a fibule ο a piccoli utensili che per la frammentarietà delle matrici non è facile identificare. Per una di esse (Tav. I, 2, Fig. 3) con doppia voluta e palmetta, pur non avendo trovato confronti precisi, penserei ad una placchetta d'attacco, munita superiormente di occhielli per il manico e riferibile quindi ad un recipiente di lamina bronzea ad ansa mobile oppure, in seconda istanza per via della dimensione un pò troppo ampia, alla placca inferiore d'attacco di un'ansa di brocca. Altri frammenti si riferiscono agli arti (forse un braccio) e alla testa (Tav. II, 1) di una statua maschile con capigliatura a piccoli boccoli, dai tratti particolarmente colti e raffinati per la quale è stata congetturata l'al-
48 Su questi forni la bibliografia recente si è molto incrementata. Mi limito qui a ricordare G. Sperl, Untersuchungen zur Metallurgie der Etrusker, in L'Etruria mineraria (Atti XII Convegno di studi etruschi e italici, Firenze-Populonia-Piombino 1979), Firenze, 1981, p. 29-50; M. Martelli, Scavo di edifici nella zona «industriale» di Populonia, ib idem, p. 161-165, entrambi con bibliografia precedente sul problema. Si veda anche P. T. Craddock, The Metallurgy and Composition of Etruscan Bronze, in SE, LU, 1984 (ed. 1986), p. 214-218 e ancora G. Sperl, in L'Etruria mineraria (Mostra), Milano, 1985, p. 3940. Sulla loro funzione ci sono ancora divergenze fra gli studiosi. L'ipotesi recentemente più accreditata è che si tratti di forni per il cosiddetto arrostimento del minerale, opera zione per la quale non occorrono temperature molto elevate. La successiva riduzione del rame dal minerale arrostito che lo conteneva richiedeva invece forni più perfezionati e più piccoli, in grado cioè di sviluppare temperature molto alte (oltre 1060°) per cui si tende ora ad escludere che i forni a graticola servissero per questa operazione. Non sono inoltre mancate proposte di riferirili alla cottura delle ceramiche (Craddock), ipotesi che almeno per l'esemplare di Marzabotto mi sentirei di escludere se non altro per la notevol e diversità con i veri forni per ceramiche e laterizi qui assai bene documentati (G. Sassatelli, in Santuari d'Etruria (Mostra), Milano, 1985, p. 46-47). Così come non mi sentirei di escludere a priori che il forno a graticola di Marzabotto per le dimensioni ridotte e per la compattezza delle pareti consentisse il raggiungimento di temperature elevate e potesse essere utilizzato anche per la riduzione del rame. 49 Sul fatto che le tecnologie della «produzione» del rame e del ferro potessero esse rein relazione, anche per la presenza negli stessi minerali sia del ferro che del rame (oltre al ritrovamento nelle stesse aree di lavorazione di scorie di entrambi i metalli), si veda E. Formigli, in Gli Etruschi in Maremma, Milano, 1981, p. 184.
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tezza di quasi un metro50. Del resto, secondo una notizia settecentesca, alcuni bronzetti rinvenuti a Marzabotto e poi dispersi erano alti almeno 60-70 cm51. Le notevoli dimensioni e il buon livello dell'esecuzione sul piano formale che i frammenti di matrice lasciano intuire presuppon gono una elevata tecnica fusoria e anche capacità stilistiche di primissimo piano. Tutto questo induce a riesaminare il problema della bronzistica
Fig. 3 - Marzabotto, Museo P. Aria : disegno del frammento di matrice di fusione in argilla di cui alla tav. I, 2.
50 Sulle matrici, G. Sassatelli, in Civiltà degli Etruschi (Mostra), Milano, 1985, p. 146147 n. 6.14, con bibliografia precedente. 51 S. Calindri, Dizionario corografico, georgico, orittologico, storico ec. ec. della Italia, Bologna, 1782, LV, p. 217-218 «e furono da un distruttore portati in Bologna a vendere, ridotti prima in pezzi, due idoli di bronzo quivi a Marzabotto trovati di più piedi di altez za,venduti per pochi paoli, per timore di non incorrere in pena, serviti essendo per un qualche vaso ο campana. . . ». Un piede era di circa 38 cm.
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figurata dell'Etruria padana e a prendere seriamente in considerazione l'ipotesi di una produzione locale non solo per quei bronzetti dalle for me un pò atticciate che solitamente vengono attribuiti ad officine padan e,ma anche per alcuni prodotti di maggior pregio e di più raffinata esecuzione. Questa elevata capacità fusoria finisce col risultare ancora più rilevante se paragonata alla povertà e alla modestia delle manifes tazioni figurative di Marzabotto52. Sembra quasi che le notevoli capac itàformali dei suoi artigiani e l'acribia dei suoi fonditori siano sostan zialmente estranee alla cultura artistica della città, la quale mantiene sotto questo aspetto un carattere austero e quasi rustico, e si concentri no invece nella fabbricazione di prodotti di grandissima qualità da destinare verosimilmente all'esportazione53. Tra le matrici in argilla figura inoltre un altro frammento di note vole importanza (Tav. II, 2 Fig. 4) che reca in negativo l'impronta di un segno a tridente nel quale ho proposto di riconoscere54, sia pure con una piccola riserva che l'esame attento e prolungato del pezzo mi ha indotto ora a superare, la porzione superiore del motivo del ramo secco usato per marcare a rilievo pani di rame, verso i quali si è registrato in questi ultimi tempi un rinnovato interesse55. Messi in relazione con la
52 Escludendo la bronzistica, tali manifestazioni si riducono infatti ad alcune testine fittili (C. Saletti, in La città etrusca e italica preromana (Atti del Convegno, Bologna, 1966), Bologna, 1970, p. 279-283); ad una piccola testa di impasto (G. A. Mansuelli, in Studi in onore di L. Banti, Roma, 1965, p. 247); ad una stele in arenaria decorata a bassorilievo (G. Sassatelli, in Santuari d'Etruria (Mostra), Milano, 1985, p. 44 n. 1.31); ad un cippo di marmo con decorazione incisa (G. Sassatelli, in SE, XLV, 1977, p. 126-128 n. 18); ad una figura maschile a rilievo di un acroterio centrale (G. Gualandi, in Studi sulla città antica. L'Emilia Romagna, Roma, 1983, p. 50-53). 53 La raffinata tecnica metallurgica e l'alta specializzazione artigianale sono docu mentate anche da preziosi strumenti di lavoro come la piccola lastra di pietra serpentinosa con fori passanti, disposti su due file e regolarmente decrescenti, contrassegnati da lettere dell'alfabeto. Interpretato come calibro ο piuttosto come filiera, reca incisa un'iscrizione di possesso con una solenne forma bimembre che ne sottolinea la preziosità (G. Sassatelli, in Civiltà degli Etruschi (Mostra), Milano, 1985, p. 146-147 n. 6.13). 54 G. Sassatelli, in Civiltà degli Etruschi (Mostra), Milano, 1985, p. 146-147, n. 6.14. 55 C. Ampolo, in PP, 1974, p. 385-387; M. Torelli, in DArch, Vili, 1974-1975, p. 23; G. Colonna, in Contributi introduttivi allo studio della monetazione etrusca (Atti del Conve gno,Napoli 1975), Napoli, 1976, p. 22-23. Per la situazione padana F. Panvini Rosati, // ripostiglio di Castelfranco Emilia. Nuovi elementi, in Emilia Preromana, VI, 1970, p. 15-26; e più di recente, E. Ercolani Cocchi, in La Formazione della città (Mostra). . . cit., vol. I, p. 143-153, con aggiornamento delle scoperte recenti come quelle di Mantova e altra bibl. Sul problema in generale, con prospettive nuove, è tornato N. F. Parise, Forme della cir-
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Fig. 4 - Marzabotto, Museo P. Aria : disegno della matrice di fusione in argilla utilizzata per la preparazio ne di pani di bronzo con il mar chio del «ramo secco» di cui alla tav. II, 2.
notizia di Plinio desunta da Timeo secondo la quale Servius rex primus aes signavit, avevano probabilmente un valore premonetale, se non altro come metallo predisposto e garantito, con una sorta di validità internazionale per gli scambi a lunga distanza. La loro frequenza in area tiberino-meridionale è stata messa in relazione con la notizia della loro prima segnatura da parte di Servio Tullio; mentre la concentrazione in area padana è stata spiegata col fatto che qui facevano capo le vie commerciali provenienti dal paese dei Celti e dall'Etruria per cui fu possibile accumulare ricchezza in «metallo segnato». L'aver trovato una matrice che sembra riferirsi alla preparazione di questi lingotti significa tuttavia che l'Etruria padana era in grado di «coniare» in pro prio questo tipo di unità premonetale, con ripercussioni notevoli sia relativamente all'importanza del metallo nell'economia della regione, sia relativamente all'organizzazione degli scambi. Il conio in area padana di lingotti col marchio del ramo secco, secondo una ipotesi che già era stata fatta sia pure dubitativamente56, colazione metallica fra Etruria e Lazio dall'VIII al VI secolo a.C, in Etruria e Lazio antico (Atti dell'Incontro di studio, Roma, 1986), Roma, 1987, p. 89-92. 56 Panvini Rosati, art. cit. a nota precedente, p. 21.
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ma che ora trova una piena conferma, significa infatti disponibilità notevole di materia prima, cioè di minerale di rame e significa anche allineamento dell'area padana con quella tirrenica, entrambe in grado di produrre questa primordiale moneta. Il fatto che a Marzabotto si fondessero lingotti con il ramo secco da destinare al commercio sta ad indicare da un lato che esisteva una buona disponibilità di minerale; dall'altro che tali lingotti non costituivano soltanto delle semplici riser ve di metallo da utilizzare localmente (in questo caso sarebbe stato suf ficiente il ricorso a normali barre di rame, senza impronta, ο addirittu ra al minerale che lo conteneva) e se anche erano delle riserve di metall o, lo erano per la vendita e lo smercio. Mi pare evidente quindi che la lavorazione del metallo, e in particolare la fusione del bronzo, costitui va un settore fondamentale dell'economia padana. Queste stesse attività metallurgiche infatti sono ben documentate sia a Bologna, dove si hanno numerose tracce di officine, che a S. Polo Servirola57 nel reggiano, dove sono ricordate matrici di fusione, un forno a graticola analogo a quello di Marzabotto e anche un piccolo deposito di «pani di rame». Mi pare lecito a questo punto chiedersi da dove veniva la materia prima per questa importante attività di trasfor mazione. Nonostante riaffiori di tanto in tanto l'ipotesi di piccole mi niere locali58, ipotesi che a tutt'oggi non ha trovato alcuna conferma, credo si possa pensare che il metallo venisse dall'Etruria e da Populonia in particolare, città che assume un ruolo di primissimo piano in seguito allo spostamento sulla costa delle attività di raffinamento dei minerali elbani e con il sorgere delle prime « manifatture di stato » pro prio a partire dalla seconda metà del VI secolo59. In questo stesso periodo, tra l'altro, anche per quanto riguarda le importazioni attiche 57 Per Bologna manca uno studio d'insième, ma la tradizione metallurgica ha radici molto lontane se solo si pensa al deposito di S. Francesco sulla cui connessione con un'of ficina metallurgica non ci sono dubbi. Altri impianti sono testimoniati in via Ca' Selvati ca (NSA, 1965, 59 e NSA, 1970, p. 54-57), in via Indipendenza (NSA, 1886, p. 220 e p. 247) e in via S. Gervasio (Mansuelli, in Emilia Preromana, II, 1949-1950, p. 174-175). Per S. Polo-Servirola, M. Degani, Considerazioni sul materiale preistorico e protostorico del Campo Servirola di Sanpolo, in La città etrusco e italica preromana (Atti del Convegno, Bologna 1966), Bologna, 1970, p. 170-171. 58 Mansuelli, Contributo alla conoscenza del popolamento. . . cit. a nota 8, p. 210. 59 Martelli, art. cit. a nota 48 ; M. Cristofani, Geografia del popolamento e storia economico-sociale, in L'Etruria mineraria (Atti del XII Convegno di studi etruschi e italici, Firenze-Populonia-Piombino 1979), Firenze, 1981, p. 432-436; G. Colonna, Presenza greca ed etrusco-meridionale nell'Etruria mineraria, ibidem, p. 445, 448, 451-452.
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si riscontrano alcune significative analogie tra il centro tirrenico e l'area padana : coppe dei Piccoli Maestri nella fase iniziale, ceramica a figure nere di qualità piuttosto scadente e qualche pezzo di pregio nelle prime figure rosse60. Non va dimenticato tra l'altro che i minerali elbani, che si poteva no utilizzare sia per la produzione del ferro che per quella del rame, erano quasi privi di materia inerte per cui poteva risultare relativament e conveniente il loro trasporto anche in zone piuttosto lontane, come provano i frammenti di ematite elbana rinvenuti a Ischia61. Contatti tra l'area padana e Populonia sono stati del resto già evidenziati per il vasellame bronzeo, per le ambre figurate, per certe forme del buccher o62. Ma esistono anche altri aspetti meno legati alla pratica commerc iale e quindi più significativi, come l'utilizzazione funeraria di un tipo di altare, probabilmente per libagioni, con modanature contrapposte ai lati di un elemento centrale, documentato a Populonia63, raffigurato a Marzabotto nella nota stele con donna libante, ma vicino anche ai cippi dell'area sacra di Villa Cassarini a Bologna64. Assai significative inoltre le analogie tra le tombe a sarcofago costruito di Populonia e quelle di Marzabotto (Tav. Ili, 1). Il tipo arriva poi fino a Bologna dove viene interpretato in chiave monumentale nella tomba dei Giardini Margherita che forse non era isolata stando ai bloc chi di travertino rinvenuti nel sepolcreto Certosa da riferire probabil mente a strutture analoghe65. 60 M. Martelli, Populonia : cultura locale e contatti con il mondo greco, in L'Etruria mineraria (Convegno). . . cit., p. 414-416. 61 E. Formigli, in Gli Etruschi in Maremma, Milano, 1981, p. 183-184. Per i framment i di ematite elbana rinvenuti a Ischia G. Buchner, in DArch, III, 1-2, 1969, p. 97-98. La datazione alla seconda metà del VI secolo si deve a M. Cristofani, in Gli Etruschi in Maremma. . . cit., p. 177. 62 Martelli, art. cit. a nota 60, p. 413-419. « M. Martelli, REE, 1978, η. 58. 64 G. GUALANDI, Santuari e stipi votive dell'Etruria padana, in SE, XLII, 1974, p. 44-46 e 50; Santuari d'Etruria (Mostra), Milano, 1985, p. 92 (cippo di Villa Cassarini) e p. 44 n. 1.31 (stele di Marzabotto). 65 Sassatelli, art. cit. a nota 4, p. 231 con cenno all'ipotesi che la tomba potesse esse refuori terra e quindi visibile in antico, contribuendo in tal modo alla monumentalizzazione dell'area sepolcrale. Per le tombe di Marzabotto che presentano caratteristiche molt osimili a quelle di Populonia (assemblaggio delle lastre, incastri, riseghe, coperchi displuviati) e che una consolidata tradizione di studi vuole completamente interrate ad eccezione del segnacolo che le sormontava, credo sia necessario riconsiderare il proble ma. Da un lato infatti non so quanto sia legittimo un impegno costruttivo di tale portata
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Se esisteva veramente questo itinerario dei metalli tra Populonia e l'area padana si potrebbe pensare allora che la fibula tipo Casalfiumanese, presente oltre che in Romagna anche nei pressi di Bologna (Villanova Cà dell'Orbo), documentata in un unico esemplare a Populonia rappresenti una sorta di mercé di ritorno; così come lo sono probabil mente i due esemplari rinvenuti a Orvieto66, della quale sono ben noti i contatti sia con l'area padana centrale che con la Romagna. Sulla costa adriatica, alla foce del Po, Spina, grande emporio del sistema padano, era destinata ad accogliere i prodotti attici che vi approdarono senza flessioni sensibili per più di un secolo e a redistri buirlinei diversi centri dell'Etruria padana, oltre che verso nord e ver sola stessa Etruria tirrenica attraverso i valichi dell'Appennino secon do alcune ipotesi molto recenti67. Che il mare avesse un ruolo import anteper questo centro costiero e per il suo retroterra è fuori discussio ne, come si evince fra l'altro dalla nota stele di Bologna con raffigura zione di una nave68, ma anche dall'utilizzo di un ceppo d'ancora come segnacolo nella tomba 245 di Valle Trebba, segnacolo che indica ed
in strutture che poi venivano occultate; dall'altro, in diverse tombe il segnacolo risulta ancorato direttamente sul coperchio del sarcofago di lastre ο tramite un perno nel caso dei segnacoli a colonnetta ο attraverso la realizzazione di un apposito incavo nel caso di semplici ciottoli di fiume. Non so se questi elementi siano sufficienti per sostenere che le tombe erano visibili in antico. Credo comunque che l'ipotesi meriti attenzione anche per ché le tombe di Populonia, così simili a quelle di Marzabotto, dovevano essere fuori ter ra. 66 Per la Romagna rimando a Romagna tra VI e IV secolo a.C. (Mostra), Bologna, 1982, p. 373-374, tipo 30 Α-M; per Ca' dell'Orbo Villanova, La necropoli villanoviana di Ca' dell'Orbo a Villanova di Castenaso (Mostra), Bologna, 1979, p. 22-23, nota 18 con elen codi vari esemplari documentati in Romagna, cenno ad un esemplare conservato a Marz abotto, ma di incerta provenienza e ad un altro, anch'esso di incerta provenienza, nel Museo archeologico di Modena ; per Populonia, F. Fedeli, Populonia. Storia e territorio, Firenze, 1983, p. 302-303; per Orvieto, P. Guzzo, Le fibule in Etruria dal VI al I secolo, Firenze, 1972, p. 122. 67 Per una valutazione complessiva del flusso di queste importazioni, M. Martelli, / luoghi e i prodotti dello scambio, in Civiltà degli Etruschi (Mostra), Milano, 1985, p. 176 e 180-181. Per l'ipotesi di uno smistamento a sud dell'Appennino, anche F. Giudice, in Cro nache di archeologia e di storia dell'arte (Università di Catania), XVIII, 1979, p. 153-162; Id., in AFIARXAI. Nuove ricerche e studi sulla Magna Grecia e la Sicilia antica in onore di P. E.Arias, Pisa, 1982, p. 279-284. 68 Da ultimo G. Sassatelli, in Civiltà degli Etruschi (Mostra), Milano, 1985, p. 241 n. 8.15; Id., art. cit. a nota 4, p. 246 e 255.
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esalta l'attività marinara esplicata in vita dal defunto69. Proprio la stele con raffigurazione di nave, il cui titolare Vel Kaikna apparteneva ad una delle più illustri famiglie di Felsina, ha fatto ipotizzare che l'empor io adriatico fosse in rapporto di dipendenza da questa città70. Pur non potendosi escludere forme di stretta collaborazione tra questi due cent ri (ne parleremo tra poco) è tuttavia difficile pensare che Spina non godesse di completa autonomia sul piano politico e istituzionale. La provano l'impianto urbano con partizioni regolari e pianificate, come mostrano tra l'altro i ciottoli con decussis e i cippi di confine (mi tular)11, impianto che solo un'autorità statale poteva gestire. E la prova anche il thesaurós che gli Spineti avevano nel Santuario di Delfi e che accogliendo le spoglie della loro attività piratesca non va riferito alla sola componente greca, ma all'intera comunità cittadina72 cui si ric onosceva evidentemente piena autonomia e totale dignità sul piano poli tico. Per questa sua presenza nel Santuario di Delfi, per la grande quantità di ceramica attica che importava, ma forse anche per certi aspetti ellenizzanti della sua cultura, Spina era nota agli antichi come polis hellenis™. E tale coloritura si estese anche agli Etruschi padani che alcune fonti consideravano diversi dagli Etruschi tirrenici, perché discesi direttamente dai Pelasgi74.
69 P. Gianfrotta, L'anfora di Kutikluna (ovvero considerazioni sulla tomba n. 245 di Valle Trebba), in Bollettino musei ferraresi, 12, 1982, p. 59-62 e G. Kapitän, in The Interna tionalJournal of Nautical Archaeology and Underwater Exploration, 1986, p. 133-136. 70 M. Cristofani, Gli Etruschi del mare, Milano, 1983, p. 100-102. 71 Per l'urbanistica in generale G. Uggeri-S. Uggeri Patitucci, Topografia e urbanisti ca di Spina, in SE, XLII, 1974, p. 82-97. Per il cippo con iscrizione mi tular, F. Berti, L'abitato arcaico, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 180-183, con bibliografia precedente. 72 Oltre a N. Alfieri, Spina. Museo archeologico nazionale di Ferrara, Bologna, 1979, p. XXXI ; M. Cristofani, / Greci in Etruria, in Forme di contatto e processi di trasformazio ne nelle società antiche (Atti Convegno, Cortona 1981), Roma, 1983, p. 253-254 e nota 62; Id., Gli Etruschi del mare. . . cit., p. 101-102. 73 Sul significato di questo termine si veda ora N. Alfieri, Spina «polis hellenìs», in La formazione della città preromana (Convegno). . . cit., p. 283-288 con l'ipotesi che si trat tasse di una indicazione prevalentemente marinaresca, da intendere cioè come città dove i Greci potevano fare approdo a scopo commerciale. Sullo stesso problema, G. Sassatelli, On «nuovo» candelabro etrusco da Spina. Aspetti ellenizzanti nella cultura dell'Etruria Padana, in Celti ed Etruschi (Colloquio). . . cit., p. 81-83. Un riesame di tutta la questione si deve ora a R. Vattuone, in La formazione della città (Mostra). . . cit., vol. I, p. 119-121. 74 In questo senso G. Colonna, Virgilio, Cortona e la leggenda etrusca di Bardano, in AClass, XXXII, 1980, p. 1-14, con bibliografia.
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Mentre la documentazione dei sepolcreti sembrava fissare l'esordio della città negli ultimi decenni del VI secolo, il recente rinvenimento nell'area dell'abitato di alcuni frammenti attici a figure nere consente di far risalire la prima frequentazione del sito al 540 a.C.75 in perfetta sincronia con quanto avviene a Marzabotto e nella «terza Bologna». Un problema ancora aperto e cruciale resta quello di una corretta valutazione delle testimonianze più recenti di Spina soprattutto sul pia no quantitativo. È noto che le tombe di Spina sono oltre 4.000. Ma quante di queste tombe siano databili tra la fine del VI e la metà del IV e quante invece siano posteriori non è possibile saperlo, neppure in modo approssimativo. Da una indagine, necessariamente sommaria stante la situazione degli studi, sul sepolcreto di Valle Trebba76, ho potuto riscontrare che su circa 900 tombe per le quali è possibile pro porre una cronologia precisa (le tombe del sepolcreto sono 1213 ma non tutte sono databili con precisione), circa 500, pari al 55,5%, si data notra la fine del VI e la metà del IV secolo; mentre circa 400, pari al 44,5%, sono posteriori alla metà del IV secolo e si datano ad un periodo compreso tra la metà del IV e la metà del III ο poco oltre, età quest'ul tima alla quale si fa tradizionalmente risalire la fine della città77. Tenendo conto che le tombe «tarde» si riferiscono ad un periodo più breve (metà del IV-metà del III secolo) di quello a cui si riferiscono le tombe «più antiche» (fine del VI-metà del IV secolo) ne risulta in per centuale, per l'ultima fase di Spina, quasi un incremento. Se questa linea di tendenza fosse confermata anche per Valle Pega significhereb be che una parte molto consistente delle tombe di Spina è posteriore alla metà del IV secolo e risale ad un periodo in cui il sistema padano si era ormai dissolto, così come va riferita a questa stessa età la stragran de maggioranza delle sue iscrizioni, cioè più di 80 contro 18. Per quanto riguarda Mantova credo che la recente mostra sugli scavi del Forcello-Bagnolo S. Vito e sulla documentazione del territorio circostante mi esimano da qualsiasi ulteriore considerazione78. Mentre
75 F. Berti, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 186-190, fig. 127. 76 I dati sono ricavati da due tesi di laurea in Etruscologia e Archeologia Italica di Cinzia Solera e Nicoletta Camerin, nell'ambito di una ricerca più ampia sulla struttura delle tombe in area padana. 77 Alfieri, op. cit. a nota 72 e S. Uggeri Patitucci, Classificazione preliminare della ceramica dipinta di Spina, in SE, LI, 1983 (ed. 1985), p. 91-92. 78 Mi limito pertanto a ricordare i vari contributi del catalogo della mostra Gli Etru schi a nord del Po, I-II, Mantova, 1986-1987.
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per Adria mi pare che le novità da S. Basilio79 confermino il precoce interessamento greco per l'alto Adriatico (prima metà del VI secolo) e l'altrettanto precoce presenza etrusca le cui tracce più antiche risalgo no comunque alla seconda metà del VI secolo, in perfetta sintonia con la riorganizzazione padana cui si è più volte accennato. Più complesso e più ricco di novità il discorso su Bologna, per la quale mi limiterò a considerare due problemi, uno di carattere urbanis ticoe architettonico, l'altro di carattere politico e istituzionale. Ho insistito molto sulla centralità di Bologna in quel processo di trasformazione di tutta l'area padana che si manifesta a partire dalla seconda metà del VI secolo. Tale centralità sembra in contrasto con la fatiscenza dei resti relativi all'abitato, talmente accentuata da pregiudi carne una precisa identificazione. Alla mancanza pressoché totale di resti monumentali all'interno dell'area urbana si accompagna quella di tegole e coppi per cui la città sembrerebbe avere avuto, ancora nel V secolo, abitazioni con tetto di paglia ο di strame. Questo quadro negati vo tuttavia va notevolmente ridimensionato. In primo luogo, per quanto mal conservata a causa di un forte dilavamento, Bologna aveva la sua arx, in posizione centrale rispetto ai sepolcreti della Certosa e dei Giar dini Margherita e in posizione elevata rispetto all'area dell'abitato. Dal complesso sacro di Villa Cassarmi80 si dominava infatti tutta la città, le diverse necropoli e gran parte della chora. Degli edifici di culto non è rimasto quasi nulla, ma l'importanza del complesso è fuori discussione, come mostrano l'alta quantità degli ex voto in bronzo, con due immagin i di divinità (Apollo ed Eracle), caso unico in tutta l'area padana; i numerosi cippi in pietra travertinoide, sagomati e destinati a reggere le offerte; le iscrizioni votive incise su coppe attiche in una delle quali compare il verbo turuke. L'area di Villa Cassarmi si configura quindi come vera e propria arx di tipo etrusco, polo sacro di tutta la comunità cittadina, con una sua monumentalizzazione e un arredo durevole. Gli edifici di culto, ma anche quelli limitrofi di servizio, avevano sicuramente un tetto di tegole e coppi con relativi kalypteres hegemones, come si può vedere dai frammenti che qui mostro (Tav. Ili, 2). Quest'ul-
79 M. De Min, L'abitato arcaico di S. Basilio, in Gli Etruschi a nord del Po, II, Mantova, 1987, p. 84-91 ; M. De Min-Ε. Jacopozzi, L'abitato arcaico di S. Basilio di Ariano Polesi ne, in L'Antico Polesine. Testimonianze archeologiche e paleoambientali (Mostra), Padova, 1986, p. 171-179. 80 Santuari d'Etruria (Mostra), Milano, 1985, p. 92-93, con bibliografia precedente.
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timo dato mi pare rilevante rispetto all'annosa questione della probabil e assenza di tegole negli strati archeologici dell'abitato. Sono convinto infatti che tale assenza sia dovuta alla perdita ο alla distruzione di ques tielementi di copertura in conseguenza della continuità abitativa, pra ticamente ininterrotta dalla più antica età etrusca fino ai nostri giorni. Del resto è intuitivo che siano proprio i livelli felsinei, cioè quelli più recenti e quindi più in superficie a fare le spese delle successive occu pazioni, cominciando da quella romana. Ed è per questo che molto spesso il livello romano si sovrappone direttamente a quello villanovia no81. A meno di non pensare che il tetto di tegole e coppi fosse prero gativa dei soli edifici di culto - ipotesi alquanto improbabile - è evident e che questo moderno sistema di copertura non era affatto ignoto agli Etruschi di Felsina, i quali lo avranno sicuramente adottato anche per le case di abitazione, pur essendo probabile che tutto ciò sia avvenuto lentamente e che si siano conservate a lungo le capanne ο le case di legno con tetto di paglia. Del resto tegole e coppi erano ben noti non solo a Marzabotto dove il loro utilizzo è generalizzato, ma anche nel vicinissimo e modesto abitato etrusco di Casalecchio di Reno82, che si trovava subito al di là del fiume, a meno di 4 chilometri di distanza dall'abitato di Bologna. È grande merito di H. Rix83 l'avere sollevato, nell'ambito di una revisione della documentazione epigrafica bolognese, il problema delle magistrature in questa città. Su una grande stele di forma canonica ha individuato il verbo zila/nuke; su un'altra stele molto frammentaria e dal profilo insolito la forma zìlu, entrambe riferibili alla carica dello «zilacato» ricoperta in vita dal defunto. Partendo da queste indicazioni io stesso ho tentato una ricostruzione della stele frammentaria ricono scendovi un corteo di tipo magistratuale con personaggi muniti di lan cia e lituo che rendono omaggio al defunto Ανηθ Petlna figlio di Venel che fu ζίΐαθ*4. A questi due segnacoli pertinenti a tombe di magistrati
81 G. Gualandi, Problemi urbanistici e cronologici di Felsina alla luce degli scavi dei Giardini Margherita e della Facoltà di Ingegneria (ex Villa Cassarmi), in Atti e memorie della Deputazione di storia patria per le province di Romagna, n.s. XX, 1969, p. 47-67. 82 C. Peyre, L'habitat étrusque de Casalecchio di Reno (Bologna), in La città etrusca e italica. . . cit., p. 253-261 («abondante récolte des fragments de tuiles à rebord»). 83 H. Rix, REE, 1982, nn. 60-66; Id., Una nuova ricostruzione della stele Ducati 137 e la questione di magistrati etruschi a Felsina- Bologna, in Emilia preromana, 9-10, 1981-1982 (ed. 1984), p. 281-286. 84 Sassatelli, art. cit. a nota 4, p. 247-254, fig. 28.
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ho accostato la nota stele n. 10 con raffigurazione di una nave forse predisposta per un'azione di guerra, e con il nome del defunto Vel Kaikna, a proposito del quale, anche in assenza di un esplicito rifer imento epigrafico, non è difficile pensare ad un personaggio che dovett e ricoprire una rilevante posizione di comando nell'ambito delle attivi tà marinare condotte dagli Etruschi sull'Adriatico. Questi tre segnacoli si distinguono dal resto della documentazione anche per la loro altezza, che oscilla tra m 2,70 e m 2,80 ed è del tutto eccezionale85. Proseguen do in questa stessa direzione credo di avere individuato altre stele le cui raffigurazioni rimandano a tematiche magistratuali ο si riferiscono a cortei e cerimonie di particolare solennità ai quali si accompagnano talora iconografie speciali anche per il viaggio verso l'oltretomba. Si tratta della stele n. 286 (Taw. IV-V), anch'essa una delle più alte (m 1,70) tra i segnacoli felsinei, con una triga di cavalli alati per il viag giodel defunto e una scena molto complessa nel registro immediata mente superiore : a sinistra due personaggi seduti, con uno speciale copricapo a calotta munito di larga tesa, suonano due lunghe trombe e sono rivolti verso un personaggio, anch'esso con cappello a calotta munito di larga tesa, che stringe un'asta sormontata da un volatile nel laquale forse si può riconoscere un'insegna. Nello stesso registro, a destra, gara di pugilato. Un personaggio con lituo sta inoltre seduto sot tola pancia dei cavalli alati che conducono il defunto verso l'oltretom ba. La stele η. 15987 (Tav. VI), alta circa due metri, presenta una icono grafia insolita per il viaggio del defunto che avviene con un carro di tipo speciale, fornito di un lungo timone e trainato da felini alati. Nel registro centrale si snoda un corteo di personaggi che rendono omagg io al defunto il quale, solennemente seduto su un trono munito di
85 Per tutte queste considerazioni rimando all'art. cit. a nota precedente. 86 P. Ducati, Le pietre funerarie felsinee, in MonAL, XX, 1911, cc. 362-363. 87 Ducati, Le pietre funerarie felsinee. . . cit., ce. 433-434. Si veda anche Sassatelli, art. cit. a nota 4, p. 252-253 fig. 29 con interpretazione che qui si modifica. L'asportazione di una piccola incrostazione di terra ha consentito infatti di riconoscere nelle due figure di destra non due portatori di sgabello ma due personaggi seduti in trono : l'elemento ricurvo che sta alle spalle di uno di essi non è infatti uno sgabello, ma lo schienale del trono.
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spalliera, stringe un bastone ricurvo con l'estremità ingrossata88. Nella figura femminile, anch'essa seduta in trono, che gli sta dietro, va pro babilmente riconosciuta la moglie. Il corteo è costituito da una figura maschile, forse con la lancia, da una figura femminile e da un'altra figura maschile con lituo alzato e proteso. La stele n. 10 infine (Tav. VII- Vili), della quale ho parlato poc'anzi presenta da un lato la ben nota raffigurazione di una nave e dall'altro una complicata sequenza di registri : nel primo dall'alto una quadriga di cavalli alati preceduti da suonatori di lituo incede solennemente tra inando il carro del defunto; nel secondo registro, a sinistra gara di pugil ato, a destra introduzione nel campo riservato agli agoni in onore del defunto di due prigionieri condotti da altrettanti accompagnatori che sollevano e protendono un lituo; nel terzo, gara di lotta a sinistra e sce na molto complessa a destra : suonatori di lunghe trombe seduti, perso naggio maschile con lituo e remo (ricordiamo che si tratta della stele di un navarca), altro personaggio maschile con copricapo del solito tipo a calotta munito di larga tesa, che stringe un'insegna costituita da un'asta sormontata da un quadrupede in funzione di episema89. Ci sono in tutte queste stele alcune evidenti ricorrenze e diversi el ementi che non troviamo in nessun altro segnacolo, neppure isolatament e : la solennità del viaggio del defunto; i giochi atletici, e in particolare il pugilato, fatti in suo onore; i suonatori di lunghe trombe; i personagg i con lituo ο quelli con insegna che talora indossano speciali copricapi a calotta con larga tesa ad indicare probabilmente che si tratta di «in servienti». Mi pare evidente che ci troviamo di fronte a segnacoli di defunti investiti di un ruolo speciale all'interno della comunità urbana. Credo anzi che insegne come il lituo e lo scettro possano indicare vere e proprie cariche magistratuali a cui bene si addicono la solennità dei giochi atletici, eseguiti in taluni casi da prigionieri, l'accompagnamento di musici con lunga tromba e la solennità dei cortei. Lo stesso viaggio del defunto avviene su una triga ο una quadriga, mentre in tutte le altre stele si ha una biga. Nonostante l'assenza di precise indicazioni 88 È molto simile al bastone di gara dei due giudici della Tomba degli Auguri per la quale rimando a M. Martelli, in Civiltà degli Etruschi. . . cit., p. 300 con bibliografia pre cedente. 89 Qualcosa di analogo si trova anche nella stele n. 169 (Ducati, Pietre funerarie felsi nee. . . cit., ce. 441-444) con solenne viaggio della defunta, gara di pugilato e scena di omaggio. Nel complesso tuttavia le varie raffigurazioni sono meno perspicue delle altre qui ricordate.
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epigrafiche è probabile che queste insistenze su alcune tematiche r ispondano effettivamente al desiderio di connotare il defunto come magistrato, ο comunque come personaggio pubblico ο di rilievo all'i nterno del corpo civico. Assai meno chiara sempre a Bologna la connotazione del defunto come guerriero. Su quasi un migliaio di tombe della fase felsinea sol amente 8 contengono armi, quasi sempre cuspidi di lancia in ferro e in un caso anche lo scudo di bronzo90; soltanto una di queste, del tutto eccezionale e riferibile nonostante l'assenza degli schinieri ad un oplita, presenta una vera panoplia con lance, scudo circolare ed elmo bronzeo tipo Negau91. Non so tuttavia quanto sia corretto per via dell'assenza di armi nei corredi, considerare le stele su cui troviamo spesso raffigura zioni di guerrieri, come la testimonianza di una classe di militari con specifica professionalità indicati come tali a livello funerario92. A mio avviso infatti non è chiaro se con queste raffigurazioni sul segnacolo
90 Prescindendo dalle due tombe del sepolcreto Arnoaldi con armi, anelli e ganci di cintura traforati, interpretate come le prime chiare manifestazioni di guerrieri gallici in Italia, forse mercenari (O.H.Frey, Sui ganci di cintura celtici e sulla prima fase di La Tene nell'Italia del Nord, in Celti ed Etruschi (Colloquio). . . cit., p. 9-13), ad un calcolo approssi mativole tombe etrusche di Bologna con armi risulterebbero otto : quattro dal sepolcreto Certosa (A. Zannoni, Gli scavi della Certosa di Bologna, Bologna, 1876-1884, p. 100, tav. XXXIV (tomba 67); p. 195-196, tav. XLIX (tomba 103); p. 247-248, tav. LXIX (tomba 180); p. 330, tav. LXXXVII (tomba 253); tre dal sepolcreto dei Giardini Margherita (NSA, 1876, p. 51 e p. 68, quest'ultima con scudo circolare; NSA, 1890, p. 139); e una dal sepol creto Arnoaldi (NSA, 1879, p. 62). Su queste tombe si veda anche Vitali, Monte Bibele tra Etruschi e Celti. . . cit. a nota 35, p. 369. Con ogni probabilità tuttavia il loro numero è destinato ad aumentare se solo si considera che tra i materiali del sepolcreto dei Giardini Margherita si riconoscono agevolmente altre armi come spade e cuspidi di lancia in ferro delle quali non ho trovato cenno nelle relazioni di scavo. Solo attraverso un esame sist ematico di tutta la documentazione bolognese si potranno conseguire risultati definitivi sul piano della consistenza e si potrà quindi proporre una corretta valutazione di questo fenomeno. Nell'ambito della collaborazione fra Istituto di Archeologia e Museo civico di Bologna si sta definendo un programma di ricerca che spero di iniziare presto assieme a C. Morigi Govi sulla consistenza e sul significato della presenza di armi nelle tombe etru sche di Bologna, compresa naturalmente la fase villanoviana, anche in concomitanza con altri elementi come le rappresentazioni di guerrieri sui segnacoli tombali. 91 Zannoni, Gli scavi della Certosa. . . cit., p. 247, tav. LXIX, tomba 180. Per un'altra tomba con scudo circolare da S. Giovanni in Triario, nelle immediate vicinanze di Bolo gna, rimando a Vitali, Monte Bibele tra Etruschi e Celti. . . cit. a nota 35, p. 369 con biblio grafia. 92 In tal senso Vitali, Monte Bibele tra Etruschi e Celti. . . cit., p. 369-370 che riprende un'ipotesi di M. Cristofani, Gli Etruschi del mare, Milano, 1983, p. 101.
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della tomba si volesse dare una connotazione del defunto come guerrier o, trattandosi di temi e di iconografie alquanto eterogenei, sulla cui valutazione occorre molta prudenza : ci sono guerrieri isolati ο in cop pia; ci sono cavalieri, talora armati alla leggera e talora senz'armi; ci sono anche combattimenti, spesso però più vicini alla parata e al vol teggio in armi che ad una vera contesa di carattere guerresco93. Se da un lato gli ζϋαθ attestati epigraficamente sulle stele nel pieno V secolo, anch'essi in largo anticipo sull'Etruria tirrenica, sembrano continuare la tradizione dei più antichi ζίΐαθ impegnati militarmente nell'Emilia occidentale attorno al 600 come documentano i cippi di Rubiera; dall'altro alle spalle di tutte quelle raffigurazioni speciali cui ho accennato si intravede una compagine urbana con solide tradizioni gentilizie e con alcuni individui emergenti non tanto sul piano economi co quanto piuttosto su quello politico e istituzionale. Si pensi che la stessa «Tomba dello sgabello», con un corredo di raffinatissime cera miche attiche e uno sgabello pieghevole di avorio, era sicuramente la tomba di un magistrato94. Se rapportiamo questa situazione a quella di Spina ο a quella di Marzabotto ne risulta confermata la centralità di Bologna la quale sembra proprio meritare sotto questo aspetto quel titolo di «princeps Etruriae» che già gli antichi le riconoscevano.
Aspetti e caratteristiche degli scambi commerciali Pur avendo già avuto occasione nei due paragrafi precedenti di accennare a questioni che riguardano l'organizzazione degli scambi vorrei ora affrontare il problema in modo più diretto. Non reputo necessario spendere troppe parole sul quadro storico che dopo la batta gliadi Alalia vide gli Etruschi, ormai consapevoli della necessità di aprire nuovi sbocchi commerciali verso il continente europeo, impe gnarsi nella riorganizzazione delle vie padano-alpine e nella ricerca di 93 Brevi considerazioni in tal senso sono in G. Sassatelli, Le stele felsinee con «celtomachie», in Popoli e facies culturali celtiche a nord e a sud delle Alpi dal V al I sec. a.C. (Atti del Convegno, Milano 1980), Milano, 1983, p. 167-177. Il problema, come si può faci lmente intuire, è complesso e ricco di sfumature per cui è preferibile evitare di prendere posizione nell'attesa di un lavoro complessivo che tenga conto di tutti gli aspetti della questione, lavoro cui ho accennato alla nota 90. 94 Sullo sgabello e sul suo significato nella tomba in cui è deposto si veda da ultimo G. Sassatelli, in Civiltà degli Etruschi. . . cit., p. 252 η. 9.14.
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intese con i Greci che già da tempo frequentavano l'alto Adriatico. Con la fondazione di città nuove come Spina, Marzabotto e Mantova e con la rifondazione di vecchi centri come Felsina, gli Etruschi padani si assicurarono in breve tempo il controllo pieno di un ampio settore del laValle del Po, rivendicando per se la funzione di mediatori tra ambito mediterraneo da un lato, Italia settentrionale e mondo transalpino dall'altro. Ho già espresso le mie perplessità sull'ipotesi che tra i vari centri di questo nuovo sistema padano e in particolare tra quelli di Bologna e di Marzabotto potesse esistere una forte concorrenza ai limit i della rivalità sul piano politico. Itinerari occidentali come quello del laValle dell'Enza possono avere avuto a mio avviso una funzione inte grativa, non certo concorrenziale ο addirittura ostile alla Valle del Reno e a Bologna. Ipotesi di questo genere sembrano derivare più ο meno inconsapevolmente dal desiderio di applicare alla realtà padana modelli e situazioni attestati in area tirrenica dove autonomie, particolarismi e conflittualità tra singoli centri, anche in territori molto ristrett i, sono usuali e frequenti. Il ventaglio delle merci che erano oggetto di scambio nel comparto padano è abbastanza chiaro nel suo complesso. Prima di tutto le cera miche attiche, sulle quali si è avuto in questi ultimi tempi un rinnovato interesse, specie per quanto riguarda analisi quantitative e consideraz ioni statistiche95. A proposito di queste ultime tuttavia, in mancanza di edizioni sistematiche e con tanti materiali ancora inediti, occorre molta prudenza. Per l'Etruria padana infatti, come del resto per altre aree, tali valutazioni sono basate esclusivamente sulle ceramiche figurate e attribuite dal Beazley. Ma bisogna tener presente sia la grande quantità di ceramiche che pur essendo figurate non sono attribuite, sia la straor dinaria dovizia di ceramiche a vernice nera. Per Bologna, ad esempio, i vasi attribuiti dal Beazley, cioè quelli che rientrano nelle indagini stati-
95 Per un inquadramento generale del problema M. Martelli, / luoghi e i prodotti dello scambio, in Civiltà degli Etruschi (Mostra), Milano, 1985, p. 175-181 con rimandi ai principali studi su questo stesso tema. Più di recente, F. Giudice, Gela e il commercio atti coverso l'Etruria nel primo quarto del V sec. a.C, in SE, LUI, 1985 (ed. 1987), p. 115-139. Per il settore padano e adriatico G. Bergonzi, Società della tarda età del ferro, loro articola zioni e relazioni : l'area adriatica tra VI e IV secolo a.C., in La Romagna tra VI e IV secolo (Atti del Convegno, Bologna 1982), Bologna, 1985, p. 67-98.
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Stiche sono poco più di 300, mentre soltanto dal Catalogo del Pellegrini risulta che i vasi attici importati sono più di 800 96. Pur con tutte queste riserve gli istogrammi relativi alle importazion i di ceramica da Atene fra 475 e 375 a.C. mostrano con molta chiarez za che l'assorbimento ae\\' emporion spinetico non manifesta flessioni apprezzabili nonostante il contrarsi della produzione attica nella secon da metà del V secolo97. La straordinaria vitalità del mercato padano ha fatto addirittura pensare che parte di questi prodotti attici valicassero l'Appennino da nord verso sud per raggiungere l'Etruria propria, natu ralmente quella interna e tiberina98. Non posso fare a meno di espr imere una certa perplessità su quest'ultima ipotesi per la lacunosità e l'incompletezza dei dati di cui possiamo disporre, per l'intrinseca diffi coltà di un itinerario come quello appenninico e per l'assenza di con crete testimonianze intermedie. Il flusso di ceramiche attiche da Spina verso Bologna, e soprattutto da Bologna verso Marzabotto sembra diminuire progressivamente, sia sul piano della qualità sia su quello della quantità. Tra Spina e Bologna il trasporto delle ceramiche, così come quello di altre merci, avveniva molto probabilmente per via fluviale, come si può desumere tra l'altro dalla presenza di un insediamento etrusco a Voghiera cioè alla confluenza di un antico corso del fiume Reno con il Po99. E proprio il fatto che questa via fluviale terminasse a Bologna 96 G. Pellegrini, Catalogo dei vasi greci dipinti delle necropoli felsinee, Bologna, 1912. Il catalogo del Pellegrini andrebbe tra l'altro aggiornato sia con le ceramiche attiche ri nvenute dopo la sua pubblicazione, sia con i frammenti che lo stesso Pellegrini non ha considerato. Pur non disponendo di dati cosi precisi come per Bologna, in assenza di un « Catalogo dei vasi greci dipinti », la stessa sproporzione è ipotizzabile sia per Marzabotto che per Spina. I vasi attici di Spina presi in considerazione dal Beazley sono circa 1400, mentre quelli di Marzabotto sono appena 15. Se solo si considera che a Spina sono docu mentate circa 4000 tombe, non è difficile pensare a molte migliaia di vasi attici ; mentre a Marzabotto, stando alle fotografie del vecchio museo e soprattutto ai numerosi framment i rinvenuti negli scavi dell'area urbana le ceramiche attiche importate dovevano ammont are almeno ad alcune centinaia. 97 Martelli, / luoghi e i prodotti dello scambio. . . cit., p. 180-181 e M. Cristofani, Pro cessi di trasformazione socio-economica nell'Etruria Padana fra VI e V secolo a.C, in La formazione della città preromana (Convegno). . . cit., p. 52-55, entrambi con bibliografia sul problema. 98 Oltre ai lavori citati nella nota precedente, si vedano anche, per questo specifico problema, gli interventi di F. Giudice ricordati alla nota 67. 99 S. Patitucci Uggeri, Voghiera. Un nuovo insediamento etrusco del delta padano, in SE, XL VII, 1979, p. 93-105. Questo piccolo insediamento si troverebbe proprio nel punto
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può avere influito sulla diminuzione consistente della quantità di cera mica attica che procedeva oltre Bologna verso sud per raggiungere la città di Marzabotto. Non va dimenticato infine, come è stato più volte ribadito100, che la recessione del V secolo a sud dell'Appennino non sembra colpire indiscriminatamente tutta l'Etruria propria e sembra risparmiare il distretto minerario con i due poli di Aleria e Populonia i quali continuano a mostrare per tutto il V secolo una certa vivacità sul piano delle importazioni attiche. È evidente quindi che pur non poten dosiescludere a priori che qualche vaso attico, sbarcato a Spina abbia valicato l'Appennino, questo flusso da nord verso sud ebbe sicuramente i caratteri dell'occasionalità e non raggiunse livelli apprezzabili sul pia no quantitativo. Riguardo ai prodotti che venivano acquistati in cambio, l'ipotesi che riscuote maggior credito è quella del grano101 ο comunque di beni di prima necessità, giunti dall'entroterra padano all'emporio adriatico sempre attraverso il Reno e il Po. Ma forse veniva acquistato dai Greci anche qualche manufatto di bronzo, da considerare se non altro come mercé di ritorno, stando al tripode vulcente dell'Acropoli di Atene per il quale si è pensato ad una provenienza da Spina e che poteva soddisfare nella sua esoticità anche il gusto di una società urbana e raffinata come quella ateniese 102. Accanto alla funzione di «mercato del grano», attribuita quasi con cordemente all'Etruria padana, va presa in considerazione anche quella di «mercato dei metalli», ma in senso più pieno di quanto indicato da M. Zuffa una decina d'anni fa103. L'importazione e la lavorazione del metallo avevano sicuramente un ruolo determinante nell'economia pa-
di confluenza in un ramo del Po di un affluente di destra di origine appenninica, da identificare probabilmente col fiume Reno. 100 Martelli, art. cit. a nota 60. 101 Per la discussione su questo problema rimando ad Alfieri, op. cit. a nota 72, p. XXXIII-XXXV, con rassegna delle principali opinioni e relativi rimandi bibliografici. Si veda anche, più diffusamente, M. Zuffa, / commerci ateniesi nell'Adriatico e i metalli d'Etruria, in Emilia Preromana, VII, 1971-1974, p. 151-179 e, di recente, R. De Marinis, Produzione e scambio nell'Etruria padana alla luce degli scavi del Forcello, in Gli Etruschi a nord del Po (Mostra), voi. I, Mantova, 1986, p. 197-200. 102 Per il tripode Martelli, / luoghi e i prodotti dello scambio. . . cit., p. 177. Sul signi ficato di queste presenze Cristofani, Processi di trasformazione socio-economica nell'Etru ria Padana. . . cit., p. 54 e nota 40, con bibliografia recente sul problema dei bronzi etru schi tardo-arcaici rinvenuti in Grecia. 103 Zuffa, / commerci ateniesi. . . cit., p. 151-179.
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dana stando all'apprestamento delle officine di Marzabotto, ma anche di Bologna e di S. Polo Servirola, allo strumentario da lavoro, al buon livello della tecnica fusoria comprovato dalle matrici, e alla fabbrica zione in proprio di lingotti con l'impronta del ramo secco. A giustifica re questa complessa organizzazione produttiva non basta l'ipotesi di un «mercato dei metalli» inteso come semplice luogo di vendita di materie prime, funzione per la quale era sufficiente procurarsi il minerale ο i lingotti da destinare allo scambio, facendoli venire dall'Etruria. Non vorrei enfatizzare ulteriormente questo dato, ma a mio avviso sia la fonderia per il bronzo sia le officine per il ferro documentate a Marzabotto sono importanti proprio perché mostrano una precisa volontà degli Etruschi di realizzare nella pianura padana un modello produtti vo ampiamente collaudato in area tirrenica, modello che prevedeva la disponibilità del minerale, i forni per la riduzione, gli strumenti e le tecniche per la lavorazione. In questa prospettiva, forzando un poco i termini della questione, «mercato dei metalli» significa mercato in cui i Greci che frequentavano la pianura padana ο le sue coste potevano tro vare le stesse materie prime ο forse anche le stesse merci che trovava no a Populonia. All'altro polo del complesso sistema padano era situato il mondo celtico da cui gli Etruschi della Valle del Po compravano stagno e forse schiavi104, e verso il quale riuscirono a convogliare soprattutto vasella me simposiaco 105 naturalmente attraverso Mantova la cui importanza, testimoniata fino a poco tempo fa solo dalle fonti 106, è oggi comprovata dalle recenti scoperte archeologiche 107 e che costituisce una vera testa di ponte verso la grande via transalpina dell'Adige più che un semplice
104 G. Colonna, in // commercio etrusco arcaico (Atti del Convegno, Roma 1983), Roma, 1985, p. 276-277; De Marinis, Produzione e scambio nell'Etruria padana. . . cit., p. 199-200; Id., Fibule tardohallstattiane occidentali dell'abitato etrusco del Forcello (Bagnol o S. Vito), in Celti ed Etruschi (Convegno). . . cit., p. 94. Per un quadro generale della que stione si veda anche O. H. Frey, / rapporti commerciali tra l'Italia settentrionale e l'Europa centrale dal VII al IV secolo a.C, in Gli Etruschi a Nord del Po (Mostra). . . cit., vol. II, p. 11-17; L. Pauli, La società celtica transalpina nel V secolo a.C, ibidem, p. 18-30. 105 B. Bouloumié, Les vases de bronze étrusques et leur diffusion hors d'Italie, in // commercio etrusco arcaico. . . cit., p. 167-178 con elenco completo dei vari tipi di vasell ame esportato e rimandi alla bibliografia precedente. 106 Opportunamente valorizzate da Colonna, Ricerche sugli Etruschi e sugli Umbri. . . cit., p. 9-10. prima degli scavi del Forcello presso Mantova. 107 Sulle quali si veda ora Gli Etruschi a nord del Po (Mostra), vol. I-II, Mantova, 19861987, passim.
Tav. I
1 . Marzabotto, officina per la fusione del bronzo : veduta del forno circolare a graticola. 2. Marzabotto, Museo P. Aria : frammento di matrice di fusione in argilla e relativo calco.
Tav. II
1. Marzabotto; Museo P. Aria : frammento di matrice di fusione in argilla di una testa maschile e relativo calco. - 2. Marzabotto, Museo P. Adria : matrice di fusione in argilla utilizzata per la preparazione di pani di bronzo con il marchio del «ramo secco» e relativo calco.
Tav. Ill
1 . Marzabotto, necropoli est : tomba a sarcofago costruito. 2 - Bologna, area sacra di Villa Cassarini : frammenti di coppi e di Kalypter Hegemon da riferire al tetto di un edificio.
Tav. IV
Bologna, Museo civico archeologico : stele felsinea n. 2.
H
:
Bologna, Musco civico archeologico stele felsinea η. 2 (dettaglio del rcgis:'
Tav. VI
Bologna, Museo civico archeologico : stele felsinea n. 159.
Tav. VII
Bologna, Museo civico archeologico : stele felsinea n. 10.
Bologna, Museo civico archeologico : Stele felsinea n. 10 (dettaglio dei due registri inferiori).
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punto di passaggio della via che da Spina, procedendo verso ovest, arri vava fino a Corno e all'area golasecchiana 108. E proprio dagli scavi di Mantova sono emerse novità importanti sul problema dei commerci. Mi riferisco alla grande quantità di anfore greche rinvenute al Forcello : anfore corinzie, chiote, samie, attiche e forse anche di Taso. I fram menti sono oltre un migliaio109. Questo dato andrà naturalmente com misurato alla consistente documentazione di Spina dove alle anfore rin venute in tombe, circa 150, quasi tutte tarde, si aggiungono ora i numer osissimi frammenti dall'abitato relativi ad anfore corinzie, chiote, sa mie, attiche e di Mende, destinate prevalentemente al trasporto del vino110, con una coincidenza quasi integrale dei tipi rispetto a Mantov a. La grande quantità di anfore sia a Spina che a Mantova e la conco mitante assenza, ο quanto meno la scarsissima presenza delle stesse a Bologna e a Marzabotto111, stanno chiaramente ad indicare che il vino e
108 In questo senso G. Colonna, in La Lombardia tra protostoria e romanità (Atti del 2° Convegno archeologico regionale, Comò 1984), Corno, 1986, p. 579. Diversamente R. De Marinis, / commerci dell'Etruria con i paesi a nord del Po dal IX al VI secolo a.C, in Gli Etruschi a nord del Po. . . cit., vol. I, p. 71. 109 R. De Marinis, Le anfore greche da trasporto, in Gli Etruschi a nord del Po. . . cit., vol. I, p. 211-224. 110 P. Desantis, Anfore commerciali dell'abitato di Spina dal V al HI secolo a.C. : appunti preliminari, in Gli Etruschi a nord del Po (Atti del Convegno, Mantova, 1986), in stampa. Ringrazio la dott. P. Desantis per avermi consentito la lettura del dattiloscritto. L'utilizzo di questi contenitori prevalentemente per il trasporto del vino, oltre che dall'identificazione dei tipi per i quali è generalmente nota la destinazione, è garantito anche dal riconoscimento in alcuni residui rinvenuti all'interno delle anfore spinetiche di sostanze resinose utilizzate sia per impermeabilizzare il contenitore, sia per profumare il vino che vi era contenuto. I risultati di queste analisi, eseguite da M. Desantis e A. F. Sedda, saranno pubblicati in appendice al lavoro di P. Desantis. 111 Allo stato attuale della ricerca l'assenza di anfore vinarie in entrambi questi centri sembrerebbe incontrovertibile. Ma da un lato occorre ricordare che per Bologna i mater iali dell'abitato sono quasi integralmente perduti e dall'altro, prescindendo dall'anfora corinzia di tipo A di cui parleremo tra poco, va considerata per Marzabotto la possibilità che un più attento esame dei materiali possa portare al riconoscimento di qualche esemp lare. Si vedano in proposito i due frammenti di anfora citati in P. Sandri, Saggio prelimi nare sulle forme della ceramica acroma di Marzabotto, in SE, XL, 1972, p. 327, 336 η. 18 e p. 339 η. 41, fig. 3 η. 18 e fig. 8 η. 41, senza alcuna precisazione né sul tipo né sulla cronol ogia. Eventuali frammenti, frutto di una ricerca più attenta (fra i materiali conservati nei magazzini io stesso ho potuto osservarne alcuni sui quali mi riprometto di tornare), non potranno comunque modificare in modo rilevante la consistenza della documenta-
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l'olio, ma direi soprattutto il vino approdato a Spina, oltre che agli Etruschi padani era destinato ai Celti d'oltralpe. E dato che il commerc io delle anfore era un commercio marittimo ο fluviale, una volta giun to attraverso l'Adriatico a Spina e poi, per via fluviale, a Mantova ο anche più a nord, il vino doveva proseguire in altri contenitori come bauli di legno od otri di pelle112. Credo sia lecito ipotizzare che questo smercio del vino greco approdato a Spina fosse saldamente controllato dagli Etruschi padani, stando se non altro al suo itinerario. Si trattereb be quindi di una ulteriore conferma del ruolo pienamente alternativo alla via del Rodano che l'Etruria padana assunse in rapporto all'esigen za di raggiungere i mercati d'oltralpe. Le anfore etrusche della Gallia meridionale, espressione tangibile dell'interesse tirrenico per i mercati europei, diminuiscono regolarmente e con rapida progressione a parti re dalla seconda metà del VI secolo e ciò avviene in favore delle anfore corinzie e della Grecia dell'est ο relative imitazioni113. In area padana gli Etruschi sembrano invece essersi assicurati attraverso Mantova la continuità di questo loro commercio verso il paese dei Celti, sia pure ricorrendo a vino d'importazione, con i relativi contenitori. Ho accennato all'assenza di anfore sia a Bologna che a Marzabotto. In quest'ultima città a dire il vero è presente un'anfora corinzia di tipo A destinata presumibilmente al trasporto dell'olio; ma si tratta di un esemplare unico rinvenuto quasi integro (manca solo il fondo) all'inter no di una casa di abitazione dove era usato come contenitore114. Ne risulterebbe così confermata l'assenza pressoché totale di vino greco importato e dei relativi contenitori sia a Bologna che a Marzabotto ( si vedano comunque le osservazioni di nota 111). Ciò significa che i due
zione sia per Bologna che per Marzabotto, sostanzialmente estranei ο comunque assai poco interessati a questo tipo di commercio. 112 Colonna, art. cit. a nota 104, p. 276-277 e De Marinis, art. cit. a nota 109, p. 211213. 113 Si vedano in proposito le osservazioni e i grafici di M. Py, Les amphores étrusques de Gaule méridionale, in // commercio etrusco arcaico. . . cit., p. 84-89. 114 Per l'anfora Guida alla città etrusco e al Museo di Marzabotto, Bologna, 1982, p. 65 e fig. 61. Per l'area di rinvenimento Mansuelli, La casa etrusco di Marzabotto. . . cit. a nota 46, p. 44-62. Un'altra anfora corinzia di tipo A è ora documentata nell'abitato di Pre stino (R. De Marinis, in Lombardia tra protostoria e romanità. . . cit., p. 475) a conferma di una consistente penetrazione verso l'interno, sia pure in esemplari isolati, di questi conte nitori per il trasporto dell'olio.
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centri potevano contare soprattutto su una produzione locale115, dato che l'ideologia del banchetto riflessa nelle tombe e la frequenza del vasellame da simposio specie a Bologna attestano un consumo larg amente diffuso del vino. Questa stessa assenza costituisce un'ulteriore conferma che le anfore di Spina e di Mantova, e il relativo commercio del vino, non riguardavano se non marginalmente il fabbisogno interno dell'area padana, ma erano destinate allo smercio di questa bevanda verso il mondo transalpino116. Ne risulta in definitiva per il V secolo una solida organizzazione di carattere commerciale che ha interessato tutta l'area padana. I suoi stessi centri di nuova fondazione, Spina in una zona lagunare e Marzabotto a ridosso dei primi contrafforti dell'Appennino, denunciano nella situazione ambientale sfavorevole ο comunque poco propizia all'agri coltura, la loro preminente funzione di centri di scambio e, nel caso di Marzabotto, anche di produzione metallurgica.
Le realtà vicine con particolare riguardo alla Romagna e ai rapporti degli etruschi con le altre popolazioni dell'Italia settentrionale Sul problema della Romagna è intervenuto più volte in questi ult imi anni G. Colonna117, con valutazioni che hanno trovato consensi pres soché unanimi. I termini della questione sono ben noti e sufficient emente chiari per cui non credo sia necessario parlarne a lungo. Vorrei 115 In questo senso, proprio di recente, Cristofani, Processi di trasformazione soci oeconomica nell'Etruria Padana. . . cit., p. 50-51, con un richiamo all'ipotesi di E. Sereni, Storia del paesaggio agrario italiano, Bari, 19773, p. 43 sull' arbustum gallicum, considerato, nonostante il nome, un tipo di vite peculiare dell'area padana abitata dagli Etruschi. 116 A completamento del discorso sui commerci va ricordata un'altra importante novità degli scavi di Mantova. Al Forcello, tra la fauna dell'abitato, si registra una percen tualedi suini superiore alle necessità alimentari del centro, all'interno della quale l'indice di frequenza degli arti anteriori è molto più alta di quella degli arti posteriori che eviden temente venivano esportati (De Marinis, Produzione e scambio nell'Etruria Padana. . . cit., p. 198-199). È un'altra conferma che larga parte delle esportazioni padane, anche verso la Grecia, rientrava nella sfera del biòtos. 117 G. Colonna, Ricerche sugli Etruschi e sugli Umbri a nord degli Appennini, in SE, XLII, 1974, p. 3-24; Id., La Romagna fra Etruschi, Umbri e Pelasgi, in La Romagna tra VI e IV secolo a.C. (Convegno). . . cit., p. 44-65; Id., Gli Etruschi della Romagna, in Romagna Protostorica (Convegno). . . cit., p. 37-44.
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osservare tuttavia che mentre nel primo contributo (1974) la facies archeologica romagnola, coeva ma distinta da quella felsinea, veniva attribuita agli Umbri storici con molta determinazione, nel Convegno «La Romagna tra VI e IV secolo» (1982) lo stesso Colonna pur ribaden do la validità di fondo della sua prima proposta, sottolinea l'estrema complessità della situazione romagnola dove al dominante popolament o umbro si accompagnavano una forte egemonia culturale etrusca e la presenza di minoranze etniche non trascurabili. Sulla complessità della situazione romagnola non si può che convenire. E credo che in tale complessità uno spazio maggiore di quanto si sia loro riconosciuto fino ad oggi spetti proprio agli Etruschi, sulla base di svariati elementi come la presenza di una fase culturale villanoviana a Verucchio118 ora arricchita dalle attestazioni di Rimini119; le iscrizioni etrusche della stessa Verucchio e di Covignano120; ma anche l'alfabetario di San Mart ino in Gattara121 e la dedica del guerriero di Ravenna122; la presenza dell'idronimo Ariminus e di altri toponimi123. Nell'abitato di Verucchio inoltre, dopo le fasi villanoviana ed orientalizzante è ora ben document ata una fase successiva, analoga e coeva a quella felsinea con fondaz ioniin ciottoli a secco pertinenti a case di abitazione124 la cui planimet ria è stata accostata a quella delle case signorili dell'Etruria
ne per Verucchio disponiamo ora di vari contributi di G. V. Gentili tra i quali segnalo G. V. Gentili, // villanoviano verucchiese nella Romagna orientale e il sepolcreto Moroni, in Studi e documenti di archeologia, I, 1985, p. 1-130; Id., L'età del ferro a Verucchio : cronol ogiadegli scavi e scoperte ed evoluzione della letteratura archeologica, in Studi e document i di archeologia, II, 1986, p. 1-41; Id., // villanoviano della Romagna orientale con epicent ro in Verucchio, in Romagna protostorica (Atti del Convegno, S. Giovanni in Galilea 1985), Viserba di Rimini, 1987, p. 7-36; Id., Testimonianze dell'abitato villanoviano ed «etruscoide» di Verucchio, in La formazione della città preromana (Convegno). . . cit., p. 79-103; Id., Verucchio, in La formazione della città (Mostra). . . cit., p. 207-219 e 257-263. 119 G. RicciONi, Nuovi dati sulla più antica Rimini preromana, in La formazione della città preromana (Convegno). . . cit., p. 186 e tav. II, 1. 120 per Verucchio REE, 1971, n. 52; per Rimini-Covignano REE, 1978, n. 113, entram be con bibliografia precedente. 121 REE, 1969, p. 304. 122 M. Martelli, // «Marte» di Ravenna, in Xenia, 6, 1983, p. 25-36. 123 G. Colonna, Gli Etruschi della Romagna. . . cit., p. 37-38. Ma si veda anche G. Co lonna, Ricerche sugli Etruschi e sugli Umbri. . . cit., p. 18-19. 124 G. V. Gentili, Verucchio. . . cit., p. 257-258 ; Id., Testimonianze dell'abitato villano vianoed «etruscoide» di Verucchio. . . cit., p. 92-100.
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naie125; mentre la tecnica costruttiva con ciottoli a secco e rinforzi angolari oltre che con tetto di tegole e coppi si riallaccia alle case di Marzabotto. A ciò si aggiungano le ceramiche attiche del V secolo, il vasellame e gli utensili di bronzo come situle, candelabri, fibule del tut to simili a quelli che troviamo negli abitati etrusco-padani, da Bologna a S. Polo. Si aggiungano l'antefissa a busto femminile da Covignano e i marmi importati, come le statue e il labrum da Villa Ruffi e il supporto di bacile a colonnetta con fusto scanalato da Verucchio, quest'ultimo sicuramente di provenienza greca126. Le stesse iscrizioni rinvenute in quest'area sono tutte etrusche tranne quella incisa sulla stele di Rimini che secondo una recente ipotesi di G. Colonna si riallaccia a minoranze indigene, linguisticamente vicine al gruppo di Novilara. Per la stessa ceramica dipinta a fasce di uso comune che sembra riallacciarsi a Orvieto sia nelle forme che nella decorazione ed è presente fino all'Emilia occidentale, divenendo una peculiarità di tutti gli Etruschi padani, sembra che il primo impulso alla produzione possa essere
125 G. V. Gentili, Testimonianze dell'abitato villanoviano ed «etruscoide» di Veruc chio.. . cit., p. 94 e G. Colonna, Urbanistica e architettura, in Rasenna. Storia e civiltà degli Etruschi, Milano, 1986, p. 467. nò per l'antefissa di Covignano Colonna, La Romagna fra Etruschi, Umbri e Pelasgi. . . cit., p. 52-53, 62-63 note 31 e 32. Per il labrum e le statue di Villa Ruffi, M. Moltesen, Membra collecta, in Analecta Romana Institua Donici, XI, 1982, p. 27-40 che le considera prodotte in Magna Grecia; Colonna, Gli Etruschi della Romagna. . . cit., p. 38-39 che le attribuisce, sia pure con prudenza, ad una manifattura locale; Cristofani, Processi di trasformazione socio-economica nell'Etruria Padana. . . cit., p. 52 che le considera greche e rifiuta l'ipotesi di una produzione locale. Prescindendo da questi problemi di inquadra mento le statue di marmo di Villa Ruffi, una volta datate al V secolo a.C, rappresentano per la Romagna un ulteriore legame con l'Etruria Padana dove il commercio dei marmi fu particolarmente fiorente (G. Sassatelli, in SE, XLV, 1977, p. 109-147). Che l'importa zione di marmi greci, oltre che interessare l'Etruria Padana, toccasse anche la Romagna è provato tra l'altro dal supporto di bacile a fusto scanalato rinvenuto in una casa di Verucchio e molto simile ad un esemplare trovato nel piccolo scalo marittimo di S. Mari na di Focara (M. Zuffa, in Spina e l'Etruria Padana (Atti del I Convegno di studi etruschi, Ferrara 1957), Firenze, 1959, p. 134-135, fig. 2). Ricordo che colonnette di marmo a fusto scanalato, da interpretare come supporti di bacile, sono segnalate anche nell'abitato di Spina (G. Sassatelli, in SE, XLV, 1977, p. 119) confermando un vasto interesse adriatico per questo genere di manufatti alcuni dei quali giunsero poi fino a Bologna (G. Sassatell i, in SE, XLV, 1977, p. 122-123 n. 13). La loro assenza a Marzabotto è compensata in parte dalla notevole frequenza nell'area urbana di bacili in marmo con sporgenza esterna per l'incastro nel relativo supporto.
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venuto da Rimini, attraverso l'insegnamento di artigiani orvietani qui operanti 127. Se anche per la spedizione adriatica del 524 contro Cuma si deve pensare agli Etruschi di Rimini più che a quelli di Spina, non so quanto sia lecito per la Romagna parlare ancora di assediata etruscità di front iera. Certo non si possono dimenticare fatti macroscopici come l'in umazione quasi generalizzata, la presenza pressoché costante delle armi nelle sepolture maschili, le tombe a circolo che rinviano effettivamente all'area umbro-sabellica. Ma tutto il resto concorre ad evidenziare la presenza di un consistente e dinamico gruppo di Etruschi anche per la Romagna, Etruschi probabilmente legati all'ambito volsiniese come mostra del resto la meridionalità delle loro iscrizioni. Al di là delle relazioni commerciali, che sono ovvie e scontate, un esame più attento della documentazione archeologica ha consentito di individuare alcuni rapporti del tutto speciali tra gli Etruschi padani, in particolare quelli di Felsina, e le altre popolazioni dell'Italia settentrio nale. In tre tombe del sepolcreto Certosa sono presenti ceramiche ate stine zonate e un bicchiere golasecchiano, i quali per la loro intrinseca modestia che dovrebbe escluderne l'arrivo attraverso comuni canali commerciali e per la speciale collocazione all'interno della fossa, dato che in almeno due casi erano presso la testa del defunto come unico oggetto di corredo, potrebbero documentare la presenza fisica nella Bologna del V secolo di individui provenienti da Este e dall'area di Golasecca 128. L'ipotesi di immigrati provenienti da nord è del resto pi enamente credibile se solo si pensa alla grande capacità di attrazione
127 Per questa classe ceramica Colonna, Ricerche sugli Etruschi e sugli Umbri. . . cit., p. 7 ; S. Patitucci Uggeri, Classificazione preliminare della ceramica dipinta di Spina, in SE, LI, 1983 (ed. 1985), p. 91-139, con bibliografia. Alla consistente documentazione romagnola per la quale rimando a La Romagna tra VI e IV secolo a.C. (Mostra), Bologna, 1982, p. 292-328, vanno aggiunti ora altri frammenti da Sarsina (J. Ortalli, in La forma zione della città preromana (Convegno). . . cit., p. 165, fig. 22. Per frammenti dello stesso tipo rinvenuti a Fiesole, cioè a sud dell'Appennino con conseguenze rilevanti sul piano della ricerca, Maggiani, Pisa, Spina e un passo controverso di Scilace. . . cit., p. 307-308, fig. 1. Per l'ipotesi di maestranze orvietane, attive sull'Adriatico, e in particolare a Rimini, Colonna, Gli Etruschi della Romagna. . . cit., p. 39. 128 Per tutti questi problemi G. Sassatelli, Ancora sui rapporti tra Etruria Padana e Italia Settentrionale : qualche esemplificazione, in Gli Etruschi a nord del Po (Atti del Con vegno, Mantova 1986), in stampa. Per l'ipotesi di una convergenza di genti «occidentali» verso il capoluogo dell'Etruria padana si veda D. Vitali, in Studi sulla città antica. L'Emi lia-Romagna, Roma, 1983, p. 144 e nota 36.
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che una metropoli come la Bologna del V secolo doveva esercitare sui centri settentrionali non etruschizzati. In questa stessa prospettiva si deve ora a O. H. Frey129 l'individua zione di due corredi del sepolcreto Arnoaldi di Bologna con lance e spa dedi ferro, cinturoni ad anelli e un gancio di cintura traforato tipo La Tene databile al tardo V secolo. Mentre per altri materiali come le fibu le tardohallstattiane di alcune tombe bolognesi130 si può pensare all'esi to di semplici scambi commerciali, i ganci di cintura traforati vengono invece interpretati come le prime chiare manifestazioni di guerrieri gallici, trattandosi di elementi genuinamente celtici e assolutamente peculiari a quel tipo di armamento. Questa connotazione militare del defunto, per di più attraverso un armamento tipicamente transalpino, acquista ulteriore rilievo in rapporto all'estrema rarità di armi nei cor redi felsinei di cui ho parlato poc'anzi. Dietro di essa si intravede un guerriero di origine straniera, dedito professionalmente all'uso delle armi e quindi mercenario, giunto a sud del Po probabilmente al seguito di piccoli gruppi la cui infiltrazione è testimoniata anche altrove. Del tutto particolari e pieni di sfumature anche i rapporti con l'area nord-orientale. Individui venetici attestati epigraficamente abita vano a Spina, mentre a Tombarelle nei pressi di Bologna troviamo una defunta, reidvi keisnas il cui prenome sembra mostrare legami con l'area retica131. Da un lato il mondo atestino forte della sua identità cul turale accoglieva le merci provenienti da sud in quantità molto ridotta (si pensi soltanto alle schnabelkannen del tutto assenti ad Este o alla ceramica attica assai poco rappresentata in tutta l'area veneta). Dall'al tro gli Etruschi di Bologna pur essendo in possesso del gusto raffinato di una società pienamente urbana e fortemente influenzata sul piano formale dagli stretti contatti col mondo greco, mostravano comunque di apprezzare i bronzi sbalzati ο incisi di tradizione veneto-alpina come le situle Arnoaldi e della Certosa, lo specchio Arnoaldi ο il bacile della tomba Certosa 108 132, forse per la loro esoticità, ma forse anche per lo
129 Ο. Η. Frey, Sui ganci di cintura celtici e sulla prima fase di La Tene nell'Italia del Nord, in Celti ed Etruschi (Colloquio). . . cit., p. 9-20. 130 Frey, art. cit. a nota precedente con rimandi bibliografici su queste fibule e sul significato della loro presenza in tombe bolognesi. 131 Sassatelli, art. cit. a nota 128. 132 II bacile della tomba Certosa 108 è in realtà di produzione etrusca, ma il fregio animalistico inciso all'esterno, si riallaccia a tradizioni figurative veneto-alpine (O. H. Frey, Die Entstehung der Situlenkunst, Berlino, 1969, p. 58-59 e p. Ili n. 50, tav. 85-
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speciale significato che potevano assumere come sontuosi doni stranier i133 a sanzione di clientele ο di particolari legami tra individui di pro venienza nord-orientale e cittadini di Felsina.
La grande crisi del iv secolo Una serie relativamente recente di nuove scoperte e un rinnovato interesse per le vicende dell'Italia padana nel corso del IV e del III secolo hanno notevolmente ampliato il quadro delle nostre conoscenz e134. Se è vero (Livio V, 33-35) che i Galli che assediarono Chiusi e inva sero la penisola all'inizio del IV secolo non furono i primi ad avere pas sato le Alpi, è vero però che furono i responsabili di cambiamenti radi cali nella Valle del Po e anche a sud dell'Appennino. La massiccia calata nel territorio degli Etruschi, degli Umbri e dei Piceni di popolazioni celtiche provenienti dall'Europa ο anche dalla Transpadana dove erano attestate da lungo tempo135 non provocò sol tanto un mutamento sul piano delle manifestazioni culturali, ma ebbe effetti dirompenti, almeno in una fase iniziale, sull'intero sistema eco87) così come lo specchio Arnoaldi, la cui fusione va attribuita ad un'officina etrusca, fu istoriato da un artista veneto-alpino (CSE, Italia I-Bologna Museo civico, II, p. 13-14, n; n. 1. 133 Va qui ricordata l'ipotesi di G. Colonna, in Este e la civiltà paleoveneta a cento anni dalle prime scoperte (Atti dell'XI Convegno di studi etruschi e italici, Este-Padova, 1976), Firenze, 1980, p. 183 nota 14 che ha visto nelle tematiche figurative delle situle « bolognesi », strettamente legate a strutture cittadine, una conferma della loro destinazio ne a personaggi etruschi di Felsina. Sulla scia di questa importante intuizione ho creduto di poter proporre l'ipotesi di sontuosi doni stranieri a sanzione di particolari vincoli di amicizia tra individui appartenenti a questi due ambiti culturali. Si veda per questo Sassatelli, art. cit. a nota 128. 134 Sono numerosissimi i lavori che andrebbero ricordati, ma mi limito a quelli vera mente essenziali. Fondamentale il volume Celti ed Etruschi nell'Italia centro-settentrionale (Colloquio). . . cit., sia per i contributi di carattere generale (M. Torelli, O. H. Frey, V. Kruta, C. Peyre, D. Vitali) sia per gli interventi che riguardano le singole aree. Si veda inoltre D. Vitali, Monte Bibele (Monterenzio) und andere Fundstellen der keltischen Epoche im Gebiet von Bologna (Kleine Schriften, 16), Marburgo, 1985, con ampia trattazione del pro blema e ricca bibliografia. 135 Sulla lunga permanenza dei Celti a nord del Po e quindi sulla cronologia alta del loro primo arrivo a sud delle Alpi, A. L. Prosdocimi, Celti in Italia prima e dopo il V secolo a.C, in Celti ed Etruschi (Colloquio). . .cit., p. 561-581; G. Colonna, in La Lombardia tra protostoria e romanità (Convegno). . . cit., p. 580.
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nomico creato dagli Etruschi nella pianura padana. A Marzabotto la città perde la sua identità urbana trasformandosi in un austero avam posto militare, controllato dai nuovi venuti : si costruiscono povere case di abitazione nelle aree stradali; si adibiscono a luogo di sepoltura inte risettori dell'area urbana e talora si utilizzano per le deposizioni gli invasi dei pozzi per l'acqua costruiti dagli Etruschi136. A Bologna la situazione sembra meno traumatica, ma non mancano segni di una svolta altrettanto radicale 137 : la stratigraf ia orizzontale delle tombe vie ne interrotta e si torna a seppellire in settori più vicini alla città, non tanto per ragioni rituali, a mio modo di vedere, quanto piuttosto in con seguenza di una contrazione ο di uno spostamento dell'area dell'abita to; si adibiscono a sepolture i pozzi per l'acqua; si adotta quasi esclus ivamente il rito inumatorio con l'introduzione nelle tombe maschili del learmi, alcune delle quali, come i foderi decorati, sono di sicura prove nienza transalpina. Questi mutamenti costituiscono una sostanziale rot tura nei confronti delle manifestazioni culturali etrusco-padane e van no messi in rapporto con la penetrazione e la sedentarizzazione delle popolazioni celtiche a sud del Po. In definitiva la crisi investe il modello urbano creato dagli Etruschi e provoca spostamenti e variazioni sia negli itinerari che negli insediamenti. Solo Mantova e Spina sembrano sopravvivere a questo sconvolgimento. La prima in virtù di una posizio ne strategicamente favorevole riuscì a mantenere il suo status urbano e il nome etrusco, e probabilmente anche la lingua, ben oltre la fine degli altri centri padani, circostanza che può spiegare il sorgere di una tradi zione che la considerava come la più importante città etrusca, in alter nativa a Felsina138. La seconda traendo vantaggio dall'essere circondata
136 L. Kruta Poppi, Les Celtes à Marzabotto (province de Bologne), in EC, XIV, 1975, p. 345-376 che ne fissa i limiti cronologici tra la fine del IV e la metà del III secolo a.C. ; Vitali, Monte Bibele (Monterenzio) und andere Fundstellen. . . cit., p. 58-78, che sottolinea il carattere «austero ed emarginato di Marzabotto», più fortemente connotato in senso lateniano, rispetto alle mode ellenizzanti di altri centri come Bologna. 137 Anche per Bologna rimando a Vitali op. cit. a nota precedente. Si veda inoltre D. Vitali, / Galli a Bologna : la calata delle tribù celtiche, in Storia illustrata di Bologna, 2, 1987. Per il fodero decorato D. Vitali, Una tomba di guerriero a Costei del Rio (Bologna), in Atti e memorie della Deputazione di storia patria per le province di Romagna, XXXV, 1984, p. 13-14, nota 13. 138 Per Mantova R. De Marinis, // mantovano tra invasioni galliche e romanizzazione : appunti per una ricerca, in Gli Etruschi a nord del Po (Mostra). . . cit., vol. Il, p. 183-187, dove si ribadisce che il mantovano sopravvive al naufragio dell'Etruria padana, pur con uno spostamento di sedi dal Forcello verso Mantova e verso Castellazzo della Garolda,
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da paludi e dune e probabilmente anche dall'essere decentrata rispetto alle nuove direttrici appenniniche dei traffici che, privilegiando il setto re orientale della regione, giungevano nel cuore della penisola attraver so la Romagna e non attraverso la vecchia via etrusca del V secolo, cioè attraverso Marzabotto e la Valle del Reno139. Il disegno dei Galli era fondamentalmente quello di assumere in prima persona il ruolo di intermediari tra Mediterraneo e continente europeo, ruolo che era stato saldamente nelle mani degli Etruschi e di cui i nuovi venuti vollero impadronirsi abbandonando e svuotando i vecchi itinerari 140. Il fatto che negli «abitati di montagna» si abbia un numero di guerrieri assai maggiore che negli «abitati di pianura» sta ad indicare l'esigenza primaria e imprescindibile di un controllo delle vie di transito appenniniche attraverso le quali, dopo il contraccolpo iniziale, i nuovi venuti cercarono di riorganizzare una vasta rete di traf fici con l'Etruria e l'Italia centrale. Resta ancora da indagare l'eventuale ruolo che elementi etruschi poterono avere in questo programma di riorganizzazione. L'esemplare documentazione archeologica di alcuni centri come Monte Bibele nella Valle dell'Idice141 ο come la stessa Bologna142 consente di cogliere le tappe essenziali di quest'ultima pagina di storia padana prima dell'arri vo dei Romani. A Monte Bibele un primo nucleo di Etruschi forse fuggiti dalla pia nura per la situazione di pericolo, viene raggiunto da individui stranier i, di sicura origine transalpina, indiziati dalla repentina comparsa del learmi nelle tombe. Ad essi si affianca una componente maschile non
secondo una ipotesi che andrà verificata sulla base di una documentazione più ampia, specie per quanto riguarda l'assenza a Mantova di materiali più antichi della prima metà del IV secolo. Sul sorgere della tradizione relativa al suo primato padano, in conseguenza del tempo più lungo della sua etruscità, Colonna, Ricerche sugli Etruschi e sugli Umbri. . . cit., p. 9-11 ; Id., in La Lombardia tra protostoria e romanità (Convegno). . . cit., p. 579. 139 Oltre a distinguersi dagli altri centri etruschi della valle del Po per l'assenza di testimonianze galliche, Spina costituisce anche il principale punto di arrivo per il fiorent e commercio di ceramiche etrusche, in special modo volterrane, che vi giungono in grande quantità a partire dalla metà del IV secolo. Su questo problema si veda da ultimo Artigianato artistico in Etruria (Mostra). . . Milano, 1985, p. 186-199. ho Vitali, L'armement de type celtique dans la région de Bologne, in Aquitania, Suppl. I, 1986, p. 316. 141 Vitali, Monte Bibele tra Etruschi e Celti. . . cit. a nota 35, p. 309-380 con bibliograf ia precedente. 142 Vedi nota 137.
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guerriera, legata verosimilmente ad attività mercantili. Stando alle iscrizioni, che sembrano prerogativa dell'elemento femminile (su 5 iscrizioni, 4 sono femminili), le donne sono etrusche e chiaramente destinate a matrimoni di alleanza coi nuovi venuti. Dopo una prima fase di assestamento si registra una intensa e progressiva etruschizzazione dei vertici della società gallica, attraverso l'esibizione di utensili in bronzo tipicamente etruschi per il banchetto ; attraverso l'adesione a giochi simposiaci e a ideali atletici; spingendosi in taluni casi a forme di eroizzazione di chiaro sapore ellenizzante come indica ad esempio il diadema d'oro della tomba Benacci 953 143. La comparsa all'interno del la comunità di Monte Bibele di un individuo maschile non guerriero che l'iscrizione mi Ia6ialus144 qualifica come etrusco di indubitabile ori gine padana, così come la presenza a Bologna di un analogo personagg io maschile non guerriero che l'iscrizione mi titles145 qualifica come etrusco settentrionale, stanno ad indicare che all'interno di queste comunità vistosamente guerriere, dove l'elemento maschile si caratte rizza quasi esclusivamente per l'uso delle armi, riprende quota fino a conquistare posizioni di rilievo una componente maschile non guerrier a, sicuramente etrusca, dai forti connotati simposiaci ed atletici. Per quest'ultima è lecito pensare a individui dediti prevalentemente al com mercio che forse finirono col contribuire a quella riorganizzazione del territorio padano che vide la compagine dei nuovi venuti bene inserita in una serie di scambi commerciali a vasto raggio tra l'Etruria e l'Italia centrale, tra Spina e l'area transpadana146. Sul versante adriatico forse si registra qualcosa di analogo, anche se di proporzioni più vistose. Solo lo studio completo dei corredi potrà darci indicazioni precise sulla eventualità che Spina non solo sia uscita indenne dalla calata dei Galli, ma abbia potuto essere addirittura un 143 Torelli, / Galli e gli Etruschi. . . cit. a nota 14, p. 6-7; Vitali, Monte Bibele (Monterenzio) und andere Fundstellen. . . cit., p. 3-28; Id., Una tomba di guerriero a Costei del Rio (Bologna). . . cit., p. 32-35. 144 Vitali, Monte Bibele tra Etruschi e Celti. . . cit., p. 370-372, con bibliografia. 145 G. Colonna, REI, in SE, XLVI, 1978, p. 397. 146 Consistenza e caratteristiche di questi commerci che vivono una stagione partico larmente felice tra IV e III secolo sono ormai ben noti. Per Bologna G. Sassatelli, in Rivista di archeologia I, 1-2, 1977, p. 27-35. Per Monte Bibele, Vitali, Monte Bibele tra Etruschi e Celti. . . cit., p. 336-338. Per Mantova e l'area transpadana De Marinis, II manto vanotra invasioni galliche e romanizzazione. . . cit., p. 183-187; P. Frontini, II Castellazzo della Garolda : la ceramica a vernice nera, in Gli Etruschi a nord del Po (Mostra). . . cit., vol. II, p. 190-193.
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punto di coagulo o di raccolta per molti Etruschi padani fuggiti dall'in terno, in conseguenza della situazione di pericolo che si era verificata a partire dalla metà del IV secolo. Certo la grande quantità di tombe tar de, che pur non raggiungendo mai il fasto e la ricchezza di quelle del secolo precedente rivelano comunque un discreto benessere, così come l'eccezionale numero delle iscrizioni in un'età in cui l'area padana dell'interno subisce violenti contraccolpi, devono essere spiegate in qualche modo. Lo stesso fenomeno coinvolge tra l'altro anche Adria, dove si ha una presenza altrettanto massiccia di iscrizioni etrusche databili tra il IV e il III secolo (circa 60) di contro ad una scarsissima documentazio ne per il V secolo (soltanto 3). Viene allora spontaneo pensare che il decreto ateniese del 325/324 con il progetto di una colonia da inviare nell'alto Adriatico per tutelare i traffici dalla pirateria tirrenica147 fosse proprio in funzione degli Etruschi padani i quali, bene attestati a Spi na, avevano trovato nella guerra da corsa un modo per sopravvivere allo scardinamento economico del loro entroterra. Il fenomeno sembra tra l'altro in sintonia con quanto si verifica altrove in questa stessa età. Episodi come quello del pirata Postumio, forse un etrusco di Pontecagnano ο di Salerno come ha suggerito G. Colonna148, e la stessa situazio ne di Spina stanno ad indicare che la pirateria etrusca del IV e del III secolo, molto vivace ed attiva, più che di qualcuna delle città storiche dell'Etruria propria ο dell'area padana è ormai espressione di comunit à costiere rimaste isolate e del tutto avulse dal proprio entroterra. Giuseppe Sassatelli
147 M. R. Torelli, Tyrranoi, in PP, 1975, p. 417-433; M. Giuffrida Ientile, La pirateria tirrenica. Momenti e fortuna {Supplemento a Kòkalos, 6), Roma, 1983, p. 77-87 che però si pronuncia per un sostanziale ridimensionamento dell'episodio della colonia ateniese ed esprime forti perplessità sul fatto che i pirati di cui si parla fossero degli Etruschi padan i. Se le considerazioni su Spina che qui si fanno sono giuste, forse andrebbe modificata anche questa opinione sulla pirateria tirrenica di età tarda. 148 G. Colonna, La Sicilia e il Tirreno nel V e IV secolo, in Kòkalos XXVI-XXVII (Atti del V Congresso internazionale di studi sulla Sicilia antica), 1980-1981, p. 181.
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GRECI, ETRUSCHI E ITALICI NELLA CAMPANIA E NELLA LUCANIA TIRRENICA
In via preliminare ci sia consentito esplicitare l'angolazione da cui ci siamo posti rispetto al tema che è al centro di questo convegno poi ché molteplici sono le valenze che può assumere il termine «crisi»1. Nel linguaggio corrente spesso indica semplicemente un deteriorament o di una situazione, soprattutto economica, provocata da fenomeni naturali ο da eventi quali le guerre. Nell'ambito territoriale preso come campione, tenendo conto della natura degli elementi conoscitivi a nostra disposizione, ci è sembrato che cercare di registrare soltanto i segni rivelatori di contrazioni e distruzioni di risorse economiche avrebbe portato a ricondurre questi fenomeni agli eventi noti dalle fonti scritte. Pur costituendo questo tipo di documentazione un aspetto fondamentale di conoscenza, dal quale non si può assolutamente prescindere, abbiamo tuttavia provato ad individuare, attraverso l'analisi grammaticale dei contesti più ampi ed omogenei noti, lo spettro di possibili modelli indicatori di forme di rot tura di vecchi equilibri, di processi di trasformazione che, oltrepassata una certa soglia, diventano fonte di nuovi equilibri. La crisi viene intesa dunque come dinamica di scomposizione e ricomposizione secondo parametri desunti dalla fisica e oggi largamente applicati alle scienze sociali. L'area campana e la Lucania occidentale, gravitanti l'una sul golfo di Napoli e l'altra su quello poseidoniate, sono occupate da città gre che, centri etruschi ed insediamenti indigeni, cioè da popolazioni strut1 Numerose sono infatti le sfumature che in vari contesti la parola κρίσις ha già nella lingua greca. Per quanto riguarda i significati assunti di volta in volta nel tempo ed a seconda dei presupposti teorici una sintesi con ricca bibliografia è presentata da T. Kowalik nella Enciclopedia Einaudi, 4, Milano, 1978, s.v.
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turate in maniera differente ma con forti influenze reciproche. Pertant o non è possibile procedere ad un esame delle situazioni che le hanno attraversate nel corso del V secolo senza la comprensione sia delle loro specificità sia della natura dei loro contatti, a volte conflittuali, anche bellici, come appunto registrano le fonti, ma che soprattutto investono livelli dell'organizzazione politica, sociale ed economica nonché aspetti culturali più ampi2. È all'interno di questi processi che cercheremo di cogliere i segni, proporzionali alla quantità ed al livello di elaborazione dei dati a dispo sizione, delle tappe di formazione e di organizzazione interna di quei gruppi italici che nel IV secolo giunsero ad un tale livello di struttura zione sociale e politica da manifestarsi in tutta la loro diversità e specif icità. Nel clima di restaurazione oligarchica in atto a Cuma dopo la caduta di Aristodemo, intorno al 470 viene fondata Neapolis le cui test imonianze più antiche sono quelle offerte dai corredi della necropoli di Castelcapuano3. Essi sono costituiti da kylikes, tazze ο skyphoi a verni ce nera, olpette e anforette acrome (figg. 1-2). Queste ultime, spesso coperte da uno strato di scialbatura e decorate con fasce a vernice bru namolto diluita, si presentano come oggetto caratterizzante del rituale funerario di questa comunità. Infatti, sono costantemente presenti, fino agli inizi del III secolo a.C, ripetute anche in più esemplari. In assenza di un'adeguata documentazione di scavo non siamo in grado di avanzare proposte sulla loro funzione, possiamo solo osserva re che nella fase iniziale e per buona parte della seconda metà del V secolo sono morfologicamente assimilabili alle pelikai rinvenute ad Ate ne, ritenute di importazione orientale, e ad esemplari noti da Cuma, Vico Equense e Capua. I vasi a figure rosse importati da Atene aumentano progressiva mente nel corso della seconda metà del secolo : in principio sono peli kai, hydriai e kylikes; a partire da terzo quarto, invece, comincia ad
2 Attenzione ed accento su questi problemi sono stati posti più di recente in Guerre et sociétés en Italie (V-IV siècle av. J.-C), (testi di una tavola rotonda tenutasi a Parigi nel 1984 e coordinati da A. M. Adam e A. Rouveret), Parigi, 1986 e nel saggio di M. Lombardo, La Magna Grecia dalla fine del V secolo a.C. alla conquista romana, in Magna Grecia II, Milano, 1987, p. 55 ss. 3 Cfr. il catalogo della mostra Napoli antica, Napoli, 1985, p. 228 ss. e A. Pontrandolfo, Le necropoli urbane di Neapolis, in Atti Taranto 1985, Napoli, 1988, p. 225 ss. ed in particolare fino a p. 266.
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essere deposto il cratere. Questo vaso, rinvenuto in un numero abba stanza consistente di sepolture, non diventerà mai un oggetto omolo gante nel rituale, come le anforette, ma viene usato sempre per marcar e una distinzione. In alcuni casi si affianca ai vasi tradizionali, ma più sovente è accompagnato esclusivamente dalla kylix e/o dallo stamnos, messi al suo interno, e deposti ai piedi dell'inumato. Molto è stato scritto sull'uso funerario del cratere, ma, ai fini del nostro discorso, ci sembra necessario richiamare l'attenzione sul dato che nelle necropoli greche di età arcaica e classica non compare nei corredi tombali e che invece, in quanto espressione dell'ideologia del consumo del vino e del simposio, assume un ruolo predominante nella concenzione funeraria del mondo etrusco e coloniale4. La sua presenz a, dunque, nelle tombe di Neapolis si connota come un'anomalia, segno dell'adozione di un modello ideologico ampiamente attestato nell'ambiente campano circostante ed estraneo, in quelle forme, ad una polis. Noto è il caso di Caudium dove sistematicamente e senza soluzione di continuità, dalla fine del VI alla seconda metà del IV secolo a.C, il cratere viene deposto nella tomba ai piedi del defunto5 (fig. 3). Questo rituale, a partire dal terzo quarto del V secolo, viene adottato ed esibito da una parte della compagine sociale neapolitana e rivela che con i centri etrusco-campani esistevano rapporti di reciprocità radicati an che a livello ideologico molto prima dell'immissione ufficiale dei Camp ani nella cittadinanza e l'apertura ad alcuni di essi della massima magistratura dello stato. L'evento, riportato da Strabone (V, 246), è sta togiustamente collocato tra il 438, quando Yethnos campano è politic amentedefinito, ed il 421, data della loro conquista di Cuma. Napoli, nata con una chiara impronta euboica e cumana e con un apporto sira-
4 Cfr. N. Valenza Mele, La necropoli cumana di VI e V secolo a.C. ο la crisi di una aristocrazia, in Nouvelle contribution à l'étude de la société et de la colonisation eubéenne {Cahiers du Centre Jean-Bérard, VI), Napoli, 1981, p. 97 ss; in particolare p. 117 dove l'uso di alcuni crateri come contenitori per ceneri è letto come segno del passaggio dal ban chetto, proprio di una società aristocratica, al simposio. Sull'estraneità dell'uso del crate re nel rituale funerario delle città greche cfr. B. D'Agostino, II rituale funerario nel mon doindigeno, e A. Pontrandolfo, L'escatologia popolare e i riti funerari greci, in Magna Gre cia III, rispettivamente p. 110-114 e 183-4. Per l'opposizione tra mondo funerario e simpos io, cfr. O. Murray, Death and the Symposion, Atti del Colloquio internazionale : La parola, l'immagine e la tomba, svoltosi a Capri nel 1988, in AION, X, 1988, p. 239-257. 5 G. D'Henry, Testimonianze di Caudium, Benevento, dicembre 1973-gennaio 1974.
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cusano, fin dall'inizio manifesta propensione a svolgere funzioni emporiche e commerciali riprendendo una tradizione ormai da Cuma abban donata. Ma, quasi immediatamente instaurò rapporti non episodici con i Campani installati nel territorio circostante, documentati dalla notevol e circolazione della ceramica attica e dalla monetazione. Questo pro cesso di mistione e convivenza, tangibilmente evidente attraverso il rituale funerario, come si è detto, anche a Neapolis, culminò con un rinnovamento istituzionale che poneva in condizioni pari il vecchio cor po civico ed i non greci, dopo aver «allontanato da sé quelli della loro propria gente», secondo il racconto di Strabone, verosimilmente i memb ri dell'oligarchia tradizionale uniti agli esuli cumani6. Sullo scorcio del V secolo e per gran parte di quello successivo, in questo rinnovato clima politico che fece della città greca il centro di una più ampia organizzazione territoriale, Napoli continuò ad essere il tramite della diffusione della ceramica attica ne\V hinterland, ma, senza dubbio, diventò anche uno dei centri di produzione di vasi a figure ros serinvigorendo quella produzione di qualche decennio più antica dal Beazley attribuita al Pittore del Pilastro con la Civetta, collocata nel ter zo quarto del secolo e ritenuta specifica di un atelier campano7. I limiti dei dati a nostra disposizione non permettono di analizzare e conoscere le tappe delle trasformazioni di quelle comunità della Camp ania meridionale che furono protagoniste della crisi neapolitana, se non per rapide campionature. Di Noia, ad eccezione del corredo della tomba Blacas scoperta nel 18398 e di quelli della necropoli Ronga scavati nel 1937, poi smembrat i e successivamente ricomposti ed editi da M. Bonghi Jovino e da R. Donceel9, conosciamo solo alcuni dei materiali, spesso di pregevole qualità, saccheggiati e dispersi in tutti i musei europei. Tuttavia, esplo razioni intraprese in quest'ultimo decennio che hanno portato al rinv enimento di altre sepolture, in parte nella stessa area in cui si operò nei secoli passati, cominciano a far distinguere nella necropoli un'articola zione in gruppi segnalata essenzialmente dalla diversa distribuzione della ceramica attica rinvenuta in maniera disuguale nei diversi nuclei 6 Cfr. i saggi di A. Mele, La città greca, e di E. Lepore, La città tra Campani e Roman i, nel catalogo della mostra Napoli antica, cit., rispettivamente a p. 103 ss. e 109 ss. 7 Groups of Campania Red-Figure, in JHS, LXIII, 1943, p. 66 ss. 8 Cfr. P. E. Corbett, The Burgon and Blacas Tombs, in JHS, LXXX, 1960, p. 58-60; A. D. Trendall, LCS, p. 202. 9 La necropoli di Noia preromana, Napoli, 1969.
Fig 1 - Corredo tipo di una tomba di V secolo a.C. dalla necropoli di Castelcapuano, Napoli.
Fig. 2 - Corredo tipo di una tomba di V secolo a.C. dalla necropoli di Castelcapuano, Napoli.
Fig. 3 - Cratere di bucchero da una delle sepolture di Caudium.
Fig. 4 - Particolare del cratere attico dalla t. 21 del 1966 di Nocera.
Fig. 5 - Bronzi etruschi da una tomba di Nocera, loc. Oschito.
Fig. 6 - Corredo delle tombe 72 (1963) della necropoli di Fratte.
Fig. 7 - Hydra a figure rosse attica della necropoli di Fratte.
Fig. 8 - Particolare della situla di bronzo dalla t. 116 (1974) di Fratte.
Fig. 9 - Pontecagnano. Brocca a figu rerosse dalla t. 1240.
Fig. 10 - Armatura da una sepoltura di Pontecagnano della fine del V secolo a.C.
Fig 1 1 - Ipotesi ricostruttiva dell'edificio circolare di Poseidonia (da Poseidonia Paesi unì III).
Fig. \1
Corredo προ da una loniha della mitrinoli di s Wncra. l'aesmm (t 7 del 1975)
Fig. 13 - Corredo tipo da una tomba della necropoli di S. Vener a, Paestum (t. 3 del 1972).
Fig. 15 - Cratere attico dalla t. 6 di Padula, loc. S. Franc esco.
Fig. 14 - T. 371 del 1976 dalla necropoli di Arcioni, Paestum.
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che in alcuni casi sembrano fisicamente separati da una zona libera10. Sembra così delinearsi, con tutte le cautele dovute alla frammentarietà e lacunosità dei dati, una diversità di comportamento che potremmo leggere come il segno di una forma di organizzazione «politica» meglio nota dall'indagine di Pontecagnano e che sembra esistere anche a Fratt e. Inoltre, va sempre tenuto presente che, sia pure indirettamente e al di fuori di contesti, la non scarsa quantità di ceramica attica e di vasi attribuiti al Pittore del Pilastro con la Civetta di cui si conosce la prove nienza nolana, è una spia della floridezza di questo centro ο di alcuni gruppi costituenti questa comunità, anche nel corso del V secolo. Infi ne, va rilevato che il corredo della tomba Blacas ripropone le stesse associazioni delle tombe napoletane dello scorcio del V secolo come ad esempio la tomba XLII di Castelcapuano11 con una kylix attica del Pit tore di Monaco 2535, un cratere a campana del Pittore della Scacchier a, uno skyphos del campano Pittore Eros and Hare, oltre a numerosi vasi a vernice nera ed acromi. Alla tomba Blacas appartengono una kylix attica del Pittore di Meleagro, un' hydria attica attribuita al Pittore di Londra F90, un'altra hydria che ha dato il nome al campano Pittore dell'Orgia e due skyphoi del Pittore di Napoli 2074 che presenta forti affinità con quello di Dirce. Sarebbe fuorviante entrare ora nel merito del dibattuto problema relativo alla localizzazione delle officine in cui furono prodotti i vasi di questi ceramisti ed il loro rapporto di dipen denza temporale dagli ateliers della Sicilia orientale, ma, ai fini del tema che stiamo trattando, è necessario sottolineare che l'insieme dei dati, forniti non solo da questi contesti, portano ad avanzare l'ipotesi dell'esistenza di officine operanti in Campania già negli ultimi decenni del V secolo e verosimilmente proprio tra Napoli e Noia. Anche la più meridionale Nuceria non sembra entrare in crisi nel corso del V secolo; infatti i materiali provenienti dalle necropoli scavat e nell'800 e negli anni 1963-4 e 1966 mostrano una consistente circola zionedi beni di prestigio costituiti da vasellame di bronzo, vasi attici e protoitalioti, presenti nelle tombe più ricche12. Ad una grande sepoltu10 Cfr. V. Sampaolo, Noia preromana, Noia, 1985 (Catalogo della mostra di Noia 12-13 dicembre 1985); Ead., Noia, in StEtr, LII, 1984, p. 506-7; L. Cerchiai, II processo di struttu razione del politico : i Campani, in AION, IX, 1987, p. 41-53 ed in particolare p. 46. 11 Cfr. Napoli antica, cit., p. 242-3. 12 Cfr. G. MiNERViNi, in Bull. Nap., n.s., V, 1856-1857, p. 3 ss.; M. Ruggiero, Degli scavi di antichità nelle provincie di Terraferma dell'antico Regno di Napoli dal 1743 al 1876,
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ra del secondo quarto del V secolo dovevano apparenere gli oggetti rin venuti nel 1856 in località Oschito13 (fig. 5) : quattro vasi attici a figure rosse, una oinochoe a figure nere del tipo Capua e numerosi oggetti di bronzo tra cui due situle, due oinochoai, sei colini e due grattugie, tutti oggetti di chiara provenienza etrusca, forse vulcente, ma forse in parte prodotti in officine localizzabili in Campania dove si registra la maggior e concentrazione. Sia questa tomba «emergente», sia il resto delle sepolture ascrivibili allo stesso periodo, si presentano del tutto simili a quelle della vicina Fratte, ma, a differenza di questo centro che sembra isterilirsi a partire dal terzo quarto del V secolo, le necropoli di Nocera restituiscono molto materiale dell'ultimo quarto dello stesso secolo, così come abbiamo riscontrato per Napoli e Noia. Tra i vasi attici basta ricordare lo stamnos ex Vivenzio del Pittore del deinos di Berlino14, numerosi vasi italioti attribuibili ad officine ruotanti, secondo il Trendall, intorno al Pittore di Dirce. Degno di attenzione, sia per l'associazione degli oggetti, sia per il rituale che esprime, è il corredo della tomba 21 rinvenuta, insieme ad altre tre della stessa epoca, nel 1966 durante l'ampliamento del tronco ferroviario Napoli-Salerno15. Esso consta di un cratere (fig. 4), una kylix ed una lekythos attici, attribuiti il primo alla cerchia di Kleophon e l'ultimo al Pittore di Eretria, di un'anfora del protolucano Pittore di Amykos, di uno skyphos di probabile produzione italiota, forse campan a, di un kantharos tipo St. Valentin, di numerosi altri vasi a vernice nera e di un'anfora da derrate. Quest'ultima isolata dal resto del corre do e deposta ai piedi del morto, sembra perpetuare un uso funerario molto diffuso tra le comunità italiche sin dall'età orientalizzante; inve ceil resto degli oggetti rinvenuti lungo un fianco dell'inumato formano un servizio che riflette la volontà di esaltare il rituale incentrato intor no al consumo del vino, richiamato del resto anche dalla scena con rappresentazione delle Lenee che decora lo stamnos ora al Museo di Napoli.
Napoli, 1888, p. 441-451 ; V. Panebianco, in Apollo, 1 1 1-IV, 1963-1964, p. 190-1 ; Id., in BdA, XLIX, 1964, p. 362. 13 Cfr. F. Parise Badoni, Ceramica campana a figure nere, Firenze, 1968, p. 71; M. Cristofani, Gli Etruschi del mare, Milano, 1983, p. 70 fig. 50. 14 Ο. Elia, Lo stamnos dionisiaco di Nocera, in Apollo, III-IV, 1963-1964, p. 79-92. 15 G. D'Henry, Una tomba a Nocera della seconda metà del V secolo : problemi di inquadramento, in AION, III, 1981, p. 159-174.
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In sostanza, la polis Tyrrhenias di Filisto alla fine del V secolo a.C. non sembra subire il tracollo che investe molti centri etrusco-campani e mostra di avere forti rapporti economici e culturali con Napoli e, in misura più ridotta, anche con la costa ionica. Purtroppo i dati di cui disponiamo non permettono di spingere oltre il discorso, né di cogliere i segni dell'integrazione tra l'elemento etrusco e quello indigeno, docu mentata dalle iscrizioni già alla fine del VI secolo16, soprattutto alcuni aspetti di quella continuità etrusco-campana che pure la tradizione scrit ta sembra indicare quando fa coincidere la serie di città cui viene attr ibuita origine etrusca e quelle considerate come probabili sede deWethnos nocerino 17. Diverso è il quadro che deriva dall'analisi dei dati relativi al centro etrusco di Fratte dove possiamo coniugare la conoscenza delle necropol i con l'indagine dell'abitato. Delle prime abbiamo un campione di circa 400 tombe scavate in parte tra il 1927 ed il 1929 in una cava di tufo in proprietà Mari, in parte negli anni 1963-1964 in un'area più a nord della precedente ed a settentrione del pianoro in località Scigliato a ridosso dell'attuale Piaz zaMatteo Galdi, ed in parte negli anni 1971-1974 in un'altra proprietà Mari sita in località Cappelle, presso via dei Greci18. Di queste sepoltur e, pochissime, meno di una decina, si collocano nel secondo e nel terzo quarto del VI secolo a.C, mentre di gran lunga più numerose sono quelle databili nell'ultimo quarto dello stesso secolo. Ma è il periodo compreso tra la fine del VI ed il primo quarto del V che registra il maggior numero di tombe che subito dopo, nel corso della seconda metà dello stesso secolo, cominciano progressivamente a diminuire fino a ridursi a poche decine negli ultimi anni. 16 G. Colonna, Nuovi dati epigrafici sulla protostoria della Campania, Atti della XVII riunione scientifica dell'Ist. ital. di preist, e protost. in Campania del 1974, Firenze, 1976, p. 152, 163-5. 17 Cfr. E. Lepore, // quadro storico, in F. Zevi (ed.), Pompei 79. Raccolta di studi per il decimonono centenario dell'eruzione vesuviana, Napoli, 1979, p. 13-23. 18 Cfr. A. Maiuri, Una necropoli arcaica presso Salerno e tracce dell'espansione etrusca nell'agro picentino, in StEtr, III, 1929, p. 91-101; A. Marzullo, La tomba del Deinos della necropoli di Fratte, in Annuario del regio Liceo Ginnasio T. Tasso, XIV, 1937, p. 69-79; V. Panebianco, Fratte di Salerno. Necropoli osco-etrusca di Irnum, in RSS, I, 1937, p. 181 ss.; P. Claudio Sestieri, in BdA, XLIX, 1964, p. 361-2; C. Samaritani, in Apollo, V, 1984, p. 165. In questi ultimi anni è stata intrapresa una revisione sistematica di tutte le necropoli di Fratte coordinata dalle cattedre di Archeologia dell'Università di Salerno di concerto con la direzione dei Musei provinciali.
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Ne deriva pertanto che il momento di maggiore fioritura è compres o tra la fine del VI e la prima metà del V, non solo per i dati quantitat ivi, ma anche perché in questo arco di tempo compaiono corredi ascri vibili a sepolture «emergenti». Gli oggetti normali del rituale funerario nella prima fase sono le coppe. Quella carenata di bucchero persiste anche in molti corredi del primo quarto del V secolo confermando a Fratte quell'attardamento già noto da Nocera, Stabia e Caudium, differenti dagli altri centri della Campania dove la coppa carenata di bucchero scompare prima della fine del VI secolo19. Nel primo venticinquennio del V è comunque costantemente associata ad oggetti a vernice nera ed in particolare alla coppetta su alto piede. Frequente, anche se in misura più ridotta, è l'a ccostamento alla kylix su alto piede ed al cup-skyphos. Con la scomparsa del bucchero si consolidano come caratterizzanti il rituale la kylix tipo Bloesch C, quella emisferica e le coppe sia ad orlo piatto che ad orlo ingrossato, queste ultime tipologicamente affini a quelle rinvenute negli strati di fondazione del santuario di Pyrgi nonché a Noia, Pompei, Nocera, Vico Equense, Alfedena e Pompei, per cui è stata avanzata l'ipotesi di una produzione campana ed in particolare capuana20. Non si può escludere, però, per molti degli esemplari rinvenuti a Fratte, una produzione locale ben riconoscibile dalle caratteristiche dell'argilla e della vernice. Prodotte a Poseidonia sono invece molte delle olpette, parzialmente verniciate e dal piede a disco pieno, presenti nei contesti del secondo e del terzo venticinquennio del V secolo. Accanto a questi oggetti base, in alcune sepolture, compaiono vasi decorati a bande molto simili a quelli noti dalle necropoli di Poseidonia della fine del VI e dei primi decenni del V; in altre tombe vi sono vasi, soprattutto oinochoai e stamnoi, con il fondo scialbato e con decorazio ne di tipo geometrico, abbastanza simili ad esemplari noti dell'area campana e che sembrano riallacciarsi a più antichi prodotti di deriva zioneionica. Un altro gruppo di sepolture è invece caratterizzato dalla presenza di grossi contenitori : anfore, ma soprattutto grandi olle stamnoidi con il collo ad imbuto, che dalla fine del VI, con leggere variazio19 Cfr. C. Albore Livadie, Le bucchero nero en Campanie. Notes de typologie et de chronologie, in Le bucchero nero étrusque et sa diffusion en Gaule méridionale {Collection Latomus, 160), Bruxelles, 1979, p. 91-110. 20 Cfr. G. Colonna, in NSc, 1959, p. 233; F. Parise Badoni e M. Roggeri Giove, Alfede na. La necropoli di Campo Consolino, Chieti, 1980, p. XVII.
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ni tipologiche, durano fino alla seconda metà avanzata del V secolo. È difficile trovare confronti precisi per questo grosso vaso che riecheggia forme note sia dalle colonie greche dell'Italia meridionale e della Sici lia, sia dall'Etruria, ma attestate nella seconda metà del VII e nel VI secolo a.C. e non ancora riconducibili a centri di produzione ben definit i. Piuttosto limitato è il numero delle sepolture in cui è presente cera mica attica figurata; esse sono concentrate tra gli ultimi decenni del VI e la prima metà del V : i vasi più correnti sono lekythoi e kylikes (fig. 6), rare e di ottima qualità anfore ed hydriai (fig. 7), spesso rinvenute isola te forse usate come contenitori di ceneri. Altrettanto rari i crateri : solo diciotto esemplari e di questi quattro a figure nere ed uno a figure ros se, comunque sempre associati ad altri vasi che servono a comporre un servizio funzionale al consumo del vino. Accanto agli oggetti ceramici, nelle tombe « emergenti », secondo un costume ben documentato nei centri etruschi ed etruscizzati, compaio no anche, a partire dagli ultimi anni del VI, ma essenzialmente nel cor sodella prima metà del V, numerosi oggetti di bronzo che servono a rafforzare e quasi a rendere più manifesta la esibizione di un rituale che integra quelli che vi partecipano separandoli dal resto della comun ità.Il vasellame di bronzo è costituito da situle, olpette, brocchette, attingitoi, colini, bacili e grattugie, del tutto simili a quelli rinvenuti nel lavicina Nocera. Esemplificativi i corredi delle tombe 22 e 1 16 scavate negli anni 1971-4: il primo, databile intorno al 510/500, ha un' hydria attica a figure nere, una kylix ed una coppa su alto piede ed un calice a vernice nera, un'olla a fasce, una brocchetta, un attingitoio, un colino ed un bacile di bronzo, un coltello, alari e spiedi di ferro. L'altra sepol tura, databile intorno al 480/70, ha il seguente corredo : kylix tipo Bloesch C, coppa, coppetta, brocca, skyphos e lekythos a vernice nera, situla con coperchio (fig. 8), olpe, due colini ed un bacile di bronzo, alar i, spiedi ed anello di ferro. In mancanza di un'accurata documentazio ne di scavo, in verità in alcuni casi inesistente, non conosciamo la esat ta distribuzione di questi oggetti nelle tombe e pertanto non possiamo avanzare alcuna ipotesi sul rapporto funzionale tra il vasellame di bronzo e l'insieme alari-spiedi che in un caso, associati al coltello, fan no pensare alla sfera del sacrificio. Nel corso della seconda metà del V secolo, come si è già detto, il numero delle tombe diminuisce progressivamente fino a cessare del tutto. Inoltre diminuisce il numero degli oggetti che compongono i cor redi, quasi tutti prodotti localmente e piuttosto di serie. Mancano torn-
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be che potremmo definire «emergenti» e l'unico vaso figurato è un1 hydria protoitaliota della tomba 96 del 1974 che si accompagna ad una epikysis e ad un saltcellar a vernice nera. Dopo uno iato di circa un secolo ricompaiono sepolture, sia a camera sia a cassa, con corredi che le connotano come decisamente sannitiche. Queste tombe sono però state rinvenute non nelle aree occu pate dalle necropoli di VI e V secolo, ma a ridosso ed in parte inglobate all'abitato. Qui, scavi recenti21 hanno permesso di individuare, accanto ai tracciati delle ampie trincee eseguite durante l'esplorazione degli anni '50 e poi ricolmate, alcuni lembi intatti che cominciano a fornire utili elementi per definire le fasi cronologiche dell'occupazione del sito. Sembra abbastanza chiaro che la prima sistemazione di tipo urbano dell'area si colloca intorno alla fine del VI secolo a.C. e si sviluppa nel corso del primo quarto di quello successivo. Le strutture degli edifici eretti in questo periodo sono obliterate da un consistente strato di ter reno argilloso, sterile, che segna una fase di abbandono e coincide con il momento in cui cessa anche la documentazione dalle necropoli. L'area verrà poi rioccupata e risistemata nella seconda metà del IV secolo. Dall'insieme di questi dati ne deriva che l'insediamento corrispon dente all'attuale Fratte si sviluppa a partire al VI secolo a.C. in una posizione geografica molto favorevole che ne fa una testa di ponte tra Capua e la piana del Sele oltre che con l'agro nocerino e quello che sarà poi il territorio degli Irpini. Il periodo di maggiore fioritura di questo centro si colloca tra gli ultimi decenni del VI e la prima metà del V, e particolarmente nel pr imo quarto, come sembrano indicare sia i contesti funerari sia l'indagi ne nell'abitato. È questo il momento in cui si registra la maggiore art icolazione nella composizione dei corredi che sembrano esprimere an che una ricca gamma di valenze ideologiche quasi f isicamente raggruppabili nell'ambito dei tre nuclei di necropoli indagate. Del resto la coe sistenza di più componenti etniche all'interno di questa comunità è documentata dalle iscrizioni che lasciano intravvedere una realtà socia-
21 Scavi sistematici nell'area dell'abitato di Fratte sono stati intrapresi dal 1985 dalle cattedre di Archeologia e Storia dell'arte greca e romana e di archeologia della Magna grecia dell'Università degli studi di Salerno. I primi risultati di queste campagne, insieme a quelli scaturiti dalla revisione delle necropoli, saranno ogetto di una mostra permanent e presso il Museo Provinciale di S. Benedetto e di un catalogo.
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le molto dinamica coagulata dall'elemento etrusco ma nello stesso tem pogravitante verso Poseidonia22. L'impoverimento e la fine dell'abitato di Fratte coincide con la tr asformazione che, rompendo consolidati equilibri, portò sullo scorcio del V secolo all'occupazione lucana di Poseidonia e a quella di Capua da parte dei Campani. Nell'Agro Picentino, sulla destra del Sele, l'insediamento etrusco di Pontecagnano sembra entrare in crisi nel corso della prima metà del V secolo con una evidente contrazione delle necropoli e soprattutto con l'esaurirsi, già agli inizi del V (fig. 9), di quei nuclei che, nella seconda metà del secolo precedente, fisicamente distinti dagli altri gruppi, esib ivano ricchi corredi comprendenti tra l'altro vasi attici figurati di note vole impegno23. All'esaurirsi della necropoli corrisponde un impoverimento del santuario di Apollo ed una fase di abbandono dell'abitato. Scavi recenti nel santuario in loc. Pastini hanno verificato che una sistemazione di età arcaica, connessa con un livello di frequentazione databile tra la metà del VI e la metà del V secolo a.C, viene obliterata da una nuova sistemazione con la costruzione di un sacello nel IV secolo. Questo complesso di strutture è sigillato da un livello di crollo riscontrato anche altrove, e databile tra la fine del IV ed i primi del III secolo a.C.24. Evidenti segni di ripresa si manifestano in alcuni ambiti della necropoli intorno agli ultimi decenni del V secolo, quando si registrano vasi importati, prodotti di officine lucane, vasi a figure rosse sovraddipinte del tutto simili a quelli noti a Paestum e prodotti in officine locali e, soprattutto, alcune sepolture maschili con l'inumato deposto con l'armatura indossata e costituita dalle lance, dai cinturoni e dalla coraz za a tre dischi di tipo italico (fig. 10) come quelle che contraddistinguo no le sepolture maschili «emergenti» della prima generazione di Lucan i di Poseidonia e che compaiono, indossate dai cavalieri, nelle scene con «ritorno del guerriero» che, all'interno del sistema decorativo delle 22 Cfr. G. Colonna, Nuovi dati epigrafici della protostoria della Campania, cit., p. 151169; R. Antonini, in StEtr, XLIX, 1981, p. 338, n. 28 e 29; A. Pontrandoldo, Un'iscrizione posidoniate in una tomba di Fratte di Salerno, in A1ON, IX, 1987, p. 55-63. 23 Cfr. L. Cerchiai, cit., p. 44 ss. 24 Cfr. G. Bailo Modesti, Lo scavo nell'abitato antico di Pontecagnano e la coppa con l'iscrizione AMINAf ], e L. Cerchiai, Nota preliminare sull'area sacra di via Verdi, in AION, VI, 1984, rispettivamente p. 215-245 e p. 247-250.
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pitture funerarie pestane della prima metà del IV secolo a.C, servono sempre a connotare le tombe maschili più importanti. I dati in nostro possesso indicano, dunque, che i due centri etru schi più meridionali della Campania nel corso del V secolo si comport ano in maniera polare. Fratte continua la parabola ascendente, iniziata negli ultimi decenni del VI, fino al secondo quarto del V quando comincia a regredire progressivamente, annullandosi intorno agli ult imi anni dello stesso secolo. Al contrario il centro di Pontecagnano sem bra segnare una fase di stallo proprio nel primo quarto del V secolo e manifesta indizi di ripresa solo sullo scorcio dello stesso secolo. L'inda gine futura potrà chiarire meglio le forme ed i modi di questa polarità nonché le cause; per il momento possiamo solo tenere presente che le due comunità, per certi aspetti e sia pure in maniera differente, sem brano entrambe gravitare in parte su Poseidonia e risentire delle tr asformazioni che in questo periodo attraversano questa città. Tra gli ultimi decenni del VI e la prima metà del V secolo a.C. la colonia di Sibari manifesta la sua maggiore floridezza, vale a dire pro prio all'indomani della distruzione della madrepatria quando la volontà di impadronirsi del controllo di quello che era stato Γ« impero» sibarita avrebbe portato Poseidonia a cambiare il piede ponderale, agganciato al commercio tirrenico, per assumere quello che era stato di Sibari. È questo il periodo in cui viene monumentalizzato lo spazio urbano sia con funzioni pubbliche sia religiose. Alla metà del V secolo risalgono le ultime costruzioni templari e l'edificio circolare (fig. 11) eretto nell'ago rà e destinato a riunioni politiche e collettive25. Anche le necropoli registrano un grosso incremento alla fine del VI e nell'arco di tempo compreso all'incirca tra il 475 ed il 450, seguito da una consistente fles sione che abbraccia quasi tutta la seconda metà del V secolo a.C.26. Inoltre, sempre nell'ambito delle necropoli, si verifica un diverso uso dello spazio tra quelle ubicate a settentrione dell'area urbana e quelle poste a sud. Infatti nella necropoli di Arcioni, immediatamente fuori Porta Aurea e sfruttata sin dai primi anni di vita della colonia, le tombe continuano a disporsi fortemente concentrate a gruppi spesso sovrapponendosi ed intersecandosi le une alle altre, mostrando una sostanziale continuità con il periodo precedente.
25 Cfr. E. Greco-D. Theodorescu, Poseidonia-Paestum II, Roma, 1983. 26 Cfr. A. Pontrandolfo, Le necropoli di Poseidonia-Paestum, relazione tenuta al XXVII Convegno di studi sulla magna Grecia, ottobre 1987 (atti in corso di stampa).
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A sud, invece, nella località oggi chiamata S. Venera, in un'area solo episodicamente occupata prima da sepolture, viene impiantata una necropoli che geometricamente allinea le tombe su file regolari lungo assi orientati in direzione est-ovest. Ne scaturisce l'impressione che il corpo civico, numericamente accresciuto e allargato proprio nei primi decenni del V secolo, nel destinare nuove aree ad un uso collettivo le regolamenti secondo un principio di «uguaglianza» che sembra ribalta re la più antica distribuzione per appezzamenti familiari propria della necropoli di età arcaica e che comunque continua ad essere usata anche se le sepolture sono di gran lunga meno numerose di quelle della necropoli meridionale. Entrambe però sono accomunate dal rituale : tipo di sepoltura, modo di deporre il defunto, composizione del corredo, molto sobrio ο in molti casi del tutto assente (figg. 12-13). Mancano i grandi contenitor i come i crateri che si rinvengono invece spesso, in frammenti, sui lastroni di copertura e nell'area intorno alle tombe, testimonianza dei rituali che venivano compiuti sia al momento dell'interramento sia suc cessivamente. Alcune differenze fra i corredi delle due necropoli consi stono nella qualità dei vasi importati, di migliore qualità e di maggiori dimensioni in quella meridionale dove in alcune tombe è presente anche lo striglie ed ancora, in pochissimi casi, la lyra e Yaulòs. Nella necropoli settentrionale, invece, va segnalata la presenza di una ventina di sepolture i cui corredi, accanto agli oggetti propri del rituale funerario poseidoniate, ne hanno degli altri anomali in questo ambito ma fortemente caratterizzanti il rituale funerario di molti centri etrusco-campani e soprattutto Capua, Nocera, Vico Equense, Noia : sono ollette di impasto decorate da un giro di bugne sotto l'orlo, anfore ingubbiate con anse a gomito, boccaletti di argilla figulina con ansa sormontante (fig. 14). Questi segni rivelatori di una diversità flebilmente manifestata e per certi versi quasi integrata sono ribaditi da una iscrizione rinvenuta a Fratte, ma impressa nell'argilla ancora fresca, prima della cottura, su di un'olpetta di evidente fabbricazione posidoniate, databile con suffi ciente precisione tra il 480 ed il 470 a.C.27. L'iscrizione è in alfabeto acheo ed usando un formulario specificamente greco allude a pratiche sessuali e comunicative che vedono coinvolti greci (Apollodoro, Onata), etruschi (Vulca) e probabilmente italici (Nikso, Ybrico, Parmynio), e 27 Cfr. A. Pontrandolfo, Un iscrizione posidoniate. . ., cit.
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lascia intravvedere in filigrana anche a Poseidonia l'esistenza di una mistione etnica, marginale almeno per quanto riguarda il modello ideo logico espresso dal corpo civico, ma del tutto simile a quella più consi stentemente manifesta a Fratte ed a Pontecagnano già alla fine del VI secolo. In questo orizzonte culturale si inserisce la Tomba del Tuffatore che rimane un documento eccezionale e palesemente anomalo per il mondo greco che non usa decorare le pareti interne delle tombe con scene figurate e soprattutto separa nettamente il mondo del simposio da quello della morte. Il coerente programma decorativo che informa queste pitture usa coscientemente un codice greco per esaltare un modello mentale ed ideologico altro rispetto a quello dominante nella città e che rappresenta una risposta individuale alla morte in cui viene meno ogni forma di integrazione politica, ribadita, come è stato più volte sottolineato, anche dalla non appartenenza di questa tomba alle necropoli urbane28. La Tomba del Tuffatore ha, nella scelta di decorare le pareti con scene tratte da schemi frequenti nella ceramica attica, alcuni aspetti in comune con un altro monumento coevo : la tomba a camera rinvenuta a Capua e di cui purtroppo rimane solo un disegno di uno dei lati lun ghi su cui erano rappresentati due uomini seduti intenti a giocare a dama con due giovinetti come spettatori29. In mancanza di un sistema di dati in cui collocarla, ogni ipotesi interpretativa sarebbe azzardata, tuttavia va registrata la sua contemporaneità alle pitture della tomba posidoniate ed il fatto che viene espressa nel momento in cui l'insedi amento realizza in maniera definita una organizzazione di tipo urbano. Nel corso della seconda metà del V secolo nelle necropoli di Poseidona si registra una forte ed evidente contrazione che corrisponde ai livelli di distruzione riscontrati all'Heraion alla foce del Sele; l'esito di questa crisi sarà l'occupazione della città da parte dei Lucani, archeolo gicamente segnata da una radicale trasformazione del rituale funerario intorno all'ultimo decennio del V secolo30. È lo stesso periodo in cui viene abbandonato l'insediamento di Fratte, entra in crisi la comunità 28 Cfr. E. Greco, Non morire in città. Annotazioni sulla necropoli del Tuffatore di Poseidonia, in A10N, IV, 1982, p. 50-55. 29 Cfr. B. D'Agostino, // mondo periferico della Magna Grecia, in Popoli e civiltà dell'Italia antica II, Roma, 1974, p. 201-2. 30 Cfr. A. Greco Pontrandolfo, Segni di trasformazioni sociali a Poseidonia tra la fine del V e gli inizi del III secolo a.C, in Dialoghi di archeologia, n.s., 1979, 2, p. 27 ss.
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di Capua con le sue notevoli produzioni artigianali, mentre al contrario si rivitalizza l'insediamento di Pontecagnano. Nell'entroterra tirrenico gravitante sul golfo pestano dai pochi dati noti ricaviamo due grossi momenti di cesura : uno intorno al primo quarto del V quando cessano le tombe di Sala Consilina e contempora neamente si incrementano le necropoli di Padula, sorta intorno alla fine del VI e che nel V assume il ruolo di centro principale del Vallo di Diano. Qui, al cvatere-kantharos, grosso contenitore di produzione loca le e con funzioni pregnanti in questo rituale funerario, si affiancano vasi attici di ottima fattura, molto spesso crateri (fig. 15) ed hydriai. Nei corredi più ricchi vi sono anche numerosi vasi di bronzo del tutto simili a quelli delle tombe di Nocera e Fratte, ma anche di Bologna e Spina. La fine della necropoli di Padula, intorno all'ultimo quarto del secolo, segna il passaggio ad una nuova fase di cui, purtroppo, siamo poco informati in assenza quasi assoluta di contesti esplorati31. Ai marg ini del Vallo di Diano, l'abitato di Monte Pruno presso Roscigno, a ridosso del valico che collega il vallo con la piana del Sele, sorto proba bilmente tra la fine del VI e gli inizi del V, come sembrano indicare i rinvenimenti di superficie, offre un importante documento : una gran detomba di tipo principesco, forse coperta da un tumulo, scavata casualmente nel 1938. Questa sepoltura, databile intorno agli ultimi anni del V secolo, aveva, accanto all'inumato deposto in posizione supi na, ben 43 oggetti di corredo. Tra essi assumono un ruolo centrale quelli che celebrano il simposio : una nestoris di bronzo come Yoinochoe, l'olpe, l'olpetta, il boccaletto, il colino, un kantharos d'argento e numerosi vasi attici e protoitalioti tra cui un rhyton ed una kylix attici a figure rosse. Ad essi si affiancano altri oggetti, quali la cuspide di lan cia ed il carro di ferro e gli strigili di bronzo che sembrano alludere ad un modello atletico-militare. Tutti questi segni riflettono un ideale piut tosto arcaico di tipo aristocratico, lo stesso esibito dalla coppia delle tombe «principesche» di Melfi-Pisciolo e da quella di Ruvo del Monte di qualche decennio più antiche a cui è accomunata anche dalla pre senza di un candelabro di bronzo di matrice etrusca sia nella fattura che nelle funzioni32.
31 Per il Vallo di Diano in V secolo a.C. cfr. i saggi di E. Greco e di A. Greco Pontrandolfo, in Storia del Vallo di Diano I, Salerno, 1981, rispettivamente p. 125 ss. e p. 149 ss. 32 La tomba di Monte Pruno è stata edita da R. R. Holloway, in Revue des archéolo gues et historiens d'art de Louvain, 15, 1982, p. 97 ss., per le interpretaziuni cfr. A. Greco
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In un altro centro, Atena Lucana, che si trova ai margini opposti del Vallo di Diano, alla fine del V secolo viene invece registrato, in un quadro di sostanziale continuità con la realtà più antica, un mutamento nel rituale funerario esibito però solo da alcune sepolture che hanno il defunto deposto in posizione supina e non, come di norma, rannicchiat o33. Lo stesso fenomeno si riscontra anche nella non lontana Satriano a cui è accomunata dalla stessa cultura materiale. Va ricordato come è stato più volta sottolineato, che la tomba più antica di Atena con il cadavere supino, databile intorno al 400, aveva un cinturone ed una lancia insieme ad un cratere protoitaliota a figure rosse e ad una pate ra di bronzo, un corredo diverso da quelli normali nella zona e che esi bisce, sia pure in tono minore, segni abbastanza simili a quelli espressi della prima generazione dei Lucani di Poseidonia e presenti, come si è detto, anche a Pontecagnano. Angela Pontrandolfo Bruno D'Agostino
Pontrandolfo, / Lucani, Milano, 1982, p. 104-7; A. Bottini, / Lucani, in Magna grecia II, Milano, 1987, p. 269; B. D'Agostino, II rituale funerario nel mondo indigeno, cit., p. 114. 33 Cfr. W. Johannowsky, in StEtr, 49, 1981, p. 504 ss.
CARMINE AMPOLO
ROMA ARCAICA ED I LATINI NEL V SECOLO
Nel 1913 Arthur Rosenberg, il grande studioso allievo di Ed. Meyer, pubblicava la sua opera più novatrice, Der Staat der alten Italiker. In essa scriveva, quasi come conclusione dell'analisi che vi faceva della documentazione romana (p. 80-81) : «Mitten in Italien lag der römische Staat. Er war latinischer Nationalität, nah benachbart den oskischen Stämmen, den Sabinern und Volskern, und von früh an stand er in engster Verbindung mit den Etruskern. So kreuzten sich in Rom die Einflüsse aus allen Teilen Italiens. Diese Ver hältnisse haben auch der Entwicklung der römischen Magistratur den Weg gewiesen. Von Anfang an hat Rom die Anregungen, die das Ausland ihm bot, bereitwillig aufgenommen. Aber mit grossartigem staatsmänni schen Takt haben die Römer stets die fremden Institutionen umgebildet, ja zu ganz neuen Formen des Staatslebens umgeschaffen. So ist schon die älteste römische Republik ein origineller Staat, der keinem anderen im damaligen Italien glich, soweit wir sehen können». Egli continuava riaffermando l'originalità romana che, sull'esem pio degli Oschi e forse di altre città latine, aveva rifiutato la presenza di un sovrano unico e quella di un dittatore annuale (come ad Alba), ma aveva combinato potere supremo e collegialità. Una innovazione che forse Roma aveva introdotto per prima1. La precisa ricostruzione del1 A. Rosenberg, Der Staat der alten Italiker, Berlino, 1913, p. 80-1. Sul problema della continuità delle strutture magistratuali italiche, la loro originalità ed il rapporto con quelle romane si vedano le diverse posizioni di H. Rudolf, Stadt und Staat im römischen Italien, Lipsia, 1935; S. Mazzarino, Dalla monarchia allo stato repub blicano, Catania, 1945; E. Campanile, C. Letta, Studi sulle magistrature indigene e municip ali in area italica, Pisa, 1979; per le magistrature etrusche R. Lambrechts, Essai sur les magistratures des républiques étrusques, Bruxelles-Roma, 1959; M. Cristofani, Società e istituzioni nell'Italia preromana, in Popoli e civiltà dell'Italia antica, VII, Roma, 1978, p. 51-112; M. Pallottlmo, Etruscologia1 , Milano, 1984, p. 307-321; G. Colonna, Le forme
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le istituzioni romane alle origini della repubblica è ed è destinata a restare materia di discussione; ma quello che merita di essere ribadito sulla scia di Rosenberg è il duplice carattere dell'esperienza romana, quell'essere nello stesso tempo 'città latina' e 'città aperta'. La capacità d'integrare elementi di diversa origine si manifesta sul piano etnico, su quello culturale ma anche su quello istituzionale. Da questa capacità d'integrazione nasce anche una capacità di elaborazione originale2. Mi limito qui a presentare alcuni elementi nuovi ο poco considerati, che vanno ad integrare un gruppo di studi che ho già dedicato alla 'città aperta' ed al rapporto con i Latini e con le altre culture. Cercherò quin di di non ripetere tutto quanto ho già sostenuto in altra sede, salvo ribadire due punti fondamentali : 1) Roma nel VI secolo a.C. è una città latina come prova indiscu tibilmente il cippo del lapis niger nel Foro romano, anche se natural menteessa ha una cospicua presenza di elementi di origine diversa; 2) due documenti sicuri, cioè i due primi trattati tra Roma e Cartagine, riportati da Polibio III, 22-25, mostrano con tutta la loro eviden za documentaria quale era la situazione di Roma in rapporto al Lazio
ideologiche della città, in Civiltà degli Etruschi, (Catalogo della mostra Firenze 1985) Mila no,1985, 242s. 2 Sulla mobilità sociale arcaica e sulla capacità romana d'integrare elementi esterni ho insistito più volte, ad es. vedi : Su alcuni mutamenti sociali nel Lazio arcaico tra Will e il V secolo, in DArch, IV-V, 1970-71, p. 37-68; Demarato. Osservazioni sulla mobilità sociale arcaica, in DArch, IX-X, 1976-77, p. 333-345; 1 gruppi etnici in Roma arcaica. Posizione del problema e fonti, in Gli Etruschi e Roma. Incontro di studio in onore di M. Pallottino, (Roma 1979), Roma, 1981, p. 45-70; Roma arcaica tra Latini ed Etruschi : aspetti politici ed istituzionali, in Etruria e Lazio arcaico (QuadAEl, 15), Roma, 1987, 75-87. Per una sintesi rimando al mio La nascita della città, in A. Momigliano, A. Schiavone (a cura di), Storia di Roma, I, Torino, 1988, p. 153-180, in particolare 172-177. Sulla presenza di genti di origi ne straniera e di elementi culturali diversi (italica ed ellenica) aveva portato l'attenzione dei Moderni già E. Pais (ad es. in Ricerche storiche e geografiche sull'Italia antica, Torino, 1908, p. 307-436 ed in Ricerche sulla storia e sul diritto pubblico di Roma, II, Roma, 1916, p. 232-248). Importanti conferme sono venute dall'onomastica etrusco-italica e dagli studi di G. Colonna e C. De Simone ; a quest'ultimo in particolare si deve l'individuazione certa di passaggi tra sistemi onomastici diversi {SE, XL, 1972, p. 152-181) ed ora l'elaborazione del concetto di « competenza onomastica multipla » {Etrusco Acvilna latino Aquilius : un problema di intercambio onomastico, in PP (in stampa)). Richiamo qui solo le fonti più significative per la consapevolezza di questi fenomeni : Liv. IV, 3-4; T\c, Ann. XI, 24; CIL XIII, 1668 = ILS 212 (discorsi di Canuleio e dell'imperatore Claudio); cfr. Cic, de off. I, 11, 35; D.H. I, 9, 4; II, 16-17; IV, 23; Plut., Rom. 16, 3; per la sola integrazione di schiavi la lettera di Filippo V ai Larissei : IG IX, 2, 517 = SIG3 543 = ILS 8763 (anno 214 a.C).
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all'inizio del periodo qui considerato (cioè nei decenni intorno al 500 a.C.) e poi nel IV secolo. Senza voler riaprire l'annosa querelle sulla cro nologia dei trattati romano-cartaginesi, credo di aver già portato argo menti decisivi in favore della cronologia tradizionale, polibiana, del pr imo trattato e, soprattutto, di aver mostrato quanta distanza di cronolog ia, di situazione politica e di concezione ci sia fra i due testi. Ripeto brevemente i due argomenti : a) le formule dei giuramenti con le divini tà menzionate sono radicalmente diverse, perché nel I trattato si giura ο per Iuppiter lapis ο 'mediante la pietra', coinvolgendo - quale che sia la interpretazione seguita - Iuppiter Feretrius*', b) nel I trattato il cam pod'azione politico-militare di Roma è limitato al Lazio, mentre in Sar degna, Sicilia ed Africa sono previste solo transazioni mercantili regola mentate (la presenza in Africa al di là del capo Bello di navi romane ο di alleati è prevista solo in casi di forza maggiore come tempeste ο ins eguimenti di navi nemiche). Invece nel II trattato i Romani compaiono come potenziali fondatori di città : l'espressione πόλιν κτίζειν compare ben tre volte, la prima non nel testo ma nella presentazione che ne fa Polibio (III, 24, 2 con riferimento all'Africa), ma le altre due volte nel testo vero e proprio del trattato, una volta in riferimento all'Africa (od alla Spagna secondo un'interpretazione moderna) ed un'altra con rif erimento alla Sardegna ed alla Libye. Nel II trattato quindi i Romani sono dei fondatori di città, che potrebbero addirittura insediarsi in Sar degna ed in Africa. La situazione internazionale è quindi molto cambiat a rispetto a quella del I trattato, anche per quel che riguarda la poten za romana che potrebbe agire fuori del Lazio. L'insistenza del trattato
3 Pol. Ili, 25, 6-7. Sia che si legga con l'Ursinus Δία λίθον che δια λίθων (ο δια λίθου) come sembra più probabile (ad es. a J. de Foucault nell'ediz. Bude, Parigi, 1971, p. 197), la connessione con questa divinità è sicura; lo prova Paul, ex Fest. 102 L (Lapi dentsilicem tenebant iuraturi per Iovem etc.) confrontato con 81 L (Feretrius Iuppiter dictus a ferendo, quod pacem ferre putaretur; ex cuius tempio sumebant sceptrum, per quod iurarent, et lapidem silicem, quo foedus ferirent). Per una discussione del problema cfr. F. W. Walbank, A Historical Commentary on Polybius, I, Oxford, 1957, p. 351-353 con bibl. Si osservi comunque che P. contrappone espressamente questo tipo di giuramento antico (κατά τι παλαιον εθος) a quello per Marte e Quirino (da soli, senza menzione di Giove!). Poiché i trattati di P. sono tre, non è del tutto chiaro a quali si riferiscano esattamente i due tipi di giuramenti; ma poiché il terzo è giudicato un ampliamento del secondo dallo stesso P., se ne deduce che il tipo più antico di giuramento è relativo al solo 1° trattato (così Walbank e de Foucault, loc. cit.) mentre il secondo tipo faceva parte del 2° ed even tualmente del 3° trattato. Sul giuramento cfr. inoltre H. Wagenvoort, Roman Dynamism, tr. ingl., Oxford, 1947, p. 50-58.
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su questo punto è eloquente; il riferimento alla Sardegna ci consente di affermare con Momigliano che qui i Cartaginesi volevano rispondere ai tentativi coloniali romani in Sardegna e Corsica4. Comunque, quali che siano le differenze tra i due testi, è chiaro che sia verso il 500 a.C. che nel IV secolo (comunque prima del 338 a.C.), il campo di azione di Roma, l'area geografica con cui i Romani hanno un rapporto privilegiato, è il Lazio dei Latini. Tanto che si è anche pensato che il Lazio costituisse in un certo senso la chora, il territorio di Roma, una sorta di primo passo verso formazioni territoriali più ampie, aggre gazioni ο federazioni di città attorno ad un centro dominante5. Ma
4 A. Momigliano, Due punti di storia romana arcaica, in SDHI, II, 1936, 373-398 ora in Quarto contributo alla storia degli studi classici e del mondo antico, Roma, 1969, p. 329-361 (in particolare 360-361); C. Ampolo, Roma arcaica, cit. (in particolare 81-85). Sulla coloniz zazione romana in Sardegna e Corsica da ultimi M. Torelli, Colonizzazioni etrusche e lati nedi epoca arcaica : un esempio, in Gli Etruschi e Roma cit., p. 71-82; Ampolo, Roma arcai ca, cit.; fonti letterarie : Diod. XV, 27, 4 (anno 378/7 a.C); Theophr., Hist, plant. V, 8, 2 (si noti che per la colonia in Corsica egli usa le espressioni κατασχευασθαι πόλιν e τήν πόλιν οίκίζειν). Vanno inoltre considerati il graffito Klavtie da Aleria in Corsica e le iscrizioni della tomba dei Clavtie di Caere (editi rispettivamente da J. Heurgon in J. et L. Jehasse, La nécropole preromaine d'Alena (Gallia, XXV Suppl.), Parigi, 1973, p. 551 e da L. Cavagnaro Vanoni, in SE, XXVII, 1969, p. 318-323; cfr. da ultimo A. Fraschetti, A proposito dei clavtie ceretani, in QUCC, n° 24, 1977, p. 1-5 con bibl. precedente); il primo è su una kylix a figure rosse del 425 a.C. ca, le seconde sono del IV sec. a.C. ma entrambe mostrano rapporti fra Roma, Caere e la Corsica fra V e IV secolo. Per quel che riguarda le clausole del II trattato romano-cartaginese il parallelismo tra μηδ' έμπορεύεσθαι μηδέ πόλιν κτίζειν di Pol. Ill, 24, 4 (cfr. il πόλιν κτίζειν ricordato subito prima da P.) e μήτ' έμπορευέσθω μήτε πόλιν κτιζέτω di III 24, 1 1 mostra che le riserve di D. Musti in Etruria e Lazio arcaico cit. a n. 2, p. 189-90 sono infondate ; semplicemente all'espressione citata di III, 24, 1 1 fa seguito una lacuna, come rilevato già dal Casaubon (Walbank, op. cit., p. 349; de Foucault, op. cit., p. 60 n. 2). Si noti anche una certa corrispondenza tra le clausole del trattato e l'espressione usata da Theophr., loc. cit. (in ambedue i casi a proposito dei Romani, anche se Teofrasto si riferi scealla Corsica; questa non è menzionata nei trattati con Cartagine per il fatto che essa rientrava nella zona d'influenza etrusca). Per la terminologia in generale vedi M. Casewitz, Le vocabulaire de la colonisation en grec ancien, Parigi, 1985, p. 32 s. e 90 s. Per l'ampia bibliografia sui due primi trattati e altri testi vedi H. Bengtson, Die Staatsverträge des Alter tums, II, Monaco di Β., 19752, p. 16-20, 306-309, 339-340 e 345. Ho riassunto gli argomenti a favore della cronologia polibiana del I trattato in Momigliano, Schiavone, Storia di Roma, I, cit., p. 231 n. 82; per il secondo trattato Polibio non da una cronologia assoluta; anche se non lo si identifica con il trattato del 348 a.C. di Liv. VII, 27, 2 e di Diod. XVI, 69, 1 (ad es. S. Calderone, in Philias charin. Miscellanea E. Manni, Roma, 1979, p. 365-375), esso è comunque anteriore al 338 a.C. 5 L'idea di una chora come «zona di espansione» è stata analizzata a proposito del 3° trattato di Polibio da S. Mazzarino, Introduzione alle guerre puniche, Catania, 1947,
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anche senza accettare interamente questa ultima interpretazione, resta il fatto che dei documenti già da soli indicano per gl'inizi del V secolo ca. e poi per il IV secolo (prima del 338 a.C, cioè della fine della vec chia lega latina) che vi era un rapporto speciale dei Romani con il nomen Latinum ed il Latium. Esso si esprimeva in modi vari, oltre che attraverso la comunanza linguistica : attraverso i culti comuni, cioè i sacra (in primo luogo le feriae Latinae), attraverso l'organizzazione poli tica della lega latina e - a livello magistratuale - attraverso comandanti comuni, praetores e dictatores. Quest'ultimo punto è di fondamentale importanza perché mostra l'esistenza di un comando unificato e l'un iformità tra alcune forme dell'organizzazione istituzionale romana e quelle latine. Privilegio qui gli aspetti istituzionali sia perché mi offrono la possibilità di dare un contributo nuovo, sia perché le istituzioni della repubblica romana e quelle della lega latina consentono di vedere meglio la struttura originale, profonda, della civitas romana. Inoltre, come in altri casi, cerco di seguire quella che ritengo la 'via maestra' da seguire quando si ha a che fare con un terreno così incerto come la storia romana più antica : fondarsi soprattutto su documenti sicuri, frutto di scavi ο citati dagli Antichi, e confrontarli con le fonti letterarie (storiche ed antiquarie) ed il contesto storico e archeologico.
I Rapporti romano-latini agl'inizi del V secolo a.C. Com'è noto, le stesse riserve che si possono avere per la ricostru zione della storia interna di Roma nel V secolo, gravano sulla storia esterna ed i rapporti internazionali di Roma. Tutti ricordano la famosa osservazione critica di Tito Livio (II, 21, 4): Tanti errores res implicant temporum, aliter apud alios ordinatis magistratibus, ut nec qui consules secundum quos, nec quid quoque anno actum sit, in tanta vetustate non rerum modo sed edam auctorum digérere possis. E si noti che queste riserve di Livio vengono fatte non per un avvenimento interno, ma pro prio quando egli ricorda l'esistenza di due diverse cronologie della batp. 64 s. (importante anche per le osservazioni sui rapporti romani con la Sardegna e la Corsica, p. 89 s.). La grande distanza tra i due primi trattati è stata giustamente sottoline ata fra gli altri da J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu'aux guerres puni ques, Parigi, 1969 p. 386 s. (trad, it., Roma-Bari, 19862, p. 379 s.) e da A. J. Toynbee, Hannib al'sLegacy, I, Oxford, 1965 (trad. it. Torino, 1981, p. 662 s.).
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taglia fra Romani e Latini combattuta al lago Regillo (cioè 499 ο 496 a.C). Ma a parte questi dubbi, che vertono sulla cronologia esatta e non sulla storicità ο l'interpretazione degli eventi narrati dalle nostre fonti letterarie, è ben nota l'enorme differenza che corre fra le ricostruzioni moderne e la valutazione diversa del ruolo di Roma in rapporto ai Latin i.Il problema centrale è questo : dopo la guerra con i Latini, i Romani hanno avuto una posizione di dominio (come ce la presentano Livio e Dionigi), oppure sono stati un membro come altri della lega latina e quanto viene loro attribuito fu in realtà opera dei Latini collegati (come ha sostenuto A. Alföldi)6? Per rispondere alla domanda occorre a mio avviso partire da tre elementi che sono strettamente connessi nelle nostre fonti, tanto da fo rmare una sorta di sistema, di blocco unico : la vittoria romana al lago Regillo a conclusione della guerra con i Latini; il voto e la costruzione del tempio dei Castori; il foedus Cassianum che regola i rapporti roman o-latini, sostanzialmente fino al 338 a.C. Questo blocco di fatti concat enati, strettamente collegati nei racconti degli Antichi e nella logica stessa degli eventi, offre il grande vantaggio di poter essere verificato in uno dei punti chiave (la costruzione del tempio dei Castori) grazie ad indagini archeologiche recentissime; inoltre si fonda anche su un docu mento noto agli Antichi per testimonianza oculare, leggibile e controllab ile ancora in età storica, cioè la colonna bronzea con il foedus1. Gli scavi hanno messo in luce l'esistenza di una prima fase del tem pio che presentava una grande imponenza : difatti esso aveva un podio in blocchi di cappellaccio che raggiungeva un'altezza di circa m 3,60 e che era formato da un reticolo di muri di fondazione su cui si ergevano
6 A. Alföldi, Early Rome and the Latins, Ann Arbor, 1963. Una posizione equilibrat a, non lontana da quella che viene proposta in questa sede, in A. Bernardi, Nomen Lat inum, Pavia, 1973, p. 33 s. 7 Per il foedus Cassianum : D.H. VI, 95, 1-3; Liv. II, 33, 3-4, 9; cfr. II, 22, 5; VI, 2, 3; VII, 12, 7; Cic, pro Ealbo 23, 53; Fest. 166 L, 276 L. Cfr. per fonti e bibl. Bengston, Staatsverträge, cit. 126, p. 22-26 e 340. Per il tempio dei Castori ved. n. 8 e per la battaglia del lago Regillo n. 9. Fra i lavori più recenti sul foedus : M. Humbert, Municipium et civitas sine suffragio, Roma, 1978, p. 65 s. ; D. W. Baronowski, Roman Treaties with Communi tiesof Citizens, in The Ancient History Bulletin, I, 1987, p. 43-47; R. Hirata, Die sogenannten Neutralitätsbestimmungen im Foedus Cassianum, in T. Yuge, M. Doi (edd.), Forms of Control and Subordination in Antiquity, Tokio, 1988, p. 96-104. Oltre alle import antitrattazioni nelle opere citate alle note 5 e 6 vedi R. Werner, Der Beginn der römi schen Republik, Monaco, Vienna, 1963, p. 443 s. e K. E. Petzold, Die beiden ersten r ömisch-karthagischen Verträge und das foedus Cassianum, in ANRW I, 1 (1972), p. 364-411.
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muri e colonne del tempio. Gli scavatori pensano che fosse un tempio con tre celle, simile al tempio A di Pyrgi. Il tempio prese il posto di strutture precedenti, forse delle abitazioni, e la sua costruzione è legata ad un grande rialzamento del terreno (di circa m. 1,5) su cui fu eretto il tempio. Della decorazione architettonica restano frammenti di terrecotte databili su base stilistica agl'inizi del V secolo a.C.8. Fondarsi su scavi noti solo da rapporti preliminari e non editi interamente è sempre rischioso, ma in questo caso i dati emersi mi sembrano confermare la sostanza dell'informazione nota dalle fonti letterarie : agl'inizi del V secolo fu costruito il tempio dei Castori legato alla vittoria sui Latini ed alla cavalleria. Sotto la leggendaria epiphaneia dei Dioscuri intravvediamo la corposa presenza della cavalleria e la conseguente costruzione dell'imponente tempio (votato quindi nel 499 ο nel 496 e consacrato nel 484, secondo la cronologia tradizionale)9. Tutto ciò mostra che Roma agl'inizi del V secolo avrà attraversato una fase critica (lotte con Latini ed altri vicini vecchi e nuovi; lotte sociali all'interno; possibile perdita di territori controllati nel VI secolo ecc.) ma era ancora una città in grado di costruire con bottini ο con risorse proprie un grande tempio. E, per quel che riguarda il valore delle fonti, abbiamo ottenuto la veri fica non solo di un dato, ma anche di un principio di metodo : le notizie relative a costruzioni ο ricostruzioni di templi, per la loro natura sacral e e pubblica insieme, sono quelle che si conservano più facilmente e che sono più degne di fede (quali che ne siano ovviamente i risvolti leggendari od etiologici che le rivestono spesso). Ritornando agli eventi di quegli anni, possiamo anche supporre ragionevolmente che l'organizzazione ο l'ampliamento del numero del letribù rustiche ricordato da Livio (II, 21,7) sia anche in rapporto con una riorganizzazione del territorio romano, soggetto a modifiche in base alle alterne vicende belliche (lotte con Latini, Sabini e poi soprat tuttoEqui, Volsci, e persino Aurunci). Il documento principe dell'alleanza con i Latini è naturalmente il trattato stipulato da Spurio Cassio (il cui nome da solo figurava nel 8 E. Nielsen e C. Gr0NNE in Archeologia laziale, Vili, 1987 p. 83-87; Gr0nne, in Archeologia laziale, IX, 1988, p. 27-31. 9 D.H. VI, 13; Liv. II, 20, 12; 42, 5; Cic, de nat. deor. Ili, 5, 11-13; Plut., Cor. 3, 5. Altre fonti sul tempio in S. B.Platner, Th. Ashby, A Topographical Dictionary of Ancient Rome, Londra, 1929, p. 102-105. Vi era confusione sul dies natalis del tempio stesso e sul giorno della battaglia del lago Regillo, connessi ο con il 27 gennaio ο con la transvectio equitum del 1 5 luglio (testi e discussione in A. Degrassi, //, XIII, 2, p. 403-404, 483).
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testo, come ricorda Livio II, 33, 9), visibile ancora al tempo di Cicerone nel Foro Romano, dietro i Rostri (Cic, pro Balbo 23, 53). Dionigi (VI, 95) ne da una sorta di riassunto parziale, mentre Festo (166 L, s.v. nancitor) ne riporta una citazione10. Non si può quindi dubitare dell'es istenza del testo epigrafico del foedus Latinum esposto in pubblico nel cuore politico di Roma; naturalmente è difficile dire se quello che si vedeva nel I secolo a.C. era ancora il documento del V secolo oppure una copia incisa più recentemente (ad esempio in occasione del rinnovo del 358 : Liv. VII, 12, 7). Esso, com'è noto, regolava una serie di iura che facilitavano i rapporti mercantili, giuridici e personali (questi ult imi erano certamente molto intensi, come mostrano vari indizi; hospitia : Liv. II, 22, 7; matrimoni : D.H. VI, 1, che ne parla per il 497 a.C). Ma per valutare i rapporti di forza tra i Romani e gli altri Latini dob biamo tener conto soprattutto della norma che regolava la spartizione del bottino (D.H. V, 95, 2); ora preda e bottini dovevano essere divisi in parti uguali tra Romani da un lato e Latini dall'altro. Questa clausola mostra con grande chiarezza che l'eguaglianza era solo apparente, per ché Roma equivaleva a tutti gli altri Latini messi insieme e quindi ave vamolto più peso di ognuno dei singoli membri della lega. Anche se gli altri membri conservano evidentemente una loro indi vidualità e possono poi avere rapporti bilaterali di vario tipo fra loro ο con Roma, è chiara la loro sostanziale subalternità a Roma. Ciò si accorda per l'essenziale con le clausole del primo trattato romano car taginese, mentre l'assimilazione tra Romani e Latini trova ulteriore riscontro in due altri documenti, come già sottolineava Mommsen11. Nelle XII Tavole (III, 5) la vendita come schiavo del debitore insolvente può avvenire solo trans Tiberini, cioè fuori del territorio della confeder azione. Ciò prova che alla metà del V secolo la lega latina era piena mente operante e l'assimilazione tra Romani e Latini avanzata. L'altro documento è il secondo trattato romano-cartaginese che pre scrive che se i Cartaginesi catturano un alleato dei Romani e lo portano in un porto romano, se un cittadino romano mette la sua mano su di lui, il prigioniero dovrà essere lasciato libero (Pol. Ill, 24, 6). Quindi « nessun membro di uno degli stati confederati poteva vivere come servo entro i confini di tutta la confederazione» (Mommsen). Inoltre sembra di co gliere anche in questa clausola una posizione di forza dei Romani sui 10 Vedi n. 7 11 Th. Mommsen, Römische Geschichte, I, 18746, p. 101.
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federati latini (pur essendo qui usata in modo ad essi favorevole). Quello che si può ribadire è che non c'è contraddizione di fondo tra le norme del foedus Latinum ed i due trattati romano-cartaginesi. Il problema si pone invece in termini diversi per quel che riguarda la dedica votiva del bosco sacro a Diana Nemorense presso Aricia, di cui trattava Catone (fr. 58 P)12. La lista di otto populi che vi compare dopo il nome del dedicante ufficiale (un magistrato latino : dic(t)ator Latinus) è stata da Beloch, De Sanctis, Bernardi ed altri considerata come un documento completo, testimonianza di una federazione ant iromana indipendente dalla lega latina dei triginta populi13. Credo di aver mostrato, come già Mommsen ed i suoi scolari ed altri studiosi, che la lista è quasi certamente incompleta perché la citazione (di terza mano!) s'interrompe al nome che interessava i grammatici (Capro ripreso da Prisciano) che citavano Catone14. La cosa più probabile è che vi fosse un lungo elenco di populi Latini, gli stessi ο quasi che face vano parte della lega. Ci si può divertire a ricostruire la lista, con lo stesso spirito con cui antiquari e storici avevano ricostruito l'elenco - in ordine alfabetico - di 29 città latine, vale a dire i 30 populi meno Roma, che nel 498 a.C. avrebbero deciso nell'assemblea federale al bosco di Ferentina di muover guerra ai Romani. L'unica certezza che possiamo trarre dal testo è che il magistrato in carica era un Tuscolano, che la lista ha al suo inizio città come Tuscolo ed Aricia e che il nome dei 12 Lucum Dianium in nemore Aricino Egerius Baebius Tusculanus dedicavit dictator (dicator nel Parisinus latinus 7496) Latinus. Hi populi communiter : Tusculanus, Aricinus, Lanuvinus, Laurens, Coranus, Tiburtis, Pometinus, Ardeatis Rutulus. Il passo di Catone ci è conservato da Prisciano (IV, 129 Η ; VII, 337 H); nella recente edizione Bude, curata da M. Chassignet (Caton, Les origines. Fragments), Parigi, 1986) è il fr. II, 28. Esso va con frontato con Fest. 128 L (Manius Ege(rius lucum) Nemorensem Dianae consecravit, a quo multi et clan viri orti sunt etc.). È probabile che Festo alludesse alla stessa dedica, ma c'è incertezza anche per le varianti del nome del dedicante in Prisciano. Per una discussione e la bibliografia precedente rimando al mio Ricerche sulla lega latina. IL La dedica di Egerius Baebius (Caio fr. 58 Peter), in PP, XXXVIII, 1983, p. 321-326. La popolarità del proverbio Multi Mani Ariciae cui si riferiva Festo 128 L è attestata ancora da Persio V, 55-60. 13 K. J. Beloch, Die Weihinschrift des Dianahaines von Aricia, in Jahrbücher für dassische Philologie, XXIX, 1883, p. 169-175; G. De Sanctis, Storia dei Romani, II, Firenze, I9602, p. 86; Bernardi, op. cit., p. 25 s.; da ultimo V. Cicala, A proposito di una dedica a Diana Nemorensis : Caio, ap. Prise, IV, p. 129 = Peter, HRR, Ρ, p. 72, in RSA, VI-VII, 197677, p. 301-305. 14 Art. cit. an. 12. Per l'incompletezza è anche Chassignet, op. cit. p. 29, che si basa sull'opinione di Alföldi ed Heurgon.
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Romani o non compariva affatto oppure era citato successivamente nella parte che non ci è pervenuta. Ciò vuoi dire ο che si tratta della lega che combattè contro Roma, cioè quella sconfitta al lago Regillo, oppure che si tratta della lega latina in un momento storico in cui il ruolo di Roma era stato ridimensionato. Siamo comunque in una situa zione diversa da quella attestata dal I trattato romano-cartaginese e dal foedus Cassianum, compatibile con la datazione correntemente accolta al 500 a.C. (cioè fra le date tradizionali dei due documenti citati). Sono possibili altre ipotesi, ma in questo caso occorre affidarsi a combinazion i con tradizioni annalistiche sulle vicende delle varie città menzionate, notizie tutte da verificare. In conclusione si può affermare che allo stato attuale delle cono scenze i documenti e almeno una verifica archeologica concreta si accordano con le grandi linee della ricostruzione tradizionale degli avvenimenti tra 510 e 484 a.C; ma per quel che riguarda il comando delle forze della lega latina e le colonie latine la situazione doveva esse re diversa da come le fonti letterarie ce la presentano.
I Comandanti della lega latina L'iscrizione di Aricia, di cui si è trattato, sembra attestare che il comandante della lega era un dittatore. L'ipotesi alternativa (del Ru dolf) che valorizza la lezione dicator grazie al confronto con un'altra lex sacra da Spoleto (colonia di diritto latino) non basta ad eliminare la tesi di dittatori come comandanti dei latini : i due termini possono essere equivalenti e la dittatura è ben attestata da altre fonti. In realtà la lega latina era comandata da capi militari (imperatores, duces) che vengono chiamati in particolare praetores e dictatores (in greco strategoi, autokratores : vedi D.H. HI, 34, 3 per l'età di Tulio Ostilio con chiaro anacroni smo; per le guerre con Roma di età repubblicana V, 61, 3; V, 76, 3). In età storica com'è noto la dittatura rimase come magistratura ordinaria in varie città latine, forse ridotta ormai ad ambito sacrale15. Una ditta15 Dicator : vedi sopra n. 12 e, per l'iscrizione di Spoleto, CIL F 366 = XI 4766 = ILS 4911 = ILLRP 505 (su questo testo e quello analogo di controversa autenticità rinvenuto presso Trevi vedi da ultimo B. Trombettoni in Gens antiquissima Italiae. Antichità dell'Umbria in Vaticano, (Catalogo della mostra Roma 1988-89), Perugia, 1988, p. 111-114 con bibl.); H. Rudolf, Stadt und Staat im römischen Italien, Lipsia, 1935, p. 12 s.; S. Mazzarino, op. cit. a n. 1, p. 253 s.; Id., Dicator e dictator, in Helikon, VII, 1967, p. 426-430. Per
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tura fra gli Albani era fatta risalire da storici come Licinio Macro (fr. 10 Ρ; cfr. Plut., Rom. 27, 1) già all'età di Romolo e coerentemente Mettio Fufezio, l'avversario di Tulio Ostilio, veniva indicato come dictator (Liv. I, 23, 4; 24, 9; 27, 1; D.H. Ili, 5, 3; 7, 3; 23, 3; 23, 7; 26, 6). Ma c'è anche, importantissima, la pretura. Il testo fondamentale è citato da Festo (276 L) che riporta un'affermazione dell'antiquario Cincio. È la stessa persona che aveva scritto libri de consulum potestate e de comitiis (Fest. 276 L cit.) ed a cui dobbiamo la citazione della lex vetusta relativa al clavus annalis (presso Liv. VII, 3), di cui diremo sotto. Si tratta quindi di un esperto di istituzioni romane, distinto dallo storico Cincio Alimento con cui talora è confuso. Il passo è controverso, non privo di qualche oscurità, e su di esso si è fondato A. Alföldi per negare la ricostruzione tradizionale della struttura della lega latina16. Esso sembra prescindere dal foedus Cassianum, perché a proposito del comando la periodizzazione va dalla distruzione di Alba fino al 338 a.C. Se quanto dice Cincio è vero (e non c'è motivo di escluderlo con decisione) dobbiamo dedurne
la dittatura vedi fra gli altri l'articolo di G. De Sanctis in appendice a Storia dei Romani, P, a cura di S.Accame, Firenze, 1980, p. 465 s. Per una rassegna sintetica delle teorie sulla dittatura romana: J.-Cl. Richard, Les origines de la plèbe romaine, Roma, 1978, p. 333 s., 346 s. ; G. Poma, Tra legislatori e tiranni, Bologna, 1984, p. 41 s. 16 Fest. 276 L, s.v. Praetor : Praetor ad portant nunc salutatur is qui in provinciam pro praetore aut pro consule exit : cuius rei morem ait fuisse Cincius in libro de consulum pote state talem : «Albanos rerum potitos usque ad Tullum regem : Alba deinde diruta usque ad P. Decium Murem consulem populos Latinos ad caput Ferentinae, quod est sub monte Albano, consulere solitos, et Imperium communi consilio administrare : itaque quo anno Roman os imperatores ad exercitum mittere oporteret iussu nominis Latini, complures nostros in Capitolio a sole oriente auspiciis operam dare solitos. Ubi aves addixissent, militem illum quem aves addixerant, praetorem salutare solitum, qui earn provinciam optineret praetoris nomine». Alföldi, op. cit., p. 117 s. W. Kunkel, Kleine Schriften, Weimar, 1974, p. 345 s. Riserve di Momigliano in Quarto Contributo, cit., p. 416. Per il tipo particolare di auspica no ad opera dei candidati stessi vedi P. Catalano, Contributi allo studio del diritto augural e, Torino, 1960, p. 46, 185, 322. Diversamente I. Valeton, in Mnemosyne, XVIII, 1890, p. 241. Per un dictator come magistrato a Tusculum: Liv. Ili, 18,1; VI, 26,4; CIL XIV 2634 = 6210; ad Arida: CIL XIV 2213 = ILS 3243; a Lanuvium : Liv. XLI, 16, 1 (che parla genericamente di magistratus); Cic, pro Mil. 27, 45 con il commento di Asconio; ILLRP 129a = CIL Ρ 1427; CIL XIV 2097 = ILS 6194; a Fidenae : ILLRP 591; CIL XIV 4058 = ILS 6224; Macrob. I, 1 1, 37; a Nomentum : CIL XIV 3941 ; ILS 2740; a Caere : CIL XI 3593; 3614 = ILS 5918a. Sulla problematica relativa cfr. Rosemberg, op. cit., p. 71 s.; Rudolph, op. cit., 7s.; Mazzarino, op. cit. a n. 1, p. 144s.; De Sanctis, op. cit., P, p. 465 s.; Campanile, Letta, op. cit., p. 34 s. A dittatori di singole città latine in generale si riferisco no la cosiddetta lex Acilia repetundarum, CIL I, 22 583 = FIRA I, 7, 1. 78 (85) e SHA, Hadrian. 19, 1.
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che sul comando della lega il patto con i Latini ο non si è pronunciato ο non ha fatto altro che ristabilire la situazione anteriore alla guerra tra Romani e Latini degl'inizi del V secolo. Comunque sia, il testo mostra che il comando era assegnato iussu nominis Latini, che ci si consultava fra federati al bosco di Ferentina e che quindi Yimperium era esercitato communi consilio. Il dato antiquario sulla denominazione di praetor del comandante (designato attraverso l'avvistamento augurale di uccelli) è confermato indipendentemente da Livio (Vili, 3, 9) per l'anno 341 a.C. in cui i due praetores di allora provengono da Seda e Circei 17. Non sap piamo se nel comando della lega si è passati ad un certo momento (ad es. dopo il 493 od in altra data) dalla nomina di dittatori a quella di pre tori ο se vi era invece un sistema misto. Ma è anche possibile che la denominazione di praetor avesse il significato più generico di magistrat o e comandante, come vedremo nel caso del praetor maximus. È merito indubbio di Alföldi aver portato l'attenzione sulla testimonianza di Cincio e sulla comunanza di imperium fra Romani e Latini. Ma non è affat to necessario seguirlo fino all'estreme conseguenze e rifiutare cronolo gia e dati ricavabili da documenti, come il I trattato con Cartagine ed il foedus Cassianum. In realtà l'esercizio di un comando unico ed a turno fra le città latine non significa affatto che i Romani contassero quanto altre città, magari meno di Tusculum e di Aricia. Prima di tutto Cincio non ci dice ogni quanto tempo spettasse ai Romani il comando delle truppe federali, senza contare che i Romani potevano esercitare il loro predominio di fatto, anche mediante pretori provenienti da loro colonie
17 Liv. Vili, 3, 9 : praetores turn duos Latium habebat, L. Annium Setinum et L. Numisium Circeiensem, ambo ex coloniis Romanis, per quos praeter Signiam Velitrasque, et ipsas colonias Romanas, Volsci etiam exciti ad arma erant; eos nominatim evocari placuit. Cfr. E. Manni, Praetores turn duos Latium habebat, in Synteleia Arangio-Ruiz, Napoli, 1964, p. 253-259 (che pensa che i Latini avessero adottato il sistema romano di due magis trati supremi). Praetores di città latine documentati per Lavinium : CIL XIV 172 = ILS 1429; XIV 171 = ILS 2741; XIV 2070; 5345; VI 29712 = ILS 6187; XI 7555 = ILS 1886; NS 1930, p. 202; EE IX, 593, 10-11 ; Lavinium I, p. 34; un praetor è attestato nella falisca Capena (CIL XI 3873), a Velitrae, città latina occupata dai Volsci {CIL X 6554) e nelle città erniche di Anagnia (ILLRP 271; CIL X 5925-5927; 5919-5920 = ILS 6263, 6261; 5929, 5932) e di Capitulum Hernicum (CIL XIV 2960 = ILS 2681). Come nel caso del dittatore non entro nella controversia sul carattere sacrale ο civile della magistratura in epoca più recente. Su questo punto vedi Campanile, Letta, op. cit., p. 37-39 con bibl. precedente. Naturalmente nelle città non latine i titoli di dictator e praetor sono traduzioni di magi strature locali anteriori. Si ricordi inoltre quanto già detto nel testo a proposito dell'attr ibuzione al periodo regio di pretori e dittatori delle lega latina.
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(come nel caso ricordato da Liv. Vili, 3, 9, cit.) e che comunque il loro peso era determinante e riconosciuto al momento della spartizione del bottino. Non vedo comunque una contraddizione di fondo con quanto è ricavabile dagli altri documenti, mentre invece mi sembra chiaro che la tradizione annalistica tende ad attribuire ai Romani anche le imprese comuni condotte contro nemici comuni di Romani e Latini, come gli Equi ed i Volsci. È un fatto questo che emerge anche all'interno dell'annalistica, ad esempio quando Livio (II 41), scrive (a torto od a ragione non ci interessa) che il console Cassio tolse agli Ernici due terzi del ter ritorio e che voleva distribuire un terzo ai Latini ed un terzo alla plebe; parlando poco prima (II, 40, 14) della guerra con gli Ernici, Livio non aveva neanche menzionato la presenza dei Latini accanto ai Romani, una presenza che va comunque ricostruita visto che ai Latini si voleva attribuire la metà esatta del territorio ottenuto con la vittoria, in accor do con le clausole del foedus Cassianumì Lo stesso vale per le colonie romane ο gl'insediamenti di Romani in centri del Lazio. Le notizie contraddittorie e le assurdità (tipo le sette conquiste di Fidene, le curiose vicende di Ardea e di Circei ed altri centri) si possono spiegare solo con quanto aveva sostenuto J. Bayet : «dans les temps anciens, les Romains pratiquaient des peuplements 'coloniaux' beaucoup plus divers que pendant la période classique». Egli intuì che i tipi coloniali si fissarono solo nella seconda metà del IV secolo con chiarezza; che in precedenza dovevano esistere colonie miste come presso altre popolazioni; che potevano ben esservi colonie nate da secessioni ο migrazioni di vario tipo, perfino da insediamenti militari che in origine non erano destinati a dar origine ad una città (cfr. D.H. IV, 63, l)18. Questa straordinaria varietà di rapporti e la grande mobilità di gruppi spiega per Bayet lo straordinario numero di rivolte attribuite a sedicenti 'colonie' romane : 18 J. Bayet, Tite-Live et la précolonisation romaine, in Mélanges de littérature latine, Roma, 1967, p. 351-375. L'attribuzione ai Romani d'imprese comuni di Latini e Romani, combattute da eserciti federali, è stata messa in luce da A. Piganiol, Romains et Latins. I. La légende des Quinctii, in MEFR, 38, 1920, p. 285-316, che ha mostrato chiaramente che il teatro delle guerre con Equi e Volsci è in territorio latino e non romano, e che Quinctii agiscono con eserciti federali (comprendenti Latini ed Ernici). Cfr. Heurgon, op. cit. p. 289 (tr. it. p. 271). Si noti anche l'espressione socialis exercitus in Liv. Ili, 4, 10 e Vili, 3, 3. La trattazione di Heurgon, op. cit., p. 288 s. (tr. it. p. 270 s.) dei rapporti romanolatini è particolarmente felice ed equilibrata. Dal punto di vista archeologico è fondament ale ora G. Colonna, / Latini e gli altri popoli del Lazio, in Italia omnium terrarum alumna, a cura di G. Pugliese Carratelli, Milano, 1988, p. 411-528. Oltre alla classica opera di Alföldi, Early Rome and the Latins cit., si veda anche Bernardi, op. cit.
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«en réalité, il ne s'agit que de soubresavts de cités liées à Rome par con trat de «peuplement réciproque» mais au reste indépendantes et souve raines, et cherchant à sauvegarder leur liberté en face d'une alliée qui grandit trop vite ».
Praetor maximus Un notissimo passo di Livio (VII, 3) è al centro di ricostruzioni e controversie senza fine sulla suprema magistratura romana nei primi tempi della repubblica. Una limpida esposizione, seguita da una acuta critica, da parte di Momigliano ci esime dal ripetere quanto è stato scritto19. Una antichissima legge, affissa nel tempio di Giove Capitoli no, dalla parte della cella di Minerva, scritta con caratteri e parole arcaiche diceva che «qui praetor maximus sit idibus Septembribus clavum pangat». L'antiquario Cincio viene citato subito dopo a proposito della cerimonia della infissione del chiodo a Volsinii nel tempio di Nortia; egli verosimilmente ne trattava nel suo de consulum potestate, a cui direttamente ο indirettamente risalirà Livio20. Contro la teoria diffusa che praetor maximus indichi una particola re magistratura suprema possiamo portare alcuni elementi, in parte già noti in parti nuovi. Innanzitutto Livio stesso parla della lex a proposito della istituzione di un dictator apposito {davi figendi causa) dopo un 19 Momigliano, Praetor maximus e questioni affini, in Studi G. Grosso, I, Roma, 1968, p. 161-175 = Quarto contributo, cit., p. 403-417. Questo lavoro e la bibliografia in esso discussa sono continuamente presupposti (specialmente K. Hanell, Das altrömische Eponyme Amt, Lund, 1946 e le opere citate di Alföldi e Werner). 20 L'altra possibilità è che Cincio ne trattasse nei Mystagogica in cui parlava di altre dediche nel tempio capitolino (una di esse era nota anche a Liv. VI, 29,9, che si confronta con Cincio Fr. 11 Funaioli) come ha proposto con buoni argomenti Heurgon (L. Cincius et la loi du clavus annalis, in Athenaeum, XLII, 1964, p. 432-437 = Scripta varia, Bruxelles, 1986, p. 117-121). Non si può neanche escludere che l'antiquario ne trattasse nel de fastis (di cui sono noti cinque frammenti, 6-10 Funaioli), poiché la lex fissava la data del rito. Un'eco delle discussioni antiquarie in merito è in Paul, ex Fest. 49 L : clavus annalis appellabatur, qui figebatur in parietibus sacrarum aedium per annos singulos, ut per eos numerus colligeretur annorum. Controversa era poi già fra gli Antichi l'interpretazione di praetor maximus, come mostra Fest. 152 L : maximum praetorem dici putant ali eum qui maximi imperi sit, ali qui aetatis maximae. Sul rituale da ultima L. Aigner Foresti, Zur Zeremonie der Nagelschlagung in Rom und in Etrurien, in AJAHf IV, 1979, p. 144-156 con bibl. precedente; in generale da ultima M. J. Pena, La «lex de davo pangendoy>, in HAnt, VI, 1976, p. 239-265.
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lungo intervallo e spiega che la lex era stata applicata dal console M. Orazio dedicando il tempio di Giove O.M. e che poi il compito era passato ai dittatori quia maius imperium erat. Senza dubbio Livio inter preta il praetor maximus come il magistrato di grado più elevato che ci sia. Questa interpretazione di Livio è rafforzata da vari altri testi ed è a mio avviso la più soddisfacente. Mi riferisco in particolare a quanto è prescritto da un rituale roman o, istituito in un periodo vicino a quello cui è attribuito l'uso della lex vetusta e che riguarda anch'esso il culto di Giove Capitolino. Dionigi d'Alicarnasso (VII, 71, 1 - 73, 5) riporta un ampio passaggio di Fabio Pittore (fr. 16 Ρ = FGrHist 809 F 13 b) che parlava dell'istituzione dei ludi maximi, ο Romani ο magni come erano chiamati con varia deno minazione. Ora questi ludi iniziavano il 4 di settembre e duravano più giorni, comprendendo anche il giorno dell'infissione del chiodo (le idi, cioè il 13) in cui avveniva anche un epulum Iovis21. Questo collegament o da ancora più peso al confronto che presento. Ora Dionigi-Fabio Pit tore (D.H. VII, 72, 1) specifica che «prima di dare inizio alle gare, i magistrati che ricoprivano la carica maggiore (oi την μεγίστην έχοντες έξουσίαν) allestivano una processione in onore degli dei e la guidavano al Campidoglio». L'espressione usata è molto interessante perché non si riferisce ad una carica in particolare, ma a coloro che avevano la potestas più elevata. 'Εξουσία corrisponde normalmente a potestas e μεγίστη εξουσία a summa potestas (come ad es. mostrano le res gestae divi Augus ti, e. 6, 39 e 13). In una società in cui esistono più magistrature di gra do elevato ο magistrature collegiali era importante stabilire chi aveva una maior potestas rispetto ad un altro, come ad esempio un dittatore in confronto ad un console ecc.22. È significativo ritrovare una prescri21 Le testimonianze sono raccolte e discusse da Degrassi, //, XIII, 2, cit., p. 506 s. Egli difende anche la connessione tra i ludi e V epulum Iovis, come già W. Warde Fowler, The Roman Festivals of the republic, Londra, 1908, p. 216 s. I ludi erano certamente con nessi con Giove (Cic, in Verr. II, V, 14, 36; Paul, ex Fest 109 L) e la triade capitolina, indipendentemente dall'incertezza sull'epoca della loro istituzione (Tarquinio Prisco s econdo Cic, de rep. II, 20, 36; Liv. I, 35; Eutr. I, 6; secondo D.H. VII, 71, 2 invece li avrebbe celebrati per la prima volta il dittatore A. Postumio prima della battaglia del lago Regillo che egli data al 496 a.C. ; Cic, de div. I, 26, 55). Il 13 settembre era anche il dies natalis del tempio capitolino : Plut., Popi. 14, 1. Recentemente D. Sabbatucci, La religione di Roma antica, Milano, 1988, p. 305 s. ha messo in rapporto i ludi con le feriae Latinae. 22 Th. Mommsen, Le droit public romain, tr. fr., Parigi, 1893, p. 85 s. Praetores maiores et minores: Fest 152 L; maior consul: Fest. 154 L; Paul, ex Fest. 155 L; per altri casi analoghi Fest. 148 L; Paul, ex Fest. 121, 137. La proposta mommseniana di correggere
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zione di tipo analogo in una festa che ha rapporti con la cerimonia del clavus annalis, anche se nel caso dei ludi si tratta - almeno teoricament e - di più magistrati e nel caso del chiodo di uno solo. Ma in entrambi i casi c'è insistenza sul fatto che si deve trattare del magistrato di rango più elevato. Preoccupazioni analoghe ricorrono in altri testi. Segnalo qui per la loro importanza un passo della tabula Heracleensis in cui si fa riferimento a «quei in eis minicipieis coloneis praefectureis maximum mag(istratum) maximamve potestatem etc. » ed un passo di Livio che fa riferimento ad un'altra prescrizione sacrale (XXII, 10, 10) : Veneri Erucinae aedem Q. Fabius Maximus dictator vovit, quia ita ex fatalibus libris editum erat, ut is voveret, cuius maximum Imperium in civitate esset. Livio si riferisce al voto del 217 a.C, ma ciò che più importa è che il voto secondo i libri fatales doveva essere fatto da colui che nella città aveva maximum Imperium, cioè dal magistrato dotato à'imperium di grado più elevato, che in questo caso è un dittatore. In tutti questi casi qui considerati (tutti esempi a carattere giuridico ο sacrale ο misto) la terminologia usata si riferisce al magistrato dotato di imperium e potestas più elevata e per questo si usa maximus ο summus ο corrispondent e termine greco, senza che esso faccia parte della titolatura ufficiale della magistratura. Una preoccupazione analoga esisteva nell'orbo sacerdotum, che riflette realtà arcaiche, in cui al primo posto è il rex (sacrorum) seguito da tre flamini (//. Dialis, Martialis, Quirinalis), mentre il pontifex è solo il quinto in gerarchla (pur chiamandosi realmente maximusi). Persino un testo proveniente da Olimpia, in dialetto dell'Elide, databile alla prima parte del V secolo, mostra una formulazione parall ela(o il basileus ο colui che ha il megistos telos)23. Tutti questi testi (ne tralascio altri più recenti e meno significativi) mi sembra rafforzino l'interpretazione che era già di Livio, e forse già in D.H. VII, 72, 1 εξουσία in ουσία non è stata accolta da Peter né da Jacoby. Si osservi che εξουσία può corrispondere sia a potestas (come ad es. nelle res gestae e. 6, 41 dove δημαρχική εξουσία traduce tribunicia potestas) che ad imperium. Sull'uso del termine per rendere diverse realtà magistratuali e giuridiche romane vedi da ultimo M. Dubuisson, Le latin de Polybe, Parigi, 1985, p. 94-5. Per μέγιστος = maximus vedi Pol. Ill, 87,6. 23 Tabula Heracleensis : CIL I, 22, 593, 142, = ILS 6085 = FIRA II, 13. I libri fatales di Liv. XXII, 10, 10 sono ricordati anche in Liv. V, 144, 4; XLII, 2, 6; Censorin., de die nat. 14, 6; Arnob. VII, 47; Serv. ad Aen. II, 140; essi sembrano comprendere sia i libri sibillini che libri rituali etruschi, ma è questione controversa che qui non ci interessa. Ordo sacerdotum : Fest. 198 L. Per l'iscrizione di Olimpia : DGE 409; L. H. Jeffery, Locai Scripts of Archaic Greece, Oxford, 1961, p. 220 n°15; Momigliano, Quarto Contributo, cit., p. 413 n. 16.
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dei Romani che avevano creato un dictator apposito addetto alla infissione del chiodo: il praetor maximus della lex vetusta è semplicemente il magistrato dotato d'imperium di grado più elevato, detto pretore sempli cemente perché così si chiamavano in antico i magistrati più elevati (quelli poi chiamati consoli) e perché così potevano essere intesi anche i dittatori (visto che il posto del praetor sarà preso da un dictator2*. Sul problema dei rapporti romano-latini anche il caso del praetor maximus è indicativo e ci rivela una corrispondenza almeno sul piano terminologico : ai dittatori e pretori della lega fanno riscontro dittatori e pretori (poi consoli) di Roma. Ma ancora una volta accanto alla com penetrazione tra esperienza romana e mondo latino riscontriamo un elemento profondamente originale, come aveva constatato Rosenberg nel passo citato all'inizio : i Romani fondono ed uniscono esperienze costituzionali diverse in modo sostanzialmente nuovo. Roma è, come si diceva all'inizio, «città latina» e «città aperta» nello stesso tempo; è immersa in una koinè ma nello stesso tempo ha caratteri originali. Roma è nel Lazio, in Italia e nel Mediterraneo ma è soprattutto Roma. Carmine Ampolo
24 È in sostanza la vecchia tesi di Mommsen, Römische Chronologie, Berlino, 1859, p. 174; Droit public, cit., p. 84 s. Sul valore ampio di praeìor vedi soprattutto Varrò, de vita pop. Rom. 68 Rip. : quod idem dicebantur consules et praetores; quod praeirent popul o, praetores; quod consulerent senatui, consules. Cfr. schol. Cic. Verr. I, 14, 36. La spiega zionequi seguita è una di quelle, compatibili con la ricostruzione tradizionale, presentate da Momigliano, Praetor maximus cit. Mi differenzio dalla classica tesi dei praetores-consules di De Sanctis (op. cit., p. 407 s.) perché ritengo la denominazione di praetor attribui bile genericamente alle magistrature più elevate e non solo ai tre da lui indicati (due cons oli più un pretore propriamente detto). Agli argomenti convincenti portati da Mommsen e De Sanctis sulla funzione militare dei pretori vanno aggiunte le recenti considerazioni di A. Giovannini, Les origines des magistratures romaines, in MH, XLI, 1984, p. 15-30 che sottolinea invece le funzioni giudiziarie. Per la situazione interna di Roma nel V secolo si vedano soprattutto Richard, op. cit. e K. A. Raaflaub (ed.), Social Struggles in Archaic Rome, Berkeley, Los Angeles, Londra, 1986. Per il valore di praetor specialmente in rifer imento a comandi militari vedi Fest. 249 L (praetoria porta) e Liv. XXX, 43,9. Qui praetor compare in un senatoconsulto del 201 che sembra usare un formulario giuridico-sacrale arcaizzante e si riferisce al comando di Scipione, che era un proconsole con prorogano imperii.
FILIPPO COARELLI
ROMA, I VOLSCI E IL LAZIO ANTICO
1. L'argomento che ho avuto io stesso l'incoscienza di proporre agli organizzatori del colloquio è di quelli che pongono difficoltà immense : anzi, allo stato attuale degli studi, praticamente insolubili. Affrontare lo studio di una popolazione italica, come i Volsci, la cui vicenda è rac chiusa quasi interamente entro uno dei periodi più oscuri della storia dell'Italia, antica, come il V secolo, significa in primo luogo confrontars i con un problema di fonti, che si identificano in questo caso quasi esclusivamente nella tradizione annalistica, con tutti i problemi e le dif ficoltà che ne derivano1. Dobbiamo inoltre fare i conti con una man canza quasi totale di documenti epigrafici ed archeologici, anche se lo scavo di Satricum, condotto dalla Scuola Olandese, comincia a restitui re documenti di prim'ordine, ma anch'essi non esenti da gravi proble mi di interpretazione. Finché non ci sarà un piano organico di ricerche, e in particolare di scavi sistematici nel Lazio, in funzione di questa pro blematica (la cui importanza, per lo studio - tra l'altro - della più anti castoria di Roma mi sembra evidente) non credo che vi potranno esse re sostanziali progressi : penso a qualcosa di analogo a quanto è stato fatto per la Lucania e per il Sannio, che pongono problemi analoghi se non identici - e che oggi conosciamo meglio proprio in grazia di sistematiche esplorazioni archeologiche. Particolarmente urgente sa rebbe - per la particolare struttura socio-politica di queste comunità l'identificazione e lo scavo dei santuari etnici; per i Volsci conosciamo il nome e il sito approssimativo del principale centro del culto comunit ario, Ecetra : questa non può essere identificata con Artena, come di recente si è tornati a proporre, ma va localizzata - con i più antichi 1 L'unica sintesi recente sui Volsci è quella di G. Radke, Volsci, in RE, IX, A 1, cc. 773-827. Cfr. E. Manni, Le tracce della conquista volsca nel Lazio, in Athenaeum, η. s. 17, 1939, p. 233-79.
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topografi, dal Cluverio in poi - nella zona del basso Sacco, nei pressi di Supino e di Morolo2. Ricordo anche il caso di Anagni, capitale religiosa degli Ernici, la cui importanza in età arcaica comincia ad essere confermata da recenti scoperte archeologiche3. Considerate tutte queste premesse, quanto dirò in seguito andrà preso col beneficio dell'inventario : cioè come una serie di ipotesi di lavoro, che richiederebbero tutte ben più ampie indagini, e un vaglio più accurato. Una sintesi organica dell'argomento è oggi impossibile, date le enormi lacune della documentazione; di qui l'andamento desul torio e frammentario della mia esposizione, di cui mi scuso fin d'ora, ma che comunque è inevitabile. I temi che mi è sembrato di poter in qualche modo prendere in esame (con i limiti già esposti) sono sostanzialmente i seguenti : 1) origine dei Volsci e loro arrivo nel Lazio meridionale; 2) situazione economica e sociale della pianura pontina in età arcaica; 3) situazione politica della pianura pontina prima e dopo l'arrivo dei Volsci, in particolare per quanto riguarda i rapporti con Roma e con i Latini. 2. Sul carattere «italico» (nel senso corrente) dei Volsci non vi pos sono essere dubbi, come pure sulla loro originaria estraneità alle sedi che essi occuparono storicamente nel Lazio meridionale : si tratta di una migrazione avvenuta in un momento recenziore, e quindi docu mentabile con sicurezza. Quanto alla provenienza, i dati principali sono di natura linguistica, e sono stati esaminati da tempo, sulla base dell'unica iscrizione sicuramente attribuibile ai Volsci, la 'tabula veliterna'4. I risultati di queste ricerche sono univoci, e mi esimono da una disamina del problema, per il quale del resto non sarei in alcun modo qualificato. Rimando, per brevità, al saggio di Poultney, che
2 Su Ecetra, cfr. RE V, e. 1907. La vecchia e insostenibile identificazione con Artena (la medioevale Montefortino) è stata di recente riproposta da L. Quilici, La civita di Arte na,Roma, 1982, p. 168-71. La posizione della città risulta chiarita, tra l'altro, dal colleg amento con Ferentinum (Liv. IV 61, 5-6). 3 L. Biddittu, Rinvenimento di facies orientalizzanti ad Anagni, in Boll. Lazio Merid., 10, 1978, p. 5-7. 4 J. W. Pultney, Volscians and Umbrians, in AJPh, 72, 1951, p. 113-27.
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costituisce la sintesi recente più completa : da questa risulta che la li ngua volsca è del tutto distinta dall'osco, e in genere dalle lingue sabelliche meridionali, e invece strettamente imparentata con l'umbro, ciò che era ben chiaro già alla cultura antica : si ricordi il fr. di Titinius (in Fest. p. 204 L. : «qui obsce et volsce fabulantur») che conosce la diversi tà delle due lingue. Un dato nuovo è fornito dalla recente scoperta a Satricum di una breve iscrizione, trovata in una tomba del V secolo a.C. e che si può qualificare con certezza di 'volsca'. Rimando per questa allo studio del Colonna, di cui riassumo qui solo le conclusioni essenziali5. Si tratta di una piccola accetta di piombo, su cui sono tracciate tre parole. I rap porti più precisi, anche sul piano paleografico, sembrano rinviare all'area sabina, intorno a Cures e alla cosiddetta area medio-adriatica. È anche importante ribadire, con Colonna, che i Volsci, contrariamente a quanto in genere si ritiene, erano in possesso di una scrittura già al momento del loro arrivo nel Lazio : infatti la data della nuova iscrizio ne non può essere di molto più tarda rispetto a questo avvenimento sto rico, che si colloca, come è noto, all'inizio del V secolo a.C. Solo più tardi dunque (probabilmente nel corso del IV secolo a.C.) i Volsci adot teranno l'alfabeto latino. La conclusione di Colonna è che si tratta di « una scrittura nazional e dipendente da quella attribuita a Capena per l'uso del samech e da quella sabina di Cures. . . Una scrittura dipendente da modelli «tiberi ni», elaborata nelle originarie sedi appenniniche di quel popolo, proba bilmente nella conca del Fucino». Quest'ultima affermazione è sconcert ante, e contrasta con gli stessi risultati dell'indagine di Colonna, che rimandano per l'appunto all'area sabino-capenate. La menzione del l'area del Fucino costituisce, in questo contesto, un evidente omaggio alla teoria tradizionale che fa provenire i Volsci da quest'ultima zona. Ora, se è indubbio che la penetrazione avvenne tramite la zona marsica e l'alta valle del Liri, non è necessario pensare a un'origine prima della popolazione della stessa zona. La documentazione linguistica, come si è visto, conduce necessariamente a tutt'altra conclusione. La recente scoperta di un'iscrizione arcaica sabina, con caratteri stiche del tutto analoghe a quelle cosiddette medio-adriatiche ο sud-
5 G. Colonna, La nuova iscrizione di Satricum, in Archeologia laziale, 7, 1984, p. 104-6.
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picene6, dovrebbe a mio avviso indurre a riesaminare la possibilità di rivalutare la tradizione storiografica antica, che collega con la Sabina la totalità delle apoikiai italiche. Ma su questo non posso che lasciare il campo a più esperti di me7. Quella che mi sembra accertata, comunque, è la provenienza dei Volsci da un'area al confine tra Sabina e Umbria. Non escluderei che l'elaborazione dell'alfabeto utilizzato in età arcaica in quest'area possa esser avvenuta proprio in un'area di confine tra Etruria e Sabina, e cioè tra Capena e Cures : viene immediatamente a mente l'importantis simo centro cultuale di Lucus Feroniae, al quale la tradizione antica attribuiva una funzione centrale nei rapporti tra Sabini, Latini (ed Etruschi) già all'epoca di Tulio Ostilio8. Ora, da questa osservazione ne scaturisce un'altra relativa ai culti. È un fatto che il sistema cultuale volsco differisce profondamente da quello delle popolazioni sabelliche centrali e meridionali. La presenza di Feronia è particolarmente significativa : si tratta di una divinità esclusivamente sabina9, mentre nel Lazio meridionale ci aspetterem mo piuttosto divinità quali Mephitis (che pure è presente, ma chiara mente come conseguenza della successiva occupazione sannitica) o, nel caso di una provenienza dalla Marsica, di Angitia. Analoghe conclusioni si possono ricavare dalle notizie che abbiamo su altre entità divine, omogenee tra loro, collegabili con i Volsci : Vesuna (Antium), Pupluna (Aquinum), Decluna (Velitrae), si pensi anche a toponimi quali Casinum e Antinum10. La prima, come è noto, si ritrova nelle tabulae Eugubinae. Si deve aggiungere l'altra tipica divinità sabina, Sancus, la cui esistenza è attesta a Velitrae nel 199 a.C. n. Nella stessa direzione vanno altri dati linguistici ricavabili dalla toponomastica, come Polusca (e anche lo
6 A. Morandi, Iscrizione sabina arcaica dal territorio di Cures, in SE, 51, 1983, p. 595608; Id., in DialArch., ser. 3, 5, 1987, p. 7-15. 7 Cfr. A. L. Prosdocimi, 'Sabinità ' e (pan)italicità linguistica, in DialArch, ser. 5, 1987, p. 53-64. 8 D. Briquel, Sur les faits d'écriture dans Vager Capenas, in MEFRA, 84, 1971, p. 789845. L'episodio, attribuito all'epoca di Tulio Ostilio, si trova in Liv. XXVI 11 e in Dion. Hal. Ill 32, 1-2. Cfr. D. Musti, / due volti della Sabina, in DialArch, ser. 3, 3, 1985, p. 7786. 9 Su Feronia, cfr. G. Radke, Die Götter Altitaliens, Münster, 1965, p. 124-127. 10 Su queste, si veda Radke, in RE, cit. a nota 1, c. 823. Su Pupluna ad Aquinum, R. Antonini, in SE, 53, 1985, p. 259-260. 11 Liv. XXXII 1, 10 (prodigio nel tempio di Sancus).
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stesso nome dei Volsci) e ad es. Mutuesca; Arpinum e Arpi12. E si potrebbe continuare. Mi sembra indubbio, alla luce di tutte queste con siderazioni, che la zona originaria di provenienza dei Volsci debba esse reidentificata nella Sabina interna, più probabilmente nella zona a contatto con l'Umbria. Non mancano del resto nella stessa tradizione storiografica antica accenni che sembrano riportare in questa direzione : ne ricorderò qui un paio. Non escluderei che le notizie sui contatti dei Volsci con il Lazio all'epoca di Anco Marcio e dei Tarquinii debbano spiegarsi non come reduplicazione di fatti più tardi, ma come ricordo di reali infiltrazioni da est, per esempio dall'area tiberina13. Si tratterebbe di un'ipotesi pri va di riscontri, se non fosse disponibile un dato di grande interesse, e finora trascurato. Si tratta di un passo di Servio, ricavato certamente da un'ottima fonte di età repubblicana (probabilmente M. Octavius Herennius ο An tonius Gnipho - via Masurius Sabinus, come in altri casi) : « salii sunt, qui tripudiantes aras circumibant. Saltabant autem ritu veteri armati post victoriam Tiburtinam de Volscis»14. Si accenna qui all'istituzione tipicamente tiburtina dei salii di Hercules Victor, e mi sembra probabil e che l'origine ultima della informazione debba riconoscersi in un documento locale (come ne conosciamo ad esempio per Praeneste). È difficile pensare che si tratti di un'invenzione, dal momento che Tivoli, in età storica , non ha alcun contatto diretto con i Volsci. Ci aspett eremmo semmai gli Equi (è caratteristico, ad esempio, che nelle notizie relative a una presenza di Volsci nella più antica storia romana, questi sono sempre collegati con le loro più tarde sedi storiche, ad esempio Velitrae); nel caso specifico, anche per il carattere antiquario della notizia (trasmessa probabilmente da documenti sacri) mi sembra diffi cile negare la possibilità che si tratti di un dato reale. In tal caso, avremmo una conferma della presenza originaria dei Volsci nell'area sabina interna (e quindi a contatto con Tivoli). È possibile che si tratti dei primi tentativi di migrazione in direzione del Lazio, lungo la via naturale da est, che furono bloccati e respinti, e quindi provocarono la scelta di una via diversa, quella più meridionale, lungo la valle del Liri.
12 Radke, in RE, cit. a nota 1, e. 776. 13 Liv. I 23, 8; 53, 2. 14 Serv., ad Aen. Vili 285.
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Tutto ciò naturalmente può diluirsi su un lungo periodo : la notizia rimanda alle origini del culto di Èrcole tiburtino, certamente non poste riori alla metà del VI secolo a.C, come si ricava anche dal cippo iscrit to dell'Acquoria, probabilmente collegato al culto di Hercules Victor15. A questo proposito, è interessante notare che l'alfabeto di questa iscr izione si distingue nettamente dai documenti latini contemporanei (ad esempio di Roma) per la presenza di segni (ΓΟ reso con un punto) che sembrano spiegabili proprio attraverso il rapporto con l'alfabeto arcai co «sabino». È noto fino a qual punto Tivoli, tipica zona di frontiera, sia culturalmente legata già in età protostorica all'area sabellica (mi limito qui a ricordare le caratteristiche tombe a circolo)16. La data dell'arrivo e dell'insediamento dei Volsci nel Lazio è suff icientemente sicura, ed è unanimemente fissata ai primi anni del V secolo a.C. Tanto i dati delle fonti letterarie, quanto le informazioni che ci restano su analoghi episodi (ad esempio i Sanniti in Campania), quanto la stessa logica ci indicano però che non dobbiamo vedere in questa occupazione un fatto puntuale, precisamente databile, ma piut tosto un processo progressivo, di lunga durata, concretatosi probabil mente attraverso una serie di vena sacra indirizzati lungo le tradizional i e frequentate vie di transumanza : nel caso specifico, dalla Marsica al Lazio meridionale interno, attraverso l'alta valle del Liri, e di qui nella pianura pontina attraverso la valle dell'Amaseno. Ciò equivale a dire due cose : che l'occupazione di quest'ultima area dovette procedere da sud a nord (e quindi i centri più settentrionali, come Velitrae, saranno stati gli ultimi ad essere investiti); e che si tratta di una penetrazione iniziata già da qualche tempo, con un carattere piuttosto di infiltrazio ne progressiva che di invasione massiccia e puntuale. Ciò complica naturalmente ogni tentativo di fissare con precisione la data di arrivo dei Volsci, che dovette diluirsi lungo un certo numero di anni. A questo dobbiamo attribuire anche le oscillazioni della tradi zione letteraria, oscillazioni che non travalicano comunque una fascia cronologica compresa, grosso modo, entro i primi due decenni del V secolo a.C. A questo proposito, dobbiamo in primo luogo prendere posi zione su un gruppo di testimonianze liviane, tenute in scarsa ο nessuna considerazione, ma rivalutate giustamente da Ogilvie. Nel 503 a.C,
15 Su questo, si veda da ultimo A. Mancini, L'iscrizione sulla base di Tivoli CIL Ρ 2658. Nuova lettura, in SE, 47, 1979, p. 370-375. 16 Civiltà del Lazio primitivo, Roma, 1976, p. 188-212, tavv. 33-41.
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«duae coloniae latinae, Pometia et Cora, ad Auruncos deficiunt. Cum Auruncis bellum initum». Subito dopo, i consoli Opiter Verginius e Sp. Cassius investono Pometia, tenuta dagli Aurunci, che resistono. Se guono la deditio e un massacro17. Nel 495 a.C. gli Aurunci avanzereb bero fino ad Aricia, dove verrebbero di nuovo sconfitti18. Si ritiene in genere che la menzione degli Aurunci sia erronea, e debba essere sosti tuita da quella dei Volsci. Ma, almeno nel primo caso, la notizia sembra attendibile : nel 503 a.C. i Volsci non sembrano ancora presenti, almeno in modo così massiccio. In precedenza, l'area pontina era probabilment e abitata proprio dagli Aurunci : un indizio in questo senso, a mio avvi so, si può ricavare proprio dal doppio nome di Suessa Pometia, il secondo dei quali è certamente latino, mentre il primo potrebbe essere quello aurunco (come si deduce, tra l'altro, dalla sua presenza in zona aurunca, in sedi coloniali ο meno : Suessa Aurunca, Suessula). 3. La discriminante decisiva per la storia dell'agro pontino si ha con la ' riconquista ' romana, iniziata già alla fine del V secolo e conclu sa definitivamente nel corso del IV secolo a.C. Non è qui il caso di ripercorrere nei particolari questa vicenda, trattata di recente in modo dettagliato da M. Humbert19. Gli episodi centrali di essa sono la crea zione delle tribù Pomptina (358) e Oufentina (318), con le relative deduz ioni vintane e delle coloniae civium Romanorum di Antium (338) e Terracina (329), oltre all'apertura della via Appia (312). Si tratta di un processo di radicale rimodellamento del territorio, che si risolve in una profonda romanizzazione e nella totale destrutturazione dell'insedi amento più antico : lo stesso percorso della via Appia, che attraversa in linea retta il centro della pianura, tagliando sistematicamente fuori gli antichi abitati dei Lepini, è sufficiente da solo a chiarire portata e modi dell'intervento romano. Le conseguenze di tutto ciò non si faranno attendere, anche se i frutti più evidenti si vedranno soprattutto dopo la guerra annibalica. Significativo, a questo proposito, è un episodio avvenuto nel 198 a.C. :20 gli ostaggi cartaginesi detenuti a Setia, insieme ai loro schiavi personali 17 Liv. II 16, 8-9; 17, 1. Cfr. R. M. Ogilvie, Commentary, p. 276. 18 Liv. II 26, 41. 19 M. Humbert, Municipium et civitas sine suffragio, Roma, 1978, p. 152-154, 184-190, 195-204. 20 Liv. XXXII 26, 4-18; per. 32; Zonar. IX 16, 6. Cfr. M. Capozza, / movimenti servili nel mondo romano in età repubblicana. I, Roma, 1966, p. 101-120.
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e a quelli di origine africana appartenenti ai Setini tentarono una rivol ta,che fu presto domata. Questi ultimi erano prigionieri di guerra, acquistati dopo la fine del conflitto annibalico, senza dubbio per essere destinati ad attività agricole. Il loro numero era certamente notevole, come risulta dal racconto di Livio e da quello parallelo di Zonara (oltre che dalla periocha che completa il testo lacunoso di Livio) : tra l'altro, nel corso della repressione ne furono uccisi 2500. Una simile concentrazione di personale servile si riscontra anche per Circei e Norba, che furono coinvolte nella congiura. In un'epoca ancora piuttosto antica possiamo dunque notare nell'agro pontino una situazione analoga a quella contemporanea dell'Etruria e dell'Apulia, testimoniata tra l'altro dalle rivolte servili del 196 e del 185 a.C.21 : uno sviluppo precoce del modo di produzione schiavistico legato allo sfruttamento di proprietà agricole senza dubbio di dimensioni piuttosto ampie. Questo fenomeno trova una conferma evidente nella presenza, entro l'agro setino, di numerose ville di età repubblicana piuttosto antica, con basamento in opera poligonale ο incerta22, e coincide probabilmente con l'inizio di una produzione mass iccia di vino destinato all'esportazione, produzione testimoniata dalle fonti letterarie solo per un'epoca più tarda23. Non c'è dubbio quindi che, già a partire dall'inizio del II secolo (ma il fenomeno è probabilmente più precoce), fosse già pienamente operante quella situazione particolare delle terre pontine, che Livio caratterizza così efficacemente in un noto passo, che è opportuno riportare testualmente : «... aut innumerabilem multitudinem liberorum capitum in eis fuisse locis, quae nunc vix seminario exiguo militum relieto servitia Romana ab solitudine vindicant»24. Il grande numero di abitanti liberi, che permetteva ai Volsci di ri nnovare continuamente la guerra contro Roma ancora agli inizi del IV secolo a.C. (il passo si riferisce al 385 a.C.) contrasta vivacemente con la situazione dell'epoca di Augusto, quando ormai la solitudo delle terre pontine era vindicata quasi solo dai servitia Romana. Si delineano così con grande chiarezza due momenti storici netta21 Sulle quali cfr. Capozza, op. cit., p. 121-141, 145-159. 22 Si veda L. Zaccheo, F. Pasquali, Seize dalla preistoria all'età romana, Sezze, 1972 (l'argomento è trattato ampiamente in una tesi perugina di G. Spaterna, ancora inedita). 23 A. Tchernia, Le vin de L'Italie romaine (BEFAR, 261), Roma, 1986, p. 202-203; 345-346. 24 Liv. VI 12, 6. Cfr. P. A. Brunt, Roman Manpower, Oxford, 1971, p. 348-349.
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mente differenziati : la fase arcaica, compresa tra il VI e il IV secolo, e quella successiva alla ' riconquista ' romana : la prima è concordemente ricordata dalle fonti letterarie come un periodo di grande prosperità agricola e in generale economica, nel corso del quale il territorio ponti no costituisce il vero e proprio granaio di Roma; la densità della popo lazione in questa fase era proverbiale, al punto da determinare computi leggendari, come quello dell'esistenza di ben 24 città, riportato da Muciano25. La seconda invece, pur restando prospera, segna il progres sivo ridursi della popolazione libera, l'apparizione e la rapida diffusio ne della proprietà schiavistica, specializzata nella produzione di derrate destinate all'esportazione, come il vino. Se non ci sono dubbi sulla verosimiglianza di un tale quadro per quanto riguarda l'età tardo-repubblicana, la perplessità e lo scetticismo degli studiosi moderni si sono concentrati soprattutto sull'attendibilità del quadro che le fonti tracciano della situazione più antica, in partico lare di quella arcaica (VI-V secolo a.C). Eppure, le tracce evidenti di una fitta occupazione del territorio, connessa con uno sfruttamento capillare delle risorse agricole, sono state segnalate da tempo. Si tratta, in particolare, del fitto sistema di cunicoli che caratteriz za tutto il settore settentrionale dell'area, tra Velitrae, Cori e Satricum, la cui funzione di drenaggio del suolo a fini agricoli non mi sembra contestabile, nonostante i dubbi periodicamente avanzati26. L'interpretazione alternativa avanzata dal Fraccaro27 e da altri, anche di recent e28,secondo la quale si tratterebbe di captazione di acqua pura non sembra sostenibile : anche se in altre situazioni una simile funzione dei cunicoli sembra accertata, nel caso del territorio pontino - ricchissimo
25 Plin., N. H. Ili 59. Cfr. Liv. II 34; IV 25, 21; VI 12, 6. La migliore trattazione del problema è ancora quella di M. R. de La Blanchère, Un chapitre d'histoire pontine, in Extraits des savants étrangers à l'Acad. des inscr. et belles-lettr., X 1, Paris, 1889 (trad. ital. in Id., Terracina e le terre pontine, Terracina, 1984, p. 127-241). 26 La Blanchère, op. cit., p. 112-23; Id., Le drainage profond des campagnes latines, in MEFR, 2, 1882, p. 207-11; Id., La malaria à Rome et le drainage antique, ibid., p. 94-106 (ambedue gli articoli sono tradotti in Terracina e le terre pontine, op. cit., p. 77-97); Id., Cuniculus, in Darenberg-Saglio I 2, p. 1591-4; S. Quilici Gigli, Sistemi di cunicoli nel terri torio tra Velletri e Cisterna, in Archeol. laziale, 5, 1983, p. 112-23. 27 P. Fraccaro, Di alcuni antichissimi lavori idraulici di Roma e della campagna, in Bollettino della Reale Soc. Geogr. hai, ser. 5, voi. 8, 1919, p. 186 ss. (Opuscula, III, Pavia, 1957, p. 1-49). 28 F. Ravelli, P. J. Howarth, / cunicoli etrusco-latini : tunnel per la captazione di acqua pura, in Irrigazione e drenaggio, 35, 1, 1988, p. 57-70.
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di sorgenti, e il cui principale problema è costituito, come è evidente, dallo smaltimento delle acque superficiali - la soluzione è certamente diversa : il sistema di cunicoli non può che costituire un'opera di dre naggio delle acque superficiali, del tutto analoga a quella che è stata riconosciuta negli analoghi complessi del territorio etrusco. Lo studio di questo imponente complesso di cunicoli venne realiz zatogià alla fine del secolo scorso dal La Blanchère : purtroppo, l'ope ra rimase in gran parte manoscritta, e sembra perduta, insieme ai pre ziosi rilievi che l'accompagnavano. Ci resta solo il capitolo conclusivo, pubblicato a parte, ma privo di qualsiasi supporto cartografico : solo pochi disegni di dettaglio furono pubblicati nel Dictionnaire des Anti quités 29. Ci sembra opportuno riportare alcune considerazioni dell'autore a proposito di questo impressionante complesso di opere idrauliche, che appaiono ancora perfettamente attuali a più di un secolo di distanza : «La raison peut-être en est simple. Ce système correspond à un temps très différent de l'âge littéraire. Celui-ci se place vers l'époque où les campagnes latines sont en pleine décadence : le latifundium est par tout, le désert se crée, l'abandon atteint de plus en plus toutes les ter res. Évidemment, ce n'est pas alors que se fit un travail d'ensemble . . . et ce n'est pas non plus à l'âge précédent, où les moissons cèdent la place aux prés, où la culture diminue peu à peu avec la population libre, où la guerre dévaste, où la conquête dépeuple les pays Latin et Pontin, où n'existe plus de groupement de forces permettant même de concevoir des opérations pareilles. Il faut donc remonter d'un saut aux premiers âges agricoles de Rome et de l'Italie, du Latium. Les commun autésrustiques de l'époque primitives peuvent seules donner assez de bras à une œuvre commune de ce genre . . .»; «ce n'est pas l'âge des agronomes romains, ce n'est pas l'âge des lois Liciniennes qui nous feront voir comment un peuple a vécu sur les terres désertes que tra verse la Via Appia. C'est l'antique histoire italique, si fabuleuse pour les événements, si précise pour les faits sociaux, c'est l'histoire de la conquête par Rome des campagnes Latine et Pontine, c'est surtout la vie de Rome même à l'époque de cette conquête. Conquérants et conquis en étaient au même âge économique et social». «Si l'on aban donna la culture des champs, c'est que telle qu'on la faisait, elle demandait trop d'avances. L'agriculture devenant une affaire, il n'y eut 29 Cfr. nota 26.
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plus de convenance à user de moyens si coûteux. Mais, alors qu'elle était un besoin, qu'elle donnait à manger, non à vendre, que chacun travaillait de ses mains ou par des mains qu'il payait seulement avec une part de nourriture et qui ne se marchandaient pas, alors on ne cherchait qu'une chose, atteindre au produit maximum; peu importait la somme de travail, pourvu qu'on fût en mesure de l'exécuter dans l'année»30. E ancora : «Or, on l'avoue, la création d'un système cuniculaire n'a pas été une œuvre de détail, faite par une foule de petits pro priétaires, chacun sur son petit terrain; c'est un travail d'ensemble, conçu et exécuté par régions. Il est évident dès lors qu'elle ne peut être rapportée qu'à deux périodes de l'histoire, - où bien au temps des lat ifundia, ce qui ne peut être accepté, vu la décadence de ces contrées, où bien à l'époque primitive, quand chaque canton était patrimoine d'une tribu, d'un peuple, d'une gens ou d'une cité, où un chef, un père de famille, un roi semblable à ceux d'Homère . . . pouvait disposer de toutes les forces, et faire travailler tous les bras à un ouvrage d'ensemb le sous ses ordres. Je pense qu'il n'y a pas de choix entre ces deux suppositions, et que la dernière seule est possible. Nous voici donc reportés d'un saut aux âges primitifs de l'Italie»31. Una tale cronologia 'alta' corrisponde a quanto la ricerca successi va ha potuto dimostrare per le analoghe realizzazioni in territorio etru sco32. Essa del resto è confermata dall'osservazione che la via Appia taglia in vari punti i cunicoli dell'area pontina33 : ciò significa non solo, come è evidente, che questi sono anteriori al 312, ma anche che al momento della ristrutturazione romana del territorio tutto questo sist emadi drenaggio - e quindi l'intera organizzazione economica, sociale e politica che esso presuppone - si era da tempo disgregato. Siamo così riportati a un periodo nettamente anteriore alla 'ricon quista' romana, che può essere identificato, piuttosto che con la fase dell'occupazione volsca (e cioè con il V secolo a.C), con quella della
30 Op. cit., p. 132, 108, 125. 31 Art. cit. in MEFR, 1882, p. 102. 32 S. Judson, A. Kahane, Underground Drainageways in Southern Etruria and Nor thern Latium, in PBSR, 31, 1963, p. 75-99. Cfr. G. Colonna, Basi conoscitive per una storia economica dell'Etruria, in Contributi introduttivi allo studio della monetazione etrusca, Roma, 1976, p. 15-6, 48. 33 La Blanchère, Drainage, art. cit., nota 1 a p. 211; p. 215; Malaria, art. cit., p. 102. Contra, senza argomenti, Quilici Gigli, art. cit. a nota 26, p. 118.
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precedente occupazione romana del VI secolo a.C, della cui storicità non mi sembra ormai lecito dubitare. Siamo in grado di allineare altri dati, che vanno nella stessa dire zione. In primo luogo, sembra possibile collegare il complesso sistema di drenaggio della pianura pontina con la realizzazione dei grandi emissari dei laghi laziali, in particolare di quello di Nemi. L'argomento, singo larmente trascurato, meriterebbe una ricerca approfondita. Comunque, La Blanchère sembra ancora una volta nel giusto quando propone di riconoscere in queste grandiose realizzazioni lo scopo di «régler tout le régime des eaux profondes, et débarrasser de celles-ci les flancs même de leur massif»34. Anche se è probabile che si debba accettare la data tradizionale, all'inizio del IV secolo, attribuita dalla tradizione antica all'emissario del lago Albano, è certo che l'emissario del lago di Nemi è notevolmente più antico35 : esso precede la costruzione del santuario di Diana, il cui sito attuale in precedenza era certamente coperto dalle acque; è anzi probabile che le due opere siano collegate tra loro. I dati storici permettono di identificare questo momento con la creazione al nemus Dianae di un santuario federale latino in opposizione a Roma, e quindi con gli anni finali del VI secolo a.C, tra la battaglia di Aricia e quella del lago Regillo36. Anche per questa via si giunge così a conclus ioni non diverse da quelle del La Blanchère. Ma ancora più notevole, in via teorica generale, è un'osservazione dell'autore francese già ripor tatain precedenza : il carattere di opera collettiva, e al tempo stesso concepita e imposta da un'autorità centrale, che si deve riconoscere nel complesso dei cunicoli pontini. Le dimensioni e il carattere di questo ne suggeriscono la pertinenza a un sistema sociopolitico arcaico, tutto compreso analogo a quello che caratterizza il Vicino Oriente antico. Ancora una volta, con l'allusione alla regalità omerica e ai lavori di urbanizzazione della Roma dei Tarquinii, e in particolare alla cloaca Maxima, il La Blanchère ha colto un dato essenziale37. La tradizione romana - annalistica e antiquaria - si diffonde larg amente sulla grandiosità dell'opera realizzata dai Tarquinii, e sul carat tere'tirannico' di essa (ovviamente, soprattutto nel caso di Tarquinio il
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La Blanchère, op. cit., p. 71-2, nota 1 ; Id., Drainage, p. 218. F. COARELLI, / santuari del Lazio in età repubblicana, Roma, 1987, p. 167-8. Coarelli, op. cit., p. 165-9. Drainage, p. 217.
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Superbo)38. Non c'è motivo di dubitare della storicità di questa tradi zione, confermata ormai da numerosi dati archeologici, e che corr isponde assai bene alle caratteristiche di un periodo storico che ci sono ben note, ad esempio, per la Grecia contemporanea. Colpisce in particolar modo l'insistenza delle fonti sulle connotazioni sociali di questi lavori, realizzati con prestazioni d'opera obbligatorie, con corvées, che avrebbero coinvolto l'intera plebe romana39. Sarebbe difficile sostenere che un dettaglio così caratteristico, così coerente con una situazione socioeconomica di tipo arcaico sia stato inventato in un'epoca in cui le condizioni del lavoro erano radicalmente diverse. È interessante che gli autori antichi insistano tanto sulla durezza del lavoro necessario per realizzare le complesse opere di drenaggio, di cui la cloaca Maxima costituiva solo l'esempio più imponente. Per sfuggire a questo sfibrante lavoro di scavo sotterraneo molti si sarebbero dati la morte : motivo topico ricorrente, che risale almeno a Cassio Hemina. In effetti, si tratta di notizie tutt'altro che inverosimili, se teniamo nel debito conto le condizioni disumane di lavoro a cui dovevano essere soggetti i fossores che realizzarono i cunicoli arcaici del Lazio, condizion i efficacemente descritte dal La Blanchère : « Ainsi, rampant, courbé, toujours dans une position incommode, il avançait ouvrant son chemin, et des enfants derrière lui déblayaient au fur et à mesure»40. È altresì interessante osservare che la realizzazione da parte dei Tarquinii del sistema di drenaggio e delle altre opere di urbanizzazione della città è strettamente collegata dagli autori antichi con la contem poranea colonizzazione della pianura pontina : « His laboribus exercita plebe, quia et urbi multitudinem, ubi usus non esset, oneri rebatur esse et colonis mittendis occupari latius imperii fines volebat, Signiam Circeiosque colonos misit, praesidia urbi futura terra marique»41. Sembra dunque ragionevole identificare l'enorme opera di drenagg io realizzata ai margini della pianura pontina con un'opera connessa con la colonizzazione arcaica di Roma, databile all'epoca dei Tarquinii, e nella quale sono riconoscibili tecniche sostanzialmente etrusche; l'esi38 L. Clerici, Economia e finanza dei Romani (dalle origini alla fine delle guerre sannitiche), Bologna, 1943, p. 425-6; J.-C. Richard, Les origines de la plèbe romaine (BEFAR, 232), Roma, 1978, p. 294-5. 39 Liv. I 38, 6; 56, 2; Dion. Hal. Ili 67, 5; IV 44, 1-2; 81, 2; Plin., A/. H. XXXVI 106-8; Serv. Dan., ad Aen. XII 603 (da Cass. Hemina : fr. 15 Peter). 40 La Blanchère, op. cit., p. 84. 41 Liv. I 56, 3; vir. ili. 8, 3.
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'tirrenici' stenza in tutta l'area, da Velletri a Terracina, di toponimi sembra andare nella stessa direzione. Del resto, la straordinaria ri cchezza di Satricum in età arcaica, attestata da scavi vecchi e recenti, sembra confermare in pieno la tradizione antica, che insiste concorde mente sulla particolare prosperità del territorio pontino, e in particola re del capoluogo di questo, Suessa Pometia. È curioso che non si sia mai pensato di collegare (almeno per quanto è a mia conoscenza) la perdita del territorio pontino da parte dei Romani con l'insorgere delle gravi carestie e del profondo malesser e sociale che caratterizza Roma nei primi decenni del V secolo a.C.42. Eppure, si tratta di episodi la cui sostanziale storicità è ormai evidente e la cui insorgenza - proprio per la subitaneità del fenomeno - non può spiegarsi senza una diretta causa scatenante, che potrebbe riconoscersi proprio nella perdita, a seguito della calata dei Volsci, di un territorio agricolo la cui fertilità era proverbiale : perdita che non può non aver determinato gravi ripercussioni sul piano alimentare nella Roma dell'epoca, città certamente popolosa, e la cui sussistenza doveva dipen derein notevole misura dalle forniture dell'agro pontino. Del resto, è proprio verso quest'ultimo che si dirigeranno in un primo momento le navi frumentarie romane, che saranno però respinte43. La durezza del lalotta che coinvolse i Romani e i Volsci, insieme ai loro alleati, per più di 150 anni si spiega assai meglio, se inserita in un siffatto contesto. 4. Gli scavi realizzati nel secolo scorso hanno dimostrato che Satr icum esisteva ben prima della conquista volsca : si tratta di un centro che - come molti altri analoghi del Lazio antico - si sviluppa a partire dall'età del ferro. Quello che lo caratterizza, semmai, è la particolare prosperità, che si deduce ad esempio dalla stipe del santuario di Mater Matuta (purtroppo ancora praticamente inedita), la più ricca del Lazio. A proposito del santuario, si deve sottolineare la presenza in esso di una dedica votiva particolarmente antica, che dimostra la presenza di Etruschi in questa zona in un'epoca che coincide con quella tradizional e dell'arrivo dei Tarquini a Roma44.
42 Si veda, da ultimo, C. Virlouvet, Famines et émeutes à Rome des origines de la République à la mort de Néron, Roma, 1985. 43 Liv. II 34, 4-5; Dion. Hal. VII 2, 1. 44 G. Colonna, in Civiltà del Lazio primitivo, Roma, 1976, n. 128, p. 374-5 (vaso datato al 620-600 a.C, con dedica di un Ceretano).
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Una chiave a mio avviso risolutiva per la storia della città ci è stata fornita dalla recente identificazione tra Suessa Pometia e Satricum, proposta da Stibbe45. Constatiamo infatti che le due città sembrano occupare la stessa zona, e rivestire le stesse funzioni, rispettivamente in due epoche successive. Ora, è un fatto che il nome latino è certamente Pometia (che appare infatti in un documento importante, come il passo di Catone in Prisciano sulla fondazione del lucus Dianius in nemore Aricino)46 : Suessa sembra essere il nome più antico, aurunco, come abbia mo visto. Si tratta, come sottolineano più volte le fonti antiche, di un centro di grande ricchezza, il più importante della pianura pontina, che da esso del resto prende il nome. In Satricum dobbiamo con tutta probabilità identificare un nome volsco : lo ritroviamo infatti attribuito a un altro abitato volsco della valle del Liri (da identificare probabilmente con S. Giovanni Campano), ricordato da Livio e da Cicerone47. Ora, la città identificata con Satr icum, come è noto, è un centro di grandissima importanza, come hanno dimostrato gli scavi del secolo scorso e quelli più recenti della scuola olandese. Le più antiche tracce di insediamento risalgono almeno al IX secolo a.C. e la città si sviluppa particolarmente nel periodo arcaico48. Ma essa non potè in origine chiamarsi Satricum, dal momento che que sto è probabilmente il nome volsco, quindi non anteriore al V secolo. Quale è dunque il nome più antico di essa? La risposta potrebbe esse re : Suessa in origine (cioè il centro aurunco), Pometia in seguito (la colonia romana). Un caso del tutto analogo ci è noto del resto nella stessa zona, quello di Tarracina-Anxur : un doppio nome, latino e vol sco rispettivamente, che corrisponde a fasi diverse della storia della cit tà. Gli scavi di Satricum, ripresi di recente con ottimi risultati, comin ciano a mettere a nostra disposizione un contesto archeologico di una certa importanza, che ci permette per la prima volta di conoscere l'aspetto reale di un insediamento volsco49. Non è mia intenzione 45 C. M. Stibbe, Satricum e Pometia : due nomi per la stessa città, in Meded. Rome, n.s. 12 (47), 1988, p. 7-16. 46 Caio, orig., fr. 58 Peter. 47 Liv. IX 12, 5; 16; XXVI 33, 10; Cic, Q.fr. Ili 1, 4. 48 Civiltà del Lazio primitivo, op. cit., p. 323-346 e bibl. cit. sotto, a nota 49. 49 Vecchi scavi : A. Della Seta, Museo di Villa Giulia, Roma, 1918, p. 233-320; Civiltà del Lazio primitivo, op. cit., p. 323-46. Sui nuovi scavi, oltre alle relazioni preliminari in Archeologia laziale, cfr. Aa.Vv., Lapis Satricanus, 's- Gravenhage, 1980; J. De Waele, / tem pli della Mater Matuta a Satricum, in Meded. Rome, 43, 1981, p. 7-68; R. R. Knoop, Antefi-
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esporre qui i risultati di questi scavi, presentati per ora solo in alcune relazioni preliminari molto sommarie. Alcuni fatti sembrano però fin d'ora sufficientemente chiari, e vanno qui ricordati. 1) In primo luogo, la storia del tempio di Mater Matuta. Qui sono da considerare soprattutto le due fasi monumentali, rispettivamente della metà del VI secolo e dei primi anni del V : è notevole che la secon da presenti un orientamento diverso dalla prima, che si ripete anche in una serie di edifici circostanti, certamente da identificare con grandi abitazioni aristocratiche 50. In altri termini, tutta l'acropoli di Satricum sembra ricostruita nei primi anni del V secolo (data del secondo tem pio) con una pianta interamente rinnovata, dopo un grave incendio, nel quale sarebbe difficile non identificare uno degli episodi di radicale distruzione della città ricordati delle fonti letterarie. Sostanzialmente, sembrano qui entrare in gioco solo tre possibilità : la distruzione di Pometia dovuta a Spurio Cassio, del 503 51; quella di Servilio, subito dopo la battaglia del Lago Regillo, del 495 (data canonica)52; oppure, più semplicemente, un episodio di assedio collegato con l'invasione volsca. Quello che mi induce a preferire quest'ultima soluzione è il fatto che l'ormai celebre iscrizione di Publio Valerio sia stata utilizzata come materiale da costruzione nella crepidine del secondo tempio53. Sembrer ebbeinfatti trattarsi della distruzione volontaria di un monumento, che tra l'altro era di pochissimi anni più antico : fatto difficilmente spiegabile, se i ricostruttori del tempio erano Romani ο Latini. Non ha alcun valore l'obiezione che è stata fatta contro una tale soluzione, cioè la pretesa rozzezza culturale dei Volsci, considerati incapaci di realiz zareun tale monumento54 : la stessa pianta del tempio, un periptero di chiara ispirazione ellenizzante, rimanda all'intervento di maestranze esterne, forse campane, che avranno lavorato per committenti volsci55.
xae Satricanae, Assen, 1987; M. Maaskant-Kleibrink, Settlement Excavations at Borgo Le Ferriere 'Satricum'. The campaigns 1979, 1980, 1981, Groningen, 1987. 50 Case e palazzi d'Etruria, Milano, 1985, p. 178-185. 51 Liv. II 16, 8. 52 Liv. II 25, 5; Dion. Hal. VI 29, 5. 53 Lapis Satricanus, op. cit., p. 104, Maaskant-Kleibrink, op. cit., p. 15-16. 54 C. M. Stibbe, in Archeol. laziale, 4, Roma, 1981, p. 307. 55 Sui templi del V secolo, cf r. G. Colonna, / templi del Lazio fino al V secolo compres o, in Archeol. laziale, ó, 1984, p. 396-411.
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Un caso analogo è quello del santuario minturnese di Marica, realizzato per gli Aurunci da maestranze probabilmente campane.56. Un altro dato molto interessante emerso dalle ultime campagne di scavo è la presenza di tombe entro l'area dell'acropoli57. Si tratta di un chiaro esempio di destrutturazione della città ad opera dei nuovi abita toridi stirpe italica, il cui livello di sviluppo non era tale da permettere l'uso di strutture urbane. È possibile che l'area dell'acropoli sia stata allora riservata a pochi nuclei familiari particolarmente eminenti, che avranno utilizzato le grandi dimore più antiche, forse rinnovate per l'occasione, e seppellito i loro morti nell'area circostante. Sono questi fatti del tutto prevedibili e naturali, che non giustificano in alcun modo il dubbio avanzato dagli scavatori sull'identificazione della città con Satricum58 (attestata senza possibilità di dubbio, tra l'altro, dall'iscr izione di età tardo-repubblicana con una dedica a Mater Matuta)59. Ritornando per un momento alla ormai celebre iscrizione di Publio Valerio, è difficile sfuggire alla tentazione di identificare nel personagg io P. Valerio Poplicola, anche a rischio di incappare nei fulmini dell'ipercritica. A questo proposito, si devono avanzare almeno tre ordi ni di considerazioni. In primo luogo, la tradizione che riporta l'intervento di Valerio Poplicola nella zona a sud di Roma durante il suo secondo consolato del 508 a.C, quando egli avrebbe fondato la colonia di Signia60. La creazione di colonie latine arcaiche a Cora e Pometia potrebbe ascrivers i alla stessa occasione. In secondo luogo, è da ricordare la strana leggenda, riportata dal solo Plinio il Vecchio, che collega una Valeria con Pometia al momento di una delle distruzioni della città61. A questo proposito, si deve citare la Valeria, sorella di Poplicola, che appare nella leggenda di Coriola no62 : è lei a far costruire il tempio di Fortuna Muliebris sulla via Lati na,nel punto stesso dove sarebbe avvenuto l'incontro tra Coriolano e la madre. L'intervento di una Valeria in questo contesto costituisce un ele-
56 P. Mingazzini, // santuario della dea Manca alle foci del Garigliano, in MAL, 37, 1938, cc. 684-983. 57 Cfr. Maaskant-Kleibrink, op. cit., a nota 49. 58 Ibid., p. 13. 59 CIL P 1552. 60 Plut., Popi. 16; cfr. Dion. Hal. VI 43, 1; 44, 2. 61 Plin., Ν. H. VII 68-9. 62 Dion. Hal. Vili 39, 2; 55, 4.
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mento di disturbo nella narrazione, nella quale non può integrarsi in alcun modo. Ciò rende ancora più interessante la notizia, che era chia ramente ineliminabile, perché attestata da una fonte sicura : ciò fa pen sare a una tradizione autonoma, connessa con lo stesso atto di fonda zione del tempio, e quindi particolarmente fededegna. Sembra molto probabile, in altri termini, che l'edificio fosse realmente dovuto a una Valeria e fosse stato realizzato in relazione a una guerra contro i Volsci. Anche in questo caso sembra possibile di riscontrare un rapporto privilegiato della gens Valeria con l'area pontina. In terzo luogo, è impressionante la regolarità con cui ritroviamo dei Valeri al comando di eserciti inviati contro i Volsci nel corso del V e del IV secolo a.C.63. Potremmo pensare a una sorta di specializzazio ne funzionale, analoga a quella dei Fabii nei confronti degli Etruschi e di Veio. È possibile cioè che i praedia originari della gens Valeria fosse ro al limite meridionale deli'ager Romanus, in direzione dell'area ponti na. L'iscrizione di Satricum, con l'allusione ai sodales di Valerio, rivela l'esistenza, alla fine del VI secolo, di un corpo armato gentilizio analo go a quello che ci è noto per i Fabii nel corso del V secolo a.C. In sintesi, sembrerebbe di poter ricostruire con notevole verosimi glianzala presenza nella valle pontina di una colonizzazione arcaica romana, che sembra articolarsi in due fasi, una di età regia (metà del VI secolo) e una dei primi anni della repubblica, quest'ultima probabil mente da collegare con l'attività dei Valerli, come si ricava dalle fonti letterarie, e ora della straordinaria iscrizione di Satricum. Dobbiamo a questo punto esaminare brevemente i dati che sembrano confermare una tale ipotesi. Il più importante di questi è il primo trattato romano-cartaginese, che anch'io non esiterei a collocare nella data tradizionale, all'inizio della repubblica64. La situazione che esso descrive infatti non può esse re successiva : né del V secolo, né della prima metà del IV. Quello che colpisce nell'indicazione sullo stato delle città costiere del Lazio meri dionale, da Ardea a Terracina (contrariamente a quanto si pensa, Lavinio non è nominata)65 è la loro dipendenza esclusiva da Roma : non si 63 Liv. IV 53, 2 ss.; 59, 2; V 12, 1 ; VI 32; VII 27-8; Diod. XV 61, 1. 64 Polyb. Ili 22, 1. Sintesi recenti sul problema : A. Toynbee, Hannibal's Legacy, I, Londra, 1965, p. 519-55; J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu'aux guer respuniques, Parigi, 1969-80, p. 386-395; Κ. Ε. Petzold, in ANRW, I, 1972, p. 364-411. 65 Gli Arentinoi citati nel testo sono localizzati sulla costa tra Anzio e Circei : non è possibile quindi corregere in Laurentinoi.
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tratta affatto di Latini, e neppure di alleati dei Romani, che pure sono menzionati in precedenza. Si dice : « i Cartaginesi non faranno torto agli Ardeati, agli Anziati, agli Arentinoi, agli abitanti di Circei e di Terracina, né ad alcun altro dei Latini che sono soggetti a Roma». Torneremo fra poco su questo punto. Ma dobbiamo in primo luogo ricordare che una situazione analoga si trova in Scilace66 (e anche in un noto passo di Esiodo)67, dove si afferma che i Latini occupavano la costa fino al Circeo. Quella rivelata dal primo trattato romano-cartaginese è insomma la situazione posteriore alla colonizzazione arcaica - che la tradizione attribuiva a Tarquinio il Superbo - ed anteriore alla calata dei Volsci : diciamo la situazione della seconda metà del VI secolo, confermata tra l'altro dalla presenza nel Lazio meridionale di nomi di città chiarament e etruschi, nomi già notati da tempo : da Tusculum a Velitrae a Tarracina. I pochi dati archeologici di cui disponiamo confermano nel comp lesso la tradizione : ricordo qui solo la presenza di terrecotte architet toniche (in particolare antefisse), che sembrano di produzione romana, a Circei e a Norba68, e la duplice cinta di Segni, attribuibile al pieno VI e agli inizi del V secolo a.C, in perfetta coincidenza con i dati delle fonti che ricordano una doppia colonizzazione, di Tarquinio Prisco e dell'inizio della repubblica (che la storiografia moderna spiega, in modo meccanico, come una reduplicazione)69. Così pure la duplice cin ta di Norba, la più antica delle quali, che include un'area assai più ristretta, va datata, per vari motivi che qui non è possibile precisare, nel V secolo a.C. :70 ancora una volta, in perfetta coincidenza con la cronologia della colonia, attribuita dalle fonti letterarie all'inizio del V secolo71. La presenza di colonie latine nella pianura pontina va spiegata, a mio avviso, non con l'intervento della lega Latina in quanto tale, ma in rapporto diretto con Roma, che dovette avere in quest'area una zona
66 Ps. Scylax 5. Sulla data si veda ora A. Peretti, in Si. Class. Orient., 10, 1961, p. 534; Id., ibid. 12, 1963, p. 16-80. 67 Hesiod., Theog. 1013 ss. 68 Norba: NS 1901, p. 547, fig. 28. Circei: Enea nel Lazio, Roma, 1981, p. 72, A 121 (R. Righi). 69 F. CoARELLi, Lazio (Guide archeologiche Laterza), Roma-Bari, 1984, p. 175-7. Liv. I 56, 3; II 21, 7; Dion. Hal. V 20. 70 Coarelli, Lazio, op. cit., p. 267. 71 Liv. II 34, 6.
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privilegiata di espansione. Ciò risulta con chiarezza dal testo del primo trattato romano-cartaginese, e forse anche da altri indizi, che qui menz ionerò brevemente. Si tratta in particolare della narrazione leggendar ia della conquista di Coriolano72, nella quale si deve riconoscere, a mio avviso, la trasposizione mitica della reale conquista dei Volsci : la narrazione annalistica sintetizza in rapidissimo scorcio una serie di eventi che dovettero occupare un periodo di tempo assai più lungo. Ora, nella narrazione di Dionigi73, che è come sempre la più ampia (ma anche in quella di Livio, se si accetta un emendamento del Niebuhr, che a mio avviso si impone)74 la spedizione di Coriolano è divisa in due episodi, che hanno per teatro geografico due zone diverse. In Dionigi si afferma che le forze dei Volsci si divisero in due part i : la prima di queste invase il territorio latino, l'altra il territorio roman o.In sequito appare chiaro che il territorio latino è quello disposto più ο meno lungo il percorso della futura via Latina (forse questa è anche la spiegazione del nome della via), da Tolerium a Boia a Labici a Pedum (di cui si specifica esplicitamente che si tratta di colonie degli Albani), poi a Corbio. Il territorio romano invece corrisponde a Longula, Polusca, probabilmente Setia, Satricum, Muglila, Corioli. È evidente, mi sembra, che tutto ciò deve essere messo in rapporto con la reale duplicità degli insediamenti volsci, nella valle del Sacco-Liri e nella pia nura pontina (con le due «capitali» rispettivamente di Ecetra e di Privernum); ma appare anche chiara la conferma di quanto ci era sem brato di poter cogliere in precedenza : la prima di queste aree, cioè la valle del Sacco-Liri, è in qualche modo considerata area di espansione dei Latini, la pianura pontina invece area di espansione dei Romani. Anche da questo punto di vista mi sembra che emerga una certa parità tra le due parti contraenti della lega Latina, ma allo stesso tempo la prevalenza di Roma, che da sola equivale, economicamente, demografi camentee militarmente, all'insieme delle città latine. Nel complesso, riconosciamo ancora una volta la situazione di dominio di Roma sui Latini, che le fonti letterarie attribuiscono all'età dei Tarquinii. Filippo COARELLI
72 Plut., Coriol. 28, 3-5; 29, 1-2; 31, 4; Liv. II 39, 1-5; Dion. Hal. Vili 36. 73 Dion. Hal. VIII 36. 74 Liv. II 39, 4 (cfr. Class. Quart., 4, 1910, p. 274).
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L'idea che il V secolo e soprattutto la sua seconda metà sia stata un periodo di crisi tanto per gli Italioti che per gli Italici appare ben radi cata nella tradizione storiografica relativa alla Magna Grecia. Il termine, specie se pensato al singolare, non appare tuttavia del tutto adeguato per esprimere quanto avviene nel corso di questi decenn i; se è infatti vero che scompaiono allora molti dei protagonisti della fase arcaica, mentre crollano ο vengono duramente minacciate alcune grandi poleis, è altrettanto vero che negli stessi decenni entrano propo tentemente in scena nuovi attori (Lucani e Sanniti), e che addirittura una larga parte delle genti indigene, gli Apuli, non conosce sulla lunga durata alcuna discontinuità sostanziale. Gli eventi sono comunque numerosi e complessi : volendone dar conto non può essere adottato altro criterio che quello diacronico, ancorato - quale punto iniziale - all'articolazione etnico-culturale v igente alla fine della fase arcaica. Quale data convenzionale di partenza si assume così il 510 a.C, cercando di tracciare, per quanto concerne il versante indigeno, il qua dro generale del sistema che sta per essere messo in crisi - e qui il te rmine è certo ben adatto - dal repentino crollo di Sibari. Nel Sud della Basilicata, la città achea è da tempo subentrata alla ionica Siris nel costituire punto di riferimento per quegli Enotri delle vallate dell'Agri, del Sinni e del Cavone che, attraverso i propri corr ispondenti stanziati nel Vallo di Diano avevano fondato le proprie fortu ne sulla possibilità di gestire - al centro di rapporti fra partners diversi - un comodo canale di transito in direzione della Campania etruschizzata, in un rapporto così stretto da far nascere addirittura una produ zionedi pseudobuccheri locali. Nel loro seno, già ai primi del VI sec, come indicano i corredi tomb ali, era sorta un'organizzazione militare che vedeva la presenza della cavalleria pesante armata alla greca.
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In questo momento, tale ruolo di tramite a lunga distanza è peral tro già stato ampliamente ridimensionato, se non annullato, dall'affermarsi del secondo itinerario interno, quello facente capo a Metaponto e Poseidonia, snodantesi lungo il Sele, l'Ofanto, il Basento (o meno bene il Bradano). È l'itinerario attraverso le terre delle genti che producono le cera miche definite come «serie secondaria» del subgeometrico bicromo da J. de La Genière, dette ora «nord-lucane» da D. Yntema1, e che prati cano l'inumazione in posizione rannicchiata. Al centro del suo tratto «lucano» si colloca l'insediamento di Serra di Vaglio, che rappresenta del resto il punto più elevato attinto dal pro cesso di ellenizzazione nel quadro della mesogaia appenninica. A questo medesimo àmbito culturale appartengono anche i centri che fanno corona alla stessa Metaponto, in primo luogo Pisticci, della quale un recente rinvenimento epigrafico ha posto in piena luce la con dizione di sito di frontiera. Si tratta di un'invettiva in dialetto acheo, graffita su di un frammento di vaso indigeno, che trova la propria spie gazione nelle pratiche omosessuali dell'ambiente giovanile. Difficile non pensare, con gli editori, agli efebi inviati a prestare servizio milita re en tais eschatiais2. D'altra parte, Pisticci non è - come ci conferma no soprattutto le panoplie restituiteci dalle tombe coeve - un centro inglobato nello Stato metapontino; appare quindi non troppo lontano dal vero pensare che sia in contesti di questo tipo che si andassero sv iluppando quelle forme di mercenariato italico destinate ad assumere in seguito importanza determinante nella vita delle poleis. Al di là del Bradano, si estendono poi i territori apuli. La documentazione archeologica relativa, molto diseguale, non consente di formulare un quadro completo della situazione. In linea generale, si può comunque osservare come le specificità cantonali si colleghino strettamente ad una notevole diversità nel grado di una ellenizzazione, massima nel Salento e progressivamente decre scente in Peucezia e in Daunia, innestatasi su basi strutturali e culturali omogenee. Solo in territorio messapico, sia in relazione alla presenza di Ta-
1 J. de La Genière, Recherches sur l'âge du Fer en Italie méridionale, 1. Sala Consilina, Napoli, 1968; D. G. Yntema, The Matt-painted Pottery of Southern Italy, Utrecht, 1985. 2 M. Tagliente, M. Lombardo, in ParPass, 223, 1985, p. 284-306.
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ranto sia grazie a diretti apporti transadriatici, si manifestano così fenomeni come la piena adozione della scrittura e la nascita di autono me figure sacerdotali3, riferibili con tutta evidenza ad una compagine sociale ormai notevolmente complessa ed articolata. Una situazione peraltro confermata da quel non molto che conoscia mo in merito all'organizzazione degli abitati (essenzialmente Cavallino, difesa da una fortificazione già in età arcaica), e dei vari santuari. Più a Nord, in Peucezia, il quadro non è forse molto dissimile, a giudicare almeno dalla complessità degli abitati e da qualche rinven imento epigrafico4; manca tuttavia quasi completamente quanto sareb be necessario per valutarne gli aspetti ideologici. Merita comunque di essere sottolineato come i rinvenimenti della più importante necropoli di tutta quest'area, Rutigliano, pervenutaci miraco losamente intatta, ripropongano il problema, forse finora sottovalutato, del diretto contatto fra queste terre e l'Attica, rapporto documentato teste Tucidide (7. 33) - per il tardo V secolo, momento per il quale a Banzi è documentata la conoscenza del rituale funerario infantile legato alle Anthesterie, ma probabilmente avviato in epoca molto anteriore, secondo F. G. Lo Porto già durante la tirannide pisistratea5. Da ultima la Daunia, al di qua e al di là dell'Ofanto. Fra tutti i vari territori indigeni che si sono finora passati in rasse gna, essa rappresenta senza dubbio quello meno permeato di elementi culturali greci, certo il solo che abbia conosciuto uno sviluppo non direttamente condizionato dalla loro colonizzazione, per non dire del tutto orientato secondo parametri ad essa estranei. Alla fine del VI secolo, le importazioni elleniche vi costituiscono un fatto eccezionale e quantitativamente limitato; gli stessi fenomeni di modernizzazione delle strutture abitative, così diffuse altrove, si mani festano in modo assai debole e tutto sommato esteriore, senza giungere ad incidere sull'organizzazione globale degli insediamenti, neppure in quelli più importanti. Un aspetto peculiare delle Daunia merita ancora di essere sottoli neato, per il suo peso anche in relazione ad avvenimenti di molto suc3 C. De Simone, in StEtr, 50, 1984, p. 177-197. 4 F. Ribezzo, in RIGI, 4, 1920, p. 237 ss.; M. Gervasio, Bronzi arcaici e ceramica geo metrica nel museo di Bari, Bari, 1921, p. 88 (fibule da Valenzano : L. H. Jeffery, The Locai Scripts of Archaic Greece, Oxford, 1961, p. 281). 5 In Locri Epizefirii. Atti del XVI convegno int. di studi sulla Magna Grecia, Taranto, 1976, Napoli, 1977, p. 736-745.
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cessivi : la radicata attenzione per l'allevamento dei cavalli, presente come indicano i più recenti rinvenimenti del Melfese - anche a livello di immaginario religioso. Torniamo così agli avvenimenti politici. Nella prospettiva degli Italici della futura Lucania, le conseguenze dirette della scomparsa di Sibari furono piuttosto contenute : il solo ad essere coinvolto fu infatti il cantone enotrio nella sua parte meridional e, anche se non sembra negabile il fatto che nel successivo riassetto politico (ma anche fisico, in conseguenza della diaspora degli esuli), abbiano finito per essere interessati, in vario modo, anche altri gruppi indigeni. La situazione che si determina in Enotria, al di qua dello spartiac que appenninico è comunque molto chiara : quasi nessun abitato a noi finora noto continua la propria vita oltre i primi decenni del nuovo secolo. Le vallate dell'Agri e del Sinni, al tempo della seconda battaglia di Cuma, sono pressocchè disabitate. A provare il legame causale con la vicenda di Sibari vale un'osser vazione già fatta altre volte : oltre le montagne, in direzione del Tirre no, dov'è lecito postulare il crearsi ο il rafforzarsi di rapporti con le poleis costiere, il fenomeno si manifesta in modo assai meno intenso e drammatico : Yethnos enotrio sopravvive insomma nel Vallo di Diano (a Padula) e nel tratto costiero fra Velia e Laos. Nello stesso periodo che vede il consumarsi di questa decadenza, sull'opposto versante apulo si verifica uno dei noti e conclamati casi di diretta contrapposizione militare fra genti indigene e Greci : quella che vede coinvolti da un lato i Tarantini e dall'altro dapprima i Messapi e poi (anche) i Peuceti. Al di là dello specifico problema - che non si intende certo ripren dere - delle due vittorie grece documentate dai donari delfici e del pho nos ellenikos megistos cui fa troppo brevemente cenno Erodoto (7. 170), preme qui sottolineare l'incidenza negativa di questo conflitto, che ha per protagonista il gruppo senza dubbio più ellenizzato di tutta la Magna Grecia, e per il quale è dunque assai difficile accettare l'ottica di comodo della lotta antibarbarica in cui si muovono le fonti, come ha ben dimostrato G. Nenci6. Gli studi e le ricerche dell'Università di Lecce e di F. D'Andria in particolare ci indicano infatti che nel corso della prima metà del V 6 In AnnSNPisa, serie III, VI-3, 1976, p. 719-738.
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secolo viene abbandonata Cavallino, cessa il culto di Oria, cadono i traf fici transmarini di Torre S. Sabina7. Ciò non va inteso - per riallacciarsi al giudizio espresso all'inizio come il manifestarsi di una crisi irreversibile della Messapia, ma sic uramente costituisce una netta battuta d'arresto nella sua vicenda. Non può d'altra parte sfuggire come questo conflitto, con l'asprez za della sua lotta militare, non faccia che prefigurare l'imminente e ben più grave scontro fra le nuove compagini italiche ed i coloni greci. Oltre un certo livello, ellenizzazione non è più a sinonimo di accettazione di una subalternità strutturale nei confronti dei Greci. Intorno a questa contraddizione ruotano, a quanto sembra, molti degli accadimenti del V e poi del IV secolo. Verso la metà del V secolo le aree di crisi sono dunque costituite da due cantoni più periferici del territorio qui considerato, l'Enotria a Ovest, la Messapia ad Est. Al centro e più a Nord, nulla è invece mutat o. Tranne quelli più meridionali, tutti i centri indigeni dell'attuale Basi licata appaiono anzi fiorenti. Sono i decenni che, per quanto concerne l'organizzazione soci oeconomica, vedono il sorgere di strutture di tipo «palaziale» a Serra di Vaglio e poi, nel diverso contesto etnico - culturale della Daunia, a Lavello; ancora, lo sviluppo di quell'ideologia funeraria che è opportu no definire piuttosto regale che principesca. I beni importati segnalano il perdurare dei rapporti sia con la Campania (i bronzi ottenuti a fusione, le terrecotte architettoniche), sia con i centri costieri, da cui provengono le ceramiche a f.r., attiche pri ma, poi metapontine, ceramiche che veicolano messaggi religiosi e più genericamente ideologici probabilmente recepiti da coloro che le acqui siscono in una misura più ampia di quanto ci è dato ora di cogliere. Lo straordinario caso del mito salvifico di Eos e del suo giovane amato (Kephalos, Tithonos), presente nella coppia tombale più ricca di Ruvo del Monte (sotto forma di scena figurata sul cratere della sepoltu-
7 Aa.Vv., Salento arcaico. Atti colloquio int., Lecce, 1979, Galatina, 1979; Aa.Vv., Cavallino I, Galatina, 1979; F. d'Andria, in Ricerche e studi, 9, 1976, p. 19-66; Id., in MEFRA, 89, 1977, 2, p. 525-562; Id., in ASAIA, 40, 1982, p. 101-116; D. Yntema, in Studi di antichità, 3, 1982, p. 83-131.
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ra maschile8 e di terminale di candelabro bronzeo in quella femminil e, ne sembra al momento l'esemplificazione più chiara. Del resto, la t. 599 di Lavello ci mostra ora addirittura l'arrivo di vasellame d'argento di tipo greco9. Non dissimile il quadro del resto dell'area apula, con in più, alme no nel caso del Nord barese, gravitante su centri come Ruvo di Puglia e Canosa, l'avvio di produzioni artigianali specializzate, come nei casi degli elmi «apulo-corinzi», delle ambre scolpite e forse anche di alcuni tipi di cinturoni in lamina rettangolare di bronzo, come si accinge a dimostrare H.-M. Von Kaenel10. Questi ultimi oggetti - la cui adozione rompe lo schema tradizionale della panoplia oplitica - insieme con pochi bronzetti votivi e forse anche un particolare tipo di bacile in bronzo di piccole dimensioni11, ci segnala no l'avvio ο almeno il divenire significativo anche in termini archeologici dei rapporti con le genti sannite dell'area appenninica centro-italica, indi viduate di recente anche in siti-chiave fra Campania e Daunia 12. La spinta di queste campagini italiche verso le paraliai ha, com'è uni versalmente noto, una ben maggiore consistenza sull'opposto versante tirrenico. Non a caso, essa è anzi da sempre individuata come una di quell e ricorrenti ondate barbariche destinate ad abbattersi sulla grecita, tanto più funesta in quanto alla fine destinata ad essere prevalente. Dal punto di vista ellenico, come ci ricorda il famoso brano di Aristosseno13, vi sono ben pochi motivi per dubitare della fondatezza di questo giudizio, che a noi compete tuttavia di rovesciare, se consideriamo gli avvenimenti dal punto di vista, adottato all'inizio, delle genti italiche. Non intendo naturalmente riprendere ora il problema dell'etnogenesi lucana, ma appare comunque indubitabile - qualunque sia il peso che si vuole attribuire alla componente centro-italica - il fatto che solo grazie al suo apporto, alcuni segmenti delle precedenti compagini indi gene supera i limiti della propria organizzazione arcaica e giungono a costituirsi in un'entità unitaria, dai connotati statuali, designata da un etnico ben preciso, in una parola Selbstbewufit. 8 A. Bottini, in BArte, 30, 1985, p. 55-60. 9 A. Bottini, M. Tagliente, in Bollettino storico della Basilicata, 2, 1986, p. 65-76. 10 A. Bottini, in AION ArchStAnt, 5, 1983, p. 33-63; Id., in BArte, 41, 1987, p. 1-16. 11 Id., Principi guerrieri della Daunia del VII secolo, Bari, 1982, p. 57-60 (tipo e). 12 M. Mazzei, in Aa.Vv., La Daunia antica, Milano, 1984, p. 185-211; A. Bottini, in DdA, 1985, 1, p. 59-68. 13 Sul fr. 124 Wehrli, da ultimo A. Fraschetta in AIONArchStAnt, 3, 1981, p. 97-115.
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Prendendo spunto dalla recente analisi di A. La Regina14, appare molto probabile che la forma assunta da tale componente sia stata quella di piccole schiere militari gravitanti attorno a nuclei di cavalieri aristocratici, ben attestati dalla documentazione archeologica, diretta ed indiretta. Gli avvenimenti che fanno di Poseidonia la prima città lucana non sono certo privi di conseguenze sulla mesogaia compresa fra Salernita no e Potentino attuali. A distanza di non più di tre ο quattro generazioni dal dissolversi della cultura enotria, un'analoga sorte travolge infatti gran parte dei territori che abbiamo visto fiorire in relazione alle opposte ed equival enti polarità delle due città achee. I modi in cui ciò si manifesta non sono peraltro omogenei; esiste infatti una gamma di situazioni che va dall'estremo negativo della pura e semplice scomparsa repentina, ai processi di graduale trasformazion e, passando per una discontinuità funzionale affiancata da una conti nuità di frequentazione. È il caso, quest'ultimo, di Serra di Vaglio, accanto al quale nascerà di lì a poco il santuario di Rossano, destinato ad ereditarne molte fun zioni. I due estremi opposti sono invece ben rappresentati da un lato da siti come Pisciolo di Melfi, Ruvo del Monte, Ripacandida, dove nulla oltrepassa la fine del V secolo, e dall'altro da Satriano, Buccino (Volcei), Atena Lucana, dove il segno del cambiamento è offerto dal muta mento del rituale funerario. Alla precedente inumazione rannicchiata si sostituisce ora la nor male deposizione supina. Se si osserva sulla carta geografica la distribuzione territoriale di queste diverse situazioni, è facile giungere alla conclusione che la punt apiù negativa è raggiunta dai siti posti nei territori del Nord e del Nordest, mentre i fenomeni di trasformazione accentuano i loro tratti di continuità man mano che ci si avvicina al versante tirrenico. Ciò induce a ritenere che non sia il processo di etnogenesi lucano in quanto tale a mettere in crisi questa parte del vecchio mondo indige no, quanto le conseguenze che tale processo ha provocato sulla polis greca. Come ci indicano tutte le manifestazioni culturali ed ideologiche, 14 Ibidem, p. 129-137.
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una volta in mano lucane, Poseidonia cessa di fungere da partner per Metaponto; la corrispondente via dell'interno, sulla quale abbiamo visto innestarsi lo sviluppo di queste genti, perde in questo stesso momento ogni funzione. La conseguenza è il determinarsi di un vuoto proprio in corrispon denza dei lembi orientali dell' Appennino ; un vuoto che naturalmente non può restare tale a lungo. Alle spalle della catena di grandi centri dauni (che al momento sopravvivono senza eccessivi traumi proprio per essere inseriti in un sistema che non si appoggia sulla grecita coloniale), si incuneano ora le avanguardie di quei Sanniti di cui si è detto poco fa. Le trasformazioni socio-politiche, urbanistico-abitative e rituali del laForentum di fine V e poi di IV sec, fino allo stabilizzarsi di questa sorta di entità mista daunio-sannita, lo dimostrano ora con l'evidenza indiscutibile delle scoperte archeologiche. Non sarà del resto un caso se, un secolo più tardi, la linea della discesa sannita diverrà l'asse portante della romanizzazione, da Luceria a Venusta, a Bantia e Sidion/Silvium. Venusta e Bantia segneranno del resto il confine orientale della regio tenia, come ci ricorda l'oraziano lucanus an apulus anceps (ser., 2.1.34). Nel resto del territorio (a parte qualche isolato caso di sopravviven za residuale, comme quello di Pomarico Vecchio, dove i vasi subgeometr ici giungono ad affiancare quelli apuli a f.r.), dalle ceneri delle prece denti comunità arcaiche iniziano ad emergere i contorni della nuova compagine lucana, con quei tipici connotati di omogeneità organizzati va e culturale destinati a durare almeno fino all'epoca di Pirro. Verso la fine del secolo, ritornano così ad essere frequentate le val late dell'Agri e del Sinni, con una fitta trama di insediamenti nella mag gioranza dei casi dalla chiara dimensione di semplici fattorie. L'organizzazione militare, le tecniche fondamentali (inclusa la scrittura), le forme espressive permettono di includere anche la compag ine lucana fra quelle più profondamente influenzate dalla cultura gre ca (basterà pensare a fenomeni come la partecipazione alle strutture organizzative del Pitagorismo, studiata di recente da A. Mele e B. d'Agos tino)15, ma l'impostazione di fondo, i parametri guida della sua es istenza appaiono ormai lontanissimi da quelli propri delle entità arcai cheche sostituisce. 15 Ibidem, p. 61-96 (A. Mele); p. 117-127 (B. d'Agostino).
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II territorio fra Tirreno e Ionio, che verrà via via difeso da un imponente sistema di fortificazioni, sembra rinchiudersi su se stesso in una sorta di autarchia; di questa nuova situazione sono emblematici gli avvenimenti del 389 a.C, allorché il tentativo greco di penetrare manu militari si concluderà con la memorabile sconfitta di Laos. Angelo Bottini
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Quelle image le Grec du Ve siècle se faisait-il de l'Italie indigène? Pour tenter de l'appréhender, nous ne sommes pas dans des conditions très favorables. Nous ne disposons pas pour ce faire d'une documentat ion comparable, même de loin, à celle qu'Hérodote nous offre pour l'Orient : un travail du genre de celui de F. Hartog sur l'image du Scy the est ici impensable1. Force est d'opérer à partir des quelques ren seignements donnés par les auteurs de l'époque, ou de ce qu'on peut inférer de certains événements de la période. Et les auteurs qui au raient vraisemblablement été le mieux à même de nous informer - un Hécatée, avec sa description de la terre à portée universelle, ou les his toriens grecs d'Occident, directement intéressés à la question, comme Antiochos de Syracuse - ne nous sont plus accessibles qu'à travers d'in fimes fragments. La plus grande partie de leurs remarques a dispa ru2.C'est donc d'un matériau réduit, tributaire de limitations qui tien nent au simple hasard de la transmission indirecte, que l'on est obligé de partir. Nous essaierons cependant d'utiliser ce matériel, si pauvre soit-il, en nous intéressant d'ailleurs plus particulièrement à l'Italie cen trale qui est plus directement concernée par le colloque. *
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1 Voir Le miroir d'Hérodote, Paris, 1980. 2 Voir p. ex. FGH 555 F 2 = DH, I, 12, 3 : (Αντίοχος) έπειτα διεξελθών ôv τρόπον έπολιτεύοντο (à propos des Œnôtres). Cette description en tant que telle a disparu. Cela étant, on ne peut pas penser que les populations italiennes aient déjà à cette époque fait l'objet d'une enquête systématique (comme cela sera le cas au siècle suivant avec l'école aristotélicienne, au moins pour les Tyrrhenes). Des recueils de νόμιμα βαρβαρικά comme ceux de Damaste et d'Hellanicos (FGH 5 Τ 5 = Porph., ap. Eus., Praep. Ev., X, 3, 466 b) devaient concerner l'Orient.
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On doit déjà relever qu'au Ve siècle l'Italie n'est plus du tout une terra incognita. Des approximations comme celles qui étaient possibles lorsqu'à été rédigé l'appendice de la Théogonie, faisant régner Latinos (avec Agrios) sur « tous les Tyrrhenes » et localisant ces Latins ou Étrus quesindistincts «bien loin au fond des îles divines», n'ont plus cours3. La péninsule, y compris dans la partie qui n'est pas sous le contrôle des Grecs, est bien connue, et se voit décrite d'une manière satisfaisante. Si on essaie de se faire une idée, d'après les fragments subsistants (sur tout à partir d'Etienne de Byzance), de la façon dont Hécatée présentait la péninsule, on aboutit à une description à peu près complète4, qui n'a rien à envier au Périple attribué à Scylax qui sera vraisemblable ment rédigé au siècle suivant (mais souvent avec une documentation recueillie dès cette époque)5. Certes il convient de nuancer quelque peu cette affirmation. Tout n'est pas également connu. Malgré l'intensité du commerce en direc tiondes emporta padans les confins du nord de l'Italie restent entourés d'obscurité : il suffit de citer l'allusion d'Hérodote aux «fleuves Alpis et Carpis, au nord du pays des Ombriens qui coulent vers le nord et se jettent dans le Danube»6. Ces vagues références aux Alpes ou aux Carpathes, l'imprécision de la localisation, montrent qu'on est en dehors de la zone de contact direct des grecs. Plus significatif, la péninsule elle-même comporte des zones inéga lement connues. Malgré le hasard dû aux aléas de la transmission, il peut être intéressant de relever que des 31 fragments de la Périégèse d'Hécatée qui concernent l'Italie plus de la moitié corresponde à des zones touchées par la colonisation grecque - 3 pour la Campanie, 6 pour Γ« Italie» au sens étroit, 8 pour la Sicile : il est clair que les Grecs s'intéressent surtout aux régions dans lesquelles ils se sont établis. Quant au reste des fragments, il est aussi à noter que seuls trois frag ments concernent le nord de la péninsule : et il s'agit alors de la Tosca ne et ses abords - et nous sommes à une période où le commerce grec y est intense - tandis que le dernier concerne Adria, un des grands cen3 Voir Th., 1012-7 (traduction de P. Mazon, éd. G. Budé, Paris, 1928). 4 Voir les fragments 59 à 90 des FGH; Étrurie et îles: F 59-60, Campanie: 61-2, Œnôtrie : 64-71, Sicile : 72-9, Italie au sens propre : 80-5, Iapygie et Peucétie : 86-9, Vénétie : 90. 5 Sur le Périple, nous pouvons renvoyer à A. Peretti, // periplo di Scilace, Pise, 1979. 6 Voir IV, 49.
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très du commerce padan7. À l'inverse on notera bien des blancs dans nôtres documentation (ce qui reste vrai si on ne se limite pas à Hécatée). Les peuples du centre de la péninsule, avec lesquels les Hellènes ne peuvent guère avoir de contacts directs, sont soit inconnus, soit fort mal connus8. Ainsi nulle référence n'est faite aux Sabins, pourtant si importants pour l'histoire ancienne de Rome9. Même les Ombriens, plusieurs fois cités, ne sont connus que d'une manière fort approximat ive. Nous avons relevé l'imprécision de la référence d'Hérodote à pro pos de l'Alpis et du Carpis. Et l'allusion de I, 94, à leur établissement en Toscane avant l'arrivée des Lydiens de Tyrrhènos ne permet pas de se les représenter autrement que comme un vague substrat originel de cette partie de l'Italie. Signe de ce relatif désintérêt, de cette marginalit é pour les Grecs, les Ombriens n'ont pas donné lieu à des elaborations légendaires comme celles concernant les Étrusques, les Vénètes, Rome ou les peuples méridionaux10. L'Italie est donc relativement bien perçue par les Grecs. Mais cette connaissance ne reste pas de l'ordre de la description générale, exté rieure. Les Hellènes connaissent assez bien l'Italie pour en donner une image relativement précise et exacte, en faire l'objet d'une véritable connaissance scientifique, compte tenu du moins des catégories de l'époque. Ainsi on sera sensible au souci de classement des réalités ethniques dont témoigne la littérature de cette époque. Il n'y a plus d'erreurs
7 Adria a peut-être même été à une certaine époque une véritable colonie des Grecs d'Egine (voir G. Colonna, / Greci di Adria, dans RSA, 4, 1974, p. 1-22). 8 Nous reviendrons sur le cas des populations sabelliques plus directement en contact avec les Grecs - Samnites, Campaniens et Lucaniens. Ils posent un problème spé cifique, qu'il convient de traiter à part. 9 On notera que les peuples du Picénum, qui semblent pourtant s'être eux-mêmes définis comme Sabins (ainsi que l'ont montré les inscriptions de Penna Sant'Andrea, voir A. Marinetti, Le iscrizioni sud-picene, I, Florence, 1985, p. 32-46) sont désignés comme ombriens dans le Périple de Scylax (15). Pour cette zone relativement en marge des contacts avec la Grèce (malgré les trouvailles de Numana), du moins avant l'établiss ement des Syracusains à Ancóne (sur lequel nous paraît toujours valable L. Braccesi, Gre cita adriatica, Bologne, 1971, p. 119-26), on se contente d'un concept générique et on n'use pas de la désignation précise que se donnent les indigènes. 10 Les Ombriens ne commencent à jouer un rôle important dans les représentations des Grecs qu'après la période qui nous concerne, avec Philistos - signe de l'élargissement des intérêts helléniques dans ce secteur (voir Les Pélasges en Italie, Rome, 1984, spec, p. 44-53).
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grossières à nos yeux - du genre de la confusions Latins/Tyrrhènes de la fin de la Théogonie : dans les passages où il est question de Rome celle-ci est considérée comme une entité autonome et est assurément distinguée de l'Étrurie11. Au reste la politique d'appui dont témoignent les aides en céréales envoyées de Sicile à Rome montrent que, dès l'épo quede Gélon, les Grecs siciliotes connaissaient la place spécifique de Rome 12, qui n'était pas purement et simplement une polis Tyrrhènis 13. Et il est clair que pour les Cuméens ces Latins qu'Aristodème venait appuyer contre l'armée de Porsenna ne pouvaient être confondus avec des Étrusques14. Les distinctions nécessaires sont faites. Inversement il est procédé à des regroupements selon les similitudes constatées entre tel ou tel groupe. Le concept d'Ausones semble ainsi avoir reçu une valeur géné rale : il se voit appliqué aussi bien aux Opiques de Campanie, ceux qu'Antiochos connaît «autour du cratère»15, qu'aux populations plus au Nord, dans la zone où les Romains connaîtront des Aurunci16, ou au substrat originel de la Pouille, dans le territoire sur lequel s'établiront les Iapyges à leur arrivée d'outre Adriatique17. Mais c'est surtout le 11 Que ce soit chez Hellanicos et Damaste de Sigée (FGH 4F84 = 5F3 = DH, I, 72, 2) ou chez Antiochos (FGH 555 F 6 = DH, I, 73, 3). 12 Voir Liv., II, 34, DH, VII, 12 (pour 492/1), Liv., IV, 25, 4 (pour 433), IV, 52 (pour 411 ; mais voir pour ce cas J. Bayet, éd. G. Budé, Paris, 1946, p. 115-6, et R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy, Oxford, 1960, p. 614). Sur ces différents récits, D. Musti, Tendenze nella storiografia romana e greca su Roma arcaica, Rome, 1970, p. 121-39; sur l'importan ce de cette politique, p. ex. G. Colonna, La Sicilia e il Tirreno nel V e IV secolo, dans Kôkalos, 26-7, 1980-1, p. 167. 13 Nous serions cependant réticent à voir dans le fragment d'Antiochos relatif à Sikélos (FGH 555 F 6) un reflet direct de cette situation (voir E. Manni, La fondazione di Roma secondo Antioco, Alcimo e Callia, dans Kôkalos, 9, 1965, p. 252-68). 14 Pour la bataille d'Aricie les sources sont Liv., II, 14 et surtout DH, VII, 5-6 - dont le récit se fonde (que ce soit ou non à travers Timée) sur une documentation cuméenne dont p. ex. A. Alföldi, Early Rome and the Latins, Ann Arbor, 1964, a montré la relative fiabilité. 15 FGH 555 F 7 = Str., V, 4, 3 (242); d'où Arstt., Poi, VII, 9. 16 Voir Str., V, 3, 2 (232-3) (avec l'idée d'une éviction par les Osques qui rappelle la distinction Opiques/Osques de Str., V, 4, 3 (242), sur laquelle Les Pélasges en Italie, p. 5546), Ps. Scymn., 229-30 (avec l'éponyme Auson, fils d'Ulysse et de Calypso; la documentat ion sur laquelle se fonde ce passage peut être ancienne : l'auteur paraît avoir suivi Éphore). 17 Voir Ant. Lib., 31 (d'après Nicandre, sans doute du IIe siècle). En fait l'idée paraît ancienne : dans sa présentation du passage des Sicules en Sicile Hellanicos fait état d'une opposition Ausones/Iapyges (les Sicules seraient des Ausones chassés par les Iapyges; cf.
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concept d'Œnôtres qui est utilisé pour rendre compte de ce qui est per çucomme une communauté ethnique de divers peuples d'Italie du Sud. La succession d'éponymes par laquelle Antiochos explique l'existence des Itales, Morgètes et Sicules en Italie méridionale, puis (pour les deux derniers) en Sicile, en fait des Œnôtres18. De même, au Nord de l'Italie propre, dans la région de Siris, sont connus des Chônes : eux aussi sont considérés comme Œnôtres19. Ces apparentements de populations sont exprimés par des procé dés qui pour nous sont des constructions artificielles. Chez Antiochos la formation des peuples se voit exprimée par le procédé de l'éponymie, la succession d'Italos, Morgès, Sicèlos servant à rendre compte de l'ap parition des peuples correspondants, selon un procédé cher à des for mes encore très primitives d'histoire, telles celles qui sous-tendent en core au Ve siècle les Généalogies de Phérécyde. Mais on peut déjà noter que cela implique le refus de certaines explications encore plus évanescentes, comme ces mythes dont Hécatée voulait débarrasser l'histoire20. Italos permet d'éviter l'explication, en core retenue par Hellanicos, du nom de l'Italie par Héraclès et les bœufs de Géryon21. Et par ailleurs cette présentation, toute artificiellement personnalisée qu'elle soit, doit correspondre à la perception de données authentiques. La référence à la venue de Sicélos de Rome dénote assuré mentla connaissance dès cette époque du rôle des Sicules dans le passé du Latium22. Et le cadre éponymique sert ici, sans plus, comme l'a bien FGH 4 F 79 b = DH, I, 22, 3). Sur le récit d'Ant. Lib., voir D. Musti, // processo di forma zione . . . delle tradizioni greche sui Dauni, dans La civiltà dei Danni, Florence, 1980 (1984), p. 93-111. 18 FGH 555 F 2 = DH, I, 12, 3, F 5 = DH, I, 35, 1. Voir en particulier la formule «ούτω δέ Σικελοί και Μόργητες έγένοντο και Ίταλίητες εοντες Οίνωτροι». Étant donné que ces peuples se différencient dans le temps des Œnôtres (et dans le cas des Sicules il est fait état expressément d'une scission), il n'y a pas absolument de contradiction entre cette formulation et le fait que ceux qui contraignent Sicules et Morgètes à passer en Sicile soient définis comme Œnôtres (F 4 = DH, I, 22, 5; cf. Str., VI, 1, 6 (257-8), parlant des seuls Œnôtres). 19 Cf. FGH 555 F 3 a = Str., VI, 1,4 (255), d'où Arstt., Poi. VII, 9, F 3 b = St. Byz., s.v. Χώνη. 20 Voir la proclamation de FGH 1 F 1 a = Demetr., Deci., 12. 21 Voir FGH 4 F 111 = DH, I, 35, 2. On peut penser avec F. Jacoby qu'Hellanicos a repris une tradition plus ancienne. 22 Voir FGH 4 F 2 = DH, I, 12, 3, F 6 = DH, I, 73, 3. Cela n'a rien d'étonnant étant donné p. ex. les liens établis entre Latins et Grecs de Cumes à l'époque d'Aristodème, ou le soutien à Rome des tyrans de Sicile lors de disettes.
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montré E. Manni, à poser un des problèmes de base sur lesquels s'est interrogé l'historiographie grecque de l'Italie : la question de l'établiss ement en Sicile des Sicules. Il est clair que les diverses solutions présent ées23- dont E. Manni a souligné qu'elles pouvaient se fonder, notam mentau niveau chronologique, sur des traditions locales24 - sont autant de manières de résoudre le problème en faisant appel aux diverses notions ethniques connues pour le Sud de la péninsule et l'île25. Par ailleurs, compte tenu justement des catégories qui sont celles des Grecs de cette époque, ces récits - pour nous de pures légendes -, qui constituent la quasi-totalité de ce qui nous est dit de la réalité indi gène, peuvent être de bons révélateurs pour saisir la manière dont les Hellènes appréhendent ce monde local. Prenons un personnage comme celui d'Italos, tel que le présente Antiochos (dont on peut assez vraisemblablement penser que procède Aristote)26. Ce roi27 fait figure de héros civilisateur, et inaugure ainsi,
23 Pour Antiochos les Sicules et Morgètes sont chassés par les Œnôtres et Opiques (F 4, F 9; pour les différences entre les deux fragments et la question de la chronologie de l'événement, E. Manni, Sicelo e l'origine dei Siculi, dans Kôkalos, 3, 1957, p. 156-74); Hellanicos, FGH 4 F 79 b = DH, I, 22, 3, fait intervenir aussi les Élymes, chassés par les Œnôtres, et fait des Sicules des Ausones chassés par les Iapyges; Thucydide (VI, 2, 4-5, et ap. DH, I, 22, 5) pose les Opiques comme adversaires des Sicules qui les contraignent au départ. 24 Pour une étude plus précise, nous renvoyons à l'article cité à n. 23. 25 Comme l'ont noté E. Wikén, Die Kunde der Hellenen von der Appeninenhalbinsel, Lund, 1937, p. 81-2, et G. Colonna, RSA, 4, p. 21, η. 33, il est probable que le renouvelle ment de la question par Philistos (FGH 556 F 46 = DH, I, 22, 4) au siècle suivant repré sente un élargissement de la problématique à l'Adriatique (où sont connus d'autres Sicul es), dû aux horizons nouveaux qui s'offrent alors à Syracuse et à ses historiens. Voir Les Pélasges, p. 45-53. 26 Voir FGH 555 F 5 = DH, I, 35, 1. Denys ne décrit que l'extension territoriale du pouvoir de ce roi. Mais il mentionne sa sagesse (αγαθόν και σοφον γεγημένον) ainsi que sa capacité à user à l'égard de ses voisins de persuasion et non seulement de force (λόγοις/βία) - aspects que son récit n'explicite pas. On sera donc enclin à rapporter à Anti ochos ce qui figure chez Arstt., Pol., VII, 9 (τούτον δέ λέγουσι τον "Ιταλόν νομάδας τους Οίνωτρούς όντας πονήσαι γεωργούς και νόμους άλλους τε αύτοΐς θέσθαι και τα συσσίτια καταστήσαι πρώτον · διό και νυν ετι των άπ' εκείνου τινές χρώνται τοις συσσιτίοις και των νομών ένίοις). On peut donc admettre que pour l'historien sicilien il a été une sorte de héros civil isateur. 27 Qu'il soit qualifié de roi (ainsi que Morgès et Sicèlos) ne permet de rien inférer quant à la réalité politique indigène. On a sans plus ici l'idée très générale (p. ex. Thuc, I, 13, 1) que le régime politique primitif a été la royauté.
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en tant que premier souverain mentionné dans l'histoire des Œnôtres28, l'histoire des peuples italiens. Selon un topos des représentations helléniques, c'est lui qui marque le passage à un stade civilisé, en fai sant accéder son peuple à l'état sédentaire et non plus nomade, en lui faisant pratiquer l'agriculture et concomitamment en lui donnant des lois. On voit qu'à travers cette figure légendaire les Grecs expriment une perception du monde indigène de l'Italie qui lui reconnaît un type de développement culturel et matériel qui n'est pas très différent du leur. Ces Italiens ne sont pas de barbares en dehors de toute norme comme les Scythes d'Hérodote! Ils sont susceptibles d'offrir des points de contact avec le monde grec : on notera la remarque d'Aristote sur l'existence chez eux de syssities, qui renvoie aux faits Spartiates ou crétois29. On constate donc chez ces indigènes italiens une certaine com munauté avec ce qui existe dans l'hellénisme : ils ne sauraient représent er l'irréductible altérité, telle que F. Hartog l'a décrite pour les peuples nomades dans la représentation d'Hérodote30. Si les Grecs sont enclins à leur reconnaître un développement com parable au leur propre, s'ensuit-il qu'ils estiment que ces indigènes soient totalement mis sur le même plan qu'eux? Ce n'est sans doute pas le cas, et il faut tenir compte, pour rendre compte à la fois d'une certai ne similitude et de la différence persistante, d'une remarque de Thucyd ide,qui paraît exprimer une conviction générale, que le degré de civi lisation actuel des barbares correspond à un stade dépassé dans le monde grec31. Et c'est ce qu'exprime bien une tradition comme celle, rapportée par Phérécyde, qui fait des deux éponymes des Œnôtres et des Peucétiens, soit des deux groupes de populations avec lesquels les Grecs sont en contact en Italie du Sud, sur le versant tyrrhénien et le
28 De ce qu'Œnôtros existe en tant que tel chez Phérécyde (FGH 3 F 156 = DH, I, 13, 1) n'autorise pas à poser son existence chez Antiochos. 29 Pour cette époque on n'est pas autorisé à conclure à une affirmation de parenté entre indigènes et Lacédémoniens (telle celle qui apparaît chez Just., XX, 1, tributaire sans doute de Théopompe, pour les Brettiens et Samnites). On n'a alors aucune trace de l'existence de telles elaborations. 30 Voir n. 1. 31 L'historien exprime le jugement en sens inverse, pour rendre compte de ce qu'il rencontre dans l'histoire ancienne de son pays (I, 3, 3 : πολλά δ" αν καί άλλα τις άποδείξειε το παλαιον Έλληνικον ομοιότροπα των νυν βαρβάρων διαιτωμένων).
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versant adriatique, deux fils de Lycaon32. Certes dans cette tradition il peut y avoir un aspect spécifiquement athénien : au moment où les intérêts de la cité se tournent vers l'Italie, et où par ailleurs le mythe pélasgique et par là arcadien est mis au service de la politique de Périclès - comme l'a bien noté E. Luppino33 -, cette définition rattachant les éponymes des peuples d'Italie du Sud au fils de Pélasgos rentre dans le cadre de la propagande athénienne. Mais cela exprime égale ment, comme l'ont souligné B. D'Agostino et D. Musti34, une perception spécifique de la réalité italienne : elle correspond au stade « arcadien » pour la Grèce, soit à un état encore relativement embryonnaire du développement de la civilisation. Il est cependant malaisé de cerner exactement la portée de ce rap prochement. Faut-il en conclure que, pour reprendre là encore une dis tinction de Thucydide, les Italiens seraient caractérisés, par rapport aux Grecs, par un degré de civilisation où n'existent pas encore de véri tables cités, où on vit «par bourgades»35. La réponse ne peut être que nuancée. Il est probable en effet que pour certaines zones de l'Italie indigène les Hellènes estimaient qu'elles ne connaissaient pas encore de véritables cités, mais se caractérisaient encore par un type de culture arriéré - celui des «bourgades dépourvues de murailles». Ce devait être le cas notamment pour les secteurs les plus directement visés par la présentation de Phérécyde, soit les arrière-pays indigènes des zones de colonisation grecque dans le sud de l'Italie. Mais il est clair que les Grecs connaissaient également en Italie,
32 Voir FGH 3 F 156 = DH, I, 13, 1. Sur la légende donnant à Lycaon pour fils les trois frères Iapyx, Daunos, Peucétios, voir n. 17. Son élaboration doit être postérieure à notre période (voir D. Musti, art. cité). 33 Voir I Pelasgi e la propaganda politica del V secolo, CISA, 1, 1972, p. 71-7 et pour les aspects occidentaux G. Colonna, dans Gli Etruschi e Roma, Rome, 1979 (1981), p. 84-5, et Les Pélasges en Italie, p. ex. p. 208-10. 34 Voir respectivement Popoli e civiltà dell'Italia antica, II, Rome, 1974, p. 228-31, et art. cité à η.17, p. 100. Les faits religieux notés par J. Bayet dans son article classique, Les origines de l'arcadisme romain, dans MEFR, 38, 1920, p. 63-143, ne peuvent représenter qu'une explication partielle. 35 Cf. Thuc, I, 5, 1 : πολέσιν άτειχίστοις καί κατά κώμας οίκουμέναις. On trouve une utilisation de cette distinction de deux stades successifs dans le déve loppement de la civilisation intégrée dans un cadre indigène dans la tradition (postérieu re à notre période, au moins sous cette forme qui fait intervenir un rapprochement avec la Grèce) rapportée par Str., V, 4, 12 (250) sur l'origine des Samnites, s'établissant sur le territoire des Opiques.
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dans des zones plus développées, de véritables cités indigènes, compar ables à leurs propres poleis, structurées matériellement d'une manière comparable. Ainsi pour parler de l'aide apportée par certains Étrus ques à l'expédition athénienne en Sicile, Thucydide parle de poleis menant en l'occurrence leur propre politique36. Les légendes faisant appel à des fondateurs helléniques pour telle ou telle cité indigène montrent bien que les Grecs qui ont véhiculé et sans doute imaginé ces légendes considéraient ces villes indigènes comme de vraies cités, exac tement comparables à celles que d'autres héros avaient fondées en Grè cepropre. Le terme de polis s'applique ainsi tout aussi bien à Rome chez Hellanicos et Damaste de Sigée37, qui racontent sa fondation par Énée à la suite de l'incendie de ses vaisseaux par les femmes troyennes qu'à Cortone où, selon Hellanicos, suivant sans doute Hécatée, va s'éta blir Nanas le Pélasge, fondateur du peuple étrusque38. Par ailleurs, sur un plan beaucoup plus concret, les Grecs savent parfaitement jouer de l'existence de ces cellules autonomes que sont les cités de l'Italie indigène, au même titre que celles de la Grèce. Nous avons déjà fait allusion à la politique de Cumes à l'époque d'Aristodème : elle s'appuie sur certaines cités latines, comme Aricie, mais se montre plutôt défavorable à Rome, ou du moins y soutient les préten tionsdes Tarquins alors que Rome les a chassés; par rapport à l'Étrurie, la guerre contre Porsenna n'empêche pas le tyran de s'allier aux Étrusques que sont les Tarquins - ni d'ailleurs ses adversaires de trou ver refuge auprès de la cité alors tyrrhénienne de Capoue39. Prenons aussi le cas de l'attaque syracusaine contre l'île d'Elbe en 453 : on a pu l'interpréter non comme une menée contre le nomen Etruscum dans son ensemble mais comme une opération visant à favoriser Populonia
36 Voir VI, 88. 37 Voir DH, I, 72, 2 = FGH 4 F 84, 5 F 3. 38 Voir FGH 4 F a = DH, I, 28, 4. Sur ce passage (et la question de la mention de la πόλις Cortone chez Hérodote en I, 57) voir Les Pélasges, p. 101-68. 39 Le scepticisme dont faisait preuve F. Schachermeyr, RE, IV A, 1931, c. 2389, à l'égard de la tradition faisant se retirer Tarquin à Cumes (Cic, Tusc, III, 12, 27, Liv., II, 21, 5, DH, VI, 21, 3, Aur. Vict., Vir. ill., 1, 4, ZoN., VII, 12 (356)) n'est certes plus de mise aujourd'hui. Dans la vaste bibliographie sur Aristodème, on peut citer M. Pallottino, // filoetruschismo di Aristodemo e la data della fondazione di Capua, dans PP, 1 1, 1956, p. 818, Α. Alföldi, o.e., p. 47 sq., 56 sq., E.Manni, A. di Cuma, detto di Malaco, dans Klearchos, 7, 1965, p. 71-4, G. Gianelli, La data e le conseguenze della battaglia di Ancia, dans Ricer che. . . in memoria di C. Barbagallo, Naples, 1970, p. 393-8.
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aux dépens des cités méridionales40. Les conditions de la politique it alienne n'étaient pas aussi différentes des leurs pour les Grecs que pou vaient l'être celles qu'ils pouvaient rencontrer en Orient, avec les états monarchiques de cette région : ils le savaient et étaient à même d'en user. Ansi, cas relativement rare dans le monde antique, surtout si on pense aux contrées du Nord de l'Europe ou aux types de civilisation, fort différents de leur monde des cités, que les Grecs connaissaient en Orient, les Hellènes se trouvaient en présence en Italie d'un type de civilisation qui, souvent, était assez proche du leur. En Italie, du moins dans les secteurs qui pouvaient apparaître comme les plus importants économiquement et politiquement, les Grecs rencontrent un «monde des cités» assez semblable au leur, mais qui n'est pas grec, qui reste barbare - ne serait-ce que par ce qui définit fondamentalement le bar bare, c'est-à-dire qu'il ne parle pas grec41. De là découle sans doute qu'il soit fait appel, si souvent, pour défi nirles populations indigènes de l'Italie, à ce que nous pouvons appeler les «concepts intermédiaires». Certes pour rendre compte de la réalité indigène, il est parfois fait appel à des Grecs véritables : il n'est pas besoin de rappeller ici toutes les traditions de voyage ou d'établiss ement de héros ou de peuples helléniques en Italie42. Au Ve siècle, com meavant ou après, de telles traditions existent. Mais on peut dire qu'el les ne sont pas vraiment caractéristiques : elles existent au fond partout et ne permettent pas de cerner une spécificité italienne. Il est donc probablement plus significatif que, pour l'Italie, il soit souvent recouru à des héros ou des peuples qui ne sont pas véritable-
40 Voir Diod., XI, 88, 4-5; sur la question G. Colonna, art. Kôkalos, 26-7, p. 169, et surtout dans L'Etruria mineraria, Florence, 1979 (1981), p. 446 sq. 41 Pour le caractère central de ce point dans la définition du barbare on pourra rap peler la description des Pélasges (y compris selon nous ceux de Toscane, donc les Étrus ques) telle qu'elle figure en Her., I, 57. M. Pallottino (Erodoto autoctonista?, dans SE, 20, 1946, p. 11-6) a bien montré que cette description reposait sur les observations - d'allure très scientifique - d'Hécatée. 42 II est d'ailleurs notable que ces traditions ne soient pas les plus vivantes en ce qui concerne les indigènes italiens. Ainsi la référence à Ulysse pour le Latium (quelque soit son rapport avec Enée qu'il faille poser dans le fragment d'Hellanicos cité à n. 37, d'éta blissement controversé sur ce point) ne paraît pas avoir eu l'importance de la légende d'Énée. Et généralement Ulysse, Jason ou Héraclès et les autres héros grecs de ce genre sont présentés comme des personnages qui sont simplement passés, sans vraiment servir à rendre compte de l'origine des populations locales.
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ment des Grecs, se situent en dehors du monde hellénique proprement dit, mais en même temps en sont suffisamment proches pour ne pas apparaître comme de purs barbares, comme ces Perses, Égyptiens ou Scythes dont l'hétérogénéité est soulignée par Hérodote. Le recours aux Lycaonides rentre dans une certaine mesure dans ce schéma43. Au moins sur un plan chronologique, par leur stade de développement qui peut apparaître archaïque, les Arcadiens représent ent une anomalie par rapport au reste de la Grèce, quelque chose qui se distingue du véritable hellénisme. Mais c'est bien sûr surtout avec des populations vraiment distinctes que le fait d'avoir recours, pour des Italiens, à des sortes d'intermédiaires entre hellénisme et barbarie, est le plus net. De telles références, sauvegardant à la fois l'indéniable aspect barbare de ces indigènes et leur proximité culturelle des Grecs, sont susceptibles de fournir une explication adéquate. On le constate avec les Étrusques. Les Pélasges, qui appartiennent peut-être au passé de la Grèce, mais qui, actuellement, en sont rejetés aux marges et sont définis, sur des bases scientifiques, par Hérodote (suivant Hécatée)44, comme des barbares, rendent bien compte de ce statut μετάξυ των 'Ελλήνων και των βαρβάρων des Étrusques : c'est ainsi qu'Hellanicos, sans doute Hécatée, et plus généralement les Étrusques de cette époque comme leurs alliés grecs définissent Vethnos tyrrhénien45. Mais il en va de même avec la nouvelle définition, lydienne, avancée par Hérodote : elle aussi se réfère à des barbares, et cette fois purement extérieurs à la Grèce, mais qui n'en restent pas moins pro ches d'eux46. On retrouve le phénomène pour d'autres secteurs de l'Italie, avec le recours à d'autres notions. Ainsi L. Braccesi a repris récemment l'étude de la mise en rapport des Vénètes de Vénétie et des Énètes d'Asie Mineure, alliés des Troyens dans l'Iliade, qu'Anténor aurait conduits dans cette région47. Il est clair qu'on a affaire à une légende du type qui nous occupe ici, où on réfère un peuple indigène d'Italie non à un véritable peuple grec, mais à un groupe qui, psychologiquement, gravi43 Voir n. 34. 44 Voir n. 41. 45 Sur la question, nous nous permettons de renvoyer à notre thèse, Les Pélasges en Italie. 46 Nous traitons en détail de cette question dans notre ouvrage L'origine lydienne des Étrusques, Rome, 1990. 47 Voir La leggenda di Antenore, Padoue, 1984, p. 45-66.
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te dans son univers, et peut donc sembler adapté à sa situation particul ière, de barbares liés aux Grecs. Il faut en effet souligner que le déve loppement de cette légende - attestée pour nous à partir de Sophocle 48 est tributaire de l'essor du commerce grec, et plus précisément attique, dans cette zone, au Ve siècle - spécialement à Adria, porte de la Vénétie. On peut faire les mêmes remarques pour un autre centre de déve loppement de cette légende troyenne, dont le cas d'Anténor et de ses compagnons énètes fournit déjà une illustration : la région de Siris. On sait que la référence à une fondation troyenne (qui se superpose dans cette zone à la légende de Philoctète) est attestée à partir d'Aristote, mais que celui-ci doit suivre une tradition athénienne du siècle précé dent49. C'est en effet dans le cadre de la politique athénienne, ici encor e,marquée en particulier par la fondation de Thourioi à l'époque de Périclès50, que s'est propagée cette légende. Ici comme en Vénétie elle correspond à l'image des populations indigènes. Il est probable que la référence aux Chônes, rapprochés des Chaones d'Illyrie chez qui a éga lement existé une légende troyenne, a joué un rôle dans cette élaborat ion51.En tous cas, une fois de plus, les Troyens, ces adversaires des Grecs mais qui occupent une telle place dans la culture hellénique, ser vent à rendre compte de l'entité indigène, reconnue comme proche des Grecs sans être vraiment hellénique. Le cas le plus célèbre52 de recours à la référence troyenne est bien 48 Voir fr. 373 Ρ = DH, I, 48, 2. 49 Voir Arstt. (et Tim.) αρ. Ara., XII, 523; également Ps. Arstt., Mir. ause. 106, Lyc, 978-92, avec schol. ad 978, 984, 989, Str., VI, 1, 14 (264). Pour l'ensemble des données J. Bérard, Histoire de la colonisation grecque . . ., Paris, 1941, p. 202-8, 366-8 (avec juste insistance sur le rôle du culte d'Athéna Ilias). Sur le thème de la ville «semblable à Ilion» (Lyc, 984), D. Musti, Una città simile a Troia, Siri e Lavinio, dans Arch. Class., 33, 1981, p. 1-26. 50 Mais l'intérêt athénien pour cette région remonte à l'époque de Thémistocle lequel aurait donné à ses deux filles les noms de Sybaris et Italia (voir Her., VIII, 62, 2, et sur la question S. Mazzarino, // pensiero storico classico, Bari, 1966, I, p. 199 sq.). 51 Sur ce point p. ex. J. Bérard, o.e., p. 376, 463-4, G. Pugliese Carratelli, dans Temesa e il suo territorio, dir. G. Maddoli, Tarente, 1982, p. 11 sq.; plus réservé, D. Musti, art. cité, p. 12 (qui insiste cependant sur la place des Chônes dans le développement de la légende troyenne). 52 Nous laisserons de côté ici le cas de Ségeste et des Élymes, pour lequel la légende troyenne est affirmée dès Thucydide (VI, 2, 3) et dont le lien avec l'alliance conclue avec Athènes est patent. Il sort de l'aire géographique que nous prenons en considération : mais il conduirait bien évidemment aux mêmes conclusions.
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sûr celui de Rome. Cette légende est bien attestée pour le Ve siècle par Damaste de Sigée et Hellanicos53. On retrouve le même cadre de déve loppement que précédemment : que Rome ait été intéressée dans une certaine mesure par les projets occidentaux d'Athènes (dont on sait qu'ils ont commencé bien avant Périclès, dès l'époque de Thémistocle)54 peut être illustré par des faits comme la tradition - qui n'est pas nécessairement dénuée de tout fondement - d'une influence d'Athènes sur la codification des lois romaines au milieu du Ve siècle ou celle relative à l'érection, plus tard, d'une statue d'Alcibiade sur le Comitium55. En tous cas, là encore, on n'utilise pas une légende purement grecque pour rendre compte de la réalité romaine. S'il est (peut-être) encore fait allusion à Ulysse à côté d'Énée56, c'est avant tout le héros troyen ainsi que les femmes troyennes qui interviennent57. Comme les Pélasges, Lydiens ou Énètes, les Troyens constituent un de ces «ponts» entre mondes grec et barbare58 : la question a été suffisamment étu diée pour qu'il ne soit pas nécessaire d'insister sur ce point. Ainsi donc les Grecs ont pu, par le recours à ces « concepts interméd iaires», rendre compte de l'impression qu'ils ressentaient face à une réalité italienne dont ils sentaient, par delà sa nature «barbare», qu'elle se rapprochait de leur propre civilisation. Cependant il ne faudrait pas croire que les Grecs s'en sont tenus à cette constatation objective, et que cela exprime de leur part un jugement définitif et universellement admis sur les peuples italiens. Il faut bien évidemment tenir compte de la diversité de leurs points de vue, laquelle est souvent le reflet des
53 Voir FGH 4 F 84, 5 F 3 = DH, I, 72, 2. On sait que S. Mazzarino, o.e., p. 203 sq., a souligné le rôle de Damaste de Sigée, originaire de Troade, dans le développement de la légende. Mais le rapport chronologique entre les deux auteurs n'est pas parfaitement clair (témoignages contradictoires dans FGH 5 Τ 4 = Agathem., Gr. inf., 5, et Τ 5 = Porph., ap. Eus., Praep. Ev., X, 3, 466 b). 54 Voir n. 50. Pour Périclès, outre bien sûr la fondation de Thourioi, on rappellera l'intervention à Naples attestée par Timée, FGH 566 F 98 (parlant de Diotimos, stratège de 439 à 432) et Str., V, 4, 6 (246). 55 Voir respectivement Liv., III, 31, 8, Pl., XXXIV, 26, et Plut., Num., 8, 12. 56 II n'est pas besoin ici de discuter la question controversée du μετ 'Οδυσσέως ou Οδυσσέα du passage de Denys. 57 On notera sur ce point la différence avec la version d'Aristote, qui reprend le topos de l'incendie des vaisseaux grecs par leurs captives troyennes (DH, I, 72, 3). 58 Voir p. ex. la formule de G. K. Galinsky, Aeneas, Sicily and Rome, Princeton, 1969, p. 96 (reprise par L. Braccesi, o.e., p. 60) : «les Troyens n'étaient ni tout à fait identiques aux Grecs, ni tout à fait différents d'eux».
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positions divergentes des différentes cités grecques à l'égard des indigè nes de l'Italie. Ceux-ci sont pris dans des faisceaux d'intérêt divergents, jouent parfois un rôle actif dans les luttes opposant les Grecs les uns aux autres, s'opposent aussi quelquefois directement aux Grecs ou du moins à tels ou tels d'entre eux. Dans ces conditions on ne s'étonnera pas de voir, en pratique, une grande diversité dans le jugement des Grecs à l'égard des indigènes italiens - diversité derrière laquelle on retrouve les vicissitudes du temps. On ne s'étonnera donc pas que, face à cette vision somme toute assimilatrice des Italiens - nonobstant leur appartenance au monde barbare - que nous avons soulignée, se ren contrent des positions accentuant en quelque sorte leur caractère bar bare. Il est clair que le rapprochement des indigènes avec la Grèce, par le biais de ces para-Hellènes que sont les Pélasges ou les Troyens (voire les Lycaonides), est le fait de Grecs qui ont des intérêts communs avec eux, ont des contacts commerciaux ou politiques, le cas échéant recher chentleur appui. Au Ve siècle c'est surtout le cas d'Athènes. Nous avons déjà souligné le fait dans le cas de la légende pélasgique, qui a dû servir à légitimer l'alliance conclue lors de l'expédition de Sicile59. Et nous venons de le rappeler pour la référence troyenne, qu'elle s'exerce visà-vis des Vénètes, du Latium, des Chônes ou des Élymes de Sicile60. Par ailleurs il apparaît parfois que de telles ascendances, les rappro chantdes Grecs, ont été mises en œuvre par les indigènes eux-mêmes, désireux de rehausser ainsi leur image aux yeux des Hellènes : nous l'avons souligné à propos de la légende pélasgique, qui a été utilisée par les Étrusques en relation avec la politique delphique de certaines cités61. Mais la contrepartie négative existe. Elle est, naturellement, le fait de Grecs qui s'opposent à ces indigènes, et insistent donc sur leur côté barbare. Ces Grecs sont de ce fait enclins à récuser de tels rapproche ments : nous avons eu l'occasion d'étudier la manière dont les Syracusains, à l'époque où leur cité s'opposait activement aux Étrusques c'est-à-dire clairement à l'époque de Denys mais sans doute déjà avant,
59 Voir Les Pélasges, p. 208-10, 256-9. 60 Nous pouvons rappeler (outre p. ex. S. Mazzarino, o.e., I, p. 203 sq.) les bonnes remarques à ce sujet de J. Perret, Athènes et les légendes troyennes d'Occident, dans Mélanges J. Heurgon, Rome, 1976, p. 791-803. 61 Voir Les Pélasges, p. 17-22, 214-21.
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comme lors de l'expédition athénienne en Sicile -, se sont portés en faux contre la définition pélasgique (ou lydienne) des Étrusques62. Sur un plan plus général, à propos justement de ces Étrusques, on peut cerner, à côté d'une vision plus positive, qui est le fait principale ment des Athéniens, d'une image négative, qui met en avant des traits barbares (qui souvent seront repris et amplifiés ultérieurement) : l'or igine syracusaine en est souvent décelable. Si les sources dont nous disposons ne parlent pas encore au Ve siè cle à propos des Tyrrhenes de leur tryphè - motif qui aura le succès que l'on sait par la suite -63, on trouve celui de la cruauté étrusque qui avait déjà eu des précédents avec la question de la lapidation des prisonniers phocéens après Alalia64 et qui sera développé par le frag ment d'Aristote sur le supplice infligé à leurs captifs par les pirates étrusques, avant de se voir repris par la tradition romaine, avec Virgile, pour Mézence65. Le motif apparaît au Ve siècle sous la forme spécifi que du recours au sacrifice humain à l'encontre d'un Grec prisonnier motif qui lui aussi aura une postérité (quelle que soit par ailleurs la réalité de la pratique qu'il peut recouvrir)66. C'est en effet le mérite de G. Colonna d'avoir attiré l'attention sur une série de textes relatifs au comportement des Étrusques lors d'une prise de Lipari67, et d'avoir situé cet événement au début du Ve siècle, en liaison avec la politique
62 Outre Les Pélasges, en part. p. 45-53, 105-204, nous avons abordé la question dans Denys d'Halicarnasse et l'autochtonie des Étrusques, REL, 61, 1984, p. 55-86. 63 Sur ce thème, A. Passerini, RIFC, 11, 1934, p. 35-56, J. Heurgon, La vie quotidienne chez les Étrusques, Paris, 1961, p. 47-9, W. V. Harris, Rome in Etruria and Umbria, Oxford, 1970, p. 14-5. On peut peut-être retrouver la trace du motif au niveau de Philistos {Les Pélasges, p. 50). 64 On a la preuve du ressentiment ressenti par les victimes dans le comportement de Dionysios de Phocée après 494 (Her., VI, 17). Mais on notera la relative modération du récit d'Hérodote (I, 167). 65 Voir Arstt., ap. Cic, fr. 90 Baiter; Verg., Aen., VIII, 483-8, avec Serv., ad 479; Iul. Capit., Vita Macr., 12. 66 II suffit de rappeler le cas des prisonniers romains mis à mort sur le forum de Tarquinia en 357, à une époque voisine de celle où le sacrifice des prisonniers troyens aux mânes de Patrocle est représenté sur les fresques de la tombe François (Liv., VII, 15-9; l'emploi du verbe immolare montre qu'on a affaire à un véritable sacrifice, malgré les réserves de A. J. Pfiffig, Religio Etrusco, Graz, 1979, p. 110-1). 67 Voir Apollon, les Étrusques et Lipara, dans MEFRA, 1984, 96, p. 557-78; les textes sont Callim., fr. 93 Pfeiffer, Ον., Ibis, 465-6, avec schol. ad loc, citant Cornelius Gallus, Tzets., ChiL, VIII, 889-92.
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de Hiéron68. On retrouve donc Syracuse : ce sera probablement, autant que les Liparéens eux-mêmes, les Syracusains qui auront développé ce thème de la cruauté étrusque, dont la trace nous est parvenue en l'o ccurrence à travers Ovide et Cornelius Gallus69. De même l'accusation de piraterie, qui deviendra par la suite un topos de l'image des Étrusques (après avoir été attaché à celle des Tyr rhenes de l'Egée)70, se rencontre déjà dans cette présentation négative du Ve siècle. Les Liparéens, s'attaquant à la marine étrusque, mettent en avant ce motif71. Il justifie aussi la fortification du détroit par Anaxilas, sans doute sous la pression de Syracuse, après Himère72. Il servira encore lors des expéditions lancées par Syracuse contre le «district minier» étrusque en 453 73. Une fois de plus, on ne s'étonnera pas de voir Syracuse derrière cette présentation. On voit ainsi, à propos des Étrusques tels que les présentent en particulier les Syracusains, se tracer un portrait négatif de l'indigène italien, aux antipodes de cette semi-assimilation aux Grecs que nous avons examinée. Les bases sont dès lors posées pour une opposition radicale entre Hellènes et indigènes, une affirmation de l'incompatibilit é absolue entre l'hellénisme et la barbarie de ceux-ci. Effectivement une telle opposition, à base ethnique, entre le Grec et le barbare, se rencontre dans le cas de l'Italie du Ve siècle. C'est déjà
68 Le nom de Hiéron apparaît chez Tzetz., o.e., 892 : il aurait mis fin à la pratique du sacrifice humain chez les Étrusques. La mise en relation de ce passage avec les autres, proposée par G. Colonna (à l'encontre de K. O. Müller, W. Deecke, Die Etrusker2, Stutt gart, 1877, 1, p. 188, n. 35, A. J. Pfiffig, I.e., qui pensaient à une confusion entre Étrusques et Carthaginois) apparaît convaincante. 69 Cf. Ον., o.e., 466 : saevo hoste necem, Corn. Gall. : quamvis/nequaquam sit homo victima grata deo. 70 Sur la question nous pouvons renvoyer aux bonnes études qui sont parues récem mentsur la piraterie étrusque : M. Cristofani, Gli Etruschi del mare, Milan, 1983, p. 65 sq., M. GuFFRiDA Ientile, La pirateria tirrenica, Rome, 1983, p. 77 sq.; pour les Tyrrhenes de l'Egée, aussi M. Gras, Trafics tyrrhéniens archaïques, Rome, 1985, p. 583-701. 71 Sur les victoires des Liparéens contre les Étrusques, Diod., V, 9, Str. VI, 2, 10 (276), Paus., Χ, 11, 3, 16, 7; inscriptions de Delphes dans Syll.3, 1, 14 (et F. Courby, Fouilles de Delphes, II, Paris, 1927, p. 152-3) et J.Bousquet, REA, 45, 1943, p. 40-8 (et BCH, 78, 1954, p. 431-2), sur lesquelles L. Rota, Gli ex-voto dei Liparesi a Delfi, dans SE, 41, 1973, p. 143-8. La mention de la piraterie figure chez Diodore (των Τυρρηνών ληστευόντων). 72 Str., VI, 1, 5 (257) : ... έτείχισε τοις Τυρρηνοίς . . . και άφείλετο τους ληστας τον δια του Πορθμού διάπλουν. Sur la question, M. Giuffrida Ientile, o.e., p. 66, n. 18, G. Colonna, art. cité, p. 560. 73 Diod., XI, 88, 4 : κατά δε τήν Σικελίαν Τυρρηνών ληζομένων.
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celle que met en œuvre, dans les faits, Dionysios de Phocée, dans la «guerre privée» qu'il s'en vient mener dans les eaux occidentales une fois chassé de l'Egée par la répression de la révolte ionienne et la défai te de Phocée : il n'attaque pas les vaisseaux grecs, mais seulement les étrusques ou carthaginois74. Mais c'est surtout elle qui sous-tend les développements de Pindare à la gloire de Hiéron de Syracuse après sa victoire sur les Étrusques dans les eaux de Cumes75. Le tyran, écrasant Yhybris tyrrhénienne à Cumes, après avoir vaincu - avec Gélon et Théron - les Carthaginois à Himère, se hausse à l'égal des vainqueurs des luttes entre Grecs et Perses - Athéniens à Salamine, Spartiates à Pla tées : la victoire du Syracusain contre l'Étrusque (et le Punique) est exactement comparable à celles remportées en Orient sur le barbare perse, c'est un triomphe de l'hellénisme sur la barbarie. Et cette victoi re, comme celles remportées sur le Perse, constitue une libération de la Grèce de l'esclavage - bareia/doulia -76 tandis que l'Étrusque, au même titre que le Grand Roi, se voit caractérisé par son hybris. Cependant il ne convient pas - à notre avis du moins - de suréval uer,pour cette époque, la portée de telles affirmations, fussent-elles exprimées par un Pindare. Elles semblent appartenir davantage à la propagande qu'à une perception réelle des choses. Elles ne nous parais sent pas vraiment témoigner d'un état d'esprit grec hostile en face du monde indigène, se contentant d'y voir pure barbarie. Il convient en effet de ramener à leur juste place les accusa tionsportées envers les Étrusques. Le grief de piraterie peut aussi bien être porté à l'encontre des Liparéens77 ou de Dionysios de
74 Her., VI, 17. Sur la question, G. Colonna, Kôkalos, 26-7, p. 168-9, M. Cristofani, o.e., p. 81, M. GiufFRiDA Ientile, o.e., p. 65. La question de la base de Dionysios (Lipari ou Syracuse) ne nous importe pas directement ici. 75 Cf. Pyth., VI, 72-80; sur ces événements, Diod., XI, 51. On sait qu'ont été découv erts à Olympie deux casques dédiés par Hiéron après cette victoire (voir IG, 510). Pour une trace dans le monnayage de Syracuse, voir Lenschau, RE, VIII, 1912, c. 1499. 76 Le thème apparaîtra aussi dans le réfection du IVe siècle de l'ex-voto en calcaire des Liparéens à Delphes (F.Bourguet, Fouilles de Delphes, II, p. 352 : έλ[όντες έξός δθ]λοσινάς). 77 La piraterie est présentée comme une institution nationale des Liparéens dans la tradition romaine sur le vol du cratère d'or envoyé à Delphes après la prise de Véies (Liv., V, 28; Diod., XIV, 93; Val. Max., I, 4; mais le Grec Plutarque, Cam., 8, 5, soutient que les Liparéens ont pris le vaisseau parce qu'ils l'ont confondu avec un navire pira te . . .).
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Phocée78. On a souligné avec raison que les attaques contre Lipari étaient le fait d'escadres, donc rentraient dans le cadre d'une polit iquede « thalassocratie » organisée, non dans celui d'une piraterie qui en fait est plutôt le fait de ces Grecs79. Certes il a pu exister une sorte de piraterie étrusque - telle celle que G. Colonna envisage de la part des cités étrusques du Sud à l'encontre des navires syracusains voulant s'approvisionner en fer de l'île d'Elbe, justifiant ainsi l'intervention de 453 80. Mais même alors les nécessités de la police des mers ne suffisent pas à expliquer une action qui a des implica tions beaucoup plus amples81. Derrière ces développements (comme derrière la question de la fortification du détroit), ce qui est en jeu, on le saisit de mieux en mieux, c'est la substitution d'une hégémonie syracusaine en mer tyrrhénienne à la vieille thalassocratie étrusque (ou étrusco-carthaginoise). Au fond même le sacrifice humain dont est victime Théodotos peut être relativisé comme marque de barbarie, d'hétérogénéité absolue par rapport au monde grec. Même si G. Colonna a raison de souligner que son aspect de vœu ne correspond à rien de grec82, il n'en reste pas moins qu'il n'est pas offert à une sanguinaire divinité barbare, du gen rede l'Artémis taurique. C'est à Apollon, le dieu même vers lequel se tournent les Liparéens pour célébrer leurs victoires (et auquel, si on suit l'hypothèse de G. Colonna, les Étrusques auraient dédié le «cippe des Tyrrhéniens» dans ces circonstances) que s'adresse cette offran de ... Nous restons, paradoxalement, dans l'univers hellénique, et cette anomalie peut ne guère être jugée plus scandaleuse que le sacrifice des trois jeunes perses avant Salamine83 . . . En tous cas il est remarquable
78 Hérodote emploie le terme ληστής à son sujet en VI, 17. 79 Voir M. Giuffrida Ientile, Kôkalos, 24, 1978, p. 158. 80 Voir n. 40. Rappelons que c'est aussi au Ve siècle que se manifeste la piraterie antiate (rapt du navire des ambassadeurs siciliens qui ont convoyé le blé expédié par Gélon à Rome en 492/1, DH, VII, 37). 81 On a ainsi souligné - outre sa signification sur un plan intérieur à Syracuse - sa portée à l'encontre de la politique athénienne, qui commence à s'affirmer alors dans ce secteur (G. Maddoli, dans Storia della Sicilia, II, Naples, 1979, p. 65, 70, E. Lepore, dans Storia di Napoli, Naples, 1967, p. 181, G. Colonna, art. Kôkalos, 26-7, p. 169). 82 Voir art. MEFRA, 1984, p. 573. 83 Cas cité par G. Colonna, I.e. ; les sources sont Plut., Them., 13, 2-5, Arist., 9, 2.
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que, autant que cela apparaisse dans nos sources, les Étrusques ne soient pas qualifiés de barbares à cette occasion84. Nous serions donc porté à restreindre quelque peu l'impression de barbarie que peuvent donner au Ve siècle des indigènes italiens comme les Étrusques, tels du moins qu'ils peuvent apparaître dans certains tex tes grecs. Cela fait partie de motifs de propagande (quel que soit par ailleurs le fondement précis de tel ou tel grief) et on peut y voir une conséquence des différentes politiques menées à leur égard par les cités grecques. Ces même Tyrrhenes qui sont des barbares à l'égal du Perse pour Syracuse sont presque des Grecs pour leurs amis athéniens. Ne donnons pas une valeur générale à ce qui n'est que particulier, et rentre dans les méandres de la politique des cités!85 Après tout la qualification de barbares, avec intention péjorative, n'apparaît jamais dans les textes faisant allusion à ces heurts entre Étrusques et Grecs, ni ne se voit inscrite sur les casques d'Olympie ou sur les ex-votos liparéens à Delphes. Finalement on a l'impression, notamment chez Pindare, de l'application à l'Occident d'un concept qui s'est forgé en Orient, dans le contexte des guerre médiques86. On aura transposé sur ces adversaires occidentaux des Grecs, ou plutôt de cer taines cités grecques, une idée de l'hostilité irréductible, l'incompatibilté absolue entre mondes grec et barbare qui correspond beaucoup mieux à ce qui a pu être ressenti vis-à-vis des Perses87. Il est notable qu'utilisé en Italie, è l'égard des Étrusques, la thème perde beaucoup de sa validité. Des aspects aussi importants de cette conception de deux mondes irrémédiablement distincts que la question du despotisme, celle de l'inexistence dans un état monarchique comme ceux qu'offre
84 II en va de même du côté des Étrusque : ils font preuve d'une hostilité à l'égard de Syracuse, notée par Thucydide (VII, 57, 11), non des Grecs en général - ce que montre bien l'appui qu'il accordent à Athènes. 85 De même l'attitude de Dionysios de Phocée a des chances de s'expliquer par des motifs particuliers. Il est phocéen et retrouve les adversaires de sa patrie à Alalia. De plus il s'attaque aux Carthaginois, parents de ces Phéniciens qu'il a connus au service du Grand Roi et contre lesquels il s'est d'abord tourné lors de son départ d'Ionie. Là encore on ne peut conclure de son cas à une hostilité générale du Grec contre le barbare. 86 Dans le cas de Dionysios de Phocée aussi on sera sensible à l'influence de données orientales : l'expérience de la lutte contre le Perse, de l'asservissement de sa patrie par le barbare a dû contribuer à donner une coloration «nationale» à son attitude. 87 Sur le thème de l'opposition grec/barbare en général, nous pouvons renvoyer à Y. Thébert, Réflexion sur l'utilisation du concept d'étranger, dans Diogene, 112, 1980, p. 96-115, où on trouvera l'essentiel de l'abondante bibliographie.
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l'Orient de citoyens exerçant des droits politiques, se trouvent privés de toute base. Finalement Vhybris des Tyrrhéniens dénoncée par Pindare fait piètre figure à côté de celle du Grand Roi . . . Ainsi l'indigène italien resterait, somme toute, assez proche du Grec. Qu'il soit son partenaire commercial, voire son allié politique ou militaire, ou au contraire son ennemi (mais alors comme peut l'être un Grec d'une cité adverse), il ne serait pas irréductiblement différent de l'Hellène. Au fond il serait un barbare essentiellement en ce qu'il ne parle pas grec. Mais pour le reste il se situerait aux franges de l'hell énisme. Néanmoins, avec cela, nous ne pensons pas avoir tout dit sur l'ima ge de l'indigène par rapport au Grec. Il faut aussi tenir compte d'autres facteurs, qui vont nous amener à nuancer ce jugement, et en même temps nous permettre de cerner davantage la spécificité du Ve siècle car ils paraissent correspondre, en grande partie, à des développe ments nouveaux de cette période, lesquels portent en germe des modifi cations sensibles. Déjà, nous nous sommes intéressés, surtout, pourrait-on dire, aux indigènes «classiques», ceux qui sont les interlocuteurs naturels des Grecs, que ce soit comme clients, fournisseurs, alliés ou adversaires. Mais à côté de ces Italiens - comme les Étrusques -, qui appartiennent eux aussi à un monde des cités, il en est d'autres, dont la barbarie est autrement irréductible, autrement inquiétante. Ils apparaissent parfois au détour de notre documentation. Nous pouvons ainsi évoquer - même si cela nous écarte un peu du Ve siècle la description qui est faite de la bataille opposant aux Cuméens les «Étrusques, Ombriens, Dauniens et autres barbares» qui attaquent la cité campanienne en 524 88. La différence qui existe entre le récit de cette bataille et celui de celle d'Aricie89 est en effet flagrante - et ne doit pas tenir seulement au grandissement épique qu'a subi l'épisode (sensible en particulier aux prodiges qui accompagnent la victoire des Grecs)90. On trouve des motifs - attirance des barbares pour la richesse 88 Voir DH, VII, 3-4. Le sens historique de cet événement (intervention en Campanie d'autres Étrusques que ceux impliqués habituellement, et même plus septentrionaux et «barbares» que ceux que mènera Porsenna; voir p. ex. M. Torelli, Storia degli Etruschi, Rome-Bari, 1981, p. 196) ne nous concerne pas ici. 89 Telle que la narre le même Denys en VII, 6. 90 Prodige des fleuves remontant vers leur source avant la bataille (VII, 3, 3), éclairs et tonnerre lors du combat (4,2).
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de la cité, énormité de leurs effectifs, emploi constant du terme barba re (alors que pour Aricie Denys emploie constamment celui seul de Tyrrhenes) - qui mettent bien à part cet épisode. Ce n'est plus le choc de deux phalanges - comme à Aricie - et Denys insiste sur la «manière barbare et sans ordre» de combattre de ces premiers adversaires d'Aristodème91. Ce qui n'est pas le cas pour la bataille d'Aricie ou ai lleurs à propos des luttes entre Étrusques et Liparéens ou Syracusains, on a ici vraiment un heurt entre Grecs et barbares, entre deux mondes différents92. Il s'agit là d'un contact avec une barbarie comme celle des Gaulois, qui il est vrai ne touche pas directement les Grecs dans l'horizon chro nologique qui est le nôtre. Mais on peut faire sans doute des remarques analogues à l'égard de certains des indigènes italiens avec lesquels les Grecs sont en contact au Ve siècle : les populations montagnardes de l'Italie centrale dont la pression sur les plaines littorales est une donnée de base de l'histoire de cette période93. Or, par rapport à d'autres indigènes, plus «classiques», ces populat ionsoffrent des singularités qui, visiblement, ont surpris les Grecs. Leurs coutumes leur semblaient autrement barbares, autrement élo ignées de leurs normes que celles des habitants des cités latines ou étrusques. On peut rappeler la tradition, bien étudiée par J. Heurgon, qui s'est développée autour de la coutume du ver sacrum™. Comme le montre le texte de Strabon (ainsi que les remarques de J. Heurgon sur la forme qu'a dû avoir primitivement la récit d'origine des Mamertins de Messine), l'étiologie qui nous est parvenue par Strabon et Festus adû se constituer à propos des Samnites - et avant Myrsile de Lesbos qui l'a transposée au cas des Pélasges95 : elle peut remonter à Philistos, voire même déjà à Antiochos96. En tous cas le processus en deux temps qui 91 Cf. VII, 4, 1 : τον βάρβαρον τρόπον άνευ κόσμου (cavaliers et fantassins combattent mêlés). 92 Les Étrusques sont évidemment présents en 524. Mais ils se voient en quelque sor tedissous dans la masse barbare que constitue cette armée. Et surtout il ne s'agit pas des mêmes Étrusques, comme ces voisins hellénisés des Grecs de Cumes auprès de qui les adversaires d'Aristodème vont se réfugier (DH, VII, 10, 3). 93 Sur cette question restent valables les remarques de J. Heurgon, Rome et la Médi terranée occidentale, Paris, 1969, p. 242-5. 94 Voir Trois études sur le ver sacrum, Bruxelles, 1958, p. 20-35. 95 Voir respectivement Str., V, 4, 12 (250), Fest., 150 L, FGH 477 F 8 = DH, I, 23. Voir aussi nos remarques dans Les Pélasges, p. 278-9, 485-6. 96 Voir Les Pélasges, p. 279, 486, n. 146.
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est décrit, insistant sur l'énormité qu'il y a, aux yeux des Grecs, à vouer des hommes aux dieux, montre bien l'étonnement, la perplexité que les Hellènes devaient ressentir devant ces barbares97 autrement frustres et aggressifs que leurs interlocuteurs habituels98. On pourrait dire la même chose à propos des Brettiens, cet autre rameau de l'expansion sabellique : leur caractère d'« esclaves fugitifs» était aussi choquant pour des Grecs99. Mais avec eux nous sortons de notre cadre chronolo gique 10°. Or, à propos de ces Sabelliens - Samnites, Lucaniens, en attendant les Brettiens - les questions que pouvaient se poser les Grecs n'étaient certes pas de pure curiosité ethnographique ! Au Ve siècle déjà ils repré sentent un grave danger pour les cités grecques d'Italie. Sans vouloir entrer ici dans le débat sur la nature de ce populus Campanus - de tou tes façons apparenté aux Samnites - qui prend le contrôle de la Camp anie vers le dernier quart du Ve siècle101, rappelons que la cité grecque de Cumes, la doyenne des cités de Grande Grèce, la cité d'Aristodème qui avait été sauvée de l'invasion étrusque en 474 par la flotte de Hiéron, tombe entre les mains de ces Campaniens en 421 102. C'est sans dout e à la même période que les Lucaniens, autre peuple du même groupe,
97 Strabon il est vrai introduit une discrète comparaison avec des faits grecs (inspi rée sans doute par les précédents delphiques que pouvaient paraître offrir le cas de Rhégion ou celui de Magnésie du Méandre) et par ailleurs fait des Samnites des civilisateurs, établissant des cités là où les Opiques habitaient κατά κώμας. Il s'agit certainement d'une volonté secondaire de rapprochement avec la Grèce. Le cas des Mamertins, relaté par Festus, et encore plus net : J. Heurgon a bien montré, à partir d'une étude du monnayage de la cité, comment le récit a été progressivement hellénisé. 98 Pour Str., VI, 1, 15 (264-5), nous suivrions plutôt D. Musti, Metaponto, note sulla tradizione storica, dans RFIC, 111, 1983, p. 265-91 (et déjà La civiltà dei Dauni, p. 99-100, n. 10) sur la question d'une éventuelle allusion à des attaques samnites à époque haute (dans ce sens G. Maddoli, / Samniti a Metaponto, dans PP, 29, 1974, p. 237-43). 99 Voir Str., VI, 1, 4 (255), Diod., XII, 22, XVI, 15, Just., XXIII, 1. Il ne faut pas réduire cette qualification à un trait de propagande hostile. Sur son fondement sociologi que, A. Napoli, / rapporti tra Bruzi e Lucani, dans SMSR, 37, 1966, p. 61-83, G. Pugliese Carratelli, Atti X Convegno sulla Magna Grecia, Tarente, 1970, p. 139-42. 100 Ils apparaissent selon Diodore en 356/5. Sur Antiochos FGH 555 F 3c = St. Byz., s.v. Βρέττος, voir F. Jacoby, Notes, p. 293, n. 50. 101 Diodore, XII, 31, fait remonter la formation de ce peuple à 438/7. La prise de Capoue aurait eu lieu en 424 (Liv., IV, 37, 1). Sur la question, on se reportera à B. D'Agost ino,art. cité à n. 34. 102 Cf. Diod., XII, 76; voir aussi Str., V, 4, 4 (243), DH, XV, 6, Vell. Pat., I, 4, 1.
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s'emparent de Poseidonia 103. Et la pression lucanienne se fait sentir sur Thourioi, sans doute déjà peu de temps après sa fondation -104 en tous cas bien avant la retentissante défaite de Laos en 390/389 105. Ces guerres ne sont pas de même nature que celles que Syracuse ou les Liparéens ont eu à mener contre les Étrusques, ou celle qui a abouti à la victoire des Cuméens à Aricie. Il ne s'agit plus d'intérêts extérieurs, de questions d'hégémonie économique ou politique. Cette fois, et encore plus nettement que lors des attaques étrusques contre Cumes en 524 et en 474, c'est l'existence même des cités grecques en tant que telles qui est en jeu. On assiste à l'asservissement effectif de poleis helléniques par des indigènes, à une amputation du domaine grec en Italie. Les Grecs sont sensibles à cet état de fait. Derrière le récit de Diodore décrivant le pillage de Cumes par les Campaniens et la réduction de ses citoyens en esclavage, encore plus derrière celui de Strabon, insistant sur Yhybris des vainqueurs, qui s'emparent des femmes des vaincus106, c'est une défaite de l'hellénisme en tant que tel qui est dépeinte - et cette peinture a des chances de correspondre à ce qu'ont ressenti les Grecs témoins de ces faits107. Les choses sont encore plus nettes dans le cas de Poseidonia, tel qu'il apparaît à travers les remar quesd'Aristoxène de Tarente, au IVe siècle : désormais la cité est per due pour l'hellénisme, est devenue une ville barbare, et ses habitants ne peuvent garder un lien avec le nomen Graecum que par une inutile déploration rituelle de ce qui est définitivement perdu108. Ainsi au Ve siècle les fondements mêmes de l'hellénisme - sa cultu re, sa langue - peuvent apparaître en danger du fait des indigènes ita liens, ou du moins certains d'entre eux, et spécialement ces nouvelles 103 Voir Str., VI, 1,4 (254), Aristoxène de Tarente, ap. Ath., XIV, 31, 632 (= FHG, II, 291). km voij- Polyaen., Strat., II, 10, Front., Strat., II, 3, 12; la référence à Cléandridas de Sparte permet de dater les guerres auxquelles il est fait allusion vers la fin du Ve siècle (voir Diod., XII, 106, où le nom est à corriger d'après Thuc, VI, 93, 2). los voir Diod., XIV, 91, 101-2, Str., VI, 1, 1 (252) - avec une élaboration légendaire qui montre bien le retentissement qu'a eu l'événement. 106 Cf. Str., I.e. à η. 102 : ύβρισαν εις τους ανθρώπους πολλά και δη και ταΐς γυναιξίν αυτών συνωκησαν αυτοί. 107 Sur ce point, F. Lasserre, éd. G. Budé, Paris, 1967, p. 214. 108 Aristoxène emploie le terme έκβαρβαρώσθαι (le rapport avec Τυρρηνοΐς ή Ρωμαίοις, qui est peut-être une glose, n'importe pas ici) et insiste sur la perte de la langue grecque (thème qui se retrouve chez Vell. Pat., I.e.).
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populations qu'on voit se manifester vers cette époque 109 et qui se révè lent autrement aggressives que les Œnôtres, Chônes, Opiques ou Ausones auxquels on était habitué110. On comprend les mesures exceptionn elles que prennent alors les cités grecques menacées par ce danger, telles que les relate Diodore à propos de l'alliance conclue contre les Lucaniens111. À cette période au moins112, ces barbares semblent repré senter une menace d'anéantissement total pour l'hellénisme italien. Ainsi le Ve siècle, période de rupture, période de tension - en même temps que siècle d'ouverture à l'hellénisme, où les céramiques attiques arrivent en masse dans la péninsule : nous constatons cette complexité de la période aussi dans l'image que le Grec se fait du monde indigène. À côté du quasi-Hellène, assez rassurant finalement même quand les aléas de l'histoire font que l'on s'oppose à lui, se profile le barbare inquiétant qui menace l'existence même de la Grèce italienne. Dominique Briquel
109 Strabon, VI, 1, 4 (255) reproche à Antiochos (FGH 555 F 3a) de ne pas avoir dis tingué Lucaniens et Bruttiens des Chônes et autres populations œnôtriennes. Il y a là un indice chronologique, mais aussi une marque du caractère barbare, non familier aux Grecs de ces nouvelles populations : on peut penser que les Lucaniens au moins étaient déjà apparus à l'époque où Antiochos a écrit ses ouvrages (vers 420). 110 Nous tenons à part le cas de Tarente et de ses démêlés avec les Iapyges. Sur cette question, P. Wuilleumier, Tarente, Paris, 1939, p. 51-9. 111 Voir Diod., XIV, 91 (pour 393), et, plus précis, 101. Les cités décident de se porter automatiquement secours en cas d'attaque lucanienne, et prévoient la peine de mort pour les stratèges qui ne le feraient pas. 112 On constate bien sûr l'établissement de traditions liant ces indigènes au monde grec (Just., XX, 1, pour la Campanie, les Samnites et Brettiens) et il faut aussi mention ner l'hellénisation constatable archéologiquement. Mais ces développements appartien nent plutôt à une époque ultérieure (Justin paraît tributaire de sources du IVe siècle, sans doute Théopompe).
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LA SOCIETÀ ETRUSCA DELLA CRISI QUALI TRASFORMAZIONI SOCIALI?
Sarebbe probabilmente divertente tentare una storia della storio grafia archeologica sul tema della «crisi» etrusca del V secolo a.C, per mettere in luce i limiti di ogni storia «archeologica» fatta con i soli strumenti quantitativi, per non parlare dei limiti ideologici di molti cul tori di quelle storie, per i quali il concetto ambiguissimo di «fioritura» (e per converso di «crisi») si identifica borghesemente con la quantità e con l'opulenza dei consumi. Se dovessimo restare a questi parametri, le conseguenze archeologiche del dibattito panellenico sulla ricostruzione dei templi distrutti dai Persiani si trasformerebbero in una «crisi», paradossalmente coincidente con una delle fasi di maggior espansione della cultura greca. Posta in questi termini la questione e di fronte alla palese oziosità di questo eventuale recensus di opinioni, resta comunque il fatto che nei decenni tra 480 e 460 a.C. l'espansione tardo-arcaica dell'intera società etrusca viene quasi improvvisamente a cessare. Alcu ni sincronismi su scala peninsulare e mediterranea, da tutti invocati e anche da chi vi parla, contribuiscono a formare il quadro di «disagio» politico-sociale delle economie opulente dell'Italia e quindi anche di quelle etrusche : la grave sconfitta di Cuma del 474 a.C. ; il mutato qua dro mediterraneo con la fine della pax Persica ; le calate di genti italiche dalle montagne verso le pianure fertili occupate appunto dalle società più prospere della penisola; le turbolenze celtiche in area più setten trionale, ma non prive di contraccolpi anche nel mezzogiorno, come ci illustra il precedente di quegli Etruschi piombati con Umbri e Dauni sotto le mura di Cuma nel 524 a.C. ; la particolare vicenda romana della «serrata del patriziato» e dello scontro patrizio-plebeo1. 1 V. M. Torelli, Storia degli Etruschi, Roma-Bari, 19852, p. 183 sg.
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Tutti questi sincronismi, abbiamo detto, mentre possono concorrer e a delineare il quadro del «disagio», tuttavia non spiegano affatto la trasformazione almeno parziale del modello socio-economico dell'opu lenza tardo-arcaica etrusca a partire dal secondo venticinquennio del V secolo a.C. e fino alla fine dello stesso secolo ο ai primi decenni del successivo. Ho detto «almeno parziale», poiché i segni della «crisi» sono quanto meno ambigui. Uno dei parametri tradizionali dell'opulenz a, gli istogrammi delle importazioni attiche, non subisce, per quel che si sa, un calo netto in quei decenni2, ma piuttosto un frazione di tem poprima, tra 500 e 490 a.C, in concomitanza con un duplice fattore, l'uno politico della rivolta ionica e l'altro materiale della crescita delle importazioni (assai meno studiate di quelle figurate) della vernice nera attica; ma, quel che è più importante, a parte l'interesse del commercio attico per il nuovo e più attraente mercato padano, è l'obiettiva com pensazione del minor flusso quantitativo di ceramiche attiche figurate con la continuità dell'elevata qualità delle importazioni sul piano della forma e del contenuto e questo lungo tutto il periodo dello Stile Classi co fino ai Manieristi, quando gli istogrammi delle importazioni si man tengono costanti, almeno per le città dell'Etruria centrale e tiberina e per i porti «naturali» di queste, Populonia e Vulci. L'acquisizione del lusso diventa dunque selettiva, con una significativa metamorfosi dalla quantità alla qualità : l'apprezzamento sociale si sposta dall'accumula zione degli oggetti, facilmente spendibile in termini di formazione di consenso secondo il modello arcaico del potlach, alla più aristocratica dimensione di esoterici messaggi veicolati dall'oggetto esclusivo. Di qui, la necessità di portare la nostra attenzione verso il tema più che mai attuale dei significati profondi delle importazioni attiche, le cui rappre sentazioni acquistano, rispetto al passato, un valore sempre più comp lesso per la costruzione della nuova società etrusca e dell'intricata ideologia ellenizzante delle classi dominanti : dal grande corpus mitolo gico e narrativo del vaso François3, vera biblioteca dell'ideologia di un princeps chiusino arcaico, in cui il racconto ha ben precisi toni didascal ici generali da bibita pauperum, si passa ai raffinati estratti narratolo2 Cfr. C. Tronchetti, in DdA, VII, 1973, p. 5 sg., e M. Martelli, in Civiltà degli Etru schi (Cat. Mostra Firenze 1985), Milano, 1985, p. 175 sg. 3 Sul tema, oltre all'edizione del restauro in BdA, Suppl. 1, Serie spec. 1, 1980, e alla nota di A. Stewart, in W. G. Moon, (ed.), Ancient Greek Art and Iconography , Madison (Wise;), 1983, p. 53 sg., v. le acute pagine di M. Menichetti, // mito greco in Etruria. Le origini (Diss. dott. Archeologia - Perugia 1989), in stampa.
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gici o a figurazioni ad alto contenuto etico e nomotetico delle centinaia di coppe, anfore e crateri attici a figure rosse presenti nelle poche ed esclusive tombe aristocratiche del secolo della «crisi». Alcune sommar ie analisi delle scene mitiche di questi materiali mostrano chiaramente che nelle «quasi-special commissions» tardo-arcaiche predominano soggetti direttamente collegati all'eroizzazione del defunto, laddove nell'età della «crisi» la scelta dell'alta committenza è orientata verso Selbsdarstellungen assai più complesse e mediate di comportamenti eroi ciο genericamente aristocratici, con riferimenti a volte molto specifici aìl'ethnos ο addirittura al genos. Qualche esempio potrà forse chiarire questo spostamento di campi semantici. A dimostrazione dell'uso fune rario prevalente di quei vasi, la morte e il seppellimento eroici sono centrali in pezzi straordinari di epoca tardo-arcaica : pensiamo all'o rmaiceleberrimo cratere di Euphronios di New York, nel quale la meta fora anche etnica è evidente, se si pensa all'origine licia dell'eroe Sarpedonte affidato per l'estremo viaggio ad Hypnos e Thanatos4; poco più tardi, nel primo decennio del V secolo, l'allusione si fa ancor più trasparente nella grande anfora di Myson al Louvre, dove la singolare e rarissima leggenda dell'autoimmolazione del re lidio Creso è un giuoco di specchi tra il mito e la realtà della cremazione eroica di un Lydius rex d'Etruria5. Ancora due decenni dopo, una coppa inedita di Orvieto attribuita a Pistoxenos6 rende vieppiù complicata (e diversa) la Spieler ei : il tondo e il lato Β raffigurano i Kabeiroi danzanti e il lato A l'in iziazione di Eracle ai misteri cabirici di Samotracia, con allusioni molto intricate non solo ai valori iniziatici, ma anche e soprattutto alla notiss ima tradizione di Samotracia e di Lemno come isole «tirreniche». Nella seconda metà del secolo, un noto cratere polignoteo di Berlino, che ha suscitato l'interesse (e le perplessità) del Webster studioso delle «spec ial commissions» per la evidente prosopografia tutta ateniese dei pro tagonisti del sacrificio rappresentato7, trova spiegazione non come
4 D. von Bothmer, in AA, 1976, p. 485 sg. ; nota il medesimo soggetto nello stesso pittore agli inizi della carriera nella coppa di Dallas, coll. priv. edita da J. Frel, in W. G. Moon (ed.), op. cit. (a nota prec), p. 151 sg., fig. 10.9a, 19.9b, 10.10. 5 Da ultimo, J. Boardman, Athenian Red Figure Vases. The Archaic Period, Londra, 1975, p. 112, fig. 171. 6 La coppa (ARV2, p. 575) è allo studio di C. Masseria, cui debbo l'interpretazione delle scene, oscure allo stesso Beazley. 7 T. B. L. Webster, Potter and Patron in Classical Athens, Londra, 1972, p. 32 sg. ; il vaso è in ARV2, p. 677.
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«astray pot», vaso migrato casualmente nella lontana Etruria secondo le perplesse conclusioni dello stesso Webster, bensì come documento di philiai attico-tirreniche del protagonista della scena, Nikias, di cui pos siamo così, almeno in parte, comprendere lo schizofrenico atteggi amentodi capo riconosciuto del partito oligarchico-moderato e di non riottoso comandante della sfortunata spedizione in Sicilia. La lista potrebbe continuare a lungo, ma la mancanza di uno stu dio sistematico del tema, peraltro assai delicato e complesso, ci induce a muoverci con particolare cautela e a limitarci a sottolineare le linee generali del mutamento di atteggiamento verso la multiforme e colorat a imagerie di quella ceramica tanto amata dall'aristocrazia etrusca nel VI come nel V secolo a.C; si tratta in ultima analisi di un mutamento che potremmo definire come un passaggio da temi di eroizzazione funeraria, non senza attenzione alle condizioni «regie» degli eroi effi giati, a soggetti di natura etico-religiosa, etico-politica e nomotetica, il tutto con particolare e continuo interesse per le connotazioni etniche degli acquirenti in vario modo recuperate. La lunga digressione aveva uno scopo, quello di mettere in luce la necessità di inserire nel quadro parametri qualitativi e con essa la vaghezza del concetto di «crisi», attraverso il duplice strumento di una continuità «selettiva» delle importazioni e del mutato atteggiamento nei confronti di quel cruciale bene di prestigio di età arcaica e classica che è la ceramica attica a figure rosse. La selezione operata su tale bene di prestigio lungo tutto il V secolo a.C. rivela (e uno studio ravvicinato del problema rivelerebbe ancor più e meglio) che una forma di «conspi cuous comsumption» ha continuato ad esistere nell'Etruria dell'età del la«crisi». Il processo di rimozione della ricchezza, cui ho fatto più vol teriferimento in passato per spiegare forme economiche, politiche e artistiche di questo «Interim Periode»8, è esistito, ma non è stato, per così dire, perfetto o, se si vuole, di tipo spartano, nel senso della stretta «licurgheo-chiloniana», che dalla metà del VI secolo in poi ha mutato il volto della società e dei consumi della Laconia9. Al contrario, in Etru rial'indubbia stretta oligarchica non ha innovato in una direzione di tipo spartano, pur comprimendo (ma non eliminando) i consumi sun-
8 Cfr. Arte degli Etruschi, Bari-Roma, 1985, p. 123 sg. 9 Su questo argomento v. M. Nafissi, L'aristocrazia spartana (Diss. dott. Storia Anti ca- Pisa 1986), con amplia bibl. e discuss.
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tuari e indirizzandosi verso la tesaurizzazione nascosta e verso un'enfas i dei depositi di valore nei santuari10. La ragione di questo indirizzo va a mio avviso ricercata nella situa zione generale dell'Etruria e delle regioni vicine nei decenni anteriori all'apertura dell'età della «crisi». Come è noto, tra la fine del VI e gli inizi del V secolo a.C. la struttura territoriale delle grandi poleis etrusche raggiunge una forma definitiva, che sarà conservata nelle grandi linee per gli altri quattro secoli della storia di un'Etruria indipendente. Le metropoli tirreniche sono ora virtualmente isolate entro vastissimi territori, un tempo popolati di vici, di oppida e di potentati minori, gra dualmente eliminati nel corso di guerre durate sin dall'età del Ferro. Il problema del controllo di questi territori, in senso economico, politico e militare, ha in primo luogo indubbiamente aperto in seno alle città del legravi questioni per l'eventuale integrazione nei vari corpi civici delle comunità un tempo autonome ed ora soggette, secondo una linea che traspare per lungo tutto il VI secolo a.C. dai diversi ampliamenti delle strutture politico-militari e politico-territoriali di Roma arcaica11; in secondo luogo, altri e maggiori contenziosi si debbono essere aperti fra gruppi aristocratici cittadini per il possesso e lo sfruttamento delle ter re conquistate. Purtroppo l'archeologia è muta sul destino e addirittura sull'entità del popolamento di queste terre nel V secolo a.C, e in larga misura potremmo dire pour cause : non credo sia difficile immaginare per queste vaste estensioni di terra un popolamento estremamente rarefatto di gruppi subalterni dalle scarse capacità di consumo (e dun que poco rilevabili in termini archeologici) e soprattutto una diffusione assai ampia di culture estensive non bisognevoli di presenze stabili di coltivatori in loco : questo è almeno il quadro che la tradizione ci pre senta allo scadere del V secolo a.C. quando i Celti chiedono terra ai Chiusini nelle condizioni di coloro i quali latius possideant quarti colant 12, malgrado il tradizionale diecismo della polis di Chiusi. Ancora una volta torna utile riprendere genus proximum e different ia specifica del confronto con Sparta. La riforma «chiloniana» è stata di recente messa in rapporto con la definitiva conquista della Messenia
10 Ripeto in ciò concetti di D. Musti, L'economia in Grecia, Roma-Bari, 1981, partie, p. 80 sg. e 95 sg. 11 V. ora M. Torelli, in A. Momigliano e A. Schiavone (ed.), Storia di Roma, I, Tori no, 1988, p. 252 sg. 12 Liv. V, 36, 3.
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e con le relative difficoltà di un ritorno alla homoiotes tradizionale dopo un cinquantennio di mobilità prodotta dai problemi di allarga mentidel corpo civico e dal controllo del territorio acquistato : questa struttura suntuaria, il diverso atteggiamento verso l'eroizzazione test imoniato dalla nota serie di hero-reliefs e il sempre contestuale affiorare di hippeis spartani attestati dal tramonto di vincitori olimpici nelle gare appiedate e dalla frequenza invece di vittorie ippiche13, sono tutti el ementi che trovano analogia nel contesto etrusco dei decenni iniziali del periodo della «crisi», sempre però nella evidente diversità di una classe dirigente, che non ha potuto per ragioni strutturali imitare fino in fon do il modello spartiate. Ciò spiega perché le pratiche suntuarie etrusche non hanno il carattere radicale spartano della fase «chiloniana» e perché la tryphè etrusca arcaica è potuta filtrare, attraverso le maglie strette della «crisi», fino alla rinascita dell'opulenza aristocratica di IV secolo a.C, ben documentata da testi e monumenti. Fra le ragioni strut turali dai diversi esiti possiamo qui ricordare alcune fra le più signifi cative : il carattere in qualche misura diverso sin dall'origine delle for me di dipendenza etrusche rispetto a quelle laconiche, connesso a dif ferenti modi di acquisizione e spartizione della terra e dei servi; la natura composita e processuale della formazione della classe dominant e etrusca; la probabile compresenza in Etruria, ancorché minoritaria e residuale rispetto al modello produttivo aristocratico, di forme di pro prietà contadina piccola e media; la mancata separazione politica e soprattutto fisica di ceti produttivi intermedi, incarnati a Sparta dalla periecia, ma in Etruria in vario modo interni e consustanziali alla polis ; la pluralità infine e i diversi livelli di sviluppo delle singole città etru sche rispetto all'unicità e alla controllabilità della società laconica. Tuttavia il modello spartano nella fase di riorganizzazione politica successiva alla instaurazione dei regimi repubblicani in area tirrenica fu certamente presente, come molti indizi desumibili dalle meglio note vicende della prima fase repubblicana di Roma ci inducono a credere, a partire dalla dedica del tempio dei Castori nel Foro con tutti i possibil i significati ideologici da essa incarnati; ma pur potendo essere fonte mediana ο immediata di ispirazione, quel modello non era, come ho detto or ora, perseguibile e le aristocrazie tirreniche scelsero un'altra strada.
13 V. M. Nafissi, op. cit. (a nota 9).
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L'equilibrio peninsulare protostorico14, basato su di una struttura di fondo di comunità di villaggio, si era incrinato in maniera chiara con il consolidarsi della forma urbana in area tirrenica e su di una modifi cazione del rapporto più arcaico tra sviluppo e sottosviluppo (e cioè tra aree tirreniche e zone montane e orientali della penisola evolutosi all'inizio dell'età del Ferro; ciononostante, lungo tutto l'arcaismo, que sto equilibrio continuò a giuocare un suo ruolo socio-politico tra Etruria e zone italiche adiacenti, come dimostra la mimesi in area italica delle forme economico-sociali etrusche di tipo principesco (penso qui agli episodi delle grandi tombe principesche umbro-picene, sabine e sannitiche, da Fabriano a Monteleone di Spoleto, da Colle del Forno a Poggio Sommavilla, e fino a Capestrano). Il vantaggio in termini di ces sione e acquisto di ricchezze, forza-lavoro e terra per entrambi i diversi livelli di sviluppo è evidente e le conseguenze lungo tutto il VII e il VI secolo a.C. in ordine all'endogamia orizzontale e soprattutto alla mobil itàsociale - anch'essa ovviamente orizzontale - sono ben note, dalla prosopografia italica del grande archivio onomastico orvietano fino al celebre arrivo dei Claudii a Roma : l'integrazione economica e sociale fra i due diversi livelli di sviluppo centro-italico sopravvisse fino alla rottura definitiva di quell'equilibrio, sanzionato dall'imporsi nelle città tirreniche di un sistema politico repubblicano. Questo sistema per l'a ppunto sanciva di fatto, nei vasti territori soggetti alle metropoli, un'or ganizzazione del controllo economico, sociale e politico di tipo rigido, tale da limitare fortemente scambi matrimoniali (con tutto quanto la cosa comportava nell'economia arcaica), scambi materiali e la tradizio nale mobilità dei gruppi egemoni dei due versanti dell'economia dell'Italia media. Naturalmente, questa rigidità non fu fenomeno pun tuale ed univoco, ma progredì in maniera lenta lungo tutto il VI secolo a.C, come ci insegnano diversi fatti, dalla scelta della costituzione timocratica serviana all'episodio della ricolonizzazione etrusca della valle Padana e all'affermarsi dell'autocoscienza etnica visibile dal ruolo as sunto nel corso del VI secolo a.C. dai santuari panetruschi e panlatini e dalle leghe etniche : la risposta italica a tale stato di cose si manifesta prima, agli inizi del V secolo a.C, con movimenti organizzati di seg-
14 Per questo problema e quelli delle pagine successive, v. ora M. Torelli, in A. Momigliano e A. Schiavone (ed.), Storia di Roma cit., p. 53 sg. (per il versante italico) e gli Atti del Simposio su «Stato e statualità dalla fine del VI agli inizi del III secolo a.C, Ber lino, Freie Universität, 1988), in preparazione (per il versante romano).
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menti tribali, di cui quello della calata volsca è l'esempio meglio cono sciuto e quello dell'invasione celtica l'ultimo atto, e poi, dalla metà del secolo, con una prima organizzazione politica delle comunità a più ele vato tenore di sviluppo, come mostrano gli esempi di Todi ο di Gubbio. E, come nell'ambito etrusco si debba parlare di linea di tendenza e non di un fenomeno sincronico ed organico, così in ambito italico perietrusco - in armonia con i diversi livelli di sviluppo socio-economico inter no - le varie tappe del processo non hanno un'evoluzione sincronica : tipico al riguardo è l'episodio romano del 460 a.C. della cosiddetta rivolta servile guidata dal sabino Appio Erdonio, evidentemente un evento di mobilità sociale in «ritardo» sui tempi. Sul piano interno delle città dell'Etruria propria, la rigidità impos ta dai nuovi ordinamenti si è tradotta in una chiusura oligarchica delle forme politico-sociali con le sue leggi di natura moderata suntuaria sopra ricordate e nella centralità del modello agoraico a danno del pre cedente emporico delle forme dello scambio (altra cosa è palesemente la situazione padana), per evidente opportunità di un controllo politico sull'irrequieta realtà mercantile, tale da porre fine all'ingresso nella cit tà di elementi di classi subalterne, così come di fatto si era operato sul versante italico - a livello di classi egemoni, e al tempo stesso di togliere ogni tipo di humus per eventuali eversioni tiranniche. Questa eunomia oligarchica, limitando scambi e consumi, se non colpiva al cuore la tryphè (che continuò, come abbiamo visto, a sopravvivere nello sfondo, in forme sublimate in virtù dell'accettazione di modelli aristo cratici greci di V secolo a.C), certo comprometteva la sopravvivenza di una parte consistente dei gruppi sociali intermedi, che nel VI secolo a.C. avevano prosperato in maniera abnorme sulle briciole del grande banchetto dell'opulenza arcaica. Il confronto tra le necropoli di VI e quelle di V secolo a.C. della più mercantile delle città etrusche, Caere, da la misura del restringimento della base sociale etrusca nell'età della «crisi» e dell'abbassamento del livello economico di questi ceti intermed i : era a costoro che si doveva la grande ricchezza e varietà di espres sioneartistica del tardo arcaismo etrusco ed il loro declino sta alla base di quell'indubbia involuzione formale che caratterizza la cultura artisti ca del cuore dell'età della «crisi», adagiata - per motivi programmatici, prima ancora che materiali - nella contemplazione e nella rielaborazio ne di modelli iconografici e stilistici affermatisi alle soglie del momento della «crisi». Come le metropoli etrusche ci appaiono chiuse nel loro isolamento di poleis oligarchiche, protese alla « tesaurizzazione nascosta» dell'oro e
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del bronzo dei grandi santuari, al centro di territori vastissimi, così le classi dominanti tirreniche emergono dal grande mare archeologica mente buio di una estesa servitus delle città e delle campagne in manie ra flebile e incerta : il restringimento della piramide sociale ha portato con sé non solo una strozzatura dell'area sociale intermedia, ma anche quella del vertice, che, come tutte le oligarchie, deve aver sofferto del cancro dell' oliganthropia e dell'anandria. I calcoli fatti al Ranouil15 sul lasocietà patrizia romana e sulla sua continuità tra V e IV secolo a.C. sono istruttivi e possono servirci a valutare il fenomeno analogo di alcune città etrusche meglio note. Tra tutte le grandi sepolture arcaiche ceretane due soltanto sono quelle per le quali è ipotizzabile una conti nuità nella fase del rinnovamento di IV secolo a.C, il tumulo n. 2 del recinto della Banditacela, cui è significativamente adiacente la tomba dei Rilievi, e il tumulo Torlonia nella necropoli di Monte Abatone, che con la sua forma rievoca in maniera inequivoca la forma arcaica del sepolcro principesco, e che potrebbe ricollegarsi a tombe arcaiche vici ne16; altri casi, come quello della tomba delle Iscrizioni17 mostrano ο una continuità di sepolture tra tombe «isonomiche» di V secolo a.C. e tombe tardo-classiche di IV secolo a.C. ο un intenzionale abbinamento di queste, mentre appare sociologicamente significativo per la situazio ne di IV secolo a.C. la concentrazione di tombe emergenti nella zona delle «tombe del Comune»18. Se per Tarquinia abbiamo i calcoli molto rivelatori di S. Stopponi 19 sulla situazione delle tombe dipinte che mo-
15 P. C. Ranouil, Recherches sur le «patrìciat», Parigi; 1975, p. 181 sg., di cui sarà utile riassumere le conclusioni. Su 43 gentes patrizie degli inizi della repubblica, 12 sono già estinte a metà del V secolo a.C. e 21 nel 366 a.C; alla fine della prima guerra punica solo 19 famiglie patrizie sono sopravvissute. Il calo più drastico (28%) è quello che coinci de con la stretta oligarchica più forte ; la progressiva apertura con la lex Canuleia poi con le leggi di « pacificazione » tra patrizi e plebei visibilmente rallenta il calo, rispettivamente 20% e 7% per periodi di tempo quasi doppi (un secolo circa contro un sessantennio della fase precedente). 16 Mentre per la tomba dei Rilievi la situazione a noi sufficientemente nota può auto rizzare un maggiore ottimismo nel formulare l'ipotesi, i dati per la tomba e il tumulo Torlonia sono scarsissimi : in particolare la notizia di un'importante tomba orientalizzant e e arcaica presso il tumulo Torlonia mi è giunta attraverso la comunicazione orale (1969) dell'allora assistente sig. C. Zapicchi. 17 M. Cristofani, La tomba delle Iscrizioni, Firenze, 1964. 18 Per la topografia della zona, non è purtroppo mai comparsa l'edizione complessi va promessa da G. Ricci (cfr. B. Pace, in Mon. Ant. Lincei, XLII, 1955, col. 20). 19 S. Stopponi, La Tomba della Scrofa Nera (M.M.A.T., Vili), Roma, 1983, p. 102 sg.
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strano una sostanziale continuità almeno numerica della classe emer gente lungo tutto il V secolo a.C, attestata sulla diecina di unità per generazione, il caso di recente ben indagato della tomba François, con una tomba di pieno V secolo sovrapposta alla più celebre tomba di IV secolo a.C.20, è al momento isolato nella disastrosa situazione delle nostre conoscenze per la città di Vulci. La stretta oligarchica fu dunque il volto della «crisi» dell'Etruria propria ed è indissolubile dal quadro complessivo della penisola : per questo, rispetto alla sopravvalutazione di episodi pur importanti panmediterranei, come le battaglie di Imera e di Cuma, occorre ricordare che l'economia e la società etrusche - il nostro pensiero corre alle leg gendarie trecento città umbre conquistate dagli Etruschi di Plinio, N.H., III, 1 1 3 ο al catoniano in iure Tuscorum paene omnis Italia fuerat - han nole radici profonde oltre il labile confine etnico delle sponde del Tevere. Mario Torelli
20 F. Buranelli - S. La Pera BuRANHLLi, in Aa.Vv., La tomba François di Vulci (Cat. Mostra Vaticano 1987), Roma, 1987, p. 57.
FRANÇOISE-HÉLÈNE MASSA-PAIRAULT
L'ART ET LA DÉFINITION DE LA CITÉ
Dans l'Enciclopedia del Novecento1, G. C. Argan définit la crise de l'art contemporain par la difficulté d'intégration dans le système cultu rel en acte et par la rupture du rapport qui reliait l'activité artistique à d'autres activités sociales. Mutatis mutandis, cette définition nous pa raît utile pour essayer de caractériser quelques problèmes relatifs à l'art du Ve siècle a.C. dans ses liens avec les sociétés d'Italie centrale. Dans la perspective même tracée par Argan, il est nécessaire de consi dérer le système culturel en acte au Ve siècle, c'est-à-dire l'ensemble des structures, solides ou fragiles, constituant les cités de cette époque. La question est alors de savoir si la production artisanale et artistique pos sède un statut et une fonction bien définis ou problématiques dans de telles cités, si précisément au Ve siècle ne se déterminent pas un certain nombre de contradictions et de ruptures assimilables à une crise. Certainement, il serait vain de reconstruire une image de cette cri se qui fasse fi des distinctions nécessaires de périodes et de lieux. Mais, inversement, notre vision s'appauvrirait au point de devenir une simple chronologie illustrée si elle ne cherchait pas à percevoir une trame commune aux périodes et lieux considérés. Aussi nous a-t-il semblé que le Ve siècle correspondait à la naissance difficile et souvent contrariée de l'originalité, tant formelle que de contenu, de l'art italique, originali té qui s'épanouira seulement au IVe siècle. La démonstration de cette proposition dans le domaine artistique et artisanal nous paraît devoir aborder trois types de problèmes qui reflètent les conditions critiques de la polis avant son expression constitutionnelle originale. - Les ambiguïtés des programmes décoratifs de style subarchaïque et sévère comme expression non résolue d'un premier art de cité. - L'organisation de l'artisanat et la finalité de classes entières de la 1 Enciclopedia del Novecento, Rome, 1975, s.v. Critica d'arte, p. 1114 sg.
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production locale en fonction de l'homogénéité des classes de destina tairesou des équilibres entre groupes sociaux différents. - La lente conquête des finalités propres de l'art au service de la cité en contexte italique.
I Les programmes monumentaux du premier quart du Ve siècle révèlent une proportion subtile entre phénomènes de continuité et phé nomènes de rupture. Malgré la mise en question de la tyrannie, les thè mes héracléens précédemment utilisés dans un tel contexte sont encore traités avec vigueur. Toutefois, tout en réaffirmant des formules per sonnalisées, ces programmes font une plus large place aux thèmes épi ques collectifs, témoignant en réalité de l'âpreté des luttes entre fac tions aristocratiques. Nous nous limiterons à quelques exemples d'un problème unitaire au début du Ve siècle qu'il s'agisse de Caere ou du pays latin, de Véies, du pays falisque ou de Rome. À Caere, l'acrotère du Musée Grégorien2, motif d'origine orientale paraît adapté à un sanctuaire d'emporion. Or ce cheval ailé semble presque une réplique d'un acrotère du péristyle du temple d'Héraclès à Thasos daté de 510 environ3. Cette référence nous paraît importante et pourrait ne pas être le fruit d'une simple rencontre stylistique ponct uelle, puisque le kallinikos thasien est promu au cœur même de la cité comme héros fondateur4. On se demande donc si l'acrotère de Caere, de provenance inconnue, est en rapport avec l'aire de Vigna Parocchia-
2 A. Andren, Architectural terracottas from etrusco-italic temples, Lundt, 1941, p. 4647 et pi. 14; en dernier reproduit dans Rasenna, Rome (Credito italiano), 1986, fig. 572. 3 Guide de Thasos, Athènes, 1980, p. 132 n° 8 (fig. 80), daté vers 500; voir aussi M. Launey, Le sanctuaire et le culte d'Héraclès à Thasos, dans Études thasiennes, I, Paris, 1944, p. 98, fig. 55. 4 Sur ces différents aspects, cf. J. Pouilloux, L'histoire et les cultes de Thasos, dans Études thasiennes, III, Paris, 1954, p. 352-371. La traduction de καλλίνικος est connue en étrusque sous la forme calanice, nom d'Héraclès sur un miroir de Vulci (Cil 2145) : C. de Simone, Die griechische Entlehnungen im Etruskischem, Wiesbaden, 1968, I, p. 38, η. 3; sur le terme cf. encore Cil 2505 et Cil 2531 bis = SE, 39, p. 371 n. 70; sur le miroir Cil 2145 : U. Fischer Graf, Spiegelwerkstatten in Vulci, Berlin, 1980 {Arch. Forschungen DAI, 8), p. 27 (V. 14), taf. 4, 3.
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le ou du temple du Manganello, qui a livré les coupes inscrites HRA5. En tout cas la référence orientale indéniable en ce début de Ve siècle laisse place à plusieurs interprétations. Est-elle seulement à la gloire d'un tyrannos ou constitue-t-elle l'assomption par la polis d'un Héraclès fondateur des forces du dèmos6? Cette ambiguïté entre les catégories de la polis et de la tyrannie est aussi au cœur du programme de Pyrgi A dont la date stylistique corres pondaux années 490/480 7. Certes, du temple «B» au temple «A», on passe d'un modèle tyrannique bien assis à un modèle en question, com mele démontre l'emploi politique du mythe thébain comme expression de la stasis8. Mais le véritable héros de la plaque est Mélanippe, ce fils
5 Sur ces plats, cf. R. Mengarelli, // luogo e i materiali del tempio di Hera a Caere, dans SE, 10, 1936, p. 67 sg. (aire de Vigna Parocchiale) et pour l'aire du temple du Mang anello, R. Mengarelli, Iscrizioni su cippi sepolcrali dans NSc, 1937, p. 355 sg. ; M. CristoFANi, dans Contributi allo studio della ceramica etrusco tardo classica, Rome, 1985, p. 21 sq. 6 Le culte urbain ou suburbain d'Héraclès à Cerveteri devait être en rapport avec le jons Herculis : G. Colonna, dans Die Göttin von Pyrgi, Florence, 1981, p. 31. La référence à Thasos fait songer à un Héraclès καλλίνικος assumant des valeurs chtoniennes (cf. H. Launey, o.e., p. 161 sg. et p. 191 sg. : sur le κήπος d'Héraclès). Cepen dantà Thasos, Héraclès-héros paraît avoir quelque lien avec la structure de l'aristocratie guerrière fondatrice de la ville puisque les cinq oïkoi du temenos réorganisé semblent en rapport avec le nombre des polémarques (J. Pouilloux ; o.e., p. 361-366 et p. 368). Sur Héraclès-héros à Cerveteri, cf. l'antéfixe du Musée du Louvre (Athèna près d'Héraclès, tient une cruche (semblable à la cruche remplie de nectar qu'elle préparait aussi pour Tydeus) : cf. A. Andren, o.e., p. 47-48, pi. 16. 7 Le problème de la datation de Pyrgi A a été affronté de la façon la plus complète par M. Verzar, Zur Datierung des Tempels A in Pyrgi (S. Severa), dans AA, 1982-1, p. 89 sg. Le débat ouvert par cet article ne nous paraît pas encore conclu. Si l'on s'en tient aux éléments de style, il nous paraît franchement impossible d'envisager une date vers 460 ou 450 à moins d'imaginer un retard considérable par rapport aux éléments connus de l'art grec pour cette période (Olympie, Sélinonte, Agrigente, etc.). Les comparaisons de M. Verzar avec les vases de style sévère (ibid., p. 105) nous paraissent appropriées. Les terres cuites les plus voisines actuellement connues sont peut-être celles de Satricum (en particulier le Zeus du fronton). Les plaques de revêtement sont aussi voisines de celles de Pyrgi. Sur ces plaques, L'area sacra di Satricum tra scavo e restituzione, exposition Museo Civico d'Albano, 20 avril/2 juin 1985, p. 55 sg. et fig. 19, p. 57, fig. 20, p. 58 (datable vers 490/480) et G. Colonna, / templi del Lazio fino al V secolo compreso, dans Quad ΑΕΙ, 8, 1984, p. 396-411. 8 Sur le modèle tyrannique du temple B, cf. M. Verzar, Pyrgi e l'Afrodite di Cipro, dans MEFRA, 92, 1980, p. 35 sg. et avec une interprétation différente, F. -H. Massa-Pai rault, Recherches sur l'art et l'artisanat étrusco-italiques à l'époque hellénistique, Rome, 1985, (BEFAR, 257), p. 10 sg. ; sur l'emploi du mythe thébain comme expression de Γυβρις,
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d'Ares thébain dont le tyran Clisthène avait consacré le culte, au cœur de Sicyonè argienne9. Un autre accent important de la composition pourrait être constitué par la présence d'Amphiaraos, déterminante, selon les versions courantes, dans l'épisode qui consacre l'acte de can nibalisme de Tydeus10. F. Roncalli, dans Rasennalì, a proposé d'identi fier le devin à la figure du guerrier qui s'efface derrière Zeus12. La proposition est suggestive dans la mesure où elle permettrait d'appréc ier l'idée qui préside à une telle mise en scène du devin dans un pr ogramme monumental étrusque. À l'ombre du Zeus Moiragetès thébain13, Amphiaraos serait l'archétype du devin qui trahit son propre camp parce qu'il a une connaissance supérieure du destin14 et s'en sert pour assouvir ses inimitiés personnelles. Mais la plaque de Pyrgi pose encore deux grands problèmes.
G. Colonna, dans NSc, suppl. 2, 1970, p. 59-62; sur l'idée d'une utilisation du mythe com mereflet de combat entre différentes factions gentilices, cf. encore nos remarques, o.e., p. 28-37. 9 Sur Mélanippe, cf. RE, suppl. 5, [1931], 5.v. Melanippos col. 725-727 [Krischan] et sur Clisthène, RE, XI. 1, s.v. Kleisthenes, col. 619-20, n° 1 (Kahrstedt). 10 Sur cet aspect d'Amphiaraos, cf. les remarques de J. D. Beazley, dans JHS, 67, 1947, p. 1 sg. La tradition littéraire, bien analysée par Beazley, ne fait pas apparaître Tydeus comme l'opposant direct de Melanippos, mais simplement comme celui qui demande la tête de Melanippos mort pour s'en nourrir. Beaucoup disent que c'est Amphiaraos qui tue Mélanippe. Beaucoup encore, sauf Stace et Libanius, qui attribuent l'acte à Capaneus, affirment que c'est le même Amphiaraos qui coupe la tête de Mélanip pe pour tenter Tydeus qu'il déteste. Le scholiaste de Pindare, Stace et Libanius sont d'ac cord pour affirmer que Tydeus demande la tête. On peut donc se poser la question sui vante : si l'artiste de Pyrgi a représenté un duel direct Tydeus/Melanippos qui n'est pas attesté dans la tradition littéraire parvenue jusqu'à nous ou si Tydeus tente de dévorer le cerveau de Melanippos qui aurait été terrassé par quelqu'un d'autre (Amphiaraos). 11 Rasenna (cité) p. 621. 12 On peut penser aussi à un personnage secondaire, en l'occurence sans doute un thébain auquel Zeu« se substituerait pour foudroyer Capaneus. Cette solution est à préfé rer si l'on pense que l'artisan a simplement rempli un espace par l'un des guerriers peu connus par ailleurs dont parle Eschyle. (Contre Capaneus le poète cite Polyphontès : Sept, 448). Mais nous nous demandons si Zeus incarnation du fatum ne couvre pas de son corps le seul guerrier qui connaît ce même fatum : Amphiaraos. Sur le cratère de Spina et le dilemme des Sept, cf. K. Jeppesen, dans Acta archaeologica, 41, 1970, p. 155 sg. 13 Paus. IX, 25, 4. Le Périégète cite près de la Porte Néiste un Zeus Agoraios et des sanctuaires de Thémis et des Moirai. Sur les cultes de Béotie, cf. maintenant A. Schachter, Cults of Boiotia (BICS, Suppl. 38), Londres, 1986, I, p. 121 sq., II, p. 125. 14 On peut songer à Véies et à l'épisode de la capture ou de la trahison du devin lors de la campagne précédant la prise de la ville.
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1) Comme l'a souligné Colonna15, les artistes ont une telle connaissan ce du mythe qu'elle suppose l'influence d'un milieu culturel bien préc is. 2) Quel est le sens de la condamnation de Tydeus et de la ville d'Argos? Sur le premier point, l'hypothèse d'une médiation ou d'un modèle chalcidien nous paraît la plus plausible. En effet l'utilisation d'un mythe en rapport avec la Béotie n'est pas concevable dans les tradi tions propres des cités coloniales grecques d'Italie, sauf peut-être dans le cas de Cumes. En effet des rapports de culte, soulignés par N. Valen za existent entre l'Eubée et la Béotie16. En outre Naples, héritière de Cumes, connaît une phratrie des Eunostidai rattachée au héros de Tanagra17. Or Tanagra (kômè de l'Harma) abritait l'une des tombes légendaires d'Amphiaraos18. Enfin, si l'on doit penser à un premier emploi politique du mythe thébain, avant que Pindare ne chante ses vers à Syracuse, Cumes et la stasis de l'époque d'Aristodème ne seraient pas à exclure, que l'on doive songer au sanctuaire d'Hèra19 ou à un sanctuaire de Leucothéa20, divinité présente aussi à Naples. Sur le second point les incertitudes sont encore plus grandes et dépendent encore plus de l'interprétation chronologique de l'édifice. G. Colonna a envisagé un sens argien-corinthien-syracusain et songe à une polémi que anti-syracusaine après la bataille de Cumes21. Mais la plaque
15 G. Colonna, dans NSc suppl. (cité). 16 N. Valenza mele, Eracle euboico a Cuma. La Gigantomachia e la Via Heraclea, dans Recherches sur les cultes grecs et l'Occident, 1, Naples (Cah. J. Bérard, 5), 1979, p. 19 sg. 17 Cf. en dernier E. Miranda, dans Napoli antica, Exposition 1985, Naples, 1985, p. 387 et la bibl. antérieure, n. 13, p. 309 (= PdP, 7, 1952, p. 396-400 pour les sources). À Thèbes, le tombeau de Mélanippos était sur la route de Chalcis (Paus. IX, 18, 1). 18 Cf. Paus. IX, 18, sg. et Strabon IX, 404 (ιερόν Αμφιάραου) dans la Kômé de l'Har ma,dépendant de Tanagra. Sur les liens entre Tanagra et Oropos cf. RE, 8.2, s.v. Tanag ra, 2157 sg. Et sur les rapports Eubée/Béotie à l'époque archaïque, Cl. Talamo, dans Cah. Jean Bérard, 6, 1981, p. 35 sg. 19 Sur le culte d'Hèra à Cumes, N. Valenza Mele, Hera e Apollo nella colonizzazione euboica, dans MEFRA, 89, 1977-2, p. 495-524. Cf. aussi G. Pugliese Carratelli, Per la sto ria dei culti delle colonie euboiche d'Italia, dans Atti Convegni Magna Grecia, Tarente, 1978 (1979), p. 221 sg. 20 II est à noter que les aristocrates qui reprennent le pouvoir en évinçant Aristodème, pénètrent dans Cumes près du lac Averne (DH. VII, 11.1). Le sanctuaire d'Hèra était sûrement situé près du port : cf. N. Valenza Mele, art. cité. Sur Leucathéa à Naples, cf. l'inscription impériale d'une prétresse de Leucathéa : E. Miranda, dans Napoli antica (cité), p. 393. 21 G. Colonna dans Magna Grecia, XV, 1-2, 1980, p. 28-30 et Id., dans Santuari d'Etruria, p. 137-138 (est condamnée 1 'ύβρις des Déinoménides).
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appartenait au fronton orienté non vers la mer mais vers la cité de Caer e.En outre d'autres sens possibles du mot argien ne sont pas encore exclus : le Latium, le pays falisque, Rome même ont des traditions argiennes22. Enfin Yhybris condamnée appartient à des héros qui i ncarnent aussi des factions et des gentes aristocratiques23. Ainsi la pro tection spéciale de Minerve dont jouissait Tydeus avant son forfait évo que la fonction d'une Minerve gentilice comparable à la divinité de la gens Nautia ou de la gens Fabia24. Le geste de Minerve aurait donc un sens bien net si l'on songe à l'évocation d'une telle réalité italique. De déesse gentilice, Minerve devient, ou choisit d'être exclusivement, divi nité de la cité25. Le temple «A» de Pyrgi pourrait donc représenter l'expression d'un idéal de polis opposé aux excès dénoncés comme archaïques, barbares, et source de tyrannie, de luttes entre gentes, quelle que soit la formule politique que l'on doive restituer pour Caere à cette époque. Cette opposition cité-gentes n'est pas moins sensible à Rome, dont les magistrats ressemblent, selon la formule de Denys d'Halicarnasse, à des αιρετοί τύραννοι26, du moins dans les premières années du Ve siè cle. De nouveau l'influence de Cumes tant en pays latin qu'à Rome nous paraît devoir être considérée. Mais les commanditaires des grands programmes sont indéfectiblement liés aussi bien à la Grande Grèce qu'à la Sicile, que ces liens soient nouveaux ou traditionnels : ïaes signatum consacré à Cérès dans le sanctuaire de Bitalemi à Gela27 22 Cf. les fondateurs argiens de Tibur (résumé des sources dans RE, VI. A. 1, s.v. col 816 sg. [St. Weinstock]). Pour Halesus et le pays Falisque, RE, VII. 2, s.v. Halesus col. 2229 sg. [weiss]. Pour les Argées à Rome K. Latte, o.e., p. 412 sg. et sur le problème de l'Hèra argienne, cf. aussi G. Maddoli, II rito degli Argei e l'origine del culto di Hera a Roma, dans PdP, 26, 1971, p. 153-166. 23 Sur cet aspect cf. notre livre, cité supra n. 8, p. 28-37. 24 Sur la Minerve de la gens Nautia, cf. Festus, 166 M et Serv. ad Aen, V. 704 (cf. ibid., II, 166 et III, 407) et DH. VI, 69. Pour la gens Fabia, qui avait des sacra gentilicia également spéciaux, cf. les hypothèses de M. Torelli, dans Lavinio e Roma, Rome, 1984, p. 51 (à propos de la Minerve du Capitolium vêtus). 25 Sur cet aspect, cf. aussi notre échange de vues avec G. Colonna, dans la discus sion. 26 DH. V, 73, 3 : (à propos de la dictature), αιρετή τυραννάς. 27 Sur cette trouvaille accompagnée de fragments de cantharoi de bucchero noir, cf. P. Orlandini, Lo scavo del Thesmophorion di Bitalemi e il culto delle divinità ctonie a Gela dans Kôkalos, 12, 1966, p. 8 sg.; Id. Gela. Topografia dei santuari e documentazione archeologica dei culti, dans RIASA, 15, 1968, p. 20 sg. C. Ampolo, Servius rex primus signavit aes, dans PdP, 29, 1974, P. 382 sg. Ampolo tou-
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pourrait constituer un singulier précédent de l'ambassade frumentaire de 492 28. En effet la présence de Y aes signatum dans ce sanctuaire n'a pas une signification génériquement «commerciale» mais indique qu'un individu d'origine italique (un romain?)29 a consacré symboli quement partie de son «peculium» à Cérès. A. Postumius Albus, Sp. Cassius Vecellinus et les Valerii sont sûre ment à l'origine de l'initiative publique et font appel aux artistes les plus prestigieux, dans un esprit de compétition avec les Latins et les Tarquins. Le problème des nuances politiques qui donnent leurs couleurs ori ginelles au culte de Cérès, comme la question des commanditaires de Damophilos et Gorgasos, est à poser en fonction du rapport ou de la différence à établir entre A. Postumius Albus, auteur du vœu du temple de Cérès et Sp. Cassius qui aurait consacré le temple30. Le premier, qui agit sur les conseils des livres sibyllins, pourrait référer son inspiration à la Demeter mantique et originelle de Cumes31 dans une tentative à la fois anti-latine et aristocratique d'annexion de la divinité thesmophor os. Le second, sans renier cette inspiration politique, pourrait avoir infléchi dans le sens du dèmos (le dèmos aggrandì par l'apport des Latins du fameux traité de Cassius l'utilité de la divinité Thesmophoros, exactement comme l'avait fait Aristodème à Cumes32. En ce qui concerne les artistes Damophilos et Gorgasos, c'est Postumius qui les aurait engagés contre paiement d'un salaire33 et leur origine serait plu-
tefois ne considère pas la valeur spéciale (économico-religieuse) de l'aes de Bitalemi com meoffrande à Cérès. 28 Sur cette ambassade frumentaire, composée d'un P. Valerius et d'un L. Geganius, cf. principalement Tite Live II, 34; DH. VII, 1-3. 29 On peut songer à la valeur du cognomen de Q. Cloelius Siculus (soulignée par G. Colonna, La Sicilia e il Tirreno nel Ve IV secolo, dans Kôkalos, I, 1980-81, p. 166). 30 Sur le vœu du temple de Cérès, cf. DH. VI, 17, 2-4 et Tacite, Ann. II, 49. Sur la consécration par Sp. Cassius, cf. DH. VI, 94.3. H. Le Bonniec, Le culte de Cérès à Rome, Paris, 1958, p. 213 sg. 31 Sur la question, N. Valenza Mele, art. cité en part. p. 502 et antérieurement G. Pu gliese Carratelli, Per la storia dei culti delle colonie euboiche d'Italia, dans XVIII Conve gno di Studi sulla Magna Grecia, Tarente, 1978 (1979), p. 221 sg. et en part. p. 227 (contre l'aspect oraculaire d'Hèra). 32 N. Valenza Mele, La necropoli cumana di VI e V secolo a.C. e la crisi di una aristo crazia, dans Nouvelles contributions à l'étude de la société et de la colonisation eubéennes (Cah. Jean Bérard, 6), Naples, 1981, p. 97 sg. 33 DH. VI, 17, 2.
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tôt à chercher en Sicile qu'à Cumes même. Comme l'a souligné Colon na, Gorgasos est un nom fréquent en Messénie34 mais l'origine ethni queprobable ne résout pas totalement la question de la cité d'origine de ces artistes qui pourraient avoir transité aussi bien par Himera35 que par les cités du détroit, comme Rhegion36. En tout cas, selon Pline, le temple de Cérès, Liber et Libera, temple tuscanique, était remarquable aussi bien par ses terres cuites que par les picturae, sûrement à restituer à l'intérieur de la cella principale et signées par les deux artistes37. Le passage plinien semble faire allusion à des crustae, qui auraient été récupérées sous Auguste grâce à la tech nique des tabulae marginatae, décrite aussi par Vitruve38. Mais, comme
34 G. Colonna, art. cité, dans Kôkalos, 1980/81, 1981, p. 164-165. 35 Sans accepter la tradition qui fait de Damophilos d'Himère, le maître de Zeuxis, on peut toutefois souligner que le seul Damophilos illustre connu (et qui suppose, comme souvent, une famille d'artisans où se retrouve le nom personnel de Damophilos) vient d'Himère. 36 On peut noter avec G. Maddoli (qui refuse cependant l'historicité de cette frumentatio) que la route de la frumentatio romaine de 492 aurait suivi les côtes de la Sicile occidentale; les navires, à un moment ou à un autre, auraient donc croisé au large d'Hi mère. Himère serait donc sur la route régulière des contacts entre l'Italie Centrale et la Sicile. Ce fait pourrait renforcer l'hypothèse de l'origine de Damophilos et Gorgasos (de la chalcidienne et dorique Himère). G. Maddoli, Storia della Sicilia, II, Naples, 1979, p. 37 ; l'importance de cette route occidentale est soulignée par G. Colonna, art. cité, p. 167 et p. 167 n. 36 (se référant à G. Maddoli). 37 Pline, N.h., 35, 4. H. Le Bonniec, o.e., p. 256-266. On pourrait songer également à un déploiement du système décoratif sur chacune des alae, dextra et sinistra parte. 38 Vitruve (II, 8, 9) évoque des peintures de Sparte qui furent sectionnées et incluses dans des cadres en bois sous l'édilité de Varron et Murena. Le passage de Vitruve est le meilleur commentaire technique, nous écrit P. Gros, du sens de tabulae marginatae chez Pline. En effet, Pline évoque aussi des tabulae marginatae qui durent encadrer les enduits (cf. aussi Pline 35, 173 pour crustae) de la paroi interne de la cella. H. Zehnacker (com mentaire de Pline, N.h. 33, 157, éd. Budée) note que crustae peut désigner aussi les reliefs ornant certains vases. En ce sens aussi H. Le Bonniec, o.e., p. 260 (crustae = plaques avec bas-reliefs). La technique de récupération des fresques anciennes est souvent employée à la fin de la République et sous l'Empire en raison de l'attrait que représentaient les anciennes peintures ou fragments en terre cuite ou en marbre (typoï) pour la décoration des mai sons. On encastrait souvent ces fragments dans l'enduit (in tectorio : cf. Cic. Ad. Att. I. 10.3) des parois. Sur le sens de «typoi», cf. Athenagoras, Leg. pro Christo, 17, cité par M. Torelli, dans Mèi. Magi. On peut donc se demander quelle destination ont eue les fresques de l'ancien temple de Cérès, Liber et Libera et les ornements du toit. Seront-ils allés orner quelque villa de
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le contexte du passage en question concerne spécialement les rapports de la coroplathie et de la peinture, on peut se demander si le décor interne du temple n'était pas plutôt comparable aux tuiles peintes du Portonaccio à Véies, ou à celles de Falerii, fixées sur une armature en bois39. On hésite donc entre des fresques sur enduit, nouveauté absolue à Rome et dont l'antiquité est loin d'être prouvée pour Caere et le Latium40, et une série de pinakes en terre cuite, qui seraient la synthèse entre l'art du coroplathe et l'art du peintre, et rappelleraient les fameus es pinakes de Locres. Le contenu des scènes représentées se laisse en tout cas deviner : elles devaient faire allusion aux deux fêtes rituelles des nuptiae Orci et du sacrum anniversarium Cereris analysées par Le Bonniec et Torelli41. Tibère? Pour conclure nous croyons que la mention des tabulae marginatae montre que l'on a découpé un enduit. De là il ne s'ensuit pas immédiatement que les fresques étaient sur enduit. En effet certaines des plaques peintes en terre cuite de Cerveteri (cf. F. Roncalli, Le lastre dipinte di Cerveteri, Florence, 1965, p. 50-51) étaient directement immergées dans l'enduit-ciment de la paroi. Si les pinakes en terre cuite étaient distantes les unes des autres, elles pouvaient bien être séparées par des zones d'enduit. Même si elles formaient une frise continue, l'enduit à découper n'en existait pas moins supérieurement et inférieurement aux plaques. 39 Sur ces tuiles pour Véies cf. E. Stefani, dans NSc, 1953, p. 67 sg. Santuari d'Etruria, Florence, 1985 (exposition Arezzo 1985), p. 107 n.E. Pour Falerii, A. Andren, o.e., fig. 24, p. 91. 40 Ce sont des tuiles peintes qui sont connues pour Caere (cf. en dernier F. Roncalli, o.e., supra, n. 38) et le passage de Pline parlant de fresques «antiquiores urbe» à Ardée (voir n.h., 35, XVII) est vague et a plus de chances de se rapporter à l'époque hellénisti que qu'à l'époque archaïque (Capaneus frappé de la foudre est un topos du pathos et des mirabilia hellénistiques (pour la peinture de Tauriscos, cf. Pline, n.h. 35, 144) et n'est pas traité dans le contexte des vases attiques, surtout de la façon précise (les tempes transper cées par la foudre) dont Pline décrit les fresques d' Ardée ; Id. pour les iconographies clas siques des scarabées étrusques: P. Zazoff, Etruskische Skarabäen, Mayence, 1968, n° 832 sg. (index) en part, dans le texte n°62, 63, 65, 78, 83, 141, 247, 249, 250. Pour l'antiquité des fresques d'Ardée, cf. G. Colonna, / templi del Lazio fino al V seco locompreso, dans Arch, laziale, 6, 1984, p. 409. Pour une date à l'époque hellénistique, F. CoARELLi, Arte ellenistica e arte romana : la cultura figurativa in Roma tra li e I secolo a.C, dans Caratteri dell'ellenismo nelle urne etrusche, Florence, 1977 (suppl. I, Prospetti va), p. 39. Lyco ou Loco (? ! cf. Ed. Budée, J. M. Croizille ad toc. = Pline 35, 115), auteur des fresques du temple de Junon Regina n'est pas déterminable chronologiquement. Mais c'est avec lui que M. Plautius semble rivaliser de génie. 41 L'enlèvement de Cérès et son mariage correspondent aux nuptiae Orci. Le sacrum anniversarium Cereris serait lié à l'été, à la moisson et à Proserpina retrouvée : H. Le
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Par là le décor interne représentait une nouveauté dépassant l'âge des tyrans dans son utilisation de la mythologie. Cette dernière en effet n'est plus la simple traductrice des valeurs du pouvoir (triomphes, apo théoses). Au contraire, la présentation presque ésotérique, à l'intérieur de la cella, du cycle démétriaque, revêtait une valeur paradigmatique pour l'histoire de tout individu formant la communauté attachée au sanctuaire, puisque le récit imagé reflétait sur le mode du quotidien42 la valeur sacrée du rite matrimonial et de la juste acquisition de liens de parenté43. Le décor interne du temple du Portonaccio, à Véies, postérieur à l'œuvre de Damophilos et Gorgasos, reflète sur le mode mineur44 la nouveauté romaine. Comme à Rome, en effet, l'image mythologique ou l'image tendant à élever au plan mythologique des éléments narratifs concernant les hommes et les dieux45, assume également un caractère paradigmatique susceptible d'applications au domaine du status et de l'histoire individuelle. L'exemple le plus clair est sans doute le fameux combat dit des Amazones qui évoque plutôt une danse rituelle, en rapBonniec, o.e., p. 400 sg. et 438 sg. M. Torelli, Lavinio e Roma, Rome, 1984, p. 94, 132-133 {Orci nuptiae). 42 Voir dans des pinakes de Locres l'opposition entre le cadre (l'oïkos), les objets (les coffrets de mariage, etc. . .) et leur projection dans une autre dimension, cf. l'interpréta tion de M. Torelli, dans^m' Convegni Magna Grecia, 16, 1976, p. 147 sg. Sur les pinakes de Locres cf. H. Prückner, Die Lokrische Tonreliefs, Mayence, 1968 en part, p. 112 pour la distribution de plaques semblables à Sélinonte, Syracuse et Tharros; pour Medma, cf. NSc. suppl. 1913, p. 138, pour Hipponion, M. Schinko, dans Klearchos, 57-60, 1973, p. 59 sg.; pour Gravisca, M. Torelli, dans PdP, 1977, p. 411; cf. aussi les types de pinakes, plus archaïques encore, du temple de Demeter à Syracuse : G. V. Gentili dans Boll, d'arte, 58, 1973, p. 3-8. 43 M. Torelli, Lavinio e Roma (cité), p. 132. 44 En particulier nous ne sommes pas sûrs d'avoir affaire à un cycle ou à une narrat ioncontinue. 45 II en est ainsi de la tuile présentant une scène interprétée comme une scène de pêche par Stefani (art. cité, p. 67 sg. n° 37). En réalité, la mer qui est au-dessus du niveau du personnage féminin, ne saurait indiquer, par une traduction grossière de la perspecti ve inconnue dans les tombes tarquiniennes contemporaines, que la mer est à côté du per sonnage. Il s'agit plutôt d'un lieu sous la mer, qui pourrait évoquer le domaine de Venilia, divinité présente dans le sanctuaire (cf. TLE 34 et G. Colonna, séminaire à l'université de Rome, Mai 1986) ou encore la mystérieuse Ortygie, lieu de naissance d 'Artémis (cf. RE, 18.2, s.v. Ortygia, col. 1522 sg. [Johanna Schmidt]). L'évocation des persécutions de Léto de la part de Python déjà présente dans l'une des statues-acrotères du sanctuaire, pourr aitêtre répétée par la tuile = Stefani, n° 15 qui montre un serpent courant sur les flots.
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port éventuel avec le problème des transitions d'âge récemment analy sé par Torelli46. On songe au jeu guerrier d'Athèna et Iodamas, à l'évo cation d'une réalité qui concerne peut-être l'existence de Virgines Saliae47. Cependant on ignore pour Véies selon quelle construction théo logique ces images sont corrélatives du fatum personnel des fidèles ou du fatum de la communauté de référence (toute la polis; une partie du corps social?) et selon quelle formule politique (tyrannie ou aristocrat ie)48. Un dernier problème est lié à l'activité de Damophilos et Gorgasos : il a trait à la présence à Rome d'un chef-d'œuvre comme le torse de l'Esquilin. Sans reprendre tous les éléments d'un dossier examiné maintes fois49, nous nous bornerons à quelques remarques. Le torse appartenait vraisemblablement au sanctuaire de Venus Libitina50 et cette considération nous paraît entraîner trois questions : 1) la qualité de la terre cuite est l'indice d'un commanditaire de haut rang, a fortiori s'il s'agit d'un anathema51; 2) la provenance de l'Esquilin permet de situer ce chef-d'œuvre dans le contexte d'une activité artisanale modest e mais significative comme la production des arulae funéraires, objets dont le modèle est aussi d'origine sicilienne ou italiote52; 3) quel est le
46 Lavinio e Roma (cité) p. 31-47. 47 Sur Iodamas, tuée par erreur par Athéna, au cours d'une initiation guerrière, RE, IX. 2, s.v. Iodama, col. 1839-41 [Gunning]. Sur les virgines saliae à Rome et leur costume militaire, cf. Festus, p. 329 M. Sur les Saliens à Véies institués par le roi Morrius, cf. Servius, Ad Aen, 8, 285. 48 Pour l'époque des tuiles de Portonaccio (datées vers 480-470), on proposerait plu tôt une formule aristocratique parce que le roi Tolumnius a été élevé à la tyrannie lors que les Véiens se furent lassés du système électif dans les commandements (Tite Live, V, 1,3). 49 En dernier, G. Colonna, Un aspetto oscuro del Lazio antico dans Lazio arcaico e mondo greco, dans PdP, 32, 1977, p. 162-165; sur ces trouvailles de l'Esquilin, voir essen tiellement BC, 5, 1877, p. 276 sg. (dépôt votif près de l'église S. Antonio) et BC, 3, 1875, p. 54 (trouvailles au-delà de Porta Esquilina, isolato XXI, S. Vito) : cf. aussi BC, 42, 1914, p. 144 sg. 50 Sur le sanctuaire de Libitina, cf. J. Lugli, o.e., p. 47 sg. Il était probablement orné de plaques de type Velletri - S. Omobono, comme l'indique ces éléments réemployés dans les tombes de la nécropole voisine : BC, 3, 1875, tav. VI, 1. 51 G. Colonna (art. cité supra) penche pour cette solution. 52 Sur les figlinae de l'Esquilin, J. Lugli, Fontes ad topographiam veteris urbis Romae pertinentes, IV, Rome, 1957, p. 35 : cf. Varron, LL, 5, 50 et Festus p. 344 L. Sur les arulae de Rome, cf. F. Castagnoli, dans BC, 77, 1959/60, p. 161 sg. Sur le problème de la fonc tion des arulae en dernier D. Ricciotti, Antiquarium comunale, terrecotte votive. 1 Arule,
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contexte iconographique du fragment? L'hypothèse minimum reconst ruit un fragment de combat épique et, dans le cas d'un anathema, on songerait plutôt à un duel. Dans la technique particulière du fragment, la couleur blanche peut se rapporter aussi à un guerrier. Mais la couleur blanche n'est pas à elle seule un argument pour exclure un personnage féminin qui, en l'occurence, ne pourrait être qu'une Amazone. Cependant, on attribue généralement au torse un fragment de jambe revêtue de cnémide et cette jambe a des muscles plutôt masculins. Or cette attribution n'est ni exclue ni prouvée53. Même si l'on penche pour un guerrier blessé, un fragment d'Amazonomachie n'est pas même à écarter, comme l'avait souligné Giglioli. Le thème de l'Amazonomachie (Amazonomachie d'Héraclès à la conquête de la ceinture d'Ares ou Amazonomachie de la guerre de Troie), thème à la fois erotique et funéraire, se chargerait en tout cas d'une rare suggestion dans un sanctuaire de Libitina qui est aussi Venus equester54. Mais même un thème épique troyen serait plein de significations. Devant un tel fragment, on songe aux liens des Valerii avec la Venus equester, mis en évidence par Coarelli55, et au fait que Servius (ad Aen IV, 410) leur attribue une maison in esquiliis qui devait se confondre ou qui est confondue avec la maison de Tarquin le Superb e. Ce rapport des Valerii avec les cultes funéraires, manifeste aussi dans leurs liens avec le Tarentum56, est bien mis en évidence en core lors de la mort glorieuse des fils du Publicola ou de leur oncle pendant
Rome, 1978, p. 5 sg. et p. 62 sg. (cf. pi. I, 1 et II, 2-3 pour le début de la production entre fin VIe et début Ve siècle a.C). 53 En ce sens, nous ne serions pas aussi sûre de ce fait que M. Sgubini-Moretti, dans Enea nel Lazio (catalogue de l'exposition), Rome, 1981, p. 152-54, C. 69. La seule chose prouvée est que la jambe appartient au même ensemble, A. Andren {o.e., p. 345, I, 4) cite aussi une tête revêtue de la leontè provenant de l'Esquilin. Mais les caractères de l'argile et de la polychromie devraient faire écarter l'attribution aux frag ments ici examinés, même si rien n'exclut que cette tête d'Héraclès ait été trouvée dans les parages du sanctuaire de Libitina. 54 Sur ce lien cf. M. Torelli, Lavinio e Roma (cité), p. 151. 55 F. Coarelli, // foro Romano I. Età arcaica, Rome, 1983, p. 80-82. 56 F. Coarelli, // Campo Marzio Occidentale. Storia e topografia, dans MEFR, 89, 1977, p. 807-46.
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la bataille du lac Régule. Tels Hypnos et Thanatos, les Valerii portent le cadavre de leur oncle dans le camp romain57. Ces suggestions ne prétendent pas reconstruire toute la réalité mais veulent seulement jeter une lueur sur la perspective historique dans laquelle se situe une pièce aussi exceptionnelle. Cet exemple, comme d'autres - et je n'excluerais pas la Louve capi toline, en songeant cette fois aux Fabii58 -, révèle l'imbrication et par fois la contradiction intime entre initiative gentilice et initiative publi queau cœur de l'art subarchaïque et sévère de style italique. Contraire ment à ce qui se passe à Athènes, le premier quart du Ve siècle ne sert pas à clarifier, à purifier totalement le rapport entre la valeur person nelleet de «genos» assumée par la scène épique et la valeur historique d'ordre général, à rapporter à la communauté civique.
II Un autre aspect de la crise a trait à la transformation du rapport précédemment institué entre la cité et les différentes catégories d'arti sans, question immense qui met en cause le fonctionnement et la finali té des collegia par rapport à la propriété et à la commandite aristocrati que59. Cette transformation se manifeste par la rupture ou l'instabilité 57 Tue Live, II, 20, 1-3; DH. VI, 12 (version légèrement différente) et RE 14 halb., s.v. Valerius, col. 178, η. 302. 58 Cf. l'antiquité des luperci Fabiani. Pour les sources RE, 13.2, 5.v. luperci, col. 1830 sg. [Marbach] et K. Latte, Römische Religions-geschichte, Munich, 1960, p. 85 sg. 59 La période archaïque se caractérise en effet par des phénomènes de mobilité sociale qui, rapportés au monde artisanal, consistent, en particulier, dans la faculté pour un étranger d'ouvrir un atelier (voir Démaratos et sa suite d'artisans) : cf. en dernier sur le problème M. Torelli, dans Studi in onore F. Magi (Qua Un. Perugia, 1, 1979), p. 307 sg. Dans le cas d'un grec installé ou d'un grec utilisant des services locaux (ateliers, intermédiaires de commerce), cette activité n'était rien d'autre qu'une forme de commerc e ou de prestation de service légalisée, expliquant peut-être en partie l'acquisition d'un gentilice ou d'un pseudo-gentilice (cf. Lard Telicle; Rutile Hipucrate). Toutefois, on peut se demander si Lard Telicle ou Rutile Hipucrate, ne sont pas l'équivalent de Lard ou Rutile (dépendant de, représentant de, négociant pour) Telicle ou Hipucrate plutôt que de Telicle accueilli dans la cité avec praenom. Lard, et gentilice Telicle. Quelle sorte d'équilibre existait-il entre ateliers ouverts par des étrangers et ateliers locaux? Et le statut public (l'appartenance à un collegium) exclut-il la dépendance? Les arti-
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de la relation qui unit l'existence de certains produits de l'artisanat à l'existence de groupes socialement constitués et réguliers de destinatair es. C'est dans ce contexte que se posent des questions cruciales à pro pos de la persistance ou de la disparition de certaines classes de pro duits artisanaux. Comment expliquer en effet le cours pris par la pro duction étrusque à figures noires ou à figures rouges durant le Ve siè cle? Comment rendre compte de l'histoire de la sculpture funéraire en bas-reliefs à Chiusi ou à Bologne? Les phénomènes de continuité ou de rupture ne s'expliquent sans doute pas seulement par la conjoncture externe mais aussi par l'incidence de facteurs internes à la société. Le développement de la figure noire avait révélé précédemment quatre traits : 1) des ateliers et des artisans dont certains avaient un étroit rapport avec la culture et la langue grecque. En témoigne l'am phore de Florence publiée dans le Boll, d'arte par P. Bocci et A. Maggiani60; 2) des propriétaires d'ateliers ou des patrons d'artisans (ainsi Mucade revalorisé par Colonna)61 dont certains étaient d'origine étrus que; 3) un marché articulé supposant des ateliers itinérants. Ainsi le rapport entre Vulci et d'autres cités est souligné encore récemment par Ginge62; 4) un répertoire de sujets représentant une tentative intéres-
sans locaux sont-ils « à leur compte », ou travaillent-ils aussi, comme des oiketai d'un cer tain type au service de grandes génies ? Autant de questions qui ne sont pas résolues. Toutefois la réorganisation des collegia numaïques par Servius Tullius devait tenir compte de deux choses : affirmer la priorité de la commandite publique sur d'autres types de commandite, tout particulièrement dans le secteur sensible de la construction (place des tectones) ; cette mesure de la reprise en main de la construction publique (quell e que soit sa couleur, et en l'occurence, sûrement d'ordre tyrannique) va contre le pou voir des grandes génies. D'autre part on peut songer à une réduction de la dépendance des artisans vis à vis de la propriété des génies par le reversement des collegia dans les circonscriptions urbaines qui échappent au contrôle traditionnel des génies sur le territoi re. Tout le problème est au fond de savoir quand naît la commandite proprement dite (avec le salaire ou avec des pratiques assimilables au salaire : par exemple le dépôt de bronze dans la «stips» d'un temple ou d'un lieu de culte réservé à un collegium). 60 P. Bocci - A. Maggiani, Una particolare hydria a figure nere del Museo Archeologico di Firenze, dans Boll, d'arte, 30, 1985, p. 33 sg. 61 G. Colonna, Firme di artigiani di età arcaica in Etruria, dans MDAI (R), 82, 1975, p. 181 sg. en part. p. 186 sg. Le fait que MucaQe ne soit pas un gentilice à proprement parler mais un ethnique employé comme gentilice milite en faveur d'un artisan originai re de -, donc qui s'est déplacé pour venir travailler dans la « grande ville ». 62 B. Ginge, Ceramiche etrusche a figure nere (MAMT, 12), Rome, 1987, p. 15-16.
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sante de créer un imaginaire commun à la culture grecque et à la culture étrusque, tentative qui s'apparente aux réalisations décoratives des fresques funéraires63. Les deux premiers points évoqués laissent penser que la fin de la production de ces vases correspond à la fin de l'atelier libre dont l'existence dépend du développement de structures sociales en relation avec les emporta, la météquie64 et la mobilité des décorateurs. Les deux derniers points nous invitent à chercher, dans la clientèle de ces vases, ou un groupe social homogène65, commanditaire régulier se reconnaissant dans l'imaginaire constitué par les thèmes de ces vases, ou bien un moment d'homogénéité sociale relative qui ne se maintiendra pas. En ce cas nous penserions à la production des vases à figures noires comme témoin d'un équilibre entre gentes et «demos», d'un système de production et de redistribution encore tout archaïque entre l'aristocratie et ses clientes ou oiketai. En ce sens pourraient nous éclairer les enseignements de l'étude encore en cours de la catégorie des plats dits «spurinas»66. 63 Cf. par exemple F. Gaultier, dans Tarquinia, ricerche, scavi e prospettive, Milan, 1987, p. 209 sq. 64 Sur ce point, en relation, en particulier, avec Arnd Praxias, cf. G. Colonna, art. cité, supra n. 61, p. 188. 65 En ce cas les gentes et les parties du demos qui sont actives dans le fonctionne ment des emporia : Tarquinia, Vulci, essentiellement, aussi Caere. Le cas du groupe d'Or vieto (cf. A. L. Calò dans SE, 10, 1936, p. 429 sg.) peut aussi être en rapport avec des structures de type emporial, en rapport avec les commerces de la vallée du Tibre. Sur l'économie d 'Orvieto- Volsinii, en dernier, G. Colonna dans Ann. Fondazione Faina, II, 1983, (1985), p. 128 sg. 66 Sur ces plats, cf. J. D. Beazley, Etruscan Vase Painting, Oxford, 1947, p. 24 sg. et p. 296; en dernier P. Fortini, Contributo introduttivo allo studio dei piattelli spurinas, dans Documenta Albana, M.C. ser. 2, p. 97 sg. cf. aussi S. H. Garver, Etruscan stemmed plates of the sixth and fifth Centuries, Ann Arbor Diss., 1980. La principale question posée par cette classe qui a été retrouvée en contexte funérair e, en contexte de sanctuaire (Pyrgi, Orvieto), ou d'emporion (sanctuaires de Gravisca), est de savoir si l'inscription peinte avant cuisson est une marque d'atelier (en ce sens M. Cristofani, dans SE, 34, 1966, p. 352 n. 2) ou possède d'autres significations. Les ins criptions présentent : des gentilices seuls au génitif (type spurinas) ; des formules nominal es plus développées (gentilice + praenomen en abrégé, ex. la : reces) : des prénoms sim ples (venelus) ou des appellatifs (hurOus, denus) au génitif, ainsi que des noms de divinit és.Les vases, d'après Colonna, auraient une circulation « paracommerciale » destinée à sceller le nom de celui qui en fait la commande et qui en fera le don (G. Colonna, Atti del Convegno «l'Etrusco arcaico», Florence, 1976, p. 20 sg.). Si le don est à l'intérieur de la famille ou si le donateur est bien connu du destinataire, l'exigence de formuler le gentili ce n'existerait pas. Dans le cas de la reproduction de noms de divinités, il s'agirait d'ob-
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L'exemple de la figure noire en Campanie, analysé par F. Parise, inspire d'ultérieures réflexions. Cette production composée de vases modestes connaît son moment le plus significatif vers 480/460 mais se maintient au-delà de 450 67. Elle présente aussi un répertoire original, qui a des racines dans l'imaginaire local68. Enfin les contextes funérai res connus de ces vases appartiennent à des tombes relativement mod estes à incinération à fosse69. Il vaut la peine peut-être de relever que Γ acmé de cette production correspond aux années que Caton attribue à la fondation de Capoue70. Même si ce moment n'est pas celui de la naissance proprement dite de Capoue et ne correspond pas, comme le
jets appartenant à Y instrumentant de sanctuaire et, en tant que tels, ils seraient marqués au nom de la divinité qui en est le titulaire, sur requête de l'autorité qui en fait la com mande. Nous nous demandons si l'explication par des signatures d'artisan (praenomen seul) mais dont le propriétaire ou l'atelier est bien connu (c'est pourquoi celui qui signe n'a pas besoin de le préciser) ou par la marque d'un propriétaire de l'atelier (gentilice ou praenomen + gentilice) ou encore, dans le cas d'un nom de divinité, le fait que soit indi qué un atelier (de la propriété) du sanctuaire, donc de la divinité, ne permettrait pas une approche plus satisfaisante de la question. Comme dons, ces plats n'ont rien de particu lièrement précieux; ils n'auraient de sens dans cette fonction que s'ils accompagnaient d'autres vases plus riches. D'autre part le système du don se poursuit-il au niveau d'une pratique, même symbolique et paracommerciale, entre VIe et Ve siècle? Dans le cas d'une explication par ateliers au contraire, nous aurions : a) la preuve de l'existence d'ateliers de propriété gentilice avec un certain nombre de dépendants; b) l'individualisation des gentes mêmes qui sont liées à certaines activités de com merce et d'artisanat nées dans le contexte des emporta et se répandant ensuite dans tous les cas où l'on peut soupçonner une possibilité de marché (donc une communication sociale entre gentes ou entre gentes et demos au sein d'une même cité (jusqu'à un certain point Chiusi, Vulci). On retrouve donc le problème de l'homogénéité sociale comme condition de la production et de la distribution de certaines classes de matériel. 67 F. Parish, Ceramica campana a figure nere, Florence, 1968, p. 133 sg. 68 F. Parise, ibid., p. 116 sg. 69 Ibid., p. 140 sg. 70 Caton, Origines, fr. 69 Peter. Il faut tenir compte aussi pour cette date, comme le souligne E. Lepore (Storia, arte e cultura della Campania, Milan, 1976, p. 30) le fait qu'une certaine historiographie ne voul ait pas se représenter comme ancienne la domination étrusque en Campanie (pour mieux dire dès l'époque Villanovienne). Néanmoins la date précise de Caton devait se raccorder à quelque événement choisi comme remarquable et ayant un caractère fondat eur.Cf. aussi sur la valeur de cette tradition J. Heurgon, Recherches sur Capoue préro maine (BEFAR, 154), Paris, 1942, (1970), p. 63.
Coupe attique de la tombe 128 de Spina (interpretation gtaphiqiu du id apres S Αι rkìhmm.a, o.e., pi λ4).
tondo
Fig. 2 - La même (interprétation graphique), face A (S. Aurigemma, ibid.).
Fig. 3 - La même (interprétation graphique), face Β (S. Aurigemma, ibid.).
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souligne Johannovsky71, à un apport appréciable de population, il pourrait représenter néanmoins une phase d'organisation sociale et politique. Or cette organisation suppose ou une homologation des sta tuts civiques comparable au cas des colonies grecques ou un ordre reconnu entre composantes sociales différentes mais connaissant des formes de mutuelle intégration. Dans ce contexte, l'homogénéité d'une production (et, pour en définir l'entité, une scène de culte aussi singul ière que celle traitée, par exemple, par le groupe du Diphros aurait une certaine valeur)72 indiquerait également l'homogénéité d'une clas sede destinataires et nous ferait peut-être approcher de l'idée de «co lon» campanien. Peut-être retrouve-t-on mêlés des éléments ayant fait partie de la clientèle de grandes génies ou assimilables à des génies minores, qui, de plus en plus, dans la seconde moitié du Ve siècle, se définiraient par les connotations caractéristiques d'une plèbe73. L'histoire de la figure rouge entraîne des considérations en partie du même ordre. En effet ArnOe Praxias et ses émules, comme le démont rent les études et réflexions de Cl. Laviosa et de G. Colonna74, appar tiennent de nouveau au milieu de la météquie ou de la pseudo-météquie. Certes Praxias est sûrement le nom du Chalcidien à l'origine de l'atelier75 mais, en considération du style graphique particulier des représentations, ArnOe Praxias n'est-il pas plutôt un Étrusque travail lant pour Praxias76 qu'un Grec prenant le nom a'Arnd ou ArnQel En tout cas, la disparition de la signature Praxias et la pulvérisation des expériences qui ont un rapport de filiation avec ce style particulier, supposent de nouveau la disparition ou la marginalisation de l'atelier libre. En outre, comme dans le cas de la figure noire, il est vraisembla-
71 W. Johannovsky, Materiali di età arcaica della Campania, Naples, 1983, p. 87 et p. 11-12. 72 F. Parise, o.e., p. 14 sg. en part. tav. Ill (5A), tav. IV (7B), tav. V (8A et 8B), tav. VI (10A). 73 Comme le démontrerait le contexte modeste où ont été trouvés ces vases, supra n. 67 74 G. Colonna, art. cité, supra n. 61 ; Cl. Laviosa, Vasi etruschi sovradipinti, dans Boll, d'arte, 43, 1958, p. 293 sg. ; Ead, dans Boll, d'arte, 45, 1960, p. 297 sg. 75 Sur le caractère sicilien de l'écriture, en dernier G. Colonna, art. cité, supra, n. 61, p. 188. Le A pointé cependant ne permet pas à coup sûr de dire que Praxias est Chalci dien,cf. l'article de A. Brugnone, dans Kôkalos, 24, 1978, p. 69 sg. (A pointé également dans des cités non-chalcidiennes) 76 Qui prendrait donc son nom de l'atelier Praxias, et de condition plutôt assimilable du moins dans la formule onomastique, à celle d'un libertus.
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ble de songer ou bien à la fin d'un rapport de commandite régulier avec des groupes sociaux déterminés ou bien à la fin de certains équili bressociaux comme condition d'une forme de commandite. Conséquemment, on se demande si la fermeture sociale que révèle l'évolution des produits artisanaux précédemment considérés n'aide pas à mieux situer le problème des signatures d'artisans d'origine grec que qui, en plein Ve siècle, transposent leur nom en étrusque soit le type Metru et peut-être Pheziu Paves ou Taves77. Colonna a relevé le climat de fermeture juridique de la cité par rapport aux années de Praxias que révèlent ces formes étrusquisées de signatures78 et Torelli a songé à rapprocher l'organisation de la production de ces vases attiques distribués en Étrurie, du phénomène des andrapoda misthophorounta ou des esclaves Xôris oikountes connus en Attique79. Il pense en effet à une sorte de production déléguée dans un système contrôlé par les aristocrates étrusques. Je me demande si la transcription en étrus quedu nom grec ne suppose pas un statut de l'artisan comparable à celui des oiketai étrusques ou faisant semblant d'être tel. L'assimilation d'un artisan à un oiketès consacrerait une évolution déjà sensible de puis longtemps et serait un des symptômes d'une véritable capture de la production artisanale dans le cadre d'une structure économique et juridique fermée comme la maison aristocratique : ce ne serait plus Yemporion mais Yoikos qui réglerait en quelque sorte les caractères de la formule onomastique. Cette explication pourrait rendre compte des deux tendances de la figure rouge proprement étrusque vers la fin du Ve siècle, rappelées récemment encore par P. Bocci80. D'une part des artisans ou des déco rateurs, lointains élèves d'artisans comme Metru, auteurs d'une product ion isolée et provinciale de petites coupes témoignant du caractère, pour ainsi dire individuel et corrélatif à chaque oïkos, du fonctionne-
77 Pour Metru, cf. TLE 370 et G. Colonna, art. cité, supra n. 61, p. 190 et C. De Simo ne,o.e., p. 94 n° 1 s.v. Pour Karmu, autre artisan grec à Populonia, TLE 373 > SE, 43, p. 213, n. 17. Pour Pheziu, cf. A. Talocchini, dans SE, 46, 1978, p. 343 n. 97. 78 G. Colonna, art. cité, supra n. 61, p. 190. 79 M. Torelli, L'arte degli Etruschi, Bari, 1985, p. 128-129. Sur ces catégories d'escla ves attiques, cf. E. Perotti, dans Coll. Besançon, 1972, p. 47-56 et Id., dans Coll. Besançon, 1973, p. 179-194. On pourrait se demander si dans la tombe Golini I le type onomastique Qresu penznas, etc. ne désigne pas des esclaves loués à des tiers. 80 P. Bocci, // pittore di Sommavilla e il problema della nascita delle figure rosse in Etruria, dans SE, 50, 1982, p. 23 sg. en part. p. 33 sg.
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ment des ateliers, d'autre part l'apparition des nouveaux ateliers atticisants entre la fin du Ve siècle et le premier quart du IVe siècle (peintre de Sommavilla, de Pérouse, de Diespater, etc.)81 qui, par le caractère organisé de leur production, évoquent de nouveau indissolublement un statut artisanal compris dans les structures communautaires, selon des formules renouvelées par rapport aux formules archaïques d'emporion, et une conscience de polis retrouvée des groupes de destinataires. À la lumière de cette enquête sur la céramique, l'histoire de la pro duction artisanale de série, acquerrait une certaine cohérence. En effet la mainmise de l'aristocratie sur la production artisanale et l'attraction de cette dernière dans la sphère de Yoïkos au point de déterminer par fois des phénomènes inverses de ceux qui avaient conditionné la réor ganisation des collegia et de la commandite publique sous Servius Tullius, expliqueraient tous les phénomènes assimilables à une involution ou à une décadence. On songe en particulier à la décadence de la pein ture funéraire de Tarquinia dans la seconde moitié du Ve siècle82, com meà la fin, pour autant qu'on puisse en juger, des grands ateliers de coroplathie qui semblent désormais fixés dans les sanctuaires83 comme l'artisan peut parfois être fixé à Yoïkos. À ces exemples, qui mettent en cause l'organisation de l'artisanat, s'ajoutent d'autres exemples, qui concernent plus spécifiquement la question de l'homogénéité sociale, comme condition de production de certaines classes d'objets. Ainsi la fin des bas-reliefs funéraires de Chius i dans le premier quart du Ve siècle paraît accompagner la fin de cer tains équilibres socio-politiques et une radicalisation de la société dans
81 Nos dates sont larges dans la mesure où pour certains de ces peintres (peintre de Pérouse, de Diespater), l'accord des spécialistes sur la chronologie n'est pas encore acquis. Pour les tendances les plus récentes d'évaluation et la révision critique de certai nespièces ou de certaines séries, cf. F. Gilotta, // problema «Earlier red figure», dans Contributi alla ceramica etrusco tardo classico, Rome, 1985, p. 25 sg. Sur les raisons de cette nouvelle impulsion (diaspora athénienne après la guerre du Péloponnèse), cf. G. Pianu, Ceramiche etrusche a figure rosse, dans MMAT, 1, 1980, p. 3. 82 On songe à la difficulté d'individualiser des ateliers, au fait même que les tradi tions d'atelier se perdent sûrement. Cf. P. Bocci, art. cité. 83 Le corollaire de cet aspect, c'est le développement de la production votive en terre cuite. Mais on peut rarement songer à des équipes itinérantes ou à des emprunts de matri ces dans ce domaine au-delà de 450. Voir l'exemple de Falerii analysé par A. M. Comella, / materiali votivi di Falerii, Rome, 1986 (Archeologica, 63) p. 215 sg.
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le sens oligarchique84. Au contraire, la persistance d'ateliers de stèles historiées à Bologne durant tout le Ve siècle présuppose l'homogénéité d'un ensemble social fonctionnant selon des critères ou des idéaux «isonomiques». En effet les stèles de Bologne distinguent les plus riches sépultures mais aussi les sépultures de ceux qui entreraient dans la définition de la classis*5. Ainsi cette production qui se maintient, telle la figure noire à Capoue, serait vraisemblablement l'expression d'indivi dus se rattachant à une idée-force, l'acte de colonisation comme phéno mène agrégateur et porteur d'ordre social. Aussi les différents thèmes iconographiques de ces monuments exaltent-ils le status aristocratique mais aussi, dans le dernier quart du Ve siècle, exhument-ils des images révélatrices, comme la louve ou la lionne allaitant l'enfant86. Le motif, qui se répète87, ne se réfère pas individuellement au défunt, mais au mythe-collectif de fondation entrant en quelque sorte dans le patrimoi ne du défunt comme descendant des plus anciens colons.
III Malgré les ambiguïtés des programmes monumentaux de polis dans la première moitié du Ve siècle, les difficultés ou les contradic tions caractérisant les rapports entre artisans et destinataires, entre production artisanale et équilibres sociaux, perçoit-on cependant une évolution qui conduit à un véritable renouvellement de la place et de la fonction de l'art dans la cité étrusque? Dans ce processus et quelles que soient les différences régionales et les variations des flux commerciaux, les vases attiques et les images qu'ils ont transmises en Étrurie nous paraissent avoir joué un rôle puis sant de médiation culturelle. Posséder un vase attique, c'est d'abord affirmer la possession d'un objet prestigieux que l'on peut thésauriser selon les principes de la mentalité aristocratique, bien mis en évidence par D. Musti88; mais c'est aussi thésauriser des images porteuses de 84 En ce sens M. Torelli, L'arte degli Etruschi (cité), p. 147-150. 85 Pour les représentations hoplitiques, cf. P. Ducati, dans MAL, 20, 1910, c. 656 sq. Pour les cavaliers cf. ibid. c. 574 sq. c. 670 sq. 86 P. Ducati, ibid., fig. 24, c. 531. 87 P. Ducati, c. 532-533 (figures de lionnes ou félins femelles), mais le dessin fait penser à des éléments plus archaïques. 88 D. Musti, L'economia in Grecia, Bari, 1981, p. 54.
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sens : sens propre, écho direct de la polis athénienne et de ses concepts, et sens figuré correspondant aux significations que la société d'accueil accorde à ces images. La compréhension, la sélection, la transmutation éventuelle du sens originel des images attiques, peuvent renforcer ou faire naître les valeurs propres de la société d'accueil, les organisant en une sorte de système implicite de polis. Ce dialogue finit par promouvoir une idée de l'art dont la finalité est essentiellement eikasia*9, c'est-à-dire bien moins conquête de la pro portion qu'approche de la réalité et représentation. Que demande-t-on à ces images qui accompagnent le défunt? D'exprimer des statuts et des modèles d'ethos individuel et collectif. Ici, notre réflexion ne peut que donner l'esquisse d'une plus longue enquête. L'étude des contextes funéraires les mieux conservés, notamment à Bologne ou Spina, démontre qu'un ou deux vases monumentaux por tent les accents principaux du sens attaché à la destinée du défunt. Dans la tombe 82 de la Certosa (Bologne), appartenant à un enfant, le vase principal à représentations dionysiaques illustre le kômos d'un satyre âgé accompagné d'un satyreau90. À Spina, dans la tombe 422, certainement féminine, le vase principal offre d'un côté une scène où Nikè assiste à la libation d'un jeune guerrier (Achille?), de l'autre côté une scène «d'agora» comprenant une femme entre deux hommes (ou éphèbes) en manteaux91. Le statut féminin se projette donc de façon complexe à travers l'image de l'hoplite et la figure de Nikè, alter ego de la femme, qui accueille la libation de reditus au foyer du guerrier vain queur et consacre les valeurs guerrières dans i'oïkos. La tombe 614 de Spina92 présente un mobilier qui suit peut-être le fil du mythe d'Achill e. Le cratère principal représente en effet le don des armes à Achille par Thétis et le célèbre groupe en ivoire du candélabre de la tombe, 89 Sur la signification de ce concept, chez Socrate cf. Xénophon, Mem. Ill, 10, 1 sg. et l'interprétation de W. Tatarkiewicz, Storia dell'estetica, I, Turin 2, 1979, p. 133-134. En ce sens, le vase grec n'est pas seulement «école d'art» (aspect bien vu par T. Dohrn, Die Etruskische Kunst im Zeitalter der Griechischen Klassik. Die Interimsperiod, Mayence, 1982, p. 12-13) mais il est instrument de la «construction d'un sens social». 90 Sur cette tombe, dans laquelle on note le collier avec bullae de l'enfant (donc un enfant non-majeur), cf. A. Zannoni, Gli scavi della Certosa di Bologna, Bologne, 1876, pi. XLI. 91 S. Aurigemma, Scavi di Spina (Valle Trebba), I. 1, Rome, 1960, p. 151-155 et pi. 172-178 (tombe féminine en raison de la présence à'alabastra à parfum, d'un collier et de boucles d'oreilles). 92 S. Aurigemma, ibid., I. 2, p. 73-74, pi. 87-89.
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représente la lutte athlétique d'un homme et d'une femme, selon des canons qui évoquent un groupe de Thétis et Pelée93. Le statut du pro priétaire de la tombe, en l'occurence, semble-t-il, une défunte94, est donc exalté deux fois à travers les symboles du mariage héroïque, et à travers les symboles de la maternité. Quant à la fameuse tombe 128 de Spina95, elle présente à travers une image synthétique d'Athènes, les principales significations de statut et à! ethos retenues. Un premier vase monumental représente Dionysos-Hadès et Démèter-Chloé (composition solennelle qui évoque une fête attique et les îhesmoi rendant sacrés les mariages). Un second vase monumental présente des scènes d'Amazonomachie, allusion à Yaristeia de Thésée, à la guerre et au mariage (avec Hippolyte). Les kylikes constituent des allusions réitérées aux entreprises de Thésée, fondateur de la polis. Une coupe enfin présente Apollon et la Muse Klio, image raffinée de status, qui à travers l'évoca tion de la divinité delphique bien connue des Spinètes, est une allusion à l'histoire, et aux actions des hommes dont la fille de la Mémoire est le témoin. Il n'est pas inutile de rappeler que l'extérieur de la coupe représente d'un côté Anténor, le mythique troyen lié aux Grecs par des hospitia, qui avait émigré dans la région padane et le pays des Vénètes (fig. 1 à 3). Certes, les différents sens attribuables aux images restent au ni veau de l'affirmation d'un certain nombre de qualités d'ordre général. Mais c'est précisément ce caractère de grande plasticité de l'image, adaptable à l'expression d'un nombre restreint de concepts, qui finit par renforcer, au niveau de ce que l'on attend de l'art comme eikasia, la conscience d'appartenir à une même polis. Dans certains cas, la fascination de l'image d'Athènes revêt des significations politiques précises et en rapport avec la réalité locale. Ainsi, dans la tombe François, l'amphore du peintre de Syleus est un
93 Pour l'interprétation de ce candélabre cf. P. E. Arias, Contributo a Spina etrusco, dans MMAI, 1971, p. 32-33; E. Hostetter, Bronzes from Spina, Mayence, 1986, p. 94 (dont nous ne comprenons par la réflexion : « the man is not heroically nude »). 94 La tombe 614 appartient sûrement à une femme (présence d' alabastro de parfums et de colliers). 95 S. Aurigemma, ibid., I. 1, p. 46 sg., pi. 19-48. Sur la coupe cf. ARF, p. 1252, 52 et S. Aurigemma, cit., pi. 34. On lit sur la coupe : A/ Hippolyto[s] Ge [seus]? B/ Antenor Chrysi[pp]o(s). Le thème est de nouveau clairement celui des libations allusives à des philiai. Sur la coupe «d'Antenor», voir L. Braccesi, La leggenda di Antenore da Troia a Padova, Signum ed., 1984, p. 45-64 et fig. 4.
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véritable manifeste politique athénien mettant en scène Thésée, Athèna, Poseidon et une Centauromachie à situer dans la même période que la Centauromachie de Mikôn dans le Théséion96. Le choix d'un tel vase prend toute sa valeur si l'on considère qu'il était présent dans la cham bre funéraire située en face de l'image de Nestor. En effet, Nestor est un ancêtre de génè, des Pisistratides, des Alcméonides, des Paionides, et ce parallèle introduit une interprétation aristocratique et non démocrat ique d'Athènes au niveau des élites étrusques. Mais ne retient-on pas généralement beaucoup moins (c'est-à-dire des faits moins précis) et beaucoup plus (c'est-à-dire, comme l'enseigne la coupe de Spina présentant Apollon et Klio, un sens affiné de l'éthos héroïque à la lumière de l'histoire), grâce aux compositions jamais innocentes des vases attiques et à leur rhétorique implicite? Ainsi une idée moyenne de la cité se répand qui passe par les valeurs de l'isonomie hoplitique et de l'athlétisme. Le succès des coupes du peintre de Penthésilée en Étrurie entre 475 et 450 environ montre bien où se dis tribuent, en dehors de l'Étrurie padane, ces vases qui représentent presque exclusivement des scènes d'athlétisme, de congé du soldat ou de rencontres propédeutiques entre différentes classes d'âge : ces cou pes se distribuent sur l'axe Vulci/Chiusi et se trouvent en majorité à Orvieto97. Par ailleurs, on assiste à un filtrage très conscient des valeurs de Yarétè personnelle. Dans la seconde moitié du Ve siècle, les vases attiques diffusent une image beaucoup plus intériorisée du héros aux prises avec des débats qui reflètent sa propre destinée dans les des tinées mêmes de la cité. Cette conception profondément éthique de la représentation, au cœur de l'esthétique classique, atteint très certain ement Vulci. Dans la seconde moitié du Ve siècle, en effet cette cité continue à recevoir, en Étrurie méridionale, la plus grande quantité de vases en rapports avec des thèmes troyens ou thébains ainsi conçus. Les thèmes dionysiaques se chargent aussi d'accents nouveaux : en témoigne un cratère qui exalte les valeurs de la paideia à travers l'ima-
96 Voir en ce sens notre communication au IIe Congrès international étrusque, F.-H. Massa-Pairault, La divination, les Étrusques et l'histoire vue par les Étrusques, à paraître ; en attendant, F.-H. Massa-Pairault, La divination en Étrurie. Le IVe siècle, période criti que, dans Suppl. à Caesarodunum, 52, 1985, p. 78 sg. 97 Les résultats du dépouillement que nous avons fait dans les listes de Beazley (ARF, p. 877-971) donnent en effet : 60 coupes à Orvieto, 31 à Vulci, 21 à Chiusi, 16 à Falerii, contre 10 à Tarquinia et 7 à Cerveteri, 86 à Spina, 37 à Bologne et 26 à Adria.
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ge de l'éducation du jeune Dionysos98. Je me réfère aux peintres d'Achille, de la Phialè et au groupe de Polygnote défini par Beazley". Dans une certaine mesure, les miroirs produits à Vulci permettent de vérifier par leurs compositions et leurs thèmes, ce réel approfondisse ment tout classique de la notion de héros. Ainsi entre le dernier quart
98 Sur ce « calyx-cratère », de qualité exceptionnelle, cf. Beazley, ARF, II, p. 1017 n. 54. 99 Le dépouillement des listes de Beazley que nous avons effectué donne en effet : A) Peintre de Penthésilée et de Persephone (ARF, p. 987-992 et p. 1012). Vases susceptibles de porter l'un des accents principaux de sens dans la déposition funéraire. 1 . amphores (tous types) = sujets : - Achille/Briseis (987-1) - Euphorbe-enfant Œdipe/Homme (987-4) - Eôs et Kephalos/vieil Homme (987-5) 2. statnnos : - Départ du guerrier/Id. (992-65) - Petit satyre (épaule) (= 992-67) - Ménades/Ménades (1012-4) - Castor et Pollux/Guerrier et hommes (1012-5) 3. dinos : - Pelée et Thétis (992-69) B) Peintre de la Phialè (ARF, p. 1095, 1097). 1 . amphore : - Satyre/Ménade/Femme (1015-24) 2. calyx-cratère (cf. supra n. 97) - Hermès portant l'enfant Dionysos au vieux Silène/Trois Nymphes (1017-54) C) Groupe de Polygnote (ARF, 1027-1054) Polygnote 1 . stamnos : - Centauromachie/Satyres-Ménades (1027-1) - Symposion/Trois jeunes gens (1028-14) - Kômos/Id. (1028-15 bis) 2. calyx-cratère: - Ranson d'Hector/Achille pleurant Patrocle (1030-33)
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du Ve et le début du IVe siècle la nouvelle école de graveurs analysée par Fischer Graf100 saura transformer Yéthos classique en sens de fatum italique et réinterpréter les principaux héros de la guerre de Troie. Dans cet obscur cheminement de l'idée de cité comme objet véri table de la représentation artistique, on pourrait encore considérer la diffusion de l'image dionysiaque en contexte funéraire. C'est un type de
MlDAS PAINTER stamnos : - Eôs sur son char/Ménade, Satyre et jeune satyre (1035-1) Hector painter 1 . amphore : - Départ d'Hector/Homme et Femme (1036-1) 2. stamnos : - Achille et Troïlos/Homme, Femme, et jeune homme (1036-8) Peleus painter 1. amphore : - Terpsichore, Mousaios et Melousa/jeune homme et femme (1039-13) 2. stamnos : - Citharède et Nikai/Trois jeunes hommes (1039-7) - Symposion/Trois jeunes hommes (1039-8) Guglielmi painter stamnos : - Amazonomachie/Roi et femmes (l'une se réfugiant auprès du Roi) (1043-1) stamnos : - Theseus et les Amazones/Femmes se réfugiant auprès d'un homme (Simos) (1043-1) Groupe de polygnote 1 . stamnos : - Amazonomachie/Homme en costume thrace et deux femmes (1051-13) - Femme nue au bain/Trois femmes (1051-18) 2. Cratère en cloche : - Combat/jeunes hommes et garçons (1054-52). 100 E. Fischer Graf, o.e., V. 17, V. 19, V. 20, V. 21, V. 22, V. 26, V. 27, V. 28 en parti culier.
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représentation qui permet d'assumer l'exigence du statut unifié, isonomique, qui est l'idéal de l'aristocratie : tel est en effet le champ sémant iquedes images de Symposion ou de kômos. Mais c'est aussi un type de représentation qui peut se charger de valeurs particulières comme celles a'hétaireiai au sein de la cité : nous songeons aux coupes avec l'inscription fuflunsul paXies velcWi 101 ou encore à l'usage ritualisé des kylikes dans une déposition funéraire de Todi102. Il est en outre évident que Dionysos constitue en milieu italique une allusion aux liberalia et aux valeurs propres de la Juventus. Voilà donc quelques unes des raisons qui font penser que les vases importés ne sont pas à considérer comme des objets de consommation, pour employer un néologisme déplacé, mais comme des objets pui ssamment «eikastiques» qui contribueront à façonner la «psyché» du destinataire tout en aidant par leur exemple les artistes à se mesurer avec la réalité de leur propre société. Quelle distance, cependant, existe encore entre cette réalité origi nale en pleine définition et son expression artistique! il suffit de considérer les tâtonnements des artistes locaux et les apparentes bi zarreries de certaines solutions pour s'en apercevoir. Les peintres de fresques ont-ils réussi à nous donner autre chose qu'une plate image du symposion aristocratique? Les exceptions sont vite recensées : la tombe du lit funèbre qui unit à la représentation du banquet l'évoca tion d'un dies festus particulier en rapport peut-être avec les énergies vitales de la gens et la figuration de deorum capita1021; la tombe de la Scrofa Nera où, comme l'a analysé Stopponi, le symposion est lié à Yenkômion du propriétaire, nouveau Thésée104; la tombe Querciola I où l'existence d'une taxis particulière entre les frises et la conception du fronton présentant deux guerriers comme les Dioscures à côté de
101 Sur ces dédicaces, cf. M. Cristofani - M. Martelli, Fufluns paXies, dans SE, 46, 1978, p. 119 sg. et les observations de G. Colonna. 102 Cette tombe contient une grande quantité de coupes à sujet bachique qui ont été brisées (rituellement?). On songe à un rite collectif (symposion en l'honneur du défunt) cf. G. Bandinelli dans MA Lincei, 23-2, 1916, c. 841 sg. 103 Sur le lectus genialis, cf. Festus Paul, p. 94 M = 83 L : genialis lectus, qui nuptiis sternitur in honorem genii, unde et appellatus. Sur les Struppi, Fest. Paul. p. 437 L et Fest. p. 169 L. 104 S. Stopponi, La tomba della Scrofa Nera, Rome, 1983 (MMAT 8), p. 75 sg.
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leurs chevaux105 évoque de nouveau les procédés métaphoriques de Yenkômion pindarique. Les mêmes tâtonnements et d'autres ébauches sut generis d'expres sion de la réalité sociale de la cité sont perceptibles pour les statuescinéraires de Chiusi analysées autrefois par M. Cristofani106; comme l'a fait récemment noter Torelli, la production de ces statues paraît just ement commencer au moment où les urnes et les cippes en pierre tendre cessent leur cours vital107. Comme l'a écrit encore R. Bianchi Bandinelli, le processus mental qui conduit à la fabrication de ces statues de style classique est complexe108. L'héroïsation est évidente mais plus intéressantes et complexes sont à notre avis les intentions d'ordre poli tique. En effet ces statues appartiennent à la lignée formelle109 des exvotos des sanctuaires de Demeter ou d'Hèra et de leurs traductions ita liques, en Campanie, dans le Latium et en Étrurie méridionale110. Aussi ces statues développent-elles la vieille conception du canope par l'adop tion d'une forme évocatrice de la nupta de l'Hadès et réalisent-elles la synthèse des symboles propres au mariage et à la naissance : tel est le but de la figuration de l'enfant qui est spes et spicalu, ou encore de la
105 Sur la tombe Querciola I. nous renvoyons à S. Steingräber, Etruskische Wandmale rei, Stuttgart-Zurich, 1985, p. 346-347, n° 106. Nous n'avons pu prendre en considération la tombe des Démons Bleus : M. Cataldi dini, dans Tarquinia. Ricerche, scavi, prospettive (cité), p. 37 sq. 106 M. Cristofani, Statue cinerarie chiusine di età classica, Rome, 1975, {Archeologica, 1), p. 49 sg. 107 M. Torelli, L'arte degli Etruschi (cité), p. 147. 108 R. Bianchi Bandinella Prefazione a M. Cristofani, Statue cinerarie chiusine di età classica (cité), p. Vili. 109 M. Cristofani, (o.e., p. 56) minimise à tort cette ressemblance. Il ne s'agit pas d'une confrontation de caractères extérieurs (« il livello del significante »), mais bien d'une indication de modèle qui éclaire «le processus mental» de fabrication des statues et atteint donc «il livello del significato». 110 Pour ces ex-votos de Kourotrophoi ou de personnages féminins trônant : - à Véies : L. Vagnetti, // deposito votivo di Campetti a Veto, Florence, 1971 ; - à Capoue : M. Bonghi Jovino, Capua. Museo provinciale campano, 1, Terrecotte votive, vol. II, Florence, 1965, en part. tav. VII (mater et filia); - à Pyrgi : cf. les fouilles récentes années 1979 sg. (petite statuette trônante à polos) ; en dernier, en général, les analyses de A. M. Comella sur le matériel italique (Tar quinia, Falerii) etc. . . 111 Sur Sabin speca = spica = spes, cf. Varron, LL VI, 21 et peut-être aussi la légende «speca» des plats Spurinas, L. Fortini, art. cité. Avec Vea et seX (= la fille d'où peut-être la filia par excellence, Korè), ce sont les seules légendes à valeur « démètriaque ».
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grenade, l'un des plus antiques attributs de l'Hèra d'Argos. Ainsi l'ima ge de Démèter-Eleuthô et d'Hèra-Eileithyia112 serait ici transposée et utilisée, non point pour signifier une élévation de statut de type plé béien, mais, comme le suggèrent la provenance et la distribution terri toriale de ces statues, pour exprimer la condition sociale des épouses des seigneurs du far clusinum. Cette interprétation toute oligarchique du culte de Cérès s'accorde avec les suggestions qu'autorise le contexte et la conception d'un cratère du peintre des Niobides trouvé dans une tombe de Pérouse113. Le vase présente d'un côté l'image de Triptolème et des déesses et de l'autre le couple de Zeus et Hèra. Si l'on considère à présent tout autre chose, les couvercles des sarcophages masculins de Chiusi, on s'aperçoit qu'ils renouvellent, au début du IVe siècle, le concept de banquet funéraire, en confrontant généralement le défunt aux divinités du destin114, et en essayant ainsi de suggérer un approfon dissement des valeurs éthiques de l'aristocratie à travers les catégories de la disciplina. Nous saisirions d'autant mieux cette lente conquête de l'originalité si nous pouvions bâtir un raisonnement continu sur les ex-votos des sanctuaires, point sensible de l'expression de l'italicité115. Le célèbre exvoto d'Ahal Trutitis analysé par F. Roncalli reflète les valeurs de l'hoplitie confrontées aux valeurs de la cité, comme sur les vases attiques116. Est sûrement en cause l'un des grands sanctuaires extra urbains de Todi, célèbre par son Mars Gradivus117. De même, les fameux ex-votos en terre cuite du sanctuaire de Portonaccio à Véies
112 Hera-Eileithyia à Argos, Hesych. s.v. Είλειθυία et Paus. II, 18, 3 et II, 22. 2. 113 J. D. Beazley, ARF, p. 603, n. 34 (donné comme provenant d'Orvieto) mais cf. F. Messerschmidt, Inedita Etruriae, dans SE, 6, 1932, p. 509 sg., pi. 26-27 (tombe à chamb rede Frontone près de S. Pietro). 114 Cf. par exemple l'urne «du Bottarone» illustrée par M. Cristofani, o.e., pi. XXXVII. 115 Nous nous référons surtout aux ex-votos en bronze sur lesquels nous renvoyons à T. Dohrn, Die Etruskische Kunst im Zeitalter der griechischen Klassik. Die Inter imsperiod, (cité), passim. S. Haynes, Etruscan Bronzes, Londres, 1985, passim.; E. Hill Richardson, Etruscan votive Bronzes geometric, orientalizing archaic, Mayence, 1982, passim.; Small sculptures in bronze from the classical world, North Carolina Univ. Exhibition, 1976 et AA.VV. / Bronzi etruschi, Milan, 1985, passim. 116 F. Roncalli, // «Marte» di Todi. Bronzistica etrusca ed ispirazione classica, Vatican, 1973, p. 71 sg. 117 Cf. Sil. Ital. VI, 644.
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(ainsi la tête Malavolta et le jeune garçon, analysés par M. Sprenger118), reflètent les valeurs de cité à travers une recherche formelle qui s'ins pire du canon athlétique polyclétéen. Ces jeunes garçons ne sont cepen dantpas de purs athlètes dans leur conception. Il existe de grandes chances pour qu'il s'agisse de l'image de juvenes consacrés à Minerv e119, l'une des déesses du sanctuaire. Nous sommes donc en présence d'un effort pour rendre selon le langage classique l'une des réalités fondamentales de la polis. C'est pourquoi ces juvenes de Véies consti tuent les antécédents des héros du temple du Belvédère120, par les caractères de leur langage formel et par leur capacité de rendre synthétiquement concrète la rencontre entre valeurs civiques grecques et valeurs de status et de fatum italiques. Notre conclusion veut donc rappeler les points suivants : - le premier quart du Ve siècle nous confronte à un style subar chaïque et sévère sui generis employé dans des programmes monument aux qui ne résolvent pas la question d'une expression globale de la cité à la lumière de l'histoire. Ces programmes restent l'expression ambiguë des contrastes non-résolus entre différentes factions; - la faiblesse de ce premier art de cité tient aussi à l'organisation des ateliers et au statut des artisans, comme à la fragilité de la détermi nationde certains groupes ou ensembles sociaux comme commanditair es réguliers de produits artisanaux. Dans ce domaine plusieurs fac teurs reflètent l'involution du monde aristocratique et sa fermeture; - enfin les emprunts à la culture grecque ne portent des fruits originaux qu'à la fin du Ve siècle. Auparavant le dialogue de culture avec la Grèce, notamment à travers les importations de vases attiques, permet de repréciser les finalités de l'art comme eikasia et la fonction de l'artiste de nouveau ouvert aux valeurs de la société. La tendance des programmes publics à partir du IVe siècle semble indiquer que l'ar118 M. Sprenger, Die Etruskische Plastik des V. Jahrhunderts ν. ehr. und ihr Verhältnis zur griechischen Kunst, Rome, 1972, (Studia archeologica, 14), p. 35-41, p. 85 sg. ; pi. X à XV. 119 Fondamentales, pour le rapport Minerve-/wvenes, les analyses de Torelli, dans Lavinio e Roma (cité), p. 23 sg. 120 Pour notre interprétation des frontons du temple du Belvédère, cf. F. -H. MassaPairault, Recherches sur l'art et l'artisanat étrusco-italiques à l'époque hellénistique, (cité), p. 41-46 et la communication de M. J. Strazzula (à paraître) dans les actes du IIe Congrès International d'Études étrusques.
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tiste assume l'histoire à travers une méditation sur les fata publica et propose une nouvelle perception du monde héroïque grec à travers les catégories de la disciplina. À ces fata publica répondent les fata privata à la lumière desquels seront réinterprétés aussi les statuts individuels et les valeurs d'isonomie d'une aristocratie remodelée. Françoise-Hélène Massa-Pairault
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LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI»
L'interrogativo che intendo porre, e la cui legittimità stessa è da verificare, nasce da una esigenza che gli studi più recenti sulla pittura funeraria etrusca di età protoellenistica ed ellenistica hanno portato a definitiva evidenza. In essi infatti, pur secondo itinerari metodologi diversi, è stato posto in modo singolarmente univoco il problema della organizzazione dello spazio immaginario perseguita, nel sepolcro, me diante il duplice strumento della configurazione dello spazio architetto nico reale, da un lato, e della trasformazione ο interpretazione di esso indotta dal mezzo pittorico, dall'altro1. Questo approccio individua con precisione un problema ed un momento interpretativo ben distinto da quello della lettura pura e semplice delle scelte architettoniche ope rate nella strutturazione della tomba e della identificazione dei soggetti raffigurati. Ora, se fosse vero, come si è sempre sostenuto e ripetuto anche di recente2, che proprio con il quarto secolo inoltrato l'involucro della tomba, intesa come spazio delimitato e luogo della immaginata soprav vivenza del defunto, si spezza definitivamente sui più fluidi panorami di un oltretomba di tipo greco-ellenistico, ecco che, sottoposte ad analo go esame le fasi precedenti quel drastico trapasso, si sarebbe portati ad attendersi una tanto più leggibile risposta, in quanto la maggiore semp licità del disegno complessivo, architettonico e pittorico, delle tombe 1 Cfr. F. Coarelli, Le pitture della tomba François a Vulci : una proposta di lettura, in Dialoghi di archeologia, III, 1/2 1983, p. 43-69; M. Torelli, Ideologia e rappresentazione nelle tombe tarquiniesi dell'Orco I e II, in Dialoghi di archeologia, III, 1/2 1983, p. 7-17; F. Roncalli, La decorazione pittorica, in La tomba François di Vulci, Roma, 1987, p. 79110. 2 S. Steingraeber, in Catalogo ragionato della pittura etrusca, Milano, 1984, p. 61 sg.
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di tale fase fa sì che in esse il luogo reale (punto nello spazio e volume definito dalla struttura architettonica) e quello immaginario (individuat o dall'effetto concertato dei dipinti) siano portati ad una più stretta coincidenza potenziale. Ma non sembra che ciò avvenga con quella chiarezza ed univocità che lo status quaestionis lascerebbe intendere : di qui, appunto, l'interrogativo che credo vada riproposto. Ma vi è una seconda esigenza, del tutto indipendente dalla prima, che induce ad affrontare il medesimo problema. L'indagine storico-politica e socio-economica sul «secolo della cri si» in Etruria ha cercato e trovato, sul terreno della produzione artisti ca e artigianale, risposte e conferme di varia natura, non tutte e non sempre previamente selezionate in funzione dei fenomeni specifici dei quali dovrebbero rendere testimonianza : così si è giunti a vedere tutte le manifestazioni artistiche etrusche come sospese in una εποχή da manuale3, in attesa degli eventi del capitolo successivo. In particolare, per il tema che qui ci occupa, l'innesto del tema della «crisi» nel qua dro dello sviluppo della pittura funeraria etrusca viene tradizionalment e risolto mediante il ricorso ad una semplificazione suggestiva, ma non del tutto convincente : quella appunto che, muovendo dalle ben note informazioni di fonte storiografica sui rovesci politico-militari subiti dagli Etruschi tra gli ultimi decenni del VI ed i primi del V secolo a.C, ne cerca - e puntualmente ritrova - le tracce in quegli altrettanto noti segni di stanchezza che la pittura tombale esibisce fra l'inoltrato V secolo e la prima metà del IV : il numero delle tombe, che apparente mente si contrae, i temi trattati nelle tombe, che parimenti si sclerotizzano, la qualità stilistica ed il livello tecnico dei dipinti, che sembrano decadere. Non è mia intenzione contestare questi segni, quanto piutto sto verificare se davvero dietro di essi si possano cogliere i sintomi più specifici di una crisi, che non si identifica né con quella politica né con quella economica, né con quella dei talenti né con quella della tavo lozza. È infatti chiaro che questi aspetti permangono sostanzialmente marginali alla più intima sostanza del complesso fenomeno rappresent ato dalla pittura tombale, e dunque marginali anche rispetto alla defi nizione di una eventuale crisi specifica che tale fenomeno investa. Se infatti per pittura tombale intendiamo, com'è doveroso fare almeno a
3 È il concetto di «Interimsperiode» esplicitato da T. Dohrn, Die etruskische Kunst im Zeitalter der griechischen Klassik. Die Interimsperiode, Magonza, 1982.
LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI» 231 partire del VI secolo a.C, non un generico dipingere sul «supportotomba», bensì un'arte nella quale si è ormai realizzato un pieno ade guamento delle peculiari risorse del mezzo pittorico alla funzione ritual e, il loro globale asservimento ai contenuti e scopi ideologici e cultuali della sepoltura, si vedrà quanto poco significhino, di per sé, l'impover irsi della tavolozza, il monotono ripetersi di temi ο schemi iconografic i, addirittura il contrarsi della intera produzione : sintomi bensì di una crisi, che però potrebbe non avere nulla a che fare con altre, e più pro fonde. In teoria, scadimenti di qualità artigiana in una produzione si possono verificare anche in presenza di situazioni opposte a quelle che si sogliono chiamare critiche : una esplosione, ad esempio, della do manda, indotta dall'attenuarsi della sua connotazione di élite, cui l'a pparato produttivo risponda con una caduta nella «routine». È chiaro dunque che altra è la crisi di cui si deve verificare l'insorgenza e tenta re l'analisi : quella che investe precisamente la sfera nell'ambito della quale si svilupperebbero, se si sviluppano, i rivolgimenti che emerge rannotanto vistosi nel IV secolo a.C. Una simile verifica non è evidentemente possibile se si limita l'es ameentro i confini, artificiosi dal nostro punto di vista, del V secolo a.C. Anche se è incontestabilmente l'assetto ideologico-figurativo raggiunto fra il primo ed il secondo quarto del secolo, e concretamente rappre sentato dalle T. delle Bighe, dei Leopardi, del Triclinio, del Letto Fune breecc.4, a gettare la propria ombra lunga sui decenni successivi, tut to, in tale assetto, elabora e seleziona entro un repertorio saldamente predisposto nel mezzo secolo precedente : e non è possibile prescindere da indicazioni che solo in quello si colgono con chiarezza. Occorre ritornare con pazienza all'esame degli elementi fondanti, fin dall'inizio, l'individuazione architettonico-pittorica del vano tombal e. Osserviamo subito che, se la ovvia struttura/base della camera ipo gea coperta da un tetto a doppio spiovente non poteva essere radica lmente ignorata dall'arredo pittorico, ciò avviene in misura estrema mentecontenuta e limitatamente ad un momento che precede comun que l'immissione piena in quel repertorio di immagini, narrazioni e significati che subito la alterano e, direi, la sgretolano. La Tomba della Capanna appartiene ad un piccolo gruppo in cui il
4 Cfr. S. Stopponi, La tomba della «Scrofa Nera», Roma, 1983, p. 97. Per tutte le suc cessive menzioni delle tombe dipinte rinvio, per brevità, al Catalogo ragionato citato alla nota 2.
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pittore si limita a ribadire le premesse architettoniche dettate dal taglio dell'ipogeo : il supporto del columen vi ha esattamente la secchezza che ci si può attendere da un simile elemento strutturale; ma non è ozioso rilevare che è la scelta - ideologica, questa - del tema della porta come allusione subito matura al più recondito e preciso luogo del defunto, come diaframma fra vita e morte, a fornire al pittore il destro per que sto raccordo, che ci appare come una sanatoria fra ideologia e struttur a, e che ci mostra, in ultima analisi, un tetto sorretto dai montanti di una porta. Sistema che, rispetto ad una logica puramente imitativostrutturale, appare quantomeno anomalo5. Con l'inizio dello sfruttamento narrativo delle pareti della tomba o, per dir meglio, con l'affermarsi delle risorse più precipue ed esclusive del mezzo pittorico nella «ri-costruzione» della tomba, si osserva che le allusioni pseudo-architettoniche in parte si alterano - immediatamente, non per disfacimento progressivo nel tempo! - in parte cedono il passo ai temi via via prescelti, nella misura in cui questi lo richiedono : una misura tale, da convincerci che anche tutto ciò che l'ornato della tomba preserva ed enfatizza trova giustificazione non nella semplice allusione architettonica in quanto tale, ma nella immissione di questa nel pr ogramma allusivo globale. Fra gli elementi più ricorrenti ed esclusivi della definizione dello spazio tombale, un primario rilievo, al livello del significato, va ricono sciuto a quelli che formano, con ogni evidenza, la cornice preliminare destinata ad ambientare ogni successiva, eventuale narrazione. Ne fan no parte la famosa e discussa mensola di sostegno del trave longitudi nale; le alte fasce policrome che corrono sulle pareti all'altezza della sommità di quelle laterali, talvolta replicate più in basso, al di sotto ma non necessariamente - del fregio figurato, talaltra diverse per ri cchezza e spessore tra l'una e l'altra parete; gli alti zoccoli per lo più acromi, ο monocromi. L'esistenza di rare testimonianze di soluzioni in qualche modo accostabili a quella costituita dalla «mensola» dipinta, nell'ambito
5 Qualsiasi raccordo fra la porta ed il profilo degli spioventi manca nella Tomba n. 12 : L. Cavagnaro Vanoni, Tarquinia : aspetti inediti dei lavori della Fondazione Levici nella necropoli dei Monterozzi, in Tarquinia : ricerche, scavi e prospettive, Milano, 1986, p. 250, mentre una più scarna e lineare resa della mensola si ha nella tomba n. 2968, ibid., p. 251, tav. LXXIII, 9.
Fig. 1 - Tomba dei Tori. Parete di fondo della la stanza : la «mensola-altare».
Fig. 2 - Tomba 3098. Parete di fondo. La «mensola-altare».
Fig. 3 - Tomba Bartoccini. Camera di fondo, parete d'ingresso : il sostegno del columen.
Fig. 4 - Tomba dei Baccanti. Parete di fondo : il timpano.
Fig. 5 - Tomba delle Pantere. Parete di fondo.
Fig. 6 - Tomba dei Fiorellini. Parete di fondo : il timpano.
Fig. 7 - Tomba del Guerriero. Parete di fondo : il timpano.
Fig. 8 - Tomba François. Il fregio animalistico dell'« atrio » : particolare.
Fig. 9 - Tomba della Caccia al Cervo. Parete di fondo : la « mensola-altare >
Fig. 10 - Tomba del Cacciatore.
Fig. 1 1 - Tomba del Triclinio. Parete d'ingresso.
Fig. 12 - Tomba del Letto Funebre. Parete di fondo.
Fig. 13 - Tomba Cardarelli. Parete d'ingresso.
Fig 14 - Tomba Uuerciola I. Parete di fondo la « mensola-altare
LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI» 233 dell'architettura funeraria etrusca arcaica sia d'esterni6 che d'inter ni7 non toglie tipicità a questo basilare elemento della definizione pit torica della tomba : anzi la sottolinea. Premetterò ai confronti più probanti le seguenti considerazioni : a) dal contesto della riproduzione pseudo-architettonica del tet to, nelle tombe etrusche realizzate a rilievo, questo elemento è vistos amente assente; b) solo a Tarquinia, dove la elaborazione scultorea dell'ipogeo è notoriamente inusuale, se ne conoscono realizzazioni sottolineate anche dal rilievo (Tomba delle Bighe, Tombe n. 4021 e 5591 )8 : fatto molto significativo, non già come testimonianza dell'estendersi all'ambito tarquiniese di un costume generalmente diffuso, ma, al contrario, come riflesso diretto della sua locale frequenza, a sua volta indotta proprio dalla sua pertinenza ai temi della pittura tombale; e) il motivo ci si presenta subito, fin dagli anni attorno al 530 a.C, in versioni che si dovrebbero annoverare fra le più destrutturate e sfatte, se si giudicassero nell'ottica di una pura funzionalità archittonica. Questi indizi devono indurci a riconsiderare, un'ennesima volta, la natura complessa di questo elemento, troppo stabilmente innestatosi nell'esclusivo repertorio pittorico tombale per non essere fortemente caratterizzante proprio in rapporto a quel tipo di «spazio» che qui ci interessa di cogliere. Il referente ideale che dovette rapidamente condi zionare la resa di questo particolare e fissarlo nella sua forma canonica è senza dubbio l'altare9. Basterebbe a convincerne l'esempio della Tomba dei Tori (fig. 1), dove le due protomi d'ariete angolari rinviano all'ovvio confronto con quelle di altari funerari come quello ecceziona-
6 Cfr. la tomba a dado a Tuscania, loc. Peschiera : G. Colonna, Urbanistica e archi tettura, in Rasenna. Storia e civiltà degli Etruschi, Milano, 1986, fig. 328. 7 Cfr. la soluzione presentata nelle tombe orientalizzanti Campana 1 e dei Leoni Dipinti di Cerveteri : F. Prayon, Frühetruskische Grab- und Hausarchitektur, Heidelberg, 1975, tav. 35 sg. 8 Cfr. Steingraeber, Catalogo ragionato, cit., p. 35. Si aggiungano ora le tombe citate dalla Cavagnaro Vanoni, loc. cit., p. 251, 253, tav. LXXIX, 13; LXXVII, 21. 9 Tale opinione è tendenzialmente abbandonata, quando non esplicitamente respint a, nei più recenti studi sul tema. In particolare Prayon, op. cit., p. 171, ribadisce il carat tereoriginariamente strutturale del particolare, pur rilevandone la predominante presen za nella pittura tombale e, qui, quella che interpreta come una frequente «stilizzazione».
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le, coevo, della necropoli di Ischia di Castro10, mentre la loro curiosa resa di profilo verso l'interno traduce, con una arcaica proiezione in piano, la loro verosimile sporgenza «in fuori», verso l'interno della camera sepolcrale. Ricorderò anche la Tomba n. 3098, in cui il profilo superiore dell'ara, desinente in due contrapposte volute arrotondate, è libero e meglio leggibile per la mancata indicazione del columen (fig. 2) ; la Tomba del Fiore di Loto, in cui la « mensola » non ha rapport o alcuno, né di dimensioni né di colore, con il columen stesso; la forma assunta dalla mensola nelle Tombe n. 1646 e 808, da confrontarsi, ad es., con il cippo-altare di Bologna-Villa Cassarmi e con quelle, identiche, dello specchio parigino del Cabinet des Médailles e della stele di Marzabotto, a loro volta ricondotte, unanimemente, alla forma di altari monumentali come quello D di Marzabotto, di Pieve Sòcana, ecc. n. Chiarirò subito che sarebbe assurdo con questo negare la funzione anche strutturale che tale elemento, così come è stato di recente descritto 12, viene ad assolvere nelle tombe dipinte : intendo affermare che quella con l'altare è somiglianzà non casuale e neppure secondaria, bensì primaria ed ancorata ad un ben cosciente rinvio tematico, il quale ne condiziona e modifica la forma e lo rende, in questa sede e non in altre, irrinunciabile. Addirittura conclusiva mi pare, in questo senso, la configurazione differenziata data ai supporti del columen nelle tre celle interne della T. Bartoccini : sulle pareti di fondo, dove sono affiancate dalle coppie di felini, hanno la forma ad «altare»; sulle pareti d'ingress o, dove sono immuni da qualsiasi coinvolgimento figurativo, hanno
10 Cfr. S. Steingraeber, Überlegungen zu etruskischen Altären, in Miscellanea archaeologica Tobias Dohrn dedicata, Roma, 1982, p. 105-107, tav. 2, 3-4, 3, 1-2; Colonna, loc. cit., fig. 310-311. 11 Cippo da Bologna : Santuari d'Etruria, Milano, 1985, p. 92 sg., 4.11 A; specchio del Cabinet des Médailles: ES, IV, 292; stele da Marzabotto: Santuari d'Etruria, cit., p. 44. 1.31. Cfr. F. -H. Pairault-Massa, Deux questions religieuses sur Marzabotto, in MEFRA, 93, 1981, 1, p. 127-154; D. Emmanuel-Rebuffat, Sur le miroir 1300 du Cabinet des Médailles, in St. Etr., LUI, 1985 (1987), p. 105 sg. Sugli altari monumentali cfr. Steingraeber, Überle gungen, cit., p. 103 sg. e G. Colonna, in Santuari d'Etruria, cit., p. 23 sg. Cfr. anche il monumento funerario di Tuscania qui citato alla nota 16. Tali esempi non soltanto conva lidano il confronto tipologico qui riproposto, ma ne rafforzano il valore cultuale specifi co nel contesto pittorico tombale. 12 C. Weber-Lehmann, Catalogo ragionato, cit., p. 46 sg. Si cfr. le tombe n. 5892, 5899 e 5904 (Cavagnaro Vanoni, loc. cit., p. 25, tav. LXXV, 16), in cui due fasce riproducenti travi longitudinali a metà degli spioventi del tetto sono « sorrette » da due mensole minori simili a quella centrale.
LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI» 235 sagoma del tutto diversa e davvero puramente «strutturale» (a «U» rovesciata) (fig. 3). A questa persistente allusione all'altare mi sembra infatti convenire il non raro sviluppo assunto dal tema, solo in apparenza convenzionale, dei felini affrontati ai lati della mensola-altare : dove la vittima, ο le vittime, già aggredite ο ancora in fuga - spesso inerpicantisi sui fianchi dell'altare stesso (Tombe Cardarelli, Bartoccini, dei Baccanti (fig. 4), del Vecchio, del Maestro delle Olimpiadi ecc.) - soccombono ο soccomber anno, e lo spargimento del loro sangue avrà luogo sopra, ο davanti all'altare. Che nella Tomba degli Auguri la mensola/altare scompaia, cedendo addirittura lo spazio centrale del timpano - sopra alla porta ! alla vittima del duplice assalto, indica, a mio avviso, con chiarezza ine quivocabile la omogeneità tematica di quel particolare all'ambito del sacrificio, qui altrimenti espresso, e la sua strumentalità rispetto ad esso. Abbiamo con questo attribuito un preciso valore significante anche al particolare ritenuto da sempre il più esornativo dell'intero arredo pittorico tombale : la coppia di felini affrontati. La più antica tomba dipinta tarquiniese - la Tomba delle Pantere (fig. 5) - con i due felini che protendono una zampa sopra la testa del terzo, giacente a terra (adorna di bende attoreigliate e alternate bianche e rosse che le pendo no ai lati come trecce)13, ci dimostra quanto precoce sia questo signifi cato,che anticipa nettamente la sistemazione di simili gruppi negli spaz ifrontonali; esso è del resto da riconoscersi sia alla teoria di animali che aggirava l'altare funerario monumentale di Grotta Porcina14 sia, probabilmente, anche al leone in nenfro rinvenuto nei pressi dell'altare di Castro. Anche nella Tomba delle Leonesse un preciso asse tematico ci sembra traversare verticalmente il dipinto e condurre dalla lotta dei due felini ai lati dell'altare alla gigantesca urna/cratere al centro della scena di banchetto sulla parete di fondo, a sua volta «figura» di ciò
13 L'affinità compositiva d'insieme fra la decorazione della parete e quella di fronto ni arcaici (tipo-Corfù) ed una qualche assonanza fra la stessa singolare protome centrale e certe ancora fluide ed ibride rappresentazioni di Gòrgóni tra VII ed inizi del VI secolo a.C. (dalla Gorgone-centauro del pithos «beotico» del Louvre alla Gorgone-Potnia del piatto rodio da Camiro del British Museum) mi avevano indotto ad interpretarla come «maschera gorgonica» {L'arte in Rasenna, cit., p. 633) : interpretazione che ora respingo. 14 Per l'allusione sacrificale nel fregio di Grotta Porcina cfr. G. Colonna, Santuari d'Etruria, cit., p. 116.
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ch'era contenuto nella nicchia sottostante, oltre la porta dall'architrave appena sagomato. La forza del tema della vittima «naturalmente» sacrificata sopra il luogo della sepoltura è, del resto, dimostrata dal fatto ch'esso attravers a, vitalissimo, il V e il IV secolo a.C. Non a caso le innovazioni cultuali di estrazione attica ο magnogreca promuoveranno, nel V secolo inoltrat o, il gallo sia come animale combattente per eccellenza sia come vitt ima privilegiata (Tombe dei Fiorellini (fig. 6), del Guerriero (fig. 7), del Gallo) mentre ancora nella seconda metà del IV secolo a.C. la Tomba François di Vulci (fig. 8), mostrerà il fregio animalistico del ed. atrio arrestare la propria marcia unidirezionale in assalti simmetrici, vistos amente cruenti, proprio ed esclusivamente sopra le porte di accesso alle celle15. È questo, infine, il tema che perverrà intatto al monumento funerario che segnalerà esternamente la tomba tuscaniese dei Nevzna, attorno alla metà del IV secolo a.C. : dove un leone solleva minacciosa mente le fauci dalla testa d'ariete che sta sbranando, trattenuta con una zampa, sopra una «base circolare modanata» che altro non è (o raffigura) che un'ara funeraria in tutto riconducibile al tipo che abbia mo indicato sopra; il tema della custodia del sepolcro - se pure vi sopravvive - è ormai remoto, e in sott'ordine rispetto a quello sacrifical e, qui rappresentato nella più esplicita e fedele traduzione scultorea dell'antico tema tarquiniese 16. È su questo sfondo di testimonianze dirette che mi sembra acqui stino spessore le parole che Arnobio17 riporterà dalla traduzione di Labeone dei libri Tagend: «Etruria libris in Acherunticis pollicetur, certorum animalium sanguine numinibus certis dato divinas animas fieri et ab legibus mortalitatis educi » ; e sul già citato specchio del Cabi netdes Médailles, che nei due personaggi affrontati si voglia vedere significata la presenza delle divinae animae di defunti eroizzati ο di numina certa, emerge chiaro il significato del cucciolo chiuso nelle fauc idel felino passante, nel segmento superiore : dove l'incisore scalza già la simmetria dello schema tradizionale (felini affrontati con ο senza animale-vittima al centro) salvaguardandone piuttosto il significato es senziale ed anzi precisandolo nel senso eminentemente ctonio del sacri ficio del catulus.
15 Cfr. Roncalli, loc. cit., p. 83. 16 Cfr. Civiltà degli Etruschi, Milano, 1985, p. 294, 11.10.2. 17 Ad nat. II, 62.
LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI» 237 Ci sembra farsi trasparente, a questo punto, l'aggancio che il tema dell'uccisione sull'ara, sopra la tomba, offre all'immissione, nella stessa sede, di un altro tema, destinato a particolare fortuna nel V secolo a.C. : quello della caccia. Sta forse già qui il motivo per cui, nella Tomba del laCaccia e della Pesca, il tema stesso, di per sé non meno dell'altro suscettibile di sviluppi e divertissements paesaggistici e narrativi, viene compresso entro il timpano di fondo della prima stanza; ma è certa mente questo il motivo che attrarrà proprio qui, nel secolo successivo, sintetici excerpta dallo stesso tema (Tombe della Scrofa Nera, della Nave (?), della Caccia al Cervo (fig. 9), Maggi), collocando all'interno del profilo della mensola/altare - nella Tomba della Scrofa Nera ancora una volta semiannullata a tale fine - il momento culminante dell'impres a, le cui valenze plurime, rievocative, aristocratiche, atletico-eroiche, ci sembrano tutte ricomprese nell'antica e sempre dominante chiave sacrificale e cultuale. Neppure è un caso che la centralità e pregnanza di questo soggetto, nella sola tomba tarquiniese in cui un unico tema sia stato prescelto ad esclusione di tutti gli altri - la Tomba del Cacciatore -, vi porti alla rinuncia, tutt'altro che ovvia, ad ogni altra allusione ο interferenza di significati : rinuncia allo zoccolo, al timpano, agli animali affrontati, alla mensola/altare (fig. 10). È infatti la tomba stessa il luogo attorno al quale il «rito» della caccia si svolge : e la genialissima trovata del riba ltamento di prospettiva, che ci fa assistere alla scena quasi attraverso gli occhi del defunto, dall'interno, «per speculum in aenigmate», ci conse gna - vedi caso - il solo ipogeo tardoarcaico in cui davvero spazio reale e spazio immaginario coincidano senza la minima contraddizione ο sbavatura. È chiaro infatti che una netta, e multiforme, frattura è invece di norma introdotta nella ridefinizione pittorica dello spazio tombale dal lagià vista polivalenza simbolica delle figurazioni del timpano : dove le pareti dell'ipogeo sono annullate omogeneamente dalle aperte prospett ive di banchetti, danze ο giuochi, ma il carattere infero e ctonio dello spazio e del luogo è rievocato e ristabilito, e poi subito infranto, proprio da quella collocazione dell'ara e del sacrificio, idealmente alti sopra la tomba e fuori di essa, in realtà interni e costretti a fare con essa i conti sul piano compositivo e iconografico. All'estremo opposto, nello sviluppo verticale dell'ipogeo, sta quell'alto zoccolo, lasciato vuoto ο dipinto, la cui interpretazione pitto rica sembra idealmente conseguente ad una sua necessità comunque avvertita, la quale fa sì che anche ipogei non figurati ne rispettino la
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presenza grazie ad una rigorosa suddivisione e gerarchizzazione degli spazi verticali delle pareti. Tale suddivisione è insistentemente affidata a quelle fasce policrome che già molti anni fa proponevo di interpreta re come vere e proprie modanature pseudo-architettoniche, ma la cui ricorrenza ed il cui sviluppo, tipici, vistosi e variati (pur nella fissità di talune costanti, prima fra tutte la disposizione simmetrica delle sequenz e di colori a partire dal centro verso l'alto e verso il basso) attendono ancora una spiegazione rispetto alla quale la troppo abusata chiave del lagratuità esornativa ο della stessa imitazione architettonica non mi paiono esaurienti18. La sequenza : Tomba degli Auguri, dei Giocolieri, delle Leonesse, della Caccia e della Pesca (2a stanza) introduce per la prima volta nel patrimonio d'immagini della pittura tombale la singolare identificazio ne dello zoccolo inferiore della parete dipinta con il mare : identifica zione in cui è facile riconoscere un altro fra i più vitali e durevoli el ementi del repertorio simbolico funerario etrusco. A tanto successo, che raggiunge, come si sa, la piena età ellenistica, non si può negare un qualche preciso riscontro a livello concettuale : escludo che un element o di così coercitiva forza ambientante ed evocatrice entri nella tomba e vi permanga per secoli anche riducendosi a cifra stilizzata - a soli fini paesaggistici, sia pure mirati alla riproduzione magico-religiosa dell'ambiente quotidiano. Il mare, l'oceano segna i limiti della οικου μένη, e al tempo stesso quello fra la terra dei vivi ed il luogo delle ombre, dei beati. Il mare in cui si nuota, si naviga e si pesca è anche, nella seconda stanza della Tomba della Caccia e della Pesca, il potente diaframma che separa e avvolge la raffigurazione del defunto nel fron tone. Una duplice connotazione e collocazione simbolica dello spazio tombale sembra dunque emergere da queste indicazioni : una connota zione ctonia ed una ultra-terrena, una profondità «verticale» ed una lontananza «orizzontale». Entrambe tracciano un proprio confine alla tomba, in un punto che è anche varco : quello superiore significato dall'altare, ma anche dalla custodia espressa dai felini affrontati (come nell'altro), e quest'ultimo, l'ingresso materiale alla camera sepolcrale. Uno spazio ideale dunque già duttile e polivalente forza fin dall'ini-
18 Si vedano le osservazioni raccolte dalla Weber-Lehmann, toc. cit., a sostegno della interpretazione puramente «strutturale».
LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI» 239 zio il rigido taglio dell'architettura ipogea : uno spazio che non sembra dover attendere la cultura ellenistica per aprirsi e moltipllcarsi. Che avviene di questo spazio nei decenni successivi? Le tombe del Triclinio e del Letto Funebre segnano, anche da que sto punto di vista, tappe fortemente innovatrici e ricche di futuro. Sulla superficie del mare - di cui s'inaugura in entrambe, e con ancor magg iore evidenza nella seconda, una stilizzazione di grande successo - si svolgono il banchetto, le danze, la musica, i giuochi atletici. La visione centrale della tomba del Triclinio, dall'ingresso, ce ne propone l'estr ema armonia e polarità. La scena ha infatti un centro e una periferia che corrispondono al centro ed ai margini del campo visivo : agli estre mi di questo vengono così a trovarsi le due semipareti ai lati della porta (fig. 11). A queste è destinato un tema distinto, in cui si è soliti vedere un'allusione a quei giuochi atletici, equestri in questo caso, cui le tombe tardoarcaiche ci avevano abituati. Vi è certo anche questo : ma nella polivalenza della simbologia evocata mi sembra preminente un rifer imento ai Dioscuri, presentati qui come lo saranno nel tempio ionico di Marasà, a Locri, sul finire del V secolo a.C. : identica la posizione, nel frontone ο come statue acroteriali, identici l'atteggiamento e la resa iconografica che ne esaltano, come desultores, la celebrata abilità di ίππόδαμοι e, infine, identica la ideale qualificazione/collocazione celeste e marina : su un Tritone là, e cioè, come qui, sul mare19. Il tema della Tomba del Letto Funebre è, fin dal tempo dello studio del Brizio20, uno dei più discussi (fig. 12). L'attento esame del Messer schmidt21 ne aveva già messo in rilievo alcune peculiarità, che non si arrestano all'enigmatico «letto funebre» dominante la parete di fondo. Esclusa una convenzionale scena di πρόθεσις, per la quale sia l'arte funeraria greca che quella etrusca - e la stessa pittura tombale - ci offrono versioni nettamente diverse22, è chiaro che la destinazione del solenne catafalco è specificata dai copricapi inghirlandati e bendati (o feticci aniconici, secondo l'alternativa prospettata dal Messerschmidt) poggianti sui cuscini, dalle clamidi ripiegate accanto ad essi e dalla insistita reduplicazione di ciascuno di questi segni. Si ha inoltre l'im-
447.
19 Cfr. P. Orlandini, Le arti figurative, in Megale Hellas, Milano, 1983, p. 442, fig. 446-
20 Bull. Inst., 1873, p. 101 sg. 21 St. Etr., Ill, 1929, p. 519-524. 22 Si vedano la scena sulla parete sinistra della Tomba del Morto, ο le note urnette fittili arcaiche ceretane.
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pressione che tale reduplicazione si estenda alla configurazione stessa della κλίνη sottostante, non semplicemente ingigantita ma in qualche modo «doppia» anch'essa, come sembra indicare la ripetuta sequenza dell'alta coltre rossoscura e della sottostante chiara, ornata da ricami rosa23 (non escluderei l'ipotesi che il pittore abbia così risolto l'esigen za di rappresentare due κλΐναι giustapposte, con un procedimento non dissimile da quello che lo porta, nelle copie di cavalli aggiogati delle semipareti d'ingresso, a muovere ed ampliare il profilo di quello retro stante). I due simposiasti sulla destra banchettano e colloquiano fra loro in primo piano, al cospetto del «letto funebre» arretrato, come mostra il piede di uno dei due sovrapposto al profilo di quello, ma non dirett amente coinvolti dalla sua vicinanza : lo sono invece, sullo stesso suo pia no, i due uomini retrostanti, i cui gesti (privi della benché minima notazione «dolente») esprimono invece animatamente, nei confronti di quel la presenza simbolica, più ancora che devozione, quasi una diretta sol lecitazione colloquiale. L'ipotesi del lectisternium in favore di una coppia divina, già espressa dal Ducati, e dubitativamente riformulata dallo Steingraeber24, va riproposta con decisione : l'evidenza che questo stesso monu mento ci offre è sufficiente da sola a rompere il lamentato silenzio del lefonti circa una simile pratica nel mondo etrusco. La specificità cul tuale dell'intera scena è del resto ribadita anche dalla inusitata sparti zione per sessi dei partecipanti al banchetto sotto lo stesso baldacchi no : uomini a destra e donne a sinistra del «letto». Il Messerschmidt, avanzate alcune ipotesi (Demetra e Kore, Ade e Persefone), dichiarava impossibile identificare la coppia divina evocata. Proporrei ora di rico noscervi i Dioscuri, i soli cui si addicano sia la forma del copricapo (πΐλος), sia il serto che lo incorona, sia le vesti uguali e leggere - clami-
23 Rimossa idealmente una delle due coppie di fasce, la κλίνη assume un aspetto normale, paragonabile ad es. a quella della già citata Tomba del Morto. Si ricordi lo spec chio arcaico di Berlino, ES, IV, 421, raffigurante una coppia davanti ad un'alta κλίνη assai simile (doppia?), vista da uno dei lati corti, sulla quale sono ripiegate l'una accanto all'altra due. clamidi ο tuniche : L. Bonfante, Etruscan Life and Afterlife, Detroit, 1986, p. 238, VIII-6. 24 P. Ducati, Etruria antica, I, p. 128 (che proponeva di riconoscervi Mantus e Manis); Steingraeber, Catalogo ragionato, cit., p. 326.
LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI» 241 di? -, sia infine l'attitudine alla rappresentazione aniconica25. Ricorde rò ancora che, nella distribuzione dei soggetti sulle restanti pareti della tomba, mentre la sinistra prolunga il simposio, dal lato «delle donne», in una composita scena con danze, musica ed un'isolato discobolo, la destra, dal lato degli uomini, e la parete d'ingresso, eccezion fatta per l'accompagnamento musicale, sono dedicate esclusivamente, e con ins istenza eccezionale, a ludi equestri (ben tre coppie di cavalli) ed al pugi lato (tre pugili) : le discipline, per l'appunto, dei Dioscuri. Il loro culto è ben attestato, proprio a Tarquinia, almeno dall'ult imo quarto del VI secolo a.C. : ma il fatto che nella dedica della celebre coppa di Oltos26 essi vi fossero indicati con un nome non già «impres tato», bensì localmente modellato sulla autonoma nozione di «figli di Tin», parallela a quella di «figli di Zeus» per la prima volta introdotta in Grecia negli Inni Omerici27, è indizio di conoscenza già allora non superficiale del mito e del culto stesso. Temi equestri, anticipati nella Tomba del Barone, si diffondono con significativa intensità nella pittura tombale etrusca, a partire dall'inizio del V secolo a.C, e mi chiedo se a convogliarveli non sia sta taappunto, in nuce, l'allusione ai Dioscuri, emblematicamente dotati di tutte le valenze più pertinenti ad una simile collocazione e funzione : estrazione regale/eroica ma anche paternità divina, fisionomia vittorio sa, guerriera ed atletica ma anche rapporto «conflittuale» con quella soglia fra morte ed immortalità che quotidianamente varcano e, forse non da ultimo, modelli (già in Pindaro28) di quegli affetti che, per i vincoli del sangue, per l'appunto traversano quella soglia legando la sopravvivenza dei trapassati all'esistenza dei vivi. Avremmo dunque ancora una volta, nei primi decenni del V secolo a.C, un'anticipazione di quanto accadrà, in termini diversi, nei sepolcri ellenistici del IV e del III, le cui pareti d'ingresso troveremo popolate da Sisifo, Teseo, Amfia-
25 Si ricordino i δόκανα, i due pali verticali, legati reciprocamente da piuoli alle estremità, con cui gli Spartani antichi raffiguravano i Dioscuri (Plut., Περί φιλαδ, 478.1) : di tale « iconografia » è notevole si conservi una traccia particolarmente fedele in Etruria, anche nelle più dozzinali e tarde rappresentazioni su specchi, dove l'emblema costituito dai due travi verticali collegati da due traverse si anima per lo più nella diretta raffigura zione dei due personaggi contrapposti e collegati da fasce incise orizzontali. 26 Inv. RC 6848, ARV, 1, p. 60, n. 66; TLE, 156. 27 H. 33. Sul culto dei Dioscuri cfr. L. R. Farnell, Greek Hero Cults and Ideas of Immortality, Oxford, 1921 (rist. 1970), p. 175 sg. 28 Nem. 10.150; Pyth. 11.62.
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rao ecc.29, ο più semplicemente da Charun e Vanth. Ricorderò ancora che, proprio nei decenni tra la fine del VI e la prima metà del V secolo a.C, là dove alle semipareti d'ingresso non si estenda semplicemente il tema di quelle adiacenti, tende a privilegiarle (certo anche in forza di una sua particolare attitudine compositiva) il pugilato (cfr. le Tombe Cardarelli (fig. 13), della Fustigazione, del Citaredo), l'arte in cui eccel leval'altro Dioscuro, Polluce πύξ αγαθός30. Sarei infine propenso a cercare le tracce dei Dioscuri anche in prossimità dell'altra «soglia» ideale della tomba : quella superiore, rap presentata dalla mensola/altare che eccezionalmente, ma non troppo (Tomba Querciola I, Tomba 1560), riserva il prezioso spazio all'interno del proprio profilo, come già abbiamo visto accadere per il tema della caccia, alla rappresentazione di due giovani (nella Tomba Querciola I certamente armati (fig. 14), ciascuno dei quali tiene per le redini un cavallo. I segnali più ο meno sparsi che ci è parso di poter cogliere nella pittura tombale tra VI e V secolo a.C. mi sembra consentano di affe rmare che una «crisi» specifica, tra V e IV secolo, si delinea con chia rezza : ma che essa non infrange né sgretola un robusto e monolitico credo escatologico arcaico, aprendogli bruscamente davanti, dopo un mezzo secolo e più di stanchezze e poco convinte ripetizioni, le angos ciose vastità dell'Ade. Essa piuttosto, proprio in forza di una interpretazione dello spazio tombale già sostanzialmente aperta, poliedrica, a tratti contraddittoria, che alla tomba/casa attinge una falsariga tutto sommato labile senza esaurirvisi né rimanervi chiusa, vi introduce con tenuti nuovi, cari ai gusti ellenizzanti della nuova arostocrazia. Si potrebbe semmai dire che, al contrario, saranno proprio le grand i aule del IV e del III secolo a.C. a ridefinire la tomba nel senso della nuova dimora della gens, regale e di stampo ellenistico, attirando al proprio interno, più ο meno esplicita, la rievocazione del palazzo di Ade e Persefone e dei suoi mitici abitatori31. Si spiega così come, nello spazio già «critico» definito - a nostro avviso fin dalle sue prime esperienze tarquiniesi - dalla pittura tombal e, possano progressivamente filtrare tra le maglie del repertorio con-
29 30 31 ghidi
Cfr. Roncalli, loc. cit., p. 105 sg. //. 3.237. Cfr. G. Colonna, Per una cronologia della pittura etrusco di età ellenistica, in Dialo archeologia, III, 2/1 1984, p. 1-24.
LA DEFINIZIONE PITTORICA DELLO SPAZIO TOMBALE NELLA «ETÀ DELLA CRISI» 243 venzionale, prima l'esplicita eroizzazione realizzata dall'allusione ai Dioscuri, poi la inopinata e scoordinata autoesaltazione «tipologica» del fondatore della Tomba della Nave, tramite la raffigurazione della nave oneraria cui certo deve le sue fortune : esempio precoce e singolarissimo di una nuova esigenza, che troverà nelle produzioni funerarie dei secoli successivi la sua massima espressione. È la stessa crisi che (Tom ba dei Pigmei), sempre in presenza del «vecchio» banchetto sulla paret e di fondo, accoglierà il trasferimento oltre i confini del mondo (oltre il paese dei Pigmei) del punto d'arrivo dei due opposti cortei che accompagnano i defunti, ο che giustapporrà al simposio il viaggio all'aldilà ed inserirà nel corteo stesso gli araldi dell'Oltretomba (Tomba dei Dèmoni Azzurri)32. Francesco Roncalli
32 Cfr. M. Cataldi Dini, La Tomba dei Demoni Azzurri, in Tarquinia : ricerche, scavi e prospettive, Milano, 1986, p. 37-42.
JEAN-CLAUDE RICHARD
LES FABII À LA CRÉMÈRE : GRANDEUR ET DÉCADENCE DE L'ORGANISATION GENTILICE
Si les mots même d'organisation gentilice figurent en bonne place dans les travaux consacrés aux structures sociales de la Rome archaï que, la réalité qu'ils recouvrent ne laisse pas d'être mal connue. Cet état de choses tient à ce que celle-ci appartient à un passé largement révolu par rapport aux quelques témoignages qui en laissent deviner l'existen ce. Reste que, malgré l'ignorance dans laquelle nous sommes de ses ori gines et de ses finalités pour des temps aussi reculés, ce que nous entre voyons de la gens elle-même en tant que molécule du tissu social de la Rome archaïque peut atténuer les ténèbres à défaut d'apporter toute la lumière souhaitable. La gens peut en effet, au moins en première approximation, se définir comme un agrégat de familles portant le même nom et dont les membres descendent ou sont censés descendre d'un même ancêtre éponyme qui en est considéré comme le princeps ou créateur1. Qui dit gens dit aussi clientèle, même si les clients ne sont pas assimilables à des gentiles à part entière. Ils exploitent des terres qui leur sont concé déesà titre précaire2 sur des bien-fonds appartenant au lignage dont 1 Cf. parmi un océan de littérature P. De Francisci, Primordia ciuitatis, Rome, 1959, p. 162-190; J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu'aux guerres puniques, Paris, 1969, p. 192-195. Sur l'irritant problème, que nous négligeons ici, du pater gentis, cf. en dernier lieu L. R. Ménager, Systèmes onomastiques, structures familiales et classes sociales dans le monde gréco-romain, dans SDHI, 46, 1980, p. 147-235, p. 191; A. Romano, Dal pater gentis ai patres dell'organizzazione cittadina. Note sul fondamento della leaders hip arcaica, dans Ricerche sulla organizzazione gentilizia romana, a cura di G. Franciosi, 1, Naples, 1984, p. 81-117, p. 104-105. 2 Selon l'interprétation canonique qui reconnaît des clients dans les tenuiores ment ionnés par Paul. Fest., p. 289 L, s.v. Patres {Patres senatores ideo appellati sunt quia agrorum partes adtribuerant tenuioribus ac si liberis propriis). Mais des doutes viennent à nou-
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ils dépendent. Bref, la gens constitue une «cellule familiale polynucléai re»3 vouée à certaines formes d'autonomie et d'autarcie. Une triple correspondance d'ordre linguistique (av. zantu, gr. γένος, lat. gens)4 suggère que cet agrégat réapparaît sous des formes comparables en d'autres points du domaine indo-européen. Mais ce parallélisme est trompeur. En effet la preuve a été récemment apportée que, pour les temps anciens, le γένος n'est pas dans le monde grec «un bloc humain tenant à la fois du clan patriarcal et de la famille noble»5. Toujours est-il qu'en milieu romain, une évolution en ce sens est perceptible dès les débuts de la ville, puisque l'annalistique note à pro pos du Sénat d'époque royale que les quartiers de noblesse de ses memb res s'appréciaient par rapport à l'ancienneté ou à l'importance (?) des gentes auxquelles ceux-ci appartenaient6. Si les racines de ces lignages plongent dans un passé reculé, leur entrée dans l'histoire est à mettre en rapport avec le processus de différenciation sociale et d'accumulat ion de la richesse7 dont les nécropoles des périodes III et IV illustrent
veau d'être exprimés sur ce point par G. Franciosi, Una ipotesi sull'origine della clientela, dans Labeo 32, 1986, p. 263-281, p. 267. 3 L. R. Ménager, op. laud., p. 189. 4 É. Benveniste, Le vocabulaire des institutions indo-européennes, 1, Paris, 1969, p. 316. 5 F. Bourriot, Recherches sur la nature du genos, 2, Paris-Lille, 1976, p. 1367. C'est seulement à partir du IVe siècle que le mot γένος s'applique rétrospectivement à des familles «qui ont réussi par leur puissance, l'habileté de leurs membres durant plusieurs génération ... à constituer de courtes dynasties d'hommes d'État» (ibid., p. 1365). 6 Nous pensons ici à la hiérarchie des gentes en gentes maiores et gentes minores, telle qu'elle s'instaura consécutivement à la réforme du Sénat par Tarquin l'Ancien : Cic, Rep. 2, 35; Liv., 1, 35, 6; Denys d'Hal., AR 3, 67, 1 ; Suet., Aug. 2, 1 ; Vir. ill. 6, 6. Elle est interprétée en termes de chronologie relative par T. Mommsen (Römisches Staatsrecht, 33, Leipzig, 1887, p. 30, qui prend en considération la date de leur admission dans la cité), par U. Coli (Regnum, dans SDHI, 17, 1951, p. 1-168 = Scritti di diritto romano, 1, Milan, 1973, p. 321-483, p. 388) et par P. De Francisci (op. laud., p. 191, qui reprend le point de vue de T. Mommsen). Pour G. Mancuso (Patres minorum gentium, dans Annali Semin. Giuria. Palermo, 34, 1973, p. 397-419, p. 414-415), antérieures à Tarquin l'Ancien qui leur ouvrit le Sénat, les gentes minores sont à la fois plus récentes et moins amples que les maiores. 7 Sur ce phénomène mis en lumière par toute une série de travaux concordants, cf. C. Ampolo, Su alcuni mutamenti sociali nel Lazio tra Will e il V secolo, dans DArch, 4-5, 1970-71, p. 37-68; A. Bedini-F. Cordano, Periodo IH, dans La formazione della città nel Lazio, DArch, 2, 1980, p. 97-124; G. Bartoloni-M. Cataldi Dini, Periodo IVA, ibid., p. 125164 ,C. Ampolo, Periodo IV B, ibid., p. 165-192. Cf. aussi les divers articles du recueil Aspett i delle aristocrazie fra Vili e VII secolo a.C, dans Opus, 3, 1984.
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la réalité sur près d'un siècle et demi à Rome et en d'autres points du Latium. Elle se reflète également dans l'agencement de ces nécropoles qui permet d'entrevoir, par rapport à de plus anciennes, comment l'in térêt s'est déplacé de l'individu sur le groupe familial auquel il appart ient8. Au témoignage de l'archéologie, il faut ajouter l'évolution qui se laisse déceler dans le domaine de l'onomastique, s'il est vrai que l'adop tiondu système gentilice y date des débuts du VIIe siècle9. En effet, cette innovation atteste une exigence de cohésion, de permanence et d'identité qui s'accorde avec ce que nous pouvons deviner des aspira tionsde groupes familiaux nécessairement amples au moment où ils revendiquaient et obtenaient la qualité héréditaire de patriciens. En droit pourtant, la gens ne sera jamais une réalité spécifiquement patr icienne et les prétentions qu'à date plus récente, le patriciat devait faire valoir en ce sens10 relèvent purement et simplement de la propagand e. Si un certain nombre d'indices autorisent à croire que les rois étrusques s'appliquèrent à endiguer la volonté de puissance de ces gentes, il est vraisemblable que celle-ci se donna libre cours à la faveur des tensions consécutives aux événements de 509. Dans ce qu'il a d'excep tionnel puisque cinq noms y figurent, le témoignage des Fastes de l'an 1 peut s'interpréter en ce sens. D'autre part ce que nous entrevoyons du découpage de Yager en tribus rustiques oriente l'analyse dans la même direction. Même si la chronologie et l'ampleur de ce processus nous échappent, il est indéniable que plusieurs tribus à dénomination gentili-
8 Cf. par exemple T. Cornell, Rome and Latium vêtus 1980-1985, dans AR, 32, 1986, p. 123-133, p. 131. 9 G. Colonna, Nome gentilizio e società, dans SE, 45, 1977, p. 175-192. Mais cf. aussi dans des cadres chronologiques différents M. Cristofani, Diffusione dell'alfabeto e ono mastica arcaica nell'Etruria interna settentrionale, dans Atti dell'VIII Convegno Naz. Stud. Etruschi ed Italici, Florence, 1974, p. 307-324; J. Heurgon, Onomastique étrusque : la déno mination gentilice, dans L'onomastique latine, Coll. Intern. CNRS, nr. 564, Paris, 1977, p. 25-34; L. R. Ménager, op. laud., p. 181-184. 10 Liv., 10, 8, 9 où, à l'occasion de la controverse provoquée par la rogano Ogulnia, l'historien met dans la bouche de P. Decius Mus, porte-parole de la plèbe dans ce débat, les mots Semper ista audita sunt . . . vos solos gentem habere; Gell., 10, 20, 5 et 17, 21, 7. A. Magdelain, Auspicia ad patres redeunt, dans Hommages à J. Bayet, Bruxelles, 1964, p. 427-473, p. 465-466, dont la démonstration nous paraît péremptoire.
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ce y furent alors créées11. Tout se passe comme si cette intiative avait consacré la toute-puissance de lignages qui marquèrent ainsi de leur sceau les primordia ciuitatis. Et à quelque quinze ans de distance, l'e xpédition des Fabii à la Crémère atteste la persistance de valeurs et d'usages propres à l'organisation gentilice dans la mesure où elle réac tualise vraisemblablement un état de choses antérieur à ces primordia. *
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Une double tradition nous est parvenue sur cette entreprise. L'une, isolée et considérée parfois, mais à tort, comme la plus ancienne, nous a été gardée par Diodore de Sicile12 qui, pour l'année 472, fait état d'une grande bataille ayant opposé au voisinage de la Crémère les armées de Rome et de Véies. Au cours de ce combat qui leur fut défa vorables, les Romains auraient subi de lourdes pertes. L'historien grec ajoute qu'au dire de «certains» auteurs, la gens Fabia avait perdu dans l'affaire 300 des siens. De ces deux versions des faits, l'une ignore les Fabii, alors que l'autre les sauve de l'anonymat en leur conférant une place à part dans la série des victimes. De plus si, comme la précédent e, elle situe leur trépas dans le cadre d'une guerre de cité à cité, elle
11 Liv., 2, 21, 7, Tribus una et uiginti factae (495 av. J.-C:); Per. 21, Claudia tribus adiecta numerusque tribuum ampliatus ut essent una et uiginti (à une date, semble-t-il, postérieure à la bataille du lac Régule, mais antérieure à la première sécession). Sur la difficile question de la chronologie des premières tribus rurales, cf. entre autres les points de vue opposés de L. Ross Taylor (The voting districts of the roman republic, Rome, 1960, p. 35-45), A. Alföldi (Early Rome and the Latins, Ann Arbor, 1965, p. 304-318) et de M. Humbert (Municipium et ciuitas sine suffragio, Rome, 1978, p. 52-78). Cf. aussi J.C. Richard, L'œuvre de Servius Tullius. Essai de mise au point, dans RD, 61, 1983, p. 181-193. 12 DiOD., 11, 53, 6. Parmi les tenants de la théorie selon laquelle la tradition qu'il mentionne en premier serait la plus ancienne, on trouve F. Münzer, dans RE, 6, 2, Stutt gart, 1909, s.v. Fabius, nr. 159 (K.Fabius Vibulanus), col. 1873-1880, col. 1877, L. Adams Holland, Janus and the bridge, Rome, 1961, p. 243, et E. Montanari, Nomen Fabium, Lec ce, 1973, p. 94 et 142. Sur le témoignage de Diodore et sur la source qu'il utilise cf. les analyses divergentes de T. Mommsen (Fabius und Diodor, dans Römische Forschungen, 2, Berlin, 1879, p. 221-296, p. 245-261), de E. Schwartz (dans RE, 5, Stuttgart, 1903, s. v. Diodoros, nr. 38, col. 663-704, col. 694-696), de E. Manni (Diodoro e la storia arcaica di Roma, dans Kokalos, 16, 1970, p. 60-73, p. 68) et de F. Cassola (Diodoro e la storia romana arcai ca, dans ANRW, 13, 1, Berlin-New York, 1982, p. 724-773, p. 750-752).
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mentionne l'appartenance de ces 300 braves à une seule gens en des termes dont l'insistance ne laisse pas d'être significative. Elle spécifie en effet qu'ils étaient «apparentés entre eux et que, pour cette raison, ils portaient un seul et même nom». Cette donnée dont Diodore ne pré cise pas l'origine fait directement écho à la définition de la gentilité qui, par-delà L. Cincius l'antiquaire, remonte à Q. Mucius Scaeuola13 cos. 95. Son intérêt tient en fait à ce qu'elle évoque la tradition commun e à nos autres sources. À l'intérieur de la guerre qui mit alors aux prises Rome et Véies, celle-ci isole en effet l'épisode de la Crémère dont elle fait le dernier acte d'une entreprise d'inspiration et de réalisation exclusivement fabiennes. Chez Tite-Live et chez Denys d'Halicarnasse, l'expédition s'étend sur une durée quelque peu supérieure à deux ans (479-477). L'Ab urbe condita note qu'elle fut entreprise à l'initiative de la seule gens Fabia. Si K. Fabius y informe le Sénat de cette décision, c'est moins en sa qualité de cos. 479 que de porte-parole de ce lignage (2, 48 8, Consul pro gente loquitur) et son propos n'est pas tant en l'occurren ce d'obtenir l'assentiment des patres que de les mettre devant le fait accompli. D'autres notations s'inscrivent dans le droit fil de ce début. La plus significative est à chercher dans l'image du consul paludatus qui passe en revue les gentiles qu'il avait convoqués devant sa demeure, prend place au centre du contingent ainsi formé et donne le signal de la mar che (2, 48, 10 et 2, 49, 3). Elle apporte la preuve que, parmi les tradi tions qui avaient cours sur cet épisode, l'une professait que Yimperium consulaire s'était en la circonstance mis au service d'une entreprise de caractère privé, même si elle était censée avoir pour objet le salut de la ville. Il est en effet significatif que le tout début du récit soit rythmé par le leit-motive du familiare bellum il, 48, 9) et des priuata arma (2, 49, l)14 et qu'à l'heure de la catastrophe, les Fabii apparaissent seuls face à leur destin. L'image que les Antiquités Romaines nous ont gardée de l'affaire 13 Cic, Top. L, 29, Gentiles sunt inter se qui eodem nomine sunt (suit l'exposé d'au tres conditions). Nihil enim uideo Scaeuolam pontificem ad hanc definitionem addidisse ; Paul. Fest., p. 83 L, s.v. Gentilis, Gentilis dicitur et ex eodem genere ortus et is qui simili nomine appellatur, ut ait Cincius : «Gentiles mihi sunt qui meo nomine appellantur ». 14 F. Frezza, Intorno alla leggenda dei Tabi al Cremerà, dans Scritti in onore di C. Fer rini, Milan, 1946, p. 295-306, p. 300, qui tire de cette donnée des conclusions différentes des nôtres; E. Montanari, op. laud., p. 24.
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de la Crémère est plus nuancée que la précédente. Certes, Denys d'Halicarnasse mentionne au départ de l'épisode une délibération de la gens à l'issue de laquelle, par la bouche de M. Fabius, cos. 480, et de son frère Kaeso qui lui avait succédé dans cette magistrature, celle-ci se serait engagée à mener avec ses seules forces et à ses frais la guerre qui opposait ÏVrbs à Véies (AR 9, 15, 2). Mais l'essentiel est qu'il s'inspire d'un annaliste qui avait conscience des difficultés que la tradition d'une guerre gentilice soulevait sur le plan juridique. C'est ainsi qu'il distin gue (AR 9, 15, 3) entre le contigent de gentiles, clients et sodales d'une part et l'armée régulière de l'autre qui quittèrent Rome en direction de Yager Veiens. En effet il spécifie que le premier était placé sous les ordres de M. Fabius qui, s'il avait été consul l'année précédente, ne détenait en 479 aucune fonction officielle, tandis que la seconde était commandée par K. Fabius alors consul. Il est vraisemblable que cette version des faits n'est pas à mettre au compte de Denys, mais qu'elle se rattache à une tradition plus ancienne selon laquelle, à aucun moment de son déroulement, Yimperium consulaire en tant que tel n'avait été partie prenante dans l'expédition. Contre cette quasi-certitude, il nous paraît vain d'invoquer le t émoignage d'AR 9, 16, 3 où nous lisons qu'après avoir obtenu du Sénat l'autorisation de rejoindre, à sa sortie de charge, le commando, Kaeso reçut à cette fin le pouvoir proconsulaire. En effet ce souci de normali sationpoussé jusqu'à l'anachronisme ne se limite pas15 à ce passage du livre IX, si bien qu'il ne paraît pas interdit de l'imputer à Denys. Tout se passerait donc en l'occurrence comme si, à ce que sa source présent ait comme initiative et action autonome des Fabii, celui-ci avait été ten téde substituer une mission certes revendiquée par la gens, mais dont les patres gardaient toutefois le contrôle. Reste que l'interférence qui en résulte çà et là des plans gentilice et civique est trompeuse et qu'elle ne doit pas faire oublier l'essentiel : même si l'un et l'autre rapportent que l'action du commando fut dans un premier temps appuyée, en d'autres points de Yager Veiens, par celle des légions16, Denys d'Halicarnasse, comme Tite-Live, est tributaire d'une tradition qui soulignait le caractè-
15 C'est ainsi que Ser. Furius aurait marché contre les Eques avec rang de proconsul (Denys d'HAL., AR, 9, 16, 4 et 9, 17, 5). 16 Liv., 2, 49, 10-12 (478); Denys D'Hal., AR 9, 15, 4-6 (479), 9, 16, 6-17, 1 (478), 9, 18, 5 (477; au moment de la catastrophe finale, le consul T. Menenius s'apprêtait à marcher contre l'armée étrusque qui avait pris position sur Vager Veiens).
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re autonome et privé de l'entreprise17. Il est significatif que pour l'es sentiel, elle ait situé le déroulement de l'expédition et la catastrophe18 finale en-dehors de la période d'hégémonie fabienne, puisqu'aucun membre de la gens Fabia n'exerça le consulat en 478 et en 477. Seul Ovide19 dont la dette à l'endroit de YAb urbe condita est évi dente semble être allé plus loin dans cette voie que nos deux historiens. Mais cette particularité découle de ses intentions. Il a en effet choisi de limiter son évocation de l'épisode (Fast. 2, 193-342) à la clades ellemême, optant du même coup pour le grossissement épique. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner que, dans son évocation d'une geste héroï que, il ait privilégié, voire majoré, les éléments qui pouvaient flatter l'amour propre de Paullus Fabius Maximus qui fut son protecteur et son ami. Quant à nos autres sources20 qui se réduisent à quelques brèves
17 Contra, mais à tort, E. Montanari, op. laud., p. 24-28. 18 À propos de laquelle les Antiquités Romaines nous ont gardé une double version des événements que Denys déclare emprunter à des sources dignes de confiance (9, 21, 6). Selon l'une, qu'il ne reprend pas à son compte, les Fabii seraient tombés dans une embuscade alors qu'ils revenaient à Rome où l'accomplissement d'une θυσία πάτριος requérait leur présence (9, 19, 1-3). Quant à l'autre, elle se confond pour l'essentiel avec celle de Tite-Live (9, 20, 1-21, 6). Seule une tradition tardive (Liv. 9, 38, 15-16, ... atque ei legem curiatam de imperio ferenti triste omen diem diffidit, quod Faucia curia fuit principium duabus insignis cladibus, captae Urbis et Caudinae pads, quod utroque anno eiusdem curiae fuerat principium. Macer Licinius tertia etiam clade quae ad Cremeram accepta est abominandam earn curiam facit) puisque Tite-Live la met au compte de Licinius Macer affirmait qu'un magistrat majeur (cf. le rapprochement avec le désastre de Caudium et la prise de Rome par les Gaulois), en l'occurrence un consul, avait été associé au moins à la phase finale de l'expédition. Nous comptons revenir ailleurs sur cette tradition et sur les problèmes qu'elle pose. 19 Qui à la date du 18 juillet (cf. le synchronisme du dies Cremerensis et du dies Alliensis) a préféré, pour des raisons qui nous échappent, celle du 13 février. F. Bömer, Interpretationen zu den Fasti des Ovid, dans Gymnasium, 64, 1957, p. 112-135, p. 114-115; Id., P. Ovidius Naso. Die Fasten, 2, Heidelberg, 1958, p. 96; D. Porte, L'étiologie religieuse dans les Fastes d'Ovide, Paris, 1985, p. 375-377; E. Lefevre, Die Schlacht am Cremerà in Ovids Fasten, dans RhM, 123, 1980, p. 152-162. 20 Plut., Cam. 19, 1 ; Flor., 1, 6, 1-2, ... adeo ut . . . priuatum . . . gesserit bellum gens Una Fabiorum ; Ampel., 20, 2, Fabii . . . cum omnes patriciae stirpis essent, bellum Veiens peculiariter sibi depoposcerunt ; Gell., 17, 21, 13; App., hai., frg. 6; Fest., p. 358 L, 5.v. Religioni; Id., p. 450 L, 5.v. Scelerata porta; Cass. Dio 5, 21, 1-3; Lib. de praen., 6; Hieron., Chron., p. 103 Schöne; Vir. ill.., 14, 1 (Veientes . . . sibi hostes familia Fabiorum priuato nomine depoposcit) - 6; Serv., Aen. 6, 845 et 8, 337; Oros., Hist. 2, 5, 8-9, Nam cum . . . Fa bii . . . speciale sibi aduersum Veientes decerni bellum expetiuissent . . .; Paul. Fest., p. 451
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notices ou scholies, elle n'offrent d'intérêt que dans la mesure où elles acceptent expressément ou de manière implicite la version des faits selon laquelle la gens Fabia aurait revendiqué et obtenu de prendre sur elle le poids de la guerre contre Véies. Envisagés de ce point de vue, certains de ces témoignages nous ont gardé des informations qui reflè tentles traits spécifiques d'une entreprise dont la vulgate des primordia ne connaît pas d'autre exemple. *
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II est vrai que, dans sa forme canonique, la tradition relative à l'e xpédition de la Crémère se révèle à l'analyse riche en données qui éveil lent le scepticisme. Les critiques les plus radicales qui en ont été faites sont celles d'E. Pais et, il y a peu, d'E. Montanari21. Le premier de ces réquisitoires se fondait entre autres choses sur le synchronisme du dies Cremerensis et du dies Alliensis. Et de fait il est plus que douteux que la responsabilité de la gens Fabia ait été engagée dans deux désastres qu'à la date du 18 juillet, Rome aurait essuyés, à près d'un siècle de distanc e, dans la même zone. Aussi E. Pais tenait-il pour acquis que la vulgate de l'épisode était dans le principe d'inspiration étiologique. Selon lui en effet, elle visait à fonder en raison l'interdit qui s'attachait à l'une des arches de la porte Carmentale. Sur cette donnée originelle, Fabius Pictor aurait greffé, à coup d'anticipations et de duplications, mais aussi en s'inspirant du modèle des Thermopyles le récit d'une bataille forgée de toutes pièces, même s'il demeure probable que la gens Fabia avait pris une part active aux guerres menées par Rome contre Véies dans les années 480. Plus systématique encore, pour ne pas dire plus impitoyable, la cri tique d'E. Montanari procède du postulat selon lequel le noyau com-
L, s.v. Scelerata porta. Cf. encore Sen, Benef. 4, 30, 2 et 5, 3, 2; Id., Epist. 82, 20; Sil. Ital., 2, 4-7, 6, 637-638 et 7, 39-61; Iuv., 2, 153-155; Schol. luv., 2, 153-155. 21 E. Pais, Storia di Roma, 1, 1, Turin, 1898, p. 434-436 et 515-521; Id., Storia critica di Roma durante i primi cinque secoli, 2, Rome, 1915, p. 151-161 et p. 431; Id., Ancient legends of roman history, Londres, 1906, p. 172-178. E. Montanari, op. laud., passim. Rap pelons d'autre part que Κ. J. Beloch, Römische Geschichte . . ., Berlin-Leipzig, 1926, p. 298, considérait que la tradition relative à l'épisode de la Crémère avait été forgée de toutes pièces afin d'expliquer l'absence répétée de consulats fabiens après 479.
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mun aux divers états de la tradition ne garde en aucune manière le sou venir d'événements réels. Il relèverait au contraire de ce qu'il faut bien appeler une histoire orientée dont les grandes lignes auraient été conçues et fixées en milieu pontifical. Celle-ci se caractériserait en l'e spèce par une volonté évidente de réactualiser un état de choses anté rieur à l'avènement de la ciuitas. C'est dans cette perspective que devrait s'interpréter la place faite dans les témoignages canoniques au thème de la prédestination du sang par l'exaltation du nomen Fabium et à celui de la résurgence d'usages caractéristiques, dans l'ordre mili taire, de l'organisation curiate. Même si elles font état de quelques éléments dignes de retenir l'a ttention, ces analyses n'emportent pas la conviction. Nous avons en effet établi ailleurs22 qu'elles ne sauraient infirmer l'authenticité globale de la tradition. Il est probable que le souvenir de l'entreprise s'était gardé en priorité dans la mémoire collective des Fabii. Et les mises en garde de Cicéron et de Tite-Live23 contre les formes d'altération du passé inhérentes à ce mode de conservation ne s'appliquent guère à ce cas. Dans le cadre ainsi défini, l'imagination ne peut en effet s'être donné libre cours à propos d'un épisode qui entrait difficilement dans la caté gorie des falsi triumphi. En d'autres termes, le rôle de Fabius Pictor qui fut porté, selon toute vraisemblance, à interpréter l'épisode avec l'idée bien arrêtée de laver par ce biais le nomen Fabium de ses responsabilit és dans l'affaire de Clusium et de l'Allia24 ne change rien à l'affaire et
22 J.-C. Richard, Historiographie et histoire : l'expédition des Fabii à la Crémère, dans Latomus, 47, 1988, p. 526-553. 23 Cic, Brut. 62, Multa enim scripta sunt in eis quae facta non sunt : falsi triumphi, plures consulatus, genera etiam falsa et ad plebem transitiones ; Liv., 8, 40, 4-5, Vitiatam memoriam funebribus laudibus reor falsisque imaginum titulis, dum familiae ad se quaeque famam rerum gestarum honorumque fallente mendacio trahunt; inde certe et singulorum gesta et publica monumenta rerum confusa. Nec quisquam aequalis temporibus Ulis scriptor exstat quo satis certo auctore stetur (322 av. J.-C). 24 En prenant les armes contre les Gaulois à Clusium en 391, trois membres de la gens Fobia avaient manqué à leurs devoirs de legati et au ius gentium (Liv., 5, 36, 6 et 8). C'est à la suite de cet incident que les Gaulois avaient entrepris de marcher sur Rome. Sur le synchronisme du dies Cremerensis et du dies Alliensis, cf. Liv., 6, 1, 11 ; Tac, Hist. 2, 91, 1 ; Plut., Cam. 19, 1 ; Fast. Ant. Ministr., à la date du 18 juillet (A. Degrassi, Inscriptiones Italiae, 13, 2, Rome, 1963, p. 208). À ce synchronisme, Licinius Macer (Liv., 9, 13, 5) substituait le rôle de principium dévolu à la curie Faucia lors du vote de la loi curiate des magistrats suprêmes des années 477 et 391 (mais aussi de l'an 321 où l'Urbs devait connaître le déshonneur des Fourches Caudines).
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la réalité des faits ne saurait être mise en doute : entreprise par les Fabii, l'expédition de la Crémère tourna pour eux à la catastrophe. Au demeurant, toute approche exclusivement philologique des t émoignages est vouée à laisser échapper l'essentiel. Il suffit d'analyser le dossier qu'ils constituent à la lumière de ce que nous pouvons entrevoir de l'histoire intérieure de Rome dans les années 485 à 475 pour obtenir la quasi-certitude que ses données les plus atypiques sont aussi les plus précieuses. *
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II se trouve en effet que cette décennie coïncide pour l'essentiel avec une période d'hégémonie fabienne, et ce dès l'entrée dans l'histoi re de la gens Fabia, puisque, si elle accède pour la première fois au consulat en 485 25, elle va jusqu'en 479, c'est-à-dire pendant sept années consécutives, monopoliser, en la personne de trois de ses membres, l'un des deux sièges consulaires. Bref, cette période marque une rupture brutale par rapport à la situation antérieure. Le témoignage des Fastes est au demeurant corroboré par un certain nombre de constatations irrécusables. M. Pallottino26 qui les a formulées avec toute la netteté souhaitable souligne que la mainmise des Fabii sur le pouvoir coïncida avec l'élimination de Sp. Cassius et du même coup avec la disparition, au moins jusqu'en 461, des gentilices plébéiens et des gentilices étrus ques27 qui, précédemment, avaient figuré à intervalles irréguliers dans cette même liste. En d'autres termes, le septennat des Fabii est indisso ciable de la «serrata» du patriciat28. Quant à l'éclipsé de cette gens dont les Fastes attestent la réalité pour une décennie d'abord, mais auss i,plus largement, au-delà de cette période, elle est de toute évidence à mettre en rapport avec l'expédition et le désastre de la Crémère. On ne saurait mieux dire que la responsabilité de cet épisode lui incombait.
25 Outre le premier consulat de Q. Fabius Vibulanus, l'année 485 vit également son frère K. exercer les fonctions de questeur. 26 M· Pallottino, Fatti e leggende (moderne) sulla più antica storia di Roma, dans SE, 31, 1963, p. 3-37 = Saggi di antichità, 1, Rome, 1979, p. 248-277, p. 275-276. 27 Cf. en 461 le consulat de P. Volumnius Amintinus Gallus. 28 Avant M. Pallottino, cf. déjà sur ce point F. Altheim, Römische Geschichte, l2, 1956, Amsterdam-Leipzig, 1956, p. 54.
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L'annalistique n'affirme rien d'autre, même si son témoignage sur la fin tragique des 306 tourne par la force des choses à la chanson de geste. *
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Si les résultats de l'analyse philologique et de la mise en perspecti ve historique se corroborent mutuellement pour établir l'authenticité substantielle de la tradition, celle-ci pose encore trois problèmes fonda mentaux qui sont en rapport étroit avec l'objet de cette table-ronde. L'un a trait à la composition du contingent fabien, les deux autres aux objectifs de l'entreprise et à son caractère exceptionnel. Il va de soi que les clients de la gens Fobia furent associés au déroulement de l'épisode. Même s'ils divergent quant à leur nombre29, plusieurs témoignages sont catégoriques sur ce point. Certes Diodore de Sicile et \Ab urbe condita ignorent tout de leur participation. Et pourtant il est hors de doute que Tite-Live utilise un annaliste qui ment ionnait leur présence dans le commando30. En effet la preuve a été faite qu'en tenant en-dehors de l'expédition la turba cognatorum sodaliumque (2, 49, 5), il a, de son plein gré ou malgré lui, faussé une don née précieuse. Ces sodales qui deviennent tout naturellement des έταΐροι mêlés à des πελάται dans le passage correspondant des Antiquités Romaines (9, 15, 3) avaient de droit leur place dans ce corps d'élite. Ils sont en effet indissociables de ceux dont l'inscription de Satricum31 nous a, pour une époque à peine antérieure, gardé le souvenir et qui,
29 Denys d'Hal., AR 9, 15, 3 (306 Fabii épaulés par 4.000 hommes qui, dans leur majorité, se recrutaient parmi leurs πελάται et leurs εταίροι) 9, 19, 1 ; 9, 23, 1 et 9, 59, 1 ; Paul. Fest., p. 451 L, 5.v. Scelerata porta, . . . cum clientium millibus quinque; Serv., Aen. 8, 337, . . . cum seruis et clientibus. Cf. aussi Gell., 17, 21, 13, ... Fabii sex et trecenti cum familiis suis . . . perierunt. Mais, dans leur majorité, les notices consacrées à l'expédition mentionnent exclusivement les 300 ou les 306 Fabii. 30 R. M Ogilvie, A commentary on Livy, BooL· 1-5, Oxford, 1965, p. 363. 31 Pour laquelle on se reportera à C. M. Stibbe, G. Colonna, C. De Simone et H. S. Versnel, Lapis Satricanus, with an introduction by M. Pallottino, Gravenhage, 1980, et à J. Bremmer, The suodales of Poplios Valesios, dans ZPE 47, 1982, p. 133-147. Mais on n'ou bliera pas que l'empereur Claude appliquait ce mot à Mastarna-Servius Tullius (ILS, 212, col. 1, 1.19-20, Caeli quondam Viuennae sodalis fidelissimus).
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par la force des choses, formaient une «Gefolgschaft» associée aux entreprises militaires de P. Valerius. En ce qui concerne les clients dont le nombre fait dans nos sources l'objet d'amplifications indues, leur participation à l'expédition ne sau rait davantage être mise en doute. Le rapprochement s'impose sur ce point avec les conditions de la venue à Rome, dans un passé encore proche, d'Attius Clausus et, plus encore, avec l'épisode du Sabin Appius Herdonius32 qui, projetant vingt ans plus tard de marcher sur YUrbs pour s'y emparer du Capitole, devait s'entourer à cet effet de clients ainsi que de serviteurs recrutés «parmi les plus valeureux». Sur un plan plus général, l'utilisation des clients à des fins militaires corres pondà un état de choses dont l'annalistique nous a gardé le souvenir en diverses circonstances de cette période33. Nous n'avons au demeur ant aucune raison de mettre les notices en question au compte de fal sifications tardives. L'entrée de la plèbe dans l'histoire à la faveur de la première sécession n'entraîna pas ipso facto la disparition des clientèl es, c'est-à-dire d'un élément de la population romaine qui se définissait par l'état de dépendance dans lequel il vivait par rapport aux familles patriciennes. C'est grâce à elles que celles-ci purent à diverses reprises faire face à la situation créée par le refus des plébéiens de se laisser enrôler. Il est également possible que, dans l'affaire de la Crémère, les attaches bien attestées des Fabii avec le monde étrusque34 aient joué en
32 Sur la venue d'Attius Clausus à Rome : Liv., 2, 16, 4, ... magna clientium comitatus manu ; Denys d'Hal., AR 5, 40, 3, pour qui le total des parents, amis et clients qui le suivirent à Rome n'était pas inférieur à 5.000 personnes; App., Reg. 12 (même nombre); Serv., Aen. 7, 706 (même nombre); Plut., Popi. 21,4 (chez qui cette suite se monte à 5.000 familles). Coup de main d'Appius Herdonius : Liv. 3, 15, 5 et 9, qui mentionne des exsuies seruique au nombre de 2.500; Denys d'Hal., AR 10, 14, 1 (clients et θεράποντες, soit un total de 4.000 hommes environ); Zon., 7, 18; A. Bottiglieri, // «caso» di Appio Erdonio, dans AAN, 88, 1977, p. 1-14. 33 Denys d'Hal., AR 6, 47, 1 (pour organiser la défense de l'Urbs pendant la première sécession); 7, 19, 2 (492, armée de Coriolan); Plut., Marc. 13, 5 (idem); Denys d'Hal., AR 9, 64, 3 (464) 10, 15, 5 (460, pour faire face à la menace d'Appius Herdonius : cf. à ce sujet les réflexions des tr. pi. chez Liv., 3, 16, 5) et 10, 27, 3 (457, proposition faite par L. Quinctius). 34 TLE2 65 (Caere, dernier tiers du VIIe siècle) et 471 (Clusium, dans les années 570 av. J.-C). Liv., 9, 36, 2. Rapproché de la deuxième inscription, la tradition relative à l'en voi à Clusium de trois membres de la gens Fabia chargés de négocier, en 391, avec les Gaulois qui s'étaient installés dans cette cité gagne en crédibilité (Liv. 5, 35, 5).
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ce sens. En 480 encore, si l'on en croit Denys d'Halicarnasse35, les prin cipes de la dodécapole avaient marché au combat sur le territoire de Véies avec des armées semiprivées de pénestes et d'etera. En partant un an plus tard pour le même front, il n'est pas exclu que les Fabii se soient inspirés de cet usage. Toujours est-il que leur initiative se fondait sur un type de solidarit é précivique qui constituait déjà une survivance. On comprend mieux dans ces conditions qu'une tradition qui remonte vraisemblablement aux antiquaires ait reconu en elle l'archétype de la coniuratio36, c'està-dire d'une entreprise guerrière étrangère au cadre de la militia légit ima.Cette transposition dans une catégorie marginale au sein du monde où ils vivaient ne laisse pas d'être significative. Elle établit à notre sens que, dans la vulgate des initia, l'épisode de la Crémère occupait la pla cequi lui revenait de droit, celle d'une initiative guerrière de caractère privé et qui, comme telle, échappait au contrôle de la collectivité ou plutôt de ses magistrats. En faisant état, l'un expressément (AR 9, 15, 2), l'autre au moins implicitement (2, 48, 8), d'un decretum gentis, Denys d'Halicarnasse et Tite-Live ne disent rien d'autre. * * *
On aura compris qu'en ce qui concerne ses objectifs, nous rejetons toute interprétation reconnaissant dans l'entreprise des Fabii une mis sion officiellement confiée à leur gens dans le cadre d'une stratégie d'ensemble. C. Saulnier37 qui a formulé ce point de vue considère que l'installation à demeure d'un contingent romain dans Yager Veiens visait à préserver la liberté de circulation sur la uia Flaminia et à éviter que l'expansion de Véies en direction du Tibre ne fît peser une menace 35 Denys d'Hal., AR 9, 5, 4. J. Heurgon, Les pénestes étrusques chez Denys d'Halicar nasse (IX, 5, 4), dans Latomus, 18, 1959, p. 713-723, p. 721. 36 Serv., Aen. 6, 845, . . . Qui, cum coniurati cum seruis et clientibus suis contra Veientes dimicarent, . . . apud Cremeram fluuium interempti sunt; Id., ibid. 7, 614, Coniuratio quae fit in tumultu, id est Italico bello et Gallico, quando uicinum urbis periculum singulos turare non patitur, ut inter Fabios fuit. T. Mommsen, Fabius und Diodor, p. 247-250; J. Bleicken, Coniuratio, dans JNG, 13, 1963, p. 51-70. 37 C. Saulnier, L'armée et la guerre dans le monde étrusco-romain (VIIIe-IVe siècle), Paris, 1980, p. 146-149. Sur le commerce du sel auquel l'Vrbs se livrait dès cette époque, cf. A. Giovannini, Le sel et la fortune de Rome, dans Athenaeum, 63, 1985, p. 373-387.
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sur le commerce du sel auquel YUrbs se livrait avec le pays sabin. Sa théorie doit au demeurant quelque chose à celle d'O. Richter38 qui mett ait en rapport l'expédition avec la volonté de Rome de couper la ligne de communications naturelle entre Véies et Fidènes et d'empêcher la cité étrusque de garder le contrôle de la navigation sur le Tibre. Cette double reconstruction des faits appelle à nos yeux deux crit iques. Si YUrbs avait alors opté pour une stratégie ayant pour objet le contrôle du Tibre, on s'attendrait que Fidènes ait été au centre du conflit qui opposait Rome à Véies depuis plusieurs années. Or tel n'est pas le cas, et cette évidence ne doit pas être sous-estimée si l'on songe que le nom de Fidènes apparaît à plusieurs reprises dans la chronique des années 509-498, date depuis laquelle l'annalistique rapporte qu'elle était sous la domination romaine39. Et surtout, dans ces deux hypothès es, les raisons du recours à une seule gens, fût-elle toute-puissante, sont des plus obscures. La situation s'éclaire quelque peu à partir du moment où l'on s'en gage dans la voie ouverte il y a un siècle par W. Kubitschek40 qui émit l'hypothèse selon laquelle les Fabii furent conduits à s'installer dans le voisinage de la Crémère parce que ce cours d'eau limitait à l'est le terri toire de la tribu qui portait leur nom. De ce qui n'était au départ qu'une conjecture prudente, les modernes ont trop vite41 fait une certitude, dans la mesure où il n'est pas exclu que la tribus Fabia soit postérieure à cette date et où nous ignorons tout de son emplacement. Reste que l'idée d'une intervention des membres de la gens dans une zone où ils possédaient des terres exposées depuis les débuts de la guerre contre Véies à des pillages ou à des destructions mérite d'être prise en consi-
38 O. Richter, Die Fabier am Cremerà, dans Hermes, 17, 1882, p. 425-440, p. 433-438. 39 L. Quilici-S. Quinci Gigli, Fidenae, Rome, 1986, p. 391, qui souscrivent à la tradi tion de Denys d'Halicarnasse (AR 5, 59-60) selon laquelle les Romains se seraient, en 498, emparés de Fidènes. 40 W. Kubitschek, De romanarum tribuun origine ac propagatione, Vienne, 1882, p. 6. Retenue comme vraisemblable par G. De Sanctis, Storia dei Romani, 22, Florence, 1960, p. 126, cette hypothèse a été reprise par L. Ross Taylor, op. laud., p. 40-41, J. Heurgon, Rome . . ., p. 296, M. Humbert, Municipium . . ., p. 52, J. Gagé, La chute des Tarquins et les débuts de la République romaine, Paris, 1976, p. 217, A. Ruggiero, Mito e realtà nella vicenda storica della gens Fabia, dans Ricerche sulla organizzazione gentilizia . . ., p. 257294, p. 277. Contra, A. Alföldi (mais pour des raisons essentiellement chronologiques), Early Rome . . ., p. 132 et 312; C. Saulnier, op. laud., p. 146. 41 Cf. les justes remarques d'E. Badian dans sa recension du livre de L. Ross Taylor, dans JRS, 52, 1962, p. 200-210, p. 201.
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dération. L'existence de prata Muda42 sur la rive droite du Tibre, qui sont sans doute indissociables des arae Muciae dont Pline l'Ancien spé cifie qu'elles étaient situées in agro Veiente {Nat. 2, 211) oriente en tout cas l'analyse en ce sens. En effet, si Tite-Live rapporte que le bienfonds en question avait été accordé à C. Mucius par le sénat désireux de récompenser son héroïsme, il est tout aussi vraisemblable qu'il ait appartenu aux Mucii avant la coniuratio de 508 (Liv. 2, 12, 5) et que celle-ci, embellie par l'annalistique ad maiorem Vrbis gloriam, ait eu plus prosaïquement pour objet de le soustraire aux visées des Véiens sur les Septem pagi. Auquel cas tout se serait passé dans l'épisode de la Crémère comme si, se refusant à abandonner aux Véiens une zone vita lepour elle, la gens Fabia avait entrepris d'y conduire une guerre de clan avec le concours de clients et de sodales directement intéressés au succès de cette expédition. *
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Reste que cet épisode constitue un hapax s'il est vrai qu'aucun autre exemple de guerre gentilice n'a été enregistré par la vulgate de l'annalistique et que les seuls termes de comparaison dont nous dispo sonsavec les témoignages relatifs à la venue à Rome d'Attius Clausus et au coup de main d'Ap. Herdonius sont approximatifs. Cette particularit é invite à croire qu'il marque un tournant dans l'histoire de l'aristocrat ie romaine et de l'organisation gentilice. De quelque façon qu'il faille en envisager les liens avec les six années d'hégémonie fabienne qui le précédèrent, il prit place dans des circonstances exceptionnelles. En effet les efforts de la gens Fabia pour se perpétuer au pouvoir dès le moment où son nom apparaît dans les Fastes et ses aspirations à une sorte de monopole de Yimperium consulaire traduisent une volonté de puissance poussée à son point le plus haut et dont on chercherait en vain un exemple comparable tout au long de la République patricienne. Tout va désormais se passer comme si l'oligarchie avait opté à Rome
42 Liv., 2, 13, 5, Patres C. Mudo uirtutis causa trans Tiberini agrum dono dedere; Paul. Fest., p. 131 L, 5.v. Muda prata. Le rapprochement avec les arae Mudae est propos é par E. Pais, Storia critica . ... 2, p. 117.
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pour la cohésion43, afin de faire bloc face aux menaces extérieures et aux revendications de la plèbe. Mais l'avènement de cet esprit unitaire passait par l'adoption de valeurs égalitaires, donc par la fidélité à une éthique qui, à la différence de ce qui était le cas dans le monde grec archaïque, s'accommodait mal des luttes de faction ou des aspirations au pouvoir personnel. Ap. Claudius le décemvir et, au siècle suivant, M. Manlius Capitolinus sont les exceptions qui confirment la règle. Or il est significatif qu'au dire de nos sources, ils n'aient ni l'un ni l'autre fait l'unanimité parmi leurs pairs. Il est vraisemblable que les nécessités militaires conjuguèrent leurs effets avec ces exigences de cohésion. Même sous la forme rudimentaire qu'il lui avait donnée, l'organisation centuriate avait été conçue par Servius Tullius avec le ferme propos d'affaiblir les solidarités gentilices qui s'étaient tissées dans le cadre des curies44. Et s'il faut croire qu'elle ne trouva sa forme définitive qu'après le décemvirat et que la substitu tion d'une infanterie de cinq classes à la dichotomie de la classis et des infra classem est pour l'essentiel l'œuvre du tribunat militaire à pouvoir consulaire45, la preuve se trouve ainsi pratiquement faite que, tout au long des soixante-quinze années précédentes, la République lui était restée fidèle. C'est dire que, malgré A. Momigliano46, l'épisode de la Crémère ne peut avoir marqué le point culminant d'une crise du syst èmecenturiate avec lequel le nouveau régime aurait rompu avant de le remettre en honneur à la lumière de l'expérience. Si les sodales et les clients des Fabii, peut-être équipés pour partie d'un armement de caractère hoplitique47, y prirent une part active et s'il put arriver ulté-
43 Cf. sur cet état d'esprit K. A. Raaflaub, From protection and defense to offense and participation : stages in the conflict of the orders, dans Social struggles in archaic Rome, edited by K. A. Raaflaub, Berkeley-Los Angeles, 1986, p. 198-243, p. 227. 44 J.-C. Richard, Classis - infra classem, dans RPh, 51, 1977, p. 229-236. 45 Selon une hypothèse séduisante formulée par E. Gabba, dans Les origines de la République romaine, Entretiens sur l'antiquité classique 13, Genève, 1967, p. 285, et à laquelle A. Momigliano devait donner son assentiment (ibid., p. 286). 46 A. Momigliano, An interim report on the origins of Rome, dans JRS, 53, 1963, p. 95121, p. 121. 47 Si du moins la comparaison avec ce que nous entrevoyons, à date il est vrai plus ancienne, dans le monde grec (A. Snodgrass, Early greek armour and weapons from the bronze age to 600 B.C., Edimbourg, 1964, p. 183, qui se fonde sur Alcée, frg. 15 Bergk) est valable. Au point de vue de F. Cornelius (Unter sunchungen zur frühen römischen Ges chichte, Munich, 1940, p. 75-76) qui considérait l'épisode de la Crémère comme antérieur à l'apparition de l'organisation centuriate, il faut préférer les considérations plus nuan-
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rieurement encore que le patriciat fît appel à ses clientèles pour les besoins de la défense de Wrbs, l'heure était désormais à une armée de type civique et le temps se trouvait révolu où, au sein de la communaut é à laquelle ils appartenaient, des groupes ou des individus pouvaient à des fins personnelles prendre des initiatives lourdes de conséquences politiques. En d'autres termes, l'échec de la Crémère marque la fin d'une épo que. Il suffit pour en avoir la preuve de mettre en parallèle les deux seuls decreta gentilices dont le souvenir est venu jusqu'à nous. Le pre mier est celui des Fabii tel qu'il se lit en filigrane chez Tite-Live et chez Denys d'Halicarnasse. Le second, qui lui est postérieur d'un siècle envi ron, fut pris par les membres de la gens Manlia48 qui décidèrent en 384 (?) que désormais, aucun des leurs ne porterait le prénom maudit de Marcus. Dans un cas, le lignage n'avait pas reculé devant une résolu tion qui, outre son propre avenir, engageait au moins indirectement celui de Rome, même si, à tort ou à raison, l'annalistique a cru devoir situer la catastrophe en-dehors de la série des consulats fabiens. Dans l'autre, il ne put que se borner à tirer les leçons d'un proche passé et, en lavant à l'avance ses fils de tout soupçon d'adfectatio regni, il fit, à titre au moins symbolique, acte d'allégeance à la cité. La différence perceptible entre ces deux decreta est différence de nature et non pas de degré. Elle traduit l'ampleur d'un processus dont les modalités nous échappent, mais qui n'en eut pas moins pour effet évident de restreindre le champ des activités ou visées gentilices. Il est vraisemblable que l'affaiblissement des liens de clientèle fut pour beau coup dans cette évolution. En effet, dans sa chronique des activités post-décemvirales, l'annalistique est muette sur l'utilisation des clientè les à des fins militaires. Cette rupture avec un mos encore récent suggèr e à tous le moins que le processus d'absorption des clients par la plèbe était en cours de réalisation. Pour cette raison comme pour d'autres, il était exclu que l'histoire pût se répéter. Dans ses motivations et dans les modalités de son déroulement, l'entreprise des Fabii porte la marque
cées de M. P. Nilsson, The introduction of hoplite tactics at Rome : its date and its conse quences, dans JRS, 19, 1929, p. 1-11, p. 2 et 8. 48 Cic, Phil. 1, 32 (. . . decreto gentis Manliae . . .); Liv., 6, 20, 14 (. . . gentis Manliae decreto . . .); Gell., 9, 2, 11; Plut., QR 91; Paul. Fest., p. 112 L, 5.v. (M.) Manlium. Cf. infra, n. 49.
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d'une époque désormais révolue49. Mais, même replacée à la date qui est la sienne, elle garde un caractère exceptionnel s'il est vrai que, dans l'état actuel de notre documentation, elle est le seul et unique exemple qui traduise en termes de passage à l'acte ce qu'ailleurs, nous n'entre voyons qu'à l'état de virtualités. Jean-Claude Richard
49 C'est pourquoi nous ne saurions souscrire au point de vue de P. A. Brunt (Italian manpower 225 B.C. - A.D. 14, Oxford, 1971, p. 640) selon lequel la tradition relative à l'entreprise des Fabii épaulés par leurs sodales et leurs clients évoquerait de trop près ce que nous entrevoyons du recrutement de l'armée que Scipion Émilien devait en 134 conduire en Espagne pour que des doutes ne surgissent pas sur son authenticité. Cette authenticité est au demeurant acceptée, entre autres spécialistes de Γ« Altertumswissens chaft» actuelle, par A. Alföldi, Early Rome..., p. 292, 302, 315-316, J. Heurgon, Rome . . ., p. 275 et 296, A. Momigliano, The origins of Rome, dans Settimo contributo alla storia degli studi classici del mondo antico, Rome, 1984, p. 379-436, p. 420. Cf. aussi M. To relli, Storia degli Etruschi, Bari, 1981, p. 200; A. Ruggiero, op. laud., p. 275-278. En ce qui concerne le problème évoqué à la note précédente, on notera que Suétone mentionne, mais sans indication de date (Tib. 1, 4), la décision unanime (consensus) par laquelle les Claudii avaient pour l'avenir rejeté le prénom de Lucius que deux des leurs avaient enta ché d'opprobre par leur conduite. À la bibliographie indiquée dans la n. 2, on ajoutera M. Rusconi, Le notizie di Diodoro e gli Annales Maximi, dans Storiografia e propaganda a cura di M. Sordi, Milan, 1975, p. 105-110, p. 107. Aux exemples mentionnés dans la n. 31, on ajoutera celui de Γέταιρία μεγάλη νέων ευγενών dont Coriolan, dépité par son échec au consulat, était censé avoir grossi ses πελάται déjà nombreux (Denys d'Hal., AR 7, 21, 3). Enfin on complétera les travaux énumérés dans la n. 36 par M. Lemosse, La condition ancienne des auctorati, dans RD, 61, 1983, p. 239-241.
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LA CRISE POLITIQUE DU Ve SIÈCLE ET LA LÉGISLATION DÉCEMVIRALE
La Loi des XII Tables compterait-elle parmi les gloires usurpées? On pourrait le croire. Pour les prudentes, il est vrai, et pour l'ensemble de la tradition juridique antique, le code décemviral serait un trophée insigne. Déchi rantle voile du temple, les décemvirs auraient révélé les principes de l'action en justice, publié le catalogue des délits et des peines, défini la source des obligations, découvert d'un coup la «source de tout le droit privé et public» (Liv. 3, 34, 6). Mais la critique moderne est beaucoup plus réticente; elle met en évidence les lacunes du vénérable document, déclare inacceptable tout empiétement sur le domaine du droit public, réserve aux coutumes un rôle encore essentiel et souligne, parmi les dispositions de la loi elle-même, la faible place qu'y tiennent les innovat ions. Peut-être alors faut-il, à la suite de la tradition annalistique, com prendre avant tout le Code des XII Tables comme l'un des événements politiques majeurs du Ve siècle? Mais on demande à être convaincu. Le tribun Terentilius Harsa a-t-il vraiment entretenu pendant des années l'une des plus dramatiques tensions plébéiennes1 pour arracher à l'ol igarchie patricienne le secret de la durée de la grossesse, pour découvrir sur les tables de bronze le délai de l'usucapion, pour connaître le poids de la ration quotidienne de farine versée au débiteur enchaîné ou la largeur, en pieds, de la bande mitoyenne qui doit rester en friche? C'est douteux. 1 Liv. 3, 9 à 3, 32 : dix années de luttes et de menaces de sécession, marquées notamment par le tentative plébéienne de s'emparer du Capitole (affaire d'Appius Herdonius - Liv. 3, 15 et s. -.
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À la déception du juriste, qui perçoit mal la cohérence de cet amas de dispositions fragmentaires et hétéroclites, s'ajoute la déception de l'historien curieux des motivations profondes de la plèbe révoltée : Terentilius Harsa se serait-il battu pour rien? Mais il y a plus. Si part ielles soient-elles, les grilles d'interprétation juridiques et politiques ne se rejoignent guère. Entre le mouvement purement politique qui, d'une part, par coups de force successifs, conduit à la codification et, d'autre part, le résultat publié, il y a un décalage ou un hiatus. Un exemple suffira : l'une des dernières synthèses, et des plus remarquables, pu bliées sur le droit des XII Tables (A. Magdelain, 1986)2 affirme l'i mportance juridique exceptionnelle du code, mais ne lui reconnaît aucu ne signification politique particulière. L'hypothèse présentée ici voudrait réconcilier les deux tenants de la tradition : rétablir une unité, a priori nécessaire, entre la pression plébéienne initiale et le code finalement soutiré à l'oligarchie décemvirale. Il s'agit d'un plaidoyer «pour une lecture politique» des XII Tables, à la recherche d'une signification unitaire. Au cours de cette enquête, les quelques satisfactions d'ordre social que l'oligarchie aurait pu lâcher à la plèbe insurgée seront laissées délibérément de côté - et pour deux raisons. L'inventaire, en premier lieu, en a été maintes fois dressé3 et l'on ne saurait ajouter quoi que ce soit à une liste vite arrê tée: quelques dispositions, certes, ont pu, entre autres, favoriser part iculièrement la plèbe écrasée sous le poids des dettes et de l'usure4, victime de procédés d'exécution brutaux5 et choquée par le luxe pro vocant des grands, étalé notamment dans leurs usage funéraires6. Mais surtout - et c'est le motif principal -, il est regrettable de se satis faire, comme on l'a fait jusqu'ici, de ces quelques douteuses conces sionspour refermer aussitôt, à peine entrouvert, le dossier de la dimens ion politique de la codification décemvirale. Pour ne pas en être aveug lé,on négligera donc ces gains, ou soi-disant gains plébéiens ; le carac tèreéminemment politique de la rédaction d'une législation globalisan-
2 Le ius archaïque, dans MEFRA, 98, 1986, p. 265-358. 3 Notamment par Fr. Wieacker, Zwölf tafelprobleme, dans RIDA, 1956, p. 459-491, notam., p. 472 et s. ; Die Zwölftafeln in ihrem Jahrhundert, dans Les origines de la Républi que romaine (Fondation Hardt, XIII), 1967, p. 293-356. 4 VIII, 18. 5 Table III. 6 Table X. Cf. C. Ampolo, // lusso funerario e la città arcaica, dans Annali (Univ. Napoli), VI, 1984, p. 71-102.
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te n'en ressortira que mieux, placée comme il convient dans la crise qui divise alors la noblesse romaine partagée entre les défenseurs d'une constitution oligarchique et les partisans d'une ouverture démocratiq ue. L'enquête se déroulera en trois étapes. La première, négative, a une vocation de déblayage, autour de «ce que ne sont pas les XII Tables». La seconde, positive, rassemble les preuves d'une réforme politique fondamentale réalisée grâce aux XII Tables. La troisième, hypothétique, part en quête de l'inspiration de ce bouleversement. On suggérera l'influence de modèles grecs.
I - L'approche par élimination
A) Les XII Tables ne sont pas l'œuvre de publication ou de révélation d'un droit resté secret. Prenons les trois premières tables relatives à la procédure, ou les dispositions donnant efficacité aux actes per aes et libram (VI, 1 : mancipium et nexum) ou encore la formulation des délais de l'usucapion et de son domaine (VI, 3 et VI, 4). Pas un de ces versets ne dévoile un quelconque secret; aucun d'eux ne s'expliquera par la volonté de porter à la connaissance de tous un droit qui fût resté le monopole de quel ques spécialistes. On remarque en effet que les données fournies par la loi dans tous ces exemples, d'une élémentaire simplicité, relevaient du domaine pub lic. Les verba que le formalisme requiert pour la formule mancipatoire ou pour le déroulement de la procédure par le sacramentum étaient connus de tous. Qui pouvait ignorer les délais de l'usucapion (1 an, 2 ans) ou la durée légale de la grossesse? Et l'on posera la même quest ion, appelant la même réponse, pour la plupart des peines variées dont la loi des XII Tables accompagne les nombreux délits qu'elle énumère. La vocation de la loi ne fut pas de tirer de son ignorance la masse des justiciables; l'esprit de la codification n'est pas à chercher dans une sorte de diffusion pédagogique et égalitaire. Trop banales par certains côtés pour prétendre dévoiler quoi que ce soit, les dispositions du code, inversement, sont souvent beaucoup trop elliptiques pour avoir apporté une aide quelconque à des plaideurs
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isolés. Pour en rester à la procédure, quels instruments fournit concrè tement la loi? Elle pose un principe général d'action sous la forme du sacramentum (II, 1); puis elle dresse la liste d'un grand nombre de cas concrets d'application, qui relèvent d'obligations ou de faits délictueux appelant réparation ou vengeance, ou protègent des droits dits absolus (propriété, puissance maritale, liberté. . .). Mais le passage nécessaire de l'un à l'autre, l'intermédiaire entre le principe général d'action et le droit dont la garantie est judiciairement demandée, n'est jamais fourni par la loi. Il manque les formules concrètes dont les verba rituellement prescrits devaient être prononcés par les plaideurs; il manque les actions spécifiques se coulant dans la procédure générale du sacramen tum, propres à chacun des droits inventoriés par le code. La vindicatio du volé, celle de l'héritier, celle du propriétaire dont le bien est menacé par une usucapion, celle de l'agnat agissant contre l'acquéreur d'un bien illégalement aliéné par sa parente sans Yauctoritas de son tuteur, la vindicatio de Yadsertor dénonçant l'abusive servitude d'un parent ou d'un voisin appellent, chacune, une formule spécifique que la loi ne donne pas - même si chacune, coiffée par le sacramentum, est légal ement garantie par le code. La connaissance des actions n'est pas com muniquée. Elle restera, jusqu'à l'indiscrétion calculée du scribe d'Appius Claudius, le monopole des spécialistes du droit. La loi des XII Tables n'est pas un catalogue d'actions : elle fonde des possibilités d'agir mais n'expose pas les moyens techniques de les réaliser. On conviendra donc que le code décemviral ne prétend nullement démasquer un droit resté jalousement secret. Ou le droit publié n'était pas secret ou le «secret» pouvait, aux yeux des décemvirs, subsister sans inconvénient majeur.
B) Les XII Tables ne sont pas une œuvre de laïcisation du droit. Les défenseurs d'une origine sacrale du droit - que l'on se réfère à la valeur primitive du ius, ou que l'on penche vers l'idée d'une efficaci té magico-religieuse du rite - admettent que le ius est déjà entré, bien avant la rédaction des XII Tables, dans sa phase laïcisée7. Même si les pontifes restent - et pour longtemps - les interprètes naturels des actes de procédure et des formes d'engagement, les dépositaires privilégiés Voir, par exemple, A. Magdelain, art. cit., p. 315.
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des verba doués de l'efficacité prescrite, néanmoins le droit pré-décemviral n'a pas gardé grande trace de ses origines religieuses et magiques. On peut même penser que l'une des vocations de la législation fut, loin de chercher à opérer une conversion en désacralisant un droit dont les racines religieuses fussent restées vivantes, de raviver au contraire par l'autorité-relais de la loi une efficacité religieuse progressivement ta rie8. Bien plus, si les décemvirs avaient voulu une sécularisation général e du droit dans le souci d'éliminer la religio des sources immédiates du tus, ils auraient attiré, pour les transformer, toutes les institutions enco re fondées au Ve siècle sur le droit sacré. Ce ne fut pas le cas. Plusieurs prescriptions volontairement omises par le code entrent précisément dans la catégorie des droits religieusement sanctionnés, maintenus donc dans un domaine exclusivement sacral. On citera par exemple le iusiurandum, que n'ignorent sans doute pas les XII Tables9, mais qui, comme source général d'engagement, reste extra-légal. Les nombreux cas de sacrano connus par les leges regiae apportent le même témoignag e. Il faudra expliquer - on y reviendra - pourquoi le code ne voulut pas les absorber; il suffit pour le moment d'en tirer la conclusion que l'entreprise de codification ne fut pas portée par la volonté d'une sécu larisation globale.
C) Les XII Tables ne sont ni un code exhaustif, ni le catalogue de disposi tions ambiguës ou contestées. Dans un vigoureux article consacré en 1973 aux domaines respect ifs de la lex et du ius à l'époque archaïque, Max Kaser a reconnu aux décemvirs des ambitions fort modestes10. Loin d'eux l'intention d'éta8 Ainsi le rite de Yobvagulatum ire ob portum (dénonciation rituelle et publique de la défaillance d'un témoin - II, 3 -) ou rite de la procédure de perquisition lance et lido VIII, 1 5 - : ces rituels très archaïques, actes privés munis d'efficacité magique, sont repris par la loi soucieuse de ranimer une efficacité déclinante. 9 Fragm. 6 (de place incertaine) - d'après Cic, de off. 3, 31, 111. Où les XII Tables pouvaient-elles mentionner le iusurandum, au moins implicitement? On peut songer à l'action de la loi par sacramentum. 10 Die Beziehung von lex und ius und die XII Tafeln, dans Studi in memoria di G. Donatuti, II, 1973, p. 523-546 (= Ausgewählte Schriften I, Camerino, 1976, p. 186 et s.); de même (plus rapidement), Zur Problematik der römischen Rechtsquellenlehre, dans Fest-
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blir sur la loi la totalité du droit privé : ils se seraient contentés, dans des réformes ou des précisions de détail, d'apporter quelques retouches à un fonds de droit préexistant et resté, après 450, hors du domaine de la loi. À preuve la manière dont se présentent, selon la tradition, les dispositions relatives à la succession ab intestat; aucun principe génér al n'est proclamé qui fonde en premier lieu le droit de Yheres suus à la succession du défunt, mais simplement une précision (V, 5) qui, «en l'absence d'hères suus appelle l'agnat le plus proche». Pour le célèbre romaniste allemand, la loi aurait complètement laissé hors de son domaine la dévolution des biens ab intestat; elle n'interviendrait que là où le ius antérieur (découlant des mores), ambigu ou incomplet, aurait mérité d'être réformé. Tout récemment André Magdelain a radicalement rejeté cette inter prétation et démontré - avec succès selon nous - que ce que l'on avait pris pour une très grande timidité de la part du législateur était en réal ité une remarquable concision11. Pour en rester à l'exemple choisi : les décemvirs, sans le souci, qui eût guidé l'auteur d'un code moderne ou inspiré l'exposé systématique d'un professeur, de poser les principes de la dévolution aux biens selon les droits du sang, ont résumé en une seu leformule et les droits prioritaires de Yheres suus et ceux, secondaires ou accessoires, de Yadgnatus proximus. C'est donc toute la succession ab intestat qui, pour A. Magdelain, est passée d'un coup dans le ius nou vellement fondé sur la lex. Mais fallait-il en conclure pour autant, que le code décemviral contient la somme de tout le droit privé? La patria potestas, dans sa presque totalité, a échappé au champ couvert par le code décemviral12. Sa source ne s'y trouve pas - qu'il s'agisse du mariage ou de l'acte de tollere liberos -, pas plus que son contenu - durée ou prérogatives -. Cela implique que le droit du poter schrift Flume, I, 1978, p. 105 s. Pour M. Kaser l'idée selon laquelle les XII Tables seraient une norme générale, source de l'organisation collective, serait une vue tardive de la fin de la République, formée sous l'influence de la philosophie grecque. Voir, en revanche, les arguments, décisifs à notre sens, de Fr. Wieacker, art. cit. (n. 3), p. 293-294 et lus e lex in Roma arcaica, dans Sodalitas, VII, Naples, 1982, p. 3105-3123, notam. p. 3122. 11 Art. cit. (η. 2), p. 322-326. 12 A. Magdelain, art. cit, (η. 2), p. 326, a soutenu que la patria potestas serait tout entière passée dans le domaine de la loi, du fait que sa source y aurait été englobée par IV, 4 (fixant à 10 mois la durée de la grossesse). L'argument est trop ingénieux pour être véritablement solide. La patria potestas, dans sa source et son contenu, échappe complète ment à la loi. La Table IV, 4, veut trancher la question de la légitimité du posthume - et de sa qualité d'hères suus.
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sur ses enfants (IV, 2-a n'a été inséré dans le code décemviral par quel ques éditeurs modernes qu'au prix d'une maladroite interpolation), sur leur existence ou sur leurs biens, échappe au tus ex lege. La loi s'est désintéressée de la puissance paternelle : plus exactement elle ne l'a prise en considération que pour en réprimer certains abus (infanticide - IV, 1 -; exploitation de la force de travail du fils - IV, 2 -) ou lorsque la patria potestas rejaillit indirectement sur un tiers (actions noxales XII, 2). Il faudra expliquer ces lacunes et le motif des choix faits par les décemvirs. Mais une constatation immédiate s'imppse : les décemvirs n'ont pas prétendu fonder sur la lex la totalité du droit en vigueur. On ne saurait voir non plus dans le code décemviral un catalogue de cas douteux tranchés par la volonté de la loi. L'interprétation, sans doute, conviendra dans quelques hypothèses : pour fixer des délais (dans l'exécution de la sentence - III, 1 et 5 - ), établir des limites (VII, 4; VII, 6; VII, 9), prescrire des peines fixes (Table Vili, passim). Mais trop de versets énoncent des principes pacifiques (la validité du test ament comitial - V, 3 -; l'efficacité de l'acte per aes et libram - VI, 1 -; la sacralité du patron infidèle - VIII, 21 -; la procédure par le sacramentum - II, 1-a -) pour que l'on puisse reconnaître dans le code décemviral le souci principal de trancher des controverses entre juris tes spécialistes.
D) La loi des XII Tables n'est pas un recueil de dispositions neuves ou rénovées. Il y a, certes, des innovations. Dans le domaine de la procédure on songe aussitôt à la création (par les XII Tables, selon une grande vra isemblance) de la iudicis arbitrive postulano, aux progrès significatifs en comparaison de la vieille action du sacr amentum. Le droit pénal a lui aussi bénéficié de progrès, tels que l'extension de la peine compensatoir e par l'autorité de la loi ou sous la menace du talion. La liste peut en être allongée, mais il serait abusif de percevoir dans la loi une vaste entreprise de modernisation d'institutions surannées. Le bilan, pour le moment, est purement négatif. Le code ne pré tend pas dresser le tableau de tout le droit privé; il n'a pas pour mis sion principale d'introduire des innovations techniques; il reprend bien des dispositions incontestées et qui n'avaient de secret pour personne. Sa vocation est à chercher ailleurs.
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II - LA VOCATION POLITIQUE DES XII TABLES : FONDER LE IUS SUR LA LEX La loi des XII Tables marque l'apparition à Rome d'un concept nouveau qualifié de lex. Sans doute y eut-il des leges avant les XII Tables (leges templi, lex d'un foedus, voire lex d'un roi édictant une nor me), mais il s'agissait là, par définition, de leges partielles. Avec la rédaction du code décemviral, on découvre tout autre chose qui n'a rien de commun avec les quelques leges antérieures. La loi des XII Tables est à la fois un recueil de leges, terme quali fiant techniquement les divers versets décemviraux, et à la fois une lex, au sens de principe général, source nouvelle du droit. En consentant la rédaction d'un code, les décemvirs introduisent à Rome un concept neuf : celui d'une norme générale gouvernant la Cité et dont découlera désormais le ius. Mais ce faisant les décemvirs font une victime : Yimperium consulaire à qui, pour l'avenir, échapperont la détermination judiciaire du ius et le monopole de sa sanction. Là réside la véritable révolution décemvirale et sa signification éminemment politique. Le code opère une mutation de la source du ius (bien plus que de sa for mulation). La loi s'empare de l'ensemble du droit privé et du droit public dans la mesure où l'un et l'autre étaient placés jusque-là sous le contrôle Yimperium. La loi annexe le droit et s'en proclame la garante exclusive. L'hypothèse formulée, tentons-en la preuve. A) lus Privatum. Les exemples peuvent être empruntés à trois domaines : la procé dure, les droits substantiels, les délits privés. 1) Les actions de la loi. Le terme legis actiones, dont rien ne prouve qu'il soit tardif, affirme officiellement que la sanction du droit est désor mais fondée sur la loi13. C'est la loi qui, pour l'avenir, offre aux particul iers les procédures dont l'efficacité découle encore pour partie des rites et des formules; la loi encore qui fixe leur champ d'application et garant it ainsi la sanction générale du droit privé. En annexant la sanction du droit, la loi devient médiatement la source générale du droit. L'innovation, par rapport à l'époque pré-décemvirale, n'est pas à 13 Même si l'expression n'apparaît qu'au 4e siècle, selon une hypothèse de M. Kaser, lus et lex, cit., (n. 10), p. 544, la réalité qu'elle exprime ne peut être contestée, malgré les hésitations de Gaius 4,11.
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chercher dans la formulation de la procédure, ni dans la structure de l'action, ni dans les rites selon lesquels elle se déroule : le sacramentum n'est certainement pas sorti transformé de son passage par la codificat ion. L'innovation se trouve dans le déplacement de l'autorité qui fonde cette procédure, qui en garde l'accès et en assure le déroulement. En s'emparant de l'action, la loi a détrôné le pouvoir souverain - pouvoir arbitraire au sens plein et noble du terme - du magistrat qui, roi puis consul ou préteur, n'acceptait d'organiser un procès, donc de sanction ner un droit, qu'en vertu de la souveraineté de son imperium. Dorénav ant, puisque l'action est fondée sur la lex, le magistrat ne pourra plus refuser l'ouverture d'une procédure devenue légale. Jusque-là, le magistrat pouvait, s'il en décidait ainsi, prononcer le jugement par défaut, accepter de n'entendre une partie qu'en présence de l'autre, tenir compte d'une transaction judiciaire, ménager un délai de trente jours pour l'exécution du jugement. La décision, au-delà de la pression des traditions, relevait du magistrat seul. Pour l'avenir la loi élimine ce pouvoir et oblige le magistrat à prononcer le jugement par défaut (I, 8); elle lui retire la faculté de renvoyer le plaignant seul pré sent si son adversaire ne peut invoquer un motif légal pour excuser sa défaillance (II, 2); désormais, de même, la transaction met un terme définitif à l'action (I, 7) et les délais d'exécution s'imposent au magist rat (III, 1). Jusqu'ici, le déroulement de la citation à comparaître {in ius vocatio) pouvait être interrompu sous le prétexte d'un trouble à la paix publique. Désormais, la loi des XII Tables énumérant minutieusement les étapes de la citation en justice (I, 1-3) garantit au particulier qui agit iure, qu'il a pour lui la caution de la loi, supérieure à la volonté du maître du tribunal. Mais, plus encore, l'organisation du procès, autrement dit l'ouver ture de la procédure ou l'octroi de l'action, ne relevait, au début de la Cité, que du bon vouloir du magistrat. À lui seul il appartenait, devant l'affirmation d'un soi-disant droit lésé, face au dommage causé par un délit, en présence d'une victime implorant vengeance, d'ouvrir son tr ibunal et de ius dicere. Pour le futur le pouvoir de refuser l'action, d'actionem denegare, sera entièrement borné par la loi; il n'appartiendra plus au magistrat de refuser d'entendre14 celui qui invoque en sa
14 Sur l'acte d'actionem dare du magistrat, M. Käser, Römisches Zivilprozessrecht, 1966, p. 29, p. 57.
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faveur l'un des droits inscrits sur l'une des Tables affichées au comitium. Le magistrat reste un auxiliaire indispensable, car c'est grâce à son autorité que le procès se déroule et la sentence est exécutée. Mais la part de son arbitraire est par définition éliminée. Le magistrat n'est plus que l'instrument nécessairement docile chargé de ménager à cha que citoyen la part du ius que la lex lui réserve. Après avoir annexé la sanction du droit (legis actiones), la loi ne s'arrêta pas à mi-étape. Très logiquement, ayant consacré ses trois pre mières tables à la procédure (citation, action, exécution), la loi en tira les conséquences en dressant la liste exhaustive de tous les droits englo bés dans le champ d'application des procédures légales. On passait ains ide l'action, fondée sur la loi, aux droits fondés sur la loi car protégés par une action ex lege. 2) Le catalogue des droits privés énumérés par les XII Tables. Il est facile de démontrer que toutes les situations juridiques (droits réels ou absolus, obligations, droits de succession) énumérées dans les Tables IV, V, VI et VII entrent toutes dans le domaine de compétence des actions de la loi. C'est la raison essentielle pour laquelle ces situations sont répertoriées dans le code15. D'une part, la liste est complète16; de l'autre, elle ne comprend aucun droit qui ne serait pas directement ou indirectement sanctionné par une action de la loi. L'unité est certaine. En voici quelques illustrations. Les tables IV et V - en admettant tel quel un contenu que, depuis Dirksen et Schoell, il est de tradition de respecter - aménagent l'exerci ce de l'action en revendication : au profit de la femme répudiée sur ses biens (IV, 3) ou au profit du posthume sur la succession paternelle (IV, 4). La tutelle des femmes (V, 1), celle des mineurs (V, 6), la curatelle des prodigues (V, 7) met immédiatement en question leur capacité de disposer (V, 2), donc la capacité pour le tiers acquéreur d'accéder, par l'usucapion, à la propriété quiritaire des biens aliénés (V, 2). Tout tour nedonc autour de la propriété quiritaire et des conditions d'exercice de l'action en revendication. On voit que les Tables IV et V, par ces quel15 Fr. Wieacker, lus e Lex, cit., p. 3122; A. Magdelain, art. cit. (n. 2), p. 329. 16 Plus exactement : devait être complète dans le texte originel. Nous n'avons qu'un texte lacunaire, mais c'est sans inconvénient pour notre interprétation. La liste des situa tions juridiques protégées peut être allongée, la vocation de la loi restera identique. L'es sentiel est de ne tirer aucun argument e silentio : si l'on affirme une lacune du texte, il faut la prouver (à partir des leges regiae, infra, p. 279, par ex.) et l'expliquer.
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ques exemples, s'inscrivent dans la suite logique du sacramentum réel : ces tables donnent à la vindicatio son contenu et délimitent son domai ne utile d'application. On discute à l'infini de la signification du célèbre «uti legassit super pecunia tutelare suae rei, ita ius esto» (V, 3). La loi aurait-elle voulu reconnaître pour la première fois efficacité juridique (ita ius esto) à un procédé nouveau de disposition post mortem'? De fait, aucune innovat ion ne semble se cacher derrière l'acte de legare suae rei. Comme André Magdelain en a apporté la démonstration17, il s'agit là exclusive ment du testament comitial déjà source de ius avant 450 - et non d'un soi-disant Legatentestament -. Du testament per aes et libram, bien pos térieur, il ne saurait être question, pas plus que de Yemptio familiae, incapable de créer un hères. Mais alors, s'il n'y a d'innovation ni dans la structure de l'acte ni dans son efficacité, pourquoi la loi s'en est elle emparée? La réponse est simple: le testament comitial, qui était dès avant 450 créateur de droit sous le contrôle des pontifes (qui président les comices calâtes) et bénéficiait naturellement d'une sanction judiciair e, trouve normalement sa place parmi la totalité des actes que la loi protège à l'aide des actions de la loi (ici la vindicatio de Yheres, l'une des actions spécifiques relevant du sacramentum). Il n'était pas dans les intentions du législateur de dépouiller les pontifes de leur rôle, ni de contester au peuple réuni en curies sa fonction nécessaire de témoin ; la loi affirme seulement n'omettre du champ de sa garantie aucun des droits privés confiés jusque-là à la garde de la puissance civile du magistrat. L'insertion parmi les actes protégés par la loi (VI, 1) de l'acte per aes et libram, globalement qualifié de nexum ou de mancipium, se justi fie exactement de la même façon. La forme de l'acte ne subit certaine ment aucune modification lors de sa reconnaissance légale : les formes rituelles et la parole - nuncupatio - étaient déjà créateurs de ius avant la codification. Mais en affirmant ita ius esto, l'acte librai est désormais devenu «légal» en ce sens que la loi prend à son compte l'efficacité des rites pour en assurer judiciairement la protection. L'acte librai figure dans la loi des XII Tables au même titre que les droits de l'héritier par le sang à la succession du défunt, certainement pas une création du Ve siècle, et selon un ordre (V, 4 et V, 5) qui ne devait pas être nouveau.
17 Les mots legare et hères dans la loi des XII Tables, dans Hommages à Robert Schill ing, Paris, 1983, p. 159-173.
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Dans tous ces cas, qu'il serait aussi facile qu'inutile de multiplier, la loi a osé une translation révolutionnaire du droit privé. Ce n'est plus à Yimperium aristocratique, éminemment suspect à la fraction plébéien ne de la Cité, qu'est confiée la haute mission, sous la pression des tradi tions judiciaires, de protéger l'efficacité du rite ou de faire respecter l'ordre des héritiers par le sang. Le tus trouve maintenant dans la loi sa source nouvelle. L'appauvrissement de Yimperium, à qui le ius échapp e, est à la mesure de la conquête opérée par la loi pour le compte de toute la Cité. 3) Ce qui vient d'être dit des droits substantiels vaut aussi pour les délits privés. La Table VIII égrenne au long de ses 27 versets la «totali té» des délits ouvrant une action privée sous la forme de la legis actio du sacr amentum. Il est certain que le législateur a profité de l'annexion pour procéder à une toilette des peines et affiner la qualification du délit, en généralisant la condamnation pécuniaire et en tenant meilleur compte de l'intention. Mais l'innovation la plus remarquable n'est pas là. Il s'agissait beaucoup plus de soustraire à la décision du magistrat, maître jusque-là de la répression, et la modulation des peines et la défi nition des délits, tout en menant jusqu'à sa complétude la liste des situations juridiquement sanctionnées par la procédure légale du sacramentum. S'expliquent ainsi sans difficulté les diverses prescriptions répr imant les atteintes aux personnes ou aux biens, que la peine soit fixe (os fractum - VIII, 3 -; iniuria - VIII, 4 -; couper sans droit les arbres d'autrui - VIII, 1 1 -), qu'elle soit modulée par le juge en fonction du dommage, au simple ou selon un multiple (dommage causé par les an imaux - VIII, 6 -; incendie involontaire - VIII, 10 -; vol non flagrant VIII, 16 -; recel - VIII, 15 -; usure - VIII, 18 -; non restitution d'un dépôt - VIII, 19 -; vol commis par un tuteur - VIII, 20 -) ou enfin que la peine permette le talion si les parties n'ont pu, par une transaction, s'entendre sur le principe et sur le montant d'une condamnation pécu niaire (membrum ruptum - VIII, 2 -). La répression des délits, dans les XII Tables, recourt encore fr équemment à des formes de justice privée, dont l'origine doit se placer avant la fondation de la Cité : mise à mort du voleur nocturne pris en flagrant délit (VIII, 12) ou du voleur armé après appel à témoin (endoploratio : VIII, 13); procédure de perquisition lance et lido en cas de vol non flagrant (VIII, 15b); rite de Yobvagulatum ob portum à l'encontre du témoin défaillant (II, 3) ... On a bien vu que la loi, en reprenant à son compte ces rites ou en autorisant lege ces actes d'auto-défense, transfor-
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me une initiative privée, source de ius, en un acte désormais créateur de ius car fondé sur la lex. C'est certain. Mais pourquoi cette métamorphos e? On croira volontiers que le législateur fut guidé par une volonté pré cise : le souci de ne plus laisser au magistrat le pouvoir souverain de décider dans quels cas la réaction de la victime d'un vol est un homicide (parricidium) et dans quel cas, au contraire, elle est conforme au ius iiure caesus esto - VIII 12 et 13 -); le souci de fixer sous quelles condi tions la perquisition du volé est conforme au ius et, a contrario, dans quels ces elle conduira ce dernier devant le magistrat pour être condamn é a'iniuria ou de furtum s'il s'est emparé par la violence, et au mépris des rites, de la chose d'un individu injustement accusé de vol. Bien sûr, il serait absurde de se figurer l'âge pré-décemviral comme celui du nondroit, abandonné au caprice anarchique des titulaires de Yimperium. Mais si l'on admet - ce qui ne doit pas faire difficulté - que les rites primitifs «légitimant» l'auto-défense n'étaient plus compris ou avaient perdu leur efficacité première, si l'on ajoute que les conditions délimi tant le déroulement de la justice privée, fixées par d'incertains mores, étaient équivoques, on admettra que l'élimination de la latitude du magistrat dut paraître opportune lors de la rédaction des XII Tables 18. L'appétit légal fut d'ailleurs sélectif. La loi n'a pas absorbé tous les délits - on le verra; elle n'a pas prétendu qu'aucune peine ne frapperait si elle n'était légale. La loi s'est contentée d'absorber toute peine venant au jour grâce à une intervention de Yimperium ou sous le contrôle de Yimperium. On peut conclure sur l'œuvre privée du code décemviral. L'unité est élémentaire. Le code est l'inventaire des situations auxquelles les procédures légales s'appliqueront. Le droit a suivi la procédure; le droit a globalement basculé à la remarque de la procédure, déplacée de Yimperium dans la loi. Le pouvoir consulaire, expulsé de la procédure, dont il n'est plus le maître, a perdu le contrôle du droit qu'il protégeait jusqu'ici. B) lus Publicum. Fons omnis publici privatique iuris, corpus omnis Romani iuris : l'affirmation, à deux reprises, chez Tite-Live (3, 34, 6; 3, 34, 7) d'une codification globale et du droit privé et du droit public grâce aux XII 18 Fr. Wieacker, Zwölftafelprobleme, art. cit. (n. 3), p. 478 s.
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Tables a été contestée19. Mais la critique, tendant à éliminer toute intrusion des XII Tables dans le domaine du droit public n'a pu être faite qu'en prêtant aux Romains une conception du ius publicum qui leur était étrangère, et en expulsant des XII Tables plusieurs disposi tionsfondamentales accusées d'être apocryphes. Cette critique, dans ses deux arguments, doit être repoussée. On ne cherchera pas, évidemment, dans les XII Tables des disposi tionssur l'organisation des pouvoirs, moins encore un traité de droit constitutionnel, pour la simple raison que de telles lois n'existent pas à Rome - sauf sous la forme de faux tardifs20, que leurs auteurs n'eurent d'ailleurs jamais l'audace d'insérer dans les XII Tables. Tite-Live avait autre chose à l'esprit en déclarant que les XII Tables ont établi sur la loi le ius publicum du Ve siècle. En revanche, de nombreuses dispositions des XII Tables sont rela tives à la juridiction criminelle publique. Or ces normes ressortissent incontestablement au ius publicum puisque les crimes de droit com mun, dont les XII Tables organisent la sanction, - par leur définition atteignent la collectivité, et non un particul ier en la personne d'une victime; - par leur poursuite requièrent l'action de l'autorité publique, et non l'action privée d'un particulier (à la différence des délits sanction nés par l'action privée du sacramentum); - par leur répression impliquent un jugement du populus et une peine (la mort ou un sacrifice de substitution) qui prend en considérat ion les intérêts du corps civique souillé par le crime, et non strict ementla défense de la victime. La démarche suivie par la loi des XII Tables répond exactement à celle que l'on a pu reconstituer dans les pages qui précèdent pour le droit privé. Afin de faire passer le ius publicum (du moins ce qui au Ve siècle entrait en ce concept, par opposition au ius privatum) de la sphè re de Yimperium dans le domaine de la lex, les décemvirs ont d'abord atteint la puissance juridictionnelle des magistrats et l'ont décapitée;
19 Notamment par A. Magdelain, art. cité, (n. 2), p. 330 et s. ; pour Fr. Wieacker, Die Zwölftafeln, art. cit. (n. 3), p. 305, les XII Tables auraient contenu des dispositions d'ordre constitutionnel mais qui, peu à peu dépassées, n'auraient pas été retenues par la tradi tion: hypothèse non confirmée - et non nécessaire -. 20 À l'instar de Pomponius dans son Enchiridion (D. 1, 2, 2).
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puis la loi a dressé le catalogue des crimes publics englobés dans la juridiction criminelle annexée par la collectivité. 1) De capite civis nisi per comitiatum maximum ne ferunt (IX, 1-2). La prescription décemvirale est rapportée à quatre reprises par Cicéron21, confirmée par Pomponius22 - ce qui n'a pas empêché certains auteurs d'en contester la portée ou même l'authenticité. Beseler23, il y a un demi-siècle, puis U. v. Lübtow24 ont d'abord soutenu que le caput civis, dont le jugement est réservé à l'assemblée centuriate, signifierait non pas la tête de l'accusé, mais sa personnalité juridique, son status civitatis. Il ne s'agirait donc pas de réserver aux centuries la peine de mort, mais, selon l'expression décemvirale, la déchéance de la citoyenneté. L'interprétation n'est guère soutenable; plus encore qu'un énorme contresens de la part de Cicéron, elle suppos e une valeur archaïque de caput (personnalité juridique et non tête) invraisemblable. A. Magdelain25 et A. Guarino26 ont soutenu de leur côté que le te rme de maximus au sens de souverain (ce qui, en dépit de réserves récentes d'E. Gabba27, nous semble bien être, et pour Cicéron et pour le verset qu'il cite, la signification de maximus) serait impossible au Ve siècle, les comices centuriates n'ayant accédé à la souveraineté qu'au cours du IVe siècle. Le verset décemviral serait donc un faux datable au plus tôt du IIIe siècle. Mais l'argument est très fragile, éminemment subjectif. Que les comices centuriates aient enrichi leur pouvoir au IVe 21 De leg., 3, 4, 11 ; 3, 19, 44; pro Sestio 30, 65; de rep. 2, 36, 61. Sur l'authenticité des versets IX, 1 et 2, nous renvoyons à notre édition et commentaire de la Loi des XII Tables, à paraître (Roman Laws of the Republic). 22 D. 1, 1, 2, 16 et 1, 2, 2, 23. 23 ZSS, 45, 1924, p. 554 et 57, 1936, p. 356 s. 24 Das Römische Volk, Berlin, 1955, p. 148. 25 Praetor Maximus et comitiatus maximus, dans Iura 20, 1969, p. 257-286 - notam., p. 280 s. 26 L'ordinamento giuridico, Naples, 1980, p. 162. 27 Maximus Comitatus, dans Ath. 65, 1987, p. 203-205. Le témoignage serait authenti que (attribution aux comices centuriates de la juridiction criminelle capitale), mais maxi muscomitatus signifierait : « le rassemblent comitial le plus nombreux (ou important) ». Mais Cicéron ne prête visiblement pas à maximus le sens de frequentior ; en outre l'allu sion à une sorte de quorum particulier pour une affaire capitale jugée à Rome au Ve siècle est bien surprenante. Entre comitia et comitiatus, il n'y a guère qu'une nuance sty listique légère et l'on comprendra : «II n'y aura de peine capitale qui n'aura été prononc ée par le réunion souveraine des comices». (= par le peuple souverain réuni en comic es).
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siècle, ce n'est pas douteux, mais il est tout aussi certain qu'ils accru rentleur rôle dans la constitution au cours des IIIe et IIe siècles. Sur la base d'un concept aussi flou et élastique que celui de souveraineté qui relève plus du slogan politique que de l'analyse juridique (à moins de raisonner, grâce au recul de l'histoire, dans l'absolu), on ne peut établir une chronologie solide. Les comices centuriates acquirent en 450 le pouvoir souverain, car exclusif, de prononcer la mort : voilà qui, sans emphase excessive, méritait d'être salué par l'épithète de maximus. Cel le-ci n'est finalement pas plus déplacée en 450 qu'elle ne l'aurait été en 300, alors que des conquêtes ultérieures enrichiront encore les pouvoirs de l'assemblée du peuple. La consistance du témoignage répété de Cicéron est renforcée par deux affirmations de Pomponius au Digeste28 : les XII Tables ont retiré à Yimperium consulaire le pouvoir de prononcer la mort pour les cr imes politiques et de droit commun au profit d'une procédure nouvelle se déroulant devant les quaestores parricida (IX, 4) et les comices centur iates. Les quaestores recueillent la tâche désormais subalterne d'ins truire l'affaire capitale et de requérir la peine; les comices centuriates décident en dernier ressort du châtiment suprême. Le popuîus s'est emparé de la souveraineté répressive capitale29. 2) Vient ensuite, dans la loi des XII Tables, l'inventaire complet des crimes publics capitaux affectés par cette réforme de la juridiction. Pour chaque crime figurent la définition (ou la qualification) et l'indi-
28 D. 1, 2, 2, 16 et 1, 2, 2, 23 (= XII Tables, IX, 4). Sur l'articulation de ces deux témoignages et leur interprétation, v. M. Humbert, Le tribunat de la plèbe et le tribunal du peuple, dans MEFRA, 100, 1988, 1, p. 431-503 not. p. 443 s., 466 s. 29 Les consuls ne disposent plus, après les XII Tables, que du pouvoir de coercition, ou de police, qui peut aller jusqu'à l'exécution capitale par décapitation de l'insoumis. Mais ce pouvoir, que les consuls conservent intact dans son principe et dans les limites de la ville jusqu'en 300, est de facto entravé (de manière probablement systématique) par l'intercession des tribuns de la plèbe, dès la reconnaissance officielle de celle-ci par les lois Valeriae Horatiae de 449. Dépouillés de la juridiction criminelle capitale dès 450, entravés à partir de 449 dans leurs pouvoirs de coercition capitale, les consuls seront dès lors contraints ou de renoncer à la coercition capitale (au profit de peines plus douces), ou de déférer leur sentence de mort à l'agrément du peuple saisi par la provocano ad populum (hypothèse d'école : les consuls éviteront à tout prix le risque de désaveu cin glant que les centuries pourraient leur infliger), ou d'abandonner, le cas échéant (acte d'insubordination entrant dans la catégorie d'un crime politique), l'affaire aux quaestores qui l'instruiront et porteront la sentence de mort devant les comices centuriates qui tran cheront. Cf. M. Humbert, art. cit., p. 458 s.
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cation de la peine, toujours capitale mais susceptible de formes d'exé cution diverses : les formules magiques dont l'incantation a provoqué la mort (VIII, 1 a) ou la destruction des récoltes (VIII, 8); l'incendie volont aire (VIII, 10); le vol nocturne de récoltes sur pied (VIII, 9 et VIII, 24 b); le faux témoignage ayant entraîné la mort (VIII, 23); l'homicide volontaire, implicitement qualifié par le verset relatif à l'homicide invo lontaire (VIII, 24); l'acceptation par un juge ou arbitre de se laisser cor rompre (IX, 3)30. La liste des crimes capitaux est «complète» - à une exception : on ne trouve rien, du moins dans le texte actuel dont nous disposons, sur la perduellio, le crime politique capital par excellence (IX, 5 n'est qu'un cas d'espèce : il ne saurait englober la perduellio dans sa généralité). Mais la lacune est seulement apparente, et pour deux motifs. Le crime «d'atteinte aux intérêts de l'Etat» échappe par principe à une définition légale, nécessairement restrictive, alors que l'intérêt du crime est de permettre de châtier les comportements nocifs les plus variés. Il n'était pas plus possible, ou opportun, d'enfermer la perduell io dans une définition légale que cela ne le fut, à Athènes, pour le cr ime d'eisangélie. La loi des XII Tables a donc pu, avec bon sens, se di spenser d'une telle qualification légale. Mais la loi n'a pas pour autant abandonné à l'arbitraire de Yimperium la répression de la perduellio. Car ce crime a nécessairement été affecté par la réforme de la procédure criminelle qui retira aux consuls la peine de mort pour la confier au peuple. Les condamnations capital es qui peuvent toujours menacer en priorité les chefs plébéiens em prunteront inévitablement la procédure comitiale fixée par les XII Tables31.
30 L'histoire pré-décemvirale de ces crimes est plongée dans l'obscurité. Us ont sans doute été primitivement réprimés par la sacratio du coupable, une mise à mort immédiate et sans jugement. Masi ce stade s'est-il prolongé au Ve siècle et n'avait-il pas laissé déjà la place à un pouvoir de punir entre les mains du magistrat? On ne peut savoir. Toujours est-il qu'en prenant la répression de ces crimes à son compte, le législateur supprime les sources d'impunité, qu'elles soient à placer dans le laxisme (sélectif et tendancieux?) des magistrats ou du goupe lui-même n'assurant plus l'élim ination des coupables maudits. 31 Procès politiques conduits par des duoviri perduellioni iudicandae ou par des quaestores : M. Humbert, art. cit., p. 464-465; p. 485 n. 144.
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C) Bilan : les choix des décemvirs. Le tableau est complet : pour le droit privé et le droit public - du moins pour ce que les Romains concevaient alors comme ius publicum. La loi s'est installée aux deux extrémités du droit : à sa source et à sa sanction. Pour tout le droit privé et public alors en vigueur? Non. Il y a des domaines qui ont échappé à la convoitise de la loi, révéla teursdes mobiles éminemment politiques de la codification. Quels sont ces «oublis délibérés»? Le contenu des leges regiae, ces règles coutumières issues de la tradition et de précédents judiciaires, placées fictiv ementsous l'autorité des divers rois de Rome, permet de se représenter une partie des institutions qui, antérieures à coup sûr au code décemviral32, sont restées en vigueur après 450 (ce qui les a sauvées de l'oubli) parce qu'elles ne faisaient pas double emploi avec la loi nouvelle. Les leges regiae prouvent que les délits d'ordre familial sont restés, après 450, hors du domaine de la loi. La répudiation abusive de l'épou se innocente (Plut., Rom. 22), les voies de fait de la bru ou du fils envers le pater familias (Festus, 260 L), l'abus parental du droit d'expos ition(Dion. Hal. 2, 15) sont tous des crimes sanctionnés par la sacrano
32 On ne pourrait soutenir avec de bons arguments que les leges regiae seraient des adjonctions postérieures aux XII Tables, complétant ainsi après coup les lacunes du Code. Ce serait mal poser le problème. En réalité, les leges regiae sont le recueil des dispo sitions ou règlements antérieurs aux XII Tables et qui, non repris par celles-ci, ont conti nuéaprès 450 à rester en vigueur. On expliquera ainsi quelques (rares) exemples de dou blets (le meurtre involontaire : Servius, in Verg. ecl. 4, 43, attribue à Numa la disposition que l'on retrouve en XII T., VIII, 24 - a; la sanction, par l'émancipation, de la triple vente du fils par son père: Dion. Hal. 2, 26, 27 = XII T., IV, 2; Dion. Hal. 2, 15, sur l'exposition et l'élimination des nouveaux-nés, est beaucoup plus détaillé que XII T. IV, 1). On ne peut, en s'appuyant par exemple sur la forme de la sacralité, établir une chro nologie relative entre les XII Tables et les leges regiae. Si, en effet, la divinité destinatrice de la sacralité apparaît fréquemment dans les dispositions attribuées aux leges regiae, il y a des cas où elle n'apparaît pas (Dion. Hal. 2, 15 pour la puissance paternelle; Plut., Numa 10 pour la veuve violant le tempus lugendi). De la même manière si, dans les XII Tables, la divinité, à qui est consacré le coupable subissant au terme d'un jugement crimi nel une forme d'exécution empruntée au passé, n'est pas indiquée le plus souvent (VIII, 1; VIII, 8; VIII, 21; VIII, 24 a), il est d'autres cas (VIII, 9; VIII, 24 b) où cette précision est donnée. Rappelons que les lois Valeriae Horatiae de 449 indiquent quelles sont les divinités à qui seront consacrés les contempteurs de la sacro-sainteté tribunicienne. Aucu ne conclusion ne peut donc être tirée de ce type de sanction.
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du coupable - mais aucun n'est passé dans la loi33. Le non-respect par la veuve du délai de viduité (Plut., Numa 12) ou l'inceste entre frère et sœur échappent de même à la juridiction de la cité, punis par des sacri fices ou des piacula décidés par les Pontifes (Tac, ann. 12, 8). L'inceste de la Vestale - comme l'ensemble de sa condition civile, à l'exception de sa capacité de faire un testament - ressortit également au domaine de l'autorité pontificale (Festus 277 L; Plut., Numa 10)34. Tout le domaine de la patria potestas, sauf quelques exceptions déjà signalées et justifiées, échappe pareillement au domaine de la loi, qu'il s'agisse du mariage, de l'adrogation, de la puissance paternelle. Le déplacement des bornes d'un champ (Dion. Hal. 2, 74), de même que la violation des devoirs de clientèle (Dion. Hal. 2, 10), deux crimes punis de la sacrano, restent après la codification des crimes extra-légaux. Ces apparentes lacunes s'expliquent. Toutes ces hypothèses tour nent autour de délits ou de puissances qui, avant la codification, échap paient par nature à la juridiction consulaire : - ou parce que la peine publique, la sacrano ne découlait pas d'un jugement et ne dépendait donc pas d'une manifestation de la puis sance judiciaire du magistrat, qui ne pouvait ni la prononcer ni l'entra ver; - ou parce qu'il s'agissait de droits (la puissance paternelle) exercés dans le cadre de la familia, en dehors de l'intervention de la justice publique; - ou parce que ces droits ou délits, de nature comitiale (adrogatio) ou religieuse (condition de la Vestale, inceste, deuil de la veuve, confarreatio et diffareatio), relevant de l'autorité pontificale, échap paient à l'emprise de X'imperium.
33 Même sanction, par la sacrano sans doute, de l'abus paternel consistant à vendre son fils marié cum manu - pour garder les biens de sa bru et la bru elle-même (Dion. Hal. 2, 27). C'est la raison pour laquelle cet abus n'a pas été repris par le code - à la différence de XII T. IV, 2, dont les effets civils sont évidents. 34 Plut., Numa 10 place dans les lois de Numa le droit, pour les Vestales, de faire leur testament du vivant de leur père et d'échapper à la tutelle des femmes; XII T. V, 1 (selon Gaius 1, 145) n'aurait prévu que l'exemption de tutelle. Si la différence est signifi cative, on peut penser que l'émancipation de la Vestale est sanctionnée par les Pontifes; la loi s'est contentée de sanctionner la capacité - notamment de disposer, donc de faire acquérir la propriété quiritaire - sine tutoris auctoritate. Le verset décemviral implique d'ailleurs Numa 10, même si l'émancipation de la Vestale ne relevait pas directement du ius civile.
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II n'y avait donc aucune raison, pour les rédacteurs du code décemviral, d'attirer à la loi des droits qui, par leur source ou dans leur sanction, ne faisaient pas appel à la puissance du magistrat. Ces droits purent donc, après 450, être laissés sans inconvénient à la garde des pontifes ou à la diligence des particuliers qui, au nom de la collectivité, continueront à éliminer l'individu sacer. Les rédacteurs du code n'ont admis qu'une seule entorse à la rigueur sans défaut de leur program me. Il s'agit du célèbre verset : Patronus si clienti fraudent fecerit, sacer esto (VIII, 21). Ce cas, unique (et d'autant plus révélateur de l'attitude des législateurs), de la reprise par la loi de la peine de sacralité s'expl ique aisément : la crainte de pressions, politiques ou sociales, sur le client isolé face à un patronus foulant aux pieds ses devoirs de fides, a poussé la loi à voler au secours du client. S'emparant par exception du pouvoir de prononcer la sacralité35, la loi donne une sanction effective aux devoirs du patronus, et de lui seul. Ainsi s'explique, nous semble-t-il, le tri fait par le législateur entre le droit devenu, pour l'avenir, légal et le droit qui restera sans inconvé nient sacral ou familial.
III - ACMÈ DUNE CRISE POLITIQUE, LA LOI DES XII TABLES introduit À Rome le modèle du nomos
1) Le ressort de l'œuvre codificatrice est de nature plus politique que juridique. C'était, dans la bouche de Terentilius Harsa, la nature mo narchique de Yimperium consulaire qui était dénoncée et c'était contre ce dernier que des droits pour tous devaient être fondés, c'est-à-dire coulés dans une lex. Tel était bien l'espoir que l'opposition plébéienne plaçait dans la loi écrite, écrite contre les convictions politiques de l'oli35 À la différence des cas de sacralité non annexés par les XII Tables (maintenus sans changement dans les «leges regiae»), la sacralité du patronus ne pourra résulter que d'un jugement et d'une condamnation. Comme le précise (de manière à vrai dire presque superfétatoire) le verset XII, 6 (connu à travers Salvien, de Gubern. Dei 8, 5), toutes les peines capitales (sous-entendu fulminées par la loi) impliquent désormais une damnatio. Ce n'est plus son crime qui rend ipso ture le patronus sacer (et menacé d'exécution som maire par le premier venu), mais le jugement le condamnant à cette forme d'exécution sommaire.
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garchie : ut quinque viri creentur legibus de imperio consulari scribendis36. Or, où trouver, dans le texte des XII Tables, les lois relatives à Yimperium consulaire sinon à travers une lecture politique - la seule qui l'explique - de la refonte de «tout le droit privé et public» placé désormais dans la loi? Cet Imperium, qui sort si diminué de la tourment e décemvirale, laisse apparaître pour la première fois à Rome l'idée d'un droit du citoyen qui ne découle pas de la grâce discrétionnaire du magistrat. On peut, répondant de nouveau aux exigences de la plèbe insurgée, parler maintenant de droits égaux, de Yaequatio iuris37. Le concept de lex est né contre celui d' Imperium. L'oligarchie patricienne, qui parvint pourtant avec l'accord de la plèbe38 à conserver en totalité le recrutement du collège décemviral, succomba à la contrainte et consentit ce sacrifice. Certes, tout dans les XII Tables ne répond pas aux exigences de la plèbe. Il serait certaine ment bien naïf de saluer dans les XII Tables le triomphe de toutes les aspirations politiques de la plèbe, comme il serait tout aussi naïf de refuser au code décemviral le caractère d'une grave défaite de l'oligar chie parce qu'il se situe au moment où s'affirme sans partage - ni opposition - le monopole patricien du pouvoir. Que tout, dans les XII Tables, n'ait pas répondu à l'attente des chefs plébéiens, c'est incontest able. Il suffit de rappeler la disposition sur le conubium (XI, 1), éphé-
36 Liv. 3, 9, 5. La superbia des patres et Yimperium consulaire, excessif et intolérable dans une civitas libera, sont pareillement dénoncés (3, 9, 2). Le caractère monarchique (prope atrocius quant regium) de Yimperium, jouissant d'une potestas immoderata et infi nita, lui même au-dessus des lois, détourne sur la plèbe seule la rigueur des châtiments (3, 9, 3-4). Grâce aux lois écrites que réclame l'opposition plébéienne, quod populus in se ius dederit, eo consulem usurum, non ipsos libidinem ac licentiam suam pro lege habituros (3, 9, 5). On comprend l'hostilité des consuls devant une lex minuendae suae majestatis causa promulgata (Liv. 3, 24, 9). 37 Liv. 3, 34, 3 : les décemvirs affirment, par leur œuvre, omnibus summis infimisque tura aequasse. Voir de même Liv. 3, 31, 7 : aequanda libertas; 3, 61, 6; 3, 63, 10; 3, 67, 9 : leges aequatae; ius commune civitatis : Liv. 3, 56, 10 et Dion. Ital. 10, 10. Autres références dans M. Voigt, Die XII Tafeln, Leipzig, 1883, 1, p. 7, n. 3. Sur ce thème, M. Ducos, Les Romains et la loi Paris, 1984, p. 49 s. 38 La naissance du décemvirat est le fruit d'un laborieux compromis. Les plébéiens consentent, en échange de la rédaction de la loi, à ne pas entrer dans le collège décemvir al et surtout renoncent provisoirement à utiliser l'arme de l'opposition tribunicienne (Liv. 3, 31, 7 et 53, 4).
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mère dans son aveuglante mais explicable maladresse39. Et l'on évo quera surtout, dans le même ordre d'idées, beaucoup plus révélatrice des arrière-pensées de l'oligarchie, la condamnation par le silence des institutions plébéiennes, dont les XII Tables ne soufflent mot40. Mais, comme lors du vote du plébiscite Canuléien, la plèbe ne fut pas dupe. Elle ne se laissa pas faire. La violente agitation déclenchée dès 449 fut suivie d'un nouveau succès éclatant avec la reconnaissance légale du tribunat de la plèbe. Le vote des lois Valeriae Horatiae en 449 confirme et la puissance de la plèbe et l'étendue des conquêtes que, grâce à l'arme de la sécession, elle parvient au Ve siècle à arracher à l'oligar chie patricienne. 2) Le modèle solonien ? La plèbe, pendant la première moitié du Ve siècle s'est faite le véhicule de conceptions si étrangères au sol romain que l'on peut songer à un modèle grec. La légende de l'ambassade en Grèce ou Grande-Grèce expliquera quelques emprunts substantiels à une législation d'inspiration solonienne. Ces convergences d'ordre stylistique et institutionnel (du concept de poena aux limitations du luxe funéraire que prescrit la Table X) ont été souvent recensées41 : il est inutile de les reprendre. Mais l'identité des préoccupations de la plèbe en lutte pour la rédaction de lois, d'une part, et l'œuvre, de l'autre, des grands réformateurs athéniens du début du VIe siècle nous paraît plus révélatrice : cette coïncidence ne peut être mise sur le compte du hasard : elle suppose des contacts mainte nus entre Rome et le monde grec depuis au moins les années 500.
39 Volonté, au moment où le consulat devient le monopole des familles marquées par le charisme auspicial, indélébile et héréditaire, de s'ériger en caste en rejetant toute union avec des non-patriciens. 40 Devant l'agitation qui renaît aussitôt après la chute des décemvirs, il est évident que la plèbe attendait, dans les XII Tables, la reconnaissance légale de la puissance tribunicienne et son pouvoir officiel de bloquer Yimperium. Les leges Valeriae Horatiae sont le complément des XII Tables et s'inspirent de la même volonté politique. 41 Par ex. par Fr. Wieacker, Zwölf tafelprobleme, art. cit. (n. 3) p. 467 et s. (et bibliogr.) ; A. Magdelain, art. cit. (n. 2), p. 299 s. Les arguments critiques développés par M. Ducos, L'influence grecque sur la loi des XII Tables, Paris, 1978, ou par P. Siewert, Die angebliche Übernahme solonischer Gesetze in die Zwölftafeln, dans Chiron, 8, 1978, p. 331344, ne sont pas fondés. Sur la date de réception à Rome (VIe siècle) des prescriptions soloniennes relatives aux funérailles, voir la démonstration définitive de G. Colonna, PP, 32, 1977, p. 131-165 et L'ideologia funeraria. . ., dans Archeologia laziale, 4, 1981, p. 229232. Sur les motifs politiques de la reprise de ces prescriptions par les décemvirs, nous renvoyons à notre commentaire au XII T., cité (n. 221).
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La substitution, à Rome, de mores plus ou moins contraignants par une loi égale pour tous, ce tus aequum que Denys d'Halicarnasse tra duit si exactement par le concept d'isonomia (10, 15-19-29-35), évoque les réformes de Solon42. À Athènes, entre Dracon et Solon, les nomoi fondent le droit et remplacent les thémistai; la part des thesmothètes et des archontes (l'oligarchie des Eupatrides) dans la sanction et la for mulation du droit s'estompe. A Rome de même, par la loi des XII Tables, la loi fonde le ius sur des bases neuves, qui ne concèdent plus aux magistrats - à l'oligarchie patricienne - que le rôle modeste d'exé cutants de la loi. L'attribution au peuple de la juridiction criminelle capitale, en 450, répond au déplacement comparable qui, au début du VIe siècle, mar qua la naissance de l'Héliée. Le pouvoir des archontes fut atteint com mele sera, à Rome, celui des consuls. Les conquêtes plébéiennes contemporaines, non dissociables du mouvement de pression qui aboutit à la rédaction du code décemviral, reflètent la même inspiration. Depuis 494, la plèbe manie l'arme de la provocano ad populum pour entraver la coercition capitale consulaire au profit de la juridiction souveraine du peuple, et réussit, grâce aux lois de 449, à décapiter la coercition consulaire dans les limites de la Ville. La notion de collégialité (introduite par et pour le tribunat de la plèbe), l'élection des magistrats (se substituant à la cooptation), l'idée de la lex rogata calquée sur le modèle du plebiscitum, voilà autant de concepts neufs, d'inspiration résolument populaire, que la plèbe impos e ou propose au gouvernement oligarchique de la cité. Il est visible que les chefs plébéiens, durant tout le demi-siècle qui va de Spurius Cassius aux lois Valeriae Horatiae et au plébiscite Canuléien, puisant leur inspiration dans des modèles grecs d'esprit «démocratique» (Athè nes,dont la constitution solonienne s'est enrichie de l'isonomie clisthénienne, a pu, directement ou par une cité-relais de Grande-Grèce, servir d'exemple), contestent brutalement la structure oligarchique du gou vernement consulaire. 3) L'ouverture démocratique du Ve siècle. L'expression peut cho quer. Pourtant l'histoire post-décemvirale du concept de loi confirme la nature toute révolutionnaire de la codification de 450, acmè d'une gra-
42 Cf. Fr. Wieacker, Die Zwölftafeln, art. cit. (n. 3), p. 332 s.; lus e lex, art. cit. (η. 10), p. 3114.
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ve stasis. Les XII Tables resteront, dans l'histoire de Rome, un phéno mène plongé dans un isolement inquiétant, presque insolent. L'oligarchie, contrainte par la force plébéienne de céder en 450, parviendra non seulement à éviter de se laisser reprendre, mais au te rme d'une reconquête tenace, réussira à récupérer l'essentiel des sour ceset de la sanction du droit. De 450 à 200, à part la lex Aquilia (de portée très technique, sur la réparation du dommage causé aux biens), aucune loi de quelque importance ne voit le jour dans le domaine de la procédure ou du droit privé. Après 200, on peut citer quelques mesures ponctuelles43 : autant dire insignifiantes par rapport à l'immense édifi ce construit par les décemvirs. En outre, toutes ces leges républicaines «tardives» - et la tradition s'en maintiendra jusque sous l'Empire pour un grand nombre de texte normatifs -, dépourvues de sanction, sont imperfectae. Elles appellent la collaboration nécessaire de Yimperium (prétorien) pour fixer leur sanction ou la moduler. Or ce type d'invali dité - on devrait parler d'une infériorité législative - n'apparaît qu'après les XII Tables, dont au contraire toutes les prescriptions sont munies d'une sanction44. La loi, si rare après 450, n'est donc plus après cette date qu'une voix timide, un appel lancé à l'intervention du magist rat.Le temps est loin où la loi prétendait avant tout réduire la superbe des magistrats! Pourtant le droit privé continue après 450 à évoluer et à s'enrichir. Mais la loi, ce contempteur de Yimperium, la loi, envers laquelle l'ol igarchie conservera une rancune tenace, fut délaissée au terme d'une trop explicable répulsion. Elle ne fournira plus les moyen des progrès du droit. La loi a d'abord subi la concurrence, dès après 450, de Yinterpretatio (entre les mains de l'aristocratie) qui, sous les apparences modestes d'une explication docile et d'une fidélité soumise au texte,
43 II est remarquable que les plus significatives de ces lois aient été non pas des manifestations d'autorité, mais au contraire des actes de démission populaire : le peuple abdique d'une partie de ses pouvoirs et s'en démet au profit de Yimperium des magist rats. Ainsi la loi Aebutia (149?), qui reconnaît au prêteur le pouvoir de s'évader de la loi et de composer librement des formules d'action ; ainsi encore les leges iudiciariae qui, par la création des quaestiones, vident progressivement la juridiction criminelle comitiale de son contenu. Praetores et recuperatores ou indices sénatoriaux sont les gagnants de ces renoncements successifs. 44 Les ordres sont sanctionnés : si iniuriam faxsit, XXV poenae sunto; si furtum faxsit, iure caesus esto; cf. de même II, 3; VIII, 2; et passim. Il en était de même pour le règlement d'époque royale du Lapis Niger (sacer esto).
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adapte et complète progressivement les prescriptions légales. Puis sur tout, à partir du IIP siècle, la loi fut supplantée par l'édit du préteur. Or c'est avec l'édit que ïimperium du magistrat trouvera sa revanche, et avec éclat. La création des formules de procédure, notamment, fait du magistrat le principal artisan du droit privé, pénal et civil. Dès lors, l'édit du préteur refoule le code décemviral vers le statut d'un monu ment prestigieux, mais pétrifié au terme d'une momification calculée. La fièvre populaire, entretenue par l'élite plébéienne ouverte aux schémas démocratiques grecs, n'a pas dépassé l'intégration de la plèbe dans l'oligarchie gouvernante au début du IVe siècle. L'ouverture du consulat en 367 est en réalité une fermeture : à l'idéologie populaire. L'histoire de la loi des Romains en est le reflet. Passé le Ve siècle, ce peuple de juristes ne sera plus un peuple de législateurs. On peut ainsi dire que, dans la maîtrise de son droit, Rome fut plus démocratique au Ve siècle qu'au IVe siècle et, le modèle grec s'éloignant toujours davant age,beaucoup plus nettement démocratique au Ve qu'au IIP ou au IIe siècle. Michel Humbert
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PARALLELISMI, RIFLESSI E INCIDENZA DEGLI AVVENIMENTI DEL CONTESTO MEDITERRANEO IN ITALIA
Parlare di questi rapporti tra il Mediterraneo tutto (come avrebbe detto Fernand Braudel) e l'Italia del V secolo a.C. esige di travalicare i limiti cronologici, impliciti nel tema, a monte e a valle di esso. Così non può trascurarsi l'antefatto «foceo» del VI secolo a.C. e la presenza di potenze mediterranee a Occidente e ad Oriente del bacino: Cartagine e la Persia. La loro «ombra lunga», per così dire, si proietta sulle vicende dell'Italia tirrenica almeno da Alalia e dalla fondazione di Elea alla caduta di Sibari e di Mileto, alla sostituzione della arche crotoniate a quella sibarita, con i problemi dell'eredità di questo impero, fino all'ascesa dei tiranni sicelioti a Gela, a Siracusa, ad Agrigento. La Sicilia appunto di questi tiranni non manca di guardare al conflitto tra Greci e Persiani, accoglie signori egei sudditi del Gran Re e più tardi dirett amente simboli persiani della regalità per poi scontrarsi - come del resto Massalia nel più lontano ovest - con Cartagine, sventandone a Himera (480 a.C.) il tentativo di espandersi nell'isola, al di là della sua eparchia. La presentazione ideologica di quella battaglia, e il suo sincronismo con la battaglia di Salamina, sottolineano (cfr. Her. VII, 158 e 166) il contemporaneo arresto ed eliminazione di ogni progetto di quelle più eccentriche potenze di assoggettare, a Oriente come a Occi dente, l'elemento greco, metropolitano e siciliano. L'ombra loro e della loro minaccia fu simboleggiata e racchiusa, emblematicamente, nel «fantasma» del falso trattato del 481 a.C. tra Persiani e Cartaginesi, con l'ambasceria di Dario a Cartagine, in coalizione di incombenti forze «barbariche». Questa tradizione, riconosciuta ormai senza dubbio fittizia dalla critica moderna, è in realtà l'alibi per i Dinomenidi, sottrattisi, invece, alla cooperazione con Sparta, Atene e la lega ellenica contro il Persiano
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dello stesso 481 a.C, rinfacciando vecchi torti di mancati interventi metropolitani nelle crisi siceliote del secolo precedente, causate dai nuovi interessi cartaginesi, e quasi ribadendo con la loro autonomia e «insularità» certe «eredità» simboliche. Siracusa si volgeva di fatto ancora al Tirreno e allo Ionio, a con trollare, con alto protettorato, la grecita di Occidente contro gli Etru schi, già alleati di Cartagine, a Cuma e nel golfo di Neapolis, recente mentefondata; e a stendere in pari tempo la longa manus verso l'estr ema penisola, guardando con attenzione ad ogni riemergenza di «nuo ve»Sibari, ο di potenze autonome e archai italiote, come che si pren desse poi in considerazione il pericolo degli Iapigi, fronteggiati da Taranto con l'aiuto della Reggio di Micito (473 a.C), la cui ambigua reggenza per i figli di Anassilao e velleitario programma «tirrenico» a Pixunte, non riscuoteva certo l'assenso dinomenide. Quando quel programma fallì e Micito venne congedato, tutta una serie di elementi greci, non soltanto coloniali di Occidente, dei mondi «calcidese» e «foceo», ma anche del più lontano e ampio mondo «ioni co»e di quello di una «megalopoli» come Atene, con la sua crescita di potenza, intrattenevano già intensi rapporti dalla fine del VI secolo a.C e gli inizi del V, con la Cuma di Aristodemo e poi della restaurata ol igarchia, ma anche con le comunità latine e «tirrene». La tradizione «ionica» è quella della prexis e poi della emporta, ma anche quella della «pirateria» e del mercenariato - specialmente dei Samì - le cui frange di esuli e «fuorusciti» appaiono ο sono presenti in tutto l'arco dall'insediamento di Dicearchia alla Siritide e alla Sicilia. Alcune di queste tradizioni sopravvivranno a lungo con il piede ed. «foceo», mezzo di scambio della emporta tirrenica, specialmente a Cuma e a Neapolis, dopo che a Poseidonia, e nelle oscillazioni di Elea, quali tendenze di fondo, strutturali, al di là della storia evenemenziale di Magna Grecia. Esse, come alcune tradizioni mitiche e cultuali - pr ima ancora focee, ma poi specialmente calcidesi di Eubea ed eoliche da Cuma anatolica - scandiranno un orizzonte marittimo e costiero da Cuma in Campania, lungo il litorale settentrionale della regione, il Lazio e l'Etruria meridionale, rivolto al mondo latino ed etrusco-tiberi no, e durato ben oltre la battaglia di Aricia e Aristodemo, nella Neapolis sottrattasi al protettorato dei Dinomenidi e proiettata sulla rotta che arriva fino a Massalia con i trasporti e la redistribuzione della ceramica attica. Il passo da queste tradizioni «ioniche» - che si riflettono ancora nella Italia ecataica ο in quella probabile degli Ionikà di Paniassi di
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Alicarnasso e delle sue «Gesta di Eracle» - alle prospettive occidentali di Atene, non più soltanto economiche, è breve. La «presenza» ateniese si concretizza nella svolta della sua società e classe politica con i suoi nuovi orientamenti posteriori alla fine della guerra persiana (480/478 a.C.) e con le vicende che portano alla crea zione della lega delio-attica e alla formazione dell'impero ateniese. Temistocle e Cimone nella loro antitesi condividono prospettive occidentali più ο meno ampie, così come ereditano dalla età pisistratica il modello delle gesta e dell'apoteosi di Eracle, trasmesso agli Ioni nell'affermata syngeneia, e da essi reciprocamente ritrasmesso alla cul tura ateniese letteraria ed artistica. Mentre la Cirene di Batto II si apre agli Ioni, negli ultimi decenni del VI secolo a.C, ed essi si diffondono dalla Libia all'Egitto, attenti alle reazioni antielleniche dei periokoi libici, trasmettendo miti postodissaici del ciclo (Telegonia) con Eugammon, ambientati in Occidente tra Cuma e i Latini e Tirreni, Atene si interessa - nelle sue officine ceramiche e nelle botteghe di pittori (di Leagros come di Euphronios) allo scontro tra Eracle e Anteo, localizzato nel mondo cirenaico della «resistenza» indigena, e ne trasmette la rappresentazione con i mediat ori ionici alle città etrusche. Nei primi decenni del V la prospettiva temistoclea già guarda all'Italia, a Sibari, alla Siritide nella pretesa eredità «achea» ad Atene; e la sua fuga passa per l'Occidente greco per poi raggiungere di là, attra verso Epiro e Tessaglia, il re Persiano. La tradizione eleusina su Demetra che Paniassi era venuto ad attin gere in Atene, si trasmette d'altra parte al poeta Sofocle e i versi di un interssante frammento del suo Trittolemo, la tragedia vincitrice sotto la presidenza di Cimone, considerano nuovamente l'Italia nella prospetti va ionica, dalla Japigia al mar Siculo, dagli Enotri al golfo Tirrenico e alla Liguria, prima che con Erodoto questi orizzonti, ormai ateniesi, si richiudano sulle poleis Italioteis, che circondano l'osservatorio di Turii e sulla Oinotria ghé eleate (dove appunto tra Elea e Laos i resti di quel popolo, precedentemente molto esteso, si erano conservati). Anche X Ita lia di Antioco, pur nel ricordo dell'ampio dominio enotrio, non oltre passerà la linea tra Posidonia e Taranto, come sua massima ampiezza. Alla sua periferia settentrionale la tradizione di V secolo a.C. su Aristodemo (che risale forse allo stesso storico siracusano) conserva per Cuma e la battaglia contro gli Etruschi l'ottica del confronto con le vit torie greche contro i Persiani (specialmente Platea) e il perdurante alibi dinomenide della lotta contro gli altri barbari, di Occidente.
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È appunto tra gli orizzonti politici di Cimone e quelli di Pericle (non così antitetici nelle direttrici espansionistiche, e forse neppure nel ledirettive interne postefialtee) che si iscrive il riflesso e l'incidenza della politica ateniese in Occidente e nell'Italia del V secolo a.C. con le sue scansioni. Anche questa ha a monte un'altra forma immaginaria di lunga durata per esprimere un rapporto di parentela con il mondo gre co, non solo nell'ambito delle relazioni tra poleis coloniali e metropoli tane (senza più alcun vero legame ecistico, com'è ovvio nel caso di Ate ne), ma anche in quello del rapporto paritario con i Greci di comunità ed élites indigene. L'utilizzazione delle tradizioni «troiane» di Enea, come di Eleno e di Antenore, sperimentate nella Cestrine epirota, come in Illiria e presso i Veneti, oltre che nell'Italia «tirrenica», ne è esempio significativo, che può contare emblematicamente anche su un uso ate niese di esse. I nuovi orientamenti posteriori alla fine della seconda guerra per siana, le vicende politiche e le trasformazioni strutturali della società ateniese, sue classi dirigenti, ma anche massa del demos, che portarono alla formazione dell'impero ateniese, specialmente marittimo (dal 475 a.C), posero la vita e le aspirazioni economiche ateniesi su nuove basi, provocando sviluppi commerciali e politici di nuovo genere. L'esigenza di raggiungere aree cerealicole sempre più numerose per il nutrimento del demos indirizzò il traffico ateniese ai ricchi mercati dell'Italia, non più solo all'Erutria (in cui Atene aveva detenuto nel primo ventennio del V secolo a.C. il primato, quasi assoluto, di ceramica greca di qualit à, costituente di per sé un'importante mercé), ma alla Sicilia e alla Campania, come alla valle del Po e all'Apulia. Così, già negli anni 460-450 a.C, quando declinava il «protettorato» dinomenide di Siracusa e si preparava la caduta delle tirannidi siceliote, la politica ateniese si trasformò in pretese di egemonia e controllo delle esportazioni granarie dalle regioni citate, senza poter più prescin dere dalle loro vicende interne, quali che esse fossero, nelle differenti situazioni dei «mondi» italici interessati, prendendone almeno consapev olezza. Da questo momento e fino alla fine del V a.C. anche la sempli ce «presenza» ateniese si intrecciò con quelle varie vicende, con le «spinte» e «controspinte» etniche e sociali, nelle loro ripercussioni a catena, anche lontane, che percorsero la penisola italiana. Senza che si possa fissare alcuna vera alternativa - almeno dal secondo quarto del V secolo a.C - tra le varie aree investite dall'attività di Atene, ora eco nomica e culturale, ora più esplicitamente diplomatica e politica, in una molteplicità di rapporti di differente precocità d'inizio e di durata,
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il Tirreno giocò in questa dinamica un ruolo immediatamente significat ivo. Nel passaggio da una politica « panionica » a quella « panellenica » di Pericle, la prospettiva occidentale avvertì la sua importanza e nel mentre gli Ateniesi venivano spinti ad accogliere l'appello di Inaro e impegnarsi nella spedizione di Egitto, contro quella satrapia persiana (459/8 a.C), essi si assicuravano tempestivamente con il passaggio dello Stretto il necessario presupposto di successive relazioni. Si concludeva così - quan do si condivida la datazione alta di una parte della critica moderna (460 a.C.) - quel più antico accordo con Regio, «con cui per primo furono iniziati trattati e che era la più naturale alleata, essendo di stirpe affine a Leontini e da sempre loro cliente», come finisce per riconoscere Tucidide (VI, 46,2 per il 415 a.C), pur nella sua unilineare e razionalistica ricostru zione dell'approccio ateniese all'Italia e alla Sicilia, in cui si sono spec chiate altre e più recenti, moderne interpretazioni. Se, invece, ammettiamo accanto a Reggio - prima della dissociazione da Messana e delle rivoluzioni democratiche in Magna Grecia, con la sta sis in quella stessa città - Γ« amicizia» e «alleanza» con la città degli Elimi, Segesta (IG, F 19), nel 458/7 a.C, e l'apparizione di Diotimo a Neapolis (Timeo, 566 F 98 Jacoby; LYKOPHR.,yl/ex, vv. 732 s. con Tzetz. schol. ad 1.), secondo una tesi contro la quale non sono stati ancora avanzati argomenti decisivi, si profila immediato questo cuneo in Tirreno, che giustifica anche la menzione degli Ateniesi al terzo posto, accanto a Cumani e Pitecusani, tra i fondatori (Strab. V, 246 C) della «città nuova», ormai libera dal decaduto «protettorato» di Siracusa. L'arrivo dello stratego, ambasciatore e geografo, con una flotta, il sacrificio alla Sirena Partenope secondo la prescrizione dell'oracolo e l'istituzione delle lampadodromie non può ridursi ad un semplice atto rituale e di purificazione. Esso inserisce Atene nel mondo della Campan ia e del Lazio e nelle relazioni che esse hanno tra loro dal tempo del tiranno Aristodemo, in cui spiccavano, ancora una volta, interessi per i rifornimenti e il commercio del grano (Liv. II, 34, 3-5; Dion. Hal. VII, 1, 3; 2, 1-4). La visita di Diotimo fu certo un episodio precoce, ma modesto che si esaurì presto come diretta presenza politico-militare ateniese; con il fallimento della spedizione in Egitto e il disastro di Prosopitide (452 a.C). La pausa alla spinta ateniese in Tirreno e la sua sfu mata «continuità», che spiega l'ottica evolutiva e «quasi quantitativa» di Tucidide, con altre oscure menzioni nella tradizione degli scolli timaici, come una guerra «contro i Siculi» di Diotimo, destinata ancora a rimanere poco determinata, non impedisce di scandire i momenti
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diversi e successivi e i «cicli» della politica di Atene in Occidente nel moltipllcarsi ο rinnovarsi di iniziative. L'episodio è prima di tutto ribadito dalle successive relazioni tra Atene ed Elea, città con vecchie connessioni regine e sulla linea tradi zionale di traffici foceo-calcidesi, ereditata in parte da Neapolis. Esse, altra volta sottolineate da chi scrive, diverrebbero meno spiegabili se isolate da questo quadro. In esso sembra rientrare perfino la tradizione sulle ambascerie romane ad Atene e Magna Grecia al tempo della stesu ra decemvirale delle XII Tavole a Roma, e sulla presenza e collabora zione in questa città di Ermodoro di Efeso, che ben si inquadra nelle ambiguità di quella polis ionica entrata a far parte dell'impero ateniese e nelle conseguenze politiche interne, in essa come in altre comunità venute a contatto con quella potenza. Le successive scansioni cronologiche sono meglio note e non r ichiedono molti dettagli: dalla «vecchia alleanza» (Tue. Ili, 86,3) con Leontini e i suoi «alleati», da collocarsi dopo la pace di Callia e forse dopo quella con Sparta, con la ripresa di relazioni a Neapolis, al nuovo ciclo «ionico», dopo quello «tirrenico» di Diotimo, che vide le operazion i di Lampone (Justin. IV, 3, 4-5; XII, 7,1; 10, 3-4), forse a Catane (446 a.C), prima che a Turii (444/3), con gli sviluppi della fondazione «panellenica» in questa città (436/5-434/3 a.C.) e l'ultimo «ciclo» della poli tica occidentale di Pericle. La nuova fase, «adriatica» e «siciliana» insieme, andò dai rapporti con Corcira (436/5 a.C. ai trattati rinnovati con Reggio e Leontini (IG I2, 51 : 433/2 a.C.) e allo scoppio della guerra contro Siracusa (427-424 a.C), ormai riemergente quale potenza siceliota e tirrenica, dalle spedizioni di Faillo ed Apelle contro gli Etruschi (Diod. XI, 88, 4-5 per il 453/2 a.C), alla guerra con Agrigento (Diod. XI, 8, spec. 4 per il 446 a.C.) e all'affermarsi di Ermocrate. La nuova pre senza di Diotimo - in mancanza di conoscenze soddisfacenti sulla lista degli strateghi di tutti questi anni e in analogia ai casi di altri, come Callia, presenti in diversi e successivi avvenimenti - significò appunto la continuità di una esperienza e di una politica, anteriore alla morte di Pericle e allo scoppio di quella guerra. A questi puntuali episodi diplomatici, politici e militari si accompag nò, a documentare le molteplici iniziative ateniesi sulle coste della penisola italiana - e non soltanto negli emporì padani - la diffusione della ceramica e della moneta e l'influenza dei tipi monetali in altre monetazioni, anche al di là del territorio costiero e di quello delle città con cui Atene ebbe rapporti ufficiali. Così il commercio ateniese legò, con la sua domanda di grano, Neapolis a Dicearchia e a Cuma e al
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retroterra etrusco di Capua e di Noia, canalizzandovi la produzione vascolare attica dipinta e quella a vernice nera. La Campania fu negli anni dal 480 al 425 a.C. una dei maggiori clienti ateniesi, come attesta l'esigua e isolata presenza di ripostigli (v. Noe, n. 813) e una curva delle importazioni attiche, subito dopo la pianura padana e prima della Sici liastessa. Lo stimolo alla produzione cerealicola della regione, rappre sentato da questi contatti, accentuò il contrasto tra città e campagna, in area greca come etrusca, e produsse una più intensa rete di relazioni tra gli ambienti greci di Campania e quelli italioti e sicelioti, al di là della stessa presenza ateniese, diradatasi con la pace di Gela (424 a.C.) dopo la prima spedizione contro Siracusa e cessata quasi del tutto con la più famosa e disastrosa seconda spedizione (415-412 a.C), che videro chiudersi in «isolazionismo» e solidale «neutralità», uno dopo l'altro, il mondo siceliota e quello italiota, Turii compresa. Le relazioni della Campania, e soprattutto di Neapolis con Turii, appunto, come con Elea e con Terina, la loro durata tra il 425 e la fine del V secolo, ma anche nella prima metà di quello successivo, permise ro alla regione di sopravvivere alla riscossa degli indigeni protoitalici delle campagne, alleati ormai dei nuovi arrivati dall'entroterra sannitico, infiltratisi fin dai tempi di Aristodemo e ora esplosi in conquista ed espansione, costituendo il popolo dei Campani (cfr. Dion. Hal. VII, 8,3 e 10, 3-4). Neapolis resistette alla pressione sabellica dell'ultimo quarto del V secolo a.C, ma si trasformò entrando in fruttuoso contatto con le nuove genti, su cui influì tecnologicamente e culturalmente, trasfo rmandosi anche in «piazza» di arruolamento mercenario, oltre che in porto commerciale della regione. Atene, nel fallimento della sua impresa siciliana, con la domanda di rifornimenti e mercenarì dalla Campania, e poi dal mondo tirrenico, etrusco ed italiota (Tue. VI, 57,11; 88,6; 90,3; 103,2; VII, 25,2; 57,11; Diod. XIII, 44,2), finì per contribuire alla riapertura dei rapporti della Sicilia con le regioni peninsulari centro-meridionali. Lo stesso effetto, pur nella recessione generale dei commerci ateniesi, si ebbe in Adriati co nei confronti dell'Etruria padana e degli scambi con Felsina e Spina, non diminuiti in intensità relativa rispetto a Campania e Sicilia per tut tala seconda metà del V secolo a.C, e capaci di porre in relazione con Delfi gli «Spineti», creando il mito «talassocratico» di questo insedi amentoa forte pluralismo culturale (cfr. Strab. V, 214 C e IX, 421 C). La stimolazione ateniese di quella «talassocrazia» non fu senza effetto e ripercussione anche sulle coste adriatiche più meridionali, modificando indirettamente la situazione in Daunia, con la provocata decadenza del-
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le sue «clientele» liburniche, della sua produzione vascolare geometric a, anche se non riuscì - pur nelle formali relazioni stabilite con i Messapi durante la guerra del Peloponneso, ottenendo arcieri da Artas (Tue. VII, 33, 3-4; 57,11) - a spezzare la prevalente e privilegiata posi zione e influenza tecnologica e culturale di Taranto nella estrema Japigia. Nell'ultimo trentennio del V secolo a.C, come in quello successivo, fu quest'ultima e non certo Atene la protagonista in Puglia della defini tiva e generale «ellenizzazione». Il parallelismo tra queste due poleis greche, anche nel contrasto che possono rappresentare, fu tuttavia singolare per la trasmissione di eredità culturali greche ai popoli italici e a Roma, accanto e dopo il momento delle influenze «calcidesi», sopravvissute in Campania, e spe cialmente a Neapolis. Mentre Taranto contribuì a strutturare - anche con tradizioni ideologiche e modelli «immaginarì» - la nuova koinè culturale e sociale del lepopolazioni sabelliche dell'Appennino, Sanniti e Lucani e Brettì, Cartagine e i nuovi tiranni sicelioti postisi nuovamente a campioni della grecita siciliana contro la potenza punica, raccolsero l'eredità dei tentat ivi ateniesi falliti. L'intervento cartaginese tra i «barbari» Elimi e Sicelioti (409-406 a.C.) provocò la caduta di Agrigento, ma anche la successiva sconfitta di Cartagine e l'ascesa di Dionisio I. Le azioni della risorta tirannide a Siracusa riaprirono a fine V secolo a.C. un nuovo «ciclo», come quello «dinomenide» all'inizio di esso, disputando a Taranto e al suo «miraggio spar tano» l'influenza e l'egemonia sui popoli sabellici (per il momento soprat tuttoi Lucani). Esse ripresero altresì la crociata antietrusca e questa volta vi compresero Roma che doveva di lì a poco avvertire un nuovo pericolo, quello gallico. Non è forse un caso che Dionisio I, con il crollo italiota di fronte ai Lucani e la pace seguitane che riprendeva il modello di quella di Antalcida e frammentava in autonomia la lega greca, con l'intesa stabilita con le bande galliche, reduci dall'incendio del Campidoglio e percorrenti il Mezzogiorno della penisola per un trentennio, sembrò di nuovo proiet tare in Occidente l'ombra del dispotismo persiano, dei cui simboli regali amò rivestirsi personalmente. Se questi fenomeni ed avvenimenti cadder o, ormai, al di là del V secolo a.C. essi non furono meno il segno finale di quella serie di parallelismi, riflessi e incidenze del contesto politico di tutto il Mediterraneo, nella crisi e trasformazione dell'Italia antica, che in questa occasione si è voluto sottolineare. Ettore Lepore
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NOTA BIBLIOGRAFICA Per maggiore documentazione si rinvia a E. Lepore, // Mediterraneo e i popoli italici nella transizione del V secolo, in Storia di Roma, I (Torino, 1988), p. 485-503, che rappresenta un quadro più ampio di fenomeni e problemi, al quale la presente relazione e tutto il convegno in cui si inserisce ha dato spunto e sostanziale nutrimento. Alla bibliografia ivi contenuta di chi scrive (spec. La vita politica e sociale, in Storia di Napoli, I, Napoli, 1967, p. 151-170; 171-186, spec. p. 179-80 con η. 32, a p. 350, per i trattati con Reggio e Segesta, p. 172-78, con n. 27 e 30, a p. 350 per Diotimo; e 187-92, nonché il diagramma a cura di G. Vallet, a p. 321; Elea e l'eredità di Sibari, in La parola del passato, XXI, 1966, p. 266-77; infine l'intervento in Circolazione della moneta ateniese in Magna Grecia e Sicilia, Roma, 1969, p. 230-35), si aggiunga ora E. Lepore, La Magna Grecia tra geografia e storia, in Geografia e storiografia nel mondo classi co, a cura di M. Sordi, Milano, 1988, p. 127-144, con la precedente bibliografia dell'A., a n. 3 di p. 128. Per la rimanente bibliografia altrui, cfr. soprattutto G. Vallet, in Circolazione, cit., p. 225-27; le integrazioni di A. Mele, La città gre ca, in Napoli antica, Napoli, 1985, p. 103-108; e A. Mele, Aristodemo, Cuma e il Lazio, in Etruria e Lazio arcaico, Roma, 1987, p. 155-177, spec. p. 164-65, 175-76; F. Ra viola, Temistocle e la Magna Grecia, e E. Culasso-Gastaldi, Temistocle e la via dell'esilio, in Tre studi su Temistocle, Padova, 1986, p. 13-112 e 133 sq., spec. 142-63, con le osservazioni di E. Lepore, La Magna Grecia, cit., p. 134-35 note 14 e 15; p. 138 con n. 23, con altra bibliografia; e E. M. De Juliis, Gli Iapigi, Mila no,1988, sintesi la più recente dei suoi precedenti lavori.
NICOLA F. PARISE
MONETA E SOCIETÀ IN MAGNA GRECIA L'ESEMPIO DI CROTONE
Alla stessa maniera di Metaponto, di Sibari e di Caulonia, Crotone organizza la sua più antica valuta di argento in base ad uno statere del peso teorico di g 8,06 suddiviso in tre dramme di sei oboli l'una ! : statere dramma obolo
g 8,06 g 2,68 g 0,44
1 3 18
1 6
1
La tecnica monetaria è quella cosiddetta «a rovescio incuso», per la quale C. M. Kraay ha potuto proporre un'articolazione in tre fasi distinte : a) la prima, caratterizzata dall'uso di un tondello sottile, fino agli ultimi anni del VI secolo; b) la seconda, detta «del tondello medio», compresa nel periodo 500-480; e) la terza, del tondello spesso, dopo il 480 2. Gli esemplari esibiscono tutti il tipo del tripode con ο senza simbol o. Negli ultimi anni del secolo VI si collocano le prime serie che hanno al rovescio il tipo dell'aquila incusa. Quattro, le combinazioni attestate variamente nelle tre fasi : 1 Parise, 1973, p. 112. 2 Kraay, 1960, p. 59-60. L'abbandono della tecnica incusa ed il passaggio al doppio rilievo si lasciano porre a Crotone all'indomani della catastrofe dei pitagorici (Parise, 1982, p. 114).
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NICOLA F. PARISE a) ante 500: (1) Tripode-Tripode, senza simbolo; (2) Tripode-Tripode, granchio; (3) Tripode-Tripode, airone (nelle emissioni più tarde); b) 500-480 : (2-3) Tripode-Tripode, granchio ο airone ; (4) Tripode-Aquila; e) post 480 : (2) Tripode-Tripode, granchio (ultime attestazioni) ; (3) Tripode-Tripode, airone; (4) Tripode-Aquila.
Il gruppo predominante è il (3) che copre circa il 55% dei circa 600 esemplari studiati da A. Stazio3. Fra le unità coniate s'impone lo statere nella misura del 91%. Sono attestate ancora le unità della dramma (7,5%) e dell'obolo (1,5%). Dramme ed oboli, coniati in numero esiguo negli anni precedenti, aumentano con le emissioni della fine del secolo VI. Diversamente che per quella di Sibari e di Metaponto, per la crono logiadi Crotone si dispone di alcuni elementi sicuri. Uno dei più antichi pezzi emessi dalla zecca (conservato a Berlino) è riconiato su di uno statere di Corinto del 535 circa (del periodo I, 2 Ravel), e permette di porre gli inizi della monetazione crotoniate intorno al 530. Uno statere, ancora a tondello sottile, conservato nella raccolta dell'American Numis matic Society, del tipo Tripode-Tripode e granchio, è riconiato, invece, su di un esemplare di Metaponto (VII, 139 Noe) negli anni 5 10-505 4. Con isolate eccezioni, certamente significative, ma di ben scarsa rilevanza statistica, la moneta di Crotone conosce una circolazione limi tata alla Magna Grecia, con incidenza naturalmente diversa di luogo in luogo, come si evince della provenienza dei gruzzoli dal versante ionico ο da quello tirrenico5. Così riassunti i tratti caratteristici e le tappe fondamentali della monetazione di Crotone, si può finalmente cercare di definire le deter minazioni storiche assunte di volta in volta dal numerario messo in ci rcolazione. Procedendo ordinatamente, dalla fase più antica degli incusi a ton dello sottile, pare incontestabile, nonostante sospetti recenti6, ricono scere il ruolo assolutamente dominante dello statere. Per esempio, e
3 4 5 6
Stazio, 1984, p. Garraffo, 1984, Parise, 1973, p. Stazio, 1984, p.
371-373. p. 103, n. 1, 3. 115. 372.
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con riferimento alla base statistica già riferita di quasi 600 esemplari, le dramme del gruppo (1) non raggiungono che lo 0,5% dei pezzi trovati. Sulla base di questo dato si potrebbe sostenere che veramente la prima moneta di Crotone, tenuto conto della sua circolazione a raggio assai limitato, non venisse coniata per assolvere la funzione d'intermed iario negli scambi sia interni sia internazionali7. Più correttamente conviene ammettere, invece, che la funzione riconosciuta come domi nante a pezzi di peso elevato prevalentemente destinati alla circolazio ne locale doveva essere quella di scala dei prezzi e di mezzo di acquisto, e quindi di rudimentale mezzo di tesaurizzazione8. E viceversa : la moneta pietrificata dalla tesaurizzazione poteva aspirare nuovamente alla sua esistenza economica in quanto unità di conto della misura dei valori e di strumento di acquisizione di beni e servizi. In realtà, la moneta, introdotta a Crotone dopo l'arrivo di Pitagora, trovava riscon tro nella sua prevalente determinazione di unità di conto nella tradizio ne che attribuiva al filosofo il tentativo di una regolamentazione dei pesi e delle misure. La dominanza dello statere significava, a sua volta, privilegiamento degli scambi su scala locale e ad alto livello. Come con il metallo pesato, prima della moneta. E di fatto non c'è soluzione di continuità fra una concezione premonetaria dell'accumulo di ricchezza in termini di metallo prezioso ed una nuova figura di moneta intesa con questi limiti, come ha dimostrato da ultimo A. Mele9. Nella fase terminale del tondello sottile cominciano ad affermarsi le serie Tripode-Tripode con i simboli del granchio (2) ο dell'airone (3). Ancor una volta la predominanza dello statere è incontestabile; mentre si assiste ad un graduale aumento del volume delle emissioni. L'incre mentoè considerevole, ed è stato messo in rapporto con la preparazio ne e con le vicende della guerra contro Sibari10; ma difficilmente può essere limitato nello scorcio del secolo VI : non mancano indizi di un suo prolungamento nei primi anni del V11. Con la vittoria su Sibari si ampliano gli orizzonti della valuta di Crotone. Venuto in suo possesso il territorio del vecchio impero e sv iluppando l'iniziativa, che era stata di Sibari, di fare dell'emissione
7 Kraay, 1964, p. 89. 8 Hicks, 1971, p. 75-77. 9 1984, p. 50-51. 10 Stazio, 1984, p. 375. 11 Si vedano i dati di Stazio, 1984, p. 372-373.
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monetaria un efficace strumento di controllo dei suoi domini, Crotone conia monete incuse ο a doppio rilievo che mediante il tipo del tripode al dritto sanciscono la sua egemonia sulle comunità evocate dalla le ggenda e dalla tipologia del rovescio (a-b) ο della sola leggenda (e) 12 : a) Crotone-Sibari (Tripode - Toro retrospiciente incuso) ; b) Crotone-Pandosia (Tripode - Toro retrospiciente a rilievo in rettangol o incuso); e) Crotone-Temesa (Tripode - Tripode incuso)13. Si tratta di serie d'impero14, che hanno senz'altro alle origini moti vazioni politiche, ma che contribuiranno a formare un'ampia area valutaria unitaria dominata dalla moneta di Crotone, nella cui zecca doveva essere accentrata tutta l'attività di coniazione. La cosa è sicura per Crotone-Temesa. Almeno un conio predisposto per battere stateri di Crotone e Temesa è stato adattato per battere stateri della sola Croton e15. In generale, questa produzione monetaria d'impero si esaurisce nel breve periodo : tranne che per Crotone-Temesa, che si protrae per tutta la fase del tondello spesso fino all'avvento del doppio rilievo16. Continuano nel frattempo a prevalere i valori alti, tanto che si è potuto parlare di questa evidente maggior articolazione della moneta come di un'articolazione più «orizzontale» che «verticale»17. Prima del passaggio al tondello spesso la zecca di Crotone cominc ia a battere regolarmente moneta incusa a doppia tipologia : tripode al dritto ed aquila ad ali spiegate al rovescio, secondo una tecnica sper imentata per gli stateri di Crotone-Sibari dopo la vittoria del 510. Per queste nuove monete si è pensato ad emissioni realizzate fuori Crotone : in una zecca sussidiaria localizzata ad Ipponio in base al confronto con la tipologia delle più tarde emissioni di bronzo della città18. Tuttavia, la circostanza che, ancor una volta, un conio predisposto per la battitura di stateri a tondello spesso Tripode-Aquila della serie di Crotone-Teme-
12 Parise, 1982, p. 106-109. 13 Agli esemplari citati nel testo vanno aggiunti gli stateri di (Crotone)-Sibari-Lao emessi dalla «dominante, tesa ad affermare ... il suo 'predominio politico' anche sulla città tirrenica e sui fuorusciti, che vi si erano rifugiati» (Parise, 1982, p. 107). 14 Kahrstedt, 1918, p. 184, e Perret, 1941, p. 260. 15 Parise, 1982, p. 107-108. 16 Stazio, 1982, p. 94-96, e Parise, 1982, p. 108-109. 17 Mele, 1984, p. 61. 18 Kraay, 1976, p. 168.
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sa sia stato corretto per poter battere esemplari con la sola leggenda di Crotone19 porta ad escludere una simile ipotesi20. Più verisimile, il rif erimento del tipo al tentativo di organizzare olimpiadi locali messo in atto da Crotone21. Un altro tipo incuso associato all'emblema del tripode è quello dell'elmo. Ma a differenza del tipo dell'aquila l'elmo non conosce futu ro nelle emissioni a rovescio incuso, e trova confronto con gli stateri a doppio rilievo di Crotone-Temesa. Per la sottigliezza del tondello degli esemplari che lo esibiscono al rovescio esso si lascia datare intorno alla fine del VI secolo22; e per il confronto con il più tardo doppio rilievo viene riferito solitamente a Temesa come simbolo di una prima serie fatta per la città tirrenica (serie sostanzialmente effimera e destinata ad essere immediatamente sostituita da quella Tripode-Tripode)23. Semb ra, tuttavia, più corretto, come già suggerivano R. Garrucci ed E. Babelon24, mantenerlo, per così dire, all'interno della tipologia di Crotone e riferirlo semmai agli ideali oplitici che negli ultimi anni del VI secolo il pitagorismo veniva opponendo alle pratiche militari di tipo arcai co25. Durante le ultime emissioni incuse a tondello medio e quelle se guenti a tondello spesso (prima del passaggio al doppio rilievo intorno alla metà del V secolo) le articolazioni interne della moneta di Crotone aumentano. Allo statere si affianca, anzi tutto, un maggior numero di dramme. Ma si afferma anche la coniazione dell'obolo : nella misura di
19 Parise, 1982, p. 108. 20 Le conclusioni avanzate nel testo correggono innanzi tutto Parise, 1982, p. 116, ove, d'accordo con Kraay, si riteneva il tipo dell'aquila esibito dai bronzi d'Ipponio del secolo IV una riesumazione del vecchio simbolo crotoniate. 21 Mele, 1984, p. 66. 22 Allo statere già noto della Collezione Tirelli (ora a Berlino) si è aggiunto quello dell'Antiken-Museum di Basilea edito da Gorini, 1975, p. 22, n. 10. Non è stato possibile sapere se si tratta dello stesso esemplare rinvenuto, secondo anonimi «corrispondenti», in un ripostiglio d'Italia meridionale (IGGH, n. 1894), insieme con uno statere (Crotone)Sibari-Lao. Ma è un fatto che un nuovo pezzo di (Crotone)-Sibari-Lao risulti essere passat o nello stesso Museo di Basilea (Gorini, 1975, p. 30, n. 2). 23 Minervini, 1856-57, p. 50; Kraay, 1976, p. 167; Stazio, 1982, p. 96. 24 Garrucci, 1885, p. 147; Babebolon, 1907, col. 1455-1456. Vedi anche Gorini, 1975, p. 149, e Caccamo Caltabiano, 1982, p. 211-212. 25 Parise, 1982, p. 110.
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più del 7,5% calcolata sul totale di una novantina d'incusi TripodeAquila26. Resta da esaminare il gruppo delle frazioni di argento a doppio rilievo dell'ordine del triobolo (g 1,34), del diobolo (g0,89), dell'obolo (g 0,44) e dell'emiobolo (g 0,22). Le quali al dritto presentano sempre il tipo del tripode; mentre al rovescio hanno tipi diversi ispirati a quelli di altre città greche (di Grecia propria e di Italia meridionale e Sicilia) : a) il Pegaso di Corinto (triobolo e diobolo); b) la civetta di Atene (triobolo); e) la ruota e la seppia degli oboli e delle litre di Siracusa (triobolo, obolo ed emiobolo) ; d) la lepre di Reggio e Messana (diobolo); e) il granchio di Agrigento (triobolo ed obolo). Un solo pezzo di g 1,41 reca al rovescio il tipo del gallo d'Imera27. Non si tratta di un gruppo di valori omogeneo (i pezzi con i tipi del Pegaso, della seppia e della lepre sono più comuni di altri) né cronolo gicamente unitario (vi sono tipi che attraversano tutto il V secolo, pas sano nel IV e si attestano anche nelle emissioni di bronzo)28. L'ipotesi più ragionevole, avanzata da Kraay29, è che si sia trattato, almeno agli inizi, di pezzi intesi come unità di ragguaglio. Il loro peso sommato a quello dello statere facilitava l'aggancio della valuta crotoniate a quella euboica usata da tutti i centri ricordati, ad eccezione d'Imera, che usava, invece, dramme «calcidesi» di g 5,82 30. Così : 2 stateri di Crotone di g 8,06 = g 16,12; g 16,12 + 1 triobolo di g 1,34 = g 17,46; g 17,46 = 1 tetradrammo euboico = 2 stateri corinzi. Questa esigenza d'integrazione è identica per tutte le zecche citate (tranne che per Imera, naturalmente), e non giustifica di per sé la 26 Stazio, 1984, p. 372-373, nota 5. 27 In Stazio, 1984, p. 378-380, un elenco completo della documentazione conosciuta : per il tipo della ruota sono stati proposti confronti con gli stateri di Taranto del periodo 470-460. 28 Per le prime serie di bronzo di Crotone vedi Rutter, 1979, p. 208-211. 29 1958, p. 102. 30 II ragguaglio fra i valori (teorici) d'Imera e quelli Crotone poteva essere istituito alla maniera seguente : (g 5,82 χ 3) = (g 8,06 χ 2) + g 1,34 = g 17,46.
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varietà dei tipi impiegati. La ragione di questa dev'essere ricercata, secondo Stazio31, in circostanze, seppure non precisabili, di natura politica. Mele, invece, ne propone il collegamento con la diffusione del pitagorismo e, per la Sicilia, con la fine delle tirannidi32. Come che sia, e per restare ancorati al dato delle monete, il risultato che forse si vole varaggiungere era quello di porre Crotone al centro di un'area di ci rcolazione sempre più vasta, nella misura in cui il suo porto si veniva ponendo sempre di più al centro di una fitta rete di scambi, che mette vano capo alla Grecia ed alla Sicilia ed al resto d'Italia meridionale33. Ci si può chiedere allora se la varietà tipologica non possa rispecchiare in qualche maniera i risvolti politici dell'operazione. L'ampliamento della zona di circolazione e la maggiore articolazio ne del sistema monetario avrebbe finito per agevolare (almeno negli usi) il passaggio dell'intermediario da una determinazione storica do minante all'altra : da quella di misura del valore e di mezzo di acquisto a quella di mezzo di scambio34. Si assiste ora ad una crescita del numer ario, che si discosta ampiamente dalle condizioni precedenti. Ad essa corrispondono «sviluppi di attività e ceti legati alla circolazione inter nazionale della moneta . . . svincolati dalle immediate attività agricole di sussistenza» ed i conseguenti nuovi spazi che si aprono nel tessuto sociale ed il superamento delle vecchie cerehie oligarchiche35. Nicola F. Parise
RIFERIMENTI BIBLIOGRAFICI
Babelon, E., Traité des monnaies grecques et romaines, II, 1, Parigi, 1907. Caccamo Caltabiano, M., // tipo monetale dell'elmo e l'eroe di Temesa, in Temesa e il suo territorio (Atti Perugia-Trevi, 1981), Taranto, 1982, p. 211-217. 31 1984, p. 383-384. Stazio non crede all'ipotesi di Kraay che le frazioni in esame potessero rispondere ad «esigenze tecnico-contabili di equiparazione di valori». 32 Mele, 1982, p. 76-78. 33 Mele, 1984, p. 62-64. 34 Parise, 1981, p. 54. 35 Mele, 1984, p. 63.
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NICOLA F. PARISE
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ROME : UNE SOCIÉTÉ ARCHAÏQUE AU CONTACT DE LA MONNAIE (VIe-IVe SIÈCLE)
Les tombes du Latium archaïque contiennent dès le Xe siècle envi ron des objets manufacturés qui attestent une société pourvue d'une certaine aisance. Cette richesse mobilière connaît ensuite un accroisse ment et une concentration remarquables à partir du milieu du VIIIe siècle1. À la même époque, les premiers colons grecs apportèrent en Italie l'usage d'évaluer les métaux précieux d'après des unités de poids qui devinrent ainsi des unités de compte. À partir du VIe siècle, les poleis de la Grande Grèce adoptèrent l'invention de la monnaie; un fos séculturel les séparait désormais des peuples de l'Italie qui en étaient restés à la pesée du cuivre ou du bronze. Pour l'Etrurie on connaît de rares monnaies de Vulci du Ve siècle et quelques émissions du IVe; la monnaie romaine apparaît, au mieux, dans les dernières années du IVe siècle; les peuples italiques suivirent le mouvement plus tard encore2. La période qui nous occupe, les VIe, Ve et IVe siècles, est donc fon dée sur ce contraste entre des sociétés de type grec qui utilisent cou ramment l'instrument monétaire, et des populations qui l'ignorent ou le négligent. Selon leur niveau de développement, ces dernières étaient plus ou moins éloignées du stade de la monnaie, et il n'est pas trop difficile d'évaluer cette distance. Une indication peut être donnée par les trouvailles de monnaies grecques en pays non grec; à cet égard, la différence est nette entre l'Etrurie, où de telles découvertes ne sont pas 1 Civiltà del Lazio primitivo, Palazzo delle Esposizioni, Rome, 1976: notamment Ardée (2e-3e quart du VIIIe siècle), p. 312-317, et les tombes princières de Préneste (VIIIe siècle), p. 213-250. - Naissance de Rome, Petit Palais (Paris), mars-mai 1977. 2 M. H. Crawford, Coinage and Money under the Roman Republic, Londres, 1985, chap. I; R. Thomsen, Early Roman Coinage, 3 vol., Copenhague, 1957-1961; R.E. Mit CHELL, The fourth-century origin of Roman didrachm, dans ANSMN, XV, 1969, p. 41-71.
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trop rares, et la ville de Rome où, à notre connaissance, aucune n'a jamais été signalée3. Mais d'autres paramètres doivent également être envisagés : la présence d'objets d'origine grecque et la capacité à les imiter; la constitution de structures urbaines, l'usage de l'alphabet, l'émergence d'une organisation politique qui comporte des institutions codifiées et ait besoin de ressources pour fonctionner. Il n'est pas jus qu'à l'urgence de quelque effort de guerre qui n'ait joué son rôle dans ce processus de maturation. Les régions de l'Italie centrale et septentrionale, la Sardaigne et la Sicile connaissaient dès le VIIe siècle l'usage de masses plus ou moins informes, puis de lingots assez réguliers, en cuivre ou en bronze. On parle d'aes rude, parfois d'aes formatum, et surtout d'aes signatum. Ce matériel est présent dans toutes les grandes collections numismatiques4; les trouvailles archéologiques sont bien attestées sans être abondantes5; à l'occasion, tel de ces objets fait surface dans le com merce international des antiquités6. Il est d'autant plus regrettable qu'il n'existe aucune monographie récente et exhaustive consacrée à ce type de matériel, et qu'on en soit réduit à consulter des travaux du début de ce siècle, en particulier l'excellente synthèse de E. J. Haeberlin7. Les faits étant connus, on nous permettra de traiter par prétention tout l'aspect archéologique et muséographique de la question, en rap pelant seulement les grandes catégories de la description.
3 M. H. Crawford, op. cit., p. 17. 4 H.A. Grueber, BMCRR I, p. 1-2; A. Burnett et P. Craddock, dans J. Swaddling (éd.), Italian Iron age artefacts in the British Museum, Londres, 1984 (cité par M. H. Crawf ord, op. cit., p. 3). 5 R. Thomsen, Early Roman Coinage, 1, p. 109-111 et III, p. 202-212; M. H. Crawford, Roman Republican coin hoards, Londres, 1969, n° 10 (Vulci 1828), 13 (Aricia 1848) et 16 (La Bruna 1890); G. Colonna, La più antica iscrizione di Bologna. Studi e documenti di archeologia, II, 1986, p. 57-66 (un morceau d'aes rude portant le graffite AIE); E. Ercolani Cocchi, Unità-riserva di valore, strumenti di pagamento, mezzi di scambio in Emilia Romagna e in Italia, dans Stud, e doc. di arch., Ill, 1987, p. 131-173. 6 Monnaies et médailles, Bale, Vente publique 47 (30 nov. - 1er déc. 1972), p. 7-8 et pi. 5 : huit morceaux d'aes signatum dont un à ramo secco; Vente publique 52 (19-20 juin 1975), p. 41 et pi. 18 : un fragment analogue. 7 E. J. Haeberlin, Aes grave, Francfort, 1910; H. Willers, Italische Bronzebarren aus der letzten Zeit des Rohkupfergeldes, dans HZ, 36, 1904, p. 1-34; Id., das Rohkupfer als Geld der Itatiker, dans ZN, 34, 1924, p. 194-283. Bibliographie rétrospective dans notre Moneta, II, p. 1152-1154 (et cf. ibid. I, p. 199-204).
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a) Le métal est d'abord un mélange de cuivre et de fer, la pro portion de ce dernier pouvant aller jusqu'à 38%. Cet alliage est total ement impropre à tout usage artisanal et c'est là une remarque intéres sante.Par la suite, les lingots sont en un cuivre plus ou moins pur. b) Ils sont décorés de dessins schématiques comme le ramo secco ou les arêtes de poisson, mais aussi de traits, de lettres (surtout le A), de formes simples (croissant, croix, étoile) ou un peu plus évoluées (dau phins). c) Ils présentent à l'occasion des bavures dues à la fonte. La plu part des pièces ont été cassées à date ancienne; la cassure a été faite à chaud. Ainsi donc, une métallographie peu raffinée, une technologie rudimentaire et une iconographie très simple, voilà qui semble épuiser la ..description de ces objets prémonétaires, precedenti della moneta vera e propria8. Nous voudrions plutôt nous interroger, dans les pages qui suivent, sur le sens et la fonction de ces lingots dans la société romaine. Notre première question sera de nous demander ce qu'on entend par des objets « prémonétaires ». On admet en général, implicitement, qu'il s'agit d'objets qui ne sont pas encore techniquement des monnaies, mais qui en remplissent déjà toutes les fonctions. Ce serait une sorte de monnaie qui aurait seule ment une forme moins «abstraite» et moins commode que la monnaie proprement dite. Mais on suppose qu'elle est employée dans une écono miede marché, où l'on achète et vend des marchandises au sens moderne du terme, où les prix sont déterminés par l'offre et la demand e; d'où entre autres l'idée très répandue que les lingots sont cassés parce qu'on en a détaché ce qu'il fallait pour un achat. Mais la plupart des morceaux s'échelonnent entre une et trois livres, et la répartition des poids semble parfaitement aléatoire, ce qui exclut l'intention mercantile. D'autre part, quand l'échange portait sur de fortes sommes, on n'avait pas besoin de casser les lingots. En fait, l'emploi généralisé d'un système aussi incommode paraît peu vraisemb lable.Pour sauver l'hypothèse mercantile, on admet parfois que dans une société rurale vivant en une autarcie presque complète, le bronze
8 L. Breglia, / precedenti della moneta vera e propria nel bacino del Mediterraneo, dans Congr. intern, num., Rome, 1961, I, p. 5-7, avec bibliographie.
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prémonétaire ne servait qu'à des achats exceptionnels ou aux rapports des individus avec l'État : le paiement du tributum et l'encaissement du Stipendium. Cette explication peut avoir sa part de vérité; elle n'en exclut pas d'autres, qui rendent tout aussi bien compte de la cassure des lingots : la consécration d'offrandes religieuses ou funéraires9, l'emploi comme tessères d'hospitalité ou à la suite d'une manumissio 10 II reste qu'on voit mal pourquoi la société romaine en serait restée à ce stade plutôt rudimentaire pendant deux ou trois siècles si le concept de monnaie avait été prêt. C'est donc qu'il ne l'était pas, ou que la mentalité romaine le refusait. Les lingots étrusques et italiques font partie de ce que dans d'autres domaines on appelle des paléomonnaies ou des objets paléomonétaires11, ces termes impliquant, par rapport à la monnaie, une antériorité non seulement dans le temps mais aussi dans le développement. Les objets paléomonétaires ne répondent pas aux mêmes fonctions que les monnaies. Ils ne sont ni le paiement d'un temps de travail ni le fruit d'un capital; ils ne servent généralement pas à l'acquisition de biens de consommation. Ils échappent à la loi de l'offre et de la deman de qui règle les rapports dans la sphère marchande. Mais ils servent à reproduire, c'est-à-dire à justifier, à perpétuer et éventuellement à transformer les structures sociales. Leur détention est l'apanage des classes dirigeantes ou aristocratiques; plus la hiérarchie sociale est évo luée, plus les paléomonnaies remplissent des fonctions complexes et codifées12. Bien entendu, loin d'être statique, l'étape paléomonétaire des socié-
9 H. Zehnacker, La trouvaille de La Villeneuve-au-Châtelot (Aube), dans Trésors mon étaires, VI, 1984, p. 87; J. Heurgon, Les graffites d'Aléna, dans J. et L. Jehasse, La nécro polepréromaine d'Aléna (1960-1968), XXVe Suppl. à Gallia, Paris, 1973. 10 Sur la procédure per aes et libram, Gaius, I, 119-123. - E. Peruzzi, Money in early Rome, Florence, 1985, chap. I. 11 H. Zehnacker, Usage du bronze et hiérarchie sociale dans la Rome archaïque, dans Monnaie et Financement 13, Univ. Lyon II, 1983, p. 3-27. Nous remercions bien vivement M. J. M. Servet, directeur de cette publication, de nous avoir autorisé à reprendre ici quelques analyses de notre première étude. 12 Leur échange ressortit initialement non pas à la notion de paiement, mais à celle de don. M. H. Crawford, Coinage and Money, p. 21, η. 18, citant M. Cristofani, II «dono» nell'Etruria arcaica, dans PdP, 1975, p. 132, rappelle à ce propos qu'en Étrurie la pratique de marquer les objets de valeur avec le nom du donateur et éventuellement celui du réc ipiendaire disparaît vers 550 : le «don» tend à être remplacé par le paiement.
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tés se caractérise par le progrès des trois fonctions qui aboutissent, une fois parvenues à maturité, au stade monétaire : la fonction d'unité de compte, celle d'instrument de réserve, et celle de moyen de paiement ou à tout le moins de moyen d'échange. Et nous voudrions donc tester l'idée que les différentes espèces de lingots étrusques et italiques, à l'exception de ïaes signatum des numis mates, trop tardif - mais nous en dirons un mot in fine, - sont au départ des objets paléomonétaires, même si les exemplaires qui nous en restent ne font peut-être que refléter certaines pratiques particulières. Ce sont donc surtout les sources historiques qu'il nous faudra interro ger; les données qu'elles nous fourniront seront d'autant plus précieu ses qu'elles se rapporteront à des faits plus anciens. Il est vrai que les historiens antiques ont souvent modernisé les faits qu'ils rapportent, en les adaptant aux habitudes monétaires et à la mentalité de leur propre époque. L'utilisation de leur témoignage requiert un mélange délicat de confiance et de prudence. Les livres I à V de Tite-Live, de la fondation de Rome au début du IVe siècle, nous ont paru plus sûrs à cet égard que le récit parallèle de Denys d'Halicarnasse. * * * Depuis le début de l'âge du fer, la détention de masses ou de lin gots de bronze semble avoir été l'expression d'un statut civique et social privilégié. Ce bronze était évalué au poids; comme on sait, le mot qui le désigne, aes, ainsi que le verbe peser, pendere, ont joué un rôle import ant dans la constitution du vocabulaire latin de la monnaie13. Il est possible que l'adoption d'une unité de poids commune à toute la cité, la livre de bronze d'environ 324 g. appelée as, date du règne de Servius Tullius (578-534) M. Cette hypothèse implique une première codification des usages prémonétaires vers le milieu du VIe siècle; une influence grecque n'est pas à exclure. La même hypothèse permet aussi d'expliquer de façon vraisemblable les légendes postérieures sur le thè me de l'invention de la monnaie par Servius Tullius15.
13 Varrò, L.L. V, 182-183; Plin., N.H. XXXIII, 42-44; Isid., Orig. XVI, 18, 8. 14 M. H. Crawford, Coinage and Money, p. 17-21. 15 Plin., N.H. XXXIII, 43; Cassiod., Var. VII, 32,4; Varrò, Ann., apud Charisius I, 105 K. - R. Thomsen, Early Roman Coinage I, p. 25 ; M. H. Crawford, Roman Rep. Coinage I, p. 35-37; Coinage and Money, p. 19.
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L'existence d'une unité de poids permettait l'appréciation objective des quantités de bronze détenues. Grâce à l'émergence sans doute simultanée de la notion d'unité de compte, on put aussi convertir en livres de bronze toutes les autres formes de la richesse. La participa tion de chacun aux charges publiques se régla selon un ensemble de critères timocratiques que nous appelons la constitution servienne. Nous possédons de bonnes descriptions de ce système; Tite-Live, Denys d'Halicarnasse, Cicéron nous en ont transmis le tableau, avec des variantes qui trahissent son évolution ultérieure16. Evoquant la mise en place de cette constitution qu'il attribue à Servius Tullius lui-même, Tite-Live (I, 42) souligne la nouveauté de la cho se: Le cens, dit-il, répartissait les charges non plus par tête, comme auparavant, mais d'après la fortune : non uiritim, ut ante, sea pro habitu pecuniarum. Comme l'a rappelé jadis G. Dumézil dans un livre pas sionnant17, la notion de census implique l'évaluation et la déclaration des fortunes par leurs détenteurs18; cette opération n'est possible que si tous les biens étaient réductibles à un dénominateur commun, l'unité de compte constituée par la livre de bronze19. Le Ve siècle voit s'opérer divers efforts de codification et de res tructuration. Le décemvirat législatif et la loi des XII Tables en sont l'exemple le plus connu. Mais la création de la censure en 443 s'inscrit dans la même ligne. On parle souvent aussi d'une série de lois qui sont censées avoir établi des équivalences, pour les amendes, entre têtes de bétail et masses de bronze : lois Aternia Tarpeia de 454, Menenia Sestia de 452, Papiria Julia de 43020. Les auteurs anciens nous fournissent à leur sujet des témoignages en partie contradictoires, en tout cas diffici les à interpréter. Il reste peut-être que le souvenir de ces lois témoigne des problèmes que posait au Ve siècle l'emploi de la livre de bronze comme unité de compte. La constitution servienne a du être nécessairement affectée par les réductions de la monnaie de bronze au cours de la deuxième guerre punique. On sait maintenant que le tableau que nous en tracent nos 16 T.-Liv., I, 42; Den. Hal. IV, 16-22; Cic, De rep. II, xxii, 39-40. 17 G. Dumézil, Servius et la Fortune, Paris, 1943. 18 C. Nicolet, Le métier de citoyen dans la Rome républicaine, Paris, 1976. 19 R. Thomsen, King Servius Tullius. A historical synthesis, dans Humanitas, 5, Gyldendal, 1980, p. 202 sq., adopte un point de vue plus réservé et dénie à Yaes rude tout rôle d'unité de mesure; sous sa forme première, le census aurait été purement qualitatif. 20 G. Rotondi, Leges publicae populi Romani, Milan, 1922 et rééd.
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sources résulte d'un remaniement opéré à la fin du IIIe ou au début du IIe siècle. Les chiffres du cens pour les différentes classes correspon dent à des as sextantaires, ce qui nous situe aux premiers temps du sys tème de denier, introduit vers 213-211. Mais cela ne signifie pas que tout le contenu de nos textes soit tardif, et il faut se garder de toute attitude hypercritique. Ainsi l'armement que décrivent Denys et TiteLive ne résulte probablement pas d'une reconstruction savante due à un érudit du IIe siècle, comme on l'a suggéré, mais paraît bien corres pondre à l'équipement des hoplites du Ve et du IVe siècle21. Nous estimons donc que la genèse d'une hiérarchie timocratique fondée sur un système paléomonétaire peut être l'œuvre d'un turannos ayant régné à Rome au VIe siècle. Les chiffres de la constitution servienne ont pu être actualisés; ce qui ne doit pas être mis en cause, c'est leur étagement. Il semblerait même que les autres sommes en bronze qu'on lit pour la même époque dans Tite-Live soient en harmonie avec les chiffres qu'il donne pour les classes censitaires. Nous verrons que tout se passe comme si l'on était en présence d'un système cohérent, qui est peut-être l'œuvre des annalistes, mais dont il n'est pas exclu qu'il reflète une cohérence originelle. Il y a donc une corrélation étroite entre l'emploi d'une unité de compte, le census et la structure de la société. Toute l'idéologie romai ne de la res familiaris peut être expliquée dans cette perspective. On peut envisager aussi sous cet angle le difficile problème de Yaes ali enum. On traduit d'ordinaire cette expression par «dette», et c'est un sens qui convient effectivement pour des événements se situant en gros dans les deux derniers siècles de la République, dans une civilisation de type monétaire. Pour les périodes plus anciennes, nous soupçonnons qu'il s'agit d'un fait social beaucoup plus grave qu'une simple dette, et il vaut mieux traduire, prudemment, par «bronze d'autrui». Car on ne parlait sûrement pas d'aes alienum à propos des modestes emprunts liés à une gêne passagère ou au rythme de l'année agricole. Nous pen sons qu'il y avait primitivement aes alienum lorsqu'un citoyen faisait appel aux réserves métalliques d'une autre famille, afin de trouver dans ce «bronze d'autrui» la crédibilité qui lui faisait défaut, en vue
21 R. M. Ogilvie, A commentary on Livy, BooL· 1-5, Oxford, 1965, p. 166-168 (trop critique) ; C. Nicolet, Métier, p. 76 ; D. Kienast, Die politische Emanzipation der Plebs und die Entwicklung des Heerwesens im frühen Rom, dans BJ, 175, 1975, p. 83-112.
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d'une opération importante. Nous sommes là aux racines de la fides, autre notion politique et sociale de première importance22. Sur ce point, nos sources paraissent plus modernisées encore que partout ailleurs; le problème des dettes y est toujours traité sous l'angle du capital et des intérêts, ce qui est déjà une vision monétaire des chos es. Mais un reflet de l'état ancien est peut-être perceptible dans le récit célèbre du centurion endetté (T.-Liv. II, 23) : nous sommes en 495, et le problème de Yaes alienum se pose pour la première fois en termes dra matiques23. Dans l'énumération des malheurs qu'a connus le centurion, la per tedes récoltes vient en premier, comme le fait le plus bénin; puis les coups du sort se font de plus en plus graves; enfin on exige de lui le tributum au moment où il n'a pas d'argent liquide, tributum iniquo suo tempore imperatur24 : le recours à Yaes alienum devient inévitable. Obli gésd'expliquer pourquoi le centurion a fini par être jeté dans la prison privée de ses créanciers, Tite-Live et ses sources font appel au jeu des intérêts cumulés : explication invraisemblable pour une époque où n'existent ni l'argent ni les mécanismes bancaires et juridiques qu'en gendre son usage. En réalité, le recours au «bronze d'autrui» devait comporter de sévères limitations, temporelles ou autres. Le fournisseur de Yaes alienum pouvait cesser d'accorder son soutien : l'emprunteur perdait alors sa place dans la hiérarchie sociale et pouvait, à la limite, tomber dans une sorte d'esclavage. Ainsi réduit en servitude, le centurion ne peut pas rembourser sa dette par le produit de son travail25. Le fait que le créancier a mis la main sur lui traduit non pas sa volonté d'être remboursé, mais son désir d'humilier le débiteur en exerçant sur lui le mépris et la vengeanc e. Tite-Live dit que le centurion a été jeté in ergastulum et carnificinam. Ogilvie rappelle avec raison que c'est là un anachronisme patent; les ergastules ne sont concevables à Rome qu'à partir de l'époque de Sylla. En réalité, l'historien romain prête au centurion une expression pathétique et redondante, destinée à soulever l'indignation populaire, mais qui équivaut simplement à in carcerem, «en prison». Le scandale
22 Bibliographie utile dans G. Freyburger, Fides, Paris, 1986. 23 Récit parallèle : Den. Hal. VI, 26. 24 II y a là plus d'un anachronisme : le tributum est contemporain de l'institution de la solde, en 406. 25 Ce point est bien souligné par R. M. Ogilvie, Commentary, p. 296 sq.
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n'est pas que le centurion ait travaillé, mais qu'il ait été maltraité et frappé. Les cas de servitude à vie pour dettes dans l'Orient ancien manifest ent la même conception26. La rétribution du travail manuel était si basse qu'il était illusoire de penser qu'elle pût jamais solder une dette de quelque importance. L'esclavage pour dettes est une mesure de déchéance civique; son intérêt économique est des plus médiocres. La révolte populaire que provoque le discours du centurion dans le récit de Tite-Live anticipe d'un bon siècle et demi sur l'époque où la servitude pour dettes tendit à ne plus être acceptée à Rome. La cons cience collective dissocia dès lors, dans une certaine mesure, statut social et aes alienum. Nous venons d'évoquer des problèmes relatifs à la détention du bronze ou d'une fortune mesurée en unités de bronze et, corrélative ment, ceux de l'emprunt et du remboursement de Yaes alienum. Ces questions concernent le droit public, dans la mesure où l'étagement des fortunes détermine une hiérarchie civique et guerrière. Dans l'appré ciation de la place de chacun dans la société, l'État intervient de façon décisive : c'est en son nom que les censeurs procèdent au census en consignant les déclarations de fortune faites par les chefs de famille. Mais l'intervention de l'État peut revêtir d'autres formes encore. Au cours de la première décade, Tite-Live mentionne à plusieurs repri sesdes amendes infligées à des hommes politiques à la suite d'une accusation d'incurie ou d'incapacité. Nous venons de rappeler qu'une série de lois, entre 452 et 430 av. J.-C, passait pour avoir fixé des équi valences entre têtes de bétail et unités de bronze dans le taux des amend es.De la même façon, les lois des XII Tables impliquent l'existence d'une unité de compte : Yiniuria est punie de 25 unités27. S'agissant des taux des amendes, Tite-Live les exprime de la même manière que les chiffres du cens de la «constitution servienne», c'est-à-dire en milliers d'unités; et ces unités, dont le nom est sous-entendu, sont évidemment
26 Travaux de M. I. Finley, notamment Esclavage antique et idéologie moderne, trad, franc. D. Fourgous, Paris, 1979. 27 Gell. XVI, 10,8 et XX, 1,12 + Fest. 508 L + Gaius III, 223 = XII Tables 8, 3-4. M. H. Crawford, Coinage and Money, p. 19-21, avec une discussion de plusieurs problè mes apparentés.
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encore les livres de bronze. Du livre III au livre V de \'Ab Vrbe Condita, les amendes sont normalement de dix ou de quinze mille livres28. L'un de ces cas (III, 31) se situe peu avant la rédaction de la loi des XII Tables. Les deux consuls de 456, T. Romilius et C. Veturius, ont vendu le butin d'une campagne contre les Eques, au lieu de le distr ibuer à l'armée. Ils s'attirent le mécontentement de la plèbe. À leur sor tie de charge ils sont condamnés, Romilius à dix mille livres d'amende, Veturius à quinze mille. Ce jugement provoque évidemment l'indigna tion des patriciens29. Malgré l'absence totale de commentaire chez Tite-Live, ces chiffres donnent à réfléchir. Dix mille ou quinze mille unités de bronze corres pondent à peu près à la moitié de l'intervalle (25.000 unités) qui sépare les classes de la constitution servienne, de la première à la quatrième : le cens était respectivement de 100.000, 75.000, 50.000 et 25.000 unités. Dans un tel système, une amende de dix à quinze mille livres risquait fort de faire descendre le condamné d'un échelon dans la hiérarchie civique. On vient de rappeler que les chiffres de la constitution servien ne telle que nous la connaissons ne remontent probablement pas plus haut que la fin du IIIe ou le début du IIe siècle. Pour les périodes anté rieures, nous ne savons évidemment rien. Le problème se pose dans des termes analogues pour les amendes. Ou bien les chiffres que donne Tite-Live sont sincères, et alors une amende de dix à quinze mille livres avait un effet radicalement dévastateur sur le census du condamné; ou bien ces chiffres ont été refaits sur le modèle de ceux de la constitution servienne dans sa dernière version, et dans les mêmes proportions. On peut penser que les annalistes romains des IIe et Ier siècles ont été capa bles de moderniser leurs sources en adaptant le taux des amendes com meon avait adapté les chiffres du cens. Il semble donc que les amendes aient eu pour but non pas d'appauv rir les condamnés mais de les dégrader. La sanction qui a frappé Romilius et Veturius ne ressortit pas à la sphère marchande : elle est d'ordre timocratique et vise à les exclure de la classe dirigeante. C'est la conclusion qui se dégage aussi du plus ancien exemple d'une amende chiffrée que l'on trouve chez Tite-Live (II, 52). En 476, T. Menenius, le fils d'Agrippa, est traîné en justice pour avoir laissé
28 Dix mille en III, 31; IV, 41; V, 12 et 29; quinze mille en III, 31; IV, 44; V, 32. R. M. Ogilvie, Commentary, p. 369. 29 Récit parallèle : Den. Hal. Χ, 48-52.
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l'ennemi prendre le camp que les Romains avaient établi sur le Crémère. «Dans l'application de la peine, dit l'historien, les tribuns furent modérés : après avoir demandé sa tête, ils ne le condamnèrent qu'à une amende de 2.000 as. Mais ce fut son arrêt de mort : on dit qu'il ne sup porta pas son déshonneur et son chagrin, qu'il en tomba malade et en mourut»30. On ne sait que penser de la remarque de Tite-Live, que les tribuns firent preuve de modération. Peut-être l'historien a-t-il été étonné de la faiblesse du chiffre et lui a-t-il cherché une explication d'ordre psychol ogique. Peut-être au contraire a-t-il trouvé cette explication dans ses sources. Ce qui reste assuré, c'est que Menenius est mort de chagrin, une fois sa condamnation encourue. C'est donc qu'une amende de deux mille as n'avait rien de symbolique. Quel qu'ait été son impact sur le cens de Menenius, elle a dû affecter gravement son statut civique. Une autre forme de dégradation sociale était directement liée aux prérogatives des censeurs : la réduction à l'état d'aerarius. Le premier exemple se situe en 434, neuf ans après la création de la censure. Le dictateur Mamercus Aemilius avait fait abréger la durée de la censure de 5 ans à 18 mois (T.-Liv. IV, 24). Les censeurs «le mirent hors tribu, multiplièrent son cens par huit et le réduisirent à l'état d'éraire» : La multiplication arbitraire du census a pour objet d'augmenter d'autant les impôts du condamné; c'est là une amende au sens moderne du ter me, visant l'appauvrissement. L'anachronisme est probable. Mais en même temps Mamercus est mis hors tribu, ce qui équivaut à le priver des avantages de la citoyenneté, et classé arbitrairement parmi les aerar ti,qui, quoique hommes libres, n'ont pas de cens, ne sont pas admis parmi les guerriers et n'entrent pas dans les classes de la constitution servienne. Mamercus a dû subir une dégradation civique telle que seul l'esclavage aurait pu être pire. Ce cas extrême montre comment les censeurs pouvaient tempérer les réalités matérielles du cens par l'ap préciation morale. Si la perte du patrimoine ou l'excès d'aes alienum ont pour effet de réduire en un quasi-esclavage, à l'inverse l'État romain, lorsqu'il veut récompenser des services exceptionnels rendus par des esclaves,
30 In multa temperarunt tribuni : cum capitis anquisissent, duo milia aeris damnato edixerunt. Ea in caput uertit : negant tulisse ignominiam aegritudinemque ; inde morbo absumptum. - Dans le récit de ces faits, Denys - IX, 27 - trouve l'amende très forte pour l'époque.
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ne leur accorde jamais la libertas et la ciuitas sans y ajouter une certai ne quantité de bronze : ainsi les nouveaux citoyens trouvaient d'emblée une place honorable dans l'échelle de la constitution servienne. Mais là aussi, l'annalistique romaine et Tite-Live ont souvent transformé ces masses de bronze en sommes d'argent au sens banal, économique, du terme. Voyons-en deux exemples significatifs. En 509 (T.-Liv. Π, 5)31, un complot monarchiste met en péril l'existence de la jeune république. Le complot est découvert par un esclave appelé Vindicius - le nom paraît étiologique, dérivé du mot qui désigne l'affranchissement par la ba guette, uindicta. L'esclave reçoit une récompense : praemium indici pecunia ex aerano, libertas et ciuitas data. Même si plusieurs détails de cette historiette sont sujets à caution, il reste qu'elle se fonde sur un usage qui demeura constant par la suite. En 419 (T.-Liv. IV, 45), des esclaves complotent de mettre le feu à Rome et de s'emparer en armes de l'Arx et du Capitole. Le récit de Tite-Live dénote une anticipation des révoltes serviles qui se produisirent aux IIe et Ier siècles; il n'empêche que l'épisode paraît avoir un fondement historique. Les esclaves sont dénoncés par deux des leurs. «Dix mille livres pesant - une fortune pour l'époque, - versées à chacun par le trésor, et la liberté furent leur récompense»32. Ogilvie trouve cette indication «over-schematic»; J. Bayet faisait remarquer qu'elle ne correspond même pas au cens de la 5e classe servienne, et concluait à un manque de coordination des données. Il nous semble au contraire que la coordination est très visible. La 5e classe se définit, dans Tite-Live, par un cens de 1 1 .000 as. La récom pense accordée par l'État aux dénonciateurs reste juste en dessous de ce chiffre. Il n'eût pas été convenable, sans doute, qu'ils passent direc tement de l'esclavage à la cinquième classe des hommes libres; il leur fallait donc rester pendant quelque temps dans la fraction la plus basse de la plèbe, celle qui était - détail important s'agissant d'anciens escla ves- immunis militia, exclue d'une participation à la guerre. Mais une progression assez modeste pouvait leur permettre ultérieurement, à
31 Récit parallèle: Den. Hal. V, 7-13. 32 Indicibiis dena milia grauis aeris, quae turn diuitiae habebantur, ex aerario numerat a et libertas praemium fuit. - Den. Hal., excerpt. XII, 6. - R. M. Ogilvie, Commentary, p. 603; J. Bayet, éd. C.U.F., ad loc.
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eux où à leurs descendants, de s'élever d'un cran dans la hiérarchie censitaire. La même somme, dix mille as, représente le taux de beaucoup d'amendes, le montant de la participation de l'État au «cheval pu blic»33 et le patrimoine accordé à ces esclaves en même temps que la liberté et la citoyenneté romaine. Il semble que pour toutes ces opé rations de nature timocratique, l'annalistique ait retenu le même chif fre, ce qui signifie probablement qu'elle y voyait plus qu'une coïnci dence. Une autre série de faits concerne le Stipendium ; nous devons nous arrêter un instant à ce mot, riche d'enseignements. Sur la foi de Varron, Pline l'Ancien34 enseigne que le Stipendium est l'équivalent de stipis pondus, le poids d'une stips. On peut dire aussi que c'est l'action de stipem pendere, de peser une stips, et le transfert qui en résulte. Quant à la stips elle-même, c'est primitivement un tas, comme le montre le verbe stipare, «entasser», et donc un tas de bronze35. Certains exemples de Stipendium présentent des traces évidentes d'anachronisme. Ainsi, Tite-Live raconte (II, 54) que sous le consulat de L. Furius et de C. Manlius, en 475, une trêve de quarante ans fut accor dée aux Véiens moyennant fourniture de blé et paiement d'un Stipen dium. Il est difficile de dire quelle est la réalité qui se cache derrière ce terme : des métaux précieux sans doute, peut-être aussi des armes, autant et plus que du bronze. Il semble donc que Stipendium ait ici son sens moderne de «tribut, indemnité de guerre»36. Mais le sens ancien est perceptible dans d'autres exemples, et d'abord dans celui du Stipendium des Vestales. Selon Tite-Live (I, 20), le fondateur de la religion romaine, le roi Numa (dates traditionnelles: 715-672) «choisit des jeunes filles pour le culte de Vesta ... ; afin qu'elles puissent se consacrer en permanence au service du temple, il fixa une stips qui leur serait versée sur les
33 T.-Liv., I, 43,9. 34 Plin., N.H. XXXIII, 43. 35 Varrò, L.L. V, 182 : asses stipare. - Bonne analyse dans E. Peruzzi, Money in early Rome, Florence, 1985, chap. V. 36 Den. Hal., IX, 36, va jusqu'à interpréter ce Stipendium comme le montant d'une solde annuelle en monnaie d'argent pour l'ensemble de l'armée.
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réserves de l'État; par le vœu de virginité et d'autres pratiques pieuses, il les rendit vénérables et sacrées37. La plupart des traducteurs comprennent le mot Stipendium, dans ce passage, comme s'il s'agissait d'un traitement payé par l'État. En apparence, cette traduction est confortée par la remarque monétariste et anachronique de Tite-Live, sur la possibilité qui était ainsi offerte aux Vestales d'être en permanence au service de la déesse. Mais était-il concevable qu'elles dussent gagner leur vie? Devons-nous nous imagi ner les Vestales comme des fonctionnaires vivant de leur traitement? C'est peut-être l'image qu'ont tenté d'accréditer, quelques siècles plus tard, les apologistes chrétiens; et encore saint Ambroise et Symmaque, lors de l'affaire de l'autel de la Victoire, insistent-ils surtout sur Yimmunitas dont jouissaient les Vestales, ce qui n'est pas du tout la même chose. Un passage de Tacite (Ann. IV, 16) nous aidera à mieux comprend re la réalité ancienne. Il est question du recrutement d'une Vestale à l'époque de Tibère; d'un commun accord, l'Empereur et le Sénat veu lent redorer le blason des institutions religieuses. Et donc, «afin de relever la dignité des prêtres et de stimuler leur zèle à assurer le servi ce du culte, on attribua à la Vestale Cornelia, prise pour remplacer Scantia, deux millions de sesterces»38. Cela représente une somme considérable, le double du cens sénator ial. Nous devons penser qu'il était urgent de rehausser le prestige des Vestales. En temps ordinaire, l'État leur versait une somme moindre, mais encore respectable. Nous ignorons son montant à date ancienne. En tout cas, il n'a pu s'agir que d'un versement unique, effectué au moment de la «prise de voile», et non d'un traitement, qui est par défi nition un versement périodique39. Le bronze que Numa a fait accorder aux premières Vestales n'était pas destiné à assurer leur vie quotidien ne; il ne constituait pas non plus la récompense de services rendus, puisque son versement intervenait au moment de l'entrée en fonctions. Tout indique au contraire, tant chez Tite-Live que chez Tacite, que l'on 37 Virgines Vestae legit ... ; his ut adsiduae templi antistites essent Stipendium de publico statuii; uirginitate aliisque caerimoniis uenerabiles ac sanctas fecit. - Den. Hal. II, 64 et 67 est moins précis. 38 Vtque glisceret dignatio sacerdotum atque ipsis promptior animus foret ad capessendas caerimonias, decretum Corneliae uirgini, quae in locum Scantiae capiebatur, sestertium uicies. 39 C'est ce qu'a bien vu Th. Mommsen, Staatsrecht, 3e éd., II, p. 65.
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a voulu honorer les Vestales et leur garantir d'emblée un statut social on pourrait même dire : civique - égal à celui des premiers personnag es * de l'État. Une analyse comparable peut s'appliquer à l'institution du Stipe ndium militaire, qu'on traduit d'ordinaire par «la solde». La question du Stipendium a été soulevée une première fois en 424 (T.-Liv. IV, 36), mais les faits décisifs se passent en 406, après la prise d'Anxur, avant la guerre contre Véies (T.-Liv. IV, 59-60). Il faudrait commenter tout le texte; nous nous bornerons à relever ce passage essentiel : «À cela s'ajouta une largesse, opportune entre toutes, que les grands firent aux masses : avant toute revendication de la plèbe ou des tribuns, le Sénat décréta que la troupe recevrait un Stipendium de l'État, tandis qu'auparavant chacun avait fait son service à ses frais»40. La décision du Sénat est donc présentée comme une largesse des grands, qui sont les détenteurs du bronze, envers le peuple, qui en pos sède peu ou pas du tout. Le versement accordé aux soldats est prélevé sur les réserves de l'État. Tite-Live souligne la nouveauté et l'importan ce de cette mesure, mais en même temps se méprend totalement sur sa portée, en lui attachant une signification économique, voire monétaire. Dans la suite du récit, la plèbe manifeste sa satisfaction. Désor mais, en effet, la participation à la guerre ne compromet plus la res familiaris : le schéma est analogue à celui que nous avons vu dans l'his toire du centurion endetté. Mais les tribuns de la plèbe, à qui l'historien prête une vive jalousie, présentent des objections: «D'où viendra l'ar gent, sinon d'un impôt payé par le peuple? . . . D'ailleurs, même si les autres citoyens y consentent, ceux qui ont déjà accompli leur service n'admettront pas que d'autres fassent le leur dans de meilleures condit ions». Pour un peu, le projet allait échouer, quand les Patres prennent l'initiative de payer l'impôt les premiers et d'entraîner par leur exemple le reste du peuple: «Et comme il n'y avait pas encore d'argent monn ayé, certains apportèrent au trésor des masses de bronze dans des chariots, ce qui ajoutait à l'éclat de leur contribution»41. Les différentes couches chronologiques de ce texte se dégagent 40 Additum deinde, omnium maxime tempestiuo principum in multitudinem munere, ut ante mentionem ullam. plebis tribunorumue decerneret senatus ut Stipendium miles de publico acciperet, cum ante id tempus de suo quisque functus eo munere esset. 41 Patres bene coeptam rem perseuerant tueri; conferre ipsi primi; et, quia nondum argentum signatum erat, aes graue plaustris quidam ad aerarium conuehentes speciosam etiam conlationem faciebant.
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pour ainsi dire d'elles-mêmes. La mention des stipendia emerita au sens d'un service militaire accompli - le pluriel s'expliquant par le nombre des campagnes ou des années de service - relève d'un usage tout à fait récent : on croirait entendre des vétérans des armées de Pompée ou de César. Est récente aussi, quoique dans une moindre mesure, la position de tout le problème en termes de finances ou de budget de l'État : où prendre l'argent, sinon en créant des impôts nouveaux? C'est l'arg ument qu'on oppose habituellement aux gouvernements présentés com medépensiers. Mais la notion moderne d'impôt suppose une monétarisation assez avancée : le tributum dont il est question ici, à la fin du Ve siècle, recouvre sans aucun doute des réalités très différentes. Est récente enfin la notion d'une solde, c'est-à-dire d'un versement que l'État consent aux troupes de façon périodique, à la journée ou à l'année, ou pour la durée d'une campagne. Les commentateurs de TiteLive et les historiens de Rome, parlant à propos de ce texte d'une «ins titution de la solde», paraissent songer à de tels versements périodi ques.Il est d'ailleurs probable qu'ils le sont devenus assez vite : mais il faut attendre Polybe pour avoir une indication sur leur montant42. Pour l'instant, si l'on veut bien lire Tite-Live sans préjugés, on ne trouve rien de tel : comme l'a bien vu Ogilvie43, il n'est question ici que d'un versement unique; et si notre interprétation est juste, il s'agit d'une quantité de bronze substantielle, d'une indemnité exceptionnelle. Mais cette indemnité est-elle financière? Nous répondons : Non. Contrairement à Ogilvie, nous pensons qu'elle fut avant tout honorifi que. C'est en effet ce qui paraît ressortir de la strate la plus ancienne du récit, celle dont l'historien a conscience qu'elle remonte à l'époque pré monétaire. Les Pères font apporter au dépôt de bronze de l'État, Yaerarium, des lingots de leur patrimoine, aes graue, sur des chariots. Leur exemple est suivi par les primores plebis, puis par le reste des citoyens qui détiennent du bronze mais ne combattent pas. Ce geste est accomp li de manière ostentatoire, rituelle en quelque sorte, - speciosa coniano - et provoque admiration et félicitations. Et tout ce bronze sera ensuite redistribué parmi les combattants. On n'a pas manqué de rapprocher cette scène d'un épisode compa-
42 Cf. notre étude : La solde de l'armée romaine, de Polybe à Domitien, dans AHN, 30, 1983(1985), p. 95-121. 43 R. M. Ogilvie, Commentary, p. 622.
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rable qui se situe en 210 et que Tite-Live rapporte également (XXVI, 35-36) 44. Le trésor est vide et il faut trouver de l'argent pour la flotte. Les consuls publient un édit invitant les citoyens, selon leur niveau cens itaire, à fournir des rameurs, de la solde et des vivres. Leur exigence provoqua des récriminations qui faillirent tourner à l'émeute. C'est alors que le consul M. Valerius Laeuinus propose que les sénateurs donnent l'exemple, et en particulier qu'ils livrent les premiers tout leur or et leur argent, à l'exception de quelques objets nommément désignés (bulles, phalères, vaisselle des sacrifices) et d'une petite quantité per sonnelle de métal précieux. Les sénateurs s'exécutèrent et provoquèrent l'émulation de l'ordre équestre, puis de la plèbe45. Dans une perspective hypercritique, on peut considérer que l'épiso de de 406 est une projection dans le passé de celui de 210. C'est un type de raisonnement qu'on a souvent appliqué à l'histoire de la République, et dans certains cas la démarche ne manque pas de vraisemblance. Ains il'épisode de 406 serait au mieux une enjolivure d'ordre littéraire, au pis une falsification historique caractérisée. À vrai dire, aucune de ces explications n'est satisfaisante, et la présence d'un Valerius au tribunat militaire à pouvoir consulaire en 406, tout en nous orientant vers la chronique familiale des Valerii, ne suffit pas à expliquer le phénomèn e. Il paraît plus opportun d'imaginer que certaines formes de com portement ont pu se répéter ou se perpétuer chez les Patres ou dans certaines gentes. Dans cette optique, l'initiative des sénateurs de 210 n'est peut-être qu'une réédition, sous la pression de la nécessité et grâ ceà l'influence des Valerii, d'un scénario très archaïque dont l'épisode de 406 nous fournit un autre exemple. Il faut penser à une sorte de grande fête civique : au milieu des clameurs d'enthousiasme, les déten teurs principaux du bronze procèdent à l'oblation solennelle d'une part iede leurs réserves, qui seront ensuite réparties parmi les guerriers : favorisant la promotion des plus jeunes, le processus concernait les classes d'âge autant que les classes censitaires. Ce mécanisme, qui était au départ destiné à rééquilibrer périodi44 C. Nicolet, Tributum, dans Antiquitas, I, Bonn, 1976, p. 73-74; Id., Le métier de citoyen dans la Rome républicaine, p. 225-226. 45 Senatu inde misso pro se quisque aurum argentum et aes in publicum conferunt tanto certamine iniecto, ut prima aut inter primos nomina sua uellent in publicts tabulis esse, ut nec triumuiri accipiundo nec scribae referundo sufficerent. Hune consensum senatus equester ordo est secutus, equestris ordinis plebs.
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quement les structures sociales au profit des guerriers, a connu par la suite, comme tous les mécanismes paléomonétaires que nous analysons ici, une monétarisation progressive. Lorsque le bronze a commencé à être perçu principalement comme un instrument de transactions comm erciales, le «bronze des combattants» a été considéré comme une sol de, c'est-à-dire comme le salaire d'un temps de service consacré à l'État; en même temps, ce salaire tendait à être dépensé pour les besoins de la vie courante, et non plus détenu comme une garantie de statut social. C'est une évolution qui s'achève au IIIe siècle, lors de la deuxième guerre punique. Dans un ordre d'idées tout à fait différent, nous ne voudrions pas terminer cette étude sans évoquer les collectes faites par la plèbe lors des funérailles de certains patriciens de haut rang. Tite-Live en fournit quelques beaux exemples. En 493, à la mort d'Agrippa Menenius (II, 33), celui-ci «ne laissait pas de quoi payer ses funérailles: la plèbe y pourvut en versant une cotisation d'un sextans par tête».46 En 460, lors de la mort du consul P.Valerius (III, 18), «les plébéiens vinrent, dit-on, à la maison du consul déposer chacun un quadrans, pour contribuer à la pompe des funérailles»47. Il arrive aussi que de tels versements soient directement prélevés sur la caisse de l'État, ce qui, du point de vue de notre analyse, revient au même. En 504, P. Valerius mourut «si dénué de ressources personnelles qu'il n'y avait pas de quoi payer ses funérailles : ce fut l'État qui s'en chargea.» (II, 16)48. L'anachronisme de ces récits est évidente. Les traducteurs et com mentateurs de Tite-Live l'ont encore aggravé, en donnant aux mots quadrans et sextans un sens monétaire qu'il n'ont pas ici. À la fin du VIe et au Ve siècle, il ne peut guère être question d'un sumptus pour les funérailles, si l'on entend par sumptus une dépense au sens moderne du terme. L'économie interne des génies pourvoit nor malement à l'ensemble de leurs besoins. Les seuls achats concevables seraient ceux d'objets de luxe - armes, bijoux, vaisselle - qui seraient destinés à accompagner le défunt dans sa dernière demeure, et qui sont ceux-là mêmes qui permettent aux archéologues contemporains de dé-
46 Sumptus funeri defuit : extulit eum plebs sextantibus conlatis in capita. - Den. Hal. VI, 95. 47 In consults domum plèbes quadrantes ut funere ampliore efferretur iactasse fertur. 48 P. Valerius . . . moritur . . ., copiis familiaribus adeo exiguis ut funeri sumptus dees set; de publico est datus. - Den. Hal. V, 48, 3.
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crire l'évolution de la civilisation latiale. Si l'on admettait que les Menenii ou les Valerii n'avaient pas, à l'époque considérée, de quoi se procu rer ce type d'objets, on serait en peine d'expliquer pourquoi certains de leurs membres étaient aux affaires. Leur prétendue pauvreté n'est qu'un habillage moderniste et moralisateur. Tout au plus peut-on pen ser que la plebs a voulu marquer, par son geste, la part qu'elle prenait au deuil de la gens ; cela ne se conçoit que si le bronze offert ne possède pas encore une valeur monétaire, mais s'il est l'expression et la mesure du statut social et des honneurs qui y sont attachés. La famille du dis paru est censée retrouver, par le surcroît de prestige que lui vaut l'ap port de ce bronze, le rang et l'influence qu'elle possédait avant la mort de son chef. Il n'est pas surprenant, dès lors, qu'on retrouve dans beau coup de ces récits, et notamment dans ceux qui concernent des Valerii, la trace de chroniques familiales49. * * * II est temps de conclure. Les textes que nous avons analysés souli gnent le rôle qu'a joué le bronze prémonétaire comme critère de diffé renciation politique et sociale à Rome du VIe au IVe siècle. La livre de bronze est une unité de compte, mais les faits montrent aussi que la détention effective du métal est source de prestige. Sa circulation, dans les rapports de l'État avec les citoyens comme dans ceux que les citoyens - ou plutôt les chefs de clans - entretenaient entre eux, assure une bonne partie des fonctions civiques et garantit la souplesse du corps social et le rajeunissement de ses élites. Rien de monétaire ni d'économique en tout cela : la société que décrivent nos sources est de nature timocratique. L'influence grecque devait néanmoins faire évoluer cet état de chos es. Indépendamment de la modernisation des sources annalistiques, les documents relatifs au IVe siècle suggèrent des dosages variables entre les structures prémonétaires et la contagion progressive des mé canismes monétaires. Le tournant décisif se situe à la fin du IVe et au début du IIIe siècle, d'abord avec l'adoption, à usage uniquement exter ne, d'une monnaie d'argent de type grec, puis avec l'invention des monn aies coulées de bronze.
49 R. M. Ogilvie, Commentary, ad loc.
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En plein IIIe siècle, la persistance tenace de la mentalité prémonét aire se manifeste par les lingots romains d'aes signatum, par l'obstina tion de l'État romain à garantir aux monnaies de bronze un poids qui était un défi aux lois de l'économie comme aux exigences de la commodi té, et enfin, de façon plus limitée, par l'étrange culte familial du triens des Servilii, relaté par Pline l'Ancien, et dont nous avons essayé ailleurs de proposer une exégèse50. Hubert Zehnacker
50 Plin., N.H. XXXIV, 137 - Notre étude, Le triens des Servilii et le bronze patrimon ial, a paru dans les Studi per Laura Breglia, dans Boll, di numismatica, SuppL, 1987, t. II, p. 9-17.
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LES CITÉS ÉTRUSQUES ET LA GUERRE AU Ve SIÈCLE AVANT NOTRE ÈRE
Si l'on devait se fier à la reconstitution virgilienne de l'Enéide, il faudrait considérer les Étrusques comme un peuple essentiellement guerrier : c'est en tant que spécialistes de la guerre (et notamment com meexcellents cavaliers), qu'ils interviennent pour soutenir Énée. Leur chef, Tarchon, est dépeint avant tout comme le commandant d'une troupe d'élite, prêt à se mettre aux ordres d'un fatalis dux, et non plus comme le héros religieux et fondateur de cités qu'il est dans d'autres aspects de la tradition. C'est bien pour cette raison que G. Dumézil, dans son exégèse trifonctionnelle du poème virgilien a pu voir dans les Étrusques les représentants de la fonction guerrière. Or, si l'on comprend sans peine les motifs qui président à la cons truction idéologique augustéenne dont Virgile se fait l'interprète, il faut néanmoins se demander si quelque support réel dans les traditions concernant les Étrusques et leur histoire a pu justifier l'élaboration à cette époque d'une telle image «belliqueuse» d'un peuple que l'histori ographieantique situe plus souvent entre les deux images contradictoi res de la gens ante omnes alias (. . .) dedita religionibus (Tite-Live V, 1, 6) ou des Tyrrhéniens livrés aux délices de la truphè, semper inertes Tyrrheni, jugement que Virgile (Enéide, XI, v. 732) prête à Tarchon luimême lorsque ses troupes fléchissent devant Camille, la reine des Volsques. De fait, si l'on se reporte à l'évolution de l'histoire de l'Étrurie, il semble bien difficile au premier abord de définir, dans le domaine mili taire, des modèles de comportement qui soient spécifiquement étrus ques. En ce qui concerne l'armement proprement dit et les techniques de combat, il est bien établi (et notamment à la suite des travaux de
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A. Snodgrass1), qu'à partir du milieu du VIIe siècle, les Étrusques adoptent la panoplie hoplitique, et sans doute également la tactique de la phalange qui lui est liée. Par ailleurs, nous sommes soumis, dans nos tentatives d'individualisation du fait militaire en Étrurie, à l'emprise contraignante (et peut-être déformante) de la documentation romaine, en particulier en ce qui concerne la période de la royauté étrusque. Les sources littéraires romaines semblent, en effet, fournir des cadres d'in terprétation que l'on serait tenté d'étendre, sans doute abusivement, aux villes d'Étrurie, sans tenir compte de ce que pouvaient être déjà, à cette époque, les spécificités de la cité romaine : dans quelle mesure pouvons-nous, par exemple, tirer de l'analyse (par ailleurs si controvers ée) de la réforme servienne, des indications utilisables pour l'examen des pratiques militaire étrusques à la fin du VIe siècle avant notre ère? Si l'on considère la période archaïque, un des aspects qui paraît clair est que l'hoplitisme reste lié, en Étrurie, à une organisation sociale de type gentilice, comme l'illustrent les scènes figurées, si fréquentes, où l'on voit le chef guerrier sur son char et lourdement armé, condui sant au combat une troupe d'hoplites certainement composée de memb res de la gens ou de clients2. Au début du Ve siècle, encore, l'hopliti sme repose toujours, en partie, sur la même base sociale gentilice, com meparaît le montrer, pour l'Étrurie, le texte de Denys d'Halicarnasse (IX, 5, 4), où l'on voit venir au secours de Véies, vers 480, des troupes étrusques composées clairement des chefs de l'aristocratie et de leurs dépendants, que Denys assimile de manière significative aux pénestes thessaliens3. L'épisode des Fabii à la Crémère, en 477 (Diodore de Sici le, XI, 53, 6; Tite-Live, II, 48,8-50) montre de manière évidente qu'une 1 The Hoplite Reform and History, dans JHS, 85, 1965, p. 110-122 (en part. p. 116 sq.) et L'introduzione degli optiti in Grecia e in Italia, dans RSI, 77, 1965, p. 434-444 (en parti culier p. 441). Ce fondement gentilice de l'hoplitisme étrusque avait été mis en lumière auparavant par A. Momigliano, 1RS, 53, 1963, p. 119-121; voir aussi M. Torelli, Tre studi di storia etrusca, dans DdA, VIII-1, 1974-75, p. 13-17. 2 P. F. Stary, Zur eisenzeitlichen Bewaffnung und Kampfesweise in Mittelitalien (Marburger St. z. Vor- und Frühgesch., 3), Mayence, 1981, pl. 17 (pyxide d'ivoire de La Pania à Chiusi); pl. 19, 1 (œuf d'autruche de la Tombe d'Isis à Vulci), etc. L'appartenance de tous les guerriers de la troupe à un même clan doit être volontairement soulignée par la similitude de tous les épisèmes des boucliers (exemples illustrés par P. F. Stary, op. cit., pl. 10, 3; 12; 22). Le commentaire historique de ces documents a été fait récemment par M. Torelli, Storia degli Etruschi, Bari, 1981, p. 128. 3 Συνεληλύθεσαν γαρ έξ άπάσης Τυρρηνίας οι δυνατώτατοι τους εαυτών πενέστας επαγόμενοι, και έγένετο του 'Ρωμαϊκού στρατού μείζον το Τυρρηνικόν ούκ όλίγφ.
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telle armée de clan pouvait subsister à Rome également à la même épo que, et le rapport de dépendance personnelle entre le chef militaire et ses troupes est encore souligné (avec, toutefois, une transposition sur un plan qui n'est plus celui de la gens et inclut également les aspects censitaires du recrutement militaire), à propos du commandement de Coriolan, par Denys d'Halicarnasse (VII, 21, 3) : «II avait autour de lui une grande hétairie de jeunes nobles, qui avaient le cens le plus élevé, et une foule de clients qu'il s'était gagnés par des services dans les guerres (ήν δε περί αυτόν εταιρία μεγάλη νέων ευγενών οίς ην τα μέγιστα τιμή ματα βίων, και πελάται συχνοί συνεστηκότες έπί ταϊς έκ των πολέμων ώφελείαις). En Étrurie, certains documents archéologiques fournissent peutêtre la même indication : on a trouvé, au pied des remparts de Vetulonia, un dépôt de casques de bronze à calotte ogivale (datables des envi rons de 500), dont un certain nombre portent, gravé sur leur rebord, le même gentilice4. Par ailleurs, J.-R. Jannot, dans une analyse récente des reliefs du sarcophage clusien trouvé dans la nécropole de Sperandio à Pérouse, a même proposé d'interpréter le cortège comme une sor tede «triomphe privé», consécutif à une opération de razzia, menée encore au niveau du clan, de la gens 5. C'est là une hypothèse séduisant e bien qu'on ne puisse à proprement parler employer l'expression de «triomphe privé» qui paraît constituer une contradiction dans les ter mes. Mais ces manifestations ne doivent guère dépasser les premières années du Ve siècle : la défaite des 306 Fabii enregistre clairement l'échec de cette organisation gentilice de la guerre, dont elle constitue la dernière attestation historique6. En Étrurie, cet idéal de l'hoplitisme gentilice trouve son exaltation la plus spectaculaire dans la présence, au cours de la deuxième moitié du VIe siècle, des grands chars de bron ze dans quelques tombes aristocratiques, tel celui récemment découvert
4 L. Pernier, Ricordi di storia etrusco e di arte greca della città di Vetulonia, dans Ausonia, IX, 1919, p. 13-20 («II ripostiglio degli elmi»). 5 J.-R. Jannot, Les reliefs archaïques de Chiusi, Rome, 1984, p. 43-44 et 384. 6 À ce sujet, voir l'article de J.-C. Richard, Les Fabii à la Crémère. Grandeur et déca dence de l'organisation gentilice, dans ce même volume ainsi que L'affaire du Crémère : recherches sur l'évolution et le sens de la tradition, dans Latomus, XLVIII-2, 1989, p. 312325.
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à Ischia di Castro7. Mais cette volonté de grandiose n'indique-t-elle pas précisément que les chefs de gens cherchent à réaffirmer de manière plus éclatante un pouvoir dont ils sentent la précarité, face notamment à des tentatives de réorganisation politique et militaire fondée sur de nouvelles bases sociales, comme celle que l'on attribue pour Rome, au roi Servius Tullius? Il n'est pas indifférent de constater que cette réaf firmation de prestige se situe dans le cadre individuel, ou familial de la sépulture et contaste avec l'évolution perceptible au cours du VIe siècle dans l'iconographie du chef hoplitique en Étrurie. En effet, à cette époque, l'image du conducteur de la phalange, lourdement armé et s'avançant majestueusement sur son char se dé ploie sur les terres cuites architectoniques des monuments publics8, au lieu de rester liée exclusivement à l'imagerie funéraire, comme c'était le cas à l'époque orientalisante (par exemple sur les œufs d'au truche). Elle sort du cadre strictement privé et gentilice de la tombe, et apparaît donc davantage comme une image héroïque et idéale, transpo sant désormais dans le cadre de la cité une réalité militaire encore par tiellement en vigueur, mais déjà sans doute en cours de transformat ion. Ce schéma iconographique disparaît d'ailleurs au tournant du VIe et du Ve siècle. Déjà dans la deuxième moitié du VIe siècle, les représent ations de guerriers se diversifient. À partir de cette époque, on rencont re, de plus en plus nombreuses, des images individuelles de guerriers : stèles en Étrurie septentrionale et à Volsinies9, petits bronzes votifs, notamment en Étrurie intérieure, comme les statuettes de Brolio, ou d'autres de fabrication sans doute volsinienne 10. Dans le domaine des monuments publics, on trouve des scènes belliqueuses plus variées, dont il est parfois difficile de reconnaître si elles illustrent des combats réels ou si, comme c'est clairement le cas à Pyrgi, il s'agit de représent ationsmythiques (quel que soit, par ailleurs, le contenu politique de telles représentations - voir plus loin, à propos de l'utilisation à Pyrgi du mythe des Sept contre Thèbes). L'utilisation des mêmes schémas 7 La tombe dans son ensemble est encore inédite ; pour le char : Civiltà degli Etrus chi(Catalogue de l'exposition de Florence), Milan, 1985, n°9-ll, p. 250 et F. Boitani, La biga etrusco di Castro, dans Tuscia, Viterbe, 39, mai 1986. 8 P. F. Stary, op. cit., pi. 34-38 (Poggio Buco, Tuscania, Cerveteri, Véies). 9 Id., ibid., pi. 28-31. 10 A. RoMUALDi, Catalogo del deposito di Brolio in Val di Chiana, Rome, 1981, et M. Martelli, // «Marte» di Ravenna, dans Xenia, VI, 1983, p. 25-36.
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iconographiques se prolonge au Ve siècle, avec notamment plusieurs séries de petits bronzes représentant des hoplites11. D'autre part, (en dehors des données plus anciennes sur la thalassocratie tyrrhénienne), c'est pour le Ve siècle que les sources histori ques nous fournissent le plus d'attestations de l'intervention des Étrus ques dans le domaine militaire, en relation avec une période troublée qui voit, en Italie centrale, les premiers affrontements des cités étrus ques contre Rome (à l'époque de Porsenna, d'abord, puis avec les démêlés entre Rome et Véies) et, dans le cadre plus général de la Médi terranée occidentale, le conflit pour l'hégémonie avec certaines cités grecques (Cumes et Syracuse notamment). Au fur et à mesure que l'on avance dans le Ve siècle, cette lutte pour l'hégémonie devient d'ailleurs davantage un combat pour la défense même du territoire des cités. Voici quels sont, brièvement rappelés, les principaux événements militaires auxquels participent les Étrusques au cours du Ve siècle, et dont les sources littéraires nous apportent le témoignage : a) Affrontements avec les Grecs : Mise à part l'expédition terrestre de 524 contre Cumes, menée par les Étrusques depuis la côte adriatique (Denys d'Halicarnasse, VII, 3, 1), ce sont pour la plupart des affrontements maritimes, à proximité des côtes de la Grande-Grèce et de la Sicile : - des conflits répétés ont dû opposer les Étrusques aux Liparéens qui ont commémoré plusieurs de leurs victoires par la consécration d'ex-voto à Delphes (Diodore, V, 9; Strabon, VI, 2, 10; Pausanias, X, 11, 3 et 16, 17)12. - Vers 493, Anaxilas, tyran de Rhégion, barre par un mur l'isthme du Skyllaion pour arrêter les incursions tyrrhéniennes dans ce secteur de la Calabre (Strabon, VI, 1, 5). - Au début du Ve siècle, les habitants de Zancle projettent, face aux menaces tyrrhéniennes, de renforcer par la fondation d'une colonie la côte septentrionale de la Sicile (Hérodote, VI, 22). 11 S. Doeringer et G. M. A. Hanfmann, An Etruscan Bronze Warrior in the Fogg Mu seum, dans SE, 35, 1967, p. 645-653; E. Hill Richardson, The Icon of the Heroic Warrior : a Study in Borrowing, dans Studies presented to George M.A Hanf mann, Mayence, 1971, p. 161-168; E. Hostetter, Warriors from Spina, dans Bronzes hellénistiques et romains. Tradition et renouveau, dans Ve Coll. intern, sur les bronzes antiques [Lausanne, 8-13 mai 1978], Lausanne, 1979, p. 148-150, pi. 90-92. 12 Voir en dernier lieu G. Colonna, Apollon, les Étrusques et Lipara, dans MEFRA, 96, 1984-2, p. 557-578.
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- En 474, Hiéron, tyran de Syracuse, bat les Étrusques au large de Cumes (Diodore, XI, 51; Pindare, Pythiques, I, 140)13. - En 414, à l'appel des Athéniens, l'Étrurie envoie trois pentécontores en Sicile (Thucydide, VI, 103, 2) et l'on voit, un peu plus tard, les Étrusques combattre à pied sur la digue du port de Syracuse (Id., VII, 53, 2 et 54) 14. b) Affrontements contre Rome : - Le plus ancien, concernant la période qui nous intéresse, est l'e xpédition bien connue de Porsenna qui, en 508, met le siège devant Rome (Tite-Live, II, 9) (et prend sans doute la ville, malgré la tradition annalistique). Dans le même temps, son fils Arruns attaque Aricie, mais il est défait par les Latins auxquels Aristodème de Cumes a prêté main forte (Tite-Live, II, 14, 5 sqq.; Denys d'Halicarnasse, VII, 5-6). - Après la Chiusi de Porsenna, c'est surtout Véies qui, tout au long du Ve siècle, et jusqu'au siège final, à partir de 406, est impliquée dans la lutte contre la cité romaine, dont elle est la plus proche voisine étrus que15 : l'annalistique rapporte, entre 485 et 474, toute une série d'épiso des guerriers, dont le plus fameux est marqué par le sacrifice, déjà évo qué, des Fabii à la Crémère (Diodore, XI, 53, 6; Tite-Live II, 48,8-50; Denys d'Halicarnasse, IX, 22, 1-6; Ovide, Fastes, II, 193-242; etc...). Face à la menace romaine, on voit parfois (rarement) les autres cités étrusques intervenir pour seconder Véies (Denys d'Halicarnasse, IX, 5, 13 Les données historiographiques sont confirmées, on le sait, par la découverte de plusieurs casques étrusques consacrés par Hiéron au sanctuaire d'Olympie : présentés en dernier lieu dans le catalogue de l'exposition de Florence, Civiltà degli Etruschi, cit., n° 921, p. 256-257. 14 La découverte du célèbre elogium de Tarquinia a permis de donner un nom au commandant de cette expédition : Velthur Spurinna, magistrat de Tarquinia, qui agissait, sans doute, non pas en tant que chef mercenaire, comme on l'a cru parfois, mais in magistratu, à la suite d'une décision politique de sa cité (ou de la confédération) : sur ce sujet, M. Torelli, Elogia Tarquiniensia, Florence, 1975, p. 59-66. On hésite sur la nature exacte de l'aide militaire apportée aux Athéniens : pour M. Torelli, qui s'appuie sur le récit de Thucydide, VII, 53-54, il s'agissait d'une intervention de troupes terrestres et non d'une simple opération navale (contra, J. Heurgon, dans MEFR, 63, 1951, p. 133). Pour les autres interprétations concernant V elogium, cfr. G. Colonna, art. cit., note 12. 15 En ce qui concerne les causes et le déroulement de ces hostilités, une synthèse est fournie par J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu'aux Guerres puniques, 2e éd., Paris, 1980, p, 295-297.
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4). Un premier pas réellement décisif est franchi par Rome, en 426 seu lement, avec la prise de Fidènes (Tite-Live, IV, 21, 2 et 31, 4). Pour tenter de compléter le tableau ainsi offert, l'enquête dont nous présentons ici les premiers résultats, s'est appuyée au départ sur un certain nombre de réalités archéologiques, mais elle ne se comprend qu'en relation avec la question fondamentale de la cité en Étrurie au Ve siècle. C'est donc par rapport à ce problème de la cité que se définis sent les questions principales et l'interrogation de fond pourrait être formulée ainsi : est-il possible de définir l'image d'un soldat-citoyen dans l'Étrurie du Ve siècle et quelle est la place des valeurs militaires dans la cité? Il ne s'agit pas de présenter ici un catalogue exhaustif des réalités militaires, mais il faut souligner d'emblée que la situation n'est pas unitaire à travers les différentes cités, comme le montre, en parti culier l'analyse, site par site, de la documentation funéraire, qui nous fournit évidemment une base quantitative essentielle pour l'évaluation de l'importance de l'élément militaire dans la cité. Si l'on retient com mecritère immédiat la présence ou l'absence des armes dans la compos itiondes mobiliers funéraires, on constate que plusieurs cas de figure peuvent se présenter. Sur certains sites, comme Cerveteri ou Tarquinia, on remarque l'absence quasi totale des armes dans les tombes (au moins pour le Ve siècle) et, parallèlement, le manque complet de représentations strict ementmilitaires dans l'iconographie funéraire, structurée, sur les fres ques de Tarquinia par exemple, autour des thèmes du banquet et des jeux. Quelques scènes de jeux ou danses armés sont, dans ces tombes, le seul élément à connotation guerrière et on note en particulier, à plu sieurs reprises, l'apparition à Tarquinia (mais aussi à Chiusi) de la représentation de la pyrrhique, où le danseur est caractérisé par sa nudité et son armement (casque, lance et bouclier rond). Il est le plus souvent associé, dans des représentations de jeux funéraires, à des athlètes ou danseurs16. Dans le même contexte, on peut trouver égale-
16 En dehors de la célèbre Tombe des Biges, le «guerrier» de la tombe du même nom est certainement, étant donné sa tenue et la présence à ses côtés d'un flûtiste, un pyrrhiciste, et l'on peut citer plusieurs autres tombes : - Tombe du lit funèbre (sur la paroi de gauche, au milieu d'une scène de jeux); Tombe de la chasse au cerf (scène de chasse en fronton; sur les parois, banquet et danses au milieu d'arbres, parmi les dan seurs un pyrrhiciste) ; Tombe des Pyrrhicistes (sur la paroi de droite, un flûtiste, au centre, flanqué de part et d'autre de trois danseurs armés) ; Tombe n° 551 7 (sur la paroi de droit e,vestiges d'une silhouette de danseur armé); Tombe n° 3243 (scènes de danse et musi-
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ment des scènes hippiques avec cavaliers en armes, exercices dont le contenu athlétique et la connotation militaire n'ont d'ailleurs jamais été réellement élucidés17. Le cas de la pyrrhique est apparemment plus clair : le modèle ic onographique est celui de la céramique attique, où l'on voit souvent, au Ve siècle, la représentation de cet exercice de palestre et de concours, qui figurait au programme des Panathénées. Sur les vases, le flûtiste, toujours présent, accompagne un seul pyrrhiciste, ou deux, qui l'enca drent; le cadre de la palestre est parfois suggéré par la présence du tabouret sur lequel sont posés les vêtements de l'athlète18. Au-delà de ces aspects athlétiques, la pyrrhique athénienne est liée directement à la formation militaire du citoyen. Chargée d'une valeur pédagogique19, et même plus exactement initiatique20, c'est à ce titre qu'elle est inté grée aux jeux panathénaïques, avec des modalités qui confirment son caractère à la fois individuel et collectif, dans le cadre de la cité, et les rapports étroits qu'elle entretient avec la notion de classes d'âge, si importante pour la structuration du corps social et civique. Par le modèle qu'elle propose symboliquement (et que souligne Platon), elle
ciens ; parmi d'autres danseurs, un pyrrhiciste) ; tombe anonyme, aujourd'hui perdue : décrite, en dernier lieu, par S. Steingräber, Etruskische Wandmalerei, Stuttgart-Zurich, 1985, n° 173, p. 381 (pour l'ensemble des peintures de la tombe, prédominaient les scènes de danse et de jeux ; sur la paroi de droite, on voyait, outre un pyrrhiciste avec sa tenue traditionnelle, un homme dont le bras levé brandissait un bouclier (?) et un autre, mar chant dans la même position, mais apparemment sans armes). 17 Tombe des Biges : cavalier casqué, avec deux chevaux; Tombe du Polichinelle: cavalier armé d'un bouclier rond de petite dimension et d'un casque, sans doute corin thien, à cimier, il porte une courte tunique ; Tombe du guerrier : sur la paroi de droite, guerrier à cheval, coiffé d'un casque à haut cimier; un deuxième cheval est conduit par un autre guerrier, à pied. Voir en dernier lieu J.-L. Thuillier, dans CRAI, 1989, p. 33-51. 18 Représentations recensées et analysées par J.-C. Poursat, Les représentations de la danse armée dans la céramique attique, dans BCH, 92, 1968, p. 566-581. 19 Cette valeur formatrice est soulignée par Platon, Lois, 815 a-b : την πολεμικήν δη τούτων (. . .), πυρρίχην άν τις ορθώς προσαγορέυοι, τάς τε ευλάβειας πασών πληγών και βολών έκνεύσεσι και ύπείξει πάση και έκπηδήσεσιν έν υψει και ξύν ταπεινώσει μιμουμένην, και τάς ταύταις εναντίας, τάς έπί τα δραστικά φερομένας αύ σχήματα εν τε ταΐς των τόξων βολαΐς και ακοντίων και πασών πληγών μιμήματα επιχειρούσαν μιμεΐσθαι. τό τε ορθόν έν τούτοις και το εύτονον, τών αγαθών σωμάτων και ψυχών οπόταν γίγνηται μίμημα, εύθυφερές ώς το πολύ τών τοΰ σώματος μελών γιγνόμενον, ορθόν μεν το τοιούτον, το δέ τούτοις τουναντίον ούκ ορθόν άποδεχόμενον. 20 Pour l'ensemble de ces questions : P. Scarpi, La pyrrhichè ο le armi della persuasio ne, dans DdA, n.s. 1, 1979, p. 78-97. Pour Rome, voir Denys d'Halicarnasse, VII, 72, 5-8.
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joue un rôle essentiel dans le processus d'intégration des jeunes gens à la cité, plus encore que dans l'entraînement guerrier proprement dit (la fonction d'entraînement effectif étant sans doute dévolue mieux encore à d'autres exercices de type voisin, comme la course armée). Pour les Athéniens, la pyrrhique ne se comprend donc que par référence à un certain modèle militaire et politique. L'adoption en Étrurie du motif iconographique de la pyrrhique, au début du Ve siècle, et au-delà l'introduction, qui semble effective, de la pyrrhique dans les jeux funéraires, peuvent-elles s'inscrire dans un contexte analogue, ou du moins correspondre au développement à cette époque, dans les villes étrusques, des valeurs de la cité? À première vue, la situation est complètement différente : en admettant que la pyrrhique ait réellement été introduite, à ce moment-là, comme exerci ce nouveau, dans les rituels funéraires étrusques (car ces images pourr aient, à la rigueur, n'être qu'une représentation modernisée, influen cée par l'iconographie attique, du vieux motif funéraire de la danse armée ou de la parade militaire en l'honneur du défunt), il semble bien que le statut des pyrrhicistes soit le même que celui des autres dan seurs ou athlètes, et qu'il s'agisse, comme eux, de professionnels au ser vice des familles aristocratiques. Moins encore que pour les partici pantsà certains jeux équestres, dans lesquels on a cru voir parfois de jeunes aristocrates21 (et une telle identification pourrait, à la rigueur, être étendue aux cavaliers armés que nous avons énumérés plus haut), il n'est guère possible de voir dans les pyrrhicistes qui figurent parmi les jeux funéraires de Tarquinia (ou Chiusi), des personnages de rang élevé : ils semblent, en tout cas, toujours traités sur le même plan que les athlètes ou saltimbanques22, à l'inverse de certains danseurs dont le statut aristocratique peut être suggéré par les attitudes ou le costume (par exemple, les danseuses de la Tombe du Triclinium). La signification guerrière et symbolique de la pyrrhique ne saurait donc être analysée, comme à Athènes, par référence au danseur, mais 21 Notamment dans la Tombe des Inscriptions : pour la discussion concernant cette tombe et le problème des courses montées en général, J.-P. Thuillier, Les jeux athlétiques dans la civilisation étrusque, Rome, 1985, p. 547-552 Id., dans REL, 65, 1987, p. 53-73. 22 Par exemple, sur la base de Chiusi, où l'on voit le pyrrhiciste attendre, en compag nie d'un lanceur de javelot, d'un flûtiste et d'une danseuse-équilibriste, devant l'estrade des magistrats où seront distribués les prix aux vainqueurs (J.-R. Jannot, op. cit. {supra, n. 5), n° C, I, 8, fig. 171 (Palerme, 8385). Voir aussi les remarques essentielles de J. G. Szilâgyi dans Prospettiva, 1981, p. 10 sq.
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par référence au défunt lui-même : nous sommes en face d'une version ritualisée de la pyrrhique; elle devient alors une sorte de «mime» qui exprime de manière médiatisée les valeurs militaires de l'aristocratie de Tarquinia. Par là même, elle est l'héritière directe des différentes for mes de danses armées archaïques, dont G. Camporeale, dans un article récent23, a souligné le caractère aristocratique, et le même caractère explique encore, plus tardivement, la présence des danseurs armés sur le manteau porté par Vel Saties dans la Tombe François. À Tarquinia même, et sans doute pour la période qui nous intéress e, la Tombe Querciola I nous montre, en un schéma exceptionnel, le pyrrhiciste associé au motif des jeux, suivi d'une scène de chasse au sanglier, exercice aristocratique par excellence, auprès duquel il figure avec sa nudité et ses armes caractéristiques, face à un vieil homme éga lement nu, assis sur un rocher. Cette tombe constitue d'ailleurs, dans l'iconographie tarquinienne des guerriers (par ailleurs fort pauvre, nous l'avons dit), un monument unique et dont la pleine signification n'a certainement pas encore été dégagée : outre la scène de chasse déjà citée, on y trouve, en effet, sur le mur d'entrée, un guerrier casqué, sur un bige, encadré de danseurs et musiciens, et sur les deux frontons, deux couples de guerriers, avec casque et cuirasse, dont chacun tient un cheval par la bride24. Il est vrai, pourtant, que les incertitudes sont grandes, quant à la datation de cette tombe qui varie, selon les auteurs, entre le deuxième quart du Ve siècle25 et le milieu du IVe (supra n. 24). Considérant pour notre part que la chronologie haute est préférable et que la tombe devrait se situer dans les années centrales du Ve siècle, nous verrions volontiers dans ce document et dans quelques autres sus ceptibles d'être placés dans un arc temporel semblable ou voisin, com mela Tombe du Guerrier, déjà citée, la Tombe de la Laie Noire ou la Tombe de la Chasse au Cerf, qui accordent une place importante au motif de la chasse, le signe d'une «remilitarisation» plus précoce de l'aristocratie tarquinienne qui ne se définirait plus alors à travers les seules images de truphè dominantes à la fin du VIe siècle, et il n'est pas
23 La danza armata in Etruria, dans MEFRA, 99, 1987, 1, p. 11-42. 24 F. Messerschmidt, Tomba Querciola I bei Tarquinia, dans Scritti in onore di Β. Νοgara, Cité du Vatican, 1937, p. 289-304 (qui date la tombe du milieu du IVe siècle) et, en dernier lieu, S. Steingräber, op. cit., n° 106, p. 346-347 (datation proposée : fin du Ve ou première moitié du IVe siècle). 25 S. Stopponi, La tomba della «Scrofa Nera», Rome, 1983, p. 96-98.
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interdit de penser que l'apparition de la pyrrhique dans les tombes dès le début du Ve siècle est une manifestation du même phénomène. Reste à savoir si le choix du motif et des gestes de la pyrrhique, avec tous ses caractères attiques, est purement fortuit (visant simple mentà la traduction d'images guerrières), ou s'il illustre, consciem ment ou non, un certain esprit militaire étroitement lié à un idéal civi que. Ceci impliquerait que les valeurs de la cité étaient dès cette époque fermement ancrées dans la mentalité aristocratique d'une ville comme Tarquinia, au point que l'on puisse, dans une fusion totale des valeurs aristocratiques et des valeurs civiques, exprimer ce nouvel idéal guerr ier à travers des images métaphoriques : non seulement la danse armée, sous l'aspect particulier de la pyrrhique, mais encore, comme nous venons de l'indiquer, la chasse, motif dont le développement est remarquable dans la peinture tarquinienne du Ve siècle26, et qui peut fort bien apparaître dans l'imagerie funéraire de l'aristocratie, à la fois comme un complément et comme un substitut de la guerre27. Ces allu sions détournées à la pratique militaire, qui s'opposent à une affirmat ion directe des valeurs guerrières par l'iconographie ou le mobilier funéraire, telle qu'on la rencontre partout ailleurs en Étrurie à la même époque (infra), peuvent apparaître justement comme le reflet d'une mentalité propre à la polis, qui, au-delà de l'idéal du citoyensoldat, rejette tout étalage trop éclatant de la force militaire, considéré au contraire comme caractéristique du comportement barbare28. Concrètement, cela signifierait que l'aristocratie conserve (avec le pouvoir politique) le pouvoir militaire, dans le cadre de la cité, mais peut-être au prix d'une réorganisation de l'armée analogue à celle que
157.
26 Stopponi, ibid., p. 68-70 et G. Camporeale, La caccia in Etruria, Rome, 1984, p. 145-
27 Les relations entre la chasse et la guerre sont souvent soulignées également par l'iconographie attique : la chasse, comme la pyrrhique, comporte une fonction initiatique, et concrètement, elle fait partie, elle aussi, de la formation du futur guerrier : A. Schnapp, Pratiche e immagini di caccia nella Grecia antica, dans DdA, 1979, p. 36-59; La cité des images. Religion et société en Grèce ancienne, Paris-Lausanne, 1984, p. 39-41 (F. Lissarague) et p. 57-66 (J.-L. Durand et A. Schnapp). 28 C'est du moins ainsi que Thucydide définit le fait de circuler en armes dans sa cité, et dans la vie de tous les jours (I, 6, 1) : Πάσα γαρ ή Ελλάς έσιδηροφόρει δια τας ' άφάρκτους τε οικήσεις και ούκ ασφαλείς παρ αλλήλους εφόδους, και ξυνήθη τήίαιταν μεθ' οπλών έποιήσαντο ώσπερ οι βάρβαροι.
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la tradition attribue, pour Rome, à Servius Tullius29. Une telle réforme s'appuyait peut-être, en Étrurie comme à Rome, sur une base censitair e, mais elle pouvait reposer également sur d'autres principes, et faire intervenir notamment la notion de classes d'âge, à laquelle, nous l'avons vu, la pyrrhique ou la chasse ne sont pas étrangères non plus : il est logique, en effet, d'admettre une adéquation réelle de l'organisa tion militaire de la cité et de la traduction métaphorique des valeurs qui l'accompagnent. Mais on ne peut aller plus loin en ce sens, faute de disposer d'éléments techniques précis sur les pratiques guerrières et la répartition des différents corps de troupes. En dehors de l'iconographie funéraire, cette intégration des va leurs militaires à la cité, mais dans un cadre, semble-t-il, oligarchique, est soulignée par la présence en contexte urbain (dès le dernier tiers du VIe siècle) de quelques représentations de combats : à Cerveteri, plu sieurs plaques peintes, fragmentaires, étaient certainement liées à des monuments publics30; mais le document le plus intéressant est le grand relief du Temple A de Pyrgi, qui, de quelque façon qu'on l'inter prète, illustre bien, nous semble-t-il, ce que nous avons voulu démont rer. Il s'agit, de toute façon, certainement d'un document directement lié à l'histoire politique et militaire de la cité, soit qu'on l'interprète, à la suite de G. Colonna31, comme le reflet mythique des tendances antisyracusaines qui gouvernent, dès cette époque, la politique extérieure de la ville, soit que le recours au mythe des Sept contre Thèbes traduis e, comme le voudrait F. -H. Massa-Pairault32, les rivalités des génies pour le contrôle de la cité. Un exemple sensiblement différent est offert par le site d'Orvieto dont les analyses antérieures, en particulier de M. Torelli et G. Colon-
29 Parmi l'abondante bibliographie consacrée à l'exégèse de la constitution servienne, récemment : D. Kienast, Die politische Emanzipation der Plebs und die Entwicklung des Heerwesens im frühen Rom, dans BJ, 175, 1975, p. 83-112; J.-C. Richard, Notes sur la participation militaire dans la Rome archaïque, dans DHA, 12, 1986, p. 185-204. 30 F. Roncalli, Le lastre dipinte da Cerveteri, Florence, 1965, pi. XVI-XVII et XIX; toutes ces plaques proviennent de la cité alors que sur les exemplaires découverts dans les nécropoles les allusions directes au fait militaire sont, comme à Tarquinia, totalement absentes. 31 Voir en dernier lieu, dans Santuari d'Etruria, Milan, 1985, p. 137-138, avec bibli ographie antérieure ad loc. 32 Recherches sur l'art et l'artisanat étrusco-italiques à l'époque hellénistique, Rome, 1985, p. 28-31, et dans ce volume, L'art et la définition de la cité.
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na33, ont bien montré que s'y développait, à partir du courant du VIe siècle, une classe certes dirigeante et aisée, mais plus égalitaire et plus ouverte que dans d'autres cités étrusques. Sans aller peut-être jusqu'à l'assimilation, parfois proposée, de cette classe avec le demos grec, on est obligé de constater l'organisation spatiale très régulière des nécro poles, le nombre relativement important et la nature des gentilices attestés par les épitaphes34, la composition des mobiliers funéraires, qui sont d'un niveau de richesse moyen et constant. Ces mobiliers35 comportent presque toujours, dans le cas des tombes masculines, la présence d'une ou plusieurs lances, mais jamais de panoplie complète : à ces pièces d'armement sont associés d'ailleurs, le plus souvent, des chenets et broches de fer qui, conformément au vieux schéma orientalisant, caractérisent ici encore les tombes masculines36. On peut remarquer par ailleurs que, dès la deuxième moitié du VIe siècle, Orvieto a développé, dans le domaine de la sculpture funéraire et des petits bronzes, une iconographie individuelle du guerrier en tant qu'hoplite, sur des monuments qui montrent des aspects de la panoplie inconnus jusqu'à nouvel ordre dans les sépultures (deux cippes en for me de tête casquée du Crocefisso del Tufo, stèle inscrite et cippe de la nécropole de Cannicella; statuette du «Mars de Ravenne», étudiée par M. Martelli - supra, note 10). On peut donc se demander si cet ensemb le d'indices archéologiques et iconographiques ne confirmerait pas l'existence d'une organisation de la cité qui, laissant plus d'autonomie, reconnaissant une individualité politique et sociale à un plus grand
33 Annali Fondazione per il Museo «Claudio Faina», I, 1980, p. 127-130 et 136-137; G. Colonna, Società e cultura a Volsinii, dans Annali Fond. Museo Faina, II, 1985, p. 101131. 34 Ces réflexions « sociologiques » à partir de l'analyse des gentilices présents dans les nécropoles ont été amorcées par M. Pallottino, Qualche annotazione in margine al CIE, dans SE, 22, 1952-53, p. 179 sq. (en part. p. 192-195) et reprises récemment par C. De Simone, Le iscrizioni etrusche di Orvieto, dans Ann. Fond. Museo Faina, I, 1980, p. 27-41, qui brosse le tableau d'une classe dirigeante nombreuse et ouverte, capable de renouvel lementpar l'intégration dans la cité étrusque de nouveaux venus d'origine italique. 35 Pour l'inventaire des mobiliers : B. Klakowicz, La necropoli anulare di Orvieto. I. Crocefisso del Tufo-Le Conce, Rome, 1972, et II. Cannicella e terreni limitrofi, Rome, 1974; M. Bizzarri, dans SE, 34, 1966, p. 3-109 et 35, 1967, p. 62-115; Mostra degli scavi archeolog ici alla Cannicella di Orvieto, (11-02/12-03-1978), tombe 2, p. 33-49; et remarques de syn thèse dans P. F. Stary, op. cit., 1. 1, p. 113. 36 Β. Klakowicz, op. cit., 1. 1, p. 103, note 89, rectifie à ce propos l'erreur de M. Biz zarri qui attribue de manière systématique les chenets à des dépositions féminines.
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nombre de citoyens, permettait, dès avant la fin du VIe siècle, le déve loppement d'une image du «citoyen-soldat», qu'on ne voit pas apparaît re de la même manière à Tarquinia ou à Cerveteri. La représentation de la danse armée, qui orne une amphore peinte d'Orvieto37 pourrait garder, dans ce contexte, une signification plus proche de celle qui est la sienne sur les modèles de la céramique attique : notons d'ailleurs qu'ici le danseur armé apparaît seul, et non dans le contexte de jeux (avec d'autres danseurs ou athlètes) ou en relation avec des images aristocratiques, comme la chasse (voir supra). Le contexte social paraît avoir, d'une manière générale, favorisé la réception, à Volsinies, de l'art classique grec, dont l'imagerie est utilisée ici dans un esprit plus proche des modèles helléniques que partout ailleurs en Étrurie38. Dans le tableau ainsi offert, la lance présente dans les sépultures devrait constituer, nous le voyons, un signe de statut (le statut du «ci toyen-soldat»), bien plus qu'un simple instrument militaire. Si nous examinons maintenant les mobiliers funéraires du site colonial de Spina, il semble qu'un pas supplémentaire soit franchi dans la réceptivité aux modèles attiques, en relation avec une expression peut-être plus égalitaire encore du corps civique et du partage des obli gations militaires. Les armes réelles sont, à nouveau, presque complète ment absentes des sépultures : elles sont, pour ainsi dire, remplacées sur le plan idéologique par l'apparition, parmi les objets du mobilier funéraire, de candélabres de bronze dont les statuettes de couronne ment illustrent des thèmes iconographiques empruntés directement à l'imagerie hoplitique attique. Le motif du guerrier endossant sa cuiras se39 est inconnu à cette époque en milieu étrusque, en dehors de Spina. On le trouve, en revanche, à plusieurs reprises dans la céramique att ique, à la fin du VIe et au début du Ve siècle, souvent, il est vrai, dans un contexte mythologique et héroïque, mais traité d'une façon qui renvoie avant tout à l'iconographie de l'hoplite, comme sur l'amphore de Mun ich40 où Hector endossant sa cuirasse est encadré de Priam et d'Hécube, tout comme les hoplites anonymes partant pour le combat sont sou vent flanqués d'une femme et d'un vieillard, symboles des autres fonc-
37 SE, 10, 1936, p. 430 sq., et pi. XLV, 3. 38 T. Dohrn, Die etruskische Kunst im Zeitalter der griechischen Klassik-Die Interims periode, Mayence, 1982, p. 52-59 et 73-86. 39 E. Hostetter, art. cit. (supra, η. 11), p. 141-148, pi. 85-89. 40 Mus. Antiker Kleinkunst, n° 2307: CVA Deutschland 12, p. 13-15, pl. 165-167.
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tions essentielles de la cité. Dans d'autres cas, d'ailleurs, le guerrier qui s'arme n'est nullement une figure mythologique, mais un simple comb attant athénien41. À partir du milieu du Ve siècle, les mêmes candélabres de Spina montrent encore d'autres aspects des préparatifs du soldat pour le combat, gestes rituels qui se comprennent avant tout dans le contexte de la famille et de la cité : c'est le cas, notamment, sur deux petits bronz es,du motif, récemment étudié par P. Bruschetti42, de la coupe d'une boucle de cheveux que le soldat, en général à demi armé, tranche par fois avec son épée. Les statuettes de Spina ont pour modèle plusieurs représentations de la céramique attique, quelques-unes placées en contexte mythologique. P. Bruschetti interprète ce geste avant tout comme un acte de piété filiale : il s'agirait, plus encore que de consa crercette boucle de cheveux à une divinité, de laisser un «souvenir» aux parents qui demeurent dans la cité et qui souvent, nous l'avons vu, saluent sur d'autres vases le départ de l'hoplite, nettement intégré ainsi dans le corps social. Mais il nous semble bien plutôt au regard du dos sier ethnographique rassemblé à propos du monde grec43 et plus récemment à propos du monde romain et latin, à la suite notamment des découvertes de Lavinium44, que le fait de se couper une boucle de cheveux puisse se lire avant tout comme un geste ritualisé, souvenir d'antiques initiations juvéniles. Cette même idée de l'intégration du guerrier dans l'ensemble du corps social ou civique est exprimée plus clairement encore par une autre série, plus nombreuse, de décors de candélabres qui associent au soldat en armes un homme âgé en tenue civile ou une femme, parfois
41 Amphore de Munich, n° 2308 : Ibid., p. 15-17, pi. 169-170; hydrie de Boston (MFA, n° 98-878) : Hesperia, 61, 1972, p. 471 sq., pi. 115 sq.; cratère d'Euphronios à New- York : AA, 91, 1976, p. 492, fig. 6 et 498, fig. 12-13. 42 P. Bruschetti, // motivo del taglio di un ricciolo : contributo alla esegesi di un gesto, dans Studi di antichità in onore di G. Maetzke, Rome, 1984, I, p. 151-159. 43 P. Vidal-Naquet, Le chasseur noir, Paris, 1981, passim (sacrifice du coureion comp ortant l'oblation de la chevelure, à l'âge de seize ans lors de la Couréôtis, au troisième jour de la grande fête des phratries du monde ionien, les Apatouries, rite correspondant à une éphébie plus archaïque que l'éphébie officielle, définie à dix-huit ans dans le cadre de la cité ; au contraire à Sparte rite inversé puisque ce sont les adultes qui laissent pous serleur chevelure). 44 Voir en dernier lieu M. Torelli, Lavinio e Roma. Riti iniziatici e matrimonio tra archeologia e storia, Rome, 1984, qui évoque p. 107 la tonsa coma des iuuenes du Lusus Troiae (Virgile, Enéide, V, ν. 556).
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munie d'une patere (comme sur le célèbre sommet de candélabre de Marzabotto)45. Nous voyons là, directement, la traduction plastique (et réduite à deux personnages au lieu des trois réglementaires) des images céramiques du départ de l'hoplite, déjà évoquées précédemment46. Une variante du même thème associe également, sur les bronzes de Spina, un jeune guerrier imberbe et un autre barbu, plus âgé, illustrant, dans une armée qui est l'émanation du corps civique, des classes d'âge diffé rentes. C'est, sans doute, la même notion qui a inspiré la création, dans la série des guerriers endossant leur cuirasse, d'une statuette qui repré sente un guerrier barbu, d'aspect nettement plus âgé que les autres exemplaires du même type (peut-être un officier, un strategos, s'il faut en croire E. Hostetter)47. En relation avec cette adoption certainement significative de thè mes iconographiques grecs, se pose la problème du choix, éventuelle ment signifiant, de certains sujets privilégiés parmi ceux proposés par la céramique peinte : une étape supplémentaire de notre enquête serait de tenter de mettre en relation l'image guerrière, ou non, qui nous est offerte par la présence ou l'absence d'armes dans les tombes, avec les motifs de la céramique attique contenue dans les mêmes sépultures. Il ne semble pas que, pour Spina, les images hoplitiques soient particuli èrement nombreuses sur la céramique importée, à l'inverse de ce qu'on constate pour les objets de fabrication locale. Pour d'autres sites, on se heurte souvent à la difficulté de raisonner sur des ensembles clos, qui limite dans le détail la portée précise des observations : tout au plus peut-on discerner parfois une certaine communauté d'inspiration entre tous les vases d'une même sépulture, comme dans la «Tombe des Vases grecs» à Cerveteri, où l'ensemble des représentations vasculaires sont liées, d'une part au monde guerrier, d'autre part au monde athléti-
45 A.-M. Adam, Bibliothèque nationale. Département des monnaies, médailles et anti ques. Bronzes étrusques et italiques, Paris, 1984, p. 57-58. 46 Sur cette iconographie attique de l'hoplite, encadré d'un vieillard et d'une femme, voir en dernier lieu les réflexions de F. Lissarague, Autour du guerrier, dans La cité des images, op. cit., p. 40-47 (avec bibliographie antérieure) ainsi que J. Bazant, Les vases athéniens et les réformes démocratiques, dans Images et société en Grèce ancienne. L'icono graphie comme méthode d'analyse, Actes du colloque international, Lausanne, 8-11 février 1984, dans Cahiers d'archéologie romande, 36, 1987, p. 33-40. 47 Art. cit., p. 145-147, pi. 88-89 (fig. 18-24) (Spina, Valle Pega, t. 344 Β).
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que48. Par ailleurs, il n'est pas toujours facile d'évaluer le contenu mili taire réel de certaines scènes de combat mythiques. En tout cas, nous sommes ici, à Spina, dans un milieu dont les contacts directs avec le monde grec, et notamment athénien, sont bien connus au Ve siècle, et dans un milieu colonial, dont les caractéristiques sociales pouvaient être assez différentes de ce que l'on trouvait dans les vieilles cités d'Étrurie proprement dite. Pourtant, parmi celles-ci, Volsinies semble avoir pris une part particulièrement active à la conquête de l'Étrurie padane49, et nous avons déjà constaté, là aussi, le développe ment de tendances isonomiques et peut-être d'une image du «soldatcitoyen» dès le courant du VIe siècle. La conjonction de ces diverses influences peut avoir favorisé la naissance, en Étrurie Padane, d'une organisation politique reposant sur un corps civique élargi et ouvert, et on pourrait voir dans l'implantation, à partir de la fin du VIe siècle, de cités orthogonales et régulières, non seulement à Spina, mais aussi à Marzabotto, la traduction architecturale d'un tel système politique. Pourtant, quelques questions demeurent posées, qui nous obligent sans doute à nuancer ce tableau apparemment simple. Les statuettes «hoplitiques» que nous avons décrites ornent exclusivement des candél abres, c'est-à-dire qu'elles sont liées étroitement aussi à une certaine image du luxe, à des objets que l'on peut considérer comme symboli ques de l'univers aristocratique étrusque et qui apparaissent en particul ier dans les scènes de banquet. L'aspect strictement «démocratique» de la fonction et des valeurs militaires à Spina doit s'en trouver modifié et c'est sans doute un idéal malgré tout assez différent de l'idéal hoplitique athénien (ne serait-ce que par l'usage même de déposer de tels objets dans les tombes) qui s'exprimait ainsi par cette fusion des images hoplitiques et des symboles de la vie aristocratique. Simplement, alors qu'à Tarquinia, les allusions à la fonction civique du guerrier se font de manière indirecte, au sein même de l'iconographie aristocratique (par exemple la représentation de la pyrrhique étroitement insérée dans le cadre des jeux funéraires, ou le pyrrhiciste apparaissant comme un personnage isolé, à côté d'une scène de chasse), ici l'iconographie hoplitique s'exprime directement dans l'ensemble ou, du moins, une partie de 1'« espace décoratif» (puisque certains candélabres sont cou ronnés également par des figures de danseuses ou d'athlètes) : on peut
48 Mon. Ant. Line, 42, 1955, col. 247-269, fig. 22-32. 49 G. Colonna, Umbri ed Etruschi a nord degli Apennini, dans SE, 42, 1974, p. 19-24.
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admettre que, à l'inverse de Tarquinia, on part des valeurs hoplitiques pour rejoindre l'univers aristocratique par l'intermédiaire d'un objet dont la fonction utilitaire, dans la société des vivants, s'accompagne, pour son possesseur, d'un effet de distinction. Ces remarques, évidemment, ne nous suffisent pas pour définir concrètement ce que pouvait être l'organisation militaire d'une cité comme Spina, et d'ailleurs, on doit, plus largement, s'interroger sur la place réelle de l'élément guerrier dans un établissement dont la princi paleactivité semble avoir été commerçante et artisanale. Le tableau offert par Marzabotto n'est guère celui, non plus, d'une cité guerrière, à tel point qu'on n'est même pas assuré de la réalité d'un rempart autour de l'ensemble urbain. À Bologne, on peut penser que la fonc tion guerrière était le fait de quelques individus, au sein d'une société de marchands et d'artisans; c'est, du moins, ce que suggère l'examen des mobiliers funéraires de la nécropole de la Certosa, où fort peu de sépultures renferment des armes: quelques tombes d'« Étrangers» (peut-être des Ombriens), pourvus de leur armement national, et une seule comportant, avec du matériel de type étrusque et de la cérami que attique, la panoplie hoplitique complète (deux pointes de lance, le bouclier circulaire et le casque)50. Faut-il en conclure que la présence des armes caractérise, au sein de la société felsinienne (ou si l'on veut de sa classe dirigeante), des individus déterminés qui sans doute assu ment une fonction militaire spécifique51? Nous aurions là un tableau complètement différent de celui qui, malgré les nuances apportées, nous semblait offert par Spina. Mais il est vrai que les deux sites ont, malgré une communauté d'intérêts au Ve siècle, une histoire total ement différente qui peut justifier pleinement ces divergences d'organi sationpolitique et sociale : d'un côté, un site occupé anciennement dont le développement de l'Étrurie Padane n'a fait que renforcer le rôle économique, de l'autre, une cité coloniale, où se côtoient Étrus ques et Grecs. L'analyse des mobiliers funéraires de Vulci nous permet peut-être d'entrevoir, au sein de la cité, l'exercice d'une fonction militaire spécifi50 Tombe n° 180: A. Zannoni, Gli scavi della Certosa, Bologne, 1876, p. 247-248, pi. LXIX. 51 Cette hypothèse est soutenue par G. Bergonzi, Società della tarda età del Ferro, loro articolazioni e relazioni : l'area adriatica tra VI e IV secolo a.C, dans La Romagna tra VI e IV secolo a.C.-nel quadro della protostoria dell'Italia centrale. Atti conv. Bologna 23-24 ott. 1982, Bologne, 1985, p. 81.
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que analogue à ce que l'on rencontre à Bologne. Pourtant, globalement, la situation est différente, dans la mesure où les armes apparaissent ici de deux manières dans les contextes funéraires, entre la fin du VIe et la deuxième moitié du Ve siècle. Au VIe siècle, la présence des armes dans les tombes se limite toujours à un groupe d'objets traditionnels qui inclut, en particulier, la pointe de lance. Avant la fin du siècle, la panop lieest absente (comme à Volsinies, par exemple). À partir des derniè res années du VIe siècle, parallèlement aux tombes qui comportent seu lement la pointe de lance, apparaissent plusieurs sépultures que caract érise la présence d'une panoplie complète, de type hoplitique. Le meil leur exemple est offert par la célèbre «Tombe du guerrier»52, mais il n'est pas le seul, s'il faut en croire la description proposée en 1835 par Campanari, du grand tumulus dit «Des guerriers», description dont nous citons ici l'essentiel53: «Una tomba maggiore era stata ricavata nel centro del monte . . . Quivi un cadavere disteso in mezzo sul suo lo ... reggeva nel teschio un elmo finissimo intersiato di argento, con A' elegante bassorilievo ... piedi [del guerriero] giacevano spezzate ed infrante, aste, spade e giavellotti in un mucchio. Un grande scudo di metallo, foderato di legno e di altra lamina al di sopra del metallo stes so,vedevasi appeso alla parete per un chiodo, ma consunto e cadent e ... Le altre tombe erano piene di armi di tutte sorte». D'après le matériel qu'elle contenait (casque aujourd'hui conservé à la Bibliothè que nationale de Paris - n°2013, et un trépied de type vulcien, au Musée du Vatican), on peut dater la tombe centrale autour de 500, ou au début du Ve siècle. Plus tardivement, dans une zone de tombes à chambres «récentes» de la nécropole de la Polledrara (deuxième moitié du Ve et début du IVe siècle), autrefois publiées par S. Gsell54, on peut noter l'opposition entre la tombe XXV qui comporte la panoplie comp lète (casque à calotte ogivale, pointe de lance et vestiges de l'armature d'un bouclier), et les autres voisines, avec seulement une lance. On connaît, par ailleurs, le nombre important de casques de bronze conservés dans différentes collections et provenant vraisemblablement
52 Rome, Villa Giulia : publiée pour la première fois par son inventeur, S. Ferraguti, dans SE, 11, 1937, p. 115-120, cette tombe souvent citée n'a pas, jusqu'à ce jour, fait l'ob jetd'une publication exhaustive. 53 Bull. Insu, VII, 1835, p. 204-205. 54 Fouilles dans la nécropole de Vulci, Paris, 1891, p. 69-86.
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de Vulci55, ce qui constitue certainement une situation unique, puisqu'ailleurs en Étrurie les casques sont, dans tous les cas de figure, extrêmement peu fréquents dans les sépultures. Il semble donc qu'il y ait eu, dans les nécropoles de Vulci, un cer tain nombre de tombes où le statut militaire de l'occupant est mis en relief par la présence de la panoplie complète. Puisque, par ailleurs, une connotation militaire est présente, de toute façon, dans la majorité des sépultures, avec la déposition de la lance, il faut admettre que l'a rmement complet apporte une indication supplémentaire, définit l'exer cice,par certains, d'une fonction militaire spécifique et souligne la pré sence, au sein de l'aristocratie vulcienne, de «grands capitaines», de chefs de guerre qui pourraient correspondre, dans ce cas, à une forme particulière d'évolution du modèle guerrier gentilice. La tradition histo rique nous fournit d'ailleurs, avec les figures de ceux que l'on appelle traditionnellement les condottieri étrusques, une indication analogue tout particulièrement pour Vulci, avec les fameux personnages des frè res Aulus et Caelius Vibenna et de leur compagnon Macstarna. Sans doute n'est-il pas toujours de bonne méthode de forcer les rapports entre données archéologiques et sources littéraires, mais la rencontre nous paraît ici significative, d'autant plus que la geste des mêmes personnages est illustrée aussi, toujours à Vulci, par les peintu res de la Tombe François, comme nette allusion au passé «national» de la cité, lors des affrontements décisifs avec Rome dans la seconde moit iédu IVe siècle av. n. ère56. Du fait de l'histoire de la cité, l'aristocratie vulcienne s'est probablement structurée autrement que celles, par exemple, de Tarquinia ou de Cerveteri. On peut même dire que, au tournant du VIe et du Ve siècle, au moment où l'on date les principales tombes de ces chefs de guerre («Tombe du Guerrier» et «Tumulus des guerriers»), elle réagit différement à la «crise» du modèle gentilice et que les valeurs guerrières y jouent un plus grand rôle que dans les autres cités : c'est ce qui explique que celles-ci s'expriment ici directe ment,au premier degré, et non de manière médiatisée comme ailleurs en Étrurie méridionale. La panoplie hoplitique (et même la lance seule)
55 Par exemple, la collection Benedetto-Guglielmi, au Musée du Vatican : F. Magi, La raccolta Benedetto Guglielmi nel Museo Gregoriano Etrusco. II. Bronzi e oggetti vari, Cité du Vatican, 1941, n° 107-111, p. 221-224. 56 Voir les analyses décisives du système décoratif de la tombe proposées par F. Coarelli, dans Ricerche di pittura ellenistica, Rome, 1985, p. 43-69.
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ne tendent pas tant ici à affirmer l'appartenance du guerrier au corps des citoyens, qu'à le valoriser, à titre individuel et au milieu de ses com pagnons d'armes. Ce compagnonnage militaire est mis en lumière par plusieurs témoignages archéologiques ou historiques : c'est sur lui que reposent dès la première moitié du VIe siècle si l'on suit le comput antique, tou tes les aventures des frères Vibenna et de Macstarna, et c'est lui qu'il lustrent, dans la tombe François, la juxtaposition des combats singul ierset surtout la scène où Macstrna délivre Caile Vipinas des liens qui le maintenaient prisonnier. Toute l'organisation des sépultures dans le grand tumulus «Des guerriers» en est une autre illustration, puisqu'on y voit le chef, dans une tombe centrale plus riche (et voisinant avec une tombe féminine également fort riche), et une succession de sépultures périphériques où sont déposés d'autres guerriers, compagnons d'armes entourant le chef dans la mort, comme ils l'ont fait dans leur vie mili taire. Dans un contexte un peu plus tardif, l'exemple déjà cité de Coriolan évoque certes les clients que des obligations de reconnaissance lient au chef, mais aussi Γέταιρία de jeunes nobles qui acccompagne celuici57. Or ce qui frappe dans la geste de Coriolan, c'est que la guerre joue un rôle déterminant dans la définition de tous ces liens de dépendance personnels : compagnonnage assurant, d'un côté, la formation militaire d'une élite, profits guerriers attirant les clients sans ressources écono miques de l'autre. Cette donné est doublement significative, elle renvoie 57 Voir encore Plutarque, Coriolan, XV. Dans ce contexte, la découverte de l'inscrip tion de Satricum de la fin du VIe siècle, portant une dédicace faite à Mars (Mamartei) par des «compagnons de Publius Valerius» (Popliosio Valesiosio suodales), sans doute le Publius Valerius Publicola de la tradition romaine, revêt une importance toute particulièr e, cf. les contributions de C. M. Stibbe, G. Colonna, C. De Simone, H. S. Versnel, Préface de M. Pallottino, dans Lapis Satricanus. Archaeological, Epigraphical, Linguistic and Historical Aspects of the New Inscription from Satricum (Archeologische Studien van het Nederlands Instituut te Rome. Scripta Minora, V), 1980. H. S. Versnel fait justement remarquer p. 120 que dans le texte des Tables de Lyon l'empereur Claude désigne préci sément Macstarna-Servius Tullius comme le sodalis fidelissimus de Caelius Vibenna. Il insiste également sur le fait que ces sodales (εταίροι) sont essentiellement des iuuenes. Voir aussi le commentaire de C. De Simone, ibid., p. 83-84, qui cite le passage de Denys d'Halicarnasse, II, 46, 3, sur les εταίροι (sodales), συγγενείς (cognati), πελάται (clientes) qui accompagnent Titus Tatius, en renvoyant à l'analyse d'E. Peruzzi, Origini di Roma I, Florence, 1970, p. 147-148. Il est significatif que dans l'épisode des trois-cent-six Fabii marchant contre Véies, Tite-Live (II, 49, 5) oppose à la turba publica qui escorte les sol dats (omnes patricii, omnes unius gentis, II, 49, 4) la turba propria (. . .) cognatorum sodaliumque.
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d'une part à la période de conflits que connaît l'Italie entre la fin du VIe siècle et les premières décennies du Ve siècle, au moment où de nouveaux équilibres politiques entre les cités se cherchent et se définis sent.Elle correspond aussi aux conflits sociaux internes qui caractéri sent la vie de nombreuses cités occidentales pendant la même pério de58. Dans le cadre de la jeune république romaine, l'exemple de Coriolan montre les dangers qu'un tel chef militaire, ne concevant les rap ports sociaux que sous la forme du lien personnel, peut faire courir à la cité, puisque en cas de conflit politique, il n'hésite pas à rallier le camp ennemi59. Pendant la même période, le sacrifice des trois-cent-six Fabii dévoil e l'autre facette de l'échec de la guerre gentilice dans la cité : croyant assurer à eux seuls le salut de tous, les Fabii risquent l'extinction totale de leur gens. Dans l'économie du récit livien, Coriolan et les Fabii se trouvent aux deux pôles d'une même structure signifiante tendant à démontrer qu'à Rome, la guerre qui assure la victoire et la survie de la cité est l'affaire de tous les citoyens-soldats. En outre, l'épisode des Fabii, placé en prélude de l'interminable guerre de Véies annonce par contraste l'instauration du Stipendium à la fin du Ve siècle, étape décisi ve dans la prise en charge publique de la guerre. Pour en revenir à Vulci, l'absence de sources écrites suffisantes nous empêche de définir à quelque degré que ce soit l'existence éven tuelle de conflits entre modèle guerrier gentilice et affirmation d'autres valeurs civiques. Nous ne pouvons que constater en cette fin du VIe siè-
58 Voir notamment les remarques de M. Frederiksen à propos d'Aristodème de Cumes, Campania, British School at Rome, 1984, p. 95-97. Deux points dans les traditions concernant Aristodème, paraissent particulièrement significatifs pour notre propos : 1) Aristodème réussit à prendre le pouvoir à Cumes contre les aristocrates, pour avoir combattu particulièrement brillamment, en tant que cavalier, dans le conflit de 524, déclenché par l'attaque liguée d'Étrusques, d'Ombriens et de Dauniens ; 2) régnant en tyran sur la cité de Cumes, il subvertit le modèle de régime aristocrati que précédemment en vigueur, en s'appuyant sur les couches inférieures de la populat ion et en faisant appel à des mercenaires barbares (μισθοφόρους έκ των άγριωτάτων βαρ βάρων, Denys d'Halicarnasse, VII, 8, 3). Comme le souligne à juste titre Frederiksen, op. cit., p. 97 : «Here are the seeds of the Oscan takeover which, a century later, ended the Greek history of Cumae». 59 Voir les justes remarques de L. Gerschel, qui rapproche à ce propos la figure de Coriolan des chevaliers-brigands du Moyen Âge allemand, Coriolan, dans Hommages à Lucien Febvre II, Paris, 1953, p. 38-39.
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cle la «militarisation» de plusieurs groupes de sépultures qui semblent mettre l'accent sur des formes de compagnonnage militaire. Un type semblable de compagnonnage semble s'exprimer aussi sur un certain nombre de reliefs funéraires de Chiusi, où la fonction mili taire a pu être, comme à Vulci, exercée, dans le cadre de la cité, par un nombre restreint de membres de la classe dirigeante. Nous ne pensons pas, toutefois, qu'il faille aller aussi loin que J.-R. Jannot, dans son ana lyse historique et sociologique des reliefs60. Il estime que si, globale ment,les arts funéraires de la ville témoignent d'une indifférence de la classe dirigeante à l'égard des valeurs militaires, indifférence soulignée par la rareté des thèmes guerriers dans l'iconographie clusienne, les forces militaires de la cité, dont l'importance est attestée par l'historio graphie, et notamment les succès attribués à Porsenna, devaient être constituées essentiellement de troupes quasi professionnelles «peut-être à la limite encadrées par quelques nobles». Il est facile évidemment de rattacher cette hypothèse à l'épisode célèbre, rapporté à la fois par Tite-Live et Denys d'Halicarnasse, où l'on voit Mucius Scaevola frapper par erreur, à la place de Porsenna lui-même, le secrétaire du roi assis à ses côtés, tandis que l'on procède à une distribution de la solde à l'a rmée étrusque61. On a souvent cherché à mettre en doute la vraisemblance de l'anec doteet cru y voir le reflet d'une tradition postérieure, influencée par les pratiques militaires hellénistiques62 (ou encore par l'institution pro bable du Stipendium dans l'armée romaine elle-même au début du IVe siècle). Pourtant G. Colonna a montré récemment63 que les différents détails de la scène ne présentaient rien d'anachronique et ceci nous autorise à considérer également comme historique l'allusion à la solde versée. Reste à savoir comment nous devons l'interpréter en ce qui concerne le statut social ou «professionnel» des troupes de Porsenna :
60 J.-R. Jannot, op. cit. {supra, n. 5), p. 403-406. 61 Tite-Live, II, 12, 6-7 : Ubi eo venu, in consertissima turba propre regium tribunal constituit. Ibi cum Stipendium militibus forte daretur, et scriba cum rege sedens pari fere ornatu multa ageret, eum milites volgo adirent ... ; et Denys (V, 28, 2) précise le rôle du scribe dans cette opération: «o ft ην άρα γραμματεύς τοΰ βασιλέως, έκάθητο S έτη τοΰ βήματος διαριθμών τους στρατιώτας και διαγραφών αύτοΐς τους όψωνιασμούς». 62 En particulier, R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy 1-5, Oxford, 1965, p. 262. 63 Scriba cum rege sedens, dans Mélanges offerts à J. Heurgon, Rome, 1976, I, p. 187192. La même théorie de l'authenticité du récit avait déjà été défendue par E. Peruzzi, dans Par. Pass., XXIV, 1969, p. 184.
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faut-il en déduire que les soldats recevaient un salaire en tant que mer cenaires? Ces textes, en fait, illustrent parfaitement les ambiguïtés aux quelles nous nous sommes déjà heurtées pour d'autres sites, puisque l'épisode a pu, tout aussi bien, être considéré comme la preuve de l'a ppartenance de ces soldats au corps des citoyens de la cité clusienne. Les circonstances ayant entraîné l'institution du Stipendium dans l'armée de Porsenna seraient alors comparables à celles qui justifient la même mesure pour l'armée romaine lors du siège de Véies : l'armée est depuis longtemps loin de sa cité, et donc les soldats loin de leurs terres, et ils doivent, privés de leurs sources habituelles de revenus, subvenir d'une manière ou d'une autre à leur propre entretien64. Pour tenter de résoudre ces contradictions, la documentation ar chéologique ne nous fournit que peu d'indices qui permettent d'appréc ier la part exacte de l'élément militaire dans la cité clusienne à la fin du VIe et au Ve siècle. Les mobiliers funéraires ont presque toujours disparu et, dans le domaine iconographique, seuls les reliefs consti tuent une série suffisamment ample pour autoriser quelques remar quesstatistiques. En admettant qu'ils indiquent le développement dans la cité, à partir de la deuxième moitié du VIe siècle, d'une classe sociale homogène et relativement nombreuse, il ne semble pas effectivement que les valeurs militaires aient revêtu, aux yeux de l'ensemble des membres de cette classe, une importance particulière et les thèmes favoris sont, comme à Tarquinia, la danse, le banquet ou les jeux. Pourt ant, là aussi, les représentations de la pyrrhique sont fréquentes à part ir du début du Ve siècle, sur les monuments de pietra fetida, comme dans les tombes peintes, et elles pourraient apparaître, au même titre que les scènes de chasse, nombreuses également, comme une sorte de traduction indirecte d'un idéal guerrier inscrit dans le cadre de la cité. Par ailleurs, les reliefs de certains monuments funéraires révèlent un contenu militaire direct et précis et pourraient désigner des indivi dusinvestis, dans le même cadre, de fonctions guerrières spécifiques. En dehors de quelques représentations de combat65, ou de parades66, ou encore de l'image, déjà évoquée, du chef hoplitique grimpant sur 64 F.-H. Massa-Pairault, Notes sur le problème du citoyen en armes : cité romaine et cité étrusque, dans Guerre et sociétés en Italie aux Ve et IVe siècles, Paris, 1988, p. 34-35. 65 Jannot, op. cit., n° A, 1, fig. 63 (Palerme 8450); n° A, 7, fig. 75 (Palerme); n° A', 3, fig. 85 et 87 (Londres D 10). 66 Ibid., n° A, 2, fig. 65-68 (Palerme 8446 et Chiusi); n° B', II, 1 et B', II, 2, fig. 129 et 134 (Rome, DAI et American Academy).
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son char67, l'élément militaire semble dans certains cas, plus rares, intégré au rituel funéraire lui-même : sur un relief de Palerme (n° 8414)68, le défunt est accompagné, dans la scène de prothesis, d'une partie de sa panoplie, casque et jambières qui, placés sous le lit funérair e, désignent clairement le personnage comme un guerrier. Sur un fragment de Chiusi69, on remarque, à la tête du lit de prothesis, derriè re un personnage féminin, trois hoplites armés, en file : s'agit-il de l'hommage au défunt de ses compagnons d'armes, hommage rendu par une simple salutation au lit funèbre, ou sous la forme d'une parade militaire, intégrée, comme le suppose J.-R. Jannot, aux jeux funèbres qui se déroulent sur un autre fragment du même monument, conservé à Palerme? On peut remarquer, d'ailleurs, qu'un hommage analogue semble rendu, sur la base n°8414 de Palerme, au guerrier défunt, par les cavaliers (il est vrai, dépourvus d'armes) qui encadrent sur deux faces la scène de prothesis et portent la main à leur tête dans le geste traditionnel de lamentation. Ces différents reliefs appartiennent au Groupe A défini par J.-R. Jannot, et donc au milieu du VIe siècle : ils pourraient, par conséquent, refléter encore, dans une certaine mesure, une organisation militaire de type gentilice. Mais d'autres allusions directes à la vie militaire et au compagnonn age qu'elle implique sont présentes encore, beaucoup plus tard, sur le cippe conservé au Musée Barracco de Rome, où trois thèmes sont figu rés sur les différentes faces : une scène d'armement, des figures de cavaliers armés de javelots, enfin, le combat proprement dit. L'ensemb le des représentations présente donc une remarquable unité : il s'agit bien, comme le note J.-R. Jannot, de la description globale d'un comb at, pour lequel on se prépare et où l'on se rend70. C'est, par ailleurs, un des rares monuments clusiens où l'on ne rencontre, sur l'une ou l'autre face, aucun des thèmes funéraires traditionnels. Particulièr ement intéressante est la scène d'armement qui dérive partiellement du schéma attique, déjà évoqué plus haut, de l'armement du héros ou du soldat-citoyen, en présence d'une femme et d'un vieillard : ici, toutefois, le guerrier en train de s'équiper est encadré, non pas de personnages 67 Ibid., n° A', 3, fig. 84 (Londres D 10). 68 Ibid., n° A', 2, fig. 80. 69 Ibid., n° A, 3, fig. 70. 70 J.-R. Jannot, Description d'un combat. À propos d'une représentation de l'archaïsme tardif, dans Guerre et sociétés, cit. {supra, n. 64), p. 121-128 (dans la publication générale des Reliefs archaïques de Chiusi, ce cippe porte le n°D, H, 16, fig. 570-573).
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symboliques de la cité, comme à Athènes (où le personnage féminin est parfois même remplacé par Athéna), mais par deux valets d'armes ou compagnons d'armes. Aucune allusion donc, ici, à des valeurs civiques, mais une simple illustration du milieu guerrier et de la fraternité qui y règne, avec, en outre, un réel souci du réalisme militaire qui a poussé, par ailleurs, le sculpteur à bien différencier, dans la représentation du combat, l'armement de chacun des combattants71. Reste à évoquer pour Chiusi, dans le domaine de l'iconographie guerrière, ce monument unique dans toute la peinture funéraire étrus que, qu'est la Tombe Paolozzi : nous avons déjà noté, en effet, l'absence totale, au Ve siècle, de représentations de combat dans les sépultures peintes de Tarquinia. Le Musée de Chiusi conserve trois fragments en mauvais état des fresques de cette tombe, qui doit être attribuée sans doute, malgré les incertitudes concernant sa datation, au milieu du Ve siècle72 : ils illustrent, l'un un cavalier qui, transpercé par une lance, tombe à la renverse sur le dos de son cheval, un autre, un cavalier dra pédans son manteau, qui lance le javelot, et le troisième, un guerrier qui s'appuie sur sa lance et brandit son épée73. Il est impossible év idemment de reconstituer l'image globale de cette bataille, où la cavaler ie semble jouer un grand rôle, ni même de préciser s'il s'agit ici de la représentation d'un combat mythique ou d'une allusion historique. Re marquons, en tout cas, que le cippe Barracco, sans doute plus ancien que la Tombe Paolozzi de quelques décennies, a été interprété par J.-R. Jannot (supra, n. 70) comme la peinture d'un événement historique contemporain, mettant aux prises «des Étrusques de Chiusi, armés comme des combattants de cavalerie légère, et des fantassins armés en hoplites, à la manière grecque». Une autre scène de combat figure, vers 71 Le même souci réaliste de différenciation est perceptible, vers la même époque, sur la base de Londres D 15 (Jannot, Reliefs . . ., n°D, I, 7, fig. 503), une face montre un énigmatique cortège, inteprété par J.-R. Jannot comme le transport, dans le cadre des rituels funéraires, des armes du défunt, mais où l'on voit plutôt quatre guerriers dont chacun, par la spécificité de son armement défensif et offensif, semble appartenir à un corps de troupe distinct. L'existence, ainsi attestée, de corps de troupes à spécialités dif férentes coïnciderait évidemment mieux avec une armée de caractère professionnel ou semi-professionnel. 72 Comme le propose J. R. Jannot, art. cit., note 70, p. 127, alors que R. Bianchi Bandinelli dans sa publication des documents, MPA-Clusium. I. Le pitture delle tombe arcaiche, Rome, 1939, p. 33-35, en soulignant l'importance exceptionnelle du monument, avanç aitune chronologie dans les années 420 av. n. ère. 73 R. Bianchi-Bandinelli, op. cit. (note précédente), fig. 27-28.
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le milieu du Ve siècle, sur une des dernières productions de la série des reliefs clusiens, mais c'est là, vraisemblablement, la représentation d'une Amazonomachie74 : il n'en reste pas moins que se manifeste encore, à travers elle, un goût pour les sujets guerriers. Tel est donc le constat que nous pouvons dresser en ce qui concer ne Chiusi; il ne nous permet pas de trancher. Sans doute, l'iconogra phie, à Chiusi moins encore qu'ailleurs ne nous offre-t-elle guère d'ima ge du «soldat-citoyen». Mais la position qui consiste à attribuer à la cité des troupes presque exclusivement professionnelles paraît excessive : comme nous l'avons déjà entrevu pour d'autres sites, il semblerait plus logique d'imaginer un modèle militaire à mi-chemin entre l'armée gentilice et l'armée civique, où seule une fraction de la classe dirigeante exercerait, au service de la cité, une fonction militaire et le contrôle sur des troupes issues de la population de la ville (ou de son territoire), mais dont les liens personnels avec le chef demeureraient forts. Ce modèle serait d'ailleurs conforme à ce que l'on peut entrevoir des cadres de la société étrusque et des rapports de dépendance qui la structurent, puisqu'il faut rappeler que, même au Ve siècle, l'existence réelle d'une «plèbe» indépendante des grandes familles n'est nullement assurée. Cela signifie-t-il que les armées étrusques n'employaient pas de mercenaires ? En fait la frontière qui sépare les condottieri que les sour ceslittéraires nous permettent d'évoquer, de chefs mercenaires est, comme nous l'avons vu, bien mince. De même la distribution du Stipe ndium par Porsenna à ses troupes semble relever plutôt d'une extension du lien de dépendance personnelle, en rapport avec la répartition des profits tirés de la guerre, comme on l'entrevoit à propos des clients de Coriolan, que d'une rétribution opérée à titre vraiment public75. Par ailleurs, l'iconographie et les mobiliers funéraires témoignent de la pré sence en Étrurie de corps de troupes ou de soldats isolés, que leur
74 Jannot, Reliefs . . ., n° D', 1, fig. 579 (Chiusi 2601); une autre scène qui alterne les mêmes personnages d'hoplites et d'archers orientaux, ou Amazones (Berlin 1221) a été interprétée par J.-R. Jannot comme une sorte de parade à la fois militaire et théâtrale, sur le thème de l'amazonomachie, voire comme «la ritualisation [à usage funéraire] d'un mythe incompris ou volontairement dévié» (n° D', 2, fig. 581-585, et p. 385-386). 75 On remarque d'ailleurs qu'à Rome même l'institution du Stipendium est présentée par Tite-Live comme un munus (don appelant un contre-don) fait par les patriciens à la plèbe, après la prise d'Anxur et après le pillage de la ville qui a déjà rapporté aux plé béiens un riche butin : Histoire Romaine, II, 59, 1 1 .
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aspect extérieur et leur armement, au moins, semblent désigner comme des «Étrangers». Ainsi les archers de type oriental ou «scythe», tel celui illustré par le petit bronze de la Certosa de Bologne76, qui appartien nent certainement à la réalité guerrière d'Étrurie aux VIe et Ve siècles, peuvent-ils être soit des Étrusques dont certains détails de la tenue sont destinés à souligner une fonction militaire spécifique, soit de véritables étrangers qui louaient leurs services aux cités étrusques, et revêtaient comme signe distinctif une sorte de costume national77. Si l'on admet aujourd'hui l'ancienneté relative des relations entre les populations cel tiques et celles de l'Italie centrale, bien avant l'installation massive des Gaulois en Italie au IVe siècle, et la présence effective de Celtes dans les cités étrusques peut-être dès le Ve siècle, il est tentant de mettre ces contacts précoces en rapport avec l'utilisation éventuelle de mercenair es celtiques par les armées étrusques : c'est peut-être à l'un d'entre eux qu'appartenait, vers la fin du Ve siècle, une sépulture de Pérouse78 où l'on a trouvé un casque à calotte conique et couvre-nuque, d'un modèle alors inconnu en Étrurie, mais proche, en revanche, d'exemplaires transalpins de la même période. On peut supposer également que les Étrusques ont utilisé comme mercenaires leurs voisins italiques, en particulier ombro-sabelliens, tel le guerrier qui, sur une plaque peinte trouvée à Ceri79, porte un cardiophylax d'un modèle qui n'est certainement pas en usage à cette époque en Étrurie même : peut-être s'agit-il seulement, dans une scène qui n'est pas forcément une scène de combat, d'un «vieux type de cuirasse, réduit ici à une fonction de parade». Mais il est tentant de rapprocher cette représentation du matériel déposé, vers le milieu du Ve siècle, dans la tombe à chambre n° 90 d'Aléria, en Corse, et parmi lequel se
76 Mostra dell'Etruria Padana e della città di Spina, Bologne, 1960, pi. XXXVIII. 77 Sur la présence dans les armées étrusques, peut-être dès le VIIe siècle, d'archers utilisant la technique scythe, voir P. F. Stary, op. cit. (supra n. 2), p. 91-92, pour lequel ces armes et ces techniques ont pu être transmises, avec d'autres, par l'intermédiaire des Grecs (malgré les réflexions de A. Snodgrass, Arms and Armours of the Greeks, Oxford, 1967, p. 82, qui doute que les Grecs aient réellement adopté, dans leurs propres armées, un mode de combat étranger et de maniement aussi complexe que l'arc scythe). 78 Publiée par F. Messerschmidt, dans SE, 6, 1932, pi. XXIX, III- 1. 79 F. Roncalli, Le lastre dipinte da Cerveteri, op. cit., p. 101-102 et pi. XXIX; P. F. Stary, op. cit., pi. 42, 2; L. Ricci Portoghesi, Una nuova lastra dipinta cerile, dans AC, 18, 1966, p. 16-22.
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trouvait un cardiophylax de type analogue80 : s'agissait-il, ici encore, d'un chef mercenaire employé par les Étrusques pour le contrôle de la base d'Alalia, contrôle auquel, d'ailleurs, Cerveteri, parmi toutes les cités étrusques, pouvait se trouver particulièrement intéressée (du moins si l'on en juge par son intervention, quelques décennies plus tôt, contre l'installation de Phocéens en Corse)? Nous disposerions donc d'un double témoignage de l'utilisation, par la grande cité d'Étrurie méridionale, de mercenaires originaires sans doute de la Campanie ou de son arrière-pays81. L'ensemble des questions militaires que nous avons évoquées ici s'insère donc clairement dans la situation de «crise» qui est celle de l'Étrurie à la fin du VIe et au Ve siècle : si, du point de vue technique, les principes fondamentaux de la tactique et les caractères généraux de l'armement évoluent peu au cours de cette période, en ce qui concerne les bases sociales sur lesquelles repose la pratique militaire, il est cer tain que le vieux modèle guerrier en vigueur depuis le VIIe siècle se dégrade progressivement, en même temps que s'affirment, à un rythme inégal selon les villes, les valeurs de la cité. S'il nous est impossible de dresser un bilan homogène de la situation militaire pour l'ensemble de l'Étrurie, nous saisissons presque partout ce processus de transformat ion en cours : les réponses apportées à cette situation nouvelle sont remarquables par leur diversité, d'une cité à l'autre, et par leur ambig uïté. Nous n'avons trouvé nulle part la preuve absolue de l'existence d'une armée civique au sens grec du terme : il semble plutôt que se substitue alors au vieux modèle gentilice, une organisation militaire qui, mise au service de la cité, et non plus du clan, n'en repose pas moins toujours sur une relation personnelle des soldats à leurs chefs, ou sur la fraternité guerrière, plus que sur un engagement du citoyen vis-à-vis de sa cité. Une telle image n'est pas sans évoquer le rôle de Tarchon à la tête de sa leda manus dans l'Enéide et après tout, au delà de la volonté idéologique du princeps, le discours de Claude est là pour nous rappeler que les Romains du début de l'Empire avaient encore présent à la mémoire le souvenir du compagnonnage de Servius Tullius
80 J. et L. Jehasse, La nécropole préromaine d'Aléna, XXVe suppl. à Gallia, Paris, 1973, n°1815, p. 455 et pi. 148; G. Colonna, dans Kokalos, XXVI-XXVII, 1, 1980-81, p. 175. 81 Sur la précocité du recours aux mercenaires campaniens cf. M. Frederiksen, op. cit. note 58 ainsi que G. Colonna, art. cité note précédente.
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et des frères Vibenna. Ajoutons qu'un tel état de choses n'est pas incompatible, bien au contraire, avec le développement de la notion de virtus individuelle, tel que nous le percevons à travers l'iconographie : c'est peut-être même là le meilleur signe de rupture avec le vieux syst èmestrictement clientélaire. Mais il faut admettre en même temps que, dans cette nouvelle organisation, la guerre ne semble concerner, dans la plupart des cas, qu'une frange réduite de la population de la cité et qu'elle est aussi par tiellement affaire de professionnels, recrutés dans la cité ou hors de celle-ci. C'est la raison pour laquelle seule une partie de la classe dir igeante continue à se définir par référence à des valeurs guerrières : l'image guerrière n'est plus, pour l'aristocratie étrusque, à la fin du VIe et au Ve siècle, qu'une image de statut marginale; elle reprendra une place plus importante à la faveur de la restructuration des groupes aristocratiques au IVe siècle, en recourant toujours au vieux schéma hoplitique qui, sur le plan strictement technique sera alors pourtant partiellement dépassé. Anne-Marie Adam Agnès Rouveret
JEAN-PAUL THUILLIER
L'ORGANISATION ET LE FINANCEMENT DES LODI CIRCENSES AU DÉBUT DE LA RÉPUBLIQUE MODÈLE GREC OU MODÈLE ÉTRUSQUE ?
Chacun connaît la différence essentielle entre les courses de chars «à la grecque», telles qu'elles se déroulaient par exemple dans l'Olympie du Ve siècle avant notre ère, et les courses de chars «à la romaine» que pouvait suivre un spectateur du Circus Maximus, sous le règne des Antonins. À côté d'un certain nombre de points communs obligés, tenant à la nature sportive particulière de cette épreuve, et à côté d'un certain nombre de différences techniques, plus importantes qu'on ne le croit souvent, en ce sens qu'elles permettent de bien saisir les influen ces exactes dans la formation des ludi romains, les compétitions grec queet romaine se distinguaient principalement par leur mode d'organi sation : ce que l'on pourrait résumer en citant simplement - et par facil ité, j'y reviendrai - l'existence à Rome des factions1. À Olympie, et partout en Grèce, c'était en revanche des propriétai res privés qui, dans l'immense majorité des cas, faisaient courir à titre personnel, un (ou plusieurs) chars, et qui remportaient éventuellement des victoires et des couronnes pour leur propre compte : personnages riches, appartenant très souvent à l'aristocratie de leur cité, pour qui l'hippotrophie était une activité fondamentale, et qui tiraient de leurs victoires des profits qui étaient loin d'être seulement honorifiques; on sait que la carrière politique a été pendant longtemps liée à cette activi té «sportive», et Alcibiade pourrait être cité ici comme un bon exemple 1 La bibliographie sur ce sujet est, comme on s'en doute, immense. On se contente ra de citer ici : J. Regner, art. ludi circenses, dans RE, suppl. VII, 1940, 162; J. Toutain, art. ludi (publici), dans Diet. Ant. Gr. Rom., p. 137; A.Cameron, Circus factions, Oxford, 1976; H.A.Harris, Sport in Greece and Rome, Ithaca (New- York), 1972, p. 184-222; J. P. V. D. Balsdon, Life and leisure in ancient Rome, Londres2, 1974, p. 314 sq.
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de ce comportement, à vrai dire plus souvent attesté dans les décennies qui l'avaient précédé2. À Rome au contraire, le système de ces «clubs» qu'étaient les factions fait en sorte que la victoire sportive appartient individuellement à l'aurige - et, si je puis dire, au cheval - et les bénéfi ces honorifiques et politiques sont accaparés par Y editor : il n'y a plus d'Alcibiade à Rome pour se targuer d'une victoire de ses propres che vaux, et ce sont désormais les cochers, les agitatores qui vantent, dans des inscriptions parfois longues, leur palmarès3. Si l'Aurige de Del phes est un des chefs-d'œuvre de l'art grec, on n'oubliera pas que c'est peut-être le seul hasard qui lui a conféré cette célébrité, aux dépens du propriétaire vainqueur, le tyran sicilien Polyzalos, qui figurait éventuel lementaussi dans cet ex-voto agonistique4. Mais cette différence entre les Jeux Olympiques et les ludi circenses a-t-elle toujours existé? C'est ce que contestent plusieurs historiens de la Rome archaïque, et il semble même se faire depuis quelques années une certaine unanimité en ce sens : les courses de chars romaines auraient suivi, jusqu'à une époque qui reste à déterminer, dans leur organisation et leur financement, un modèle grec. Cette opinion est par exemple celle de H. A. Harris dans son ouvrage sur le sport en Grèce et à Rome5, celle d'E. Rawson dans un article de 19816, et elle vient d'être réaffirmée tout récemment par J. H. Humphrey7, qui, dans son
2 Bonne mise au point sur cette question dans l'ouvrage tout récent de D. G. Kyle, Athletics in ancient Athens, Leyde, 1987, p. Ill sq. en particulier. 3 Exemples typiques de ces brillantes carrières d'auriges : celle de P. Aelius Gutta Calpurnianus {CIL, VI, 10047) et celle de C. Appuleius Diodes {CIL, VI, 10048). 4 On sait en effet que les propriétaires figurent souvent près du cocher ou de la Nikè, dans les groupes agonistiques dédiés après la victoire (Pausanias, 6, 10, 6; 6, 18, 1); le propriétaire est parfois à côté du quadrige (Pausanias, 6, 4, 10; 6, 1, 6). Mais il arrive aussi que l'aurige soit seul ou remplacé par une Nikè, ou même que le char - de petit format dans ce cas - soit vide. F. Chamoux, L'aurige de Delphes, Paris, 1955, p. 54-55, indi que qu'on ne peut savoir si l'aurige était seul ou non, mais, pour sa part, il incline à le restaurer seul sur son quadrige pour des raisons d'ordre esthétique. 5 Op. cit., p. 185 : «No doubt in early centuries wealthy amateurs played an import antpart in Roman chariot-racing as in Greek.», et p. 193 : «Of the organization in the Republican age we know little. It is reasonable {sic) to suppose that it resembled the Greek set-up, with racing controlled by wealthy owners who entered their teams at the various meetings according to their chances of success and the prestige or pecuniary advantage of victory at any particular festival». 6 E. Rawson, Chariot-racing in the Roman republic, dans PBSR, 1981, p. 1-16. 7 J. H. Humphrey, Roman circuses. Arenas for chariot racing, Berkeley-Los Angeles, 1986, p. 11 : «Yet a closer look at Roman racing reveals that Roman racing and Roman
ORGANISATION ET FINANCEMENT DES LUDI CIRCENSES
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beau livre sur les cirques romains, publié en 1986, avoue que E. Rawson lui a en quelque sorte soufflé ses propres idées sur ce point; cette thèse du «Greek pattern» - pour reprendre l'expression des historiens britanniques - est aussi avancée dans le livre de G. Ville sur la gladiature en Occident; je cite ce dernier exemple parce qu'il est très clair et sans ambiguïté - il s'agit ici d'un passage que l'on peut attribuer sans difficulté à P. Veyne, non pas tellement parce qu'il figure entre cro chets, mais parce que le style en est, je crois, aisément reconnaissable : «Voilà comment les choses se passaient primitivement dans le Cirque de Rome : on se croirait à Olympie et il n'y manque qu'un Pindare pour célébrer les propriétaires des chevaux, des cochers et des chars»8. Avant d'énumérer et de discuter les divers arguments mis en avant par les tenants de cette thèse du «Greek pattern», je voudrais, très rapi dement, rappeler deux points qui me paraissent souvent interférer, de façon malencontreuse, dans la discussion. Et tout d'abord, il ne faut pas oublier qu'en Grèce aussi, depuis le VIe siècle au moins, les auriges étaient pour la plupart des professionnels, de basse condition le cas échéant9: cela ne change rien au système d'ensemble et ne relie pas pour autant les courses grecque et romaine, pour ce qui est de l'organi-
circuses did evolve from something that was much closer to Greek racing and Greek hip podromes than is generally realized. It is very likely that chariot racing at Rome during the regal and much of the Republican periods was in the hand of private owners. . . » (n. 19: «Some of my arguments have been anticipated by E. Rawson. . . »). Cf. aussi p. 137-138 (où l'idée d'une phase de transition est envisagée). 8 G. Ville, La gladiature en Occident, des origines à la mort de Domitien, Rome (BEFAR, 245), 1981, p. 17. À vrai dire, cette thèse n'est pas récente et se trouve exprimée dans des ouvrages classiques et dans divers articles du Daremberg-Saglio : elle repose à cha que fois sur le seul passage de Pline, cité n. 21. Cf. par exemple L. Friedländer, Mœurs romaines du règne d'Auguste à la fin des Antonins, Paris, 1867 (trad, libre de Ch. Vogel), 2, p. 49-50; J. Toutain, art. ludi publici, Diet. Ant. Gr. et Rom., p. 1373; Bussemaker-E. Saglio, ibid., p. 1196; E. Egger-E. Fournier, art. corona, p. 1531. 9 Le document le plus ancien attestant cette pratique est une inscription du sanc tuaire thébain du Ptoion relatant la victoire aux Panathénées d'Alcméonidès, vers le milieu du VIe siècle (L. Moretti, Iscrizioni agonistiche greche, Rome, 1953, p. 10-12). Ce cas est très intéressant en ce sens qu'il semble bien que ledit Alcméonidès ait également remporté aux Panathénées une victoire athlétique (sans doute, la course hippios, cepen dantque son propre frère remportait le pentathlon; sur la course hippios, qui est égale ment attestée aux Jeux Néméens et qui se disputait sur une distance de 4 stades, hypothès e de J. Humphrey, op. cit., p. 9-10. Cf. L. Moretti, ibid. p. 8, n° 4). Autrement dit, Alcméon idès est un sportif accompli, mais, malgré cela, il laisse les rênes à un aurige profession nel : ce qui montre bien la difficulté et la technicité de cette épreuve.
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sation. D'autre part, le système romain, en quelque sorte «étatique», n'est pas lié véritablement à l'existence des factions, comme je le lais sais supposer plus haut par facilité, ces factions dont nous ne savons d'ailleurs pas quand elles sont apparues exactement; en tout cas, il a pu, il a dû y avoir auparavant un système où les chars étaient fournis par un magistrat, et où seuls les auriges, peut-être déjà revêtus de diffé rentes couleurs, s'affrontaient et recueillaient la gloire et les prix de la victoire, gloire qu'ils partageaient bien sûr avec Y editor, lequel en tirait lui un bénéfice essentiellement politique, pour le bon déroulement de son cursus honorum. C'est dans l'article d'E. Rawson que l'on trouvera les différents arguments des tenants du « Greek pattern ». Ces arguments sont de deux sortes, archéologique et littéraire : il y aurait tout d'abord une question d'ambiance culturelle, le modèle grec étant, selon E. Rawson, en v igueur aux VIe et Ve siècles av. notre ère, dans les régions proches de Rome et en particulier en Étrurie ; là, les aristocrates auraient participé en personne aux jeux hippiques et athlétiques, et Rome elle-même n'au rait pas dû échapper à ce mouvement culturel. Exemple de cette ten dance : la Tombe du Guerrier à Lanuvium, qui semble bien être, dans les premières décennies du Ve siècle, celle d'un personnage de haut rang, exaltant les valeurs athlétiques, puisqu'on y a retrouvé, en parti culier, tout un matériel allant dans ce sens (strigiles, alabastres, et sur tout un remarquable disque de jet gravé) 10. Mais on ne peut pas ne pas remarquer, avec F. Coarelli, que cette tombe est l'unique tombe de cavalier aristocratique, que l'on ait découverte dans le Latium, pour l'époque classique11 : il paraît donc difficile d'en tirer des conclusions d'ensemble pour la région et pour Rome en particulier. D'autant que cette tombe pourrait plutôt apparaître comme le témoin le plus septen trional d'un phénomène bien attesté en Grande-Grèce12, qui est celui
10 E. Rawson, art. cit., p. 2-3. Pour la Tombe du Guerrier de Lanuvium : A. Galieti, Contributo alla conoscenza dell'armatura dei prisci Latini, dans Arch, e società, 2, 1976, p. 45-50; G. Colonna, dans PP, 32, 1977, p. 151 sq.; J.-P. Thuillier, Les jeux athlétiques dans la civilisation étrusque, Rome (BEFAR, 256), 1985, p. 349-351. 11 F. Coarelli, Dintorni di Roma, Bari (Guide Laterza), 1981, p. 107. 12 Le très riche matériel, militaire (cuirasse anatomique, superbe casque, armes offensives) et agonistique, qui a été trouvé dans cette Tombe du Guerrier (et même s'il est vrai qu'il n'y a pas de céramiques dans cette tombe, comme le fait remarquer G. Colonna, art. cit., p. 155), à une époque où précisément les tombes des Latins se caractérisent par l'extrême pauvreté de leur mobilier (cf. G. Colonna, ibid., p. 155-156 : «Possiamo dunque
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des tombes d'athlètes, et, sur le plan idéologique, pour reprendre une expression d'A. Rouveret, celui de la «valorisation du sport qui s'expri me, à la même époque, dans les milieux aristocratiques grecs»13; les tombes de Tarente publiées par F. G. Lo Porto étant la plus belle illus tration de ce phénomène, mais on ne saurait oublier telle tombe messapienne d'Ugento14. Naturellement, si l'Étrurie, qui a tant influencé la Rome archaïque dans le domaine des jeux, avait elle-même appartenu à cette même sphère culturelle et idéologique, il y aurait là un élément de poids dans cette discussion. Mais, pour ma part, je ne crois pas que dans l'Étrurie du VIe et du Ve siècles, des représentants des classes aisées se soient jamais affrontés dans des compétitions sportives : en Étrurie, athlètes et auriges étaient des professionnels d'humble origine et non des aristo crates. Le cas du lutteur, de la tombe tarquinienne des Augures, qui porte le nom de latithe, est révélateur; si J. Heurgon pensait que ce nom était porté par «d'honorables familles de Cortone et de Chiusi» et en tirait des conséquences quant à la participation aux compétitions d'amateurs de haute condition15 - et s'il a été suivi par de nombreux auteurs sur ce point 16 -, nous savons maintenant en fait que latithe est ici un cognomen, que cet athlète est ainsi désigné au contraire comme appartenant à une catégorie inférieure de la population, et que ces ins criptions sur les parois de la tombe ne marquaient que la célébrité, que la notoriété sportive de ces athlètes-vedettes17. affermare che nel VI-V secolo le tombe dei Latini sono contraddistinte, in generale, da una pronunciata modestia ο totale assenza di corredi. . . ») n'est-il pas justement, sinon la preuve, du moins l'indice très fort que cette tombe n'appartient pas à cette ambiance culturelle latiale, mais ne peut qu'être rattachée à la «società magnogreca», où les idéaux athlétiques sont «così vivi», comme le rappelle encore G. Colonna, ibid., p. 155? 13 A. Rouveret, Les oiseaux d'Ugento, dans L'Italie préromaine, et la Rome républicai ne (Mélanges J. Heurgon), Rome {Coll. de l'École française de Rome, 27), 1976, p. 931. 14 F. G. Lo Porto, Tombe di atleti tarentini, Atti e Mem. Soc. Magna Grecia, 8, 1967, p. 31 sq.; Id., Tomba messapica di Ugento, dans Atti e mem. Soc. Magna Grecia, 11-12, 1970-1971, p. 150 sq.; A. Rouveret, art. cit., p. 927 sq. 15 J. Heurgon, La vie quotidienne chez les Étrusques, Paris, 1961, p. 258. 16 J. P. Néraudau, La jeunesse dans la littérature et les institutions de la Rome républi caine,Paris, 1979, p. 80; S. Stopponi, dans Gli Etruschi a Tarquinia, Milan, 1986, p. 266267. Comme M. Pallottino, Etruscologia, Milan6, 1973, p. 327, affirme une chose analo gue,on peut dire que cette idée est présente dans les deux ouvrages-phares de l'étruscologie. 17 H. Rix, Das etruskische Cognomen, Wiesbaden, 1963, p. 201, 235, 288-289 (η. 18). J.-P. Thuillier, op. cit., p. 545-546.
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Le cas de l'aurige véien Ratumenna, qui aurait donné son nom à une porte de Rome, et qui, selon Festus, aurait été de naissance illustre, n'est pas plus convaincant pour la démonstration18. Sans même s'attar der sur le fait que nous partons d'un texte douteux sur ce point précis, et s'il est vrai que le récit s'appuie sur des realia étrusques tout à fait vraisemblables, il est non moins évident que l'on ne pouvait donner à une porte de Rome, située de surcroît près du Capitole, le nom d'un manant : dans ce récit étiologique, cette indication sur l'éventuelle haut enaissance du personnage apparaît donc comme éminemment suspect e, - à une époque précisément où en Grèce même, les auriges étaient désormais des professionnels, souvent d'humble condition. En réalité et je me permets de renvoyer ici à mon livre de la Bibliothèque des Écol esfrançaises d'Athènes et de Rome les sources les plus fiables, qu'elles soient littéraires, épigraphiques ou iconographiques, nous montrent bien que, dans l'Étrurie du VIe et du Ve siècles av. notre ère, les athlètes étaient des professionnels de basse condition19, comme ces histrions esclaves de leur dominus, dont nous parle Tite-Live au début de son livre 5 : je ne cherche pas à préciser ici à quelle «classe» ils apparte naientexactement et ce que ce mot de servi recouvrait dans la société étrusque de ce temps20. J'ajoute qu'il n'y avait pas, selon moi, de tom bes d'athlètes dans les nécropoles étrusques : ainsi, il ne me paraît pas possible de retenir ce premier argument quant à l'existence d'une ambiance sportive de type hellénique dans l'Italie centrale du début du Ve siècle av. notre ère. Le second point - et à vrai dire le point central - en faveur de la thèse du «Greek pattern» en matière de ludi circenses archaïques, est constitué par un texte de Pline l'Ancien, qui paraît au premier abord sans ambiguïté. Je cite ce passage, dans la traduction française de la Collection des Universités de France : « En effet, lors des jeux, les citoyens non seulement descendaient en personne dans le cirque pour concourir mais encore y envoyaient leurs esclaves et leurs chevaux. De là cette loi des XII Tables : «Si quelqu'un gagne une couronne par luimême ou par son argent, qu'elle lui soit donnée pour son mérite». Per sonne n'a jamais douté que par «gagnée par son argent», la loi n'enten-
18 Festus 340L : « (clarusci) generis iuvenis Veiis. . . ». 19 J.-P. Thuillier, op. cit., IVe partie, (p. 683-686 en particulier). 20 Tite-Live, 5, 1, 4-5. Thuillier, ibid., p. 520-529.
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dît une couronne gagnée par ses esclaves ou ses chevaux»21. Ainsi, au milieu du Ve siècle, c'était donc le modèle grec qui, selon Pline, était aussi appliqué à Rome, et le nemo dubitavit de l'auteur semble interdi re toute discussion. Voire. À y bien regarder, la loi elle-même, telle qu'elle est d'ailleurs citée par Pline, ne fait aucune référence explicite à des jeux : «Qui cor onam paru ipse pecuniave eius, virtutis suae ergo duitor ei»22. Et on s'aperçoit alors que cette même loi somptuaire, qui s'inscrivait dans une série cherchant à limiter le faste de certaines funérailles, est égale ment citée par Cicéron dans le de Legibus, Cicéron qui ne fait pas là la moindre allusion à des jeux, à des festivals sportifs23. Comme l'avait déjà remarqué G. de Plinval, dans son édition du texte de Cicéron24, le soupçon vient alors légitimement à l'esprit que tout ceci n'est que l'i nterprétation personnelle - et erronée - de Pline (ou de sa source) qui avai(en)t en fait la situation grecque en tête; cette impression est confirmée par la phrase qui précède immédiatement le passage que je viens de citer, et dans laquelle Pline l'Ancien remarque que les couron nes agonistiques ont toujours (semper !) été recherchées25 : ce qui mani-
21 Pline I'Ancien, NH, 21, 5 : «Semper tarnen auctoritas vel ludicro quaesitarum fuit. Namque ad certamina in circum per ludos et ipsi descendebant et servos suos equosque mittebant. Inde Ma XII Tabularum lex : qui coronam paru ipse pecuniave eius, virtutisve suae ergo duitor ei : quant servi equive meruissent pecunia partant dici nemo dubitavit ». 22 Dans l'édition R. Schoell des XII Tabulae, Leipzig, 1866, p. 155, la table X, 7 est citée sous la forme suivante : «Qui coronam parit ipse pecuniave eius (honoris) virtutisve ergo arduuitur ei ». Mais cela ne change rien à la question qui nous intéresse ici. 23 Cicéron, de Legibus, 2, 24, 60 : «... quod coronam virtute partam et ei qui peperisset et eius parenti sine fraude esse lex impositam iubet ». 24 G. de Plinval, p. 75-76 de l'édition de la Collection des Universités de France : « Pli ne l'Ancien. . ., qui n'a peut-être pas bien compris le texte des XII Tables, suppose qu'il s'agit d'une couronne gagnée aux jeux par les exclaves ou les chevaux du vainqueur : cette couronne pouvait s'acquérir pecuniave eius virtutis causa. On peut penser qu'il s'agit d'une récompense décernée à un citoyen pour le remercier de l'argent donné à l'occasion d'une famine ou d'une calamité publique». Naturellement, on ne s'arrêtera pas ici à la traduction du mot pecunia, dont le sens dans les XII Tables n'est pas sans poser quelque problème. E. Rawson, art. cit., p. 4, explique cette «omission» de Cicéron de la façon sui vante : « It is significant that when in the late Republic they were financed quite different ly, and owners did not get individual prestige, Cicero, adapting the regulation in the XII Tables for his own idealized Rome in the De Legibus, is only concerned with crowns given for valour, and omits those won at the games altogether». Mais le passage en ques tion de Cicéron n'apparaît pas comme lié à une adaptation particulière. 25 Cf. n. 21. Ce point est d'ailleurs remarqué par E. Rawson, p. 4.
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festement ne saurait convenir à la société romaine de l'époque tardorépublicaine et du début de l'empire, mais seulement à la mentalité hel lénique. C'est parce qu'en matière de jeux le modèle grec était (et est encor e)hégémonique que Pline l'a appliqué à cette loi des XII Tables et a voulu retrouver dans la Rome archaïque le système d'organisation de type grec. Il ne faut pas oublier que Pline, par l'intermédiaire des œuvres d'art en particulier, statues d'athlètes, ex-votos agonistiques divers, avait souvent sous les yeux des références aux agônes helléni ques qu'il cite dans le même passage26; et au moment où il écrivait, la mode des certamina graeca commençait à se répandre en Italie, en Campanie comme à Rome27. Mais en réalité, la couronne obtenue ipse, par soi-même ou par sa valeur (virtuté) pouvait être, par exemple, une couronne militaire. Quant à celle qui était obtenue pecunia, par son argent ou plutôt par ses diverses possessions, il peut, il doit s'agir d'une récompense décernée pour un acte quelconque d'évergétisme. On peut d'ailleurs se demander si un passage de Denys d'Halicarnasse ne nous livre pas l'origine de l'erreur de Pline. Au livre 7 de ses Antiquités Romaines, après avoir décrit longuement la pompa circensis dans un texte essentiel pour nous, l'historien grec livre quelques considérations sur le déroulement des compétitions proprement dites, et ajoute : «Dans les intervalles entre les compétitions, on observait une coutume qui est typiquement grecque, et qui est la plus recommandable de tou tes, celle de couronner les évergètes et de proclamer les honneurs qui les récompensaient, comme cela se faisait à Athènes pour les fêtes de Dionysos»28. C'est peut-être parce que, dans la Rome du début du Ve
26 Pline, NH, 21, 3, 4 : «.Arborum enim ramis coronati in sacris certaminibus mos erat primum». On peut aussi citer ce passage de Pline, NH, 34, 19-20, où l'auteur signale, à propos de statues équestres, que l'usage du char à Rome pour les statues des triomphat eurs est emprunté à l'usage des ex-votos agonistiques grecs : là encore, on voit bien la différence de comportement entre Grecs et Romains par rapport aux jeux. («Equestres utique statuae Romanam celebrationem habent, orto sine dubio a Graecis exemplo. Sed Uli celetas tantum dicabant in sacris victores, postea vero et qui bigis vel quadrigis vicissent; unde et nostri currus nati in Us qui triumphavissent. . . Non vêtus et bigarum celebratio in Us qui praetura functi curru vedi essent per circum) ». 27 Cf. Par exemple L. Robert, dans CRAI, 1970, p. 6-27. 28 Denys d'Halicarnasse, 7, 73, 4: «έν δε τοις δια μέσου των αθλημάτων χρόνοις Έλληνικώτατον και κράτιστον απάντων έθών άπεδείκνυντο, στεφανώσεις καΐ αναρρήσεις ποιούμενοι τιμών αις έτίμων τους έαυτων εύεργέτας, ώς Άθήνησιν έν ταΐς Διονυσιακαΐς έγίνετο θυσίαις. . . ».
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siècle, le couronnement des bienfaiteurs, la remise de couronnes pour faits d'évergétisme se passaient au Circus Maximus pendant le déroule ment même des jeux, que ces couronnes ont été considérées par Pline l'Ancien ou sa source comme agonistiques (ou ludicrae), comme récom pensant des vainqueurs aux jeux. Bien d'autres éléments nous incitent alors à rejeter l'interprétation de Pline l'Ancien et donc le type d'organisation des ludi circenses à la grecque, que retiennent nombre d'historiens de cette période et de cette question. Comment se fait-il en effet que nous n'ayons pas la moindre indication d'un citoyen romain vainqueur lors des jeux du cirque, si ce modèle grec a duré pendant un temps relativement long29? Si des nota bles de la société romaine archaïque avaient engagé, comme dans le monde grec contemporain, leurs chars, leurs chevaux et leurs auriges, pour remporter au Grand Cirque des victoires qui devaient être pour eux source de profit et de prestige, il est inconcevable que ce type de participation, ces succès éventuels n'aient pas été enregistrés une seule fois, d'une facon ou d'une autre, dans nos sources : avec les distorsions auxquelles nous sommes habitués, avec les anachronismes bien connus, il n'en reste pas moins que nous devrions avoir quelques échos de ce qui aurait été alors une des préoccupations majeures de la classe diri geante. Comment se fait-il aussi que Denys d'Halicarnasse, qui décrit si minutieusement les ludi romains du début du Ve siècle, et qui insiste si pesamment - et si faussement - à cette occasion sur leur caractère hel lénique, n'insiste pas alors sur la similitude des modèles d'organisation qui auraient existé à cette époque en Grèce et à Rome? Il aurait tenu là l'argument le plus convaincant qui soit pour nous démontrer sa thèse de l'origine grecque des Romains30. Mais en réalité il se contente de noter que les magistrats romains disposaient déjà de certaines sommes
29 E. Rawson a d'ailleurs relevé cette difficulté (p. 2) : « Roman tradition does not recall any such victors among prominent citizens of early times. . . ». 30 On pourrait naturellement supposer que Denys est ici dépendant de sa source, Fabius Pictor, et que les informations de ce dernier ne remontaient pas sur ce point audelà de la période où le changement de système était déjà enregistré : mais, dans la pers pective des tenants du « Greek pattern », celui-ci était encore forcément en place après le milieu du Ve siècle, et Fabius devait avoir des sources remontant au moins jusque-là : cf. A. Piganiol, Recherches sur les jeux romains, Strasbourg, 1923, p. 15-31.
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pour remplir leur office à' editor ludorum 31 : ce qui certes n'est pas une preuve, puisque les dépenses ne concernaient pas que les concurrents, comme on le voit aussi en Grèce32, mais enfin cela va plutôt dans le sens du modèle romain traditionnel. . . Comment, pourrait-on encore remarquer, se fait-il que les Romains aient attendu le début du IIIe siè cle pour décerner des palmes aux vainqueurs, comme on le voit par Tite-Live33? Ne serait-ce pas parce que les récompenses honorifiques décernées à des auriges ou des athlètes de basse extraction n'avaient pas beaucoup d'importance? Il faut vraiment attendre, comme l'a bien noté G. Dumézil34, ce mouvement profond d'hellénisation, qui touche la société romaine au IIIe siècle, pour que cet usage soit lui-même adopt é dans les jeux. Est-il interdit d'ailleurs de se demander si les vainqueurs aux jeux romains étaient couronnés à l'époque archaïque? La chose est habituel lementconsidérée comme allant de soi, mais aucun document ne per met de l'affirmer en toute certitude35. Ainsi, dans le texte de Tite-Live,
31 Denys d'Halicarnasse, 7, 71, 2, dit expressément que les Romains consacraient chaque année 500 mines d'argent pour les jeux, soit 200.000 sesterces. Cf. déjà pour l'épo queroyale, Ps. Asconius, p. 142 Orelli : «.Romani ludi sub regibus instituti sunt magnique appellati, quod magnis impensis dati : tune primum ludis impensa sunt ducenta milia nummum·». Cette somme est passée ensuite à 333.333 sesterces 1/3, au moment de la deuxième guerre punique (217 av. notre ère, Tite-Live, 22, 10, 7). Sur la chronologie du budget consacré aux jeux, voir A. Piganiol, op. cit., p. 16-17 32 Cf. par exemple, pour Delphes, ce témoignage épigraphique couramment appelé « Les comptes de Dion » et qui détaille, non sans poser quelques questions, les différentes dépenses engagées pour l'aménagement des lieux de spectacle : voir en particulier J. Pouilloux, Travaux à Delphes à l'occasion des Pythia. «Les comptes de Dion. 247/6», dans Études delphiques, BCM, suppl. IV, Paris, 1977, p. 103 sq. 33 Tite-Live, 10, 47, 3 : «eodem anno (il s'agit de 293 av. notre ère) coronati primum ob res bello bene gestas ludos Romanos speetarunt palmaeque turn primum translato e Graeco more victoribus datae». 34 G. Dumézil, La religion romaine archaïque, Paris, 1966, p. 430 : «Les modes grec ques avaient alors commencé leur grande carrière. Cette année même, pour la première fois, les Quirites assistèrent aux ludi Romani une couronne sur la tête, et, pour la premiè re fois, translato e Graecia more, on donna des palmes aux vainqueurs ». 35 Ainsi, E. Rawson, p. 4, n. 13, note-t-elle, à propos de ce texte de Tite-Live: «Livy notes that in 292 B.C. palms were also (sic) introduced in victory» (laissant sans doute entendre par là que les palmes s'ajoutaient aux couronnes : mais, comme on le voit, le texte de Tite-Live ne dit rien de tel). À vrai dire, les seuls textes qui témoignent de ce fait sont ceux de Festus 60L («idonaticae coronae dictae, quod his victores in ludis donabantur, quae postea magnificentiae causa institutae sunt super modum aptarum capitibus, quali amplitudini fiunt, cum Lares ornantur», et de Pline l'Ancien lui-même qui indique que les
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que nous citions à l'instant, on constate que ce sont les spectateurs (ou plutôt certains d'entre eux) qui aux jeux sont coronati36. Et naturelle ment, pour le cas où les couronnes agonistiques n'auraient pas existé dans le cirque archaïque, l'interprétation de Pline l'Ancien tomberait d'elle-même. Une fois de plus, on constate qu'au cirque de Rome - ici
premières couronnes d'or et d'argent auraient été données par Crassus Dives au IIe siè cle. . . («Crassus Dives primus argento auroque folia imitatus ludis suis coronas dédit. . .», HN, 21, 4, 3 - encore qu'il ne soit pas sûr que les couronnes aient été données ici aux vainqueurs sportifs). En tout état de cause, ces deux passages ne permettent pas d'affi rmerque la remise de couronnes aux vainqueurs aux jeux était en vigueur à l'époque archaïque; peut-être cette tradition est-elle postérieure à 186 av. notre ère, quand des athletae - à la grecque - ont été présentés pour la première fois à Rome : naturellement, la chose est claire pour la fin de la République et l'Empire, où les représentations d'auriges couronnés par exemple sont assez nombreuses (cf. aussi pour les jeux des Frères Arvales, CIL, VI, 2065 = Dessau, ILS, 5037 : «... victores palmis et coronis argenteis honoravit»). Dans cette perspective, on pourrait encore rappeler le cas des munera, où la pal me est la récompense banale (et originelle?), cependant que la couronne est exceptionnell e - tout au moins dans les premiers temps - (et rajoutée à la palme?) : cf. G. Ville, op. cit., p. 313 sq., 426. On peut d'ailleurs noter la différence de vocabulaire entre Rome et Athènes de ce point de vue : à Rome, la victoire, c'est la palme, comme le montrent bien textes littéraires et surtout inscriptions (vincere palmas), tandis qu'en Grèce, être victo rieux, c'est être couronné. D'autre part, il n'est pas du tout sûr que les athlètes étrusques aient été régulièrement couronnés, contrairement aux banqueteurs par exemple, - mais il est vrai que les artistes étrusques s'intéressent plus au déroulement des épreuves sporti ves qu'à leur environnement (J.-P. Thuillier, op. cit., p. 606). On notera cependant que sur le relief de Païenne 8385 (J.-R. Jannot, Reliefs archaïques. . ., C, I, 8b, fig. 171), qui est le seul document à montrer spécifiquement et en entier le moment de la remise des prix, il n'y a ni palme ni couronne - qui pourraient parfaitement être posées sur une table ou tenues par un appariteur - mais seulement des outres, récompenses matérielles. Et sur le kylikeion de la Tombe tarquinienne du Guerrier (IVe siècle), figurent des vases de toutes sortes, mais aucune couronne : cf. au contraire les tables de récompenses en Grèce et à Rome à l'époque tardive (reliefs, mosaïques. . .). Je ne crois pas enfin qu'on puisse atta cher beaucoup d'importance à ce passage de Servius, ad Aen., 11, 134 : «denique obsessa urbe a Tarquiniis inter Porsennam et Romanos factis indutiis, cum ludi circenses in urbe celebrarentur, ingressi hostium duces curuli certamine contenderent et victores coronarentur » : ce passage me paraît surtout révélateur de ce qu'a été véritablement la geste de Porsenna à Rome, et peut-être aussi de l'intérêt des Romains et des Clusiens pour les ludi; mais on ne saurait prendre pour argent comptant tous les détails touchant aux realia. 36 Pour G. Dumézil, ce sont apparemment tous les citoyens qui sont couronnés (cf. notre note 34, et lui-même, ibid., p. 437 : «... aux jeux qui sont célébrés ob res bello bene gestas, les citoyens assistent coronati, et des palmes sont remises aux vainqueurs»). Cf. en revanche la traduction de l'édition Loeb : « This year for the first time those who had been presented with crowns because of gallant behaviour in the war wore them at the
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pour la question des couronnes - c'est le spectateur qui d'un point de vue idéologique et social, est important37, et non l'athlète participant en personne aux compétitions : différence essentielle entre les compor tements grec et romain, et que les auteurs anciens n'ignoraient pas. Et surtout, si l'on admet que les jeux romains se déroulaient, au début du Ve siècle, selon un schéma d'organisation et de financement semblable à celui des grands jeux panhelléniques, il me paraît impossi ble d'arriver à saisir l'évolution qui aurait abouti au système romain traditionnel. On sait en effet qu'au moment de la deuxième guerre punique, celui-ci était déjà en vigueur, avec la locatio3* : les magistrats passaient alors des contrats avec les éleveurs de chevaux et certains citoyens soumissionnaient pour la fourniture des chevaux (et sans dout edes chars)39. C'est donc désormais l'État qui paie pour obtenir des
Roman games, and palms were the for the first time conferred upon the victors, in accordance with a custom borrowed from the Greeks». Si cette seconde interprétation paraît plus vraisemblable, aucune des deux traductions n'est vraiment satisfaisante : peut-être faudrait-il amender ici le texte de Tite-Live. 37 À propos des couronnes concernant les spectateurs aux jeux et non les acteurs même de ces jeux, cf. encore Pline l'Ancien, HN, 21, 8 : «L. Fulvius argentarius bello puni co secundo cum corona rosacea interdiu (e) pergula sua in forum prospexisse dictus ex auctoritate in carcerem abductus non ante finem belli emissus est. » (ici donc pour le spectacle des gladiateurs : avec le commentaire de F. Coarelli, // foro romano. 2. Periodo repubbli cano e augusteo, Rome, 1985, p. 145. On notera de surcroît que Pline semble introduire cette remarque à propos des ludicrae coronae, ce qui laisse planer un doute sur le sens de cette expression. 38 Cf. en effet Tite-Live, 24, 18, 10 : «.Cum censores ob inopiam aerarti se iam locationibus abstinerent aedium sacrarum tuendarum curuliumque equorum praebendorum ac similium his rerum, convenire ad eos fréquentes qui hastae huius generis adsueverant, hortarique censores ut omnia proinde agerent locarent ac si pecunia in aerario esset : neminem nisi bello confecto pecuniam ab aerario petiturum esse-» (ceci se passe en 214 av. notre ère). Sur le sens de l'expression equi cu(r)rules, parfois comprise à tort (cf. éd. Loeb) comme désignant les chevaux des tensae de la pompa, justes remarques d'E. Rawson, p. 56 (cf. Festus, 43 L). 39 Ce système est souligné par d'autres auteurs que Tite-Live, qui font allusion en particulier au droit - exceptionnel - qu'avaient alors les sénateurs de soumissionner pour ces fournitures honorifiques, à caractère religieux (cf. C. Nicolet, L'ordre équestre à l'épo que républicaine (312-43 av. J.-C), Paris, 1974, 1, p. 327-330). E. Rawson, p. 9-12, étudie minutieusement l'expression equi (ou quadrigae) vectigales utilisée deux fois par Cicéron (ap. Asconius, In orat. in toga cand., éd. A. C. Clark, Oxford, 1956, p. 93; Phil., 2, 25, 62), et estime qu'il ne s'agit pas seulement ici de l'obtention du contrat pour la fourniture des chevaux de course (comme le pensent C. Nicolet et les éditeurs des Philippiques dans la Collection des Universités de France, A. Boulanger et P. Wuilleumier). Pour elle, cela signi-
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chevaux pour les jeux, ce ne sont plus de grands personnages qui s'en gagent pour conquérir la victoire et tout le prestige qui en découle. Une fois de plus, cela n'a pas forcément à voir avec le système bien structu ré des factions40, même si on peut supposer que la naissance de cellesci a été favorisée par le développement des jeux à l'intérieur de ce cadre; la date d'apparition exacte des factions est, comme on sait, très controversée : ce qui est sûr, c'est que désormais (et à mon avis plutôt depuis les origines) la faveur du public allait aux agitatores et à X editor et non pas aux propriétaires. Admettons provisoirement qu'on soit passé d'un, système à l'autre. Nous laisserons de côté la question du pourquoi : P. Veyne se contente de signaler le changement («Et puis Rome divergea, se sépara de la Grèce. . . »), mais E. Rawson suppose soit une décadence économique soit une volonté politique de ne plus laisser certains individus obtenir trop de prestige par une victoire aux jeux41. Mais on peut tout de même penser que les grands à Rome avaient bien d'autres occasions de se distinguer - par exemple dans une cérémonie, comme celle du fierait que désormais «one pays a fee to the treasury for the right to enter one's horses or chariots in the races » (p. 1 1 ; cf. encore le résumé en italien : « Probabilmente quando i premi divennero più consistenti furono gli allevatori a pagare lo stato per il diritto a competere». Mais on ne voit pas très bien comment ni pourquoi cette situation nouvelle pourrait s'insérer entre deux périodes où le système traditionnel de la locano est attesté (par Tite-Live pour la seconde guerre punique et par Dion Cassius pour l'époque d'Aug uste, 55, 10, 5 : «... και τήν τε παράσχεσιν των ϊππων των ές την ίπποδρομίαν άγωνιουμένων και τήν του ναοϋ φυλακήν και βουλευταϊς έργολαβεΐν έξείναι. . . ». 40 Mais on peut penser que l'apparition des «couleurs», attestées à la fin de la Répub lique, a précédé celle des factions proprement dites, qui ne le sont qu'au 1er siècle de notre ère. Ainsi, pour A. Cameron, Circus factions, Oxford, 1976, p. 59, «the colours thems elves probably go back much further than the factions as we find them in the first cen tury A.D.»; A.Cameron estime d'ailleurs que les couleurs remonteraient à l'époque archaïque et seraient liées aux tribus originelles : on voit ainsi qu'il ne partage pas la thèse des partisans du « Greek pattern ». On trouvera un bon résumé des différentes posi tions dans l'ouvrage de J. Humphrey, p. 137-138 (l'auteur estimant que la «construction» des carceres en 174 - Tite-Live, 41, 27, 6 - pourrait être liée à une réorganisation d'en semble des ludi). Et, comme on sait, Agrippa est aussi un bon candidat à la «paternité» des factions : son rôle édilitaire au Cirque, et, d'une façon générale, dans le Champ-deMars - où se trouvent les stabula des factions - est en effet loin d'être négligeable : cf. M. Roddaz, Marcus Agrippa, Rome (BEFAR, 253), 1984, p. 288-290. 41 E. Rawson, ibid., p. 5. Il est curieux de voir que cette dernière raison est déjà invo quée pour justifier certaines mesures tendant à limiter le luxe funéraire, dans les Lois des XII Tables, alors que précisément les couronnes agonistiques auraient échappé a cette politique de restriction.
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triomphe. . . - et ces occasions n'ont pas été supprimées pour autant. Pourquoi les ludi Romani auraient-ils fait l'objet, après 450, d'une dis position particulière? Mais la simple question du comment me paraît, elle, déboucher sur une réelle impossibilité. Ce n'est pas une évolution plus ou moins progressive qui est enregistrée, c'est un changement complet ou plus exactement un renversement total : n'oublions pas en effet que les compétitions athlétiques sont également mentionnées dans le texte de Pline. Ainsi, du jour au lendemain, au Grand Cirque, on serait passé d'épreuves mettant aux prises des citoyens distingués à des compétitions réservées à des athlètes de rang servile ou approchant. Comment imaginer, comment justifier ce saut dans les habitudes et les mentalités? Et en tout cas, certes pas par une période de cœxistence entre les deux systèmes, tout à fait inconcevable d'un point de vue poli tique et social42. En réalité, il est beaucoup plus logique et beaucoup plus économi que de supposer que le modèle «étatique», si je puis ainsi m'exprimer disons le «modèle romain» par rapport à ce que nous avons appelé jus qu'à présent le «modèle grec» - a été en vigueur à Rome dès les origi nes, et qu'en particulier il était appliqué au début du Ve siècle avant notre ère, comme il l'était sans conteste dans l'Étrurie archaïque. Cette hypothèse correspond mieux à ce que nous savons de l'influence étrus que43, unanimement reconnue aujourd'hui en ce domaine, et à ce que nous indiquent ou plutôt nous suggèrent les rares textes évoquant les ludi circenses de cette époque. Ainsi, quand Tarquin l'Ancien organisait des jeux à Rome, à la fin du VIIe siècle, dans ce qui était désormais le Circus Maximus, il faisait venir principalement d'Étrurie des boxeurs et des chevaux (et on peut supposer aussi des cavaliers et des auriges) : «ludicrum fuit equi pugilesque ex Etruria maxime aeriti»**. C'est de la même façon, et avec le même vocabulaire, qu'on appelait à Rome un
42 J. H. Humphrey, op. cit., p. 138. 43 Cette influence a été mise en évidence par R. C. Bronson, J. H. Humphrey et moimême, et elle est acceptée par E. Rawson. Mais, à ce propos, je ne comprends pas la première phrase de sa conclusion, p. 16 : «... and that though Rome exhibits various fea tures that were ' Etruscan ' rather than Greek, its organisation and financing followed the (usual) Greek pattern both in Etruria and Rome». Puisqu'elle estime en effet que les Etrusques utilisaient ce Greek pattern (ce qui, selon moi, est erroné), il n'y a pas de contradiction entre le fait que Rome ait emprunté ses sports à l'Étrurie et ait adopté ce système grec, qu'elle trouvait donc soi-disant aussi en Étrurie. 44 Tite-Live, 1, 35, 8.
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certain nombre d'artisans qualifiés et d'artistes, des artifices, chargés par exemple de décorer tel ou tel édifice45. C'est évidemment un syst èmesemblable à celui que nous découvrons en Étrurie au Ve siècle, et semblable à celui que nous voyons fonctionner à Rome, sous la Répub lique : dans ce dernier cas, les magistrats, disposant alors d'une som mequi leur est allouée par le Trésor (c'est le lucar, en ce qui concerne au moins les jeux scéniques)46, et pouvant dépenser des sommes sup plémentaires, en puisant dans leur propre bourse, se procurent l'e nsemble des éléments humains, animaux et matériels, nécessaires à l'o rganisation des festivités. Certes, il n'y avait pas encore dans la Rome royale le système de la locano et du contrat - peut-être d'ailleurs ce système n'a-t-il jamais été utilisé pour des jeux mineurs - mais l'impor tant est qu'en aucun cas, on ne voit de riches propriétaires engager per sonnellement leurs chevaux et leurs attelages pour remporter une vic toire qui serait, pour eux-mêmes, source de profit et de prestige. P. Veyne faisait remarquer qu'il n'y avait pas à Rome de Pindare pour chanter les exploits des vainqueurs aux jeux, et, certes, cela peut bien s'expliquer par l'état de la littérature latine au Ve siècle! Mais, plus grave, on constate aussi qu'il n'y a pas le moindre vainqueur : décidé ment, si la pièce du «Greek pattern» a de nombreux auteurs, on est en revanche en quête de personnages. En fait, si le modèle grec est si sou vent mis en avant par les historiens des ludi archaïques, c'est moins pour les raisons archéologiques et littéraires examinées plus haut, qu'en raison du gréco-centrisme qui règne en ce domaine : l'impact des agônes panhelléniques, et en particulier, l'importance et la célébrité des courses hippiques en Grèce accréditent la théorie de l'universalité du modèle grec d'organisation, pour l'époque archaïque tout au moins47 : 45 Tite-Live, 1, 56, 1 : «intentus perficiendo tempio fabris undique ex Etruria accitis. . . ». Cf. aussi Cicéron, Har., 25, à propos de ces techniciens de la divination que sont les haruspices. 46 Sur le lucar, qui serait constitué par le revenu tiré de l'exploitation des bois sacrés, des lud, voir par exemple P. Veyne, Le pain et le cirque, Paris, 1976, p. 389, sq., et p. 497, n. 43. 47 Ainsi est-il caractéristique de voir que même les auteurs qui soulignent les diffé rences entre les courses de chars en Grèce et en Étrurie, et les ressemblances entre les courses de chars étrusques et romaines, tiennent cependant à considérer que la Grèce est à l'origine de tout. Ainsi, E. Rawson, qui reconnaît parfaitement que « the costume of the drivers (étrusques) is very much closer to that known from Rome in the imperial period than it is to that of classical Greece » (p. 6), écrit-elle aussi : « Probably the Etruscans had learnt the custom from the Greeks» (p. 2). Cf. aussi H. A. Harris, op. cit., p. 185 : « Whe-
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lors même qu'on insiste sur les influences étrusques, et sur les différen ces entre courses étrusques et courses grecques, on veut cependant voir reproduit ce modèle grec à Rome. Cette hypothèse est évidemment faci litée par le fait que les lacunes sur cette période sont considérables - ce qui ne veut pas dire pour autant que nous connaissions parfaitement le fonctionnement des courses de chars et l'organisation des factions à l'époque impériale48. Il est un point sur lequel je partage l'opinion d'E. Rawson, dans sa conclusion : c'est que cette question est important e pour saisir le comportement de l'aristocratie romaine; mais, s'il y a une différence d'« ethos», ce n'est pas entre les aristocraties romaines du début et du milieu de la République, c'est entre les aristocraties grecque et romaine - et cela est déjà vrai au début du Ve siècle avant notre ère49. Jean-Paul Thuillier
ther the Romans took chariot-racing from the Greeks or the Etruscans is uncertain ; it is in any case an academic point, since the Etruscans probably took it from the Greeks». II est nécessaire de rappeler que les Grecs n'ont pas inventé tous les sports et que beaucoup d'entre eux sont attestés dans d'autres civilisations, qui n'ont pu en aucun cas les emprunter à la culture hellénique. 48 Cf. H. A. Harris, op. cit., p. 213. On peut ainsi se demander quels étaient le rôle et l'autonomie des familiae à l'intérieur d'une faction déjà constituée; cf. Dessau, ILS, 5312 : «... Familiae panni russei C. Ceioni Maximi. . .». Mais sans doute étaient-ce les domini de cette familia qui pouvaient alors soumissionner, à titre individuel, dans le cadre de la faction : on ne comprendrait pas sinon le sens de la phrase de Dion Cassius, que nous avons citée plus haut (n. 39). Plus tard, les factions ayant sans doute été structurées de façon plus homogène (E. Rawson, p. 8, n. 35), ce type d'intervention a dû disparaître. 49 E. Rawson, art. cit., p. 16. Notons enfin que toutes les tentatives faites pour retrou ver d'éventuelles couleurs sur les fresques étrusques représentant des courses de chars s'avèrent infructueuses : c'est évidemment le seul souci de la variété esthétique qui pous se les artistes étrusques à peindre en rouge ou en bleu les tuniques des auriges; de la même façon, il est parfaitement aléatoire de s'appuyer sur le nombre de chars peints sur telle ou telle fresque, pour en tirer des conclusions sur l'ensemble du système qui régis saitces courses (ibid., p. 6). Il est clair en effet que les peintres étrusques étaient tenus par diverses contingences, de place en particulier, et qu'ils ne pouvaient sur ce point res pecter les realia dans toute leur précision.
OLIVIER DE CAZANOVE
LE SANCTUAIRE DE CÉRÈS JUSQU'À LA DEUXIÈME SÉCESSION DE LA PLÈBE REMARQUES SUR L'ÉVOLUTION D'UN CULTE PUBLIC
Le premier demi-siècle de la République est, sans contredit, une période d'essai de nouvelles formes institutionnelles qui, de la chute des rois et, un peu plus tard, du début du conflit des ordres, jusqu'au décemvirat législatif, à l'affichage des XII Tables et à la restauration démocratique, va donner l'essentiel de ses mécanismes de fonctionne ment à l'État romain. Ce que l'on voudrait montrer ici, c'est que, paral lèlement à cette phase de mise en place des structures politiques, existe aussi une phase de formation des institutions religieuses. Dans une société où politique et religieux sont indissociables, où ils ne sont, pour mieux dire, que les deux faces de la même réalité, les cultes ne sont pas donnés, figés, une fois pour toutes. Ils évoluent, au même rythme que la constitution de la cité dont ils assurent la légitimité. Ce qui est vrai de tous les cultes publics, l'est particulièrement pour celui de Cérès, plus que tout autre impliqué dans les vicissitudes du conflit patricioplébéien. Cette évolution conjointe du politique et du religieux, de la lutte des ordres et de Yaedes Cereris, constitue le fil conducteur des remarques qui suivent. On ne traitera donc pas ici de questions importantes - la localisation du temple, son architecture et son décor, les formes du culte etc. - pour lesquelles on ne peut que renvoyer à une abondante bibliographie1. On laissera même largement ouvert le problème de 1 La thèse exhaustive d'H. Le Bonniec, Le culte de Cérès à Rome, des origines à la fin de la République, Paris, 1958, regroupe commodément la bibliographie antérieure à cette date. Depuis lors, et malgré les analyses, en faveur d'une chronologie basse d'A. Alföldi (// santuario federale latino di Diana sull'Aventino e il tempio di Cerere, dans SMSR, 32,
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l'origine du sanctuaire. L'essentiel, en effet, n'est pas tant de remonter à un commencement absolu, d'ailleurs introuvable, d'isoler à tout prix un élément premier, «chimiquement pur», que de comprendre par quel processus complexe le temple de Cérès est devenu ce qu'il est : le lieu privilégié où se cristallisent les nouvelles institutions plébéiennes. Cette cristallisation apparaît achevée avec les lois Valeriae Horatiae consécutives à la deuxième sécession, qui sanctionnent officiellement le lien étroit existant entre les magistratures de la plèbe et Y aedes Cereris. Ce sont précisément les mécanismes qui ont permis d'en arriver là que l'on s'efforcera de décrire : ceux d'abord de la fondation du temple ; ceux, ensuite, qui mettent en crise l'institution capitoline (j'entends par là l'ensemble des manifestations qui se rattachent au sanctuaire de Jupiter Optimus Maximus) et ouvrent de ce fait un espace plus large au culte public de Cérès; ceux, enfin, qui vont permettre de résoudre, pour un temps, la crise politique et religieuse par le recours à de nouveaux modèles, grecs et plus spécifiquement attiques.
La fondation du temple Deux textes bien connus de Denys d'Halicarnasse relatent briève mentles circonstances de la fondation du temple. Les voici : En 499 ou 496 av. J.-C. (chronologie varronienne)2, la bataille du Lac Régule dresse contre Rome les Latins coalisés. Le dictateur A. Postumius Albus les défait et rentre à Rome en triomphe. C'est le moment des actions de grâces : «[Postumius] préleva la dîme du butin; il consacra 40 talents à fai re célébrer des jeux et des sacrifices pour les dieux et afferma, selon son vœu, la construction de temples à Demeter, Dionysos et Coré. De fait, au début de la campagne, l'insuffisance des approvisionnements 1961, p. 21-39; Early Rome and the Latins, Ann Arbor, 1965, p. 92 et suiv.), la datation traditionnelle du sanctuaire est généralement acceptée : cf., entre autres, A. Momigliano, Quarto contributo alla storia degli studi classici, Rome, 1969, p. 344 et suiv.; p. 451 et suiv.; J.-C. Richard, Les origines de la plèbe romaine, (BEFAR, 232), Rome, 1978, p. 504 et suiv. 2 Tite-Live (avec hésitation: Π, 19, 1 et suiv.; 21, 3) place l'événement en 499 av. J.-C. ; Denys (VI, 2, 1 et suiv.) en 496. La date la plus généralement retenue était la deuxiè me (R. M. Ogilvie, A commentary on Livy, booL· 1-5, Oxford, 1965, p. 286), tandis que la première peut dépendre de Cn. Gellius et de Licinius Macer, critiqués par Denys (VI, 11, 2) et dont les versions concordent avec celle de Tite-Live (II, 19, 6).
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de l'armée avait donné fort à craindre aux Romains qu'ils ne manquent complètement : la terre était stérile et les importations de vivres n'étaient plus convoyées, à cause de la guerre. Cette peur est la raison pour laquelle [Postumius] ordonna aux gardiens des Livres Sibyllins de s'y reporter; lorsqu'il sut quels dieux les oracles prescrivaient de propitier, il leur adressa des vœux, au moment d'emmener l'armée en expé dition : si la récolte de l'année était, pour la ville, aussi bonne sous sa propre magistrature qu'auparavant, il leur érigerait des temples et ins tituerait pour eux des sacrifices annuels. [Les dieux] l'exaucèrent et firent en sorte que la terre produise en abondance - la terre ensemenc ée mais aussi la terre plantée d'arbres - et que toutes les importations de vivres affluent davantage qu'auparavant. Voyant cela, Postumius fit voter la construction de ces temples»3. En 493 av. J.-C. Varr., alors que Postumus Cominius Auruncus mène campagne contre les Volsques, «Cassius, l'autre consul qui avait été laissé à Rome, dédicaça pendant ce temps le temple de Demeter, Dionysos et Coré qui se trouve à l'extrémité du Circus Maximus, juste au-dessus des carceres4; en effet le dictateur Aulus Postumius avait fait le vœu, au nom de la cité, de le consacrer aux dieux, à l'époque où il devait combattre l'armée des Latins; or le sénat, après la victoire,
3 DH, VI, 17, 2-4 : από δέ των λαφύρων έξελόμενος τας δεκάτας αγώνας τε και θυσίας τοις θεοις από τετταράκοντα ταλάντων έποίει και ναών κατασκευας έξεμίσθωσε Δήμητρι και Διονύσω και Κόρη κατ' εύχήν. έσπάνισαν γαρ αϊ τροφαί του πολέμου κατ' αρχάς καί πολύν αύτοΐς παρέσχον φόβον ώς έπιλείψουσαι, της τε γης άκαρπου γενομένης καί της έξωθεν αγοράς ούκέτι παρακομιζομένης δια τον πόλεμον. δια τοΰτο το δέος άνασκέψασθαι τα Σιβύλλεια τους φύλακας αυτών κελευσας, ώς εμαθεν οτι τούτους έξιλάσασθαι τους θεούς οί χρησμοί κελεύουσιν, εύχάς αύτοΐς έποιήσατο μέλλων έξάγειν τον στρατόν, έάν εύετηρία γένηται κατά την πόλιν έπί της ιδίας αρχής οϊα πρότερον ήν, ναούς τε αύτοΐς καθιδρύσεσθαι καί θυσίας καταστήσεσθαι καθ' εκαστον ένιαυτόν. οί δε ύπακούσαντες την τε γήν παρεσκεύασαν άνεΐναι πλουσίους καρπούς, ού μόνον την σπόριμον, αλλά καί την δενδροφόρον, καί τας έπεισάκτους αγοράς άπάσας έπικλύσαι μάλλον ή πρότερον · απερ ορών αυτός ό Ποστομιος έψηφίσατο τας των ναών τούτων κατασκευας. Ρωμαίοι μεν δη τον τυραννικόν άπωσάμενοι πόλεμον ευνοία θεών έν έορταΐς τε καί θυσίαις ήσαν. 4 Η. Le Bonniec, op. cit., p. 271 et suiv., comprend différement υπέρ et traduit «exac tement au-delà des remises». Il est ainsi amené à reproposer l'identification, déjà soute nuepar Nibby, Canina, Lanciani etc., et reprise par G. B. Giovenale, La Basilica di S. Mar ia in Cosmedin, Rome, 1927, p. 47, du maximum monumentum de Tibertinos tufos démoli , sous le pontificat d'Adrien Ier, pour faire place à cette église, avec le podium de l'aedes Cereris ; interprétation combattue, en dernier lieu, par F. Coarelli, // Foro Boario, Rome, 1988, p. 67 et suiv., qui se rallie à la localisation de Ch. Hülsen, // Foro Boario e le sue adiacenze nell'antichità {Dissert. Pont. Accad., II, 6), 1896, p. 271.
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avait décrété qu'il serait entièrement construit avec l'argent du butin, et c'est à ce moment que les travaux avaient pris fin»5. Le deuxième de ces textes peut être précisément confronté avec un passage de Tacite - il s'agit d'ailleurs du seul témoignage extérieur qui corrobore les dires de Denys. Tacite note qu'en 17 ap. J.-C, Tibère dédi caça à nouveau, après restauration, «[le temple] de Liber, Libera et Cérès auprès du Circus Maximus qu'avait voué le dictateur Aulus Postumius»6. L'historien donne là, à propos d'un événement officiel, un signalement du temple réduit à l'essentiel : son titre exact (aedes Cereris Liberi Liberae), sa localisation, le nom de son fondateur; tous éléments qui, à la limite, pouvaient être déduits de la simple vision de l'édifice et de son inscription dédicatoire. À l'évidence, la deuxième notice des Antiquités Romaines est bâtie exactement sur le même modèle et donne, dans sa sécheresse, la même impression d'authenticité. Seul change le nom du dédicateur, puisque Denys parle de la consécration originelle du temple. De celle-ci, Tite-Live ne dit mot, mais son silence même est peut-être significatif : Cassius restait, pour la postérité, un traître cou pable d'avoir aspiré au trône7. Il est logique que, dans ces conditions, on ait cherché à minimiser le rôle qu'il avait joué dans la formation des
5 DH, VI, 94, 3 : Κάσσιος δ' ό έτερος των υπάτων ό καταλειφθείς έν τρ Ρώμη τον νεών τής τε Δήμητρος και Διονύσου και Κόρης έν τω μεταξύ χρόνφ καθιέρωσεν, ος έστιν έπί τοις τέρμασι του μεγίστου των ιπποδρόμων υπέρ αύτας ιδρυμένος τας αφέσεις, εύξαμένου μέν καθ' δν χρόνον αυτόν Αυλού εμελλενΠοστομίου άγωνίζεσθαι τουπρος δικτάτορος την Λατίνων υπέρ της στρατιάν, πόλεωςτης άναθήσειν τε βουλής τοιςμετά θεοΐς, τό νίκημα την κατασκευήν αύτοΰ ψηφισαμένης έκ των λαφύρων ποιήσασθαι πάσαν, τότε δε τοΰ έργου λαβόντος τήν συντέλειαν. Dans le premier texte cité, Denys parle de temples ; dans le second d'un seul. Ce pas sage du pluriel au singulier a retenu l'attention de la critique (H. Le Bonniec, op. cit., p. 215); en réalité, Denys parle d'un seul et unique temple, à l'intérieur duquel se juxtapo sent trois cellae (dédiées chacune à une divinité distincte, selon les règles du droit pontifi cal qui negabant unam cellam duobus dis recte dedicari : Liv., XXVII, 25, 8) ; même varia tionde Denys à propos du temple capitolin : III, 69, 1 (τον νεών . . . τοΰ τε Διός και της Ήρας και της Αθηνάς) et IV, 59, 1 (τφ Διί και τ// Ήρα και τί\ Άθηνη. . . . ναούς). 6 Tac, Ann., Π, 49: deum aedis. . . dedicauit, Libero Liberaeque et Cereri iuxta circum maximum, quam A. Postumius dictator uouerat. 7 Th. Mommsen, Sp. Cassius, M. Manlius, Sp. Maelius. Die drei Demagogen der älteren republikanischen Zeit, dans Hermes, 5, 1871, p. 228 et suiv. (=Römische Forschungen, II, Berlin, 1879, p. 153 et suiv.); dans le même sens (condamnation du personnage par la propagande anti-gracchienne), E. Gabba, Dionigi d'Alicarnasso sul processo di Spurio Cassio, dans La storia del diritto nel quadro delle scienze storiche, Atti 1° Congr. intern. Soc. hai. St. Dir., Florence, 1966, p. 143 et suiv.
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institutions politiques et religieuses de la République. Denys lui-même, comme embarrassé, met l'accent sur le concours de circonstances qui ont permis à Cassius de procéder à la dédicace : il s'est trouvé qu'à ce moment l'autre consul était absent de Rome, et que les travaux affer méspar Postumius étaient achevés. Le premier texte de Denys d'Halicarnasse, plus détaillé, est aussi plus criticable. Certes, le silence qu'observe Tite-Live en cette occasion également, peut s'expliquer par la gêne manifeste qu'éprouve l'histo rien en face des chronologies discordantes des débuts de la République, qui l'ont sûrement contraint à opérer des coupes parmi les différentes sources qu'il pouvait avoir sous les yeux; cela est particulièrement vrai pour la bataille du Lac Régule qu'il ne sait où placer, en 499 ou 496 av. J.-C.8. Le témoignage de Denys n'en reste pas moins suspect. On a le sentiment que l'annaliste n'avait presque pas d'autres éléments à sa dis position que ceux qu'il mentionne à propos de la dédicace («le dictateur Aulus Postumius avait fait le vœu, au nom de la cité, de consacrer [un temple à Demeter, Dionysos et Coré], à l'époque où il devait combattre l'armée des Latins») et qu'il les a développés librement, Que faire des précisions comme celles que donne Denys, lorsqu'il écrit qu'à la suite du vœu de Postumius, l'abondance revint, non seulement dans les ter res labourables (γη σπόριμος), mais aussi dans les vergers (γη δενδρόφορος)? L'annaliste, voulant expliquer pourquoi le uotum du dictateur res tait attaché à un sanctuaire dédié à Cérès-Déméter, à Libera-Coré, mais également à Liber-Dionysos, a pensé, tout naturellement, à Dionysos Dendritès, le seigneur des vergers, auquel «tous les Grecs, pour ainsi dire, sacrifient», selon l'expression de Plutarque9. Dans ces conditions, la donnée, la donnée la plus incontestable du récite est le uotum lui-même. Postumius en formule la condition exécut oirede la manière la plus nette : le dictateur demande que Rome jouis se de ϊεύετηρία «sous sa propre magistrature autant qu'auparavant». Cette εύετηρία annuelle - conformément d'ailleurs à l'étymologie - ne peut avoir ici que son sens premier : c'est à la «bonne récolte»10 de 496 av. J.-C, et à elle seule, qu'est suspendue la construction de Yaedes Cereris. Cette constatation pourrait sembler banale, s'il n'était admis
8 Supra, n. 2; cf. H. Le Bonniec, op. cit., p. 217 et suiv. 9 Symp., V, 3, 1; cf. Pind., Adela, fr. 35; A. Bruhl, Liber Pater, Paris, 1953, p. 20. 10 Par ex. Xen., Hell, V, 2, 4; Plat., Conu., 188a; Arstt., Gen. An., 760b., Dem., Phil. IV, 49. «Abondance», «prospérité» en général sont des sens dérivés.
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depuis longtemps que la déesse invoquée par Postumius avait partie liée avec les ambassades envoyées à l'extérieur pour acheter du blé, et qu'elle avait été en fait importée en même temps que celui-ci11. Et cependant, il est clair que, premièrement, la récolte annuelle dont il s'agit ici est celle de Vager Romanus : Postumius prend bien soin de st ipuler, avec un souci de précision contractuelle typiquement romain, que la seule εύετηρία à laquelle il subordonne l'acquittement de son vœu est celle dont les bénéfices s'étendront sur ÏUrbs, κατά την πόλιν. Deuxièmement, les sources ne mentionnent aucune expédition frumentaire de quelque ampleur, ni en 496 av. J.-C, ni jusqu'à la dédicace du temple. Ce n'est qu'après celle-ci, en 492-491, que la famine contraindra Rome à recourir au blé sicilien12. Il est donc exclu que les importations de vivres dont parle Denys en termes plutôt vagues aient eu une prove nance lointaine, dont la tradition aurait sûrement gardé le souvenir; il ne peut s'agir que de convois venus des territoires voisins et de celui même de Rome, dans lesquels la guerre latine devait effectivement
11 Cette théorie, qui se recommande de l'autorité de G. Wissowa, s.v. Ceres, dans RE, III (1899), col. 1973; Religion und Kultus der Römer, 2e éd., Munich, 1912, p. 297 et suiv., est devenue la vulgate (H. Le Bonniec, op. cit., p. 243 et suiv.). Elle a particulièrement été défendue par E. Paîs, Gli elementi sicelioti nella più antica storia di Roma, dans Studi storici, II, 1893, p. 144 et suiv.; Storia di Roma, I, 1, Turin, 1898, p. 511 et suiv. (qui en tire argument pour étayer sa thèse de l'origine sicilienne du culte hellénisé de Cérès : infra, η. 29); par A.Merlin, L'Aventin dans l'antiquité, Paris, 1906, p. 140 et suiv. (qui tient Cérès pour le principal des « dieux étrangers. . . apportés par les négociants peregrins » à Rome); par D. Van Berchem, 11 tempio di Cerere e l'ufficio dell'annona a Roma, dans BCAR, 63, 1935, p. 91 et suiv. (mais il n'est pas prouvé que la statio annonae ait jouxté Yaedes Cereris, a fortiori que les deux édifices se soient trouvés en rapport fonctionnel); par A. Momigliano, Due punti di storia romana arcaica, dans Stud, et doc. hist, et juris, 2, 2, 1936 (= Quarto contributo. . . , op. cit., p. 344 et suiv.) (mais ici, le raisonnement s'inver se : c'est la fondation, au début du Ve siècle, du temple de Cérès qui devient « la conferma più netta di questi rapporti col mondo greco provocati dalla ricerca di grano »). Beaucoup plus respectueuse du «quotidien économique» de Rome à la fin de l'archaïsme me semb le l'analyse équilibrée que F. Zevi, / santuari di Roma agli inizi della reppublica, dans Etruria e Lazio arcaico, Rome, 1987, p. 128, propose des implications frumentaires du vœu de Postumius : « se il buon raccolto dell'anno è evidentemente il presupposto dello scioglimento del voto a Cerere, la riapertura dei commerci col Lazio è, nell'ottica della plebe, il primo, immediato frutto della vittoria ». Sur ces importations à l'échelle locale, et qui ne devaient représenter, en règle générale, qu'un complément de ressources, voir infra. 12 Voir à ce sujet le tableau des commissions frumentaires dressé par C. Virlouvet, Famines et émeutes à Rome des origines de la République à la mort de Néron {Coll. EFR, 87), Rome, 1985, p. 84 et suiv.
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gêner les communications. Troisièmement, Cérès n'est pas à propre mentparler, en ce début du Ve siècle av. J.-C, la déesse de l'approv isionnement de YUrbs. Un an après le vœu de Postumius, c'est autour du temple de Mercure que se constitue une archaïque - et anachronique cura annonae13. D'après le férial romain, en effet, le patronage de Cérès et de sa compagne Tellus sur les céréales s'étend des semailles à l'offrande des prémices de la moisson. Leur intérêt se porte exclusive ment sur la plante en terre ou sur pied, tandis que, pour toutes les manipulations successives auxquelles peut être soumis le produit de la récolte, on se réclame d'autres divinités (Consus, Ops, Quirinus14 - et Mercure, si cette récolte est objet de commerce).
13 Liv., II, 27, 5; cf. B. Combet-Farnoux, Mercure romain (BEFAR, 238), Rome, 1980, p. 35 et suiv. ; F. Zevi, art. cit., p. 126. À l'affirmation de Tite-Live, on objecte classique ment qu'à l'époque historique, la cura annonae était du ressort des édiles. Cette attribu tion semble avoir effectivement fait partie de leurs tâches primitives (cf. DH, VI, 90, 2-3, et le commentaire de J.-C. Richard, op. cit., p. 581 et suiv.; contra, Th. Mommsen, Römisc hesStaatrecht, II, 3e éd., Leipzig, 1887, p. 477) mais découle de leur statut de magistrats de la plèbe (dont l'aedes Mercuri est clairement un sanctuaire!), tandis qu'on tombe dans un cercle vicieux en voulant déduire de Y αγορανομία des édiles la vocation annonaire de la déesse, après avoir utilisé cette même αγορανομία pour montrer que les édiles sont spécia lement rattachés à l'aedes Cereris (la création par César d'aediles Ceriales, qui frumento praeessent selon Pompon., Dig., 1, 2, 2, 32, est trop éloignée des faits qui nous occupent pour pouvoir rentrer ici en ligne de compte). En réalité, {'αγορανομία des édiles et leur rattachement au temple de Cérès sont deux conséquences distinctes d'une cause unique : l'appartenance de ces magistrats à l'organisation politique plébéienne. En ce sens, A. Mom igliano, L'origine della edilità plebea, dans BCAR, 59, 1932, p. 157 et suiv. (= Quarto contributo, op. cit., p. 317) : «gli edili. . . vanno. . . considerati come dei laici addetti al tem pio perché. . . il tempio era l'archivio e il centro della vita plebea». À l'inverse, l'étude exhaustive de D. Sabbatucci, L'edilità romana. Magistratura e sacerdozio, dans Memorie Accad. Lincei. Scienze mor., stor. e filoi, ser. Vili, 6, 3, fait sienne l'idée d'un lien originel et exclusif entre le culte de la triade Cérès Liber Libera et les édiles, dont dériverait l'e nsemble de leurs fonctions, cura ludorum comme cura annonae. Mais cette théorie repose sur la conception d'une communauté plébéienne primitive, culturellement autonome par rapport au patriciat, possédant ses propres cultes (dont surtout celui de Cérès), ses pro pres prêtrises et ses propres magistratures (en ce sens, voir récemment M. A. Levi, Roma arcaica e il connubio fra plebei e patrizi, dans PP, 38, 1983, p. 241 et suiv.). De cette conception «ethnique», d'un dualisme exacerbé, les analyses de J.-C. Richard, op. cit., ont fait justice. 14 Sur les fêtes de Cérès et son association avec Tellus, voir surtout J. Bayet, Les «Feriae Sementiuae» et les Indigitations dans le culte de Cérès et Tellus, dans RHR, 137, 1950, p. 172 et suiv.; H. Le Bonniec, op. cit., p. 52 et suiv. Pour les opérations d'engrangement et de dégrangement, office de Consus et d'Ops, voir G. Dumézil, Idées Romaines, Paris, 1969, p. 289 et suiv. ; P. Pouthier, Ops et la conception divine de l'abondance dans la
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II en résulte que Postumius demande à la déesse exactement ce qu'en stricte orthodoxie religieuse romaine elle pouvait lui offrir : une moisson abondante. Il n'est bien sûr pas question de nier que la déesse à laquelle s'adresse le dictateur ne soit, par ailleurs, fortement helléni sée. Le contraire serait étonnant dans un contexte de large ouverture culturelle au monde grec colonial, tandis que la consultation des Livres Sibyllins à la veille de la bataille du Lac Régule, si l'information a quel que valeur, fournit un indice en ce sens. Il n'empêche que l'acte fonda teurdu temple répond à des contraintes et obéit à une logique qu'on pourrait qualifier de locales. Il n'est pas besoin d'invoquer quelque influence extérieure que ce soit pour concevoir que, devant la menace d'une stérilité des champs, on ait fait appel à celle qui assure la crois sance des végétaux. Quant à la présence de Liber et Libera aux côtés de Cérès, elle reste, à cette date, problématique. Celle de Liber, on l'a vu, n'est pas justifiée par Denys d'Halicarnasse de manière pertinente; Cérès d'autre part apparaît toujours seule, jusqu'aux lois Valeriae Horatiae exclusivement : dans la lex sacrata de 493 15, comme bénéficiaire des biens de Cassius en 486 16, des Postumii et des Cloelii en 455 17. De cet effacement extrême de ses partenaires, on verra plus loin ce qu'on peut penser18. Le vœu de Postumius, s'il a pour cause immédiate une disette, n'en est probablement pas pour autant dépourvu d'implications politiques. Celles-ci toutefois, à s'en tenir à la chronologie traditionnelle, ne sont pas liées au conflit patricio-plébéien, puisque la πολιτική στάσις19 ne commence qu'en 495 av. J.-C, avec la mort de Tarquin à Cumes20. Pour cette simple raison, le projet initial de Yaedes Cereris ne rentre pas dans la perspective de la lutte des ordres; le temple n'est pas, de fonda-
religion romaine jusqu'à la mort d'Auguste (BEFAR, 242), Rome, 1981, p. 67 et suiv. ; 102 et suiv. Sur la fête des Quirinalia=Stultorum Feriae qui prolonge les Fornacalia, G. Dumézil, La religion romaine archaïque, 2e éd., Paris, 1974, p. 170 et suiv. En général, sur l'encadre ment liturgique des opérations de mouture et de torréfaction, O. de Cazanove, Exesto. L'incapacité sacrificielle des femmes à Rome, dans Phoenix, 41, 1987, 2, p. 159 et suiv. 15 Dh, VI, 89, 3. 16 Liv., II, 41, 10; Dh, VIII, 79, 3; Plin., XXXIV, 15; Val.-Max., V, 8, 2; cf. art. cit. à la n. 24. 17 Dh, X, 42, 4. 18 Infra, p. 396 et suiv. 19 L'expression est de DH, VI, 22, 1. 20 Liv., II, 21, 5-6; DH, VI, 21, 3; Cic, Tusc, III, 12, 27; Zonar., VII, 12, p. 336.
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tion, un sanctuaire de la plèbe21, mais un sanctuaire politique au sens fort du terme : le dictateur formule son vœu υπέρ της πόλεως. En 496 au contraire, le péril extérieur occupe le premier plan, avec la guerre contre les Latins que Postumius conclut victorieusement. Il est frap pant de constater que la question latine se trouve, trois ans plus tard, définitivement résolue (jusqu'en 338 av. J.-C. tout au moins. . .) par celui-là même qui finit d'acquitter le uotum souscrit avant la bataille du Lac Régule, en consacrant le temple de Cérès. Nos sources d'ailleurs suggèrent que les deux événements, fœdus Cassianum et dédicace, sont liés, puisque si Sp. Cassius reste à Rome, en 493, alors que son collègue entre en campagne, c'est à la fois pour conclure le traité22 et procéder à la consécration23. Il y a là une présomption sérieuse que Cérès joue un rôle important dans la politique extérieure de Rome face au milieu latin. J'ai ailleurs24 essayé de montrer qu'il fallait rendre compte des liens qui unissent Sp. Cassius à Cérès d'une part, à Tellus d'autre part, deux divinités elles-mêmes fonctionnellement solidaires, à la lumière de l'œuvre entière du démagogue : rogano agraria, fœdus cum Latinis populis, fœdus cum Hernicis. Déesses des cultures et du sol cultivable, Cérès et Tellus sont les garantes naturelles de la juste répartition des terres, entre citoyens et entre cités. Plus généralement, c'est son presti ge international qui vaut à Cérès de se voir vouer un temple, en cette aube du Ve siècle - un prestige auguel son assimilation à Demeter contribue, sans nul doute, puissamment. Les autres initiatives religieu21 Opinion similaire de M. Sordi, // santuario di Cerere, Libero e Libera e il tribunato della plebe, dans Santuari e politica nel mondo antico (Contr. 1st. St. Ant. Univ. Milano, 9), Milan, 1983, p. 127 et suiv., qui, toutefois, abaisse la date de création des tribuns (en 471) et creuse ainsi l'écart entre la fondation du temple et le début de la lutte des ordres. En définitive, le rapprochement entre la plèbe et le sanctuaire serait d'ordre purement topo graphique (l'Aventin en étant le facteur commun). C'est là faire la part trop belle à un élément - en définitive de hasard - extérieur à la fois à la logique du conflit politique et à celle du culte de la déesse. Par ailleurs, si Yaedes Cereris n'est pas, de fondation, un sanc tuaire plébéien, une objection forte tombe d'elle-même, celle qu'élevait A. Alföldi, op. cit., p. 92 et suiv., pour qui il aurait été inconcevable que Postumius, «leading figure of the new ruling aristocracy», ait fait construire un temple de la plèbe (en ce sens déjà G. De Sanctis, Storia dei Romani, IV, 2, 1, Florence, 1953, p. 194 et suiv.). 22 Liv., II, 33, 3-4 : per secessionem plebis, Sp. Cassius et Postumius Cominius consulatum inierunt. lis consulibus cum Latinis populis ictum foedus. Ad id feriendum consul alter Romae mansit. 23 DH, VI, 94, 3. Au contraire. Th. Mommsen, art. cit., p. 158 et suiv., refuse d'attr ibuerà Cassius la dédicace de Yaedes Cereris, comme la conclusion du fœdus Cassianum. 24 O. De Cazanove, Sp. Cassius, Cérès et Tellus, dans REL, 67, 1989 (sous presse).
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ses de Postumius Regillensis regardent de même des cultes de grande ampleur que Rome entend s'approprier (ou renforcer), de manière à faire efficacement contrepoids à ceux de ses voisins : l'établissement (ou le pseudo-établissement) des Ludi Romani25 en face des Feriae Latinae, la fondation du temple de Castor26 en face des nombreux sanc tuaires des Dioscures, dans le Latium et en Italie27. C'est là, si l'on peut dire, le «volet religieux» de l'effort de reprise en main, politique et mili taire, de la Ligue Latine, après une période d'incertitude consécutive à la chute des Tarquins. Cérès-Déméter, quant à elle, est partout, aux portes de Rome28, comme en Grande-Grèce et en Sicile29. Et c'est pré-
25 DH, VI, 10, 1 et 17, 2; VII, 71, 2. 26 Liv., II, 20, 12 et 42, 5; DH, VI, 13; cf. Cic, N.D., 2, 2, 6; Val.-Max., 1, 8, 1. 27 La présence des jumeaux divins est attestée dans la plupart des cités latines, à Lavinium (F. Castagnoli, dans SMSR, 30, 1959, p. 109 et suiv.; dans Lavinium II. Le tredi ci are, Rome, 1975, p. 441 et suiv.), à Ardée (Serv., ad Aen., I, 44), à Cora (CIL, X, 6505), à Préneste (Serv., ad Aen., VII, 678), à Tusculum (Cic, Diu., I, 98; Fest., p. 408 L.; CIL, I, 2, 1443). 28 En particulier à Lavinium , où la découverte d'une fameuse lex sacra (M. Guarducci, dans Arch, class., Ill, 1, 1951, p. 99 et suiv.; F. Castagnoli, op. cit., p. 441) a suscité une ample bibliographie (mises au point divergentes de M. Guarducci et H. Le Bonniec, dans Mélanges. . . J. Heurgon (Coll. EFR, 27), 1976, p. 411 et suiv.; 463 et suiv.; dans le même sens que M. Guarducci, M. Torelli, Lavinio e Roma, Rome, 1984, p. 164 et suiv.), en même temps qu'elle donnait naissance à l'hypothèse d'une origine lavinate du culte : R. Bloch, Une lex sacra de Lavinium et les origines de la triade agraire de l'Aventin, dans CRAI, 1954, p. 203 et suiv.; G. Pugliese Carratelli, Lazio e Magna Grecia prima del secolo quarto a C, dans PP, 23, 1968, p. 321 et suiv. 29 Exposé critique des différentes hypothèses de provenance du culte romain dans H. Le Bonniec, op. cit., p. 279 et suiv. Le postulat encore dominant, celui d'une importat ion sicilienne, a été formulé par L. Preller (Römische Mythologie, 3e éd., Berlin, 1881, 2, p. 40 et suiv.) suivi par E. Païs (supra, n. 11), alors même qu'on n'admet plus aujourd'hui les prémisses chronologiques sur lesquelles Pais se fondait (abaissement général des tra ditions relatives à la première sécession et aux événements connexes). La réfutation argumentée de H. Le Bonniec, p. 285 et suiv., me semble décisive. En fait, Païs prend le mythe de Cérès pour de l'histoire, et, ce faisant, opère une confusion similaire à celle que comm ettait, quelques années auparavant, E. Rohde lorsque, dans Psyché, il inférait de la légende dorée dionysiaque l'origine thrace du culte. Le principal argument avancé par Preller-Païs est celui de l'ambassade des Décemvirs à Henna, en 133 av. J.-C, sur l'injonc tion des Livres Sibyllins, ex quibus inuentum est Cererem antiquissimam placari oportere. Mais cette rapide note de Cicéron (Verr., IV, 108; cf. Val-Max., I, 1, 1 ; Lact., Diu. Inst., II, 4, 29-30) ne peut être isolée arbitrairement de son contexte : l'éloge de la Demeter d'Hen na (Cic, ibid., 106-115). La Sicile est le berceau (incunabula) de tous les cultes démétriaques, dont celui de Yaedes Cereris romaine ne constitue qu'un cas particulier : ... hanc ipsam Cererem, antiquissimam, religiosissimam, principem omnium sacrorum quae apud
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cisément cette ubiquité de la déesse qui explique l'importance que lui ont reconnu Postumius et ses concitoyens, sans qu'il faille penser qu'ils ont alors choisi une Cérès-Déméter, à l'exclusion de toutes les autres, pour l'implanter à Rome - alors qu'elle s'y trouvait déjà30. Toutefois, parmi les différents cultes de la déesse dont les Romains pouvaient
omnes gentes nationesque fiunt {ibid., 109). Ce que veut dire Cicéron, ce dont convien nent nec solum Siculi uerum etiam ceterae gentes nationesque {ibid., 108), ce n'est pas tant que le sanctuaire d'Henna soit relativement plus ancien que les autres sanctuaires de la déesse, qu'il les précède dans l'ordre des temps historiques : il est originel dans l'absolu parce qu'il est le lieu même où, selon le mythe universellement reçu {quem iam a pueris accepimus : ibid., 107), Demeter a vécu et a souffert. C'est donc commettre un contre-sens que de considérer l'ambassade des Décemvirs comme une manifestation d'allégeance, de la part d'un sanctuaire-filiale, à un autre sanctuaire dont il serait matériellement issu. Cicéron dit très exactement le contraire : tanta erat enim auctoritas illius religionis (=Cereris) ut, cum illuc irent, non ad aedem Cereris sed ad ipsam Cererem proficisci uiderentur {ibid., 108). L'autre argument invoqué par Païs est que l'aedes Cereris contenait des œuvres des plastae laudatissimi Damophilos et Gorgasos (Varr. ap. Plin., n.h., 35, 154), qui seraient d'origine sicilienne. Mais cette hypothèse même, soutenue en premier lieu par H. Brunn {Geschichte der griechischen Künstler, I, Stuttgart, 1889, p. 370) est loin d'être assurée (H. Le Bonniec, p. 257 et suiv.). On a pu tout aussi bien penser que Damop hilos et Gorgasos venaient de l'aire corinthienne (A. Andren, Architectural terracottas of the etrusco-italic temples, Lund, 1939, p. CXLVII), lacédémonienne (M. Guarducci, dans Mélanges Piganiol, III, 1966, p. 1619 et suiv.), posidoniate (G. Colonna, dans PP, 32, 1977, p. 164; le même auteur est toutefois revenu à l'hypothèse d'une provenance, non propre mentsicilienne, mais reggienne de ces plastae : Kokalos, 26-27, 1980-1981, p. 162 et suiv.). De toute manière, une chose est la provenance, quelle qu'elle soit, de ces artistes, autre chose la provenance du culte. Ne reste donc, en faveur de la thèse sicilienne de PrellerPaïs, qu'un pur rapprochement d'événements et de dates (496-493 pour la construction de l'aedes Cereris, 492-491 pour la commission ad frumentum coemendum envoyée (sic) auprès de Denys de Syracuse), événements et dates que la tradition annalistique ne fait pas exactement coïncider et entre lesquels elle n'établit aucun rapport. En faveur d'une origine cette fois italiote, et plus spécifiquement éléate, du culte romain, s'est récemment prononcée M. Sordi {art. cit., p. 130 et suiv.), mais sans arguments décisifs. Plus générale ment, A. Momigliano a défendu, à plusieurs reprises (voir part, l'ascesa della plebe nella storia arcaica di Roma, dans Riv. stor. Hai., 79, 1961, p. 297 et suiv.=Qwario Contributo, op. cit., p. 451 et suiv.), le concept d'un « philhellénisme plébéien», tel qu'il s'exprimerait jus tement dans le choix d'une culte grec comme signe de ralliement. Mais c'est là postuler une autonomie culturelle de la plèbe qu'elle ne semble pas avoir eue à cette époque (voir infra) et dont il serait étrange qu'elle se soit exprimée à travers le uotum d'un patricien (cf. n. 21, fin). 30 On ne doute plus aujourd'hui de l'autochtonie de Cérès, que Fr. Altheim avait niée en son temps {Terra Mater, Giessen, 1931, p. 108 et suiv.). Autre chose sont les pere grina sacra de Cérès (Fest., p. 268 L.) = Graeca sacra Cereris (Paul.-Fest., p. 86 L. ; cf. Cic, Verr., IV, 115; Balb., 55) qui ne peuvent remonter au Ve siècle {infra, p. 395 et n. 89). Le
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avoir connaissance à cette époque, il en est un qui ne devait pas man quer de revêtir une grande importance à leurs yeux, et précisément en ces années où la question de l'hégémonie sur le Latium était en jeu : le culte de Demeter à Cumes. La cité d'Aristodème, soutien puis héritière des Tarquins détrônés31, alliée fidèle de la Ligue32, constitue un puis sant pôle d'attraction dont les intérêts s'opposent constamment à ceux de Rome, et dont le prestige doit beaucoup à ses cultes poliades - à celui de Demeter en particulier33. Dès lors, il est assez naturel de pen ser que le vœu de Postumius avait, entre autres motivations, celle d'an-
uotum de Postumius et sa réalisation sont donc davantage placés sous le signe de la conti nuité que sous celui de la rupture (même s'il est indéniable qu'ils s'adressent à une divini té dont l'interpretatio graeca est dès alors, et depuis longtemps, acquise : voir l'inscription CIE 8079 de Falerii Veteres, vers la moitié du VIIe siècle ou peu après, dans laquelle Cérès est rapprochée d'£wto5=Dionysos : G. Giacomelli, dans Popoli e Civiltà dell'Italia antica, VI, Rome, 1978, p. 525 et suiv.; M. Cristofani et M. Martelli, dans SE, XLVI, 1978, p. 133). Une preuve évidente de cette continuité réside dans le fait que les antiques Cerialia du calendrier numaïque sont choisis comme natalis du nouveau temple (CIL, I2, p. 315; cf. G. Wissowa, s.v. Ceres, dans RE, III, 2, 1899, col. 1975) et qu'à cette date sont célébrés les jeux qui s'y rattachent (H. Le Bonniec, op. cit., p. 277 et suiv.). Mais il doit y avoir aussi continuité dans la localisation même du sanctuaire, s'il est vrai qu'autour du Circus Maximus sont regroupés les cultes archaïques qui intéressent le devenir des céréal es (ibid., p. 185 et suiv.). Aussi bien n'est-il question, dans la présente étude, que de la fondation du temple de Cérès, d'une aedes. Le sanctuaire lui-même peut être bien anté rieur. Le silence qu'observe Cicéron sur les événements de 496-493 (supra, p. 376 et suiv.) devient peut-être par là plus explicable : l'historien pouvait, sans se contredire, «oublier» le uotum de Postumius et néammoins faire mention du sanctuaire un demi-siècle plus tard (III, 55, 7 et 13) ... si celui-ci était, de toute manière, préexistant. 31 Liv., II, 21, 5; 34, 4; DH, VI, 21, 3; VII, 2, 3 et 12, 1-2; cf. A. Mele, Aristodemo, Cuma e il Lazio, dans Etruria e Lazio arcaico, Rome, 1987, part. p. 174 et suiv. 32 Liv., II 14, 6-7; DH, V, 36; VII, 5 et suiv.; cf. M. Combet-Farnoux, Cumes, l'Étrurie et Rome à la fin du VIe siècle et au début du Ve siècle, dans MEFR, 69, 1957, p. 7 et suiv.; A. Alföldi, op. cit., p. 56 et suiv.; A. Mele, art. cit., p. 155 et suiv. 33 Demeter est, selon une tradition, l'archégète des fondateurs eubéens de Cumes : Vell. Pat., I, 4, 1. Elle figure à ce titre parmi les di patrii de la colonie et de la subcolonie de celle-ci, Naples : Stat., Silu., IV, 8, 45-46 et 50-51 ; cf. IG, XIV, 756a; E. Miranda, dans Napoli antica, cat. d'exposition, Naples, 1985, p. 392 et suiv. Xénocrite, concubine d'Ari stodème dont elle provoque la perte, reçoit pour prix de sa trahison, la prêtrise du culte de Demeter: Plut., Mul. uirt., 262 d; cf. N. Valenza Mele, dans Nouvelle Contribution à l'étude de la société et de la colonisation eubéenne (Cahiers du Centre Jean Bérard, VI), Naples, 1981, p. 121 et suiv. Plus généralement, Demeter était - avec Dionysos - une divi nité protectrice de la Campanie : Plin., n.h., III, 60; cf. Flor., I, 11, 4. Pour la localisation du culte de Demeter à Cumes, voir en dernier lieu M. Pagano, Una proposta di identifica zione per il santuario di Demetra sull'acropoli di Cuma, dans Puteoli (sous presse).
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crer plus solidement encore la déesse sur le sol de ÏUrbs pour mieux faire pièce à l'influence de Cumes. Pour la Rome des débuts de la République, affirmer son rôle international suppose aussi de se consti tuer toujours plus en métropole religieuse, de manière à contrebalanc er, voir à éclipser, les cultes des cités rivales. Si le uotum du dictateur est formulé indépendamment du conflit des ordres, il n'est pas niable que le temple suscite, dès l'année de sa dédicace, l'intérêt de la plèbe. La lex sacrata de 493, dans une certaine mesure34, le montre. Rien d'étonnant, en définitive, à cela. S'il est vrai que la première sécession répond à «la montée des périls en milieu rural»35, qu'elle est, en particulier, le fait d'une paysannerie poussée à bout par les engrenages inexorables de l'endettement foncier, de la confiscation progressive de ses terres par les gentes patriciennes, il est compréhensible que la plèbe se soit tournée vers la déesse par excellen ce des cultivateurs, en tant qu'elle représente la capacité productive du sol. Dans le moment même où le patriciat tend à accaparer Yager Romanus, les paysans dépossédés ou menacés de l'être font recours à celle qui leur garantit la jouissance du fruit de leur travail, frugem ara tro quaesitam selon la formule, un peu postérieure, des XII Tables36. Ce recours, loin d'être dicté à la plèbe par la nostalgie d'on ne sait quel âge d'or révolu, constitue entre ses mains un moyen concret de lutte pour la revendication de ses droits. Il est significatif, à cet égard, que le dédicateur de Yaedes Cereris, Sp. Cassius, passe aussi pour avoir propos é la première loi agraire de l'histoire (ou de la pseudo-histoire) de Rome37.
34 DH, VI, 89, 3; sources annexes et bibliographie dans J.-C. Richard, op. cit., p. 549 et suiv. (mais Cérès n'apparaît qu'en tant que bénéficiaire des biens du coupable, non comme garante de la sacrosanctitas tribunicienne : infra, p. 387). 35 Selon une heureuse tête de chapitre de J.-C. Richard (op. cit., p. 490 et suiv.), dont je suis ici les analyses. 36 Ap. Plin., n.h., XVIII, 12 : frugem quidem aratro quaesitam furtim noctu pauisse ac secuisse puberi XII tabulis capital erat, suspensum Cereri necari iubebant grauius quam in homicidio conuictum. Ce fragment montre à l'évidence qu'à l'époque de la législation décemvirale, Cérès est encore, avant tout, la protectrice des récoltes sur pied (même si, comme il est probable, le fragment est d'origine plus ancienne). Le problème de la pro priété des récoltes est au centre de la question du nexum : J.-C. Richard, op. cit., p. 496 et suiv. et part. n. 208. 37 Je développe ce point dans mon art. cit. à la n. 24.
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olivier de cazanove La crise de l'institution capitoline
Dès 493 donc, le culte de Cérès est un enjeu du débat politique. Estce à dire qu'il est alors définitivement marqué comme un «culte plé béien»? Il faut ici s'entendre sur les termes. Il n'existe à Rome qu'une seule religion, celle de la cité. Certains rituels peuvent être propres à un groupe restreint : gens, collège par exemple. Ils n'en intéressent pas moins l'ensemble des citoyens qui gardent sur eux un certain contrôl e38. Au contraire, il n'existe pas, et ne peut exister de «religion pl ébéienne» qui se manifesterait à la fois par le développement autonome de dévotions spécifiques et par l'éloignement, voire le rejet, de la com munauté des cultes. Lorsque des fondations religieuses sont ouverte mentdonnées pour plébéiennes, elle ne constituent qu'un décalque, une modalité si l'on veut, d'un culte public. C'est ainsi qu'on a les dou blets Ludi Romani/Ludi Plebei, Pudicitia Patricia/ Pudicitia Plebeia etc.39. La plèbe en tant que telle n'a donc aucune alternative, aucune solu tion de rechange à proposer en matière religieuse. Son orthodoxie, sur ce plan, est parfaite, y compris dans les phases les plus aiguës du schi smepolitique. Rien n'est plus significatif que la manière dont l'armée organise son camp, lors de la première sécession : il serait inconcevable que des citoyens créent un établissement, même temporaire, sans qu'y soient physiquement présents les dieux de Rome. La sécession est donc possible et effective lorsque la plèbe emporte avec elle les enseignes militaires qui sont «comme des statues divines», ώσπερ ιδρύματα θεών40. Et surtout les plébéiens consacrent un autel à Jupiter Territor au som38 G. Wissowa, Religion und Kultus der Römer, 2e éd., Munich, 1912, p. 400 et suiv. («die sacra priuata selbst unterstehen bis zu einem gewissen Grade der staatlichen Auf sicht und Unterweisung»); J. Scheid, Religion et piété à Rome, Paris, 1985, p. 17 et suiv., qui met particulièrement en relief le concept de «communauté cultuelle». Particulièr ement significative est la transmission des cultes gentilices, sous contrôle pontifical (Cic, Dom., 34 et suiv.), tandis que la renonciation à ceux-ci (detestatio sacrorum) relève de la juridiction des comices calâtes (Labeo ap. Gell., XV, 27, 1). 39 Ludi Romani/Plebei : G. Wissowa, op. cit., p. 127 et suiv.; 423 et suiv.; G. Dumézil, op. cit., p. 563 et suiv. (opinion différente de A. Piganiol, Recherches sur les jeux romains, Strasbourg, 1923, p. 84), Pudicitia Patricia/ Plebeia : Liv., X, 23. 40 DH, VI, 45, 2. Sur la signification religieuse des enseignes militaires romaines, voir C. Renel, Cultes militaires de Rome, les enseignes, Paris, 1903. Les enseignes sont déposées, en temps de paix, au pied du Capitole, dans Yaerarium Saturni : Liv., III, 69, 8; IV, 22, 1 ; VII, 23, 3.
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met même du Mont Sacré qui devient par là une réplique du Capitole voué à Jupiter Optimus Maximus41. Enfin, c'est aux dieux de la cité, τοϊς έν rfj πόλει θεοϊς42, que l'armée fait ses actions de grâces pour l'heu reuse issue de sa sécession. L'attachement de la plèbe à la communauté des cultes, et surtout à celui du Capitole qui prime tous les autres, semble bien être, à cette époque, indéfectible. Cérès est certes présente, lors des deux sécessions de la plèbe, mais en position nettement subordonnée : c'est Jupiter qui est le vrai garant de la sacrosainteté des tribuns (à coup sûr selon la lex Valeria Horatia de 44943; sans doute déjà selon la lex sacrata de 493, comme pourrait l'indiquer l'épithéte de Territor que reçoit alors le dieu souverain). Cérès, elle, ne gère que les aspects proprement économi ques de l'exécration44. C'est encore vers Jupiter que se tourne la plèbe après sa victoire. En 493, les édiles obtiennent la présidence de jeux que Denys identifie avec les Feriae Latinae45 mais qui seraient plutôt, d'après Mommsen, les Ludi Magni ou Romani46, de toute manière voués, les uns comme les autres, à Jupiter. D'ailleurs les Ludi Magni semblent avoir été l'occasion d'une sorte de trêve civile, εκεχειρία τις47, la plèbe abandonnant ses revendications pour le temps de la fête. Cette institution capitoline, si révérée à la fois des patres et des plé béiens, voilà cependant qu'elle entre en crise, dès le début de la lutte des ordres dans YUrbs, en 495 av. J.-C. Nous disposons, pour en juger, d'un précieux indicateur. Alors que les jeux ne semblent pas encore avoir été annuels, ce sont les triomphes qui ramènent, à intervalles plu tôt réguliers et rapprochés, des fêtes où Jupiter Capitolin lui-même s'i ncarne dans la personne du général victorieux, où se trouve manifesté, plus qu'en toute autre occasion, le destin providentiel de Rome. Or, alors qu'au témoignage des Fasti Triumphales, 6 triomphes sont célé brés en 13 ans, entre 509 et 496 48, les difficultés commencent avec
41 Ibid., 90, 1 : βωμον . . . έπί της άκρωρείας. 42 Ibid., 90, 2. 43 Liv., II, 55, 7 : qui tribunis plebis, aedilibus, iudicibus decemuiris nocuisset, eius caput Ioui sacrum esset, familia ad aedem Cereris Liberi Liberaeque uenum iret. 44 Tout comme, il faut le noter, dans la «loi de Romulus» sur le divorce: Plut., Rom., 22, 3, 1 : commentaire de H. Le Bonniec, op. cit., p. 83 et suiv. 45 DH, VI, 95, 3-4. 46 Th. Mommsen, op. cit. à la n. 13, II, p. 519. 47 DH, VI, 31, 1. 48 CIL, V, p. 43.
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celui de Publius Servilius sur les Volsques, en 495, que les Fastes n'en registrent même pas. Le Sénat, à l'instigation d'Appius Claudius, refuse en effet le triomphe au consul victorieux, l'accusant d'être un «sédi tieux» (στασιαστής), un «adepte de la mauvaise constitution» (πολιτείας πονήρας εραστής) et d'avoir distribué l'intégralité du butin à ses troupes, sans en rien verser au Trésor49. Servilius, interdit de Capitole pour motifs politiques, passe outre : ayant rassemblé son armée sur le Champ-de-Mars, il prononce un discours dont la véhémence ne cède en rien à celle de ses adversaires, revêt l'habit triomphal (θριαμβική έσθής) - c'est-à-dire celui même de Jupiter50 - et célèbre finalement son triomphe jusqu'au Capitole. Denys note: «ce faisant, il s'attira encore plus la haine des patriciens, mais fit de la plèbe son alliée»51. L'épisode montre bien comment le culte de Jupiter devient un moyen de pression politique que se disputent plèbe et patriciat. Il n'est d'ailleurs pas isolé : en 448, Lucius Valerius et Marcus Horatius, les consuls à qui l'on doit la satisfaction des revendications plébéiennes au terme de la deuxième sécession, triomphent des Éques, des Volsques et des Sabins, sine auctoritate senatus, populi iussu52. Là encore, le Sénat ayant refusé «à une énorme majorité»53 d'accorder le triomphe, celuici n'est pas inscrit dans les Fastes. Ces tentatives des patres n'ont qu'un but : exclure la plèbe et ses soutiens du Capitole, réserver le prestige et la légitimité qui s'y attachent aux seuls patriciens. Cette politique d'exclusion conduit l'institution capitoline, poliade par définition, tout au bord de la ruine : après 486 et le triomphe - vi olemment critiqué - de Sp. Cassius54, plus aucun triomphe ne sera célé bré pendant onze ans55. Cette interruption coïncide avec les débuts de
49 DH, vi, 30. 50 H. Versnel, Triumphus. An inquiry into the origin, development and meaning of the Roman Triumph, Leyde, 1970, p. 58 et suiv. ; J. Scheid, Le f lamine de Jupiter, les Vestal es et le général triomphant, dans Le temps de la réflexion, 7, 1986, p. 213 et suiv. 51 DH, VI, 30, 3 : έκ δε τούτου φθόνον μεν έτι μείζονα παρά των πατρικίων έπεσπάσατο, οίκεΐον δ'έαυτφ παρεσκευάσατο το δημοτικόν. 52 Liv., Ill, 63, 11. 53 Ingenti consensu patrum : ibid., 63, 8. 54 DH, VIII, 69, 1. 55 Le frg. IV des Fasti Triumphales (CIL, I2, p. 43) s'interrompt après la mention du triomphe de M' (ou M.) Valerius sur les Sabins, en 494 ; le triomphe de P. Valerius, en 475, se trouve dans le frg. V, au-dessous d'une ligne très mutilée : cette dernière cepen dantdoit appartenir à la notice relative au triomphe de Sp. Cassius en 486 : en effet,
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la «serrata del patriziato»56, et particulièrement avec la mainmise des Fabii sur le consulat. Peu d'années après le Crémère, l'institution se remet progressivement en marche. Il est clair en effet que si le Sénat décidait en dernier ressort d'accorder ou non le triomphe, l'approbat ion de la plèbe, actrice et spectatrice de la cérémonie, ne pouvait manq uer57. De fait, l'attitude de rejet du patriciat finit à terme par provoquer une certaine désaffection de la plèbe vis-à-vis du Capitole et de ses dieux. L'épisode d'Appius Herdonius, en 460, en illustre dramatique ment les conséquences. L'attaque nocturne du Sabin et de ses hommes contre le Capitolium et l'Arx ne provoque aucune réaction de la part de la plèbe et de ses magistrats, malgré les remontrances désespérées des consuls : «Jupiter Optimus Maximus, Junon Regina, Minerve, les autres dieux et déesses sont assiégés; des esclaves tiennent dans leur camp les saints patrons de votre ville; et voici la politique qui vous semble ra isonnable?»58. L'appel à l'union sacrée de la plèbe et du patriciat59 est en fait bien tardif. Ce sera finalement avec l'aide des Tusculans de Mamilius que le Capitole sera libéré. Cet éloignement de la plèbe du principal sanctuaire de l'Urbs peut bien n'être que temporaire. Il n'en est pas moins révélateur du profond malaise qu'éprouvent les plébéiens face aux cadres d'une religion d'État confisquée par les patriciens, pour la raison qu'elle est l'essence même du pouvoir et de la légitimité. Le sentiment d'exclusion se déve loppe et donne lieu à des formules frappantes : quelques années après
«auctores inter annos 268 e 279 [a.U.c] nullius triumphi mentionem faciunt» (Th. Mommsen, ibid., p. 51). 56 Selon une expression célèbre de G. De Sanctis, Storia dei Romani, I2, Florence, 1956, p. 241 et suiv. ; mise au point récente de J.-C. Richard, Sur trois problèmes du pre mier âge républicain, dans MEFRA, 97, 2, 1985, part. p. 776 et suiv. 57 Significatif à cet égard est l'épisode de la campagne de 455 contre les Éques : aux consuls T. Romilius et C. Veturius, le Sénat refuse le triomphe parce que les menées de ceux-ci contre le leader plébéien Siccius ont attisé le mécontement populaire : DH, X, 47, 6. 58 Liv., III, 17, 3-4 : Si uos Urbis, Quintes, si uestri nulla cura tangit, at uos ueremini deos uestros ab hostibus captos. Iuppiter optimus maximus, luno regina et Minerua, alii dei deaeque obsidentur ; castra seruorum publicos uestros pénates tenent : haec uobis forma sanae ciuitatis uidetur? 59 Ibid., 17, 5 : Non quidquid patrum plebisque est, consules, tribunos, deos hominesque omnes armatos opem ferre, in Capitolium currere, liberare ac pacare augustissimam illam domum Ioui optimi maximi decuit?
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la deuxième sécession, en 445, alors qu'on débat pour savoir s'il est pos sible de nommer des consuls issus de la plèbe, et si ceux-ci pourront prendre les auspices, les plébéiens s'indignent d'être considérés «com me un objet de haine pour les dieux immortels», tamquam inuisi dis immortalibus60. Mais, dès les années 460-450 au moins, la situation est mûre pour que la plèbe veuille investir un sanctuaire public plus acces sible que celui du Capitole, et lui confier ses espérances - sans pour autant, bien sûr, abandonner la révérence qu'elle doit à Jupiter O. M. Or, c'est aussi à peu près à ce moment que la situation politique se présente à nouveau, pour la plèbe, sous un jour plus favorable. À partir de 461, on voit réapparaître progressivement, dans les Fastes, les gentes plébéiennes61. Les magistrats de la plèbe voient s'accroître leur presti ge, au point qu'échoient aux édiles de 463 - il est vrai à l'occasion d'une épidémie qui décime la classe politique romaine - «l'autorité suprême et la majesté du pouvoir consulaire»62. Enfin, en 456, la lex Icilia de Auentino publicando attire la plèbe autour de la colline et de ses sanc tuaires63. Les éléments sont réunis pour que Yaedes Cereris gagne en poids politique et religieux.
Le modèle attique D'après les sources écrites, Rome a toujours conservé, au Ve siècle, des contacts avec le monde grec, malgré la présence obsédante des Volsques dans le Latium méridional : en témoigne la liste des déléga tionsrégulièrement envoyées à l'étranger pour acheter du grain64. Ces relations ne sont pourtant que commerciales. Une toute autre impor tance revêt, aux dires des annalistes, l'ambassade envoyée en 454 «à Athènes»65, ou «dans les cités grecques d'Italie et à Athènes»66, puis qu'il s'agit d'une mission législative dont le but est rien moins que de 60 Liv., IV, 6, 3. 61 J.-P. Richard, op. cit. à la n. 1, p. 532, n. 316. Cet intermède n'est cependant que provisoire : la clôture définitive du patriciat est chose faite dès 433 : Id., art. et loc. cit. à la n. 56. 62 Summa rerum ac maiestas consularis imperii : Liv., III, 6, 9. 63 Liv., III, 31, 1; 32, 7; DH, X, 32, 4. 64 Supra, n. 12. 65 Liv., III, 31, 8; cf. 32, 1 et 6; 33, 5. 66 DH, X, 51, 6; 52, 4; cf. 56, 2; 57, 5 et Pomp., I, 2, 2, 4.
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procurer à YUrbs une base constitutionnelle inspirée de celles des plus grandes poleis et, ce faisant, de ramener enfin la concorde dans une Rome déchirée par le conflit des ordres. L'historicité de cette ambassade a été violemment contestée. Et de fait, on ne voit que trop bien quelles pieuses réfections ont pu couvrir les XII Tables de la prestigieuse autorité de Solon67. Il serait pourtant excessif de rejeter en bloc cette tradition comme un faux. Car c'est effectivement dans les années au tournant du siècle que Rome et l'Athènes de Périclès sont le plus susceptibles d'entrer en contact, alors que ce dernier commence à multiplier les initiatives en direction de l'Occident. Ce n'est pas ici le lieu d'entrer dans le débat sur les limites chronologiques de la diplomatie occidentale d'Athènes. On se contente ra de noter que la fondation de Thourioi, en 444/443, représente proba blement moins un point de départ qu'une étape sur un chemin déjà jalonné d'alliances et d'échanges de toutes sortes : traité avec Ségeste pour lequel a été proposée la date de 458/457, premier traité avec Rhegion, qui devrait être antérieur, expédition de Diotimos à Naples en gros contemporaine de ces événements, enfin, toujours à Naples, αποι κίαathénienne à l'œuvre peut-être dès les «années soixante» du siè cle68. Dans ce cadre, l'idée centrale du récit annalistique romain peut être préservée. Sans penser à un voyage jusqu'à Athènes, ni même à une légation en bonne et due forme, on peut envisager que des contacts aient existé entre Romains et Athéniens présents en Grande-Grèce - par exemple à Naples. La plausibilité de l'ambassade apparaît mieux encore, si l'on inter-
67 Sur l'historicité de l'ambassade, voir récemment E. Ferenczy, Römische Gesandtsc haft in Perikleischen Athen, dans Oikumene, 4, 1983, p. 37 et suiv. ; G. Poma, Tra legislator i e tiranni. Problemi storici e storiografici nell'età delle XII Tavole, Bologne, 1984, p. 41 et 125. 68 Une datation «haute» des débuts de la présence athénienne en Italie du Sud se trouve, en premier lieu, dans les contributions de G. De Sanctis et S. Accame, dans RFIC, 63, 1935, p. 71 et suiv. L'exposé le plus complet est celui d'E. Lepore, dans Storia di Napol i, I, 1967, p. 170 et suiv., qui développe et affine le système des datations «hautes», et dont je suis ici les conclusions. Contra, H. Mattingly, Athens and the Western Greeks, c. 500-413 B.C., dans La circolazione della moneta ateniese (Atti Imo Conv. int. Studi Numism atici [Napoli, 1967]), Rome, 1969, p. 201 et suiv., qui abaisse jusqu'en 421/420 la date du traité avec Ségeste (dans le même sens, avec une datation encore plus basse, T. E. Wick, dans CPh, 76, 1981, p. 118 et suiv.). Depuis, la datation haute a été, entre autres, défendue par D. W. Madsen et M. F. Me Gregor, dans Phoenix, 33, 1979, p. 233 et suiv.
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roge les motivations affichées des parties en présence. Dans le moment même en effet où les Romains se tournent vers le monde grec à la recherche d'exemples à suivre (de législation, de «bon gouvernement»), les Athéniens apportent avec eux en Occident, non seulement des armées ou de l'influence politique, mais encore et surtout des modèles. Modèles politiques : la constitution de Thourioi, colonie il est vrai panhellénique, se réclame de Protagoras69. Modèles politico-religieux : tout ce que l'on sait de la venue de Diotimos à Naples, c'est qu'il y institue une fête religieuse, en l'honneur de la sirène Parthénope70. C'est à la même époque, à coup sûr, que les cultes de Neapolis et de ses environs reçoivent une coloration attique prononcée : celui du héros Phaléros71, et surtout celui de Demeter, qualifiée d'Actaea, d'« Attique» par Stace72. La Demeter «attique», c'est-à-dire celle d'Eleusis, se superpose alors, jusqu'à la dénaturer complètement, à l'antique Demeter cumaine et eubéenne73, à tel point que le récit de la fondation de Cumes sous la conduite de la déesse se transforme en un épisode de la colonisation mythique athénienne avec comme archégète la divinité d'Eleusis an noncée par le bruissement des cymbales74. 69 Her. Pont., αρ., Diog. Laert., IX, 50. 70 Tim. (F. Jacoby, FGrH, III B, 566, F 98) ap. Tzetz., Schol. Lykophr. Al, 732. Cf. E. Lepore, op. cit., p. 172 et suiv. 71 A. Mele, dans Napoli antica (cat. cit. à la n. 33), p. 106 et n. 71. 72 Stat., Silu., IV, 8, 50-51 : tuque, Actaea Ceres, cursu cui semper anhelo / Votiuam taciti quassamus lampada mystae. La course éperdue des mystes appartient probablement au «Jeu (muet) de la Passion de Demeter» en quoi consistaient essentiellement, semblet-il, les δρώμενα qui se déroulaient dans la nuit du 20 au 21 Boédromion (G. Mylonas, Eleusis and the Eleusinian mysteries, Princeton, 1961, p. 258 et suiv.; É. des Places, La religion grecque, Paris, 1969, p. 212). 73 Cf. G. Pugliese Carratelli, dans PP, 7, 1952, p. 243 et suiv. (=Scritti sul mondo antico, Naples, 1976, p. 179 et suiv.), qui suppose néammoins l'existence d'un chaînon intermédiaire : la Demeter syracusaine. 74 Vell. Pat., I, 4, 1 : Athenienses in Euboea Chalcida Eretriam colonis occupauere. . . Nec multo post Chalcidenses orti, ut praediximus, Atticis, Hippocle et Megasthene ducibus, Cumas in Italiani condiderunt. Huius classis cursum esse directum alii columbae antecedentis uolatu ferunt, alii nocturno aeris sono, qualis Cerealibus sacris eteri solet. Les Cerialia sacra dont il est question ici ne sont autres que les mystères d'Eleusis. Apoll., Περί θεών F. Jacoby, FGrH, II Β, 110 b) rapporte que l'hiérophante d'Eleusis faisait résonner un gong (ήχεΐον) pour appeler Coré; cf. K. Kerenyi, Eleusis. Archetypal image of mother and daughter (trad, angl., Londres, 1967), p. 200, n. 22. Aussi Demeter est-elle qualifiée de χαλκόκροτος (Pind., Isthm., 7, 3-4, dans un contexte où la déesse a d'ailleurs Dionysos pour parèdre; contra, B. Moreux, Demeter et Dionysos dans la Septième Isthmique de Pindare, dans REG, 83, 1970, p. 1 et suiv., pour lequel cette Demeter «bruissante de bronze» serait
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Ainsi, le culte de Demeter, de la Demeter éleusinienne, constitue lui aussi un modèle qu'exporte l'Athènes classique. A Naples, mais aussi à Thourioi : W. Burkert a naguère montré qu'il fallait reconduire les lamelles d'or de Thourioi au culte éleusinien et que Γ« acculturation» de celui-ci dans la colonie devait sans doute beaucoup au personnage de Lampôn, fidèle de Périclès, oeciste de Thourioi et par ailleurs instiga teur du décret des prémices75. Cette vocation internationale du sanc tuaire d'Eleusis, c'est à Isocrate qu'il reviendra bientôt de l'affirmer avec le plus de force : lorsque, dans son Panégyrique76, il veut montrer qu'Athènes a été «cause de la civilisation où nous sommes, selon laquell e nous vivons en citoyens, grâce à laquelle nous pouvons exister», il prend d'abord l'exemple d'Eleusis; la philanthropie universelle d'Athè nes vient de ce que «notre cité. . . ayant à sa disposition de si grands biens (i.e. ceux conférés par le sanctuaire), elle ne les refusa pas aux autres, mais donna à tous une part de ce qu'elle avait reçu», άλλ' ών ελαβεν άπασιν μετέδωκεν. Eleusis représente donc un modèle de civilisation, en tant qu'il signifie le passage de l'état de nature à l'état de droit, au règne de la loi, et de la loi écrite. Xénocrate, l'élève de Platon, signale qu'on conserv ait à Eleusis les lois qu'avait édicté Triptolème. Aussi bien les Athé niens considéraient-ils celui-ci comme le plus ancien de leurs nomothètes77. C'est encore à Eleusis que de pures jeunes filles allaient consa crer«les saints livres de la loi» à l'occasion d'une initiation de type thesmophorique78. Il faut, dans ce contexte, restituer à l'épithète de Demeter θεσμοφόρος son sens plein, celui de «législatrice», comme le comprenait tout naturellement Virgile qui le rendait par legifera79, malgré l'autorité de Nilsson qui écartait ce sens avec un dédaigneux
plutôt une Cybèle ou du moins une «Grande Mère». Plus problématique semble l'existen ce de « paroisses éleusiniennes en Campanie », hypothèse avancée par H. Metzger, Re cherches sur l'imagerie athénienne, Paris, 1965, p. 30, à partir de Γ« assez nombreuse série de monuments éleusiniens recueillis en Campanie ou dans les régions voisines », essentie llementdes vases attiques. 75 W. Burkert, Le laminette auree : da Orfeo a Lampone, dans Orfismo in Magna Gre cia (Atti XIV Conv. Studi Magna Grecia, Tarente, 1974), Naples, 1975, p. 81 et suiv. 76 Isocr., Pan., IV, 26-35. Dans le même sens, Arstt., αρ. DiOG. Laert., V, 1, 11, établit un lien étroit entre les inventions - pour lui athéniennes - du blé et des lois. 77 Porph., Abst., IV, 22, p. 267 Nauck. 78 Schol. Vet. ad Theocr., IV, 25 b, p. 142-143 Wendel. 79 Virg., Aen., IV, 58.
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«kein griechisch»80. Certes, les Thesmophories diffèrent profondément des Éleusinies et n'ont - peut-être - que bien peu de choses à voir avec les institutions civiles, si ce n'est éventuellement avec celles du mariage. Toutefois, en admettant même que le sens de θεσμοφόρος = legifera ne soit pas originel, il faut penser qu'il s'est imposé assez rapidement, dès l'époque classique. La θεσμοφόρος doit déjà répondre au signalement sans ambiguïté que donnera d'elle, plusieurs siècles plus tard, Cornutus : «on dit que Demeter est l'inventrice des lois et des institutions, des νόμοι et des θεσμοί; de là vient qu'on l'appelle aussi θεσμοθέτις, c'està-dire nomothète»81. Il est clair maintenant que les Romains, alors qu'ils partent à la recherche des Atticae leges*2 peuvent trouver à peu de distance de chez eux, à Naples, la déesse attique - Actaea Ceres - qui préside à la législa tion,la θεσμοφόρος - et nous savons que Demeter y portait effectiv ement ce titre83. Si cette hypothèse est juste, il faut que Cérès-Déméter devienne, à Rome aussi, la garante de la loi. Or précisément son sanctuaire du Grand Cirque joue un rôle politique parce qu'il est, à partir de 449, un dépôt d'archives : les sénatusconsultes y sont désormais déposés par les édiles plébéiens alors qu'auparavant, précise Tite-Live, «l'arbitraire des consuls les étouffait ou les altérait»84. Symétriquement, indique Pomponius, les plebis scita y étaient archivés85. L'enregistrement des dé crets à Yaedes Cereris marque, comme l'affichage des tables de bronze sur le Forum86, le passage du droit coutumier à la loi écrite. Que ce passage s'effectue sous le signe de Demeter θεσμοφόρος, c'est ce que
80 M. P. Nilsson, Griechische Feste, Leipzig, 1906, p. 323 et suiv. 81 Cornut., Nat. Deor., p. 169 Os.; cf. déjà Callim., Hymnes, VI, 18; voir aussi Diod., I, 14, 4; 25, 1; Cic, Verr., V, 18, 7; Ον., Met., V, 343; Calv. ap. Serv., ad Aen., IV, 58; Plin., VII, 191; Macr., Sat., Ill, 12; cf. F. Lenormant, s.v. Ceres, dans DA, I, 2, 1887, p. 1043 et suiv. 82 Liv., III, 37, 6. 83 IG, XIV, 702 et 756 a. 84 Liv., III, 55, 8. 85 Pompon., Dig., I, 2, 2, 21. Sur tout cela, voir Th. Mommsen, Sui modi usati dai Romani nel conservare e pubblicare le leggi e i senatusconsulti, dans Ann. Ist. corrisp. arch., 30, 1858, p. 181 et suiv.; repris dans Gesammelte Schriften, III, 3, Berlin, 1907, p. 290 et suiv. 86 DH, X, 57, 7; selon une version conservée par Liv., III, 57, 10, ce seraient just ement les édiles qui, sur l'ordre des tribuns, auraient procédé à l'affichage des XII Tables.
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suggère explicitement le commentaire de Servius (auctus) à l'épithète virgilien legifera. Pourquoi la déesse porte-t-elle ce titre? «(Parce que) c'est elle, dit-on, l'inventrice des lois . . .; ou est-ce parce que les lois étaient gravées et déposées dans Yaedes Cereris?»*7. Si l'hypothèse d'une «contamination» attique - via Naples - est just e, il faut également qu'un certain souvenir ait été gardé par les Romains de la provenance et de la nature de celle-ci. Deux indices en ce sens sont fournis par des textes bien connus de Cicéron. Dans le pre mier88, sont évoqués les sacra de Cérès, célébrés en grec, par des prê tresses grecques. Certes, cette forme de culte est vraisemblablement assez postérieure au Ve siècle89. De fait, les prêtresses viennent «pres quetoutes de Naples ou de Velia»90 et cette double mention s'explique assez bien, après 400, alors que Naples et Vèlia sont les seules πόλεις grecques à se maintenir en milieu samnite et lucanien. Reste qu'il est significatif qu'on ait continué à faire venir de Naples les desservantes du sanctuaire, comme si le souvenir de ce que celui-ci devait à la Demet er napolitaine n'avait jamais été perdu. Dans le deuxième passage91, le stoïcien Balbus mentionne Liber-
87 Serv. et Serv. auct., ad Aen., IV, 58 : legiferae cereri leges enim ipsa dicitur inuenisse. . . an quia in aede Cereris incisae positae leges fuerunt? 88 Cic, Balb. 55. 89 Démonstration en forme de H. Le Bonniec, op. cit., p. 381 et suiv. (suivant, entre autres, Wissowa : p. 394), qui s'appuie essentiellement sur le texte d'ARN., adv. nat., II, 73 : quid, Phrygiam matrem, non cum Hannibal Poenus res Italas raperei. . . , et nosse et scire coepistis et memorabili religione sancire? Sacra Cereris matris non quod uobis incognita essent, adscita paulo ante, obtentum ut Graeca dicantur, nouitatem ipsam testificante cognomine? Mais l'argument le plus fort en défaveur de l'existence du graecus ritus au temple de Cérès dès le Ve siècle est apporté par A. Alföldi, op. cit., p. 95 et suiv., qui cite Liv., IV, 30, 1 1 (en 428 av. J.-C, devant la propagation incontrôlée des externae religiones, les édiles doivent veiller «à ce qu'on ne rende de culte qu'aux dieux romains, et seule ment dans les formes nationales», ne qui nisi Romani di neu quo alio more quant patrio colerentur), et commente : « if this were a reliable report, the aediles, the guardians of the temple of three foreign divinities, would be obliged first to wipe out the religious basis of their own political organization». En fait, le témoignage de Tite-Live implique qu'est pos térieure à 428, non Yaedes Cereris elle-même (comme le pensait Alföldi), mais seulement le graecus ritus. 90 Cic, loc. cit. : sacerdotes. . . fere aut Neapolitanas aut Velienses fuisse. 91 Cic, Nat. deor., II, 24, 62 : hune dico Liberum Semela natum, non eum quem nostri maiores auguste sancteque cum Cerere et Libera consecrauerunt, quod quale sit, ex mysteriis intellegi potest. Balbus continue en faisant de Liber et Libera les enfants (liberi) de Cérès.
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Dionysos, «Le Liber né de Sémélé, non celui que nos ancêtres ont consacré religieusement avec Cérès et Libera; ce dont il s'agit là, les mystères permettent de le comprendre». On a depuis longtemps mont ré92 que les mysteria en question étaient ceux d'Eleusis. Pour Cicéron et son porte-parole, les choses sont claires : Liber, à Yaedes Cereris, n'est autre que le parèdre de Demeter. Cérès, en effet, n'est pas seule dans son sanctuaire du Grand Cir que. Deux divinités l'entourent, Liber et Libera, c'est-à-dire Dionysos et Coré. Or, ce regroupement prend tout son sens dès lors que, peu avant 450, la «Cérès attique» vient enrichir et compléter la physionomie de la déesse que les Romains connaissaient et honoraient déjà dans le temple voué par Postumius. Le problème de l'existence d'une «triade» Déméter-Dionysos-Coré (dite parfois «triade praxitélienne»93) à Eleusis ou ailleurs a fait couler beaucoup d'encre. L'hypothèse d'une importation de cette «triade» à Rome a trouvé des défenseurs94. Toutefois, est-il correct de poser la question en ces termes? Car, s'il est sans doute excessif dé parler de «triades» éleusiniennes (Demeter est le maîtresse incontestée du sanc tuaire), le groupement romain non plus ne doit pas faire illusion : Liber et Libera n'apparaissent, dans Yaedes Cereris qu'en position nettement subordonnée95. Seule la singulière fortune qu'a rencontré chez les mo dernes le concept de «triade», de Dreiheit96, explique qu'on ait voulu, à toute force, faire correspondre à la «trinité» romaine supposée une
92 H. Le Bonniec, op. cit., p. 306 et suiv., qui, tout en niant que cette assimilation puisse remonter au Ve siècle, admet toutefois qu'elle peut dériver du « culte de Demeter à Naples [qui] avait reçu de la colonisation athénienne une empreinte attique prononcée». 93 Par référence aux statues de Praxitèle représentant Demeter, Coré et Iacchos dans le temple de Demeter à Athènes : Paus., I, 2, 4. 94 Entre autres J. Toutain, N. Turchi, H. J. Rose : discussion et bibliographie dans H. Le Bonniec, op. cit., p. 280 et suiv. 95 Ibid., p. 305 et suiv. 96 Titre d'un article célèbre et exhaustif de H. Usener, dans Rhein. Mus., LVIII, 1903, p. 1 et suiv.; 161 et suiv.; 321 et suiv. Dans le domaine italique, l'effort le plus systémati que de recherche de triades est dû à L. Banti, // culto del ed. «tempio dell'Apollo » a Veti e il problema delle triadi etrusco-italiche, dans SE, XVII, 1943, p. 176 et suiv. Autre chose est la «triade archaïque» dumézilienne qui, précisément parce qu'elle est donnée pour la projection théologique d'un système de pensée - la tripartition fonctionnelle -, ne laisse aucune place à la prolifération d'autres triades structurelles, capitoline ou moins encore « plébéienne ».
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structure grecque équivalente (ou italique, ou étrusque)97 et, par suite, qu'on oppose couramment, en un parallélisme forcé, «triade capitoli ne» et «triade plébéienne» - alors que l'importance respective de ces cultes est incommensurable, y compris, on l'a vu, pour la plèbe en sécession. Ceci posé, l'association de Dionysos à Demeter et Coré dans le cadre éleusinien , si elle a suscité bien des doutes98 est certainement un fait acquis vers le milieu du Ve siècle : on n'en voudra pour preuve que ce chœur fameux à'Antigone (représentée avant 441), dans lequel Dio nysos est dit «protecteur des vallons de Demeter Éleusinienne» et assi milé in fine à Iacchos". On remarquera par ailleurs que Demeter, Dio nysos et Coré (avec peut-être Hestia) sont précisément les seules divini tés du monde grec auxquelles soit accolé l'épithète de θεσμοφόροι100. Faut-il déduire de ces rapprochements que c'est vers le milieu du siècle seulement, lorsque Demeter Ελευσίνια peut être connue à Rome, que rentrent dans son orbite Liber et Libera, assimilés à Dionysos et Coré? Pas forcément, même si Cicéron rapporte explicitement à la myst ique éleusinienne la consécration conjointe qu'ont faite les maiores des trois divinités. Il est également possible que le couple Liber-Libera ait été déjà associé, sous une forme ou une autre, à Cérès. En ce cas, Yinterpretatio eleusina serait venue enrichir et effermir une solidarité déjà existante. Quoi qu'il en soit, il faut attendre les énoncés des leges Valeriae Horatiae de 449 pour qu'apparaisse, chez Tite-Live, le titre officiel et complet du sanctuaire : aedes Cereris Liberi Liberaeque101. L'hypothèse d'une influence d'Eleusis sur le culte romain a plu sieurs fois été avancée, sans d'ailleurs être étayée par une démonstrat ion en forme. Elle a été assez généralement abandonnée au profit des postulats d'une dérivation sicilienne ou locale de ce même culte, pour
97 Caractéristique est, de ce point de vue l'enquête de Fr. Altheim, op. cit. à la n. 30, p. 36 et suiv., sur la genèse de la «triade» Cérès Liber Libera. 98 Exprimés en particulier par G. Mylonas, Έλευσίς και Διόνυσος, dans ΑΕφημ., 1960, p. 68 et suiv. F. Graf, Eleusis und die orphische Dichtung Athens, Berlin, 1974, adopte une position beaucoup moins critique, sans suivre toutefois (p. 52) la position extrême de H. S. Versnel, IAKXOS, dans Talanta, 4, 1972, p. 23 et suiv., qui fait remonter jusqu'à l'extrême fin du VIe siècle l'équation Dionysos = Iacchos. Sur ces problèmes, mise au point récente de R. Martin et H. Metzger, La religion grecque, Paris, 1976, p. 139 et suiv. 99 Soph., Ant., 1119 et 1152; cf. frg. 374 Nauck et frg. anonyme 140 Nauck. 100 G. Kruse, s.v. Thesmophoros, dans RE, VI A 1, 1936, col. 28 et suiv. 101 Liv., III, 55, 7.
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trois raisons essentiellement : premièrement, il semblait impossible d'envisager des relations directes entre Athènes et Rome, dès le début du Ve siècle; deuxièmement, et toujours au début du Ve siècle, le rap prochement de Dionysos et des divinités d'Eleusis ne paraissait pas acquis ; troisièmement, il ne semble y avoir - à cette époque - ni mystè res romains, ni vocation initiatique du sanctuaire. Les deux premières objections tombent d'elles-mêmes, dès lors qu'on fixe vers le milieu du siècle l'influence qu'exerce sur le temple déjà existant de Cérès, via Naples, son homologue attique. La troisième semble plus forte parce qu'il est clair que Yaedes Cereris est avant tout, en ce début de la République, un sanctuaire politique, bien plus qu'un éventuel lieu d'initiations. Mais justement, le modèle éleusinien est émi nemment politique. Si les Romains sont susceptibles de prêter à leur propre déesse quelques traits de Ceres Actaea, c'est en raison du presti ge international, de la vocation universaliste d'Eleusis, de la place cen trale qu'il occupe dans ce qu'on pourrait appeler la «mythologie du droit». Certes, pas plus à l'époque de Γ« ambassade à Athènes» qu'à cel lede Postumius, Rome n'a pu ni voulu choisir une hypostase, une fo rme particulière de Demeter : c'est à toutes les Demeter que Cérès était semblable, ou plutôt à une seule divinité aux multiples visages que YUrbs découvrait peu à peu, qu'elle fut campanienne, attique ou sic ilienne. Eleusis néammoins, servi par le rayonnement incontesté de l'Athènes de Périclès, était sans doute alors le centre le plus à même d'imposer, et jusqu'aux marges de l'hellénisme, une image magnifiée de Demeter qui devient cause première de la civilisation et des lois.
Le temple voué vnèp της πόλεως par Postumius affirme donc tou jours davantage, jusqu'à la deuxième sécession et au-delà, sa vocation de sanctuaire politique, dans les deux sens du terme : il s'agit d'une ins titution pleinement publique, bien commun de l'ensemble des citoyens; il représente en même temps un instrument et un enjeu de pouvoir. Aussi bien la plèbe en fait-elle, de plus en plus, son point de ralliement, dès la crise agraire qui débouche sur la première sécession, et jus qu'aux leges Valeriae Horatiae qui y officialisent sa présence active. Le temple n'abrite pas pour autant un «culte de classe», qui constituerait l'émanation d'une hypothétique collectivité plébéienne possédant assez d'autonomie culturelle pour affirmer ses propres choix religieux. Il
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serait, de ce point de vue, illusoire d'opposer à un «pôle jupitérien» un «pôle cérérien» et, plus encore, à la «triade» capitoline la «triade» plé béienne. Les deux sanctuaires sont partie intégrante d'une communaut é de cultes fortement hiérarchisée, dans laquelle l'ordre des préémi nences ne fait de doute pour personne. Et pourtant, Yaedes Cereris représente un certain contrepoids face au Capitole. De quelle manière? Jupiter-roi, dieu souverain du pan théon de Rome, source du pouvoir politique, de Yimperium, est le plus haut gardien du droit et de la justice, comme le montre la tutelle qu'il exerce sur le serment. Aussi bien le contrat social que Jupiter patronne est-il fondé sur la loyauté, la fides102. Le temple de Cérès, quant à lui, devient au temps des XII Tables un dépôt d'archives, répondant ainsi à la vocation d'une déesse que l'on considère généralement comme «la législatrice». Sur Y Imperium des magistrats supérieurs s'exerce désor maisun certain contrôle; la fides ne suffit plus, il s'y mêle de la défian ce 103 : tout doit pouvoir être vérifié sur les écrits qui, eux, ne mentent pas. Cérès n'est pas, par essence, une divinité plébéienne. Mais les plé béiens, eux, ont choisi leur camp. Si la fidélité qu'ils doivent, en tant que Romains, au culte capitolin, ne subira que de brèves éclipses, les espoirs qu'ils formulent, en tant que citoyens, s'adresseront toujours plus à la protectrice des terres et des lois. Olivier de Cazanove
102 Sur le concept de fides, voir part. G. Dumézil, Idées. . . (op. cit. à la n. 14), p. 55 et suiv. ; G. Freyburger, Fides. Étude sémantique et religieuse jusqu'à l'époque augustéenne, Paris, 1986 (p. 282 et suiv. pour les rapports de Fides et de Jupiter). La bonne foi est essentiellement celle des paroles (Cic, Off., I, 23) avant d'être sanctionnée par des enga gements écrits : un dépôt d'archives fédérales (à l'exclusion, semble-t-il, des règlements de politique intérieure : Suet., Vesp., 8, 9) ne sera constitué qu'aux IVMIP siècle av. J.-C. sur le Capitole autour du temple de Fides, selon Th. Mommsen, art. cit. à la n. 85, p. 303 et suiv. 103 L'« insuffisance» de Fides - bientôt relayée par Concordia - dans le conflit patricio-plébéien est bien analysée par G. Dumézil, La religion. . . (op. cit. à la n. 14), p. 403. Voir en outre les remarques de G. Piccaluga, La colpa di «perfidia» sullo sfondo della pri ma secessione della plebe, dans Le délit religieux dans la cité antique (Coll. EFR, 48), Rome, 1981, p. 21 et suiv.
DOMINIQUE BRIQUEL
CONCLUSION
Dans le cadre de l'axe de recherches dont elle assure la direction scientifique au sein de l'équipe du CNRS «Recherches étrusco-italiques», et grâce à l'appui amical et efficace de l'École française de Rome, F. -H. Massa-Pairault nous a permis de nous retrouver pour tra vailler ensemble sur une période encore obscure de l'histoire de l'Italie ancienne, le Ve siècle. Je crois qu'il n'est pas hasardeux d'affirmer que cette initiative aura été heureuse et féconde. Elle nous a rappelé dans son introduction combien notre percept ion de cette époque restait marquée par la célèbre formule de A. Piganiol : «la nuit du Ve siècle». Nous n'allons certes pas prétendre que ces trois jours ont permis à la lumière de jaillir dans cette nuit . . . Mais nous avons tous ressenti combien notre rencontre, les exposés qui y ont été présentés et les discussions auxquelles ils ont donné lieu, avaient permis de progresser dans l'appréhension de cette période si difficile à saisir. Assurément cette «nuit du Ve siècle» existe. Mais il est heureux que nous n'ayons pas passé notre temps à nous complaire dans la déploration de notre impuissance, à souligner une fois de plus - et très banale ment- les limites de notre documentation. Au contraire, il est remar quable que ces limites elles-mêmes aient été interrogées, nous soient apparues porteuses d'un sens. Ainsi leur perception a été affinée, et nous ne pouvons plus nous contenter d'une vague impression globale. A. Maggiani et G. Colonna nous ont fait sentir combien, en Toscane, la situation était diverse selon les secteurs. G. Sassatelli nous a même montré que l'Étrurie padane restait peu touchée par ce qui, ailleurs, amène à parler de crise. Exemp laire de ce point de vue a été l'étude, on pourrait dire microscopique, de A. Pontrandolfo et B. D'Agostino, qui nous a révélé à quel point au
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sein d'une seule région comme la Campanie coexistaient des sousensembles clairement définis et articulés, et nettement différenciés. Nous avons été de ce fait amenés à constater l'existence de zones de vide. Mais nous avons appris à apprécier ces vides, à en analyser les diverses variétés. A. Bottini nous a fait sentir à travers les cas contrast és des Lucaniens et des Œnôtres la différence entre un vide qui n'est que pauvreté et un phénomène de vide effectif touchant une zone entiè re - et qu'on ne peut réduire à un effet du hasard des trouvailles. F. Coarelli nous a rappelé l'existence d'un vide social, certaines couches de la société étant pour nous invisibles : là encore nous avons senti combien nos données ne nous permettaient de saisir qu'une partie de la réalité historique. En tous cas, nous avons bien compris, au fur et à mesure des com munications, combien était simpliste le procédé qui consisterait à ne juger de la crise que d'après la chute des importations grecques. Déjà en 1977 G. Colonna avait montré que cette «pauvreté» pourrait tenir à bien d'autres facteurs qu'une crise économique globale. Et un des grands apports de ce colloque aura été la constatation de la nécessité, selon la formule de M. Torelli, de remplacer une approche quantitative par une approche qualitative. Parler d'un appauvrissement général, quand bien même ce ne serait pas gravement fausser la réalité dans sa complexité, ne nous apprendrait que bien peu! Ce qui importe, c'est de saisir les changements de ces sociétés, de percevoir les forces qui les travaillent, dans leurs articulations complexes. Il est clair que seul un examen approfondi des diverses données, attentif à en saisir les éléments de signification historique, le permet. Nous en avons eu des exemples éloquents avec des analyses précises comme celles de F. -H. Massa-Pairault et F. Roncalli sur les faits artist iques, N. Parise sur les données monétaires, A. Rouveret et A.-M. Adam pour les aspects militaires, J.-P. Thuillier pour un phénomène comme celui des jeux ou O. de Cazanove sur les innovations religieuses de Rome à cette époque. À la limite, la considération d'un seul objet peut se révéler riche d'enseignements en ce sens : M. Torelli nous l'a montré avec le vase de Nicias. À travers toutes ces contributions, nous avons constaté l'émergen ce d'une société renouvelée, caractérisée par une volonté d'affirma tion individualisée, se définissant à l'encontre des vieilles structures aristocratiques de type gentilice. M. Humbert, par ses remarques si pénétrantes sur l'innovation fondamentale représentée par la loi des XII Tables (innovation dont il a par ailleurs bien souligné les limites),
CONCLUSION
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J.-Cl. Richard, dans son analyse du cas exemplaire de l'expédition des Fabii contre Véies, nous ont bien fait sentir cette nouveauté - et cela quand bien même le poids de facteurs qui ne ressortissent pas au simple modèle de la cité se fait sentir encore nettement, comme nous l'ont rappelé C. Peyre, analysant la pression d'un monde différent, celui des Celtes, ou C. Ampolo, évoquant à propos du Latium l'impor tancepersistante, pour les diverses cités, des organisations de type fédéral. Bien sûr cette démarche n'a de sens que si le point de vue, indis pensable, du spécialiste sait dégager les implications proprement histo riques du phénomène qu'il analyse, l'intégrer dans une perspective plus vaste, comme celle qui nous a réunis. Je n'en prendrai comme illustra tion que la belle communication de H. Zehnacker, qui à partir d'une question en apparence purement technique - le montant des amendes à Rome - a su dégager le sens démocratique de la société romaine de l'époque. Fort heureusement, nous n'avons pas assisté à une série de monographies juxtaposées, closes sur elles-mêmes : je me contenterai d'évoquer la manière dont F. Coarelli nous a fait sentir, pour la ques tion du pays volsque, le poids des facteurs de la politique intérieure de Rome, ou celle dont E. Lepore a dégagé l'interaction constante, au cours du Ve siècle, des faits grecs et italiens, et en particulier «l'omni présence» d'Athènes. Au cours de ces trois jours nous avons travaillé. Nous avons beau coup travaillé, et sans doute aussi bien travaillé. Surtout nous l'avons fait dans un climat d'échanges ouverts et amicaux, où ceux qui comme moi venaient de France ont eu la grande satisfaction de pouvoir bénéfic ier, pendant quelques jours, de la vie qui anime nos recherches de ce côté-ci des Alpes - et qui suscite souvent notre admiration, sinon notre envie . . . L'École française de Rome est un lieu où chercheurs cisalpins et transalpins peuvent ainsi se retrouver et collaborer fructueusement. Qu'il me soit permis, en notre nom à tous, d'exprimer à ceux qui en ont la responsabilité notre reconnaissance pour cette rencontre qu'ils ont rendue possible - et leur dire, tout simplement, combien nous sommes heureux d'avoir pu en profiter. Dominique Briquel
INDEX GÉOGRAPHIQUE
Acquarossa, 11, 13. Adria, 53, 67, 79, 100, 166, 176. Agri (fleuve), 155, 158. Agrigente, 289, 294. Agylla, 9. Albe, 127. Aleria (Alalia), 87, 179, 354. Alfedena, 108. Allia (fleuve), 253. Anîinum, 138. Annum, 138, 141. Anxur, 357 n. 75 (cf. aussi Terracine). Aquinum, 138. Apennins, 35. Apulie, 155. Ardée, 129, 152, 307 n. 1. Arena (sur le Serchio), 41. Arezzo, 32, 35. Argenta (Bo), 55. Arida, 125, 187. Arno, 37. Arpi, 139. Arpinum, 139. Artena, 135. Animino, 37. Asciano (Si), 36 n. 43. Atena Lucana, 116, 161. Athènes, 86, 221, 285, 291, 335, 391. Aurunques (peuple), 151, 168. Ausonie, 168. Bagnolo San Vito, 52 (cf. aussi Mantoue). Bagnoregio, 11. Banditacela (Caere), 197. Barberino (vai d'Elsa), 47. Basento (fleuve), 156. Basilicate, 155. Bientina, 37, 39. Bisenzio, 11.
Blera, 11, 13, 19. Bologne, 52, 53, 60, 62, 74, 75, 79, 97, 218, 344. Bolsena, 11. Bomarzo, 12, 17, 19. Bondena (Bo), 55. Bradano (fleuve), 156. Brettiens (peuple), 186. Ca' Buccino dell'Orbo (Volcei), (Bo),161. 53, 76. Caere, 17, 20, 200, 333, 338 (cf. aussi Banditaccia, Ceri, Monte Abatone). Camucia (Cortone), 31. Campanie, 8, 101, 295. Canovella (val du Reno), 59. Canosa, 160. Capena, 137. Capestrano, 195. Capoue, 113, 115, 173, 214, 295. Carthage, 118, 281, 296. Casale Marittimo (Pi), 46. Casalecchio di Reno (Bo), 80. Casalta di Lucignano (Si), 35. Casinum, 138. Castelcapuano (Naples), 102. Castel d'Asso (Vt), 11, 13. Castelleto Ticino, 58. Castiglione in Teverina, 16. Castro, 11, 13. Catane, 294. Caudium, 103. Cavallino (Le), 157. Cavone (torrent), 155. Cecina (fleuve), 44. Celtes (peuples), 96, 193. Ceri, 11. Chianciano, 27. Chônes (peuple), 176.
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INDEX GÉOGRAPHIQUE
Circei, 129, 153. Città della Pieve, 27. Clusium, 8, 25, 217, 225, 253, 332, 349, 350. Colle (vai d'Elsa), 46. Colle del Forno, 195. Corno, 89. Corcyre, 294. Cora, 141, 143. Cornia (fleuve), 44. Costa Murata (Vetulonia), 48 n. 95. Cortone, 361. Covignano, 93 (cf. aussi Rimini). Crémère (fleuve), 245, 317, 328. Crotone, 299. Cumes, 57, 186, 203, 290. Cures, 137. Cyrène, 291. Daunie, 157. Dauniens (peuple), 57, 184. Delphes, 183, 331. Doganella (vallée de l'Albegna), 12. Dometaia (vai d'Elsa), 46. Ecetra, 135. Elbe, 7, 44, 173. Elèe, 290, 294 (cf. aussi Velia). Eleusis, 393. Élymes (peuple), 178, 293. Emilie, 84. Enza (fleuve), 40, 64. Épire, 299. Era (fleuve), 44. Este, 58, 94. Étrurie, 7, 22, 49, 181, 189, 192, 230, 327. Fabriano, 195. Faléries, 8, 14, 33, 207. Felsina, 60, 295. Ferentina (Aqua), 128. Ferentinum, 136 η. 2. Ferento, 12 (cf. aussi Sorrina). Fidènes, 258, 333. Fratte (Salerno), 106, 110. Garfagnana, 39. Gela, 204, 289. Ghiaccio Forte, 12. Golasecca, 94. Grande-Grèce, 299. Grotta Porcina, 235.
Grotte di Castro, 11. Grotte San Stefano, 18, 19. Grotti (Si), 36 n. 43. Gubbio, 196. Henna, 382 n. 29. Himère, 180, 206. Iapyges (peuple), 168, 290. Ischia (Naples), 75. Ischia di Castro, 330. Italie, 165. Lac Fucin, 27, 137. Lac Régule, 374. Lanuvium, 360. Laos, 158 n. 22, 381. Latins (peuple), 117. Latium, 121, 135, 307, 382. Lavello, 160. Lavinium, 341. Leontinoi, 294. Lipari, 8, 179. Liri (fleuve), 139. Locres, 208 n. 42, 239. Lucanie, 101, 155. Lucaniens (peuple), 116, 186, 296. Luceria, 162. Lucques, 41 n. 61. Lucus Feroniae, 138. Macchia del Monte {Vetulonia), 48, n. 95. Magliano (Sabina), 11. Mantoue, 60, 78, 88, 97 (cf. aussi Bagnolo San Vito). Marciano (val du Clanis), 27. Marica, 151. Marzabotto, 40, 58, 60, 68, 69, 71, 97, 234, 342. Messana, 293. Messapie, 159. Messapiens (peuple), 296. Métaponte, 156, 162, 300. Modène, 63. Montaione (vai d'Elsa), 46 n. 87. Monte Abatone (Caere), 197. Monte Bibele (vallèe de ridice), 98. Monteguragazza (Apennin bolognais), 67. Monteleone di Spoleto, 195. Monte Pruno (vallo di Diana), 115. Monte Spazzavento (vallée du Serchio), 41 (cf. aussi Lucques).
INDEX GÉOGRAPHIQUE Monterano, 11. Monterenzio (vallée de l'Idice), 65. Montereggi (au Nord de Fiesole), 37. Monteriggioni, 47. Morgètes (peuple), 169. Morolo (vallée du Sacco), 136. Musarna, 12, 13. Naples, 102, 203, 290, 293, 395. Nemi, 146. Nepi, 17. Nocera (Campanie), 113 (cf. aussi Nuceria). Noie, 104, 113, 295. Norba, 153. Norchia, 12, 13. Nuceria, 105 (cf. aussi Nocera, Campanie). Ôenôtres (peuple), 158, 171, 291. Ofanto (fleuve), 156. Olympie, 183, 358. Ombriens (peuple), 57, 167, 184, 344. Ombrone (fleuve), 35. Opiques (peuple), 168. Orbetello, 11. Oria (Peucétie), 159. Orte, 12, 17. Orvieto, 30, 213 η. 65, 221, 338. Padula (vallo di Diana), 115. Pandosia, 302. Pérouse, 40, 226, 329, 354. Peucétie, 157, 271. Phocée, 182. Pieve a Socana (Ar), 234. Pise, 37, 38, 48, 64. Pisciolo di Melfi, 161. Pisticci, 156. Pitigliano, 11. Poggetto Lepri (Vetulonia), 48 n. 95. Poggio a Issi (vai d'Elsa), 46 n. 87. Poggio Buco, 11, 13. Poggio dell'Aglione (vai d'Elsa), 46 n. 87. Poggio Sommavilla, 195. Polusca, 139. Pomarico Vecchio, 162. Pometia, 141, 148. Pompei, 108. Pontecagnano, 115. Pontine (Marais), 146. Populonia, 42, 190.
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Poseidonia, 108, 114, 161, 187, 290 (cf. auss i Santa Venera). Pozzi di Serravezza (Versilia), 39. Préneste, 307, n. 1. Pyrgi, 20, 201, 330, 338. Quinzano d'Oglio (Cremona), 43. Ramonte (vallée du Reno), 60. Ravenne, 92, 339. Reggio (de Calabre), 293 (cf. aussi Rhegion). Regisvilla, 12, 17. Reno (fleuve), 55 η. 5, 58. Rhegion, 206, 331, 341 (cf. aussi Reggio). Rimini, 92, 94 (cf. aussi Covignano). Ripacandida, 161. Rofalco (Selva del Lamone), 17. Romagne, 91. Rome p. 117, 135, 168, 177, 194, 204, 246, 263, 307, 357, 373. Romito di Pozzuolo (Lu), 42. Roselle, 47. Rossano (Serra di Vaglio), 161. Rubiera (Re), 57. Rutigliano (Ba), 157. Ruvo del Monte, 159. Ruvo di Puglia, 160. Sabins (peuple), 138, 388. Samnites (peuple), 185. Samothrace, 191. San Basilio (Adria), 79. San Casciano (Si), 27. San Germano (Vetulonia), 48 n. 95. San Gimignano (Si), 46 n. 87. San Giovenale, 11. San Giuliano, 11, 13. San Martino in Gattara (Forlì), 92. San Polo Servirola (Re), 74, 88. San Rocchino (Lac de Massaciuccoli), 38. Santa Venera, 113 (cf. aussi Poseidonia). San Vitale (Bo), 53. Sarteano, 27. Satriano, 161. Satricum, 137, 143, 148. Saturnia, 11. Secchia (fleuve), 41, 63 n. 30. Ségeste, 293. Segni, 153 (cf. aussi Signia). Sele (fleuve), 114, 156.
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INDEX GÉOGRAPHIQUE
Selvello (Vetulonia), 48, η. 95. Serchio (fleuve), 41, 63 η. 30. Serra di Vaglio, 159, 161. Setta, 141. Sicile, 170, 289. Sicyone, 202. Signia, 151 (cf. aussi Segni). Sinni (fleuve), 155, 158. Siris, 155, 169, 176. Sorrina (Ferento), 12 (cf. aussi Ferento). Sovana, 11, 27. Sparte, 193, 289. Sperticano (près de Marzabotto), 59. Spina p. 9, 42, 52, 60, 65, 76, 78, 86, 98, 219, 295, 340, 342, 343, 244. Spolète, 126. Stables, 108. Suessa Aurunca, 141, 148. Suessula, 141. Supino (vallée du Sacco), 136. Sutri, 17. Sybaris, 112, 158, 180, 289, 301. Syracuse, 180, 203, 290, 294, 296, 331. Tanagra, 203. Tarente, 156, 290, 296, 361. Tarquinia, 14, 21, 26, 57, 197, 217, 233, 241, 333, 336. Τemesa, 302. Terracine, 141, 149 (cf. aussi Anxur). Thasos, 200. Thermopyles, 252. Thessalie, 291. Thourioi, 176, 187, 294, 391. Tivoli, 139. Todi, 8, 196, 224.
Tombarelle (Bologne), 95. Trequanda (Si), 35. Trevignano, 11. Tuscania, 11, 13. Tusculum, 125. Ugento, 361. Val Beretta (Vetulonia), 68 η. 95. Val d'Ampio (Vetulonia), 48 n. 95. Val d'Arno, 36. Val d'Elsa, 46. (Cf. aussi Barberino, Colle, Dometaia, Montaione, Poggio dell'Aglione, Poggio a Issi). Val di Chiana, 25, 31. Vallo di Diano, 115. Véies, 8, 18, 19, 57, 208, 226, 248, 328, 332. Velia, 158, 395 (cf. aussi Élée). Velitrae, 139, 143. Vénétie, 176. Venola (torrent), 64. Venusta, 162. Versilia, 39 (cf. aussi San Rocchino et Pozz idi Serravezza). Verucchio, 52, 55, 92. Vetulonia, 25, 47, 48, 329 (cf. aussi Costa Murata, Macchia del Monte, Poggetto Lepri, San Germanio, Selvello, vai Berett a, vai D'Ampio). Vico Equense, 102, 113. Villa Ruffi, 93 (cf. aussi Covignano). Voghiera, 86. Volsinies, 8, 18, 330, 340. Volsques (peuple), 135, 198. Volterra, 36, 44. Vulci, 25, 190, 221, 236, 344, 345, 346. Zancle, 331.
Giovanni Colonna, Città e territorio nett'Etruria meridionale, p. 7-21. L'esame del rapporto tra città e territorio mostra che nell'Etruria meridionale le città provocano nel tardo VI secolo la destrutturazione del sistema di centri urbani minori, che era stato l'espressione del modo di produzione favorito dalle aristocrazie gentilizie. In parallelo le città pro muovono una più intensa e diretta occupazione della campagna, attuan do una 'colonizzazione interna', appoggiata a fattorie e insediamenti rurali, verosimilmente a vantaggio dei ceti medio-bassi del corpo sociale. Il fallimento di questa operazione, verso la metà del V secolo, sembra confermare l'ipotesi, già avanzata per altra via, di una reazione in senso oligarchico dei ceti dominanti, sulla quale ricadrebbe in larga misura la responsabilità della generale recessione economica che investe Γ Etruria dell'epoca. Nel IV secolo la rinascita dei centri minori sancisce il ritorno alle forme ' tradizionali ' di sfruttamento del territorio, da parte di domini ormai saldamente impegnati nella gestione dello Stato.
Adriano Maggiani, La situazione archeologica dell'Etruria settentrionale, p. 23-49. La crisi interna e internazionale che tocca all'inizio del V sec. certa mente anche questo settore d'Etruria si risolve, nelle varie città, in maniera diversificata. Soltanto alla fine del periodo di crisi (intorno alla metà del secolo) appare affermato quell'equilibrio tra città e campagna che sembra caratterizzare alcuni centri dell'interno (Chiusi, Cortona, Arezzo; forse Volterra) rispetto alle metropoli meridionali. Le città della costa conoscono invece periodi di grande floridezza, Populonia incr ementando il controllo sulle fonti di approvvigionamento del ferro elbano, Pisa attuando una notevole azione espansiva sulla costa versiliese, nella Valle dell'Arno e verso l'Oltreappennino. Soltanto Vetulonia sembra soccombere al complesso processo di tr asformazione dell'assetto sociale e non è praticamente più documentata archeologicamente nella seconda metà del V sec. a.C.
Giuseppe Sassatelli, La situazione in Etruria Padana, p. 51-100. Dopo alcuni brevi cenni sulla più antica occupazione della pianura padana da parte degli Etruschi (IX-VIII secolo), vengono delineati i caratteri essenziali della riorganizzazione di questo territorio a partire dalla seconda metà del VI secolo, l'assetto politico e produttivo delle città che costituivano l'ossatura (Bologna, Marzabotto, Spina, Mantova), i rap porti con il mondo transalpino. Nella prima metà del IV secolo, il contraccolpo dell'invasione gallica provoca probabilmente una fuga verso l'Adriatico e verso Spina di molti Etruschi dell'interno che sembrano trovare nella pirateria un modo per sopravvivere allo scardinamelo economico del loro entroterra.
Angela Pontrandolfo et Bruno D'Agostino, Greci, Etruschi e Italici nella Campania e nella Lucania tirrenica, p. 101-116. Partendo dal presupposto che il termine crisi sta ad indicare processi dinamici di scomposizione e ricomposizione, gli Autori cercano di indiv iduare lo spettro di possibili modelli indicatori di forme di rottura di vec chi equilibri e di processi di trasformazione fonte di nuovi equilibri. L'in dagine è stata condotta attraverso l'analisi grammaticale dei contesti più ampi ed omogenei noti in un ambito territoriale che comprende l'area campana e la Lucania occidentale, un'area in cui insistono città greche, centri etruschi ed insediamenti indigeni, popolazioni strutturate in man iera differente ma con forti influenze reciproche. A Neapolis l'uso del cratere nelle sepolture della seconda metà del secolo segna l'adozione di un modello ideologico estraneo ad una polis ma ampiamente attestato (v. retro)
Carmine Ampolo, Roma arcaica ed i Latini nel V secolo, p. 117-133. Si ribadiscono due caratteristiche dell'esperienza romana : essa è cit tà aperta ed ha un rapporto speciale con i Latini (lo mostrano anche i primi due trattati romano-cartaginesi). Si analizzano tre punti : 1) I rapporti tra Romani e Latini agli inizi del V secolo (battaglia del lago Regillo, foedus Cassianum e costruzione del tempio dei Castori sono strettamente collegati e la loro storicità con fermata) ; 2) Pretori e dittatori sono al comando della lega latina ; Romani e Latini partecipano anche alla ripartizione del bottino ed alla creazione di colonie; 3) Praetor maximus è designazione generale del magistrato che in un certo momento è dotato del potere più elevato : lo prova il con fronto con varie formule giuridiche e sacrali di età repubblicana. Anche in campo istituzionale i Romani rielaborarono in modo nuovo esperienze latine e italiche.
Filippo Coarelli, Roma, i Volsci e il Lazio antico, p. 135-154. Si prende in esame il problema della presenza volsca nella pianura Pontina : origine della popolazione e suoi primi contatti con il Lazio ; situazione economica e sociale del Lazio meridionale costiero in età arcaica; situazione politica dello stesso territorio prima e dopo l'arrivo dei Volsci, con particolare riguardo ai rapporti con Roma e con i Latini.
nell'ambiente campano circostante e rivela l'esistenza di profondi rap porti di reciprocità prima dell'immissione ufficiale di Campani nella ci t adinanza. Più a sud, centri quali Noia e Nocera non sembrano subire il tracollo che investe invece, a partire dal terzo quarto del secolo, la vicina Fratte il cui periodo di maggiore fioritura si colloca tra la fine del VI e la prima metà del V quando sembra entrare in crisi l'insediamento etrusco di Pontecagnano. I due centri etruschi più meridionali della Campania nel corso del V secolo si comportano in maniera polare : infatti quando Fratte comincia la parabola discendente il centro di Pontecagnano manif esta indizi di ripresa, entrambi condizionati dalle trasformazioni che, rompendo consolidati equilibri, portarono all'occupazione lucana di Poseidonia ed a quella di Capua da parte dei Campani.
Angelo Bottini, I popoli apulo-lucani, p. 155-163. Il V sec. a.C, visto di solito come un periodo di crisi nel mondo della Magna Grecia (ma che vede la comparsa delle nuove compagini italiche), si apre con la distruzione di Sibari. Ad essa corrisponde il disfacimento della cultura degli Enotri, già in crisi per l'ascesa di Metaponto e della gemella Poseidonia, favorevole invece alla crescita delle genti site nel cuore dell'odierna Basilicata. Più ad Oriente, elemento saliente del periodo sono le guerre che con trappongono gli Apuli a Taranto, pur legati (specie della penisola salentina) da un intenso processo di ellenizzazione destinato peraltro a conti nuare, seppure in forme diverse, nelle fasi seguenti. Il compiersi dell'etnogenesi lucana (presa di Poseidonia), avviatosi proprio in seguito agli avvenimenti precedenti, costituisce il vero momento di svolta di questo secolo, che termina così con la nascita della prima entità statuale italica.
Dominique Briquel, Le regard des Grecs sur l'Italie indigène, p. 165-188. L'Italie indigène du Ve siècle, est aux yeux des Grecs un monde bar bare, ne serait-ce que parce qu'on n'y parle pas grec. Mais, à la différen ce des classiques barbares de l'Orient, ces barbares italiens, ou au moins les plus évolués d'entre eux, comme les Étrusques ou les Latins, connais sent un type de civilisation, défini par la vie en cités, qui les rapproche des Grecs. Aussi, pour appréhender cette réalité spécifique, les Grecs recourent-ils fréquemment à des concepts ethniques qui les rapprochent d'eux-mêmes, tout en préservant l'écart nécessaire : les Étrusques sont des Pélasges ou des Lydiens, les Latins des Troyens. Sans doute les advers aires grecs de ces indigènes sont-ils amenés à récuser la validité de ces définitions, trop favorables à leurs yeux : mais on ne peut parler d'oppo(v. au verso)
Mario Torelli, La società etrusco della crisi. Quali trasformazioni sociali ?, p. 189-198. Il quadro della « crisi» della società etrusca va sfumato alla luce di tutti i fenomeni, di ordine « qualitativo », che ne determinano il più giusto colore. Esempio tra gli altri, la scelta della «qualità» dei vasi attici import ati.Bisogna quindi allargare l'indagine nel tentativo di capire su quali direttrici di sviluppo poteva orientarsi la società etrusca, tenuto conto dei limiti storici già delineatisi in funzione di particolari strutture e ideologie proprie a siffatta società, e nella congiuntura determinatasi in varie città dopo l'adozione, come a Roma, di un sistema politico «repubblicano», caratterizzato dal dominio di ristrette oligarchie. L'esempio di Sparta può aiutarci a comprendere perché l'oligarchia (v. retro)
sition systématique Grecs/barbares. Celle-ci existe, mais se manifeste à propos d'autres populations, moins évoluées, comme les Celtes du Nord, ou les Italiques qui font alors sentir leur pression sur le monde grec d'Italie.
etrusca non ha avuto lo stesso sviluppo dell'oligarchia spartana. Ciò sarebbe dovuto al fatto che, in Etruria, si determinavano diversi livelli tra le poleis, chiusura dei sistemi politici sia rispetto agli altri popoli italici che alle molteplici componenti interne e subalterne delle città e che le classi dirigenti erano, per natura e formazione, composite e complesse. Il modello « agoraico » si sostituisce quindi al modello « emporico », con tutte le conseguenze che ne derivano, di restrizione della piramide sociale e di « anandria ».
Françoise-Hélène Massa- Pairault, L'art et la définition de la cité, p. 199-227. La production artistique et artisanale du Ve siècle a. J.-C. à Rome et en Étrurie connaît-elle une crise? Cette synthèse essaie de comprendre pourquoi l'art de cette époque reflète l'histoire des difficultés de la nais sance de la « polis » italique comme « idée et représentation ». 1) Dans le premier quart du Ve siècle, la conception des programmes décoratifs des édifices publics surmonte rarement la contradiction entre l'expression des valeurs gentilices et celle des valeurs de «polis». Contrai rement à ce que révèle l'exemple d'Athènes, la communauté ne peut se penser comme telle dans son entité et son rapport à l'histoire. 2) La production artisanale est elle-même en pleine redéfinition dans (v. au verso)
Francesco Roncalli, La definizione pittorica dello spazio tombale nella «età della crisi», p. 229-243. Lo studio si propone di isolare, nel quadro della pittura funeraria del V sec. a.C, considerata «in crisi» quantitativa e qualitativa, i sintomi propri e indipendenti di una evoluzione specifica, ideologica, del fenomeno. Il riesame di alcuni elementi di base della « interpretazione » pittorica del vano tombale (come il discusso « mensolone » del timpano), e poi quello di alcuni temi e schemi iconografici evolventisi tra VI e V sec. a.C, porta all'accertamento della polivalenza dei simboli applicati : l'allusione archi tettonica, indotta dal taglio dell'ipogeo, è poco più che punto d'avvio ver socontaminazioni e aperture simboliche di varia natura. Il valore sacrifi cale dei temi, non solo esornativi, del timpano e, tra la fine del VI e la (v. retro)
Jean-Claude Richard, Les Fabii à la Crémère : grandeur et décadence de l'organisation gentilice, p. 245-262. Sous les diverses formes qu'elle revêt, la tradition relative à l'épisode du Crémère est homogène en ce qu'elle fait la part belle au caractère pri vé de cette entreprise : jusque dans les formes qui cherchent à la normalis er sur ce point, le leit motiv du familiare bellum et des priuata arma y est aisément décelable. Cette expédition, comme telle, constitue un hapax dans la vulgate des primordia. Elle prolonge des comportements se fon dant, dans l'ordre militaire, sur des solidarités de type précivique. Tout se passe d'autre part comme si son échec avait marqué un tournant dans l'histoire de l'aristocratie romaine et de l'organisation gentilice. Le seul autre decretum d'une gens dont le souvenir nous soit parvenu pour le (v. au verso)
ses acteurs, ses destinataires, et ses liens avec la société dans son ensemb le. 3) La naissance des valeurs propres à l'art italique se réalise à tra vers l'enseignement et la médiation d'Athènes, omniprésente politiqu ement et culturellement dans la péninsule. L'achat de vases attiques, mais surtout la sélection ininterrompue des images, riches de sens, qu'ils dif fusent dans les sociétés qui les recherchent, permettent l'acquisition d'idées neuves de la part de l'aristocratie. C'est le début d'une nouvelle saison de l'art comme représentation de «polis», unissant l'expression de Γ« ethos », propre à l'art classique, et la considération des « fata », centrale dans la «disciplina». Dans ses formes et ses sujets, l'art italique est le fruit de cette synthèse difficile.
prima metà del V secolo, l'emergere dell'allusione ai Dioscuri, indicano una collocazione già da tempo «mista» - terrena, ctonia ed ultraterrena del locus repositionis : essa anticipa nella sostanza le allusioni all'Ade del pieno ellenismo e accoglie senza traumi, lungo l'intero arco del V secolo a.C, spunti tematici nuovi (lotte di galli, geni alati, demoni infernali, lo stesso viaggio all'aldilà).
Moyen Âge romain, celui de la gens Manlio. (384 av. J.-C.) illustre l'am pleur de l'évolution qui s'était accomplie en près d'un siècle. Les Fabii n'avaient pas reculé devant une résolution qui, outre leur lignage, enga geait aussi l'avenir au moins immédiat de Wrbs. Après l'exécution de M. Manlius Capitolinus, la gens Manlia n'eut d'autre ressource que de fai re, à titre au moins symbolique, acte d'allégeance à la cité.
Michel Humbert, La crise politique du Ve siècle et la législation décemvirale, p. 263-287. Essai de lecture politique de la loi des XII Tables. L'œuvre de codifi cation, arrachée par la plèbe révolutionnaire à l'oligarchie patricienne, porte un coup décisif à la puissance souveraine de Yimperium. La sanc tiondu droit est annexée par la loi ; et, à la suite du procès, civil et public (c'est-à-dire criminel), tout le droit privé et pénal, garanti jusque-là par l'autorité seule du magistrat, est désormais fondé sur la loi. La loi établit ainsi l'inventaire de toutes les situations juridiques dont chaque citoyen pourra exiger la protection. Réforme «démocratique» décisive, dont le modèle et l'inspiration pourraient, on le suggère, être à replacer en Grèc e.
Ettore Lepore, Parallelismi, riflessi e incidenze degli avvenimenti del contesto mediterraneo in Italia, p. 289-297. La storia del V secolo in Italia si inserisce nei contemporanei vasti processi che si svolgono in tutta l'area mediterranea. La presenza di Ate ne sulla scena occidentale costituisce un fatto di capitale importanza. Erede della politica «panionica» in Italia, già con Temistocle, ma sempre più, in seguito, con Cimone e Pericle, e fino all'ultima spedizione di Sici lia, Atene apre in questa area nuove prospettive « panelleniche ». La ricer ca,sotto la spinta e la crescita del demos, di nuovi mercati granari, lo stabilimento di complesse relazioni di carattere politico, economico e culturale, sia con le poleis italiote e siceliote, che con i rappresentanti dei popoli indigeni, hanno molteplici riflessi e profonde incidenze sulle varie situazioni locali. I fattori analizzati sono : la promozione di nuovi mercati (v. retro)
Nicola F. Parise, Moneta e società in Magna Grecia. L'esempio di Crotone, p. 299-306. Tentativo di analizzare le articolazioni del sistema monetario di Cro tone in rapporto alla crisi della aristocrazia.
privilegiati, come la Campania e la valle padana; la destabilizzazione, indotta dalla presenza di questi mercati, di antichi rapporti tra città e campagne, tra popoli e poleis, in una serie di spinte e controspinte etniche e sociali; l'attuazione di progetti politico-culturali che tendono al superamento delle arcaiche realtà coloniali. Essi sono visti nella loro scansione evenemenziale e nella dialettica conflittuale delle varie situa zioni venute a determinarsi, illustrando il ruolo eminente di Atene nella crisi e le trasformazioni del V secolo in Italia.
Hubert Zehnacker, Rome : une société archaïque au contact de la monnaie (Ve-IVe siècle), p. 307-326. Du Ve au IVe siècle, la société romaine connaît une forte différenciat ion sociale fondée sur la richesse, mais ignore encore l'usage de la monn aie. Des lingots de bronze y jouent le rôle de paléomonnaies, c'est-à-dire d'objets qui servent à reproduire et à justifier les structures sociales. Fon dée sur les livres I-V de Tite-Live, l'étude concerne : la hiérarchie de la société civique selon la constitution «servienne»; le mécanisme de l'aes alienum comme transfert provisoire de crédibilité ; le Stipendium des Vest ales; le Stipendium militaire comme compensation timocratique à la fonction guerrière; les amendes et les récompenses accordées par l'État, qui visent à modifier la place de certains individus dans la hiérarchie civique; enfin les «cotisations» à l'occasion de funérailles. Les mécanis mes paléomonétaires s'effacent au cours du IIIe siècle.
Anne-Marie Adam et Agnès Rouveret, Les cités étrusques et la guerre au Ve siècle avant notre ère, p. 327-356. À partir d'un examen des sources écrites et de la documentation archéologique (mobiliers funéraires, documents figurés), on cherche à définir certains traits de comportement des cités étrusques face à la guerr e. L'analyse permet de dégager l'existence d'une «crise» du vieux modèl e gentilice tout en faisant ressortir la diversité des réactions d'un centre à l'autre. Dans les vieilles aristocraties d'Étrurie méridionale (Tarquinia, Cerveteri), l'absence presque totale d'armes dans les tombes, les allusions détournées à la guerre dans l'iconographie funéraire s'opposent à l'affi rmation directe des valeurs guerrières, présente partout ailleurs à la même époque en Étrurie. Les indices les plus nets d'un statut de citoyensoldat se trouvent à Orvieto et, dans une moindre mesure, dans les cen(v. au verso)
Jean-Paul Thuillier, L'organisation et le financement des ludi circenses au début de la République: modèle grec ou modèle étrusque?, p. 357-372. La plupart des historiens contemporains estiment que, dans la Rome archaïque, les ludi circenses étaient organisés selon un modèle grec, c'està-dire que les chevaux, les chars et les auriges étaient engagés dans la compétition, à titre privé, par de riches propriétaires qui, en cas de vic toire, en retiraient toute la gloire, sportive ou autre. On tente de montrer ici que cette hypothèse repose sur une vue erronée de la situation en Étrurie même, et sur une analyse insuffisante du texte clé (Pline l'Ancien, HN, 21,5). En fait, les couronnes dont il est question dans la loi des Douze Tables (X, 7) citée par cet auteur, n'étaient pas décernées à des vain queurs aux jeux du cirque, comme la comparaison avec des passages de (v. au verso)
très de la plaine padane, comme Spina. À Vulci, plusieurs sépultures, datées entre le fin du VIe siècle et le Ve siècle, attestent l'importance de certains chefs de guerre au sein de la cité, ce qui évoque l'exemple fameux, et plus ancien, des frères Vibenna et de leur compagnon Macstarna mais permet surtout de souligner le rôle décisif de la guerre dans les conflits sociaux internes aux cités. On s'est interrogé plus spécial ement sur la question des compagnonnages militaires au sein de la jeunes se noble (suodales de Publius Valerius à Satricum, geste de Coriolan). De tels compagnonnages sont également évoqués sur les reliefs de Chiusi où l'on trouve aussi le seul exemple de peinture funéraire du Ve siècle figu rant un combat (de cavalerie).
Cicéron et Denys d'Halicarnasse le laisse apparaître. D'ailleurs, on ne voit pas ce qui aurait pu justifier un pareil changement dans les habitudes romaines, changement qui aurait abouti au système de la locatio, dans lequel des citoyens soumissionnaient pour la fourniture des chevaux et des chars. Il faut en ce domaine se méfier d'un certain « grécocentrisme » : même lorsqu'on est amené à reconnaître que, sur le plan techni que,ce sont les influences étrusques qui ont été essentielles sur les circenses de Rome, on veut à toutes forces retrouver par ailleurs un «systè me grec » qui a peu de chances d'avoir jamais été en vigueur à Rome.
Olivier de Cazanove, Le sanctuaire de Cérès jusqu'à la deuxième sécession de la plèbe : remarques sur l'évolution d'un culte public, p. 373-399. Le temple de Cérès voué à l'aube du Ve siècle par A. Postumius n'ac quiert que progressivement ses traits caractéristiques. L'évolution appar aîtachevée avec les lois Valeriae Horatiae consécutives à la deuxième sécession qui sanctionnent officiellement le lien étroit existant entre les magistratures de la plèbe et l'aedes Cereris. Le temple n'est, de fondation, ni un sanctuaire lié aux importations frumentaires lointaines, ni un sanc tuaire d'essence plébéienne. L'intérêt croissant de la plèbe à son égard répond à la politique de clôture du patriciat qui tend à confisquer à son seul profil les cadres de la religion d'État, et en particulier le culte capitolin. Dans la crise qui débouche sur la deuxième sécession. Cérès appa(v. au verso)
raît comme le recours des plébéiens contre l'arbitraire des patriciens, en tant que garante de la loi écrite. La déesse doit sans doute de jouer ce rôle à l'influence attique (éleusinienne) qui peut s'exercer sur Rome, via Naples, dès le milieu du siècle.
TABLE DES MATIÈRES
Pag. 1-5
Introduction, par Françoise-Hélène Massa-Pairault Giovanni Colonna, Città e territorio nell'Etruria meridionale
7-21
Adriano Maggiani, La situazione archeologica dell'Etruria settentrionale
23-49
Giuseppe Sassatelli, La situazione in Etruria Padana
....
51-100
Angela Pontrandolfo et Bruno D'Agostino, Greci, Etruschi e Italici nella Campania e nella Lucania tirrenica
101-116
Carmine Ampolo, Roma arcaica ed i Latini nel V secolo
117-133
. .
Filippo Coarelli, Roma, i Volsci e il Lazio antico
135-154
Angelo Bottini, I popoli apulo-lucani
155-163
Dominique Briquel, Le regard des Grecs sur l'Italie indigè ne
165-188
Mario Torelli, La società etrusca della crisi. Quali trasfo rmazioni sociali?
189-198
Françoise-Hélène Massa-Pairault, L'art et la définition de la cité
199-227
Francesco Roncalli, La definizione pittorica dello spazio tombale nella «età della crisi»
229-243
Jean-Claude Richard, Les Fabii à la Crémère : grandeur et décadence de l'organisation gentilice
245-262
Michel Humbert, La crise politique du Ve siècle et la législa tion décemvirale
263-287
Ettore Lepore, Parallelismi, riflessi e incidenza degli avveni menti del contesto mediterraneo in Italia
289-297
426
TABLE DES MATIÈRES
Nicola F. Parise, Moneta e società in Magna Grecia. L'esem pio di Crotone 299-306 Hubert Zehnacker, Rome : une société archaïque au contact de la monnaie (Ve-IVe siècle)
307-326
Anne-Marie Adam et Agnès Rouveret, Les cités étrusques et la guerre au Ve siècle avant notre ère
327-356
Jean-Paul Thuillier, L'organisation et le financement des ludi circenses au début de la République : modèle grec ou modèle étrusque?
357-372
Olivier de Cazanove, Le sanctuaire de deuxième sécession de la plèbe
373-399
Cérès jusqu'à la
Conclusion, par Dominique Briquel
401-403
Table des matières
409-410
Résumés des communications en fin de volume.